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Full text of "Dictionnaire historique de l'ancien langage françois, ou Glossaire de la langue franxoise depuis son origine jusqu'au siecle de Louis XIV. Pub. par les soins de L. Favre"

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DICTIONNAIRE  HISTORIQUE 


DE 


L'ANCIEN  LANGAGE  FRANÇOIS 


NIORT.    —    TYPOGRAPHIE    DE    L.    FAVRE. 


DICTIONNAIRE  HISTORIûnE 

L'ANCIEN  LANGAGE  FRANÇOIS 


GLOSSAIRE  DE  LA  LANGUE  FRANÇOISE 

DEPUIS  SON  ORIGINE  JUSQU'AU  SIÈCLE  DE  LOUIS  XIV 
Par  LA  ÇURNE  DE  SAINTE-PALAYE 

MEMBRE   DE   L'ACADÉMa  DES   INSCRIPTIOKS   ET   DE   L' ACADÉMIE   FRANÇOISE 

Publié  par  les  soins  de  L.  FAVRE,  membre  de  la  Société  de  l'Histoire  de  France, 

avec  le  concours  de  M.  PAJOT,  Archiviste-paléographe, 

CONTENANT  : 

SIGNIFICATION  PRIMITIVE  ET  SECONDAIRE  DES  VIEUX  MOTS 

Vieux  mots  employés  dans  les  chants  des  Trouvères, 
Acceptions  métaphoriques  ou  figurées  des  vieux  mots  français.  —  Mots  dont  la  signification  est  inconnue. 

ETYMOLOGIE  DES  VIEUX  MOTS 

Orthographe  des  vieux  mots.  —  Constructions  h-régulières  de  tours  de  phrases  de  l'ancienne  langue. 

Abréviations  ;  études  sur  les  équivoques  qu'elles  présentent  dans  les  anciens  auteurs. 

Ponctuation  ;  difficultés  qu'elle  présente. 

Proverbes  qui  se  trouvent  dans  nos  poêles  des  XII^,  XlIIe  et  XIV*-  siècles. 

Noms  propres  et  noms  de  lieux  corrompus  et  défigurés  par  les  anciens  auteurs. 
Mots  empruntés  aux  langues  étrangères 

Usages  anciens. 

SUIVI  DES 

CDRIOSITEZ  FRAiÇOlSES.  pour  supplément  aux  Dictionnaires 

Ou  Recueil  de  plusieurs  belles  propriété^,  avec  une  infinité  de  proverbes  et  quolibets  pour  l'application  de  toutes 
sortes  de  livres,  par  Antouin  OUDIN. 


TOME    SECOND 


NIORT 

L.  FAVRE,  éditeur  du  GLOSSARIUM  de  Du  Cange, 

Rue    Saint-Jean,    6. 


Te 
Si 


DICTIONNAIRE  HISTORIQUE 


L'ANCIEN  LANGAGE  FRANÇOIS 


AP 


Ap,  préposition.  Avec.  On  observe  que  les  lettres 
p  e\  b  étant  de  même  organe,  on  a  pu  prononcer  et 
écrire  indifféremment  «p  ou  ab;  préposition  qui, 
dans  le  langage  méridional  de  la  France,  paroil  être 
une  abréviation  de  l'adjectif  ambe,  pris  dans  le  sens 
conjonclif  de  cette  même  préposition  ap  ou  ab,  avec. 
(Voy.  Ambe  ci-dessus.) 

Aut  Apostols  cumtet  (1) 
E  dis  c'ap  Deu  parlet. 

Fragmcnl  du  MS.  de  S'  Martial  de  Limoges,  fol.  50,  Rv 
Molt  lo  laudaven  (2)  e  amie  e  paront 
C'ab  (3)  Damnedeu  se  ténia  (4)  forment. 

Vie  ae  Boêce,  frag:m.  MS.  de  S'  Benoil-sur-Loire.  p.  273. 

E  (5)  sa  ma  dextra  la  Domna  u  libre  ten  (G), 
Tôt  aquel  libres  ara  de  fog  (7)  ardent. 
Zo's  (8)  la  jiisticia  al  Rei  omnipotent  ; 
Si  l'om  o  forfai,  e  pois  no  s'en  repent... 
Ab  aquel  fog  s'en  pren  so  vengament. 
Cel  bonai  vai  (9)  qui  amor  ab  lei  pren. 

Ibid.  p.  275. 

Que  le  p  ou  le  b,  ait  été  changé  en  v,  autre  lettre 
de  même  organe,  il  n'en  faut  point  d'autre  preuve 
que  la  préposition  composée  avoec.  (Voy.  Avoec.) 
C'est  proprement  à  l'oubli  et  à  l'ignorance  de  la 
prononciation  du  v  toujours  écrit  u,  et  au  retran- 
chement de  ce  même  u  prononcé  v,  que  l'on  doit 
attribuer  l'origine  d'au  et  À,  préposition  qui  dans  la 
signification  d'avec,  paroit  avoir  la  même  étymolo- 
gie  qu  ap  ou  ab.  (Toy.  Au  ci-après.) 

TARIAiNTES  : 
AP.  Fragment  du  MS.  de  S'  Mailial  de  Limoges,  fol.  50,  R». 
Ab.  Vie  de  Boèce,  Frag.  MS.  p.  270,  passim. 

Apaer,  verbe.  Pacifier,  accommoder,  etc. 
Apaiser.  Payer,  satisfaire,  contenter,  soulager,  etc. 
Il  est  évident  que  le  principe  de  la  formation  des 
verbes  apaier,  apaiser,  est  le  substantif  latin  pax  ; 
mais  en  remontant  à  l'origine  la  plus  vraisemblable 
de  ce  même  substantif  ;ja.i',  pacis,  dérivé  de  l'ancien 
verbe  pacere  ou  pagere,  le  même  que  pangere,  au 
supin  pactum,  on  croit  apercevoir  une  analogie 
marquée  entre  les  verbes  françois  apactir,  apaier, 
apaiser.  (Voy.  Appactir.)  L'ordre  de  la  société  géné- 
rale, ou  particulière,  est  établi  sur  des  pactes,  sur 
des  obligations  fixes  et  réciproques  :  ainsi,  pacifier 
une  ville,  Vapaieren  ancien  langage,  c'est  en  fixer 
l'état  par  le  rétablissement  de  ce  même  ordre. 


AP 


.  .  .  Artus  remest  en  Bourgoigne  : 
Tout  river  iUec  séjourna  ; 
Les  citez  prist  et  apaia. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  99,  R'  col.  2. 

Lorsqu'il  s'agissoit  de  particuliers  désunis  par 
l'intérêt,  ou  par  quelqu'autre  passion,  les  apaier 
c'étoit  faire  la  paix  entre  eux,  les  lier,  les  obliger 
par  un  jugement,  un  accommodement,  etc.  en 
général,  par  un  pacte  qui  fixoit  leurs  prétentions  ou 
îeurs  droits  respectifs.  «  Comme  conlens  fut  entre 
«  Jeanne  comtesse  de  Flandres...  etJean  deNéelle... 
«  li  Rois  fit  la  Comtesse  semondre  par-devant  lui, 
«  par  deux  Chevaliers.  La  Comtesse  comparant 
«  à  jour,  proposa  quellen'avoitpasété  suffisament 
«  semonse  par  deux  Chevaliers;  quar  elle  devoit 
«  estre  semonse  par  ses  Pers,  les  parties  eux  (10) 
«  appayant  en  jugement.  »  (Daniel,  Mil.  Fr.  T.  \, 
p.  181  ;  tit.  de  1324.)  Il  seroit  inutile  de  multiplier 
les  preuves  de  cette  acception  du  verbe  apaier, 
pacifier  un  différent,  l'accommoder,  le  juger,  etc. 
On  ajoutera  seulement  qu'il  étoit  quelquefois  réci- 
proque dans  le  sens  d'accommoder. 

Si  s'est  au  vilain  apaié. 

Bestiaire.  MS.  du  R.  n"  7989,  fol.  164  ;  fable  xvn. 

Il  existe  entre  le  Ciel  et  la  Terre  un  pacte  d'al- 
liance qui  se  renouvelle  autant  de  fois  que  l'homme 
fait  sa  paix  avec  Dieu,  en  satisfaisant  à  sa  justice  par 
l'humble  et  douloureux  repentir  de  son  audace  ou 
de  sa  foiblesse.  On  disoit  en  ce  sens,  apaier  Dieu, 
apaer  le  Seigneur.  >■  Pur  co  que  li  Reis  Roboam  eli 
»  suen  se  humilièrent  devant  nostre  Seignur, 
«  alches  (il)  le  apaèrent  de  sun  maltalent;  si  que  il 
»  ne's  volt  del  tut  destruire.  «  (Livres  des  Rois,  ms. 
desCordel.  fol.  104,  V°  col.  1.) 

Qui  ci  corrouce  Deu,  ci  Testuet  apayer. 

Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  T.  Il,  fol.  144.  R*  col.  2. 

Et  preslz  de  Dieu  prier  soyez  ; 
Ainsi  ramez  et  appayez,  etc. 

J.  de  Meun,  Test,  vers  1657  et  1658. 

En  satisfaisant  à  une  obligation  contractée  par  un 
pacte  civil,  on  procure  la  paix,  la  tranquillité  de  la 
personne  que  ce  pacte  intéresse.  On  l'apaise,  pour 
ainsi  dire,  et  elle  se  tient  apaiée.  De  là  l'acception 
des  verbes  apayer,  payer. 


(1)  Conta,  raconta.    -  (2)  Louoient.  —  (3)  De  ce  qu'avec,  etc.  —  (4)  Se  tenolt.  -  (5)  En  sa  main,  etc.   —  (6)  Tient.  — 
(7)  Feu.  -  (8)  C'est.  -  (9)  Il  en  va  bien  à  celui.  -  (10)  Eux;  c'est-à-dire  les  Pairs.  -  (11)  Quelque  peu,  un  peu. 
II.  1 


AP 


-  2  - 


AP 


En  tes  ditez,  qui  bien  entendent, 
Pevenl  veer  qu'à  trois  fins  tendent... 
La  premier  e.st  de  bien  paier 
Pour  faire  ses  gens  upaier. 

Geufioi  de  Taris,  U  la  suite  du  R.  de  Fauvcl,  MS.  du  R.  fol.  4G. 

El  de  leurs  gaiges  si  paiez 
Qu'ilz  en  soient  si  appuie-:,  etc. 

Gace  de  la  Digne,  des  Déduits,  WS.  fol.  153,  V*. 

On  disoit,  se  tenir  apaië  ou  apaisé,  dans  le  même 
sens.  «  Nous  avons  eu  el  receu  trois  mille  lloriiis 
«  d'or...  desiiuels  nous  nous  tenons  bien  upaije:i  et 
«  les  en  (|uilons  du  tout.  ■>  (Oïd.  T.  111,  p.  3;{2 
et  333.)  «  Cuiivenances  tenir  dusqu'à  mil  livrées  de 
«  terre  dont  elc  se  tendra  apaiée  avec  la  conté  de 
«  S.  l'ol.  "  (Ducliesiie,  Hist.  de  la  M.  de  Cliàlillon, 
pr.  p.  /i,");  til.  de  l'23tj.  —  Yoy.  Apaiser  ci-dessous.) 

L'idée  particulière  de  celle  espèce  de  satisfaction 
étant  généralisée,  le  vei'be  apaer  ou  apaier, 
abstraction  laite  de  toute  idée  de  pacte,  signifioit 
l'état  paisible  dont  on  nous  fait  jouir  en  satisfaisant 
un  besoin  physique  ou  moral,  réel  ou  idéal  ;  en  sou- 
lageant les  douleurs  du  corps;  en  contentant  les 
passions  de  l'âme,  du  cœur  ou  de  l'esprit. 

.  .  .  Par  les  mires  sont  li  navré  upaié. 

\'ab\.  MS.  du  R.  n-  7615,  ï.  1,  fol.  63,  V'  col  2. 

.  .  .  Por  Dieu,  çaienz  vos  traiez 
Et  mon  desirrer  m'o/inic:. 

Aleïaudre  et  Arislote,  MS.  de  S.  Gcrm.  fol.  73,  V  col.  I. 
Jà  por  regarder  son  vis 
Apaicz  ne  me  tenroie, 
S'auire  cose  n'en  avoie. 

Chans.  du  Comte  Thibaut,  MS.  p.  154. 
Ne  se  tient  de  riens  appuyé 
Le  desloyal,  le  renoyé  : 
N'est  riens  quiluy  puisse souffire. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  20084-2008C. 
...  Je  me  tieg  apaiés  del  atendre, 
Puiske  chascuns  vos  aime  ensi  sans  prendre. 

Ane.  Poêt.  fr.MSS.  av.  13UU,  T.  UI,  p.  997. 

Les  foulz  sont  apaié 

De  ce  de  coi  li  sages  est  honnis,  etc. 

Ane.  Poës.  1>>.  MS.  du  Valic.  n-  1J2"2,  fol.  162,  R°  col.  1. 

On  trouveroit  inutile  un  plus  long  détail  des 
acceptions  particulières  du  verbe  upaier,  soulager, 
tranquilliser,  etc.  puisque  toutes  se  réunissent  d'ans 
l'acception  générale  à'upaler,  satisfaire.  (Yoy. 
Apaiemekt  et  Apaier  ci-dessous.) 

VARIANTES  : 

APAER.  L.  des  Rois,  MS.desCordel.  fol.  104.  -  D.  Morice, 
preuv.  de  IHist.  de  Bretagne,  T.  I,  col.  959;  tit.  de  1254. 

Apaier.  L.  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  25.  -  Geofroi  de 
Paris,  à  la  s.  du  Rom.  de  Fauvel.  —  Athis,  MS.  fol.  114, 
V"  col.  1,  etc.  -  Borel,  Dict. 

Ap.mier.  D.  Carpent.  S.  G.  1.  de  Du  Gange,  au  mot  Apacare. 

Apayeu.  J.  de  Meun,  Cod.  -.'ers  572.  -  Fabl.  MS.  du  R. 
n»  7218,  loi.  2(i6,  R»  col.  2. 

Apoier.  D.  Carpent.  S.  G.  1.  de  Du  Gange,  au  mot  Apacare. 

Appayer.  J.  de  Meun,  Test,  vers  1545.  -  Id.  ibid.  vers  1658. 

Apai,  subst.  masc.  Amorce.  L'origine  de  l'ancien 
mol  apai  semble  être  la  même  que  celle  d'apast. 
(Voy.  Apasï.)  On  a  dit  figurément  : 

Oel  riant  et  gai 

Garni  d'amourous  apai. 

Ane.  Poei.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1205. 


Apaicmont,  subst.  luasc.  Action  d'apaiser, 
expiation,  satisfaction.  Dans  une  signification  rela- 
tive à  celle  du  verbe  npaer,  apaièi',  on  nommoit 
apnirmcus  :  \°  les  expiations  par  lesquelles  on 
(ijxiisdit  la  Divinité.  «  Les  offrandes  et  les  sacrifises 
«  et  les  upuieinen%  qui  se  faisoient  à  Deu  au 
«  temple.  »  (Livres  des  iUachabées,  ms.  des  Cordel. 
fol.  15G,  R-col.S.) 

2"  Les  complaisances  dont  une  maîtresse  paye  et 
satisfait  son  amant. 

Fausse  piliez  est  as  nices  chetis 

Apaieinots,  e  li  sage  enragié 

En  sont  :  partant  vault  fausse  piliez  pis,  etc. 

Ane.  Poës.  fr.  MS.  du  Vatic.  n-  1522,  fol.  1G2,  R-  col.  1. 

Apaier,  verbe.  Amorcer.  Attirer  en  présentant 
un  appât  :  délinilion  conforme  h  notre  première 
conjecture  sur  l'origine  du  substantif  apai.  (Voy. 
Apai  ci-dessus.) 

Chesl  goupil  qui  tant  set  barat... 
A  cliascun  qui  vit  charneument, 
Se  fait  tout  mort  chertainement 
Pour  chou  que  plus  près  les  apaie. 

D.  Carpentier,  S.  Gl.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  .\pacare. 

Quoiqu'on  ait  soupçonné  avec  quelque  vraisem- 
blance, une  analogie  entre  apast  et  apai,  il  seroit 
possible  qu'ff/;fli  et  apaiement  fussent  de  même 
origine,  et  que  dans  un  sens  relatif  à  celui 
iV apaiement,  satisfaction,  l'on  eût  désigné  par  œil 
iraiiiorous  apai,  un  œil  dont  l'expression  vive  et 
leiidrc  satisfait  un  désir  amoureux.  Alors  le  verbe 
apaier,  dans  les  vers  qu'on  a  cités,  seroit  le  même 
qu'apaer,  apaier,  satisfaire.  11  ne  signifieroit 
amorcer  qu'autant  qu'on  satisfait  l'homme  charnel, 
en  lui  présentant  l'amorce  des  plaisirs.  (Voy.  Apaer.) 

Apaisement  (l),s;/&si.  masc.  Pacification;  rem- 
boursement, dédommagement,  elc.  satisfaction.  On 
a  dit  et  l'on  dit  encore  apaiser  dans  le  sens  de  paci- 
fier. De  là,  le  substantif  apaisement  a  signifié  paci- 
fication. •<  L'Empereur,  le  Roy  d'Angleterre  et  le 
«  Duc  de  Bourgogne  convinrent  ensemble  à  Calais, 
«  pour  traicler  de  Yappaisement  de  France  et 
«  d'Angleterre.  »  (Hist.  chron.  1400.  —  l-'i67;  an. 
141G.)  '<  Accord  et  appaisement  des  divisions  qui, 
«  elc.  •'  (Preuves  sur  le  meurtre  du  D.  de  Bourgo- 
gne, page  295.) 

11  semble  qu'en  particularisant  cette  acception, 
l'on  a  nommé  apaisement,  acte  d'apaisement,  l'acte 
par  lequel  on  pacifioit,  on  apaisoit  une  contestation 
née  ou  à  naître  sur  la  nécessité  des  réparations  et 
améliorations  à  faire  par  l'acquéreur  d'un  héritage 
dont  il  doit  prévoir  le  retrait;  sur  l'obligation  d'un 
dédommagement,  d'une  indemnité,  etc.  «  L'achep- 
«  leur  devra,  pendant  l'an  accordé  par  la  Coustume 
«  pour  user  du  retrait  lignager,  conserver  et  main- 
«  tenir  le  bien  vendu  en  aussi  bon  estât  comme  il 
«  estoit  au  jour  de  la  vente...  et  s'il  y  a  fait  aucunes 
«  mises  ou  impenses  nécessaires...  elles  luy  seront 
«  resliluées  par  ledit  lignager,  sans  que  néantmoius 
«  luy  soit  permis  de  faire'  démolition,  ny  édifices 


(1)  Ce  mot,  qu'on  emploie  encore  fréquemment  et  qui  date  au  moins  du  xv«  siècle,  ne  se  trouve  pas  au  Dictionnaire  de 
l'Académie,  (.n.  e.) 


AP 


3  - 


AP 


«  nouveaux  que  par  ordonnance  de  Justice,  et 
«  après  appaiscment  pris  de  la  nécessite  ou  utilité 
«  évidente.  »  (Coût,  de  Cliimay,  nouv.  Coût.  gén. 
T.  II,  p.  "II').)  «  Les  censiers  avant  pouvoir  préten- 
«  dre  quittance  à  leurs  maistres  pour  cause  des 
•  pertes  qu'ils  auroient  supportées  en  leurs  adves- 
«  tures...  seront  tenus  de  monstrer  leurs  pertes  et 
«  dommages  à  leurs  maistres...  et  en  cas  de  refus 
.  ou  déUiy,  les  faire  visiter  par  gens  de  Loy  et 
«  laboureurs  à  cecognoissans...  pour  par  ce  moyen 
«  en  appointer  amiàblement.  Et  s'ils  ne  s'accor- 
«  dent,  s'adresseront  à  notre  Cour...  par  requeste, 
«  à  laquelle  joindans  les  actes  des  (ippaiscmens  et 
«  refus  cy-dessus,  ils  contendront  ;\  telle  modéra- 
«  tion  que  de  raison.  »  iCout.  de  Haiuaut,  ibid. 
page  13i,  col.  2.) 

C'est  dans  le  sens  d'apaiser,  payer,  rembourser, 
dédommager,  etc.  qu'on  lit  :  «  diront  vérités  de 
«  toutes  les  restitucionset  apaisemenx-  qu'il  auront 
«  fait,  ou  fait  faire  de  fait,  ou  de  promesse.  »  (Ord. 
T.  I,  page  544.) 

La  signification  A' apaisement  en  cet  autre  pas- 
sage, semble  relative  à  celle  d'apaiser  une  demande, 
satisfaire  à  une  question,  y  répondre.  «  Pourremé- 
«  dier  et  pourveoir  aux  abus  et  larcins  que  l'on 
«  commet  journalièrement  par  tous  nos  bois  et 
«  ceux  de  nos  vassaux,  nous  avons  consenty...  que 
«  l'on  puisse  faire  Visitation...  en  toutes  maisons  de 
«  ceux  qui  seront  suspectez  desdits  larcins  ;  et  si 
«  on  y  trouvoit  bois  verd  ou  autre,  et  que  les  resi- 
>.  dcns  esdites  maisons  ne  voulussent  donner  appai- 
"  sèment  d'où  ledit  bois  trouvé  procéderoit,  etc.  » 
(Coût,  de  Ilainaut,  nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  148.) 

En  termes  de  procédure,  l'apaisement  sur  lequel 
un  défendeur  étoit  admis  à  requérir  le  profit  d'un 
défaut  contre  le  demandeur  qui  ne  comparoissoit 
pas  au  jour  assigné,  étoit  probablement  l'acte  qui 
conslaloit  que  le  défendeur  ayant  satisfait  îi  l'ajour- 
nement ,  devoit  être  tranquillisé  par  absolution 
d'instance.  «  Si...  le  demandeur  est  défaillant  de 
«  comparoir  au  jour  assigné,  le  dePfendeur  devra... 
«  prolester  d'iceluy  défaut,  et  en  la  journée  ensui- 
«  vante,  en  requérir  le  profit,  à  qiioy  il  sera  admis 
«  sur  appaisement  prins  tant  du  registre  que  des 
«  exploits  du  Sergeant;  et  emportera  la  contumace 
«  du  demandeur  congé  de  Court  et  absolution  d'ins- 
«  tance.  »  (Coût,  de  Hainaut,  nouv.  Coût.  gén.  T.  II, 
p.  113.)  Peut-être  aussi  que  «  prendre  appaisement 
<i  tant  du  registre  que  des  exploits  du  Sergeant.  » 
c'étoit  les  vérifier,  satisfaire  à  une  formalité  en  les 
vérifiant.  Quelque  variées  que  puissent  être  les 
acceptions  particulières  du  substantif  fl/w/srmmf, 
il  suffit  ici  de  marquer  celles  dont  l'analogie  paroit 
moins  sensible  avec  les  acceptions  du  verbe  dont  il 
est  formé. 

On  pouvoit  «  faire  appaisement  de  l'amende  du 
«  poing  coupé,  »  en  satisfaisant  à  la  Loi  qui  pro- 
nonçoit  cette  peine  contre  celui  qui  frappoit  un 
Serg'ent;  ou  plutôt  en  modérant  cette  peine,  en  la 
commuant  en  une  peine  pécuniaire  dont  on  se  con- 
tentoit  par  humanité.  «  Si  sur  calenge  faite  par 


«  Sergent,  le  calengé  ou  autres  assistans...  touche 
«  par' main  mise  ledit  Sergent,  celuy  ou  ceux 
«  encherront  en  l'amende  du  poing  couppé,  dont 
«  le  Seigneur  ou  maistre  du  Sergent  pourra  faire 
«  Vappaisement  ;  et  si  la  poursuyie  s'en  fait  par 
«  noz  Officiers,  elle  se  fera  en  nosfre  Court  à  Mons, 
«  veu  que  c'est  cas  de  hauteur.  »  (Coût,  de  Hainaut, 
Coût.  gén.  T.  I,  p.  793.  —  Voy.  Apaiser.) 

TARUNTES  : 

AP.USEMEXT.  Ord.  T.  I,  p.  54i. 

Ap.wsemext.  Gloss.  fr.  lat.  MS.  du  R.  n"  7684.  -  D.  Car- 
pentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Expiare. 

Appaisem.\xt.  Monet.  Dict. 

Appaisement.  Percef.  Vol.  V,  fol.  106,  R"  col.  1.  — 
Cotgrave,  Oudin,  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict. 

Apaisenter,  verbe.  Etre  apaisé.  Apaiser,  paci- 
fier. La  signification  de  ce  verbe  est  neutre  dans  le 
passage  suivant  :  «  Deus...  à  poines  encomenzat  à 
«  apaisenteir  al  tens  Abraham  son  amin.  »  (S'  Bern. 
Serm.  fr.  jis.  p,  16G.)  11  semble  que  plus  ordinaire- 
ment elle  étoit  active.  Dans  le  sens  d'apaiser,  paci- 
fier, on  a  dit  :  «  Despoz  que  Criz...  fut  devenuz 
"  moyeneres  de  Deu  et  des  homes,  et  qu'il  apaisen- 
«  tat  parmei  son  sanc  celés  choses  ki  estoient  en 
«  Ciel  et  celés  qui  estoient  sor  terre,  etc.  »  (S"  Bern. 
Serm.  fr.  ms.  p.  259.) 

C'est  encore  dans  le  sens  d'apaiser,  qn' apaisanter 
signitîoit  disposer  Dieu  ou  l'homme  à  pardonner, 
en  satisfaisant  à  la  Justice  divine  et  humaine. 
«  Pues  que  nostre  Sires  ne  welt  mies  ma  mort...  ju 
>■  volentiers...  li  offre  ma  vie.  Cist  est  li  sacrifices 
«  ki  apaisantet  nostre  Signor.  »  (S'  Bern.  Serm.  fr. 
MS.  p.  269.)  «  Petiz  enfès  est  ki  legierement  puet 
«  eslre  apaisantei:>  ;  car . . .  li  enfès  paVdonet  legiére- 
«  ment.  »  (Id.  ibid.  p.  19G.  —  Voy.  Apaiser  et  Apaisir.) 

VARIANTES   : 
APAISENTER.  S>  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  259. 
Apaisanter.  Id.  ibid.  p.  269.  -  G.  .Machaut,  MS.  fol.  208. 
Apaisexteir.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MS.  p.  166. 

Apaisenteur ,  suhst.  masc.  Pacificateur.  La 
signification  à'apaisenteur  est  la  même  que  celle 
à'apaiseur.  (Voy.  D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat. 
de  Du  Cange,  au  mot  Paciarii.)  «  Arbitres  et  amia- 
«  blés  app'aisen tiers,  etc.  «  (Lett.  de  grâce,  an  1427, 
citées  par  D.  Carpentier,  (//)/  supra.  —  Voy.APAiSEUR 
et  Apaisiteur  ci-dessous.) 

VARIANTES  : 
APAISENTEUR.  D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du 
Cange,  tome  IV,  col.  36. 
Appaisenteur,  Appaisentier.  Id.  ibid.  T.  III,  col.  117. 

Apaiser,  verbe.  Procurer  la  paix,  tranquilliser  ; 
satisfaire,  payer,  rembourser,  dédommager,  indem- 
niser, soulager,  etc.  Le  verbe  apaiser,  de  même 
origine  que  îe  verbe  apaier,  avoil  les  mêmes  signi- 
fications. C'est  à  l'idée  générale  de  pacte  que 
paroissoient  être  liées  les  idées  signifiées  par  ce 
verbe,  lorsqu'on  dit  apaiser  les  troubles,  les  divi- 
sions d'une  société  générale  ou  particulière,  apaiser 
la  colère  de  Dieu  ,  ou  des  hommes,  etc.  Ces  accep- 
tions et  autres  ne  sont  pas  moins  anciennes  dans 
notre  langue  que  celles  du  verbe  apaier. 

On  a  déjà  observé  que  satisfaire  à  une  obligatioa 


AP 


—  4  — 


AP 


contractée  par  un  pacte ,  c'est  procurer  la  paix ,  la 
tranquillité  de  la  personne  envers  laquelle  on  est 
obligé.  Elle  s'appaise,  elle  se  tient  appaisée,  lors- 
qu'on satisfait  à  celte  même  obligation.  (Voy.  Ai-aer.) 
De  là,  se  tenir  appaisé,  ou  s'âppaiser,  signifioit, 
1"  être  satisfait,  se  contenter  du  payement  d'une 
rente  :  »  Convenances  tenir  dusqu'ù  mil  livres  de 
«  rente  dont  elle  se  tenra  appaisé  avec  le  fief  de 
«  Saiut-Pol.  »  (Ducliesne,  Ilisl.  généal.  de  la  M.  de 
Chàlillon,  pr.  p.  4G;  til.  de  l'23G.) 

2°  Se  contenter,  être  satisfait  d'un  dédommage- 
ment, du  remboursement  d'une  créance;  se  dédom- 
mager, s'indemniser,  se  rembourser.  «  Lesdeffenses 
«  données  par  les  Maîtres  des  foires  du  temps  passé, 
«  contre  plusieurs  pays...  seront  suspendues  jus- 
«  ques  à  quatre  ans,  dedans  lesquiex  la  Justice  et 
-'  les  Créanciers  se  puissent  apaisier  ;  et  iceux 
"  passez,  se  apaisiez  ne  sont,  les  deffenses  vaillent 
«  comme  devant.  »  (Ord.  T.  I,  p.  795.) 

3°  Se  contenter,  être  satisfait  d'une  caution  qui 
tranquillise.  »  Un  nouveau  Crand-bailly  de  Ilainaut, 
«  sur  remonstrance  que  luy  feroit  le  Bailly  précé- 
«  dent  ou  ses  hoirs,  se  devra  appaiser  des  cautions 
«  de  chacun  Sergeant...  si  elles  sont  suffisantes  ou 
«  non  ;  et  oîi  elles  ne  seroient  suffisantes  par  pleige 
«  ny  autrement,  pourra  demander  nouvelle  cau- 
«  tion.  »  (Coul.  de  Ilainaut,  nouv.  Coût.  gén.  T.  II, 
page  110,  col.  2.} 

4°  Dans  un  sens  plus  étendu,  se  contenter,  être 
satisfait  d'un  état  que  la  confiance  en  Dieu,  la 
soumission  à  notre  sort,  ou  quelqu'autre  chose  rend 
paisible  et  tranquille.  <>  Le  vray  Dieu  tout-puissant 
>'  est  tel  que  devant  luy  toute  chose  ne  luy  est 
«  impossible  ;  si  m' appaisé  bien  en  ses  œuvres  qui 
-'  tant  sont  merveilleuses.  »  (Percef.  Vol.  VI,  f-  128.) 

Qui  ne  peut,  ne  peut  ;  si  s'appaise. 

Poès.  de  Charles  D.  d'Orléans,  p.  92,  col.  3. 

C'est  par  une  suite  de  la  même  extension,  qu'rt- 
paisev  désignoit  l'état  paisible  que  procurent  en 
général  les  besoins  et  les  désirs  satisfaits  : 

Moult  font  femmes  à  Dieu  granl  honte, 
Comme  foies  et  desvoyées, 
Quant  ne  se  tiennent  appaisécs 
De  la  beaulté  que  Dieu  leur  donne. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  9461-946-S. 

L'état  paisible  que  procure  le  soulagement  d'un 
mal,  la  guérison  d'une  blessure  : 

Moult  aléja  sa  maladie 

La  coucha  por  miex  aaisier, 
Et  por  les  plaies  apaisier. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  292,  R"  col.  t. 

L'état  paisible  que  procure  la  satisfaction  d'ap- 
prendre des  nouvelles  qui  tranquillisent  sur  !e  sort 
d'une  personne  à  qui  le  cœur  s'intéresse  :  «  Sire, 
«  dist  la  Royne,  appaisez-moy  de  mon  filz,  ou 
«jamais  je  n'auray  liesse.  »  (Percef.  Vol.  II,  f°  150.) 
L'état  paisible  que  procure  la  satisfaction  de  connoi- 
tre  la  cause  d'un  elTel  qui  excite  la  curiosité  de 
l'esprit,  et  qui  en  trouble  la  tranquillité  : 

....  Une  fois  se  pourpensa 
Que  le  Vilain  apeseroit 
De  la  demande  qu'il  fesoit. 

Fabl.  as.  du  R.  n-  7615,  T.  I,  fol.  87,  V  col.  1. 


L'état  paisible  que  procure  à  un  coupable  la  cer- 
titude, ou  l'espérance  d'un  pardon  qui  le  tranquillise  : 

Te  proierai  de  cuer  vrai, 
Dame  ;  vers  ton  fil  tous  fais  xa'apais, 
U  damnés  serai. 

Ane.  PoSs.  fr.  MS.  du  Valic.  n°  1490,  fol.  127,  V. 

On  conçoit  que  la  signification  du  verbe  apaiser 
pouvoilêlre  aussi  variée  que  le  sont  les  obligations, 
les  besoins  et  les  désirs  auxquels  on  peut  satisfaire. 
(Voy.  Ai'AisEME.NT  et  Ai'AisENTER  ci-dcssus.) 

CONJIG. 

Apais  (f),  subj.  prés.  T'apaises.  (Rom.  de  la 
Rose,  vers  7429.) 

VARI.^NTES    : 

APAISER.  Orth.  subsist.  -  Ane.  Poës.  fr.  MS.  du  Vatican, 
n»  1490,  fol.  127,  V. 

Apaisier.  Duchesne,  Ilist.  srénéal.  de  la  M.  de  Béthune, 
p.  145.  -  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  292,  R»  col.  1. 

Apaysier.  Gloss.  fr.  lat.  MS.  du  R.  n»  7684.  -  Voy.  D. 
Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Expiare. 

Apeser.  Bestiaire,  MS.  du  R.  n"  7989,  fol.  173  ;  fable  lui. 

Appaiser.  Duchesne,  H.  gén.  de  la  M.  de  Chàtillon,  pr.  p. 
46.  -  Percef.  Vol.  Il,  fol.  150.  -  Cotgrave,  Rob.  Estienne, 
Nicot  et  Monet.  Dict. 

Apaiseur,  subst.  masc.  Pacificateur.  Celui  qui 
apaise,  qui  pacifie  les  troubles ,  les  dissensions,  les 
différens  d'une  société  en  général.  Dans  la  signifi- 
cation de  pacificateur  d'un  différent  entre  particu- 
liers, on  distinguoit  l'arbitre  et  l'arbitrateur  de 
Vaniiable  apaiseur  ou  apaisenteur ,  parce  que 
«  amiable  compositeur  on  appaiseur  est  celuy  qui 
«  du  consentement  des  parties,  les  met  en  accord; 
«  c'est-à-dire  que  chacune  partie  sçait  bien  qu'avoir 
"  en  deveroit  avant  l'édict  de  famiable  composi- 
«  tion.  »  (Bouleiller,  Som.  rur.  p.  694.)  «  Dit, 
«  ordenance  et  appointenient  de  nous  arbitres 
«  dessus  nommés,  comme  arbitres,  arbitraleurs, 
«  ou  amiables  appaiseurs,  etc.  »  (D.  Carpentier, 
Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  T.  III,  p.  117;  tit. 
de  1404.  —  Voy.  Apaisenteur  ci-dessus.) 
variantes  : 

APAISEUR.  Cotgrave,  Dict. 

Appaiseur.  Cotgrave,  Nicot  et  Monet,  Dict . 

Apaisir,  verbe.  Apaiser.  On  procure  la  paix  en 
faisant  cesser  la  guerre.  De  là,  on  a  dit  : 

La  guerre  n'a  pas  apaisie  ; 
Toute  la  Conté  a  saisie,  etc. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  217.  Rv 

Apaisiteur,  substantif  masculin.  Pacificateur. 
La  signification  d'apaisiteur  étoit  relative  à  l'ac- 
ception particulière  à'apaiseur,  lorsqu'on  disoit  : 
«  Fu  rapporté  par  arbitres  ou  appaisiteurs,  etc.  » 
("D.  Carpentier,  ubi  supra;  tit.  de  1404.  —  Voyez 
Apaiseur  ci-dessus.) 

variantes  : 

APAISITEUR,  App.\isiteur.  D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss. 
lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Paciarii. 

Apalir,  verbe.  Etre  pâle,  devenir  pâle;  être 
ému,  consterné,  etc.  Changer  de  couleur,  se  faner, 
se  flétrir,  etc.  Languir,  s'àffoiblir.  On  ne  voit  pas 
que  dans  notre  ancienne  langue,  la  préposition  à  ou 
en,  réunie  au  verbe  simple  pâlir,  ait  rien  ajouté  à 
la  signification  de  ce  verbe  qui  subsiste. 


AP 


—  5  — 


AP 


Pensser,  veiller,  soupir,  sangloz, 
Et  soupirers  m'avoient  toz 
Fait  pâlir  et  descoulorer. 

Ovide,  de  Arte,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  96,  R*  col.  3. 

Et  jà  avoit  apalie  la  bouche 

Pour  le  grant  grief  qui  si  au  cuer  li  touche. 

Froi^sart,  Poès.  MS.  p.  73,  col.  2, 

...  Tu  qui  d'amor  es  à  niestre, 
Dois  enpalir  et  maigres  estre. 
C'est  la  coulor  qui  mielz  avient 
A  celui  qui  amors  maintient. 

Ovide,  de  Arle,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  95,  R"  col.  3,  et  V"  col.l. 

C'est  la  traduction  du  vers  latin  : 

Palleat  omnis  amans  ;  hic  est  color  aptus  amanti. 

Que  l'œil  compare  deux  beautés  dont  l'une  soit 
plus  vive,  plus  animée  que  l'autre,  celle  qui  le  sera 
moins,  paroitra  devenir  pâle.  Il  semble  qu'on  ait 
désigné  l'effet  de  celle  comparaison ,  lorsqu'on  a 
dit  :  »  Je  fais  double  que  la  beaulté  de  vostre  Dame 
«  ne  vous  apallisse  en  la  veue  de  la  mienne  qui 
<•  toutes  passe.  «  (Percef.  Vol.  V,  fol.  21,  V»  col.  2.) 

On  sait  que  la  pâleur  est  un  effet  ordinaire  de  ces 
émotions  de  l'âme  qui  font  refluer  le  sang  avec  pré- 
cipitation vers  le  cœur.  De  là,  le  verbe  upalir  aura 
signifié  l'émotion  excitée  dans  l'âme  d'un  Chevalier 
amoureux,  par  la  beauté  d'une  femme  qui  dans  un 
Lai  où  elle  le  compare  au  cèdre,  dit  que  le  cèdre  en 
fut  apalij.  "  Elle  te  compare  là  au  cèdre  qui  est  l'ung 
«  des  plus  haulx  arbres  du  monde  ;  et  par  ce  cèdre 
«  qui  de  sa  beaulté  fut  appaUj,  elle  veult  dire  que 
«  quant  tu  veiz  sa  beaulté,  tu  en  fuz  moult  esmer- 
«  veillé.  »  (Percef.  Vol.  111,  fol.  36,  \'°col.  1.) 

Il  pareil  que  ce  même  verbe  signifioil  la  pâleur 
d'un  ennemi  mort  ou  consterné  ,  lorsqu'on  disoit 
par  métonymie,  le  camp  jut  appalij.  «  Tant  fis  que 
«  le  camp  fut  appalij  pour  avoir  la  veue  munde  : 
u  c'est-à-dire  que  quant  les  trois  Chevaliers  le  ap- 
«  pellèrenl  de  la  jouste,  tu  les  feiz  Irébuscher  par 
«  terre,  afin  qu'ils  ne  te  donnassent  empeschement 
«  à  regarder  sa  beaulté.  "  (Percef.  ubi  supra.) 

L'idée  particulière  du  changement  de  couleur 
signifié  par  le  verbe  pâlir  ou  apâlir,  élant  généra- 
lisée, on  disoit  qu'une  fleur  éloil  apalie,  qu'une 
feuille  rt^jfl/issoi/,  etc.  lorsqu'en  se  fanant,  en  se 
flétrissant,  elle  changeoit  de  couleur.  (Voy.  Frois- 
sart,  Poës.  mss.  p.  26,  col.  2.  —  Eust.  Desch.  Poës. 
Mss.  p.  202,  col.  4,  etc.) 

Peut-être  aussi  que  ce  verbe  signifioil  se  faner,  se 
flétrir,  comme  il  a  signifié  languir,  s'affoiblir,  parce 
que  la  pâleur  est  un  signe  de  foiblesse  et  de  langueur. 

Un  peu  de  mal  ou  fièvre  aguë 
Qui  de  legier  te  santé  mue , 
Et  fait  ton  visage  pâlir 
Et  tes  membres  si  apdlir 
Qu'a  peines  te  peus-tu  aidier. 

D.  Carpentier,  Suppl,  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au  mot  Apalus. 

VARIANTES  : 

APALIR.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  202,  col.  4.  -  Rom. 
du  Riche  homme  et  du  Ladre,  MS.  etc. 

Apallir.  Percef.  Vol.  V,  fol.  21,  V»  col.  2. 

Appalir.  Ibid.  Vol.  III,  fol.  36,  V°  col.  1.  -  Du  BeUai, 
Mém.  T.  VI,  p.  304. 


Enpalir.  Ovide,  de  Arte,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  95,  R"  col.  3. 
Pâlir.  Orth.  subsist.  -  Id.  ibid.  fol.  96,  R»  col.  3.  -  Rom. 
du  Riche  homme  et  du  Ladre,  MS.  etc. 

Apan,  subst.  masc.  Empan.  On  observe  qu'a/)«n 
et  empan  sont  des  variations  de  l'orthographe 
espan.  (Voy.  Espan.)  «  Courtelas  long  de  deux  bras- 
«  ses  (1)  et  large  d'un  grand  apan.  »  (D.  Florès  de 
Grèce,  fol.  157,  R°.) 

ApapeIardir,w?'/)C.Fairerhypocrite.  Significa- 
tion analogue  à  celle  de  notre  ancien  mol  papelard. 

James  n'apapelardirai  : 
Mais  fi  des  papelars  dirai. 

Hist.  de  S"  Léocade,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  31,  R°  col.  3. 

A-par,  prép.  Par  ;  moyennant,  au  moyen  ,  etc. 
On  sait  que  la  préposition  par,  en  latin  per,  désigne 
une  idée  de  mouvement  progressif,  une  idée  de 
passage  dans  les  expressions  par  terre,  par  mer,  etc. 
En  comparant  un  espace  de  temps  à  un  espace  de 
lieu,  on  a  dit  et  l'on  dit  encore  par  un  temps,  par 
un  tel  jour,  etc.  C'est  probablement  en  cette  signi- 
fication qu'avec  ellipse  du  mol  temps,  on  disoit  que 
deux  choses  se  faisoient  à-per-mesmes  ou  à-per- 
mismcs,  lorsqu'elles  se  passoient  dans  le  même 
temps,  par  le  même  temps.  «  A-per-mesmes  ke  vos 
«  oyste  ceste  chose  anoncier  .  .  .  par  droit  rendisles 
«  grâces,  etc.  »  (S'  Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  112.) 
«  Cav à-per-mismes  que  li  soels  (2)  fut  brisiez,  si 
«  vint  à-per-mêmes  a[wès  li  amers  deparleraenz  (3) 
«  elli  triste  discorde.  »  (Id.  ibid.  p.  137.)  «  Li  mes- 
"  saige  célesliien  se  hastent,  et  à-per-mismes  qu'ils 
«  virent  la  misère  des  hom  ...  si  ploreivent  amei- 
«  remenl.  »  (Id.  ibid.  p.  376.) 

Dans  tout  espace  de  temps,  il  existe  un  milieu 
par  lequel  les  choses  succèdent  plus  ou  moins 
immédiatement  les  unes  aux  autres.  De  là,  ces 
expressions  au-par-mé ,  à-par-main ,  en  latin  per 
médium,  per  medianum  tempus,  prises  dans  le 
sens  oîi  nous  dirions  tandis,  tout  de  suite,  bientôt, 
dans  peu  de  temps,  etc.  Le  peuple  de  Normandie 
dit  encore  moyennant  que,  pour  tandis  que.  «  Le 
«  Mareschal .  .  .  jettera  le  gand  au  milieu  des  lices. 
«  Alors  part  à  pied,  ou  monte  à  cheval  qui  voudra  ; 
"  car  en  gages  de  querelle,  se  il  n'est  emprins,  face 
«  chascun  le  mieux  qu'il  pourra:  et  au-par-7né  que 
«  les  combaleurs  feront,  les  Conseilleurs  d'honneur 
«  sailliront  hors  delà  prochaine  lisse  voir  comment 
«  la  chose  se  passera.  »  (Oi-d.  de  Philippe-le-Bel  sur 
les  Duels.  —  Voy.  Du  Cange ,  Gloss.  lat.  au  mot 
Duellum.)  Une  preuve  que  l'origine  et  la  significa- 
tion de  mé  sont  les  mêmes  que  celles  de  ??u  dans 
parmi,  en  latin  yjcr  médium,  c'est  qu'au  féminin 
on  disoit  )?;t'V,  en  latin  ?»erf?rt.  De  medianum,  ce 
qui  est  au  milieu,  s'est  formé  par  contraction  l'ad- 
jectif moyen,  qu'anciennement  on  écrivoit  meien, 
mein,  main. 

Ne  fust  por  ma  chose  haster 
Por  aler  au  marchié  demain, 
Tu  le  compraisses  à-par-main. 
Comparaisse,  fet  Anieuse  ? 


(l)  Mesure  de  longueur  qu'on  prend  de  l'extrémité  du  pouce  à  celle  du  petit  doigt,  quand  la  main  est  ouverte  le  plus 
possible.  Ce  mot,  d'origine  germanique,  vient  de  spannen.  (N.  E.)  —  (2)  Scel,  sceau.  —  (3)  Division. 


AP 


—  6  — 


AP 


Par  mon  chief,  je  vous  en  di  beuse  ; 
Quant  vous  volez,  si  commenciez. 

Fal)l.  JIS.  (lu  R.  n-  lUS,  fol.  49,  V  col.  2. 
Se  Dex  ne  li  ajue,  il  est  mors  ù-pcr-main. 

Ane.  PoC'l.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1349. 

Araors  m'ont  si  par  tôt  le  cors  saisi, 
Que  rt  par-mniii  iert  ma  joie  finie. 
Se  vos  n'avés  pitié  de  vostre  ami. 

Id.  T.  Il,  p.  947. 

Peut-être  la  préposition  par  n'a-l-elle  marqué  les 
causes  et  les  moyens  par  lesquels  on  ao:it,  que  parce 
qu'agir,  c'est  en  quelque  manière  passer  des  moyens 
ou  des  causes  aux  elTets.  Le  moyen  étoit  exprimé 
par  l'adjecUf  mU  lorsqu'on  disoiL  parmi  un  subside, 
parmi  payant,  etc.  11  n'étoit  que  désigné,  lorsque 
pour  sii^iiilier  à  peu  de  chose  près,  à  peu  près,  on 
disoil  à-jiar-un-pou,  et  simplement  7Jfl>'ywî{;  façons 
de  parler  dans  lesquelles  l'acception  âe.  par,  à-par, 
semble  être  analogue  à  celle  de  parmi,  c'est-à-dire, 
moyennant,  au  moyen.  (Voy.  PAniii.)  Ainsi  l'expres- 
sion à-par-iin-jxni  siguirieroil:  1°  moyennant  quel- 
ques personnes  de  plus:  «  Moult  de  Evesques  et  de 
«  Prélats,  et  à-par-un-peu  tous  les  Barons  ,  etc.  » 
(Cbron.  fr.  de  G.  de  A'angis,  Jis.  an.  1190.)  2»  Moyen- 
nant quelque  chose  de  plus:  «  A-par-un-pou  avoil 
B  toute  Normandie  acquise,  fors  Rouen.  »  (Ibid. 
an.  \'H)i.)  3°  Moyennant  quelque  temps  de  plus  : 
«  Autant  de  temps  à-par-unpou  avoit-elle  esté 
«  tenue  des  nostres,  comme  elle  avoit  esté  tenue 
«  des  Sarazins.  »  (Ibid.  an.  1187.) 

Lorsque  les  moyens  et  la  puissance,  la  faculté 
d'agir  et  de  produire  un  effet  en  général ,  étoient 
propres  à  un  Etre  et  dans  sa  nature,  on  disoit  qu'il 
agissoit  à-par-soi,  par  soi,  dans  le  sens  oîi  l'on  dit 
soi-même,  de  soi,  de  soi-même.  (Voy.  Par.)  «  Je 
«  vouldroye  que  Lyonnel  .  .  .  fust  apporté  ça-siis , 
«  s'il  ne  povoit  ft-yw/r-soy  venir.  »  (Lanc.  à\x  Lac, 
T.  II,  fol.  130,  li"  col.  2.) 

En  agissant  à-par-soi  ou  par-soi,  en  lalin  per  se, 
on  agit  seul  et  pour  ainsi  dire  à  part.  On  soupçonne 
donc  que  cette  idée  particulière  étant  généralisée, 
l'expression  à-par-soi  aura  signifié  tout  seul,  sépa- 
rément; et  que  la  signification  de  par  étant  deve- 
nue la  même  que  celle  du  substantif  ;jarf,  on  aura 
substitué  le  substantif  à  la  préposition ,  laquelle 
étant  précédée  de  l'a,  paroissoit  elle-même  être  un 
substantif.  «  Pour  ce  mesme  effait  vous  pouvez 
«  pareillement  user  del'orpigmenttout  à-/;flr^sol/, 
«  et  du  poivre  aussy  sans  orpigment.  >>  (Fouilloux, 
Fauconnerie,  fol.  49.)  «  Tous  ensamble  et  chacun 
«  à-par-soi,  etc.  »  (Beaum.  Coût,  de  Beauvoisis,  p.  2.) 

En  tout  temps  fait  bon  couchier  ô-par-smj. 

Eusl.  Desch.  Pocs.  MSS.  p.  271,  col.  1. 

Telle  pourroit  être  l'ancienne  origine  de  notre 
expression  à  part,  à-part-soi.  Quoi  qu'il  en  soit,  la 
préposition  à  étant  supprimée,  par  soi  signifioit  en 
particulier,  seulement,  séparément.  (Voyez  Appar 
et  Par  ci-après.) 

VARIANTES  : 

A-PAR.  Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis  ,  p.  2.   —  Fabl. 

MS.  du  R.  n»  72-18,  fol.  11.  -  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  359. 


A-PART.  Le  .Touvencel,  MS.  p.  509.   -    Fouilloux,  Faucon- 
nerie, fol.  49  R».  -  Du  Bellay,  Mém.  L.  VII,  fol.  198,  R"  etc. 
A-PER.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  27,  112,  150,  passim. 
Au-PAR.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Duellum,  col.   1688. 

Aparageor,  subst.  masc.  Qui  tient  en  parage. 
On  observera  que  dans  les  principes  de  l'ancien 
Droit  féodal,  lorsque  des  puînés  ne  dévoient  pas  à 
leur  aine  l'hommage  de  la  portion  héréditaire  d'un 
fief  partagé  entre  eux  suivant  les  Coutumes,  l'ainé 
et  les  puinés  étoient  pairs  es  parties  de  ce  même 
fief;  ils  étoient  égaux  en  noblesse  féodale.  De  là,  le 
mot  aparageor  qui  désignoit  et  les  parageaux  ,  les 
puînés  tenans  en  parage  de  leur  aîné,  elle /j^mgrewr 
ou  l'aîné  sous  l'hommage  duquel  ils  étoient  garan- 
tis en  parage.  «  Nus  hons  qui  tient  en  parage ,  ne 
«  fet  aide  à  son  aparageor,  se  il  ne  le  fel  au  Chief- 
«  seigneur;  et  se  aucuns  est  qui  ait  aparageors qui 
«  tiennent  de  lui  en  parage,  il  ne  lor  puet  terme 
c<  mettre  hors  du  parage.  ->  (Ord.  T.  I,  p.  139.)  «  Se 
«  li  Vavasor  avoient  aparageors  qu'il  deussent  met- 
«  Ire  en  l'aide,  il  leur  doit  mettre  jor  que  il  auront 
«  lors  aparageors  ;  et  li  Vavassor  doit  dire  as  autres 
«  aparageors  que  eus  viegnent  à  tel  jour  voir  fère 
«  l'aide.  »  (Ibid.  p.  138.  —  Voy.  Parageau,  Parager, 
Paragecr  ci-après.) 

Aparager,  verbe.  Comparer,  égaler.  Doter, 
maiier.  Oiî  ne  croit  point  que  le  partage  d'un  fief 
héréditaire  entre  un  aîné  et  ses  puînés ,  ait  été 
nommé  parage,  par  la  seule  raison  qu'ils  étoient 
pairs  en  lignage.  Il  n'y  auroit  donc  eu  nulle  dis- 
tinction réelle  à  faire  enire  le  parage  et  le  frérage, 
dans  les  cas  où  le  frérage  étoit  aussi  le  partage 
coutumier  qu'un  frèi'e  aine  et  ses  puînés,  pairs  en 
lignage,  faisoient  d'un  fief  dont  l'hommage  étoit 
indivisible.  On  sait  pourtant  qu'ils  difïéroient;  mais 
la  différence  consiste  en  ce  que  les  puinés  tenans 
en  frérage,  faisoient  à  l'aîné  un  hommage  dont  les 
puinés  tenans  en  parage,  étoient  affranchis.  L'af- 
franchissement de  cet  hommage  semble  donc  cons- 
tituer essentiellement  le  ;jrtm^e  qu'on  peut  définir 
égalité  de  noblesse  féodale.  (Voyez  Aparageor  ci- 
dessus  et  Parage  ci-après.) 

Il  est  possible  que  cette  idée  particulière  d'égalité 
qui  n'existoit  jamais  qu'entre  Nobles  de  même 
lignage,  étant  généralisée,  le  molparage  aitsignifié 
noblesse,  parenté,  etc.  égalité  entres  nobles,  entre 
parens  ;  égalité  entre  personnes  de  même  mérite, 
de  même  état,  de  même  fortune.  De  là,  on  aura  dit 
s'aparager  on  s'emparager,  pour  s'égaler,  aller  de 
pair  avec  la  noblesse ,  en  s'alliant  ou  en  vivant 
noblement. 

.  .  .  Tant  se  veulent  enhaucier 
Et  en  tel  lieu  aparar/ier 
Qui  n'avient  pas  à  leur  corsage, 
En-seur  que  tout  (1)  à  leur  parage. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7615,  T.  I,  fol.  78,  R'  col.  1. 

Quant  li  hom  possède  muison. 
Qu'il  est  auques  souraagiés 
Rioes  d'avoir,  emparagiés  ; 
Et  s'ait  le  cuer  plain  de  noblèce 
Et  qu'il  ait  kier  feste  et  léèce, 


(1)  Sur-tout. 


AP 


—  7 


AP 


Li  enviex  par  moquerie 
Dit  lues  que  c'est  redoterie. 

Ane.  Poêl.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1315. 

C'est  relativement  à  l'espèce  àe  pavage  ou  d'éga- 
lité qui  existe  entre  parens,  qu'on  a  dit  : 
.  .  .  Maie  chose  est  envie. 
A  traïson  de  paraige 

S'apai-aiye  ; 
Car  nul  temps  ne  prant  déduit 
Fors  en  haineux  ouvraige. 

Eusl.  Desch.  Poès.  SISS.  p.  295,  col.  3. 

On  s'aparageoit  en  se  comparant  à  un  homme  de 
mérite,  en  croyant  aller  de  pair  avec  lui  et  l'égaler. 

Dont  Aiax  à  moi  s'aparage. 

Ovide,  MS.  Voy.  Borel,  Dicl. 

En  terme  de  Coutumes,  apparager  suffisamment 
ou  deucment  une  fille,  Yemparager  noblement, 
c'étoil  égaler,  proportionner  la  dot  d'une  fille  h  son 
état,  la  doter  et  marier  à  une  personne  qui  lui  étoit 
paire  et  noble  comme  elle.  (Du  Cange ,  Gloss.  lat. 
T.  V,  col.  157.  —  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  fr.  —  Cot- 
grave,  Dict.)  «  Le  Seigneur  noble  peut  doubler  ses 
«  devoirs  sur  ses  hommes  .  .  .  pour  le  mariage  de 
«  sa  fille  aisnée,  emparagée  noblement.  »  (Coût. 
d'Anjou,  Coût.  gén.  T.  II,  p.  72.)  En  général, fl??ijyfl- 
rager  ou  emparager  une  fille,  c'étoit  la  marier  h 
un  homme  égal  à  elle  par  la  naissance,  l'état  et  la 
fortune.  (Oudin  et  Monet,  Dicl.) 

VARIANTES  : 
APARAGER.  Borel,  Dict.  -  Dict.  de  Trévoux. 
A.MP.^RAGER.  Monet,  Dict. 

Aparagier.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  T.  I,  fol.  78,  R»  col.  1. 
Aparaiger.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  295,  col.  3. 
Apparager.  Cotgrave,  Dict.  —  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  fr. 
Emparager.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  72. 
Emparagier.  Ane.  Poët.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1315. 

Apareill,  subst.  masc.  Préparatif,  viandes, 
tables,  etc.  Préparatif,  engins,  armes,  etc.  Préparatif, 
charrue,  paire  de  bœufs,  etc.  Il  est  probable  que  le 
verbe  appareiller  a  signifié  en  général  préparer, 
dans  un  sens  analogue  à  celui  de  comparer,  égaler; 
et  que  par  la  même  analogie,  le  substantif  appareil 
signifioit:  1°  les  préparatifs  d'un  repas,  d'un  festin, 
comme  les  viandes,  les  tables,  etc.  «  Moult  fut  grande 
«  la  teste  au  chastel,  quant  les  Chevaliers  furent 
«  desarmés;  car  ilz  estoient  assis  à  l'entour  de 
«  Y  appareil.  »  (Percef.  Vol.  IV,  fol.  43,  R°  col.  1.  — 
Rob.  Eslienne  et  Nicot,  Dict.) 

2°  Les  préparatifs  d'un  triomphe,  d'un  arc  de 
triomphe.  «  L'ng  haubert,  ung  hault  appareil  asseré, 
«  une  hasche.  . .  et  ainsi  de  tout  appareil  requis  à 
«  un  arc  triumphal  ou  trophée.  »  (Rabelais,  T.  II, 
p.  223.  —  Rob.  Estienne  et  Nicol,  Dict.) 

3°  Les  préparatifs  d'une  guerre,  d'un  assaut,  d'un 
combat,  engins,  armes,  etc.  «  Quant  li  Empereres 
«  Challes  sot  que  il  faisoit  tel  apareil,  il  manda  ses 
«  Barons,  etc.  «  (Chron.  S'  Denys,  Roc.  des  Hist.  de 
Fr.  T.  V,  p.  273.)  «  Feit  commencer  à  faire  plusieurs 
<•  apparaux  pour  iceux  prendre  el  subjuguer,  mais 
«  quand  les  assiégez  apperceurent  le&âii&apparaux, 


«  ils  commencèrent  à  parlementer.  »  (Jlonstrelet, 
Vol.  I,  fol.  253.)  «  Le  haut  appareil  éloit  une  armure 
«  complette,  l'armure  de  toutes  pièces  de  l'homme 
«  d'armes,  avec  la  grande  pièces  ou  plastron.  » 
(Voy.  Mcot,  Dicl.  —  Rabelais,  T.  II,  page  244.  —  S' 
Julien,  îlesl.  hist.  p.  i42,  etc.) 

4°  Les  préparatifs  pour  le  labourage,  une  charrue, 
une  paire  de  bœufs,  etc.  «  Chacun  des  supplians 
«  ayans  son  appareil  ou  charrue  de  beufs  pour 
«  labourer...  et  quant  furent  chacun  en  son  appareil 
«  pour  ilec  labourer,  etc.  >•  (Lett.  de  grâce,  an.  1466. 
—  Voy.  D.  Carpentier,  Sup.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange. 
au  mot  Apparamenta,  col.  242.) 

On  pourroit  aussi  rapporter  la  signification  à'ap- 
pareil,  charrue  attelée  d'une  paire  de  bœ'ufs,  a  celle 
de  notre  verbe  appareiller,  joindre  à  une  chose  une 
autre  chose  qui  lui  soit  pareille. 

En  termes  d'Architecture,  appareiller  signifie  en- 
core préparer  la  pierre,  les  matériaux  pour  la  cons- 
truction d'une  maison^  d'un  édifice;  proportionner 
la  mesure,  la  forme  de  ces  matériaux  à  la  place  où  ils 
doivent  être  posés.  On  a  dit  dans  un  sens  analogue: 

Géométrie  est  ars  bien  autentiques 
De  mesurer  et  de  faire  apparaulx, 
Pour  maisonner,  forgier  choses  antiques, 
Compasser  tours,  églises  et  chasteauLx. 

Eust.  Desch.  Poés.  MSS.  p.  348,  col.  1. 

Il  semble  même  qu'on  ait  désigné  par  le  mot 
appareil,  celle  justesse  de  proportion  dans  l'assem- 
blage des  matériaux,  et  l'effet  qui  en  résulte  pour 
la  beauté  d'un  édifice,  lorsqu'on  a  dit  : 

On  faisoit  celle  sainte  abbaye 

Qui  en  sus  la  montagne  est  hautement  dressie 
De  très- grand  apparuil,  par  merveilleuse  estude,  etc. 
Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  177. 

L'orthographe  apparat  est  sans  doute  une  altéra- 
tion d'upparoi.  (Ibid.  Variantes  du  jis.  de  la  Cathéd.  de 
Sens.  —  Voyez  Aparoi.)  Enfin  l'acception  particulière 
dans  laquelle  on  prend  encore  aujourd'hui  le  pluriel 
apparaux,  n'est  pas  moins  relative  que  les  autres  à 
l'acception  générale  d'appareil,  préparatif.  (Voyez 
Apakeillement  ci-dessous.) 

VARIANTES  : 
APAREILL.  Ch.  S'  Denys,  Rec.  des  H.  de  Fr.  T.  V.  p.  273. 
Apparaulx  (plur.).  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  348,  coL  1. 
Apparaux  (plur.).  Monstrelet,  Vol.  I,  foL  253,  R». 
Appareil.  Orth.  subsist.  -  Percef.  Vol.  IV,  f°  43,  R"  col.  1, 
etc.  —  Rob  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Apparoil.  Ger.  de  RoussiUon,  JIS.  p.  177. 

Apareillé,  participe  masc.  et  fém.  Préparé, 
disposé;  préparée,  disposée.  Les  significations  du 
participe  apareillé,  quelque  multipliées  qu'elles 
puissent  être,  sont  toutes  analogues  à  celles  du 
verbe  apareiller.  On  se  bornera  donc  ici  à  une 
remarque  sur  l'espèce  de  formule  que  le  roi  d'An- 
gleterre, Edouard  I",  et  Jean  I",  duc  de  Bretagne, 
ont  employée  dans  l'inscription  de  lettres  écrites  au 
roi  de  France.  C'étoit  peut-être  comme  vassaux 
qu'ils  se  disoient  apareillés  à  son  service  (1),  à  son 


(1)  Joinville  emploie  aussi  cette  expression  au  commencement  de  son  livre,  et  d'une  lettre  datée  de  1315,  s'adressant 
dans  l'un  et  l'autre  cas  au  roi  Louis  X:  «  .^.  son  bon  signour  Looys,  fils  dou  roy  de  France,  par  la  grâce  de  Dieu  roy  de 
Navarre,  de  Champaigne  et  de  Brie  conte  palazin,  Jehans,  sires  de  Joinville,  ses  senecbau.\  de  Champaigne,  salut  et 
amour  et  honneur,  et  son  sei-vise  appareillié.  ï   M.  de  Wîiilly  traduit;  et  son  service  disposé,  (n.  e.) 


AP 


AP 


plaisir,  etc.  °  A  très-haut  Prince  et  Seigiior  Pliilipe... 
«  Rey  de  France,  Edward...  Rei  de  Englelerre, 
«  Sei£!;nor  de  Irelaunde,  Duc  de  Guyene,  saluz  ;  e  se 
o  apàraillé  h  son  jilesir.  »  (Rymer,  T.  I,  part,  ii, 
p.  168;  lit.  de  1-278.)  -  A  son  'très-liault  Seigneur 
«  Louis...  Roy  de  I-'rance,  .Jelum  Duc  de  Bretaigne, 
«  salus;  et  soit  (1)  appareillé  à  son  service  en  toute 
<■  chose.  »  (D.  Morice,  preuv.  de  l'Hist.  de  Bretagne, 
T.  I,  col.  998;  tit.  de  1265.) 

Ce  même  duc  de  Bretagne  et  Jean  son  fils  aîné 
qui  épousa  Béalrix  fille  de  Henri  III  roi  d'Angle- 
terre, devinrent  les  vassaux  de  ce  Prince,  par  la 
restitution  qu'il  leur  fit  du  Comté  de  Richemont,  à 
la  charge  de  l'hommage  et  du  service  féodal.  Ainsi 
leurs  femmes  Blanche  et  Béatrix  semhleroient  avoir 
affecté  de  se  reconnoître  vassales  du  roi  d'Angle- 
terre, lorsqu'en  lui  écrivant,  elles  se  disoient  apa- 
reillies  à  faire  sa  volonté.  «  A  son  très-haut  et 

«  très-cher  Seignor  Henri...  Roe  d'Englcterre 

«  Blanche,  Duchesse  de  Brelangne,  salit  et  révé- 
«  rence  cum  à  son  Seignor,  e  soc  apparellic  alTerre 
«  sa  volenté  en  totes  choses.  »  (Rymer,  T.  I.  part,  n, 
p.  53,  col.  1  ;  til.  de  1200.  —  Id.  ibid.  p.  102,  col.  2; 
tit.  de  1205.)  Il  faut  lire  soi  upparellie,  etc.  au  lieu 
de  foi  apparellie,  etc.  (D.  Morice,  preuv.  de  l'Hist. 
de  Bretagne,  T.  I,  col.  997.)  >■  A  très-haut  Seignor  e 
"  à  son  très-chere  pière...  Henri...  Roe  d'Engle- 
«  terre...  Béatrice  sa  dévote  file,  feme  à  Monsor 
«  Jehan  de  Bretaigne,  salut  e  amor  cum  à  son 
«  cher  Seignor,  a  (2)  soe  aparellie  à  fère  sa  volenté 
K  en  lolesdioses.  »  (Rymer,  T.  I,  part,  n,  page  71, 
col.  2;  lit.  de  1262.) 

Quel  qu'ait  été  l'usage  de  cette  espèce  de  formule, 
soi  apareillé  etc.  on  a  pu  l'adopter  comme  une 
reconnoissance  spéciale  de  vasselage.  «  A  haut  home 
«  e  noble  moun  Seiguur  le  Roy  d'Englelerre,  Jo 
«  Giies  de  iNueville,  voz  orbs  (3),  saluz  e  îoial  amour, 
«  e  aparailez  à  tote  vos  volenté  faire.  "  (Rymer, 
T.  I,  part,  u,  p.  170,  col.  1  ;  tit.  de  1278.)  «  L'accepta 
"  pour  son  Seigneur,  en  luy  offrant  d'estre  apareillé 
«  de  faire  tout  ce  qu'il  luy  seroit  possible.  »  (Nuits 
de  Straparole,  T.  I,  p.  209.  —  Yoy.  Apareiller.) 

VARIANTES  : 
APAREILLÉ.  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis,  p.  478. 
Aparailé.  Rymer,  t.  I,  part,  ii,  p.  176,  col.  1;  tit.  de  1278. 
Aparaillik.  Id.  ibid.  p.  17i,  col.  1  ;  tit.  de  1278. 
Apareillié.  Estrubert,  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7996,  p.  3. 
Apariliet.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  97. 
Apparill.  Livres  des  Machabées,  MS.  des  Cordel.  fol.  173. 
Apareillié  Prov.  du  Vilain,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  75,  V». 
Aparellie.  Rymer,  T.  I,  part,  n,  p.  71,  col.  2;  tit.  de  1262. 
Appareillie.  Rom.  de  la  Ro.se,  vers  3804. 
Apparellie.  Rymer,  T.  I,  part,  ii,  p.  102;  tit.  de  1265. 
Apparillie.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  376. 

Apai'eillenient,  sithst.  m.  Action  de  préparer, 
préparation,  préparatif.  C'est  dans  un  sens  analogue 
a  celui  d'apaieiller,  préparer,  qu'on  a  dit  :  «  Long 
«  appareillemcnt  de  bataille  fait  victoire  avoir.  » 
(Le  Chev"  de  la  Tour,  instruction  à  ses  filles,  f°  78.) 

On  emploie  les  choses,  les  moyens  convenables 
pour  se  préparer  à  ce  qu'on  veut,  à  ce  qu'on  doit 


faire.  De  là,  le  mot  apareillement  a  signifié,  1°  pré- 
paratif, chose  convenable  pour  une  noce:  «  Parceu 
«  mismes  pues-tu  awertement  aparzoivre  ke  si  soit 
«  li  apparillement  des  noces.  »  (S"  Bern.  Serm.  fr. 
MSS.  p.  239.)  2°  Préparatif  au  combat  dans  les  vers 
suivans  : 

Son  bon  cheval  a  demandé. 

Or  verrai,  dist-il,  qui  vendra, 

Et  or  verrai  qui  me  suivra. 

Ne  fist  autre  uppareillemeiit. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  299. 

3°  Préparatif,  chose  convenable  pour  l'ajustement, 
la  parure  d'une  femme  : 

Si  ai  tôt  YapareiUnment 
Dont  feme  fait  forniement. 

Fabl.  MS.  de  S'  Germ,  fol.  «,  V-  col.  3. 

4°  Préparatif,  chose  convenable  au  dessein  de 
plaire.  C'est  l'amour  qui  parle  dans  ces  vers: 

Nus  hom  n'ert  jà  de  ma  mesnie 
Qui  ne  soit  plains  de  cortoisie. 
Ce  sont  li  appareillement 
Desquels  j'appareille  ma  gent. 

Fabl.  MS.  du  R.  n- 1218,  fol.  362,  R*  col.  2. 

Qu'il  suffise  d'avoir  indiqué  le  développement  des 
idées  particulières  qui  peuvent  avoir  été  comprises 
dans  l'idée  générale  A' apareillement,  apareil  prépa- 
ratif. (Voy.  Apareill  et  Apareiller.) 

variantes  : 
APAREILLEMENT.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  foL  281,  V». 
Aparillemext.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  32. 
Apparaillement.  Liv.  des  Machabées,  MS.  des  C.  f°  168. 
Appareillement.   Rom.  de  Rou,  MS.  p.  229.  —  Fabl.  MS. 
du  R.  n»  7218,  foL  362,  R»  col.  2.  -  Cotgrave,  Dict. 
Apparillement.  S'  Bern.  Serm.  MSS.  p.  31,  etc. 

Apareiller,  verbe.  Etre  pareil,  être  égal,  être 
semblable.  Comparer,  égaler,  rendre  pareil,  rendre 
semblable,  peindre.  Réparer,  raccommoder,  panser, 
Préparer,  accommoder,  parer,  ajuster,  habiller, 
armer,  disposer.  On  croit  que  l'adjectif  latin  ;jfl77Zis, 
en  frangois  pareil,  comparable,  égal,  semblable,  est 
l'origine  du  verbe  apariller,  apareiller,  dans  la 
signification  de  ressembler,  être  pareil. 

...  De  serur  et  de  raoiUier 
Ne  puet  amours  apareiller... 
Car  en  l'un  n'a  fors  seul  nature  ; 
Nia  point  d'autre  conjointure. 
L'autre  est  nature  et  si  est  lois,  etc. 

Alliis,  MS.  fol.  23,  V»  col.  1  ;  Var.  du  MS.  du  Roi. 

C'esll'unique  preuve  qu'on  ail  de  la  signification 
neutre  du  verbe  apareiller.  Dans  le  ms.  en  marge 
duquel  sont  les  variantes  du  ms.  du  Roi,  on  lit  : 

....  De  serur  et  de  moillier 

Ne  peut  nuns  bons  apparillier,  etc. 

Alors  il  signifie  comparer ,  faire  comparaison , 
égaler  ;  il  étoit  actif  en  ce  sens  et  plus  souvent 
réciproque. 

Lors  te  viendra  à  remembrance 
Et  sa  façon  et  sa  semblance 
A  qui  nulluy  ne  s'appareille. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  2458-2460. 

Encore  i  a  autre  merveille 
A  cui  nulle  ne  s'apareille 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7615,  T.  II,  fol.  U8,  V  col.  1. 


1)  Corr.  soi.  -  (2)  Corr.  e,  et.  -  (3)  On  croit  qu'il  faut  lire  Chrs,  abréviation  de  Chivalers,  Chevalier. 


AP 


-.9  — 


AP 


Clos  de  girofle,  lis  et  rose 
Où  toute  doucor  se  repose, 
A  vous,  Dame,  ne  s'aparaille. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7218,  fol.  217,  V  col.  1. 

Quelque  variées  que  soient  les  acceptions  de  ce 
verbe,  il  seroit  possible  que  toutes  ne  fussent  que 
des  modifications  de  racccption  génévn]eapareiller, 
comparer,  égaler,  rendre  semblable.  La  peinture 
ayant  ordinairement  pour  objet  la  ressemblance,  il 
paroit  assez  naturel  qvi' apareiller  ait  signifié 
peindre. 

Geste  chievre  que  ci  véez. 

Pour  combien  vous  la  me  peindrez  '!... 

Amis,  trois  francs  de  les  deniers 

M'en  donras,  et  je  volentiers 

La  te  paindré,  et  bien  et  bel... 

Li  maislres  la  chievre.  apareille 

Inde,  jaune,  vert  et  vermeille,  etc. 

Estrub.  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7996,  p.  i. 

On  réalise  cette  ressemblance  avec  les  couleurs, 
le  vernis,  etc.  De  là,  on  aura  dit  : 

A  un  huis  est  arestez 

Où  ot  peint  un  viez  crucefiz 
Et  apareilUé  de  vernis. 

Estruberl,  fabl.  MS.  du  R.  n-  7996,  p.  3. 

En  réparant  une  vieille  cbose,  une  chose  usée, 
en  la  raccommodant,  on  lui  donne  une  forme 
pareille,  une  forme  semblable  à  celle  qu'elle  avoit 
étant  neuve;  on  la  rend  d'une  utilité  égale.  C'est 

Srobableinent  ce  que  signifioit  le  verbe  apareiller 
ans  le  sens  de  réparer,  raccommoder.  «  Les 
«  Chausseliers...  n'auront  pour  la  façon  d'une  paire 
«  de  chausses  î»  homme  que  six  deniers,  et  à  femmes 
«  et  enfans  quatre  deniers,  et  non  plus.  Ceux  qui 
«  les  appareillent,  ne  prendront  pour  mettre  un 
«  avant-pied  en  une  chausse,  que  deux  deniers.  » 
(Ord.  T.  Il,  p.  372.)  «  Bourreliers  n'auront,  ne 
«  prendront  d'une  selle  de  limons  que  douze  sols 
«  de  la  meilleure,...  du  collier  de  limons,  garni  de 

«  brasseures,  d'astellets,  douze  sols et  pren- 

«  dront  d'appareiller  aucunes  des  choses  dessus 
«  dites,  etc.  »  (Ibid.  p.  37.  —  Voy.  Rapareiller.) 

Celte  analogie  étant  reconnue,  l'on  voit  comment 
les  significations  parliculières  des  verbes  par 
lesquels  on  exprime  diverses  façons  de  réparer  les 
choses,  pourroient  être  rapportées  à  la  signification 
générale  à' apareiller.  Par  exemple,  panser  un 
blessé,  lui  mettre  un  appareil,  c'est  employer  les 
médicamens  propres  à  le  rétablir  dans  un  état 
pareil  à  celui  où  il  étoit  avant  sa  blessure. 
«  Ordonna  faire  appareiller  les  blécez.  »  (Saintré, 
page  603.) 

Confortez-vous  d'autre  manière  : 
Faites  vos  mors  mètre  en  litière, 
Et  vos  navrez  appariUier. 

Alhis,  MS.  fol,  52,  R'  col.  1. 

On  conçoit  une  espèce  de  comparaison,  d'égalité, 
de  proportion,  de  convenance  nécessaire  entre  les 
choses  qu'on  prépare  et  l'objet  pour  lequel  elles 
sont  préparées  ;  entre  un  besoin  et  le  moyen  par 
lequel  on  en  prépare  la  satisfaction;  entre  la  réso- 
lution, le  projet  de  faire  une  chose,  et  les  moyens 
par  lesquels  on  s'y  prépare;  entre  la  volonté  et  la 
faculté  d'agir,  etc.  Il  est  donc  possible  que  par  une 
II. 


même  analogie  d'idées,  le  verbe  apareiller  ait 
signifié  préparer  la  voile  à  recevoir  le  vent,  prépa- 
rer un  vaisseau  à  faire  voiles  : 

Et  ses  Barons  et  ses  Parens 
S'aparlièrent  isnellement. 
Lors  nez  ont  tost  appnreillies. 

Rom.  de  Brul,  MS.  fol.  70,  R'  col.  1. 

Préparer  une  somme  d'argent  pour  le  prix  d'une 
chose,  et  la  payer  en  deniers  comptans  :  «  Acheta 
«  le  Roy  d'Angleterre,  le  Connestable  de  France  et  le 
«  Comte  de  tancarville,  de  Monseigneur  Thomas 
«  de  Holande  et  de  ses  compaignons,  et  en  paya 
«  vingt  mille  Nobles  tous  appareillés.  »  (Froissart, 
Vol.  I,  page  145.) 

Préparer  des  viandes,  les  accommoder,  en  pro- 
portionner la  qualité  et  la  quantité  au  besoin  et  au 
goût  des  convives;  préparer  un  festin  ;  préparer  à 
manger,  etc.  «  En  ces  festivalz  jors...  appariUier 
«  les  délicieuses  viandes,  etc.  «  (S*  Bern.  Serm.  fr. 
Mss.  p.  24.  —  Voy.  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict.) 

S'il  faut  aparlier  à  mangier. 

Eust.  Dcsch.  Poè's.  MSS.  p.  500,  col.  i. 
L'an  aparoille\e  maingier. 
Et  cil  n'an  fist  onques  dangier. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'  '7615,  T.  II,  fol  149,  V-  col.  2. 

Préparer,  accommoder  un  hôtel,  pour  recevoir 
convenablement  la  personne  qui  doit  l'occuper  : 

L'ostel  apparechier  et  prendre 

U  ilh  voloit  primes  descendre,  etc. 

Lus  IV  Filles  le  Roy.  MS.  de  Turin,  fol.  39,  R-  col.  2. 

Préparer  la  réception  d'une  personne,  la  recevoir 
avec  les,  égards  convenables,  en  la  faisant  servir 
par  des  Écûyers,  etc.  «  Quant  ilz  furent  emmy  la 
«  Court,  ilz  furent  appareiller  de  deux  Escuyers 
«  qui  misrent  jus  la  Damoiselle,  et  tindrenl  aux 
«  Chevaliers  leurs  estriers,  etc.  »  (Percef.  Vol.  I, 
fol.  35,  R"  col.  -1.) 

Préparer  les  choses  dont  on  a  besoin  pour  se 
vêtir,  se  coucher,  etc.  «  Por-kai  apparailles-ln  ta 
«  vesture  par  si  grant  cuvise  ?  »  (S'  Bernard, 
Serm.  fr.  mss.  p.  24.)  «  Ses  gens  ne  lui  avoient  riens 
«'  appareillé,  comme  de  robbes,  lit,  cousche,  ne 
«  autre  bien.  »  (Joinville,  p.  79.) 

Préparer  à  une  personne  le  moyen  de  paroitre  ce 
qu'elle  est,  lui  préparer  le  moyen  de  plaire,  la 
parer,  l'ajuster  d'une  manière  convenable  :  «  Faistes 
«  vostre  fil  apareiller  comme  fil  d'Emperour.  « 
(Rom.  de  Dolopathos,  ms.  du  R.  n»  7534,  fol.  294.) 

La  Dame  sa  fille  apareille  ; 
Moult  fut  gente,  clere  et  vermeille. 
Fors  la  malne  ;  li  Quens  Va  prise 
Par  la  main  et  lez  lui  assise. 
Moult  li  fu  sa  biautè  loèe,  etc. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7615,  T.  II,  fol.  174,  V'  col.  1. 

Le  sens  ironique  dans  lequel  nous  employons  les 
verbes  s'ajuster,  s'accommoder,  en  parlant  d'un 
homme  qui  s'est  incommodé  par  un  excès  de  vin, 
étoit  quelquefois  celui  du  verbe  apareiller.  «  Des 
«  vins  avoyent-ilz  assez  à  foison;  mais  ils  estoyent 
«  si  chaux  et  si  fors  que...  ceux...  qui  grand'foison 
o  d'eaue  au  boire  n'y  metloienl,  s'en  trouvoient 
«  tellement  appareillés  qu'ils  ne  se  pouvoyent 
«  aider  au  matin.  »  (Froissart,  Vol.  III,  p.  204.) 

On  conclura  d'après  notre  observation  sur  l'ori- 


AP 


-10  — 


AV 


grine  de  l'acception  générale  du  verbe  apareiller, 
s'aparciller,  piépurcr,  se  préparer,  qu'il  pouvoit 
avoir  la  signification  de  tout  verbe  par  lequel  on 
désigne  un  moyen  de  se  préparer  à  une  chose. 
«  En  toutes  besongnes,  avant  que  l'en  les  com- 
«  nience,  on  se  doit  appareiller...  àgrant  diligence 
«  et  à  grant  délibération.  »  S'il  falloit  s'habiller, 
s'armei',  etc.  le  verbe  s'rt/jare/Z/n'signifioil s'armer, 
s'habiller,  etc.  (Voy.  Ai'areill  et  Ap.\iieillement.) 
«  Commanda  Jonalhas  as  suens  que  il  veillassent, 
«  et  eslre  apparill  por  combattre.  »  (Livres  des 
Machabées,  ms.  des  Cordel.  fol.  173.  —  Voy.  Nicot, 
Dict.)  «  Quand  il  eut  un  petit  reposé  sur  son  licl, 
«  il  se  leva  et  appareilla  ;  et  quand  il  fut  appareillé, 
«  il  m;mda  en  sa  chambre,  etc.  "  (Froissart, 
Vol.  III,  page 'iOO.) 

Lors  te  fauldra  appareitler, 
Vestir,  chausser  et  alourner,  etc. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  2533  el  2534. 

Enfin,  être  apareillé,  préparé  à  une  chose,  y  être 
disposé,  c'est  avoir  de  l'inclination  à  faire  cette 
chose,  en  avoir  la  volonté  et  la  faculté  dans  une 
proportion  qui  la  rende  possible  ou  naturelle. 
«  Aparillie~~i  est  mes  cuers...  as  aversitez,  aparilUe:^ 
«  as  propéritez  ;  aparllliez  est  as  humles  choses  ; 
«  aparilliez  est  à  hallesce  ;  aparilliez  est  à  lot  ceu 
«  ke  tu  me  comanderas.  «  (S'  Bernard,  Serm.  fr. 
Mss.  p.  2!)6.)  «  Je  suis...  dattres  (1)....  à  justise  et  à 
«  vériteit  cui  vos  véez  estre  si  aparillie  por  faire 
«  veniance.  (S'  Bernard,  Serm.  fr.  mss.  p.  37G.) 
«  Li  fil  Adam  estoient  molt  aparilliet  à  non-greit- 
»  sachance  {'2).  »  (Id.  ibid.  p.  11.) 

Se  l'ire  jalousie  engaigne, 

Elle  est  moult  fiére  el  moult  estrangne 

El  de  tencer  appareUlie,  etc. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  3802-3804. 

On  terminera  cet  article,  en  observant  que  les 
significations  d'apareiller,  et  â'aparier  étoient  quel- 
quefois les  mêmes.  (Voy.  Aparier  ci-dessous.) 

CONJLG. 

Aparaut  (s'),  subj.  prés.  Qu'il  se  prépare.  (Fabl. 
MS.  du  R.  n*  7G15,  T.  l,  fol.  102,  V  col.  1.) 

Aparelt,  subj.  prés.  Qu'il  prépare.  (Fabl.  ms.  de 
S'Germ.  fol.  37,  R°  col.  2.) 

Apparaillet,  ind.  prés.  Il  prépare.  (S'Bern.  S.  F.) 

AppariUieret,  ind.  imp.  Préparoit.  (Id.  ibid.) 

VARIANTES  ". 

APAREILLER.  Rom.  de  Dolopathos,  fol.  294.  -  Fabl.  MS. 
du  R.  n»  7-218,  fol.  112.  -  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  T.  II,  f°  148, 
V»  col.  1.  -  Clém.  Marot,  p.  408,  etc. 

Aparailler.  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7218,  fol.  217,  V  col.  1.  - 
Rymer,  T.  I,  part,  ii,  p.  168,  col.  2  ;  lit.  de  1278. 

Apareller.  Vie  du  monde,  MS.  de  N.  D.  n»  2,  fol.  14,  Y» 
col.  1.  -  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7615,  T.  I,  fol.  113,  R°  col.  1. 

Apariller.  Atliis,  MS.  fol.  55,  R»  col.  1. 

Aparillier.  S'  Rern.  Serm.  fr.  MSS.  page  296.  —  Rom.  de 
Dolopathos,  MS.  du  R.  n»  7534,  fol.  294,  V»  col.  1. 

Aparlier.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  70,  R».  —  Gloss.  sur  les 
Coût,  de  Beauvcisis,  p.  478.  -  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  500. 

Aparoillf.r.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  24.  —  Ane.  Poët. 
fr.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  104.  -  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615, 
T.  II,  fol.  149,  V»  col.  2. 

Apparailler.  S>  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  24  et  94. 


Appabechier.  Les  iv  filles  le  Roy,  MS.  de  Turin,  fol.  39. 

Appareiller.  Orth.  subsist.  —  Rom.  de  la  Rose,  vers  2533. 
—  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis.  —  Joinville,  p.  79.  — 
Ord.  T.  II,  page  371.  -  Froissart,  Vol.  III,  page  200.  -  Rob. 
Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict. 

Appareillier.  Rom.  de  Dolopathos,  MS.  du  R.  n»  7534, 
fol.  294.  -  Rom.  de  la  Rose,  vers  16979   -  Ord.  T.  I,  p.  314. 

Appareller.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  T.  II,  fol.  211,  R» 
col.  1.  -  Ord.  T.  I,  p.  314. 

Apparillier.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  24.  -  Athis,  MS. 
fol.  23,  V»  col,  1. 

Apperieillier.  Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  p.  244. 

Apperiller.  Britlon,  des  Loix  d'Angleterre,  fol.  60,  V". 

Aparenter,  verbe.  Avoir  pour  parent.  Traiter 
de  parent,  cousiner,  reconnoitre  pour  parent. 
Traiter  comme  parent,  accueillir,  obliger,  aider, 
secourir,  soutenir,  fortifier.  On  devientle  parent  de 
ceux  ;\  qui  on  s'allie;  on  les  a  pour  parens.  De  là, 
l'acception  du  verbe  réciproque  s'apparenter,  qui 
subsiste.  Mais  on  ne  dit  plus  en  parlant  des  person- 
nes à  qui  on  s'allie,  à  t]ui  on  est  allié,  qu'on  les 
apparente.  (Monet,  Dict.)  La  signification  du  verbe 
apparenter,  traiter  de  parent,  cousiner,  reconnoitre 
pour  parent,  est  plus  ancienne  dans  notre  langue. 

Povres  parens  nus  n'aparente. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'  7615,  T.  I,  fol.  72,  R'  col.  2. 

Tant  ai  de  sa  manière  aprise  dès  piéga, 
C'oume  de  laschelé  jà  n'aparentera. 

Buenon  de  Comniarchies,  MS.  de  Gaignat,  fol.  198,  V*  col.  1. 

On  lit  que  Henri  IV  «  étoit  fort  respectueux 
«  envers  ses  prochains....  n'y  ayant  Prince  ni  Gen- 
«  tilhomme  de  quelque  loin  qui  lui  pût  appartenir, 
«  qu'il  n'apparentât.  »  (Mém.  de  Sully,  T.  XII, 
p.  130.)  Après  sa  mort,  la  politique  de  Marie  de 
Médicis  dédaigna  le  cousinage.  «  Pour  faire  anéan- 
«  tir  toutes  les  civililez,  familiaritez  et  courtoisies 
"  de  tout  temps  pratiquées  au  royaume,  le  Roi  son 

«  fils,  ni  ses  autres  enfans  n'aparentoient en 

«  saluant  qui  que  ce  soitdans  le  royaume intro- 

«  duisant  de  plus  en  plus  un  tel  mépris  des  Gentils- 
«■  hommes  d'illustre  extraction,  et  une  si  grande 
«  indifférence  entr'eux  et  toutes  sortes  de  gens  de 
"  néant  qui  avoientaccèsà  la  faveur,  qu'ils  vivoient 
<>  comme  pairs  et  compagnons  ensemble.  »  (Ibid. 
page  98.) 

Ce  verbe  aparenter  n'est  pas  moins  ancien  dans 
le  sens  de  traiter,  accueillir  comme  parent,  en  obli- 
geant, aidant,  etc.  Peut-être  même  a-t-il  dans  le 
premier  vers  qu'on  a  cité,  la  même  signification  que 
dans  les  vers  suivans  : 

Fox  est  qui  aparente 
Ne  parent  ne  parente 
De  quoi  il  ait  villance. 
Mais  loinz  de  lui  le  meta, 
N'onques  ne  li  promette 
Chose  où  il  ait  fiance. 

Prov.  du  Vilain,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  74,  V  col.  2. 

Il  est  naturel  de  s'aider  entre  parens  ;  c'étoit  une 
espèce  de  loi  dans  les  principes  du  système  féodal 
et  de  la  chevalerie.  On  se  fortifioit  donc  en  s'appa- 
rentant,  en  s'alliant  à  une  famille  nombreuse  et 
puissante,  à  une  famille  dont  on  avoit  droit  d'espé- 
rer l'aide,  le  secours  dans  une  entreprise,  une 


(1)  Débiteur,  redevable.  -  (2)  Ingratitude. 


AP 


—  n 


AP 


guerre,  une  querelle.  Cette  idée  particulière  de  se- 
cours étant  généralisée,  l'on  aura  dit,  par  extension, 
qu'un  ennemi  étoit  mal  apparenté,  lorsqu'il  n'étoit 
pas  en  force,  en  nombre  suffisant  pour  soutenir  un 
siège,  un  combat,  etc.  «  Les  Espaignols  de  la  Ceri- 
«  gnolle,  congnoissans  que  trop  mal  apparentes 
«  estoienl  pour  attendre  le  siège  des  François,  etc.  » 
(J.  d'Auton,  Annal,  de  Louis  XII,  an.  1502,  p.  41.) 
«  Tousjours  estoient  en  picque,  etlfi  où  les  François 
«  les  trouvoient  mal  apparente--, ,  très-mauvaise 
«  compaignée  leur  faisoient,  et  eulx  de  même  aux 
«  François.  »  (Id.  ibid.  an.  i50G-ir,07,  p.  188.  — 
Voy.  EsiPARENTER  ct  Pare.nter  ci-après.) 

VARIANTES    : 
APARENTER.  Mém.  de  SuUy,  T.  XII,  page  98. 
App.\ranter.  Monet,  Dict. 

Apparenter.  J.  d'Auton,  Annal,  de  Louis  XII,  an.  1502.  — 
pages  17,  41,  etc.  —  Mém.  de  Sully,  T.  I,  page  94. 

Apariage,  suhst.  masc.  Apanage.  Dot.  On  adou- 
cit la  rigueur  nécessaire  des  Lois  qui  proscrivent 
l'égalité"  si  naturelle  entre  frères  et  sœurs  dans  le 
droit  de  succéder  à  leur  père,  en  pourvoyant  à  la 
subsistance  de  ceux  qu'elles  excluent  ;  en  égalant, 
en  proportionnant  ù  l'état  qu'ils  doivent  avoir  dans 
la  société,  les  fonds  en  terre  ou  en  argent,  qui  leur 
tiennent  lieu  de  partage  et  de  patrimoine.  C'est 
relativement  à  cette  idée  de  proportion,  d'égalité, 
qn'apariage  a  signifié  la  même  chose  qu'apanage. 
(Voy.  ArPANAGE  ci-dessous.)  «  Jà  soit  ce  que  nous 
<■  sachions  certainement...  que...  le  Seigneur  de 
«  Beaujeu  et  ses  prédécesseurs  Seigneurs  dudit 
«  lieu,  aient  tousjours  tenu  et  doivent  tenir  en  foy 
«  et  hommage  de  nous  et  de  noz  prédécesseurs  Roys 
«  de  France,  h  cause  de  la  Corone  de  France,  toute 

«  la  terre  et  baronie  de  Beaujeu et  aussi  eux  et 

<■  leurs  dictes  terrez  et  baronie...  et  subgès  de  leur 
«  dicte  terre  et  baronie  aient  ressorti  et  doienl  de 
«  tout  temps  ressortir  îi  nous  et  à  nos  prédeces- 

«  seurs ne  que  ladicle  foy,  hommage  et  ressort 

«  aient  esté,  ne  puissent  ou  "doïenl  estre  séparés  en 
«  tout  ne  en  partie,...  soit  à  cause  de  partaige, 
•  appariage,  ou  doaire  qui  ait  esté  ou  soit  faitou 

«  constitué,  etc Que  jamais  ledit  fief  et  ressort 

«  puissent  estre  séparés  de  la  Corone  de  France,  en 
«  tout  ne  en  partie,  à  perpétuité,  ù  vie  ne  à  temps, 
«  soit  à  cause  de  partaige,  d'appanage,  de  doaire, 
«  de  donacion ,  vendicion ,  transport  ou  alienacion 
«  que  l'en  face,  ou  constitue  à  Royne  de  France,  à 
«  enfans ,  frère  ou  neveu  de  Roy  de  France ,  etc.  » 
(Ord.  T.  V,  p.  112  et  113.) 

La  dot  des  filles  étant  une  espèce  d'apanage  qui 
doit  être  proportionné  à  leur  état  et  à  leur  naissance, 
il  est  possible  qu'on  ait  désigné  celle  dot  par  le  mot 
apariage.  Charles  VI,  par  le  contrat  de  mariage  de 
sa  fille  Isabelle  de  France  avec  Richard  II,  roi 
■  d'Angleterre,  s'oblige  îi  payer  «  la  somme  de  sept 
«  cens  mille  francs  d'or...  lesquels...  il  donne  et 
«  octroyé  à  sadile  fille  pour  et  en  lieu  de  tous  par- 
«  tages,  apariages,  successions  de  père  et  de  mère. 


c.  et  autres  droicts  quelconques  qu'elle,  ses  enfans 
»  et  les  descendans  d'eux...  pourroient  demander, 
«  reclamer  et  avoir  en  meubles  ou  héritages,  au 
«  royaume  de  France,  ou  autre  part.  »  (Godefroy, 
Annot.  sur  l'IIist.  de  Charles  VI,  p.  581.)  On  remar- 
quera que  la  signification  du  mot  simple  pariage  est 
très  ditTérente  de  celle  du  composé  apariage.  (Voy. 
Appariation  ci-dessous.) 

VARIANTES  : 
APARIAGE.  Godef.,  Annot.  surTHist.  de  Charles  VI,  p.  581. 
Appari.\ge.  Ord.  T.  V,  p.  113. 

Aparier,  verbe.  Unir,  joindre,  conjoindre,  ac- 
coupler. Rendre  pareil,  égaler,  comparer.  On  sait 
que  les  êtres  mâles  et  femelles  qui  produisent  leur 
semblable  et  se  perpétuent  en  s'uuissanl  l'un  à 
l'autre,  sont  d'espèce  pareille.  De  là,  le  verbe 
apairer,  ou  aparier,  formé  de  pair,  paire,  en  latin 
par,  a  signifié  joindre  le  pair  au  pair,  joindre 
l'homme  à  la  femme,  joindre  le  mâle  à  la  femelle; 
en  général,  les  unir,  les  conjoindre,  les  accoupler. 
(Voy.  Nicot  et  Monet,  Dict.) 

Par  foi,  vous  estes  tout  d'un  grant  ; 

Ce  seroit  une  belle  paire. 

Et  Diex  doinst  qu'amours  vous  apaire. 

Froissant,  rocs.  MSS.  p.  134,  col.  2. 
Bien  seras  çains,  se  te  maries, 
Se  vers  autrui  ne  te  desçains 
K'à  celi  à  cui  Vaparies. 

Miserere  du  Red.  de  Moliens,  MS.  de  Gaignat.  fol.  212,  R*  col.  S. 
.  .  .  Puisque  Sainte  Yglise  apaire 
Deus  gens,  ce  n'est  mie  à  refaire. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'  7218,  fol.  250,  V"  col.  î. 

On  a  désigné  l'union,  le  commerce  d'un  mari  avec 
une  autre  femme  que  la  sienne,  en  disant  qu'il 
apairoit  une  autre  femme.  Les  hommes  sont  si 
constans  dans  leurs  préjugés,  qu'on  peut  dire  encore 
avec  un  de  nos  anciens  Poêles  : 

S'uns  horas  autre  famé  apaire, 
Petit  (1)  en  voi  blastengier  (2) 
Sa  mouiller  (3)  :  mes  à  tout  dis 
Est  li  preudoms  escharnis  (4) 
Puisque  sa  lame  folie  (5). 
Abc.  Poês.  fr.  MS.  du  Vatic.  n-  1522,  fol.  158,  R-  col.  1. 

Lorsque  le  bonheur  d'aimer  et  d'être  aimé  éloit 
<c  la  pasture  et  l'embrasement  aux  jeunes  Cheva- 
«  liers,  pour  estre  preux,  hardis,  larges,  courtois 
«  et  gais,  '•  il  paroissoit  bien  naturel  de  favoriser 
l'amour,  ce  principe  général  de  leurs  vertus  guerriè- 
res et  sociales.  On  le  voyoit  souvent  naître  à  table  et 
s'exalter  avec  cette  gaieté  franche  et  honnête  qu'ins- 
piroit  à  chaque  Chevalier  le  plaisir  «  d'avoir  une 
Dame  h  son  escuelle  et  de  lui  être  aparié,  »  c'est-à- 
dire  uni  pour  manger  avec  elle  et  la  servir.  «  Beaulz 
•>  Seigneurs,  aura  chascun  une  mienne  niepce  à 
«  son  escuelle  à  ce  soupper...  car  c'est  la  pasture 
«  et  l'embrasement,  etc.  »  (Percef.  Vol.  1,  fol.  125, 
V°  col.  2.)  «  Sire,  dist  la  damoiselle,....  ores  vous 
«  séez  plus  près  de  moy,  si  me  livrerez  ce  qu'il  me 
"  faudra...  et  la  Royue  d'Escosse  sera  près  de  vous, 
«  et  le  Roy  après,  qui  la  servira  à  son  vouloir,  et 
«  Lys'ine  près  de  luy,  mais  le  Tors  sera  à  sa  dextre 
«  qui  la  servira  ;  si  serons  appariez....  Regardez  le 


(1)  Peu.  —  (2)  Mésestimer,  mépriser.  —  (3)  Femme  ;  en  latin  muHer.  —  (4)  Ridiculisé.  —  (5)  Fait  une  folie,  est  infidèle. 


AP 


—  12  — 


AP 


1  Roy  Alexandre,  il  ne  lairroit  pas  une  miette  de 
«  pain  devant  la  Damoisellle  avec  qui  il  mangue.  » 
(Ibid.  fol.  l'i'i,  Vcol.  1  et  2.) 

En  particularisant  l'acception  générale  du  verbe 
aparier,  joindre  le  pair  au  pair,'joindre  le  mâle  à 
la  femelle,  les  unir,  les  accoupler,  on  dit  encore  que 
les  pigeons,  les  tourterelles,  les  perdrix  s'apparient. 
Plus  anciennement  ce  verbe,  le  même  qu'apairei; 
désignoit  l'accouplement  de  toute  espèce  d'oiseaux. 
(Voy.  Ari'AiiiATio.N  et  ArrAniRMENT  ci-dessous.)  «  Au 
«  tempsquelesoiseauxsonten amouvei s' apparient 
"  pour  faire  génération.  »  (Nicot,  Dict.) 

Quant  li  beax  Esté  repaire, 

Qu'arbre  sont  flori, 
Que  chascun  oiseaux  s'ajjaire 

Por  ii  temps  joli,  etc. 

Anu.  Poël.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  465. 

Il  y  a  une  telle  analogie  entre  les  verbes  apareiller 
et  aparier,  qu'on  a  pu  dire  :  «  Quand  la  tourterelle 
"  a  perdu  sa  compagne,  elle  ne  s'appareille  jamais 
«  avec  une  autre.  »"(Dict.  de  Trévoux.)  On  ajoutera 
que  l'un  et  l'autre  ont  signifié  rendre  pareil,  égaler, 
comparer.  (Voy.  Nicot  ef  Monet,  Dict.) 

Si  l'en  remonstre  une  autre  père  ; 

Et  li  Chapelains  les  apère. 

Si  les  truéve  quarrés  et  drois. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7218,  fol.  235,  V  col.  2. 

La  douceur  attrayante  d'une  femme  l'a  fait  com- 
parer à  l'abeille. 

Trop  bien  vous  puis  apparer,  sans  mesdire, 
A  la  mouche  qui  porte  miel  et  cire  : 
Le  miel  est  doulz  et  le  sire  à  lui  tire. 

G.  Macbaul,  MS.  fol.  197,  R'  col.  1. 

Encore  aujourd'hui,  apparier  et  appareiller  signi- 
fient joindre  à  une  chose,  une  autre  chose  qui  lui 
soit  pareille.  (Voy.  Apareiller  ci-dessus.) 

VARIANTES  : 
APARIER.  Miserere  du  Recl.  de  Moliens,  MS.  de  G.  fol.  212. 
Apairer.  Ane.  Poës.  fr.  MS.  du  Valic.  n«  1490,  fol.  162,  R". 
-  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  134,  col.  2. 
Aperer.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  235,  V"  col.  2. 
Apparer.  G.  Machaut,  MS.  foi.  197,  R»  col.  1. 
Apparier.  Peroef.  Vol.  1,  fol.  122,  V°  col.  1. 

Aparir,  verbe.  Accoupler.  Satisfaire ,  contenter 
également.  Le  premier  sens  est  le  même  que  celui 
du  verbe  aparier,  s'aparier,  accoupler,  s'accoupler. 

Les  oyseaulx ,  au  printemps  de  may, 
S'appurisseiit  et  font  leur  glay. 

Eust.  Desch.  Poés.  MSS.  p.  477,  col.  4. 

Si  le  verbe  aparir  au  second  sens  n'est  pas  une 
altération  d'orthographe  du  verbe  apaer,  apaier, 
contenter,  satisfaire,  on  peut  dire  que  dans  un  sens 
analogue  à  celui  d'aparier,  égaler,  il  a  signifié  sa- 
tisfaire, contenter  également,  lorsqu'en  parlant  de 
l'acceptation  d'une  trêve,  on  a  dit: 

Donnée  en  fu  la  seurté  ; 

Si  que  ambes-deux  les  parties 

S'en  tinrent  très  bien  aparien. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  2,  V*  col.  2. 

VARIANTES  '. 
APARIR.  Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  2,  V»  col.  2. 
Apparir.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  477,  col.  4. 


Aparlement,  subst.  inasc.  Pourparler,  paroles, 
etc.  Significations  analogues  à  celles  du  mot  simple 
parlement,  en  latin  cnlloquium ,  eloquium.  (Pseau- 
tier,  MS.  du  R.  n°  7837,  fol.  17ô.  —  Voy.  Parlement.) 

Aparier,  verbe.  Parler.  Anciennement,  aparier 
une  personne,  s'aparier  à  elle,  l' aparier  d'une  chose, 
c'étoil  lui  parler,  lui  transmettre  ses  sentimens, 
ses  idées  par  l'organe  de  la  voix.  (Voy.  Aparoler  ci- 
dessous.)  «  Il  Vapavlerent  de  faire  pais.  »  (Chron. 
d'Outremer,  ms.  de  Berne,  n»  113,  fol.  130,  V°col.  3.) 
«  Auquel  Mareschal  le  suppliant  s'apparia  et  lui 
"  dist,  etc.  »  (D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de 
Du  Gange,  au  mot  Arrationare  ;  lit.  de  1451.) 

....  Tuit  cil  de  sa  contrée 
L'aiment  et  plus  fier  s'en  font  ; 
Ne  jai  n'en  iert  apairlée  ; 
.Tai  tant  hardi  ne  seront. 

CUans.  fr.  MS.  do  Berne,  n'  389,  pari,  il,  fol.  2,  R». 
.  .  .  Feist  bien  as  povres,  et  bel  les  aparloit. 

Doctrinal,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  102,  R-  col.  ï. 
Quand  ne  vous  plait  ke  je  sois  escoutés, 
■frop  sui  de  vous  cruelment  apartés. 

Ane.  PoÈt.  fr.  MS.  avant  1300,  T.  IH,  p.  1109. 
Les  messagiers  a  honnorés 
Et  festiés  et  apartés. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  60,  V*  col.  3. 

On  dit  aujourd'hui  parler  à  une  personne  ;  mais 
V  aparier  est  plus  rapide.  Lorsque  le  rapport  indiqué 
par  la  préposition  initiale  et  inséparable  A' aparier, 
étoit  vague  et  incertain,  ce  verbe  paroissoit  être 
neutre  et  ne  rien  signifier  de  plus  que  noire  verbe 
simple  parler. 

Se  plus  i  ot,  plus  n'en  dirai  ; 
Car  d'autre  chose  aparterai. 

cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  63,  V*  col.  2. 
Ains  de  tel  trayson  n'oy  aparter  nus. 

Berte  as  grans  pies,  MS.  de  Gaignat,  fol.  124,  V"  col.  1. 

VARIANTES  : 

APARLER.  Ane.  Poët.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  423.  - 
Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  62.  —  Enfance  d'Olivier  le  D. 
MS.  de  Gaignat,  fol.  86.  -  Le  Jouv.  MS.  p.  235,  etc. 

Apairler.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  n"  389,  part.  II,  fol.  41. 

Aparller,  Apparler.  d.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de 
Du  Cange,  au  mot  Arrationare. 

A-par-main,  express,  adverb.  Tout  de  suite, 
bientôt,  dans  peu  de  temps,  etc.  En  latin,  per  me- 
dianum  (1);  suppl.  tempus.  (Voy.  A-par  et  Au-par-mé.) 

VARIANTES  : 
A-PAR-MAIN.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol  49,  V  col.  2. 
A-PER-MAIN.  Ane.  Poët.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1349. 

A-par-mesmes,  express,  adverb.  Dans  le 
même  temps. 

VARIANTES    : 

A-PAR-MESMES.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  178,  passim. 
A-PER-MEMES.  Id.  ibid.  p.  186. 
A-PER-MiSMES.  Id.  ibid.  p.  381. 

Aparoi,  subst.  masc.  Préparatif.  Parure  ou  ap- 
parence. Paroi,  porte,  fenêtre,  etc.  Il  semble  que 
dans  un  sens  analogue  à  celui  du  verbe  apareiller, 
ajuster,  préparer  en  général ,  on  a  dit  que  les  pen- 
nons,  les  plumes  ajustées  aux  côtés  d'une  flèche 
pour  la  diriger  en  l'air,  en  font  les  apparais. 


(1)  Ou  plutôt  per  manè;  de  même  demain  est  de  manè.  (n.  e.) 


AP 


—  13  — 


AP 


.  Hai  !  Amors,  devant  tes  elz 

Ne  pwet  garir  joenes  ne  vielz... 
Contre  ton  dart  n'a  nul  essoine... 
Li  fers  navre  à  l'esgarder  ; 
La  flèche  coule  el  pensser  ; 
Li  penon  font  les  apparais,  etc. 

firime  el  Tysbé,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  98,  R°  col.  1. 

On  sépare,  on  s'ajuste  d'une  façon  proportionnée 
à  l'idée  qu'on  veut  que  les  personnes  prennent  de 
nous  en  jugeant  par  l'apparence.  Ainsi  la  significa- 
tion d'aparoi  peut  être  relative  à  celle  d'aparoir  ou 
d'apareiller  dans  les  vers  suivans  : 

Les  bestes  si  sont  sans  Pastor  ; 
Nul  n'i  pense  qu'à  bel  ator 
Et  biau  apurai  par  dehors, 
Et  l'ame  lessent  por  le  cors. 
Hist.  de  Fr.  à  la  suite  du  Rom.  de  Fauvel,  MS.  du  R.  n'  6812,  fol.  67. 

Enfin,  le  mot  aparoi  qui  dans  le  sens  de  prépa- 
ralif  a  signifié  les  matériaux  convenables  et  propres 
à  la  construction  d'un  édifice,  d'une  maison,  auroit 
pu  signifier  par  la  même  raison  d'analogie,  les 
choses  convenables  et  propres  à  la  distribution,  à 
la  commodité,  à  la  sûreté  d'un  logement,  cloison, 
porte,  fenêtre,  etc.  »  Il  convint  abatre  les  apparoir 
«  de  la  chambre  où  se  tenoit  le  Roy;  et  estoit  tel  le 
«  vent  que  onques  n'y  oza  demourer  en  celle  cham- 
«  bre  personne,  de  paeur  que  le  vent  ne  le  gectast 
«  en  mer.  «  (Joinville,  p.  113.  —  Voyez  Ap.^reill.) 
Quelles  que  soient  en  cet  endroit  l'origine  et  l'ac- 
ception d'aparoi,  il  signifie  paroi,  muraille,  dans 
les  passages  suivans.  •<  Getta  le  voirre  contre  le  mur 
«  ou  apparoy  de  la  maison.  •>  (D.  Carpentier,  Sup. 
Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Paries;  —  Lett.  de 
grâce,  an  1454.)  «  Se  tenoit  musse...  contre  le 
«  torchis  ou  apparoy  de  son  hostel.  »  (Id.  ibid.  Lett. 
de  grâce,  an  1468.  —  Voy.  Appare  ci-dessous.) 

VARIANTES  : 

APAROI.  Hist.  de  Fr.  à  la  suite  du  Rom.  de  Fauvel,  MS. 
du  R.  n°  6812,  fol.  67,  V»  col.  3. 

Appaboi.  Pirame  et  Tysbé,  MS.  de  S"  Germ.  fol.  98,  R" 
col.  1.  -  Joinville,  p.  113. 

Apparût  (corr.  Apparoi.)  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  177. 

Apparoy.  D.  Carpentier.  S,  G.  lat.  de  Du  C.  au  mot  Paries. 

Aparoler,  verbe.  Pailer.  G'est  le  verbe  simple 
paroler  qui,  précédé  de  l'a,  préposition  initiale  et 
inséparable  ,  acquéroit  une  signification  active , 
comme  «jyaj'/er  contraclion  A'aparoler.{^.  Aparler.) 

Quant  li  Prestres  entent  et  ot 
C'on  dist  de  lui  itel  parole, 
Doucement  .\loul  aparole. 

Fabl.  .MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  148,  R*  col.  î. 
Cortois  set  bien,  s'on  X'aparole, 
Rendre  raison  de  quanqu'il  ot  ; 
Jà  ne  dira  un  vdain  mot. 

Diz  d'amurs  fines,  MS.  de  Turin,  fol.  14,  R'  col.  1. 

A-par-soi,  express,  adv.  Tout  seul,  séparément, 
à  part.  On  croit  avoir  suffisamment  expliqué  ailleurs 
comment  l'expression  à-par-soi,  à-part-soy,  ou  par- 
soi,  en  latin  per  se,  c'est-à-dire  soi-même,  de  soi, 
de  soi-même,  aura  signifié  tout  seul,  à  part,  sépa- 
rément. (Voy.  A-PAR  ci-dessus,  et  Appar  ci-dessous.) 

VARIANTES  : 
A-PAR-SOI.  Reaumanoir,  Coût,  de  Reauvoisis,  p.  2. 
A-PAR-soY.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  371,  col.  1,  etc. 
A-PABT-SOY.  Fouilloux,  Fauconnerie,  fol.  49,  R». 


Apartenance,  subst.  fém.  Appartenance.  Pro- 
priété. Parenté.  On  observe  que  la  signification 
d'appartenance  est  plus  générale  que  celle  d'appen- 
dance,  puisque  appendre  n'est  qu'un  moyen  parti- 
culier par  lequel  une  chose  tient  à  une  autre. 
L'idée  particulière  d'appendance  étant  donc  com- 
prise dans  l'idée  générale  d'appartenance,  il  est 
possible  que  ces  deux  mots  réunis  n'aient  signifié 
rien  de  plus  que  le  mot  seul  appartenance.  "  Nus 
«  avons  rendu  à  nostre  cher  le  Duc  de  Bretagne... 
«  la  cunté  de  Richemund  ave  totes  les  upurtenan- 
«  ces...  lequel  cunté  ove  lesquèles  apurtenances, 
«  les auncestres  meimesceluy Duc autrefi Is lindrent, 
«  etc.  »  (D.  Morice,  Preuv.  de  l'Hist.  de  Bret.  T.  I, 
col.  1013  ;  tit.  de  1268.)  On  décomposoit  en  quelque 
façon,  l'idée  générale  d'appartenance,  lorsqu'on 
disoit  :  «  Laquelle  maison  dessusdite,  si  comme  elle 
«  se  comporte  ,  o  Loutes  ses  appartenances  et 
«  appendances,  le  devant  dit  Jehan  Arrode,  etc.  » 
(Ilist.  de  la  ville  de  Paris,  T  III,  p.  297;  til.de  1302.) 
"  Que  nostre  hostel ,  tout  ainsi  comme  il  se  com- 
«  porte  en  long  et  en  large,  en  toutes  ses  parties 
»  haut  et  bas,  avec  tous  les  jardins,  appartenances 
»  et  appendances  d'icelui  quelconques,  etc.  »  (Ibid. 
p.  483;  tit.  de  1364.)  Si  l'on  eût  fait  réflexion  que 
Vappendance  est  une  espèce  d'appartenance,  et  que 
par  cette  raison  appartenances  signifie,  dans  le 
premier  de  ces  trois  titres,  tout  ce  que  dans  les 
autres  peut  signifier  appartenances  et  appendances, 
on  auroit  senti  l'inutilité  de  réunir  deux  termes 
dont  l'un  signifie  en  particulier  ce  que  l'autre  signi- 
fie en  général.  Peut-être  aussi  les  a-t-on  employés 
comme  termes  synonymes 'f  Au  moins  est-il  certain 
que  l'idée  particulière  d'appartenir  â  une  chose  en 
y  appendant,  étant  généralisée,  l'acception  d'appen- 
dances  peut  avoir  été  la  même  que  celle  d'appen- 
ditiœ ,  qui  dans  un  titre  latin  équivaut  seul  aux 
termes  réunis  pertinentiœ  et  appenditiœ,  en  fran- 
çois  appartenances  et  appendances.  «  Domum 
«  nostram...  unà  cum  suis  appenditiis  et  adjacentiis 
«  quibuscumque  dedimus....  Concedimus  insuper... 
«  quod  prœnominata  domus  cum  suis  pertinentiis, 
«  appenditiis  et  adjacentiis  supradictis,  etc.  »  (Hist. 
de  la  ville  de  Paris,  T.  III,  p.  484  ;  lit.  de  1368.) 

Il  semble  donc  qu'on  se  soit  trompé,  lorsqu'on  a 
dit  en  général  :  »  Les  appartenances  sont  les  pri- 
«  mordiales  consistances  de  la  seigneurie,  en  hom- 
"  mes,  terres  labourables,  prez,  bois,  cens,  rentes, 
«  coutumes,  droitures,  péages,  etc.  Les  appendances 
«  sont  au  contraire  tout  ce  qui  a  été  nouvellement 
«  attaché  à  la  seigneurie,  tant  en  domaine  qu'en 
«  mouvances.  »  (Brussel,  Usage  des  Fiefs,  T.  I, 
p.  17.)  Quand  cette  distinction  seroit  vraie,  relati- 
vement à  quelques  titres,  à  quelques  coutumes  où 
ces  deux  mots  auroient  une  signification  aussi 
différente,  oii  appartenance  désigneroit  des  objets 
évidemment  distincts  de  ceux  que  désigneroit 
appendance,  elle  deviendroit  fausse,  en  devenant 
générale.  Les  lois  Anglo-Normandes,  qui  sont  nos 
anciennes  lois,  distinguent  à  la  vérité  «  les  choses 
«  regardants  des  choses  appendants  à  manor,  à 


AP 


—  1-: 


«  terres,  etc.  ■>  (Voy.  Tenurcs  de  Littleton,  fol.  41.) 
Mais  on  n'en  conclura  pas  que,  selon  ces  mêmes 
lois,  «  tout  ce  qui  entre  dans  la  constitution  pri- 
«  mordiale  du  tlef,  le  regarde  ;  que  tout  ce  qui  a  été 
«  attaché  ù  une  Icrre,  depuis  son  érection  en  fief, 
«  en  dépend.  «  (Voy.  Hoiiard,  anc.  Loix  des  Fran- 
çois, T.  I,  p.  2GI.)  Ce  seroit  dire  que  la  distinction 
des  choses  rcfjanlants  et  des  choses  appendants 
n'est  autre  que  celle  qu'on  a  peut-être  imaginée 
entre  appartenances  et  appendances  ;  et  ce  seroit 
se  méprendre. 

«  Les  choses  regardants  al  manor,  ou  al  terres 
«  et  teuements,  ne  sont  point  tout  ce  que  Brussel 
«  nomme  appartenances ,  puisque  nul  chose  est 
«  nosmé  regardant  à  un  manor,  etc.  fors  que 
«  villeine.  »  (Voy.  Tenures  de  Littleton,  fol.  -iL) 
Ce  mot  regardant  ne  désigne  donc  que  le  villain,  et 
le  désigne  comme  un  serf  que  l'impossibilité  de 
s'éloigner  de  la  terre  i>  laquelle  il  est  attaché,  force 
à  teni'r  ses  regards  tournés  vers  un  maître  qui  veut 
être  obéi  au  premier  signal.  D'ailleurs,  lorsqu'on 
lit,  (id.  ibid.)  que  «  certèines  auters  choses,  come 
«  advowson,  common  de  pasture,  etc.  sont  nosmés 
«  appendants  al  manor,  etc.  »  on  voit  que  les 
choses  appendants  étant  des  droits  honorifiques  et 
utiles,  sont  des  choses  incorporelles,  et  par  consé- 
quent de  la  nature  de  celles  que  Britton  nomme 
appartenances.  «  Ore  fait  à  dire  de  disseisines  de 
«  choses  nent  corporelles,  si  come  des  apurte- 
«  naunces...  ascuns  apurtenannces  sont  fraunches, 
«  si  come  à  regard  des  personnes  et  des  tenementz 
«  à  quex  ils  sont  dues  :  enserves  quant  à  regard 

«  des  tenementz  dont  ilz  issent En  plusurs 

«  manères  purra  un  home  enserversont  tenement, 
«  si  come  cascun  à  graunter  î'i  autre  que  rien  n'ad, 
«  que  il  eyt  lyens  droit  de  pescher,  ou  de  laver,  ou 
«  de  carier,  et  par  autres  servages  que  purrount 
«  estre  sauns  nombre,  solonc  ceo  que  ilz  sount 
«  simples  ou  compountz  de  autres  apnrtenatl)ices  : 
«  car  il  y  ad  apurtenaunces..  et  si  nà  apurtenannces 
«  des  apurtenaunces.  »  (Britton,  des  Loix  d'Angle- 
terre, fol.  139.)  Ainsi  la  distinction  des  choses  regar- 
dants et  des  choses  appendants,  par  laquelle  on  ne 
peut  justifier  celle  (Y appartenances  et  d'appendan- 
ces,  est  une  nouvelle  preuve  que  ces  deux  mots 
employés  indifféremment  ont  eu  même  signification, 
soit  qu'on  la  restreignît  aux  choses  incorporelles, 
soit  qu'on  retendit  aux  corporelles. 

Ces  mêmes  choses  étant  vues  relativement  aux 
personnes  à  qui  elles  appartiennent  comme  leur 
bien  propre,  le  mot  appartenance,  qui  ne  subsiste 
plus  qu'au  premier  sens,  signifioit  propriété.  (Voy 
Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict.)  En  supposant 
avec  les  Etymologistes  latins,  que  propè  soit  l'ori- 
gine de  proprium,  supposition  d'autant  plus  vrai- 
semblable que  par  une  façon  de  voir  très-naturelle, 
rien  ne  nous  est  plus  proche  que  ce  qui  nous  est 
propre,  l'idée  de  propriété  seroit  analogue  à  celle 
de  proximité  et  même  î»  celle  d'appartenance,  puis- 


qu'entre  les  choses  et  les  personnes  appartenantes 
les  unes  aux  autres,  il  y  a  nécessairement  une 
proximité  réelle  ou  idéale. 

Quoi  qu'il  en  soit,  le  mot  appartenance,  comme 
terme  collectif  des  personnes  à  qui  l'on  tient  par  la 
proximité  du  sang,  signifioit  parenté.  (Nicot,  Dict.) 

Mollit  en  fil  grant  le  pleur  en  France 
De  ceus  de  leur  apartenance. 

G.  Guiarl,  MS.  M.  37,  V. 

VARIANTES  : 
AP.\.RTE.\ANCE.  G.  Guiart,  MS.  fol.  37,  V». 
Aportenaunce.  Rymer,  T.  I,  part,  ii,  p.  109,  col.  1. 
AppunTENANCE.  Id.  ibid. 

Apurtenance.  Id.  ibid.  p.  H4,  col.  2.  —  Livres  des  Rois, 
MS.  des  Cordel.  fol.  8.5,  R»  col.  1. 
Apurten'aUiVce.  Britton,  des  Loi.x  d'Angleterre,  fol.  139,  R*. 
Apurtenauxse.  Rymer,  T.  I,  part,  ii,  p.  109,  col.  1. 

Apaptenant,  participe.  Qui  appartient  comme 
mari  et  femme,  comme  parent,  ami,  serviteur,  etc. 
Les  hommes  que  rapprochent  diverses  relations 
physiques  ou  morales,  tiennent  les  uns  aux  autres 
par  ces  relations.  De  là,  on  a  dit,  1°  en  parlant  d'un 
mari  et  d'une  femme,  qu'ils  étoient  apartenants  : 

Cil  Rois  bastars, 

Guillaumes  ki  ne  fu  couars,... 
Funda  S'  Estievene  à  Kaan  ; 
Et  sa  feme,  par  karité, 
I  funda  Sainte  Trinité. 
Mehaus  (1)  ot  non  ;  et  pour  itant 
Qu'il  estoient  apartemint, 
Fist  li  Dus  ces  deux  abeïes, 
Ki  seront  à  tousjors  siervies. 
Par  le  conseil  de  l'Apostole 
Qui  leur  commanda  par  estole. 
Pour  cou  que  SIehaus,  ki  l'avoit 
Auques  priés,  li  apartenoit. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  459  et  460. 

2°  En  parlant  de  personnes  entre  lesquelles  il  y 
avoit  relation  de  parenté,  qu'elles  étoient  aparte- 
nantes.  «  Celui  qui  le  fié  a  et  tient,  estoit  apartenant 
■>  à  celui  de  par  qui  le  fié  est  escheu.  »  (Assis,  de 
Jérus.  chap.  clxv,  p.  115.) 

Cil  ert  amis  Buenon  et  ses  apartenan.i. 

Biienon  de  Commarchies,  MS.  de  Gaignal.  fol.  193,  R'  col.  1. 

Li  Dux  Fagons  fu  Chevaliers  vaillans... 
Armes  ot  bleues,  si  ot  d'or  trois  croissans  ; 
Tes  armes  ot  li  Quens  Hues  dou  Mans  ; 
Mais  que  labiaus  de  gueules  biens  seans 
Y  ot  ;  car  l'uus  ert  l'autre  apartcnans. 

Enfance  d'Ogier  le  Danois,  MS.  de  Gaignat,  fol   101,  V-  col.  2. 

Enfin,  quelle  que  fût  l'espèce  de  relation  par 
laquelle  un  homme  tenoil  à  un  autre,  comme  rela- 
tion d'amitié,  de  services,  etc.  on  disoit  qu'il  lui 
étoit  apartenant.  «  Hieu  {-2)  ocist  tuz  ces  ki  aparte- 
«  nant  furent  à  Achab  en  Jesrael,  les  mielz  vaillanz, 
«  e  ses  privez,  e  ses  pruveires.  »  (Livres  des  Rois, 
MS.  des  Cordel.  fol.  13i,  V°  col.  2.) 

Ne  m'ont  leissié  soror,  ne  frère. 
Ami,  parent,  ne  apertinant. 
Rom.  de  la  guerre  de  Troycs,  MS.  Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  T.  V,  col.  416. 

VARIANTE  : 
APARTENANT.  Anc.  Poët.  fr,  MSS.  av.  1300,  T.  IV,  p.  1371 . 
Aparten.\ns.  Enfance  d'Ogier  le  Danois,  MS.  de  Gaignat, 
fol.  101,  V- col.  2. 
Apertement.  (Cor.  ApiHenant.)  Athis,  MS.  fol.  85,  a.'. 


1)  Matheculdis  se  transforme  au  moyen-âge  en  Maheu,  Mahaut,  etc.;  c'est  le  nom  Matliilde.  (n.  e.)  -  (2)  Jehu. 


ÀP 


—  15  — 


AP 


Apektinant.  Rom.  de  la  guerre  de  Troyes,  MS.  —  Voyez 
Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  V,  col.  416. 
Apurtenant.  Livres  des  Rois,  WS.  des  Cordel.  fol.  134. 

Apartenir,  verbe.  Etre  attenant,  être  proche. 
Approcher,  être  comparable.  11  semble  qu'où  ait 
dit  au  premier  sens  :  «  Mesons  qui  appartcnoient 
«  à  ladite  église....  et  une  meson  asise  à  porte 
«  Garnaul.  »  (Hist.  généal.  de  la  M.  de  Chastillon, 
pr.  p.  61  ;  tit.  de  1273.)  «  Le  cemetiere  de  celle 
«  église  et  la  meson  qmapcn-tient-àu  presbitoière.  » 
(Ibid.  p.  63;  tit.  de  1274.)  On  disoil,  en  parlant  de 
personnes  ou  de  choses  qui  n'étoient  pas  compara- 
bles, qui  n'approchoienl  point  l'une  de  l'autre, 
qu'elles  ne  pouvoient  s'appartenir. 

Nul  ne  s'i  puet  à  vous  appartenir. 

Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  225,  eo!.  i. 
Fleiir  ne  se  peut  à  fueille  appartenir. 

Id.  ibid.  p.  203,  col.  2. 
Nulle  joie  ne  s'apartient 
Au  cuer  qui  bonne  amour  maintient. 

Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  T.  Il,  fol.  137,  R'col.  1. 

Les  autres  significations  du  verbe  appartenir, 
aussi  anciennes  que  notre  langue,  n'ont  point  varié. 
Etre  parent  de  quelqu'un ,  lui  être  proche ,  c'est 
encore  lui  appartenir.  «  Nous  vodrions  que  vos 
«'  eussiés  bien  et  honor,  por  ce  que  vous  m'aperte- 
«  nés  de  si  près,  etc.  »  (Assis,  de  Jérus.  chap.  cccv, 
p.  206.  —  Ibid.  chap.  clxv,  p.  115.)  Enfin,  plus  on  y 
réfléchit,  plus  on  se  persuade  qu'entre  les  idées 
à' appartenance  et  de  proximité,  le  rapport  est  le 
même  que  celui  de  la  cause  à  l'effet  ;  que  tout  ce 
qui  est  propre,  relatif,  convenable  aux  personnes 
ou  aux  choses,  a  été  vu  comme  étant  proche  d'elles, 
lorsqu'on  a  dit  :  «  Donanz  .  .  .  ceu  qu'ù  unchascun 
«  apartenivet  ;  à  Deu  l'onor  et  à  l'ome  la  pitiet.  » 
(S'  Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  385.)  «  A  Père  aparlignet 
»  k'il  anzois  ait  pitiet  k'iror.  »  (Id.  ibid.  p.  157  et 
148.)  «  Mainte  gent  .  .  .  oyent  la  parole  de  Deu  assi 
«  cum  il  ois  n'en  apartignet  de  niant  ceu  c'undist.  « 
(Id.  ibid.  p.  272.)  «  Juront  ces  choses  à  tenir  tant 
«  come  a  chescun  apertendra,  etc.  «  (Rymer,  T.  I, 
part,  n,  p.  46,  tit.  de  1259.)  «  Quand  il  fera  aucunes 
«  choses  là  où  il  appartendra  liardiement ,  que  il 
«  le  fâche  sagement.  »  (Beaumanoir,  Coût.  deBeau- 
voisis,  p.  8.  —  Voy.  Ai'arten.\nce  ci-dessus.) 

CONJUG. 

Apartenist,  subj.  imp.  Appartînt.  (Cléomadès.) 
Apartenivet,  ind.  imp.  Apparlenoit.  (S'  Bern.  S.) 
Apartent,  ind.  prés.  Appartient.  (Ilist.  généal.  de 

la  M.  de  Chastillon,  pr.  p.  61  ;  tit.  de  1268.) 
Apartièncnt,  ind.  prés.  Appartiennent.  (S"  Bern.] 
Apartignent,  ind.  prés.  Appartiennent.  (Id.  ibid.) 
Apartignet,   indic.    prés.   Appartient.  (Id.   ibid. 

p.  157.)  Subj.  prés.  Qu'il  appartienne.  (Id.  ibid.) 
Apartigniens,  subj.  prés.  Que  nous  appartenions. 

(Id.  ibid.  p.  119.) 
Apertendra,  ind.  futur.  Appartiendra.  (Rymer.) 
Appartendra,  ind.  f.  Appartiendra.  (Beaumanoir.) 
Appartenist,  subj.  imp.  Appartînt.  (Ord.  T.  I.) 
Appartinra,  ind.  futur.  Appartiendra.  (Ibid.) 


VARIANTES  : 

APPARTENIR.  S»  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  107.  -  Assis,  d» 
Jérus.  chap  clxv,  p.  115,  etc. 

Apertenir.  Assis,  de  Jérus.  chap.  cccv,  p.  206. 

Appartenir.  Hist.  généal.  de  la  M.  de  Chastillon,  pr.  p.  61  ; 
tit.  de  1273  ;  -  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet.  Dict. 

Appertenir.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  7,  R».  -  Rabelais, 
anc.  Prolog.  T.  IV,  p.  17,  note  32. 

Apurtenir.  Brilton,  des  Loi-\  d'Angleterre,  fol,  139,  V». 

Apartir,  verbe.  Partager,  donner  part.  Partir, 
se  séparer.  Le  rapport  de  l'action  signifiée  par  un 
verbe  neutre,  comme  parler,  paroler,  etc.  étant 
désigné  par  la  préposition  initiale  et  inséparable  a, 
dont  le  sens  est  relatif  à  la  préposition  latine  ad, 
on  disoit  aparter  une  personne,  Vaparoler,  etc. 
Donner  à  quelqu'un  ;;«?■;  à  une  chose,  la  partager 
avec  lui,  c'étoit  l'y  apartir,  comme  Charles  V  apar- 
tit  à  ses  cendres  le  Connétable  du  Guesclin  avec 
lequel  il  partagea  sa  sépulture,  en  le  faisant  enter- 
rer à  Saiiit-Denys,  auprès  du  tombeau  qu'il  s'étoit 
fait  préparer.  «  La  mort  empescbée  de  treuver 
«  successeur  à  tant  de  vaillances,  luy  fit  mériter  le 
«  plus  honorable  prix  que  sceptre  donnast  jamais 
»  à  sujet  :  le  jeune  Charles  à  la  teste  du  convoy, 
«  couvert  de  ses  lauriers,  suyvre  son  corps,  et  pour 
«  tiltre  solemnel  des  obligations  qu'il  avoit  à  sa 
«  loyauté  Vappartir  à  ses  cendres.  »  (Hist.  de  B.  du 
Guesclin,  par  Ménard;  épit.  à  la  Nobl.  Fr.)  On  sait 
qu'à  la  mort  de  Turenne ,  Louis  le  Grand  imita 
Charles  le  Sage. 

11  semble  qu'au  second  sens  du  verbe  a;;a?'/n-,  l'a 
initial  soit  de  même  signification  que  ab,  préposi- 
tion latine  que  souvent  en  françois  on  rend  par  de. 
Ainsi  l'expression  apartir  son  cœur,  signifieroit  se 
départir,  se  séparer  de  son  cœur,  dans  ces  vers  oîi 
le  Poêle  dit  qu'une  pareille  départie  ou  séparation 
lui  seroit  plus  chère  qu'une  vie  sans  amour. 

.  .  .  Mis  en  amour  mon  vivre  ay 
D'une  volenté  si  très-vraie, 
Que  jà,  pour  nul  mal  que  j'en  traye, 
Ne  pour  nul  bien,  n'en  partiray  ; 
Plus  chier  mon  cuer  apartiraij. 
Et  quant  mes  cuers  en  partiroit, 
Hélas  !  li  las,  quel  part  iroit? 
Certes  il  le  faudroit  partir, 
Se  de  lui  se  véoit  partir. 

G.  Machaut,  Poês.  MSS.  fol.  21,  R-  col.  3. 

VARIANTES  '. 
APARTIR.  G.  Machaut,  Poës.  MSS.  fol.  21,  R»  col.  2. 
Appartir.  Hist.  de  B.  du  Guesclin,  par  Ménard. 

Apas,  subst.  masc.  Pas.  Mouvement  progressif 
qui  se  l'ait  en  étendant,  en  avançant  une  jambe  ou 
un  pied  devant  l'autre.  De  là,  on  aura  nommé  pas, 
apas,  l'espace  parcouru  et  mesuré  par  ce  mouve- 
ment. (Voy.  Pas  ci-après.) 

....  Un  petit  en  sus  alai, 
Environ  x  ou  xi  apas, 
Par  quoi  ne  les  oisse  pas. 

Froissart,  PoSs.  MSS.  p.  384,  col.  1. 

On  gardoit  sans  doute  une  certaine  proportion 
relative  à  la  mesure  de  ce  mouvement,  en  posant 
des  pierres  d'espace  en  espace,  pour  faciliter  le 
passage  d'un  fossé,  d'un  mauvais  chemin;  et  ces 
pierres  ainsi  disposées  s'appeloientja/e/ré's  d'appas, 
ou  simplement  appas.  «  On  publie  par  chacun  an 


AP 


—  16  - 


AP 


«  les  bancqs  de  mars,  afin  que  chacun  ait  nettoyer 
«  les  rivières  et  cours  d'eaux,  réédificr  les  chaùs- 
«  séesetchemin.cliacun à l'encontreson héritage.... 
«  à  faute  de  quoy  faire  ...  les  deffaillans  succom- 
«  bent  eu  amende,  scavoir  pour  les  cours  d'eaues 
u  qui  se  trouveront  au  devant  d'une  pièce  de  terre, 
«  de  cinq  gros  ;  et  pour  les  j)icm's  d'appas,  de  trois 
«  gros.  "  (Coût,  de  Ricliebourg  S'  Vaast,  au  nouv. 
Coût.  gén.  T.  I,  p.  450.)  "  L'on  ne  peut  faire  fouir 
«  en  manière  (|uelconque  sur  les  chemins,  ny  don- 
«  ner  em[)esclienient  au  cours  des  eaux  ....  sinon 
n  pour  la  réparation  des  chemins  et  remettre  les 
«  pierres  et  appas  en  lieu  et  place  ordinaire.  » 
(Ibid.  p.  450.)  11  est  vraisemblable  que  c'est  par  la 
même  raison  de  proportion,  qu  apas  a  signifié  pas, 
degré.  On  a  dit  figurément,  en  exhortant  unejeune 
personne  à  monter  au  dernier  degré  de  la  perfec- 
tion : 

Qu'elle  monte  au  septime  apas, 
Et  que  de  la  ne  parle  pas. 

Froissart,  Poês.  MSS.  p.  43,  col.  î. 
VARIANTES  : 
APAS.  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  34,  col.  1,  etc. 
Appas.  Nouv.  Coût.  gén.  ï.  I,  p.  450,  col.  2. 

Apasser,  verbe.  Passer.  La  préposition  initiale 
dans  apas  et  apasser,  semble  relative  au  lieu  où 
l'on  est  et  au  lieu  oîi  l'on  passe. 

Tuit  cil  de  la  cité  s'amassent  ; 
"Vers  l'ost  le  Roy  le  pont  apassent 
Pour  leur  contrée  chalengier. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  84,  V. 

Apatissement,  siibst.  masc.  Contribution.  Les 
citoyens  dont  la  vie  et  la  propriété  sont  à  la  discré- 
tion de  l'Ennemi ,  n'obtiennent  souvent  qu'avec 
peine,  la  liberté  de  vivre  misérables,  en  s'obligeant 
par  des  pactes,  à  payer  des  contributions  ruineuses. 
Delà,  le  mot  apatissement  dont  l'origine  est  la 
même  que  celle  â'appaclis  (i),  a  signifié  contribution. 
«  Prendrons  Iribuz  el  appatissemens  sur  nos  adver- 
«  saires  le  plus  que  nous  pouvrons;  el  sur  ceulx 
«  de  noslre  party,  ferons  aucune  cueillette  la  moin- 
«  dre  et  la  plus  douce  que  nous  pouvrons.  »  (Le 
Jouvencel,  m.  p.  78.  —  Voy.  Apatissube  ci-dessous.) 

VARIANTES  : 
APATISSEMENT.  Le  Jouvencel,  impr.  fol.  31,  R". 
Appatissement.  Ibid.  MS.  p.  78. 

Apatissure,  subst.  fém.  Pacte  qui  fixe  une 
contribution.  Cette  définition  du  moi  apatissure,  en 
indique  l'étymologie.  «  Tanneguy,  bastard  de  Cois- 

«  menet,  autrement  dit  le  Borgne apalissa 

«  la  Villeneuve  S.  George  ;  ains  la  ville  et  tout  le 
«  pays  entièrement  .  .  .  Après  \equel\es apatissures 
«  faiz  et  après  les  deniers  par  luy  receus ,  non 
«  contant  de  ce,  bouta  les  feux  tant  en  ladite 
«  ville,  etc.  »  (Preuv.  sur  le  meurtre  du  Duc  de 
Bourgogne,  p.  308  et  309.  —  Voy.  Apatissement  ci- 
dessus  et  ArPACTis  ci-dessous.) 


Apatrié,  participe.  Qui  a  un  pays  pour  patrie. 
On  observera  que  le  mot  patrie  ne  se  trouve  point 
dans  le  dictionnaire  de  Robert  Estienne,  imprimé 
en  1539;  que  lors  de  la  publication  du  dictionnaire 
de  Nicot,  en  1C06,  patrie  étoit  francisée  du  latin 
patria,  qu'on  disoil  pays  de  naissance.  Ce  n'est 
donc  qu'au  xvii'  siècle  que  l'usage  du  mot  patrie 
prévalant  sur  celui  de  pays,  est  devenu  aussi  com- 
mun qu'il  étoit  rare  dans  le  xvr  siècle.  Joachim  du 
Bellay,  disoit  indifléremment  pays  ou  patrie.  (Voy. 
lUust.  delaLang.  Fr.  fol.  1.  —  Id.  ibid.  fol.  6.) 
Mais  on  le  biftmoit  d'affecter  l'usage  d'un  mot 
«  obliquement  entré  et  venu  en  France  nouvelle- 
>■  ment,  et  dont  les  anciens  Poètes  et  Prosateurs 
«  françois  n'avoient  voulu  user,  craignant  l'escor- 
«  chérie  du  latin.  «  (Voy.  Quintil.  Censeur,  p.  191. 
—  Ménage,  Observ.  sur'la  Lang.  fr.  p.  408.)  Quoi- 
que le  mot  patrie  fût  alors  peu  usité,  il  n'étoit  pas 
nouveau,  puisque  .lean  Chartier  (Hist.  de  Charles 
VII,  p.  147)  s'en  étoit  servi  longtemps  avant  Joachim 
du  Bellay,  et  que  le  participe  apatrié,  formé  de 
patrie,  se  trouve  dans  le  livre  du  Jouvencel,  dont 
l'auteur  étoit  contemporain  de  Jean  Chartier,  histo- 
rien du  XV  siècle.  «  Il  faut  faire  chose  qui  soit  au 
«  bien  du  Royaulme  et  y  pourveoir.  Vous  y  avez 
"  tous  vos  pères,  vos  mères,  vos  parens,  et  le  lieu 
«  de  vostre  nativité  ;  vous  y  estes  apatriez  naturel- 
«  lement.  »  (Le  Jouvencel,  ms.  p.  442.  —  Voy.  Patrie.) 

Apavit,  subst.  masc.  Espèce  de  tenement.  Espèce 
de  droit  seigneurial  et  domanial.  Ferme  de  ces 
mêmes  droits.  Dans  les  constitutions  canoniques  et 
synodales  de  l'église  de  Nicosie,  la  signification 
à'apaltus  et  à'appaltum  est  la  même  que  celle 
à'apaut,  dans  les  Assises  de  Jérusalem.  Quelques 
Etymologistes  croient  que  ces  mots  appaltum  et 
apallus,  en  françois  apaitt,  sont  des  allérations  du 
com\)Osé  appactîim,  pacte.  (Voy.  Du  Gange,  Gloss. 
lat.  T.  I,  col.  541.  —  D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss. 
lat.  de  Du  Gange,  T.  I,  col.  241.  —  Ménage,  Orig. 
de  la  Ling.  liai.  p.  53  et  54.)  11  est  vrai  que  dans 
ces  mêmes  constitutions  on  lit  une  fois  appactis 
pour  appaltis  et  apattibus.  Mais  quelle  raison  d'é- 
crire une  seule  fois  fl;j/}flc/!(??i  et  d'altérer  un  mot 
qu'on  suppose  être  le  véritable,  en  l'écrivant  plu- 
sieurs fois  appaltum  et  apaltus?  (Voyez  Labbe, 
Goncil.  T.  XI,  col.  2412.  —  Id.  ibid.  col.  2395,  2399, 
2417et243G.)  Peut-être  seroil-il  plus  rai.sonnable 
de  ne  voir  dans  l'orthographe  appftc/;/?»  que  l'alté- 
ration d'un  mot  propre  au  langage  d'une  nation 
avec  laquelle  les  Croisades  nous  avoient  mis  en 
relation  d'intérêts  politiques  et  de  commerce.  Il  est 
possible  que  les  Italiens  doivent  à  des  relations 
semblables  avec  la  même  Nation,  les  mots  appalto, 
appattatore ,  appaltone,  etc.  Quant  au  françois 
apaut,  la  conjecture  qu'on  hasarde,  paroit  d'autant 
plus  vraisemblable  qu'on  ne  trouve  ce  mot  que 


(1)  On  lit  dans  Froissart,  tome  3,  cap.  iO\,  page  276,  édition  1560:  «  Encore  avez  vous  bien  oui  conter  Geoffroi 
Teste-Noire  Breton  qui  le  tenoit  à  ta  garnison  et  fort  chatel  de  Ventadour  en  Limosin.  Ce  Geoffroi  ne  s'en  fut  jamais  parti 
pour  nul  avoir.  Car  il  tenoit  ledit  chatel  de  Ventadour  comme  sien  et  son  propre  héritage,  et  avoit  mis  tout  le  pays  a 
certains  pactis,  et  parmi  toutes  ces  pactions  touttes  gens  labouroient  en  pai.\  dessous  lui  et  demeuroient.  »  (n.  e.) 


AP 


—  47  - 


AP 


dans  les  Assises  de  Jérusalem,  où  il  semble  désigner 
une  espèce  de  tenement  de  la  nature  du  caseau,  en 
latin  casale,  un  tenement  sujet  à  la  taille  serve  ou 
franche,  à  une  redevance  arbitraire  ou  convention- 
nelle, soit  en  argent,  soit  en  grains.  «  Alors ,  de- 
«  meurerdans  la  terre  d'un  Seigneur  par  apaiit  ou 
«  sodées,  signifieroit  être  à  la  solde,  aux  gages 
«  d'un  Seigneur,  ou  être  son  tenant.  Se  aucun  vilain 
«  s'en  part,  ou  fuit  de  la  terre  de  son  Seignor  et 
«  vait  en  autre  terre,  et  y  demore  auci  com  par 
«  apaut  ou  sodées  dou  Seignor,  il  doit  torner  en  la 
«  terre  de  son  Seignor,  se  il  est ,  etc.  »  (Assis,  de 
Jérus.  chap.  cclxxvu,  p.  183.) 

De  là.  on  auia  nommé  apaus,  les  droits  que  les 
Seigneurs  tiroient  de  ces  mêmes  tenemens,  par 
extension  toute  espèce  de  droit  seigneurial  et  do- 
manial. «  L'oflice  des  Enquestes  sera  de  tout  abatue, 
«  et...  tous  les  droictures  et  apaus  que  les  Maistres 
«  des  Enquestes  et  autres  ont  mis  et  usé,  sans 
«  Tassent  des  homes.  »  (Assis,  de  Jérus.  chap.  cccxiv, 
page.  214.) 

La  difficulté  de  percevoir  en  détail  ces  mêmes 
droits,  obligeant  à  les  affermer,  on  en  désignoit  la 
ferme  par  le  mot  apaut.  «  Des  dons,  et  ventes,  et 
«  eschanges,  et  apaus  qui  touchent  en  la  haute 
«  Court  et  en  la  segrete,  lesquels  ont  deniers  donés, 

*  doivent  recouvrer  lors  deniers  et  rendre  le  surplus 
«  qu'ils  auront  reçu ,  acuillant  etc.  »  (Assis,  de 
Jérus.  chap.  cccvni,  p.  209.  —  Voy.  Apauteor.) 

VARIANTES  : 
APAUT.  Assis  de  Jérus.  chap.  ccLxxvii,  p.  185. 
Apau.  Ibid.  chap.  cclxxxix,  p.  192. 

Apauteor,  subst.  masculin.  Fermier  de  droits 
seigneuriaux  et  domaniaux.  Une  preuve  assez  vrai- 
semblable (|ue  Vapaut  étoit  une  espèce  de  tenement 
de  la  nature  du  caseau,  pour  lequel  il  étoit  dû 
certain  droit  que  le  même  mot  aura  désigné,  c'est 
que  dans  les  Assises  de  Jérusalem,  la  signification 
d'apeauteor  est  la  même  que  celle  d'apallatores 
casalium  aut  rcddituum,  dans  les  Constitutions  de 
l'église  de  Nicosie.  «  De  tous  les  propres  apaus  dou 
«  Roy,  que  l'on  ne  puisse  eslre  de  trop  engigné  et 
«  que  il  sache  lor  value  de  tout  le  gain  que  les 

•  apauteors  gaigneront  en  chascun  apau,  le  Se- 
«  neschal  doi"t  avoir  deux  caroubles  franchement.  » 
(Assis,  de  Jérus.  chap.  cclxxxix.  page  192.  —  Voyez 
Apaut  ci-dessus,  et  Apauter  ci-dessous.) 

Apauter,  verbe.  Affermerdes droits  seigneuriaux 
et  domaniaux.  On  ne  peut  guère  douter  que  la  défi- 
nition qu'on  a  donnée  d'apauteor,  ne  soit  vraie, 
puisque  les  apauteors  étoienl  ceux  à  qui  les  rentes 
du  Roy  éioient  apautécs,  c'est-à-dire  affermées, 
a  Les  rentes  dou  Roy,  quels  qu'elles  soient  dehors 
«  ou  dedens,  quant  il  ou  celui  qui  tendra  son  leu 
«  vodra  que  elles  soient  apautécs,  il  les  doit  co- 
«  mander;  et  le  Seneschau  les  doit  faire  crier  et 
«  multiplier  au  maus  que  il  porra. ...  De  tous  les 
«  propres  apaus  dou  Roy,  que  l'on  ne  puisse  estre 
«  de  trop  engigné,  etc.  »  (Assis,  de  Jérus.  chap. 
CCLXXXIX,  p.  192.  —  Voy.  Apauteor  et  Apaut.) 
II. 


VARIANTES  : 
APAUTER.  Assis,  de  Jérus.  chap.  cclxxxix,  p.  192. 
Apautrer.  (corr.  Ajiauler.)  Du  Cange,  Gl.  l.T.  VI,  col.  361. 

Apédefte,  adj.  et  subst.  masc.  Ignare,  ignorant. 
En  grec  dnàiôevioç.  Les  deux  orthographes  du  mot 
françois  sont  relatives  à  la  diverse  prononciation 
du  mot  grec  que  les  uns  prononcent  apaideutos,  et 
les  autres  apaidcvtos.  Rabelais,  conformément  à  la 
dernière  prononciation,  a  introduit  le  mot  apédefte 
dans  notre  langue.  «  Par  Dieu,  dist  Panurge  à 
«  Gaigne-beaucoup,....  menez-nous  à  ces  Apéde'ftes; 
«  car  nous  venons  du  pays  des  Sçavans  où  je  n'ay 

«  guières  gaigné Mais  pourquoy,  mon  compère, 

«  mon  amy,  appelle-on  ces  gens  icy  ignorans  ?  Par 
«  ce,  dist  Gaigne-beaucoup,  qu'ils  ne  sont  et  ne 
«  doibvent  nullement  estre  clercs,  et  que  céans  par 
«  leur  ordonnance  tout  se  doibt  manier  par  igno- 
«  rance,etn'y  doibt  avoir  raison,  sinonque  Messieurs 
«  l'ont  dict  ;  Messieurs  le  veulent  ;  Messieurs  l'ont 
«  ordonné.  >■  (Rabelais,  T.  V,  page  70  et  75.)  En 
adoptant  la  première  façon  de  prononcer  le  mot 
grec,  on  a  écrit  apédeute.  «  Le  célèbre  M.  Huet 
«  croyoit  avoir  survécu  aux  Lettres,  parce  que  de 
«  son  temps  il  se  formoit  une  cabale  d'apédeutes. 
«  de  gens  ignares  et  non  lettrez,  qui  sentant  leur 
«  incapacité,  et  ne  pouvant  se  résoudre  à  une  étude 

«  assidue  de  plusieurs  années entreprenoient 

«  de  se  faire  un  mérite  de  leur  incapacité,  de  ridi- 
«  enliser  l'érudition,  et  de  traiter  la  science  de 
«  pédanterie.  »  (Voy.  Huetiana,  p.  2  et  3.)  De  là,  le 
suhstainiii  apédeutisme  encore  usité  pour  désigner 
l'ignorance  qui  vient  du  défaut  d'instruction.  (Dict. 
de  l'Acad.  fr.) 

VARIANTES  : 
APÉDEFTE.  Rabelais,  T.  V,  p.  68  et  suiv.  -  Cotgr.  Dict. 
Apédeute.  Huetiana,  p.  2,  etc. 

Apelé,  participe.  Qui  a  sa  peau.  C'est  en  ce  sens 
que  pour  signifier  l'état  glorieux  du  Lazare  après 
sa  mort,  on  a  dit  que  son  corps  étoit  apelé;  participe 
forzué  du  substantif /)e/,  en  latin  peliis. 

De  ses  deux  lès 

Fut  la  piaus  en  chaut  venin  frite, 
Tant  que  il  fu  tous  despelés... 
Par-tans  iert  ses  cors  apelés, 
Et  mis  en  gloire  o  l'Esperite  ; 
Dont  aura  il  joie  partite, 
Quant  de  sa  pel  iurt  rempelés. 

Dil  de  Charité,  MS.  de  Gaignal,  fol.  224,  V"  col.  3. 

VARIANTES  : 
APELÉ.  Dit  de  Charité,  MS.  de  Gaignat,  fol.  225,  R»  col.  1. 
Appelé.  Ibid.  Variante  du  MS.  de  N.  D. 

Apert,  participe.  Ouvert,  découvert,  évident, 
etc.  Ouvert,  franc,  indiscret,  impudent,  effronté,  etc. 
Qui  fait  voir  de  l'expérience,  de  la  force,  de  l'agilité, 
de  l'adresse,  de  la  valeur,  etc.  connu  par  des  qua- 
lités naturelles  et  acquises.  Chose  évidente  et  connue. 
La  signification  propre  et  figurée  d'apert,  en  latin 
apertus,  étoit  la  même  que  celle  d'aouvert.  (Voyez 
AouvERT  ci-dessus.) 

Ot  vairs  iex,  rians  et  fendus, 
Les  bras  bien  fés  et  estendus, 


AP 

Blanches  mains,  longues  et  ouvertes 
Aux  templières  (1)  que  vi  apertes 
Apparut  qu'èle  ol  leste  blonde 
^^  Fabl.  MS.  du  R.  n-  72 


-    i8   — 


AP 


7218,  fol.  280.  V*  ool.  1. 


Diex  !  comme  est  apei-le  folie 

Coutivér'(2),'  comme  une  image, 
Son  cors.  Certes,  c'est  Une  rage; 
C'est  comme  une  mahommene.  ^^^  ^^_^_  ^_  ^^^  ^ 

Dans  les  expéditions  où  Von  employoit  la  force 
.  ouverte,  comme  pour  mener  prisonniers,  ou  pour 
„  aucun  autre  cas  par  lequel  aucun  youloit  aler  en 
.  s'i  justice  elïorciement,  on  s  arnioit  de  liaubeis  et 
.  des  armes  qui  avecque  aparliennent  ;  et  ces  armes 
„  éloicnt  nommées  armes  apertes.  Mais  lorsque 
«  pour  aller  dans  sa  justice,  il  falloit  passer  parmi 
«  autre  justice,  on  devoit  les  porter  vestues  couver- 

„  tement car  bien  sachent  tuit  li  Seigneur  qui 

.<  sont  sougès  as  Barons,  que  ne  pueent  pas  donner 
«  conaié  que  l'en  voit  à  armes  aperles  parmy  les 
«  Terres  pour  che  que  de  l'establissement  le  Roy 
.<  tèles  ciievauclnées  de  foiclie  et  de  armes  son 
«  défendues.  »  (Beaumauoir,  C.  de  Beauv.,  p.  i'JO.) 
Pour  nos  ancêtres  qu'une  confiance  téméraire  en 
la  Justice  divine,  a  trop  souvent  rendus  barbares  et 
superstitieux,  révéuement  d'un  duel  doit  un  juge- 
ment de  Dieu  qui  leur  découvroit  la  vente,  et  que 
dans  celte  persuasion  ils  nommo\en[  Loij  aperte. 
(Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  IV,  col.  IbO  et  161.) 

L  expression  adverbiale  en  apert,  en  appert,  c  est- 
à-dire  ouvertement,  à  découvert,  évidemment,  en 
évidence,  étoil  très-usitée.  On  lit  en  apart,  en 
appart.  (Ord.  T.  111,  p.  246  et  656.) 

On  désignoit  une  personne  dont  1  extérieur  laissoit 
voir  à  découvert  une  âme  franche  et  vraie,  en  disant 
fio-urémenL  quelle  avoit  un  visage  apert,  quelle 
étoit  anerte;  acception  encore  usitée  du  participe 
ouvert  (Voy.  Ouvert.)  «  Si  avoit  ung  visage  appert 
«  et  esveillé.  »  (Percef.  Vol.  II,  fol.  IM,  V°  col.  1.) 

S'encontrèrent  un  Chapelain 
Seur  un  bai  palefroi  ambiant, 
^per<  et  dehailié  (3)  samblant 
^  Fabl.  JlS.  du  R  n"  7218,  fol.  23o,  R'  col.  2. 

Peut-être  a-t-on  dit  en  ce  sens  que  Clovis  étoit 
a  moult  appert  et  de  noble  contenance.  »  (Chron. 
S-  Denys,  fol.  9,  V°.) 

....  Elle  est  bonne  et  preude  femme, 
Sage,  honneste,  cointe  et  apperte; 
Et  n'est  ombrage,  ne  couverte.     , ,  ^„,  „      ,  „ 
^        G.  Machaut,  MS.  fcl.  203,  R"  col.  2. 


L'extrême  franchise  d'une  âme  qui  pense  a  dé- 
couvert, est  si  naturellement  indiscrète  qu  on  ne 
sait  si  l'on  faisoit,  il  y  a  plusieurs  siècles,  l'éloge  ou 
la  satvre  du  caractère  François,  en  disant  :  ^  Li  plus 
.,  apèrt  home  sont  en  France.  »  (Voy.  Ane.  Poet.  l-r. 
Mss  avant  1300,  T.  IV,  p.  1652.)  Quelquefois,  ce  mot 
avért  signilioit  l'indiscrète  franchise  d'une  jeune 
Bersonne  trop  prompte  à  découvrir  le  secret  de  son 
cœur  Le  Chevalier  de  la  Tour  étant  allé  faire  une 


première  visite  h  la  Demoiselle  que  son  père  lui 
destinoit  pour  femme,  s'alarma  d'en  être  aime  trop 
franchement,  trop  ouvertement,  et  refusa  de  lé- 
pouser.  «  Elle  fut  dit-il:  bien  aperte ;  car  elle  me 
«  pria  deux  fois  ou  trois  que  je  ne  demeurasse  point 
«  a  la  venir  voir.  »  (Le  Ch"  de  la  Tour,  Instr.  à  ses 
tilles  fol.  8.  "  On  ne  pardonne  point  à  une  pucelle 
..  qu'elle,  à  la  premier  requeste,  face  appert  octroy, 
..  ne  descouvre  son  couraige.  ■>  (Voy.  Percef.  \  ol.  M, 
fol.  86,  V°  col.  2.)  ..  , 

Il  y  a  une  esoèce  de  franchise  proscrite  par  la 
décence,  à  penser  et  faire  le  mal  ouvertement,  a 
être  impudent,  effronté;  de  sorte  que  le  mot  apert. 
qui  désignoit  en  général  les  qualités  propres  a 
caractériser  une  franchise  aussi  aimable  que  1  autre 
est  odieuse,  a  pu  désigner  non-seulement  1  indis- 
crétion, mais  l'impudence,  l'etTronterie.  (^oy.  Le 
Ch"  de  la  Tour,  Instr.  à  ses  filles,  fol.  13,  \°  col.  2.) 
Ou'il  suffise  d'avoir  indiqué  l'étendue  de  1  ac- 
ception figurée  à'apert;  mot  dont  les  orthographes 
aouvert  et  ouvert  sont  des  altérations  aussi  visibles 
que  celles  û'aspert  et  espert  dans  les  passages 
suivans.  «  Li  larrecins  qui  n'est  pas  appers,  mes 
«  toute  vois  il  se  prueve  par  présomptions,  si  est 
«  de  chaus  qui  sont  pris  par  nuit  en  autrui  meson» 
(Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  page  Ib-i.)  «  Li 
«  aspers  larrechins  est  chil  qui  est  trouves  sezis  et 

«  vestus  de  la  chose  emblée ne  plus  espers  lar- 

.<  recins  ne  puet  estre  que  chil  qui  est  trouves  sésis 
.<  et  vestus  de  la  chose  emblée.  »  (Id.  ibid.  p.  ib4.) 
Après  avoir  prouvé  que  l'orthographe  espert  etoit 
quelquefois  une  altération  d'apert,  évident;  on  re- 
marquera que  plus  souvent  l'orthographe  apert 
sembloitêtre  une  altération  d'expert.  «  Noz  ancestres 
«  ont  usé  de  ce  mot  appert. . .  pour  expert. . .  ou 
«  adroit  aux  armes.  »  (Froissart,  Vol.  1,  annot.  à.) 
L'ancienne  Chevalerie  étant  une  expérience,  une 
épreuve  continuelle  de  force,  d'agilile    d  adresse, 
de  valeur,  de  bravoure  et  d'intrépidité,  le  moi  apert 
aura  signifié  fort,  agile,  adroit  vaillant,  brave,  in- 
trénide-  acceptions  peu  faciles  à  distinguer  les  unes 
des  autres.  «  Aucuns  des  Seigneurs  de  la  compaignie 
«  au  Duc  de  Bourgongne  se  vauldrent  mettre  a 
I  «  deffence       mais  che  leur  valut  moult  peu  ;  car 
«  tous  furent  prins  et  menez  prisonniers  excepte 
'  «  le  Seit-neur  de  îlontagu  qui  estoit  moult  appert 
«  et  viste  :  et  l'espée  ou  poing  toute  nue  saillit 
«  dehors  les  barrières.  »  (J.  le  Fevre  de  S'  Remy, 
Hist.  de  Charles  VI,  p.  138.)  ,  ^    ,•  •    „ 

Il  semble  qu'on  ait  compare  au  vol  de  1  oiseau 
l'a-ilité  avec  laquelle  un  homme  intrépide  court  à 
l'ennemi  et  le  renverse,  lorsqu'on  a  dit  : 


Trop  nous  eussent  fait  de  contraire 

Cil  Sarrasin  de  pute  affaire, 

Se  ne  fussent  cil  Daraoisel 

Qui  sont  aussi  appers  qu'oissel.  „<,  „  wyj 

^  Hist.  des  trois  Marks,  en  -vers,  MS.  p.  468. 

On  recommandoit  à  la  Noblesse  l'exercice  de  la 


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chasse,  comme  propre  à  former  un  appert  homme 
d'armes;  et  l'on  disoit  on  parlant  du  Chasseur  : 

Telz  homs  (1)  communément  devient 
Et  chevauchant  et  bien  trayant, 
Bien  appert  et  bien  combatant, 
Bien  assaillant  bestes  terribles... 
Pourquoy  vient  le  hardement, 
Sans  craindre  péril  nullement  : 
Il  s'accoustume  à  fort  courir, 
Et  à  grans  labeurs  soustenir  : 
Toutes  telz  choses  sont  reqises 
Aux  Nobles  à  qui  sont  commises 
Grans  seigneuries  et  grans  terres 
Pour  plus  vaillances  avoir  ez  guerres. 

Gace  de  la  Bigno,  des  Déduits,  MS.  fol.  99,  VS 

Les  qualités  et  les  vertus  qu'indiquent  ces  vers, 
étant  nécessaires  aux  personnes  destinées  par  leur 
naissance  ii  la  profession  des  armes,  il  est  probable 
qu'un  Chevalier  dont  la  force,  l'agilité,  l'adresse,  la 
valeur  et  l'intrépidité  avoient  été  éprouvées,  étoit 
ce  qu'on  nommoit  un  apert  homme  d'armes.  «  Si 
«  appela  tantost  le  Prince  un  Chevalier  de  son 
«  hostel....  nommé  Messire  Pierre  Ernaut,  du  pais 
«  de  Bearn,  apcrt  homme  d'armes,  et  cousin  au 
o  Comte  de  Foix.  »  (Froissart,  A'ol.  III,  p.  7.  — 
Monstrelet,  Vol.  II,  fol.  66.)  Mais  il  paroit  très  dou- 
teux que  dans  cette  expression,  appert  homme  d'ar- 
mes, le  mol  appert  soit  de  même  origine  qu'expert. 
L'un  et  l'autre  existoient  en  mémetemps  dans  notre 
ancienne  langue. 

à  découppler  sont  appcrs, 

Et  en  ce  qu'ont  à  faire  expers. 

Gaco  de  la  Bigne,  des  Déduits,  MS.  fol.  102,  V*. 

S'il  faut  en  croire  Le  Duchat,  appert  en  ce  sens 
vient  à'adperitus.  (Voy.  Rabelais,  T.  IV,  p.  166  et 
167.  note  3.)  C'est  le  même  qu apert,  en  latin 
apertiis,  suivant  l'opinion  de  Nicot,  qui  dit  (\\x  appert 
a  signifié  expert  dans  l'art  militaire,  dans  un  art 
quelconque,  «  parce  qu'à  celuy  qui  n'ignore  rien 
«  d'aucun  art,  discipline  et  exercice,  rien  ne  luy  en 
«  est  clos,  ains  luy  est  le  tout  ouvert,  cogneu  et  en 
«  main.  »  (Nicol,  Uict.  au  mot  Apertise.)  Peut-être 
auroit-il  mieux  raisonné  sur  la  cause  de  celte 
acception  figurée  à'appert,  en  latin  apertus,  s'il  eût 
dit  que  l'aptitude  acquise  ou  naturelle,  qui  se  décou- 
vre et  se  fait  voir  dans  un  homme,  ou  dans  un  ani- 
mal, pour  certains  exercices,  a  été  désignée  par  le 
mot  apert,  comme  l'on  désigne  encore  par  le  mot 
ouvert,  l'aptitude,  l'ouverture  de  l'esprit  pour  cer- 
taines sciences.  Telk  pouvoit  être  l'origine  des  signi- 
fications û'apert,  lorsqu'on  disoit  en  "parlant  d'un 
homme  agile,  adroit,  vaillant,  courageux,  inlrépide, 
qu'il  étoiî  apert.  (Voy.  Nicot  et  Mônet,  Dict.)  Les 
coups  d'un  homme  fort  et  adroit,  éloienl  des  coups 
apperts  ;  èlveapert,  avoir  la  jambe  aperte  A' aWer, 
c'étoit  être  agile,  prompt  à  aller,  à  courir.  «  Com- 
«  mencèrentà  traire,  à  lancer  et  ù  chacer  les  uns 
«  les  autres,  et  donner  grans  coups  et  apperts.  » 
(Froissart,  Vol.  ï,  p.  307.)  <•  Sire  Damoysel....  les 
«  chausses  de  fer  qui  vous  environnent  les  pieds  et 
«  les  jambes,  vous  donnent  à  congnoistre  que... 


«  devez  avoir...  la  jambe...  légère  et  appjerte  d'em- 
o  batre  en  tous  jeulx,  pour  soustenir  justice  et 
«  droicture.  »  (Percef.Vol.  II,  fol.  119,  R»  col.  1  et  2.) 

Trois  varletz  qui  sont  bien  espars 
De  lièvres  garder,  et  apers 
De  tost  aller,  et  bien  entendre 
A  leurs  lévriers  tantost  reprendre. 

Gace  de  la  Bigne,  des  Déduits,  MS.  fol.  110,  V'. 

Etre  apert,  avoir  la  main  aperte,  c'étoit  être 
adroit,  faire  voir  de  l'adresse,  de  la  dextérité,  de  la 
grâce,  en  faisant  une  chose.  «  Aussi  on  en  a  la  main 
'<  plus  aperte,  etc.  »  (Ch.  de  G.  Phébus,  ms.  p.  213.) 

Les  uns  sont  hardiz  et  appers, 
Autres  couars  et  mal  appers 

Eust.  Descli.  Poës.  MSS.  p.  471,  col.  1. 

Gardez-vous,  Dames,  bien  aoertes 
Qu'au  mengier  soiez  bien  apertes. 
C'est  une  chose  c'om  moult  prise 
Que  là  soit  Dame  bien  aprise. 

Fabl.  MS.  du  K,  n-  7218,  fol.  13-2,  R-  col.  2. 

Un  cheval  dans  lequel  on  découvroit  une  inclina- 
lion  naturelle  à  regimber,  étoit  un  cheval  appert  de 
regiber. 

...  Se  ton  cheval  est  appert 
De  regiber  la  jambe  haulte, 
Chascun  dira  que  c'est  ta  faulte,  etc. 

Contrediz  de  Sougecreux.  fol.  141,  R". 

On  faisoil  plus  souvent  l'éloge  des  qualités  que 
l'on  découvroit  dans  un  cheval,  un  chien,  etc.  en 
disant  qu'il  étoit  apert.  «  Cheval  appert  (2),  léger,  et 
«  bien  courant ,  et  bien  tournant  à  la  main.  » 
(Froissart,  Vol.  IV,  p.  82.) 

Bien  nous  appert 

Que  cbiens  sont  hardiz  et  appert, 
Et  qu'ilz  ont  proesse  et  vaillance, 
Et  sont  de  grant  recongnoissance. 

Gace  de  la  Bigne,  des  Déduits.  MS.  fol.  75,  V». 

Au  reste,  en  faisant  voir  par  ses  actions,  en  dé- 
couvrant certaines  qualités  reçues  de  la  Nature,  ou 
acquises  par  l'expérience  qui  les  découvre  elle- 
même,  on  se  fait  connoître  comme  possédant  ces 
mêmes  qualités.  De  là,  le  mot  apert  aura  signifié 
1-  connu  pour  être  agile,  adroit,  vaillant,  etc. 

Ne  sont  mie  poindre  couvers. 
Mais  biax,  et  riches,  et  apers. 
Moult  est  lor  oevre  bien  veue, 
Et  d'ans  et  d'autres  conneue. 

Athis,  MS.  fol.  115,  V  col.  1. 

2°  Connu  pour  être  expert,  non-seulement  dans  la 
science  des  armes,  mais  dans  toute  autre  science 
en  général.  Telle  paroit  être  la  raison  de  l'analogie 
fiu'on  remarque  entre  les  mots  apert  et  expert; 
analogie  qui  les  aura  fait  probablement  employer 
l'un  pour  l'autre,  sans  égard  à  la  diflérence  étymo- 
logique. «  Que  bonnes  personnes  et  apertes  pour 
«  délivrer  (3),  soient  aux  requestes  de  la  Langue 
«  d'oc  et  de  la  Frani;oise.  »  (Ord.  T.  I,  p.  675.) 
«  Appelés  à  ce  plusieurs  Sages,  connoissans  et 
«  esperts  en  fait  de  monoyes.  »  (Ibid.  p.  770.) 

On  croit  aptircevoir  l'origine  delà  formation  et  de 
la  signification  tîu  substantif  aperte,  dans  l'ellipse 
par  laquelle  le  participe  féminin  aperte,  désignoit 


(I)  L'analogie  a  donné  le  z  au  cas  sujet  de  liom,  comme  aux  noms  masculins  de  la  2»  déclinaison,  (n.  e.)  —  (2)  Appert 
est  ici  le  contraire  d'ombrageux,  (n.  e.)  —  (3)  Expédier. 


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une  chose  aperte,  une  chose  évidente,  une  chose 
connue  : 

Quant  vous  à  cui  que  soit  parlés, 
En  sus  de  lui  si  vous  t^nés, 
Qu'à  lui  voslre  alaine  ne  viegne  ; 
Et  d'une  aperte  vous  soviegne,  etc. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  toi.  131,  V'  col.  2. 

Une  action  de  valeur,  une  action  connue,  ou  qui 
mérite  de  l'être.  «  Les  Ilainuyers  s'asseml)!èrent 
«  pour  les  rebouter;  mais  ils  estoient  si  puissans 
«  ([u'ils  s'en  retournèrent  en  leur  pays  sans  faire 
«  aperte  qui  soit  à  raconipter,  n'escrire.  »  (Mons- 
trelet,  Vol.  I,  fol.  27.  —  Voy.  Aperte  ci-dessous.) 

VARIANTES    : 
APERT.  Livres  des  Machabées.  MS.  des  Cordei.  fol.  188 
Apart.  Liv.  des  Machabées,  MS.  des  Cordei.  fol.  188,  R". 
Apers  (plur.)  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  142,  V"  col.  1. 
Appart.  Ord.  T.  111,  p.  246. 

Appers.  Eeaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  p.  164. 
Appert.  Marbodus,  de  Gemm.  Art.  viii,  col.  1648. 
ASPERS.  Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  p.  164. 
EsPERS  (sing.  et  plur.).  Id.  ibid.  p.  238.  -  Ord.  T.  I,  p.  770. 
EsPERT.  Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  p.  192. 

Aperte,  subst.  fém.  Qualité  par  laquelle  on  se 
fait  connoitre.  Action  connue  et  par  laquelle  on  se 
fait  connoitre.  Au  premier  sens,  les  qualités  dési- 
gnées par  le  mot  aperte,  étoient  l'expérience,  la 
force,  l'agilité,  l'adresse,  la  valeur,  etc.  (Voy.ApERT.) 

Resaut  en  piez  com  hom  plains  d'aperlé. 

Enfance  d'Ogier  le  Danois.  MS.  de  Gaignat,  fol.  109,  R"  col.  2. 

.  .  .  D'armes  est  tex  li  mestiers 
Que  il  i  convient  aperte, 
Et  de  bien  faire  volenté. 

Ciéomadès,  MS.  de  Gaignal,  fol.  62,  R'  col.  1. 

Peut-être  la  beauté,  dans  ces  vers  : 

Dame  de  grant  apperteté. 
Plus  que  palmes  hauls  et  parens; 
Dame  plus  noble  et  plus  flairans, 
Plus  vermeille  et  mielx  coulourée 
Que  pomme  doulce  et  savourée  ;  etc. 

G.  Machaut,  MS.  fol.  201,  V-  col.  3. 

Il  étoit  naturel  que  ce  même  mot  aperte  désignât 
spécialementles  faits  d'armes,  les  exploits  guerriers, 
dans  un  temps  où  l'on  n'avoit  guère  d'autre  moyen 
de  se  faire  connoitre  et  de  se  distinguer. 

Li  Dus  Tierris,  ou  poing  le  bran  letré, 
Fist  celui  jour  mainte  grant  aperte  : 
De  lui  ert  bien,  as  coups  ferir,  monstre. 
Enfance  d'Ogier  le  Danois,  IIS.  de  Gaignat,  fol.  104,  V"  col.  2. 

VARIANTES  : 
APERTE.  Ciéomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  62,  R»  col.  1. 
Apperteté.  G.  Machaut,  MS.  fol.  201,  V"  col.  3, 

Apertelet,  adj.  Vaillant.  Signification  analogue 
î»  celle  du  participe  apert,  doiu'on  a  formé  le  dimi- 
nutif fl7;^r/e/ci,  en  faveur  de  la  rime. 

Là  fu  li  Sires  de  Clervaus,... 
Et  le  Seigneur  de  Nantoullet 
Qui  est  cointe  et  apeiielrt. 

G.  Machaul,  MS.  fol.  225,  V-  col.  3. 

Apertement,  adverbe.  Ouvertement,  évidem- 
ment, etc.  Ouvertement,  fanchement.  De  manière 
à  faire  connoitre  certaines  qualités  naturelles  et 
acquises.  Les  significations  de  V^àyerhë  apertement 
sont  toutes  relatives  ù  celles  du  participe  «joerL  On 
disoit  au  premier  sens  :  «  Pur  co  véez  apertement 


«  que  nient  n'est  arrière  de  ce  que,  etc.  »  (Livres 
des  Rois,  ms.  des  Cordei.  fol.  13i,  V"  col.  2.) 

Diex  t'a  monstre,  de  ce  n'en  doutes, 
En  celi  songe  espertement, 
Ce  qu'est  venu  nouvellement. 
Geofroi  de  Paris,  ,i  la  suite  du  Rom.  de  Fauvel,  MS.  du  R.  n'  6812,  fol.  52. 

Dans  le  second  sens,  apertement  signifioit  ouverte- 
ment, franchement.  (Rob.  Est.,  Nicot  et  Monot.  Dict.) 

Enfin,  agir  ou  se  tenir  de  manière  à  faire  con- 
noitre qu'on  avoit  certaines  qualités,  qu'on  étoit 
expert,  adroit,  leste,  agile,  prompt,  etc.  c'étoit  se 
tenir  ou  agir  apertement.  «  Lors  print  apertement 
"  son  cheval  par  le  frain,  et  saillit  en  la  selle.  » 
(Percef.  Vol.  II,  fol.  119.  —  Voy.  Nicot,  Dict.) 

Moult  apartement  s'arréèrent 
Cil  qui  par  raison  tenu  èrent 
D'aler  à  ces  tabliaus  lancier. 

Ciéomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  67,  V"  col.  1. 
Moult  lvès-aperteme>ît  s'arma 
Ciéomadès,  ne  détria. 

Ibid.  fol.  38,  V"  col.  3. 
Mestres,  feites  apertement  ; 
Car  je  sui  ci  en  grant  forment... 
Sire,  ne  me  puis  plus  haster. 

Esirubert,  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7996,  p.  43. 

Bien  doit  haus  hom  estre  jolis  devant  la  gent, 
Cointes  et  acesmans,  se  il  est  de  jovent  ; 
Et  doit  son  cors  tenir  bel  et  aperloneiit, 
Et  si  se  puet  vestir  et  bien  et  richement. 

Fabl.  MS.  du  K.  n"  7218,  fol.  335.  R-  col.  2. 

VARIANTES    : 

APERTEMENT.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordei.  fol.  134. 

,\P-\RTEMENT.  Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  67. 

Apertem.\nt.  Monet,  Dict. 

Appertrment.  r.om.  de  la  Rose,  vers  22,  Percef.  Vol.  II, 
fol.  119,  V°  col.  1.  -  Nicot,  Dict. 

Espertement.  Geofroi  de  Paris,  à  la  suite  du  Rom.  de 
Fauvel,  MS.  du  R.  n»  6812,  fol.  53,  V"  col.  3. 

Apertise,  subst.  fém.  Evidence.  Franchise 
indiscrète.  Aclion  qui  découvre  certaines  qualités 
et  les  fait  connoitre.  Qualité  qui  se  découvre  et  par 
laquelle  on  est  connu.  Du  participe  apert,  évident, 
s'est  formé  le  substantif  apertise,  dans  le  sens 
d'évidence.  (Voy.  Oudin,  Dict.)  C'est  encore  dans  un 
sens  relatif  à  celui  d'apert,  ouvert,  franc,  etc.  que  le 
mot  apertise  signifioit  franchise  indiscrète.  On 
craint  d'être  l'époux  d'une  Demoiselle,  «  pour  la 
«  trop  grande  apertise  et  la  légiéreté  et  la  manière 
■'  qu'il  semble  à  veoir  en  elle.  "  (Le  Ch''  de  la  Tour, 
Inst.  à  ses  filles,  fol.  8.  —  Id.  ibid.  fol.  13.) 

En  général,  une  action  par  laquelle  on  faisoit 
connoitre  son  expérience,  sa  force,  son  agilité,  son 
adresse,  sa  valeur  et  autres  qualités  naturelles  et 
acquises,  étoit  une  apertise;  par  conséquent,  un 
fait  d'armes,  un  exploit  militaire,  étoit  une  apertise 
ou  expertise  d'armes.  Il  paroit  que  l'orthographe 
expetise  est  une  faute  pour  expertise  qu'on  subsli- 
tuoit  quelquefois  au  mot  apertise.  (Voy.  Apert.) 
«  Nécessité  luy  feist  faire  une  moult  belle  fl/;/)er- 
«  tisse  :  car  quant  il  sentit  ce,  il  ahert  les  arsons 
«  du  Chevalier  h  deux  mains;... lors  se  lance... par 
«  derrière  luy  sur  la  crouppe  de  son  cheval.  » 
(Percef.  Vol.  I,  fol.  143.)  «  Un  maistre  Engingneur 
«  d'appertise...  issit  de  son  échaufaut...  et  tout 
«  chantant  sur  la  corde...  moult  fit  d'appertises, 
«  tant  que  la  légèreté  de  lui  et  de  ses  œuvres  fut 


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AP 


«  moult  prisée.  »  (Froissart,  Vol.  IV,  p.  4.)  «  Entre 
«  les  autres  assaux  en  firent  un  qui  dura  un  jour 
«  tout  entier.  Là  eut  mainte  grand  appertise  faite.  » 
(Id.  Vol.  I,  p.  70.)  «  En  ce  temps  y  eut  à  Bordeaux 

••  sur  Gironde  une  appertise  d'armes à  courir 

«  à  tout  trois  lances  à  cheval  et  en  férir  trois  coups, 
«  trois  d'espée,  et  trois  coups  de  dague,  et  trois 
«  coups  de  hache.  Si  furent  les  armes  faites  devant, 
'<  etc.  "  (Id.  Vol.  m,  p.  159.)  «  Furent  faites  de  fort 
»  belles  apertises  d'armes  d'un  costé  et  d'autre.  » 
(J.  Charlier,  Ilist.  de  Charles  VII,  p.  14.)  «  Le  Baron 

«  de  Biron n'avoit  point  faict  tant  à'expetises 

«  d'armes  comme  il  en  a  fait  despuis.  »  (Brantôme, 
sur  les  Duels,  p.  103.)  Telle  éloit  encore  la  signifi- 
cation particulière  du  mot  apertise,  au  commence- 
ment du  xvu'  siècle.  «  On  l'approprioit  aux  faits 
<c  militaires;  mais  rien  n'empeschoil  que  le  mesme 
«  mot  ne  se  pîit  employer  es  autres  arts,  disciplines 
«  et  exercices.  »  (Voy.  Nicot,  Dict.) 

On  désignoit  aussi  par  le  mot  apertise  ou  exper- 
tise, les  qualités  qui  se  découvrent  dans  une  per- 
sonne, et  par  lesquelles  elle  se  fait  connoitre,  comme 
l'expérience,  la  force,  l'agilité,  l'adresse,  la  valeur, 
etc.  "  Le  pont  rompit  sous  luy  ;  mais  par  grand  ap- 
«  pertise  de  corps  il  se  sauva.  »  (Froissart,  Vol.  Il, 
p.  '203.  —  Voyez  Cotgrave,  Oudin,  Borel,  Mcot  et 
Monet,  Dict.)  Montaigne  se  plaignoit  de  ce  que  de 
son  temps  on  prodiguoit  à  la  vaillance  l'Ordre  de 
S"  .Michel,  ancienne  récompense  «  d'une  expertise 
«  bellique  plus  universelle  et  qui  embrassas!  la 
«  pluspart  et  les  plus  grandes  parties  d'un  homme 
«  militaire.  »  (Essais  de  Montaigne,  T.  Il,  p.  87.) 

\ARIA>TES  : 

APERTISE.  J.  Charlier,  Hist.  de  Charles  VII,  p.  t4. 

Apertisse.  Ch.  S'  D.,  Reo.  de.s  Hist.  de  Fr.  T.  III.  p.  288. 

Appertese.  D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange, 
au  mot  Apparentia,  3;  tit.  de  1470. 

.\ppertise.  Froissart,  Vol.  I,  p.  70,  etc.  —  Borel,  Oudin, 
Nicot  et  Monet,  Dict. 

Appep.tisse.  Percef.  Vol.  I,  fol.  143,  V"  col.  2. 

Expertise.  Essais  de  Montaigne,  T.  il,  page  87.  —  Cotgrave, 
et  Oudin,  Dict. 

Expetise.  Brantôme,  sur  les  Duels,  p.  280. 

Apesant,  participe.  Pesant.  (Voir  Apeser  et 
Apoiser.)  L'ancienne  acception  figurée  du  participe 
apesant,  étoit  la  même  que  celle  de  pesant,  onéreux, 
fâcheux. 

Ec-vos  (1)  Boeci  cadegu  (2)  en  afan, 

E  grant  ledenas  (3)  qui  l'estan  (4)  apesayit. 

Fragm.  de  la  Vie  de  Boèce,  MS.  de  S.  Benoit-snr-Loire,  p.  271. 

Apesart,  suhst.  ?»asc.  Cauchemar.  Incube.  Dans 
le  premier  sens,  sorte  d'oppression  nommée  ape- 
sart, parce  que  lorsqu'elle  se  fait  sentir  durant  le 
sommeil,  il  semble  qu'on  ail  un  poids,  un  corps  qui 
pèse  sur  l'estomac.  (Voy.  Borel,  Dict.)  La  fable  des 
Incubes  est  une  vieille  erreur  populaire  qui  n'a 
d'autre  fondement  que  les  elîets  de  cette  oppres- 
sion. Cependant,  Guillaume  de  Paris,  entre  autres, 
a  beaucoup  parlé  de  ces  Démons  imaginaires,  de 


ces  Incubes  que  nos  ancêtres  nommoient  Appesarts. 
Il  discute  si  leur  prétendu  commerce  avec  les  fem- 
mes est  réel,  et  s'il  peut  être  fécond.  (Voy.  Mém.  de 
l'Acad.  desB.  Lettres,  T.  XIII,  p.  G4GetG48.  —  Borel, 
Dict.  —  Dict.  de  Trévoux,  T.  III,  col.  938.) 

VARIANTES  : 
APESART.  Borel,  Dict. 
.Appesart.  Raoul  de  Presles,  Cité  de  Dieu,  liv.  xv,  ch.  23. 

Apeser,  verbe.  Faire  peser.  (Voir  Apoiser.)  Faire 
qu'une  chose  pèse,  qu'elle  ait  un  certain  poids.  Par 
une  comparaison  tirée  de  l'action  de  peser  deux 
choses,  de  manière  que  le  poids  de  l'une  l'emporte 
sur  celui  de  l'autre ,  on  a  dit  en  parlant  des  Clercs 
dont  la  science  indigente  devoit  l'emporter  sur 
l'opulente  ignorance  des  Prélats  : 

Pour  Dieu,  Seigneurs  Prelatz,  embracez  diligence  ; 
Car  par -trop  de  maulx  naissent  de  vostre  négligence  ; 

Ayez  pitié  des  Clercs  et  de  leur  indigence 

Car  ilz  savent  trop  bien  ton  povoir  souspeser, 
Et  à  leurs  advantaiges  leurs  engins  apeser  ; 
Si  ne  peut-on  povoir  contre  leurs  sens  peser. 

J.  de  Meun,  Cod.vers  645-68i. 

Apetisement,  suhst.  masc.  Amoindrissement. 
Espèce  d'impôt.  La  signification  du  substantif  ape- 
tisement, appel'issement,  relative  à  celle  du  verbe 
apetiser,  appetisser,  faire  plus  petit,  faire  moindre, 
amoindrir,  n'étoit  pas  moins  générale.  «  Ne  sous- 
>i  tiendront  fait  de  quelconque  Seigneur....  à  Vape- 
«  ticement  de  la  chevance  du  Roy.  »  (Ord.  T.  V, 
p.  540.  —  Voy.  Apetiser.)  Il  semble  que  parce  que 
la  vente  du  vin  en  détail  se  l'ait  à  la  petite  mesure 
dans  plusieurs  villes  du  Royaume,  on  ait  nommé 
appetissement  de  mesure,  et  tout  simplement  appe- 
tissement,  une  espèce  d'impôt  sur  la  vente  du  vin 
en  détail.  (Voy.  d'Argentré.  Coût,  de  Bretagne,  page 
1327,  note.  —  Cotgrave,  Dict.  —  Dict.  de  Trévoux.) 

VARIAJiTES  : 
APETISEMENT.  Règle  de  S-  Benoît,  chap.  ii. 
Apeticement.  Ord.  T.  V,  p.  540. 
Appetissem.^nt.  Monet,  Dict. 
Appetissement.  Cotg.  Oudin,  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict. 

Apetiser,  verbe.  Amoindrir,  diminuer,  abréger, 
accourcir,  etc.  On  a  cherche  l'origine  de  l'adjectif 
petit,  d'où  s'est  formé  le  verbe  apetiser,  apetisser, 
dAns,  putitus  (5),  diminutifdumot;jH/Hsqui  nesigni- 
fioit  petit,  petit  enfant,  qu'en  présentant  à  l'esprit 
l'image  d'une  partie  naturelle  que  voile  la  pudeur  ; 
putaen  latin,  en  italien  potta.  (Voy.  Petit.)  Mais 
croira-t-on  qu'il  y  ait  une  analogie  entre  cette 
acception  particulière  ûepulitus  et  l'acception  géné- 
rale de  petit  ;  que  l'une  puisse  être  une  extension 
de  l'autre?  Quel  que  soit  le  principe  de  cette  exten- 
sion, le  verbe  apetiser  ou  apetisser,  dans  un  sens 
relatif  à  celui  de  l'adjectif  petit,  signilioit  en  général 
faire  plus  petite  l'étendue,  la  ((uanlité  d'une  chose 
physique  ou  morale,  la  faire  moindre,  l'amoindrir, 
la  diminuer.  (Voy.  Ord.  T.  III,  p.  229,  443,  503  et 
521.  —  Hist.  de  B.  du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  512, 


(!)  Voilà.  —  (2)  Chû,  tombé.  —  (3)  Opprobres.  —  (4)  Etoient.  —  (5)  Nonius  cite  le  vieux  mot  latin  pe(t/i(s,  qu'il  rend  par 
tenuis  et  e.cilis,  et  qui  se  trouvait  dans  Plaute  et  dans  Lucilius  ;  Mabillon  donne  à  l'an  775  pitito  vitlare.  Diplom.,  p.  498.  (n.  e.) 


AP 


22  — 


AP 


etc.  —  Cotgrave,  Oudin,  Rob.  Estienne,  Nicot  et 
Monet,  Dict.) 

Povres  homz  qui  est  trez  en  cort  de  Sainte  Eglise, 

Est  ausi  atachiez,  cora  chiens  à  terre  glise. 

Ce  petit  que  il  a,  chacun  li  npalise. 

Ce  sont  gens  sans  pitié  et  plain  de  covoitise. 

F»bl.  MS.  du  R.  n-  7G15,  T.  II,  fol.  141,  R°  col.  1. 

On  conçoit  que  tout  verbe  qui  désigne  une  façon 
d'amoindrir  les  choses,  de  les  diminuer,  peut  être 
l'explication  du  verbe  apetissri',  comme  accourcir, 
abréger,  etc.  «  Se  la  matière  est  longue  ou  obscure, 
«  l'on  la  doit  npcticcr  h.  mots  briefs  et  entendibles.  » 
(Fabri,  Art  de  Rétbor.  L.  I,  fol.  3!).)  On  regrettoit 
l'âge  d'or,  lorsqu'on  parlant  de  .lupiter,  on  disoit  : 

Moult  eut  en  luy  mol  justicier  ; 
Il  fist  printemps  appelicier,  etc. 

Uom.  de  la  Rose,  Terâ  21097  el  21098. 

Dans  ces  vers,  la  signification  d'apetisser  étoit 
neutre,  comme  lorsqu'en  parlant  d'un  homme  gé- 
néreux et  libéral  sans  diminuer  sa  fortune,  sans 
l'endommager,  on  disoit  figurément  :  »  Li  saiges 
«  larges...  despent...  ce  que  il  peut  souffrir  sans 
«  apcticic)'....  Doncques  li  loons-nous  que  il  soit 
«  large,  etc.  »  (Beaumanoir,  C.  de  Beauv.,  p.  9.) 

Ce  verbe  actif  et  neutre  étoit  aussi  réciproque, 
comme  il  Test  encore  aujourd'hui  sous  l'orthographe 
apetissev.  «  Prenés  un  pot  de  terre  neuve...  rempli 
«  d'eaue  bien  clère  ;  puis  mettes  la  poulrlre  dedens, 
«  et...  soit  tant  bouUi  que  elle  s'apelice  de  la 
«  moitié.  »  (Modus  et  Racio,  ms.  fol.  130.)  «  Largesse 
«  maintenir  sans  soy  fl/;c</c/ej",  etc.  »  (Beaumanoir, 
tibi  supra.) 

VARIANTES  ' 

APETISER.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  206,  R"  col.  1.  - 
Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  385,  col.  3. 

Apeticer.  Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  p.  10.  —  G. 
Guiart,  JIS.  fol.  67,  V».  -  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  1.30,  R». 

Apeticuer.  Chron.  S'  D.  Reo.  des  H.  de  Fr.  T.  III,  p.  238. 

Apeticier.  Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  p.  9.  —  Hist. 
de  B.  du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  i5I2. 

Apetisier.  Fabl.  ilS.  du  R.  n»  7218,  fol.  167,  R»  col.  2. 

Apetisser.  Orth.  subsist.  -  Ord.  T.  III,  p.  .503. 

Apetissier.  Psautier,  MS.  du  R.  n°  7837,  fol.  12,  V»  col.  2. 

Appeticer.  Ord.  T.  III,  p.  229. 

Appeticier.  Ibid.  p.  443  et  521. 

Appetisser.  Gace  de  la  Bigne,  des  Déduits,  MS.  fol.  116, 
R".  -  Percef.  Vol.  I,  fol.  58,  R»  col.  1.  -  Cotgrave,  Oudin. 
Rûb.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Trévoux,  Dict. 

Apie,  subst.  fém.  Douceur.  La  douceur  de  la 
langue  latine  étant  comparée  à  la  douceur  du  miel 
de  l'abeille,  on  a  dit  que  César  «  composa  un  œuvre 
«  très-élégant,  de  la  raison  et  manière  de  bien 
«  purement  et  nettement  parler,  dédiant  cest  œuvre 
«  et  l'envoyant  à  Cicero,  comme  prince  et  inventeur 
«  de  l'élégant  et  apie  de  la  langue  latine.  >•  (L'amant 
ressusc.  p.  263.)  La  signification  figurée  de  ce  mot 
apie,  formé  du  latin  apis,  en  françois  abeille, 
semble  caractériser  l'atTectation  érudite  d'un  Ecri- 
vain du  XVI'  siècle. 

Apiécer,  verbe.  Assembler  les  pièces,  les  parties 
d'un  tout.  Dans  une  signification  particulière  , 
assembler  les  parties  d'un  pourpoint,  faire  un  pour- 
point, le  coudre  après  l'avoir  taillé.  «  Xe  fut  trouvé 
«  en  la  maison  du...  cousturier,  tant  seulement  que 
«  ung  pourpoint  taillé ,  encores  à  apiécer  et  à 


<■  quouldre.  »  (D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de 
Du  Cange,  au  mot  Appire  ;  tit.  de  1403.) 

Apier ,  subst.  masc.  Place  où  l'on  met  des 
abeilles.  En  latin  apiarium.  (Voy.  Cotgrave,  Dict.) 

.  Apigi-atis,  subst.  masc.  Grapilleur.  Telle  paroit 
être  la  signification  d'apigratis,  sobriquet  d'un 
cuisinier,  dans  Rabelais,  (T.  IV,  p.  170.) 

Apiler,  verbe.  Mettre  en  pile,  en  masse.  (Cot- 
grace,  Dict.)  C'est  relativement  à  la  signification 
propre  du  substantif  pile,  en  latin  pila,  d'où  s'est 
formé  le  verbe  réciproque  s'apiler,  ou  s'appiler, 
qu'on  a  dit  dans  un  sens  métaphorique  :  «  La  société 
«'  des  hommes  se  tient  et  se  coust  à  quelque  prix 
«  que  ce  soit.  En  quelque  assiette  qu'on  les  couche, 
«  ils  s'appilentei  se  rangent  en  se  remuant  et  s'en- 
«  tassant,  comme  des  corps  mal  unis  qu'on  empoche 
«  sans  ordre,  trouvent  d'eux-mesmes  la  façon  de 
«  se  joindre  et  s'emplacer  les  uns  parmy  les  autres, 
«  souvent  mieux  que  l'art  ne  les  eust  sceu  disposer.  » 
(Essais  de  Montaigne,  T.  III,  p.  307.)  On  disoit  en 
parlant  d'un  homme  dont  le  corps  étoit  ramassé, 
par  conséquent  robuste  et  fort,  qu'il  étoit  apilé. 
<>  Il  esloit  demeuré  petit,  mais  fort  et  apilé,  les 
«  épaules  grosses.  »  (Mém.  de  Montluc,  T.  I,  p.  570.) 
Dans  un  sens  plus  figuré,  sappiler  c'étoit  se  forti- 
fier en  ramassant  toutes  les  forces  de  son  âme,  s'en 
faire  un  appui,  comme  d'un  pilier,  d'une  digue 
contre  la  violence  des  passions.  «  Regardez  dans 
«  vous ,  reconnoissez-vous ,  tenez-vous  à  vous  : 
«  vostre  esprit  et  vostre  volenté  qui  se  consomme 
«  ailleurs,  ramenez-la  en  soy  :  vous  vous  escoulez, 
«  vous  vous  respandez  :  appilovous,  soustenez- 
«  vous  :  on  vous  trahit,  on  vous  dissipe,  on  vous 
«  desrobe.  •>  (Essais  de  Montaigne,  T.  III,  p.  391.) 

VARIANTES  : 
APILER.  Mém.  de  Montluc,  T.  I,  p.  570.  -  Cotgrave,  Dict. 
.Vppiler.  Essais  de  Montaigne,  T.  III,  p.  356.  —  Cotg.  Dict. 

Apilletter,  verbe.  Rendre  aigu.  Il  semble  qu'un 
fer  apiletté  étoit  un  fer  aigu  comme  celui  d'une 
espèce  de  javelot  qu'on  nommoit  pile,  pilète;  d'où 
le  verbe  apiletter,  dans  la  signification  d'aiguiser, 
rendre  aigu.  (Voy.  Pile.)  «  Une  sayette  ou  volet,  où 
"  avoit  ou  bout  ung  fer  apilletié,  etc.  »  (Lett.  de 
grâce,  an.  1  i76.  —  Voy.  D.  Carpentier,  Sup.  Gloss. 
lat.  de  Du  Cange,  au  mot  Pilatus.) 

Apincer,  verbe.  Pincer.  On  a  dit  figurément  : 

Luxure  emboe  tout  et  en  riens  ne  la  rainco; 
Car  en  tous  les  estatz  mort,  acroiche,  ou  apince  : 
D'un  Duc  fait  ung  villain,  et  d'un  villain  ung  Prince. 

J.  de  Meun,  Cod.  vers  1781-1783 . 

Apinianlx,  subst.  masc.  pluriel.  Bateleurs, 
farceurs.  On  a  conjecturé  avec  assez  de  vraisem- 
blance, que  les  apinïaulx  dont  le  Cartulaire  de 
l'abbaye  de  Lagny  fait  mention,  étoient  des  bate- 
leurs, des  farceurs  ù  qui  l'on  permettoit  d'amuser 
le  public  dans  les  foires,  en  exigeant  d'eux  un  tribut 
que  sans  doute  on  comprenoit  dans  la  ferme  des 
droits  quisepercevoient  durant  les  foires,  u  Ce  sont 
«  aucunes  fermes  qui  estoient  de  prouffit  à  l'abbaye 


AP 


—  23  - 


AP 


«  de  Laigny,  es  foires  de  Champaigne  el  Brye.... 
«  Cil  d'apiniaulx  et  autres  menues  trueues,  lxx 
«  livres.  »  (D.  Carpentier,  Suppl.  Ciloss.  lat.  de  Du 
Gange,  au  mot  Apinarii.)  Celte  conjecture  est  fondée 
sur  la  possibilité  que  le  mot  franrois  apiniaulx  soit 
dérivé  du  latin  apinarii,  qui  désignoit  l'espèce  vile 
et  méprisable  de  ces  hommes  qu'on  appelle  au- 
jourd'hui bateleurs,  farceurs,  saltimbanques.  On 
croit  apinarii  formé  à'apinœ.  (Voy.  D.  Cange  Gloss. 
lat.  T.  I,  col.  551  et  552.) 

Apiter,  verhe.  Etre  ému  de  pitié.  Ce  verbe  dont 
la  signification  intéresse  l'humanité,  est  encore 
usité  parmi  le  peuple  en  province,  où  l'on  dit  apiter, 
s'apiter.  «  Le  Uuc  se  appitoija,  si  que  l'en  luy  véoit 
«  les  larmes  aux  yeux.  »  (Monstrelet,  Vol.  III,  f°  118.) 
Quelquefois  la  signification  de  ce  verbe  réciproque 
étoit  neutre. 

Le  cueur  lors  luy  appilo'ia. 

Vigil.  de  Charles  VII,  p.  157. 

Dans  le  temps  où  nos  ancêtres  s'amusoient  dévo- 
tement à  voir  jouer  nos  mystères,  celui  de  la  Passion 
de  Nolre-Seigiieur  étoit  sans  doute  fait  pour  émou- 
voir la  pitié.  Aussi  lisons-nous  qu'à  l'entrée  des  rois 
de  France  et  d'Angleterre  dans  l'aris,  le  1  "  décembre 
1420,  «  n'estoil  homme...  à  cui  le  cueur  ne  apiteasi, 
«  en  voyant  le  mystère  de  la  passion  Nostre-Sei- 
«  gneur  au  vif,  selon  que  elle  estoit  tigurée  autour 
«  du  cueur  de  Rostre-Dame  de  Paris.  »  (Journ.  de 
Paris,  sous  Charles  VI  et  Charles  VII,  p.  72.) 

VARIANTES  : 
APITER.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  du  Du  C.  au  mot  rielosiis. 
Apitèer.  Journ.  de  Paris,  sous  Charles  VI  et  Charles  Vil, 
p.  72. 
Apitoyer.  Colgrave,  Dict. 
Appitoïer.  Vigil.  de  Charles  VII,  p.  157. 
Appitoyer.  Monstrelet,  Vol.  III,  fol.  118,  V°. 

Aplaider,  verbe.  Obtenir,  ou  demander.  Il 
semble  que  dans  un  sens  analogue  à  celui  du  mol 
latin  placitum,  dont  on  a  formé  le  françois  plaiel, 
plaid,  aplaider  une  femme  à  un  homme,  signifioil 
lui  obtenir  une  femme  en  mariage,  la  demander 
pour  lui  à  des  conditions  qui  plaisent  aux  parties 
que  ce  mariage  intéresse. 

Ses  parages  par  force 

De  la  prison  d'Aniurs  renforce. 


Si  porchacent  tant  et  li  aident 
C'une  autre  feme  li  aplaidenl. 

l'rison  d'Amour,  MS.  de  Turin,  fol.  30,  V°  col.  1. 

Apleit,  sitbst.  mase.  Ilarnois.  Joug.  Filet  pour 
la  pèche.  On  croit  (\uap])lect,  ajiploil  ou  apleit  est 
un  mot  formé  du  latin  appiieitum,  comme  A'impli- 
citiim  s'est  formé  emploicte,  et  eiploict  û'expli- 
cituni;  que  dans  le  sens  étymologique,  il  signifie 
chose  pliée,  appliquée,  employée  a  certain  usage, 
et  que  relativement  à  cette  acception  générale,  on  a 
nommé  spécialement  apleit,  le  harnois  d'une  bête 
de  somme,  d'un  cheval  de  charrue,  etc.  »  Des  for- 
«  faitures  que  les  Sergans  prendront...  de  ce  qui 
«  sera  porté  à  somme,  auront  la  somme  et  les  bas 
«  etaplail,  aulrement  harnois.  »  (Ord.  T.  VI,  p.  228.) 


Un  jour  com  autrefoiz  li  païsant  ala 
A  l'ore  de  disner,  à  l'ostex  repaira; 
A  la  charue  apleiz,  soc  et  coutre  lessa. 

Rom.  deRou,  MS.  p.  51. 

Dans  la  Bresse,  on  nomme  encore  applis,  >>  les 
«  cordages  et  autres  choses  semblables  que  le  pro- 
«  priélaire  fournit  à  son  métayer,  lorsqu'il  entre 
«  dans  sa  terre.  »  (Laur.  Gl.  du  Dr.  fr.)  (Juelquefois 
V apleit  étoit  le  joug,  la  pièce  de  bois  traversant 
par-dessus  la  tête  des  bceufs  qu'on  attèle.  «  Icellui 
«  Messent  donna  d'un  applect  à  beufs  dont  on  lye 
«  ou  attelé  les  beufs.  »  (D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss. 
lat.  de  Du  Cange,  au  mot  Aploidum;  tit.  de  1452.) 
La  signification  A' apleit,  filet  pour  la  pêche,  est 
encore  familière  aux  pêcheurs,  sur  les  côtes  de 
Normandie.  «  Comme  Jehan  Mignot  et  Jehan  Colin 
«  se  feussent  accompaigniez  pour  estre  à  un  [iroffit 

«  à  peschier, advinl  que  Yapploit  ou  harnois 

«  dudit  Colin  fut  plus  grevé.  »  (D.  Capentier,  iibi 
supra;  tit.  de  1379.  —  Colgrave,  Dict.) 

Aotre  opinion  sur  l'étymologie  de  ce  mot  et  sur 
l'analogie  des  acceptions  particulières ,  harnois, 
joug,  etc.  avec  l'acception  générale,  chose  pliée, 
appliquée,  employée  à  certain  usage,  paroit  au 
moins  vraisemblable,  \ovs,qu' applect^est  rapproché 
â'emploicle  et  cxploict.  [Voy.  Emploicte  et  Exploict.) 

VARIANTES  : 
APLEIT.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  51. 
Aplait.  Ord.  T.  VI,  p.  228. 
Apleiz  (plur.).  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  51. 
Aplet.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Aploidum. 
Applect.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  D.  C.  au  mot  Aploidum. 
Applis  (plur^.  Laur.  Gloss.  du  Dr.  fr. 
Apploit.  d.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  D.  C.  au  mot  Aploidum. 

Apleitage,  mbst.  masc.  Lieu  où  des  vaisseaux 
abordent  pour  charger  ou  décharger  des  marchan- 
dises. 11  semble  que  la  signification  à'apleilage  est 
relative  à  celle  de  plaele  ou  plat  te,  en  latin  placta; 
soit  que  ce  mot  signifie  ballot,  marchandise  pliée 
en  ballot,  soit  qu'il  signifie  une  espèce  de  bateau 
plat,  un  vaisseau  de  transport,  ou  une  place  com- 
mode pour  l'embarquement,  ou  pour  le  débarque- 
ment. «  Si  a  une  pièce  de  lière  sor  le  Mueeze,  ù  on 
«  met  faissel,  se  l'apièle-on  apleitage....  Encor  i  a 
«  li  Cuens  sor  Meuze  une  pièche  de  terre,  c'on  apele 
>'  apleitage;  si  vaut  par  an  xx  sols.  »  (Reg.  de  la 
Ch.  des  Comptes  de  Lille.  —  Voyez  D.  Carpentier, 
Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  aux  mots  Placta, 
Placlata,  etc.) 

Aplenner,  verbe.  Venir  en  foule.  Signification 
analogue  h  celle  du  verbe  affouler  (Voy.  Affoiler.) 
qu'on  croit  être  dérivé  d'un  mot  dont  le  sens  est 
le  même  que  celui  de  l'adjectif  latin  pleniis,  en 
françois  plein,  d'où  le  verbe  aplenner. 

Tous  ensemble  el  cellier  aplcnnciit, 
Duquel  les  huis  verrouilliez  tennent. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  80,  R'. 

Aplier,  verbe.  Plier.  (Voyez  Plier.)  Ce  verbe, 
composé,  de  même  origine  qu'aploier,  est  une 
preuve  que  le  verbe  simple  plier  n'est  pas  moins 
ancien  que  ploier  dans  notre  langue.  Au  figuré, 
s' aplier  signifioitse  plier  à  une  chose,  s'y  soumettre. 


AP 


—  24  - 


AP 


Sens  solais,  sens  déport, 

Me  fait  fine  amor  chanteir; 
Et  veult  ke  je  soutire  et  port 
Tous  mais,  sens  gueridoneir. 
Je  seux  sil  ke  s'i  np/;>. 

Clians.  fr.  MS.  Je  Berne,  n-  389,  part.  II,  fol.  il,  V'. 

Aploier,  verbe.  Appliquer.  Plier.  (Voy.  Ploier.) 
L'origine  de  ce  verbe  aploier  est  la  même  que  celle 
du  verbe  appliquer,  en  latin  applicare.  C'étoit  aussi 
la  même  signification,  lorsqu'on  disoit: 

Se  Diex  me  voie, 

Tiex  fet  semblent  qu'à  Dieu  s'aploie, 
Que  c'est  l'éve  qui  pas  ne  cort. 

FaW.  MS.  du  R.  n-  7615,  T.  I,  fol.  101,  R*  col.  1. 

Cil  qui  ne  quiert  esongne, 
Doit  bien  à  sa  besongne 
Soi  meisme  aploiicr. 

Prov.  du  Vilain,  MS.  de  Gaijnat,  fol.  276,  R"  col.  1. 

On  croit  que  dans  le  sens  étymologique,  i  aploier, 
s'apiiliquer,  c'est  se  faire  un  pli,  former  son  corps 
ou  son  esprit  ii  l'habitude  de  se  plier  à  certains 
mouvemens,  à  certaines  inclinations,  comme  une 
étoffe  se  plie  à  la  l'orme  ([u'on  veut  lui  faire  prendre. 
Au  reste,  s'aploier  signilloit  se  plier,  plier  le  corps 
en  signe  de  soumission  : 

Et  quant  on  escrie  monjoie, 
N'i  ot  llamen  qui  ne  s'apploie... 
Cis  molt  esniaia  les  llamens. 
Ph.  Mou^kes,  MS.  —  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  Du  C.  au  mot  Àplegiare. 

Figurément,  se  plier,  plier  son  esprit,  sa  raison  à 
croire  une  chose,  ou  à  la  faire  :  «  Moult  est  granz 
«  merveille  cornent  li  humains  cuers  se  polt  onkes 
«  aploier  à...  croire  ke  Deus  fust  hom  et  ke  virgine 
«  permanust  cèle  k'enfant  avoitporteitetenfantèit.  » 
(S'  Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  81.) 

Bien  fait  à  desplaire, 
Puisk'elle  s'est  aploïe 
Del  tout  à  ma  faire. 

Clans,  fr.  MS.  de  Berne,  n'  389,  part,  il,  fol.  37,  V'. 

Dans  cet  autre  passage,  se  plier,  plier  sa  volonté 
au  désir  de  quelqu'un,  incliner  à  lui  faire  une  grâce. 

Je  vous  requier,  dist-èle,  Sire, 

C'a  ce  vous  voelliés  aploier 

Que  vous  me  voelliés  otroier,  etc. 

D.  Carpenlier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Aplegiare. 

Enfin,  aploier  l'homme  aux  choses  raisonnables, 
c'étoit  plier  ses  passions  au  joug  de  la  raison  et  du 
devoir. 

Ma  Dame  est  tant  douce  à  regarder, 

Que  mauvetiés  ne  pouroit  demourer 

En  cuer  d'ome  qui  le  voie. 

Coument  donc  li  fausseroie, 

Qui  mieus  doit  s'onneur  garder. 

En  tant  qu'amours  m'i  aploic, 

Qui  fet  tant  vice  eschiver  et  redouter? 

Ane.  Poël.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1398. 

VARIANTES  : 
APLOIER.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS,  p.  81.  -  Fabl.  MS 
du  R.  n»  7989,  fol.  64,  V»  col.  2,  etc. 
Aploiier.  Prov.  du  Vilain,  MS.  de  Gaignat,  fol.  276,  R". 
Apploier.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  D.  C.  au  mot  Apleyian'. 

Aplomber  (s'),  verbe.  Tomber  à  plomb.  Tomber 
perpendiculairement.  (Cotgrave  et  Oudin,  Dict.  — 
Voy.  Plomber  ci-après.) 


Aplommer,  verbe.  Etre  amassé,  s'amasser. 
Tomber  en  masse.  Etre  assommant,  accablant.  Etre 
accablé,  accabler  de  sommeil.  Enduire,  revêtir  de 
plomb.  Il  est  évident  que  par  une  comparaison  tirée 
des  effets  de  la  pesanteur  d'une  masse  de  plornb,  le 
verbe  aplommer,  de  même  origine  qu'aplomher.  a 
signifié  1°  s'amasser  pour  tomber  sur  un  ennemi  et 
l'accabler. 

Endroit  ceus  qui  viennent  serre?. 
Et  armez  d'armeures  chiéres. 
En  a  es  chans  deux  granz  et  fières. 
Où  grant  flo  de  flamens  aplomme. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  264,  V'. 

2°  Tomber  en  grande  quantité,  et  pour  ainsi  dire 
en  masse  : 

La  gresle  ne  verrez  jà 

Si  dru,  com  sajettes  et  dars 

Aplonincrciit  de  toutes  pars. 

G.  Macliaut.  MS.  fol.  220,  V  col.  3. 

3°  Etre  assommant  par  son  poids,  être  accablant  : 

Noslre  fais  apoise  et  aplomme. 

Miserere  du  Recl.  de  Molicns.  MS.  de  Gaignaf .  fol.  203,  V"  col.  1. 

4°  Etre  accablé,  accabler  de  sommeil.  Le  verbe 
aplommer  en  ce  sens  étoit  neutre  et  actif,  et  l'on 
disoit  aplommer  de  sommeil,  ou  tout  simplement 
applommer.  (Voy.  Borel,  Cotgrave,  Oudin,  Rob. 
Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict.) 

Je  n'ose 

Parler  haut  ;  je  croy  qu'il  repose. 
Il  est  un  petit  aplomme. 
Hélas?  il  est  si  assomé,  etc. 

Farce  de  Pathelin,  p.  36. 

On  voit  que  les  acceptions  figurées  d'aplommer 
ont  précédé  dans  notre  ancienne  langue,  l'acception 
propre  enduire,  revêtir  de  plomb.  On  ne  trouve 
applommer  en  ce  sens  que  dans  Monet,  Dict.  (Voy. 
Plommer  ci-après.) 

VARIANTES  : 
APLOMMER.  G.  Guiart,  fol.  264.  -  Farce  de  Pathelin,  p.  36. 
Aplomer.  Borel,  Dict. 

Aplonmer.  g.  Machaut,  JIS.  fol.  220,  V°  col.  3. 
Applomer.  Oudin,  Dict. 
Applommer.  Cotgr.  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict. 

Apluvoir,  verbe.  Tomber  du  ciel  en  pluie.  Tom- 
ber comme  une  pluie.  Affluer,  abonder.  (Voy. 
Pllvoir.)  Le  verbe  latin  appluere,en  (rançois  apleu- 
voir,  semble  avoir  été  formé  à  l'imitation  d'fl/'//îier(?, 
pour  peindre  la  fluidité  des  nuages  qui  tombent  en 
pluie,  la  fluidité  de  l'eau  qui  tombe  du  ciel.  C'est  la 
signification  û'apleiivoir  dans  ces  vers  : 

Salemons  qui  bien  fait  à  croire, 
Il  conmenda  son  flU  à  boire 
L'yaue  qui  de  son  puis  venist  ; 
Et  avoec,  à  ce  se  tenist. 
Que  entresait  (1)  l'yaue  beust, 
Qui  en  sa  citerne  aplcusl. 

Alars  de  Canibray,  MS.  de  Gaignat,  fol.  144.  R*  col.  1  et  2. 

Par  un  abus  semblable  à  celui  que  nous  faisons 
de  l'expression  propre  tomber  du  ciel  ou  des  nues, 
le  verbe  apleuvoir  signifioit  paroitre  dans  un  lieu, 
y  arriver  sans  être  connu  ni  attendu. 

....  Lor  est  puis  apleuz 
Un  Chevaliers  qui  fu  perduz. 

Farton.  de  Blois.  MS.  de  S.  Gêna.  fol.  133.  R-  col.  3. 


(1)  de  suite,  sur-le-champ  ;  en  provençal,  atrasag.  (N.  E.) 


AP 


—  25  — 


AP 


Les  nuages  pluvieux  qui  flottent  dans  l'air,  sont 
une  image  naturelle  des  flots  qui,  lorsque  la  mer 
monte,  s'élèvent  et  retombent  en  pluie  sur  le  rivage 
où  ils  se  brisent.  De  là,  on  aura  désigné  le  flux  de 
la  mer,  en  disant  que  la  mer  ou  le  flot  apleul. 

.  .  .  Est,  pour  peur  de  marée, 
Chascune  aus  deux  bouz  aancrée  ; 
Si  que  flot  qui  doie  aploitvoir, 
Ne  les  a  povoir  de  movoir. 

G.  Guiart,MS.  fol.  312,  R-. 
Passèrent  couart  et  liardi,... 
Tout  droit  la  seconde  semaine 
De  Juignet,  outre  la  rivière 
Dont  ge  vous  ai  parlé  derrière, 
Où  la  mer  estoit  apleue. 

Id.  fol.  283,  R-. 

C'est  encore  relativement  à  l'idée  d'une  pluie  qui 
tombe  en  abondance,  qn'apleuvoir  signifioit  les 
flots,  l'affluence  du  monde  qui  abonde  dans  un  lieu, 
en  y  tombant  comme  la  pluie,  •■  Cume  Absalon  fist 
«  le  sacrelise,  ces  ki  od  lui  furent  firent  cunjureisun 
«  encuntre  David,  e  li  poplesapluveitde  tûtes  parz, 
«  e  fud  e  se  teneit  od  Absalon.  »  (Livres  des  Rois, 
Ms.  des  Cordel.  fol.  59,  R°  col.  2.) 

Li  villains  des  villes  aplovoient. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  319. 

Ileuc  viennent,  ileuc  apleuvent ; 
Depuis  vers  S'  Orner  s'esmeuvent. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  27i.  R'. 

Il  semble  que  dans  les  vers  suivans  on  ait  écrit 
aparleuvent  à  cause  de  la  mesure. 

Mansiaus,  Berruiers,  Orlenois 

A  granz  compaignies  aparleuvent  ; 

Les  oz  Loys  de  Chinon  meuvent. 

Id.  fol.  Hi,  R'. 

VARIANTES  : 
APLUVOIR.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  59. 
Aparlkuvoih.  g.  Guiart,  MS.  fol.  114,  R°. 
Aj>leuvoir.  Id.  fol.  65,  R». 

Aplovoir.  Ch.  S'  Denys,  Rec.  des  H.  de  Fr.  T.  VII,  p.  127. 
APLOuvoiR.  G.  Guiart,  MS.  fol.  312,  R».  -  J.  Le  Febvre  de 
S'  Remy,  Hist.  de  Charles  VI,  p.  98. 

Apocalipse,  suhst.  fém.  Apocalypse.  On  jugera 
sans  doute  qu'Adam  de  Cambray,  Premier  Président 
du  Parlement  de  Paris,  ne  respéctoit  pas  assez  l'au- 
teur mystérieux  de  VApocalijpse,  lorsque  pour  dési- 
gner ces  Jurisconsultes  ignorans  et  décisifs,  à  qui 
l'origine  obscure  des  Droits  coutumiers  et  de  nos 
anciens  usages  semble  avoir  été  révélée,  il  disoit 
«  avoir  veu  que  gens  coustumiers  et  non  clercs,  en 
«  parloient  comme  S' Jehan  de  l'Apocalipse.  »  (Voy. 
D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au 
mot  Apocalijpsis.)  Rabelais  paroit  avoir  abuse  de  la 
même  comparaison,  en  dé\]gur3inl\e  mol  Apocalipse. 
Le  Frère  Jean  des  Entommeures,  supposant  que 
Gymnaste  parle  de  ce  qu'il  n'entend  pas,  de  ce  qu'il 
ignore,  lui  dit  :  «  Voire,  voire,  vous  en  parlez 
«  comme  Sainct  Jean  de  la  Palisse.  -  (Habelais, 
T.  IV,  p.  7i  et  75.)  On  croit  que  la  Palisse  est  l'allé- 
ration  du  mot  Apocalipse,  ou  Apocalice,  précédé  de 
l'article.  11  est  possible  qu'on  ait  écrit  apocalice; 
mais  cette  orthographe  citée  par  Le  Duchat  {ubi 
supra,  note  9),  ne  se  trouve  point  dans  Froissart 
(Vol.  II,  chap.  cLNxin,édil.  de  Le  Sauvage.)  C'est  pro- 


bablement  au  chap.  axxm  du  Vol.  Il  d'une  édition 
peu  connue  que  renvoie  la  note  de  Le  Duchat. 

L'auteur  du  Roman  de  la  Rose,  après  avoir  per- 
sonnifié V Abstinence-contrainte  ,  la  compare  au 
cheval  de  V Apocalipse,  au  pallidus  equus  qui  dans 
V Apocalypse  porte  la  mort. 

Tantost  Abstinence-contrainte 
Vest  une  robe  cameline 
Et  s'aourne  comme  béguyne... 
De  belle  taille  est  à  devys; 
Mais  ung  pou  fut  pale  de  vis  ; 
Et  ressarabloit  la  pute  lice 
Le  cheval  de  l'Apocalipse 
Qui  signifie  la  gent  maie 
D'ypocrisie  taincte  et  pale  ; 
Car  ce  cheval  sur  soy  ne  porte 
Nulle  couleur  fors  paie  et  morte. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  12169-1Î797. 

VARIANTES  : 
AP0C.4.L1PSE.  Rom.  de  la  Rose,  vers  12793. 
Apocalice.  Rabelais,  T.  IV,  p.  74,  note  9. 

Apodixie,  siibst.  (cm.  Démonstration,  explica- 
tion. On  croit  que  le  mot  françois  apodixie  est  une 
altération  du  mot  grec  dniâiqiç,  et  que  Y  Apodixie 
pour  la  Messe,  ouvrage  de  Barthélémy  du  Poix,  ou 
de  Beau-Poix,  auteur  du  \\i'  siècle,  étoil  la  démons- 
tration de  quelque  vérité  relative  au  sacrifice  de  la 
Messe,  ou  l'explication  des  cérémonies  qu'on  y 
observe.  (Voy.  }>a  Croix  du  Maine,  Biblioth.  p.  33.) 
L'adjectif  apodictique,  terme  didactique,  de  même 
origine  qu'apodixie,  signifie  encore  évident,  dé- 
monstratif. 

Apodytère,  subst.  maso.  Lieu  où  l'on  se  dévêt, 
où  l'on  se  déshabille.  En  grec  dnoâvrijQioy.  (Voy. 
Monet,  Dict.) 

Apoigner,  verbe.  Prendre  avec  le  poing.  Pren- 
dre une  chose  et  la  tenir  en  fermant  la  main,  en 
serrant  le  poing.  «  Bourdon  apoigna  ledit  coustel  ; 
«  mais  ledit  Piene  lira  si  fort  que  il  lui  trancha  les 
«  mains.  »  {D.  Carpentier,  ubi  supra;  tit.  de  1374. 

—  Voy.  Empoigner.)  On  soupçonne  que  ce  même  pré- 
térit apoigna,  dans  un  autre  titre  de  1389,  est  moins 
le  prétérit  d'apoigner,  que  celui  du  verbe  apoindre, 
prendre  en  piquant  avec  la  pointe  d'un  couteau, 
d'une  fourchette,  etc.  «  Joudon  appoigna  dudit 
«  poulet  en  l'escuèle.  »  (D.  Car penûer,  ubi  supi-a. 

—  Voy.  Apoindre  ci-dessous.) 

VARIANTES  : 
APOIGNER.  D.  Carpent.  S.  Gl.  1.  de  Du  C.  au  mot  Arpagare. 
Appoigner.  Id.  ibid.  tit.  de  1389. 

Apoindre,  verbe.  Piquer,  coudre.  Piquer,  don- 
ner des  éperons.  Venir  en  piquant  des  deux.  (Voy. 
Poindre.)  Le  premier  sens  est  coudre,  attacher  une 
chose  à  une  autre,  en  les  piquant,  en  y  faisant  des 
points.  On  lit  qu'au  moment  où  Adam  et  Eve  rougi- 
rent de  leur  nudité, 

Por  lor  humanité  repoindre, 
Conmenchièrent  lors  à  apoindre, 
Et  à  noer  et  à  lyer 
Ensole  fuelhes  de  figier. 

Les  IV  filles  le  Roy,  MS.  de  Turin,  fol.  39,  R'  col.  t. 


AP 


26  — 


AP 


Dans  le  second  sens,  on  disoit  : 

Garins  li  Dus  vint  apoignant  ; 
Tint  une  lance  à  fier  trençant. 

Ph.  Mouskcs,  MS.  p.  191. 

Apoingnant  vint  ;  à  haute  vois  s'escrie  : 
Rois  Anseis,  li  miens  cors  te  défie. 

Anscis,  MS.  fol.  30,  V  col. 2. 

De  là,  le  verbe  apoindre  signifioit  piquer  droit  à 
un  adversaire,  pour  le  comballre,  pour  le  vaincre; 
venir  à  lui  eu  piquant  des  deux,  en  poussant  un 
cheval  à  sa  rencontre.  «  Si  laissa  courre  Agravain 
"  qui  aussi  luy  apoignoit.  Hz  s'entrefièrent  des 
0  glayves,  si  qu'ilz  en  font  voiler  les  esclatz.  » 
(Lanc.  du  Lac,  ï.  II,  fol.  70,  V-  col.  1.) 

Normanz  comparurent  ; 

D'un  pendant  (1)  sortent  où  il  furent... 
Li  Roiz  lierait  de  loing  les  vist  ; 
Guert  apela,  si  li  a  dit  :... 
II  apoitujnent  à  nos  C(jnquerre,  etc. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  395. 

Il  paroit  assez  naturel  que  dans  un  temps  où  la 
Noblesse  combattoit  ordinairement  à  cheval,  on  ait 
désigné  un  ennemi  qui  venoitdansun  pays  pour  en 
faire  la  conquête,  en  disant  qu'il  apoingnoit  à  le 
conquérir.  Au  reste,  apoindre  d'un  lieu  à  un  autre, 
c'étoit  venir  d'un  lieu  à  un  autre,  en  piquant  des 
deux,  en  poussant  son  cheval,  en  lui  appliquant  aux 
flancs  les  pointes  des  éperons. 

A  tant,  ez  le  Barnage  qui  apoingnoit  detriés, 
L'Empereres  devant,  qui  s'estoit  avanciés. 

Guiteclin  de  Sassoigne,  MS.  de  Gaignal,  fol.  248,  R"  col.  i. 

Cil  vindrent  volentiers,  n'i  a  cil  qui  n'i  apoingne  ; 
Nul  n'i  requiert  respit,  ni  terme,  ni  aloingne. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  41. 

Apoingnant,  participe.  Piquant,  donnant  des 
éperons.  Telle  étoil  la  signification  de  ce  participe, 
formé  d'après  l'ancienne  conjugaison  du  verbe 
apoindre,  lorsqu'on  disoit  venir  apoignant,  s'en 
venir  appoignant.  (Ph.  Mouskes,  ms.  p.  191.  — 
Percef.  \ol.  1,  fol.  153.  —  Voy.  Poingnant.) 

VARIANTES  : 
APOINGNANT.  Anseis,  MS.  fol.  30,  V°  col.  2. 
Apoignant.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  191. 
Appoignant.  Percef.  Vol.  I,  fol.  153,  V»  col.  I. 

Apoiser,  verbe.  Peser;  être  pesant,  fâcheux. 
Fâcher.  Rendre  pesant,  appesantir.  Il  est  probable 
que  l'orlhographe  apeser  n'a  d'autre  cause  que  la 
prononciation  vicieuse  de  la  diphthongue  oi  dans 
apoiser  ('2).  (Voy.  Apeser.)  La  préposition  initiale  du 
verbe  composé  apoiser,  désignoit  un  rapport  idéal, 
lorsqu'on  disoit  : 

Nostre  fais  apoise  et  aplomme. 

Recl.  de  Moliens,  MS.  de  Gaignal,  fol.  S03,  V  col.  1. 

Un  de  nos  anciens  Poètes,  qu'une  femme  avoit 
plaisanté  sur  son  âge,  observoit  malignement  qu'il 
y  avoit  longtemps  qu'elle  étoit  belle,  et  que  la 
durée  de  sa  beauté  en  étoit  nécessairement  la  déca- 
dence. Il  croyoit  le  prouver  en  disant  : 


Cou  c'on  a  tant  porté 
Tost  chiet,  k'adès  apoise. 

Ane.  Poêt.  Fr.  MSS.  ayant  1300,  T.  m,  p.  H5J. 

La  préposition  initiale  de  ce  même  verbe  apoiser, 
peser  sur  un  corps,  étoit  absolument  inutile,  lorsque 
dans  le  sens  de  poiser,  peser  en  appuyant,  on  disoit 
apoiser  sur,  etc. 

Si  l'adoise  (3) 

A  l'esperon,  et  pas  n'apoise 
Sore  celui  ;  si  resvoilla. 

Rom.  de  Perceval,  MS.  de  Cerne,  n"  354,  fol.  262,  R"  col.  2. 

C'est  dans  un  sens  analogue  à  celui  de  notre 
verbe  peser,  être  fâcheux,  qu'on  disoit  figurément: 

Ce  sachez,  dur  m'en  poise  : 

Mais  dictes-moy  comment  le  fait  apoine. 

Percef.  Vol.  V.  fol.  112.  V  col.  2. 

On  comparoit  et  l'on  compare  encore  en  ce  sens 
une  chose  fâcheuse,  à  un  poids  sous  lequel  on 
souffre. 

Quelquefois  le  verbe  apoiser,  comme  aparîer, 
aparoler,  etc.  étoit  actif  par  la  force  de  la  préposi- 
tion initiale,  et  signifioit  fâcher,  faire  une  chose 
qui  poise  ou  pèse  à  quelqu'un,  qui  lui  est  fâcheuse. 
(Voy.  Peser  et  Poiser  ci-après.) 

Mors  apoise  les  envoisiés  (4). 

Poème  de  la  Morl,  MS.  de  Berne,  n'  H3,  fol.  199,  V»  col.  3. 

Dans  la  signification  de  rendre  pesant,  appesan- 
tir, on  a  dit  en  parlant  de  Dieu  :  «  Si  apoeset  sor 
«  noz  toz  sa  main  ;  car  nos  péchâmes tuit  en  Adam.  » 
(S'  Bern.  Serin,  fr.  ms.  p.  5.  —  Voy.  Apeser.) 

VARIANTES    : 
APOISER.  Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1I5I.  - 
Rom.  de  Perceval,  MS.  de  Berne,  n»  354,  fol.  262. 
Apoeser.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  5. 

Apollien,  adj.  Qui  appartient  à  Apollon.  Adorer 
dans  sa  maîtresse  la  grâce  d'Apollon  réunie  à  la 
gravité  de  Pallas,  est  une  galanterie  d'un  Poêle  du 
xvr  siècle. 

Si  je  veux  veoir  quelque  perfection  ; 
Je  veoi  en  toy  la  grâce  Appollienne, 
La  gravité  plus  que  Palladienne, 
Où  gist  l'espoir  de  mon  intention. 

Poês.  de  Lojs  le  Caron,  fol.  13,  V-. 

Apollin  (5),  subst.  masc.  et  adj.  Apollon.  Faux 
Dieu  ;  Faux  Prophète.  Qui  appartient  à  Apollon, 
L'imagination  de  nos  anciens  Poètes,  affectée  du 
spectacle  des  Cours  qu'ils  fréquentoient,  semble 
n'avoir  voyagé  en  Enfer  que  pour  y  voir  des  fêtes 
et  des  tournois,  où  les  faux  Dieux  et  les  faux  Pro- 
phètes, tels  qu'Apollon  et  Mahomet,  s'ébattoient 
avec  les  Diables.  Un  de  ces  Poètes,  feignant  d'arri- 
ver avec  des  nouvelles  de  la  Cour  infernale,  dit  en 
s'écriant  : 

Ha  liai  !  ha  hai  !  je  suis  venus. 
Salus  vous  mande  Behebus, 
Et  Jupiter  et  Apollin. 
Je  vieng  d'Enfer  le  droit  chemin  ; 
Novèles  conter  vous  en  sai... 
A  mengier  oi  à  grant  plenté... 


(1)  terrain  en  pente.  —  (2)  Le  premier  e  de  pensare,  après  la  chute  de  n,  a  donné  régulièrement  poiser  :  on  s'explique 
plus  difficilement  que  ii  soit  resté  dans  penser,  venu  du  même  mot  latin  appliqué  à  une  opération  intellectuelle,  (n.  e.)  — 
(3)  ou  ucleise;  touche;  vient  à'adeser,  fait  peut-être  sur  adhœsum.  (N.  E.)  —  (4)  ceux  qui  se  divertissent.  —  (.5)  Ce  mot  se 
trouve  déjà  dans  la  Chanson  de  Roland  :  «  Mahummet  sert  e  Apollin  recleimet  (v.  8).  »  (N.  E.) 


AP 


-  27  — 


AP 


J'aporte  d'Enfer  grant  pardon 
De  Tervagan  et  de  Mahom,  etc. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7-21S,  fol.  242,  R'  col.  2,  et  V'  col.  1. 

On  lit  ailleurs  qu'au  Tornoiement-Anleclirist  : 

Vint  Jupiter 

Et  tuit  li  bon  Baron  d'Enfer, 
Dont  il  i  ot  dix  mille  et  plus. 
Jupiter  avec  Saturnus 
Chevauche,  et  Apolin  le  preu,  etc. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n'  7615,  T.  U,  fol.  189,  V-  col.  1. 

Ce  nom  propre  à'Apollin  étoit,  par  une  espèce 
d'antonomase,  un  nom  commun  aux  faux  Dieux, 
même  aux  faux  Prophètes.  Pour  nos  Poètes  et 
Romanciers  du  temps  des  Croisades ,  croire  à  un 
Dieu  tel  qu'Apollon,  ou  à  un  Prophète  tel  que  Maho- 
met, c'étoit  une  même  chose.  Aussi  nommoienl-ils 
Gent-Apollin,  toute  nation  ennemie  du  Christia- 
nisme, soit  Payenne,  soit  Mahométane.  On  pourroit 
imaginer  qn' Apollin  dans  celte  expression  est  adjec- 
tif, si  l'on  ignoroit  que  dans  notre  ancienne  langue, 
la  suppression  de  la  préposition  relative  de  étoil 
très-ordinaire. 

Moult  ot  en  Rorame  cèle  nuit  grant  hustin, 
Au  deslogier  de  la  gent  Apolin. 
A  l'ajorner,  quant  la  nuit  ot  pris  fin, 
Erent  monté  Païen  et  Sarrazin. 

Enfance  d'Ogier  le  Danois,  MS.  de  Gaijnal,  fol.  100,  R*  col.  2. 

Dans  un  autre  Roman,  le  fils  d'un  Roi  Sarrazin 
annonce  sa  conversion  et  celle  de  ses  sujets ,  en 
disant  : 

Ci  guerpisson  tuit  Apolin, 
Et  Mahomet  et  Tervagant  : 
Ne  pueent  faire  home  garant. 
Jà  croi-ge  bien  el  Creator 
Qui  du  siècle  est  justiseor. 

Blanchandin,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  186.  V"  col.  1. 

Ailleurs,  jurer  son  Apollin,  c'est  jurer  au  nom  de 
ses  faux  Dieux  ou  de  ses  faux  Prophètes. 

Li  Soudans  vient  parmi  la  presse, 
"   Haut  tient  l'escu,  la  lance  bes^e  : 
Si  a  juré  son  Apolin,  etc. 

l'arlon.  de  Blois,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  156.  V'  col.  2. 

Il  a  plu  à  un  Poète  du  xvr  siècle,  de  faire  Apollin 
adjectif  de  même  signification  qu'/lj^oZ/ïe»,  dans  ces 
vers  où,  dédaignant  le  laurier  d'Apollon,  il  offense 
les  Muses  pour  flatter  sa  maîtresse: 

Je  ne  fay  point  aux  Muses  révérence 
Pour  m'enrichir  du  laurier  Apollin  ; 
J'admire  plus  d'une  toille  de  lin 
Les  blancz  mouchoirs  cantillez  d'espérance. 

Poès.  de  Loys  le  Caron,  fol.  14,  R°. 

VAR1.\NTES    : 
APOLLIN.  Fabl.  MS.  du  R.  n°  7218,  fol.  242,  R»  col.  2.  - 
Poës  de  Loys  le  Caron,  fol.  14,  R". 
Apolin.  Enfance  d'Ogier  le  Danois,  MS  de  G.  fol.  106,  V». 
Appollin.  g.  Machaut,  Prise  d'Alexandrie,  MS.  fol.  226. 

Apollinaire,  adj.  et  subst.  Qui  appartient  à 
Apollon.  Espèce  de  plante,  hanebane,  jusquiame.  Il 
est  vraisemblable  que  dans  un  recueil  d'Epithètes, 
tel  que  celui  de  M.  de  la  Porte,  auteur  du  xvr  siècle, 
la  peur  apollinaire  est  la  fleur  du  laurier,  arbre 
consacré  h  Apollon,  le  Dieu  des  Sciences.  (Voyez 
Apollin  et  Apollinee.)  Le  Dieu  des  Sciences  étoit  le 
Dieu  de  la  Médecine.  De  là,  on  aura  nommé  apol- 


//)w/?'^,  la  jusquiame,  spécialement  celle  dont  la 
fleur  et  la  graine  sont  blanches,  et  qui  au  témoi- 
gnage de  Galien  est  très-bonne  en  Médecine.  Il  la 
distingue  de  deux  autres  espèces  de  jusquiame  que 
l'expérience  a  reconnues  pour  être  d'un  usage 
dangereux  La  graine  de  l'une  est  noire,  et  celle  de 
l'autre  est  roussàtre.  C'est  en  sous-entendant  le 
substantif  plante  ou  herbe,  en  latin  herha  ou  planta, 
que  l'adjectif  (T/;o///Hfl/rc,  en  latin  apollinaris,  a  si- 
gnifié seul  hanebane,  jusquiame.  {Voy.  Cotgr.  Dict.) 
Apollinée,  adj.  fém.  Qui  appartient  à  Apollon. 
La  fleur  apollinée  est  sans  doute  la  même  que  la 
fleur  apollinaire.  (Epilh.  de  M.  de  la  Porte.  —  Voy. 
Apollinaire  ci-dessus.) 

Apolloniseï*,  verbe.  Versifier  comme  Apollon. 
En  général  versifier.  On  lit  dans  la  Muse  historique 
de  Loret,  qu'Apollon,  sensible  ù  la  mort  de  Charles 
Deys,  Poète  du  xyu-  siècle,  en  avoil  bien  grondé  : 

Car  il  aimoit  ce  galant  homme 

Plus  qu'un  Normand  n'aime  la  pomme  ; 

D'autant  qu'en  son  art  studieux 

Il  apollonisoit  des  mieux. 

Goujct,  Biblioih.  Fr.  T.  X\l,  p.  291. 

Apologème,  subst.  mase.  Apologie.  Du  verbe 
grec  dTToXoyéofiae,  loquor  pro  alicujus  defensione,  a 
été  formé  le  substantif  apologème,  de  même  signi- 
fication qu'apologie,  en  grec  dnoXoyia.  On  a  imprimé 
en  1577,  V  Apologème  de  Guillaume  Paquelin,  pour 
le  grand  Homère,  contre  la  repréhension  du  divin 
Platon.  (Voy.  Du  Verdier,  Biblioth.  p.  500.) 

Apologiqne,  adj.  Apologétique.  On  ne  voit  pas 
trop  pourquoi  ce  mol  apologétique  a  été  substitué 
à  l'adjectif  apolor/iquc,  formé  si  naturellement  du 
substantif  apologie.  Charles  Fontaine,  auteur  du 
XVI'  siècle,  vanloît  l'utilité  des  préfaces  apologiques, 
et  croyoit  en  prouver  la  nécessité  par  celle  de 
François  Aretin  «  sur  la  translation  des  grecques 
«  epistresde  Phalaris.  »  (Voyez  Quintil.  censeur, 
pages  227  el  228.) 

Apoltronner  (s'),  verbe.  S'accoutumer  à  la 
paresse.  On  observera  que  le  mot  italien  poltrone, 
francisé  par  nos  Auteurs  du  xvr  siècle,  a  pu  se 
former  de /JoZiro,  autre  mot  dont  la  signification 
vuls;aire  et  analogue  à  celle  de  fallemand  polster^ 
oreiller,  lit,  coussin,  couche ,  est  attestée  par  des 
Etymologistes  Italiens  et  par  le  Dict.  ilal.  fr.  d'Ou- 
din.  Il  esl  possible  que  relativement  à  celte  étymo- 
logie,  le  verbe  latin  pultronizare  ou  poltronizare, 
d'orio'ine  italienne,  ait  signifié  dans  une  bulle  du 
Pape'^Jean  XXII,  datée del'an  1317,  «  vilampinguem 
»  volvere  cum  liberlate  et  sine  labore  deditus 
«  somnc,  et  vagalioni  continuée.  »  (Du  Gange,  Gloss. 
lai.  T.  V,  col.  978  )  Cette  définition  du  verbe  latin 
poltroni'Mre,  seroit  par  la  même  raison  celle  du 
verbe  françois  s  apoltronner,  proprement  s'accou- 
tumer au  lit(I),  y  faire  le  paresseux;  de  là,  s'accoutu- 
mer  à  la  paresse,  par  conséquent  à  l'oubli  de  ses 
devoirs.  On  a  dit  en  ce  sens  que  s'appoiltronner 


(1)  On  trouve  encore  en  portuguais  poUrona,  grand  fauteuil,  en  italien  boldrone,  couverture  de  lit.  (N.  E.) 


AP 


—  28  - 


AP 


autour  d'une  femme,  cétoit  «  pour  elle  contaminer 
«  celle  unicque  et  suprême  affection  que  doibt 
.  l'homme  à  Dieu  ;  laisser  les  offices  qu'il  doibt 
«  naturellement  à  sa  patrie,  à  la  république,  à  ses 

•  amis;  mettre  en  nonclialloir  ses  estudes  et  né- 

•  goces  pour  continuellement  à  sa  femme  com- 
«  plaire.  »  (Rabelais,  T.  111,  p.  191.)  Un  chien  de 
chasse  accoutumé  à  la  paresse  par  le  défaut  d'exer- 
cice, étoit  un  chien  apollronné.  ••  Les  chiens,  pour 

«  s'estre  apoltroiinez  et  rendus  trop  gras, 

«  perdent  le  sentiment.  »  (Fouilloux,  Vénerie,  fol. 
124,  R°.  —  Voy.  Apoltron.mr  ci-dessous.) 

VARIANTES    " 

APOLTRONNER  (S').  Fouilloux,  Vén.  fol.  124,  R». 
Apoitronner  (s').  Cotgrave,  Dict. 
Appoiltronner  (s').  Rabelais,  T.  III,  p.  191. 

Apoltronnir,  verbe.  Accoutumer  k  la  paresse, 
rendre  lâche,  énerver.  Etre  accoutumé  à  la  paresse, 
devenir  lâche,  s'énerver.  On  a  indiqué  quelle  pou- 
voit  être  l'oriyine  de  ces  significations  figurées  du 
verbe  apoltronnir.  (Voy.  Afoltronner.)  Il  étoit  actif 
au  premier  sens  :  «  Toute  gourmandise,  yvrongne- 
«  rie,  paillardise,  et  toute  volupté  infâme  .  .  .  apol- 
"  tronit  et  relâche  le  soldat.  «  (Sagesse  de  Charron, 
p.  441.)  Il  Le  mariage  .  .  .  apoltronit  ou  accroupit 

•  les  bons  et  grands  esprits.  ••  (Id.  ibid.  p.  179.  — 
Voy.  Appaillardir  ci-dessous.)  Il  semble  qu'apol- 
tronni  soit  neutre,  lorsqu'on  disoit  : 

.  .  .  J'ayme  mieux  oysif,  me  sauvant  de  l'envie, 
Traîner  apoltroni  le  reste  de  ma  vie. 

(Euv.  de  Baif.  Epil.  au  Roy,  p.  U. 

En  s' accoutumant  à  la  paresse,  on  devient  lâche. 
De  là,  ce  verbe  a  signifié  devenir  lâche.  (Voy.  Oudin. 
Dict.)  Un  Prince  «  appollronni  à  des  occupations 
«  lasclies  et  vaines,  étoit  un  Prince  énervé  et  devenu 
«  lâche  par  l'habitude  d'une  vie  paresseuse  et 
«  inutile.  Il  n'est  rien  qui  puisse  si  justement 
«  dégoûter  un  sujet  de  se  mettre  en  peine  et  en 
«  hazard  pour  le  service  de  son  Prince ,  que  de  le 
«  voir  appoltronnij  cependant  luy-mesme  à  des 
«  occupations  lasches  et  vaines.  »  (Essais  de  Mon- 
taigne, T.  II,  p.  G28.  —  Voy.  Apoltrowiser.) 

On  terminera  cet  article,  en  remarquant  que  les 
opinions  varient  sur  l'origine  de  poltron,  apoltron- 
nir, etc.  Saumaise,  et  après  lui  Savaron ,  Lindem- 
brog,  Bourdelot,  Vossius,  la  font  remonter  à  une 
loi  de  Valentinien  et  Valens,  contre  les  soldats  qui 
s'exemptoient  lâchement  du  service  militaire,  en  se 
coupant  le  pouce  ;  et  croient  que  poltron  est  formé 
de  poUice  truncus.W  &emh\e  qu'on  ait  eu  en  vue 
cette  étymologie  plus  érudite  que  vraisemblable , 
lorsqu'on  a  dit  qu'en  termes  de  Fauconnerie,  apol- 
tronnir un  oiseau  c'étoit  le  rendre  lâche ,  en  lui 
coupant  les  ongles  des  pouces,  qui  sont  les  doigts 
de  derrière.  (Dict.  de  Trévoux.  —  Voy.  Poltron.) 

VARIANTES  : 
APOLTRONNIR.  Oudin,  Dict.  -  Dict.  de  Trévoux. 
Apoltronir.  Sagesse  de  Charron,  p.  411,  576,  etc. 
Appoltronnir.  Essais  ie  Montaigne,  T.  II,  p.  6'28. 


Apoltronniser,  verbe.  Rendre  poltron,  rendre 
lâche.  Signification  figurée,  de  même  origine  que 
celle  du  verbe  apoltronnir.  Mont-Bourcher  pensoit 
que  «  le  moyen  de  rendre  le  François  vaillant , 
»  comme  son  naturel  l'y  porte  assez,  s'il  n'avoit 
«  esté  flyjoZ/ronH /se  d'ailleurs,  étoit  de  rétablir  le 
»  gage  de  bataille  en  champ  clos,  de  prescrire  des 
«  lois  au  duel,  et  d'interdire  l'usage  des  pistolets  de 
«  poche,  des  poignards  et  autres  armes  traîtresses 
•<  avec  lesquelles  les  plus  gens  de  bien  et  coura- 
«  geux  ....  seront  tousjôurs  malmenez  par  les 
«  poltrons.  »  (Mont-Bourcher,  des  Gages  de  Bataille, 
fol.  23,  R°  et  V°.  —  Voy.  Apoltronnir  ci-dessus.) 

Apoure  (s'),  verbe.  Se  disposer.  C'est  proba- 
blement d'après  l'infinitif  aponre  ou  apondre,  formé 
du  latin  apponere  (comme  de  reponere  s'est  formé 
répondre  ou  réponre)  qu'on  a  dit  figurément  : 

Joie  aurai;  mes  ne  sai  dont  (1), 
Se  à  merci  ma  Dame  ne  s'nponf. 

Aiic.  Poét.  fr.  .MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  637. 

CONJLG. 

Apont  (s"),  indic.  prés.  Se  dispose.  (Ane.  Poël.  fr.) 

Aporétique,  adjectif.  Embarrassant,  douteux-. 
(Oudin,  Dict.)  Ce  mot  formé  du  grec  Snoçoç,  qui  est 
sans  passage,  en  latin  invius,  a  pu  signifier  au 
figuré  douteux,  embafrassant,  qui  ne  laisse  aucun 
passage,  aucune  voie  pour  arriver  au  point  d'une 
question  à  résoudre. 

Aposer,  verbe.  Poser.  Imposer.  Disposer.  On 
indi([uera  l'origine  des  acceptions  usitées  et  Inusitées 
du  verbe  apposer  et  du  substantif  apposition  en 
observant  qu'ap])0ser  signifie  poser  une  chose  contre 
une  autre  chose,  ajouter  l'une  à  l'autre,  poser  deux 
choses  de  manière  qu'elles  soient  contiguës  ou  rela- 
tives, les  appliquer,  les  joindre  par  apposition. 
(Monet,  Dict.  —  Dict.  de  l'Acad.  Fr.)  La  préposition 
initiale  et  inséparable  qui  désigne  l'idée  de  cette 
position  relative,  est  superflue  dans  les  expressions, 
«  apposer  la  main  à  la  poitrine,  apposer  une  mar- 
«  que  à  une  chose,  etc.  »  (Rob.  Estienne  et  Mcot, 
Dict.)  Plus  anciennement,  en  parlant  dune  personne 
à  laquelle  il  sembloit  naturel  de  croire,  on  disoit 
figurément  que  «  créance  lui  étoit  tost  apuse;  n 
littéralement,  qu'en  elle  créance  étoit  bientôt  posée, 
que  foi  lui  étoit  bientôt  ajoutée. 

Que  ma  vie  soit  laide  ou  bêle, 

N'est  pas  à  mon  sergant  (2)  repuse. 

Et  on  a  tost  créance  apuse 

A  mon  ser£;ant,  de  ma  querèle. 
Miserere  du'Rcc!.  d»  Moliens.  MS.  de  Gaignal,  fol.  222,  R°  col.  1. 

On  dit  encore  •<  apposer  une  clause  à  un  contrat.  » 
Peut-être  »  qu'apposer  une  peine  à  ceux  qui  rom- 
«  proient  l'alliance,  »  c'étoit  apposer  au  traité 
d'alliance  une  clause  relative  aux  infracteurs  de  ce 
traité,  et  qui  les  soumettoit  h  une  peine.  Peut-être 
aussi  qu'en  ce  cas,  la  signification  d'apposer  éloil 
la  même  que  celle  d'imposer  à  quelqu'un  une  peine 
relative  à  sa  faute.  (Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict.)  La 
position  de  la  main  est  relative  à  celle  de  la  chose 


(1)  D'où  ;  en  latin  undé.  —  (2)  Serviteur,  domestique;  en  latin  servtens. 


AP 


—  29  — 


AP 


qu'on  saisit.  Ainsi,  «  apposer  sa  main  à  happer  des 
«  mouches,  »  c'étoit  disposer  sa  main,  se  disposer 
à  attraper  des  mouches. 

Mousches  à  las  viendrent  faire  repos 
Dedens  >ing  plat  quel  devant  lui  on  pose; 
A  les  happer  soudain  sa  main  appose. 

'^'^  Faifeu,  p.  87. 

On  sait  qu'une  inclination  trop  naturelle  à  l'homme 

Sour  le  mal,  est  une  disposition,  un  acheminement 
sa  perte,  lorsqu'il  n'est  pas  arrêté  par  cette  crainte 
salutaire  dont  on  a  désigné  l'effet,  en  disant  : 

Paours  ainsi  tout  son  tans  use 
Que  mors  le  truist  en  bon  estai; 
Que  ne  soit  par  péchié  mortal 
Sa  vie  à  maie  fin  apuse. 

Miserere  du  Uecl.  de  Moliens,  MB.  de  Gaignat,  fol.  2H ,  R"  col.  1 . 

CONJUG. 

Apiis,  part.  Posé,  disposé.  (Miserere  du  R.  de  M.) 
Quoiqu'on  n'ait  pas  sous  les  yeux  la  preuve  de 
l'infinitif  apuser,  variation  d'orthographe  du  verbe 
aposcr,  on  croit  pouvoir  former  cet  inliiiilif  d'après 
le  participe  apus,  abréviation  à'apusé.  L'omission 
de  Vé  final  dans  les  participes  apus  et  repus,  n'est 
pas  plus  extraordinaire  que  dans  apost  et  rcpost, 
participes  des  verbes  aposter  et  reposter,  dont  l'ori- 
gine semble  être  commune  aux  verbes  reposer  et 
aposer.  (Voy.  Apost  et  Aposter.)  11  n'y  auroit  donc 
entre  apus  et  apost  qu'une  différence  de  termi- 
naison; ce  qui  paroit  d'autant  plus  vraisemblable 
que  dans  le  Miserere  du  Recl.  de  Moliens,  ms.  de  N.  D. 
le  participe  féminin  reposte  est  synonyme  de  repuse 
dans  ce  même  Miserere,  ms.  de  Gaignat,  fol.  "i'il. 
On  ajoute  qn'apus  étant  le  participe  du  verbe  com- 
posé apuser,  aposer,  il  seroit  possible  que  dans  la 
préposition  depuis  et  la  conjonction  puisrjue,  le  mot 
/)h/s(1)  qu'anciennement  on  écrivoil7-»H('s,7;î(s,  fût  le 
participe  dont  on  auroit  formé  le  verbe  simple 
puser,  poser.  En  effet,  lorsqu'on  dit,  depuis  ce  lieu, 
depuis  ce  temps,  il  désigne  ce  temps,  ce  lieu,  dans 
une  position  plus  ou  moins  distante  d'un  autre 
temps,  d'un  autre  lieu.  Les  causes  d'après  lesquelles 
on  agit,  on  parle,  sont  vues  comme  étant  dans  une 
position  relative  aux  effets  qui  succèdent,  lorsqu'on 
dit:  puisque  vous  le  voulez,  j'agirai,  je  parlerai,  etc 
Il  semble  enfin  que  c'est  en  comparant  les  actions, 
les  paroles,  les  choses  dites  ou  faites  dans  un  certain 
ordre  successif,  à  des  choses  posées  les  unes  avant 
les  autres,  qu'on  ait  dit  avec  ellipse  d'un  nom  ou 
d'un  pronom:  faire  une  chose,  puis  une  autre,  dire 
une  chose,  puis  une  autre,  etc.  Cette  ellipse  une 
fois  méconnue,  l'on  n'a  plus  vu  qu'un  adverbe  dans 
le  participe  puis.  (Voy.  Depuis,  Puis  et  Puisqle.) 

VARIANTES  : 
APOSER.  Cotgrave  et  Oudin,  Dict. 

Apposer.  Orth.  subs.  —  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Apuser.  Miserere  du  Recl.  de  Moliens,  MS.  de  G.  fol.  211. 

Apost,  partie.  Apposé.  On  vient  de  remarquer, 
à  l'occasion  du  participe  apus,  qu'en  certains  par- 
ticipes Vé  final  étant  omis,  on  écrivoit  apost  pour 
aposté,  repost  pour  reposté,  etc.  Dans  le  premier 


sens,  le  participe  apost,  en  latin  appositus,  signifioit 
apposé. .  Deffandons  par  cet  présent  Escritde  nostre 
«  séel  et  de  l'aucthorité  de  nostre  réal  non  que  est 
«  dessouz  apost,  etc.  »  (La  Thaumassière,  Coût. 
d'Orléans,  p.  465;  tit.  de  11G8.) 

Les  faux  cheveux  et  autres  choses  postiches  que 
l'Art  ajoute  à  la  Nature,  pour  en  réparer  les  défauts, 
étoient  choses  apostes,  c'est-à-dire  apposées,  ajou- 
tées. (Voyez  Aposer.)  En  observant  que  ces  mêmes 
choses  sont  apposées,  ajoutées  pour  en  imposer,  on 
aperçoit  un  rapport  d'idées  accessoires  entre  la 
signification  de  ce  participe  du  verbe  aposter  et  celle 
d'imposer,  tromper. 

N'i  aura  chevel  mort,  ne  autre  chose  aposte. 
L'en  porra  tout  veoir  et  devant  et  en  coste  ; 


Car  n'i  aura  là  chose  celée  ne  reposte. 

Fahl.  MS.  du  R.  n"  7615,  T.  II,  fol.  143,  V*  col.  !. 

Apostate,  adj.  et  subst.  Qui  s'est  éloigné  d'un 
lieu.  Proprement,  qui  en  est  distant.  Celle  définition 
littérale  est  conforme  à  l'élymologie  d'apostate,  en 
grec  dnoazàzrjç.  Dans  un  sens  relatif  à  cette  même 
étymologie,  on  a  dit  en  parlant  des  courtisans  qui 
ne  s'éloignent  qu'avec  peine  de  la  Cour  : 

Pou  en  est  qui  de  Court  veulent  estre  apostate. 
Je  ne  m'en  merveil  pas  ;  car  chascun  les  y  flate, 
Ou  ilz  fiaient  autruy  pour  que  Ven  n'en  s'embale. 

J.  de  Meun,  Cod.  -vers  841-843. 

La  signification  de  ce  mot  apostat  ou  apostate, 
n'est  donc  odieuse  qu'autantqu'il  désigne  figurément 
un  homme  qui  s'est  éloigné  des  principes  de  la  Re- 
ligion et  de  l'honneur.  Anciennement,  on  flélrissoit 
le  malhonnête  homme,  l'homme  infidèle  à  ses 
sermens  et  traître  au  parti  dont  il  s'éloigne,  en  le 
nommant  apostat,  comme  on  nomme  encore  «  apos- 
«  tats,  ceux  qui  se  départent  et  desvoyent  du  tout 
«  de  la  Religion  Chrestienne,  ceux  qui  abondonnant 
«  l'Ordre  de  religion  duquel  ils  ont  faict  profession, 
«  se  rendent  fugitifs  de  leur  abbaye  ••  (Voy.  Bou- 
teiller,  Soin.  rur.  Liv.  Il,  tit.  xii,  p.  700.  —  Id.  ibid. 
Annot.  p.  76'2.  —  Nicot  et  Monet,  Dict.  —  Dict.  de 
Trévoux.) 

VARIANTES  : 
APOSTATE.  J.  de  Meun,  Cod.  vers  841. 
Apostat.  Orth.  subsist.  -  Bouleiller,  Som.  rur.  p.  760. 

Apostater,  verbe.  Apostasier.  C'est  relativement 
au  sens  littéral  d'a/jos/fl/c,  qu'on  a  dit  apostasier,  ou 
apostater  de  la  foi,  apostater  d'un  Ordre  religieux. 
(Monet,  Dict.  —  Voyez  Apostate.)  On  abrégeoit  en 
disant  tout  simplement  apostater,  parce  que  la  signi- 
fication de  ce  verbe  étoit  restreinte  à  la  désertion 
de  la  foi  et  du  cloître.  «  Les  Religieus  cloistiiers,.... 
«  s'ils  desvoient  du  grant  chemin  de  leur  obser- 
"  vance  régulière  et  prennent  les  sentiers  et  voies 
«  obliques. .  .  d'apostater,  trouvent  plusieurs  en- 
«  nemis  qui  sont. . .  ministres  de  la  chair,  ennemi 
«  mortel  de  tous  humains,  soient  religieus  ou 
«  autres.  »  (Triomphes  de  la  noble  Dame,  fol.  246. 
—  Voy.  Oudin  et  Nicot,  Dict.) 


(1)  Puis  vient  de  post  :  il  est  vrai  que  positum,  où  i  est  bref,  devenait  postum  ;  par  la  chute  de  la  terminaison,  il  est 
identique  à  post.  (n.  e.) 


AP 


3Ô 


AP 


Apostatiser,  verbe.  Apostasier.  (Oudin,  Dict. 

—  Voy.  Apostater  ci-dessus.) 

Aposte,  adverbe.  A  la  disposition,  à  propos,  à  la 
volonté,  etc.  11  semble  qu'on  se  soit  figuré  l'homme 
dans  une  position  de  corps  ou  d'esprit,  relative  Â 
celle  des  choses  dont  il  peut  ou  veut  disposer,  dont 
il  jouit  ou  se  propose  de  jouir,  lorsqu'on  a  dit  que 
ces  choses  étoient  ou  se  faisoient  à  sa  poste.  De  là, 
l'acception  de  l'adverbe  aposte,  composé  de  la  pré- 
position à  réunie  au  mot  poste.  On  ne  trouve 
l'expression  à  poste  réunie  en  ce  seul  mot  aposte 
que  dans  Monel,  Dict.  (Voy.  Postf,  ci-après.) 

Aposte,  partie.  Disposé.  Mis  hors  d'une  position 
ordinaire.  Il  est  possible  qu'on  ait  voulu  reprocher 
à  nos  anciens  historiens  François,  trop  de  dispo- 
sition à  natter  la  vanité  nationale,  lorsqu'en  parlant 
d'eux,  on  a  dit  qu'ils  étoient  «  apostés  de  flatterie 
«  et  de  vanité,  >■  peut-être  disposés  à  la  flatterie  et 
à  la  vanité.  Peut-être  aussi  vouloit-on  dire  figu- 
rément  qu'ils  étoient  apostés  par  la  vanité  et  la 
flatterie,  pour  trahir  la  vérité  historique?  «  Mal- 
«  veullance,  ...  ce  vice  par  trop  commun  aux 
«  Escrivains  de  la  nation  Gallicane,  faict  que  leurs 
«  histoires  sont  peu  receues,....  principalement  où 
«  ilz  traitlent  la  matière  de  leurs  adversaires  :  tant 
«  s'y  exhibent-ilz  apostez  de  flatterie  et  vanité.  » 
(Mém.  d'Ol.  de  la  Marche,  Avis  aux  Lecteurs,  p.  2. 

—  Voy.  Aposter  ci-dessous.) 

En  supposant  que  dans  aposte,  comme  dans 
aparllr,  partir,  se  départir,  l'a  initial  soit  de  même 
signification  que  la  préposition  latine  a  ou  ab,  ce 
même  participe  désignera  une  personne  ou  une 
chose  «  mise  hors  de  sa  position  ordinaire.  »  Si  l'on 
en  croit  Léon  Trippault,  (Celt-hell.  p.  'îl±)  c'est  le 
mot  grec  àn6»caToç,  en  latin  depositns,  rejecttts.  On 
ne  parle  de  cette  étymologie  qu'autant  qu'elle  nous 
rappelle  qu'en  Normandie  on  dit,  en  parlant  d'une 
personne  affectée  de  se  voir  «  hors  de  sa  position 
«  ordinaire,  »  qu'il  lui  fait  apos,  qu'il  lui  est  tout 
apos  :  expressions  dans  lesquelles  apos  sembleroit 
'être  une  altération  du  participe  apost ,  le  même 
qu'aposté  dont  on  supposera  initial  de  même  signi- 
fication que  la  préposition  latine  a  ou  ah.  (V.  Apost.) 

Aposteinent,  siibst.  masc.  Action  d'aposter. 
On  a  dit  que  «  le  Capitaine  Bernardo,  bon  Capitaine 
«  et  bon  François,  avoil  été  tué  d'un  coup  de  pis- 
«  tolet  à  Paris,  par  Vapostement  et  pourchas  du 
«  Duc  Cosme  de  Florence.  »  (Brantôme,  Cap.  Fr. 
T.  IV,  p.  39.  —  Voy.  Aposter  ci-dessous.) 

Aposter,  verbe.  Poster.  On  croit  que  l'origine 
du  verbe  aposter  est  commune  au  verbe  aposer,  et 
que  l'un  et  l'autre  sont  formés  de  l'ancien  participe 
apost,  en  latin  apposittis.  11  est  probable  qn'apost 
étant  prononcé  comme  nous  prononçons  dépost, 
sitppost,  l'on  aura,  sans  égard  à  l'étymologie,  sup- 
primé le  t,  en  écrivant  apos;  A' où  aposer,  verbe  de 


même  origine  qu'aposter.  (Voy.  Aposer.)  La  signi- 
fication d'aposter  est  aussi  la  même  que  celle 
à' aposer;  mais  dans  le  sens  de  poser  ou  poster 
quelqu'un  en  un  lieu,  en  un  passage,  la  préposition 
initiale  du  verbe  aposter  désignoit  et  désigne  encore 
une  position  relative  à  de  mauvaises  fins,  comme 
dans  ces  expressions:  «  aposter  un  assassin  à  un 
"  passage,  aposter  des  gens  pour  faire  une  insulte, 
«  etc.  »  (Nicot  et  Monet,  Dict.  —  Voy.  Aposte.) 

VARIANTES  : 
APOSTER.  Nicot,  Dict. 
Apposter.  Nicot  et  Monet,  Dict. 

Apostil,  subst.  masc.  Apostille.  (Cotgrave  Dict. 
—  Voy.  Apostille  ci-dessous.) 

Apostille,  subst.  fém.  Disposition.  On  croit  voir 
forigine  de  ce  substantif  dans  le  participe  a;;os^  (1), 
apposé,  ajouté;  signification  à  laquelle  est  relative 
celle  de  notre  mot  apostille,  écrit  apostile  ou  appos- 
tile  dans  Cotgr.  Dict.  (V.  Apostil,  Postil  et  Postille.) 
Il  semble  que  ce  même  mot  apostille,  pris  dans  un 
sens  différent,  et  pourtant  analogue  à  celui  dans 
lequel  on  l'emploie  encore,  ait  signifié  certaines 
dispositions  relatives  au  succès  d'une  affaire. 

....  Le  chasteau  de  Cremonne 
Estoit  le  plus  fort  des  Italles, 
Imprenable  à  toute  personne... 
En  celluy  temps  aulcun  noble  homme 
De  Cremonne  la  bonne  ville, 
Avec  une  Dame  qu'on  nomme 
Au  pays  ma  Dosne  Camille, 
Firent  si  bien  leur  apostille, 
Que  sans  faire  aulcun  desarroy 
Le  chasteau  fut  rendu  au  Roy. 
Ainsi  concludz  qu'en  c'este  affaire 
Femme  a  sceu  plus  que  force  faire. 

J.  Marot,  p.  U9. 

VARIANTES  : 
APOSTILLE.  Orth.  subsist.  -  J.  Marot,  p.  149. 
Apostile,  Appostile.  Cotgrave,  Dict. 

Apostiller,  verbe.  Disposer.  On  connoit  l'origine 
de  l'acception  encore  usitée  de  notre  verbe  apos- 
tiller, qu'on  écrivoit  apostileron  appostiler.  (Cotgr. 
Dict.)  Il  n'a  peut-être  signifié  disposer,  que  par  un 
effet  de  cette  singularité  d'expression  qu'affectoient 
nos  Poètes  du  xv'et  du  xvi'  siècle.  Quoi  qu'il  en  soit, 
il  semble  que  le  poète  Crétin  ait  désigné  la  France 
se  disposant  à  continuer  une  guerre  destructive  et 
ruineuse  dans  le  Milanois,  lorsqu'il  a  dit  : 

Milan  mauldict. 
En  faict  et  dit 
As  foy  perverse... 
Soubz  ton  faulx  stille, 
France  distille 
Somme  d'argentz  ; 
Et  aposlille 
Manière  hostille 
De  perdre  gens. 

Crétin,  p.  tK. 

VARIANTES    ". 
APOSTILLER.  Orth.  subsist.  -  Crétin,  p.  122. 
Apostiler,  Appostiler.  Cotgrave,  Dict. 


(1)  Ce  sont  des  annotations;  Du  Gange  propose  deux  étymologies  :  1»  Post  illa  varha,  mots  par  lesquels  on  annonçait  la 
place  d'une  explication  à  mettre  en  marge;  2»  Posta,  poste;  postille  en  serait  le  diminutif  avec  le  sens  de  manchette, 
position.  (N.  E.) 


AP 


—  31  - 


AP 


Apostis,  subst.  pluriel.  Terme  de  marine.  Les 
apostis  d'une  galère  sont  deux  longues  pièces  de 
bois  (i)  sur  lesquelles  on  pose  les  rames  de  la 
chiourme.  (Oudin,  Dict.) 

Il  desrobe  le  mats,  la  poupe  et  le  fanon; 
Raze  voiles  et  bancs,  bancades  et  antenes, 
Aposlis  et  fougons  jusques  à  la  carène. 

Bergeries  de  R.  Belleau,  T.  I,  fol.  125. 

Apostoire,  subst.  mnsc.  etadj.  Apôlre.  Evêque, 
Pape.  Apostolique.  On  observera  que  par  le  chan- 
gement de  /  en  r,  on  a  écrit  Apostoire  pour  Apostoile. 
Peut-être  que  Saint  Sonplice  V Apostoire  étoit  du 
nombre  de  ceux  qu'on  appelle  Apôtres,  parce  qu'ils 
ont  les  premiers  annoncé  l'Evangile  en  quelque  pays. 

De  Saint  Souplice  V  Apostoire, 
Laquelle  ame  ait  repos  en  gloire, 
Ert  Waluam  nouvelement  venus. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  75,  V  col.  1. 

Anciennement  on  désignoit  le  Pape,  l'Evéque  de 
Rome ,  en  l'appelant  Apostoile  ou  Apostoire  de 
Home.  (Voy.  Apostole  ci-dessous.) 

Ce  est  la  som 
De  par  Y  Apostoire  de  Rom, 
Qui  grant  pert  de  prévilége  don. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'  7218,  fol.  191,  R-  col.  1. 

Le  substantif  Apostoire  semble  comme  adjectif 
avoir  signifié  apostolique.  ><  Ils  s'en  obligèrent  es 
«  mains  de  deux  Notaires  apostoires,  voulans  et 
«  accordans  estre  incontinent  excommuniez  se  par 
«  eulx  etc.  »  (Chron.  scandai,  de  Louis  XL  p.  3i.  — 
Voy.  ArosTûLic  ci-dessous.) 

Apostole  (2),  sî(bst.  musc.  Qui  a  une  mission, 
Envoyé.  Apôtre,  l'Apôtre  S"  Paul.  Evêque,  Pape. 
Lettres  d'appel.  On  sait  que  du  mot  grec  dniazoXnç, 
en  latin  apostolits,  s'est  formé  le  fiançois  apostoles 
ou  apostole  qu'on  écrivoit  apostoile,  par  le  chan- 
gement du  second  o  en  la  diphthongue  oi  dont  la 
prononciation  vicieuse  a  probablement  occasionné 
les  orthographes  apostèle  et  apo telle.  C'est  par  l'effet 
d'une  prononciation  très-sourde  que  ce  même  o, 
transformé  en  oi  et  en  e  dans  apostèle  et  apostoile, 
disparoit  dans  apostle.  L'orthographe  apostel  est  la 
preuve  d'une  transposition  de  ïe  final,  très-usitée 
autrefois  dans  les  mots  terminés,  comme  apostle, 
apostre,  etc.  11  faudroit  ignorer  que  dans  les  prin- 
cipes du  mécanisme  du  langage,  le  changement  de 
l  en  r  et  de  r  en  /  est  réciproque,  pour  ne  pas 
reconnoitre  dans  apostoil,  apostoile  et  apostle,  l'ori- 
gine des  orthographes  apostoir,  apostoire  et  apostre. 
(Voy.  Apostoire  ci-dessus.) 

Dans  le  sens  étymologique,  un  Apostre  est  celui 
qui  a  une  mission,  un  Envoyé.  Ainsi  les  Juifs  nom- 
moient  Apostres,  certains  Officiers  qu'ils  envoyoient 
dans  les  provinces,  avec  commission  de  veiller  à 
l'observation  de  la  Loi,  et  de  recevoir  les  deniers 
destinés,  soit  à  la  réparation  du  Temple,  soit  au 
payement  du  tribut  qu'ils  dévoient  aux  Empereurs. 
Les  Apostres,  les  Envoyés  des  synagogues  furent 


les  modèles  de  ceux  à  qui  les  Eglises  donnoient 
commission  de  secourir  les  Fidèles  et  d'adoucir 
leur  misère  par  des  charités  proportionnées  ù  leurs 
besoins.  En  disant  que  les  uns  et  les  autres  étoient 
les  Apostres  de  l'humanité,  on  ne  croit  pas  profaner 
un  mot  spécialement  consacré  à  désigner  les  Apos- 
tres du  ChrisUanisme.  Les  Apostres  par  excellence 
sont  les  douze  Disciples  qui  reçurent  de  Jésus- 
Christ  même  leur  mission ,  pour  annoncer  son 
Evangile  aux  nations.  S'  Paul,  à  qui  l'on  contesta 
cette  mission  divine,  répondit  qu'il  étoiL  Apostre; 
non  de  la  part  des  hommes,  ni  par  aucun  homme; 
mais  par  Jésus-Christ  et  Dieu  son  père.  Enfin,  ce 
nomd'Apostre,  qui  lui  éloit  commun  avec  les  douze 
premiers  Disciples,  lui  est  devenu  si  particulier  que 
par  antonomase,  l'Apostre  a  signifié  et  signifie 
encore  Saint  Paul,  l'Apostre  des  Gentils. 

Cant  j'oi  de  V Apostle  parler, 

Lor  sai  bien  que  ce  est  Sains  Polz 

Ki  les  bons  cuers  met  à  repoz. 

Fabl.  MS.  dj  Turin,  fol.  4,  R"  col.  2. 

On  est  sans  doute  scandalisé  de  voir  Pantagruel 
étant  avec  dix  ou  douze  compagnons  de  ses  exploits 
burlesques,  comparé  à  Jésus-Christ  au  milieu  de  ses 
Apôtres.  ■>  Laissons  ici  Pantagruel  avecq  ses  Apos- 
«  /o/£'s,  et  parlons  du  RoyAnarcbe  et  de  son  armée  » 
(Rabelais,  T.  II,  page  232.)  Peut-être  a-t-on  voulu 
accoutumer  le  Peuple  Vénitien  à  une  sorte  de  respect 
religieux  pour  la  Noblesse,  lorsque  par  un  autre 
abus  du  mot  Apostre,  une  classe  de  Nobles  a  été 
nommée  les  douze  Apostres,  et  une  autre  classe  les 
quatre  Evangelistesr  Une  imagination  qui  n'est  pas 
moins  extraordinaire,  c'est  d'avoir  donné  ù  douze 
canons  le  nom  des  douze  Apostres.  Henri  VIll,  roi 
d'Angleterre,  allant  de  Calais  à  Thérouanne,  pour 
en  presser  le  siège,  fut  poursuivi  par  le  Chevalier 
Bayard  qui  lui  enleva  une  pièce  d'artillerie,  dite 
Sainct-Jean.  ■■  Et  en  avoit  le  Roy  d'Angleterre  encore 
«  onze  autres  de  ceste  façon,  et  les  appelloit  ses 
«  tlouz-e  Apostres.  »  (Hist.  du  Ch"  Bayard,  p.  345.) 
Les  Espagnols,  dit  le  P.  Daniel,  (Mil.  Fr.  T.  I,  p.  445.) 
donnoient  quelquefois  par  dévotion  des  noms  de 
Saints  aux  canons,  témoins  les  douze  Apostres  que 
l'Empereur  Charles-Quint  fit  faire  à  Malaga  pour 
son  expédition  de  Tunis.  Il  sembleroit,  d'après  de 
pareilles  comparaisons,  que  détruire  les  hommes 
ou  les  convertir,  c'est  une  même  chose.  Cette  idée, 
toute  fausse  qu'elle  est,  a  dû  paroitre  vraie  aux 
Américains  convertis  par  les  Espagnols. 

Quoique  les  anciens  monumens  de  l'histoire 
attestent  que  le  nom  d' Apostole  fut  dans  la  primitive 
Eglise,  commun  à  tous  les  Evêques,  successeurs  des 
Apostres,  on  l'a  spécialement  affecté  au  successeur 
de  l'Apôtre  S'  Pierre,  c'est-à-dire  au  Pape  nommé 
autrefois  VApostole  de  Rome,  et  tout  simplement 
Y  Apostole.  (Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis,  au 
mot  Apostoiles.  —  Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose,  sup. 
p.  110  et  111.)  «  Al  tens  Innocent  III,  Apostoille  de 


(1)  On  le  voit,  ces  pièces  de  bois  forment  bastingage.  (N.  e.)  -  (2)  Il  est  curieux  qn'apostolus  soit  apostole  quand  il 
signifie  pape,  et  apostle,  apostre,  quand  il  se  rapporte  aux  compagnons  de  Jésus-Chrisl.  Ce  dernier  cas  est  la  règle: 
epist{o)la  donne  épistre,  capit{u)lum,  chapitre.  (N.  E.) 


AP 


-  82  — 


AP 


«  Rome,  etc.  »  (Villehard,  p.  4.  —  Voy.  Fabl.  ms.  du 
R.  n"  7G15,  T.  II,  fol.  1  i".  -  Fabl.  ms.  du  R.  n°  T2\8, 
f»  324.  —  Lanc.  du  Lac,  T.  1,  f°  13G,  etc.)  «  Gerberz, 
«  grant  Clercs  et  Philosophes. . .  esleus  à  l'arce- 
«  veschie  deRavane...  tint  l'archeveschie  jusques 
"  à  tant  que  li  Apostres  morut.  Lors  requist  li  poples 
•  de  Home  que  il  leur  fust  donez ,  et  ensi  fu 
«  Aposlres.  "  (Chron.  S"  Denys,  Rec.  des  Ilist.  de  Fr. 
T.  X,  p.  304.)  «  Se  plet  est  devant  le  Doien,  l'en  puet 
«  appeller  à  TEvesque,  et  de  l'Evesque  à  l'Arche- 
«  vesque,  et  de  l'Arciievesque  à  YApostoile.  Mes  du 
«  Juge  envoie  de  par  l'Apostoile,  etc.  »  (Beaumanoir, 
Coût,  de  Beauvoisis,  p.  22.) 

Gentil  Roys,  je  l'ose  bien  dire, 
Que  ceux  du  Réaume  et  de  l'Empire, 
Ce  sunt  Roys  et  Enipereours, 
Plus  de  honours  et  de  biens  maours 
Ont  à  Sainte  Eglise  donné 
Qu'onques  n'ont  fait  Clerc  couronné. 
Abbé,  Prélat  et  Apotelle. 
Géofroi  do  Paris,  à  la  suite  du  Rora.  de  Fauvcl,  MS.  du  R.  n'  6812,  fol.  50. 

C'est  avec  une  allusion  peu  respectueuse  pour 
l'Apostre,  (lu'un  de  nos  anciens  Poètes  a  feint  qu'un 
Roi  de  France,  nommé  Philippe,  prononçant  en 
gourmet  sur  l'excellence  des  vins,  avoit  nommé 
Apostole,  c'est-à-dire  Pape,  celui  dont  la  qualité  lui 
sembloit  n'admettre  aucune  comparaison  avec  celle 
des  autres  vins. 

Li  Rois  les  bons  vins  corona, 

Et  à  chascun  son  nom  dona. 

Vin  de  Cipre  fist  Apostoile, 

Qui  resplendis!  comme  une  estoile  ; 

Dont  fist  Chardonal  et  Légat 

Du  bon  gentil  vin  d'.\quilat. 

FaW.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  232,  V'  col.  1. 

On  conçoit  à  peine  comment  des  Chrétiens,  qui 
dans  les  siècles  d'ignorance  s'opiniàtroient  à  ne 
vouloir  pas  distinguer  le  Mahométisme  du  Paga- 
nisme, aient  osé  assimiler  au  successeur  de  S"  Pierre, 
à  leur  Apostole,  un  Calife  des  Sari'asins,  le  succes- 
seur du  faux  prophète  Mahomet  qu'ils  atfectoient  de 
confondre  avec  le  faux  dieu  Apollin.  «  Li  Soutans... 
«  manda  al  Calife  de  Baudas,  qui  Apostolcs  est  des 
«  Sarrasins... qu'il  fesistansi  prechierparPaienime, 
«  com  !i  Apostoles  des  Cresliens  faisoit  par  Cres- 
«  tienté,'  et  si  le  secorust.  »  (Chron.  d'Outremer,  ms. 
de  Berne,  n"  113,  fol.  IGI,  R"  col.  2.  —  Martène, 
Contin.  de  G.  de  Tyr,  T.  V,  col.  685.) 

On  a  sans  doute  eu  raison  de  réclamer  contre 
l'abus  de  ces  appels  qui,  en  étendant  la  juridiction 
des  Papes,  bornoient  trop  celle  des  Evéques,  et 
l'auroient  anéantie,  si  l'on  avoit  moins  insisté  sur 
la  nécessité  des  Lettres  d'appel,  nommées  Apostoli 
en  latin,  en  françois  Apostoles  ou  Apostres.  Par  ces 
Lettres,  qu'on  appeloit  aussi  Lettres  dimissoires  ou 
Lettres  de  renvoi,  le  Juge  à  quo  certifioit  de  l'appel 
interjeté,  et  renvoyoit  la  connoissance  de  l'affaire  au 
Juge  devant  le  tribunal  de  qui  l'appelant  demandoit 
qu'elle  fût  portée.  On  ne  pouvoit  être  admis  îi  pour- 
suivre cet  appel  sans  Apostres,  qui  dans  les  causes 
ecclésiastiques  étoient  expédiés  par  l'Evèque,  par 
son  Officiai,  et  par  le  Chapitre  de  la  cathédrale 
durant  la  vacance  du  Siège.  (Voy.  Du  Cange,  Gloss. 
lai.  T.  I,  col.  506.  —  Nouv.  Traité  de  Diplom.  T.  I, 


page  253.  —  Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.  —  Cotgrave  et 
Borel,  Dict.)  <i  Plusieurs  fois  avoient  été  devers  ledit 
«  Evéque  h  S.  Mor  des  Fossez  porter  et  intimiter 
«  certaine  appellation  faite  par  mondit  Seigneur 
"  de  Bourgogne,  ses  Vicaires  et  Officiers,  pour 
«  requérir  et  obtenir  les  Apostres  nécessaires  à 
«  ladite  appellation.  »  (Etat  des  Officiers  des  D.  de 
Bourgogne,  p.  107.  —  Félibien,  Hist.  de  la  ville  de 
Paris,  T.  III,  pr.  page  404,  col.  1  ;  Ut.  de  1381.  — 
Rabelais,  T.  III,  p.  210,  etc.)  Les  Apostres  refutatoires 
avoient  lieu  lorsque  le  Juge  dont  on  appeloit,  ne 
vouloit  pas  déférer  à  un  appel  qui  lui  paroissoit 
frivole  et  illusoire.  »  Le  Pape  en  faveur  du  Roy  de 
«  Sicile,  ordonna  un  dixiesme....  Les  Gens  d'Eglise 
«  s'y  opposèrent  et  l'Université,  et  appellèrent  des 
«  Commissaires  ordonnez,  et  eurent  Apostres  refii- 
•  tatoires.  Mais  il  leur  fut  dit  pleinement  que 
0  nonobstant  leurs  appellations  et  oppositions,  ils 
«  le  payeroient.  »  (Juvenal  des  Ursins,  Hist.  de 
Charles  VI,  p.  94.  —  Voyez  Dict.  de  Trévoux,  T.  I, 
col.  480.)  ^'on-seulement  les  Lettres  données  sur 
appels  interjetés  de  l'Evèque  au  Métropolitain,  du 
Métropolitain  au  Pape,  du  Pape  au  Concile,  mais 
encoi  e  celles  où  il  s'agissoit  d'appels  au  Roi,  à  un 
Juge  séculier,  ont  été  nommées  Apostoles  ou  Apos- 
tres. (Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  566  et  567. 

—  Nouv.  Traité  de  Diplom.  T.  I,  page  253  et  254.) 
Enfin,  l'usage  de  ces  Lettres  a  été  aboli.  «  On  n'use 
»  plus,  même  en  Cour  d'Eglise,  à' Apostres,  ou 
«  Lettres  de  renvoi  que  l'appellant  devoit  obtenir 
«  du  Juge  à  quo.  Mais  l'appel  s'interjette  par  un 
«  acte  et  se  relève  par  requête  ou  par  commission 
«  du  Métropolitain.  »  (Fleury,  Institut,  au  Dr.  Eccl. 
T.  II,  page  218.) 

VARIANTES  : 
APOSTOLE.  Martene,  Contin,  de  G.  de  Tyr,  T.  V,  col.  635. 

-  Chrou.  S'  Denys,  T.  X,  page  304.  -  Ane.  Poët.  Fr.  T.  IV, 
p.  1312.  -  Anseis,  fol.  .51.  -  Lanc.  du  Lac,  T.  I,  fol.  136. 

Apostel.  Le  Carpentier,  H.  de  Cambray,  T.  II,  pr.  p.  29. 

Apostele.  Très,  des  Chartes,  Reg.  xxii,  pièce  10. 

Apostle.  S'  Bern.  Serm.  fr.  —  Rymer,  T.  I,  p.  13.  —  Fabl. 
MS.  de  Turin,  fol.  4,  R»  col.  2.  -  Ph.  Mouskes,  .MS.  p.  130. 

Apostoil.  'Très,  des  Chartes,  Inv.  de  P.  d'Etampes,  pièce  2. 

Apostoile.  Ane.  Poët.  Fr.  T.  IV,  p.  1341.  -  G.  Guiart,  MS. 
fol.  107.  -  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  175,  V»  col.  2,  etc. 

Apostoille,  Ane.  Poët.  Fr.  T.  IV,  p.  165.  —  Villehard,  p.  1. 

Apostoir.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  191,  V»  col.  1. 

Apostoles.  Chron.  S' Denvs,  T.  III,  p.  314.  —  Dits  et  Moral, 
fol.  286.  -  Fabl.  MS.  du  R.  ii°  7615,  T.  I,  fol.  65,  V"  col.  2. 

Apostre.  Hist.  de  Fr.  à  la  s.  du  Rom.  de  Fauvel,  fol.  82.  — 
Eust.  Desch.  p.  485.  —  Hist.  du  Ch'^  Bavard,  p.  345,  etc. 

Apostres.  Chron.  S'  Denys,  T.  X,  p.  304  et  306. 

Apotelle.  Geofroi  de  P.  à  la  s.  du  Rom.  de  Fauvel,  fol.  48. 

Apoustre.  Joinville,  p.  383. 

Apoutre.  D.  Morice,  preuv.  de  l'Hist.  de  Bret.  T.  I,  c.  981. 

Appostre.  Félibien,  Hist.  de  la  Ville  de  Paris,  T.  III,  pr. 
p.  404.  —  Mém.  de  Rob.  de  la  Marck,  p.  197. 

Apostolic,  adject.  et  subst.  Qui  a  rapport  aux 
Apôtres.  Pape,  Successeur  des  Apôtres.  Dans  le 
premier  sens,  on  a  nommé  souliers  à  Vapostolique, 
des  souliers  tels  qu'en  portoient  encore  les  Cor- 
delieis  du  xvr  siècle,  «  des  souliers  traversés  de 
«  plusieurscourroies  qui  tenoient  lieu  d'empeigne,  • 
et  dont  la  forme  avoit  rapport  à  la  chaussure  avec 
laquelle  les  Peintres  ont  représenté  les  Apôtres. 

Les  Evêques  de  la  primitive  Eglise,  comme  suc- 


AP 


—  33  — 


AP 


cesseurs  des  Apôtres,  s"appeloient  Apostolics  ou 
Apostoliques.  C'est  par  ellipse  qu'Apostolic,  en  latin 
Apostolicus ,  pris  substantivement ,  désignoit  un 
Evèque,  un  successeur  des  Apôtres  en  général,  en 
particulier  le  Pape,  le  successeur  de  S"  Pierre.  {Voy. 
Du  Gange,  Gl.  1.  T.  I,  col.  568.  —  Dict.  de  Trévoux.) 

Li  Apostoles  Innocens 
Fu  mors  adonques  à  cel  tans  ; 
AposloHc  fisent  d'Onorie, 
Par  eslection  et  glorie. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  61i. 

VARIANTES  : 
APOSTOLIC.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  614. 
Apostolique.  Le  Duchat,  sur  Rabelais,  T.  IV^  p.  58. 

Apostoliscr,  verhe.  Imiter  les  Apôtres,  affecter 
de  leur  ressembler.  (Voy.  Cotgrave  et  Oudin,  Dicl.) 
On  a  prétendu  que  «  si  l'Aulheur  des  Jésuites  eust 
«  esté  tant  soit  peu  nourry  en  l'ancienneté  de  nostre 
«  Religion,  il  eust  trouvé  que  ce  n'estoit  pas  apos- 
«  toliscr,  mais  bien  apostatiser,  que  luy  Religieux 
»  voulust  comme  les  Apostres  administrer  les  saints 
«  Sacremens,  mesme  au  milieu  des  villes,  revestu 
«  d'un  babiilement  qui  n'a  rien  de  commun  avec  les 
«  Moines.  »  (Pasquier,  Rech.  liv.  III,  p.  304.) 

VARIANTES  ; 
APOSTOLISER.  Oudin,  Dict. 
Apostolizer.  Cotgrave,  Dict. 

Apostolité,  subst.  fém.  Apostolat;  Papauté. 
(Voyez  Rom.  de  Brut,  fol.  55.  —  Ph.  Mouskes,  ms. 
p.  843.)  On  sait  que  l'Empereur  Henri  IV,  fit  déposer 
le  Pape  Grégoire  VII  dans  un  concile  : 

Desposa  le  pape  Grigorie  ; 
Ce  nos  raconte  li  estore. 
Par  oquoisson  le  mist  en  trape 
Pour  cou  que  Grigore  cil  Pappe 
De  son  avoir  ot  acaté 
Le  don  de  V Apostolité, 
Trois  mile  livres  de  deniers. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  451. 

Apostume,  subst.  viasc.  (1)  Aposlôme.  En  grec 
à7xiai)],ua.  11  Semble  que  conformément  à  l'étymo- 
logie,  on  auroit  dû  toujours  écrire  aposlcmc  ; 
oi'thographe  très-ancienne  dans  notre  langue,  et 
adoptée  par  quelques  Auteurs,  quoique  de  leur 
temps  elle  fût  moins  usitée  que  celle  à'apostume. 
(Voy.  Psautier,  ms.  du  R.  n-  7837,  fol.  192,  R"  col.  I. 
—  Essais  de  Montaigne,  T.  I,  page  34ï>.  —  Nuits  de 
Straparole,  T.  I,  page  219  et  352.  —  JNicot,  Dict.)  On 
avoit  sans  doute  moins  égard  à  l'étymologie  qu'à  la 
terminaison  du  mot  apostume,  lorsqu'on  le  faisoit 
du  genre  féminin.  «  L'an  mille  cinq  cens  trente- 
«  huict,  le  Roy  estant  à  Compiegne  tomba  malade 
«  d'une  apostume....  dont  il  fut  en  grand  danger 
«  de  mort.  »  (Du  Bellay,  Mém.  liv.  vin,  fol.  270.  — 
Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict.  —  Dict.  de 
Trévoux.)  La  comparaison  de  l'effet  d'un  deuil  ou 
cbagrin  intérieur,  à  celui  d'une  apostume  dans 
l'estomac,  paroitroit  aujourd'hui  fort  dégoûtante. 
Gectoit  sangloux,  gémissemens  parfonds. 
Et  gros  souspirs,  comme  s'il  eust  au  fonds 


De  l'estomach  venimeuse  apostume. 
D'extrême  dueil  et  doulente  amertume. 

Crétin,  p.  1U.  —  Id.  52. 

VARIANTES  : 

APOSTUME.  Crétin,  p.  52.  -  Du  Bellay,  Mém.  liv.  x,  f'SSO. 
—  Cotgrave,  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict.  —  Dict. 
de  Trévoux. 

Aposthème.  Oudin,  Cur.  Fr.  —  Dict.  de  Trévoux. 

Apotume.  Dit  de  Jehans  li  Rigolez,  fol.  150,  R"  col.  2. 

Apostume ,  participe.  Qui  a  un  apostème. 
Proprement  formé  en  apostème.  (Voy.  Apostumer.) 
De  là,  on  a  dit  en  parlant  d'une  personne  ayant  un 
apostème  dans  la  tète,  dont  une  blessure  à  la  tête 
s'éloil  formée  en  apostème,  que  sa  teste  étoit  apos- 
tumée.  (Voy.  Froissart,  Vol.  III,  p.  -354.) 

Apostumer,  verbe.  Se  former  en  apostème,  se 
tourner  en  abcès,  s'ulcérer.  Il  paroitroit  raisonnable 
qu'ayant  réformé  l'orthographe  du  substantif  fl;;os- 
tume,  on  réformât  celle  du  verbe  apostumer,  et 
qu'on  écrivit  apostémer,  comme  l'on  écrit  apostème. 
Un  abcès  est  un  apostème  ouvert.  De  là,  le  verbe 
apostumer  a  non-seulement  signifié  se  former  en 
apostème,  mais  se  tourner  en  abcès,  rendre  du  pus, 
s'ulcérer.  (Voy.  Monet,  Dict.) 

Tu  le  sçais  bien,  France  :  mais  je  n'essaye 
Icy  pourtant  de  refraischir  la  playe 
Qui  tousjours  saigne  et  qui  ne  guarit  or, 
Et  qui  pourroit  apostumer  encor,  etc. 

Bergeries  de  R.  Belleau,  T.  I,  fol.  105.  R'. 

On  préfère  aujourd'hui  l'usage  du  verbe  s'ulcérer 
à  celui  à'apostumer.  Mais  on  ne  trouvera  point 
dans  la  nature  la  raison  de  cette  préférence,  puisque 
l'idée  d'ulcère  n'est  pas  moins  révoltante  que  celle 
d'apostU7ne.  (Voy.  Apostume  ci-dessus.) 

VARIANTES  : 

APOSTUMER.  Orth.  subsist.  -  Bergeries  de  R.  Belleau, 
T.  I,  p.  105.  -  Fouilloux,  Faucon,  fol.  40  et  79.  -  Cotgrave, 
Oudin,  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict. 

Apostemer.  Cotgrave  et  Oudin,  Dict. 

Aposthemer.  Oudin,  Dict. 

Aposume,  subs.  maso.  Apozème.  L'orthographe 
apozème,  qui  se  trouve  dans  Cotgrave  et  Monet, 
Dict.  est  conforme  à  l'origine  de  ce  mot  dérivé  du 
grec  dnouù),  en  latin  defervesco.  L'humanité  a  des 
obligations  si  réelles  à  la  Chirurgie,  qu'on  s'étonne 
aujourd'hui  que  la  Médecine  lui  ait  interdit  en  1507, 
le  droit  d'ordonner  des  aposumes  et  des  clystères. 
;Voy.  Pasquier,  Rech.  liv.  ix,  p.  825  et  828  ) 

VARIANTES  : 
APOSUME.  Pasquier,  Lett.  T.  II.  p.  551  et  556. 
Aposème.  Monet,  Dict.  —  Dict.  de  Trévoux. 
Apozime.  Cotgrave  et  Nicot,  Dict. 

Apothecairaisse,  subst.  fém..  et  adj.  Femme 
d'Apothicaire.  Qui  est  fait  par  l'Apothicaire,  qui  est 
relatif  à  l'état  d'Apothicaire.  Ce  mot  encore  usité 
dans  les  couvens,  pour  désigner  comme  substantif, 
la  Religieuse  qui  a  soin  de  l'apothicairerie,  a  signifié 
femme  d'Apothicaire.  (Dicl.  de  Trévoux.)  «  Que 
«  dira-on  de  VApotiqiiaresse?  Elle  contrefaict  si  bien 
«  la  belle,  qu'il  luy  semble  bien  qu'ouy.  »  (Caquets 


(1)  Dès  le  Roman  de  la  Rose,  le  mot  est  féminin  ;  Furetiére  et  Richelet  lui  donnent  ce  genre  :  l'Académie  (pourquoi?)  l'a 
fait  masculin,  (n.  e.) 

n.  5 


AP 


34  — 


AP 


de  l'AcoviclK^e,  p.  74.)  11  cloit  adjectif,  lorsque  dans 
le  second  sens  on  disoit  médecine  (ipotliccairaisse 
ou  (ipoticirirc'sse,  etc.  (Epilli.  de  M.  de  la  Porte.  — 
Cotgnive,  Dict.  —  Voy.  Apotiiecaire  ci-dessous.) 

VAHIANTES  : 
APOTHECAIRAISSE.  Cotgrave,  Dict. 
Apothicairesse,  APOTiiicAiiESSE.  Dict.  de  Trévoux. 
APOTiCAHtESSE.  Epilli.  de  M.  de  la  Porte,  p.  250. 
Apotiquaresse.  Caquets  de  l'Acouchée,  p.  74. 

Apotiiecaire,  subsl.masc.  Apothicaire.  Lemot 
grec  iino»i^xij,  origine  du  Irançois  apotiiecaire  qu"au- 
jourd'liui  l'on  écrit  apothicaire,  sigiiilie  assez  géné- 
ralement un  lieu  où  sont  déposées  les  choses  qu'on 
veut  vendre  ou  conserver,  un  magasin,  une  bou- 
tique, etc.  \\.  Ai'ûTiiEycE.)  Ainsi  tout  homme  tenant 
bouli(iue  ou  magasin,  pouvoit  cire  nommé  Apotiie- 
caire. On  trouve  la  preuve  de  celte  acception 
générale,  dans  le  Ciloss.  lat.  de  Uu  Gange,  au  mot 
Apotliecarii.  Mais  en  Irançois,  le  mol  A})otliecuire 
a  signilié  par  excellence  celui  qui  tient  boutique  de 
drogues;  boutique  où  l'ordre  dans  lequel  on  pose 
les  drogues  médicinales,  est  si  nécessaire  pour 
éviter  les  quiproquo  qui  ont  donné  lieu  à  ce  pro- 
verbe :  «  Dieu  nous  guarde  de  qui-pro-quo  d'Apo- 
«  thicquaires!  »  (Apol.  pour  Hérodote,  page  45.)  Le 
danger  de  ces  quiproquo  d'ApolItecaires  èloit  sans 
doute  bien  plus  à  craindre  qu'il  ne  l'est  aujourd'hui, 
lorsque  Pasquier  regieltoit  «  l'ancienneté  qui  faisoit 
«  marcher  sous  une  mesme  cadence  Testât  de  Me- 
«  decin.  Chirurgien  et  d'Apolicaire.  »  Il  croyoilque 
l'Apothicaire  étant  \' adopérateur  du  Médecin,  on 
éloit  d'autant  moins  assuré  de  sa  guérison,  que 
«  l'exéquution  de  l'ordonnance  du  Médecin  des- 
«  pendoit  de  la  miséricorde  d'un  maistre  Apoti- 
«  caire;...  ains  le  plus  souvent  d'un  vallet  auquel 
«  il  n'y  avoit  ny  science  ny  conscience.  »  (Voyez 
Pasquier,  Lett.  T.  Il,  p.  551  et  552.) 

VAIllANTES    : 
APOTHECAIP.E.  Rabelais,  T.  I,  Prolog,  p.  41.  -  Id.  T.  IV, 
p.  286.  -  Cotgrave,  Dict. 
ApoTHicQUAinE.  Apol.  pour  Hérodote,  p.  45. 
Apoticaire.  Dialûg.  de  Tahureau,  fol.  oO,  V». 
Apoticquaire.  Oudin,  Cur.  fr. 

Apotikaire.  Hist.  de  Job,  en  vers,  MS.  de  Gaignat,  f»  169. 
Apotiquaire.  Monel,  Dict. 
Appoticaire.  Poës.  de  Charles,  D.  d'Orléans,  MS.  fol.  92. 

Apothecairei'ie,  mhst.  féni.  Apolhicairerie. 
Etal  et  art  de  l'Apothicaire.  (Cotgrave,  Dict.) 

Apothème,  subst.  viusc.  Apophlhegme.  En  grec 
d7ié<f»iy/^a.  Il  seroit  atîieux  que  le  fanatisme  eût 
consacré  l'apophlliegme  de  M.  de  Montpensier,  qui 
croyant  imiter  par  sa  haine  contre  les  Hérétiques, 
le  zèle  du  Koi  S'  Louis  contre  les  Infidèles,  disoit 
«  qu'il  un  hérétique  on  n'estoit  nullement  obligé  de 
"  garder  sa  foy...  11  le  pratiqua  bien  à  l'endroit  du 
■<  Capitaine  des  Marais,  qu'il  prit  dans  le  chasteau 
«  de  Rocliefort  sur  Loire,  par  honeste  capitulation 


"  et  sur  sa  foy;  et  puis  le  fist  exécuter  aussitost, 
"  se  fondant  sûr  son  apotireme  (I)  que  je  viens  de 
«  dire.  »  (Brantôme,  Cap.  Fr.  T.  III,  p.  280.) 

Apotheque,  sulist.  /'t'/H.  Boutique  (2).  Acte  sujet 
à  la  lormalilé  du  dépôt.  Ce  mol  purement  grec  signifie 
bouti(iue,  lieu  où  l'on  expose  des  marcliandises  en 
vente.  «  Il  l'ault,  dict  Galon,  que  le  Pere-fauiillesoit 
»  vendeur  perpétuel.  Parce  moyen  est  impossible 
«  qu'enfin  riche  ne  devienne,  si  tousjours  dure 
«  V apotheque.  »  (Rabelais,  T.  111,  page  12.) 

H  est  possible  quapotheque,  dans  un  sens  relatif 
à  l'iicception  générale  du  mot  grec  dno»i]y.tj,  lieu  où 
sont  déposées  les  choses  dont  la  garde  intéresse, 
ait  désigné  certains  actes  juridiques,  par  la  raison 
qu'ils  étoient  sujets  à  la  formalité  du  dépôt;  c'est- 
à-dire  qu'une  expédition  de  ces  actes  devoil  être 
déposée  au  greffe  de  la  juridiction  où  ils  étoient 
passés.  «  Leftres  et  instrumens  faicts  et  passez  par 
>'  Eschevinage  qui  se  faict  en  deux  parties  cyrogra- 
«  phées,  ou  en  trois  parties  dont  le  Juge  garde  l'ure 
"  des  parties;  et  les  parties  à  qui  touche,  gardent 
«  les  autres.  Et  sont  telles  lettres  selon  le  Droict 
«  civil  appellées  apotheques.  »  (Bouleiller,  Som. 
rur.  lit.  cvn,  p.  C36.) 

Apotliérapic,  subst.  Récréation.  Ce  mot  qu'on 
trouve  dans  Cotgrave  Dict.  est  une  altération 
d'apo  thérapie. 

Apothérapie,  subst.  fém.  Récréation.  En  grec 
àno^içaniia.  «  Par, manière  â'apothcrapic  s'esba- 
«  toieut,  etc.  •>  (Rabelais,  T.  I,  p.  I7(i.;  C'est  ainsi 
qu'il  faut  lire  dans  les  éditions  où  il  y  a  apotliérapic. 
(Id.  ibid.  note  de  Le  Duchat.  —  Voy.  Apotiiérapic.) 

Appactir,  verbe.  Obliger  à  payer  une  contri- 
bution fixée  par  un  pacte.  On  se  souvient  encore  de 
ces  temps  malheureux  où  l'habitant  des  villes  et  de 
la  campagne,  exposé  à  la  fureur  avide  et  meurtrière 
des  ennemis  étrangers  et  domestiques  qui  désoloieut 
la  France,  n'obtenoit  la  vie  avec  la  liberté  de  faire 
son  commerce  et  de  labourer  la  terre,  qu'en  se 
mellant  à  pactis,  ou  en  pactis;  qu'en  s'obligeanl  à 
payer  les  contributions  fixées  par  des  pactes,  sur 
lesquels  étoit  établie  une  espèce  de  paix  ruineuse 
et  tyrannique.  (Voyez  Apaer.)  Telle  est  l'origine  du 
verbe,  quelquefois  réciproque,  appactir  ou  em- 
pactir,  et  de  la  signification  dans  laquelle  on  a  dit  : 
«  Ne  pouvant  plus  souffrir  eslre  raen^'onnez  et 
«  apactis  auxdits  ennemis  depuis  six  ou  sept  ans, 
«  etc.  »  (D.  Carpenlier,  au  mol  Apaluare.)  «  Tous 
.<  les  villaiges  d'entour  Paris  estoient  upali%  aux 
«  Arminaz  (3).  »  (Journal  de  Paris,  sous  Charles  VI, 
p.  427.)  «  Ils  ne  pouvoyent  labourer  leurs  terres... 
«  pour  la  dou tance  des  pillars,  s'ils  n'estoyent  bien 
«  acconvenancés  et  appactis.  »  (Froissarl,  Vol.  III, 
p.  258.)  Peut-être  faul-il  lire  apactis  en  un  seul  mot, 


(1)  Il  y  a  là  une  faute  d'orthographe  ;  apolkinip.  de  dnà  et  ziBr^^i  est  seulement  employé  en  chimie  et  en  géométrie  ; 
c'est  la  perpendiculaire  menée  du  centre  sur  le  côté  d'un  polygone  régulier,  ou  la  hauteur  d'une  quelconque  des  faces 
triangulaues  d'une  pyramide  régulière  ;  c'est  enfin  un  précipité  brun  qui  se  forme  peu  à  peu  dans  les  dissolutions  des 
extraits  végétaux.  (N.  e.)  -  (.2)  JJoulique  vient  lui-même  d'dnoe7,xT],  par  l'italien  boltega,  comme  le  rend  probable  l'apocope 
de  la.  (N.  E.)  —  (3)  Armagnacs. 


AP 


—  35  — 


AP 


SiU  Vieu  de  à  pactis  dans  cel  auL:  i..,jsage.  «Ceux 
«  de  Lourde  et  de  Malvoisin  raiiçoniioycnt  aussi 
«  bien  les  marchands  du  royaume  d'Arragou  el  de 
«  Catelongne,  comme  ils  fâisoyent  les  François, 
«  s'ils  n'esloyent  à  7;aci/s  à  eux.  »  (Id.  ibid.  p.  8.) 
Au  reste,  on  a  pu  dire  estre  à  pacfis,  comme  l'on 
disoit  se  mettre  à  pactis,  estre  à  appactis.  (Voyez 
Appactis,  Appactizer  el  Pactis.)  La  violence  qu'un 
désir  lyrannique  fait  h  notre  volonté,  étant  com- 
parée à  celle  que  souffroient  des  citoyens  obligés 
malgré  eux  de  s'appaclir,  on  aura  dit  figurément: 

.  .  .  Desir  tient  tout  apastis 
Mon  voukiir  qui  est  amatis. 
Al.  Charlier,  Liv.  des  iv  Dames,  Du  Gange,  Gloss.  lal.  au  mot  Apatisatio. 

VARIANTES  : 
APPACTIR.  Froissart,  Vol.  III,  p.  258. 

Apactir.  Id.  ibid.  p.  67.  —  D.  Carpentier.au  mot  Apatiiare. 
Apastir.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mol  Apalisatio,  col.  546. 
Apatir.  ,Iour.  de  Paris,  sous  Cliarles  VI,  p.  -127. 
E.MPACTIR.  Froissart,  Vol.  III,  p.  8,  note  margin. 

Appactis,  subst.  masc.  Contribution  fixée  par 
un  pacte.  Pacte  qui  fixe  une  contribution.  C'est 
probablement  d'après  les  expressions  estre  à  pactis, 
se  mettre  à  pactis,  qu'a  été  formé  le  substantif 
composé  appactis  ou  a])pactix:,  ainsi  que  les  verbes 
appactixer,  appaclir,  s'appactir.  (Voy.  Pactis.)  Il 
semble  que  l'usage  de  ce  mot  ait  commencé  et  fini 
avec  les  malheurs  de  ces  temps  d'anarchie  oi^i  ceux 
qui  dévoient  être  le  soutien  de  la  I^'rance,  se  réunis- 
soient  ;'i  ses  ennemis  pour  en  être  le  fléau.  On 
croiroit  que  la  tyrannie  militaire  du  xiv  et  du  xv 
siècle  alfectoit  de  pallier  l'odieux  de  ces  contribu- 
tions auxquelles  le  citoyen  étoit  forcé  de  souscrire, 
en  les  nommant  appactis,  comme  si  elles  eussent 
été  fixées  par  un  pacte  volontaire.  «  Les  appactis.... 
«  montoyent  bien  par  an  es  terres  dessus  dites 
«  autant  comme  la  rédemption  des  fors  et  des  gar- 
«  nisons  devoit  monter.  »  (Froissart,  Vol.  IIT,  p.  258.) 
«  îv'estoit  année,  à  cause  de  ladite  place,  qu'ils 
B  n'eussent  d'appactis  sur  le  pais  bien  vingt-quatre 
«  mille  escus.  «  (Juvenal  des  Ursins,  H.  de  Charles 
VI,  page  17'2.)  «  Ne  seront  faites  aucunes  prises  de 
Cl  personnes,  courses,  voleries,  pilleries,  logis, 
o  appatis .  rançonnement  de  bestes  ou  d'autres 
«  biens  quelconques,  sur  les  terres,  villes. ...  et 
o  autres  lieux  estansdu  parti  et  obéissance  du  Roy.  » 
(Mém.  de  Comines.  T.  III,  pr.  p.  180. "i  Le  brigandage 
multiplioil  ces  contributions  nommées  appactis,  h 
tel  e.xcès  qu'un  «  pauvre  village  estoit  à  appatis  à 
«  huict  ou  dix  places.  »  (Œuv.  d'Al.  Chartier,  Annot. 
p.  839.)  De  là,  on  disoit  en  parlant  d'un  Capitaine  ou 
Soldat  avec  qui  une  ville,  un  pays  étoit  à  appactis, 
qu'il  tenoil  ce  pays,  celte  ville  en  composition  d'ap- 
pactis, en  rente  d'appactis,  ou  tout  simplement  en 
appactis.  «  Tindrent  tousjours  le  pais  en  guerre  et 
«  en  composition  à'appactiz.  »  (Froissart,  Vol.  IV, 
p.  32.)  .<  Sur  les  marches  de  la  duché  de  Luxem- 
«  bourg...  le  Signeur  de  Commersy...  faisoit  guerre 
<«  au  premier  rencontré,  et  prenoit  el  ravissoit  de 

«  toutes  pars  prisonniers  el  butin Sur  les 

«  marches  de  Mets. . .  se  tenoil  Henry  de  la  Tour, 
«  au  lieu  de  Pierrefort  et  tenoil  les  citez  de  Tout  et 


«  de  Verdun  en  rente  d'apatis  et  tous  ses  voisins 
«  en  sujeltion.  »  (Mém.  d'Ol.  de  la  Marche,  liv.  I", 
page  1j1  et  152.)  «  Se  retrait  le  Roy  en  la  cité  de 
»  Bourges. . . .  laquele  cité  un  pauvre  soudoyer 
«  Bourgongnon,  nommé  Pernet  Grasset,  tenoit  en 
«  apatis,  le  Roy  estant  dedens.  »  (kl.  ibid.  p.  124.) 
«  Prospère  Colonne,  Lieutenant  général  du  Pape,... 
«  tenoil  tout  le  pays  en  appatis  et  en  faisoit  ce  qu'il 
«  vouloit.  »  (Hist."du  Ch"  Bayard,  p.  363.  —  Voyez 
Apatissemext  et  Apatissure.) 

Il  semble  que  la  signification  d'appactis  étoit 
quelquefois  celle  d'apatissure,  et  que  les  Lettres 
seellécs  d'apacli~~^  éloient  des  pactes  qui  fixoient  les 
contributions  au  payement  desquelles  on  s'obligeoit 
sous  le  scel  de  celui  qui  les  avoit  exigées.  «  Les 
»  Bourgongnons...  voulans  vivre  delà  guerre,  se 
«  boultoieiît  avec  les  Anglois;  et  en  portaiil  la  croix 
«  rouge  prenoient  les  François  et  leur  faisoient 

«  guerre:  par  lequel  moyen regnoit  contre  le 

«  peuple  et  gens  d'Eglise  Ir'ès-innumérables  et  tyran- 
«  niques  pilleries.  Et  combien  que  pour  vivre  en 
«  paix  au  dessouhs  de  ceux  qui  faisoient  la  guerre, 
0  ils  donnassent  et  promeissent  du  leurs  très-lar- 
»  gement,  en  prenant  d'iceux,  ou  de  leurs  Capi- 
«  Faines,  saufconduits,  lettres  de  gardes,  ou  seellées 
«  à'apacli:^,  néant  moins  peu,  ou  néant  leur  estoit 
«  entretenu.  »  (Monstrelet,  Vol.  II.  fol.  83.  —  Voyez 
Appactir  et  Appactizer.) 

variantes  : 
APPACTIS.  Froissart,  Vol.  III,  p  258. 
Apactiz.  Monstrelet,  Vol.  II,  fol.  83,  R». 
Ap.\tis.  Mém.  d'Ol.  de  la  Marche,  liv.  i,  p.  124. 
Appactiz.  Froissart,  Vol.  IV,  p.  32.  —  Monstrelet,  V.  II,  p. 86. 
Appastis.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Appatiamentum. 
Appatis.  Ib.  ibid.  au  mot  .ipaii.'iatin,  col.  545.  —  Mém.  de 
Comines,  T.  III,  p.  180.  -  Hist.  du  Cii"- Bayard,  p.  303. 
App.^tiz.  D.  Garpentier,  S.  Gl.  I.  de  D.  C.  au  mot  Apatuare- 

Appactizer,  verbe.  Obliger  à  une  contribution 
fixée  par  un  pacte.  Telle  a  été  la  signification  du 
verbe  appactizer,  apaticlier,  ou  apatisser,  dont 
quelques  étymologistes,  trompés  sans  doute  par 
les  orthographes  apastir  el  appastis  qui  sont  des 
altérations  d'aj)jiactis  et  d'appactir,  ont  cru  voir 
l'origine  d'àw?, pasl'is  ou  past,  en  latin  pastus.  (Voy. 
Borel,  Dict.  —  Du  Cange,  Gl.  1.  au  mot  Apatisat'io.) 
On  l'a  même  défini  conformément  à  celte  fausse 
étymologie.  Mais  il  est  évidemment  formé  de  pactis, 
pacte,  en  lartin  paclum,  et  signifie  mettre  à  contri- 
bution ,  obliger  au  payement  d'une  contribution 
fixée  par  un  pacte.  (Voy.  Pactis.)  «  La  plus  grande 
«  partie  des  villes  estoient  toutes  appactizées  à 
«  eux,  cl  rançonnées  à  certaine  somme  d'argent  et 
«  de  fromens  pour  chacun  mois.  "  (.Monstrelet. 
Vol.  II,  fol.  183.)  «  Tanguy...  apatissa  la  Villeneuve 
«  S"  George....  et  après  lés  deniers  par  lui  receus, 
«  etc.  "  (Preuv.  sur  le  meurtre  du  D.  de  Bourgogne, 
page  309.)  Ce  même  verbe  est  réciproque  dans  une 
lettre  o\x  Juvenal  des  Ursins,  représentant  aux  Etats 
de  Blois  la  misère  du  peuple,  disoit  :  "  Le  [iauvre 
«  peuple  de  tous  estats  cuidant  y  mettre  remède, 
«  délibéra  de  soy  apaticher  à  la  garnison  plus  pro- 
«  chaîne;  mais  tantost  toutes  les  autres  garnisons 


AP 


—  3G  — 


AP 


«  commenci'rent  à  courir  villages,  voulant  avoir 
«  palis.  »  (Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Apatisatio. 
—  Voy.  Ai'i'ACTm.) 

VARIANTES  : 
APPACTIZER.  Monslrelet,  Vol.  II,  fol,  18,3,  R°. 
Apaticher.  Du  Cange,  Gl.  lat.  à  Apatisatio.  —  Borel,  Dict. 
Ap.\tiser.  Id.  ibicl. 

Ap  ATissER.  Preuv.  sur  le  meurtre  du  D.  de  Bourgogne  p .  309. 
Appaticiier.  Œuv.  d'.\l.  Chartier,  Annot,  p.  860. 
Appatisser.  Id.  ibid.  p.  839.  —  Le  .louvencel,  MS  p.  335. 
Appatissier.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  D.  G.  à  Appalicire. 

Appaillarder  (s'I,  verbe.  Se  livrer  à  une  luxure 
honteuse  et  iiilàme.  (Cotgr.  Dict.  —  V.  AppAiLLAnom.) 

Appaillai'dir,  vcvb.  Devenir  paresseux  et  lâche. 
Rendre  gueux.  Devenir  luxurieux,  impudique.  On 
subslituoil  à  l'idée  d'être  couché  sur  la  paille,  celle 
d'être  couché  sur  un  lit,  en  substituant  le  verbe 
apoltronnit;  devenir  paresseux  et  lâche,  au  verbe 
appaillarder  plus  ancien  dans  notre  langue  en  cette 
même  signification  figurée.  ;Voyez  Apoltron.mr  et 
Apoltron.ner.)  Longtemps  avant  que  Charron  eût  dit 
que  le  mariage  apoltroiuiisoit  les  Savans,  on  s'étoit 
plaint  que  non-seuieuieiit  les  Clercs,  mais  les  Che- 
valiers, en  se  mariant  appaillarJissoieiit,  qu'ils 
devenoient  paresseux  et  lâches. 

Car  nulz  d'eulz  ne  puet  les  mestiers 

Exercer,  li  uns  de  Clergie, 

Li  autres  de  Chevalerie, 

Et  servir  aux  femmes  ensemble. 

Ainsi  chascun  son  l'enom  amble, 

Se  destruit,  et  apaillardit . 

Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  o46,  col.  i. 

C'est  probablement  en  faisant  allusion  â  la  paille 
sur  laquelle  couchent  les  gueux,  tiuappaillardir  a 
signifié  rendre  gueux,  réduire  à  la  paille  comme  un 
gueux. 

Faulte  d'argent  et  les  grans  prestz 
Nous  ont  Ung  peu  appaillardis. 

Dialog.  de  Mallepaye,  p.  57. 

On  répugne  à  retracer  l'idée  du  vice  inhérent  â  la 
paresse  des  gueux  qui  couchent  sur  la  paille,  en 
disant  qu' appui llardi7-  c'est  devenir  luxurieux,  im- 
pudique. (Oudin,  Dict.  —  Voy.  Paillarder.) 

VARIANTES  1 
APPAII.LARDIR.  Dialog,  de  Mallepaye,  p.  57. 
Apaillardir.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  349,  col.  1. 

Appanage,  siilist.  inasc.  Dot.  Apanage.  On  peut 
voir  dans  Ménage,  Dict.  étym.  combien  Tes  opinions 
ont  varié  sur  l'origine  du  mot  appanage.  En  suppo- 
sant qu'il  fût  dérivé  du  substantif  latin  appemlagiuin 
formé  du  verbe  nppendere,  l'ortliographe  appcnage 
que  l'on  croit  une  altération  d'appanage,  seroit  la 
vraie  orthographe.  Cette  opinion  de  Spelman,  pré- 
férable sans  doute  â  celle  d'Antoine  Loisel  qui  veut 
qa'appennage  ait  été  formé  de  penne,  en  latin 
penna,  parce  que  les  enfans  appennés  commen- 
çoient  à  voler  d'eux-mêmes,  ne  mérite  cependant 
d'être  remarquée  qu'autant  que  la  signification 
d'apanage  semble  y  être  relative,  lorsqu'on  dit  que 
les  infirmités  sont  les  apanages,  les  dépendances 


do  la  nature  humaine.  C'est  dans  le  mot  pain,  en 
latin  panis,  qu'on  trouve  l'origine  aussi  simple  que 
naturelle  du  mot  appanage.  (Voy.  Du  Gange,  Gloss. 
lat.  T.  I,  col.  ô'd.  —  Nicot,  Dict.  -  Dict.  de  Trévoux.) 
Il  suffit  que  le  pain  soit  une  chose  essentielle  à 
la  nourriture  de  l'homme,  pour  qu'on  ait  nommé 
pain  tout  ce  qui  est  nécessaire  à  sa  subsistance,  et 
appanage  ce  que  les  pères  et  mères  donnent  à  leurs 
.  enfans,  ou  les  frères  aines  à  leurs  puiiiés,  tant  pour 
leur  nourriture  que  pour  leur  entretien.  Dans  cette 
signification  générale,  la  dot  des  filles  étoit  une 
espèce  d'ajB/jfljîflg'e.  «  Père  et  mère,  ou  fun  d'eux, 
«  entant  que  â  luy  est  permis  et  leur  est  loisible, 
«  peuvent  par  contract  de  mariage  appaner  leurs 
"  filles  et  leur  laisser  pour  leur  dot  de  mariage  et 
"  pour  tous  droicts  de  leurs  successions ,  ce  que 
«  bon  leur  semblera;  tellement  que  leurs  dictes 
'<  filles  ainsi  appanées  ne  peuvent  aprez  le  déceds 
«  et  trespas  de  leurs  dicts  père  et  mère  demander 
"  ne  quereller  aucune  chouse  ez  biens  et  succes- 
«  sions  de  leurs  dicts  père  et  mère,  sinon  leurs 
«  dicts  appanages,  au  cas  que  les  dicts  père  et  mère 
«  ou  l'un  d'eux  ne  les  eussent  rappelés.  «  (La 
Thaumassière,  Coût  de  Berry,  p.  209  et  -210.)  «  Fille 
«  mariée  et  appanée,  ou  dotée,  par  père  et  mère 
«  vivans...  ne  peut  retourner  à  la  succession  des- 
«  dits  père  et  mère...  tant  qu'il  y  aura  hoir  masle, 
«  ou  hoir  descendant  de  masle  ,  soit  masle  ou 
«  femelle....  Et  ne  peut  ladite  fille  impugner  ladicte 
»  dotation  et  appanage...  sauf  par  supplément  de 
«  sa  légitime,  eu  esgard  à  son  dit  dot,  ou  appanage, 
"  et  aux  biens  de  ses  dits  père  et  mère  délaissez 
«  par  leurs  décès.  )>  (Coût,  de  Mvernois,  au  Coût, 
gén.  T.  L  p.  892.) 

On  a  dit  en  parlant  des  Filles  de  France,  e.vcluses 
en  tout  temps  de  la  succession  à  la  Couronne,  que 
«  c'est  une  espèce  d'abus  de  leur  donner  des  appa- 
«  nages  en  fonds  »  de  terres  domaniales.  Cette 
observation  de  Le  Laboureur  paroit  d'autant  plus 
judicieuse  qu'elTectivement  fabus  dont  il  indique 
l'époque,  (Hist.  de  la  Pairie,  p.  20.5,)  est  un  écai*t 
de  l'ancien  principe  des  usages  Saliques  ;  principe 
d'après  lequel  il  semble  que  Charles  V  ordonna  pai- 
ses  Lettres  du  mois  d'octobre  1374  (1),  que  «  pour 
«  tout  droict  de  partage  ou  appennage  que  ses  iilles 
«  pourroient  demander  en  ses  Domaines,  Droicts, 
»  Noblesses  et  Seigneuries  royaux,  l'ainée  auroit  en 
«  mariage  cent  mille  francs,  et  les  autres  filles 
«  soixante  mille  francs,  avec  tels  garnisons  et  esto- 
«  remens  comme  il  appartient  à  filles  de  Roy  de 
«  France.  »  Il  est  probable  que  ce  n'est  pas  sans 
raison  qu'en  parlant  de  ses  filles,  il  a  dit,  «  pour 
«  tout  droict  de  partage  ou  d'appennage  qu'elles 
"  pourroient  demander,  etc.  »  S'il  eût  reconnu  leur 
droit  à  demander  un  partage  ou  appen)iage  en  fonds 
de  terre,  un  appennage  de  même  nature  que  celui 
de  leurs  frères,  il  se  seroit  exprimé  sans  doute  à 
l'égard  de  ses  filles  Marie  et  Ysabelle,  comme  à 


(1)  Cette  sage  mesure  demeura  sans  effet,  et  ce  fut  seulement  à  partir  de  1566  que  les  rois  s'astreignirent  à  l'observation 
rigoureuse  d'une  loi  précise.  Lhospital  fit  rendre  alors  une  ordonnance  en  vertu  de  laquelle  tous  les  apanages  rentraient 
francs  et  quittes  de  toute  obligation  à  la  eourop-ne,  après  l'extinction  de  la  ligne  masculine  directe,  (n.  e.) 


AP 


—  37  — 


AP 


réirard  de  son  fils  Louis  ;  il  auroit  dit,  pour  «  tout 
«  droict  de  partage  ou  appennaqe  à  elles  apparte- 
«  liant,  »  comme  en  parlant  de  leur  frère,  il  avoit 
dit  :  «  Ordonnons  que...  nostre  très-cher  et  aimé 
«  fils  Louys  aye  pour  tout  droict  de  partage  ou 
«'  appcunage  à  luy  appartenant  en  nos  Terres  et 
«  Seigneuries,  pour  raison  de  nostre  succession , 
«  ou  autrement,  selon  les  vieils  usages,  observan- 
«  ces  et  coustumesde  nostre  Royaume,  douze  mille 
«  livres  de  Terres,  etc.  »  (Godefroy,  Aunot.  sur 
fHist.  de  Charles  VI,  p.  571  et  57'i.) 

Quoique  cette  Ordonnance  semble  confondre  le 
partage  et  Vappanage,  la  signification  de  ces  deux 
mots  n'en  étoit  pas  moins  essentiellement  différente, 
puisque  les  filles,  bornées  à  une  dot  qu'on  nommoit 
appanage,  n'ont  jamais  partagé  les  terres  Saliques, 
conjointement  avec  leurs  frères  ;  et  (lu'antérieu- 
rement  à  l'Ordonnance  de  Charles  Y,  Vappanage, 
tel  qu'on  le  conçoit  encore  aujourd'hui,  excluoit, 
même  entre  frères,  le  partage  de  ces  terres.  Une 
preuve  de  cette  exclusion  commune  aux  fils  puînés 
des  grands  Seigneurs  avec  les  fils  puînés  de  nos 
Rois^  c'est  ([ue  dans  un  titre  de  1323,  «  Guy  de 
«  Chastillon,  Comte  de  Blois,  après  avoir  dit*  et 
"  maiutenu  (iue....lohan  son  frère  ne  devolt,  ne  ne 
«  pooit  demander  en  la  comté  de  Blois,  ne  es  ap- 
"  parlenances  que  appenage  tant  seulement,  fixe 
»  cet  appanage  à  doze  cenz  livres  tournois  de  rente 
«  en  fonds  de  terre,  quoique  son  frère  prétendit 
«  avoir  droit  de  partage  en  ladite  conté  et  es  appar- 
«  tenances.  »  (Voy.  Ilist.  de  la  M.  de  Chastillon,  pr. 
p.  100.)  L'appanage  des  puînés  n'éloit  même  pas 
toujours  un  appanage  en  fonds  de  terre.  Guillaume, 
Seigneur  de  Montpellier,  fils  de  la  Duchesse  Ma- 
thilde,  déclara  par  son  testament  du  4  novembre 
1202,  son  fils  puîné  exclus  du  droit  de  parlager 
avec  l'aiaé  l'hérédité  paternelle  ,  moyennant  un 
appianage  de  mille  sous  de  rente  annuelle  :  «  Volo 
«  quod  filius  meus  major  natu...  det  ei  tempore 
'<  vitse  suœ  annualim  1000.  sol.  et  pro  his  sit  con- 
"  leulus  omnibus  aliis  bonis  meis.  »  (Du  Cange, 
Gloss.  lai.  T.  I,  col.  543.)  Dans  un  autre  testament 
d'un  Seigneur  de  Montpellier,  aussi  nommé  Guil- 
laume, fils  d'Ermessinde,  le  puîné,  désigné  pour 
l'état  ecclésiastique,  subit  la  même  exclusion,  sans 
pouvoir  exiger  de  l'ainé  autre  chose  qu'une  éduca- 
tion et  une  subsistance  proportionnées  à  la  noblesse 
de  sa  naissance.  C'est  relativement  à  cette  idée  géné- 
rale de  proportion,  particularisée  dans  le  testament 
et  indiquée  par  l'adverbe  honorificè,  qu  apariagc  a 
signifié  la  même  chose  (\n  appanage.  (Voy.  Aparl^ge.) 

On  peut  dire  que  ce  testament,  en  date  du  li 
décembre  1146,  est  une  cession  faite  au  fils  aine, 
de  tous  les  droits  de  l'autorité  paternelle  sur  le 
puîné.  "  Rernardum  Guillelmum  filium  meum 
«  dimillo  Guillelmo  filio  meo  majori,  ita  scilicet  ut 
<'  usque  ad  aîtalem  xviu  annorum  benè  faciat  eu  m 
<•  docere  et  in  lilteris  studere  ;  et  si  tune  voluerit 


«  clericus  fieri  et  ad  sacros  ordines  promoveri , 
«  Dominus  Montispessulani  teneat  illum  honorificè 
•<  secum,  ita  scilicet  ut  equos  et  ai'ma,  et  armige- 
«  ros,  et  victum  et  vestitum  sibi  honorificè  adminis- 
«  tret ,  et  Bernardus  nihil  aliud  in  Loto  honore 
«  ipsius  aliquo  jure  petere  possit;  vilis  enim  h;ere- 
«  ditas  nobilem'hominem  non  decet.  ••  (Du  Cange, 
Gloss.  lat.  uhi  supra.)  Il  seroit  à  désirer  pour  les 
mœurs  qu'il  suffit  d'être  vertueux  pour  être  noble 
avec  décence.  Mais  telle  est  la  force  des  préjugés 
vulgaires,  qu'on  sent  encore  aujourd'hui  que  dans 
le  xn'  siècle  on  pouvoit  avoir  raison  de  dire  qu'un 
médiocre  patrimoine  messied  à  la  Noblesse.  La 
crainte  que  cette  médiocrité  n'exposât  la  noblesse 
d'une  Maison  illustre  à  l'obscurité  et  à  l'avilisse- 
ment, parut  un  motif  raisonnable  d'exclure  les 
enfans  puînés  de  la  succession  pnternelle.  On  les 
força  de  se  contenter  d'un  appanage  (I),  au  moyen 
duquel  ils  pouvoient  subsister  décemment,  et  se 
venger,  en  acquérant  l'honneur  et  la  richesse  dans 
la  carrière  ecclésiastique  et  militaire,  de  l'espèce 
d'injustice  qu'on  leur  faisoit  éprouver. 

Ces  appanages  durent  sans  doute  paroitre  encore 
plus  contraires  à  la  Nature  que  les  partages  dont  le 
droit  d'aînesse  autorisoit  l'inégalité.  «  Aussi  nos 
><  premiers  ancestres  ne  se  pèurent  aisément  in- 
«  duire  à  introduire  en  leur  monarchie  des  droits  si 
«  contraires  à  l'égalité  qui  semble  naturelle  entre 
"  les  enfans  d'un  même  père.  Et  de  fait  ne  furent, 
«  ny  les  droits  d'ainesse,  ny  les  apanages,  conneus 
«  sous  la  première,  ny  mesme  sous  la  seconde  lignée 
«  de  nos  Roys.  »  (Pasquier,  Rech.  liv.  ii,  p.  128.) 

Mais  la  Nature  qui  dicte  la  loi  de  l'égalité,  excuse 
elle-même  l'amour  propre  d'un  père  de  famille  qui 
s'occupe  des  moyens  de  perpétuer  l'illustration  de 
sa  noblesse.  C'est  ce  même  amour-propre  devenu 
dominant  qui  proscrivit  enfin  l'égalité  du  partage 
entre  frères.  «  On  reconnut,  sous  la  troisième  Race, 
«  le  droict  d'aisnesse  si  essentiel  à  l'entretenement 
«  des  familles,  et  que  la  Nation  Françoise  a  eu  en 
«  grande  recommendation,  voire  sur  toutes  autres 
«  nations.  »  (Pasquier,  ubi  supra.)  Vappanage  anéan- 
tissoit  quelquefois  toute  espèce  de  droit  de  partage, 
même  inégal,  lorsque  les  fils  et  les  frères  puînés 
des  Seigneurs  particuliers  étoient  appanages  comme 
l'ont  été  et  le  sont  encore  les  fils  et  les  frères  puinés 
des  Rois  de  France. 

On  sait  que  sous  les  deux  premières  Races  de 
nos  Rois,  le  Royaume  qui  est  terre  Salique  par 
essence,  se  partageoit,  suivant  les  mêmes  Lois 
qu'une  hérédité  particulière  ;  que  le  partage  étoit 
égal  entre  les  fils,  à  l'exclusion  des  filles  ;  que  pour 
obvier  aux  inconvéniens  de  cette  égalité  de  partage, 
on  établit,  sous  la  troisième  Race,  la  maxime  de 
l'indivisibilité  de  la  Couronne  :  maxime  qui  devint 
loi  fondamentale  de  l'Etat,  et  dont  les  Seigneurs 
particuliers  ont  profité  eux-mêmes,  en  la  faisant 
valoir  pour  leurs  fiefs  nobles  ou  seigneuries. 


(1)  L'apanage  était  donc  la  pension  annuelle,  la  rente  assignée  d'ordinaire  sur  certains  fonds,  que  faisaient  les  seigneurs 
à  leurs  frères  puînés.  Il  nous  en  reste  des  exemples  assez  nombreux  au  xii'  siècle.  La  tenure  en  pavage,  la  division  des 
flefs  firent  tomber  en  désuétude  Vapanage  seigneurial,  (n.  e.) 


AP 


—  38 


AP 


Le  rtomniiiede  ia  Couronne  étant  ainsi  devenu 
indivisible,  le  ..  ■  pour  assurer  i^i  ses  puinés  un  sort 
cligne  de  leur  naissance,  leur  donna  la  jouissance 
de  ïeii'os  et  de  titres,  aux  charges  de  reversion  à 
l'extinction  de  leur  postérité  masculine  ;  et  cette 
jouissance  ainsi  donnée,  fut  par  la  suite  nommée 
appanage(\).  «  Au  lieu  où  premièrement  tous  enfans 
o  du  Roy  estoyent  recompensez  en  t^oyaumes,  pour 
«  leurs  partages,  et  (jue  depuis  on  leur  donuoit  les 
«  grandes  contrées  par  forme  de  Duchez ,  avec 
«  grandes  prérogatives  et  soy  l'essentans  au  plus 
«  près  de  la  Royauté  sous  le  titre  de  Ducs  ;  nos 
«  Roys  par  une  innovation  très-politiiiue  et  prolita- 
«  ble  pour  l'accroissement  de  ce  royaume,  commen- 
«  Gèrent  à  retrancher  cette  grandeur  à  leurs  frères, 
«  leurs  donnans  Terres  et  Seigneuries  en  apanaçie. 
«  Quoy  faisans  ils  n'entendoient  leur  avoir  rien 
«  donné  en  partage,  fors  le  domaine  et  le  revenu 
«  annuel.  »  (Voy.  Pasquier,  Rech.  liv.  u,  p.  129.) 
En  effet,  l'idée  d'une  propriété  indivisible  ou  impar- 
table,  exclut  nécessairement  l'idée  d'un  appnnage 
qui  diviseroit  cette  propriété,  en  la  partageant.  Il 
est  donc  de  la  nature  d'un  appanage  de  n'être  pas 
un  partage.  On  l'a  déjà  prouvé  par  quelques  anciens 
titres  relatifs  aux  enfans  puînés  des  Seigneurs  par- 
ticuliers. Mais  il  s'agit  ici  de  Yappanage  que  Saint- 
Julien,  (Mesl.  hist.  p.  G.)  dit  avoir  en  soy  quelque 
excellence  réservée  pour  les  fils  de  Roys.  Cet  appa- 
nage, disoit  l'Avocat  général  Talon,  parlant  dans 
une  cause  d'appanage  en  16'd,  n'étoit  point  un  par- 
tage; ce  n'étoit  point  une  légitime,  mais  un  droit 
spécial,  une  concession  particulière,  par  grâce,  par 
bonté,  par  bienfait.  (Voy.  Journ.  desAud.  T.  1.  p. 
347.)  Le  P.  Hesnault  dit  que  sous  le  règne  de 
Philippe-le-Bel,  «  Yappanage  étoitune  sorte  de  con- 
«  cession,  qui  sans  morceler  le  domaine  de  la 
«  Couronne,  en  suspendoit  seulement  la  jouissance 
«  pour  quelque  temps  et  pour  quelque  portion , 
"  mais  sans  toucher  à  la  propriété.  »  (Abr.  chron. 
de  l'Hist.  de  Fr.  T.  I,  p.  2G0  ;  édit.  de  1768.) 

Il  paroit  aujourd'hui  tellement  constaté  que 
l'essence  de  Yappanage  est  de  rester  domaine  de  la 
Couronne,  qu'il  seroit  inulile  d'insister  long-temps 
sur  la  preuve  d'une  vérité  établie  par  la'  Loi  et 
attestée  par  les  Jurisconsultes.  «  Terrœ  appanagii 
«  sunt  pars  domanii  Régis,  concessa?  per  modum 
«  provisionis,  filiis  masculinis  Regum.  ..  (Du  Mou- 
lin, sur  la  Coût,  de  Paris,  titr.  i",  §  4.3,  n"  185.) 
L'Avocat  général  Talon,  dans  son  plaidoyer  que  j'ai 
cité  plus  haut,  prouvoit  que  le  Domaine  donnij  à 
titre  d'appanage,  conservoit  la  nature  de  Douuiine 
de  la  Couronne,  en  alléguant  les  articles  xv  et  xvi 
de  l'Ordonnance  de  15GG,  sur  le  Domaine. 

Ces  ailicles  portentque  dans  les  terres  domaniales 
cédées  par  engagement,  (Rec.  des  Ordonnances, 
édit.  de  1720,  T.  1,  p.  IIOG.)  la  réception  de  l'hom- 


mage demeurera  au  Roi ,  mais  que  lorsqu'elles 
seront  cédées  en  appanage,  l'hommage  sera  reçu 
par  le  Prince  appanage,  aux  charges  par  lui  d'eii- 
voyer  une  copie  de  la  réception  "à  la  Chambre  des 
Comptes  de  Paris  ;  «  ce  qui  justifie  (ajoutoit-il)  que 
"  les  terres  de  Yappanage  demeurent  domaine  de 
«  la  Couronne.  »  (Voy.  Journ.  des  Audiences,  ubi 
supra.)  «  L'appanage,  dit  du  Tillet,  n'est  point  un 
«  partage  qui  importe  Seigneurie....  Les  droicls 
«  royaux  qui  sont  adhérens  à  la  Couronne,  insépa- 
«  râbles  d'icelle,  sont  réservez  et  ont  toujours  esté  ; 
«  et  souloit  ou  Duché  ou  Comté  qui  estoit  baillé 
«  estre  retenue  par  le  Roy  quelque  ville  où  il  éri- 
«  geoit  un  Bailliage  royal  pour  la  cognoissance 
«  desdits  cas  royaux...  Depuis  ont  esté  créez  Juges 
«  des  Exempts.  »  (Vov.  Du  Tillet,  Rec.  des  Rois  de 
Fr.  p.  208,  209  et  213.  —  Pasquier,  Rec.  liv.  u, 
p,  129.)  Henri  111  ne  fit  aucune  exception  pour  les 
appanages,  lorsque  par  l'article  cccxxxi  de  son  Edit 
du  mois  de  mai  l,->79,  «  il  ordonna  qu'es  aliénations 
«  et  délaissemens  des  terres  du  Domaine  de  la 
"  Couronne,  à  quelque  titre  que  ce  fût,  ne  pourroit 
«  estre  faite...  aucune  cession  des  droits  de  nomi- 
«  nation  des  offices  extraordinaires  des  dites  terres, 
"  ni  semblablement  des  droits  royaux  dépendans 
«  de  la  Couronne,  comme  y  étant  inséparablement 
«  unis  et  annexés.  >•  (Ord.  1. 1,  p.  645  ;  édit.  de  1720.) 

VARIANTES    ! 
APPANAGE.  Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr. 
Apannage.  Pasquier,  Rech.  liv.  vm,  p.  690. 
Appaxaige.  S'  Julien,  Mesl.  hist.  p.  7,  12,  etc. 
Appannage.  Monet,  Dict. 

Appenage.  Hist.  de  la  M.  de  Chastillon,  pr.  p.  100. 
Appennage.  Du  Tillet,  Rec.  des  Rois  de  Fr.  p.  209. 
Appennaige    Crétin,  p.  80. 

Empanage.  Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.  —  Cotgrave,  Dict. 
Empannage.  Monstrelet,  Vol.  III,  fol.  121,  R». 

Appanager,  verbe.  Apanager  ;  Doter.  Faire 
pâturer.  On  a  pu  nommer  appanage  en  général,  ce 
qu'on  donnoit  en  deniers  ou  en  terres  aux  enfans 
exclus  de  toutes  successions  paternelles  et  mater- 
nelles, pour  leur  nourriture  et  entretien,  pour  leur 
subsistance.  (Voy.  Appanage.)  Aussi  trouve-t-on  que 
donner  à  une  fille  ou  à  une  sœur,  à  un  fils  ou  â  un 
frère,  pour  .son  droit  successif,  une  somme  d'argent 
ou  une  portion  d'héritage  en  usufruit  et  même  en 
propriété,  c'étoit  les  appanager  ou  appaner.  (Laur. 
Gloss.  du  Dr.  Fr.  p.  50.  —  Dict  de  Trévoux,  T.  I, 
col.  461.  —  Voy.  Appaner.)  Il  semble  en  effet  que  les 
appanages  en  fonds  de  terre  varioient  relativement 
à  la  nature  des  biens  et  à  la  disposition  des  Cou- 
tumes, qu'ils  ii'étoient  pas  toujours  une  cession  de 
simple  usufruit,  \)ms,q\i' appanager  signifioit  non- 
seulement  donner  à  quelque  sien  fils  ou  fille,  frère 
ou  sœur,  pour  tout  droit  d'hoirie  présente  et  future, 
certaine  portion  â  tenir  par  voie  d'usufruit;  mais 
encore  lui  assigner  portion  de  bien ,  moyennant 


(1)  Les  règles  de  l'fl/ifDinf/e  royal  auraient  alors  pu  ne  pas  différer  essentielleme.it  de  l'apanage  seigneurial:  mais  la 
faiblesse  des  rois  laissa  introduire  l'usage  désastreux  deriiérédité;  c'était  constituer  des  familles  rivales  de  la  maison 
royale  elle-même  et  plus  puissantes  qu'elle.  La  plus  puissante  fut  celle  des  ducs  de  Bourorogne,  fondée,  pour  la  première 
fois,  par  la  donation  de  Robert  en  faveur  de  son  fils,  éteinte  par  la  mort  de  Philippe  de  Ro'uvre,  en  1362,  et  rétablie  à  cette 
époque  par  Jean  II,  en  faveur  de  Philippe  le  Hardi,  sans  exclusion  de  la  tige  féminine.  (N.  e.) 


AP 


—  39 


AP 


quoi  il  renonçoit  à  tout  héritage  présent  et  futur 
(\oy.  ilouet,  Dict.)  Cette  seconde  délinition  ne  seroit 
qu  une  répétition  inutile  de  la  première,  si  la  pro- 
priété de  la  portion  de  bien  donné  en  appunaqe  n\ 
eloit  tacitement  réunie  à  l'usufruit.  Une  preuve 
plus  évidente  que  le  don  d'un  appamtge  étoit  quel- 
quelois  une  espèce  de  partage,  une  cession  de  pro- 
priété, c  est  que  le  père,  la  mère  ou  autre  cmpamqeoit 
son  fils.  Il  le  ou  parent,  en  lui  délaissant  quelques 
terres  ou  héritages;  en  l'apporlionnant,  comme  dit 
Ja  Lqulume  dAcs,  quand  fainé  donne  part  à  ses 
pûmes  en  cas  de  succession.  fLaur.  Gloss  du  Dr 
rr.  iibi  supra.) 

Il  est  si  naturel  d'égaler,  de  proportionner  la  dot 
Uippanarje  d'un  fils  et  d'une  liUe  à  l'état  qu'ils 
doivent  avoir  dans  la  société,  qnappmmner  et 
apparager  ont  pu  réciproquement  siamlier  la  même 
chose.  .Vinsi  la  raison  de  subslituer,\lans  (jiielques 
toutiimes,  au  verbe  appanagerle  verbe  apnaraner 
semble  moins  essentielle  que  ne  l'ont  cru  Uaaueau 
e  les  Auteurs  du  Dict.  de  Trévoux.  (Voyez  ApIruge 

et  APAR.iGER.) 

La  signification  i'appamiger,  faire  pâturer,  est 
i  eiative  a  celle  de  panage;  mot  formé  de  pain  (1)  et 
qui  par  e.vtension  aura  désigné  toute  espèce  de 
nourriture  propre  aux  bestiaux,  aux  cochons,  etc 
«  Le  suppliant,  pour  nourrir  et  appaiicu/er  ses 
"  pourceaulx,  a  |irins  du  Seigneur  de  Courtenav  les 
«  haj-es  et  bois  d'icelle  seigneurie.  »  (D.  Carpentier 
tiKe  rS        '^^  °"  ^'"^'^'  ""  ™°'  -^PPamghm] 

De  là,  on  aura  dit  en  parlant  de  l)estiaux  qu'on 
n  avoit  pas  le  droit  de  faire  pâturer  dans  une  torêt 
qu  lis  n  eloient  pas  appanagés  ou  (ipparuaigés.  «  Hz 
•■  ont  droits  de  franchises  et  libériez,  tels  que  nous 
"  avons  en  nostre  dite  forest  de  Charnie-  et  en- 
«  tr  autres  sont  en  possession  de  prendre.!  toutes 
«  les  bestes  porchines,  aumailles  et  autres  nu'ilz 
<•  treuyent  au  dedans  de  leur  dict  parc,  non  her- 
«  i)iiigeeselapparn(iigées,  comme  à  eux  annartenans 
«  par  confiscation  »  (Id.  ibid.  tit.  de  1480.) 

VARUXTES  : 
APPAN.\GER.  S-  Julien,  Mesl.  hist.  p.  6 
Appannager.  Lett.  de  Pasquier,  T.  II,  p.  578.  -  Monet  D 

Afpenxager.  Cotgrave,  Nicot  et  Monet,  Dict. 

Appaner,  verbe.  Apanager;  Doter.  La  signi- 
hcation  propre  d  appaiicr,  c'est  trancher  et  donner 
a  chacun  de  pain  ce  qu'il  lui  en  faut;  par  extension 
"  tranclier  et  diviser  entre  les  séants  à  table  autant 
(vif  ^?|ef. servis  comme  on  juge  estre  nécessaire.  » 
l!f]  •',"'"^,'î'  *'^^'-  ^"s'-  P-  ♦^•)  H  semble  qu'on  ait 
as  ez  naturellement  comparé  à  des  convives  ainsi 
paitcigeb,  les  enfans  qu  on  exclut  des  sucpessinn« 
paternelles  et  matern'elles,  en  leur  as"iSnan  le 
quoi  vivre  et  s  entretenir,  lorsqu'on  a  dit  figurément 
qu'au  moyen  d'une  dot  en  argent,  ou  d'un  rCTenu 


en  fonds  de  terre,  ds  etoient  appanés  ou  appanagés 
l\oy.  Appaxager.)  «  i-^iiie  mariée  et  appanée  ou  doté^ 
'-  par  père  et  mère  vivans...  ne  peut  retourner  à  la 
«  succession  des  dits  père  et  mère....  et  ne  neuf 
<•  impugner  la  dicte  dotation  et  appamige.  »  (Coul 
de  Nivernois,  au  Coût.  gén.  T.  I   p  89->  ) 

On  a  veillé  à  la  conservation  du  rovaume  de 
l-rance,  «  en  voulant  que  tout  le  droict  de  la  Cou- 
«  ronne  fut  attribué  aux  aisnéz,  et  que  les  frères 
«  cie  nosF.oys  fussent  senlemenl  appennez.  »  (Pas- 
quier, liech.  hv.  n,  p.  m.  -  Voy.  Appanage.)    ^ 

APE.NNER.J   le.Mairè,must   des-GàuIes   MV'rr'^OO 
Appanner.  Cotgrave  et  Monet,  Dict  '  ^' 

Appe.xner   Du  Tillet,  Rec.  des  Rois'de  Fr  p  4G5 
Ejipaner.  Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.  p  52.       ^' 

Appar,  préposition.  Par.  On  a  indiqué  ailleurs 
quelle  pourroit  être  la  cause  de  la  persuasion  où 
Ion  est  que  dans  ces  expressions,  à-par-moi  à  nar- 
nous,  etc.  a-par-soi,  à-par-lui,  à-par-eux    eV  li 

ïs:^s;!SLf  ""''  «•^^''^"«"  '^  ^^^^ 

L'a  et  par  étant  réunis,  on  écrivoit  anpar  ou 
appar t;  préposition  composée  qui  ne  signSt  rieS 
ce  p  us  que  la  préposition  simple  pal  lorsqi'oS 
disoit  appar  ou  appart-soi,  dans  le  sens  ôé  S"  Si 
ou  de  par-soi  tout  seul,  séparément,  à-part  F  Mour- 
"  ront  m.eulx  ensemble  qu'ilz  ne  eroiei  t  chacïn 
«  appar-soy,  etc.  »  (Le  Jouvencel,  ms.  p  431  v!  /is 

(ibid.  p.  023.  -  \oy.  A-PAR-soi  et  Par-soi.) 

VARIANTES  : 
APPAR.  Le  Jouvencel.  MS.  p.  431 
Appakt.  Ibid.  p.  023.  ' 

Appai-able,  adj.  Qui  se  décide  par  Tévidence 
du  droit.  Signification  relative  à  celle  du  verbe 
W/'d'/-,  paroitre,  être  visible,  évident.  (Voyez 
AiPARER.)  pans  la  Coutume  de  Normandie,  en  vers 
es  querelles  apparubles  sont  celles  que  la  me^mè 
Coutume  nommoit  querelles  apparismntes  parce 
que  la  Loi  qui  les  décidoit,  faisoit  paroitre  le  droU 
des  parties,  et  le  mettoit  en  évidence 

Or  convient  veoir  des  querelles 
De  possession,  qui  sont  telles  : 
Une  naouvable,  autre  imniouvable- 
L  une  simple,  autre  apparable. 

Coul.  de  Norm.  en  vers,  MS.  fol.  68,  V  col.  1  el  2. 

Apparaument,  adverbe.  De  façon  à  être  vu  II 
semble  que  la  formation  de  cet  adverbe  ait  quekiue 
analogie  avec  celle  de  l^ndjectif  «j.p«,r^6/,/(vï.ez 
Apparaple.)  Peut-être  a-t-on  écrit  apparableiuent  et 
apparaument  m  une  espèce  de  contiadiui,  •)  don 
h  preuve  n  est  pas  rare  dans  notre  ancienne  la^i-ue-^ 
Quoi  qu  11  en  soit,  radverbeû;^;;flr«M,«t'«/.  pris  dans 
un  sens  relatif  à  celui  du  verbe  apparei-,  paroitre 
se  faire  voir,  signifioit  de  façon  à  é  re  vu   «  Où  es 


(2|lle;^'<^'^ls'ai^S«'^S;;;/c^?-^^c^C^  Signifie  fabrication  du  pain.  (..  e.)  - 

cheval  est  devenu  c/ievau,  etc.  (n.  e.;  '-""S'Onne  (  s  est  cbangee  en  la  voyeUe  tt;  ainsi  léalmeut  est  dev-enu  leaumenl, 


AP 


40  — 


AP 


«  Archiers  fauklront,  l'en  doit  asseoir  les  autres  qui 
«  n'ont  nulz  arcs. .  .  .  mais  ilz  doivent  estre  assis 
«  plus  au  descouvert  et  plus  apparemment  que  les 
«  Archiers  »  (Modus  et  Racio,  ms.  1"  78.)  Ouelquefois 
l'acception  de  cet  adverbe  étoit  la  même  que  celle 
à' apparemment.  (Voy.  Apparemment.) 

VARIANTES  : 
APPARAUMENT.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  78,  R". 
Aparau.ment.  Psautier,  MS.  du  R.  n°  7837,  fol.  (31. 

Appare,  siibst.  fém.  Paroi.  Ce  mot  semble  être 
de  uiêuie  origine  et  de  même  signification  qu'«/j- 
paroi,  paroi,  muraille.  «  De  si  grant  force  getta 
0  l'escuelle  en  quoy  ilz  buvoient,  que  elle  lompy 
<■  en  pluseurs  pièces  encontre  une  fl;;;^?'^  oii  elle 
"  fery.  ■>  (D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lai.  de  Du 
Cangè,  au  mot  Paries;  lit.  de  1409.  —  Voy.  Aparoi.) 

Apparement,  suhst.  masc.  Action  de  paroitre. 
L'action  de  se  faire  voir  en  public,  de  se  faire 
counoitre.  (Voy.  Apparer.)  »  Damoiselles,  comment 
Il  nous  maintiendrons-nous  jusques  au  jour  de 
«  nostre  feste  et  de  mon  apparement?  car  je  n'ai 
«  voulenté...  de  moy  monstrer,  ne  faire  cognoistrc 
«  en  appert,  fors  que  entre  vous.  »  (Percef.  Vol.  II, 
fol.  48,  V"  col.  2.  —  Voy.  Apparition.) 

Apparemment,  adverbe.  De  façon  apparente, 
visiblement,  évidemment,  vraisemblablement.  On 
regarde  l'ortbographe  appareil lenienl  comme  une 
preuve  de  l'affectation  avec  laquelle  les  Ecrivains 
du  -wi'  siècle  préféroient  à  l'orlliograpbe  vulgaire, 
une  orthographe  plus  étymologique.  11  semble  en 
effet  qu'en  écrivant  apparentement  pour  apparem- 
ment, on  ait  voulu  rendre  l'orthographe  plus  con- 
forme à  l'étymologie  (1),  et  désigner  ainsi  le  rapport 
de  cet  adverbe  avec  le  participe  apparent  dont  il  est 
formé  par  une  espèce  de  contraction  ordinaire  dans 
la  formation  des  adverbes  différemment,  fi'équem- 
mcnt,  et  autres  de  même  terminaison.  (V.  Apparent.) 
C'est  dans  un  sens  relatif  à  celui  du  verbe  apparer, 
paroitre,  être  visible,  évident,  vraisemblable,  que 
l'adverbe  apparemment  ou  apparentement  a  signifié 
visiblement,  évidemment,  vraisemblablement,  en 
apparence.  On  en  a  restreint  l'usage  à  cette  dernière 
acception  ;  mais  anciennement  on  disoit  :  «  Se  le 
«  dit  bois  n'estoit  apparement  marquié,  etc.  «  (Ord. 
T.  VIll,  page  100.)  «  Les  Baillis. . .  soupeçonnés  de 
«  usures,  ou  menions,  apparemment  âGè\\oï\Qè\&\ie, 
«  ifs  ne  soulendront  en  leur  erreur.  »  (Ibid.  T.  I, 
p.  69.  — Voy.  Apparaument.) 

VARIANTES    : 
APPAREMMENT.  Orth.  subsist.  -  Ord.  T.  I,  p.  69. 
Apparammant.  Monet,  Dict. 

Apparéejient.  II.  Carpentier,  S.Gl.  1.  deD.C.  a.  Apparenter. 
Apparement.  Ord.  T.  VIII,  p.  100. 
Apparentement.  Contreditz  de  Songecreux,  fol.  90  et  95. 

Apparence,  ,s;(/^s/.  féminin.  Représentation, 
prestance,  extérieur.  Etat  visible  d'une  chose.  Vérité 


évidente,  réalité.  Le  substantif  apparence,  dans  un 
sens  analogue  à  celui  du  verbe  apparer,  pai'oitre, 
a  signifié  représentation,  prestance,  extérieur  par 
lequel  on  se  distingue  en  paroissant,  en  se  pré- 
sentant. >'  L'homme  est  de  sa  nature  de  plus  grande 
"  apparence  et  plus  honorable  que  la  femme.  » 
(Nicot,  Dict.)  «  Les  petites  gens  sont  sujets...  à  estre 
"  choqués  et  coudoyez,  à  faute  à'appareiiee.  »  (Essais 
de  Montaigne,  T.  111,  page  570.)  De  là,  on  a  nommé 
hommes  (l'apparence  ceux  à  qui  la  nature  ou  la  for- 
tune a  donné  les  moyens  de  paroitre  avec  cet 
extérieur  qui  les  distingue.  »  Se  celuy  qui  est  trouvé 
«  de  jour  en  l'héritage,  en  temps  de  fruicts,  avec 
»  brisure  de  porte  ou  closture,  est  Jiome  cogneu  et 
>'  d'apparence,  celuy  qui  l'a  prins  ne  le  peut' mener 
«  que  jusques  à  quelque  lieu  ofi  il  puisse  trouver 
"  tesmoings.  »  (Coût,  de  Bayonne,  au  Coût.  gén. 
T.  II,  p.  701.  —  Voy.  Apparent  et  Apparoissance.) 

L'apparence  d'un  lieu  où  s'est  fait  quelque  dom- 
mage, est  sans  doute  l'étal  dans  lequel  on  voit  ce 
lieu,  l'état  dans  lequel  il  paroit  depuis  qu'il  a  été 
endommagé.  «  Bien  se  gart  qui  fet  à  autrui  damage 
«  en  blés  semés,  ou  en  mars,  ou  en  bos,  ou  en  prez, 
«  que  chil  qui  est  pris  en  damage  fesant,  est  tenus 
"  à  rendre  tout  le  damage  qui  est  trouvés  ou  prouvés 
«  par  Yaparance  du  lieu.  »  (Beaumanoir,  Coût,  de 
Beauvoisis,  chap.  xxx,  p.  157.) 

Ce  même  mot,  qui  relativement  à  la  signification 
A' apparer,  être  vraisemblable,  désignoit  et  désigne 
encore  une  apparence  plus  ou  moins  sensible  de 
réalité,  a  signifié  la  vérité  évidente,  la  réalité  même 
des  choses.  «  Tout  ainsi  que  avez  veu  à  l'heure  du 
«  Sacrement,  il  se  assiet...  et  tant  attent...  que  le 
«  Prestreluy  apporte  son  Saulveur....  Merveilleuse 
«  chose  est;  car  autre  substance  n'a  eu  depuis... 
«  plus  de  deux  mois. . . .  Molt  fut  Arfaran  esmer- 
«  veillé...  et  dist  :  Sire,  merveilleuse  chose  m'avez 
«  icy  déclairée  et  forte  t'i  croire,  si  n'en  visse  Vap- 
«  parenee.  »  (Percef.  Vol.  VI,  fol.  128,  R-  col.  1  et 2. 
—  Voy.  Apparent  et  Apparer.) 

VARIANTES  : 
APPARENCE.  Orth.  subsist.  -  Percef.  Vol.  \'I,  fol.  128. 
Aparance.  Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  p.  157. 
App.\rance.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  27,  col.  1. 

Apparent,  participe.  Paroissant,  qui  se  fait 
voir,  qui  se  voit.  On  observe  que  ce  participe  du 
verbe  apparer  a  toujours  eu  les  significations  avec 
lesquelles  il  subsiste.  Dans  un  sens  relatif  îi  celui 
du  substantif  apparence,  représentation  extérieure, 
il  a  signifié  et  signifie  encore  une  personne  qui  re- 
présente dans  une  ville,  en  y  paroissant  avec  un 
extérieur  qui  la  dislingue.  Mais  quelle  que  soit 
aujourd'hui  la  représentation  d'un  Ambassadeur 
extraordinaire,  on  ne  le  qualifie  plus  de  «  très- 
"  haut  et  Ivès-apparent  extraordinaire  Ambassa- 
«  deur.  »  (Mém.  de  Bassomp.  T.  II,  p.  208.) 

L'acception  d'apparent  étoit  la  même  que  celle 


(I)  L'étymologie  condamne  la  forme  inventée  an  K\v  siècle;  en  effet,  les  adjectifs  en  eus,  aus,  n'avaient  qu'une  forme 
au  singulierpour  le  masculin  et  le  féminin  ;  de  là  vient  qu'aux  xif  et  xiir'  siècles  on  disait  formait,  léahnoit;  au  xiv»  siècle, 
on  dit  par  analogie  rjrandewcnt,  comme  bonnement,  mais  prudemment,  apparemment  et  quelques  autres,  restèrent  luiéles 
à  l'étymologie.  (n.  e.) 


AP 


—  41  — 


AP 


û'apparer,  paroitre,  lorsqu'on  disoit,  l'«  l'apparent 
de  quelqu'un,  pour  signifier  dès  qu'il  parut  : 

Pas  ne  me  vit  si  tost  que  je  le  vi  ; 
Bien  l'aperçus  à  l'apparant  de  li. 

Froissart,  Poès.  MSS.  p.  74,  col.  1. 

2"  A  Vapparent  de  tous,  pour  signifier  en  se 
faisant  voir,  en  se  faisant  connoitre  à  tous  :  «  La 
«  condicion  de  la  maulvaistié  est  telle  que  d'elle- 
«  niesme,  où  elle  n'a  nuls  conlredisans,  sideschiet- 
«  elle  et  se  publie  à /'fly;a?'rt«/  de  tous.  ■>  (Sainlré, 
page  91.) 

3°  A  l'apparent  du  monde,  pour  signifier  au  vu  et 
au  sç.u  de  tout  le  monde.  «  Le  Comte  de  Nevers... 
«  venoit  d'un  loingtain  voyage...  Si  fut  voulontiers 
«  veu....  en  toutes  les  seigneuries  et  terres  de  son 
«  père;  desquelles  il  estoit  à  l'apparent  du  monde, 
«  héritier  et  successeur.  »  (Froissart ,  Vol.  IV  , 
p.  288  et  289.) 

La  préposition  à  étant  supprimée,  on  disoit  en 
parlant  d'une  personne  triste  et  qui  paroissoit  l'être, 
qu'elle  étoit  triste  l'aparent  ;  façon  de  parler  ellipti- 
que qui  semble  particulière  à  Ph.  Mouskes  : 

Et  sa  maisnie  et  si  parent 
Furent  moult  triste  l'aparent. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  6-18,  etc. 

Dans  le  même  auteur,  être  joiant  et  par  deçà  et 
l'aparent  signifie  probablement  être  plus  joyeux 
qu'on  ne  le  paroit. 

Joiant  en  furent  leur  parent 
Et  par  deçà  et  l'aparent. 

Idem,  p.  623. 

Enfin  le  participe  apparent  précédé  de  l'article 
le,  étoit  de  même  signification  que  le  substantif 
apparence,  existence  visible  ou  intelligible,  exis- 
tence réelle  ou  idéale.  (Voy.  Apparence  et  Appareh.) 

n'entendoit 

Fors  au  chanter,  ainsi  qu'il  le  monstroit. 
Par  l'apparent. 

Froissart,  PoSs.  MSS.  p.  74,  col.  1  et  2. 

Les  Lettres  patentes  sont  des  Lettres  dont  on  voit 
le  contenu,  parce  qu'on  les  délivre  tout  ouvertes  ; 
de  là,  elles  auront  été  nommées  Lettres  apparans. 
(Voy.  Chron.  Fr.  de  G.  de  Nangis,  .ms.  an.  1291.) 

On  distingue  dans  l'ancienne  Coutume  de  Nor- 
mandie, deux  espèces  àeLoix  apparentes,  que  plus 
communément  on  appeloil  Loix  apparissantes. 
(Voy.  Apparoissant.) 

VARIANTES  : 
APPARENT.  Orth.  suhsist.  -  Froissart,  Vol.  IV,  p.  289. 
Af.^rant.  Saintré,  page  91. 
Aparent.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  623,  648,  etc. 
APPARANT.  Percef.  Vol.  IV,  fol.  115,  R»  col.  1. 

Apparer,  verbe.  Faire  apparoitre.  Apparoître, 
s'apparoitre.  Comparoître.  Paroitre,  se  présenter, 
se  faire  voir.  Paroitre,  être  visible,  évident,  vrai- 
semblable, intelligible.  Faire  paroitre,  rendre  évi- 
dent, prouver. 

On  ne  croiroit  pas  que  la  signification  d'un  verbe 
essentiellrment  neutre  ait  quelquefois  été  active,  si 
on  n'en  donnoit  la  preuve. 


Or  dist  li  uns  des  mors  as  vis  (li  : 
Seignor,  regardez-nous  as  vis  (2)... 
Diex  nous  a  à  vous  aparits, 
Pour  ce  que  vous  melons  à  voie 
De  bien  ;  et  Diex  vous  i  avoie. 

Dits  de  Baudoin  de  Condé,  MS.  de  Gaignat,  fol.  311,  V  col.  3. 

Dans  le  sens  d'apparoître,  s'apparoitre,  verbe  qui 
signifie  particulièrement  l'apparition  d'une  subs- 
tance spirituelle  et  invisible,  ([ui  se  fait  voir  sous 
une  forme  matérielle,  on  a  dit  en  parlant  de  l'at- 
tente et  de  la  venue  du  Messie  :  «  Près  est  nostre 
"  Sires...  et  tost  apparrit;  ne  défaillis  mie,  etc.  » 
(S'Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  96.)  «  Quant  nos  eswar- 
"  dames  oîi  il  venoit,  si  nos  apparaît  une  mervil- 
«  louse  humiliteiz.  (Id.  ibid.  p.  9.)  Les  apparitions 
de  la  Divinité  sont  attestées  par  l'Ecriture  sainte. 
H  Derechief  s'a/j;jrtr(/<  Deus  en  Sylo;  kar  révélé  se 
«  fud  à  Samuel  en  Sylo,  selunc  sa  parole.  »  (Livres 
des  Rois,  MS.  des  Cord.  fol.  5,  V°  col.  1.) 

On  désignoit  le  Juge  à  qui  l'on  se  présente,  et 
non  la  partie  adverse  avec  laquelle  on  paroit  devant 
lui,  lorsque  dans  le  sens  de  comparoître,  on  disoit 
apparer  ou  apperer.  «  Nul  ne  doit  départir,  depuis 
■<  que  renablement  avéra  esté  somouns,  ne  dédei- 
«  gner  de  apper  (3)  en  Court,  sinon  par  renables 
«  excusacions.  »  (Britton,  des  Loix  d'Angl.  fol.  281.) 
Cette  abréviation  apper  qu'on  retrouve  (id.  ibid. 
fol.  280,,  prouveroit  seule  la  réalité  de  l'infinitif 
apparer  ou  apperer,  quand  d'ailleurs  elle  ne  seroit 
pas  démontrée  par  la  conjugaison  oîi  l'on  voit  à 
l'indicatif  présent,  1"  pers.  'du  plur.  apparons  ou 
apperons,  etc.  à  l'indicatif  imparfait,  3=  pers.  du 
sing.  apparoit  ou  appéroit,  etc. 

La  signification  de  cet  ancien  verbe  apparer  ou 
s  apparer,  n'étoit  pas  moins  générale  que  celle  de 
notre  verbe  paroitre,  se  présenter,  se  faire  voir. 
«  Ensi  ke  nos,  à  moens  appariens  vestit  de  confes- 
"  sion,  ki  ne  poons  mie  aparoir  en  vesture  d'inno- 
«  cence  et  de  justice.  «  (S*  Bcni.  Serm.  fr.  mss. 
page  63.) 

Se  tan  tost  armez  n'apparons 
Pour  secourir  ce  fin  amant. 
Perdu  est  :  à  Dieu  le  commant. 

Rorn.  de  la  Rose,  vers  15887-15889. 
Mon  père  voi  dedens  seoir  : 
Mais  ge  ne  l'oserai  veoir... 
Trop  sui  mesfez  :  mais  tote  voie 
M'estuet  que  devant  li  m'apere 
Ge  sui  ses  filz,  il  est  mon  père. 

Corlois  d'Artois,  MS.  de  S'  Gerni.  fol.  85,  R»  col  2. 

Ce  verbe  qui  désignoit  la  présence,  l'existence 
visible  des  personnes,  désignoit  aussi  celle  des 
choses  physiques  et  morales  ;  les  signes  plus  ou 
moins  vrais  de  cette  existence;  une  existence  plus 
ou  moins  sensible  de  choses  visibles  ou  seulement 
intelligibles.  «  xipeiret  donkes  li  jors,  etc.  » 
(S-  Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  187.) 

La  nuiz  s'en  vet,  li  jors  aperl. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'  7615,  T.  H,  fol.  176,  V-  col.  I. 

On  a  dit  en  parlant  de  Dieu  :  «  Sa  poxance  appa- 
«  rut  d'avant  en  la  création  des  choses,  et  sa 
«  sapience  apparoit  el  governement  des  choses  ke 


(1)  Vivans. 

a. 


(2)  Visages.  -  (3)  Ne  serait-ce  pas  un  simple  oubli  de  l'abréviation  per'i  (n.  e.) 


AP 


-  42 


AP 


«  créeies  estoicnl  :  mais  li  benigiiiteiz  de  sa  mis(5ri- 
«  corde  est  or  maisineuienl  apparue  en  son  liuma- 
"  nileil.  »  (S'  Bern.  Serm.  fr.  m^s.  p.  124.) 

Dame,  la  foiz  apparra  jà 

Que  vous  menez  à  vos  Seigneurs  ; 

lit  la  loiauté  des  amours 

Que  les  Uaraoiselles  demainent, 

Pour  qui  les  Chevaliers  se  painent. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  •!C15.  T.  I,  fol.  113.  V-  col.  2. 

En  parlant  des  traces  du  sanglier,  on  a  dit  :  «  Les 
«  os  du  pie  apparent  partout  où  il  marche.  » 
iModus  et  lUicio,  ms.  fol.  44,  R°.) 

C"esl  par  une  comparaison  très  naturelle  de  ce 
qui  est  intelligible  avec  ce  qui  est  visible,  ([u'appa- 
rer  ou  apperer  signifioit  élre  intelligible. 

Il  barbelole 

Ses  mots,  tant  qu'on  n'y  entend  rien. 
Il  ne  parle  pas  Chrestien, 
Ne  nul  langage  qui  apure. 

Farce  de  Palhelin,  p.  63  et  64. 

L'acception  d'apparer  ou  apperer,  être  intelligi- 
ble, est  une  extension  de  Tacception  propre  et  figu- 
rée paroîti'e,  être  visible,  évident,  ou  seulement 
vraisemblable. 

Dans  le  sens  de  paroilre,  être  visible,  être  évident, 
on  dit  encore  au  Palais,  «  il  appert  \^Av  tel  acte,  s'il 
"  vous  appert  que  cela  soit  :  »  expressions  dans 
les(iuelles  appert  conserve  une  signiOcalion  qui  a 
été  très-générale ,  et  dont  on  trouve  partout  la 
preuve.  Qu'il  suffise  donc  ici  de  remarquer  que  cette 
signification  neutre  A' appert  étoit  active,  lorsqu'on 
disoit  :  »  Nul  ne  sera  receu  ii  dire  que  Advocat  luy 
«  ait  esté  baillé  par  distribucion,  se  partie  adverse 
«  le  débat;  se  celuy  qui  l'alègue,  ne  \' appert  par 
«  procès  et  acte  présentement.  »  (Ord.  des  D.  de 
Bretagne,  fol.  -li»0,  11".) 

Peut-être  qu'en  parcourant  les  passages  dans 
lesquels  nous  avons  cherché  la  preuve  des  significa- 
tions du  verbe  apjparer,  on  s'étonnera  d'y  lencon- 
Irer  ajiperl,  apparut,  appuritst,  etc.  Quoique  la 
formation  de  ces  modes  et  temps  n'ait  aucune  ana- 
logie avec  linlinitif  des  verbes  apparoir  et  appa- 
raître, il  suffit  qu'ils  aient  suppléé  et  qu'ils  sup- 
pléent encore  quelques-uns  de  ceux  qui  manquent 
à  ces  mêmes  verbes,  pour  faire  croire  qu'ils  appar- 
tiennent à  la  conjugaison  de  l'un  ou  de  l'autre.  Il 
est  vrai  qu'on  n'aperçoit  pas  plus  le  principe  de  la 
formation  de  ces  modes  dans  l'infinitif  françois  du 
verbe  apparer,  que  dans  celui  des  verbes  apparoir 
et  apparaître.  Aussi  croit-on  qu'ils  sont  étrangers 
à  la  cuiijiigaison  françoise  de  chacun  de  ces  trois 
verbes  ;  qu'ils  n'appartiennent  pas  plus  à  celled'a/j- 
paroitre  qu'à  celle  A' apparoir  ou  à' apparer  ;  qu'ils 
sont  un  supplément  de  modes,  commun  à  la  conju- 
gaison de  chacun  de  ces  trois  verbes  défectifs.  (Voy. 
Ai'rAnoiu  et  Ari'ARoisTiu:.)  On  préfère  cependant  pour 
la  réunion  des  modes  dont  il  s'agil,  sous  une  même 
conjugaison,  linlinitif  apparer,  parce  que  dans 
l'origine  de  notre  langue,  les  verbes  françois  se 
modifioienl  à  l'imitation  des  verbes  latins,  souvent 
même  avec  une  lelle  exactitude  que  l'infinitif  amer, 
en  latin  amare,  faisoit  à  la  3'  pers.  du  sing.  de  l'in- 
dicatif présent  amet ,  en  latin  amat,  ù'ia  même 


personne  de  l'indicatif  imparfait  amevet,  en  latin 
amabal,  etc.  11  est  donc  assez  probable  que  suivant 
la  règle  de  cette  modification  imitative,  les  modes 
appert,  apparut,  appurrit  et  au  très  n'appartiennent 
pas  moins  à  la  conjugaison  du  verbe  apparer,  en 
latin  apparere,  que  ceux  dont  la  formation  et  la 
terminaison  semblent  plus  propres  au  génie  de 
notre  langue.  On  ajoute  que  ces  modes  françois  ne 
sont  eux-mêmes  que  les  coniraclions  et  altérations 
des  modes  latins.  En  comparant  la  conjugaison  du 
verbe  latin  apparere  a.\eG  celle  du  françois  fl/;;;a;'er, 
on  acciuiert  la  preuve  d'une  vérité  particulière  qui 
peut  être  généralisée. 

CûNJCG. 

Apurai,  ind.  fut.  J'apparoitrai.  (Psautier,  ms.  du  R.) 
Aparege,  subj.  pr.  Apparoisse.  (Ane.  Cout.deBret.) 
Aparruiii,  ind.  fut.  Apparoitrons.  (Liv.  des  Rois.) 
Aparuit,  ind.  prêt.  Parut.  (S"  Bern.  Serm.  fr.^ 
Aparust,  subj.  impaif.  Parût.  (Id.  ibid.  p.  2.3.) 
Apeirt,  ind.  pr.  Paroit.  (Chans.  fr.  .ms.  de  Berne.) 
Aperche,  subj.  prés.  Paroisse.  (Règle de  S'  Benoit.) 
Apierge,  subj.   pr.    Comparoisse.  (Britton,  des 

Loix  d'Angleterre,  fol.  172,  V°.) 
Appaira,  ind.  fut.  Apparoilra.  (Ord.  T.  111,  p.  1G9.) 
Appaire,  subj.  prés.  Paroisse.  (Crétin,  p.  213.) 
Appara,  ind.  fut.Comparoitra.  (Brit.  Loixd'Angl.) 
Apparent,  apperent  et  aperent,  ind.  prés.  Appa- 

roissent,  paroissent.  (Le  Jouvencel,  .mss.  p.  301.) 
Appariensai  apuriens,  subj.  prés.  Paroissions; 

en  latin  appareaiitus.  ;S'  Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  G3.) 
Apparuient  et  apperoient,  ind.  imp.  Paroissoient  ; 

en  latin  apparebant.  (S'  Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  11.) 
Apparoit  et  apperoit,  ind.  imp.  Paroissoit;  en 

latin  apparebat.  iS'  Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  124.) 
Apparons  et  appcrons ,  ind.   prés.   Paroissons. 

'Rom.  de  la  Rose,  vers  15887.) 
Apparra  et  apperra,  ind.  fut.  Paroitra.  (Rom.  de 

la  Rose,  vers  2007.) 
Apparrat,  ind.  fut.  Apparoîtra,  paroitra  ;  en  latin 

apparebit.  (S'  Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  101  et  154.) 
Apparrit,  ind.  fut.  Paroitra.  (Id.  ibid.  p.  96.) 
Apparrunt  et  apperront,  ind.  fut.  Apparoitront, 

paroîtront;  en  latin  apparebnnt.  (Id.  ibid.  p.  34.) 
Apparut,  ind.  prêt.  Parut.  (S'  Bern.  Serm.  fr.) 
Appeiret  e[  a  pe  ire  t,  suh'}.  prés.  Apparoisse,  pa- 
roisse; en  latin  appareat.  [là.  ibid.  p.  118  et  119.) 
Apper,  impér.  Parois  ;  en  latin  appare.  (Id.  ibid.) 
Apper  (J').  Je  parois.  (Rob.  Estienne,  Gram.  fr.) 
Appere  et  apere,  sub].  prés.  Paroisse.  (Rom.  de 

la  Rose,  vers  G944.) 
Apperez,  ind.  prés.  Vousparoissez.  (R.  Estienne.) 
Appérois,  ind.  imp.  ïu  paroissois.  (Id.  ibid  ) 
Appcroije  [y],  ind.  imp.  Je  paroissois.  (Id.  ibid.) 
Appers,  ind.  prés.  Tu  parois.  (Id.  ibid.) 
Appert  et  apert,  ind.  prés.  Paroit;  en  latin  appa- 

ret.  (S'  Bern.  Serm.  fr.  ms.  p.  92  et  217.) 
Apperte,  subj.  prés.  Paroisse.  (G.  Macliaut,  .ms.i 

VARIANTES  : 
APPARER.  S'  Bern.  Serm.  Ir.  MSS.  page  124. 
Aparer.  S'  Bern.  Serm.  Ir.  MSS.  page  101,  etc. 
-Aperer.  Id.  ibid.  p.  350. 
Apperer.  Percef.  Vol.  lY,  fol.  122,  R»  col.  1,  etc. 


AP 


-  43 


AP 


Apparesser,  verbe.  Rendre  paresseux  et  lâche, 
affoiblir.  Devenir  paresseux  et  làctie  ,  s'affoiblir.  Il 
semble  que  ce  soit  dans  un  sens  analogue  à  celui  du 
mot  g:rec7ràe£<r(f(l),  en  latin  remisf<io,  debilitatio, 
qu'on  a  dit  au  propre  et  au  figuré  :  «  Le  feu  apparesse 
«  le  cors  et  débilite  l'entendement  et  le  cerveau.  " 
(Triomph.  de  la  noble  Dame,  fol.  110,  V°.)  «  Nous 
«  apparesserons  nos  cueurs  qui  maintenant  pensent 
«  petit  une  grant  chose.  »  (Le  Jouvencel,  ms.  p.  138.) 

....  Oidive  (2>  atrait  mauveistié, 
Et  maint  homme  a  aparaicié. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  81,  V"  col.  2. 

La  signification  de  ce  verbe  étoit  neutre ,  lors- 
qu'en  parlant  d'un  Yavasseur  parvenu  à  certain 
degré  d'élévation,  on  disoit  : 

Est  si  haut  mis  que  nul  lionte 
Ne  puet  à  son  cors  aprocliier, 
S'il  n'en  chiet  par  aperecier  : 
Or  se  gart  qu'il  ne  s'apérèce, 
Si  ert  toz  jors  en  grant  haulèce. 

Fabl.  MS    du  K.  n"  7218,  fol.  255,  V'  col.  2. 

On  voit  qu'il  s'employoit  aussi  d'une  manière  réci- 
proque. «  Pour  garder  que  les  forces  de  nostre 
«  estomach  ne  saparoissent,  il  est  bon  une  fois  le 
<>  mois  les  éveiller  en  s'enivranl.  »  (Essais  de  Mon- 
taigne, T.  II,  p.  18.  —  Voy.  Ai'PARESsiR.) 

V.\RIANTES  : 

APPARESSER.  Le  Jouvencel,  MS.  p.  138. 
Aparaicier.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  81,  V»  col.  2. 
Aparasser,  Aparecer.  Celthell.  de  L.  Trippault. 
Ap.\roisser.  Essais  de  Montaigne,  T.  II,  p.  18. 
Aperecer.  Fal)l.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  118,  V»  col.  I. 
Aperecier.  Ibid.  fol.  255,  V»  col.  2. 

Apparessir  (s'),  verbe.  Devenir  paresseux,  s'af- 
foiblir par  l'inaction.  (Yoy.  Nicot ,  Dict.)  «  Quelle 
••  raison  y  avoit-il  qu'ayans  les  grandes  forces  que 
V  le  Roy  avoit  assemblées  si  chèrement,  ils  s'arres- 
«  lassent  et  apparessissent  au  même  camp  où  ils 
«  s'étoienl  fortifiés.  •>  (Du  Bellay,  Mém.  liv.  vu,  fol. 
234,  Ro.  —  Voy.  Apparesser  et  Paresse.) 

Apparfondir,  verbe.  Faire  plus  profond.  Faire 
profond. 

On  ne  voit  dans  l'orihographc  apparfondir  qu'un 
etïet  de  la  prononciation  foible  et  adoucie  de  pro  (3) 
dans  approfondir.  (Voy.  P.\nFo.ND  ci-après.) 

Il  semble  que  ce  soit  en  vertu  de  la  préposition 
à,  i\\i  apparfondir,  le  même  qu'approfondir,  signi- 
floit  rendre  plus  profond,  faire  plus  profond.  (Cot- 
grave  et  Nicot,  Dict.)  «  Fist  très-bien  garnir  la  ville 
«  et  derrière  et  devant,  haucier  les  murs,  et  les 
>'  fossez  d'environ  aparfondir.  »  (Hist.  de  B.  du 
Guesclin,  par  Ménard,  p.  183.) 

L'énergie  de  la  préposition  n'étant  pas  sentie,  ce 
verbe  n'aura  signifié  rien  de  plus  que  pnrfondre, 
rendre  profond ,  faire  profond.  (Cotgrave ,  Dict.) 
«  On  doit  aparfondir  les  fossez  tellement  que  nulle 


«  mine  ne  puisse  passer.  «  (Le  Jouvencel ,  fol.  87. 
—  Voy.  Parfondre  ci-après.) 

variantes  : 
APP.\RFONDIR.  Cotgrave,  Oudin  et  Nicot,  Dict. 
Aparfondir.  Hist.  de  B.  du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  183. 

Appariation,  snhst.  fém.  Appariement,  accou- 
plement. Espèce  d'association. 

Le  verbe  aparier  signifloit  joindre  le  pair  au 
pair,  accoupler.  De  là,  la  première  acception  du 
?,ubsti\\\\.ii  appariation.  (Cotgrave  et  Oudin,  Dict.  — 
Voy.  AiTARiE.MENT  ci-dcssous.) 

Anciennement,  lorsqu'un  Seigneur  ecclésiastique, 
un  Evêque,  un  Abbé,  craignoit  qu'on  n'attaquât  les 
droits  de  sa  seigneurie  et  de  sa  justice,  il  s'associoil 
un  Seigneur  laïque,  un  Duc,  un  Comte  assez  puis- 
sant pour  faire  respecler  ces  mêmes  droits  ;  et 
l'association  au  moven  de  laquelle  le  Seigneur  laï- 
que devenoit  pair,  égal  au  Seigneur  ecclésiastique 
dans  l'administration  de  la  justice  seigneuriale, 
étoit  une  appariation  plus  connue  sous  le  nom  de 
pariage.  {\oy.  Cotgrave,  Dict.  —  Laurière,  Gloss. 
du  Dr.  fr.)  Il  étoit  de  la  politique  des  Rois  de  la 
troisième  Race,  de  multiplier  ces  associations  entre 
eux  et  les  Seigneurs  justiciers,  ecck'siastiques  ou 
laïi|ues,  parce  qu'en  s'associant  à  leur  pouvoir,  ils 
étendoient  les  bornes  de  l'autorité  royale  (4).  (Voyez 
Pariage  ci-après.) 

Appariement,  subst.  masc.  Accouplement. 
Comparaison.  Significations  analogues  à  celles  du 
verbe  aparier,  accoupler,  comparer.  (Voy.  Aparier.) 

variantes  : 
APPARIEMENT.  Orlh.  subsist.  -  Dict.  de  Trévoux. 
Appariem.\nt.  Monet,  Dict. 

Apparisiaire,  subst.  masc.  Nonce,  Légat.  C'est 
le  mot  .ipocrisiaire  défiguré  par  une  faute  d'im- 
pression. Lorsqu'on  lit  (Traité  de  l'Orig.  des  Cardi- 
naux, p.  19  et  "20,  que  «  les  Àpparisiaires  envoyez 
«  anciennement  par  les  Papes  en  la  Cour  de  Cons- 
«  tantinoples  auprès  des  Empereurs,  estoient  vray- 
«  semblablement  ....  des  Diacres  Cardinaux  .  .  . 
«  qui  depuis  à  la  différence  de  simples  Diacres 
«  furent  appeliez  Archidiacres  »,  il  est  visible  que 
ces  .ipparisiaires  ne  sont  autres  que  les  Apocri- 
siairc's  qui  résidoient  à  Consfantinople  en  qualité 
de  Légats  ou  Nonces  du  Pape.  Ces  Nonces  ou  Légats, 
qui  éloient  ordinairement  Diacres,  recevoient  les 
réponses  de  l'Empereur  aux  demandes  du  Pape  et 
l'en  informoient.  De  là,  on  les  nommoil  .ipocrisiai- 
res,  mot  formé  du  grec  dnixonnç,  en  \alin  responsio. 
(Voy.  Du  Cange,  Glôss.  lat.  T.  I,  col.  55G.  —  Dict.  de 
Trévoux,  au  mot  Apocrisiairc  ) 

Appariteur, s/(^s^  masc.  Domestique  ;  Sergent; 
Huissier  ;  Bedeau  ;  Bourreau.  On  a  regardé  les 
Domestiques,  les  Sergens ,  les  Huissiers ,  les  Be- 


(1)  Paresse  vient  de  pigritia,  par  la  forme  intermédiaire  perece,  en  provençal  pereia.  (n.  e.)  —  (2)  Oisiveté.  —  (3)  Nous  ne 
voyons  pas  que  par  ait  un  son  plus  faible  que  pro  :  on  a  formé  le  composé  parfoml,  comme  parmi,  parjure.  (N.  E.)  — 
(4)  Ainsi  les  évêques  de  Mende,  de  Viviers  et  du  Puy,  seigneurs  de  leurs  diocèses,  furent  tellement  inquiétés  par  les  baillis, 
qu'ils  donnèrent  au  roi  la  moitié  de  leurs  domaines  en  pariage.  L'administration  restait  indivise,  mais  était  exercée  une 
année  par  les  agents  du  roi,  une  autre  par  ceux  de  l'évêque.  Parfois  encore,  le  prélat,  comme  l'archevêque  de  Lyon  en 
1312,  était  dédommagé  par  le  don  de  belles  terres  éloignées  de  son  diocèse.  (N.  e.) 


AP 


AP 


deaux,  les  Bourreaux,  comme  asservis  à  paroitre, 
à  être  lonjours  présens  devant  ceux  ;\  qui  ils  doi- 
vent obéir,  en  hdin  parère,  lorsqu'on  les  a  désignés 
par  le  mol  Appariteur,  en  latin  Apparitor.  <•  Quand 
«  jadis  en  Caulc,  par  l'insUlulion  des  Druides,  les 
«  serfs,  varlets  et  appariteurs  estoieut  touts  vifs 
«  bruslez  aux  l'unerailles  ('l  exèques  de  leurs  Mais- 
«  1res  et  Seigneurs ,  n'avoienl-ils  belle  paour  que 
«  leurs  Maislres  et  Seigneurs  mourussent  ;■  »  (Rabe- 
lais, T.  III,  p.  17.) 

Les  Apparileiirs  étoleut  à  Rome,  ce  que  sont  en 
France  les  Sergens  et  les  Huissiers  qu'on  a  aussi 
nommés  Apjiariteurs.  (Voy.  Mém.  de  Dassomp.  T.  I, 
p.  314.  —  Cotgrave,  Oudin  et  Nicot,  Dict.)  ■<  Chic- 
«  quanous  ...  le  pria  ne  prendre  en  mal,  si  de  la 
«  part  du  gras  Prieur  il  le  citoit  ;  remontra  par 
«  harangue  diserte  comment  il  estoit  personne  pu- 
'<  blic(iue,  Serviteur  de  moynerie.  Appariteur  de  la 
«  mitre  abbatiale.  »  (Rabelais,  T.  IV,  p.  G2.)  Les 
Sergens  de  la  Justice  ecclésiastique,  les  Bedeaux 
qui  portent  des  masses  devant  le  Recteur  de  l'Uni- 
versité et  les  quatre  Facultés,  sont  connus  encore 
sous  le  nom  d'Appariteurs  :  nom  qui  dans  la  signi- 
fication de  Bourreau,  étoit  sans  doute  aussi  odieux 
en  France  qu'il  le  fut  jamais  ;i  Rome,  où  la  condi- 
tion des  Appiirileurs  étoit  si  méprisée  que  pour 
marque  d'ignominie,  le  Sénat  ordonna  qu'une  cer- 
taine ville  dontles  habitanss'étoient  révoltés,  seroit 
obligée  de  fournir  des  Appariteurs  aux  Magistrats. 
«  L'Appariteur  estoit  venu  pour  les  occire.  »  (Triom- 
phe des  neuf  Preux,  p.  130,  col.  2.  —Voy.  Cotgrave 
et  Nicot,  Dict.  —  Dict.  de  Trévoux.) 

VARI.\NTES  : 
APPARITEUR.  Cotgrave,  Oudin  et  Nicot,  Dict. 
Apariteur.  Percef.  Vol.  II,  fol.  39,  V»  col.  2. 

Apparition,  subst.  féin.  Epiphanie.  Action  de 
paroitre,  de  se  faire  voir.  Espèce  de  trappe. 

Dans  l'origine  du  Christianisme,  la  naissance  de 
Jésus-Christ ,  sa  première  apparition ,  comme 
homme,  étoit  propiement  l'Epiphanie;  mot  dont  la 
signification  est  la  même  que  celle  d'apparition. 
Mais  lorsque  le  Pape  Jules  eut  appris  aux  Chrétiens 
du  IV'  siècle,  à  distinguer  la  Nativité  de  l'Epiphanie, 
le  mot  Epiphanie  signifia  Vapparition  de  Jésus- 
Christ,  moins  comme  homme  que  comme  Dieu  ; 
Vapparition,  la  manifestation  de  sa  Divinité.  Quoi- 
qu'il parût  homme,  il  fut  reconnu  pour  Dieu,  par 
les  trois  Rois  qui  lui  offrirent  de  l'encens  et  l'ado- 
rèrent; par  le  peuple  attentif  à  la  voix  céleste  qui 
se  fit  entendre  le  jour  de  son  baptême dansleseaux 
du  Jourdain  ;  par  les  témoins  de  son  premier  mira- 
cle, lorsqu'en  Souverain  de  la  nature ,  il  changea 
l'eau  en  vin  aux  noces  de  Cana.  Telles  sont  les  trois 
apparitions  ou  manifestations  de  la  Divinité  de 
Jésus-Christ,  célébrées  peu  de  temps  après  sa  Nati- 
vité, sous  le  nom  d'Epiphanie  ou  de  fête  de  VAppa- 
rition;  «  car  épifaine  valt  altretant  cum  appari- 
«  dons.  »  (Voy.  S' Bern.  Serm.  fr.  mss.  page  211.) 
Non-seulement  il  a  voulu  naître,  mais  il  a  voulu 
être  connu;  «et  por  cette  conissance  faisons  nos 
«  ceste  feste  de  VAparicion Li  troi  Roi  ... . 


«  ensevirent  lo  conduit  de  la  novele  estoile  et  si 

«  aorerent  le  novel  enfant  de  la  Virgine si 

«  cum  Deu De  cesle  sole  aparition  ne  fait- 

«  om  mies  selement  la  feste,  mais  aussi  d'une 
•<  altre,  etc.  »  (Id.  ibid.  p.  198  et  200.)  «  Quoiqn'en 
«  la  primiere  il  apparut  vraiz  hom,  l'adoration  des 
"  trois  Rois,  et  l'otîraude  de  l'encens  mostret  bien 
"  qu'il  conurent  k'il  Deus  estoit.  »  (Id.  ibid.  p.  204 
et  20.").)  «  En  la  seconde  aparicion  mostrat  awerte- 
'<  ment  li  tesmoignages  del  peire  k'il  estoit  vraye- 
«  ment  li  filz  de  Deu  ;  et  en  la  tierce  apparut  bien 
"  k'il  estoit  vrais  Deus ,  lai  où  par  son  comande- 

■1  meut  fut  mueye  li  nature mervillous  fut 

«  li  muemenz  de  l'awe  ;  mervillous  fust  li  tesmoi- 
■<  gnaiges  Saint  Johans  et  del  Colon,  et  de  la  voix  del 
"  Peire  ;  mais  ceu  fut  ancor  plus  mervillouse  chose 
«  ke  li  troi  Roi  lo  porent  conoslre.  »  (Id.  ibid.) 

C'est  donc  à  cause  de  la  manifestation  de  la 
Divinité  de  Jésus-Christ,  et  non  à  cause  de  l'appa- 
rition de  l'étoile  qui  annonça  sa  naissance,  qu'on 
a  nommé  fête  de  l'apparition,  la  fête  de  l'Epiphanie, 
de  la  manifestation  de  la  Divinité  de  Jésus-Christ 
aux  Gentils,  et  particulièrement  aux  trois  Rois  qui 
l'adorèrent.  Il  semble  néanmoins  qu'en  appelant  le 
jour  de  cette  fête,  le  jour  de  l'apparition  aux  Rois, 
on  ail  eu  en  vue  l'étoile  qui  leur  apparut.  En  disant 
que  «  le  dimenche  xir  jour  de  janvier  étoit  le  jour 
"  de  Vapparicion  au  Rois  ou  environ,  »  l'on  a  sans 
doute  voulu  désigner  un  des  derniers  jours  de  l'Oc- 
tave de  cette  fête  que  l'Eglise  célèbre  le  G  janvier. 
Il  est  visible  qu'il  faut  lire  apparicion  aux  Rois, 
dans  les  Lettres  de  Charles  VI,  en  date  du  mois  de 
février  i41.j.  «  Comme  le  Dimenche  xir  jour  de 
«  janvier  dernier  passé  qui  fu  le  jour  de  l'rtyjyjrtrt- 
«  cion  au  Rois  ou  environ,  Girart  le  Bicorgne....  et 
«  autres  feussent  allez  boire,  etc.  »  (Reg.  du  Très, 
des  Chartes.) 

On  soupçonne  avec  assez  de  vraisemblance,  que 
ce  fut  relativement  à  l'idée  de  l'apparilian  de  cette 
même  étoile,  que  le  Roi  Jean  ayant  rétalili  l'Ordre, 
la  Compagnie  des  Chevaliers  de  l'Etoile,  par  ses 
Lettres  du'6  novembre  1351,  «  voulut  faire  la  pre- 
«  mière  feste  et  entrée  de  la  dite  Compaignie  à 
«  Saint-Oùin,  la  veille  et  le  jour  de  V Apparition 
«  prouchene.  »  (Voy.  Ord.  T.  II,  p.  466.) 

La  signification  de  ce  mot  spécialement  consacré 
à  désigner  la  divinité  de  Jésus-Christ  manifestée  aux 
Gentils,  étoit  quelquefois  la  même  que  celle  d'rt/j;m- 
rement,  action  de  paroitre,  de  se  faire  voir  en  pu- 
blic. «  Le  Roy  Perceforest  est  gary  de  sa  maladie.... 
«  si  faict  assavoir...  h  tous  Gentilz-hommes....  et  à 
•'  toutes  Dames  et  Damoyselles  qu'ils  soient  à  sa 
«  venue  et  ù  son  apparition  devant  le  neuf  chastel, 
«  au  dernier  jour  de  may.  ■•  (Percef.  Vol.  II,  fol.  55, 

R°  col.  2.  —  Voy.  API'AREMENT.) 

On  sait  qu'aujourd'hui  le  mot  apparition  ne  se 
dit  plus  que  des  phénomènes  qui  apparoissent,  et 
des  objets  qui  d'invisibles  se  rendent  visibles.  C'est 
relativement  à  cette  dernière  signification,  que  par 
une  espèce  de  métonymie  assez  ordinaire,  on  nom- 
mo'\l, apparitions  les  trappes  par  où  les  diables,  les 


AP 


—  45  — 


AP 


fantômes,  les  ombres  apparoissoient  sur  le  Théâtre 
dans  les  anciennes  représentations  des  mystères' 
On  voyoït  dans  celle  du  mystère  de  S' Denvs  "Lucifer 
évoquant  tous  les  démons  qui  sortoient  chacun  par 
une  trappe  ou  apparition.  (Voy.  Ilist.  du  Th  fr 
T.  II,  p.  542.  —  Ibid.  p.  331.) 

VARIANTUS  : 
APPARITION.  Orth.  subsist.  -  Ord.  T  II  n  460 
Aparicion.  S>  Bern.  Serm.  fr.  MSS   n  217 
Aparition.  Id.  ibid.  p.  102 
Apparicion.  Id.  ibid.  p.  205. 

Apparoir,  verbe.  Paroître,  se  faire  voir.  L'inli- 
nitifdece  verbert;;/wroh-,  encore  usité  en  termes 
de  Palais,  ne  diffère  de  rinlinitifrt/j/wm-  que  par 
le  changement  assez  ordinaire  de  la  voyelle  é-  en  la 
diphthongue  oi  (1).  11  semble  même  prouvéquVw;«- 
roir.  plus  ancien  dans  notre  lan-ue  que  l'infinitif 
opparer  eloil  aussi  d'un  usage  plus  général  On  a 
dit  que  Dieu  voulant  se  faire  voir  au.x  hommes  et  en 
être  reconnu,  .<  si  non-digne  chose  ne  fu  mie  h  lui 
•'  apparoir  en  son  ymagine  à  ceos  qui  en  sa  subs- 
«  lance  n  el  poient  mies  conoistre  ;  ensi  ke  cil  mis- 
"  mes  aparust  hom  as  homes,  ki  avoit  fait  l'orne  à 
«  son  ymagine  et  à  sa  semblance.  »  (S- Bern  Serm 

vvn  Kf-^  "  ^^  ^-'^^  ''"  l"*^  'e  mesaise  que  le 
«  \adlant  homme  a  en  son  cueur  ne  lui  doit  avna- 
«  voir  au  visage.  »  (.loinville,  p.  UO  ) 

Plus  les  objets  sont  saillans,  plus'ils  paroissent 
et  mieux  ,1s  se  font  voir.  De  Ih,  l'expression  appa- 
ro?/; /(ors,cest-à-dire  saillir,  être  saillant,  en  latin 
nmnere.  (Monet,  Dict.  -  Voy.  Api-aroissa^ce  ) 

Les  modes  dont  la  conjugaison  d'apparer  est 
lormee,  étant  communs  à  apparoir,  on  auroit  rénn 
çcb  deux  verbes  de  même  origine  et  demêmesi-ni- 
ication,  SI  la  terminaison  en  or,-  ne  sembloit  être 
le  principe  de  plusieurs  modes  et  temps  particuliers 
au  xerhe  apjmron-;  tels  que  r.ndicatif  présent  !w 
paro/s,  etc.  1  indicatif  imparfait  fannaroissois  eu- 
l'impératif  apparais,  le  subjonctif  p^?ent7iï: 
rom.  etc.  Il  y  a  eu  dans  Torlhographe  de  ciSo- 
des,  des  variations  que  l'on  croit  devoir  remarquer. 

CONJUG. 

Aparege,  subj.  pr  Apparoisse.  (Ane.  Coût.  deBr  ) 
^pam^e,  subj  près.  Apparoisse.  (Ibid  fol  M  v°'\ 
Appar esse.  snhi.  prés.  Apparoisse.  (Faifeu,  p'so'i 
Apparest,  indic.  prés.  Apparoit.  (C.  Marot  ) 
Apparo/ssoye  (j'),  indic.  imparf.  J'apparo  ssois 
iRob.  Estienne,  Gram.  fr.  p  63)  "PP-" «issois. 

-4/;/;flro/s/   ind,  prés.  Apparoît.  (Desperiers  ) 
Apparoy  (j  ),  ind.  prés.  J'apparois.  (R.  Estienne.) 


Dans  un  sens  analogue  à  celui  de  l'expression 
"  apparoir  hors,  Vapparoissance  d'une  chose  nui 
«  passe  outre  une  autre,  une  apparoissance  an 
"  aehors,  «  etoit  ce  qu'en  termes  d'Architecture  on 
nomme  sai  le,  en  latin  e.rsfantia,  cminentia.  (Rob 
tstienne,  Nicot  et  Monet,  Dict.  -  Voy.  ArrARom.) 

Il  seroit  possible  que  relativement  à  l'idée  d'un 
objet  qui  paroit  et  se  voit  d'autant  mieux  qu'il  est 
plus  saillant,  plus  éminent,  on  eût  désigné  un 
homme  a  qui  la  vertu  ou  la  fortune  donne  une  cér- 
ame prééminence,  en  disant  qu'il  étoit  apparent, 
liomme  d  apparence.  (Voy.  Apparence.) 

ro^'^'^'^-^v?'*^''*']''  Participe.  Paroissant.   Appa- 
rent, visible,  évident.  ^^ 

On  n'aimoit  bien  et  l'on  ne  méritoit  d'être  aimé, 
dans  les  principes  très  rigoureux  de  l'ancienne 
galanterie,  qu  autant  qu'on  paroissoit  pâle  et  mai- 
g  e  et  qu  on  1  etoit  réellement  par  l'effet  d'un 
amour  extrême. 

El  bien  sçachiés  qu'amours  ne  laisse 
bur  Im  amant  couleur,  ne  gresse 
De  ce  ne  sont  apparissaiit 
Ceulx  qui  Dames  vont  trahyssant  • 
tA.  dient  pour  eulx  loseneiei- 
Qu;ilz  ont  perdu  boire  ct"mangier 
fct  je  les  voy  comme  Jengleurs, 
Plus  gras  qu'Abbés,  ne  que  Prieurs. 

fiom.  de  la  Rose,  vers  257G-2583. 

Dans  le  sens  où  nous  dirions  il  y  paroît,  il  y  na- 
roitra,  on  disoit  il  est  aparissant,  il  est  aparissant. 

W,  ■  ■  '  ;  ■•„■  •„■  •  ■  ^^  'i'^'''  si  vis  devant 
Que  ventaille  d'auberc  ne  li  fu  ainz  garant  ■ 
loz  les  jors  qu'il  vivra,  li  ert  aparissant. 

Psrton.  de  Blois,  MS.  de  S.  Gerra.  fol  127,  \"  col  2. 
Vos  fustes  longues  (2)  Clers,  bien  est  aparissant 
Ibid.  fol.  171  V"  cDl.l. 


''appar 

VARIANTES  : 

APPAROIR.  Orth.  subsist.  -  S-  Bern.  Serm  fr  n  ''"2 
Aparoir.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  63  ^'  " 

^n^i?o^n-c^!r''^''^^'  '"''*'•  A'w.  Apparence.  Saillie. 

La  signidcation  d  apparoissance  étoit  la  même  en 
gênerai  que  celle  d'apparence,  lorsqu'on  disoiVm- 
Tnvf  n  .''■""^  chose. physique  ou  moraîè  ffi- 
grave,  Oudin,  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict  ) 


«innn.?  '^"'^"*  *''''?'!'''"^'l^'^  'ï'^  ^e'-btî  apparoir 
nIvH  J  'î  qu'a  signilie  et  signifie  encore  apparent, 
paiticipedu  verbe  rt/jywr^/',  le  même  qu'wro/r 
[\  oy.  Apparoir.)  On  a  désigné  el  l'on  désigne  par  le 
mol  apparent ,  un  homme  dans  lequel  on  voit  de^ 
qualités  qui  le  distinguent,  un  homme  qui,  parois- 
sant avec  certains  avantages  naturels  ou  acquis 
semble  devoir  obtenir  sur  les  autres  une  sorte  de 
prééminence.  (Voy.  Apparoissa.nce.)  C'étoit  aussi  la 
signitication  d  apparaissant.  .  Hyrcan-Tobie  étoit 
«  moult  apparissanl  home,  »  eii  latin  vir  valdè 

f^  "".«i^  'n'^^'-  f^'^'^'  '^^^  Machabées,  ms.  des  Cordel. 
loi.  18J.)  On  croît  qu'il  faut  lire  apparissant  ou 
apparaissant  dans  cet  autre  passage  où  la  signin- 
cation  d  appaissant  semble  analogue  ;\  celle  d'»- 
rant  employé  quelques  lignes  plus  haut  •■  J'av 
"  fnli''^'l"'  ^'^  ^''  "ouvelles  d'ung  mien  cousin 
«  nomme  Passelyon,  auquel  tout  mon  désir  s'encline 
«  que  de  luy  je  soye  fait  Chevalier...  Quant  Passe- 
«  yon  entendit  Pedracus  qui  son  cousin  se  disoit, 
«  Il  en  fut  joyeulx  à  merveilles  ;  car  il  le  veoit  fort 
«appaissant,  etc.  .  (Percef.  Vol.  IV,  fol.  115.)  L'ac- 
ception à  apparissant  étoit  encore  la  même  que 
celle  A  apparent,    lorsqu'il    signifioit  une  chose 


-\%nte"mT^"*^'^^P"'^^P-'-é'«c"'e:elongaccentué,donne^ 


(N.  E.) 


AP 


_  /,f.  — 


AP 


apparente  sans  réalité  .«  Vos  ne  "^^^f^'/^Sel 
„  maraslrevosdisf?  Nonyoïrs,  f'^Ui  Emperere.  . 
«  mais  aparissant  fait  croire    »  (J^m     e  Doiopa 
thnc;  fnl  "'l'î^  Plus  souvent  il  desi^iioit  la  itaiiie 
ri^mipcho'se  apparente,  visible,  évidente,  dans  le 
s^i    ph  s  qu?o  1  moral.  On  nommoit  /,a's  ajm- 
,Ss«E    les  lices  d'un  champ-clos    lorsquelle^ 
éSiSÏS^ez  hautes,  pour  'l^^e^  comMUan^s^    ; 
«pnt  les  voir,  et  qu  en  les  voyant  il»  se  ga  dasstiu 
dPles  fra^d  ir.  «  En  toutes  batailles.  ..  doit  justice 
„  baiuèi    c  àmp    à  combattre  advenant   et  lices 
<  amaresSeï:  c'est  assavoir  à  gens  qui  se  com- 
baftent  de  cheval,  si  fortes  que  les  cHeyaulx  ne 
:^ÏÏul5eiUysir;etàgensde^e^ 

Tpôur  le  profit  commun  de  nostre  royaume,  etc.  - 

^*^DanIVancieS Coutume  de  Normandie,  la  Loi 
««»«  -LIS  opposée  à  la  Loi  simple,  étoil  a  même 
nïe  a  ïo  apparente,  aussi  nommée  Lo>  aperte 
?Vov  Api'ARrNT  )  Ces  dénominations  semblo.ent  d  au- 
taSt  plus  raisonnables  qu'on  étoit  persuadé  que  par 
ce  te  Si,  qui  étoit  souvent  la  Loi  du  duel  il  appa- 
??  ssoit  évidemment  du  bon  droit  des  parties 

Les  Querelles  personnelles  nées  de  dict  ou  de 
faict  se  tel  mino  ont  par  »  simple  loy  qm  se  nom- 
f  lit  Besrene  (1).  «  EUes  n:étoient  appelées  crimi- 
nelles qu'autant  qu'elles  naissoient  «  de  tel  ciime 
de  quoy  l'en  devoit  et  ponvoit  perdre  vie  o 
membre.  »  Alors  elles  éloient  décidées  par  Loy 
amassant.  (Voy..  Anc^  Coût,  de  Norniandie,  cbap. 
ivMi  fol   88  —  Ibid.  cbap.  i.xxxiv,  fol.  10 1.) 

la  même  Coutume  divise  les  querelles  de  posses- 
sion Si  querelles  de  meuble  et  en  querelles  de 
?èîre   Toute  querelle  de  meuble  ou  de  possession 
mouvable,  ciu  n'excédoit  pas  dix  sous,  ctoit  termi- 
ï  par  simple  Loy  ;  si  elle  excédoit  celte  somme, 
elle  éïït  terminée  par  Loy  appanssant[^  oy-  Ane 
Coût    de  Normandie,  cbap.  lxxxvii,  fol.  106,  \   et 
108  R°  ]  Ouant  aux  querelles  de  terre  ou  de  posbcs- 
sion  non  mouvable,  qu'on  nommoit  nnssx  querelle^ 
Saiil.r  par  la  raison  qu'en  Normandie  a  posses- 
sio       on  mouvable,  soit  noble  ou  roturière,  etoi 
communément  appellée  fief  ;  comme  el  es  avo.en 
diverses  causes,  il  y  avoit;.  diverses  Loix  es  ab  ic. 
„  k  les  terminer.  -  (Voy.  Ibid.  cbap.  L>^,^^^:";fo\- Y^'  • 
On  ajoute  que  .-  les  unes  querelles  fieffaulx  » 
étoient\erminées  par  «nqueste  et  es  aultres  pa 
I  mide  deresne  ;  "  que  lenqueste  faicte  par  juge 
«  ment  de  saigés  hommes,  par  raison  et  par  cous- 
«    ume  gardée  de  longtemps  étoit  une  enquesle  ce 
«  droitetdecoustume;  ^^^  l'enqueste  de  quoy  la 
«  matière  estoit  contenue  es  bnefz  de  «ou/f  'e  des- 
«  saisine ,  de  mort  d'ancesseurs  et  autres  bre  b 
«  dénommés  au  chapititrexç,    étoit  une  enqueste 
«  d'establissement.  «  (Voy.lhid.chap.xcn  fol.  112. 
En  voyant  les  querelles  fieffaulx  qu  oji  termino.t 
par  enqueste ,  opposées  aux  querelles  lieffaulx  tei- 


minées  par  'a  Lov  de  Desrcne,  Laurière  a  juge  qu  ici 
SîSes^te  est  opposée  à  la  Loy  de  Desrene,  comme 
l'est  ailleurs  à  la  Loy  simple,  V,  Loy  apparissm 
que  par  conséquent  toute  Enqueste,  même  1  mi- 
ùes  e  le  droic  et  de  couslume,  étoit  Loy  appans- 
Sf;  qu'enfin  il  n'y  avoit  d'autre  Loy  simple  que 
la  Loy  de  Desrene.  (Voy.  Gloss.  du  Dr.  1-k  T     i, 
p    6i  et  65.)  On  croit  néanmoins  avoir  quelque 
Maison  de  douter  qu'il  n'y  eût  de  simp  e  Loy  que 
celle  qu'on  nommoit  Desrene  ;  cest-à-due  «  dene- 
f 'ation  ou  espurgement  de  ce  dont  aulcun  est 
nuèrele-.  .  par  son  serment  et  le  serment  de 
pnlvmiiiv  aident    -.  (Voy.  Ane.  Coût,  de  Nor- 
^aS  e  cbap  \x  XV,  fol.  103.  Il  est  probable  qu'elle 
n'étoit  qu'une  espèce  de  Loy  simp  e  dont  la  deno- 
mSion  particulière  peut  à  la  vente  avoir  ete  gê- 
né 3iséë.(Vov.  DEsnAiNT..)  S'il  étoit  vrai  que  dans  le 
;    siïe  dont  il  est  question ,  la  Çesrene  opposee^^ 
l'Enqueste,  signifiât  en  gênerai  Loy  s  mpie    pai 
opïïsiUon'à  Loy  m>arissant    \\  semm^n^^^ 
•ivoir  parlé  des  querelles  fieffaulx  terminées  pai 
Su  .e?  e  ou  par  Desrene,  on  n'auroil  pas  ajouté 
'r  ^ou    diions'de  Loy  apparissant  de  quoy  la  que- 
„  re'le  doibt  estre  menée  en  ces  e  forme  en  con- 
«  tendz  fieffal.  .-  (Ane.  Coût,  de  Normandie,  chap. 

''ouoïïue^ouT'le  nom  générique  d'Enqueste,  on 
ait  d'abord    réuni  à  l'Enqueste    d'establissement 
Î-En  ueSède  droict  et  de  coustume,  on  les  a  ensuite 
iivSs  comme  étant  essentiellement  différentes; 
e  cette  différence  paroit  consister  principalement 
en  ce  aue    outes  deux  n'étoient  pas  Loij  de  reeoi- 
'.îofssS.  Les  Enquesles  «i'e^ljl'f  e™enl   dis  m 
suées  des  Enquestes  de  droict  et  de  cousiume, 
I  oient  appellées  de  recongnoissant.O  oyez  Ane. 
rout  de  Normandie,  chap.  xcu,  fol.  112.)  Oi  la  Loy 
^P  .pcon-noissant,  ainsi  nommée,  pour  ce  que,  dit 
îî  .i:?,wip  H  o  ose    «  par  icelle  il  estoit  à  con- 
l^îoi  trelaqulle  desifarties  avoit  droit  ou  tort 

ers  s  àsr:iSi;ï^=f  f 

éisoeït  la  forme,  on  appeloit  Enqueste  d'esta- 

^tre  connue  que  la  même  Enqueste  s'appeloit  En- 
S'/sl^d Somiaatlo'n  Tune  même  E».l»e^JJ,S  »»,' 

pn?  eSencri  semble  que  «s  termes  Loy  de 


par  enquebic,  uijp>.'.=>-^-^  ""— 1- n„  Pnnrrp  t   V, 

p.  597,  c.  2.  (N.  E.) 


AP 


—  47  — 


AP 


recongnoissant  éloient  colleclifs  de  bataille  et  cVEn- 
questedu  pays  ou  cVestablissemeiit,  lorsqu'on  disoit  : 
.<  L"en  appelle  simple  querelle  de  possession,  qui 
«  est  terminée  par  simple  loy.  Querelle  (ipparissant 
«  est  celle  qui  est  terminée  par  loy  de  recongnois- 
"  saut  ou  par  bataille,  ou  par  lenquesle  du  pays 
>'  que  l'en  appelle  recongnoissant.  »  (Ane.  Coût,  de 
Normandie,  cliap.  i.xxxvu,  fol.  107.)  Dans  ce  passage, 
les  querelles  sont,  comme  on  le  voit,  désignées  par 
le  nom  de  la  Loi  qui  devoit  les  terminer.  Or  la 
querelle  apparissant  étoit  celle  qui  se  terminoil  par 
Loy  de  recongnoissant  ;  donc  l'expression  par  Loy 
de  recongnoissant  semble  être  synonyme  de  l'ex- 
pression par  Loy  apparissant.,  et  signifier  collecti- 
vement, ou  par  bataille,  ou  par  enqueste  du  pays, 
par  enqueste  d'establissement.  On  croit  que  si  Lau- 
rière  eût  eu  l'idée  de  cette  signification  collective, 
il  n'auroit  pas,  en  citant  le  même  passage,  mis  après 
ces  mots  par  Loy  de  recongnoissant,  une  virgule 
qui  n'est  pas  dans  le  texte,  et  qu'il  auroit  besité  à 
décider  que  cette  Loi  étoit  l'Enqueste  de  droit  et  de 
coutume,  appelée  improprement  Loi  de  reconnois- 
sant.  Pcut-éire  auroit-il  prononcé  moins  affirmati- 
vement contre  l'opinion  de  l'auteur  de  la  glose  sur 
ce  même  texte,  que  l'Enqueste  de  droicl  et  de 
coustume  éloit  Loy  apparissant.  (Voy.  Gloss.  du  Dr. 
Fr.  T.  II,  p.  64  et  (55.)  Eu  effet,  ce  n'esl  pas  sans 
raison  que  l'auteur  qu'il  contrarie,  a  prétendu  que 
«  Loy  apparissant  n'est  aultie  cbose  que  bataille, 
•'  ou  recongnoissant,  c'est-à-dire  Enqueste  du  pays 
'<  ou  d'establissement;  et  simple  Loy,  toute  preuve 
«  qui  se  fait  par  serment  de  partie,  ou  par  tesmoings 
«  de  certain,  ou  par  enqueste  de  droict.  »  (Voyez 
Ane.  Coût,  de  Normandie,  Glose,  fol.  107.) 

Il  résulte  évidemment  de  celte  définition  de  simple 
Loy,  que  la  Desraine  ou  dénégation  avec  serment, 
n'étoit  par  la  seule  Loi  qu'on  nommât  Loy  simple. 
Il  paroit  même  que  lorsqu'on  combattoit  pour  une 
querelle  de  possession,  la  Loy  du  duel,  celte  Loy 
apparissant  par  excellence,  se'nommoitquebiuefois 
Loy  simple  par  opposilion  ;i  Loy  apjuirissant  ;  lu 
signification  de  Loy  apparissant  étant  restreinte 
alors  à  la  Loy  du  duel  pour  une  querelle  criminelle. 
La  preuve  est  que  dans  le  chapitre  i.xxxi  du  même 
Coutumier,  on  lit  que  durant  le  temps  où  »  les 
«  mariages  ne  se  pouvoient  assembler,  les  Loix  ne 
«  dévoient  paseslre  faictes  ne  simples  ne  apportes; 
"  que  Saincte  Eglise  défendoit  à  faire  Loy  apparis- 
«  sant  tous  les  jours  de  fesle,  etc.  »  11  est  probable 
qu'en  ce  passage,  les  Loix  appei'tes  ou  apparissuntes 
sont  celles  qui  étoient  criminelles,  et  que  les  simples 
sont  celles  dont  on  combattoit  en  aucuns  cas  de 
propriété  d'héritage  et  aultres  cas,  avant  que  «  telles 
«  simples  Loix  fussent  ramenées  à  preuves  par 
«  enqueste.  »  (Voy.  Gr.  Couf.  de  Normandie,  f»i01.) 

On  a  déjà  observé  que  les  querelles  étoient  dési- 
gnées par  le  nom  de  la  Loy  à  la  décision  de  laquelle 
elles  éloient  soumises.  De  là,  les  querelles  simples 
opposées  aux  querelles  apparoissantes.  (Voy.  \fv.\- 


R.\Di.E  et  Apparext.)  Aujourd'hui  que  tout  cet  ancien 
droit  est  aboli  en  Normandie,  l'action  intentée  pour 
la  propriété  d'un  héritage,  s'appelle  encore  Loy 
apparoissante.  (Voy.  Coût,  de  Normandie,  au  Coût. 
gén.T.  I,  p.  1006.  -  Laur.  Gl.  du  Dr.  Fr.  T.  II,  p.  65.) 

VARIAMES  : 
APPAROISSANT.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  1007. 
Apareissant.  Marbodus,  de  Gemm.  Art.  col.  1668. 
Aparisant.  Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  344. 
Aparissan't.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol. 171. 
APPAISSANT.  (Usez  Appariasaut  ou  Apparoissanl.)  Percef. 
Vol.  IV,  fol.  115,  R°  col.  1. 
Appareissant.  Ord.  T.  I,  p.  6i6. 
AppARESSANT.  Anc.  Cout.  de  Bretagne,  fol.  71,  R.». 
Apparissant.  Gr.  Cout.  de  Normandie,  fol.  151,  R». 

Apprti'oisti'e,  verbe.  Apparoître,  paroître.  On 
croit  qu'apparoistre,  moins  ancien  dans  notre  langue 
qu'apparoir ,  a  été  formé  d'apparoist  (1),  troisième 
personne  de  l'indicatif  présent  de  ce  même  verbe; 
et  qu'à  l'exception  de  \' apparoitrai ,  etc.  i'appa- 
roîtrois,  etc.  il  n'a  point  de  modes  et  de  temps  qui 
n'appartiennent  à  la  conjugaison  d' apparoir,  verbe 
dont  l'infinitif  est  aujourd'hui  presque  aussi  inusité 
qu'anciennement  celui  A'apparer.  (Voy.  Apparer  et 
Apparoir.) 

variantes  : 

APPAROISTRE.  Cotgrave,  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict. 

App.\RESTRE.  Faifeu,  p.  6. 

Apparoyssaiiimeut ,  adverbe.  Visiblement, 
évidemment.  Signification  analogue  à  celle  d'appa- 
roissant,  visible,  évident.  (Voy'ez  Lanc.  du  Lac, 
ï.  III,  fol.  68,  V»  col.  1.) 

Apparreure,  subst.  féminin.  Apparence.  C'est 
probablement  en  ce  sens  que  pour  obvier  à  ce  que 
les  marchands  trompassent  leurs  acheteurs  en 
cachant  la  mauvaise  qualité  de  la  marchandise  sous 
une  superficie  de  belle  apparence,  «  il  étoit  ordonné 
«  que  aucun  marchant...  ne  mist  plus  belle  appar- 
«  reure  par  dessus  que  par  dessous.  ■  (Voyez  D. 
Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au  mot 
Apparalura;  tit.  de  1415.) 

Apparu,  part.  Paru,  qui  a  paru.  On  remarquera 
qu'en  général  les  participes  de  même  terminaison 
que  celui-ci,  ont  tous  été  formés  de  la  troisième 
peisonne  de  l'indicatif  prétérit  du  verbe,  comme 
apparu  d'apparut  (2;  ;  encore  ne  relranchoit-on  pas 
toujours,  comme  on  voit,  le  t  final  dans  l'ancienne 
orthographe.  La  signification  de  ce  même  participe 
du  verbe  apparer,  le  même  qu'apparoir,  a  été  plus 
générale  qu'elle  ne  l'est  aujourd'hui.  (Voy.  Apparer 
et  Apparoir.) 

VARIANTES  : 
APPARU.  Orth.  subsist.  -  S'  Bern.  Serm.  ii.  MSS.  p.  124. 
Ap.\ruit.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  124. 
Apparuiz.  Id.  ibid.  p.  lUl. 
Appéru.  Rob.  Estienne,  Gram.  fr.  p.  63. 

Appast,  subst.  mase.  Repas,  nourriture.  Pâture, 
mangeaiile.  Appât,  attrait.  La  signification  d'appast 
étoit  quelquefois  la  même  que  celle  du  mol  simple 


(1)  Il  vient  d'appui-escere,  forme  qu'on  a  dû  employer  à  la  basse  latinité,  (n.  e.)  —  (2)  C'est  un  participe  de  seconde 
formation,  qui,  en  latin,  était  terminé  en  utus,  comme  uabutus.  (n.  e.) 


AP 


48  — 


AP 


past,  en  latin  paslus,  repas,  nourriture.  (Cotgrave, 
Dict.  —  Voy.  Past.) 

Quoiqu'il  ait,  relativement  à  l'idée  générale  de 
nourriture,  désigné  celle  de  l'homme,  plus  souvent 
il  désignoit  celte  des  bêtes  et  des  oiseaux,  leur 
pâture  et  leur  mangeaille.  iCotgrave  et  Nicot,  Dict.) 
On  a  restreint  la  signification  de  ce  mot  appast  à 
celle  de  pâture  ou  de  mangeaille  qu'on  met,  soit 
à  un  piège  pour  attirer  les  bètes  à  quatre  pieds  et 
les  oiseaux,  soit  à  un  hameçon  pour  pécher  les 
poissons.  De  là,  celte  comparaison  prise  dans  la 
Kature,  et  d'apf-ès  laquelle  appast  ou  appât  a 
signifié  et  signifie  encore  figurément  tout  ce  qui 
attire  en  excitant  la  cupidité  odieuse  d'une  àme  vile, 
ou  la  sensibilité  aimable  d'une  âme  honnête.  On 
sait  qu'en  ce  dernier  sens  il  n"est  plus  d'usage  qu'au 
pluriel,  et  qu'il  s'écrit  «/)/;««  (l).(V.  Dict.  de  Trévoux.) 
Il  y  a  de  l'art  dans  les  appas  4'une  belle  femme; 
dans  ses  charmes  il  n'y  a  que  la  nature.  Par  la 
vertu  invisible  de  ses  charmes  naturels  elle  retient 
et  fixe  auprès  d'elle  les  hommes  que  l'artifice 
éblouissant  de  ses  appas  y  avoit  attirés.  Malherbe 
avoit  probablement  l'idée  de  quelque  distinction  de 
cette  espèce,  puisqu'il  «  faisoit  toujours  quelque 
«  ditïérence  entre  charmes  et  appas.  »  (Ménage, 
Observ.  sur  Malherbe,  p.  313.) 

VARIAMES  : 
APPAST.  Cotgr.  Nicot  et  Monet,  Dict.  -  Dict.  de  Trévoux. 
Apast.  Cotgrave  et  Nicot,  Dict. 
Ap.\t,  Appât.  Monet,  Dict.  au  mot  Appast. 

Appasteler,  verbe.  Repaître,  nourrir.  Appâter, 
faire  manger.  La  première  acception  du  verbe 
appasteler,  plus  ancien  dans  notre  langue  qu'ap- 
paster,  est  relative  à  celle  d'appast,  repas,  nourriture. 

Après  trop  longe  june 

Wapasteloit  d'oes  pourris. 

Adc.  Pocs.  fr.  MS.  du  Valic.  ii-  1490,  fol.  152,  R'. 

Des  ans  y  a  demy  douzaine. 
Qu'en  son  hostel,  de  cochons  gras 
Me  apaaiela  une  sepniaine. 

Villon,  p.  57. 

Pris  dans  le  sens  général  de  nourrir,  il  désignoit 
non-seulement  la  nourriture  des  hommes,  mais 
celle  des  bètes,  leur  pâture,  (l'oyez  Appast.)  «  Se 
«  print  Sarra  à  fioter  son  poullafn  et  à  luy  donner 
«  à  manger...  ne  autre  œuvre  ne  faisoit  la"  Damoy- 
"  selle  jour  et  nuyt  que  de  YapasteUer  de  tout  ce 
«  qu'elle  scavoit  que  bon  luy  estoit  pour  croistre  et 
«  amender.  »  (Percef.  Vol.  Il,  fol.  45.)  «  Sera  tenu 
«  le  fermier  de  apasteller  les  poissons  et  trouver  la 
«  pasture  à  ses  coûts  et  frais.  »  (D.  Carpentier,  Sup. 
Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Pastus.) 

Ce  même  verbe  appasteler  signifioit  plus  parti- 
culièrement le  soin  qu'on  prend  de  nourrir  un 
animal,  un  enfant,  ou  un  homme  privé  de  l'usage 
de  ses  mains,  en  le  faisant  manger,  en  l'appâtant. 
(Voy.  Cotgrave,  Oudin,  Rob.  Estiènne  et  Nicot,  Dict. 
—  Dict.  de  Trévoux.)  C'est  par  allusion  sans  doute 
à  celte  acception  particulière  d'appasteler,  que  pour 


uienacer  un  homme  de  lui  donner  un  coup  de  cou- 
teau, l'on  a  dit  :  «  Se  tu  me  approches,  je  le  appas- 
<■  tcleraij  de  cesle-cy;  et  trait  un  grant  coustel.  » 
(D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au 
mot  Pastus;  til.  de  1389.  —  Voy.  Appaster.) 

VARIANTES  : 
APPASTELER.  Cotgr.  Oudin,  Rob.  Estiènne  et  Nicot,  Dict. 
Apasteler.  Ane.  Poës.  fr.  MS.  du  Vatic.  n"  1490,  f»  152,  R». 
Apasteller.  Percef.  Vol.  2,  fol.  45,  R"  col.  1. 
Apateler.  Monet,  Dict.  au  mot  Appast. 
Appasteller.  Rob.  Estiènne  et  Nicot,  Dict. 

Appaster,  verbe.  Repaître,  nourrir.  Attirer  avec 
un  appât,  appâter.  Mettre  un  appât.  Il  paroît  que  le 
verbe  appaster,  formé  du  substantif  appast,  nour- 
riture, pâture,  a  signifié  nourrir  dans  un  sens  aussi 
général  qn  appasteler.  (Voy.  Cotgr.  et  Mcot,  Dict.) 
On  a  même  dit  figurément  : 

Je  ne  ra'appaste  pas  d'une  vaine  espérance. 

Coujet,  Bibliotli.  Fr.  T.  XIV,  p.  1\. 

C'est  relativement  à  l'idée  particulière  d'appast, 
pâture  avec  laquelle  on  attire  un  animal  dans  le 
piège,  que  ce  même  verbe,  soit  au  propre,  soit  au 
figuré,  signifioit  attirer  avec  un  appât.  (Voy.  Cotgr. 
Oudin,  Mcot  et  Monet,  Dict.)  L'acception  propre  est 
encore  usitée. 

Enfin  appaster  un  hameçon,  c'est  y  mettre  un 
appât.  Mais  on  ne  diroit  plus,  appaster  certaines 
choses  dans  un  lieu,  pour  y  mettre  des  choses  de 
nature  à  attirer  les  animauxau  piège,  à  les  appâter, 
comme  l'on  dit  encore  dans  le  sens  propre.  (Voyez 
Monet,  Dict.  —  Dict.  de  Trévoux.)  «  Pour  le  renard, 
«  blereau,  foine  ou  putois,  suffira  d'appaster  autour 
«  des  lieux  labourez,  des  rougets  de  poulaille...  ou 
«  appaster  des  rôties  de  pain  bis  fricassées  avec 
»  graisse.  »  (Fouilloux,  Vénerie,  fol.  121,  R°.) 

On  sait  qu'appaster  ou  appâter  a  remplacé  dans 
notre  langue,  l'ancien  verbe  appasteler,  faire 
manger.  (Voy.  Appasteler.) 

variantes  : 
APPASTER.  Cotgrave,  Oudin  et  Nicot,  Dict. 
Apaster.  Cotgrave,  Dict. 
Apater.  lylonet,  Dict.  au  mot  Appast. 

Appasteiix,  adjectif  et  subst.  masc.  Trompeur. 
Ce  mot  appasteux,  dans  un  sensrelatifà  l'acception 
figurée  du  mot  appast,  désignoit  un  homme  qui  en 
trompe  un  autre,  en  lui  présentant  un  appât  par 
lequel  il  est  attiré  dans  le  piège  tendu  à  sa  simpli- 
cité et  â  sa  bonne  foi.  (Cotgr.  Dict.  —  Voy.  Appast.) 

VARIANTES  : 
APPASTEUX.  Cotgrave,  Dict. 
Apasteux.  Celt-hell.  de  L.  Trippault. 

Appastis,  subst.  masc.  Pâturage.  Pâture.  (Voy. 
Appaster.) 

Le  premier  sens  est  celui  d' appastis.  «  Il  vint  en 
«  ung  moult  £;rand  appastiz  .  .  si  mist  paistre  son 
«  cbeVal.  »  (Percef.  Vol.  III,  fol.  ir.8,  R-  col.  2.) 

Quoiqu'«;;a///s  et  rt/jj^as//^  soient  de  même  origine 
et  à  peu  près  de  même  terminaison ,   ils  différent 


(1)  On  a  eu  tort,  dès  le  xvn*  siècle,  d'employer  cette  forme  pluriel  an  singulier.  Ainsi  Corneille,  dans  Sertorius  :  «  Si 
jamais  une  flamme  eut  pour  vous  quelque  appas;  »  Molière,  dans  l'Ecole  des  Fenwies:  «  Qui  dort  en  sûreté  sur  un  pareil 
appas.  »  (N.  E.) 


AP 


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AP 


en  ce  que  la  signification  à'apatil  n'est  point  celle 
A'appastis,  pâturage  ;  mais  celle  d'appast ,  pâture. 
(Voy.  ArPAsT.)  Dans  un  sens  analogue  à  l'acception 
figurée  d'appâter,  nourrir,  repaître,  on  a  dit  : 

Espérance  paist  les  chetifz. 
Assez  promect  et  peu  contente  ; 
Les  grans  et  haultains  appetitz 
N'ont  cure  de  ses  apatitz. 

Molinet,  p.  126. 

VARIANTES  : 
APPASTIS.  Chasse  et  départ  d'Amours,  p.  8. 
Apatilz  (plur.)  Molinet,  p.  126. 
Appastiz.  Percef.  Vol.  III,  fol.  158,  R». 

Appel,  subst.  masc.  Convocation.  Provocation 
au  combat,  provocation  en  Justice,  accusation,  de- 
mande. Provocation  d'un  Juge  h  un  autre  Juge. 
Invitation,  ordre,  ordonnance.  Exécution  d'un  ordre, 
d'une  ordonnance. 

Quelles  que  soient  les  acceptions  usitées  et  inu- 
sitées du  substantif  «/v^^/,  toutes  sont  analogues  à 
celles  du  verbe  appeler,  pousser,  faire  approcher, 
faire  venir,  etc.  En  termes  d'escrime,  l'appel  est 
une  feinte  par  laquelle  on  essaye  de  surprendre  son 
adversaire,  en  le  faisant  venir  imprudemment  à 
l'attaque  ou  îi  la  parade.  Pour  attirer  les  oiseaux 
dans  les  filets,  pour  les  y  faire  venir,  on  se  sert 
d'un  oiseau,  ou  d'un  sifflet  avec  lequel  on  contre- 
fait la  voix  de  l'oiseau  de  mêm.e  espèce.  De  là ,  le 
sifflet  et  l'oiseau  ont  été  et  sont  encore  désignés 
par  le  mot  appeau.  C'est  probablement  dans  un 
sens  relatif  à  celui  de  l'expression  ,  la  cloche  ou 
l'heure  appelle,  qu'en  termes  d'horlogerie ,  on  a 
nommé  appeau,  un  timbre,  une  petite  cloche  qui 
sonne  les  quarts  et  les  demi-heures.  Il  y  a  dansées 
trois  dernières  acceptions  un  abus  de  métonymie, 
très-connu  des  Grammairiens. 

Anciennement,  faire  appeau  de  quelqu'un  à  un 
fait,  c'étoit  l'y  appeler,  le  faire  venir  comme  aide, 
comme  témoin  ou  complice  de  ce  même  fait. 

Alors  Faifeu  de  liiy  soubdain  s'empart, 

Et  va  songer  une  bonne  cautelle 

Que  vous  orrez,  et  pour  tout  vray  fut  telle. 

Il  va  trouver  ung  cheval  mort  de  frays 

En  ung  foussé  qui  estoit  là  auprès... 

Et  amassa  les  petiz  ousselletz 

Et  de  la  char  de  petiz  morselez  ; 

Et  les  pousa  en  partie  de  la  peau, 

Sans  à  ce  faict  de  nuUy  faire  appeau. 

Lors  s'en  alla  de  nuict  en  sa  pasture,  etc. 

Faifeu,  p.  U  el  42. 

En  réfléchissant  sur  le  rapport  de  ces  acceptions 
du  substantif  rty>i;«'/  ou  appeau,  avec  racceplion  éty- 
mologique du  verbe  appeler,  pousser,  faire  appro- 
cher, faire  venir,  on  aperçoit  la  raison  pour  laquelle 
dans  un  sens  analogue  à  celui  d'appeler,  convo- 
quer, on  a  dit  : 

Quinze  Roi  coroné  vienent  à  son  apel  ; 
Si  vient  li  Chanceliers  qui  porte  le  séel. 

Parlon.  de  Blois,  MS.  de  S'  Gerni.  fol.  169.  V°  col.  2. 

Quoiqu'appel  soit  aujourd'hui  distingué  d'appeau, 
il  est  prouvé  qu'anciennement  on  disoit  appeau  el 
appel  sans  aucune  distinction  de  signification.  Sou- 
vent les  appels  ou  appeaux  éloientdes  provocations 
à  venir  combattre  en  champ  clos,  ou  à  venir  plai- 


der  en  Justice.  (Voy.  Appeller.)  On  étoit  provoqué 
par  une  accusation,  une  demande  ;  de  là  ,  ces  ex- 
pressions, appel  de  mort  ou  de  vwurtrc,  appel  de 
félonie,  appel  de  foi  mentie,  appel  de  fere  fere,  etc. 
expressions  dans  lesquelles  appel  sinaille  accusa- 
tion, demande.  (Voy.  Tenures  de  Littleton,  fol.  41. 
—  Id.  ibid.  fol.  45. —Britton,  des  Loix  d'Angleterre, 
fol.  49.  —  Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  chap. 
Lxi,  p.  317,  etc.)  L'accusation  d'un  crime  commis 
par  une  personne,  à  l'instigation  d'une  autre,  par 
son  conseil  ou  par  son  ordre,  étoit  un  appel  de 
faire  faire.  «  Cas  si  est  A'apeler  de  fere  fere ,  si 
«  comme  quant  cheli  qui  apele  ne  met  pas  sus  à 
«  cheli  que  il  apele,  que  il  l'ut  presens  à  fere  le  fet, 
«  mais  il  le  feist  fere  pour  louier,  ou  par  pramesse, 
«  ou  par  prière,  ou  par  quemandement  ;  et  de 
«  chesle  manière  d'apel  vismes  nous  apeler,  etc.  » 
(Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  chap.  lxi,  p.  312.) 

On  connoissoit  peu  sans  doute  Vappel  de  défaute 
de  droit,  lorsque  les  Comtes  et  autres  Juges  se  mon- 
troient  si  actifs  à  rendre  la  Justice ,  qu'il  falloit 
modérer  cette  activité  funeste  au  repos  et  à  la  for- 
tune des  citoyens,  par  des  Ordonnances  qui  défen- 
doient  de  tenir  plus  de  trois  assises  par  an.  Mais 
les  petites  seigneuries  s'étanl  mullipliées  avec  dif- 
férons degrés  de  vasselage,  la  Justice  commença  à 
languir  dans  les  juridiclions  subalternes  des  Sei- 
gneurs vassaux,  qui  faute  d'Hommes  ou  de  Pairs 
en  nombre  suffisant,  négligèrent  souvent  de  tenir 
leur  Cour.  Alors  les  appels  de  défaute  de  Droit 
furent  d'autant  plus  fréquens  qu'ils  produisoient 
des  amendes  au  Seigneur  suzerain  devant  qui  le 
Seigneur  vassal  étoit  accusé  de  négligence  à  rendre 
justice.  Celte  négligence  étoit  toul-à-fait  inexcusa- 
ble lorsqu'elle  éloit  volontaire.  «  Nous  veons  aucuns 
«  Seigneurs  en  malice  contre  chaus  à  qui  il  ne 
«  vuelent  fere  droit  ....  Si  convient  à  chaus  qui 
«  ont  meslier  d'apeler,  que  il  soient  soutil  de  som- 
"  mer  les  souffisaument,  si  que  il  puissent  avoir 
«  droit  en  la  Court  de  chaus  où  il  le  requièrent,  si 
«  que  il  puissent  avoir  seur  apel  de  défaute  de 
«  droit,  etc.  »  (Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis, 
chap.  Lxn,  p.  319.)  Les  formalités  dont  on  peut  voir 
le  détail.  (Id.  ibid.)  varioient  suivant  l'état  des  per- 
sonnes intéressées  à  poursuivre  celte  sorte  d'appel. 

L'appel  de  défaute  de  droit  étoit  toujours  une 
accusation,  une  simple  provocation  en  Justice,  et 
jamais  une  provocation  au  combat  en  champ  clos, 
à  moins  qu'on  «  n'ajoustast  vilaine  cause  aveques 
"  défaute  de  droit.  »  (Voy.  Beaumanoir,  Coul.  de 
Beauvoisis,  chap.  Lxvii,  p.  339.)  «  Se  aucuns  veut 
«  appeler  son  Seigneur  de  de/faute  de  droit,  il 
«  convendra  que  la  detfaute  soit  prouvée  par  tes- 
«  moins,  non  pas  par  bataille.  ■>  (Ord.  T.  I,  p.  92.) 
«  Li  apel  fet  par  défaille  de  droit,  ne  sont  pas  .  .  . 
«  démené  par  gages  de  bataille,  mais  par  monstrer 
«  resons  par  quoi  la  défaute  de  droit  soit  clère  :  et, 
«  ches  resons  convient-il  avérer  par  tesmoins 
«  loiaux.  »  (Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  chap. 
Lxi,  p.  315.)  Cependant  la  preuve  par  témoins  pou- 
voit  occasionner  le  combat  judiciaire.   «  Quant  li 

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AP 


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AP 


«  tesmoing  viennent  pour  tesmoigner  en  tel  cas,  de 
«  quelque  partie  que  il  viengnent,  ou  pourapeleur, 
«  ou  pour  clielui  qui  est  apelés,  cliil  eucoatre  qui 
1  il  vuelent  tesuioiguer,  puet  .  .  .  lever  le  second 
«  tesmoiu  et  lui  inellre  sus  que  il  est  faux  et  par- 
"  jure  ;  aussiut  pueent  Ltieu  naistre  gages  de  l'apel 
«  qui  est  fet  seur  défautc  de  droit.  ■>  (Id.  ibid.)  Les 
principes  de  celte  Loi  iiui  défend  le  combat  en  cas 
de  simple  appel  de  défaille  de  droit,  sont  indiqués 
par  M.  de  Montesquieu.  11  ajoute  que  s'il  étoit  per- 
mis d'appeler  au  combat  les  témoins ,  c'est  qu'en 
les  appelant,  «  on  n'offensoit  ni  le  Seigneur,  ni  son 
.<  tribunal.  »  (Voy.  Espr.  desLoix,T.  II,  chap.xxvm. 
pages  345  et  34G.) 

Il  paroit  que  les  peines  auxquelles  exposoit  l'ap- 
pel de  dé  faute  de  droit,  n'éloient  pas  les  mêmes 
dans  toutes  les  Coutumes.  «  Se  la  deff'aule  n'est 
'<  prouvée,  cil  qui  appelera  le  Seigneur  de  la  def- 
«  faute,  il  aura  tel  dommage  comme  il  doit  par 
<'  l'usage  du  pais;  et  se  la  deffaute  est  prouvée,  li 
«  Sire  î'amandera  et  perdra  ce  que  l'en  li  doit,  par 
'•  la  Coutume  del  pais  et  de  la  terre.  »  (Urd.  T.  I, 
p.  92.)  Dans  la  Coutume  de  Beauvoisis ,  lorsque  la 
défaute  de  droit  n'étoit  pas  suffisamment  prouvée, 
l'appelant  payoit  une  double  amende ,  l'une  au 
Seigneur  qu'il  avoit  accusé  de  négligence  à  lui 
rendre  jushce,  l'autre  au  Seigneur  devant  lequel  il 
l'avoit  accusé  de  cette  négligence.  Pour  un  Gentil- 
homme, l'amende  étoit  de  soixante  livres  ;  de  soi- 
xante sous  pour  «  l'Homme  de  pooté.  »  Au  contraire, 
si  la  preuve  étoit  jugée  suffisante,  le  Seigneur 
appelé  de  défaute  de  droit,  éloit  condamné  à  l'a- 
mende de  soixante  livres,  et  perdoit  le  Jugement  et 
la  Justice  de  sa  terre.  (Voy.  Besiumanoir/Cout.  de 
Beauvoisis,  chap.  lxi,  p.  312.)  On  observera  d'après 
M.  de  Montesquieu  i,Espr.  des  Loix ,  T.  II ,  chap. 
xxiv,  p.  329,  note),  que  dans  les  auteurs  contempo- 
rains de  Beaumanoir,  l'expression  perdre  sa  Justiee 
n'avoit  pas  une  signification  générale,  qu'elle  étoit 
restreinte  à  l'affaire  dont  il  s'agissoit. 

Quoique  l'appel  de  dé  faute  de  droit  fût  déjà  connu 
du  temps  de  Philippe-Auguste,  il  n'est  pas  à  beau- 
coup près  aussi  ancien  dans  noti'e  Jurisprudence, 
([ue  l'appel  de  faux  Jugement.  On  voit  que  dès  l'an 
755,  les  Comtes  et  leurs  Officiers  étoient  sujets  à 
rfly;/Jt'/ d'un  homme  qui  se  croyoit  jugé  contre  la 
Loi.  >'  Si  reclamaverit  quôd  legem  ei  "non  judicas- 
"  sent,  tune  licentiam  habeat  ad  Palatium  veuire 
"■  pro  ipsà  causa,  et  si  ipsos  convincere  potuerit 
<'  quôd  legem  ei  non  judicassent  secundum  legem, 
«  contra  ipsum  emendarefaciat.  »  (Synod.  Yernens. 
art.  XXIX,  et  Capitul.  Metens.  art.  ix.  —  Voy.  Baluz. 
Gapitul.  r.eg.  Fr.  T.  I,  col.  170  et  180.  —  Espr.  des 
Loix,  chap.  xxviii,  p.  314  et  345.) 

L'appel  de  faux  jugement  n'étoit  point  alors  ce 
([u'il  fût  le  plus  souvent  au  commencement  de  la 
troisième  Race,  une  provocation  au  combat.  On 
provoquoit  les  Juges  à  combattre,  en  les  accusant 
d'avoir  faussement  et  méchamment  jugé,  en  disant 
à  la  Justice  :  «  Sire,  chis  jugemens  qui  est  pronon- 
«  ciés  contre  moi,  et  auquel  P.  s'est  accordés,  est 


'<  faux  et  mauves  à  desloiaux,  et  tel  le  ferai  contre 
"  le  dis  P.  par  moi  ou  par  mon  houme  ...  en  la 
"  Court  de  eheens  ou  en  autre  là  où  Droit  me  merra 
«  par  reson  de  cet  appel  ;  et  ([uant  il  a  ainsint  dit, 
«  chil  qui  est  apelés  doit  dire  que  li  jugement  est 
«  bon  et  loiaux,  et  offrir  loi  à  fère  par  li  ou  par 
«  autre  qui,  etc.  »  (Beaumanoir,  Coût  de  Beauvoi- 
sis, chap.  Lxi,  p.  314.)  On  conçoit  que  les  formalités 
et  les  peines  de  cet  appel  xanoienl  comme  presque 
tous  les  usages  coulumiers.  Lorsqu'un  des  Pairs  ou 
des  hommes  de  fief  avoit  déclaré  qu'il  soutiendroit 
le  jugement,  le  Juge  recevoil  les  gages  de  bataille 
et  prenoit  sûreté  de  l'appelant,  qu'il  soutiendroit 
son  appel.  «  Mais  àcheliquidetrendoit  lejugeraent, 
«  ne  conveuoit-il  point  de  seurlé  fere  par  le  reson 
«  de  che  que  il  étoit  lions  au  Seigneur,  et  qu'il 
«  devoit  faire  le  jugement  bon.  Autrement  il  per- 
«  doit  le  jugier  et  chéoit  en  l'amande  de  soixante 
"  livres  au  Seigneur.  »  Si  l'appelant  ne  prouvoit 
pas  que  le  jugement  avoit  été  faux  et  mauvais,  il 
payoit  au  Seigneur  une  amende  de  soixante  livres, 
la  môme  amende  au  Pair  ou  à  l'Homme  de  fief  qu'il 
avoit  appelé,  autant  à  chacun  de  ceux  qui  avoient 
ouvertement  consenti  au  jugement.  (Voy.  Beauma- 
noir, «bj  supra,  p.  313  et  314.  —  Défonlaines, 
chap.  XXII,  art.  1,9,  10  et  11.) 

On  sait  que  dans  les  principes  de  l'ancien  système 
féodal,  un  homme  ne  pouvoit  appeler  son  Seigneur, 
le  provoquer  à  combattre,  sans  être  coupable  du 
crime  de  félonie,  à  moins  que  son  appel  devant  le 
Seigneur  suzerain,  ne  fût  précédé  d'une  renoncia- 
tion juridique  au  fief  qu'il  tenoit  de  celui  qu'il  accu- 
soit  de  lui  avoir  méfait.  «  Nus  ne  puet  apeler  son 
«  Seigneur  à  qui  il  est  bons  de  cors  et  de  mains, 
«  devant  que  il  li  a  delessé  l'ounuige  et  che  que  il 
«  tient  de  luy  ;  donques  se  aucuns  vient  apeler  son 
«  Seigneur  d'aucun  cas  de  crime  ou  quel  il  chiet 
o  apel,  il  doit  ains  l'apel  venir  à  son  Seigneur  en  la 
«  présence  de  ses  Pers,  et  dire,  etc.  «  (Beaumanoir, 
Coût,  de  Beauvoisis,  chap.  lxi,  p.  310et311.)C'étoit 
sans  doute  afin  d'éviter  ce  crime  de  félonie,  qu'au 
lieu  cl'aj)peller  pour  faux  jugement  le  Seigneur,  on 
appeloit  les  Pairs  ou  les  Hommes  de  fief  qui  avoient 
jugé.  Lorsqu'un  Seigneur  n'avoit  pas  d'Hommes 
de  fief  en  nombre  suffisant  pour  former  sa  Cour,  il 
pouvoit  en  emprunter  de  son  Seigneur  suzerain. 
Mais  les  hommes  qu'il  empruntoit,  s'ils  étoient 
prudens,  se  dispensoient  de  juger,  en  déclarant 
qu'ils  n'étoient  venus  que  pour  conseiller.  Alors  si 
le  Seigneur  jugeoit  lui-même,  et  si  l'on  appeloit 
contre  lui  de  faux  jugement,  «  le  péril  de  l'apel 
«  tournoit  sur  lui  et  non  pas  sur  les  hommes  de 
«  son  Seigneur.  »  (Voy.  Beaumanoir,  ubi  supra, 
chap.  Lxii,"p.  322.)  Il  est  probable  qu'en  ce  cas  par- 
ticulier, comme  dans  tous  ceux  où  l'appel  éloit  une 
provocation  au  combat,  la  renonciation  au  fief  étoit 
une  formalité  nécessaire.  En  général,  si  l'homme 
d'un  Seigneur  «  appeloit  avant  qu'il  eût  renoncé 
>'  au  fief,  il  n'y  avoit  nul  gage  ;  ainchois  ainandoit 
«  à  son  Seigneur  la  vilenie  qu'il  lui  avoit  dite,  etc.  » 
De  même,  le  Seigneur  ijui  appeloit  son  homme, 


AP 


—  51 


AP 


devoit  avant  l'a/jpe/,  »  lui  quitter  l'hommage  en 
«  présence  du  Souverain.  »  (Voy.  Id.  ibid.  cliap. 
Lxi,  page  31 1 .) 

11  paroit  qu'au  moyen  de  cette  renonciation  à 
l'hommage,  tout  vassal  appelé  par  son  Seigneur 
pour  un  attentat  quelconque,  pouvoit  sans  félonie, 
garder  son  fief  et  combattre  pour  sa  justification, 
ainsi  que  l'homme  de  fief  appelé  de  faux  jugement 
par  le  Seigneur  contre  lequel  il  avoit  jugé  dans  sa 
propre  Cour.  «  Quant  li  Sires  plede  en  se  Court 
«  meisme  contre  son  houme,  il  n'est  pas  Juges... 
<>  et  quant  li  houme  rendent  le  jugement,  se  il  le 
«  font  contre  li,  apeler  en  puet  comme  de  faus  ju- 

«  gement Se  il  dit  à  chelui  contre  qui  il  vient 

«  fausser  le  jugement,  vous  avés  fet  jugement  faus 
«  et  mauves,  comme  mauves  que  vous  este,  ou  par 
«  louier  ou  par  pramesse,  ou  par  autre  mauvèse 
«  cause,...  li  apiaus  se  demaine  par  gages:  car  il 
«  loit  bien  à  l'Oume  h  soi  deffendre  contre  son  Sei- 
«  gneur  quant  il  l'accuse  de  mauvestié  ;  ne  jà  pour 
«  che  se  il  se  deffent  de  mauvestié  contre  son 
«  Seigneur,  ne  convenra  que  il  lesse  le  fief  que  il 
«  tient  de  li.  »  (Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis, 
Chap.  Lxvn,  p.  337.) 

Lorsque  le  Seigneur  n'attaquoit  pas  l'honneur  du 
Juge,  en  l'accusant  de  prévarications  personnelles, 
et  «  qu'il  appelait  simplement,  en  disant  que  le 
«  jugement  étoit  faux  et  mauvais,  »  son  appel 
n'ètoit  qu'une  requête  en  amendement  du  jugement 
dont  il  se  plaignoit,  et  n'obligeoit  point  aux  gages 
de  bataille.  «  Quant  li  Sires  apèle  simplement,  si 
«  coume  il  est  dit  dessus,  le  erremens  seur  quoi  li 
«  jugemens  fu  fès  doivent  estre  aporté  en  le  Court 
«  où  li  apiaus  est,  et  doivent  regarder  li  Iloumes 
«  de  le  Court  se  li  jugemens  fu  bons  ou  mauves 
«  selonc  les  erremens  de  le  Court  oii  li  apiaus  fut 
«  fès;  et  se  il  est  trouvé  mauves,  chacun  des 
«  Houmes  qui  s'assenti  au  jugement  chiet  en 
«  l'amande  de  soixante  livres  vers  le  Seigneur  et  si 
«  perdent  le  jugier.  >•  (Beaumanoir,  Couf.  de  Beau- 
voisis, chap.  Lxvir,  p.  337.)  Au  contraire,  s'il  se  plai- 
gnoit du  Juge  même  et  le  provo  inoit  par  des  impu- 
tations personnelles,  «  s'il  ajoustoit  avec  Vapel 
«  vilain  cas,  il  y  avoit  gages  de  bataille  ;  et  li  vain- 
«  eus,  soit  li  Sires,  soit  li  Hons,  perdoit  le  cors  et 
«  l'avoir.  «  Quant  aux  autres  Hommes  qui  avoient 
«  consenti  au  jugement,  ils  ne  perdoienl  fors  le  ju- 
B  gement  et  l'amande  de  chacun  de  soixante 
«  livres.  »  Mais  cette  distinction  particulière  dans 
la  manière  de  fausserjugement,  é!ant  devenue  plus 
générale,  on  crut  que  dans  le  cas  même  d'appel  de 
faux  jugement  sans  outrage  personnel,  il  falloit  con- 
server au  Juge  «  le  choix'de  faire  bon  le  jugement 
«  par  gages  devant  le  Comte  et  devant  son  Conseil  ; 
«  car  le  Comte  pouvoit  bien  tenir  la  Cour  de  ses 
«  Hommes  appelés  de  faux  jugement.  »  (Vov.  Beau- 
manoir, tibi  supra,  p.  337  et  338.) 

n  est  vraisemblable  qu'à  moins  d'être  animées 
par  une  passion  de  haine  ou  de  vengeance,  les 
Parties  profitèrent  d'une  distinction  au  moyen  de 
laquelle  on  pouvoit    fausser  un  jugement  sans 


s'exposer  au  péril  de  combattre,  et  que  les  Juges 
dont  on  faussoit  le  jugement,  sans  outrager  leur 
personne,  usèrent  rarement  du  droit  qu'ilsavoient 
d'y  forcer  ces  mêmes  Parties,  en  choisissant  le  gage 
de  iKitaille.  C'est  ainsi  qu'aura  prévalu  insensible- 
ment dans  les  Cours  mêmes  des  Barons,  la  Loi  par 
laquelle  S'  Louis  avoit  sagement  proscrit  le  combat 
dans  les  appels  de  faux  jugement. 

La  ressemblance  paroit  sensible  entre  ces  appels- 
sans  combat  et  les  requêtes  ou  supplications  en 
amendement  de  jugement,  usitées  dans  les  Cours 
royales,  où  l'on  «  demandoit  amendement  de  juge- 
«  ment,  en  suppliant,  en  requérant;  car  supplica- 
«  tion  devoit  estre  faite  en  Cour  de  Boi,  et  non  pas 
«  appel;  par  la  raison  que  Y  appel  contenoit 
«  félonie.  «  (Voy.  Ord.  T.  I,  p.  171  et  264.  —  Beau- 
manoir, Coût,  de  Beauvoisis,  chap.  lxvu,  p.  337.) 

Quant  aux  jugemens  des  Cours  seigneuriales 
qu'on  pouvoit  fausser,  non-seulement  on  en  appe- 
loit  comme  de  faux  jugement  ;  mais  le  plus  souvent 
cet  appel  étoit  une  provocation  au  combat.  Il  paroit 
que  l'ordonnance  de  fausser  sans  combattre,  ne 
s'étendoit  pas  aux  appels  qui  se  faisaient  à  une  autre 
Cour  qu'à  celle  du  Souverain.  Les  appels  de  faux 
jugement,  comme  les  appels  de  défaute  de  droit, 
étoient  de  degré  en  degré,  c'est-à-dire  «  selonc  che 
«  que  li  houmage  descendoient  dou  plus  bas  au 
«  plus  prochein  Seigneur  après,  si  comme  du  Pre- 
«  vost  au  Baillif,  et  du  Baillifau  Boy,  es  Cours  où 
«  Prévost  et  Baillif  jugent  ;  et  es  Cours  où  les 
«  Hommes  jugent,  selonc  che  que  li  houmages 
«  alloient  et  descendoient,  li  appel  dévoient  estre 
«  faits  en  montant  de  degré  en  degré  sans  nul 
«  Seigneur  trespasser.  »  (Voy.  Beaumanoir,  Coût, 
de  Beauvoisis,  chap.  lxi;  p.  317.)  On  ne  voit  dans 
cette  citation,  qu'un  commentaire  du  chapitre  lxxxi 
des  Etablissemens  de  S'  Louis.  «  Si  le  Seigneur  dont 
«  on  faussoit  le  jugement,  étoit  Bers,  il  falloit  s'en 
«  clamer  en  la  Court  le  Roy,  ou  en  la  Court  de  celui 
«  de  qui  il  tenoit;  en  la  Court  au  Bers  ou  de  celui 
«  de  qui  il  tenoit,  s'il  étoit  Vavasor.  L'appelant 
«  disoit  :  Sires,  cil  m'a  fet  faux  jugement,  pour 
«  laquelle  reson  je  ne  vuel  plus  tenir  de  luy,  ainçois 
«  tendre  de  vous  qui  estes  Chiefsires.  Si  le  Vavasor 
"  vouloit  s'en  deffendre,  il  ajoutoit  :  Je  ne  viiel  mie 
«  qu'il  s'en  puisse  deffendre,  car  il  me  fist  le  juge- 
»  ment  faux  à  veiie  et  asseùe  de  moi  qui  foi  li  doit, 
«  et  le  sui  prest  de  monstrer  contre  son  cors,  se  il 
«  le  veut  deffendre.  Et  tout  ainsi  appeloit  l'en  son 
«  Seigneur  de  faux  jugement  et  en  pouvoit  l'en 
«  bien  jugier  une  bataille.  »  (Voy.  Ord.  T.  I, 
p.  171  et  172.) 

Plus  on  réfiéchit  sur  le  sens  de  ce  passage,  qui 
semble  devoir  être  expliqué  relativement  à  la  Loi 
par  laquelle  en  cas  d'appel  de  faux  jugement,  le 
combat  étoit  défendu,  plus  on  doute  que  le  pouvoir 
de  juger  bataille  s'étendît  à  Y  appel  de  faux  jugement 
à  la  Cour  du  Souverain.  S' Louis  en  abolissant  dans 
les  Cours  du  Roi,  l'usage  du  combat  judiciaire,  le 
laissa  subsister  dans  les  Cours  des  Seigneurs.  11  est 
vrai  qu'en  même  temps  il  ordonna  qu'on  fausseroit 


AP 


—  52  - 


AP 


leurs  jucremens  sans  combattre  ;  mais  c'étoil  proba- 
blemeiif  lorsqu'en  les  f;uissant  on  appellcroit  à  la 
Cour  du  Hoi,  et  non  à  celle  d'un  Seigneur  où  l'usage 
du  combat  judiciaire  éloit  autorisé.  Ainsi  le  pouvoir 
de  juger  bataille,  que  l'Editeur  des  Ordonnances 
étend  à  ïappel  de  faux  jugement  à  la  Cour  du  Roi, 
seroit  restreint  à  V appel  fait  à  la  Cour  du  Chef- 
.âeigneur  du  Vavasseur;  et  le  cbapitre  lxxxi  des 
Eta'blissemens  de  S'  Louis,  dans  lequel  on  a  vu  une 
exception  aux  chapitres  n  et  m  des  mêmes  Etablis- 
semens,  et  à  l'article  vm  de  l'Ordonnance  de  l'2G0, 
seroit  une  conlirmaliun  de  la  Loi  généiale  qui  sup- 
primoit  les  gages  de  bataille  dans  les  appels  de  faux 
jugement  îi  ia  tour  du  Roi.  «  Se  aucun  veut  fausser 
■<  jugement  ou  pais  où  il  appartient  que  jugement 
«  soit  faussé,  il  n'i  aura  point  de  bataille  ;  mes  les 
"  clains  et  les  respons  et  les  autres  erremens  de 
«  plet  seront  apportez  en  nostre  Court,  et  selon  les 
«  erremens  du  plet  l'en  fera  dépécier  le  jugement 
«  ou  tenir;  et  cil  qui  sera  trouvé  en  son  tort, 
"  l'amandera  selon  la  Coutume  de  la  Terre.  »  (Ord. 
T.  I,  p.  1)1  et  92.  —  Ibid.  p.  113.)  Quand  on  ignore- 
roit  la  défense  de  fausser  dans  les  Cours  royales, 
il  est  impossible  qu'à  ces  mots,  «  les  erremens  du 
"  plet  seiont  portés  à  nostre  Cour,  »  on  ne  recon- 
noisse  qu'il  s'agit  ici  de  faux  jugemens  des  Cours 
seigneuriales,  dont  Y  appel  se  fâisoit  à  la  Cour  du 
Roy.  Au  reste,  il  pouvoit  y  avoir  de  la  sagesse 
à  s'écarter  en  certains  cas,  des  principes  d'une  Loi 
si  raisonnable,  mais  odieuse  à  la  Noblesse,  dans  la 
crainte  de  trop  révolter  des  hommes  dont  le  génie 
étoit  aussi  ennemi  des  procès  qu'il  étoit  ami  des 
combats  (1). 

Quoi  qu'il  en  soit  de  la  réalité  des  exceptions  à  la 
Loi  qui  proscrivoit  le  combat  dans  les  appels  de 
faux  jugement  à  la  Cour  du  Roi,  cette  Loi  n'opéra 
pas  moins  une  révolution  qui,  en  changeant  la 
Jurisprudence  Françoise,  prépara  les  moyens  de  la 
perfectionner.  La  raison  l'ayant  enfin  adoptée 
comme  Loi  générale,  tout  a}tpel  à  un  tribunal  supé- 
rieur, pour  réformer  le  jugement  d'un  tribunal 
inférieur,  ne  fut  plus  qu'une  simple  provocation  en 
Justice.  On  provoqua  longtemps  encore  le  Juge 
même  (lui  avoit  prononcé  le  jugement;  mais  le  fait 
du  Juge  étant  enfin  devenu  le  fait  de  la  partie,  on 
provoqua  la  partie  en  faveur  de  laquelle  avoit  été 
prononcé  le  jugement  qu'on  accusoit  d'être  injuste. 


L'appel  dont  on  abandonnoil  la  poursuite,  étoit  un 
appel  désert;  celui  dans  la  poursuite  duquel  on 
succomboit,  un  fol  appel,  qu'on  nommoit  aussi 
faux  appel.  (Voy.  Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.  — 
Colgrave,  Dict.  —  Tenur.  de  Littleton,  fol.  45,  V° 
et  /lO,  R°.  —  Ord.  T.  III,  p.  4'i8,  etc.) 

On  regarde  Vappel  volage  comme  un  abus  parti- 
culier de  la  nouvelle  Jurisprudence  qui,  en  facilitant 
les  appels  d'un  tribunal  à  un  autre,  les  avoit  peut- 
être  trop  multipliés.  Cet  appel  qu'en  latin  on  nom- 
moit appellatio  Laudunensis,  parce  qu'il  étoit  plus 
commun  dansleLaonois(iu"ailleurs,  étoit  tel  qu'une 
partie  ajournée  devant  le  Juge,  pouvoit  l'empêcher 
de  passer  outre,  en  se  présentant  devant  lui,  et  en 
disant  :  «  Sire  Juge,  vous  m'avez  faict  adjourner 
«  par  devant  vous  i\  la  requeste  de  tel  ;  si  ay  cause 
«  d'appeller  de  vous  et  de  vostre  jurisdicùon,  et 
«'  pour  ce  en  appellé-je  (ïappel  volage...  Et  pour 
«  soustenir  dès  maintenant  mon  appel  volage,  je 
«  vous  adjourne  par  devant  Monseigneur  le  Baillif 
»  de  Vermandois,...  au  jour  de  la  prochaine  assise, 
«  contre  moy  à  voir  soustenir  mon  dit  volage 
>'  appel  :  et  "si  vous  cuidez  que  bon  soit,  soyez-y. 
«  Dès  maintenant  intime  ma  partie  adverse  qu'elle 
«  y  soit,  si  bon  luy  semble...  El  n'y  falloit  adjour- 
<i  nement,  ne  puis  aussi  le  Juge  appelle  n'y  osoit 
«  procéder  en  outre.  »  (Bouteiller,  Som.  rur. 
liv.  II,  tit.  XIV,  p.  773.  —  Yoy.  Du  Cange,  Gloss.  lat. 
T.  I,  col.  578.)  C'est  probablement  L'usage  de  ces 
a/ijiels  que  Philippe-le-Bel  avoit  aboli  dans  quelques 
villes  du  Laonois,  et  qu'il  y  rétablit  ensuite  par  son 
Ordonnance  de  129G,  lorsque  mieux  informé  à  cet 
égard,  il  comprit  que  ces  appels  avoient  été  intro- 
duits en  faveur  des  habitans  et  pour  leur  utilité. 
(Ord.  T.  I,  p.  328.)  Il  paroit  néanmoins  que  cette 
faveur  leur  devint  nuisible,  puisque  ce  fut  à  leur 
requête,  et  même  aux  offres  de  payer  un  fouage 
annuel  de  deux  sous  parisis,  que  Philippe  de  Valois 
renouvela  l'abolition  âes  appels  volages,  par  Lettres 
du  23  mars  1334,  confirmées  par  autres  Lettres  du 
roi  Jean,  en  date  du  mois  d'août  1351.  (Ord.  T.  II. 
page  444.) 

Dans  la  prévôté  foraine  de  Laon,  lorsqu'un  pos- 
sesseur étoit  troublé  par  voie  de  fait  en  son  héri- 
tage, il  pouvoit  «  sans  commission  et  ordonnance 
«  du  Juge,  de  luy-mesme  appcller  promptement  au 
«  Juge  royal;  car  le  Roi  avoit  seul  la  connoissance 


(1)  Vappel  existait  en  Gaule  sous  l'administration  romaine;  sous  les  Mérovingiens,  il  disparut,  car  il  était  incompatible 
avec  les  jugements  de  Dieu  et  le  jury  des  Rachimbourgs.  Cliarlemagn.?  le  rétablit  ;  on  put  en  appeler  du  dizenier  au 
centenier,  du  centenior  au  placituni  du  comte,  et  de  ce  dernier  à  l'empereur  lui-même.  Mais  ['aj)pel  était  porté  non  contre 
la  partie  adverse,  mais  contre  les  juges  eux-mêmes",  et,  si  le  jugement  n'était  pas  réformé,  le  réclamant  payait  quinze  sous 
d'amende  ou  recevait  quinze  coups  de  bâton. 

A  l'époque  purement  féodale,  Vuppei  disparut.  Comment  aurait-il  existé,  puisque  les  jugements  étaient  rendus  par  les 
pairs?  En  allant  à  une  juridiction  supérieure,  on  n'eût  plus  été  devant  ses  pairs.  —  Le  noble  prévenait  la  condamnation  en 
prenant  ses  juges  à  partie  ;  il  les  accusait  d'avoir  sciemment  rendu  un  jugement  inique  et  menti  à  leur  conscience.  Le  duel 
était  la  conséquence  de  cette  provocation  ;  si  le  juge  était  vaincu,  sa  sentence  était  annulée,  et  la  cause  portée  devant  le 
tribunal  du  seigneur  immédiatement  supérieur.  Mais  le  bourgeois  et  le  paysan,  auxquels  la  justice  était  rendue  par  le 
seigneur  ou  ses  agents,  ne  pouvaient  les  accuser  de  mensonge,  ni  les  provoquer. 

Cependant  dés  le  xii'  siècle,  au  Midi,  le  droit  romain  reparut,  et  avec  lui  l'appel,  on  Ton  n'accusait  pas  le  juge  de  mauvaise 
foi,  mais  d'erreur. 

Dans  le  Nord,  dés  Philippe  le  Bel,  une  nouvelle  doctrine  prévaut;  on  «  fausse  jugement  »  comme  par  le  passé,  mais  le 
juge  n'est  plus  obligé  de  se  battre  :  un  tribunal  supérieur  révise  sa  sentence.  On  appelait  par  «  defaute  de  droit,  »  si  l'on 
prétendait  qu'on  ne  voulait  pas  vous  rendre  justice. 

Au  Midi,  on  ne  pouvait  appeler  que  deux  fois;  au  Nord,  des  causes  passèrent  par  sept  juridictions,  (n.  e.) 


ÂP 


53 


AP 


«  de  celte  sorte  A'appel  qu'on  nommoit  aussi  appel 
«  volage.  »  On  peut  voir  quelle  éloit  la  façon  d'y 
procéder  suivant  la  Coutume  de  Laon,  dont  le 
procès-verbal  semble  prouver  que  les  appels  vola- 
ges,  après  avoir  été  abolis,  furent  encore  en  usage 
en  quelques  lieux.  (Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.  —  Ord. 
T.  Il,  page  81,  note.) 

Lorsqu'on  étoit  semons  irrégulièrement  en  Cour 
de  Chrétienté,  c'est-à-dire  en  Cour  ecclésiastique, 
on  comparoissoit  devant  le  Juge,  et  on  lui  deman- 
doit  justice  de  l'irrégularité  de  la  semonce.  Si  le 
Juge  ne  la  faisoit  pas,  on  pouvoil  appeler,  et  cet 
appel  étoit  un  appel  de  Chrétienté.  On  a  observé 
qu'en  «  Cour  laie,  il  falloit  appeler  en  montant  de 
"  degré  en  degré  sans  nul  Seigneur  trespasser  ; 
"  mais  il  n'en  étoit  pas  ainsi  à  la  Cour  de  Chrétienté 
«  pour  qui  ne  vouloit  ;  car  de  quelque  Juge  que  ce 
«  fût;  l'on  pouvoil  appeler  àl'Apostoile,  etquivou- 
"  loil,  il  pouvoil  apeler  dedegréen  degré  si  comme 
•  du  Doien  à  l'Evesque,  et  de  l'Evesque  à  l'Arche- 
«  vcsque,  et  de  l'Archcvesque  à  l'Apostoile.  Quant 
«  à  l'appel  d'un  Envoyé  de  l'Apostoile,  il  devoit  se 
«  faire  directement  à  la  Cour  de  Rome.  »  (Beauma- 
noir.  Coût,  de  Beauvoisis,  chap.  lxi,  p.  317.  —  Id. 
ibid.  chap.  n,  p.  "i'i.  —  Voy.  Appellation.) 

11  y  avoit  des  appels  hors  des  Champs  clos  et  des 
Cours  de  Justice;  et  ces  appels,  tels  que  ceux  de 
boire,  de  manger,  de  jouer,  de  rire,  d'être  galant, 
de  plaire  aux  Uames  par  son  adresse  dans  les  exer- 
cices de  chevalerie,  éloient  des  provocations,  des 
invitations  auxquelles  on  cédoit  d'autant  plus 
volontiers  qu'on  y  étoit  poussé,  excité  parle  gotit 
du  plaisir. 

Ne  sai  quel  cuer  autres  genz  ont  ; 
Mais  je  pris  poi  trestol  le  mont, 
Et  quanqu'el  siècle  est  bon  ne  bel, 
Envers  Dame  qui  sert  d'appel 
Et  de  joir  et  de  joer, 
Et  de  rire  et  de  beau  parler. 

Parlon.  «leBlois,  MS.  de  S.  Gcrm.  fol.  150,  R»  col.  2. 

vinrent  trusqu'à  lor  chastel. 

Où  l'en  lor  fist  meiUor  appel 

De  beax  inengers  et  de  beax  vins. 

Ibid.  fol.  152,  R-  col.  1. 

L'on  vit  ailleurs  maint  mystère  nouveau, 
Chevaulx  bondir,  soubz  l'acueil  et  appeau 

De  doulx  regars. 
En  ceUuy  temps  Cupido  par  ses  arcs, 
Alloyt  jectant  par  feneslres  ses  darcs. 

i.  iMaroi,  p.  166. 

En  général,  la  signification  d'appel  pourroil  être 
aussi  variée  que  les  mots  par  lesquels  on  désigne 
les  différens  moyens  de  pousser  quelqu'un,  de  l'exci- 
ter, de  le  forcer  à  faire  ou  à  dire  une  chose.  Ainsi 
le  mot  appel  dont  l'acception  est  analogue  à  celle 
des  mots  convocation,  sommation,  dans  un  passage 
de  la  Coutume  d'Alost,  peut  signifier  en  ce  même 
passage,  un  ordre  public,  une  ordonnance  ;i  laquelle 
on  est  sommé,  forcé  d'obéir.  «  L'on  publie  à  chacune 
«  demi-mars  les  appeaux  ;  ce  sonl  de  boucheries 
«  endroits  qui  doivent  estre  bouchez  pour  les  grains 
«  d'hiver,  les  paslurages,  les  grains  d'esié,  les 
«  courans  d'eaux,  et  les  chemins  qui  ne  sont  point 


«  d'usage,  les  champs  et  les  préries,  de  vuider  les 
«  fossez,  etc.  »  (Nouv.  Coût.  2;én.  T.  I,  p.  1114.) 

Il  semble  même  qu'on  ait  étendu  cette  acception 
à  l'exécution  de  ces  mêmes  appeaux  ou  ordonnan- 
ces. «  Les  appiaux,  comme  aussi  les  bonchures,  ou 
«  estoupemens  des  terres,  des  préries,  des  pastu- 
»  rages,  des  bois,  sont  visitez  par  les  Praters 
«  accompagnez  de  quatre  paysans  connoissans , 
«  etc.  »  (Nouv.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  1115.  —  Voyez 
Appeller.) 

variantes  : 

APPEL.  Orth.  subsist.  -  Britton,  des  Loi-x  d'.Vngl.  fol.   38. 

Apel.  Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  chap.  lxi,  p.  307. 

Apiau.  Id.  ibid.  chap.  Lxii,  p.  319. 

Apiaus  (plur.  et  sing.)  Id.  ibid.  chap.  Lxni,  p.  323. 

Apiaux  (plur.  et  sing.)  Id.  ibid.  chap.  lxi,  p.  318. 

Appeal.  Tenures  de  Littleton,  fol.  41,  V". 

Appeau.  Nouv.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  1114,  col.  1. 

Appeauls  (plur.)  Ord.  T.  III,  p.  48. 

Appeaulx  (plur.)  Gloss.  de  l'IIist.  de  Bretagne. 

Appeaus.  Beaumanoir,  Coat.  de  Beauvoisis,  chap.  i,  p.  13. 

Appiau.  Id.  ibid.  chap.  i,  p.  14.  -  Ord.  T.  III,  p.  448. 

Appiax.  Id.  ibid.  chap.  i,  p.  i3. 

Appellable,  adj.  Sujet  à  l'appel.  On  a  dit  en  ce 
sens,  ([u'une  juridiction  ou  un  jugement  dont  on 
pouvoit  appeler,  étoit  appellable.  (Voy.  Nouv.  Coût, 
gén.  T.  II,  p.  101,  col.  t>.  — Coût.  gén.  T.  II,  p.  976.) 

Appellation,  subst.  féin.  Action  d'appeler,  de 
crier,  de  nitmmer.  Action  d'appeler,  de  provoquer 
d'un  Juge  à  un  autre  Juge.  Quelque  différentes  que 
soient  en  apparence  lès  signilicalions  du  verbe 
appeler,  elles  sont  toutes  analogues.  (Voy.  Appel- 
ler.) C'est  parla  même  analogie  que  le  substantif 
ajipellalion  a  signifié  action  d'appeler  en  général, 
action  de  crier,  de  nommer.  (Cotgr.,  Hob.  Éstienne 
et  .Monet,  Uict.  —  Voy.  Appellement.) 

Ce  mot,  qui  n'est  plus  guère  usité  que  dans  les 
formules  des  arrêts  et  des  sentences,  semble  être 
moins  ancien  en  notre  langue  que  le  mot  appel 
dont  il  éloit  synonyme  dans'la  signification  parti- 
culière, action  d'appeler,  provocation  d'un  Juge  à 
un  autre  Juge.  Lorsqu'on  appeloit  sans  raison,  les 
appellations  éloient  folles,  frivoles.  (Voy.  Appel.) 
On  dislinguoil  plusieurs  sortes  d'appellations  : 
Vappellatioii  judiciaire  et  extrajudieiaire,  l'appel- 
lation verbale,  l'appellation  que  nécessita  l'abus 
des  appellations  à  la  Cour  de  Rome,  et  que  par  cette 
raison  on  nomma  appellation  comme  d'abus.  (Voy. 
Cotgrave,  Nicot  et  Monet,  Dicl.  —  Laurière,  Gloss. 
du  Dr.  Fr.) 

L'abus  des  appellations  à  la  Cour  de  Rome, 
excitoit  dans  le  xa'  siècle  le  zèle  de  S'  Bernard,  qui 
se  plaignant  au  Pape  Eugène  III,  de  ce  qu'on  appe- 
loit à  lui  de  toutes  les  parties  du  monde  Chrétien, 
l'exhortoit  à  user  avec  modération  et  sagesse,  d'un 
hommage  qu'on  rendoit  à  sa  suprématie  :  «  Mihi 
<•  videtur  et  in  mullam  posse  eas  [appellationes] 
«  devenire  perniciem,  si  non  summo  moderamine 
«  aclilentur.  Appellalur  de  loto  mundo  ad  te  ;  id 
«  quidem  in  teslimonium  singularis  primatùs  tui. 
"  At  tu,  si  sapis,  non  primatu  gaudebis,  sed  fructu.  » 
(Voy.  S.  BernardideConsider.  ad  Eugenium  lib.  III, 
cap.  II.)  Cette  leçon  n'inléressoit  pas  moins  les  Rois 


AP 


AP 


que  les  Papes.  Mais  les  Rois  Chrétiens,  en  reconnois- 
sanl  le  l'ape  pour  Juge  île  leurs  (luerelles  el  arbitre 
de  leurs  traités,  autorisèrent  de  plus  en  plus  les 
peuples  trop  souvent  moins  citoyens  que  Chrétiens, 
à  croire  (lue  le  Chef  de  la  Chrétienté  en  étoit  le 
Monarque  universel,  et  qu'à  ce  titre  il  étoit  le  Juge 
souverain  des  Rois  et  de  leurs  sujets.  Ainsi,  les 
Cours  de  Chrétienté,  c'est-à-dire  les  Cours  ecclé- 
siastiques, dont  on  appeloit  à  la  Cour  de  Rome,  au 
mépris  même  de  la  Juridiction  épiscopale,  parurent 
supérieures  aux  Cours  laïques,  et  elles  furent  pré- 
férées, même  pour  la  décision  d'affaires  purement 
civiles.  «  Voirs  est  que  en  cas  de  convenanches  et 
«  d'obligations,  se  les  parties  s'assemblent  à  plai- 
0  dier  en  la  Cour  de  Sainte  Eglise....  et  se  metent 
«  ou  plet  tant  que  il  soit  entamés,  la  Cour  de  Sainte 
«  Eglise  en  a  la  connoissance....  et  quant  l'une  des 
«  parties  est  condemnée,  elle  puet  contreindre  le 
«  condemné  à  fère  paier  le  jugié  par  forche  d'escom- 
«  muniement.  »  (Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis, 
chap.  XI,  p.  GO.)  Cette  préférence  accéléroit  chaque 
jour  le  progrès  des  usurpations  de  la  puissance 
spirituelle  sur  la  puissance  temporelle.  Il  fut  si 
rapide  que  dans  le  xnr  siècle  et  au  commencement 
du  XIV  les  Ecclésiastiques  se  trouvèrent  en  posses- 
sion déjuger  presque  toutes  les  causes  des  séculiers. 
La  Cour  de  Rome  ayant  été  transférée  à  Avignon, 
en  1308,  par  le  Pape  Clément  V,  on  vit  les  appel- 
lations à  cette  Cour  se  multiplier  en  proportion  de 
l'activité  des  Juges  ecclésiastiques  à  empiéter  sur 
la  juridiction  des  Juges  laïques.  Enfin  la  nécessité 
de  marquer  les  bornes  respectives  de  l'une  et  de 
l'autre  Juridiction  ,  et  de  les  fixer  ,  fut  sentie. 
Philippe  de  Valois  assembla  le  Clergé  de  son  royaume 
et  tint  un  Lit  de  Justice  en  132i),  où  Pierre  de 
Congneres,  Avocat  du  Roi,  soutint  contre  Pierre 
Bertrandi ,  Evêque  d'Autun  ,  que  la  Juridiction 
ecclésiastique  étant  purement  spirituelle,  ne  pou- 
voit  être  devenue  temporelle  que  par  une  extension 
abusive  et  dangereuse.  Mais  le  Roi  dont  la  politique 
suspendit  l'arrêt,  se  contenta  (dit  Pasquier)  de 
recommander  aux  Evêques  la  réforme  des  abus 
dans  leurs  diocèses,  et  il  enjoignit  sous  main  à  la 
Cour  de  Parlement  d'y  veiller.  Quelle  qu'ait  été 
dès  lors  la  vigilance  du  Parlement  à  restreindre  la 
Juridiction  ecclésiastique ,  et  à  en  réformer  les 
abus,  les  moyens  par  lesquels  il  y  parvint,  ne  furent 
connus  que  longtemps  après,  sous  le  titre  d'rt/j;)e/- 
lations  comme  d'abus.  «  Enfin  comme  nous  voyons 
«  l'ours  en  léchant  souvent  ses  petits,  les  rendre 
«  en  la  perfection  de  leur  espèce,  lesquels  aupara- 
„  vaut  ne  paroissoient  estre  qu'une  lourde  masse 
„  de  chair  ;  aussi  discourans  souvent  dans  le  Parle- 
„  ment,  des  abus  qui  se  commettoient  en  Cour 
,  d'Eglise,  et  reblutans  cette  mesme  paste,  furent 
„  formées  entre  nous,  sur  la  fin  du  règne  de  Louis 
„  XII,  ces  appellations  comme  d'abus...  et  establies 
„  sur  quatre  pilliers,  sur  lesquel  sont  aussi  fon- 
„  dées  les  libériez  de  nostre  Eglise  Gallicane.  » 


(Pasquier,  Rech.  liv.  ni,  p.  257.  —  Voy.  Id.  ibid. 
p.  '254  et  suiv.  —  Fleurv,  Institut,  au  Dr.  Ecoles. 
T.  II,  p.  9  et  222.) 

Appellement,  subst.  masc.  Action  d'appeler, 
de  convoquer,  de  nommer,  d'épeler.  Ces  significa- 
tions, dont  on  trouve  la  preuve  dans  Cotgrave . 
Oudin,  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict.  sont  "toutes 
analogues  à  celles  du  verbe  Appeller.  (Voy.  Appel- 
LATio.x  et  Appelleb.) 

Appelle!',  verbe.  Pousser,  presser,  faire  appro- 
cher, faire  venir.  Citer  à  comparoitre.  Crier,  heurter. 
Invoquer.  Convoquer.  Provoquer  à  combattre  et  à 
plaider  ;  assigner,  sommer,  accuser,  etc.  Requérir, 
prier,  questionner,  interroger,  etc.  nommer,  épeler. 

En  supposant,  avec  les  Étymologistes  Latins,  que 
le  verbe  simple  et  inusité  péllare  (1)  ait  été  formé  du 
verbe  pellere  dont  l'acception  est  relative  à  celle 
du  grec  ncXàv,  faire  approcher,  le  composé  appellare, 
en  françois  appeler,  signifiera  pousser  vers  un  lieu, 
en  latin  appelleve,  peilerc  ad  locum.  (Voy.  Marti- 
nius,  Lexic.  Philolog.)  Il  semble  que  ce  soit  la 
signification  de  notre  verbe  appeler,  lorsque  pour 
désigner  une  personne  que  sa  volonté  ou  la  néces- 
sité "pousse  à  faire  ou  à  aimer  une  chose,  on  dit 
figurément  qu'elle  y  est  appelée.  C'est  peut-être 
encore  dans  un  sens  analogue  à  celui  de  pousser, 
qu'en  parlant  d'une  rançon  dont  on  avoit  poussé, 
porté  le  prix  trop  haut,  l'on  a  dit  :  «  Salehadins 
«  apela  si  haut  le  raen(;on  Bauduin,  que,  etc.  » 
(Chron.  d'Outremer,  ms.  de  Berne,  ir  113,  fol.  121.) 

On  approche  du  lieu  ou  de  la  personne  vers 
lesquels  on  est  poussé,  ou  pressé  de  venir.  De  là,  le 
verbe  appeller  aura  signifié  faire  approcher  quel- 
qu'un, le  faire  venir,  quelle  que  soit  la  façon  dont 
on  le  pousse,  on  l'excite,  on  le  force  à  s'approcher, 
à  venir,  à  paroître,  à  comparoitre. 

Si  Vapicmi  U  lerres  à  soi. 
Dame,  fait-il,  délivre-moi. 
Va,  fait-ele,  ne  doutes  riens, 
Jou  te  délivrerai  moult  biens. 

Bestiaire.  MS.  du  R.  u"  7989,  fol.  172,  V  col.  2. 

Au  figuré,  l'on  disoit  en  parlant  d'une  femme  qui 
approchant  du  terme  oii  elle  devoit  accoucher,  se 
sentoit  pressée  de  mal  d'enfant,  qu'elle  étoit  appellée 
de  maladie.  «  Celle  Dame  estoit  moult  enceincte  de 
«  son  mary. .  . .  mais. .  . .  comme  celle  qui  estoil 
«  appellée  lie  maladie  luy  vint  au  devant  au  mieulx 
«  comme  elle  peut.  «  (Percef.  Vol.  IV,  fol.  11(3.) 

11  seroit  inutile  de  prouver  l'acception  particulière 
d'appeller,  faire  approcher,  faire  venir  en  Justice, 
citer  à  paroître,  à  comparoitre  devant  un  Juge.  On 
a  dit  relativement  à  cette  acception  ,  que  Dieu 
appelle  le  monde,  que  Dieu  nous  appelle  à  lui. 

Par  Dieu  qi  li  raons  apele, 
Mult  doit  estre  chil  irés 
Qi  pert  tout  outréement 
Chou  dont  il  a  bonement. 

Ane.  POBS.  fr.  MS.  du  Vatic.  n"  U90,  fol.  145,  R'. 

Richard,  Duc  de  Normandie,  se  sentant  afîoiblir. 


(1)  Ce  mot  signifiait  parler. 


AP 


—  55  - 


"  Mi  ?M  ^^r  "'^'^'^^  ^0™^-  et  parla  en  tel  manere  • 
«  Ml  Chevalier  et  mi  compaignon,  je  ai  esté  Sîe 
.  Sires  terriens  jusques'aujordùi  ;  mes  puiscml 
-'  nostre  Sires  me  veut  à  soi  apcler,  il  meSn? 

Hist  de"/r  TPx''o\'o/?r"-  ^''  "^"J'^'  «^^  ^"« 
niM   ue  rr.  i.  \,  p.  sno.)  On  remarque  en  oénéral 

que  les  acceptions  usitt4s  de  notre  verbe  fSr 
sont  anciennes  dans  notre  lan"-ue  fW^<?/é;r 

Qu'un  homme,  un  animal  vienne,  qu'il  approche 
au  son  dune  voix,  d'une  cloche,  ou  de  ehme 
autre  instrument,  il  obéit  toujo  ,rs  à  i„,e  Se 
d  impu  sion  dont  ce  verbe  partit  dés  onéi    vïïïl 

simplemenUw,,/,,son  domestique,  son  ciiie,"  etS 
Le  bruit  qu'on  fait  à  une  porte,  soi  en  crhi  '  snu 
en  heurtant  fait  venir  quelqu'un  qui  fSuv  e  De  i  ' 
on  aura  dit  appeler  un  mot,  appeler  à  la  m,,,- 
açons  de  parle,-  de  même  èspèie  que  plusieurs 
autres  qu  on  a  déjà  remarquées,  et  par  iKouei  is 

h7ur£poïrtfaii?(Sii';'  ""^  '"'■'^'  ^'^'^'^^^ 


AP 


A  son  ostel  vint,  si  apele 
Un  mot;  et  sa  famé  l'oi 
yui  moult  forment  s'en  esioi 
Lors  couru  coumo  preus  et  saçe  • 
L  uis  ouvn  sanz  autre  message    ' 

FM.  MS.  du  R.  n-  TBIS^t/ii,  fol.  125,  R.  col.  2. 
•  •  .  Oui  bonne  nouvelle  aporte 
Seurement  apèle  à  la  porte. 

Rom,  de  Rou.  MS.  p  %•■> 

3^;î^™^s^fïïŒ'Hn=F 

Namies  le  voit  ;  Nostre  Dame  en  ow/e 

dillerens  moyens  étant  commr.'c  ^  ^^i   -'^    ,"^'  ^^^ 
appeller,  kapSf  si-n  nUn  1  '"""'  «'^'^''^'a 

criminelles  el  c  v  S   [™J    t^Misioi]  des  alfaries 

cours  .es  Bn^;'i';-,-i«,'s,rifs,îs,is 


une  preuve  évidente  de  la  justice  nnripnn,^ 
fie  l'accusation  ou  de  la  dPmnnrip  f.      ■   ^"^''^® 

=,?erii;SV!i™--s 
ooi;?';'!;f?„;;«sr;?ir,^iïjî™T,ïY„"'^'="- 

HSsIïSilSpS 

on  se  FésentSuen  JuS  aSsavof  'rni.'"'°''''^' 
e  counablp  rl'v  v^n;..    r     '  ''P'^^  avoir  lait  sommer 

-  ra™o  iroj/;   °.r,US:i","«  ,■;"«  lecoml,»lle„>. 

:îSu?,?efr'=''r''™?'°°-  »  iS 

«  Oes    fFf.m  (^    ^'Çcuse  laisoit  le  serment  su  vant  : 
ws   (Ecoute),    homme   que  je    tiens    par    là 


<..  «,.U  .  ,-.„ou.e„e..  .3  .„.„«„  ,,„3  „„,.,.„,  „,^^  ^„^  ^_,  ^^^^^  ^^^  ^^^^^^^^  ^^ 


AP 


—  56  — 


AP 


«  main  seneslre  et  qui  L.  le  fais  appeller-en  bap- 
«  tesme  •  telle  personne  ne  meurdry  en  felonnie  : 
a  ainsi  ui-aist  Dieu  et  ses  Saincls.  "  L'accusateur 
lui  reprochoit  clans  les  mêmes  termes  et  avec  le 
même  serment,  qu'il  s'étoit  parjure.  Le  premier 
serment  éloit  suivi  d'un  second,  par  lequel  chacun 
des  deux  Champions  juroit  de  n'avon-  sur  lui  aucun 
sortiléo-e  qui  pût  l'aider,  ou  nuire  à  son  adversaire. 
Alors  on  leur  donnoit  l'escu  et  le  baston,  et  les 
Quatre  Chevaliers  élus  à  la  garde  du  champ  de 
bataille,  se  placoient  entre  les  Champions  et  }es 
tenoieiit  éloignés  l'un  de  l'autre,    »  tant   qu  ils 
«  eussent  aouré,  c'est-à-dire  prié  avenaument.  " 
Leur  prière  Unie,  les  quatre  Chevaliers  se  retiroient 
aux  quatre  coins  du  champ-clos,  et  les  Champions 
marchoient  l'un  contre  l'autre  et  se  joignoient. 
..  Si  Vappellé  pouvoit  se  défendre  tant  que  les  es- 
.,  toilles  apparussent  au  Ciel,  il  avoit  la  victoire    » 
(Voy.  Ane.  Coût,  de  Norm.  chap.  lxviii,  fol.  88  et  90.) 
Peut-être  qu'en  étendant  l'usage  de  ces  combats 
aussi  odieux  au  Clergé(l)  qu'ils étoient  agréables  a  la 
Noblesse  on  voulut  les  rendre  moins  sanguinaires. 
Telle  pourroit  être  la  raison  de  la  défense  de  com- 
battre avec  d'autres  armes  que  l'écu  et  le  balon. 
Par  une  Constitution  de  Charlemagne,  (Loi  des  Lom- 
bards, liv.  11,  tit.  V,  §'i3,)  le  bâton  etoit  la  seu  e 
arme  permise  dans  le  combat  judiciaire.  Mais  la 
liberté  du  choix  des  armes  fut  autorisée  par  un 
Capitulaire  que  Louis-le-Débonnaire  ajouta  a  la  Loi 
Salique. 

On  croit  voir  dans  l'abus  de  la  preuve  négative 
admise  par  la  Loi  des  Francs  Ripuaires  et  celle  de 
presque  tous  les  peuples  barbares,  une  cause  géné- 
rale de  l'établissement  et  de  l'extension  de  la  loi  du 
combat  «  Il  me  paroît,  dit  M.  de  Montesquieu,  que 
«  la  Loi  du  combat  étoit  une  suite  naturelle  et  le 
a  remède  de  la  Loi  qui  établissoit  les  preuves 
„  néo-atives.  »  Si  Gondebaud  ,  Hoi  des  Bourgui- 
enonl  l'autorise,  c'est  afin  que  ses  sujets  ne  fassent 
Dlus  de  serment  sur  des  faits  douteux,  et  ne  se  par- 
lurent  pas  sur  des  faits  certains.  «  Multos  in  populo 
..  nostro...  ita  cognoscimus  depravari  ut  de  rébus 
„  incertissacramentaplerunqueofferrenondubitent 
..  et  de  cognitis  jugiter  perjurare.  Cujus  scelens 
«  consuetudinem  submoventes  prœsenti  lege  decer- 
<.  nimus  ut  quotiens  inter  homines  nostros  causa 

«  surrexerit,  etc pugnandi  licentia  non  rie- 

«  aetur  >■  (Voy.  Burgund.  Leges,  cap.  xlv.)  Si  1  Lm- 
Dereur  Othon  II  veut  que  celte  même  Loi  décide  les 
contestations  sur  la  propriété  des  héritages,  ces 
nu'on  étoit  sûr  d'être  usurpateur  dès  qu  on  osoit 
être  parjure.  «  H  s'étoit  introduit  depuis  long- 
«  temps  une  détestable  coutume,  à  la  faveur 
«  de  laquelle  un  homme  se  rendoit  propriétaire 
«  d'un  héritage,  en  faisant  serment  sur  les  Evan- 
«  giles  que  là  charte  qu'il  presentoil  et  qu'on  atta- 
«  quoit  de  faux,  étoit  vraye.  >•  (Voy.  Loi  des  Lom- 
bards, liv.  II,  tit.  Lv,  chap.  xxxiv.)  Si  plusieurs  Cons- 
.titutiôns  générales  de  Charlemagne  et  de  Louis-le- 


Débonnaire,  antérieures  à  celle  d  utnoii,  et  insérées 
comme  elle  dans  la  Loi  des  Lombards,  (liy.  II,  tit.  lv, 
S  '>3  )  étendirent  l'usage  du  combat  judiciaire , 
d'abord  aux  affaires  criminelles,  et  ensuite  aux 
civiles,  c'est  qu'avec  autant  de  facilite  d  abuser  uti- 
lement de  la  preuve  négative,  il  étoit  presque  im- 
possible que  l'accusateur  ou  l'accusé,  le  demandeur 
ou  le  défendeur  ne  se  parjurassent.  On  acquiesça 
donc  aux  représentations  de  la  nation  qui  demandoit 
qu'à  la  preuve  par  serment  on  substituât  la  preuve 
par  le  combat. 

Quoique  la  Loi  des  Francs  Saliens,  plus  sage  que 
la  Loi  des  Francs  Ripuaires  et  des  autres  peuples 
qui  admettoient  les  preuves  par  serment,  eut  obvie 
à  la  nécessité  des  preuves  par  le  combat,  en  ordon- 
nant que  toute  demande  ou  accusation  fut  prou- 
vée, et  que  pour  s'en  défendre.  Il  ne  suffiroit  pas 
de  la  nier,  les  constitutions  insérées  dans  la  Loi 
des  Lombards,  furent  ajoutées  a  la  Loi  Salique 
Ainsi  lusage  de  la  preuve  par  le  combat,  devint 
.Général  en  France.  On  n'exclut  cependant  pas  des 
tribunaux,  les  autres  preuves  :  mais  la  na  ion,  libre 
de  suivre  son  génie  guerrier,  préféra  la  Loi  du 
combat  et  retendit  ;  extension  qui  paroit  avoir  été 
la  principale  cause  de  l'oubli  ou  tombèrent  insen- 
siblement les  Loix  Saliques  les  Loix  Romaines  et 
les  Capitulaires.  (Esprit  des  Loix,  T.  II,  chap.  xiii, 

^''0^116  tongea  plus  dès  lors  qu'à  réduire  en  prin- 
cipe l'usage  de  cette  Loi,  et  à  former  le  corps  de 
celte  lurisorudence  militaire  qui  changeoit  toutes 
les  acliSns  dvlfes  et  criminelles,  en  faits  sur  lesquels 
elle  ordonnoit  le  combat.  On  y  réussit  même  au 
point  de  prouver  que  s'il  y  a,  comme  1  observe  à  ce 
siî  et  de  Montesquieu,  «  ""<^  i".fi">\e  de  choses  sages 
u  qui  sont  menées  d'une  manière  très  folle,  il  y  a 
.<  aussi  des  folies  qui  sont  conduites  d'une  manière 
«  très  sage.  «  (Voy.  Esprit  des  Loix,  T.  II,  chap.  xxv, 
P-  331.) 

La  sao-esse  avec  laquelle  on  fixa  les  règles  et  les 
bornes  du  combat  judiciaire,  est  particulièrement 
attestée  par  Beaumanoir.  (Coût,  de  Beauvoisis,  chap. 
Lx-ixiv)  11  arrive  souvent,  dit  cet  Auteur,  que 
dans  les  Cours  laïques  «  li  plet  chieent  en  gages  de 
?  batailles,  ou  que  apensément  li  un  apele  l  autre 
.     e  vilain  fet  par  devant  Jusliche  ;  si  est  bons  que 
«     ous  en  façons  propre  chapitre,  qui  ensaignera 
„  desquiex  cas  l'en  puet  apeler.  et  quelles  personnes 
..  pueent  apeler  et  estre  apeles  et  lesque  es  non   e 
„  comment  l'en  doit  fourmer  son  ay;^/  et  le  per  1 
«  qui  est  entre  tex  apiaux,  et  lesquels  ay*î««.rli  be  - 
„  gneur  ne  doivent  pas  soulfnr,  si  que  chil  qu 
louront  apeler  sachent  comment  il  se  doivent 
:   Silënir  en  plet  de  gages  et  la  fin  en  quoi  il  en 
„  pueent  venir  se  il  enchieent  dou  plet.  »  (Coût,  de 
Reauvoisis,  ubi  supra,  p.  307.) 

Si  le  bàtôn  étoit  encore  d'usage  dans  ces  combats, 
ce  n'éloit  plus  qu'entre  Vilains.  Les  Gentilshommes 
combaltoient  à  cheval  et  avec  telles  armes  qu  il  leur 


(1)  Le  jugement  de  Dieu  admis  par  VEglise  était  le  serment,  (n.  e.) 


AP 


—  a/  — 


AP 


plaisoit  de  choisir,  «  excepté  coustel  à  pointe  et 
«  mace  d'arme  molue.  «  Mais  lorsqu'un  Gentil- 
homme appeloit  ou  provoquoit  un  Vilain,  il  devoit 
se  présenter  comme  lui  à  pied,  sans  autres  armes 
que  l'écu  et  le  bâton,  parce  que  «  s'abaissant  en 
«  apeler  si  basse  personne,  sa  dignité  étcit  ramenée 
«  en  cel  cas  à  telles  armeures  comme  chil  qui  estoit 
«  apelé.  0  (Voy.  Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis, 
chap.  Lxi,  p.  308.  —  Id.  ibid.  chap.  lxiv,  p.  328.) 

La  précaution  de  ceux  qui  louoient  pendant  un 
certain  temps  un  Champion  pour  combaltre  dans 
toutes  leurs  querelles  bonnes  ou  mauvaises,  nous 
paroît  une  preuve  singulière  de  l'extension  prodi- 
gieuse de  l'usagedu  combat  judiciaire.  Beaumanoir, 
pour  qui  cette  Coutume  éloit  ancienne,  remarque 
d'ailleurs  que  du  temps  de  S'  Louis,  il  suffisoit 
encore  qu'une  demande  excédât  la  valeur  de  douze 
deniers,  pour  être  jugée  par  la  Loi  dn  combat  :  Loi 
à  laquelle  on  peut  dire  que  toutes  les  autres  Loix 
étoient  presque  toujours  forcées  de  céder,  jusqu'à 
ce  que  ce  Prince,  abolissant  les  preuves  par  le  com- 
bat, s'occupât  du  soin  de  rétablir  les  preuves  par 
chartes  ou  par  témoins.  (Voy.  Beaumanoir,  Coût. 
de  Beauvoisis,  chap.  .xxxvui,  p.  203.  —Id. ibid. chap. 
Lxni,  p.  325.)  C'étoit  ramener  la  Jurisprudence  aux 
premiers  principes  de  la  Loi  Salique  ;  Loi  conforme 
à  celles  de  presque  toutes  les  nations  du  monde, 
en  ce  qu'elle  assujetlissoit  les  accusations  et  les 
demandes,  les  défenses  et  les  juslilications  à  la 
nécessité  des  preuves  positives.  «  Nous  deffendons 
"  les  batailles,  par  tout  nostre  demaine,  en  toutes 
«  querelles  :  mais  nous  n'ostons  mie  les  dénis,  les 
"  responses,  les  contremans  qui  ayent  esté  accous- 
«  tumés,  selon  les  usages  des  divers  pays,  fors  itant 
«  que  nous  en  osions  les  batailles.  Et  en  lieu  des 
«  batailles,  nous  mettons  priieves  des  tesmoins,  ou 
«  des  Chartres.  »  (Ord.  T.  I,  p.  m.) 

On  pouvoil  s'opposer  à  l'abolition  de  l'usage  du 
combat  dans  les  Juridictions  seigneuriales,  et  S' 
Louis  l'y  laissa  subsister,  excepté  dans  le  cas 
A'appel  de  faux  jugement.  (Voy.  Ord.  T.  I,  p.  113. 
—  Ibid.  p.  25G-258.)  La  prudence  de  ces  ména- 
gemens  nécessaires  avec  des  Seigneurs  jaloux  de 
leurs  prérogatives,  les  prépara  à  souffrir  que  leurs 
vassaux  partageassent  avec  les  sujets  du  Roi,  le 
bienfait  de  la  nouvelle  Jurisprudence. 

Beaumanoir  qui  écrivoit  peu  de  temps  après  la 
mort  de  ce  Prince ,  nous  apprend  qu'il  étoit  «  à  la 
«  Yolenté  des  houmes  dou  Comte  de  Clermont  de 
«  tenir  leur  Court.,  selonc  l'anchienne  Coustume, 
«  ou  selonc  l'Establissement  le  Roy  :  mais  se  li  plès 
«  estoit  lamés  (1)  seur  l'Establissement  par  le  souf- 
«  rance  dou  Seigneur,  li  Sires  ne  le  pouvoit  puis 
«  mettre  à  gages,  etc.  »  (Voy.  Coût,  de  Beauvoisis, 
chap.  Lxi,  p.  309.)  Le  progrès  de  cette  tolérance  de  la 
part  des  Seigneurs  fut  tel  que  la  nouvelle  Jurispru- 
dence, aussi  conforme  à  la  raison  naturelle  et  à  la 
Religion,  que  l'ancienne  y  étoit  contraire,  s'étendit 


de  proche  en  proche,  et  devint  univei'selle  dans  les 
tribunaux  de  Justice.  Le  cri  des  appels  au  combat 
cessa  d'y  retentir  et  d'alarmer  le  citoyen  dont  l'inno- 
cence où  la  propriété  étoit  attaquée.  Mais  hors  de 
ces  mêmes  tribunaux,  il  fallut  à  ce  cri  prendre  les 
armes,  et  au  mépris  des  Loix  politiques  et  reli- 
gieuses dont  la  Noblesse  regardoit  le  respect  comme 
une  lâcheté  déshonorante,  combaltre  pour  la  gloire, 
l'amour  et  la  vengeance.  Ainsi  la  l'aison  victorieuse 
d'une  superstition  ignorante  et  barbare,  fut  soumise 
au  préjugé  fanatique  et  impérieux  de  l'honneur.  De 
là,  l'usage  de  ces  expressions  si  familières  à  nos  an- 
cêtres Gentilshommes,  ajipcllerde  gage,  de  combat, 
de  duel,  de  joute,  etc.  Les  exemples  en  sont  si  fré- 
quens,  surtout  dans  les  romans  de  Chevalerie  et 
dans  les  ouvrages  qui  traitent  des  duels,  des  gages 
de  bataille,  qu'il  suffira  de  les  avoir  indiqués. 
Ces  expressions  ont  d'ailleurs  la  même  signification 
que  celles  encore  usitées,  appeler  en  duel,  appeler 
au  combat. 

Souvent  le  verbe  appeller  a  signifié  seul ,  provo- 
quer à  combattre,  provoquer  à  venir  en  champ-clos, 
y  faire  venir  en  provoquant  au  combat  ;  et  dans 
les  tribunaux  où  l'usage  du  combat  toit  aboli,  pro- 
voquer à  venir  en  Justice  ,  y  faire  venir  quelqu'un 
en  l'assignant,  en  lui  faisant  une  sommation,  en 
formant  contre  lui  une  accusation,  une  demande. 

C'est  dans  le  sens  d'assigner,  qu'on  dit  encore 
aujourd'hui  «y^y^cZa- en  Justice,  appeler  en  témoi- 
gnage, etc.  On  ajoute  qu'anciennement  appeller 
quelqu'un  de  meurtre,  c'éloit  l'en  accuser  ;  que 
Vappeller  de  servage,  c'étoit  le  redemander,  le 
réclamer  comme  serf,  proprement  le  pousser,  le 
forcer  par  cette  accusation,  ou  par  cette  demande, 
à  venir  en  Justice  prouver  sa  liberté  ou  son  inno- 
cence. <■  Se  nus  hom  veut  aj>peller  un  autre  de 
«  murtre,  que  il  soit  ois,  ententivement  ;  et  ([uand 

«  il  vodra  faire  sa  clameur,  que  l'en  li  die 

'<  Soies  bien  certain  que  tu  n'auras  point  de 
«  batiiilles  ;  ains  te  conviendra  jurer  par  bons  tes- 
«  moins  jurez....  Et  se  cil  qui  veut  aj/pcller,  quand 
«  l'en  li  aura  ainsi  dit,  ne  veut  poursuivre  sa  cla- 
«  meur,  laissicr  la  puet.  »  (Ord.  T.  I,  p.  111  et  112.) 
«  Se  aucuns  est  appelle  de  servage ,  ou  de  murtre, 
«  ou  d'aucun  autre  meffet,  etc.  »  (Ibid.  p.  113et285.) 

Bernart,  cist  preudom  vos  ajiele 
D'une  chose  qui  n'est  pas  bêle. 

F^.  MS.  de  Berne,  n-  354.  fol.  7,  V*  col.  i. 

Lorsqu'on  appelle  d'un  jugement,  on  l'accuse  en 
quelque  façon  d'être  injuste,  et  on  provoque  la 
partie  en  faveur  de  laquelle  il  est  rendu,  à  venir 
devant  le  Juge  supérieur  à  qui  l'on  demande  répa- 
ration de  l'injustice  dont  on  se  plaint.  (Voy.  Appel.) 

En  requérant,  en  priant  quelqu'un  d'une  chose, 
on  le  provoque  à  la  faire  ;  on  provo  ;ue  sa  réponse 
en  le  questionnant,  en  l'interrogeant  sur  ce  qu'il 
fait,  sur  ce  qu'il  pense.  De  là, "le  verbe  appeller 
signifioit  requérir,  prier,  questionner,  interroger, 
etc.  dans  un  sens  analogue  à  celui  de  pousser,  pres- 


(1)  Ne  faut-U  pas  lire  tancé?  Tamer  se  trouve  dans  la  Chronique  des  ducs  de  Normandie,  mais  ce  peut  être  une 
erreur,  (n.  e.) 

II.  8 


AP 


—  58  - 


AP 


ser,  provoquer.  «  Me  promistes  tous  quatre  que... 
«  vous  me  délivreriez  de  mort  cliascun  une  fois 
«  quant  je  vous  eu  ro(iuerroye,  dont  tous  en  ont 
«  fait  leur  devoir,  fors  vous  que  je  appelle  de  pro- 
«  messe.  »  (Percef.  Vol.  III,  fol.  157,  Vcol.  l.j 

Arriers  s'est  à  la  voie  mise, 
Ainz  n'enporta  que  sa  chemise. 
Et  la  Contesse  l'an  apele  ; 
Si  li  demande,  quel  novèle  ? 
Por  qu'as  laissié  le  Chevalier  ? 

Fabl.  MS.  de  Berne,  n'  354,  fol.  172,  V  col.  2. 

On  nomme  les  personnes  qu'on  a  quelque  raison 
ù'appeller,  de  faire  approcher,  de  faire  venir  à  soi. 
Ainsi  le  sens  littéral  de  noire  expression  appeller 
quehiu'un  par  son  nom,  seroit  faire  venir,  faire 
approcher  quelqu'un,  l'y  provoquer  en  le  nommant, 
le  nommer  pour  qu'il  approche,  pour  qu'il  vienne; 
expression  qui  est  ancienne  dans  notre  langue. 
«  Nuls  n'apiaut  l'autre  par  son  nom  purement.  » 
(Règle  de  S'  Benoit,  ms.  de  Bouhier,  p.  84.)  Telle 
paroit  être  effectivement  la  signification  du  verbe 
appeller  :  i°  nommer,  prononcer  à  haute  voix  les 
noms  de  personnes  qui  doivent  venir  ou  être 
venues  dans  un  lieu  à  certaine  heure;  2°  nommer, 
lire  tout  haut  le  nom  des  parties  dont  on  appelle  la 
cause,  pour  qu'elles  viennent  plaider.  Enfin, 
lorsqu'au  lieu  d'épeler,  on  disoita/jyjfZZé'/'leslellres 
d'un  mot,  c'étoit  les  nommer,  afin  que  venant,  pour 
ainsi  dire,  l'une  après  l'autre,  elles  composassent  le 
mot  qu'on  vouloit  prononcer.  Ce  ne  seroit  donc  que 
par  abstraction  de  l'idée  d'une  cause  finale,  analo- 
gue à  celle  qui  est  indiquée,  que  le  verbe  appeller 
ou  ujjpcler  auroit  signifié  et  signifieroit  encore  nom- 
mer les  personnes  et  les  choses,  en  dire  les  noms 
et  qualités,  sans  autre  raison  que  celle  de  les 
désigner. 

GONJUG. 

Apeaut,  subj.  prés.  Qu'il  appelle,  qu'il  nomme. 

(G.  Guiart,  ms.  fol.  88,  V°.) 
Apelecent,  subj.  prés.  Qu'ils  appellent.  (Règle  de 

S"  Benoit,  lat.  et  fr.  ms.  de  Beauvais,  chap.  lxui.) 
Apeleil,  participe.  Appelé,  accusé,  nommé.  (Loix 

Norm.  art.  iv,  vi  et  xvii.) 
Apeleit,  part.  Appelé,  nommé.  (S'Bern.) 
Apeleiz,  participe.  Appelé,  nommé.  (Id.  ibid.) 
Apelerad,  ind.  fut.  Appellera.  (Loix.  Norm.) 
Apelet,  ind.  prés.  11  appelle,  il  nomme.  (S'  Bern.) 
Apiau  (j'),  ind.   prés.  J'appelle,  j'accuse.  (Ane. 

Poès.  fr.  MS.  du  Vatic.  n"  1490,  fol.  55,  ^'°.) 
Apiaut,  ind.  prés.  Il  appelle.  (Fabl.  ms.  du  R.) 
Apiaul,  subj.  pr.  Qu'il  appelle,  qu'il  invoque.  (Id.) 

VARIANTES  ; 
APPELLER.  Rom.  de  la  Rose,  vers  22665. 
Apaller.  Chans.  Fr.  WS.  de  Berne,  n°389,  fol.  57,  R». 
Apeler.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  14,  35,  passim. 
Apeller.  Chans.  Fr.  MS.  de  Berne,  n»  389,  fol.  15,  V». 
Apieler.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  247. 
Appeler.  Orth.  subsist.  —  Cotgr.  R.  Estienne,  Nicot,  Dict. 

Appelleur,  sub&t.  masc.  Appelant.  Les  ac- 
ceptions de  ce  mot  appelleur  ou  appelierres,  plus 
usité  dans  notre  ancienne  langue  qu'appellant  ou 
appelant,  sont  relatives  à  celles  d'appel ,  soit 
qn'appclleiir  désigne  un  champion,  un  accusateur, 


un  demandeur  en  Justice;  soit  qu'il  désigne  un 
oiseau  qui  en  fait  venir  d'autres  dans  les  filets,  un 
oiseau  à  la  suite  duquel  les  autres  volent.  Si  l'on  en 
croit  Cotgrave,  la  signification  d'appelleur  étoit 
quelquefois  analogue  à  celle  du  verbe  appeller, 
épeler.  (Voy.  Appel  et  Appeller.) 

VARIANTES  : 
APPELLEUR.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Campiones. 
Apeleres.  Id.  ibid.  col.  113. 
Apelel'R.  Id.  ibid.  —  Loix.  Norm.  art.  xvi. 
Apeliere.  g.  Guiart,  MS.  fol.  87,  V». 
Apelieres.  Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  p.  312. 
Apeliers.  Id.  ibid.  n.  22. 
Apelierres.  Id.  ibid. 
Apellieres.  Id.  ibid.  p.  312. 

Appelleres.  Du  Cange,  Gl.  lat.  au  mot  Campiones. 
Appellerres.  Id.  ibid.  col.  114. 
Appelloir.  Assis,  de  Jerus.  p.  49  et  60. 
Appellour.  Skinner,  Yoc.  forens.  expositio. 

Appepd,  adv.  et  express,  adv.  En  pendant. 
On  soupçonne  Monet  d'être  l'auteur  de  l'expression 
à-pend,  et  d'en  avoir  formé  l'adverbe  append.  Il  est 
possible  au  reste  que  dans  une  signification  relative 
à  celle  de  pendre,  suspendre,  on  ait  dit  qu'une 
colomne,  une  vis  suspendue  étoit  une  colunine,  une 
vis  append.  Mais  c'est  une  méprise  d'avoir  confondu 
cet  adverbe  avec  le  participe  appens,  en  disant  que 
le  guet  appens  ou  ù-pens  étoit  embusches  en  lieu 
comme  penchant  et  désavantageux  à  celui  qu'on 
guette.  (Monet,  Dict.  —  Voy.  Appens.) 

VARIANTES    : 
APPEND,  A-PEND,  A -PENS,  appens.  Mouet,  Dict.  au  mot 
Appens. 

Appendances,  substantif  féminin  pluriel. 
Appartenances.  Dépendances. 

11  est  prouvé  que  l'idée  particulière  de  tenir  à  une 
chose  en  y  appcndanl,  étant  généralisée,  on  a  pu 
dire  appendances  pour  appartenances.  (Voy.  Appar- 
tenance.) 

Peut-être  aussi  a-t-on  dit  appendances  pour  dé- 
pendances. «  Je  suis  natif  des  appendances  du 
«  royaulme  de  la  grande  Bretaigne.  «  (Percef. 
Vol.VI,  fol.  43.)  Il  sembleroit  qu'alors  la  préposi- 
tion initiale  à' appendances  seroit  de  même  signi- 
fication que  la  préposition  latine  ah,  qu'en  françois 
on  rend  souvent  par  de.  Au  reste,  comme  ce  qui 
dépend  d'une  chose,  y  est  nécessairement  appen- 
dant  et  par  conséquent  appartenant,  il  est  possible 
que  sans  égard  à  la  différence  de  la  préposition,  les 
mots  dépendances  et  appendances  aient  été  récipro- 
quement substitués  l'un  à  l'autre,  pour  signifier 
appartenances,  en  général  ce  qui  tient  ou  appar- 
tient à  une  chose,  soit  en  appendant,  soit  en  dé- 
pendant. (Voy.  Dépendance.) 

Appendices,  subst.  fém  plur.  Appartenances 
et  dépendances.  Il  est  constant  que  dans  un  grand 
nombre  d'anciens  titres  latins,  le  mol  appenditiœ 
ou  appendiciœ,  en  françois  appendices,  signifie 
seul  ce  que  dans  un  aussi  grand  nombre  d'autres 
signifient  les  mots  réunis  pertinentiœ  et  appendi- 
tiœ. Soit  qu'une  chose  appende  à  une  autre  chose 
ou  qu'elle  en  dépende,  soit  qu'elle  y  soit  soupendue 


AP 


-  59  — 


AP 


ou  suspendue,  elle  y  tient.  Or,  ces  façons  particu- 
lières de  tenir,  d'appartenir  à  une  chose,  étant 
généralisées,  on  a  pu  désigner  \es,  appartenances  et 
dépendances  d'une  terre,  d'une  fief,  d'une  maison, 
en  les  nommant  seulement  appendances  ou  appen- 
dices, dépendances  ou  dépendlces,  quelquefois  sup- 
pendices.  Ce  dernier  mot  est  synonyme  ù'appendi- 
ces  dans  un  titre  de  12C8,  publié  par  Dubouchet. 
(Preuv.  de  l'Hist.  de  la  M.  de  Coligny,  p.  58.  —  Voy. 
Ap^ENDA^■cEs  et  App.\rte.nance.)  «  Contens  fut  entre 
«  moy...  et  l'Abbé  et  le  Convens  dou  mont  Saint- 
«  Eloy....  des  Justices,  desostes(l),  des  terres  et  des 
«  appendisses  de  la  Court  de  Faveril.  »  (Duchesne. 
Hist.  généal.  de  la  M.  de  Béthune,  pr.  p.  13i  ;  tit. 
de  12i7.)  «  Don  li  fit  deLinei  et  des  apendises,  en 
«  mariage.  »  (Id.  Hist.  généal.  de  la  M.  de  Bar-le- 
Duc,  pr.  p.  32.  —  Voy.  Dépe.ndices.) 

V.-iRlANTES  : 
APPENDICES.  Duchesne,  H.  g.  de  la  M.  de  Béthune,  p.  37.3. 
Apendises.  Dubouchet,  ubi  supra,  p.  63. 
Appendisses.  Duchesne,  H.  g.  de  la  M.  de  Béthune,  p.  134. 

Appendis,  subst.  masc.  (2)  Appentis.  Bâtiment 
attenant  aux  murs,  aux  portes  d'une  ville.  Coteau. 

Anciennement,  un  appendis  étoit  ce  qu'on 
nomme  encore  appentis,  un  bâtiment  dont  le  toit 
en  pente  d'un  seul  côté,  append  ou  tient  au  mur 
contre  lequel  il  est  appuyé.  (Voy.  Appendue.)  «  Un 
o  appendeis  qui  se  fiert  en  la  rue  S.  Abrahamj  etc.  » 
(D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au 
mol  appoidaria  ;  tit.  de  1295.)  C'est  relativement  à 
l'idée  de  la  possibilité  d'atteindre  ù  certaine  hauteur, 
en  montant  sur  un  appentis,  qu'on  disoit  figuré- 
ment  :  «  Vostre  promotion  en  l'office  de  Conseiller 
«  aux  Généraux,  c'est  un  appentij...  pour  monter 
"  à  une  magistrature  plus  relevée.  »  (Pasquier, 
Lett.  T.  III,  p.  60G.) 

Dans  une  signification  plus  étendue  qu'elle  ne 
l'est  aujourd'hui,  les  bâtimens,  les  maisons  attenant 
aux  murs  ou  aux  portes  d'une  ville,  peut-être  aux 
faubourgs  de  la  ville,  en  étoientles  appentis.  «  Cou- 
«  rurent  les  Mareschaux  du  Roy  d'Angleterre  jus- 
«  ques  bien  près  de  Paris....  Adonc  s'émeut  le  Koy 
»  Philippe,  et  fit  abbattre  les  appentis  de  Paris,  et 
«  s'en  vint  à  Sainct  Denis.  »  (Froissart,  Vol.  I, 
page  146.) 

Il  seroit  possible  que  par  la  même  extension,  un 
terrain^  un  lieu  attenant  à  des  vignes  eût  été 
nomme  l'rtyj/^eHf/is  aux  vignes.  Peut-être  aussi  que 
le  coteau  étant  à  la  montagne  ce  qw'wnappentis  est 
au  mur  contre  lequel  il  est  appuyé,  \q  moi  appendis 
aura  signifié  coteau.  »  Monterez  sur  ceste  petite 
«  montaigne  auprès  de  \' appendis  aux  vignes,  pour 
«  garder  qui  sauldra.  »  (Le  Jouvencel,  ms.  p.  86.  — 
Voy.  Pendant.) 

VARIANTES   : 
APPENDIS.  Le  Jouvencel,  MS.  p.  86. 
Apentis.  Cotgrave  et  Nicot,  Dict. 


ApPENDEts.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  deD.  C.  à  Apiiendavia. 
Appentis.  Orth.  subs.  —  R.  Estienne,  Nicot,  Monet,  Dict. 
Appenty.  Pasquier,  Lett.  T.  III,  p.  606. 

Appendre,  verbe.  Pendre.  Etre  attaché,  tenir, 
appartenir.  (Voyez  Appe.ndance.)  Quelques  Etymolo- 
gistes  latins  croient  que  le  verbe  pendere,  pendeo, 
formé  de  pendere,  pendo  (3),  signifie  un  effftt  de  la 
pesanteur;  opinion  d'autantplus vraisemblable  que 
c'est  par  sa  pesanteur,  par  son  poids  qu'une  chose 
pend,  en  latin  pendet.  On  citera  comme  une  preuve 
de  l'analogie  de  ces  deux  idées,  le  vers  suivant  : 

Moult  granz  fez  (4")  à  preudomme  apent. 

Fabl.  MS.  duR.  n"  7-218,  fol.  223,  R-  col.  1. 

Les  rapports  qu'indique  la  préposition  initiale 
de  ce  verbe  composé  appendre,  étant  signifiés  par 
une  seconde  préposition,  il  semble  que  l'acception 
d'appendre  étoit  la  même  que  celle  du  verbe  simple 
pendre,  lorsque  dans  un  sens  actif  on  disoit,  appen- 
dre une  chose  à  une  colonne,  Yappendre  contre  un 
mur,  Yappendre  en  haut.  (Voy.  Monet,  Dict.)  Ron- 
sard et  Du  Bellay  afïectoient  peut-être  un  air  d'éru- 
dition, en  consacrant  spécialement  ce  verbe  à 
désigner  l'action  de  pendre,  de  suspendre  à  la 
voûfe  d'un  temple  les  choses  qu'on  d'Jdieaux  Dieux. 
(Voy.  Nicot,  Dict.)  Il  est  encore  usité  en  cette  signi- 
fication particulière,  maison  a  la  preuve  qu'ancien- 
nement l'usage  en  étoit  plus  général. 

Le  noir  escu  bendé  de  nuit 
Ot  Larrecin  au  col  pendu, 
Et  d'une  torches  apundu. 

FaM.  .MS.  du  R.  n-  7615,  T.  II,  fol.  191,  V  col.  1. 

Plus  souvent  aussi  l'acception  à'appcndre  étoit 
neutre  comme  celle  du  verbe  latin  appendere, 
pendre,  être  pendant.  «  Le  ray  du  feu  faisoit  à 
«  l'estoille  queue  de  trois  toises  de  longueur,  et  celle 
«  queue  estoit  en  appendant  du  costé  de  la 
«  Grand'Bretaigne.  "  (Percef.  Vol.  IV,  fol.  68.)  On 
pourroil  à  ce  passage  en  réunir  d'autres  où  il  seroit 
possible  que  dans  un  sens  relatif  à  celui  des  prépo- 
sitions latines  ab  et  ad,  la  préposition  initiale  et 
inséparable  du  verbe  ajipendre  indiquât  tour-à-tour 
le  point  duquel  s'éloigne  la  partie  inférieure  d'une 
chose  pendante,  et  le  point  vers  lequel  elle  appro- 
che en  pendant.  Dans  le  premier  cas,  appendre 
seroit  de  même  signification  que  le  verbe  dépendre. 
(Voy.  Dépendre.) 

On  sait  qu'en  général  une  chose  pesante  ne  pend 
qu'autant  qu'elle  est  retenue  par  une  autre  chose, 
qu'autant  qu'elle  est  attachée  et  tient  à  cette  même 
chose,  par  un  moyen  quelconque.  De  là,  l'usage 
figuré  du  verbe  s'appendre,  être  appendant,  s'atta- 
cher, être  attaché  à  servir  l'amour  et  à  mériter  ses 
faveurs. 

Veillier,  ploreir,  poene,  travels,  ahans. 
Tout  ceu  covient  as  fins  amans  sentir  : 
Mais  jai  (5)  por  ceu  ne  se  doit  ébahir 
Li  hons  ki  est  à  haus  dons  apendayis. 

Chans.  Fr.  MS.  de  Barne,  n*  389,  pari,  n,  fol.  18,  V'. 


(1)  hospilcs,  tenure  et  condition  intermédiaire  entre  la  liberté  et  le  servage,  (n.  e.)  —  (2)  Ce  mot  nous  semble  fait  sur 
pente  ;  appendiciuin,  qui  est  ordinairement  cité,  aurait  été,  comme  les  mots  en  itia,  termmé  en  esse  ou  en  ice.  (n.  e.)  — 
(3)  La  forme  romaine  vient  même  de  pendere  avec  e  bref,  et  non  de  pendere  avec  e  long  :  pendeo  est  à  pendo,  ce  que  jaceo 
est  àjacio.  (N.  E.)  —  (4)  Faix,  fardeau  pesant.  —  (5)  C'est  le  mot  jamais  (jain  magis)  interverti,  (s.  k.) 


AP 


—  60  - 


AP 


Moût  est  fox  qui  ne  s'apent 
A  amors  servir  toz  dis  ; 
Qu'amors  tient  celui  joiant 
Qui  à  li  est  ententis. 

Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  217. 

Les  lieux  où  un  amant,  consei-voit  un  attachement 
aussi  heureux  qu'honnête,  étoient  des  lieux  où 
appeiuloient  sa  juie  et  son  honneur. 

Se  j'ai  tors  dou  paix  esteit 
Où  ma  joie  et  m'onors  apent  ; 
Por  ceu  n'ai-je  pas  oblieit 
Coinent  on  aimine  loiaulment. 

Clmns.  fr.  .MS.  de  Berne,  n-  389,  part.  II,  fol.  7,  R°. 

Ces  acceptions  llgurées  prouvent  combien  l'on  a 
abusé  de  la  siu;nification  propre  de  ce  verbe.  On 
considéroit  comme  appoidantes  les  unes  aux  au- 
tres, les  personnes  entre  lesquelles  il  y  avoit  une 
relation,  quelle  que  fût  l'espèce  de  relation  par 
laquelle  elles  étoient  attachées  les  unes  aux  autres, 
par  laquelle  elles  se  teuoient.  Ainsi,  pour  désigner 
les  relations  de  la  créature  au  Créateur,  les  relations 
de  l'homme  à  l'homme,  comme  inférieur,  comme 
parent,  etc.  on  disoit  :  «  Fiz  furent  Remon  ki  fu  de 
«  Beroth  et  des  Hz  Benjamin,  e  Beroth  apenileif  à 
'<  Benjamin.  »  (Livres  des  Rois,  ms.  des  Cordel. 
fol.  45,  V°col.  1.) 

Là  est  Guillaume  de  .Inliers, 

A  qui  ilz  sont  touz  apendanz,  etc. 

G.  Guiart,  MS.  fol. 261,  R". 
La  Corone  de  France  doit  estre  si  avant 
Que  tout  autre  Roi  doivent  estre  à  li  apendant. 

Guiteclin  de  Sassoigne.  MS.  de  Gaignat,  fol.  229,  R*  col.  2. 

Diex  où  tout  est  apendant, 

Qui  de  la  Sainte  Virge  nasqui  en  Belléant,  etc. 

Buenon  de  Comraarchis,  Ms.  de  Gaignat,  fol.  200,  R*  col.  1. 
Mais  au  fort  Roi  où  tout  apent, 
En  rendent  grâces  bonement. 

Lucidaires,  MS.  do  Gibert,  fol.  6,  V'. 

On  voyoit  comme  appcndant,  non-seulement  aux 
personnes,  mais  aux  choses,  tout  ce  qui  leur  étoit 
relatif,  propre,  convenable.  «  Yaissèle  d'or...  ki  al 
>i  servise  apencleit,  etc.  «  (Livres  des  Rois,  ms.  des 
Cordel.  fol.  138.)  «  Co  ne  li  apendeit  pas  à  faire.  » 
(Ibid.  fol.  139.) 

Puisque  Dame  aura  ami, 
Et  èle  li  veut  douner 
S'araour  ;  mis  l'a  en  la  voie 
De  rechevoir  la  grant  joie 
K'al  olroi  d'amours  apent. 

Ane.  Poès.  fr.  .VS.  du  Valic.  n*  li90,  fol.  143,  Rv 
Mais  ce  n'est  pas  amors  qu'à  moi  apende. 

Ane.  Poét.  Fr.  MSS,  avant  1300,  T.  I,  p.  411. 

Richart  par  prière 

Ne  fera  chose  qu'il  requière, 
Ne  qui  a  loiauté  s'apande. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  25,  V'. 
Dame,  fet-èle,  à  vous  qu'apent  de  cest  afère'' 

Fabl.  MS.  du  R  n-  7218,  fol.  338,  V-col.  1. 

C'est  ainsi  qu'en  généralisant  l'idée  d'une  chose 
qui  tient  à  une  autre  chose  en  y  appendant,  on  a 
fait  du  verbe  appcndre  un  synonyme  d'appartenir. 
«  Si  ascun  (1)  face  purchas  de  comune  de  pasture  en 
«  autruy  soil  (2),  et  ne  eit  nul  tenement  à  qui  cèle 


«  Commune  purra  appendre,  tiel  purchas,  etc.  » 
(Britlon,  des  Loix  d'Angl.  fol.  144.)  •<  Tenement  à 
«  qui  l'avowson  (31  appenl  ove  toutes  les  apurte- 
«  naunces.  »  (Id.  ibid.  fol.  23î.)  «  Advowson  et 
>'  common  de  pasture....  sont  nosmés  appendants 
»  al  maiior,  ou  al  terres  et  tenements.  •>  (Tenures 
deLitUelon,  fol.  41.) 

Et  qui  li  voudroit  fere  droit, 
Normendie  il  apcndmit. 

Roiu.  de  Rou,  MS.  p.  232. 
Uns  riches  Chevaliers  estoit 
Moult  franc,  à  qui  il  appendoit 
Assez  grant  terre  et  grant  honor. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7615,T.  11,  fol.  173,  V  col.  1. 

VARIAiSTES  : 
APPENDRE.  Britton,  des  Loix  d'Angl.  fol.  144,  V°. 
Apandre.  g.  Guiart,  MS.  fol.  25,  V». 
Apendre.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  4. 

Appens,  pari,  et  subst.  Pensé,  réfléchi.  Pensée, 
réflexion  (4).  Temps  pour  penser,  pour  réfléchir. 

Il  semble  que  l'usage  du  participe  appens,  abré- 
viation d'appensé,  ait  toujours  été  restreint  à  l'ex- 
pression encore  usitée,  guet  appens.  (Nicot  et  Monet, 
Dict.  —  Dict.  de  Trévoux  et  de  l'Acad.  Fr.  —  Voy. 
Appensé.)  On  pourroit  regarder  l'addition  de  ce  par- 
ticipe appens  au  substantif  guet,  comme  superflue, 
puisqu'il  n'y  a  point  de  guet  ou  â'agiiet  sans 
pensée,  sans  réflexion.  Mais  Pasquier  observe  qu'en 
François,  comme  en  Latin,  il  n'est  pas  extraordi- 
naire de  réunir  deux  mots  de  même  signification, 
pour  rendre  ce  que  l'on  veut  dire  plus  poignant  ; 
qu'ainsi  le  guet  ou  Vaguet  paroit  d'autant  plus 
odieux,  qu'il  est  appens.  (Voy.  Pasquier,  Rech.  L. 
VIII,  p.  099  et  700.)  C'est  par  ignorance  que  l'on  a 
écrit  à-pend  ou  append.  (Voy.  Âppend.) 

Quelquefois  on  écrivoit  guet-à-pens.  Alors,  le 
participe  pens  signifioit  ce  que  signifie  encore  le 
mot  pensée  qui  n'est  autre  chose  que  le  féminin  du 
participe  pensé,  pris  substantivement  au  moyen 
d'une  ellipse.  Par  conséquent,  le  guet-à-pens  étoit 
la  même  chose  que  le  g  net -à-pensée,  c'est-à-dire 
guet  avec  pensée,  avec  réflexion.  (Voy.  Pens  et 
Pensée.)  Il  résulte  de  celte  observation,  que  le  par- 
ticipe composé  apens  peut  aussi  avoir  signifié 
réflexion,  pensée.  (Voy.  Borel,  Dict.) 

On  croit  même  que  dans  un  sens  relatif  à  celui 
de  l'expression  jour  d'appensement,  on  a  nommé 
appens  un  délai  accordé  en  Justice,  pour  penser  et 
réfléchir  aux  objections  qui  pourroient  être  faites  à 
des  témoins.  «  Qui  delTault  en  sa  prouve,  doit  faire 
«  les  despens,  et  luy  doit  cheoir  li  jour  de  la  def- 
«  faulte  en  producion  ;  et  s'il  deffault  à  veoirs 
«  donner  tesmoins  que  l'en  donneroit  contre  lui,  il 
«  n'aura  plus  appens  îi  dire  après.  Ainczois  dira, 
«  etc.  "  (Ane.  Coût,  de  Bretagne,  fol.  102.  —  Voyez 
Appensement  et  Appe.nseb.) 

VARIA^iTES    : 
APPENS.  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Apens.  Pasquier,  Rech.  L.  VIII,  p.  699. 


(1)  aucun  :  ahquns  unus.  (s.  e.)  —  (2)  fonds  de  terre  ;  on  trouve  la  forme  féminine  soile  se  rattachant  à  solum,  devenu  en 
bas-latin  suluim.  -  (3)  Voir  Du  Gange  à  Aduotia.  -  (4)  Comme  on  le  voit  par  ces  vers  (3609)  du  Roman  de  la  Rose  :  a  Mes 
ge  metrai  tout  mon  apens,  Dès  ore  en  Bel-Acueil  garder.  »  (n.  e.) 


AP 


—  61  — 


AP 


Appensé,  participe.  Qui  est  pensé,  réfléchi. 
Qui  a  pensé,  réfléchi.  Occupé,  insirait;  qui  a  des 
idées,  de  la  raison,  de  la  prudence,  etc. 

La  signification  d'appensé  étoit  passive  et  la 
même  que  celle  à'appens,  Inrsqu'en  disant  cliose 
appensée,  fait  appensé,  advis  ou  guet  ap/icnsé,  l'on 
exprimoit  une  pen.sée,  un  dessein  réfléchi  de  nuire. 
(Chron.  S'  Denys,  T.  l,  p.  53.  —  Ord.  T.  I,  p.  57, 
col.  2.  —  Coquillart,  p.  112.  -  Pasquier,  Rech. 
L.  vin,  p.  700.  —  Hob.  Eslienne,  Xicol  et  Monet, 
Dict.  —  Voy.  Appens.) 

Plus  généralement,  le  participe  appensé  signifioit 
la  pensée  sans  dessein  de  nuire.  Il  étoit  actif,  c'est- 
à-dire  qu'il  désignoit  l'état  de  l'homme  ayant  été 
pensant,  et  non  celui  de  la  chose  ayant  été  pensée, 
toutes  les  fois  qu'en  parlant  d'une  personne  qui 
avoit  pensé,  réfléchi,  l'on  disoit  qu'elle  étoit  ap- 
pensée. 

Amours,  se  bien  y  suis  appensée, 
Est  maladie  de  pensée. 

Rom.  de  la  Rose,  ïers  448)  et  4482. 

Apensels  sui  c'une  chose  feroie, 
S'amors  voloit  et  li  venoit  en  greit,  etc. 

Chans.  fr.  MS.  de  Bei'ne,  n"  389,  part,  i,  fol.  21,  V. 

C'est  par  l'analyse  de  l'expression  elliptique  être 
appensé,  qu'on  aperçoit  la  raison  pour  la(iuelle  un 
participe  passé  semble  avoir  quelquefois  la  signifi- 
cation d'un  participe  présent,  comme  en  ce  passage  : 

Lors  esgarde  avant  et  arriéres, 
Et  voit  couvertes  les  gaschieres  (1) 
Des  siens  qui,  serrez  vers  le  val. 
S'en  vont  à  pié  et  à  cheval. 
De  vuidier  le  champ  ape}if:fz. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  368,  Rv 

En  pensant,  on  s'occupe,  on  s'instruit,  on  acquiert 
des  idées,  on  se  fait  une  habitude  de  raison,  de 
prudence,  etc.  De  là,  ce  même  participe  appensé 
signifioit,  1°  occupé  : 

Garde  ta  bouche  soit  de  proier  upeusée, 
Tant  que  de  t'amor  soit  esprise  et  eschaufée. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7G13,  T.  U,  fol.  178,  V  col.  2. 

2"  Instruit  : 

...  De  quanlques  li  demanda 
Le  trouva  si  très-apensé. 
Si  courtois  et  si  avisé,  etc. 

Cléomadès,  .MS.  de  Gaigual,  fol.  40,  R»  col.  9. 

3°  Qui  a  de  la  prudence,  de  la  raison,  etc.  »  Grant 

«  partie  s'accorda  à  ce  que  l'en  li  devoit  aidier 

«  et  s'offrirent  por  li  aidier;  li  autres  disoient  qu'il 
«  n'estoient  mie  appensé.  -  (Martène,  Conlin.  de 
G.  de  Tyr,  T.  V,  col.  710.) 

...  Sa  mère  Done  Ynabele 
Le  reconfortoil  coume  celé 
Qui  ert  apensée  tousjours. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  57,  Y-  col.  3. 

Qu'il  suffise  d'avoir  indiqué  l'analogie  par  laquelle 
tout  mot  signifiant  une  idée  relative  aux  qualités 
habituelles  d'un  être  qui  s'occupe  l'esprit  et  qui 
pense,  pourroit  être  l'explication  du  participe  ap- 
pensé. (Voy.  Appenséement  et  Appensememt.) 


VAJUANTES  : 
APPENSÉ.  Nicot  et  Monet,  Dict. 

Apensé.  Cléomadès,  fol.  1,  passim.  —  R.  Estierme,  Dict. 
Apenseis.  Chans.  Fr.  MS.  de  Berne,  n»  389,  fol.  21. 

Appenséement,  adverbe.  En  pensant,  avec 
examen,  avec  poids  et  mesure.  A  dessein.  Avec 
réflexion,  avec  prudence,  etc.  (Voyez  Appensé  et 
Appe.nser.) 

Anciennement,  faire  ou  dire  une  chose,  enj'y 
pensant,  en  examinant  les  raisons  de  faire  ou  de 
ne  pas  faire  cette  chose,  de  la  dire  ou  de  ne  la  pas 
dire,  c'étoit  agir  ou  parler  apenséenient  ou  empen- 
séement,  agir  ou  parler  avec  poids  et  mesure,  avec 
examen.  «  Quand  elle  parloit  c'esloit...  mont  apen- 
«  séement.  »  (Vie  d'Isabelle,  à  la  suite  de  Joinville, 
p.  174.)  «  Choses  qui  sont  par  adventure  et  non  mye 
«  apenséement  faictes,  etc.  »  (Fabri,  Art  de  Rélhor. 
L.  I,  fol.  51.1  On  lit,  empensécment.  (Id.  ibid.  f°  52.) 
>'  Le  Roy  Richart  férit  par  adventure  ,  non  mie 
"  apenséement;  si  que  luy  fist  mortelle  playe.  » 
(Chron.  S' Denys,  T.  II,  fol.  26.) 

On  forme  un  dessein  en  pensant,  en  pesant  les 
raisons  de  faire  une  chose  ou  de  ne  la  point  faire; 
de  là,  l'adverbe  appenséement  signifioit  à-dessein. 
■<  Sire,  je  le  vous  diray,  et  suy  cy  venu  apenséement 
«  pour  vous  en  parler.  »  (Modus  et  Racio,  ms.  fol. 
249.)  «  Ce  faisoit  Patience  appenséement  pour  deux 
«  causes.  »  (Ibid.  fol.  258.) 

U  y  a  de  la  réflexion,  de  la  prudence,' [du  bon 
sens,  du  jugement  à  n'agir,  à  ne  parler  qu'après 
avoir  pensé.  Ainsi  l'adverbe  appenséement  signifioit 
avec  jugement,  avec  bon  sens,  avec  prudence,  avec 
réflexion.  (Voy.  Cléomadès,  ms.  de  Gaignat,  fol.  14. 
—  Ibid.  fol.  31».)  u  Li  sages  hardis,  si  est  chil  qui 
«  sagement  et  apenséement  monstre  son  harde- 
"  ment.  »  (Beaumanoir ,  Coût,  de  Beauvoisis , 
chap.  I,  page  8.) 

...  .là  nus  hom  feme  ne  prisera 
Ki  aime  trop  baudeinent  (2). 
En  canpion  qui  apenséement 
Conbat,  a  on  plus  seure  atendance 
Ken  benbancier  de  foie  contenance. 

Ane.  Pocs.  Fr.  MS.  du  Valic.  tl-  1490,  fol.  166,  R'. 

VARIANTES  : 
APPENSÉEMENT.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  25. 
Apenséement.  Ane.  Poës.  fr.  MS.  du  V.  n"  1490,  fol.  166. 
Apensémënt.  Chron.  S'  Denys,  T.  II,  fol.  26,  V». 
Empensée.ment.  Fabri,  Art  de  Rhétor.  L.  I,  fol.  52,  R». 

Appensement,  sul)st.  masc.  Action  de  penser, 
de  réfléchir  ;  pensée,  réflexion.  Qualités  d'un  être 
pensant,  prudence,  etc. 

(Voyez  Appe.nséeme.nt  et  Appensé.) 

On  a  dit  au  premier  sens,  «  que  de  de  fol  apen- 
«  sèment  naist  le  mal  consentement.  »  (Voy.  Rom. 
de  la  Rose,  vers  18C62  et  18663.) 

S'uns  Clercs  est  trop  fos  par  nature, 

Nus  sages  hom  n'a  de  luy  cure  : 

S'il  est  trop  sages  ensement 

Il  entre  en  tel  apensement 

De  quoi  bien  Ten  puet  meskair. 

Ane.  Poèt  fr  MSS  avant  1300,  T.  IV,  p.  13U. 


(1)  Voir  Du  Cange  à  Gascaria  :  terres  nouvellement  défrichées,  (ji'ttines.  (n.  é.)  -  (2)  de  l'allemand  bald  :  avec  trop 
a  expansion,  (n.  e.) 


AP 


—  62 


AP 


.  .  .  A  bataille,  ce  dist-on, 
Est  adès  prouece  en  saison, 
Et  avis  et  apensoneiis 
Et  senrtés  et  hardemens. 

Clëomadès,  MS.  de  Gaigtul.  fol.  G3,  R-  col.  2. 

En  termes  de  procédure,  le  jour  d'appensement 
étoit  un  délai  accordé  à  des  héritiers,  pour  penser, 
réfléchir  aux  raisons  qu'ils  pouvoient  avoir  de 
reprendre  un  procès,  ou  de  l'abandonner.  «  Jour 
«  ù'appc  lise  ment  est  et  sert  tant  seulement  en  cas 
«  où  l'on  seroit  ndjonrné  à  reprendre  ou  délaisser 
«  la  cause  et  erremens  d'un  procez  dont  le  deman- 
«  deur  ou  défendeur  seroit  allé  de  vie  h  trespas.  » 
(Bouteiller,  Som.  rur.  tit.  vu,  p.  39.  —  Voy.  Appens.) 

On  a  indiqué  ailleurs  par  quelle  analogie  ce  mot 
appensement  a  désigné  les  qualités  d'un'  être  pen- 
sant, la  prudence,  etc. 

Moult  durement  les  assailloit  ; 
Car  de  très-grant  vaillance  estoit 
Et  de  très-grant  apensement. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignat  fol.  4,  V  col.  1. 

VAR1.\NTES    : 
APPENSEMENT.  Laurière  Gloss.  du  Dr.  Fr. 
Apensement.  Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  58. 

Appenser,  verbe.  Penser,  examiner  ;  avoir  une 
idée,  former  un  dessein,  projeter.  (Voy.  Appensé.) 
On  sait  qu'en  Latin,  pensare  signifie  proprement 
peser  une  chose,  l'évaluer  au  poiclsen  la  pesant,  en 
la  tenant  suspendue  dans  la  balance  ;  qu'en  François, 
penser  a  signifié  et  signifie  encore  figurérnent cette 
opération  de  l'àme  par  laquelle  on  pèse,  on  examine, 
on  évalue  les  choses  en  idée.  De  là,  les  anciens 
verbes  composés  ajipenser  et  enpenser  qui  étoient 
de  même  signification  que  le  verbe  simple  penser, 
en  Latin  pensare.  (Voy.  Penser.) 

Il  semble  qn'appenser  des  témoins,  c'étoit  penser 
à  ce  qu'on  pourroit  opposer  à  leurs  témoignages, 
peser  ces  témoignages,  les  examiner  avant  que 
d'y    souscrire.    «   S'il    deffault  à    veoirs  donner 

«  tesmoins  que  l'en  donneroit  contre  lui dira 

«  de  surs  comme  se  il  les  veistpour  tous  appenser, 
«  les  luy  nommant;  et  les  gréera.  >>  (Ane.  Coût,  de 
Bretagne,  fol.  102,  V°.  —  Voy.  Appens.) 

On  a  réuni  appenser  et  enpenser,  parce  que  la 
difîérence  de  la  préposition  initiale  n'en  opéroit 
aucune  dans  la  signification  de  ces  deux  verbes,  soit 
qu'ils  désignassent  la  pensée,  ou  l'idée,  le  dessein, 
le  projet  formé  d'après  la  pensée.  «  Se  aucuns  gens 
«  avoient  enpensé  h  aler  tuer  un  bons,  etc.  »  (Ord. 
T.  I,  p.  134.) 

Cuer  orgueilleux  veult  trop  estre  honoré, 

Et  si  ne  veult  à  nullui  faire  honneur. 

Tout  est  bien  fait  quanqu'il  a  cmpensé; 

Ce  qu'autrui  fait  lui  semble  deshonneur. 

Eust.  Desch.  poës.  MSS.  p.  125,  col.  4. 

La  preuve  que  cette  acception  A'enpenser  étoit 
aussi  celle  à'appenser,  alongeroit  inutilement  cet 
article.  On  le  terminera  en  remarquant  que  dans  le 
sens  de  penser,  peser  ses  idées,  peser,  examiner  les 
raisons  de  faire  ou  de  ne  point  faire  une  chose,  de 


la  juger  bonne  ou  mauvaise,  fausse  ou  vraie, 
le  verbe  appenser,  h  la  différence  d' enpenser,  étoit 
plus  ordinairement  réciproque.  "  Ele  s'apensa 
«  d'une  grant  Iraïson  comme  malicieuse.  »  (Rom. 
de  Dolopathos,  ms.  du  R.  n°  753i,  fol.  293,  V"  col.  2.) 

Lors  s'assist  sor  l'esponde  (1)  et  tint  le  chief  embron  (2); 
Lors  s'dptvîsse  et  porponsse  à  oui  dira  son  bon. 
Fabl.  MS.  du  R  n-  7218.  fol.  347,  V-  col.  i. 

Quand  bien  m'apense, 

Il  ne  me  semble  pas  par  m'ame, 
Qu'amans  Hons,  n'amoureuse  Dame, 
Puist  avoir  greignor  joie  au  monde 
Que  d'amour,  quant  el  s'i  habonde. 
Poi-s.  i.  la  suile  du  R.  de  Fauvel,  MS.  du  R.  n"  681i,  fol.  1,  V  col.  1. 

VARIANTES  : 
APPENSER.  Ane.  Coût,  de  Bretagne,  fol.  102,  V". 
Apanser.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  T.  II,  fol.  126,  R»  col.  1. 
Apenser.  Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  13()0,  T.  IV,  p.  1368. 
Apensser.  Fabl.  MS.  du  R.  u«  7218,  fol.  3i7,  V»  col.  1. 
Empexser.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  125,  col.  4. 
Enpenser.  Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  59,  V»  col.  2. 

Apperceii,  participe.  Connu  par  quelques 
qualités  éminenles.  Ce  participe  apperccu,  dont 
l'acception  générale  et  figurée  étoit  la  même  que 
celle  du  verbe  apercevoir,  avoit  une  signification 
absolue,  toutes  les  fois  qu'en  parlant  d'une  per- 
sonne dans  laquelle  ou  apercevoit,  on  connoissoit 
des  qualités  éminentes,  on  disoit  qu'elle  étoit 
apperçue,  connue  par  son  intelligence,  sa  prudence, 
son  courage,  son  intrépidité,  etc. 

Mes  Theseus  les  ot  veu3 
Qui  vassauz  ert  aperceus. 
Cinq  batailles  issir  en  fait,  etc. 

Athis,  MS.  fol.  99,  V-  col,  2. 

Il  est  sages,  aperceus. 

Si  ne  vuet  pas  estre  déceus. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'  7615,  T.  II,  fol.  134,  R-  col.  1. 

Luxure  est  un  péohié  ;  qui  trop  s'y  laisse  vivre, 
Si  vit  jusques  à  la  mort  à  paine  sans  délivre... 
David  et  Salomon  en  furent  si  deceu. 
Et  maint  autre  grant  homme,  et  sage  et  apparceu. 
S.  de  Meun,  Codic.  vers  1705-1770. 

Il  semble  que  les  Soldats  qu'en  Franche-Comté 
l'on  noitiiwoW,  Apperçus  (3),  soient  des  Soldats  con- 
nus par  le  patriotisme  intrépide  et  courageux  avec 
lequel  on  les  avoit  vus  servir  leur  pays  et  le  défen- 
dre. Les  trois  Bailliages  de  cette  province  dévoient 
entretenir  trois  Légions  ou  Régimens  de  cette  espèce 
de  milice  toujours  prête  à  marcher  au  premier 
ordre  ;  milice  à  la  vérité  peu  aguerrie,  mais  à 
laquelle  «  on  avoit  vu  autrefois  que  l'amour  de  la 
«  patrie...  avoit  inspiré  beaucoup  de  courage.  » 
(Pelisson,  Ilist.  de  Louis  XIV,  T.  II,  p.  260,  267  et 
268.  —  Voy.  Appercevoir.) 

VARIANTES    : 
APPERCEU.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.p.  7. 
Aparceus.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  T.  II,  fol.  13t. 
Aparceut.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  230. 
Aperceus.  Athis,  MS.  fol.  99,  V"  col.  2. 
Apercheu.  Anseis,  MS.  fol.  14,  R»  col.  1. 
Aperzuiz.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  169. 
Apparceu.  J.  de  Meun,  Codic.  vers  1770. 


(1)  châlit  ;  on  le  trouve  dans  Virgile  :  ,  „ 

propose  in  et  pronus;  Cachet,  dans  son  Glossab-e'clu  Chevalier  au  Ûyipie,  ne  se  prononce  pas  ;  M.  Gautier,  dans'  sa  Chanson 
ae  tU)land,  déclare  cette  étymologie  très  difficile,  (n-  e.)  -  (3)  Paraît  avoir  ici  le  sens  i'appoincté  (Voir  c 


Ati!o;is  qmtm  se  regina  superbis  Aui-ea  coynposuit  sponda.  (n.  e.)  —  (2)  penché  :  Diez 

ir,  dans  sa  Chan 
ce  mot).  (N.  K.) 


AP 


AP 


Appercevable,  rtrfj.  Apercevable.  (Voyez  Oudin 
et  Monet,  Dictionnaire.) 

Appercevance,  subst.  fém.  Faculté  d'aperce- 
voir, de  sentir,  de  connoitre.  Perception,  idée, 
notion,  connoissance.  Cliose  apercevable. 

Les  significations  du  ènbilànWi  appercevance  sont 
toutes  analogues  à  celles  du  verbe  apercevoir. 
C'est  avec  raison  qu'au  premier  sens,  l'on  a  dit  : 
«  Les  sens  sont  l'extrême  borne  de  noslre  apperce- 
«  vance....  Ils  font  Irestous  la  ligne  extrême  de 
«  nostre  faculté.  »  (Essais  de  Montaigne,  T.  II, 
p.  472.) 

Chien  a  grant  Icgeresce  et  grant  apercevance. 

Chasse  de  Gaston  Phébus,  MS.  p.  89. 

Dans  le  second  sens,  appercevance  désignoit 
l'effet  de  cette  faculté  d'apercevoir,  la  perception, 
l'idée,  la  notion,  la  connoissance  qu'on  prend  des 
personnes  ou  des  choses,  en  les  apercevant.  (Voy. 
Oudin,  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict.)  Ainsi, 
lorsqu'une  personne  avoit  peur  d'être  aperçue, 
d'être  connue,  on  disoit  qu'elle  nwoit paor  d' aperce- 
vance. (Fabl.  MS.  du  R.  n°  7218,  fol    330,  Y°  col.  1. 

—  Voy.  Appercevement.) 

Quelquefois  V appercevance  étoit  la  chose  même 
qu'on  apercevoit,  une  chose  apercevable.  (.Nicot, 
Dict.)  «  Ce  dont  nous  avons  encore  veu  de  nostre 
«  temps  quelques  restes  et  appercevances  en  la  rue 
»  Nostre-Dame,  etc.  "  (Pasquier,  Rech.  L.  i.\,  p.  708. 

—  Voy.  Appercevoir.) 

VARIANTES    : 
APPERCEVANCE.  Oudin,  R.  Estienne,  Nicot,  llonet,  Dict. 
Apercevance.  Chasse  de  Gaston  Phébus,  MS.  p.  89. 

Appercevant,  ;j«î'f('cijJ^.  Qui  voit  de  loin,  qui 
voit  bien.  Qui  peut  être  vu,  qui  est  visible.  (Voyez 
Appercevance  et  Appercevoir.) 

Dans  le  premier  sens,  on  disoit  :  «  Le  Roy  qui 
«  estoit  assez  fl;'7J<'/T('i'«H/,  leva  amont  le  visaige, 
"  et  veit  venir...  les  deux  Chevaliers.  »  (Percef. 
Vol.  VI,  fol.  106,  V°  col.  1.) 

Celte  acception  est  figurée  dans  les  vers  suivans  : 

Ll  mesengue  (1)  qui  ert  molt  sage, 

Aperchevaiis  et  enscgnie  ; 

Qui  molt  estoit  de  sens  garnie,  etc. 

Bestiaire,  MS.  du  R.  a'  7989,  fol.  171,  V"  col.  2. 

On  trouve  qu'abstraction  faite  de  l'idée  de  celui 
qui  voit  une  chose,  qui  l'aperçoit  parce  qu'elle  est 
visible,  le  participe  appercevant  a  signifié  ce  qui 
peut  être  vu,  ce  qui  peut  être  aperçu  comme  visi- 
ble. »  Donnant  à  iceulx  deniers  blancz  telle  diffé- 
«  rence  comme  bon  vous  semblera  à  faire,  et  la 
«  moins  apparcevant  que  l'en  pourra.  »  (Ord. 
T.  III,  p.  430.  —  A^oy.  Appercevoir.) 

variantes  : 
APPERCEVANT.  Percef.  Vol.  VI,  fol.  106,  V»  col.  1. 
Aperchevant.  Bestiaire,  MS.  du  R.  n»  7989,  fol.  171. 
Apparcevant.  Ord.  T.  III,  p.  430. 

Appercevement,  subst.  masc.  et  fém.  Action 
d'apercevoir,  vue,  connoissance.  On  a  voulu  justi- 


fier un  égarement  de  l'amour  dans  le  philosophe 
Aristote,  en  disant  qu'il  avoit  été  séduit,  non  par 
Vapersure,  par  la  vue  d'une  femme,  mais  par  le  pen- 
chant de  la  Nature  qui  peut  égarer  la  philosophie. 

Donc  n'a  li  maistres,  ce  me  sanble, 
Nule  coupe  en  sa  mespresure, 
Quant  ne  mesprist  par  apersure, 
Mais  par  nature  droite  et  fine. 

Alex,  et  .\ri5t.  MS.  de  S.  Geriu.  fol.  73,  V*  col.  3. 

Anciennement,  les  amans  craignoient  qu'on  ne 
s'aperçût  de  leur  amour,  et  làchoient  d'en  dérober 
la  connoissance. 

.  .  .  Li  proie  que  sagement 
Me  vueiÛe  fere  enseignement 
Et  demonstrer  en  quel  manière 
J'ai  joie  de  ma  proiere  ; 
Et  que  ce  soit  céléement. 
Qu'il  n'en  soit  apercevement. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7218,  fol.  205,  V  col.  1. 

Ils  préféroient  leurs  peines  amoureuses  à  des 
plaisirs  pleins  iVappercevemens,  à  des  plaisirs  dont 
la  connoissance  échappe  rarement  à  la  curiosité 
maligne  des  médisans. 

A  pais  ameroie 

Miex  grant  déduis  qui  fust  lens, 
C'un  bien  hastié  ne  feroie 
Tous  plain  d'appercevemens. 

Ane.  Poës.  fr.  MS.  du  Vatic.  n"  1522,  fol.  153.  R-  col.  I. 

On  a  personnifié  la  honte  ;  et  pour  signifier 
qu'elle  redoute  la  vue,  les  regards  de  la  curiosité, 
on  a  dit  : 

Honte...  portoit  une  espée 
Bonne,  clère  et  très-bien  trempée 
Qu'elle  forgea  doubteusement 
De  soucy  d'aparçoijveinenl. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  16284-16287. 

VARIANTES  1 
APPERCEVEMENT.  Ane.  P.  fr.  MS.  du  Vat.  n»  1522,  f.  153. 
Ap.\rcoy\'e.ment.  Rom.  de  la  Rose,  vers  16287. 
ArERCEVE.MENT.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  205,  V"  col.  1. 
Apersure.  Alex,  et  .Arist.  MS.  de  S' Germ.  fol.  73,  V»  col.  3. 

Appercevoir,  verbe.  Apercevoir,  voir,  ouïr., 
goûter,  sentir,  connoitre,  juger.  Percevoir,  toucher, 
recevoir.  Ou  observera  que  du  verbe  simple  capere, 
prendre,  s'est  formé  le  composé  latin  percipere,  en 
françois  percevoir.  (Voy.  Percevoir.)  Il  semble  qu'en 
réunissant  à  la  préposition  per  la  préposition  a 
dans  apercevoir,  l'on  indique  tout-à-la  fois  l'objet 
et  le  moyen  de  la  perceplion.  C'est  par  le  moyen 
des  sens  sur  lesquels  agissent  les  objets,  que  l'àme 
saisit  ces  mêmes  objets,  qu'elle  en  reçoit  l'idée, 
qu'elle  en  prend  connoissance.  De  là,  l'usage  figuré 
du  verbe  appercevoir  qui  signifioit  voir,  ouïr, 
goûter,  sentir  en  général,  connoitre  par  les  sens, 
juger  d'après  cette  connoissance  réfiéchie.  «  Porons 
'<  aperzoïjvre  par  nostre  esprueve  mismes,  cum 
■^  convenaule  chose  soit,  etc.  »  (S'  Dern.  Serm.  fr. 
Mss.  page  3.)  «  Par  la  grandesce  del  pardon,  pues 
«  aparwivre  la  grandesce  de  la  veniance.  »  (Id. 
ibid.  page  198.) 


(1)  mésange;  en  bas-lalin  »ie:e/i:t(,  de  l'allemand  mcise,  avec  suffixe,  (n. e.) 


AP 


-  64 


AP 


En  l'oslol  fu  plus  de  douze  ans, 
Tant  que  li  Enfes  fu  jà  grans 
Et  se  sot  bien  o()eir«îî'o?V  (1). 

Kabl.  M5.  du  II.  11'  7218,  fol.  151,  R'  ool.  1. 

Dans  une  signification  relative  à  la  différence  des 
sens  par  lesquels  on  prend  connoissance  des  per- 
sonnes et  des  choses,  on  disoit  :  «  Cil  ki  aparceut 
«'ont  le  deleit  de  l'espiritel  vitaille,  etc.  »  (S'  Bern . 
Serm.  fr.  mss.  p.  -230.) 

Au  Roi  a  dit  parole  (qyercheue; 
Sire,  dist-il,  c'est  ventés  seue,  etc. 

Anseis,  lis.  fol.  14,  R-  col.  1. 

Par  sous  le  chaperon  l'esgarde... 
Si  connut  bien  et  aperçoit, 
C'est  son  mary  qui  la  decoit. 

Fabl.  MS.  duR'.  n"  7218,  fol.  163  V  col.  1. 

.le  ne  vos  puis  de  jor  veoir. 
Car  trop  redout  ['apercevoir. 

;,  Cliaus.  Fr.  MS.  de  Berne,  n-  389,  part.  1,  fol.  45,  V'. 

Ce  même  verbe  apercevoir,  dont  on  a  restreint 
l'ancienne  acception  figurée,  signifioit  dans  le  sens 
propre,  toucher,  prendre  avec  la  m.ain,  recevoir, 
percevoir.  «  Huit  deniers  de  cens...  avoit  q{  aper- 
«  cevoit  chascun  an  es  mesons  de  Saint  Salveor.  >> 
(Hist.  généal.  de  la  M.  de  Chastillon,  pr.  page  Gl  ; 
titre  de  1273.) 

CONJl'G. 

Aperceifii),  ind.  prés.  J'aperçois.  (Liv.  des  Rois.) 
AparceifiV),  imp.  Aperçois-toi.  (Ibid.  fol.  32.) 
Aparchut,  indic.  prêt.  Aperçut.  (Ibid.  fol.  82.) 
Aparçoeve  (s'),  subj.  prés.  S'aperçoive.  (Rymer.) 
Aperçoif,  indic.  prés.  J'aperçois.  (G.  Guiart.) 
Apercuit  (s'),  ind.  prêt.  S'aperçut.  (Liv.  des  Rois.) 

V.\RIA>TES   : 
APPERCEVOIR.  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Aparcevoir.  Fabl.  MS.  du  R.  n"  76-15,  T.  II,  fol.  -124,  V». 
Ap.\rzoivre.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  198,  239,  etc. 
Apercevoir.  Orth.  subsist.  —  Fabl.  MS.  du  R.  fol.  151. 
Aperçoivre.  Ane.  Poës.  fr.  MS.  du  Vatic.  n»  1522,  fol.  161. 
Apersoivre.  Chans.  Fr.  MS.  de  Berne,  n°  389,  fol.  78. 
Aperzoivre.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  17  et  35. 
Aperzoyvre.  Id.  ibid.  p.  3. 
Apparcevoir.  Cotgrave,  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict. 

Appétence,  snbst.  févi.  Convoitise,  appétit. 
(Cotgrave  et  Oudin,  Dict.) 

Appeler,  verbe.  Convoiter,  vouloir,  désirer, 
rechercher,  demander,  etc.  On  sait  qu'au  xyi"  siècle, 
on  affectoit  de  parler  latin  en  françois.  De  là,  le 
verbe  appeler,  en  latin  appetere,  qui  dans  la  signi- 
fication de  convoiter,  vouloir,  désirer,  rechercher, 
demander,  etc.  désignoit  l'effet  de  toute  espèce  de 
sentiment  par  lequel  l'âme  est  invitée  à  satisfaire 
un  besoin  physique  ou  moral.  Il  ne  se  dit  plus  que 
d'un  appétit  dont  la  cause  est  physique,  comme  en 
ces  phrases.  >■  L'estoma£  appelé  les  viandes;  la 
«  femelle  appelé  le  mâle.  »  (Voy.  Appétisser.) 

VARIANTES  : 

APPÉTER.  Orth.  subsist.  -  J.  Marot,  p.  72. 


ApéTEr.  Gloss.  de  Marot.  —  L'Amant  ressusc.  p.  75, 
Apetter.  Du  Bellay,  Mérn.  piéc.  justif.  T.  YI,  p.  311. 

Appétisser,  verhe.  Inviter  à  manger,  mettre 
en  appéfit.  On  excite  l'appétit  des  oiseau.x  qu'on 
veut  faire  chasser,  en  leur  donnant  «  desestouppes 
»  couvertes  de  chair,  en  forme  de  pillule....  Parce 
«  moyen  seront  rendus  plus  sains,  plus  appetissez, 
'•  plus  avides,  plus  légers  et  plus  promps  à  la 
"  proye.  »  Budé,  des  Oiseaux,  fol.  120.  —  Cotgrave 
et  Monet,  Uict.  —  Dict.  de  Trévoux.  —  V.  Appéter.) 

Appétit,  subst.  masc.  Convoitise,  volonté,  désir, 
besoin.  On  a  déjà  observé  qu'en  général  V appétit 
est  l'effet  d'un  sentiment  qui  invite  l'àme  à  vouloir 
et  à  rechercher  la  satisfaction  d'un  besoin  physique 
ou  moral.  (Voyez  Appeter.)  Quoiqu"rt;;/;t7/^  subsiste 
dans  le  sens  de  convoitise,  désir,  il  ne  signilieroit 
plus  la  volonté,  le  désir  de  voir  une  personne  qu'on 
aime. 

Et  Moigne,  et  Clerc,  et  Prestre,  ly  Grands  et  ly  Petit 
De  veoir  leur  Patron  avoient  aypétil. 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  201. 

Dans  le  sens  oîi  l'on  dit  que  l'honneur  veut 
qu'on  se  venge  d'une  parole  outrageante,  on  disoit 
figurément  : 

Combien  voit-on  de  dangers  courir 
Pour  quelque  bruit  d'un  faux  raport  qui  vole  ! 
Combien  voit-on  dliommes  braves  mourir 
A  l'oppvlit  d'une  seule  parole! 

Poés.  à  la  suite  des  Dialog.  de  Taliureau,  fol.  191,  R'. 

On  dit  encore  à  l'appétit  d'un  écii;  expression 
adverbiale  dans  laquelle  appétit  signifie  la  volonté, 
le  désir,  le  besoin  d'épargner  un  écu. 

Anciennement  le  besoin  de  vomir,  comme  le 
besoin  de  manger,  étoit  désigné  par  le  mot  appétit. 
On  disoit,  appétit  de  vomir.  (Voy.  Rob.  Estienne  et 
Nicot,  Dict.)  «  Les  Chevaliers  qui  n'avoient  mangé, 
«  et  qui  le  travail  du  Tournoy  avoient  souffert, 
«  dévoient  bien  avoir  appétit  de  manger.  »  (Percef. 
Vol.  V,  fol.  108,  R°col.  1.) 

Enfin,  l'acception  générale  à'appétit  étant  parti- 
cularisée, ce  mot  a  signifié  seul  et  signifie  encore  le 
besoin,  le  désir  de  manger.  Montaigne  ne  sentoit 
jamais  le  besoin  de  manger  qu'en  se  mettant  à  table. 
«  Pour  moy  (dit-il)  je  ne  mange  jamais  trop  tard  : 
«  Vappétil  me  vient  en  mangeant,  et  point  autre- 
«  ment.  Je  n'ay  point  de  faim  qu'à  table.  »  (Essais 
de  Montaigne,  T,  III,  p.  341.  --  Voy.  Appetitif.) 

L'insatiabilité  de  nos  désirs  est  si  naturellement 
exprimée  par  ces  mots  l'appétit  vient  en  mangeant, 
qu'on  en  a  fait  un  proverbe  dont  on  a  cru  que 
Jacques  Amyot,  évêque  d'Auxerre,  étoit  l'auteur. 
On  raconte  qu'ayant  paru  d'abord  ne  désirer  rien 
de  plus  qu'un  Bénéfice  qu'il  obtint,  il  demanda 
ensuite  l'évéché  d'Auxerre;  et  que  le  Roi  l'ayant 
plaisanté  sur  l'accroissement  de  ses  désirs,  il  ré- 
pondit: Sire,  l'appétit  vient  en  mangeant.  (Voyez 
Dict.  de  Trévoux.)  Mais  l'abbé  Lebeuf  croit  qu'Amyot 


(1)  Le  sens  juger  du  latin  percipere  permet  de  rendre  compte  de  ce  vers.  Mais  il  est  difficile  d'expliquer  la  locution 
s'apercevoir  de,  qui,  du  sens  de  voir  scn,  a  passé  au  sens  de  remarquer:  on  en  trouve  des  exemples  dans  la  Chanson  de 
Roland  :  «  Li  amiraiz  auquesi  s'en  aperceit.  »  Le  verbe,  neutre,  aura  ensuite  pu  s'adjoindre  le  pronom  réfléchi,  comme  se 
taire,  se  pâmer,  etc.  (n.  e.) 


AP 


65  - 


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n'est  intéressé  pour  rien  dans  ce  proverbe,  «  en 
«  mangeant  V appétit  vient,  comme  dit  l'évêque 
«  d'Auxerre.  "  Cet  évéque  d'Auxene  lui  paroit  être 
Philippe  de  Lenoncourt  qui  fui  longtenis  appelé  en 
Cour  l'Evêque  d'Auxerre,  depuis  la  résignation  qu'il 
avoil  faite  de  cette  prélature,  et  qui  accumula  grand 
nombre  de  bénéfices.  (Voyez  Hist.  ceci,  et  civ. 
d'Auxerre.  T.  I,  p.  G'(5.)  Au  reste,  l'intempérance 
des  désirs  est  si  naturelle  à  l'homme,  qu'il  n'en  est 
presque  aucun  dont  le  cœur  n'ait  senti  que  l'appétit 
vient  en  mangeant.  On  ne  voit  donc  pas  trop  pour- 
quoi ce  proverbe  seroit  plus  propre  à  Philippe  de 
Lenoncourt  qu'à  Jacques  Amyot.  Une  chose  qui 
paroit  plus  vraie,  c'est  que  l'un  dé  ces  deux  évèques 
d'Auxerre,  et  peut-être  tous  deux  ont  répété  ce 
qu'avant  eux  nombre  de  personnes  auroient  pu  dire 
aussi  raisonnablement  que  l'avoit  dit  Angeston. 
(V.  Rabelais,  T.  1,  p.  27.)  Si  l'on  en  croit  Le  Duchat, 
«  Angeston  est  Jérôme  le  Hangest,  Docteur  de  Paris 
«  et  grand  Scholastique.  »  Rabelais,  qui  semble  le 
désigner  comme  auteur  du  proverbe,  Yappétit  vient 
en  mangeant,  prouve  évidemment  qu'il  n'y  a  pas 
plus  de  raison  d'en  attribuer  l'origine  ù  Philippe  de 
Lenoncourt  qu'à  Jacques  Amyot,  puisqu'il  écrivoit 
plusieurs  années  avant  que  l'un  et  l'autre  fussent 
évèques  d'Auxerre. 

VARIANTES  : 
APPÉTIT.  Orth.  subsist.  -  Géi'.  de  RoussiUon,  MS.  p.  201. 
Apétit.  Poës.  à  la  suite  des  Dialog.  de  Tahureau,  fol.  191. 

Appetitif,  adj.  Convoiteux,  désireux,  concupis- 
cible.  Appétissant.  Dans  le  premier  sens,  on  a  dit  : 

Pourquoy  sont-ilz  d'honneur  appetitifz? 

C.onliedilz  de  Songecreiix,  fol.  106,  R". 

La  faculté  appétitive  (1)  de  l'âme  est  ce  qu'en  style 
dogmatique,  on  nomme  appétit  concupiscible.  (Voy. 
Gotgr.  Oudin  et  Monet,  Dict.  —  Dict.  de  Trévoux.) 

On  connoît  l'espèce  de  métonymie  par  laquelle  le 
substantif  appétit  a  désigné  et  désigne  encore  cer- 
taines choses  qui  donnent  de  Yappétit  et  l'excitent. 
Delà,  vraisemblablement  l'adjectif  appetitif  ([ui, 
dans  un  sens  analogue  à  celui  du  verbe  appctisscr, 
signifioit  appétissant.  (Gotgr.  Dict.  —  V.  Ai-petisser.) 

Appiéceter,  verb.  Rapiéceter.  Mettre  des  pièces 
à  du  linge,  à  des  habits,  etc.  (Gotgr.  Dict.  —  V.  Pièce.) 

Appigner,  verbe.  Exhausser  un  mur,  un  bâti- 
ment, une  maison.  On  observera  que  dans  les 
Coutumes  de  trois  bailliages  de  Lorraine,  lit.  xiv, 
des  Servitudes,  le  verbe  rehausser  paroit  relatif  au 
verbe  appigner  dans  les  Coutumes  de  lévêché  et 
comté  de  Verdun,  tit.  xv,  des  Servitudes.  «  Quand 
«  aucun  édifie  et  dresse  mur  qui  soit  mitoyen  à  kiy 
«  et  à  un  autre,  celuy  qui  n'édifie  pas  et  qui  a 
«  moitié  audit  mur,  doit  contribuer  à  la  reédifi- 
«  cation  dudit  mur,  tant  en  fondement  que  jus([ues 
«  à  la  hauteur  de  la  closture;  et  au  résidu,  s'il  ne 
»  veut  contribuer,  l'autre...  peut  réédifier  ledit  mur 
«  et  y  faire  veue  au-dessus,  de  hauteur  de  closture. 


«  Et  neantmoins  si  l'autre  en  après  veut  réédifier 
«  et  appigner,  il  le  peut  faire  et  s'aider  dudit  mur 
«  en  payant  la  moitié  des  frais  et  dépens  qui 
«  auroient  esté  faits  pour  réédifier  ledit  mur,  et 
«  doit  celuy  qui  a  premier  réédifié,  boucher  ses 
«  veues.  »  (Nouveau  Coût.  gén.  T.  H,  p;ige  433.) 
Lorsque  dans  l'Ancien  Goût.  gén.  T.  Il,  p.  Î701,  on 
lit  que  «  si  de  plusieurs  voisins,  l'un  veut  bastir 
«  pour  mieux  ou  plus  commodément  se  loger,  il  lui 
«  est  loisible  de  contraindre  par  justice  ses  voisins 
«  de  contribuer  aux  fraiz  de  la  réparation  de  murs 
«  communs;  que  s'il  veut  les  reliaulser  plus  qu'à 
«  leur  hauteur  première,  faire  le  doit  à  ses  fraiz, 
«  en  y  faisant  faire  pour  tesmoignage  de  ce  fenestres 
»  de  maçonnerie  qu'il  sera  néanmoins  tenu  d'es- 
»  toupper,  si  le  voisin  voulant  se  servir  de  ladite 
«  rehausse,  offre  contribuer  aux  fraiz,  »  on  aperçoit 
la  relation  du  verbe  reliaulser  au  \evhe  appigner, 
exhausser  un  mur,  un  bâtiment,  une  maison.  Cette 
acception  du  verbe  appigner,  paroit  d'autant  plus 
vraie  qu'elle  est  analogue  à  une  origine  assez  pro- 
bable du  substantif  pigîion  (2).  (Voy.  Pignon.) 

Appigrets,  subst.  inasc.  Chose  où  l'on  grappille. 
Les  alfaires  qui  appartiennent  à  la  Chambre  des 
Comptes  étant  comparées  par  Rabelais  à  des  plants 
de  vignes,  mettre  ou  remettre  une  grappe  sur  le 
pressoir,  c'éloit  mettre  ou  remettre  une  affaire  sur 
le  bureau.  Pour  signifier  qu'on  tiroit  de  l'afTaire 
peu  de  gain,  peu  deproflt,  qu'ilyavoit  peu  de  chose 
à  gagner,  à  grappiller,  Gaigne-beaucoupdisoit  qu'on 
ne  trouvoit  pas  grand  appigrets  [3]  dans  la  grappe. 
(Voy.  Rabelais,  T.  V,  p.  73.)  Ce  mot  que  Rabelais  a 
sans  doule  forgé  d'après  sa  fantaisie,  et  dont  Got- 
grave  altère  l'orthographe,  en  écrivant  appigrès, 
ne  désigne  aucune  chose  à  l'usage  des  pécheurs. 
C'est  une  méprise  de  Golgrave  qui  l'explique  en  ce 
sens.  Il  ne  s'agit  point  de  pêche  dans  Rabelais,  mais 
de  vendange.  Ainsi,  le  mol  appigrets  paroit  signifier 
chose  où  l'on  grappille,  le  gain,  le  profit  qu'on  tire 
d'une  afl'aire  comparée  à  une  grappe  de  raisin  dont 
on  exprime  la  liqueur  en  la  pressurant.  On  soup- 
çonne que  dans  une  signification  relative  à  l'accep- 
tion figurée  â'appigrets,  gain,  profit,  le  sobriquet 
Apigratis  aura  désigné  un  Cuisinier  qui  grappille» 
qui  fait  de  petits  profits  injustes.  (Voy.  Apigratis.) 

VARIANTES  : 
APPIGRETS.  Rabelais,  T.  V,  p.  73. 
Appigrès.  Cotgrave,  Dict. 

Applauier,  verbe.  Aplanir,  planer,  doler,  raser. 
Polir,  rendre  doux  au  toucher.  Caresser  du  plat  de 
la  main,  tlatter,  adoucir,  apprivoiser,  accoutumer. 

La  signification  propre  d'applanier  est  aplanir, 
égaler  fa  surface  de  certaines  choses  en  les  planant, 
en  les  dolant.  «  Prenés  un  billot  qui  ayt  un  demy- 
«  pied  de  long,  et  l'aplanés  à  un  bout,  pour,  etc.  » 
(Modus  et  Hacio,  fol.  83,  R°.  —  Voy.  Plamer.)  Dans 
le  Dict.  lat.  fr.  ms.  qu'a  publié  le  P.  Labbe  (Etym. 


(1)  «  Selonc  Arislote,  cinc  puissancf-s  ou  parties  de  l'àme  sont,  c'est  assovoir  la  veg.  tative,  la  spnsitive,  Vappetitive, 
l'intellective,  la  motive.  »  (Oresme.  thèse  de  Meunier.)  (n.  t.)  —  (2)  On  p  mrr  àt  remontir  jusqu'au  latin pJHim, créneau.  (N.  K.) 
—  (3)  N'y  aurait-il  pas  là  le  mot  apis,  abeille  ;  appigrets  signifieri.it  alors  ce  que  l'abeille  a  Ijutiné.  (n.  e.) 

II.  '  9 


AP 


66  — 


AP 


fr.  p.  498),  le  verbe  latin  dolare  est  rendu  par  le 
françois  uplaigner,  le  même  qu'aplaner  dans  les 
vers  suivans  : 

.  .  .  L'un  des  arcs  esloit  de  bois, 

Tout  cornu  et  mal  aplani:. 

Tout  plaiii  de  neuds  et  mal  tourné. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  925-927. 

C'est  relativement  à  l'idée  d'une  surface  plane  et 
égale,  qu'applanier  a  signifié  raser  une  ville,  raser 
les  murs  d'une  forteresse.  »  Frai  de  Jérusalem 
«  cume  fait  l'ai  de  Samarie...  Si  la  destruirai,  aba- 
«  ferai  e  aplanierai,  si  cume  l'un  sultplanier  tables 
c<  de  graife.  »  (Livres  des  Rois,  jis.  des  Cordel. 
fol.  149,  R"  col.  I.) 

Cilz  de  hors  sont  au  mur  monté, 
En  pluseurs  lieux  l'ont  effondré  ; 
Après  ont  tout  aplanie, 
Fossé  et  mur  égaiUié  ; 
Puis  passèrent  tout  plainement. 

Rom.  du  Brul,  JIS.  fol.  48,  V"  col.  2,  et  49,  R"  col.  1. 

On  conçoit  que  ce  verbe  ait  pu  désigner  plusieurs 
autres  idées  aussi  relatives  à  celle  d'une  surface 
plane  et  polie;  surface  qu'en  même  temps  il  peint 
douce  au  toucher.  Tel  est  par  comparaison  le  poil 
du  cbevreuil,  lorsqu'il  n'est  point  hérissé.  «  Quant 
«  il  fuit  au  commencement  devant  les  chiens,  il 

»  fuit...  tout  héricié Quant  il  a  fouy  longue- 

>'  ment,  il  fuit  le  poil  tout  aplaignié,  et  n'est  point 
<•  héricié.  »  (Chasse  de  Gaston  Phébus,  ms.  p.  39.) 

Peut-être  faisoit-on  allusion  ii  l'idée  d'une  chose 
douce  au  toucher,  lorsqu'en  parlant  d'un  jeune 
Prince  dont  on  avoit  soigné  la  parure  en  le 
peignant,  en  le  baignant,  en  le  parfumant,  ondisoit 
qu'il  étoit  aplanoiié. 

Lavés  fu  et  aplanoucs, 
Et  atournés  si  coume  cil 
Qui  fius  estoit  à  Roi  gentil. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  508. 

Quoi  qu'il  en  soit,  applanier  exprimoit  en  géné- 
ral l'effet  de  l'action  douce  et  coulante  du  plat  de  la 
main  sur  la  télé  d'un  enfant,  sur  le  poil  d'un  chien, 
d'un  cheval,  sur  le  plumage  d'un  faucon,  etc. 
lorsque  dans  la  signification,  caresser  du  plat  de  la 
main,  flatter,  on  disoit  :  «  Comme  ladite  nourrisse 
"  eust  respondu  que  c'estoit  une  fille....  la  Déesse 
"  lielene  la  print  et  luy  applania  le  chef  aucune 
«  espace,  puis  la  rendit  à  la  nourrisse.  »  (J.  Le 
Maire,  lllustr.  des  Gaules,  liv.  n,  p.  261.)  «  Fist 
>■  aplainier,  et  grater,  et  tirer  le  lévrier  par  le  col- 
«  lier...  mais  il  ne  se  bouga.  »  (Chasse  de  Gast. 
Phébus,  MS.  p.  91.)  «  Quant  le  cheval....  sentit  sa 
"  main  qui  luy  aplanijoit  son  doz,  etc.  »  (Percef. 
Vol.  11,  fol.  45.)  «  11  vint  h  son  destrier  qu'il  apla- 
>>  niait  doucement,  et  mist  le  pied  en  l'estrief.  » 
(Hist.  de  B.  du  Guesclin,  par  Menard,  p.  370  et  371.) 

Le  ceval  forment  convoitoit  ; 
Souvent  l'acole  et  aplanie, 
Et  le  ceval  si  bel  manie, 
Por  un  poi  ne  le  vait  baisant  ; 
Il  vit  le  ceval  si  plaisant. 

Ane.  Poft.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1350. 

il  aplanie, 

Il  li  fait  chiere  trés-Ue, 

Que  li  faucons  bien  apperçoit 

Que  son  service  en  gre  reçoit. 

G.  Macliaul,  PoCs.  MSS.  fol.  207,  R-  col.  2. 


Par  cette  manière  de  caresser  les  oiseaux  et  au- 
tres animaux,  ils  s'adoucissent  et  s'apprivoisent. 
De  là,  le  verbe  applanier  signifioit  apprivoiser, 
quelle  que  fût  la  façon  d'apprivoiser,  d'accoutumer 
un  oiseau  ou  autre  animal,  à  être  docile  à  la  volonté 
de  l'homme.  En  parlant  du  faucon,  l'on  disoit  : 
"  Qui  a  ung  faulcon  nouvel...  lui  doit  faire  geclz  de 
«  cuir  de  cerf  mol  et  une  laisse  de  cuir,  laquelle  doit 
«  estre  attachée  au  gant;  et  doit  eslre  pendue  une 
«  petiic  boiiclele  à  une  petite  cordelele,  de  laquelle 
«  on  doit  mener  et  aplainer  le  faulcon  souvent.  » 
(Modus  et  Racio,  fol.  59,  V".) 

Sobresse  duit  les  faulcons  et  affete  ; 
A  hault  voler  les  duit  et  apla»ie. 

Al.  Cliartier,  Poës.  p.  592. 

On  adoucit  les  hommes,  on  les  apprivoise,  on  les 
accoutume  à  tout,  même  à  la  douleur,  en  les  trai- 
tant comme  l'on  traite  certains  animaux,  en  les 
caressant,  en  les  flattant.  De  là  encore,  l'acception 
générale  et  figurée  à'applanier,  caresser,  flatter 
l'humeur  d'un  homme,  sa  fierté,  sa  passion,  sa 
douleur.  «  11  ne  faisoit  sinon  dire  :  Chevalier 
«  malheureux  !  Adonc  l'allèrent  applanier  qu'ilz  le 
«  firent  monter  sur  son  cheval.  »  (Percef.  Vol.  I, 
fol.  156,  R°col.  1.) 

Espoir  par  fois  le  vient  applanier. 

Œuv.  de  Rog.  de  CoUerye,  p.  166. 
Deus  !  ki  sauroit  com  norrist  et  aplaigne 
Amors  tous  ceux  ke  ne  sont  entaichié 
De  fauceteit,  ne  de  boise  enpirié  ; 
Pouc  puet  prixier  dolor  ke  l'an  avaigne. 

Chaus.  Fr.  MS.  de  Berne,  n-  389.  part,  n,  fol.  44,  Vv 

.  .  .  Tant  n'el  sot  aplanoier 
K'il  vosist  Gormont  renoiier. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  367. 
....  Ceaus  qui  sevent  losengier. 
Ne  les  Seigneurs  uplanier,  etc. 

Alars  de  Comliray,   Moral.  MS.  de  Gaignat,  fol.  165,  V  col.  3. 

Costume  est  de  traître  de  que  redote  aplaigne. 

Hist.  de  Job,  envers,  MS.  de  Gaignat,  fol.  133,  V  toi.  1. 

Enfin  quelle  que  fût  la  manière  de  flatter  la  sen- 
sibilité raisonnable  ou  déraisonnable  d'un  homme, 
ou  la  comparoit  visiblement  à  la  manière  de  cares- 
ser certains  animaux,  tels  que  le  chat,  le  chien,  etc. 
puisqu'on  disoit  : 

.  .  .  Bien  lo  sauroiz  aplaignier 
Si  con  l'an  aplaigne  lo  chat. 

Rom.  de  Perceval,  MS.  de  Berne,  n"  354,  fol.  244,  R-  col.  2. 

C'est  proprement  une  caresse  du  plat  de  la  main 
que  désigne  le  verbe  applanier  employé  substanti- 
vement dans  les  vers  suivans  : 

.  .  .  Trop  plus  douche  est  la  bature 
Dou  poing  qu'on  aime  par  nature, 
Que  d'un  fauls  li  aplaniicrs 
Qui  est  de  llater  raaniiers. 

Hist.  de  Job,  en  vers,  MS.  de  Gaignal,  fol.  174,  R'  col.  1. 

VARIANTES    : 
APPLANIER.  Percef.  Vol.  1,  fol.  156,  R»col.  1. 
Aplaigneu.  Rom.  de  Perceval,  MS.  de  Berne,  n»354.  f.  244. 
Aplaignieh.  Uom.  de  Perceval,  ubi  supra. 
Aplainer.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  994. 
Aplaingner.  Chasse  de  Gast.  Phébus,  MS.  p.  99. 
Aplaingnier.  Estiubert,  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7996,  p.  85. 
Aplainier.  Chasse  de  Gast.  Phébus,  MS.  p.  91. 
Aplmnxer.  Fabl.  de  Morel,  MS.  de  N.  D.  fol.  7i. 
Aplainnoier.  Ibid.  fol.  72,  R»  col.  1. 
Aplaner.  Rom.  de  la  Rose,  vers  926. 


AP 


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AP 


Aplanier.  Livres  des  R.  MS.  des  Cordel.  fol.  149. 
Aplaniier.  Hist.  de  Job,  eu  vers,  MS.  de  Gaignat,  fol.  174. 
Apl.\noier.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  367. 
Aplanoiier.  Id.  p.  508. 
/Vplanoyer.  Cotgrave,  Dict. 

Aplanyer.  Gace  de  la  Bigne,  des  Déduits,  MS.  fnl.  76. 
Applaigner.  Rom.  de  la  Rose,  vers  7302. 
Applanoyer.  Rom.  de  la  Rose,  vers  7802. 
Applanyer.  Ibid.  vers  17267. 

Applanieur,  snbst.  masc.  Aplaneur.  Ancienne- 
meiil,  tout  homme  dont  l'occupation  étoit  d'aplanir 
des  choses  inégales,  se  désignoit  par  le  mot  appla- 
nieur. (Voy.  Cotgrave  et  Nicot,  Dict.)  On  observera 
néanmoins  d'après  Nicot,  que  ce  mol  ap/)la7iieiir.  le 
même  qu'appUmisseur,  a  signifié  plus  particulière- 
ment un  ouvrier  que  dans  les  manufactures  de 
couvertures  et  de  draps,  on  nomme  encore  apla- 
neur; par  la  raison  peut-être  qu'en  faisant  venir 
avec  des  chardons  la  laine  aux  couvertures  et  aux 
draps,  après  la  première  tenture,  il  les  aplanit  et 
les  rend  doux  à  la  main.  (Voy.  ArrL.\NiF,R  et  Ai-pla- 

NISSEUR.) 

Applanir,  verbe.  Polir,  rendre  brillant.  (Voyez 
Applanissrmknt  et  Applanisseur.)  On  ne  trouve  le 
verbe  applanier  avec  la  signification  de  notre 
verbe  applanir,  qu'en  remontant  à  l'origine  de  no- 
tre langue.  (Voy.  Applanikr.)  Peut-être  (\u  applanier 
n'étant  plus  connu  qu'avec  la  signification  de  cares- 
ser, flatter,  les  Auteurs  du  xvi*  siècle  éprouvèrent 
le  besoin  du  verbe  applanir,  et  crurent  en  être  les 
créateurs,  avec  d'autant  plus  de  vraisemblance 
qu'avant  eux  il  paroit  avoir  été  d'un  usage  très- 
rare.  C'est  relativement  aux  choses  qu'on  rend  bril- 
lantes en  les  aplanissant,  que  le  verbe  applanir  a 
signifié  rendre  brillant ,  polir  ,  comme  l'ancien 
verbe  applanier  signifioit  polir,  rendre  doux  au 
toucher. 

Si  eut  avecques  ce  Richesse 

Ung  cadre  d'or  mis  sur  sa  tresse... 

De  pierres  estoit  fort  garni 

Précieuses,  et  aphuuj  (1). 

Rom.  de  la  Rose,  vers  1098-1103. 

VARIANTES  : 
APPLANIR.  Cotgrave,  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Aplanir.  Orth.  subsist.  —  Rom.  de  la  Rose,  vers  1103. 

Applanissement,  subst.  masc.  Aplanisse- 
ment.  L'action  d'aplanir,  de  polir.  (Voy.  Cotgrave, 
Bob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict.)  Il  paroit  que  la 
formation  du  iv\\)s,l-AnV\Uipplanissement  est  relative 
au  commencement  ou  au  renouvellement  de  l'usage 
du  verbe  applanir.  (Voy.  Applanir.) 

VARIANTES  : 
APPLANISSEMENT.  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict. 
Applanisement.  Cotgrave,  Dict. 
Applanissemant.  Monet,  Dict. 

Applanisseur,  subst.  masc.  Aplaneur.  L'ac- 
ception générale  et  particulière  à' applanisseur  étoit 
la  même  que  celle  à'applanieur.  (Voy.  Nicot  et 
Monet,  Dict.)  Ainsi  la  différence  de  ces  deux  mots 
n'est  que  dans  la  terminaison  ;  l'une  analogue  à 


celle  du  verbe  applanier,  et  l'autre  à  celle  du  verbe 
applanir.  (Voy.  Applanieur.) 

Applatir,  verbe.  Faire  tor.:!'^"  tout  à  plat,  éten- 
dre mort  par  terre.  Le  verbe  applatir  dont  on  con- 
noit  l'acception  usitée,  a  signifié  faire  tomber  tout 
à  plat,  étendre  mort  par  terre,  ;'(  plate  terre.  «  Tant 
«  de  Lombars...  t'eurent  fl/^/;/«//,s et estendus,  que... 
«  on  eust  peu  dire  que  guerre  atîamée  avoit  illec 
«  faict  une  repeue.  »  (J.  d'Auton,  Annal,  de 
Louis  XII,  an.  1499-1501,  p.  37.  —  Voy.  Platir.) 

Applatissement,  subst.  masc.  Aplatissement. 
L'action  d'aplatir,  de  rendre  plat.  (Cotgrave,  Dict.  — 
Voy.  Applatir.) 

Applaudir,  verbe.  Rendre  favorable.  Flatter  en 
donnant  des  claques.  Quelques  Elymologistes 
croient  avec  assez  de  vraisemblance,  que  le  verbe 
simple  plaudere,  d'où  le  composé  applaudere,  en 
franç.ois  applaudir,  est  un  mot  formé  à  l'imitation 
d'un  bruit  auquel  on  a  comparé  celui  du  battement 
de  mains,  signe  ordinaire  d'approbation  et  de 
faveur.  De  \h,  notre  verbe  applaudir  a  signifié  et 
signifie  encore  approuver,  favori^-er.  Mais  on  ne 
diroit  plus  qu'un  \\omme  cowp-AhXe  uplaudit  son  fait, 
lorsqu'il  le  rend  favorable,  en  alléguant  des  choses 
propres  à  le  soustraire  à  la  rigueur  de  la  Loi. 
«  Thomas  dist  qu'il  l'avoit  frappé  d'une  fourche  de 
«  bois,  combien  que  en  vérité  il  n'en  feust  riens  : 
«  mais  le  dist  pour  aplnudir  et  coulourer  son 
"  fait.  »  (Lett.  de  grâce,  an.  1391  —  Voy.  D.  Car- 
pentier,  Suppl.  Gl.'lat.  de  Du  C.  h  Applausivus.) 

Il  semble  qw'ap/ilaudir,  dans  le  sens  de  flatter, 
désigne  le  bruit  que  l'ait  la  main  sur  le  dos  d'un 
chien  qu'on  flatte  en  lui  donnant  des  claques,  en  le 
frappant  légèrement  sur  le  dos.  «  Il  doit  approcher 
X  son  limier,  Yapplaudissnnt  de  la  main  et  luy 
«  donnant  queUiuc  friandise  ;  puis  l'exciter  et  par- 
«  1er  à  luy.  »  (Fouilloux,  Vén.  fol.  113,  V°.) 
variantes  : 

APPLAUDIR.  Orth.  subsist.  -  Fouilloux,  Vén.  fol.  113,  V°, 

Aplaudir.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  D.  C.  à  Applausivus. 

\pp\sins,ement,  subst.  masc.  Applaudissement. 
(Voy.  Applaudir.)  «  Ne  cherchons  honneur  ny  ap- 
»  plausement  des  hommes,  mais  la  vérité  seule.  » 
(Rabelais,  T.  II,  pag.  178.  — Voy.  Plaudissement.) 

Applégenient,  subst.  masc.  Complainte,  action 
possessoire.  La  raison  pour  la([uelle  applégenient, 
dans  le  sens  général  cautionnement,  caution,  a 
signifié  complainte,  action  possessoire,  est  que  dans 
les  cas  où  la  Loi  aulorisoit  l'action  possessoire,  la 
complainte,  il  fatloit  que  la  Partie  complaignante 
?>'aplilérieât,(\n'el\e  donntàt  une  caution,  sans  la- 
quelle la  Partie  adverse  restoit  saisie.  (Voy.  Applé- 
GER.)  Mais  la  caution  de  poursuivre  le  plait,  une 
fois  donnée  par  le  Demandeur  en  complainte,  il 
obtenoit  la  saisine  qu'on  ôtoit  au  Défendeur,  à 
moins  qu'il  ne  donucàt  aussi  caution,  qu'il  ne  se 


(1)  De  l'existence  du  participe  aplany,  il  ne  faut  pas  conclure  à  celle  d'aplanir  ;  la  rime  a  bien  pu  amener  la  formation  de 
ce  participe,  (n.  e.) 


AP 


—  68  — 


AV 


contr'applégeât.  Ainsi  les  complaintes,  en  deman- 
dant et  en  défendant,  furent  nommées  rt/jy^/('Y/'''"<'«s 
et  conlr'applcfjcniens,  parce  qu'il  y  avoit  une  cau- 
tion réciproiiue,  au  moyen  de  la(|uelle,  la  chose 
litigieuse  éloit  séquestrée  en  main  de  Justice.  (Voy. 
Contu'ai'flégement.) 

Anciennement,  icipplcger,  se  compla'nidrc  d'avoir 
été  dessaisi  de  choses  dont  on  ^  avoit  été  an  et  jour 
«  en  sezine  pcsiblement,  c'étoit  s'appléger,  se 
«  comphiindre  de  nouvelle  dessaisine.  »  On  venoit 
à  son  Sei;jneuret  on  lui  disoit  :  "  Sire,  uns  riche 
«  ou  tit>x  hons  est  venus  à  moy  d'une  meson,  ou 
«  de  pré,  ou  de  vignes,  ou  de  terres,  on  de  cens,  ou 
«  d'autres  choses,  et  m'a  desseisi  de  nouvele  des- 
«  sesine,  que  je  exploitié  au  seu  et  au  veu ,  en 
«  servage  de  Seigneur  jusques  ii  ores,  que  il  m'en 
a  a  dessaisi  à  tort  et  ù  force  dont  je  vous  pri  que 
"  vous  prengniez  la  chose  en  vostre  main.  »  Il  falloit 
dès-lors  «  mettre  pleiges  à  poursuivre  le  plet;  » 
autrement  la  Partie  adverse  resloit  saisie  de  la 
chose  conteutieuse.  Si  le  demandeur  en  complainte 
donnoit  caution,  s'il  «  mettoit  pleiges  bons  et  souf- 
»  fisans,  selon  ce  que  la  querele  étoit  grande,  »  sa 
Partie  étoit  mandée  par  le  Seigneur  qui  lui  disoit  : 
«  Cil  a  mis  bons  pièges  qu'il  est  dessesi  à  tort  et  à 
«  force  de  tele  chose  ...  je  vuel  syavoir  se  vous 
«  meltrés  pièges  au  deiïendre.  »  Dans  le  cas  où  le 
Défendeur  en  complainte  refusoitde  «  mettre  pièges, 
«  de  se  coiitr'ajipU'gev,  »  le  Demandeur  avoit  la 
saisine  de  la  chose  conteutieuse,  «  pour  les  pièges 
«  qu'il  y  avoit  mis.  »  S'il  répondoit  au  contraire: 
«  Je  i  mettre  bons  pièges  au  deffendre  .  .  .  que  ce 
«  est  ma  droiture,  la  .Justice  devoit  mettre  jour  aus 
«  deus  Parties  et  tenir  la  chose  en  sa  main  jusques 
t>  à  tant  que  liquiex  que  fust,  eust  gaigniée  la  sai- 
«  sinne  par  droit.  »  (Voy.  Ord.  T.  I,"p."lâ7  et  158. 
—  Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  p.  167.) 

On  pouvoit  être  dessaisi  à  tort,  sans  être  dessaisi 
à  force  ;  c'est-à-dire  que  l'injustice  dont  on  se  com- 
plaignoit  en  cas  de  nouvelle  dessaisine,  n'ètoit  pas 
toujours  accompagnée  de  violence.  De  là,  Beauma- 
noir aura  distingué  ce  qui  paroit  confondu  [ubi 
supra,  chap.  lxv  des  Etablissemens  de  S'  Louis),  en 
séparant  la  nouvelle  dessaisine  à  tort  de  la  nouvelle 
dessaisine  à  force  qu'il  nomme  le  casde force.  Cette 
distinction  est  d'autant  moins  essentielle,  que  le 
cas  de  force  étoit  au  cas  de  nouvelle  dessaisine  ce 
que  l'espèce  est  au  genre;  puisque  de  l'aveu  même 
de  Beaumanoir,  «  nule  tele  force  n'estoit  sans  nou- 
a  vêle  desezine.  Aussi  se  complaignoi!  on  de  nou- 
«  velle  dessaisine  dans  le  cas  de  force  :  mais  lorsque 
«  forche  avoit  été  fête  à  le  dessaisine ,  c'est-à-dire, 
«  lors(iu'on  avoit  été  dessaisi  a  grant  planté  de 
«  gent  ou  à  armes,  si  qu'on  n'i  osasl  estre  pour 
«  paour  de  mort,  on  pouvoit  le  mettre  avant  en  son 
«  clain,  dans  sa  complainte  de  nouvelle  dessaisine.  » 
(Voy.  Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  p.  37,  167.) 
Alors,  la  complainte  ou  l'action  possessoire  étoit  à 
la  fois  civile  et  criminelle. 


Enfin  les  •<  complaintes  de  nouvelle  dessaisine  à 
'<  tort  et  à  force  dévoient  être  applegiées,  »  par  la 
raison  ((u'eu  celte  matière  il  y  avoit  «  condamnation 
"  de  dépens.  »  Quoique  Ragueau,  dans  son  Indice 
des  Droits  royaux ,  cite  en  preuve  du  contraire, 
"  l'arreslde  la  Dame  de  Vierzon  contre  l'Abbé  de 
«  Foucombaut  (1),  es  Enquestes  du  Parlement  de 
«  Toussaints  1275,  »  il  semble  qu'on  n'en  doive  con- 
clure autre  chose,  sinon  que  cet  Arrêt  n'ètoit  pas  dans 
les  principes  de  l'ancienne  Jurisprudence  établie 
par  S'  Louis.  «  Quar  droit  est  qui  fait  autre  dessai- 
«  sir,  et  il  li  met  sus  que  il  l'a  dessesi  à  tort  et  à 
«  force  et  il  perd  la  querèle,  il  doit  rendre  à  l'autre 
«  partie  ses  coûts  et  ses  despens,  pour  ce  que  il  l'a 
«  fet  dessaisi!',  et  pour  ce  en  prend  l'en  les  pièges.  » 
(Ord.  T.  I,  p.  158.  —  Voy.  Laurière,  Gloss.  du  Dr. 
Fr.  T.  I,  p.  55  et  56.) 

On  avoit  les  mêmes  raisons  d'o])server  la  forma- 
lité de  Yajiplégement  Qldu  contr'applégemenl,  pour 
la  «  complainte  de  nouvelle  eschoite  :  »  complainte 
par  laquelle  un  héritier  se  reconnoissant  dessaisi 
par  l'usurpateur  d'une  succession,  demandoil  à  être 
mis  en  possession  et  saisine  des  héritages  dont  étoit 
«  mort  saisi  puis  an  et  jour  »  celui  à  qui  il  avoit 
droit  de  succéder.  »  Quant  aucun  va  de  vie  à  tres- 
«  passement,  et  celuy  qui  doit  estre  héritier,  est 
«  empesché  es  choses  de  la  succession,  ou  en  géné- 

«  rai  ou  en  particulier; s'il  veut,   il   peut 

»  venir  devers  le  Seigneur,  son  Seneschal  ou  Ser- 
«  gent  du  Baillage  dont  les  choses  sont  sujettes, 
«  dedans  l'an  après  la  mort  du  detTunt  du  quel  il 
■<  se  dit  héritier,  et  déclarer  comment  il  est  pro- 
«  chain  parent  et  héritier  dudit  deffunt ,  et  à  luy 
«  appartient  à  venir  et  eslre  l'eceu  à  la  possession 
«  et  saisine  des  biens  dont  étoit  mort  ledit  deffunt 
«  vêtu  et  saisi  puis  an  et  jour  ....  et  suffit  s'il  dit 
«  par  certains  degrés  et  moyens  a  declairer  en 
«  temps  et  en  lieu,  et  que  pour  ce  soy  s'applege  de 
«  nouvelle  succession  ou  eschoite,  contre  tous  ceux 
«  qui  opposer  ou  contr'appleger  se  voudront.  » 
(Ane.  Coût,  de  Poitou,  chap.  xvin.)  Lorsqu'il  y  avoit 
«  applégement  et  contr'applégement,  la  chose  con- 
«  teutieuse  étoit  mise  en  main  de  Cour.  »  (Voyez 
Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  T.  I,  p.  55-58.) 

En  comparant  le  chapitre  xvmdela  très-ancienne 
Coutume  de  Poitou  avec  le  chapitre  iv  du  Livre  II 
des  Etablissemens  de  S'  Louis,  on  pense  que  «  de- 
«  mander  sésine  d'héritage  »  signifie  la  même  chose 
que  s'appléger  de  nouvelle  eschoite.  «  Quiconques 
«  demande  sesine  d'héritage,  il  le  doit  demander 
»  en  tèle  manière:  Mon  père  ou  mon  frère,  mon 
«  cousin  ou  mon  parent  morut  sesis  et  vestus, 
«  tenans  et  prenans,  ploians  et  desploians  tenant 
»  de  Seigneur,  et  à  ilel  temps,  que  il  ala  de  vie  à 
"  mort,  et  morut  en  paisible  sesine,  sans  suite  de 
«  nului  et  de  tel  héritage,  ....  et  est  assis  en  tel 
"  sesine,  et  en  tel  lieu,  et  en  tel  fié ,  et  comme  je 
«  soie  le  plus  prochains  hoirs,  et  de  cèle  part,  dont 
«  li  héritage  muet,  et  cil  tienne  à  tort  lesdites  cho- 


(i)  Aujourd'hui  Fontgombault,  en  Berry  (Indre). 


AP 


69  — 


AP 


«  ses,  dont  je  requiex  à  avoir  la  sesine;  et  bien 
«  m'en  enlignageray  envers  luy,  se  il  le  me  nie, 
«  en  fesant  vers  vous  ce  que  je  devré,  couime  vers 
«  Seigneur,  ou  Droit;  sçavoir  mon  ,  se  je  le  dois 
«  avoir  ou  non.  »  (Ord.  T.  I,  p.  '2i9.)  Pi  l'on  juge 
d'après  celle  comparaison ,  que  la  demande  de 
«  saisine  d'héritage  «  soit  ce  qu'on  nomme  applé- 
gemcnt  de  nouvelle  eschoite  dans  la  très-ancienne 
Coulume  de  l'oilou,  on  en  conclura  que  Vapidége- 
ment  ou  coinplahite  de  nouvelle  eselioite  n'étoil  pas 
d'un  usage  moins  ancien  que  Vapplégenient  ou 
«  complainte  de  nouvelle  dessaisine  à  tort  et  à 
«  force.  »  Dans  le  «  cas  de  nouvelle  eschoite,  » 
comme  dans  celui  de  «  nouvelle  dessaisine  avec  ou 
«  sans  force,  »  le  complaignanl  qui  s'avouoit  des- 
saisi, agissoit  pour  acquérir  la  saisine  et  la  posses- 
sion, ou  pour  les  recouvrer. 

Il  semble  qu'il  y  avoit  aussi  dessaisine  dans  le 
cas  du  nouveau  trouble  que  Beaumanoir  définit  en 
ces  termes:  «  Nouviaus  troubles  si  est  se  je  ai  esté 
«  en  sezine  an  et  jour  d'une  chose  pesibiement  et 
«  l'en  m'empeesche  ....  coume  se  l'en  oste  mes 
«  vendengeurs  ou  mes  ouvriers  d'une  vigne  ou 
«  d'une  terre  dont  j'aurai  esté  en  sezine  an  et 
«  jour,  ou  en  assés  autiex  cas  semblables  se  sont 
«  nouviau  trouble  ....  et  ai  bonne  action  de  me 
«  plaindre  si  que  la  chose  me  soit  mise  arrière  en 
"  pésible  estât.  La  procédure  en  cas  de  nouveau 
«  trouble,  comme  en  celui  de  nouvelle  dessaisine 
«  avec  ou  sans  force,  devoit  se  faire  selonc  l'Esta- 
»  blissement  le  Roy.  Quand  la  complainte  ou  le 
«  clain  seur  nouviau  trouble  estoit  fait,  le  Comte 
«  ou  son  Lieutenant  devoit  contraindre  la  partie 
«  adverse  à  connoislre  ou  à  nier:  mes  tant  i  avoit 
«  de  délai  que  se  il  vouloit,  il  avoit  jour  de  voue, 
'<  et  au  jour  de  le  veue  11  Quens  devoit  envoler,  et 
«  se  il  treuvoit  le  lieu  dessesi ,  il  le  devoit  faire 
«  ressesir  tout  à  plain  avant  que  il  envoiast  nules 
«  des  detl'ences  au  delfendeur  ;  et  le  lieu  ressesi , 
•■  les  choses  dévoient  tenir  en  la  main  le  Comte,  et 
«  puis  connoistre  la  nouvelle  dessesine  aprez  ce 
«  jour  de  veue.  »  (Voy.  Beaumanoir,  Coût.  deBeau- 
voisis,  p.  1G7.)  Peut-être  reconnoitra-t-on  la  pre- 
mière trace  de  celte  procédure  en  cas  de  nouveau 
trouble,  dans  les  Elablissemens  de  S'  Louis,  liv.  II, 
chap.  .\u,  où  on  lit:  «  Quand  aucuns  est  plaintif  en 
«  jugement  d'aucune  personne  qui  est  venus  à  son 
«  droit,  et  à  son  fié,  ou  à  sa  seignorie,  à  force  et  à 
«  tort  d'armes,  et....  a  portez  ou  fet  porter  mes... 
«  muebles  dont  je  requier  que  li  lieus  en  soient 
«  saisis  entérinement,  et  mes  dommages  amender 
«  jusques  la  monstrance  de  cent  livres,  etc.  » 
(Ord.  T.  I,  p.  289  ) 

Que  le  nouveau  trouble,  sous  le  règne  de  S' Louis 
et  du  temps  de  Beaumanoir,  fût  une  «  dessaisine 
«  de  meubles  ou  d'autres  choses  »  dont  l'enlève- 
ment troubloit  la  possession  d'un  an  et  jour,  on 
croit  en  voir  la  preuve,  non-seulement  dans  la 
nécessité  de  saisir  ou  ressaisir  les  lieux,  des  choses 
qui  en  avoient  été  enlevées,  mais  encore  dans  l'ex- 
pression nouvelle  dessaisine,  que  Beaumanoir  sem- 


ble rendre  commune  au  nouveau  trouble,  en  disant 
qu'après  jour  de  vue,  les  lieux  étant  ressaisis  et  les 
choses  tenues  en  la  main  le  Comte,  on  connoissoit 
la  nouvele  dessesine.  (Coût,  de  Beauvoisis,  iibi  su- 
pra.) Il  est  vrai  que  dans  le  cas  de  nouveau  trouble, 
le  complaignanl  ne  se  disoit  pas  dessaisi  de  la  terre, 
de  l'héritage  même,  comme  dans  les  «  cas  de  nou- 
«  velle  eschoite  et  de  nouvelle  dessaisine  avec  ou 
«  sans  force:  »  mais  il  pouvoit  se  dire  dessaisi  de 
choses  essentielles  à  la  possession  de  ce  même 
héritage,  de  cette  même  terre.  Alors  Vappléf/emeiit 
ou  complainte  de  nouveau  trouble  n'éloit  point  un 
applégemenl  ou  «  complainte  en  cas  de  saisine  et 
«  de  nouvelleté  ;  puisque  celuy  qui  se  plaint  en  cas 
«  de  nouvelleté,  »  dit  l'auteur  du  grand  Coutumier 
de  France,  se  doit  garder  de  dire  qu'il  soit  dessaisy 
ou  despouillé  de  sa  saisine  :  «  car  il  ne  pourroitpas 
«  intenter  la  nouvelleté,  s'il  ne  possédoit  ou  con- 
«  tendoit  posséder.  »  (Voy.  G''.  Coût,  de  Fr.  liv.  n, 
page  loi.) 

Quelque  générale  que  soit  l'opinion  oi!i  l'on  est 
qu'anciennement  le  cas  de  nouveau  trouble  étoit  le 
même  que  «  le  cas  de  saisine  et  de  nouvelleté,  »  il 
est  au  moins  douteux  qu'on  puisse  la  fonder  sur  le 
chapitre  xxxH  des  Coutumes  de  Beauvoisis,  où  est 
défini  le  nouveau  trouble,  et  sur  le  chapitre  de  la 
saisine  dans  les  Elablissemens  de  S'  Louis.  C'est 
néanmoins  d'après  ces  deux  prétendues  autorités 
qu'on  taxe  l'auteur  du  grand  Coulnmier  de  France, 
d'en  avoir  imposé,  en  disant  que  Messire  Simon  de 
Bucy,  Premier  Président  du  Parlement  de  Paris,  fut 
le  premier  qui  «  trouva  et  mist  sus  le  casdesaisine 
«  et  de  nouvelleté.  »  (Voy.  Gr.  Coût,  de  Fr.  liv.  n, 
p.  15G.  —  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  T.  I,  p.  274.) 
La  fausseté  du  témoignage  d'un  auteur  à  peu-près 
contemporain  de  ce  Magistrat ,  paroissant  moins 
démontrée  que  la  réalité  de  la  dessaisine  dans  le 
cas  du  nouveau  trouble  défini  par  Beaumanoir,  on 
croit  non-seulement  que  ce  nouveau  trouble  diffé- 
roit  essentiellement  de  la  «  saisine  et  nouvelleté  ;  » 
mais  que  le  «  cas  de  saisine  et  de  nouvelleté  »  dont 
l'invention  est  attribuée  à  Messire  Simon  de  Bucy, 
par  un  .lurisconsulte  presque  contemporain,  n'a 
été  réellement  connu  que  dans  le  xiv  siècle.  On 
vouloit  alors  trouver  dans  les  Loix  Romaines  qu'on 
étudioit  avecplusd'ardeur  que  jamais,  tous  les  prin- 
cipes du  Droit  François  et  les  moyens  de  le  perfec- 
tionner. C'est  probablement  en  abusant  d'un  prin- 
cipe de  ces  mêmes  Loix  Romaines,  principe  d'après 
lequel  «  la  volonté  sulTisoit  en  certain  cas  pour 
«  conserver  la  saisine,  "  qu'on  établit  pour  maxime 
générale  que  toute  espèce  de  dessaisine,  soit  de 
choses  essentielles  à  la  possession  d'un héiitage  ou 
d'une  terre,  soit  de  l'héritage  ou  de  la  terre  niême, 
ne  seroit  plus  qu'un  nouveau  trouble  sans  dessai- 
sine. Quelle  que  fût  la  manière  dont  on  avoit  été 
réellement  dessaisi,  on  agissoit  non  pour  acquérir 
ou  recouvrer  sa  possession,  mais  pour  y  être  main- 
tenu sans  trouble  ;  et  cela,  sous  prétexte  qu'on  étoit 
resté  saisi  par  l'effet  de  la  seule  volonté.  On  ne 
connut  plus  dès  lorsque  «  Vapplégement  ou  corn- 


AP 


—  70  — 


AP 


«  plainte  de  saisine  et  (le  nouvelleté,  «  parce  que 
non  seulement  dans  le  cas  de  nouveau  trouble, 
mais  dans  «  ceux  de  nouvelle  eschoile  eî  de  nouvelle 
«  dessaisine.  »  les  Parties  réciproquement  deman- 
deresses et  défenderesses,  ne  se  disoient  que  «  trou- 
o  blées  dans  leur  saisine  ou  possession.  Quoiqu'en 
«  cas  de  saisine  et  de  nouvelleté,  cliascun  fust 
«  demandeur  et  défendeur,  l'un  contredisant  à 
«  Taiitre  en  toutes  choses,  toutefois  ceiuy  qui  avoit 
«  faict  la  complainte,  étoil  proprement  demandeur 
«  original  et  luy  falloit  grâce  et  à  l'autre  non  .... 
«  Cefuy  n'estoit  mie  légitime  contradicteur  qui  con- 
«  tendoil  son  adversaire  posséder;  mais  convenoit 
"  que  luy  mesmes  se  dist  possesseur  ...  Il  conve- 
«  noit  que  chascun  se  dist  saisi  et  empesché.  » 
(Voy.  Gr.  Coût,  de  Kr.  p.  151.  —  Laurière,  Gloss. 
du  Dr.  Fr.  T.  I,  p.  274-ti7C.) 

Il  sembloit  qu'on  lut  d'autant  plus  fondé  «  à  s'ap- 
•  piéger,  à  se  complaindre  de  saisine  et  de  nouvel- 
a  leté  dans  le  cas  de  nouvelle  eschoile,  qu'en 
«  conséquence  de  l'axiome  coutumier  ,  le  mort 
«  saisit  le  vif,  l'usurpation  d'une  hérédité  paroissoit 
«  ne  pouvoir  anéantir  la  saisine  de  celui  à  qui 
«  l'hérédité  apparlenoit.  «  Aussi  la  très  ancienne 
Coutume  de  Poitou,  qu'on  a  déjà  citée  en  preuve  de 
dessais'nie  dans  le  cas  de  nouvelle  eschoile,  laissoit- 
elle  ù  l'héritier  l'option  de  se  dire  saisi  ou  dessaisi. 
«  S'il  veult,  il  s'en  tiendra  pour  saisi,  par  la  Cou- 
«  tume  générale  du  royaume  de  France,  le  mort 
«  saisit  le  vif,  et  se  peut  complaindre  en  cas  de 
«  saisine  et  de  nouvelleté,  des  troubles  et  empes- 
«  chemens  fi  luy  faits  :  ou  s'il  veult,  etc.  »  (Ane. 
Coût,  de  Poitou,  chap.  xvni.  —  Voy.  Laurière,  Gloss. 
du  Dr.  Fr.  T.  I,  p.  57  et  58.) 

On  croit  avoir  suffisamment  expliqué  comment 
«  toute  espèce  de  dessaisine  »  n'étant  plus  regardée 
que  comme  un  <•  nouveau  trouble  sans  dessaisine, 
a  la  complainte  de  saisine  et  de  nouvelleté  fut 
«  substituée  même  aux  complaintes  de  nouvelle 
«  eschoile  et  de  nouvelle  dessaisine.  »  Il  seroit 
inutile  de  répéter  pourquoi  dans  plusieurs  Coutumes 
on  les  nommoit applégemens et eontrapplégeineiis. 
(Voy.  Gr.  Coût,  de  Pr.  liv.  ni,  p.  415.  —  Boutoiller, 
Som.  rur.  lit,  xx.^i,  p.  198.  —La  Thaumassière,  not. 
et  observ.  sur  les  Coût,  de  Beauv.,  p.  ilO.  —  Lau- 
rière, Gl.du  Dr.  Fr.  T.  I,  p.  .55.)  Ces  applégemens  et 
contf  applégemens,  dans  le  cas  même  où  il  s'agissoit 
de  choses  mobiliaires,  dilïéroient  des  adveux  et 
contr'adveux  applégés;  et  la  princip;ile  différence 
consistoit  «  en  ce  que  dans  l'adveu  il  étoit  question 
«  non-seulement  de  la  possession,  mais  aussi  de  la 
«  propriété,  au  lieu  que  dans  Vapplegement  il  n'étoit 


i  jamais  question  que  de  la  possession.  »  (Laurière, 
Gloss.  du  Dr.  Fr.  p.  26.  —  Voy.  Advou.) 

Quant  à  ïanplégement  de  refus  de  plege ,  ou 
«  coiupri.n.L^  faite  au  Supérieur  de  ce  que  l'infe- 
«  rieur  n'avoil  voulu  ordonner  main-levée  ,  ea 
«  baillant  caution  ;  c'étoit  ce  qu'on  nommoit  applé- 
'<  gement  privilégié  dans  l'ancien  Style  d'Anjou.  » 
En  effet,  il  semble  qu'en  définissant  Vapplegement 
de  refus  de  plege,  Ragueau  ait  défini  le  titre  d'ap]ilé- 
gemenl  privilégié,  où  on  lit  :  «  Si  aucun  Seigneur 
«  de  fié  a  prins  et  saisi  en  sa  main  aucune  chose 
«  tenue  de  luy  pour  aucun  cens,  ou  devoir,  ou 
«  autre  cause,  le  Sujet  qui  tient  icelle  chose  peut 
«  venir  requérir  délivrance  du  sien  o  plege,  et  offrir 
«  à  le  bailler  à  son  Seigneur...  et  le  plége  présent 
«  offrir  à  le  piéger.  Et  si  ledit  Seigneur,  ne  ses 
»  Officiers  ne  lui  veulent  faire  délivrance,  ne  faire 
«  raison,  le  Sujet  peut  faire  applégement  contre  le 
«  Seigneur  qui  luy  a  fait  tort,  force,  et  de  nouvel 
«  depuis  an  et  jour  en  ça,  en  détenant  le  sien...  à 
«  tort  et  sur  refus  de  plege.  «  (Ane.  Style  d'Anjou, 
lit.  ii'Apj)lége)n.eiU  privilégié.  —  Voy.  Du  Gange, 
Gloss.  lat.  T.  V,  col.  569.) 

\j' applégement  sur  saisine  brisée  étoil  aussi  une 
espèce  A'applégement  privilégié.  «  Si  aucun  brise 
«  la  saisie  d'un  Seigneur,  il  pourra  faire  applége- 
«  ment  sur  saisine  brisée,  contre  celuy  qui  aura 
ce  exploicté  par-dessus  sa  main,  ou  le  faire  convenir 
«  à  sa  Cour  ou  par-devant  son  Suzerain,  pour  en 
..  avoir  réparation  et  amende.  >>  (Coût,  de  Lodunois, 
au  Coût.  gén.  T.  II,  p.  543.) 

En  général,  Yapplér/ement  privilégié,  distingué 
de  Vapplegement  simple,  étoit  «  de  Seigneur  à  sujet, 
«  comme  sur  le  refus  de  plege,  sur  saisine  brisée 
«  et  en  autres  cas  qui  portoient  soixante  sols,  ou  le 
«  meuble  d'amende.  »  (Ane.  Coût.  d'Anjou,  citée 
«  par  Chopin,  art.  lxix  de  la  même  Coutume.) 

Les  applégemens  simples  étoient  de  sujet  à  Sei- 
gneur, comme  de  «  voisin  à  voisin,  en  simples 
«  exploits  qui  ne  portoient  que  loy  d'amende  comme 
«  en  succession  et  exploit  de  domaine.  ■>  (Chopin, 
ubi  supra.  —  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  T.  I,  p.  58 
et  50.)  «  Les  applégemens  simples,  faits  de  subjet 
«  à  Seigneur,  comme  de  voisin  à  voisin,  ne  portent 
«  aucune  exemption  d'iceluy  subjet  ne  de  ses  hom- 
«  mes.  »  (Coût  d'Anjou,  au  tout.  gén.  T.  II,  p.  67.) 
Il  est  évident  qu'on  abuse  de  la  signification  de  ce 
mot,  toutes  les  fois  qu'on  nomme  applégement  une 
complainte  sans  caution.  «  Nos  Praticiens  ont  donné 
«  sans  distinction  le  nom  a'applégement  ù  toutes 
«  les  complaintes.  »  (Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr. 
T.  I,  p.  58.  —  Voy.  Appléger.)  (1) 


(1)  Vapplâijenirnl  ou  plégerie  est,  comme  la  caution,  un  contrat  assurant  l'exécution  d'une  obligation,  donnant  au 
créancier  une  garantie  personnelle.  Au  commencement  du  moyen-âge,  le  débiteur  principal  engageait  sa  propre  personne 
par  un  contrat  dit  nhtwxicitio.  On  promettait  aussi,  dans  la  caulio,  l'ulejussio,  vadium,  de  travailler  pour  le  créancier  jusqu'à 
complet  paiement  de  la  dette. 

A  l'époque  féodale,  Vapplegement  conserve  son  caractère  de  personnnlité  contraire  au  principe  actuel,  qui  est  celui  de 
l'hérédité.  Cependant,  les  héritiers  devaient  acquitter  la  dette,  si  la  personne  recevait  commandement  de  payer  au  moment 
de  mourir.  Les  femmes  pouvaient  cautionner,  mais  en  renonçant  au  bénéfice  du  sénatus-consulte  Velleien. 

Quand  les  parties  ne  justifiaient  pas  de  ta  possession  d'un  immeuble,  le  demandeur  fournissait  une  caution  garantissant 
la  solvabiUté,  au  cas  de  condamnation  (sa «isdddo  de  expeush  rc/iciendis),  et  le  défenseur  déposait  une  somme  qui  restait 
en  justice  jusqu'à  la  fin  du  procès.  Si  Von  agissait  au  nom  d'un  tiers  la  caution  attestait  l'approbation  du  mandant  et 
prenait  le  nom  de  satisdatio  de  restituendo.  (n.  e  ) 


AP  _  71  _ 


AP 


VARIANTES  : 
APPLÉGEMENT.  Gr.  Coût,  de  Fr.  L.  m,  u  415 
Aplegement.  Cotgrave,  Dict. 
Appleigement.  Ord.  T.  I,  p.  157,  note  b. 

Appléger,  verbe.  Donner  caution,  cautionner 
be  complaindre,  intenter  une  action  possessoire 

h.t^u^"?T'^'}}  '  '^''^1"^  ^'^"s  les  Cliamps  de 
bataille  et  les  Cours  de  Justice,  ou  sengageoit  à 
poursuivre  une  alTaire  criminelle  ou  civile  et  à 
satistaire  aux  peines  d'une  accusation  fausse  ou 
d  une  injuste  demande,  le  signe  assez  ordinaire  de 
cet  engagement  étoit  un  ..  pan  de  robe,  un  sanl 
«  ploie.  »  De  là,  on  disoit  «  ploier  un  gage,  ploier 
«une  amende ,  ..  e.xpression  dans  lesquelles  on 
croit  apercevoir  le  principe  de  la  formation  et  de  la 
signilication  des  verbes  appléger,  piéger  et  plévir  (  1  ) 
(Voy.  PLEGp,  Plévir  et  Ploier.)  Ainsi  piéger  ou  aimle- 

^fninnPo"'™"  P'""^f  ^^^ ^  donner' cauliSen 
ploiant  gage  ;  par  extension,  donner  gage,  donner 
caution,  quelles  que  fussent  la  nature  du  gage  etS 
manière  de  le  donnei'  pour  caution  des  cliSsIs  aux- 
quelles on  sobligeoil  de  satisfaire. 

dPmnnlii'^'î'.'^'î  ^°'''  "l'P'^'J'^r  un  adveu,  une 
demande,  cetoit  en  cautionner  la  justice,  donner 
caution  pour  l'amende,  dans  le  cas  où  fadveu  se"oit 
dec  are  injuste.  .<  En  chose  mobiliaire  cbet  SvSû 
«  et  contr  adveu;  et  qui  en  déchet,  après  ce  qu'H 

«  sols  »  (Goût,  de  Tours,  au  Goût.  gén.  T.  II  n  25  \ 
On  a  observe  ailleurs,  que  V adveu  applégé  différoi 
àelapplegement.  (Voy.  Aitlegejient.)  "'"«'oit 

nm.P^iL  ^"'^°'''^  relativement  à  la  caution  donnée 
pour  le  payement  dun  fermage,  pour  rexécution 
d  un  marche,  pour  les  suites  de  l'accusation  ou  32 
a  dénonciation  d'un  crime  public  ou  délit  partmu 
lier,  qu  on  disoit  «  appléger  une  ferme,  un  marché- 
«  appléger  une  accusation,  une  dénonciation  ou 
«  denoncement.  »    \oy.  Ord.  T.  III,  p.  437.-  Coût 

Gi^£^rb;:w^ït^s^ètï;^^p^^^^"'-^^-' 

L'accusation  et  la  dénonciation,  dans  les  Coutn- 
mesd  Anjou  et  du  Maine,  ubl  supra,  n'éloient  Ss 

éfoU  S'tu.' H  ™*^'"'^  '''''''  P"'^'ï"^  raccSsâtfon 
etoit  laite  par  la  personne  que  le  crime  ou  le  délit 
interessoit  particulièrement,  et  la  dénonciation  ni. 

•acï  eu  Zn''!  '^"'J'  Jénoncialeur,  comme 
idtcusaieui,  donnât  caution  ou  i)iéoe  sulTi^ifinf 
«  Quand  la  dénonciation  ou  le  déSëmén  éto  i 
«  duemenl^  applégé  ,  on  meltoit  le  deZnc  |  en 

I  ?e  rilvoirrï^^^'^"}'^""!^"^''''  nn  îu  îro'cès 
ce  qui   avoit  heu  seulement  lorsque  le  crime 

:  Zf,V^'^-  P,"'"/-  '^oiporelle  :  car  lorsque  le  déîu 
«  éto  t  prive,  le  dénuncié  évitoit  la  prison  en  bail- 
;  lan  plege  suffisant  de  fournir  et  obéir"',  droit  „ 
(Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  T.  I  p'ïiVonteut 


voir  dans  le  Style  de  Touraine,  cbap.  xm,  imprimé 
à  la  fin  de  l'ancienne  Coutume,  quelle  éto  t  Ta'^nïS! 
cedure  de  ces  dénonciations,  trop  favon lies  à  îâ 
haine  et  à  la  vengeance,  et  que  pour  la  i-  Silli  é 
des  citoyens,  le  Parlement  a  sagement  prôscSes 

Il  ny  avoit  peut-être  point  de  moyen,  point  dp 
manière  de  cautionner  les  engagemens  publ  éson 
particuliers  d'une  personne,  qu'Sn  né  dé^  g  âuï 
disau  que  cette  personne  éU>it  r^^^S  ï'eSè 
oit  iu'eT' fT.'i.r'^  '^"'""^  ''»""■«  1^  Stiïn,    ! 

«  10  ma£JsJ'di'dS;i^;:èîSc^^;sj;i 

«  qui  soient  jurez,  et  sermentez  et  S;  %S  df 
«  ^ute  loyauté  et  bonne  renommée  et  aussVdé  viS 
•■  marcs  d'argent  fin.  »  (Ord.  T.  m,  p  587  fcon 
"  rat.ers.  face  applégier  et  faire  ^seremintnï: 
(Ibï"p '  loy ciumenl  eulx  menront  ledit  coure"Sgr» 
^  R^'  y-  >  "  ^°"^  '''^ons.  .  .  ordené  que  noz 
«  Receveurs  se  applégassent  en  la  Chambre  de  Sos 
«  Comptes  par  certaine   manière,  et  que  il  ne 

loT?.Tvàt)''' ''"'*'"' '''"'"" '''^"'"''  " 
On  a  vu  sous  le  règne  de  Louis  XIV  le  Francni.: 
encore  trop  jaloux  de  cette  espèce  dé  supS?té 
que  donne  un  tempéramment  fort  et  robus  e  se 
I  faire  gloire  de  vaincre  un  rival  dans  c2s  appelf 
bachiques  dont  on  trouve  l'ancienne  manierépniS 

T  I  l^n.   i  ?'??f,"'"-.  "  (^^'"^<^'  Capit.  Reg.  Fr^ 
1.1,  col.  394.)  L  obligation  d'obéir  à  un  appll  où 

i  hivrÔlff''  '""'^  ""''''  -^^  P^-»"  ^1"^  l-amitil  étoi" 
?,i  nP  vn  n'.''"^  P^"'  '""^■•^'"  l'honneur  d'un  am 
"ï  ion  Pn  hn  .?,?  "'  P°"''«'^  ^^n^^^n^e  à  cette  obli- 
gation en  buvant,  on  croyoit  devoir  Ymmlêaer  1p 
cautionner;  c'est-ù-dire  boire  pour  ffi,  comme 
étant  sa  caution.  Il  est  probable  qu'un  dé  nos  m 
ciens  Poètes  faisoit  allusion  à  cet  usage  dans  u,iê 

^izs^r  '''  ''"'  ^"™*^  '''  -^«^"^ 

L'oste  n'ot  pité,  ne  mercy  ; 
Trie  de  ses  vins  et  ses  biens  ; 
A  run  boit  là,  à  l'autre  cy  ; 
Es  voyrres  ne  demeure  riens. 
Je  boy  a  toy  ;  je  le  retiens, 
iJist  l'un  à  l'autre  :  S'aptà/ié 
N'eusse  esté,  je  fusse  noyé. 

Eusl.  Desch.  Poés.  MSS.  p.  365,  col.  2  et  S. 


On  ajoute  que  du  temps  de  Pasquier,  il  étoit 
encore  permis  à  un  homme  qui  dans  une  partie  de 
débauche  buvoit  moins  que  les  autres,  .,  de  prendre 
«  un  second  pour  le  deffendre  et  jo/t^'ôrfr  contre  tous 


^^B'BiSBsB^^f'"^'^-'^^'^'^ 


AP 


—  72  — 


AP 


.  ceux  qui  le  semondroient  de  ^oire  »  Ces  à 
l'io^norance  el  à  Toubli  de  cet  usage  qu  il  faut  att  i- 
bùl;  1  aZs  qu-on  faisoit  de  la  significalion  du  verbe 
«m,U;îr  ouW(''/n';  toutes  les  fois  qu'abstraction 
?a^,e  dé  toute  /e  dé  cautioi.  autre  que  la  parole  de 
celui  nu-o  1  iuovo.iuoit  i^  boire  une  santé.on  repon- 
doU  au  buveur  qu  Favoit  portée,  •■  je  ^ons  applegc, 
ri  vous  «W.  »  (Voy.  Pasquier,  Rech  L.  vui, 
;  ^52)  on  1  it  «lue  Marie  Stuarl,  Reine  d  Ecosse, 
s'éti^nt  n  se  à  table,  le  soir  de  la  veille  de  sa  mort, 
!  bu  sur  la  fui  du  soupper,  à  tous  ses  gens,  leur 
:  commandant  de  la  piéger  :  ^^^ «J  «?,^:f  f^^ 
«  se  mirent  à  genouil,  et  meslans  leuis  larmes 
c,  avecque  leur  vin  beurent  h  leur  maistresse.  »  [H. 
ihiri    1    vr   D   509.  —  Voy.  Plégée. 

Il  seroU  inutile  de  rappeler  ici  les  d.fférens  cas 
où  ilfalloi  s-appléger,  ou  donnçr  caution,  en  se 
2ïm,  iSS  it,  en  intentant  une  action  possessoire 
qÏ  ùtîise  de  dire  que  relativement  a  l.dee  de 
cette  caution  donnée  ou  non  donnée,  le  veibe 
s'«ï^;/S  a  signifié  en  général,  intenter  une  ac  ion 
pSs/oire,  sicomplaindre.  (Voy.  Applegement.) 

VARlAîsTES  :  ^    TT         r/Q 

APPLÉGER.  Oïd.  T.  Il,  p.  284.  -  Coût.  gén.  T.  II,  p.  ^. 
—  Col  grave,  Dict.  ,_-   ., 

APLÉGER.  Ane.  Coût,  de  Bret.  fol   157  V 
Aplégier.  Eust.  Desch.  Poes.  MSS.  p.  àbo,  col.  à. 


expressions  dans  lesquelles  appoincl  désignoit 
comme  substantif  une  relation  entre  les  choses  et 
te  temps  où  elles  se  disoient  et  f  .«^'^^oi^^  •  "  Le 
„  jeune  homme  voyant  son  apoin  ,  di  ,  etc  »  (ConL 
de  la  Reine  de  Navarre,  T.  11,  p.  Ib6.)  <■  ïl^^.euieni 
rasseoir  leurs  garnisons  en  plusieurs  et  diverses 
:  JaVues  d'icelle,  pour  après  \leur  «pomc  .  ^. 
,<  l'assaillir  alors  universellement^  «  (Du  Bellay, 
Mém.  liv.  IV,  fol.  131.  -  Cotgrave,  Dict.) 

VARIANTES  : 
APPOINCT  Cotgrave  Dict.  Uv.  iv,  fol.  131,  R«. 

Apoinct.  Id.  ibid.  —  Uu  iieuay,  meiu.  ""■,.'  .p^ 
ApoiNT  Contes  de  la  Reine  de  Navarre,  T.  II,  p.  m 
Appoint.  Cotgrave,  Dict.  -  Le  Jouvencel,  Mh.  p.  302. 

Annoinctation,  subst.  féminin.  Tvégociation, 
ar~o"ement.  Significalion  analogue  à  cet  e  du 
ferbëXÏÏ'S  négocier,  accommoder,  etc.  (^oy. 
wf™  1  a  gardé  laditte  ville  d'estre  pillée, 
!  nconnie,  necmnposée,  qui  sera  une  très-bonne 
..  apuncliation,  et  en  nos  présences  api  s ^eser 
,   nipnt  ptc  »  (Lett.  de  Louis  Xll,  T.  1,  p.  !'<>■}  . 

Onconnoit  l'histoire  de  Perrin  Dandin  qui  n  «p- 
co?«"  S  n-accoinmodoit  jamais  un  procès  sans 
nho Cl  lès  Parties  h  boire  ensemble  par  symbo  e  de 

■  .=.?iii.^inn    neùi  les  Taverniers  de  son  village 

[voy.  Rabelais,  T.  m,  p.  t218  et  220.) 


VARIANTES  : 
APPOINCTATION.  Rabelais,. T.  III,  p.  220. 
APUNCTiATioN.  Lett.  de  Louis  XII,  T.  I,  p.  17;}. 

Anooincté,  participe.  Qui  a  une  gratification, 
nnin  une  haute  paye.  On  observera  qu  autrefois  le 

livpment      comme    aujourdhui   Ion    emploie   le 

Se  du  verbe  traiter,,  et  ^^e  Pa^,  ^«f^nsei 

nn  inilé  étoitun  appoincte.  »  Le  Ro\  et  son  tonseu 

eSent  que  en.  .  prenant  trefve  entre  vous  et 

futTouiT^^^^^^^        à  quelque  bon  appointe  M..^ 

„    pTov  mon  maistre  seroit  Irès-joyeulx.  »  (Letl.de 

T     •;  y\i  T  I  mo-e  89  )  Il  n'y  a  d'ailleurs  aucune 

SeS  esseSieSelaus  L   significations  du 

P'rvïpi?lS)Sent  dans  un  sens  relatif  à  celui 
d'.?«ÏÏ«cï  ordonner,  commander  etc..  que  les 
nSrs  ou  Soldats  exempts  de  tout  service  mili- 
ïïipphors^e  combat,  se  nommoient  Appointes.  Ils 

d^ie^S^o/n'e,y  ^f^^rS'SpSS 
,i.-.p  oi"itificatioii.  une  haute  paye,  ue  la,  le  pai  uuipc 

Appoincter.) 


Appoinct,  adv.  adj.  ctsuhst.^  A  point  à  propos 
Qui  est  à  propos.  Instant  d  agir  ou  de  pailer  à 
nrnnos  à  sa  coiumodite,  avec  succès. 
^  En  se  fiSrant  dans  l'espace  successif  du  temps 
uifîoiîtltfe  auquel  on  vise,  PO"/ ,^,Sé  ef  1  on 
d'agir  ou  de  parler  à  propos,  on  f.f'î^'gi  e  et  1  on 
désigne  encore  tout  ce  qui  est  fait  a  piopos,  en 
ÊnîyS  ^t  fait  à  point.  ^  est  évident  ,jue  6^^ 
nrénosition  à  réunie  au  substantil  yjo^Ht/; ,  s  est 

formé    -ancien  adverbe  appoinct.  (\oyez  PoinctO 
Gouverner  leurs  voilles,  tirer  cordes  appoint  et 

l  Si  encrer  et  desencrer,  si  que  besoin  est.  » 

(Le  Jouvencel,  ms.  p.  302.) 

Ne  deglosez  rien  auUreraent  que  o^>po»!^  ^^ 

niiPiniipfois  cet  adverbe  tenoit  lieu  d'adjectif  et 

•  ^  c.]?  m    Pst  •'.  nronos,  la  qualité  d'une  chose 

JgaS  a2"  oS  .  à  f  éToù  l'oil  est  POur  l'instanU 

pou  le  moment.  «  Des  '^l'0^f^^;i»\/^«Srr  tran- 
„  I  nv  la  dispute  nous  en  doit  estre  du  loin  reiran 
l  chle- autrement, SI  vous  en  levez  les  deffences. 
:  sSretk'ndra  un  chacun  en  celle  Loy  se  on  le 
a  pours  de  ses  humeurs  ou  de  ce  qu  il  \eiia  luy 
:  esïi  le  plus  expédient  et  apoint,  pour  parvenir 
l  f  son  intention.  ..  (Pasquier,  Rech.  p.  899.)  . 

Fnfin    aSr  ou  parler  relativement  au  point,  à 

l'instàS  où  on  pouvoit  le  fane  à  propos,  relalive- 

mpnt  aunoinl,  a  l'élal  où  l'on  devoit  èlie  pour  le 

S  à  sa'  Snodilé  et  avec  succès,  c'éloil  agir  ou 

-    parier,  à  son  appoinct,  envoyant  son  appoint.  » 


AP  -  73  - 


AP 


VARIANTES  : 
APPOINCTÉ.  Lett.  de  Louis  XII,  T.  I,  p  90 
Appointé.  Oudin  et  Monet,  Dict. 

Appoiiictement,  siibst.  masc.  Exemption  de 
tout  service  militaire,  hors  le  combat.  Coup  de 
poing.  On  connoitra  les  significations  d'ff»»o/?u'/^- 
meiit,  par  l'explication  de  celles  d-appoincter 
Quelque  nombreuses  et  variées  que  soient  les 
acceptions  du  substantif,  il  n'y  en  a  pas  une  en 
gênerai  qui  ne  soit  commune  au  verbe,  et  par  con- 
séquent relative  h  l'idée  de  point  ou  de  pointe 
(Voy.  Appoincter.)  ^ 

Si  Vappoinclement  étoit  une  exemption  de  tout 
service  militaire,  hors  le  combat,  c'est  que  cette 
exemption  appartenoit  à  Thonneur  d'être  apnoincté 
commande  pour  les  actions  où  il  falloit  un  couraoè 
et  une  expérience  plus  qu'ordinaires.  (V.  Appoincte  ) 
Autrefois,  maltraiter  une  personne,  la  mettre  en 
mauvais  point    dans  un  état  à  faire  compassion, 
cétoit  misérablement  appointe?-  son  corps.  (Vovez 
J.  Le  Maire,  Illusl.  des  Gaules,  p.  249  )  il  est  très- 
possible  que  dans  un  sens  analogue,  appnintement 
ait  sig7iilie  mauvais  Iraitement;  mais  dans  rexnres- 
sion  charger  à-appontclcmenl,  c'est-ù-dire  chai-o-er 
de  coups  de  poing,  on  ne  voit  qu'un  abus  de  la 
consonnancedej9o;H^aveclemot;wmf/.  .,  Pensans 
«  que  ces  charretiers  se  voulussent  mocquer  d'eux 
«  commencèrent  à  les  charger  û'appoinctcment  et 
«  prenans  leurs  armes  qui  estoient  leurs  esguillo'ns 
"    f  ^  ''l'eut  crocheteurs.  »  (Bouchet,  Serées,  p  278  ) 
"  f;^"  .'^f/'^'i'^^.ayaiit  bruit  contre  un  de  ses  frères 
«  H  1  attend  a  1  yssue  de  matines,  et  le  surprenant 
«  en  quelque  coing  du  dortoir,  le  charge  cVappoin- 
«  tement  a  la  faveur  des  ténèbres;  et  à  ce  prSpos 
'<  despuis  on  a  dit,  dangereux  comme  le  retour  de 
«  matines.  »  (Garasse,  Rech.  des  Rech.  p.  850  ) 

VARIANTES  : 

Apointement.  Modus  et  Racio,  MS.  fol  160  V» 
Appointemant.  Monet,  Dict  '"",  v  . 

Appointement.  Le  .Touvencel,  MS.  p.  60  et  Si')   -  Mathi^,, 

Catrerau^^^^^:^];,.^;:;-^-)-;;»^  '^'-  '^^^^ 

Appoincter,  verbe.  Arrêter  à  un  point,  fixer  à 
ce  point;  négocier,  traiter,  accommoder,  arranger 
régler,  juger,  raisonner,  etc.  Diriger  vers  un  nolnt' 
mettre  a  ce  point;  mettre  en  étal,nnjustei  annré  ër' 
préparer  armer,  équiper,  approvIsionneî^Ke: 
tenir,  panser,  ordonner,  commander  nommer 
tromper,  attraper,  etc.  Rendre  pointu!  tèrmher  en 

Fixe  '-dS"""  P?'"^l"'  ''  ^'^™'"^''  e"  Ste" 
n'  '  "  "Ser,  présenter,  opposer  la  pointe  des 
armes.  Attaquer,  se  prépare.-  à  attaquer  Mettre 
pointe  contre  pointe,  opposer 

étanfi~T'i  *'"'^''"*  nos  vues  et  nos  actions, 
eidnt  legarde  comme  un  pont  fixe  aiinnpl  nn 
s  arrête,  le  verbe  appointer  signifie  t^'aiTête,  m 
point,  en  fixant  les  clauses  d'une  négoc  ation  d'un 
traite,  d  un  accommodement,  d'un  .arrangement 


I  ^'^•^"  Considéroit  que.  .  .  l'ennemy  auroit  entrée 

I  >'  pour  empiéter  sou  royaume. . . .  s'il  naimointoit 

-avecques  ledit  Empereur.  ,.  (Du  Bellayf  S 

pi; J  n     A-}  "  :^  ^y  ('PPOinté  avec  Madame  de 

«  Belleville,  de  la  place  de  Montagu;  et  Dlanchefort 

^■,^''^^T^^"  PJ'o'?'^''?  '"^  possession.  ,.  ^Brantôme, 

nnl.  1  ^'  p-  ^f-^  "  L^  ^"^y  ^e^''''  appoincter  avec- 

ques  eulx  pour  le  passaige  et  pour  les  vitailles 

'•  nécessaires.  »  (Le  Jouvencel,  ms.  p.  439  ) ..  il  e«toit 

-XirT'lt'p^SSsV  *'''"''  '^''      ^         '^'  ^'"^ 
Il  y  avoit  et  il  y  a  encore  dans  la  procédure 
diverses   espèces   d-appointe,nms   dont   Lau.S 
semble  rapporter  les  significations  particuHèrès  à 
1  Idée  générale  d'arrêter,  fixer  à  un  point.  Ouôi  qu'il 
en  soit,   appointement  en  général  étoit  un  higenen 
préparatoire,   un  règlement  en  Justice  sur  une 
affaire,  pour  parvenir  à  la  juger  par  rapport    On 
designoitun  règlement,  un  jugement  de  ce  genre 
en  disant  que   les  Parties   étoient  appointes  i 
Mre  appointées  en  droit,  appointées  au  Conseil 
appointées  contraires  et  en  enqueste,  etc.  (Voyez 
Aresia  Amor.  p.  48,  108,  IIG,  130,  158, 197,  passim 
-  Lauriere,  Gl._  du  Dr.  Fr.  -  Mcot  et  Monel,  Dict  ) 
11  semble  (\n  appointer  en  jugement  et  dehors 
w  n!  i"^^'^  ^''^.^  '^^  s=^»s  formes  judiciaires,  juger 
les  Parties,  ou  les  accommoder.  ..  Que  personnes 
«  sages  et  dignes  de  foy...  sachent  faire  justice  et 
«  apointer  h^  parties  et  les  causes  en  jugement  et 
«dehors.  ..  (Ord.  T.  111,  page  081.)  On  ne  voit  pas 
d  ailleurs  pourquoi  le  verbe  appointer  n'auroit  ms 
fZ'ii";  "r  J^ê'^^^ent  fléfinitif,  un  jugement  par 
equel  on  fixe  le  point  où  commence  et  finit  le  droit 
des  Parties.  Aussi  disoit-on  en  ce  sens:  «  Après 
"  parties  ouyes,  et  après  ce  qu'elles  furent  ««- 
"  ^^^^/"'^f«  en  droict,  le  Viguier  appointa  que  les 
"  di  es  lettres  et  reliefvement  ne  seroyent  point 
"  interinees    et  qu'il  n'y  avoit  point  matière  de 
•■  rescinder  ledict  contraict,  .  .  De  laquelle  sen- 
-'  tence. . .  ha  appelle  en  la  Court  de  céans.         et 
«  tout  considéré,  la  Court  dit  qu'il  ha  esté  bien  dict 
"  et  appoinete  par  ledict  Viguier,  et  mal  appelle 

nnof /«^f/'^i^"^"^  ^'  l'amendera.  »  (Arest.  Amor. 
page  4s  et  49.) 

Lorsqu'on  jugeoit  de  ses  affaires  par  soi-même 
lorsque  par  son  propre  jugement,  par  le  raison- 
nement on  fixoit  le  point  d'où  il  falloit  partir  pour 
en  assurer  la  réussite,  c'étoit  appoijiter  de  ses 
aiiaires.  «  Les  assiégez  et  enclos  en  aucune  forte- 
"  resse  doivent  estre  soigneux  de. . .  savoir  par 
«  subtilz  moyens  et  bonnes  Espies,  la  convine  de 

"  leurs  ennemis; car  par  ce  peuent  ilz  mieulx 

«  appoineterâe  leurs  affaires,  par  quoy  ilz  ont  bon 
'.  couraige,  ilz  peuent  savoir  l'eure  que  leurs  adver- 
L^nJ;^!  Tof"*  ^"''  ''^"'"  ^^'''le.  »  (Le  Jouvencel, 

On  ajoute  que  relativement  encore  à  l'idée  d'un 
point  fixe  auquel  on  s'arrête,  le  verbe  appointera 
signifie  arrêter,  fixer  à  certaine  somme  le  salaire 
la  gratihcalion,  l'entretenement  de  quelqu'un,  le 
lixer  lui-même  à  certaine  somme.  «  Un  Prédica- 

10 


AP 


—  74  — 


AP 


.  leur...  appoincté...  à  cent  escus  pour  prescher 
«  tout  le  caresme.  »  (Boucliet,  Serées,  liv.  m,  p.  '■22A.) 
Le  point  auquel  on  se  fixe,  est  souvent  le  point 
vers  lequel  on  a  dirigé  sa  vue,  son  action.  Ainsi, 
le  verbe  apiiohUcr,  soit  au  propre,  soit  au  figure, 
sigiiifioil  ajuster  une  chose  à  une  autre,  diriger 
l'une  vers  l'autre,  comme  vers  un  point  auquel  on 
vise.  «  Les  Arbalestriers. . .  n'avoient  point  remis, 
•  n'appoincté  autres  quarreaux  au  poinct  de  leurs 
«  arbaleslres.  "  (Monslrelet,  Vol.  \,  chap.  xxiv,  f°  19.) 

Cloistriers  qui  tes  dras  et  ton  pié 
Dou  point  de  l'ordre  as  despointié, 
Et  au  point  dou  siècle  apoinlié,  etc. 
Miserere  du  Recl.  de  Moliens,  MS.  de  Gaignal,  fol.  222,  R"  col.  1. 
Plus  droit  qu'ele  puet  l'i  apointe; 
Et  Trubert  ne  fet  pas  le  cointe  (i)  : 
Tout  li  a  dedens  embatu. 

Eslruberl,  FaLl.  MS.  du  R.  n°  7996,  p.  85. 

Pour  les  preudomes  acointier, 
Si  vorrai  mon  sens  apointier 
A  biaus  mos  trover  et  reprendre. 

Dits  de  Baudoin  de  Condé,  MS.  de  Gaignat,  fol.  304,  R'  col.  1. 

L'usage,  l'effet  pour  lequel  on  ajuste,  on  apprête, 
on  prépare  les  choses,  étant  vu  comme  un  point 
vers  lequel  on  les  dirige,  on  disoit  en  ce  sens: 
»  Prist  le  fromage  qui  estoil  appointié  pour  faire 
«  laditte  tartre,  etc.  »  (D.  Carpentier,  Supp.  Gloss. 
lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Ajipitnctare;  tit.  de  1399.) 
«  Tel  poison  1^2]  sçay  faire  et  appointer,  que  pourtant 
«  que  luy  en  donnez  à  boire  et  que  après  luy  en 
«  beuvez,...  sur  ton  le  riens  serez  aimée  de  luy.  » 
(Ger.  de  Nevers,  part,  i,  p.  131.)  Appointerun  cheval 
automate,  comme  celui  dont  il  s'agit  dans  le  Roman 
de  Cléomadès,  c'étoit  en  ajuster  les  ressorts,  le 
mettre  à  certain  point,  le  mettre  en  état  de  faire  ses 
mouvemens  ordinaires. 

Quant  son  cheval  ot  apointié, 
Vers  le  chastel  l'a  adrécié. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignal,  fol.  18,  R°  col.  3. 

Quelle  que  fût  la  manière  d'ajuster,  d'apprêter, 
de  préparer  les  choses,  de  les  mettre  à  leur  point 
en  les  dirigeant  vers  l'usage,  vers  l'effet  qu'on  avoit 
en  vue,  elles  pouvoient  être  désignées  par  le  verbe 
appointer.  Aussi  l'acception  en  étoit-elle  si  générale 
qu'on  disoit  :  «  battre  et  appointer  les  gerbes  de 
«  bled  ;  appointer  un  pont  sur  une  rivière  ;  appointer 
«  un  vaisseau  pour  naviguer;  appointer  un  ^a\e- 
«  froi,  etc.  »  (Yoy.  Nouv.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  416.  — 
Yigil.  de  Charles  Vil,  p.  96. — Matthieu  de  Coucy, 
lïist.  de  Charles  Vil,  p.  684.  —  Percef.  Vol.  II,  f"  1-22.) 

C'est  toujours  dans  un  sens  analogue  à  celui  de 
mettre  en  état,  préparer,  qu'appointer  son  corps  ou 
s'appointer  signifioit  s'armer,  s'équiper,  s'approvi- 
sionner, etc.  parce  qu'en  s'appiovisionnant,  en 
s'équipanl,  en  s'armant,  on  se  mettoit  en  état  de 
combattre,  de  s'embarquer,  de  voyager,  etc.  (Bout. 
Som.  rur.  page  883.  —  Percef.  Vol.  III,  fol.  64,  etc.) 
En  équipant  une  femme,  en  l'entretenant  de  robes 
et  autres  choses  nécessaires  t\  sa  parure,  on  lui 
prépare  les  moyens  de  s'ajuster,  de  se  mettre  en 
état  de  paroitre  et  de  plaire.  De  là,  on  a  dit  : 


Et  de  faict  l'a  appointée 
De  chaperon  rouge,  au  surplus 
De  corset  de  soye,  de  baudrier, 
De  robbe  :  que  voulez-vous  plus  ? 

Coquillarl,  p.  54. 

La  signification  S'appointer  étoit  absolue,  lors- 
qu'on parlant  d'une  personne  préparée  à  bien  faire 
une  chose,  mise  en  état  de  la  faire  à  son  aise ,  avec 
plaisir,  avec  décence,  on  disoit  qu'elle  étoit  appoin- 
tée. «  Le  Roy  Palamedes  qui  esloit  notablement 
"  appointé ,  pour  ce  qu'il  sçavoit  leur  venue ,  s'en 
«  vint  à  rencontre  d'eulx  noblement  accompaigné 
«  de  Chevaliers.  »  (Percef.  Vol.  III,  fol.  77,  R°  col.  1.) 

Le  soir  vint,  il  fault  préparer 
Le  souper  et  le  vin  tirer. 
Monsieur  fut  scis  et  appoincté  ; 
Et  dist-on  benedicite. 

Coquillarl,  p.  148. 

On  prépare  la  guérison  d'une  blessure  qu'on 
panse  ;  et  cette  guérison  est  le  point,  l'état  où  le 
Chirurgien  veut 'mettre  son  blessé,  le  point  vers 
lequel  il  dirige  l'effet  de  son  opération.  Ainsi,  le 
verbe  appointer  signifioit  panser.  »  Bertran  pria  à 
«  sescompaignons  qu'ilz  le  feissento7.'0«Hf(?rparle 
«  Syurgien.  »  (Triomphe  des  neuf  Preux,  p.  499.) 
«  Matias  icellui  Regnault...  porta  en  la  maison  de 

«  son  maislre  pour  Vapointier Ensuite  il  fina 

«  vie  par  mort.  »  (D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat. 
de  Du  Cange,  au  mot  Aplare  ;  tit.  de  1402.) 

La  chose  dont  on  projette  l'exécution,  étant  com- 
parée à  un  point  vers  lequel  on  dirige  la  volonté, 
l'action  de  ceux  à  qui  elle  est  ordonnée ,  l'on  aura 
dit  appointer  dans,  le  sens  d'ordonner,  commander, 
nommer  pour  faire  une  chose.  <>  Le  Roy  avoit 
«  fl;;/;o/)i/J  que  les  Templiers  feroientl'avantgarde.  » 
(Joiuville,  p.  41.)  «  Fist  barrer  son  logis  et  fut 
«  appoinctié  que  au  plus  matin  ceulx  qui  estoient 
0  nommez,  iroient  devant  et  descouvriroient  le 
«  pays.  »  (Le  Jouvencel ,  ms.  p.  338.)  «  Le  Roy 
«  appoincta  certain  nombre  de  gens  pour  venir  au 
«  lendemain  devers  luy.  »  (Ibid.  p.  412.)  Peut-être 
l'acception  particulière  du  participe  appoincté  est- 
elle  relative  ii  l'ancien  usage  de  nommer,  comman- 
der, ordonner  des  gens  d'élite  pour  une  action  pé- 
rilleuse, un  assaut,  etc.  (Voy.  Appoincté.) 

Si  le  mensonge  et  l'artifice  étoient  les  moyens 
par  lesquels  une  personne  étoit  dirigée,  mise  au 
point  où  l'on  avoit  en  vue  de  l'amener,  le  verbe 
appointer  signifioit  tromper,  attraper. 

Ainsis  ly  ment,  ainsis  l'apoinle  ; 
Ainsis  le  déçoit  et  confont  ; 
Ainsis  pluseurs  femmes  le  font. 

Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  517,  col.  1. 

.   .   .  Son  moyen  de  appoincler  estoit  tel  : 
Quant  il  sçavoit  sa  mère  aller  à  messe, 
Il  s'en  venoit  comme  une  grande  asnesse,  etc. 
Faifeu,  p.  24. 

On  croit  avoir  assez  clairement  démontré  que  ces 
significations,  auxquelles  on  pourroit  en  ajouter 
plusieurs  autres,  ont  entre  elles  une  analogie  dont 
le  principe  est  l'idée  générale  d'un  point  physique 
ou  moral  auquel  on  vise. 


(1)  Vient  peut-être  ici  de  cunclari  :  hésiter,  (n.  e.)  —  (2)  A  ici  le  sens  de  sa  racine  potio,  boisson,  breuvage.  (N.  E.) 


AP 


75 


AP 


C'étoit  relativement  à  l'idée  de  pointe,  que  le 
même  verbe  appointer  signifioit  rendre  pointu, 
terminer  en  pointe.  (Voy.  Nicot  et  Monel,  Dict.) 

Aucuns  font  leur  dars  ferier, 
Et  apointier  les  fers  des  lances, 
Pour  miex  entrer  es  connoissances. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  329,  R". 

Il  étoit  neutre,  lorsqu'en  parlant  d'une  chose  qui 
se  terminoit  en  pointe,  on  disoit  avec  comparaison  : 
Elle  va  en  appointant  comme  une  poire.  (Voy. 
Nicot,  Dict.) 

...  On  voit  naistre  aux  champs  une  flame  légère, 
D'un  bien  petit  de  feu  que  la  foie  Bergère 
A  laissé  par  mesgarde  au  chaume  craquetant, 
Et  ses  ondes  lancer  au  ciel,  en  apoiniaiil. 

Pocs.  de  Perrin.  fol.  7G,  Vv 

Quelquefois,  la  signification  ^'appointer  étoit 
fixer,  diriger,  présenter  la  pointe  des  armes,  l'op- 
poser. (Monet,  Dict.) 

On  sait  que  dans  les  joutes,  les  Chevaliers  cou- 
roient  les  uns  contre  les  autres,  la  pointe  des  lances 
fixée  et  dirigée  vers  leurs  adversaires.  De  là,  le 
verbe  appointer  aura  pu  désigner  l'action  de  pro- 
voquer à  la  joute  et  de  s'y  préparer,  en  fixant  et 
dirigeant  la  pointe  de  sa  lance  vers  celui  qu'on  se 
proposoit  d'attaquer.  «  Joustay  à  quatre  Chevaliers 
«  sans  blasme  recevoir  ;....  mais  le  cinquiesme  me 
«  porta  à  terre....  Après  ce  appointa  mon  compai- 
•1  gnon  de  la  jouste,  etc.  »  (Percef.  Vol.  Il,  fol.  70.) 

Peut-être  a-t-on  fait  encore  allusion  à  la  pointe 
des  traits  avec  lesquels  on  feint  que  l'Amour  attaque 
un  cœur,  lorsqu'on  a  dit  : 

Jusqu'à  Biauvais  fai  une  pointe  : 
Si  me  saluej  à  cuer  haitiè, 
Le  Chastelam  à  cui  s'apoirite 
Amers  qui  le  fait  sage  et  cointe. 
Et  debonère  et  afetié. 

Fa))l.  MS.  du  R.  a'  7218,  fol.  61,  R'  col.  2. 

Enfin ,  le  verbe  appointer  aura  signifié  par  com- 
paraison, opposer  l'une  à  l'autre  deux  personnes  ou 
deux  choses,  comme  l'on  oppose  pointe  à  pointe 
deux  lances,  deux  épées:  opposition  qn  appointer 
désigne  spécialement  en  termes  de  Blason,  lorsqu'en 
parlant  d'épées,  de  flèches  dont  les  pointes  opposées 
se  touchent,  on  dit  qu'elles  sont  appointées.  (Voy. 
Monet,  Dict.  —  Dict.  de  Trévoux.) 

Cette  comparaison,  si  l'on  en  croit  l'auteur  du 
Nouveau  Dictionnaire  de  Droit,  est  le  principe  de  la 
signification  de  ce  verbe,  en  termes  de  procédure. 
Comme  les  prétentions  des  Parties  qui  plaident, 
sont,  dit-il,  toutes  opposées,  le  verbe  appointer, 
dans  le  sens  propre  mettre  pointe  contre  pointe, 
s'est  pris  au  figuré  pour  donner  un  règlement  en 
Justice.  Quelque  favorable  que  paroisse  être  îi  son 
opinion,  l'expression  «  appointer  les  Parties,  par 
o  faits  contraires,  ou  les  ft/i/;o/Kto' contraires,  »  il 
est  possible  que  même  en  ce  cas  d'opposition,  l'ac- 
ception d'appointer  soit  relative  à  l'idée  générale 
d'arrêter,  fixer  à  un  point.  (Voy.  Appoinctement.) 

VARIANTES    : 
APPOINCTER.  Le  Jouvencel,  MS.  page  67.  -  Monstrelet, 
Vol.  I,  fol.  19.  -  Percef.  Vol.  II,  fol.  i22.  -  Rabelais,  T.  III, 
p.  218.  —  Âresta  Amor.  p.  97.  —  Coquillart,  p.  148,  etc. 


Apointer.  Estrubert,  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7996,  page  8.5.  — 
Ord.  T.  Itl,  p.  681.  -  Le  .louvencel,  fol.  89.  -  Eust.  Desch. 
Poës.  MSS.  p.  517,  col.  1,  etc. 

Apointier.  Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  18.  —  D.  Car- 
pentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Aptare. 

Appoinctier.  Le  Jouvencel,  MS.  p  338. 

Appointer.  Orth.  subsist.  —  Le  Jouvencel,  MS.  p.  384.  — 
Percef.  Vol.  II,  fol.  70.  -  Lauriore,  Gl.  du  Dr.  Fr.  -  Cotgr. 
Nicot  et  Monet,  Dict. 

Appointier.  D.  Carp.  S.  Gl.  1.  de  Du  Gange,  à  Appunctare. 

Appoincteur,  subst.  masc.  Négociateur.  On 
sait  que  l'histoire  de  Perrin  Dandin  et  de  Tenot 
Dandin  son  fils,  est  une  plaisanterie  de  Rabelais 
très  agréablement  imaginée  pour  ridiculiser  cette 
espèce  de  gens  qu'on  nomme  «  Avocats  sous 
«  l'orme.  »  L'activité  du  fils,  égale  à  celle  du  père, 
pour  appoincter,  accommoder  les  procès,  n'est  pas 
d'abord  aussi  heureuse.  11  s'en  plaint  à  Perrin  Dan- 
din qui  le  console  et  l'encourage  par  l'espérance 
de  mériter  comme  lui  l'honneur  et  tiltre  ù'appoinc- 
teur  irréfragable,  pourvu  que  fidèle  à  ses  leçons,  il 
ne  songe  jamais  à  faire  û'appointement,  d'accom- 
modement qu'au  moment  où  les  Parties  lasses  de 
plaider,  s'aperçoivent  que  «  leurs  bourses  sont 
«  vuides.  »  (Voy.  Rabelais,  T.  III,  p.  ^O  et  221.) 

On  n'avoit  pas  encore  avili  la  signification  de  ce 
mot  appoincteur,  lorsque  dans  un  sens  relatif  à 
celui  du  verbe  appoincter,  négocier,  on  disoit  : 
«  Si  fust  chargé  de  ceste  chose,  pour  aller  en  Alle- 
«  magne,  pour  traiter  ce  mariage,  un  moult  sage 
«  et  vaillant  Chevalier....  et  esloit  nommé  ce  Che- 
«  valier  Messire  Simon  Burle,  sage  et  grand 
«  appointeur.  »  (Froissart,  Vol.  II,  p.  75.  —  Voy. 
Appuincter  et  Appmnxtation.) 

variantes  : 
APPOINCTEUR.  Rabelais,  T.  111,  p.  218  et  219. 
Appointeur.   D.   Carpentier,    Suppl.   Gloss.  lat.    de  Du 
Gange,  au  mot  Appointamcntum. 

Appointir,  verbe.  Rendre  pointu,  terminer  en 
pointe.  Devenir  pointu,  se  terminer  en  pointe. 

La  signification  d'appointir,  active  dans  le  DicL 
de  Cotgrave,  est  neutre  dans  Oudin,  Dict.  Elle  étoit 
encore  neutre ,  lorsqu'on  disoit  :  »  La  forme  du 
«  pied  du  lièvre...  aiguë  et  faite  à  la  semblance 
»  d'une  pointe  de  coùsleau...  vient  tousjours  en 
«  appointissant.  »  (Fouilloux,  Vén.  fol.  CG,  V°.  — 
Voy.  Appoincter  et  Appointuser.) 

variantes  : 
APPOINTIR.  Cotgrave  et  Oudin ,  Dict. 
Apointir.  Cotgrave,  Dict. 

Appointon,  subst.  masc.  Arme  pointue.  Proba- 
blement une  espèce  de  poignard. 

Un  appointon  en  la  main  destre 
Et  une  boiste  en  la  senestre 
Tenoit:  mais  Vappointon  rauchoit 
Derrière  li,  et  concheloit. 

D.  Carpentier,  S.  Gl.  lat.  de  Du  Canjô,  au  mot  Pitnctorium. 

Appointuser  (s'),  verbe.  Devenir  pointu,  se 
terminer  en  pointe.  Par  comparaison,  aller  en  di- 
minuant, en  se  rétrécissant.  (Cotgrave,  Dicl.  — 
Voy.  Appoi-ntir.) 

Apportion,  participe.  Divisé  par  portions  et 
avec  proportion,  partagé.  Il  sembleroit  qn'apportion 


AP 


—  76 


AP 


fût  un  adverbe  composé  de  la  préposition  à  réunie 
au  substantif  por/ioH,  el  qu'étant  par  conséquent 
de  même  espèce  que  Tadverbe  appoinct,  il  a  pu, 
comme  cet  adverbe,  tenir  lieu  d'un  adjectif,  et 
signifier  partageable ,  divisible  par  portions.  On 
croit  néanmoins  qnapportion  est  le  participe  du 
■verbe  apportionner .  (Voy.  Ai'I'ortionner.) 

En  se  conformant  à  la  prononciation  sourde  de  la 
"voyelle  e  supprimée  souvent  dans  la  finale  du  par- 
ticipe anglois  apportioned  ou  apportmid,  Littleton 
aura  prononcé  et  écrit  en  françois  apportion  pour 
apportionné,  c'est-à-dire  divisé  par  portions,  par- 
tagé. «  Le  gard  des  terres  ou  tenements  durant  li 
«  nonage  d'un  enfant...  sont  chateux  realx  et  poyent 
«  estre  apportions  et  severs.  »  'Tenures  de  Little- 
ton, fol.  73.)  11  paroit  que  ce  mot  désigne  plus  spé- 
cialement l'idée  de  proportion,  lorsque  le  même 
auteur  dit:  ■>  Le  bornage  et  féaltie...  ne  sont  pas 
«  annuals  services,  et  ne  poient  eslve  apportion  ; 
«  mes  l'escuage  poit  et  serra  apportion,  solon  que 
«  l'afférence  et  rate  de  la  terre,  etc.  »  Id.  ibid.  p. 
49.  —  Voy.  Apportionsément.) 

Apportionnement,  subst.  masc.  Division, 
partage  en  proportion  des  produits  d'un  fonds. 
Signification  analogue  à  celle  du  participe  appor- 
tion. (Skinner,  voc.  forens.  exposit.  au  mot  Appor- 
tionment.  —  Voy.  Apportion  et  Apportionnement.) 

Apportionnement ,  adverbe.  Proportionné- 
ment.  C'est  dans  un  sens  relatif  à  l'idée  d'une  divi- 
sion proportionnelle,  qu'on  a  dit  :  <■  Si  par  un 
«  mesme  contract  se  treuvent  plusieurs  pièces 
«  vendues,  aucunes  desquelles  soient  de  l'ancien 
«  du  vendeur,  autres  de  son  acquest,  ou  toutes  de 
«  l'ancien  et  partie  de  l'une  de  ses  lignes,  partie  de 
«  l'autre,  le  lignagier  de  chacune  ligne,  venant 
o  à  retraire  ce  que'meut  de  la  sienne,  y  est  receva- 
«  ble  en  rembourceant  au  prorata  les  pris  et  loyaux 
«  cousis,  distribution  d'iceux  faite  à  l'arbitrage  du 
«  Juge  sur  cbacun ,  apportionnement  à  ce  qu'il 
«  emportera  desdites  pièces.  ■■  l'Cout.  de  Lorraine, 
au  Coût.  gén.  T.  II,  p.  1069.  —  Voy.  Apportion.) 

Apportionner,  verbe.  Parlager  en  donnant 
portion.  C'est  la  signification  A' apportionner  dans 
les  Coutumes  où  l'on  partage  les  enfans  ou  les  frères 
puinés,  en  leur  donnant  certaine  portion  d'béritage, 
ou  certaine  somme  d'argent  proportionnée  à  "la 
valeur  de  cette  portion  coutumière.  «  Au  cas  que 
«  les  fils  puisnez  el  filles  n'auroient  esté  rt;j/;o)7;i9H- 
«  ne:::  et  dotez  pendant  la  vie  de  leurs  père  et  mère, 
«  el  que  leurs  dits  père  et  mère  ne  leur  auroient 
«  rien  laissé  en  testament,  l'aisné  qui  aura  succédé 
«  est  tenu  apportionner  les  puisnez,  fils  ou  filles 
«  raisonnablement,  en  or  ou  en  argent,  ou  héritage 
«  à  son  choix,  etc.  »  (Coût,  de  S'  Sever,  au  Coût, 
gén.  T.  II,  p.  692.;  «  Es  maisons  nobles,  vulgaire- 
«  ment  dits  héritages  gentioux,  de  plusieurs  enfans 
«  d'un  mesme  mariage  le  fils  aisné  succède  univer- 
«  sellement  à  ses  père  et  mère  décédez  sans  faire 
«  testament  ;...  lequel  fils  aisné  est  lenu  apportion- 
«  ner  tous  les  autres  fils  ou  filles  raisonnablement 


«  en  argent,  ou  héritages  à  son  choix,  qui  sera 
«  doresnavant,  s'ils  sont  trois  puisnez  ou  plus,  la 
«  tierce  partie  desdits  héritages  nobles;...  el  s'il 
«  n'y  a  trois  puisnez  ,  mais  seulement  deux  ou  un, 
«  leur  portion  sera  la  quarte  partie,...  ou  l'estima- 
'  tion  d'icelle.  »  (Coût.  d'Acs,  ibid.  p.  673.) 

La  portion  d'héritage  des  puinés,  ou  l'estimation 
en  argent  de  cette  portion,  étant  vue,  non  comme 
un  partage  coutumier,  mais  comme  un  moyen  de 
subsister,  comme  un  appanage  en  général,  lé  verbe 
appanagersignifioitla  même  chose  qn  apportionner. 
Enfin,  comme  un  appanage,  de  quelque  nature  qu'il 
soif,  est  une  portion  de  bien,  assignée  à  quelqu'un 
pour  sa  subsistance,  le  verbe  apportionner  signifioit 
réciproquement  la  même  chose  qn'appanager.  On 
a  dit  en  parlant  de  la  Reine  Brunehaud,  que  Chil- 
péric  son  époux  «  la  relégua  en  la  ville  du  Mans, 
"  apportionnée  de  quelque  pension  annuelle  pour 
<■  son  vivre.  »  (Pasquier,  Rech.  liv.  v,  page  399.  — 
A'oy.  App.\nager.) 

Appouvrir,  verbe.  Appauvrir,  faire  pauvre. 
Etre  appauvri,  être  fait  pauvre,  devenir  pauvre. 
(Voy.  PouvRE.j  On  peut  voir  dans  Mcot,  Dict.  au  mot 
Appauvrir  qui  subsiste,  comment  de  l'adjectif 
paiiper  on  a  fait  pauvre,  paovre,  paoure,  paure, 
poHvre,  poure;  et  de  l'adjectif  frangois,  le  verbe 
appourir,  apourier,  apouvrer,  appouvrir,  apaurier, 
appaourir,  appaouvrir,  appauvrir,  dans  le  sens 
actif  faire  pauvre.  (Voy.  Cotgrave,  Rob.  Estienne, 
Nicot  et  Monet,  Dict.; 

La  signification  active  est  celle  d'appauvrir  : 
signification  qui  pourtant  semble  n'avoir  pas  été  si 
particulière  aux  orthographes  de  même  terminaison, 
que  jamais  elle  n'ait  été  commune  aux  orthographes 
apouvrer,  apaurier,  etc.  «  Sont  les  pais  gastez,  les 
«  marchandises  anullées,  et  l'Eglise  mou\[  apouvrée. 
«  Si  vous  prie  et  conseille  le  Roy  que,  etc.  »  (Hist. 
de  B.  du  Guesclin,  par  Menard,  p."  383.)  «  Ont  esté... 
«  grevez,  domagiez  el  apau)iez  par  extorsions  de 
«  très-grandes  usures.  »  Ord.  T.  II,  p.  86. 

C'est  avec  raison  qu'un  ancien  Poète  historien, 
parlant  de  l'anéantissement  du  pouvoir  souverain 
dans  le  xii«  siècle,  disoit  : 

Moult  iert  li  règnes  descreuz, 
Apouriez,  et  decheuz 
De  sa  hautesce  souveraine, 
Puis  la  mort  au  Rov  Kallemaine. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  11,  R". 

11  est  possible  que,  surtout  en  ce  dernier  passage, 
la  signification  du  participe  apourié  soit  neutre  et 
relative  à  celle  du  verbe  apourier,  ou  apouroier, 
être  fait  pauvre,  devenir  pauvre. 

Cil  qi  n'a  riens  ne  puet  apourier. 

Ane.  Poés.  fr.  MS.  du  Valic.  n'  liOO.  fol.  143,  R'. 
Riche  gent  érent  à  merveille  ; 
Mais  Deable  qui  tôt  tems  veille 
S'entremist  moU  d'ax  engigner, 
Tant  qu'il  les  fist  apouroier. 

Fabl.  IIS.  de  S'  Germ.  fol.  36,  R*  col.  2. 

VARIANTES  : 
APPOUVRIR.  Xicot  et  Monet,  Dict. 
Apaurier.  Ord.  T.  II,  p.  86. 
.\POURiER.  Miserere  du  Recl.  de  Moliens,  MS.  de  G.  f"  219. 


AP  -  77  - 

Apouroier.  FaW.  MS.  de  S-  Germ.  fol.  36,  R»  col  2 
Apouvrer.  Hist.  de  B.  du  GuescUn,  parlienard/p  '383 
Appaourir,  Appaouvrir.  Nicot,  Dict  '  ^ 

Appourir.  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict. 
Appovrir.  Cotgrave,  Dict. 

Appouvrisseinaiit,  subst.  mase.  Annauvris- 
semeut.  (Cotgr.  Nicot  et  Monet,  Dict.  -  V.  Appouvbir.; 

VARIANTES  : 
APPOUVRIS.SEMANT.  Monet,  Dict 
Appourissement.  Nicot,  Dict 
Appovrissement.  Cotgrave,  Dict. 

Appréhender,  verbe.  Prendre,  arrêter,  faire 
arrêter.  Prendre,  l'ecevoir  une  idée.  Comprendi-e 
connoitre  évaluer,  juger.  Prévoir,  craindre.  On 
sait  qu  en  latin  apprehendere  signifie  prendre  avec 
]a  main,  et  que  relativement  à  celte  signification 
générale  apprehemler  en  françois,  désignoit  paru" 
culièrement  une  prise  de  corps,  lorsqu'on  disoit 
appréhender  quelqu'un,  Vapprehender  au  corps- 
expression  encore  usitée  en  style  de  Palais  «  Nostrê 
«  grand  Bailly,  comme  souverain  Officier  peut 
«  appréhender  tous  criminels  et  malfaicteurs  et 
«  SI  le  f,ergent  de  nostre  dit  Bailly...  appréhende 
'  an  corps  tmcnnè  malfaicteurs  en  la  terre  d'un 
o-én  't  T  n  -«'i'  *'^''V"  ^^T'-  '^^  "aynault,  au  Coût. 

seil.    1.  J,  p.    /8I.  _  Voy.  Al'1'REIlE.NDITlON.) 

Lest  par  extension  du  sens  propre  qu'on  a  dit 
Srv'utZ'Z  ^"^^r^'«"-  (Voye.  d2s  Accord  ,' 
n  ?iô        V   '  '^°/-  '^'  ^°-  -  ^"^"'ts  de  Strapa.  T.  II 
il       '".V^y-  A^EiiENsioN.)  Le  sens  llguré  dans 
lequel  on  dit  qu'on  a  eu  vent  d'une  chose/ semble 
avoir  que  que  analogie  avec  celui  de  l'ex preSn 
appréhender  qnelqwnn  du  rcuL  le  prendre^  'arrêter 
sans  information  précédcile,  le  faire  arrêter  sm' 
une  forte  présomption  autorisée  par  n  pSence 
ou  parce  qu'un  Juge  peut  avoir  appris  de  la  corn: 
^a'ue  le"B^';:'n  ''  *^^  «l"*^  1'^"  dif  EommunémeTit 
.  Tent     S-J""!  seigneur  peut  appréhender  du 
'  vent     doit  s  entendre  a  l'égard  de  l'étrano-er  des 
"  I»f' -f"',"'^'''"'*^^»'^--  lesquels  le  BaUy  peS 
«  appréhender  sans  informations  précède  Ues    ou 
•<  lesquels  on  trouve  actuellement  délinqS  s  n'um 
"  que  ce  fussent  des  habitans  et  bo3  Ss^Su 
iîin  Ict^'"?'^  '^'^^  véliémentes  présomplons 
et  ind  ces,  ou  la  commune  famé  ou  renommée  '^ 
îcaT^^'^r^''  1'  quelque délict digne  delà  piSn  ? 
(Coût,  de  Gand,  au  nouv.  Coût.  ién.  T.  I  p  looi  ) 
.   Quand  la  prise  de  corps  étoit  justiflée  par  mVi 
information  qui  changeoit  en  conviS,  Ta  nié 
eTT,Zr'"'''  ^"^''^^"elle  on  avoUfai  prendre 
et    aireter    un   malfaiteur,  on   disoit  ou*il   étni» 
appréhendé  et  convaincu  du  fait?  On  ne  peu 
«  condamner  personne  à  la  mort  pour  délicî  sUe 
«•  nestquil  soit  appréhe^idé  et  convainc    dû  /a't 
«  lï    'c'SS;^;fV  '''  ""'T''  tenues  cône 
Peut-être  aussi  que  dans  un  s^us  relalifà  fi' 
ception  générale  et  figurée  d' appréhl.S f,prenSe 


AP 

idée  et  connoissance  d'une  chose,  en  juger  d'après 
cette  Idée  et  cette  connoissance,  on  auni  dit  d'uni 
personne  reconnue  et  jugée  coupable  d'un  déUt 
qu  elle  en  etoit  appréhendée  ?  ' 

La  preuve  qu'appréhender,  signifioit  fiaurément 
prendre  l'Idée  d'une  chose  en  général  c'est  cmVn 
parlant  de  l'entendement  humahi,  on  d  soit  «'  sSS 
«  premier  office. . .  est  de  recevoir  simplement  et 

(sagesse  de  Charron,  p.  loo.) 
La  simple  appréhension  de  l'idée  des  choses  est 

ie  l'iSan,^'"*^^  °"  '"'%  '^'^^P''^"'^  en  sScupan 
et  d'en  i,  Ipp  n",'  P,'''''  '"  '"°>en  de  lesconnoitre 
et  cl  en  juger.  Delà,  les  acceptions  (ï  appréhender 
comprendre,  çonnoitre,  évaluer,  juger.'^tef  (Monet; 
iJict.  —  \oy.  Appreiiendre.)  ' 

Enfin  le  verbe  appréhender,  dans  le  sens  dp 
craindre,  désignoit  et  désigne  encore  l'efflf  d'une 
connoissance  anticipée,  de  cette  prévoyance  inquiète 
avec  laquel  e  on  juge  les  choses  d'après  idée 
facieuse  quon  en  prend,  avant  même  qu'elles  se 
réalisent.  (Monet,  Dict.  -  Yoy.  Appréhensif  ) 


VARIANTES 
APPREHENDER.  Orth.  snbsist  - 
Apprehander.  ironet,  Dict. 


Coût.  gén.  T  I,  p.  781. 


Apprehenditiou,  subst.  fém.  Prise  de  corps 
bigni, cation  relative  à  celle  du  verbe  appréhender 
prendre  arrêter.  ^Cout.  de  Ilaynault,  au  Coût  gén' 
1.  1,  p.  /82.  —  ^oy.  Appréiie.nder.) 

ma'^rf''Tpn'{,^"i^*'^' /'''■''''■•  ^'^""^''^  en  étendant  la 
main.  Tenir  dans  la  main.  Prendre  l'idée  d'une 
chose,  la  retenir  dans  sa  mémoire.  Prendre  une 
1  habitude,  çonnoitre  par  habitude,  s'accoutun"er 
Reprendre,  relever,  faire  çonnoitre'.  Faire  pSre 
1  idée  d  une  chose,  la  faire  çonnoitre,  enseio-ner 
instruire,  etc.  Accoutumer.  Il  est  évident  que  le 
•fi  n  .,       'F°".'''"P'"^"'^'"e,  est  une  contracthjn  du 

P  pnf^'rî'.f  "''•  ^''^-  P^""  ""e  espèce  d'asservis" 
semen  à  1  orthographe  étymologique,  que  dans  le 
siècle  de  l'érudition,  l'on  aura  écrit  appréleZre- 
en  transposant  Ve  final,  appréhender  {i)%yezAp'. 

PREllE.NDER.)  ^   '    ^       .jv.^.  ^1 

n,.?ii^n''  ''"^^  ^^'^  aujourd'hui  la  différence  de  signi- 
nPP,  ,p  ^"^e  apprendre  et  appréhender,  on  a  la 
preuve  que  dans  un  sens  très-analogue  à  celui  du 

avPr'l-f^^f'''"r^"''f"  '^''*"  'W^'^endere,  prendre 
avec  la  mam,  le  verbe  apprendre  signifioit  ancien- 
nement prendre  eu  étendant  la  main.  Tel  étôi!  saSs 
doute  le  sens  d'apprendre,  lorsqu'on  personnifiant  la 


Mors,  moût  os  bien  apris  le  monde. 
De  toutes  partz  à  la  reonde, 
ru  lieves  sor  toz  ta  beniere,  etc 

Fabl.  .MS.  du  R.  n-  7615,  T.  I,  fol.  103,  V  col   1. 

«/J!!;.^''/ens'«nJl  paroît  avoir  signifié  tenir  dans 
sa  main  la  chose  qu  on  a  prise. 


s2SS9aiïs^^Sïî«"=^- 


AP 


78  — 


AP 


Envis  lait-on  cou  qu'on  aprent  (I). 

l'rov.  rur.  et  vulg.  US.  de  N.  D.  n"  2,  fol.  H.  R'  col.  *. 

Au  figuro,  ce  même  verbe  apprendre  signifioit  ce 
qu'il  signilie  encore  aujourd'liui,  prendre  l'idée  de 
ce  qu'on  veut  ou  doit  connoitre,  en  retenir  l'idée 
dans  sa  tôle,  comme  l'on  retient  dans  sa  main  une 
cliose  qu'on  a  prise,  en  prendre  connoissance 
d'après  cette  idée  retenue  dans  la  mémoire  par  la 
force  active  de  l'entendement  humain.  (V.  Apprise.) 

Droiz  dit  que  cil  fait  à  reprendre 
Oui  ne  set,  ne  ne  vuet  aprenctre. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'  7615.  T.  I,  fol.  110,  R-  col.  ). 
Nuns  n'enpire  de  bien  apronlrc. 

IbiJ.  T.  II,  fol.  165,  V-  col.l. 

C'étoit  la  même  signification,  lorsqu'en  employant 
comme  substantifs  le  verbe  apprendre  et  le  participe 
apprenant,  on  disoit  : 

....  Je  n'ai  mie  si  chier 
Le  séjor  d'Arras,  ne  la  joie, 
Que  Vaprendre  lessier  en  doie. 

Fabl.  .MS.  du.  R.  u-  7218,  fol.  250,  V'  col.  1. 
Maistre  qui  désensaigne, 
Son  aprenant  méhagne  (2). 

Prov.  du  C-do  Bretagne,  VS.  de  S.  Gerni.  fol.  lU,  V  col.  2. 

Dans  cette  expression  apprendre  à  lettres,  la  pré- 
position à,  en  latin  ad,  étoit  d'autant  plus  inutile, 
que  le  rapport  de  l'action  de  prendre  une  idée,  une 
connoissance,  à  l'objet  de  cette  action,  étoit  suffi- 
samment indiqué  par  la  préposition  initiale  du 
verbe  apprendre,  qui  d'ailleurs  avoit  le  régime  qu'il 
conserve  encore. 

Et  puis  cou  k'il  ot  XL  ans 
Fu  il  à  laitres  aprcndans. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  416. 

On  ajoute  que  l'acception  de  la  préposition  fran- 
çoise  à,  étoit  relative  à  celle  de  la  préposition  latine 
ab,  quand  pour  indiquer  la  personne  de  qui  l'on 
apprenoit  une  chose,  on  disoit  qu'on  l'apprenoit  à 
cette  même  personne  ;  expression  dans  laquelle  à 
est  de  même  signification  que  de,  usité  comme 
aujourd'hui,  dans  notre  ancienne  langue.  «  Si 
«  covient  ke...  nos  apregniens  del  Saint  des  Sainz 
«  mansuetume  et  la  grâce  de  comune  vie,  si  cum  il 
«  mismes  dist:  apremiz  à  mi  ke  je  suis  sueys  et 
«  humiles  de  cuer  ;  en  latin,  discite  à  me,  quia  mitis 
«  sum,  et  humilis  corde.  »  (S'  Bern.  Serra,  fr.  mss. 
p.  lOi.  —  Id.  ibid.  Serm.  lai.  col.  777.) 

Dans  le  cas  oîi  l'idée  prise  d'une  chose  et  retenue 
dans  la  mémoire,  en  opéroilla  connoissance  parfaite 
et  permanente,  on  disoit  que  cette  chose  étoit 
apprise  du  tout,  ou  tout  au  long,  qu'elle  étoit  apprise 
par  cœur.  L'apprendre  par  avant  ou  auparavant, 
c'étoit  en  avoir  une  connoissance  anticipée,  en 
prendre  une  idée  que  la  prévoyance  réalise  dans 
l'avenir.  (Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict.) 

Quoique  ce  verbe  apprendre,  dont  l'acception 
figurée  n'a  presque  point  varié,  signifie  encore 
l'habitude  qu'on  prend  de  certaines  choses  aux- 
quelles on  s'accoutume  en  lesconnoissant  par  cette 
même  habitude,  on  ne  désigneroit  plus,  1°  une 
personne  qui  connoîtroit  l'agrément  d'une  compa- 


gnie à  laquelle  elle  se  seroit  accoutumée,  en  disant 
qu'elle  a  appris  compagnie  : 

.  .  .  Qui  a  compaignie  aprise, 
Bien  sai  de  voir  que  petit  prise 
L'aise  qu'il  a  sans  compaignie. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  213,  R'  col.  1. 

2°  Une  personne  qui  ne  seroit  pas  accoutumée  à 
l'air  d'un  climat,  en  disant  qu'elle  n'en  a  pas 
appris  l'air  : 

...  Le  mal  plus  griement  l'a  pris. 
Pour  l'air  qu'il  n'avoit  pas  apns. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  36.  V-. 

3°  Une  personne  qui  ne  connoîtroit  pas  la  pauvreté 
faute  d'y  être  accoutumée,  en  disant  qu'elle  n'a  pas 
appris  la  pauvreté.  «  Grant  cruauté  seroit  que  l'en 
«  la  laissast. . .  désespérer  par  poureté  que  elle 
«  n'auroit  pas  aprise.  >•  (Beaumanoir,  Coût,  de 
Beauvoisis,  chap.  xxx,  p.  103.) 

A°  Une  personne  qui  connoîtroit  le  plaisir  d'être 
riche  ou  à  son  aise,  et  s'y  seroit  accoutumée,  en 
disant  qu'elle  a  appris  ses  aises,  qu'elle  a  appris  la 
richesse.  «  S'enclinoyeal  à  la  guerre  poures  Cheva- 
»  liers...  qui  avoyent  a/;pm  leurs  aises  et  souste- 
«  noyent  leur  estât  sur  la  guerre.  »  (Froissart, 
Vol.  IV,  page  111.) 

.  .  .  Qui  f(  (tpris  la  richèce, 
Moult  i  a  dolor  et  destrèce, 
Quant  l'en  chiet  en  autrui  dangier, 
Por  son  boivre  et  por  son  mengier. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  299,  R-  col.  1. 

5°  On  ne  désigneroit  plus  enfin  une  jeune  per- 
sonne dont  les  membres  délicats  ne  sont  point 
accoutumés  aux  blessures,  en  disant  que  ses  mem- 
bres n'ont  pas  appris  qu'on  les  blesse.  "  Si  bel  pié  et 
«  ses  bêles  mains...  n'avoient  mie  apris  c'on  les 
»  bléçast.  "  (Fabl.  ms.  du  R.  ir  7989,  fol.  77.  —  Voy. 
Apprentl're  et  Apprisure.) 

Quelquefois  l'acception  figurée  du  verbe  reprendre 
étoit  celle  d'apprendre;  de  façon  qu'apprendre  le 
vice  signifioit  reprendre  le  vice,  le  relever  comme 
on  relève  une  chose  en  la  prenant  avec  la  main, 
faire  connoître  le  vice,  en  faire  prendre  une  idée 
odieuse  en  le  présentant  aux  yeux  de  l'esprit, 
comme  on  présente  à  ceux  du  corps  une  chose 
qu'on  lient  à  la  main. 

Li  Philosophe  tel  estoient, 
Que  à  nule  rien  n'entendoient, 
Fors  qu'à  bien  dire  et  à  aprendre 
Les  malvès  vices,  etc.. 

Bible  Guiot,  MS.  de  N.  D.  a'  E.  6,  fol.  89,  V°  col.  1. 

Encore  aujourd'hui,  apprendre  une  chose  à  quel- 
qu'un ,  c'est  lui  en  faire  prendre  une  idée  qu'il 
retienne  dans  sa  mémoire,  lui  faire  connoître  cette 
chose  en  lui  en  présentant  l'idée,  en  l'enseignant, 
en  l'inslruisant,  etc.  (Voy.  Apprenture  et  Apprisfre.) 
Mais  on  ne  diroit  plus,  apprendre  quelqu'un  les 
Sciences,  ou  tout  simplement  l'apprendre,  pour 
enseigner  ;\  quelqu'un  les  Sciences,  l'instruire  dans 
les  Sciences.  «  Glergie  vint  en  France  par  Alcuin.... 
u  Dui  moines  Escoz  aprenoient  les  gens  sapience 
«  pour  l'amour  Nostre  Seignour.  »  (Chr.  S'  Denys, 


(1)  C'est  à  regret  qu'on  laisse  ce....  (n.  e.)  -  (2)  blesse,  lèse. 


AP 


—  79  — 


Reç.  des  Hist.  de  Fr.  T.  V,  pa^e  263.)  «  Nous 
:i^^^p>Jftmes,  et  il  sot  moult  retenir.  ..  (Rom  de 
Dolopathos,  Ms.  du  R.  n-  7534,  fol  '^94  )      ^ 

On  ne  supprimoil  pas  toujours  la  prénosition  à 
qui  orsqu'elle  ne  désignoit  point  la  pSnne  qu'on 

doï  'on ^tr;? 'nf ''^""^''  quelqifefois"lT ?hose 
aont  on  1  instruisoit,  comme  en  cette  exoressinn 
;  apprendre  une  Nymphe   aux  ébas  Sour    ' 

ainreS-nt,^''^''  'i'''^  PI"'  ancUnnem  n 
•eKstîrV^.fi?^^^^       d'une  chose,  »  c'étoit  aussi 
îa'S^uSre  Siilr  ''''"'''  ''^'^^e  de  cette  chose, 

0  lui  ara  encanteours, 

Et  moult  divers  engingneors 

yui  de  tous  maus  Vaprendront. 

Lucidaires,  MS.  de  Gihert,  fol.  24,  V°. 

On  disoit  d'une  chose  qu'on  pouvoit  connoîtrp 
sans  instruction,qu'elle  »  nefaisoit  mie  à  «Sï  ! 

-  Rom.  de  Rou,  ms.  p.  no'.  -  Voy  A  Îre 't.   ) 
difoiis  qui  mslruisenl  de  la  v&ilé  te  Ms 

En  celui  termine  meisme 
Ou  faus  devise  Uopra»c/,'es, 
be  boisa  h  Quens  de  Flandres. 

G.  Giiiart,  MS.  fol.  232,  R". 
.  .  .  Envoya  li  Quens  de  Flandres 
A  Furnes,  ce  dit  li  aprendres 

Id.  fol.  236,  R». 


AP 


Apprins  ou  Aprins,  participe.  Annris  insfmif 
accoutume.  (Rob.  Estienne,  NicotetZIt  dS?  ' 
Apraujnet,  s  pr.  Qu'il  apprenne.  (S- Bern  s  fr  ) 
jPrcdnet,  subj  prés.  Qu'il  apprenne.  (IdibTé  f '^ 
Apregniens.  subj.  pr.  Que  nous  apprenions  rid  \ 

ApnncioU  indic.  imp.  Apprenoit.  fCléomadi'"? S 
Am'igeH,  subj.  pr.  Qu'il  apprenne    L  des  Ro  s  ^ 
(Rom  Soton!:i£-  P'-^t'/PPr^'"*^^^^'  enselfn.fmS 

^Sis  ï>  '  S-'i^P-  '^"^'  '^PP^'t.  (S-  Bern.  S.  r.) 
^^/çs/.iu's,  subj.  imp.  Que  vous  apnrissie?   a 

Apustrent,  ind.  prêt.  Apprirent.  (Athis,  ms.  ^54.) 

APPRÉHENDRE.  Colgr^ûS'  ' 

ÏT.Z-Àl\tl  ëîcT-  '''''■  '^  ^-  ^^-"-  T.  n,p.  1391. 

pS^C^^Siaî^!^^i|'-^^«r'^°'-'^'P'"^- 

Aprendre  Rom.  de  Rou,  MS.  p   ilo  ' 

APRENRE.  Beaumanoir,  C.  de  B^eaiv oisis,  chap.  xl  p  22. 

"  de  ce  quon  ht  aux  histoires  Romaines  de  cpnv 
"  qui  avant  le  jour  des  batailler^ss  "ni?  ,^^ 
«  moient  aussi'  P-'ofondément  que  sf  c'estoif  [; 
«  lendemain  de  leurs  nopces  :  je  S-  LSll  st 
"  S?pir'''"'"''f-  ;(-^'^^'»-deMontlîiT  I  p'?|9' 

Appréhender  et  APPREHENSION.^  Prevoii .  (Voyez 


avoir  certaines  ciuaîte-s      b  Slfes^'on  "rïl'' ' 
parlant  de  fumiel^  qu'il  est  .S".fl^^2^^^  '''  ^" 

L'habit  de  pris, 
Fard  bien  compris, 
Font  d'un  laid  corps  le  parement  • 
Ainsi  que  les  Heurs  du  pourpris   ' 
Reparent  le  fumier  appns     ^ 
De  puyr  natureUement. 

J.  Marot,  p.  200. 
.  .  CONJUG. 

(coî5£rp."?5i'?S,!"£5î:?."|^r--- 


Appréhension,  subst.  fém  Prise  snisip-  nr.-o^ 
..o,mnéMaistreWlïï"„lt';v  S' Sis"  ,,ra*î2 


..e  ™  u..g,  ,.■„,  „,.  .,,„,..  * ;»=  20..,  on  „„„v.  <ie,a  :  .  Mal, .,  .p.j,  y  „„  .„^,,  ,^^^  ^  ^^  _^^  _  ^^^  ^^  ^^^  ^^^ 


AP 


—  80  - 


AP 


de  comprendre,  la  compréhension.  (Cotgrave,  Rob. 
Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict.) 

On  a  désigné  même  par  ce  mot  appréheimon, 
l'idée  plus  ou  moins  vraie,  la  connoissance  plus  ou 
moins  certaine  qu'on  prend  des  choses,  le  jugement 
qu'on  eu  l'orme  d'après  cette  idée,  cette  connois- 
sance. "  11  eut  une  appiélwnsion  que  c'étoient  ses 
«  enfans.  »  (Nuits  de  Strapar.  T.  I,  page  300.)  «  La 
«  femme  de  S'  Hilaire...  prit  une  vive  appréhension 
«  de  la  béatitude  élerneiie  et  céleste.  »  (Essais  de 
Montaigue,  T.  I,  page  350.)  «  Les  hommes  ont  eu 
«  apprélicnsion  de  Dieu  par  les  astres  qui  nous 
«  a|)paroissent.  »  (Amyol,  Moral,  de  Plutarque,  T.  II, 
p.  -218.  -  Voy.  Monet,  Dict.) 

Qu'il  suffise  d'avoir  uidiqué  ailleurs  par  quelle 
analogie  ce  mot  apprélienslon,  qui  désigne  encore 
l'idée  qu'on  prend  d'une  chose,  a  signifié  et  signifie 
crainte.  (Voy.  Appréhender  et  Appréhensif.) 

Apprentis,  adjectif  subst.  masc.  et  féni.  Qui 
apprend  une  chose,  qui  est  encore  à  l'apprendre. 
(Voyez  Ari'HEiiENDiuc.)  On  voit  que  l'ortliographe 
apprenti,  préférée  aujourd'hui  à  l'oiihographe  ap- 
prcntif,  n'est  pas  nouvelle  dans  notre  langue.  L'une 
et  l'autre  ont  fait  oublier  l'ancienne  orthogiaphe 
apprentis,  dont  se  forme  si  naturellement  le  subs- 
tantif ap[irentissage  qui  subsiste  (1).  Encore  aujour- 
d'hui, un  apprenti  est  quelqu'un  qui  apprend  un 
métier,  ou  autre  chose  en  général;  quelqu'un  à  qui 
il  faut  apprendre  ce  métier  ou  cette  autre  chose. 

Mais  on  ne  diroit  plus  avec  Montaigne  :  «  Je  ne 
«  me  prens  gueres  aux  nouveaux  livres,  pour  ce 
«  que  les  Anciens  me  semblent  plus  pleins  et  plus 
«  roides;  ny  aux  Grecs,  parce  que  mon  jugement 
«  ne  sçait  pas  faire  ses  besognes  d'une  puérile  et 
«  apprentisse  intelligence.  »  (Essais  de  Montaigne, 
T.  II,  page  136.) 

On  a  voulu  sans  doute  désigner  le  chant  naturel 
des  oiseaux,  ce  chant  qu'ils  n'apprennent  point  de 
l'art,  lorsqu'on  a  dit  : 

A  chanter  furent  ententis 

Les  oyseauLx,  non  comme  aprentis, 

Ne  aussi  comme  non  sachans. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  692-694. 

Anciennement,  l'acception  d'apprentis  éloit  si 
générale,  que  pour  signifier  qu'on  étoit  encore  i\ 
apprendre  des  nouvelles  de  quelqu'un,  on  disoit 
qu'on  en  étoit  aprentis. 

En  demandoit  par  tous  pays; 
Mais  aussi  en  ert  apprentis 
Que  il  fu  au  commencement. 

CléomaJès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  46.  R*  col.  1. 

VARIANTES  : 
APPRENTIS.  Cléomadés,  MS.  de  Gaignat,  fol.  46,  R"  col.  1. 
Apprentie.  Monet,  Dict.  au  mot  Appris.  —  D.  de  Trévoux. 
Apprenti.  Orth.  subsist.  —  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict. 
Apprenty.  Nicot,  Dict.  au  mot  Apprenti. 


Aprenti.  Rom.  de  la  Rose,  vers  693. 
Apprentisse.  Essais  de  Montaigne,  T.  II,  p.  136.  —  Dict. 
de  Trévoux. 

Apprenture,  suhst.  féminin.  Enseignement, 
instruction  ou  coutume,  habitude.  SignificaUons 
relatives  à  celles  du  verbe  apprendre,  instruire, 
accoutumer.  (Voy.  Appréiiendre.)  «  Peu  de  gens  est 
«  qui  soint  hardiz  par  nature  ;  mais  mains  devien- 
«  nent  hardiz  par  art  et  par  apprenture.  «  (Instr. 
de  Chevalerie  et  exerc.  de  Guerre,  ms.  fol.  12,  R».  — 

Voyez  At'RENE.ME.NT.) 

Apprise,  subst.  fém.  Apprentissage.  Connois- 
sance d'une  chose  apprise.  Espèce  d'Enquête. 
Entreprise.  Ce  mot  aprise  ou  aprinse,  dans  le  sens 
d'apprentissage,  signifioit  l'exercice  par  lequel  on 
apprend  un  métier,  par  lequel  on  s'y  instruit  sous 
les  yeux  d'un  Maître.  «  Pourveu  qu'il  ait  servi  trois 
»  ans  en  bonne  aprise,  etc  »  (Ord.  T.  VIII,  p.  513. 
—  Voy.  Api'RisiRE.) 

Il  semble  qu'être  de  Vaprinse  d'un  métier,  c'étoit 
être  né  dans  un  métier  dont  on  a  fait  l'apprentissage 
en  s'y  exerçant  dès  l'enfance.  «  Se  il  est  filz  de 
«  Maistre  et  de  la  dicte  aprinse,  il  ne  payera,  etc.  » 
(Ord.  T.  IX,  p.  45.) 

On  a  dit  d'une  personne  qui  avoit  appris  une 
langue,  qui  en  avoit  la  connoissance,  l'intelligence, 
qu'elle  «  étoit  de  cette  langue  par  aprise.  «  (Voyez 
ArpRÉiiENDRE.)  «  Encores  que  je  ne  soye,  par  nature, 
«  ou  par  apprise,  de  la  langue  d'Alemaigne;  si 
»  ay-j'enquis,  à  la  vérité,  de  ceste  généalogie,  le 
«  plus  qu'il  m'a  esté  possible.  »  (Méin.  d'Ol.  de  la 
Marche,  p.  12.  —  Voy.  Apprisure.) 

L'espèce  d'enquête  qu'un  Juge  faisoit  d'office 
pour  apprendre  la  vérité  d'un  fait,  étoit  une  apprise. 
(Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  apprisia,  col.  590 
et  591.  —  Lalirière,  Gloss.  du  Dr.  fr.)  L'Enquête  en 
général  différoit  de  Vapprise,  en  ce  que  Yapprise, 
qui  se  faisoit  d'office  et  sans  le  consentement  de 
celui  qu'on  soupçonnoit  d'être  coupable,  ne  portoit 
pas,  dit  Beaumanoir,  fin  de  querelle.  »  Quant  aucun 
«  est  pris  pour  soupechon  de  vilain  cas...  l'en  doit 
«  demander  à  cheli  qui  est  pris,  se  il  viout  atendre 

«  enqueste  dou  fet S'il  ne  veut  atendre  l'en- 

«  queste,  adonques  i  appartient  aprise;  che  esta 
«  dire  que  li  Juges  de  son  office  doit  aprenre  et 

«  enchercliier  dou  fet Mes  à  che  que  il  fust 

«  condempnés  i^  mort  par  Vaprise,  il  convient  bien 
«  que  li  fès  fust  sens  clers  par  plus  de  trois  tesmoins 
«  ou  de  quatre,  si  ([ue  li  jugement  ne  soit  pas  fait 
«  tant  seulement  par  l'aprise,  mes  pour  fet  notoire. 
«  La  différence  qui  est  entre  aprise  et  enqueste,  est 
«  tele  que  enqueste  porte  fin  de  querele,  et  aprise 
><  n'en  porte  point  :  car  aprise  ne  sert  fors  de  tant 
«  sans  plus  que  li  Juges  est  plus  sages  de  la  besoigne 


(1)  Les  deux  formes  apprentif  et  apprentis  ont  dû  être  contemporaines.  Dans  Berthe  aux  grans  pies  (vers  1),  on  trouve: 
«  Aprentif  jugleor  et  escrivain  marri  ;  »  et  dans  le  Livre  des  Métiers  d'Et.  Boileau,  du  xiir  siècle,  comme  le  poème 
précédent:  «  Il  peut  avoir  tant  d'apprentis  et  de  vallés  comme  il  li  plaist.  »  (Edition  Depping,  p.  18.)  Le  féminin  était 
a/j/j/(,')i/ife;  cet  archaïsme  est  encore  employé  par  quelques  personnes.  —  Voir  sur  l'uppre»*;,  YEssai  sur  l'organisation  de 
ioulustrie  à  Paris  aux  XIII'  et  XIV'  siècles,  art.  de  G.  Fagniez.  —  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Chartes,  1874  (p.  479  à. 
497).  (N.  E.) 


AP 


—  81  - 


«  quil  a  apme.  »  (Beaumanoir,  Coût,  de  Beau- 
VOisis,  chap.  XL,  p.  221.  _  Voy.  Ord.  T.  I,  p.  575  ) 
Dans  la  signification  d'entreprise,  ce  mot  aprise  (1) 
étoitlememe  qu'emprise.  »  Les  Zassons...  s'avan- 
«  turoyent  pour  gaigner,  par  bonne  façon  ;  voire 
«  jusques  h  gaigner  et  emmener  de  nos  gens.  De 
«  telles  petites  prises  et  aprises  firent...  sur  nostre 

«  compaignie Plusieurs    chevaux    et  4ns 

ml^r  d'ol*  ^I'^^m'""',"'  P^^'"  ^'^"^^^  emprises,  elc.  ! 

VARIANTES  : 


AP 


APRisîf  Ord^xT^n'.^'r'-  \=''-  ^H  ^ot^pprisia,  col.  590. 
Apri'kse.  Ord.  T   l5;  l%7  ''"""''■^'  '^'°^^-  *•"  ^r.  fr. 

Apprisure,  siibst.  fém.  Apprenlissa^-e  Ensei 
gnement,  instruction,  etc.  Coutume,  1  abii&^^^^^ 
APPREHE.NDRE  et  APR.soN.)  On  a  dit  au  premier  sens  :' 


■  •  Il  firent  leur  apresure 
U  armes,  sans  nule  mespresure. 

Pli.  Mouskes,  MS.  p.  823. 

Dans  le  second  sens,  une  histoire  à'apresnre 
étoit  une  histoire  où  Ton  pouvoit  s'inslru  re  une 
personne  de  bêle  «/.,ï'.«r/étoit  une  perso  ne  beii 

p.  ddj.  —  Ane.  Poet.  fr.  mss.  av.  1300,  T.  II,  p.  70G.) 

Amours  nélie  et  escure 

Le  cuer  k'éle  a  bien  saisi. 

Vaillant  le  fait  et  hardi; 

Est  de  courtoisie  apresure  ■ 

Biens,  sans  li,  n'est  fors  que  painture. 

Ane.  Poés.  fr.  MS.  du  Vatican,  n-  U90,  fol.  94,  R.. 

C'est  relativement  aux  effets  d'un  long  annren- 
tissage  et  d'une  instruction  continuelle,  me  le  S 
appnsure  paroît  avoir  signiHé  coutume. 'habituSe 

C'ert  moult  fort  cho.se  d'apresure  ■ 
Mes  nature  deust  pas.ser,  etc. 

Fahl.  MS    du  R.  n"  7-218,  fol.  225,  R-  col.  ). 
VARfANTFS  ' 

APPRISURE.  G.  Machaut,  Poës.  MSS.  fol  19  r»  col   1 
Apreseure.  Ph.  Mouskes  MS.  p  331  '         °'-  ^• 

Apreslre.  Vie  de  S'eThaysies,  MS.  deS.  chif.  xxvn,  col.  16. 

Approbation,  subsf.  fém.  Action  d'énrouver 
épreuve.  Action  de  prouver,  preuve    L'acceïïion' 

2Tr!uTl'',  •?'  ''  '"^^  appràation,  est  la  Sï 
que  ce  le  du  latin  appvobatio.  (Voy.  Àpprouvement  t 
Delà,  Il  aura  signifié,  1° l'action  d'ép  ouver,  e'Jreuve- 
«  b.  ne  vous  plaist  me  donner  cette  petite  S  S  on 
«  pour  m  approuver,  parce  que  de  telle  arnSSi 
M^rn'^T'^  '''■  "  ^^"""P''  '''  ''  niille  Dame, 

^nni.^  f *^i'-^"  ^^  prouver,  preuve,  comme  lorsau'en 
pariant  dune  action  qui  prouVoit  dé  H  hnnnn 
volonté,  on  disoit  qu'elle  éK  ,  unetiSS 
«  de  bonne  volonté.  »  (Du  Bellay,  Mém  Km  7 
«  Dame,  vous  direz  ce  qu'il  vous  plaira  mais  ' 
«  oncques  Monseigneur  Lancelot  ne  se  neS  de 
«  faire  ce  que  vous  luy  mettez  sus.  Il  a  bien  monshé 
«  àceste  assemblée,  ilist  la  Royne  •  doTt  sr^oy^e 

11 


j  moy  que  l'approbation  en  est  si  apparovssante    ,, 
(Lanc.  du  Lac,  T.  III,  fol.  121,  R»  col   1  ) 

Approfitement,  subst.  masc.  Action  de  mettrP 
a  prolit.  L'action  de  faire  valoir  une  cl  ose  L^  r  sn? 
ou  pour  quelqu'autre.  (Cotgrave  et  S  dTc 
\oy.  Approfiter.)  ci.  moui,  uict. — 

Approfiter,  verbe.  Mettre  à  profit,  faire  vilnir 
Mettre  en  état  de  profiter,  de  faire  valor^rofuér" 
Etre  profitable.  Ce  verbe,  composé  de  la  préposit  on 
«  reunie  au  verbe  simple  profiler,  signifioif  me  tre 
a  profil  une  chose,  la  faire  vn  ni  r  nnnr  =ni   ^       ^ 

pour  1  usage,  'Utilité  des  autres.  «  Les  cSnnlfestes 
"  faictes  sur  les  ennemis...  il  faut  amrS  Jl 
«^non  prodiguer,  ny  dissiper.  »  (S^Sseï SSr'ron^! 

En  cas  de  »  séquestre  estably  en  un  bénéficp 

*:  sS"/'  "  °.^*^''^"  ^"<^  "  "^  '-evenu  de  ce  bé,  éfice 
«  seroit  approfite  par  un  tiers,...  au  moven  ellZot 
«  qu'i  avoit  promis  faire  le  dit  rw;nS»iSf  la 
"  Z^'^-^T  et„P'?'Ception  des  fru:    s  au  SJe 

se  rendre  utile,  qu'rw^.o/?/^./,  Je  qu'un  éiTens 
sgnifioit  le  mettre  en  ét;.t  de  profitei' ,  le  mettre  en 

qL'on  lif  P,i;'^''^  ''  ^'"■«"  ''''  P«"'-  lui 'le  bien 
qu  on  lu  lait.  .  Seigneur,  quant  je  pense  en  mnv 
•■  en  quelz  ne  en  quanz  biens  tu  m'as  aproufité  II 

etc.  «  (Liiasse  de  Gaston  Phebus,  ms.  p.  387  1 
La  signification  active  de  ce  verbe  etoit  -ibsoinp 
lorsque  pour  désigner  une  personne  qupontou' 
qui  faisoit  qu'une  chose  fût  p.uir  ele  en  Til' 
rendant  utile,  on  disoit  qu'elle  appo/^ft  'VoStc? 
"  mes  euvres  ordene  à  ton  dou  x  plaisii   si  oue  l 

«  Que  aproup te  à  ta  charité,...  si  je  iS  en  mn 
PeuVÎi't-  "  (P'^^^sse  de  Gaston  Phébus,'  m  p'383 
Peut-être  qu  aproufier,  en  latin  proftcere  nW 
!  V."n.?r  d  «•■n^os-'iaphe  dans  le  Jassaîé  sùivLu 
«  Le  meilleur  médecine.  .  .  si  es  .  .  Tes  lessipr 
«  mengier  tout  quant  qu'iîz  voudront  ;  car  aud  S 

ibif?'VTfr^rf,i°"''''''""''«^^''''»/'^"'  ('^)'^ien.  '(id^ 
.,..    P-  r?''ù   ^*^'"^  conjecture  paroit  d'autant  n ki s 
vraisemblable,  qu'on  trouve  plusieurs  fois  'nVn  n 
graphe  aproitfiter  dans  le  même  o^TagS  "" 

VARIANTES  ' 
APPROFITER  Contes  de  Des  Périers,  T  I  p  151 
Aproufier.  Chasse  de  Gaston  Phébus   MS  n  105 
Aprûufiter.  Ibid.  p.  359,  383,  etc  ^' 

Ce'^'ol 'Tn^n^'l'n'**""''"^'.  '"*^^-  '««^^-  P>'Ovision. 
ce  mot,  forme  de  provende,  en  latin  prœbendu  par 


AP 


—  82  - 


AP 


contraction  de  prœhiheiula,  désigne  une  chose  que 
doit  avoir  d'avance,  ou  par  provision,  celui  à  qui  on 
la  donne.  <•  Au  regard  de  Vapprouvandeynent...  pour 
a  la  plaine  affolure,  lequel  avoit  esté  limité  à  huict 
«  muids  de  bled,  etc.  "  (Coutumes  de  Hainaull,  au 
nouv.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  59.  —  Voy.  Provende.) 

V.4R1A.NTES  : 
APPROUVANDEMENT.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  à  Provenda. 
Aprovandement.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  784. 

Approuve,  subst.  fém.  Epreuve.  Preuve.  Il 
semble  que  dans  un  sens  relatif  à  celui  du  verbe 
approuver,  éprouver,  l'on  ait  dit  en  parlant  d'un 
Prélat  en  général  : 

Les  bons  et  les  maulvais  sont  dessoulz  tes  approuves  : 
Qui  scet  ou  qui  ne  scet,  t'appartient  que  tu  preuves  (1). 

J.de  Meun,  Codicile,  vers  593-595. 

Peut-être  la  rime  exige-t-elle  que  dans  ces  vers 
on  lise  appreuve,  comme  dans  le  passage  suivant 
où  ce  mot  signiiie  preuve.  «  Hercules  en  faisant  ses 
«  voyages...  passa  par  le  pays  que  l'on  nomme  à 
«  présent  Bourgongne,  et  y  prit  en  mariage...  l'une 
«  de  ses  femmes  nommée  Alise  ; ....  et. ..  de  ceste 
«  Alise  il  eut  génération,  dont  sont...  yssus  les  pre- 
«  miers  Roys  de  Bourgongne  :  et  pour  appreuve, 
«  vous  trouverez  au  Duché  de  Bourgongne,...  appa- 
«  rence  d'une  cité  ou  ville  qui  se  nommoit  Alise.  » 
(Mém.  d'Ol.  de  la  Marche,  p.  21.  —  Voy.  Approuver.) 

VARIANTES  : 
APPROUVE.  J.  de  Meun,  Codicile,  vers  593. 
Appreuve.  Mém.  d'OI.  de  la  Marche,  p.  22. 

Approuvement ,  subst.  maso.  Appi'obation. 
(Cotgrave,  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict.  — 
Voy.  Approuver.) 

Approuvender,  verbe.  Approvisionner.  (Voy. 
Approuvanuement.)  Signification  relative  à  celle  du 
substantif  approuvandeincnt,  formé  de  provende. 
On  a  dit  figurément  : 

.   .  .  Carités  qui  en  tous  lieus 
Est  grandement  recommendée, 
Garnie  est  et  ap}irouvc)idée 
De  largèce,  sans  nul  dangier. 

Froissaii,  Poès.  MSS.  p.  42,  col.  2. 

Approuver,  verbe.  Eprouver.  Prouver.  L'ac- 
ception encore  usitée  du  verbe  approuver,  est  la 
même  que  celle  du  lalin  approbare.  Martinius  la 
présente  comme  acception  primitive  du  verbe  sim- 
ple latin  probare,  qui  par  une  espèce  de  métonymie 
signifioit  éprouver.  (Voy.  Aprob.)  C'étoit  aussi  la 
signification  du  verbe  françois  composé  approuver. 
<■  Aucune  fois  Dieu  afflige  les  humains  pour  les 
«  approuver;  sgavoir  est  les  bons,  comme  Job  et 
«  Tobie.  »  (Triomphes  de  la  noble  Dame,  fol.  277.) 
«  Nous  qui  de  voslre  loial  et  approviée  diligence 
«  nous  fions,  etc.  »  (Ord.  T.  I,  p.  528,  notes,  col.  2.) 

Mais  de  moult  lointains  seigneurages, 
Par  fiez  tenir  et  par  hommages, 
Grant  honneur  aprovoil. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  »,R'. 

Dans  le  sens  de  prouver,  en  latin  probare,  on 


disoit  :  «  Je  vous  prometz  que  c'est  le  Chevalier  à 
«  l'aigle  d'or  ;  et  ce  vous  appreuve-je  par  son  escu.  ^ 
(Percef.  Vol.  111,  fol.  19.)  "  Pour  vous  approuver  et 
<"  justifier  leurs  faicts,  etc.  »  (Du  Bellay,  Mém.  Liv. 
VI,  fol.  178,  R°.  —  Voy.  Prouver.). 

variantes  : 
APPROUVER.  Orth.  subs.  -  G.  de  RoussUlon,  MS.  p.  188. 
Appkeuver.  Percef.  Vol.  III,  fol.  19,  R°  col.  1. 
Approer.  Ord.  T.  III,  p.  578. 
Approvier.  Ord.  T.  I,  p.  528,  notes,  col.  2. 
Aprover.  g.  Guiart,  MS.  fol.  11,  R». 
Aprovier.  Ane.  Poët.  Ir.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  16CQ. 
Aphouver.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  236,  V». 
Apruever.  Fabl.  M.  du  R.  n»  7615,  T.  II,  fol.  127,  V»  col.  1. 

Appuy,  subst.  masc.  Appui,  accoudoir,  dos- 
sier, etc.  Dans  le  sens  étymologique  (2),  chose  sur 
laquelle  on  pose  les  pieds  afin  de  se  soutenir  :  par 
extension,  chose  sur  laquelle  on  pose  la  main ,  le 
coude  ;  chose  contre  laquelle  on  pose  le  dos  :  en 
général,  soutien,  tant  au  propre  qu'au  figuré.  (Voy. 
Appuyer.)  U  semble  qu'un  banc  sans  appois,  dans 
les  Honneurs  de  la  Cour,  ms.  p.  54,  est  un  banc  sans 
accoudoirs  et  sans  dossier.  On  conçoit  que  les 
explications  de  ce  mot  appuy  pourroient  être  aussi 
variées  que  le  sont  les  noms  par  lesquels  on  spé- 
cifie, 1°  les  choses  propres  à  soutenir  différentes 
parties  du  corps,  les  choses  propres  à  soutenir  les 
personnes,  comme  un  balcon,  un  garde-fou,  une 
balustrade,  etc.  2°  les  choses  propres  à  en  soutenir 
d'autres,  comme  une  étaye,  un  étançou,  etc.  (Voy. 
Appuyal  et  Appuyé.) 

variantes  : 

APPUY.  Cotgrave,  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict. 

Appoi.  Honneurs  de  la  Cour,  MS.  p.  54. 

Appuyai,  subst.  masc.  Appui,  balcon,  che- 
ville, etc.  (Voy.  Appuy.)  Ce  mot  appuyai,  de  même 
origine  qu'appuy,  signifioit  soutien  en  général  ;  en 
particulier  un  balcon  pour  s'appuyer,  se  soutenir: 
«  Firent  les  deux  Roys  loges  dresser  emmy  les 
«  prez,  où  il  y  avoit  fenestres  et  appuyaulx  aux 
u  Dames  et  aux  Damoiselles.  »  (Lanc.  du  Lac,  T.  II, 
fol.  82,  V°  col.  2.) 

Une  cheville,  ou  autre  chose  propre  à  fermer  une 
porte,  à  l'appuyer,  à  la  soutenir  contre  l'effort  de 
quiconque  voudroit  l'ouvrir.  «  La  porte...  n'est 
«  fermée,  ne  à  poste,  ne  ti  barre,  ne  à  nul  appoyal, 
«  sinon  à  gons  où  elle  est  sellée.  »  (Lanc.  du  Lac, 
T.  I,  fol.  147,  R-col.  1. 

Au  figuré,  la  signification  à'appuyal  étoit  la  même 
que  celle  de  notre  mot  appui,  soutien.   «  Loys^ 
«  Monseigneur  de  Luxembourg,...  appuyai  du  peu- 
«  pie,  le  parement  de  Court  ell'onneur  du  royaume 
ic  de  France.  »  (J.  d'Auton,  Annal,  de  Louis  XII, 
MSS.  an.  1503-1505,  p.  93.) 
Vile  roiaus  des  Cités, 
Se  tes  appoia7(s 
Fust  vrais  et  loiaus,  etc. 

Ane.  PoOt.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1301. 

VARIANTES  : 
APPUYAL.  Lanc.  du  Lac,  T.  II.  fol.  82,  V°  col.  2. 
Apoial.  D.  Carp.  s.  Gl.  lat.  deD.  C.  d.\imot  Apodiamentum. 


(1)  Tu  éprouves,  tu  juges  à  l'épreuve.  -  (2)  De  ad  et  podium,  pui,  élévation,  colline.  (N.  E.) 


J 


AP 


-  83 


AP 


Apoyal.  Lanc.  du  Lac,  T.  I,  fol.  147,  R°  col.  1. 
Appoiau.  Ane.  Poët.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1?01. 
Appu.^il.  Al.  Chartier,  de  l'Espérance,  p.  285. 

Appuyé,  subst.  fém.  Appui,  galerie  à  balcon, 
balustrade,  accoudoir,  etc.  Dans  la  signification 
particulière  de  galerie  à  balcon,  balustrade,  le  mot 
appuije  étoit  le  même  qu'appuy,  galerie  et  saillie 
sur  quoi  on  s'apptiije  pour  regarder  hors  la  maison. 
(Voy.  Cotgrave  et  Nicot,  Dict.) 

L'acception  à'appoiée,  accoudoir,  est  relative  à 
eelle  d'appoi.  «  Deux  pommeaulx  des  appâtées  du 
«  dit  siège  despiciés  par  moittié,  etc.  »  (D.  Carpen- 
tier,  uht  supra.  —  Voy.  Appuy  et  Appuyelle.) 

VARIANTES  : 
APPUYE.  Cotgrave  et  Nicot,  Dict. 
Appoiée.  D.  Carp.  s.  Gl.  1.  de  D.  C.  au  mot  Appodiatorium. 

Appuyelle,  suhst.  (ém.  Appui,  garde-fou. 
Espèce  de  parapet,  ou  de  barrière  sur  laquelle  on 
s'appuie  pour  ne  pas  tomber  en  passant  sur  un 
pont,  sur  une  chaussée,  etc.  «  Les  Eschevins  ont 
«  connoissance  du  fait  des  cauchies,  plaucques  et 

«  appuielles,  et  es  chemins; les  dits  chemins, 

«  plancques  et  appuielles  et  cauchies,  etc.  »  (Coût. 
de  Richebourg,  au  nouv.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  392, 
coL  2.)  On  trouve  appuy  avec  la  même  signification 
particulière,  dans  la  Coût,  de  Ham.  (Ibid,  p.  381, 
col.  1.  —  Voy.  Appuy.) 

VARIANTES    : 
APPUYELLE.  Coût,  de  Lessines,  au  n.  C.  g.  T.  II,  p.  214. 
Appuielle.  Coût,  de  Ricjiebourg,  ibid.  T.  I,  p.  392,  col.  1. 

Appuyer,  verbe.  Soutenir,  se  soutenir,  s'accou- 
der, s'adosser,  s'asseoir.  Poser,  mettre,  arrêter, 
assurer,  établir,  confirmer.  Frapper,  presser,  fouler, 
renverser.  Opposer.  On  sait  que  du  mot  grec  noiç, 
noâôç,  pes,  pedis  en  latin,  s'est  formé  nifioy  en  grec, 
en  latin  podium  (4);  d'où  le  verbe  latin-barbare  ap- 
podiare,  en  françois  appuyer.  C'est  peut-être  à  l'idée 
de  pied,  partie  du  corps  sur  laquelle  on  est  stable, 
sur  laquelle  on  se  soutient,  on  s'atïermit  et  s'élève, 
que  sont  relatives  les  acceptions  des  substantifs /;«;/ 
et  appuy,  aussi  bien  que  celles  du  verbe  appuyer, 
&' appuyer  ;  proprement  se  soutenir,  s'affermir  sur 
les  pieds,  être  stable,  poser  les  pieds,  se  soutenir, 
s'affermir  en  posant  les  pieds  sur  une  chose  qui  ail 
de  la  stabilité.  Il  semble  du  moins  que  dans  un 
sens  analogue  aux  significations  indiquées,  l'on  ait 
dit  :  «  Ne  n'en  atroverons  mies  trop  estroite  la  sente 
«  del  pont. . .  De  trois  tisons  (2)  est  faite  celte  sente  (3), 
«  por  ceu  ke  li  piet  de  ceos  ki  à  lei  se  verront  apoier, 
«  ne  puist  glacier  (4)  en  la  voie.  »  (S' Bernard,  Serm. 
fr.  MSS.  p.  340  (5).) 

A  un  tertre  monter  s'appuie. 

Desoz  ert  la  valée  fière  ; 

Parmi  coroit  une  rivière. 

Blanchandin,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  176,  R"  col.  2. 

En  comparant  à  cette  façon  naturelle  de  se  soute- 


nir sur  les  pieds,  de  se  soutenir  en  posant  les  pieds 
sur  quelque  chose,  toute  autre  fa(;on  de  se  soutenir 
sur  différentes  parties  du  corps  ;  de  se  soutenir  en 
posant  la  main  sur  un  bâton,  le  coude  sur  une 
fenêtre,  le  dos  contre  une  porte,  en  s'asseyant  sur 
un  fauteuil,  en  posant  partie  du  corps  ou  le  corps 
entier  sur  une  chose  qui  le  soutienne,  on  aura  dit 
par  extension  :  «  s'appuyer  ou  s'espuyer  du  genoil, 
"  de  la  main,  du  côté,  etc.  s'appuyer  d'un  bâton  ou 
«  sur  un  bâton,  s'appuiier  à  une  fenêtre,  s'appuyer 
«  à  un  huis,  sur  un  faudestuel,  h  un  banc,  etc.  Le 
«  suppliant  cuida  tumber  h  terre,  et  lui  convint 
«  sojj  espuyer  d'un  genoil  et  d'une  main  à  terre.  » 
(D.  Carpenlier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au 
mot  apodiare;  Tit.  de  1480.)  «  Se  assist  emmi  le 
«  chemin,  en  soy  espuyant  du  costé  à  terre.  »  (Id. 
ibid.  Tit.  de  1.381.)  «  As-tu  espérance  en  cez  de 
«  Egypte  ki  sont  eu  me  baston  de  rosel  pesceed  (6)  sur 
«  qui  si  l'um,  se  apuied,  tost  falsed  e  depiesced  (7.)  » 
(Livres  des  Rois,  ms.  des  Cordel.  fol.  144,  V°  col.  1.) 

.  .  .  Vos  resemblez  le  gaignon  (8) 
Qui  se  venge  en  abaiant  ; 
Pour  ce  avez  mors  en  mon  baston 
De  quoi  je  m'aloie  apuant. 

Ane.  Poft.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  476. 

Quoique  appuyer  signifie  encore  soutenir,  on  ne 
diroit  plus  «  appuyer  ses  memhves  »  dans  le  sens 
du  verbe  réciproque  s'appuyer. 

Faulx-semt)lant  qui  bien  se  retourne,... 
Après  s'en  va  sans  Esouyer  ; 
Et  pour  les  membres  apuijer. 
Eut,  ainsi  que  par  impotance, 
De  trahison  une  potance 

Rom.  de  la  Rose,  vers  12815-12819. 

Sans  désigner  la  chose  sur  laquelle  un  soldat 
blessé,  par  exemple,  se  soutenoit  pour  fuir  dans 
une  déroute  générale,  on  disoit  qu'il  s'en  alloit 
apurant,  à  la  différence  de  celui  qui  n'étant  point 
blessé,  s'en  alloit  droit. 

S'en  vont  l'un  droit,  l'autre  upuiant, 
Le  plustost  qu'il  pevent  fuiant. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  256,  V'. 

Il  paroit  que  la  signification  de  s'appuyer  est 
s'accouder  dans  le  passage  suivant  :  «  La  Damoy- 
«  selle  se  leva  sus,  délaissant  Liziart  s'apoyant  à  la 
«  fenestre,  la  main  à  la  maiselle(9).  »  (Ger.de 
Nevers,  Part.  I,  p.  16.) 

Probablement  s'adosser,  dans  ces  vers  : 

Hersent  qui  n'estoit  mie  loins, 
Qui  n'est  encore  réconcilié, 
S'estoit  à  un  huis  apoié. 

FM.  MS.  du  R.  n"  7218,  fol.  U6,  R"  col.  1. 

Enfin,  s'asseoir,  dans  ces  autres  vers  : 

....  Diex  vos  gart,  Sire  Prévost  ; 
Venez  vos  apoier  lez  moi. 
Cil  respont,  Dame  je  l'otroi. 
Desor  un  faudestuel  vermeil 
S'apoiereiit,  en  un  conseil. 

Blanchandin,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  180.  R»  col.  2. 


(1)  Le  podium  était  un  soubassement  peu  élevé  et  formant  marche  le  long  du  mur  d'une  chambre  ou  d'un  bâtiment.  Dans 
l'amphithéâtre,  ce  soubassement  était  élevé  de  dix-huit  pieds  au-dessus  de  l'arène  ;  on  y  plaçait  les  chaises  d'ivoire  (selles 
cwules)  de  l'empereur,  des  magistrats  curules,  des  vestales.  Enfm,  en  architecture,  c'était  un  socle,  une  console,  (n.  e.)  — 
(2)  poutres,  pieux.  —  (3)  tablier  du  pont.  —  (4)  aUsser.  —  (5)  Edition  Le  Roux  de  Lincy,  Paris,  18il,  à  la  suite  du  Livre  des 
ilois.  (N.  E.)  -  (6) fait  de  pièces,  (n.  e.)  —  (,7)  se  désagrège,  se  dépèce,  se  rompt,  (n.  e.)  —  (8)  chien.  —  (9)  ,Toue  ;  en  latin  maxilla. 


AP 


—  84  — 


AP 


Et  Tristan  à  un  banc  s'apow. 

Fabl.  MS.  dj  Berne,  n-  354,  fol.  154,  R*  col.  i. 

C'est  sans  doute  relativement  à  l'idée  de  poser  le 
pied  ou  quelinie  autre  partie  du  corps  sur  une 
chose  qui  soutienne,  iiu'aiipuyer  une  chose  à  une 
autre,  une  chose  sur  une  autre,  a  signifié  et  signifie 
encore  donner  du  pied  îi  cette  chose,  l'affermir,  la 
poser,  la  mettre  de  façon  qu'elle  soit  ferme  et 
stable,  de  façon  qu'elle  soit  soutenue  par  la  chose 
sur  ou  contre  laquelle  elle  est  mise,  elle  est  posée. 
(Voy.  Appuy.) 

Je  montai  sans  lui  dire  mot, 
Qu'il  ne  me  sorprist  à  pié  ; 
Et  pris  en  ma  main  mon  espié 
Qu'à  un  pin  apoié  avoie. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'  7615,  T.  II,  fol.  187,  R-  col.  2. 

Mes  aiisi  pense  apoier 
L'espié  à  une  roche  bise,  etc. 

Ibid.  fol.  187,  V  col.  1 

Puis  a  un  rasor  desploié  ; 
Si  l'a  sor  l'anclume  apoié. 

Fabl  MS.  de  Berne,  n'  354,  fol.  l.'.S,  V-  col.  2. 

Dans  un  sens  analogue  à  l'idée  d'une  position 
ferme  et  stable,  par  conséquent  sûre,  le  verbe  ap- 
puyer ou  s'appuyer  aura  signifié  s'arrêter  en  sûreté 
dans  un  lieu,  s'y  mettre  en  sûreté  : 

Mordret  s'enfuit  toute  la  nuit, 
Quérant  rechet  où  il  s'apuit. 

Rom.  de  Brul,  MS.  fol.  100,  R"  col.  2. 

Au  figuré,  s'arrêter  à  une  personne,  à  une  chose, 
s'assurer  en  cette  personne,  en  celte  chose,  y  met- 
tre sa  confiance. 

Fox  est  qui  va  veoir  s'amie, 
S'il  y  moine  tel  compaignie 
Où  ne  se  doie  moult  fier  ; 
On  ne  set  à  cui  apuier. 

Athis,  MS.  fol.  11,  V  col.  1. 

.  .  .  Raempliz  de  couardise 
Où  leur  flo  se  va  apuiciiit. 
S'en  revont  vers  Furnes  fuiant. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  241,  V-. 

.  .  .  Qu'aucune  à  ce  ne  s'apuie 
Que  sa  net  guerpisse  et  s'enfuie. 

Id.  fol.  312,  R'. 

...  Cil  qui  par  son  sens  se  set  bien  avoier, 
Ne  doit  son  bon  conseil  por  autrui  sens  lessier, 
Se  on  ne  le  puet  fère  à  meillor  apoier. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7218,  fol.  335,  R"  col.  2. 

En  termes  de  procédure,  s'appuyer  à  droit,  s'ap- 
puijer  à  jugement  on  en  jugement,  c'étoit  établir 
en  droit  une  question,  établir  une  demande,  la 
soutenir  en  droit,  la  soutenir,  fétablir  en  justice. 
«  Un  Chevalier  qui  avoit  à  plaidier  ...  se  fistesso- 
«  nier  ;  et  chil  qui  avoient  à  lui  à  faire  .  .  .  s'apue- 
«  rent  à  droit,  savoir  mon  se  il  povoit  fère  en  la 
«  manière  dessusdite.  »  (Beaumanoir,  Coût,  de 
Beauvoisis,  chap.  m,  p.  27.)  <■  Toutes  resons  .  .  . 
«  doivent  estre  mises  avant  que  li  jugement  soit 
»  enchargiés:  car  puisque  chil  qui  doivent  fère  le 
«  jugement  ont  les  paroles  receues  des  Parties ,  et 
"  ils  se  sont  apuié  à  droit,  ils  n'i  pueenl  ne  mètre 
«  ne  ester.  •>  (Id.  ibid.  chap.  vu,  page  45.)  «  Leurs 
«  resons  oies  et  apuiées  en  jugement,  nous  disons 
«  par  droit,  etc.  »  (Id.  ibid.  chap.  lxvii,  page  343.) 
«  Quant  l'en  rent  jugement,  il  n'est  pas  resons  de 


«  tout  recorder  che  qui  fu  proposé  des  deux  Par- 
«  ties,  sur  quoi  il  s'apuièrent  à  jugement.  «  (Id.  ibid.) 

C'est  encore  relativement  fi  l'idée  de  rendre  ferme 
et  stable,  qu'appuyer  siguifioit  confirmer.  «  Ordon- 
"  nous  et  commandons  en  appuiaiit  et  ratifiant 
<■  ladite  Ordonnance,  etc.  »  (Ord.  T.  I,  p.  580  et  581.) 

L'origine  de  ces  significations  étant  ainsi  expli- 
quée, il  est  aisé  de  saisir  l'analogie  des  significa- 
tions actuelles  du  verbe  appuyer  avec  les  anciennes. 
Quoiqu'il  désigne  encore  aujourd'hui  l'action  de 
peser  sur  un  corps,  en  posant  les  pieds  dessus,  par 
extension  les  mains,  les  poings,  etc.  faction  de  le 
presser,  de  le  fouler  en  tombant  dessus,  en  le  char- 
geant, en  le  frappant,  etc.  on  ne  diroit  plus  : 

Lor  dona  tex  cox  des  basions 
Qui  s'aponicnl  des  moignons. 

Fabl.  MS.  de  Berne  n"  354,  fol.  155,  V'  col.  2. 

Il  semble  que  la  signification  de  espoier,  est, 
presser,  fouler,  renverser,  dans  les  vers  suivans  : 

.  .  .  Guide  bien  que  nostre  guerre 
Fausist,  quant  le  Mor  vi  à  pié  ;        ' 
Car  je  le  voil  de  mon  espié 
Encontre  la  terre  espoier. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7615,  T.  II,  fol  187.  V  col.  1. 

Enfin,  s'appuyer  ù  une  bataille,  c'étoit  s'y  oppo- 
ser en  la  pressant,  en  la  chargeant,  en  tombant  sur 
elle,  les  armes  à  la  main. 

Di.x  batailles  à  trois  s'apoient  ; 
N'est  merveille  s'elles  s'ennoient. 

Athis,  MS.  fol.  73,  Vcol.  1. 

CONJUG. 

Apuied{s'),  ind.  prés.  S'appuie.  (Livres  des  Rois.) 
Apuiout{s'),  ind.  imp.  S'appuyoit.  (Ibid.  fol.  41.) 
Apuit  (s'),  subj.  pr.  S'arrête,  se  mette  en  sûreté. 
(Rom.  de  Brut,  ms.  fol.  100,  R°  col.  2.) 

VARIANTES  : 
APPUYER.  Orth.  subsist.  -  Lanc.  du  lac,  T.  II,  fol.  108. 
Ap.uer  (peut-êlre  Apoiier.)  .\nc.  Poët.  fr.  T.  III,  p.  1059. 
Apeuer.  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7989,  fol.  67,  V»  col.  1. 
Apoier.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  IISS.  p.  320,  347,  etc. 
Apoiier.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7989,  fol.  77,  V»  col.  2. 
Apooier  Fabl.  MS.  de  Berne,  n^  354,  fol.  155,  'V"  col.  2. 
Apoyer.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MS.  p.  104. 
Apouyer.  Chasse  de  Gaston  Phébus,  MS.  p.  202. 
Appoier.  Gloss.  du  P.  Labbe,  p.  488. 
Appouieu.  Miserere  du  Recl.  de  Moliens,  MS.  de  G.  fol.  209. 
Appuier.  Ord.  T.  I,  p.  581. 

AruER.  Ane.  Poët.  fr.  MSS.  avant  4300,  T.  I,  p.  476. 
Apuier.  Ane.  Poët.  fr.  MS.  avant  1300,  T.  I,  p.  429. 
Apuyer.  Rom.  de  la  Rose,  vers  12817. 
Espoier.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  T.  II,  fol.  187,  V»  col.  1. 
ESPUER.  D.  Carpentier,  s.  Gl.  1.  de  D.  C.  au  mot  .ipodiare. 
ESPUIER.  Id.  ibid.  Tit.  de  1381. 
EsPUYER.  Id.  ibid.  Tit.  de  1480. 

Aprenement,  subst.  inasc.  Enseignement, 
leçon.  (Voy.  Apprenture.)  Signification  relative  à 
celle  du  verbe  apprendre,  enseigner,  etc.  Il  semble 
que  dans  les  saisons  du  printemps  et  de  l'été,  le 
spectacle  de  la  Nature  renaissante  et  féconde  soit 
pour  l'homme  une  leçon  d'aimer.  De  là  ,  on  aura 
dit: 

Ver  est  plus  dous  et  plus  temprés  ; 

Près  son  parant  il  et  Estex... 

D'amor  donnent  aprenement. 

Athis,  MS.  fol.  38,  Vcol.  1. 

Après,  part,  et  prép.  Opprimé.  Adjoint,  associé. 
Près,  auprès.  Après,  secondement,  d'après.  Il  esfc 


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AP 


possible  que  comme  on  écrivoit  apus  pour  apusé, 
participe  du  verbe  apiiser,  le  même  qu'aposer  ci- 
dessus,  appens  pour  appen&é ,  etc.  l'on  ait  écrit 
après  pour  apressé  et  pour  apressée  ,  apresse.  Ou 
trouve  en  effet  (\uapprcsse  est  une  abréviation  du 
participe  féminin  appressée  ,  opprimée ,  dans  ces 
vers  où  l'on  a  dit,  en  parlant  de  Sextus  Tarquin  ; 

S'efforça  tant 

Qu'il  print  Lucresse. 

Quand  l'eut  oppresse, 

Tost  fust  Maîtresse 
'Vengeance,  que  Tarquin  le  Grand 
Chassa  de  Rome  en  telle  presse,  etc. 

Blason  des  Faulces  amours,  p.  252. 

Ce  participe  féminin  oppresse  suppose  le  mascu- 
lin apprès.  Aussi  croit-on  qu'après  est  un  participe 
employé  comme  substantif,  lorsque  dans  un  sens 
analogue  à  celui  du  verbe  oppresser,  suivre  de 
près,  suivre,  la  Prudence  personnifiée  nomme  son 
flyw'cs,  c'est-à-dire,  son  adjoint,  son  associé,  un 
Poète  qui  en  suivant  son  parti  et  ses  avis,  s'associe 
et  se  joint  à  elle  pour  l'exécution  de  ses  desseins. 

J'apperceu  tost  approcher  celle  Daine... 
Elle  sentoit  meilleur  que  nul  ciprés. 
Sa  doulce  bouche,  quant  de  moi  fut  auprès, 
Pour  me  parler  ouvrit  si  doulcement, 
Disant  ainsi  :  mon  amy,  mon  après,  etc. 

Nef  des  Dames,  prolog.  fol.  2V",  et  3  R'. 

Peut-êtie  faut-il  chercher  dans  le  latin  pressum, 
l'origine  des  prépositions  près  et  après ,  en  Italien 
pressa  et  oppressa  ?  On  a  pu  se  figurer  comme 
pressées  ou  pressant  les  unes  sur  les  autres ,  les 
personnes  et  les  choses  entre  lesquelles  il  y  a  pro- 
ximité, suite,  ordre  successif  dans  un  espace  de 
lieu  ou  de  temps  ;  faire  abstraction  de  cette  idée  de 
presse  spécialement  exprimée  par  les  participes 
j:;m  et  «/jct's  ;  prendre  ces  mêmes  participes  dans 
un  sens  absolu,  et  les  employer  comme  préposi- 
tions, pour  désigner  les  idées  générales  de  proxi- 
mité, de  suite,  d'ordre  successif,  lors  même  que 
cette  proximité,  cette  suite,  cetordresuccessif  n'oc- 
casionnoientaucunejuressc.  Telle  pourroit  être  l'ori- 
gine des  prépositions  près  et  après,  très-anciennes 
dans  notre  langue  (1).  Quant  à  la  préposition  auprès, 
elle  paroit  formée  de  la  préposition  à  et  de  l'article 
/(?  confondus  ensemble,  et  réunis  à  la  préposition 
simple  près.  (Voy.  Aui'Rés.) 

Anciennement,  la  préposition  après,  qui  dans 
l'usage  actuel  ne  désigne  plus  que  l'idée  générale 
de  suite,  d"ordre  successif,  désignoit  aussi  l'idée 
générale  de  proximité,  comme  les  prépositions, 
simple  et  composée,  après,  auprès.  «  Oza  estendid 
«  sa  main  vers  l'Arche  .  .  .  e  nostre  Sire  s'en  cure- 
«  chad  vers  Ozam  ...  e  il  chaid  morz  en  la  place 
«  «jB?'('S  l'Arche  Nostre  Seigneur.  »  (Livres  des  Rois, 
Ms.  des  Cordel.  fol.  47.)  «  Conchioient  tôt  co  qui 
«  estoit  après  del  Temple.  »  (Ibid.  fol.  177.) 

.  .  .  D'eus  onbraier  (2)  après  pin 
N'ont  pas,  ce  dit-on,  tel  courage, 
Comme  d'être  de  guerre  sage. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  344,  R". 


C'est  relativement  à  l'idée  générale  de  suite, 
poursuite,  qu'exprime  encore  la  préposition  après, 
qu'on  a  dit,  soit  au  propre,  soit  au  figuré  :  1°  «  Etre 
«  rt//r(^"s  une  personne,  «  poursuivre  une  personne, 
la  presser  d'agir  ;  «  être  après  une  chose,  »  pour 
suivre  une  chose,  la  poursuivre,  en  presser  l'exé- 
cution, l'accomplissement,  etc. 

2°  «  Quérir,  chercher,  courir  «jun's  une  personne 
«  ou  après  une  chose,  »  pour  se  mettre  à  la  suite 
de  cette  personne,  de  cette  cliose;  être  pressé  de 
voir  la  personne,  de  la  joindre,  être  pressé  de  trou- 
ver la  chose,  de  l'obtenir,  en  cherchant,  courant, 
désirant,  etc. 

3°  «  Crier  après  une  personne  ou  après  une 
«  chose,  »  pour  être  à  la  suite  de  cette  personne, 
de  cette  chose  ;  les  suivre,  les  poursuivre  en  criant, 
presser  par  des  cris  la  volonté,  l'action  de  la  per- 
sonne, l'acquisition,  la  jouissance  de  la  chose. 

4»  »  Demander  après  une  personne  ou  après  une 
"  chose,  "  pour  se  mettre  à  la  suite  de  cette  per- 
sonne, de  cette  chose;  être  pressé  de  rencontrer  la 
personne,  la  chose  qu'on  demande,  presser  par  sa 
demande  l'instant  do  les  rencontrer. 

5°  "  Enfin,  dans  l'expression  «  dépenser  après 
«  une  personne  ou  après  une  chose,  »  la  préposi- 
tion après  peut  signifier  la  suite  d'un  projet,  d'un 
dessein  relatif  à  la  personne  ou  à  la  chose  pour 
laquelle  on  dépense  :  l'empressement  de  voir  arri- 
ver la  personne,  de  voir  se  réaliser  la  chose  qu'on 
attend,  dans  cette  autre  expression  «  allendve  après 
«  une  personne  ou  après  une  chose.  «  Quelques 
citations  prouveront  que  l'usage  de  la  préposition 
après  n'a  point  ou  presque  point  varié  depuis 
qu'elle  existe.  «  Il  délibéra  qu'il  demanderoit  .  .  . 
«  «Tjj't'sleChaslel.  »  (Percef.  Vol.  VT,  fol.  .52.)  «  Criad 
«  Jonathas  après  le  vadlet  ;  vien  hastivement.  » 
(Livres  des  Rois,  ms.  des  Cordel.  fol.  28.)  «  Estoit  là 
«  Monsieur  de  Sedan  cherchant  après  ses  enfans; 
»  lequel  les  trouva  en  très-mauvais  ordre.  »  (Mém. 
de  Rob.  delà  Marck,  Seigneur  de  Fleuranges,  ms. 
p.  184.)  '<  Nos  avons  jai  atroveit  trois  fontaines  ;  or 
«  quarons  ajsm  la  quarte.  «  (S'  Bern.  Serm.  fr. 
Mss.  page  130.) 

Plus  on  réfléchit,  plus  on  croit  voir  que  les  signi- 
fications d'après,  quelque  variées  qu'elles  puissent 
être,  sont  toutes  relatives  à  l'idée  de  suivre,  presser 
en  suivant,  en  approchant  ;  idée  analogue  à  celle 
de  succéder  et  qui  n'est  pourtant  pas  tout-à-fait  la 
même,  par  la  raison  qu'on  ne  succède  pas  toujours 
à  ce  qu'on  approclie,  à  ce  qu'on  suit.  On  désigne 
donc  l'idée  générale  d'ordre  successif,  plus  spécia- 
lement que  celles  de  suite  et  de  proximité,  lorsque 
dans  le  sens  propre  ou  figuré,  l'on  dit  encore, 
comme  autrefois,  qu'une  personne  naît ,  se  place , 
marche,  agit,  parle  après  une  autre  ;  qu'une  chose 
existe,  qu'elle  a  lieu,  qu'elle  se  passe,  qu'elle  se  fait 
après  une  autre,  etc.  «  Adonias  .  .  .  fud  li  secundz 
I  des  fiz  le  Rei,  après  Absalon.  »  (Livres  des  Rois,  ms. 


(1)  Dans  la  Chanson  de  Roland,  on  trouve,  vers  1160  :  «  Sun  cumpaignun,  après,  le  vait  sivant.  »  (n.  e.)  —  (2)  se  tenir 
à  l'ombre. 


AP 


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AP 


des  CoPflel.  fol.  77.)  «  Micliiaus  li  Empereres  de 
«  Coiistaalinoble  .  .  .  l'Empire  laissa,  etpuis  devint 
«  Moines.  ii;;ms  li  reçut  la  dignité  de  TEmpire, 
<»  Leons  qui  fu  filz  Bardele  palricho.  »  (Chron.  S' 
Denys,  Rec.  des  llist.  de  Fr.  T.  V,  p.  262.)  -<  Premie- 
«  rement,  se  les  maisons  sont  faites  d'avoir  qui 
«  malement  sont  gaainés  ;  apré ,  s'on  les  aimme 
«  miex  ke  ces  coses  qui  ja  n'auront  fin,  etc.  >>  (Lu- 
cidaires,  .ms.  du  R.  n°  7989,  fol.  22C.)  On  borne  à  ce 
dernier  passage  où  apré,  le  même  qn'après,  est  mis 
pour  secondement,  la  preuve  qu'anciennement  la 
préposition  après  signifioil  comme  à  présent  une 
idée  générale  d'ordre  successif  entre  les  personnes 
et  les  choses.  Cet  ordre  successif  n'étoit  indiqué 
que  par  le  sens  de  la  phrase,  toutes  les  fois  qu'en 
supprimant  après,  plusieurs  Ecrivains  des  xv  et 
xvr  siècles  se  servoient  des  façons  de  parler  suivan- 
tes ou  d'autres  semblables.  «  Eux  avoir  pris  leur 
«  lieu,  Messire  .Jaques  se  partit  de  l'Eglise.  »  (Mém. 
d'Ol.  de  la  Marche,  L.  i,  p.  297.)  «  Avoir  le  tout 
«  entendu,  Robertet  a  dit,  etc.  »  (Lett.  de  Louis  XII, 
T.  I,  p.  499.)  "  Avoir  bien  beu  et  bien  repeu,  Editue 
«  nous  mena  en  une  chambre  bien  garnie.  »  (Rabe- 
lais, T.  V,  p.  25.)  «  Quoy  entendant  Cœsarin ,  et 
«  avoir  quelque  peu  songé,  dit ,  etc.  »  (Nuits  de 
Strapar.  T.  Il,  p.  274.) 

Enfin,  il  est  possible  qu'on  ait  vu  ce  qui  se 
rapproche  par  la  ressemblance  ou  par  l'imitation, 
comme  étant  placé  dans  un  ordre  successif,  et  que 
de  là  on  ait  dit  :  «  Les  daims  toutes  leurs  natures 
«  ont  après  la  guise  d'un  cerf,  fors  tant  que  le  cerf 
«  va  plustost  au  ruit.  »  (Chasse  de  Gaston  Phébus, 
MS.  p.  27.) 

Fist  la  kapièle  (1)  faire 

Ausi  biele  com  nul  el  monde  ; 
Et  si  le  fist  faire  reonde 
Apriès  l'ongle  de  son  ceval 
Ki  senti  l'aiguë  caude  el  val. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  68. 

Après  Savis  a  nom  Savine. 

Alhis.MS.  fol.  122,  V  col.  1. 

On  sait  qu'aujourd'hui  l'on  diroit,  d'après  avec  la 
même  signification. 

VARIANTES    : 
APRES.  Orth.  subsist.  -  S'  Bernard,  Serra,  fr.  MSS.  p.  96. 
Apré.  Baluze,  Hist.  généal.  de  la  M.  d'Auvergne,  pr.  p.  9'2. 
Apriès.  Pli.  Mouskes,  MS.  p.  3. 
Apris.  Carpentier,  Hist.  de  Cambrai,  T.  II,  pr.  p.  31. 

Apresser,  verbe.  Presser,  opprimer,  fouler, 
affaisser.  Etre  près,  presser,  approcher,  suivre, 
poursuivre,  etc.  Les  passions  qui  captivent  l'espèce 
humaine  el  la  tyrannisent,  les  besoins  qui  l'asser- 
vissent et  la  tourmentent,  les  maux  auxquels  l'as- 
sujettit la  Nature,  ceux  que  lui  font  souffrir  le 
despotismeetl'injustice,  étant  comparés  à  un  poids, 
à  un  pesant  fardeau  sous  lequel  elle  est  pressée, 
opprimée,  foulée,  affaissée,  etc.  l'on  a  désigné  toute 
espèce  d'idées  relatives  à  un  état  d'oppression,  par 
le  verbe  apresser,  comme  le  prouvent  les  citations 
suivantes  :  «  Ensi  que  li  Sergenz  ne  fust  apprcissez 


«  de  plus  fière  sentence  par  le  maltalent  del  Sei- 
0  gnor,  etc.  »  (S'  Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  305.)  «  Cil 
«  qui  sont  Prélat  et  Justice  de  Sainte  Eglise,...  s'il 
«  apressent  le  Pueple crueuement  et  à  tort,  si  auront 
«  grant  torment  devant  tous  les  autres.  »  (Luci- 
«  daires,  ms.  du  R.  n"  7989,  fol.  225.)  «  Chil  qui 
«  point  ne  parle  par  che  que  il  sont  muets  dès 
«  nature,  ou  si  apressé  de  maladie  que  il  ont  per- 
»  dus  la  parole,  etc.  »  (Beaumanoir,  Coût,  de  Beau- 
voisis,  chap.  xii,  p.  71.)  «  N'avoient  que  manger; 
«  si  les  appressa  moult  la  faim.  ■>  (Hist.  de  B.  du 
Guesclin,  par  Ménard,  p.  104.)  «  Naissons  en  cha- 
»  tiviteit...  ensi  k'ancor  fussiens  nos  saige  et  fort, 
«  si  seriens  nos  tote  voies  appresseit  desoz  le  jus 
•<  de  ceste  chaitive  servituit.  »  (S'  Bern.  Serm.  fr. 
MSS.  p.  260.)  a  Li  terrienne  habitations  apresset  lo 
«  sen  (2)  ki  à  maintes  choses  penset,  ensi  k'il  con- 
«  tremont  ne  se  puist  drecier  as  bien  celestiens.  >• 
(Id.  ibid.  p.  261.)  «  Il  estoit  griefment  apresseiz  de 
«  la  templacion  de  sa  char.  »  (Id.  ibid.  p.  319.) 

....  Se  pristrent  à  pensser 
Comment  se  porroient  tensser. 
"Vers  poureté  qui  les  apresse. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  227,  V*  col.  2. 

.  .  .  Bons  Clers,  Chevaliers  en  jeunesce, 
Ne  se  doivent  pour  or,  ne  pour  richesce, 
Bouter  au  feu  qui  art  et  qui  estrangle 
Les  mariez  ;  car  tous  maulx  les  apresse. 

Eust.  Desch.  Poês.  MSS.  p.  256,  col.  1. 

Qu'au  lieu  de  comparer  les  maux  de  l'homme, 
ses  besoins  et  ses  passions  à  un  poids  qui  l'opprime 
et  l'affaisse,  on  se  les  figure  comme  autant  d'êtres 
actifs  qui  le  poursuivent,  qui  le  pressent  en  le 
poursuivant,  en  l'approchant,  le  verbe  apresser 
désignera  plutôt  les  idées  de  poursuite  et  d'approche 
que  celles  d'oppression  et  d'affaissement.  Cette 
acception  d'apresser  paroil  d'autant  plus  vraisem- 
blable dans  quelques-uns  des  passages  qu'on  a  cités, 
que  ce  verbe  signifioit ,  soit  au  propre,  soit  au 
figuré,  «  être  près,  approcher  de  près,  suivre, 
«  poursuivre  de  près  ;  presser  en  approchant,  en 
«  suivant,  en  poursuivant,  en  insistant,  en  pous- 
«  sant,  etc.  »  (Voy.  Après.) 

Les  Roys  ressemblent  les  painctures... 

Se  bien  y  sçavoit  prendre  garde 

Cil  qui  les  painctures  regarde, 

Oui  plaisent  qui  ne  s'en  apresse  ; 

Mais  de  près  la  plaisance  cesse. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  19147-19451. 

Li  sages  cm  ki  confiessa 
L'Empereis,  moult  apriesn 
De  viellaice  et  de  maladie. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  777. 

Dans  la  signification  de  suivre,  poursuivre  de 
près,  approcher,  presser  en  suivant,  en  poursui- 
vant, on  disoit  : 

Turc  et  Païen  moult  les  apriesent, 
Glatissent,  cornent  et  engriesent. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  194. 

Au  figuré  : 

Se  pitié  n'est,  de  mort  suy  apresse. 

Eust.  Desch.  Poes.  MSS.  p.  117,  col.  3. 


(1)  cha  elle.  -  (2)  esprit. 


AP 


-  87 


AP 


Quelquefois  le  verbe  ajiresser  a  signifié  seul  l'étal 
de  presse  où  se  trouve  l'homme  aux  approches  de 
la  mort. 

Et  quant  li  Rois  fu  apriessés, 
Et  de  la  mort  fu  engriesés,  etc. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  638. 

En  ce  sens  on  l'employoil  comme  substantif  : 

Et  tout  li  autre,  aine  Vapricser, 
S'orent  fait  ausi  confieser. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  215. 

C'est  dans  la  signification  figurée  de  notre  verbe 
presser,  insister  auprès  de  quelqu'un  pour  qu'il 
fasse  une  chose,  le  pousser  à  la  faire,  qu'on  a  dit  : 

...  Il  n'a  talent  d'arrester  ; 
Pour  ce  ne  l'en  veut  apresser. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignal,  fol.  46,  V»  col.  3. 

Enfin,  «  apresser  l'ame  dehors  d'un  corps ,  » 
c'étoit  la  presser  d'en  sortir,  comme  l'on  feroit 
sortir  quelqu'un  du  lieu  où  il  seroil,  en  le  poussant, 
en  le  jetant  dehors. 

Un  Chevalier  moult  noble  et  cointe 
Fiert  si  par  ambes  deux  les  flancs 
Que  d'autre  part  en  saut  li  sans  ; 
Et  l'ame  prent  congié  au  cors 
Que  cil  a  apressce  dehors. 

Rom.  de  Glygel,  MS.  du  P..  n*  C987,  fol.  271,  P,"  col.  2. 

On  terminera  cet  article  en  observant  qu'entre 
les  idées  de  presse  et  de  proximité,  il  y  a  une  telle 
analogie,  qu'on  peut  soupçonner  qn'apresser  en 
certains  cas  n'est  qu'une  variation  d'orthographe 
du  verbe  aprocher,  aprecev,  aprescer^  etc.  (Voyez 
Aprocueu.) 

CONJUG. 

Appresseit,  part.  Opprimés  ;  en  latin  appressi.  (S' 
Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  8.) 

Apjn-esseiz,  part.  Opprimé,  pressé  ;  en  latin  pres- 
sais, (id.  ibid.  p.  245.) 

Appreijssevet,  indic.  imparf.  Opprimoit.  (Id.) 

Apresset,  ind.  prés.  Affaisse,  abaisse.  (Id.) 

VARIANTES  : 
APRESSER.  S«  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  276. 
Appresser.  S'  Bern.  Serra,  fr.  MSS.  p.  125. 
Aprieser.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  194,  215  et  777. 
ApRiESSER.  Id.  p.  638. 

Aprest,  subst.  masc.  Action  de  s'apprêter.  L'ac- 
tion de  se  mettre  en  état  de  défense,  dans  ces  vers  : 

Un  porc  espic...  voyant  l'intérest 
Qu'on  luy  faisoit,  bruoyt  oultre  mesure  ; 
Ses  dars  fronçoit  tant  qu'à  veoir  son  aprest, 
Bien  se  monstroit  déhbéré  et  prest 
Garder  ses  pars  et  royale  pasture. 

J.  Marut,  p.  56. 

On  reconnoitra  dans  le  verbe  apreslerle  principe 
de  la  formation  et  de  la  signification  du  substantif 
aprest.  (Voy.  Aprester  et  Aprestise.) 

Aprester,  verbe.  Etre  devant ,  se  mettre,  s'arrê- 
ter devant.  Apprêter,  mettre  en  état,  disposer, 
habillei',  parer,  préparer.  Etre  preste,  être  vite,  être 
adroit.  Il  semble  que  relativement  à  la  signification 
étymologique  du  verbe  latin  prœstare,  d'où  les 
verbes  françois  prester  et  aprester,  on  ait  désigné 
une  personne  étant  devant  une  autre,  se  mettant, 


s'arrêtant  devant  elle,  en  disant  qu'elle  s'aprestoit 
devant  cette  personne. 

Issir  voit 

De  la  cave,  amont  un  degré. 
Un  vilain  treslot  hérupé... 
Devant  Gauvains  s'est  aprestez  ; 
Si  l'a  maintenant  salué  : 
Et  Gauvains  a  moult  regardé 
Sa  contenance  et  sa  figure. 

Fabl.  MS.  de  Berne,  n-  354,  fol.  30,  V"  col.  2  et  31,  R"  ool.  1. 

Nous  croyons  apercevoir  un  principe  d'analogie 
entre  celte  acception  et  les  acceptions  encore  usitées 
du  verbe  aprester,  ou  apprester  qu'aujourd'hui  l'on 
écrit  apprêter.  Il  est  possible  qu'en  généralisant 
l'idée  particulière  de  se  disposer  à  faire  une  chose 
en  se  mettant  devant  celle  chose,  en  se  mettant  en 
avant,  en  s'avançant  pour  la  faire,  on  ait  dit  par 
extension  et  figurément,  s'apprester  pour  se  mettre 
en  état  de  faire  une  chose,  quelle  que  soit  la  chose, 
quel  que  soit  le  moyen  de  se  mettre  en  état  de  la 
faire,  de  s'y  disposer. 

Je  qui  hete  les  autres,  sui  li  mains  aprestez, 
Li  mains  aisiez  d'atendre,  et  li  plus  endetez. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'7615,  T.  Il,  fol.  144,  V  col.  2. 

En  habillant  une  personne,  en  la  parant,  on  la 
met  dans  l'étal  où  elle  doit  être  avanl  qu'elle  puisse 
se  montrer  avec  décence,  ou  avec  rcs|MTaiiL'e  de 
plaire.  De  là  le  verbe  aprester  a  signifié  babiller, 
parer,  etc. 

....  Charles,  li  bons  Rois  natures, 
De  main  (1)  lever  estoit  acoustumez 
Et  d'oyr  Messe,  si  tost  k'ert  aprestez. 

Enfance  d'Ogier  le  Danois,  MS.  de  Caignat,  fol.  114,  V  col.  1. 

A  peines  puet  estre  famé  de  mal  faire  tornée  (2)  ; 
Car  quant  un  preudons  l'a  veslue  et  atornée 
De  roubes,  et  de  jouiaus  garnie  et  aprestée,  etc. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7015,  fol.  140,  R°  col.  2,  cl  V  col.  1. 

On  apreste  les  choses,  lorsqu'on  les  met  dans 
l'état  où  elles  doivent  être  avanl  qu'elles  soient 
propres  à  l'usage  pour  lequel  on  les  préprre.  «  Que 
«  nulz,  se  il  n'est  Lormier  (3),  ne  puist  aprester,  ne 
«  faire  aprester  ouvre  de  Lormerie.  »  (Ord.  T.  HT, 
p.  187.) 

Les  choses  qu  on  apreste  à  quelqu'un,  sont  des 
choses  que  pour  ainsi  dire,  on  met  devant  celui 
pour  le  besoin  duquel  elles  sont  préparées. 

Qui  ce  qu'il  vait  querant 

Troeuve  apreste,  s'il  ne  le  prend  errant, 
Mal  oseroit  un  grant  fais  entreprendre. 
Com  récreans  est  bien  dignes  de  pendre. 

Ane.  Poës.  fr.  MS.  du  Vatic.  n"  1522,  fol.  155,  V  col.  2. 

On  reconnoîl  sans  doute  qu'elle  pouvoit  être 
l'analogie  des  significations  du  verbe  simple  prester 
avec  celles  du  composé  aprester,  lorsqu'on  disoit, 
comme  l'on  dit  encore  aujourd'hui,  prêter  à  une 
personne  les  choses  dont  elle  a  besoin,  se  prester  à 
ses  besoins,  etc. 

Enfin,  la  vitesse  et  la  dextérité  avec  lesquelles  on 
fait  les  choses,  étant  en  proportion  de  la  vilesse 
avec  laquelle  on  s'avance  pour  les  faire,  de  la 
dextérité  avec  laquelle  on  s'y  dispose  et  s'y  prépare, 
il  est  possible  qu'aprester  ait  signifié  être  preste, 
être  vite,  être  adroit. 


(1)  matin  ;  en  latin  manè.  —  (2)  détournée.  —  (3)  sellier  et  éperonnier.  (N.  E.) 


AP  -8 

L'on  ne  poiirroit  mieulx  apprester 
De  circonsir  plus  gentement 
Que  l'enfant  est  :  benignement 
En  suit  loué  Dieu  noslre  père. 

Hisl.  du  Tliéàlre  Fr.  T.  I,  p.  UT. 

VARIANTES  : 
APRESTER.  Ane.  Poës.  fr.  MS.  du  Vatican,  fol.  155. 
AMPRESTiiR.  Athis,  MS.  fol.  87,  R°  col.  1. 
Apprester.  Ger.  de  Nevers,  Part,  i,  p.  5b. 
Aprestrer  (corr.  Aprester.)  Ane.  Poes.  fr.  MS.  du  V.  f°  IbS. 

Aprestise,  siihsi.  [cm.  Apprêt,  préparatif.  Ce 
mot  aprestise,  que  D.  Carpeiitier  expluine  comme 
étant  une  altération  à'apertise,  pareil  avoir  une 
signification  analogue  à  celle  du  verbe  aprester. 
(Voy.  Aprester.) 

Les  essais  et  les  ajicesfises 

Qui  se  font  pour  son  adrecer  ; 

Ce  sont  les  dévotes  aprises 

Qui  sont  pour  bataille  requises.  „„„,,„,  „« 

Rom.  du  Ch"  Délibéré,  D.  Carpenlier,  h.  Gl.  1.  de  Du  C.  T.  I,  col.  243. 

On  le  croit  de  même  origine  qu'aprest.  (Voy. 
Aprest.) 

Apretier,  verbe.  Evaluer  en  argent,  fixer  à  cer- 
tain prix.  Quoique  apprécier,  en  latin  apprettare, 
signilie  encore  aujourd'hui  évaluer  une  chose,  1  es- 
timer en  fixer  le  prix,  on  ne  diroit  plus  qu'une 
redevance  en  grain  évaluée  en  argent  est  appréciée 
à  argent.  (Voy.  Uob.  Esticnne,  Nicot  et  Monet,  Dict. 
au  mot  adénérer.)  C'est  probablement  dans  la  signi- 
fication d'évaluer  et  faire  payer  en  argent  une  rede- 
vance en  grain,  qu'on  a  dit,  en  faisant  l'éloge  de  la 
bonté  de  la  femme  du  Premier  Président  de  Thou  : 
«  Geste  bonne  Dame...  ne  changea  jamais  de  Fer- 
«  miers,  ni  ne  leur  aprétia  grain  ;  estans  par  ce 
«  moyen  tous  devenus  riches  avec  elle.  «  (Lett.  de 
Pasquier,  T.  1,  p.  434.  —  Voy.  Aprisagier  et 
Aprisier.) 

variantes  : 

APRETIER.  Lett.  de  Pasquier,  T.  I,  p.  434. 

APPRECIER.  Orth.  subsist.  -  R.  Est.  Nicot  et  Monet,  Dict. 

Apreuf,  préposition.  Après.  (Voy.PREUF.)  Si  l'on 
fait  réflexion  que  non-seulement  b,  mais  f,  est  de 
même  organe  que  p,  on  apercevra  la  possibilité  que 
preuf  soit  de  même  origine  que prob,  en  latin /«'o;;t^ 
O'oy  ApRoii.)  Quoi  qu'il  en  soit,  cette  préposition 
preuf,  c'esl-à-dire  proche,  près,  étant  précédée  de 
la  préposition  o,  signifioit  (qwès,  dans  un  sens  rela- 
tif à  ridée  de  deux  choses  qui  s'approchent  l'une  de 
l'autre  en  se  suivant  de  près,  en  se  succédant. 

Un  sarouel  fist  appareillier, 
Lez  la  messière  du  monstier, 
A  meilre  apreuf  sa  mort  son  cors, 
Sous  la  goutiere  de  deffors. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  159. 

Apriiner,  verbe.  Opprimer,  accabler:  ou  appro- 
cher, incommoder.  Peut-être  que  dans  un  sens  rela- 
tif îi  celui  du  verbe  latin  premere,  A'ovi  le  compo.se 
opprimere,  en  françois  apprimcr,  on  aura  désigné 
l'incommodité  d'une  chaleur  accablante,  en  disant 
qu'elle  aprimoit. 

Enz  en  un  bois  espès,  ramu, 

Sont  entrées,  moult  bien  foillu. 

Li  chauz  les  vait  moult  cprimciit,  etc. 

Fabl.  MS.  de  Beruc,  n-  354,  fol.  150,  V*  col.  2. 


AP 

Peut-être  aussi  que  le  verbe  aprimer  dans  ces 
vers  désigne  l'incommodité  de  la  chaleur  qui  appro- 
choit  etcommençoit  à  devenir  insupportable.  Alors, 
il  seroit  une  variation  d'orthographe  du  verbe 
aproismer  qu'on  écrivoit  aprismer,  aprimer,  etc. 
(Voy.  Aproismer.) 

Aprisagement,  subst.  masc.  Evaluation,  esti- 
mation. Signification  relative  à  celle  du  verbe  apri- 
sagier. (Voy.  Aprisagier.) 

VARIANTES  : 
APRISAGEMENT.  D.  Carp.  supp.  Gl.  1.  de  D.  C.  à  Apjn-essio. 
Apprésagement.  Id.  ibid.  Tit.  de  1334. 

Aprisagier,  verbe.  Evaluer,  estimer.  Dans  le 
sens  étymologique,  mettre  à  prix  une  chose,  la  fixer 
à  certain  prix,  en  l'évaluant,  en  festimant.  (Voy. 
Aprétier  et  Aprisier.)  La  signification  d'aprisagier 
étoit  évaluer,  estimer,  lorsqu'on  disoit  :  «  Par  vertu 
«  dicelles  lettres...  eust  fait a/jnsa(/i«' les  arrérages 
«  h  certaine  somme  de  deniers,  contenue  au  dit 
«  aprisagement.  »  (D.  Carpentier,  suppl.  Gloss.  lat. 
de  Du  Cange,T.l,col.255.)  «  .Nous  vous  mandons... 
<.  que...  vous  faciez  apprésagier  les  diz  domma- 
«  ses.  »  (Id.  ibid.)  ■■  Lesquelx  blés...  apresagiez 
«  valoir  en  somme  en  revenue  de  terre,  la  somme 
«  de  XX  livres  de  terre  par  an,  etc.  »  (Id.  ibid.  — 
Voy.  Aprisagement.) 

VARIANTES  : 
APRIS.\GIER.  D.  Carp.  suppl.  Gl.  de  Du  C.  à  Appressio. 
Apprésagier.  Id,  ibid.  au  mot  Apprettare  ;  Tit.  de  1334. 
Apprisagier.  Id.  Mem.  de  la  Ch.  des  Comptes  de  Paris.  - 
Aprésagier.  Id.  ibid.  Tit.  de  1376. 

Aprisier,  verbe.  Apprécier.  (Voy.  Aprétier  et 
Priser.)  On  prise  les  choses  plus  ou  moins  qu'elles 
ne  valent;  dans  le  prix  qu'on  y  met,  il  y  a  souvent 
de  l'arbitraire  :  mais  les  apprécier,  c'est  en  propor- 
tionner le  prix  à  la  valeur  réelle.  Telle  étoit  la  signi- 
fication du  verbe  aprisier,  (ovmé  comme  aprisagier 
du  substantif  prix  ou  pris,  en  latin  precium  ou 
pretium,  lorsqu'en  parlant  de  choses  dont  la  valeur 
réelle  ne  pouvoit  être  appréciée,  on  disoit  : 

...  On  ne  poroit  aprisier 

Sa  valor,  ne  sa  dignité  : 

Car  je  vos  dis  par  vérité 

K'ilh  est  de  pierres  précieuses,  etc. 

Prison  d'Amours,  MS.  de  Turin,  fol.  18,  V  col.  2. 

Aprismement,  subst.  mase.  Action  d'appro- 
cher. On  observera  (lue  du  verbe  latin  approximare, 
s'est  formé  le  français  aproismer  ou  aprismer,  de 
même  oi-igineet  de  même  signification  qu  aiirocher. 
(Voy.  Aprociier.)  De  là  le  substantif  aprismement, 
dans  le  sens  d'approcbement,  l'action  d'approcher, 
lorsqu'en  «  disoit  avoir  aprismement  à  une  per- 
ce sonne  »  pour  l'approcher. 

.\insi  vet  de  la  poure  gent  ; 
S'aus  riches  ont  aprismement, 
Forment  les  cuident  corroucier, 
Domage  faire  et  anuier. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7615,  fol.  85,  R'  col.  l. 

Aprison,  subst.  fém.  Enseignement,  instruction. 
(Voy.  Apprisere.)  On  indiquera  le  sens  propre  du  mot 
simple  prison,  en  observant  que  le  composé  aprison 
pourroit  avoir  signifié  prise.  (Voy.  Prison.)  La  signi- 


AP 


-  89  — 


AP 


fication  de  ce  même  composé  aprison,  instruction, 
enseignement,  est  figurée  dans  ces  vers,  où  on  lit 
que  Richard  I"  roi  d'Angleterre,  voulant  faire 
assassiner  Philippe-Auguste  son  ennemi  : 

Faisoit  enfanz  endoctriner, 
Pour  lui  ocire  et  afiner. 
Qui  jà  ièrent  touz  embarniz  (1), 
Et  de  tele  aprisoit  (2)  garniz, 
Que  chascun  d'eus  homme  oceist, 
Tel  con  son  Mestre  li  deist. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  39,  R°. 

Aprissance,  subst.  féni.  Prééminence.  Ce  mot 
flpn'ss«»f?  qui  dans  une  traduction  de  Lettres  de 
Charles  V,  en  faveur  des  bourgeois  de  Paris,  répond 
au  \Siiin  pi'eeminencia,  n'est  probablement  qu'une 
altération  à'apparoissance  pris  dans  le  sens  de 
prééminence,  avantage  avec  lequel  on  paroît  supé- 
rieur aux  autres.  «  11  appartient  à  Haultesse  royale 
«  que  elle  eslieve  de  plus  large  honnour  et  apris- 
•  sance  (3),  ceulx  envers  lesquielx  elle  a  ordonné 
«  principalement  la  chaere  de  sa  proppre  Majesté.  » 
(Ord.  T.  V,  note,  p.  418.  —  Voy.  Apparoissance.) 

Apriver  (s'),  verbe.  S'apprivoiser,  se  familiari- 
ser. (Voyez  Priver.)  On  observe  que  le  mol  privus, 
dans  lequel  on  croit  voir  le  principe  de  la  formation 
des  verbes  françois  priver,  apriver,  aprivoiser,  étoit 
en  latin  de  même  signUicalion  que  si iigulus  nnicits. 
(Voy.  Martinius,  Lexic.  philolog.)  Il  y  a  des  antipa- 
thies naturelles  entre  les  animaux  :  ceux  dont 
quelque  cause  altère  et  adoucit  réciproquement  le 
naturel  antipathique,  deviennent  uniques  et  singu- 
liers dans  leur  espèce,  en  vivant  privémenl  ensem- 
ble et  familièrement.  C'est  peut-être  relalivement 
à  ce  sens  étymologique,  qu'en  parlantd'un  chien  et 
d'un  loup  que  la  faim  nécessitoit  à  vivre  l'un  avec 
l'autre,  on  a  dit  qu'ils  s'aprivoieut,  et  qu'aujour- 
d'hui l'on  diroit  qu'ils  s'apprivoisent.  (Voy.  Apri- 
voiser.) 

Li  chiens  va  o  le  leu  muiant; 

De  commune  proie  vivant, 

Chien  et  leu  se  vont  aprivaiil, 

Tant  li'ensamble  font  leur  covine  (4),  etc. 

Dit  de  Charité,  MS.  de  Gaignat.fol.  221,  R"  col.  1. 

Aprivoiser,  verbe.  Apprivoiser,  rendre  privé 
et  familier  (5).  (Voy.  Aprivoisir.)  Peut-être  qn'apri- 
voiser  ou  apprivoiser  un  animal,  le  rendre  privé 
en  adoucissant  son  naturel  farouche, c'est  le  rendre 
unique  et  singulier  dans  son  espèce,  par  la  docilité 
avec  laquelle  il  obéit  à  l'homme  qu'il  reconnoit 
pour  maître.  (Voy.  Apriver.) 

Hours,  liepars  et  lions,  leu,  guerpil,  singe  et  chien 
Donte  l'en  bien  par  nature  et  aprivoise  on  bien. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7615,  fol.  140,  V-  col.  1. 


Il  paroît  qu'anciennement  «  s,' aprivoiser  de 
<•  quelqu'un,  »  c'étoit  se  familiariser,  se  rendre 
avec  lui  un  peu  trop  privé,  être  avec  lui  d'une  fami- 
liarité singulière  et  unique. 

Faux-semblant,  dist  Amours,  dy  moy  : 
Puisque  de  moy  tant  i'uprivoij,  etc. 

Rom.  Je  la  Rose,  vers  12703  et  12704. 

VARIANTES  : 
APRIVOISER.  Fabl.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  140,  V»  col.  1. 
Aprevesier.  Dit  d'Amours  flnes,  MS.  de  Turin,  fol.  11. 

Aprivoisir  (s'),  verbe.  S'apprivoiser.  (Voy. 
Apprivoiser.)  Dans  le  sens  du  verbe  aprivoiser,  chan- 
ger le  naturel  farouche  d'un  animal  sauvage,  on  a 
dit  : 

S'aprivoisisI  mainte  beste  sauvage... 
L'un  par  douceur,  l'autre  par  oultrage 
Que  l'en  leur  fait,  changent  condicion. 
Ainsi  est-il,  selon  m'entencion 
En  l'aage  humain  de  mainte  créature 
Qui  par  doucour  ou  par  contempcion 
Mue  souvent  et  change  sa  nature. 

Eust.  Deschamps,  poc-s.  MSS.  p.  29,  col.  4  et  30,  col.  l. 

Aprob,  préposition.  Auprès.  Après.  (Voyez 
Apreif  (6).)  Lorsqu'on  sait  que  p,  b  et  f,  comme  let- 
tres de  même  organe,  se  substituent  les  unes  aux  au- 
tres, que  /■  est  l'adoucissement  de  l'aspiration  h,  que 
parmi  quelques  peuples  //  se  prononce  ch,  et  que 
cette  prononciation  étoit  même  particulière  aux 
anciens  Francs;  on  n'est  plus  étonné  que  la  prépo- 
sition latine  propê  soit  l'origine  de  la  préposition 
françoise  proche  :  préposition  que  par  le  change- 
ment de  la  voyelle  o  en  eu  l'on  écrivoit  quelquefois 
preiif,  et  prob  dans  le  langage  des  pays  Méridio- 
naux. De  là,  la  préposition  "composée  fl/;)'o6  qui 
signifioit  proche,  auprès. 

Coms  (7)  fo  de  Roma,  e  ac  (8)  ta  (9)  gran  valor  (10) 
Aprob  Mallio  lo  Rei  Emperador,  etc. 

Fragm.  de  la  Vie  de  Roèce,  MS.  de  S.  Benoîl-sur-Loire,  p.  270  (H). 

La  signification  à'aprob  est  la  même  que  celle 
à'apreuf,  après,  dans  cet  autre  passage  : 

Quan  veng  la  fis  (12)  Mallio  Torquator, 

Donc  (13)  venc  Boeci  ta  (14)  grand  dolors  al  cor, 

No  cuid  (15)  aprob  altre  dois  (IC)  li  demor. 

Fragm.  de  la  Vie  de  Boùce.  MS.  îibi  supra. 

Qu'on  nous  permette  de  hasarder  ici  une  idée 
absolument  différente  de  celles  des  Etymologistes 
latins,  sur  l'origine  des  verhesprobare  et  approbare. 
Il  seroit  possible  que  ces  verbes,  dont  on  a  fait  en 
françois  prouver  et  approuver,  dérivassent  comme 
prob  et  aprob,  de  la  préposition  propè  qui,  dans  le 
sens  étymologique  indiqué  par  Martinius  et  Vossius, 
signifie  pro  pedibus,  aiitè  pedes.  Alors,  prouver  une 
chose  à  quelqu'un,  ce  seroit  l'approcher  de  lui,  au 


(1)  Dans  des  lettres  de  rémission  de  1447,  pièce  581  du  registre  JJ.  176  du  Trésor  des  Chartes,  on  lit  :  «  La  mère  d'iceUe 
Magnon  s'aperceut  que  sa  fille  embaj-yussoit  et  engrossissoit  de  corps.  »  Le  sens  est  donc;  devenus  gros  et  grands  ;  la 
racine  est  la  même  que  celle  de  baron,  banmge  (voir  ces  mots),  (n.  e.)  —  (2)  Ce  mot  a  été  fait  sur  le  participe  appris,  de 
apprendre.  (N.  E  )  —  (3)  Le  sens  estime  est  suffisant,  apprissa>7ce  venant  àe  priser,  (n.  e.)  —  (4)  association.  —  (5)  Ce  mot, 
dérivé  du  précédent,  vient  d'un  adjectif  fictif  pm'ois,  en  latin  privensis,  dérivé  lui-même  de  privits.  Le  n  tombe  dans  ces 
formes  en  ensis,  et  le  c  long  devient  oi  :  niensis,  mesis,  mois.  etc.  (N.  E.)  —  (6)  La  forme  apreuf  (aprof  au  vers  1577  de  la 
Chanson  de  Roland),  qu'on  écrivait  plutôt  apriief,  vient  Ijien  de  propè;  Vo  bref  s'est  écrasé  en  ue.  Ye  final  est  tombé,  et  le  p, 
comme  c'est  la  tindynce  générale  des  consonnes  finales,  s'est  renforcé  en  f:  de  même  sepes  a  donné  .soî/'  (haie);  capul, 
chef  ;  mais  1'  forme  provençale  devrait  être  aprop,  et  non  aprob,  ce  qui  embarrasse  l'étymologiste.  (N.  e.)  —  (7)  Comte.  — 
(8)  Eut.  —  (9)  Tant.  —  (10)  Crédit.  —  (11)  M.  P.  Meyer  vient  de  pubher,  à  la  librairie  Franck,  un  recueil  de  textes  bos-latins 
et  provençaux  :  la  Vie  de  Boèce,  qu'il  a  revue  et  corrigée  sur  le  manuscrit,  s'y  trouve,  et  doit  seule  être  consultée,  (n.  e.)  — 
(12)  Fin,  mort.  -  (13)  Alors  ;  en  latin  tune.  -  (14)  Tant.  -  (15)  Que  je  ne  crois  pas  que,  etc.  -  (16)  Douleur. 

II.  12 


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propre  la  melire  à  ses  pieds,  et  par  conséquent  sous 
ses  yeux,  pour  qu'il  la  voie  et  la  recounoisse. 
Approuver  une  personne  ou  une  chose,  dans  la 
significalion  d'éprouver,  ce  seroit  les  approcher  de 
soi  pour  les  voir  et  les  connoilre,  pour  avoir  l'idée 
de  ce  qu'elles  sont  et  de  ce  qu'elles  valent.  Enlin, 
les  approuver,  dans  le  sens  contraire  à  celui  des 
verbes  désapprouver,  reprouver,  ce  seroit  les  juger 
agréables,  utiles  et  bonnes,  d'après  l'idée  qu'on 
peut  s'en  faire  en  les  approchant  de  soi  pour  les 
voir  et  les  connoilre  ;  ou  les  approcher  de  soi,  s'en 
approcher  d'après  une  idée,  un  jugement  qui  pré- 
céderoil  l'aclion  d'approcher,  et  dont  cette  action 
seroil  pour  lors  le  signe  et  la  conséquence,  ^otre 
conjeclure  sur  le  principe  des  significations  et  de 
la  formation  des  verbes  prouver,  approuver,  désap- 
prouver et  reprouver,  paroitra  peut-être  d'autant 
plus  vraisemblable,  que  nécessairement  on  se  figure 
l'esprit  opérant  de  même  manière  que  le  corps,  et 
qu'un  moyen  aussi  simple  que  naturel  de  voir  et  de 
connoilre  corporellement,  c'est  d'approcher  de  soi 
les  personnes  ou  les  choses.  De  lîi,  sans  doute, 
l'identilé  de  signification  des  verbes  reprouver  et 
reprocher.  (Voy.  Reprocher  et  REPRorvER.)  On  trouve 
aussi  qu'aprocher  a  signifié  approuver  dans  le  sens 
de  prouver.  (Voy.  Approuver  et  Aprocher.) 

Aproclie,  sitbst.  fém.  Approche,  action  d'appro- 
cher. L'origine  de  ce  mol  aproclie  ou  approche  (1), 
est  sans  doute  la  même  que  celle  de  la  préposition 
aprob.  (Voy.  Aprob.)  Si  l'on  fait  réflexion  que  la 
préposition  simple  proche  ne  semble  être  adjectif  el 
substantif,  que  parce  qu'en  disant  «  maisons  pro- 
«  ches  de  la  rivière,  un  de  mes  proches,  »  on  fait 
ellipse  de  qui  sont,  on  reconnoitra  la  possibilité 
qu'approche  soil  réellement  une  préposition  com- 
posée el  de  même  origine  qxi'aprob,  quoiqu'elle 
paroisse  être  un  substantif  dans  noire  langue. 
(Voy.  Proche.)  Il  résulte  de  cette  observation  ,  qu'au 
moyen  d'une  métonymie  par  laquelle,  en  exprimant 
ce  qui  suit,  on  désigne  ce  ([ui  précède,  le  mot  apro- 
che  ou  approche,  fût-il  préposition,  peut  avoir 
signifié  comme  substantif,  le  mouvement  ou  la 
position  d'après  lequel  une  personne  ou  une 
chose  se  trouve  proche  d'une  autre.  Ainsi,  l'accep- 
tion encore  usitée  d'approche ,  éloit  la  même 
que  celle  d'approchement,  l'aclion  d'approcher. 
(Voy.  ApRociiER.) 

De  là,  on  a  nommé  aproches  en  général,  une 
aproclie  d'assiête,  les  tranchées  el  autres  travaux 
par  lesquels  on  approchoil  du  corps  d'une  place 
qu'on  assiégeoit  ;  les  machines  et  l'artillerie  qu'on 
approchoil  des  murailles  de  cette  place,  ou  avec 
lesquelles  on  s'en  approchoil. 

.  .  .  Firent  de  grans  escarmouches 
Sans  cesser,  presque  tous  les  jours, 
BastiUes,  bollevers,  approuches, 
Affin  qu'il  n'y  entrast  secours. 

Vigil.  de  Charles  VU,  pari.  I,  p.  94. 


Coitivy  pour  lors  Admirai, 
A  faire  l'api-ouche  d'assiette 
Eut  grant  peine,  amont  et  aval. 

Ibid.  p.  180. 

Les  approches,  en  terme  de  guerre,  étoient  de 
deux  espèces  ;  les  aproches  découvertes  et  les  apro- 
ches couvertes.  «  On  commença...  à  faire  des  «pra- 
"  ches  couvertes  el  découvertes,  dont  le  Bourgeois 
«  conduisoil  une,  el  Jacques  de  Chabannes  l'autre  : 
«  mais  celle  du  Bourgeois  fut  la  première  avancée 
«  jusques  ti  la  muraille,  el  puis  l'autre  arriva,  et 
<'  fui  minée  la  muraille.  »  (Hisl.  d'Arlus  III,  duc  de 
Bretagne,  p.  788.  —  Voy.  Aprochement.) 

VARIANTES  : 
APROCIIE.  llist.  d'Artus  III,  Duc  de  Bret.  p.  788. 
Approuche.  Vigil.  de  Charles  VIT,  part,  i,  p.  94. 
Aprouche.  Ibid.  p.  M. 

Aprochement,  subst.  niasc.  et  fém.  Action 
d'approcher,  approche.  Lieu,  position  où  l'on  est 
après  s'être  approché.  Anciennement,  aprocher  à 
une  personne,  ou  avoir  aprochement  h  elle,  signi- 
fioit  s'approcher  d'elle,  rapprocher.  «  Par  ti  ayens 
«  aprocliement  al  fil,  ô  lu  bien-aurouse  troveresse 
«  de  grâce.  »  (S'  Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  '21.  —  Voy. 
Aprocher.)  Le  participe  féminin  de  ce  verbe  aprocher 
signifioit  par  ellipse  d'un  substantif  de  même  genre, 
le  mouvement  par  lequel  on  approche  de  quelqu'un, 
on  s'avance  vers  lui  pour  le  rencontrer,  l'attaquer. 

Les  Angloys,  amont  et  aval, 
Firent  des  fossez  et  tranchées, 
Affin  (jue  les  gens  de  cheval, 
Ne  feissent  sur  eubc  aprouchées. 

Vîgil.  de  Charles  VU,  part.  II,  p.  86. 

Sous  l'idée  A' aprochement,  action  d'approcher, 
mouvement  par  lequel  on  s'approche,  étoil  voilée 
l'idée  du  plaisir  vers  lequel  ou  s'avance  en  obéissant 
h  la  Natiire  el  à  l'amour.  «  Si  de  aprecement  à 
«  femmes  demandés,  sacés  que  dès  ier  e  de  avant- 
«  ier  nus  eimes  guardez.  »  (Livres  des  Rois,  ms.  des 
Cordel.  fol.  28.)  L'expression  étoil  moins  modeste, 
lorsqu'on  disoit,  «  connoilre  une  femme  par  char- 
«  nel  aprecement.  «  (Ibid.  fol.  76,  V"  el  77,  R°.) 

Quelquefois  ce  qu'on  nommoil  aprochement 
d'amour,  étoil  un  signe  démonslralif  de  l'amitié 
qui  nous  invile  h  nous  approcher,  à  nous  rappro- 
cher les  uns  des  autres.  «  Si  eut  \h  grans  approche- 
«  mens  el  grans  recongnoissances  d'amour,  quand 
«  ils  se  trouvèrent  tous  ensemble.  »  (Froissart, 
Vol.  I,  p.  3G3.)  «  Envoyoit  le  Roy  de  Portugal  au 
«  Duc  et  à  la  Duchesse...  de  beaux  mulets  blancs... 
»  et  avecques  ce  grans  salus  et  grands  approche- 
«  mens  d'amour.  »  (kl.  Vol.  III,  p.  131.) 

En  termes  de  guerre,  «  {m'e\esapproche7nents  » 
d'une  place  qu'on  assiège,  en  faire  les  approches, 
c'éloit  s'en  approcher  à  l'aide  des  tranchées  et  des 
machines ,  s'en  approcher  avec  l'artillerie  qu'on 
faisoit  avancer  vers  les  murailles  de  la  place  assié- 
gée. «  Ils  pressèrent  fort  la  ville  de  fossez  el  d'ap- 
«  prochements.  »  (Berry,  Chron.  depuis  140'2-1461, 


(1)  Approche  \ient  de  ad  et  pi-opius,  comparatif  de  propè.  Propius  est  devenu  propjus,  et,  comme  p  était  une  consonne 
forte,  j  s'est  transformé  en  ch;  approcher  est  dérivé  d'approche;  il  n'est  pas  besoin  de  la  longue  discussion  que  le  lecteur 
rencontrera  plus  loin.  (n.  e.) 


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AP 


p.  451.)  «  Firent  leurs  «p/J/'or/i?/H^HS  les  François, 
«  et  assortirent  canons  et  bombardes  ;  et  firent  de 
B  grands  approuchemens  de  jour  et  de  nuit,  tant 
«  qu'à  la  fin  les  Anglois,  etc.  »  (Al.  Chartier,  Hist. 
de  Charles  VI  et  Charles  VII,  p.  133.) 

Si  furent  faitz  approuchemens 
A  jetter  bombardes,  canons  ; 
Et  moult  divers  habillemens 
Pour  rompre  bastilles  et  pons. 

Vigil.  de  Charles  VII,  part.  I,  p.  182. 

Enfin,  le  mot  approchement  signifioit  le  lieu,  la 
position  oîi  l'on  se  trouvoit  après  s'èlre  approché, 
s'être  avancé,  lorsqu'on  disoit  :  «  Ils  approchèrent 
«  contre  ceulx  de  la  cité....  tellement  que  on  pouvoit 
«  jetter  une  pierre,  de  Y  approchement  d'iceux  Fran- 
1  çois,  dedens  la  dicte  cité.  »  (Al.  Chartier,  Hist.  de 
Charles  VI  et  Charles  VII,  p.  113.  —  Voy.  Aprociie.) 

VARIANTES  : 
APROCIIEMENT.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  21. 
Approchement.  Cotgrave,  Oudin,  Rob.  Estienne,  Nicot 
et  Monet,  Dict. 
Ai'PROUCHEMENT.  Al.  Chartier,  Hist.  de  Charles  VI,  p.  133. 
Aprecement.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  28. 
Aprouchement.  Vigil.  de  Charles  VII,  part,  i,  p.  225. 
Aprouchée.  Vigil.  de  Charles  VII,  part,  ii,  p.  86. 

Aproclier,  verhe.  Approcher,  s'approcher; 
avancer,  s'avancer.  Approcher,  rendre  proche. 
Assigner  à  comparoir.  Rapprocher,  faire reconnoître. 
Prouver.  On  peut  voir  à  l'article  aprob,  comment  il 
est  possible  que  de  la  préposition  latine  propè,  c'est- 
à-dire  pro  pedibus,  ante  pedes,  on  ait  formé  la  pré- 
position françoise  proche,  d'où  naît  le  verbe  apro- 
cher,  que  par  le  changement  très  ordinaire  de  la 
voyelle  o  en  ou,  en  u  et  même  en  e  muet ,  on  pro- 
nonçoit  aproitcher,  aprucher,  aprecher,  etc.  L'ortho- 
graphe aperchier  ou  apercher,  est  conforme  à  la 
prononciation  adoucie  de  pre  dans  aprecher.  On 
ajoute,  qu'en  certaines  provinces  le  peuple  prononce 
encore  aprecher,  et  avec  un  e  ouvert  aprescher. 

Enfin,  l'aspiration  /;  à  laquelle  les  anciens  Francs, 
entr'autres  peuples,  ont  substitué  ch,  se  changeant 
très  fréquemment  en  s  dans  toutes  les  langues,  il 
est  probable  que  pour  apresclier  l'on  aura  écrit 
apresser.  On  a  observé  ailleurs  pourquoi  cette 
variation  d'orthographe  du  verbe  aprocher  est  sou- 
vent peu  facile  h  distinguer  du  verbe  apresser  formé 
d'aj»'és.  (Voy.  Apresser.) 

Le  sens  littéral  de  la  préposition  latine  propè,  en 
françois  proche,  étant  reconnu,  l'on  aperçoit  par 
quelle  analogie  le  verbe  aprocher  ou  approcher  a 
signifié  et  signifie  encore  une  idée  générale  de 
mouvement  e"t  de  position,  au  moyen  desquels  on 
se  trouve  près,  auprès  d'une  personne  ou  d'une 
chose,  devant,  à  côté,  etc.  (Voy.  Aproismer.) 

Il  est  évident  que  dans  le  verbe  composé  aprocher, 
la  préposition  a  est  de  même  énergie  qu'en  cette 
ancienne  expression  «  procher  à  une  personne,  se 
«  procher  à  elle,  »  lorsqu'on  dit  l'ajtprocher.  (Voy. 
Procher.)  «  Saul  sur  sa  lance  s'apuiout  ;  e  les  curres, 
«e  feschiele  des  Chevalers  Vaprucout ,  etc.  » 
(Livres  des  Rois,  ms.  des  Cordel.  fol.  41,  R°  col.  1.) 


«  Se  le  cerf  est  froyé,  neVaprouche  m\e.  »  (Modus 
et  Racio,  MS.  fol.  2G,  V°.) 

On  exprimoit  deux  fois  un  rapport  suffisamment 
indiqué  par  la  préposition  initiale  A'aprocher,  en 
disant  aprocher  à  une  personne,  à  une  chose.. 
«  Por  ceu  vint  en  cest  munde  li  soloz  de  justice... 
«  ke  tuitcil  k'enlumineit  vorroient  estre,  aproches- 
"  sent  h  lui.  «  (S'  Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  71.) 
«  Aprocheons  h  la  taule  (1),  et  d'un  chascun  de  ces 
«  maz  assaverons  (2).  »  (Id.  ibid.  p.  350.)  «  Li  Pru- 
«  veire  ki  sacrefiouent  es  munz,  ne  se  apriichonent 
«  pas  al  altel  Nostre  Seigneur  en  .lerusalem.  » 
(Livres  des  Rois ,  ms.  des  Cordel.  fol.  151 ,  R"  col.  1.) 
C'est  avec  même  inutilité  qu'en  substituant  vej's 
ou  de  à  cette  seconde  préposition  A,  l'on  a  dit  : 
«  Cume  Golias  vers  David  apruçad,  David  curut 
«  encontre.  »  (Livres  des  Rois,  ms.  des  Cordel.  fol. 
23.)  Cl  La  Dame  aprescad  vers  celé  compaignie.  » 
(Ibid.  fol.  33.)  «  David  vers  le  Reis  s'fl7;resd;rt(/,  etc.  » 
(Ibid.  fol.  32,  R°col.  1.) 

.  .  .  Tant  par  grâce  s'apressa 

De  nous,  qu'en  luy  nous  ennexa, 

Sans  jamais  faire  départie. 

J.  de  Meun,  Tesl.  vers  1251-1253. 

Dans  un  sens  relatif  à  l'idée  du  mouvement  par 
lequel  on  aproche  en  s'avançant  vers  les  personnes 
ou  vers  les  choses,  on  a  dit  figurément  :  »  Li  termes 
«  del  coronement  rt;;roif«,  et  fu  coronez,  etc.  » 
(Villehard,  p.  inS.)  «  Ala  totejor  parmi  la  foresl.... 
«  et  quant  il  vit  que  li  vespres  aperçoit,  si  comença 
«  à  plorer.  »  (Fabl.  ms.  du  R.  n°  7089,  fol.  78.) 

Quoique  ce  verbe  désigne  encore  aujourd'hui 
l'approche  du  temps  et  des'événemens  qu'il  amène 
à  sa  suite,  on  ne  diroit  plus  dans  la  signification 
active  d'avancer,  qu'on  «  approche  une  affaire,  un 
•<  voyage,  etc.  »  (Voy.  Ord.  T.  I,  p.  6i3.  —  Ger.  de 
Nevers,  part,  i,  p.  1Ô2,  etc.) 

Dans  la  signification  d'approcher,  faire  qu'une 
personne  ou'qu'une  chose  soit  proche  d'une  autre, 
on  a  désigné  la  familiarité,  la  faveur  auxquelles  on 
étoit  admis  auprès  de  son  maître,  en  disant  qu'on 
en  étoit  aproché.  «  Le  Trésorier  Robertel .  .  .  gou- 
«  vernoit  tout  le  Royaume  ;  car  depuis  (jue  M.  le 
«  Légat  d'Amboise  mourut,  c'estoit  Ihommeleplus 
«  aproché  de  son  maistre.  »  (Mém.  de  Rob.  de  la 
Marck,  Seigneur  de  Fleuranges,  ms.  p.  218.) 

Une  façon  très-naturelle  de  comparer  les  person- 
nes ou  les  choses,  c'est  de  les  approcher,  de  poser 
ou  mettre  l'une  devant  l'autre ,  de  mettre  l'une  à 
côté,  auprès  de  l'autre.  De  là,  on  a  dit  :  «  Ce  ne  sont 
«  certes  que  roses  de  vostre  accident,  si  vous 
»  Vaproche%,  et  en  faictes  comparaison  avec  ma  for- 
ci tune.  »  (L'Amant  ressusc.  p.  504.  —  Voy.  Aproprier.) 

Sans  doute  que  relativement  à  la  même  accep- 
tion, le  verbe  aprocher  aura  signifié  en  style  de 
procédure  encore  usité  dans  la  plaidoirie  Normande, 
assigner  quelqu'un  à  comparoir  devant  un  .luge,  le 
mettre  en  Justice,  le  meltre  pour  ainsi  dire  devant 
le  .Juge.  «  Que  noz  Railliz,  Prevoz  et  autres  Justi- 
«  cieVs,  de  leur  volonté  ne  de  leur  office,  ne  puis- 


Ci)  Table.  -  (2)  Goûtons. 


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AP 


«  sent  aucun  a/);;?'odi/('c  sans  aucun  fait,  détenir, 
»  ne  emprisonner.  »  (Ord.  T.  1,  p.  ôGi.)  «  Que  au- 
«  cuns  ne  soit  ajiprueltie~^d'oU\ce,  sans  information 
«  soufllsant.  »  (Ibid.  T.  11,  p.  407.) 

On  indiquoit  la  raison  de  l'assignation  à  compa- 
roir devant  un  Juge,  en  disant  qu'on  aprochoitune 
personne  sur  le  fait  d'usure ,  qu'on  «  Yaprochoit 
«  d'un  fait  en  général,  qu'on  Vaproclioit  de  coinp- 
•'  ter,  d'abuser  d'un  privilège,  etc.  »  (Voy.  Ord.  T.  1, 
p.  299.  —  Coût.  géii.  T.  1,  p.  1043.  -  Ord.  T.  1, 
p.  775.  —  La  Tliaumassière,  Coutume  de  Berry, 
p.  430,  etc.)  "  Aucun  des  Mestres  ne  pourra  aucune 
«  personne  upprochiev  de  ce  dont  la  congnoissance 
«  li  appartiendra,  jus(iues  à  tant  qu'il  en  soit  bien 
«  enfourmé.  »  (Ord.  T.  11,  p.  24G.) 

Peut-être  aussi  qu'en  plusieurs  cas  judiciaires 
ou  non  judiciaires,  ■^^  aprocher  d'un  fait  »  la  per- 
sonne qu'on  soupçonnoit  ou  qu'on  savoit  eu  être 
coupable,  c'étoit  en  quelque  sorte  la  rapprocher  de 
ce  même  fait,  le  lui  faire  reconnoitre  en  la  rappro- 
chant des  lieux,  des  temps  el  des  circonstances  qui 
pi-ouvoient  qu'elle  en  étoit  coupable.  «  Que  l'en  ne 
«  puisse,  en  cas  de  crime,  aller  encontre  les  Nobles 
«  par  dénonciation,  ne  par  soupe(;on,  ne  eus  juger 
«  ne  condampner  par  enquestes,  se  il  ne  s'y  met- 
«  tenl;  jaçoit .  .  .  ([ue  la  souspeçon  pourroit  estre 
«  si  grant  et  si  notoire  que  li  souspeçonnez  contre 
"  qui  la  dénonciation  seroit  faite,  devroit  demeurer 
«  en  l'hoslel  de  son  Seigneur...  une  quarantaine.... 
«  et  se  en  ce  termine  aucun  ne  Vajijirocluiit  du 
«  fait,  etc.  »  (Ord.  T.  I,  p.  558.)  «  Leur  plaise  uions- 
«  trer  au  Roy  que  il  ne  veuille  se  esmovoir  envers 
«  Monseigneur,  ne  tant  Yaprocher  de  ce  qu'il  tient 
«  des  Anglois  en  sa  compaignie.  »  (D.  Lobineau  , 
Hist.  de  Bret.  T.  11,  pr.  col.  581.)  C'est  au  contraire 
le  fait  qui  est  rapproché  et  mis  sous  les  yeux  du 
coupable,  lorsqu'on  le  lui  reproche.  (Voy.  Raprociier 
et  Reprocher.) 

Enfin,  "  approclier  son  droit,  »  c'étoit  le  prouver, 
le  mettre  sous  les  yeux  de  celui  à  qui  on  vouloiten 
faire  connoitre  la  justice.  «  Enseigner  ceaus  que 
«  mester  en  auront,  el  auront  droit  et  le  requerront, 
«  de  savoir  le  «yjî'oc/ricr  el  desreigner  ;  et  à  ceaus 
«  à  qui  l'on  requerra  ce  que  estlor  droit,  desavoir 
«  les  esloigner  et  deffendre.  »  (Assises  de  Jérusa- 
lem, chap.  V,  p.  16.  —  Voy.  Aprob.) 

CONJIG. 

Aprecerum,  ind.  f.  Approcherons.  (Livres  des  R.) 
Apresçad  et  Apreschad,  passé  déf.  Approcha.  (Ib.) 
Aprochessent,  sub.  imp.  Approchassent.  (S"  Bern.î 
yl/»7/('/(«HiHs,passé  déf.  Approchâmes.  (Liv.desR.) 
Apruclioiient,  ind.  imp.  Appiochoient.  (Ibid.) 
Aprucled,  part.  Approché.  (Ibid.  fol.  130,  R".) 
Aprucoud,  ind.  imp.  Approchoil.  (Ibid.  fol.  41.) 

VARIANTES  : 
APROCHER.  S-  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  71. 
Apercer.  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7989,  fol.  78,  V»  col.  2. 
Aperchier.  ilodus  et  Racio,  MS.  fol.  163,  V». 
Appresser.  J.  de  Meun,  Test,  vers  1251,  etc.. 


Approcher.  Orth.  subsist.   —  Rob.  Estienne ,   Nicot  et 
Monet,  Dict. 
Approchier.  OrJ.  T.  I,  p.  562,  etc. 
Approucher.  J.  Marot,  p.  57,  etc. 
Approuchiek.  Ord.  T.  III,  p.  138,  etc. 
Aprescer.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  33,  V». 
Aprescher.  Ibid.  fol.  32,  R»  col.  1. 
Aprocer.  Villehard,  p.  26. 

Aprochier.  Assises  de  Jérusalem,  chap.  v,  p.  16,  etc. 
Aproicer.  Villehard,  p.  108. 
Aproucher.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  26,  V",  etc. 
Aprouchier.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  181,  col.  1,  etc. 
Aprucer.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  23,  R'  col.  3. 
Aprucher.  Ibid.  fol.  53,  R»  col.  2. 
Apruchier.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  332,  V». 
Aprucier.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  130,  R°  col.  2. 
Apruecher.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  13,  R»  col.  1. 

Aproismer,  verbe.  Approcher,  s'approcher. 
Lorsqu'on  sait  que  de  propè  les  Latins  ont  fait  le 
superlatif  yjrox/Hie,  d'oîi  le  verbe  approximare,  en 
françois  aproismer,  aprismer,  aprimer,  apremier, 
apermcr,  on  ne  s'étonne  plus,  qu'abstraction  faite 
de  l'idée  superlative,  le  verbe  apruismer,  de  même 
origine  qua])rocher,  ait  eu  même  signification. 
Aussi  disoit-on  indifféremment  aprocher  ou  aprois- 
mer les  personnes  et  les  choses,  aprocher  o\i  aprois- 
mer à  elles,  s'aprocher  ou  s'aproismer  d'elles,  etc. 
(Voy.  Aprismement  et  Aprocher.) 

La  Dame,  quant  le  vit  venir, 

Isnelement  prent  à  fuir  ; 

Le  S'  hom  le  vait  enoauchant, 

Auques  le  va  jà  aproisinaiit. 

Vie  de  S"  Marie  ÉgypI.  MS.  de  Sorb.  chif.  LXI,  col.  21. 

Tout  li  moisnet  (1)  dehors  estoient 
Qui  au  blé  aproismier  n'osoient. 

Bestiaire,  MS.  duR.  ii"  7989,  (ol.  181,  V"  col.  2,  fabl.  83. 
Delez  l'erabuchement  passèrent  ; 
Mes  onques  point  n'i  aperinèrent. 

Alliis,  MS.  fol.  95,  R-  col.  2. 
Et  empoisonne  et  envenyme 
Tout  homme  qui  de  luy  s'aprime. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  17iG4  et  17465. 

Au  figuré,  «  s'«ion)H.er  aux  raisons  »  de  quelqu'un, 
c'étoit  approcher  de  lui  par  la  façon  de  sentir  et  de 
raisonner,  se  rapprocher  du  sentiment  d'après 
lequel  il  raisonnoit.  «  Les  raisons  qu'ilz  y  mettent 
«  sont  moult  courtoises  ;  et  toutesfois  je  ne  m'y 
<>  pourroye  pourtant  aprimer  :  car  l'ardeur  de  mon 
"  amour,  etc.  >■  (Percef.  Vol.  VI,  fol.  102,  V°  col.  2.) 
C'est  encore  relativement  à  la  signification  pro- 
pre d'approcher  deux  personnes  fune  de  l'autre, 
qu'on  a  dit  : 

A  tant  leva  un  mal  talenz 

Entre  les  pères  as  enfanz... 

Geste  chose  fist  destorber 

Les  deus  enfanz  à  assembler. 

D'eus  aprimer  par  mariage. 

Pyrame  et  Tisbé,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  98,  R'  col.  3. 

VARIANTES  : 
APROISMER.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  509. 
Apermer.  Athis,  MS.  fol.  95,  R°  col.  2. 
Approimer.  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  196,  col.  2. 
Apremier.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  112. 
Apresmier.  Ibid.  p.  71. 

Aprimer.  Ibid.  p.  94.  -  Rom.  de  la  Rose,  vers  17465. 
Aprimier.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  60. 

APRI3.MER.  Floire  et  Blanchetlor,  MS.  do  S'  Germ.  fol.  197. 
Aprismier.  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7615,  fol.  79,  V»  col.  2. 


(1)  Moineaux. 


AP 


93  — 


AP 


Aproimer.  Bestiaire,  JIS.  du  R.  n»  79 
Aproismier.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  69 


[»,  fol.  164,  V»  col.  1. 


Api'ompt,  part.  Emprunté.  Dans  le  sens  qu'in- 
dique rélymologie  la  plus  vraisemblable  de  promp- 
IHS,  participe  du  verbe  //roinere,  une  chose  que /rti 
aprompte,  est  une  chose  que  j'ai  fait  mienne,  en  la 
prenant  de  celui  qui  consent  à  ce  que  j'en  use 
comme  d'une  chose  ù  moi,  et  par  conséquent  tou- 
jours prête  pour  mon  besoin.  ^Martinius,  Lexic. 
philolog.  —  Vossius,  Etym.  Liug.  lat.)  On  voit  par 
cette  définition,  quelle  pourroit  être  l'analogie  de 
la  signification  de  l'adjectif  prompt ,  prêt  à  faire 
une  chose,  avec  celle  du  participe  aprompt,  em- 
prunté. «  Obligacion  ...  est  vestue  ...  de  chose, 
«  quaunt  ascune  chose  est  aprompt  de  rendre  à 
«  certeinjour;  et  par  ceux  enpromptz  sount  les 
«  dettours  obligés  as  creaunsours  de  mesme  les 
«  choses  apromptes  rendre  en  ausi  bon  point ,  ou 
«  en  meillour,  corne  il  les  receurent.  »  (Britlon , 
des  Loix  d'Angl.  fol.  G2,  R°.  —  Voy.  Ai'romi'te.) 

Aprompte,  siibst.  Emprunt.  Il  semble  qu'rt- 
promple  soit  le  féminin  du  participe  rtyjcoHi/yf.  (Voy. 
Aprompt.)  Peut-être  que  par  ellipse  du  mot  somme, 
ce  participe  aprompte  aura  signifié  comme  substan- 
tif, la  même  chose  (\\xempriuil.  «  Poit  home  dever 
«  par  apromptes  de  deniers.  »  (Britton  ,  des  Loix 
d'Angi.  fol.  G9,  R°.  —  Voy.  Emprunt.) 

Apropriement,  subst,  masc.  et  fém.  Action 
d'approprier.  Appropriation.  L'acception  figurée 
d'approprU'nwnt  ou  iVajipropriance,  est  relative  au 
sens  élymolui;ii|ue  du  vciiie  aproprier,  soit  que  ce 
substantif  signifie  l'acliou  d'approprier  une  chose, 
de  la  rendre  propre,  de  la  disposer  dans  un  état  de 
propreté,  ou  l'action  de  se  l'approprier,  de  se  la 
rendre  propre,  de-s'en  assurer  la  propriété  par  des 
voies  légitimes  ou  illégitimes.  (Voyez  Cotgrave , 
Oudin  et  Monet,  Dict.) 

En  Bretagne,  Vapproprianee  ou  Y appropriement 
est  non-seulement  une  acquisition  de  propriété  de 
chose  immobiliaire  par  bannie  ou  par  laps  de  temps, 
mais  une  acquisition  de  propriété  avec  affranchis- 
sement d'hypothèques.  (Voy.  Laurière ,  Gloss.  du 
Dr.  fr.  T.  l,  p.  61.  —  Coût,  de  Bretagne,  au  nouv. 
Coût,  génér.  T.  IV,  p.  417.)  C'est  par  la  raison  que 
les  bannies  ou  proclamations  pour  Vapproprianee, 
l'acquisition  de  propriété,  purgent  les  hypothèques, 
qu'on  a  dit:  «  Àppropriance ,  en  la  Coutume  de 
«  Bretagne,  est  la  même  chose  que  Décret  parmi 
«  nous.  »  (Nouv.  Dict.  de  Droit.  —  Dict.  de  Tré- 
voux. —  A'oy.  Aproprier.) 

VARIANTES  ! 
APROPRIEMENT.  Coutume  de  Bretagne,  au  Nouv.  Coût, 
gén.  T.  IV,  p.  417,  col.  1. 
Appropriement.  Cotgrave,  Oudin  et  Monet,  Dict. 
Appropriance.  Cotgr.  Dict.  —  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  fr. 

Aproprier,  verbe.  Approcher,  rapprocher,  assi- 
miler, comparer,  etc.  On  croit  avec  les  Etymologis- 
tes  latins,  que  de  j5ro;>é,  proche  en  françois,  s'est 


îormé proprium,  en  françois  propre.  (Voy.  Martinius, 
Lexic.  philolog.  —  Vossius,  Etym.  Ling.  lat.)  Cette 
opinion  sur  l'élymologie  de  Vud'ieciU proprium  ,  et 
par  conséquent  sur  celle  du  verbe  latin  barbare 
ajipro/irtare,  en  françois  approprier  (1  ,  est  d'autant 
plus  vraisemblable,  que  dans  notre  ancienne  lan- 
gue il  y  avoit  une  analogie  réelle  entre  les  signifi- 
cations des  verbes  approcher  et  aproprier.  Il  est 
évident  que  l'acception  d'approprier  étoit  relative  à 
celle  d'approcher,  rapprocher,  réunir  en  rappro- 
chant, lorsque  dans  le  sens  de  l'ancienne  expression 
<-  raprocher  un  fief,  >■  on  disoit  figurémenl  :  «  Nous 
«  avons  approprié,  unie  et  annexé ,  .  .  .  .  appro- 
«  prions,  unions  et  annexons  perpétuelement  à 
«  nous,  à  noz  Successeurs  et  au  Domaine  de  la 
«  corone  de  France,  etc.  »  (Ord.  T.  V,  p.  413.  — 
A'Oy.  Aprociier  et  Raprocher.) 

C'est  encore  relativement  à  la  signification  d'ap- 
procher une  chose  de  l'autre  pour  juger  quel  rap- 
port elles  ont  entr'elles ,  qnapjiroprier  signifioit 
assimiler,  comparer.  «  Us  avoyenl  pris  or  et  argent 
«  pour  rendre  Bourbourg  ...  et  vouloyent  les  au- 
>'  cuns  gens  en  Angleterre  ce  fait  approprier  h 
"  trahison.  »  (Froissart,  Vol.  III,  p.  2-2 i.)  «  Le  dain 
«  et  le  chevi'el  .  .  .  ont  cornes,  et  ycelles  représen- 
«  tent .  .  .  couronnes;  pour  quoy  je  puis  aproprier 
«  ces  deux  bestes  aux  Empereurs  et  aux  Rois.  » 
(Modus  et  Racio,  ms.  fol.  87,  \\) 

Les  significations  actuelles  du  verbe  approprier, 
ne  sont  pas  moins  analogues  que  les  anciennes  à 
celle  d'approcher,  pmsqu  approprier  les  choses,  les 
ajuster,  les  approprier,  les  ajuster  h  d'autres,  c'est 
les  rapprocher  en  les  comparant,  les  disposer  de 
façon  qu'elles  soient  entr'elles  dans  un  rapport 
conforme  à  certaines  vues  d'utilité  ou  d'agrément. 
L'effet  agréable  de  ces  rapports  est  ce  qu'on  nomme 
propreté. 

On  ajoute  qu'une  manière  très  simple  de  se  pro- 
curer la  jouissance  d'une  chose  et  de  s'en  assurer 
la  possession,  c'est  d'approcher  de  soi  cette  même 
chose,  de  l'avoir  proche  de  soi.  sous  ses  yeux,  sous 
sa  main.  De  lu,  le  verbe  approprier,  de  même  ori- 
gine qu'approcher,  aura  signifié  les  idées  de  pos- 
session et  de  jouissance  à  titre  de  propriété  légitime 
ou  illégitime.  (Voy.  Apropriement.) 

VARIANTES  : 
APROPRIER.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  87,  V". 
Approprier.  Orth.  subsist.  —  Froissart,  Vol.  III,  p.  234. 

Apte,  adj.  Qui  a  certaine  disposition.  Qui  a  cer- 
taine proportion.  Il  est  probable  que  l'orthographe 
acte  ('2)  est  une  altération  du  mot  apte  encore  usité 
au  Palais,  et  que  dans  un  sens  relatif  à  l'acception 
générale  du  latin  aptus,  on  a  désigné  une  personne 
qui  n'étoit  pas  formée  au  vice,  qui  n'y  avoit  aucune 
disposition  acquise  ou  naturelle,  en  disant  qu'elle 
étoit  «  non  acte  et  non  suspecte  de  quelque  vice.  » 
(Voy.  Hist.  de  la  Toison  d'or.  Vol.  II,  fol.  139.) 

Lorsque  cette  même  personne  étoit  formée  avec 


(1)  Quoique  ce  mot  se  trouve  dès  le  xuv  siècle,  il  est  de  formation  savante.  (N.  E.)  —  (2)  Il  est  probable  que  acle  est  la 
forme  aate  :  une  partie  de  l'a  aura  été  effacée,  (n.  e.) 


AQ 


^  94  — 


AR 


les  dispositions  nécessaires  pour  trouver  le  bonlieur 
dans  la  vertu,  et  ne  le  devoir  qu'à  elle-même,  on 
disoit  qu'elle  étoil  apte  de  soij-mesmes.  «  0  !  toy 
«  paourc  fol  et  insensé,  tu  ne  sçaiz....  de  quelle 

«  force  est  la  vertu Unliomme  ne  sçauroit  estre 

«  que  parfaitement  lieureux,  qui  est  comme  tout 
«  apte  de  soy-mcsmes,  ou  qui  en  soy  seul  met  et 
«  constitue  tout  le  sien.  «  (L'Amant ressusc.  p.  115.) 
Il  semble  qu'un  Chevalier  «^e  ou  aate,  étoit  celui 
qui  avoit  les  dispositions  acquises  et  naturelles  pour 
tous  les  exercices  de  Chevalerie,  pour  monter  à 
cheval,  pour  combattre,  etc. 

Moult  .sont  andui  bon  Chevalier, 
Et  moult  aatc,  et  moult  legier. 

Parlon.  de  Blois,  MS.  de  S'  Cxerm.  fol.  136,  R"  col.  I. 
Ce  est  Atys  li  bien  ates, 
Au  pié  votiz,  au  cuisses  plates, 
Au  fier  corace,  à  douz  semblant,  etc. 

Alhis,  MS  fol.  ■32,  R-  col.  i. 

Peut-être  qu'en  prononçant  et  écrivant  apte,  l'on 
a  cru,  dans  le  siècle  de  l'érudition,  franciser  pour 
la  première  fois  l'adjectif  latin  rtyjfns  qu'on  nerecon- 
noissoit  plus  dans  les  anciennes  orthographes  ate 
et  aate.  Quoi  qu'il  en  soit,  la  signification  û'aate 
étoit  évidemment  la  même  que  celle  du  latin  aptus, 
lorsque  pour  désigner  la  juste  proportion  d'une 
chose,  on  disoit  qu'elle  étoit  aate. 

Puis  a  estroit  et  bel  chauciez 
Ses  bêles  janbes  et  ses  piez. 
Chances  de  soie  bien  aates  (1) 
Et  bons  sorchauz  d'escarlates. 

Parlon.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  143,  R'  col.  2. 

Notre  mot  aptitude,  qui  se  trouve  dans  Cotgrave 
et  Monet,  Dicl.  paroissoit  au  P.  Bonheurs  un  peu 
barbare.  (Dict.  de  Trévoux.) 

VARIANTES  : 
APTE.  Oitb.  subsist.  -  Essais  de  Montais^ne,  T.  II,  p.  314. 
Aate.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  1.S6,  R»  col.  1. 
Acte.  Hist.  de  la  Toison  d'or,  Vol.  II,  fol.  139,  Ro  col.  2. 
Ate.  Athis,  MS.  fol.  72,  R»  col.  1. 

Aquilaine,  adj.  fém.  Terme  de  Droit.  On 
observe  qu'Aquilius  Gallus,  contemporain  de  Cice- 
ron  et  son  ami,  fut  l'auteur  d'une  espèce  de  stipu- 
lation que  par  celte  raison  les  Jurisconsultes  fran- 
çois  du  xiv  siècle,  à  l'imitation  des  Jurisconsultes 
romains,  nommoienl  aquilaine,  en  latin  aquiliann. 
Quelle  que  fût  la  cause  d'une  ancienne  obligation 
litigieuse,  quelle  qu'en  fût  l'incertitude,  on'lixoit 
cette  obligation  par  la  stipulation  aquitaine,  qui  la 
changeoit  d'ailleurs  en  une  obligation  nouvelle  et 
verbale  dont  on  étoit  quitte  et  libéré  par  l'acceptila- 
lion.  «  Par  stipulation  aquilaine  les  obligations  et 
«  actions  de  toutes  choses  estoient  transférées  en 
«  stipulation  et  novées,  et  ladite  stipulation  estoit 
«  périmée  par  l'acceptilation.  »  (Bouteiller,  Som. 
rur.  Liv.  I,  tit.  xli,  p.  301t.)  ■•  Transaction  de  nou- 


«  velle  stipulation,  que  les  Clercs  appellent  stipu- 
«  lation  aquitaine,...  chose  incertaine  met  en  obli- 
"  galion  certaine  par  lien  de  paroles.  »  (Id.  ibid. 
p.  30G.)  «  Moyennant  certaine  transaction  que  nous 
«  fismes  ensemble  par  acquilaine  stipulation,  qu'il 
«  m'en  promist  à  rendre,...  je  fis  à  celui  quittance, 
«  et  luy  promis  que  rien  ne  luy  demanderoy-ie.  » 
(Id.  ibid.  p.  308.) 

VARIANTES  : 
AQUILAINE.  Bouteiller,  Som.  rur.  Liv.  I,  tit.  xli,  p.  30'j. 
Acquilaine.  Id.  ibid.  p.  308. 

Aquilant,  adj.  Bai  ou  vite.  (Voy.  Aquilin.)  Il  est 
probable  que  relativement  à  la  couleur  du  plumage 
de  l'aigle,  en  latin  aquila,  ou  bien  à  la  vitesse  de 
son  vol,  on  aura  désigné  par  l'adjectif  aquilant  (2) 
un  cheval  bai  ou  vite. 

Forqueres  point  le  destrier  aquilant. 

Rom.  d'Aubcry,  MS.  cité  par  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  619. 

Aqiiilé,  participe.  Courbé  en  bec  d'aigle.  Dans 
la  signification  particulière  de  notre  adjectif  aquilin, 
l'on  a  dit,  en  parlant  de  la  Force  personnifiée, 
qu'elle  avoit  les  «  ieuls  fort  pénélrans,  le  nés  aqui- 
"  lés,  et  la  couleur  clere  et  brune.  »  (Triomphe  de 
la  noble  Dame,  fol.  23,  V°.) 

Aquilin,  adj.  Qui  a  rapport  à  l'aigle.  Ce  mol  qui 
par  comparaison  se  dit  encore  d'un  nez  dont  la 
forme  a  quelque  rapport  à  celle  du  bec  de  l'aigle, 
s'est  dit  aussi  de  la  pierre  qu'on  nomme  aujourd'hui 
pierre  d'aigle,  parce  qu'on  la  trouve  quelquefois 
dans  le  nid  de  cet  oiseau.  C'est  peut-être  d'après 
l'observation  vraie  ou  fausse  de  Mathiole,  qui  assure 
que  sans  la  pierre  aquiline  ou  pierre  d'aigle  les 
petits  des  oiseaux  de  proie  ne  pourroient  éclore, 
qu'on  s'est  persuadé  que  celle  pierre  attachée  au 
haut  de  la  jambe  d'une  femme,  avançoit  et  facilitoit 
remaniement.  (Cotgrave  et  Oudin,  Dict.  —  Voy. 
Aquilant.) 

Ar,  subst.  Moitié.  On  observe  qu'en  langue  Alle- 
mande, Angloise,  Flamande,  etc.  le  mot  lialf  signi- 
fie moitié;  dans  le  sens  général  et  étymologique 
indiqué  par  Skinner,  partie  d'un  tout.  (Voy.  Junius, 
Elym.  Angiic.  —  Skinner,  Elym.  ling.  Anglic  )  Le 
changement  réciproque  de  /  en  r  et  de  r  en  /,  étant 
commun  à  toutes  les  Langues,  il  seroil  possible  que 
«r  fût  une  altération  de  ce  mot  /irt//",  prononcé  et 
écrit  sans  aspiration  et  avec  retranchement  de  la 
consonne  sifllante  f.  On  peut  d'ailleurs  fonder  cette 
conjecture  sur  l'identité  de  signification,  puisque 
dans  l'expression  Françoise  et  elliptique  deux  et 
rt?-(3),  le  mot  ar  signifie  évidemment  la  même  chose 
que  liatf  dans  l'expression  Angloise  •<  two  pence  and 
«  half-peny;  »  c'est-à-dire  deux  sous  et  moitié  de 
sou,  deux  sous  et  demi.  La  preuve  est  que  dans  les 


(1)  Acijes  vient  ici  do  adaplus,  «  bien  justes  ;  ><  le  mot  se  trouve  déjà  dans  la  Chanson  de  Roland  en  parlant  de  destriers, 
vers  1651  et  3876  :  «  E  lur  cheval  sunt  curnnt  el  aate;  »  il  ne  peut  signifier  dans  notre  exemple  rapide,  comme  le  croit  Diez, 
qui  le  l'ait  venir  du  nordique  al.  Dans  la  Chanson  de  Roland,  même,  il  peut  signifier  maniable,  bien  dressé  ;  au  vers  suivant 
on  voit,  en  effet,  gu'on  lâche  les  rênes  aux  chevaux  ;  il  faut  donc  qu'ils  soient  doriles  :  enfin  on  ne  peut  dire  qu'un  cheval 
courant  est  presse,  ce  serait  une  tautologie  trop  naïve,  (n.  e.)  —  (2)  Signifie  brun,  comme  le  latin  ai/uilua,  qu'on  trouve 
déjà  dans  Plante  :  «  Staturà  non  magnà,  corpore  aquilo  :  ipsa  ea  est.  »  (Pasnus,  V,  2,152.)  (n.  e.)  —  (3)  Xe  faudrait-il  pas  lire 
deux  et  as?  As  signifierait  un,  comme  au  jeu  de  dés.  On  trouve  d'ailleurs  dans  les  mémoires  de  François  de  Scepeaux, 
publiés  en  1757,  au  tome  II,  page  8  :  «  Il  demeura  sur  l'heure  en  suspens,  et,  comme  l'on  dict,  entre  cieitx  et  as.  »  (n.  e.) 


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Œuvres  de  Rabelais,  édition  de  Dolet,  l'expression 
six-blancs,  c'est-à-dire  deux  sous  et  demi,  répond 
à  celle  de  deux  et  ar  en  ce  passage.  «  Aulx  funé- 
.'  railles  du  Roy  Charles,  l'on  avoit  en  plain  marché 
«  la  toison  pour  deux  etar.  »  (Rabelais,  T.  II,  p.  130.) 
Il  est  probable  que  relativementà  l'idée  de  moitié, 
de  partie  d'un  tout,  on  aura  nommé  rythme  de  deux 
et  ar,  une  espèce  de  rytlime  où  deux  ou  trois  lignes 
de  semblable  longueur  et  léonines  étoient  croisées 
par  une  autre  ligne  qui  n'ayant  qu'une  partie  de  la 
longueur  des  précédentes,  étoit  sans  doute  regardée 
comme  demi-ligne,  moitié  de  ligne.  Voici  un'exera- 
ple  de  cette  espèce  de  rythme  : 

Princes  et  Roys  qui  estes  hault  montez 
En  royaumes,  en  ducliez,  en  contez  ; 
Du  hault  degré  fault  que,  les  pas  comptez, 
Ou  que  à  ung  sault, 
Vous  chéez  bas,  sans  que  on  vous  donne  assault,  etc. 

Par  abus  de  l'extension,  l'espèce  de  rythme  où  ces 
deux  ou  trois  premiers  vers  étoient  croisés  par  un 
vers  d  égale  mesure,  aura  été  aussi  nommée  rythme 
de  deux  et  ar.  «  Une  espèce  de  rytlime...  s'appelle 
"  aeiix  et  ar,  pour  ce  que  deux  ou  trois  lignes  de 
■<  semblable  longueur  sont  léonines,  et  celle  qui 
«  croyse  est  plus  courte;  ou  de  semblable  lon- 
-•  gueur.  ..  (Fabri,  Art  de  Réthorique,  L.  II,  fol.  23.) 

Arabe,  subst.  fém.  Arabie.  (Voy.  Akabiant.)  Pays 
d  Asie  dont  on  altéroit  le  nom  latin  Arabia,  en  écri- 
vant Araibe,  Arabe,  Arable,  etc. 

Ematite 

Ke  de  vertu  n'est  pas  petite, 

D'Ethyope  r'est  aportée. 
Et  d'Afabe  o  ele  est  née. 

Marbodus,  de  Gemni.  art.  xxxii,  col.  1CG4. 

H  est  possible  que  Arage  soit  formé  d'Arabia, 
comme  le  mot  rage  du  latin  rabies,  et  que  relative- 
ment à  l'idée  de  l'Arabie  heureuse  si  riche  en  mines 
d  or  et  d  argent,  on  ait  désigné  d'immenses  riches- 
ses par  l'expression  grand  trésor  A' Arage  (1). 

Li  plus  rice  sont  si  tenant  ; 
Ce  sont  cil  ki  or  vont  cloant  ; 
Parmi  lor  grant  trésor  d' Arage 
Muèrent  de  faim  et  vont  à  rage. 

Ane.  Poèt.  fr  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1355. 

variantes: 
ARABE.  Marbodus,  de  Gemm.  art.  viii  col  1G48 
Arable.  Fabl.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  1,  Ro  col  3    ' 
Arage.  Ane.  Poët.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1355 
Araibe.  Marbodus,  de  Gemm.  art.  1,  col  1640 
Arrabe.  Pb.  Mouskes,  MS.  p.  134. 

Ai-al)ech,  adj.  Qui  est  propre  aux  Arabes  C'est 
avec  ellipse  du  substantif  langage,  que  Montaigne 
parlant  de  son  éducation,  disoit  :  «  J'avois  plus  de 
"  SIX  ans  avant  que  j'entendisse  non  plus  de 
«  François  ou  de  Périgourdin,  que  à' Arabesque  » 
(Essais  de  Montaigne,  T.  I,  p,  205.) 

Irbougua  bûcha  Nassardin  : 
Si  h  a  dit  en  son  latin, 
C'est-à-dire  en  Arabech,  etc. 

G.  Machault,  prise  d'Alexandrie,  MS.  p.  230,  R-  col.  1. 


En  sous-entendant  le  substantif  ornement  les 
Peintres  et  les  Sculpteurs  ont  désigné  et  désignent 
encore  par  l'adjectif  Arabesque,  une  espèce  d'orne- 
mens  propres  aux  Arabes  (2),  ces  neurons  ou  rin- 
ceaux d'où  sortent  des  feuillages  faits  de  caprice,  et 
dans  le  goût  des  Arabes.  (Voy.  Cotgrave,  Dict.) 

VARIANTES  : 
ARABECH.  G.  Machaut,  prise  d'Alexandrie,  MS  n   230 
Arabesque.  Essais  de  Montaigne,  T.  I,  p.  265. 

Arabeis,  subst.  masc.  plur.  Arabes.  Les  habi- 
tans  de  1  Arabie;  en  latin  Arabes. 

Evax  fut  un  multe  riches  Reis  • 
Lu  règne  tint  des  Ambais. 

Marbodus,  de  Gemm.  prolog.  col.  1638. 
VARIANTES  '. 

ARABEIS.  Marbodus,  de  Gemm.  prolog.  col  1638 
ARAB.4IS.  Id.  ibid. 

Arabi,  adj.  Qui  est  d'Arabie.  Rapide.  Les  che- 
vaux qu  aujourd'hui  l'on  nomme  Barbes  parce 
qu  ils  viennent  de  Barbarie,  sont  de  race  Arabe  de 
la  race  des  chevaux  qu'anciennement  on  nommoit 
Arabts. 

Cbevaulx  d'Espaigne  et  Arabis. 

Rom.  d'Athis,  iMS.  cilé  par  Du  Cange,  Gl.  1.  T.  III,  col.  120. 

On  écrivoit  arabis  au  singulier,  comme  le  prou- 
vent les  deux  vers  suivans  où  ce  mol  semble  exuri- 
mer  la  rapidité  du  cours  d'un  fleuve,  comparée  à  H 
vitesse  de  la  course  d'un  cheval  arabi.  Peut-être 
aussi  qu  en  ce  sens  arabis  est  l'adjectif  latin  ravi- 
dus,  rabidus,  avec  l'«  emphatique. 

Entr'aus  et  la  terre  as  formis 
Qeurt  un  llueves  molt  arabis. 

Bestiaire  de  la  Div.  Escrit.  MS.  du  R.  u»  7989,  fol.  195,  V  col.  1. 
VARIANTES  : 
ARABI.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  T.  III,  col  3i3 
Arabis.  Bestiaire  de  la  Div.  Escrit.  MS.  du  R.  fol.  195. 

Ambiant,  adj.  Qui  est  d'Arabie.  (Voy.  Arabe) 
L  or  le  plus  estimé  aujourd'hui  est  l'or  d'Asie,  que 
nos  anciens  Romanciers  paroissent  avoir  nommé 
or  Un  arabiant,  parce  qu'un  des  pays  d'Asie  le  plus 
fécond  en  mines  d'or  est  l'Arabie  heureuse,  que 
les  relations  des  croisades  avoient  sans  doute  fait 
connoilre. 

En  une  balancetes  d'orfm  arrabiant 
A  mis  loel  Aristotes  :  quant  ot  fait  son  talant,  etc. 
Rom.  d'Ale.\andre,  MS.  du  R,  n"  6987,  fol.  208,  R"  col.  2. 
VARIANTES  : 
ARABIANT.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  T  I   col   873 
Arrabiant.  Rom.  d'Alex.  MS.  du  R.  n"  6987,  fol.  208 
Arrabien.  Lanc.  du  Lac,  T.  I,  fol.  73,  V»  col.  1. 

Arabie  ftf/jf-.  Arabique.  L'adjectif  arabique,  qui 
est  aujourd  hui  de  tout  genre,  étoit  anciennement 
le  féminin  cVarabic.  (Voy.  Cotgrave,  Dict.) 

Arabiois,  adjectif.  Qui  est  propre  aux  Arabes. 
(Voy.  Arabech.)  u  Salam,  c'est  Diex  en  la  langue 
«  Arabioisse.  »  (Ilist.  de  Charlemagne,  ms.  de  la 
Clayette,  p.  93,  col.  2.) 

Arable,  adjectif.  Propre  à  être  labouré,  qui  est 


a  ^h\btol^'^f!ÊjZZ.  t)-\i'ZiX'iron'l  San'^l'^ntlâ-^i •'"  'î'^^  '"  '^^^^^"'^.^  précédente  était  douce  :  de  même  on 
des  versets  du  Coran  et  non  des  feumages^lN.  e.-^)   "^^"^^  ^  «"'"I""^  greco-romame  ;  Varabesque  arabe,  d'aiUeurs,  entrelace 


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labourable.  Propre  îi  labourer,  qui  est  de  labour. 
On  a  mille  preuves  que  dans  quantité  de  mots  où 
la  lettre  finale  s  est  aujourd'hui  le  signe  du  nombre 
pluriel,  cette  lettre  n"otoil  anciennement  qu'un 
caractère  très-ordinaire  de  ressemblance  entre  la 
terminaison  latine  et  la  françoise.  C'est  ainsi,  par 
exemple,  que  d'après  le  mol  latin  arabilis,  on  écri- 
voit  au  singulier  arables.  (Voy.  Gloss.  du  P.  Labbe, 
page  489.) 

Il  y  a  sans  doute  moins  de  raison  que  de  caprice 
à  préférer  l'expression  terres  labourables,  à  l'an- 
cienne expression  terres  arables,  qu'on  trouve  dans 
Cotgrave,  Oudin,  Nicot  et  Monet,  Dict.  iD.  Lobineau, 
Hist.  de  Paris,  ï.  V,  pr.  p.  G32,  col.  1,  etc.)  Un  de 
nos  anciens  Poêles,  comparant  la  Vierge  mère  à  une 
terre  féconde  sans  labour,  disoit  qu'elle  éloil  terre 
non  arable.  (Voy.  Arer.) 

Tu  es  la  terre  non  arable, 


Vierge  sacrée  et  vénérable  : 

En  toy  s'est  fait  œuvre  admirable, 

Oultre  usaige  de  Nature,  etc. 

Crêlin,  Poés.  p.  32  et  33. 

Dans  le  second  sens,  on  nommoil  bœuf  arable, 
un  bceuf  de  labour,  un  bœuf  propre  au  labourage. 
«  Fit  publier...  que  homme  de  guerre...  ne  fust  si 
«  hartly  de  tuer  ny  faire  tuer  bœuf  arable  ny  vache 
«  laiclière.  »  (Mathieu  de  Coucy,  Ilist.  de  Charles 
VII,  p.  GIO.  —  Voy.  Ar.^toire.) 

VARIANTES   : 
ARABLE.  D.  Lobineau,  Hist.  de  Paris,  T.  V,  pr.  p.  632. 
Ar.vbles.  Gloss.  du  P.  Labbe,  p.  489. 
Ar.\ule.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  Du  C.  T.  I,  col.  268. 

Arage,  subst.  masc.  Terre  labourable.  Terrage. 
Campagne.  La  signification  de  ce  mot  arage  étoit  la 
même  que  celle  de  l'expression  terre  arable, 
lorsqu'on  disoit  :  «  Arages  seans  en  ban  et  ou 
«  finage  de  ladite  ville,  etc.  »  (D.  Carpentier,  ubi 
sujyra  ;  Tit.  de  13-24.  —  Voy.  Arable.) 

On  doute  qu'il  signifie  la  même  chose  dans  un 
Titre  de  1255,  où  on  lit  :  »  Ont  donné  et  octroyé... 
«  quant  que  ils  avoient...  en  tailles,  en  bans,  en 
«  justices  grandes  et  petites,  en  plaiz  généraux, 
«  en  araiges,  eu  prez,  en  corvées,  en  terres  gaigna- 
«  blés,  etc.  »  (Perard,  Rec.  pour  l'IIist.  de  Bourgo- 
gne, p.  483.)  Peut-être  ces  «r«/(/es  sont-ils  des  droits 
de  teirage,  de  l'espèce  de  celui  qui  paroit  indiqué 
dans  une  Charte  d'alfranchissement  en  faveur  des 
habitans  de  Bourlemontetde  Frebecourt.  «  Devront 
«  et  paieront  les  habitans  au  Seigneur  autant 
«  à'araige  comme  de  denré ,  de  toutes  labours 
«  qu'ils  feront  es  bans  et  linage  de  Boullaumonl  et 
«  de  Frebecourt.  »  (Ord.  T.  VI,  p.  631.)  On  sait  que 
l'obligation  de  payer  ce  droit  à'arage  (1)  qu'en  cer- 
taines Coutumes  on  nomme  terrage,  étoit  une  con- 
dition ordinaire  des  concessions  de  terres  arables 
que  les  Seigneui-s  faisoient  ii  leurs  vassaux. 

11  est  possible  que  par  extension  de  l'acception 
terre  labourable,  ce  même  mot  arage  ait  signifié  en 


général  campagne  où  on  laboure,  et  qu'en  opposant 
la  campagne  à  la  ville,  on  ait  dit  : 

Li  traïsons  tout  par  tout  meuce  ;... 
Par  coi  no  vile,  n'o  nrage 
Nus  ne  veut  faire  mariage 
Por  grant  avoir  ne  por  argent  ; 
Ains  le  fait  on  por  honir  gent. 

Ane.  Poèt.  Fr.  MSS,  avant  1300,  T.  IV,  p.  1321. 

Peut-être  que  soubmettre  Vairage,  c'étoit  asservir 
leshabitans  delà  campagne,  les  soumettre  à  quelque 
espèce  de  servitude  aussi  odieuse  à  l'humanité  que 
nuisible  à  l'Agriculture. 

Qui  Seignourir  veult  amiableraent, 

Et  en  grâce  tenir  son  héritage  ; 

De  tel  douçour  doit  gouverner  sa  gent, 

Non  pas  conlr'eul.K  user  de  divers  langaige. 

Eulx  retranchier,  et  soubmettre  {2)Vairage, 

Leur  fait  haïr  tel  dominacion, 

Le  lieu  fuir,  etc. 

Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  30,  col.  1. 

Peut-être  aussi  que  l'expression  «  soubmettre 
«  Vairage,  «  désigne  en  ces  vers  les  attentats  de  la 
tyrannie  féodale  contre  la  propriété  des  héritages. 
On  a  la  preuve  qn'airage,  de  même  origine  que 
hérage,  a  signifié  héritage.  (Voy.  Hérage.) 

variantes  : 
ARAGE.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  Du  C.  T.  I,  col.  268. 
Airage.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  30,  col.  1. 
Araige.  Ord.  T.  VI,  p.  631. 

Aragne,  sabst.  fém.  Araignée.  Toile  d'arai- 
gnée. Espèce  d'étoffe  claire  et  légère.  Treillis  de 
fil-d'archal.  Quelque  différente  que  soit  la  termi- 
naison des  noms  aragne  et  aragnée,  il  est  possible 
qu'il  n'y  ait  aucune  réalité  dans  la  distinction  que 
Monet  semble  indiquer,  en  opposant  aragne,  en 
latin  araneus,  à  aragnée,  en  latin  aranea  (3).  (Voy. 
Monet,  Dict.)  Il  résulteroit  de  cette  distinction  appa- 
rente, que  le  nom  françois  aragne .  originairement 
masculin,  auroit  été  fait  du  genre  féminin,  par  une 
erreur  dont  la  terminaison  ù'aragne  peut  être  la 
cause. 

....  Uirmiinc  ménagère, 

Filant  ses  rez  à  l'entour 

De  la  mouche  passagère,  etc. 

D.  Florès  de  Grèce,  Épil.  p.  8,  col.  1. 

Pour  signifier  que  la  Justice  n'est  inflexible  et 
rigide  que'  l'our  le  coupable  sans  argent  et  sans 
faveur,  on  a  dit  : 

.  .  .  .Tustice  est  la  toile  de  Vyrahujne 
Qui  ne  retient  que  les  poures  chetis  : 
Les  grans  larrons  laisse  aler  et  aplaine, 
En  tous  Estais  et  par  tous  les  Pais. 

Eust.  Desch.  poës.  MSS.  p.  251,  col.  3. 

L'espèce  de  métonymie  par  laquelle  le  nom  de 
l'araignée  a  signifié  l'ouvrage  même  de  cet  insecte, 
une  toile  d'araignée,  paroît  d'autant  plus  naturelle, 
que  le  verbe  hébreu  dans  lequel  Ménage  croit  voir 
l'origine  assez  vraisemblable  du  nom  aragne  ou 
aragnée,  en  latin  araneus  ou  aranea,  en  grec 
dqàxfi,,  désigne  l'opération  de  l'araignée  qui  tire  de 
son  corps  la'  substance  gommeuse  dont  elle  forme 


(1)  ou  champart.  —  (2)  Veut  dire  mettre  au  dernier  rang  le  labourage;  arage  vient  d'une  forme  araticum,  devenue  plus 
tard  aragium.  (N.  E.)  —  (3)  Anigne  est  l'animal  même  et  vient  d'aranea,  avec  l'accent  sur  ra  ;  araignée  était  primitivement 
la  toile  de  l'insecte  et  vient  de  araneata,  avec  l'accent  sur  at.  (n.  e.) 


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le  tissu  merveilleux  de  ses  filets,  (toy.  Ménage, 
Dict.  élym.  au  mot  aragnée.  —  Monet,  Dict.^  On  sait 
que  les  filandres,  ces  fils  blancs  et  longs  qui  volent 
en  l'air  dans  les  beaux  jours  d'automne,  sont  l'ou- 
vrage d'une  espèce  d'araignées  vagabondes,  plus 
petites  et  plus  noires  que  les  autres.  Les  fils  que 
ces  araignées  n'abandonnent  pas  au  vent,  elles  les 
étendent  sur  les  chaumes,  ou  sur  l'herbe  des  prai- 
ries, en  forme  de  tissu,  de  crêpe  qu'on  nommoit 
aragne.  «  La  praerie...  estoit  ourdye  et  tissue 
«  d'arignes  que  avoient  ouvré  les  arignées,  h  la 
«  doulceur  de  la  nuyct  et  de  l'aube  du  jour.  » 
(Percef.  Yol.  V,  fol.  72.  —  (Voy.  Abantelles.) 

Il  est  probable  que  dans  un  ancien  compte  de 
fournitures  pour  habillement  de  Chevaliers  et 
d.'Ecuyer&,\'iiraing  ne  [i]  est  une  espèce  d'étoffe  claire 
et  légère,  comme  le  crépon,  le  crêpe  ou  le  voile,  et 
dont  on  comparoitle  tissu  à  celui  de  Varagne,  delà 
toile  d'araignée.  «  Pour  151  aunes  de  brunelte,  en 
«  plusieurs  pièces,  de  la  petite  moison  de  Louvain,... 

«  pour  4  escarlates  vermeilles  de  Bruxelles, 

«  2  ijmingnes  de  la  grant  moison  de  Louvain,  etc.  » 
(Du  Cange,  Gloss.  lat.  T.  IV,  col.  7iO.) 

Enfin,  la  toile  de  l'araignée  des  jardins  est  un 
lissu  à  claire  voie,  une  espèce  de  réseau  auquel  on 
a  comparé  un  treillis  de  fil  d'archal,  «  une  contre- 
o  vitre  en  treillis  de  fil  d'archal,  »  lorsqu'on  a  dési- 
gné ce  treillis  par  le  nom  de  Varagne.  »  Si  le 
«  Maistre  à  qui  est  la  muraille  en  laquelle  l'on  veut 
«  appuyer,  a  en  icelle  muraille  fenestrages  portant 
0  bort,  ferrures,  ou  yraig)ie,....  l'on  ne  pourra 
«  appuyer,  n'autrement  empescher  la  veuedes  dits 
«  fenestrages.  »  (Coût.  gén.  T.  II,  p.  478.  —  Lau- 
rière,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  —  Ménage,  Dict.  Etym.  ~ 
Monet,  Dict.  -  -  Voy.  Aragkee.) 

VARIANTES    : 
ARAGNE.  Monet,  Dict. 
AiBAiGNE.  Cotgrave  et  Oudin,  Dict. 
AiREiGNE.  Merlin  Cocaye,  T.  II,  p.  379. 
Araigne.  Riibelais,  T.  IV,  p.  205. 
Araine.  Doctrinal  de  Sapience,  fol.  35,  R». 
Aricne.  Percef.  Vol.  V,  fol.  72,  V»  col.  1. 
Arreigne.  Coût,  de  Metz,  au  nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  433. 
Eraigne.  Borel,  Dict. 
Iragne.  Contes  d'Eutrapel,  p.  184. 
IRAIGNE.  Cotgrave,  Dict. 
Yraigne.  Cotgrave  et  Borel,  Dict. 
Yraixgne.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  521,  col.  3. 

Aragnée,  siibst.  féin.  Araignée;  Toile  d'arai- 
gnée, etc.  En  latin  aranea.  Ces  deux  premières 
significations  ne  sont  pas  les  seules  qui  soient 
communes  au  mot  aragnée  avec  celui  A' aragne.  Ils 
désignoienl,  l'un  comme  l'autre,  «  une  contre-vitre 
<i  en  treillis  de  fil  d'archal,  »  un  treillis  de  fil 
d'archal  comparé  au  lissu,  au  réseau  de  l'araignée 
des  jardins.  «  Baltes  et  assiette  de  ventilions, 
"  grilles,  araignées  du  dehors  de  la  feneslre...  sont 
«  signes  et  marques  de  servitude  de  jour.  »  (Coût. 
de  S-  Mihiel,  au  nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  105G.  — 
Voy.  Aragne.) 

11  paroit  inutile  de  multiplier  les  preuves  qu'au 


moyen  de  la  comparaison,  l'on  a  pu  nommer 
araignes  ou  araignées,  les  choses  qui  offrent  à  l'œil 
et  à  l'esprit  quelque  ressemblance  avec  la  toile  de 
l'araignée,  ou  avec  la  figure  de  l'araignée.  (Voy. 
Ménage,  Dict.  étym.  — Aubin, Dict.dela  Marine,elc.) 

VARIANTES    : 
ARAGNÉE.  Monet,  Dict.  -  Ménage,  Dict.  étym. 
Araignée.  Orth.  subsist.  -  Nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  1056. 
Arignée.  Cotgrave,  Oudin,  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict. 
Arragnée.  Nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  1167,  col.  2. 
Iraignée.  Villon,  p.  8. 

Iregnie.  Rom.  dAudisïier,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  66. 
Ybaig.nie.  Gloss.  du  P.  Labbe,  p.  489. 

Aragnète,  subst.  fém.  Petite  araignée.  Dimi- 
nutif d'aragne.  (Voy.  Monet,  Dict.) 

Aragneus,  adjectif.  Plein  d'araignées.  Plein  de 
toiles  d'araignée.  Propre  ;^  l'araignée.  Semblable  à 
la  toile  d'araignée.  Qui  se  nourrit  d'araignées.  On 
trouve  la  première  et  la  seconde  signification  de 
l'adjectif  araignens,  en  latin  araneosus,  dans 
Cotgrave  et  Oudin,  Dict.  (Voy.  Aragne.) 

Il  signifioit  une  chose  propre  à  l'araignée,  lorsque 
pour  toile  d'araignée  on  disoit  toile  yraigneuse. 
(Poës.  de  Loys  le  Caron,  fol.  13.  —  Voy.  Araignier). 
Dans  le  tableau  qu'un  Poëte  du  xvi'  siècle  a  tracé 
de  la  surprise  de  Mars  et  de  Vénus  épiés  par  Vul- 
cain  qui  les  enveloppe  d'un  filet  invisible,  le  mot 
iraigneur  exprime  la  ressemblance  fabuleuse  de  ce 
filet  avec  la  toile,  le  filet  dont  l'araignée  se  sert 
pour  arrêter  sa  proie. 

Celuy  qui  a  veu  le  tour 

De  l'iraigne  mesnagère 

Filant  ses  rez  à  l'entour 

De  la,  mousche  passagère  ; 

Il  a  veu  Mars  et  Venus 

Encliaisnez  à  membres  nuds, 

Et  Vulcan  guygnant  auprès 

De  son  embusche  iraigneuse 

Qui  la  couple  vergongneuse 

AUoit  serrant  de  si  près. 

II.  Florès  de  Grèce,  Epil.  p.  8,  col.  1. 

On  a  nommé  figurément  rets  «rfli5'»é;!fj",  ce  qu'en 
parlantd'unecourlisane,  on  nommeroit aujourd'hui 
ses  filets,  aussi  dangereux  pour  l'homme  que  le 
sont  pour  la  mouche  les  filets  de  l'araicnée.  (Voy. 
Merlin  Cocaie,  T.  11,  p.  Gl.) 

Enfin,  la  souris  araigneuse,  autrement  la  musa- 
raigne, en  latin  mus  araneus,  est  un  peiit  animal 
quadrupède  qu'on  a  ainsi  désigné,  comme  se  nour- 
rissant d'araignées,  et  ressemblant  à  la  souris  par 
la  grosseur  et  un  museau  alongé  et  pointu.  (Col- 
grave,  Dict.) 

VARIANTES  : 
ARAGNEUS.  Monet,  Dict. 
AiRAiGNEUX.  Cotgrave,  Dict. 
Araigneux  Cotgrave  et  Oudin,  Dict. 
IRAIONEUX.  D.  Florès  de  Grèce,  Epit.  p.  8,  col.  1. 
Yraigneox.  Poës.  de  Loys  le  Caron,  fol.  13,  R». 

Araignier,  adj.  masc.  adj.  et  subst.  fém.  Pro- 
pre à  l'araignée.  Semblable  à  l'araignée.  Semblable 
à  la  toile  d'araignée.  Membrane  cristalline ,  Arach- 
noïde. Le  premier  sens  de  l'adjectif  araignier,  est 


(1)  C'était  un  drap  de  luxe,  fabriqué  ordinairement  à  Ypres,  fort  à  la  mode  sous  les  trois  premiers  Valois,  (n.  e.) 
II.  13 


AR 


-  08 


ÀR 


le  même  que  celui  à'ciraigneus,  dans  l'expression 
toile  (trayneuse.  (Colgrave,  Dict.) 

Dans  le  second  sens,  on  désignoit  par  ce  même 
adjectif  certaines  choses  qui  avoient  de  la  ressem- 
blance avec  la  ligure  de  l'araignée.  (Colgrave,  Dict.) 

Il  signifioit  aussi  la  ressemblance  d'une  chose 
avec  une  toile  d'araignée.  (Voy.  Aragneus.)  C'est  par 
la  raison  de  celle  ressemblance  que  la  tunique  ou 
membrane  dont  quelques  Anatomisles  croient  l'hu- 
meur cristalline  de  l'œil  immédiatement  envelop- 
pée, a  été  nommée  membrane  ou  tunique  arai- 
gnère.  (Voy.  Colgrave,  Dict.) 

De  là,  l'adjectif  «r«/;7H('r<' signifioit,  avec  ellipse 
du  substantif,  tunique  ««//;;»(')■(',  cette  membrane 
cristalline  qu'en    terme  d'Anatomie  l'on  nomme 
Arachno'ide.  (Voy.  Oudin,  Dict.) 
VARIANTES  : 

ARAIGNIER.  Colgrave,  Dict. 
Araignère.  Colgrave  et  Oudin,  Dict. 

Araim,  subst.  niasc.  Airain.  On  reconnoît  le 
mot  latin  œrumeu,  formé  de  œs ,  œris ,  dans  l'an- 
cienne ortho'graphe  araim  :  orthographe  qu'on 
n'avoit  pas  encore  trouvée,  lorsqu'on  a  réuni  sous 
Mrin,  les  variations  érain  et  arain.  (Voyez  .Erin 
et  Araine.) 

VARIANTES  : 
ARAIM.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordai,  fol.  72,  R»  col.  2. 
AREI.M.  Ibid.  fol.  88,  V  col.  1. 

Araine,  subst.  /"f^'m.  Espèce  de  trompette  ;  Trom- 
pette. (Voy.  Araim.)  Les  trompettes  qu'on  nommoit 
araines,  parce  qu'elles  étoient  A'arain,  de  cuivre 
jaune,  paroissent  avoir  été  distinguées  des  trompes, 
comme  l'on  dislingue  aujourd'hui  le  clairon  de  la 
trompette.  «  Firent .  .  .  huier  trompes  et  arènes 
«  sonner.  »  (Chron.  S"  Denys,  Rec.  des  Hist.  de  Fr. 
T.  III,  p.  311.) 

.  .  .  Lors  oist  tentir  araines 
Qu'en  fait  par  les  deux  oz  sonner, 
Tabours  croislre,  corz  bondonner, 
Flagiex  piper  et  trompes  braire. 

G.  Guiart,MS.  fol.  313,  V. 

Cette  espèce  de  trompette,  connue  de  nos  anciens 
Historiens  et  Romanciers,  éloit  probablement  un 
clairon  semblable  à  celui  que  les  Portugais  ont 
emprunté  des  Maures,  faisant  le  dessus  des  cors, 
des  buisines  et  des  trompes  ou  trompettes  qui  son- 
noient  en  taille  ou  en  basse-contre,  et  que  parcelle 
raison  l'on  aura  quelquefois  nommé  grosse  araine. 
«  Firent  sonner  maintes  trompettes  et  maint  arai- 
«■  nés,  et  assemblèrent  pour  combattre.  »  (Hist.  de 
B.  du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  357.) 

A  fait  ses  cors  bondir. 

Ses  buisines  soner,  ses  araines  tentir. 

Rom.  d'Alexandre,  MS.  du  R.  a-  6987,  fol.  180,  V-  col.  2. 

1  ot  cornés  et  douçaines, 

Et  trompes  et  grosses  araines. 

CléoBiadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  66,  V'  col.  3. 

On  conçoit  au  reste  combien  il  est  naturel  que 
toute  espèce  de  trompette  de  même  métal  que  celle 


dont  on  a  distingué  souvent  l'espèce  particulière, 
ail  été  désignée  en  général  par  le  mot  araine. 

Ses  arainnes  fist  haut  sonner 
Pour  les  Flamens  à  estourner. 

Vh.  Mouskes,  MS.  p.  586. 
Lors  si  a  fait  sonner  ses  trompes 
A  grans  alainnes  et  à  longes. 
Moult  sonnèrent  bien  les  arainnes. 

Id.  p.  584. 

variantes  : 
ARAINE.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  587. 
Arainne.  g.  Guiart,  MS.  fol.  131,  R». 
Areine.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  fol.  \9\,  R»  col.  2. 
ARENE.  Chron.  S'  D.  Rec.  des  Hist.  de  Fr.  T.  III,  p.  311. 

Araire,  subst.  Instrument  de  labourage;  Char- 
rue ;  Machine  à  labourer.  (Voy.  Afaire.)  On  soup- 
çonne que  les  instrumens  de  labourage,  qu'en 
Bresse  on  nomme  araires,  sont  lesinstrumensdont 
les  Lyonnois  et  les  Languedociens  composent  leur 
araire,  c'esl-à-dire  leur  charrue  ou  autre  machine 
sans  roues  propre  à  labourer.  (Voy.  Laurière,  Gloss. 
du  Dr.  Fr.  —  Dict.  de  Trévoux.  —  Colgrave  et  JNicot, 
Dicl.  —  D.  Carpentier,  Suppl.  Glossaire  latin  de  Du 
Gange,  T.  I,  col.  270.) 

Ce  mot  araire  encore  usité  dans  plusieurs  pro- 
vinces, avec  la  signification  de  charrue  ou  autre 
machine  à  labourer,  peut  être  aussi  ancien  dans 
notre  langue  que  le  verbe  arer.  (Voy.  Arer.)  On  dé- 
signoit l'inutilité  des  etîorts  amoureux  d'un  jeune 
homme  pour  s'insinuer  dans  un  cœur  dur  et  insen- 
sible par  fierté,  en  disant  figurément  : 

Tu  as  en  dure  terre  enroyé  ton  areres  ; 
Tu  deusses  amer  fille  d'une  commère. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7218,  fol.  345,  V  col.  2. 

Il  est  très  probable  que  relativement  à  l'idée  de 
contre,  partie  essentielle  de  Varaire,  de  la  charrue, 
on  aura  dit  que  l'araire  vaut  peu  sans  le  contre  (1), 
pour  signifier  une  expédition  impossible  sans  le 
secours  essentiel  d'un  Chef.  On  croit  qu'au  lieu 
i'afaires  il  faut  lire  araires  dans  ce  vers  : 

Peu  vaut  Yafaires  sans  le  coutre. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  796. 

VARIANTES  : 
ARAIRE.  Cotgrave,  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Arere.  Fabl.  MS.  du  R.  n°  7218,  fol.  345,  V  col.  2. 
Areyre.  d.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  Du  C.  T.  I,  coL  270. 

Araisiiement,  subst.  masc.  Action  de  parler, 
d'adresser  la  parole  ;  entretien,  conversation.  Signi- 
fication analogue  ù  celle  du  verbe  araisonner  ou 
araisner,  parler,  s'entretenir,  converser.  (Voyez 
Araisonner.) 

variantes  : 

ARAISNEMENT.  S'  Rern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  149. 

Arraisonnement.  Cotgrave,  Oudin,  Nicot  et  Monet,  Dict. 

Araisneour,  subst.  masc.  Raisonneur,  parleur. 
Celui  qui  perd  à  raisonner,  à  parler,  un  temps  qu'il 
emploieroit  mieux  à  agir.  Telle  éloit  la  signification 
d'araisneour,  lorsqu'on  faisoit  l'éloge  de  la  valeur 
active  d'une  Nation,  en  disant  : 

Onques  en  lor  contrée  n'ot  un  araisneour  : 
Ains  se  fièrent  de  près,  o  les  brans  de  coulor  (2). 
Rom.  d'Alexandre,  MS.  du  R.  n"  6987,  fol.  176,  R"  col.  3. 


(1)  L'ai-cii're,  en  effet,  n'a  pas  de  roues,  (n.  e.)  -  (2)  avec  les  épées  étincelantes.  (n.  e.) 


AR 


—  99  - 


AR 


Araisniement,  adv.  Avec  opiniâtreté  d'idées  ; 
avec  une  volonté  opiniâtre.  (Voy.  Araisonner.)  Signi- 
fication relative  à  celle  du  verbe  amisonner  dans 
l'expression  ?,' amisonner  à  une  chose ,  la  vouloir. 

Cilh  ne  sot  pas  qu'il  covenist 
Rechivoir  son  commandement  ; 
Si  li  dist  araisnieinaiit 
Ke  mie  ne  le  laisseroit. 

Les  IV  Filles  le  Roy,  MS.  de  Turin,  fol.  38,  R*. 

Araisonner,  verbe.  Questionner,  interroger, 
demander  des  raisons.  Parler,  converser,  s'entre- 
tenir, donner  des  raisons,  les  détailler.  Sommer, 
accuser.  Intenter  et  poursuivre  une  action.  Appré- 
cier. Etre  ou  devenir  raisonnable.  Vouloir  une 
chose,  s'y  préparer.  On  ne  peut  juger,  ni  parler 
raisonnablement  des  choses  transmises  à  l'âme  par 
le  moyen  des  sens,  qu'autant  qu'elles  y  existent  en 
idée,  telles  qu'elles  existent  en  réalité  dans  la  Na- 
ture. La  conformité  de  celte  existence  idéale  des 
choses  avec  leur  existence  physique,  est  ce  qu'on 
nomme  raison,  en  latin  ratio  :  terme  abstrait  dont 
on  trouve  l'origine  dans  ratus,  participe  du  verbe 
latin  reor  formé  du  substantif  générique  res ,  en 
françois  chose.  Ainsi,  notre  verbe  françois  raison- 
ner, de  même  origine  et  même  acception  que  le 
latin  7'eri,  signifiera  littéralement  réaliser  en  idée, 
faire  qu'une  chose  existe  en  idée,  comme  elle  existe 
en  réalité;  assimiler  à  l'existence  physique  des 
choses,  leur  existence  idéale,  la  voir  et  la  juger 
conforme  ;  exprimer  cette  conformité  d'existence, 
la  faire  voir,  la  rendre  sensible ,  la  faire  connoitre 
aux  autres  par  la  parole ,  qui  représente  plus  ou 
moins  fidèlement  les  idées,  comme  les  idées  repré- 
sentent les  choses.  (Voy.  Raison  et  Raisonner.) 

De  là,  l'ancien  verbe  composé  araisonner,  par 
contraction  araisner,  arainer,  signifioit  question- 
ner, interroger,  etc.  presser  quelqu'un  de  parler, 
de  faire  connoitre  en  parlant,  en  répondant  à  une 
question,  aune  interrogation,  quelles  idées  il  se 
fait  des  choses,  quelles  sont  les  raisons  de  sa  façon 
de  sentir,  de  penser  ou  d'agir.  «  Sis  mariz  Belehana 
«  le  areisuna,  si  li  dist:  pur  quel  plures?  «  (Livres 
des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  2,  R-  col.  1.)  (1) 

Ne  se  vielt  ore  plus  celer  ; 
Ains  va  le  Roi  amtisoner. 
Rois,  fait-il,  c'as-tu  enpensé? 

Vie  de  S"  Calherine,  MS.  de  Sorb.  chiff.  LX,  col.  59. 

Quant  je  la  veoie, 

Le  pooir  des  membres  perdoie. 
Qui  me  vousist  aresoner, 
Ne  li  peusse  mot  soner. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7-218,  fol.  356.  V*  col.  2. 

De  toutes  pars  je  fuz  environné 

Des  assistans,  et  d'euLx  arraisonné 

Que  je  queroys,  et  qui  vers  eux  me  meine. 

Faifeu.  p.  18. 

Lorsqu'on  étoit  moins  empressé  de  connoitre  les 
idées  des  autres  que  de  leur  faire  connoitre  les 
siennes,  araisonner  une  personne,  ou  s'araisonner 
avec  elle,  c'étoit  lui  parler,  lui  adresser  la  parole  ; 


raisonner  avec  elle,  lui  exprimer  une  sensation,  en 
parlant,  en  conversant,  en  s'entretenant  avec  elle, 
lui  peindre  l'idée  qu'on  se  faisoit  de  la  chose  qu'on 
sentoit,  et  dont  on  lui  parloit.  (Voy.  Araisnement.) 
«  Nous  arainons  ceos  ki  vrai  Geu  (2)  sunt,  ceos  qui 
«  sunt  semence  Abraham.  »  (S'  Bernard,  Serm.  fr. 
Mss.  p.  57.)  «  La  pucelle...  avoit  grant  merveilles 
«  pour  quoy  le  Bachelier  ne  Yarraisonnoit  ;  car  à 
«  son  advis  il  devoit  premièrement  emprendre  la 
»  parole.  »  (Percef.  Vol.  VI,  fol.  -42,  R°  col.  1.) 
«  S'fl?T«iso;ina«iavecle  Prince,  lui  demanda,  etc.  » 
(Nuits  de  Strapar.  T.  II,  p.  209.) 

Ne  desprisiez  pas  poure  gent  ; 
Mes  aresniez  les  doucement. 
Qui  rien  ne  lor  done  del  sien, 
Si  lor  fet  li  biaus  parlers  bien. 

Fabl.  MS.  du  R.  ir  7-218,  fol.  130,  R"  col.  2. 

Dans  la  signification  de  parler  d'une  chose  à 
quelqu'un,  on  disoit  l'araisonner  d'une  chose. 

Durement  me  doi  merveiller 
Que  m'oses  de  cou  araisnier. 

Fabl.  MS.  du  R.  a'  7939,  fol.  67,  R'  col.  1. 

Il  seroit  heureux  en  amour  de  toujours  croire 
aux  sermens  des  femmes  ;  on  croiroit  toujours  à 
leur  fidélité. 

Qui  d'amors  les  araisonnast, 
Ni  a  cèle  qui  ne  jurast, 
S'il  fust  qui  croire  l'en  vousist, 
Que  onques  n'i  mesprist. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7615,  fol.  lU,  R"  col.  1. 

Cet  ancien  verbe  araisonner  ou  arraisonner,  dont 
Mézeray  faisoit  encore  usage,  a  longtemps  subsisté 
dans  notre  langue  avec  la  signification  de  parler  (3). 
«  Faunus,  le  prince  des  bocages,...  m'ha  souvent 
«  arraisonné  d'amours,  sans  effect  de  sa  prière.  » 
(J.  Le  Maire,  illuslr.  des  Gaules,  L.  I,  p.  77.  —  Voy. 
Nicol  et  Monet,  Dict.  —  Dicl.  de  Trévoux.) 

Quelquefois  araisonner  un  choix,  araisonner  un 
fait,  c'éloit  exprimer  le  rapport  de  ce  fait,  de  ce 
choix,  à  ridée  qui  l'avoit  déterminé,  en  faire  con- 
noitre les  raisons,  les  détailler.  «  Les  occasions  font 
«  aucunes  fois  les  causes  piteuses,  qui  amolissenl 
«  les.Iugesquifontles/■rtù•^x■rt/•ra?so?^Mcr.  »  (Percef. 
Vol.  VI,  fol.  G9,  V"  col.  2.)  «  Charles  le  Sage  ayant 
«  fait  mettre  sur  un  carreau  de  veloux  un  sceptre  et 
«  une  couronne  d'or,  et  sur  un  autre  un  armet  et 
<<  une  espée.  commanda  à  son  fils,  Dauphin  de 
«  France,  de  choisir  l'un  ou  l'autre  ;  lequel  promp- 
«  tement  courut  à  l'espée  et  à  l'armet,  avec  ceste 
«  repartie  araisonnant  son  choix,  que  c'estoit  l'espée 
«  qui  conqueroit  et  maintenoit  les  couronnes  et  les 
«  sceptres.  «  (Savaron ,  Espée  françoise,  p.  8  et  9.) 

En  sommant  une  personne  de  faire,  ou  de  réparer 
une  chose  qu'on  exige  d'elle,  ou  qu'on  lui  reproche, 
en  la  sommant  de  comparoitre  devant  le  .Juge,  en 
l'accusant,  on  la  presse  de  parler,  de  faire  connoitre 
les  raisons  avec  lesquelles  elle  prétend  se  défendre, 
et  l'on  fait  connoitre  celles  avec  lesquelles  on  persiste 
à  la  poursuivre.  Il  est  donc  possible  que,  relalive- 


(1)  Dans  la  Chanson  de  Roland  :  «.  Mult  fièrement  Carie  en  araisunet  (vers  3536).  »  (n.  e.)  —  (2)  ,Iuifs.  —  (3)  Saint-Simon 
l'employait  encore:  «  Tandis  que  i'arraisonnais  M.  le  duc  d'Orléans,  le  roi  consultait  et  sa  famille  et  son  conseil.  »  (Edition 
de  1842;  ch.  247,  p.  209.)  (n.  e.) 


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ment  aux  acceptions  indiquées,  le  verbe  araisonner 
ou  aru'micr  ail  sifçnilié  sommer  de  faire  une  cliose, 
sommer  de  la  réparer,  sommer  de  comparoilre 
devant  le  Juge,  accuser,  etc.  "  Ne  fu  nus  qui  les 
«  osast  contraindre,  ne  rtrra/Hicr  de  rendre  treu.  » 
(Glu'on.  S'  Denys,  Hec.  des  Ilist.  de  Fr.  T.  III,  p.  157.) 
'<  Ou  doit  araisonner  son  Seigneur,  avant  que  on 
<'  ait  bon  apel  contre  la  défaute  de  droit.  «  (Beau- 
manoir,  Coût,  de  Beauvoisls,  chap.  lxu,  p.  319.)  Une 
preuve  évidente  qw' araisonner  désigne  ici  une  som- 
mation en  réparation  de  la  défaute  de  droit,  c'est 
qu'à  la  fin  de  ce  même  chapitre,  on  lit  qu'il  «  ensaigne 
«  comment  on  doit  sommer  son  Seigneur  avant  que 
«  l'en  le  puistapeler  de  défaute  de  dVoit.  >>  (Id.  ibid. 
p.  322.1  «  Quant  je  veiz  le  grant  oultraige  qu'il  me 
<'  faisoit,  si  le  feiz  arraisonner  devant  le  Roy.  » 
(Lanc.  du  Lac,  T.  II,  fol.  !)(j.)  «  Qui l'oseroit  araisnier 
«  de  ceste  chose.  »  (S'  Bern.  Serm.  fr.  .mss.  p.  381.) 

Les  araisonne  (i) 

De  meffait,  et  les  ochoisonne. 

Dits  do  Baudoin  de  Condé.  WS.  do  Gaignat,  fol.  320,  R'  col.  3. 

Dans  les  anciennes  loix  d'Anglelerre,  l'assise  ou 
bref  en  verlu  duquel  on  pouvbit  intenter  et.  pour- 
suivre une  action  en  Justice,  faisoit  connoître  les 
raisons  de  cette  action.  De  là,  on  disoil,  «  arraigner 
«  assise  de  nouvelle  dessaisine,  arrainer  assise  de 
«  mort  d'ancestres,  etc.  »  pour  intenter,  poursuivre 
une  action  de  nouvelle  dessaisine,  de  mort  d'ancê- 
tres, etc.  «  Puis  le  lessée  (2)  arraigne  assise  de  novel 
«  disseisin  de  la  terre,  envers  le  lessor  lequel  plede 
«  que  il  fist  nul  tort  ne  nul  disseisin ,  et  sur  ceo 
«  l'assise  soit  prise,  en  cest  case  les  Recognitors  del 
«  assise  poyent  dire,  etc.  »  (ïenures  de  IJttleton, 
fol.  8."),  V°.)  .'  Si  le  frère  pusné  soit  entré  en  l'héri- 
«  tage  son  piere  et  hors  de  sa  seisine  eyt  feffé  ascun 
«  estrau nge,  sur  qui  le  frère  ey né  eyt  arrainé  assise 
<•  de  mor  ifaiincestre,  et  cel  tenaunt  voche  à  garaunt 
<■  le  frère  pusné  son  feffour ,  et  celuy  veigne 
«  garaunter,...  pur  ce  ne  reineyne  mie  l'asise.  » 
(Britton,  des  loix  d'Angl.  fol.  200,  V°,  et  201,  R-. 

Il  est  évident  que  c'est  relativement  à  l'idée  qu'on 
se  fait  ou  doit  se  faire  des  choses,  qn'araisonner  la 
marchandise  signifioit  mettre  un  prix  raisonnable 
à  la  marchandise,  l'apprécier  conformément  à  l'idée 
de  sa  valeur  réelle.  (Voy.  Cotgrave,  Dict.) 

Lorsque  la  volonté  d'une  personne,  les  mouve- 
mens  de  son  âme,  ses  passions,  étoienl  ou  devenoienl 
conformes  aux  idées  qu'elle  devoit  avoir  des  choses 
qui  l'affectoient,  aux  vraies  idées  de  prudence  et 
de  sagesse ,  on  disoit  que  sa  volonté  estoit  araison- 
née,  iiue  celte  personne  s  araison)ioit  on  s' araisnoit. 
«  Les  jeunes  pucelles  ne  regardoient  pas  fort  à  leur 
"  voulenté  qui  n'estoit  pas  encore  araisnnnée.  » 
(Percef.  Vol.  II,  fol.  -128,  R°  col.  2.)  «  Tous  hommes 
«  hors  des  premiers  mouvemens,  lesquels...  durent 
»  et  tiennent  aux  uns  plus,  aux  autres  moins,  se 
«  peuvent  modérer  et  «rraïsoHHfr  plus  aisément.  » 
(Montbourcher,  des  Gages  de  bataille,  fol.  28,  R°.) 


Tant  pécha 

Li  mondes  et  folia, 

Ke  Diex  el  siècle  envola 

Le  diluve  ki  noia 

Fors  Noë  ki  eschapa... 

Par  lui  donc  s'aresna. 

Recrut  et  recommença 

Li  mondes  dès -lors  en  cha. 

Ane.  Poél.  fr.  .MSS.  av.  1300,  T.  H,  p.  87i  et  875. 

On  veut  une  chose,  on  se  prépare  à  la  réaliser 
d'après  une  idée,  une  raison  qui  dirige  la  volonté 
ou  régare.  De  là,  «  s'cn'rt/.so/uicr  à  faire  une  chose,  » 
aura  signifié  vouloir  faire  une  chose,  s'y  préparer 
conformément  à  ses  idées.  (Voy.  Araisniemf.nt.) 

Cil  qui  se  armisoitite  ou  se  fonde 
A  parler  d'amours  tout  au  long. 
Simple  est  :  car  hom  tout  ne  veit  onc. 

Chasse  et  départ  d'Amours,  p.  115,  col.  2. 
Et  cils  qui  au  parler  s'arine. 
Les  fist  venir  en  un  tropel  (3), 
Et  dist  ;  Dimence  a  bonne  estrine,  etc. 

Froissart,  Poês.  MSS.  p.  293. 

Il  est  au  moins  vraisemblable  qu'en  ces  vers 
l'orthographe  ariner  est  une  contraction  du  verbe 
ara/sonner,  comme  l'orthographe  urainer  qui,  dans 
S'  Bern.  (Serm.  fr.  .mss.  p.  57,)  répond  au  latin 
alloqui ,  interprété  par  arresiner  dans  le  Gloss.  du 
P.  Labbe,  où  il  faut  lire  aresnier.  Si  l'orthographe 
arranguier,  en  latin  ajfari,  n'étoit  pas  dans  lemême 
Glossaire  une  faute  pour  nrrang)iier,  on  croiroit 
voir  dans  arrainer,  arraigner,  arranguier,  contrac- 
tions et  altérations  (ï araisonner,  l'origine  de  notre 
verbe  haranguer  (4).  (Voy.  Haranguer.) 

VARIANTES  : 
ARAISONNER.  Cotgrave  et  Nicot.  Dict. 
Araigner.  Rom.  de  Perceval,  MS.  de  B.  n»  354,  fol.  223. 
Araignier.  Etat  des  Offic.  du  D.  de  Bourgogne,  p.  307. 
Arainer.  S'  Bern.  Serra,  fr.  MSS.  p.  57. 
Araisner.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  236,  col.  1. 
Araisnier.  Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  3S,  'V"  col.  2. 
ARjUsoner.  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  fr. 
Arasoner.  Anseis,  MS.  fol.  M,  V"  col,  2. 
Aregnier.  Ane.  Poës.  fr.  MS.  du  Vatican,  n»  1522,  fol.  162. 
Arei-SUNer.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  2,  R». 
Arenier.  Chron.  S'  D.  Rec.  des  Hist.  de  Fr.  T.  III,  p.  157. 
Aresner.  Athis,  MS.  fol.  120,  R"  col.  1. 
Aresnier.  Ane.  Poët.  fr.  MS.  avant  1300,  T.  I,  p.  304. 
Aresoner.  Fabl.  MS.  du  R.  n°  7218,  fol.  361,  V»  col.  1. 
.Aresonner.  Athis,  MS.  fol.  71,  R»  col  2,  etc. 
Ariner.  Froiss.  Poës.  MSS.  p.  293,  col.  1. 
Arisner.  Anseis,  MS.  fol.  59,  'V»  col.  \. 
Arraigner.  Tenures  do  Littleton,  fol.  85,  V". 
Arrainer.  Britlon,  des  Loix  d'Angl.  fol.  192,  V». 
Arrainier.  Chron.  S>  D.  Rec.  des  Hist.  de  Fr.  T.  III,  p.  157. 
Aruaisoner.  Vie  de  S<=  Calh.  MS.  de  Sorb.  chif.  lx,  col.  59. 
Arraisonner.  Percef.  Vol.  VI,  fol.  42,  R»  col.  1. 
Arranguier  (peut-être  Arraurpiier.)  Gl.  du  P.  Lab.  p.  487. 
Arranner.  Britton,  des  Loix  d'Angl.  fol.  112,  V". 
Arrayner.  Id.  Ihid.  fol.  148,  R". 
Arraysonner.  Rom.  de  la  Rose,  vers  2394. 
Arresiner  (lisez  Arvesnier.)  Gloss.  du  P.  Labbe,  p.  488. 
Arresneu.  Fabl.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  I,  V»  col.  2. 

Arantelles,  subst.  fém.  plur.  Filandres.  On 
croit,  d'après  l'auteur  du  Spectacle  de  la  Nature, 
que  les  filandres  qui  volent  en  l'air  dans  les  beaux 
jours  de  l'automne,  et  qu'en  Poitou  l'on  nomme 


(1)  blâme.  —  (2)  Possesseur  d'un  franc  tenement  laissé  à  vie  et  à  charge  d'une  rente.  —  (3)  en  une  troupe,  c'est-à-dire 
les  rassembla,  (n.  e.)  —  (4)  Il  n'y  a  aucun  rapport  entre  ces  deux  mots  :  harangue  vient  de  l'allemand  rhing,  cercle  ;  parler 
à  une  assemblée  rangée  en  cercle,  (n.  e.) 


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arantelles,  c'est-à-dire  toiles  d'aragne,  sont  l'ou- 
vrage d'une  espèce  d'araignée  vagat)onde.  (Voyez 
Aragne.)  Dans  le  cas  où  il  seroit  plus  vrai  de  dire, 
avec  ie  Seigneur  du  Fouilloux,  que  «  les  arantelles 
«  ne  sont  point  filées  des  areignées,  »  la  ressem- 
blance de  ces  filandres  aux  fils  d'araignée,  seroit  la 
raison  pour  laquelle  on  les  ■ànommés arantelles (1). 
"  Ne  faut  pas  s'arresler  à  un  las  de  resveurs  qui 
«  disent  que,  quant  on  trouve  des  arantelles  dedans 
«  la  forme  du  pied  de  cerf,  c'est  signe  qu'il  va  de 
«  hautes  eri'es  ;....  car  incessamment  les  arau^e/Zt's 
«  tombent  du  ciel  et  ne  sont  point  filées  des  arei- 
«  gnées  :  ce  que  j'ay  vu  par  expérience  d'un  cerf 
«  qui  passoil  à  cent  pas  de  moy,  là  où  j'allay  sou- 
«  dainement  voir  ;  je  n'y  sceu  jamais  estre  à  temps 
«  que  les  filandres  ou  aranlelles  ne  fussent  tombées 
■'  dedans  la  forme  du  pied.  »  (Du  Fouilloux,  Vén. 
fol.  29.— Voy.  Mén.  Dict.  étym.  — Dict.  de  Trévoux.) 

VARI.iNTES   : 
ARANTELLES.  Du  FouUloux,  Vén.  fol.  29,  R». 
-Vrantèles.  Dict.  de  Trévoux. 

Arap,  subst.  masc.  Acte  de  violence  ;  rapt,  vol. 
On  fait  violence  à  la  femme  ou  à  la  fille  qu'on  ravit, 
à  l'homme  dont  on  ravit  le  bien.  Ainsi,  arap  peut 
avoir  signifié  rapt,  vol,  en  général  acte  de  violence. 
(Voy.  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis.  —  Du 
Gange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  623.) .  Qui  veaut  appeller 
«  homme  d'ara/)  ou  de  brisseure  du  chemin,  ou  de 
«  force  quel  qu'elle  soit,  ou  d'un  marc  d'argent  ou 
"  de  plus,  ou  d'autre  chose  de  quoi  l'on  pert  vie  ou 
"  membre  qui  en  est  attaint  ou  prové,  il  doit,  etc.  » 
(Assises  de  Jérusalem,  chap.  cv,  p.  8i.)  «  Se  feme 
"  qui  ait  baron  veaut  faire  apeau  de  murtre,  ou 
«  d'omecide,  ou  d'arap,  ou  de  brisseure  de  chemin, 
<'  ou  de  chose  en  que  ait  bataille,  etc.  »  (Ibid.  chap. 
r.vi.  —  Voyez  Araper.) 

Araper,  vei'be.  Prendre  avec  violence,  avec 
force.  Tenir,  se  tenir  avec  force  et  violence.  Il  est 
évident  qu'araper  est  un  verbe  tel  qu'est  en  latin 
arripere,  composé  du  verbe  simple  rapere ,  en 
françois  ravir  ;  qu'en  le  prononçant  on  exprime 
autant  qu'on  le  peut  avec  l'organe  de  la  voix,  une 
idée  de  violence,  de  force,  etc.  "  Le  Suppliant  rtm/jff 
«  ledit  Pierre  au  col  et  lui  donna  de  la  canivete  ou 
«  coustel  qu'il  tenoit  en  sa  main.  >•  (D.  Carpenlier, 
Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Arrapare; 
tit.  de  1456.) 

De  là,  «  s'arraper  à  une  chose  »  signifioit  tenir 
fortement  une  chose,  s'y  tenir  avec  force  et  violence. 
"  Guillaume....  s'arrapa  à  l'un  des  bras  de  la  dilte 
«  femme,  en  tirant  à  soy.  »  (Id.  ibid.  tit.  de  1382.) 

L'analogie  de  la  signification  de  ce  verbe  araper 
avec  celle  d'agrapper,  agraffer(2),  est  d'autant  plus 


naturelle,  que  l'expression  vocale  et  imitative  des 
choses  et  des  idées  est  le  principe  général  de  la 
formation  d'une  infinité  de  mots  communs  à  diffé- 
rentes langues.  (Voy.  Agr.^ffer.) 

VARIANTES  : 
ARAPER.  D.  Carpentiar,  S.  Gl.  lat.  de  D.  C.  T.  I,  col.  306. 
Arraper.  Id.  ibid.  tit.  de  1382. 

Aratoire,  adj.  Propre  à  labourer,  qui  est  de 
labour.  Dans  plusieurs  Coutumes,  les  bœufs  ara- 
toires sont  les  bœufs  qu'on  nommoit  quelquefois 
arables  ou  bœufs  d'arc^'.  (Coût,  de  Marsan,  au  nouv. 
Coût.  gén.  T.  IV,  p.  907.  —Goût,  de  S"  Sever,  ibid. 
p.  928.  —  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  1246.  — 
Voyez  Arable  et  Arée.) 

Arbaleste,  subst.  /'ej/î.  Arbalète (3) ;  Baliste.  Por- 
tée d'arbalète.  Arbalétrier.  On  décomposoit  le  nom 
d'arbalesle  ou  d'arbalestre,  formé  d'arcus  et  balista, 
en  françois  arc  et  baliste,  lorsqu'on  escrivoit  arc  à 
baleste,  ou  arcq  à  balestre.  «  Soubs  le  nom  de 
>'  bâtons  d'armes  emolues,  sont  compris  arcq  à 
"  balestre,  arcq  à  la  main,  etc.  »  (Coût,  de  Hainaut, 
au  nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  60.) 

L'arbalesle  portative  étoit  un  arc  de  bois,  de 
corne  ou  d'acier,  monté  sur  un  fût  que  la  corde  de 
l'arc  débandé  coupoit  à  angles  droits.  On  peut  voir 
la  figure  de  cette  espèce  d'arbalesle  que  le  P.  Daniel, 
(Mil.  Fr.  T.  I,  p.  407,)  a  fait  graver  d'a;irès  un  mo- 
nument du  xu'  ou  du  xiii'  siècle,  où  étoit  représenté 
un  piéton  arbalestrier  avec  son  armure.  Il  paroit 
que  la  corde  de  Tare  se  tendoit  avec  la  main,  et  que 
pour  l'amener  plus  facilement  au  point  où  il  falloit 
l'arrêter,  on  mettoit  le  pied  et  quelquefois  les  deux 
pieds,  dans  l'espèce  d'étrier  qui  est  à  l'extrémité 
supérieure  du  fust  de  l'arbalesle.  (Voy. le  P.Daniel, 
ubi  supra.  —  Fauchet,  Milice  Fr.  p.  121.  —  Philipp. 
L.  VII,  p.  312.) 

Telles  furent  sans  doute  les  premières  arbalestes 
portatives ,  dont  l'usage  en  France  remonte  au 
commencement  du  xii"  siècle  (4).  C'est  avec  une  nom- 
breuse troupe  d'Archers  et  d'.\rbalestriers,  en  latin 
«  cum  magnà  militari  Sagitlarià  manu  et  Balista- 
«  rià,  »  que  Louis  VI  attaque  Drogon  de  Monchy. 
On  retrouve  ces  Archers  et  Arbaleslriers  à  l'attaque 
et  défense  du  château  de  Gournay  assiégé  par  ce 
Prince,  qui  occupa  les  premières  années  de  son  règne 
à  réprimer  les  violences  de  ses  Vassaux  rebelles. 
«  P>epellentes  repellere  insistunt,  balistarios  et 
«  sagittarios  jacere  compellunt.  "  (Du  Chesne,  Hist. 
Franc.  Script.  T.  IV,  p.  284,  291,  etc.) 

Il  résulte  de  ces  passages,  relatifs  à  l'histoire  des 
premières  années  du  règne  de  Louis  VI,  parvenu  à 
la  couronne  en  1108,  que  l'usage  des  arbalestes 
étoit  connu  dès  le  commencement  du  xii'  siècle,  et 


(1)  .irantetles  signifie  encore  toile  d'araignée  en  Berry,  et  vient  de  aranea  et  tela.  Quoi  qu'en  dise  du  Fouilloux,  les  cerfs 
ont  ordinairement  aux  pieds  des  filandres  en  forme  de  toile  d'araignée,  (n.  e.)  —  (2)  Arapper  a  le  sens  et  rétymologie 
d'agrapper,  agripper,  agrafrr;  on  avait  déjà  en  bas- latin  grappa  (Voir  L.  Quicberat,  Addenda  le.cicis  latmis),  qui  sans  Joute 
vient  du  celte  ou  du  haut  allemand,  (n.  e.)  —  (3)  Nous  écrivons  maintenant  arbalète  par  un  accent  grave  ;  l'accent  circonflexe 
vaudrait  mieux,  puisqu'on  écrit  têle  pour  leste,  (n.  e.)  —  (4)  On  les  connaissait  à  la  fin  du  xi'  siècle,  comme  le  prouve  le 
vers  2265  de  la  Chanson  de  Roland  ;  «  D'un  {corr.  plus  qu')  arch'xleste  ne  poet  traire  un  quarrel.  a  Le  moine  Richer  en  parle 
et  elles  sont  représentées  d^ms  des  miniatures  du  temps  de  Louis  d'Outremer  ;  l<;s  armées  romaines  du  Bas-Empire  en 
firent  aussi  usage.  (N.  E.) 


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que  par  conséquent  l'époque  de  ce  même  usage  en 
France,  touche  à  celle  de  la  première  Croisade  qui 
finit  en  1099.  Peut-être  que  la  forme  de  Varbniesie 
portative,  moins  simple  que  celle  de  l'arc,  étoit  une 
invention  des  Infidèles  ;  et  qu'en  se  défendant 
contre  les  Chrétiens,  ils  leur  apprirent  de  quelle 
utilité  pouvoit  être  à  la  guerre  cette  arme  offensive 
et  meurtrière,  dont  le  second  concile  de  Latran, 
tenu  l'an  1139,  sous  le  pontificat  d'Innocent  II, 
anathématisa  l'usage,  deux  ans  après  l'avènement 
de  Louis  VII  au  trône.  <  Artem  illam  mortiferam  et 
«  Deo  odihilem  Ballistrariorum  et  Sagittariorum 
«  adversùs  Christianos  et  Catholicos  éxerceri  de 
«  celero  sub  anathemate  prohibemus.  "  (Harduini 
concil.  T.  VI,  part,  n,  col.  I21i.) 

Quelque  prompte  qu'ait  été  la  soumission  des 
Franrois  à  l'autorité  de  ce  Concile,  qui  semble 
réserver  pour  les  Infidèles  une  arme  dont  il  n'in- 
terdit l'usage  odieux  qu'entre  les  Chrétiens,  il  est 
peu  probable  que  quarante  ou  cinquante  ans  après  le 
décret  du  pape  Innocent  II,  au  commencement  du 
règne  de  Philippe-Auguste,  cette  arme  fût  inconnue 
en  France;  et  tellement  inconnue,  que  dans  ses 
armées  il  n'y  avoit  pas  un  seul  homme  qui  sût  faire 
usage  de  Vavbaleste.  Ce  témoignage  de  Guillaume 
le  Î3ielon  ,  Poète  historien  de  Philippe- Auguste , 
prouve  seulement  qu'alors  les  François  respectoient 
encore  l'autorité  apostolique,  à  laquelle  ils  avoient 
sans  doute  obéi  sous  le  règne  de  Louis  VII,  depuis 
1139  jusqu'en  1180,  année  de  la  mort  de  ce  Prince. 
Mais  au  retour  de  la  Croisade  entreprise  l'an  1188, 
la  guerre  ayant  duré  quelques  années  entre  la 
France  et  l'Angleterre,  Philippe-Auguste  parut  forcé 
de  partager  la  désobéissance  de  Richard,  Cœur-de- 
lion,  qui  sans  crainte  de  l'anathème  fulminé  par  le 
Pape,  avoit  renouvelé  l'usage  de  Varbaleste  qui  lui 
fut  futaie  à  lui-même.  Il  mourut  en  1199,  d'un  coup 
de  flèche  tiré  par  un  Arbaleslrier.  C'est  une  de  ces 
remarques  qui  ne  prouvent  rien,  et  qu'on  aime  à 
faire  parce  qu'on  aime  le  merveilleux.  (Voy.  le  P. 
Daniel,  Ilist.  de  la  MO.  Fr.  T.  II,  p.  424-'4'2G.) 

Le  commencement  du  xur  siècle  est  donc  l'épo- 
que à  laquelle  on  peut  fixer  l'usage  constant  des 
arbalestes;  usage  que  les  François  avoient  pris, 
laissé  et  repris  dans  le  cours  du  siècle  précédent. 
Il  paroit  que  le  zèle  d'Innocent  III,  pour  la  conser- 
vation du  peuple  Chrétien,  n'étoit  pas  moins  ennemi 
des  Arbalestriers  que  celui  de  son  prédécesseur 
Innocent  II,  qui  les  avoit  frappés  d'anathème.  Dans 
le  quatrième  concile  de  Latran  tenu  l'an  1215,  il  les 
appelle  des  hommes  de  sang.  «  NuUus  quoque 
«  Clericusruptariis(l), autbalistariis, authuiusmodi 
«  viris  sanguinum  prœponatur.  «  (Harduini  concil. 
T.  VII,  col.  3.">.)  On  voit  dans  ce  Concile  une  preuve 
que  Philippe-Auguste  continuoit,  au  commencement 


du  xiii"  siècle,  l'usage  de  Varbaleste,  qu'à  la  fin  du 
xn"  il  avoit  renouvelé  à  l'imitation  de  Richard,  roi 
d'Angleterre.  Cet  usage  (2)  devint  chaque  jour  plus 
commun,  puisqu'en  1230,  Thibaud  VI,  comte  de 
Champagne,  vouloit  que  «  chascunsde  la  commune 
«  de  Vitré  qui  auroit  vaillant  vingt  livres,  eust 
«  atibeleste  en  son  ostel  et  quarriaux  jusque  cin- 
«  quante;  »  et  que  vers  l'an  1250  ou  1251,  du  temps 
de  la  première  Croisade  de  S'  Louis,  »  Symon  de 
"  Monceliart  estoit  Mestre  des  Arbalestriers  le  Roi.  » 
(Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  275.  —  Join- 
ville,  Ilist.  de  S'  Louis,  p.  115;  édit.  de  1761.)  Il 
paroit  qu'alors  l'arc  et  Varbaleste  étoient  d'un  égal 
usage.  «  Nos  Serjans  à  pié.  .  .  .  commencierent  à 
«  hardier  à  eulx  et  d'arcz  et  d'arbalestres.  «  (Id. 
ibid.  p.  114.)  Mais  «  on  se  servit  dans  la  suite  beau- 
«  coup  plus  des  arbalètes  que  des  arcs,  par  ce  que 
«  les  flèches  étoient  lancées  avec  plus  de  force  par 
«  Varbalête  ;  que  l'on  miroit  plus  juste  avec  cette 
«  arme  qu'avec  l'arc  ;  et  que  le  mouvement  de  la 
«  délente  qui  faisoit  partir  la  flèche  étoit  bien  plus 
><  sûr  que  celui  de  la  main  qui  débandoit  l'arc.  » 
(Le  P.  Daniel,  Mil.  Fr.  T.  I,  p.  426.)  Ainsi  l'usage  de 
Varbaleste  subsista  constamment  depuis  la  fin  du 
règne  de  Philippe-Auguste,  jusqu'au  règne  de  Fran- 
çois I"  qui  l'abolit  presque  entièrement  en  France, 
excepté  parmi  les  Gascons.  (V.  Id.  ibid.  p.  426  et  427.) 

Les  arbalestes  portatives  du  xu'  siècle  et  du  com- 
mencement du  xur  n'étoient  pas  aussi  composées 
qu'elles  le  furent,  après  qu'un  long  et  continuel 
usage  les  eût  perfectionnées.  On  peut  enjuger  par  la 
comparaison  de  la  forme  d'une  arbaleste  que  le  P. 
Daniel  décrit  [ubl  supra,  p.  423),  avec  la  forme  de 
celle  du  Piéton-arbalêtrier  qu'on  voit  représenté 
(ibid.  p.  407),  et  dont  on  a  déjà  parlé  (3).  L'une  ne 
ressemble  à  l'autre  que  pour  les  parties  essentielles. 

Ces  premières  arbalestes  portatives  étoient  sans 
doute  très-semblables  à  celles  dont  il  est  mention 
dans  Fauchet,  (Mil.  Fr.  p.  121  ;)  «  à  ces  arbalestes 
«  qui  au  hault  de  l'arbre  avoient  un  fer  en  façon 
«  d'eslrier,  pour,  en  mettant  le  pied  dedans  et  en 
«  tirant  à  mont...  le  bout  du  bandage  encorné,  plus 
«  aisément  bander  l'arc.  ■>  Peut-être  que  Varbaleste 
nommée  arbaleste  simple  dans  les  Chron.  d'Outre- 
mer, (ms.  de  Berne,  n°  113,  fol.  1681)  étoit  une  de 
ces  premières  arbalestes,  une  arbaleste  dont  l'arc 
se  tendoit  avec  le  pied  et  la  main,  ou  seulement  à 
force  de  bras,  sans  le  bandage  qu'on  nommoit  pied 
de  chèvre,  cranequin,  à-l'armatot  (4). 

Ce  bandage  nommé  pied  de  chèvre,  parce  qu'il 
étoit  fourchu  du  côté  qu'il  appuyoit  sur  Varbaleste 
et  la  corde,  étoit  de  bois,  de  corne  ou  de  fer,  comme 
le  cranequin  que  les  Arbalestriers  d'Allemagne,  les 
Cranequiniers  portoient  à  leur  ceinture.  Il  est  pro- 
bable que  ce   bandage  étoit  nommé  cranequin,  à 


(1)  Routiers  ;  c'était  leur  beau  temps  ;  Philippe- Auguste  en  prit  à  son  service  pour  conquérir  la  Normandie  ;  l'un  de  leurs 
chefs,  Cadoc,  fut  créé  bailli  de  Gisors.  (n.  e.)  —  (2)  L'arbalète  alors  en  usage  fut  Varbalcte  à  étriev.  (Voir  p.  101,  col.  2.) 
Avant  Saint-Louis,  on  employait  Varbalùte  à  tour,  mécanisme  disposé  le  long  de  l'arme  et  qui  dispensait  de  la  renverser, 
quand  on  tendait  la  corde,  (n  e.)  —  (3)  On  peut  voir  à  la  page  241  de  l'Histoire  du  Costume,  de  M.  Quicherat,  un  arbalétrier 
de  1375  environ  (B.  N.  ms.  fr.  281.3),  armant  une  arbalète  à  étrier.  (n.  e.)  —  (4)  hu.  xv  siècle,  on  employait  les  arbalètes  à. 
tilloles,  mot  qui  paraît  signifier  poulie;  c'était  Varbcdéte  à  tour  transformée.  0'°'''  Quicherat,  1.  c,  p.  306.)  (n.  e.) 


AR 


—  103  — 


cause  de  quelque  ressemblance  avec  le  bec  de  la 

mnH  nn"i'  ^"'''"'',  ^T''''^''  Pe"l-èlre  aussi  le  nom- 
moû-on  a- 1  armât ot,  p;irce  qu'au  moyen  du  ban- 
dage qu  on  adaptoit  au  fût  de  Yarbalelte,  on  avo  t 
bientôt  mis  cette  arme  en  état  de  lancer  une  flèche 
Dans  un  duel  entre  un  Italien  et  un  Gascon,  celui- 
ci  ayant  le  choix  des  armes,  envoya  à  son  adversaire 
"  une  bonne  grosse  arhaleste  de  passe,  avec  son 
«  bandage  qu  on  appeloit  ù-1'armatot  et  qu'on  pen- 
"  doit  a  la  ceinture.  »  L'Italien,  forcé  de  combattre 
avec  une  arme  dont  l'usage  lui  étoit  étranger  fut 
vaincu  par  le  Gascon  à  qui  cette  arme  étoU  fami- 

fm'.ln  'T"'  ''"^  ''■:Î"'^*'  ^'  rebandé,  et  tiré  deux 
.  fois  dans  le  corps  du  pauvre  Italien,  qu'il  n'eut 
«le  loysir  ny  l'adresse  de  bander  son  arballeste.  » 
(Brantôme,  sur  les  Duels,  p.  81  et  82  —  Vov  Fm. 
chet.  Mil.  Fr.  -  Le  P.  Daniel,  Mil.  Fr.  T.  1,  p  423) 

On  trouve  dans  cette  anecdote  une'  preuve 
év  dente  qu  il  y  avoit  des  «  arba/estes  de  passe  por- 
dP  Si';; ''T"'''y'';''''/'^'^''«^«''''^'^«nt  Catherine 

£   f^û  ^>™?'  /o'^t  à  tirer,  et  tiroit  fort  bien. 

Quand  elle  s  alloit  promener,  faisoit  porter  son 
..  ^'^^aleste  a  tallet;el  quand  elle  voyoit  quelque 
«  beau  coup,  elle  tiroit.  ..  (Voy.  Brantôme  Dames 
Illustres,  p.  48.)  Sans  doute  qu'il  f^nuTlHaS 
a  jallet,  espèce  darbaleste  avec  laquelle  on  jetoit 
des  pierres  rondes  nommées  jalet,  auiourlrhu 
galet,  et  au  dé  aut  de  ces  pierres  des  petites  1  ouïes 
de  terre  cuite.  \  oy.  Dict.  de  Trévoux,  au  mot  Jalet) 

JS'l'i/'"'  e,^"t  «'-^'^'s/^  à  allais  pour  arba/csie 
jaet  dit  que  1  arbalesle  a  gctai,  étoit  la  même  uue 
kni  oiu/p' 1  ^"Vf'  ^i^^.^-arbalc.tc  avec  laquelle  on 
Kinçoit  des  boulets  de  pierre.  (Voy.  Cotgrave,  Dict  ) 
Or  larbalese  a  ,/V//f^  qu'on  assure  avoii  é^  a 
même  que  Varbaleste  à  boulet,  étoit  portative  •  el 
spécialement  celle  dont  Catherine  de  Medicis  aimoi 
exercice.  Il  y  avoit  donc  parmi  les  arbalcstes  à 

^Si^^;:s'' ''''''"''  '^«"^^  p^™"- 

Il  semble  qu'on  ait  désigné  toute  espèce  d'rt?-6«- 
lesteportative,soaàjalet,  soit«  boulet  ou  de  passe 
en  disant  qu'on  ..  pouvoit  la  bander  aus  reins  .na,' 
conséquent  sans  tour,  sans  moulinet  ni  poulie 
«  Dehusseront...  toute  la  grosse  artillerie  et  autre 
«  qui  n  est  point  portative  à  cheval  et  ù  pied  et 
«  par  especial  ar;;«/cs/ts  qu'on  ne  peut  bander  àus 
«  reins.  »(J.Chartier,  Hist.de  Charles  VII  p  033  ^ 
Quoiqu  on  ait  pu  faire  usage  du  tour  pour  les 
arbalestes  portatives  et  faciles  à  bander  aux  reins 
Il  sera  toujours  vrai  de  dire  en  général  ni  e?es 
arbalestes  qu-on  ne  pouvoit  bander  aux  Sus 
etoient  celles  qu'on  nommoit  arbalestes  à  tour' 
dénomination  sous  laquelle  pouvoient  être  réunies 
nLn'J'f'T  'f  *'"'^''  '^^  «'•'^a/estes  de  /msTlll 
arbalestes  (leehantelle,  et  toute  autre  espèce  d'«?- 

pSulS'  ''^     ''"'  '"^P^^^'^'e  de  bander  sans  tour  ni 
L'espèce  d'arbalète  avec  laquelle  Monet  dit  mr^n 
lancoitdes  boulets  de  cent  livres,  dés  boulets  ëm 

celles  avec  lesquelles  les  Turcs  lançoient  anciemTe^  J 


AR 


foM)cP,''''iH'i"^/v"'  riiistoire  de  Froissart,  (Vol.  II 

t^iJïïHnSrs'iîSiïS^tsS 

«  a«rS  ^^^f,'^^^-^^^  on  k^fkoit'S; 
chSSn  o n  riP  1.  '^  //  jusquau  pied  des  murs  du 
l'iS  rJ  "*  ;'"*^  "  ^'"^l"e"e  on  vouloit  donner 
1  assaut.  Chaque  étage  du  passavant,  ou  du  passe 
étoit  garni  darbalestes,  que  par  cette  raison  l'on 
aura  nommé  arbalestes  dépasse;  .  et  lés  Arïa  es" 
1'  ssn  nf/  '^"«f  "iPO'^'-  faire,  quand  on  vSulo U 
D  ?,      ■•  ^^(^°>•  froissart,  V.  III,p.  71    72  el  7S 

eijm.  J.    ,  p.  //.    On  a  déjà  observé  qu'il  v  nvnif 

rmpnf  î'^r -'''1  '^' J""''  Portatives,  e?llv  consé 
uet  différentes  de  celles  que  Fauchet  (Mil  Fr 
P^  120  )  assimile  aux  ribaudequivs,  qui,  pour  leur 
pesanteur,  demeuroient  sur  les  murs  des  forte 
resses,  et  qu'on  bandoit  à  l'aide  d'un  to  1,  mÏÏié 
par  un  ou  deux  et  quatre  hommes.  Lesarl>Steî 
de  1  espèce  de  celles  qu'on  assimiloit  aux  r  S£! 
fjuuis  ei  qu'on  distinguoit  des  arbalestes  de  DassP 
portatives  et  faciles  à  bander  aux  reins  eS  les 
nommant  grandes  ou  fortes  arbalestes  de  passf 
etuient  des  arbalestes  à  tour.  Aussi  trouve-t-on  mf^ 
tendre  avec  les  mains  une  arbaleste  "toui-,  ou  bS- 
la''pîSuve'd'unp"r'?'''7''''^'''^'^  ^'^  passe,'c'étoit 
daiSGarointn  .-.  ""^  de  corps  plus  quhumainfe 
uansbaigantua,  a  qui  Rabelais,  (T.  I   n   l(î-,  Uiif 

et  !S;.  r -^  T:'^''  ^«'^tes  «;^i/.i  de  p  .ssè 
et  dans  Gérard  de  Roussillon,  qui,  si  l'on  en  croit 

Ouf  rpPf^r/H*^'  demy  a  de  longueur  sa  toise  ".' 

a"eval  ifnt    "v^^'^l  ^  ^^^  "'^'"'^  estendoit, 
Llieval  et  Chevaliers  tout  armés  porfendoit  • 

Et  tinllfà'"  ''"°''  '"^  '■°^«^'  en  attour,      ' 
tt  tendoit  a  ses  mains  une  arbalesle  à  tour. 

Rom.  de  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  8. 


En  effet,  il  n  y  a,  dit  Brantôme,  «  homme  ni 
»  gean  qui  pût  de  la  main,  ou  aux  reins,  c'estS  dire 
«  sans  tour  m  poulie,  bander  une  de  ces  batistes 
«  de  ces  arbalestes  à  tour  ou  de  passe  :  mais  a  ec 
.'  le  tour  nomme  engin,  du  latin  higenium  rien  de 
«  plus  facile.  »  Aussi  le  Grand  capital  eGonsnKp 
de  Cordoue,  à  la  gloire  duquel  l'esprit  servit  ?n?in? 
et  plus  que  la  vaillance,  prit-il  pour  ïeVs'e  une 
grande  arba  este  de  passe  avec  ces  mots  -  ingenium 
«  superat  vires,  »  pour  signifier  „  qu'il  n'y  a  ?^ 
«  belle  force  que  l'esprit  et  l'industrie  de  l'hlmmè 
:  tanràPS.nf''*^';''^  P«"'-'^"t  n'estouTofnt 


AR 


—  104  - 


AR 


La  gfrosse  arbalcsle  de  chantelle,  ainsi  nommée 
peul-cire  à  cnused'une  pii''cedel)Ois,d'inu'Iievalet, 
en  latin  cantciius,  sur  lequel  on  la  posoil  comme 
en  cliantier,  6\o\[  sans  doute  une  balisie  de  l'espèce 
des  grandes  et  fortes  cirbalcstcs  de  passe,  qui 
étoient  des  nrbalestes  à  tour,  avec  lesquelles  on 
lançoit  des  traits  qui  bien  souvent  perfoient  trois 
et  quatre  hommes  tout  d"un  seul  coup,  comme 
Faucliet  (Mil.  Fr.  p.  120,)  l'atleste.  «  Feist  le  duc  de 
«  Bourbon  metti'c  avant  les  grosses  arbalcstres  de 

0  chanlelle  au  devant  de  la  bataille  des  Anglois 

«  et  lendemain  par  malin  vint  le  comledeBourgui- 
«  gnan  et  ses  Anglois  en  bataille  rangée...  devant  la 
«  bastiedu  duc  de  Bourbon  ;  et  lui  estant  en  bataille, 
«  Thomas  le  Genevois  et  Domiges  feirent  tirer  la 
«  grosse  arbalesle  de  chantelle  en  la  bataille  du 
«  Comte,  qui  lua  deux  hommes;  dontfeurent  esbahis 
«  les  Anglois  :  car  onques  n'avoient  veu  si  gros 
«  traict.  »  (Ilist.  de  Loys  III,  duc  de  Bourbon,  p.  OG.") 

Quoique  les  canons  et  bombardes  aient  fait  dis- 
paroître  les  balisles  et  arbalètes,  on  trouve  que 
pendant  plus  de  deux  siècles  l'usage  des  armes  de 
trait  a  subsisté  en  même  temps  que  celui  des  armes 
à  feu  ;  armes  non  moins  ennemies  de  prouesse  que 
les  arbalestes  et  batistes,  abhorrées  de  nos  anciens 
Chevaliers,  comme  «  armes  traiteresses  avec  quoi 
«  un  coquin  se  tenant  a  couvert  peu  tuer  un  vail- 
«  tant  homme  de  loin  et  par  un  trou.  »  (Yoy.  le  P. 
Daniel,  Mil.  Fr.  T.  I,  p.  411.  -  Fauchet,  Mil.  Fr. 
p.  121  et  12-2.  —  M.  Gaillard,  Hist.  de  la  Rivalité  de 
la  France  el  de  rAngletorre,  T.  II,  p.  87.) 

11  seroit  facile  de  multiplier  à  l'infini  les  preuves 
que  pour  la  baliste  et  Yarbalête,  il  y  avoit  une 
espèce  particulière  de  flèches,  que  rarement  on 
lançoit  avec  l'arc.  Ces  flèches,  dont  le  fer  étoit 
quarré  se  nommoient  quarreaux;  ou  viretons, 
parce  qu'elles  viroieni,  tournoient  en  l'air,  au 
moyen  des  pennes  qu'on  y  ajustoit  pour  l'équilibre. 
On  "lit  dai;s  la  vie  de  Louis  VI,  par  Suger,  que  Raoul 
de  Vermandois  eut  un  œil  crevé  d'un  quarreau 
d'arbalète.  (Voy.  Duchesne,  Hist.  Fr.  T.  IV,  p.  317. 
—  Le  P.  Daniel,  Mil.  Fr.  T.  I,  p.  417,  418  et  419.) 
«  Au  son  du  siblet  saillirent  bien  de  la  sente  de  la 
«  galie  quatre  vingts  Arbalestriersbien  appai'eillés, 
«  les  arbaleslvcs  montées,  et  misirent  maintenant 
«  les  carriaux  en  coche.  "  (Joinville,  Hist.  de- 
S'  Louis,  p.  80;  édit.  de  1701.)  <■  N'avoient  point 
«  remis  n'appoincté  autres  quarreaux  au  poinct  de 
«  leurs  arbalestres.  »  (Monstrelet,  Vol.  I,  chap.  24, 
fol.  19.)  «  Les  Arbalestiers  Genevois  ne  failloyent 
«  là  où  ils  visoyent;  si  en  y  eut  de  frapés....  de  ces 
«  longs  viretons  parmy  leurs  testes.  »  (Froissart, 
Vol.  m,  p.  68.) 

On  connoit  les  différentes  mélonymies  par 
lesquelles  arbaleste  a  signifié  1°  portée  ù'arbalête  : 
«  Estoil  li  forest  près  ù  deux  arbales^trcs.  »  (Fabl. 
ws.  du  R.  n°  7989,  fol.  77.  —  Voy.  Arbalestée.) 

2°  Arbalétrier  :  «  Menons  avec  nos....  deux  mil 
«  Arbalestriers  qui  ont  arbalestres  à  lor,  et  trois 
«  mil  arbalestres  simples.  ■>  (Chron.  d'Outrem«r, 
ws.  de  Berne,  n°  113,  fol.  1(58.  —  Voy.  Arbalestier.) 


3°  Peut-être  meurtrière,  ouverture,  fente  par 
laquelle  on  pouvoit,  étant  à  couvert,  tirer  de  Yarba- 
lête. "  Se  retira  en  une  tour  en  bas,  oîi  il  y  avoit 

><  de  petites  rt/'ftrt/cî^f.s  et  fenestres bien  estroi- 

«  tes.  Toutes  fois  on  lui  percea  les  deux  cuisses 
"  d'une  lance,  par  une  des  lucarnes.  »  (Hist.  de  la 
Pucelle  d'Orléans,  p.  499.  —  Voy.  Arbalestiere.) 

VARIANTES  : 
ARBALESTE.  Gcr.  de  RoussUlon,  MS.  p.  8. 
Arbalesthe.  ViHehardouin,  p.  66. 
ARBALETE.  Monet,  Dict. 
Ahballeste.  Brantôme,  sur  les  Duels,  p.  81. 
Arrastre  (cor.  Ai-ba!eslre.)  Athis,  MS.  fol.  66. 
Arbei.este.  .Toinville,  p.  39. 
Aubeleste   Du  Cange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  275. 
Aubelestre.  Id.  ibid.  Rom.  de  Garin,  MS. 

Arbalestée,  siibst.  fém.  Portée  d'arbalète. 
L'espace  que  parcourt  le  trait  d'une  arbaleste  étant 
en  proportion  du  plus  ou  moins  de  force  avec 
laquelle  il  étoit  lancé,  on  ne  peut  déterminer  avec 
précision  quelle  longueur,  quelle  distance  on  dési- 
gnoit  par  un  trait  (\' arbalestée,  par  une  arbalestée. 
«  Li  dux  de  Venise....  ot  ses  nés,  el  ses  uissiers,  et 
«  ses  vaissiaux  ordenez  d'un  front;  et  cil  front 
«  duroit  bien  trois  arbalestrées.  «  (ViHehardouin, 
p.  06.)  »  Quant  ilz  vindient  au  fret  d'une  arbales- 
«  trée,  ilz  ferirent  des  espérons,  etc.  »  (Modus  et 
Racio,  MS.  fol.  299  V".) 

I.e  pas  que  j'ai  ci  devisé, 
Où  cil  sont  de  guerre  atisé,... 
lert  bien  à  trois  arbalentées, 
S'au  certain  dire  me  déport, 
Loin  de  Gravelingues  le  port. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  279,  Rv 

On  concluroit  sans  doute  du  particulier  au  géné- 
ral, si  l'on  disoit  que  la  distance  d'une  arbalestée, 
d'une  portée  d'arbalesle  étoit  de  deux  arpens,  par 
la  raison  qu'être  ii  un  arpent  ou  à  demie  arbalestée 
paroit  avoir  désigné  une  égale  distance.  ■■  Je  vous 
"  pry  que,  sitost  comme  nous  serons  à  un  arpent 
«  près  d'eulx,  nous  descendons  tous  à  pié;....et 
«  quand  ilz  furent  près  d'eulx  comme  à  demie 
«  arbalestée,  illec  descendirent  à  pié  et  se  rengé- 
»  rentemmi  le  pré.  «  (Hist.  de  B.  du  Guesclin,  par 
Ménard,  p.  416  et  417.) 

VARIANTES  : 
ARBALESTÉE.  ViHehardouin,  p.  63. 
Arbalestrée.  Hist.  de  Loys  III,  D.  de  Bourbon,  p.  46. 
Arbelestrée.  Chron.  S'  Denys,  T.  II,  fol  197,  V». 

Arbalestel,  stibst.  mase.  pliir.  Arbalètes. 
On  croit  que  ce  mot  est  le  même  qu'arbaleste  dont 
on  alléroit  la  terminaison  en  faveur  de  la  mesure 
el  de  la  rime. 

En  la  plus  maistre  tor  sont  cent  arbaleslel ; 
El  se  getent  ensanle  quatorze  mangonel. 

Rom.  d'Alexandre,  MS.  du  R.  n-  61187,  fol.  212,  R-  col.  1. 

11  est  probable  que  l'expression  barbeoite  d'arba- 
lestiax,  est  une  allusion  aux  baibes  des  plumes 
avec  lesquelles  on  garnissoit  quelquefois  les  traits 
d'arbalète.  (Voy.  Fabl.  ms.  du  R.  n"  7989,  fol.  45, 
V°  col.  1  ;  Var.  du  ms.  de  Berne,  n'  351.) 

Par  une  métonymie  semblable  à  celle  d'après 
laquelle  arbaleste  a  signifié  arbalétrier,  le  mot  arba- 
lestel ou  arbalestiaus  pourroit  avoir  la  même  signi- 


AR 


—  105  - 


ification  dans  quelques-uns  de  nos  anciens  Poètes 
Tel  est  par  exemple,  celui  qui,  comparant  àlVxPr 
çice  de  l'arbalète  ou  de  Farbal^^trier  iSvité  d'un 
jeune  homme  plus  robuste  que  délica?  en  amour" 

Li  novices  petit  sent 

Damour,  ne  de  ses  reviaus  • 

Li  gieus  des  arbalestiaux     ' 

Soufist  si  fais  emplumés 
...  .  .Li  saiges  qi  est  amés, 
Kl  bien  connoist  kamours  li  puet  valoir 
A  plus  soufisaument  joious  voloir  ' 

Ane.  Poes.  fr.  MS.  du  Valic.  n-  J490,  fol.  107.  R-, 

ARBALKSTRAus.  Fabl.  MS.  du  R   no  TQsi^ubt'supra. 


AR 


Arbalestier,  stibst.  masc.  Arbalétrier  On 
observera  que  par  la  raison  qu'aujourd'hu  il'on  hpp 
fère  à  l'orthographe  arbalètre  celle  d'arb'lète    n" 

En  cherchant  à  fixer  les  époques  auxauellP^  ^ 
commence  et  cessé  pour  un  temps  reconXencée^ 
cesse  pour  toujours  l'usage  de  l\^rba!tHe  ^5?  ' 

qu  11  tut  aboli,  «  on  ne  se  servoit  plus  euère  d'Ar 
«  baletners  en  France  vers  le  milieu  du  rè^ned; 
«  traneois  I"  :  je  dis  en  France  ;  car  on  s'en  servni^ 
"  "rî^'T  f.?  Angleterre  sur  là  tin  du  rèoïe  ÏÏ 

(Voy  T1  'Dànie^t'r"^'^'■|^"'^  deLouls.xflI.'! 
V*uy   le  1-.  Daniel,  Mil.  l-r.  p.  42G  et  4t>7  i 

S.  1  on  en  croit  Brantôme,  les  Anglois  apprirent 
aux  Gascons  1  exerces  de  l'arbalèfe  •  m^ic  if 

mmmm 

msmm 
mâêmm 


Philippe  de  Valois  .  en  envoya  quérir  jusnue.  à 
■wvni  nf  Arbalestriers  Genevois,  dit  Froissart 

S  nf^r"'  P""'  ^^P't^""'^  généraUiarquePde 
sous  le  rè'-ne  de  PhVriAc  vt  '   •   ^-  ***"'•)  *^"  '™"ve 

«  Convient  avnrri,         ■      '  ('°y-  A"1!aleste. 

croc.  etc.  »  (Le  Jouvencel,  ms.  p.  '291  ]  ' 

n  9sr.  "^  ,V.',  'f-^es  Ulfic.  des  D.  de  Bour^oo-np 
«  dit  Fauchet  (Mil   F-   n   Vi^       '■     ''  ^  *^"  ^™it' 

eto'ttïitsru7irrSe'dret''^  '  ^^-^' 

son  fils  aîné  Charles  Lie.ftennn  '^f^^b  P"'''^"^ 
accepta  par  ses  Let'ris'  du 'mo'  'de  1évru7'l r ,■ ' 
1  otïre  que  les  Etats  du  Languedoc    n  t     nt'd   lîl 


mvarbart  d-  -^"  "" -""g"c"w  lui  nrent  de  1  ai- 

14 


AR 


—  106  - 


AR 


der  d-un  corps  à' Arbalétriers  dont  moitié  seroit  à 

%;itô^ris^:a^=-'--^T'^ 

Sm  à  che^^l,  qui  eonçourujeut  au  succès  d^^ 
„  appelloilCranequiniers  »(\oy.  bauUiei,Hu.  ^ 

^TJfrbalestriers  h  pied  comme  les  ^rbaZesfWers 

T   I   n  S8'»et6Gl. — Ibid.  l.ilU  P-  "— •  " 

cliet  Mifr'-P  121-)  ces  Gens-d-armes  ou  sergents 

WsÊiséMm 

:  fourSroltJ  Ès  paroisses  ou  aUleurs,  s.  cens 

.,  des  paroisses  n-estoient  souffisanz  .  .  •,•  •/\,"f 

=ix  il  vpii  aura  deux  il r/^a/csinm.  »  ^Ord.  T.  I, 

;  38i    insensiblement  les  non  Nobles,  toujours  si 

rpiiibie  1355,  dans  lesquelles  on  lil .  «  Pour  ce  que 

f  Sucuni  de'noz  Subgiez  se  «venturero.ent  vo  on- 

„  tiprs  "i  o-rever  noz  ennemis  en  coi  ps  et  en  meub 

l  pf de  ceie  lefraingnenl  aucune  fois,  pour  ce  que 

nofueultenans,  gonnestables,  Admiraulx,  Mais- 

«  l^£^Arbalesriers,  Trésoriers  des  guerres  e 

Sresde  noz  Officiers  demandent  et  rec  ameiU 

«  aucuns  droits,  parts  ou  portions  es  geignes     ou 

.  es  pilles  faites  sur  noz  ennemis  nous         orde- 

,  nan^  fiiip  chascun  puisse  prendre,  gaignier  et 

S- sur  noz  diz  ennemis,  senz  ce  que  aucuns 

de  noz  Officiers  dessusdiz,  ou  autres,  y  puissent 

deiSderoureclamerpailoupourcion,ouaucui 

S?  se  ainsi  n'est  qu^^eulz  ou  leurs  genz  soient 
..  •>  la  besoingne.  •  (Ord.  T.  111,  p.  35  et  36.) 

La  saoesse  de  Charles  V,  son  (ils  et  son  succes- 
seu?  ^t  dans  ce  patriotisme  les  moyens  de  reparer 
e  malheur  de  l'Etat,  et  les  calcula.  Par  ses  Lettres 


fin  10  iuillet  1367.  «  11  enjoint  et  commande  à  tous 
\\lS^sllArbalestriÀs  demourans  en  ses  bon- 
nes villes  qu'ils  se  mettent  en  estât  ;  et  que  pai 
es  Gouverneurs  en  chacune  d'icelles  villes  soil 
sceu  queTnombre  d'Archiers  et  Arbalestriersy 
a  et  combien  on  en  pourroit  avoir,  se  besoin 
estoit  •  et  de  ce  facent  registre  en  cliascune  viiie 
I  sur'lSut  le  certifient  au  P'uslost  qu  ds  pour- 
ront;  et  avecques  ce  enjoignent  et   induisent 
toutes  jeunes  gens  à  exerc.ter,  continuer  ^l  ap- 
„  nrendre  le  fait  et  manière  detran-e   »  (Oïd.  i.  iv, 
p  Ï6    1  est  probable  que  le  peuple  devenu  tout-à- 
fait -uenier  seconda  en  général  la  politique  de  ce 
Priife  en  oubliant  les  jeux  de  hasard  et  en  prefé- 
rânà'tout  exercice  non-seulement  de  l'espri   mais 
du"tor  s'celui  de  l'arc  et  de  l'arbalète ,  çon  ormé- 
menl  k  l'Ordonnance  du  3  avril  1309    ou  on  ht 
Défendons  tous  geux  de  dez,de  tables  de  Palmes, 
de  quilles,  de  palet,  de  soûles,  de  bil  es    et  tous 
autres  telz  geux,  qui  ne  cheenl  PO"    .^.^^^^/f  [ 
ne  habiliter  nos  Subjez  a  fait  et  nsa.ge  d  armes,  à 
„  la  delTense  de  nostre  'oyanme  ;.....  et  o.denons 
■■  nue  noz  diz  Sub  ez  prennent....  leuis  geux  et 
Ssbatemenl  à  eul.exfrcer  et  habiliter  en  faïc   de 
traict  d'arc  ou  à-arbaleslrçs      et    ^^ent  ^^eurs 
dons  aux  mieulx  traians.  »  Ord.  T.  V,  p.  'iii-] 
AÎÏrs  on  V  t  dans  la  plupart  des  villes  du  royaume 
comme  Paris,  Rouen,  Caen,  Amiens,  Laon  ,  etc.  se 
forïef  des  cônfrairiès(l),  descoUéges  desconne  a- 
hiips  (VArbalestr  ers,  auxquels  le  bomerain  accoi 
Soft  des  pSiléges  et  franchises,  en  reconnoissance 
dps  services  qu'ils  avoient  rendus,  et  dans  la  vue 
de  les  encourager  à  en  rendre  qui  fussent  plus 
^^nSaîèment  utiles.  »  Pour  ce  que  dignes  sont  de 
^'?£Suon  ceulx  qui.pour  le  bien  du  rogume 
se  exDOsent  et  offrent  a  exposer  ebpetialement 
fpufsDropres  corps,  si  comme  sont  les  Arbales- 
?mqu?jà  très  agréables  services  nous  on 
a      cSsideransquepar  eulx  pourront  avenir 
,      nnllde  biens  à  nous  et  au  royaume  ou  fait  des 
Ses  et  que  es  bonnes  villes  de  Rouen ,  d  A- 
;  ISs,  d'Arras,  de  Saint  Omer  les  Arf,«/.sr.m 
»  nui  V  sont  ont  certains  privilèges,  no  s  »"■; 
Vrbalcstiers  de  la  confraerie  de  monsieur  Saint 
D      le    nostre  dicte  ville  de  Paris  ,    .  donnons 
.  Pt  oclrovons  .  .  privilèges ,  franchises  et  liber- 
tez  .  (Ord  T  111%.  sGl.)  ->  Les  Arbalestners  du 
cSiége  de  Rouen  de  la  connestabl.e  de  Laon  de 
roniDiegne  etc.  s'obligèrent  comme  les  Aibales- 
:  SSTaconfrairiedeParis,  à  servir  en    ous 

;'„*i  «"diSVce  zèle  une  nouvelle  acu.ite 


aCbalétes  de  la  page  290  à  la  page  292.  (n.  e.) 


AR 


—  107  — 


AR 


par  une  exemption  semblable  à  celle  que  les  Arba- 
lestriers  de  la  Rochelle  obtinrent  de  Charles  V. 
«  Oclroïons...  à  tous  Arbalestriers...  demourans  et 
«  residans  en  ladicte  ville  de  la  Rochelle,  que  pour 
«  quelconques  sièges,  osts ,  chevauchées,  ou  ar- 
«  mées....  ne  puissent  estre  contrains....  à  saillir 
«  hors  de  ladicte  ville....  se  ce  n'estoit  par  leur 
«  propre  voulante  et  assentement.  »  (Ord.  T.  V, 
page  636.) 

Ces  confrairies,  ces  collèges,  ces  connestablies 
d'Arhalestriers,  qu'on  formoit  de  Télite  des  Arba- 
lestriers des  villes,  avoient  des  chefs  particuliers 
qu'on  nommoit  Prevosts ,  Connestables ,  Maistres 
d' Arbalestriers.  (Vov.  Ord.  T.  III,  p.  360.  —  Ibid. 
T.  V,  p.  22.  —  Ibid."T.  VI,  p.  540.  -  Coût.  gén. 
T.  I,  p.  108.)  Les  Arbalestriers  qui  n'étant  pas  admis 
dans  ces  compagnies,  n'avoient  point  de  chefs  sous 
les  ordres  desquels  ils  pussent  comme  les  autres  se 
rassembler  en  temps  de  guerre,  étoient  sans  doute 
du  nombre  de  ces  «  Piétons  et  Gens-d'armes  qui 
«  sans  maistres  ne  chevetaine  se  rendoient  à  l'armée 
«  par  menues  parties.  Alors  le  Connestable ,  les 
«  Mareschaux,  les  Maistres  des  Arbalestriers ,  ou 
«  autres  à  qui  il  appartenoit,  choisissoient  un  Che- 
«  valiersouffisantetlui  bailloientetaccomplissoient 
«  une  route  de  vingt  cinq  ou  de  trente  hommes 
«  d'armes.  On  meltôit  touz  les  Piétons  par  connes- 
«  tablies  et  compaignies  de  même  nombre  d'hom- 
«  mes.  ..  (Ord.  T.  IV,  p.  69  et  70.) 

Il  est  probable  que  les  Prévôts,  Connestables,  ou 
maîtres  particuliers  d'Arbalétriers  marchoient  ;'i  la 
tète  de  leurs  compagnies,  sous  la  bannière  d'Offi- 
ciers généraux  qu'on  nommoit  aussi  Maistres  des 
Arbalestriers,  et  auxquels  les  maîtres  particuliers 
obéissoient,  comme  les  Capitaines  des  Arbalétriers 
Génois  obéissoient  îi  un  Capitaine  général.  (Voy. 
Ord.  T.  V,  p.  651.)  «  Les  Maistres  des  Arbalestriers, 
«  sans  estre  Barons,  ne  Benneretz ,  de  tant  qu'ilz 
«  étoient  Officiers  par  dignitez  de  leurs  offices , 
«  pouvoient  porter  benniere.  »  (Voy.  La  Salade, 
fol.  51. )  Peut-être  qu'en  réunissant  plusieurs  com- 
pagnies d'.lî'/>fl/c7r/É'?'S  en  corps,  on  mettoit  à  la 
tête  de  chaque  corps  un  Maislre  général  des  Arba- 
lestriers. On  croit  avoir  quelque  raison  de  soup- 
çonner que  dans  les  armées  il  y  avoit  plusieurs 
Maistres  généraux  des  Arimlestriers,  lorsque  dans 
deux  Ordonnances  du  Roi  Jean,  on  lit  :  «  Nous  vou- 
«  Ions  et  ordenons  que  par  nostre  Connestable , 
«  Mareschaux,  Maistresdes,lrb«/cs//v>?"s,  ou  autres 
«  à  qui  il  appartiendra,  soit  regardé  ,  etc.  »  fOrd. 
T.  IV,  p.  69.)  «  Que  aucuns,  soit  du  lignage  du  Roy, 
«  ses  Lieuxtenans ,  Connestable,  Mareschaulx , 
«  Maistres  des  Arbalestriers,  Maistres  du  Parle- 
«  ment,  etc.  »  (Ibid.  T.  II,  p.  406.) 

Si  notre  conjecture  sur  la  pluralité  de  ces  Maistres 
des  Arbalestriers  est  fondée,  l'on  reconnoîtra  qu'ils 
n'ont  pas  plus  de  droit  que  le  Capitaine  général  des 
Arbalétriers  Génois,  à  une  place  parmi  les  Maistres 
des  Arbalestriers  qu'on  a  sans  doute  voulu  distin- 
guer des  autres,  en  les  nommant  quelquefois  Mais- 
tres des  Arbalestriers  le  Roy,  Maistres  des  Arbales- 


triers de  France,  Grands-maistres  d&s  Arbalestriers. 
(Voy.  Joinville,  llist.  de  S'  Louis,  p.  115;  édit.  de 
1761.  —  Froissart,  Vol.  I,  pages  182,  3.50  et  381  — 
Monstrelet,  Vol.  I,  fol.  29  et  154.  —  Du  Tillet,  Rec. 
des  Roys  de  France ,  leur  Couronne  et  Maison , 
p.  282.  —  Brantôme,  Cap.  Fr.  T.  IV,  p.  42.)  Il  est 
possible  que  faute  de  cette  même  distinction  pres- 
que toujours  omise,  quelques  Maistres  des  Arbales- 
triers qui  n'étoient  cas  Grands-maislres,  aient  été 
inscrits  dans  la  liste  des  Grands-maitres  des  Arba- 
létriers de  France,  comme  l'on  y  a  inscrit  Marc  de 
Grimant,  Ecuyer,  créé  Capitaine' général  des  Arba- 
lestriers  Génois,  par  Lettres  de  Charles  V,  datées 
de  Vincennes,  le  6  décembre  1373.  La  preuve  que 
ce  Capitaine  général  n'éloit  pas  Grand-maître  des 
Arbalétriers  et  qu'on  peut  se  défier  de  l'exactitude 
de  la  liste  de  ces  Grands-officiers ,  depuis  Symon 
de  Monceliart,  Mestre  des  Arbalestriers  ie  Roy,  sous 
le  règne  de  S'  Louis,  jusqu'à  Aimar  de  Prie,  dernier 
Grand-maître  des  Arbalétriers,  sous  celui  de  Fran- 
çois I";  c'est  qu'en  1374,  Hugues  de  Chastillon, 
seigneur  de  Dampierre,  placé  dans  la  liste  comme 
prédécesseur  de  Marc  de  Grimaut,  seigneur  d'Anti- 
bes,  étoit  encore  en  possession  de  cette  charge. 
Dans  une  Ordonnance  du  mois  d'octobre  1374,  il 
est  nommé  après  les  Maréchaux  et  Amiraux,  et 
avant  le  Panetier  de  France,  pour  assister,  comme 
Maistre  des  Arbalestriers,  au  Conseil  de  la  tutelle 
des  enfans  mineurs  de  Charles-le-Sage.  (Ord.  T.  'V, 
p.  651.  —  Ibid.  T.  VI,  p.  52.  —  Joinville ,  Hist.  de 
S'  Louis,  p.  115;  édit.  de  1761.  —  Du  Tillet,  Rec. 
des  Rois  de  France,  leur  Couronne  et  Maison,  page 
283.  —  Le  P.  Daniel,  Mil.  Fr.  T.  I,  p.  198  et  199.) 

On  trouve  partout  les  preuves  de  la  prééminence 
des  Maréchaux  sur  les  Maîtres  des  Arbalestriers.  Si 
le  Maréchal  nommoit  quatre  Lieutenans  pour  rece- 
voir les  monstres  de  toutes  manières  de  gens ,  le 
Maislre  des  Arbalestriers  n'en  pouvoil  nommer  que 
ung  pour  recevoir  les  gens  de  son  hostel  seulement. 
(Voy.  Ord.  T.  V,  p.  658  et  659.)  Néanmoins  leurs 
fonctions  paroissent  avoir  eu  dans  le  xiv  siècle  des  . 
rapports  qui,  à  certains  égards ,  supposoient  une 
espèce  d'égalité.  Philippe-le-Long,  par  ses  Lettres 
du  10  juillet  1319,  ordonne  que  "  l'en  ne  paie  nuls 
»  deniers  à  gens  d'armes  jusques  à  tant  que  le 
«  Mareschal  ou  le  Mestre  des  Arbalestriers  lesayent 
«  reçeus  deuement.  »  (Ord.  T.  I,  p.  661.)  Dans  une 
Ordonnance  du  Roi  Jean,  datée  du  30  avril  1351,  on 
lit  :  «  Von I ans  que  les  Mareschaux,  les  Mestres  des 
«  A7'balestriers  e[  ixulres  h  qui  il  appartendra,  en 
«  leurs  personnes,....  voient  et  reçoivent  les  mons- 
«  très,  afin  que  les  Gens  d'armes,  etc.  »  (Ord. 
T.  IV,  p.  70.) 

Les  Clercs  des  Arbalestriers  étoient,  relativement 
aux  Maistres  des  Arbalestriers ,  ce  qu'étoient  aux 
Mareschaux  les  Trésoriers  de  la  guerre.  «  Fera 
»  chascun  l'office  qui  Mui  appartient;  c'est  assavoir 
«  le  Trésorier  de  la  guerre,  ce  qui  li  appartient  par 
«  devers  les  Mareschaux,  et  le  Clerc  des  Arbales- 
«  îm?'s,  ce  qui  touche  le  Mestre  des. l/'(*rt/es<?v'é'?'s.  » 
(Ord.  T.  I,  p.  661.)  Charles  V,  toujours  occupé  de 


ÀR 


—  108  — 


AR 


prévenir  les  abus  ou  de  les  réformer,  ordonna,  n'é- 
tant encore  que  Régent  du  Royaume,  qn'h  l'avenir 
il  n'y  aiiroil  qu'un  Clerc  en  l'office  de  la  clergie  des 
Arbalestriers,  et  pourvut  de  cet  office  Jehan  de 
rOspital.  (Voy.  Ord.  ï.  III,  p.  387  et  31)1.) 

On  conçoit  qu'en  autorisant  une  espèce  de  con- 
currence entre  les  Maistres  des  Arbalestriers  et  les 
Mareschaux,  dans  l'exercice  de  leur  cliarge,  on 
occasionna  les  débats  qui  furent  enfin  terminés,  à 
l'avantage  des  Maréchaux,  sous  le  règne  de  Charles 
VI.  «  Les  Arbalestiers,  Archers  et  Canonniersayans 
«  les  Maistres  des  Arbalestiers  et  de  l'Artillerie 
«  leurs  supérieurs,  débatoient  n'estre  sous  la  charge 
«  des  Mareschaux.  Le  Roi  Charles  VI  sur  ce  débat 
«  meu  entre  le  mareschal  Bouciquault  et  Jehan 
«  sieur  de  Ilangest  Maistre  des  Arbalestiers  de 
«  France,  le '22  avril  liH,  déclara  que  la  congnois- 
«  sance  desdils  Arbalestiers,  Archiers  et  Canonniers 
«  appartenoil  et  appartiendroit  perpétuellement,  et 
a  la  réception  de  leurs  monstres  et  reveues  ausdits 
«  Mareschaux.  »  (DuTillet,  Rec.  des Roys  de  France, 
leur  Couronne  et  Maison,  p.  282.  —  Voyez  le  P. 
Daniel,  Mil.  Fr.  T.  I,  p.  193.) 

Quand  on  sait  que  parmi  les  Arbalestriers  il  y 
avoit  des  Arbalestriers  à  cheval  ;  que  la  charge  de 
Colonel  de  l'Infanterie  n'avoit  point  de  jurisdiction 
sur  aucune  Cavalerie;  que  tout  ce  qui  regardoit 
l'ancienne  et  la  nouvelle  Artillerie  n'a  jamais  eu 
aucune  dépendance  du  Colonel  général  ;  enfin  que 
l'ancienne  Artillerie  étoit  toute  sous  le  Grand- 
maitre  des  Arbalétriers  de  France  ;  on  ne  peut  être 
de  l'avis  du  savant  Du  Tillet,  qui  croyoit  qu'au 
Maistre  des  Arbalestiers  avoit  succédé  le  Couronnel 
de  l'Infanterie.  Cette  opinion  que  Brantôme  adoptoit 
comme  la  plus  vraisemblable,  l'est  pourtant  moins 
que  celle  qu'il  rejetoil ,  en  contrariant  ceux  qui 
avoientditque  «  leGrand-maistredes.lr&a/t;s;)7C/'s 
Il  étoit  ce  que  de  son  temps  on  disoil  le  Grand- 
«  maistre  de  l'Artillerie.  »  (Voy.  Du  Tillet,  ubi 
supra,  p.  282. -Brantôme,  Cap.  Fr.  T.  IV,  p.  42 et  43.) 

Anciennenientonnommoitartilleiie,les  machines 
de  guerre  à  l'usage  desquelles  on  a  insensiblement 
substitué  celui  dès  canons  et  autres  armes  à  feu, 
tant  pour  les  sièges  que  pour  les  batailles.  Il  y  avoit 
même  des  arbalestes  qui  faisoient  partie  de  la  grosse 
artillerie  ;  et  la  signification  d'Artillier  étoit  la  même 
que  celle  d'Arbalestrier,  selon  Cotgrave,  un  faiseur 
d'arbalètes.  «  Délaisseront  en  icelle  place  toute  la 

«  grosse  artillerie et  par  espécial  arbalesles 

«  qu'on  ne  peut  bander  aux  reins.  »  (J.  Chartier, 
Hist.  de  Charles  VII,  p.  233.)  «  Jehan  li  Ermin  qui 
<■  estoit  Artillier  le  Roy,  ala  lors  à  Damas  pour 
«  acheter  cornes  et  glus  pour  faire  arbalestres.  » 
(Joinville,  Hist.  de  S'  Louis,  p.  93;  édit.  de  1761.) 
On  peut  voir  dans  le  P.  Daniel  (Mil.  Fr.  T.  I,  p.  195 
et  196,)  la  preuve  que  ces  Arlilliers  ou  Maîtres  par- 
ticuliers de  l'artillerie  d'une  ville,  d'une  forteresse, 
ou  d'un  château,  faisoient  non-seulement  les  arcs, 
les  arbalètes,  les  flèches,  mais  qu'ils  construisoient 
toutes  les  machines  nécessaires  pour  l'attaque  et  la 
défense  des  places  ;  qu'on  leur  conlioit  l'entretien 


et  la  garde  de  cette  ancienne  artillerie,  sous  l'ins- 
pection du  Grand-maitre  des  Arbalétriers.  Il  parolt 
même  qu'au  moins  pendant  quelque  temps  encore 
après  l'invention  de  la  nouvelle  artillerie,  les 
Artilliers  en  général  reconnurent  sa  jurisdiction, 
puisque  sur  la  fin  du  xiv  siècle,  ce  Maistie  des 
Arbalestriers  avoit  cognoissance  des  Maistres  d'en- 
gins, de  Canonniers,  de  Charpentiers,  de  Fossiers, 
et  de  toute  l'artillerie  de  l'Ost.  Voici  quelles  étoient 
ses  anciennes  prérogatives  et  ses  fonctions.  "  Le 
«  Maistre  des  Arbalestriers,  de  son  droit  a  toute  la 
"  cure,  garde  et  administration  avec  cognoissance 
«  des  gens  estans  à  pied  en  l'ost  ou  chevauchée  du 
«  Roy  ;  de  tous  Arbalestriers,  Archers  ;  des  Maistres 
«  d'engins,  de  Canonniers,  de  Charpentiers,  de 
«  Fossiers  et  de  toute  l'artillerie  de  l'ost,  à  toutes 
«  les  monstres:  a  l'ordonnance  sur  ce  ;  à  la  bataille 
«  premier  assiet  les  escoutes,  et  envoyé  querre  le 
"  cry  de  la  nuict.  Et  se  ville,  forteresse  ou  chasteau 
n  est  prins,  à  luy  appartient  toute  l'artillerie  quelle 
«  qu'elle  soit  qui  trouvée  est  ;  et  se  de  l'artillerie 
«  du  Roy  est  commencé  à  traire  sur  les  ennemis, 
«  le  remanant  de  l'artillerie  est  à  luy.  Item  a  de 
«  son  droict  les  oyes  et  chèvres  qui  sont  prinses  en 
«  fait  de  pillage  sur  les  ennemis  du  Roy.  »  iBouteil- 
1er,  Som.  rur.  liv.  n,  p.  898.)  Il  est  évident  que 
dans  l'Histoire  des  Grands  Officiers  de  la  Couronne 
(T.  H,  p.  1058,)  et  la  Milice  Françoise  du  P.  Daniel 
(T.  I,  p.  192,)  l'Extrait  du  registre  des  titres  de 
Rochechouart-Chandenier,  est  une  copie  de  cette 
énumération  des  fonctions  et  anciennes  prérogatives 
du  Grand-maître  des  Arbalétriers  ;  et  qu'au  îieu  de 
ces  mots  «  a  toute  la  cour,  »  il  faut  lire  dans 
l'Extrait  comme  dans  la  Somme  rurale,  «  a  toute  la 
«  cure.  »  On  s'en  convaincra  par  la  comparaison. 
En  résumant  ce  qu'on  a  dit  relativement,  soit  à 
la  différence  entre  le  Colonel  d'Infanterie  et  le 
Maître  des  Arbalétriers,  soit  à  la  ressemblance  entre 
le  Maître  des  Arbalétriers  et  le  Maître  de  l'Artillerie, 
on  trouve  que  le  Colonel  de  l'Infanterie  n'ayant 
jamais  eu  d'inspection  sur  aucune  Cavalerie,  ne 
peut  en  avoir  eu  sav  les, Arbalétriers  achevai  ;  qu'il 
n'en  eut  jamais  aucune  sur  l'ancienne  et  la  nouvelle 
Artillerie  ;  qu'au  contraire  l'ancienne  Artillerie  et 
même  la  nouvelle,  ont  été  sous  la  dépendance  du 
Maître  des  Arbalétriers;  que  par  conséquent  il  y  a 
eu  un  rapport  réel  entre  sa  charge  ef  celle  du  .Maître 
de  l'Artillerie;  et  que  ce  rapport  est  une  raison  de 
croire  que  «  la  dignité  de  Grand-maitre  de  l'Artille- 
«  ne  d'aujourd'hui,  représente  beaucoup  mieux 
«  celle  de  Grand-maître  des  Arbalétriers  que  la 
«  dignité  du  Colonel  de  l'Infanterie.  »  (Voy.  le  P. 
Daniel,  Mil.  Fr.  T.  I,  p.  195.)  Peut-être  prouveroit' 
on  encore  celte  ressemblance  en  observant  que 
dans  l'Histoire  de  S"  Louis,  p.  101,  publiée  en  1668, 
d'après  les  éditions  de  Claude  Mesnard,  et  d'Antoine- 
Pierre  de  Rieux  qui  sous  prétexte  de  polir  le  texte 
de  son  manuscrit  l'avoit  défiguré,  le  titre  de  Maistre 
de  l'Artillerie  le  Roi  répond  l'i  celui  de  Mestre  des 
Arbalestiers  dans  la  même  Histoire,  p.  113,  édition 
de  1761,  conforme  à  un  Manuscrit  du  xiv  siècle. 


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Enfin,  l'on  pense  avec  le  P.  Daniel,  que  toute 
l'Artillerie,  «  même  la  nouvelle  depuis  l'invention 
«  delà  poudre,  fut  dans  le  district  du  Grand-maitre 
«  des  Arbalétriers  au  moinsjusqu'au  règne  de  Louis 
«  XI,  el  que  sous  le  règne  de  ce  Prince  la  charge 
«  de  Mailre  de  l'Artillerie,  c'est-a-dire  du  canon, 
»  des  armes  à  feu,  des  Mineurs  et  des  Officiers  qui 
«  servoient  à  cette  nouvelle  artillerie,  fut  déinem- 
«  brée  de  la  charge  de  Grand-maitredes.4  rbalêtriers, 
«  et  soustraite  à  son  intendance  (1).  ■>  (Voy.  Mil.  Fr. 
T.  I,  p.  197  etl'JS.) 

variantes: 

ARBALESTIER.  Fauchet,  Mil.  Fr.  p.  IH. 

Arbalestrier.  Ord.  T.  I,  p.  383. 

Arbaletieh,  Arbalétrier.  Monet,  Dict. 

Akbeletrier  Ord.  T.  III,  p.  298. 

Arbestiek  (corr.  Arbalesticy.)  Ord.  T.  VI,  p.  538. 

Hahbeletrieb.  Ord.  T.  III,  p.  435. 

Arbalestiei-e,s;/bs^/'t!?«.  Espèce  de  meurtrière. 
(Voy.  Arbaleste.)  Fente  par  laquelle  on  lant^'Oit,  à 
couvert,  les  traits  d"arbalête. 

Là  endroit  séoit  un  moulin,... 
Dont  les  ais  n'ièrenl  pas  entières, 
Mes  garnies  d'arbalestieres. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  295,  Vv 

VARIANTES    : 
ARBALESTIERE.  G.  Guiart,  MS.  fol.  295,  V°. 
.Arbalatiere.  Brantôme,  Cap.  Fr.  T.  II,  p.  18. 

Arban  (2),  subst.  masc.  Amende  pour  défaut  de 
service  militaire,  de  service  exigible  par  le  Seigneur 
souverain.  Service  ou  devoir  tel  que  la  corvée, 
exigible  par  un  Seigneur  féodal.  Comparaisons 
relatives  h  l'idée  des  corvées.  Service  militaire  et 
personnel,  exigible  par  un  Seigneur  féodal.  Convo- 
cation par  le  Seigneur  féodal,  de  ses  vassaux,  pour 
le  service  du  Seigneur  souverain.  Convocation 
itérative  par  le  Seigneur  souverain,  des  Nobles  et 
Non-nobles  sujets  au  service  féodal  el  coutumier, 
pour  service  extraordinaire.  Convocation  générale 
par  le  Seigneur  souverain,  pour  service  extraordi- 
naire. Réunion,  assemblée  des  personnes  générale- 
ment convoquées  pour  service  extraordinaire. 
Forces  réunies,  dernier  effort.  On  observera  que 
dans  les  principes  de  l'ancienne  constitution  de  la 
Monarchie,  tout  homme  libre,  ù  raison  de  sa  pos- 
session bénéficiaire  ou  allodiale,  devoit  le  service 
militaire.  «  llomnis  //^er /(OHio  qui  quatuor  mansos 
«  vestitos  de  proprio  suo,  sive  ùealiciijus  beneficio 
«  habet,  ipse  se  pneparet,  el  ipse  in  hoston  pergat, 
«  sive  cum  seniore  suo.  »  (Baluz.  Capitul.  Reg.  fr. 
T.  I,  col.  489.) 

La  portion  de  fonds  et  terres,  pour  laquelle  on 
exigeoit  ce  service,  n'étoit  pas  toujours  la  même. 
Elle  paroit  avoir  varié  relativement  à  la  nécessité 
plus  ou  moins  grande  de  multiplier  les  défenseurs 
de  la  Patrie.  «  Quicumque  liber  mansos  quinque 
«  de  proprielate  habere  videtur,  in  hostem  venial. 
«  Et  qui  quatuor  mansos  habet,  similiter  facial. 


«  Qui  Ires  habere  videtur,  similiter  agat.  »  (Id. 
ibid.  col.  457.) 

Quant  aux  hommes  libres,  possesseurs  des  deux 
tiers,  de  la  moitié,  d'un  tiers,  d'un  quart,  d'un 
sixième  de  cette  portion  de  fonds  el  terres,  pour  la 
totalité  de  laquelle  le  service  d'un  homme  libre 
étoit  exigible,  on  les  associoit  en  nombre  suffisant 
pour  former  une  portion  totale  ;  et  le  service  mili- 
taire auquel  cette  portion  ainsi  formée  les  assujet- 
lissoit,  se  faisoil  par  un  seul  homme  libre,  que  son 
associé  ou  ses  associés  dévoient  aider.  »  Qui  verè 
<•  très  mansos  de  proprio  habuerit  huic  adjungaiur 
«  unusqui  unum  mansum  habeatetdet  illi  adjuto- 
"  rium  ut  ille  pro  ambobus  ire  possit.  Qui  autem 
«  duos  mansos  tanlùm  de  proprio  habet,  jungatur 
«  illi  aller  qui  similiter  duos  mansos  liabeat  ;  et 
«  unusexeis,allero  illi  adjuvante,  pergal  in  hoslem. 
«  Qui  etiam  unum  tantum  mansum  de  proprio 
«  habet,  adjungantur  ei  très  qui  similiter  habeant,  et 

«  dent  ei  adjulorium ,  et  ille  tanliim  pergal 

«  Ubicunque  autem  Ires  fuerint  invenli  quorum 
«  unusquisque  mansum  unuin  habeal,  duo  ierlium 
«  prœparai  e  faciant  ;  ex  quibus  qui  melius  polest, 
«  in  hoslem  venial.  Illi  verô  qui  dimidios  mansos 
«  habent,  quinque  sextum  prœparare  faciant.  » 
(Baluz.  Capitul.  Reg.  fr.  T.  1,  col.  457.  458,  489  et 
490.)  Il  y  avoil  même  telle  circonstance  où  la 
jouissance  seule  de  la  liberté ,  sans  propriété  de 
terres ,  sans  possession  allodiale ,  obligeoit  les 
hommes  libres  à  contribuer  en  argent  à  la  défense 
du  Royaume.  «  Qui  sic  pauper  inventus  fuerit  qui 
"  nec  mancipia  nec  propriain  possessionem  terra- 
■<  rum  habeat,  tamen  in  pretio  valente  quinque 
«  solidos,  quinque  sextum  prœparent.  »  {Id.  ibid. 
col.  458.) 

On  a  la  preuve  que  sous  les  règnes  de  Louis-le- 
Debonnaire  et  de  Charles-le-Chauve,  la  loi  du  service 
militaire  étoil  la  même  que  sous  le  règne  de  Char- 
lemagne.  «  Comités,  vel  Missi  nostri  diligenter 
«  inquirant  quanti  homines  liberi  in  singulis  comi- 
»  talibus  maneant  qui  per  se  possunt  expedilionem 
«  exercilatem  facere,  vel  quanti  de  his  quibus  unus 
«  alium  adjuvet,  etc.  »  (Id.  ibid.  T.  II,  col.  187.) 

Lorsque  par  un  Capitulaire  déjà  cité,  Charlemagne 
oblige  au  service  militaire  tout  homme  libre,  pro- 
priétaire ou  usufruitier  d'une  portion  de  fonds  et 
terres,  déterminée  par  la  loi,  il  semble  que  par 
rapport  à  l'obligation  de  servir,  il  n'y  avoit  aucune 
différence  entre  la  possession  bénéficiaire  et  la 
possession  allodiale.  Mais  lorsqu'en  obligeant  à  une 
aide  mutuelle  les  hommes  libres,  qui  ne  possédoient 
pas  en  totalité  celle  portion  légale  de  fonds  et 
terres,  pour  laquelle  un  seul  devoit  le  service,  il 
parle  uniquement  des  homi^ies  libres  propriétaires 
ou  possesseurs  d'alleus;  lorsqu'après  avoir  ordonné 
ailleurs,  que  tous  usufruitiers  ou  possesseurs  de 
bénéfices  le  suivront  à  l'armée,  il  détermine  pour 


(!)  Le  dernier  grand-maître  fut  Aimar  de  Prie,  seigneur  de  Montpoupon,  de  1515  à  1527:  la  bataille  de  Pavie  (l.")25)  avait 
prouvé  l'inutilité  des  arbal^'lriers ;  il  n'était  plus  besoin  d'un  chef  sans  soldats.  (.N.  E.)  —  (2)  Nous  renvoyons  le  lecteur  qui 
voudra  contrôler  ce  Ion?  article  sur  Varbnn,  au  livre  déjà  cité  de  M.  Bautaric,  livre  II,  chap.  II  (p.  09  à  99),  livre  IV, 
cbap.  m  (p.  223  à  240),  et  livre  V,  chap.  V  (p.  349  à  358).  (N.  E.) 


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les  seuls  propriétaires  ou  possesseurs  cl"alleus , 
la  portion  de  fonds  et  terres  à  raison  de  laquelle  il 
les  assujettissoit  au  même  devoir  ;  il  semble  que  le 
possesseur  usufruitier,  sa  possession  fût-elle  moin- 
dre que  celle  du  possesseur  propriétaire,  devoit  seul 
et  sans  aide,  satisfaire  à  l'obligation  de  servir  la 
Patrie.  «  Quicunque  bene/icia  habere  videntur, 
«  omnes  in  hostem  veniant.  Quicunque  liber  mansos 
«  quinque  de  proprietate  habere  videtur,  similiter 
«  in  hostem  veniat.  Et  qui  quatuor  mansos 
«  habet,  etc.  »  (Baluz.  Capitul.  Reg.  Fr.  T.  I,  col. 
457.  —  Id.  ibid.  col.  489.) 

Si  l'on  ne  proportionnoit  pas  à  la  possession 
bénéficiaire,  comme  à  la  possession  allodiale,  l'obli- 
gation du  service  qu'on  exigeoit  d'un  homme  libre, 
c'est  probablement  que  cette  obligation,  réelle  pour 
les  propriétaires ,  les  possesseurs  d'alleus ,  étoit 
personnelle  aux  usufruitiers ,  aux  possesseurs  de 
bénéfices,  comme  l'étoit  aux  hommes  libres  sans 
propriété,  l'obligation  de  s'associer  plusieurs  en- 
semble, pour  aicîer  en  argent  l'un  d'eux  à  faire  le 
service  militaire.  Ainsi  l'obligation  d'obéir  au  ban 
du  Prince  et  de  s'armer  pour  la  défense  du  Royaume, 
pouvoit  n'être  pas  la  même  pour  le  possesseur  d'un 
alleu  que  pour  le  possesseur  d'un  bénéfice,  quoi- 
qu'elle fût  commune  à  l'un  et  à  l'autre.  Dans  les 
Capitulaires,  le  possesseur  d'un  alleu  est  souvent 
désigné  par  la  seule  qualité  d'homme  libre.  «  Qui- 
«  cunque  liber  homo  in  hostem  bannitus  fuerit,  et 
«  venire  conteaipserit,  etc.  »  (Capitulare  11,  an. 
812,  lib.  I,  leg.  Longob.  tit.  xiv,  cap.  13.)  «  Quicun- 
«  que  homo  nostro  habens  honores  in  hostem  ban- 
«  nitus  fuerit,  et  ad  condictum  placitum  non  vene- 
«  rit,  etc.  »  (Capit.  II,  an.  812,  cap.  3.)  «  Quicunque 
«  exhisqui  beneficium  Principis  habent ,  parem 
«  suum  contra  hostes  communes  in  exercitu  per- 
«  gentem  dimiserit,  etc.  »  (Ibid.  cap.  5.) 

On  croit  donc  que  l'obligation  du  service  mili- 
taire, contractée  par  l'homme  libre,  à  raison  d'un 
usufruit  qu'on  nommoit  honneur  ou  bénéfice,  parce 
que  la  concession  de  cet  usufruit  étoit  un  bienfait 
ou  une  récompense  honorable,  dilTéroit  de  l'obli- 
gation imposée  à  l'homme  libre  ù  raison  de  sa 
propriété  ;  que  l'une  étoit  réelle  et  l'autre  person- 
nelle; que  pour  l'homme  libre  qui  réunissoit  à  la 
possession  allodiale,  la  possession  bénéficiaire, 
elle  étoit  personnelle  et  réelle  tout-à-la-fois.  Autre- 
ment les  concessions  d'honneurs  ou  de  bénéfices , 
non-seulement  inutiles  à  la  Patrie,  mais  même  à  la 
Souveraineté,  auroient  été  trop  désintéressées.  Ce 
désintéressement  est  d'autant  moins  vraisemblable, 
qu'il  répugne  à  l'idée  de  la  bienfaisance  royale,  qui, 
lors  même  qu'elle  récompense,  doit  avoir  un  objet 
utile  et  politique. 

D'ailleurs,  plus  on  fait  réflexion  que  les  Francs, 
et  même  les  Gaulois,  étoient  Germains  d'origine; 
que  les  Germains  naissoient  tous  soldats  de  la 
Patrie;  qu'ils  s'honoroienl  d'être  les  compagnons 
d'un  Chef  auquel  ils  se  dévouoient;  que  ce  même 
Chef anoblissoit  par  des  distinctions,  et  justifioit 
par  des  actes  de  libéralité,  un  dévouement  qui  fai- 


soit  sa  propre  siireté  en  temps  de  guerre ,  et  en 
temps  de  paix  sa  gloire  :  plus  on  trouve  raisonnable 
de  croire  que  les  Leudes  d'un  Roi  Franc  avoient 
les  mêmes  idées  de  noblesse,  d'honneur  et  de 
patriotisme  que  les  compagnons  d'un  Chef  de 
Germains;  que  nos  premiers  Rois,  Germains  eux- 
mêmes,  connoissoient  ces  idées  nationales;  qu'a- 
près leur  établissement  dans  les  Gaules,  ils  songèrent 
à  fortifier  ces  mêmes  idées ,  surtout  celles  qui 
étoient  relatives  îi  leur  gloire  et  à  leur  sûreté ,  par 
des  concessions  à  titre  d'honneurs  et  de  bénéfices. 

Tel  paroît  être  le  motif  politique  de  ces  conces- 
sions, au  moyen  desquelles  l'obligation  d'obéir  au 
ban  et  de  servir  la  Patrie,  semble  avoir  été  person- 
nelle aux  Leudes,  comme  aux  hommes  libres  sans 
propriété  l'obligation  de  s'aider  à  faire  ce  service. 
On  ajoute  qu'un  homme  libre  possesseur  d'un 
bénéfice  auroit  été  ingrat,  si  comme  l'homme  libre 
en  général,  il  n'eût  vu  que  la  défense  de  l'Etat  dans 
la  défense  de  la  personne  de  son  Souverain  et  de  son 
bienfaiteur.  11  devoit  à  la  Patrie  et  au  Roi ,  ce  que 
l'autre  ne  devoit  qu'à  la  Patrie.  Enfin,  nos  Rois  par 
leur  bienfaisance,  obligèrent  sans  doute  les  Leudes 
à  des  services  qui  leur  étoient  personnels.  Il  étoit 
naturel  qu'à  raison  de  ces  services ,  exigibles 
comme  hommages  de  la  reconnoissance,  les  Leudes 
fussent  les  premiers  à  obéir  au  ban,  et  à  s'armer 
pour  la  défense  du  Roi  et  du  Royaume.  En  l'an  640, 
le  roi  Sigebert  se  disposant  à  châtier  la  révolte  de 
Raoul,  duc  de  la  Thuringe,  appela  d'abord  à  son 
secours  les  Leudes  d'Austrasie.  «  Cum  Sigibertus 
«  regnaret,  et  Radulphus  dux  Thoringice  vehementer 
"  Sigiberto  rebellare  disposuisset,"jussu  Sigiberti 
«  omnes  Leudes  Austrasiorum  in  exercitu  gradien- 
«  dum  banniti  sunt,  etc.  »  (D.  Ruinart,  Fredeg. 
Chronic.  append.  ad.  Gregor.  Turon.  Hist.  col.  656.) 

L'homme  libre  qui  n'étoit  point  Leude,  devoit 
aussi  le  service  militaire  :  mais  comme  on  vient  de 
l'observer,  il  ne  le  devoit  qu'à  la  Patrie.  C'étoit  elle 
seule  qu'il  servoit,  soit  qu'il  marchât  à  une  con- 
quête, soit  qu'il  s'opposât  à  l'invasion  d'un  ennemi 
étranger,  ou  à  la  révolte  d'un  sujet,  qui,  en  s'ar- 
mantcontre  son  Roi,  s'armoil  contre  elle-même. 
Cliarlemagne  veilloit  à  la  conservation  de  ses 
défenseurs ,  lorsqu'à  dessein  d'empêcher  qu'un 
homme  libre,  plus  lâche  que  dévot,  ne  se  fit  Prêtre 
pour  être  dispensé  de  servir,  il  interdisoit  aux 
hommes  libres  en  général,  l'entrée  dans  les  Ordres 
ecclésiastiques,  sans  sa  permission.  «  De  liberis 
«  hominibusqui  ad  servitium  Deisetraderevolunt, 
a  ut  prius  hoc  non  faciant  quàm  a  nobis  licentiam 
a  postulent.  Hoc  ideo  quia  audivimus  aliquos  ex 
<i  illis  non  tàm  causa  devotionis  hoc  fecisse  quàm 
«  pro  exercitu  seu  aliâ  functione  regali  fugiendâ.  » 
(Baluz.  Capitul.  Reg.  Fr.  T.  I,  col.  725  et  726.) 

11  est  probable  que  sans  la  crainte  de  se  désho- 
norer aux  yeux  d'une  Nation  prompte  à  soupçon- 
ner de  lâcheté  quiconque  se  dispensoit  de  faire  la 
guerre,  nos  Prélats  auroient  eu  plus  de  respect 
pour  les  décrets  de  l'Eglise,  et  moins  d'ardeur  pour 
la  défense  du  Royaume.  Cette  ardeur  guerrière. 


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naturelle  sans  doute  à  plusieurs  d'entre  eux  ,  étolt 
si  générale  sous  le  règne  de  Cliarlemagne ,  que  le 
peuple  tremblant  pour  ses  Ministres,  dont  la  mort 
ou  le  danger  sembloit  lui  présager  une  défaite, 
supplia  ce  Prince  d'ordonner  qu"à  l'avenir  les  Evo- 
ques ne  le  suivroient  point  à  l'armée.  <■  Flexis 
X  omnes  precamur  poplitibus  Majeslatem  vestram 
«  ut  Episcopi  deinceps,  sicut  haclenus,  non  vexen- 
«  tur  hostibus;  sed  quando  vos  nosque  in  hostem 

"  pergimus,  ipsi  propriis  residcant  in  parochiis 

«  Quosdam  enim  ex  eis  in  hostibus  et  prœliis  vulne- 

«  ratos  vidimus  et  quosdam  périsse  cognovimus 

«  Novit  Dominus,  quando  eos  in  talibus  videmus, 
«  terror  apprehendit  nos,  et  quidam  ex  nostris 
«  timoré  perterrili  propter  hoc  fugere  soient.  » 
(Baluz.  Capitul.  Reg.  Fr.  T.  I,  col.  405.) 

Par  la  loi  des  Francs,  tout  homme  libre ,  que  les 
décrets  de  l'Eglise  ou  ses  privilèges  n'e.xemptoient 
pas  du  service  militaire,  étoit  condamné  à  une 
amende  de  soixante  sous,  toutes  les  fois  qu'il  refu- 
soit  ou  négligeoit  d'obéir  au  ban  du  Roi.  «  Si  quis 
«  liber,  contemptà  jussione  nostrà,  ceteris  in  exer- 
«  citum  pergentibus,  domi  residere  prœsumpserit, 
«  plénum hêribannum  secundùmlegem Francorum, 
«  id  est  solidos  sexaginta  sciât  se  debere  compo- 
«  nere.  »  (Capitula  ad.  leg.  Longob.  addita,  an.  801, 
imperii  Karoli-Magni  1 .)  On  croit  voir  dans  cette  ex- 
pression, secitndiuii  h'ijon  Fraiiconint,  une  preuve 
que  l'obligation  de  servir,  et  la  peine  imposée  à 
l'homme  libre  qui  n'y  avoit  pas  satisfait,  étoit 
aussi  ancienne  que  les  premières  loix  faites  par 
les  Francs,  lorsqu'ils  s'établirent  dans  les  Gaules. 
Cette  opinion  semble  d'autant  plus  probable  qu'en 
578,  c'est-à-dire,  soixante-sept  ans  après  le  règne 
de  Clovis,  le  roi  Cbilpéric  abusoit  de  cette  même 
loi,  en  y  assujettissant  des  hommes  que  la  Religion 
ou  l'humanité  devoit  en  affranchir.  «  Cliilpericus 
«  rex  de  pauperibus  et  junioribus  ecclesiœ  vel 
«  basilicœ  bannos  jussit  exigi ,  pro  eo  quôd  in 
«  exercitu  non  ambulassent.  Non  enim  oratconsue- 
«  tudo  ut  hi  ullam  exsolverent  publicam  functio- 
«  nem.  »  (D.  Ruinart,  Gregorii  Turon.  Hist.  tit. 
xxvn,  col.  237.) 

La  peine  prononcée  contre  l'homme  libre  qui 
n'obéissoit  pas  au  ban,  sous  les  Rois  de  la  première 
et  de  la  seconde  race,  étoit  la  même  sous  ceux  de 
la  troisième,  contre  l'homme  coutumier  qui  devoit 
le  service  militaire.  «  Se  les  Gens  le  Roy  truevent 
«  les  ]ions  couslumiers  par  les  chastelleries  qui 
«  fussent  remès,  fors  ceus  qui  devroient  remaindre, 
«  li  Roy  en  porroit  bien  lever  sus  chacun  soixante 
«  sols  d'amende ,  et  li  Bers  ne  les  en  pourroit 
"  garantir.  »  (Etal3lissemens  de  S"  Louis,  livre  I, 
chapitre  lxi.) 

En  attaquant  la  propriété  ou  possession  allodiale 
de  l'homme  libre,  on  l'auroit  mis  dans  l'impossibilité 
de  faire  à  l'avenir  le  service  auquel  il  étoit  tenu 
comme  propriétaire  ou  possesseur  d'alleu.  Cliarle- 
magne s'assuroit  donc  la  continuation  d'un  service 
dans  lequel  consistoit  la  principale  force  de  l'Etat, 
lorsqu'il  protégeoit  contre  la  vexation  et  l'injustice, 


la  propriété  de  l'homme  libre  ;  lorsqu'il  défendoit 
d'y  attenter,  même  pour  le  payement  de  l'amende 
due  par  celui  qui  n'avoit  pas  obéi  au  ban  ;  lorsqu'il 
vouloit  que  celte  amende  fût  perçue  en  or  et  en 
argent,  en  habits,  en  armes,  etc.  «  De  oppressione 
«  pauperum  liberorum  hominum,  ut  non  fiant  à 
«  potentioribus  per  aliquod  malum  ingenium  contra 
«  justitiam  oppressi,  ita  ut  coaclirese'orum  vendant 
«  aut  tradant.  Ideo  hœc,  et  supra  et  hic,  de  liberis 
«  hominihus  diximus,  ne  forte  parentes  contra 
"  justitiam  fiant  exheredati,  et  regale  obsequium 
"  minuatur,  etc.  ■>  {Baluz.  Capitul.  Reg.  Fr.  T.  I, 
page  427.  —  Id.  ibid.  col.  487.)  »  Ileribannus  non 
«  exactetur  neque  in  terris ,  neque  in  mancipiis  ; 
«  sed  in  auro  et  argento,  palliis  atque  armis,  et 
«  animalibus  atque  pecudibus,  sive  talibus  speciebus 
«  quœ  ad  utilitatem  pertinent.  »  (Id.  ibid.  col.  767.) 
On  exigeoit  au  reste  l'amende  dont  il  s'agit  avec 
tant  de  rigueur,  que  dans  le  cas  d'insolvabilité , 
l'homme  libre  étoit  réduit  à  se  mettre  en  la  servi- 
tude du  Prince,  et  d'y  rester  jusqu'à  ce  qu'il  l'eiit 
payée  en  entier.  «  Si  non  habuerit  unde  illam  sum- 
«  mam  persolvat,  semetipsum  pro  wadio  in  servi- 
«  tium  Principis  tradat ,  donec  per  tempera  ipse 
<'  bannus  ab  eo  fiât  persolutns  ;  et  tune  iterum  ad 
«  statum  libertatis  suœ  reverlatur.  »  (Id.  ibid. 
col.  493  et  7G6.) 

Quant  à  l'homme  libre  usufruitier  ou  possesseur 
d'un  bénéfice,  d'un  honneur,  on  punissoit  en  lui  le 
refus  de  service,  par  la  perte  de  son  usufruit ,  de 
sa  possession  bénéficiaire.  S'i^  n'étoit  coupable  que 
de  lenteur,  il  en  étoit  quitte  pour  faire  abstinence 
de  viande  et  de  vin ,  autant  de  jours  qu'il  avoit 
différé  d'obéir  au  ban  du  Prince.   «  Homo   nostros 

«  habens  honores  in  hostem  bannitus quot 

«  diebus  post  placitum  condictum  venisse  compro- 
«  batus  fuerit,  tôt  diebus  abstineat  a  carne  et  vino.  » 
(Baluz.  Capitul.  Reg.  Fr.  T.I,  col.  7G7.)  «  Quicunque 
«  ex  his  qui  beneficium  Principis  habent,  parem 
«  suum  contra  hostes  communes  pergentem  dimi- 
«  serit,  et  cum  eo  ire  vel  staie  noluerit,  honorem 
«  suum  et  beneficium  perdat.  »  (Id.  ibid.) 

L'opinion  commune,  dit  l'Auteur  de  la  Glose  sur 
le  Chapitre  lx  de  la  Coutume  d'Anjou,  est  que  sous 
le  règne  de  S'  Louis,  les  Bers  et  Arrière-vassaux, 
qui  refusoient  d'obéir  au  ban,  perdoient  leurs  fiefs, 
comme  les  Leudes  perdoient  leurs  honneurs  et 
bénéfices  sous  le  règne  de  Charlemagne.  (Voyez 
Ord.  T.  I,  p.  154,  note  (r). 

On  chercheroit  en  vain  dans  les  Capitulaires  des 
Rois  de  la  première  et  de  la  seconde  race ,  une 
distinction  entre  les  mots  bannus  et  heribannns , 
semblable  à  celle  qu'on  trouve  entre  les  mots  ban 
et  arrière-ban,  dans  les  Ordonnances  des  Rois  de 
la  troisième  race.  On  y  voit  qu'en  général  bannus 
signifioit  publication  d'une  loi,  d'un  ordre  du  Sou- 
verain ;  en  particulier,  publication  d'un  ordre  relatif 
à  la  nécessité  du  service  militaire. 

De  là,  on  nommoit  bannus,  bannus  dommicus, 
la  peine  à  laquelle  on  condamnoit  les  infracteurs 
du  ban  ou  de  la  loi  publiée  par  ordre  du  Seigneur 


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AR 


souverain;  banniis,  heribannns,  la  peine  à  laquelle 
on  condaninoit  les  hommes  libres  sans  bénéfices  ni 
honneurs,  lorsqu'au  mépris  du  ban  ou  de  Tordre 
publié  de  la  part  du  Seigneur  souverain  ,  relative- 
ment à  l'obligation  de  servir,  ils  avoient  refusé  ou 
négligé  de  le  suivre  ù  l'armée,  ou  de  faire  quel- 
qu'autre  service  utile  ù  la  Patrie.  Il  ne  s'agit  ici  que 
de  la  dernière  signilication  du  mot  simple  bannus, 
sigiiilication  qui  étoit  particulière  au  composé 
luh-ibannns.  «  Nec  pro  wactà,  nec  de  scarà,  nec  de 
"  wardà,  nec  pro  heribergare,  nec  pro  alio  banno, 
a  heribannum  Comcs  exactare  prœsumat,  nisi 
«  missus  nosler,  etc.  «  {Baluz.  Capital.  Reg.  Fr. 
T.  I,  col.  767.)  «  lUi  qui  in  hostem  pergere  non 
«  potuerint,  juxta  aniiquam  et  aliarum  gentium 
«  consuetudinem  ad  civitates  novas,  et  pontes ,  ac 
«  tiansilus  paludium  operentur,  et  in  civitate  atque 
«  in  marcha  waclas  faciant,  ad  defensionem  Patriœ 
a  omnes  sine  ullà  excusatione  veniant.  Et  qui... 

«  hostem  dimiserint, /((?rif)a?i/n<m persolvant.  » 

(Id.  ibid.T.  II,  col.  187.) 

La  distinction  que  dans  les  Capitulaires  on  aper- 
çoit entre  Imnnus  et  heribannns,  consiste  en  ce  que 
le  mot  composé  signifie  particulièrement  la  peine, 
l'amende  pour  défaut  de  service  militaire,  et  que  le 
mot  simple  signifie  généralement  «  peine,  amende 
i<  pour  infraction  de  la  loi  du  Seigneur  souverain  ; 
«  la  peine,  l'amende,  qu'on  nommoit  souvent  ban- 
«  nus  dominicus.  »  (Voy.  Baluz.  Capitul.  Reg.  Fr. 
T.  I,  col.  3-47,  393,  passim.  —  Id.  ibid.  col.  197, 
198,  207,  254,  passim.  —  Id.  ibid.  col.  349,  371, 
passim.)  C'est  sans  doute  en  conséquence  de  cette 
acception  générale,  que  bannus,  bannus  dominicus, 
signilioit  quelquefois  la  môme  chose  que  heriban- 
nus.  ^■^  De  Mundoburgio  ecclesiarum,  viduarum, 
«  orphanorum  et  de  minus  potentum  personarurn 
a  atque  et  de  exercitali  placito  instituto,  ut  hi  qui 
<"  ista  irruperint,  bannum  dominicum  omnimodis 
«  componant.   »   (Baluz.  Capitul.   Reg.   Fr.   T.   I, 

col.  403.)  «  De  heribanno diligenter  inquirant 

«  Missi  :  qui  hostem  facere  potuit  et  non  fecit,  ipsum 
«  bannum  componat.  »  (Id.  ibid.  col.  474,  etc.) 

On  ajoute  que  dans  le  sens  de  peine,  amende, 
non-seulement  l'acception  de  heribannns  étoit  aussi 
particulière  que  celle  de  bannus  étoit  générale; 
mais  que  cette  acception  est  la  seule  qui  paroisse 
justifiée  par  les  Capitulaires.  En  effet,  on  n'y  a  ren- 
contré aucune  itreuve  qu'il  ait  signifié /^a»,  publica- 
tion en  général  ;  pas  même  en  parliculier  ban  de 
l'ost,  en  latin  hostiiis  bannus,  le  to)(,la  publication 
d'un  ordre  pour  se  rendre  à  l'armée,  ou  pour  faire 
quelqu'autre  service  militaire.  C'est  néanmoins 
d'après  f  idée  contraire  qu'on  a  prétendu  que  la  plus 
ancienne  signification  de  heribannus,  en  fran^'ois 
heriban,  hereban,  étoit  le  cri  public  fait  de  par  le 
Roi  à  ses  vassaux  pour  l'aller  servir  à  l'armée,  et 
qu'ensuite  le  même  mot  avoil  signifié  l'amende  que 
payoient  les  mêmes  vassaux  pour  n'avoir  pas  obéi 
a  la  convocation.  Les  Etymologistes  sont  en  géné- 
ral d'autant  plus  attachés  à  cette  opinion,  qu'elle 
leur  semble  autorisée  par  la  signification  du  mot 


allemand  heer,  qui,  réuni  à  ban,  forme  selon  eux 
le  composé  hereban,  en  latin  heribannus.  (Voy. 
Fauchet,  Mil.  Fr.  p.  114.  -  Rabelais,  T.  IV,  p.  218; 
note  de  Le  Duchat.  —  Ménage,  Dict.  Etym.) 

Il  est  vrai  qu'en  allemand  heer  signifie  armée  ; 
mais  comme  le  droit  d'assembler  une  armée  et  de 
la  commander,  est  un  droit  de  Seigneur,  il  seroit 
possible  qu'une  armée  eût  été  nommée  heer,ie  cet 
autre  mot  allemand  hei'r,  /ie77<senlatin,enfrançois 
Seigneur.  Quoi  qu'il  en  soit,  les  Savans,  qui  ne  sont 
pas  de  l'opinion  générale  des  Etymologistes  sur  la 
composition  de  hereban,  le  croient  formé,  non  de 
lieer,  mais  de  herr  réuni  au  mot  ban.  (Voy.  Coquille, 
Hist.  de  Mvernois,  p.  121.  —  De  la  Roque,  Traité 
du  Ban  et  Arrière-ban,  chap.  xvii,  p.  43.  —  Borel, 
Très,  de  Rech.  et  Antiq.  Gaul.  p.  508.)  Cette  seconde 
Etymologie  peut  être  préférable  à  la  première  ;  mais 
on  n'en  conclura  point  avec  Coquille,  que  dans  les 
Capitulaires  hereban,  en  latin  heribannus,  ait  signi- 
fié l'ordre  publié  de  la  part  du  Seigneur  souverain 
pour  s'armer  et  faire  le  service  militaii'e.  On  a  déjà 
remarqué  qu'il  y  désignoit  spécialement  et  peut- 
être  uniquement  l'amende  due  au  Seigneur  souve- 
rain, par  tout  homme  libre  qui  n'avoit  pas  obéi  à 
cet  ordre. 

Il  paroit  que  cette  amende  étoit  si  essentiellement 
le  droit  du  Seigneur  souverain,  qu'on  refusoit  d'en 
compter  à  toul  autre  qu'à  ses  Envoyés,  même  aux 
Comtes.  «  Dicunt  ipsi  Comités  quod  alii  eorum 
<"  pagenses  non  illis  obediant,  nec  bannum  domni 
«  Imperatoris  adimplere  volunt  ;  dicentes  quod 
«  contra  Misses  domni  Imperatoris  pro  heribanno 
><  debeant  ratiouem  reddere.  »  (Baluz.  Capitul.  Reg. 
Fr.  T.  I,  col.  486.)  Ce  refus  de  la  part  des  hommes 
libres,  fut  autorisé  par  les  loix  de  Charlemagne. 
«  Ut  haribannum,  aut  aliquod  collectum,  pro  exer- 
«  citali  causa.  Comités  de  liberis  hominibus  reci- 

«  père non  prœsumant;  excepte  si  de  palatio 

«  nostro Missus  veniat  qui  illum  haribannum 

«  requirat.  "  (Id.  ibid.  col.  532.)  Quoique  les  Comtes 
eussent  le  tiers  de  cette  amende,  la  concession 
qu'on  leur  en  faisoit,  étoit  une  concession  de  partie 
d'un  droit  qui  n'appartenoit  sans  doute  qu'au  Sei- 
gneur souverain,  puisqu'ils  ne  pouvoient  recevoir 
le  don  qui  leur  en  étoit  fait,  que  par  les  mains  de 
ses  Envoyés.  «  Herilinnnum  Cornes  exactare  non 
«  prœsumat,  nisi  Missus  noster  prius  lieribannuni 
«  ad  partem  nostrani  recipiat  et  ei  suam  tertiam 
«  partem  exinde  per  jussionem  nostram  donet.  » 
(Id.  ibid.  col.  767.) 

Lorsqu'on  fait  réflexion  d'ailleurs,  que  l'homme 
libre  à  qui  il  étoit  impossible  de  servir  la  Patrie  en 
suivant  le  Roi  ;i  l'armée,  étoit  tenu  de  la  servir  et 
de  travailler  pour  son  utilité  ou  pour  sa  défense, 
soit  en  gardant  les  frontières,  soit  en  aidant  à  bâtir 
de  nouvelles  cités,  à  construire  des  ponts,  à  rendre 
les  marais  praticables  ;  lorsqu'on  a  la  preuve  que 
l'amende  pour  défaut  de  travail  aux  ouvrages 
publics,  comme  l'amende  pour  défaut  de  service  à 
l'armée,  pour  défaut  de  service  militaire  en  général, 
se  nommoit  heribannus;  on  est  de  plus  en  plus  au- 


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torisé  à  croire  que  cette  dénomination  étoit  moins 
relative  à  l'idée  particulière  du  service  à  Farmce, 
qu'à  l'idée  générale  du  service  que  le  Seigneur  sou- 
verain avoit  seul  le  droit  d'exiger  d'un  homme 
libre.  On  a  remarqué  plus  liaut  que  bannus  domi- 
niciis  signifioit  quelquefois  amende  pour  défaut  de 
service  même  à  l'armée. 

Tant  que  la  puissance  souveraine  fut  en  état  de 
protéger  la  liberté  et  la  propriété  contre  l'usurpa- 
tion et  l'oppression  des  Grands,  l'homme  libre  ne 
servit  que  le  Roi  et  la  Patrie.  «  Liberi  homines  nul- 
«  lu  m  obsequium  Comitibus  faciant  nec  Vicariis, 
«  neque  in  prato,  neque  in  messe,  netiueinaraturà 
■1  aut  vineà;  et  conjectum  ullum  vel  residuum  eis 
«  resolvant,  excepte  servitio  quod  ad  Regem  perti- 
«  net,  et  ad  heribannatores,  vel  bis  qui  legationem 
«  ducunt.  »  (Baluz.  Capitul.  Reg.  Fr.  T.I,  col.  400.) 
Mais  à  l'anéantissement  presque  total  de  cette  puis- 
sance, la  propriété  devint  servile,  et  on  vit  la 
liberté  expirer  sous  les  efforts  redoublés  de  la 
tyrannie  féodale.  Le  Seigneur  féodal  exigea  pour 
lui  les  services  que  le  Seigneur  souverain  avoit 
exigés  pour  l'utilité,  ou  pour  la  défense  du  Royaume. 
11  appela  son  homme,  celui  qui  jusqu'alors  avoit  été 
comme  lui  l'homme  du  Roi  et  de  la  Pairie,  et  l'as- 
servit à  des  devoirs  qu'on  nommoit  bans,  baiis- 
arùans,  ou  tout  simplement  arbans  :  mot  dans 
lequel  on  reconnoit  le  \a.['m  heribanniis,  qu'on  écri- 
voit  liarlbannus,  hairbauniis,airbanmis,arbanniis, 
e7'baii)uts,  etc.  (Vov.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  T.  III, 
col.  1107-1111.  —  Baluz.  Capi\ul.  Reg.  Fr.  T.  I,col. 
532.  —  Formulœ  vet.  Bignon.  Form.  xxxi.) 

Ainsi  le  mol  irtxnçois  arban,  formé  de  l'alléralion 
du  latin  heribannus,  qui  signifioit  l'amende  pour 
défaut  de  service,  exigé  de  l'homme  libre  par  le 
Seigneur  souverain,  signifia  le  service  même, 
exigé  de  l'homme  serf  par  le  Seigneur  féodal  :  dans 
la  Coutume  de  la  Marche,  «  les  corvées  à  bras,  ou 
«  de  bœufs  et  charettes  que  les  subjects  tenans  hé- 
«  ritages  servement  ou  mortaillablement  doivent  à 
«  leurs  Seigneurs:  »  dans  la  Coutume  de  Poitou, 
«  certains  devoirs  et  charges  dues  sur  héritages.  » 
(Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  T.  1,  p.  02.  —  Id.  ibid. 
T.  II,  p.  9.  —  Cotgrave,  Dict.) 

On  nommoit  arbans  ces  corvées,  ou  autres  ser- 
vices, parce  qu'ils  se  faisoient  en  vertu  d'un  ban, 
d'un  ordre  publié  de  la  part  du  Seigneur.  «  Outre 
«  la  taille  annuelle,  l'homme  serf  tenant  feu  ellieu 
«  est  encores  biennable  ;  c'est  assavoir  qu'il  doit 
«  une  journée  d'homme  à  bras,  depuis  soleil  levant 
«  Jusques  au  couchant,  tel  jour  de  l'année  qui  luy 
«  est  commandé  par  son  Seigneur  ou  son  Sergent 
«  baillial  ;  de  laquelle  semonce  ou  commandement 
0  le  Sergent  baillial  est  creu,  pour  faulcher,  faire 
«  vignes,  ou  autres  œuvres;  ou  pour  le  bian,  autre- 
«  meut  arban,  doit  payer  à  son  Seigneur  quinze 
«  deniers  tournois,  au  choix  du  Seigneur.  »  (Cou- 
tumes locales  de  la  ville  et  baronnie  de  Chàleau- 
neuf,  art.  iv.)  Dans  celles  de  la  ville  et  comté  de 
Chàteau-Meillan  (art.  xxvet  xxvi},  on  lit  :  »  Leshom- 
«  mes  serfs  doivent  un  chascun  mois  à  leur  Seigneur 


«  un  arban  à  bœufs  et  charrette,  s'ils  en  ont;  sinon, 
«  une  corvée  de  leur  corps.  Item,  tous  les  hommes 
«  et  femmes  serfs  des  vassaux  demeurans  en  ladite 
"  terre,  doivent  audit  Seigneur  chascun  an,  un 
«  chascun  d'eux,  un  arbdn  à  bœufs,  etc.  »  (La 
Thaumassière,  Coût,  de  Berry ,  p.  -160  et  191.) 
Renoul,  chevalier,  sire  de  Culant,  affranchit  en  1273, 
les  bourgeois  de  Veydun,  «  et  quita  tout  arban  aux 
«  hommes  et  aux  femmes  de  la  franchise,  »  avec 
une  restriction  qui  prouve  que  sous  la  dénomina- 
tion d'arban,  étoient  compris  différens  services  ou 
devoirs  exigibles  par  les  Seigneurs.  «  Je  quite  tout 
«  arban  aux  hommes  et  aux  femmes  de  ladite  fran- 
«  chise,  fors  que  tant  que  je  relien  mon  charroi  en- 
«  tierement  au  besogne  de  mon  chaslel  et  de  mes 
«  maisons  de  Veydun,  et  de  vins,  et  de  foingz  tant 
«  seulement  ;  et  je  ne  les  puis  fourcer  de  nul  arftare 
«  ne  de  charroy  aller  fors  la  parroche  de  Veydun 
«  por  nesun  besoin.  ..  (Id.  ibid.  p.  103.  —  Voy.  Ban 
ci-après.)  1!  est  évident  que  dans  l'ancienne  Coutume 
de  Poitou,  art.  xcxv,  le  mot  arbaux,  ou  berbaux, 
dans  la  nouvelle,  art.  cm,  n'est  autre  que  le  mot 
arbans  ou  berbans  dont  on  a  altéré  la  terminaison. 
«  Tailles,  berbaux  et  autres  charges,  ensemble 
>'  toutes  rentes  roturières  foncierts,  sont  indivisi- 
"  blés.  »  (Coutumes  de  Poitou,  au  Coût.  gén.  T.  I, 
page  ô78.  —  Voy.  Laurière  ,  Glossaire  "du  Droit 
français.  —  Du  Cange,  Glossaire  latin,  T.  III,  col. 

moet  lin.) 

Ce  n'est  peut-être  pas  sans  raison  qu'on  a  cher- 
ché dans  le  nom  de  ces  corvées,  insupportables  aux 
malheureux  qui  en  étoient  surchargés,  le  principe 
d'une  comparaison  d'après  laquelle  on  disoit  pro- 
verbialement, «  se  jeter  sur  quelqu'un  comme 
«  herbaut  sur  pauvres  gens,  pour  se  jeter  avec 
«  violence  sur  quelqu'un,  lui  tomber  sur  le  corps 
«  aussi  lourdement  qu'hcrbaut  ou  le  fardeau  des 
«  corvées  et  autres  redevances,  tombe  sur  les  pau- 
••  vres  gens.  »  Il  est  possible  aussi,  que  relative- 
ment à  l'idée  des  violences  faites  aux  corvéables 
par  ceux  qui  les  commandoienl,  tel  chien  qu'un 
instinct  particulier  porte  à  se  jeter  sur  les  pauvres, 
ait  été  nommé  herbaut.  (Voy.  Rabelais,  T.  IV, 
p.  218  et  219;  note  de  Le  Duchat.)  Enfin  le  Dieu  de 
misère  et  de  pauvreté,  se  nommoit  Herban,  relati- 
vement sans  doute  à  l'idée  de  l'étal  pauvre  et  misé- 
rable auquel  les  hommes  sujets  aux  corvées  étoient 
réduits.  «  Si  allons  querre  la  chetivelé,  que  Herban, 
«  le  Dieu  de  misère  et  de  poureté  ne  nous  faille.  » 
(Percef.  Vol.  II,  fol.  50,  V"  col.  1.) 

On  sait  que  ces  corvées,  proscrites  par  les  loix  de 
Charlemagne  comme  autant  d'attentats  à  la  liberté 
de  ses  sujets,  commencèrent  à  être  autorisées  vers 
la  fin  de  la  seconde  race,  lorsque  les  Ducs,  les 
Comtes,  les  Barons,  les  Châtelains  et  autres  Officiers, 
parvenus  à  rendre  héréditaires  les  charges  et  les 
terres  qu'ils  possédoient  à  vie,  en  obtinrent  enfin  la 
propriété  seigneuriale,  avec  les  moyens  de  s'asser- 
vir des  hommes  sur  lesquels  ils  n'avoient  jamais  eu 
qu'un  pouvoir  émané  du  Souverain,  ou  d'assujettir 
leurs  possessions  bénéficiaires  et  même  allodiales, 

15 


Aft 


-  114  — 


AU 


changées  en  possessions  féodales,  :\  d'autres  ser- 
vices que  ceux  dûs  au  Roi  et  à  la  Patrie. 

Avant  l'établissement  du  système  féodal,  toute 
possession,  même  la  possession  d'un  bénéfice  qu'on 
ne  tenoit  pas  immédiatement  du  Roi,  n'obligeoit  à 
aucun  service  distinct  de  celui  que  devoit  le  vassal 
immédiat  du  Seigneur  souverain.  En  suivant  à 
l'armée  le  Comte  ou  le  Seigneur  dont  on  tenoit  un 
bénéfice,  dont  on  étoit  le  vassal,  on  ne  servoit  que 
la  Patrie,  et  l'on  n'obéissoit  qu'au  ban  du  Roi. 
Aussi  a-t-on  vu  qu'à  lui  seul  étoit  due  l'amende 
pour  défaut  de  service  militaire.  «  Omnis  liber 
«  homo  qui  quatuor  mansos...  dealicujusbeneficio 
«  habet,...  ipse  in  tiostem  pergat,  sive  cum  seniore 
«  suo.  »  (Baluz.  Capitul.  Reg.  Fr.  T.  I,  col.  489.) 

«  De  vassis  dominicis  qui intracasam  serviunt, 

«  et  tamen  bénéficia  habere  noscuntur,  slatutum  est 
«  ut  quicunque  ex  eis  cum  domno  Imperatore 
«  domi  remanserint,  vassallos  suos  casatos  secum 
«  non  retineant,  sed  cum  Comité  cujus  pagenses 
«  sunt,  ire  permiltant.  «  (Id.  ibid.col.  495.)  «  Vassi 
«  nostri  et  vassi  Episcoporum,  Abbatum,  Abbatis- 
«  sarum  et  Comitum,  qui  in  lioste  non  fuerunt, 
«  heribannum  rewadient.  »  (Id.  ibid.  col.  618.) 
Mais  la  propriété  seigneuriale  des  vassaux  immé- 
diats du  Seigneur  souverain  une  fois  légitimée,  on 
vit  naître  et  s'élever  une  nouvelle  puissance  qu'on 
nomma  suzeraineté;  mot,  dit  Loyseau,  «  qui  est 
"  aussi  étrange  que  cette  espèce  de  Seigneurie  est 
«  absurde.  »  "Alors  une  servitude  presque  générale 
succéda  à  la  liberté;  l'homme  de  la  patrie  fut  un 
homme  de  fief;  le  possesseur  d'un  fief  qui  ne  rele- 
voit  pas  immédiatement  du  Roi,  fut  le  vassal  d'un 
Seigneur  suzerain  et  intermédiaire,  et  ce  vassal  par 
sous-inféodation,  acquit  un  autre  vassal  qui  étoit 
par  rapport  à  lui  ce  qu'il  étoit  lui-même  par  rapport 
à  son  Seigneur,  et  ce  qu'étoit  ce  Seigneur  par  rap- 
port au  Souverain.  Le  service  militaire  auquel  les 
Seigneurs  propriétaires  obligèrent  leurs  hommes  et 
leurs  vassaux ,  en  cas  de  guerres  particulières, 
a  été  désigné  comme  les  corvées  et  autres  devoirs 
féodaux,  par  le  mot  arbaii  ou  erban.  On  croit  qu'il 
faut  lire  erband  dans  une  charte  de  l'an  984,  par 
laquelle  Emenon,  seigneur  d'Yssoudun,  affranchit 
de  ce  service  militaire  les  habitans  du  bourg 
S'  Martin.  «  Concedimus  omnes  consueludines.... 
«  ita  scilicet  ut  nemo  illorum  pergat  ad  pugnam 
«  quœ  alio  nomine  vocalur  eijbanid,  neque  botta- 
*  gium  vini  alicui  reddat.  »  (La  Thaumassière, 
Coût,  de  Rerry,  p,  697.  —  Voy.  Du  Cange,  Gloss. 
lat.  T.m,  col.  1109.) 

Ou  ne  confondra  point  ce  service  militaire,  per- 
sonnel aux  Seigneurs  qui  forcèrent  en  conséquence 
leurs  hommes  et  leurs  vassaux  à  prendre  les  armes 
contre  le  Roi  même,  avec  le  service  militaire  qu'ils 
en  exigeoient,  toutes  les  fois  que  le  Seigneur  sou- 
verain faisoit  publier  son  ban,  ou  l'ordre  de  s'armer 
pour  sa  défense  et  celle  du  Royaume. 

Probablement  que  d'après  l'opinion  générale  et 
peu  vraisemblable  des  Etymologistes,  qui  veulent 
qu'arrlère-ban  ait  été  formé  comme  arban,  du  mot 


heribannus,  composé  de  ban  et  hère  en  allemand, 
lieras  en  latin,  en  franç,'ois  Seigneur,  l'on  aura  dit 
que  V arrière-ban  étoit  pour  les  Seigneurs,  pour  les 
Nobles  ou  lenans  tiefs,  et  le  ban  pour  les  roturiers. 
On  a  déjà  observé  que  dans  les  Capitulaires,  ce  mot 
heribannus  signifie  toujours  l'amende  exigible  par 
le  Seigneur  souverain  pour  défaut  de  service  mili- 
taire, et  jamais  la  publication  de  l'ordre  relatif  à  ce 
service  ;  encore  moins  la  publication  d'un  ordre 
particulier  à  une  classe  supérieuie  d'hommes,  tels 
que  les  Seigneurs,  les  Nobles  ou  les  possesseurs  de 
fiefs,  pour  qui  l'obligation  de  servir  la  Patrie  fut 
une  espèce  de  prérogative,  sous  les  Rois  de  la 
troisième  race.  Sous  ceux  de  la  première  et  de  la 
seconde  race,  c'est-à-dire,  jusqu'à  l'époque  de 
la  seigneurie  féodale,  tout  homme,  quel  que  fût  son 
état,  pourvu  qu'il  fût  libre,  servoit  ou  aidoit  à  servir 
le  Roi  et  la  Patrie.  La  publication  de  l'ordre  auquel 
il  obéissoit  en  concurrence  avec  l'homme  que  la 
fortune  et  le  méiite  élevoient  au-dessus  des  autres 
sujets  du  Roi,  se  nommoit  ban;  et  ce  ban  étoit  pour 
le  Comte,  pour  le  Leude  illustré  par  la  faveur, 
comme  pour  le  possesseur  obscur  d'un  bénéfice  ou 
d'un  alleu,  pour  l'homme  libre  en  général.  Il  n'y 
avoit  point  alors  de  ban  pour  les  Seigneurs,  qu'on 
distinguât  du  ban  pour  les  hommes  libres,  en  le 
nommant  hériban.  Quand  il  seroit  vrai  que  de  ce 
mot  hériban  l'on  eût  fait  arrière-ban,  il  faudroit 
encore  prouver  qu'on  a  eu  raison  de  dire  ([ue  sous 
les  Rois  de  la  troisième  race,  V  arrière-ban  étoit 
pour  les  Seigneurs,  pour  les  Nobles  ou  possesseurs 
de  fiefs  en  général,  et  le  ban  pour  les  roturiers. 
(Voy.  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr .  au  mot  Arrière-ban.) 
On  imagina  sans  doute  le  mot  arrière-ban  ou 
riereban,  en  latin  retrobannus,  et  on  le  distingua 
du  ban,  lorsque  les  Seigneurs  propriétaires  com- 
mencèrent à  avoir  des  vassaux,  qui,  relativement 
à  l'obligation  du  service  militaire  qu'ils  dévoient 
au  Roi,  n'éioient  plus  placés  sur  la  ligne  des  vas- 
saux immédiats  du  Seigneur  souverain;  puisque  ce 
n'étoit  plus  le  Roi,  mais  ces  Seigneurs  intermédiai- 
res qu'ils  suivoient  à  l'armée,  puisque  c'étoit 
arrière  eux  qu'ils  marchoient  et  combattoient  pour 
la  défense  du  Royaume.  De  là,  on  aura  nommé 
arrière-ban,  la  publication  de  l'ordre  auquel  les 
vassaux  d'un  Seigneur  intermédiaire  obéissoient 
en  le  suivant  à  l'armée,  par  opposition  au  ban,  à  la 
publication  de  l'ordre  adressé  aux  vassaux  immé- 
diats du  Seigneur  souverain.  «  Le  ban  éloit  la  con- 
•<  vocation  des  vassaux  du  Roi  sans  moyen  ; 
"  Yarrière-bati,  la  convocation  de  ceux  qui  tenôient 
<■  du  Roi  médiatement.  »  (Voy.  Laurière,  Gloss.  du 
Dr.  Fr.)  On  caractérisera  encore  mieu.N.  cette  pre- 
mière distinction  du  ban  et  de  Varrière-ban,  en 
disant  avec  Charondas  :  «  Le  ban  estoit  la  convoca- 
"  tion  que  faisoit  faire  le  Roy  et  souverain  prince  ; 
«  et  Y  arrière-ban,  la  publication  que  le  Seigneur 
«  appelle  au  ban  de  son  Roi  ou  Prince,  faisoit  faire 
«  pour  assembler  ses  vassaux  et  arrière-vassaux, 
«  pour  l'accompagner  à  l'ost  et  armée.  »  (Voy. 
BouteiUer,  som.  rur.  art.  lxxxui,  annot.  p.  486.) 


AR 


—  H5  — 


AR 


Le  service  militaire  qu'en  ce  cas  les  Seigneurs 
appelés  au  bail  du  Roi  exigeoient  de  leurs  vassaux, 
ëtoit  le  service  auquel  les  avoit  obligés  eux-mêmes 
l'inféodation  du  Seigneur  souverain.  Quoique  leurs 
fiefs  ou  plein-fiefs,  au  moyen  de  la  sous-inféoda- 
tion,  fussent,  relativement  au  Roi,  changés  en 
arrière-fiefs,  ce  changement  n'anéanlissoit  pas 
l'obligation  primitive  qu'ils  avoient  contractée. 
Mais  pour  y  satisfaire,  ils  s'associèrent  des  vassaux 
qui  en  paroissant  les  servir,  ne  servoient  réellement 
que  le  Roi,  comme  Seigneur  suzerain  de  toute  pos- 
session féodale.  Il  est  probable  que  nos  Rois  sans 
cesse  occupés  du  soin  politique  de  rétablir  les  droits 
de  la  souveraineté,  en  faisant  valoir  ceux  de  leur 
suzeraineté  universelle,  accoutumèrent  insensible- 
n\ent  les  vassaux  de  ces  Seigneurs  intermédiaires, 
à  voir  comme  une  formalité  assez  indifférente,  un 
arrière-ban  que  devoit  précéder  le  ban  ou  Roi,  ban 
auquel  ils  obéissoient  en  paroissant  n'obéir  qu'h 
l'arrière-ban  de  leurs  Seigneurs.  Aussi  a-t-on  dit 
que  le  ban  étoit  •<  un  mandement  fait  l'i  tous  Gen- 
«  tilshommes  et  tenans  llefs  et  arrière-fiefs,  d'assis- 
tt  ter  à  la  guerre  du  Prince.  »  (Voy.  De  la  Roque, 
Traité  du  Ban  et  Arrière-ban,  p.  2.)  Si  les  tenans 
arrière-fiefs  partageoient  la  Noblesse  avec  les 
tenans  liefs,  comme  ils  partageoient  avec  eux 
l'obligation  de  faire  service  personnel  avec  armes 
es  guerres;  il  faut  en  conclure  qu'ils  étoient  du 
nombre  de  ceux  qu'on  a  désignés  comme  sujets  au 
ban,  en  disant  que  les  Nobles  seuls  estoient  sujets 
au  ban.  (Voy.  Ord.  T.  I,  p.  152,  note  (a.)  —  Coquille, 
Hist.  de  Nivernois,  p.  110.) 

On  pourroit,  d'après  cette  définition  du  ban,  ima- 
giner que  Varrière-ban  fut  alors  une  convocation 
des  Non-nobles  à  la  suite  des  Nobles,  comme  il  avoit 
été  la  convocation  des  vassaux  médiats  du  Seigneur 
souverain,  à  la  suite  de  ses  vassaux  immédiats.  Il 
est  vrai  qu'au  temps  où  l'on  paroit  avoir  confondu 
avec  le  ban  du  Roi,  un  arrière-ban  qui  en  étoit  la 
conséquence  nécessaire,  on  distinguoit  encore 
Varrière-ban  du  ban.  Mais  cette  distinction  n'étoit 
point  relative  à  celle  des  Nobles  et  des  Non-nobles, 
les  uns  convoqués  à  la  suite  des  autres;  puisque 
par  son  ban  le  Seigneur  souverain  convoquoit  tout 
homme  noble  ou  non-noble  qui  lui  devoit  un  service 
militaire.  En  prouvant  qu'il  y  avoit  des  Non-nobles 
obligés  à  ce  service,  que  les  hommes  coutumiers, 
les  bourgeois  et  habitans  des  villes,  les  hommes 
des  Seigneurs  servoient  en  l'ost  du  Roi  avec  les 
possesseurs  de  fiefs  et  arrière-fiefs,  avec  les  Sei- 
gneurs, les  Cientilsbommes,  les  Nobles  en  général, 
on  prouve  qu'ils  obéissoient  à  son  ban,  en  concur- 
rence avec  les  Nobles  et  les  Seigneurs,  lors  même 
qu'ils  marchoient  sous  leur  ban'nière.  «  Nobles  et 
«  Non-nobles  qui  à  nous  et  à  nos  successeurs,  en 
«  nos  guerres  et  osts,  doivent  certains  services, 
«  etc.  »  (Ord.  T.  1,  p.  588.)  «  Li  Barons  et  li  bons 
«  le  Roy  doivent  le  Roy  suivre  en  son  ost,  quand  il 
«  les  en  semondra,  et  le  doivent  servir  soixante 

<■  jours  et  soixante  nuits Li  bons  coustumier 

a  doivent  être  en  l'ost  le  Roy quarante  jours  et 


«  quarante  nuits;  et  se  il  en  venoit  avant,  et  il  en 
«  fussent  prouvé,  la  Justice  le  Roy  en  porroit  bien 
«  lever  soixante  sols.  »  (Établissemens  de  S'  Louis, 
chap.  Lxi.)  On  ne  dispensoit  du  service  de  l'ost  les 
Non-nobles  qui  y  étoient  assujettis,  qu'autant  qu'ils 
se  soumettoient  à  l'imposition  de  certains  droits 
d'aide.  «  Les  gens  des  villes,  ne  les  subgiez  des 
«  Nobles,  ne  seront  contrainz  à  aller  en  nostre  ost, 
«  durant  le  temps  de  nostre  imposition.  »  (Ord. 
T.  II,p.  39'(,etc.) 

Dans  le  cas  oii  le  Souverain  jugeoit  que  le  pre- 
mier ban  devoit  être  suivi  d'un  second  ban,  par 
lequel  il  exigeoit  des  Nobles  et  Non-nobles  un  autre 
service  que  celui  prescrit  par  les  loix  féodales  et  cou- 
tumières,  on  nommoit  ce  ban,  relativement  h  celui 
qui  l'avoit  précédé,  arrière-ban.  C'est  en  ce  sens 
qu'on  a  eu  raison  de  dire  qu'il  n'y  a\oil  arrièi'e-ban, 
lorsque  nul  ost  n'estoit  allé  devant;  (luele  ban  étoit 
pour  le  service  ordinaire,  et  Varrière-ban  pour  un 
service  extraordinaire.  (Voy.  Chron.  Fr.  de  Nangis, 
Ms.  an.  1338.—  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  —  De  la 
Roque,  Traité  du  Ban  et  Arrière-ban,  p.  2.) 

On  définira  donc  Varrière-ban  ainsi  distingué  du 
ban,  en  disant  que  c'étoit  une  convocation  itérative 
des  Nobles  et  Non-nobles  sujets  au  service  féodal  et 
coutumier,  pour  un  service  extraordinaire  :  défini- 
tion justifiée  par  les  Ordonnances,  entre  autres  par 
celle  de  Louis  X,  en  date  du  22  juillet  1315,  dans 
laquelle  on  lit  :  «  Que  iceux  Nobles  et  Non-nobles 
«  qui  à  nous  et  à  nos  successeurs,  en  nos  guerres 
<•  et  osts,  doivent  certains  services  et  homages, 
«  iceux  services  payez,  demeurent  quilles  et  francs, 
«  sans  ce  que  par  nous,  ne  par  nos  successeurs 
«  puissent  estre  contrains  à  autre  service  d'ost 
«  faire  h  nous,  fors  en  cas  de  Varrière-ban  qui  con- 
«  vient  eslre  raisonnable  et  de  cause  apparissant.  » 
(Ord.  T.  I,  p.  588.)  Lorsque  le  droit  de  faire  publier 
cet  arrière-ban,  fut  un  droit  du  Souverain,  exclusi- 
vcmenl  aux  Seigneurs  qui  avoienl  pu  se  l'arroger, 
le  Souverain  s'obligea  par  amour  pour  son  peuple, 
que  Varrière-ban  exposoit  à  des  vexations,  à  ne  le 
faire  publier  que  dans  le  cas  de  nécessité  évidente 
et  après  bataille;  conséquemment  après  que  les 
Nobles  et  Non-nobles  auroient  acquitté  le  service 
ordinaire.  Rien  de  plus  positif  à  cet  égard  que  l'Or- 
donnance du  Roi  .lean,  en  date  du  28  décembre  1355, 
et  celle  de  Charles  son  fils  aîné  et  son  Lieutenant, 
datée  du  mois  de  mars  1350.  «  Que  desores-mais 
«  nuls  ne  pu  isse  faire  arriereban  en  nostre  Royaume, 
«  fors  tant  seulement  nous  en  nostre  personne  et 
«  nostre  ainsné  filz  ;  et  ycelluy  ne  pourrons  faire, 
«  fors  seulement  en  cas  de  pure  et  évident  néces- 
«  site,  et  bien  conseilliez  sur  ce.  »  (Ord.  T.  IIl, 
p.  31.1  «  Que  aucuns  ne  puisse  doresnavant  faire 
«  arrierebans,  fors  tant  seulement  noslre  très-chier 
"  Seigneur  et  père  et  nous  ;  et  icelluy  ne  pourrons 
«  faire  fors  après  bataille,  et  en  cas  de  pure  et  évi- 
«  dent  nécessité,  et  bien  conseillé  sur  ce,  et  eu 
«  advis  et  délibération  avec  les  Esleuz  de  par  les 
■1  troiz  Etats,  se  bonnement  les  pouvons  avoir.  » 
(Ibid.  p.  138.) 


AR 


—  116  — 


AR 


Il  paroît  que  pour  les  Non-nobles  sujets  au  ser- 
vice militaire,  l'exemption  de  servir  au  moyen  de 
certains  droits  d'aide,  ne  s'étendoit  pas  au-delà  du 
ban,  puisqu'ils  ne  l'obtenoient  qu'avec  la  restric- 
tion :  si  ce  n'est  h  cause  à'arrière-baji,  si  ce  n'est  en 
cas  de  nécessité  évidente  ;  par  conséquent,  en  cas 
de  Varricn'-ban,  que  cette  même  nécessité  rendoit 
légitime.  •<  Les  gens  des  villes  ou  de  nos  subgiez, 
«  ne  seront  contrains  à  aller  en  nostre  ost,  durant 
«  le  temps  de  ladicte  imposition,  si  ce  n'est  h  cause 
«  àeaireban  Ml  pour  bonne  et  juste  cause,  sanz 
«  feinlize.  »  (Ord.  T.  II,  p.  530,  etc.)  11  éloit  juste 
que  pour  les  Non- nobles,  les  habitans  des  villes,  et 
autres  ainsi  affranchis  de  service,  l'obligation 
d'obéir  h  Y  arrière-ban,  fût  la  même  que  pour  ceux 
qui  ayant  réellement  fait  le  service  ordinaire  et 
exigible  par  le  bandit  Roi,  n'eu  dévoient  pas  moins 
le  service  extraordinaire  et  exigible  par  son 
arrière-ban.  On  a  déjà  prouvé  par  l'article  ni  de 
J'Ordonnance  de  Louis  X,  datée  du  mois  de  juillet 
1315,  que  les  Nobles  et  Non-nobles,  après  avoir 
acquitté  le  service  auquel  ils  étoient  assujettis  par 
les  loix  féodales  et  coutumières,  pouvoient,  en  cas 
à'arrière-bnn,  être  contrains  à  faire  un  autre  ser- 
vice, lorsqu'il  étoit  jugé  essentiel  à  la  défense  du 
Roi  et  du  Royaume.  Dans  l'article  vu  de  la  même 
Ordonnance,  l'arrière-ban  est  désigné  par  l'évidente 
utilité,  par  la  nécessité  urgente  qui  le  légitimoit. 
Philippe  de  Valois  interprèle  ce  même  article  par 
lequel,  s'il  n'y  avoit  évidente  utilité,  ou  nécessité 
urgente,  Louis  X  n'exigeoit  des  hommes  de  son 
duché  de  Normandie  que  les  services  à  lui  dûs,  en 
disant  que  ces  services  étoient  les  seuls  auxquels 
ils  fussent  obligés;  à  moins  que  la  publication  de 
Y  arrière-ban,  après  celle  du  ban,  ne  fût  nécessilée 
par  l'impossibilité  de  s'opposer  aux  ennemis  qui 
envaliissoient  le  Royaume,  ou  aux  rebelles  qui  en 

troubloient  la  tranquillité.  •<  In  casu  quo per 

«  primam  semonsam  seu  convocacionem  generali- 
«  ter  factam,  nos  seu  nostri  successores,  et  illi  qui 
«  tune  essent  nobiscum  aut  cum  successoribus 
«  nostris,  non  essemus  aut  ipsi  non  essent  salis 
«  fortes  ad  obviandum  seu  resistendum  hoslium 
»  potencie,  aut  ad  reducendum  ad  obedienciam 
«  subditos  rebelles,    absque    faciendo    retroban- 

«  num, fieret  et    fieri    posset  retrobannum, 

«  etc.  »  (Ord.  T.  VI,  p.  550  et  551.) 

Si  les  Nobles  et  Non-nobles  qui  dévoient  le  ser- 
vice militaire,  étoient  les  seuls  qui  dussent  obéir 
au  ban  du  Roi,  la  première  semonce  ou  convocation 
généralement  faite,  par  laquelle  Philippe  de  Valois 
paroit  désigner  le  ban,  n'étoil  donc  générale  que 
par  rapport  aux  Nobles  et  Non-nobles  sujets  à  ce 
service.  11  falloit  qu'il  y  eût  nécessité  de  service 
extraordinaire,  et  par  conséquent  arrière-ban  ou 
convocation  itérative  des  hommes  qui  avoient  obéi 
au  ban  et  fait  le  service  ordinaire,  pour  que  ceux 
dont  on  n'exigeoit  pas  ce  service,  ou  qu'on  en  dis- 
pensoitau  moyen  de  certains  droils  d'aide,  fussent 
tenus  de  suivre  le  Roi  à  l'armée  et  de  le  servir  en 
concurrence  avec  les  autres.  La  preuve  est  qu'im- 


médiatement après  avoir  dit  que  «  les  Nobles  et 
«  Non-nobles  qui  auroient  fait  les  services  par  eux 
«  dûs,  ne  pourroient  être  contraints  à  faire  autre 
«  service  d'ost,  fors  en  cas  de  l'arrière-ban,  » 
Louis  X  ajoute  que  dans  le  cas  de  cet  arrièreban, 
les  hommes  même  qui  ne  dévoient  aucun  service, 
seroient  tenus  d'y  obéir.  «  Queiceiix  homes  qui  ne 
«  sont  tenus  envers  nous  en  aucuns  certains  servi- 
«  ces,  ne  puissent  estre  contrains  à  aucun  service 
«  estre  fait  à  nous,  fors  en  cas  dessus  dil  et  derrai- 
«  nement  déclaré.  »  (Ord.  T.  I,  p.  .588  et  589.)  En 
ordonnant  que  l'arrière-ban  publié,  tous  y  obéis- 
sent, Philippe  de  Valois  réunit  sans  doute  ces  hom- 
mes qui  ne  dévoient  pas  le  service  exigible  par  le 
ban,  à  ceux  pour  qui  ce  service  éloit  un  devoir 

féodal  ou  coutumier.  «  In  casu  quo fieret 

"  rt;/robfl«/n<m,  omnestenerentureidem  obedire.  » 
(Ord.  T.  VI,  p.  551.) 

On  ne  voit  pas  que  les  hommes  non  sujets  au  ser- 
vice ordinaire  et  exigible  par  le  ban,  aient  toujours 
été  tenus  d'obéir  à  l'arrière-ban,  à  la  convocation 
itérative  des  Nobles  et  Non-nobles  pour  .un  service 
extraordinaire.  Il  paroit  au  contraire  que  l'arrière- 
ban  dont  Cliarles  VI,  par  ses  Lettres  du  8  février 
1413,  ordonne  la  publication,  n'intéresse  que  des 
hommes  sujets  au  service  féodal  et  coutLunier; 
puisque  le  commandement  d'obéir  ne  doit  être 
fait  qu'aux  Nobles,  aux  Possesseurs  de  fiefs  et 
arrière-fiefs ,  aux  Dourgeois  et  habilans  des 
bonnes  villes.  Une  preuve  évidente  que  ces 
bourgeois  et  habitans  des  villes  dévoient  un  service 
coutumier,  c'est  que  comme  on  l'a  déjà  observé,  pour 
en  obtenir  l'exemption,  ils  payoient  certains  droits 
d'aide.  «  Enjoignons  qu'incontinent  ces  pré- 
"  sentes  veues,  vous  faites  proclamer  solemnelle- 
«  ment  à  haute  voix  et  ù  son  de  trompe,  en  vostre 
«  bailliage,  nostre  arrière  ban  de  par  nous,  en 
"  faisant  commandement...  à  tous  les  Nobles.... 
«  qui  ont  accoustumé  d'user  et  ensuivir  les  armes 
1  et  qui  sont  en  état  de  poursuivir,  et  Aultres  qui 
«  tiennent  fiefs  et  arrière-fiefs  vallans  par  an  vingt 
«  livres  tournois,  et  outre  aux  Rourgeois  et  habi- 
«  tans  de  toutes  bonnes  villes  et  ressors  de  vostre 
ic  dil  bailliage;  c'est  à  sçavoir,  ausdits  Nobles  qui 
«  ont  accoustumé  d'user  et  ensuivir  armes,  sur  la 
«  foy  et  loyauté  et  aussi  le  service  qu'ils  nous 
»  doivent,  et  sur  la  peine  de  confiscation  de  leurs 
«  biens,  fiefs  et  arrière-fiefs  et  tenement,  ils  vien- 
«  nent  lantosten  diligence  et  sans  demeure,  à  tout 
«  le  plus  grand  nombre  et  puissance  de  Gens 
«  d'armes  et  de  traicl  qu'ils  pourront,  et  ausdits 
«  Bourgeois  et  habitans  des  bonnes  villes  qu'ils 
"  envoyent  le  pluslosl  qu'ils  pourront,  des  Gens 
<■  d'armes  et  de  li'aicl  devers  nous,  montez  à  cheval, 
«  et  armez,  souffisamment  accompaignez.  »  (Ord. 
T.  X,p.  I9-i.)  S'ils  n'envoyoient  pas  ces  Gens  d'armes 
et  de  traict,  ils  étoient  personnellement  tenus  d'obéir 
à  l'arrière-ban.  (Voy.  Ord.  T.  II,  p.  320,  etc.) 

Il  n'y  avoit  donc  réellement  convocation  générale 
pour  le  service  extraordinaire  ,  que  lorsque  les 
hommes  qui  n'avoient  fait  ou  n'avoient  dû  faire  le 


AR 


—  117  - 


AR 


service  ordinaire  et  exigible  par  le  ban ,  étoient 
convoqués  avec  ceux  pour  qui  ce  service  ayoit  été 
un  devoir  indispensable.  Mais  alors  Varriêrc-lian 
ou  convocation  itérative  par  rapport  aux  uns,  étoit 
par  rapport  aux  autres  un  ban  ou  première  convo- 
cation. Il  seroit  possible  que  les  mots  ban  et  arrière- 
ban  réunis,  eussent  expliqué  cette  double  significa- 
tion A' arriére-ban.  Peut-être  aussi  la  réunion  de 
ces  deux  mots  a-t-elle  été  occasionnée  par  l'igno- 
rance ou  par  l'oubli  de  la  raison  pour  laquelle  on 
les  avoit  distingués  Fun  de  l'autre.  Il  paroit  même 
que  l'idée  de  la  distinction  du  ban  et  de  Varrière- 
ban  avoit  quelquefois  été  très  confuse;  puisque 
dans  une  Ordonnance  de  Philippe  de  Valois,  on  lit 
qu'au  moyen  d'une  aide  qui  exemptoil  seulement 
du  service  exigible  par  le  lian,  »  les  Bourgeois  et 
«  habitans  de  la  ville  de  Paris,  ne  seront  tenuz 
«  d'aller  ou  envoyer  en  l'ost  pour  arrereban  ou 
«  autrement,  si  ce  n'est  en  cas  de  évident  néces- 
.<  site.  »  (Voy.  Ord.  T.  II,  p.  320.) 

On  sait  qu'à  l'établissement  des  Compagnies 
d'Ordonnance  par  Charles  YII ,  la  Noblesse  brigua 
l'honneur  utile  d'y  servir  ;  et  qu'en  servant  dans 
ces  Compagnies  à  la  solde  de  nos  Rois,  en  temps  de 
paix  comme  de  guerre  ,  elle  s'affranchit  du  service 
exigible  par  le  ban  et  arriére-ban.  »  Ledit  Roy 
«  Charles  VII  mit  sus  premièrement  les  Ordonnances 
«  de  Gendarmerie....  et  pour  les  entretenir  en 
»  temps  de  guerre  et  de  paix,  fit  les  tailles  ordinaires 
«  sur  le  peuple....  En  ces  Compagnies  des  Ordon- 
«  nances  n'estoient  et  ne  sont  receuz  que  Gentils- 
<•  hommes  qui  par  ce  moyen  ont  esté  exemptés  de 
«  Varricrc-ban  ;  ce  qui  ne  semble  pas  raisonna- 
«  ble  quant  à  la  contribution  de  la  bourse.  Car 
'<  c'est  une  charge  réelle  que  les  fiefs  doivent  ;  et 
•'  es  dites  Ordonnances  ils  reçoivent  solde  pour  le 
«  service  qu'ils  font  à  la  guerre,  et  le  reçoivent  en 
'<  temps  de  paix  aussi  bien  comme  de  guerre  ;  dont 
•'  le  peuple  du  Tiers-estat  est  foullé  de  tant  plus  ; 
»  car  il  paye  les  tailles  pour  l'entretenement  de  la 
-•  Gendarmerie  »  (Coquille ,  Hist.  de  Nivernois , 
p.  H9.)  Alors  on  négligea  sans  doute  plus  que  jamais 
la  distinction  du  banei  de  Varrière-ban.  Enfin  le 
ban  ou  la  convocation  pour  le  service  ordinaire,  fut 
confondu  avec  Varrière-ban,  la  convocation  itéra- 
tive ,  la  convocation  générale  pour  un  service 
extraordinaire;  et  ces  deux  mots  souvent  réunis  si- 
gnifièrent en  général  «  convocation  pour  service  de 
"  l'ost.  >■  (Voy.  le  P.  Ménest.,  de  la  Chevalerie,  p.  199. 
—  DelaRoque.  Traité  du  Ban  et  Arrière-ban,  p.  45.) 

C'est  relativement  à  l'idée  d'fljvvn'f-fcaii,  convoca- 
tion générale  pour  service  extraordinaire,  qu'on  a  dit  : 

(i)  En  résumé,  la  propriété  fut  la  base  du  service  militaire  sous  les  deux  premières  races  :  les  hommes  libres  propriétaires 
d'un  missaticinn  voisin  de  l'ennemi  étaient  convoqués  par  le  missus,  et  partaient  après  la  proclamation  du  ban  au  prône  de 
Jeur  paroisse.  Les  réfractaires  payaient  17ié/'j6n.;,  amende  montant  souvent  à  60  sous  et  pouvant  atteindre  600  sous. 

Le  mot  héi-ihaii  reparait  au  temps  de  Philippe-le-Bel,  mais  on  ne  le  comprend  plus  ;  on  le  rapproche  à'urban  et  on  le 
transforme  en  arriéve-ban.  Ce  mot  composé  est  toujours  joint  au  mot  simple  ban,  dont  il  a  la  signification;  c'est  le  ban 
mérovingien  et  carlovingien,  levée  en  masse  {tunudtus)  s'appliquant  aux  nobles  et  aux  roturiers  ;  pour  guerroyer  en 
Gascogne  et  en  Flandre,  le  roi  a  besoin  dune  armée  et  d'argent  :  la  convocation  de  l'arricrc-ban  lui  donnait  l'un  et  l'autre. 
Il  offrait  de  partir  ou  de  payer  :  le  plus  souvent  on  pavait.  Ce  fut  là  l'orii^ine  d'abus  qui  amenèrent  la  décadence  de 
Yan-iére-ban  :  on  n'y  consentit  plus  que  dans  les  circonstances  graves,  et  Louis  XI  l'aurait  réuni  pour  la  dernière  fois. 

A  partir  du  xv  siècle,  le  ban  et  Yarriére-ban  n'est  plus  que  la  convocation  des  possesseurs  de  fiefs  qui  doivent  le  service 
militaire  gratuit,  (n.  e.) 


Li  loa  ses  consaus 

Que  mandés  fut  Varierebatis 
Des  gens  menues  et  des  grans. 

Ph.  Mouskes,  MS.  ji.  256. 

Se  il  m'estoit  nus  mestiers 

De  Sergans  ne  de  Cevaliers  ; 
Tous  li  arrierebans  venroit. 
Lues  que  mon  mesage  veroit. 

Id.  p.  147. 

En  doubtance  fut  qu'il  feroit, 
Et  se  à  .\rtus  se  combatroit, 
Ou  s'ariereba>i  atendroit. 

Riim.  de  Brut,  MS.  fol  9S,  V°  col.  2. 

On  voit  que  dans  ces  vers,  le  moi  arrière- ban 
signifie  la  réunion,  l'assemblée  des  personnes  géné- 
ralement convoquées  pour  un  service  extraordinaire. 

En  regardant  cette  assemblée ,  cette  réunion 
comme  un  dernier  effort  pour  la  défense  du  Roi  et 
du  Royaume,  on  aura  dit  figurémentd'un  Chevalier 
qui  réunissoit  toutes  ses  forces  et  les  rassembloit, 
qui  faisoit  les  derniers  efforts  pour  vaincre  un  rival 
et  réussir  dans  une  entreprise,  «  qu'il  monstroit 
■<  Varrière-ban  de  sa  force  ou  de  sa  prouesse  ;  que 
«  l'arrière-ban  de  sa  prouesse  «  venoit  à  son 
secours.  «  Voyant  le  Chevalier  sauvage  qu'il  avoit 
«  atTaire  à  ung  si  preux  Chevalier,  il  pensa  bien 
«  qu'il  lui  convenoit  monstrer  Varrière-ban  de  sa 
«  force.  »    Percef.  Vol.  III,  fol.  9.)  «  Lyonnel  du 

«  Glar pensa  que  à  ce  jour  monstrer  luy  con- 

«  venoit  Varriereban  de  toute  sa  proesse.  »  (Ibid. 
fol.  126.)  «  Au  besoing  de  vostre  emprise,  viendra 
«  au  secours  Varriereban  de  vostre  prouesse.  » 
(Ibid.  Vol.  V,  fol.  103.) 

Il  est  encore  possible  <iue  par  allusion  à  l'espèce 
d'hommes  qui  n'étant  sujets  qu'à  Varrière-ban , 
venoient  les  derniers  à  l'armée,  on  ait  désigné  le 
courage  et  l'intrépidité  de  quelqu'un  toujours  prêt 
à  marcher  des  premiers  à  l'ennemi ,  en  disant  qu'il 
ne  faisoit  pas  le  riereban. 

De  S'  Pol  est  là  Gui  le  Conte  : 
0  lui,  pour  Flamens  à  mort  rare, 
Raoul  de  Neele  son  frère. 
Cil  ne  sont  pas  le  riereban. 

G.  Gui.in,  MS.  fol.  234,  R-  el  V. 

Li  quens  d'Artois  est  à  main  destre... 
Lez  lui,  qu'à  péril  ne  li  tourge, 
Jehan  de  Henaut  son  serourge, 
Auquel  il  ot  celé  journée 
L'ordre  de  Chevalier  donnée. 
Cis  ne  fait  pas  le  riereban . 

Id.  ibid.  fol.  254,  V  el  255,  R-. 

On  n'ignore  pas  sans  doute  que  pour  les  Vassaux, 
les  Hommes  d'un  Seigneur  à  qui  il  étoit  dû  un 
service  militaire  et  personnel,  il  y  avoit  le  ban  et 
Varrière-ban  comme  pour  les  Vassaux,  les  Hommes 
du  Seigneur  souverain  (1).  (Voy.  D.  Lobineau,  Hist. 


àïl 


—  118 


AR 


de  Bretagne,  T.  II,  col.  947;  lit.  de  1420. —  Ane. 
Cûut.  de  Normandie,  fol.  G6,  R%  etc.) 

VARIANTES  : 
ARBAN.  La  Thaumassière,  Coût,  de  Berry,  p.  103. 
Arbaux  (plur.)  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  III,  col.  1109. 
AniEREBAN.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  93,  V»  col.  2. 
Arueban.  Ord.  T.  Il,  p.  530. 
Aruereban.  Ibid.  p.  320. 
AiîRiEREBAN.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  147. 
Erband.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  III,  col  1109. 
Eybamd  (lisez  Erband.)  La  Thaumass.  G.  de  Berry,  p.  697. 
Herban.  Percef.  Vol.  H,  fol.  50,  V»  col.  1. 
Herbault.  Rabelais,  T.  IV,  p.  219. 
Herbaut.  Id.  ibid.  p.  218  ;  note  de  Le  Ducliat. 
Herbal-x  (plur.)  Coût.  gén.  T.  II,  p.  578. 
Hereban.  Coquille,  Hist.  de  Nivernois,  p.  121. 
Heriis.vn.  Fauchet,  MU.  fr.  p.  114. 
Herisha.n'.  Borel,  Dict.  p.  260. 

HiEREBAN.  De  la  Roque,  Traité  de  l' Arrière-ban,  p.  45. 
Riereban.  D.  Lobineau,  Hist.  de  Bretagne,  T.  II,  col.  947. 

Arbitrage,  S!</vsL  wasc.  Pouvoir  déjuger  comme 
arbitre.  Avis,  jugement,  volonté.  La  signification 
avec  laquelle  ce  mot  subsiste,  n'est  pas  moins 
ancienne  que  l'acception  d"après laquelle  il  désignoit 
«  le  pouvoir  de  juger  comme  arbitre  ;  la  volonté  ou 
«  puissance  donnée  à  aucun  qui  entreprendre  le 
«  vouloit,  à  déterminer  et  prononcer  sur  le  débat 
«  des  Parties,  ce  que  raison  en  donneroit.  «  (Voy. 
Bouteiller,  Som.  rur.  liv.  Il,  tit.  m,  p.  693.)  Il  dési- 
gnoit en  même  temps  le  jugement  qu'en  conséquence 
de  ce  pouvoir  les  arbitres  qui  prenoient  connois- 
sance  de  l'affaire  soumise  à  leur  avis  et  inspection, 
prononçoient  ou  dévoient  prononcer  ;  puisque  le 
même  Jurisconsulte  ajoute,  qu'ayant  accepté,  ils 
étoient  «  contraints  à  procéder  avant  à  Varbitrage 
«  durant  le  temps  de  leur  pouvoir  ;  lequel  expiré, 
a  Yarbitrage  estoit  failly,  et  n"avoient  plus  de  pou- 
o  voir,  ne  plus  contraindre  on  ne  les  pouvoit  ne 
o  devoit  en  outre,  se  terminé  n'avoient  à  sentence 
«  diffiritive,  ou  appointement  entre  les  Parties.  » 
{Voy.  Id.  ibid.  p.  094.) 

On  a  restreint  à  cette  dernière  acception  l'usage 
d'un  mot  qui,  relativement  h  l'acception  générale 
du  latin  flj'b/7/v»?H,signifioitavis,  jugement,  volonté 
que  détermine  l'inspection  ou  la  connoissance  des 
choses.  C'est  en  ce  sens  qu'un  criminel  à  la  volonté 
de  qui  on  laissoit  le  choix  du  genre  de  mort  qu'il 
aviseroit,  qu'il  jugeroit  le  plus  doux,  étoitdit  mourir 
à  son  arbitrage.  ><  Celluy  milourl(l)  Anglois  auquel 
«  fut  fait  commandement,  pour  les  crimes  desquels 
«  estoit  convaincu ,  de  mourir  à  son  arbitraigc, 
«  estent  mourir  nayé  dedans  ung  tonneau  de 
«  malvesie.  »  (Rabelais,  T.  IV,  p.  14G.) 

VARIANTES  : 
ARBITRAGE.  Orth.  subsist.  -  Bouteiller,  Som.  rur.  p.  693. 
Abbitraige.  Rabelais,  T.  IV,  p.  UG. 

Arbitrateiir,  sitbst.  viasc.  Arbitre.  Quoique  les 
amiables  compositeurs  ou  appaiseurs,  les  arbitra- 
teurs  et  arbitres  eussent  tous  le  droit  de  connoitre 
d'une  affaire  soumise  à  leur  avis  et  inspection,  ils 
différoient  cependant  les  uns  des  autres  en  ce  que 
le  pouvoir  de  la  juger,  plus  limité  pour  «  l'amiable 


«  compositeur  ou  appaiseur  que  pour  l'arbitre,  » 
étoit  presque  absolu  dans  \' arbitrât cnr.  (Voyez 
Apaiselr  et  AniiiTRE.)  En  jugeant,  l'arbitre  observoit 
nécessairement  l'ordre  de  droict  :  »  l'amiable  com- 
«  positeur  ou  appaiseur  »  ne  jugeoit  que  du  con- 
sentement des  Parties  qu'il  mettoit  en  accord.  (Voy. 
Bouteiller,  Som.  rur.  liv.  11,  tit.  m,  p.  693  et  694.) 
Mais  Varbitrateur  étoit  un  juge  qui  pouvoit  ne 
consulter  que  sa  conscience  el  ne  s'assujettir  à 
d'autre  règle  que  celle  de  l'équité  naturelle. 
«  Arbitrateur,  si  est  celuy  qui  de  la  cause  est 
«  chargé  à  sa  conscience,  ordre  de  droict  gardé  ou 
«  non  gardé,  et  peut  les  Parties  appoincter  selon 
a  que  bon  luy  semble.  »  (Id.  ibid.  p.  69i.) 

On  conçoit  la  possibilité  que,  même  avec  l'idée 
de  ces  distinctions,  idée  qui  sans  doute  fut  souvent 
confuse,  la  personne  nommée  pour  connoitre  d'une 
affaire  et  la  juger,  fût  tout-à-la  fois  arbitre,  arbitra- 
teur et  amiable  appaiseur  ou  appaisenteur.  Alors 
la  forme  du  jugement  indiquoit  en  quelle  qualité  il 
étoit  prononcé.  «  Monseigneur  Jehan  Aubignet, 
«  abbé  de  S'  Jehan  de  Laon,  arbitre,  arbitrateur, 
«  et  amijable  appaisenteur,  prins  et  esleu  par  noble 
«  homme  Charles  de  Longueval,  etc.  »  (D.  Carpen- 
tier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  T.  I,  col.  273; 
tit.  de  1489.) 

Arbiti'ation,  subst.  fém.  Avis,  volonté.  On 
étoit  puni  à  Varbitration  de  Justice ,  lorsque  la  Loi 
laissoit  à  la  volonté  des  Juges  le  droit  de  prononcer 
telle  punition  qu'ils  aviseroient  être  proportionnée 
à  un  délit.  «  Requièrent  les  Gens  des  Estais  estre 

«  remboursez  de  plusieurs  sommes  de  deniers 

«  payées  à  aucuns  Commissaires  particuliers 

«  pour  illicites  exactions  ;  et  que  lesdits  Commis- 

«  saires pour  l'injuste  exaction  d'iceux  soient 

«  punis  à  Varbitration  de  Justice.  »  (Godefroy, 
Observ.  sur  THist.  de  Charles  VIII,  p.  415.  —  Voy. 
Ardithage  et  Arbitrement.) 

Arbitre,  subst.  masc.  Arbitre  compromission- 
naire.  Inspection,  avis.  Jugement,  volonté,  arbitrage. 

Anciennement  le  mot  arbitre,  en  latin  arbiter, 
dont  la  signification  actuelle,  en  termes  de  Droit,  n'est 
pas  moins  générale  que  l'étoit  celle  du  mot  inusité 
arbitrateur,  désignoit  spécialement  un  arbitre 
eoinpromissionnaire,  un  arbitre  que  le  compromis 
obligeoit  de  juger  conformément  à  la  règle  du 
Droit.  «  Arbitre  ne  peut  et  ne  doit  en  la  cause  à  luy 
«  submise,  procéder  autrement  que  par  ordre  de 
«  droict  gardé,  selon  qu'il  est  allégué  ou  prouvé 
«  devantluy  :  car  nul  traicté  n'y  peut  ne  doit  faire 
«  non  plus  que  feroit  le  Juge,  ne  plus  ne  doit  avoir 
«  de  faveur  à  une  partie  qu'à  l'autre  ;  mais  tout 
«  laisser  aller  selon  la  reigle  de  Droict.  »  (Bouteil- 
ler, Som.  rur.  liv.  II,  tit.  m,  p.  693  et  694.  —  Voy. 
Arbitrateir  et  Arbitreus.) 

Ce  même  mot  arbitre,  en  \aiin  arbitrium,  àan& 
un  sens  relatif  à  l'étymologie  latine,  signifioit  avis, 
inspection;  jugement,  volonté  que  détermine  la 


(1)  Le  duc  de  Clarence,  frère  d'Edouard  VI.  (n.  e.) 


AR 


—  119  — 


^  IP,?,    nh';^'^""^''^^'^  j"^'«  ^t  raisonnable. 

Lej't  bi  bs.de  ou  aide sera  levée  et  cuillie  du 

«  ton  .  et  gardée....  au  proffit  commun  de  touz 
'  \^fr^  P"!'  ^}-  ''-'^"lé  par  l'ordenance  et  arbitre 
"  des  Genz  desd.z  pais.  ,.  (Ord.  T.  m,  p.  G8G 

Ln  termes  de  Jurisprudence,  se  mettre  en  arbitre 
ce  oit  se  mettre  en  arbitrage;  soumettre  à  iS 
due  personne,  ù  son  inspection,  la  chose  dont  on 
L,S"if  ^■'"f ''^'P'"^'  en  avoir  pris  connois- 

!  Los  HVF.Ç.f  ""'  1T  "  ^^^''  "^  J'  convensde 
«  LOS,  et  h  Eskevm  et  h  communiiez  de  Biéthune 

"  K;/!"/''T    ^''  '^  "^^'""^  assenleuS  en 

fC  -P    "°^n"  H ''"''    Margherite    conlesse    de 

«  Handie.  »  (Duchesne,  Hist.  généal.  de  la  M  de 

Bethune  pr.  p.  145  ;  tit.  de  1270.  -  Vov  Arbitra- 

TION  et  ARIilTREMENT.)  ^     AKKITRA 

etdifncilfr/.S^^  ''^  ''  naturellement  défiant 
et  dill  ule  à  satisfaire,  que  toujours  on  croira  rai- 
sonnable 1  ancien  proverbe  :  .<  Fol  est  Tbomme  aûi 
.<  de  son  mantel  se  met  en  arbitre;  car  clé  le4r  â 
«  la  moyclie  perdue.  »  (Percef.  Vol.  IV  fol   ifi) 

«inV.'V'P?''^'^'',®'''"^^^"^'^  »^'ec  quelle  analogie  de 
signilicalion,  la  volonté  par  laquelle  on  se  d^tpV 


AR 


en  latin  Arl^orosa  (2).  (Voy.  llfnt^l^TAZil'r' 

Arborateur,  subst.  masc.  Planteur  d'arhrpc- 
Pepinienste.  (Voy.  Cotgrave,  Dict.)  fl^'hies, 

Arborer,  verbe.   Planter  haut    et   dmit  ^  lo 

d-après  laquelle  le'stSlant    a.^rt  InuS'Sor 
designoit  une  enseigne,  un  éte.Ed  \loy  IÏr Ti 

Si  1  on  en  croit  Pasquier,  c'est  à  Vamira    3e  cmmV 
•  Ordonnances    q\'é   fi  ^'adm  ?al    de    ciZ^f^ 

se^??S^1^ts'lï;?L'Sc"£^^' "■^"- 

a.Kdogue  à  celui  ^u  SbSîf'^^ï;,.^'  ^,?'i  ^^. 

pesSâ    levép-pf-  ,'  ^'^'''  '''^-'  ^^"«'"«"t  eml 

pestnce,  ie\ee  et  close  que  on    n'y  oeut  ailpp 

"  ''^,  P'çd   ny  ù  cheval;  et  qui  plus  est  s'efforpp 

«  d  y  planter,  arborier,  et  nourrir  haj^  à  lin  0^^ 

iii.  xxii,  p.  111.  _  Voy.  Arboirie.)  ' 

Arboriser,  verbe.  Chercher  à  connoître  H 
nature  et  a  vertu  des  plantes;  chercherdes  p  antes 
On  ne  croit  point  qu-arboliser  et  arbo  S  soient 
des  al  erations  ûlierboriser  et  herboriser  yerhel 
iïSf  la.infpf/^.'"^'  ''''  f'^'"'"*^^  de/,?S(3rd  ?n'! 

r\v>.  M-  ^^'  ^u'^'*^^  <^^"s  arboriste  et  arboliste 
Aoy  Ménage,  Observ.  sur  la  Lang.  Fr.  p  31  e  32  ) 
Il  est  plus  vraisemblable  qu'en  étendant  l'accention 
t  '"^^»''f  .arbre,  en  latin  arbor.  à  tou  e  eTpèce 
de  plante  boiseuse  ou  non  boiseuse,  on  en  a  Sa 
forme  le  verbe  primitif  «rôor/sé-r,  qui  sî?niSt 
«  chercher  à  connoitre  la  nature  et  la  vertu  les 

"  hShf  '  'V''  r^^"'^^'''"^'  «^es    arbustes    et  des 
"  herbes  ;  chercher  à  connoitre  la  nature  et  la  vertu 

."  Pa;sa'us''n'nr''''''i''''"   ""''  P'^"'^^  en'yineVaL 

passants  par  quelcques  prez  ou  aultrês  lieux 

«  herbus  visitoient  les  arbres  et  plantes      e    en 

.  emportoient  leurs  pleines  mains  au  log  s    des- 

«  quelles  avoit  la  charge Rhizotome,  ensemble 

"  des.      instruments  requis  à  bien  arboriSr^ 
'  «  S  11  advenoit  que  l'aer  feust  pluvieux  et  intem': 


„^^^,^^^^^^^l^^,subsl.  m«sc.  Arbitrage  Le  verbe 
arbitrer  qui  subsiste,  n'est  pas  moins  ancieS  dans 
notre  langue  que  le  substantif  arbitretSlTln 
eto.t  forme,  «  Sur  les  amendes  de  ceux  dan  ai  es  s2 
«  m.strent-.l  en  le  arbitrement  Aq  tiel  et  de  tiel 

«ll4^s  riSî^?'iSie;i!i~ 

îrdS:^^^y!1^^5^-^^'^-'-S^: 

Arboirie,  subst.  fém.  Arbres  et  arbrisseaux- 
,e  mot  arbome  étoit  un  nom  collectif  d'aibres  de 

ÏS'S^^-^^ï""^?'p-PP-'^'^^-^eK;rs 
parmi  la  terre  desquels  ces  rivières  passent  «Leurs 
«  terres  et  seigneuries  vont  jusques  en  l'eaue  pÎ 
«  ont  la  couppure  des  ronsses  ilarboirtekne 

:  si'SnS"  S£?"î^f^(i)"^PO""-oSu'passe  • 
"M  g  ana    arboirie   ny   doivent    laisser    mrnn 
«  y  puisse  tramer  ;  et  s'ils  ne  le  fa  so  e      [es  traU 
«  leurs  le  pourroient  faire  et  coupper  si  avant  aûe 

rinnli*^™'^^'^""  ^,^"^  '^e  mot  arboirie,  formé  sans 
doute,  comme  arbrorie,  du  latin  arbor,  ^1  f"anyois 

f  s     ,      i  ui.  a  ou\  e  la  lome  arboUsta,  jardinier  pour  les  arbres,  (n.  e.> 


AR 


120  — 


AR 


«  péré,...  au  lieu  à'arboriser  visiloient  les  bouli- 
«  ques  des  Drogueurs,  Herbiers  et  Apolhecaires.  " 
(Rabelais,  T.  I,  p.  167,  IGO  et  171.  —  Voy.  Cotgrave 
et  Oiidin,  Dict.)  Ainsi,  le  verbe  herboi'iser  qui 
subsiste,  pourroit  être  une  altération  de  l'ancien 
verbe  arboriser.  (Voy.  ÂRnoiusTi;.) 

VARIANTES  : 
ARBORISER.  Rabelais,  T.  I,  p.  171. 
Arboliser.  Ménage,  Observ.  sur  la  Lang.  Fr.  p.  31  et  32. 
Arborizer.  Rabelais,  T.  I.  p.  168. 

Herboliser.  Ménage,  Observ.  sur  la  Lang.  Fr.  p.  31  et  32. 
Herboriser.  Orth.  subsist.  —  Monet,  Ménage,  Dict. 

Arboriste,  subst.  masc.  Qui  cherche  à  con- 
uoitre  ou  qui  connoît  la  nature  et  la  vertu  des 
plantes.  Il  semble  qu'on  ait  méconnu  la  possibilité 
d'étendre  l'acception  du  substantif  arbre,  à  toute 
espèce  de  piaule,  lorsqu'à  raison  de  ce  que  les 
arbres,  les  arbrisseaux  et  les  arbustes  intéressoient 
moins  que  les  herbes  ou  les  simples,  la  curiosité 
des  Botanistes,  on  a  imaginé  qu'au  lieu  à'arbortste 
et  d'arboriser,  il  falloit  écrire  herboriser  et  herbo- 
riste. On  prouve  cependant,  par  une  citation  de 
Rabelais,  qu'arboriser,  c'étoit  visiter  les  arbres  et 
plantes  ;  par  conséquent  les  heibes,  les  simples, 
dont  la  connoissance  est  l'objet  plus  particulier  de 
la  Botanique.  (Voy.  Auboriser.) 

De  là,  arboriste  aura  signifié  la  même  chose  que 
herbeur,  herbier,  et  herbiste,  mots  formés  du 
substantif  herbe  ;  mais  dans  herboriste,  on  ne  voit 
qu'une  altération  du  mot  primitif  arboriste.  «  Her- 
B  boriste  qui  est  aujourd'hui....  le  seul  mot  d'usage 
«  ne  s'est  introduit  que  par  la  réflexion  qu'on  a  faite 
«  que  puisque  c'étoient  les  herbes  qu'on  cherchoit 
«  et  non  pas  les  arbres,  on  devoit  écrire  herboriste 
«  et  non  pas  arboriste  :  en  quoi  l'on  n'a  pas  pris 
«  garde  que  les  deux  dernières  syllabes  du  mot  sont 
«  des  preuves  convaincantes  de  l'ancienne  ortho- 
«  graphe.  »  (Rabelais,  T.  1,  p.  1G8;  notedeLeDuchat.) 

On  trouve  l'ancienne  orthographe  arboriste  (1), 
dans  les  Fables  de  la  Fon laine  (liv.  v,  édit.  de  1678.) 
Un  loup,  feignant  de  croire  malade  un  cheval  qu'on 
a  mis  au  vert,  s'offre  à  le  guérir  en  disant  qu'il 
connoît  la  nature  et  la  vertu  des  simples  de  la 
prairie  :  mais  une  ruade  le  force  à  se  donner  à  lui- 
même  cette  leçon  : 

Chacun  à  son  métier  doit  toujours  s'attacher; 
Tu  veux  faire  ici  VArhorisie, 
Et  ne  fut  jamais  que  Boucher. 

VARIANTES  : 
ARBORISTE.  Ménage,  Observ.  sur  la  Lang.  Fr.  p.  31. 
Arboliste.  La  Grant  Nef  des  Fous,  fol.  3G,  édit.  de  1499. 
Hebboliste.  Ménage.  -  Dict.  Etym.  au  mot  Herboliser. 
Herboriste.  Orth.  subsist.  -  Nuits  de  Strap.  T.  II,  p.  426. 

Arbre,  subst.  masc.  et  fém.  Bois.  La  substance 
qui  forme  le  corps  des  arbres  et  sert  à  bâtir. 

Desous  la  tour  descent  el  porce  (2)... 
Rien  n'i  avoit  qui  aine  fiist  d'arbre; 
Car  il  estoit  tos  fai.s  de  marbre. 

Siéiçe  de  Thèbes,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  38,  R-  col.  3. 


En  se  conformant  à  la  règle  d'après  laquelle  on 
rapproche,  autant  qu'il  est  possible,  un  mol  de  tous 
ceux  dont  il  est  l'origine,  on  auroit  dû  pour  la 
rédaction  de  l'article  entier,  préférer  à  l'orthographe 
abrc,  l'orthographe  primitive  arbre;  et  d'un  seul 
coup-d'œil  on  en  auroit  vu  naître  arbreau,  arbres- 
seau,  arbroisel,  abrisel;  arbret  d'où  le  verbe 
arbreter  ;  arbreus;  arbri,  ou  abri  d'où  le  verbe 
abrier  ;  les  substantifs  arbrier  ou  abrier,  arbriere, 
arbroie,  arbrorie,  etc.  (Voy.  Abre,  Abri,  Abrier  et 
Abrisel.) 

variantes  : 

ARBRE.  Orth.  subsist.  -  S'  Bern.  Serra,  fr.  MSS.  p.  50. 

Airbre.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  n»  389,  fol.  119. 

Arbreau,  subst.  masc.  Petit  arbre  ou  arbris- 
seau. (Voy.  Cotgrave,  et  Rob.  Estienne,  Dict.) 

Arbresseaii.  subst.  masc.  Arbrisseau.  Les 
orthographes  arbruissel  elarbraissiau sont  un  sup- 
plément à  l'article  abrisel,  on  le  pluriel  ar/^rcssctii/a; 
est  une  faute  pour  arbresseaulx,  qu'on  trouve  dans 
Molinet  (Poës.  p.  177.  —  Voy.  Abrissel.) 

VARIANTES    : 
ARBRESSEAU.  Molinet,  p.  177. 

Arbr.\issiau.  Lettre  du  patriarche  de  Jérusalem,  fragm. 
MS.  de  la  Clayette,  p.  114,  col.  1. 
Arbruissel.  D.  Carp.  S.  Gl.  1.  de  Du  C.  au  mot  Arboreta. 

Arbret,  subst.  mnsc.  Petit  arbre.  Fût  d'arbalète. 

La  signification  d'arbret  est  la  même  que  celle 
d'arbreau,  petit  arbre,  dans  le  passage  suivant: 
«  Quand  voslre  faucon  sera  fait  et  reclamé,  toutes 
«  les  fois  que  vous  le  leurrerez,  jettez  luy  le  leurre 
a  en  quelque  arbret,  ou  petit  buisson,  afin  qu'il 
«  aprennedesoiarresteretde  prendre  la  branche.  » 
(Arteloque,  Fauconnerie,  fol.  91.  —  Voy.  Arbreau.) 

On  a  nommé  arbrels,  des  branches  de  chêne  pré- 
parées en  façon  de  petits  arbres,  pour  y  tendre  des 
gluaux  et  prendre  les  pinsons.  «  Ces  arbrets  au 
"  nombre  de  trois  ou  quatre,  faits  en  trépied  aussi 
«  comme  à  dix  pieds  l'un  de  l'autre,  doivent  être 
«  de  branches  de  chêne  et  n'être  mie  si  haulx  que 
«  l'en  ne  puisse  bien  avenir  au  coupel  (3)  pour  les 
.<  gluer.  »  (Modus  et  Racio,  fol.  184-185.  —  Voy. 
Arbreter.) 

Quelquefois  abret,  comme  altération  de  l'ortho- 
graphe arbret,  désignoit  le  fût  d'un  arbalète,  nom- 
mée plus  souvent  abre  ou  arbre,  abrier  on  arbrier. 
«  Ainsi  que  le  Suppliant  ot  tendue  son  arbalestre 
«  et  couchée  la  vire  sur  l'abi'ier,....  ne  scet  se  la 
«  dite  vire  estoit  couchée  sur  le  cours  de  Vabret  de 
«  sa  dite  arbalestre-  »  (D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss. 
lat.  de  Du  Gange,  T.  1,  col.  274;  tit.  de  1429.  — 
Voy.  Abre  et  Abrier.) 

VARIANTES   t 

ARBRET.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  184,  V". 

Abret.  D.  Carp.  S.  Gl.  1.  de  Du  Cange,  T.  I,  col.  274. 

Arbreter,  i>erbe.  Tendre  des  gluaux.  Préparer 
en  façon  de  petits  arbres  ou  d'arbrets  des  branches 


(1)  Ce  mot  est  à  la  fois  un  archaïsme  et  un  néologisme  :  le  peuple  l'emploie  encore  pour  herboriste,  et  quelques  personnes 
en  font  le  synonyme  de  pépiniériste,  (n.  e.)  -  (2)  Porche  (.porticus),  vestibule  soutenu  ou  non  par  des  colonnes,  devant  les 
églises  et  les  palais,  (n.  e.)  -  (3)  En  bas-latin  cupci,,  branches,  sommet  d'un  arbre,  (n.  e.) 


AR 


—  121  — 


AR 


de  chêne  sur  lesquelles  on  prend  les  pinçour  en 
leur  tendant  des  gluaux.  De  là,  l'ancienne  expres- 
sion arhreter  aiix  pinsons,  qui  signifie  un  de  ces 
amusemens  qu'on  nommoit  Zts  déduits  aux  pau- 
vres. (Modus  et  Racio,  ms.  fol.  IGl.  —  Voy.  Arbret.) 

Arbreus,  adj.  Planté  d'arbres  ;  garni  d'arbres. 
C'est  en  ce  sens  qu'on  disoit,  vallées  arbreuses, 
arbrctises  forêts,  bocage  arbreus.  (Voy.  Epilhètesde 
M.  de  la  Porte.  —  Poës.  d'Amadis  Jamin,  fol.  21),  V". 
—  Œuv.  de  Ba'if,  fol.  52,  V°.) 

Arbrière,  subst.  fém.  Arbres  et  arbrisseaux. 
Nom  collectif  d'arbres  et  arbrisseaux  formant  une 
haye.  «  Ti'ouva  quatre  escus  d'or,  lesquelz  il  enterra 
«  au  pié  d'un  chesne,  en  V arbrière  ou  baye  de  bois 
«  de  Pousiniere.  »  (D.  Carpenlier,  Suppl.  Gloss.  lat. 
de  Du  Cange,  au  mol  Arborela;  tit.  de  1457.) 

Ai'brisselet,  subst.  niase.  Petit  arbrisseau. 
Arbrisseau  tel  que  le  groseillier.  On  a  désigné  la 
qualité  aigre  et  acide  du  fruit  du  groseillier  rouge, 
en  le  nommant  arbrisselet  d'aigreur.  (Cotgrave, 
Dict.  —  Voy.  AiiRisEL.) 

Arbroet,  subst.  masc.  Lieu  planté  d'arbres  de 
la  nature  de  l'aune,  du  saule,  etc.  Peut-être  faul-il 
lire  arboret,  en  latin  arborctum  ;  mot  qui,  dans  un 
extrait  du  troisième  registre  des  Coutumes  de  la 
franche  forêt  de  Mourmal,  paroît  signifier  «  un  lieu 
«  planté  d'arbres  de  la  nature  de  l'aune,  du 
••  saule,  etc.  »  comme  dans  une  charte  de  l'an  1402, 
citée  par  D.  Carpenlier,  (Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du 
Cange,  T.  I,  col.  273,)  le  mot  arboreta  signifie 
salicium,  en  françois  saussaie'?  «  Pour  avoir  fait 

«  faire plusieurs  laignes  (1)  d'aulnes,  commen- 

1  çant  à  l'aulnoye  desseure  la  blanche  fontaine, 
«  depuis  les  arbroets  venants  du  long  trouver 
«  Aletruyr  et  venant  passer  au  bicquet  Mallerir,  et 
«  d'illec  aux  fossez  des  autels  ;  desquelles  il  en  a 
«  vendu  aucunes,  et  les  autres  mené  à  ses  cau- 
«  fours,  etc.  »  (Coût,  de  Landrecies,  au  Nouv. 
Coût.  gén.  T.  II,  p.  269,  col.  1.) 

Arbi'oie,  subst.  fém.  JNom  collectif  d'arbres 
formant  une  forêt,  un  bois,  un  taillis,  un  bosquet, 
un  bocage,  etc.  On  nommoit  en  ce  sens  rt?'/i)'0|/<?  une 
forêt,  un  bois,  un  taillis,  etc.  «  Il  vint....  à  une 
"  forest  que  ceux  du  pays  appelloient  VArbroye.  » 
(Lanc.  du  Lac,  T.  II,  fol.  65.)  ••  Les  racines  qui  re- 
"  mestrent  en  la  terre,  engendrèrent  d'eles-meismes 
«  granz  arbroies  autretelles  comme  perches.  » 
(Hist.  de  Charlemagne,  ms.  de  la  Clayette,  p.  94.) 

I,a  lune  luist  parmi  Varhroie. 

Parton.  de  lilois,  MS.  de  S.  Gerra.  fol.  163,  V  col.  3. 
L'autre  jour  me  chevauchoie 
De  lès  une  grant  arbroie; 
Si  pi'arestoie  un  petit. 
Si  com  dedens  esgardoie, 
Vi  pucèle  simple  et  coie 
Qui  disoit  par  grant  despit  : 


Il  jut  anuit  en  mon  lit, 
Nuetement  en  mes  bras, 

Li  chaitis,  las  ! 
A  pou  que  je  n'ai  tout  dit  : 

Mal  feu  (2)  soit  il  ars  ; 

Trop  est  couars. 

Chans.  fr.  MS.  de  Doubler,  fol.  301,  V°  col.  1. 
Parmi  cèle  a>-broie, 
Cil  oisèlon  s'envoisent 
Et  mainerit  grant  baudor. 
Quant  j'oi  là  leur  joie, 
Por  riens  ne  m'i  tendroie 
D'amer  bien  amors. 

Ane.  Poèt.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1448. 

Ces  derniers  vers  font  partie  d'une  chanson 
attribuée  au  comte  Thibaut  par  M.  delà  Ravalière, 
qui  a  écrit  arboie  pour  arbroie.  (Voy.  Poës.  du  Roi 
de  Navarre,  T.  II,  p.  95.) 

VARIANTES  : 
ARBROIE.  Siège  de  Troye,  MS.  du  Roi,  n»  6987,  fol.  92. 
Arboie.  De  la  Ravalière,  Poës.  du  R.  de  Nav.  T.  II,  p.  95. 
Arbrove.  Lanc.  du  Lac,  T.  II,  fol.  0.5,  R»  col.  I. 

Arbroier,  subst.  masc.  Nom  collectif  d'arbres. 

Peut-être  pépinière.  «  Courtieux où  on  fait 

«  plusieurs  labourages  de  vignes,  à'arbroiers,  et 
«  d'autre  semence.  ■•  (Bouteiller,  Som.  rur.  liv.  II, 
tit.  X,  p.  794.) 

Arbi'orie,  subst.  fém.  Bois,  forêt.  Lorsque  la 
forêt,  le  bois  ou  lieu  planté  d'arbres  étoit  très  cou- 
vert, «  c'étoit  une  arbrorieespesse  de  grans  arbres.  » 
(Percef.  Vol.  I,  fol.  99.) 

Arhroys,,  subst.  masc.  plur.  Arbres  et  arbris- 
seaux. Nom  collectif  d'arbres  et  arbrisseaux  qui 
croissent  au  bord  des  rivières,  et  dont  l'eau  baigne 
les  souches  et  les  racines.  Probablement  dans 
l'Ordonnance  des  Eaux  et  Forêts,  que  cite  D.  Car- 
penlier, d'après  un  ms  du  Roi,  la  défense  de  battre 
aux  arbroys,  est  relative  aux  moyens  usités  par  les 
Pêcheurs,  pour  attirer  dans  leurs  filets  le  poisson 
auquel  les  souches  et  racines  de  ces  aibres  et 
arbrisseaux  servent  de  retraite.  «  Que  l'en  ne  batte 
«  aux  arches,  ne  aux  gors,  ne  aux  arbroys.  » 
(D.  Carp.  S.  CI.  lat.  de  Du  Cange,  au  mot  Arboreta  (3).) 

Il  est  évident  que  le  mot  ables,  altération  du 
pluriel  abres  ou  arbres,  étoit  de  même  signification 
qu'arbroys,  lorsque  Charles  VI,  par  son  Ordonnance 
du  1"'  mars  1388,  défendoit  «  d'abattre  aux  arches, 
«  ne  aux  gors,  aux  ables.  «  (Voy.  Ord.  T.  VII,  p.  779.) 
L'article  lxxh  de  l'Ordonnance  de  1402,  citée  par 
D.  Carpenlier,  réitère  la  même  défense;  mais 
croiroit-on,  sans  l'autorité  du  ms.  du  Roi,  qu'au 
lieu  de  ces  mots  gors  et  arbres  ou  arbroys,  un 
copiste  inattentif  et  ignorant  ait  écrit  gros  herbes 
ou  seulement  herbes,  comme  on  lit  (Ord.  T.  VIII, 
p.  535  ;  et  Gr.  Coût,  de  Fr.  p.  73,  édit.  de  1598.)  On 
sait  que  les  gors  ou  gords  (4)  sont  des  pêcheries 
construites  dans  les  rivières. 

Arc,  subst.  masc.  Arc,  arbalète.  Arc  de  triomphe. 
Arcade,  voûte,  cintre,  enfoncement  cintré.  Partie 


(1)  Cordes  de  bois^  bois  en  corde  ;  en  latin  ligna.  -  (2)  Malè  falutus,  le  mal  fortuné,  le  malheureux,  (n.  e.)  -  (3)  C'est  la 
racine  du  mol  étudie  :  de  même  suliccliini  fait  saussaie  ;  alnetum,  aulnoy.  (n.  e.)  -  (4)  En  latin  gurges  ;  ce  mot  est  resté, 
sous  la  forme  younis  en  Nivernais,  prés  de  Decize  :  il  désigne  des  étangs  profonds  et  poissonneux.  (N.  e.) 

II.  16 


AR 


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du  corps  d'un  clieval,  d'un  chien;  les  jambes  ou 
partie  des  jambes  de  devant.  S'il  est  vrai  que  baliste 
ou  bah'ate  soit  formé  du  grec  />'«;i;iQ),  l'usage  de  l'arc 
avec  lequel  on  lançoil  les' traits  nommés  llèches,  ou 
les  pierres  nommées  jalets,  semlile  avoir  été  désigné 
par  l'expression  arc  à  baleste,  doù  le  mot  composé 
arbaleste.  (Voy.  Ahii^u-este.)  On  omettoit  celte  dési- 
gnation assez  "inutile,  en  disant  arc  à  flèches,  arc  à 
jalets.  (Borel,  Rob.  Eslieune  et  Nicol,  Uict.  — 
Voy.  Arcajalet.) 

Les  arcs  à  tour,  distingués  des  arcs  de  main  et 
de  COI  ps,  étoient  les  arcs  qu'on  bandoit  avec  un 
tour,  uu  moulinet,  comme  les  arbalètes  qu'on  ne 
pouvoit  bander  aux  reins.  «  Pour  double  de  mort 
«  s'enfuyrent  en  l'autre  tour  à  garant,  où  ilz  firent 
«  par  force  d'Archiers  et  Arbalestriers  reculer  :  car 
«  ils  avoient  leanz  plusieurs  arbalestes  et  ars  à 
«  tour.  Si  gariterenl  leur  dite  tour,  etc.  »  (Hist.  de 
B.  du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  iSi.) 

On  nommoit  les  arcs  faciles  ù  bander  sans  tour 
ou  sans  moulinet,  arcs  de  main,  arcs  îi  main,  et 
plus  anciennement  arcs  maniers. 

Plus  que  ne  giete  un  ars  matiiers, 
Les  envoient  fuiant  ariers. 

Alhis,  US.  fol.  79,  R-  col.  1. 

«  La  longueur  d'un  arc  de  main,  qu'on  faisoit 
«  d'yf  ou  d'autre  bois,  éloit  au  moins  de  vingt  poi- 
«  gnées,  de  l'une  ousche  où  la  corde  se  metjusques 
«  à  l'autre.  Quand  Yarc  étoit  tendu,  il  y  avoit  entre 
«  l'arc  et  la  corde  qui  étoil  de  soye,  tout  les  cinq 
«  doigts  et  la  paume  large.  La  flèche  ayant  en  lon- 
"  gueur  huit  poignées,  dès  la  bosce  de  la  coche 
«  derrière  jusqu'au  barbel,  étoit  garnie  d'un  fer 
«  long  de  cinq  doigts,  et  large  de  quatre,  au  bout 
<•  des  barbiaux  ou  pennons.  »  Ces  proportions 
n'étoient  pas  si  invariables  qu'elles  ne  pussent 
avoir  plus  de  longueur,  puisqu'en  parlant  de  ce 
même  arc  qu'on  tendoit  à  la  main  ,  on  a  dit  qu'«  il 
«  devoil  avoir  de  long  entre  la  coche  du  bout  de 
«  hault  jusques  à  celles  du  bout  d'embas  vingt-deux 
«  poignées,  etc.  «(Voy.  Chasse  de  Gaston  Phébus,Ms. 
p.  324  et  325.  —  Modus  et  Racio,  ms.  fol.  72  et  73.) 
L'expression  «  faire  les  buissons  aux  arcs,  »  signifie 
les  préparatifs  de  la  «  chasse  îi  l'arc  de  main,  »  ou 
tout  simplement  de  la  chasse  ii  l'arc.  (Voy.  Modus 
et  Racio,  ubi  supra.)  On  a  la  preuve  qu'à  la  guerre, 
comme  à  la  chasse,  on  se  servoit  d'arcs  de  main 

ou  d'arcs    à    main.   «Commencèrent  à   tirer 

«  d'arbalestres  et  arcs  à  main  très-fort  contre  leurs 
«  ennemis.  >•  (Monslrelet,  Vol.I,  ch.ccxvii,  fol.287.) 

Il  est  probable  que  l'arc  de  corps  étoit  l'arbalète, 
espèce  d'aj-c  dont  les  Turcs  paroissent  avoir  été  les 
inventeurs  (1).  Les  Chrétiens,  qu'on  croit  n'avoir 
connu  l'usage  de  cet  arc  et  ne  l'avoir  emprunté  des 
Turcs  qu'au  retour  de  la  première  croisade,  l'auront 
nommé  par  celte  raison  arc  turquois.  On  ajoute 


qu'avec  l'arc  turquois,  autrement  Tare  de  corpSj on 
lançoitdesiiuarreaux,  espèce  de  tlèches  plus  particu- 
lièivs  à  faibalèie  qu'à  toute  autre  espèce  d'arc.  «  Les 
"  Seigeans  prindrent  leurs  ars  turquoijs  (2)  et  s'en 

«  vindrent  tous  renger  devant  la  porte  du  Chastel 

<(  GadilTer  et  le  Tors,  Lyriope  et  Lisane....  jouoient 
«  h  tables....  Mais  ainsi  que  Lyriope  jecloit  les  dez 
«  sur  le  tablier,  ung  Sergent  tira  d'ung  arc  de 
«  corps  par  dedans  la  tour,  et  ferit  contre  le  mur. 
<•■  Lors  cheurentquarreauxsurla  main  de  Lyriope.  » 
(Percef.  Vol.  I,  fol.  81,  R»  col.  1.) 

Quant  en  Chippre  furent  venu, 

Il  recouvrèrent  à  planté 

De  vivres  à  leur  volenté  ; 

Armes,  chevaux,  artillerie, 

Pour  mettre  dedenz  leur  navie  ; 

Ars  turquois,  angins  et  briquoles,  etc. 

G.  Macliaut,  piise  d'Alaxaudrie.  MS.  fol.  217. 

Cet  arc  turquois,  probablement  le  même  que 
l'arc  de  corps,  différoit  peut-être  de  f  aî'c  à  main, 
en  ce  que  la  force  du  bras  ou  de  la  main  étant 
insuffisante  pour  le  bander,  on  y  employoit  toute 
la  force  du  corps.  Il  seroit  possible  aussi  que  par 
la  raison  qu'un  arc  tendu  avec  la  main  est  tendu 
avec  partie  de  la  force  du  corps,  on  eûl  nommé 
indifféremment  nrc  de  corps  ou  arc  de  main,  toute 
espèce  d'arc  qu'on  bandoit  sans  tour  ou  sans 
moulinet.  Ainsi  l'arc  de  main  dont  on  a  parlé,  étoil 
comme  l'arc  de  corps,  un  arc  turquois.  «  Puet-on 
«  prendre  les  bestes  à  traire  aux  arcs,  et  à  l'arba- 
«  leste,  et  à  Varc  de  main  que  on  appelle  turquoys.  » 
(Chasse  de  Gaslon  Phébus,  ms.  p.  324.) 

On  nommoit  ce  même  arc,  un  arc  anglois; 
dénomination  qui  semble  désigner  l'adresse  avec 
laquelle  on  se  servoit  en  Angleterre  de  l'arc  de 
main  ou  de  l'arc  turquois,  qu'on  croit  être  l'espèce 
d'arbalète  propre  aux  Turcs,  et  dont  les  Anglois 
furent  les  premiers  à  renouveler  l'usage  interdit 
aux  Chrétiens  par  les  Papes.  «  L'a/"c  de  main  que 

«  on  appeWc.  Anglois  ou  turquoys doit  avoir  de 

«  long,  etc....  Des  arcs  ne  scay-je  pas  trop  :  mais 
«  qui  plus  en  vouldra  sçavoir,  si  aille  en  Angleterre  ; 
«  car  c'est  leur  droit  mestier.  »  (Chasse  de  Gaston 
Phébus,  MS.  p.  324  et  329.) 

L'arbalesle  étant  une  espèce  d'arc,  on  la  com- 
prenoit  souvent  avec  l'arc  de  main,  le  même  que 
l'a?'c  anglois  ou  turquois,  sous  le  nom  simple  et 
générique  d'arc.  «  Les  Archiers  doivent  avoir  leurs 

«  arcs  tenduz et  estre  vestuz  de  vert,  et  leurs 

«  arcs  aussi  verz  ;  soyent  arbalestes  ou  autres.  » 
(Chasse  de  Gaston  Phébus,  ms.  p.  332.) 

On  a  comparé  la  santé  dont  on  abuse,  à  un  arc 
qui  rompt  à  force  d'être  tendu. 

Santés  est  ars  que  fols  entoise  (3), 

Qui  à  son  besoing  brisera  : 

Or  peust  (4)  cascuns  quels  il  sera. 

Pofine  de  la  Mort,  MS.  .lu  R.  n-  6987,  fol.  336,  R*  col.  4. 

Dans  le  sens  figuré,  on  désignoit  une  personne 


(1)  Voir  l'article  Arbalète  :  il  était  déjà  connu  des  armées  romaines;  le  moine  Richer  en  parle  et  il  est  représenté  sur  des 
miniatures  du  temps  de  Louis  d'Outremer,  (n.  e.)  —  (2)  Cet  arc  turquoijs,  qu'on  ne  connaît  qu'au  xav  siècle,  avait  des 
branches  en  os  ou  en  corne,  réunies  par  un  ressort  d'acier;  les  arsenaux  du  temps  de  Charles  V  contenaient  encore  des 
provisions  de  cornes  de  bœuf  pour  répondre  à  cet  usage.  (N.  E.)  —  (3)  D'un  fréquentatif  intc{n)sare,  de  intendere.  (n.  e.)  — 
(4)  Puisi,  pèse,  vaudrait  mieux  pour  le  sens.  (n.  e.) 


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toujours  prêle  à  bien  dire  et  h  bien  faire,  en  l'assi- 
milant a  un  Arclier,  qui  tenant  Vare  tendu  est  tou- 
jours prêt  à  lancer  son  trait. 

De  bien  fere  et  de  dire  a  toz  jors  l'ace  tendu 

Fabl.  MS.  du  R.  Il"  7218,  fol.  202,  R-col.  1. 

Si  l'on  exigeoit  de  quelqu'un  autre  chose  que  ce 
qu  il  avoit  projeté  de  faire,  on  lui  disoit  : 

D'autre  arc  vous  convenra  traire. 

Fabl.  M.S.  de  S'  Germain,  fol.  45,  V"  col.  2. 

On  blâmoit  un  homme  trop  timide  pour  oser  ce 
qu  11  s  étoit  promis  d'exécuter,  en  disant  proverbia- 

Coart  est  qui  ne  trait,  quant  son  arc  a  tendu. 

Chaslie-Musan,  MS.  de  S.  Gerra.  fol.  105,  R"  col.  2. 

h' arc-en-ciel,  ce  Météore  qui  paroîl  dans  les  nues 
ligure  en  arc  et  diversement  coloré,  s'est  nommé 
are  celestre;  comme  signe  d'alliance  entre  Dieu  et 
es  liommes  a.rc  fédéral,  en  latin  arens  fœderis 
(Voy.  Rom.  de  la  Rose,  vers  18900.  —  J.  d'Auton 
Annal,  de  Louis  XII,  an.  I4!)9-ir)0I    p  '^0  ) 

Il  semble  que  dans  la  satire  dixième  de  Régnier 
«  se  préconiser  cousin  de  ïare-en-ciel  signifie 
«  s  exalter,  s  élever  jusqu'aux  nues.  » 

S'idolâtre,  s'admire,  et  d'un  parler  de  miel 
be  va  préconisant  cousin  de  Varc  en  ciel. 

Cette  expression,  imaginée  par  Régnier  a  été 
dn''vvn.Pi''I'^i"'l"v'  d"  r^orens,  autre  poëte  satirique 

245  ^  ^^'     ^"^'^^'  '^'•'•'O*'!-  <■''•  T.   XVI, 

En  comparant  à  un  arc  l'espace  que  le  soleil  par- 
court du  levant  au  couchant,  on  a  pu  nommer  W 
rfHjo«r  autrement  are  diurne,  le  jour  artificiel  qui 
se  prend  depuis  le  lever  jusqu'au  coucher  du  solei 
(\  oy  Co  grave,  Dict.  -  Dict.  des  Arts  et  Sciences.)  ' 

L  arc,  la  plus  simple  des  armes,  et  sans  doute  a 
première  que  la  nécessité  de  combattre  de  loin  ait 
tait  inventer  a  1  homme,  même  le  plus  sauvao-e  fut 
aussi  le  premier  signe  de  la  victoire  (1).  Les  mo'nu- 

menselevesàlagloiredesvainqueursreprésentèrent 
\irc  avec  lequel  ils  avoient  triomphé  des  ennemis 
e  ces  monumens  furent  nommés  arcs,  ares  triom- 
phans,  aujourd'hui  arcs  de  triomphe.  ..  Les  Reis 
»  soldent  anciennement  faire  lever  e  voidre  (2)  ars  ki 
«  fussent  signe  e  à  remembrance  de  lur  victorie  .' 
vLivres  des  Rois,  ms.  des  Cordel.  fol,  04,  R-  col.  2.) 

Face  chasteaux  qui  voudra  et  théâtres, 
4!lZ!'''l'T''"""'  thermes,  amphithéâtres, 
lours  et  dongeons,  colosses  monstrueux 
U  or,  bronze  ou  marbre,  et  palais  sumntueux- 
Tout  cela  tombe  et  déchet  en  ruine  ' 

Les  Marg.  de  la  Marg.  fol.  3  v 

On  ne  pouvoit  mieux  désigner  la  figure  de  ces 
monumens  que  par  l'expression  voidre  «m  en  latfn 
arciis  volvere;  d'où  l'on  a  dit  are  r./„,  «  r  S's 
arc  voulte  :  en  un  seul  mot  arvoulu,  arvoi^  S' 
arvout,  e  peut-être  arbout,  en  latin  «r,-o//«/co,:  I 
traction  dm-cus  volutus.  Il  paroit  qu'en  Architec 
turc  1  arc  valu  ou  Varvoulu,  désigna  génénlemeSt 


tout  ce  qui  étoit  figuré  en  arc,  voûté  en  arc  ■  une 
arcade  une  voûte,  un  cintre;  une  galerie  ou  autre 
Sn'chitœ""  '"*'  ^°™^'^'^  ai^ade!  en  vSe! 

En  un  arool  d'une  cortine 
De  soie  ù  gisoit  la  mescine 
.Se  sont  assis  privéement. 

Rom.  de  Flo.re  et  Blanchellor,  MS.  du  R.  n"  6987,  fol.  252,  V  col   3 

Josep  qui  enz  fu  herbergiez 
Desouzr<(,Toi(?»  et  logiez 
tn  son  ht  sedormoitla  nuit 

Concop.ion  de  la  Vierge,  MS.  de  la  Clayelle,  p.  161,  col.  2. 
Quant  Ulixes  s'en  est  partis 
■lus  avalent  les  arvolis. 
En  lor  palefrois  sont  monté  etc 

Siège  de  Troye,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  81 ,  V  col   1 
Fors  des  arvols  del  parleour  / 

Ut  une  place  grant  et  lée 
Ue  haut  mur  tote  avironée. 

Ibid.  fol.  70,  R«  col.  1. 


Tos.  V^'  -^^  ^r  '^  ^°'™*'  «°'-e  li  sont  coru  • 
Ii^tV  Z""^*'"'  avoir  ochis  et  confondu.  ' 
Ahxandre  s'es   trais  devers  un  arc  voulu,  etc    ' 

Rom.  d  Alexandre,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  182rv-  col.  2. 

Dans  ces  différentes  citations  qui  prouvent  F'ic 
cep  ion  générale  d'arc  volu,  d'an;««/ ,  en  n  seul 
mot,  d' arvolis  et  d'arvol,  il  n' est  pns  p  lus  fadle  d'en 
distinguer  les  acceptions  particulières  que  cellS 

«  cSu  fde'î.','''':f"'''''^^^'''^'°"'  "  J«-Vouvri? 
cest  nujsdela....  et  vous  serez  en  cest«rct)oî//«<î 

for/oo'Tcnf  ï'^'^"^''-^/')-  "  (L'-'"'^'  du  Lac  T.t 
101.  100,  R»col.  J.  —  Voy.  Arvol-lu. 

On  designoit  sans  doute  la  forme  cintrée  d'une 
espèce  d'armoire  pratiquée  dans  répaisseur  d"în 
mui-^  en  nommant  cette  armoire  un  arcloum 
«  La  muraille  d'.celle   tour  avoit  bien  quatorze 

par  la  main  dextre....  le  mena  vers  ung  arc  vanité 
"  qui  es  oit  par  dedans  le  mur,  moytié  en  terîe  et 
"  moytie  dehors,  et  puis  luy  dist  :  Sire  Conte  vous 
«  povez  veoir  ceste  armairie  qui  est  dedans  ce 
«  mur    »  (Percef.  Vol.  I,  fol.  3,  V»  col  2.)         '  ""^ 

I  est  probable  que  dans  la  Coutume  de  Blois,  le 
mot  «rc  signi  le  un  enfoncement  cintré,  de  même 

arc  voulte.  «  Si  aucun  veut  faire  cheminée  ou  arcs 
«  en  un  mur  commun  et  moytoien,  il  ne  pourra 
«  prendre  que  a  tierce  partie/dudit  mur.  .Tout 
s,en  1.  11,  p.  it,4.  —  Voy.  Arcade.)  Le  narticine 
mute,  voultis,  ou  volu  étant  retranche,  on  diso^l 
tout  simplement  are  pour  arcade,  voûte,  etc.  fVov 
Gotgrave,  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict  ) 

Un  soupt'onne  que  par  une  allusion  triviale  et 
révoltante  du  mot  In-eneux  au  nom  de  bernard,fon 
aura  désigne  par  l'expression  arc  S'  nernard    la 

pM'fj;°P.';f'^'^'""."  '''''^'''^  d'une  voûté  obscure 
et  favorable  aux  besoins  naturels  des  passans  et 
que  de  là  on  aura  dit  «  passer  sous  ïarc  S'  èer- 

.En.acambre....;»^..^L-î^^^^-(3)0n^^ 


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«  tourner  un  pet  de  sexe  masculin  en  féminin, 
sans  passer  sous  Varc  Seinct  Ilernard.  >•  (Des  Ac- 
cords, Escr.  Dijon,  fol.  4,  V".  —  Voy.  Cotgrave,  Dict. 
—  Oudin,  Cur.  fr.) 

Peut-élre  qu'en  parlant  du  clieval  et  du  cliien, 
l'on  aura  nommé  arcs  dedevunl  et  tout  simplement 
an's,  les  jambes  ou  partie  des  jambes  de  devant, 
parce  que  dans  le  mouvement  pour  marcher  elles 
se  courbent  en  arc.  «  Leurs  chevaulx  furent  en 
«  l'eaue  jusciues  es  nrs;  lors  se  mettent  à  nager.  » 
(Percef.  Vol.  I,  fol.  51,  V"  col.  1.)  «  Estoyent...  leurs 
«  clievaulx  tous  espaullez  à  cause  qu'ilz  avoient 
«  hurlé  au  puys,  des  arcs  de  devant.  »  (Ibid.  Vol. 
YI,  fol.  19,  V°  col.  2.)  «  11  faut...  seigner  le  chien  des 
><  deux  venes  qui  viennent  par  le  dedans  des 
«  espaules  des  jambes  de  devant  qu'on  appelle  pour 
»  les  chevaux,  les  arcs.  »  (Du  Fouilloux ,  Vén. 
fol.  80.)  '<  A  chacune  sorte  de  galle,  il  est  néces- 
«  saifc  de  seigner  le  chien  des  deux  jarrets  de 
«  derrière  des  veines  qui  sont  au  dedans,  et  des 
«  arcs.  »  (Charles  IX,  de  la  Chasse,  page  82.) 

On  terminera  cet  article  en  ajoutant  que  l'usage 
seul  a  restreint  l'acception  d'un  mot,  par  lequel  on 
auroit  pu  désigner  toute  espèce  de  chose  dont  la 
figure  ou  la  forme  a  quelque  rapport  à  la  courbui'e 
et  même  à  l'idée  de  la  courbure  d'un  ai'C.  (Voy. 
Arche.) 

variantes  : 

ARC  Orlh.  subsist.  -  L  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  50. 

AlRC.  Chanson  fr.  WS.  de  Rerne,  n»  389,  part,  ii,  fol.  20. 

Arch.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  24,  R"  col.  1. 

Arcq.  Nouv.  Coût.  gén.  T.  Il,  p.  60,  col.  1. 

Ark.  Britton,  des  Loix  d'Angl.  chap.  Lxvi,  fol.  1U4,  R». 

Ars.  (Plur.  et  sing.)  Athis,  MS.  fol.  78,  R"  col.  2. 

Xm.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  fol.  102,  V»  col.  1. 

Arz.  (Plur.  et  sing.)  Rora.  de  Perceval,  fol.  272,  V°  col.  2. 

Arcade,  subst.  féni.  Arc,  demi-cercle.  Enfonce- 
ment cintré,  espèce  d'armoire  en  cintre.  Quelles 
que  soient  les  acceptions  usitées  et  inusitées  du  mot 
arcade,  elles  sont  toutes  relatives  à  l'idée  de  la 
courbure  d'un  arc.  C'est  dans  le  sens  d'arc,  demi- 
cercle,  que  par  comparaison  on  a  dit  :  «  mettre  les 
«  mains  on  arcade  sur  les  costes.  »  (Voy.  Cotgrave, 
Dict.) 

Il  est  probable  que  dans  les  Coutumes  de  Gorze 
et  de  S'  Mihiel,  une  arcade  est  la  même  chose  qu'un 
arc  dans  la  Coutume  de  Blois  ;  un  enfoncement 
cintré,  une  espèce  d'armoire  en  cintre,  creusée 
dans  l'épaisseur  d'un  mur.  «  Parois  commun  et 
«  métoyen  peut  estre  creusé  jusques  au  tiers  de 
«  son  espaisseur  pour  y  dresser  tuyau  de  chemi- 
"  née,  armoires,  arcades,  ou  autres  commodités.  » 
(iNouv.  Coût.  gén.  ï.  Il,  p.  1090.  —  Ibid.  p.  1057.  — 
Voy.  Arc  et  Arche.) 

VARIANTES  : 
ARCADE.  Orth.  subs.  -  N.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  1057,  col.  2. 
Archade.  Cotgrave,  Dict. 

Arcage,  subst.  masc.  Courbure  en  arc.  (Voy. 
Arceure.)  Vraisemblablement,  une  porte  à'arcage, 
étoil  une  porte  voûtée,  courbée  en  arc. 


Prendent  lor  volage 

Vers  la  Cité  qui  estoit  grans  et  large  : 
Ens  sont  entré  par  le  porte  d'accoge. 

Anseis,  MS.  fol.  3i,  R-  col.  2. 

Arcajalet(l),  subst.  masc.  Espèce  d'arc  ou  d'ar- 
balète. L'arc  ou  l'arbalète  avec  lesquels  on  jetoit  des 
pierres  rondes  nommées  jalets,  et  (lu'on  désignoit 
par  l'expression  are  à  )«/ef;  d'où  le  mot  composé 
arcajalet,  altéré  àans,  arcanjelet  que .Monet  définit  : 
«  espèce  d'arbalète  à  la  main,  tirant  à  baie  et  à 
«  trait.  »  (Voy.  Arc  et  Arbaleste.) 

VARIANTES  : 
ARCAJALET.  Ménage,  Dict.  Etym. 
Arcangelet.  Monet,  Dict. 

Ai'ceau,s(//)sL  masc.  Petit  arc.  Arc  de  triomphe, 
arcade,  voûte,  berceau.  On  courbe  en  petit  arc  la 
partie  supérieure  d'un  berceau  d'enfant,  les  deux 
pièces  de  bois  qui  jointes  l'une  à  l'autre  soutiennent 
une  selle  de  cheval,  les  rejetons  des  ceps  de  vigne 
provignés.  De  là,  les  expressions  arceau  de  bers, 
arceau  de  selle,  arceau  de  provin  en  la  vigne. 
(Monet,  Dict.) 

En  termes  d'Architecture,  l'arc,  la  courbure  d'une 
voûte  se  nomme  encore  arceau.  Mais  il  paroit  que 
sans  égard  ;'t  la  terminaison  qui  caractérise  un 
diminutif,  la  signification  d'arceau  étoit  autrefois  la 
même  que  celle  d'arc,  arc  de  triomphe,  arcade, 
voûte,  berceau.  (Voy.  Du  Bellay,  Mém.  pièc.  justif. 
T.  VI,  p.  366.  —  Alector,  fol.  136.  —  Rabelais,  T.  I, 
p.  74.)  En  termes  de  jardinage,  arceau  désignoit 
aussi  une  treille  disposée  en  voûte,  en  berceau. 
(Monet,  Dict.  —  Voy.  Arc.) 

Arcelor,  verbe.  Creuser  en  demi-cercle;  can- 
neler.  Il  semble  qu'on  ait  comparé  à  la  courbure 
intérieure  d'un  arc,  d'un  petit  arc,  la  circonférence 
concave  d'un  creux  en  demi-cercle,  d'une  canne- 
lure creusée  sur  une  colonne  ou  sur  un  pilastre, 
lorsqu'on  termes  d'architecture  on  a  dit,  1°  dans  le 
sens  de  creuser  en  demi-cercle  :  «  Perron  de  mar- 
"  bre,  hault  de  sept  piedz,  de  figure  triangulaire, 
«  et  les  costez  arcJiele%  en  dedans  en  hémicycles, 
«  faisans  trois  demi-rondes  enfonceures.  »  (.\lector, 
fol.  11,  V°.) 

2°  Dans  le  sens  de  canneler  :  «  Ronds  pilliers 
«  bien  arcclez,  et  tous  faits  à  feuillages,  selon  la 
«  mode  Lombarde.  »  (.1.  d'Aulon,  Annal,  de  Louis 
XII,  an.  1502,  p.  107.) 

VARIANTES  : 
ARCELER.  J.  d'Auton,  Annal,  de  Louis  XII,  p.  107. 
Arcmeler.  Alector,  fol.  11,  V». 

Arceure,  subst.  Arc,  cintre.  Pièces  de  menui- 
serie qui  entourent  les  meules  d'un  moulin.  Arc, 
portion  de  cercle.  Forme  arquée,  courbure  en  arc. 
Dans  le  premier  sens  on  a  dit  :  »  Quant  ilz  vindrent 
«  a  un  portail....  le  Roi  passa  devant....  et  veil 
«  escript  en  Varceure,  par  dessus  les  deux  huys. 
«  lettres  d'or.  »  (Percef.  Vol.  II,  fol.  120,  R-  col.  2.) 

Les  pièces  de  menuiserie  qui  entourent  les  meu- 
les d'un  moulin,  étant  nécessairement  courbées  en 


(1)  Mieux  écrit  arc-à-jalet.  Voir,  sur  les  arbatites,  le  résumé  donné  par  M.  Littré,  add.  au  1V«  vol.,  p.  2573,  2«  col.  (n.  e.) 


AR 


—  125  - 


AR 


arc,  on  en  aura  désigné  l'assemblage  par  le  mot 
arcure,  dans  une  pièce  de  vers  où  le  Poëtc  fait  une 
allusion  continuelle  de  la  vanterie  à  un  moulin 
à  vent. 

L'eureus  Wagons  a  encovent 

Qu'il  fera  un  molin  de  vent 

Or  nos  covient  faire  une  suele 

Ki  bien  puist  soustenir  le  muele 

Or  me  covient  faire  une  arcure 

De  celui  qui  a  mis  se  cure 

En  mentir,  très  cou  qu'il  lu  nés. 

Ane.  Pofl.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1351  et  1358. 

Il  paroit  qu'en  ces  vers,  arcure  est  de  même  signi- 
fication qn'archure.  (Voy.  Colgrave,  Dict.  —  Dict. 
des  .\rts  et  Sciences.  —  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  I, 
col.  04-2,  au  mot  Archeura.) 

On  sait  qu'en  Géoméliie  l'on  nomme  arc  toute 
portion  d'un  cercle.  Le  Zodiaque  est  un  grand  cercle 
de  la  sphère,  imaginé  par  les  Astronomes  et  divisé 
en  douze  portions.  Ainsi,  les  arcures  du  Zodiaque 
sont  les  portions  de  cercle,  les  arcs  qu'avant  Coper- 
nic on  faisoit  parcourir  au  Soleil,  en  lui  attribuant 
un  mouvement  relatif  à  l'ordre  des  signes  du 
Zodiaque.  «  Le  cler  Titan  (1)  passant  par  les  arcures 
■'  du  Zodiaque,  par-devant  la  maison  de  la  Vierge, 
<•  jettoit  son  regard  en  terre.  »  (J.  Le  Maire,  lUustr. 
des  Gaules,  liv.  i,  p.  78.) 

La  forme  d'un  beau  sourcil  étant  comparée  à  la 
courbure  d'un  arc,  on  a  dit  :  «  Considéra  l'ampli- 
«  tilde  et  spaciosité  de  son  cler  front  bien  arrondy, 
•<  V arcure  de  ses  sourciz  noirs,  etc.  »  (J.  Le  Maire, 
lllustr.  des  Gaules,  liv.  i,  p.  110.  —  (Voy.  Arcage.) 

VARIANTES  : 
ARCEURE.  Percef.  Vol.  II,  fol.  120,  R°  col.  2. 
Archure.  Cotgrave,  Dict.  —  Dict.  des  Arts  et  Sciences. 
Arcure.  Ane.  Poët.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1358. 

Archaïsme,  s!//^s^  maso.  Ancien  mot;  expres- 
sion ancienne.  Mot  ou  expression  de  l'ancienne 
Langue  françoise.  On  en  trouve  de  cette  espèce 
dans  les  Poésies  de  Malherbe.  La  dernière  Ode  qu'il 
ait  faite,  est  celle  où  il  y  a  moins  de  ces  expressions 
anciennes,  de  ces  anciens  mots,  que  Ménage  a  dési- 
gnés par  le  mot  archaïsme;  en  grec  a^xancfiis.  (Voy. 
Observ.  sur  les  Poës.  de  Malherbe,  liv.  ii,  p.  327. — 
Dict.  de  l'Acad.  Fr.) 

Archal,  subst.  masc.  Espèce  de  métal;  cuivre; 
laiton.  En  grec,  le  mot  composé  ÔQù^aXxoç  signi- 
fioit  œs  montanuni;  le  métal,  le  cuivre  qu'on  tire 
des  montagnes,  et  que  les  Latins,  à  l'imitation  des 
Grecs,  ont  nommé  oriclialcum.  C'est  d'après  une 
idée  dont  Vossius  indique  la  fausseté,  qu'à  cette 
orthographe  primitive  ils  préférèrent  celle  d'auri- 
chalcum,  contractée  dans  le  mot  françois  arkal  ou 
archal.  Ce  mot  étoit  de  même  significalion  que  le 
latin,  lorsqu'on  désignoit  une  monnoie  de  cuivre, 
une  horloge  faite  en  cuivre,  en  disant  monnoie 
d'archal,  horloge  à'arcluil,  etc. 

Je  me  gageroie 

Un  denier  d'argent  ou  d'archal, 
Se  Bertran  et  le  llaréclial,  etc. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  197,  R-  col.  2. 


.  .  .  .  Li  tramist,  se  jou  n'i  fal  (2), 
Uns  moult  rice  orloge  d'arkal. 

Ph  Mouskes,  MS.  p.  71. 

On  percevoit  au  profit  du  Roi,  en  1315,  un  péage 
de  deux  sols  dix  deniers  pour  cent  de  Varcha!  et  fil 
A' archal  trans;iorlé  depuis  le  lieu  où  la  Seine  se  jette 
dans  la  mer,  jusqu'au' Pont-de-l'Arche.  (Ord.  T.  I, 
p.  600.)  Le  cuivre  passé  par  la  filière  se  nomme  en- 
core fil  d'archal;  expression  dont  on  abuse  en 
l'étendant  au  fil  de  fer.  Quoique  les  éi/ingles  soient 
des  brins  de  fil  d'archal  ou  de  cuivre,  on  ne  diroit 
plus  aujourd'hui  : 

J'ai  bêles  espingues  d'argent  ; 

Si  en  ai  d'archal  ensement. 

Fabl.  MS.  de  S'  Geim,  fol.  42,  V'  col.  2. 

On  substitueroit  au  mot  archal  celui  de  laiton  ; 
espèce  de  cuivre  moins  jaune  peut-être  que  Varchal 
dont  le  laiton  paroit  avoir  été  distingué. 
J'ai  fsrmaiUez  (3)  d'archal  dorez, 
Et  de  laiton  sor  argentez. 

Fabl.  MS.  do  S-  Germ.  fol.  42.  R-  col.  3. 

VARI.\KTES  : 
ARCHAL.  Orth.  subsist.  -  Fabl.  MS.  de  S>  Germ.  fol.  42. 
Archail.  Cotgrave,  Dict. 

Archant.  Labbe,  Gloss.  lat.  fr.  au  mot  Aurichalcum. 
Archat.  Des  .\ccords,  bigarrures,  fol.  30,  R". 
.\rich.\l.  Bourgoing,  de  Orig.  Voc.  Vulg.  fol.  65,  V». 
Arkal.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  71. 

Archangle,  suhst.  masc.  Archange.  En  latin 
Archangelus.  (Voy.  Arche,  principauté.) 

Archarage,  subst.  masc.  Service  d'un  Archer. 
Ce  mot  qu'on  trouve  dans  les  titres  féodaux,  anté- 
rieurs à  la  cessalion  de  l'usage  de  l'arc  à  la  guerre, 
signifioit  le  droit  qu'avoit  un  Seigneur  d'exiger  d'un 
certain  nomb;  e  de  vassaux,  le  service  d'un  Archer. 
(Voy.  Borel,  Dict.  —  Dict.  de  Trévoux.) 

VARIANTES  : 
ARCHARAGE.  Borel,  Dict.  -  Dict.  de  Trévoux. 
.\rcair.\ge.  Dict.  de  Trévoux,  au  mot  Archarage. 
Archairage.  Borel,  Dict.  au  mot  Archarage. 
.Arquairage.  Id.  ibid.  —  Dict.  de  Trévoux,  iibi  supra. 
ARQUAiR-i^TGE.  Borel,  Dict.  abi  supra. 

Arche,  subst.  fém.  Arc  de  triomphe.  Arcade. 
Archipompe.  Coffre,  trésor,  archive.  Cellier  ;  cuve. 
Bâtiment  de  mer  ou  de  rivière. 

Anciennement  le  mot  arche,  dont  on  a  restreint 
l'acception  relative  à  l'idée  générale  de  courbure  en 
arc,  signifioit  arc  de  triomphe.  «  Oid  la  nuvele  que 

«  li  Reis ont  fait  voldru  une  arche  que  fust  signe 

«  e  demustrance  de  sa  victorie  e  de  sa  glorie.  » 
(Livres  des  Rois,  .ms.  des  Cordel.  fol.  19,  R°  col.  1.) 

Les  arches  }[ariennes  étoient  les  arcs  de  triomphe 
élevés  à  la  gloire  de  Marins.  ><  Ces  arches  avoient 
«  fait  détruire  les  Sénateurs;  mais  César  les  fist 
»  redresser  et  réparer.  »  (Triomphe  des  neuf  Preux, 
page  294,  col.  2.) 

De  là ,  l'expression  arche  triomphante ,  dans 
P.  Desroy(à  la  suite  de  Monstrelet,  fol.  118,  R°. — 
Voy.  Arc.) 

L'arcade  est  une  voûte  en  arc  comme  Varche  d'un 
pont.  Néanmoins  on  ne  diroit  plus,  en  parlant 


(1)  Le  Soleil,  petit-fils  de  Titan,  fils  d'Hypérion.  (x.  e.)  —  (2)  Si  je  no  m'y  trompe.  —  (3)  Espèce  d'agrafes. 


AR 


—  126  - 


AR 


d'édifices  en  général,  qu'ils  sont  faits  par  arches  et 
piles.  (Voy.  Mcol,  Dict.)  Il  semble  que  \  arche  d  un 
moulin  ctoit  res[)6ce  d'arcade  sous  laquelle  tourne 
la  roue  d'un  moulin  ii  eau.  »  Le  sault  du  moulin, 
«  restancbement  qui  porte  le  moulage,  soit  de  hois 
c<  ou  de  pierre;  Varche  du  moulin  la  maison  dont 
«  le  moulage  est  couvert,  etc.  »  (Boutedler,  Som. 
rur.  liv.  1,  lit.  Lxxiv,  p.  431.)  v       ,   • 

Dans  un  sens  qui  paroît  analogue  à  celui 
û-arccure,  archure,  le  mot  arche  signifioit  en 
termes  de  marine,  arcliipompe  ;  une  enceinte  de 
planches,  au  milieu  de  laquelle  les  pompes  d  un 
vaisseau  sont  élevées  :  «  une  clôture  faite  entour 
«  les  escoutilles  des  pompes  pour  les  garantir 
«  d'estre  heurtées.  »  (Cotgrave  et  Nicot,  Dict.  - 
Dict.  de  Marine.  —  Voy.  Akceure.) 

On  a  la  preuve  que  la  plupart  des  significations 
du  mot  arche  étoient  communes  au  mol  arc,  et  que 
par  comparaison  l'on  nommoit  arc,  un  lieu  voûte, 
un  enfoncement  fait  en  voûte  ou  en  cintre,  dans 
l'épaisseur  d'un  mur.  Anciennement,  les  lieux,  les 
bàlimens  faits  pour  lagarde  et  la  sûreté  des  trésors, 
des  titres,   et  autres  choses  qu'on    y  enfernioil, 
étoient  assez  généralement  voûtes  (1);  les  cotiies 
bombés,  etc.  Il  seroit  donc  possible  que  relative- 
ment à  l'idée  de  voûte,  de  courbure  en  arc,  on  eut 
désigné  par  le  mot  arche,  ces  coffres,  ces  lieux  ou 
ces  ijàtimens,  et  même  avec  extension  ceux  dont  a 
structure  ou  la  forme  n'avoit  rien  de  relalit  à    a 
figure  d'un  arc;  maison  trouvera  peut-être  celte 
conjecture  moins  fondée  que  celle  des  Etymologis- 
tes  qui  rapportent  à  l'idée  de  l'usage  de  1  arc  avec 
lequel  on  éloignoit  de  soi  l'ennemi  dont  on  craignoit 
d'être  approché,  cette  signification  générale  du  mol 
arche,  en  latin  arca,  dérivé  comme  arc,  en  latin 
arcus,  du  verbe  arcere,  en  franç.ois  éloigner.  Quoi 
qu'il  en  soit,  les  arches  à  garder  des  titres  et 
papiers,  des   trésors,  des   pierreries,  des   habits 
et  autres  choses  qu'on  vouloit  mettre  en  surele, 
étoient  des  coffres,  des  archives.  (\oy.  INicot  et 
Monet,  Dict.  -  Ord.  T.  III,  p.  437.- Valois,  notice, 
page  453,  col.  2.) 

D'une  Roi  ly  souvenoit  qui  tenoit  si  grands  marches 
Que  feist,  par  bel  sens,  taire  quatre  petites  arches... 
Pleines  furent  d'espices,  de  pierres  précieuses. 

Rom.  de  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  95. 

En  comparant  la  gloire  établie  sur  l'opinion  des 
hommes,  à  une  arche,  h  un  trésor  qui  n'est  pas  en 
sûreté,  l'on  a  dit  :  «  Celé  glore  est  vaine  ke  cil 

«  prennent  li  uns  de  l'atre 0  !  tu  fols  qui  el  sac 

«  parlusiet  (2)  assembles  tes  merz,  ki  ton  trésor 
«  estaulis,  cuides  ke  cesle  arche  soit  close  el  k  èle 
«  ait  serres  (3).  «  (S'  Bernard,  Serm.  fr.  ms.  p.  34.) 

Les  arches  des  Amans,  espèce  d'Officiers  déposi- 
taires des  actes  publics,  étoient  leurs  archives. 
«  N'emporte  hypothecque  l'obligation  passée  devant 


«  Notaire,  que  du  jour  qu'elle  est  mise  en  arche 
«  d'Amant.  "  (Coût,  de  Metz,  au  iiouv.  Coût.  gén. 
T.  II,  p.  399.  —  Voy.  Amman.) 

On  nommoil  arches  communes,  les  archives 
d'une  communauté,  d'une  ville,  le  lieu  où  sont  de- 
posés  les  titres  el  l'argent  des  villes  qui  sont  en 
communauté.  La  révolte  de  la  ville  de  Montpellier 
lui  fit  perdre  en  1379,  «  ses  Consuls,  Consulat, 
«  Maison,  Arches  communes,  et  cloches.  »  (Chron. 
S- Deny.s,  T.  m,  fol.  46,  Vo.) 

Les  archives  de  l'Ordre  de  S' Jean  de  Jérusalem 
à  Malte,  sont  les  Arches  de  la  Religion  dont  parle 
(Brantôme,  Cap.  Fr.  T.  IV,  p.  171.) 

On  sait  que  Varche  d'alliance,  en  latin  arca 
fœderis,  mots  qu'on  reconnoît  dans  l'ancienne 
expression  arce  fédri,  étoit  une  espèce  de  coffre. 
«  Uarce  fédri....  en  la  quelle  fu  la  verge  Aaron  et 
a  les  tables  del  Testament,  etc.  >>  (Chron.  d  Outre- 
mer, MS.  de  Berne,  ir  113,  fol.  166,  R"  col.  3.) 

Il  est  possible  qu'au  moyen  de  l'extension,  ou  de 
la  signification  générale  qu'on  vient  d  indiquer, 
l'on  ait  désigné  en  françois  par  le  mot  arche, 
comme  par  le  mol  arca  en  latin,  certains  meubles 
et  bàlimens  dans  lesquels  on  gardoit,  on  metloit  en 
sûreté,  autres  choses  que  des  trésors,  des  titres, 
des  habits.  On  soupçonne  même  que  le  mo\aiiche, 
comme  altération  d'arche,  peut  avoir  signifie  une 
espèce  de  cuve.  (Vov.  Borel,  Dict.)  Quoi  qu  il  en 
soit,  il  est  prouvé  qu'en  substituant  /  à  ?•  dans 
archa,  l'on  a  écrit  eu  latin  alcha  pour  arca.  Peut- 
être  qu'en  françois,  par  le  changement  de  r  en  n, 
l'on  aura  écrit  anche  pow  arche.  Il  paroitd  ailleurs 
que  dans  un  litre  de  1262,  ce  mol  anche  (4)  es  de 
même  signification  que  le  latin  alcha  dans  un  litre 
de  1253,  el  qu'ils  y  désignent  l'un  et  1  autre,  un 
cellier.  >■  Li  Abbés  et  li  Convens  ont  quitel  à  Martin 
«  une  anche  qui  siet  derier  sa  maison.  -  (D.  Car- 
pentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  rnot 
^^Iciia.  —  Id.  ibid.  aux  mots  Arca  et  Archa.  -  Voy. 
Anche  et  Anse.)  .  ^„ff„„  Aa 

Enfin,  il  semble  qu'on  ait  comparé  à  un  coffre  de 
forme  bombée,  l'espèce  de  bâtiment  de  mer  ou  de 
rivière,  qu'on  a  désigné  par  le  mol  arche,  sans 
égard  à  l'usage  qui  paroît  l'avoir  consacre  spéciale- 
ment à  signifier  Varche  de  Noé. 


Marchant  qui  par  la  mer  marche 

En  nef,  en  calane  ou  en  acc/te 

Percef.  Vol.  II,  fol.  84,  V-  col.  1. 

VARIANTES    :  ^      j   ,     r,jn 

ARCHE.  Orth.  subsist.  -  L.  des  Rois  MS.  des  Cordel.,  fo  19. 
Anche.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  de  Du  C.  au  mot  -ycha- 
Arce.  Chron.  (f  Outremer,  MS.  de  Berne,  n°  113,  fol.  166. 
Arque.  Borel,  Dict.  au  mot  Arche. 

Arche,  subst.  masc.  Principauté.  En  grec  dQxn, 
principatus  en  \alïn.  «  Macédoine  fut  jadis  nommée 
a  Emathie,  après  Emathion  qui  en  fut  le  P'emiei 
a  Roi      En  celle  région  étoit  une  arche  nommée 


<1)  On  trouve  ce  mode  de  conslruction 
signifierait  donc  coin  et  aurait  pour  diminutif  «ji^iOms.  (n.  e.) 


AR 


—  127  — 


AR 


«  Panlhome  où  régna  Thessalus.  »  (Hist.  des  neuf 
Preux,  p.  lOG.) 

Il  paroît  évident  que  dans  les  mots  composés 
Archangel,  Archiabbé,  Archediakene,  Archeprestre, 
Archite'cleur,  et  autres  dont  rénumération  seroit 
trop  longue  ;  la  signification  d'arche  el  archi ,  est 
analogue  à  celle  dii  mot  grec  «c/ôf,  en  latin  pr in- 
ceps.\es  idées  de  principauté,  de  primauté,  de 
supériorité,  de  maîtrise,  sont  tellement  liées  les 
unes  aux  autres,  qu'elles  forment  une  seule  et 
même  idée  générale  de  supériorité  qu'on  exprime 
en  nommant,  1°  Archangel,  Archangeles,  Archangle 
ou  Arcangle,  un  Ange  supérieur,  un  prince  des 
Anges.  (Voy.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  mss.  p.  2.  — 
FaiJl.  Ms.  du  R.  n°  7218,  fol.  58,  V°  col.  1.  —  Ane. 
Poët.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  806.  —  Chasse  de 
Gaston  Phébus,  ms.  p.  385,  etc.) 

Gantés,  Arcangles  S'  Mikieus, 

Devant  Dieu,  ma  cançon  nouvèle 

Soit  de  vous  mes  esprits  reçus, 
Qant  mors  li  taura  sa  cotele. 

Ane.  Poës.  Fr.  MS.  du  Valic.  n"  1490,  fol.  120,  R". 

2°  Archiabbé,  en  latin  Arcliiabbas,  un  Abbé  mili- 
taire, un  Abbé  laïque  (1)  qui  s'arrogeoit  la  supériorité 
sur  l'Abbé  ecclésiastique.  «  Les  Grands  et  Gens  de 
«  guerre  jouissans  des  abbayes,  non-seulement  se 
«  disoient  Abbez  ;  mais  aussi  Arcliiabbez-,  comme 
<•  qui  diroit  premiers  Abbez  et  commandans  aux 
«  autres,  pour  différence  d'avec  ceux  qui  faisoient 
»  lesfonclions.  »(Galland,duFranc-aleu,p.294-29C.) 

3°  Archediakene ,  en  latin  Archidiaconus ,  un 
Supérieur  ecclésiastique  à  qui  l'on  attribue  une 
espèce  de  juridiction  sur  les  cures  de  certaine  partie 
d'un  diocèse.  (Voy.  Archediakene.) 

4°  Archeprestre,  un  Prêtre  ou  Curé  supérieur  aux 
autres  Curés,  en  quelques  diocèses.  ;Y.  Archeprestre.) 

5°  Architecteur,  le  Supérieur,  le  Maître  des 
ouvriers  employés  ù  la  construction  d'un  bâtiment 
dont  rArchilecteur  ou  l'Arcbitecle  a  donné  les  plans 
et  les  dessins.  «  Commanda  venir  incontinent  mais- 
<>  très  ArchitecteiD's  pour  deviser  sa  sépulture.  » 
(D.  Florès  de  Grèce,  fol.  4i,  \'°.) 

Quel  que  soit  le  nombre  de  ces  mots  composés, 
tous  expriment  une  idée  de  supériorité  dans  les 
dilîérens  genres  que  désignent  les  mots  simples 
auxquels  arclie  et  archl  sont  réunis.  Il  y  a  une 
supériorité  malheureuse  que  l'on  condamne,  ou 
qu'on  ridiculise  en  nommant  archifripon,  archi- 
paresseux,  archifou,  archipédant,  un  homme  d'une 
friponnerie,  d'une  paresse,  d'une  folie  ou  d'une 
pédanterie  extrême.  L'usage  de  ces  mots  composés, 
auxquels  on  substitue  souvent  l'expression,  maitre 
fripon,  maitre  paresseux,  etc.  n'est  pas  nouveau 
dans  notre  langue,  et  paroit  remonter  au  w  siècle. 

Ai'chediakene,  subst.  masc.  Archidiacre.  Il  est 


si  ordinaire  aux  Langues  en  général,  de  substituer 
l'une  à  l'autre  les  lettres  consonnes  ?•  et  ?(,  qu'on 
trouve  naturel  qu'en  françois  on  ait  prononcé  et 
écrit  indifféremment  Diakne  ou  Dlahre  (2).  L'altéra- 
tion d'arche  et  archi  dans  le  mot  composé  Archedia- 
cre  ou  Arcliediakene,  en  latin  Archidiaconus,  est  le 
principe  évident  des  orthographes  Ercliidiakin, 
Arcediacre,  Accediakre,  etc.  On  a  la  preuve  que 
dans  la  latinité  du  moyen  âge,  on  contractoit  le  mot 
Archidiaconus  en  prononçant  et  écrivant  Archiaco- 
«»s;dans  le  langage  des  Bretons,  Archiago)!.  (Voy 
Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  643.) 

Quant  à  l'orthographe  .Issedjflcjr,  on  la  regarde- 
roit  comme  l'elTet  d'une  prononciation  commune 
aux  deux  ss  et  au  c  suivi  de  la  voyelle  e  dans  Acce- 
diakre, si  l'on  n'étoit  autorisé  à  croire  avec  Cotgrave, 
que  pour  ridiculiser  le  titre  d'Archidiacre  on  écrivoil 
Assediacre,  ou  Astiacre  comme  Henri  Estienne.  Cet 
Auteur,  après  avoir  parlé  de  l'indulgence  de  l'Archi- 
diacre du  Hardas,  pour  le  libertinage  des  Prêtres 
dont  il  analhématisoit  le  mariage  en  ces  termes, 
»  qu'à  tous  les  Diables  soyent  donnez  ces  vilains 
«  qui  se  marient,  veu  qu'on  leur  permet  de  paillar- 
«  der,  ajoute  ironiquement  ;  voilà  la  sentence  de  ce 
«  bon  Astiacre  ou  Archidiacre.  »  (Apologie  pour 
Hérodote,  p.  324.  —  Voy.  Cotgrave,  Dict.) 

Peut-être  que  l'expression  "  se  morver  en  Archi- 
»  diacre  »  est  une  satyre  de  la  grossièreté  indécente 
avec  laquelle  certains  Archidiacres,  dans  le  cours  de 
leurs  visites,  aunoncoient  leur  supériorité  (3).  Mais 
si  l'on  en  croit  Le  Duchat,  c'est  une  plaisanterie  que 
faisoit  Rabelais  sur  l'effet  physique  de  leur  embon- 
point, lorsqu'il  représentoit  Gargantua,  <•  crachant, 
"  toussant,  sanglotant,  esternuant,  se  morvant  en 
«  Archidiacre,  et  desjeunant  pour  abbatre  la  rosée 
«  et  mauvais  air.  »  (Voy.  Rabelais,  ï.  I,  p.  132.  — 
Id.  ibid.  note  de  Le  Duchat.) 

Il  est  possible  que  dans  le  temps  oh  les  Archi- 
diacres faisoient  en  toutes  saisons  leurs  visites  à 
cheval  et  même  à  pied,  on  se  soit  avisé  de  désigner 
un  homme  bien  croté,  en  disant  proverbialement 
qu'il  étoit  «  croté  en  Archidiacre.  »  (Voy.  Pasquier, 
Rech.  Liv.  vm,  p.  701.)  La  haine  a  fait  un  crime  à 
Pasquier  de  l'origine  de  ce  proverbe,  que  le  P. 
Garasse  regardoit  comme  une  plaisanterie  digne 
d'un  «  Huguenot,  »  d'un  «  tiercelet  de  Calvin,  » 
comme  une  profanation  du  mot  et  Office  des 
Archidiacres.  (Voy.  Garasse,  Rech.  des  Rech.  p.  838.) 

variantes  : 
ARCHEDIAKENE.  Duchesne ,  Histoire  généalogique  de  la 
Maison  de  Béthune,  p.  152,  titre  de  1257. 
AccEDiAKNE.  D.  Lobineau,  Hist.  de  Bret.  T.  II,  pr.  col.  409. 
Accediakre.  D.  Morice.Pr.  deTHist.  de  Bret.  T.  I,  col.  1003. 
Arcediacre.  Perard,  Rec.  de  pièces  p.  l'His.  de  Bourg,  p.  501. 
Arcediakene.  Ph.  Mouskes ,  MS.  p.  97. 
ARCHEDI.A.CRE.  D.  Touss.  du  Plessis,  Hist.  de  Meatix,  T.  II. 


(1)  On  pourrait  les  comparer  aux  laïques  qui,  au  ix=  siècle,  convoitaient  l'autorité  des  archidiacres  et  se  substituèrent 
aux  clercs.  Charlemagne  s'oppose  à  cet  envaliissement  dans  ses  capitulaires  ;  Orderic  Vital,  en  1066,  le  représente  comme 
habituel  ;  Innocpnt  III  s'en  plaint  encore  à  la  fin  du  xil'  siècle,  (n.  e.)  -  (2)  De  diac'nus :  de  même  tympanum,  devenu 
twnpniim,  a  donné  timbre;  co})hitnis,  devenu  coph'nus,  a  donné  coffre;  et  orrfi/iem,  devenu  Ofd'nem,  ordre.  {N.  E.)  — 
(à)  Les  archidiacres,  en  efîet,  dépouillèrent  les  évêques  de  leur  juridiction,  de  l'an  1000  à  1200,  et  devinrent  plus  passants 
que  leurs  chefs  spirituels,  (n.  e.) 


AR 


_  128  -  AR 


p.  64,  litre  de  1 177.  -  Test, .     n-,  du  O'  d'Alencon,  à  la  suite 
de  Joinville,  p.  1?5-  avantl300,X.  lV,p.l349. 

AssEDiACRE.  Cotgrave,  Dict 
É^^;;^;;^^^?^:?:t:i,Ï^'^.?oJ^o..  VU.  delcos. 

Arclielet,  subst.  masc  Petit  arc.  (Borel,  Dict.) 

Arohelettc,  subst.  fém.    Petite  arche.  Petit 
corne  On  t?ou?e  clans  Cotgrave,  Dict  ces  deux  s>gni- 

ficaluiiis  relatives  à  celles  du  mot  arche.  (Voy .  AncE.) 
AiThenrebstre,  subst.  masc.  Arcliipretre. 
Qudes^iue soient  lesorlhographes  diiïérenlesdece 
mot  el  esne  sont  rien  moinsquessenlielles;  pui.- 
Suno%ii  du /*  changé  en  t.,  et  du  i  supprime  dans 
TfZS>Ttre  (l),  en  latin  Archiprcsbyter,  se  forme 
fout  Su  e  en  eut  Torthographe  Archcprovoirc  ou 
aT^ î;  om'",  prononcé  quelquefois  Archcpvemie, 
en  substituant  'H  à  la  lettre  consonne  r.  ^\oy. 
'X^InS^^Q^'lePoëte,  auteur  d-una,K;ion 
Fab  au  inilulé  Confession  du  Renard,  songeoil  a 
Lvèn-'er  de  quelque  désagrément  personnel  qu  i 

lUrSouvé^  la  part  ^-^J^^f^^^^S^^ 
flP^io-noii  ràne  associé  au  renard  dans  un  p6ierina5,e 
fKr,  en  le  nommant  Bernard  lV4rc/-^.m|S^re  ou 

YArrhrmvoire  (Vov.  Fabl.  ms.  du  R.  n"  i2i8,  fol. 
48  et  4'  R»  col  1  )  li  seroit  possible  aussi  que  ce 
fût  une  uSusîin  salyrique  ù  rigaorance  des  bccle- 
ïasîiques  en  général,  dans  les  xu'  et  xi.r  siècles. 

VARIANTES    : 
ARCHipROVOiRE.  Ibid.  fol.  49,  R»  col.  1. 

Archer,  subst.  masc.  et  fém.  Qui  tire  de  l'arc. 
On  lîe  deffinoit  pas  toujours  un  homme  de  guerre 
de  iistice  ou  de  police,  lorsqu'en  général  on  nommoi 
jSer  celui  -  qui  tiroit  de  l'arc   qui  usoit  d  aie  et 
«  de  flèches.  »  (Voy.  Monet,  Dict.) 

Ki  voit  venir  son  anemin  corrant 
Por  traire  à  lui  grans  sietes  d  aicier, 
Bien  se  devroit  destorneir  en  fuiant, 
S'il  pooit  guerantir,  de  Vairchier. 

Chans.  Fr.  MS.  de  Berne,  n-  389,  pari.  I.  fol.  8U,  R  . 

Dans  le  Roman  de  la  Rose,  Vénus  irritée  contre 
Honte  ei  Raison,  constamment  opposées  au  bonheui 
de  V.Unant,  combat  pour  lui  avecl  arc  et  les  flèches 
de  l'Amour  : 

Puis  ainsi  comme  bonne  Archiere, 
Par  une  moult  petite  archiere 


nue  nature  eut  par  grant  maislrise 

Entre  deux  beauLx  Vi^lZ'ITi!se!l^^.m,-^.i^^O. 

Les  œillades  amoureuses  sont  '«^  "è'^'^^s  dont  on 

fpint  nu'Amour,  à  l'aide  de  son  arc,  blçbbe  nos 

Srs    Dt^Ui,  on  a  dit  l^.gurément  que    es  yeux 

^Zni    archers    de    cœur,    Archers    d'amours. 

!  Same  à  Damp  Abbez  et  Damp  Abbez  à  Madame, 

ès'STx  arc/-zms  de  cucur,  peu  à  peu  commen- 

<  rèrent  l'ung  des  cueurs  à  l'aultre  traire.....  Damp 

Abbez  qui  de  ceste  queste  nouvelle  esto.t  sur  tous 

leSs  ioveulx....  selieve....  et  revient  a  Madame 

et  de  iove  vis-à-vis  elle  se  siet.  Lors  recomman- 

:  cè.ïntleurs«rd</VrsdVnKOHrsplusforlatra,re.  » 

^'ïSS'of  âSi  en  France  l'usage  de  i;arc 
à  Ui  "ueïe  et  celui  de  l'arbalète,  les  Archers  for- 
.  îenune'c  les  Arbalétriers  une  ™>  '^«Jj  ^f^ 
cinni  uarlie  combaltoil  a  pied,  et  1  autie  sei\ou  ae 
Cavalerie  légère.  Le  Roi  Charles  VIll,  en  insutuan 
£  CompS^ies  d'Ordonnance  dont  chacune  fu 
romnosée  de  cent  Lances ,    c'est-a-dire   de  cent 
homSes  d'ames,  voulut  qu'à  leur  suite  ils  eussent 
Ses  l  Sm  à  dièval.  Ces  Archers,  les  mêmes  sans 
doui  aïe  ceux  à  qui  il  ordonna  de  loger  chacun 
aîeileïÏÏance  2),  étoient  probablement  les  Arcbers 
â'O  donnance.\.''Le  Roy  ordonna  que  les  A,j-rj;s 
„  logeroient  chacun  avec  leur  lance.  'M^Jall'ieu  de 
roucv  Hist.  de  Charles  Vil,  p.  610.)  ••  Des  Cent,  ae 
«"uerie  de  l'Ordonnance  du  Roy,  mourut  environ 
loTs  cens7rc/u.rs  de  ladite  Ordonnance  sans 
„  lés  Francs-archers.  »  (Chron.  scandai,  de  Loui. 

"^l^S-ard^^i  étoient  ainsi  nommés,  par  la 
ra'stn  qïfls  étoient  affranchis  Je  tout  subs.d  . 

tx   Lieux   faisans;  lesquels  enfin  esprouvez 

:  Snîexempts  de  la  taille,  ^.^^^^^^.^ 

„  rhpv       auand  1  seroit  question  d  aliei  pai  pays.^ 

Ces  -ens  pour  cette  exemption  et  la  sorte  d  armes 

nSe'p  us  communément  ils  manioient    furent 

ZlS!z  Francs-archers.  '^  ^^"-,f„  h.Î  "  for^ 
n  15  et  110  )  Cette  milice  des  Francs-arLhns,\oT 
p.  iij  ei  Y,,  ,.r;^  vil    vers  l'an  1448,  s'aguerrit  de 


opWé  au  chorèv^que   qull  -PP>-  ^„^^^y4°rchPprl?;le' on^^^^^^^  1.  plus  ?o-ent  avec  le  do,.nJ^^^ 
SurestafeTpfyll  ^Im^^en  tetpVdT^aîx^  feTfnstructeurs  éta.entdes  Suisses.  (N.  E.) 


AR 


—  129  — 


«  leur   service   celui    des   Adventuriers    et    des 
«  Puisses.  »  ^Voy.  Fauchât,  ubi  supra,  p  117  ) 

Il  paroît  qu-anciennement  les  Archers,  comme 
les  Archers  des  toutes,  étoient  OHiciers  de  la 
Vénerie  de  nos  Rois.  Dans  le  procès-verbal  des 
Coutumes  de  Vermandois,  il  est  fait  mention  d'un 
"  Jul  1^  v'^^n"^*  '  mesureur  du  greniei-  à  sel  de  la 
ville  de  Vaily,  seigneur  de  Toute-fille,  el  Archer 
•^des  toutes  du  Roy.  »  (Voy.  Coût.  gen.  T.  I,  p.  553  ) 

m-JlvT^v''  i^'^K'  '"'  ^^'y  etoitsans  doute  un 
Of  icier  de  1  espèce  des  Archers  placés  entre  «  les 
«  Louveliers  el  les  Vallels  à  chiens,  sur  les  estais 
«  des  Roys  Phihppes  III,  Philippes-le-Bel  et  Philippe  t 

Frî:i;iS'Sc.'p.'3SJ:)  '^'  '•"*^''  ''''■  '''  ^-'^^ 

Quoique  l'arc  ne  soit  plus  l'arme  des  hommes  qui 
accompagnent  les  Prévôts,  soit  pour  les  honorer 
SOI  pour  exécuter  quelque  ordre  relatif  ù  l'adminis- 
trafon  de  la  .îust.ce  ou  de  la  Police,  on  a  conli  ,é 
de  les  nommer  «Archers,  parce  que  les  Rois  et 
"  SiL""^^  souverains,  et  les  Prevosts  de  leurs  hos- 

mP^;,P  "l/n-^'f""  ''*?  '^"''=  personnes  ou  autre- 

{voT  Ni'cot^S.T  """  "  '""'  '''''''  ''''■  '• 

VARIANTES  : 
p.  1652  °''*^"  ^"^^-  ~  '^"''-  ^°^^-  '■'■•  ^'S-  av-  ^300,  t.  IV, 

AmcHiER.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne ,  n«  389,  part   I  fol  80    I 
Archier.  Lanc.  du  Lac,  T.  III,  fol   4   V»  col   '/      ' 
ARCIEK.  Hom.  d'Ale.xandre,  MS.  du  R.  n.  6987"'fùl   "01 
Archiere.  Hom.  de  la  Rose,  vers  19403. 

Archerer,  verbe.  Tirer  de  Parc,  chasser  à  Parc 
On  a  employé  ce  mot  pour  désigner  le  droit  de  chas- 
ser, dans  un  temps  où  Ton  chassoit  à  Parc  ■  «  droit 
^archerer  sur  une  terre,  »  le  droit  d'y  chasser  à 

â'ei.lxT  ^a"  ^''''V''  ^^  (-"-amesni^^dans  le   ir 
siècle,  (voy.  Arçoieb.) 

Archerie,  subst.  fém.  Action  de  tirer  de  Parc 

On  peut  voir  quels  etoient  les  «  dix  enseignements 
dumestierd'^rc/^cm,  »  dans  Modus  et  Racio   îi 

dthf^T^l'^^'  ^'?^  traitoit  de  l'exercice  de  Parc 
etoient  des  livres  ù'Arclœrle.  (Voy.  Modus  et  Racb' 

Enfin  un  lieu  propre  à  l'exercice  de  Parc  était  une 
Archerie.  (Voy.  Cotgrave,  dict.) 

/v;^^'A***^*■*'*',f"^^'■  "''*«^-  Diminutif  d'Archer 
(Voy.  ARCHEH.-Voy.  Oudin  elNicot.Dict.)  Nos  poètes 
çonservoient  à  PAmour  son  arc  et  ses  11  Ses 
lorsqu'ils  le  nommoient  Archerot  ' 


AR 


■  .  .  D'un  nain,  d'un  bastard,  d'un  Archcrol  ssnq  vo,,^ 
Font,  non  un  Dieutelet,  ains  un  maistre  des  Dièux^ 

vp^*'*^'^*^f'  ^"^'^*-  ""^«^'-  Coffret  ;  trésor.  On  obser- 
vera que  les  acceptions  encore  usitées  de  ce  mot 
«r^/;^ï  sont  relatives  à  l'idée  de  la  couilure  d'un 
rc  I  est  possible  que  relalivement .',  la  mêmeidéS 
lait  signifie  colTrel,  trésor,  comme  arche  si<  nifoit 

K'r/'S  ^e'.^T^  ^'^-^  Q"«'  "" '•  ^"  «oit  '^oÛt 
uueiiet  û&  sa  riche  aumo  re   ..  o'éloit  en  sfvi 
poétique  du  xvr  siècle,  «  ouvrir  les  trésors    p  S 
«  esprit,  de  son  imagination.  V  ^  ^^" 

Abbé  d'Auton  et  maistre  Jehan  le  Maire 
Ouvrez  Varchel  de  votre  riche  aumaire^'  '  '  ' 
Lt  composez  quelque  plaincte  sommaire  etc 

et  J<  •  Mv""'  delïcndons  marchepier  à  Var. 
"fhet  etc.  »  Mais,  en  rapprochant  cette  défense  riP 
celle  faite  aux  Pécheurs  par  Part  xlvh  d'imp  Orll 
iiance  de  Charles  VI,  en  clatc  du  mo  s  de  ma'rs  m 
e  re,  eree  par  l'art,  lxxh  d'une  autre  0  do  ,S 
en  dale  du  mois  de  septembre  1402,  on  acnuiért  h 
preuve  évidente  qu'au  lieu  de  ..  niàrcle  S  Xi 


Heureux  ceux-là  qui  dans  les  retz  surpris 
De  1  A  rchcrot,  filz  de  la  Cithérée,  ^ 

i-euvent  donner  par  leur  plume  dorée, 
A  leurs  moitiez,  des  plus  belles  le  prix. 

Poés.  de  J.  Taliureau,  p,  d06. 

(1>  C'est  le  diminutif  d'arcAe  :  il  en  a  tous  les  sens.  (n.  e.) 


Ai-chiabbé,  suhst.  masc.  Premier  Abbé  En  la. 
tni  Archmbbas.  (Voy.  Arce,  au  sensde  piSncip^mté.) 

Archie,  subst.  fém.  et  masc.  Portée  d'arc  L'es- 
pace que  parcourt  une  fièche  lancée  avec  un  w 
;  Il  estoienl  à  deus  archks  de  nos,  dev  ni  Baruth  »' 
OV  artene,  Ampl.  Coll.  contin.  de  G.  de  Tyr  TV  col 

J  '■  ■\''"  partent  Lancelot  et  le  Nayn  en  une  forest 

istt^'^sT^^'^r  '^'"'^■-  "  ^'""""^ 

.  .  .  Fut  ensus  de  la  rivière, 
Ausi  comme  une  archie  entière. 

G-  Guiarl,  MS.  fol.  279  V- 

Cest  probablement  pour  le  besoin  de  la  mesure 

La  seconde  bataille  vient 

Qui  trois  arcMers  de  front  tient 

Gace  de  la  Signe,  des  Déduits,  ilS.  fol.  57,  R- 
Devant  la  porte  a  une  place 
Qui  tient  deux  archiez  d'espace 

G.  Machaul,  prise  d'Alexandrie,  MS.  fol.  225,  V"  col.  1. 
A  tant  sont  les  os  aprociés 
Assez,  à  mains  de  deux  arciés. 

ri'-  Mouskes,  MS.  p.  181. 

Si  l'on  avoit  la  preuve  que,  dans  la  signification 
Aarchoier,on  eût  dit  archier  pour  lirn  eSc 
on  pourrait  croire  que  l'orthographe  archier  alté- 
rée peu  -être  dans  archie.  étoît  un  verbe  qui'  pis 
busbtantivement,  signilioil  portée  d'un  trait  d'arc 
blemPnf'nn'"f  f  "'  «''^"«''■«Phe  «r.ft/.r  est  v  i-' 
blemei  t  une  faute  pour  archiée,  dans  la  citation 

Ô';'''ï  -n'   '  Tr  '"  ''■*  ^"'■'^^f'  '"*  et  ses  cômpSf- 
«  gnons.  Quand  ilzsontentrez  dedans,  unearchien: 


4T 


ÂR 


—  130  — 


ÂR 


«  siliève  entour  eulxungcry.  -  (Une.  du  Lac,  T.  Il, 
fol.  10,  Y"  col.  '2.  -  Voy.  Auchiee.) 

VARIANTES  : 
\RCiK   Ph.  Mouskes,  Mb.  p.  181. 

s      .      .  'eS  lîastué  une  «rd.e.    que,  etc.  . 

(Llnc.duLac,T.l,fol.l41,V"col.l.) 

Près  des  rens,  à  mains  d'une  avchwe, 

Si  comme  on  ma  fait  entendant, 

se  vont  les  François  estendant.^^  ^^^  ^^^  ^. 

VARIANTES  : 
ARCHIÉE  G.  Guiart  MS   ff-^^^i  f °.      ^^^  .^ 
Archée.  Lanc.  au  Lac,  i.  .i,  lui.  i-**! 


*     i»:»,.*.    <:)y//s/    fcm.  Espèce  de  meurtrière, 
Arcluere,  ««^f -^f '^'^'^  ,  d^^^^  le  premier  sens, 

l^^L'S;Jn?dèrn,ur^.  (Cl.ro,..  de  Sa,,,lDe„,s, 

T   1,  fol.  "207,  Y°.) 

Aux  archieres  de  la  tour 
Sont  arbalestres^tout^entour.  ^^^^  ^^^^  ^^  ^^^^ 

On  a  dit  en  parlant  de  la  mort  : 

Elle  est  tout  ausi  en  agait, 

Probablement,  le  mot  archiere  signifioil  voûte, 
Dorte  à  V archiere. 

Archif  subst.  masc.  et  fém.  Chartrier;  dépôt 
nnbUc   11  V  a  différentes  opinions  sur  1  etymologie 

tj'ii  pst  de  même  origine  que  le  mol  arcne,  c  est  pai 
L  ml.  irrS'o"  que  tous  deux  ont  signi^iie  coffre^ 

mSarchifve,    coffres  à   tenir   papiers.    (Voy. 

^Tu'iennement,  on  écrivoit  ard»/'  pour  archives 
.  tdonnoTèn  mandement  à  nos  amez  et  féaux 
t  P^ràndSeneschal  de  Provence,  Gensdenostre 
:  Conse^royàrMaistres  rationaux  et  Archivaires 
:  §e  nos  re  Chambre  et  Archif  d'Aix,  etc.  »  (Gpde- 
frnv  Observ.  sur  l'ilist.  de  Charles  Ylll,  p.  ^39 
Uorthograihe  archil  n'est  sans  doute  qu'une  alté- 


ration de  l'orthographe  archi  .  "  Si  ne  puis-je  tiou- 
!  ver  desduelz  Roys  ilz  furent  faictz  Contes  ne  Ba- 
rons ne  par  les  livres  et  caterves  de  l'ardu/,  ne 
:  de  ?à  seJlie  de  Naples,  où  se  souloient  trouver 
„  tous  les  faicts  dudit  Royaume.  »  (La  Salade, 
fol.  45,  Y"  col.  2.) 

VARIANTES  : 
ARCHIF.  Godefroy ,  Observ.  sur  rHist.  de  Charles  \  Ill,p.  530. 
AncHiL.  La  Salade,  fol.  45,  V  col.  2. 
f.S;vE"MénSè,'obs.  sur  la  Lang.  Fr.  part.  II,  p.  412. 

Architecteur,  subst.  masc.  Architecte.  (Voy. 

Arche,  principauté.) 

Architectonique,  subst.  (^m.  Architecture. 
L'art  de  l'Architecte,  en  grec  «e^^r.xro,».  «  Meca- 
«  nique...  esloil  suivie  par  Agricultuie,  Chasse, 
„  PeSerie,  Navigation,  Marchandise,  ^yOitecto- 
:  «îgSÎ  et  Laniflce.  ..  (Les  triomphes  de  la  Noble 
Dame,  fol.  5,  Y°.) 

Archivaire,  subst.  masc.  Garde  des  archives. 
(Voy.  Archif.) 

Arcipoles,  subst.  masc.  Il  semble  qu'on  ait  dé- 
sioi^é  le  pouvoir  de  Cupidon  arme  de  son  arc,  en  le 
Simanr^rc/i;o/es, 'peut-être   du    latin  aveu 

pollens. 

Arcipoles  tient  un  arch  taint  en  gramne. 
Dont  si  doit  tret  qu'un  coer  perce  parmi    , 
Et  ce  sont  ceuls  quOiseuse  ou  vregier  mainne. 
Dont  portier  sont^le_sJ^  Mercuru.^^^  ^^^_  ^. 


Arcoier,  verbe.  Tirer  de  l'arc,  chasser  ù  1  arc, 
se  courber  en  arc,  plier.  (Voy.  Arçonner.) 
On  disoit  au  premier  sens  : 

Un  jour  ala  li  Dus  kacier 
En  sa  foriest  et  arcouer.  .,<.  „  oju 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  oa*. 

Or  devroie-jou  rivoiier 
Et  par  mes  foriès  arcotiei: 

Id.  ibid.  p.  227. 
Pc  ornnc;  fnrès  aloient  arcoier  et  berser. 
''\^om.  Awr?,  mI.  du  R.  u-  6987.  fol.  201,  R'  col.  3. 

Dans  le  second  sens  : 

Lances  ont  droites  que  ne  ploient  ; 

Ne  si  ne  traignent,  "e  ,f^-t"7'^!-v.  col.  1. 

Les  lances  grosses  si  roidoient 

Que  sans  brisier  toutes^«rcfto,e»>^ ^,  ^^  ^ 

VARIANTES   : 
ARCOIER.  Athis,  MS.  fol.  107   R«  col.  2 
ARcnoiER.  Anseis,  Mb.  fol- 2'- R°  ^ol.  1. 
Arçouer.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  iîl. 

Arçon,  subst.  masc.  Arc.  Archet.  Demi-cercle; 

^'£^f^!sem&Sment  pour  la  rin;e  et  la  me- 
sure des  vers  qu'au  lieu  d'arc  on  ecrivoit  arçon. 

Commande  à  prendre  au  garçon 
Ses  sajetes  et  son  arçon 


AR 


—  131  — 


AR 


Si  me  vault  miex  ainsi  attendre 
Que  rompre  mon  arsoit  au  tendre. 

G.  Machaut,  Poés.  MSS.  fol.  181.  V  col.  2. 

La  signification  de  ce  mot  arçon  éloit  la  même 
que  celle  d'archet,  lorsqu'on  disoit  traire  Yarçon 
pour  se  préparer  à  jouer  du  violon  ;  traire  de  \'arço7i 
pour  jouer  de  ce  même  instrument. 

Es-vous  Nichole  au  peron, 
Trait  viele.  trait  arçon  : 
Or  dist  par  là  sa  raison.... 
Plàiroit  vous  oir  un  son 
D'Aucassin  un  fran  Baron  ? 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7689,  fol.  80,  R*  col.  1. 

Devant  que  aucuns  di.x  ou  neuf 
M'eust  donné  por  mon  chanter. 
Je  me  porroie  bien  vanter  : 
James  de  cliar  ne  mangeroie  ; 
Quar  certes  je  ne  troveroie 
Qui  tel  présent  me  vousist  fere, 
Tant  seusse  bien  d'arçon  trere. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7-218,  fol.  176,  R-  col.  1. 

Quelle  que  soit  la  ressemblance  de  l'archet  de 
violon  avec  l'arc,  on  en  désignoit  une  encore  plus 
sensible  en  nommant  arço)ts  ou  archons,  les  demi- 
cercles  qui  forment  le  tomberel  ou  la  tonnelle,  es- 
pèce de  filet  à  prendre  les  perdrix.  «  Les  archons... 
«  y  sont  mis  que  la  rois  (1)  court  par  dessus,  quand 
«  on  la  tire  ;  et  sont  de  ia  moitié  de  deux  cercles 
«  de  tonnel,  affin  que  la  rois  coure  plus  souef  par 
«  dessus.  »  (Modus  et  Racio,  .ms.  fol  178,  Y".) 

C'est  relativement  à  la  même  idée  de  ressem- 
blance qu'arfo»  auroit  pu  signifier  en  général  chose 
courbée  en  arc,  comme  une  petite  arcade,  dans  le 
Dictionnaire  de  Monnet  ;  le  dessus  de  nos  anciens 
chars  bombés  en  forme  de  fourgon,  etc. 

Fort  sunt  les  roes,  et  bien  fait  li  limon  ; 
D'ebenus  sunt  deseure  li  archoii  ; 
De  fin  argent  fu  cleés  environ. 

Enseis,  MS.  fol.  59,  R'  col.  1. 

II  s'estent  si  qu'il  fait  croistre  et  brisier 
Les  flans  del  car,  et  les  arçons  brisier. 

Ibid.  fol.63,  R-col.  1, 

L'acception  à  laquelle  on  a  restreint  l'usage  de 
ce  mot  arçon,  arçon  de  selle,  est  ancienne  dans  notre 
Langue  (2). 

Par  desor  son  archon  devant 
Le  porte  outre  l'iaue  courant. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7989,  fol.  210,  V  col.  1. 

Par  opposition  à  Yarçon  devant,  on  disoit  arçon 
derrier  ou  daerrain.  (Voy.  Rom.  d'Alexandre,  ms. 
du  R.  ir  6987,  fol.  181,  R°  col.  2.  —  Ibid.  fol.  206.) 

VARIANTKS  : 
ARÇOX.  Ort.  subs.  -  Cotgrave.Borel,  Nicot  et  Monet.Dict. 
Archon.  Anseis,  MS.  fol.  21,  R"  col.  1. 
Arson'.  Modus  et  Racio,  impr.  fol.  87,  R». 

Arçoner,  verbe.  Se  courber  en  arc,  plier.  Affer- 
mir, rendre  stable. 

On  a  vu  qn'arçon  signifioit  arc.  De  là,  le  verbe 
arçoner  de  même  signification  qnarçoier,  se  cour- 
ber en  arc,  plier.  «  Les  lances  furent  fortes,  et  point 


«  ne  brisèrent  ;  mais  arconnèrent.  »  (Froissart, 
Vol.  IV,  p.  44.) 

Les  lances  ploient  et  arçonenl. 

Rom.  de  Clygcl,  MS.  du  R.  n'  6987,  fol.  277,  R'  col.  4. 

11  est  possible  que  relativement  à  l'idée  d'un 
Cavalier  arçonné,  c'est-à-dire,  ferme  entre  les 
arçons,  le  verbe  arçonner  ait  signifié  affermir, 
rendre  stable.  Au  reste,  on  n'a  queCotgrave  pour 
garant  de  cette  acception,  bien  moins  ancienne  que 
la  première. 

VARI.\NTES    : 
ARÇONER.  Rom.  de  Perceval,  MS.  de  B.,  n"  3.54,  fol.  268. 
Arçon.ner.  Froissart,  Vol.  IV,  p.  4i.  —  Cotgrave,  Dict. 

Arçonneur,  subst.  masc.  En  termes  de  Chape- 
lier, Yarçon  est  un  instrument  fait  en  archet  de 
violon ,  long  de  cinq  à  six  pieds  et  garni  d'une 
corde,  avec  lequel  on  fait  voler  la  laine?  On  trouve 
dans  l'ancien  usage  de  cet  instrument  pour  la  pré- 
paration des  laines,  la  raison  pour  lai|uelie  l'ouvrier 
qui  les  préparoit,  se  nommoit  Arçonneur  (?>).  (Voy. 
Du  Cange,  Gloss.  lat.  T.  l,  col.  668.) 

Arçonnenx,  Adj.  Qui  s'attache  et  tient  aux 
arçons  d'une  selle.  On  a  dit  en  ce  sens,  malctte  ar- 
çonneuse.  (Voy.  Cotgrave,  Dict.) 

Arçonnier,  adj.  Qui  garnit  et  orne  les  arçons 
d'une  selle.  Signification  analogue  à  celle  à'arçon- 
neux,  dont  l'adjectif  arçonnier  ne  ditféroit  que  par 
la  terminaison  ,  et  l'usage  qu'on  en  faisoit  lors- 
qu'avec  ellipse  d'un  substantif  féminin,  on  désignoit 
une  chose  attachée  comme  ornement  aux  arçons 
d'une  selle,  en  la  nommant  arçonnière.  «  Trois 
"  selles,  l'une  de  coursier  garnie  de  soye  à  parer 
«  Xq?:  arçonnières...  et  en  chacun  cuigne't  desdites 
«  arçonnières  un  Angelot  d'ivire.  »  (Extraits  des  Reg. 
du  Très,  des  Chartes,  p.  H. — Voy.  Du  Cange,  Gloss. 
lat.  T.  VI,  col.  1361.  —  Cotgrave,  Dict.) 

Arct,  part.  Astreint,  obligé.  Dans  un  sens  relatif 
à  celui  de  l'adjectif  latin  arctus,  et  du  participe 
arctatus,  on  a  dit  figurémcnt  :  «  Est  tenus  per  tout 
«  le  Court  que  tenant  in  laile  ne  serra  arct  d'al- 
«  turncr,  etc.  »  (Tenures  de  Littleton,  fol.  128,  R" 
—  Voy.  Arcté.) 

Arcté,  part.  Étréci,  resserré.  En  latin  arctatus. 
«  Est  le  collège  des  Carmes  plus  noble  que  cil  de 
«  Laon  ;  et  ont  ceux  de  Laon  grand  lieu  et  espacieux, 
«  et  les  Carmes  petit  et  arcté,  et  si  ne  se  puet  ac- 
»  croistre.  »  (Félibien,  Hist.  de  Paris,  preuv.  T.  II, 
p.  510  ;  lit.  de  1386.  —  Voy.  Arct.) 

Artlamment,  adv.  (Voy.  Ardent  et  Ardentement.) 
On  subslituoit  g  h  d,  comme  dans  la  formation  des 
substantifs  et  verbes  françois  manger,  en  latin, 
mandere  ;  ronger,  en  latin,  rodere  ;  orge,  en  latin, 
ordeum  ;  ardille,  en  latin,  argilla,  etc.  lorsqu'on 
prononçoit  et  écrivoit  arge  pour  arde,  en  latin, 
ardent;  argant  ponr  ardant,  argamment  pour  ar- 


(1)  de  rete,  relis.  —  (2)  On  le  trouve  même  dans  la  Chanson  de  Roland  sous  la  forme  arçuns  (vers  1229,  1534)  :  «  Pleine 
sa  hanste  l'abat  mort  des  arçuns.  »  (N.  E.)  -  (3)  On  lit  au  registre  du  Trésor  des  Chartes  ,IJ.  154,  p.  443:  «  Ledit  Guillaume 
decoppa  par  grand  despit  à  Cyrot  arçonneur  la  corde  de  son  arçon.  »  (n.  e.) 


AR 


—  d32 


AR 


dammenl(l).  La  signification  de  cet  adverbe  est  figu- 
rée dans  ces  vers  : 

Cuers  qi  anjanment 

Aime,  ne  doit  refuser  q'il  n'olrie 
La  volenlé,  tant  cou  soit  aconpUe, 
De  sa  Dame  haut  et  bas  plainement. 

Ane.  VoH.  fr.  MS.  du  Vatican,  n-  U90,  fol.  443,  V'. 

VARIANTES    : 
ARDAMMENT.  Cotgrave,  R.  Estienne  et  Nicot,  Dict. 
Ardamm.vnt.  Monet,  Dict. 
Arganment.  Ane.  Poës.  Fr.  MS.  du  Vat.,  n»  1490,  fol.  143. 

Ai'dant,  part.,  adj.  et  sub&t.  Qui  brûle,  qui  est 
en  llamme,  qui  est  en  feu.  Qui  est  de  nature  l^  brû- 
ler, à  s'eullammer,  à  prendre  feu.  Qui  brûle,  qui 
enflamme,  qui  fait  prendre  feu.  Qui  est  couleur  de 
feu. 

On  a  désigné  l'état  passif  d'un  corps  qui  brûle, 
qui  est  en  flamme,  qui  est  en  feu,  en  disant  qu'il 
éloit  ardent  en  (eu,  ou  tout  simplement  qu'il  éioit 

ardent.  «  Esloient villes,  villaiges,  chasteaulx, 

«  forteresses,  champs  et  forests,  toutes  ardentes  en 
.<  feu.  »  (Rabelais,  T.  V,  p.  184.) 

11  semble  que  pour  le  peuple  ce  soit  un  besoin 
d'imaginer  des  prodiges  qui  annoncent  la  mort  des 
hommes  extraordinaires  qu'il  a  détestés  ou  aimés 
durant  leur  vie.  Que  peu  de  temps  avant  celle  de 
Cbarlemagne,  un  pont  de  bois  s'en  vienne  argant, 
c'est-à-dire,  qu'il  soit  brûlé  par  un  accident  dont  on 
ignore  la  cause,  cet  accident  présage  la  mort  de  ce 
Prince. 

Or  oéz  com  Karles  fu  dignes. 
Et  quels  miracles  et  quels  signes 
Devant  sa  mort  flst  nostre  Sire. 


.  .  .  Uns  pons  k'il  ot  fait  de  fust 
A  Maience,  ù  il  mit  sept  ans, 
Quar  il  ert  Ions  et  haus  et  grans, 
S'en  vint  artjunt  par  la  rivière  ; 
Si  ne  sot  on  par  quel  manière. 

Ph.  Muuslics,  MS.  p.  303. 

Dans  ces  vers,  la  signification  du  participe  argant, 
altération  visible  de  l'orthographe  ardant,  est  la 
même  ([ue  celle  de  l'expression  ardent  en  feu. 
(\'oy.  Ardam.me.nt.) 

Il  y  avoit  déjà  longtemps  que  l'humanité  récla- 
moit  en  vain  le  secours  de  la  îfédecine  contre  l'es- 
pèce de  maladie  épidémique  et  pestilentielle  qui, 
sous  les  noms  de  feu  Sacré  et  de  feu  S'-Antoine,  a 
désolé  la  France  à  plusieurs  reprises  ('2j  ;  lorsqu'avec 
celui  de  la  Foi,  les  ArdeMs,  c'est-a-dire  les  Malades 
qui  étoient  brûlés  de  ce  feu,  obtinrent  de  S"'-Gene- 
viève,  vers  l'an  1130,  une  guérison  surnaturelle, 
par  un  miracle  dont  on  a  perpétué  la  mémoire  en 
le  nommani  miracle  de  S"-Geneviève  des  Ardens. 
La  même  maladie,  ou  une  toute  semblable,  s'étant 
renouvelée  en  1374,  on  l'appela  le  mal  des  Ardens. 
(Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  671  et  672.  — 
Ménage,  Dict.  Etym.  —  Dict.  de  Trévoux.) 


On  a  nommé  enu  ardant  et  vin  ardant  (3),  l'esprit 
de  vin  et  l'eau-de-vie,  comme  étant  de  nature  à 
brûler,  à  s'enflammer,  à  prendre  feu.  (Voy.  Cotgrave, 
Dict.)  Charles-le-Mauvais,  Roi  de  Navarre,  pour  ra- 
nimer en  lui  la  chaleur  naturelle  amortie  par  l'âge, 
faisoit  meilre  une  bucine  d'œrain  dans  son  lit,  avec 
laquelle  on  lui  «  souflloit,  à  air  volant,  eau  ardant.  » 
Mais  cette  façon  de  le  réchauffer  lui  fut  fatale  un 
jour,  «  ainsi  que  Dieu  ou  les  Diables  le  vouloyent  : 
"  car  flamme  ardant  se  bouta  en  son  licl,  entre  ses 
«  linceux,  par  telle  manière  qu'on  n'y  peut  oncques 
<i  venir  à  temps,  ne  lui  secourir,  qu'il  ne  fust  tout 
•■  ars,  jusques  à  la  boudiné;....  Ne  Cirurgien,  ne 
«  Médecin,  n'y  purent  oncques  remédier  qu'il  n'en 
«  mourust.  »  (Froissart,  Vol.  111,  p.  275.) 

C'est  encore  à  raison  de  la  nature  inflammable 
de  ces  météores,  de  ces  exhalaisons,  de  ces  feux 
folets  qui  s'élèvent  et  paroissent  à  la  surface  des 
lieux  marécageux,  qu'ils  ont  été  désignés  par  l'ad- 
jectif ou  participe  ardent  pris  substantivement, 
comme  dans  l'expression  mal  des  Ardens. 

Qtiebiue  générale  que  soit  aujourd'hui  l'acception 
figurée  de  l'adjectif  ardent,  qui  peint  l'homme 
comme  étant  de  nature  à  brûler,  à  s'enflammer,  à 
prendre  feu,  à  la  vue  des  objets  qui  affectent  son 
âme  et  réchauffent,  on  ne  diroit  plus  en  parlant 
d'une  femme  qui  seroit  de  nature  à  brûler,  à  s'en- 
flammer d'un  amour  illégilime,  qu'elle  est  ardente. 
Il  semble  ([ue  ce  soit  là  signification  d'argans  en 
ces  vers  : 

Quant  li  Dame  est  iière  et  argans, 

Ses  cuers  devient  ausi  cangeans 

Com  li  faucons  qui  par  orguel 

Ne  daigne  nis  veir  de  l'oel 

Cel  oisel  ù  on  l'a  rué. 

Puisque  feme  s'en  vait  au  cange, 

Sen  cuer  met  en  un  lieu  estrange, 

Ne  daigne  aler  à  son  oisel  ; 

Ains  s'asiet  sour  un  Damoisel,  etc. 

Ane.  Poét.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  13-25. 

On  exprimoit  l'idée  d'un  feu  qui  brûle  et  enflamme 
l'objet  sur  lequel  il  agit,  lorstiu'en  faisant  l'éloge 
d'une  femme  on  disoit  : 

Vos  douçours  est  la  fontenele 
Qui  sourt  sous  la  plaisant  gravele, 
Qui  rent  talent  as  maladieus. 
Les  mors  cuers  pereceus  et  viens 
Esprendés  â'argitDt  eslincele. 

Ane.  Poès.  fr.  MS.  du  Valic.  n-  li90,  fol.  120,  R'. 

L'effet  des  passions  étant  comparé  à  celui  d'un 
feu  qui  brûle  et  enflamme,  on  ditfigurément  que  la 
colère  est  ardente,  que  l'amour  est  ardent,  etc. 

.  .  .  Feme  qui  done,  art  et  enflame 
D'orjajis  amours  :  car  j'ai  oï  retraire,  etc. 

Ane.  Poes.  fr.  MS.  du  Vatican,  n-  1490,  fol.  157.  R*. 

Enfin,  une  soye  ardente  étoit  une  soye  couleur 
de  feu.  (Voy.  Extr.  des  Reg.  du  Très,  des  Ch.,  p.  12.) 

Jaune,  vert,  sort,  ardani  et  perse. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  345,  V'. 


(1)  C'est  mêler  des  phénomènes  phonétiques  bien  différents:  manger  vient  de  maiiducare,  devenu  mand'carre  ;  ronger 
vient  de  rumigare  (ruminer  dans  Apulée),  devenu  rum'gare;  ardille,  comme  ^irdillon,  rf-monte  à  l'ancien  français  harde, 
bâton,  et,  comme  hart,  est  d'origine  celtique  ou  germanique;  orge,  arge  et  argant  rentrent  seuls  dans  la  même  ciitégorie  ; 
ils  viennent  de  liordium,  ardiat,  ardiantem,  et  le  g  est  amené  par  le  i,  deveuu  consonne.  (N.  E.)  —  (2)  Elle  paraît  avoir  été 
une  sorte  d'érysipèle  gangreneux,  (n.  e.)  —  (3)  De  nos  jours  encore,  les  paysans  bas-bretons  l'appellent  giuin  ardant,  vin 
ardent,  (n.  E.) 


AR 


—  133  — 


AR 


VARIANTES  : 

ARDANT.  Fabl.  MS.  du  R.  n°  7615,  fol.  188,  V»  col.  1. 
Ardent.  Orth.  sub.  —  Rabelais,  T.  V,  p.  184. 
Argans.  Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  av.  1300,  T.  IV,  p.  1325. 
Argant.  Ane.  Poës.  Fr.  MS.  du  V.,  n»  1490,  fol.  120,  R». 

Ardéeur,  subst.  masc.  Brûleur,  incendiaire. 
Anciennement,  les  incendiaires,  les  brûleurs  de 
maisons  se  nommoient  Ardéeitrs  de  maisons,  et 
tout  simplement  Ardéeurs.  (Voy.  Ord.  T.  I,  p.  288. 
—  Rymer,  T.  I,  part,  ii,  p.  13;  tit.  de  1256,  etc.) 

VARIANTES   : 
ARDÉEUR.  Ord.  T.  I,  p.  228. 
Ardeor.  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Reauvoisis. 
Ardeur.  D.  Carp.  suppl.  Gl.  lat.  de  Du  C.  T.  I,  col.  284. 
Ardour.  Rymer,  T.  I,  part,  ii,  p.  13,  tit.  de  1256. 

Ardenteiuent,    adverbe.   Ardemment.    (Voy. 

Ardamme.nt.) 

Tant  il  alla  et  tant  il  en  revint, 
Qu'ardeiiteinent  amoureux  II  devint. 

Clém.  Marot,  p.  2i5. 

Arder,  verbe.  Brûler.  Briller.  Rougir. 

La  signilication  propre  et  figurée  de  l'ancien 
verbe  arder,  ardoir,  ou  ardre,  en  latin,  ardere, 
éloit  passive,  lorsque  dans  le  sens  neutre  du  verbe 

brûler,  on  disoit  :  «  Il  virent ces  grans  rues 

«  mareheandes  ardoir  en  feu.  »  (Villehardouin, 
page  81.; 

....  Fut  pour  n)-rf/-eau  feu  livré, 

Quant  par  pluye  fut  délivré. 

Qui  le  grand  feu  fist  tost  esteindre. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  6851-6853. 

Li  uns  le  juge  à  escorchier, 
Et  l'autre  le  juge  à  noier. 
Et  ii  tier  à  arder  en  cendre. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7615,  fol.  I8i,  R"  col.  2. 

.  .  .  Ii  fèvre  qui  toz  jors  s'arcleiil, 
Et  qui  moult  poi  sont  à  sejor  ; 
Ce  qu'il  ont  gaaignié  le  jor 
Despendent  largement  et  bien. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  --218,  fol.  198,  R-  col.  1. 

C'est  relativement  à  l'usage  de  comparer  les  pas- 
sions à  un  feu  dont  on  brûle,  qu'on  a  dit  :  «  Mieulx 
"  vauU  mariage  que  ardoir  au  feu  de  luxure.  » 
(Chron.  S'  Denys,  T.  I,  fol.  271,  R°.) 

.  .  .  Quant  plus  air  et  espran, 
Plus  seu.x  joious  ;  et  si  di. 
Madame  et  Amors  merci. 

Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  n'  389,  pari.  Il,  fol.  55,  R'. 

Quant  li  Rois  l'ot,  si  a  tel  raige, 
Avis  11  est  que  de  duel  arye. 

Fabl.  MS.  de  S-  Germ.  fol.  60,  R-  col  I. 

Il  a  tel  doel,  a  poi  qu'il  n'art. 

Siège  de  Tliébes,  MS.  du  R.  n"  6987,  fol.  65,  V  col.  *. 

On  disoit  dans  le  sens  actif  du  même  verbe  brû- 
ler :  «  Ceaus  qui  son  pople  courrecoient  arst  tôt  en 
«  feu.  "  (Livres  des  Rois,  ms.  des  Cordel.  fol.  158.) 
«  Cil  de  Sepharnaum  arstrent  lur  fiz  en  l'onurance 
«  Adramalech.  »  (Ibid.  fol.  143,  R-  col.  2.) 

.  .  .  Pria  que  son  corps  ardisse?!?, 
Sitost  comme  ardoir  ils  le  puissent. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  6811  et  6812. 

Se  ce  pourpris  ne  puis  garder, 
Tout  vif  me  puisse  l'en  arder. 

Ibid.  vers  3824  et  3825. 


Le  maxfex  m'arâe  à  froide  cendre, 
Se  jà  me  font  à  mari  prandre,  etc. 

Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  150.  R-  ool.  2. 

Au  figuré  : 

Amours  art,  amours  point  ;  amours  esprent  trop  fort  ; 
Amours,  sans  deffiance,  a  maint  preudome  mort. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7615,  fol.  138.  V. 

Toute  princesse  en  qui  prudence  habite, 
Aymé  vertu,  de  vice  se  désiste  ; 
Justice  tient,  charité  son  cueur  ard. 
i.  Marot,  p.  78. 

Ce  même  verbe,  pris  substantivement,  a  signifié 
l'action  de  brûler,  d'incendier,  le  crime  d'un  incen- 
diaire. «  Es  cas  de  rapt,  de  murdre,  de  traïson,  de 
»  ardoir,  et  de  larrecein,  etc.  »  (Ord.  T.  IIl,  p.  361. 
—  Voy.  Ardéeur.) 

En  termes  de  science  hermétique,  la  signification 
de  brûler  est  la  même  que  celle  de  l'ancien  verbe 
arder,  cuire.  »  Faisoient  fondre,  ardoient  et  affi- 
«  noient  leur  suif.  ..  (Ord.  T.  III,  p.  6'»0.)  On  dési- 
gnoit  alors  un  effet  de  l'activité  du  feu,  comme 
lorsqu'en  parlant  du  feu  du  soleil  qui  brûle,  qui 
dessèche  la  terre  et  la  rend  aride,  on  disoit  :  «  Le 
«  soleil....  hasle  toutes  les  routes  et  ar^,  eschauffe 
«  la  terre  et  oste  Tumeur.  »  (Chasse  de  Gaston 
Phébus,  MS.  p.  22i.)  «  Aux  champs  il  n'a  point 
«  d'ombre;  ainçoys  a  le  soleil  arse  la  terre.  »  (Id. 
ibid.  p.  226.  —  Voy.  Ardant.) 

C'est  relativement  à  l'idée  de  la  couleur  brillante 
et  rouge  d'un  corps  qui  brûle,  d'un  corps  enllammé, 
que  par  comparaison  l'on  a  dit,  l"  dans  le  sens  de 
briller  : 

....  Tout  aussi  comme  l'or  art 

Et  flamboie  sus  touz  métaus 

Que  l'on  vent  et  livre  à  detaus,  etc. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  290,  V. 

2°  Dans  le  sens  de  rougir,  être  rouge  de  honte  : 

Anseis  l'ot  ;  de  honte  art  com  un  fu. 

Auscis,  MS.  fol.  61,  R»  col.  1. 

CONJllG. 

Air,  ind.  prés.  Je  brûle.  (Chans.  Fr.  hs.  de  B.) 
Airt,  ind.  prés.  Il  brûle.  (Ibid.  fol.  G2,  V°.) 
Ar  {]),  ind.  prés.  Je  brûle.  (R.  Est.  Gr.  Fr.  p.  64.) 
Arce,  pari.  Brûlée.  (Fabl.  ms.  du  R.  fol.  60.) 
Arch,  ind.  prés.  Je  brûle.  (H.  de  Job.  fol.  168.) 
Ard,  ind.  prés.  Il  brûle.  (R.  Est.  Gr.  Fr.  p.  64.) 
Ard,  participe.  Brûlé.  (Id.  ibid.) 
Arde,  subj.  prés.  Qu'il  brûle.  (Rom.  de  la  Rose.) 
Ardent,  ind.  prés.  Brûlent.  (Rom.  de  la  Rose.) 
Ardent,  part.  Brûlant.  (Rabelais,  T.  V,  p.  184.) 
Ardèrent,  ind.  prêt.  Brûlèrent.  (Siège  de  Troye, 

Ms.  du  R.  n°  6987,  fol.  108,  R»  col.  1.) 
Ardez-,  ind.  prés.  Vous  brûlez.  (R.  Est.  Gr.  Fr.) 
Ardi  (j'),  indic.  prêter.  ,Ic  brûlai.  (Id.  ibid.) 
Ardi,  ind.  prêt.  Brûla.  (Villehardouin,  p.  101.) 
Ardirent,  ind.  prêt.  Brûlèrent.  (R.  Est.  Gr.  Fr.) 
Ardismes,  ind.  prêt.  Brûlâmes.  (R.  Est.  Gr.  Fr.) 
Ardis,  ind.  prêt.  Tu  brûlas.  (Id.  ibid.) 
Ai-dissent,  subj.  imp.  Brûlassent.  (R.  de  la  Rose.) 
Ardist,  subj.  imp.  Brûlât.  (Les  Marg.  de  la  Marg. 

fol.  178,  V°.) 
Ardistes,  ind.  prêt.  Vous  brûlâtes.  (R.  Est.  Gr.  Fr.) 
Ardit,  indic.  prêter.  Brûla.  (Id.  ibid.) 


AR 


—  13i  - 


iLX 


Ardnns,  ind.  prés.  Nous  brûlons.  (R.  Est.  Gr.  Fr.) 
Ardirnt,  ind.  prêt.  Brûlèrent.  (Villeliard.  p.  195.) 
Ards,  parlicipe.  Brûlé.  (Rabelais,  T.  III,  p.  '268.) 
Ardij,  ind.  prêt.  Brûla.  (Poës.  de  Molinet,  p.  159.) 
Avgc,  subj.  prés.  Qu'il  brûle  ;  en  latin  ardent.  — 
Fabl.  Ms.  de  S'  Germ.  l'ol.  G3.j 
.1rs,  ind.  prés.  Tu  brûles.  {R.  Est.  Gr.  Fr.  p.  64.) 
Ars,  participe.  Brûlé.  (Id.  ibid.) 
Arsent,  ind.  prêt.  Brûlèrent.  (Pli.  Mousk.  p.  482.) 
Arsimes,  ind.  prêt.  Brûlâmes.  (Livres  des  Rois, 
MS.  des  Cordel.  fol.  39,  R"  col.  2.) 
.'l)'s/,s,  ind.  prêt.  Tu  brûlas.  (Dit  de  Cbarité.) 
Arsisent,  subj.imp.  Brûlassent. (Ch.  d'Outremer.) 
Arsist,  subj.  imp.  Brûlât.  (Fabl.  ms.  du  R.) 
Arsse,  parlicipe.  Brûlée  (G.  Guiart,  ms.  fol.  92.) 
Arst,  ind.  prêt.  Brûla.  (Livres  des  Rois.) 
Arstrcnt,  ind.  prêt.  Brûlèrent.  (Livres  des  Rois.) 
.4)-/,  ind.  prés.  Brûle.  (Modus  et  Racio,  fol.  200.) 
Art,  ind.  prêt.  Brûla.  (Livres  des  Rois.) 
Art,  subj.  prés.  Qu'il  ])rùle.  (Siège  de  Troye.) 
Astrcnt,  ind.  prêt.  Brûlèrent.  (Livres  de  Rois.) 
Il  existe  entre  les  terminaisons  de  l'infinitif  des 
verbes  françois  et  la  formation  des  autres  modes  et 
temps,    une    règle    générale    d'analogie,    d'après 
laquelle  on  juge  que  relativement  à  la  terminaison 
fln/cr,  on  a  formé  l'indicatif  prétéi'itard^'reH^;  rela- 
tivement à  la  terminaison  rt)'rfn%  l'indicatif  présent, 
ar,  ars,  ard  ou  art;  relativement  aux  terminaisons 
ardre  et  ardoir,  l'indicatif  prétérit,   ardi,  ardis, 
ardit,  ardi&mes,  ardistes,  ardirent  et  le  subjonctif 
imparfait  ardist,  ardissent.  On  recoiinoit  au  pre- 
mier coup-d'œil  les  modes  et  temps  dont  la  forma- 
tion est  également  analogue  aux  différentes  termi- 
naisons de  l'infinitif,  ardre,  ardoir  o\i  arder.  Quant 
à  ceux  qui  paroissent  exactement  imitatifs  de  modes 
et  temps  latins,  tels  que  l'indicatif  prétérit  arst  ou 
art,  en  latin  arsit;  arsimes,  en  latin  arsiinus; 
arstrent,  par  contraction  arsent,  en  latin  arserunt, 
on   pourroit  les  regarder  comme  une  preuve  de 
l'existence  de  rinfinîtif  arsir,  et  dire  que  les  modes 
et  temps  de  cette  espèce,  comme    le  subjonctif 
imparfait  arsist  et  arsîsent,  le  participe  ars  ou 
arsis,  appartenoient  à  la  conjugaison  de  l'ancien 
verbe  arsir.  (Voy.  Arser.) 


ARDER.  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7615,  fol.  18i,  R»  col.  2. 
Ardoir.  S'  Bern.  Serra,  fr.  MSS.  p.  76  et  372. 
Ardre.  Rom.  de  la  Rose,  vers  6851. 

Ardeur,  subst.  fém.  (Voy.  Ardeure.)  Ardeur  du 
feu.  Quoique  la  signification  propre,  comparative 
et  figurée  d'ardeur,  ait  toujours  été  la  même, 
depuis  que  ce  mot  existe  dans  la  Langue,  il  semble 
qu'en  parlant  d'un  buisson  ardent,  on  ne  diroit 
plus  dans  le  sens  propre  : 

Il  sembloit  qu'il  arsist;  n'niv/oc  ne  le  raehaigne. 
Je  vueil,  dist  Moyses,  veoir  la  vision, 
Comment  c'est  qu'il  me  samble  qu'il  art  sans  arsion. 
Dils  et  iMoralités,  MS.  de  Gaignal,  fol.  298,  col.  1. 

Au  figuré,  en  parlant  du  feu  de  la  colère  : 

Karles  l'entent,  s'en  ot  ire  et  ardor. 

Anseis,  MS.  fol.  68,  V-  col.  2. 


VARIANTES  : 
ARDEUR.  Orth.  subsist. 
Ardor.  Dits  et  Moralités,  MS.  de  Gaign-it,  fol.  298. 

Ardeure ,  subst.  fém.  (Voy.  Ardeur.)  Effet  de 
l'ardeur  du  feu.  Ardeur  des  passions. 

La  signification  de  ce  mol  ardure  éloit  la  même 
que  celle  de  brûlure,  effet  de  l'ardeur  du  feu,  lors- 
qu'on parlant  de  la  pierre  magnétique  pulvérisée, 
on  a  dit  : 

La  puldre  est  bone  sur  ardure, 
Et  sur  toute  eschaldeure. 

Marbodus.de  Gemrais.  art.  XIX,  col.  1656. 

Au  figuré,  et  par  extension  de  l'idée  particulière 
du  mal  occasionné  par  l'ardeur  du  feu,  à  l'idée 
générale  d'un  mal  physique  ou  moral  occasionné 
par  le  tourment  de  la  faim,  de  la  crainte,  de 
l'amour,  etc. 

....  Se  li  sièges  auques  dure, 
Test  auroient  de  fain  ardure. 

Atliis,  MS.  fol.  89,  R-  col.  1. 

Oiez  par  quel  bonne  aventure 
Dex  les  garda  de  ceste  ardure. 

Ibid.  fol.  81,  R-  col.  1. 
Quant  Amours  m'a  ce  commandé 

.Te  luy  ay  adono  demandé 

Comment  vit  homme  et  comment  dure 
En  telle  paine,  en  telle  ardure  '? 

Rom.  de  la  Rose,  vers  2610-2617. 

En  comparant  à  l'activité,  à  l'ardeur  du  feu.  celle 
des  passions,  on  disoit  figurément  et  dans  le  sens 
de  notre  mot  ardeur,  qu'un  cheval  plein  de  feu, 
étoit  de  grant  ardure;  qu'un  homme  ardent  au 
combat  s'y  mettoit  par  ardure;  qu'une  femme 
brûlant  d'amour  séchoit  û'ardure,  etc.  {Voy.  Fabl. 
MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  193.  R°  col.  1.  —  G.  Guiart,  ms. 
fol.  350,  R"  etc.) 

Si  com  Echo  qui  sert  de  recorder 

Se  qu'autre  dit  :  et  par  sa  sorcuidance 

Ne  la  daigna  Narcissus  regarder  : 

Aiiis  sécha  toute  de  ardeure, 

Fors  de  la  voix  qui  encores  li  dure  ; 

Aussi  perdrai  tout  fors  merci  crier, 

Et  sécherai  de  dueil  et  de  pesance. 

Fauchcl,  Lang.  et  Poês.  Fr.  p.  U3. 

VARIANTES    : 
ARDEURE.  Fauchet,  Lang.  et  Poës.  Fr.  p.  143. 
AiUDURE.  Chans.  Fr.  MS.  de  B.,  part.  II,  fol.  4. 
Ardure.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  3. 

Ardi,  subst  mnsc.  Liard.  On  s'est  trompé  en 
croyant  que  //  ardis  ou  li  hardis  étoient  inconnus 
avant  le  règne  de  Louis  XI.  La  fausseté  de  cette  opi- 
nion est  prouvée  par  deux  titres  latins,  l'un  de  1409 
et  l'autre  de  1410,  cités  par  Du  Gange,  (Gloss.  lat.  au 
mot  Ardicus  ;)  et  par  deux  titres  en  françois,  l'un  de 
1417  et  l'autre  de  1451,  cités  par  son  Continuateur. 
«  Le  suppliant  fist  bailler  au  tavernier  sept  hardiz-, 
«  etc  »  (D.Carpentier,  Sup.  Gloss.  lat.  deDu  Gange, 
T.  I,  col.  285;  lit.  de  1417.)  «  Sera  levé  pour  nous 
«  en  la  ville...  le  droit  de  l'asize,  qui  y  est  acous- 
«  tumé  de  lever,  c'est  assavoir  de  soixante  hardiz, 
«  ung.  "  (Id.  ibid.  tit.  de  1451.) 

Le  cours  de  cette  monnoie,  antérieur  au  règne 
de  Louis  XI,  auroit  commencé  sous  celui  de  Philippe- 
la-Uardi,  s'il  étoit  vrai  qu'on  l'eût  ainsi  nommé, 
parce  que  ce  Prince  fut  le  premier  qui  en  ordonna 


AR 


—  135  — 


AR 


la  fabrication.  Probablement  la  ressemblance  du 
nom  de  celte  monnoie  avec  le  surnom  de  Phi- 
lippe m,  est  la  seule  raison  qu'on  ait  eu  de  croire 
qu'il  avoit  fait  frapper  les  premiers  hardis  ou  ardis; 
puisqu'afiu  de  pouvoir  en  attribuer  la  fabrication  à 
Richard  I,  roi  d'Angleterre,  comme  à  Philippe,  roi 
de  France,  on  a  supposé  que  tous  deux  avoient  eu 
le  surnom  de  Hardi.  On  sait  que  Richard  fut  sur- 
nommé C(i'ur-de-Lion,  surnom  qui  atteste  la  har- 
diesse de  son  courage,  sans  justifier  la  prétendue 
origine  de  la  dénomination  des  ardis  ou  hardis. 

Lorsqu'on  a  la  preuve  que  dans  le  moyen  âge 
l'expression  latine  argentum  arsum,  par  une  com- 
paraison relative  à  la  couleur  noire  d'une  chose 
arse,  signifioit  monnoie  de  billon,  monnoie  de  cui- 
vre, autrement  monnoie  noire,  eu  latiu  argentum 
niyrum  ;  il  paroit  bien  plus  raisonnable  de  penser 
que  les  ardis  étant  une  monnoie  noire,  une  mon- 
noie de  billon,  une  monnoie  de  cuivre,  on  l'aura 
désignée  par  un  mot  qui,  à  la  terminaison  près, 
semble  être  le  même  que  ard  ou  ars,  en  latin  arsiis  (1  ). 
En  elfet,  les  pièces  de  monnoie  nommées  en 
Guienne  et  en  d'autres  Provinces  méridionales,  H 
ardis,  étoieut  les  mêmes  que  dans  le  Daupbiné  et 
les  Provinces  en-deyà  de  la  Loire,  on  nommoit 
liurds,  en  réunissant  l'article  pluriel  H  au  participe 
ards  employé  comme  substantif.  (Voy.  Lurd.) 

Les  Ordonnances  de  l'ûO  et  l'i73,  qu'on  trouve 
manuscrites  en  léte  de  l'ancienne  Coutume  de  Nor- 
mandie, envers,  (fol.  17,  V°  et  18)  et  une  autre 
Ordonnance  du  16  février  1485,  citée  par  Du  Gange 
(Gloss.  lat.  T.  IV,  col.  928),  concernant  le  cours  des 
Monnoies,  fixent  à  trois  deniers  pièce,  la  valeur  des 
liards  et  hardis.  «  Cette  monnoie  qui  valoit  trois 
«  deniers,  et  qui  par  conséquent  partageoit  le  sol 
«  en  quatre,  éloit  appelée  hardi  en  Guyenne,  et 
«  liarden  Daufmé  et  dans  les  autres  provinces  qui 
"  sont  en  deçà  de  la  Loire.  »  (Le  Blanc,  Tiaité  des 
Monnoies,  p.  250.)  Peut-être  rapportoit-on  au  sur- 
nom de  Pbilippe-le-//fl)'rf?,  l'origine  de  la  dénomi- 
nation de  cette  monnoie  en  écrivant  hardis,  pour 
ardis.  (Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  673,  au 
mol  Ardicus.  —  Id.  ibid.  col.  686,  au  moi  Argen- 
liini.) 

VABIAKTES  : 
AUDI.  Du  Caiige,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  673. 
Ardic.  Id.  ibid. 
Ardid.  Cotgrave,  Dict. 
Ardit.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  723. 
H.\RDi.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  073. 
H.\RDY.  Des  Accords,  Bigarrures,  fol.  60  R". 

Ardilier,  subst.  masc.  Buisson  de  ronces  et 
d'épines.  Le  substantif  ardilier  (2),  formé  du  verbe 
ahcrdre  (|ue  par  contraction  l'on  écrivoil  ardre, 
comme  dans  les  Poës.  de  Geoffroi  de  Paris,  à  la 
suite  du  Rom.  de  Fauvel,  (ms.  du  R.  n"  6812,  fol.  50, 
R°  col.  3,)  désigne  en  îNormandie  un  buisson  de 
ronces  et  d'épines;  peut-être  parce  qu'en  voulant 


passer  à  travers,  on  accroche,  on  ah.ert.  (Voy.  Da 
Gange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  673,  au  mol  Ardillaria. 
Ce  mot  latin  ardillaria,  qu'on  a  cru  de  même  ori- 
gine et  même  acception  que  le  franyois  ardilier, 
étant  formé  de  ardilha,  en  francois  ardille  pour 
argille,  signifioit  argillière.  (Voy.  D.  Carpentier, 
Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  T.  I,  col.  285,  au 
mot  Ardilha.) 

Ardille,  snhst  (ém.  Argile. En  latin  argilla,  que 
dans  le  moyen  âge  on  écrfvoit  ardilha,  en  substi- 
tuant d  à  g,  comme  dans  le  francois  ardille  (3)  et 
ardrille.  «  Les  Cerfs....  se  brunissent  leurs  testes, 
«  les  uns  aux  Charbonnières,  les  autres  en  Vardille, 
«  en  terre  rouge.  »  (Fouilloux,  Vén.  fol.  18.)  C'est 
par  le  changement  de  la  lettre  dentale  en  la  sif- 
flante s,  changement  commun  à  toutes  les  Langues, 
qu'on  a  prononcé  et  écrit  arsille  pour  ardille. 
«  Rompirent  la  paray  qui  estoit  d'arsille,  d'entre 
«  deux  coulombes,  pour  osier,  etc  (D.  Carpentier, 
Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  T.  L  col.  285,  au 
mol  Ardilha.  —  Voy.  Arcuil.) 

VARIANTES    : 
ARDILLE.  Fouilloux,  Vén.  fol.  18,  V°. 
Ardille.  D.  Carp.  S.  Gl.  1.  de  D.  C.  au  mot  Ardilha. 
Arsille.  Id.  ibid.  tit.  de  t397. 

Ardilier,  t'erftf?.  Enduire  d'argile.  (Voy.  Cotgrave, 
Dict.) 

Ardillier,  adj.  Argilleux.  On  a  dit  en  ce  sens, 
terre  ardilliere.  (Voy.  Golgrave,  Dict.) 

VARIANTES  '. 
ARDILLER.  Cotgrave,  Dict.  au  mot  Ardilier. 
Ardiller.  Id.  Ibid.  —  Médecines  des  Clievaux,  p.  4. 
Ai\DRiLLOux.  D.  Carp.  S.  Gl.  1.  de  D.  C.  à  .Ardilha. 

Ardillon,  subst.  mase.  (Voy.  Ardiuer.)  Ce  mot 
qui  subsiste  est  ancien  dans  notre  Langue  et  peut- 
être  aussi  ancien  que  le  verbe  aherdre,  aerdre  ou 
ardre  dont  Gaseneuve  l'a  cru  formé.  Cette  origine, 
à  laquelle  on  en  oppose  plusieurs  autres  indi- 
quées dans  le  Dict.  Elym.  de  Ménage,  semblera 
peut-être  d'autant  plus  naturelle  qu'aherdre  signifie 
l'usage  de  Vardillon  d'une  boucle,  de  la  boucle 
d'une  ceinlure  de  Moine. 

Si  a  lo  Ardeillon  trové; 
Moult  fieremant  l'a  atachié  : 
Puis  est  arrière  repairié.... 
A  ses  compaignons  a  conté 
Cernant  lo  moine  avoit  pendu 
A  la  hart  o  li  bacons  (4)  fu. 

Fabl.  MS.  de  Berne,  n-  354,  fol.  142,  R-  col.  1. 

D'ailleurs,  lorsqu'on  sait  qu'en  certaines  pro- 
vinces, le  Peuple  prononce  f/afd;7/o»  \>ouv  ardillon, 
il  ne  paroit  pas  moins  naturel  de  croire  qu'ardillon 
est  le  diminutif  de  dard,  comme  dardillon  un  peu 
altéré  dans  l'orthographe  usitée,  par  la  suppression 
de  la  première  lettre. 

VARIANTES  : 
ARDILLON.  Orlh.  subsist. 
Ardeillon.  Fabl.  MS.  de  Bou.  n»  354,  fol.  142. 


(1)  On  peut  considérer  en  effet  arditus  comme  une  forme  intensive  de  arsiis.  Comme  ce  mot  était  surfont  employé  au 
midi  de  la  Loire  (limousin  ordi)  et  en  Espagne  (ardite),  on  a  aussi  proposé  la  racine  basque  ardila.  (n.  e.)  —  (2)  Ce  mot  a 
la  même  ori;jine  que  ardillon,  c'est-à-dire  l'ancien  français  arde,  avec  le  suffixe  urius,  crius.  (N.  e.)  —  (3)  C'est  encore  ainsi 
que  se  prononce  le  mot  uigile  en  Berry  ;  n'indique-t-eUe  pas  qu'à  l'origine  le  y  se  prononçait  dj,  puis  di  ?  (n.  e.)  -  (4)  lard. 


AR 


—  136  — 


AR 


Ardoise,  suhst.  fém.  Pierre  bleue  et  fossile. 
On  liltjue  r;elte  pierre,  inconnue  aux  Anciens,  a  été 
nommôe  ardoise,  en  latin  ardesia,  ou  lapis  arde- 
sius,  later  ardesius,  parce  que  les  premières  ardoi- 
ses ont  été  tirées  d'Ardes  en  Irlande.  «  C'est  du 
a  nom  de  ce  pays,  en  latin  Ardesia,  que  cette 

«  pierre transportée  dans   toute  l'Europe  fut 

«  appelée  lapis  ardesius,  later  ardesius,  ardesia  ; 
«  d'oîi  nous  avons  fait  notre  mot  ardoise.  »  (Mé- 
nage, Dict.  Elym.)  Au  reste,  il  y  a  sur  l'origine  de 
cette  dénomination,  différentes  opinions  qu'on  peut 
voir  ibid.  au  mot  Ardoise  (1). 

Ardoiser,  verbe.  Couvrir  d'ardoise.  (Voy.  Cot- 
grave,  Dict.)  De  là,  l'expression  clocher  ardoisé. 
(Epith.de  M.  delà  Porte.) 

Ardoiseux,  adj.  Qui  est  en  ardoise.  (Voy.  Cot- 
grave,  Dict.) 

Ardoizin,  adj.  Qui  est  d'ardoise.  On  a  dit  en  ce 
sens,  pierre  ardoizine.  (Voy.  Rabelais,  T.  Il,  p.  24i.) 

Ardu,  adj.  Haut,  sublime,  difficile.  C'est  l'ad- 
jectif latin  arduus,  francisé  par  nos  Auteurs  du 
.XVI' siècle,  qui  désignoient  figurémenl  et  par  compa- 
raison la  hauteur  et  la  sublimité  des  choses,  et  par 
conséquent  la  difficulté  d'y  atteindre,  la  difficulté 
de  parvenir  à  les  comprendre  et  à  les  connoitre,  en 
disant  qu'elles  étoient  ardues. 

Nobles  espritz,  arduz,  scientificques, 
Que  songez-vous,  où  avez -vous  esté  ? 

F.iifeu,  p.  1. 
Tes  poincts  sont  grans,  tes  mètres  mesurez, 
Tes  dits  tous  d'or,  tes  termes  azurez, 
Voire  si  hauts  et  ardus,  à  tout  prendre. 
Que  mon  esprit  travaille  à  les  comprendre. 

Clém.  Marot,  p.  157  et  158. 

Les  sciences,  lesconnoissances  auxquelles  il  étoit 
difficile  d'atteindre,  étoient  desconnoissauces,  des 
sciences  ardues.  «  C'est  une  si'ience  divine  et  bien 
«  ardue,  que  de  scavoir  jouir  loyalement  de  son 
«  eslre.  «(Sagesse  de  Charron,  p.  314.)  «  Quelle 
«  chose  peut  eslre  plus  ardue  et  grave,  qu'en  si 
«  grande  dissimililude  d'amans  et  d'amantes  pou- 
«  voir  discerner  tiuelle  est  la  figure  espèce  de 
«  la  vraye  et  parfaite  amour.  »  (L'Amant  ressusc. 
p.  79.)  Ce  mot,  dont  M.  Dubois  alfecloit  l'usage,  a 
vieilli  dès  le  xtu'  siècle.  (Voy.  Longueruana,  T.  I, 
p.  95.) 

Arduité,  subst.  fém.  Difficulté.  On  a  dit  figuré- 
menl :  »  L'Empereur  ayant  considéré  Varduité  de 
«  son  entreprise,  etc.  »  (Du  Bellay,  Mém.  liv.  X, 
fol.  334.  —  Voyez  Ardu.) 

Are,  adj.  Aride,  sec,  desséché.  Qui  rend  aride, 
qui  dessèche. 

Ce  mot  are  ou  aire,  formé  par  contraction  du 
latin  aridus,  signifioil  aride,  sec,  desséché.   «  Le 

«  pays  de  Champaigue est  si  ayre  cl  infertile, 

«  qu'à  peine  les  trois  quarts  des  terres  peuvent 


«  porter  de  l'herbe.  »  (Ane.  Proc.  vcrb.  des  Coût, 
de  Troyes,  au  Nouv.  Coût.  gén.  T.  III,  p.  293.) 
«  Leurs  viandes  sont  ares  et  aigres,  et  de  peu  de 
«  substance.  »  'Du  Fouilloux,  Vén.  fol.  18,  V°.) 

Dans  un  sens  actif  et  analogue  à  celui  du  verbe 
ardre,  dessécher,  rendre  aride,  on  a  dit:  «  Le  vent 
«  de  galerne  est  arre,  froid,  desséchant  grande- 
"  ment.  »  (Du  Fouilloux,  Vén.  fol.  4i.  —  Voy. 
Arir.) 

VARI.\^"TES  : 
ARE.  Gloss.  lat.  fr.  du  P.  Labbe,  à  Arefieri. 
Aire.  Ane.  Proc.  verb.  des  Coût,  de  Troyes. 
Ares.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  167. 
Arez.  Gloss.  lat  fr.  du  P.  Labbe,  au  mot  Aridus. 
Arre.  Chron.  S'  Denys,  T.  I,  fol.  267,  R». 
Ayre.  Ane.  Proc.  verb.  des  Coût,  de  Troyes. 

Are,  pari.  Labouré.  On  observera  qu'au  moyen 
de  l'ellipse  du  substantif  terre,  ce  participe  au  fé- 
minin signifioil  terre  arée,  terre  labourée.  Ancien- 
nement, en  opposant  et  réunissant  les  terres  arées 
ou  les  arées,  aux  bruières,  on  exprimoit  l'idée  de 
lieu  en  général,  comme  aujourd'hui  en  disant  «  par 
«  monts  et  par  vaux.  »  (Voy.  Arée.) 

Tant  a  là  Sarjanz  qui  se  plaingnent, 
Espoventablement  acertes, 
Que  de  touz  lez  en  sont  couvertes 
Bruières  et  terres  arées. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  47,  R'. 

Areaii  (2),  subst.  masc.  Instrument  de  labourage. 
Espèce  de  charrue  sans  roues,  comme  l' araire. 
(Voy.  Araire.)  «  Prinl...  ung  atjreau  fourni  de 
«  coustre,  etc.  »  (D.  Caipentier,Suppl.  Gloss.  tat.de 
Du  Cange,  T.  I,  col.  '270  ;  lit.  de  1457.)  «  Laissoient 
»  leur  ureau  el  autres  habillemens  de  labourage.  » 
(Id.  ibid.  tit.  de  1498.  —  Voy.  Aroy.) 

.  .  .  Pour  soy  n'est  rangé  le  toreau 
Desous  le  joug,  pour  y  traîner  l'aireau. 

Perrin,  Poés.  fol.  40,  V'. 

VARIANTES  : 
AREAU.  D.  Carp.,  S.  Gl.  lat.  de  Du  Cange,  T.  I,  col.  270. 
AiREAU.  Perrin,  Poës.  fol.  39,  V". 
AYRE.A.U.  D.  Carpentier,  uhi  supra  ;  tit.  de  1457. 

Arée,  subst.  fém.  Terre  labourée,  terre  en  la- 
bour, terre  de  labour.  Sillon.  Labour,  labourage. 

Il  est  visible  que  ce  mol  arée  est  le  féminin  du 
participe  are,  el  qu'on  faisoit  ellipse  du  substantif 
leire,  lorsqu'il  désignoit  substantivement  terre  la- 
bourée, terre  en  labour,  terre  de  labour,  comme 
dans  l'expression  par  arée  et  par  brieroi  :  c'est-à- 
dire,  partout,  en  lous  lieux.  (Voy.  Are.) 
Tost  est  la  nouvele  espandue. 
Par  arce  et  par  brieroi, 
C'un  François  a  ocis  le  Roi. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  99,  Y'. 

Vilains  guerpissent  les  arées. 

U.  ibid.  fol.  iU,  V°. 

Gardez  que  ne  mi  faciez  mal  ; 
Car  mon  père  est  en  Varùe, 
Où  il  esploit'?  à  son  jornal. 

Ane.  Poël.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1571. 


(1)  N'y  aurait-il  pas  là  le  radical  celtique  arddû,  noir,  qu'on  retrouve  dans  ardenne  (forêt  sombre)?  De  nos  jours  encore, 
en  Bretagne,  les  Montagnes  Noires  sont  ainsi  nommées  des  carrières  d'ardoise  qui  assombrissent  leurs  flancs.  (N.  e.)  — 
(.2)  Vient  d'une  forme  areUus.  (N.  E.) 


AR 


—  d37  - 


AR 


Dous  buefs  avomes  en  Varée. 

Rom.  de  Floircmonl,  MS.  de  R.  n-  6973,  fol.  U,  V  col.  2. 

Quelquefois  une  arée  étoit  le  sillon  tracé  par  le 
soc,  le  contre  de  la  charrue  dans  une  terre  en  la- 
bour, ou  terre  de  labour.  (Voy.  Bourgoing,  de  Orio- 
Voc.  Vulg.  fol.  G7.  —  D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.' 
lat.  de  Du  Gange.  T.  I,  col.  270  ;  lit.  de  1400.) 

Emprès  Audigier  cort,  geule  baée  ; 

Et  la  Vieille  l'ateint  en  une  arée 

Par  la  teste  le  prant  qu'il  ot  enfié'é'; 
Tout  envers  l'abati  en  une  ai-ée. 

Rom.  d'Audijier,  MS.  de  S'  Gerji.  fol.  68,  R-  col.  3. 

Il  semble  que  ce  mot  arée  n'ait  siiinifié  labour 
labourage,  que  lorsqu'on  nommoit  ^bœuf  cl'arée 
un  bœuf  propre  au  labour,  au  labourage  des  terres' 
(Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  748  cl  1246  ) 
«  Un  chacun  laboureur  peut  clorre  et  fermer  pour 
«  chacun  bœuf  (Varée,  pour  faire  pastis,  un  journau 
«  de  teire.  ..  (Coût,  de  Xainlonge,  au  Goût  »én 
T.  II,  p.  652.  —  Voy.  Arlre.)  ' 

VARIANTES  : 
AREE.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  37. 
AiRÉE.  Bourgoing,  de  Orig.  Voc.  Vulg.  fol.  67,  R». 

Arène,  subst.  musc,  et  fétu.  Sable.  Rivage 
Mortier.  ° 

Quoique  la  première  acception  d'urèue,  en  latin 
arena,  soit  encore  usitée,  spécialement  dans  la 
Poésie,  on  ne  diroit  plus  chaudes  areines,  en  nar- 
lant  des  sables  brûlans  de  l'Afrique. 

Soleil,  c'est  chose  certaine 
Que  tu  pers  icy  ta  peine  : 
Non,  tu  pers  icy  ton  temps. 
Et  tant  de  raiz  esclatants.... 
Va,  par  ces  chaudes  areines, 
Courtizer  tes  Africaines. 

G.  Durant,  à  la  s.  de  Bonnefons,  p.  1G7. 

On  sait  qu'en  prose  comme  en  poésie,  ce  mot 
arène  signitie  cirque,  amphilhécàtre,  par  la  raison 
que  les  amphithéâtres,  les  cirques  éloient  sablés  ou 
couverts  de  sable.  La  raison  pour  laquelle  il  a  si- 
gnifié rivage,  n'est  pas  moins  naturelle  «  Quel 
«  pays  !  quelle  coustume  !  Voz  gens  empêchent  que 
«  nous  ne  prenions  port  ;  que  nous  ne  nous  ra- 
«  Iraiclnssions  sur  voslre  areyne.  »  (L'Amant  res- 
<>  susc.  p.  196.) 

11  suffit  que  dans  la  préparation  du  mortier  il  v 
ait  ordinairement  du  sable,  pour  qu'ara i ne  au  fé- 
minin, au  masculin  flm;i(l),  ait  signifié  ciment  mor- 
tier ;  comme  en  ces  expressions,  tables  d'arow?/  et 
darein,  mur  d'rtra/nc.  (Voy.  Blanchandin,  ms.  de 
S  Germ.  fol.  1/8.)  «  Si  Deus  fesoit  son  premier  iu- 
«  gement  par  eawe  sur  l'umaigne  lignage  les 
«  tables  d'arguil  et  ù'arein  si  depesceroient^  celés 
«  de  piere  remeyndroieiU.  »  (Histoire  de  la  S"  Groix 
ws.  p.  11.)  ■  ' 

VARIANTES  : 
ARÈNE.  Crétin,  Poës.  p.  1,56. 

Ar.vine.  Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  12  Ro  col  2 
AR.i^iNNE    Rom.  de  Tiébaut  de  Mailly,  MS  dé  N  D  fol'-l'io 
Areine.  g  Durant,  à  la  suite  de  Bonnefons,  p  "l66 
Areyne.  L  Amant  ressusc.  p.  196.  ,  t-     w. 


Aroine    Rom.  de  Floiremont,  MS.  du  R.,  fol  8  Ro  col  1 
.\REiN.  Hist.  de  la  S'e  Croix,  MS.  p.  U.    '   "'    '  ^   ^°''  ^• 

Aréneiis,  adj.  Sablonneux,  plein  de  sable  En 
latin  arenosus.  (Voy.  Arène.)  Il  est  vieilli  et  n'a 
guère  d  usage  qu'en  poésie.  (Dict.  de  l'Acad.  Fr  — 
»oy.  Arénileux.) 

VARIANTES  : 
ARÉNEUS.  Monet,  Dict. 
Arène  U.K.  Cotgrave,  Oudin  et  Nicot,  Dict. 

Arénière,  subst.  fém.  Sablonnière.  (Vov  Got- 
grave,  Oudin,  Mcot  et  Monet,  Dict.) 

Arens,  subst.  masc.  plur.  Espèce  de  manœuvre 
Un  soupçonne  que  ce  mot  arens  désigne  la  ma- 
nœuvre, les  cordages,  qu'en  termes  de  marine  on 
nomme  niartinets,  marticles,  et  quelquefois  arai- 
gnées :  dénomination  peut-être  altérée  dans  «m;s. 

Ondes  reversent  et  escument. 

Rompent  hutage  (2)  et  obens'(3>,' 
tl  li  caable  et  li  arens. 

Siège  De  Troye  ;  MS.  du  R.  n"  0987,  fol.  lU. 

Arénuleux,  adj.  Sablonneux,  plein  de  menu 
sable.  {S  oy.  Cotgrave,  Dict.) 

Arer,  verbe.  Labourer.  Parcourir,  faire  route  en 
mer.  Discourir,  parler. 

Il  semble  qu'en  préférant  à  l'usage  de  l'ancien 
yerhe  arer,  en  latin  arare,  proprement  cultiver  la 
terre  celui  du  verbe  labourer,  en  latin  laborare, 
on  ait  substitue  ù  l'idée  agréable  d'une  culture  qui 
leconde  la  terre,  l'idée  désagréable  du  labeur  qu'elle 
exige  des  Cultivateurs.  Cette  préférence  paroissoit 
peu  raisonnable  à  Henri  Eslienne,  puisqu'après 
avoir  observe  «  qu'en  Savoie  un  laboureur  s'en 
«  allant  labourer  la  terre,  dit  qu'il  s'en  va  arar  il 
«  demande  si  nous  ne  pouvons  pas  au  besoin,  en 
«  changeant  a  en  e,  dire  arer.  Quant  à  moi,  ajoute- 
«  t-il,  je  n  en  ferois  point  de  conscience.  »  (Précel- 
lenceduLang  Fr.  p.  145.  -  Voy.  Ménage,  Dict. 
Ktym.)  Le  verbe  arer  existoit  de  toute  ancienneté 
dans  notre  Langue;  il  ne  s'agissoit  que  de  le  sau- 
ver de  la  proscription.  ..  Helyes....  Iruvad  Heivseu, 
«  le  tizsaphath,rtrfl«/;  e  al  Ires  od  lui.  a  bien  jesques 
»  duze  jus  de  boes.  »  (Livres  des  Rois,  ms.  des  Cor- 
del,  loi.  114.)  «  Ung  désert  où  il  n'avoit  onques  esté 
«  are,  ne  semé,  etc.  »  (Gh.  S' D.,  T.  I,  fol.  261,  V°.) 

Li  preudom,  quant  voit  le  jor  né, 
Rêva  arer  en  son  jorné. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  309,  Y-  col.  1. 

Li  vilains  sa  vache 

Et  son  buef  donte  de  sa  mace  ; 
Et  tant  les  en  bat,  kastie. 
Que  la  tière  en  ère  et  deslie. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  260. 

En  comparant  au  labourage  l'action  par  laquelle 
1  espèce  humaine  se  reproduit  et  se  perpétue,  on  a 
dit  :  i     f        ■> 

Arez,  pour  Dieu,  Barons,  arez 
Et  voz  lignaiges  réparez. 


i)ilS4'Î5nov\mfe^^^^^^  d'hiver.  (E.   Rambert,   Revue  , es 

18 


AR 


—  138  — 


AR 


Se  ne  pensez  forment  d'arer. 
N'est  riens  qui  les  peust  réparer. 

Rom.  de  la  R(isc,  vers  20G10-'20G13. 

On  désignoit  la  nécessité  de  passer  d'un  propos 
à  un  autre,  la  nécessité  de  discourir  d'autre  chose, 
en  disant  : 

Autre  champ  me  convient  arer. 

Rom.  de  la  Rose,  icrs  22137. 

Ce  verbe  arer  étoit  pris  substantivement,  lorsque 
par  allusion  ù  l'habitude  que  les  bœufs  ont  de  la- 
bourer, on  désignoit  une  science  acquise  par  l'ha- 
bitude de  faire  une  chose,  en  disant  : 

Plus  en  sçaurez  que  beuf  â'w'er. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  13851. 

Plus  sai  d'Amors  ke  bues  tl'areir. 

Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  n-  389,  pari.  1,  fol.  120.  V°. 

Il  est  possible  que  relativement  à  Fidée  de  par- 
courir un  terrain  qu'on  laboure,  l'expression  arer 
une  route  ait  signifié  faire  une  route,  la  parcourir 
en  naviguant,  sans  comparaison  même  du  sillage 
du  navire,  au.\  sillons  tracés  par  la  charrue.  «  Ces- 
«  tuy  jour....  ne  leur  apparut  terre,  ne  aultre  chose 
«  nouvelle:  car  autrefois  avoient  are  ceste  routte.  » 
(Rabelais,  T.  IV,  p.  6.) 

En  discourant  d'une  personne  ou  d'une  chose,  on 
parcourt  les  objets  qui  leur  sont  relatifs.  De  là 
peut-être  l'acception  figurée  d'arer,  discourir, 
parler  d'une  personne  avec  quelque  étendue. 

Par  cy-dessus  vous  ay  are 
Moult  d'Abraham  fil  de  Tharé. 

Hist.  des  trois  Maries,  en  vers,  MS.  p.  i6. 

On  a  vu  plus  haut,  qu'arer  antre  champ,  c'étoit 
discourir  d'autre  chose;  expression  dont  le  sens 
présente  certaine  analogie  avec  l'acception  d'arer  (I  ), 
discourir. 

VARIANTES    : 
ARER.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  114,  R»  col.  2. 
Areir.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  part.  1,  fol.  120,  V". 
Arreu.  D.  Carpealier,  S.  Gl.  1.  de  Du  Gange,  T.  I,  col.  270. 
Errer.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  260. 
Harer.  Hist.  de  B.  du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  9. 

Ares,  subst.  On  a  cherché  dans  le  grec  «pa,  l'ori- 
gine de  ce  mot  are  ou  ares,  usité  en  Gascogne  et 
dans  quelques  autres  provinces.  (Voy.  Dict.  de 
Trévoux.)  Mais  il  est  probable  qu'étant  de  même 
signification  que  le  mot  ore  ou  ores,  il  est  de  même 
origine.  On  est  si  familiarisé  avec  la  voyelle  a,  subs- 
tituée à  la  voyelle  0  dans  la  prononciation  et  l'ortho- 
graphe, (ju'en  are  comme  en  ore,  on  croit  recon- 
noitie  le  substantif  Itoi^e,  en  latin  hora,  pris  abso- 
lument et  employé  comme  adverbe  pour  signifier 
à-l'heure-même.  (Voy.  Hore.)  «  La  Bastide  criast  au 
«  Suppliant:  ribault,  traître;  ares,  par  le  ventre 
«  de  Dieu,  tu  mourras.  «  (D.  Carpentier,  Suppl. 
Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  T.  I,  col.  286  ;  fit.  de  1482.) 
Il  est  évident  qu'en  ce  passage  la  signification  du 
mot  ares  est  la  même  que  celle  du  composé  ares- 
metys  qu'on'  trouve  dans  Rabelais,  et  que  les  Gas- 


cons semblent  avoir  formé  du  latin  horâ  rnetipsâ. 
"  Voussoubvienne  de  boire  à  my...  et  je  vous  plei- 
»  geray  tout  aresmetijs.  r,  (Rabelais,  T.  I,  Prolog, 
p.  50.  —  Voy.  Aresmetys.) 

VARIANTES    : 
ARES.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  Du  Cange,  T.  I.  col.  286. 
Are.  Id.  Ibid.  -  Dict.  de  Trévoux. 
Ahex.  Cotgrave,  Dict, 

Aresmetys,  adv.  A-l'heure-même.  En  latin 
horâ  rnetipsâ  ;  d'oîi  le  mot  composé  gascon  ares- 
metys, aresmedis,  ou  aremeti.  (Ménage,  Dict.  Etym. 
—  Voy.  Ares.) 

VARIANTES  : 
ARESMETYS.  Rabelais,  T.  I,  Prolog,  p.  50. 
Aremeti,  Ares.medis.  Cellhellenisme  de  L.  Tripault.   — 
Mén.  Dict.  Etym. 

Aresner,  verbe-  Attacher  par  les  rênes  de  la 
bride.  Saisir  par  les  rênes  de  la  bride.  Tenir  en 
bride.  (Voy.  Resne.) 

On  disoit  au  premier  sens  : 

Si  descent  et  si  se  désarme  : 
Son  cheval  uresne  à  un  charme. 

Rom.  de  Pcrccval,  MS.  de  Bjrne,  n-  35i,  fol.  260,  R°  eol.2. 
lUoec  avoit  un  olivier  ; 
Il  aresna  son  bon  destrier. 

Sicge  de  Tliébes,  MS.  du  R.  n"  6987.  fol.  38,  R°  col.  3. 

Dans  le  second  sens  : 

N'il  ne  laist,  por  clicon  d),  le  ceval  amener; 
Tolome  quidast  prendre,  sel'peust  aresner. 

Roro.  d'Alexandre,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  178,  V  col.  3, 

Au  figuré  : 

Prince  qui  veut  en  triomphe  régner, 
Doit  le  vouloir  des  esmeuz  arraiuer  ; 
El  n'exploicter  tout  ce  que  chagcun  cuide, 
Garder  que  nul  ne  se  puisse  effrener. 

J.  d'Auton,  Annal,  de  Louis  XII,  MSS.  1603-1505,  fol  IIS,  V. 

VARIANTES  : 
ARESNER.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  148. 
Aregn'er.  Anseis,  MS.  fol.  61,  V»  coi.  2. 
Aresoner.  Lanc.  du  Lee,  T.  I,  fol.  148. 
Arrainer.  J.  d'Auton,  annal,  de  Louis  XII,  fol.  115. 

Areste,  subst.  fém.  Barbe  d'épis.  Petite  partie 
ligneuse  de  lin.  Espèce  d'aiguille  ou  d'épingle. 
.\rète;  incommodité;  retard;  obstacle;  difficulté; 
embarras. 

Le  mot  areste,  en  latin  arista,  qu'au  premier 
sens  Monet  définit,  «  longue  et  menue  pointe, 
«  comme  une  aiguille,  à  la  cyme  de  l'épi,  »  est 
ancien  dans  notre  langue,  en  ce  même  sens  : 

De  dolor  est  doloreus  pains 

Il  est  fais  d'orge  qui  est  plains 
De  paille  et  poignant  areste. 
Miserere  du  Reclus  de  .Volicns,  MS.  de  Galjnat,  fol.  211,  R°  col.  1. 

On  sait  qu'après  avoir  roui,  séché  et  broyé  le  lin, 
on  le  passe  par  le  séran  qui  en  sépare  les  parties 
ligneuses.  En  comparant  ces  parties  ligneuses  du 
lin  broyé  et  passé  par  le  séran,  aux  barbes,  aux 
pointes  des  épis,  on  les  a  nommés  arestes.  «  Du 
«  premier  filet  de  lin  qu'elle  traira  de  sa  quenoille, 
«  il  lui  entrera  une  areste  au  doy,  en  telle  manière 
«  qu'elle  s'endormira  à  coup,  et  ne  s'esveillera  jus- 


Ci)  Ce  mot  s'emploie  encore  dans  la  marine,  lorsque  l'ancre  d'un  vaisseau,  le  fonds  étant  mauvais,  n'y  tient  point  et 
are  (laboure)  le  fond.  (N.  E.)  —  (2)  A  le  sens  de  clicart,  sorte  de  bâton  (voir  Du  Gange  à  C/icha).  Traduire:  «  Le  cheval, 
malgré  le  bâton,  ne  se  laisse  amener.  »  Il  s'agit  ici  de  Bucéphale.  (n  e.) 


AR 


—  139  - 


AR 


V  ^"wT  ^  ,'''*"*  ^"'^^''^  sera  succée  hors.  »  (Percef 
^01.  III,  fol.  115.  -  Voy.  Ibid.  Vol.  IV,  fol.  m.) 

Bissus  (1)  est  ver;;,  naiscens  de  terre 

Quant  il  est  du  bois  arrachiez, 

Adonc  fault  qu'il  soit  plungiez 

En  l'eaue,  et  puis  traiz  par  defors  ; 

Puis  aux  raiz  (2)  du  Souleil  très-fors 

Doit  estre  mis  et  desechiez  : 
Et  lui  sec,  doit  estre  mailliez 
Amaillez,  puis  fraiez  aux  mains, 
Puis  ferroiez  sur  le  moins, 
Ef  divisez  pout  les  arrestes. 

Eusl.  Desch.  Poès.  »ISS.  p.  545,  col.  1. 

Probablement,  cet  ancien  Poëte  avoit  en  vue  le 
même  objet  de  comparaison,  lorsqu'en  parlant  de 
la  coiffure  des  femmes  de  son  siècle,  il  désisnoit 
|ar  le  mot  areste  une  espèce  d'aiguille  ou  d'épingle 

Grant  merveille  est  que  deUes  regarder  ■ 

Car  cornes  ont  trop  plus  longues  que  bestes- 

lant  qu  om  ne  puet  leur  doulz  viaire  cler 

/O""- Trop  y  a  d'espingles  et  â'ai-estes, 

Ue  cheveulx  mors,  de  bourriaux  et  de  crestes  (3) 

Eusl.  Desch.  Poés.  MSS.  p.  3-28,  col.  \. 

La  ressemblance  de  la  partie  dure  et  solide  de 
certains  poissons,  avec  les  barbes  ou  pointes  d  éoi 
est  sans  doute  la  raison  pour  laquelle  on  l'a  nom- 
mée areste.  (Voy.  Ménage,  Dict.  Etym.)  Il  semble 
que  relativement  à  l'idée  de  l'incommodité  des 
a}  êtes  dans  le  poisson  qu'on  mange,  l'on  ait  dit 

Vie  d'omne  est  d'areste  plaine  .. 
Moult  are.stouse  vie  maine 
Cil  qui  maine  la  plus  légiére. 
Miserere  du  Recl.  de  Moliens,  M.S.  de  Gaîgnat,  fol.  211,  R"  col.  1. 

Cette  même  incommodité  des  arêtes  relavûe  celui 
qui  mange,  et  fait  obstacle  à  son  plaisir.  Il  est  donc 
possible  que  d'après  cette  idée  le  mot  arestV  Ta 
S'^'JIfrS'^  ''•"?'  ""  '^"'  ^1"'  P'^™'*  se  confondre 
dïns  ces  lers  !"     ""''"'  '"  ''^■"^"'  "'^"''^'  '^°'"™'^ 

Chiers  pères,  veuillez  moi  aidier  ■ 
Je  doute  l'e-xcommunier. 
Cite  suy  ;  cy  n'a  os  ne  nreste  ■ 
b  argent  n'ay  devant  cette  feste 
De  Pasque,  etc. 

Eusl.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  435,  col   1 

J^f!^^iSSl^  ^'"  '^-'^^"■^-^'  lorsque  ce 

Il  n'a  cy  areste  ne  boces  ; 
Ne  chose  qui  ne  soit  visible. 
Et  trouvée  en  texte  de  bible. 

Id.  Ibid.  p.  489,  col.  1. 

On  terminera  cet  article  en  observant  que  par 
une  autre  comparaison,  relative  à  l'idée  del  animes 
que  forme  une  arête  de  poisson,  l'on  a  pu  nommer 
areste,  I  angle,  l'élévation  qui  règne  le  loio  de 
que  ques  lames  d'épées  ;  aresles  et  vLves  arestes  les 
angles  d'une  pierre  ou  d'une  pièce  de  bois  équarrie 

(I)  Byssus,  lin.  -  (2)  rayons.  -  (3)  Ailleurs,  Deschamps  écrit 
Atournez  vous,  mesdames,  aultrement 
Sans  emprunter  tant  de  harribouras 
Et  sans  quérir  cheveulx  estrangement 
()ue  maintes  fois  rongent  souris  et  rats 
'Vostre  affubler  est  comme  un  grand  cabas  • 


de  Trévoux.)'"^"'  ''''  ^^''^'-  ^^'"'''  ^'''^-  "  ^ict. 

AufcT-  VARIANTES  : 

AKhbTE.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS  n  435 

AiRESTE.  Cotgrave,  Dict. 

AnETE.  Monet,  Dict. 

Arreste.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  545,  col   1 

m^ffS^AS'''  ''''''''■  ''^^"  ^•"««'»- 

(E?irdeKe'SS.r  '  '"  ^'--'-^--- 
Au  figure  une  vie  arestotise  étoil  une  vie  nleine 
d  II  commodités  et  d'embarras.  (Miserere  du  Si 
de  Mohens,  ms.  de  Gaignat,  fol.  211.  _  vôy.  areTte!) 

.„„„  variantes: 

ARESTEUX.  Cotgrave,  Dict. 

Arestous.  Miserere  du  Recl.  de  M.  MS.  de  G.  fol.  211. 

Areur,  subst.  masc.  Laboureur.  (Voy.  Arer.) 

.„_„„  variantes: 

AREUR  Gloss.  lat.  fr.  du  P.  Labbe  au  mot  4,-atnr 

Areor.  Vie  des  Saints,  MS.  de  la  ClayeUe  p  g  " 

Argent    subst.   masc.    Métal  blanc.    Monnoie 

^n  •^'''"""''  '''^'■-  '''«'--e'^l  0"  d'autre  métï 
On  observera   qu'en   général,    lorsqu'on    parlé 
à  argent  on  entend  de  l'argent  fin,  de  l'a,-ent  sans 
alliage.  Pour  fixer  la  loi  del'argen't  fi'i,  on^^  diviS 
en  douze  deniers,  et  chaque  deHier  en  vingt^auï  ?e 
grains.  Cette  division  de  l'argent  fin  en  douze  de 
mers,  et  de  chaque  denier  en  vingt-quatre  o'raint 
est  commune  à  l'Argent-le-Roi  ;  mfis  dlins  l'ArgS 
f^Z'Jv'  "est  qu'à  onze  deniers  douze  grains 
4i^s1       f^  '^  '""'"ri""  ^'"g'-quatrième  d'aîliaie 
Aiiibi,  .  lorsquon  dit  que  Yargent  fin  est  à  tix 
»  deniers  de  loij,  cela  signifie  qu'il  y  a  six  partie? 
"  d.argent  et  six  parties  d'alliage;  niais  loiSon 
"  di  que  \  Argent-te-ltO!i  est  à  six  deniers  rfe/o/ 
"  Çfl:' signifie  qu'il  y  a  six  parties  et  6/24  de  pa?: 
«  fies  en  alliage;  en  sorte  qu'il  ne  reste  que  cina 
«  pnrtiesetl8/24de  parties  en  argent  »  (o?d  T.  1?! 

\Ji  cl .  p .  CXJ  .1 

La  loi  de  l'argent  mis  en  œuvre  par  les  Orfèvres 
HP  ?'-','i'o- ^'- '"'™'  .^'."^  ^e"«  de  l'Argent-leRoL 
dp    ;   w"i''  ""d'"'  ^  ''-'"^0"  ^^  ce  que  nos  Rois 
de  la   troisième  Race  accoutumèrent  enfin  leurs 
sujets  a  reconnoîtrc  en  eux  seuls  le  droit  de  fixer  la 
01  de  1  argent;  ou  qu'attentifs  au  moyen  de  répare? 
le  défaut  de  mines  d'or  et  d'argent  en  France    Us 
en  favorisèrent  l'importation  dans  le  Royaume  et 
I  encouragèrent  en  payant  l'argent  qui  étoit  à  onze 
deniers  douze  grains,  comme  s'il  eût  été  à  douze 
deniers.  (Voy.  Ord.  T.  II,  p.  254.  -  Ibid    T    m 
p.   0Ô5,    etc.  -  Dict.  de  Trévoux.)   ,.    Que  "nuls 
«  Orfèvres...  ne  puissent...  ouvrer  argent  que  il  ne 
«  soit  aussi  bon  comme  celi  que  l'on  dit  l'.l?w,f/- 
«  le-Rot.   ..    Ord.  T.  I,  p.  522.)  „  Nul  Or  evre  îe 


Bourriaux  y  a  de  coton  ef  de  laine 
Autres  choses  plus  d'une  quarantaine, 
Frontiaux,  filets,  soye,  espingles  et  nèuds  • 
De  les  trousser  est  à  vous  trop  grand  peine  ■ 
Rendez  1  emprunt  des  estranges  cheveulx  I     (n  e  ) 


AR 


140  — 


AR 


»  peut  ouvrer  crargent  qui  ne  se  revienne  aussi  bon 
«  comme  A)'i/ent-le-Roi,  sans  les  soudures,  lequel 
.  est  dit  argent  de  gros.  «  (Ibid.  T.  III,  p.  12  ) 

Il  semble  que  la  dénomination,  argent  de  gros, 
soit  relative  à  une  ancienne  façon  de  désigner  le 
prix  du  marc,  soit  d'argent-le-Roi,  soit  d'argent  fin, 
par  un  nombre  de  gros,  espace  de  monnoie.  Peut- 
être  aussi  que  l'argent  de  gros  étoitde  l'argent  ù  la 
loi  de  cette  même  monnoie?  «  L'en  dourra  du  inarc 
"  d'argent  fin  en  pièce,  au  pois  du  marc  monsieur 
«  Saincl-Loys ,  cinquente-huit  gros  tournois.  » 
(Ord.  T.  II,  p.  38.)  «  Se  aucun  vouloit  ouvrer 
«  Argcnt-le-I\o\i,  et  acheloit  argent  lin,  et  fut  l'acbat 
«  et  la  délivrance  tout  !i  un  marc,  il  le  peut  faire, 
u  mes  que  le  prix  de  la  délivrance  et  de  l'achat 
«  soient  considérez  eslre  d'une  valeur  ;  si  comme 
«  qui  acheteroit  un  marc  cV Argent-le-lloij  cinquante 
«  gros,  l'on  n'en  devroit  donner  que  cinquante-six 
>>  gros,  se  l'en  les  delivroit  à  Argenl-le-Roij,  c'est 
<■  tout  une  valeur,  car  argent  fin  en  emporte  plus 
«  que  Argent-le->Aoij  ;  et  combien  que  il  semble  que 
«  il  donne  plus  grant  pris,  c'est  assavoir  cinquante 
«  huit  gros,  si  ne  donne  il  pas  plus  de  cinquante  six 
«  gros  argent,  car  il  acheté  argent  et  délivre  argent  ; 
«  et  semble  que  le  seurcrois  de  l'argent  fin  que  il 
"  acheté,  il  doit  rendre,  puis  que  il  délivre  Argent- 
«  le-Hoy  qui  bien  se  pourroit  monter  à  tel  prez 
«  demi  gros.  »  (Registre  delà  Chambre  des  Comptes 
de  Paris,  cotté  INoster,  p.  "lO').  —  Voy.  Du  Cange, 
Gloss.  lat.  T.  I,  col.  687.) 

Probablement,  Vargent  en  plate,  dans  l'Ordon- 
nance de  Philippe-le-Bel,  en  date  du  mois  de  juin 
1313,  étoit  de  même  forme  que  Vargent  en  mace  et 
billon,  ou  tout  simplement  Vargent  en  billon,  dans 
l'Ordonnance  de  Philippe  de  Valois,  datée  du  29 
septembre  1329.  <>  L'en  donrra...  du  msivc  d'argent 
«  fin  en  billon....  cinquante  six  soûls  six  deniers 
«  desdiz  bons  peliz  tournois.  ••  (Ord.  T.  II,  p.  38.) 
«  Que  tout  homme  puissent  apporter  dehors  de 
«  noslre  Royaume,  à  noz  Monnoyes,  or,  argent  en 
«  mace  et  billon,  franchement  et  sans  en  poier, 
«  etc.  »  (Ibid.  p.  39.)  .<  Que  nuls  Orfèvres,  ne  Chan- 
«  geurs,  ne  autres  ne  rachalent,  ne  affinent... 
«  nules  monnoies  d'or  ne  d'argent,  blanches  ne 
"  noires,  ne  nul  argent  en  plate,  quel  que  il  soit, 
«  seur  paine,  etc.  »  (Ibid.  T.  I,  p.  521.)  On  croit  que 
cei  argent  en  plate,  étoit  de  l'argent  en  barre,  en 
lingot;  par  conséquent  de  même  forme  que  l'argent 
en  masse  ou  en  biUon.  Les  Lettres  de  Philippe-le- 
Bel,  datées  du  mois  de  septembre  1295,  semblent 
prouver  incontestablement  qu'en  latin  Billio  étoit 
synonyme  d'argentum  in  massa.  (Voy.  Ord.  T.  I, 
p.  32G;  notes,  col.  2.  —  Du  Cange,  Gloss.  lat.  T.  1, 
au  mot  Billio,  col.  1108.  —  Id.  ibid.  T.  V,  au  mot 
Plata,  col.  5i9.)  Il  paroitroit  raisonnable  d'en  con- 
clure qu'on  a  nommé  billon,  la  monnoie  décriée, 
parce  que  celte  monnoie  étoit  souvent  fondue  en 
masse,  en  barres,  ou  en  lingots  qu'on  employoit  à 
la  fabrication  de  la  monnoie  nouvelle. 

On  soupçonne  que  dans  quelques  Ordonnances, 
le  marc  d'argent  en  argent,   autrement  nommé 


marc  d'argent  blanc,  étoit  un  marc  d'argent  en 
espèces  décriées  ;  mais  non  fondues  en  masse,  en 
barres  ou  en  lingots,  comme  l'étoient  celles  du 
marc  d'argent  en  billon.  «  Les  Mestresde  nos  Mon- 
«  noies  prendront  pour  nous  le  marc  d'argent  en 
«  billon,  Argent-le-Roy,  au  marc  de  Paris,  pour 
«  cinquante  et  sept  soulz  tournois;  et  en  argent, 
«  Argent-le-Roy,  pour  cinquante-neuf  soulz  tour- 
«  nois.  »  (Ord.  T.  I,  p.  4r)0.)  «  On  rendra  cinquante- 
«  neuf  sols  tournois,  du  marc  d'argent  blanc;  et 
«  cinquante-septsols tournois,  d'argicnl  en  billon.  » 
(Ibid.  p.  408.) 

Peut-être  trouvera-t-on  que  la  différence  entre 
l'argent  en  liillon  et  cet  argent  blanc,  nommé  ar- 
gent par  excellence,  n'étoit  autre  que  celle  qu'on 
désignoit  en  disant  argent  noir,  par  opposition  à 
argent  blanc.  Quoique'l'argent  blanc  ait  été  dans 
les  anciennes  Ordonnancesde  Vargent  à  douze  de- 
niers de  loi  ou  envii'on,  par  conséquent  de  l'argent 
fin  ou  de  VArgent-le-Hoi,  il  semble  qu'en  général 
on  ait  nommé  argent  blanc,  celui  dont  l'alliage, 
quel  qu'il  fût.  étoit  légal;  argent  noir,  celui  dont 
l'alliage  excédoit  la  loi.  »  Les  Orfèvres  payeront 
«  par  chascun  marc  d'argent  blanc  et  vere,àeu\ 
«  deniers  pour  marc.  «  (Ord.  T.  II,  p.  320.)  Vrai- 
semblablement, vere  est  une  faute  pour  nere  ou 

noir.    «  Voulons que  vous  faciez  donner  par 

«  toutes  nos  Monnoyes,  (i  tous  Changeurs  et  Mar- 
«  chans,  de  chascun  marc  d'argent  tant  blanc 
«  comme  noir,  quarante  sols  tournois  de  creue, 
«  oultre  le  pris  que  nous  y  faisons  donner  à  pre- 

«  sent  :  c'est    assavoir pour    chascun   marc 

«  d'argent  alluie  à  la  loij  de  trois  deniers,  seize 
«  livres  tournois  ;  et  de  tout  autre  marc  d'argent 
"  allnié  au  dessonbz;  quinze  livres  et  huit  solz 
<-  tournois.  »  (Ord.  T.  III,  p.  18.) 

Les  malheurs  du  règne  de  Philippe  de  Valois, 
renouvelèrent  la  nécessité  d'affoiblir  les  monnoies. 
Sous  le  règne  encore  plus  malheureux  du  roi  Jean, 
on  n'en  fabriqua  presque  pointd'argentfin,  et  assez 
rarement  d' Argent-le-Roi .  Il  y  avoit  presque  tou- 
jours moitié  et  même  plus  que  moitié  d'alliage. 
Mais  on  supposoit  très-souvent,  pour  la  fixation  du 
prix  du  marc  d'argent,  que  l'argent,  par  exemple, 
»  allié  à  trois  deniers  de  loi,  éio'û  Argent-le-Roi.  » 
C'est  d'après  cette  supposition,  que  dans  un  mande- 
ment de  Charles,  fils  aine  et  Lieutenant  du  roi 
Jean,  daté  du  22  octobre  1350,  le  marc  d'argent 
blanc,  qui  étoit  argent  fin  ou  Argent-lc-Uoi,  puis- 
qu'il étoit  réellement  «  à  douze  deniers  de  loi  ou 
«  environ,  >-  paroissoit  ne  valoir  que  sept  sols 
tournois  plus  que  le  marc  d'argent  allié  à  trois 
deniers.  «  Qu'il  soit  donné  à  tous  Changeurs  et 
«  Marchans  frequentans  les  Monnoyes,  de  chascun 

«  marc  d'argent allai é  à  trois  deniers  de  loy, 

«  dit  et  nommé  Argent-le-Roi huit  livres  dix 

«  solz  tournois;  et  de  tout  autre  marc  d'argent 
«  blanc  à  douze  deniers  de  loi  ou  environ...  huit 
«  livres  dix-sept  solz  tournois.  »  (Ord.  T.  III,  p.  86.) 
La  raison  de  cette  fixation  du  prix  de  l'argent  h 
trois  deniers  de  loi,  presque  la  même  en  apparence 


AR 

que  celle  de  l'argent  à  douze  deniers,  seroit  incon- 
cevable, si  l'on  ignoroit  qu'en  fixant  h  huit  livres 
dix-sept  sols  tournois  le  prix  du  marc  d'aroent  à 
douze  deniers  de  loi,  et  ù  huit  livres  dix  sois,  celui 
du   marc  d'argent  à  trois  deniers,  on   ne  faisoit 
quindiquer  la  règle  de  l'évaluation  proportion- 
nelle de  l'argent  supposé  Argent-le-Roi,  quoiiiu'il 
ne  fut  qu  à  trois  deniers  de  loi.  Un  autre  mande- 
ment du  23  novembre  135G,  par  lequel  on  ordon- 
noit  la  fabrication  de  gros  deniers  blancs  h  quatre 
deniers  de  loi,  paroit  fixer  le  prix  du  marc  de  cet 
argent  ainsi  monnoyé,  à  douze  livres  tournois. 
(A  oy.  Ord.  T.  III,  p.  87  et  88.)  Mais  ce  seroit  une 
erreur  d  en  conclure  que  le  marc  d'argent  avec 
lequel  ou  labriqu;i  ces  gros  deniers  blancs,  n'étant 
compo.se  que  d'un  tiers  cVArgent-le-Itoi  et  de  deux 
tiers   d  alliage,    valoit    réellement   douze    livres 
«  Leia  signifie  seulement,  que  le  prix  du  marcd'ar- 
"  pnt  monnoye,  supposé  que  la  monnoye  eust  été 
"    abriquee  avec  de  V Argent t-le-lioij,  vandroit  douze 
»    ivres.  Or  comme  ces  gros  deniers  blancs  ne  con- 
"  ',';"'?!e"t  fiu'un  tiers  d'argent,  et  les  deux  tiers 
«  d  alliage,  le  marc  d'argent  monnrnié  de  ces  esné- 
"  ces  ne  conteiioit  que  le  tiers  d'un  marc  iVArgent- 
«  le-Hoi  ;   et  comme  le  cuivre  et    l'alliage  sont 
"  comptez  pour  rien,  il  ne  devoit  valoir  qm  iiuatre 
"  livres  qni  est  le  tiers  de  douze  livres,  à  quoy  a 
«  esle  fixe  le  prix  du  marc  d'argent  monnoyé,  eii  le 
«  supposant  Argent-le-Roi.    »   (Ord.  T     lIl    nréf 
p.  cxij.)  ^  '       '  '   '^'• 

On  a  étendu  la  signification  d'argent,  monnoie 
a  argent,  a  toute  espèce  de  monnoie,  lorsque  pour 
designer  la  possibilité  de  tout  conclure,  de  tout 
tinir  avec  de  1  argent,  on  a  dit  en  proverbe  : 

Adès  fine  il  qui  a  arijenl. 

Eusl.  Desch.  PoC-s.  MSS.  p.  loe,  col    3. 

Le  proverbe  contraire,    «    Quand   argent  faut 
'■  fiuaison  nulle,  «  est  particulièrement  Justine  par 

art.  Lxii  du  tit.  II  do  la  coutume  du  Perche,  où  on 
lit  :  <■  Si  le  A  assal  ayant  esté  saisi,  compose  avec  son 
«  Seigneur  du  rachat  et  proffit  de  (ief  qu'il  peut 
«  devoir,  et  pouriceluy  payer,  luy  estdonné  terme 
"  dedans  lequel  il  n'ait  payé,  peut  ledit  Seigneur 
«  jouyr  dudit  lief,  ainsi  qu'il  faisoit  auparavant  et 
'■  iceluy  saisir  de  nouvel,  si  saisi  n'a  esté;  qui  est 
«  ce  qu  on  dit  communément,  quand  argent  faut 
«  maison  nulle.  »  (Coût.  uéu.  T.  II,  p   175  )  ' 

Il  est  SI  rare  d'être  bienfaisant  et  de  cacher  sa 
bienfaisance,  que  pour  signifier  qu'une  chose  ne 
sest  jamais  faite,  on  a  pu  dire  troverbialemeÏÏ 
quelle  s'est  faite  a  du  temps  qu'on  se  cacha  po  r 
«  presler  argent.  .  (Cotgrave.Dict  1  ^ 

Les  malversations  trop  fréquentes  dans  l'admi- 
nistration des  iinances  des  Rois  et  autres  Princes 
ont  fait  dire  proverbialement  que  »  leur  aro-ent  es 
••  sujet  a  la  pince.  »  (,Vpol.  d'Hérodote,  p  13G 

l.ien  n  est  plus  vrai,  sans  doute,  que  le  proverbe  : 

Mieulz  vault  science  qu'arrye/Ls. 

Froissarl,  Poès.  JlSS.  p.  339,  col.  1. 

Mais  l'homme  qui  aura  dédaigné  l'argent  pour  la 


141  — 


AR 


science,  ne  s'exposera  point  à  l'affront  de  s'enten- 
dre dire  : 

A  luis,  à  l'uis,  qui  n'a  ar/joif. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218.  fol.  317,  R"  col.  i. 

Il  restera  chez  lui  paisible,  et  se  dira  avec  plusde 
philosophie  que  d'humeur  :  «  Quelque  sravoir  que 
«  soit  en  l'homme,  s'il  n'a  de  Vargent,  on  s'en 
<■  moque.  «  (Cotgrave,  Dict.) 

Il  pardonnera  aux  hommes  qui  ne  le  vaudront 
pas,  leur  passion  pour  l'argent;  passion  dont  on  a 
dCMgne  1  ardeur  par  cet  ancien  jeu  de  mots  «  Li 
;; ^"IfJis.f'-t  l\S-ent.  »  (Voy.  Fabl.  ms.  du  R. 
n   /blo  fol.  01,  R"  col.  2.  -  Cotgrave,  Dict  ) 

Peut-être  même  que  forcé  par  ses  besoins  d'être 
p  us  homme  que  philosophe,  il  reconnoitra  la 
sagesse  de  ce  proverbe  : 

Qui  n'a  de  l'argent  en  bource 
Qu'il  ait  du  miel  à  la  bouche. 

Méni.  de  Montluc,  T.  II,  p.  529. 

L'argent  est  si  essentiel  à  la  satisfaction  des 

d^tni'.ïiP,  li''? '"'"^  '^'^•'^''  ^""'1  ï"*  est  impossible 
d  oublier  les  anciens  proverbes  relatifs  à  une  vérité 
dont  le  sentiment  se  renouvelle  sans  cesse.  Si  on 
v.;.i^'^  -'utrelois  .  Point  d'argent,  point  de 
«  Nailel  »;  on  lui  dit  aujourd'hui,  ..  Point  d'argent 
"  P.O'nt  de  Suisse  ».  Il  sentira  toujours  qu'il  est 
vrai  de  dire  :  «  Argent  faict  tout;  qui  ade  rargeSt 
«  a  des  pirouettes;  toujours  argent  vient  ù  pSiiil' 
«  argent  comptant  porte  médecine,  etc.  ..   fVov' 

?!^%7'-  "r  ^'  ^-  ^^^^,"§iS'  a"-  1339.  -  oidiJ; 
c,  J^»^-,- Ji'Oissart,  Vol.  II.  p.  1C3.  -  Nuits  de 
Straparole,  J.  II,  p.  393.  -  Cotgrave,  Dict 

Au  figure,  ..  prendre  une  chose  pour  aro-ent 
"  compte  ou  i^our  argent  comptant.  »  c'est  croire 
■  rSn  '"'"  î'?  ^^'"^  '^'^^^e'  1''  •'ega'-der  comme 
,  îpuL  A"'''^  °'Î  .comptant  qui  est  chose  très- 
I  celle.   «  Ou  ne  doit  pas  toujours  prendre  pour 

"  {".yf'fl  "'"<««/ tout  ce  qui  est  escrit  aux 

"  liistoires  pour  ce  que  souvent  les  causes  qui  ont 
-  produi  des  effecis  sont  ignorées  ou  falsifiées    . 
(Disc,  po  11.  et  milit.  de  La^'oue,  p.  107    -  W 
Contes  dEutrapel,  p.  i5l.)  ^' 

Phn'iT'-^  comptant,  chose  très-réelle,  est  aussi 
chose  toujours  prête  au  besoin.  De  là,  on  a  désiené 
igurement  la  facilité  avec  laquelle  Jean  Bodin 
trouvoit  son  esprit  au  besoin,  en  disant  «  ou'il 
«avoit  son  esprit  en  argent  comptant.  »  (Vov  De 
Thoii,  Ilist.  hv.  cxvu,  p.  701.)  ^ 

VARIANTES  ; 
ARGENT.  Orlh.  subsist.  -  Ménage,  Dict.  Etvm 
-ViiiGEN.^.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  part. Il   fol  OQ 
AiRGE.NT.  Ibid.  part.  I,  fol.  42   R» 
Argeant.  Monet,  Dict. 
Argient.  Ord.  T.  I,  p.  468 
Ergent.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  fol  253 


Argentelet  «r^.  Argentin.  (Voy.  Argentif.) 
L  adjectif  argentin  dont  notre  Langue  paroit  être 
redevable  aux  Poètes  du  xvr  siècle,  n'est  pas  irohîs 
ancien  que  leur  diminutif  argentelet,  de  même  si- 
gnilication  qu  argentin.  En  comparant  h  la  blan- 
cheur de  l'argent,  le  cristal  d'une  onde  claire  et 
Iransparcnle,  ils  disoient  figurémenl  :  .-  ruisseau 


AR 


—  142  — 


AR 


«  argentelet,  fontaine  argentelette,  clc.  »  (Poës.de 
R.  Belleau,  T.  I,  part,  i,  fol.  KW,  R°.  —  Id.  ibid.  fol. 
105,  R°.  —  Epith.  de  M.  de  la  Porte.) 

Prez  d'une  fontainelctte, 

Doiicelelle,  argeiileletlc, 

,Te  tenois,  un  jour  d'Esté, 

Ma  Charlotte  à  mon  costé. 

G.  Durant,  à  la  suite  de  Bonnefons,  p.  119  et  120. 

Argenterie,  SM&sf./em.  Garde-meuble.  Recette. 
Banque. 

La  vaisselle  et  autres  tneiiblesd'argent  dont  l'opu- 
lence fait  un  usage  souvent  moins  utile  que  fas- 
tueux ;  la  croix,  le  bénitier,  les  chandeliers  et  tous 
les  vases  d'argent  que  la  piété  consacre  au  service 
des  Eglises  ;  le  fonds  en  argent  que  chez  le  Roi  on 
fait  tous  les  ans  pour  certaines  dépenses  extraordi- 
naires, se  nomment  encore  argenterie  [\).l\:{\?.  ce 
mot  n'est  plus  usité  avec  la  signification  de  garde- 
meuble,  lieu  où  se  gardoit  V argenterie  des  Rois  ou 
des  Reines,  avec  tout  ce  qui  sert  à  l'appareil  de  leur 

magnificence.  «  LeMaistre  d'hoslelde  la  Royne 

«  fêit  promptement  venir  un  Tailleur,  et  print  des 
«  draps  en  Vargenterie  pour  babiller  le  bon  homme 
«  Berger.  »  (J.  Le  Maire,  Illustr.  des  Gaules,  liv.  I, 
page  142.) 

Quelquefois  Vargenterie  d'une  ville  étoil  la 
recette,  le  lieu  où  se  versoienl  les  deniers  publics. 
«  Preist  suz  l'arj/ra^mc  de  Chartres,  soixante  livres 
«  parisis;  et  sur  la  trésorerie  de  Thoulouse, 
«  soixante  livres  parisis  de  rente.  »  (Ord.  T.  I, 
p.  705,  notes,  col.  2.) 

Il  semble  que  dans  la  coutume  de  Ponthieu, 
l'argenterie  d'Abbeville  étoit  une  des  banques  pu- 
biques  où  l'on  faisoit  valoir  l'argent  des  Particu- 
liers à  qui,  sur  le  papier  de  l'Argentier  ou  directeur 
de  la  banque,  un  Greffier  expédioit  les  contrats 
nécessaires  à  leur  sûreté.  «  En  1495,  Nicolas  de 
«  Sainct  Eloy,  procureur,  ctoit  greffier  de  Vargen- 
«  terie  d'Abbeville.  »  (Coût.  gén.  T.  1,  p.  6G8.  — 
■Voy.  Argentier.) 

VARIANTES  : 
ARGENTERIE.  Ord.  T.  I,  p.  7(35,  notes,  col.  2. 
Argeanterie.  Monet,  Dict. 

Argenteur,  stthst.  masc.  Argentier.  Significa- 
tion qui  semble  relative  h  celle  d'Argenterie,  Garde- 
meuble.  «  Jacques  Cuer...  estoit  Conseiller  et 
«  Argentier  du  Roy,  et  avoit  grant  autorité  devers 
«  luy,  et  fournissoit  son  Argenteur  de  toutes  den- 
«  rées.  »  (Procès  de  J.  Cuer,  ms.  p.  85.  —  Voyez 
Argentier.) 

Ai'genteure,  subst.  fém.  Argent  massif.  Argent 
en  pâte.  Argent  appliqué  en  feuilles.  Il  est  probable 


que  le  premier  sens  étoit  celui  à'argenture,  lors- 
qu'on parlant  de  la  figure  que  Nabuchodonosor  vit 
en  songe,  on  a  dit  qu'elle  avoit. 

Les  bras,  le  pis  d'arrjentiire. 

G  Machaut.'Poës.  MSS.  fol.  25.  V"  col.  1. 

L'argent  resous  en  pâte  par  l'eau  de  départ  (2),  el 
destiné  à  argenter,  se  nommoit  aussi  argenture, 
(Monet,  Dict.) 

Enfin,  l'argent  appliqué  en  feuilles  sur  le  cuivre, 
le  bois  et  autres  choses,  étoit  et  est  encore  de  l'ar- 
genture. (Id.  ibid.) 

VARIANTES  : 
ARGEXTEURE.  Oudin,  Dict. 
Argeanture.  Monet,  Dict. 
Argenture.  G.  Machaut,  Poës.  MSS.  fol.  25,  'V»  col.  1. 

Argenteux,  adj.  Qui  est  d'argent.  Qui  est  mé- 
langé d'argent.  Qui  a  de  l'argent. 

On  ne  trouve  ce  mot  argenteux,  expliqué  au  pre- 
mier sens,  que  dans  Cotgrave,  Dict. 

Dans  le  second  sens, 'or  argeanteus,  étoit  un  or 
mélangé  d'argent.  (Monet,  Dict.) 

On  diroit  encore  dans  le  langage  familier,  pour 
désigner  une  personne  qui  a  de  l'argent  :  "  Sy 
«  mondit  sieur  de  Gueldres  eust  esté  argenteux, 
"  etc.  »  (Lett.  de  Louis  XII,  T.  I,  p.  98.  —  Voy. 
Cotgrave,  Oudin,  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet, 
Dict.) 

VARIANTES   : 
ARGENTEUX.  Cotgrave,  Oudin,  R.  Estienne,  Dict. 
Argeanteus.  Monet,  Dict. 

Argentier,  subst.  masc.  Orfèvre.  Homme  qui 
a  une  administration,  une  recette,  un  maniement 
d'argent.  Banquier.  Homme  riche,  homme  en 
argent. 

Quelque  général  que  soit  aujourd'hui  le  luxe  des 
ouvrages  en  or,  l'on  observe  que  dans  plusieurs 
lieux, 'entre  autres  à  Caen,  les  Orfèvres  se  nomment 
encore  Argentiers,  relativement  aux  ouvrages  qu'ils 
font  en  argent. 

En  un  anel  d'or  tout  massis 
Fu  mon  signet  mis  et  assis  ; 
Et  l'entailla  moult  volentiers 
Uns  très  bons  mestres  argentiers. 

Froissart,  Pofs.  MSS.  p.  16G,  col.  1. 

On  sait  que  dans  les  Maisons  royales  et  autres 
grandes  Maisons,  Y  Argentier  est  encore  aujour- 
d'hui un  Officier  préposé  à  la  distribution  de  cer- 
tains fonds  d'argent  qu'il  administre  sous  l'inspec- 
tion d'un  Officier  supérieur.  Cet  Officier,  nommé 
quelquefois  Argenteur,  étoit  en  138G  celui  qui,  dans 
dans  la  maison  des  Ducs  de  Bourgogne,  «  recevoit 
«  les  sommes,  pour  payer  les  frais  des  ambassades, 
«  des  voyages,  des  habillements,  de  la  garde-robe 


(1)  Les  Archives  Nationales  conservent  sous  la  cote  KK.  18  à  27,  les  comptes  clc  Vargenterie  du  règne  de  Charles  'VI  (de 
13R0  à  1410).  M.  Douët  d'Arcq,  y  réunissant  des  documents  plus  anciens,  en  a  donné  des  extraits  pour  la  Société  de 
l'Histoire  de  France  (1  vol.  in-8",  1851).  Ces  comptes  de  l'argenterie  embrassent  une  période  de  six  mois,  du  1"  janvier  à  la 
Saint-Jean  d'été,  de  la  Saint-Jean  au  !•'■  janvier  suivant  ;  on  y  lit  d'abord  les  fonds  de  recettes  ordinaires  et  extraordinaires  ; 
puis  viennent  les  dépenses  séparées  du  roi,  des  frères  du  roi,  et  de  la  reine:  draps  de  laine  et  de  soie,  toiles,  chaussures, 
chapellerie,  bijoux,  peignes  et  peignoirs  même,  y  sont  détaillés  par  le  menu  ;  ce  compte  se  termine  d'ordinaire  par  une 
longue  énumération  de  dettes  arriérées  et  de  façons  soldées.  L'Histoire  du  Costume,  pour  la  fm  du  xiv«  ciecle  et  le 
commencement  du  xv  siècle,  est  là  tout  entière;  on  peut  voir  ce  qu'il  fallait  d'aunes  de  soie  pour  le  hennin  d'une  reine  ; 
M.  H.  de  Laborde  a  déjà  dépouillé  les  comptes  spéciaux  de  l'orfèvrerie  dans  le  glossaire  de  sa  Notice  sur  les  émaux  et 
oijotix  du  Louvre  (1853,  2  vol.  in-12).  (x.  e.)  —  (2)  eau  régale. 


AR 


—  143  — 


°  fi  "i''^^  ^^°s^s  exiraordinaires.  Il  avoit  '^00 
«  francs  de  gages.  »  (Etat  des  Officiers  des  D  de 
«  Bourgogne,  p.  22.  -  Voy.  Arge.nte™  ) 

P.ni"';'f'l'-''"'*"^*'  l'-^'cception  de  ce  mot  Arqentier 
etojt  SI  générale  que,  sans  égard  aux  distinctions 
elabhes  entre  un  Ministre  des  finances    utS 
ner,  un  Receveur,  un  Caissier,  un  intendant  de 
maison,  un  homme  d'alfaire,  on  es  réunissoï  oS 

souslamemedénomination.JacquesCœurqS  so  s 
le  règne  du  roi  Charles  VII,  étoit  ce  qu'ont  été  dé 
puis  les  Surintendans,  les  Contrôleurs  -énériv 
eto.t  qualifié  tout  simplement  cXXr  ^./ÏC^ 
S.f  "  ^'^-  (^^°y-  P'-O'^^*  fie  ,1.  Cuer  i  p  8.1  - 
Godefroy,  Rem.  sur  rilist.  de  Charles  VII,  p  850  1 

If,  if  r  '^°"''  ^r^"«"  du  Trésorier,  du  Rect 
eur  des  l^^nances  de  Charles  VI,  lorsqu'en  lil2 
1  Université  disoit  dans  ses  remontrances  .On 
<■  n  excuse  pas...  Raymond  Raguier  qui  a  la  princi- 
"  P'i^^  administration  de  voslre  Chambre  aux  dé- 
"  »  «l  S:,no"  plus  que  vostre  Argentier  Poui  art  (I) 
«  et  Guillaume  Budé,  maistre  de  vos  garniso  s  nai' 

'■  d  argent,  dont  vous  ne  tirez  aucun  profit  et  dont 

:  £n?'a'."/r"'"'''''^'^'^^'^'-desterre'^e  letïïs 
"biens.  »  (Le  Laboureur,  Hist.  de  Charles  VI  n  «si 
On  designoit  un  Caissier,  un  Intendant  de  nrasôn' 
un  Homme  d'atîaires,  en  disant  :  !  Corbieu    sis 

aussi  tacile  que  supe  fli  d'àciu^^if  j^'i:;  ^^ 
de  la  signification  générale  d'^r^^-^i/g,.  honime  uni 

ce  les  du  mot  Argentier  qui,  dans  un  sens  eHtif^ 
celui  de  rexpression  «  faii'e  e  fait  et  demenere  ùnî 
d  argenterie,  »  sienifioit  Bannuie.    fVn      v      .    î 

»vo,l  po,,r  objel  ruliliié  p"l  iiw'Jl  m«  il    S' 


AR 


:  / f'?"'"' j  tellement  que  par  le  papier  des  Aroen- 
tiers    plusieurs  con tracts  estoient  evuédie/  1» 
«  estoient  lesdits  papiers  authentk  ies  et  /  foiVn 
"  foi  comme  les  instrumens  passés  Dardiinfl^ 
:  Notaires  d'aujourd'hui.  „  (Voy    Nicot    D l't  !  On 
soupçonne  que^dans  la  coutLm^  de  Vaio?s,^c'o?t" 

miner  le  nombre.  Dans  un  spn«  nnoi^        x^eter- 
de  l^adjeclif  rr.^.»/,  ;]"  Vu^,'X  l'a^^^^^^^^^ 
boit  homme  riche,  un  homme  en  aro|nt    ,  IcK 
«  Jouyencel....  pour  ce  qu'il  n'estS pas -rnfl? 

tion  ;  la  seconde  dans  le  Dicl.  de  Cotgrave.   " 

VARIANTF-;  • 

ARGENTIERE.  Colgrave  et  Oudh;   Dict 
Argeantière.  Monet,  Dict. 

ArgeiUif,  AcIJ.  Blanc  comme  argent  On  •!  dit  p» 
ce  sens,  que  le  croissant  de  la  lune  esfc|.  ;  e  m? 

esA^Î!^S5^eS-^;f-^J^S;;,^£- 

comme  aggen,  le  premier  o  se  d,a,i°i?pn  „  ô?    '• 

On  a  loué  dans  Sully  son  activité  ..  à  travailler 
«  aux  argmes  (2),  turcies  et  levées,  pontz,  pavez  éhe. 
«  mins  et  chaussées,  et  sa  vigilance  à  faire  en  ^orfP 
«  (lue  les  deniers  octroyez  aux  Villes  et  rn.«m„ 
«  nautez  pour  tels  ouvrages,  y  fussenf  bien  m 
■'  ployez.  »  Mém.  de  Sullf  T  V  n  lo  i>w\  T' 
soins  tels  que  ceux  du  Ministre^rSri  n-,'qu1 


(1)  Charles  Poupart  était  CHYJÊO/Wdpmilc  iqon  .,. 

Lxxx.  milUa  hominum  eï  mu  ierum    F?/'"''"''.''" '«^'^!''''  (M«ratori    Vlir  col   Wiv  <?Tnn?'^'''  ^«semate....  A,yi>,e  se 
victuaUbus.  .  (N.  E.)  ""^'^'^"'»-  Et  f^^^erunt  a,rjinale,n  contre  exercitU  de  biscottô,'^dëca~e1ardo, 'e"t  de'^lt'erfs 


AR 


144  - 


AR 


Louis  XIV  doit  une  partie  de  la  gloire  de  sou 
règne. 

Arnot,  siibat.  masc.  (Voy.  Argoteure.)  Article  de 
dol^!-du  pied;  doigt  du  pied.  Ergot  de  coq,  de 
cliièn.  etc.  Boulet  d'un  cheval. 

Fn  faisant  rénexion  que  d  et  t  sont  des  lettres  ae 
nie^meoSane,  auxquelles  on  a  substitue  souvent  a 
"ettre^  dans  la  prononciation  et  rorthographe  de 
auanlilé  de  mots,  ou  conçoit  la  possibilité  quarto/, 
Su  pluriel/ soit  une  alténtion  d  «'■f«^./,  ar- 
tok  au  p  unel  avtans,  arm.  (\oy.  Aktieil.) 

i;opinion  d'après  Uuiuelle  on  se  persuaderoi 
qu'arîoi  est  réellement  une  altération  d  «rn/t'«,  et 
Ja.  conséquent  de  même  origine  sembleroil  peut- 
?ù-e  d'autant  plus  probable  4"  ^^  i^';«'\.,«  S,J^ 
même  signitication,  lorsiiue  pour  designer  attitude 
iu  homme  qui  se  tient  légèrement  sur  la  pointe 
du  pied,  qui  se  tient  ferme  et  eleve  sur  a  pou  tedu 
pied  par  la  tension  des  articles,  on  dit  au  piopie 
?  a  liguré,  qu'il  se  tient  légèrement  sur  ses  ergots 
qui  lèft  surses  ergots.  «Le  Bonhomme  se  . eut 
l  sur  ses  ergots  le  plus  leg'èrement  qu  il  peut  » 
(Les  quinze  Joyes  du  mariage,  p.  '1-)  •'Lf"\mf 
lion  et  l'opiniastreté  sont  signes  exprès  de  bestise 
.,  f  e  e-CY  aura  donné  du  nez  à  terre  cen  fois  pour 
:  un  otir;  le  voila  sur  ses  (^r^o/s,  aussi  résolu  et 
.  entier  que  devant.  »  (Montaigne,  Essais,  1.  111, 

'^'L'Iltftudfd'un  homme  élevé  et  ferme  sur  ses  er- 
gots, sur  ses  arigots,  est  celle  d'un  homme  qui  me- 
nace son  adversaire,  et  lui  résiste  de  manière  a  se 
faire  cïàindre.  De  là  ou  a  ditflgurémenteu  par  an  t 
du  duc  de  Glocestre  et  de  PhiHppe-le-Bon  duc  de 
Bourgogne,  également  redoutables  1  un  à  laulie, 
«  qu'ils  estoient  tous  deux  sur  leurs  angoU.  » 
(Mém.  d'Oliv.  de  la  Marche,  liv.  L  P-  l-'i9-) 
C'est  par  mignardise  de  prononciation,  qu  à  1  oi- 

thographe  argot  ^^Ar^^^.::f^^!:^'^Si:}, 


^'  cS  ,  Dict.)  On  pourroit  regarder  comme  relative  a 
•dîj  mologie  (^- argot,  finsertion  de  la  voyelle  i  dans 
ariqot,  si'la  raison  de  celle  orthographe  qu  en  cer- 
taines provinces  on  altère  en  prononçant  engot  et 
hérigol  d'où  le  participe  érigoic  ou  '"'';'t/o  '>,,et  ]e 
substantif  érigoteure  ou  hérigotcnre,  eut  ele  1  idée 
de  la  possibilité  que  l'origine  darlueil,  en  latin 
fl?'//cH/!is,soitcommune  au  moUirgoton  ergot.  Ma\s, 
il  est  plus  vraisemblable  que  relativement  a  1  idée 
de  la  figure  redressée,  en  latin  arrccta  ou  erecta, 
de  l'ongle  pointu  dont,  par  exemple,  le  derrière  de 
la  iambe  d'un  coq  est  hérissé,  l'on  aura  imagine  les 
oithographes  arigot,  êrigot  et  herigot,  qui  auront 
paru  contractées  dans  argot  et  ergot.  Ce  seroit  alors 
par  extension  de  cette  acception  particulière,  que 
l'ongle  qui  croit  au  derrière  de  la  jambe  du  chien 
et  de  plusieurs  autres  animaux,  quelle  qu  en  lut 
la  fio-ure,  auroit  été  nommée  arigot  et  erigot,  par 
contraction  argot  et  ergot.  (Voy.  Nicot,  Dict.  au  mot 

'peutêtre  trouvera-t-on  plus  raisonnable  de  croire 

(1)  Posé,  placé  près;  en  latin  apposltus.  -  (.2)  Jusqu'aux. 


que  dans  un  sens  analogue  h  celui  d  article,  join- 
ture, \e  mol  argot  ou  ergot,  altéré  dans  arigot  mi 
érinot  a  signifié  non-seulement  1  ongle  qui  croit  au 
derrière  de'la  jambe  de  quelques  animaux,  mais  la 
corne  molle  qui  est  au  derrière  du  boulet  d  un  che- 
val parce  que  celte  corne,  ainsi  que  1  ongle  du  coq 
et  du  chien,  croît  au  premier  article,  à  la  première 
jointure  de  la  jambe.  L'argot  ou  Vergot  du  cheval, 
est  une  corne  molle  de  la  grosseur  d'une  châtaigne, 
qui  est  au  derrière  et  au  bas  du  boulet,  de  la  jointure 
au-dessus  du  paturon  de  la  jambe  du  cheval  (Voy 
Dict  de  Trévoux,  au  mot  Ergot.)  Telle  est  sans 
doute  la  signification  de  l'ancien  mot  pluriel  argos, 
dans  ces  vers  ; 

S'est  à  eus  si  ajoins  et  apos  (1), 
OÙé  plus  de  trente  mil  en  a  que  pns,  que  mors, 
Ôue  ses  cevax  en  fu  et  sanc  dusc  as  (2)  o'-yos- 
^         Rom   d'Alexandre.  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  19-2.  R»  col.  1. 

VARIANTES  : 
ARGOT.  Cotgrave,  Nicot  et  Monet  Dict 
Argos  (Plur  )  Rom.  d'Alexandre,  MS.  du  R.,  fol.  192. 
Xrgoz:  (Plur.)  Bible  en  franc,  MS.  de  la  Clayette,  p.  523. 
Arigot.  Mém.  dOliv.  de  la  Marche,  liv.  i,  p.  US). 
Ergot.  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict. 

\raoté,participe.  Qui  a  des  ergots.  (Voy.  Argot.) 
«  Les  chiens  fauves  qui  sont  retroussez  eiherigo- 
«  /(?s,  sont  bons  à  faire  limiers.  »  (Nicot,  Dict.  - 
Voy.  Argoter.) 

VARIANTES  : 
ARGOTÉ,  Ercoté.  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Erigoté.  Monet,  Dict. 
Hergoté.  Nicot,  Dict. 
HÉRiGOTÉ.  Nicot  et  Monet,  Dict. 

Ai-goter,  verbe.  Combattre  avec  les  ergots; 
lulter,  combattre  corps  à  corps.  ,      „  u„ 

En  disant  d'après  Cotgrave  et  Nicol,  que  le  verbe 
arnoier  désiguoit  la  manière  de  combattre  qui  est 
aturelle  aiTx  coqs,  on  en  concluera  poin  avec 
eux  que  par  allusion  ti  celte  manière  de  combattre, 
ilasionifié  figurément,  contester,  disputer,  chica- 
ner dans  la  di'spute.  11  est  plus  probable  qu  en  ce 
^Z,argofere!i  une  altération  du  verbe  ergoter 
Smé  ûe  Vergo  si  familier  aux  argumentateurs, 
dans  les  disputes  de  l'Ecole^  (Voy.  ^^'^^■l 

L'attitude  d'un  homme  ferme  et  eleve  sur  ses 
ercjots  étant  naturelle  à  ceux  qui  luttent  et  combat- 
tent corps  à  corps,  on  a  pu  dire  relativement  à  cette 
Liée  même  en  parlant  de  la  lutte  amoureuse 
„  Mahilet....  prinl  Gilet  par  la  poitrine  et  ledit 
„  Gilet  lui  semblablenaent;  et  tenoient  et  hargo- 
oient  l'un  l'autre  forment.  »  (D.  Ca.pentier,  bup 
Gloss  lat  de  Du  Gange,  au  mol  Argutw;  Ut.  de 
V'Stri  <!  A  la  femme...  .  disl  ces  mots  :  avance,  si 
le  va  faire  joluier,  qui  est  à  enlendie  harigoter^^ 
Id  ib  d  lit  de  1403.1  Peut-être  la  signilication  de 
Sdère  verbe  harigoter  est-elle  relative  a  celle 
de  la  tenue  expression  frôler  Vortoie  dune  ^ 
femme  0,1  a  indiqtié  la  Possibilité.iu'a,.,o  e  artÇ 
soient  de  même  origine  que  artueil,  ortueiL  etc. 
(Voy.  Argot  et  Arteuil). 


AR  -  145  — 


AR 


VARIANTES  : 
ARGOTER.  Cotgrave  et  Nicot,  Dict. 
Hargoter.  D.  Carp.  S.  G.  1.  de  Du  G.  à  Argutio 
Harigoter.  Id.  Ibid.  tit.  de  1393. 

Argoteiir,  sitbst.  tnasc.  Ergoteur.  (Cotarave  et 
Nicot,  Dict.  -  Voy.  Argoter.)  v      ë     ve  ei 

Argoteure,  subst.  fém.  Ergots.  Terme  collectif 
a  ergots  ;  dans  une  signification  spéciale,  »  assor- 
«  tissement  d'ergots,  es  chien  de  Vénerie.  »  (Monef 
Dict.  —  Voy.  Argot.) 

VARIANTES  : 
ARGOTEURE.  Cotgrave  et  Nicot,  Dict. 
Ergoteure.  Nicot,  Dict. 
Ergoture.  Cotgrave,  Nicot  et  Monet,  Dict 
Herigoteore.  Nicot,  Dict 
Héric.oture.  Monet,  Dict. 

Argouirer,  verbe.  Vah-e  des  agaceries  ;  fâcher 
par  des  agaceries.  Il  semble  que  dans  un  sens  rela- 
tif a  celui  d  arguer,  fâcher,  on  ait  dit  ■  ><  Alizon 
«  commança  à  se  rejouir  et  à  argouirer  par  paroles 
«  à  icellui  estourmel  qui  estoit  sur  la  table  en  une 
-<  cage  de  bois.  »  (D.  Caipentier,  Suppl.  Gioss.  lat 
de  Uu  Lange,  au  mot  Argutio;  tit.  de  1480.  -  Vov 
Arguer.)  ^* 

Argu,  stibst.  musc.  Blâme,  reproche,  accusation 
querelle,  otîense,  etc.  Avis,  vue,  idée,  sentiment' 
volonté,  croyance,  etc.  Divination,  Raison,  raison- 
nement ;  prétention,  demande  ;  argument  cantieux 
sopliisme;  subtilité  d'esprit.  Peiiîe  d'esprit  per- 
plexité; doute,  irrésolution.  (Voy.  Arguer  ) 

Il  est  possible  que  relativement  [i  l'idée  d'une 
chose  claire  et  évidente,  d'une  chose  clairement  et 
évidemment  démontiée,  le  mot  argu  ait  signifié 
blâme,  reproche,  accusation,  querelle,  offense- 
signification  dont  on  abrégera  la  preuve  parce 
qu  elles  sont  analogues  à  celles  du  verbe  arguer 
«  Mars  est  le  Dieu  des  Batailles,  et  se  délecte  en 
«  occisions,  en  contentions,  en  argux-  et  en  toutes 
«  dissensions.  »  (Percef.  Vol.  1,  fol.  lo-i,  V ■  col  ->) 
«  LeMareschal  de  Saint-André  s'estoit...  absenté 
■•  de  la  Cour  pour  quelques  paroles  A' argu  qu'il 
«  avoit  eu  avec  le  roi  de  Navarre.  ..  (Lelt    de  Pas- 

?Cetc. -\StTicl.)"'  '''■  "'  '''■  '''  ''  '''' 

Hui  matin  le  lairiistes  (I)  ;  malvès  est  vo  arnus. 
Moult  lost  vous  en  est  ore  li  guerredoiis  rendus 

Rom.  d  Alexandre.  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  200,  V"  col   3 

Dame  Sapho,  de  Pan  belle  amoureuse 
Contre  Atropos  austère  et  rigoureuse 
l'eu  et  chanta  ung  dictié  plain  d'argus. 

Poës.  de  Crétin,  p.  45, 

On  retrouve  la  même  analogie  entre  l'acception 
d  arguer,  éclairer,  aviser,  et  celles  d'argu,  avis  vue 
Idée,  sentiment  par  lequel  on  est  plus  ou  moins 
éclaire  sur  la  raison  de  vouloir  une  chose  ou  de  la 
croire  -  Luy  remonstra  tellement  et  si  sagement 
"  ^}^  V,  br'sa  les  argus  du  roi  de  Hongrie.  »  (Frois- 

^'p'.^^'a  ^r'  P-  ^^'^■)  "  Tant   considéra    Messire 
<■  J  leirede  Craon  ses  besongnes  qu'il  y  subtillapar 

(1)  Blessâtes,  offensâtes.  -  (2)  Le  Démon 


mauvais  argu  et  par  l'enhortation  de  l'En- 
nemy  (-2).  ,.  (id.  ibid.  p.  140.)  «  S' Aimericot  eust 
tourne  ses  voyes  et  argus  en  bonnes  vertus,  il 
esloit  bon  homme  d'armes,  de  faict  et  d'emprise 
pour  moult  valoir  ;  et  pour  ce  qu'il  en  fit  tout  le 
contraire,  il  en  vint  à  maie  fin.  »  (Id.  p.  77.) 

four  recouvrer  le  temps  que  j'ai  perdu, 
voeu  de  nouvel  priler  nouvelle  amie- 
Je  croi  que  jaie  un  raisonnable  air/u 
Pour  recouvrer  le  temps  que  j'ai  perdu. 

Kroissarl.  Poès.  MSS.  p.  331,  col.  t. 

On  me  dit,  dont  j'ai  grant  merveiUe, 
yne  de  dormir  est  temps  perdus. 
Tant  qu'à  moi  je  m'en  esmerveille- 
Car  le  dormir  me  vault  trop  plus 
Que  le  villier.  C'est  mes  argus  ■ 
Dormir  est  grant  aise  de  corps,  etc. 

Id.  ibid.  p,  315,  col.  1. 

Quoi_que  la  divination  regardée  par  l'homme 
supersli  leux  et  inquiet  de  l'avenir,  comme  un  avis 
qui  I  éclaire  sur  son  sort  futur,  puisse  avoir  été 
désignée  par  ce  mot  argu,  on  croit  néanmoins 
quen  ce  sens,  argu  est  une  altéiation  d'aunur 
présage  tire  de  l'observation    des  oiseaux    (Vov' 

AUGUR.)  •    \    "J- 

Ne  croit  en  songe,  n'en  argu, 
En  carroi,  ne  en  esternu. 

Rom.  d'Amadas.  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  319,  V"  col.  i. 

Si^dans  la  fable  d'un  larron  et  d'une  sorcière. 
.MS.  du  R.  n-  7989,  fol.  173,  R"  col.  I,  on  lit  argu  en 
ce  même  sens,  un  autre  ms.  présente  le  mot  aunur, 
moins  défigure  dans  un  troisième  iis.  où  on  lit 
argure. 

Qu'il  ne  croient,  Diex,  le  deffent, 
En  argure,  n'en  sorcerie; 
Car  trahis  est  qui  s'i  affie 
Fabl.  d'Esope,  MS.  du  R.  n'  7615,  fol.  86,  V  col.  2  ;  Fabl.  49. 

Enfin  le  mot  argu,  relativement  à  l'acception 
geneiale  d'arguer,  éclaircir,  raisonner,  signifioit 
raison,  raisonnement,  par  lequel  on  croit  pouvoir 
rendre  claire  et  sensible  la  justesse  d'une  idée,  la 
justice  d'une  prétention,  d'une  demande,  etc  Ouel- 
que  raisonnable  que  soit  l'indifféience  du  Sa^-e 
pour  les  richesses ,  l'homme  riche  s'imaginera  tou- 
jours l'humilier  en  lui  disant  : 

Li  poure  chetif  qui  sont  mol, 

En  voslre  argu  vous  soustendroient  ■ 

Car  ne  puent  faire  leur  vol 

Aux  richesses  qu'avoir  vouldroient. 

Eust.  Descli.  Poos.  MSS.  p.  106,  col.  3. 

Le  roi  d'Aragon  sollicité  de  prendre  la  défense 
du  pape  Benoist  Xlll  contre  le  roi  de  France 
Charles  M  «  respondità  ceux  qui  delez  luy  estoyent' 
'<  Guide  ce  prestre  que  pour  ses  «rr/ws  aider  à  sous- 
"  tenir,  je  doye  entreprendre  la  guerre,  contre  le 
•■  roi  de  France  ?  on  me  tiendroil  bien  h  mal-con- 
«  seille.  ..  (Froissarl,  Vol.  IV,  p.  311.1  On  raconte 
que  le  roi  Jean  ayant  été  fait  prisonnier  avec  Phi- 
hppe-le-Hardi,  celui  de  ses  fils  qu'il  aimoit  le  plus, 
«  Un  chevalier  Anglois  prétendit  droit  à  la  foy  du 
<■  Roy...  et  pour  ce  que  le  Roy  ne  déposa  pas  au  gré 
«  du  chevalier  demandeur,  il  se  troubla  :  et  cuida 
«  Philippe  le  fils  entendre  qu'en  ses  argus  il  dé- 


19 


AR 


_  li6  — 


AR 


«  COUD  donna  au    t^e^alel    h"'  „t,  ^ 

oïtm.rflv   »  (Mém  d'Ol  vier  de  la  Marche,  p.  à-., 
"  ^-^V        lo  if  ra  son  el   du  raisonnement,  etoil 

SaSenl  et  évidemment  vraie,  on  diso.l . 

Je  feroie  par  mon  arcju: 

Ce  qui  est  no.r^deve^r_blanc.  ^^^  ^  ^^,^^  ^^,  , 

Famé  a  trestout  passé  argu  ; 

Par  lor  engin  sont  deceu 

Li  Sage,  des  le^ten^AbeL  ^  ^^_^^^  ^^^  ^^^^  ^.  ^^,  , 

On  ne  parvient  pas  toujours  aisémenlà  éclaircir 
,  ^nnf^  de  l'esorit  partaoé  entre  des  idées  contrai- 
res StcÊontre?ùùr^ncnl  la  raison  qui  doit  en 

:  ïaSf,  etc!t  (Percef.  Vol.  Ul,  fol.  138,  Y'  col.  2.) 

A..fiiipp  subst  fém.  Argument  sophistique. 
Abt  ?e  fa  subtm?é  d-'esprit.  (Oudin  et  Monet,  Dict. 
_  Voy.  Argu  et  Argutie.) 

Arquer,  verbe.  Montrer  clairement,  démontrer  ; 
Wa^ne?'  accuser, condamner,  punir;  quereller,  chi- 
cSer  importuner,  fâcher,  offenser,  etc.  Eclaner; 
avser  aire  voir,  avertir,  vouloir;  presser,  ha  er, 
épeionner  'aiguillonner,  faire  souffrir,  ourmenter 
Ser  douloureusement.  Eclaircir;  rendre  sensible 
efdfstinct  avancer,  prétendre,  objecter,  rétorquer  ; 
Jaisoier,'  examiner,  discuter,  disputer;  hésiter 
dou?èï,  conjecturer  ;  argumenter,  sophistiquer,  faire 

^^  LÏuion  des  Etymologistes  est  que  dans  le  sens 
propres  oier,  en  latin  argtiere  (1),  signifie  montrer 
SSient  u  e  chose,  la  démontrer  évidemment, 
S  rendiè  claire  et  évidente.  On  a  donc  suppose  que 
la  ia"son  de  blâmer,  d'accuser,  de  condamner,  de 
puni  %étoit  clairement  et  évidemment  démontrée 
lorsqù'en  ces  significations  analogues,  on  a  dit  . 
Pm  ceu  ke  cil  cui  il  argtiet  el  reprent,  ne  pu.st 
«  murmurier,  etc.  ^.  (S'  Bernard,  Serm.  fr.  mss. 

n  S4i  1  »  Li  reis  Saul  avoit  une  amie e  Uib- 

!'bose  h,  le  fils  saul  s'aperceut  que  Al^^er  la  han- 
„  iad;si  em  parlad....  e  Abner  se  cuiuchad  fo  - 

..  ZnL...  si  li  dist tu  as  enquis,  ma  v'e  s  me. 

..  niir  mei  aroner  pur  une  femme.  »  (LiviCb  cies 
Ro?s  M  des  CordeL  fol.  /i3,  Y°  col.  2)  »  Liquels  de 
»  vo'sm-ar^wmUdepécliier?  »  (S' Bernard,  Serm. 


fr  M^s  p.  344.)  «  Je  ai  pécliiel  à  nostre  Signor,  ce 
dist  David,  quant  Nathan  l'«''ff«'''«/^.de  adul" 
teire.  »  (Id.  ibid.  p.  368.)  «  Sire,  ce  dist  li  Sal- 
mistes,  ne  m-uryuer  en  ta  forsenncne.  »  ^Id-ibid. 

n     '2%)  C'est  le   commencement    du    pseaume, 

!,■  Domine,  ne  in  furore  tuo  arguas  me,  »  paraphrase 

dans  ces  vers  : 

Las  !  en  ta  fureur  aiguë 

Ne  m'argue 
De  mon  tait,  Dieu  tout-puissant  : 
Ton  ardeur  un  peu  retire, 

N'en  ton  ire 
Ne  me  punis  languissant. 

Clern.  Marot,  p.  6bï. 

Le  bon  ami  point  et  fovyKe 

^^Lfoffe"f.^rl^Tluuf afrr».  ao  Fauve,,  MS.  du  R.  fol.  4S. 

La  vieillesse  est  naturellement  encline  a  blâmer 
et  à  condamner  tout  ce  qui  n'est  p  us  de  son  goût 
îl  semble  donc  qu'on  ait  désigné  dans  une  vieille 
emme  cette  inclination  à  blâmer,  a  condamner  a 
auerel ler!  à  chicaner  avec  une  aigreur  importune, 
en  disant  :    «  C'est  une  vieille,  seiche,  aigre  av- 
oua t.  »  (Les  quinze  .loves  du  mariage,  p.  132  ) 
On  conçoit  qu'au  moyen  de  l'extension  de  la 
cause  â  l'effet,  la  signification  de  ce  verbe  arguey 
St  êli-e  la  même  que  celle  d'importuner  tacher, 
offïnseï    ou  de  tout  autre  verbe  propre  a  designer 
f'effét  d'une  chicane,  d'une  querelle, d'une  condam- 
nSn  "l'une  accusation,  d'un  blâme  mjuste  e 
éraisonnable.  «  Lyonnel  et  ses  compaignons  furent 
7miÏÏtdolens  de  ce  que  le  desloyal    ^^l^l'^es  le^ 
>,  estoit  venu  arguer  et  mocquer.  «  (Peicet.  \oi. 
V  fol  4  -  Yo5'.  Cola-rave,  Nicot  et  Monet,  Dict.) 
L'amour  que  la  fierté  d'une  femme  sensible  et  ver- 
tueuse condamne  el  contre  lequel  elle  se  fâche, 
n'en  est  souvent  que  plus  dangereux. 

A  ce  que  famé  est  convoiteuse, 

Au  premier  se  tient  orgueiuose. 

Com  plus  se  deffent  et  aiyue, 

Tant  est  ele  plustot^^amcue.^^^^^^  ^  ^^^^  ^^^_  „_ 

Il  paroit  inutile  de  multiplier  les  preuves  de 
la  réalité  d'une   extension   quil    suffira    davoii 

''"eS  montrant  clairement  la  raison  d'une  cliose  en 
la  démontrant  évidemment,  o^.eclaire  on  avise 
celui  à  qui  on  la  démontre,  on  lui  fait  voir  la  i  aisoi 
potu'  aquelle  on  veut  qu'il  fasse  ou  ne  fasse  poin 
S  c  lose  la  raison  pour  laquelle  on  'en  avertit,  en 
le  pressant  de  se  rendre  à  l'avis  qu'on  lui  donne. 

Li  Arceveskcs  de  Ruem  Hue 
De  la  pais  moult  le  Duc  ai-gne  ; 
Et  li  Dus  vint  al  parlement 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  txa. 

Vous  vous  voulez  mal  atorner, 
Quant  au  siècle  voulez  torner. 
L'Escriplure  vous  en  arrjue 
Par  celui  qui  tient  la  charrue, 
Kt  nuis  derrière  soi  regarde.      „   ,   „  , ,  p, 
Hist.  de  ?r.  ^en \ers  1,  la  suite  du  R.  de  Fauvel,  MS.  du  R.  fol.  67. 


I 


AR 


—  147  — 


AR 


Abés,  tes  basions  par  amont 
A  humilités  te  semont  ; 
Mais  si  tu  vois  trop  dissolus 
Ceaus  qui  dessouz  ta  garde  sont... 
Pour  ce  est  tes  basions  agus, 
Que  tu  les  poingne  en  parfont... 
Abés,  esgarde  la  longuece 
De  ton  baslon,  cora  il  se  drece. 
Il  te  commande  adrecier  l'Ordre  ; 
Abés,  tien  l'Ordre  sans  pérece... 
Evesque,  Abé  je  vous  argu 
Dou  baslon  courbé,  droit,  agu  : 
S'au  baslon  ne  vous  confermés, 
Vous  desserves  estre  batu. 

Dit  de  Charilé,  MS.  de  Gaignat,  fol.  220,  V'  col.  2  et  3. 
Absolument  la  loi  argue 
Et  commande  qu'on  se  marie 
Pour  contenir,  et  pour  lignie 
Avoir,  sans  autre  entencion  ; 
Non  pas  pour  délectation. 

Eust.  Desch.  poës.  MSS.  p.  567,  col.  3. 

Lorsqu'un  homme  éclairé  par  sa  raison  seule,  ou 
par  le  sentiment  d'une  passion,  avisoitou  sentoit  le 
besoin  de  faire  une  chose,  on  disoit  qu'il  s'arguoit, 
qu'il  s'empressoit,  se  hàtoit  de  la  faire. 

Chascuns  de  bien  férir  s'arrjiœ. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  8,  R°  col.  1. 

Leur  compaignie  vint  après. 
Qui  moult  s'arque  et  fierl  adès. 

IbiJ.  fol.  96,  R- col.  i. 

On  est  éclairé  sur  le  danger  de  mourir,  on  est 
averti  de  l'approche  de  la  mort  par  le  sentiment  des 
maux  qui  en  hâtent  l'instant.  De  là,  on  a  dit: 

En  l'aage  vient  qui  de  mourir  Varnuc. 

Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  388,  col.  2. 

Li  cuers  me  faut,  la  mors  m'argue. 

Rom.  d'Amadas,  MS.  du  R.  n"  6987,  fol.  325,  V"  col.  3. 

Li  Rois  euist  dit  mainte  cose  ; 
Mais  li  raaus  qui  l'argue  et  cose, 
Le  tenoil  et  hasloit  de  priés. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  641. 

Le  cheval  auquel  on  fait  sentir  l'éperon,  est 
averti  de  hâter  sa  course  :  on  hâte  sa  course  en 
l'éperonnanl.  De  là  Vexpveis'ion  arguer  des  éperons; 
ou  tout  simplement  arguer,  pour  éperonner. 

Le  ceval  broce,  des  espérons  l'argue. 

Ànseis,  MS.  fol.  61,  V'  col.  2. 

Brandist  l'espiel,  et  le  ceval  argue. 

Ibid.  fol.  i2,  V  col.  2. 

Souvent  nos  sensations,  nos  passions  sont  aussi 
douloureuses  que  pressantes.  Elles  font  souffrir, 
elles  tourmentent,  elles  agitent  douloureusement 
l'homme  qu'elles  avertissent  de  ses  besoins  et  qui 
les  sent  trop  vivement.  Ainsi,  le  verbe  arguer 
signifloit  non-seulement  presser,  hâter,  aiguillon- 
ner, mais  faire  soutTrir  en  brûlant,  en  piquant,  etc. 
tourmenter,  agiter  par  une  douleur  physique  ou 
morale. 

Ains  où  vas?  où  viens?  et  quels  besoins  t'argue. 

Rom.  d'Alexandre,  MS.  du  R.  n°  6987,  fol.  197.  V-  col.  2. 


Maulalenl  l'argue  et  alise. 
Kabl.  MS.  du  R. 


7615,fol.  65,  Vcol.  1. 


Li  Solaus  (1)  fu  levés,  li  caurre  (2)  les  argue. 

Rom.  d'.Mexandre.  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  189,  R°  col.  1. 

....  Lecherie  l'espiciere 
Le  fit  delecher  par  angoise, 


Por  la  poudre  qui  les  angoise. 
Qui  si  est  ardent  et  ague, 
Que  leur  langue  prenl  et  argue. 
Crie  chacun,  le  vin,  le  vin,  etc. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7615,  fol.  188,  V  col.  2. 

Plus  de  sept  fois  se  torne  la  Bêle  en  un  tenant  ;  ' 

Du  fort  mal  qui  l'argue  va  forment  tressuant. 

Fabl.  MS.  dn  R.  n-  7-218.  fol.  347.  R-  col.  i. 

*        Amors  si  ont  sor  moi  lor  arc  tendu  ; 
Si  m'ont  navré  d'une  saele  ague 
Qui  m'est  el  cuer  que  point  ne  s'en  remue, 
Ne  ne  fera  tant  com  ma  Dame  plera  : 
C'est  s'amor  qui  si  rti'argue. 

Ane.  Poël.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  657. 

Enfin,  c'est  dans  la  signification  d'éclaircir,  dé- 
montrer clairement  une  chose,  la  faire  voir,  la  ren- 
dre sensible  et  distincte  aux  yeux  de  l'esprit,  qu'on 
a  défini  la  Logique  «  une  science  d'arguer  choses^ 
<>  saintes  et  subtiles,  coulouréesde  faulxargumens, 
»  pour  discerner  et  mieulx  congnoistre  la  vérité 
«  des  choses  entre  le  faulx  et  le  voir.  »  (Eust. 
Desch.  Poës.  ms.s.  p.  39'i,  col.  l.) 

L'amour-propre  nous  persuade  si  aisément  quela 
raison  de  notre  façon  de  voir  les  choses  et  d'en 
juger,  doit  être  claire  pour  les  autres,  que  dans 
l'opinion  de  certaines  personnes  ,  avancer  une 
chose,  la  prétendre,  l'objecter,  la  rétorquer,  c'est 
l'arguer,  la  démontrer  clairement,  la  rendre  sen- 
sible, la  persuader.  Ainsi,  l'on  disoit  :  «  Se  aucun 
ic  veult  arguer  que  je  vueil  faire  de  vieil  bois  nou- 
n  velle  maison,  etc.  »  ([.e  Jouvencel,  fol.  3,  R°.) 

Vous  argués  ainsi,  et  dites 
Qu'en  oiseaux  a  plus  de  mérites 
Qu'il  n'a  es  chiens  formement, 
Quant  au  déduit  que  l'en  y  prent. 
C'est  là  toute  la  question. 

Modus  et  Racio,  MS.  fol.  152,  R'. 

C'est  ung  abus,  vouloir  rédarguer 
Femme  qui  est  ouvrière  d'arguer. 

Poês.  de  Crétin,  p.  99. 

On  abrégera  la  preuve  de  toutes  les  significations 
d'arguer,  relatives  à  celle  d'éclaircir  les  choses,  les 
démontrer  clairement,  les  rendre  sensibles  et  dis- 
tinctes aux  yeux  de  l'esprit.  Elles  étoient  aussi 
multipliées  que  le  sont  les  dilTérens  verbes  qui 
expriment  les  moyens  plus  ou  moins  efficaces  de 
démontrer  aux  autres  ou  à  soi-même,  qu'une  chose 
est  vraie  ou  fausse,  raisonnable  ou  déraisonnable, 
possible  ou  impossible,  etc.  Ces  moyens  étant  le 
raisonnement,  l'examen,  la  discussion,  la  dispute, 
l'hésitation,  le  doute,  les  conjectures,  la  justesse  el 
la  subtilité  d'esprit  avec  lesquelles  on  argumente, 
le  verbe  arguer  signifioit  raisonner,  examiner,  dis- 
cuter, disputer,  hésiter,  douter,  conjecturer  ;  argu- 
menter, sophistiquer  en  abusant  de  la  subtilité  de 
son  esprit.  (Voy.  Colgrave,Nicol  et  Monet.)  »  Argou- 
«  lant  ala  veoir  Chaîies  et  arguèrent  de  plusieurs 
«  choses  ensemble.  ■>  (Triomphe  des  neuf  Preux, 
p.  4-40,  col.  1.)  «  Je  arguatj  en  moy-mesme,  si  je 
«  pourrois  comprendre  et  entendre  ce  que  cela 
«  vouloit  dire.  »  (Mathieu  de  Coucy,  Hist.  de  Char- 
les Vin,  p.  673.)  «  Toutesfois  sur  sa  demande  vous 
«  arguastes,  doublant,  etc.  »    (Percef.    Vol.    III, 


(1)  Soleil.  —  (2;  Chaleur;  en  latin  calor. 


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—  148  — 


AR 


fol.  85,  V"  col.  1.)  En  termes  d'Ecole  arguer,  c'étoit 
faire  le  sophiste  (Monet,  Dict.) 

CONJUG. 

Argueivet,  iiul.  imp.  Bhlmoit,  accusoit.  (S'  B.  S.) 
Argutn,  ind.  prés.  Vous  condamnez.  (Id.  ibid.) 
Arguet,  ind.  prés.  Blâme,  accuse.  (Id.  ibid.) 
Aryuevel,  ind.  imp.  Blàmoit.  (Id.  ibid.  p.  -113.) 

Argiieiir,  suijst.masc.  Argumentateur.  Raison- 
neur. (Voy.  Colgrave  et  Oudin,  Dict.) 

Argueux,  adj.  Qui  lient  du  reproche,  de  l'of- 
fense, de  la  dispute.  Signilication  relative  à  celle  de 
l'expression  paroles  â'argu.  (Voy.  Argu.)  «  Auquel 
«  Boulet,  Pierre  Dubos  print  paroles  argileuses.  » 
(D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au 
mot  Argulio;  lit.  de  1477.) 

Arguil,  subst.  Argil.  (Voy.  Ardille.)  «  Si  Deus 
"  fesoit  son  iremer  jugement  par  eauve  sur 
«  l'umayne  lignage,  les  tables  d'arguil  et  d'arein  si 
«  dépesceroient,  e  celés  de  piere  remeyndroyent.  » 
(Hist.  de  la  S"  Croix,  ms.  p.  11.) 

VARIANTES  : 
ARGUIL.  Hist.  de  la  S'=  Croix,  MS.  p.  11. 
Argoil.  Ibid. 

Arguilloîineux,  adj.  Enclin  à  chicaner,  à  dis- 
puter; plein  de  fausses  subtilités.  (Gotgrave,  Dict. 
—  Voy.  Argu  et  Argi'er.) 

Argument,  subst.  masc.  Vue,  idée,  sentiment. 
Raison,  raisonnement,  dispute,  plaidoyer,  écriture, 
production,  etc.  Les  acceptions  usitées  et  inusitées 
d'argument  étant  comme  celles  d'argu,  relatives  à 
l'idée  d'une  chose  claire  et  sensible,  on  a  dit  au  pre- 
mier sens  :  «  Si  monterez  plus  haut  que  je  ?  Par 
«  mon  chief,  non  ferez  je  fausserai  vostre  argu- 
«  meut.  >'  (Rom.  de  Dolopalhos,  ms.  de  N.  D.  n"  2, 
fol.  68,  V°col.  1.) 

On  raisonne,  on  dispute,  on  écrit,  on  produit  en 
termes  de  procédure,  afin  d'éclaircir,  de  rendre 
sensible  la  vérité  d'une  idée,  la  bonté  d'une  cause. 
De  là,  le  mot  argument  a  signifié  raison,  raisonne- 
ment, dispute,  plaidoyer,  écriture,  production. 
(Voy.  Gotgrave  et  Monet,  Dict.)  «  Il  se  fist  un  argu- 
«  ment  de  deux  Dames  jeunes  et  biaux  ;  l'une  avoit 
«  chiens  et  l'autre  oiseaux.  «  (Modus  et  Racio,  ms. 
fol.  147,  R°.)  «  Deux  Dames  firent  un  argument  de 
«  ceste  matière....  et  l'envoyèrent  au  comte  de 
«  Tancarville  pour  estre  jugié.  »  (Ibid.  fol.  145,  R°.) 

Les  lettres  apporta 

Au  Conte  à  qui  les  présenta  ; 
Et  le  Conte  les  prist  à  lire. 
Assés  tost  commença  à  rire, 
Et  dist  :  où  est  l'arcjument  ? 

Modus  et  Racio,  MS.  fol.  158,  R*. 

Un  de  nos  Auteurs  du  xvi'  siècle  souffroit  impa- 
tiemment le  mépris  qu'affectoient  pour  l'Ecrivain 
pensant  et  raisonnant  en  françois,  «  je  ne  sçay  quels 
<■  braves  sillogisateursd'ar(/ume»i/sco>'H«s,  qui  don- 
«  noient  la  moitié  plus  de  gloire  à  quelque  petit 


«  Maistre  es  Arts  crotté,  ou  autre  bourgeon  de 
«  scolarez,  pour  deux  ou  trois  mots  de  latin 
"  desgorgez  en  une  dispute  ambiguë.  »  (Dialog.  de 
Tahureau,  fol.  1C5,  R^etV".) 

Enfin  ce  mot  argument,  dont  l'usage  est  toujours 
familier  li  la  logi(iue,  a  signifié  et  signifie  encore 
preuve,  indice,  conjecture,  sujet  en  abrégé  d'un 
Ouvrage;  parce  que  l'exposition  abrégée  d'un 
Ouvrage  en  fait  voir  clairement  le  sujet,  et  qu'au 
moyen  des  conjectures,  des  indices,  des  preuves, 
on  se  démontre  les  choses,  on  s'en  éclaircit. 
(Voy.  Argu  et  Arguer.) 

VARIA:iTES  : 
ARGUMENT.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  145,  R». 
.Vrguement.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  157,  V". 
Argu.mant.  Monet,  Dict. 

Argumeiitatif,  adj.  Qui  argumente,  qui  rai- 
sonne avec  esprit  et  subtilité.  On  a  dit  en  ce  sens, 
que  Maistre  Angel  physicien,  «  pari  oit  bel  latin  et 
«  estoit  fort  moult  argumentatif.  «  (Martène,  Thés. 
Aneed.  T.  1,  col.  1574;  lit.  de  1378.) 

Argiinientation,  subst.  fém.  Action  d'argu- 
menter, raisonnement.  L'action  d'éclaircir  une 
vérité,  un  dogme  de  la  foi,  en  argumentant,  en 
raisonnant.  Quoique  ce  mot  signifie  encore  la 
manière  d'argumenter ,  il  semble  qu'on  ne  diroit 
plus  :  «  Il  faut  fuir  toutes  contentions  et  argumen- 
«  tations  dialectiques,  et  se  rapporter  nuemenlaux 
«  prescriptions  et  formules  de  la  foi.  » 

Argunienter,  verbe.  Déclarer,  juger.  Signifi- 
cation relative  à  l'idée  générale  de  clarté  et  d'évi- 
dence exprimée  par  le  verbe  arguer.  On  lit  que 
Sophocles  'i  fut  argumenté  suffisant  au  maniment 
«  des  choses  domestiques,  contre  l'accusation  de 
ic  son  fils,  pour  avoir  veu  l'une  de  ses  tragédies.  » 
(Voy.  Montaigne,  Essais,  T.  II,  p.  11.) 

Argut,  adj.  e\,  subst.  Subtil,  spirituel.  Subtilité, 
abus  de  l'esprit. 

La  signification  d'argut  étoit  la  même  que  celle 
du  latin  «r^'itifis,  subtil,  lorsqu'on  disoit:  «  Il  est, 
"  par  Dieu,  sophiste,  argut,  ergoté,  et  naïf.  » 
(Rabelais,  T.  III,  p.  120.) 

Probablement  il  y  avoit  ellipse  du  substantif 
raisonnement ,  toutes  les  fois  {\\i  argut  signifioit 
comme  argu,  l'abus  de  la  subtilité  d'esprit,  une 
subtilité  affectée.  (Monet,  Dict.  —  Voy.  Argu.) 

Argutie,  subst.  fém.  Argument  sophistique, 
subtilité  d'esprit.  Trait  d'esprit,  saillie,  bon  mot, 
fine  plaisanterie. 

Dans  le  premier  sens,  c'est  l'abus  ridicule  et 
quelquefois  dangereux  de  la  subtilité  d'esprit  dans 
les  disputes  de  l'Ecole.  «  Si  ces  sottes  arguties.... 
«  doivent  persuader  un  mensonge,  cela  est  dange- 
«  reux  :  mais  si  elles  demeurent  sans  effet  et 
"  n'émeuvent  qu'à  rire,  je  ne  voy  pas  pourquoi  s'en 
'<  donner  garde.  »  (Montaigne,  Essais,  T.  I,  p.  260 
et  261.  —  Voy.  Arguce  (i).) 


(1)  Argutiaj  avecraccent  sur  (ju,  a  du  donner  arguce  ;  cette  forme  est  donc  la  plus  ancienne,  bien  qu'on  ne  la  rencontre 
qu'au  xvi«  siècle,  (n.  e.) 


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AR 


Il  y  a  une  subtilité  d'esprit  naturelle  d'où  partent 
les  traits  d'esprit,  les  saillies,  les  bons  mots,  les 
lines  plaisanteries  qu'on  nommoil  aussi  arguties 
(Voy.  Gotgrave,  Dict.) 

Ariole,  subst.  masc.  Sorcier.  Qui  prédit  l'avenir 
par  les  sorts  ;  en  latin  uriolus  ou  hariolus:  mot  que 
les  litymologistes  latins  croient  formé  du  verbe  A«ri 
et  qui  par  conséquent  seroit  d'une  signification 
analogueji  celle  de  fatidicus.  La  maladie  du  roi 
Charles  \[  paroissanl  incurable  à  la  médecine,  on 
imagina  ([ue  la  cause  en  étoit  surnaturelle,  et  les 
ylr/o/^'s  furent  consultés.  «  Aucuns  de  ces  Arioles 
«  atîermoyent,  pour  plus  donner  à  toutes  gens  ù 
«  penser,  que  le  Roi  estoit  démené  par  sors  et  par 
«  charmes  ;  et  le  savoyent  par  le  Diable  qui  leur 
«  reveloit  cest  affaire:  desquels  .Im/^^s  et  Devins 
»  Il  en  y  eut  de  deslruis  et  ars  à  Paris  et  en  Avi- 
gnon. »  (Froissart,  Vol.  IV,  p.  26'i.  -  Voy.  Ariollikn  ) 


VARl.VNTES  . 
ARIOLE.  Froissart,  Vol.  IV,  p.  2ii4. 
AuRiOLE.  Les  Triomphes  de  la  noble  Dame,  fol.  201,  R«. 

Arioler,  verbe.  Prédire  par  les  sorts.  En  latin 
anoiari  ou  hariolari  (Voy.  Aiuole.)  «  Aulu-Gelle 
"  tenoil  tel  langage  à  ceux  qui  croyent  à  ce  qu'ils 
»  enlenuoieiU  anoler,  astrologiser,  et  mathema- 

/rnifrr  ■  Pîï^^ry^"^  '^l'^  ^ous  fier  aux  Astrologues.  . 
(Contes  de  Cholières,  fol.  190,  V°.) 

ArioîIiçMi,  subst.  masc.  Sorcier.  (Voy.  Ariolf  ) 
"  Les  Ariolliens,  les  Enchanteurs,  les  Devinafeurs 
'-  quelonnommoitSaiges,  etc.  »  (Ilist.  de  la  T oi 
son  dor,  T.  I,  fol.  44,  R°.) 

Arir,  verbe.  Devenir  aride  et  sec,  être  desséché 
Rendre  aride  et  sec,  dessécher.  Ce  verbe  rtrSSs 
Rob  Estienne  et  Nicot,  Dict.  est  neutre  ;  eutre  et 
actif,  dans  Monet,  Dict.  (Voy.  Are.) 

Arire,  verbe.  Rire  (1).  Le  principe  évident  de  h 
form.lion  du  verbe  simple  rire,  en  latin  .5  -res' 
1  expression  imitalive  de  l'effet  d'une  sensation 
agréable  et  plaisante,  sur  les  mu.scles  du  visâîe  De 
la,  le  compose  arire,  rire  à  ce  qui  plaît  et  agrée 

Ha  !  Diex,  s'ensi  m'avoit  aris 
Par  amiirs,  une  seule  fois, 
Cèle  viers  cui  j'en  ai  defois,  etc. 

Prison  d'.\mour,  MS.  de  Turin,  fol.  17,  V  col.  2. 

Aristarquer,  verbe.  Faire  TArislarque  Ce 
verbe  anslanjuer,  formé  du  nom  propre  d'un 
Grammairien  célèbre  qui  criliquoitles  veSes  nlus 
excellensPoetes,sembleindiquWl'époqueù S  ue^^^^ 
on  prit  tigurement  ce  nom  pour  désigner  en    otre 

ët"SSetÏ^"5?7T"'-^  ''^-  ^'''-  «^^--  P- 
de  1  Ecole  pour  les  opinions  d'Aristote,  îSju  on 

numeement  (xi.  siècle.  Bol  ^).  »  Cel?x"e^p,;^e^ét=,.'^;,  S  ^ie^XotU^'^'^l^  ^'""^  -'ëu'e^sXa^t^^nt 


disoit .  ..  Icelle  anstotchsant  en  sa  caboche  à  tort 

«  et  à  travers,  veut  que  son  advis  soit  receu  •  ce 

rwS'V^  pP^"^V"^  ^^"f  fl»e  ce  soit  Evangile    » 
(Merhn  Cocaie,  T.  I,  p.  156.)  vai.-,ne. 

Armaire,  subst.  masc.  et  fém.  Lieu,  meuble 

meiible  propre  a  serrer  autre  chose  que  des  armes  ' 
coffre,  bibliolhèque,  chûsse,  niche,  tibernaclé  ' 
un  a  mille  preuxes  qu' Mmaire  on  armoire  en 
lalin  armanum,  a  signifié  en  général  lieu  propre 
J^serrer  des  armes;  spécialement  dans  le  lli  ÏÏ| 
dune  Nation  composée  d'hommes  à  qui,  S  îs  la 
simplicité  de  leurs  mœurs  guerrières ,  les  femmel 
n  apportoient  en  dot  que  des  armes,  et  à  qui  dans 
1  origine  de  la  Monarchie  françoise,  eseul  hônneï? 
d  être  libre  imposoit  la  loi  de  s'armer  pour  a  c  Sse 
eommune.  Il  semble  que,  relativen^ci  à  cetS 
acception  primu.ve  et  eu  quelque  so,f(?nationale 
0  ait  désigne  les  magasins  d'armes,  les  arsenaux 
en  les  nommant  armoires.  «  0  Pr  nces,  hauts  et 
..  nobles  personnages,,.,  ne  tentez  Dieu,  ne  son 
«  executeresse  fortune;  ne  vous  liez  en  force  de 
«chevalerie  de  peuple,  ne  ,V  armoires.  »  (Ifêm 
d  Ohv.  de  la  Marche,  liv.  I,  p.  291  ) 

L'obligation  de  s'armer,  non-seulement  pour  la 
c^iuse  du  .souverain ,  mais  pour  celle  d'un  sSeu? 
féodal,  a  ete  si  générale  sous  nos  Rois  de  la  troisième 
Race,  que  les  roturiers  et  même  les  serfs  avoieït 
comme  les  Nobles,  besoin  d'une  armaire,  d'un  lieu 
^nVi""  "h"''"^  ^"^'^  ''  «'^'-'-e'-  leurs  armes,  d'un 

•es  nostils  qui  communément  courent  avant  la 
«  maison,  et  dont  de  jour  se  faut  nécessaire  ien* 
«  aider  par  errement  de  maison;  si  comme  son 

:  S!^/;.5'f '"'''•■•  ""'^'"^''  '"ir>'^'^  cuslodes,  sou 
«  .-1  mettre  armures  ou  autres  choses.  »  (Roule  lier 
Som.  rur.  liv.I,  tit.  l.vxiv,  p.  434.)  C'est  dans  le  sens 
d  armaire,  coffre  à  mettre  armures,  meuble  ou  lieu 
propre  h  serrer  des  armes,  qu'on  trouve  aumair^ 
eiUinm  armamentum,  dans  un  Gloss.  fr   l"t  "f' 

f'I  ^^  Vf'^  '''^^  P^ï"  D-  Carpentier,  (Suppl  Gloss 
lat.  de  Du  Gange,  T.  I,  col.  296.)  ^^ 

On  croiroit  que  le  François,  familiarisé  avec  un 
besoin  dont  l'idée  flaltoit  sa  passion  natuieSe  pou? 
les  armes,  se  soit  plu  à  généraliser  l'acception  pri- 
mitive et  spéciale  de  ce  mot  armaire  ou  armoire 
qui  a  signifie  et  signifie  encore  «  meuble,  ou  Heu 
«  propre  a  serrer  toute  autre  chose  que  des  armes 
"  réservoir  pratiqué  en  une  muraille,  à  serrer  et 
«  garder  toute  chose.  »  (Voy.  Monet,  DicL)  «  Relais 
«  ou  artmires  ne  font  marque  de  propriété  du 
"  coste  dont  elles  sont  faites,   si  elles'^ne  son 
«  accompagnées  de  pierre  de  taille  traversant  tout 
"  Tosi  )"  ^  Normandie,  au  Coût.  gén.  T  ï, 

Comme  on  a  prononcé  et  écrit enlatin  armazium 


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150  — 


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pour  armarium  ,  il  est  possible  qu'en  françois 
armoire  ou  ermoire  ait  été  prononcé  et  écrit  rt?'mo/s<î 
ou  crinoise,  par  le  chans:emenl  de  /■  en  s  dont  la 
prononciation  dans  ermoisc  est  la  même  que  celle 
de  zàanaarmazium.  Probablement,  c'est  en  parlant 
d'une  armoire,  d'une  iietite  armoire  pratiquée  dans 
le  mur,  ciu'on  a  dit  :  «  Pi'indrent  ung  sachet  et  une 
«  bourse  qui  estoiont  en  une  ermoise  ou  fenestre.  » 
(D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au 
moi  Armaxium  ;  lit.  de  1455.  —  Voy.  Armazi.) 

Les  colîi'es,  les  meubles,  les  lieux  propres  à 
serrer  les  livres  et  à  les  rassembler  en  dépôt,  étoient 
des  armaires  auxquelles  on  comparoit  le  cœur  ou 
la  tète  de  l'homme,  comme  étant  le  dépôt  de  ses 
sentimens,  de  ses  idées,  de  ses  connoissances. 

Alain  fist  ouvrir  les  aumaires  (1), 
Et  fist  venir  les  bons  gramaires  : 
Les  histoires  fist  aporter,  etc. 

♦  Kora.  de  Brut,  MS.  fol.  112,  V  col.  2. 

Celé  estoire,  trouvons  escrite, 
Que  vous  vueil  raconter  et  ratraire, 
En  un  des  livres  de  l'Ainaire 
Monseigneur  S.  Père  à  Biauvès. 

Rom.  d'Alexandre,  MS.  cilé  par  Du  Caugc.  Gl.  lat.  T.  I,  col.  701. 

On  déterminoit  l'acception  d'armaire  en  ce  sens, 
lorsqu'on  disoit  rtrmfl/r<'  à  I ivres,  armaire  à  mettre 
livres.  (Voy.  Nicot  et  Moiiet,  Dicl.) 

Aujourd'hui,  l'on  nommeroit  iigurément  biblio- 
thèque vivante,  un  homme  dont  nos  Ancêlres  com- 
paroient  le  cœur  ;\  une  armaire  pleine  de  livres. 
«  Tant  par-fu  sages  en  toutes  choses,  et  meisment 
"  en  la  doctrine  de  la  foi,  que  ses  cuersestoit  aussi 
«  comme  une  aumaire  pleine  de  livres.  »  (Ghron. 
S'  Denys,  Recueil  des  Hist.  de  Fr.  T.  V,  p.  306.) 

Dans  un  sens  relatif  à  l'idée  de  cette  comparaison 
du  cœur  avec  une  armaire  à  livres,  avec  une  biblio- 
thèque, la  tète  étoit  aussi  une  armaire  ;  la  vérité 
considérée  comme  le  dépôt  des  principes  essentiels 
à. la  législation,  étoit  V armaire  de  toute  toi. 

Dieu  ne  doubtent,  ne  prouvoire  ; 
Cuidier  est  en  leur  aumoire. 

Eust.  Desch.  Poés.  MSS.  p.  78,  col.  1. 
.  .  .  Vérité  qui  est  le  droit  aumaire 
De  toute  loy,  veult  toudis  estre  estable. 

Id.  ibid.  p.  21,  col.  2. 

En  étendant  l'acception  de  ce  mot  armaire  ou 
armoire,  on  en  varioit  le  sens  de  manière  ({\x  ar- 
moire tournant  signifioit  ce  que,  dans  les  monastè- 
res de  filles,  l'on  nomme  un  tour.  (Voy.  Gotgr.  Dict.) 

L'abus  de  l'extension  fut  tel ,  i\{x'armaire  ou 
rt)-îHo/re  signifioit,  1°  châsse,  espèce  de  coffre  oiî 
sont  les  Reliques  de  quelque  Saint: 

Aine  k'il  venist  al  saintuaire 
C'on  aportoit  en  une  almaire,  etc. 

Ph.  MouskDS,  MS.  p.  293. 

2°  Niche  dans  laquelle  on  place  une  statue  :  «  Il 
«  regarda  en  hault  en  une  grande  aumaire  qui 
«  esloit  dessus  l'autel ,  où  l'ymage  de  Mercurion 
«  estoit.  .>  (Percef.  Vol.  ï,  fol.  103,  R»  col.  1.) 

3°  Espèce  de  tabernacle  où  brùloit  une  lampe 
merveilleuse  à  l'honneur  du  souverain  Dieu.  «  Me 


«  pensay  que  je  ne  pourroye  mettre  au  non  de  lui 
■<  plus  belle  remembrance  que  de  lumière;...  et 
"  pour  ce  je  fiz  faire  ceste  aulmaire  que  vous  voyez 
«  si  noble  et  si  riche,  et  y  pendys  ceste  lampe  et 
«  l'allumay  en  l'houneur  de  cellùy  qui  est  souste- 
«  nement  et  lumière  de  tout  le  monde.  »  (Percef. 
Vol.  I,  fol.  65,  R"  col.  2.) 

i"  Enfin  le  tabernacle  où  l'on  dépose  le  corps  de 
Jésus-Ghrist.  (Gotgrave,  Dicl.)  Il  est  probable  que 
relativement  ù  l'itîée  de  ce  tabernacle,  on  aura  dit 
figurément  et  par  comparaison,  en  parlant  de  la 
S"  Vierge  : 

Moult  ait  en  li  très  glorious  amaire 
Ke  toute  fut  plains  dou  Saint  Espir. 
Por  herbergier  son  saint  cors,  la  fist  faire 
Deus,  ki  en  li  voloit  hom  devenir. 

Chans.  fr.  MS.  de  Berne  n'  389,  fol.  30,  R'. 

On  a  remarqué  sans  doute  qu'anciennement  il 
n'y  avoit  pour  le  genre  aucune  dilTérence  entre 
armoire  et  armaire.  En  effet,  le  changement  de  la 
diphthongueft?"  en  oi  pouvoit-il  altérer  la  nalured'un 
substantif  qui,  sous  l'une  et  l'autre  orthographe,  fut 
toujours  des  deux  genres,  jusqu'à  ce  qu'on  eût 
imaginé  que  sous  celle  à'armoire  il  étoit  essentiel- 
lement féminin,  et  masculin  sous  celle  û'armaire? 
(Voy.  Nicot  et  Monct,  Dict.)  On  croit  donc  que  ce 
féminin  armoire  pour  lequel  l'usage  s'est  décidé, 
même  à  l'exclusion  d'armaire  masculin ,  n'est 
qu'une  altération  de  l'orthographe  primitive  ;qu'«î'- 
maire  et  armoire  étant  de  même  origine  ,  on  les 
faisoit  féminins  relativement  à  la  terminaison  qui 
sembloit  féminine ,  et  masculins  relativement  au 
genre  du  substantif  latin  armarium,  dont  ils 
étoient  formés.  (Voy.  Armarie.) 

VARIANTES  : 
ARMAIRE.  Gotgrave,  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Almaire.  Ph.  Mousk,  MS.  p.  293. 
Amaire.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  part,  m,  fol.  30,  R". 
Armoire.  Mém.  d'Oliv.  de  la  Marche,  lir.  i,  p.  291. 
AULMARE.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  lat.  de  D.  Gange,  à  Alniaria. 
AULMOIRE.  Lanc.  du  Lac,  T.  II,  fol.  38,  R»  col.  1. 
Au.\i-\mE.  Percef.  Vol.  I,  fol.  63,  V"  col.  1. 
AUMOIRE.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  78,  col.  1. 
AusMOiRE.  Percef.  Vol.  VI,  fol.  109,  V»  col.  2. 
Au.MOYRE.  Poës.  de  Villon,  p.  4. 

Erm.vire.  Gelt-hell.  de  L.  Trippault.  —  Cotgrave,  Dict. 
Ermoi.se   D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  D.  C.  à  Annazium. 
Hermaire.  Gelt-hell.  de  L.  Trippault. 
Ormaire.  Gotgrave,  Oudin,  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Or.moire.  Mém.  de  Sully,  T.  V,  p.  37(3. 

Armairiei",  subst.  masc.  Ghantre,  ou  Procureur 
d'abbaye.  Quelque  décisive  (lue  soit  en  général  l'au- 
torité de  D.  Garpenlier,  on  doute  qnarmairier  si- 
gnifie chantre  en  ce  pa.ssage  :  «  Roui  Potet  Cheval- 
«  lier,  par  devant  Fr.  Nicolas  de  Mounier  Souprieur 
»  et  Armairier  de  l'abbaye  de  Boneval,  ....  fina 
«  audit  Àr)narier  pour  demoiselle  famé  feu  Aubert 
«  Potet  à  cause  de  la  garde  de  ses  enfans...  vi  lib. 
«  pour  son  droit.  »  (D.  Garpentier,  Suppl.  Gloss. 
lat.  de  Du  Gange,  au  mot  armarierius;  tit.  de 
1348.)  Peut-ètre'que  dans  un  sens  relatif  à  celui 
d'armaire ,  lieu  propre  à  serrer,   non  les  livres 


(1)  Le  r  de  armarium  étant  lingual,  comme  dans  l'italien,  se  change  en  l,  qui  devient  voyelle  :  almaire,  aumaire.  De 
même  Arvernia,  Alvernia,  Auvergne;  arbor,  albre,  aubre...  (n.  e.) 


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d'Eglises,  mais  les  titres  de  l'abbaye,  l'on  aura 
nommé  Armairier  le  Procureur  ou  l'Agent  de  cette 
abbaye,  comme  étant  le  dépositaire  des  titres  essen- 
tiels à  la  conservation  et  à  la  perception  de  ses 
droits. 

VARIANTES  : 
ARMAIUIER,  Armarier.  D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat. 
de  Du  Cange,  au  mot  Annatierus  ;  til.  de  13^. 

Armaison,  suhst.  fém.  Défense.  Signification 
relative  à  l'usage  qu'on  fait  d'une  arme  pour  se 
défendre.  «  Cecy  est  plus  à'armaison  que  cela.  » 
(Cotgr.  Dict.) 

Arinarie,  mhst.  masc.  et  fém.  Armoire.  Maga- 
sin d'armes.  Armes  en  termes  de  blason. 

Il  paroit  que  dans  l'origine  de  notre  Langue,  les 
mots  françois  formés  de  mots  latins  terminés  comme 
armarium,  n'étoient  pas  essentiellement  féminins  ; 
que  relativement  au  genre  du  substantif  latin,  ils 
étoient  quelquefois  masculins  en  françois,  comme 
armarie  dont  on  prononçoit  r<^  final,  probablement 
sans  autre  idée  que  celle  d'imiter  le  son  de  la  der- 
nière syllabe  d'anHarà//».  «  L'n  almarie  esteit  el 
«  porclie  del  temple,  ù  l'um  meteit  les  oblaciums 
«'  numéement  que  li  Reis  soleient  faire  as  sabalz  e 
«  as  jurs  festivals.  »  (Livres  des  Rois,  ms.  des  Cordel. 
fol.  \-\%  R-col  1.) 

C'est  par  une  extension  semblable  à  celle  de 
l'acception  primitive  û' unitaire  ,  qu  armarie  ou 
almarie,  si  rarement  d'un  autre  genre  qn'ariiiairie 
ou  urmoirie  toujours  féminins,  a  signifié  en  géné- 
ral lieu,  meuble  propre  à  serrer  toute  autre  chose 
que  des  armes.  On  nommoit  en  ce  sens  armairie 
ou  armoirie,  une  armoire  pratiquée  dans  un  mur, 
quel  que  fût  l'usage  auquel  elle  étoit  destinée. 
"  Geste  rtrH(fl/r/e  qui  est  dedans  ce  mur...  souloit 
«  estre  par  dehors  si  subtilement  fabriquée,  elc.  » 
(Percef.  Vol.  1,  fol.  3,  V"  col.  2.)  «  Un  chacun  peut  à 
«  ses  frais  affermir  son  bastiment  dans  la  muraille 
"  commune...  sans...  luy  ester  quelque  chose  de 
•<  son  épesseur,  soit  pour  faire  des  cheminées,  ar- 
"  moiries,  ou  autrement.  »  (Coût,  de  Bru.xelles,  au 
Nouv.  Coût.  gén.  T.  l,  p.  1209,  col.  1.) 

En  comparant  la  Bible  à  un  dépôt  sacré  el  mys- 
térieux, on  a  dit  figurément  :  «  Cist  livres  est  cum 
«  armarie  des  secrez  Deu  ;  plein  est  de  figure  et 
«  de  signeliance.  »  (Livres  des  Rois,  îhs.  des  Cordel. 
fol.  2,  V°  col.  1.  —  Voy.  AnMAiRiî.) 

On  rappeloit  la  signification  de  ce  mot  à  l'étymo- 
logie,  en  nommant  armairie  ou  armoirie ,  un  cof- 
fre, un  meuble,  un  lieu  propre  à  serrer  des  armes, 
un  magasin  d'armes.  (Voy.  Cotgrave,  Dict).  «  Avoit 
"  fait  porter  secrettement  avec  luy  son  harnas  de 
«  guerre  en  paniers  ;  et  quant  ceux  qui  estoient 

«  aveuc  luy se  conclurent  d'eulx  armer  avecq 

»  lui,  pour  ce  qu'ils  n'avoient  point  de  harnas,  le 
«  Duc  leur  en  fist  baillier  de  son  armoirie.  »  (J.  Le 
Févre  de  S'  Remy,  Ilist.  de  Charles  VI ,  page  9.) 
«  Commanda  que....  se  il  leur  falloil  chevaulx  ne 
«  armeures,  ilz  s'en  allassent  en  ses  estables  et  en 
«  son  armoirie,  et  qu'ilz  en  prinssent  à  leurs  vou- 
«  loirs.  »  (Percef.  Vol.  I,  fol.  125,  R°  col.  1.) 


Pouldre,  bouletz,  et  grosse  artillerie  ; 
Vivres  assez,  enseignes,  wmarie. 

J.  Marot,  p.  96. 

Peut-être  qu'en  ces  vers  armarie  est  le  nom  col- 
lectif d'armes  en  termes  de  Blason.  Lorsqu'à  la  un. 
du  xr  et  au  commencement  du  xu'  siècle,  les  Nobles 
occupés  dans  les  combats  du  besoin  de  se  faire 
reconnoitre,  joint  au  désir  bien  naturel  de  fixer  les 
regards  sur  leurs  exploits,  eurent  imaginé  à  l'exem- 
ple de  ceux  ([ui  se  signaloient  dans  les  tournois,  de 
se  distinguer  les  uns  des  autres,  par  les  cottes  d'ar- 
mes, par  les  pannes,  les  couleurs,  les  métaux  elles 
figures  plus  ou  moins  arbitraires  dont  ils  ornoient 
leurs  écus,  on  nomma  armes,  ces  ornemens  distinc- 
tifs  des  armures,  des  écus,  des  cottes  d'armes,  des 
bannières.  C'est  donc  relativement  à  l'usage  de  ces 
ornemens,  dont  la  distinction  originairement  per- 
sonnelle el  passagère  devint  héréditaire  et  perma- 
nente, qu'en  termes  de  Blason,  armarie  a  signifié 
armes,  bannière  armoriée  dans  ces  vers  : 

L'orgueilleuse  armarie 

Au  fier  Marcou  de  la  grand'seigneurie, 
Ostée  fut  des  tours,  murs  el  palUs, 
Pour  donner  lieu  aux  nobles  Heurs  de  Hz. 

J.  Slarol,  p.  138. 

Il  semble  que  montrer  Yarmarie,  c'étoit  arborer 
la  bannière  armoriée,  ou  se  faire  connoilre  à  ses 
armes,  à  son  écu  armorié,  à  sa  cotte  d'armes. 

Qui  en  amours  veut  esti-e  heureux, 
Faut  tenir  train  de  seigneurie, 
Estre  prompt  et  avantureux. 
Quant  vient  à  montrer  Yarmarie, 
Porter  drap  d'or,  orfaverie  ; 
Car  cela  les  Dames  émeut. 
Tout  sert  :  mais  pour  Saincte  Marie, 
11  ne  fait  pas  ce  tour  qui  veult. 

Poès.  à  la  suite  de  Villon,  p.  64, 

En  faisant  allusion  aux  armes,  aux  écus  armoriés 
dont  la  Noblesse  se  glorifie,  on  a  dit  figurément  : 

Ail  dieu  Bacchus  rendit  grâces  condignes, 
Qui  tant  avoit  multiplié  les  vignes, 
Que  Terre  adonc  portoit  pour  armarie 
Thirses  hachez  de  vigne  trés-flourie. 

J.  Marol.p.  48. 

Probablement,  ce  mot  cessoit  d'être  regardé 
comme  le  nom  collectif  d'armes  en  termes  de  Bla- 
son, lorsqu'en  préférant  à  l'orthographe  armarie 
celle  A' armoirie  Qïicwe  usitée  au  pluriel,  on  disoit 
armoiries  et  qu'on  définissoit  le  singulier  armoirie, 
pièce  d'armes,  de  blason  d'armes,  de  blason  armo- 
riai. (Voy.  Monet,  Dict.)  «  Il  peignit  les  armoiries 
CI  d'un  vilain  nouvellement  annobli,  oîi  il  y  a  tou- 
«  jours  à  mettre  et  à  oster  ;  car  on  dit  que  les 
«  armoiries  d'un  vilain  sont  faites  à  plaisir.  >>  (Bou- 
cbet,  Sérées,  liv.  m,  p.  98.  —  Voy.  Armerie.) 

On  a  écrit  des  volumes  sur  l'origine  de  ces  Armoi- 
ries. Pour  savoir  ce  qu'ils  contiennent  de  plus 
intéressant  et  de  plus  vrai,  il  suffit  de  lire  une  Dis- 
sertation très-courte  et  très-instructive  sur  «  l'Ori- 
«  gine  des  Armoiries  en  général,  et  en  particulier 
"  de  celles  de  nos  Rois,  »  imprimée  dans  les  Mém. 
de  Littérature  (T.  XX,  p,  579  et  suiv.)  L'Auteur  de 
celte  Dissertation,  aussi  lumineuse  que  savante,  est 
M.  de  Foncemagne,  à  qui  nos  antiquités  semblent 
être  révélées,  lanl  son  érudition  est  ingénieuse  à 


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les  dévoiler.  Après  avoir  observé  que  l'usage  des 
Armoiries,  de  ces  marques  héréditaires  de  noblesse 
et  de  dignité,  qu'on  distingue  avec  raison  des  ima- 
ges symboliques,  qui  dès  les  premiers  temps  ornè- 
rent l'armure  des  Guerriers,  ne  peut  être  plus 
ancien  que  le  xi'  siècle,  il  fait  voir  qu'on  assigne  à 
cet  usage  une  même  épo(iue  (1)  ;  soit  qu'on  en  rap- 
porte l'origine  aux  tournois,  où  les  JNobles  qui  pré- 
tendoient  à  l'iionneur  d'y  signaler  leur  courage  et 
leur  adi^esse,  se  faisoient  connoitre  par  l'écu  de 
leurs  armes;  soit  aux  Croisades,  où  les  bannières 
armoriées  des  Clievaliers  étoient  si  nécessaires 
pour  le  ralliement  de  leurs  vassaux.  C'est  même 
par  la  réunion  de  ces  deux  opinions,  différentes 
quant  à  la  circonstance  de  l'introduction  des  Armoi- 
ries, mais  semblables  quant  au  temps  oii  elles  fu- 
rent introduiles,  que  M.  de  Foncemagne  parvient  à 
constater  qu'elles  commencèrent  avec  les  tournois, 
dont  l'éliiblissement  a  précédé  de  peu  d'années  la 
première  Croisode  ;  que  les  Croisades  en  étendirent 
et  fixèrent  l'usage,  variable  dans  les  commencemens, 
et  restreint  aux  seuls  Gentilshommes  qui  avoient 
assisté  il  quelque  tournoi.  Il  ajoute  que  ce  fut  aussi 
depuis  les  Croisades  que  les  Armoiries  devinrent 
héréditaires  (2). 

VARIANTES  : 
ARMARIE.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  2,  V». 
Almakie.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  142,  R». 
Arm.\irie.  Tercef.  Vol.  I,  fol.  3,  Y"  col.  2. 
Armoiiue.  l'ercef.  Vol.  I,  fol.  125,  R»  col.  1. 

Armatot.  On  nommoit  bandage  à-Varmatot,  le 
bandage  d'une  arbaleste  de  passe;  à  raison  peut- 
être  de  ce  qu'au  moyen  du  bandage  adapté  au  fût 
de  l'arbaleste,  on  avoit  bientôt  mis  cette  arme  en 
état  de  lancer  une  flèche.  (Voy.  Brantôme  sur  les 
Duels,  p.  82.) 

Armature,  siihst.  fem.  Armure.  En  latin  a?'?Ma- 
turu.  "  La  cuirasse  ([ue  les  Poètes  appellent  Egide.... 
»  est  Vannaliire  des  corps  célestes  seulement.  » 
(J.  le  Maire,  lllustr.  des  Gaules,  liv.  i,  p.  101.)  On  a 
du  ligurément  que  «  sans  Varmature  de  pru- 
«  dence le  dieu  Mars  ne  sauroit  conduire  ses 

-  batailles.  »  (Id.  ibid.  p.  102.  —  Voy.  ARiiEruE.) 

Arniazi,  snbst.  masc.  Armoire.  Mot  formé  du 
latin  aniiariiim,  qu'on  altéroit  en  prononçant  ar- 
marJum,  armazi  en  languedocien.  (D.  Carpenlier, 
Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cangc,  au  mot  Armazium. 

—  Voy.  Ermoise  sous  Armaire.) 

Arme,  subst.  fém.  Armes,  armoiries.  Cotte 
d'armes.  Fait  d'armes,  prouesses,  exploit  militaire, 
combat.  Armoire  ;  retrait,  lieux,  aisances.  Défense 
d'un  sanglier.  Espèce  de  courroie. 

L'opinion  la  plus  générale  sur  l'étymologie  du  mol 
latin  arma,  armes  en  françois,  paroît  être  aussi  la 
plus  vraisemblable.  En  réfléchissant  à  la  façon  de 


porter  les  plus  anciennes  ar7nes  et  de  s'en  servir, 
on  aperçoit  quelle  peut  être  la  raison  de  croire 
qu'«?7««s,  en  françois  épaule,  bras  joint  ù  l'épaule, 
est  l'origine  d'un  mot  qui  a  signifié  bouclier,  car- 
quois, flèches  ;  par  extension  toute  espèce  de  chose 
dont  on  se  dit  armé,  quelle  que  soit  la  manière  de 
la  porter  et  de  s'en  servir  pour  l'attaque  et  la  dé- 
fense. On  a  nommé  fln/u's,  les  basions  que  l'homme 
de  guerre  portoit  pendant  ab  armis,  par  un  baudrier 
porté  en  escharpe  ou  autrement.  (Nicot,  Dict.  — 
Voy.  Vossius,  Etym.  Ling.  Lat.)  «  Est  Dict.  arme, 
«  Cousteau,  espée,  bisarme  ou  vouge,  lance  ou  ja- 
«  véline,  espieu,  dard,  et  tout  fer  êsmoulu  et  non 
"  esmoulu,  barre,  baston,  tison,  et  tout  autre  chose 
«  de  quoy  l'on  pourroit  tuer  ou  blesser  un  homme.  » 
(Coût,  de  S'  Sever,  au  Coût.  gén.  T.  H,  p.  094.) 

Dans  le  langage  de  l'ancienne  Chevalerie,  les 
armes  courtoises  étoient  des  armes  sans  fer,  des 
armes  sans  pointe  et  sans  tranchant,  destinées  à 
l'usage  des  Tournois,  de  ces  combats  où  la  noblesse 
ne  disputoit  que  d'adresse  et  de  galanterie:  au  con- 
traire, les  armes  esmolues  ou  molues,  étoient  des 
armes  affilées  et  aiguisées  sur  la  meule,  des  armes 
pointues  et  tranchantes.  «  Armé  d'armes  molues, 
«  c'est  assavoir  d'un  demy  glaive,  d'une  espée  et 
«  d'un  grand  coustel.  »  (D.  Cârpentier.  Suppl.  Gloss. 
lat.  de  Du  Gange,  T.  l,  col.  290  ;  tit.  de  1375.)  «  Il 
«  me  féri  de  ses  armes  esmoulues,  et  me  donna 
«  coups  et  colées  dont  cuir  creva,  et  sanc  en  issi, 
«  et  me  fit  plaie  mortieux  ipii  bien  sont  apparis- 
«  sans.  »  (Oi'd.  T.  1,  p.  257.) 

C'est  par  extension  et  relativement  à  l'usage  des 
armes  esmoulues,  dans  ces  combats  qui  dévoient  se 
terminer  par  la  mort  de  l'un  des  combattans,  qu'on 
aura  nommé  arnw  esmoulue,  toute  espèce  d'arme 
offensive  avec  laquelle  on  donne  la  mort,  même  en 
assommant.  «  Toutes  loix  se  jugeront  parEschevins, 
«  et  en  sera  usé  en  la  forme  et  manière  que  s'en- 

«  suit  : à  sçavoir  pour  simple  main-mise  entre 

«  particuliers  quatre  livres  tournois  ; de  main- 

«  mise  d'armes  émohies  ,  ores  que  sang  y  ait  ou 
«  non,  vingt  livres  tournois  :  bien  entendu  que 
«  soubs  le  nom  de  tels  basions  d'armes  émoulues 
*  sont  compris  arcq-a-balestre,  arcq  à  la  main,  plo- 
«  met,  maillez  de  plomb,  aussi  pots,  trenchoirs,  et 
«  autres  basions  ayans  fer,  plomb,  eslain  ou  autre 
«  métal.  »  (Coût,  de  Hainaut,  au  Nouv.  Coût.  gén. 
T.  II,  p.  GO,  col.  1.) 

Les  armes  offensives  de  l'espèce  des  javelines, 
des  lances,  des  pique.s,  des  hallebardes  et  des  per- 
tuisannes,  se  nommoient  armes  d'ast  ou  d'hast, 
parce  qu'elles  étoient  emmanchées  d'un  long  bois, 
d'un  fût,  en  latin  Iiastile.  Ce  fût,  dont  on  les  em- 
manchoit,  éloit  la  raison  pour  laquelle  on  les  nom- 
moit aussi  armes  d'haute  ou  de  liante;  mot  qui 
semble  formé  de  l'allemand  hand,  en  françois  main, 
et  altéré  dans  l'orthographe  hampe.  (Cotgrave,  Dict.) 

(1)  U  ne  faut  pas,  en  efîel,  confondre  les  peintures  de  l'écu,  connues  même  des  soldats  romains,  avec  les  armoiries, 
aessins  réguliers,  ayant  pour  origine  la  garniture  de  fer  fixant  au  bois  le  cuir  du  bouclier.  (Voir  Quicherat,  Histoire  du 
Loslione,  passvn)  (N.  e.)  -  (2)  Les  armoiries  sont  le  signe  de  la  puissance  terrienne  au  moyen-âçe,  où  la  condition  de 
i  nomme  était  ceUe  de  sa  terre  ;  si  les  communes  possèdent  des  armoiries,  c'est  qu'elles  sont  des  seigneuries  coUectives.  (n.  e.) 


à 


AR 


—  153  — 


AR 


Anciennement,  s'armer  de  pleme&  armes  ou 
d'armes  plenières,  c'étoit  se  conformer  aux  loix  de 
la  féodalité,  aux  usages  de  la  Chevalerie,  ou  aux 
Ordonnances  militaires,  en  s'armant  de  la  façon 
prescrite  par  la  loi,  l'usage,  ou  par  l'ordonnance 
qui  fixoit  l'idée  des  armes  plenières,  des  pleines 
armes,  ou  d'une  armure  complète.'  «  Le  Koi  armé 
«  de  ses  plenières  armes,  etc.  »  (Du  Gange,  Gloss. 
lat.  T.  I,  col.  697.)  «  Le  comte  d'.4rtois  armé  en  ses 
«  pleines  armes,  etc.  "  (Id.  ibid.) 

Les  armes  pleines,  qui  pour  un  Ecuyerétoienl  le 
roussin,  le  gambeson,  le  chapel  et  la  lance,  étoient 
pour  un  Chevalier,  le  cheval,  le  haubert,  l'écu, 
l'épée  et  le  heaume.  (Voy.  Ane.  Coul.  de  Normandie, 
Ms.  part.  II,  chap.  xxv,  citée  par  Du  Cange,  ubi  supra.) 

On  indiquoit  le  service  féodal  et  militaire  auquel 
assujettissoit  la  possession  d'un  fief  de  haubert,  en 
disant  qu'il  servoit  en  pleines  armes,  qu'il  éloit 
tenu  à  pleines  armes;  parce  que  le  Chevalier  ou 
possesseur  de  ce  fief  étoit  obligé  de  le  desservir 
armé  de  pleines  armes.  (Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lat. 
T.  I,  col.  697.) 

Il  paroit  que  l'homme  ainsi  armé,  étoit  celui  que 
par  excellence  on  nommoit  homme  d'armes;  c'est- 
à-dire,  homme  armé  de  toutes  pièces,  homme  ser- 
vant avec  l'armure  complète  et  à  cheval.  (Voy.  Cot- 
grave  et  Nicot,  Dict.)  De  1^,  on  a  dit  en  opposant 
les  piétons  aux  hommes  d'armes  : 

Piétons  meuvent,  cil  d'armes  montent  : 
Coiteus  que  leur  vueil  acomplissent, 
Seiréeraent  de  la  ville  issent. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  100.  Rv 

Probablement,  on  désignoit  l'épée,  comme  faisant 
partie  des  armes  pleines, ûeVavnmre  complète  d'un 
homme  d'armes  ou  d'un  Chevalier,  lorsqu'on  disoit 
espée  d'armes.  L'espée  d'armes  étoit  la  même  que 
l'espée  de  chevalier.  (Cotgrave,  Dict.) 

La  comparaison  assez  fréquente  des  habits  sacer- 
dotaux avec  les  armures,  est  une  preuve  entre  autres 
que  le  parallèle  de  la  Chevalerie  avec  le  Sacerdoce 
étoit  familier  à  nos  Ancêtres.  C'est  d'après  ce  paral- 
lèle adopté  par  les  gens  d'Eglise,  qui  se  plaisoient 
quelquefois  eux-mêmes  à  mêler  par  de  semblables 
comparaisons,  aux  idées  saintes  de  leurs  fonctions 
sacerdotales,  les  idées  nobles  de  la  profession  mili- 
taire, qu'on  a  dit  :  «  Armes-Dieu,  Armes  Nostre 
«  Seigneur,  »  pour  signifier  habits  sacerdotaux. 
"  L'Evesque  de  Paris  esloit  revestu  des  armes 
«  Nostre  Seigneur,  et  tout  le  collège  aussi,  où 
'•  moult  avoit  grand  clergé.  »  (Foissart,  Vol.  IV, 
p.  41.  —  Id.  ibid.  p.  2-J.)  «  Le  Chapelain  se  revestit 
«  des  armes  de  Nostre  Seigneur  Jesu-Christ,  et 
«  chanta  la  messe.  >•  (Lanc.  Du  Lac,  T.  III,  fol.  9'2, 
V°  col.  2.  —  Percef.  Vol.  VI,  fol.  427,  K-  col.  2,  etc.) 

Erranment  s'est  des  armes-Dieu  vestis  ; 
Lors  fu  li  lieus  par  lui  rebeneis... 
Chanta  la  messe  rApostole  gentis. 

Enfance  d'Ogier  le  Danois,  MS.  do  Gaignal,  fol.  iU.  V  col.  '2. 

Il  est  encore  possible  que  celle  façon  de  désigner 
les  ornemens  du  Sacerdoce,  ait  été  plusieurs  fois 
relative  à  l'idée  des  armoiries,  par  lesquelles  la  No- 
blesse se  distinguoildans  les  tournois  elles  combats. 
n. 


et  qu'elle  se  rendit  propres  et  héréditaires.  (Voy.  Ar- 
MARiE.)  On  a  nommé  armes,  cesmaïquesdislinctives 
et  héréditaires  de  la  Noblesse,  parce  que  les  Nobles 
en  ornoienl  leurs  écus,  leurs  cottes  d'armes,  leurs 
bannières,  leur  armure  en  général.  De  là,  l'expres- 
sion inusitée  faire  arme,  c'est-à-dire  blasonner, 
peindre  des  armes  ou  armoiries.  «  Si  tu  demandes 
«  comment  se  faict  arme....  je  te  dis  qu'elle  .se  faict 
«  chacun  escu  de  cinq  couleurs,  et  d'un  métal  des- 
«  sus,  ou  le  contraire....  si  un  escu  est  d'argent,  il 
«  doit  avoir  un  lion  de  gueulles;  si  l'escu  est  de 
"  gueulles,  un  lion  d'arge'nt.  Ainsi  se  doit  faire  ar- 
«  moirie  d'une  couleur  et  d'un  metail.  »  (Fauchet, 
Orig.  liv.  I,  p.  101.) 

Les  armes  pleines  ou  armes  pures,  qu'en  termes 
de  Blason  l'on  oppose  aux  armes  brisées,  appar- 
tiennent aux  aînés  des  familles,  que  pour  cette  rai- 
son l'on  nomme  Chefs  d'armes.  «  L'aîné  des  frères 
«  a  droit  et  prérogative  à'arines  plaines  el  pures, 
«  au  regard  de  ses  puînés  qui  n'ont  droit  que  des 
•«  brisées.  »  (Monel,  Dict.  —  Laurière,  Gloss.  du  Dr. 
fr.)  «  Les  armes  vrayes  sont  celles  où  couleur  n'est 
«  mises  sur  couleur,  ni  métal  sur  métal,  es  pièces 
«  principalles  de  l'écu  ;  »  autrement  ce  sont  des 
armes  fausses.  Il  y  a  néanmoins  des  cas  où  les 
armes  sont  vraies,  quoiqu'on  se  soit  écarté  de  la 
règle  ordinaire  du  Blason,  en  les  composant  de 
métal  sur  métal,  ou  de  couleur  sur  couleur  ;  c'est 
lorsque  le  motif  de  cet  écart  est  glorieux  pour  celui 
dont  les  armes  ainsi  composées  se  nommoient 
armes  à  enquerre,  comme  les  armes  chargées, 
parce  qu'elles  excitoienl  la  curiosité  de  s'enquérir 
de  la  raison  de  cette  irrégularité.  (Monet,  Dict.) 

Les  armes  en  quarré  distinguées  de  l'écusson  et 
affectées  par  la  Coutume  de  Poitou  à  la  dignité  de 
Comte,  de  Vicomte  ou  de  Baron,  représèntoient 
sans  doute  la  bannière  qu'ils  avoienl  droit  de  porter 
à  la  guerre.  «  Peut  le  Seigneur,  Comte,  Vicomte  ou 
«  Baron,  en  guerre  ou  en  armoirie,  porter  ses 
"  armes  en  quarré,  ce  que  ne  peut  faire  le  Seigneur 
«  châtelain,  lequel  seulement  les  peut  porter  en 
«  forme  d'Ecusson.  »  (Coût,  de  Poitou,  art.  1,  cité 
par  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  fr.  T.  1,  p.  131.) 

On  dégradoitun  Chevalier  coupable  d'une  lâcheté, 
d  une  perfidie,  d'une  action  contraire  à  la  noblesse 
de  son  état;  on  le  vouoit  à  l'infamie  en  renversant 
ses  armes,  Vécu  de  ses  armes.  Le  roi  Jean  dans  ses 
lettres,  datées  du  6  novembre  1351,  dit  en  parlant 
des  Chevaliers  de  l'Etoile  :  «  Se  il  y  a  aucun  qui 
>'  honteusement...  parle  de  bataille  ou  de  besoîgne 
«  ordenée....  li  tournera  l'en....  ses  armes  ei  son 
«  timbre,  ce  dessus  dessous.  »  (Ord.  T.  II,  p.  466.) 

Les  armes  de  Bertrand,  où  tant  a  de  vigueur, 
Ont  pendue  laidement,  ainsi  come  trahiteur, 
Et  traînée  aussi  au  long  d'un  carrefort, 
Et  les  ont  enversée,  en  monstrant  par  frenour, 
Que  Bertrand  de  Glaiequin  a  cuer  de  boisfour. 
Chron.  .MS.  de  B.  Du  Guesclin,  Du  Cange,  Gl.  1.  à  Arma  reversnta. 

Il  est  probable  qu'à  raison  des  armoiries  dont 
les  Chevaliers  ornoient  l'espèce  de  casaque  qui  cou- 
vroit  leur  armure,  le  mot  armes  aura  signifié  cotte 
à'armes.  «  Portoient  les  harnois  à  ung'Chevalier  ; 

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AR 


..  haulberl  et  heaulme,  et  chausses  de  fer  et  genoil- 
«  lieres,  et  armes  de  blanc  samit.  »  (Lanc.  du  Lac, 
T.  11,  fol.  8t>,  R-col.  \.) 

L'acception  figurée  de  ce  mot  armes,  par  lequel 
on.désignoit  les' faits  d'armes,  les  prouesses  de  la 
Chevalerie  dans  les  combats  et  les  tournois,  n'est 
pas  plus  extraordinaire  que  celle  du  mol  plume, 
par  lequel  on  désigne  aujourd  hui  l'expression  des 
idées  d'un  Ecrivain,  la  manière  dont  il  les  exprime. 
Ainsi,  1  on  disoit  ligurément,  faire  armes,  faire  de 
grandes  armes,  chercher  armes,  etc.  (Froissart, 
Vol.  II,  p.  '2Gr..  —  Vigil.  de  Charles  Vil,  part.  I, 
p.  197.  —  Ibid.  part.  Il,  p.  108,  etc.  —  Nicot  et  Mo- 
net,  Dict.)  «  Si  est  ce  qu'î^i  laide  des  armes  que  lit 

«  la  Gendarmerie  françoise, tous  les  AUemans 

«  impériaux  furent  rompuz.  »  (Du  Bellay,  Mém. 
liv.  X,  fol.  324,  R^)  «  Diray  des  autres  nouvelles 
>'  armes  que  Sainlré  fist  à  rencontre  du  Seigneur 
>>  de  Loiselench.  »  (Hist.  de  Saintré,  p.  307.) 

Les  faits  d'armes,  les  prouesses  de  la  Chevalerie, 
en  général  les  exploits  militaires,  les  combats  de  la 
Noblesse  armée  pour  la  gloire  et  la  défense  de 
l'Etat,  se  nommoient  armes  armiyères,  armes  de 
guerre,  armes  guerroiables,  par  opposition  aux 
armes  de  paix.  (Vov.  Chasse  de  Gaston  Phébus,  ms. 
p.  276.  —  Ilisl.  de 'Saintré,  p.  39.  —  Ibid.  p.  221, 
etc.)  Dans  la  noble  maison  où  s'assembloienl  les 
Chevaliers  de  l'Ordre  de  l'Etoile,  il  y  avoit  une  table 
d'honneur  à  laquelle  s'asseyoient  tous  les  ans,  la 
veille  et  le  jour  de  la  fête  "de  l'Assomption,  «  les 
«  trois  Princes,  trois  Bannerez  et  trois  Bachelers 
«  qui  l'année  avoient  plus  fait  en  armes  de  guerre; 
«  car  nul  fait  à'armes  de  pais  n'y  esloient  mis  en 
«  compte.  »  (Ord.  T.  11,  p.  4G6.) 

Ces  armes  de  paix,  autrement  nommées  armes 
de  plaisance  ou  de  plaisir,  armes  courtoises,  étoient 
les  faits  d'armes,  les  prouesses,  les  combats  par 
lesquels  cette  même  Noblesse  signaloit  l'ardeur 
d'êtie  utile  à  l'Etat,  sa  passion  pour  la  gloire,  et  le 
délire  héroïque  de  sa  galanterie.  •>  Les  armes  de 
«  plaisance  ou  de  plaisir  se  faisoient  pour  exercer 
•'  les  armes  et  continuer  le  mestier,  pour  habilleté 
«  de  cors,  et  apprendre  à  valoir  pour  la  delîense 
«  du  bien  public.  »  (Voy.  Olivier  de  la  Marche, 
Gage  de  bataille,  fol.  2,  V°.  —  Ibid.  fol.  13,  V^)  Le 
mérite  d'être  à  table  le  plus  mangeant,  n'en  étoit 
un  sans  doute,  qu'autant  que  le  bon  appétit  d'un 
Chevalier  annonçoit  une  force  qui  lui  assuroit  la 
supériorité  tant  en  armes  arvtigères  qu'en  armes 
courtoises;  c'est  ainsi  qu'il  faut  lire,  au  lieu  d'armes 
convoijtises,  en  ce  passage  :  »  Dame  d'honneur  ne 
«  peut  aymer  homme  envyeulx,  se  ne  feusl  les 
«  bonnes  vertus  pour  en  estre  le  meilleur  :  comme 
'■  à  l'église  le  plus  devosl,  îi  table  le  plus  mengeant  ; 
«  en  compaignie  de  dames  le  plus  gracieulx  et 
«  plaisant  ;  eh  armes  armigeres,  on  armes  convoxj- 
"  lises  plus  vaillant,  et  de  ce  avoir  envie  pour  faire 
«  le  mieulx.  »  (Hist.  de  Saintré,  p.  38  et  39.) 

Les  armes  courtoises,  les  armes  de  plaisance  ou 
de  plaisir,  se  nommoient  aussi  armes  d'einprises, 
relativement  au  motif  de  gloire  ou  de  galanterie 


qui  faisoit  entreprendre  ces  armes  ou  combats,  que 
la  rivalité  et  même  la  haine  changèrent  trop  sou- 
vent en  combats  à  outrance,  en  armes  à  outrance. 
«  Chacun  de  bien  en  mieux,  à  son  povoir,  seeraploye 
«  d'acquérir  la  très  noble  grâce  d'honneur  ;  soit  en 
•'  ar7nes  d'emprises,  soit  en  guerres  guerroyables, 
«  et  en  toutes  honnesles  fayons.  »  (Hist.  de  Saintré, 
p.  221.) 

On  disoit  d'un  jeune  Ecuyer,  qui  pour  la  pre- 
mière fois  figuroit  en  lice  les  armes  à  la  main,  qu'il 
faisoit  ses  pretnières  armes  ;  expression  qui  nous 
est  encore  familière ,  malgré  l'oubli  des  usages  de 
l'ancienne  Chevalerie.  »  .Après  les  présentations 
«  faites,....  tous  se  retirèrent  d'un  costé  et  d'autre, 
«  hors  de  la  lice;  e.xcepté  un  Escuyer...  conduit 
"  par  le  dit  de  Compays,  lequel  Escuyer  esloit 
«  ordonné  à  faire  st's  premières  armes.  »  (Mém. 
d'Olivier  de  la  Marche,  liv.  i,  p.  192.) 

Il  paroit  que  les  armes  à  cheval  étoient  les  com- 
bats à  la  lance,  distingués  des  combats  à  l'épée,  au 
poignard,  à  la  hache,  qu'on  nommoit  arènes  à  pied. 
«  Se  présenta  un  escuyer  nommé  Heni'y  de  Gouvi- 

"  gnon  monté  et  armé  pour  faire  armes  à  cheval 

«  et  d'autre  part  se  présenta  un  escuyer  nommé 

«  Jehan  de  Chaumergis Cérémonies  faites  et 

•<  accomplies,  les  Escuyers  furent  saisiz  de  leurs 
lances.  »  (Mém.  d'Olivier  de  la  Marche,  liv.  i,  p.  19."). 
—  Id.  ibid.  p.  200.  —  Le  Jouvencel,  ms.  p.  354,  etc. 
'<  Estoyent  assignées  les  armes  de  pié  entre  Jehan 
«  de  Compays,  seigneur  de  Torain,....  et  .\nthoine 

«  de  Vaudrey  seigneur  de  l'Aigle Ledict  Vaudrey 

«  fit  délivrer  au  Mareschal  de  Bourgongne....  deux 
«  haches  et  deux  espées....  Fièrement  s'assemble- 
«  rent  les  deux  Escuyers....  et  ledict  de  Vaudrey 
«  donna  de  la  pointe  de  l'estoc  au  bacinet  de  son 
«  compaignon.  Que  feroy-je....  long  récit  d'icelles 

«  armeâ'^ Si  se  partirent à  l'honneur  des 

«  Parties Je  ne  vey  onques  puis  ce  jour  nulles 

«  armes  combatre  de  l'estoc,  en  armes  à  pié,  sans 
'•  relraitle  :  et  qui  les  entreprendra,  il  les  trouvera 
«  dures  it  achever  ;  et  furent  cestes  armes  corabatues 
«  l'an  1443,  parun  jeudyhuictiemed'Août.  »(Mém. 
d'Olivier  de  la  Marche,  liv.  i,  p.  203-206.) 

En  opposant,  comme  a  fait  Monstrelet,  (Vol.  111, 
fol.  73,  R°)  le  verbe  jouster  à  l'expression  faire 
armes,  on  opposoit  vraisemblablement  aux  armes 
à  pied,  les  armes  à  cheval,  les  joutes  ou  combats  à 
la  lance.  Il  est  possible  qu'on  ait  nommé  armes  par 
excellence,  les  armes  à  pied:  ces  armes  ou  combats, 
qu'il  étoit  si  rare  et  si  glorieux  d'achever  sans 
retraite,  et  dans  lesquels  on  hasardoit  sa  vie  comme 
dans  les  combats  à  outrance. 

On  sait  que  dans  le  langage  de  la  Chevalerie, 
faire  armes  à  outrance,  c'éfoit  «  combatre  en  lice, 
«  à  glaives  esmoulus,  jusques  au  mourir,  ou  au 
«  rendre.  »  (Mcot,  Dict.) 

Le  sort  des  armes  étant  heureux  un  jour,  un 
autre  jour  malheureux  ;  on  en  a  désigné  l'incons- 
tance, en  disant  que  les  armes  étoient  journales, 
qu'elles  étoient  journalières  :  expression  qu'Olivier 
de  la  Marche,  historien  du  xv  siècle,  paroit  avoir 


AR  —  155  — 

inventée ,  et  dont  l'usage  semble  nous  avoir  été 
transmis  par  les  Ecrivains  du  xvi'  siècle       Ainsî 
«  que  les  armes  sont  jotirnales,  et  les  bonnes 
«  aventures  a  la  disposition  de  fortune,  etc.  »  (Mém 
dOMvier  de  la  Marche,  liv.   ,,   p.   193.)  Lorsque 
Charron  d.so.t  qu'.l  étoit  «  bon  de'^penser  au  hazard 
«  des  armes  qui  sont  journalières,  »  on  étoit  sans 
doute  familiarisé  avec  cette  expression     encoe 
nouvelle  au  commencement  du  xvi' siècle  nuisau'on 
en  modifloit  l'usage  en  disant:  .  Les  «rS  s°n 
"  ^'\/i"e  je  parle  ainsi,    sont  yo«m  / "  ÎV e 
^sujettes  à  la  fortune.  .,  (Dialog.  de  Tahuréau  foL 
;>    ■ ,~  ^^y-  Sagesse  de  Charron,  p.  434  ) 
Que  le  mot  arme  eût  signifié  «rmafr^,  lieu  propre 
r.h"'"'"''''  des  armes,  ce  seroit  une  ex tens  on  dSnî 
1  abus  sembleroit  moins  étrange  que  celui  d'une 
extension  au  moyen  de  laquelle  il  paroi    avôi? 
Si'  "«"-seulement  une  armoire,  que^Z' en  m 
I  usage,  mais  un  retrait,  les  lieux,  les  aisancS 
d  une   maison.   .<  Lorsque  d'un   cos  é  seul  dS  la 
«  muraille  se  trouvent  des  potelles,  «jws  chemi^ 
.<  "eos  conduits  de  la  fumée;  semblaE  sSs 
"  font  foy  que  h.  muraille  appartient  à  celuvseS 
«  du  coste  de  qui  ils  se  trouvent.  .  (Coût    de  Bra- 
xenes    au  Nouv.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  1268  col  1 
«  Nest   licite   faire    chambres  aysées     nommées' 
«  fosses    «m^s  ou  latrines,  ou  fosse  deTuïsfne 
»  pour  tenir  eau  de  maison    auprès   d'un    mï? 

p")'),     '^""''  ^^  Montargis,  au  Coût.  gén.  T.  I, 

à  ndée'^Sp  1 'nl?rP,'/'''°"  toute  simple  et  relative 
d  1  iciee  de  1  usage  des  annes  défensives  aue  les 

£sr..  ïïrSs  î' ^•'•"^"'''^'i.^"^  ét/'nSJei 

uimt6.      Les  dens  dessus  ne  h  servent  de  riens 
«  fors  que  d'aguiser  celles  dessoubz         et  ceTles 
«  dessoubz  appelle  on  les  armes  ou    mes  du  saiî 
glier    „  (Chasse  de  Gaston  Phébus,  ms.  p  62  ^ 

lath'  imis'm^r.!  f™^/st  réellement  fomé  du 
iduii  aimus[\),  la  signifîca  ion  se  rannrorboit  rip 
letymologie,  lorsque  dans  le  sens  de  l'ancien  mn^ 
enarmes,  on  nommoit  armes  les  courroS  m  ser 
anp^r//  «^'"'^rasser  l'écu,  les  courroves  dans  lej." 
quelles  on  passoil  le  bras  pour  tenir  l'écu  et  sVn 
couvrir.  „  s'alla  le  Chevalier  afficher  es  eslrîersp^ 
«  embrasser  l'escu  par  les  armes,  hé  et  enflammi 
«  de  mal  talent.  ,>  (Percef.  Vol.  I  fol  S  _] Tn 
<lu  Lac,  T.  I,  fol.  74.  -  Voy.  Enar.e  i)     ''       ^'"'• 


AR 


Armé,  participe  et  substantif.  Couvert  énninp 
Homme  armé  (2).  ^uuveit,  cquipe. 

ffuolî  'f  H  "r'j""'^  "'  Chevaliers,  et  on  les  distin- 
guoit  a  la  différence  des  cottes  d'irm^^   Lt    î 
armoiries   dont    elles    élLn     ornées     lorSuls 
n  avoient  point  de  cottes  d'armes  sS?  leur  cuSsst 


!Tiune  co'wf''.\  ^"  .^^'^«''.q"'il«  étoient  .  sans 
nulle  tognoibsance  et  armés  à  crud    » 

Touts  cils  de  l'ost  Girard,  sans  nulle  co-noissanrp 
lintie  eux  et  les  François,  quant  seront  tuit  en  tourbe 

p,  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  165 

cest  relativement  à  l'effet  visible  du  noli  dp 

i    mrf  Ton^Z%'''''  del'expressioiu^^rïnS 
a  iiuci,  1  on  a  dit  être  arme  au  cler,  être  arnip  à 

Lvon"  ""''''   e  Bourgmaistre  che^'auchaif  Sa.i 
•">""'. et  tous  ses  gens  an/tes  au  cler  1p 

ibid^rô?.)-  "  ^"■'"'''''  ''''■  "'  p  ««•  - 1^ 

Il  semble  que  cette  manière  de  s'armer  ait  été 
spécialement  affectée  à  l'appareil  du  triomphe 

'a'  ■  -•  •■  i,-  ■  devers  Gènes  s'adresse 
Arme  a  blanc,  en  triomphe  et  honneur,  etc. 
r,„j         ,  ,  J-  Marot,  p.  28. 

Dedans  la  noble  et  grant  cité  de  Bresse 
tntra  Loys,  de  ce  nom  le  douziesme 
Arme  a  blanc,  triumphant  en  prouesse. 
r»«    I    «1  f     ,  J- Marot,  p.  136. 

Peut-être  generalisoit-on  l'idée  particulière  dp 
s  équiper,  se  couvrir  en  s'armant,  iL  qu'o     disoit 

:  ame'uS  '"'Zn  ''''''?'^  f''  «'  "'^^  ^ë  toute 
aimeuies.  »  (Voy.  Arjier.    «  Se  partit  de  Ipnns 

:  ciëval"'?}r"1  '1  '"'T  <^rmïurlÎ!nlfTe 
Cheval.  ..  (Lanc.  du  Lac,  T.  Il,  fol.  130,  V°  col  2  ) 

Ont  ja  cinq  grant  bataille  faites.  ' 

Endroit  ceus  qui  viennent  serrez  '  ' 

tt  armez  d'armeures  chieres 

En  a  es  chans  deus  grans  et'fieres. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  264,  R'  et  V- 

On  abusoit  étrangement  de  l'acception  o-énéralp 
de  ce  participe  armé,  en  disant  figurémenl" 

Entrez  sui  enla  nasse,  n'i  sai  pas  mon  retor  ■ 
Se  ne  me  confortez,  armez  sui  de  folor  ' 

Fabl.MS.du.  R,„.7218,fol'.346,Vcol.2. 

hnhn    le  participe  armé  étoit  pris  suhsinnfivp 

men  ,  lorsqu'en   parlant  de  gens  de  pied  m ieux" 

armes,  mieux  défendus  par  leur  armure  aïe  les 

autres,  on  les  nommoit  par  excellence  les  «m2 

«  Or  avoient  les  François  mis  entre  le  nréSier 

«  rang  e     e  second  un  rang  d'Arquebouziërs 

-'  Le  capitaine  Yillefranche  ,  lequel  avoitKarip 

-  de  la  corne  droite  du  bataillon  des  François  col 

"  ^'derant  que  le  bataillon  d'Allemans  qui  le  veno  t 

«  a  0,'der  estoit  plus  large  que  le  sien,'...  fëii  tber 

«  du  derrière  de  son  bataillon  les  armez  des  deux 

«  derniers  rangs  dont  il  élargit  sa  teste  ;?     si  est-ce 

«  qua  laide  des  armes  que  fit  la  Gendarmerie 

"    ''Tn  "'  '°'"'"'''^  P^^''  "^  sieur  de  Boutiëre™  ous 

Armée  (3),  subst.  fém.  Bataille,  combat  C'est  nar 
ellipse  que  le  participe  féminin  ami^^  stibStSn- 


ne  rencontre  qu'au  Tiiv'^icli^  f^^fL^^^  ^''^''^  ^^  ^"-^  °^^<>^^^  Aewoà  (n  e  ?  -  ?^^  Ini  -    "'/"'"'^  s'emploie  pour  les 
Plus  anctenne^ment,  o^ ^^^te^^^.TolriT.r  ''"=""  ^^°''  °^'^"-'  "  (^-"-m^de  Mact^  "tT/a^i^) 


AR 


—  156  — 


AR 


tivemenl,  a  signifié  et  signifie  encore  troupe  armée. 
(Nicot,  Dict.  —  Voy.  Arme.) 

On  alléroil  la  signification  propre  de  l'adjectif 
terrestre,  en  nommant  fl/7He'e  terrestre  une  armée 
destinée  à  combattre  sur  terre,  une  armée  de  terre, 
par  opposition  à  une  armée  de  mer,  ù  une  armée 
navale.  (Voy.  Monet,  Dict.) 

L'expression  année  volante,  qu'on  trouve  dans 
les  Mém.  de  Dassompierre,  (T.  I,  p.  121),)  étoit  moins 
figurée,  et  paroitra  sans  doute  plus  naturelle  que 
celle  de  camp  volant  qu'on  y  a  substituée. 

On  connoîl  l'espèce  de  figure  par  laquelle  le  mot 
bataille  signifie  armée,  troupe  en  état  de  combat, 
troupe  prête  à  combattre  :  par  la  figure  contraire, 
le  mol  armée  signifioil  combat,  bataille. 

Puisque  vous  desirez  l'armée  , 
ComCatez  vous,  quant  je  vous  broche. 

Eusl.  Deschamps,  foés.  MSS.  p.  237,  col.  2. 

Armement,  subst.  masc.  Armure.  Ce  mot, 
encore  usité  dans  le  sens  d'appareil  de  guerre , 
équipement  de  vaisseaux,  a  signifié  armure.  De  Ih, 
on  disoit  armement  de  teste  pour  armure  de  tète. 
(Voy.  La  Jaille,  du  Champ  de  bataille,  fol.  17,  R°.  — 
Monet,  Dict.) 

Armer,  verbe.  Couvrir.  Terme  de  Blason.  Louer, 
flatter. 

Lorsqu'on  disoit  armer  un  fer  de  venin,  on  expri- 
moit  sans  doute  une  idée  relative  à  l'usage  mortel 
des  armes  offensives.  (Voy.  Nicot,  Dict.)  On  expri- 
moit  l'idée  contraire  et  relative  l^i  l'usage  des  armes 
défensives,  lorsque  dans  un  sens  non  moins  figuré 
l'on  disoit  en  termes  de  guerre,  s'armer  d'une 
rivière,  pour  s'en  couvrir,  se  poster  de  façon  qu'on 
fût  couvert  et  défendu  par  la  rivière.  «  Une  rivière 
«  sert  à  merveilles  à  un  ost....  pour  seureté....  On 
«  passe  de  costé  et  d'autre  ;  on  s'en  arme  quant  on 
«  vieult  ;  on  garde  que  les  ennemis  ne  s'en  puissent 
><  aider.  »  (Le  Jouvencel,  ms.  p.  144.) 

En  termes  de  Blason  ou  d'Armoiries,  «  un  escus- 
«  son  armé  du  Roy  étoit  un  écusson  fait  à  ses  armes, 
«  un  écusson  îi  ses  armes.  »  (Voy.MatbieudeCoucy, 
Hist.  de  Charles  VIT,  p.  737.)  Pour  signifier  que 
Robert  Bruce,  roi  d'Ecosse,  avoit  dans  ses  armes 
trois  oreilles  d'or  en  un  champ  d'argent,  on  disoit 
qu'il  «  è'armoit  d'argent  à  trois  oreilles  d'or.  » 
(Kroissart,  Vol.  I,  p.  25,  etc.  —  Voy.  Arme.) 

Si  les  Hérauts  publioient  la  gloire  des  Chevaliers, 
en  blasonnant  les  armoiries  de  ceux  qui  entroienl 
dans  la  lice  des  anciens  tournois ,  ils  révéloient 
aussi  publiquement  la  honte  de  ceux  qui  s'y  présen- 
toient  au  risque  de  s'en  voir  interdire  l'entrée  :  de 
là  peut-être,  l'ancien  verbe  blasonner,  pris  en  bonne 
et  mauvaise  part,  aura  signifié  louer  et  blâmer.  Il 
semble  que  la  signification  d'ai'mer  soit  analogue  à 
celle  de  blasonner,  louer,  lorsque  l'avocat  Pathelin, 
tout  joyeux  d'avoir  escroqué  le  drap  de  maître 
Guillaume  en  louant  l'honnêteté  de  sa  famille,  dit  : 


.Te  l'ai  armé  et  blasonné , 
Si  qu'il  me  Ta  presque  donné. 
Je  luy  disoye  que  son  feu  père 
Fut  si  vaillant  :  ha  !  fais-je,  frère, 
Qu'estes-vous  de  bon  parentaige  ! 

Farce  de  rathelin,  p.  29  el  30. 

Armeraiige,  adj.  Qui  aime  les  armes,  les  com- 
bats. (Voy.  Armeret.)  La  terminaison  â'arrnerange 
est  une  de  ces  licences  que  nos  anciens  Poètes  se 
permettoient  en  faveur  de  la  rime. 

Bertran  de  Benanges 

Qui  est  hardiz  et  armcratujes,  etc. 

G.  Machault,  piise  d'Alexaiarie,  MS.  p.  227,  R-  col.  3. 

Armeret,  adj.  eisubst.  Qui  ala  passion  des  armes 
et  delà  gloire.  Espèce  d'armure  de  tête.  (Voy.  Armet.) 

Anciennement,  un  Chevalier  amoureux  et  arme- 
ret, étoit  un  Chevalier  dont  l'amour  ennobli  par  la 
passion  des  armes  el  de  la  gloire,  honoroit  la  beauté 
et  la  trouvoit  sensible.  »  Le  gentil  et  joly  duc  Wince- 
«  lins  de  Boesme,  duc  de  Luxembourc  et  de  Brabant, 
«  en  son  temps,  noble,  frisque,  sage,  amoureux  et 
«  armeret  avoil  esté.  »  (Froissart,  Vol.  W,  p.  260.) 

On  désignoit  cette  passion  des  armes  el  de  la 
gloire,  comme  étant  naturelle  à  la  jeunesse,  lors- 
qu'en  prenant  armeret  substantivement,  on  disoit  : 
«  Il  envoya...  en  la  cité  d'Evreux,  devers  le  Capi- 
«  taine,  en  lui  signifiant  qu'il  vousisl  faire  vuider 
«  et  départir  toutes  manières  de  compaignons, 
«  jeunes  armerets  dont  on  se  pourroit  aider,  et  iceux 
«  traire  devant  Cocherel.  »  (Froissart,  Vol.  I,  p.  271.) 

Il  semble  que  Yarmeret  distingué  du  harnois  de 
tête,  soit  une  armure  de  tète  plus  légère  que  le 
heaume,  une  armure  de  même  espèce  que  l'armet. 
Peut-être  même  que  pour  la  mesure  des  vers,  on 
aura  allongé  ce  mot  armet,  en  écrivant  armeret. 

Les  ungz  portoient  son  armeret, 
Les  autres  son  harnoiz  de  teste. 
Brief,  tout  chascuu  lors  labouret 
A  avoir  bruyt  en  ceste  feste. 

Vigil.  de  Charles  VU,  part.  Il,  p.  73. 

Armerie,  subst.  fém.  Ecusson,  écu  d'armoiries. 
(Voy.  Arme.)  Ce  mot  armerie.  qu'on  pourroit  regar- 
der" comme  une  variation  de  l'orthographe  armarie, 
paroit  être  immédiatement  formé  du  substantif 
arme,  qui  a  signifié  armoiries.  «  Si  coucha  son  doy 
«  sur  Varmerie  d'un  chevalier  de  Portugal,  en 
«  disant  :  haa  !  véez-cy  les  armes  dont  le  gentil 
»  Chevalier,  etc.  »  (Froissart,  Vol.  III,  p.  131.) 

....  Chascun  pense  de  s'accoustrer 
Sans  espargner  drap  dor,  n'orfaverie  ; 
Desirans  l'heure  où  pourroit  rencontrer 
Leurs  ennemys,  affin  de  se  monstrer 
Et  enrichii'  leurs  noms  et  armerie. 

1.  Marol,  p.  8i. 

Armet,  subst.  mase.  Casque.  Ce  mot  armet,  qui 
au  premier  coup-d'œil  semble,  ainsi  qu'armeret, 
avoir  été  formé  d'arme,  est  probablement  une  alté- 
ration d'elmet,  diminutif  de  l'ancien  mot  elme, 
lielme,  herme  (1),  à  peine  reconnoissable  dans  l'or- 
thographe heaume.  (Voy.  Ei.me.) 


(1)  C'est  là  l'opinion  do  Ménage  ;  mais  cette  dérivation  d'helmet  en  armet  aurait  laissé  des  traces,  puisque  le  mot  apparaît 
au  xiv  siècle  :  «  Li  ars  (^lairj  resplendit  touz  des  splendissours  des  armes,  Des  armez,  des  aubers,  des  jusarmes.  s  (Girard  de 
Kossillon,  '3767.)  D'autres  préfèrent  voir  là  un  diminutif  d'arme,  (n.  e.) 


AR 


157  - 


AR 


L'usage  de  ce  mot  annet  et  de  Texpressioti  accous- 
trement  ou  habillement  de  teste  avoit  tellement 
prévalu,  dans  le  cours  du  xvi'  siècle,  sur  celui  de 
heaume,  que,  si  on  en  croit  un  Ecrivain  de  ce 
même  siècle,  il  éloit  ridicule  d'ignorer  que  l'armure 
propre  à  couvrir  la  tête  d'un  Chevalier,  d'un  homme 
d'armes,  ne  se  nommoit  plus  heaume,  mais  armet, 
bourguignotte,  accoustrement  de  teste.  (Voy.  Contes 
d'Eufrapel,  p.  479.)  Quand  Pasquier,  contemporain 
de  l'Auteur  de  ces  Contes,  dit  en  ses  Recherches 
(liv.  vm,  p.  Oe'i),  qu'au  temps  où  il  écrivoit,  l'expres- 
sion habillement  de  teste  signitloit  un  heaume, 
l'armure  que  sous  P'rançois  I"  on  avoit  nommée 
armet,  il  semble  qu'on  doive  en  conclure  que  dès- 
lors  le  mot  armet  n'étoit  pas  moins  inusité  que 
celui  de  heaume,  sous  le  règne  de  ce  Prince.  On  a 
pourtant  la  preuve  qu'au  commencement  du  xvn' 
siècle,  cette  expression  étoit  encore  l'explication 
d'armet.  (Voy.  Nicot,  Dict.) 

Quelque  général  qu'ait  été  sous  François  I" 
l'usage  du  mot  armet,  celui  du  mot  heaume  ne  fut 
pas  absolument  proscrit,  puisriue  l'Auteur  d'un 
Roman  dédié  à  son  successeur  Henri  II,  disoit 
indifféremment  heaume  ou  armet.  «  Le  Chevalier 

«  des  Flammes luy  donna  si  grand  coup  d'espée 

«  sur  ïarmet  qu'il  demeura  si  estourdy  qu'il  estoit 
«  hors  de  toute  congnoissance,  quand  celuy  des 
«  Flammes  luy  mit  le  pied  sus  la  gorge  et  le 
«  désarma  de  heaume,  prest  à  luy  mettre  l'espée 
«  en  la  gorge.  »  (D.  Florès  de  Grèce,  fol.  128,  V".  — 
Ibid.  fol.  138,  \{\) 

Jl  est  vrai  qu'alors  le  mot  heaume  étoit  infini- 
ment moins  usité  que  celui  d'armet,  dont  on  se  sert 
encore  aujourd'hui  lorsqu'on  parle  des  anciens 
Chevaliers  errans  ;  mais  l'usage  d'armet  paroît 
avoir  été  aussi  commun  que  celui  de  heaume  étoit 
rare,  plus  de  demi-siècle  avant  le  règne  de 
François  I".  Il  est  probable  que  les  relations  politi- 
ques de  la  France  avec  l'Italie,  en  occasionnèrent 
l'introduction  dans  notre  Langue,  vers  la  fin  du 
XIV'  siècle.  Dans  les  Mémoires  d'Olivier  de  la  Mar- 
che, historien  du  siècle  suivant,  le  casque  des  Che- 
valiers armés  pour  les  joutes,  pour  les  combats  à 
la  lance,  n'est  presque  jamais  autrement  nommé 
i\\x  armet,  de  l'italien  elmeto,  diminutif  d'elmo;  en 
françois  elme  ou  heaiune,  elinet  ou  heaumet  «  Se 
«  présentèrent  en  la  lice...  le  comte  de  Sainct- 
«  Marliu  d'un  costé  et  Guillaume  de  Vaudrey  de 
«  l'autre,  tous  deux  montez  et  ai'mez  comme  en  tel 
"  cas  appartient....  Présentations  et  devoirs  accous- 
«  tumez  furent  faictz  et  leurs  lances  baillées;  dont 
«  il  advint  que  de  celle  première  course  ledit  de 
><  Vaudrey  donna  tel  coup  au  clou  de  la  visière  du 


«  Comte,  qu'il  rompit  ledit  clou;  et....  pour  celuy 
<'  jour  ne  peut  estre  Varmet  du  comte  de  Sainct- 
«  Martin  refaict.  »  (Mém.  d'Olivier  de  la  Marche, 
liv.  I,  p.  202.  —  Id.  ibid.  passim.) 

On  voit  que  le  P.  Daniel  s'est  trompé  en  définis- 
sant Varmet  un  casque  léger,  sans  visière  et  sans 
gorgerin,  comme  le  bassinet.  (Milice  françoise,  T.  I, 
p.  389.)  >>  Baissans  les  veues  de  leurs  armelz,  vin- 
«  drent  l'un  sur  l'autre,  etc.  «  (D.  Florès  de  Grèce, 
fol.  133,  R°.  —  Ibid.  fol.  134,  R°  passim.)  Non-seule- 
ment Varmet  dont  on  rappeloit  l'origine  en  le  nom- 
mant quelquefois  heaumet,  mais  le  hacinet,  étoient 
des  casques  à  visière.  «  Présentations  faictes... 
«  et....  lances  baillées...  le  Comte  fit  atteinte  en 
«  glissant  sur  le  heaumet  du  seigneur  de  Sey  et  l'en 
«  désarma  ;  et  le  S'  de  Sey  consuivit  le  Comte  au 
«  bord  de  la  baviere  de  l'armcf  et  rompit  sa  lance.  » 
(Mém.  d'Olivier  de  la    Marche,  liv.  i,   p.    195.) 

><  Anthoine  de  Vaudrey,    seigneur   de  l'Aigle 

«  estoit  armé  pour  combatre  à  pié,  le  hacinet  en  la 
«  teste,  à  visière  levée,  etc.  »  (Id.  ibid.  p.  203.) 

La  preuve  que  ïarmet  ou  heaumet  n'étoit  point 
un  casque  d'espèce  particulière,  c'est  que  dans  le 
xvr  siècle  on  ledéfinissoiten  général  accoustrement 
ou  habillement  de  teste  ;  armure  de  teste,  au  com- 
mencement du  xviir  siècle  (1).  Il  est  évident  que  ces 
définitions  n'étoient  pas  plus  propres  à  Varmet 
qu'au  bassinet,  au  cabasset,  anmorion,  à  \t\ salade, 
h  l'espèce  de  heaume  nommé  bourgnignote  :  aussi 
trouve-t-on  (\\ïarmet  signifioit  salaile,  morion,  ca- 
basset, etc.  «  Je  vous  prie  me  dire  qui  le  meut  de 

«  porter  ainsi  ce  heaume  et  l'escu  blancs On  les 

<'  jugeroit  estre  véritablement  ou  d'yvoire  ou  d'oz 

«  de  quelque  autre  animal,  .le  vous  le  diray En 

«  ceste  isie  pierreuse  souloit  avoir  un  serpenL.. 
«  contre  lequel  Macarée  entreprint  le  combat,  et  fit 
«  tant...  qu'il  le  deffit  et  rendit  mort....  De  la  teste 
«  il  en  fit  cest  armet  ou  cabasset  ;  et  du  plus  large 
«  du  corps,  l'escu  qu'il  porte.  »  (D.  Florès  de  Grèce, 
fol.  10(1,  R°.  -  Voy.  Fauchet,  Orig.  liv.  ii,  p.  110.— 
Monet,  Dict.)  Probablement,  tout  casque,  avec  ou 
sans  visière,  fut  nommé  armet  ou  heaumet, 
parce  qu'il  étoit  plus  petit  et  moins  lourd  que  l'an- 
cien heaume  auquel  on  l'avoit  substitué.  Lorsqu'on 
ne  connut  plus  l'usage  de  ces  heaumes  pesans  et 
incommodes  dont  parle  Fauchet  (Orig.  liv.  », 
p.  109),  Varmet  ou  /(caMme^  devint  heaume  relative- 
ment à  celui  qui  étoit  moins  gi'and  et  plus  léger. 

Armeure,  subst.  fém.  Ai'me  offensive.  Arme 
défensive  (2).  Homme  d'armes,  Banneret,  Chevalier, 
Bachelier,  Ecuyer.  Compagnie  d'hommes  d'armes. 
Port  d'armes. 

Quelque  générale  que  fût  l'acception  du   mot 


(1)  h'arinet  fut,  à  l'origine,  un  casque  ronJ  à  couvre-nuque,  ayant  sur  le  devant  un  masque  grillé.  Sous  le  règne  de 
Louis  XI,  le  couvre-nuque  s'élargit  et  le  masque  emboite  le  menton:  c'est  l'annet  de  gonjer'ui.  Enfin,  sous  Charles  VIII  et 
Louis  XII,  la  mentonnière  et  le  gorgerin  sont  articulés  ;  un  garde-vue  s'avance  sur  la  visière  et  fait  ressembler  le  haut  do 
Varmet  à  une  casquette.  Une  forêt  de  plumes  le  couronne  et  un  panache  retombe  sur  le  dos.  La  mentonnière  est  encore 
plus  proéminente  sous  François  I",  et  les  plumes  atteignent  les  reins,  (n.  e.)  —  (2)  La  plus  ancienne  panoplie  équestre  de 
notre  musée  d'artillerie  date  du  règne  de  Louis  XI.  Une  étude  détaillée  des  armures  peut  être  faite  avec  l'Histoire  du 
Costume,  de  M.  Quicherat,  et  avec  le  Costume  de  (juerrc,  de  M.  Demay  (Mémoires  de  la  Société  des  Antiquaires  de  France, 
•Î874-1875).  L'éclaircissement  III  de  Tédition  classique  de  la  Chanson  de  Roland  (p.  400-415),  de  M.  L.  Gautier,  est 
consciencieux  et  fort  instructif  pour  l'équipement  militaire  du  xi'  siècle,  (n.  e.) 


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—  158  - 


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arme,  on  la  restreignoit  quelquefois  à  celle  d'arme 
offensive  ;  c'éloil  quelquefois  aussi  l'acceplion  du 
mol  anneure.  «  Cilz  s"abessc  o  Varmcure  qu'il 
«  avoit  apportée  ;  si  li  cope  la  teste  ;  si  l'emporte.  » 
(Rom.  de  Dolopalhos,  ms.  de  N.  D.  n"  2,  fol.  53.) 

En  restreignant  l'acception  d'arme  à  celle  d'arme 
offensive,  on  opposoit  le  mol  arme  à  celui  d'rtî-- 
meure,  qui  paroît  avoir  signifié  plus  spécialement 
arme  défensive.  «  Aux  portes  des  cités  et  des  bon- 
«  nés  villes,  \h  où  ils  venront  ou  voudront  entrer  et 
«  demeurer,  ils  mettront  jus  toutes  leurs  armeures 
>•  et  armes.  »  (Froissart,  Vol.  III,  p.  -248.)  En  effet, 
cette  opposition  d'armes  i~i  armeiires  semble  prou- 
ver ([u'armure  défini  par  Monet,  couverture  d'ar- 
mes, éloit  dès-lors  spécialement  alTeclé  à  désigner 
les  armes  dont  on  se  couvre,  les  armes  défensives, 
telles  que  l'écu,  le  casque,  la  cuirasse,  etc.  C'est 
d'ailleurs  ce  qu'atteste  Nicol,  en  disant  qu'armures 
éloit  plus  singulier  en  sa  signification  que  armes, 
puisque  le  dernier  comprenoit  non-seulement  les 
basions  de  guerre,  les  armes  offensives,  mais  les 
escus,  les  armes  défensives,  les  armures.  (Voy. 
Nicot  et  Monet,  Dicl.)  La  comparaison  d'après 
laquelle  ce  mot  armure  a  signifié  différentes  cboses 
dont  l'usage  est  relatif  à  celui  des  armes  défensives, 
paroît  si  naturelle  qu'il  suffira  de  l'avoir  indiquée. 

On  nommoit  figurément  armenres  de  fer,  et 
tout  simplement  arineures,  les  Hommes  d'armes, 
les  Bannerets,  les  Chevaliers,  les  Bacbeliers,  les 
Ecuyers,  comme  ayant  le  privilège  exclusif  de  se 
couvrir  d'une  armure  de  fer,  qui  les  rendoit  invul- 
nérables. «  Li  cuens  nous  doit  aidier  en  la  tiere  de 
«  Haynnau  et  en  la  contée  de  Flandres,  à  mil  armu- 

<-  res  de  fer as  gages  accoustumés  en  France; 

«  c'est  à  savoir  per'le  Banerech  vint  sols,  pour  le 
«  Baceler  diz  solz,  et  pour  l'Escuiier  cuink  solz 
«  tournois.  »  (D.  Carpenlier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de 
Du  Gange,  T.  1,  col.  296  ;  lit.  de  1297.)  «  Si  esloyent 
«  bien  trois  mille  armeures  de  fer.  Chevaliers  et 
«  Escuiers.  »  (Froissart,  Vol.  1,  p.  159.)  «  Si  assem- 
«  bla  en  peu  de  temps  mille  armeures  de  fer,  et 
«  huit  mille  hommes  de  pié.  »  (Id.  ibid.  p.  104.) 

De  personnes  à  guerre  dures 
Ont  viixn-  et  XVI  armeures. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  213,  U'. 

11  est  possible  qu'en  ce  même  sens  figuré,  le  mot 
armure  ait  signifié  Compagnie  d'hommes  d'armes. 
(Voy.  Nicot,  Dicl.) 

Enfin  «  deffendre  armures  el  en  tenir  vérité,  » 
c'éloil  probablement  défendre  le  port  d'armes  et 
tenir  une  assise,  où  ceux  que  la  loi  obligeoit  d'y 
comparoître  faisoient  serment  de  dire  vérité  sur  les 
contraventions  à  cette  même  défense.  «  Peut  faire 
i>  Vicontier  dedans  sa  terre  les  bans  d'aousl,  el 
«  armures  accouslumez  delîendre....  et  en  tenir 
«  vérité  une  fois  l'an.  «  (Bouleiller,  Som.  rur. 
page  903.) 

VAItlANTES  : 
ARMEURE.  Rom.  de  Dolopathos,  MS.  de  N.  D.  fol.  53. 
Armure.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  D.  G.  T.  I,  col.  296. 

Armeurerie,  sm&s^  fém.  Forge  et  boutique 


d'armurier.    Magasin    d'armes.    Armure.    (Voyez 

ArUiElRE.) 

La  première  significationest  attestée  par  Cotgrave, 
Oudin  et  Monet,  Dicl. 

On  n'a  que  Cotgrave  et  Monet  pour  garans  de  la 
seconde,  magasin  d'armes  ;  à  moins  qu'on  ne 
veuille  qu'armurerie  signifie  magasin  d'armes, 
dans  ces  vers  : 

....  Sans  attendre  assaulx,  ne  batterie, 
Rendirent  clefz,  bastons,  armurerie. 

i.  Marol,  p.  171. 

Mais  il  est  plus  probable  qu'en  ces  vers,  armu- 
rerie est  le  nom  collectif  d'armes  défensives.  On  a 
la  preuve  que  le  même  Poëte  a  dit,  dans  le  sens 
d'arme  deffensive  ou  d'aj'mwre  ; 

Voit  ses  souldars  faisans  chère  marrye, 
Nudz,  sans  battons,  n'aulcune  armeurerie. 
3.  Marot,  p.  90. 
VARIANTES  : 
ARMEURERIE.  J.  Marot,  p.  90. 
Armurerie.  J.  Marot,  p.  191.  -  Monet,  Dict. 

Armeurier,  subst.  masc.  Faiseur  d'armures. 
(Voy.  Armoyeur.)  Dans  le  sens  relatif  à  l'acception 
spéciale  A'armeure,  arme  défensive,  ce  mot  armu- 
rier ou  armeurier,  signifioit  celui  qui  forgeoit  et 
faisoit  les  armes  servant  à  couvrir  la  personne, 
telles  que  le  casque,  la  cuirasse,  etc.  (Voy.  Nicol, 
Dicl.)  On  imagine  bien  que  nos  anciens  Chevaliers, 
qui  ne  dévoient  souvent  leur  salut  et  leur  gloire 
qu'à  la  bonté  de  leurs  armeures,  de  leurs  armes  dé- 
fensives, étoienl  soigneux  d'avoir  à  leur  suite  un 
bon  armeurier,  un  armeurier  preudhomme.  »  Pour 
u  briefvement  faire  son  voyage  el  accomplir  ses 
"  armes,....  avoit....  ung  fourrier,  ung  mareschal 
«  el  ung  armeurier  à  quatre  chevaulx,  etc.  »  (Hist. 
de  Saintré,  p.  180  et  187.) 

Ron  paintre  pour  faire  bannière, 

Ron  armurier  fault  que  l'en  quierre. 

Eust.  Desch.  Pocs.  MSS.  p.  356,  col.  4. 

Armoier  qui  fait  haubergons 

Et  harnois,  doit  estre  preudoms  ; 

Car  soubz  la  fiance  de  lui, 

Combatent  pluseurs  à  autrui. 

Id.  ibid.  p.  443,  col.  î. 

VARIANTES  : 
ARilEURIER.  Hist.  de  Saintré,  p.  187. 
Armoier.  Eust.  Descli.  Poës.  MSS.  p.  443,  col.  2. 
Armorier.  Cotgrave,  Dict. 
Armurier.  Orth.  subsist.  —  Nicot  et  Monet,  Dict. 

Armigère,  adj.  Qui  expose  au  sort  meurtrier 
des  armes.  On  a  déjà  observé  que  par  opposition 
aux  armes  courtoises,  à  ces  combats  galants  où 
l'usage  des  armes  meurtrières  éloit  interdit  à  la 
Chevalerie,  on  nommoit  armes  «rm/r/c'/rs,  ceux  que 
les  rivalités  personnelles  ou  nationales  ont  trop 
souvent  ensanglantés.  Pour  la  Noblesse,  ces  com- 
bats qui  l'exposoient  au  sort  meurtrier  des  armes, 
étoienl  des  fêles  armigères,  distinguées  sans  doute 
des  fêtes  courtoises,  comme  l'on  dislinguoit  des 
armes  courtoises  les  armes  armigères.  »  A  toutes 
«  les  aultres  testes  royalles  el  solennelles  que  le  Roy 
>i  tiendra,  el  aussi  des  autres  fêtes  armigères  ou 
«  courtoises,  etc.  »  (Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  m,  au 
mot  Heraldus,  col.  1100.  —  Voy.  Arme). 


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ArmiIle,SM6sL/-em. Bracelet;  anneau (1).  (Vov 
Armiole.)  Eu  latin  armilla,  mot  formé  d'arvius  oui 
signifie  bras.  '  ^ 

Es  bras  aront  armilles,  et  torkes  à  lor  cols 

Rom.  d'Alexandre,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  186,  V-  col,  2. 

Il  semble  qu'on  ait  étendu  l'acception  particu- 
lière de  ce  mot  armille,  à  des  anneaux  ou  orne- 
mens  d'autre  espèce  que  le  bracelet. 

Leur  osteray  de  leurs  oreilles 

Les  biaux  anneaulx  et  les  arnieiUes. 

Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  532,  col.  1. 
VARIANTES  : 
ARMILLE.  Rom.  d'Alexandre,  MS.  du  R.  fol   186 
Armeille.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  532,  col.  ï. 

Armin  adj.  et  siibst.  masc.  Qui  est  d'Arménie 
Uui  est  d  hermine.  Hermine.  (Voy  Armine  ) 

En  latin  Armenius  (2),  dont  on  a  fait'ladiectif 
françois  hermins,  ermin,  armin,  etc. 

Ne  sai  s'est  Grizois  ou  Hennins. 

BlaiichaDdin,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  186,  R-  col  2 

C'est  par  ellipse  que  cet  adjectil',  masculin  même 
sous  orthographe  hermine,  signitioit  comme  sX 
stantif,  peuple  d  Arménie,  homme  d'Arménie  un 
Arménien.  .  ViUehardouin  parlant  de  Léon  I  rïv 
■'  d  Arménie  ou  de  la  Cilicie,  le  qualifie  sirè  des 
«^mw/nes.  »  (Du  Gange,  Dissert.  I"  sur  Joinville! 

Por  un  sien  Chevalier  a  mandé  un  Hermine 
gui  sa  plaie  appareille,  et  santé  li  devine       ' 
Parlon.  de  Blois,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  173   R"  col  " 

nin'  rpHiSf  }'^  ^°"^  on  faisoit  ellipse  étoit'fémi- 
mn,  1  adjectif  hermine  pris  substantivement  étoit 
de  même  genre,  et  signifioit  comme  auiourd'hu 
1  espèce  de  lourruie  qu'anciennement  on  noinmoU 

Cange  Dissert.  I"  sur  Joinville,  p.  131.)  En  disant 
peand  hennin,  peliçon  d-ermin,  on  piroit  :S 
transforme  ermin  ou  hermin,  adjectif  dai  s  l'exires 
sion  peliçon  hermin,  en  substantif  poui-déà-'ue; 
1  espèce  de  rat  d'Arménie  que  l'on  connoit  wcore 
sous  la  dénomination  elliptique  d'hermine. 

Vestuz  fu  d'un  pliçon  hennin 

Floire  et  Blanchellor,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  201    V  col    " 

Chemisete  avoit  de  lin, 
Et  blanc  peliçon  d'ermin. 

Ane.  Poèl.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  14«. 

.D„Tx,    T.  VARIA.NTES  : 

ARMIN.  Poës.  de  Crétin,  p  161 

Ermin.  Ane.  Poët.  F.  MSS  T.  iv,  p  1444 

Harmin.  J.  Marot,  p.  160 

Hermin.  Floire  et  Blaucheflor,  MS.  de  S'  Germ   fnl   ont 

Hermine.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S^  Germ   M   179 

Hermins.  Blanchandin,  MS.  de  S- Germ  f".'  m 


«  destrier  tout  housse  de  très-fines  amm^s  etc  » 
(Ilist.  de  Saintré,  p.  330.  -  Voy.  Arm.n.)        ' 

Dans  1  origine  de  l'usage  des  fourrures  de  peaux 
d  hermine,  on  cousoit  ensemble  ces  peaux  dont  les 
queues  noires  à  l'extrémité  et  pendantes  Jormoient 
une  moucheture  naturelle,  mais  irrés^uS  On 
imagina  ensuite  de  la  fair^  plus  régulière    par  le 

luci,  en  oDservant  les  distances,  de  petits  morcpauv 

rèf-l;Ln?"'^"n'^^^°^'^'''^''^^'  ^i' ■  est  s  s 

tres-iuisant ,  «  en  sorte  que  ce  noir  ainsi  entrp- 
:  d'iie  mfn?".?  '(xt^'T',^'  blanchetfrSesreau; 

moucheture  artificielle  de  l'hermine,  îo  s  m'on  ci! 
soit  ermine  mouchetée.  «  Les  erminesnMetéès 
"  et  genettes  noires  n'appartenoient  qu'au"  Dames 

p.  //.  — -  Voy.  Armi>er.)  ' 

Si  Ihermine  réservée  par  le  cérpmnniii  ri„ 
XV'  Siècle  aux  Dames  issues^ de  San|  rojï"di  ,in- 
guoit  les  Rois  et  les  Princes  dans  lel grandes  Sié 
monies,  elle  annonçoit  aussi  la  supérior Ué  du  ran.^ 
des  .seigneurs  et  du  mérite  des  Chevaliers  oîi 
après  avoir  fait  d'hermine  leurs  cottes  d'à  mes^Sn 
firent  eurs  armoiries.  Vraisemblablement  on  Val" 
soit  allusion  à  l'hermine,  comme  h  la  première  Tel 
deux  pannes  ou  fourrures  en  usage  dans  lesJrmot 
ries,  lorsqu'en  parlant  d'un  Chevaliei  du  premier 
mérite  d'un  mérite  supérieur,  on  disoit  figuSenî 
qu  II  etoit  «  hermine  et  sable  de  tous  Chevaliers    , 

De  tous  Cevaliers  convenables 
Esties  vous  ermines  et  sables. 

Pli.  Mouskes,  MS.  p.  228. 

Il  semble  qu'en  réunissant  le  sable  à'i'herminp 

"SklTT  l'^'S''  ^T  l'hermine  ei/teÏÏes'dè 
uiason,  est  un  champ  d  argent,  semé  de  DPfitp« 
pointes  de  sable,  par  lesquelles  on  a  vou  S  Kre? 
la  moucheture  de  l'hermine.  C'est  par  une  a  usioii 
de  même  genre  que  la  première,  qu'un  Poé"edï 

sanfdôu  P^'^ilV'^'"'^'''"^^'''»"*^'  '-elativement 
BretagÏÏÏamère'""'"  '''  ^'""«'"'^  ^'^""^  ^^ 

Puisqu'avons  de  la  douice  anninc 
tng  beau  Daulphin,  dueil  se  termine. 

Poës.  de  Grelin,  p.  161. 


no^i ,  '?,*^',?"?-  /•  Hermine.  On  a  indiqué  l'ellinse 
par  laquelle  1  adjectif  féminin  hermine  qu'ancien 
nemen  on  écrivoit  ermi«e,  armine  !ilmrnS\ 
signifie  et  signifie  encore  peau  d'Arménie  ÎJ^enu 
d  une  espèce  de  belette  aussi  nommée  iieminP 
parce  qu'elle  naît  en  Arménie,  où  S  trafiaS 
ces  peaux  si  estimées  pour  lès  fourrures  ?  Son 


Ariiiiner  verbe.  Moucheter  comme  l'hermine 
î'  ourrer,  border  d'hermine 

ciP^fp''!?rw"''  •'"  'ïesignoitla  moucheture  artifi- 
tiirP  iP  nniiT'"''',^"  assimiloit  à  cette  mouche- 
tuie  le  poil  d  un  cheval  gris-pommelé,  en  disant 
qu  un  cheval  étoit  hermine  de  son  poil,  que  'her- 
mine eto.t  arminée.  <■  Elle  estoit  monta  sur  un 

aiér'i- -1?^  'Tr  t^  ^«»  P«i'  naturellement  » 
(Mem.  dOhv.  de  la  Marche,  liv.  u  p  5571  On 
trouve  l'expression  ermines  arminées,  dans  les 
Honneurs  de  la  Cour,  (.ms.  p.  34  37  etc  ) 


^ï=3!i-&'ï^-"ïï-3àr:s#.s&<î^^^^ 


AR 


—  160 


AR 


Dans  le  second  sens,  on  disoil  :  «  Qui  voudra 
«  fourer  sa  robbe  aulrement  qu'îi  la  commune  et 
«  ancienne  guise,  comme  de  trop  longues  manches, 
«  ou  de  les  l'aire  hennhier,  etc.  «  (Ord.  T.  U,  p.  372. 
—  Voy.  AuMiNE.) 

VARIANTES  : 
ARMINER.  Honneurs  de  la  Cour,  MS.  p.  34,  37,  etc. 
Er.miner.  Mém.  dOliv.  de  la  Marche,  liv.  ii,  p.  557. 
Herminer.  Ord.  T.  II,  p.  372.  -  Oudin,  Dict. 

Armiole,  subst.  fém.  Espèce  de  broc.  En  obser- 
vant que  du  mot  latin  arnms  on  a  formé  celui 
A'armiUum  (1),  qui  signilioit  une  espèce  de  vase  à 
mettre  du  vin,  parce  qu'on  le  portoit  sur  l'épaule, 
on  croit  indiquer  l'origine  A'Armiole,  espèce  de 
broc  que  sans  doute  on  portoit  à  bras  ou  sur 
l'épaule.  «  Saicha  une  dague,...  et  la  getta  à  ladite 
«  lemme  par  tele  manière  que,  se  icelle  dague 
«  n'eust  encontre  une  armiole  plaine  de  vin,  tenant 
"  trois  quartes  ou  environ,  etc.  »  (D.  Carpentier, 
Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Armillum; 
tit.  de  1381.  —  Voy.  Armille  et  Arme.) 

Armoie,  Sit&s/.  fé^n.  Attirail.  Peut-être  que  dans 
un  sens  relatif  à  l'acception  générale  d'armer,  four- 
nir, équiper,  le  mot  armoie  formé  d'arme,  aura 
signifié  attirail  de  pressoir,  comme  nom  collectif  de 
diverses  choses  dont  il  faut  armer  un  pressoir,  le 
fournir,  l'équiper.  »  En  la  ville  de  \ineuf,  un  pres- 
»  souer  et  quatre  cuves.  Item,  une  granche  et  les 
»  mesons,  si  comme  elles  se  comportent  avecques 
«  toute  Yarmoie  dudit  pressouer.  »  (D.  Carpentier, 
Suppl.  Gloss.  lat  de  Du  Gange,  T.  I,  col.  300;  lit. 
de  4331.  —  Voy.  Armer.)  Peut-être  aussi  ne  verra- 
t-on  dans  armoie  que  l'altération  d'un  mot  de  même 
origine  que  harnais. 

Armoire,  adj.  et  subst.  fém.  Qui  est  à  armoi- 
ries. Espèce  de  lleur. 

Probal)lement  les  cottes  armoriées  des  Héiauts 
ne  se  nommoient  cottes  armoires,  qu'autant  que 
la  rime  ne  permettoit  pas  de  les  nommer  cottes 
d'armes. 

S'avoienl  haslées  et  noires 

Les  chars  en  ces  cotes  armoires  ('2). 

Quelques  vers  plus  bas,  on  lit  : 

.  .  .  Com  lasses  gens  et  destroites. 
En  ces  cotes  d'armes  estroites,  etc. 

Dits  do  Baudoin  de  Coudé,  MS.  de  Gaignat,  fol.  318,  V  col.  1. 

Comme  substantif.  Armoire  étoit  de  même  ori- 
gine et  même  signification  qu'Armoirie,  espèce  de 
fleur,  en  latin  armerius  flos.  (Gotgrave,  Dict.  — 
Martinius,  Lexic.  Philolog.  —  Voy.  Armoirie.) 

Armoirie,  subst.  fém.  Plantes  de  diverses 
espèces;  bétoine;  espèce  de  giroflée  sauvage;  espèce 
d'œillet.  (Voy.  Armoire.) 

Quand  il  seroit  vrai  que  de  la  Grande-Bretagne 
on  eiit  transplanté  dans  la  Bretagne  Armorique,  la 
fleur  nommée  armoirie,  il  n'en  seroit  pas  plus 


vraisemblable  qn'armorica  filt,  comme  on  l'a  sup- 
posé, l'origine  de  cette  dénomination.  (Voy.  Ménage, 
Dict.  Etym.) 

On  a  tant  de  preuves  du  changement  de  s  en  r 
dans  la  prononciation  et  l'orthographe,  qu'il  semble 
possible  que  du  nom  latin  arlemisia  (3),  en  françois 
armoise,  on  ail  fait  armerie,  armoirie  et  armoire. 
Quoi  qu'il  en  soit,  l'ai-moise,  celle  dont  les  tiges 
sont  terminées  par  des  épis  de  fleurs,  chaque  fleur 
formant  un  amas  de  petits  fleurons  de  couleur  de 
pourpre,  offre  une  telleressemblance  avec rarmem, 
qu'on  la  soupçonne  d'en  être  une  espèce.  En  effet, 
Varmerie  ou  Varmoirie,  en  latin  armerius  flos,  est 
une  plante  de  diverses  espèces,  et  dont  les  fleurs 
qui  naissent  à  l'extrémité  des  tiges,  forment  en  se 
réunissant  une  touffe  de  fleurs  d'un  rouge  pourpré, 
et  semblables  à  de  petits  œillets.  (Voy.  Martinius, 
Lexic.  Philolog.  T.  I,  p.  56,  col.  1.)  Probablement, 
une  armerie  à  seiz>e  pompes  étoit  une  touffe  de  pa- 
reil nombre  de  ces  fleurs,  un  bouquet  formé  natu- 
rellement de  l'assemblage  de  seize  fleurons.  «  Le 
«  vieillard.... luyavoitdonné....  \x\\q  armerie  à  seize 
«  pompes  que  elle  garda  et  raeil  en  sa  quenoille, 
«  pour  la  peur  de  luy.  »  (Arrêts  d'Amours,  p.  296.) 

L'armerie  étant,  comme  on  l'a  déjà  observé,  une 
plante  de  diverses  espèces,  il  est  possible  que  la 
bétoine,  la  giroflée  sauvage  et  l'œillet  qu'on  nom- 
moit  armeries,  aient  été  réunis  comme  espèce,  sous 
la  même  dénomination.  On  altère  sans  doute  l'or- 
thographe armerie,  lorsqu'à  Metz  on  dit  armenie 
pour  désigner  une  espèce  de  petit  œillet  sauvage 
qui  est  ordinairement  de  couleur  de  sang,  (Voy. 
Borel,  Oudin  et  Monet,  Dict.  —  Gloss.  des  Arrêts 
d'Amours.  —  Ménage,  Dict.  Elym.  —  Dict.  de 
Trévoux.) 

Peut-être  l'œillet  de  Poëte  ou  de  Poitou,  peut-être 
aussi  l'armoise  dont  les  fleurs  de  couleur  pourpre 
sont  d'une  odeur  agréable  et  aromatique,  fut-elle 
l'espèce  d'armerie  que  la  galanterie  du  xv=  siècle 
croyoit  propre  à  exalter  le  sentiment  de  l'amour,  et 
à  l'usage  de  laquelle  on  ne  renonçoit  que  lorsqu'il 
falloit  renoncer  au  plaisir  de  courtiser  la  beauté. 

Ces  dorelotz,  ces  gorgias 
Menoient  les  meilleures  galoises. 
On  ne  sentoit  que  muglias, 
Marjolaines,  armeries,  boiiquetz,  etc. 

Poés.  de  Coquillart,  p.  157  et  158. 
.  .  .  Quand  ce  viendra  au  lever, 
Que  l'eu  met  dedans  ces  choffreltes, 
Pour  en  amours  cueurs  eslever, 
Armeries,  sentiers,  violettes,  etc. 

L'Amant  rendu  Cordeller,  p.  575. 

Adieu  roses,  armeries,  et  boucquetz  ; 
Adieu  Déesses  chantans  comme  seraines; 
Adieu  baisiers  et  plaisances  mondaines. 

Vigil  de  Cliarles  VU,  part.  Il,  p.  32. 

VARIANTES  : 
ARMOIRIE.  Gotgrave,  Ménage,  Dict.  Etym. 
ARMENIE.  Ménage,  Dict.  Etym. 
Armerie.  Poës.  de  Coquillart,  p.  158. 
Armorie.  Cotgrave,  Dict. 


(1)  Armilium,  non  armillum,  se  trouve  dans  Isidore  de  Séville.  (n.  e  )  -  (2)  C'est-à-dire  les  cottes  d  armes  recouvertes 
de  taffetas  armojsin,  c'est-à-dire  cramoisi,  (n.  e.)  -  (3)  Comme  Artémis  secourait  les  femmes  dans  leurs  maladies,  cette 
plante,  qui  passait  pour  utile  dans  ces  affections,  reçut  le  nom  de  la  déesse.  (N.  e.) 


AR 


161  - 


AR 


Armoiseur,  sttbst.  masc.  Fabriquant  ou  mar- 
chand d'Armoisin.  Il  sembleroit  d'après  ce  mot 
Armoiseur,  ainsi  expliqué  par  D.  Carpentier,  qu'on 
eût  dit  armoise  pour  armoisine,  espèce  de  taffetas. 
«  Entrèrent  en  la  maison  d'un  Armoiseur  et  là 
«  prindrent  chacun  une  huvette  ou  capeline.  » 
(D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au 
mol  Ermisinus;  tit.  de  1421.) 

Armoisin,  adj.  et  subst.  masc.  Qui  est  de  soie, 
d'une  étoffe  légère  de  soie,  qui  est  de  taffetas.  Etoffe 
légère  de  soie,"  taffetas.  Qui  est  rouge  ou  pourpré. 

On  a  dit  que  l'espèce  de  taffetas  désignée  par  ce 
mot  armoisin,  fut  ainsi  nommée  à  cause  de  la  toile 
armoriée  dans  laquelle  on  l'enveloppoit  pour  faire 
des  envois.  Une  opinion  plus  vraisemblable,  et  que 
paroit  justifier  le  moi  ormusinus  i\m  dans  la  latinité 
du  moyen-àge  signifioit  une  étoffe  légère  de  soie, 
est  celle  du  savant  M.  Huel,  pour  qui  armoisin  étoit 
une  altération  A'ormoisin,  espèce  de  Taffetas  venant 
de  l'ile  d'Ormus.  (Voy.  Ménage,  Dict.  Etym.  —  Dict. 
de  Trévoux.)  Peut-être  concluera-t-on  de  cette  opi- 
nion, qu'0)7H((SiM!/s  est  le  nom  primitif  altéré  dans 
le  latin  ermisinus,  l'italien  crmisino  ou  ermesino, 
et  le  françois  armoisin  ou  armesin?  D'ailleurs, 
l'expression  lat.  ermisinus  rubeus,  en  françois 
armoisi)i  rouge,  semble  évidemment  prouver  que 
Du  Cange  s'est  mépris  en  expliquant  ermisinus 
dans  le  sens  de  cremasinus  [i),  en  franrois  cramoisi  ; 
et  qu  ermisinus  a  signifié,  comme  onnusinus,  une 
étoffe  légère  de  soie,  une  espèce  de  taffetas,  quelle 
qu'en  fût  la  couleur.  (Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au 
mot  Ermisinus  .  —  Id.  Ibid.  au  mot  Ormusinus.  — 
D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss  lat.  de  Du  Cange,  au 
mot  Ermisinus.)  On  conçoit  que  la  même  dénomi- 
nation fut  naturellement  commune  à  toute  étoffe 
légère  de  soie,  fabriquée  à  l'imitation  de  Yarmoisin, 
du  taffetas  qu'on  dit  avoir  été  ainsi  nommé,  parce 
qu'il  venoit  de  l'ile  d'Ormus  (2). 

Aussi,  trouve-t-on  que  comme  adjectif,  armoisin 
signifioit,  qui  est  de  soie,  d'une  étoffe  légère  de 
soie,  qui  est  de  taffetas.  (Cotgrave,  Dict.) 

C'est  par  ellipse  du  substantif  étoffe,  qn'armoisine 
a  signifié  une  étoffe  légère  de  soie,  la  même  que 
par'ellipse  du  substantif  taffetas,  signifie  encore 
l'adjectif  armoisin.  (Cotgrave,  Dict.) 

Anciennement,  l'on  a  dit  taffetas  armoisin; 
expression  dans  laquelle  on  aura  imaginé  qn'armoi- 
sin,  qui  désigne  la  qualité  d'une  espèce  de  taffetas, 
en  désignoit  la  couleur  rouge  ou  pourprée.  (Voy. 
Hist.  du  Théât.  Fr.  T.  Il,  p.  38-2,  etc.)  C'est  proba- 
blement d'après  une  idée  semblable ,  que  pour 
signifier  le  coloris  brillant  et  solide  de  l'Eloquence 
et  de  la  Poésie,  Rabelais  disoit  figurément,  en  par- 
lant des  Poètes  et  Orateurs  Gallicques  :  «  Ils  ne 
>«  traictent  que  gestes  héroïcques ,  choses  grandes, 
«  matières  ardues,  graves  et  difficiles  ;  et  le  tout  en 
«  ï{héXor\cque  artnoisine  et  c7'amoisine.  »  (Rabelais, 
T.  V,  prolog.  p.  12.  —  Voy.  Armoisy.) 


VARIANTES  : 
ARMOISIN.  Orth.  sub.  -  Rabelais,  T.  V.  prolog.  p.  12. 
Armesin.  Monet,  Dict. 
Armoysin.  Hist.  du  Théât  Fr.  T.  II.  p.  382. 

Armoisy,  participe.  Teint  en  rouge  ou  en 
pourpre.  Définition  relative  à  l'idée  qu'on  paroît 
s'être  faite  de  la  couleur  signifiée  par  l'adjectif 
armoisin,  dans  l'expression  taffetas  armoisin. 
«  Les  femmes....  qui  portoient  robbes  de  tafetas 
«  armoisy,  etc.  »  (Rabelais,  T.  II,  p.  160.  —  Voy. 
Armoisin.) 

Peut-être  aussi  qu'en  ce  sens,  le  participe  armoisy 
et  l'adjectif  armoisin  étoient  de  même  origine 
qu'armoirie  ou  armoire,  plante  dont  le  nom  paroit 
une  altération  d'armoise  ;  et  qu'ils  signifioient  une 
ressemblance  de  couleur  avec  celle  des  fleurs  rou- 
ges et  pourprées  de  cette  plante.  On  fonde  unique- 
ment cette  conjecture  sur  la  possibilité  qu'à  la  fin  du 
xv°  et  au  commencement  du  xvi'  siècle,  on  se  soit 
plu  à  comparer  la  couleur  d'un  tatTeias  rouge  pour- 
pré avec  celle  de  l'armoirie,  et  à  la  désigner  par  un 
nom  qui  retraçoil  l'idée  d'une  fleur  consacrée  à  la 
galanlerie.  (Voy.  Armoirie.) 

Arnioyer,  verbe.  Armorier,  bhisonner.  On  disoit 
en  ce  sens  :  "  Ung  penoncel  armoyé  de  telle  cong- 
«  noissance  comme  l'escu.  •■  (Percef.  Vol.  Il,  fol.  99. 
—  Voy.  Armoirie,  armes  en  termes  de  Blason.) 

VARIANTES   : 
ARMOYER.  Froissarl,  Vol.  IV,  p.  53. 
Armoier.  Monet,  Dict. 
Armoirer.  Cotgrave,  Dict. 
Armoyrer.  Du  Bellay,  Méra.  T.  VI.  p.  136. 

Armoyeur,  subst.  masc.  Peintre  et  brodeur 
d'armoiries.  On  cvo\[qu  Armoyeur  a  l'une  et  l'autre 
signification  en  ce  passage  :  «  Noble  chose  fust  à 
«  Veoir  la  Chevalerie;....  car  trop  plus  noblement 
«  estoienl  parez  que  par  avant  n'avoient  esté,  pour 
'<  les  Armoyeurs  qui  estoient  venus  à  la  feste  pour 
«  gaigner.  •>  (Percef.  Vol.  V,  fol.  81,  R"  col.  2) 

Quoiqu'il  soit  très  probable  qu. irmoyeur  signi- 
fioit aussi  Armurier,  il  semble  que  le  titre  de  l'an 
1412,  cité  par  D.  Carpentier.  (Suppl.  Gloss.  lat.  de 
Du  Cange,  au  mot  Armeator,)  ne  prouve  pas  assez 
évidemment  cette  signification  :  elle  n'est  pas  moins 
incertaine  dans  l'Hist.  de  Charles  VI,  par  J.  Le 
Fèvre  de  S'  Remy,  p.  162.  (Voy.  Armeurier.) 

Arnaud,  subst.  masc.  Nom  propre.  Quoique 
Arnaud  ait  été  distingué  à'Arnoul,  il  est  vraisem- 
blable que  dans  l'origine  c'étoit  le  même  nom. 
(Ménage,  Dict.  Etym.  —Voy.  Arnulfins.) 

Si  l'on  a  ridiculisé  le  nom  à'Arnoul  en  le  choi- 
sissant pour  désigner  un  mari  dupe  et  malheureux, 
on  a  rendu  odieux  celui  d'Arnaud,  en  le  donnant  à 
toute  espèce  de  garnement,  d'homme  malfaisant  et 
méprisable.  (Voy.  D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat. 
de  Du  Cange,  au  mot  Arnaldus.)  De  là,  on  aura 
nommé  Cap  de  S'  Arnaud,  un  Capitaine,  un  Chef  de 
garnements,  dont  on  feignoit  que  S' Arnaud  étoit  le 
patron.  «  Pour  estre  estimé  Gentil-homme,  aujour- 


(1)  Cremasinus,  d'où  cramoisi,  parait  venir  de  l'arabe  kermès,  cochenille.  (N.  E.)  —  (2)  Ou  plutôt  du  détroit  d'Ormuz.  (N.  E.) 
n.  21 


AR 


—  162 


AR 


«  d'hui  il  suffit  qu'on  ne  sache  d'où  vous  estes.  Et 
«  un  Cap  de  S'  Ai'natid,  un  Pedescaux  (I)  de  Gas- 
u  cogne,  le  Capitaine  du  Buisson,  do  l'Espine,  de  la 
«  Ronce,  tous  enfanis  d"un  hallier,....  n'auront 
«  point  honte  de  se  comparer  aux  plus  illustres 
«  Seigneurs  de  France,  et  leur  dire  :  je  suis  Gentil- 
»  homme   comme  vous.    «  (l'aucliot,  Orig.  liv,  I, 

p.  loi.  —  VOy.   AUiNAlDER.) 

Arnaudens,  adj.  et  siibst.  masc.  plur.  Nom 
d'une  espèce  demonnoie.  LessolsArïiaudens  ou  les 
Arnaudens,  en  lalin  Ai'naldenses  !;2],  étoient  une 
espèce  de  monnoie  connue  dans  les  provinces 
méridionales  de  la  France;  peut-être  une  monnoie 
des  vicomtes  de  Lomagne  à  qui  le  nom  d'Arnaud 
étoit  familier;  peut-être  aussi,  une  monnoie  des 
comtes  de  Carcassonne  ou  de  Comminge.  (Voy.  Du 
Gange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  71G.  —  D.  Carpenlier, 
Suppl.  Gloss.  lai.  de  Du  Gange,  T.  I,  col.  300.) 
<■  L'homme  ou  femme  pris  en  adultère,  doiveni 
«  courir  la  ville,  leurs  mains  liées  toutes  deux  avec 
«  une  corde  ;  et  le  Seigneur  doit  avoir  cinq  sols 
•1  Arnaudens.  »  (Coût.  d'Agen,  au  Nouv.  Coutgén. 
T.  IV,  p.  903.  col.  1.  —  Voy.  Arnclfins.). 

VARIANTES  : 
ARNAUDENS.  Coût.  D'Agen,  au  Nouv.  C.  g.  T.  IV,  p.  904. 
Ahnaudenx.  D.  Carp.  S.  Gl.  1.  de  D.  C.  à  Arnatdensis. 

Ai'iiaiider,  verbe.  Maltraiter.  Il  semble  qu'«;'- 
nauder  quelqu'un,  c'étoil  le  maltraiter,  en  agir  avec 
lui  comme  un  garnement,  comme  un  homme  de 
l'espèce  de  ceux  qu'on  désignoit  par  le  nom  d'^l?-- 
naiid,  en  latin  Arnaldus  ou  \irnoIdus.  «  Tu  me  vas 
<•  arnaudant.  comme  tu  fiz  hier  mon  père  que  tu 
«  affolas.  »  (D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du 
Gange,  T.  I,  col.  301  ;  tit.  de  1410.) 

Arnoul,  subst.  masc.  Nom  propre.  Mari  dupe 
et  malheureux.  (Voy.  Arnacd.) 

Qu'on  parcoure  lès  Légendes,  on  y  trouvera  plus 
d'un  Saint  dont  la  femme  resta  vierge,  ou  lui  fut 
infidèle.  On  conserve  dans  la  Bibliothèque  du  Cha- 
pitre de  S'  Pierre  de  Lille,  une  ancienne  Légende 
manuscrite,  où  il  est  parlé  d'un  S'  Gengoufle 
assez  malheureux  en  femme,  pour  être  comme  un 
autre  le  patron  de  la  confrérie  nommée  en  latin, 
confralria  Sancti  CucuUi.  Saint  Vincent  Ferrières, 
dans  son  sermon  sur  la  luxure,  cite  l'histoire  d'un 
homme  veuf  que  la  crainte  d'être  de  cette  confré- 
rie empéchoit  de  hasarder  un  second  mariage  que 
ses  amis  lui  proposoient  avec  une  jeune  femme 
dont  l'infidélilé,  disoient-ils,  étoit  d'autant  moins 
inquiétante  qu'il  s'en  vengeroit  en  la  faisant  de  la 
confrérie  de  Saint-Luc.  «  Si  faciat  vos  de  coufra- 
«  tria  Cucullorum  vel  Sancli  CucuUi,  facietis  de 
«  confratrià  Sancti  Lucœ.  »  (Voy.  Supplément  au 
Gloss.  du  Boni,  de  la  Bose,  p.  113  et  lli.) 

Probablement,   ce   patron  de  la  confrérie  des 


Maris  dupes  et  malheureux  est  un  Saint  imaginaire 
pour  qui  l'on  auroit  dû  réserver  fhonneur  de  ce 
burlesque  patronnage,  sans  y  associer  S'  Arnoul, 
dont  on  a  ridiculisé  la  mémoire,  en  le  nommant 
Seigneur  des  Coux.  On  ne  prétend  pas  décider  quel 
osi  ce  Saint  Arnoul;  si  c'est  celui  dont  la  femme 
mourut  vierge,  ou  celui  dont  la  femme,  mère  de 
deux  enfans,  se  fit  religieuse  du  vivant  de  son 
mari  qui  fut  évêque  de  Metz. 

Peut-être  faut-il  attribuer  au  besoin  de  la  rime 
l'association  de  Saint-Thibaud  à  Saint  Arnoul, 
dans  le  serment  que  fait  une  femme  de  se  venger 
des  mauvais  procédés  de  son  mari.  Il  est  vraisem- 
blable que  sans  le  besoin  de  la  rime  elle  n'auroit 
juré  que  par  S"  Arnoul,  généralement  regardé 
comme  le  Patron  de  la  confrérie  des  Maris  dupes 
et  malheureux. 

Puisque  mon  mari  fault, 

Et  que  mon  cliastel  m'emble  et  tault, 
Et  autre  pertuis  en  estoupe  ;... 
Par  Saint  Arnoul  el  Saint  fhiebault, 
Je  lui  feray  d'autel  pain  souppe. 

Eust.  Desch.  Poës.  JISS.  p.  449,  col.  1. 

Puisqu'il  brise  son  mariaige, 
Par  S'  Arnoul  aussi  feray-je 

Id.  ibid.  p.  334,  col.  3. 

On  ne  croira  pas  sans  doute,  d'après  Jean  de 
Meun  et  Coquillart,  qu'il  suffise  d'être  marié  pour 
être  de  cette  Confrérie,  pour  être  mené  à  la  danse 
le  jour  de  S'  Arnoul,  Seigneur  des  Coux  (3). 

Par  vous,  par  voslre  lécherie, 
Suisje  mis  en  la  confrairie 
Saint  Arinnit,  le  Seigneur  des  Coux, 
Dont  nul  ne  peut  estre  rescoux, 
Qui  femme  prent,  etc. 

Boni,  de  la  Rose,  vers  9550  et  9554. 

Coquins,  niays,  sotz,  joquesus, 
Trop  tost  mariez  en  substance, 
Seront  tous  menez  au  dessus. 
Le  jour  Sainct  Arnoul,  à  la  dance. 

Poës.  de  Coquillal,  p.  i"l  el  172. 

Il  semble  que  Molière,  en  nommant  Arnolphe  le 
principal  personnage  de  l'Ecole  des  Femmes,  ait 
songé  à  perpétuer  l'ancien  ridicule  du  nom  d'.ir- 
noul,  qui  désignoit  les  maris  même  dont  on  feignoit 
que  S'  Arnoul  étoit  le  patron. 

Je  li  voldrai  coper  les  cous 
Par  qui  je  sui  Ehiol  et  cous. 

Fabl.  MS.  de  Berne,  n-  354,  fol.  157,  V  col.  2. 

On  est  scandalisé  de  l'indécence  avec  laquelle  un 
ancien  Poêle  a  travesti  S'  Mathieu  qui,  dans  son 
Evangile  (chap.  \,  vers,  xvm),  dit  en   parlant  de 

Joseph,  époux  de  Marie:  «  Cum  essetdesponsata 

«  Maria  Joseph,  antequàm  convenirent,  inventa  est 
«  in  utero  habens  de  Spirilu  Sancto.  Joseph  autem 
«  vir  ejus,  cum  essetjustus  etnolleteam  Iraducere, 
«  voluit  occulté  dimit'tere  eam.  Ikcc  autom  eo  cogi- 
«  tante,  etc.  »  Dans  le  Poète,  c'est  Joseph  qui  peint 
lui-même  son  état  de  perplexité ,  en  termes  qui 


(1)  Espèce  de  Bandoulier.  —  (2)  Monnaie  épiscopale  d'Agen,  frappée  par  Arnaud  de  Rovinham,  évêque  de  cette  ville  de 
1209  à  1228.  (N.  E.)  —  (3)  Les  saints  devaient  donc  s'estimer  heureux,  lorsque  les  esprits  falots  du  xv^  siècle  s'arrêtaient  en 
chemin  et  se  contentaient  de  canoniser  le  hareng  :  «  La  vie  dp  Sainct  Ilarenc  L-lorieux  martvr.  et  comment  il  fut  pesché  en 
la  mer  et  porté  à  Dieppe.  »  Voir  le  Recueil  des  Poésies  françaises,  p.p.  A.  de  Alontaiglon  (II",  325).  (n.  e.) 


An 


-  163 


AR 


caractérisent  la  grossièreté  des  idées  religieuses  de 
nos  ancêtres. 

Helas  !  Dolent,  et  que  feray  ? 
Pour  ly  de  tous  ffabbez  serav, 

I?f    c;..J:    u :  -1 y :, 

1  ver»,  MS.  p   74. 


Et  Sire  Hei-noux  aussi  clames. 
Hist.  des  Tr)is  Maries, 


V.^RIANTES    : 
ARNOUL.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  449. 
Elnol.  Fabl.  MS.  de  Berne ,  n»  354,  fol.  157. 
Hernoux.  Hist.  des  Trois  Maries,  en  vers,  MS. 


p.  74. 


Arnulfins,  suhst.  masc.plur.  Nom  d'une  espèce 
de  monnoie.  Monnoie  de  même  espèce  que  les 
Arnaudens  ;  ce  qui  semble  justifier  l'opinion  de 
Ménage  sur  l'identité  des  noms  Arnaud  ,  en  latin 
Arnaldus,el  Arnoul ,  en  latin  Arnulplius.  (Voyez 
Arnaid  )  On  lit  que  les  Arnulfins  valoient  un  ducat 
et  demi  pièce  ;  que  98  ducats  faisoient  208  liv.  (Du 
Gange,  Gloss.  lat.  T.  II,  au  mot  Chatus,  col.  558.  - 
Voy.  Arnaudens.) 

Aro,  adv.  Tout-à-l'heure.  C'est  la  signification 
de  aro  (1),  dans  une  pièce  de  vers,  en  langage  de  Ca- 
liors,  citée  par  Borel,  Dict.  au  mot  Glouper.  On  en 
conclura  que  ce  mot  aro  est  de  même  origine  que 
ares  et  ores,  altérations  de  hore ,  en  latin  hora 
(voy.  Ares.) 

Arocher,  verhe.  Briser,  mettre  en  pièces  ré- 
duire en  poudre.  Saupoudrer.  Accabler. 

On  a  la  preuve  (\\\'arrocher  et  dépecer  étoient 
synonymes;  que  par  conséquent  la  signification  de 
1  ancien  verbe  françois  arracher  ou  arrochier  étoit 
la  même  que  celle  de  l'italien  arrochiare ,  briser 
mettre  en  pièces.  ' 

Leurs  nefs  aux  roches  dépeçait  ; 
Maint  en  noioit,  maint  en  tuoit. 

Rom.  de  Brul,  MS.  fol.  8G,  R«  col.  2. 
Leurs  nefs  au  perron  wroclwit,  etc. 

Ibid.  Variante  du  MS.  de  Bomljarde. 

Il  semble  que  dans  un  sens  analogue  à  celui  de 
mettre  en  pièces,  ce  même  verbe  ait  signifié  réduire 
en  poudre  par  l'action  du  feu,  réduire  en  cendres. 

Cil  qui  furent  geté  el  fu, 
Et  longues  i  orent  geu, 
Onques  n'i  furent  entamé  ; 

Ne  les  vesteure  arrochié.  ' 

Vie  de  S'-  Catherine,  MS.  de  Sorb.  chilT.  LX,  col.  29. 

Peut-être  qu'à  raison  de  ce  qu'on  brise  et  réduit 
en  petites  parties,  le  poivre  avec  lequel  on  assai- 
sonne les  viandes.  Ion  aura  dit  arrochier  pour 
saupoudrer.  ' 

Li  petit  poucin 
Sont  bon  au  sain, 
Arrochié  au  poivre. 
Salomon  et  Marcol,  MS.  de  N.  D.  n-  2,  fol.  I,  R-  col.  1. 

Il  seroit  encore  possible  que  relativement  à  l'idée 
de  briser,  on  eut  dit  arocher  quelqu'un  pour  l'acca- 


bler en  lui  jetant  des  pierres  et  autres  choses,  l'ac- 
cabler eu  rinsultant,  en  l'injuriant. 

Li  uns  de  torchons  Varnchoioit  ; 
Li  autres  de  près  le  féroient. 

Fabl.  MS.  de  la  Clayclle,  p.  435,  col  1. 
Par  la  grant  rue  tuit  l'arochent  ; 
De  vercjes  le  bâtent  et  brocent. 

Rom.  d'Amadas,  MS.  du  R.  n-  G987,  fol.  320,  V"  col.  3. 
.  .  .  Moult  l'arocent  et  décacent. 
Et  le  détirent,  et  agacent. 

Ibid,  fol.  321,  R-  col.  t. 
Moult  fu  arrochié!  et  gabez, 
En  toz  les  leux  où  il  venoit  ;  etc. 

Falil.  MS.  de  la  Clayette,  p.  435,  col.  1. 

La  signification  que  ce  verbe  arocher  conserve 
en  Anjou  et  dans  les  provinces  voisines,  oi:i  l'on  dit 
arocher  une  pierre  à  la  tête  de  (iuel([u'un,  pour  lui 
ruer  une  piene  à  la  lête,  est  sans  doule  la  raison 
pour  laquelle  Ménage  en  a  cherché  l'origine  dans 
le  verbe  latin  ?'He?'e(2).  (Voy.  Ménage,  Dici  Etym  - 
Id.  Orig.  délia  Ling.  Ital.  au  mot  Arrochiare.) 

VARIANTES  : 
AROCHER.  Rom.  d',4roadas.  MS.  du  R.  fol.  320    V»  col    3 
Aroceu.  Rom.  d'Amadas,  MS.  du  R.  n»  6987   fol  3'M      '     " 
Arrocher.  Rom.  de  Brut,  M.S.  fol.  86,  R"  col  '> 
ARROCHIER.  Fabl.  MS.  de  la  Clayette,  p.  4:j5,  col.  1, 

Ai-oelei",  verbe.  Faire  rouler.  Mettre  en  train 
Rouler. 

On  a  dit  en  parlant  de  S"  Léocade,  dont  les  mira- 
cles mettoient  à  l'aise  l'église  où  ils  s'opéroient  : 

Mainz  maus  morteus  a  amortiz  ; 
Doné  nos  a  maint  beax  tortiz  (3), 
Maint  parisi,  mainte  roele  (4)  ; 
D'oltre  roie  nos  aroele. 

Hist.  de  S"  Léocide,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  33,  R"  col.  3. 

Il  semble  que  dans  ces  vers  l'expression  aroeler 
doltreroie,  pri.se  fignrémeut,  signifie  tirer  d'un 
pas  mal  aise,  faire  rouler  doucement  la  vie  en 
mettant  plus  à  l'aise. 

Peut-être  que  par  allusion  au  mouvement succes- 
sit  et  continu  d'une  roue  mise  en  train  de  tourner 
1  on  aura  désigné  la  disposition  d'un  homme  en 
train  de  faire  une  chose  etde  la  continuer,  en  disant 
quil  s  arrolloit,  qa'W  étoit  arrollé.  «  Delà  ne  se 
«  fusl  remué....  que  préalablement....  il  n'eust 
«  achevé  dévider  son  fil,  huchant  à  sa  femme  et 
«  chambrière  qu'elles  eussent  apporté  le  reste 
»  pendant  qu'il  estoit  aroHé,  et  la  corde  au  puis  » 
(Contes  d'Eutrapel,  p.  251.  —  Voy.  Cotgrave,  Dict  ) 

On  croit  qu'aroller  et  aroeler  sont  de  même  ori- 
gine qu  arouller  ;  verbe  composé  dont  la  significa- 
tion active  et  neutre  étoit  la  même  que  celle  du  verbe 
simple  rouler  (5).  (Voy.  Cotgr.,  Nicot  et  Monel,  Dict.) 

VARIANTES  : 
AROELER.  Hist.  de  S««  Léocade.  MS.  de  S'  Germ   fol   3S 
Aroller.  Contes  d'Eutrapel,  p   251  "   lui.  css. 

Arroller.  Cotgrave,  Dict. 
Arrouler.  Cotgrave,  Nicot  et  Monet,  Dict 


(1)  Le  provençal  moderne  a  transformé  en  o  les  anciens  a  fiml«  ^m  ,.  ^       /on  n 
rocket  qxu  vient  de  Tallemand  rocken,  fi.seau    le  seas  nmv1nP?ni  rln      l~  ^^   ?®  ™?'  ^  ^^'n-'  ''o"''^  '»  ««"'e  orisîine  que 
-  (3)  Torches   -  (4)  Monnoie;  piéceVondlde  monnoie'^  C'rstTnien  de  ^n^  (N-  E.^ 

nous  d'autres  roues  (semblables  à  ces  roclles)  Tn    e     -  rif  fi^,/^?.  It?f  -f  ^'"'  ''^  '^''}''"''  ^'^"■^  ^«^  ™''"'^--  f^'^  rouler  vers 
(orle);  roeler,  au  contraire,  est  un  dérivé  deroelil\fotella)\^%)  '  '"'  ''"'"''"''-''  'ï"'  ^^'^^t  lui-même  de  rotuhts 


AR 


—  164  — 


AR 


Aroidi,  participe.  Qui  est  fait  rouie.  (Yoy.  Aroit.) 

Les  lances  sont  aroidies  ; 
Ne  sont  polies,  ne  gauchies  ; 
Parmi  les  cors  outrepassent. 

Athis.  MS.  fol.  98,  R-  col.  1. 

Aroidier,  v^rf/é?.  Etre  roide  ;  être  en  érection. 
(Voy.  Fabl.  ms.  du  R.  n»  7'il8,  fol.  333,  Y"  col.  1.) 

Aroit,  partie,  ou  adj.  Qui  est  roide  ;  qui  est  en 
érection.  En  latin  urrectus.  (Voy.  Fabl.  ms.  du  R. 
ir  7-218,  fol.  -230,  V°  col.  2,  et  231,  R°  col.  1.) 

Ai'omas,  subst.  viasc.  Aromate  ;  odeur,  parfum. 
(Voy.  Arom.itkjue.)  En  grec  âpai.ua,  chose  odorifé- 
rante. Cette  dénomination  des  herbes  et  drogues 
odoriférantes  étant  devenue  commune  à  plusieurs 
espèces  d'une  odeur  désagréable,  l'expression  bon 
a?'o?«fts  désignoit  le  parfum,  l'odeur  agréable  des 
premières. 

En  ma  chambre  a  bon  awnias 
De  cynamon,  mirre,  alloé  (1), 
Qu'espandu  ay  et  alloé. 

Eusl.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  530,  col.  i, 

Aromaticité,  subst.  fém.  Odeur  aromatique  ; 
goût  aromatique.  Odeur,  goût  agréable.  (Cotgr.  Dict.) 

Aromîitique ,  adj.  Odoriférant.  Une  preuve 
qu'aromale  signifioil  quelquefois  une  odeur  désa- 
gréable, c'est  que  pour  désigner  le  parfum  d'une 
chose  odoriférante,  on  disoit  qu'elle  «  estoitrtrowrt- 
«  tique  de  bonnes  odeurs.  »  (Voy.  Modus  et  Racio, 
MS.  fol.  309,  R°.) 

Aromatiquement,  adv.  Avec  des  aromates. 
Le  Roi  Louis  XII  étant  mort  le  1"  janvier  1514, 
«  son  corps  fut  aromatiquement  embasmé.  » 
(P.  Desrey,  à  la  suite  de  Monstrelet,  fol.  118,  R°.) 

Aroinatisement ,  subst.  masc.  Aromate.  En 
parlant  de  Jésus-Christ  ressuscité  ot  comparé  au 
Phénix,  cet  oiseau  fabuleux  renaissant  de  la  cendre 
du  bûcher  qu'il  allume  de  ses  ailes,  après  les  avoir 
remplies  de  douces  odeurs  des  vergetés  desLibans, 
on  a  dit  figurément:  «  Puisque  li  fenis  a  poesté  de 
«  mortéfier  soi  et  revivre,  ne  se  doit  nus  merveil- 
»  1er  de  la  parole  que  Diex  dist  :  j'ai  poesté  de 
>>  mestre  (2)  m'ame  et  de  reprendre  la.  Car,  quant  il 
"  descendi  des  Gieus,  il  raempli  ses  èles  de  trois 
"  dons  aromatisemen%.  Les  èles ,  c'est  li  noviaus 
«  testament,  et  li  viez  qu'il  raempli  des  uromatis- 
«  meiiT,.  »  (Bestiaire,  ms.  de  la  Clayette,  p.  46,  col.  2. 
—  Voy.  Arom.\s  et  AnosiATizER.) 

VARIANTES  : 
AROM.\TISEMENT,  Arom.\tisment.  Bestiaire ,  MS.  de  la 
Clayette,  p.  46,  col.  2. 

Aronializant,  adj.  ou  partie.  Odoriférant  ou 
embaumant.  (Voy.  Aromatizer.) 

La  cueult  à  plain  marjolaine  et  lavande 

Et  de  ces  deux,  ainsi  comme  est  dictant, 
Faict  ung  boucquet  en  beaucoup  méditant, 
Que  la  doulceur  si  aromatizante,  etc. 

PoSs.  de  Crétin,  p.  255. 

Aromatizer,  verbe.  Embaumer.  (Voy.  Aroma- 


TizANT.)  On  connoit  l'acception  usitée  du  verbe 
aromati'<er,  qui  plus  anciennement  signifioit  rem- 
plir d'aromates  un  corps  mort,  l'embaumer  pour  le 
garantir  de  corruption.  C'est  en  étendant  l'accep- 
tion de  baume  à  toute  espèce  d'aromate,  de  chose 
odoriférante  et  propre  à  cet  effet,  qu'au  verbe  aro- 
matiser  on  a  substitué  celui  d'embaumer. 

Le  corps  fist  aromatizer 
D'oingnement  qu'on  doit  moult  prisier, 
Faiz  par  manière  si  soubtive 
Qu'elle  semble  encore  toute  vive. 

G.  Machaut,  Poës.  MSS.  fol.  206,  R*  col.  1. 
Avant  qu'il  fusl  ensevelis, 
L'orent  bien  aromalifié. 
El  le  ventre  del  cors  sacié  (3). 

Siège  de  Troye,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  99,  V-  col.  3. 

VARI.\>'TES  : 
AROMATIZER.  G.  Machaut,  Poës.  MSS.  fol.  206,  R»  col.  i. 
Aro.matisier.  Siège  de  Troye,  MS.  du  R.  n°  6987,  fol.  99. 

Aronde,  subst.  fém.  Hirondelle.  (Voy.  Arondel 
et  Arondéle.)  En  latin /u'rHHf/o;  d'où  l'ancien  nom 
françois  aronde  qui  n'est  plus  usité  que  par  com- 
paraison, lorsqu'en  termes  de  fortification  ou  de 
charpenterie,  on  dit  que  deux  pièces  de  bois  sont 
assemblées  en  queue  d'aronde,  qu'un  ouvrage  à 
cornes  est  fait  en  queue  d'aronde. 

On  peut  voir  dans  Martinius,  Lexic.  Philolog. 
combien  les  opinions  varient  sur  l'origine  du  nom 
latin  hirundo.  Il  seroit  possible  qu'il  fit  allusion  au 
babil,  au  gazouillement  perpétuel  de  Varonde,  de 
l'hirondelle.  Probablement,  on  désignoit  une  idée 
relative  à  l'importunité  du  babil  perpétuel  de  cet 
oiseau,  en  disant  : 

Je  me  plaing  de  lingua  doiosa. 

Que  comparer  puis  au  chant  de  Varronde. 

Eusl.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  3i,  col.  3. 

Il  semble  qu'on  en  désignoit  la  monotonie  aussi 
vaine  qu'importune,  lorsqu'en  parlant  de  choses 
désagréables  et  auxquelles  il  n'y  a  aucun  change- 
ment, de  choses  inutiles  et  qui  ne  produisent  rien, 
on  les  comparoit  au  chant  de  Varonde. 

Nous  sommes  trop  subtilz  aux  choses  de  ce  monde, 
En  congnoistre,  en  acquerre,  tant  que  tout  surabonde. 
Et  si  sommes  certains  que  ce  ne  vaiilt  une  unde  ; 
."^.ins  repaire  à  néant  ;  c'est  le  chant  de  l'arondo. 

i.  de  Meun,  Cod.  vers  1413-1416. 
Chascun  double  l'escorcherie. 
Vérité  fault,  Loy  est  périe  : 
Par-tout  voit  le  chant  de  Varmtde. 

Eusl.  Desch.  Poès.  MSS.  p.  27-2,  col.  4. 
Preschier  n'y  vault  ;  c'est  le  chant  de  Varonde. 
Id.  ibid.  p.  32S,  col.  1. 

VARIAMES  : 
ARONDE.  Bestiaire,  MS.  du  R.  fol.  181. 
Arronde.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  34,  col.  3. 
Eronde.  Ménage,  Dict.  Etym.  au  mot  Aronde. 

Arondel,  subst.  masc.  Petit  de  l'hirondelle. 
Hirondelle.  (Voy.  Arondéle.) 

Du  nom  aronde  s'est  formé  le  diminutif  aro/ide;/ 
ou  arondeau  qui  signifioit  petit  d'hirondelle.  (Voy. 
Cotgrave  et  Oudin,  Dict.)  On  peisuada  à  Philippe 
Arlevelt,  élu  souverain  capitaine  de  Gand,  que 
pour  gouverner  les  Flamands  :  «  On  ne  doit  entre 


(1)  Aloès.  -  (2)  Mesire  a  le  sens  d:  milterc,  abandonner,  (n.  e.)  —  (3)  Mettre  hors:  voir  Du  Gange  à  Saccare.  (n.  e.) 


AR 


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AR 


«  eux  tenir  conte  de  vies  d'hommes  ;  n'avoir  pitié 
«  d'eux,  non  plus  que  d'arondeaux  ou  d'allouettes 
«  qu'on  prend  en  la  saison  pour  manater.  »  (Frois- 
sarl,  Vol.  II,  p.  i-2S.  —  Voy.  Arondelet.) 

Ainsi,  c'étoit  avec  tautolosrie  que  pour  désigner 
les  petits  de  l'hirondelle,  on  d'isoit  petits  urondiaus. 
"  On  a  esprouvé  ke  quant  on  emble  à  l'uronde  ses 
•'  petits  arondiaus,  s'on  lor  crieve  les  iex,  et  on  les 
•'  remet  el  ni,  jà  pour  ce  ne  demourra  k'il  ne  voient, 
«  anchois  k'il  soient  parcreu  ;  et  pense  on  bien  ke 
«  1  aronde  les  garisl  :  mais  on  ne  sait  comment,  ne 
"  par  quel  medicine.  »  (Bestiaire  d'Amour,  ms.  du 
H.  n°  Tr.ai,  fol.  '276.  —  Voy.  Arondelier.) 

On  oublioit  sans  doute  qu'arotidel  étoit  un  dimi- 
nutif; et  cet  oubli  est  peut-être  la  cause  pour 
laquelle,  en  comparant  à  la  rapidité  du  vol  de 
1  hirondelle,  la  rapidité  delà  course  d'un  cheval,  on 
disoit  que  c'étoit  un  arondel,  une  aronde;  qu'il 
"  couroit  plutost  que  ne  vole  arondel  ou  aronde.  » 

Plus  tost  court  que  ne  vole  aronde. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'  7G12,  fol.  191,  R-  col,  1. 
Plus  tost  cort  qn'arondel  ne  vole. 

Esiruberl,  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7996,  p.  6i. 
El  ceval  sist,  c'om  clamoit  arondiel. 

Anseis,  MS.  fol.  30,  R-  col.  2. 

VARIANTES    : 
ARONDEL.  Fabl.  M.S.  du  R.  n«  721S,  fol.  249 
Arondeau.  Froissart,  Vol.  II,  p.  128. 
Arondiau.  Bestiaire  d'Amour,  MS.  du  R.  fol   276 
Arondiel.  Anseis,  MS.  fol.  16,  R»  col.  2. 

Arondèle,  suhst.  fém.  Hirondelle.  On  obser- 
vera que  le  peuple,  en  Normandie,  prononce  éronde 
pour  aronde.  (Voy.  Ménage,  Dict.  Etym.)  Il  semble 
que  Vaugelas  adoptoit  la  prononciation  normande 
en  préférant  l'orthographe  hérondelle  ù  toutes  les 
autres  ;  même  à  celle  dont  l'usai^e  a  prévalu    et 
qu'on  trouve  dans  Rabelais,  (T.  1\^  p.  U)-  et  dans 
Nicot  et  Monet,  Dict.  Ainsi  rortho2;raphe  hirondelle 
n'est  point  nouvelle  dans  noire  langue  ;  mais  elle 
est  bien  moins  ancienne  que  l'orthographe  aron- 
delle,  espèce  de  diminutif  féminin  dont  la  formation 
paroit  avoir  le  même  principe  que  celle  du  mascu- 
lin arondel.  On  a  la  preuve  que  le  diminutif  aron- 
del comme  arondelle  signifioit  aronde.  (V.  Arondel  ) 
Quoiqu'aronrfe  filt  moins  usité  quarondelle     on 
disoil  assez  indifféremment  annidelle,  ou  aronde 
(Voy.  Bestiaire,  ms.  du  R.  n"  71»8'J,  fol.  181,  V°  col  *> 
-  Ibid.  fol.  182,  R-  col.  1.  -Eust.  Desch.  Poës.  msT 
p.  310,  col.  3.  -  Id.  ibid.  p.  320,  col.  3.  —  Clém 
Marot,  p.  31  et  22&.  -  Id.  p.  2G,  etc.) 

Anciennement,    on    désiroil   d'être    arondeUe 
comme  aujourd'hui  l'on  désiroil  d'être  petit  oiseau 
pour  satisfaire  à  l'impatience  de  voir  la  Beauté 
qu'on  aime,  h'arondelle  étoit  même  la  messao'ère 
des  Amans. 

Deus  !  c'or  fust  mes  ouers  arondelle 
Por  tost  voleir,  s'ou  vairait  celle 
For  cui  me  covendioit  morir, 
Se  vertus  ni  puet  avenir. 

Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  n'  389,  part,  il,  fol.  3.  V. 


Vole,  mi  arondèle, 

La  Blondete  saluer 

A  qui  tous  rai  penser  sont  ; 

Hélas  !  je  n'i  ose  aler  : 

S'en  sospir  de  cuer  parfont. 

Ane.  Poél.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  11,  p.  644. 

Si  l'hirondelle  obtenoit  quelquefois  la  préférence 
sur  le  rossignol  pour  les  messages  amoureux,  c'étoit 
sans  doute  par  la  rapidité  de  son  vol,  à  laquelle  on 
a  comparé  le  ravissement  de  la  joie  dont  on  étoit 
transporté,  en  disant  : 

Ma  joie  est  plus  isnelle 

Qu'en  l'air  ne  vole  arondelle, 
Tant  soit  vive. 

Froissart,  Poës.  MSS.  p.  250,  col.  1 . 

On  faisoit  encore  allusion  à  la  rapidité  du  vol  de 
1  hirondelle  qui  attrape  sa  proie  et  la  mange  en  vo- 
lant, lorsque  pour  désigner  le  goût  rapide'et  volage 
de  la  Chevalerie  errante  et  de  la  .leunesse,  dans 'la 
jouissance  du  plaisir,  on  disoit  :  «  Sont  les  amours 
..  du  Chevalier  errant,  comparables  à  V arondelle  qui 
«  prendsaproye  en  voilant.  »  (Percef.Vol.  V.,!fol.43) 

Sur  le  printemps  de  ma  jeunesse  folle 
,Te  ressemblois  Varondelle  qui  voile 
Puis  çà,  puis  là  •  l'aage  mo  conduisoit, 
Sans  peur  ne  soing,  où  le  cueur  me  disoit. 
Clém.  Marol,  p.  26. 

La  signification  de  ce  proverbe,  une  hirondelle 
ne  fait  pas  le  printemps,  étant  connue,  il  suffit  de 
remarquer  qu'on  le  trouve  dans  les  Poës.  d'Amadis 
Jamyn,  fol.  193.  On  disoit  aussi  :  «  une  arondelle 
"  n  ameine  point  l'Esté.  »  (Contes  de  Cholières 
fol.  107,  V°.)  ' 

Ou  attribue  beaucoup  de  vertus  à  la  pierre  A'aron- 
delle,  autrement  nommée chelonite{l),  du  nom 'grec 
d.'  1  hirondelle,  et  cbelidoine  en  ces  vers  : 

Céitdoine  est  bone,  nun  bêle  : 
El  ventre  creist  de  Varundelle. 

Marbodus,  de  Gemm.  art.  .wii,  col.  1054. 
Qui  t'aura  pierre  A'arondelle  ; 
Ce  sera  vous  garde  fidelle 
Des  honneurs  de  la  chasteté. 
Car  en  vous  les  bontez  extrêmes, 
Les  vertus  et  les  grâces  mesmes, 
Ont  basti  leur  félicité. 

Poés.  de  R.  Belleau,  T.  I,  part.  I,  fol.  59,  V". 

Il  est  évident  qu'arondelle.  dans  les  significations 
relatives  a  l'idée  de  rond,  est  le  même  que  rondelle 
(Voy.  Rondelle.) 

VARIANTES  : 
ARONDÈLE.  Bestiaire,  MS.  du  Roi,  fol  182 
Arondelle.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  no  389,  p   n  fol  3 
Arrondelle.  Eust.  Desch.  Poës.  .MSS.  p.  488  col"  1    '    ' 
Arundelle.  Marbodus,  de  Gemmis,  art.  xvii'  col  -lési 
Harondèle.  Monet,  Dict.  ' 

Harondelle.  Apologie  pour  Hérodote,  p.  491. 
Hérondelle.  Dict.  de  TrévoiLx,  au  mot  Hirondelle 
Hyrundelle.  Cotgrave,  Dict. 

Arondelet,  stibst.  masc.  Petit  d'hirondelle 
Diminutif  A'arondel  qui  signifioit  aronde. '^\{Nov 
Arondel.) 

variantes  : 

ARONDELET.  Cotgrave,  Dict. 

Arondelat.  Dict.  de  Trévoux. 

Arondel AZ.  Gloss.  lat.  fr.  du  P.  Labbe,  au  mot  Irundlnus. 


(1)  La  chélonite  est  une  tortue  pétrifiée,  tandis  que  la  chélkloinc  est  une  agate,  (n.  e.) 


AR 


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AR 


Arondelier,  adj.  Qui  est  propre  à  l'hirondelle. 
(Voy.  AnoNDEL.)  On  piétend  |ue  l'éclair  est  propic  à 
la  guérison  et  au  recouvrement  de  la  vue  des  petits 
de  ^hirondelle,  en  grec  ychâév'.  De  là  cette  herbe 
nommée  chélidoine  ou  éclaire  arondeliêre. 

Là  s'habilloit  de  bleu  l'éclairé  (iroiuleliéi-i'. 

Poi-3.  d'Am.idis  Jamyn,  fol.  H8,  R". 

Aroutéement,  adv.  En  faisant  roule.  En  cou- 
rant, en  allant  rapidement.  (Voy.  Arouter.) 

Il  est  probable  que  dans  l'expression  «  chevau- 
«  cher  aroulécmcnl  sur  l'eaue,  »  l'adverbe  arou- 
téement signifie  en  faisant  route  sur  le  bord  de 
l'eau,  le  long  d'une  rivière.  «  Chevauchèrent  tant 
«  aroutéement  sur  l'eaue,  qu'ilz  choisirent  Engloiz 
a  de  l'autre  part  :  et  adonc  Caraenloet  hasta  moult 
«  ses  gens,  pour  double  que  Engloiz  n'entrassent 
«  les  premiers  sur  le  pont.  »  (Ilisl.  de  B.  du  Gues- 
clin,  par  Ménard,  p.  ATA.) 

Ce  même  adverbe  a  signifié  la  rapidité  avec 
laquelle  on  alloit,  on  faisoil  route. 

Ne  puis  n'i  ot  re.sne  tenue  ; 
Ains  s'en  vient  avouténment,  etc. 

Hist.  do  Guillaume.  Roi  d'Angl.  MS.  du  R.  n-  6087,  fol.  24G. 

Arouter,  verbe.  Faire  route,  cheminer,  aller, 
marcher.  Mettre  en  roule,  faire  cheminer,  faire 
marcher,  conduire;  se  mettre  en  roule,  s'achemi- 
ner. Suivre  en  faisant  même  route.  Mettre  à  la 
suite.  Déduire,  proposer  par  ordre.  Ordonner, 
mettre  en  ordre,  disposer,  assembler. 

On  désignoit  la  rapidité  avec  laquelle  on  faisoit 
route,  lorsque  dans  le  sens  de  l'adverbe  aroutée- 
ment, en  courant,  on  disoit  : 

Es  vcus  Carlon  venu  tout  abrievé  ; 
Et  vit  Marsiles  venir  tout  arouté. 

Anseis,  MS  fol.  65,  R-  col.  1. 

Plus  généralement,  le  verbe  arouter  signifioit 
aller,  marcher,  se  mouvoir  d'un  lieu  à  un  autre  en 
faisant  route,  en  clieminant,  en  marchant. 

Ainz  fait  sa  bataille  arouter, 

Et  tous  ceux  de  pié  qui  là  furent  : 

Arbalestiers  premiers  s'esmurent. 

G.  Gularl,  .MS.  fol.  25*.  V". 

Quant  li  bastart  de  Roussillon 

Qui  là  sus  s'est  aie  bouter, 

Les  voit  contremont  arouter,  etc. 

Id.  ibid.  fol.  211,  V. 

Signor,  dist  Alixandre,  mêlés  vos  al  cemin, 
Faites  arouterVosX,  les  somiers,  le  carin. 

Rom.  d'Alexandre,  MS.  du  R.  w  6987,  fol.  208,  R*  col.  1. 

C'est  dans  le  sens  de  mettre  en  roule,  faire  che- 
miner, faire  marcher,  conduire,  qu'on  lit  :  «  Ber- 
«  Iran  mena  toutes  ses  gens  à  Chalon  sur  la  Saosne, 
«  et  delà  les  nrouta  vers  Avignon.  »  (Hist.  de  B. 
du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  174.) 

Si  fait  li  Rois  hucier 

Caroslé  soient  caretes  et  somier. 

Anseis,  MS.  fol.  59,  V  col.l. 

On  trouve  arrouter  avec  la  signification,  mettre 
en  route,  dans  Cotgrave,  Nicot  et  Monet,  Dict.  En 
ce  sens,  le  verbe  arouter  éloit  souvent  réciproque. 

Jusqu'au  fonz  du  fossé  s'aroutent 
Li  hardi  qui  méhaing  ne  doutent. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  77,  V'. 


Elle  voit  une  grosse  route 

D?  gens,  qui  droit,  vers  lui  s'aroute. 

Gacede  la  Digne,  des  Déduils,  MS.  fol.  65,  V'. 

Après  aus  tout  droit  s'arotcta. 
Adonques  fu  en  moult  grant  doute  ; 
.Jusqu'à  Paris  sivi  la  route. 

Vie  des  Sainls,  MS.  de  la  Clayette,  p,  30,  col.  2. 

Il  semble  qu'arouter  ait  signifié  suivre,  parce 
qu'en  tenant  la  route  de  quelqu'un,  en  faisant 
même  route,  en  ■&'aroutant  après  lui,  on  le  suit,  on 
marche  à  sa  suite. 

En  tel  manière  se  franchirent. 
Après  cest  fait,  d'eus  se  partirent, 
Les  uns  les  autres  aroutant. 
Vint  et  trois  mil  hommes  ou  tant. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  141,  V'. 

Dans  une  signification  analogue,  on  aura  dit  que 
des  chevaux  éloient  aroutés  lorsqu'ils  étoient  mis  à 
la  suite  les  uns  des  autres  ;  que  des  chasseurs  ou 
leurs  chiens  étoient  aroutés  à  un  cerf,  et  tout  sim- 
plement aroutés  lorsqu'ils  étoient  mis  sur  la  voie, 
et  par  conséquent  à  la  suite  du  cerf.  «  Se  départi- 
■<  renl  d'Ouzac...  et  se  meirent  au  chemin...  lenans 
»  arroutés  leurs  chevaux,  comme  marchans  voitu- 
«  riers.  «  (Froissarl,  Vol.  III,  p.  '28'2.)  «  Aucuns 
«  chiens  couranz  sont  qui  crient  et  janglent,  quant 
«  sont  lessiez  courre,  aussi  bien  quant  ne  sont 
«  aroutés,  comme  (oni  quanl  sont  aroutés.  »  (Chasse 
de  Gaston  Phébus,  .ms.  p.  128,) 

A  un  grant  cerf  sont  arouté  ; 
Et  li  oien  furent  descouplé. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7989,  fol.  48,  V  col.  1. 

Au  figuré,  arouter  des  faits,  c'éloit  les  déduire, 
les  mettre  à  la  suite  l'un  de  l'autre,  en  les  dédui- 
sant, en  les  proposant  par  ordre. 

Un  Cler  i  ot  qui  lor  raconte 
Les  cas,  les  griez  et  les  meffaiz 
Qui  d'Engerrant  estoient  fez 


Cil  un  à  un  les  arroula  ; 
Engerrant  moult  bien  l'escouta. 
Hist.  de  Fr.  en  vers,  à  la  suite  du  Rom.  de  Fauvel,  MS.  duR.  n'  6812,  fol.  87. 

Les  idées  d'ordre  et  de  suite  étant  analogues,  il 
est  possible  qu'en  généralisant  la  signification 
d'arouter,  mettre  de  suite,  on  ait  dit,  1°  en  parlant 
d'une  compagnie  dont  la  marche  éloit  noblement 
ordonnée,  qu'elle  étoit  noblement  aroutée  : 

Lors  est  la  route  acheminée, 
Et  moult  noblement  aroutée  : 
Deus  et  deus  moult  bel  chevauchoient. 
Dames  et  Chevaliers  chantoient. 

Cléoraadès,  MS.  de  Gaijnat,  fol.  57,  R'  col.  2. 

2°  En  parlant  d'une  troupe  mise  en  ordre  de 
bataille,  d'une  troupe  disposée  et  assemblée  pour 
marcher  et  combattre  en  ordre,  qu'elle  étoit  aroti' 
tée  :  «  Bertran....  prist  dix  mil  Espaignolz....  et  les 
«  aroutu  sur  une  rivière  qu'ils  avoient  au  doz.  » 
(Hist.  de  B.  du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  260.) 

Puceles  tait  arouter 
Parmi  les  prés  :  lances  porter 
Lor  a  fait  cent. 
N'a  pas  trives  demandé  : 
Sans  arester,  vait,  por  jouster 
Droit  à  lour  gent. 
Ane.  Po«.  fr.MSS.  av.  1300,  T.  III,  p.  1286  et  1287. 

3°  En  parlant  d'une  flotte  disposée  et  assemblée 


AR 


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AR 


en  ordre  pour  faire  route,  qu'elle  éloit  aroutée  : 
«  Ils  tirèrent  leurs  voiles  amont....  et  na£;erent 
'<  tant  en  mer....  qu'ilz  vindrent  en  Flandres  Si 
«  arrouterent  leurs  vaisseaux,  et  les  raeirent 
«  en  bon  convenant,  et  vindrent  assez  près  de 
"  Cagant.  »  (Froissart,  Vol.  I,  p.  40.) 

4"  Enfin,  par  une  extension  singulièrement 
abusive,  le  verbe  aroutei-  a  désigné  une  disposi- 
lon,  un  assemblage  de  fleurs,  pour  le  plaisir  de 
la  vue  et  de  l'odorat. 

....  En  beaux  rainseaus  vers  et  gens 
De  grouseliers,  fichent  et  boutent 
Les  violettes  et  arroiitent, 
Pour  mieulz  veoir  et  oudourer. 

Froissarl,  Toés.  WSS.  p.  432,  col.  1 

On  terminera  cet  article,  en  observant  qu'il  est 
possible  ([ue  le  mot  route  ait  signillé  troupe  narce 
quunc  multitude  de  gens  attroupés  ctoit 'regar- 
dée comme  faisant  roule  et  marcbaiU  ensemble 
comme  fraisant  route  et  marchant  dans  un  certain 
ordre.  (Voy.  Roite.) 

VARIANTES  : 
AROUTER.  Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol  65 
AnosTER.  Rom.  d'Ale.xandre,  MS.  du  R.  n"  G987',  fol.  170 
Aroteh.  Rom.  de  Floireraont,  .M.-S.  du  R   fol   7 
Arrouter.  Villehard.,  p.  46.  -  Froissart,  vol.'  III,  p.  282. 

AFoy,  sitbst.  7nasc.  Instrument  de  labourao-e 
Espèce  de  charrue,  comme  l'areau.  ><  Le  cinoe 
«  ne  garde  point  la  maison  comme  un^'  chien  -"il 
«  ne  lire  pas  Varoij  comme  le  Ijœuf;  eîc,  »  (Rabe- 
lais, f .  1,  p.  255.  —  Voy.  Areai'.) 

Arpent ,  siibst.  masc.  Etendue  mesurée  de  terre 
de^bois,  de  pré,  de  vigne,  etc.  Rôle,  feuillet  d'écri- 

Les  orthographes  d'rtrrtpfH« /s  qu'on  altéroit  en 
emxaniagnpennis,  agripentiim,  arvipendium,  etc 
ont  varie  comme  les  opinions  sur  l'origine  de  ce 
mot  qiie,  d'après  le  témoignage  de  Columelle(l),on 
croit  être  Celtique,  et  par  conséquent  commun  aux 
Gaulois,  aux  Teutons,  aux  Flam:inds,  etc  On 
trouve  dans  les  loix  des  Wisigoths  et  des  Bavarois 
dans  les  ojuvres  de  Grégoire  de  Tours,  dans  les 
anciennes  formules,  etc.  qu-arpenlum,  aripennis 
ou  arpenms  signilioit  ce  .[u'^n  langage  llamand 
sigiuhe  le  mot  composé  aerpaiif,  que  Volssius 
défini  en  alin,  relativement  à  léîymologie  Teu- 
tone  et  Gauloise  :  ..  Quicquid  cerlo  lermino  circum- 
«  sepliim,  certus  terrœ  ambilus.  »  (Voy.  Du  Can^-e 
Gloss  lat.  T.  I,  col.  624  et  625,  au  imlAravennis 

-  Spelman,  Gloss.  Archaiolog!  au  mot   b^'     L 

-  Pasquier.  Recherches,  liv.  v.u,  p.  057.  -  JéiS' 
Dict.  Etym.  -  M  Court  de  Gebel.n,  Dict.  Etym.  de 
id  Lang.  ^r.  -  Volssius,  Etym.  Liiig.  Lat.  au  mot 
Arvipendium.  -  Dict.  de  Trévoux  ) 

On  sait  combien  retendue ,  la  mesure   de  terre 
qu  on  nomme  arpent,  diffère  d'une  province  il  l'autre 
du  Royaume.  La  coulume  plus  forte  que  la  raison 
nvâ  s.  opinialrement  opposée  à  ce  que  la  mesure 
lixee  par  le  Souverain  devint  générale,  qu'on  déses- 


père de  voir  s  accomplir  le  vœu  de  Deaumanoir 
jurisconsulte  du  xur  siècle.  Il  se  plaignoit  de  ce 
que  la  ..  droite  mesure  du  Souverain  etoitcorom- 
«  pue  en  plunex  lieux,  par  acoustumanche  et  par 
«  boulTranche  de  Seigneurs,  qui  avoient  baillé  leurs 
.<  birelage  a  cens  ou  à  rentes,  et  les  avoient  livrés 
"  par  convenances  à  leuistenans,  à  une  mesure 
-■  différente  de  Varpent  le  Roy,  contenan  cent 
"  verges  de  vingt-cinq  pieds  la  verge.  C'est,  disoit 

mesurei  tous  les  hirelages  qui  par  arpent  se 
"  r^wn'^^  ™f'  les  acoustumances  de  E  ans 
"le  corompent.  ..  (Voy.  Deaumanoir,  Coût,  de 
Beauvoisis,  chap.  xxvi,  p.  135  et  136.) 

La  même  Coutume  justifie  la  remarque  de  Soel- 
man  sur  l'usage  du  mot  arpent,  restreint  à  la 
signification  de  mesure  de  bois,  cîe  piï  de  vione 
de  jardin,  lorsque  la  mesure  de  terre  abouriè 
etoit  désignée  par  des  noms  relatifs  ù  ceux  de  la 
inesiire  de  grain  nécessaire  pour  ensemencer  une 

«  Aeille,  dit  Deaumanoir,  .lue  l'en  fit  ancienne- 
«  ment  la  mesure  de  terre  selon  la  mesure  dou 

l  HPhL  "'  '''"^^'"'  ^^'",'"^  '■^"  co"'e  douze  mines 
«  de  bled  pour  un  mu.  de  bled,  tout  aussint  l'en 
"  conte  douze  mines  de  te;  re  pour  un  mui  de  terre  • 
«  et  SI  voit-on  clerement  que,  peu  s'en  faut  l'en 
"  semé  une  mine  de  terre  de  une  mme  de  bled 

"  nT,^""  ™f'"''^  '^'^  '^"'^  suit    celé  dou  bled! 
«  Uuant  aux  bois,  vignes,  aulnois,  jardins  et  prés 
»  on  les  mesure  communément  par  arpens,  et  non 
«  par  mmees,  comme  les  terres.  »  (Voy.  Coût    de 
Beauvoisis,  chap.  x.xv,,  p.  135.  -  Spelman.  G  os? 
Archaiolog.  -  Du  Ca.ige,  Gloss.  lat.  T.  I,  col  625  ) 
Cette   distinction  à  laquelle   on  se   conformoit 
assez  généralement,  dans  les  temps  dont  parlen 
Spelman  et  Du  Cange,  étant  néglig'ée,  on  a  défi" 
1  arppit  ■  .<  cerlaine  étendue  de  champ,  vi"iie  nré 
"  bois,  de  diverse   mesure,   en  divers  lieux  dé 
«  l'iaiice    la  grande  mesure  par  laquelle  sont  ine- 
"  hPHi^Ll^^  terres    vignes,  prez,  bois  et  autres 
«  heritageb.  »  (Voy.  ^icotetMonet.  Dict.)  La  mesure 
'•^5^'<^',Pil'  ",>'Pf>"'  tel  que  l'ont  fixé  les  Edits  d'oc- 
tobie  loo/  et  de  mars  1566,  à  cent  perches,  et  la 
pe.che  vingt-deux  pieds,  qui  font  deu.x  mille  deux 
cents  pieds  en  carré. 

Il  est  probable  que  relativement  à  l'idée  de  l'éten- 
due en  carre  de  Varpent  en  général,  on  aura 
désigne  par  ce  mot  arpent,  un  rôle,  un  ieuillet 
d  écriture.  »  Touttes  escriptures  comme  d'infor- 
"  ma  ions,  e.xaminations,  demandes,  responses 
«  rephcations,  raisons  de  droit;  d'un  «?w«i  d'es- 
"  criture,  douze  deniers.  »  (Etat  des  Offic.  des  D  de 
Bourgogne,  p.  305.)  ^ 

Arpentage,  subst.  masc.  Mesurage  de  terres 
La  mesure  faite  ou  prise  d'un  terroir,  d'un  héri- 
tage (Cotgrave  et  Nicot,  Dict.  -  Voy.  Arpeîstement  ) 


Z!r^^''^^^t^^i^^!f£l'^^%l^  II,£f9,  et  Forcellini.   Un  auteur  des 

bout,  extrémité,  (n.  e.)  ^         ë^uiois  .  aiiit,  en  bas-breton,  est  équivalent  à  arare,  etpenn  signifie  tête 


AR 


1G8  — 


AR 


Arpenteinent ,  subst.  viasc.  Mesurage  de 
terres.  La  mesure  qu'on  fait  ou  prend  d'une  terre, 
l'action  de  la  mesurer  par  arpents.  (^Cotgrave,  Dict. 

—  Voy.  Arpentage  et  AurEXTEniE.) 

Arpenter,  verbe.  Marcher  à  travers  champs; 
marcher  vite  et  îi  grands  pas.  On  marche  à  travers 
le  champ  qu'on  arpente,  qu'on  mesure  en  le  par- 
courant; et  naturellement  on  marche  vite  et  à 
grands  pas.  De  là,  le  verhe  arpenter  encore  usité 
en  style  familier  dans  le  sens  de  courir,  parcourir, 
aura  signifié  relativement  à  l'idée  de  marcher  à 
travers  champs,  et  à  grands  pas,  le  désordre  et  la 
vitesse  de  la  fuite  des  Véniliens  et  des  Milanois, 
après  leur  défaite  par  le  roi  Charles  YIII,  à  la 
journée  de  Fornoue.  «  Tous  fussent  tuez  ou  blessez, 
«  s'ils  n'avoient  plutost  arpenté,  en  se  sauvant  à  la 
«  fuite,  que  ceux  qui  les  chassoient  de  si  près;  et 
<>  mesmemenl  ceux  de  cheval,  ausquels  la  meilleure 
»  pièce...  de  tout  le  hainois  qu'ils  portoienl,  fut... 
«  la  pointe  de  leurs  éperons.  »  (André  de  la  Vigne, 
Voyage  de  Naplcs  de  Charles  VIII,  p.  1G7.) 

Arpenterie,  subst.  féni.  Art  de  mesurer  les 
terres.  Mesurage  des  terres.  Ce  mot  que  Mcot 
définit  au  premier  sens,  art  et  science  de  mesurer 
les  terres,  signifie  la  même  chose  (\\i'arpentement, 
mesurage  des  terres,  dans  Cotgrave,  Dict. 

Arquebusade,  subst.  fém.  Coup  d'arquebuse. 
Portée  d'arquebuse.  Arquebuse. 

Anciennement  le  mot  arquebusade  signifioit  non 
seulement,  comme  aujourd'hui,  coup  d'arquebuse, 
l'envoi  d'une  balle  d'arquebuse,  mais  la  blessure 
faite  par  le  coup  d'arquebuse.  (Voy.  Monet,  Dict.) 

La  portée  d'une  arquebuse  se  nommoit  aussi 
arquebusade.  (Voy.  Mémoire  de  Montluc,  T.  I,  p.  142. 

—  Essais  de  Montaigne,  ï.  III,  p.  504,  etc.  —  Monet, 
Dict.) 

C'éloit  par  ignorance  ou  par  oubli  de  la  première 
signification  de  ce  mot,  que  plusieurs  Ecrivains,  et 
même  des  Gens  de  guerre,  disoient  arquebxisade 
pour  arquebuse.  >•  Soudain  qu'il  fut  hors  de  la  tren- 
«  chée,  fut....  frappé  d'un  mosquet  ou  arquebusade 
«  à  croq.  »  (Du  Bellay,  Mém.  liv.  k,  fol.  309,  R°.) 

En  disant  coup  à' arquebusade,  on  s'exprimoit, 
dit  Brantôme,  très-improprement  ;  car  le  coup 
d'arquebuse  se  nomme  arquebusade.  «  Les  Italiens 
«  et  les  Espagnols  desquels  nous  avons  appris  et 
«  emprunté  le  mot  arquebusade,  ne  font  telles  in- 
«  congruitez  ;  mesme  je  les  ai  veu  faire  à  aucuns  de 
«  nos  gens  de  guerre.  »  (Brantôme,  Cap.  Fr.  T.  IV, 
p.  228.  —  Voy.  Arquebuse.) 

VARIANTES  : 
ARQUEBUSADE.  Orth.  subsist.  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Arquebousade.  Cotgrave,  Dict. 
Arquebuzade.  Essais  de  Montaigne,  T.  III,  p.  504. 
Harquebousade.  Harquebusade.  Cotgrave,  Dict. 

Arquebuse,  subst.  fém.  Espèce  d'arme  à  feu. 
L'arme  à  feu  que  dans  le  cours  du  xvr  siècle,  on 
nommoit  encore  assez  indifféremment  hacquebute 
ou  arquebuse,  paroit  n'avoir  été  connue  dans  le 
XV  siècle  que  sous  le  nom  de  hacquebute.  On  a 


même  quelques  raisons  de  croire  que  ce  fut  un 
nom  primitif  auquel  on  substitua  celui  d'arr/Me^^î/sf. 
Dans  les  Œuvres  de  Molinet,  poëte  du  xv  siècle  ; 
dans  les  Annales  de  Jean  d'Aulon,  an  150G  et  1507  ; 
dans  les  Lettres  de  Louis  XII,  an  1510  et  1511  ;  dans 
l'Histoire  du  chevalier  Bayard,  an  1524  ;  dans  les 
Poésies  de  Jean  et  de  Clément  Marot,  etc.,  on  ne 
trouve  que  le  nom  de  hacqueMite.  Si  quelques 
Ecrivains  du  xvi'  siècle  ont  usé  alternativement, 
comme  Rabelais,  des  noms  de  hacquebute  et  A'ar- 
quebu%e,  c'est  qu'ils  éloient  à  cet  égard  plus  indif- 
férens  qu'un  Auteur  contemporain  pour  qui  c'étoit 
une  peine  de  voir  que  liarquehuse  prévaloit  sur 
hacquebute.  «  C'est  pitié,  s'écrioit-il  ;  il  faut  h  ceste 
heure  dire  harquebuse.  •<  (Voy.  Contes  d'Eutrapel, 
p.  315.)  Le  nom  de  hacquebute  étoit  donc  un  nom_ 
primitif,  relativement  à  celui  d'arquebuse  ;  comme 
l'atteste  d'ailleurs  le  président  Faucbel,  de  qui  l'on 
apprend  qu'à  la  fin  du  xvr  siècle,  «  la  hacquebute 
<■  avoit  pris  le  nom  de  Harquebu:ie,  que  ceux  qui 
■'  pensoient  le  nom  estre  italien  lui  avoient  donné.  » 
(Voy.  Fauchet,  Orig.  liv.  II,  p.  122  et  123.) 

Il  est  probable  que  faute  de  connoitre  l'origine 
et  la  signification  de  ce  nom  hacquebute,  on  aura 
cru  devoir  y  substituer  celui  d'arquebuse,  en  imi- 
tant les  Italiens  qui  nommèreni  areobugio,  la 
hacquebute.  On  chercha  dès-lors  à  justifier  la  préfé- 
rence donnée  à  cette  nouvelle  dénomination,  en 
disant  qu'elle  étoit  propre  à  une  arme  à  feu  dont  la 
partie  courbe  du  fiit  sur  lequel  étoit  monté  le  canon, 
îiguroit  une  espèce  de  demi-arc  ;  à  une  arme  à  feu 
dont  la  poudre  s'enflammoit  par  le  trou,  par  la  lu- 
mière du  canon,  et  avec  laquelle  les  combats  s'enga- 
geoient,  comme  ils  s'étoient  plus  anciennement 
engagés  avec  l'arc  et  l'arbalète.  (Voy.  Ménage,  Dict. 
Etym)  C'est  d'après  ces  idées  que  non-seulement 
on  adopta  le  nouveau  nom  d'arquebuse,  en  italien 
areobugio,  c'est-à-dire,  arc-à-trou  ;  mais  qu'on 
italianisa  l'ancien  nom  de  hacquebute,  en  écrivant 
liarquebute,  arquebute 

Probablement,  ces  idées  étymologiques  auroient 
paru  moins  vraisemblables,  si  l'on  eVit  fait  rénexion 
que  l'usage  de  l'arc  et  de  l'arbalète  subsista  long- 
temps après  l'invention  de  la  hacquebute  et  de 
Varquebuse;  que  pour  la  figure,  la  hacquebute  ou 
Varquebusc  à  croc,  plus  ancienne  que  la  Itacquebute 
ou  l'arquebuse  à  rouet,  ne  put  être  raisonnablement 
comparée  à  l'arc  et  à  l'arbalète.  En  effet,  la  hacque- 
bute ou  Varquebuse  à  croc,  telle  qu'elle  est  figurée 
par  le  P.  Daniel,  étoit  une  arme  à  feu  sans  crosse, 
et  par  conséquent  sans  aucune  ressemblance  de 
courbure  avec  l'arc  et  l'arbalète.  C'étoit  une  espèce 
de  petit  canon  plus  ou  moins  long,  monté  sur  un 
affût  en  forme  de  trépied.  On  le  nommoit  hacque- 
bute ou  arquebuse  à  croc,  à  cause  d'une  espèce  de 
croc  qui  étoit  fondu  avec  la  pièce.  (Voy.  Daniel,  Mil. 
Fr.  T.  I,  p.  462  et  466.) 

On  observera  qu'il  auroit  été  bien  plus  simple  de 
conserver  à  cette  espèce  d'arme  à  feu,  de  moyen 
calibre  entre  les  plus  petits  canons  et  le  mousquet, 
le  nom  plus  ancien  de  hacquebute,  qui,  s'il  est 


AR 


169  - 


AR 


réellement  formé  des  mots  allemands  hacke  et 
buchse,  comme  le  croient  quelques  Etymologistes, 
signillot  seul  canon-à-croc.  (Voy.  Skinner,  Elym. 
ling.  Anglic.  au  mot  Ilarquebuss.  —  Ménage,  Dict. 
Etym.  au  mot  naqucl)iiU\)U  est  possible  que  l'igno- 
rance de  celle  siL;nilicalion  littérale  ait  fait  imagi- 
ner que  hacqueh'utc  étoit  synonyme  d'arquebuse, 
en  italien  arcobugio  ;  et  que  comme  on  disoit  a7'- 
quebuse  à  croc,  il  falloit  dire  haquebute  à  crochet. 
«  Après  avoir  gaigné  le  haut  des  tours  et  de  la  mu- 
«  raille,  feit  si  bien  son  devoir  ii  coups  d'arquebuse 
«  et  d'arquebuse  à  croq,  etc.  »  (Du  Bellay,  Mém. 
liv.  vin,  fol.  2(52.)  «  Pistoles  sont  petites  arquebuses 
«  qui  n'ont  environ  qu'un  pied  de  canon  ;  et  tire 
«  l'on  avecques  une  main,  donnant  le  feu  avecques 
«  le  rouet.  »  (Id.  ibid.  liv.  x,  fol.  33i,  V".  —  Fauchel, 
Orig.  liv.  II,  p.  123.)  «  Sur  les  murailles  de  la  ville, 
«  es  creneaulx,  y  avoit  quatre  cents  pièces  de  hac- 
«  quebutes  à  crochet,  toutes  montées.  »  (Du  Bellay, 
Mém.  T.  VI,  p.  347.)  «  Les  aucuns  avoienl  piciiues; 
■<  les  autres,  hallebardes  ;  \&s  aulres  baquehutes  et 
'<  espées  h  deux  mains.  »  (Id.  ibid.  p.  342.;  ■  Suy- 
«  voyent  les  jeunes  enfans  Marchaiis  de  la  ville,.... 
a  la  hacquebute  à  l'argon  de  la  selle.  »  (Id.  ibid. 
p.  378  et  379.) 

Il  résulte  de  ces  différens  passages,  qu'au  com- 
mencement du  XVI'  siècle,  on  n'avoil  déjà  plus  égard 
à  la  signification  étymologique  du  nom  hacquebute, 
c'est-à-dire,  canon-à-croq,  et  qu'on  le  confondoit 
avec  celui  d'arquebuse,  c'est-à-dire,  arc-à-lrou  ; 
puisqu'il  désignoit  les  arquebuses  à  mèche,  les  ar- 
quebuses à  rouet,  même  les  pistolles  ou  pistolets 
d'arçon,  et  que  pour  signifier  une  arquebuse  à  croc, 
on  croyoit  devoir  dire  hacquebute  à  crochet.  (Voy. 
Hacquebute  (1).) 

variantes  : 

ARQUEBUSE.  Orlh.  sub.  -  Cotgr.,  Nicot  et  Monet,  Dict. 

Arquebouse.  Rabelais,  T.  I,  p.  233. 

Arquebutte.  Mém.  de  R.  de  la  Marck,  MS.  p.  127. 

Harqueeouse.  Apologie  pour  Hérodote,  p.  439. 

Harqebuse.  Du  Bellay,  Mém.  liv.  x,  fol.  334,  V». 

Harquebutte.  Id.  ibid.  liv.  vu,  fol.  330,  R°. 

Harquebuze.  Nicot,  Dict.  au  mot  Haquebute. 

Arquebuse!',  verbe.  Tirer  une  arquebuse.  Tirer 
de  l'arquebuse.  Le  verbe  arquebuser,  dont  l'accep- 
tion encore  usitée  se  trouve  dans  Colgrave  et  Mo- 
net, signifioit  aussi  tirer  une  arquebuse,  tirer  de 
l'arquebuse.  (Voy.  Colgrave,  Dict.) 

VARIA.NTES  : 

ARQUEBUSER.  Orth.  snbsist.  -  Monet,  Dict. 
Harquebuskr.  Colgrave,  Dict. 


Arquebuserie,  subst.  fém.  Nom  collectif  d'ar- 
quebuses. Nom  collectif  d'arquebusiers. 

On  a  la  preuve  que  les  arquebuses,  même  les 
arquebuses  à  croc,  dont  le  canon  étoit  si  gros  et  si 
pesant  (2)  qu'on  ne  s'en  servoitguère  que  pour  tirer 
de  derrière  les  murailles  d'une  place,  n'éloient  point 
comprises  sous  la  dénomination  générale  d'artille- 
rie, et  qu'on  lesdistinguoitdespiècesd'artillerie,  des 
pièces  de  batterie.  (Voy.  Mém.  de  Rob.  de  la  Marck, 
Seig'-  de  Flcuranges,  ms.  p.  127,  420  et  421.)  De  là, 
aiquc'liusi'i'ic,  cdinme  nom  collectif  d'arquebuses, 
distingué  d' artillerie.  «  On  ne  tirera  l'artillerie,  hai'- 
quebuserie,  ny  autres  choses,  l'un  contie  l'autre.  » 
(Brantôme,  Cap.  Fr,  T.  I,  p.  413.)  «  Esloient  les 
<■  maisons  de  la  ville  assez  près  des  murailles  oîi 
'<  les  Suisses  avoienl  mis  toute  leur  arquebutterie 
«  et  quelques  pièces  d'artillerie.  »  (Mém.  de  Rob. 
de  la  Marck,  Seig'  de  Fleuranges,  ms.  p.  174.) 

C'éloil  aussi  le  nom  collectif  d'arquebusiers, 
comme  en  ces  passages  :  »  Le  Mareschal  de  Birou... 
'<  débanda  son  arquebuserie  pour  l'attaquer.  » 
(Brantôme,  Dames  illustres,  p.  264.)  «Furent défaits 
«  par  l'Infanterie  et  Harquebuserie,  pour  s'estre.... 
«  engagez....  dans  certains  petits  marêts....  où 
«  l'on  les  liioit  comme  à  canards.  »  (Id.  Cap.  Fr. 
T.  III,  p.  56  ) 

On  croit  nouveau  l'usage  d' arquebuserie,  dans  le 
sens  de  métier  d'arquebusier.  (Voy.  Arqueuuse.) 

VARIANTES  : 
ARQUEBUSERIE.  Brantôme,  Dames  illustres,  p.  264. 
Arquebutterie.  Mém.  de  Rob.  de  la  Marck,  MS.  p.  174. 
Harquebuserie.  Brantùme,  Cap.  Fr.  T.  I,  p.  413. 

Arquebusier,  subst.  masc.  Les  acceptions  usi- 
tées d'arquebusier  ayant  toujours  été  les  mêmes, 
depuis  que  ce  mot  existe  dans  notre  langue,  il  suf- 
fira de  renvoyer  à  l'article  Arquebuse,  pour  savoir 
d'après  quelles  idées  on  a  pu  imaginer  d'altérer  le 
nom  de  hacquebute  et  de  l'assimiler  à  celui  d'arque- 
buse, en  écrivant  harquebute,  arqnebute  ;  d'oii  ar- 
qucbnlerie  pour  arquebuserie,  et  harquebutier  pour 
uniueUusicr.  (Voy.  Aroueduse  et  Aiinri:iii  si:iiie.)  Si 
l'on  un  croit  Colgrave,  la  signification  du  harque- 
butier et  harquebusier  éloit  quelquefois  la  même 
que  celle  d'arquebusade,  coup  d'arquebuse.  On  in- 
diquera quelle  peut  être  la  cause  d'une  explication 
qui  paroit  hasardée.  (Voy.  Hacquebutier.) 

VARIANTES  : 
ARQUEBUSIER.  Orth.  sub.  -  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Harquebousier.  Rabelais,  T.  I,  p.  264  et  289. 
Harquebusier.  Cotgrave,  Monet,  Dict. 


(1)  Le  mot  primitif  était  haquebute,  dont  l'étymologie  est  indiquée  au  coiirant  de  l'article:  Haken,  croc,  et  Buchse,  canon 
d'arme  à  feu.  Haken  a  encore  donné  hache,  et  Buchse  est  une  altération  du  mot  latin  pyxis,  qui  lui-même  est  devenu 
boîte.  Les  Italiens  transformèrent  haquehide  en  arco  bugin,  arc  à  trou  ou  arc  creux  (Arioste,  au  chant  IX.  de  RoUuid  furieux, 
l'appelle  ferro  bugio).  Enfin,  pendant  les  guerres  de  Charles  VIII,  de  Louis  XII  et  de  François  1",  nos  soldats  se  mirent  à 
l'école  des  Italiens  pour  rapprendre  le  français,  et  ces  braves,  qu'on  n'appela  plus  «  li  proz  e  li  vaillanz,  »  nommèrent  leur 
haqui  bute,  arquebuse,  comme  leur  haubert,  cuirasse.  La  haquebute  appar;iît  pour  la  première  fois  aux  mains  des  Suisses  et 
des  Allemands  qui  aidèrent  les  Lorrains  à  défendre  Nancy,  en  1475  (Voir  Chronique  de  Moulinet,  de  1474  à  1504).  Comines  la 
connaissait  aussi  :  «  Nostre  queue  estoit  défendue  de  trois  cens  Allemans,  qui  avoient  moult  largement  de  coulevrines,  et 
leur  portoit  on  beaucoup  de  haquelntics  à  cheval  (T.  III,  7).  »  Elle  fit  place,  vers  1640,  au  mousquet,  qui  cesse  d'être 
réglementaire  en  1671,  lors  de  la  création  d'un  régiment  spécial  do  fusiliers.  L'arquebuse  du  xv«  siècle  était  à  croc;  au 
commencement  du  xvp  siècle  apparaît  l'arquebuse  à  mèche,  transformée  plus  tard  en  arquebuse  à  rouet  ;  enfin  ,  même 
après  l'adoption  du  fusil,  on  employa,  pour  le  tir  à  la  cible,  Varquebuse  butière.  (N.  E.)  -  (2)  En  plaine,  on  se  servait  d'un 
chevalet  pour  épauler  l'arquebuse;  les  chasseurs  tyroliens,  pendant  la  campagne  de  1859,  usaient  encore  d'une  fourchette 
pour  appuyer  leur  carabine,  (n.  e.) 

n.  22 


m 


170  — 


AR 


llARQlTEDUTiER.  Cotgrave,  Dict. 

H  \RnuEBLiTTiEH.  Mém.  de  Rob.  de  la  Merck,  MS.  p.  421. 

llAiîyUEBUZiEK.  Nicot,  Dict.  au  mot  Ilaquebuticr. 

Avquin,  siibst.  masc.  Fonte.  Métal  composé  de 
cuivre,  d'étain  et  d'antimoine.  11  semble  que  Rabe- 
lais faisoit  allusion  à  l'usage  de  rantimoine,  dans 
l'ancienne  façon  de  guérir  les  maladies  vénériennes, 
lorsqu'en  parlant  de  Pantagruel  attaqué  de  pareille 
maladie,  il  disoit  que  ses  Médecins  lui  avoient  fait 
prendre  dix-sept  grosses  pommes  de  cuivre,  nom- 
mées plus  bas  pillules  â'arquin.  «  Et  de  ces  pillules 
"  A'arquin,  en  avez  une  à  Orléans  sur  le  clochier 
«  de  TEcciise  de  Saincte  Croix.  »  (Rabelais,  T.  11, 
p.  279  et  281.  —  Voy.  Aloulmi  et  Alquinique.) 

Arrabler,  verbe.  Tirer  avec  force  et  violence  ; 
ravir,  piller.  Lorsqu'on  a  la  preuve  fxn  arable,  en 
latin  arabiiis,  s'est  prononcé  et  écrit  araiile,  on  ré- 
pugne moins  à  croire  qnaraitler  pourroit  être  une 
altération  d'arabler,  en  ces  vers  où  le  verbe  arauler 
paroît  désigner  la  force  et  la  violence,  avec  les- 
quelles un  taureau  perce  de  ses  cornes  le  ventre 
d'une  béte  monstrueuse,  et  en  tire  les  entrailles. 

Bien  trois  quartiers  ou  quatre  du  ventre  li  desmaule, 
Que  toute  sa  coraille  (i)  à  terre  li  araule. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'  "218,  fol.  3M.  R°  col.  1. 

Quoi  qu'il  en  soit,  le  verbe  arabler  que  l'on  croit 
altéré  dans  arauler,  signifioit  tirer  avec  force  et 
violence;  au  figuré  ravir,  piller.  (Voy.  Cotgrave, 
Dict.  —  Contreditz  de  Songe-creux,  fol.  24,  V°.) 
....  Preste,  par  la  grande  ardure 
D'avoir  conquerra  et  arrabler. 
C'est  celle  qui  semont  d'embler,  etc. 

Rom.  de  la  Rose,  cité  par  Borel,  Dict.  p.  20. 

On  voit  dans  arrabler  un  de  ces  verbes  qui  pei- 
gnent naturellement  les  idées  de  force  et  de  vio- 
lence, comme  arrape.r  et  autres,  tels  qu'arracher 
qui  subsiste,  arrager,  etc.  (Voy.  Arapeb.)  (2) 
vARi.\NTEs  : 

.A^RR.VBLER.  Cotgrave,  Dict. 

.\JRABLER.  Contreditz  de  Songe-creux,  fol.  24,  V". 

Arauler.  Fab!.  MS.  du  Koi,  n»  7218,  fol.  344,  R»  col.  1. 

Arrachier,  verbe.  Arracher,  déraciner. 

J'ai  ung  arbre  de  la  plante  d'amours, 
Enraciné  en  mon  cueur  proprement. 
Qui  ne  porte  fruits  sinon  de  dolours, 
Feilles  d'ennuy  et  fleurs  d'encombrement  ;... 
Et  si  ne  puis,  pour  toute  ma  puissance, 
Autre  planter,  ne  celui  arrachier. 

Poès.  à  la  s.  de  Villon,   p.  61  et  62. 

11  semble  qu'on  ait  comparé  les  pattes  d'une 
ancre  aux  racines  par  lesquelles  un  arbre  tient  à 
la  terre,  lorsque  pour  lever  les  ancres,  on  a  dit 
esragier  les  ancres. 

Lor  ancres  ont  fors  esragies, 
Et  lor  voiles  al  vent  drecies. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  452. 

Dans  le  sens  général  de  notre  verbe  arracher,  on 
disoit  :  "  Piètre  tira  une  dague....  Le  Besgue  qui 
"  vit  icelle  dague....  lui  courut  tantost  à  la  main,  et 


«  lui  esracha  »  (Hist.  de  B.  du  Guesclin,  par  Ménard, 
p.  371.). 

Ains  me  iairoie  à  chevax  traire 
Et  tous  les  membres  arraigier, 
Morir,  et  la  teste  tranchier. 

Athis,  MS.  fol.  5,  V-  col.l. 

Probablement,  cette  acception  générale  est  une 
extension  de  l'idée  de  violence  aVec  laquelle  on 
arrache  un  arbre  ou  une  plante  qui  tient  à  la  terre 
par  la  force  de  ses  racines  (3).  (Voy.  Arraijler  et 
Arrager.) 

variantes  : 

ARRACHIER.  Poës.  à  la  suite  de  Villon,  p.  62. 

Arechier.  Fabl.  MS.  de  Berne,  n«  3c4,  fol.  -141,  V»  col.  1. 

Arrager.  Fabl.  MS.  de  S'-Germ.  fol.  64,  R°  col.  3. 

Arraigter.  Athis,  MS.  fol.  5,  V»  col.  1. 

Arrecher.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  538,  col.  4. 

Arrescher.  Id.  ibid.  p.  66,  col.  1. 

EsRACER.  .\nc.  Poës.  Fr.  MS.  du  V.  n»  1490,  fol.  128,  R». 

EsRACHER.  Lanc.  du  Lac,  T.  I,  fol.  158,  V»  col.  2. 

EsRACHiER.  Ane.  Poës  Fr.  MS.  du  V.  n"  1522,  fol.  152. 

Esragier.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  422. 

Arrager,  verbe.  Enrager.  (Voy.  Arragerie.)  On 
a  designé  l'homme  méchant  que  la  mort  arrête  dans 
le  progrès  de  sa  méchanceté ,  en  disant  proverbia- 
lement et  par  comparaison  : 

Chien  esragié  longues  ne  vit. 

Rom.  de  Rou.  MS.  p.  17-*. 

Dans  le  sens  figuré,  le  verbe  arrager  étoit  l'ex- 
pression lapide  et  forte  de  la  violence  de  certaines 
passions  physiques  et  morales  qui  nous  agitent  et 
nous  transportent.  Le  mal  de  dents  est  une  rage. 

Quant  il  espoint,  U  convient  errayier, 

Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  217  col.  2. 
En  grant  torment 
Sui  ;  trop  la  truis  sauvaige. 
Si  l'aim  durement 
Ke  tos  vis  tn'esraige. 

Ane.  Poct.  Kr.  MSS.  avant  1300,  T.  HI.  p.  10*7. 

VARIANTES  : 
ARRAGER.  Briton,  des  Lois  d'Angleterre,  fol.  17. 
Arager.  Parton.  de  Elois,  MS.  de  S'-G.  fol.  166. 
Erragier.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  217,  col.  2. 
Errajer.  Ane.  Poës.  Fr.  MS.  du  V.  n»  1490,  fol.  56. 
Err.\igier.  Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  1300.  T.  III,  p.  1007. 
Ef-RAGER.  Ph.  Moukes,  MS.  p.  740. 
Esragier.  Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  av.  1300,  T.  IV,  p.  1204. 
EsRAiGER.  Id.  T.  III,  p.  1047. 

Arragerie,  subst.  fém.  Rage.  Ce  mot,  qu'on 
trouve  au  propre  dans  Gace  de  la  Bigne,  des  Déduits, 
MS.  fol.  78,  signifioit  au  ligure  l'effet  rapide  et  vio- 
lent d'une  passion  telle  que  la  colère ,  le  désespoir, 
etc.  «  Courroucez  estoient  durement  de  ce  que  les 

»  Escossois  avoient  ainsi  victoire Si  avoient 

«  ainsi  comme  par  arraigerie  lait  attacher,  etc.  » 
(Percef.  Vol.  1,  fol.  146.  —  Voy.  Enragerie.) 

VARIANTES  : 
ARRAGERIE.  Gace  de  la  Bigne,  des  Déduits,  MS.  fol.  78. 
.\rraigebie.  Percef.  Vol.  I,  fol.  146,  R»  col.  2. 

Arrainie,  subst.  fém.  Obligation,  gage  de  ba- 
taille, combat  judiciaire.  Tençon,  combat  d'esprit. 


(1)  La  courée,  comme  on  dit  encore  en  certaines  provinces,  (n.  E.)  —  (2)  Arrabler  est  un  dérivé  de  râble,  barre  de  fer  qui 
sert  au  boulanger  à  remuer  la  braise  de  son  four,  hàble  vient  lui-même  de  rotabulum  (voir  Du  Gange),  en  latin  classique 
rutabulum  (Caion  H.  H.,  10  et  11,  Suét.  Aug.,  75),  fourgon  de  boulanger;  son  radic&l  est  celui  de  rulrum,  serfouette, 
c'est-à-dire  ruere.  (n.  e.)  —  (3)  L'étymologie  est  qb,  plus  radicare  pour  radicari.  (N.  E.) 


AR 


-  171  — 


Défi,  rivalité,  amour-propre,  désir  de  supériorité 

nrZp'i''    '°'^''?'    h'^'»^'  Engagement,  sermenî,' 
promesses,  garanties,  etc.  (Voy.  Arramir  ) 

Pia?,!i  *^'^?"°/'  .i'P'l'^'e"  "S'ige  de  ces  combats  judi- 
ciaires  dont   1  événement   a   longtemps    et    tron 

rohl?"  r?f  f  '^^  T'^'''  criminelle?  et  civiS 
Lobligation  de  combattre  se  contractoit  par  les 

îenrfJJ'-  ÏÏ"f  h  *  ''.  'f''^^^''''^  réciproquement 
leur  gage,  et  cette  obligation  ainsi  contractée 
même  le  combat  auquel  on  s'étoit  ainsi  obligé  se 
nommoit  arramie.  »  Faisons  cognussant  à  tous 

I  nnL  .L'"'™'"''''  '^•^^  '^''^^'"Ps  et  des  batailles; 
Sn.  ™"'  ^ecogneut...,  c-on  ne  les  doit  faire 

:  .iinon'r  ?^"'"''  "",'"  ^«'^'''  ^e  l'ostel  nostre 
"  signour  1  Eyesque   de   Metz.   »   (D.    Carpentier 

SoP  •  %T--^f-  t"^  *^'''"§-^'  T-  I  col.  75;  Ut  de 
1299.)  .  Requist  as  Marescliaus  que  il  fust  rècreu  à 
"  revenir  h  une  certaine  journée  pour  po  irs  ever 

V  ,..  "  (Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis 

notes,  p  450;  tit.  de  1319.)  Il  est  évident  Sn  ce 
même  titre,  raamie  est  une  faute  pour  Km// 
dont  armme  paroit  être  une  autre  altération         ' 

Probablement  les  Poètes  qui  s'obligeSt  en 
présence  des  Juges  des  Cours  d-Amour,ipouver 
dans  leurs  tenions,  la  vérité  ou  la  fausseté  dïn 
Su^SKs^dï"''^-?''  ^"™"t  désigné  ceïtnçoîs 
cLZriTSflr^  ^"'  ''^  '"«'  arramie,  en  les 
cesTmhÏÏ.  H  ,n=  f^'  '''i  ''P^  ^'"'^'e»^  Clievaliers,  à 
mr^^  n  '  "^l^'^l"^'^  Ils  s'obligeoient  à  prouver 
par  a  supériorité  de  leur  courage,  celle  de  la 
Beauté  qu'ils  servoient. 

Daraoisello  Œude  enseignie 
?>oiez  de  nostre  arramie  ■ 
Jugiez  par  vostre  bonté  ; 
Uuar  je  l'ai  sus  vous  jeté. 

Ane.  Poés.  fr.  MS.  du  Vatic.  „•  15*2.  fol.  m.  K-  col.  1. 
Sire  Michiel,  par  boisdie 
Maintenez  ceste  arramie 

Ane.  Poèl.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T   II  p  943 


AR 


acceptions   analogues   du  mot  flr™>  !,ni  n 

JJe  la  guerre,  neVarramie 
Del  duc  Gaifier  n'acieva  mie. 

F'h.  Mouskes.  MS.  p.  65. 
Cil  fait  guerre,  par  aramie. 
A  Pepin,  le  signour  d'Austrie. 

là   ibid.  p.  47 

rfn,^L^f  certes  nel  faz-je  mie  ; 
Ainz  le  faz  par  fine  aramie 
Et  par  grant  ire  et  par  anui. 

Fdbl.  MS.  du  R.  n-  7-218,  fol.  3,  R-  col.  2. 
Andoi  s'en  vienent  irié,  par  arramie  ■ 
Grans  cols  se  fièrent,  ne's'épargnl'rènt  mie. 

Anseis,  MS.  fol.  30,  V  col.  2. 


Cil  cor  sonent,  par  aramie 
yue  mes  n'i  face  couardie 

S.ege  de  Thèbes,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  67  V  col  » 

Un  croît  que  dans  les  trois  dernières  rifi'tînn« 
l^S^^^'r'^'r  ^'g^'fie  à  l?nv  l'^qui 
à  arivS  à  ,?n7.°"'^'î"''"'.^e«  idées  relatives 

Ka  super  or  &  'l" '''.""'' ''^'-"^^"^  ^  '«  désir  de 

sé!^-Snas>sr^^!^ 

tr^S  unSS/'^^Sf  ^'"^^^  '^^«"^  de  con- 
cernent, serSlïïSm2i?;'ÎS,-^';>J-'  enga- 

t-l  11  tornoiement  assamble. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7G15,  fol.  164,  R-  col   » 

Or  ;  ■■  ■  }^?1  *''^^  'louce  amie. 
Or  aves  fait  votre  aramie  ■ 
^t  J  ai  caiens  por  vous  servi 
uixansjai  vopaindeservi 

.M,radesdeND.MS.duR.„.6987,r,,,3is,R.,„,.3 

•  ■  ■  •  Ensi  1  ai  con  fol  emnris  ■ 
Avec  ce  je  l'ai  si  apris  ^  ' 
liensimentenfaia,a)»„e  • 

Kp'v.rj""  ™°"''  P-'*''  '''en  amer, 
ke  Mvre  sans  amie. 

Pr.so„  d  Amours.  MS.  de  Turin,  fol.  30,  V  col.  2,  el  31,  R-  col.  1, 
VAniANTF*s    ' 

ARR^VMIE.  Ph.  Mouskes,  MS  n'fiS 
AHA.MIE.  Dits  de  Baudoin  de  Condé  MS  d.r  ■       .  . 
Arannie.  Prison  d'Amour  MS^tr-P^'S^"»'' ^ol.  312. 
Arremie.  Athis,  MS  foL    8   Roco'  ?""'  '°'-  ^'• 
RAAMiE.  Beaumanoir,  Coût.  Wea!ivoisis,  notes,  p  450 

p^^Xe.?£i,S'St^/?t'n^^ 


Et  11  Grijois  cevalcent  irié,  par  aramie 
Rom.  d'Alexandre,  MS.  du'R*!  „•  "éos,    fc 


fol.  205,  R- col.  I. 


Oi^uÎ:^?i^|',S'?^s£o  ]'X'?'  p™'^'^'^-- 

est  sans  doute îrmêmeq4|ei,r''"  '^^  ''  I^""^ 
les  coutumes  de  Clem^off^tïe'îalo  TLT^Pr  ÎL' 

:  e!?B?|^^ES'-^-S^i^^ 

«  deniers  pour  une  arramine       m    ri^  .-^''^ 
(Voy  À«,™"j*     "''  P''"'"«sse,  son  honneur,  "etc. 


AR 


rrl 


AR 


tpmus    assujettie,    les  sages  de    bataille   étoient 
Sme  les  ^ar£s  de  ces  combats  Judiciaires   par 
fe  sort  desquels  on  croyoit.prouN-e.r  1=J  j"f  Ç^  «u 
'injustice  d'une   action  criminelle,  même  d  une 
luon  civile    De  là ,    l'expression    (irramn-  une 
w.^  iP  où  fl?T«m/r  un  £;age  de  bataille,  qui  dans 
un  sens  ana^Së  à  celui  du^ubstantif  arrhes,  don 
le  Ser^m/r    semble  être  forme,  sisn.fio.t 
rontSctci  l'obligation  judiciaire  de  combattre,  s  y 
eÏÏir-ai-antrr  l'obligation  d'une  preuve  par  le 
rnmhTf    judiciaire,  la   cautionner   par  un  gage. 
!  Sa  it  ugèment  est  faussés,  et  cil  ki  le  fausse  ne 
le   Duel  prouver  par  bataille  tele  coume  il  la 
LE  •  ains  en  kiet  :  on  doit  moult  regarder  de 
?o?i  plais  estoit  ;  ou  de  mueble,  ou  d'.re  âge,  ou 
:  de  crime,  ou  de  servage.  »  (Conseil  Je  Rierre  d 
Fontaines,  chap.  xxi,  n"  xi,  p.  »^0,)  ''S^^l'lsle 
«  mns  nanoe  eust  arrami  un  gage  de  bataille  a  i  isie, 
:  S.^  Sien  Datin  par  devant  les  Ma.-esdmux 
a  de  France;  etc.  »    Beaumanoir,  Coût  de  Beau 
voisis  notes,  p.  450;  tit.  de  1319.)  «  Se  gages  sont 
!  pour  aucunes  barres  de  querele.,  i  v^ierre 
.,  ne  o-aaigne  fors  le  barre  pourquoi  h  gages  luient 
donne^  Se  un  bons  demandoit  à  un  autre 

cent  livres,  et  cbil  disoil  que  cbis  jours  ne  seroi 
uas  venus  devant  un  terme  que  il  nommeroit  a 
^enir    ou  se  il  alligoil  respit,  liquels  termes  ou 
resp  I  li  seroit  niés  dou  demandeur,  et  chil  \ara- 
:  So     à  prouver  et  li  demandierres  le  veeroi 
..  un  des  tesmoins;  se  il  vainqueroit,  il  gaaigneioi 
nSe  U  iSseroit  venus  de  le  dete;  et  se U  esloit 
I  îaincu^chisauroit  le  respit.  »  (Id.  ibid.  chap.txi, 
p.  309.) 

Lorsqu'à  la  preuve  par  le  combat  judiciaire,  on 

nréSiUa  preuve  par  serment,  par  témoins  ou 

Saféc?     on  disoit  par  extension,  quelle  que  fut  la 

manSe' de  s'obliger,  de  s'engager  à  prouver  une 

Siose  qu'on  «rmm.sso/a la  prouver,  d"  o"  '  ^™^ 

«Hssrtîf  à  niouver.    (Voy.  Arramme.)   «  Quiconque 

aïs"  ut  aS  rui  de  plet,'  et  aramist  à  prouver  les 

?esins  par  coi  il  veut  avoir  se  demande,  e  aprez 

faut  de  Drueve;ilfaut  à  se  demande,  et  est  li 

deffendienes  dé  ivres.  »  (Beaumanoir,  Coût,  de 

Beauvoïsis  cbap.  xxxix  p.  217.)  .<  Pf ''^-^^^J^f  JS 
,,  pnntre  leban,  que  il  li  devoit  dix  livres.  Jenan 

Sa  paemant,  liquel  paiemans  fu  nies  de 
:  fS.  ;'elJean  VarLi  à  prouver.  Li  dis  Jehan 
..  amena  ses  prueves  et  prouva,  etc.  «  {Id.  ibid. 
chap.  xuu,  p.  237.)  

On  généralisoit  sans  doute  l'idée  des  obliga  ions 
uour  sûreté  desquelles  on  donnoit  des  gages,  lors- 

SS'on  disoit  «mu/ur  un  to^rno/.' .«"'«tl"  défis 
joùte  ■  expressions  qui  semblent  designer  les  défis 
S  lesquels  nos  anciens  Chevaliers  s'atlaquoient 
et  engageoient  leurs  combats. 

Quant  il  lient  l'escu  à  s'enarmes, 
Et  il  est  entre  deus  rens  mis, 
Ains  que  tornois  soit  aramis  ;  etc. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7615,  fol.  104,  R-  col.  2. 


Si  tost  com  il  s'entrecoisirent, 
La  ioste  fu  moult  aramie. 
Sicgfl  de  Troje,  MS.  du  R  n-  6987.  fol.  107,  V  col.  4. 

Il  seroit  possible  que  dans  un  temps  où  l'on 
étoit  très-familiarisé  avec  les  idées  de  ces  attaques 
chevaleresques,  on  eût  alTeclé  de  parler  le  langage 
de  la  Chevalerie,  en  disant  figurément  et  dans  !e 
sens  d'attaciuer,  qu'un  homme  étoit  arrami  de  dou- 
tance,  que  son  cœur  étoit  arrami  de  meschej. 

Chevaliers  versent  en  la  bourbe, 
Gon  gent  de  doutance  (1)  aramte; 
Mes  li  quens  d'Artois  n'i  va  mie. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  256.  Vv 

Au  grant  besoing  voit  son  amy 

L'homme  ;  et  ce  tray-je  à  my  ; 

Car  cueur  de  meschef  esramy 

Puis  conforter. 

Percef.  Vol.  11.  fol.  84.  R'  col.  1. 

En  proposant  un  défi  et  en  l'acceptant,  on  s'enga- 
oeoit  à  faire  des  efforts  pour  obtenir  1  avantage  sur 
un  rival  De  là  le  verbe  arramir  ou  s  arramir  aura 
sio-nifié  s'efforcer,  faire  des  efforts  pour  l'exécution 
d'une  chose  à  laquelle  on  étoit  engage  quelque 
fût  le  motif  de  cet  engagement.  (Voy.  Arramie.)  Il 
faut  liie  arami  pour  aranti  dans  ces  vers  : 

De  bien  joster  sont  aranti  ; 
Des  écus  n'ont  nuls  merci  : 
Ains  i  fièrent  tant  rudement  etc. 

Athis.  MS.  fûl.  48.  R*  col,  ï. 

Là  veissiez  cevax  de  tost  corre  aramir, 
et  les  barons  de  Gresse  durement  enaigrir. 

Rom. d'Alexandre,  MS.  du  R.  n'  6987.  fol.  18U.  V    col.  i. 

Les  promesses,  les  sermons,  les  juremens  au 
nom  de  Dieu  étant  regardés  comme  gages  des 
obligations  que  l'on  contracte  envers  es  autres  ou 
envers  soi-même,  on  aura  dit  arramr,  pour  pro- 
mettre, promettre  avec  serment,  f^'/e  serment^ 
Armmir  Dieu  et  le  jurer,  pour  jurer  Dieu,  faire 
serment  s'engager  en  jurant  Dieu,  en  faisant  ser- 
meS  au  nom^  Se  Dieu,  comme  on  s'engage  e'j 
promettant,  en  donnant  sa  parole.^  Se  il  veut 
«  arramir  ou  jurer  que,  etc.  »  vOrd.  T.  1,  p.  i/5.) 

Li  payens  se  tont  bien  aranu 
N'en  partiront,  s'aront  le  mur  saisi. 

'^  Anseis,  MS.  fol.  47,  V  col.  3. 

Moult  les  Dissiez  aramir, 
Serement  faire,  et  plevir 
Que  por  morir  ne  ly  fauldront  • 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol  95,  R-  col.  1  el  2. 

Moult  oissiez  Bretons  crier. 

Dieu  ammù- et  Dieu  Jurer,  etc.  ^^_^ 

VARIANTES  : 
ARRAMIR.  Du  Gange.  Gloss.  lat.  J.  I.  col.  159. 
Aramir.  Rom.  de  Brut.  MS  fol.  9o. 
Ar.^ntir.  (Corr.  Am.nn-).  Ath.|,  Mb.  fol.  i»,  U   col. 

l^SH.rcervrïflof^R-01.-.. 

Arramme,  subst.  fém.  Obligation  Ju^^ichure  de 
f'tirp  une  oreuve  :  action  qui  oblige  a  tau  e  cette 
nreSve  On  a  éfini  arramme  onaram^ne  ;.«  défaut 
!nul  fait  le  deffendeur  de   comparoir  a  1  assi- 

jStion  qui  lui  est  baillée  par  devant  le  Juge  à  a 
„  requête  du  demandeur  ;  ou  congé  de  Cour  <iue 


(1)  Peur. 


AR 


—  173  — 


AR 


«  le  defîencleur  ajourné  obtient  contre  le  deman- 
«  deur,  ^'i  faute  de  se  trouver  à  la  même  assignation 
«  pour  soutenir  sa  demande.  »  (Voyez  Laurière, 
Gloss.  du  Dr.  Fr.  T.  I,  p.  393.)  On  démontrera  la 
fausseté  de  ces  définitions,  en  citant  les  articles 
mêmes  des  Coutumes  dont  on  s'autorise  pour  les 
justifier.  »  Quand  une  personne  noble  adjournée 
"  par  devant  le  Baillif,  gouverneur  de  ClermonI,  ou 
«  autre  Juge,  se  laisse  mettre  en  un  ou  plusieurs 
«  defaux,  tel  défaillant  est  tenu  payer  dix  sol  parisis 
«  pour  chacun  défaut,  es  lieux  et  jurisdictionsoù  le 
«  roturier  paye  cinq  sols  parisis;  et  quinze  sols 
«  parisis,  es  fieux  où  le  roturier  paye  sept  sols  six 
«  deniers  parisis  ;etautanl  pour  chacune  CT'm?«?«e, 
«  et  pour  chacun  reclain.  »  (Coût,  de  Clermont,  au 
Coût.  gcn.  T.  I,  p.  35G.)  «  Es  chastellenies  et  pre- 
«  vostez  de  Crespy  et  la  Ferté-Milon,  les  amendes 
><  ordinaires  sont  de  soixante  sols  nerets,  qui  valent 
«  trente-six  sols  parisis;  et  de  sept  sois  six  deniers 
»  nerets,  valans  quatre  sols  six  deniers  parisis, 
«  pour  la  petite  amende  des  reclains,  défaults,  et 
«  urammes,  et  du  cens  non  payé.  »  (Coût,  de 
Valois,  ubi  supra,  p.  391.) 

Quoique  l'amende  soit  la  même  pour  les  défauts 
et  les  m'animes -,  on  ne  peut  en  conclure  que 
Varamme  soit  un  défaut  obtenu  par  le  demandeur 
contre  le  défendeur  qui  ne  comparoit  pasen.Fuslice, 
puisque  dans  l'article  iv  de  la  Coutume  de  Clermont, 
comme  dans  l'article  vu  de  la  Coutume  de  Valois, 
elle  est  évidemment  distinguée  du  défaut.  Ce  n'est 
point  un  congé  de  Cour  obtenu  par  le  défendeur 
contre  le  demandeur,  puisque  l'article  iv  de  la 
Coutume  de  Clermont  ne  prononce  d'amende  que 
contre  le  défendeur  ou  la  personne  adjournée. 

La  différence  entre  Varamme  et  le  reclain  parois- 
soit  si  peu  sensible  à  Laurière,  qu'il  a  cru  possible 
que  Du  Cange  les  ait  confondus,  en  définissant 
Varamme,  une  action  par  laquelle  on  répète  une 
chose,  avec  obligation  de  prouver  par  seimeni,  ou 
par  témoins,  qu'elle  nous  appartient.  (Voy.  Du 
Cange,  Gloss.  lat.  T.  L  col.  158,  au  mot  Arcmia.) 
Varamme,  dit  Laurière,  «  est  proprement  le 
«  delTaut  de  payement  pour  lequel  le  débiteur  qui 
«  s'est  obligé  par  serment  envers  son  créancier,  et  à 
«  jour  certain,  doit  payer  l'amende.  >■  Il  cite  en 
preuve  de  sa  définition  l'article  ccxxu  de  la  Coutume 
d'.\miens,  oîi  on  lit  :  «  Quand  aucun  est  obligé  par 
■•  lettres  obligatoires  passées  souz  seel  royal,  ou 
<'  pardevant  le  Seigneur  dont  l'obligé  est  subjet, 
■•  pour  deniers  payables  à  jour  et  à  terme;  et  le 
'<  créancier  après  le  terme  se  retire  à  la  justice  du 
«  Roy,  quand  l'obligation  est  sous  le  seel  "royal  ;  ou 
«  à  la  justice  du  Seigneur,  quand  l'obligation  y  est 
«  passée  et  l'obligé  y  est  demeurant  ;"ledit  obligé 
«  doit  sept  sols  six  deniers  parisis  d'amende  au 
«  Roy,  ou  au  Seigneur  auquel  on  se  relire  à  faute 
«  de  payement.  »  (Coût.  d'Amiens,  au  Coût.  gén. 
T.  I,  p.  604.) 

On  ne  voit  pas  qu'en  cet  article  de  la  Coutume 
d'Amiens,  il  soit  question  de  Varamme.  Autrement, 
il  paroîtroit  en  résulter  qu'elle  ne  diiïère  aucune- 


ment du  reclain;  c'est-à-dire,  «  de  la  plainte  qu'un 
«  créancier  fait  en  jugement,  de  ce  que  celuy  qui 
«  est  son  débiteur  par  contracts  faits  et  passez  sous 
«  le  seel  royal  ou  authentique,  ne  luy  a  payé  au 
«  jour  préfix  et  marqué,  la  somme  îju'il  s'étoit 
»  obligé  par  serment  de  luy  payer.  «  Dans  la  Cou- 
tume de  Montereau,  à  la  suite  des  Coutumes  géné- 
rales de  Meaux,  on  lit  ;  «  Au  Roy  noslreSire 
■'  appartient,  et   a   droit  de  prendre  de  chacun 

«  reclain des  lettres  et  contrats  faits  et  passez 

«  souz  le  seel  royal  de  ladite  ville  et  chastellenie, 
«  la  somme  de  sept  sols  six  deniers  tournois ,  pour 
«  l'amende  de  la  fraction  de  la  promesse  faicte  par 
«  serment,  par  les  debteurs,  lesquels  s'obligent  en 
«  la  main  du  Tabellion  ou  Notaire.  •>  (Coût,  de 
Meaux,  au  Coût.  gén.  T.  T,  p.  89.) 

Cet  article  de  la  Coutume  de  Montereau  étant 
rapproché  de  l'article  ccxxu  de  la  Coutume  d'Amiens, 
onjugera  sans  doute  que  dans  la  Coutume  d'Amiens, 
l'action  de  se  l'etirer  ù  la  justice  du  Roi  ou  du  Sei- 
gneur, à  faute  d'un  payement  que  ,  par  contract 
authentique,  un  débiteur  s'est  obligé  de  faire  à 
terme,  à  jour  préfix,  est  réellement  une  même 
chose  que  le  reclain,  dans  la  Coutume  de  Monte- 
l'eau.  Si  l'une  attribue  au  Roi  »  le  droit  de  prendre 
«  de  chacun  reclain,  la  somme  de  sept  sols  six 
«  deniers  tournois  pour  l'amende  de  la  fraction  de 
«  promesse  par  le  débiteur;  l'autre  condamne  le 
"  débiteur  à  sept  sols  six  deniers  parisis  d'amende 
■'  envers  le  Roi,  ou  envers  le  Seigneur  auquel  on 
«  se  retire  à  faute  de  payement.  «Ainsi  l'article  de 
la  Coutume  d'Amiens,  supposé  qu'il  y  fût  question 
de  Varamme,  ne  justifieroit  aucunement  la  distinc- 
tion de  Laurière.  11  semble  plus  propre  à  démontrer 
l'identité  de  Varamme  et  du  reclain,  qu'à  en  prouver 
la  différence. 

Les  Praticiens  que  Laurière  avoit  consultés  sur 
la  vraie  signification  ù'aramme,  lui  ayant  répondu 
que  c'est  "  une  amende  qui  se  paye  par  celuy  qui 
<'  succombe  en  cause  en  laquelle  les  parties  ont  été 
«  appointées  contraires,  soit  le  demandeur  quand  il 
«  n'obtient  pas,  soit  le  défendeur  quand  il  est 
«  condamné  sur  les  preuves  ;  »  on  ne  conçoit  pas 
la  raison  pour  laquelle  il  s'est  cru  plus  exact  que 
Du  Cange,  dans  la  définition  de  Varamme.  A  la 
vérité,  ce  n'est  point  une  amende,  puisque  l'article  iv 
de  la  Coutume  de  Clermont  et  l'article  vu  de  la 
Coutume  de  Valois,  fixent  l'amende  de  Varamme. 
Mais  la  réponse  des  Praticiens  autorise-t-elle 
Laurière  à  dire  que  Varamme ,  distinguée  du 
reclain,  est  le  deffaut  de  payement  pour  lequel 
etc.  (Voy.  Laurière,  Gl.  du  Dr.  Fr.  T.  I,  p.  393-395.) 

Il  semble  qu'en  rectifiant  cette  réponse,  plus 
favorable  à  la  définition  de  Du  Cange  qu'à  celle  de 
Laurière,  on  peut  en  conclure  que  Varamme  n'est 
ni  une  amende,  ni  un  défaut  de  payement;  mais 
une  obligation  judiciaire  de  prouver  par  serment 
ou  par  témoins  la  justice  d'une  demande.  Si  la 
demande  étoit  prouvée  juste,  le  défendeur  payoit 
l'amende  à  laquelle  étoit  sujet  le  demandeur , 
lorsqu'il  manquoit  la  preuve  qu'il  s'étoit  obligé  de 


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faire,  qu'il  avoit  garantie,  en  formant  sa  demande. 
Ainsi,  Varamme  paroit  être  l'obligation  judiciaire 
d'une  preuve  par  serment,  ou  par  témoins  ;  l'action 
qui  oblige  à  cette  preuve.  I/analogie  de  ce  subs- 
tantif arramme  avec  le  verbe  arramir,  contracter 
l'obligation  d'une  preuve  en  Justice,  semble  indiquer 
cette  signification  et  la  justifier.  (Voy.  Ahramir.) 

VARIANTES    : 
ARR.\MME.  Cotgrave,  Dict. 

Aramme.  Du  Gange.  G.  lat.  T.  I,  col.  158,  à  Aremia. 
Eramme.  Lauriére,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  au  mot  Errame. 
Erkame.  Lauriére,  Gloss.  du  Dr.  Fr. 
Erramme.  Coût  gén.  T.  I,  p.  356. 

Arre,  subst.  fém.  Chose  obligatoire;  gage, 
assurance,  garantie.  Ou  ne  conçoit  pas  quelle  a  été 
au  commencement  de  ce  siècle,  la  raison  de  croire 
qu'au  sens  figuré  il  falloit  dire  arrhes,  et  erres  au 
sens  propre.  L'ancienne  langue  françoise  n'offre 
aucun  exemple  de  cette  distinction  attestée  par  le 
Dictionnaire  Universel,  où  on  lit  qu'au  propre  on 
prononçoit  erres,  lors  même  qu'on  écrivoit,  comme 
au  figuré,  arrhes.  «  Se  aucun  met  ses  erres  en 
«  aucun  gaige  qui  se  vend  au  marchié,  gardoir  soy 
«  bien  se  li  gaige  vault  ;  car  puis  qu'il  a  mis  ses 
«  erres,  prendre  le  doit  et  pa'ier.  -  (Ord.  T.  Il, 
p.  349.)  «  Qui  se  parjure,  il  a  grant  erres  de  vilenie 
n  avoir.  »  iBeaumanoir,  Coul.  de  Beauvoisis,  p.  l'2.) 
«  Il  y  a  une  future  béatitude;....  à  la  consécution 
«  d'icelle  Dieu  a  ordonné  aucuns  moieiis  conve- 

«  nables  ; et   le  principal  est  grâce  qui  est 

"  appellée  vie  éternelle,  parce  que  c'est  le  gage  ou 
«  erre  d'icelle  "  (Triomphes  de  la  Noble  Dame, 
fol.  336,  V%  et  337.) 

Maies  hen-es,  ami,  reçui, 
Maie  estraine  quant  vous  connui  : 
AJnz  puis  ne  soir,  ne  jor  ne  fui 
Sanz  grant  paine  et  sanz  ennui. 

l'yrarae  et  Tysbé,  MS.  de  S.  Gerra.  fol.  99.  V-  col.  2. 

Oroison  est  Veuverre 

Que  Dieu  prent  d'homme  pour  erre 
De  le  remettre  en  son  erre. 

Al.  Chartier,  de  rEspérance,  p.  38i  et  385. 

On  voit  qu'anciennement  on  disoit  erres  au  figuré 
comme  au  propre.  On  prouvera  d'ailleurs  que  rela- 
tivement à  l'un  et  à  l'autre  sens,  il  n'existoit  aucune 
distinction  entre  erres  et  arrhes.  11  est  même  pro- 
bable que  l'orthographe  arrhes  est  postérieure  à 
l'orthographe  erres  ;  la  seule  qui  paroisse  avoir  été 
usitée  tant  au  singulier  qu'au  pluriel ,  jusqu'à  ce 
qu'on  ait  songé  à  la  rendre  plus  conforme  à  l'éty- 
mologie,  en  écrivant  au  propre  comme  au  figuré, 
aires,  arres,  arrhes,  en  laLin  arrhœ. 

Ce  mot  qui  n'est  plus  d'usage  qu'au  pluriel,  signi- 
fioit  au  singulier,  comme  erre  formé  du  latin 
arrha  (I),  chose  obligatoire,  gage  qui  oblige  à  l'exé- 
cution d'une  chose,  gage  qui  en  assure  et  garantit 
l'exécution  ;  dans  le  sens  propre,  gage  pour  assu- 
rance d'un  marché.  (Voy.  Monet,  Dict.  au  moi  Arre.) 


L'acception  de  ce  mot  arre  éloit  figurée  ,  lorsqu'on 
disoit:  «  Il  lui  sembloit  bien  que  desaccuu-slumant 
'■  les  ennemis  de  vaincre  et  les  François  d'estre 
«  vaincuz,  il  donneroit  assez  bon  commencement 
«  et  auroit  suffisantes  arres  pour  la  future  et  désirée 
«  victoire.  »  (Du  Bellay,  Mém.  liv.  vu,  fol.  209,  R°. 
—  Voyez  Arrer.) 

Il  est  possible  que  comme  on  dit  aujourd'hui,  sur 
ces  enlrefailes,  pour  désigner  l'instant  présent  oii 
se  fait  une  chose,  on  ait  dit,  sur  cesrt/res;  expres- 
sion figurée  dans  laquelle,  ainsi  qu'eu  l'adverbe 
maintenant,  il  semble  qu'on  ait  comparé  cet  instant 
présent  à  celui  oii  l'on  se  tient  la  main  ,  où  l'on 
donne  et  reçoit  des  arrhes,  en  signe  d'un  marché 
présentement  fait  et  conclu.  »  Advint...  que  sur  ces 
«  arres  les  Marchands  venans  des  foires  de  Lyon, 
«  et  qui  s'estoient  hastez  pour  estre  h  temps  à  celle 
«  de  Strasbourg,  arrivèrent  les  uns  après  les 
«  autres.  »  (Du  Befiay,  Mém.  liv.  vi,  fol.  177,  R».) 

variantes  : 
ARRE.  Du  Bellay,  Mém.  liv.  vi,  fol.  177. 
Aire.  Loisel,  Institut,  coutum.  T.  II,  p.  276. 
Erre.  Beaumanoir,  Coût,  de  BeauvoisiSj  p.  12. 
Herre.  Pyrame  et  Tysbé,  MS.  de  S<  Germ.  fol.  99. 

Arrement,  subst.  masc.  Moyens  juridiques  de 
satisfaire  à  l'obligation  d'une  preuve  en  Justice  ; 
preuve  faite  par  ces  mêmes  moyens.  Action  d'arrher. 
Gage  d'amour,  engagement  amoureux,  promesse 
d'amoureux  retour.  (Voy.  Arramie.) 

Nos  Ancêtres,  familiarisés  avec  l'idée  des  arra- 
mies,  des  gages  de  bataille,  de  ces  combats  judi- 
ciaires pour  lesquels  ils  donnoient  et  acceptoient 
un  gage  en  signe  de  l'obligation  réciproque  de 
proiiver,  par  le  succès  heureux  ou  malheureux  du 
combat,  la  justice  ou  l'injustice  d'une  action  crimi- 
nelle et  même  civile,  paroissent  avoir  pris  plaisir 
à  retracer  cette  idée  et  à  la  perpétuer,  en  comparant 
aux  gages,  aux  arrhes  de  ces  combats  judiciaires, 
et  en  nommant  arrements ,  airements ,  ou  erre- 
ments, les  moyens  de  satisfaire  à  l'obligation  d'une 
preuve,  selon  les  loix  de  la  Jurisprudence  civile. 
On  assure  «  qu'à  l'imitation  des  gages  de  batailles, 
«  les  procédures  en  matière  civile  ont  été  nommées 
..  e;Te//i?ns  du  plait;  c'est-à-dire,  gages  ou  aires 
«  du  plait.  "  (Voy.  Loisel ,  Institut,  coutum.  T.  II, 
p.  270.)  Encore  aujourd'hui  les  derniers  erremens 
sont,  en  style  de  pratique,  les  dernières  procédures  : 
procéder  suivant  les  derniers  erremens,  c'est  conti- 
nuer dos  poursuites  qui  ont  été  commencées , 
pourvu  que  l'instance  ne  soit  point  périe.  (Voyez 
Lauriére,  Gloss.  du  Di-.  Fr.  T.  I,  p.  396,  col.  1.  — 
Nouv.  Dict.  de  Droit.) 

En  effet,  il  paroit  constant  qu'en  l'ancien  style, 
lorsqu'à  la  preuve  par  gages  de  bataille,  par  arra- 
mies.  on  préféroitla  preuve  parécritet  par  témoins, 
les  productions,  les  procédures,  en  général  les 


(1)  Du  latin  arrha  ou  arm  (Grég.  de  Tours),  et  aussi  arrhabo  (dipl.  de  879),  du  grec  apâa6a>y.  Calvm  et  d'.^.ubigne,  au 
XVI»  siècle,  employaient  encore  ce  mot  au  singulier.  La  prononciation  arrhes  a  duré  jusqu'au  .'CVii"  siècle,  et  c'est  Boiihours 
qui  remarquait  qu'on  dit  arrhes  au  figuré,  et  errhes  au  propre  :  i  Donner  des  arrhes  au  coche.  »  Sans  doute  on  a  du 
prononcer  d'abord  aïrrhes,  comme  en  Berry  et  à  Genève  ;  puis  le  son  est  devenu  nasal,  et  s'est  transforme  en  un  c  ferme . 
Mais  d'où  venait  cet  i  ?  Il  me  semble  aussi  difficile  à  expliquer  que  dans  le  français  aire  et  dans  le  provençal  paire,  (n.  e.) 


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moyens  juridiques  de  satisfaire  à  loblio-aLion  de 
celte  preuve,  se  nommoient  par  comparaison,  arre- 
mms  ou  errenmis  du  plait.  (Voy.  Arrkr  et  Erremen- 

fant'li'  i'"^  ^^™.^'"^^,  "  ''"''""  t^O"''  soi  et  pour 
pn  ôn'n  ™'H  ^^  ^^^  preuves  qui  ont  esté  faites 
î^  co'iun  soient  monstrées,  si  ke  on  puisse  savoir 

"  tî>  ,,  r'"'  ''  '*"  P^'^i^-  ^''  P=^''  'levant  qui  le  parolle 
•'  ^t  tiaitie  commandera  ke  li  airrcment  et  li  co- 
"  A^.-^^'^?}  so'^"*'  regardé  pour  faire  foi  de 
;«  ^^'n 'on  l^T''^  ^^^  P**^'"''^  'î'^  Fontaines,  chap.  .^' 
/'P-  90.)  "Mis  n  est  tenusà  aporler  en  jugement 
«  Lettres,  m  Chartres,  ne  £;Te»u.«s  qui  soûl  contre 
«  h.  "  (Beaumanou%  Coût,  de  Beauvoisis,  cliap.  vu, 
p. -«9.)  «Quanti  en  fet  pès  d'aucune  qùerele,  e 

:  Dlet" e?/'"/n ',''i  '^?'"^'"^  ''^^  Verrement  dou 
piet  etc.  »  (Id.  ibid.  cliap.  xxx ,  p  IGO  —  Vnv 
Launère,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  T.  I,  p.  396  col  1  ;  ' 
En  opposant  à  la  preuve  autorisée  par  Tancienne 
Jursprudence  mditan-e,  celle  que  prescr.voit  la 
Jurisprudence  civile,  on  disoit  qu'une  cause  se 
Jiigeo.t  sur  erremem  dcplet,  sur  .  r.m'^s  e  non 
par  gages,  par  bataille,  par  gages  de  bâta  le     S 

lecoi   delaQuemune  apartient,  non  par  ga-es 
«  de  bataille,  mais  par  les  erremens  dou  pfet    ! 
li  sonlT'"'  ^'"'••^''^  Beauvoisis,  chap.  l^  071 
11  sont  deux  manières  de  fausser  jugement    des- 

:  Ss'  V^  f''  ''^'''^"^  ^^'^  '^«'^  démener  pur 
gages,...  1  autre  se  doit  démener  par  erremens 
;  ^37,'^'^oi.l'jugemensfu  fès.  «(Id.ibid.chap  xv 
p.  3o  .)  ,.  he  aucuns  veut  fausser  jugement  en  nais 
"  t  ".  ^^"f  ement  de  jugement  afiert,  il  n  aui'a 
«  point  de  bataille;  mais  li  cleim,  li  respons    e"  il 

SlSeS^oSu^f  qu-aujuurd-buiS  llœSï.ÏÏt 
tentures.  Quoi  qu  il  en  soit,  on  escouinrenoit  sons 

chàruïs  lL"n.f  ^V^'  P^''  'e"^0'"s  et  par 

estSs;s^;^S^^?;g^^Ses..ji, 

mm^m 


AR 


T  7 '"■^""{'.Pf  V'-''""'^-  :  (Bû"teiller,  Som.  rur. 

rhï-~      Oy.  Erreme.NT. 

t  etoit  évidemment  le  même  ^marrement  fn.>m^ 
(1  arre,  en  latin  «n-fta,  lorsqu'il  sionifioH'  !?  -^^ 

:  {;ss;rs?^sl'^Es^^— 
sSî?iS»niEœ""'■- 
Uu  ele  m-a  tos  jors  eslongié  ;  etc 

Ane.  Poèl.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1018. 

ARREMENT.  Cot^rave.'Dfér™'  ' 

AIREMENT.  Lauriere,  Gloss.  du  Dr  fr  T   I  n    Mr 

AiRREMENT.  Conseil  de  Pierre  riPFn.iti'    '  P"  u^^' 

Arrhement.  Cotgrave  Dict  ^°"'aines,  chap.  xii. 

ERREM.i.NT.  Monet,  Dict 

ERRE.MENT.  Gr.  Cout.  de  Fr.  Uv.  Il,  chap.  xli  p  07-2 

signifie  nouer,  serrer    lipr    Air.    /ri  ^^^?    <'<"'^'^''' 

On  s  assure  du  service  d'un  hommp    nn  i-^m- 
à  servir,  en  le  prenant  à  ses"  aoeî  ffp  niJ  ''^'F 
mw  dans  le  sens  d'en-iopp^Xt'f     ,   '^  ^^''^^ 

^de^suiss^s,  cois;i;;^rd;^s,j[^tri!;j^ 

p.  210!  ^'  "  ^^"'  ''^  ^ouis  XII,  T.  IV, 

P.f  édure.  ..  r7uanï  dSx '^eVon?  ?  s  Sj,"^' 
«  dent,  là  où  le  demandeur  detfault  les  er remin: 
«  rompent,  et  convient  venir  à  nou  e'auîx  efrenS 
«  se  II  plaist  au  deffendeur  :  car  aulcu ne  fois  f/ef' 
«  au  t  le  demandeur  par  fraude  là  où  voU  Le  I 
-  a  mauvaisement  conduicte  sa  cause  ou  délaissé 
«  de  ses  temoings  à  amener,  ou  autremein  mv 
L.)^TJiaumassière  Cout^  de  Berry,  chap.'^ïi,  ^''2, 
ei  -0^.  —  Voy.  Arre  et  Arre.ment.)  ^ 

icni-D    r^  VARIANTES  : 

AHHt.K.  Cotgrave  et  Monet,  Dict 

t-RRER.  La  Thaumassiére,  C.  de  Rerry,  ch.  xxiii.  p.  262. 


^^iS!:^i^f  -'  "»>-«■■'. 


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AR 


Il  s»!nil)lc  qu'ayant  préféré  à  l'ortliographe  «rm-e 
celle  ^'arrière,  on  devroil  écrire  arriérage  ;  ortho- 
graphe que  Ménage  a  condamnée  en  raisonnant 
plus  d'après  l'usage  que  d'après  l'analogie ,  dont 
Nicol  inditiue  la  lègle  en  disant  :  Le  droit  mot  est 
arriéruges,  mais  le  françois  le  syncope  (1).  (Voy. 
Nicot,  Dicl.  au  moi  Arrérage.  —  Ménage,  Rem.  sur 
la  Langue,  p.  299.)  Anciennement,  le  mot  arrérage 
qui  n'est  plus  usité  qu'au  pluriel,  l'étoit  au  pluriel 
et  au  singulier.  On  a  désigné  ce  (lui  est  dîl ,  ce  qui 
est  échu  d'une  rente,  d'une  pension,  d'un  loyer, 
d'une  ferme,  etc.  par  le  mol  arrérage  om  arrérages, 
relativement  à  l'idée  générale  être  arrière  ,  être 
après.  "  ^nrm(7É',  ou  anwfl(/fs  sont  restais,  termes 
«  escheuz  et  non  payez  de  renies  constituées ,  ou 
«  autres  censives  et  pensions  ;  et  vient  de  arrière, 
"  par  ce  que  les  payements  n'ayant  esté  faits  au  jour 
«  qu'ils  échéoient...  sont  demeurés  en  arrière.  « 
(Nicot,  Uict.  —  Nouv.  Dict.  de  Droit.) 

Telle  est  l'origine  de  la  signification  encore  usitée 
de  ce  mot,  qui  dans  un  sens  analogue  à  celui  de 
l'ancienne  expression,  être  à  l'arrière  de  deniers, 
signifioil  retard  de  payement  ou  débet.  Lorsque  les 
Receveurs  des  impositions  royales ,  sous  le  règne 
de  Charles  VII  «  estoyent  négligents  ou  mauvais 
«  mesnagers,  et  tomboient  en  arrérages ,  on  y  en 
«  commettoit  d'autres.  »  (Eloge de  Charles  VII,  p.  7.) 
Probablement,  tomber  en  arrérages  éloit  la  même 
chose  que  demeurer  en  arrérages  ou  en  arriérage. 
(Voy.  Nicot  et  Monet,  Dict.) 

On  croit  que  l'acception  d'amemfl'eétoit  relative 
à  celle  d'arrière,  loin,  quand  pour  signifier  qu'on 
se  trouvoit  éloigné  du  but  de  ses  désirs,  on  disoit  : 

Se  j'eusse  songié 

Mes  désirs  que  tu  m'as  paie, 

N'en  truis  en  moi  fors  qnarrieruge. 

Famine,  accroissement  de  rage. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  209,  R-  col.  1. 

VARIANTES  : 
ARRÉRAGE.  Orth.  subs.  -  Cotgrave  et  Monet,  Dict. 
ARÉHAGE.  Nuits  de  Straparole,  T.  II,  p.  398. 
Arriéhage.  Cotgrave  et  Nicot,  Dict. 
Arriraghe.  Duchesne,  H.  g.  de  la  M.  de  Guines,  pr.  p.  291. 

Arrérager,  verhe.  Déposséder.  On  connoît 
l'acception  usitée  de  ce  verbe,  qui  présentoit  un 
sens  analogue  à  celui  de  l'expression  figurée  être 
arrière  de  son  droit,  en  être  dépossédé,  lorsqu'on 
disoit  :  «  Se  les  Parties  qui  pledent,  de  leur  assen- 
"  tentent  requièrent  délai  jusques  à  autre  journée, 
»  en  autel  estât  li  Sires  ne  leur  doit  pas  véer,  se  il 
«  n'est  ainsint  que  le  querele  louche  le  Seigneur, 
«  et  que  il  ne  t'ust  arriéragiés  de  son  droit,  pour  le 
"  délai  des  Parties.  »  (Beaumanoir,  Coût,  de  Beau- 
voisis,  chap.  lxv.  —  Voy.  Arrère.) 

variantes  : 
ARRÉRAGER.  Orth.  sub.  -  G.  de  Bourbonnois,  T.  II,  p.  393. 
Arriéragier.  Beaum.  G.  de  Beauv.  chap.  lxv,  p.  332. 

Arrère,  adv.  et  prépos.  Arrière,  en  rétrogra- 


dant, en  reculant,  en  retournant.  Derrière,  après, 
loin.  Derrière,  près,  dans,  chez,  auprès,  contre. 

Anciennement,  on  écrivoit  dans  un  môme  titre, 
arriens  ou  arriers,  parce  qu'en  prononçant,  il  est 
naturel  et  très-ordinaire  de  substituer  n  à  r;  lettre 
dont  on  semble  avoir  évité  la  prononciation  rude, 
en  disant  aiere  et  aier  pour  arier  et  ariere,  arer  et 
arere.  11  est  possible  qu'en  retranchant  la  dernière 
syllabe  A'arrere  on  ait  écrit  arre,  dont  Ve  final  et 
muet  paroit  être  le  principe  de  forthographe  areus, 
arreuso  en  langue  Limousine. 

Per  aqui  (2)  monten  cent  miri  (3)  auzello  (4); 
Alquant  (5)  s'en  tornen  aval  arreuso. 

Fragm.  de  la  Vie  de  Boèce,  MS.  de  S.  Benoîl-sur-Loire,  p.  274. 

Peut-être  qu'en  certains  cas,  hareu  étoit  de 
même  origine  que  an'e ,  dont  l'orthographe  erres 
est  sans  doute  une  variation.  (Voy.  Hareu.)  Il  semble 
du  moins  que  erres  et  hareu  signilioienl  arrière, 
lorsqu'on  disoit  avec  ou  sans  ellipse  : 

Erres,  erres,  vos  ni  dormirés  mie 
Entre  mes  bras,  jalons  ;  etc. 

Ane.  Ro8l.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  921. 

J'ai  mis  mon  coer  en  un  lieu  puis  un  peu. 
Ma  dame  disl:  fuies,  fuies  hareu. 
Quant  recorder  je  li  voeil  mon  afaire 

Froissart.  PoSs.  MSS.  p.  325,  col.  1 

On  soupçonne  d'ailleurs  arrié,  espèce  d'excla- 
mation vulgaire,  et  probablement  la  même  que 
arré  en  Normandie ,  d'être  comme  arriez,  une 
altération  de  Y  adverbe  arrère  ou  arrière,  et  d'avoir 
une  signification  relative  à  celle  de  l'expression 
resivardeir  ayere.  «  Ne  nos  covient  mies  rester  ;  et 
«  molt  moins  nos  covient  ancor  reswardeir  ayere.  » 
(S'-Bernard,  Serm.  Fr.  mss.  p.  3i0.)  Ainsi,  ce  seroit 
avec  ellipse,  qu'à  l'occasion  d'une  surprise  agréable 
ou  désagréable,  les  gens  du  peuple  disent  arrié  ou 
arré ,  comme  s'ils  disoient  regardez  arrrière  ; 
comme  s'ils  avertissoient  de  se  tourner  arrière,  de 
tourner  la  tête  en  arrière,  de  retourner  la  tête,  de 
se  retourner  pour  voir  ce  qui  leur  plait  ou  déplaît, 
et  pour  en  juger.  C'est  peut-être  aussi  la  signifi- 
cation de  hareu  en  ces  vers  : 

Hareu,  hareu,  jou  la  voi  là, 
La  riens  el  mont  qi  plus  ma  mis  en  desconfort  : 
N'onques   ne  voi  déport. 

Ane.  Pofs.  fr.  MS.  du  Valican,  n'  1490,  fol.  116,  R*. 

Lorsqu'à  la  vue  d'une  personne  ou  d'une  chose 
pour  laquelle  on  se  sent  de  l'aversion  et  de  la 
crainte,  on  en  exprime  le  sentiment  en  criant 
arrière,  arrière  de  moi  la  chose  qui  se  présente,  ou 
la  personne  qui  s'avance,  arrière  n'est  point, 
comme  on  fa  dit,  une  préposition.  (Voy.  Dict.  de 
Trévoux.)  Il  est  adverbe,  et  signifie  avec  ellipse, 
allez  arrière,  rétrogradez,  reculez;  éloignez-vous 
de  moi  en  allant  arrière,  en  rétrogradant,  en  recu- 
lant. Il  étoit  l'expression  d'un  sentiment  d'aversion 
pour  une  chose  à  craindre ,  lorqu'on  disoit  : 
«  Arrière,  ce  sera  une  mauvaise  besoigne.  »  (Contes 
de  Despériers,  T.  I,  p.  74.) 


(t)  Si  Ve  de  reiro  est  considéré  comme  étant  en  position,  il  reste  pur,  et  du  composé  ad  rétro  on  fait  arrère  ;  si  l'on  tient 
compte  de  la  liquide  r,  il  est  bref,  se  diphthongue  en  ic,  comme  dans  Pierre  (Velrum),  et  l'on  fait  arrière,  (n.  e.)  — 
(2)  Par-là.  —  (3)  Milliers.  —  (4)  Oiseaux.  —  (5)  Quelques-uns.  Voir  le  texte  publié  par  M.  P.  Meyer  et  mentionné  plus  haut.  (n.  e.) 


AR 


177  — 


AR 


C'est  donc  par  impér..lif  supprimé  qu'en  criant 
arrière,  on  rompt  des  cliieus  en  défaut;  que  l'on 
comm^iiide  à  un  tiomme,  à  une  Iroupu,  à  des  che- 
vaux de  harnois,  de  reculei-.  ^^oy.  Nicot,  Dict.) 

Si  crient  les  Veneurs,  arrière, 
Arrière  chiens,  arrière,  arrière. 
Adoncq  se  mectent  en  requeste 
Chiens,  pour  raieuLx  retrouver  leur  beste. 

Gace  de  la  Bigne,  des  Déduits,  MB.  fol.  lOi,  R'. 

Lorsqu'en  suivant  une  affaire  on  s'étoit  un  peu 
écarté  du  but,  et  qu'en  parlant  de  cet  écart  comme 
peu  dangereux  en  la  suite  de  l'affaire  qui  n'avoit 
avancé  lii  reculé,  on  disoit  figuiément,  «  pour  un 
«  petit  n'avant  n'arriére,  »  il  y  avoit  ellipse  d'un 
verbe,  comme  en  l'expression  «  avant  et  airiere;  » 
c'est-à-dire,  de  toutes  fayoïis.  On  lit:  «  pour  un 
«  petit  n'avant  n'arriére,  »  dans  Colgrave,  Dict. 
En  étendant  à  toute  espèce  de  façons  d'agir  diffé- 
rentes, les  idées  contraires  de  l'action  d'aller  avant 
et  arrière,  de  la  lagon  de  se  mouvoir  avant  et 
arrière,  on  a  dit  : 

Regastoient  en  tel  manière 
Saint  Yglise,  avayitel  arrière. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  102,  Rv 

Tant  que  tu  te  plaindras  et  avant  et  arrière. 
Aura  celé  enlenilu  ta  voix  et  ta  proiere  ; 
Ne  t'en  chaut  s'au  premier  est  orgueilleuse  et  fiere. 
Fabl.  MS.  du  R.  d*  7G)5,  fol  178,  V'  col  2. 

Dans  ces  expressions  où  l'on  reconnoit  sans 
doute  l'ellipse  du  verbe  qui  désigne  le  mouvement, 
la  signification  de  l'adverbe  arrière,  propre  ou 
figurée,  est  donc  la  même  qu'en  mille  autres 
expressions  ,  telle  que  arrière  aller ,  ou  aller 
arrière,  tourner  arrière ,  venir  arrière ,  entrer 
arrière,  mener  arrière,  carier  arrière,  arrière 
porter  ou  porter  arrière,  envoyer  arrière,  bouter 
arrière  ou  arrière  bouter,  etc.  «  Les  prièrent  k'il 
>•  allassent  arere,  e  trencbassent  de  cet  fust  six 
«  cotées,  e  de  celé  partie  feissenl  une  croix.  » 
(Hist.  de  la  S"  Croix,  ms.  p.  16.  —  Fabl.  ms.  de 
Berne,  n°  354,  fol.  23.  —  Eust.  Desch.  Poës.  mss. 
p.  '240,  col.  3,  etc.) 

Pères,  fet-il,  tornez  arrière... 
Or  vous  faz-je  seignor  et  mestre 
De  mon  ostel,  à  toz  jors  mais. 
Se  ma  famé  ne  veut  la  pais  ;  etc. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  llh».  fol.  J51,  V-  col.  2. 
Tantost  sans  plus  delaier, 
A  lor  ostel  vincirent  arrière. 
Chantant  et  faisant  bêle  chiere. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'  7615,  fol.  127,  V  col.  1. 

Entrent  en  leurs  vessiaux  arrière. 
L'autre  navie,  qui  qu'en  hoingne  (1), 
Le  port  de  la  cité  resloingne. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  22*,  V'. 

Il  seroit  possible  que  dans  les  verbes  rentrer, 
revenir,  retourner,  et  autres  de  même  espèce,  le 
principe  de  la  particule  rc,  fût  l'adverbe  arrere 
qu'on  ecrivoit  arre ;  d'où  vraisemblablement  plu- 
sieurs verbes  inusités,  tels  que  araler,  aretourner 
dans  le  sens  de  arrere  aller,  arrere  tourner.  (Voy. 
Rom.  d'Alexandre,  ms  du  R.  n°  6987,  fol.  190.  — 


Villehardouin,  p.  55.)  Au  moins  est-il  constant  que 
dans  nombre  de  verbes,  la  particule  re,  comme 
arrere  dans  nombre  d'expressions,  signifie  que  le 
mouvement  désigné  par  le  verbe,  se  Tait  en  rétro- 
gradant, en  retournaiil  vers  un  lieu  d'où  l'on  est 
parti,  d'où  l'on  est  venu.  C'étoit  encore  la  significa- 
tion d'arrere,  lorsiju'oii  disoit  :  «  Si  te  eiifreiieiai, 
«  eariere  te  merai  là  dun  tu  venis.  »  (Livres  des 
Rois,  MS.  des  Cordcl.  fol.  146.)  «  Tele  malady  luy 
"  p.ist  en  cheminaunt  vers  ceste  court  que  il  ne 
><  poit  avauiit  pur  gayner,  ne  pur  perdre  :  eiiis  se 
"  tist  carier  arrere  à  sa  meson.  «  (Britton  des  Loix 
d'Angleterre,  fol.  281. i  «  Cumandad  David  (jue  l'um 
"  portast  l'arche  ariere  en  la  cited.  ■■  (Livres  des 
Rois,  MS,  des  Cordel.  fol,  60.) 

Sire,  fet  il,  que  ce  sera? 
Je  cuit  que  il  me  convenra 
Le  mantel  arrière  porter. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7615,  fol.  H5,  R-  col.  1. 

Dans  le  sens  de  renvoyer  un  criminel,  de  le  faire 
retourner  au  lieu  de  la  Seigneurie  dont  il  est  justi- 
ciable, on  lit  :  «  Tuit  Geiitis-bons  qui  ont  voirie 
"  en  leur  terre,  pendent  larron  de  quelque  larrecin 
"  que  il  ait  fait  en  leur  terre  :  mes  en  aucune  Clias- 
«  tellerie  les  mené  l'en  juger  à  leur  Saingnour.  Et 
«  quand  li  Sires  les  a  jugiés,  si  les  envoie  arrière; 
■'  et  cil  en  font  la  justice.  «  (Ord.  T.  l,  p.  135  et  136.) 

C'est  relativement  à  l'idée  d'une  force  à  hniuelle 
on  cède  en  rétrogradant,  en  faisant  un  inouvenient 
arrière,  que  dans  le  sens  de  repousser  on  disoit 
«  botter  ayere  et  arrier  bouler,  »  d'où,  peut-être, 

notre  verbe  rebuter.  «  0!  tu  chaitive  chars, ke 

«  feras-tu,  s'il  avient  que  tu  de  ceste  glore  soyes 
«  botteie arjere,  el'jugieie knonûigne.  >>  (S' Bernard, 
Serm.  Fr.  mss.  p.  46.) 

Petit  nous  ont  douté 

Paien,  quant  sont  de  Homme  la  cité 

Issi  ainsi.  Fait  ont  gront  foleté, 

Quant  si  sont  trait  fors  de  leur  fermeté. 

Si  radement  (2)  soient  arrier  bouté. 

Qu'il  ne  nous  tiengnent  mie  pour  enprunté. 

Enfance  d'Ogier  le  Danois,  .MS.  de  Gaigiiat,  fol.  lOJ. 

On  ouvre  une  porte,  une  barrière,  un  buis,  en 
les  poussant,  en  les  faisant  mouvoir  en  arrière  : 
de  là,  l'expression,  «  ouvrir  arrière  un  huis.  » 

A  l'uis  vit  droit  o  l'Aversiere 
Fu  apuiez;  si  Vuevre  ariere. 

Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  fol.  128,  V"  col.  1. 

Lorsque,  par  ce  mouvement,  une  barrière  ou  une 
porte  étoit  ouverte  autant  qu'elle  pouvoit  l'être, 
lorsqu'elle  étoit  poussée  en  arrière  tant  que  se 
pouvoit,  on  disoit  comme  on  le  dit  encore  aujour- 
d'hui, quelle  étoit  ouverte  toute  arrière,  qu'elle 
«  étoit  arrière  ouverte.  »  (Voy.  Froissait,  Vol.  IV, 
p.  35.  —  Cotgrave,  Oudin  et  Monet,  Dicl.) 

Cheoir  par  dayer,  c'étoit  cheoir  par  un  mouve- 
ment en  arrière,  tomber  à  la  renverse.  »  El  mont 
«  volt  seoir  li  anciens  serpens  mordanz  les  ungles 
"  del  cheval,  por  ceu  ke  cil  ki  sor  siet.  chacet  par 


(1)  C'est  le  sens  fameux  ;  «  Qui  qu'en  grogne.  »  Ce  mot  n'aurait-il  pas  la  même  origine  que  honni);  c'est-à-dire  l'aUemand 
hohnen,  moquer,  [aire  honte'?  (n.  e.)  —  (2)  Rapidement:  rapidum  a  de  même  donné  rade.  (H.  e.) 

II.  23 


AR 


-  178  - 


AR 


«  d'ayer.  »  (S"  Bernard,  Serm.  Fr.  mss.  p.  316.)  La 
mémo  idée  de  mouvement  en  arrière  se  retrouve 
encore  dans  les  expressions,  «  couper  teste  arrière 
«  bras,  ferir  à  arriere-inain,  »  c'est-à-dire,  couper, 
frapper  de  l'evers  ;  fi  apper,  couper  en  faisant  un 
mouvement  de  bras  ou  de  main  en  arrière.  «  Si  le 
«  fiert  de  l'espëe  îi  arrU're-mahi,  tellement  qu'il 
«  l'abatit.  ..  (l.;inc.  du  Lac,  T.  L  fol.  80.)  «  Toutes 
K  les  fois  qu'il  .sentoit  les  Chevaliers  si  près  de 
«  luy....  il  leur  coupoit  les  testes  arrière  bras  » 
(Percef.  Vol.  L  fol.  58.  —  Voy.  AnRiERE-.MAiN.) 

Peut-être  regardoit-on  les  choses  délivrées, 
rendues,  redemandées,  reconquises,  etc.  comme 
faisant  ou  devant  faire  un  mouvement  par  lequel 
elles  alloient,  elles  retournoient  aux  personnes  à 
qui  on  vouloil  qu'elles  revinssent,  loi'squ'on  disoit: 
1°  délivrer  arere  :  >■  Soit  comaundé  as  Coroners  et 
«  à  lour  heires  que  ilz  deliverent  as  Justices  lour 
«  roules  puis  le  dareyn  eyre  :  et  volons  que  les 
«  Justices  les  enselent  desouth  lour  sealx,  et 
<t  taunlost,  saiinz  nul  examinement  les  lour  dc//D(?- 
«  rent  arere.  «  Britlon,desLoix  d'Angleterre,  fol. 9. 

2°  Rendre  arrière  : 

Tout  Artois  conquist  celui  Hue... 
Puis  ot  des  siens  si  granl  piiere, 
Qu'il  le  rendi  au  Conte  uriere. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  U7,  V'. 

A  la  morte  rendi  arrière 

L'ame  el  cors  ;  et  sus  se  leva,  etc. 

Miracles,  MS.  de  la  Clayelte,  p.  456,  col.  1. 

....  Firent  li  Normant  proiere 
Que  Dieux  reniJist  l'enfant  ariere. 
Oies  coument  il  fu  garis. 

Ph.  Mouskcs,  MS.  p.  374. 

3°  Demaunder  arre,  pour  redemander  «  Si  ascun 
«  eyt  lessé  à  terme  des  ans  son  lenement  que  il 
«  avéra  lenu  à  terme  de  sa  vie,  ou  à  greynour 
«  terme  des  auns,  et  demnunde  arre  sa  seisine, 
«  demeyne  après  le  terme  del  leès;  etc.  »  (Britton, 
des  Loix  d'Aiit;lelerre,  fol.  207.) 

4°  Conquérir  arrière,  pour  reconquérir  : 

Jhernsalem  fut  des  Turcs  trette 
Par  Cliarleraaine  et  Constantin  (1), 
Qui  les  chacierent  en  la  fin 
Hors  de  celle  Saincte  Cité. 
Es  mains  fut  de  Creslienté... 
A  mille  ans  lIIUx  un  mains, 
Sariazin  l'osterent  des  mains, 
Des  Ci"Sliens  qui  la  perdirent. 
A  cent  iiprès  la  conquirent 
Arrier  Godefroy  de  Buillon,  etc. 

Eusl.  Desch.  Poês.  MSS.  p.  572,  col.  \. 

Il  semble  «  qu'entendre  arrière  à  quelqu'un,  » 
c'étoil  avoir  un  retour  de  bonne  intention  pour  lui, 
retourner  à  lui  par  le  mouvement  d'une  passion 
contraire  à  celle  qui  en  avoit  éloigné.  «  Après  ce 
«  que  le  Duc  de  Julliers  eut  entendu  arrière  à  son 
«  oncle  le  Duc  de  Brabant,  et  quitté  et  délivré  de 
«  sa  prison,  ils  furent  assez  bons  amis  ensemble.  « 
(Froissart,  Vol.  III,  p.  272.) 

Peut-être  encore  s'est-on  figuré  les  personnes  et 
les  choses  qui  redeviennent  ce  qu'elles  étoient,  qu'on 
remet  et  pose  où  elles  étoient,  comme  retournant 


et  revenant  à  leur  place,  à  leur  premier  élal,  par 
un  mouvement  semblable  à  celui  par  lequel  on 
revient  et  retourne  au  lieu  d'oi^i  l'on  est  parti.  On 
croit  que  d'après  cette  comparaison,  l'on  aéra  dit  .- 
1°  Poser  arrière,  mettre  arrière,  arrière  mettre, 
pour  remettre,  rétablir:  «  Comme  plusieurs  Ser- 
«  geiils...  ayent  esté  pour  leurs  metfais...  privez 
«  pour  tousjours  de  leurs  Offices  et  ils  soient 
«  arrière  mis  en  leurs  Offices,  qu'icel  en  soient 
«  derecbief  osté  à  touz  jours.  »  (Ord.  ï.  1,  p  559.) 
«  Que  la  chose  me  soit  mise  arrière  en  pesible 
••  estât.  »  (Beaumanoir ,  Coût,  de  Beauvoisis , 
chap.  xxxii,  p.  167.) 

Celériere, 

Alez  ;  et  si  scit  mis  arrière 
Là  donc  il  fut  osté  et  pris. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7615,  fol.  147,  V-  col.  i. 

Puis  le  fist-on  poser  arrière 
En  son  Siège  de  Cantorbiere. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  13,  R'. 

2°  Devenir  arrière ,  pour  redevenir  :  »  Les 
«  Romains...  après  la  perte  de  pluseurs  consulz  .. 
«  devinrent  arrière  victoriens.  »  (Instruction  de 
Chevalerie  et  exercite  de  guerre,  m,>.  fol.  4.) 

3"  Estre  arrière,  pour  revenir  à  son  premier  état, 
redevenir  ce  qu'on  étoit  : 

L'omme  durra 

Sanz  mourir,  puis  la  mort  première 
Que  cendre  le  fault  cstre  arrière. 

Eusl.  Desch.  Poès.  MSS.  p   477,  col.  i. 

4°  Arrier-mourir,  pour  revenir  à  l'état  de  mort  : 

Et  fussent  tons  ressours  en  propre  vie. 

Je  croys  que  tuit  vouldroient  arrier-mourir, 

Ains  que  de  voir  de  ce  monde  l'envie. 

Eusl.  Desch.  poés.  MSS.  p.  4,  col.  \. 

5°  Arrière  se  coucher,  pour  se  recoucher.  (Voy. 
Athis,  MS.  fol.  6  et  26.)  Qu'il  suffise  d'avoir  indiqué 
par  quelle  comparaison,  dans  une  infinité  de  verbes 
composés  et  d'expressions  dont  l'cnuméralion 
paroitroit  sans  doute  aussi  ennuyeuse  qu'inutile, 
l'adverbe  arrere  aura  signifié  assez  naturellement 
une  idée  de  retour,  non-seulement  à  un  état,  mais 
à  une  action  ou  à  une  parole,  à  une  chose  qu'on  a 
déjà  dite  ou  faite.  En  efTet,  redire  une  chose,  comme 
la  refaire,  c'est  y  revenir,  y  retourner  en  la  com- 
mençant arrière,  en  la  réitérant,  en  la  recommen- 
çant. «  Qui  redit  une  chose,  semble  reculer  à  ce 
«  dont  sa  voix  est  partie.  »  (Nicot,  Dict.  au  mot 
Arrière.)  Ce  mouvement  sembloit  propre  à  la  chose 
même  qui  recommenyoit,  lorsqu'on  disoit  : 

Si  co>n»iença  la  guerre  arrière, 
De  Bresse  et  Henri  l'Emperiere. 
Hisl  de  Fr.  en  vers,  à  la  suilc  du  Rom.  de  Fauvel,  MS.  du  R.  fol.  77. 

On  avouera  que  l'analogie  de  signification  rend 
assez  vraisemblable  l'opinion  de  Priscien,  qui 
croyoit  possible  que  l'adverbe  latin  relro,en  fran- 
çois  riere,  arrière,  fiît  le  principe  de  la  particule 
re,  dans  nombre  de  verbes  latins  de  l'espèce  des 
verbes  françois,  recommencer,  remettre,  rede- 
mander, rebuter,  renvoyer,  reporter,  remener, 
rentrer,  revenir,  retourner,  etc.  Il  est  évident  qu'en 


(1)  C'est  un  récit  fait  d'après  le  cycle  carolingien  et  non  d'après  l'histoire,  (n.  e,) 


AR 


179  — 


AR 


ces  verbes,  re  signifie  la  même  chose  que  an  iere, 
dans  les  expressions  yrriere  tourner,  arrière  venir, 
ariiere  entrer,  arrière  nieuur,  arrière  envoyer,  et 
autres;  c'est-à-dire,  une  idée  générale  de  retour, 
propre  ou  figurée.  (Voy.  Arriere-chabte.)  Quelle  que 
soit  donc  l'origine  de  cette  particule,  c'éloit  avec 
répétitition  de  la  même  idée,  que  dans  le  sens 
à'ullcr  arrière  ou  araler ,  tourner  arrière  ou 
aretourner,  venir  arrière  ou  arrière  venir,  porter 
arrière,  botter  arrière,  demander  arrière,  con- 
quérir arrière,  remettre  arrière,  etc.  on  disoit 
remettre  arrière,  arrière  recouvrer,  redemander 
arrière,  reboter  ayere,  reporter  et  raporter  arrière 
ou  ancre,  arrière  retourner,  arrière  revenir  ou 
revenir  arrière,  ayere  raleir  ou  raleir  ayere,  etc. 
rVoy.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  mss.  p.  G6  et  339.  — 
Anseis,  ms.  fol,  14.  —  Chans.  Fr.  ms.  de  Berne, 
n<'389,  part,  ii,  fol  102.  —  Fabl.  ms.  de  la  Clayette, 
p.  43-2.  —  Vie  de  S'  Patrice,  ms.  de  N.  D.  n°  '2,  fol  98. 

—  S' Bernard,  Serm.  Fi'.  mss.  p.  339.  —  G  Guiart, 
MS.  fol.  148.  —  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  mss.  p.  "207.  — 
Fabl.  MS.  du  R.  n"  7()ir>,  fol.  209.  -  S'  Bernard, 
Serm.  Fr,  mss.  p.  280.  —  Beaumanoir,  Coût,  de 
Beauvoisis,  chap.  vu,  p.  47.  —  Enfance  d'Ogier  le 
Danois,  ms.  de  Gaignat,  fol.  109.  —  Rom.  d"e  Per- 
ceval,  MS.  de  Berne,  n°  3,i4,  fol.  234,  etc.) 

En  rétrogradant,  en  faisant  un  mouvement  en 
ari'iere,  on  passe  après  celui  devant  qui  ou  à  côté 
de  qui  l'on  étoit,  avantqu'on  eût  fait  ce  mouvement 
en  arrière ,  que  paroit  signifier  l'expression  par 
de.ricie  oupar  d'ayer,  comme  on  lit  en  ce  passage  : 
n  Adam  se  volt  covrir  contre  nostre  Signor,  de  la 
«  femme  par  cui  il  avoit  péchiet;  assi  cum  U  par 
»  d'ayer  son  dos,  se  volsist  eschuir  delà  saette.  » 
(S'  Bernard,  Serm.  Fr.  mss.  p.  373  ) 

Une  fai;on  très-naturelle  de  marquer  son  indiffé- 
rence pour  les  personnes  et  les  choses,  ou  la  pré- 
férence donnée  aux  unes  sur  les  autres,  c'est  de 
jeter  arrière  dos,  de  mettre  arrière  dos,  de  mettre 
arrière,  de  faire  passer  apjès  celles  qu'on  juge 
préférables,  ou  moins  indifférentes,  celle  qu'on  met 
de  côté,  qu'on  néglige.  Ainsi,  l'on  disoit  tigurément  : 
«  Tous  ses  affaires  m-jere  mis,  conclud  entrer  en 
«  Aragon.  »  (Hist.  de  la  Toison  d'or,  Vol.  I,  fol.  92. 

—  Voy.  Rob.  Eslienne,  Nicot  et  Monel,  Uict.j 
«  Oncques  pour  prospérité,  ne  pour  bien  que  nostre 

«  Dieu  nous  envoyast,  nous  ne  le  regratiasmes 

<t  Aincois  le  meisme  arrière  dos,  tout  ainsi  que  si 
«  nous  n'eussions  besoing  de  lui.  »  (Percef.  Vol.  I, 
fol.  61.  «  Est  si  entenduiz  en  aquaster,  k'il  l'onesteit 
«  et  lo  deleit  met  ayer  dos.  »  (S'  Bernard,  Serm.  Fr. 
MSS.  p.  106.)  «  Avons  parfaitement  mis  ayer  dos  les 
«  choses  terriennes.  »  (Id.  ibid.  p.  215.)  «  As  fait 
«  ydies  e  simulachres  ii  lun  oes....  e  mei  as  getté 
a  arrière  dos;  pur  ço  des  ore  enveierai  mais,  e 
«  anguisse,  e  travailz  sur  tei.  »  (Livres  des  R.  ms. 
des  Cordel.  fol.  102.) 

Le  possesseur  d'un  fief  relevant  immédiatement 


d'un  Seigneur  suzerain  étant  son  iiomme  proche, 
celui  qui  possédoil  médiatement,  a  un  oa  deux 
degrés  de  vasselage  après  le  piemier,  étoit  l'homme 
arrière,  l'homme  après  celui  qu'on  nommoit 
l'homme  pi'oche  du  Seigneur  suzerain.  «  Se  peut 
«  le  Seigneur  poursuivre  son  lioinme  proche  ou 
»  arrière,  par  sa  Cour,  des  obligations  et  conlracls 
«  que  le  Seigneur  diroit  avoir  faits  avec  son 
«  homme.  »  (Coût,  de  Bretagne,  au  Coût,  géu  T.  Il, 
p  758.)  C'est  relativement  à  l'idée  de  celle  féodalité 
graduelle,  et  à  la  signification  de  l'adverbe  arrière, 
employé  comme  préposition  dans  cette  expression 
elliptique  homme  arrière,  qu'on  a  dit  arriere-vassal, 
arr.ere-vasseur.  Seigneur  arriere-feudal,  aniere- 
fief,  fonds  arriere-censif,  etc. 

On  observera  que  non-seulement  le  premier 
vassal,  mais  le  second,  le  tiers,  et  ainsi  infiniment, 
avoient  tous  le  droit  d'arrierefiefer  (Voy.  Bou- 
teiller,  Som.  rur.  lit.  lxxxiu,  annot,  p  487.)  11  y 
avoit  donc  tel  vassal  médiat,  à  plus  de  trois  degrés 
arrière  ou  après  le  vassal  immédiat,  à  qui  la  déno- 
mination d'arriere-vassal  ou  de  Seigneur  arriere- 
feudal,  étoit  commune  avec  celui  qui  n'étoit  (|u'au 
second  ou  au  troisième  degré  de  vasselage.  «  Le 
«  Seigneur  arriere-feudal  ou  l'ar.  iere-vassal,  qui 
«  se  dit  il  la  différence  du  premier  vassal ,  esl  celui 
«  qui  tient  un  arriere-fief  mouvant  par  moyeu  du 
«  fief  de  quelque  Supérieur.  »  (Voy.  Laurière,  Gloss. 
du  Droit  Fr.  —  Monet,  Dict.) 

Il  en  est  de  l'arriere-fief  (1)  comme  de  l'arriere- 
vassal  ou  du  Seigneur  arriere-feudal.  Ainsi,  lors- 
qu'après  avoir  dit  que  tenir  en  arriere-fief  «  si  est 
«  si  comme  quand  on  tient  aucun  fief  par  second 
«  ou  par  tierce-main,  «  Bouleiller  ajoute  qu'il  est 
«  plus  pertinent  d'appeller  le  tiers  fief  »  arriere- 
fief  qu'il  n'est  le  second  ;  non-seulement  il  particu- 
larise la  significalion  d'arriere-fief,  mais  il  borne 
au  tiers  vassal ,  le  seul  que  d'après  son  raison- 
nement on  nommeroit  arrière  vassal,  la  faculté 
d'arrierefiefer.  Ce  raisonnement,  conforme  sans 
doute  à  la  disposition  de  quelque  coutume,  est 
contraire  au  droict  des  feudes,  par  lequel  «  le  tiers 
.■  vassal  peut  refiefver.  »  (Voy.  Bouleiller,  Som. 
rur.  tit.  Lxxxm,  p.  485.  —  Id.  ibid.  annot.  p.  488.) 
C'est  donc  en  un  sens  aussi  étendu  que  l'étoit  la 
faculté  d'arriere-fiefer,  que  l'arriere-fief,  à  la  diffé- 
rence du  proche  fief,  du  fief  sans  moyen,  est  un 
fief  servant  et  dépendant  de  fief  sans  moyen,  de 
proche  fief,  de  fief  dominant.  (Voy.  Laurière,  Gloss. 
du  Dr.  Fr.  —  Nicot  et  Monet,  Dict.) 

Les  fonds  tenus  en  arriere-fief  se  nommoient 
fonds  arriere-censifs,  relativement  au  cens,  au 
surcens  que  l'arriere-vassal,  le  vassal  médiat  devoit 
au  proche  vassal,  au  vassal  immédiat  du  Seigneur 
suzerain.  On  a  défini  «  le  fonds  arriere-censif,  un 
«  fonds  tenu  en  arriere-fief,  qui  doit  cens,  censive  (2), 
«  surcens  au  proche  vassal,  au  premier  vassal 
"  duquel  le  Prince  exige  le  chef-cens.  De  là,  les 


(1)  Varrtere-fîef  relevait  directement  du  fief  dominant,  intermédiaire  entre  V arrière- vassal  et  le  suzerain,  mais  n"avait 
aucun  nef  dans  sa  dépendance,  (n.  e.)  —  <2)  Il  ne  faut  [ja.?  nous  étonner  de  voir  ici  confondre  le  fief  et  la  censive  ;  le  fie 
peut  être  une  terre  roturière^  et  jusqu'au  xvin'  siècle,  en  Normandie,  fie£fer  une  terre  était  la  donner  en  censive.  (n.  e.) 


AR 


-  180 


AR 


»  rentes  arrière-foncières,  dues  pour  un  fonds 
«  arriere-ceiisif,  pour  un  fonds  tenu  en  arriere- 
«  fief.  »  (Voy.  Laur.  Gl.  du  Itr.  Vr.  —  Monel,  Dict.) 

Par  la  raison  qu'en  lenure  féodale  on  a  dit  arriere- 
fief,  on  a  dit  arriere-censive  en  tenure  roturière. 
(Voy.  Coliirave  et  Micot,  Dict.) 

On  supprimera  prosnue  en  totalité  la  liste  alpha- 
bétiiiue  d'une  iulinité  de  semblal)les  composés, 
parce  (lue  l'on  croit  avoir  domoniré  suflisamment 
la  possibilité  de  ramène:'  à  l'idée  générale  »  être 
après,  »  la  signification  pnpre  ou  figurée  de  mots 
tels  que  »  ai'riere-cense,  arriei'e-chambre,  arriere- 
«  coureur,  ;;rriere-fils,  arriere-fossé  ou  arrier-fossé, 
«  arriere-garand,  arrière-germain,  arriere-guet  ou 
«  arrier-guet,  arriere-juveigneur,  arrière-louage, 
«  arrieie-neveu  ,  arrière -pauage.  arriere-taille, 
«  arriere-vendage,  etc.  «  (Voy.  Coût,  de  Ilainaut, 
au  Nouv.  Coul.  gén.  ï.  11,  p.  134,  col.  '2.  —  Du 
Bellay,  Mém.  T.  VI,  p.  303.  —  Monstrelet,  Vol.  Il, 
fol.  tJ-i.  —  Monet,  Dict.  —  Eust.  Desch.  Poës.  mss. 
p.  38,  col.  1.  —  Le  .louvencel,  ms.  p.  56.  et  67.  — 
3.  Chartier,  Ilist.  de  Charles  Vil,  p.  36.  —  Nicot, 
Dict.  —  Bouteiller,  Som.  rur.  tit.  xxxiu,  p.  215.  — 
Cotgrave  et  Monet,  Dict.  —  Coût,  de  Gand  au  Nouv. 
Coût.  gén.  T.  1,  p.  1019.  —  Eust.  Desch.  Poës.  mss. 
p.  38.  —  Id.  ibid,  p.  '237.  —  Le  Jouvencel,  ms.  p.  58. 
—  Chron.  Scandai,  de  Louis  XI,  p.  71.  —  La  Thau- 
massière.  Coût,  de  Berry,  chap.  xxviu,  p.  35.  — 
Monel,  Dict.  —  D'Argentré,  Coût,  de  Bretagne, 
p.  841  et  Sî'i.  —  Laûrière,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  — 
Monel,  Dicl.  —  Laûrière,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  — 
Colgr.ive,  Dict.  —  Coût,  de  Hainault,  au  Nouv. 
Coût.  gén.  T.  Il,  p.  l'i'i,  etc.)  (Juoiqu'en  certains 
composés,  de  l'espèce  de  ceux  qu'on  indique, 
arrière  paroisse  signifier  moins  l'idée  d'être  après 
une  chose  que  celle  d'y  retourner,  on  peut,  dans 
l'explication,  substituer  très-naturellement  à  l'idée 
de  retour,  celle  d'après;  puisque  retourner  ù  une 
chose,  la  réitérer,  c'est  la  faire  après  l'avoir  déjà 
faite  une  ou  plusieurs  fois.  C'est  ainsi  qu'arriere-ban 
a  signifié  convocation  d'arriere-vassaux,  et  convo- 
cation itérative  pour  service  militaire.  (Voy.  Arb.\n.) 

On  se  figuroit  sans  doute  un  temps  passé,  une 
chose  passée,  et  on  se  les  figure  encore  comme 
ayant  devancé  une  chose  présente,  un  temps  pré- 
sent, lorsqu'on  les  désigne  par  l'expression  ellip- 
tique, ci-devant.  On  voyoit  au  contraire  le  présent 
comme  ayant  arrière  lui,  après  lui  le  passé,  lorsque, 
rétrogradant  en  idée  et  renvoyant  du  présent  au 
passé',  on  disoit  :  1°  au  temps  ça  en  arrière,  au 
temps  d'en  arrière.  (Voy.  Miserere  du  Recl.  de  Mo- 
liens,  MS.  de  Gaignat,  fol.  211,  R»  col.  1.) 

Soufert  avons  au  temps  ça  en  arrière. 

Eust.  Desch.  Pofs.  MSS.  p.  237,  col.  3. 

2°  Ça  en  arrière  ou  çay  en  arriers  ;  %a  en  aijer 
ou  %dij  en  ayer.  (Voy.  Ord.  ï.  I,  p.  520.  —  Perard, 
Hist.  de  Bourgogne,  p.  503;  tit.  de  1261,  etc.) 
«  Estoil  très  oscure  nuiz  et  très  espasses  ténèbres 


«  sor  tote  la  terre,  quant  nosire  peire  honorevent 
«  za  en  ayer  Deus  faitis.  »  (S*  Bernard,  Serm.  F'r. 
MSS.  p.  98.  —  Id.  ibid.  p.  126,  passim.) 

3°  En  ariere  ou  en  arere  ;  en  arer  ou  en  ayer  ; 
et  tout  simplement,  arrière.  (Voy.  S'  Bernard, 
Serm.  Fr.  mss.  p.  110.  —  Loix  iNorm.  art.  xvii  et 
xxxiv.  —  Rom.  d'Amadas,  ms.  du  R.  n°  0987,  fol.  325, 
etc.)  "  As  oid  co  que  fait  ai  an  arrière.  Grant  tens 
«  ad  puis  que,  elc.  «  (Livi'es  des  Rois,  ms.  des  Cordel. 
fol.  146.)  «  Asseurerent  la  convenance,  si  com  vos 
«  l'avez  oï  arrière,  parsairemens.  »  (Villehardouin, 
p.  37.) 

Probablement,  la  signification  d'arrière  étoit 
encore  relative  à  l'idée  d'être  après  ce  qui  est  de- 
vant, dans  l'ordre  successif  des  temps  et  des  choses, 
lorsqu'on  disoit  : 

Conseil  arrière  vaut  petit. 

Rora.  de  r.ou,  MS.  p.  329. 

Jehan  second  filz  du  Roi  de  France 

Si  fut  marié,  puis  arrière, 

A  une  fille  d'excellence 

Du  duc  Guillaume  de  Bavière. 

Vigil.  de  Charles  Vit,  part.  I,  p.  g. 

Cils  dit  ;  nuls  ne  la  vit  puis  A'arrers  ni  devant. 
Mais  qu'une  sienne  fille  ;  fais-là  venir  devant. 

Gér.  de  Roussillon,  MS.  p.  101. 

Il  est  évident  que  l'expression  arrière  trespassé 
étoit  une  répétition  inutile  de  l'idée  d'un  passé, 
que  signifioit  arrière  seul,  ou  avec  le  mot  temps. 
.<  Nostre  Père...  avoit  otroié  que  il  ne  ses  Sergens 
«  nulles  mains-mortes  ne  requéraient  qui  devant 
«  sept  ans  arriéres  trespassez  avandraient.  »  (La 
Thaumassière,  Coût.  d'Orléans,  p.  464;  tit.  de  1137.) 

On  a  déjà  vu  mettre  arrière  ou  arrière  mettre, 
dans  le  sens  de  rétablir,  faire  retourner  à  un  pre- 
mier état  :  sens  très  ditTérent  de  celui  dans  lequel 
on  disoit,  «  se  mettre  arrière  de  ce  dont  on  étoit 
1  avant.  »  On  a  vu  aussi  que  «  mettre  arrière  ou 
«  arrière  mettre,  »  c'étoit  faire  passer  après,  mettre 
de  côté.  (Voy.  Arriehe-boutiqce.)  11  semble  que  rela- 
tivement à  cette  dernière  acception,  l'on  ait  dit  : 
1"  en  parlant  d'une  chose  qu'on  met  de  côté  et  en 
réserve,  pour  n'en  user  qu'après  avoir  usé  d'une 
autre  : 

C'est  le  coraill  (!■)  de  nostre  porte, 
Qui  l'autre  jour  fu  adiré. 
le  cornant  qu'il  soit  bien  gardé... 
Je  voil  qu'il  soit  arrière  nus. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7615,  fol.  147,  R-  col.  2,  et  V  col.  1 . 

2""  Au  figuré,  en  parlant  d'un  père  qui,  mettant 
de  côté  son  bien-être  personnel,  et  le  faisant  passer 
après  celui  de  ses  enfans,  leur  abandonne  tout  ce 
qu'il  possède,  tout  ce  qu'il  a,  sans  possibilité  de  le 
recouvrer  : 

Ne  fêtes  raie  en  tel  manière  ; 
Ne  ne  vous  mêlez  mie  arrière 
De  ce  dont  vous  êtes  avant. 
Ne  donez  tant  à  vostre  enfant, 
Que  vous  n'i  puissiez  recouvrer. 
Fabl.  MS.  de  R.  n-  7218,  fol.  151,  V-  col.  2;  et  152,  R-  col.  1. 


(i)  Voir  Du  Gange  à  Corale.  On  lit  au  registre  JJ.  194,  p.  345  (1471)  :  «  Icellui  Guionnet  de  toute  sa  force  frappa  audit  huys, 
tellement  qu'il  rompit  le  courreil  d'icellui  et  se  ouvrit  ledit  huys.  »  On  dit  encore,  en  Seine-et-Oise,  canton  de  Chevreuse, 
crouUler  une  porte,  pour  la  fermer  au  verrou,  (n.  e.) 


AR 


—  481 


AR 


En  disant  qu'un  homme  étoit  arrière  d'une 
cliose,  on  se  le  représentoit  encore  comme  passant 
après,  comme  étant  après  la  chose  (ju'il  avoil  eue 
avant  et  qu'il  n'avoit  plus.  (Voy.  Ahrieke-ciiarte.) 
«  Li  Héritiers  ne  sont  pas  arrière  don  droit  de  la 
«  rtscousse,  pour  le  testament.  »  (Beaumanoir, 
Goul.  de  Beauvoisis,  chap.  xii,  p.  O'J.)  «  Dieu  me 
«  gard  de...  apprO|jrier  chose  à  moy,  dont  aullre 
«  puist  csire  arrière  de  son  droicl.  »  (Percef.  Vol. 

VI,  fol.  35.  —  Voy.  ARREliAGEH.) 

C'ét)it  probablement  en  se  formant  une  idée 
semblable  de  la  position  d'un  débiteur,  par  rapport 
à  une  somme  de  deniers  qu'il  n'avoil  pas  et  dont  il 
avoil  besoin  pour  payer,  qu'on  le  disoit  à  Varriere 
de  deniers.  »  La  guerre  fut  longue;  et  par  ce  moyen 
«  fut  à  l'arriére  de  deniers,  et  en  grand  somme.  » 
(Mém.  d'Oliv.  de  la  Marche,  liv.  »,  p.  655.  —  Voy. 
Arrekage.) 

Dans  un  sens  relatif  à  l'idée  d'être  plus  ou  moins 
éloigné  de  la  personne  ou  de  la  chose  après  laquelle 
on  est,  après  laquelle  on  a  passé  en  rétrogradant, 
arrière  aura  signifié  loin,  dans  le  sens  le  plus  gé- 
néral <•  S'il  n'est  plus  de  deux  lieues  arrière,  etc.  » 
(Conl.  de  Clermont,  au  Nouv.  Coul.  gén.  T.  II, 
p.  871.)  <'  Mouroit  hors  de  son  pays,  arrière  de  sa 
«  bonne  femme.  »  (André  de  la  Vigne,  Voyage  de 
Charles  VllI,  p.  183. —  Voy.  Rob.  Estienne,  Nicot  et 
Monet,  Dict  ) 

Plus  souvent  et  plus  anciennement,  arrière  signi- 
fioit  près,  auprès,  contre;  signification  qui,  pour 
être  opposée  à  celle  de  loin,  n'en  est  pas  moins  de 
même  origine.  On  a  la  preuve  qu'en  style  figuré, 
être  avant  d'une  chose,  o'éloil  l'avoir,  la  posséder. 
Le  possesseur,  ainsi  représenté  dans  une  position 
aussi  naturelle  qu'avantageuse  à  la  sûreté  de  sa 
possession,  avoit  après  lui,  mais  près,  tout  proche, 
au(irès,  tout  contre,  la  chose  dont  il  étoit  d'autant 
plus  sûr  qu'elle  étoit  moins  éloignée.  Il  est  possible 
que  selon  celte  façon  de  voir,  on  ait  dit  «  avoir  en 
»  aijer  soi  une  chose  •  pour  l'avoir,  la  posséder. 
«  Ancor  n'en  ay-je  mies  en  aijer  mi  chose  ke  ju  vos 
"  poie  mettre  davant  :  Si  demanderai-ju  Saint  Be- 
«  noit  trois  pains  dont  je  vos  poie  paslre.  »  (Saint 
Bernard,  Serm.  Fr.  mss.  p.  314.)  «  Si  j'ausserecoillil 
■<  lo  sanc  nostre  Signor,  ensi  cum  il  decorreilde  la 
«  croix,  et  si  ju  Vavoiie  en  ayer  mi  en  un  vessel  de 
«  voire,  etc.  »  (Id.  ibid.  p.  29.)  C'est  dans  un  sens 
analogue,  qu'au  xvn'  siècle  on  désignoit  encore  une 
possession  illégitime,  en  disant  :  «  Il  a  beaucoup 
«  du  mien  arrière  soi.  »  (Monet,  Dict.) 

L'idée  de  proximité,  quel  qu'en  soit  le  principe, 
étant  généralisée,  l'acception  A'arriei'e  fut  aussi 
étendue  que  celle  de  la  préposition  latine  apud,  à 
laquelle  il  répond  en  quantité  de  passages,  où  il 
signifie  dans,  chez,  auprès,  etc.  «  0!  cum  bien- 
«  aurons  le  cuer.  chier  Sire,  en  ayer  oui  tu  feras 
«  mansion.  »  (S'  Bernard,  Serm.  Fr.  mss.  p.  26.) 
«  Li  poures  en  ayer  cui  je  fui  harbegiez,  me  fist  pi- 
«  tiet.  »  (Id.  ibid.  p.  45.)  »  Est  li  sapience  de  cest 
«  Munde,  sottie  en  ayer  Deu.  ..  (Id.  ibid.  p.  261.) 

Peut-être  que,  comme  avec  ellipse,  on  désignoit 


un  conseil  qui  venoit  après  chose  faite,  en  disant 
((ue  c'étoit  conseil  arrière,  on  aura  désigné  la  Jus- 
tice dont  on  étoit  toujours  près  d'être  secouru,  e» 
disant  que  c'éioil  justice  arrere. 

Or  fut-il  aigle  très  notable, 

Q\\\  ne  voulut  tondre,  ne  rere 

Ses  oyseaulx  ;  mais  par  /iisHce  arrere 

Leur  est  tous  temps  serourable. 

Eust.  Descli.  Poés.  MSS.  p.  321,  col.  1. 

Quelle  que  soit  au  reste  la  signification  à'arrere 
en  ces  vers,  on  croit  qu'être  arrière  de  faire  une 
chose,  c'étoit  être  près  de  la  faire. 

Quant  je  vi  premifrement 
Ma  très  douce  Dame  chiere  ; 
Sa  grant  beauté  fu  arrière 
De  moi  navrer  tellement, 
Que  se  pité,  n'i  entent  ;  etc. 

Froissart,  Poés.  MSS.  p.  226,  eol.  2. 

Il  semble  même  qu'en  ces  vers,  c'étoit  approcher 
par  derrière  et  le  plus  près  possible,  afin  d'être  plus 
sûr  de  son  coup.  Il  est  probable  (jue,  relativement 
ù  l'idée  de  s'opposer  en  s'approchant  tout  près, 
tout  contre  et  par  derrière,  on  aura  dit  d'une  per- 
sonne qui  nous  étoit  contraire  et  opposée,  qu'elle 
nous  étoit  arrière  dos. 

Dont  li  redist  li  fel  Prevoz  ; 
Pourquoi  m'es-tu  arrière  dos  9 

Vies  de  Saints,  MS.  de  la  Clayetle,  p.  39,  col.  2. 

On  termine  cet  article,  sans  autre  preuve  qu'ar- 
riere  a  signifié  des  idées  d  opposition  entre  per- 
sonnes ou  choses  contraires,  parce  qu'il  paroit  suf- 
fisant d'indiquer  l'analogie  de  celte  signification 
avec  celle  d'après  et  auprès. 

VARIANTES  : 

ARRERE.  Britton,  des  Loix  d'Angleterre,  fol.  281. 

AiER.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS,  p.  356  et  374. 

AlERE.  Id.  ibid.  p.  280. 

AihER.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  217,  col.  i. 

AiRiËHE.  Siège  de  TUèbes,  MS.  du  R.  n»  6987,  fol.  40. 

AiRRiER.  Chans.  Fr.  MS.  de  Berne,  part,  i,  fol.  53. 

Areh.  Loi.x  Norra.  art.  xvii  et  xxxui. 

Arère.  Brillon,  des  Loix  d'Angleterre,  fol.  12,  V°. 

Areus.  Marbodus,  de  Gemm.  art.  vu,  col.  ■\tii6. 

AiUER.  Chans.  Fr.  MS  de  Berne,  part,  n,  fol.  102. 

Ariere.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  146. 

Ariers    Fabl.  MS  de  la  Clayette,  p.  432,  col.  1. 

Ahiez.  Fabl.  MS.  de  Berne,  n"  354,  fol.  20,  V°  col.  1. 

Arre.  Britton,  des  Loix  d'Angleterre,  fol.  267.  R°. 

Arrers.  Ger.  de  Roussiilon,  MS.  p.  101. 

Arreuso.  Frag.  de  la  v.  deBoece,  MS.  de  S'  B  -s.-L.  p.  274. 

Arriens.  Perard,  Histoire  de  Bourgogne,  p.  503. 

Arrier.  Enfance  d'Ogier  le  Danois,  MS.  deGaignat,  fol.  92. 

Arrière.  Orth   subsist.  —  Villehardouin,  p.  37. 

Arriéres.  La  Thuumassière,  Coût.  d'Orléans,  p.  464. 

Arriers.  Perard,  Hist.  de  Bourgogne,  p.  503. 

Ayer.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  p.  29,  passiyn. 

Ayere.  Id.  ibid.  p.  66,  passim. 

Ayërs.  Id.  ibid   p.  38  et  43. 

Erres.  Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  921. 

Erriere.  Hist.  de  la  Toison  d'or,  Vol.  I,  fol.  92. 

Hareu.  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  325,  col.  1. 

Arrérer,  verbe.  Mettre  en  arrière,  reculer,  éloi- 
gner, différer,  retarder.  Priver  d'une  possession. 
Endetter. 

Il  senible  que,  par  contraction  du  verbe  arrérer 
ou  arriérer,  formé  de  l'adverbe  arrière  ou  arrere, 
on  ait  dit  arrer  devises,  pour  reculer  les  bornes 
qui  divisoient  deux  possessions  voisines  l'une  de 
l'autre.  «  Si  devises  entre  veisins  soit  arres  par  un 


AR 


-  182  — 


AR 


«  des  veisins,  ydoïKiucs  tient  Heu  ceste  assyse  à  re- 
a  di-esser  ses  devises  jesques  en  lour  droit  estate.  " 
(Brillon,  des  !.oi\  dAngieterre,  fol.  lt'2,  H".) 

C'est  relativement  à  l'idée  générale  de  mouve- 
ment en  arrière,  et  de  la  position  où  l'on  est  en 
conseiiuence  de  ue  nrmvement,  que  s'arriérer  a 
signifie  se  reculer,  rester  en  arrière.  (Voy.  Oudin, 
Dict.) 

En  trop  haster  n'a  nul  avancement  ; 
Et  tels  se  cuide  arriérer  qui  s'avance. 
Amours,  j'ai  bien  de  tout  ce  sentement  : 
En  trop  haster  n'a  nul  avancement. 

Froissarl.  Pocs.  MSS.  fol.  328,  col.  1. 

Quoiqu'arr/«'<'r  subsiste  comme  verbe  récipro- 
que, on  ne  diroit  plus  arriérer  une  affaire,  pour  la 
mettre  en  arrière,  la  reciuler;  arriérer  un  ouvrage, 
pour  le  reculer,  en  éloigner  la  fin  ;  arriérer  un 
jugement,  pour  en  éloigner  l'exécution,  la  différer; 
arriérer  un  amour,  pour  en  éloigner  la  récom- 
pense, la  retarder  ;  arriérer  le  cuidier  de  quelqu'un. 
pour  reculer  son  espéiance,  l'éloigner,  etc.  (Voy. 
Lett.  de  Pasquier,  T.  III,  p.  515.  —  Cléomadès,  ms.  de 
Gaignat,  fol.  52.  —  Lanc.  du  Lac,  T.  I,  fol.  132.  — 
Percef.  Vol.  VI,  fol.  83.) 

Cis  coups  a  moult  Brunamon  desvié, 
Et  son  cuidier  durement  arriéré. 

Enfance  d'Ofier  le  Danois.  MS.  de  Gaignat,  fol.  95,  V  col.  t. 

Les  acceptions  propres  ou  figurées  de  ce  verbe, 
sont  toutes  analogues  à  celles  de  l'adverbe  arrière. 
Dans  l'expiession  être  arrière  d'une  chose,  c'est-à- 
dire,  n'avoir  pas  une  chose,  en  être  dépossédé,  en 
être  privé,  on  trouve  l'origine  de  la  signification 
^'arriérer,  en  ces  vers  : 

.  .  .  Quant  il  est  desatiriez 
Et  d'aucune  chose  arrinez, 
Si  dist  ;  se  j'estoie  à  harnas, 
Et  je  eusse  uns  linges  dras, 
Ou  tel  chose  que  il  n'a  mie  ;  etc. 

Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  256,  R"  col.  1. 

Enfin,  par  la  raison  qu'on  a  dit:  être  à  l'arriére 
de  deniers,  le  verbe  arriérer  a  signifié  endetter. 
«  Il  ne  vouloit  que  le  Hoy  fust  embesongné  de  le 
«  festoyer,  ne  aussi  que  les  Genlilzhommers  en  fus- 
«  sent  arriérez  de  les  festoyer,  chascun  selon  sa 
«  valleur.  »  (Percef.  Vol.  II,  fol.  144.—  Voy.  Oudin, 
Dict.)  C'est  dans  un  sens  relatif  qu'on  dit  encore 
qu'un  fermier  ^'arrière.  (Voy.  Arrére  et  Arrérage.) 

VARIANTES  : 
ARRÉRER.  Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  5,  'V»  col.  3. 
ARnKR.  Britton,  des  Loix  d'Angleterre,  fol.  112,  R". 
Arrierek.  Percef.  Vol  VI,  fol  83,  V"  col.  1. 
Arririer.  Fabl.  MS.  du  R.  n°  7218,  fol.  256,  R°  col.  1. 

Arrérisseinent,  suhst.  masc.  Délai  ou  priva- 
tion. On  croit  que,  dans  un  sens  analogue  à  celui 
du  verbe  arrérer,  priver  d'une  chose,  ou  la  différer, 
on  a  dit  :  «  Soit  enquis  de  alliances  de  jurors  par 
«  entre  nos  Ministres  et  eux,  ou  par  entre  veisin  et 
«  veisin,  en  arrérisseinent  de  droiture.  ■>  (Britton, 
des  Loix  d'Angleterre,  fol.  38   —  Voy.  Arreher.) 

Arrest,  suhst.  masc.  Chose  qui  arrête,  obstacle, 
empêchement  ;  arrêt  de  lance;  partie  d'une  lance, 


la  poignée;  déterminalinn,  dogme,  décret,  sen- 
tence, jugement.  Slabililé,  constance;  station, 
pause,  rei'.os,  demeure,  détention  ;  état  d'une  per- 
sonne arrêtée;  état  d'une  chose  sur  laquelle  on  a 
fait  arrêt.  Action  d'arrêter  ;  cessation,  délai,  retard. 
(Voy.  Arrestance,  Arrestee,  Arrestement  et  Arres- 

TOISON.) 

En  supposant  que  l'adverbe  riere,  en  latin  rétro, 
soit  le  principe  de  la  particule  re  dans  nombre  de 
verbes,  tels  qu'en  françois  râler,  retourner,  rebu- 
ter, on  pourroit  dire  que  de  relro  stare.  estre  ou 
ester  riere,  s'est  formé  le  verbe  latin  restare,  en 
françois  rester  ;  et  (\uarrester{\)  est  de  même  origine 
(\u'a7-aler,  aretourner,  et  autres  que  l'on  croit  être 
formés  de  l'adverbe  composé  arrière.  Peut-être  ju- 
geia-t-on  raisonnable  une  supposition  faite  d'après 
l'analogie  évidente  des  signilications  de  l'adverbe 
et  de  la  particule.  (Voy.  Arrére.) 

Quoi  qu'il  en  soit,  on  avouera  la  possibilité 
d'expliquer  dans  un  sens  relatif  à  celui  de  l'ad- 
verbe arrére,  le  verbe  arrester  et  le  sulislanlif 
arrest, en  disant  que»  faire  un  arrest  à  quelqu'un,  » 
ou  Varrester,  c'est  le  forcer  d'être  arrière,  de  rester 
plus  ou  moins  loin  du  lieu  ou  de  l'objet  qu'il  veut 
joindre  et  vers  lequel  il  s'avance.  Ancienuement, 
«  faire  un  arrest  à  quelqu'un,  »  c'éloit  l'arrêter, 
l'empêcher  de  passer  outre,  faire  obstacle  à  son 
passage. 

.  .  .  Quant  l'en  voit  une  personne, 
Tant  soit  saige,  qui  mal  se  vest  ; 
L'en  lui  a  tosl  fait  un  arrest. 
Et  deffendu  qu'avant  ne  passe. 

Eusl.  Desch.  Po6s.  MSS.  p.  550,  col.  4. 

Dans  le  sens  général  de  chose  qui  arrête,  le  mot 
arrest  auroit  désigné  mille  choses  propres  à  ce 
même  effet,  si  l'on  n'en  avoit,  comme  aujourd'hui, 
particularisé  l'usage.  Pour  nos  anciens  Chevaliers 
qui  n'avoioat  point  d'rtm^/s  de  lance,  «  parce  qu'ils 
«  n'eussent  syu  où  le  clouer  sur  leurs  haubers  de 
c.  mailles,  mettre  la  lance  en  arrest,  ou  la  coucher 
«  sur  Varrest,  »  comme  on  lit  dans  l'Histoire  de 
Saintré,  p.  499;  c'étoit  la  coucher  sur  la  selle,  en 
appuyer  le  gros  bout  contre  l'arçon  de  la  selle  de 
leurs' chevaux.  (Voy.  Fauchet,  Mil.Fr.  liv.  n,  p.  110.) 
Ainsi,  l'on  pouvoit  alors  nommer  arrest  tout  ce  qui 
tenoil  lieu  de  la  pièce  de  harnois,  du  petit  fourreau 
de  cuir  qu'on  imagina  depuis  pour  arrêter  la  lance 
du  Gendarme  qui  rompoit  en  lice  ou  dans  un  com- 
bat. «  Pierre  de  Bayard empoigna  une  lance 

«  d'un  des  Espuignols;  et  malgré  lui,  la  lui  meil 
«  hors  de  Varrest,  tant  qu'elle  lui  demeura.  » 
(Annot.  sur  l'ilist.  du  Cli"  Bayard,  p.  23.  —  Voy. 
Dict.  de  Trévoux.) 

L'opinion  du  Président  Fauchet  est  que  les 
lances,  originairement  toutes  unies  depuis  le  fer 
jusqu'à  l'aulre  bout,  ainsi  que  les  javelines,  n'eu- 
rent point  de  poignées  avant  l'an  MCCC.  (Voy.  Mil. 
Fr.  liv.  II,  p.  110.)  Il  semble  donc  qu'avant  l'usage 
de  la  pièce  de  harnois,  spécialement  nommée 
arrest,  ce  mot  ait  signifié  poignée  de  lance  ;  soit 


1)  Arrêter  vient  de  adrestare  et  apotir  substantif  verbal  arrêt,  (n.  e.) 


AR  —  183  - 

parce  que  cette  poignée  s'appuyoit  à  l'arcon  de  la 
selle,  ou  à  autre  chose  qui  rarréloil  ;  soit  parce 
qu  étant  evidee,  elle  lormoit  un  «m'si  pou i  la  main 
de  celui  qui  en  étoit  armé.  «  Les  lances  seront 
«  d  une  mesure,  depuis  la  poincte  du  1er  iusuues  à 
'•  Varrest.  »  (Monslrelet,  Vol.  II,  lui.  HM»  i .,  Le  Che- 

«  valierKspaig-nolrompitsalancede  pleine  atteinte- 
«  et  ut  rompue  par  1  arrest.  ..  (Mém.  dOliv  de  là 
Marche,  hv  1,  p.  187.)  «  Fut  ledit  Michaut  blécé  en 
«  la  main  dextre  du  commencement;  mais  il  se 
»  blecea  luy  mesme  à  son  arrest  en  couchant  sa 
«  lance.  »  (Id.  ibid.  p  30!).)  Peut-être  dira-t-on 
qu  en  ce  dernier  passage  le  mot  arrest  désigne  une 
pièce  du  harnois  où  l'on  arrêtoit  sa  lance  ?  Mais  on 
reconnoitra  sans  doute  que  dans  les  deux  précé- 
dens,  il  désigne  une  partie  même  de  la  lance  pro- 
hahlement  la  poignée.  (Voy  Arrestell.) 

La  preuve  qu'a/res/  signifioit  en  général  chose 
qui  arrête,  c'est  qu'au  défaut  du  nom'  propre  à  dé- 
signer i.articulièrement  une  chose  de  cette  espèce 
on  disoit  :  ..  Ung  arrest  qui  lient  une  longete 
«  attachée  au  lacz.  »  (Moduset  liacio  fol  81  )  «  si 
"  va....  pour  se  seoir  sur  le  perron;  mais  il  ne 
"  trouvast  point  à-arresl  ;  si  va  cheoir  les  jambes 
"levées  en  ung  nos  qui  derrière  luy  estoit.  ..  (Per- 
ce    Vol.  II,  fo  .  32.  -  Voy.  Arrest.se  et  Auestie) 

Il  est  possible  que  relativement  à  celte  acception 
générale  le  mot  arrest  ait  signillé  figurément  dé- 
termination, dogme,  decret,"sentence,  juSenî- 
en  gênerai,  chose  qui  arrête  et  détermine  hi  f^u^on 
politique  et  morale  de  se  conduire,  chosequi  arrête 
et  lixe  les  prétentions  légitimes  ou  iUeg  times  de 
nrn  .!v  ""T^'^f  J"SC'menl  qui  arrête  lecours  d'un 
procès.  >.  Or  entrèrent  le  Roy  de  Castille  et  ces  Ba- 
"  roiis  et  Chevaliers  de  France  en  parlement  pour 
"  Z'\''  ^«'''^'n  a^'-^'t  et  avis  comment  il  se  mai  i- 
«  liendroyent.  »  (Froissart,  Vol.  III  p  18G  - 
Cotgrave  Rob.  Estienne,  et  Monel,  Dict'.  -  Vov 
Arrestal.)  y- 

Anciennement,  les  Jugemens  que  les  Cours  Sou- 
yeraines  des  Parlemens,  rendoient  sur  procès  pSr 

dévolu  fY-'T'"''  ^'''''  ^'''  >'""  des  Ces  Jî 
devoit  en  faire  le  rapport  à  sa  Chambre,  étolent  les 

il  •  >V  \'  6'»  latin^;7'eA-<«m,  étoit  la  dénomination 
spéciale  des  Jugemens  rendus  publiquement  e  la 
Chambre  des  Plails,  dillérente  de  la  Chan  bre  des 

mSë  é  Si  '■  "  'ff  f  ""'"^';-'"^  f *^^  Avocats    La  fS  - 

Th\J.fly  "  ^^".""^  ralionibus  utriusque  partis 

ïu-y  et  '""^Vn"'  n'"t""    ^"'^  ^''    nrreslun 

mnt     t'.,  ,  •  ~  ^7-  ^^'  ^'"^^'•5'  Gloss.  lat.  T.  I,  au 

l'Hilf  1  ',""'•  "'^-  f^-  -  I"^em,  dissert.  2,  suï 
1  Hist.  de  S'  Louis,  p.  143  )  ' 

sipîrî'l'^l"'  P'f ''^.'^  'i'"^  P''"'^*sse  l'opinion  de  plu- 
sieurs Llymologistes  et  Jurisconsultes,  qui  ont  cru 

?onn  Z  tîéc  '  ''"''',  ''7'  «'■^^''  ^«''"«e  étant 
nin  tSr  ^  "'^""''  Plti-Ciltun  en  latin,  en  francois 
plat  on  pense  que  l'ancienne  formule  des  MS 
favorise  le  sentiment  de  Mcot.  .<  Les  Parlemens  et 


AR 


(1)  Au  Parlement  de  Paris,  le  mot  arrêt  désignait  exclusivement  les  sentences  rendues 


"  Cours  souveraines,  dit-il,  n'usent  point  de  ces 
«  mois,  U  nous  plaist,  ou  car  ainsi  nous  plaist  » 
don  11  conclut  avec  assez  de  vraisemblance  qu'au 
hgure  le  substantif  .,  arrest,  prins  du'  verte 
«ai rester,  ,,  a  signifié  et  signifie  le  jueemenf 
d  une  Cour  souveraine,  parce  qu'un  pareil     Se 

mes  f.'Vl'V  P'-'^l'^''^'^''^  feitinies  ou  flîSïï 
mes  des  Plaideurs,  parce  ,|u'il  arrête  le  cours  d'un 
procès,  parce  qu'il  est  ..  l'extrême  clostine  et  fer 
«  meture  aux  appellations  et  au  cou^>s  d?n 
"  P^cès  «  (Voy.  Mcot,  Dict.)  C'étoit  aussi  e  seiuf 
ment  d  Henry  Estienne,  qui  a  dit  :  .,  Au  hèu  «'"é  ê 
"  temps  passe  les  Arrests  faisoient  arrest  rlel 
«  procès....  maintenant  on  a  trouvé  l'inveniinn 
«  qu'au  lieu  de  les  arrester,  il  les  S  ta  t  mieS; 
«  coiircr  :  car  nous  voyons  des  procès  sur  esquels 
«  0     este  donnez  jà  dix  arrests,  et  toutes  forces? 

doS  pIIt.)''"™"''"'"'-  "  ^^''""^''  VonritS 

Ce  mot  a  signifié  et  signifie  encore  l'état  d'une 

personne  qui  reste  en  place,  qui  sarrShnne 

Clans  sa  taçon  d  être  physique  ou  morale:  puisdu'en 
parl:.nt  de  celle  dont  l'esprit  ou  le  cor.s^  e'ïeu 
s  assujettir  à  cet  état  habituel,   on  a  dit  auSe 

"dW^n'*-^'""'''"'^''  "  q"'elle  n'avoit  no  iplïs 
"darret  qu  un    jeune    veau.  »  (Cotgrave    Rob 

S;r.)^''^^^^''''^'--^^«^-^'^^^^^^^^^^^^ 

Plus  souvent,  il  désignoit  l'état  accidentel  d'une 
personne  qui  s-arrête  en  un  lieu  pour  s'y  reposer 
y  demeurer  ;  station,  pause,  repos,  deme^ure,^Ss 

]^r.S!f  *^^'V?^^''^^'^'«"^'-  l'étatd'unepersonnl 
arrêtée,  sa  détention  en  ce  passage  :  «  La  Re  e 
"  mère  avoit  été  arrêtée  le  matin  ....  Pe  après 
:  meÏÏ'"'  ';'^o™tesse  divulgua  Varrest  delà  âeini 
êtSî  "  Bassompiere,  T.  IV,  p.  m 

En  ce  sens,  le  mot  arrest  distingué  de  prison  fei^ 
mee  dams  la  Coutume  de  Bretao-,re,  fol    nf  n'eit 
P  us  usité  qu  au  pluriel,  en  tenues  le  discipline  mi 
1. taire.  Anciennement,  on  disoit  d'une  persinlîii 
obeissoit  a  Varrest  lait  par  un  Officie    de    ustice 
que  le  restoit  en  arrest;  qu'elle  forvoioU  l'aM 
SI  elle  y  desobeissoiL  «  Se  aucuns  estoient  arrestez 
"  f,^'  "1''  r  l''  "^'^".  "^^'"«"l'  souffisamment  par 
«    a.son  de  Visconté,  et  il  forvoioU  t'arrest    il 
«  I  amenderoit  par  l'esbart  du  Maieur  et  des  Eske- 
«  vins.  »  (Ord.  T.  III,p.t>95;  tit.del-i91.)  „  Qu  con- 
"  ^"^  '■?"'■''  fT  dehiteur,  ou  sa  débitrice 
«  n  estant  point  frère  ou  sœur  de  Loy  de  la  mesme 
«  ville  peut  le  faire  arrester  par  l'un  des  oScim 
..  es  ablis  par  le  Seigneur  pou'r  le  payeme.U  de  sa 
'<  detle,  ou  pour  autre  prétention  :  et  celuy  qu,  est 
1'  cîn'ïfin  ^Vr^'l  "^î  'l'^''  '"  '''■''''«^'  0"  d'establir 
gén  'rTp."943  "  '^''P''""-'''^'  ^"  ^^ouv.  Coût. 

On  ne  multipliera  point  les  preuves  qu'arma  a 
signihe  eu  Justice,  l'état  non-seulement  des  person- 


par  la  Grand'Chambre.  (n.  e.) 


AR 


184  — 


AR 


nés,  mais  des  clioses  arrêtées  :  élat  sur  lequel  pro- 
noiHîoil  une  Jurisdicliou  élaWie  dans  oertoiiies 
Villes  avec  le  lilre  de  Jurisdiclion  des  arrcsis. 
«  On  csl  dans  rusai;e  de  cinq  sortes  de  Juiis- 
«  dictions;  de  la  Chambre,  des  Mandements,  des 
«  Arrests,  etc....  Aux  Arresls,  les  Eschevins  con- 
«  noisseiit  à  la  semonce  du  Prévost  ou  Escoulette, 
«  de  toutes  les  exécutions  civiles,  délenlions, 
«  arresls,  apprétieiisions,  appositions  ou  saisies 
«  faites  dans  la  Ville  et  l'Eschevinage;  comme  aussi 
«  des  causes  et  aclions  pour  lesquelles  ils  sont 
«  faits.  »  (Coût,  de  Bailleul,  au  iNouv.  Coût.  gén. 
T.  1,  p.  974,  col.  1  et  2.) 

Les  Villes  où  l'action  d'a^wi^^?"  un  débiteur  étran- 
ger et  ses  elTets  mobiliers,  étoil  autorisée  comme 
drpit  de  Bourgeoisie,  se  nommoienl  par  cette  rai- 
son Villes  d'Arrest.  Ce  droit,  particulier  à  certaines 
Villes  privilégiées,  fut  octroyé  en  113^,  par  Louis  le 
Gros,  aux  Bourgeois  de  Paris,  «  qui  sans  cédule  ni 
<■  obligation,  pouvoient  procéder  par  voye  d'ariest 
t  sur  les  meubles  de  leurs  débiteurs  forains,  qui 
«  étoienl  les  justiciables  du  Roi  et  non  les  jusli- 
a  ciables  d'autres  Seigneurs.  »  (Voy.  Launère, 
Gloss.  du  Dr.  Fr.)  Par  Lettres  de  1430,  les  babitans 
de  Montargis  obtinrent  du  Roi,  que  leur  ville  seroit 
«  Ville  d'Arrest,  au  regard  de  leurs  debteurs, 
«  comme  les  Villes  de  Paris,  Rouen,  el  autres  bon- 
«  nés  villes.  »  (Voy.  La  Thaumassière,  Coût,  de 
Berry,  p.  412.  —  Stille  de  procéder  au  Parlement 
de  Normandie,  fol.  82,  R"  col.  2.)  C'est  sans  doute 
conformément  à  ces  Lettres,  que  dans  la  Coutume 
de  Montargis,  on  lit  :  «  La  ville  de  Montargis,  par 
«  privilège,  est  Ville  d'Arrest;  et  les  Bourgeois 
<i  manans  et  babitans  en  icelle,  peuvent  faire  arres- 
«  to' dedans  laditte  Ville  el  Kauxbourg,  les  biens 
«  meubles  d'aucun  t^stranger  et  b'orain  y  trouvez, 
«  pour  raison  des  dettes  à  eux  deues  tant  par  obli- 
»  galion  qu'autrement.  »  (Coul.  gén.  T.  \,  p.  927.) 

Ce  droit  d'Arrest,  exercé  en  certaines  Villes  sur 
les  efl'ets  mobiliers  du  débiteur  étranger,  s'exerçoit 
en  d'autres  sur  la  personne  même  du  débiteur. 
«  La  ville  de  Brnsselles  est  une  Ville  d'Arrest; 
«  el  il  est  permis  îi  un  Créditeur,  trouvant  en  icelle 
«  ou  sa  franchise,  son  Débiteur,  de  quelle  qualité, 
«  condition  ou  estât  il  soit,  n'estant  bourgeois,  ny 
«  y  tenant  lixedomicilcfaij'Crtrr^'sfÉîr  par  l'Amman, 
«  son  Lieutenant  ou  Sergeants  jurez,  pour  le  tirer 
«  en  droit  devant  le  Magistrat  de  la  Ville,  atin 
«  d'avoir  satisfaction  de  ses  debtus  ou  prélensions.  » 
(Coût,  de  Brnsselles,  au  Nouv.  Coût.  gén.  T.  I, 
page  1240,  col.  1.) 

Probablement,  l'administration  des  Villes,  qui  ne 
jouissoient  pas  du  privilège  des  Villes  d'Arrest,  s' oc- 
cupa des  moyens  d'en  généraliser  l'utilité,  en  per- 
mettant aux  Bourgeois,  et  même  à  ceux  qui  ne 
l'éloient  pas,  d'assurer  leur  créance  par  la  voie  de 
VArrest  d  eslranger.  «  Sont  réputez  arrêts  d'es- 
«  Irangers,  lorsqu'un  Bourgeois  ou  eslranger  fait 
"  arrest  sur  délies  ou  sur  des  elîets  trouvez  dans  la 
«„;  Ville  et  l'Eschevinage,  appartenants  à  un  Estran- 
«  ger.  »  (Goût.  d'Ipre,  au  iNouv.  Coût.  gén.  T.  1, 


p.  882.)  Peut-être  l'Estranger  qui  partageoit  avec  le 
Bourgeois,  le  droit  d'Arrest  d'Estraugcr,  dcvoit-il 
èlre  domicilie,  ou  associé  aux  privilèges  de  la 
Bourgeoisie  ? 

La  franchise  des  arrêts  éloit  le  droit  de  s'opposer 
aux  arrêts,  tels  qu'on  les  permeltoil  à  l'égard  d'un 
débiteur  étranger;  droit  réservé  aux  seuls  Bour- 
geois, à  moins  qu'ils  ne  le  communiquassent  à 
d'autres,  pour  quelque  raison  de  politique  ou  de 
commerce.  -  Un  créancier  peut....  arrester  les 
«  biens  de  son  débiteur  ou  de  sa  débitrice,  qui  n'est 

«  point  frère  ou  sœur  de  Loy  ; desquels  arrests 

«  sont  exempts  ceux  avec  qui  la  Ville  a  fait  alliance, 
«  ou  avec  qui  elle  la  pourroil  avoir,  portant  la 
"  franchise  des  arrests.  «  (Coût,  de  Poperinghe,  au 
Nouv.  Coût.  gén.  T.  1,  p.  943,  col.  1  et  2.) 

C'est  dans  le  sens  propre  d'Arrest,  action  d'arrê- 
ter, (ju'en  parlant  de  Chevaliers  à  qui  l'on  avoit 
défendu  de  se  laisser  flrrt'/é'/' par  des  enchantemens, 
de  s'y  arrêter,  on  a  dit:  «  Seigneurs,  mal  vous 
"  souvient  de  Zéphirqui  hier  au  soir  vous  defîendit 
"  Ïar7'est  de  telles  décevances  :  allez  vous  en  avant 
«  d'icy.  »  (Percef.  Vol.  iv,  fol.  155.) 

Le  mouvement  cessant  par  l'action  d'arrêter, 
c'est  sans  doute  avec  extension  de  l'idée  de  cette 
cessation  de  mouvement  à  la  cessation  d'agir  en 
général,  et  même  de  parler,  qu'on  a  dit  figurèrent  : 
«  Elle  n'avoit  arrest  de  dire  piteusement,  etc.  » 
(Percef.  Vol.  iv,  fol.  21. 

En  comparant  l'alTaire  dans  la  suite  de  laquelle 
on  s'arrête,  l'action  qu'on  diffère  ou  retarde,  à  un 
objet  ou  à  un  lieu  en  arrière  duquel  on  reste,  et 
vers  lequel  on  doit  ou  veut  s'avancer,  l'on  aura  dit 
arrest  dans  le  sens  figuré  de  retard,  délai.  (Voy. 
Monet,  Dict.) 

Si  s'en  ala 

Tout  tantost,  sans  nul  point  d'arrest, 
Par  dessus  une  grant  forest. 

Cléomadès,  MS.  de  Gainât,  fol.  5î,  V*  col.  8. 
VARIANTES    : 
ARREST.  Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  52,  V  col.  2. 
ÂREST.  Rom.  de  Perceval,  MS.  de  Berne,  n»  354,  fol.  217. 

Arrestable,  adj.  Qui  est  en  état  de  tenir  ferme. 
C'est  probablement  en  ce  sens,  relatif  à  celui 
d'arrest,  stabilité,  qu'on  a  dit  :  »  Je  cuide  que  ung 
«  homme  jeun  ayt  meilleure  voulonté  et  vertueuse 
«  force,  engin,  discrétion  et  propos,  et  bien  ferme 
«  de  faire  son  honneur,  et  répute  preud'homme  et 
•"  arrestable  en  la  bataille  que  celui  qui  a  beu  el 
X  mangié.  »  (L'arbre  des  batailles,  ms.  fol.  176.  — 
Voy.  Arkest.) 

Arrestal,  subst.  masc.  Séjour.  Ordre.  (Voy. 
Arrest) 

Dans  le  sens  analogue  à  celui  d'arrest,  station, 
pause,  repos,  on  disoit  :  faire  arrestal,  pour  séjour- 
ner, se  reposer  en  un  lieu,  s'y  arrêter.  (Voy.  Aiiseis, 
MS.  fol.  30.) 

Au  figuré,  ce  mot  signifioit  ordre,  comme  arrest  a 
signifiè'chose  qui  \\\Q  etdètermine  ce  qu'il  faut  faire: 

Gaudisse  fait  crier  son  arrestal, 
Qu'en  lor  nés  entrent  tout,  main  et  communal. 
Aaseis,  MS.  fol.  35,  V  ool.  1. 


AR 


—  185  — 


AR 


VARIANTES  : 
ARRESTAL.  Anseis,  MS.  fol.  30,  R°  col.  2. 
Arestal.  Ibid.  fol.  35,  V"  col.  1. 

Arrestance,  subst.  fém.  Chose  qui  arrête  ; 
obstacle,  empêchement.  Lieu  où  l'on  arrête,  où  l'on 
s'établit;  demeure  fixe,  domicile.  Retard,  délai. 
(Voy.  Arrest.) 

On  est  arrêté  parles  obstacles;  on  reste  en  arrière 
de  son  but,  lorsqu'on  les  rencontre.  De  là,  le  mot 
arrestance  aura  signifié  obstacle,  empêchement;  en 
général,  chose  qni  arrête. 

Lors  m'escriai  à  haut  ton  ; 
Sens  point  d'arestence, 
Li  lous  enporte  un  mouton. 
Et  Robins  s'avance,  etc. 

Chaos.  Fr.  MS.  de  Berne,  n-  389,  pari,  u,  fol.  8,  R*. 

Savés  qu'ele  est  la  provance 
D'amor  et  de  son  pooir  ? 
Mal  n'i  velt  faire  arrestance 
De  cortoisie  faite  oir. 

Ane.  Poët.  fr.  MSS,  avant  1300,  T.  III,  p.  1055. 

Dans  le  second  sens,  arrestance  signifioit  domi- 
cile, demeure  fixe  ;  en  général,  lieu  où  l'on  s'établit, 
où  l'on  s'arrête.  »  Se  aucuns  le  vient  accuser  de 
■>  larrecin,  il  le  doitaccuser  par  devant  le  Seigneur 
<■  dessous  qui  il  est  couchans  et  levaus,  se  il  affnvs- 
«  tance  :  car  se  il  n'a  point  de  chertain  lieu  là  où  il 
«  demeure,  si  coume  moût  de  gens  qui  nont  point 
«  à.' arrestance ,  etc.  »  (Beaumanoir,  Coût,  de  Beau- 
«  voisis,  chap.  xxxi,  p.  166.) 

Ouerez  vostre  arrestance  ailleurs; 
Ci  ne  sera  plus  vos  séjours. 

Cléoniadcs,  MS.  de  Gaignal,  fol.  55,  V'  col.  2. 

Par  la  raison  qu'on  est  arrêté,  retardé  par  les 
obstacles,  on  ne  se  méprendroit  guère  en  expli- 
quant par  obstacle  le  mot  arrestance,  lors  même 
qu'il  signifieroit  retard,  délai,  comme  en  ces  vers  : 

Celi  jure  bien  et  afie  ; 


Et  Cléomadès  la  siance 
En  a  prise,  sans  arrestance. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignal,  fol.  30,  V'  col.  1, 

VARIANTES  : 

ARRESTANCE.  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr. 

Arestence.  Chans.  Fr.  MS.  de  Berne ,  part.  II,  fol.  8,  R». 

Arrestée,  siibst.  fém.  Délai.  Doute.  (Voy, 
Arrest  et  Arrester.) 

C'est  peut-être  le  participe  du  verbe  arrester,  qui 
par  ellipse  d'un  substantif  l'éminin,  comme  action  du 
corps  et  de  l'espi  it,  signifioit  délai,  lorsqu'on  disoit  : 

Dans  Englebers  monte,  sans  arestée. 

Anseis,  MS.  fol.  5i,  R'  col.  i. 

Au  second  sens,  doute  par  lequel  l'esprit  est 
arrêté  et  dans  lequel  il  reste. 

...  Se  tant  l'ose  atendre,  que  se  gens  soit  venue; 
S'avoir  puet  afiance  sans  nesune  arestue,  etc. 

Rom.  d'Alexandre,  MS.  du  R.  n'  6987,  fol.  186,  R'  col.  2. 

VARIANTES  : 
ARRESTÉE.  Enfance  d'Ogier  le  Danois,  MS.  de  G.  fol.  74. 
Arestée.  Anseis,  MS.  fol.  54,  R"  col.  1. 
Arestue.  Rom.  d'Ale.xandre,  MS.  du  R.  fol.  186. 

Arrestement,  subst.  maso.  Séjour,  prolonga- 


tion de  séjour.  Action  d'arrêter, cessation  de  marche, 
d'action  ;  de  différer,  de  retarder. 

Dans  un  sens  analogue  à  celui  du  verbe  arrester, 
rester,  séjourner,  demeurer,  on  a  désigné  la  liberté 
qu'avoit  une  personne  de  s'arrêter  dans  un  lieu, 
d'y  rester,  d'y  prolonger  son  séjour,  en  disant 
qu'elle  avoit  ■•'  liberté  touchant  son  arrêtement.  » 
(Voy.  Mém.  de  Villeroy,  T.  VII,  p.  81.) 

Plus  souvent,  l'action  à' arrestement  éloil  relative 
à  celle-d'arresler,  rester  en  arrière,  cesser  de  mar- 
cher, par  extension,  cesser  d'agir. 

Tantost  a  mis  le  pied  à  terre. 
En  disant  qu'il  veult  aller  querre 
Son  faulcon,  sans  arrestement. 

Gace  de  la  Bigne,  des  Déduits,  MS  fol.  25,  R*. 

...  La  baisai,  sans  nul  demorement  : 
Le  gieu  d'amors  li  vueil  faire 

Sans  nul  areslemcnl. 
Sire,  que  volés-vos  faire  ? 

Ane.  Pool  fr  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1489. 

On  a  indiqué  ailleurs  la  comparaison  d'après 
laquelle  a?7"fstoH«if  et  arrestoison  peuvent  égale- 
ment signifier  cessation  d'agir  et  action  de  retarder, 
de  différer.  (Voy.  Arrest  et  Arrestoison.) 

VARIANTES  : 
ARRESTEMENT.  Cotgrave,  Dict. 

Arestement.  Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  av.  1:300,  T.  IV,  p.  1489. 
ARRÊTEMENT.  Mém.  de  Villeroy,  T.  VII,  p.  81. 

Arrestement,  adv.  En  arrêtant.  Dans  le  sens 
propre,  on  a  dit  :  «  Un  Lévrier  tout  seul  ne  pourroit 
"  prendre  arrestement  un  de  ces  chaz  ;....  car  il  a 
«  les  ongles  comme  un  Lyepart.  »  (Chasse  de 
Gaston  Phébus,  ms.  p.  81.) 

Au  figuré,  arrestement  signifioit  en  arrêtant,  en 
fixant  l'idée  qu'on  doit  avoir  des  personnes  et  des 
choses.  »  Congnoistre  au  vray  et  arrestement 
»  qui  est  vray  ou  faint  amy,  etc.  "  (Hist.  de  la 
Toison  d'or,  Vol.  II,  fol.  19.  —  Voy.  Arrester.) 

Arrester,  verbe.  Rester  en  arrière,  cesser  de 
marcher,  cesser.  Rester  en  repos,  séjourner,  demeu- 
rer, se  fixer,  s'établir,  se  poster,  rester  ferme; 
résister,  être  ferme,  de  pied-ferme  ;  être  fixe,  stable, 
constant,  posé,  etc.  Faire  rester  en  arrière,  empê- 
cher. 

Il  semble,  dit  Nicot,  (\n  arrester  ou  s  arrester  (1) 
soit  composé  de  l'adverbe  arrière  et  du  verbe  simple 
ester.  Ainsi,  il  signifieroit  litléralement,  rester  en 
arrière  d'un  lieu  vers  lequel  il  est  possible  d'avan- 
cer, si  on  ne  cesse  le  mouvement  par  lequel  on 
avance,  si  on  ne  cesse  de  marcher.  ^  Je  sçay  qu'ilz 
"  ïiarresterent  en  cest  nuyt  de  chevaucher  ;  ne  ilz 
«  n'arresteront  tant  qu'ilz  viendront  où  ilz  doivent 
«  aller.  ..  (Percef.  Vol.  II,  fol.  106.) 

«  Quant  il  vint  en  une  tertre  dehors  Jérusalem, 
<>  son  asne  s'aroista  :  Balaan  le  féri,  et  l'asne 
«  recula.  »  (Martène,  Ampl.  coll.  Contin.  de  G.  de 
«  Tyr,  T.  V,  p.  604.) 

Plus  on  réfléchit  à  l'idée  de  Nicot  sur  la  formation 
de  ce  verbe  arrester,  plus  on  la  trouve  vraisem- 
blable. En  effet,  "  en  cessant  de  marcher  outre  et 


(1)  Voir  plus  haut  à  Arrest. 


24 


AR 


—  186  — 


AR 


»  suivre  sa  route,  on  demeure  arrière,  eu  égard  au 
«  progrès  du  chemin  qu'on  eusl  fait,  si  l'on  ne  se 
»  fust  arresté.  »  (Voy.  Nicot,  Dict.)  On  a  généralisé 
sans  doute  l'idée  particulière  de  la  cessation  du 
mouvement  par  lequel  on  peut  avancer  vers  un 
but  physi(iue  ou  moral,  lorsqu'on  a  dit  arrester  ou 
sarrester,  pour  cesser  d'agir,  de  parler,  de  penser, 
etc.  (Voy.  Aruestement.) 

Peut-être  faisoit-on  abstraction  de  l'idée  rester 
en  arrière,  lorsque  dans  un  sens  qui  paroit  relatif  à 
l'idée  générale,  cesser  d'agir,  de  se  mouvoir,  le 
verbe  arrester  ou  ^'arrester  signilioit  rester  en 
repos,  séjourner,  demeurer,  se  fixer,  s'établir,  se 
poster,  rester  ferme,  résister,  être  ferme,  de  pied- 
ferme,  être  fixe,  stable,  constant,  posé,  etc. 

S'à  mon  ostel  fusse  arcstus, 

A  piesce  ne  fusse  vestuz 

De  roube  d'escarlatte  nueve. 

L'en  dit  ;  qui  bien  chascie,  bien  trueve. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7615,  fol.  120,  V  col.  1. 

En  la  forest  ert  urestans, 
Là  où  li  anciens  manans 
Avoit  la  seue  forterece. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  'iHS,  fol.  349,  R'  col.  1. 

A  Rome  ert  mes  Sire  arrestans  ; 
Là  estoit  riches  et  manans. 

Clëomadès.  MS.  de  Gaignat,  fol.  28,  Vv  col.  3. 

Le  Roi  de  France  a  déjeté 

Juis;mès  il  sont  arrête 

En  Borgoingne,  et  en  mainte  terre. 

Hist.  de  France  en  vers,  à  la  suite  du  Rom.  de  Fauvel,  MS.  du 
R.  n'6812,  fol.  75,  R-  col.  1. 

Lorsqu'une  troupe  postée  avantageusement  res- 
toit  ferme  dans  son  poste,  on  disoit  qu'elle  estoit 
arrestée  sur  son  advantage.  «  Si  on  alloil  com- 

«  battre ainsi  arrestés  sur  leur  advantage,  on 

«  se  mettoiten  très-grand  péril.  »  (Froissart,  Vol.  I, 
p.  274.) 

C'est  probablement  par  extension  de  l'idée  de  la 
position  où  l'on  reste,  lorsqu'on  se  fixe  et  s'établit, 
lorsqu'on  se  poste,  que  le  verbe  arrester,  comme 
en  lafin  resiure,  a  signifié  résister.  (Voy.  Règle  de 
S'  Benoit,  Lat.  et  Fr.  ms.  de  Beauvais,  chap.  lxviii.) 
Il  semble  inutile  de  multiplier  les  preuves  de  l'ac- 
ception propre  et  figurée  à'arrester,  résister,  estre 
ferme,  etc.  (Voy.  Arrestable.!  Qu'il  suffise  d'ajouter 
qu'on  paroit  avoir  désigné,  1°  l'état,  l'ordre  fixe  et 
constant  dans  lequel,  un  jour  de  bataille  rangée, 
l'on  combatloit  à  son  rang  et  de  pied- ferme,  en 
disant  que  celle  bataille  étoit  une  journée  arrestée, 
une  bataille  arrestée.  «  Regardèrent  longuement 
"  quel  cry  pour  la  journée  ils  crieroyent,  et  à  quelle 
■  .<  bannière  ou  pennon  ils  se  trahiroyent  :  Si  furent 
«  grand  temps  sur  tel  estât  que  de  crier  Noslre 
«  Dame,  Auxerre  ;  et  de  faire  le  Comte  d'Auxerre 
«  leur  Souverain,  pour  ce  jour.  Mais  ledit  Comte... 
«  s'excusa...  en  disant  :  Messeigneurs,  grand  merci 
«  de  l'honneur  que  me...  voulez  faire....  Je  suis 
«  encore  trop  jeune  pour  encharger  si  grand  fais 
«  et  tel  honneur;  car  c'est  la  première  journée 
«  arrestée  où  je  fu  oncques.  »  (Froissart.  Vol.  I, 
p.  273)  "  Il  a  eue  victoire  en  bataille  arrestée,  sur 
«  ses  ennemiz,  luy  estant  en  très  grant  joeunesse.  » 
(Hist.  de  B.  du  Guesclin,  par  Ménârd,  p.  542.) 


2°  La  fixation  de  la  valeur  d'une  monnoye  qui 
devoit  rester  toujours  la  même,  le  prix  fixe  et  cons- 
tant pour  lequel  on  en  établissoit  le  cours,  en  disant 
qu'elle  étoit  monnaye  arrestée,  qu'elle  devoit 
arrester  en  même  état.  «  Avons  ordonné  de  faire 
«  7nonnoiie  arrestée  et  estable.  »  (Ord.  T.  111.  p.  424.) 
«  Pour  le  fait  et  gouvernement  de  noz  monnoyes, 
«  afin  qu'elles  puissent  et  doient  demeurer  et 
«  arrester  en  bon  etdeu  estai,  etc.  <>  (Ibid.  p.  51.) 

3"  La  constance  d'un  courage  que  rien  n'ébranle, 
en  disant  que  c'étoit  un  courage  arresté. 

Prouesse  fait  aux  Nobles  assavoir.... 
Que  nul  ne  peult  par  elle  pris  avoir, 
N'estre  receu  à  sa  grant  court  planiere. 
S'il  n'a  en  luy  trop  plus  fait  que  manière, 
Et  à  l'exploit,  conduit  et  hardement. 
Ferme  propos  et  arresté  courage. 

Ai.  Chartier,  Bréviaire  des  Nobles,  p.  585. 

4°  L'état  physique  et  moral  d'un  homme  posé,  sa 
façon  d'être  paisible  et  conslant,  en  disant  qu'il 
étoit  ho7n7ne  arrêté  ou  arresté.  (ÎNicot  et  Monet. 
—  Voy.  Arrest.) 

On  pourroit  citer  nombre  d'autres  expressions 
dans  lesquelles  la  signification  neutre  ou  active 
ù'arrester,  ect  analogue  à  ces  mêmes  idées  de 
constance,  de  stabilité,  d'état  fixe,  d'état  de  repos. 
En  disant  ari'ester  dans  le  sens  actif  d'établir,  fixer, 
déterminer,  on  faisoit,  comme  pour  le  sens  neutre, 
abstraction  de  l'idée  de  position  en  arrière  :  idée  à 
laquelle  paroit  être  relative  l'acception  de  ce  verbe 
lorsqu'on  disoit  figurément  arrester  quelqu'un 
d'une  chose  ou  d'une  action. 

En  effet,  arrester  d'une  trahison,  par  exemple, 
c'étoit  empêcher  d'aller  en  avant  celui  qui  se  pré- 
paroit  il  trahir  ;  littéralement,  le  faire  rester  en 
arrière  de  sa  trahison.  «  Pensa  de  cette  trahyson 
«  faire  comme  elle  lui  avoit  missus.  Mais  on  l'avoit 
«  desavancée ,  quant  ceulx  qui  l'apperceurent , 
«  Varreslèrent  de  trahyson;  et  s'enfuyt.  »  (Lanc. 
«  du  Lac,  T.  I,  p.  427.  —  Voy.  Aurest.) 

CONJIG. 

Arestace,  subj.  prés.  Qu'il  arrête. 

A  petit  vait  ne  s'arestace 
Por  remirer  encor  sa  face. 

Siège  de  Troye,  MS.  du  R.  n-  0987,  fol.  102,  R-  col.  1. 

Arestad,   indic.  prêter.  Arrêta;  en  latin  Steiit. 

(Livres  des  Rois,  .ms.  des  Cordel.  fol.  8.) 
Aresleue,  participe.   Arrêtée.  (Rom.   d'Amadas. 

MS.  du  R.  n°Gt)87,  fol.  319.) 
Aresteus,  participe.  Arrêté.  (Athis,  ms.  fol.  128.) 
Arestit,  indic.  prêt.  Arrêta.  Fabl.  ms.  du  R.) 
Arrestoie,  ind.  imp.  J'arrêtois.  (Cbans.  Fr.  du 

xiir  siècle.) 
Arresturent,  ind.  prêt.  Arrêtèrent.  (L.  des  R.) 
Arestut  et  .i7'resta,  ind.  prêter.  Arrêta. 

En  un  boiz  s  arestut;  et  sa  gent  s'aresta. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  123. 

Arestuz,  partie.  Arrêté.  (Athis,  ms.  fol.  8.) 
Arrestu,  partie.  Arrêté.  (Cléomadès,  fol.  26.) 
Arrestut,  ind.  prêt.  Arrêta.  i^Fabl.  ms.  de  S'  G.) 
Airestut,  subj.  imp.  Arrêtât.  (L.  des  R.  fol.  68.) 


AR  —  187  — 


AR 


VARIAI*»TES    ' 

Ah\T;k1"  M^o^n^^t^rct°°"-  '■  '^  ^-  ^«^y^^^  V.-co..  604. 
Arter.  Vigil.  de  Charles  VII,  part.  I,  p.  164 
Erester.  Athis,  MS.  fol.  100,  V"  col.  2 

Arresteul,  subst.  masc.  Partie  d'une  lance  la 

5Ss?- 112.  A"--)  Si=-"ification  relaUve  à  cèl  e 
a  arrest,  chose  qui  arrête. 

Les  aresleujs  des  lances  font  en  l'aiguë  fichier 
Pour  ataindre  le  fons  .  ,nais  n'i  pueint  {ouchièr. 

Ouileclm  de  Sasswgne,  MS.  deGaignal.  fol.  237,  R'  col.  2. 

•  .  .  Sa  lance  torna,  derrière 
Le  fer  et  Vareslu,'!  devant. 

Rom.  d'Erec  et  d'Eaide,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  281   V  co!  3 

çéSe>ïux"f™"H-  '"""f ,''  ''''"ce,qu-uri  ennemi 
geneieux  f  appa   darestol   un   vieillard  à   aui  le 

uneT/T^^T'"'';  Pé-'ii-sonnis,  faisoit  chercher 
une  moi  t  certaine  dans  un  combat  inégal. 

Quant  li  Du.x  voit  que  mais  ne  peut 
Voille  ou  non,  jouster  l'estuet  ■ 
D  un  arestal  l'a  féru. 
Que  del  destrier  l'a  abatu. 
Li  gentilz  Dux  le  fist  lever  etc 

Rom.  de  Floireniont,  MS.  du  R.  n'  6973,  fol.  33,  R-  col.  1. 

ARRESTEUL.  Guiteclin  de  Sassoigne,  fol  237 
Arescuel  (corr.  Arestuel.)  Borel   Dict 

ARESTOL^'RnrH'^'t^f'^"^'^^-  ^^^S'-'"  «■  "°  6987,  fol.  327 
ARESTOL.  Rom.  de  Hoiremont,  MS.  du  R   n»  607q   fni   qq 
Arestuel.  r.  d'Erec  et  dEnide,  MS.  du  R.  6987,  Fol.  289 

Arrestcus,  adj.  Qui  s'arrête.  Qui  recule  (Vov 
Arrester  et  Arrére  )  'cu-uie.  ^vo>. 

arderï""'""  '""'  '''  '""^  'ï'«''^^'^'"«'  qui  reste  en 

.  .  .  Cil  n'est  pas  aresteus; 
Ains  est  partout  ;  léens,  alez. 
A  chascun  dist  :  levez,  levez 

Cléomadès,  MS.  de  Gai'ynal,  fol.  57,  R-  col.  2 

Probablement,  rétif  est    de  même  origine  aue 
1  ancien  adjectif  rt?-£'s//s,  qui  recule.  "        ^ 

Li  oisel  qui  volent  par  l'air 
Ne  volent  plus  del  palefroi  ' 
Et  si  nest  pas  de  grant  effroi  ;. 
Qu  11  n  est  ombrages,  n'arestis 

Rom.  d'Erec  et  dEnide.  MS.  „u  R.  „•  f,987,  fol.  281,  R-  col.  4 

On  disoit  airesiise,  au  premier  sens  : 

A  la  Court  vont  aine  n'i  font  arreslise  ■ 
El  palais  entrent  qui  fu  de  piere  bise.' 

Aiiseis,  MS.fol.  51,  R-col 

Dans  le  second  sens,  arestie  : 

Vers  lui  s'en  vint  moult  fièrement 
Le  cheval  par  Varestie  prent  ;  etc  ' 

Cléomadès,  JIS.  do  Gaignat,  fol.'i,  V  col.  ». 

.r>r^r,,.„  variantes: 

ARREbTISE.  Anseis,  MS.  fol.  51,  R»  col  " 

Arestie.  Cléomadès,  MS.  de  Ga'ignat,  fol".^,  V»  col.  2. 


Arrestoison,  subst.    [cm.   Action    d''irrÀiflr 
pause  etc.  (Voy.  Arrest  et  ArrestemenÎ)  ''' 

On  disoit  en  ce  sens  : 


Et  Oant^^Jl^"®  l'entent,  si  levé  le  menton  ; 
Et  Oautiers  s  en  torna,  n'i  fist  arestison 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218.  fol.  34*,  V  col.  1 
Dusc  al  tref  Alixandre  n'i  font  arestison. 

Rom.  d  Alexandre,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  203  V 
Fa,-  e  venir  avant,  dist  li  Sire  au  garçon  ; 
Et  ctl  1  est  venuz  sans  plus  dm-estison.     ' 

Fabl.  MS.  du  R.  „•  7218,  fol.  345,  V  col.  2. 

ARRESTOISON.  Cléom™Ms' de  Gai^nat   fol  10 
illUuZ  ^««i,«'..MS.fol.'3,  V»  col  2."""''  '"'•  '''■ 
.«iREbTizoN.  Ane,  Poët.  Fr  MSS  av    l'^nn   t   it        o^n 
ARRESTioN.  Fabl.  MS.  du  R   n^72^8  M  m  "'  P'  *^^'- 
ARRET.SON.  Enfance  d'Ogier  le  Dano!s!j!s'de  G.  fol   107 

Arnere-boutique,  sMfts/. /-m  Réserve  n-ins 
?'TS4^;1^,^S:"È-,J|^^ieineg,c'^ 

rrw''^","  ''°"''"«^  *!"'  se  réservoit  (les  m2vens 
on  ^wli^fi"'™''"'  '."^  dispositions  quil  f.tisôuS 

ni.  rr  ^"^'^V   6'.  i*ict.  S  il  n  etoil  pas  ré.servé  sur  Ip* 
motifs  qui  le  faisoienl  açir,  s'il  ne  les  ,  n,.hn;.  .1 
s'il  ne  les  tenoit  pas  secret  ,  on  d  soft  qïi   SsS 
sans  arriere-boutique.  «  Ceux  ,,ui  fa vor  sô  em  5n. 
K'livn'?"4  '%Dauph,n,'   etc. ''.'Tas  u,^' 
«ecn.  iiv  H,  p.  o9.  _  Voy.  Arrére  et  Arriére-pensée 

ou  intérêt  qui,  relalivement  au  chani  o u  .nS 

'et  du  principal,  est  arrière,  après.  (Voy.  AiIrérÈ  ) 

.  Arriere-charte,  subst  fém.  Charte  de  ivnnn 

it;  udueae  uieiig-ny,   »   renontja    u -même  mt-  ,-p 
raite  a  toutes  les  demandes  qu'il  faisoïï    sSci  f 
emen  au  nom,  au  droit,  aux  armes,  e    a     cl  a-" 
anse  de  la  Couronne  et  du  Rovaume  de  France 
J     homma|;e,  souveraineté,   et  domaine  de   là 
Duché  de  -^ormandie,  de  la  Duché  de  Touraine 
etc.  .  Il  semble  donc  qu'un  traité  par  \emw   an 
renonçoit  réciproquement  à  des  possédons  ?  des 
demandes,  à  des  prétentions  respecK     ,i(  fâ 
nomme  arriere-charte.  dans  un  seSs  anàio  L? 
ce  111   de  l'expression    être   mis  en    arrière  ^^?pp 

iqui  s  appelle  Lc//r<î  de  renoue  ntioiu  tant  d'un 


AR 


188  - 


AR 


Arriere-femme,  subst.  fém.  Concubme.  La 
traduction  de  la  Bible  en  françois,  par  Sébastian 
Castalio,  scandalisa  Henri  Eslienne.  U  lui  reproche 
l'indécence  avec  laquelle  il  avoit  défigure  le  langage 
de  l-Ecriturc  Sainte,  ■>  appelant  Arnerc-lemmc, 
.  comme  on  dit  arrière-boutique,  celle  que  le  mari 
.  entretient  avec  sa  femme  ;  au  lieu  de  Prépuce, 
.  usant  de  ce  mot  d'Avant-peau  ;  au  heu  de  Lir- 
.  concis,  disant  Rongné;  au  heu  d  Incirconcis, 
.  Empellé.  »  (Apologie  pour  Hérodote,  p.  ri»-  — 
Voy.  Arrèbe.) 

Arrière-foin,  subst.  masc.  Regain.  (Cotgrave, 
Dict.  —  Voy.  Arrére.) 

Arrière-garde,  subst.  fém.  Garde-noble  de 
mineur  d'Arriere-vassal.  Le  mol  armrc-garde 
désigne  encore  aujourd'hui  la  dernière  partie  d  une 
armée  marchant  en  bataille;  et,  en  ce  sens,  il  est 
très-ancien  dans  notre  Langue. 

C'est  relativement  à  l'idée  de  l'Homme  arrière, 
du  vassal  noble  qui  étoil  arrière  ou  après  1  Homme 
proche,  le  Vassal  immédiat  d'un  Seigneur  suzerain, 
qu'il  a  sisniûé  «  garde  noble  de  mineurs  d  Arriere- 
.'  vassal' la  garde  qui  appartient  au  Roi  ou  autre 
.  Seigneur  feudal,  pendant  que  le  mineur  d  ans  est 
.  en 'sa  garde,  si  ceux  qui  tiennent  fief  noble  du 
«  mineur,  tombent  en  sa  garde.  (Voy.  Laurière, 
Gloss.  du  Dr.  Fr.i  «  Pendant  que  le  mineur  d  ans 
.  est  en  garde,  si  ceux  qui  tiennent  tief  nohlc  de  kii 
«  tombent  en  la  garde,  la  garde  en  appartient  au 
«  Seigneur  gardain  dudit  mineur;  el  où  ledit  mineur 
«  seroit  à  la  garde  du  Roy,  il  a  pareil  droit  à  1  ar- 
.<  rière-gardè  que  les  autres  Seigneurs.  »  itout.  de 
Normandie,  au  Nouv.  Coût.  gén.  T.  IV,  p.  /O.  — 
Voy.  Abrére,  homme  arrière.) 

VARIANTES   : 
ARRIÈRE-G.\RDE.  Orth.  subs.  -  Cotgrave  et  Nicot  Dict. 
Erriere-garde.  Blanchandin,  MS.  de  S'  Ger.  fol.  191. 

Arriere-jeu,  subst.  masc.  Dessert;  fin  du 
repas.  On  observe,  d'après  Le  Ducbal,  que  Rabelais 
faisoit  allusion  au  jeu  de  Toutes-tables,  en  désignant 
par  le  mot  composé  arriere-jeu,  l'usage  Anglois  et 
Ecossois  de  boire  le  vin  au  dessert,  ou  sur  la  fin  des 
repas,  dans  les  bonnes  tables.  «  Angleterre,  Escosse, 
«  les  Rstrelins  seront  assez  maulvais  Pantagruehs- 
.  tes.  Aultant  sain  leur  seroit  le  vin  que  la  bière, 
..  pourveu  qu'il  feusl  bon  et  triant.  A  toutes  tables, 
»  leur  espoir  sera  en  Y  arriere-jeu.  "(Rabelais,  T.\, 
pronostic,  p.  19.— Voy.  Abrébe,  après.) 


Arriere-main,  express,  adv.  et  subst.  Arrière, 
après  coup,  en  relard.  En  rétrocédant.  En  taisant 
un  mouvement  de  main  en  arrière.  Coup  d  arriere- 
main,  revers.  . 

H  est  possible  que  relativement  a  1  idée  a  une 
main  prèle  à  saisir  ce  qui  s'avance,  on  ait  désigne 
ce  qui  reste  airiere,  une  chose  tardive  et  venant 
après  coup,  en  disant  figurément  qu'elle  étoit 
arriere-main,  en  arriere-main.  «  Voyant....  que 
«  longuement  ne  pourroient  tenir,  et  secours  leur 


«  estre  en  arriere-main,  se  rendirent.  "  (.T.  d'Auton, 
Annal,  de  Louis  XH,  an.  1499-1501.) 

Conselz  avriere-main  n'est  preuz. 

Prov.  du  Vilain,  MS.  de  S'  Germain,  fol.  16.  R'  col.  3. 

Probablement,  l'acception  à' arriere-main  étoit 
analogue  à  celle  de  l'adverbe  arrière  qui  signilioit 
fio-urément  le  retour  d'une  chose  à  un  premier  pos- 
sesseur, lorsqu'en  parlant  de  l'espèce  de  rétroces- 
sion par  laquelle  une  possession  féodale  retournoit 
aux  mains  de  celui  qui  l'avoil  inféodée,  on  disoit  : 
<.  Si  tenant  en  taile  fait  un  feffement  à  son  uncle, 
«  et  puis  l'uncle  fait  un  feffement  en  fée  ovesque 
..  garranty  à  un  auler,  el  puis  le  feffée  del  uncle 
«  ènfeoffa  areremaine  l'uncle  en  fée,  el  puis  l'uncle 
«  enfeffa  un  eslrange,  etc.  »  (Tenures  de  LitUeton, 

fol.  168.)  .       .  ,      , 

11  semble  qu'on  se  soit  figure  la  chose  dont  on 
éloit  dépossédé,  comme  ayant  fait  un  mouvement 
en  arrière  ;  el  la  main  de  celui  qui  recouvroit  sa 
possession,  comme  faisant  un  pareil  mouvement, 
lorsqu'on  a  dit  :  «  Come  plusurs  assises  de  ceo 
«  soient  (lar  eux  arainés,  si  coviendra  primes  ler- 
a  miner  l'assise  arraine  de  la  mort  le  dareyii  seisi, 
u  el  issi  de  seisine  en  seisiue  arrere]ncijn,  jesques 
.  à  tant  que  le  droit  de  la  possession  soit  joint  par 
«  jugement  al  droit  de  la  propreté.  »  (Britlon  des 
Loix  d'Angleterre,  fol.  20i.)  _ 

Au  reste,  c'est  dans  un  sens  relalif  a  celui  de 
l'expression  ferir  à  arriere-main,  en  faisant  un 
mouvement  de  main  en  arrière,  q\i' arriere-main, 
pris  comme  substantif,  a  signifié  coup  à'arriere- 
main,   revers.  (Cotgrave  et  Nicot,  Dicl.   —  Voy. 

ARRERE.; 

VARIANTES  : 
ARRIERE-M.VIN.  Cotgrave  et  Nicot,  Dict 
Abère-maine.  Tenures  de  LitUeton,  fol.  Ib8,  V». 
.VRiERMAiN.  Fabl.  MS.  du  R.  n"76l5,  fol.  138. 
.Vrrere-.\ieyx.  Brittou,  des  Loix  d  Angleterre,  fol.  204. 
Arriere-mein.  Fabl.  du  R.  n»  7615,  fol.  192. 

Arrière-pensée,  subst.  fém.  Pensée  secrète 
de  vengeance;  ressenlimenl  caché.  Dans  les  subs- 
tantifs composés,  tels  quarriere-pensée,  arriere- 
sens  et  autres  de  même  espèce,  l'adverbe  arrière 
paroit  signifier  des  idées  analogues  à  celles  qu  il 
désignoit  figurémenl  dans  le  composé  arriere-bou- 
tiniie.  (Vov.  Arriere-doitiqce.  ■  Quoi  qu'il  en  soit,  on 
a  dit  en  parlant  de  Charles  IX,  dont  le  ressentiment 
fut  si  funeste  aux  Calvinistes  :  «  Il  leur  garda  tous- 
«  jours  une  arrière-pensée.  ■■  iDisc.  de  la  Noue, 
p.  731.  —  Voy.  Arrière-sens.) 

Arrière-sens,  subst.  masc.  Secret  dune  affaire. 
Il  semble  que  ce  soit  le  sens  dans  lequel  on  a  dit  : 
«  Chacun  se  mutine,  si  on  luy  cache  le  fonds  des 
«  affaires  auxquels  on  l'employé,  et  si  on  luy  en  a 
«  dérobé  quelque  arrière-sens.  <•  (Essais  de  Mon- 
tai^'ne,  T  III,  p.  10.  —  Voy.  Arrière-pensée.) 


Arrivage,  subst.  masc.  Rive,  rivage,  heu  ou 
l'on  aborde  et  débarque.  Transport  par  eau.  Abord, 
débarquement.  Droit  pour  abord  et  débarquement, 
droit  d'arrivée  dans  un  port. 

La  signification  de  ce  mot  éloit  la  même  que  celle 


AR 


-  189  — 


AR 


de  rivage,  formé  de  rive,  lorsqu'on  disoit  :  «  Toutes 
«  et  quantes  fois  que  auscuns  basteaulx,  uefz  ou 
«  nasselles  vuides  ou  chargées,  menans  denrées  ou 
«  marchandises....  arrivoient  à  port  sur  ladite  terre 
«  et  arrivaige,  et  que  les  marchands  bastelliers, 
«  voituriers  menans  et  conduisans  iceulx  bas- 
«  teaulx...  affichoient  en  la  dite  terre,  livaige  , 
«  aucuns  pieulx,  etc.  »  (Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  V. 
col.  28;  tit.  de  1442.  —  Voy.  Arrivouer.) 

II  est  probable  (incurivage  signifioit  transport 
par  eau,  relativement  à  l'idée  de  l'abord  et  débar- 
quement de  choses  ainsi  transportées.  «  Sera  tenu 

«  ledit  preneur  de  faire  à  ses  dépens tous  les 

»  arrivaiges  et  chariages pour  les  réparations 

«  dudit  hostel  et  ferme.  »  (D.  Carpentier,  Suppl. 
Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Arrivagiimi; 
tit.  de  1501.) 

Les  lieux  d'arrivage  étoient  sans  doute  les  lieux 
de  l'abord  et  débarquement  des  marchandises. 
«  Les  Vicontes  ou  Receveurs  feront  rabat  sur  ce  que 
«  il  devront  pour  leurs  marchiez  desdis  cent 
»  molle....  sur  les  lieux  de  ranvwtffe.  •>  (Ord,  T.  VI, 
p.  228.  —  Gr.  Goût,  de  Fr.  chap.  vi,  p.  51  ;  tit.  de 
U02.  —  Monet,  Dict.  —  Dicl.  de  Trévoux.) 

De  là,  l'acception  figurée  (Varrivage,  droit  pour 
abord  et  débarquement  de  marchandises,  droit 
d'arrivée  dans  un  port.  «  Seront  frans  et  (juites  de 
«  rouage,....  de  pelage,  de  passage,  d'arrivage,  el 
«  de  toutes  autres  coustumes.  »  (Du  Gange',  Gloss. 
lat.T.I,  aumot..lmva^n/m,coll60;  tit.de'l320.  (!).) 

VARIANTES  : 
ARRIVAGE.  Moael,  Dict.  au  mot  Arrivemant,  -    Dict.  de 
Trévoux. 
Arrivaige.  Du  Cange,  Gl.  lat.  T.  V,  col.  28.  tit.  de  1442. 

Arrivée,  subst.  fém.  Approche  de  la  rive,  abord. 
Dans  le  sens  propre  et  littéral,  on  a  dit  d'arrivée, 
poursignilier  à  l'approche  de  la  rive,  en  abordant. 
«  Ne  trouvèrent  le  moyen  de  passer  la  rivière  que 

"  parle  bac  passager  accoastumé; mais  voulant 

«  les  hommes  d'aimes  passer  à  la  foule,  s'en  noya 
«  d'arrivée  cinq  ou  six.  Quoy  voyant  le  passager.... 
"  et  que  nostre  armée  estoil  séparée,  ii  sçavoir  la 
•'  Gendarmerie  d'un  costé  de  l'eau  et  les  Gens  de 
>'  pied  de  l'autre,....  s'en  alla  avecques  le  bac  aval 
»  l'eau  droit  à  Pavie.  »  (Du  Bellay,  Mém.  liv.  II, 
fol.  38,  R°.  -  Voy.  Nicot  et  Monet,  Dict.) 

La  signification  d'arrivée  étoit  relative  à  celle 
d'arriver,  dans  l'expression  arriver  à  une  personne, 
aborder  une  personne,  l'approcher  lorsqu'on  disoit: 

Les  doulx  regardz,  les  paroUes  privées, 

Les  entretiens,  les  doulces  arrivées. 

Poès.  de  Crétin,  p.  176, 

Quoique  ce  mot  désigne  encore  l'instant  où  l'on 
arrive,  on  ne  diroitplus  ligurément,  d'arrivée  pour 
d'abord,   dès    le  premier  instant,  dès  l'instant  de 

l'arrivée.  «  Ne  luy  servit  cette institution  que 

•'  de  le  faire  enjamber  d'arrivée  aux   premières 


«  classes.  »  (Essais  de  Montaigne,  vie  de  l'Auteur, 
p.  6.  —  Voy.  Arriver.) 

Arrivement,  subst.  mase-  Action  d'approcher 
de  la  rive,  d'arriver,  d'aborder.  Approche,  venue. 

L'acception  propre  de  ce  mot,  qu'on  trouve  dans 
Gotgrave,  Rob.  Estienne  et  Monet,  est  ancienne 
dans  notre  Langue. 

....  Un  Serpens  li  avoit  mort, 
Droit  à  l'arivement  del  port. 

Siège  de  Tioye,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  116,  R"  col  3. 

Il  étoit  de  même  acception  qu'arrivée,  lorsque 
relativement  à  celle  d'arriver,  approcher,  venir,  il 
signifioit  par  extension  approche,  venue  dans  le 
sens  le  plus  général.  «  Arriva  ausdits  fauxbourgs 
«  de  Vauceulles,  etincontinentaprès^a?'r^^'emm^... 
«  passa  le  Roi  la  rivière.  »  (Al.  Ghartier,  Hist.  de 
Gharles  VI  et  Ghaiies  VII,  p.  202.  —  Brantôme, 
Cap.  Fr.  T.  III,  p.  210,  etc.  — Voy.  Arrive  et  Arriver.) 

VARIANTES    : 
ARRIVEMENT.  Gotgrave,  R.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  D. 
Arivement.  Siège  de  Troye,  MS.  du  R.  n»  0987,  fol.  116. 

Arriver,  verbe  (2).  Faire  approcher  de  la  rive, 
débarquer,  faire  aborder.  Approcher  de  la  rive, 
aborder,  débarquer.  Approcher,  aborder,  aller, 
venir,  parvenir.  Venir  lécemmenl;  survenir. 

Anciennement,  arriver  signifioit  comme  verbe 
actif,  faire  approcher  de  la  rive,  débarquer,  faire 
aborder.  «  Il  fist  torner  vers  terre,  et  ariva  ses 
«  galies  à  une  cité  qui  a  nom  Palerne.  "  (Ghron. 
d'Outremer,  ms.  de  Berne,  n°  113,  fol.  144.)  «  Les 
«  menrés  en  Ghrestienté....  ne  les  arriverés  fors  là 
«  oii  vous  arriverés  les  riches  homes.  »  (Marlène, 
ampliss.  coll.  contin.  de  G.  de  Tyr,  T.  V,  col.  621.) 
Citherea,  ce  dist  l'Autor, 
Avoit  à  non  l'isle  à  cel  jor, 
U  il  ariverettt  lor  nés. 

Siège  de  Troye.  MS.  du  R.  n-  0987,  fol.  76,  V-  ool.  4. 
Li  Mondes,  que  nous  n'i  menton, 
Nous  tient,  en  noant,  le  menton. 
Tant  qu'il  nous  ait  osté  de  rive. 
Quant  il  nous  a  mené  en  l'onde, 
Si  nous  l'est  en  l'eue  parfonde, 
Quant  nous  cuidons  qu'il  nous  arivc. 

FaW.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  187,  R-  col.  2. 

La  signification  neutre  d'arriver  n'est  pas  moins 
ancienne  que  la  signification  active  de  ce  verbe. 
Quelquefois  il  étoit  réciproque  comme  en  ce  pas- 
sage :  «  S'en  ala  Outremer....  et  s'ariva  à  Acre.  » 
(Ghron.  d'Outremer,  ms.  de  Berne,  u"  -113.  fol.  145.) 
Mais  plus  souvent  il  étoit  actif  ou  neutre;  et  dans 
le  sens  neutre,  il  signifioit,  comme  aujourd'hui, 
aborder,  débarquer,  par  extension  du  sens  littéral 
approcher  de  la  rive.  «  S'en  vindrent  arriver  au 
«  havre  deDourdrec.  »  (Froissart,  Vol.  III,  p.  236.) 

Tant  singlérent  et  tant  nagiérent 

Qu'ils  arrivèrent  el  paiis 

Qui  estoit  à  lor  anemis. 

Siège  do  Troye,  MS,  du  R.  n"  6987,  fol.  76,  V*  col.  3. 

En  étendant  cette  acception  propre  et  littérale. 


(1^  Le  mot  se  trouve  déjà  au  xiii'  siècle,  dans  le  Livre  des  Métiers,  page  331  :  «  La  trouse  [doit]  six  deniers  de  conduit,  et 
obole  d'arivage,  et  se  en  la  porte  à  col,  si  ne  doit  point  de  conduit.  »  (N.  E.)  —  (2)  ArAver  vient  de  arripare,  qu'on  trouve 
en  841  dans  une  charte  de  S'  Victor  de  Marseille  (D.  Bouquet,  t.  VIII,  p.  272)  :  «  Nec  non  et  thelonium  de  navibus  ab  Italià 
venientibus,  quœ  ad  eamdem  ecclesiam  arripare  videntur.  »  (n.  e.) 


AR 


—  190 


AR 


approcher  de  la  rive,  parvenir  au  rivage,  y  aborder, 
on  a  dit  arriver,  dans  le  sens  général  d'aborder, 
parvenir,  approcher  en  allant,  eiï  venant  par  terre. 
Quelle  que  soit  encore  aujourd'hui  celte  extension, 
on  ne  diroit  plus  arriver  à  un  étendard,  s,'arriver 
contre  un  cadavre,  pour  en  approcher,  s'en  appro- 
cher; arriver  à  une  personne,  pour  aller,  venir, 
parvenir  à  elle,  l'aborder,  l'approcher,  etc.  »  Les 
«  gens  du  Roy,  qui  venoient  à  terre  comme  nous, ... . 
«  nous  escrierent  que  alissions  arriver  à  l'enseigne 
«  Saint  Denys.  Mais  je  ne  les  en  voulu  croire  ;  ains 
«  alasmes  arriver  devant  une  grosse  b;itaille  de 
«  Sarrazins.  »  (Joinville,  Hist.  de  S'  Louis,  p.  29.) 

«  Le  Héraut  dit....  tout  en  pleurant priez  Dieu 

«  pour  l'ame  de  très  excellent prince  le   Roy 

«  Charles    VII et  ayant  dit  cela s'arriva 

«  contre  le  corps  en  la  fosse.  »  (Mathieu  de  Coucy, 
Hist.  de  Charles  VII,  p.  738.)  «  Je  arrivay  à  ung 
«  marchant  qui  estoit ,  etc.  »  (Ger.  de  Nevers  , 
part.  I,  p.  125.) 

L'abus  de  cette  extension  étoit  autrefois  tel, 
qu'en  parlant  d'une  personne  qui  s'approchant  d'une 
autre  et  l'abordant,  en  étoit  mal  venue,  on  disoit 
qu'elle  en  étoit  ma/  arrivée.  «  Se  misrent  par  les 
«  vignes  où  les  Françoys  estoient  logez,  dont  iceulx 
«  coureurs  furent  si  mal  arrivez  que  presque  tous 
«  y  demeurèrent.  »  (J.  d'Auton,  Annal,  de  Louis 
XII,  an.  1503-1505,  ms.  fol.  61.) 

Si  fu  des  Roys 

Cel  Evesque  mal  arrivé  ; 
De  son  temporel  fu  privé, 
Et  grant  temps  en  fu  en  prison. 
Hist.  de  Fr.  en  vers,  à  la  suile  du  R.  de  Fauv.  MS.  du  R.  n'  G81-2,  fol.  74. 

Peut-être  aussi  (\\x'êtTe  mal  arrivé  de  quelqu'un, 
c'étoit  en  être  mal  mené.  On  supposeroit,  alors  que 
par  extension  du  sons  actif,  faire  approcher  de  la 
rive,  mener  au  rivage,  mener  à  bord,  le  verbe 
arriver  auroit  signifié  mener  aussi  généralement 
qu'il  signifloit  approcher,  parvenir,  par  extension 
du  sens  neutre  aborder,  parvenir  au  rivage,  appro- 
cher de  la  rive.  C'est  relativement  à  l'idée  d'arri- 
ver, approcher,  parvenir  dans  le  sens  le  plus  géné- 
ral, approcher,  parvenir  en  allant,  qu'au  figuré 
l'on  a  dit  d'un  corps  de  Cavalerie  qui  n'alloit  pas  à 
certain  nombre  de  chevaux  :  "  Toute  sa  Cavalerie 
«  n'arrivait  pas  à  mille  chevaux.  »  (Dict.  de  la 
Noue,  p.  739.) 

Il  est  possible  qu'en  se  retraçant  les  idées  dont 
on  se  sent  naturellement  affecté  à  l'instant  qu'on 
voit  une  personne  ou  une  chose  approcher  de  la 
rive  et  parvenir  au  rivage,  on  ait  comparé  à  cette 
arrivée,  la  venue  récente  ou  inopinée  d'une  per- 
sonne, un  événement  heureux  ou  malheureux  dans 
le  cours  des  choses  physiques  et  morales.  Probable- 
ment, c'est  d'après  une  semhlable  comparaison, 
qu'encore  aujourd'hui,  on  dit  d'une  personne  qui 
Jte  fait  que  de  venir,  qu'elle  arrive  ;  qu'elle  nous 
armw,  lorsqu'elle  nous  survient:  au  ligure,  qu'il 
lui  arrih's  bonheur  ou  malheur,  s'il  lui  vient  l'un  ou 
l'autre,  si',  un  événement  la  rend  heureuse  ou 
malheureufse.  On  voit  comme  autant  d'événemens 
toutes  les  ^actions  possibles  d'un  homme,  lorsqu'on 


a  dit  :  s'il  arrive  qu'il  fasse  telle  chose,  s'il  lui 
arrive  ÙQ  la  faire;  expressions  encore  usitées,  et 
qui  sont  très-anciennes  dans  notre  Langue.  »  Il  est 
«  accordé  en  cesle  pez,  que  se  il  arivoet  que  ledit 
«  Olivier  méfeist  à  nous  le  dit  Comte,  etc.  » 
(D.  Morice,  preuv.  de  l'Hist.  de  Bretagne,  T.  1, 
col.  981;  tit.  de  1261.) 

VARIANTES  : 
ARRIVER.  Orth.  subs.  -  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Ariver.  Siège  de  Troye,  MS.  du  R.  n«  6987,  fol.  116. 

Arrivouer,  subst.  masc.  Rive  oîi  l'on  aborde  et 
débarque.  On  a  dit  en  ce  sens  :  «  Prindrent....  le 
«  chemin  droit  à....  Yarrivouer  d'Avenieres....  et 
«  quant  ilz  eurent  passé  la  rivière,  trouvèrent  à 
"  Yarrivouer  de  l'autre  costéd'icelle,  etc.  »  (D.  Car- 
pentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  T.  I,  col. 
294  ;  lit.  de  1470.  —  Voy.  Arrivage.) 

Ari'ogatif,  adj.  Adoptif. 

Signification  relative  à  celle  du  substantif  arroga- 

tion.  «  Le  Roi  René mort  le  duc  Jean  de  Cala- 

«  brc  son  fils, restant  de  sa  lignée  seule  Mon- 

"  sieur  Charles  d'Anjou,....  fit  en  son  vivant  ledit 
«  Monsieur  Charles  son  fils  arrogatifet  légitime,  le 
»  déclarant  son  héritier  universel,  et  l'intitula  Duc 
"  de  Calabre.  »  (Godefroy,  Observ.  sur  l'Hist.  de 
Charles  VIII,  p.  479.  —  Voy.  Arrogation.) 

Arrogation,  subst.  fém.  Adoption.  Dans  le 
Droit  Romain,  l'adoption  à  laquelle  on  demandoit 
que  le  Peuple  consentit,  se  nommoit  arrogatio, 
adrogatio,  parce  qu'elle  se  faisoit  per  populi  roga- 
tionem.  (Voy..  Aulu-Gell.  lib.  v,  cap.  19.  —  Marti- 
nius,  Lexic.  philolog.)  C'est  d'après  l'idée  de  celle 
espèce  d'adoption,  qu'en  parlant  de  celle  de  Louis, 
duc  d'Anjou,  par  Jeanne,  reine  de  Naples,  on  a 
dit  :  «  Elle  arrogea  et  adopta  Louys  duc  d'Anjou  et 
«  de  Touraine,  comte  du  Maine,  fils  du  roy  Jean  de 
«  France,  lequel  elle  fit  son  fils  et  héritier  après  le 
«  detïaut  d'elle  en  ses  Royaumes  et  Seigneuries;.... 
«  de  laquelle  arrogation....  le  pape  Clément,  etc.  ■> 
(Godefroy,  Observ.  sur  l'Hist.  de  Charles  VIII, 
p.  478.  —  Voy.  Arrogatif  et  Arroger.) 

Arroger,  verbe.  Adopter.  Arroger.    Abroger. 

(Voy.  Arguer,  éperonner.) 

Le  premier  sens  du  verbe  arroger,  en  latin 
arrogare,  adrogare,  est  relatif  à  celui'du  substantif 
arrogation,  en  latin  arrogatio,  adrogatio;  action 
par  laquelle,  en  demandant,  on  obtenoit  celui  qu'on 
desiroit  de  faire  passer  dans  sa  famille,  à  titre 
d'adoption.  (Voy.  Arrogatio.n.) 

Dans  le  sens  d'arroger,  s'arroger  une  chose,  de- 
mander une  chose  et  se  l'attribuer,  quelqu'injuste 
et  oiïensanl  que  soit  le  désir  d'après  lequel  on  la 
demande  et  on  se  l'attribue,  on  a  dit  en  faisant 
l'éloge  du  mérite  et  de  la  modestie  de  Saint-Gelais  : 
«  De  telz  que  luy  ne  s'en  trouve  pas  treize  en  la 
.'  grand  douzaine;  et  si  ne  se  arogue  rien,  et  ne 
"  dérogue  à"  nul.  »  (Quintil.  Censeur,  p„  238.)  On 
croit  pouvoir  rapporter  à  cette  signification  A'aro- 
guer,  le  même  qu'arroger,  celle  de  notre  adjectif 
arrogant,  dont  l'usage  ne    paroit  pas  remonter 


AR 


—  J91  - 


qui  estant  iiches deviennent  si  arroocm^i  miP 

«  es  rues  ne  sont  pas  capables  de  les  ten?r  qu3nd 
«  ^s  se  preipent  par  les  costez;  et.  sèmEt 
«  mesmes  estre  favorisez  et  recognus  par  Is  vS 

iB|?!ï^e^SV'S3Soi&,S  ïïf---  - 

Honneur  son  cheval  an-ogua 

Fn "Z"^  '!f "  '°°>'  ;  ^'  marresta 
ii.n  moy  demandant,  qu'avez  faitz  ■> 

Gacede  la  Bigne,  des  Déduits,  MSS.  fol.  33,  R-, 
ippnrrr,    r  VARIANTES    : 

AH0c°.l^Q*;î„^1î^f„|,-- '■"■|t.  ''^  Cbarles  VIII,  p.  478. 
ARROGUER.  Godefr.  annot,  su'r  l'Hist.  de  Charles  VI,  p.  625 

.^^^•^«•(^^««is/./wasc.  Ligne,  trait  fi-ure  li-nP 
rang,  dispos.lion  sur  une  ou  sur  pusieurf  liÔne^ 

r'int'i'""  ^'l''^'*^  ^  «ne  opération  miSre  ETe 
dii. ingénient,  disposition  reo-uijArp  p,  ..^'v^nn?;    ' 

f  désigné  ;s?  2onS^s:ii/Se'SLs;;,if 'sr^'Li;" 


AR 


b"nez;aela-bouche,^S'' 
One  enfant  ne  ressembla  mieuU 
A  père.  Quel  menton  forché  ' 
V  rayment  c'estes  vous  tout  poché 

ipus  deux  encontre  la  naroy 
D  une  matière  el  dim  arroJ 
bi  senez-vous  sans  dilîérence. 

,,  l^aree  de  Palhelin,  fi.  U 

te  motarroy,  par  la  ménieanaloo'ie  aun  ^^icmifin 

uL"m.'?nf  f''P'^*^'°"  d-une  troupe  raSeSî 
une  ou  sur  plusieurs  lignes.  «  Chevauchèrent  p, 

Ti;oVv,^"^,"'  P'""  foie  hardiesce, 
Voult  plus  vamcre  que  par  arroy  etc 

Eusl.  Desch.  Po«s.  MSS.  p.' 549,  col.  4. 


L  Idée  particulière  de  cette  disposition    sur  nnp 
ou  sur  plusieurs  lignes,  étant  généraise'e'  on  .nrf 
despe  par  le  substantif  «/To^r comme  p^  ïï^^^^^^ 
arroyer,  toute  espèce  de  disposition  re^afie  fin 
guerre,  aux  combats,  aux  opérations  m  nfaitl 
«  Quant  «rro2/eust  esté  mis  en  certîois  bSifs" 

oSlle'  ^^r^.'lf  •^"^'■^"t  «"'■  les  chïmps  » 
lJoin\iiie,  Hist.  de  h'  Louis,  p.  99.)  .<  Feit  le  rAv Vio 
"  France  son  arroy,  et  prit  avec  lii  toS  ses  hLt^ 

n„  mTf  •  "  <^"  ^'''"?«'  Gloss.  lai   T   ?  col    7"? 
au  mot.l^■amcw^Mm.)  '         '"^' 

Les  banieres  en  haut  levant 

be  vont  aux  plains  chans  essevant  • 

D  eus  ordener  font  leur  arroi. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  262,  V. 

n.".<J  ^y,'  '  '  ■  j  ^^®  services  des  pais 

Quant  U  chevauchoit  en  ao-ou 

np"/„f  ^""''®  «^'  pour  >a  deffense. 
ue  son  règne,  etc. 

Eusl.  Desch.  Po5s.  MSS,  p,  466,  col.  9. 

Son  o.t   i""*'^  et  Bourguignons  virent 
feon  ost,  ses  gens  et  son  arroy  ■ 

nflif 'l,"1-''  ''''"^'  S''  encloirent 
ue  grands  fossez  et  de  charroy. 

Vigil.  de  Charles  vil,  part.  I   p    130 

ii?^^,^^'«'^^'^t-c^-oi 

\lnpVl^P  "^^  P^""  merveilleux  arro,,         " 
V  ns  camot'pV'S^"''  ^"'^  Lombarde^  plaines 
wns  canipeger,  d  ennemis  toutes  pleines 
J. 


p,     .-,  •■■  Marot.  p.  193. 

^t  s  il  veut  dire  avoir  vaincu  les  Rovs 
Dare  et  Pyrrhus,  par  militans  ?»-"°l  etc. 
Ar.     .,„  •.         ,.  Clëm.  Jlarot,  p.  488 

BriefleditDucsivintauRoy 
tt  promist  à  son  bon  plaisir 
Repparer  et  mettre  e>,  arroii 
Le  discord,  selon  son  désir. 

Vigil.  de  Charles  VII,  pari,  il,  p.  140. 

En  termes  de  fauconnerie,  mettre  en  arvmi  nn 
oiseau  de  proie,  c'étoit  raminger!  lé  me  tr?  Z 
règle  pour  voler,  l'armer,  l'équiper  de  Soeron 

101    iiu  I,  el  \  .  —  ibid.  fol  136,  R"  et  V"  1 

Or  t'ay  dit  quelz  oiseaux  auras 
Quant  Emperiere  ou  Roy  seras 
Ayes  ung  homme  avec  tov 
Qui  mecte  en  ton  desduyt  à,vo)/ 

Gace  de  la  Bigne,  des  Déduits,  MS.  fol.  12,  V 

Mettre  arroi  en  son  corps,  pour  en  réo-ler 
passions  et  les  diriger  vers  ftionnêteté  et  la  vertu. 


\i)  i^e  mot  se  trouve  dès  le  xivc     "  i    a 


AR 


—  192  — 


AR 


Je  te  conjur  de  Dieu  le  Roi 

Que  en  ton  cms  moles  aroi. 

Quant  Marie  o^,P-ler_^d,e  D.eu,  etc.  ^^_^  ^.  ^^,  ,_ 

Si  les  vertus  qu'on  aime  dans  un  homme,  étm^n[ 
la  règle  invariable  de  ses  actions ,  •  on  le  tiou\oii 

«  de  grand  arvoi.  " 

Brichemerestdebelafere; 

N'est  pas  un  hon  plain  de  deroi. 

Doux,  et  cortois,  et  debonere 

te  "-"-"'/i.^'âl'd; nT^eiS,  fol.  7.,  R.  col.  2. 

Pnnr  sic^nifier  (lue  la  mort  ne  garde  point  de 
rèï  en^Sappant  les  Rois  comme  les  autres 
hommes;  on  a  dit  qu'elle  n'a  point  d  arroy. 

Tu  n'as  point  d'airoy  : 

Espargnier  Prince,  ne  Roy 

Ne'veulx  ;  tant  y^es  o^uejUeuse^  ^  ^  ^^^  ^ 

Fn  réfrénant  les  passions,  la  Foi  et  la  Religion 
nréSaîet  et  assurent  l'observation  des  règles  qui 
L£f.  une  liberté  paisible  dans  les  Républiques  ; 
STes  Monarchies,  à  une  salutaire  dépendance. 
S  sont  les  règles  que  paroit  désigner  le  mol  «m  , 
dans  les  deux  citations  suivantes.  ;.  f  m^'i  Que 'e 
,  compte  que  l'on  fait  de  1  honneur  dnin.  et  l  en 
.  tSen  de  la  foy  maintient  les  Républiques  en 

IX;  ausst  le  mépris  d'icelle  est  cause  de^eu 
»  dernière  ruine.  -  (Machiavel,  Disc,  sur  lite 
Live,  p.  'ï'i-) 

Girart  est  homs  le  Roy. 
Touts  ies  Subjecis  du  règne  a^Y  Roys  en  «r™y  •• 
Si  ne  peut-on  le  Roy  «^a.sju^a  tort  .guerroyer.  ^ 

Telle  est  l'extension  pm;  ^'''^'IV^^nufrdi 

exprimoit  toute  idée  relative  ^^ ,^«1  e  de  ,«y^,  de 

lit^ne  tracée  pour  servir  de  règle;  une  idée  gène 

ral^de  rè-le,  de  convenance,  lorsqu'il  signifioit, 

'arrangement,  disposition  régulière,  disposition 

conforme  à  rusage  du  cérémonial  qui  règle  les 

S  g'    ;  La  plus  belle  pucelle  du  monde  er- 

1  vdent  deux  pucelles  qui  se  ass"'e.nt  1  ung^  ung 

„  costé  et  l'autre  à  l'autre  sur  ung  siège,  non  pas 

„  si  haut  que  elle.  Quant  Bennucq..^.  veit  cesl 

a  ajToy,  tanlosl  congneut,  etc.  »  (Percef.  \ol.  I\, 

*°  ^-'msposi'tïn'co'îiVenable  pour  faire  une  chose. 

Je  vous  voi  si  bel  pourveues 

De  sens,  d'an-oi  et  de  manière 

Que  vous  receviés  ma  proiere.  „  .  c^,,  , 

Sus  li  n'a  tache,  visce,  ne  blasme  ; 
Mes  sens,  et  bien,  et  arvoi  de  parler 
Arréement,  mieuls  que  nulle^aultie  feme. 

3"  Préparation,  assaisonnement  de  mets  : 

Dieux  scet  le  service  et  Varroy 

Des  mes,  et  les  maulx  que  j'endure 

Après  disner  :  se  du  vin  boy, 

Tantost  fault  payer,  j'e^t  d^rodu^re.   ^  ^^^  ^^^  ^ 

4'"  Préparatif  d'une  fête  : 

Riens  qui  apartiengne  à  nrroi 
De  teste  estorée  pour  Roi.  .  , ,  rs  r.  p„i  » 

Cléomadès,  MS.  de  Gai(;n«t,  fol.  62,  R'  col.  2. 

5'  Préparatif,    équipage  convenable  pour  une 


expédition  militaire,  pour  un  siège,  une  conquête 
rouand   Philippe   Rov  de  Macédoine  entreprmt 
S-er   ..  Corinthe    les  Corinthiens...   ad vertis 
„  nue  c^tr'eulx  il  venoit  en  grand  arroy  e  exercite 
»  numereux,  etc.  ■■  (Rabelais,  T.  III,  prolog.  p.  5. 

';']^qtipnl?;"!iabillement,  parur^,  appareil 
convenSble,  coi'lége,  Pompe,convoK(Voy.  Mathieu 
de  Coucv,  Hist.  de  Charles  MI,  p.  '^0- r  f  "n-^  ^ 
ratv.esxètxvm,p.  74  et  131.-NicotetM  .net,  Dict.) 
Après  sa  mort,  son  vrai  Seigneur  et  Roy 
Luiordonna  ce  beau  funèbre  «^,7^y;,,„„,  p.4„. 

Il  semble  qu'on  se  soit  figuré  les  grâces  et  les 
vertus  "onvenaSies  à  une  belle  femme,  comme 
fonSnt  son  cortège  et  ennoblissant  son  triomphe, 
lorsqu'on  a  dit  : 

C'est  ung  chef-d'«u\Te  de  beaulté, 

Ung  triumphe  de  noble  arroy  : 

Sa  prudence  et  sa  loyauUe 

Vallent  l'avoir  d'ung  peW  R^Yp^,^  ^  ,3,, 


Fn  mrlant  d'un  homme  qui  s'annonççit  d'une 
fa.  on  Svenahlë,  par  la  beauté  de  son  équipage 
[le  "on  habillement,  de  sa  parure,  on  d.soit  qu  il 
étoit  de  bel  arroy. 

Rel  fut,  gent,  et  de  bel  arroy  : 

Il  sembloit  estre  f.lz  d^e  Roy.^_^^^^  ^^^^  ^,^  ^, ,,,, 

Quoique  l'équipage  des  Personnes  ne  soit  pas 
touiours  conforme  et  convenable  a  leur  état  ofi 
S  si  communément  de  ^-^\V^\\^f\tl.Tl 
U-oit  tout  simple  qu'arroy  ait  signifie  l^Ut  Je 
rang.,  la  position  relative  des  personnes  dans  l  ordre 
politique  et  social. 

Le  chien  a  Macaire  trouvé 

Séant  à  la  table  du  Roy  ; 

car  estoit  ho^me^e  grand  arr^.  ^^  ^^,  „  ^._ 

Soit  Sa  Majesté  contente 
De  m'y  laisser  en  mon  premier  "'•;■"!'•• 
Soit  de  sa  chambre,  ou  sa  loge,  ou  sa  tente, 
ce  m'est  tout  un,  "^^^Zo^J-^^nl^^S^' ' 

On  a  même  désigné  l'état  des  choses  P^r  exemple, 
le  mauvais  état  d'un  jardin,  en  djsant  qu  il  ctoil  en 
piteux  arroy.  (Voy.  Poës.  de  Charles,  Duc  d  Orléans, 
MS.  du  R.  p.  97,  col.  2.) 

VARIANTES  : 

Arroy   Ger.  de  RoussiUon,  MS.  p.  à-t. 
Errm  Fabl.MS  duR.  n»7615,tol.71,V«col_l. 
Eroy   Ger.  de  RoussiUon,  ubi  supra;  Var.  du  MS.   delà 
Cathéd.  de  Sens. 

Arroiance.  snbst.  fém.  et  masc.  Arrangement, 

^'lÏÏSi.'- -Sucs  à  celles  d'arroi,  arran- 
wernènt,  disposition,  etc. 

Sire  fet  ele  au  Roi,  vous  veez  bien  comment 
La  chose  ne  vint  pas  de  mon  arréement  ^ 

Borle  as  srans  pies,  MS.  de  Gaignal,  fol.  133,  V  col.  .. 


AR 


—  193  — 


Lors  p  ot  cure  de  plus  targier 
yuK  1  arroiance  ne  pourvoie 
Comment  tost  soit  mis  à  la  voie 

_  Cleomadès,  MS.  deGaignal,  fol.  Sl.R-coI   3 

Arreee  fu  Vavréunce  '   ' 

De  la  feste,  sans  oubliance. 

VARIANTES    : 
ARROIANCE.  Cléomadés,  MS   de  Gai^nat   M  q^ 
Arrkance.  Ibid.  fol,  62  ^ocoio     ^      ''^°'-^- 
ARREE.MENT.  Berts  as  grans  pies;  MS.  de  Gaignat,  fol   133 

garder  sn  ligne.  (Voy.  ArrcS     ^''  '*''  ^  '^"  ''3"- 

latin  radiare  !i  nnP  Hnn!  *^  '""P'*'  '■«^"''  en 
comparaison  d-aprèllumelle  Z  iT'  '^l?'''^  ^  '^ 
ture,  un  sillon  se  no  „ïe  corpV.r"' "^  'S'"'""'- 
latin  radius,  on  aura  dU  !  Si  LTi,  n  ''''f  "'  ^^ 
«  terre  qui  marcisse  nn  Jr-inV  1   °''"^"  '''hiuiner 

rur.  ti/  LxxxvTiî^ë^SsV"  "  (««"^^^'''er,  Som. 

d'un  centre;  par  des  li-nos  ï^.-^'"'''  •''"'  P'"''ent 
rayes:  dénomïïtion  q  fsemb  eïSsK"  ""TT' 
des  rayons  par  des  li<.-  .Vs  pMo  ,  ^'e^^.'  ™'tation 
lignes  à  des  rayons  ^'       ''  "^«"^P^'-aison  de  ces 

ligne,  aura  signifié  raierÛnp'?.n'  ""f  '''^J'^-  ""e 
ligne,  la  dispose  su,r'"'^'^"'^'''  '  '^°™^*^''en 
la  ranger  en  bataille  '"''  P'^^'^urs  lignes, 

Et  s'an-ef/e,.e„ni  conrov 
^  Moult  bellement  lun  de  lès  l'autre 

tt  h  Vassal  furent  aroié 
(^om  por  bataille  conrée 

biege  de  Truye,  MS.  d«  R.  n-  6987,  fol.  97,  R-  col  3 
Celh  qui  scet  gens  d'armes  arroyer  étc 

point  soi  lef;^^'Vîrrïe«Srd^;£ 


AR 


SS''''  ■■  '""■'  *^"e  "'^  d'autant  plus  nalurelleà 

n-aurot-îlTs  Fori'i'n.     "^""  ''^  '''''^'^  =i'"''«"ger 

a?7r?«'.?  Si  dû  erbP  1  in  ,  ;  ''^  orthographe 
françois  ronger  il  n'es?  nn  f '  '?'  ^'^'""^'^  "^ 
qne  le  franco! m  9^,^  J',^  f  ,^"^':f/d'''^'i'-e 

composé  «^rirlv.  ™"  ? ,  n  PO^^'t^'^té  T-e  le 
même  origine  n?fl,TJ,f^?'^H  """  «''''''"^^'^  s^it  de 

de  rano-e r  et  n, t'^  1--      -'' -^Ç*^ ''"'^  ''^^ s>Snilications 
de  l'ânc^n  vérlp^Tr'^*'  ^^  '«"*  encore  celles 

bataille,  les  foLr  en    o';.  '.^  "i-J*^^  '■^^"°'^'-  «" 
ou  sur  plusieurs  lionp«  nJu',       «''sposer  sur  une 

qui,refat  4S|cett?nc^^^^^^^ 

Camp.  ..  Le  Rov'as.in.P."''^  ''^  "°'  Maréchaux  de 
-<  geSts  d Vmel  et  de  L  Ju/'^'m'^  ^"''"«"''^^  ^'^ 

«  descendit  le  Roy  au  niiniV  „;,    i',P-.^'"-)  ",Si 
ordonne  pour  lu^»  S^oSsS  .?,",  f  7^1 

Va  ;  SI  aroie  ta  maison.  '  '  '  "       ■' 

Fabi.  MS.  du  H.  n-  7989,  fol.  «i-2  R.  col  » 
Son  palefroi  Hst  enceler 
i-t  ses  charretes  aroiiier 

Fabl.MS.duR.„.7615,foI.124  R- col  ) 


preuve  d^rhan.  ,  enVde  "îo'vpfi  ""'  "T'^'^ 
voyelles  nasales.  b'orAR„îi„7'"''  ^""P'^^  e" 

|dJi^Se;ïïss'^t.iiï?v^?;^,û;f"^^ 

dispo^/oSydSu  à  iSu-e^lo^""'^  '^r'^ 
qu'elle  en  étoit  arro/^V  le-'  ^'^'^i^'  "^'^  ^''^oit 
(i)i?a«^«,- est  dérivé  dp  V  ^lonauoiec  ou  s  y  «rmo//;  dans  le 

dans  ApJéefi'rr  ''^  ""^'  ^<^""  ''"  '^-*  '^"^-and  /.™,,  cercle,  rangée  circulaire  ■ 

n.  '    ^"^^^^'^'^"'■'"«.'•«"Se.vient  de  ;•«,;.,;;«,.«  (ruminer, 

25 


AR 


194 


AR 


sens  de  diriger,  que  ses  pensées  s'y  arroioient. 
«  Hz  sont  Gens  d'Ordonnance,  bien  advertiz  et  bien 
«  arrotjcz  de  ce  qu'ils  doivent  faire.  »  (Le  Jouven- 
cel,  Ms.  p.  577.) 

S'acesment,  et  perent, 

Et  arréent  d'aler  souper  ;  etc. 

Cléomadès.  MS.  de  Clignai,  fol.  37,  V"  col.  3. 
Chascuns  de  li  servir  s'an-ée. 
Dits  de  Baudouin  de  Condé,  MS.  de  Gaignat,  fol.  312,  V-  col.  1. 

Leurs  pensées  à  divers  ars  s'arroient. 

Eust.  Desch.  Poès.  MSS  p.  H3,  col.  1. 

Probablement,  arroierim  règne,  c'étoit  arranger, 
régler  le  plan  de  l'administration,  le  tracer  d'après 
les  règles  d'une  saine  politique,  en  diriger  toutes 
les  parties  vers  le  même  but  et,  pour  ainsi  dire, 
les  aligner. 

Drois  Rois  est  qui  son  règne  arroie. 

Dit  de  Charilé,  MS.  de  Gaignat,  fol.  217,  R'  col.  1. 

C'est  relativement  à  l'idée  générale  de  certaines 
règles  de  convenance,  d'après  lesquelles  on  s'ar- 
moit,  on  s'équipoit  pour  combatli'e,  que  l'on  aura 
dit  :  «  Il  qui  tient  par  un  fee  de  service  de  Chivaler, 
»  covient  eslre  ove  le  Roi  par  .\l  jours,  bien  et 
«  convenablement  ariwi  pur  le  guerre.  »  (Tenures 
de  Littletoii,  fol.  20,  R°.) 

D'armes  et  de  cheval  bien  et  bel  s'arréa. 

buenon  de  Connû.ircliiBS,  .MS.  de  Gaignat,  fol.  197,  Y"  col.  1. 

Il  est  des  règles  de  convenance  pour  l'équipage, 
l'habilieracnt,  la  parure  ties  personnes;  pour  la 
préparation  ties  choses  à  certains  usages:  règles 
dont  on  retrafoit  l'idée,  lorsqu'on  disoit,  1"  en  par- 
lant de  princesses  équipées,  babillées  et  parées 
d'une  façon  convenable  a  leur  naissance,  qu'elles 
étoient  bien  araées  : 

Furent  bien  araées, 

Et  en  Lombardie  menées 
Au  Roi  Silvium  leur  parent, 
Qui  les  maria  moult  richement. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  12,  R'  col.  2  et  V'  col.  1. 
Quant  Clarmondine  l'entendi, 
Moult  duremfcut  li  abeli... 
Les  puceles  n'atargent  mie  ; 
Ains  ont  la  besoignc  avancie. 
De  ce  que  il  i  convenoit. 
Bien  et  bel,  et  tost  et  adroit, 
L'ont  pourveue  et  arrée. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignat  fol.  20,  R-  col.  2. 

2°  En  parlant  de  mets  préparés,  assaisonnés, 
qu'ils  étoient  arréés.  (Gloss.  lat.  fr.  du  P.  Labbe, 
au  mot  Condire.) 

3°  En  parlant  de  peaux  préparées  pour  certains 
usages,  qu'elles  étoient  aroiées. 

Fevres  fet  fers  à  peletierg 
De  qoi  il  aroient  lor  piaus 
A  forrer  cotes  et  mantiaus. 

Fabl.  MS.  du  R    n'  7218,  fol.  109,  R»  col.  1. 

Notre  verbe  corroyer,  qu'anciennement  on  écri- 
voit  conroijer,  signilie  encore  préparer  des  cuirs, 
les  appièler.  Cette  analogie  de  signification  prou- 
veroil,  s'il  en  étoit  besoin,  qu'il  e'st  de  même  ori- 
gine qu'ajT0i/e7-  (1).  (Voy.  CONROIER.) 

Enfin,   lorsqu'on   désignoit   un   jeune    liomme 


rangé,  en  disant  qu'il  étoit  arréé,  on  se  le  figuroit, 
sans  doute,  comme  gardant  la  ligne  d'après  laquelle 
la  sagesse  régloit  ses  démarches. 

De  joene  home  arreé, 
Pris  pou  la  Sainteé  : 
Souvent  avons  veu 
Qu'il  a  el  cors  la  rage, 
Quant  il  est  en  l'aage 
Qu'il  a  le  poil  chenu. 

Prov.  du  Vilain.  MS.  de  Gaignat,  fol.  274,  R°  col.  1. 

11  semble  en  effet  que,  relativement  à  l'idée  de 
garder  sa  ligne,  être  à  son  rang,  on  ail  dit  figuré- 
ment  faire  «rro/cr  quelqu'un  pour  faire  qu'il  soit 
à  son  rang  dans  l'ordre  social,  lui  faire  garder  la 
règle  établie  pour  le  maintien  de  ce  même  ordre. 

Drois  Rois  est  qui  son  règne  arroie, 
Et  les  desrois  fait  arroiier. 

Dit  de  Cliarité,  MS.  de  Gaignat,  fol.  217,  V-  col.  1. 

V.\R1ANTES  : 
ARROIER.  Eust.  Desch.  Poes.  MSS.  p.  113. 
Araer.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  12,  R»  col.  2. 
Aréer.  Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  foL  32. 
Akeger.  Borel,  Dict. 

Aroier.  Siège  de  Troye,  MS.  du  R.  n»  G987,  fol.  97. 
Aroiner.  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7G15,  fol.  124,  R»  col.  1. 
Arrayer.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Arraiare. 
Arréer.  Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  20. 
Arroher.  Dit  de  Chanté,  MS.  de  Gaignat,  fol.  217. 
Arroyer.  Bouteiller,  Som.  rur.  tit.  Lxxxv,  p.  498. 

Ari'oquer,  verbe.  Presser,  accabler.  (Voy. 
Arrocher.)  On  soupçonne  qu'arroquer  est  une  va- 
riation d'orthographe  du  verbe  arrocher,  mettre  en 
pièces,  accabler  ;  et  que  dans  un  sens  aiuiloî^ue  on 
a  dit  d'un  sanglier  pressé  par  une  meute  de  chiens 
qui  l'accablent  et  le  mettent  en  pièces,  qu'il  en 
étoit  ai-roqtié. 

Se  demeslant  ainsi  d'une  presse  guerrière 
Qu'un  sanglier  arroqué,  dedans  une  fondrière, 
D'une  meute  de  chiens,  escuraant,  hérissant, 
Qui  de  hure  et  le  dents  se  fait  voye  en  poussant. 

Bergeries  de  R.  Belleau,  T.  1,  p   126. 

Ari'ousable,  adj.  Propre  à  arroser.  Piopre  l'i 
être  arrosé. 

Dans  le  premier  sens,  on  disoit  :  fontaine  arou- 
sable.  (Voy.  Fabl.  ms.  du  R.  n»  7218,  fol.  301,  R°.) 

On  trouve  arrousable  au  second  sens,  dans 
Cotgrave,  Dict. 

VARIANTES  : 
ARROUSABLE.  Cotgrave  et  Oudin,  Dict. 
Arousable.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  301. 


Arrousage,  subst.  masc. 
Cotgrave  et  Oudin,  Dict.) 


Arrosement.  (Voy. 


Arrousement,  subst.  masc.  Action  d'arroser. 
Quoiiiue  la  signification  d'aiTosement  soit  encore 
aujourd'hui  la  même  qu'en  ce  passage  des  Serni. 
fr.  Mss.  de  S'  Bernard,  p.  12[t,  où  on  lit  que  «  usai- 
«  ges  des  awes  est  li  arrosement;  »  on  ne  diroit 
plus,  en  parlant  d'un  jardin  qu'arrosei'oit  une 
fontaine,  que  ce  jardin  est  «  deleitaules  par  l'arro- 
«  sèment  de  cette  fontaine.  »  (kl.  ibid.  p.  130.  — 
Voy.  Arrouser.) 


(1)  Conroijer,  comme  arroyev,  viennent  des  prépositions  cicm  et  ad,  unies  à  redum  (arrangement),  qui  rappelle  le  flamand 
reden  et  le  gothique  raidjan,  préparer,  (n.  e.) 


AR 


195  - 


AR 


VARfANTES  : 
ARROUSEMENT.  Cotgrave,  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Arrosement.  Orth.  subs.  —  S'  Bernard,  S.  F.  MSS.  p.  130. 

Arrouser  (1),  verbe  .Inonder ,  entourer,  environ- 
ner, assiéger.  La  rosée  qui  coule  sur  les  fleurs  et 
les  embellit,  est  une  image  si  naturelle  des  larmes 
qui  coulent  sur  le  visage  d'une  personne  intéres- 
sante par  sa  douleur,  qu'on  se  la  figure  encore 
aujourd'hui,  comme  ayant  «  la  face  de  larmes  piteu- 
«  sèment  arrousée.  »  (Voy.  J.  Marot,  p.  32.) 

Ce  verbe  arrouser,  dit  Nicot,  signifie  «  jetter  de 
«  l'eau  par  plusieurs  petites  gouttes  au  coup  comme 
«  rousée.  >•  (Voy.  Arrousoir.)  Si  Feau  qui  «  coule  et 
«  se  répand  en  rosée.  »  est  insuffisante  pour  hu- 
mecter la  terre  et  vivifier  les  plantes,  on  la  «  ré- 
"  pand  et  on  l'a  fait  couler  avec  une  abondance  », 
«lue  par  exiension  désigne  le  même  verbe  arrouser. 
(Voy.  Nicot,  Dict.) 

En  comparant  à  l'effet  de  cette  abondance  arti- 
ficielle, celui  d'une  fontaine  qui  coule  dans  un 
jardin,  d'une  rivière  qui  coule  dans  une  campagne, 
on  dit  qu'elles  les  arrosent.  Mais  on  ne  diroit  plus 
qu'une  place  fortifiée  par  des  fossés  inondés  d'eau, 
est  arrosée.  L'idée  de  fossés  ainsi  inondés  paroil 
avoir  été  si  familière  dans  les  siècles  de  l'anarchie 
féodale,  qu'en  parlant  d'une  armée  qui  inondoitles 
environs  d'une  Ville  et  l'entouroit  pour  en  faire  le 
siège,  on  a  dit  qu'elle  l'arrosoit,  sans  doute  comme 
l'eau  qui  en  inondoit  les  fossés. 

Son  bien  proisiez  à  deux  cents  mile 

Qui  tuit  assiéent  en  Murel 

Symon  le  Conte  naturel. 

Murel  que  celé  gent  arouse, 

Siet  en  l'Evesohié  de  Thoulouse. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  92,  V. 

Ce  seroit  par  un  abus  singulier  de  celte  signi- 
fication d'arroser,  entourer,  environner,  assiéger, 
qu'on  auroit  dit  figurément;  1°  en  parlant  d'un 
Roi  entouré  de  biens  et  environné  d'honneurs  : 

.  .  .  Bien  et  honneur  l'arousa  ; 
Trois  nobles  Dames  espousa. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  H,Rv 

2°  En  parlant  d'un  cœur  qu'assiège  une  passion 
amoureuse. 

Si  je  repose  de  fere  chançon, 

S'amor  qui  arone  mon  cuer  environ,  etc. 

Clians.  fr.  du  Xllf  siècle,  MS.  de  Bouhier,  fol.  47,  V'.  col.  1. 

Peut-être  trouvera-t-on  qu'en  ces  derniers  vers, 
arroser  signifie  l'abondance  du  plaisir  qui  inonde 
un  cœur  amoureux  ;  dans  les  premiers,  une  abon- 
dance de  biens  et  d'honneurs  répandus  sur  la  tête 
de  celui  qu'on  disoit  en  être  arrosé.  (Voy   Abrou- 

SEMENT.) 

VARIANTES  : 
ARROUSER.  J.  Marot,  p.  32. 

Aroseu.  Chans.  Fr.  du  xius  siècle,  M.S.  de  B.  fol.  45. 
Aroi'ser.  g.  Guiart,  MS.  fol.  11,  R». 
Arreuser.  Rom.  d'Audigier,  MS.  de  S'-Germ.  fol  66. 
Arroser.  Orth.  subs.  -  S'-Bernard,  S.  Fr.  MSS.  p.  129. 

Arrousoir,  subst.  masc.  Arrosoir.  Vase  d'oîi 


l'eau  «  s'écoule  et  se  répand  en  forme  de  rosée.  » 
(Cotgrave,  Nicot  et  Monet,  Dict.  —  Voy.  Arrouser.) 

Arrudir,  verbe.  Rendre  ou  devenir  rude  ;  ren- 
dre ou  devenir  insensible.  (Voy.  RuDE.)On  sefiguroit 
les  sens  et  l'esprit  comme  étant  d'une  rudesse  qui 
s'opposoit  à  l'impression  des  objets  propres  à  affec- 
ter, lorsqu'en  parlant  de  l'insensibilité  d'une  per- 
sonne pour  ces  mêmes  objets,  on  disoit  qu'elle 
s'arrudissoit,  qu'elle  avoit  les  sens  tout  arrudis, 
que  son  engin  étoit  tout  arrudi.  «  Mon  petit  engin 
-  qui  étoit  tout  arrudi:^,  etc.  »  (G.  Machaut,  ms.  fol. 
172,  V"  col   3.) 

Dame  Nature  ayant  les  yeux  mourans, 

En  force  pleurs  et  larmes  décourans. 

Le  chef  baissé,  les  sens  tout  (irudis,  etc. 

J.  le  Maire,  à  la  suite  de  l'Illuslr.  des  Gaules,  p.  MO. 

Tant  m'amtdisse 

Que  mon  bon  seulement  perdisse, 

G.  Machaut,  MS.  fol.  171,  V  col.  3. 
VARIANTES    : 
ARRUniR.  Cotgrave  et  Oudin,  Dict. 
Arudir.  j.  le  Maire,  à  la  s.  de  ITlIustr.  des  Gaules,  p.  400. 

Arrimer,  verbe.  Arranger,  équiper,  etc.  Arran- 
ger la  cargaison  d'un  navire.  Régler  une  Carte 
marine. 

Il  est  possible  que  les  substantifs  rang  et  ray, 
comme  les  verbes  arrayer  et  arranger,  soient  de 
même  origine;  et  que  la  différence  de  l'un  à  l'au- 
tre soit  l'effet  d'un  son  nasal  au  moyen  duquel  ray 
aura  été  prononcé  ra»g,  rcng,  run,  etc.  De  là,  le 
verbe  arritner  de  même  signification  quarroyer, 
arranger,  équiper,  etc.  «  Chevaliers  et  Escuyers... 
«  qui  désiroyent  les  armes,  montèrent  une  fois  sur 
'  leurs  chevaux,  sur  les  meilleurs  et  plus  aspres 
«  qu'ils  eussent,  et  les  mieux  gouvernés  et  arru- 
«  nés.  «  (Froissart,  Vol.  llî,  p.  244.)  Le  Peuple  en 
Normandie  prononce  encore  aujourd'hui  run  pour 
rang;  et,  pour  arranger,  dit  flj'nmp?".  (Voy.  Cotgrave 
et  .Nicot,  Dict.  —  Ménage,  Dict.  Etym.) 

On  pourroit  douter  qu'arriiner  et  nrrumer 
fussent  de  même  origine  qu'arruner,  si  l'on  étoit 
moins  familiarisé  avec  le  changement  des  voyelles 
71  et  ?,  et  des  consonnes  nasales  n  et  m  qui  dans  la 
prononciation  .se  substituent  souvent  l'une  à  l'autre  ; 
et  si  l'on  n'avoit  la  preuve  qu'en  termes  de  marine, 
arruner,  arrumer,  ou  arrimer,  c'est  arranger  la 
cargaison  d'un  navire,  et  que  dans  un  sens  ana- 
logue, on  a  dit  arrimage,  arrumage,  ou  arunage. 
(Voy.  Aubin,  Dict.  de  Marine,  p.  46.  —  Dict.  de 
Trévoux,  col.  C03  et  60G.) 

Enfin,  la  signification  d'arrumer,  la  même  que 
celle  à'arruner,  qu'on  croit  être  une  altération 
d'arranger,  se  rapprochoit  sensiblement  de  la  signi- 
fication'étymologique  du  verbe  arrayer,  tracer  une 
raie,  une  ligne  droite  comme  un  rayon,  lorsqu'en 
parlant  d'une  carte  marine  sur  laquelle  sont  tra- 
cées les  raies,  les  lignes  droites  qui  règlent  la 
division  et  subdivision  des  vents,  on  disoit  qu'elle 
étoit  arrumée.  Les  rums  ou  rumbs  de  vent  étant 
des  raies  ou  lignes  qui  figurent  sur  les  cartes  ma- 


(1)  Arroser  vient  du  latin  adrorare  (arroser,  dans  Marcellus  Empiricus).  (n.  e.) 


AR 


—  196  — 


AR 


rinesles  trente-deux  venls  qui  scn-enl  ù  la  conduite 
d'un  vaisseau.  «  Selon  ce  on  dit  arritmcr  une 
«  carie,  pour  tirer  enicellc  lesdits  rums(l).  »  (Nicot, 
Dict.  —  Voy.  Arroier.) 

VARIANTES  : 

ARRUNER.  Froissarl,  Vol.  III,  p.  24i. 

Arrimer.  Dict.  de  Trévoux.  -  Dict.  de  l'Acad.  Fr. 

Arhumkr.  Cotgrave,  Nicot  et  Monet,  Dict. 

Ars,  subst.  mase.plur.  Partie  de  devant  du  corps 
d'un  cheval,  d'un  cerf,  etc.  Ais,  planche. 

En  termes  de  manège,  on  dit  :  «  saigner  un  che- 
«  val  des  ijuatre  ars.  «  (Voy.  Dict.  de  Trévoux.  — 
Dict.  de  l'Acad.  Fr.)  Cette  expression  paroit  relative 
à  l'idée  que  ce  mot  ars  est  formé  du  latin  artus, 
en  frant'ois  membres;  et  qu'on  a  désigné  les  quatre 
membres  du  cheval,  en  disant  ars  de  derrière,  par 
opposition  aux  ars  de  devant.  Mais  nulle  preuve 
que,  comme  on  disoit  ars  de  devant,  l'on  ait  dit  a/'s 
de  derrière;  et  supposé  qu'il  en  existe,  l'étymologie 
reste  douteuse. 

Anciennement,  on  écrivoit  ars  pour  arcs,  en  latin 
arcus;  et  l'on  nommoit  arcs  de  devant,  ou  tout 
simplement  arcs,  les  jambes  de  devant  d'un  cheval. 
Cette  définilion,  qu'on  a  hasardée  sur  la  foi  du 
Seigneur  du  Fouilloux,  paroit  inexacte.  Quelques 
citations  ajoutées  à  celles  qu'on  trouve  sous  le  mot 
Arc,  partie  du  corps  d'un  cheval,  semblent  prouver 
que  cette  parlie  désignée  par  le  pluriel  arcs  ou  ars, 
est  celle  où  finissent  les  épaules  du  cheval  et  oîi 
commencent  les  jambes.  Au  reste,  la  signification 
d'ars  et  arcs  en  ces  mêmes  citations,  est  évidem- 
ment la  même.  «  Attaindirent  son  cheval  es  arcs  de 
«■  devant,  de  telle  puissance  que  ledit  cheval  mons- 
«  tra  bien  comment  il  estoit  attaint  au  cueur  ;  car  il 
«  cheut  tanstost  à  la  terre  mort.  »  (Percef.  Vol.  VI, 
fol.  19.)  «  Le  fer  du  glaive  luy  fiert  es  ars  de  devant  si 
«  en  parfont  qu'il  luy  saillit  hors  par  derrière;  dont 
«  cheut  le  cheval  tout  plat.  (Ibid.Vol.  I,  fol.  51.)  «  Le 
«  porc  qui  estoit  eschauffé....  consieut  de  la  dent  le 
«  cheval  de  Thelamon,  et  luy  va  fendre  le  ventre, 
«  des  «î's  jusfiLies  es  rains  derrière.  "  (Ibid.  Vol.  II, 
fol.  9.)  «  Les  deux  chevaulx  avoient  chascun  une 
«  lance  qui  leur  avoit  esté  fichée  es  ars;  et  leur 
«  sortoient  hors  l'arcon  de  devant  la  selle.  »  (Ibid. 
Vol.  III,  fol.  2.) 

Ce  mot  ars  ou  arcs  signifioit  non-seulement  parlie 
de  devant  du  corps  d'un  cheval,  mais  une  parlie 
semblable  du  corps  d'un  cerf,  et  même  d'un  chien. 

»  Passelion s'estoit  enveloppé  de  la  peau  d'un 

«  cerf au  plus  genlement  que  il  avoit  peu  :  car 

«  il  avoit  audessus  de  la  teste  les  cornes  qu'il  faisoit 

«  venir  sur  son  dos; si  venoil  à  quatre  piedz. 

«  Mais  il  ne  mist  hors  de  l'épinoy,  fors  la  moitié 
«  du  corps;  si  que  la  vieille  luy  véoit  les  ars  de 
«  devant  et  les  cornes  »  (Percef.  Vol.  V,  fol.  100.— 
Voy.  Arc,  partie  du  corps  d'un  chien.) 

Probablement,  on  nommoit  arcs  ou  ars,  partie 
de  devant  du  corps  d'un  chien,  d'un  cerf,  on  la 


voyoit  comme  formant  une  espèce  d'arc.  On  l'assi- 
miloit  à  la  parlie  de  devant  du  corps  d'un  cheval  ; 
partie  dont  la  forme  nécessite  celle  de  farcon  d'une 
selle.  (Voy.  Arçon.) 

Quoique  les  ais  dont  l'assemblage  formoit  les 
Ecus  de  nos  anciens  Chevaliers,  fussent  de  figure 
bombée  et  par  conséquent  imilative  de  la  courbure 
d'un  arc,  il  est  peu  vraisemblable  qu'on  ait  comparé 
ces  ais  à  des  arcs,  et  qu'en  ce  sens  on  ait  dit  : 
«  La  beste  luy  courut  sus,  de  grant  randon,  en  luy 
"  prenant  son  escu  aux  de'ns  ;  tellement  qu'ilz 
«  entrèrent  bien  parfond  dedans  les  ars.  »  (Percef. 
Vol.  III,  fol.  89.)  «  Hz  s'en  vont  férir  es  escuz  des 
«  lances  telz  coups  qu'ilz  faulcérent  les  ars  et  les 
«  haubers.  »  (Ibid.  fol.  105.)  -  Couchèrent  leurs  lan- 
«  ces  ;  si  commencèrent  les  joustes  de  toutes  pars, 
«  dont  les  éclatz  des  lances  rompirent  les  ars  à  très 
'<  grant  effort.  »  (Ibid.  fol.  112.)  Peut-être  trouvera- 
t-on  plus  de  vraisemblance  à  croire  que  le  mot  ars, 
dont  la  signification  en  ces  passages  paroit  évi- 
demment relative  à  celle  des  mots  «es  et  a\jes,  dans 
les  expresssions  «  faire  voler  les  aijes  d'un  escu, 
«  en  fendre  les  aés,  »  est  moins  une  variation  d'or- 
tographe  du  pluriel  arcs,  qu'une  corruption  du  mot 
ais.  (Voy.  Aïs.) 

Ars,  participe  et  substantif.  Mis  au  feu,  jeté  au 
feu.  Brûlé.  Incendie. 

Il  semble  qu'a?'s,  en  latin  arsus,  participe  du 
verbe  ardere,  d'où  le  franç.ois  ardre,  signifioit  mis 
au  feu,  jeté  au  feu,  lorsqu'en  réunissant  ars  et 
bruslé,  on  disoit  :  «  Si  fut  la  Ville  arse  et  bruslée 
«  en  un  grant  feu.  »  (Ger.  de  Nevers,  part,  n, 
p.  127.) 

Dans  le  sens  de  brûlé,  le  participe  ars  désignoit 
les  elfets  de  l'activité  du  feu,  sur  ce  qui  avoit  été 
ars  ou  mis  au  feu.  (Voy.  Ardre  sous  .\rder.) 

De  Iti,  on  a  dit,  1°  en  parlant  de  l'elfet  chimérique 
de  l'ardeur  du  feu  sur  le  jais  : 

Quant  est  ars  mult  est  rairables  : 
Chaice  Serpent,  destruit  Diables. 

Marbudus.  de  Geram.  an.  xviil,  col.  1654. 

2°  En  parlant  des  elfets  de  l'ardeur  du  soleil  en 
Espagne  :  «  La  terre  leur  sembla  trop  arse.  " 
(Chron.  S'  Denys,  T.  I,  fol.  143.) 

3"  En  parlant  de  l'effet  de  fardeur,  du  tempé- 
rament du  lièvre  lorsqu'il  est  en  amour  :  «  Gete  les 
«  fumées  plus  arses  et  plus  menues.  »  (Chasse  de 
Gaston  Phébus,  ms.  p.  43.) 

Enfin,  ce  participe  ars,  pris  substantivement 
comme  le  verbe  ardoir,  action  de  brûler,  d'incen- 
dier, a  signifié  l'elïet  de  celte  action,  fincendie 
même.  «  En  demandes  qui  sont  fctes  pour  cas  de 

«  crime se  convient  il  fere  partie,  et  dire  en 

«  tele  manière  :  Sire,  veslà  Jehan  qui  a  fait  tel 
«  meurtre,  ou  tel  traïson,  ou  tel  homicide,  ou  tel 
«  rat,  ou  tel  ars,  ou  telle  roberie.  »  (Beaumanoir, 
Coût,  de  Beauvoisis,  chap.  xi,  p.  38.  —  Voy.  Arsis.) 

Arsenal,  subst.  masc.   On  doutoit  encore,  au 


(I)  Tous  ces  mots,  arrimer,  arrumer,  arrimer,  ont  pour  étymologie  rum,  riimb,  qui  signifie  cale,  fond  de  navire,  espace^ 
en  danois  rummct,  en  allemand  Raum.  (n.  e.) 


AR 


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AR 


commencement  du  xvni"  siècle,  s'il  falloit  écrire 
arsenac  ou  arsenal.  Enfin,  rorlhogiaplie  arsenal  a 
prévalu,  malgré  le  pronostic  de  Ménage,  qui  croyoit 
qu'arsenac  obtiendroit  la  préférence. 

L'opinion  la  plus  vraisemblable  sur  l'élymologie 
d'arsenal,  est  que  ce  mot  a  été  formé  de  l'arabe 
Dâr-senâah{l],  en  retranchant  le  rfpour  la  facilité  de 
la  prononciation.  Il  est  évident  que  les  signifi- 
cations particulières  et  usitées  d'arsenal,  sont  ana- 
logues à  la  signification  générale  du  mot  arabe, 
traduit  en  latin  par  ilomus  opificiL  en  françois 
atelier,  magasin.  (Voy.  Court  de  Gebelin,  Dict. 
Etym.  delà  Lang.  Fr.  — Ménage,  Dict.  Elym.  — 
Dict.  de  Trévoux.) 

VARIANTES  : 
ARSENAL.  Orlh.  subs.  Bourg,  de  Orig.  Voc.  Vulg.  fol.  11. 
Arcenac.  ,I.  Marot,  p.  76.  —  Borel,  Dict. 
Arcenal.  Mém.  de  Ph  de  Commines,  T.  II,  p.  (512. 
Arsenac.  Rabelais,  T.  III,  p.  251  et  272. 

Arsenic,  srt^s^  7nasc.  Poison  brûlant  et  prompt. 

En  langage  oriental,  alzernig('2):  mol  composé  de 
%er,  brûler,  mordre,  et  de  neg,  être  prompt,  se 
hâter.  (Voy.  Court  de  Gebelin,  Dict.  Etym.  de  la 
Lang.  Fr.)  En  adoptant  cette  étymologie  du  mot 
arsenic,  on  avouera  sans  doute  (lu'il  signifie  très- 
énergiquement  l'elîet  d'un  poison  tel  que  Varsenic 
sublimât,  probablementl'orpiment  sublimé.  «  Il  est 
«  une  chose  qui  se  apppelle  arsenic  sublimât  :  se 
«  un  homme  en  mangoit  aussi  groz  que  un  poiz, 
«  jamais  ne  vivroit.  »  (Confession  de  Vourdreton, 
ubi  supra.) 

Cette  espèce  d'arsenic  sublimé  plusieurs  fois 
avec  le  sel  marin,  se  forme  en  une  masse  très-pure 
et  cristaline,  qu'on  aura  désignée  par  le  mot  rocher, 
en  disant  arsenic  rocher. 

En  réagal,  en  arcenic  rocher, 
En  orpigment,  en  salpestre  et  chaulx  vive,  etc. 
Villon,  Po«s.  p.  68. 

VARIANTES  : 
ARSENIC.  Orth.  subs. 
Alssignv.  Du  Bellay.  Mém.  T.  VI,  p.  301. 
Arcenic.  Villon,  Poës.  p.  68, 
AR.SIGNY.  Du  Bellay.  Mém.  T.  IV,  p.  261. 

Arser,  verbe.  Brûler.  Briller. 

Ce  verbe  arser,  formé  du  participe  ars,  comme 
les  substantifs  arseure  et  arsion,  étoit  de  même 
signification  qxïarder,  brûler.  (Voy.  Ane.  Poët.  Fr. 
Ms.  du  Vatican,  n°  1  i90,  fol.  153.  —  Gace  de  la 
Bigne,  des  Déduits,  ms.  fol.  Ai,  etc.)  On  a  désigné  la 
facilité  de  rallumer  dans  un  cœur  le  feu  d'une 
passion  dont  il  a  déjà  brûlé,  dont  il  a  éprouvé 
l'ardeur,  en  le  comparant  ù  un  tison  arsé. 

Car  Varsés  tisons 
Est  plustost  en  calour  et  en  vie, 
Quant  est  près  del  fiu  mis 

Que  li  vers  basions 
De  qui  caure  ne  fu  ains  sentie. 

Ane.  Po«t.  fr.  MS.  du  Vatican,  n-  U90,  fol.  36,  R-. 


La  comparaison  de  l'ardeur  physique  de  l'amour 
avec  celle  du  feu,  semble  si  naturelle,  qu'il  est  pos- 
sible qu'au  figuré  le  verbe  arser  signifie  brûler, 
être  en  feu,  dans  le  Moyen  de  parvenir,  (p.  G6  et 
37G1  quoiqu'on  puisse  l'y  voir  comme  une  con- 
traction d'arresser.  Cet  ancien  verbe  arresser,  qu'on 
trouve  dans  Rabelais,  T.  II,  p.  222,  et  dans  Cotgrave, 
Oudin  et  Nicot,  est  de  même  origine  et  de  même 
signification  qa'ai'oidier,  être  roide,  être  en  érec- 
tion. (Voy.  Aroidier.) 

On  assimiloit  à  l'effet  de  la  flamme  du  feu,  celui 
du  poli  de  l'acier,  lorsque  dans  le  sens  de  briller, 
on  disoit,  »  faire  arser  une  épée.  »  (Régnier,  Satyre 
vni,  p.  53.  —  Voy.  Arder.) 

Arseure,  subst.  fém.  Ardeur  du  feu.  Ardeur 
d'une  passion.  Brûlure.  Chose  brûlée.  Brùlement, 
action  de  brûler,  d'incendier. 

Dans  le  sens  propre,  arseur^e  signifiait  l'ardeur 
du  feu  : 

De  celé  seconde  closture 
Grant  eèt  la  pueur  et  l'arsure, 
Et  hydeus  li  embrasemenz. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  80,  V'. 
....  coume  Vursure 
Fait  kanq'ele  ataiiit  bruir  ; 
Fait  mon  cors  taindre  et  pâlir 
Sa  douce  regardure. 
Ane.  Po5s  fr.  MS.  du  Valic.  n-  1490,  fol.  29,  R'. 

Au  figuré,  l'ardeur  d'une  pission  : 

Mais  Blancheflor  le  rasseure, 
Dont  il  sent  l'angoisse  et  Varscure. 

Floire  et  BlancheOnr,  MS.  de  S.  Germ.  fol  202,  V"  col.  1. 

Par  extension ,  Varseure  étoit  l'effet  de  l'ardeur 
du  feu,  une  brûlure  :  «  Mes  oignemenz  est  bons 
«  pour  roulure,  por  arsure,  etc.»  (Erberie,  ms.  de 
•S'-Germ.  fol.  89.  -  Voy.  Arreure.) 

Quelquefois  même,  la  chose  brûlée  : 

Li  tombeaul  fut  chargié  de  charbon  et  à'arsure 
Pour  le  feu  qu'out  esté;  fut  tout  chargié  d'ordure. 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  MU. 

Enfin,  ce  mot  arsure  pareil  avoir  signifié  brùle- 
ment, l'action  de  mettre  le  feu  à  une  chose,  l'action 
de  brûler,   d'incendier.    «  De  arsure  l'on   prant 

«  mort et  tuit  li  bien  sont  le  Roy.  »  (Ane.  Coût. 

d'Orléans,  p.  468.  —  Voy.  jVrsion.) 

VARIANTES  : 
ARSEURE.  Chasse  de  Gaston  Phébus,  MS.  p.  223. 
Arsure.  Chron.  S<-Denys,  T.  II,  fol.  163. 

Arsili,  subst.  masc.  plur.  Espèce  de  barques. 
C'éloit  des  barques  plates,  si  l'on  en  croit  Borel  qui 
cite  Villehardouin  (3),  au  mol  lissiers.  Peut-être 
seroit-il  plus  vrai  de  dire  que  ces  barques,  nommées 
arsili,  étoient  des  brûlots? 

Arsin,  subst.  masc.  Chose  à  laquelle  on  a  mis 
le  feu,  chose  brûlée.  Effet  du  feu,  brûlure,  incendie. 
Brùlement,  action  de  mettre  le  feu,  de  brûler,  d'in- 
cendier. 


(1)  On  trouve  en  bas-grec  le  dérivé  doaài/a,  mais  le  français  vient  de  l'italien  arzenale,  arzena,  darsena.  (n.  e.)  —  (2)  Ce 
mot  vient  du  grec  dçaeyixôç,  mâle,  métal  ainsi  nommé  à  cause  de  ses  propriétés  puissantes.  On  trouve  dans  d'Aubigné  la 
lorme  ancienne  arsoine,  avec  l'accent  sur  la  syllabe  se  de  arsenicum:  «  Un  arsoine  si  blanc  qu'on  le  gousta  pour  sucre.  » 
(Tragiques,  p.  282,  éd.  Jannet,  1857.)  (n.  e.)  -  (3)  A\i  paragraphe  217  de  l'édition  de  'Wailly,  on  parle  en  effet  de  dix-sept 
navnes  équipés  en  brûlots  par  les  Grecs  ;  on  n'y  trouve  pas  la  forme  arsili,  mais  seulement  :  «  Et  li  feus  aluma  mult  hatt, 
si  que  il  sembloit  que  tote  la  terre  arsisl.  »  Aurait  •on  pris  s  manuscrit  pour  i  et  fait  de  t  un  i  ?  (n.  b.) 


AR 


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AR 


On  prouve  la  première  acception  d'arsin,  par 
queliiues  Coutumes  dans  lesquelles  les  bois  aux- 
quels on  a  mis  le  feu,  les  bois  brûlés  p^r  malice  ou 
par  accident,  sont  nommés  arsins.  (La  Thaumas- 
siiVe,  Gloss.  sur  les  Coutumes  de  Benuvoisis.  - 
Lauriôre  Gloss.  du  Dr.  Fr.  -  Dict.  de  Trévoux.  - 
Voy.  Ansis.)  .     .^  ,  ,    ., 

11  paroil  que  le  même  mot  a  signifié  brûlure, 
l'effet  du  feu  que  vomissoit  la  gueule  enflammée 
du  Dragon  qui  gardoit  la  Toison  d'or  : 

Feu  et  venin  espan  ensemble... 
Ne  fust  Jason  si  bien  garnis , 
En  petit  d'eure  fust  fenis  ; 
Que  del  arsin,  que  del  venin 
Manois  fust  aies  à  sa  Tin. 

Siège  De  Troye  ;  MS.  du  R.  n'  6087,  fol.  72,  R'  col.  1. 

En  termes  de  Coutume,  l'effet  du  feu  mis  à  une 
maison,  incendie  :  «  Les  eschevins  de  tout  cas  cri- 

a  minel, si  comme  de  meurtre,  homicide,  lar- 

«  cin,rapt,  etarsi»  vulgairement  appelle  incendie.» 
(Coût,  de  Richebourg,  au  Nouv.  Coût  gén.  T.  I, 
p.  450.  —  Voy.  Ars.) 

Le  droit  des  arsins,  spécialement  en  Picardie  et 
en  Flandre,  étoit  le  droit  de  mettre  le  feu  à  la 
maison  d'un  forain,  faute  par  lui  «  d'amender  le 
..  forfait  dont  il  s'étoit  rendu  coupable,  en  entre- 
«  prenant  viers  le  franchise  d'une  ville  et  le  corps 
«  des  bourgeois.  Parce  qu'on  mettoit  le  feu  aux 
«  maisons  des  criminels,  pour  les  abattre  et  les 
«  détruire ,  cette  exécution  a  été  appelée  arsïii.  » 
(Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  p.  72  et  73.) 

E«  déclarant  hérétiques  plusieurs  propositions 
avancées  par  le  Docteur  Jean  Petit  dans  son  apo- 
logie du  meurtre  de  Louis  duc  d'Orléans,  l'Evêque 
de  Paris  et  l'Inquisiteur  de  la  Foi,  condamnèrent 
sans  doute  au  feu  cette  apologie  et  la  firent  brûler, 
par  sentence  dont  le  concile  de  Constance  semble 
avoir  désigné  l'exécution  par  le  mot  arsin.  .<  Nous 
«  prononçons  et  déclairons  les  procès,  sentences  et 
«  condemnations ,  arsins  ,  deffenses  ,  exécutions 
«  faites  par  l'Evesque  de  Paris  contre  Maistre  Jean 
«  Petit....  estre  de  nulle  valeur  ;  elles  annulions 
«  et  cassons.  »  (Monslrelet,  Vol.  1,  chapitre  cliv, 
fol  234.  —  J.  Le  Fèvrede  S'-Remy,  llist.  de 
Charles  VI,  p.  101  ) 

Le  fanatisme  avoit  tellement  familiarisé  nos 
ancêtres  avec  les  horreurs  des  Croisades  contre  les 
Hérétiques,  qu'il  leur  paroissoit  tout  naturel  de 
réunir  à  l'idée  de  croisade  celle  de  arsin. 

Vint  de  l'apostole  Grigore 

Grans  pardons  et  coumans  de  crois, 

Dont  la  gent  furent  en  effrois... 

Ardoir  en  list  assés  en  oire  (1) 

Droit  à  la  Carité  sur  Loire... 

Entre  cest  crois  et  cest  arsin 

Si  avint  erant  joie  sans  fin. 

Ph.  MouEkes,  MS.  p.  785,  786  et  790. 

Dans  ces  vers  et  les  deux  citations  précédentes, 
on  particularisoit  l'acception  à'arsin,  qui  signifioit 
en  général  brûlement,  action  de  mettre  le  feu,  de 
brûîer,  d'incendier.  »  Les  pillages et  rençons 


«  qu'ilz  prindrent,  les  ravissemens  et  arsins  qn'iiz 
»  firent,  etc.  »  iHistoire  de  B.  du  Guesclin,  par 
Ménard,  p.  396.)  «  Nul  ne  soit  reçu  à  gane  ipie 
«  pour  trois  cas;  c'est  assavoir  pour  meurtre,  pour 
..  rapt  et  pour  «?'sen  de  maison.  »  (Savaron,  Traité 
contre  les  duels,  p.  37.)  Peut-être  faut-il  lire  arson 
pour  arsen?  (Voy.  Arsion.) 

VARIANTES  : 
ARSIN.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  735. 
Arsen.  Savaron,  Traité  contre  les  Duels,  p.  37. 

Arsion,  subst.  fém.  Effet  de  l'ardeur  du  feu; 
brûlure,  incendie,  embrasement.  Brûlement,  action 
de  mettre  le  feu,  de  brûler,  d'incendier. 

Dans  le  premier  sens,  qui  est  le  sens  propre,  on 
a  dit,  en  parlant  du  Buisson  ardent,  qu'il  ardoitsans 
arsion.  (Dits  et  Moralités,  ms.  de  Gaignat,  fol.  298.) 

En  parlant  de  Clercs  que  Dieu  sauva  miraculeu- 
sement des  effets  de  l'ardeur  du  feu,  qu'il  garantit 
d'être  brûlés  : 

Ne  daigna  lors  cors  oublier  ; 
As  Clers  rendi  lor  guerredon, 
Et  lor  rjari  de  l'arson. 
Tout  remesent  bel  et  entier  ; 
Ains  li  flamme  n'i  pot  touchier. 

Vie  de  S"  Kalcrine,  MS.  de  Sorb.  chiff.  LX,  col.  30. 

On  s'est  figuré  les  Diables  occupés  en  Enfer  à 
faire  éprouver  successivement  aux  damnés  «  les 
«  effets  du  feu  et  ceux  de  la  glace,  la  froidure  et 
«  Varsion.  »  (Voy.  Fabl.  ms.  du  R.  n"  7218,  fol.  222.) 

Après  la  grant  arson,  si  èrent  plus  frilous. 

Rora.  de  Tiebaul  de  MaiUy,  MS.  de  N.  D.  n-  E.  6,  fol  Hl. 

Il  semble  qn  arsion  ou  arson  signifioit  les  efTets 
de  l'ardeur  du  feu,  tels  que  l'incendie,  l'embrase- 
ment, lorsqu'on  disoit  faire  arson,  véer  arson ,  etc. 
Dans  les  principes  abusifs  du  système  féodal,  les 
Seigneurs  étant  légitimement  en  guerre  les  uns 
contre  les  autres,  pouvoient  se  faire  un  jeu  réci- 
proque des  embrasemens,  des  incendies,  des 
arsons.  C'étoit  un  privilège  de  Gentilhomme,  d  en 
être  quitte  pour  une  amende.  «  Tout  soit-il  ainssint 
«  nue  li  Gentilhoumes  par  nostre  Couslume  puis- 

«  sent  guerroier l'un  l'autre,  hors  de  trieve, 

«  horsde  asseurement;  pourche  ne  pueent  ilpas... 
«  ardoir  li  uns  seur  l'autre;....  et  se  il  ardent  liuns 
«  seur  l'autre,  il  meffont  aux  Seigneurs  de  qui  les 
«  choses  sont  tenues  ;  par  quoi  ils  sont  tenus  a  res- 

«  torer   les   damages    au    Souverain et    a   li 

«  amander  de  l'amande  de  soixante  livres.  Mes 
«  arson  fere....  hors  de  tans  de  guerre,  empoite 
«  ulus  grant  peine  ;  car  li  cors  en  dessert  à  estre 
«  justiciez.  »  (Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis, 
chap.  xxxui,  p.  173.) 

Maisons  et  Villes  fist  ardoir  : 
Le  feu  en  pout  le  Roi  veoir. 
Puis  fist  à  Mante  un  ar.fon  ; 
La  Ville  mist  tout  en  charbon. 

Roman  de  Rou,  MS.  p.  Mi. 

Les  arsons  et  les  proies  fist  véer  et  lessier 

Ibld.  p.  eo* 

Peut-être  trouvera-t-on  qu'en  ce  dernier  vers, 
arson  signifie  brûlement,  action  de  mettre  le  feu, 


(1)  C'est  un  dérivé  de  iter,  comme  erra:  il  les  fit  brûler  grand'crre,  belle  erre.  (N.  k.) 


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AR 


de  brûler,  d'incendier,  comme  dans  Britton.  (Loix 
d'Angleterre,  fol.  16.  —  Voy.  Arseire.) 

VARIANTES  : 
ARSION.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  222. 
Arçon.  Rom.  d'Alexandre,  MS.  du  R.  n»  6987,  fol.  -198. 
Arson.  S'. -Bernard,  Serra.  Fr.  MSS.  p.  109. 
Arsoun.  Britton  des  Loix  d'Angleterre,  fol.  16,  V» 


Ai'sls,  subs   masc.  Chose  brûlée,  embrasée, 
incendiée.  Brûlé,  odeur  de  brûlé. 

On  a  lemarqué,  à  la  fin  de  la  conjugaison  du 
verbe  arder,  plusieurs  temps  et  modes  qui  semblent 
attester  l'existence  de  l'ancien  verbe  arsir,  formé 
comme  arser,  du  participe  ars,  en  latin  arsus.  (Voy. 
Arser  el  Arder.)  Peut-être  jugera-t-on  cette  exis- 
tence suflisammenl  prouvée  par  celle  d'arsis,  que 
l'on  croit  être  le  participe  ù'arsir,  qui,  dans  la  Cou- 
tume de  Saint-Palais  signifie,  comme  substantif, 
la  même  chose  qu'arsiiis  dans  quelques  autres 
Coutumes,  des  bois  brûlés?  (Voy.  La  Thaumassière 
Coût.  loc.  de  Berry  et  de  Lorris,  p.  113  et  117.)  Il 
seroit  possible  qu'arsins,  au  moins  en  ce  sens,  ne 
différât  d'flrsîs  que  par  le  changement  de  la  voyelle 
simple  en  voyelle  nasale;  changement  qui  étoit 
très-ordinaire  dans  l'ancienne  prononciation.  (Vov 
Arsin.)  ^     •'' 

L'acception  d'arsins,hois  brûlés, étoit  une  accep- 
tion particulière  d'arsis,  qui  signilioit  en  général 
choses  brûlées,  embrasées,  ince'ndiées.  Guillaume- 
le-Conquerant  ayant  réduit  en  cendres  la  ville  de 
Mantes,  éprouva,  en  la  traversant  à  cheval,  un  acci- 
dent qui  causa  sa  mort. 

Parmy  la  ville  trespassout 
Sour  un  cheval  qui  moult  amout 
En  un  ai-Sir  mist  ses  deu.x  piez,  etc. 

Rom.  doRou,  MS.  p.  384et385. 
Raportent  gons  et  verteveles , 
Verrouz  et  clous,  et  tiex  bereles 
Qu'il  orent  trouvez  en  la  cendre 
Des  arsiz,  et  les  veulent  vendre. 

G.  Guiar!,  MS.  fol.  335,  R'. 

Anciennement,  la  signification  d'arm  étoit  la 
même  que  celle  du  participe  brûlé,  pris  substanti- 
vement dans  l'expression  usitée  sentir  le  brûlé 
lorsqu  en  ce  sens  on  disoil,  flairer  l'arsiz.  ' 

Es  nés  des  flamens  plus  prochaines 
Où  de  gent  ot  ensemble  tant, 
Les  vont  embrasées  gelant, 
Si  que  le  plus  d'eus  rni-si:  ilairent. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  316,  V-. 

On  dit  à  Beaune,  que  le  vin  seul  Varsi,  quand  il 
a  un  certain  goût  brûlé.  (Ménage,  Dict.  Etym.) 

VARIANTES    : 
ARSIS.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col   735 

Arseiz.  La  Thaumassière,  Coût.  loc.  de  Berrv  d  113 
Arsiz.  G.  Guiart,  MS.  fol.  81,  R» ,  et  301   V 
Arssiz.  Id.  ibid.  fol.  81,  R».  '      ' 

Xn,subst.  masc.  et  fém.  Culture  de  l'esprit  pro- 
duit de  cette  culture;  Logique,  Rhétorique,  etc 
Moyen  d  opérer  de  faire  valoir  les  choses  en  opé- 
rand  esprit  ou  de  corps ,  habileté,  adresse,  finesse 
subtilité,  artilice    Produit  de  la  culture  des  talens 

il  paroitroit   assez  naturel  que  le  nom  de    la 

dans  celles  du  ^ord  Airtha,  Aerd,  Earth,  eûtdésigné 


a  culture  à  laquelle  celte  mère  nourricière  de  tous 
les  -Etres  doit  sa  fécondité.  Ainsi  le  mol  art,  ars 
en  latin,  signifieroit  culture  de  la  terre,  le  premier 
des  arts;  art  sans  lequel  tous  les  hommes,  esclaves 
de  la  nécessite  de  pourvoir  à  leurs  premiers  besoins 
en  travaillant  de  corps,  auroient  vécu  toujours 
courbes  vers  la  terre,  sans  possibilité  de  s'élever 
en  travaillant  d  esprit,  ù  la  sphère  du  Génie  créa- 
teur des  a;-/s  libéraux,  des  bons  arts,  des  arts  par 

On  a  dit,  en  parlant  de  Clodion,  roi  des  Francs 
qu  II  mil  prcudom  el  sages  des  ars;  en  parlant  du 
philosophe  Cahstbène,  qu'il  étoit  hommi  de  lès 
bons  ars  (Voy.  Ph.Mouskes,  ms.  p.  lo.  -  Triomphe 
desneuf  preux,  p.  191.)  ■lumpiid 

J'estois  assis  au  milieu  des  Neuf  Sœurs  • 
Si  commença  à  chanter  l'une  d'elles-       '    " 
Assemblez-vous,  dit  elle,  6  Professeurs 
Des  bonnes  Arts  et  des  Sciences  belles. 

Poès.  de  M.  de  S'-Gelais,  p.  77. 

Ces  bons  arts,  ou  bonnes  arts  comme  l'on  disoit 
eu  égard  au  genre  de  ce  mol  dans  la  langue  latine 
éloient  sans  doute  \esArts  libéraux,  ains'i  nommés' 
dit  un  de  nos  anciens  Poètes,  ..  pour  ce  que  ancien- 
«  nemen  nul,  se  il  nestoit  libéral,  c'est  ù  dire  fils 
«  de  noble  homme  et  aslrail  de  noble  lignie,  n'osoit 
«  aprandre  aucun  d'iceulx  ars.  »  (Vov.  Eust 
Desch.  poes.  mss.  p.  391.)  ^ 

■  ,t>uoique  la  culture  de  l'esprit  ait  réellement  été 
inlerdile  ii  1  Homme  que  le  despotisme  féodal  asser- 
vissoit  a  la  culture  de  la  terre,  il  semble  plus  vrai 
de  dire  qu  en  général  les  Arts  libéraux  sont  les 
Arts  utiles  et  agréables,  dont  la  profession,  quel- 
quefois  lucrative  sans  être  servile,  rend  libre 
liomme  ne  pauvre  et  roturier  qui  s'en  occupe,  et 
I  associe  à  la  liberté  honorable  de  l'Homme  né  noble 
ou  riche  qui  s  en  amuse. 

En  honorant  la  culture  de  l'esprit  d'une  liberté 
SI  propre  à  consoler  du  défaut  de  fortune  et  de 
naissance,  la  Société  n'admet  à  cet  honneur  que  les 
Arts  pour  lesquels  elle  se  passionne,  par  le  senti- 
ment de  plaisirs  ou  de  besoins  dont  la  salisfaction 
ou  la  jouissance,  est  le  produit  de  la  culture  de 
1  esprit  inventeur  de  ces  mêmes  Arts. 

Les  besoins  et  les  plaisirs  pour  la  jouissance  et 
la  sutislaction  desquels  l'esprit  invente  et  travaille 
e  aiU  aussi  variés  dans  les  Sociétés  que  les  causes 
physiques,  politiques  el  morales  qui  en  modifient 
le  seiilimenl,  el  chaque  société  se  passionnant  na- 
turellement, d'après  cette  modification,  pour  les 
Arts  qu  elle  sent  lui  être  plus  agréables  et  plus 
utiles,  on  conçoit  qu'à  raison  des  causes  qui  diffé- 
rencient ce  sentiment  ou  cette  passion,  les  Arts  li- 
béraux aient  été  différens  pour  chaque  Société  ■  que 
1  une  a  pu  honorer  comme  libéral,  un  art  que  l'au- 
tre dédaignoit  comme  servile.  On  sait  de  plus  que 
chaque  Société,  aussi  variable  dans  sa  passion 
pour  certains  or/s  que  les  causes  mêmes  de  cette 
passion,  a  souvent  transporté  des  uns  aux  autres 
les  qualifications  d'Arts  serviles  et  d'.i/'/s  libéraux, 
ennoblissant  ceux  qu'elle  avoil  avilis  et  avilissant 
ceux  qu  elle  avoit  anoblis. 


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C'est  ainsi,  par  exemple,  que  rEriulition,  aussi 
estimée  dans  le  xvr  siècle  qu'elle  l'est  peu  dans 
le  xviii'  où  l'ulililé  eu  est  moins  sentie,  évite  ù 
peine  l'espèce  de  mépris  auquel  l'expose  une  pas- 
sion p.  es{|ue  exclusive  pour  la  Philosophie,  dont 
les  llcau.i'-arls^dn  \\i\'  siècle  ont  accéléi'é  le  règne 
préparé  par  l'Érudition  même.  C'est  ainsi  que  la 
Noblesse,  éclairée  par  celte  même  Philosophie  sur 
les  avantages  de  la  culture  de  l'esprit,  se  montre 
jalouse  dcVartager  des  travaux  qui,  dans  les  siècles 
d'une  ignorance  dont  elle  s'est  longtemps  enor- 
gueillie, lui  ;  aroissoient  une  mu&anUe,  un  amuse- 
ment frivole  et  indigne  d'un  Cenlilhomme,  dévoué 
par  sa  naissance  aux  travaux  militaires,  aux  tour- 
nois, aux  duels,  à  Y  Art  militante.  On  pourroit 
croire  que  l'expression  Art  militante  signifie  Y  Art 
militaire,  aussi  essentiel  à  la  défense  des  Sociétés, 
que  l'Agriculture,  le  premier  des  arts,  l'est  à  leur 
subsistance,  si  l'on  n'étoit  averti  que  le  fanatisme 
du  point  d'honneur  en  a  abusé  pour  signifier  les 
duels,  les  gages  de  bataille,  qui  ont  trop  souvent 
privé  la  Patrie  de  ses  plus  braves  défenseurs. 
«  Moult  de  notables  hommes  se  cognoissans  en 

«  Yart  militante s'esmerveilloient  que  leurs 

«  devant-passez  n'avoient  plus  escrit  de  tout  ce 
«  qu'il  appartient  à  faire,  louchant  ce  pesant  fait 
a  de  gage  de  bataille.  »  (llardouyn  de  la  Jaille,  du 
Champ  de  bataille,  fol.  57.) 

On  flatloit  l'orgueilleuse  ignorance  des  Nobles, 
en  nommant  Musards  ces  hommes  qui,  exclus  de 
l'honneur  de  servir  la  Patrie  en  exposant  leurs 
corps  pour  sa  défense,  la  servoient  peut-être  aussi 
utilement  en  cultivant  leur  esprit,  en  s'adonnant 
aux  Arts  et  Sciences  par  lesquelles  Euslache  Des- 
champs, poète  du  xiv  siècle,  disoit  le  Monde  gou- 
verné. Ces  Arts  et  Sciences,  qu'il  nomme  Arts 
libéraux,  étoient  la  Grammaire,  la  Logique,  la 
Rhétorique,  la  Géométrie,  l'Arithmétique,  la  Musi- 
que et  l'Astronomie.  (Voy.  Eust.  Desch.  Poës.  mss. 
p.  394.) 

Il  semble  que,  non  moins  sensibles  à  l'utilité  de 
la  Médecine  qu'à  celle  de  l'Arithmétique  ou  de  la 
Grammaire,  nos  Ancêtres  auroient  dû  l'admettre 
au  nombre  des  Arts  libéranx,  comme  elle  paroit 
admise  à  celui  des  Arts  spéculatifs,  des  Arts  de 
théorie,  dans  une  Ordonnance  del3G0,  parlaquelle 
le  roi  Jean  octroyoil  aux  Juifs  «  que  ils  pussent 
«  faire  et  exercer  leurs  mestiers,  leur  fait,  cour- 
«  rateries  et  autres  euvres  ;  ou  Ars  spéculatives, 
«  pratiques,  méchaniques,  ou  autres.  »  (Voy.  Ord. 
T.  lll,  p.  'i7G.)  L'Editeur  observe  dans  une  Note, 
qu'entre  autres  Arts  spéculatifs  exercés  par  les 
Juifs,  la  Médecine  étoit  leur  science  favorite  ;  science 
que  probablement  on  a  jugée  trop  conjecturale 

§our  mériter  le  nom  û'Art.  On  s'occupa  .sans  doute 
u  moyen  d'en  prévenir  l'abus,  en  obligeant  les 
Juifs  qui  vouloient  exercer  la  profession  de  Méde- 
cin, à  pi'endre  leurs  degrés  dans  les  Universités. 

Quelle  que  soit  une  science,  pratique  ou  spé- 
culative, quel  que  noble  qu'en  soit  l'objet,  on  a  pu 
la  désigner  par  le  mot  Art,  comme  étant  le  produit 


de  la  culture  de  l'esprit.  Aussi  voyons-nous  que  les 
hautes  Sciences,  telles  que  l'Astronomie,  la  Géomé- 
trie et  l'Algèbre,  qui  font  partie  des  Mathématiques, 
ont  été  compiises  sous  la  dénomination  générale 
d'Arts  lihéi'au.v,  ayec]([  Logique,  la  Rhétorique  et 
la  GraiiiHiairc,  qui  dans  les  Ecoles  ont  été  et  sont 
encore  les  Arts  par  excellence. 

On  sait  que  les  Mathématiques  sont  la  science, 
non-seulement  des  quantités,  mais  aussi  des  pro- 
portions. Le  sentiment  des  avantages  qui  résultent 
de  cette  Science  des  proportions,' pour  l'utilité  et 
l'agrément  des  Sociétés,  est  une  passion  à  laquelle 
la  Musique,  la  Peinture,  la  Sculpture,  l'Architecture 
civile  et  militaire,  la  Marine,  et  autres  Arts  à  la 
perfection  desiiuels  les  Mathématiques  sont  essen- 
tiellement nécessaires,  doivent  la  qualification 
d'.tr/s  libéraux,  quoiqu'ils  soient  lucratifs  et  en 
partie  mécani(iues;  quoiqu'ils  soient  Ars  prof fi ta- 
bles, comme  on  lit  dans  Rob.  Estienne  et  Nicot, 
Dict. 

En  se  conformant  à  la  distinction  usitée  des 
Arts  et  Sciences,  on  dira  que  la  Théorie  caractérise 
les  Sciences,  lors  môme  que  le  Savant  fait  succéder 
la  Pratique,  comme  la  Pratique  caractérise  les  Arts, 
lors  même  que  l'Artiste  fait  précéder  la  Théorie. 
Qu'un  Art  soit  agréable  et  utile,  que  l'utilité  et 
l'agrément  de  ce  même  Art  soient  sentis,  il  ne  sera 
néanmoins  Art  libéral,  qu'autant  que  la  Théorie  en 
anoblira  la  Pi'atique,  de  façon  à  exciter  et  justifier 
la  passion  de  la  Société  aux  yeux  de  laquelle  il 
paroîtra  moins  un  ouvrage  servile  de  la  main, 
que  le  produit  libre  delà  culture  de  l'esprit.  C'est 
sans  doute  faute  d'être  assez  affectés  de  la  théorie 
qui  préside  aux  Mécaniques,  à  une  science  qui, 
comme  partie  des  Mathématiques,  est  aussi  le  pro- 
duit de  la  culture  de  l'esprit;  c'est  faute  de  n'en 
voir  que  la  pratiiiue,  communément  abandonnée  à 
des  hommes  de  qui  l'intelligence  se  borne  aux 
seuls  ouvrages  de  la  main  et  du  corps,  que  nous 
avons  dit  Arts  méchaniques,  par  opposition  aux 
Arls  libéranx;  assimilant  ainsi  les  Arts  que  Robert 
Estienne  et  Nicot  ont  défini.  Arts  qui  se  font 
d'esprit  et  de  la  main,  à  des  Arts  serviles,  tels 
qu'étoient  probablement  ceux  qu'anciennement  on 
nommoit  Arts  des  mains. 

Ces.4?7s,que  le  préjugé  avilit  et  dédaigne  comme 
servîtes,  ont  sur  les  Arts  libéraux  l'avantage  réel 
d'être  plus  universellement  et  plus  constamment 
utiles  et  nécessaires;  par  conséquent  celui  d'assu- 
rer, en  tout  temps  et  en  tous  lieux,  à  Y  Artisan  qui 
travaille  pour  les  besoins  essentiels  de  la  Société, 
une  subsistance  au  soin  de  laquelle  YArtiste  et 
même  le  Savant  font  quelquefoisîe  sacrifice  de  leur 
liberté.  C'est  pour  obvier  h  la  nécessité  de  ce  sacri- 
fice, que  Rousseau,  philosophe  enthousiaste  d'une 
indépendance  peut-être  idéale,  auroit  souhaité 
qu'en  faisant  apprendre  un  Métier,  un  Arides  mains 
aux  enfans,  ù  ceux  même  qui  nés  riches  peuvent 
mourir  pauvres,  on  leur  procurât  les  moyens  de 
subsister,  en  n'obéissant  qu'à  la  Nature  qui  nous 
sollicite  au  travail  par  le  désir  de  vivre. 


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L'idée  de  proposer  l'apprentissage  d'un  Métier, 
d'un  Art  des  muins,  comme  le  moyen  le  plus  propre 
à  nous  tranquilliser  sur  la  conservation  de  notre 
liberté,  n'est  pourtant  pas  une  de  ces  idées  singu- 
lières qui  n'appartiennent  qu'à  notre  Philosophe 
moderne;  elle  lui  est  commune  avec  un  ancien 
Poëte  moral  qui  a  dit  : 

....  Eureux  est  qui  aprent,  dés  s'enfance, 
A  servir  Dieu,  et  aucun  Art  des  mai7is 
Pour  soi  chevir  et  vivre  à  sa  plaisance. 

Eust.  Desch.  Poés,  MSS.  p.  261,  col.  1. 

L'art,  comme  produit  de  ia  culture  de  l'esprit, 
est  le  moyen  d'en  étendre  les  l'acultés  naturelles  et 
de  les  perfectionner,  moyen  général  qu'on  parti- 
cularise en  le  nommant  Logique,  Rhétorique,  etc. 
On  a  désigné  l'abus  de  ces  mêmes  Arts,  de  ces 
moyens  particuliers  d'ajouter  à  la  Nature,  lorsqu'en 
se  plaignant  de  ce  que  trop  souvent  on  lui  préfère 
l'Art,  on  a  dit:  «  A'ous  eschivons  tous  à  elle  ;  nous 
«  la  laissons  dormir  et  chommer,  aimans  mieux 
«  mandier  ailleurs  nostre  apprentissage,  recourir  à 
"  l'eslude  et  à  r.4?'^  que  de  nous  contenler  de  ce 
«  qui  croist  chés  nous...  Nous  fermons  en  plein 
«  midy  les  fenesires  et  allumons  les  chandelles. 
■'  Geste...  folie  vient  d'une  autre  qui  est  que  nous 
«  n'estimons  point  les  choses  selon  leur  vraye  et 
«  essentielle  valeur,  mais  selon  la  monstre,  la 
«  parade,  et  le  bruict.  »  (Sagesse  de  Charron, 
p.  252  et  253.) 

Dans  l'éloge  que  le  même  Auteur  fait  de  Socrate 
et  d'Arislote,  l'opposition  de  VArt  à  la  Nature 
marque  la  différence  de  leur  façon  de  philosopher  : 
«  Un  grand  maistre  et  admirable  docteur  en  la  ^a- 
«  ture  a  esté  Socrates,  comme  en  VArt  et  Science 
«  Aristole.  Socrates  par  les  plus  simples  et  naturels 
«  propos,    par   similitudes   et  inductions  vulgai- 

>'  res, fournit  des  préceptes  et  règles  de  bien 

«  vivre que  tout  Vart  et  science  ne  syauroit 

«  inventer.  »  (Sagesse  de  Charron,  p.  252.) 

11  est  évident  que  ÏArt  ainsi  opposé  à  la  Nature, 
signifie  en  général  culture  de  l'espril,  produit  de  la 
culture  de  l'esprit,  moyen  qui  en  facilite  les  opé- 
rations naturelles  el  les  dirige,  tel  que  la  Logique, 
la  Hhétorique,  etc.  Si  la  Logique  a  souvent  offusqué 
la  raison  naturelle  qu'elle  devoit  éclairer,  la  Rhéto- 
rique l'a  souvent  trompée  en  lui  faisant  illusion. 
Aussi  Montaigne  a-t-il  dit  d'un  Rhétoricien  qui 
avouoil  que  «  son  mestier  estoit  de  choses  petites 
«  les  faire  paroistre  et  trouver  grandes:  On  luy 
«  eust  fait  donner  le  fouet  à  Sparte,  de  faire  profes- 
1  sion  d'un  Art  piperesse  et  mensongère.  »  (Essais 
de  Montaigne,  T.  l,  p.  517.) 

Quel  que  soit  un  Art  libéral  ou  servile,  quelle 
qu'en  soit  la  dénomination,  l'on  peut  dire  qu'il 
est  un  moyen  de  faire  servir  la  Nature  aux  besoins 
et  aux  plaisirs  de  l'homme;  un  moyen  de  faire 
valoir  et  d'améliorer  les  talens  naturels  du  corps 
et  de  l'esprit  en  les  cultivant;  comme  le  premier 
des  Arts,  la  culture  de  la  terre  est  le  moyen  d'en 
rendre  les  productions  naturelles,  meilleures  et 
plus  fécondes. 

L'habileté,  l'adresse,  la  finesse,  la  subtilité,  sont 


autant  de  moyens  par  lesquels  on  opère  conformé- 
ment à  ses  idées,  à  ses  vues.  En  regardant  ces 
moyens  d'opérer,  et  autres  qui  s'acquièrent  par  la 
culture  des  talens  naturels  de  l'esprit  et  du  corps, 
comme  le  produit  de  celte  même  culture,  on  les  a 
désignés  tous  en  général  par  le  nom  d'Art,  et  l'on 
a  dit  d'uD  homme  habile,  adroit  à  faire  une  chose, 
qu'il  «  avoit  main  eiai't  à  la  faire.  "  (Voy.  Poës.  de 
Crétin,  p.  G'i.) 

Pour  signifier  que  l'habileté,  la  souplesse,  le 
savoir-faire,  sont  les  moyens  de  tirer  parti  de  la 
Société,  on  a  dit  proverbialement:  «  F^'homme  qui 
«  a  de  l'ylr^  possède  sa  part.  «  (Cotgrave,  Dict.) 

Ces  moyens,  lorsqu'ils  servoient  à  tromper  et 
à  faire  des  dupes,  lorsqu'ils  nuisoient  à  la  Société, 
étoient  de  fins  Arts,  comme  on  lit  dans  les  Marg. 
de  la  Marguerite,  (fol.  H5,  V°.)  Ils  étoient  de  maies 
Arts,  de  ''mauvais  Arts,  ou  tout  simplement  des 
Arts  dont  on  désigne  aujourd'hui  l'abus,  en  les 

nommant  artifices.    «   Li  très-voisols   serpenz 

«  les  ockesons  de  péchiet  apparaillel; par  mil 

«  Arz  por  grever  ne  finel  de  tempteir.  »  (S'  Bern. 
Serm.  fr.  mss.  p.  330.)  «  Tous  ceux  à  qui  les  Arts 
«  de  l'un  n'estoient  encore  bien  ogneuz,  eussent 
«  imputé  le  retardement  de  la  S"  expédition  à 
«  l'aulre.  »  (Du  Bellay,  Mém.  liv.  ix,  fol.  287.) 
«  Tant  estoit....  plain  de  mauvais  Ar t,i\ueoncques 
«  en  Gannelon  n'en  eust  autant.  »  (Ger.  de  Nevers, 
part.  I,  p.  7.) 

Quant  le  vit  venir,  li  VieiUars 

Qui  plein  estoit  de  maies  Aris  ;  etc. 

Fabl.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  7,  V  col.  3. 

La  famé  tient  bien  l'orne  pour  fol  et  pour  m\isart... 

Tant  corn  a  que  donner,  le  lobe  par  son  Art  ; 

Et  quant  n'a  que  donner,  cel  conmande  à  la  hart. 

Fabl.  MS,  du  T..  n"  7C15,  fol.  140,  R*  col.  i. 

On  croit  avoir  suffisamment  prouvé  qu'un  Art, 
quel  qu'il  soit,  est  le  produit  de  la  culture  des 
talens  naturels  de  l'esprit  et  du  corps  ;  que  ce 
produit  est  un  moyen  d'opérer  d'une  façon  plus  ou 
moins  conforme  a  la  Nature;  (}u'enfin  les  accep- 
tions particulières  du  nom  Art,  sont  toutes  relatives 
à  l'idée  générale  de  moyen.  En  effet  VArt,  dans  le 
sens  do  Grammaire,  de  Logique,  est  le  moyen  de 
perfectionner  la  faculté  naturelle  de  parler,  de 
raisonner,  comme  il  est  un  moyen  de  tromper, 
dans  le  sens  d'artifice,  finesse;  un  moyen  de  pré- 
voir, de  se  conduire  avec  prévoyance,  dans  l'ex- 
pression se  conduire  par  art  d'avis.  «  Je  leur  iray 
«  au  devant  à  puissance  que  je  m'y  conduise  par  art 
«  d'avis  et  de  très-bonne  ordonnance,  pour  eux 
«  combattre.  »  (Froissart,  Vol.  IV,  p.  230.) 

Enfin,  les  moyens  de  subsister  étant  assez  géné- 
ralement le  produit  des  talents  cultivés,  il  est 
possible  que  par  cette  raison  l'on  ait  dit  qu'un 
homme  est  d'un  Art,  pour  signifier  qu'il  cultive  un 
talent,  qu'il  subsiste  au  moyen  du  talent  qu'il 
cultive.  C'est  par  allusion  aux  effets  de  cette 
jalousie  trop  naturelle  aux  rivaux  dans  les  yl ris, 
dans  la  culture  des  mêmes  talens,  qu'on  a  dit  pro- 
verbialement. «  L'Art  est  moqué  de  l'Art.  »  (Voy, 
Nuits  de  Straparole,  T.  II,  p.  441.) 

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VARIANTES    : 
ART.  Orth.  subsist.  Rob.  Est.  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Ars.  (Plur.)  l'h.  Mouskes,  MS.  p.  10. 
Arz.  (Plur.)  S'.-Bern.  serni.  Fr.  MSS.  p.  330. 

Artelior,  subst.  7nasc.  Atelier.  Dans  un  tilre  latin 
de  l'an  -IK'.n.  artiliaria  signitie  atelier.  (Voy.  D. 
Carpeiitier,  Suppl.  (Jloss.  lat.  de  Du  Gange,  T.  I, 
col.  'Ml.)  Celte  signification  (Varliliaria  et  l'ortho- 
graplie  aitelier  (i),  paraissent  indiquer  l'origine  et 
l'étymologie  de  notre  mot  atelier,  qu'anciennement 
on  écrivôit  «  astelier,  asteUier  ;  lieu  où  l'on  s'oc- 
«  cupe  de  certains  Arts  ;  lieu  où  l'on  pose  les  outils 
«  et  machines  propres  à  ces  mêmes  Arts.  »  Il  sem- 
ble que  ce  soit  relativement  ii  cette  dernière  accep- 
tion, qu'en  parlant  de  l'ancienne  façon  d'honorer  le 
passage  de  nos  Rois  dans  les  Villes  de  leur  royaume, 
on  a  dit  qu'au  lieu  de  tapisseï'  les  rues  «  on  les 
«  paroitd'rt//d//ers  bien  garnis  d'armes  el  d'espées.» 
(Savaron,  de  l'Espée  frànçoise,  p.  16.)  C'est  dans 
un  sens  relatif  à  la  première,  que  l'on  aura  dit 
tlguréuient  :  »  Arislote  el  les  autres  Philosophes 
«  tiennentque  le  vray  passage  pour  poster  à  la  mort, 
«  est  de  s'exercer  souvent  à  Varlcliei'  de  Venus.  » 
(Contes  de  Cholières,  p.  114  ou  115.) 

VARIANTES  : 
ARTELIER.  Contes  de  Cholières,  p.  114. 
.ASTELIER.  Rabelais,  T.  III,  p.  2G4. 
ASTELLiER.  Colgrave,  Dict. 
Attelier.  Savaron,  de  l'Espée  Françoise,  p.  22. 
Attellier.  Id.  ibid.  p.  10. 
Hastellier.  Gr.  Cowt   de  France,  livr.  I,  p.  58. 
Hatelier.  Cotgrave,  Dict. 

Arteus,  adj.  Qui  opère  avec  art,  adresse,  habi- 
leté, prudence,  etc.  Qui  opère  avec  artiflce,  ruse, 
finesse,  etc. 

On  n"étoit  qu'adroit,  habile,  prudent,  lorsqu'on 
étoii  arteus  sans  être  blâmable. 

MoiiU  parest  fiers  et  merveillox, 
Pénible  de  guerre,  et  arlox. 

Parlon.  de  Blois.  MS.  de  S.  Geim.  fol.  161.  V.  col.  2. 

sont  preu  et  arlox. 

Et  Chevalier  moult  bon,  et  d'armes  engignox. 

Ibid.  fol.  173,  V  col.  2. 

Si  l'on  ëloit  blâmable  en  opérant  avec  art,  la 
signification  ù'arteus  étoil  la  même  que  celle  de 
mal-arleus,  artificieux,  rusé,  fin,  etc. 

Et  Gondredos  li  vielz  arlox. 

Parlon.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  l.'iS,  R°  col.  2. 

Cruiex,  et  fel,  et  mal-arleus. 

IbiJ.  fol.  154,  R-  col.  2. 

Moult  mal-artotis 

Et  de  parler  moult  engignous, 
Bien  sçeot  troubler  une  raison, 
Et  esmouvoir  une  tençon. 

Rom.  de  Brul,  .MS  fol.  18,  R'  col.  2. 

Enfin,  dans  un  sens  analogue  à  celui  de  l'adjectif 
composé  inal-arteus,  on  disoit  d'un  homme  à  qui 
l'artilice  étoit  habituel,  qu'il  éloit  Enurté  de  mal  ou 
Mal-cnarlé.  (Fabl.  ms.  de  S'-Cerm.  fol.  G  et  7.  — 
Voy.  Art.) 


VARIANTES  : 
ARTEUS.  Parton.  de  Blois,  MS  de  S'.-Germ.  fol.  IS-i. 
Artous.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  18,  R°  col.  2. 
Artox.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'.-Germ.  fol.  153. 

Artialiser,  vfr/;^.  Rendre  artificiel.  On  voudroit 
pouvoir  encore  dire  avec  Montaigne,  qu'altérer  la 
Nature  par  l'Art,  c'est  Varlialiser,  la  rendre  arti- 
ficielle. «  IvCS  Sciences  traillent  les  choses  trop 
«  finement,  d'une  mode  artificielle  et  différente  de 

"  la  commune  et  naturelle Sijestois  du  mes- 

«  lier,  je  naturaliserois  l'Art  autant  comme  ils 
"  artialiscnt  la  Nature.  «  (Essais  de  Montaigne, 
T.  III,  p.  157. —  Voy.  Art.) 

Article,  subst.  mase.  et  fém.  Chose  jointe  à  une 
autre,  point  de  croyance,  article  de  foi.  Moyen  de 
fait  ou  de  droit.  Chose  distincte  d'une  autre,  point 
distinclif.  Terme  de  Grammaire. 

Eu  termes  d'Anatomie,.  la  signification  d'article, 
joinlure,  en  latin  articulus,  est  aujourd'hui  aussi 
générale  que  l'éloit  anciennement  celle  d'arteil, 
altéré  dans  l'orthographe  orteil.  Il  semble  qu'en 
celle  signilicaliou  le  mol  article  ait  été  substitué  à 
celui  û'hrteil,  lorsque  l'acceplion  d'arteil  a  été  res- 
treinte à  celle  d'article,  joinlure  de  doigt  de  pied. 
(Voy.  Artueil.) 

Il  est  probable  que  d'après  l'idée  des  articles, 
des  points  où  se  joignent  les  unes  aux  autres  diffé- 
rentes parties  d'un  corps,  comme  parties  intégrantes 
d'un  tout,  on  aura  nommé  figurément  article,  un 
point  de  croyance  en  matière  de  Religion,  une 
vérité  faisant  partie  de  la  totalité  de  celles'qu'il  faut 
croire,  el  que  l'on  désigne  encore  aujourd'hui 
comme  étant  jointes  les  unes  aux  autres,  en  les 
nommant  Articles  de  foi. 

Trés-doulx  Dieu,  com  cy  a  Irèsdoulce  vision, 
Oii  l'en  voit  face  à  face  Dieu  sans  division  !... 
Sacreniens  et  Article  seront  là  descouvert, 
Qu'à  nostre  congnoissance  n'y  aura  riens  couvert. 

i.  de  Meung,  Cod.  vers  1833-1846. 

En  rassemblant  dans  un  Ecrit  les  moyens  de  fait 
ou  de  droit  qu'on  a  pour  demander  ou  pour  défen- 
dre en  justice  civile  ou  criminelle,  on  en  forme  un 
tout  dont  le  molarlicle,  (luelquefois  féminin,  signi- 
fioil  les  parties  jointes  les  unes  aux  autres,  comme 
il  signifie  encore  les  parties  d'un  mémoire,  d'un 
compte,  d'un  traité,  ce  qui  fait  partie  d'une  vérité, 
d'un  raisonnement,  d'une  proposition,  etc.  Dans  le 
style  de  notre  ancienne  procédure,  «  prendre 
articles  contre  quelqu'un,  »  c'étoit  saisir  les  moyens 
de  fait  ou  de  droit  par  lesquels  on  avoit  action 
contre  lui  :  donner  par  écrit  ces  mêmes  moyens, 
c'étoit  faire  articles.  «  Luy  feut  respondu  qu'il  se 

'>  conlentasl  de  raison Raison'?  (dist  Janotus) 

"  nous  n'en  usons  poinct  céans.  Traistres  malheu- 

«  reux,  vous  ne  valez  rien A  ces  mois priniireni 

«  articles  contre  luv.  I.uy  de  l'aullre  costé  les  feit 
..  adjourner.  »  (Rabelais,  T.  I,  p.  127  el  128.)  «  Les- 
«  dis  Evesques,  Doïen  el  Chapitre  ont  piéçà  fait 


(1)  Atelier,  encore  écrit  hastelier  par  Bernard  Palissy,  est  un  dérivé  de  haxtellœ  (pour  hastulœ,  planchettes,  dans  Isidore 
de  Séville).  L'a/e/ierest  primitivement  l'endroit  où  Ion  fabrique  les  astelles,  aujourd'hui  attelles,  lames  de  bois  employées 
pour  réduire  les  fractures  ;  le  sens  s'est  ensuite  étendu,  (n.  e.) 


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«  article,  et,  lesquelles  ne  furent  oncqnes  accordés  : 
«  depuis...  furent  bailliez  ù  nostre  dit  procureur, 
«  pour  faire  nos  raisons  à  rencontre.  «  (Ord.  T.  V, 

Lorsque  les  Parlies  appointées  en  faits  contraires 
ne  s'accordoient  point  sur  la  rédaction  de  leurs 
moyens  réciproques,  on  disoit  que  leurs  «  articles 
«  éloient  descordés.  »  Ils  étoient  accordés,  si  la 
rédaction  en  éloit  faite  de  1  accord  des  Parlies,  et  de 
manière  ù  ce  que  le  Commissaire  de  la  Cour  pût 
faire  I  Enquête  ;  autrement,  il  falloit  plaider  de  nou- 
veau et  les  faire  réditïer  par  les  Juges.  «  Souventes- 
«  fois  est  avenu  et  avient  que  quant  les  causes  sont 
«  plaidoïées  et  apoiiitées  en  faiz  contraires,  il  est 
«  avant  un  mois,  ou  deux  ou  plus,  que  les  Advocaz 
«  et  Procureurs  baillent  leurs  articles  descordez^  à 
«  la  Court  ;  et  après,  autant  de  temps  ou  plus  et 
K  communément  jusques  en  la  fin  du  Parlement, 
«  avant  qu'il  puissent  èlve  accordez-.  »  (0  d.  T.  IV, 
i<  p.  51'>.  —  Ibid.  note  (b).  Voy.  AiiTicn.ER.) 

Les  articles  qui  joi^^neul  les  unes  aux  autres  dif- 
férentes parties  du  corps,  sont  aussi  les  articles,  les 
points  qui  les  dislingnciit.  C'est  relativement  fi  cette 
deriiiè  e  idée  que,  se  figurant  un  point  dislinclif 
entre  deux  cboses  ditTérentes,  entre  la  vie  et  la 
mon,  entre  la  raison  et  la  déraison,  l'on  aura  dit 
qu'une  chose  distinguée  d'une  autre,  étoit  un  autre 
article  ;  qu'un  homme  sur  le  point  de  mourir,  étoit 
«  à  l'article  de  la  mort,  »  qu'il  agissoit  «  hors  les 
«  articles  de  raison,  «  lorsqu'en  agissant  il  s'éivar- 
toil  du  point  où  la  raison  devoit  le  fixer.  «  Trop  il 
«  avoit  fait  d'excès  de  chevaucher  par  nuict  et  par 
«  jour,  et  de  travailler  son  corps  et  son  chef  en 
•  toutes  peines,  hors  mesures  et  les  articles  de 
«  raison.  »  (Froissart,  Vol.  IV,  p.  157.) 

En  termes  de  Grammaire,  les  articles  sont  des 
particules  ou,  comme  les  a  définis  Du  Marsais  , 
«  des  adjectifs  qui  marquent  le  mouvement  de 
«  l'esprit  qui  se  tourne  vers  l'objet  particulier  de 
«  son  idée.  »  (Voy.  Principes  de  Gramm.  p.  377.) 
Les  adjectifs  de  cette  espèce  ont  été  nommés  arti- 
cles, parce  qu'ils  distinguent  avec  plus  ou  moins 
de  précision  les  individus  auxquels  on  donne  un 
nom  appellatif;  nom  qui,  sans  rt/'^«c/c,  les  présen- 
leroil  indistinctement  à  l'esprit,  comme  faisant 
masse  avec  tous  les  autres  individus  desquels  il 
exprime  généralement  la  nature.  Quelque  néces- 
saires que  soient  les  articles  pour  la  distinction  et 
la  connoissance  précise  des  objets  individuels, 
signifiés  par  un  nom  commun  à  d'autres  qu'à  ceux 
qu'on  a  en  vue,  ils  ont  été  souvent  omis  par  nos 
anciens  Ecrivains.  «  Garde-toi  de  tomber  en  un  vice 
«  commun,  mesme  aux  plus  excellons  de  nostre 
«  Langue  :  c'est  l'omission  des  articles.  »  (Œuv.  de 
.loachim  du  Bellay,  fol.  35.) 

VARIANTES  ; 

ARTICLE.  Orth.  subs.  -  J.  de  Meun,  Codic.  vers  1845. 
Article.  Ord.  T.  II,  p.  342. 

Articulément,  adv.  Par  articles.  Dans  un  sens 
relatif  à  l'acception  figurée  d'article,  »  moyen  de 
«  fait   ou  de  droit,  proposer   articulément  une 


«  demande,  c'étoit  l'articuler,  la  déduire  par  arti- 
«  clés.  »  (Pasquier,  Rech.  liv.  VIII,  p,  749.  —  Voy. 
Articuliérement.) 

Articuler,  verbe.  Faire  mouvoir  une  articu- 
lation. Donner  par  écrit  des  moyens  de  fait  ou  de 
droit.  Citer  par  articles. 

On  désigiioit  un  mouvement  d'articulation,  en 
disant  «  articuler  des  mâchoires,  ■>  dans  le  sens  où 
le  peuple  diroit  jouer  des  mâchoires.  «  Ces  dames 
«  commencèrent  d'escrimer  du  verie  et  ^'articuler 
»  des  mâchoires.  »  (Caquets  de  l'Accouchée,  p.  198.) 

Au  figuré,  -  articuler  une  demande,  "  c'étoit 
"  bailler  par  articles  et  par  écrit  des  moyens  et 
«  conclusions,  donner  par  écrit  les  moyens  justif\- 
»  califs  et  concluans  d'une  demande.  «  (Voy.  Lau- 
rière,  Gloss.  du  Dr.  fr.)  Bouteiller,  jurisconsulte  du 
.\iv'  siècle ,  étoit  si  persuadé  «  qu'articuler  une 
«  demande  par  escrit  étoit  un  des  notables  faicts 
«  patrociniens  d'advocacerie,  »  qu'il  semble  avoir 
été  à  ce  sujet  prodigue  de  leçons.  (Voy.  Articuleur.) 
Il  distingue  «  trois  manières  d'articuler  une  de- 
«  mande  par  escrit.  »  On  V articulait  par  mi-moire, 
lorsqu'en  la  demande  et  défense  de.s  Parties  ouyes 
en  jugement,  n'étant  proposé  faict  contraire  sur 
lequel  il  fallût  examiner  témoins,  tout  ehéoit  en 
droit  et  en  discrétion  ilu  Jui/e i\m  àevoli  iip/)oincter 
les  Parties  à  escrirc  par  manière  de  mémoire  leurs 
propos  et  conclusions.  Si  le  Défendeur  nioit  les 
faicts  proposés  par  le  Demandeur  sans  lui  en  oppo- 
ser de  contraires,  le  Juge  devoit  ordonner  que  la 
demande  fût  articulée  par  intendit,  que  le  Deman- 
deur l'apportât  articulée  par  majeur,  mineur,  et 
par  conclusion.  Dans  ce  cas,  nulresponsifde  Partie 
adverse  ;  mais  audition  des  témoins  produits  par  le 
Demandeur,  qui  entendoit  à  prouver  et  mettre  en 
vérité  les  faits  par  lui  articulés.  On  disoit  qu'une 
demande  éloit  articulée  par  faits  contraires,  lors- 
qu'en leur  demande  et  défense ,  les  Parties  propo- 
soient  ou  alleguoient  faicts  positifs  et  contraires, 
et  les  ojfroient  à  prouver  \y:\T  témoins.  Le  Deman- 
deur oija^it  fuit  articles  positifs,  c'est-à-dire,  ayant 
articulé  sa  demande  en  majeur,  mineur  et  conclu- 
sion, le  Défendeur  procédoit  nécessairement  en  la 
même  forme,  observant  de  faire  ses  fins,  articles  et 
conclusions  contraires  aux  comlusions,  articles  et 
fins  du  Demandeur.  Cette  procédure  ;;rtr  faits  con- 
traires, presque  en  tout  semblable  à  la  procédure 
par  mémoire,  exigeoit  le  responsif,  la  réponse  au 
positif  de  Partie  adverse.  Le  responsif,  dit  Bouteil- 
ler, doit  respondre  à  chacun  article  de  Partie  ad- 
verse, cl  iccux  ilestruire  et  antiicliiller  en  tout, 
soit  par  arr/umois  de  faicts,  soit  j)ar  argunwns  de 
Coustume,  soit  par  argumens  de  loij  ;  et  ainsi  pro- 
céder jusques  aux  deux  articles  communément  mis 
en  fin  de  tous  articles.  Par  l'un  de  ces  deux  acticles, 
on  affirmoit  que  les  choses  proposées  étoient  vraijes, 
claires  et  notoires,  et  que  la  Partie  adverse  les 
avoit  cogneues  et  confessées  estre  vrayes  en  tout 
ou  e«  partie;  par  l'autre,  on  offrait  à  prouver  les 
faicts,  en  déniant  les  faicts  de  Partie  advet-se  rece- 
vables.  (Voy.  Bouteiller,  Som.  rur.  Tit.  xxii,  pages 


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112-121.)  On  désignoit  probablement  l'omission  ou 
l'addition  du  premier  article,  aftirmatif  de  Vaccord 
des  PUi  ties  sur  la  rédaction  des  articles  de  leur 
demande  et  défense,  en  disant  que  les  articles  en 
éloienl  accordés  ou  descordés.  (Voy.  Article.) 

Il  semble  fiu'«?/ù'«/e)'  une  Coutinne ,  c'étoit  en 
citer  les  articles.  "  Aucun....  ne  doit  estre  receu  à 
«  alléguer,  poser,  ou  rtr/rci//^^?' aucunes Coustumes, 
«  autres  que  celles  qui  sont  escrites  et  arrestées.  » 
(Coût,  de  Paris,  au  Coul.  gén.  T.  I,  p.  22.)  D'ailleurs, 
ce  pouvoit  être  l'expression  dequelque  idée  relative 
à  l'obligation  de  «  se  fonder  d'aucune  majeur  de 
«  Droict  ou  de  Coustume,  ■>  lorsqu'on  articiiloit  sa 
demande,  spécialement  en  la  manière  par  faits 
contraires.  (Voy.  Bouteiller.  ubi  supra,  p.  il3.) 

Articuliérement,  adv.  Par  articles.  La  signi- 
fication A'arliculiérernent  étoit  analogue  à  celle 
d'articulément,  lorsqu'en  parlant  d'une  informa- 
tion, on  la  disoit  faite  articuliéretnent.  (Voy.  D. 
Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lai.  de  Du  Gange,  au  mot 
Articulariter.) 

Arliculeur,  sh7;s/.  masc.  Rédacteur  de  deman- 
des fondées  sur  moyens  de  droit  ou  de  fait.  Signi- 
fication relative  à  celle  «  d'articuler  une  demande 
<■  par  escripl  »  ;  ce  qui  étoit  ><  un  des  notables  lïiicts 
«  patroniciens  d'Advocacerie.  ■>  (Bouteiller.)  «  Sen- 
«  lenchiers,....  Articuleiirs,  Notaires,  Auditeurs,  et 
«  Appariteurs  desdites  Courts.  »  (D.  Carpentier, 
Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  T.  I,  col.  316;  tit. 
de  1403.  —  Voy.  Articuler.) 

Artien,  adj.  et  siibst.  masc.  Savant  dans  les 
Arts  de  l'Ecole.  Artiste. 

C'est  rel  .tivement  à  l'idée  particulière  des  Arts 
enseignés  et  appris  dans  les  Ecoles  ,   qu'ancienne- 
ment celui  «  qui  vafjuoit  à  ces  Arts  dans  les  Univer- 
«  sites  »,  qui  les  y  apprenoit,  ou  qui  les  ayant  appris 
étoit  re^îu  à  les  y  enseigner,  se  nommoit  un  Clerc 
artien,  ou  tout  simplement  un  Artien.  (Voy.  Rabe- 
lais, ubi  supra.  —  Cotgrave  et  Monet,  Dicl.) 
Chariot,  tu  as  toutes  les  Lois  ; 
Tu  es  .luif  et  Crestiens  ; 
Tu  es  Chevaliers  et  Boigois, 
Et  quant  tu  veus,  Clercs  arciens. 

FabL  MS.  du  R.  n-  7218,  foL  323,  R*  coL  2. 
Hé  !  Arcien, 
Decrestristre,  Fisicien, 
Et  vos  la  gent  Justinien,  etc. 

FabL  JIS.  du.  R.  n-  76t5,  foL  70,  V  col.  2. 

11  semble  qu'en  ces  vers,  Artien  ou  Clerc  artien, 
signifie  Maitre-ès-Arts.  On  restreignoit  néanmoins 
la  signification  â'Artien  à  celle  de  Professeur  de 
logique  et  de  philosophie,  d'Etudiant  en  philoso- 
phie, de  Logicien,  lorsqu'en  distinguant  YArtien  du 
Clerc  grammatical,  du  Grammairien,  on  disoit: 
«  Clercs  grammaticaulx  valent  bien  un  Artien.  » 
(Fabri,  Art.  de  Rhétorique,  liv.  II,  fol.  40.)  «  Seront 
■<  20  escoliers  enfent  en  Gramaire,  et  30  en  Logi- 
'■  que  et  en  Philosophie,  et  20  en  Théologie  ou  "en 
«  Divinité.  Si  aura  chascun  Gramarien  par  semaine 


«  de  sept  jours  un  s.  par.  Li  Artlien  vi  s.  par.  et  li 
«  Théologien  tin  s.  par.  »  (D.  Carpentier,  Suppl. 
Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  T.  I,col.  314;  tit.  de  1304.) 
Que  la  signification  d'Artien  ait  été  la  même  que 
celle  d'Artiste,  on  n'en  a  pour  garant  que  le  Dic- 
tionnaire do  Colgrave.  (Voy.  Art.) 

VARIANTES   : 
ARTIEN.  Rabelais,  T.  II,  p.  181. 
Arcien.  Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  323,  R»  col.  2. 
Artiien.  d.  Carpentier,  S.  Gl.  l.  de  Du  Gange,  T.  I,  col.  313 

Artifice,  subst.  masc.  Art,  effet  de  l'Art,  chose 
artificielle.  Art,  profession  d'un  Art.  Instrument 
propre  à  un  Art. 

On  a  nommé  artifice  ce  que  l'Art  humain  f;!it 
pour  ajouter  à  la  Nature,  que  tiop  souvent  on  altère 
en  voulant  la  perfectionner.  «  Les  vanités,  folies, 

«  et  desbauches  qui  sont  au  monde sont  addi- 

<'  lions  tiennes.  Ce  n'est  pas  de  Nature,  mais  de  ton 
«  propre  artifice.  »  (Sagesse  de  Charron,  p.  3IG.) 

Ce  que  fait  le  même  Art,  ce  qu'il  opère  d'utile  ou 
d'agréable,  relativement  aux  besoins  de  la  société, 
s'est  aussi  nommé  artifice.  Dans  un  poëme  de 
Salluste  du  Barlas,  les  artifices  sont  les  Arts  inven- 
tés pour  les  besoins  de  l'homme.  (Voy.  Goujet . 
Biblioth.  fr.  T.  XIII,  p.  312.) 

En  disant  ar///jcc  à  feu,  on  désignoit  un  effet  de 
l'Art,  une  composition  artificielle  de  matières  faciles 
à  s'enfiammer,  comme  quand  nous  disons  artiftce[l), 
feu  d'artifice.  «  Luy  fusl  baillé  certains  artifices  à 
"  feu.  On  lui  faisoit  entendre  qu'ils  brusleroient  les 
«  pilliers,  si  on  les  y  altachoit.  »  (Comment,  de 
Montluc,  T.  I,  p.  178.  —  Voy.  Artificiel.) 

Ouoii]u'on  exprime  encore  aujourd'hui  l'effet  de 
l'Art  avec  lequel  une  machine  est  composée  ,  en 
disant  qu'elle  est  d'un  artifice  merveilleux,  il  sem- 
ble qu'en  parlant  d'une  statue,  comme  d'un  chef- 
d'iKuvre  de  l'Art,  on  ne  diroit  plus  qu'elle  est  d'arti- 
fice accompli.  «  On  a  trouvé  aux  ruines  de  Rome 
"  une  slalne  d'artifice  lantaccomply  qu'il  est  estimé 
«  divin.  >'  (Bouchel,  Serées,  liv.  III,  p.  110.) 

Il  est  des  femmes  artificielles,  des  femmes  dans 
lesquelles  tout  ce  qu'on  idolâtre  est  non-seulement 
artificiel  mais  dangereux,  de  qui  l'on  pourroil  dire 
avec  un  de  nos  anciens  Poètes  : 

Ce  sont  ai-keficc  et  ydoles  ; 
Venin  portent  en  lor  fioles. 

Dils  et  Moralilcs,  MS.  de  Gaijnal,  fol.  293,  R"  col.  3. 

La  profession  qu'on  fait  d'un  Art,  est  un  moyen 
de  vivre,  un  Art  que  signifioil  quelquefois  le  mot 
artifice.  (Voy.  Art.)  «  Les  Maistres  de  tous  les  ines- 
»  tiers  et  artifices  qui  sont  et  seront  à  Laon,  etc.  " 

(Ord.  T.  II,  p.  78.)  «  Font résistance  a  Lintlaer 

«  flamand,  de  poser  le  moulin  servant  à  son  arli- 
«  fiee,  en  la  deuxième  arche  du  Pont-neuf.  »  (Méni. 
de  Sully,  T.  VI,  p.  447.) 

Enfin,  l'on  a  nommé  artifices  les  instruinens  faits 
pour  art,  propres  à  un  art.  «  Morceaulx  de  cuivre 
«  à  fourme  de  gelions  non  signez,  et  autres  ferre- 
«  mens  et  artifices  à  faire  monnoye.  »  (D.  Carpen- 


(1)  C'est  au  XVI»  siècle  seulement  que  le  mot  fut  pris  dans  ce  sens.  (n.  e.) 


AR 


—  205 


AR 


lier,  Suppl.  Gloss.  lai.  de  Du  Gange,  T.  1,  col.  310; 
lit.  de  1394.) 

VARIANTES  : 
ARTIFICE.  Orlli.  subsist.  -  Ord.  T.  II,  p.  78. 
Arkefice.  Dits  et  Moralités,  iMS.  de  Gaignat,  fol.  293. 

Artificiel,  adj.  Qui  se  fait  par  art.  Qui  se  fait 
avec  art,  adresse  ;  avec  finesse ,  artifice.  Qui  fait 
une  chose  avec  art,  adresse;  avec  finesse,  artifice. 

La  vicissitude  des  ténèbres  et  de  la  lumière  qu'é- 
prouve la  Terre  en  faisant  un  tour  sur  son  axe 
dans  l'espace  de  vingt-quatre  heures,  est  l'effet 
d'une  loi  de  la  Nature ,  d'après  laquelle  ce  même 
espace  de  temps  a  été  nommé  jour  naturel.  En 
regardant  comme  opposée  à  la  Nature  la  distinction 
de  la  nuit  comprise  dans  ce  jour  naturel,  on  a  dit 
que  l'espace  du  temps  oii  la  lumière  du  Soleil 
éclaire  l'horizon,  étoit  un  jour  artipciel.  «  Jour 
«  naturel....  emporte  24  heures,  elle iour artificiel 
«  est  appelé  entre  le  poinct  du  jour  et  jour  fail- 
..  lant  ..  (Gr.  Goul.  de  Vr.  liv.  111,  p.  310.)  Celle  dis- 
tinction pareil  néanmoins  si  conforme  à  la  nature 
des  choses,  qu'on  aura  cru  avoir  raison  de  s'écar- 
ter des  idées  astronomiques  sur  le  jour  naturel , 
sur  un  joui  qui  réunit  les  ténèbres  à  la  lumière,  en 
le  nommant  jour  artificiel.  »  Il  y  ad  jour  soler  et 
>■  jour  luner,  solonc  ceo  que  Dieu  devisa  clarté  de 
"  ténèbres,  et  ceux  deux  jours  fount  un  jour  arti- 
«  ficiel  que  est  fait  del  jour  et  de  la  nuyt  suiante,  et 
«  contient  xxim  houres.  »  (Britton,  des  Loix  d'An- 
gleterre, fol.  209,  P.».) 

On  opposoil  encore  à  l'idée  de  ce  qui  est  naturel, 
l'idée  de  ce  qui  est  artificiel,  de  ce  qui  se  fait  par 
art,  en  distinguant  deux  espèces  de  Musique,  l'une 
artificielle  et  l'autre  naturelle  «  Musique  natu- 
«  relie....  est  une  Musique  de  bouche  en  proférant 
«  paroules  mélrifiées;....  et  jà  soit  que  les  faiseurs 
«  d'icelles  ne  saichent  pas  communément  la  Musi- 
«  que  arti [ici elle,  ne  donner  chant  par  art  de  notes 
«  à  ce  qu'ilz  font,  toutes  voies  est  appellée  musique 
«  ceste  Science  naturelle.  »  (Eusl.  Desch.  Poës. 
Mss.  p.  395,  col.  2.) 

Quoiqu'af///jCî<'/  signifie  en  général  ce  qui  se  fait 
par  art,  on  ne  diroil  plus  feu  artificiel ,  pour  arti- 
fice, composition  artificielle  de  matières  faciles  à 
s'enflammer.  «  Attacha  ses  feux  artificiels  aux  pil- 
«  liers.  »  (Comment,  de  Mouline,  T.  I,  p.  178.) 

Dans  un  sens  relatif  ii  celui  d'art,  adresse,  finesse, 
artifice,  on  diroil  encore  moins  que  ce  qui  se  fait 
avec  art,  avec  artifice ,  est  artificiel.  (Voy.  Rob. 
Estienne,  Nicotet  Monet,  Dict.) 

En  ce  sens,  il  désignoit  même  celui  qui  faisoit 
une  chose  avec  art,  avec  adresse  ;  avec  finesse,  avec 
artifice.  (Monet,  Dict.  —  Voy.  Artifice  et  Art.) 

VARIANTES  : 
ARTIFICIEL.  Orth.  subsist.  -  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Ertifficiel.  Du  Bellay,  Mém.  T.  VI.  p.  303. 

Artificiellement,  adv.  Artistement,  adroite- 
ment; finement,  arlificieusement.  Significations  re- 


latives à  celles  de  fadjeclif  artificiel,  qui  se  fait  avec 
art,  avec  adresse,  qui  se  fait  avec  finesse,  avec  arti- 
fice ;  mais  différentes  de  celle  qui  est  encore  usitée, 
lorsqu'en  parlant  d'une  chose  artificielle,  d'une 
chose  qui  se  fait  par  art,  on  dit  qu'elle  se  fait  arti- 
ficiellement. (Contredilz  de  Songecreux,  ubi  suprà. 
—  Rob.  Estienne  et  Monet,  Dict.  —  Voy.  Artificiki,.) 

VARIANTES  : 
ARTIFICIELLEMENT.  Orth.  sub.  -  Rob.  Estienne,  Dict. 
Artifficialement.  Coutreditz  de  Songecreux,  fol.  80,  R». 
Artificielemant.  Monet,  Dict. 

Artificieres,  suhst.  masc.  Celui  qui  fait  profes- 
sion d'un  art.  En  latin  Artifex.  «  Les  seaux   nient 

«  encore  parfitement  entailliez loons  jà    alsi 

«  coin  parfiz,  lesqueiz  nekedent  encor  esgardet  li 
«  Artificieres,  el  si  \eslimeL  »  (S"  Grég.  Dial.  fr. 
MSS.  liv.  IV,  chap.  XVII.  —  Voy.  Artillier.) 

Artiîier,  verbe.  Faire  avec  art  ;  faire  avec  arti- 
fice. (Voy.  Art.  —  Voy.  Cotgrave,  Dict.) 

Que  vault  piper,  flaler  en  trahison, 
Quester,  mentir,  affermer  sans  fiance, 
Forcer,  tromper,  unifier  poison  ! 

Œuv.  d'Al.  Charlier.  p.  lit . 

Artifior,  subsl.  masc.  Celui  qui  fait  profession 
d'un  art,  qui  travaille  d'un  art.  En  latin  Artifex. 
«  La  Glise  del  bienaurous  Laurool  lo  martre,  des 
«  Lombards  fusl  arse,  laquelle  li  Ilom  Deu  covoi- 
«  lant  resloreir,  plusors  Artefiors  et  pluisors  minis- 
«  trans  ouvriers  i  ajostat.  »  (S'  Grég.  Dialog.  fr.  mss. 
liv.  III,  chap.  xxxvii.  —  Voy.  Artificieres.) 
variantes  : 

ARTIFIOR.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  134. 

Artefior.  S'  Grég.  Dialog.  fr.  MSS.  liv.  m,  chap.  xxxvii. 

Artige(l),  subst.  /'rm.  Montagne,  colline  nouvel- 
lement cultivée.  On  lit  artigé  pour  artige,  dans  la 
Somme  rurale  de  Bouleiller  ;  ce  qui  aura  fait  croire 
à  Baibasan  (\\x'arligé  éloit  le  participe  d'un  verbe 
françois  artiger,  de  même  signification  que  le  latin 
arligare.  C'est  visiblement  une  méprise  occasion- 
née par  l'accent,  qui  lui  aura  fait  méconnoitre  dans 
artigé  le  substantif  artige,  le  même  qu'artigie, 
comme  on  lit  dans  la  Noie  marginale  de  l'Editeur, 
qui  ne  l'auroit  pas  expliqué  par  artifice,  s'il  etrt  su 
que  dans  la  basse  latinité  artigia  ou  arliga  signi- 
fioil  montagne,  colline  nouvellement  cultivée. 
«  Novalles  sont  les  places  et  les  lieux  qui  ancien- 
«  nement  n'ont  esté  par  couslume  labourez  ne 
«  cultivez,  parquoy  semence  ou  usufruiclpeulvenir 
«  dont  disuie  peut  eslre  payée  ne  deue,  si  comme 
«  des  anciens  bois  et  places,  en  bois  où  il  vient 
»  bois  el  croisl,  sans  ce  qu'ils  ayent  esté  à  cepour- 
«  plainte  ;  en  artigé,  ou  si  comme  en  terre  et  place 
«  qui  onques  n'auroit  esté  labourée,  el  on  le  met- 
«  troit  de  nouvel  à  ahan  et  à  semence.  »  (Bouleil- 
ler, Som.  lur.  liv.  II,  til.  x,  p.  749.  —  Voy.  Du 
Cange,  Gloss.  lat.  au  mol  Artiga.  —  D.  Carpentier, 
Suppl.  Gloss.  lai.  de  Du  Cange,  aux  mots  Artigia, 
Arliga  et  Artigare.) 


(1)  Le  mot  existe  encore  comme  nom  de  lieu:  L'Ardre  (Haute- Vienne),  en  latin  Arliijia.  D'autre  part,  Artegiœ  (690)  a 
donné  Arlhies  (Seine -et-Oise).  (n.  e.) 


AR 


20G  — 


AR 


VAlilANTES    : 
ARTIGE.  nontfiiller,  Sonim.  nir.  liv.  ii,  tit.  x,  p.  749. 
AnTiaiE.  Iii.  ibid.  Note  marginale  de  l'Editeur. 

Artiilece,  suhst.  fém.  Art,  Science.  Science 
acquise  par  arl.  (Voy.  Art.) 

Selonc  sa  gentiUece, 

Qu'il  ait  vigor  et  artiilece 

De  vivre  au  siècle  honestement. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  244.  R-  col.  2. 

Artiller,  verbe.  Munir  d'arlillerie.  Equiper. 
Parer  avec  art.  Opérer  avec  arlince.  (Voy.  Art  el 
Artilleux.) 

Dans  le  premier  sens,  artiller  une  ville,  un  châ- 
teau, c'étoit  les  munir  d'arlillerie,  de  machines  que 
l'art  avoit  inventées,  pour  les  mettre  en  état  de 
défense.  (Voy.  Artillerie  )  «  La  ville  est  bien  a»'«i//e<? 
«  et  bien  garnie  de  vivres.  >•  (Le  .louvencel,  ms. 
p.  162.)  «  Elle  estoit  murée,  fossoyée,  tourée,  et 
«  artillée  mieux  qu'aucune  autre  ville.  »  (Jaligny, 
Hist.  de  Charles  VIll,  p.  38.)  «  La  ville  et  lechasteau 
«  estoient  merveilleusement  bien  arlillez.  »  (Mém. 
de  Rob.  de  la  Marck,  m.-;,  p.  426.) 

Près  de  la  Marche,  sor  la  mer, 
Avoit  fet  un  chastel  former. 
Qui  moult  estoit  bien  batilliez, 
Si  fors  et  si  artilliez 
Qu'il  ne  cremoit  ne  Roy  ne  Conte. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'  1218.  fol.  1,  R-  col.  1. 

On  disoit  d'un  Homme  d'armes,  équipé  de  ce  que 
l'Art  mettoit  en  usage  pour  l'attaque  et  la  défense, 
qu'il  éloit  arlillé(l).  «  Fut  conclud....degaingner  le 

«  pas, et  y  faire  une  très  forte  bastille,  et  y 

«  laisser  ung  bon  nombre  de  genz  bien  artillez-.  » 
(Le  Jouvencel,  ms.  p.  511.)  «  Le  Roy...  trouva....  les 
«  gens  d'armes  qui  estoient  malades  ,  à  pié  et 
«  désarmez....  «  Si  les  habilla,  remonta,  arma,  et 
u  artilla  le  Roy  au  mieulx  qu'il  peut  le  faire.  » 
(Al.  Chartier,  Hist.  de  Charles  VI  et  Charles  VIT, 
page  112.) 

Si  les  monta  et  ardtla 

Le  feu  Roy,  selon  son  désir  ; 

Et  grandement  les  rabilla. 

VigiL  de  Charles  vu,  part.  I,  p.  103. 

Plus  anciennement,  on  avoit  dit  d'une  femme  qui 
s'équipoit  de  ce  que  l'art  mettoit  en  usage  pour 
sa  parure,  qui  se  pareil  avec  art,  qu'elle  s'artilloit. 

Les  Dames  es  cambres  s'artillent, 
De  si  loing  comme  venir  voient 
Le  Chevalier  qu'il  connissoient. 

Rora.  d'Erec,  MS.  du  R.  n"  6987,  fol.  282,  R-  coL  4. 

Enfin  artiller,  dans  le  sens  d'opérer  avec  artifice, 
signifioil  l'abus  de  l'art,  de  la  culture  et  de  l'exer- 
cice des  talens  de  l'esprit. 

Mult  s'estudia  d'artilhier 
Por  qu'en  le  feist  essilhier. 

Les  IV  Filles  le  Roy.  MS.  de  Turin,  fol.  39,  R*  col.  i. 

VARIANTES  : 
ARTILLER.  Le  Jouvencel,  MS.  p.  162. 
Artilhier.  Les  IV  Filles  le  Roi,  MS.  de  Turin,  fol.  39. 
Artillier.  Dits  et  Moralités,  MS.  de  Gaignat,  fol.  283. 

Artillerie,  sul)st.  fém.  Anciennes  machines  de 


guerre  ;  anciennes  armes  offensives  et  défensives  ; 
armes  de  trait.  Convoi  d'ancienne  arlillerie. 

En  nommant  Artillerie  les  anciennes  machines 
de  guerre,  les  anciennes  armes  offensives  et  défen- 
sives, spécialemeul  les  armes  de  trait,  on  désignoit 
l'art  qui  les  avoit  inventées,  comme  on  désignoit  le 
génie  qui  avoit  présidé  à  l'invention  de  ces  mêmes 
armes  et  machines,  en  les  nommant  engins,  du 
latin  ingenium.  On  a  mille  preuves  qu'avant  l'usage 
du  canon,  les  machines  propres  à  l'attaque  et 
défense  des  villes  et  châteaux,  étoient  toutes  com- 
prises sous  le  nom  â'Artillerie.  {Voy.  Borel,  Dict.) 
Le  commandement  de  cette  ancienne  arlillerie 
appartenoit  au  Grand-maitre  des  Arbalétriers,  qui 
pouvoit,  comme  l'observe  le  P.  Daniel,  être  appelle 
Maître  de  V Artillerie  dès  le  temps  de  ces  anciens 
règnes  qui  précédèrent  l'invention  du  canon  et  des 
autres  armes  à  feu  ;  puisque  dès  lors  on  nommoit 
Artillerie,  toutes  les  machines  de  guerre  dont  on 
usoit  dans  les  sièges,  soit  pour  la  défensive,  soit 
pour  l'olTensive,  et  tout  ce  qui  y  avoit  rapport.  (Voy. 
Mil.  Fr.  T.  I,  p.  195.) 

Quoique  Artillerie  paroisse  avoir  signifié  spécia- 
lement les  armes  de  trait,  il  n'en  est  pas  moins  vrai 
qu'au  commencement  du  ynr  siècle,  artillerie  étoit 
un  nom  collectif  non-seulement  d'armes  de  Irait, 
mais  d'autres  armes  offensives  el  défensives,  comme 
lances,  larges,  etc.  «  Recueillirent....  bien  la  valeur 
«  de  deux  tonneaux  pleins  d'artillerie,  espéciale- 
«  ment  de  sayetles  qui  furent  tirées  en  la  Ville.  » 
(Froissart.  Vol.  Il,  p.  2'i8.)  «  Les  Castillans  vindrent 
«  sur  eux;  et  commencèrent  à  lancer  et  jetter 
«  dardes,  et  tant  que  les  Castillans  eurent  employé 
«  toute  leur  artillerie  ;  et  ne  savoyent  mais  de 
«  quoy  lancer  ne  getter.  «  (Id.  Vol.  III,  p.  107.) 
(Voy.  la  citation  suivante,  oii  les  larges,  les  lances 
font  partie  de  ce  qu'on  nommoit  Artillerie.) 

On  apprend  de  Guiarl,  hislorien  romancier,  qu'à 
la  suite  des  Armées  marchoit  une  Artillerie, 
c'est-à-dire  un  convoi  d'ancienne  artillerie  ,  au 
moyen  duquel  ceux  qui  étoient  sans  armes  pou- 
voient  s'équiper  de  lances,  de  larges,  d'arbalètes, 
de  dards,  elc. 

Artillerie  est  le  charroi, 
Qui  par  Duc,  par  Conte,  ou  par  Roi, 
Ou  par  aucun  Seigneur  de  terre, 
Est  chargié  de  quarriaus  en  guerre, 
D'arbalestes,  de  dards,  de  lances, 
Et  de  larges  d'unes  semblances. 
De  tiex  bernois  là  prendre  seulent 
Li  desgarni  qui  prendre  en  veulent. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  341.  Rv 

Cette  définition  de  l'Artillerie  ancienne  prouve 
évidemment  que  l'acception  de  ce  mot  s'étendoit 
à  d'autres  armes  offensives  et  défensives  que  les 
armes  de  trait.  L'usage  de  ces  armes,  spécialement 
de  l'arbalète  et  autres  armes  de  trait,  subsistoit 
avec  celui  du  canon  et  autres  armes  à  feu  qu'un  art 
non  moins  destructeur  y  a  substituées,  lorsque 
pour  distinguer  la  nouvelle  Ar/i/to'/e  de  l'ancienne, 
on  la  nommoit  Ar////t'n'('  à  poudre.  «  Les  Gantois.... 


(l)  .lu  xviiF  siècle,  les  marins  ne  disaient  pas  un  vaisseau  armé,  mais  un  vaisseau  artillé.  (n.  e.) 


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AR 


«  yssirent  de  leur  siège  et  vindrent  en  belle  ordon- 
«  nance,  moult  bien  garnis  de  pïcques  ei  û' art i Ile- 
«  rie  à  pouldrc.  »  (Monslrelcl,  Vol.  III,  fol.  -i'i.) 
Tant  que  l'usage  de  l'une  n"a  pas  exclus  celui  de 
l'autre,  Artillerie  signifioit  tout  instrument  de 
trait,  soit  de  feu  ou  autre.  (Voy.  Mcot,  Dict.)  Lors 
de  cette  exclusion,  vers  la  fin  du  xvi'  siècle,  le  nom 
d'Arfi/Zme  fut  restreint  aux  instrumens  qui  pour 
opérer  sont  aidez  de  pouidre  faite  de  charbon  de 
saulx  et  de  soufre  allumé  par  le  feu.  (Voy.  Fauchet, 
de  la  Mil.  Fr.  p.  1"21.)  En  termes  de  Marine,  les 
canons  ou  pièces  de  fonte  de  gros  calibre,  étoient 
VArtilerie  cardinale.  (Voy.  Cotgrave  et  Nicot,  Dict.) 
C'est  par  allusion  au  clou  qui,  enfoncé  dans  la 
lumière  d'un  canon,  en  empêche  l'usage,  qu'on  a  dit 
figurément  :  «  Une  once  de  douleur  gastera  une 
«  mer  de  plaisir  :  cela  s'appelle  l'artillerie  en- 
«  clouée.  »  (Sagesse  de  Charron,  p.  005.) 

VARIANTES  : 
ARTILLERIE.  Orth.  subs.  -  Froissart.  Vol.  II,  p.  248. 
ARTEiLLERiE.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  D.  C.  T.  I,  col.  317. 

Artilleux,  adj.  Qui  se  conduit  avec  art,  avec 
artifice.  (Voy.  Artuler.)  Lorsque  l'art  dont  on  usoit 
dans  sa  conduite  eloit  nécessaire,  artilleux  signi- 
fioit qui  se  conduit  avec  art,  avec  adresse,  avec 
habileté,  même  avec  ruse  et  finesse. 

Touz  rengiez  cèle  part  alerent  ; 
MUE  quant  de  près  les  esgarderent, 
Il  coniiureiil  qii'o  eus  avoient 
ïiex  V  tanz  de  genz  qu'il  n'estoient, 
Serrez  en  lieu  comme  Anilleus. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  302,  Vv 

S'est  Telamonz,  preuz,  et  Vaillanz, 
Et  artilleus,  et  conbatans. 

AlliisMS.  fol.  109,  R'col.  1. 

Si  l'on  abusoit  de  cet  art  pour  tromper  et  nuire, 
artilleux  signifioit  qui  se  conduit  avec  art,  avec 
artifice,  avec  une  adresse  trompeuse  et  nuisible. 

Ha  !  feme,  come  es  enginneuse, 
Et  decevans,  et  Arlilleuse. 

Rom.  d'Aniadas,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  329,  V-  col.  2. 
Feme  est  si  Artilleiise  qe  ne  sai  que  je  die  ; 
Quar  feme  par  nature  est  plaine  de  boisdie. 

Chastie-Musarl,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  105,  V  col.  3. 

.  .  .  C'est  bien  la  manière  de  félon  orgueilleux, 
Que  com  plus  le  prions,  plus  se  fait  Artilleux^ 

Gcr.  de  Roussillon,  MS.  p.  113. 

VARIANTES  : 
ARTILLEUX.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  206. 
Artileus.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  238,  R°. 
Artilleus.  G.  Guiart,  MS.  fol.  302,  V«. 
Artilleuz.  Athis,  MS.  fol.  109,  R»  col.  I. 
Artillos.  Borel,  Dict. 

Artillier,  subst.  masc.  Ouvrier  qui  travailloit  à 
l'ancienne  el  ùla  nouvelle  Artillerie.  Anciennement 
et  longtemps  avant  l'invention  du  canon  et  autres 
armes  à  feu,  on  nommoit  «  Artilleurs  ou  Artilliers 
«  les  faiseurs  d'arcs,  fiesches,  arbalestes  el  autres 
«  instruments  de  ject,  •  parce  que,  dit  le  Président 
Fauchet,  «  il  falloit  avoir....  deVart  pour  faire  et 
«  composer  ces  ouvrages  subtils.  »  (Voy.  Mil.  Fr. 
p.  121.)  '<  Quiconque....  vouldra  estre  Artilleur.... 
'<  en  la  ville  et  banlieue  de  Paris;  c'est  assavoir, 
«  faiseur  d'arcs,  de  fieches,  d'arbalestes  ;  etc.  » 


(D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au 
mot  Artillator.)  Lorsque  les  armes  à  feu  "furent 
inventées,  tant  qu'elles  n'exclurent  pas  l'usage  des 
armes  de  trait,  on  confondit  sous  la  même  dénomi- 
nation les  Ouvriers  en  ancienne  et  nouvelle  Artil- 
lerie. Les  anciens  Artilleurs  ou  Artilliers,  les 
faiseurs  d'arbalètes  et  autres  armes  de  trait,  firent 
aussi  tous  artifices  de  feu.  (Voy.  Nicot,  Dict.)  «  Le 
«  Maistre  Artitler  qui  est  celuy  qui  se  mesle  de 
«  faire  des  arbalestes,  des  traits  et  des  fieches,.... 
«  se  mesloit  aussi  de  faire  des  fusées.  »  (Brantôme, 
Cap.  Fr.  T.  IV,  p.  i'2.  —  Voy.  Artillerie.)  GesArtil- 
liers  ou  Arlilleurs,  comme  faiseurs  de  fusées  et 
autres  artifices  de  feu,  étoient  probablement  alors 
ce  que  .sont  nos  Arfificiers  appartenant  au  Corps  de 
l'Artillerie.  On  particularise,  aujourd'hui,  la  signi- 
fication d'artificier,  autant  qu'on  a  généralisé  celle 
d'Artificier  es.  (Voy.  Artificieres.) 

Il  paroit  que  VArlillier  ou  l'Artilleur,  que  Monet 
définit  Intendant  d'Artillerie,  étoit  une  espèce  d'of- 
ficier tel  (lue  «  l'Artilleur  de  la  bastide  S'  Anthoine 
«  en  1415,  ou  l'Arlilleur  du  chàleau  du  Louvre  en 
«  1364.  »  Le  Roi,  par  ses  Lettres  du  20  Avril  de  la 
même  année,  institua  «  .lelian  de  Lyons,  Artilleur 
'<  du  Chastel  du  Louvre.  »  (Voy.  D.  Carpentier, 
Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au  mot  Artilliator, 
col.  317.)  On  sait  qu'un  Artilleur  n'est  plus  aujour- 
d'hui qu'un  homme  servant  dans  l'Artillerie,  à  l'Ar- 
tillerie. (Voy.  Dict.  de  l'Acad.  Fr.) 

VARIANTES  : 
ARTILLIER.  Fauchet,  de  la  Milice  Fr.  p.  121. 
Artiller.  Brantùme,  Cap.  Fr.  T.  IV,  p.  42. 
Artilleur.  Etat  des  Offic.  des  Ducs  de  Bourgogne,  p.  6."). 

Artimage,  suhst.  Art  magique.  (Voy.  Artimaire.) 
Le  grand  art,  l'art  d'opérer  des  choses  qui  parois- 
sent  surnaturelles. 

Tous  les  Ydles  que  Sarrasins 
Fisent,  Mahon,  ne  ApoUin,.... 
Deslruit  Karles  fors  une  ymage 
Ki  fu  faite  par  iwlimuife. 

l'h.  Mouskes,  MS.  p.  169. 

VARIANTES  ; 
ARTIMAGE.  R.  d'Amadas,  MS.  du  R.  n»  6987,  fol.  319. 
Arcimage  (corr.  Arlimage.)  Siège  de  Troye,  MS.  du  R. 
n»  6987,  fol.  96,  R«  col.  3. 

Artimaire,  Sii/vs^  Art  magique.  (Voy.  Artimage.) 
Le  grand  Art,  en  latin  Ars  major,  le  même  (\\ï Arti- 
mage, Art  magique. 

Il  ot  devant  le  sale  un  pin 
Dont  les  brances  furent  d'or  fin, 
Tresjelèes  par  Arlimaire, 
Par  Ingremance  et  par  Gramaire. 

Siège  de  Troje,  MS.  du  R.  n*  G987,  fol.  81,  R-  col.  1. 
...  Si  sait  meint  beau  geu  de  table, 
Et  d'enlregiet  et  A'Arlumaire, 
Bien  sai  un  enchantement  faire. 

Fabl.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  70,  R-  col.  3. 

VARIANTES  : 
ARTIMAIRE.  Fabl.  MS.  de  S'  Germain,  fol.  64,  col.  1. 
.\RTMAinE.  Siège  de  Troye,  MS.  du  R.  n''6987,  fol.  116. 
Artu.maire.  Fabl.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  70,  R»  col.  3. 

Artique,  Adj.  Articulaire.  Il  semble  évident 
(ixi'artétique ,  artique  et  même  arreticle,  sont 
des  altérations  d'arthritique,  en  grec  dçOçnnxài.  En 


AR 


208 


AR 


termes  de  Médecine,  arthritique,  de  même  signifi- 
cation qn'articuhure,  en  latin  arlicularis,  désigne 
une  douleur  sensible  aux  articles  des  pieds,  des 
mains  et  autres  articulations  du  corps.  (Voy. 
Article.)  Ainsi,  l'on  aura  dit  goutte  artique,  goutte 
arrclicle,  parce  que  la  goutte  est  une  fluxion  d'iiu- 
meur  acre  sur  les  articles,  et  qu'elle  les  rend  très- 
douloureux.  "  Se  l'en  est  accoustumés  de  maladie 
«  qui  vient  soudainement,  comme  de  goûte  arreti- 
n  de,  ou  de  averlin,  etc.  «  (Beaumanoir,  Coût,  de 
Beauvoisis,  cliap.  lxi,  p.  308.)  «  Les  mains  avoit 
«  noeuses  et  retraites  de  goûte  artique.  »  (Uist.  de 
Charlemagne,  r.is.  de  la  Clayette,  p.  91.)  «  Le  Comte 
«  Guillaume  de  Haynaul....  gisoit  malade  de  goûte 
«  artetique  et  de  gravelle.  »\Froissart,Vol.  I,  p.  30.) 

VARIANTES  : 
ARTIQUE.  Hist.  de  Charlemagne,  MS.  de  la  Clayette,  d.  91. 
Arreticle.  Beaum.  Coût,  de  Beauv.  chap.  lxi,  p.  30». 
Artétiqle.  Froissart,  Vol.  I,  p.  36. 
Arthétique.  Cotgrave  et  Oiulin,  Diot. 

Artisan,  subst,  masc.  Artiste.  Anciennement, 
Ari/san  signilioil  non-seulement  «  Ouvrier  dans  un 
a  Art  où  la  main  seule  opère,  mais  quelquefois 
«  aussi  Ouvrier  dans  un  Art  où  le  génie  dirige 
«  l'opération  de  la  main.  »  (NuilsdeSlraparole,T.L 
p.  418.  —  Voy.  Akt  et  Artistk.) 

C'est  dans  un  sens  relatif  à  l'acception  inusitée  de 
ce  mot  qu'on  a  dit  figurément  :  «  Le  Sage  est  un 
«  suffisan  artisan  qui  faict  son  profict  de  tout.  De 
«  loule  matière  il  forme  la  vertu,  comme  l'excel- 
«  lent  peintre  Phidias,  tout  simulachre.  »  (Sagesse  de 
Charron,  p.  3'ii.) 

Artiste,  &uhst.  et  adj.  Artisan.  Adroit  en  la  pra- 
tique d'un  Art. 

En  définissant  Artisan  ou  Artiste,  par  le  latin 
Artifex,  Opifex,  Nicot  paroît  attester  que  VArtiste 
étoit  quehiuefois  un  Artisan,  comme  l'Artisan  étoit 
un  Artiste.  (Nicot,  Dict.  —  Voy.  Artisan.) 

Une  autre  preuve  qu'on  ne  connoissoit  pas  alors 
notre  distinction  de  ['Artiste  et  de  l'Artisan,  c'est 
qu'Artiste,  comme  adjectif,  signifioit  l'adresse  d'un 
Ouviier  quelconque  en  la  pratique  de  son  Art,  lors- 
qu'on disoit.4c//s/£'  ouvrier.  Artiste  main  (Tonvrier. 
Delà,  l'adverbe  arlislemenl qui  a  désigné el désigne 
encore  l'art,  l'adresse,  l'industrie  avec  laquelle'un 
ouvrage  est  fait  et  travaillé.  (Voy.  Monet,  Dict.) 

Artitien,  suhst.  inasc.  Savant  dans  les  Arts  de 
l'Ecole.  Espèce  de  diminutif  que  Rabelais  semble 
n'avoir  imaginé  que  pour  ridiculiser  les  Artiens. 
«  De  beau  plein  jour,  et  ce  es  escholes  de  Feurre, 
«  en  face  de  touts  les  Artitiens  sophistes,  etc.  » 
(Rabelais,  liv.  Il,  p.  173.  —  Voy.  Artien.) 

Artre,  subst.  masc.  et  fém.  Insecte  d'espèces 
différentes.  Espèce  d'Alcyon. 

On  lit  dans  Laurière,  (Gloss.  du  Dr.  Fr.)  au  mol 
Artisonné,  qu'un  Artre  étoit  un  Artisor,,  un  insecte 
ou  petit  ver  qui  s'engendre  dans  le  bois  et  le  perce 
avec  son  bec,  comme  avec  un  foret.  (Voy.  Artuiso:^.) 
C'étoit  aussi  un  insecte  de  l'espèce  de  la  Teigne  ou 
de  la  Gerce  qui  ronge  les  étoffes,  les  papiers,  etc. 


«  Cem'eust...  esté  chose  très  agréable  de  délivrer 

«  de  l'outrage  des  rats,  souris  et  artres, les 

«  noms  de  leurs  ancestres.  »  (S'  Julien,  Mes!.  Hist. 
p.  328.— Voy.  Cotgrave,  Dict.) 

On  nommoit  Artre  de  lloulengier,  une  espèce  de 
papillon  ou  d'insecte  blanc  qui  vit  dans  les  moulins 
à  blé  et  dans  les  maisons  des  Boulangers.  Cotgrave, 
qui  définit  ainsi  Y  artre  de  lioulengier,  faisoit  artre 
du  genre  féminin,  en  disant  que  ['artre  grise  des 
bois  étoit  la  cloporte,  le  porcelet  de  S'-.\nloine,  en 
anglois  Wooâ  lowse.  (Voy.  Cotgrave  Dict.) 

Selon  le  même  Cotgrave,  YArtre  est  une  espèce 
d'Alcyon  nommé  communément  Martinet-pêcheur, 
par  allusion,  disent  les  Etymologistes,  à  ce  que  cet 
oiseau  prend  des  poissons,  et  (|u'à  la  S'-Martin  il 
abandonne  les  bords  où  il  est  arrivé  au  mois  de 
Mars.  (Cotgrave,  Dict.  —  Dict.  des  Arts.  —  Dict.  de 
Trévoux.  —  Ménag.  Dict.  Etym.)  On  prétend  que 
cet  oiseau  desséché,  étant  suspendu  dans  un  maga- 
sin d'étoffes,  de  draps,  en  éloigne  les  Artres,  les 
Teignes.  Peut-être  que  d'après  cette  idée  on  l'aura 
nommé  Drapier,  et  Artre  par  anti-phrase. 

Artueil,  subst.  masc.  Article,  articulation.  Arti- 
cle de  doigt  du  pied  et  de  la  main,  doigt  du  pied  et 
de  la  main,  doigt  du  pied.  Gros  et  petit  doigt  du 
pied,  gros  doigt  du  pied.  Articulation  ;  doigt,  ongle 
de  patte  de  loup,  de  chien,  etc. 

11  est  possible  que  du  latin  articulus,  en  franyois 
article,  on  ait  formé  artueil,  ortueil,  au  pluriel 
ortaus,  arlaulx,  ou  arlo:i  qu'on  soupçonne  d'être 
altéré  dans  argo^,  articulations  qu'en  parlant  d'un 
cheval  on  nomme  boulet.  (Voy.  Argot.) 

L'opinion  des  Etymologistes  sur  l'origine  d'ar- 
tueil,  ortueil,  est  d'autant  plus  probable,  que  la 
signification  de  ce  mot  étoit  la  même  que  celle 
d'article  pris  dans  le  sens  propre  et  général  d'arti- 
culation, jointure  des  os.  (Voy.  Article.)  «  La  pierre 
"  le  vint  frapper  au  travers  des  reins,  el  lui  rompit 
«  tout  le  gros  orteil  de  l'eschine.  »  (Hist.  du  Ch" 
Bayard,  p.  398.)  C'est  par  décence  qu  on  supprime 
quelques  autres  preuves  de  cette  signification  géné- 
rale, en  renvoyant  aux  Ane.  Poët.  fr.  mss.  avant 
1300,  T.  VI,  p.  1341;  au  Moyen  de  Parvenir,  p.  249. 
etc.  (Voy.  .\rgoter.) 

Il  est  néanmoins  vrai  de  dire  qii'ortueil  ou 
artueil,  signifioit  spécialement  article  du  doigt  du 
pied  et  de  la  main,  doigt  du  pied  et  de  la  main, 
comme  dans  les  Poésies  mss.  d'Eust.  Deschainps, 
p.  8.5,  col.  3;  et  plus  spécialement  encore,  article  de 
doigt  du  pied,  doigt  du  pied.  "  Ne  me  demeure 
«  orteil  en  pied,  ne  doigt  en  main  dont  le  sang  ne 
«  saille.  ..  (Percef.  VoL  IV,  fol.  107.)  «  Tous  les 
«  orteil  des  piedz  lui  chéoient,  fors  les  poulces.  • 
(Lanc.  du  Lac,  T.  I,  fol.  51.)  On  dislinguoit  le  pre- 
mier el  dernier  doigt  du  pied,  en  nommant  l'un 
petit  artueil,  et  l'autre  grand  artueil.  «  Luy  descou- 
«  vrit  les  piedz  el  le  tira  par  le  grand  artueil  ;  de 
0  quoy  la  ci'éaturc  se  troubla.  »  ;Percef,  Vol.  IV, 
fol. 26.)  «  Lecoup....cheut  en  bas  sur  le  peYûartueil 
«  du  pied  senestre.  »  (Ibid.  fol.  37.) 

Il  semble  que  le  petit  artueil  et  le  grand  artueil. 


AR 


-  209  — 


AR 


soient  les  artaulx  distingués  des  autres  doigts  du 
pied,  en  ce  passage  :  «  Pi-inl  les  doys  et  artaulx  de 
«  son  senestre  pied,  etc.  »  (Percef.  Vol  IV,  fol.  22.) 

Quelquefois  la  signification  A'artueil  éloit  aussi 
particulière  que  l'est  aujourd'hui  celle  d'orteil,  gros 
doigt  du  pied.  «  Pline  escrit  que  le  pouce  ou  a)-tmj 
«  du  pied  droit  du  roy  Pyrrhe  donnoit  guérison  à 
«  ceux  qui  avoient  douleur  de  rate.  •  (Du  Verdier 
divers.  Leçons,  p.  228.) 

.  .  .  Jusqu'au  VartoU  le  deschauce  ; 
Ne  li  laisse  haubert,  ne  chauce. 
Rom.  de  Perceval,  MS.  de  Bjrne,  n-  354,  fol.  217,  R-  col.  î. 

Enfin,  le  mot  ortueil,  ou  arteidl  duquel  on  par- 
ticularisoit  et  généralisoit  indifféremment  l'accep- 
tion, a  signifié  articulation,  doigt,  ongle  de  la  palte 
d  un  loup,  d'un  chien ,  etc.  «  Le  loup  a  le  bout  des 
«  artieux  plus  grosse  et  plus  ronde  que  ne  sont 
«  celle  des  chiens.  »  (Modus  et  Racio ,  impr 
fol.  28.)  «  Es  marches  des  Lièvres  n'apert  point  de 
«  talion  comme  il  fait  es  marches  des  chiens-  et  si 
f  1^  Pl"s.d'or^<?/x  ou  pied  que  n'a  ung  chien.  »  (Jbid. 
loi.  30,  \\)  «  La  Loutresse....  n'a  mie  les  boutz  des 
«  ortelz  SI  gros.  »  (Ibid.) 

VARIANTES  : 
ARTUEIL.  Percef.  Vol.  IV,  fol.  26  V"  col  1 
Artail.  Cotgrave,  Dict. 

Artaulx.  (Plur.)  Percef,  Vol.  IV,  fol  22   R»  col  1 
Arteil.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  85  col  3    '    ' 
Artieux.  (Plur.).  Modus  et  Racio,  impr  fol  "8  V" 
Artoil.  Rom.  de  Perceval.  MS.  de  Berne,  n»  354  fol  217 
Artoir.  Cotgrave,  Dict.  '   "'•-"• 

Artoy.  DHverdier,  divers.  Leçons,  p  228 
Artoz.  (Plur.)  Ger.  de  Rousillou,  MS.  n  203 
ORTAU.S.  (Plur.)  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  œi       ' 

n^r'^\?^},^-  ^"^^^^  -  "°'^"S  et  Racio,  imp.  fol.  28 

Ortel,  Modus  et  Racio,  impr.  fol  30  V» 

Orteul.  xMoyen  de  Parvenir,  p.  249    ' 

Ortoile.  Ane.  Poët.  Fr.  MS.  avant  1300,  T.  IV  n   I3ii 

Ortuiel.  Percef.  Vol.  II,  fol.  26,  V»  col  1 


Artuison,  subst.  masc,  Insecte  d'espèces  diffé- 
rentes. En  supposant  qu'il  soit  vrai,  comme  l'attes- 
tent les  Auteurs  du  Dictionnaire  Universel  qu'en 
quelques  lieux  de  nos  Provinces,  on  nomme  rtr/»/s 
les  trous  faits  au  bois  par  les  vers,  ou  les  vers  qui 
y  tont  ces  trous,  on  pourroit  croire  avec  assez  de 
probabilité  (\\\'m'tuis  est  une  altération  de  partuis 
e  même  (\w  pertnis.  On  a  mille  preuves  d'altéra- 
tions  pareilles,  causées  par  le  retranchement  de  la 
première  lettre  d'un  mot.  Une  autre  raison  de 
croire  que  partuis  poui  roit  être  altéré  dans  artuis 
cest  qu  artuison,  en  étant  formé,  désigneroit  natu- 
re lement  un  insecte  de  l'espèce  de  l'artison,  delà 
calandre,  du  charençon,  du  puceron,  de  la  t^ïi-ne 
un  insectequi  perce,  qui  troue  les  choses  auxquelles 
de  roto'rîv^  Uuoiqu'nrtiron  dans  le  Dictiomiaire 
de  Lotgrave,  signifie  spécialement  le  puceron,  on  a 
pu  le  reunir  avec  artison  sous  artuison  commp 
variation  d'orthographe,  puisque  dans  le  même 
Dictionnaire,  artison  est  le  même  qu'artiron  S'il 
designoit  le  puceron  comme  artiron,  comme  artui- 


son il  designoit  la  teigne.  Il  ne  se  dit  plus  aujour- 
d  hui  que  de  l'insecte  ou  petit  ver  qui  s'entendre 
dans  le  bois  et  le  perce.  (Labbe,  Gloss.  lat.  fr  au  mot 
Tmea.  _  Cotgrave,  Dict.  —  Dict.  de  Trévoux 
(voy.  Artre  et  Artuis.) 

.^^  variantes: 

ARTUISON.  Labbe,  Gloss.  lat.  fr.  au  mot  Tinea. 
Artison.  (Drt.  subsist.  -  Cotgrave,  Dict. 

A^«r."  S"vi;  ?;â.  -  "''='■  "'  '''''■  ^"  "^"^  '^^"•^<^- 

Artuis,  subst.  masc.  Trou  de  ver,  ou  ver  qui  fait 
ce  trou.  Dict.  de  Trévoux,  au  mot  Artisotme.  (Voy. 
Artuiso.\  et  Artuisonné.) 

Artuisonné,  Paticipe.  Piqué  de  ver,  percé 
D  artuison,  ver  qui  s'engendre  dans  le  hois  et  le 
perce,  on  a  dit  d'un  bois  piqué  du  ver,  d'un  bois  où 
Il  y  a  plusieurs  petits  trous  de  vers  qu'il  étoit  artui- 
sonne,  artisonné.  (Voy.  Laurière,  Gl.  du  Dr  f r  ) 
«  Seront  faits  les  vaisseaux  à  vin,...  de  bon  bois 
«  sec  non  punais,  rongé,  vergé,  ne  artisonné,  sans 
«  aubour.  «  (Coût,  de  Tours,  au  Coût  sén.  T  II 
p.  5.  —  Coût,  de  Loudun,  ibid   p.  543.  (Voy.  Artois.) 

VARIAiNTES  : 
ARTUISONNE.  Dict.  de  Trévoux  au  mr.t  Artimiiné 
ARTISONNE.  Coût,  de  Tours,  au  Coût,  gén  T  II  n  's 
Artusonne.  Dict.  de  Trévoux,  uhi  supra       '  ' 

Artuzonné.  Coût,  de  Loudun  ,  au  Coût.  gén.  T.  II,  p.  545. 

Artuisonneux,  adj.  Plein  de  teignes.  D'artui- 
son  qui,  entre  autres  insectes,  designoit  la  teio^ne 
(Voy.  Labbe.  Gloss.  latin  fr.  au  mot  micosus  ) 


Artuit,  subst.  masc.  Repas.  Espèce  de  droit  sei- 
gneurial, comme  le  droit  de  gîte,  vulgairement 
nomme  Mangerie,  en  latin  Cnniestio.  '(Voy  Du 
Gange.  Gloss.  lat.  au  mol  Cvmestiones.  —  Laurière 
Gloss  du  Dr.  fr.  au  mot  Giste.)  Les  repas  qu'un 
Vassal,  asservi  au  Droit  de  Gîte,  donnoit  à  son 
seigneur,  occasionnoient  une  consommation  de 
pain  que  désigneroit  spécialement  artuit,  s'il  étoit 
réellement  formé  du  grec  «prw  pain  C'est 
l'opinion  de  D.  Carpentief  sur  l'étymologie  de  ce 
mot,  qui,  dans  un  titre  latin  de  I3/i6,  «i.t^nifie  évi- 
demment droit  de  gite,  repas,  mangerie,  de  laquelle 
les  Seigneurs  affranchissoient  souvent  leurs  Vas- 
saux, moyennant  une  redevance  en  argent  «  Ilem 
«  pro  quodam  deverio,....  vocalo«r/H/7,seu  comes- 
«  tione  qiiam  anno  quolibet  tenetur  facere,  etc  » 
[.DjCarpenlier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  T.'l, 

Si  le  savant  Continuateur  de  Du  Cange  eût  fait 
rellexion  que  dans  la  Latinité  du  moyen  âge,  pastus 
en  françois  past,  étoit  de  même  signification  que 
comestio,  repas,  mangerie,  droit  de  gite,  peut-être 
qu  artiat,  dans  un  titre  latin  où  ce  niot  est  syno- 
nyme de  l'ablatif  comestione,  ne  lui  auroit  paru 
qu  une  altération  de  l'ablatif /jfls?«.  (Voy.  Du  Cange 
Gloss.  lat.  au  mot  Pastus.  -  Laurière,  Gloss.  du 
I  Dr.  fr.  au  mot  Giste,  p.  548  (2).)  Il  est  possible  que 


^^p^^J^t^i^  Ti^'  '^i  fa  p'f^ce'yjlT'.^^"'-  ^UJ  ^"  "'''"  '"-  ^— •  •  (-  -)  -  (2)  L'unique 
copiste  du  XV.  siècle,  (n.  b.)  '  ''^"^  '*  P'^°^  ^  ^^  1  année  1346  ;  c'est  probablement  une  mauvaise  leAure  d^n 

H. 


27 


AR 


-  210  - 


AR 


l'idée  de  cette  altération  semble  assez  naturelle, 
pour  faire  soupçonner  que  1).  Carpentler  s"esl 
mépris  en  cliercliant  dans  le  grec  aptos-,  l'origine 
d.'artuit,  et  en  supposant  à  ce  mot  une  signification 
analogue  à  celle  d'aiiis  dans  leCelt-hell.  de  L.Trip- 
pault^ou  à'arton  dans  le  Dict.  jis  de  Barbasan.  Ces 
mots  formes,  dit-on,  du  grec  àçxos,  sigifieut  pain,  en 
langage  Argotique.  Il  n'est  peut-être  aucun  Diction- 
naire qui  ait  été  si  souvent  imprimé  que  le  Dic- 
tionnaiic  de  l'Argot.  On  trouveroit  néanmoins  dans 
cinq  ou  six  ballades  de  Villon,  de  quoi  en  faire  une 
nouvelle  édition  plus  complète  que  les  anciennes. 
Après  en  avoir  averti  les  Maîtres  en  Argot,  qu'on 
nous  dispense  d'allier  à  l'ancienne  Langue  Fran- 
çoise «  un  jargon  que  Marot  a  laissé  à  corriger  et 
«  exposer  aux  successeurs  de  Villon  en  l'art  de  la 
<i  pinse  et  du  croq.  »  (Voy.  Œuv.  de  Villon,  préf.  de 
Marot,  p.  5.) 

Artus,  subst.  masc.  Nom  propre.  On  lit  dans  le 
roman  de  Lancelot  du  Lac,  qu'Arlus,  roi  de  la 
Grande-Bretagne,  après  la  perte  d'une  bataille  où 
tous  ses  Chevaliers  de  la  Table-ronde,  à  la  réserve 
de  Lucans  et  de  Girflet,  étoient  morts  en  combattant 
avec  lui  contre  Mordrec  son  mortel  ennemi,  se 
retira  seul  vers  une  rivière,  des  bords  de  laquelle  il 
disparut,  enlevé  sur  une  nef  par  sa  sœur  la  fée 
Morgain  (1).  Cette  fable,  adoptée  par  les  Brelons  sur 
la  foi  de  leurs  anciens  Romanciers,  fut  sans  doute  le 
principe  d'une  croyance  vulgaire  attestée  par  Guil- 
laume de  Malmesbury,  qui  dit  en  parlant  d'Arius  : 
«  Arturis  sepu'cbrum  nusquam  visitur;  unde 
«  antiquitas  n(X'niarum  adhuc  eum  venturum  fabu- 
«  latur.  »  Le  témoignage  de  cet  Historien  prouve 
évidemment  qu'au  temps  où  il  écrivoit,  les  Bretons 
s'opiniàtroient  encore  à  espérer  de  revoir  leur  bon 
roi  Artus,  et  à  l'attendre. 

H  suffit  que  le  merveilleux  d'une  fable  paroisse 
flatter  l'amour  propre  d'une  Nation,  pour  qu'une 
Nation  rivale  en  plaisante.  Aussi  voit-on  qu'ancien- 
nement une  espérance  incertaine,  une  vaine  attente, 
étoient  pour  un  P'rançois  l'atlente  du  roi  Artus, 
l'espérance  de  le  revoir. 

Petit  iroie  prisant 
Mon  torment, 
S'Ariu  reveoie. 

Cbans.  fr.  WS.  de  Berne,  n'  380,  part,  m,  fol.  19.  V. 

De  fol  avoir  a  grant  talent 

Cil  qui  s'afole  à  escient. 

Et  qui  son  preu  ne  veult  entendre. 

Avec  les  Dretcns  peut  ateudre 

Artu  qui  janiès  ne  vendra. 

Vie  des  Pcres.  MS.  de  la  Clayette,  p.  2.i3,  col.  i. 

On  comparoit  à  l'attente  des  Bretons,  celle  des 
habitans  de  Valenciennes,  qui  ne  vouloient  pas 
croire,  en  1225,  à  la  mo'i  de  Baudouin,  comte  de 
Flandre. 


A  Valenciennes  l'atent-on, 
Aussi  comme  funt  li  Breton 
Artu  qui  jk  ne  revenra  : 
Trestout  ensi  leur  avenra. 

Ph  Mouskes,  MS.  p.  68î. 

Probablement,  cest  par  allusion  à  l'attente  de 
quelque  merveille  vainement  espérée  par  le  bon  roi 
Artus  lui-même,  (ju'un  amant  incertain  du  succès 
de  son  amour,  disoil  : 

Maix  trop  redous  ke  n'aie  empris 
Ceu  k'en  Bretaigne  Artus  ratent. 

Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  n-  389,  part.  1,  fol.  U,  R\ 

Enfin,  il  est  possible  que  par  continuation  de  ces 
anciennes  plaisanteries,  si  naturelles  à  la  rivalité, 
on  ait  désigné  les  Acteurs  qui  dans  certaines  fêtes 
bouffonnes  établies  en  plusieurs  Villes  du  royaume, 
jouoient  les  rôles  de  Princes  et  de  Rois,  par  «  le 
«  nom  de  roy  Artus,  et  leur  Compagnie  par  celuy  de 
«  Chevaliers  de  la  Table-ronde.  Il  y  a  encore,  dit  le 
«  P.  Ménestrier,  des  jeux  et  des  plaisanteries  que 
«  l'on  nomme  du  Roy  Artus.  »  (Voy.  Ménestrier,  de 
la  Chevalerie,  p.  255.) 

Ai'vau,  subst.  masc.  Arcade,  voûte.  D.  Carpen- 
tier  avertit  qu'au  lieu  de  aman,  il  faut  lire  arvau 
dans  un  titre  de  1451  (2),  qu"ilcite.  (Suppl.  Gloss.  lat. 
de  Du  Cange,  au  mot  Arvoutus.  (Voy.  Arvoili-.) 

Ai've,  subst.  {cm.  Champ.  En  latin  du  moyen 
âge,  arva.  "  La  ruisselée  qui  est  entre  nos  vignes 
«  de Rousées et Varve (3) Thomassin  Geelin.  »  (D.'Car- 
pentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  T.  I,  col. 
318;  tit.  de  1326.  —  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot 
Arva.) 

Ai'voiilu,  subst.  masc.  Arcade,  voûte,  cintre. 
Du  latin  arcus  volutus,  en  françois  arc  voulté,  arc 
voultis,  arc  volu,  on  a  formé  par  contraction  les  mots 
composés  arvoulu,  arvolis,  arvolt,  arvol,  urvout, 
arvou  et  arvau,  qui  tous  signifioient  arcade,  voûte, 
galerie,  ou  autre  partie  de  bâtiment  faite  en  arcade, 
en  voûte,  en  cintre.  (Voy.  Arvau.) 

Devant  la  Tor  fête  à  ciment, 

En  un  ari-olt  qui  moult  ert  gent, 

Font  un  tombel  apareillier. 

Floire  et  Dlanchenor,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  198,  R»  col.  3. 

Ha  !  Diex,  ge  vol  nostre  maison, 
Les  fenestres  et  les  arvou:, 
Dont  ge  me  parti  corome  folz. 

Cortois  d'i\rlois,  JIS.  de  S'  Germ.  fol.  85,  R°  col.  l  et  5. 

On  retient  la  poussée  d'une  voûte  par  des  arcs 
boutans,  par  des  piliers  qui  finissent  en  demi  arc, 
et  qu'en  Limousin  on  nomme  arvouts  arbouts. 
(Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Arvoutus.)  En 
supposant  qiïarbout  ne  ditîère  d'arvout  que  par  le 
changement  d'une  lettre  de  même  organe,  on  pour- 
roit  en  conclure  qu'arvout,  prononcé  par  les  Limou- 
sins arbout,  est  le  principe  de  la  formation  de  notre 


(1)  Arthur,  penteyrn  ou  chef  des  Bretons  insulaires,  se  défendit  avec  un  grand  courage  contre  les  Saxons,  qui  le 
battirent  et  le  tuèrent  en  542,  sans  qu'on  ait  pu  retrouver  son  corps.  La  Légende  fit  d'.Vrthur  un  autre  Charlemagne,  et  les 
poi'mes  anglais  qui  le  célébraient  passèrent  avec  ses  sujets  émigrés  dans  la  petite  Bretagne.  Aux  traditions  celtiques  se 
mêlèrent  les  traditions  orientales  importées  par  les  croisades,  et  Ton  croyait  encore,  au  xviF  siècle,  à  l'existence  des 
Chevaliers  de  la  Table-Bonde,  (n.  e.)  —  C2)  .Vu  registre  JJ.  185,  p.  235.  -  (3)  Arve  ne  signifierait-il  pas  ruisseau,  et  n'aurait-il 
pas  pour  origine  le  sanscrit  (1)1,  signe  du  mouvement?  Cette  racine  se  retrouve  dans  l'.lcit',  qui  se  jette  dans  le  lac  de 
Genève,  et,  avec  métathése,  dans  l'.4i)-o)î,  affluent  du  Cher,  dans  VAvre,  anciennement  Arva,  affluent  de  l'Eure,  (n.  e.) 


AS 


—  211  — 


AS 


mot  composé  arc-boutant,  qu'il  faudroit  écrire  arc- 
voûtant.  (Voy.  Arc.) 

VARIANTES  : 
ARVOULU.  Conception  de  la  Vierge,  MS.  de  la  ClaY-  p- 161. 
Arvol.  Floire  et  Blanchellor,  MS.  du  R.  n»  6987,  fol.  252. 
AnvoLis.  Siège  de  Troye,  MS.  du  R.  n°  6987,  toi,  81. 
Arvolt.  Floire  et  Blanchellor,  MS.  de  S'-Germ.  fol.  198. 
Arvou.  Cortois  d'Artois,  MS.  de  S'-Germ.  fol.  85. 
Arvout.  D.  Carp.  S.  Gl.  lat.  de  D.  C.  au  mot  Arvoutus. 

Ariire,  siibst.  fém.  Labour,  labourage.  En  latin, 
arura{\).  (Ou  Gange,  Gloss.  lat.  T.  I.  col.  7i8.)  «  Par 
«  suffraunce  de  arrures  se  amendent  les  terres,  et 

«  par  le  semer  ; et  en  tiel  cas  est  la  suffraunce 

«  bone,  et  cautele  à  suffrer  que  homs  semé  autruy 
«  terre.  »  (Dritton  des  Loix  d'Angleterre,  fol.  142  et 
143.)  «  L'achateur  sera  payé  de  ses  ainires,  semon- 
«  ces  et  engrains,  s'il  n'a  les  fruicts.  »  (Coût,  de 
Normandie,  au  Coût.  gén.  T.I,  p.  1024.  (Voy.AnER.) 

VARIANTES  : 
ARURE.  Monet,  Dict.  au  mot  Arev. 
AiREURE.  Laurière,  Gloss.  du  D.  Fr. 

AiRURE.  Coût,  de  Normandie,  au  Goût.  gén.  T.  I,  p.  1009. 
Arrure.  Britton  des  Loix  d'Angleterre,  fol.  142. 

As,  subst.  masc.  Unité.  Point  unique  marqué  sur 
une  carte  ou  sur  l'une  des  six  faces  d'un  dé.  Nos 
ancêtres  étoient  si  familiarisés  avec  les  idées  de 
chance  heureuse  ou  malheureuse  au  jeu  de  dés,  que 
pour  eux,  changer  le  bonheur  en  malheur,  c'étoit 
tourner  un  six  en  as. 

Hasart,  dist  la  Mort,  fols,  estous  ; 
A  ce  coup  vengerai  ceaus  tous 
De  cui  mal  faire  te  penas... 
Je  tornerai  ton  .sis  en  as. 

Miserere  du  Recl.  de  Moliens,  MS.  de  Gaignat,  fol.  213,  R"  col.  2. 

S'ils  étoient  malheureux,  les  dés  étoient  de  deux 
et  d'as. 

Or  pues-tu  bien  crier,  hélas  ! 
Quar  ti  dé  sont  de  deus  et  d'as. 

Fabl.  MS.  du   R.  n-  7218,  fol.  77.  R°  col.  2. 

On  leur  présageoit  un  malheur,  en  leur  appor- 
tant dés  de  deux  et  d'as. 

Mors  crie  à  Romme,  crie  à  Raina  ; 
Seignor,  tuit  estes  en  mes  mains... 
Certes  je  cor  plus  que  le  pas, 
Et  s'aport  dez  de  deux  et  d'as, 
Por  vous  1ère  geter  du  mains. 

Poëme  de  la  Mort,  MS.  du  R.  n"  7218,  Strophe  XV. 

Ils  désignoient  un  malheureux,  un  homme  mé- 
prisable, à  qui  il  étoit  malheureux  de  se  fier,  en 
disant  qu'il  étoit  de  deux  et  d'as. 

Par  Eskievins  de  deux  et  d'as, 
Fu  fais  à  Paris  li  baras, 
Que  li  Cuens  ara  le  moitié 
Es  Borjois  parjures  d'Arras. 
Poème  de  la  Mon,  MS.  du  R,  n-  G987,  fol.  338,  V  col.  4. 

En  disant  qu'une  personne  ou  qu'une  chose  ne 
valoit  pas  un  as,  ils  en  désignoient  la  valeur  comme 
inférieure  à  celle  de  l'as,  au  jeu  de  dés.  C'étoit 
l'expression  du  souverain  mépris  pour  une  per- 
sonne ou  pour  une  chose  de  nulle  valeur.  (Voy. 
Athis,  MS.  fol.  19.) 

Probablement,  c'est  par  allusion  à  l'idée  d'un  dé 


qui,  pirouettant  sur  l'une  de  ses  carnes,  laisse  quel- 
que temps  la  chance  douteuse  et  incertaine,  qu'en 
parlant  d'un  homme  qui  doutoit  de  son  bonheur 
dans  une  affaire,  d'un  homme  qui  répondoit  de 
fa(,îon  à  laisser  incertain  et  douteux  le  sens  de  sa 
réponse,  on  a  dit  «  qu'il  répondoit  entre  deux  et 
«  as;  qu'il  demeuroit  entre  deux  et  as.  »  (Cotgrave, 
Dict.  —  Voy.  Ambesas.) 

Ascendant,  Partie,  et  subst.  Qui  monte,  qui 
s'élève.  Nati.'ilé,  horoscope,  destinée.  Supériorité. 

Il  est  probable  qu'on  auroit  toujours  ignoré  que 
Maître  Martin  Mesnard,  «  personnage  sachant  bien 
«  faire  le  Palais,  aimoit  à  se  jouer  de  son  esprit  en 
«  fa-sant  des  vers  ascendans,  «  si  Pasquier  ne  nous 
l'eût  révé'é  dans  une  Lettre  par  laquelle  il  témoi- 
gne au  Seigneur  des  Accords,  son  regret  de  ce 
qu'une  nouvelle  édition  des  Bigarrures,  n'étoit  pas 
enrichie  de  mille  choses  aussi  curieuses  que  ces 
vers  ascendans  : 

Rem,  regem,  regimen,  regionem,  relligionem 
Restauraverimus  rel'igionicolœ. 

Ces  vers,  que  Mesnard  nommoit  «  ascendans, 
"  d'autant  que  par  forme  de  degré  il  faisoit  monter 
«  chaque  mot  d'une  syllabe,  »  ne  sont  qu'un  échan- 
lillon  des  jeux  de  son  esprit.  «  Vous  ne  croiriez  pas, 
«  dit  Pasquier,  (Lett.  T.  1,  liv,  viii,  p.  50G.)  combien 
«  il  a  de  pareilles  gayetés.  »  On  a  peine  à  concevoir 
qu'au  xvi'  siècle,  l'esprit  se  soit  égayé  et  même 
enorgueilli  de  productions  qui  l'humilient  aujour- 
d'hui et  l'attristent. 

On  s'est  figuré  les  Pères,  les  Grands-pères,  les 
Grands-oncles,  et  on  se  les  figure  encore  aujour- 
d'hui comme  ayant  un  mouvement  par  lequel  ils 
montent,  ils  s'élèvent  d.ms  l'espace  du  temps,  au- 
dessus  des  Fils,  des  Pelits-fils,  des  Petits-neveux, 
lorsqu'en  termes  de  généalogie  on  dit  qu'ils  en  sont 
les  Ascendans.  «  Quant  aux  héritages  propres,  ils 
«  ensuivent  les  tronc  et  ligne  du  père  et  mère,  et 
«  autres  leurs  ascendans  desquels  ils  sont  venus 
«  et  issus.  »  (Coût.  gén.  T.  I,  p.  208.) 

Quoiqu'on  ne  croye  plus  à  l'immobilité  du  globe 
terrestre,  les  astres,  les  points  du  Ciel,  ou  les  degrés 
des  Signes,  qu'au  moyen  de  la  rotation  de  la  Terre 
sur  sou  axe  on  aperçoit  successivement  à  l'horizon, 
n'en  sont  pas  moins  vus  comme  ascendans,  «  mon- 
«  tans  sur  ce  même  horizon.  »  Ainsi,  l'on  dit  en 
termes  d'Astrologie  qu'un  astre,  qu'un  signe  est  à 
l'ascendant,  qu'il  monte  sur  l'horizon,  lorsqu'on  l'y 
aperçoit.  "  Le  Soleil,  dès  son  lever  jusqu'à  midi, 
continue  son  ascendant.  «  (Monet,  Dict.) 

Il  est  visible  qu'flsccHfto»i,  participe  de  l'ancien 
verbe  ascendre,  ne  devient  substantif  (|ue  par  ellipse 
d'un  nom,  tel  que  celui  de  cours  ou  de  point,  lors- 
qu'on dit  que  le  Soleil  continue  son  ascendant, 
qu'un  astre  est  à  Y  ascendant,  etc.  En  termes  d'As- 
trologie judiciaire,  naître  au  moment  où  un  astre, 
un  signe,  une  planète  est  au  point  ascendant,  c'est 
avoir  à  l'ascendant  cette  planète,  ce  signe,  cet 


(1)  Arure  vient  A'aratura.  Arura  n'est  que  la  transcription  du  grec  açovça,  dans  Marcellus  Empiricus;  on  le  trouve  aussi 
dans  des  cartulaires  anglais,  mais  c'est  alors  arure  latinisé,  (n.  e.) 


AS 


-  212  — 


AS 


astre,  au  moment  de  sa  naissance.  On  sait  avec 
quelle  folie  on  a  cru  aux  Astrologues  qui  disent 
qu'en  ce  moment  l'astre  ascendant  influe  puissam- 
ment sur  la  destinée  heureuse  ou  malheureuse  des 
hommes.  C'est  par  allusion  à  cette  vaine  croyance, 
qu'un  Poêle  du  xvi'  siècle,  espérant  tout  de  la  libé- 
ralité du  fioi  Henry  III,  disoit  : 

.Te  n'ay  soucy  sous  quel  astre  ascendant 
J'aye  tiré  quelque  heureuse  influence  ; 
Ni  quels  flambeaux,  au  jour  de  ma  naissance, 
De  dovLx  aspects  s'entr'aUoyent  regardant. 

Poès.  d'Amadi*  Janiyn,  fol.  9,  R*. 

En  supprimant  le  nom  de  la  planète,  du  signe, 
ou  de  l'astre  auquel  on  attribuoit  tant  d'influence 
sur  notre  destinée,  le  participe  ascenda)it  aura 
signifié,  comme  substantif,  l'état  et  la  disposition 
du  Ciel  et  des  astres  au  moment  de  la  naissance  de 
quelqu'un,  sa  nativité,  son  horoscope,  sa  destinée 
dépendante  de  l'astre,  de  la  planète  ,  ou  du  signe 
qu'en  ce  moment  il  avoit  «  l'ascendant. 

Si  par  quelque  raison 

Votre  ascendant  à  Ihymen  vous  expose, 
N'épousez  point  d'Honnesta,  s'il  se  peut  : 
N'a  pas  pourtant  une  Honnesta  qui  veut. 

La  Fontaine,  conte  de  Belphégor. 

Peut-être  trouveroit-on  dans  l'amour-propre , 
forcé  d'avouer  la  supériorité  de  certains  hommes 
sur  l'esprit,  sur  la  volonté,  sur  la  fortune  même  de 
ceux  qui  semblent  faits  pour  être  leurs  égaux,  la 
raison  pour  laquelle  on  a  nommé  ascendant  cette 
supériorité.  C'est  une  espèce  de  consolation  de  n'y 
voir  qu'un  etîet  de  l'influence  d'un  astre  plus  heu- 
reux que  celui  qu'au  moment  de  sa  naissance  on  a  eu 
à  Vascendant;  influence  que  l'on  a  crue  irrésistible. 

VARIANTES  : 
ASCENDANT.  Orth.  subs.  -  Poës.  d'Amadis  Jamyn,  fol.  9. 
AsçANDANT.  Monet,  Dict. 

Ascendre,  verbe.  Monter,  s'élever.  (Voy.  Ascen- 
dant.) Dans  le  sens  propre,  monter,  gravir  au  haut 
d'une  montagne  élevée:  «  Cil  levaunt  par  nuit, 
'<  flscfHrf?  ermount  Sinai,  com  nostre  Seignor  ont 
«  comandé.  »  (Trad.  de  la  Bible ,  Exod.  chapitre 
ixxiv,  ^.  4.) 

Par  extension  de  cette  acception  particulière, 
monter,  se  mouvoir  de  bas  en  haut,  se  transporter 
par  ce  mouvement  en  un  lieu  plus  haut,  plus  élevé 
que  celui  d'oii  l'on  part.  >■  Jeo  fériroi  tôles  tes  con- 
«  trées  des  raines,  lesqueux  ascenderont  et  entre- 
«  ront  ta  maisoun  et  la  couche  de  ton  lit.  »  (Ibid. 
chap.  viii,  f.  2.) 

Dans  le  sens  figuré,  monter,  s'élever  aux  hon- 
neurs, à  la  fortune  : 

Petit  hom  n'aiez  en  despit  ; 
Car  celi  k'ore  est  vil  et  petit, 
Si  com  avenu  e.st  souvent, 
A  richesces  et  honurs  ascent. 

Enseignemeos  d'Aristote,  MS. 

Ascension,  subst.  fém.  Fête  de  l'Ascension. 
Fête  de  l'Assomption. 

L'usage  du  substantif  ascension,  en  termes  de 
Physique  et  d'Astronomie,  paroît  nouveau  dans 
notre  Langue,  relativement  à  celui  d'après  lequel 
il  a  signifié  et  signifie  encore  l'élévation  miracu- 


leuse de  Notre  Seigneur ,  lorsqu'il  monta  au  Ciel, 
lorsqu'il  «  ascendit  h  la  clarté  glorifiée,  »  comme  a 
dit  J.  de  Meung.  (Testam.  vers  754  et  755.  —  Voy. 

ASCENDHE.) 

11  est  probable  qu'anciennement  on  faisoit  une 
procession  publique  et  solennelle  le  jour  de  V.As- 
cension,  puisqu'on  a  désigné  une  multitude  dépeu- 
ple que  la  curiosité  atlirbit  sur  le  passage  d'un 
Chevalier,  en  disant  : 

Et  quant  ors  de  la  Ville  issi, 
Si  ot  autel  procession, 
Com  s'il  fust  jorz  li'. Acensiun. 

Rom.  de  Perceval,  MS.  de  Berne,  n"  354,  fol.  232,  R-  col.  i. 

Le  terme  auquel  l'Eglise  a  fixé  cette  fête,  étant  le 
même  tous  les  ans,  c'est-à-dire  de  quarante  jours 
après  Pâques,  on  a  imaginé,  dès  le  xiv  siècle ,  de 
comparer  à  l'.-lsce?isiore,  les  choses  et  même  les 
personnes  qui  sont  toujours  dans  les  mêmes  termes, 
dans  le  même  état.  (Voy.  Oudin,  Dicl.  —  Dict.  de 
Trévoux.) 

A  moy  payer  est  tout  le  monde  lent  ; 
L'en  ne  me  sert  que  de  locution. 
L'en  paye  ailleurs  :  je  suis  l' Ascension 
Qui  en  un  point  m'a  fait  son  prisonnier. 

Eusl.  Desch.  Poès.  MSS.  p.  367,  col.  3. 

On  assimiloit  à  l'élévation  miraculeuse  de  Notre 
Seigneur  l'enlèvement  de  sa  Mère  au  Ciel,  en  disant 
Ascension  pour  Assomption.  >>  Qu'ils  reçoivent  le 
«  précieux  corps  de  Nostre  Seigneur  aux  bonnes 
>'  restes  annuelles  et  à  VAscensim  Nostre-Danie.  « 
(Hist.  de  Paris,  pr.  T.  III,  p.  748  ;  tit.  de  1522.  — 

Voy.  ASSUMPTION.) 

VARIANTES  : 

ASCENSION.  Orth.  subsist.  -  Chron.  S'  Denys,  Rec.  des 
Hist.  de  Fr.  T.  X,  p.  311  ;  Var.  margin. 

ACENsiON.  R.  de  Perceval,  MS.  de  Berne,  n»  3.54,  fol.  232. 

AssENTiON.  Vie  de  Théophile,  MS.  du  R.  n°  6987,  fol.  312. 

Ascient,  subst.  masc.  Avis,  sens,  connoissanee, 
raison,  volonté.  On  observera  que  dans  le  xv  et  le 
xvr  siècle,  on  a  dit  scient,  avec  la  signification  du 
participe  latin  sciens.  (Voy.  Scient.)  C'est  de  ce  même 
participe  latin  que  plus  anciennement  s'éloit  formé 
ascient,  moins  commun  dans  notre  Langue  qu'^s- 
c/«?i^  On  prononfoit  et  l'on  écrivoil  ensient ,  eu 
modifiant  par  le  nez  le  son  de  la  voyelle  initiale, 
comme  dans  ensienteus;  variation  d'orthographe 
de  Vid'iectif  escienteus,  le  même  que  scienteits  ou 
scientieux,  formé  du  substantif  science,  escience, 
en  latin  scientia.  (Voy.  Science  et  Scientieix.) 

Il  est  évident  que  c'est  par  ellipse  d'un  nom  pro- 
pre à  désigner  la  faculté  de  voir,  de  sentir,  de  cou- 
noître ,  de  raisonner,  de  vouloir,  qu  ascient  ou 
escient,  \e  même  que  scient  en  françois,  en  latin 
sciens,  a  signifié  avis,  sens,  connoissanee  ,  raison, 
volonté.  «  Pour  emender  à  lor  pooir  et  hlor essient 
«  les  assises  et  les  usages  doudit  Royaume  ,  etc.  » 
(Assises  de  Jérusalem,  chap.  m,  p.  15.)  «  S'il  est 
«  hors  d'escient,  come  s'il  estoit  yvre,  foui,  ou  for- 
"  cenné,  il  doit  avoir  administrateur.  »  (Ane.  Coul. 
de  Bretagne,  fol.  123,  \\] 

Pécher  vilainement 
Muet  de  foible  escient. 

Marconi  et  SaloraoD,  MS,  de  S'  Gcrm.  fol.  117,  R*  col.  I. 


AS 


213 


AS 


Qui  moult  voit  et  n'aprant, 
N'a  pas  grant  escient. 

Prov.  du  C"  de  Bretagne,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  115,  V  col.  1. 

Vos  en  dirai  mon  escient. 

Ane.  Poét.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1911. 

Enfin,  agir  ou  parler  «  en  y  mettant  escient,  h 
«  bon  escient,  à  son  escient,  »  en  latin  barbare  suo 
scienle,  c'éloit  agir  ou  parler  avec  connoissance 
de  cause,  d'après' son  sentiment  et  son  avis,  comme 
l'on  voyoit  et  sentoit.  (Voy.  Beaumanoir,  Coût,  de 
Beauvoisis,  p.  9,  etc.  —  Ménage,  Dict.  Etym.):  «  Si 
«  je  pensois  que  parlassiez  à  bon  escient ,  je  m'en 
«  tiendrois  toute  glorieuse.  »  (Nuits  de  Straparole, 
T.  II,  p.  380.)  «  Avant  ce  que  à  chief  venist  de  son 
K  emprinse,  à  mon  escient,  plustost  auroit  conquis 
«  toutes  les  AUemaignes.  •  (Ger.  de  Nevers,  part,  i, 
page  9.) 

Et  sanz  mètre  nul  esciant. 
Ont  lui  eslit  par  jugement. 

Parton.  de  Blois,  MS.  de  S.  Germ,  fol.  162,  R*  col.  3. 

En  supprimant  la  préposition  dans  l'expression 
à  mon  escienl,  on  àisoii  mon  escient ,  pour  à  ma 
connoissance,  à  mon  sentiment,  à  mon  avis.  (Voy. 

ASCIEÎ^TRE.) 

Se  j'eusse  faux  talent 
Et  je  s'eusse  trecier  ; 
Mieux  m'en  fust,  nio)!  essimit. 

Ane.  Poël.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  U,  p.  801. 

On  a  vu  que  «  parler  à  bon  escient,  «  e'étoit  par- 
ler comme  l'on  sentoit  réellement.  Il  semble  qu'on 
ait  généralisé  celte  idée  de  réalité,  lorsqu'en  oppo- 
sant aux  combats  à  la  baniére  les  combats  réels, 
on  a  dit:  «  Il  y  faut  venir  à  bon  escient.  »  (Bran- 
tôme, Cap.  Estr.  T.  I,  p.  304.) 

Si  l'on  agissoit  avec  la  volonté  de  nuire  ou  de 
tromper,  si  l'on  voyoit  et  sentoit,  si  l'on  connoissoit 
et  raisonnoit  la  possibilité  de  l'éaliser  cette  volonté, 
on  agissoit  à  escient.  «  Le  Chevalier  faignant  à 
«  essietit  de  dormir,  etc.  »  (Percef.  Vol.  V,  fol.  51.) 
«  Gauvain  fut  bien  honteux  du  coup  qu'il  avoitfait, 
«  et  dit  à  Lancelot  :  haa  !  Sire ,  pardonnez-moi ,  et 
«  sçachez  que  je  ne  le  feiz  point  à  mon  escient.  » 
(Lanc.  du  Lac,  T.  III,  fol.  30,  V-  col.  1.) 

Por  ceu  ne  me  puis  de  celi  partir 
Ke  à  assiant  me  fait  mal  sentir. 
Maix  se  d'un  baissier  me  voloit  merir, 
Tout  li  perdonroie. 

Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  n'  389,  part.  I,  fol.  73,  R'. 

Dans  un  sens  plus  général,  l'expression  à  escient 
signifioit  volontairement,  avec  une  volonté  que 
détermine  la  façon  de  sentir  les  choses  et  de  les 
raisonner.  «  Y  a  eu  non  seulement  plusieurs  aveu- 
«  gles,  grands  et  sçavans  ;  mais  d'autres  encores 
«  qui  se  sont  privés  de  veue  à  escient,  pour  mieux 
«  philosopher.  »  (Sagesse  de  Charron,  p.  81.) 

VABIANTES  : 
ASCIENT.  Athis,  MS.  fol.  26,  R»  col.  2. 
Assiant.  Ch.  Fr.  MS.  de  Berne,  n»  389,  part,  i,  fol.  73. 
Ensient.  Athis,  MS.  fol.  14,  V"  col.  t. 
Esci.\NT.  Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  5t. 
Escient.  Orth.  subs.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  93. 


EssiANT.  Ch.  Fr.  MS.  de  Berne,  n°389,  part,  ii,  fol.  77,  V". 
EssiENT.  Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  801. 

Ascientre,  subst.  et  adv.  En  avisant,  avec  con- 
noissance, volontairement.  Avis,  connoissance, 
volonté.  (Voy.  Ascient.) 

De  l'adverbe  latin  scienter,  s'est  formé  le  françois 
ascientre,  qui,  dans  un  sens  analogue  à  celui  du 
participe  ascient,  en  latin  sciens ,  signifioit  volon- 
tairement, avec  connoissance,  en  avisant.  «  Si  vos 
«  wardeiz  désormais  k'aucuns  de  vos  ne  tignet  à 
«  petit,  cum  petit  k'il  assiantre  forfaicct.  »  (S'  Ber- 
nard, Serm.  Fr.  mss.  p.  251.) 

C'est  sans  doute  par  ignorance  ou  par  oubli  de 
l'origine  de  l'adverbe  ascioitre,  qu'on  s'en  est  servi 
comme  d'un  substantif,  et  qu'on  a  dit  à  mon  ascien- 
tre, ou  mon  ascientre  en  sup[irimant  la  préposition, 
pour  à  mon  avis,  à  ma  connoissance,  à  ma  volonté. 
(Voy.  Rec.  de  Perard,  p.  515  ;  tit.  de  1266.) 

Mais  li  Rois  ot  mellor  confort  ; 
Car  d'Englois  ot  plus  de  lx. 
Et  lendemain,  mon  ensiantre, 
Ot-il  Saintes  à  son  voloir. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  816. 

VARIANTES  : 

ASCIENTRE.  Rec.  de  Pérard,  p.  515  ;  tit.  de  1266. 
Assi.\NTnE.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  p.  251. 
Ensiantre.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  846. 

Asclasser  (s'),  verbe.  Tomber  de  lassitude.  Il 
est  possible  qu'en  aspirant  gulturalement  le  verbe 
aZrtsscr,  on  l'ait  prononcé  et  écrit  aclasser,  asclas- 
ser, etc.  »  Ces  adnes  sunt  voz  :  sis  ai   menez  pur 

»  co  que  vos  enfanz  les  muntent; e  cest  vin, 

«  que  ces  en  beivent  ki  se  alassermit,  par  aventure, 
<•  al  désert.  »  (Liv.  des  Rois,  ms.  desCordel.  fol.  60.) 

A  ice  mot  un  pou  s'asclasse  ; 
Car  de  travail  est  endormie. 

Athis,  MS.  fol,  119,  V-  col.  2. 

Cette  analogie  de  signification  semble  justifier 
notre  idée  sur  asclasser,  le  même  qu  aclasser  dont 
on  a  cru  voir  l'origine  dans  le  verbe  latin  cadere, 
s'il  n'étoil  une  altération  du  françois  accoiser. 
(Voy.  Aclasser  et  Acase.ment.) 

VARIANTES    : 
ESCLASSER  (s').  Athis,  MS.  fol.  119,  V»  col.  2. 
Alasser  (s').  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  passini. 

Ascon,  subt.  masc.  Nacelle  (1).  Selon  Eccard, 
nacelle  de  cuir,  en  latin  ascus,  asc  en  Anglo-saxon. 
S'il  est  vrai  que  ces  noms  soient  formés  du  grec 
apxif,  en  françois  outre,  acon  est  une  altération 
d'ascon,  qu'en  certaines  provinces  les  pêcheurs  de 
marais  et  d'étangs  prononcent  nascon.  (Du  Gange, 
Gloss.  lat.  T.  I,  col.  757.  —  Ménage.  Dict.  Etym.  — 
Voy.  AcoN.) 

Ascouter,  verbe.  Ecouter.  Prêter  l'oreille,  en 
latin  auscultare,  d'oîi  le  françois  ascouter,  ascut^er. 
ascolter,  etc.  «  Les  cuers  des  ascutans  encitat  al 
"  amor  del  céleste  pa'is.  »  (Dial.  de  S'  Grégoire,  ms. 
«  liv.  I,  chap.  IV.) 

On  auroit  réuni  escouter  sous  ascouter,  comme 


(1)  Ascon  est  un  poisson,  nommé  usch  en  allemand,  ombre  en  français  actuel.  Walafridus  Slrabo,  mort  en  859,  écrivait  : 
.  Interea  du'cis  fertur  milii  norniula  piscis  Asconis  calidi,  sequitur  vas  denique  musti.  (n.  e.) 


AS 


-  214  — 


AS 


allératlon  d'orlliographe,  s'il  eût  été  possible  d'en 
rapprocher  tous  les  noms  dérivés,  tels  qn'escout 
sous  lequel  on  trouvera  ascoitt,  esronle;  CHcoute- 
rneiit  sous  leiiuel  on  trouvera  accoiislcmcnt  et 
accoutemcnt  ;  cscoutcre  ou  escoutcur  sous  lequel 
on  trouvera  aceousteur  et  accouteur  ;  escouterie, 
escoutet,  etc.  (Voy.  Escout  et  Escouter.) 

VARIANTES  : 
ASCOUTER.  Nicot,  Dict.  au  mot  Accnuter. 
Abscoulter.  D.  Carp.  S.  G.  1.  de  Da  C.  au  mot  Abscultare. 
AccousTER.  Cûtgrave,  Dict. 
ACCOUTER.  Nicot  et  Monet,  Dict. 
AcouTEK.  Nicot,  Dict.  au  mot  Accnuter. 
AscoLTER.  Dial.  de  S'  Grég.  MS.  liv.  III,  chap.  xxxvii. 
A.SCUTER.  Ibid.  liv.  I,  chap.  iv. 

Ascriptices,  siihst.  mnu.  plur.  Espèce  de  Serfs, 
En  latin  asci'iptitii  ;  dénomination  qui  semble  rela- 
tive à  l'usage  d'inscire  in  album  mcribere ,  les 
Colons  ou  Vilains  qui,  passant  d'un  village  dans 
un  autre ,  obtenoient  du  Seigneur ,  à  charge  de 
services,  la  permission  de  s'y  fixer  comme  servi 
glebœ,  comme  attachés  à  la  gièbe.  Dans  les  Statuts 
Mss.  de  Charles  I"  roi  de  Sicile,  chap.  cklis.,  on  lit  : 
«  Les  Ascrijitices,  c'est  assaveirceux  qui  sont  tenus 
«  de  labourer  les  terres  de  tours  Signors,  et  ne  se 
K  peuvent  partir  de  céans,  sans  lor  commande- 
«  ment.  »  (Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  756.) 

VARIANTES    : 
ASCRIPTICES.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  I,  col.  757. 
AscRiTicES.  Id.  ibid. 

Asiniquement,  adv.  A  la  façon  d'un  âne. 
Dans  le  sens  figuré,  juger  asiniquement,  c'étoit 
juger  bêtement  comme  feroit  un  àne.  <■  Il  avoit  esté 
«  asiniquement  }u^é  par  le  Juge,  à  quo  bien  appelle 
«  par  l'Appellant.  »  (Bigarrures  du  S'  des  Accords, 
fol.  57.  —  Voy.  AsNESQUE.) 

Asma.  subt.  masc.  Asthme.  En  grec  âde^a,  d'où 
asmn,  le  même  que  asme,  "  Quand  vous  tirez  un 
«  oiseau  de  la  mue.  ne  le  portez  pas  par  temps 

«  chaut, car  par  chaleur  lui  vient   Vasma.  » 

(Arteloque,  Fauconnerie,  fol.  91 .)  «  Les  signes  que 
«  l'oiseau  a  Vasme,  autrement  pantais,.  sont  quand 
«  il  ne  peut  avoir  l'haleine,  etc.  »  (Fouilloux,  Fau- 
connerie, fol.  80.) 

VARIANTES  : 
ASMA.  Arteloque,  Fauconnerie,  fol.  91,  V*. 
Asme.  Fouilloux,  Fauconnerie,  fol.  80,  R». 

Asmatique,  Adj.  Asthmatique.  Du  substantif 
Asma,  asme.  (Voy.  Arteloque,  Fauconnerie,  fol.  91.) 

Asne,  subst.  masc.  Ane,  bête  de  somme,  mon- 
ture. Ane,  animal  lascif.  Ane,  animal  stupide. 
On  a  dit  «  que  de  toutes  les  bêtes  il  n'y  en  a  point 


«  qui  eotendent  mieux  que  Vasne.  »  (Voy.  Bouchet, 
XI'  serée.)  Cette  finesse  d'ouïe  paroît  être  l'origine 
de  la  fable  du  roi  Mldas,  à  qui  les  Poètes  donnoient 
des  oreilles  d'âne  ,  pour  signifier  qu'il  avoit  la  sage 
curiosité  do  tout  entendre  et  tout  savoir  dans  son 
royaume.  Elle  est,  dit-on,  l'effet  naturel  de  celte 
longueur  d'oreilles,  désignée,  comme  le  croit 
Court  de  Gébelin,  par  le  nom  d'asne.  (Voy.  Dict. 
Etym.  de  la  Lang.  lat.  au  mot  Ans,  en  françois 
oreille.)  On  sait  que  si  les  oreilles  d'âne  éloient 
pour  quelques  Poêles  le  signe  d'une  curiosité  sage, 
pour  d'autres  elles  étoient  celui  d'une  stupide  igno- 
rance. 

Quelque  général  qu'ait  été  et  que  soit  encore  notre 
mépris  pour  Vasne  (1),  cet  animal  si  laborieux,  si 
patient,  si  frugal,  par  conséquent  si  utile  comme 
bête  de  somme' et  comme  monture,  les  Cabalistes 
l'ont  proposé  «  pour  marque  et  enseigne  de  sagesse 
'<  et  sapience  :  à  laquelle  quiconque  aspire,  doit 
«  endurer  patiemment  la  peine,  estre  humble  et 
«  sans  malice  comme  l'asne.  »  On  lit  que  fidèle  à 
l'allégorie  cabalistique,  «  Ammonius  Alexandrinus 
«  bailla  à  Origène  et  ;\  Porphyre  ses  disciples,  un 
«  asne  pour  compagnon  d'escole.  »  (Voy.  Bouchet, 
xr  serée.) 

Dans  un  sens  relatif  ii  l'asne,  bête  de  somme  et 
monture,  on  a  dit  proverbialement  :  1°  «  La  seur- 
«  somme  abat  Vasne,  >>  pour  signifier  le  danger 
d'une  imposition  excessive  sur  le  Peuple,  en  général 
le  danger  des  excès.  (Prov.  rur.  et  vulg.  ms.  de  N.  D. 
n-  2,  fol.  12.) 

2°  «  Jà  dui  orgueilleus  ne  chevaucheront  bien  un 
0  asne,  »  pour  signifier  que  l'union  est  impossible 
entre  deux  hommes  orgueilleusement  rivaux  l'un 
de  l'autre  dans  la  possession  ou  dans  la  poursuite 
d'un  bien  qu'ils  souffriroient  impatiemment  de  par- 
tager. (Prov.  du  Vilain,  ms.  de  S'-Germ.  fol.  277.) 

Trop  seroit  fort,  à  verte  dire, 
Deux  orgillex  un  asi>e  eslire 
Soffisant  por  lor  chevauchier. 

Poëmo  de  la  Mort,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  337,  R-  col.  3. 

3°  «  Cui  estli  asnes,  s'el  tiengne  par  la  coue,  >>  pour 
signifier  la  nécessité  de  veiller  aux  affaires  qui  n'in- 
téressent que  nous-mêmes.  (Prov.  rur.  et  vulg.  ms. 
de  N.  D.  n"2,  fol.  10.) 

A"  «  Pour  un  point,  perdi  Gibbert  son  asne,  « 
pour  signifier  qu'en  affaires,  comme  au  jeu,  il  n'y 
a  souvent  qu'un  point  de  la  perte  au  gain.  (Prov. 
rur.  et  vulg.  ms.  de  N.  D.  ir  2,  fol.  13.) 

Il  est  probable  que  si  Cardan  eût  su  que  long- 
temps avant  le  xvr  siècle,  «  pour  un  point,  Gibert 
«  perdit  son  asne,  »  il  en  auroit  conclu  qu'au  nom 
de  Gibert  on  avoit  depuis  substitué  celui  de  Martin. 


(1)  Elle  serait  curieuse,  au  point  de  vue  de  la  langue,  l'histoire  de  ces  animaux  domestiques  que  d'abord  on  évita  d'ofîrir 
aux  yeux,  et  qu'ensuite  on  couvrit  de  périphrases  et  d'épilhètes  pour  en  rendre  la  vue  supportable.  Homère  comparait 
aans  façon  Ajax  à  un  àne  ;  Lamotte  traduisit  l'animal  utile  r/uoutmrii'nt  nos  dédains.  Rosset  voulut  tenter  l'aventure,  mais 
sentant  défaillir  son  audace,  il  se  contenta  de  dire  avec  hauteur  :  «  Que  ce  nom  méprisé  dégraderait  ses  vers.  »  Il  craignait 
d'ailleurs  de  faire  de  la  peine  au  mulet,  «  dont  l'orgueil  rougirait  si  je  nommais  son  père.  »  Campenon,  plus  hardi,  demanda 
la  permission  de  le  citer  dans  une  énuméralion  :  «  ...  Et  même  enfm  si  Vàm;  osait  paraître.  »  Delille  eut  enfln  la  bravoure 
de  le  nommer  sans  périphrase  ni  précaution  oratoire.  Il  aurait  eu  les  félicitations  de  Sainte-Palaye  et  de  iMouchet  : 
cependant  le  public  s'élonnait,  et  Joseph  Chénier  pouvait  écrire  :  «  Un  âne  sous  les  yeux  de  ce  rimeur  maudit,  Ne  peut 
passer  tranquille  et  sans  être  décrit.  »  (n.  e.) 


AS 


—  2i5 


AS 


Alors  il  n'eût  pas  imaginé  que  ce  Martin  étoit  abbé, 
et  qu'un  Pape  l'avoil  privé  de  son  abbaye,  parce 
que  dans  le  vers  suivant,  écrit  sur  la  porte  de  ce 
même  abbé. 

Porta  patens  esto,  nulU.  claudaris  honesto. 

la  virgule  ou  le  point  étoit  placé  aprè  nulU.  Ce  vers 
ainsi  ponctué,  présentoit  un  sens  dont  le  Pape,  qui 
passoil  par  là,  fut,  dit-on,  tellement  indigné,  qu'il 
en  punit  l'abbé  Martin  par  la  privation  de  son 
abbaye  nommée  Asello,  comme  l'attestoit  cet  autre 
vers  mis  à  la  suite  du  précédent  : 

Fi-o  solo puncto  caruit  Mai-liiius  Asello. 

Ménage  ajoute,  d'après  Cardan  sans  doute,  que 
«  parce  que  le  mot  italien  asello  signifie  en  fran- 
«  çois  âne,  on  a  ainsi  tourné  le  proverbe.  Pour  un 
-'  point  Martin  perdit  son  âne;  au  lieu  de  dire,  son 
-  abbaye.  »  (Voy.  Ménage,  Dict.  Etym.  —  Dict.  de 
Trévoux.)  On  le  répète,  si  Cardan  eût  su  qu'an- 
ciennement on  avoit  dit  de  Gibert  ce  que,  de  son 
temps,  on  disoitde  Martin,  probablement  il  n'en  eût 
pas  fait  deux  abbés  d'AscUo.  Peut-être  auroit-il 
soupçonné  que  le  proverbe  «  pour  un  point  Martin 
perdit  son  asne,  »  faisoit  allusion  à  quelque  conte 
ou  fabliau  postérieur  à  celui  dans  lequel  Gibert 
n'étoit  pas  plus  chanceux  que  Martin.  Un  pauvre 
homme,  dit  Cotgrave,  gagea  son  âne  qu'il  étoit  tout 
blanc  ;  mais  celui  contre  lequel  il  gageoit  découvrit 
un  poil  noir,  et  le  pauvre  homme,  sans  doute 
nommé  Martin,  perdit  son  gage  :  de  \h,  le  proverbe 
«  pour  un  poil  Martin  perdit  son  asne,  »  le  même 
que  pour  un  point,  etc.  (Vov.  Cotgrave,  Dict.) 

Les  Frères  de  l'ordre  dé  la  Trinité,  institués  en 
1108,  première  année  du  Pontificat  d'Innocent  III 
furent  nommés  «  Frères  aux  asnes,  »  parce  que 
leur  Règle  ne  leur  permettoit  en  voyage  d'autre 
monture  que  Vasne.  (Voy.  Asnon.)  Si  les  trinitaires 
de  Fontainebleau,  dans  un  compte  de  1330,  cité  par 
Du  Cange,  (Gloss.  lat.  T.  I,  col.  7G1),  sont  encore 
nommes  «  les  Frères  des  asnes  de  Fontainebliaut,  » 
c'est  que  longtemps  après  qu'il  leur  fût  permis  de 
montera  cheval,  on  affecta  l'usage  de  cette  allusion 
maligne  à  l'humilité  de  leur  Règle  primitive.  Cette 
permission  qu'ils  oblinreiù,  en  12G7,  du  pape  Clé- 
ment, a  fait  dire  à  un  de  nos  anciens  Poêles  : 

Cil  de  la  Trinité  ont  grant  fraternité. 
Bien  se  sont  aquité,  d'a»es  ont  fait  roncin  ;  etc 
Kabl.  MS.  du  R.  n-  7C15,  fol.  C6,  V-  col.  i. 

Vasne,  qui  pour  ces  Religieux  éloit  une  humble 
monture,  étoit  pour  les  Bourgeois  une  monture 
aussi  ridicule  et  déshonorante  que  la  jument  pour 
les  Chevaliers.  «  Quand  on  veut  faire  une  grande 
><  ignominie  h  quelqu'un  ,  on  le  mené  pourmener 
"  par  toute  la  ville  sur  un  asne.  »  (Bouchet,  \i'  serée  ) 
Ainsi,  ..  mener  Vasne,  »  c'éloit  dans  le  sens  figuré 
jouer  un  rôle  déshonorant  et  ridicule,  comme  ceux 
que  1  on  exposoit  à  la  risée  et  à  l'ignominie  publi- 
que, en  les  promenant  montés  sur  un  asne,  en  leur 
ïaisanl  chevaucher  l'asne.  «  Comment!....  tout  le 
«  monde  chevaulchera  et  je  mcsneran  fasne  '^  » 
(Rabelais,  T.  II,  p.  221.-  Voy.  Poésies  de  Coquillart, 
p.  169.  —  Oudin,  Cur.  Fr.) 


Suivant  une  ancienne  coutume,  on  déshonoroit 
publiquement  les  Banqueroutiers  ,  on  les  punissoit 
ignominieusement  en  les  promenant  par  la  ville 
montés  sur  un  asne,  le  visage  tourné  vers  la  queue  : 
de  là,  «  monter  sur  Vas7ie  »  siguifioit  faire  cession' 
faire  banqueroute.  (Oudin,  Cur.  Fr.  —  Cotg.  Dict.) 

En  certains  pays,  on  a  déshonoré  de  la  même 
façon  les  femmes  adultères  et  les  maris  mêmes  de 
ces  femmes,  en  les  menant,  en  les  promenant  sur 
un  asne.  (Bouchet,  vm'  et  xi«  serées.) 

Les  maris  qui  se  laissoient  battre  par  leurs  fem- 
mes, etoient  publiquement  ridiculisés  et  chevau- 
cholent  l'asne.  «  Si  une  femme  a  battu  son  mary 
«  on  en  chevauche  l'asne.  »  (Bouchet,  xr  serée.) 

....  Se  ceste  femme  a  touché 
Son  mary,  il  chevauchera 
L'.isne,  tout  au  long  du  marché  ; 
Ainsi  chascun  s'en  mocquera. 

Poês.  de  Cotiuillart,  p.  10. 

On  auroit  peine  à  croire  que  cette  punition  ridi- 
cule ait  été  commune  aux  maris  qui  battoient  leurs 
femmes,  si  le  seigneur  des  Accords  n'affirmoit  qu'à 
Dijon,  en  1583,  il  avoit  été  spectateur  d'une  pareille 
farce,  exécutée  avec  un  appareil  superbe.  «  A  Dijon 
«  au  mois  de  may,  chacun  an,  l'on  a  coustume,  par 
«  privilège  exprès,  de  mener  sur  l'asne  les  maris 
«  qui  battent  leurs  femmes,  où  il  se  fait  très-belle 
«  assemblée  de  plusieurs  voisins  et  autres  masques 

«  en  fort  brave  appareil.  Or  il  s'en  fit  un qui 

«  fut  fort  superbe,  l'an  etc.  »  (Bigarrures  du  S'  des 
Accords,  hv.  i,  fol.  50.  —  Voy.  Asnee.)  Peut-être 
trouveroit-on  l'origine  de  cet  usage  dans  l'ancien 
esprit  de  galanterie  qui  se  renouveloit  tous  les  ans 
le  premier  jour  de  Mai,  et  se  manifestoit  par  tout  ce 
que  le  désir  de  plaire  aux  Dames  faisoit  imaginer 
de  plus  flatteur.  Elles  auroient  sans  doute  été  flat- 
tées de  voir  que,  pour  la  punition  des  abus  de  la 
puissance  maritale,  la  galanterie  choisissoit  le  mois 
dont  le  premier  jour  étoit  consacré  si  spécialement 
aux  hommages  de  l'amour. 

L'asne,  si  avili  comme  monture,  a  des  qualités 
auxquelles  on  opposoit  celles  du  cheval  comme  très 
différentes  et  plus  estimables,  lorsqu'on  disoit  pro- 
veibialement,  «  revenir  des  asnes  aux  chevaux,  .. 
pour  signifier  que  dans  une  conversation  l'on  pas- 
soit  d'une  idée,  d'une  chose  aune  autre  absolument 
différente.  (Voy.  Bouchet,  xr  serée.)  En  disant  qu'il 
ne  «  falloit  pas  lier  les  asnes  avec  les  chevaux, ..  on 
vouloil  faire  sentir  la  différence  de  l'homme  noble 
à  l'homme  roturier,  au  vilain,  au  rustre  que  l'on 
nommoit  «  asne  de  plat  pays,  et  l'impossibilité 
«  d'aucun  rapport  raisonnable  entre  des  Etres  aussi 
«  méprisés  que  les  autres  étoient  estimés.  »  (Voy. 

Prov.  rur.  et  vulg,  m.  de  N.  D.  n»  2,  fol.  13. 

Cotgrave,  Dict.  —  Moyen  de  Parvenir,  p.  200.)  Pour 
signifier  qu'il  est  difficile  d'inspirer  à  un  homme  les 
vertus  guerrières  qui  ne  lui  sont  pas  naturelles,  on 
disoit  :  «  il  est  mal  aisé  de  déguiser  un  asne  en  un 
«  coursier.  ..  (Voy.  Du  Bellay,  Mém.  liv.  X,  fol.  317.) 

On  trouve  à  Vasne  une  mauvaise  grâce  à  laquelle 
on  comparoit  celle  d'un  vieillard  qui  s'avisant,  à 


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216  - 


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son  âge,  de  faire  apprentissage  de  l'amour,  ressem- 
hleroil  à  VAsinus  ad  lyram  des  Latins. 

Qui  n'ama  de  joueno  eage, 
C'est  li  asiles  c'oii  aprent 
A  harper  contre  droiture. 

Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  8S2. 
Enfès  de  cent  ans,  n'est  pas  bel 
De  joene  cuer  souz  vielle  pel  : 
Moi  semble,  quant  viellars  révèle. 
Que  ce  soit  asries  qui  vièle. 
Miserere  du  Recl.  de  Moliens,  MS.  de  Gaijnat,  fol.  213.  R-  col.  1. 

Dans  le  Songe  du  Vieux  Pèlerin,  ouvrage  allégo- 
rique et  moral  que  Philippe  de  Maizières,  mort  vers 
la  fin  du  mv  siècle,  composa  pour  l'instrucUon  dos 
Enfans  de  Charles-le-Sage,  l'Auteur  semble  avoir 
désigné  Charles  VI  par  le  «  faucon  blanc,  à  bec  et 
«  à  pieds  dorés  ;  et  par  le  cerf  blanc  volant ,  » 
Louis ,  duc  d'Orléans  son  frère.  Probablement, 
Eustache  Deschamps  ,  contemporain  de  Philippe  de 
Maizières,  adoptoit  une  allégorie  qui  lui  éloit 
connue,  lorsqu'il  menaçoit  du  "  cerf  volant,  Vastie 
«  pesant  prêt  à  saillir  d'Albion.  » 

L'asjie  pesant  sauldra  hors  d'Albion  ; 
D'un  dos  costez  courra  la  fourmiere. 
Combatre  doit  encore  le  Lion  : 
Là  doit  Bruthus  estandre  sa  bannière. 
Le  cerf  volant,  à  la  teste  subtile, 
Quant  il  sçaura  Vasne  sur  le  pastis, 
De  son  bestail  fera  venir  maint  mille. 

Eusl.  Desch.  Poes.  MSS.  \i.  389,  col.  i. 

On  croit  que  le  roi  d'Angleterre  ainsi  désigné  par 
le  Poète,  est  Henri  IV,  proclamé  roi  le  20  Décembre 
1399,  après  la  déposition  de  Richard  II  ;  et  que  le 
cerf  volant  si  redoutable  à  Vasnc,  est  Louis  duc 
d'Orléans,  qui  dans  les  premières  années  du  règne 
de  Henri  gouvernoit  le  Royaume  au  préjudice  du 
■  duc  de  Boiirgogne  à  qui  il  avoit  enlevé  la  Régence. 
Trop  occupé  des  moyens  d'étoulïer  l'espVit  de 
révolte  qui  agiloit  l'Angleterre,  le  nouveau  Roi  ne 
pouvoit  guère  songer  'à  profiter  des  troubles  de  la 
France.  Peut-être  le  même  Poète  désignoit-il  cette 
impossibilité,  en  disant: 

L'astw  est  en  s'estable, 

Qui  espargne  buef,  vaches  et  brebis. 

Ses  pastures,  allez  et  subgis. 

En  deffendant  que  nulz  hors  d'iceulx  n'aille. 

Eusl.  Desch.  Focs.  MSS.  p.  139,  col.  2. 

On  ignore  si  ce  nom  A'asne  étoit  l'expression 
d'un  sentiment  de  haine  nationale,  ou  une  allusion 
à  quelque  vice  ou  défaut  de  ce  roi  d'Angleterre. 
Mais  lorsqu'Edouard  IV,  que  l'Histoire  représente 
comme  un  prince  cruel  et  débauché,  s'avisa  de 
sommer  le  roi  de  France  de  lui  restituer  les  pro- 
vinces de  Guyenne  et  de  Normandie ,  et  qu'en 
réponse  à  une  sommation  que  les  circonstances 
politiques  rendoient  vaine  et  ridicule,  Louis  XI  lui 
envoya  un  asne,  un  loup  et  un  sanglier,  on  imagine 
que  ce  présent,  dont  la  singularité  offensa  vivement 
Edouard,  étoit  un  reproche  de  son  avide  cruauté  et 
de  sa  débauche  effrénée.  (Voy.  Chron.  Scandai,  de 
Louis  XI,  p.  21G  ;  an  l-iT'i.) 

En  disant  que  Vasne,  consacré  à  Priape  à  cause 
de  sa  lascivité,  <■  semble  se  moquer  quand  il  desnue 


«  ses  dents,  •  on  se  le  figure  avec  certains  trait» 
de  la  physionomie  du  Satyre,  être  fabuleux  que  les 
Poètes  ont  doué  de  qua'lités  ciui  l'assirailoient  à 
Vasne.  (Voy.  Bouchel,  xr  serée.)  Comme  animal 
lascif,  il  étoit  le  symbole  de  la  partie  animale  de 
l'homme  ;  et  pour  signifier  que  cette  partie  devoit 
être  modérée  par  la  partie  raisonnable,  que  le 
corps  devoit  être  l'esclave  de  l'àme,  on  disoit 
ligurément  : 

Quant  entre  nos  bras  gist  le  mors. 
De  l'ame  soit  asnrs  11  cors  ; 
Si  le  face  en  tel  liu  loier 
U  il  ait  mains  de  ses  depors. 
Poëme  de  la  Mort,  MS.  du  Roi,  n-  6987,  fol.  340,  V-  col.  2. 

Dans  les  vers  suivans,  Vas7ie  est  le  corps  qui 
tombe  dans  la  fange,  et  qu'on  relève  avec  moins  de 
peine  que  l'àme  tombée  dans  l'ordure  du  péché. 

Asilcs,  quant  trop  grand  fais  li  grieve, 
S'il  chiet,  il  est  prest  qui  le  lieve 
De  la  boe,  et  qui  le  relevé  : 
Ame,  quant  par  péchié  meschieve, 
Poi  trueve  mais  qui  larelieve. 

Dit  de  Cliarité,  MS.  de  Gaignat,  fol.  221,  R-  col.  2. 

Il  semble  qu'on  ait  désigné  l'avilissement  auquel 
expose  la  recherche  des  plaisirs  sensuels,  en  disant 
proverbialement  : 

Qui  astw  quiert,  à  asnc  tent. 
Por  cou  ruis  (1)  à  Diu  seulement 
Servir  de  cuer  plus  que  ne  soel  (2). 

roème  de  la  Mort,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  342,  R'  col.  3. 

On  exprimoit  sans  doute  son  mépris  pour  une 
femme  galante  jusqu'au  libertinage,  lorsque  pour 
signifier  qu'elle  avoit  plusieurs  Amans,  on  disoit 
que  pour  elle  «  il  y  avoit  plus  d'un  asne  à  la  foire.  » 

(Voy.  AsNEssE.) 

Amis,  por  Dieu,  c'est  chose  voire 
Qu'il  a  plus  d'un  asne  à  la  foire  : 
Car  vo  Dames  a  plusieurs  acointes, 
Joennes,  jolis,  appers  et  ceintes, 
Qui  la  vont  visiter  souvent. 

Poès.  de  G.  Macbaul.  MS.  fol.  203,  R*  col.  2. 

L'asne,  si  enclin  à  l'amour,  paroi t  être  pour  tout 
le  reste  d'une  indifférence  stupide.  «  A  cause  que 
«  Vasne  est  la  beste  la  plus  stupide  de  toutes  les 
«  autres,  il  est  pris  pour  l'ignorance.  »  (Bouchet, 
XI'  serée.)  Ainsi,  l'on  a  dit  proverbialement  : 

Roy  sanz  Lettres  comme  un  asne  seroit  ; 
S'il  ne  savoit  Tescripture  ou  les  Loys, 
Chascun  de  ly  partout  se  moqueroit. 

Eusl.  Dcscli.  Pocs.  MSS.  p.  263,  col.  1. 

Roy  sans  Lettre  est  comme  asne  couronné. 

Id.  ibid.  p.  338,  col.  1. 

Ce  proverbe  plaisoit  tant  à  notre  Poète,  qu'on  le 
trouve  répété,  (ibid.  p.  550.)  C'étoit  probablement 
d'Eustache  Deschamps  que  parloit  Alain  Chartier, 
lorsqu'après  avoir  observé  que  «  se  homme  a 
«  excellence  sur  les  bestes  par  sçavoir,  bien  doit 
■c  surmonter  les  autres  hommes  en  science,  qui  sur 
«  les  hommes  a  seigneurie,  »  il  ajoutoit  :  «  si  ne 
«  sçaui'oye  reprendre  celuy  qui  dit  que  le  Roy  sans 
«  lettres  est  un  flsuéî  couronné.  »  (Œuv.  d'Al.  Char- 
tier, p.  316.)  Peut-être  ignoroit-il  l'ancienneté  d'un 
proverbe  qui  vengea  Foulques  III,  comte  d'Anjou, 


(1)  Je  demande;  en  latin  rogo.  —  (2)  .J'ai  coutume;  en  latin  solco. 


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-  217 


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des  plaisanteries  que  Louis  d'Outremer  et  ses 
courtisans  avoient  faites  de  lui,  parce  qu'ils  l'avoient 
vu,  dans  l'église  de  Saint-Martin  de  Tours,  assis 
parmi  les  Clercs,  habillé  comme  eux,  et  chantant 
l'Office  divin.  L'Auteur  des  Gestes  des  premiers 
comtes  d'Anjou ,  raconte  qu'offensé  de  ces  plaisan- 
teries, Foulques  écrivit  à  Louis  en  ces  termes- 
«  Régi  Francorum,  Comes  Andegavorum.  Noveritis, 
«  Domine,  quia  inlileratus  rex  est  asinus  coro- 
«  natus.  '•  Si  on  l'en  croit,  le  Roy  avoua  la  vérité 
de  ce  proverbe.  «  Quibus  literis  peiiectis,  Rex 
«  Francorum  vero  proverbio  tactus  ingemuit 
.  dicens  ;  verum  est,  etc.  »  (Voy.  Duchesne,  Annot 
sur  les  Œuvr.  d'Al.  Chartier,  p.  853.)  C'étoil  donc 
un  ancien  proverbe  frangois,  trop  oublié  des  Princes 
et  Chevaliers  des  xiir,  xiv«  et  xv  siècles.  Aussi 
disoit-on,  en  parlant  d'eux  : 

Noble  ne  scet  engin  ne  art. 

Ne  qu'un  des  asnes  de  Senart 

Qui  bûche  porte. 

Fabl.  IIS.  du  R.  n"  7615,  fol.  101,  V  col.  1. 

Quelque  piquans  que  fussent  les  traits  avec 
lesquels  on  attaquoit  l'orgueil  du  .Noble  ignorant 
une  fausse  opinion  l'y  rendoit  insensible.  Cette 
opinion  eloit  que  «  bien  lire  ou  bien  escrire,  étoit 
«  reprouche  de  gentillesse,  et  que  Noble  homme  ne 
«  devoil  sçavoir  les  Lettres.  »  (Voy.  Œuv.  d'Al 
Chartier,  p.  310.)  Comment  les  Lettres  n'auroient- 
elles  pas  été  dédaignées  comme  inutiles,  par  des 
hommes  à  qui,  pour  se  faire  honorer  et  aimer  il 
sufflsoude  combattre  pour  les  Dames  et  leur  Sou- 
verain? La  force  leur  tenoit  lieu  de  tout,  même  de 
la  Justice. 

On  a  dit  que  les  vertus  occultes  auxquelles  les 
Philosophes  ont  eu  trop  souvent  recours,  pour 
éviter  l'aveu  de  leur  ignorance,  étoient  \epont  aux 
as7ies.  ..  C  est  le  pont  aux  asnes  de  recourir  à  ces 
«  vertus  oculles.  »  (Bouchet,  xr  serée.) 

C'est  par  allusion  aux  effets  ordinaires  de  l'igno- 
rance, qu  en  parlant  de  personnes  et  de  choses 
auxquelles  il  étoit  sot  et  imprudent  de  se  fier  on  a 
dit  qu'il  y  avoit  de  Vasm'.  «  Il  y  aura  ici  de  Vasiie 

«  je  le  prevoy Andouilles  sont  andouilles' 

«  tousjours  doubles  et  traislresses.  ..  (Rabelais  ' 
liv.  IV,  p.  153  et  154.)  «  Disoit  que  lesdiclz  masqués' 
«  par  les  propos  qu'ilz  tiennent  ausdictes  damov- 
"  selles,  taschent  ù  les  desgouster  de  leursdictz 
"  marjs;....  qui  est  cause  que  quelquefois  il  v  ha 
«  de  1  «SHC  et  de  la  mule  esdictes  femmes  «  (\resta 
amorum,  p.  -408.)  On  disoit  d'un  homme  qui  dérai- 
sonnoit  avec  une  sotte  confiance,  qu'il  »  faisoitde 
«  Vasuc  ;  »  expression  proverbiale  qui  sisnifioit 
aussi  faire  le  sot,  feindre  d'être  sot.  «  Gara«se 
»  fait  de  l'asne,  tout  ainsi  qu'il  s'est  donné  la  per- 
«  mission  de  dire  à  Pasquier....  qu'il  fait  du  veau  • 
<■  car  puisqu'il  avoit  envie  de  prouver  qu'il  n'est 
«  point  Espagnol,  il  ne  debvoit  nous  donner  à  con- 
«  jecturer  le  contraire  par  ses  paroles.  »  (Défense 
pour  Pasquier,  p.  246.  -Voy.  Cotgrave,  Dict  - 
Oudin,  Cur.  Fr.) 

On  comparoit  à  la  stupidité  de  Vasne ,  celle  d'un 
homme  insensible  à  ce  qui  devroit  toucher  son 


cœur  et  l'attirer,  ou  flatter  son  esprit  et  le  séduire 
en  disant  que  faire  pour  lui  des  choses  agréables 
ou  utiles,  c'étoit  «  chanter  à  Vasne,  faire  ses  chants 
"  an  cul  de  Vasne.  «  (Voy.  Eust.  Deschamps,  Poës 
Mss.  p.  22,  col.  3.  —  Cotgrave,  Dict.) 

Chantez  à  l'osée,  il  vous  fera  des  pès. 

Eust.  Descliamps,  Pof-s.  MSS.  p.  -23,  col.  2. 

Il  est  possible  que  dans  un  sens  analogue  à  celui 
de  1  expression  «  chanter  à  Vas7ie,  »  'on  ait  dit 
«  prendre  les  asnes  à  la  glus,  ..  en  général  perdre 
sa  peine.  iVoy.  Id.  ibid.  p.  22.) 

VARI.^NTES  : 
ASNE.  Prov.  rur.  et  vulg.  MS.  de  N.  D  fol  13 
Adne.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordei  foi  10 
Ahne.  Assise  de  Jérusalem,  p.  212 
Aisne.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  p  315 
AiSNES.  Id.  ibid.  p.  257. 
Ane.  Fabl.  jMS.  du  R.  n»  7615,  fol.  66 
AsGNE.  Journ.  rie  Paris,  sous  Charles  VI,  p  97 
ASNE.S.  Dit  de  Charité,  .MS.  de  Gaignat,  folT221." 

Asnée,  subst.  fém.  Charge  d'un  âne.  Espèce  de 
cotisation. 

On  nommoit  asnée,  la  charge  d'un  âne,  quelle 
que  fut  la  bête  de  somme  qui  portoit  cette  charge 
"  Avoit  contraint  ledit  Renel  de  composer  à  lui  à 
«xxasnees,  et  ledit  Gauvain  à  vm  asnées  de  Vin  » 
(D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange  au 
mot  4sni«/rt;tit.  del377.)  .  Unam  asinatam  %eu 
»  chargiam'Vini,  quam  desujter  equum  \e\  jumen- 
"  tum  ducebat,  abstulerunt.  »  (Id.  ibid  —  Vov 
Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis.) 

Dans  les  villes  où  l'on  chevatichoit  Vasne  pour 
avoir  ete  battu  par  sa  femme,  ou  pour  l'avoir  bat- 
tue, cette  punition  ridicule  et  déshonorante  étoit 
sans  doute  ordonnée  par  celui  que  les  Nouveaux 
.Maries  elisoient  entr'eux  chaque  année,  pour  veiller 
et  iaire  veiller  à  l'observation  des  devoirs  mutuels 
du  mariage.  »  De  toute  ancienneté  l'en  a  acoustumé 
«  a  Ermenonville  le  jour  de  la  My-Karesme  que 
«  les  jeunes  gens  nouveaulx  Mariez  en  l'année 
«  prouchainement  précédent  font  certaine  teste  et 
«  eslisent  1  un  d'entre  eulx  qu'i'lz  appellent  \e  Sei- 
«  gneur  de  Grant,  lequel  fait  par  chacun  an  certains 
«  procureurs  pour  refformer  et  corriger  par  ebas- 
«  tement  tous  ceulx  dudit  lieu  qui  se  sont  mal  gou- 
•<  veniez  ou  portez  en  leur  mariage  durant  ladite 
"  année.  »  (D.  Carpentier,  Suppl. 'au  Gloss.  lat.  de 
Du  Cange,  T.  I,  cul.  804  ;  lit.  de  1460.)  Non-seule- 
ment les  nouveaux  Mariés,  mais  les  autres  et 
même  les  garçons,  payoient,  à  certain  jour  de  l'an- 
née, un  droit  à  ce  Seigneur  de  Grant,  c'est-ù-dire, 
au  Seigneur  de  la  Grant  terre  ,  autrement  nommé 
le  Seigneur  des  Chetifs,  ou  le  Maire  de  la  Chetiveté. 
Probablement  on  se  cotisoit  pour  se  réjouir  tous 
ensemble,  et  pour  égayer  le  spectacle  boulTon  que 
donnoient  le  même  jour  les  Maris  condamnés  par 
»  le  Maire  de  la  Chetiveté  l'i  chevaucher  Vasne  à 
«  être  promenés  sur  un  asne ,  à  être  chariés  . 
comme  on  lit  dans  un  titre  de  1377.  .<  Le  Maire  de 
«  la  Chetiveté  a  ordonné  que  tu  soies  cliariez;  car 
"tu  1  as  desservi  pour  ce  que  ta  femme  t'a  batu  . 
(D.  Carpentier,  ubi  supra.)  «  En  la  ville  de  Avise  en 

28 


AS 


—  218  — 


AS 


«  Champagne,...  le  Maire  des  Chestiz faisoit 

«  contraindre  les  nouveaulx  Mariez  à  payer  chacun 
«  cinq  solz,  et  les  autres  Compaignons  nouveaulx 
«  venus  ou  autres  estans  à  marier,  à  payer  chacun 
«  une  somme  au  dessoubz  de  cinq  solz.  »  (Id.  ibid. 
lit.  de  14G!).'!  «  En  la  Ville  de  Sueil  sur  Ayne  et  au- 
«  très  Villes  circumvoisines,  de  tous  temps  etd'an- 
«  cienneté,  les  Gens  mariez  ont  acoustumé  par 
«  forme  de  récréation  eulx  assembler  le  joui'  de 
«  Caresme  prenant,  disner  ensemble ,  et  les  nou- 
«  veaulx  Mariez  d'icelle  année  payer  leur  bienve- 
«  nue,  et  faire  obéissance  à  l'un  d"eulx  qui  se  dit  et 
«  nomme  par  forme  d'esbatement  le  Seigneur  des 
.  Chetif:^  ou  de  la  Craiit  terre.  »  (Id.  ibid.  lit.  de 
1472.) 

Ainsi,  «  payer  sa  part  de  Yasnée  ou  de  Yasne , 
«  payer  par  forme  à'asne,  »  c'étoit  vraisemblable- 
ment se  cotiser  pour  la  dépense  de  ces  jours  de 
fêles  bouffonnes,  se  cotiser  comme  il  étoit  usité  en 
ces  jours  de  fêtes,  égayées  par  le  spectacle  ridicule 
des  Maris  qui  ehevduclioient  l'asne.  «  Pour  payer 
«  leur  part  de  hiditte  asnée  ou  dudit  asne,  etc.  » 
(D.  Carpenlier,  Suppl.  au  Gloss.  lat.  de  Du  Gange, 
T.  I,  col.  326  ;  til.  de  1447.)  «  Pour  payer  leurescol, 
«  les  Supplians  promisdrent  payer /;«?•  forme  d'asne 
«  mr  tourteaulx  de  Guesde.  »  (Id.  ibid.  —  Voy. 
AsNE,  chevaucher  l'asne.) 

Asnerie,  siibst.  (ém.  Exercice  de  la  profession 
d'Anier,  de  Meunier.  Anerie,  ignorance  de  ce  qu'on 
croit  bien  savoir. 

D.  Carpentier  ne  se  seroit-il  pas  trompé  en  défi- 
nissant asnerie,  droit  seigneurial  payé  par  les  Meu- 
niers qui  reporloient  la  farine  à  ceux  à  qui  elle 
appartenons  «  Les  Fermiers,  Muniers  ou  Asners 
«  desdiz  moulins....  paieront  chascun  an....  ans 
«  rentiers  ou  aus  fermiers  qui  tenront  les  rentes 
«  ou  fermes  de  ladite  Ville  de  Meleun  quatre  livres 

«  deparisis; et  pourtant  seront  quite,  franc  et 

"  délivré....  de  toutes  autres  servitudes  paier,  quant 
«  pour  raison  d'asnerie.  «  (D.  Carpentier,  Suppl. 
au  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Asinitas;  tit.  de 
1308.)  On  soupçonne  que  dans  ce  titre ,  asnerie 
signifie  l'exercice  de  la  profession  d'Anier,  de  Meu- 
nier, parce  que  les  Meuniers  ou  Asniers  se  sont 
toujours  servi  d'asnes  plus  communément  que 
d'autres  bétes  de  somme,  pour  apporter  le  blé  au 
moulin  et  en  rapporter  la  farine.  (Voy.  Asnikr.) 

On  a  nommé  plante  des  Asnes,  ïa  férule;  par 
allusion  sans  doute  au  goût  des  Anes  pour  cette 
plante,  (jue  Pline  dit  être  mortelle  à  toute  autre 
bête  de  somme.  Les  tiges  de  cette  plante  sont  hau- 
tes, légères  et  moelleuses  ;  par  conséquent  propres 
à  fairenaitre  l'idée  de  l'usage  fabuleux  qu'en  fit 
Prométhée.  «  On  a  feint  qu'il  déroba  le  feu  du  Ciel 

«  qui  nous  anime par  le  moyen  de  la  plante  des 

«  Asnes  qu'on  nomme  férule;  "pour  dire,  ce  me 
«  semble,  que  nos  plus  hautes  connoissances  sont 
«  des  asncries.  »  (La  Mothe  le  Vayer,  T.  X,  p.  12. 
—  Voy.  AsNE,  animal  sluinde.) 

Asnesque ,  adj.  Stupide ,    ignorant.    Stupide 


comme  l'Ane.  (Colgrave  et  Oudin,  Dict.  —  Voy. 
AsNE,  animal  stupide.) 

VARIANTES  : 
ASNESQUE.  Cotgrave,  Dict. 
AsiNESQUE.  Oudin,  Dict. 

Asnesse,  suhst.  j'ém.  Anesse.  Le  sens  figuré 
dans  lequel  on  a  dit  que,  «  de  petit  aguillon  point-on 
«  grant  asnesse,  >>  est  d'une  obscénité  grossière, 
dans  les  Prov.  du  Vilain  (m*,  de  S"  Germ.  fol.  75,  R° 
col.  1.  —  Voy.  AsNE,  animal  lascif.) 

Asnier,  subst.  masc.  et  adj.  Anier,  conducteur 
d'ânes.  Ignorant,  lourdaud,  sot,  stupide. 

Quelle  que  fût  la  dénomination  particulière  de 
ceux  qui  par  leur  état  sont  destinés  à  conduire  des 
ânes  et  autres  bêtes  de  somme,  comme  les  Meuniers, 
les  Muletiers,  il  est  possible  qu'on  les  ait  compris 
sous  celle  d'.ls/u'fr,  conducteur  d'ânes.  (Voy.  Cot- 
grave, Oudin,  Mcot  et  Monet,  Dict.) 
Erinenfrois  sera  li  mausniers, 
Et  sire  Bauduins  asrncrs. 

Ane.  Poél.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1361. 

Une  preuve  qu'/lsn/i"»"  peut  avoir  signifié  Mule- 
tier, c'est  que  les  François ,  ayant  attaqué  le  12 
Mai  1511,  et  mis  en  déroule  l'armée  du  Pape  et  des 
Vénitiens  devant  Boulogne,  nommèrent  cette  «  dé- 
'■  route  la  journée  des  Asniers,  pour  ce  qu'ilyeust 
«  tant  de  mulets  pris  dedans  les  fossez,  sur  le  grand 
«  chemin  et  autre  part.  »  (Voy.  Mém.  de  Rob.  de  la 
Marck,  sieur  de  Fleuranges,  ms.  p.  111.) 

Il  sembleroit  qu'Asiiier.  conducteur  d'ânes  de 
moulin,  fût  synonyme  de  Meunier,  lorsqu'on  disoit  : 

"  Muniers  ou  Asners  des  moulins jiaierontchas- 

<•■  cun  an,  etc.  »  (D.  Carpentier,  Suppl.  au  Gloss. 
lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Asinitas;  tit.  de  1308.  — 
Voy.  AsxERiE.)  C'étoit  dans  le  sens  de  Meunier  ou  de 
Conducteur  d'ânes  de  moulin  que,  pour  signifier 
les  malheurs  de  la  disette  dans  une  ville,  on  disoit 
proverbialement  :  «  Dolente  la  Vile  que  Asniers  poi 
«  voit.  »  (Prov.  du  Vilain,  ms.  de  S'  Germ.  fol.  li.) 

On  s'est  moqué  de  l'ignorance  de  l'homme  qui 
croit  tendre  à  un  but,  lorsqu'il  est  dirigé  vers  un 
aulre  par  celui  qui  le  conduit,  en  disant  proverbia- 
lement :  «  Une  pance  li  asnes,  et  l'autre  li  asniers.  « 
(Prov.  rur.  et  vulg.  ms.  de  N.  D.  n°  2,  fol.  12.)  «  Ung 
«  pansse  ly  asgne,  et  l'autre  ly  asgnier;  et  Dieu 
«  qui  muale  propos  de  Oloferne,  tourna  leurjoye... 
«  en  tristour.  »  (Journal  de  Paris  sous  Charles  VI 
et  Charles  VII,  p.  97.) 

Le  proverbe  «  à  rude  asne  rude  asnier,  «  pro- 
verbe dans  lequel  ou  aperçoit  le  principe  de  la  for- 
mation et  signification  de  l'adjectif  rudanier,  dési- 
gne la  nécessité  d'être  rude  à  l'homme  indocile  ou 
rebelle  à  la  volonté  de  celui  ([ui  doit  le  conduire  et 
s'en  faire  obéir.  On  désignoit  la  nécessité  de  ruser 
avec  celui  ([ui  rusoit  pour  se  soustraire  à  la  con- 
duite et  à  la  volonté  d'un  maître,  en  disant  prover- 
bialement :  »  Contre  viseuz  asnon,  viseuz  asnier.  « 
(Voy.  Prov.  rur.  et  vulg.  ms.  de  >'.  D.  n°  2,  fol.  12, 
V°  col.  1.  —  Cotgrave,  Dict.) 

C'est  relativement  à  l'idée  d'asne,  animal  stupide 
et  lourd,  (\n'asnier  a  signifié  lourdaut,  stupide,  sot. 


AS 


219 


AS 


ignorant.  (Voy.  Contes  d"Eutrnpel,  p.  126.  —  Bigarr. 
du  Seig'  des  Accords,  fol.  11,  R°  etc.  —  Cotgrave  et 
Oudin,  Dict.) 

Que  voulez-vous  que  je  vous  die? 

Je  suis  pour  ung  asmjer  tenu 

Oui  vouldra,  pour  moy  estudie  : 
Trop  tart  je  m'y  suis  entendu, 
Es  derniers  jours  de  ma  vie. 

Poës.  de  Charles  duc  d'Orléans,  MS.  p.  27,  col.  \. 

Rabelais,  plaisantant  sur  la  connoissance abusive 
des  Décrétâtes,  fait  dire  à  Ilomenaz  :  "  Qui  faict  en 

«  plusieurs    pays les    Escoliers    badaulx    et 

«  asniers  ? Leurs  précepteurs  n'estoient  décre- 

"  talistes.  «  (Rabelais,  liv.  IV,  p.  226.) 

Dans  le  xvr  siècle ,  une  sotte  excuse  étoit  une 
excuse  asniere.  «  Je  ne  m'émeus  pas  une  fois  l'an 
«  des  fautes  de  ceux  sur  lesquels  j'ay  puissance: 
«  mais  sur  le  poinct  de  la  bestise  et  opiniastreté  de 
"  leurs  allégations,  excases  et  défenses  asnieres  et 
<c  brutales,  nous  sommes  tous  les  jours  à  nous  en 
«  prendre  à  la  gorge.  "  (Essais  de  Montaigne,  T.  III, 
p.  257.  —  Voy.  AsNE,  animal  stupide.) 

VARIANTES  : 
àSNIER.  Ane.  roët.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1361. 
Anier.  Monet,  Dict. 

AsGNiEH.  .Tournai  de  P.  sous  Charles  VI  et  Ch.  VII,  p.  97. 
AsNER.  D.  Carpentier,  S.  au  G.  I.  de  Du  C.  aumot  A:-i)iitas. 
Asniers.  Prov.  rur.  et  vulg.  MS.  de  N.  D.  n»  2,  fol.  12,  V". 
AsNYER.  Poës.  de  Ch.  duc  "d'Orléans,  MS.  du  R.  p.  27. 

Asnière,  subst.  fém.  Lieu  où  l'on  élève  des 
ânes.  De  là,  tant  de  Villages  en  France  nommés 
Asnière  [\].  C'est  par  allusion  à  la  stupidité  de  l'âne, 
qu'on  disoit  d'un  ignorant,  d'un  sot ,  «  qu'il  étoit 
«  logé  à  Asnieres,  qu'il  avoit  étudié,  qu'il  avoit  fait 
<■  son  cours  à  Asnieres.  »  (Voy.  Oudin ,  Dict.  et 
Cur.  Fr.  —  Défense  pour  Est.  Pasquier,  p.  573.  — 
Dict.  de  Trévoux.) 

Asnine,  adj.  et  subst.  fém.  Charge  d'un  âne. 
(Voy.  AsNÉE.)  En  termes  de  Pratique,  on  dit  encore 
Bête  asine.  Il  est  posible  qu'en  supprimant  le  subs- 
tantif charge  ou  somme,  l'adjectif  az-nie  ait  signilié 
la  même  chose  que  somme  fls«/H(',  la  charge  d'un 
âne.  «  Pour  cause  de  ce  ont  veu  paier  aux  fermiers 
«  d'iceuls  Religieux  par  plusieurs  fois  4  azines  de 
«  blé.  »  (Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Aùna.) 

....  Tant  a  robe  lange  et  Une 
Qu'ele  poise  une  somme  asniue. 
Miserere  du  Recl.  de  Moliens,  MS.  de  Gaignat,  fol.  207,  V°  col.  2. 

VAP.IAINTES  : 
ASNINE.  Miserere  du  R.  de  Moliens,  MS.  de  G.  fol.  207. 
AziNE.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Azi)m. 

Asnon,  subst.  inasc.  Anon.  (Voy.  Asne,  mon- 
ture.) La  monture  des  Trinitaires,  dans  l'origine  de 
leur  institution,  paroissoit  si  humiliante,  qu'un  de 
nos  anciens  Poètes  satyriques  a  dit  : 

Ains  c'on  m'apiaut  frère  à  Vasnon, 
Ara  meut  pieu  et  venté  ;  etc. 
Description  et  plaisaoce  des  Religions,  MS.  de  N.  D.  fol.  16. 


Aspection,  subst.  jém.  Aspect,  spectacle. 

....  Vit  des  Cieulx  l'aspection, 
Et  le  filz  au  père  monté. 
Estant  à  son  dextre  costé. 

J.  de  Meung,  Test,  vers  H80-H82. 

Aspée,  subst.  fém.  Epée.  (Livres  des  Rois  ,  ms. 
des  Cordel.  passbn.  —  Voy.  Espée.) 

Asper,  adj.  et  subst.  Rude.  Bâton  noueux. 

L'adjectif  «s/jcrs  ou  asper,  au  féminin  aspère, 
étoit  évidemment  le  même  que  aspre,  en  latin  asper, 
aspera,  rude  au  goût,  rude  au  toucher,  lorsque  sans 
transposition  de  \'e,  on  disoit  figurément  : 

S'oncques  à  ses  subjects  fut  aspei-s,  ne  grevable  ; 
A  touts  leur  est  courtois,  et  doux  et  favorable, 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  89. 

Juppiter  père, 

Qui  tout  tempère, 

Paix  nous  octroyé,  et  guerre  aspère 
Eslongne  de  nostre  Emysfere. 

Poës.  de  Grelin,  p.  144. 

C'est  sans  doute  par  ellipse  d'un  substantif,  que 
l'adjectif rts;)«' signilioit  une  espèce  d'arme,  un 
bâton  noueux,  par  conséquent  rude  au  toucher. 

Tient  un  aper  que  il  paumoie  ; 
Si  est  saillis  enmi  la  voie. 

Fabl.  MS.  ilu  R.  n-  7218,  fol.  191,  V-  col.  1. 

Le  Forestier  m'a  truef,  si  a  tret  son  usper  (2), 
Et  a  batu  mon  test,  la  paule  et  le  costet. 

Ibid.  fol.  190,  R'  col.  2. 

Peut-être  aussi  (\\ï asper  ou  aper  en  ces  vers,  est 
une  altération  à' épié,  espié,  espiel,  espieuon  épieu. 

VARIANTES  : 
ASPER.  Poës.  de  Crétin,  p.  164. 
AspERS.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  89. 
Aper.  Fabl.  MS.  du  R.  n«  7218,  fol.  191,  V»  col.  1. 

Asperague,  subst.  masc.  Espèce  de  plante. 
Les  jeunes  pousses  de  cette  plante  cuisent  si  promp- 
tement  que,  pour  signifier  la  promptitude  extrême 
avec  laquelle  on  devoit  faire  une  chose,  l'on  a  pu 
dire  qu'elle  devoit  être  faite,  «  plustost  que  ne  sont 
«  cuits  asperges;  expression  proverbiale,  familière 
«  à  l'Empereur  Auguste.  »  (Voy.  Rabelais,  liv.  V, 
p.  30.  —  Id.  ibid.  Note  de  Le  Duchal.) 

Cette  terminaison  d'asperge  étant  féminine  en 
apparence,  on  a  dénaturé  le  genre  d'un  nom  origi- 
nairement masculin  en  françois,  comme  asparagus 
en  latin,  en  grec  daTrâpayos.  L'opinion  des  Etymolo- 
gistes,  à  qui  ces  noms  offrent  une  analogie  de 
signification  avec  celle  de  l'adjectif  latin  asper,  en 
fraiu;ois  aspre,  paroîtra  peut-être  d'autant  plus 
vraisemblable  que  :  «  La  coustume  fut  jadis  en 
«  Boëcie,  que  les  bonnes  et  honnestes  Matrones 
«  approuchantes  pour  devoir  coucher  la  nouvelle 
«  Mariée,  luy  fai.'^oiunt  ung  chappellet  sur  la  teste  de 
«  branches  ile  as/nwtnjcs  aspres  et  mal  gracieux, 
«  voulans  dire  qu'il  laluit  endurer  les  rudesses  du 
«  mary.  ■■  (Voy.  Borel,  Dict.  T"  add.) 

VARIANTES  : 
ASPERAGUE.  Borel,  Dict. 
AsPARAGE.  Id.  ibid.  1"*  add. 


(1)  On  trouve  encore  VAnerie  (Eure-et-Loire),  VAne-Benoit  (même  département),  et  même  Amin  (Asinium).  (N.  E.)  — 
(2)  Ne  faudrait-il  pas  lire  aspec,  et  même  aiiapet,  le  trait  abréviatif  étant  etïacé  sur  a,  et  l  manuscrit  étant  devenu  r  ? 
Anspect,  conservé  dans  la  marine,  vient  de  l'allemand  hand,  main,  et  spike,  bâton  pointu.  (N.  e.) 


AS 


—  220  — 


AS 


ASPARGE.  Oudin,  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Asperge.  Rabelais,  liv.  iv,  p.  26. 

Aspératif,  adj.  Apéi'itif.  (Voy.  Aspre.)  On  aura 
désigné  la  qualité  âpre  des  apéritifs,  en  les  nom- 
mant aspérutifs. 

Toutes  choses  laxatives 

Et  qui  seront  uspératives 
Vueillez  user  communément  ; 
Si  en  vivras  plus  longuement. 

Eusl.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  486,  col  2. 

Aspérer,  verbe.  Rendre  âpre,  rude.  Au  figuré, 
exaspérer,  rudoyer  ;  en  latin  asperare.  (Cotgrave, 
Dict.  —  Voy.  AsPRiR  et  Asproier.) 

Aspergement,  subsf.  jnasc.  Aclion  d'épandre 
par  petites  gouttes.  Dans  une  signiTication  plus 
générale  que' ne  Test  aujourd'hui  celle  d'aspersion, 
l'on  a  dit  :  »  Arroser,  en  iorme  à'aspergement  avec 
.  la  bouche,  d'un  peu  d'eau  nette  et  fresche.  >>  (Du 
Fouilloux,  Fauconnerie,  fol.  49.  —  Voy.  Asperger.) 

Aspergeoir,  subst.  masc.  Aspersoir.  (Voy. 
Inventaire  des  Joyaux  et  Meubles  de  Charles  V,  ù  la 
suite  de  son  histoire  par  Choisy,  p.  525.) 

Asperger,  verbe.  Epandre  par  petites  gouttes; 
arroser.  L'acception  de  ce  verbe,  presque  restreinte 
à  l'usage  religieux  des  aspersions,  étoit  autrefois 
plus  étendue.Dans  le  sens  général  d'épandre  par 
petites  gouttes,  on  disoit  :  asperger  de  l'eau  sur  les 
fleurs,  asperger  du  vinaigre  sur  les  viandes,  les 
asperger  de  vinaigre  ou  d'eau,  pour  les  en  ai-roser. 
(Monet,  Diul.  —  Voy.  AsPERGE.MENr  et  Aspersion.) 

Xsperges,  subst.  masc.  Aspersoir.  On  croit  que 
par  allusion  ù  Vasperges  me  lnjssopo  du  psaume 
Miserere,  l'on  aura  désigné  un  aspersoii'  par  le  mot 
latin  asperges,  altéré  dans  aspergets.  «  L'asperges 
«  remply  d'eau-béniste,  etc.  »  (J.  Chartier,  Ilist.  de 
Charles  VII,  p.  298.  —  Voy.  Rob.  Estienne,  Nicot  et 
Monet,  Dict.) 

VARIANTES  : 
ASPERGES.  Orth.  s.  -  J.  Chartier,  H.  de  Ch.  VII,  p.  298. 
Aspergets.  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict. 

Xspersev,  verbe.  Epandre  par  petites  gouttes; 
arroser.  Du  participe  latin  aspersus,  s'est  formé  le 
verbe  françois  asperser,  de  même  signification 
qu'asperger,  en  latin  aspergere.  (Voy.  Cotgrave  et 
Oudin,  Dict.) 

Aspersion,  subst.  fém.  Action  d'épandre  par 
petites  gouttes;  action  d'arroser.  (Voy.  Rob. 
Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict.) 

Asphodèle,  subst.  masc.  Genre  de  plante  ;  la 
Heur,  la  racine  de  celte  plante.  En  \-M\ii  (isphodelus  ; 
d'où  asplioilêle,  par  corruption  asphrudile,  aphro- 
dile,  afrodile;  genre  de  plante  dont  la  racine  a  la 
forme  d'une  botte  de  navets.  On  a  vu  des  Peuples, 
particulièrement  ceux  des  Provinces  méridionales, 
manger  comme  des  navets  les  racines  de  Vaspho- 
dèle^en  faire  une  espèce  de  pain  dont  ils  se  nour- 
rissoient  en  temps  de  disette. 

L'usage  de  cette  nourriture  semble  remonter  à  la 
plus  haute  antiquité,  puisque  les  Anciens  croyoient 


pourvoir  à  celle  des  mânes  de  leurs  parens  et  amis, 
en  plantant  la  mauve  et  Yasphodèle  autour  de  leurs 
tombeaux.  Dans  les  temps  où  la  superstition  faisoit 
à  l'amitié  et  h  la  nature  un  devoir  de  songer  aux 
besoins  physiques  d'une  vie  future,  il^  est  probable 
qu'un  traité  sur  la  mauve  et  Yasphodèle,  n'étoit  pas 
aussi  frivole  qu'on  pourroitse  l'imaginer,  en  lisant 
que  "  les  plus  grands  personnages  se  sont  amusez 
>i  à    traicter  des   frivoles   et    légères    matières; 

«  comme Hésiode,  la  malve  et  Vaphrodile.  » 

(Voy.  Des  Accords,  Bigarr.  ubl  supra.)  C'est  par 
allusion  à  cette  prétendue  nourriture  des  mânes 
qu'on  a  dit  :  «  Ne  pensez  que  la  béatitude  des 
«  Ileroes  et  Semidieux  qui  sont  par  les  Champs 
«  Elysiens,  soit  en  leur  Asphodèle,  ou  Ambroisie, 
«  ou  Nectar.  »  (Rabelais,  liv.  I,  p.  83.) 

L'asphodèle  est  de  deux  espèces.  Celui  dont  les 
fleurs  découpées  en  six  parties,  sont  extérieure- 
ment rayées  de  lignes  purpurines,  est  vraisembla- 
ment  Vaphrodillè  mâle,  distingué  de  Vaphrodille 
femelle,  qu'on  soupçonne  être  celui  dont  les  fleurs 
et  les  racines  sont  de  couleur  jaune,  mais  de  même 
forme  que  celles  de  Vaphrodille  mâle,  autrement 
nommé  aphrodille  blanc.  (Voyez  Cotgrave  et 
Nicot,  Dict.) 

VARIANTES  : 
ASPHODÈLE.  Orth.  sub.  -  Rabelais,  Uv.  I,  p.  83. 
Afrodile.  Monet,  Dict.  au  mot  Asphodèle. 
Aphrodile.  Des  Accords,  Bigarr.  avis  au  Lecteur,  p.  3. 
Aphrodille.  Cotgi-ave,  Nicot  et  Monet,  Dict. 
AsFODÈLE.  Dict.  de  Trévoux,  au  mot  .Asphodèle. 
AsPHODiLE.  Cotgrave,  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict. 
AsPHRODiLE.  Cotgrave,  Dict. 
ASPHRODILLE.  Id.  ibid. 

Aspirement,  subst.  masc.  Aclion  d'aspirer,  de 
respirer.  Aclion  d'inspirer.  (Voy.  .\spirer.) 

Dans  le  sens  figuré  de  respirer  une  chose,  y  aspi- 
rer, la  désirer  comme  étant  aussi  essentielle  à  la 
satisfaction  d'un  besoin,  que  l'est  à  la  conservation 
de  la  vie  l'air  qu'on  aspire  et  respire  ;  on  a  dit  de 
personnes  qui  toutes  vouloient  et  désiroient  la 
même  chose,  qu'elles  étoient  «  toutes  d'un  aspire- 
»  ment  et  d'une  volonté.  »  (Voy.  Chron.  Fr.  m.  de 
G.  de  Nangis,  an  1096.) 

En  comparant  à  l'action  de  l'air  sur  le  poumon, 
l'action  invisible  du  souffle  divin  dans  une  âme 
qu'il  inspire,  on  disoit  : 

Ne  font  pas  par  commandement. 
Mais  par  devin  aspii-e»ient. 

Lucidaires,  .MS.  de  Gibert,  fol.  4,  V. 

Aspirer,  verbe.  Aspirer  ;  respirer.  Quoique 
aspirer  soit  d'usage  en  Physique  dans  la  significa- 
tion d'attirer  l'air,  le  respirer,  on  ne  diroit  plus 
"  as])irer  son  haleine;  aspirer  la  mère  goutte,  » 
par  une  comparaison  assez  naturelle  de  l'action  de 

boire  â  celle  d'aspirer  l'air.  «  Le  cerf aspire 

«  son  haleine  en  la  fraischeur  et  humidité  de  la 
«  terre.  «  (Du  Fouilloux,  Vénerie,  fol.  42,  R°.) 

....  En  uspifani  la  mère  goutte. 
Et  la  savoure  bien  et  tjouste. 

J.  de  Meung,  Test,  vers  160  cl  181. 

Anciennement,  comme  aujourd'hui.  Ton  distin- 
g'uoit  aspirer,  de  respirer.  (Voy.  Hist.  de  la  Toison 


AS 


—  221  — 


AS 


d'or,  Vol.  11,  fol.  87,  R°  col.  1,  etc.  —  Rob.  Eslienne 
et  iMcot,  Dict.) 

Recevons  petit  à  petit, 
Sanz  trop  mangier,  nostre  appétit  ; 
Sanz  trop  emplir  le  conduit, 
Pour  aspirer  et  respirer. 

Eusl.  Desch.  Poés.  MSS.  p.  406,  cjI.  i. 

Cette  distinction  n'éloit  pourtant  si  constamment 
observée,  qu'aspirer  n'ait  signifié  respirer,  attirer 
l'air  dans  sa  poitrine  et  l'en  repousser  par  le  mou- 
vement des  poumons.  «  Se  cet  homme  aspire 
"  encor,  ergo  il  n'est  pas  mort.  «  Fabri,  Art  de 
Rhotori(iue,liv.  I,  fol.  GG.  —  Voy.  Monel,  Dict.) 

Aspoi'ter,  verbe.  Transporter.  En  latin  aspor- 
tare,  porter  d'un  lieu  à  un  autre.  "  Se  par.. ..bonne 
«  garde  et  diligence,  il  est  bien  obvié  aux  malices 
"  des  portans  billon,  ou  asportans  fausses  et  con- 
«  trefaites  monoyes,  etc.  >■  (Ord.  T.  III,  p.  150.  — 

Voy.   PORTF.R.) 

Aspre,  adj.  Raboteux,  inégal.  Stérile,  aride. 
Rude  à  sentir,  rude  au  goût,  au  tact,  à  l'odorat,  à 
l'ouie  et  à  la  vue.  Ardent,  actif,  bardi. 

Selon  plusieurs  Etymologistes  latins,  du  grec 
âWoçof  s'est  formé  le  latin  usper,  qui,  dans  le  lan- 
gage des  anciens  .\giicoles,  désignoil  un  sol  pier- 
reux et  aride,  par  conséquent  stérile  et  inculte. 
(Voy.  Vassius,  Etym.  ling.  Lai.)  Lorsqu'en  parlant 
d'un  lieu  raboteux  et  inégal,  on  disoit  qu'il  étoit 
aspre  et  rude,  comme  on  litdans  le  Dictionnaire  do 
Nicot,  il  sembleroit  que,  dans  un  sens  relatif  h 
l'étymologie  du  latin  asper,  le  françois  aspre  eùl 
signifié  pierreux,  inculte  :  stérile,  aride,  lorsqu'en 
parlant  d"un  pécheur  qui  ne  porte  aucuns  fruits  de 
pénitence,  on  le  comparoit  au  figuier  de  l'Evangile. 
Lancelot  «  ayant  ouï  une  voix  qui  l'avoil  appelle 
«  plus  dur  que  pierre,  plus  amer  que  fiel,  et  plus 
<■  aspre  que  ung  figuier,  »  consulte  un  Hermite  sur 
le  sens  de  ces  paroles.  L'IIermite  lui  répond 
qu'étant  ■<  du  tout  desgarny  de  fueilleset  de  fleurs, 
«  c'est-à-dire,  de  toutes  bonnes  œuvres,  il  étoit  plus 

«  aspre,  plus  stérile,  plus  aride  que  le  figuier 

•<  dont  est  faicte  mention  en  l'Evangille du  jour 

«  de  la  Pasque  flourie,  »  puisque  ce  figuier  que 
dessécha  Jésus-Christ,  parce  qu'il  ne  portoit  point 
de  fruits,  étoit  du  moins  »  bien  garny  de  fueilles.  » 
(Voy.  Lanc.  du  Lac,  T.  III,  fol.  7G.  -  Ibid.  fol.  78.) 
On  a  la  preuve  que  la  stérilité  d'un  sol,  probable- 
ment aride  et  pierreux,  a  été  désignée  en  latin  par 
le  substantif  asperitas.  (Voy.  D.  Carpentier,  Suppl. 
Gloss.  lat.  T.  I,  col.  329.) 

11  seroit  possible  que  par  analogie  l'on  eût  nommé 
fruits  aspres,  les  fruits  que  produit  naturellement 
un  sol  aspre  et  inculte;  même  ceux  dont  la  culture 
adoucit  plus  ou  moins  l'àpreté  originelle.  De  là 
l'adjectif  aspre,  qui  semble  d'ailleurs  inventé  pour 
peindre  l'effet  d'une  sensation  désagréable  au  goût, 
auroit  pu  signifier,  par  extension,  ce  qui  est 
désagréable  et  rude  à  sentir  en  général.  «  Cil  ki 
«  morz  est,  despeilet  assi  bien  les  sueys  choses  de 
«  cest  munde  cum  les  aspres.  »  (S'  Bernard,  Serm. 
fr.  MSS.  p.  3U.) 


Dans  ce  même  sens,  on  a  dit  :  aspre  faim,  aipre 
torment,  etc.  (Modus  et  Racio,  ms.  fol.  115,  R°.  — 
Chans.  fr.  ms.  de  Berne,  n°  380,  part,  ni,  fol.  M.) 

Cette  acception  générale  étant  particularisée, 
aspre  signifioit  rude  au  tact  : 

Que  vaut  la  blanche  char,  plus  que  s'ele  fust  bleue, 
Quant  ne  lessez  sentir  s'ele  est  aspre  ou  sueue? 
Fabl.  MS.  Ju  R.  n-  7218,  fol.  388,  V  col.  2. 

....  Quant  cars  est  rlisciplinée, 
Aspre  drap,  povre  cuisinete, 
Travaus,  velliers,  pensée  nete. 
L'ont  tost  de  grasse  enluminée. 

Poonie  de  la  Mort,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  337,  R'  col.  4. 

Peut-être,  rude  à  la  main,  difficile  à  manier, 
lorsqu'en  parlant  d'un  cheval,  on  disoit  qu'il  étoit 
aspre. 

Moult  trouvoit  aspre 

Le  cheval  sor  quoi  il  séoit. 

Clécmadès,  MS.  de  Gaijnal,  fol.  3,  R"  col.  2. 

Au  figuré,  rude;  qui  n'a  point  l'esprit  maniable, 
qui  a  de  l'aspérité,  de  l'àpreté  dans  le  caractère,  qui 
est  rude  en  sa  façon,  en  ses  mœurs.  (Rob.  Estienne, 
ïNicot  et  Monet,  Dict.) 

Tex  a  vestue  l'aspre  haire, 
Qui  aspres  est  et  de  maie  aire. 

Vie  de  Théophile,  Evèiiue.  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  313,  V»  col.  l. 

Enfin,  l'adjectif  aspre  désignoit  non-seulement 
ce  qui  est  rude  au  goût  et  au  tact,  mais  ce  qui  est 
rude  à  l'odorat,  à  l'ouie  et  à  la  vue  ;  par  conséquent 
ce  qui  est  rude  à  sentir  en  général.  (Rob.  Estienne, 
Nicot  et  Monet,  Dict.) 

Probablement,  on  assimiloit  à  faction  de  l'àpreté 
sur  nos  sens,  à  l'effet  de  l'àpreté  d'un  feu  ardent, 
ce  que  l'ait  sentir  à  l'àme  l'ardente  activité  des  pas- 
sions, lorsqu'en  parlant  d'une  personne  ardente  à 
vouloir  et  à  faire  une  chose  pour  laquelle  elle  se  pas- 
sionnoit,  on  disoit  qu'elle  y  éloil  aspre,  qu'elle  étoit 
»  aspre  à  recouvrer  liberté;  aspre  à  escrire  contre 
«  les  vices.  ■■  (Rob.  Estienne  et  Mcot,  Dict.)  «  Si  fut.... 
«  aspre  de  s'en  vouloir  venger.  »  (Percef.  Vol.  VI, 

fol.  40.)  »  La  bonne  Dame estoit  jeune,  aspre  et 

»  désirant  de  tous  inaulx  destourner.  »  (Ibid,  fol.  87.) 

Cil  Arcevesques  Robiers 

Ki  moult  fu  vallans  et  apriès, 

Al  tière  a  une  feme  prist  ■ 

Contre  Lois  et  Decrès  le  fist. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  387. 

Il  résulte  de  ces  divers  passages  que,  si  les  objets 
pour  lesquels  on  se  passionnoit  ardemment  étoient 
louables  ou  regardés  comme  tels,  l'adjectif  aspre 
étoit  un  éloge.  Aussi,  disoit-on  d'une  Princesse 
ardente  à  l'étude  et  passionnée  pour  les  Sciences, 
qu'elle  étoit  saçans  et  aspre  ;  d'un  homme  ardent  à 
la  chasse  et  au  vol,  et  passionné  pour  les  oiseaux 
et  les  chiens,  qu'il  étoit  aspre  ;  d'un  valet  passionné 
pour  le  service  de  son  maître,  ardent  à  le  servir, 
qu'il  étoit  aspre,  etc.  (Voy.  Ph.  Mouskes,  ms.  p.  G19. 
—  Gace  de  la  Bigne,  des  Déduits,  ms.  fol.  153.  — 
Lanc.  du  Lac,  T.  îll.  fol.  3i,  etc.) 

Il  est  possible,  comme  on  l'a  déjà  observé,  qu'on 
ait  nommé  clieval  aspre,  un  cheval  que  son  ardeur 
naturelle  rendoit  difficile  à  manier.  Mais  plus  sou- 
vent on  faisoit  l'éloge  de  cette  même  ardeur,  si 
utile  au  besoin  lorsqu'on  sait  en  être  le  maître,  en 


AS 


—  222 


AS 


disant  qu"un  cheval  ctoil  aspre.  «  Monta  sur  son 
«  cheval  qui  estoit  fort  et  aspre,  où  l'en  se  devoit 
«  bien  fier  au  besoing.  »  (Lanc.  du  Lac,  T.  III,  fol.  30.) 

Cheval  li  amenèrent  nupre,  fort  et  legier. 

Buenon  de  Coramarchis,  MS.  de  Gaijnat,  fo\.  192,  V°  col  1. 

Enfin,  l'ardeur  guerrière  qui  est  naturelle  à  cer- 
tains hommes,  l'activité ,  la  hardiesse  qu'inspire  le 
sentiment  de  cette  ardeur,  et  que  la  figure  annonce, 
étoient  désignées  par  l'adjectif  aspre ,  lorsqn'en 
parlant  de  ces  hommes ,  on  disoit  qu'ils  étoient 
aspres,  qu'ils  étoient  de  chère  aspre,  qu'ils  avoient 
les  chères  aspres.  «  Si  avoient  les  chères  si  vives  et 
«  si  aspres....  que  combien  qu'ilz  fussent  dessoubz 
«  aages  d'hommes,  leur  visage  demandoit  l'escu  et 
«  le  liaulbergeon.  »  (Percef.  Vol.  II,  fol.  35.)  «  Ung 
«  jouvencel  ainsy  comme  de  dix  huit  ans,  grant  et 

«  corsu; debonnechère,  aspre  et  vigoureuse.  » 

(Ibid.  fol.  106.)  «  Lyonnel  est  ung  des  plus  aspres 
«  Chevaliers  que  l'en  saiche.  »  (Lanc.  du  Lac,  T.  III, 
fol.  6.) 

Petit  apriès  moru  Liascres, 

Qui  moult  estoit  vallans  et  aspres. 

Ph,  Mouskcs,  MS.  p.  623. 

VAR1.\NTES  : 
ASPRE.  S'  Bernard,  Serra,  fr.  MSS.  p.  311. 
AlPRE.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  part,  i,  fol.  8,  R". 
Apre.  Bestiaire  d'.\raours,  MS.  du  R.  n"  7534,  fol.  277. 
Apries.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  387. 

Asprelle,  subst,.  fém.  Espèce  de  plante.  Plante 
dont  les  tiges  sont  aspres,  rudes  au  toucher,  et 
qu'aujourd'hui  l'on  nomme  prêle,  en  altérant  l'an- 
cienne dénomination  asprelle.  (Voy.  Aspre,  rude  au 
tact.)  11  semhleroit  qu'autrefois  Vasprelle  fleurie 
étoit  une  parure  dans  les  fêtes  champêtres,  et  que, 
comme  la  rose,  elle  annon^oit  le  printemps. 

Le  Mai  qui  fait  le  lys 

Croistre  et  Vasprelle  ; 
Et  fait  venir  la  rose  belle, 
Et  toute  joie  renouvelle. 

Froissarl,  Poês.  MSS.  p.  47,  col.  1 
Cascuns  ot  chapiau  A'asprelle. 

Ane.  Poês.  fr.  MS.  du  Valic.  n'  1490,  fol.  113,  Vv 

VARIANTES  : 
ASPRELLE.  Cotgrave  et  Nicot,  Diot. 
Aprelle.  Cotgrave  et  Monel,  Dict. 
AsPRELE.  Moriet,  Dict. 

Asprement,  adii.  Aprement,  rudement,  dure- 
ment, etc.  Ardemment,  avec  ardeur,  avec  activité. 

On  croit  que  la  signification  â'asprement  étoit 
relative  à  celle  de  l'adjectif  aspre,  rude  à  l'ouïe, 
lorsqu'on  disoit  clocheter  asprement.  «  Celui  qui 
«  porte  le  feu....  tient  une  clochete....  et  s'il  voit 
«  1  aloe  ou  autre  oisel,  il  hasle  et  clochete  bientost 
«  et  plus  asprement.  «  {Modus  et  Racio.  ms.  fol.  188.) 

Quoi  (lu'il  en  soit,  on  a  dit  dans  le  sens  générique 
à'aspre,  rude  à  sentir,  qui  se  fait  sentir  rudement  : 

Si  pèches  par  tolie, 
Toi  meisraes  chastie 
Tost  et  asprement. 

Evrard,  Distiques  de  Calon,  MS.  de  N.  D.  colé  M.  18. 

Au  figuré  :  «  Cil  qui  juge  doit  regarder  que  il 
«  n'atablisse  nulle  chose  plus  asprement  ne  plus 
«  mollement  que  si  come  la  chose  le  requiert.  • 
(Ane.  Coût.  d'Orléans.) 


C'est  par  comparaison  de  l'ardeur  d'une  passion, 
avec  celle  d'un  feu  âpre,  qn'asprement  a  signifié 
ardemment,  avec  ardeur  : 

....  Biautés  donne  talens 
Toutans  d'amer  asprement. 

Ane.  Pof-s.  fr.  MS.  du  Vatican,  n*  1490,  fol.  144,  V". 

Ardemment,  avec  activité,  avec  vitesse,  dans  cet 
autre  passage  :  «  Chevauchèrent  si  asprement  que 
«  devant  qu'il  fust  nuyt,  vindrent  au  chasteau.  » 
(Lanc.  du  Lac,  T.  II,  fol.  80.) 

Enfin,  ce  même  adverbe  paroit  avoir  désigné 
l'activité  d'un  regard  fixé  sur  quelqu'un  pour  le 
reconnoitre.  "  Il  regarda  le  Chevalier  plus  aspre- 
«  ment  qu'il  n'avoit  fait,....  et  le  recongneut.  » 
(Percef.  Vol.  III,  fol.  121.—  Voy.  ki.m?.^  ardent, 
actif.) 

Aspresce,  subst.  fém.  Aprelé,  rudesse.  Rigueur, 
tourment,  peine,  mal,  etc.  Ardeur,  activité,  agilité, 
hardiesse,  opiniàireté,  etc.  (Voy.  Aspre.) 

Dans  une  signification  analogue  h  celle  de  l'ad- 
jectif aspre,  rude  au  goût  ou  à  l'odorat,  rude  au 
«  tact,  l'on  a  dit:  Viandes  dont  nul  homme  daignast 
«  gouster  pour  l'amertume  et  pour  la  très  grande 
«  asprece  qu'elles  sentoient.  »  (Cliron.  de  S'  Denys, 
T.  II,  fol.  36) 

Chou  que  il  vaurront  manoier, 
N'ara  en  els  nient  d'aspreche, 
D'amertume,  ne  de  tristreche. 

Lucidaires,  MS,  de  Gibert,  fol.74,  R'. 

On  opposoit  à  l'idée  générale  d'une  sensation 
agréable  et  douce,  celle  d'une  sensation  rude  et 
désagréable,  en  disant  :  «  Machabe  s'aperçut  que  li 
«  hom  ne  li  fesoit  si  bêle  chère,  come  il  soloit.... 
«  et  sot  que  ceste  aspreee  n'en  estoit  mie  de  bien, 
«  ni  de  bon  cuer.  »  (Livres  des  Machabées,  ms.  des 
Cordel.  fol.  103.)  «  Garde  que  tes  paroles  ne 
«  soient  grevables  à  autrui,...  ti  ris  sans  asprece,... 
«  ti  pas  sans  noise.  >•  (Prov.  de  Seneke,  ms.  de  Gai- 
gnat,  fol.  320.)  «  Icellui  escuier  doublant  rigour  el 
«  asprece  de  .lustice;  etc.  (l).  Carpentier,  Suppl. 
Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au  mot  Asperitas;  tit.de 
1372.  (Voy.  Aspre  et  Asprement.) 

C'est  aussi  dans  le  sens  à'aspre,  rude  à  sentir  en 
général,  qu  asprece  signifioit  rigueur,  tourment, 
peine,  mal,  etc. 

Pour  Dieu,  or  ne  vous  soit  paresse 
D'assavourer  com  grant  aspresse 
Dieu  souffrit  en  sa  passion. 

J.  de  Mcunj.  Test,  vers  349-351. 
A  tout  mètre  à  la  mort  eslrivent, 
Sanz  merci  quant  tju'il  aconsivent  : 
A  flamens  font  maintes  aspreces. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  299.  V. 

On  a  indiqué  l'espèce  de  comparaison  d'après 
laquelle  aspresce  désignoit  l'ardeur  de  la  jeunesse  : 

....  Sui  pris  au  premier  buillon, 
Tout  droit  en  la  verde  seson, 
Et  en  Vaspresce  de  Jovent. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  951,  R-  col.  1. 

L'ardeur  des  passions  : 

....  Renaut  de  Bouloingne 
Fist  par  courrouz  et  par  asprece 
Craventer  une  forterece. 

G.  Guiart,MS.  fol.  102,  Rv 


AS 


—  223  — 


AS 


Enfin,  les  effets  de  cette  ardeur,  dans  l'animai 
comme  dans  l'homme,  l'activité,  l'agilité,  la  har- 
diesse, l'opiniâtreté,  etc.  «  Fut  combatu  par  une 
><  merveilleuse  ardeur  et  aspresse.  »  (J.  Le  Maire 
lUuslr.  des  Gaules,  liv.  III,  p.  304.)  «  S'assemblèrent 
»  ensemble  vigoureusement  et  de  grande  aspresse; 
«  et  à  ce  rassembler  aUeindil  le  Chevalier.,  delà 
«  dague.  >.  (Mém.  d'Ol.  de  la  Marche,  liv.  I,  p.  325.) 

Voist  s'en  au  Tornoi  pour  savoir 
Quel   force  il  peut  eu  lui  avoir, 
Et  quel  auprùce  et  quel  vigour. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  62,  R».  col.  i. 
Artus  fut  de  grant  aspréce, 
De  grant  vigour,  de  grant  proesce. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  71,  \'  col,  i. 

On  a  dit  en  parlant  d'un  chien  agile,  ardent  et 
hardi  a  la  chasse  : 

....  Fu  il  bien  esparinentez, 
Et  à  granz  testes  esprovez 
De  hardement  et  d'isnelesce, 
De  tôt  engig,  de  tôt  asprèce, 
Tant  ert  délivres  et  legiers, 
Qu'an  soit  peut  avoir  bons  lévriers. 

Parlon.  de  Blois,  MS.  de  S'  Genii.  fol.  165,  V  col.  1. 

VARIANTES  : 
ASPRESCE.  Liv.  des  Machabées,  MS.  des  Cordel  fol   lUS 
Appresce.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  285,  col  i      ' 
Appresse.  Id.  ibid.  p.  76,  col.  4  >        ■    ■ 

Apresse.  Œuv.  de  Baïf,  fol.  29  R» 
Asprece  Prov.  de  Seneke,  MS.  de  Gaignat,  fol,  320 
Aspreche.  Lucidaires,  MS.  de  Gibert,  fol    74  R»      " 
ASPRESGHE.  Ibid.  fol.  6,  V".  ' 

Aspresse.  J.  de  Meung,  Test,  vers  350. 

Asprete,  adj.  fétn.  Diminutif  d'âpre.  Dans  le 
sens  daspre,  rude  à  l'ouïe,  l'on  a  dit,  voix  aspretre 
(G.  Guiart,  ms.  fol.  231,  —  Voy.  Aspre.) 

Aspr été  su bs t.  fém.  Apreté.  Peine,  douleur 
corvée  pénible.  Ardeur,  animosité,  opiniâtreté  à 
combattre.  (Voy.  Aspre  et  Aspresce.) 

Du  latin  asperitas  s'est  formé  par  contraction  le 
irançois  asprete,  plus  ancien  et  plus  usité  dans 
notre  Langue  qu'aspérité.  La  signification  en  est 
aujourd  hui  moins  générale,  puisqu'on  ne  dit  plus 
aprete  d  odeur,  comme  l'on  a  dit  et  dit  encore 
aprete  de  goût,  etc.  (Voy.  Monet,  Dict.)  «  Tu  desires 
■■  par  aventure  la  sauteit  ;  mais  tu  redotes  Vaspre- 
p  ^[^^_  Je  la  médecine.  (S'  Bernard,  Serm.  fr.  mss. 

C'est  relativement  à  l'acception  générale  d'fls»?-e 
rude  a  sentir,  qu'aspérité,  comme  asprete  À 
asprece,  a  signifié  peine ,  douleur  :  «  (tue  dis-tù  de 
•<  cou  queh  boin  home  sont  besoignex,e't  onlaspreté 
fol  22n  "  ^^"^''^'''''■^''  **'  '^^  '^«''   "°  ^989, 

La  mort  de  Dieu  vous  fut  mort  pour  jamais 
Quant  vous  veistes  sa  grant  aspérité 

Eusl.  Desch.  Poês.  MSS.  p.  117,  col.  4, 

La  douleur  de  la  circoncision  en  ce  passage  ■ 
«  lote  ceste  aspretcit  nos  at  osteit  li  nostre  Jh  c' 

fr.'Mbï  p   220  )  '"^^''  ^""'^^''  "  ^'- '  ^^"'^'^^  Serm." 

Les  corvées  pénibles  de  la  servitude  féodale  ■ 

»  four  cause  de  ost,  de  chevauchée et  de  toute 


;j,  y'/''^  (ispreté  ou  manière  de  servitude.  »  (Ord. 

Au  figuré,  l'ardeur,  l'opiniâtreté  avec  laquelle  on 
combattoit  pour  la  victoire.  iqueue  on 

Sont  par  force  et  asprelez 
Leur  ennemis  de  champ  getez. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  270,  R*. 
,,.^„  VARIANTES    : 

ASPRETE.  Rob.  Estienne  et  Xicot,  Dict 

ipRETrM^oi't,'rf.eT-'^°°"'  '''•  ^'  '^°"'"-'  P'  12- 
Aspérité.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  117  col  4 
AspRETEiT.  S'-Bernard,  Serm.  fr.  uh  p.  m 

AnunSté"'"'  '''^'^'  ^''''-  "^P''^'"'  "«'"^"'''  ^'^^^'''■ 
Dans  le  sens  propre,  on  a  dit  : 

La  chaleur  n'y  peult  rien,  n'y  Vaspreur  des  hvvers 
Du  ^'erdier,  Bibliolh.  préf.  p.  28    ' 

i"!'^"'"?.,-  "  Pour''»  grant flsy»-e»r  et  chaultcou- 
«  rage  qu  ilz  avoient  l'un  contre  l'autre  etc  » 
(D.  Carpentier,  suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Ca'nge  'au 
mot  Asperita,  ;  tit.  de  1456.-  Voy.  Aspre  et  Aspr'et?!) 

Asprir  verbe.  Rendre  âpre;  devenir  âpre.  (Vov 

la  les  veibes  Enasprir  et  Enasprier.  (Voy.  Aspérer  ] 

Dans  le  sens  propre,  on  a  dit  :  «  Le  maniement  de 
«  Id  nege  asprit  le  cuir  des  mains.  »  (Monet,  Dicl. 

■  •  .  .  .  Esloigne-toy  de  brandon  de  CvDris  • 
Ceux  qui  contre  le  vent  des  Aquilons  aspris 
Endurcissent  leur  peau,  luy  font  mieux  résistance. 

Poes.  d'Amadis  Janiyn,  fol.  160  V 

Au  figuré  : 
N'est-ce  assez  que  je  brûle,  et  que  l'extrême  ardeur 
Du  feu  qui  me  détruit,  devient  encor  plus  forte  • 
Sans  qu  un  vent  de  soupirs  à  chaque  moment  sorte 
Pour  en  soufflant  aspru-  et  doubler  sa  fureur  ? 

Poës.  d'Amadis  Janijn,  fol.  149,  y. 

On  exprimoit  sans  doute  une  idée  relative  à  celle 
de  hardiesse,  d'intrépidité,  lorsqu'on  parlant  de 
Blancheflor,  qui,  sa  prière  faite  à  Dieu,  se  résigne 
courageusement  à  être  brûlée,  on  disoit  : 

....  Blancheflor  s'est  (wpéWe  .• 
Et  le  tapis  ont  apporté 
Li  Serjaii  ;  furent  apresté 
Por  la  pucele  el  feu  lancier. 

Hoire  et  Blaochellor,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  196,  R-  col.  2. 
VARIANTES  : 
S^nToIct'^"'"'  «"'^•Es"^"ne  et  Nicot,  Dict. 
AspERiR.  Floire  et  iBlancheflor,  MS.  de  S'.  Germ.  fol.  196. 

_  Asprissemeut,  subst.  masc.  Action  de  rendre 
âpre.  Du  verbe  asprir.  (Voy.  Cotgrave,  Dict.) 

Asproier,  verbe.  Traiter  àprement,  tourmenter- 
poursuivre,  presser  avec  ardeur.  (Voy.  Aspre  )  Signi- 
fications analogues  à  celles  de  l'adjectif  «sj9?"k 

Or  vieng  proier 
A  vous  Dame,  et  merci  crier 
Que  ne  gart  l'eure  qn' asproier 

Me  viengne  cil 
Qui  m'a  mis  à  si  grant  exil 

Fabl.  MS.'du  R.  n"  7218,  fol.  302,  R-  col.  1, 
Tant  m'a  Amors  percié  et  mors, 
S  ensi  me  tient,  et  si  m'asproie 
Longhement,  vivre  ne  poroie. 

Siiîge  de  Troje,  MS.  du  R.  n'  C987,  fcl.  103,  R-  col.  1. 


AS 


-  224  — 


AS 


On  disoit  d'un  homme  que  pressoit  une  faim 
ûpre,  que  la  faim  Vasproioit.  {Voy.  Les  XV  signes 
du  Jugement,  ms.  du  H.  n°  7989,  fol.  197.)  Dans  les 
vers  suivans,  asproier  désigne  l'ardeur,  la  vitesse 
avec  laquelle  un  faucon  presse  el  poursuit  sa  proie. 

Si  se  radresse  et  se  ravoie, 
Et  se  met  à  la  droite  voie, 
Et  son  premier  oisel  asproie. 

Poésie  de  G.  Machaul,  MS.  fol.  207.  R"  col.  1. 

VARIANTES  : 
ASPROIER.  Siège  de  Troye,  MS.  du  R.  fol.  -105. 
Esi-noiER.  Fabl.  MS.  du  K.  fol.  190. 

Asproii,  suhsl.  masc.  Espèce  de  petit  poisson. 
11  ressemble  au  goujon,  et  ne  se  pêche  que  dans  le 
Rhône,  entre  Lyon  et  Vienne.  On  a  désigné  l'aspé- 
rilé  de  ses  écailles  en  le  nommant  aspron.  (Cotgrave 
et  Nicot,  Dict.  —  Voy.  Aspre.) 

Assabler,  verbe.  Remplir  de  sable.  Echouer  sur 
le  sable. 

On  le  trouve  au  premier  sens  dans  Cotgrave, 
Dict.  "  La  mer  avec  le  temps  a  assablé  le  port 
«  d'Aiguemorles.  »  (Dict.  de  Trévoux.) 

Dans  le  second  sens,  on  a  dit  de  frégates  échouées 
sur  le  sable  et  entravées,  qu'elles  étoient  assablées. 
(Voy.  Pélisson,  Lett.  hist.  T.  I,  p.  107.  —  Ccfgrave, 
Nicot  et  Monet  Dict.  —  Dict.  de  Trévoux.) 

Assablissement,  subst.  masc.  Amas  de  sable, 
banc  de  sable.  (Voy.  Cotgrave,  Dict.) 

Assagir,  verbe.  Rendre  sage,  raisonnable; 
devenir  sage,  raisonnable.  (Voy.  Assagissement.) 

Dans  une  signification  analogue  à  celle  du  verbe 
latin  sagire,  bien  sentir,  l'adjectif  sage,  très-ancien 
dans  notre  langue,  désigne  un  homme  qui  goûte 
bien  les  choses,  qui  les  sent  et  les  connoit  bien,  un 
homme  que  le  goût,  le  bon  sens  guide  dans  la  con- 
noissance  raisonnée  de  ce  qui  est  bon  ou  mauvais, 
au  moral  comme  au  physique.  (Voy.  Sage.)  C'est  en 
ce  sens  que  le  verbe  assagii'  signilioit  rendre  sage, 
raisonnable.  «  11  nous  faut  abestir  pour  nous  ussa- 
«  gir.  «  (Essais  de  Montaigne,  T.  II,  p.  288.)  «  Les 
«  conditions  de  la  vieillesse  ne  m'advertissent  que 
«  trop,  m'assagisse7it  et  me  preschent.  De  l'excez 
"  de  la  gayete,  je  suis  tombé  en  celui  de  la  sévé- 
«  rite  ;  etc.  »  (Id.  ibid.  T.  111,  p.  95  et  96.) 
Robes  de  vair,  ne  de  gris,  n'ont  puissance 
D'assarjir  nul  ;  mais  puisque  le  sens  as, 
De  robes  vestus,  pour  ce  ne  le  perdras. 

Eusl.  Desch.  PoSs.  MSS.  p.  26.  col.  i. 
Son  doulz  parler  m'assarjissoit 
Par  le  bien  qui  de  lui  issoit. 

Pof'B.  de  G.  Machaul,  MS.  fol.  183,  Y-  col,  3. 

Dans  les  vers  suivans,  il  sembleroit  qu'assagir 
une  jeune  innocente,  c'étoil  lui  donner  de  l'esprit, 
dans  le  sens  de  certain  conte  de  Lafontaine. 

Je  senc  jà  que  ton  coer  y  tent, 
Car  je  voi  ta  coulour  rougir  ; 
Mes  un  peu  te  voeil  assagir. 

Froiss,irt,  Pcès.  MSS,  fol,  35,  col.  1, 

Ce  verbe  est  réciproque  dans  le  passage  suivant  : 
«  Qui  ne  remue  son  esprit,  il  s'enrouille  et  demeure 
«  sot  :  et  de  tout  il  doit....  prendre  advis  et  conseil, 
«  tant  sur  le  passé  pour  lessentir  les  fautes  qu'il  a 


«  faict,  que  pour  l'advenir  afin  de  se  reigler  et 
«  s'assagir.  »  (Sagesse  de  Charron,  p.  539  et  540.) 
11  étoit  neutre,  lorsqu'on  disoit  :  «  Vieillir  n'est 
«  pas  assagir ,  n'y  quiler  les  vices  ;  mais  seulement 
"  les  changer,  et  en  pires.  >•  (Sagesse  de  Charron, 
p.  158.) 

Se  beau  parler  faisoit  homme  assaair  ;  etc. 

Eust.  Desch.  Pocs,  MSS,  p,  3S2,  col.  2. 

Assagissement,  suhst.  masc.  Action  de  rendre 
sage,  raisonnable.  On  a  dit  :  «  L'affinement  des 
«  esprits  n'est  pas  V assagissement.  »  (Sagesse  de 
Charron,  p.  110.  —  Voy.  Assagir.) 

Assai,  Si/6s^  masc.  Mesure  d'essai.  Dégustation, 
essai.  Epreuve,  connoissance. 

On  voit  ([w'Essai  n'est  pas  moins  ancien  dans 
notre  langue  qu'Assai;  en  latin  barbare  Assagium, 
Essaium  et  prohahlemenl  Exagiiim,  lorsque  ce  der- 
nier mot  signifioit  figurément,  comme  Essef  et 
Essief  dans  les  coutumes  d'Anjou  et  du  Maine, 
mesure  û'essai,  mesure  publique  servant  à  essayer, 
à  éprouver,  à  connoitre  si  les  mesures  particulières 
sont  telles  que  le  prescrit  la  Coutume  ou  la  Loi. 
(Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  T.  111,  au  mot  Exagium, 
col.  190.  —  Id.  ibid  aux  mots  Essaiinn  el  Essaymn, 
col.  158.  —  D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  latin  de 
Du  Cange,  au  mot  Assagium,  col.  330.)  «  Ont.... 
«  Moyens  justiciers  droit  de  bailler  mesures  à  blé 
«  et  à  vin,  du  patron  et  essief  un  Seigneur  dont  ils 
«  tiennent  leur  Justice.  »  (Coût.  d'Anjou,  au  Coût, 
gén.  T.  11,  p.  65.)  "  h'essief,  ou  essef  comme  on  lit 
«  dans  la  coutume  du  Maine  (ibid.  p.  112,)  est  le 
«  patron  sur  lequel  on  règle  et  on  essaye  les  autres 
«  mesures.  »  (Voy.  Lauiière,  Gloss.  du  Dr.  fr.) 

C'est  une  acception  particulière  h  Essef  ou  Essief. 
que  l'on  regarde  comme  une  altération  A'Essai  ou 
Assai,  qui  dans  le  sens  propre  de  l'Italien  Assaggio, 
signifie  dégustation  ;  par  métonymie  fss«/,  appreste 
de  pain  ,  ou  tranche  de  pain  préparée  pour  l'aire  la 
dégustation,  l'épreuve  des  viandes  servies  à  la  table 
des  Rois.  (Voy.  Nicot,  Dict.  —  Dict.  de  Trévoux.) 
L'Essai,  la  dégustation  qu'aujourd'hui  l'on  fait  des 
viandes  et  du  vin  devant  le  Roi,  se  faisoit  ancien- 
nement »  ez  cours  et  maisons  de  Roys,  Ducs,  Princes 
»  et  de  leurs  femmes.  On  goûtoit,  on  faisoit  Vessay 
«  des  épices,  Vessay  h  la  coupe,  des  essays  tout 
«  tranchez  de  pain,  pour  faire  la  crédence  à  chacun 
«  plat  de  viande....  posé  sur  la  table.  11  eût  été  ridi- 
"  cule  ez  maisons  de  plus  bas  degré,  de  faire  essay, 
«  crédence  de  vin,  ne  des  viandes.  (Voy.  Honneurs 
de  la  Cour,  ms.  p.  49,  72  et  76.)  On  a  remarqué 
comme  une  preuve  singulière  de  confiance  récipro- 
que, que  l'Archiduc  Maximilien  étant  venu  en 
1501,  voir  Louis  XU  à  Blois  :  «  eulxdeux,  plusieurs 
«  fois  l'un  devant  l'autre,  beurenl  à  table  et  man- 
«  gèrent  ensemble  el  sans  essay.  «  (J.  d'Aulon, 
annal,  de  Louis  Xll,  an  1499-1501,  p.  323.) 

En  essayant  les  personnes  et  les  choses,  en  les       "^ 
goûlanl,  on  en  éprouve    les  qualités  bonnes  ou  i 

mauvaises,  on  les  connoit.  De  là,  Essai  ou  Assai, 
par  extension  de  l'idée  d'épreuve,  de  connoissance 
faite  et  acquise  par  le  goût,  aura  signifié  toute 


>   


AS 


—  225  — 


AS 


espèce  d'épreuve,  de  connoissance  physique  et 
morale,  faite  et  acquise  par  les  sens  en  général  ; 
même  par  le  sentiment  bien  ou  mal  raisonné  qui 
nait  des  sensations  par  lesquelles  l'âme  est  affectée. 

Nous  convient  envoyer  devant 
Gens  saiges  et  de  grant  essay. 

Eust.  Desch.  Pocs.  MSS.  p.  41i,  col.  2. 
Ses  sorceries,  ses  assois 
A  fait  par  li  et  ses  carais  (1). 

Siège  de  Troje.  MS.  du  R   n'  6987,  fol.  116,  V  col.  3. 

On  disoil  que  l'on  étoit  h  ïassai,  en  l'essai  d'une 
chose  qu'on  éprouvoit  pour  connoître  si  elle  étoit 
raisonnable  et  possible.  (Prison  d'amour,  ms.  de 
Turin,  fol,  17,  R- col.  2,  etc.) 

Bien  le  sai  ; 

Car  jou  ai  esté  à  l'assui. 

Hisl.  de  Job,  MS.  de  Gaignal,  fol.  174,  R"  col.  2 
Hom,  dont  venis,  ou  es,  dit  ai. 
Où  iras-tu  ?  Car  je  ne  sai 
Se  tu  gaaignes,  ou  se  tu  pars. 
Garde-toi,  tu  es  en  Vassai  : 
Si  com  tu  veu.v,  mal  ou  bien  fai  ; 
Tu  auras  chou  que  tu  désers. 

Miserere,  MS.  deN.  D.  strophe  xvi. 
Pitié  dort  et  raison  larmoyé  ; 
Convoitise  est  en  son  essai/. 

Eusl.  Uescli.  Pufs.  MSS.  p.  110,  col.  4. 

Probablement,  c'est  dans  le  sens  d'épreuve 
physique  et  morale,  que  l'on  a  dit  : 

Dame  on  connoît  à  l'osa;. 

Ane.  Poés.  fr.  MS.  du  Vatican,  n'  U90,  fol.  75,  R"  col.  2. 
...  Je  la  truis  tant  doucete  et  de  bon  assai, 
Et  de  vilanie  nete,  que  jà  ne  m'en  partirai. 

Chans.  fr.  MS.  de  Bouhier,  fol.  183,  V». 

Un  amant  qui  se  plaint  des  épreuves  auxquelles 
on  met  sa  constance,  dit  : 

Por  vos  soffrerai  ; 

Mais  trop  sunt  grief  vostre  essai. 

Ane.  Po6t.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  1,  p,  172. 

On  faisoit  une  chose  sans  assai,  lorsqu'on  la  fai- 
soit  sans  nécessité  d'éprouver  sa  force,  peut-être 
sans  éprouver  de  résistance. 

S'adrecierent  parmi  Rousie  ; 
Si  l'ont  praée  (2)  et  defroisie, 
Et  ne  sai  quante  autre  cité 
Dont  pas  ne  me  sont  recordé 
Li  non,  ne  recorder  ne  sai  : 
Mais  moult  destruisent  sans  asai. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  823. 

Les  Joutes  auxquelles  les  Ecuyers  éprouvoientles 
uns  contre  les  autres  leur  force  et  leur  adresse  la 
veille  des  tournois,  étoientdes  essais  ou  éprouves 
(Voy.  Mém.  sur  l'anc.  Chevalerie,  tora.  I,  paç'  33  ) 
C'est  en  parlant  de  ces  épreuves  ou  essais  que  l'on 
a  dit  : 

Amours  trouva  premier  haulx  instrumens 
Chansons,  dances,  festes,  esbatemens, 
Joustes,  essai:,  bouhors  et  tonrnoyemens. 

Poes.  d'Alaiii  Cbartier,  p.  566. 

Enfin,  c'étoit  sans  doute  avec  les  mesures  de 
1  espèce  de  celles  que  par  métonymie  désisnoit 
essef  ou  essief,  qu'on  faisoit  Vassay,  l'essai 
1  épreuve  des  mesures  particulières.  »  A  faire 
«  1  assay  des  poids  et  mesures,  ly  menstraulx  doi- 


«  vent  avoir  de  chascune  ayme  (3)  un  denir.  »  (D.  Car- 
pentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Ganse  au  mot 
Assagium  ;  m.  de  1355.  —  Voy.  Assaiement.) 

VARIANTES  : 
ASSAI.  Ane.  Poët.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  n  1018 
Asai.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  8-23. 
AssAY.  Percef.  Vol.  V,  fol.  112,  R»  col.  1. 
EsAi.  Chanson  du  C»  Thibaut,  MS.  p.  99 
ES.SAI.  Orth.  subsist.  Poës.  d'Alain  Ghartier,  p.  566. 
tssAY.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  414,  col.  2^ 
Essef.  Coût,  du  Maine,  au  Coût,  crén   f  II   n'l22 
E.SSIEF.  Coût.  d'Anjou,  ibid.  p.  64.  -  r-       • 

Assaiement,  snbst.  7nasc.  Action  d'essayer, 
(voy.  Ass.\i  et  Assagir.)  L'action  d'éprouver  si  une 
chose  est  possible.  «  Sis  conseaus  et  son  assaiement 
«  lu  trove  vains.  »  (Livres  des  Machabées,  ms.  des 
Cordel.  fol.  169.)  «  Après  plusieurs  assauts  et 
«  essayements  d'avoir  la  place,  etc.  «  (Juvenal  des 
Ursins,  Hist.  de  Charles  VI,  pag.  163.  —  Voy.  Assai 
et  Assaier.) 

variantes  : 
ASSAIEMENT.  L.  des  Machabées,  MS.  des  Cordel  fol  169 
EssAiEMENT.  Anc.  Poët.  Fr.  MS.  av.  1300,  T.  II,  p  634 
tssAYEMENT.  Juvenal  des  Ursins,  Hist.  de  Ch.  VI,  p.  163. 

Assaier,  verbe.  Goûter,  éprouver,  connoitre. 
tiendre  sensible  à  un  goût  amoureux,  à  un  goût 
raisonnable.  On  observera  qu'en  Latin  barbare 
assaiare,  eu  françois  essayer,  étoit  le  même  que 
assaghare.  (Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lai.  tom.  I 
col.  766.  —  D.  Carpenlier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du 
Caiige,  tom.  I,  col.  330.)  C'est  probablement  ainsi 
wassajer  étoil  le  même  ([u'assaier.  On  croit  que 
la  sigiulication  propre  cVassajer,  assaier,  essaier, 
est  celle  de  l'Italien  assaggiare;  que  par  extension 
de  cette  signification  encore  usitée,  lorsqu'on  dit 
essayer  d'une  chose  pour  y  goûter,  l'éprouver  la 
connoitre  en  la  goûtant,  ce  verbe  aura  désigné 
toute  espèce  d'épreuve,  de  connoissance  qui  peut 
être  acquise  par  les  sensations,  et  parla  réflexion 
sur  ces  mêmes  sensations.  «  Cum  il  oui  l'aspée 
«  ceinte  alad  e  asaiad  s'il  se  peust  cumballre,  si 
<•  armez.  «  (Livres  des  Rois,  ms.  des  Cordel.  fol.  23.) 

La  Dame  connut  bien  le  ploi. 

Ses  cuers  estoit  en  grant  esfroi  ; 

Car  volentiers  i  asaiast, 

S'ele  peut  et  ele  ossast. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7989,  fol  53,  V  col  1. 

.le  ne  sai  rien  de  tel  ahan. 

Ne  ne  Vassaierai  avan. 

Ihid.  fol.  61,  V°  col.  2. 

S'un  seul  jour  vos  soullas  assaioie, 
Puis  m'en  degetissiés  en  Vautre  jor, 
Lors  m'averiés  doublée  ma  dolour. 

Ane.  Poél.  fr.  MSS.  av.  1300,  T.  Il,  p.  808. 
Bien  ont  amers  asaié 
Se  j'ai  loiaument  amé. 

Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  1300.  T.  UI,  p,  1170. 
Cil  qui  à  giUer  s'avoie, 
Vait  une  et  autre  asaiant  : 
A  chascune  fait  semblant 
Que  por  li  morir  se  doie. 

Id.  ibid.  p.  1051. 


piuie^ffë  -  (3°Mesure.'"°"'  '  ^'"'""'"'  ^'°"6ine  est  sans  doute  hébraïque:  ^«m,  lire.  (n.  e.)  -  En  latin  prœdata, 
II. 

29 


AS 


-  226  — 


AS 


Moult  est  sauvaie 
la  meschine  qu'il  n'asage. 
As  Dames  fait  muer  corage 

^^■lirMl'.riér„e,n.35Mo..l3i.V-colM. 

11  est  évident  qu'en  ces  vers,  asajer  est  de  même 
signification  que  asaier,  éprouver  une  femme,  la 
connoitre,  peut-être  la  rendre  sensible  a  un  goût 
amoureux.  On  soupçonne  que,  dans  un  sens  relatif 
à  celui  cVassagir,  le  verbe  assaùer  a  signifie  rendre 
sensible  ù  un  y,oùt  raisonnable. 

Loyal  me  verés  et  secré, 
Obéissant  et  cremeteus, 
Et  en  mes  requestes  honteus. 
Si  je  fai  bien,  si  m'en  paiiés  ; 
Si  je  fai  mal,  si  m'as-muéx. 

'  Froissarl,  Poes.  MSS.  p.  25,  Ml.  2. 

VARIANTES  : 
ASSAIER.  Ane.  Poët.  fr.  MSS.  av.  im  T-  "- P-  ^^^<^-     ^ 
Asaier.  Livres  des  Ro.s,  MS.  des  Cord  fol  ^>  R°  «ol-^- 
\SAJER.  Fabl.  MS.  de  Berne,  n"  3a4  fol.  131,  V»  coL  1. 
Ass.uiER.  Froissart,  Poës.  MSS   p.  2o,  col.  2 
AS30YER.  Arbre  des  Batailles,  Mfe/o!^-,*v  T  r,  480 
Ess.UER.  Ane.  Poët.  fr.  MSS.  avant  '300,  TI,  p.  480. 
Ess.^YER.  Orth.  subs.  -  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict. 

Assaillant,  partie.  Qui  assaille.  Dans  le  sens 
propre  du  verbe  assaillir,  le  participe  assa;//aHf, 
devenu  substantif  par  ellipse,  n'est  plus  d usage 
qu'au  pluriel.  Pris  figurément  comme  dans  Molière, 
il  retrace  l'ancienne  idée  dos  .tssaj//fl/is  opposes 
aux  Teaans  dans  les  combats  en  champ  clos,  les 
tournois  et  les  carrousels.  (Voyez  CotgraveeUNicot 
Dict.  -  Dict.  de  Trévoux.  -  Dict.  de  1  Acad.  fi .) 
Les  Assailluns  étoient  «  ceux  qui  soffi-ant,  pai 
«  leurs  responses  au  deffy  el  aux  cartels,  de  soute- 
«  nir  le  contraire  ,  composoient  les  Quadrilles 
..  opposées.  »    (Menestrier ,    des    tournois,    etc. 

p.  194.  —  VOy.  ASSAILLEUR.) 

Assailler  verbe.  Assaillir.  Le  prétérit  assail- 
lièrent  (i^ns  Villehardouin,  ubi  supra,  prouve  sans 
doute  que  l'on  a  dit  assaillier  comme  assatller. 
'  Parce  que....  les  avoient  assaille-,  et  trouvez 
«  d'assez  meschante  defTence,  se  férirent,  etc.  » 
(Monstrelet,  vol.  Il,  fol.  46.  —  Voy.  Assalir.) 

VARIANTES    : 
ASSAILLER.  Monstrelet,  Vol.  II,  fol.  46,  R". 
Assaillier.  Villehardouin,  p.  38. 

Assailleur,  siihst.  masc.  Assaillant.  Dans  la 
signification  relative  à  l'ancien  usage  des  combats 
en  champ  clos,  le  roi  François!",  parlant  au  héraut 
de  l'Empereur  de  Chaiies-Qumt,  dit  :  «  Héraut, 
«  porle-tu  ta  seureté  du  camp  telle  qu  un  assail- 
.  leur,  comme  est  ton  maistre,  doit  bailler  a  un 
«  deffendeur,  tel  comme  je  suis.  »  (Gage  de  bataille 
de  François  1"  et  de  Charles  V,  fol.  81.  -  voy. 
Assaillant  et  Assailli.) 

Assailli,  participe.  La  signification  propre  et 
figurée  de  notre  proverbe:  «  bien  attaque,  bien 
défendu,  »  tient  sans  doute  à  l'idée  (jue  l'ancien  spec- 
tacle des  combats  en  champ  clos  et  des  tournois 
avoit  rendu  si  familière  à  nos  ancêtres,  que  nen 
n'étoit  plus  commun  que  ce  proverbe:  »  bien 
«  défendu,  bien  assailli;  bien  ass«f/Z;,  bien  détendu 


a  ou  bien  soutenu.  »  (Eust.  Desch.  poes.  mss. 
pag.  386.  —  Poës.  de  Charles  duc  d'Orléans,  ms.  du 
R  pag  68.  —  Id.  ibid.  pag.  69.  —  Poës.  d'Alain 
Chartier,  pag.  785.   -  Coquillart,  pag.   123,  etc.) 

«  Le  Roi  fist'debattre  ces  matières  devant  luy 

Bien  assailUj,  bien  deffendu.  »  (Le  Jouvencel,  ms. 
page  451.) 

Très  fort  vous  avez  combatu, 
Et  j'ay  mon  vieillart  bien  tenu. 
C'est  lieau  débat  que  de  deux  bons  ; 
Bien  assailhj,  bien  deffendu. 

Chasse  el  départ  d  Amours,  p.  278  el  279. 

On  disoit  aussi  proverbialement  :  »  homme 
«  assailli,  à  demi  vaincu.  »  (Cotgrave,  Dict.  — 
Voyez  Assalir.) 

Assal,  subst.  masc.  Assaut,  attaque.  Cette 
orthographe  assaut  n'est  pas  moins  ancienne  dans 
notre'Langue,  que  celles  d'rtssflM  et  asaut  formées 
d'asult  et  assal  par  le  changement  si  ordinaire  de 
al  en  au  Si  l'on  a  dit  proverbialement  a  qu  homme 
a  assailli  étoit  à  demi  vaincu,  c'est  qu  on  est  en 
«  lieux  et  si  souldainement  prins  aucunes  fois  que 
.  en  restât  en  quoy  on  se  trouve,  il  se  fault  def- 
«  fendre  »  Aussi  disoit-on  qu'assaillir,  avoir  l  as- 
saut, comme  on  lit  dans  le  Jouvencel,  ms.  etoit  un 
avantage;  et  que  par  cette  raison  «  il  falloit  fuir  un 
»  assaut  de  cent  lieues  et  chercher  une  bataille  de 
„  cent  »  'Discours  polit,  et  milit.  de  la  ^oue, 
pag.  303.  —  Le  Jouvencel,  ms.  page  491.  —  voyez 

^"on'^a  fait  l'éloge  du  chevalier  Bayard,  en  disant 
au'il  avoit  «  assault  de  lévrier,  deffense  de  san- 
u  o-iier  et  fuite  de  loup  :  trois  qualités  essentielles 
a  ?i  l'homme  de  guerre,  qui  doit  assaillir  aussi  har- 
c.  diment  que  lait  un  bon  lévrier  :  s'il  est  presse  de 
«  combattre,  imiter  le  sanglier,  el  s  acculer  contre 
.  maison,  baye,  fossé  ou  buisson  et  là  soustenir 
..  l'flSsaH^  en  advisant  de  grande  hardiesse  a  pas- 
„  ser  à  travers  les  assaillaiis;  comme  le  loup, 
,.  oarder  l'haleine  de  luy  ou  de  son  cheva  ,  dans  le 
«  cas  de  possibilité  d'une  retraite.  »  (^oy.  Dutouil- 
loux  Yen  fol.  IIT.-Ilist.  du  Ch"  Bayard  p.  411.) 
Dans  une  signification  relative  à  celle  à  assalir, 
attaquer,  en  lénéral,  on  a  dit  :  «  L'en  fait  suite 
:  agissant  et  de  paix  brisée  en  diverses  nianières 
„  selon  la  diversité  des  lieux  ;  car  1  on  suit  d  assault 
„  de  charue,  àassuult  de  chemin,  âassault  de 
,.  maison,  A'assuuU  de  champ,  etc.  »  (.\nc  Lout. 
de  Normandie,  chap.  75,  fol.  96,  citée  par  Du  Gange, 
Gloss.  lat.  t.  1,  col.  161.  -  Voy.  Assalir.) 

VARIANTES  : 
ASSAL.  Siège  de  Troye,  MS  du  R  n"  G987,  fol.  107 
AissAUS  (plur.)  Poëme  de  la  Mort,  Mb.  du  K.  stropne  xii. 
AsALS.  Villehardouin,  p.  32. 
Asalt.  Loix  Norm.  art.  xxx. 
ASAUT.  Villehardouin,  M  S.  du  R.  p.  124. 
AuKiiiiT   T  e  Jouvencel,  Mb.  p- 4yi.  eio. 
fsitcf (plur)  Poëme  de  la  ifort.  MS.  du  R.  strophe  xa.. 
Ass.«  (plur.)  Siège  de  Troye,  M^-  d"  «•  fo>:  'O'. 
EssAUT  Ane.  Poët.  fr.  MSb.  avant  1300,  1.  1,  p.  &»• 

Assalie,  subst.  fém.  Assaut.  (Voy.  Assal  et 
Assalir.)  L'action  d'assaillir  l'ennemi  dans  ses  re- 
tranchemens,dans  son  camp,  en  faisant  une  sortie  . 


AS 


-  227  — 


"  Snl'l'^r®"*--  «devant  Archadicole,  si  commpn 

:  bien    Si^'n'*'  ?'^']'\  ''''  '^  defrêndreïmui't 
«  Dien    Si  ouvrirent    or  portes-    si  n^pAnf     n!. 

yd;SS;SSr"'''-"-'^^"«-e  Place,  en 


AS 


Puis  le  Conte  Dunoys  ung  jour. 
Et  les  gens  de  sa  compaignie    ' 
S  en  tirèrent  devant  H^rcourt, 
i-uidant  1  avoir  par  assaillie. 

Vifil.  de  Charles  V;i,  p.  ii. 

même  or'onnp  FI  L  "  '^^'  "^'°"  *^e  ''  ^  l'  lettres  de 

SSiiPiSHSrr 

p  101   II     "^.^f'^^.^'  '•'"  motass«/rf«,.^.  ^  vu  on 
S.i 'ol,  «s"i,  VX%-!,-a?sa'i-î,,,'."  ™* 

Mayne  la  jument  sans  delTaulle 
Et  fay  que  mes  chevaulx  Vassaùlte 

Eusl.  Desch.  rofs.  MSS.  p.  480,  col.  3 

hnp  «'.^  î     °"  communément 
yue  s  un  homme  a  une  jument 
Que  queiqu'estalon  qui  VaTsaUle 
Que  droit  li  est  acquis  sans  feinê,  etc. 
II  „„,    .    -,       .  '(I- ibid- p.  568,  col.  3 

Li  vilains  à  lesquiele  prise,  "'lieinare. 

U  apoia  a  un  postel, 

Et  tient  en  sa  main  un  coutel 

Ae  le  nacon  veut  asa/ir. 

à  certaine  ha  ileîî  Tie  l'on  l'^f  "  '"'î"^'  °"  «'^'ève 
une  Tour,  un  cSen,,  J  J  "^  -Ir  ««««'/^""une  Cité, 
l'assaut.  :  Uns  estopës  rif '^^  '^^  ^  ''"""'^' 
«  rner;  si  «sSS  al  casie '"''sl't  "'"'"'"^  P^'' 
«  force.  .  (Fabl.  ms.  du  R.  ,r  ^80  fo  |î["'^"t,P«^ 
Rom.  de  Perceval.  ms.  de  B  rnfn'lsi  '  foT  257- 


"  Vint  jesq'à  la  cited  Rabba  ;  si  Yassaillhl    «;  lo 
T-  IV,  p.  2,  etc.)      ^'  ~  ^^^'"-  ^^  ViUeroy, 

Al  castel  vindrent,  si  Vasalent; 
Mais  fors  estoit;  au  prendre  faient. 
On  o  „„  .  ■  ''"  ''■  "'  ™'  f°'-  5*.  K-  col.  1. 

n.'.iV  V  ^®'°"  'lesloial  parconnier 
Qu>  font  samblant  d'am'er  par  traTson 
C^rTT  '^  ^°'^  '^^^'el,  11?  donfôn     ' 
Car  n  ont  pas  cuer  de  nului  gerrS 

presse  avec  avantage  onlCi/poM-P      v.'   '^"    '^ 
l-aua,i!,e,-à  main  ir?nV  ?  ses  ho„i"!,v.f  "™  ^ 

rii  _  vn,    r'i^  ^  .  "'•  *^'e  Beauvois  S,  ms    chan 

'^~aI^   ^'°^f  •  ^"''  'es  Coût,  de  Beauvois  s  ) 

MS.  desCordeL  fôl  J93?V"col. Tf      '  ^^''^'^habées, 

Anemis  qui  les  bons  assaute  "' 
Ut  let  a  nvame  geter  faute 
Dont  mors  estoie. 

Fabl.  MS.  du  R.  „.  72)8,  m.  302  r.  ,,„,   » 
Ja  ne  gardera  l'eure  que  la  mort  f„.„    ,  " 

Car  poor  de  ^^^^^S^^^f^t^tXl 

■-•  ''"  •*■  "*  ™5.  fol.  (42.  P..  col.  «. 

demaîde^"'''  P''^'^'^'"  '•"^'"  '^'«'^t^"*''  ''etTet  cFune 
Etiabl^^i^^r"^'^'»- 

1  or  viande  à  son  porcelet 

™.  Mi.  de  Berne,,,- 354,  fol.  65,  V  col.  1 

Attaquer,  asiter  le  i^nmc  ai  r«,    -,    ■ 
U   mali'o-ne's  Cri?Te'^Re1saïî''nin'îy'"''^'';''- 
assa^//../  e  traveillout.  »  (Libres  des  >?iif  '   ^f  ' 
Cordel.  fol.  21,  R»  col.  2.)    ^      ^^  "^^  '^o^^'  "s.  des 

Savez  qui  YassaiUoH  forment  •        ' 
t.e  qu  11  ne  véoit  tour  coument 
ba  chose  en  mauvais  point  ne  soit 

Cleomadès,  »fs.  de  Gaignat,  fol.  27.  V  col.  » 

Enfin,  une  preuve  évidente  de  la  signification 


,  (1)  Assalir  vient  de  adsali.e    a        ,-  ,  Signification 


AS 


—  228  — 


AS 


primitive  (Y{issaillir[\),  c'est  qu'on  a  dit  «  s'essaillir 
«  en  haut  lieu  »  pour  s'y  élever,  comme  on  s'élève 
en  sautant;  assauter,  pour  exalter,  élever. 

De  mon  fin  cuei'  me  vient  à  grant  mervelle 
Ki  de  moi  est,  et  si  me  veult  occire  ; 
K'à  assiant  en  si  houet  leu  VeasaiUe, 
Dont  ma  doior  n'oseroie  pais  dire. 

Chans.  Fr.  MS.  de  Berne,  n-  389,  part.  Il,  fol.  6,  V-. 

Vaillance  la  renommée, 

Sera  de  raoy  honorée. 

Et  loyauté  confortée  : 

Le  bienfait  assauterai. 

Eusl.  Desch.  Po5s.  MSS.  p.  201,  col.  3. 

(Voy.  AssALiE  et  AssAL.)  Peut-être  faut-il  hreassuu- 
cercii  pour  assauterai  dans  la  dernièi'C  citation  ? 
Alors  ce  seroil,  comme  assancier,  une  variation 
d'orlhogiaphe à'essaucer,  essaucier,  etc.  »  (Voyez 

ASSAUCIER.) 

COMJUG. 

Aceiit,  indic.  prés.  Assaille.  (D.  Carpenlier,  Suppl. 

Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Assaklare.) 
Asalu,  part.  Assailli.  (Anseis,  ms.  fol.  20,  R°col.l.) 
Asaudra,  ind.  fut.  Assaillira.  (Fabl.  ms.  du  R.) 
Asaura,  ind.  fut.  Assaillira.  (F.  d'Esope,  ms.  duR.) 
Asauroit,  subj.  imp.  Assailliroit.  (F.  ms.  du  R.) 
Asausist,  subj.  imp.  Assaillit.  (Chr.  d'Outremer.) 
Assalotnes,  imp.  Assaillons.  (Rom.  de  Blancandin.) 
Assalrons,  ind.  fut.  Assaillirons.  (R.  d'Alexandre.) 
Assasirent,  ind.  prêt.  Assaillirent.  (R.  de  Flor".) 
Assaiulroit,  subj.  imp.  Assailliroit.  (D.  Carpenlier, 

Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Assnldare.) 
Assauldra,  ind.  fut.  Assaillira.  (Le  Jouvencel.) 
Assauldroit,  sub.  imp.  Assailliroil.  (R.  de  la  Rose.) 
Assau7'as,  ind.  fut.  Assailliras.  (G.  de  Roussillon.) 
Assaut,  ind.  prés.  Assaille.  (Rom.  d'Alexandre.) 
EssaudroU,  sub.  imp.  Assailliroit.  (L.  des  Machab.) 

VARIANTES  : 
ASS.\LIR.  Triomphe  des  ix  Preux,  p.  542,  col.  1. 
AçAUDRE.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  D.  C.  T.  IV,  col.  6. 
ACEUDRE.  Id.  ibid.  col.  7. 

AsALiH.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7989,  fol.  54  et  79,  R»  col.  1. 
AsALLiii.  Athis,  MS.  fol.  78,  V»  col.  1. 
AsARDRE.  Borel,  Dict. 

AsAUDRE.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  D.  C.  T.  IV,  col.  49. 
Assaillir.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  21. 
AssAUDRE.  Coût,  de  Beauvoisis,  MS.  chap.  ii,  p.  47. 
Assaulter.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  489,  col.  2. 
Assauter.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  721S,  fol.  302,  R»  col.  2. 
Essaille.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  part,  ii,  fol.  61,  V. 
Essaltre.  Livres  des  Lois,  MS.  des  CordeL  fol.  120,  V". 
EssoiLLiR.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  pirt.  ii,  fol.   111,  V". 

Assarter,  verbe.  Essarter.  En  latin  barbare  , 
asmrtare;  variation  de  l'orthoeraphe  Exartare. 
(Voyez  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T. 'lll,  col.  204.  — 
M.  Court  de  Gebelin,  Dict.  Etym.  de  la  Lang.   fr. 

col. 'iSG.)  «  Soit  enquis le  boys  combien  ches- 

«  cune  acre  vault  par  an  pour  tenir  à  boscage ,  ou 
«  pour  assarter,  ou  pour  curtiver.  »  (Britton  des. 
Loix  d'Angleterre,  fol.  184,  v°.  —  Voy.  Essart.) 

Assasié,  participe.  Ensemencé,  fertilisé,  fertile. 
Satisfait,  fortuné,  beureux.  (Voy.  Assasier.) 
Dans  la  supposition  qu'entre  l'adverbe  latin  satis 


et  le  substantif  pluriel  saia,  il  existe  une  analogie 
telle  que  l'indique  M.  Court  de  Gebelin  (Dicl.  ély'm. 
de  la  Lang  fr.  col.  9G6),  il  semblei'oit  naturel  qu'à 
raison  de  cette  même  analogie,  le  participe  assasié 
dontsa//s(2),  en  françois  assez,  est  Torigi  ne,  eût  signi- 
fié dans  le  sens  propre,  ensemencé,  fertilisé,  fertile. 

Une  valée 

Qui  moult  est  riche  et  assasée. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  39,  R'  col.  l. 

De  là,  par  comparaison  de  l'homme  agricole,  satis- 
fait de  la  jouissance  d'un  champ  fertile,  avec 
l'homme  que  satisfait  ou  (loitsatisfairela  jouissance 
d'une  fortune,  la  jouissance  d'un  bonheur  physique 
ou  moral,  on  auroit  encore  pu  dire  : 

Un  riches  hom  moult  asaze:, 
Menoit  assez  près  de  lor  mez. 

Fabl.  MS.  de  Berne,  n'  354,  fol.  IIG,  R"  col.  2. 
Uns  haus  hom  l'ot  fet  fpre  manans  et  assasiez. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  344,  V  ool.  2. 
Tuit  sont  riche  et  ascssei. 

Chaos,  fr.  MS.  de  Berne,  n-  389,  pari,  n,  fol.  114,  R-. 
Me  fais-jo  liez  quant  plus  sui  d'ire  ospris  ; 
Et  por  ce  chant  qu'à  chascun  soit  avis 
Que  j'aie  en  moi  aucune  bone  estance  ; 
Que  homs  axsaziez  recuevre  plus  d'amis. 

Ane.  Poet.  fr   MSS  avant  1300,  T.  I,  p.  189. 

Ensi  me  plaist,  cornent  k'il  m'en  avaigne  : 

Par  tel  raixon  seux  poures  asezeis. 

Quant  ceu  me  plaist  dont  je  seux  plux  greveis. 

Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  n"  389,  part,  i,  fol.  105,  R- . 

VARIANTES  : 
ASSASIÉ.  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7218,  fol.  3i4,  V»  col.  2. 
Acezeis.  Ch.  fr.  MS.  de  Berne,  n"  389,  part,  i,  fol.  10,  R". 
ASASÉ.  Siège  de  Troye,  MS.  du  R.  n»  6987,  fol.  109,  R». 
AS.A.ZEZ.  Fabl.  MS.  de  Berne,  n'  3.'54.  fol.  116,  R"  col.  2. 
AsEissEi.  Ch.  fr.  MS.  de  Berne,  n°  389,  part,  ii,  fol.  114. 
Asezeis.  Ibid.  part,  i,  fol.  105,  R». 
AsSAsÉ.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  30,  R»  col.  2. 
AssAzÉ.  Floire  et  Blanchefior,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  201,  R». 
AssAziÉ.  Ane.  Poët.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  189. 

Assasier,  verbe.  Satisfaire,  fournir,  rassasier. 
(Voy.  AssAsiE.)  En  fertilisant  la  Terre,  en  l'ensemen- 
çant, on  la  prépare  à  satisfaire,  à  fournir  aux  besoins 
de  la  vie.  De  lu,  on  aura  dit  d'une  leire  qui  produit 
les  choses  essentielles  à  la  satisfaction  de  ces  mêmes 
besoins,  qui  en  est  fournie,  qu'elle  étoit  assasiée. 

La  tère  trueve  riche,  assaspe,  et  plentie 

De  moult  boine  viande  et  de  tarant  manantie. 

Rom.  d'Alexandre,  MS.  du  R.  n'098",  fol.  171,  R"  col.  2. 

Qu'un  homme  fût  fourni  des  biens  de  la  fortune, 
tellement  qu'il  dût  ou  crût  devoir  en  être  satisfait, 
on  disoit  figurément  qu'il  en  étoit  assasié. 

Riches  bons  iert,  et  asasez 
D'or,  et  d'avoir,  et  de  deniers. 
Hîst.  de  la  fête  de  la  Conception,  .MS.  de  la  Clayetle,  p.  166,  col.  1. 
De  grant  avoir  est  assasez. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  233,  R"  col.  1. 

Est  et  beaus  et  preus  assez. 
S'il  est  riches  et  assasés. 

Ane.  Poét.  fr.  MSS.  avant  1300,  T.  Ill,  p.  1271. 

On  désignoit  même  la  satisfaction  d'être  fourni, 
doué  des  qualités  de  l'esprit  et  du  cœur,  en  disant  : 

Douce  dame,  bien  sai  de  voir 
Ke  ki  de  vos  veult  estre  ameis, 


(1)  Le  mot  se  trouve  déjà  dans  la  Chanson  de  Roland  dans  le  sens  de  sauter  :  «  Son  corps  demene,  moult  fièrement 
asalt,  »  et  dans  celui  d'assaitlir:  «  Nous  asaldrum  Olivier  et  Rolant.  »  (v.  729  -  v.  947)  (n.  e.)  —  (2)  Ou  plutôt  adsatlatu .  (n.  e.) 


AS 


—  229  - 


AS 


■  Il  li  covient  en  li  avoir  ' 

Fin  cuer  et  bone  volenteit  ; 
Garnis  en  seux  et  asczeis. 

Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  n-  389,  part,  m,  fol.  10,  R" 

On  assasioit  un  désir,  une  passion,  l'on  s'en 
assasioit,  on  s'en  l'aisoit  assffsie,  lorsqu'on  les  satis- 
faisoit,  lorsqu'on  fournissoille  moyen  d'y  satisfaire. 

Qui  donc  vousist  hermine  et  pailes  d'Oriaut, 
Toujours  s'en  peust  faire  asKazé  et  manant. 

Guiteclin  de  Sassoigne.  MS.  de  Gaignat,  fol.  244,  V°  col.  1. 

De  tout  mettre  en  flambe  s'asasenl; 

Chastiaus  verssent,  viles  embrasent. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  60,  R*. 

Nus  voloirs  n'ii.sosi'e 

Cuers  d'ami,  se  n'est  d'amie. 

Ane.  PoJs.  fr.  MS.  du  Vatic.  n-  1490,  fol.  44,  V». 

Cette  acception  figurée  paroit  être  une  extension 
de  celle  û'assasier  ou  rassasier,  satisfaire  à  des 
besoins  aussi  naturelsque  ceux  de  manger  et  boire, 
en  usant  des  productions  essentielles  à  la  satis- 
faction de  ces  besoins.  «  Com  tu  en  avéras  mangé 
«  et  avéras  esté  assaciez,  tu  benequieras  al  seignor 
«  ton  Dieu  pour  la  bonne  terre  qu'il  toi  donna.  » 
(Bible  en  françois,  ms  du  R.  ir  7G(H  ;  Deut.  chap.  vin.) 
Puis  joerent  au  vin,  au  nouvel  et  au  viez  ; 
Puis  orent  tant  viande,  tuit  sont  axsasicz. 

Fald.  MS.  du  R.  n'  7-218,  fol.  344,  R°  col.  2. 
....  Si  a  fait  del  mont  acorre 
Une  fontaine  parmi  l'ost  ; 
S'en  furent  rai>aziiel  tost. 

PI).  Mouskes.  MS.  p.  61. 

On  comparoit  la  vie  à  un  banquet  d'où  l'on  sort 
rassasié,  en  disant  : 

De  vivre  sui  toz  asazez  ; 
Cai  j'ai  vécu  plus  que  assez. 

Parton.  de  Blois,  .MS.  de  S.  Germ.  fol.  144,  R'  col  3. 

VARL-^NTES  : 
ASS.\SIER.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  3ti. 
AsASER.  Siège  de  Troye,  MS.  du  R.  n»  6987,  fol.  9t. 
ASASiER.  Ane.  Poës.  fr.  MS.  du  Vatican,  n°  1490,  fol.  44. 
ASAZER.  Ane.  Poët.  fr.  MSS.  avant  I30i),  T.  I,  p.  234. 
AsEZEiR.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  part,  m,  fol.  10,  R». 
AssACiER.  Bible  en  franc. MS.  du  R.  Deut.  chap.  viii,v.  10. 
Ass.ASER.  Rom.  d'Al.  MS.  du  R.  n»6987,  fol.  171,  R"  col.  2. 
.4SSAZER.  Guit.  de  Sass.  MS.  de  Gaig.  fol.  244,  V"  col.  1. 
AZASSER.  Descript.  et  plais,  des  Relig.  MS.  de  N.  D.  fol.  244. 
R.\SAZiiER.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  91. 

Assasoimer,  wri^e.  Mûrir;  préparer.  Il  semble 
que  la  signification  de  notre  verbe  assaisonner,  pré- 
parer une  viande  ou  autre  chose  à  manger,  soit 
relative  à  l'idée  des  saisons  il)  qui  préparent  la  matu- 
rité des  fruits  de  la  terre  ;  maturité  sans  laquelle  ils 
manquent  de  cette  saveur  naturelle  à  laquelle  on 
aura  comparé  celle  que  l'on  donne  aux  choses  à 
manger,  en  les  assaisonnant.  On  a  dit,  en  parlant 
de  blé  non  mûri,  qu'il  n'étoit  point  assaisonné. 
«  Comme  ilz  se  feusseiU  assemblez  pour  cueillir  et 
«  amasser  le  blé  qui  esloit  au  dedenz  d'icellui 
«  champ,  combien  que  icellui  blé  ne  feust  mie  pour 
«  lors  attempresé,  ne  assaissonné  ;  etc.  «  (D.  Car- 
pentier,  ubi  supra;  tit.  de  li07.) 

En  regardant  le  Printemps,  comme  la  saison  qui 


prépare  notre  âme  au  sentiment  de  la  joie  et  des 
plus  douces  jouissances,  on  disoit  : 

Quant  naist  la  flour  en  la  prée, 

Que  l'erbete  et  la  rousée 

Contre  le  SoUeil  resplent  ; 

Lors  doit  joie  estre  menée 
De  la  gent  qui  d'.Amors  ont  grant  talent. 

Quant  la  seson  est  tornée 

En  i-ejevenissement. 

Et  est  joie  assnsonnée 
A  ceus  qui  maintiennent  jovent  ; 

Endroit  moi  noméement, 

N'ert  ele  jà  oubliée  ; 

Car  ne  sai  vivre  autrement. 

Chans.  fr.  du  xin"  siècle,  MS.  de  Boahier,  fol.  47,  R",  col.  1. 

VARIANTES  : 
ASSASONNER.  Ch.  fr.  du  xiii''  siècle,  MS.  de  Bouh.  fol  47. 
AssAissoNNER.  D.  G.  S.  Gl.  lat.  de  D.  C.  au  m.  assaxonare. 

Assassin,  subst.  masc.  Assassinat.  Dans  les 
langues  Orientales,  Assassin  signifioit  ce  qu'en 
notre  Langue  il  signifie  encore  aujourd'hui.  (Voy. 
Ass.issiNs.)  Il  paroît  qu'au  xvr  siècle  l'usage  n'en 
étoit  point  familier;  (lu'il  étoit  nouveau  même  pour 
les  Savans  qui  sans  doute  l'introduisirent  ('2).  «Depuis 
«  que  la  France,  disoit  Henri  Etienne,  (liv.  I,  p.  263, 
«  de  l'Apologie  pour  Hérodote,)  a  eu  appris  le  style 
«  d'Italie  en  matière  de  tuerie,  il  a  fallu  trouver 
«  des  termes  nouveaux  pour  la  nouvelle  meschan- 
i.  ceté;  »  et  l'un  de  ces  nouveaux  termes  étoit  celui 
d'Assassin,,  qu'on  ne  trouve  point  dans  Rob.  Es- 
tienne.  Dict.  C'est  par  oubli  de  la  vraie  signification 
d'.lssrtss/»,  que  dans  le  sens  d'assassinat,  l'action 

d'un  assassin,  l'on  a  dit  :  «  Qui  jettera l'œil  sur 

«  les  meurtres  et  assassins  que  les  Princes  faisoient 
«  faire  par  leurs  favoris,  etc.  »  (Pasquier,  Rech. 

liv.  I,  p.  21.  —  Voy.  ASSASSINEMENT.I 

Assassinateur,  s(.'&sL  masc.  Assassin.  Du  mot 
Assassinat,  meurtre  de  guet-apens,  meurtre  de 
l'espèce  de  celui  iiui  est  défini  liv.  I,  chap.  xxv  des 
Etablissemens  de  S'  Louis ,  s'est  formé  le  nom  d'As- 
sassinateur,  de  même  signification  que  celui  d'As- 
sassin, meurtrier  de  guet-apens.  «  Les  obscures 
«  foresls,....  réceptacles  de  brigans  et  meurtriers, 
«  taupinières  d'Assassinateiirs,  officines  de  faulx- 
"  monnoyeurs,  etc.  »  iRabelais  liv,  III,  p.  13.)  On 
trouve  Assassinat  et  assassinateur  dans  Cotgrave, 
Nicot  et  Monnet,  Dict.  —  Dict.  de  Trévoux.  (Voy. 
Assassin.) 

Assassinement,  subst.  masc.  Assassinat.  Du 
verbe  Assassiner.  (Voy.  Du  Bellay,  Mém.  liv.  IX, 
fol.  2i7.  —  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  —  Cotgrave. 
Nicot  et  Monet,  Dict.  —  Dict.  de  Trévoux.) 

Assassineur,  subst.  masc.  Assassin.  En  disant 
Assassin  pour  Assassinat,  et  Assassineur  pour 
assassin,  le  Peuple  parle  comme  Pasquier  et  Henri 
Estienne,  savans  du  xvi'  siècle,  où  l'on  disoit  indif- 
féremment Assassin,  ou  Assassineur,  du  verbe 
Assassiner.  «  A  propos  d' Assassineurs  et  tueurs  à 


(1)  Assaisonner  est  dérivé  de  salionem,  action  de  semer  :  le  premier  sens  est  mettre  à  point,  mettre  à  la  saison,  (n.  e.)  — 
(2)  Le  mot  se  trouve  sous  la  forme  assacis  dans  Joinville  :  l'origine  est  l'arabe  haschisch,  poudre  de  feuilles  de  chanvre. 
C'est  cette  poudre  que  le  Vieux  de  la  Montagne  faisait  prendre  à  ses  feidairi  ;  ils  avaient  des  visions,  et,  dès  lors,  se  croyant 
près  du  paradis,  ils  allaient  tuer  les  personnages  ennemis  qu'on  leur  désignait  (voir  plus  loin  l'article  sur  la  secte),  (N.  E.) 


AS 


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AS 


«  gas;es  comme  estoyent  ceux  desquels  je  vien  de 
«  parler,  elc.  «  (Apologie  pour  Hérodote,  p.  204.  — 
A'oy.  Assassin.) 

Assassins,  subst.  masc.  plur.  IS'om  de  peuple. 
On  croit  que  pour  se  former  une  idée  vraie  des 
Assassins,  que  la  Marlinière  et  Moréri  ont  nommé 
Assassinicns ,  comme  si  Assassin  étoit  un  nom  de 
pays,  il  faut  lire  dans  le  xvu°  Volume  des  Mémoires 
de  Littérature,  p.  127  et  suiv.,  une  Dissertation  de 
M.  de  Falconet,  pleine  d'érudition  et  de  critique,  sur 
l'origine,  la  religion  et  les  tiabilations  de  ce  peuple 
homicide  par  fanatisme. 

Les  sectateurs  d'Ali,  partagées  en  cinq  principales 
sectes,  qui,  bien  que  toutes  ne  reconnussent  qu'Ali 
pour  premier  Iman  après  Maliomet,  différoient  de 
croyance  relativement  :\  la  succession  de  l'Imamat, 
virent  naître  au  milieu  d'eux  les  Ismaéliens.  La 
haine  leur  donna  le  nom  d'Assassins,  qu'ils  justi- 
fièrent par  leurs  attentats. 

Ismaël,  fils  aîné  de  Giafar-al-Sadek,  le  sixième 
des  Imans  admis  par  les  Perses,  étant  mort  avant 
son  père,  les  Ismaéliens,  ses  sectateurs,  prétendirent 
que  les  descendans  de  cet  Ismaël  avoient  succédé  à 
la  dignité  d'iman,  préférablement  à  la  ligne  colla- 
térale. On  vit  ces  mêmes  descendans,  vers  la  fin  du 
troisième  siècle  de  l'hégire,  s'emparer  de  l'Egypte, 
où  ils  régnèrent  près  de  trois  cents  ans.  Guillaume, 
Archevêque  de  Tyr,  remontoit  sans  doute  à  l'ori- 
gine de  cette  secte,  lorsqu'on  parlant  des  Assassins 
de  Syrie,  dans  son  Histoire,  liv.  XX,  chap.  xxxi,  il 
disoit  :  «  lUi  efiam  quadringentis  annis  Saraceno- 
«  rum  legem  eteorum  Iradiîîones  tanto  zelo  colue- 
«  runt,  ut  omnes  alii  respectu  eorum  prœvaricatores 
«  judicarentur.  »  En  datant  de  la  mort  de  Giafar, 
père  d'Ismaël,  vers  le  milieu  du  second  siècle  de 
l'hégire,  environ  l'an  770  de  notre  ère,  on  trouvera 
qu'au  temps  où  écrivoit  cet  Historien,  peu  après 
1170,  la  Religion  des  Assassins,  la  même  que  celle 
des  Ismaéliens,  avoit  quatre  cents  ans  d'antiquité. 

Les  dogmes  principaux  de  cette  Religion  étoient 
la  Métempsycose  et  la  descente  de  l'Èsprit-saint 
dans  la  personne  de  leurs  Imans,  à  qui  par  cette  der- 
nière raison  les  Ismaéliens  croyoient  devoir  obéir 
aveuglément,  comme  à  Dieu  même;  soit  qu'ils  les 
armassent  du  poignard  de  la  vengeance  et  de  la 
trahison,  soit  qu'ils  exigeassent  d'eux  le  sacrifice 
effrayant  de  leur  propre  vie.  Ces  dogmes  étoient 
communs  à  plusieurs  autres  Enthousiastes,  tels  que 
les  Dararioun,  les  Carmathes,  etc. 

Les  sectateurs  de  Kersah,  nommé  Carmath,  du 
lieu  de  sa  naissance,  croyoient  avec  l'imposteur 
Hakem  et  les  Zenadecab,  à  la  Métempsycose  et  à  la 
divinité  des  Imans.  Us  ne  voyoient  dans  toutes  les 
nouvelles  observations  légales  prescrites  par  leur 
chef,  que  le  symbole  d'une  obéissance  aveugle.  Leur 
domination  en  Arabie  ayant  été  détruite,  ils  restè- 
rent dispersés  pendant  plus  d'un  siècle  dans  la 
Syrie,  dans  la  Perse  et  même  dans  l'Egypte,  où  ils 
se  mêlèrent  avec  les  Dararioun  et  les  Ismaéliens, 
sous  la  dénomination  générale  de  Bathénieus,  c'est- 


à-dire  illuminés;  de  l'oriental  Bathen,  science  inté- 
rieure. 

En  effet,  les  Ismaëliens  se  nommoient  aussi,  du 
moins  en  Egypte,  Bathénieus.  Les  Bédouins,  de  qui 
nous  parlerons  à  leur  ordre,  sont  d'une  origine 
différente.  Aussi  chercheroit-ou  inutilement  le  nom 
de  Bédouins  dans  le  Manuscrit  original  de  .loinville, 
publié  par  M.  Capperonnier.  Quoiqu'il  se  trouve  en 
trois  endroits  de  l'Histoire  de  S'-Louis,  édition  de 
Du  Gange,  il  n'en  est  pas  moins  certain  que  ce  ne 
fut  jamais  le  nom  des  Assassins  :  «  C'est,  dit  M.  Fal- 
«  yonnet,  une  ignorance  del'interpolateur  deJoin- 
»  ville,  répétée  par  Pasquier,  Bergeron,  par  Case- 
«  neuve  et  autres  ;  et  ce  qui  est  plus  dangereux, 
«  par  les  derniers  Dictionnaires,  celui  de  Moréri, 
"  celui  de  la  Martinière,  et  le  Dictionnaire  uni- 
«  versel.  » 

Si  les  Carmathes,  réunis  en  partie  aux  Ismaëliens 
d'Egypte,  se  nommèrent  Bathénieus,  ce  nom  ne 
fut  pas  moins  naturellement  celui  des  Dararioun, 
secte  formée  dans  le  sein  même  de  l'Egypte.  Ce  fut 
à  la  persuasion  de  Darari,  leur  chef,  que  l'Iman  des 
Ismaëliens  d'Egypte,  le  troisième  Khalife  Fathimjte, 
affecta  de  se  croire  Dieu.  Les  Dararioun,  as'sez 
nombreux  en  Egypte  pour  que  Hamzah,  successeur 
de  Darari,  tué  en  l'an  408  de  l'hégire,  crût  devoir 
en  faire  passer  dans  la  Syrie,  reconnoissoient,  ainsi 
que  les  Carmathes,  les  dogmes  principaux  des 
Ismaëliens  :  mais  ils  admettofent  la  transfusion  des 
âmes  entre  les  vivans,  proscrivoient  toute  espèce 
de  culte  divin  et  autorisoient  l'inceste. 

Probablement  ces  sectaires  furent  persécutés  par 
les  Ismaéliens,  à  la  mort  du  Khalife  qui  les  avoit 
protégés.  Quoi  qu'il  en  soit,  ils  abandonnèrent 
l'Egypte,  sous  la  conduite  d'Hassan-Sabah.  Les 
Ismaëliens  de  Perse,  les  Carmathes  et  les  Dararioun 
répandus  en  Asie,  s'étant  réunis  à  ceux  d'Afrique, 
leur  Chef  les  établit  sur  le  Gebal  de  l'Irak  persique, 
dans  le  Kouhestan  de  la  Perse,  c'est-à-dire  l'habita- 
tion de  la  Montagne.  Il  jugea  sans  doute  que,  haïs 
partout  où  ils  étoient  dispersés,  il  falloit  les  ras- 
sembler dans  un  pays  montueux  et  presque  inac- 
cessible, d'où  ils  pussent  braver  la  haine  de  leurs 
ennemis.  «  C'est  ainsi,  dit  M.  Falconet,  que  sur  la 
«  fin  du  v^  siècle  de  l'hégire,  se  forma  la  Dynastie 
«  des  Ismaëliens,  dont  lîassan  fut  le  premier  chef  ; 
«  homme  d'esprit,  versé  dans  la  Géométrie,  la 
«  Magie  et  autres  Sciences.  » 

Cette  Dynastie,  qui  subsista  jusqu'à  l'expédition 
d'Holagou  contre  les  Ismaëliens  ou  Assassins  de 
Perse,  détruits  quelques  années  après  le  milieu  du 
vn'  siècle  de  l'hégire  et  du  xui'  de  notre  ère,  étant 
affermie  par  Hassan-Sabah  et  ses  successeurs,  leurs 
vues  politiques  s'étendirent  aux  Dararioun,  aux 
Carmathes  et  aux  Ismaëliens  de  Syrie.  La  commu- 
nication avec  ceux  de  Perse  étoit  facile  par  la  voie 
du  Kurdistan.  Aussi  Thomas  Hyde,  dans  son 
Histoire  des  Perses,  observe-t-il  que  le  Liban  étoit 
habité  par  grand  nombre  de  sectaires,  Kurdes  d'ori- 
gine. 

Ces  sectaires  et  autres,  tels  que  les  Nossairioua 


AS 


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AS 


ou  Nazerini  de  Pline,  répandus  dans  les  environs 
d'Antioclie  et  d'Apamie,  étant  réunis  tous  par 
quelque  conformité  de  croyance  aux  dogmes  essen- 
tiels de  la  religion  Ismaélienne,  se  soumirent  sans 
peine  à  la  domination  d'un  Prince,  que  le  Cardinal 
Jacques  de  Vitri  (Hist.  Orient,  et  Occid.  liv.  I,  cliap. 
xiv),  qualifie  primus  et  summus  eorum  Abbas.  Ils 
sentirent  qu'ils  agrandiroient  leur  existence  et  la 
rendroient  plus  imposante  h  leurs  persécuteurs,  en 
ne  formant  qu'un  seul  et  même  corps  avec  les 
Ismaéliens,  les  Carmalhes  et  les  Dararioun  de  Perse. 

En  conséquence,  ce  Prince  des  Ismaéliens  ou 
Assassins  de  Perse,  leur  envoya  des  Vicaires  ou 
Lieutenans,  comme  l'atteste  M.  Polo  dans  son 
Histoire,  en  Italien  (T.  II,  liv.  i,  chap.  2.)  Lorsque 
le  Cardinal  Jacques  de  Vitri,  dans  son  Histoire, 
liv.  uv  de  l'édition  de  Marlène,  dit  que  «  le  primus 
«  et  sunwius  Abbas  des  Assassins  de  Syrie,  éloit  le 
'<  chef  de  leur  religion  superstitieuse,  que  tous 
"  leurs  autres  Princes  lui  étoient  soumis  et  lui 
«  obéissoient,  »  il  semble  raisonnable  d'en  conclure 
que  ces  autres  Princes  étoient  les  Vicaires  ou  les 
Lieutenans  du  Prince  des  Assassins  de  Perse,  et 
qu'ils  le  regardoient  comme  leur  Souverain.  Son 
nom  oriental  Schéikh,  étoit  de  même  signification 
que  Senior  en  Latin  barbare.  C'est  donc  par  igno- 
rance qu'on  l'a  nommé  Senex,  Senex  de  Montanis, 
comme  M.  Polo,  liv.  I,  chap.  xxvni  de  son  Histoire  ; 
Sexmontius,  par  corruption  de  Senex  inonlium, 
comme  Haïton,  chap.  .xxui  de  son  Histoire  orientale. 

Il  est  vraisemblable  qu'une  révolution  insensi- 
ble, mais  destructive  de  la  souveraineté  du  Prince 
des  Ismaéliens  ou  Assassins  de  Perse,  avoit  pré- 
paré l'indépendance  de  ses  Vicaires  ou  Lieutenans 
en  Syrie,  avant  la  ruine  totale  de  leur  Dynastie, 
par  Ilolagou.  Guillaume  de  Tyr,  qui  écrivôil  plus 
d'un  demi-siècle  avant  cette  époque,  dit,  liv.  XX, 
chap.  XXXI  de  son  Histoire,  en  parlant  des  Assassins 
de  Syrie  :  «  Hi  Alagistrum  non  hœreditarià  succes- 
«  sione,  sed  meritorum  prœrogalivà  soient  eligere, 
«  quem  Sencm  vocaul.  »  Le  témoignage  de  cet 
Historien,  dans  lequel  M.  Falconet  a  vu  une  preuve 
qu'en  Syrie  le  pouvoir  du  Chef  des  Assassins  éma- 
noit  d'un  pouvoir  souverain,  paroit  autoriser  notre 
sentiment  sur  la  possibilité  des  révolutions  qui 
enhardirent  insensiblement  les  Assassins  de  Syrie 
à  s'élire  un  Chef  indépendant  du  Prince  des  Ismaé- 
liens ou  Assassins  de  Perse. 

Les  mêmes  raisons  pour  lesquelles  ces  Assassins 
de  Perse  avoient  fixé  leur  habitation  dansleKouhes- 
tan,  sur  le  Gebal  de  l'Irak  persique,  déterminèrent 
sans  doute  ceux  de  Syrie  à  habiter  le  pays  mon- 
tueux  du  Liban  et  de  l'Anti-Liban.  On  a  nommé 
Gebal,  le  mont  Liban,  le  pays  montueux  de  ces 
Assassins,  en  le  confondant  avec  le  pays  montueux, 
le  Gebal,  des  Assassins  de  Perse.  Probablement,  le 
nom  oriental  du  Prince  de  ces  mêmes  Assassins, 
fut  aussi  celui  du  Chef  des  Assassins  de  Syrie: 
mais  l'ignorance  de  la  vraie  signification  de  Schéikh, 
fut  cause  que  ce  Seigneur  de  la  montagne,  en  latin 
Senior  mentis,  a  été  nommé  comme  le  Prince  des 


Assassi)is  de  Perse,  «  Senex,  Senex  de  Montanis, 
■■  Velus  de  Montanis,  »  en  françois,  le  Vieux  de 
la  Montagne.  «  Si  a  une  manière  de  Sarrasins  que 
"  on  apele  Hassesis.  Lor  Sire  a  non  li  Viex  de  la 
■'  Montagne.  »  (Lelt.  du  Patriarche  de  Jérusalem, 
Ms.  de  Berne,  n°  113,  fol.  175.) 

Li  Vious  de  laMontayncoï 
Dire  que  li  Rois  ert  croisiés: 
Deux  siens  Hakesins  apiela. 
Et  deux  coutiaus  si  leur  bailla. 
Et  coumanda  mer  à  passer 
Pour  le  roi  Loeys  tuer. 

Ph.  llouskes,  MS.  p.  "09. 

Quoique  les  attentats  de  ces  Assassins,  sur  le 
Marquis  de  Montferrat,  sur  les  Rois  Philippe- 
Auguste  et  S'  Louis,  ne  soient  peut-être  pas  aussi 
réels  qu'on  le  croit  sur  la  foi  des  Historiens  suspects 
à  M.  Lévêque  de  la  Ravalière  (Mémoires  de  Litté- 
rature, T.  XVI),  on  ne  peut  douter  que  les  Croisades 
n'aient  excité  la  fureur  de  leur  fanatisme,  toujours 
armé  pour  la  défense  d'une  Religion  plus  odieuse 
peut-être  aux  Musulmans  qu'aux  Chrétiens  mêmes. 
Ils  aiguisoient  sans  cesse  contre  les  uns  et  les  autres 
les  poignards  dont  parle  Ph.  Mouskes,  sans  doute 
d'après  Guillaume  de  Tyr,  qui  avoit  dit,  liv.  XXI, 
chap.  xxxi  de  son  Histoire:  «  Si  quos  habent  Princi- 
«  pes  odiosos,  data  uni  de  suis  sica,  etc.  »  Ce 
même  Historien  ajoute  que  les  Sarrazins,  comme 
les  Chrétiens,  les  nommoient  Assassins,  dénomina- 
tion aussi  usitée  en  Perse  qu'en  Syrie,  puisque 
M.  Polo,  parlant  d'Alaëddin,  le  vu'  prince  de  la 
Dynastie  des  Ismaéliens  de  Perse,  dit  liv.  II,  chap. 
xxvin  de  son  Histoire  en  latin  :  «  Princeps  pessimus 
«  Senex  de  Montanis....  quosdam  sicarios,  quos 
«  vulgo  Assassinos  vocant,  sibi  adjunxit;  et,  per 
"  illos,  quoscumque  voUint  occidunt.  » 

Le  nom  ù'Assassi)i,  en  Latin  barbare  Assassinas, 
de  même  signilicatiouque  siearius,  est  donc  Orien- 
tal d'origine.  C'étoit  probablement  l'expression 
d'un. sentiment  de  haine  et  d'horreur  pour  les 
attentats  d'un  Peuple  fanali(iue,  de  qui  le  primus 
et  sunnnus  Abbas  étoil  nommé  par  les  Sarrazins 
Magister  cultellorum,  comme  le  témoigne  le 
Cardinal  Jacques  de  Vitri,  liv.  IIP  de  son  Histoire 
Orientale  et  Occidentale,  édition  de  Martène.  On 
auroit  pu  désigner  de  même  le  Vieux  de  la  Mon- 
tagne ou  le  Sire  des  Hassesis,  comme  on  lit  dans  la 
continuation  de  Guillaume  de  Tyr,  (Ampl.  Collect. 
de  Martène,  T.  V,  col.  (539,)  puisque  sa  résidence 
ordinaire  étoit  sur  le  mont  Assilikin,  sur  la  monta- 
gne du  Couteau  ou  du  Poignard. 

Lorsqu'on  a  la  preuve  qu'en  langue  Orientale 
saliin  ou  sikkin  signifie  poignard  ou  couteau  ;  que 
le  latin  eulter  ou  siea  est  la  traduction  de  sikkin; 
que  les  Assassins,  Assesis,  Hassesis  ou  Hakesins, 
étoient  nommés  en  latin  Sicarii,  ou  Cullelliferi 
comme  dans  Mathieu  Paris,  et  leur  Souverain 
Magister  Cultellorum,  on  penche  à  croire  que  le 
nom  oriental  du  poignard  ou  couteau,  dont  leurs 
Princes  les  armoient  pour  l'exécution  de  leurs 
ordres  sanguinaires,  est  une  origine  assez  naturelle 
de  celui  à' Assassin  :  mais  c'est  un  penchant  dont 


AS 


232  — 


AS 


M.  Falconel  s'est  défié.  La  vraie  étymologie  lui 
paroit  èlre  celle  (m'indique  Thomas  llyde,  en 
disant:  »  /Issass;';»,  signidcal  Irucidatores,  occiso- 
«  res.  »  Du  verbe  Arabe  llassa,  Chassa,  Chasasa, 
entr'autres  significations  tuer,  vient,  dit-il,  le  par- 
ticipe actif  Chàsis,  au  pluriel  Hâsisin,  Châsisin, 
Occidentes,  tueurs,  Assassins.  (Voy.  Accides.)  Il 
attribue  à  l'ignorance  de  nos  Auleui  s  occidentaux, 
ou  à  la  faute  des  Copistes,  la  c;:use  de  tant  de  varia- 
tions dansforlbograpbe  du  nom  des  Assassins,  que 
l'on  a  crus  originaires  de  la  secte  juive  des  Esséens 
ou  Esséniens.  D'après  celle  opinion,  l'on  aura 
nomm'é  Esséniens  les  Assassins;  d'autant  mieux 
en  apparence  qu'entre  l'une  et  l'autre  secte,  il  y 
avoit  une  ressemblance  essentielle  de  dogmes  et 
même  d'observalions  légales.  En  eiïet,  la  "couleur 
blanclie  de  rbahillenient  des  Esséniens,  étoil  un 
point  d'observation  légale,  qui  semble  avoir  été 
commune  à  plusieurs  sectaires  compris  sous  la  dé- 
nomination d'Assassins,  et  que  l'on  appeloit  les 
Velus  de  blanc,  les  Habillés  de  blanc.  Au  resle,  ce 
nom  d' Esséniens,  comme  M.  Falconet  l'observe,  ne 
ressembloil  pas  moins  à  celui  d'Assassins,  que 
ceux  d'Arsacides,  Assanites  et  autres,  que  diffé- 
rens  Auteurs  leur  ont  donnés,  suivant  diverses 
idées  étymologiques  également  frivoles. 

Il  esttrès-probablequela  puissance  desissflssms 
de  Syrie,  déjà  fortement  ébranlée  par  la  destruc- 
tion des  Assassins  de  Perse,  s'afToiblissoit  de  jour 
en  jour  par  les  efforts  mêmes  qu'ils  faisoient  pour 
la  rendre  redoutable  à  leurs  ennemis.  Le  fana- 
tisme qui  les  animoit,  s'amortissant  insensible- 
ment en  proportion  de  leur  foiblesse,  on  eut  moins 
à  craindre  de  leurs  attentats.  Le  dernier  qui  soit 
îi  notre  connqissance,  est  l'assassinat  commis  en 
la  personne  d'Edouard  fils  de  Henri  III,  roi  d'An- 
gleterre, dans  la  ville  d'Acre.  «  Un  Ilassassis  navra 
«  sire  Odouart  en  la  cbnmbre.  «  (Contin.  de  G.  de 
Tyr,  Ampl.  Collect.  de  Martène,  T.  V,  col.  746.)  La 
blessure  de  ce  Prince,  assassiné  en  1271  ou  1272, 
ne  fut  pas  mortelle,  puisqu'il  succéda  à  son  père, 
et  régna  jusqu'en  1307.  On  ignore  s'ils  furent  cou- 
pables d'autres  attentats  religieux  et  politiques 
jusqu'en  1280,  époque  £>  laquelle  Abulféda  fixe  leur 
destruction  totale,  par  les  Lieutenans  de  Bibart,  iv^ 
Sultan  de  la  seconde  Dynastie  des  Mamiuks.  S'il 
existoit  encore  des  .Issass/HS  en  Syrie,  au  commence- 
meiil  du  xi\=  siècle,  ils  y  vivoient  sans  doute  errans 
et  vagabonds,  et  ne  formoient  plus  un  Peuple. 

On  sait  qu'un  des  principes  les  plus  actifs  du  fa- 
natisme de  ce  peuple  Assassin,  étoit  l'espoir  d'un 
Paradis  où  les  plaisirs  qui  flalleiit  le  plus  délicieu- 
sement nos  sens  en  celle  vie,  se  lenouvelleroient 
sans  cesse  avec  la  faculté  de  les  goûtei'  après  la 
mort,  et  de  toujours  les  désirer.  L'idée  de  ce  Para- 
dis, étoil  la  même  que  celle  du  paradis  de  Schédad, 
ancien  Roi  de  l'Arabie  heureuse.  «  Ce  Prince,  dit 


•c  M.  Falconel,  voulant  persuader  ses  sujets  de  la 
«•  divinité  (lu'il  s'altribuoit,  imagina  de  renfermer 
"  dans  un  jardin  tout  ce  qu'il  y  avoit  de  plus 
«  propre  à  flatter  les  sens,  et  y  introduisoit,  comme 
«  danslevrai  Paradis,  ceux  qu'il  en  jugeoitdignes.  » 
Un  profond  sommeil,  causé  par  certains  breuvages, 
préparoit  leur  illusion  et  la  favorisoit.  C'est  par 
une  illusion  semblable,  que  le  Prince  des  Assassins 
les  disposoit  à  braver  la  mort  et  même  à  la  désirer, 
comme  le  commencement  d'un  bonheur  dont 
l'avant-goût  les  avoit  séduits  et  enchantés  (1). 

VARIANTES  : 
ASSASSINS.  Pasquier,  Rech.  liv.  VIII,  p.  689. 
Arquassins.  Wém.  de  Littérature,  T.  XVII,  p.  165. 
As.s.^ssiNiENS.  La  .Martinière,  Dict.  Géogr. 
AssAsiNS.  Lauriére,  Gloss.  du  Dr.  fr. 
AssEsis.  Martène,  Amp.  Col.  T.  V  ;  c.  de  G.  de  Tyr,  c.  736. 
AuQUAssiNS.  Mém.  de  Littérature,  T.  XVII,  p.  1(35. 
Hakesins.  Ph.  Mouskes,  p.  709. 

Has^sis.  Mart.  Amp.  Col.  T.  V  ;  c.  de  G.  de  Tyr,  c.  746. 
Hassesis.  Id.  ibid.  col.  639. 
Hauss.^cis.  Annal,  du  Règne  de  S'  Louis,  p.  206. 
Haussasis.  Du  Cange,  Gl.  lat.  T.  I,  col.  768,  au  m.  assashn. 
Heissesins.  Id.  ibid. 

Assavanter,  verbe.  Mettre  en  état  de  savoir. 
Rendre  savant. 

Du  latin  sapiens,  participe  du  verbe  sapere, 
saver  en  ancien  françois  ;  par  le  changement  si 
ordinaire  de  p  en  v,  l'on  a  fait  savant;  d'où  le  verbe 
assavanter,  mettre  en  état  de  savoir  et  de  con- 
noitre,  dans  un  sens  qui  n'a  rien  de  relatif  aux 
connoissances  et  aux  goûts  qui  caractérisent  un 
Savant.  «  Lesquelz  com'paignons,  pour  assavanter 
«  les  autres  ou  ilz  estoient,  semblablement  siffie- 
«  rent.  »  (D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du 
Cange,  T.  III,  col.  726;  tit.  de  1481.)  «  Quand  au- 
«  cun  acquiert  aucun  héritage,  ou  droit  censé  et 

«  réputé  pour  héritage,  par  contract  de  vente, 

«  le  lignager....  peut....  les  attraire  à  luy  par 
«  retraict,....  en  offrant  payer  le  sort  principal  et 
«  loyaux  coustemens,  luy  asçavanté  des  loyaux 
«  coustemens.  »  (Coul.  de  la  Rochelle,  au  Coût, 
.gén.  T.  II,  p.  640.)  «  Les  débats  qui  sourdent  entre 
«  le  mary  et  la  femme  ont  esté  de  telle  conséquence 

«  entre   les    Athéniens, qu'ils    avoient   des 

«  Magistrats  n'ayans  autre  charge  que  d'appointer 
«  le  mary  et  la  femme,  avant  que  le  Peuple  fût 
«  asçavanté  de  leur  dissention.  »  (Bouchet,  Serées, 
liv.  1,  p.  98.) 

Lorsqu'on  a  la  preuve  qu'un  nombre  de  mots  tels 
que  Sergent,  en  latin  Serviens,  le  g  est  sulistitué  à 
v,  et  qu'en  nombre  d'autres  il  est  changé  en  e,  pro- 
noncé /.:  ou  ch,  l'on  esl  tenté  de  croire  que  sachant, 
anciennement  écrit  sacant,  est  une  altération  de 
savant,  en  latin  sapiens  (2).  Aussi  la  signification  du 
verbe  assavanter,  formé  de  savant,  est-elle  relative 
à  celle  du  participe  sachant,  dans  les  citations  pré- 
cédentes. Selon  Cotgrave  et  Oudin,  il  signifioit 
également  rendre  savant,  mettre  en  état  de  savoir- 


(1)  Voir  sur  les  Assassins  un  mémoire  de  Silvestre  de  Sacy,  Mém.  de  l'Ac.  des  Insc,  t.  IV,  p.  1.  -  (2)  Sachcuu  ou  saçatit 
vient  directement  de  sapientem  ;  pi  devient  pj,  puis  p  tombe  et  j  se  transforme  en  ch.  D'ailleurs,  par  la  confusion  des  sons 
en  et  an,  cntem  latin  devient  ant  français.  Savant  est  d'une  autre  formation  :  Vi  bref  esl  tombé,  et  p  pris  entre  deux  voyelles 
est  tombé  à  v.  (n.  e.) 


AS 


—  233  — 


AS 


d'acquérir  des  connoissances,  avec  le  goût  des  Anti- 
quités, des  Sciences  et  des  Arts.  (Voy.  Savant.) 

VARrANTES  : 
ASSÂVANTER.  Cotgravo  et  Nicot,  Dict. 
AsçAVANTER.  Cotgrave,  Oudin  et  Monet,  Dict. 
AssANNETER  (assavanter.)  Mart.  Thés.  A.  T.  III,  col.  1514. 
AssçAVANTER.  Favin,  Théàt.  d'honneur,  T.  I,  p.  532. 

Assaiicier,  verbe.  Surhausser.  Saucer. 

Au  premier  sens,  le  verbe  assaucier  n'est  proba- 
blement qu'une  variation  des  orthographes  essau- 
cier,  essaucer,  exaucer  ;  proprement  exhausser, 
au  figuré  exalter.  On  soupçonne  donc  qu'en  une 
signification  analogue  à  celle  de  surhausser,  l'on 
aura  dit  figurément.  en  parlant  à  Louis  d'Outremer 
qui  meltoit  à  haut  prix  la  réparation  des  torts 
d'Arnoul  I,  comte  de  Flandre,  qu'il  ne  devoit  point 
les  assaucier. 

Aprez  li  Roiz  parlèrent  Barons  et  Chevalier, 
Qui  du  Conte  de  Flandres  ourent  moût  grant  loier. 
Ne  devez  pas,  font-il,  ceste  chose  ansaiicicr  : 
Ernouf  est  vostre  hom  lige,  si  vous  peut  bien  aidier. 
Rom.  de  Rou,  MS.  p.  77. 

Dans  le  second  sens,  assaucier,  formé  du  subs- 
tantif sauce,  est  l'explication  du  latin  saporare  (\), 
parce  qu'en  sauçant  les  viandes  ou  en  les  assaison- 
nant d'une  sauce,  on  leur  donne  plus  de  saveur. 
(Voyez  Labbe,  Dict.  fr.  p.  524.) 

Assaver,  verbe  et  adverbe.  Savoir.  Sagement. 
(Voy.  Saver  ou  Savoir.) 

En  réunissant  au  verbe  simple  saver  ou  savoir 
la  préposition  à,  usitée  par  exemple  dans  l'expres- 
sion est-à-saver  ou  c'est-à-savoir,  l'on  a  écrit  c'est 
assavoir,  etc.  «  Enseigne  moy  le  cheval....  Se  tu 
«  n'es  digne,...  jà  ne  te  lairray  approcher.  Ce 
«  est  assavoir ,  dist  Olofer  :  mais  monstre  le 
«  moy.  i>  (Percef.  Vol.  VI,  fol.  113.)  «  Encores  est 
«  assaver  que  nous  volom  le  creissement  et  amen- 
«  dément  de  la  ville  de  Coigniat.  »  (Ord.  T.  II, 
p.  343  ;  lit.  de  1262.) 

Dès  lors,  la  signification  du  verbe  composé  assa- 
ver ou  assavoir,  fut  souvent  la  même  que  celle  de 
saver  ou  savoir,  comme  lorsqu'en  faisant  ellipse  de 
la  préposition  à  dans  cette  autre  expression  faire 
à-savoir,  on  a  dit  faire  savoir.  «  Nous  faisons  assa- 
«  voir,  tant  à  cheus  qui  sont  à  présent,  comme  h 
«  cheus  qui  sont  à  venir,  que  pour  le  regart  de 
"  l'amour  divine,  etc.  »  (Ord.  T.  I,  p.  102,'^col.  2; 
lit.  de  V2m.) 

.  .  .  Pour  le  cas  mieulx  vous  faire  assavoir, 
On  ne  s'en  sceut  jamais  appercevoir. 

Faifeu,  p.  40. 

On  ahrégeoit  et  l'on  abrège  encore  aujourd'hui 
l'expression  c'est-à-savoir,  en  disant  ù-savoir,  et 
même  tout  simplement  savoir,  dans  le  sens  liltéral 
du  verbe  composé  assavoir.  Anciennement,  dans 
l'usage  elliptique  d'assavoir  et  de  savoir,  on  ajou- 
toit  à  ces  verbes  la  particule  mon  ou  moun,  dans 
laquelle  les  Hellénistes  du  xvr  siècle  ont  vu  le  .«tôi/ 
interrogaiif  des  Grecs,  tandis  qu'aux  yeux  d'autres 


Etymologistes,  c'étoit  l'inversion  du  7ium  interro- 
gatif  des  Latins.  (Henri  Estienne,  Conform.  du  Fr. 
avec  le  Grec.  —  Celt-hell  de  L.  Trippault.  —  Nicot, 
Dict.  —  Ménage,  Dict.  Etym.  —  Gloss.  de  l'Hist.  de 
Paris,  etc.) 

La  seconde  élymologie  paroîtra  sans  doute  plus 
vraisemblable  que  la  première,  lorsqu'on  aura  la 
preuve  qu'au  xn'  siècle  on  traduisoit  numquid,  par 
savoir-noun-si,  savoir-moun-si,  savoir-mon-si,  de 
même  signification  que  à-savoir-mon-si,  assavoir 
mon-si,  dans  les  siècles  postérieurs.  «  Responant 
«  Judas  qui  le  avoit  trahi,  il  dist  :  savoir  noun  si  jeo 
«  le  sui,  Maislre?  »  (Evangil.  S'  Matthieu,  ms.  du 
Gard,  de  Soubise,  chap.  xxvi,  v.  25.)  «  Saver  momi  si 
«  par  ascun  à  ceux  lesqueux  jeo  maundei  à  vous, 
«  vous  ai-jeo  deceu  ?  »  (Epit.  H,  S'.  Paul,  aux  Corin- 
thiens, MS.  du  Card.  de  Soubise,  chap.  xn,  v.  17.) 
"  Cil  grauntement  troblé  comencerent  chascun  à 
«  dire:  saver  mon  se  jeo  sui.  Seigneur?  »  (Evangil. 
S'.  Matthieu,  ms.  du  Gard,  de  Soubise,  chap.  xxvi, 
V.  22. —Voy.  Ord.  T.  I,  p.  149,  etc.— Gloss.  de  Ma- 
rot.  —  Oudin,  Dict.)  «<  Se  li  Sire  offre  à  faire  droit,  à 
«  savoir  mo7i  se  recréanche  li  appartient,  li  bons 
«  ne  se  couchera  pas  en  cel  jugement,  se  il  ne  li 
«  plest,  "  (Beaumanoir,  Goût,  de  Beauvoisis,  ms  de 
N.  D.  chap.  Liv.) 

Assavoir  mon  sy  ces  fillettes. 
Que  en  paroUes  toute  jour  tien, 
Ne  furent  pas  femmes  honnestes  ? 

Villon,  poës.  p.  34. 
Ung  mary  en  vacation 


S'en  alla  en  commission 
Veoir  sa  belle  Ante.  se  dit-on. 
Il  demourra  bien  es  villaiges 
Cinq  ou  si.x  moys  :  assavoir  mon 
S'il  est  tenu  des  arreraiges, 
Quant  il  revient  ?  Dient  aucuns  saiges,  etc. 
Coquillart,  p.  9. 

Henri-Estienne  reprochoit  aux  Théologiens  de 
son  siècle,  la  témérité  ridicule  et  souvent  crimi- 
minelle  avec  laquelle  ils  hasardoient  telles  ques- 
tions :  '<  A-sçavoir-moH  si  Dieu  pourroit  pécher,  s'il 
<>  vouloit;  à-savoir-?Hon  si  Dieu  pouvoit  prendre 
«  nature  humaine  en  sexe  féminin  ;  à-savoir-?))on 
«  si  après  la  résurrection  il  sera  licite  de  manger  et 
«  boire?  »  (Apol.  pour  Hérodote,  p.  508.  —  Voy. 
Cotgrave,  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict.) 

Si  nos  Hellénistes  eussent  connu  l'ancienneté  de 
cette  particule  juon  dans  notre  Langue,  probable- 
ment ils  auroient  hésité  à  la  croire  d'origine 
grecque.  En  voyant  qu'au  xir  siècle  la  traduction 
françoisedu  Isiiinnumgiiidétoit  savoir-noun-si,  ou 
savoir-moun-si,  de  même  signification  que  à-savoir- 
mon-si  ou  assavoir-mon-si,  dans  le  xvi'  siècle,  peut- 
être  auroient-ils  adopté  l'étymologie  latine.  (Voy. 

NOLN.) 

En  efïet,  on  ne  peut  guère  douter  que  cette  par- 
ticule noun  ne  soit  le  num  interrogaiif  des  Latins, 
altéré,  selon  l'opinion  de  quelques  Etymologistes, 
dans  inotin  et  mon,  par  une  inversion  qui  n'est  pas 


(1)  Saucer  est  dérivé  de  sauce,  qui  vient  du  latin  sa /.sa.  Du  Gange  cite  un  poème  manuscrit  du  moyen-âge,  où  on  lit 
ces  vers  :  «  Salvia,  serpillum,  piper,  allia,  sal,  petrosillum,  Uis  bona  fit  salsa,  vel  fit  sententia  falsa.  »  (n.  e.) 

11.  30 


AS 


-  234  — 


AS 


sans  exemple.  Mais,  en  admettant  que  ce  mon  ou 
moun  est  de  même  origine  nue  noun  1  on  observera 
que  dans  la  traduction  fran.-oise  de  mnwiuid,  la 
particule  noun,  moun  on  mon,  représente  1  l'iterro- 
gation  latine  ?i«m,  sans  en  avon- 1  énergie.  Elle  y 
est  tautolo^ique,  puisque  «  savoir  moun  si  ou  savon- 
«  noun  si  '»  ne  signifie  rien  de  plus  que  savmrbi. 
Pour  que  mon  on  moun  y  signiiiàt  quelque  chose, 
il  faudroit  qu'il  ne  fût  pas  une  altération  de  nomi 
en  latin  num  ;  mais  une  variation  d  orthographe  de 
l'adverhe  mont  ou  monlt,  le  même  que  moult,  en 
latin  multùm. 

Vpocrisie  moult  se  cuevre  ; 
Moult  en  pou  d'ore  se  descuevre... 
Les  Ordres  forment  en  déclinent... 
Je  nou  di  pas  tôt  por  Grant-mont; 

^"^";!S^(^!;:î';^mi«:aeN.D.fo,.mn-co,.,. 

Quatre  mois  fui-je  à  Clervaux.... 
N'est  pas  tôt  orz  quanque  voi  luire  ; 
Ne  luire  ne  pueent  il  )nont  : 
Car  n'a  nule  ordre  en  tôt  le  mont, 
Où  ait  mainz  de  fraternité. 

Ibiil.  fol.  08.  r.' col.  1. 

Fust  esleu  Connestable 
À.rtus,  Conte  de  Ricliemont  ; 
Vaillant  Seigneur,  douLx,  amiable, 
Oui  a  fait  à  son  temps  biens  mont.         ,   ,  „   ,, 
^  Vigil.  de  Charles  VII,  part.  1,  p.  55. 

Or  demandez  se  deduict  y  a  monll, 
Quant  le  faulcon  part  pour  tirer  amont 
Après  héron  faisant  une  montée. 

Poës.  de  Crcliii,  p.  81.  -  Id.  ibid.  p.  27  cl  57. 

On  remarquera  que  dans  ces  phrases  proverbia- 
les «  faire  mons  et  merveilles,  promettre  monts  et 
,.  merveilles  »  la  vraie  signitication  de  nions  ou 
monts  et  merveilles,  est  celle  du  latin  milita  ei 
mirabilia.  (Voy.  Vigil.  de  Charles  VII,  Pfft- '!' ?•  8^' 
etc  -  Cotgrave,  Dicl.  -  Oudm,  Cur.  Fr.)  G  est  par 
ienorance  de  l'élymologie  de  ce  pluriel  7nonts  ou 
mons  dans  lequel  on  a  cru  voirie  latin  montes,  que 
se  fleurant  l'idée  relative  de  vallée  et  de  montagne 
comme  idée  d'un  Tout,  on  a  dit  "  promettre  monts 
«  et  vaux,  faire  mons  et  vaulx,  «  pour  faire  ou  pro- 
mettre tout  ;  ce  qui  presque  toujours  signitie  pro- 
mettre ou  faire  l'impossible,  et  par  conséquent  du 
merveilleux.  (Vigil.  de  Charles  Vil,  part,  ii,  p.  41.  - 
La  Planche,  Hisl.  de  la  France  sous  François  II, 
p  704  _  Th.  Corneille,  l'Amour  à  la  Mode,  act.  v. 
se.  2.  —  Cotgrave,  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict.  — 
Voy.  Mont.)  .,  , 

Après  avoir  prouvé  qu'au  xir  comme  au  xvi"  siècle, 
par  le  changement  de  /  en  n  de  même  organe,  on 
prononçoit  et  l'on  écrivoit  mont  pour  molt ,  varia- 
tion des  orthographes  mult,  moult,  en  latin  /«((/- 
iùm,  on  seroit  'tenté  de  croire  à  la  possibilité  que 
7non  ou  moun,  qui  ne  signifie  rien,  comme  altéra- 
tion de  la  particule  inleirogalive  noun,  en  latin 
num,  fût  le  même  que  tinnil,  moult,  moult,  dans  la 
phrase  savoir-mon-sl.  En  elfet,  on  a  dit  sç-avoir- 
mont-si,  comme  sçavoir-mon-si.  «  Sçavoir  mon  se 


.  je  le  dois  avoir  ou  non.»  (Ord.  T.I,  p.  249.)  «  Assez 
«  pensa....  Morgain  à  celle  chose;  sçavoir  mont 
.  selle  la  diroit  à  son  frère  le  Hoy.  »  (Lanc.  du  Lac, 
T.  III,  fol.  125.) 

En  supposant  donc,  ce  qui  paroît  assez  vraisem- 
blable, que  mon,  inutile  dans  l'expression  savoir- 
moH-si,    comme  particule  interrogative,  soit  une 
altération  de  ?/iOH^  en  latin  multùm,  on  pourroit 
dire  qu'en  cette  même  expression,  7non  est  adverbe 
de  quantité,  et  de  même  signification  que  bien  dans 
cette  nouvelle  phrase  si  analogue  à  rancienne  :  je 
voudrois  bien  savoir  si,  etc.  Or,  cet  adverhe  bien  a 
signifié  et  signifie  encore  la  même  chose  que  beau- 
coup substitué  à  molt  ou  moult;  sans  qu'on  voye, 
dit  la  Bruyère,  par  où  beaucoup  l'emporte  sur  Un. 
C'est  donc  avec  assez  de  vraisemblance  qu'en  plu- 
sieurs fayons  de  parler  affirmatives,  telles  que  ce- 
suis-îHO?i,  c'estes-??iOM,  c'est-H/o?(,  et  autres;  Robert 
Estienne  a  pensé  que  ce  mon  étoit  une  altération  de 
7noult  dans  la  signification  de  l'adverbe  bien  ou 
beaucoup.  (Voy.    Id.  Gram.   Fr.)  «  Toute  femme 
.<  varie...  C'est  mon  viayemenl  :  ne  vous  en  pensez 
»  pas  mocquer.  »  (Brantôme  ,  D"  Gai.  T.  II,  p.  233.) 
a  II  se  repentira  par  après  de  s'y  estre  amuse.  C'est 
«  mon  :  mais  il  s'y  sera  toujours  amusé.  «  (Essais 
de   Montaigne,  liv.  111,  p.   3fâ.)  «  Ce  seroit  trop 
«  grant  dommage.  Certes,  Sires,  ce  seroit  mon.  » 
(Lanc  du  Lac,  T.  I,  fol.  5.)  «  Certes  ouy,  dist-elle, 
«  se  aymée  suis....  Par  ma  foy.  Dame,  distOurseau, 
«  c'estes  mon  :  car  autre  femme  n'ayme  au  monde 
..  que  vous.  »  (Percef.  Vol.  IV,  fol.   138.)  «  Geluy 
»  Rov...  luy  dit;  tu  es  venu  de  l'ost  des  Tartarins. 
«  Sire,  fist-il,  ce  suis  mon.  »  (Joinville,  Hist.  de 
S'.  Louis,  p.  92.) 

Ouand  il  est  prouvé  que,  non-seulement  on  a 
prononcé  et  écrit  mo7it  pour  nioll  ou  moult,  miais 
que  dans  ces  façons  de  parler  affirmatives,  mon 
semble  être  le  même  que  mont,  d'autant  plus  qu  il 
y  est  de  même  signification  que  bien,  beaucoup, 
moult,  en  latin  multùm  ;  on  trouve  peu  raisonnable 
la  distinction  de  Mcot  entre  c'est  /HO/(iet  c  eslmon. 
Après  avoir  reconnu  dans  mont  l'adverbe  latin 
multùm,  il  le  méconnoît  dans  inon,  qu'en  ce  cas  il 
croit  être  le  ^t./  des  Grecs.  (Voy.  Nicot,  Dict.  aux 
mots  »(0»/et  .lssa!'0(?'-?îiO/t  (1).) 

11  est  possible  que  nos  Auteurs  des  xv=  cl  xvi' 
siècles,  flattes  d'une  idée  d'érudition,  aient  cru 
parler  grec,  en  disant  :  «  Asçavoir  mon  des  deux, 
«  si  c'est  vostre  faulte  ou  la  nostre.  '>  (Rob.  Estienne 
et  Nicot,  Dict.) 

C'est  luy,  c'est  )non,  c'est  luy  qui  d'art  subtil 
Fort  bien  s'aydoit  de  la  plume  et  oustil 
Des  Orateurs. 

Crétin,  p.  53. 

Cependant,  ils  parloient  notre  ancienne  Langue, 
comme  la  parlent  encore  les  Paysans  du  Rerry,  de 
la  Bourgogne  et  de  la  Champagne,  lorsqu  ils  disent: 
c'est  mon",  assavoir  mon;  expressions  anciennes  et 


■mtindum;  de  purcnwiU  à  cerlainemeiit  la  transition  est  facile.  (N.  E.) 


AS 


—  235  — 


AS 


devenues  populaires,  dans  lesquelles  on  affectoil 
de  voir  l'interrogatif /^wy  etl'affirmatif  ^Èrdes  Grecs. 
Peut-être  voudr'a-t-on  encore  que  mon,  dans  les 
phrases  inlerrogatives ,  soit  Tinversion  du  latin 
num  ?  Il  semble  néanmoins  que  d'après  notre 
observation  sur  la  possibilité  que  ce  mon  signifie 
quelque  chose  dans  assavoir-moji-si,  non  comme 
particule  interrogative,  mais  comme  adverbe  de 
quantité,  l'on  pourroit  soupçonner  avec  nous  que, 
soit  qu'on  interroge  en  disant  asmvoir-mon-si,  soit 
qu'on  affirme  en  disant  c'est  mon,  il  est  de  même 
origine  et  de  même  signification  que  mont  ;  varia- 
tion des  orthographes  molt,  moult,  mult,  en  latin 
multùm,  qu'aujourd'hui  l'on  rend  en  françois  par 
l'adverbe  bien  ou  beaucoup. 

Au  moins  ne  doutera-t-on  pas  que  ce  ne  fiit 
réellement  la  signification  de?HO»,  lorsqu'on  disoit: 
C'est  moH,  pour  c'est  bien  ainsi,  dans  les  Poës.  de 
Crétin,  p.  G8  ;  Agardez-  mon,  pour  regardez  bien, 
dans  les  Contes  de  Desperiers,  T.  I,  p.  274  ;  Ce  fais 
mon,  pour  je  le  fais  beaucoup,  je  le  fais  bien  ; 
Ce  cuide  mon,  pour  je  le  crois  bien  ;  Sçaij  mon, 
altéré  peut-être  dans  semon,  pour  je  le  sais  bien,  etc. 
«  Messieurs  les  Médecins,  vous  en  sçavez  et  faites 
«  de  bonnes  ;  et  mesmes  vous  Monsieur  qui  en 
«  venez  parler  comme  maislre.  Il  respondit,  en 
«  baissant  la  teste:  semon,  seinon,  ouy,  ouy,  nous 
«  en  sçavonsel  en  faisons  de  bonnes.  >•  (Brantôme, 
D"  Gai.  T.  II,  p.  54  et  55.)  «  Mamie,  moult  avez  eu 
«  de  poureté  depuis  que  ne  vous  vis.  Ilelas  !  dist  la 
«  Dame,  sçay-^non.  »  (Rom.  de  Galien  restauré, 
chap.  Lxxv.) 

Ne  porroit  nus,  ce  cuit  mon,  mieux  eslire. 

Ane.  Poêt.  Fr.  JISS.  avant  1300,  T.  I,  p.  490. 
Yvon  et  Yvore  et  Salemon 
Doi  jou  plorer.  Voire,  ce  fas  moyi  ; 
Ouar  il  furent  buen  Cevalier. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  212. 

Dit  avez 

Que  mon  voloir  n'i  esgardez. 
Bien  voi  que  ce  ne  ne  faites  mon. 

Parlon.  de  Bloi,,  MS.  de  S.  Gcrm.  fol.  162,  R'  roi.  2. 

Quoiqu'au  premier  coup-d'œil  l'altération  de 
scay-mon,  dans  semon,  paroisse  assez  vraisembla- 
ble, il  seroit  possible  que  l'expression  scay-mon  ou 
saij-mon,  comme  on  lit  (Rom.  de  Mabriant,  chap. 
xxviii,  cité  par  Ménage,  Dict.  étym.  T.  II,  p.  217,  col.  2), 
fût  elle-même  nne  Méruûoii  de  se-ay-mon  ;  c'est- 
à-dire,  si  en  ai-je  bien,  si  en  ai-je  beaucoup.  «  Ou 
«  t'en  va,  Ribaux,  tuenas....Sefly  )?iO)ivoirement  : 
«  et  adoncques se  partirent  «(D.  Carpentier,  Suppl. 
Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  T.  III,  col.  756.)  La  signifi- 
cation de  scay-mon^ dans,  la  citation  du  Roman  de 
Galien  restauré,  m&/'  s!//jra,  est  évidemment  la  même 
que  celle  de  se-ay-mon. 

On  pense  donc  qu'avec  ellipse  du  verbe  dans  ces 
phrases,  se-ay-mon,  ce-fais-mon ,  ce-cuide-mon , 
c'est-mon  et  autres,  on  aura  dit  ce-mon,  semon.  Du 
moins  semble-t-il  probable  que  c'est  par  ellipse  du 
participe  dit  ou  fait,  qu'en  affirmant  ironiquement 
une  chose,  l'on  aura  dit  ce-a-mon,  c'amon.  Dans  la 


Comédie  du  Bourgeois  Gentilhomme,  Mad'  Jourdain 
blâme  la  manie  ridicule  de  son  mari,  en  lui  disant: 
«  C'amon  (1)  vrayement  ;  il  y  a  fort  à  gagner  à  fré- 
«  quenter  vos  Nobles.  »  (Acte  III,  scène  n.) 

....  Bien  souvent  en  fesois  mocquerie. 
Si  l'on  disoit,  en  oyant  un  sermon, 
Il  a  bien  dit  ;  je  respondois  ;  ce  a  mon. 

Les  Marg.  de  la  Marg.  fol.  20,  R". 

La  signification  de  c'amon  n'étoit  pus  toujours 
ironique.  Dans  le  Malade  imaginaire ,  Toinette, 
servante  d'Argant  qui  lui  a  dit  de  se  taire,  répond 
en  feignant  de  s'être  blessée  :  «  C'amon  ;  ma  foy, 
'■  j'en  suis  d'avis,  après  ce  que  je  me  suis  fait.  » 
(Acl.  I",  scène  u.)  On  croit  que  c'amon  en  ce  pas- 
sage n'est  pas  plus  ironique  qu'en  nombre  d'autres 
c'êst-mon;  quoiqu'on  ait  dit  quelquefois  avec 
ironie:  Voire,  c'est-mon.  (Voy.  Monet,  Dict.) 

Peut-être  nous  approuvera-t-on  d'avoir  placé 
sous  assavoir,  nos  observations  sur  l'unité  possible 
d'origine  et  de  signification  de  la  particule  mon, 
dans  ce-a-mon,  c'amon,  semon,  say-mon,  ce  cuide 
mon,  ce  fais  mon,  c'est-mon;  savoir-mon,  assavoir- 
mon,  eu  voyant  que  dans  l'expression  interrogative 
assnvoir-môn  ou  savoir-mon,  si  familière  à  nos 
Ancêtres,  c'étoit  une  espècede  particule  enclytique. 
Si  l'on  veut  qu'en  cette  dernière  phrase  mon  soit 
l'inversion  du  latin  num,  au  moins  reconnoîtra-t-on 
que  dans  c'est-mon  et  autres  expressions,  il  est 
comme  mont  une  variation  de  molt,  moult,  mult, 
en  latin  multùm  ;  adverbe  de  quantité,  auquel  nous 
aurions  renvoyé  pour  mon,  si  l'on  eût  dit  savoir 
moult,  comme  savoir-mont,  savoir-mon.  (Voy. 
MoiLT  ou  MuLT.) 

On  finira  cet  article  en  disant  que  assavoir, 
comme  adverbe,  a  signifié  sagement,  parce  que  le 
verbe  simple  savoir,  goûter  les  choses,  les  sentir 
tant  au  physique  qu'au  moral,  les  connoitre,  pris 
substantivement,  a  signifié  sagesse,  le  goût,  le 
sentiment  moral,  la  connoissance  des  choses  utiles 
et  agréables. 

Firent  bien  assavoir, 

Et  grant  pris  durent  cil  avoir 
Qui  escristrent  premièrement. 

Rom.  deRou,  MS.  p.  1. 

VARIANTES  : 
ASSAVER.  Ménage,  Hist.  de  Sablé,  p.  220. 
AsçAVOiR.  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict. 
Assavoir.  D.  Morice,  Hist.  de  Bretagne,  T.  I,  col.  958. 

Assavourement,  subst.  masc.  Goût.  La  faculté 
de  goûter,  de  sentir,  de  discerner  les  saveurs  : 
«  C'est  il  ki  as  oyls  donoit  la  veue,  as  oroilles  l'oye, 
«  à  la  langue  la  voix,  à  palais  rassrti)Oî<j'éîmf?ii,  etc.  » 
(S'  Bernard,  Ser.  Fr.  siss.  p.  44.  —  Voy.  Assavourer.) 

Assavourer,  verbe.  Goûter,  essayer,  sentir; 
ressentir,  éprouver,  connoitre.  Sentir,  éprouver  de 
la  douceur;  être  doucement  atTeclé.  Savourer, 
goûter  avec  plaisir,  aimer,  affectionner.  Ragoùter, 
affecter  agréablement  le  goût.  Rendre  savoureux  et 
ragoûtant;  affecter  d'une  sensation,  d'un  sentiment 
agréable. 


(1)  Il  vaut  mieux  écrire  :  Ça  mon.  (n.  e.) 


AS 


—  236 


AS 


Du  latiai  sapw,  en  françoissayoc,  savour,  saveur, 
s'est  formé  le  verbe  simple  savourer  ;  d'où  le  com- 
posé assavourer,  goûter  une  chose,  en  goûter,  en 
essayer  :  par  extension  de  l'acception  goûter,  sentir 
en  goûtant ,  sentir  d'une  fagon  quelconque  ,  physi- 
que ou  morale;  ressentir,  éprouver,  connoitre. 
(Voy.  AssAiER.) 

Dans  le  sens  propre  on  disoit:  «  Cume  vint  al 
«  mangier,  e  il  ourent  le  pulment  asavured,  etc.  « 
(Livres'des  Hois,  ms.  des  Cordel.  fol.  127.)  «  Appro- 
«  cheons  à  la  taule,  chier  frère  ;  et  d'un  chascun  de 
«  ces  maz  assaverons  al  moens,  cum  petit  que 
«  soit.  «  (S'  Bernard,  Serm.  Fr.  mss.  p.  350.) 
«  Certes  nuls  ne  reupet  de  celé  chose  dont  il  gosteit 
«  nen  at,  ne  de  celé  ciiose  mismes  cuy  il  nen  al 
«  mais  k'assavoerie  (1);  en  latin:  sanè  nemo  ([uod 
o  non  gustavit,  sed  neque  quod  tantùm  gustavit, 
«  éructât.  »  (Id.  ibid.  p.  23;  Serm.  lat.  col.  730.) 

Au  propre  et  au  figuré,  dans  les  expressions 
assavourer  la  saveur  de  chasteté,  la  douceur  de 
pureté,  la  douceur  d'un  spectacle,  assavourer  le 
fruit  du  salut,  etc.  «  0  !  cum  est  bien-aurez  cil 
«  cuers  ki  est  traiz  par  lo  fruit  de  salveteit,  k'il 
«  assavoreit  at.  i>  (S'  Bernard,  Serm.  Fr.  mss.  p.  51.) 
«  Isseiz  fors,  Filles  de  Syon,  et  si  eswardeiz  le  Roi 
«  Salemon  en  la  corone  dont  sa  mère  l'at  coroneit. 
»  En-josk'ù-or  aveiz  vos  esteit  senz  ces  délices: 
«  ceste  douzor  nen  rtssftiioî(?'ns^es  vos  onkes  mais.  » 
(Id.  ibid.  p.  200.)  «  Nos  semont....  ke  nos....  assavo- 
»  riens....  la  douceor  de  la  parfaite  purleit.  «  (Id. 
ibid.  p.  312.)  '■  Qui  est  nuls  de  vos....  ki  nen  ait 
«  assavoreit  la  savor  de  chasteit  ?  »  (Id.  ibid.  p.  233. 
—  Voy.  Savour.) 

Il  semble  que  dans  un  sens  analogue  à  celui 
cVassavourer  la  douceur,  la  saveur  d'une  chose,  on 
ait  dit: 

Douz  en  bouche 

Est  amours,  et  si  savorcz 
Que,  quant  plus  est  assavorez, 
Tant  est-il  de  meillor  savor. 
Amour,  quant  je  bien  Vasavoi;  etc. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'  7fil5,  fol.  192,  V  col.  i. 

Dans  la  signification  de  ressentir,  éprouver, 
sentir,  connoitre,  on  disoit  ligurément  :  «  Ceux  qui 
«  vous  ont  conseillé  le  département  du  Concile, 
"  n'entendoient  mie  les  griefs  maulx  qui  en  pour- 
«  roieut  naistre.  Pleust  à  Dieu  qiïWs assavourassent 
«  et  entendissent  la  fin  comme,  etc.  »  (Monstrelet, 
Vol.  II,  fol.  74,  R°.) 

Là  se  rendent  Chevalier 
Qui  ont  le  siècle  asavoré, 
Et  ont  tout  veu  et  tout  tasté. 
Bible  Guiol,  citée  par  D.  Carpenlier,  S.  Gl.  1.  do  Du  C.  au  mot  Adsaporare. 
Desconfiz  se  metent  à  voie  ; 
Angoisse  et  paour  asaveurent. 
Li  meilleur  Mestre  ocis  demeurent. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  21i,  V'. 
Leur  grant  meschief  asavouranf, 
S'en  vont  après  François  courant  ; 
N'esgardent  fosse  ni  bruière. 

Id.  fol.  120,  R°. 

Ces  deux  dernières  citations  prouvent  combien 


étoil    étendue    l'acception    d'assavourer,    sentir. 
(Voy.  Savourer. ) 

En  désignant  par  assavourer,  une  sensation ,  un 
sentiment  désagréable,  on  abusoit  sans  doute  d'un 
verbe  qui,  comme  expression  ordinaire  de  senti- 
mens  et  de  sensations  agréables,  signilioit  sentir, 
éprouver  de  la  douceur  ;  être  doucement  affecté  du 
sentiment  intérieur  de  la  paix  de  l'ùme,  en  ces  vers  : 

Li  cuers  qui  mal  aime,  maus  oure  : 
Sovent  souspire,  gient  et  plore. 
Com  plus  en  orison  demore , 
Plus  sent,  et  çouste,  et  assai'ore. 

Fab).  MS.  du  R.  n-  "-218,  fol.  125,  V-  col.  1. 

Il  est  naturel  qu'étant  affecté  d'une  sensation 
douce  en  goûtant  une  chose,  l'on  en  réitère  l'essai, 
la  dégustation,  l'épreuve,  pour  en  connoitre  mieux 
la  saveur.  Si,  d'après  cette  épreuve  réitérée,  l'on  y 
reconnoit  la  même  saveur,  si  le  goût  en  est  aussi 
doucement  affecté,  on  la  goûte  avec  plaisir,  on 
l'aime.  C'est  encore  la  signification  du  verbe  simple 
savourer  ;  et  c'étoit  celle\lu  composé  assavourer. 

Nul  ne  sçait  qu'est  bon  vin  ,  qui  bien  ne  l'assaveure. 
i.  de  Meung,  Cod.  vers  2001. 

Dans  le  sens  d'aimer,  affectionner,  on  disoit  en 
général:  «  Celés  choses  que  desor  sunt,  «ssai'Oii- 
«  re^:,;  ne  mie  celés  ki  suai  sor  terre.  »  (S"  Bernard, 
Serm.  Fr.  mss.  p.  01.)  «  La  fin  de  ceux  qui  assavou- 
»  rent  les  choses  terriennes,  est  la  mort.  »  (Jean 
de  Saintré,  p.  50.) 

Rien  ne  m'est  bon,  n'autre  bien  n'assaveure. 
Fors  seulement  l'attente  que  je  meure. 

rocs.  d'Al.  Chartier.  p.  53B. 

On  a  même  désigné  le  sentiment  doux  et  affec- 
tueux que  l'on  éprouve  à  l'idée  d'un  Dieu  bon,  à  la 
vue  d'un  homme  pour  lequel  on  se  sent  du  goût, 
de  l'affection,  en  disant  figurément  :  «  Fors  est 
«  issus  cum  giganz  por  corre  la  voie  :  si  nos  cestui 
«  assavourons,  et  nos  adès  lo  mattons  d'avant 
«  l'eswart  de  nostre  cuer  ;  dons  corrons  nos  ligiére- 
«  ment  et  lost,  trait  par  son  odour.  •>  (S'  Bernard, 
Serm.  Fr.  mss.  p.  340.) 

.Assavourons  bien  Dieu,  et  si  desirons  l'heure 

Que  nous  soyons  au  lieu;  car  trop  plus  nous  demeure 

Que  raestier  ne  nous  fust  :  mais  péchié  nous  court  seure. 

J.  do  Mcung,  Cod.  vers  2002-200i. 

C'est  relativement  à  l'idée  de  saveur  par  laquelle 
le  goût  est  agréablement  affecté,  que  dans  le  sens 
propre  de  ragoûter,  on  a  dit  :  «  Ne  me  asavure  ne 
«  délite  mais,  ne  beivre  ne  mangier.  »  (Livres  des 
Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  C7.) 

Enfin,  assavourer  les  choses,  c'étoit  les  rendre 
savoureuses  et  ragoûtantes,  les  rendre  propres  à 
nous  affecter  de  sensations  agréables  au  goût,  par 
extension  à  l'odorat,  à  la  vue.  On  a  dit  en  parlant 
de  S'  Louis  :  «  Il  menjoit  moût  de  foi^  potage  mal 
«  assavouré,  duquel  un  autre  ne  menjoit  pas  volen- 
«  tiers;  car  il  n'estoit  pas  savoureus.  -  iJoinville, 
Vie  de  S"  Louis,  p.  307.) 

Comande  que  li  face 

Savors  teles  dont  gré  II  sache, 
Et  sauces  molt  assavourées. 

Fabl.  MSS.d.!S'Germ  p.  107. 


<1)  Personne  ne  crache  (respuit)  ce  dont  il  n'a  goûté,  ni  même  ce  à  quoi  il  n'a  fait  que  goûter,  (n.  e.) 


AS 


237  — 


AS 


Vous  qui  avez  eu  octroy  d'Amye, 
Vuydez  du  boys  la  joUyette  sente, 
Vuydez  le  gand  (1)  et  la  verde  lueiUie, 
Vuydez  les  prez  assavourc:  de  mante  : 
llz  sont  nostre  que  Amours  desirans,  etc. 
Percef.  Vol.  VI.  fol.  99,  R-  col.  1. 

Au  figuré,  l'on  disoit  d'une  jeune  personne  de 
physionomie  ragoûtante  et  propre  à  nous  affecter 
d'un  sentiment  amoureux,  qu'elle  éioitassavourée  ; 
d'un  homme  libéral  et  donnant  de  manière  à  nous 
affecter  d'un  sentiment  de  reconnoissance,  qu'il 
assavouruit  ses  f/o?is;  d'un  cœur  soupirant  d'amour, 
et  dont  les  soupirs  affectent  l'amant  d'un  sentiment 
flatteur,  qu'il  éioil  assavouré  de  doux  soupirs;  d'un 
mal  propre  à  nous  affecter  d'un  sentimentde  mélan- 
colie douce  et  agréable,  qu'il  estoit  assavouré,  etc. 
«  Damoiselle,  cîist  Flourentine,  besoing  n'est  de 
«  vous  courroucer  :  se  plus  belle  et  mignote  estes 
«  de  moy.  d'aultre  part  je  suis  mieulx  assavourée.  • 
(Ger.  de  Nevers,  part,  i,  p.  118.) 

Que  chascuns  nsavort  son  don. 
De  quel  savor  ?  Par  quel  raison 
Puet-il  son  don  asavorer  ? 
La  savor  est  de  tout  donner. 

Elcs  de  Courtoisie,  MS.  de  S.  Gerra  fol,  40,  R°  col.  1. 

Se  retenir  ne  me  volés 
D'un  doue  soûlas  à  loisir, 
De  fin  cuer  asax'ouré 
D'un  doue  souspir,  etc. 

Ane.  Poët.  Fr.  .MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1275  et  127C. 
Bien  sont  asavoreit  li  mal 
C'on  trait  par  fin  amour  loiaul. 

Chans.  Fr.  MS.  de  Berne,  n-  389,  part.  1,  fol.  \<\,  V-. 

CONJUG. 

Asaveur  (j'),  ind.  pr.  Je  goûte.  (Fabl.  ms.  de  S"  G.) 
Asavor  (j'),  ind.  prés.  Je  goûte.  (Fabl.  ms.  du  R.) 
Asavoreit,  partie.  Goûté.  (S'  Bern.  Serm.  Fr.) 
Asavort,  impératif.  Qu'il  rende  savoureux.  (Etes 
de  Courtoisie,  ms.  de  S'  Germ.  fol.  40.) 
Asavuved,  participe.  Goûté.  (Livres  des  Rois.) 
Assavoret,  iiid.  prés.  Il  goûte.  (S"  Bern.  Serm.  Fr.) 
Assavoi'iois,  subj.  prés.  Que  nous  goûtions.  (Id.) 

VARIANTES  : 
ASSAVOURER.  S<  Bernard,  Serin.  Fr.  MSS.  p.  61. 
ASAVEURER.  Fabl.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  39,  V»  col.  1. 
ASAVOREIR.  Chans.  Fr.  MS.  de  Berne,  n»  389,  part,  i,  fol.  18. 
ASAVOREii.  Prov.  du  Vilain,  MS.deS' Germ.  fol.  75,  V»col.  !. 
As.wûURER.  .^nc.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1276. 
As.wuRER.  Liv.  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  127,  V°  col.  1 . 
AssAVERER.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  p.  3Ô0. 
AssAVEURER.  J.  de  Meung,  Cod.  vers  2001. 
Ass.woERiR.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  p.  23. 
Ass.woRER.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  p.  45. 

Assauriller,  verbe.  Flétrir,  déshonorer  par  la 
mutilation  des  oreilles.  Curer  les  oreilles  ;  Gratter 
l'oreille.  (Voy.  Assoleiller.) 

Quoique  Assoriller  ait,  comme  Assauriller,  une 
signification  particulière,  ces  verbes,  si  l'on  en  croit 
D.  Carpentier,  ont  une  commune  origine. 

Il  est  évident  qu  Assauriller,  dans  le  sens  de 
flétrir,  déshonorer  par  la  mutilation  des  Oreilles, 
est  une  altération  de  l'ancien  verbe  Essaureiller, 
Èssoj'ei/ie?',  etc.  (Voy.  Essaureiller.)  «  Justinian 


0  fut  chassé  par  Léonce  Patrice,  lequel,  lui  ayant 
«  fait  couper  le  nez  et  les  oreilles,  l'envoya  en 

«  exil.  Le  même  Léonce  chastié  de  pareille  peine 

«  fut  emprisonné  par  Tibère  qui  occupa  sur  luy 
"  l'Empire,  Toutesfois  Léonce  et  Tibère  pris  par 
<>  Justinian,  il  les  Ot  tous  deux  mourir;  et  luy  tout 
«  assaurillé  et  enazé  qu'il  estoit,  réintégré  en  sa 
«  Couronne.  »  (Pasquier,  Rech.  liv.  III,  p.  l.")0.) 

Mais  il  n'est  pas  aussi  évident  que  le  verbe 
s'Assoreiller  ou  s' Assoriller  soit  de  même  origine 
que  Assauriller,  et  qu'il  ait  signifié  se  cuier  les 
oreilles  ou  se  gratter  l'oreille ,  comme  font  les 
Gueux  qui  s'occupent  de  leur  misère,  assis  au  coin 
d'un  bois,  sur  le  bord  d'un  chemin.  (Voy.  D.  Carpen- 
tier, Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  T.  I,  col.  393. 
—  Id.  ibid.  T.  IV, col.  510.)  On  soupçonne  donc  que 
dans  les  vers  suivans,  même  dans  ceux  que  cite 
D.  Carpentier,  le  verbe  s'Assoreiller,  ne  diffère  de 
s'Assoleiller,  se  chauffer  au  soleil,  que  par  le  chan- 
gement de  /  en  r  ;  lettres  de  même  organe. 

Orés  d'une  puant  Viellette, 
Cornent  ele  s'asonlloit, 
Et  comme  mi  les  cans  s'espouilloit. 
.Notice  en  vers  de  R.,  do  Vies  de  Saints,  etc.  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  3*. 
II  chevauclioit  toute  une  lande  ; 
Si  vist  une  vieille  Truande 
Qui  a'asoreille  à  un  buisson. 

Fabl.  MS.  du  R.  n'  7989,  fol.  239,  R*  col.  2. 

variantes  : 
ASSAURILLER.  Pasquier,  Rech.  Uv.  III,  p.  150. 
A.soREiLLER.  Fabl.  MS.  du  R.  n°  7989,  fol.  239,  R»  col.  2. 
AsoRELLER.  Fabl.  MS.  du  R.  n-  C987,  fol.  295,  V°  col.  2. 
AsoRiLLER.  Notice  en  vers  de  Romans,  Vies  de  Saints,  etc. 
MS.  du  R.  n"  6987,  fol.  3i,  R»  col.  3. 
AssoREiLLER.  D.  Carp.  S.  Gl.  lat.  de  Du  G.  T.  I,  col.  393. 

Assauvîigir,  verbe.  Devenir  sauvage  et  farou- 
che. Rendre  sauvage  et  farouche.  Rendre  sauvage 
et  stérile. 

On  trouvera  dans  les  variations  d'orthographe  de 
l'ancien  substantif  Selve,  en  latin  Silm  ('2),  l'origine 
de  l'adjectif  Sauvage;  d'où  s'est  formé  le  verbe  as- 
sauvagir  ou  s'assauvagir, devenir  sauvage,  prendre 
quelque  chose  de  l'humeur  sauvage  et  farouche  des 
habitans  des  bois,  s'effaroucher  comme  eux,  en 
cette  première  citation.  «  Le  Cygne  s'eslongua  un 
«  petit  en  avant  tout  privéement  sans  soy  assau- 
«  vagir,  comme  par  semblant  de  luy  vouloir  mons- 
«  trer  le  chemin.  »  (J.  Le  Maire,  Illustr.  des  Gaules, 
liv.  m,  p.  312.) 

Par  la  doucour  de  doulz  nourrissement 

S'apprivoisist  mainte  beste  sauvage, 

S'adomesche  :  par  dur  gouvernement 

S'asauvanisl,  et  mue  son  usage, 

Eust.  Desch.  Poês.  MSS.  p.  29,  «1,  4. 

Quant  lo  chat  est  bel, 
Et  luisant  la  pel, 
Lors  asauvagist. 

Fabl.  MS.  de  Berne,  n"  54,  fol  38,  R-  col.  2. 
Kar  si  chesoun  leist  ses  volentez... 
Tut  estiiie  fraternité  guerpir, 
Et  cume  beste  la  gent  ensalvagir. 

Rom.  des  Romans,  sir.  829. 

Dans  le  sens  de  rendre  sauvage,  rendre  farouche 


(1)  Lisez  gaud,  bois,  bocage.  —  (2)  Sauvage  vient  en  effet  de  silvatictis  et  non  de  soUvugus,  comme  on  l'a  prétendu  en  ces 
derniers  temps,  (n.  e.) 


AS 


-  238  — 


AS 


et  peu  sociable,  on  disoit  :  «  Le  séjour  des  boib  1  a 
«  assauvagi.  »  (Monel,  Dict.)  , 

Au  figuré,  «ss«»i'«r/''-  que  qu  un  de  ne  plus  aliei 
dans  une  maison,  c'éloil  le  rendre  farouche  e 
défiant,  l'eiïaroucher,  le  rendre  lunule  c\  >  ficquen 
îer.  .'  Dist  au  Suppliant  qu'il.  Jonnermt  aud  t 
»  homme  deux  soufllelz  bien  assiz,  POur  le  «ssa 
«  vaaiv  de  plus  n'aler  à  sa  maison.  "  (D.  \^m^- 
tier  Suppl.  (Uoss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Sijlva- 

^'S'pirlïitï'terres  que  la  proximité  des  bms 
renJoirslériles,  ou  a  dit  qu'elles  élfe^^lasscnr^a^^ 
ou  assauvagiées.  .  Les  terres  sont  «"te.  «ssfljm 
„  glées  et  environnées  de  bois.  »  (D  Carpeniei, 
Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  ^y^J^«  "'«  ' 
tit  de  140G.)  «  Ferme...  assisie  eu  bois  et  bruyères 
«  oui  ont  gagné  et  assauvagi  grant  parties  aes 
.  terres  labourables.  »  (Id.  ibid.  -  ^oy.  bAuv.^cE  ) 

VARIANTES    :  ^ 

ASS.VUVAGIR.  J.  Le  Maire  Illustr  des  bliv^IH.P-  ■J'- 

Ens.vlvagir.  Rom.  des  Rom.  str.  IW. 


Asséable,  adj.  Sujet  aux  impositiçns.  Significa- 
tion relative  ii  celle  du  verbe  Asseer,  au  figme 
m  oser  leriailles,  etc.  «  Personne  noble  aisante 
«exerçant  acte  dérogeant  à  sa  noblesse,  est 
«  asséable,  taillable  et  contribuable  à  toutes  tailles, 
«  aydes,  subsides  et  antres  imposts.  -  (Goût,  a  ai - 
tois,  auCoul.  gén.  T.  I,  p.  75'2.-\oy.  Gout.  de 
Lille,  ibid.  T.  II,  p.  921.) 

Asséage,  suhst.  masc  Posage.  Dans  un  sens 
relatif  à  celui  du  verbe  Asséer,  poser,  mettre  en 
place  :  «  Ghacune  queue  de  vin  doit  v  deniers  tant 
«  pour  l'encavage  que  pour  r«sst!rt</(?.  »  (Statutsdes 
Escbevins  de  Maisière-sur-Meuse  ;  Biblioth.  de 
Cangé.  —  Voy.  Asséer.) 

Asséant,  participe.  Séant,  qui  est  convenable. 
Si-nilication  analogue  à  celle  du  verbe  Asseer, 
poler,  placer  convenablement.  «  Je  t  envoie  ces 
a  dons  bien  asséans  h  ta  Hautesse.  »  J.  Le  Maire 
ïllustr.  des  Gaules,  liv.  II,  p.  181  et  182.  -  Voyez 
Asséer.) 

Assec,  siibst.  masc.  Etang  à  sec.  Part  dans  le 
sol  d'un  ctajig  ^  sec. 

G'est  par  ellipse  au  nom  de  la  chose  à  sec,  qu  en 
Bresse  le  composé  assec  signifie  un  étang  qui 
demeure  ;\  sec,  après  qu'il  a  été  pèche.  (Laurière, 
Gloss.  du  Dr.  fr.)  ,  ^.  ^,^ 

Dans  le  second  sens,  c'est  une  part,  une  portion 
dans  le  sol  de  ce  même  étang:  portion  qui  est  orai- 
nairemenl  marquée  par  des  bornes  ou  des  pieux,  et 
que  chacun  va  reconnoître  lorsque  l'elang  est  des- 
séché, mis  ù  sec.  "  Gelui  qui  a  assec  en  un  étang, 
«  quelque  petit  que  soit  Vassec,  a  droit  de  parcours 
«  au  même  étang  pour  son  bétail.  »  (Laurière, 
Gloss.  du  Dr.  fr.) 

Assécher,  verbe.  Sécher,  dessécher,  rendre 
sec  mettre  à  sec.  Devenir  à  sec,  être  à  sec;  arriver, 
aborder,  prendre  terre.  Sécher,  devenir  sec. 


Ou  peut  voir,  sur  l'origine  Celtique  et  Orientale 
de  l'adjectif  sec,  en  latin  sicciis,  et  du  verbe  simple 
sécher,  en  latin  siccave,  M.  Court  de  Gebelin  fDict. 
clvm  de  la  Lang.  fr.  col.  995.) Le  verbe  assécher,  de 
même  origine  que  sécher,  dessécher,  étoit  de  même 
si"-nification,  lorsque  dans  le  sens  étymologique  on 
disoit  ■  «  Les  chaleurs  ont  asseiché  notre  lontaine 
«  et  notre  puis.  .  (Monel,  Dict.)  <•  Ils  entrepnn- 
..  drent  de  divertir  la  rivière  avec  des  toilles,  met- 
«  tans  en  avant  qu'estant  divertie  et  le  cours  «sse- 
«  ché,  etc.  ..  (Du  Bellay,  Mém.  liv  II,  fol  2(5  ) 

Dans  ce  dernier  passage,  c'est  l  effet  de  1  art, 
assimilé  à  celui  de  la  chaleur  du  Soleil.  En  com- 
paraut  à  l'effet  naturel  delà  chaleur  suri  humidité, 
celui  qu'opère  sur  les  boyaux  du  faucon  la  grosse 
chair,  une  chair  difficile  à  digérer,  on  a  dit  :  »  Geste 
«  chair,  et  la  puanteur  d'icelle  luy  vient  a  estrain- 
a  dre  et  assécher  les  boyaux,  de  façon  que  les 
,<  fumées  et  vapeurs  montans  à  la  teste,  etc.  «  (Du 
Fouilloux,  Fauconnerie,  fol.  13.) 

Dans  la  signification  devenir  à  sec,  on  disoit  eri 
parlant  d'un  havre  d'où  la  mer  se  retire:  «Si 
i  ainsi  est  qu'ils  soient  eu  un  havre  qui  asseiche, 
„  ils'sonl  tenuz  de  mettre  balis  à  leur  ancre,  que 
«  apièrent  au  plain  de  la  mer.  »  {Gout^  ^a  la  Mer 
art.  xvii.  —  Voy.  D.  Morice,  Preuv.  de  KHist.  de 
Bretagne.  T.  I,  col.  790.) 

I  es  Marins  disent  encore  qu'une  terre  ou  une 
rodie  assèche,  lorsqu'elle  sort  de  l'eau  et  que  la 
mer  en  se  retirant,  la  laisse  voir  étant  à  sec.  CSoy. 
Dict.  de  Marine.)  Dans  un  sens  analogue,  on  aura 
d  Uqu'en  un  havre  d'où  la  mer  se  retire,  les  ancres 
Isséchcnt,  qu'elles  deviennent  et  sont  a  sec,  lors- 
qu'elles paroissent  hors  de  l'eau.  «  Deux  neffs  ou 
.;  plusieurs  sont  dans  ung  havre  ou  il  y  a  poy 
„  d'eaue,  et  si  asseiche  l'ancre  dune  neff  ;  le 
<■  Maistre  de  cette  neff  doit  dire  au  Maistre  de  1  au- 
«  tre  etc.  »  (Gout.  de  la  Mer,  art.  xvu  —  A  oy.  D. 
Morice,    Preuv.    de    l'Hist.    de    Bretagne,  T.    I, 

'°Eir?ega™n\  un  vaisseau  abordé  au  rivage 
comme  étant  à  sec,  on  aura  dit  dans  la  signification 
d'arriver,  aborder,  prendre  terre  : 


Moult  veissiez  nez  atourner. 

Nez  atacliier,  nez  aancrer, 

Nez  assechier,  et  nezjloten^^^  ^^  ^^^  ^^  ^^  ^,  ^ 

Les  nefs  sont  à  un  port  tornées  ; 

Toutes  sont  ensemble  arrivées  ; 

Toutes  sont  ensemble  accostées  ; 

Toutes  sont  ensemble  aancrées  ; 

Et  ensemble  toutes  asséchierent. 

Et  ensemble  lez  deschargierent^.^_^_  ^^  ^  ^^^ 

Enfin,  C'est  dans  le  sens  propre  et  relatif  à  l'idée 
de  l'eiïet  de  la  chaleur  sur  l'humidite,  ^xx'assccher 
Sdur,  ou  ^assécher,  signifio.t  sécher,  devenu 
sec  «  Lue....  manière  de  pantais  advient  aux 
«  Oiseaux....  quand  ils  se  baignent  aux  champs  en 
,  volant,  et  puis  après  ne  sont....  mis  en  lieu  sec 
<■  et  chaut  où  l'humidité  par  eux  accueillie  se  puib.e 
«  esparer  et  assécher.  »  (Du  Fouilloux,  Faucon- 
nerie, fol.  30,  V-.) 


AS 


—  239  — 


AS 


Par  comparaison,  sécher,  devenir  sec,  comme 
le  devient  notre  cerveau,  lorsque  l'âge  en  diminue 
l'humidité:  «  Les  advancés  en  aage  prévalent  en 
«  entendement  sur  les  jeunes,  d'autant  plus  que  le 
«  cerveau  s'essuye  et  s'assèche  toujours  plus.  » 
(Sagesse  de  Charron,  liv.  V,  p.  90.) 

Sécher,  devenir  sec,  par  la  dissipation  de  l'hu- 
mide radical  :  «  Quant  un  des  membres  de  home 
«  ensecliistel  se  pert,....  il  covient  que  il  le  face 
«  couper,  ke  les  autres  ne  porrissent.  »  (Moralités, 
Ms.  de  N.  Dame,  p.  12C.)  <■  Les  vers  qui  font  nostre 
«  soye,  on  les  void  comme  mourir  et  asseclier,  et 
«  de  ce  mesme  corps  se  produire  un  papillon,  et 
«  delà  un  autre  ver.  »  (Essais  de  Montaigne,  liv.  II, 
p.  338.) 

VARIANTES  : 
ASSÉCHER.  Chr.  S'  D.,  Rec.  des  llist.  de  Fr.  T.  V,  p.  231. 
AssÉciiiER.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  85,  R"  col.  2. 
AssEiCHER.  Percef.  Vol.  IV,  fol.  22,  R°col.  1. 
Enséchir.  Moralités,  MS.  de  N.  Dame,  p.  126. 

Asséement,  subst.  inasc.  Action  de  s'asseoir  ; 
séance.  Action  d'asseoir,  de  poser;  position.  Action 
d'asseoir,  d'imposer;  imposition. 

Dans  le  premier  sens  asséement  ou  assiement, 
formé  du  verbe  assler  ou  asséer,  signifioit  séance, 
l'action  de  s'asseoir,  en  latin  sessio{l).  (Rob.  Estienne, 
Nicot  et  Monet,  Dict.) 

Au  second  sens,  position,  l'action  de  poser, 
d'asseoir,  dans  les  Dict.  de  Cotgrave  et  d'Oudin  ; 
l'action  d'asseoir  un  camp,  la  position  d'un  camp, 
lorsqu'on  traduisoit,  «  pro  iniquitate  vidi  tentoria 
«  .Ethiopiœ  »  dans  le  Cantique  d'Ilabacuc,  en  di- 
sant: »  Je  vi  les  assatjemens  d'Etiope,  pour  ma 
«  félonie.  »  (Bible  en  frànçois,  ms.) 

Dans  le  sens  ligure,  l'action  d'asseoir,  d'imposer, 
imposition.  (Oudin  et  Monet,  Dict.  — Voy.  Asséer.) 

VARIANTES  : 

ASSÉEMENT.  Oudin,  Dict. 

AssAYEMENT.  Bible,  en  françois,  MS.  Cantique  d'Ilabacuc. 

AssEiEJiANT.  Monet,  Dict. 

Assiement.  Cotgrave,  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict. 

Asséer,  verbe.  Faire  asseoir,  faire  reposer. 
Asseoir,  poser,  placer.  Asseoir,  imposer.  Assiéger. 
Préposer. 

Du  verbe  latin  Assidere  se  sont  formés,  par  la 
suppression  de  la  lettre  d,  les  verbes  Asséer  ou 
Assier,  Asseoir  ou  Asseir.  On  auroit  réuni  sous  le 
même  article  Asseoir  et  Asséer  comme  variation 
réciproque  d'orthographe,  si  l'on  n'eût  cru  voir 
dans  la  conjugaison  une  différence  de  modes  et  de 
temps,  relative  à  la  différence  de  terminaison.  Il 
semble  qu'anciennement  on  ait  conjugué  asseoir, 
en  latin  assidere,  comme  veoir  ou  voir,  en  latin 
videre.  C'est  d'après  l'idée  de  cette  analogie  que 
l'on  a  composé  la  conjugaison  d'asseoir  très-dis- 
tincte de  la  conjugaison  à'asséer.  En  jetant  les 
yeux  sur  celle  de  notre  verbe  ^Iss^'oi?-,  telle  qu'elle 
existe  aujourd'hui  dans  les  Dictionnaires  et  les 
Grammaires,  peut-éti-e  reconnoîtra-t-on  que,  pour 


la  compléter,  on  emprunte  des  modes  et  temps  qui 
paroissent  être  propres  à  l'ancien  verbe  Asséer, 
Asseier  ou  .Issie?-;  tels  entr'autres  ç]ue  j'assiérai, 
ou  i'asseyerai,  i'asseyerois  on  j'assiérois?  Il  seroit 
possible  aussi  qu'à  raison  de  ce  qu'avant  le  xvn' 
siècle  on  écrivoil  presque  toujours  i  voyelle  pour 
j  consonne  qui  tient  lieu  de  g  dans  les  Manuscrits 
des  xir  et  xiii'  siècles,  on  crût  devoir  lire  asscjer 
pour  asseier,  et  qu'on  regardât  cette  orthographe 
comme  une  variation  d'Asséger,  Assigier,  etc.  Au 
reste,  l'origine  n'en  seroit  pas  moins  la  même  que 
celle  A'Asséer  et  .Isscoi)',  puisque  Assigier  ou 
Asségcr  est  aussi  formé  du  verbe  latin  Assidere. 
Toute  la  différence  entre  ces  trois  verbes  consiste 
en  ce  que  le  d  supprimé  dans  la  formation  d'asseoir 
et  asséer,  est  changé  en  g  dans  celle  â'assigier  ou 
asségcr  ('■2).  On  pourroit  citer  plusieurs  exemples  de 
ce  cliangement,  et  s'en  autoriser  pour  prouver  une 
identité  d'origine  qui  semble  d'ailleurs  justifiée  par 
l'identité  de  signification.  (Voy.  Asseoir  et  Assiéger.) 
Dans  le  sens  de  faire  asseoir,  faire  reposer,  on  a 
dit: 

Mes  les  Angles  de  Paradis 
Nous  tramele  le  Roi  celestre, 
Et  toz  nous  asaiée  à  sa  destre 
En  la  grant  joie  perdurable 
Avoec  son  père  esperitable. 

l'abl.  MS.  du  P..  n-  -I-21S,  fol.  28»,  V  col.  2. 

Il  semble  inutile  de  prouver  que  s'asséer  a  si- 
gnifié s'asseoir,  se  reposer  sur  une  chose,  s'y 
poser:  mais  on  remarquera  un  abus  singulier  de 
la  signification  de  ces  mêmes  verbes  s'Asséer  et 
-Issm'.  Le  repos  étant  une  cessation  de  mouve- 
ment, on  aura  sans  doute  vu  les  choses  qui  ces- 
soient  de  se  mouvoir,  comme  s'asséant,  se  repo- 
sant, et  l'on  aura  dit  de  pierres  dressées  et  tombées 
dans  une  nef,  qu'elles  y  étoient  assises;  de  dards 
tombés  sur  le  visage  de  ceux  à  qui  on  les  avoit 
lancés,  qu'ils  y  étoient  assis;  d'une  pomme  tombée 
dans  la  main  de  celui  à  qui  on  l'avoit  jetée,  qu'elle 
y  étoit  assise  ;  de  flots  de  sang  qui  s'écouloient  en 
tombant  dans  une  rivière,  qu'ils  s'y  asseyoient;  etc. 

Entre  flamens  chaiUoz  assied 
En  la  nef,  jaunes,  bis  et  verz. 
Tant  qu'il  en  sont  comme  couverz. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  322,  R'. 
Là  veissiez  quarriaus  voler 
Qui  s'assiéent  en  pluseurs  places 
Sus  visages  nuz  et  sus  faces. 

Id,  ibid.  fol.  347,  R'. 
....  Il  getoit  droit  en  la  main 
De  l'home  d'Esté  tout  à  plain 
La  pomme  que  tenue  avoit... 
Chascune  main  ei-t  si  bendée 
De  fer,  et  si  bien  atornée, 
Qu'ele  brisier  ne  povoit, 
Qant  la  pomme  en  11  s'asseoit. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  7.  V*  toi.  3. 

.  .  , Tant  en  ocient 

Qu'au  desouz,  une  lieue  entière, 
En  ert  sanglante  la  rivière  ; 
Si  con  li  sanc  n'i  asseoit. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  275,  K-. 

C'est  par  extension  de  l'idée  faire  asseoir,  faire 


(1)  L'étymologie  serait  asseckmentum.  (n.  e.)  -  (2)  Asscijicr  vient  d'une  forme  supposée  assediare.  (n.  e.) 


AS 


—  2'iO  - 


AS 


reposer,  nieltre  dans  un  état  de  repos,  qu'assez'?- 
a  signifié  asseoir,  poser,  rendre  immobile  dans  une 
position  :  «  Doit  estre  son  arc  si  aisé  et  si  doux 
«  qu'il  se  puisse  tenir  tout  entesé  longuement,  et 
o  convoier  la  hesle  tant  qu'elle  soit  un  pou  contre 
«  lui,  en  asséant  sa  main  et  en  tenant  son  corps 
«  tousjours  le  plus  droit  et  serré  contre  son  fust 
«  qu'il  pourra.  >'  (Modus  et  Racio,  ms.  fol.  74.) 
L'orthographe  cssaier,  qu'on  trouve  (ihid.  fol,  79,) 
est  évidemment  une  altération  û'asséei\  comme 
celle  â'assdijcv  dans  Modus  et  Racio,  impr.  fol.  43.) 

En  général,  asseoir,  poser,  placer,  mettre  dans 
une  position  conforme  à  certaines  vues  de  stabilité, 
de  sûreté,  de  convenance,  de  proportion.  «  Ces 
«  dis  basses,  od  tuz  ces  dis  Vaisseis,  fist  li  Reis 
«  ascer  en  le  aitre  ki  plus  fud  prucein  al  temple.  » 
(Livres  des  Rois,  »is.  des  Cordel.  fol.  89.) 

Si  l'on  dit  asseoir  une  rente,  et  si  plus  ancien- 
nement on  a  dit  Vasséer,  ou  Vasier,  comme  on  lit 
Hist.  généal.  de  la  M.  de  Guines,  p.  283,  tit.  de 
1241,  c'est  dans  une  signification  figurée:  signifi- 
cation de  laquelle  on  sembloit  abuser,  lorsqu'on 
parlant  d'un  Créancier  dont  la  position  étoit  peu 
sûre  vis-à-vis  de  son  Débiteur,  on  disoit  qu'il  en 
étoit  mal  asseyié.  «  Se  il  faisoient  ausdiz  Marchans 
"  bailler  leurs  denrées  à  gens  dont  il  fussent 
«  vtal  asseyiés,  lesdiz  marchans,  etc.  »  (Ord.  T.  U, 
p.  130.) 

On  exprimoit  une  idée  de  convenance  dans  la 
position  des  choses,  lorsque  dans  le  sens  de  placer, 
on  disoit  figurément  en  parlant  de  cet  ancien 
proverbe.  Est  Saiil  entre  les  Prophètes:  «  L'um  le 
«  puet  là  bien  asséer,  ù  Fum  veit  alcun  de  bas 
«  parage  sudéement  venir  à  haltesce  e  à  barnage; 
«  là  l'um  veit  que  li  fols,  cume  sages,  entre  sages 
«  s'embat.  <■  (Livres  des  Rois,  ms.  des  Cordel.  fol.  12. 
—  Voy.  Asséant.) 

Dans  la  signification  d'asseoir,  imposer,  le  verbe 
Asséer  auroit  toujours  été  l'expression  d'une  idée 
de  proportion,  si  l'imposition  des  charges  publi- 
ques eût  toujours  été  proportionnée  aux  facultés  du 
Citoyen  sur  la  tète  duquel  pose  une  partie  du  poids 
de  ces  charges.  «  Eslirons  siques  à  douze  homes 
«  d'iceux,  qui  seront  les  meilleurs  ichelle  taille 
«  asséer;  et  les  autres,  etc.  »  (Ord.  T.  L  p-  180.) 

On  assied,  on  pose  son  camp  devant  une  ville 
que  l'on  veut  prendre,  ou  forcer  à  se  rendre.  De 
là,  le  verbe  Asséer,  dans  un  sens  relatif  à  l'idée 
générale  de  position  conforme  à  certaines  vues, 
signifioit  assiéger.  «  \int  JNabugodonosor  li  Reis  de 
«  Babilonie,  à  tute  se  ost,  à  Jérusalem,  si  l'aseiad, 
«  e  ses  engins  i  levad.  »  (Livres  des  Rois,  ms.  des 
Cordel.  fol.  153.) 

Sainne  passent,  la  ville  assiéent, 
Qui  lors  estoit  iiel  atermée, 
De  deus  paire  de  murs  fermée. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  85,  R». 

Enfin,  le  verbe  Asséer.  dans  le  sens  de  préposer, 
semble  retracer  une  idée  très-ancienne  d'après 
laquelle  on  désignoit  assez  naturellement  la  supé- 
riorité d'un  homme  en  le  faisant  asseoir,  en  le 
représentant  assis  devant  ceux  à  la  conduite  des- 


quels il  cHoit  préposé.  «  Cungie  les  Reis  ki  vindrent 

«  à  ta  a'ie e  retien lur  Chevalerie,  e  ass/cCunes- 

«  tables  sur  tute  Chevalerie.  »  (Livres  des  Rois,  ms. 
des  Cordel.  fol.  115.)  «  Noz  Ouvriers  et  Monnoyers 
"  asseez  et  ordonnez  pour  ouvrage  et  monnoyage, 
«  etc.  »  (Ord.  T.  II,  p.  535.) 

CONJUG. 

Aseiad,  ind.  prêt.  Assiégea.  (Livres  des  Rois.) 
Asieche,  subj.  prés.  Qu'il  asseye.  (Hist.  généal.  de 

la  M.  de  Guines,  p.  283;  lit.  de  1241.) 
Asséon,  ind.  prés.  Nous  asseyons.  (G.  Guiart.) 
Assièce,  subj.   prés.  Qu'il  asseye.  (Fabl.    de  la 

Vieillelte,  ms.  du  R.  fol.  295.) 
Assiesse7it,  subj.  prés.  Qu'ils  s'asseyent.  (Lanc.  du 

Lac,  T.  II,  fol.  27.) 
Assiez-toi,  imper.  Assied-loi.  (Rob.  Estienne.) 

VARIANTES  : 
ASSÉER.  Rom.  de  Cliget.  MS.  du  R.  n»  6987,  fol.  280. 
AsftER.  Liv.  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  89,  V°. 
AsiER.  Hist.  généal.  de  la  M.  de  Guines,  p.  283;  tit.  de  1241. 
AssAYER.  Modus  et  Racio,  impr.  fol.  43,  R°. 
AssElER.  Villehardouin,  p.  134. 
AssEYiER  Ord.  T.  Il,  p.  136. 

AssiÉER.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  282,  V»  col.  2. 
AssiER.  Liv.  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  115,  V»  col.  2. 
EssAiER.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  79,  V°. 

Asséeiir,  siibsl.  masc.  Qui  assied,  qui  pose.  Qui 
assied,  qui  impose.  Espèce  de  Juge,  d'Arbitre. 

Dans  un  sens  relatif  à  l'idée  générale  d'asséer, 
asseoir,  poser,  on  nonimoit^lssm/r,  un  Officier  des 
Rois  d'Angleterre  et  probablement  des  Ducs  de  Bre- 
tagne, quiposoit  les  plats  sur  leur  table.  (Voy.  GIoss. 
de  rilist.  de  Bretagne.  —  Du  Gange,  Gloss.  lat.  T.  I, 
col.  776,  au  mot  Assessor.) 

Le  même  verbe  Asséer  ayant  signifié  asseoir, 
imposer,  on  a  nommé  Asséeurs  ceux  qui  imposoient 
les  fouages,  ceux  à  qui  l'on  confioit  la  répartition 
des  impôts  en  général,  des  charges  publiques. 
«  Asséeurs  des....  fouages....  seront  éleuz  par  les 

«  habitans  inesmes  des  villes  et  paroisses  ; les- 

«  quelz  Asséeurs  entendront  diligemment  à  l'assiele 
«  faire  sur  eulz  et  les  autres.  »  (Ord.  T.  VI,  p.  444.) 
«  Les  Impositeurs,  Connestables  et  Asseurs  sont 
«  tenus  d'imposer  tous  les  residans  et  habitans  les 

«  maisons  de  leurs  paroisses selon  leur  estât, 

"  leurs  biens,  leur  commerce  et  exploitations.  " 
(Coût,  de  Bergh  S'.  Winox,  au  Nouv.  Coût  gén. 
T.  I,  p.  537.)  .'  Nuls  Chefs  ou  Asséeurs  ne  pourront 
«  exempter  personne  dans  la  Ville  el  la  Jurisdiction, 
«  et  le  tenir  franc  des  frais  du  pays  ou  de  la 
«  paroisse.  »  (Coût,  de  Furne,  ibid.  p.  055.) 

Probablement,  on  reprochoit  à  celui  qu'on  disoit 
être  un  Asséeur  d'escox^,  wwAsseuerrede  cul:i,  quel- 
que injustice  de  l'espèce  de  celle  d'un  Asséeur  qui, 
dans  la  répartition  des  impôts,  n'observoit  pas  l'éga- 
lité et  la  proportion  prescrites  pai-  les  Coutumes  et 
les  Ordonnances.  «  Reprocha  et  dist  audit  des  Pou- 
«  lies  que  il  n'estoit  que  un  Asséeur  d'escoz.  » 
(D.  Carpenlier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  T.  I, 
col.  341  ;  lit.  de  1357.  On  lit  Asseuerres  de  cul:;:,  ;  Id. 
ibid.  au  mot  Assidator;  tit.  de  1385.) 

En  choisissant  un  Juge,  un  Arbitre,  on  met  ses 


AS 


—  241 


AS 


intérêts  à  sa  disposition  ;  on  lui  confie  le  droit  de 
poser  les  bornes  du  juste  et  de  l'injuste  ;  on  s'oblige 
et  l'on  est  obligé  de  se  soumettre  à  la  loi  qu'il  im- 
pose. Ainsi,  le  substantif  Asséeur,  dans  un  sens 
relatif  à  celui  du  verbe  sXsséer,  asseoir,  poser, 
imposer,  pourroit  avoir  signifié  Juge  en  général, 
comme  en  particulier  il  a  signifié  Arbitre  dans  un 
échange.  Peut-être  trouvera-t-on  plus  simple  qu'un 
Arbitre  ait  été  nommé  Asséeur,  en  comparant  ses 
fonctions  aux  séances,  aux  assises  des  Juges  pré- 
posés à  l'exécution  des  Loix.  «  Noz  rement  par  ceste 
«  peztoz  lesdemaenesqueiceliHerveu  avoit  o  Bo- 

>.  sic li  an  douant  égange au  dit  Monsignor 

«  Salomon etc Est averaé antre noz quesi nu! des 

«  Asseors  devant  ditz  moraet  avant  que  ceste  asise 
«  saet  acomplie  ;  que  un  autre  do  consoil  Monsin- 
«  nor  Herveu  de  Léon  sera  mis  au  dit  ledit  Herveu 
«  équier.  »  (D.  Morice,  preuv.  de  l'Hisl.  de  Breta- 
gne, T.  I,  col.  984;  tit.  de  1202.  —  Voy.  AssEoni  et 
Assise.) 

variantes  : 

ASSÉEUR.  Cout.  de  Bergh  S'  Winox,  au  N.  C.  g.  T.  I.  p.  507. 

Anséor.  D.  Morice,  Hist.  de  Bret.  T.  I,  col.  984. 

AssÉOR.  Id.  ibid. 

AssÉouR.  Id.  ibid.  —  Gloss.  de  l'Hist.  de  Bretagne. 

AssEUERRE.  D.  Carp.  S.  GI.  lat.  de  D.  C.  au  m.  Afsidator. 

AssEUR.  Gloss.  de  l'Hist.  de  Bretagne. 

AssiEiEUR.  Monet,  dict.  au  mot  Asuciemant. 

Asseigiieurir,  verbe.  Autoriser,  rendre  maître. 
Rendre  maîtresse,  épouser. 

On  sait  que,  dans  l'origine  de  plusieurs  anciens 
Gouvernemens ,  la  raison  guidée  par  la  Nature, 
faisoit  les  vieillards  déposilaires  d'une  autorité 
semblable  à  celle  qu'ils  conservent  encore  parmi  les 
Sauvages.  C'est  par  un  abus  singulier  de  l'idée  de 
celte  autorité  si  naturelle  et  si  raisonnable,  qu'en 
la  généralisant,  on  a  nommé  Seigneur,  en  latin 
Senior,  l'homme  que  la  possession  d'un  fief  aulori- 
soit  non-seulement  à  exiger  de  ses  Vassaux  des 
devoirs,  et  des  corvées  de  ses  esclaves,  mais  à  se 
rendre  maitre,  en  certains  cas,  d'une  partie  ou  de 
la  totalité  de  la  fortune  de  ces  mêmes  Esclaves.  De 
lîi,  on  aura  dit  d'un  propriétaire  ou  possesseur  de 
fief,  agissant  d'après  les  principes  de  féodalité  qui 
l'autorisoient  à  faire  une  chose  et  l'en  rendoient 
maitre,  qu'il  s'asseigneurissoit  de  la  faire.   «   En 

«  Champaigne se  aucuns  homs  de  mainmorte  se 

«  muert,    senz  hoirs  de  son    corps, li  Sires 

"  emporte  l'eschoite,  en  meubles  et  en  héritages.... 
«  Se  il  s'aseigïLorist  de  penre  les  meubles  'et  les 
«  héritages,  il  sera  tenuz  i\  paier  tous  les  debtz  au 
«  mort  pour  raison  des  meublez  ;  et  pour  les  héri- 
«  tages  ne  pniroit  il  riens.  »  (Pithou.  Cout.  de 
<'  Troyes,  p.  102.) 

Dans  les  siècles  galans  de  notre  ancienne  Cheva- 
lerie, l'Amant  d'une  Dame  déclaroit  son  amour, 
comme  le  Vassal  d'un  Seigneur  faisoit  hommage  : 
comme  lui,  il  demandoit  la  bouche  et  les  mains, 
c'est-à-dire  l'honneur  de  tenir  d'elle  son  existence, 
comme  en  fief.  Il  all'ectoit  de  l'en  rendre  Dame  et 
Maîtresse;  il  l'asseigneitrissoit;  c'étoil  sa  genliex 
Dame  asseigneurie,  comme   on  lit  dans  les  Ane. 


Poët.  fr.  Mss  avant  1300,  T.  IV,  p.  1424.  L'Amour 
personnifié  étoit  du  sexe  féminin,  et  l'on  disoit  : 

....  Dame  est  de  si  haut  al'aire, 
Et  de  si  noble  Seignorie, 
Que  sor  ans  l'ont  asseiyiwrie 
Tout  li  plus  haut  Seignor  du  monde. 

Dits  de  Baudoin  de  Condé,  MS.  de  Gaignat,  fui.  314,  R*  col.  2. 

En  épousant  une  femme,  on  l'associe  h  son  exis- 
tence ;  mais  on  ne  l'en  rend  pas  toujours  maîtresse, 
comme  paroit  le  signifier  l'ancien  verbe  Aségnerer, 
dans  ce  passage  :  «  Prendés  la  fille  à  un  Roi,  ou  à 
«  un  Conte  :  en-seur-que-tot,  que  cuideriés  vous 
•  avoir  gaegniés  1  Se  vous  l'aviez  asegnerée  ne 
<•  mise  à  vo  lit,  moult  i  ariez  peu  conquis.  »  (Fabl. 
MS.  du  R.  ir  7989,  fol.  73.  —  Voy.  Seigneurir.) 

vAniANTES  : 
ASSEIGNEURIR.  Ane.  Poët.  fr.  T.  IV,  p.  1424. 
ASEGNERER.  Fabl.  MS.  du  R.  n«  7989,  fol.  73,  V»  col.  2. 
ASEIGNORIR.  Pithou,  Cout.  de  ïroye,  p.  402. 
AssEiGNORiR.  Dits  de  Baud.  de  Condé.  MS.  de  G.  fol.  314. 

Assels,  adv.  et  subst.  A  suffisance,  en  ([uantité 
suffisante.  En  quantité,  en  grande  (|uantité,  en 
quantité  plus  que  suffisante;  bien,  beaucoup,  trop. 
Suffisance  ,  quantité  de  bien  suf^sante.  Quantité, 
grande  quantité. 

Du  latin  ad  satis,  on  aura  fait  assais,  par  le  re- 
tranchement de  la  lettre  /  qui  se  retrouve  dans 
l'ancienne  orthographe «srti.  Delà,  l'adverbe  Italien 
Assai,  l'Espagnol  Asaz,  et  le  François  Asseis.  (Voy. 
Ménage,  Orig.  liai.)  Que  l'analogie  entre  l'adverbe 
latin  Salis  èi  le  substantif  pluriel  Sala,  soit  telle 
qu'elle  est  indiquée  ci-dessus  à  l'article  Assasié  ;  ce 
sera  dans  un  sens  relatif  à  l'idée  primitive  de  ce  qui 
suffit  aux  besoins  de  l'homme  agricole  et  les  satis- 
fait que  l'on  aura  dit  :   «  Se  tira  chascun  en  son 
«  hostel,  oîi  il  trouva  vivres  asseî-,  et  à  grant  plenté 
«  d'or  et  d'ai'gent.  »  (Triomphe  des  ix  Preux,  p.  488.) 
Mengez  poi  et  bevez  «.s.sc:. 
Quant  n'aurez  quoi,  si  jeûnez  ; 
Et  serez  du  pechié  délivre. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7G15,  fol.  183,  V  col.  2. 
Qui  assez  a,  ne  démange  plus. 

Prov.  rur.  el  vulg.  MS.  de  N.  D.  coté  N-  %  fol.  10,  R"  col.  1. 
Miauz  valt  assez  que  trop  avoir. 

Fabl.  MS.  de  Berne,  n-  354.  fol.  121.  R-  col.  1. 

Par  extension  de  l'idée  d'une  quantité  de  biens, 
suffisante  aux  besoins  de  la  vie,  l'adverbe  Asseis, 
comme  en  latin  Salis,  aura  signifié  dans  le  sens  le 
plus  général,  en  quantité  suffisante,  à  suffisance, 
suffisamment  :  «  Lo  miracle....  faiz  en  noces,  qui  fut 
«  li  encommenceinenz  des  miracles  nostre  Signor.... 
«  asseiz  est  mervillons  selonc  l'Ystoire.  »  fS'  Ber- 
nard, Serm.  fr.  mss.  p.  234)  "  N'est  mies  asseiz  si 
«  nos  par  defors  sommes  solcment  sogeit  à  nos 
«  maistres.  »  (Id.  ibid.  p.  27.) 

Tentes  et  aucubes  et  très 

Y  ot  ne  plus  ne  mains  k'ns.sés. 

Cléoniadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  5,  V*.  col.  3. 
....  Il  en  fist  tant  que  assez, 
Si  que  de  lui  tout  se  loerent. 

Ibid.  fol.  70,  R' col.  1. 
Douce  Dame,  ne  m'ociés  ; 
Ne  soies  cruel  ne  fière 
Vers  moi  ke  plux  vos  ain  c'aisseis, 
De  bone  amor  droituriere. 

Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  n-  380,  part,  il,  fol.  36,  V'. 

31 


AS 


242  - 


AS 


Nous  disons  encore  assez-,  pour  suffisaniment,  à 
sulTisaiice,  en  (luaiilité  sulTisanle.  C  est  évidemment 
la  même  siunificatiou  dans  les  expressions  plus 
qu'assez,  lan't  qu'assez,  ne  pI^s  "emouisqu  assez  ; 
et  dans  cette  autre  expression  elliptique  a..ez  e 
jour,  faisant  assez  jour,  étant  suflisamment  joui,  le 
jour'étant  encore  suffisant. 

L'autre  revint,  assés  le  jour, 

Partonopeu  joindre  en  l'estour. 

Siège ^c  Thèbes,  MS.  du  R.  n-  6987,  fol.  53,  H-  col.  4. 

En  faisant  abstraction  de  cette  idée  de  suffisance, 
on  désionoit  une  quantité  quelconque,   lorsqu  au 

sensnhYsinueondisoit  :  -  Avoient  de  1  artillerie 

«Mais  elle  n'estoit  pas  souffisante  assez-  pour  mec- 
„  tre  en  subjection  la  ville.  -  (Le  .louvencel,  ms. 
n  49!)  )  «  Ces  exemples  semblent  assez  suttisans 
TpJur  justifier,  etc.  -  (Mém.  de  Séguier,  p.  324 
—  Voy.  Rom.  Bourgeois,  liv.  11,  p.  /!•  —  taucnei, 
Lan»'  et  Poës  fr.  p.  37,  etc.) 

Au'  moral  :  «  Je  ne  suis  point  suffisante  assez 
«  pour  vous  desservir  d'ung  hault  guerdon.  » 
(Percef.  Vol.  IV,  fol.  17.)  . 

Il  semble  évident  qu'en  1  expression  suffisant 
assez  ou  assez  suffisant,  comme  en  celles  de  assez 
plus  ou  plus  assez,  de  moins  assez  ou  assez  moins, 
l'adverbe  assez  signifie  en  quantité. 

Certes,  fet-ele,  je  voudroie 

Avoir  assez  mains  que  ne  doie, 

S'il  fust  Belonc>na^volenté_._  ^^_^^^  ^^^  ^^^^  ^.  ^^^  .^_ 

N'ay-je  pas  la  moitié  partout? 
Nennil,  je  n'en  ay  qu'à  un  bout, 
Moins  tisse:  o'une  chamberiere. 

Eust.  Descli.  Poês.  MSS.  p.  501,  col.l. 

Bien  ayt  lianaps  d'or  amassez, 
Cent  mille  marcs,  ou  plus  asseî. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  19725  et  2b. 

Il  assemble  grands  gens  et  très  grand  baronie, 
Plus  assez  que  devant,  et  mieux  appareiUie.  ^ 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  'l''- 

Nous  avons  meilleurs  gens  et  plus  que  n'ont  assez. 

Ibid.  p.  i6à. 

...  La  profondeur  des  fossez 
Vingt  toises  ot  et  plus  asscr. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7-218,  fol.  359,  col.  2. 

Mil  ans  seront  et  plus  assfz. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  1440. 


Aujourd'hui  l'on  substitueroit  bien  ou  beaucoup 
à  l'adverbe  assez-,  dans  ces  phrases.  Peut-être  même 
faudroit-il  dire,  d'après  l'usage  moderne,  qu'en  ces 
mêmes  phrases  il  signifioit  non-seulement  en  quan- 
tité, mais  en  grande  quantité.  C'étoit  réellement  la 
signification  d'assez,  lorsqu'on  disoit  proverbiale- 
ment, «  assez  parents,  assez  tourments  ;  «  ou  lors- 
qu'on ajouloil  h  l'énumération  de  plusieurs  person- 
nes ou  de  plusieurs  choses,  en  disant ,  «  et  autres 
«  assez-,  et  des  autres  «ssez-  »  (Voy.  Cotgrave,  Uict. 

—  J.  Le  Maire,  llluslr.  des  Gaules,  liv.  III,  p.  30o 

—  Hist.  de  B.  du  Cuesclin,  par  Ménard,  p.  41,  etc.) 

.<  Si  pristrent  le  Cuens  de  Flandres et  des  Ha- 

«  mens  grant  partie,  et  des  autres  Chevaliers  «sses.  » 
(Martène\  ampl.  coll.  Contin.  de  G.  de  Tyr,  T.  V, 
colonne  G79.)  ... 

Si  l'usage  s'oppose  l'i  ce  qu  on  interprète  ossez-, 
autremenl  que  par  bien,  beaucoup,  trop,  toutes  les 


fois  que  la  signification  en  est  morale,  il  n  en  est 
pas  moins  vrai  que  cet  adverbe ,  dans  le  sens  de 
bien,  beaucoup,  exprimoit  toujours,  quoique  ligu- 
rément,  une  idée  analogue  à  celle  d'une  quantité 
physique,  d'une  grande  quantité,  même  d'une 
quantité  plus  que"^  suffisante ,  lorsqu'il  signifioil 
trop.  Il  semble  qu'on  ait  dit  en  ce  sens  :  «  Ledit 
-.  Seigneur  .luge  doit  entendre  en  quoy  gist  le  dif- 
.<  ferend  ;  et  tel  rapport  eu  faire,  que  les  pleiges  ne 
«  soient  si  ne  tant  grevez  d'assez.  »  (Hardouyn  de 
la  Jaille,  du  Champ  de  Bataille,  fol.  64,  R°  et  V\) 

Tu  doiz  estre  plains  de  largesce  ;.... 

Ce  qu'as  donner  à  chiere  lie, 

Promettre  ce  que  tu  n'as  mie 

Ne  te  chaille  d'asser  donner. 

G.  Machaul,  MS.  fol.  193,  V  col.  1. 

Plus  souvent  on  disoit  assez  pour  beaucoup, 
comme  en  ces  expressions:  «  d'assez,  plus  d'assez, 
«  trop  d'assez,  pire  d'assez,  mieux  d'assez  ou  d'assez 
»  mieux,  etc.  »  (Vov.  Hom.  de  Cliget,  .ms.  du  R. 
n-  6987,  fol,  '271,  V"  col.  1,  etc.  etc.) 

Ne  courut  pas  sitost  d'assez 

Comm'il  souioit  ;  trop  fu  lassez.  ,  „.  ,.      ,  , 

Confession  du  Renard.  MS.  de  N.  D.  cote  N,  fol.  21,  V  col.  S. 

Chil  qui  sa  Dame  prie 

Coii  dont  ses  cors  peut  estre  vergondés 
N'aime  pas  tant  comme  li  autres  d'assés. 

Ane.  PoSs.  fr.  MS.  du  Valican,  n"  1490,  fol.  149,  R*. 
Sachiés  que  plus  vous  ain  que  ne  faz  moi  d'assé.5. 

Buenon  de  Commarchics,  MS.  de  Gaigoal,  fol.  197,  R'  col.  1, 

....  Est  de  trop  maie  corroie 
Feme  ki  faucement  otroie. 
Et  li  hom  fait  pix  ke  derveis  : 
Maix  la  feme  est  pire  d'esseis.  . ,  „,  „ 

Cbans.  fr.  MS.  de  Berne,  n-  389,  part.  I,  fol.  87,  R*. 

L'espargnier  miex  d'asse:  vaudra. 

^     °  G.  Guiart,  MS.  fol.  99,  R-. 

D'assez  miex  aim  vivre  et  manoir. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7218,  fol.  158.  R°  col.  2. 

Quoique  l'adverbe  assez,  dans  l'expression  «  assez 
.<  plus  ou  plus  assez,  »  et  autres  prises  au  sens 
physique,  signifie  en  quantité,  en  grande  quantité, 
dans  les  mêmes  expressions  prises  au  sens  moral, 
il  faut  l'interpréter  par  bien,  beaucoup,  en  se  con- 
formant au  langage  moderne.  •>  Plus  gloriouse 
..  chose  et  plus  profeitaule  m'est  assez  que  je  soie 
„  olïerz  à  ti,  que,  etc.  »  (S-  Bernard,  Serm.  Ir. 
MSS.  p.  269.) 


,Ie  avois  mis  tost  mon  cuer 
En  une  Dame  que  je  amoie  ; 
El  osse:  plus  de  moi  l'amoie.  ,,.„,„.     ,  -, 

^  Fabl.  MS.  du  R.  n-  "615,  fol.  183,  R*  col.  2. 

Se  ne  Tamoie  plus  que  une  autre  assés. 
Ce  ne  seroit  pas  droite  loiautés. 

Enfance  d'Ogier  le  Danois.  MS.  de  Ga.gnat,  fol.  92.  R'  col.  I. 

Celé  meisme  poesté, 

Que  Dex  t'a  seur  les  tiens  donne, 

Aura  li  .\nemis  sor  toi, 

Et  plus  cisser,  si  comme  ce  croi. 

Vie  de  S'  Kalerinc,  MS.  de  borh.  cbifT.  LX,  col.  i)5. 

11  en  est  de  même  pour  ces  façons  de  parler, 
u  assez  meilleur,  assez  mieux  ou  mieux  assez,  pire 
«  assez,  »  et  autres  dans  lesquelles  l'interprétation 
bien  ou' beaucoup  est  indifférente.  «  Si  se  leva  en- 
«  contre  luy  et  luy  demanda:  quelles  nouvelles^ 
.  Dame,  dist-il,  bonnes.  Dieu  mercy,  as.sez  meii- 


AS 


—  243  - 


AS 


«  leures  que  je  ne  cuydoye.  »  (Lanc.  du  Lac,   T.  II, 
fol.  109,  V°  col.  2  et  110,  R"  col.  1.) 

Assés  aim  mix  espérer  que  faillir. 

Ane.  PoCl.  fr.  MS.  du  Vatican,  n-  1490,  fol.  67,  R*. 

Miex  fust  assez 

Que  jà  onques  hom  ne  fust  nez, 
Que  il  souftrist  si  lonc  lorment. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7-218,  fol.  122,  V'  col.  2. 

Je  le  sai  mieux  de  vous  assax. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7615,  fol.  170,  V  col.  2. 


Encor  valt  miaux  feme  assez, 
Que  li  avoirs  de  mile  citez. 

Fal)l.  MS.  de  Berne,  r 


354,  fol.  175,  R- col.  1. 


L'omme  trop  baut 

Qui  vault  pis  assez  que  ribaut,  etc. 

Eust.  Desch.  Poè.<.  MSS.  p.  568,  col.  2. 

Si  l'on  a  dit  quelquefois,  assez-  tost  pour  bientôt, 
c'est  dans  la  signification  de  suffisamment,  et  par 
la  raison  que  ce  qui  est  suffisant  est  bien  ;  comme  ce 
qui  est  en  quantité,  en  grande  quantité,  même  en 
quantité  plus  que  suffisante,  est  bien  relativement 
à  la  façon  d'étendre  ou  de  restreindre  ses  désirs  et 
ses  besoins.  «  Fait  autressi  assçavoir  à  tous  que 
«  assez  tost  nous  envoirons,  etc.  »  (Ord.  Tome  I, 
p.  519  ;  notes,  col.  2.) 

Dans  l'ancien  langage  des  Sermons  manuscrits 
(Je  S"  Bernard,  «  asscî::i"molt  plus  miodres  »  est  la 
traduction  du  latin  midto  melior.  «  Granz  demos- 
■'  Iremenz  fut  de  la  divine  Majesteit,  quant  à  la 
«  volenteit  nostre  Signor  se  tornat  li  awe  en  vin; 
«  mais  cil  chaingemenz  de  la  dexlre  de  Deu  ke  par 
«  cest  miracles  fut  signifiez,  est  asseiz  molt  plus 
«  miodres.  Nos  somes  tuit  apeleit  as  espiritels 
«  noces.  »  (S'  Bernard,  Serm.  François,  mss.  p.  234.) 
Cette  tautologie  nous  paroit  être  une  des  plus  sin- 
gulières de  celles  qui  surchargent  notre  ancienne 
langue.  Peut-être  imaginoil-on  que  ces  sortes  de 
tautologies,  occasionnées  sans  doute  par  le  défaut 
de  connoissances  grammaticales,  rendoient  l'ex- 
pression plus  énergique.  On  seroit  tenté  de  le 
croire,  en  voyant  que  Jean  de  Meung,  parlant  de  la 
durée  éternelle  des  peines  de  l'Enfer,  a  dit  : 

C'est  trop  plus  tisser  ; 

Car  adès  le  tormenteront 
Ceux  qui  de  povoir  ce  faire  ont. 

J.  de  .Meung,  Test,  vers  1444-1446. 

On  pourroit  citer  plusieurs  exemples  d'adverbes 
qui,  dans  certains  cas,  reprenoient  la  signification 
des  noms  dont  ils  sont  généralement  formés  par 
abstraction.  C'est  ainsi  que  l'adverbe  assez  a  signi- 
fié, comme  substantif,  suffisance ,  quantilé  de  bien 
suffisante  aux  besoins  de  la  vie. 

Toujours  lui  croist  son  appétit  ; 
Et  tient  son  assez  à  petit. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  4589  el  90. 

11  est  possible  qu'abstraction  faite  de  l'idée  de 
suffisance,  il  ait  signifié,  même  dans  l'expression, 
"  et  des  aultres  rtssex-,  »  toute  espèce  de  quantité, 

comme  en  ces  passages:  «  Dame  Dex vot  mos- 

"  trer  qu'en  assfô  de  gent  ne  doit-on  avoir  fiance, 
"  mais  en  lui.  »  (Chron.  d'Outremer,  ms.  de  Berne, 
n"  113,  fol.  119.)  «  De  leil  gent  veons  nos  asseiz,  ki 
«  par  ceu  k'il  ordément  vivent,  devienent  adès 
«  plus  ort.  »  (S' Bernard ,   Serm.   Fr.   ms.  p.  243.) 


Peut-être  que  par  l'habitude  de  ne  voir  qu'un  ad- 
verbe dans  assez ,  préférera-t-on  pour  ce  dernier 
pas.sage  et  l'expression  déjà  citée,  l'explication 
adverbiale  en  quantité,  en  grande  quantité. 

VARIANTES  : 
ASSEIS.  S'.  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  1. 
KcÉs.  Ord.  T.  III,  p.  511. 

A1S.SEIS.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  n»  389,  part,  i,  fol.  19. 
AsAT.  Frag.  de  la  Vie  de  Boëce,  MS.  de  S'.  B,-s.-L.  p.  273. 
AsÉs.  Fontaine-Guérin,  Trésor  de  Vénerie,  MS.  p.  60. 
AsEZ    Chr.  d'Outremer,  MS.  de  Berne,  n»  113,  fol.  119. 
Asseiz.  S'.-Bernard,  Serra,  fr.  MSS.  p.  28;  passhn. 
Assés.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  5,  R»,  col.  2  ;  passim. 
AssEX.  Guiteclin  de  Sassoigne,  MS.  du  R.  n»  6983,  fol.  139. 
Assez.    Orth.  subs.  -  S'.-Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  269 
Assiés-  Rom.  d'Amadas,  MS.  du  R.  n°  6987,  fol.  324. 
Assiez.  Livres  des  Machabées,  MS.  des  Cordel.  fol.  189. 
EssEis.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  n»  389,  part,  i,  fol.  87,  R». 

Assemblage,  subst.  masc.  Union ,  réunion. 
Action  d'unir,  de  réunir. 

Quoique  assemblage  désigne  encore  l'union ,  la 
réunion  de  plusieurs  choses,  même  de  choses  mora- 
les formant  un  tout,  un  ensemble,  on  ne  diroit  plus, 
en  parlant  de  la  réunion  de  plusieurs  ruisseaux 
dans  un  même  lieu,  d'une  réunion  de  grains  amon- 
celés, de  la  réunion  des  choses  convenables  à  un 
ameublement,  que  c'est  «  un  assemblage  de  cham- 
«  bre,  un  assemblage  de  grains  en  un"  mulon,  un 
«  assemblage  de  ruisselets  en  un  réservoir  d'eau.  » 
(Voy.  Cotgrave  et  Monet,  Dict.) 

Ce  mot,  encoie  usité  en  termes  de  charpenterie 
et  de  menuiserie  pour  signifier  l'union,  la  réunion, 
la  jonction  de  plusieurs  pièces  de  bois  convenable- 
ment façonnées  pour  en  former  un  tout,  un  ensem- 
ble, signifioit  aussi  l'action  d'unir,  de  réunir,  de 
joindre  ces  mêmes  pièces,  l'œuvre  de  les  assembler 
en  un  corps.  (Cotgrave  et  Nicot.  Dict.  —  Voy.  Assrm- 

DLEME.NT  et  ASSEMBLER.) 

VARIANTES    : 
ASSEMBLAGE.  Orth.  subst.  -  Cotgrave  et  Nicot,  Dict. 
.\ssA.MBLAGE.  Jlonet,  Dict. 

Assemblaille,  subst.  fém.  Union  amoureuse. 
Combat,  mêlée. 

Dans  le  premier  sens,  un  Amant  tourmenté  par 
la  crainte  qu'on  ne  devinât  l'amour  qui  l'unissoit  à 
sa  Dame,  disoit  en  se  plaignant  : 

Par  devinaille 

Nos  grièvent  félon. 
Por  ce  ne  volon 
Que  vostre  assemblaille 
Saiche,  se  nos  non. 

Ane.  Poêt.  Fr.  MSS.  avant  1300,  p.  30. 

Il  semble  que  nos  anciens  Chevaliers  voyoient 
les  combats  de  même  œilquelesTournois,  nommés 
des  Assemblées  d'honneur.  Pour  eux,  une  mêlée, 
un  combat,  étoit  une. IsscmWrtî//^.  (Athis,  ms.  fol. 
121,  R"  col.  2,  etc.  etc.  —  Voy.  Assemblée.) 

VABIANTES  : 
ASSEMBLAILLE.  Athis,  MS.  fol.  121,  R»  col.  2. 
AssAMBLAiLLE.  R.  d'Alexandre,  MS.  du  R.  fol.  166,  V». 

Assemblance,  subst.  fém.  Ressemblance.  (Voy. 
Assembler.)  Signification  analogue  à  celle  d'assem- 
bler dans  le  sens  d'assimiler,  faire  semblable.  Peut- 


AS 


—  iu  — 


AS 


être  trouvera-t-on  qu'il  faul  lire  à  sentblance  pour 
assemblance,  dans  ces  vers  : 

Asseynblaitcc  d'omme  iriez  et  destroiz 


M'a  fet  amois  et  ydropique  et  mu,  etc. 

Ane.  Foël.  Fr.  MSS.  avant  13G0, 


p.6- 


Assemble,  adv.  et  siibst.  Ensemble.  Tas.  En 

'  Au  premier  sens,  l'adverbe  Assemble  désignoitla 
réunion  de  personnes  faisant  la  même  chose  dans 
le  même  temps  et  dans  le  même  lieu.  «  Quant... 
..  tuit  orent  fait  assemble  lor  prières,  etc.  »  (Livres 
des  Machabées, Ms.  des  Cordel.  fol.  187,  R-  col .  2  ) 

Pris  substantivement,  il  peut  avoir  signilie  tas, 
l'ensemble  de  choses  réunies  dans  le  même  heu,  et 
entassées  les  unes  sur  les  autres  ;  en  latin  exagge- 
ratum.  (Gloss.  fr.  lat.  ms.  du  R.  n°  7084,  cite  par 
D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange, 
Tom.  1,  col.  335.)  ^,     .     .„   .^ 

ilais  plus  vraisemblablement,  assemble  signifioit 
en  las,  comme  adverbe.  On  se  permet  cette  conjec- 
ture d'après  le  doute  avec  lequel  assninhle  ost  expli- 
qué par  exaggeratum  vel  exuggcratim,  dans  le 
Glossaire  que  cite  D.  Carpentier,  ubi  supra. 

VARIANTES  : 
ASSEMBLE.  L.  des  Machabées,  MS.  des  C.  fol.  187,  R°. 
AssAMBLE.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  lat.  de  D.  C.  T.  I,  col.  33d. 

Assemblée,  subst.  fém.  Union  licite  ou  illicite 
de  l'homme  et  de  la  femme.  Réunion  de  personnes, 
d'animaux  et  de  choses;  troupe,  troupeau,  amas. 
Espèce  de  foire.  Combat,  mêlée.  Troupe  de  Chas- 
seurs ;  Chasse.  Mandement,  Convocation. 

Anciennement  l'union  licite  ou  illicite  pour 
laquelle  l'homme  et  la  femme  sont  formés  d'espèce 
semblable,  se  nommoit  xissemhlée.  (Voyez  Assem- 

BLAILLE,  ASSEMBLISON.) 

...  Ne  savez-vous  que  Diex  fist, 
Et  home  et  lame  ensemble  mist. 
Pour  ce  que  li  bons  conneust 
La  faïue,  si  corne  il  deust. 
Tels  assemblée  bien  avient. 

La  Vio  des  Porcs,  MS.  de  la  Claycltc,  p.  384,  col.  2. 

.  .  .  Gaufrois  a  la  Royne  espousée, 
Henris  Flandrine,  à  bonne  destinée. 
Grans  fu  la  feste  de  la  leur  assemblée. 

Enfance  d'Ogier  le  Danois,  IIS.  de  Gaignat,  fol.  119,  R"  col.  2. 

Molt  vient  or  mielx  que  soit  emblée 
A  ceux  de  fors  nostre  assemblée. 

Fabl.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  81,  V"  col.  2. 

Mais  on  qualifioit  ù'assemblée  dampnée,  l'union 
criminelle  d'homme  marié  avec  femme  mariée. 
«  Fut  engendrez  et  nez  de  assemblée  dampnée;  c'est 
Cl  assavoir  de  homme  marié  en  famé  mariée.  » 
(D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au 
mot  Assembleia,  col.  335;  tit.  de  1331.  —  Voyez 

AsSEMIiLEMENT.) 

Celte  première  idée  d'union  élanl  généralisée,  le 
mot  Assemblée  signifioit  et  signifie  encore  la 
réunion  de  nombre  de  personnes  en  un  même  lieu 
et  pour  le  môme  dessein.  (Voy.  Froissart,  Vol.  I, 

?.  199,  etc.  etc. IDelii,  l'ancienne  expression,  à  asscm- 
lée  :  c'est-à-dire,  en  troupe.  «  Ne  pevent  lesdiz 
«  Supplians  peschier  à  assemblée,  ne  autrement.  " 


(D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au 
mol  Asseinbleia,  col.  335;  tit.  de  1367.) 

Si  l'on  ne  dit  plus  de  gens  réunis  en  troupe,  que 
c'est  une  assemblée,  on  diioit  bien  moins  encore 
assemblée  d'animaux,  asscinhlée  de  poissons,  en 
parlant  de  poissons  réunis  en  troupe,  d'animaux 
réunis  en  troupeau.  L'extension  de  celte  acception 
étoil  telle  que  la  réunion  de  plusieurschosesafinir 
dans  un  jour,  l'amas  de  quelque  chose,  étoit  une 
assemblée.  On  disoit  en  ce  sens,  «  faire  assemblée 
«  de  beaucoup  de  choses  en  un  jour,  faire  assemblée 
«  de  quelque  chose.  »  (Rob.  Estienne,  Nicol  et 
Monet,  Dict.) 

On  parlicularisoit  l'acception  générale  A'assem- 
blée,  réunion  de  nombre  de  personnes  dans  un 
même  lieu,  en  nommant  Assemblées,  ces  Foires 
qu'autorisent  de    toute  ancienneté    les  Fêles  de 
Paroisses,  et  où  le  plaisir,  bien  plus  que  le  com- 
merce, rassemble  et  réunit  plus  ou  moins  grand 
nombre  de  monde.  On  a  distingué  ces  Assemblées 
ou  Foires,  encore  ainsi  nommées  en  Normandie, 
non-seulement  des  Foires  établies  pour  le  commerce 
d'une  Province  ou  d'un  Royaume,  maisdes  Marches 
établis  pour  celui  d'une  Ville  ou  d'un  Bourg.  (Voy. 
Du  Gange,   Gloss.  l?-t.  T.  IV,  au  mot  Mercalnm, 
col    G81.)   Dans  la  Coutume  de  Ghàteauneuf,  les 
Assemblées  n'étoient  ni  Foires,  ni  Marches,  quoi- 
qu'on y  vendit  les  mêmes  menues  denrées.  On  n  y 
faisoit  commerce,  ni  de  grains,  comme  dans  les 
Marchés,  ni  de  chevaux  et  bestiaux,  comme  dans 
les  Foires  :  aussi  en  faisoit-on  la  distinction.  «  Le 
«  Seigneur  prend  pareils  droicts  aux  Assemblées 
»  qui"^se  font  ez  Parroisses  eslans  au  dedans  des... 
«  Seit'-neuries,  qu'es...  Foires  et  Marchés  dudict 
«  Chasteau-neuf,  sur  les  non-Bourgeois    d'icelui 
u  Ghasleau-neuf,    vendans    esdicles    Assemblées, 
«  pains  blancs,  gasteaux,...  el  autres  menues  den- 
«  rées   »  (LaThaumassière,  Coût,  de  Berry,  p.  IGi.i 
Dans  les  siècles  brillans  de  la  Chevalerie,  les 
Tournois,  ces  spectacles  militaires  si  pompeux,  on 
s'assembloil  l'élite  des  Chevaliers  unis  et  divises 
par  l'amour  de  la  gloire,  étoient  des  Assemblées 
dniOHueur.  Ce?.  Assemblées  dlwnnenr,  ou  Combats 
de  plaisance,  comme  on  lit  dans  La  Colombiere 
(Théàt.  d'honneur,  Préf.  p.  iv),  étoient  une  vraie 
ima"-e  de  la  guerre,  dont  les  combals  sanglans  ne 
furent  aux  yeux  d'un  Chevalier  que  des  Assemblées 
comme  les   Tournois.   Aussi,  dans   nos    anciens 
Auteurs,    Poètes,    Romanciers,    Historiens,    une 
Mêlée,  un  Combat  est  une  Assemblée.  «  A  l  .isam- 
«  blée  que  Crestien  et    Sarrasins    firent    devant 
«  Arssur,  fu  Jakemes  d'Avesnes,  li  bon  chevaliers, 
■>  ochis.  »  (Chron.  d'Outremer,  Ms.de Berne,  ""l'S. 
fol  146  —  Cbron.  de  Saint  Denys,  T.  I,  fol.  lil.  — 
Cotgrave  el  Nicol,  Dicl.  —  Voy.  Assemulaille,  Assem- 

BLEMENT  Ct  ASSEMBLER.) 

C'est  par  une  espèce  de  mélonymie  connue  des 
Grammairiens,  que  le  mot  Assemblée  a  signibe  et 
signilie  encore  aujourd'hui  en  termes  de  \  enerie 
lelieu  où  se  réunissent  les  Chasseurs,  avant  que 
d'aller  au  laisser-courre ;  mais  plus  naturellement 


AS 


—  245  — 


AS 


il  signifioil  la  réunion  des  Chasseurs  en  ce  même 
lieu.  Troupe  de  Cliasseurs.  (Voy.  Cotgrave  et  Nicot, 
Dict.)  Si  par  une  autre  espèce  de  métonymie,  il  a 
signilié  la  Chasse  même  pour  laquelle  les  Chasseurs 
s'étoient  réunis,  alors  l'expression  de  ce  qui  pré- 
cède devenoit  celle  de  ce  qui  suit.  En  ce  sens,  on  a 
dit  de  Catherine  de  Médicis  :  «  Quand  le  Roy  son 
.1  mari  vivoit,  elle  alloit  quasi  ordinairement  avec 
«  lui  à  VAssemblée  du  Cerf,  et  autres  Chasses.  » 
(Brantôme,  Dames  illustr.  p.  47.  —  V.  Nicot,  Dict.) 
Enfin,  par  cette  même  espèce  de  métonymie, 
l'expression  de  ce  qui  suit  devenoit  celle  de  ce  qui 
précède,  \orsq\i' Assemblée  signilioit  «  Mandement, 
«  Convocation  de  Gens  de  guerre  pour  eux  assem- 
«  Lier  en  quelque  lieu,  et  de-là  yssir  et  marcher  en 
«  campagne.  «  (Cotgrave  el  Mcot,  Dict.  —  Voyez 

ASSEMDLEJIENT  et  ASSEMBLER.) 

VARIANTES    : 
ASSEMBLÉE.  0.  siibs.  -  L.  du  Lac,  T.  I,  fol  45,  R»  coL  1. 
AsAMBLÉE.  Chron.  d'Outremer,  MS.  de  Berne,  fol.  146. 
AsEMBLÉE.  Ch.  Fr.  MS.  de  Berne,  n»  389.  part.  I,  fol.  92,  R». 
Assamblée.  Enfance  d'Ogier  le  Danois,  MS.  de  G.  f.  119. 

Asseinbléement,  adverbe.  Ensemble,  en  com- 
munauté ;  ensemble,  de  compagnie;  ensemble, 
d'un  commun  avis.  On  a  fait  l'éloge  de  la  parole, 
en  disant  que  par  sa  vertu,  ■<  Peuples  farouches,  et 
«  çà  et  là  espars,  furent  unis  assemblément,  et 
«  invitez  à  ceste  société  civile.  »  (Pasquier,  Ubl 
supra.)  «  Prindrent  assembléeinentle  chemin  droit 
«  ù  ung  arivouer.  »  (D.  Carpentier,   Ubi  supra.) 

«  Comme  pour  la  nécessité  apparissant il  soii 

«  accordé  assembliement  de  plusieurs  de  noz... 
«  Prelaz  et  Barons,  avecnostre  Conseil,  que,  etc.  » 
(Ord.  Vbi  supra.  —  Voy.  Assemble.) 

VARIANTES  : 
ASSE.\1BLÉEMENT.  D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du 
Cange,  au  mot  .Asseinbleia,  col.  385  ;  tit.  de  1470. 
.ASSEMBLÉMENT.  Pasquier,  Œuv.  mesl.  p.  262. 
Assembliement.  Ord.  T.  I,  p.  347. 

Assemblément,  subst.  masc.  Union  del'homme 
et  de  la  femme.  Réunion  de  nombre  de  personnes; 
réunion,  rencontre  de  deux  Armées  ;  mêlée,  com- 
bat. Réunion,  mélange  de  plusieurs  choses.  Convo- 
cation. 

C'est  dans  le  proverbe,  qui  se  ressemble,  s'assem- 
ble, qu'il  faut  chercher  la  raison  pour  laquelle 
assemblément  a  signifié  union  de  l'homme  et  de  la 
femme.  «  Sont  les  deux  Vierges  mis  ensemble... 
«  et  ce  dont  ilz  n'avoient  riensceu,  leur  apprent 
«  Nature.  Si  se  entre  approuchentsi  charnellement 
«  que  les  fleurs  de  virginité  sont  espandues;...  et 
«  pour  ce  que  cest  assemblément  fut  fait  par  péché 
«  et  par  ygnorance,  etc.  »  (Lanc.  du  Lac,  T.  II, 
fol.  30.)  On  qualifioit  l'inceste,  d' assemblément  illi- 
cite avec  parente,  alliée,  ou  religieuse.  (Rob.  Eslienne 
et  Nicot,  Dict.  —  Voy.  Assemblaille,  Assemblée,  Assem- 
bler, ASSEMI'.LISON.) 

Par  extension,  la  signification  d' assemblément 
étoit  la  même  que  celle  d'assemblée,  réunion  de 
nombre  de  personnes  en  un  même  lieu  et  pour  le 
même  dessein.  On  disoit  :  «  Là  ot  moult  grant 
«  assemblément  de  genz.  »  (Fabl.  .ms.  de  la  Clayette, 


p.  400.  —  Voy.  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict.)  Mais 
on  particularisoit  cette  acception  générale,  en  dési- 
gnant parce  mot  la  réunion  de  deux  Armées,  et 
même  leur  rencontre  suivie  d'une  mêlée,  d'un 
combat,  que  l'on  nommoit  Assemblément.  (Rob. 
Estienne  et  Nicot,  Dict.  —  Voy.  Assemblaille,  Assem- 
blée et  Assembler.)  «  Le  Roi  Louis  envoya  à  M.  de 
"  Nemours  la  puissance  générale  sur  toute  l'Armée, 
«  et  pour  estre  Gouverneur  de  Milan;  lequel  rtsscm- 
«  blement  desdites  deux  Armées  par  lui  entendu, 
«  diligence  fut  d'assembler  la  sienne.  »  (Mém.  de 
Rob.  de  la  Mark,  Seigneur  de  Fleuranges,  ms.  p.  H4 
et-llô.)"  Sitostque  l'Archeprestre  veit  Vasamble- 
«  ment  de  la  bataille,  et  que  l'on  se  combattoit, 
«  il  se  bouta  hors  des  routes.  «  (Froissart,  Vol.  I, 
page  275.) 

Piétons  queurent,  cil  d'armes  brochent  : 
De  toutes  pars  communément 
Doulereus  est  V assemblément. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  96.  V'. 

En  parlant  de  choses  dont  la  réunion,  et  même  le 
mélange,  forme  un  ensemble,  un  corps,  un  tout,  on 
disoit  «  assemblément  d'onguents  ;  assemblément 
«  de  choses  qui  se  prennenl  ensemble  et  s'endur- 
«  cissent;  assemblément  bien  ordonné  des  mem- 
«  bres.  »  (Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict.  —  Voyez 
Assembler.)  Dans  le  sens  physique  et  moral,  assem- 
blément étoit  souvent  le  même  que  notre  mot 
assemblage.  «  Qui  croira,  selon  Démocrite  et  Epi- 
«  cure,  le  Monde  et  ce  qui  est  en  iceluy  contenu, 
«  avoir  esté  composé  par  V assemblément  fortuit  de 
«  petits  corps  indivisibles  qu'ils  appellent  atomes.  " 
(Dialog.  de  Tahureau,  Epit.  p.  xiv.)  «  Hui,  saverez 
c<  que  nostre  Sires  venrat....  Si  est  cil  asscmble- 
<■  men:  de  paroles  plus  forz  ke  ne  soit  11  premiers 
«  estaulissemenz  des  paroles  ;  et  par  avanture  de 
«  tant  plus  fors  de  tant  cum  il  al  plus  grant  desse- 
«  vrance  entre  la  figure  et  la  vériteit.  »  (S'  Bern, 
Serm.  fr.  ms.  p.  GD.)  ■<  La  fortune  et  la  vertu  ne 
«  s'assemblent  guères  souvent  ensemble,  depuis 
«  ces  braves  Romains  de  jadis  qui  en  firent  et  achè- 
te verent  V assemblément.  »  (Brantôme,  Cap.  Estr. 
T.  Il,  p.  286.  —  Voy.  Assemblage.) 

Enfin  assemblément,  que  Rob.  Estienne  et  Nicot 
expliquent  par  convocation,  est  une  preuve  qu'as- 
sembler peut  avoir  signifié  convoquer.  ("Voyez 
Assembler.) 

variantes  : 

ASSEJIBLEMENT.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  69. 

AsANBLEMENT.  Fabl.  MS.  du  R.  n"  79S9,  fol.  65,  R»  col.  1. 

Asemulement.  Fabl.  MS.  de  la  Clayette,  p.  456,  col.  1. 

AssAMBLEMENT.  Rom.  de  Narcisse,  MS.  de  S.  Germ.  f.  120. 

Assembler,  verbe.  Assimiler,  faire  semblable. 
Assembler,  unir,  réunir,  former  un  tout,  un  ensem- 
ble. Se  confondre,  être  confondu.  S'assembler,  être 
assemblé,  être  réuni.  Approcher,  joindre,  jouter, 
attaquer,  se  mêler,  combattre.  Faire  un  mouvement 
vers  l'ennemi,  aller  à  lui,  fondre  sur  lui.  Convo- 
quer. 

De  l'adjectif  latin  Similis  s'est  formé  le  verbe 
Simulare,  le  même  que  Similare,  en  françois  faire 
semblable.  (Voy.  Marlinius,  Lexic.  Philolog.  —  Du 


AS 


—  24G  — 


AS 


Cansfe,  Gloss.  lat.  T.  VI,  col.  .V2'2.)  II  seroil  donc 
possible  qu  assembler,  de  même  origine  que  le  com- 
posé latin  assimilare  ou  assimulare,  eût  signifié 
assimiler,  faire  semblable  (1). 

Reçoy  ton  Amadis  ;  pour  tout  jamais  reçoy 

Celui  qui  t'aimera  d'inviolable  foy... 

Si  ton  amitié  douce  à  la  mienne  s'assejnble, 

De  mesme  à  tout  jamais  nous  revivrons  ensemble. 

Poës.  d'AmadIs  Janiyn,  fol.  73,  V". 

Mais  il  existe  une  analogie  si  naturelle  entre  les 
idées  de  ressemblance  et  d'unité,  qu'en  ces  vers  la 
signification  d'assembler  peut  être  relative  à  celle 
d'unir.  Ce  verbe,  dans  les  passages  suivans,  dési- 
gne l'union  pour  laquelle  l'homme  et  la  femme  ont 
été  formés  d'espèce  semblable.  •>  Adans...  ploura 
«  Abel  que  Cayn  eût  occis;  et  oncques  puis  ne  vaut 
<>  s'asanlcr  h  se  famé."  (Lucidaires,  .■««.  du  R.  n»  708!», 
fol.  219,  R»col.  2.) 

Com  je  vous  oi  chi  deviser 
De  lui  et  de  moi  assambler, 
Jamais  n'aurai  autre  Signor. 

Rom.  d'Amadas,  M.S.  du  K.  n'  C987,  fol.  331,  K-  col.  1. 

En  parlant  de  l'union  hypostatiquedu  Verbe  avec 
la  Nature  humaine  dans  le  mystère  de  l'Incarnation, 
l'on  a  dit  :  «  Tôt  ensi  cum  hostre  foyaules  moye- 
«  nières  .Ihesu  Criz  assemblât  par  Lrès-merveillous 
«  Sacrement,  en  une  personne,  la  sostance  de  Deu 
»  et  de  l'Omme,  etc.  »  (S".  Bernard,  Serm.  fr.  mss. 
p.  385.) 

C'est  par  extension  de  l'idée  de  ressemblance  à 
celle  de  convenance,  que  ce  verbe  a  signifié  et  signi- 
fie encore  l'assemblage,  l'union,  la  réunion"  de 
choses  différentes,  mais  convenables  pour  foi'mer 
un  tout,  un  ensemble.  Quelque  usitée  que  soit  cette 
acception  d'assembler,  spécialement  en  termes  de 
menuiserie  et  de  charpenterie,  on  uediroit  plus  que 
a  les  hommes  sont  assemblez  et  conjointz  de  vei- 
«  nés,  nerfs  et  os.  »  (Voy.  Rob.  Estienne  et  Nicot, 
Dict.) 

On  oublioit  sans  doute  le  sens  primitif  et  littéral 
d'assembler,  lorsqu'en  parlant  de  personnes  ou  de 
choses  réunies,  on  disoit  qu'elles  étoient  assemblées 
ertsemble.  (Voy.  Rob.  Estienne  et  Nicot,  Dict.)  «  Le 
«  Roy  Alexandre  et  celuy  d'Angleterre  et  d'Es- 
«  cosse  qui  s'estoientrtsscm/;/^?:^  ensemble,  s'alerent 
«  tirer  plus  près  du  trépigny  pour  mieulx  veoir  les 
'<  grans  chevaleries.  •>  (Percef.  Vol.  I,  fol.  131,  V" 
col.  ■2.)  «  Li  Chevaliers  de  la  Terre,  et  li  Templiers,  et 
"  li  Hospitaliers  s'assernblerent  ensemble,  et  pris- 
«  Irent  conseil  à  cui  il  porroient  donner  la  demoi- 
«  selle.»  (Contin.  de  G.  deTyr;  Martene,  Ampl. 
Col.  T.  V,  col.  680.)  »  Oste  une  coiffe  de  gresse  qui 
»  est  appelléefoullie  (2),  et  l'osteavecques  l'autre  que 
«  tu  trouveras  es  bouiaux  ;  si  les  mesie  et  assem- 
«  blc  tout  ensemble.  »  (Modus  et  Racio,  ms.  fol.  30.) 

On  abusoit  de  ce  même  sens,  lorsqu'on  croyoit 
peindre  le  ciel  se  confondant  avec  la  terre,  un  pont 
fondant  et  s'écroulant  dans  l'eau,  en  disant  qu'ils 
nssembloient  ensemble. 


...  Du  tonnerre  à  la  reonde 
Toute  terre  senti  trembler. 
Je  cuidai  bien  que  assembler 
Feist  De.\  ciel  et  terre  eiisamble. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7815,  fol.  186,  V-  col.  9. 

.  .  .  L'eve  les  fesoit  trambler 

Si  fort  qu'il  sembloit  qn'assnmbler 

Deussent  pontet  eaue  ensamble. 

Fabl.  MS.  de  R.  n-  7-218,  fol.  360,  R*  col.  1. 

C'est  par  abstraction  de  l'idée  de  cette  convenance, 
au  moyen  de  laquelle  plusieuis  choses,  quoique  dis- 
semblables, peuvent  être  réunies  et  former  un  tout, 
que  le  verbe  assembler,  neutre  dans  ces  vers,  aura 
signifié  une  idée  de  confusion;  idée  très-différente 
de  celle  d'union,  réunion,  si  naturellement  expri- 
mée par  ce  même  verbe. 

Dans  les  passages  suivans,  il  désigne  la  réunion 
de  plusieurs  Chevaliers  contre  leurs  adversaires;  la 
réunion  de  deux  Armées  ennemies  dans  un  lieu  où 
elles  se  joignent  pour  combattre;  la  réunion  de 
plusieurs  personnes  qu'un  état  ou  un  intérêt  sem- 
blable, appelle  dans  un  même  lieu,  et  pour  le  même 

dessein.  «  Gaheriet sitostcomment  il  fut  assem- 

«  blé  avec  Hector  et  Monseigneur  Gauvain,....  si  se 
«  travaillèrent  tant  entre  eulx  trois....  qu'ils  arres- 
«  terent  toute  la  force  au  Roy  Claudas.  »  (Lanc.  du 
Lac,  T.  III,  fol.  45.)  »  Devant  un  chastel  c'en  apele 
«  Aràsnv...  asamblerent  li  Crestien  et  li  Sarrasins. 
«  et  se  combattirent.  »  (Chron.  d'Outremer,  ms.  de 
Berne,  ir  H3,  fol.  liG.) 

Il  assainhlerent 

A  parlement  ;  si  esgarderent 
Qu'entr'eux  deussent  avoir  Roi. 

Fabl.  d'Esope,  MS.  du  R.  n"  7989.  fol.  171,  V"  col.  1. 

Aujourd'hui  ce  verbe  est  actif  ou  réciproque,  dans 
le  sens  de  se  réunir,  ou  de  réunir  en  un  même 
lieu  plusieurs  personnes  ou  plusieurs  choses;  et 
en  ce  sens  il  n'est  pas  moins  ancien  dans  notre  lan- 
gue, qu'au  sens  neutre  être  réuni.  (Voy.  Chron. 
d'Outremer,  ms.  de  Berne,  n"  113,  fol.  120.  —  Cot- 
grave,  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dicl.) 

Nos  ancêtres ,  familiarisés  avec  les  spectacles 
militaires,  ont  pu  trouver  naturel  de  présenter  une 
mêlée,  un  combat,  sous  l'idée  d'union,  de  réunion, 
en  les  comparant  aux  Joules  et  Tournois  où  la  Che- 
valerie se  réunissoit  pour  faire  montre  de  force  et 
d'adresse.  Pour  eux,  combattre  céXo'it  assembler  ; 
approcher  l'ennemi,  le  joindre,  jouter  contre  lui, 
l'attaquer,  le  combattre,  c'étoit  assembler  à  lui, 
s'assembler,  etc.  «  Puis  s'assemblèrent  ensemble 
«  vigoureusement  et  de  grande  aspresse.  «  (Mém. 
d'OliVier  de  la  Marche,  liv.  I,  p.  325.)  «  Quant  les 
«  quatre  batailles  furent  venues  et  assemblées  aux 
«  Gens  de  Monseigneur  "Gauvain,  lors  commença  la 
«  destresse  de  la  Chevalerie.  »  (Lanc.  du  Lac, 
T.  III,  fol.  'i5.)  «  Le  Soudan  emprint  hardiesse  qu'il 
«  pouroit  assembler  front  à  front  à  tous  les  Cres- 
«  tiens.  »  (Chron.  de  S'.  Denys,  T.  I,  fol.  2G1.) 


(\)  Le  mot  est  fort  ancieni  on  le  rencontre  déjà  dans  la  Chanson  de  Roland  :  «  AsemMel  s'est  as  Sarrazins  messages  »  , 
V.  367  ;  nous  sommes  donc  revenus  au  sens  étvmologiquo  de  simiil,  mettre  ensemble,  se  rejoindre,  (n.  e.)  —  (2)  Vient  d'une 
forme  latine  foUipula.  (n.  e.) 


AS 


—  247 


AS 


Aler  vouloit, 

Ainsi  com  devisé  l'avoit, 
Au  Roi  Primonus  assembler. 

Cléoniadès.  MS.  de  Gaignat,  fol.  3i,  R»  col.  2. 
A  Chevaliers  n'asemble  c'a  terre  ne  le  porte. 

Ane.  l'oèt.  fr.  MSS.  avant  1300,  p.  855. 
Vait  premier  asambkr  : 
Margherite  d'Oisy 
Moet  à  li  por  jouster. 

Ibiil.  p.  1^283. 
...  Il  voit  d'armes  son  content. 
Grant  proesce  où  ces  cuers  entent 
Le  semon  de  lot  assembler. 

Kabl.  JIS.  du  K.  n-  7615.  fol.  164.  R-  col,  2. 
.  .  .  Selon  ce  que  dit  le  Saige, 
Folie  n'est  pas  Vasselaige. 
N'est  pus  sens  que  Capitaine  aille 
Assembler  devant  la  bataille. 

Gacc  de  la  liigne,  des  Dcduils,  MS  fol.  55,  Vv 

On  a  même  dil,  en  parlant  du  péril  auquel  s'ex- 
pose un  Chasseur,  en  approchant,  en  joignant  en 
attaquant  le  Cerf  ou  l'Ours  :  ..  Ceux  de  cheval  le 
«  doivent  férir  en  giétant  de  leurs  lances  ou  espieux 
«  et  non  pus  assembler  à  Iv  ne  de  l'espée-.  car 
«  il  l'accoleroitet  bayseroit  non  pas  trop  gracieuse- 
«  ment.  »  (Chasse  de  Gaston  Phebus,  jis.  p.  270). 

C'est  doncques  folie  tréi-fiere 
D'Espée  o  tel  Cert  assembler  ; 
Ce  pourroit  outrage  sembler. 

Fonlaints  Guerin,  Tiésor  de  Vénerie,  US.  p.  47. 

Ce  verbe  assembler,  étant  pris  comme  substantif 
signinoit  combat,  combat  à  outrance,  lorsqu'oii 
disoit  «  quand  ce  vient  à  VassemUer,  à  l'assembler 
.<  des  lances,  des  épées.  »  (Voy.  Hist.  de  Loys  III,  duc 
de  Bourbon,  p.  ICO.-  Gacede  la  Bigne,  des  Déduits 
MS.  fol.  124.  -  Athis,  MS.  fol.  45.)  «  Les  bons  Capitai- 
«  nés,  quant  se  vient  au. joindre  et  à  r«s<'?«Wn'  dient 
«  lousjours  serrez,  serrez  :  et  si  vous  diz  que  à  la 
«  guerre  ung  bon  docteur  en  ceste  science  estoit  La 
«  Hire   »  (Le  Jouvencel,  ms.  p.  582.  —  Voy.  Assem- 

L'action  de  joindre  son  ennemi,  pour  le  com- 
battre, est  précédée  d'un  mouvement  que  désio-noit 
bgurement  le  même  verbe  assembler.  Dans  les  nas- 
sages  suivans,  rtssc/Hf^/cr  à  l'ennemi,  assembler  sur 
lui  c  est  sans  doute  aller  à  l'ennemi,  fondre  sur  lui 
«  Le  comte  de  Montfort  véant  l'homme  ou  monde 
"  que  plus  11  hayoit,  misl  l'escu  avant  et  saisist  une 
«  lance  moult  forte  et  roide,  désirant  de  assembler 
«  sur  luy  ;  mais  Gérard,  etc.   ..  (Ger.  de  Xevers 
part.  Il  p.  103.)  «  Pour  rtssewiWer  aux  Sarrasins    "' 
-•  sembatirent  incontinent  entre  les  pieux  qui  fort 
'■  estoient  roides  et  aigus,  si  qu'ils  entroient  es  pan- 
"  ces  des  chevaux.   •■  (Hist.  de  Jean  de  Boucicaut 
Jiv.  I,  p.  94  ;  in-4°  Paris,  1010.)  "i-iodui. 

Ne  s'iert  encore  Oudart  meu  ; 

En  grant  pensée  iert  qu'il  feroit, 

Et  quel  part  il  assembleroil  ; 

Ou  au  flo  que  li  autre  assaillent,  etc. 

G.  Guiarl.  MS.  fol.  267,  V'. 

C'est  par  la  même  figure  qu'flsst'mft/É'r  aura  sieni- 
lie  la  convocation  d'après  laquelle  les  Membres 
d  un  Conseil  ou  d  une  Cour  de  Justice  s'assemblent, 

deven^aît  MN.Tr'  '*'  """  ''  ''^""'"'  P^"'  ''^"'''^  P^''^''  ^om-ne  notre  mot  ...-.,.  Mais  pr.mk.  ement, 


se  reunissent  en  Corps,  pour  délibérer,  pour  juoer 
(^oy.  Rob.  Estienne  et  iMcot,  Dict.)  «  Le  Supplfant 

"  "0"s  requist que  nous  li  vousissiensrtssfl«to- 

«la  court  des  frans  hommes  de  nos  dis  Seigneurs  » 
(U  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cahge  T  'l 
col.  234;  lit.  de  1358.)  &c,  i.i, 

variantes: 
ASSEMBLER.  Orih.  subs.  -  S.  Bern.  Serm.  fr  MSS  d  'W; 
Ansanbler.  Guiteclin  de  S.  Ms.  du  R.  n»  6985  tof' «q' 
AsAMBLER.  Ane.  Poët.  Fr.  MS.  av.  1300,  p.  1335 
ASANBLER   Fabl.  MS.  de  Berne,  n»354,  (ol.  68,  V»  col   1 
ASANLER.  Lucidaires,  MS.  du  B.  n»  7989,  fol  219 
AsEMBLER.  Athis,  MS.  fol.  45  V»  col  "> 

.a^^K^g:'r.t^;;;!l3l^,t!^^S-' ^"^^  ^'-^- 

LssAMBLER.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  114. 

"^.^^^'"yers  subst.  masc.  Mêlée,  combat.  On  a 
vu  1  miïnM assembler,  avec  la  même  signitication 
parce  que  1  infinitif  d'un  verbe  désigne  absolument 
une  action  laite  dans  un  temps  indéterminé,  et  nue 
désignant  une  action,  on  l'emploie  comme  subs- 
tantit,  même  avec  la  terminaison  plurielle.  De  là 
iiniimM  assemblers  dont  assambley  s  est  la  variante 
dans  les  vers  suivans  : 

Ly  as.^emblers  fut  mauLx,  hez-Ies-vous  amassés  ■ 
Mais  11  départis  fut  à  touts  pires  assés.  ' 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  66. 
VARIANTES    : 
ASSEMBLERS.  Ger.  de  RousiUon,  MS.  p  C6 
AssE.MBLEYs.  Ibid.  Variante.         '-!'•• 

Mlffo*^?'*''"^^?  ^"^^''  /■'''"•  l'nion  de  l'homme 
et  de  la  femme.  Reunion  de  nombre  de  personnes 
Signitications  analogues  à  celles  d'Assemblement  et 
Assemblée,  et  dont  la  preuve  nous  paroît  superflue 
(\  oy.  AssEMiiLEJiEXT  et  Assemblée.) 

VARIA.^TES  : 
ASSEMBLISON.  Siège  de  Troye,  MS.  du  R  fol   103 
ASSAMBLISON.  Ibid.  fol.  118. 

Assemblure, s«/ys;.  fém.  Assemblage;  jointure 
(Lotgrave,  Rob.  Estienne,  Nicot  et  Monet,  Dict.) 

VARIANTES  : 
ASSEMBLURE.  Colgrave,  Rob.  Estienne,  Dict. 
AssA.MBLURE.  Monet,  Dict. 

Assen,  subst.  mase.  Signe,  indice,  renseigne- 
ment, connoissance.  Chose  qui  indique  les  limUes 
les  tenans  et  aboutissans  d'un  héritage.  Sentier' 
voie.  Circonstance.  Prévoyance. 

En  termes  de  chasse,  on  nomme  aujourd'hui 
connoissaiice,  les  signes,  les  indices  auxquels  on 
peut  reconnoitreoù  est  la  bête  que  l'on  a  quêlée  et 
détournée.  Telle  paroit  être  l'acception  d'asst^msfl) 
dans  la  Chasse  de  Gaston  Phebus,  .ms.  p  IT'^  Ouoi 
qu'il  en  soit,  avoir  l'assen  d'une  chose,  c'étoit  pro- 
bablement avoir  desrenseignemenssur  cette  même 
chose,  la  connoître  d'après  ces  renseiguemens. 
(Fabliaux,  ms.  du  R.  n°  7CI5,  nbi  supra.  —  Vovez 

ASSENSER.)  •' 

Dans  la  Coutume  de  Lille,  les  choses  qui  li  mi- 


en position  latine 


AS 


—  248  — 


AS 


inipnt  un  hérilaec,  qui  on  indiquoient  les  tenans  et 

a  comoisins.     v^u  9-21.)  „  Pour  deuemenl 

:'l^l  "eïonnS  el  «  ";£  ^ulrl  deux  confins  de 

n  disons  e  héritages,  est  requis  faire  évoquer  et 

SdTounier  sur  leîieu,  le  Prévost  de  Ldle  ou  son 

:  StèSt:  quatre  Eschevins  du  moms  et  les 

?  emiSse  d-hé  ila^i-es  circonvoisins    cont.guz  et 

:  o3!".ïl'un  l'autre,  VO^^^ ^^^"^^^'f^i 
a  sance  ;  n'est  qu'entre  lesdits  liei  itages  i  eusi 
:  bimfes,  asscnl  ou  séparations  notables.  "  (Ibid. 

''Tslroit  possible  qu'on  eût  nommé  assens,  les 
.Pntiïs  d'une    orêt,  parce  qu'ils  indiquent  la  voie 
noir  en  sX"   Sire,  nous  sçavons  mieulx  les 
Tassens  et  con  rées  de  la  foresl  que  vous  ne  fa.c- 
es    fl  nous  convient  aller  devers  Solei  levant 
.  pour  aller  à  Tiinouant  ;  et  vous  en  yrez  au  con- 
tra re(Percef.  Vol.  I,  fol.  -'lO,  R°  col   1.)   . 
C  e'st'dans  îe  sons  de  voie,  sentier  au  fgure  v  le 
moyen  de  sortir  heureusement  dune  enti éprise, 
qu'on  a  dit  : 

Oui  raison  croit,  droiture  et  sens, 

El  chemin  et  ou  droit  assens 

^'XTŒ.  M-l";ls.ïe%a-,,n..  fol.  1«,  K-  col.  i. 

Qui  set  les  dis,  et  les  assens 
De  dire  et  de  biaus  nios  trouver, 
Volentiers  se  doit  esprouver 
Enraisonetenvénte..^.^^^^,^^^^.^^,, 

Il  semble  que  dans  le  sens  de  circonstance,  on 
ail  dit  : 

A  cel  tans  et  en  cel  aseiis, 
Moru  promons  li  quens  de  bens. 
Renaus,  ses  fius  ot  la  Conte, 


Seroil-ce  parce  que  les  circonstances  du."  fait' 
d'un  événement,  indiquent  l'idée  qu  on  doit  s  en 
faire,  qu'elles  limitent  cette  idée  et  la  de  erm.nen  ? 
Alors  cette  acception  figurée  seroit  relative  a  celle 
A-asscns,  indication  de  lenans  et  aboutissans.  Nous 
disons  figurément  d'un  bomme  qui  sait  toutes  es 
circonstances  d'une  affaire,  qu'il  en  sait  tous  les 
lenans  et  aboulissans.  ,  ■,t„„û 

Enfin,  seroit-ce  parce  que  la  prévoyance  indique 
la  voie,  le  moyen  qui  peut  conduire  au  but  ou  i  on 
vise,  que  dans  le  sens  de  prévoyance,  on  auroit  dit, 
en  parlant  de  Charlemagne  : 

Ce  fu  cil  qui  par  son  grant  sens, 
Par  sa  proaice  et  par  assois, 
Gouverna  le  règne  de  France. 

Ph.  Mouskcs,  MS.  p.  «3. 

Peut-être  iugera-t-on  qu'en  ces  vers  assens  est  de 
môme  origine  et  de  même  signification  qu'en  ces 


expressions  encore  usitées  dans  la  basse  Norman- 
die, agir  cVassem,  parler  d'assens.  (\oy.  Assens.) 

VARIANTES  : 
ASSEN.  Fabl.  MS.  du  U.  n»  7G15,  fol.  170,  V»  col.  2. 
ASESS.  Ph.  Mouskes,  MS.  |>.  41o. 
AssEI^^  Chasse  de  Gaston  PhebusMS.  p.  1/-. 
Assens.  Alars  de  Cambrai,  Moralités,  MS.  de  G.  loi.  !«.. 

Assenai,  subst.  masc.  Chose  enseignée;  con- 
noisîame  acquise.  Part,  portion  assignée.  Don 
pai  lequel  un  Père  assigne  h  des  enians  de  quoi 
^-  'tabl  r  se  marier.  Domaine,  héritage  assigne  pour 
le  mvèmenî  d'un  cens,  d'une  rente.  Domaine, 
héiSe  assi-né  pour  sûreté 'de  douaire  et  autres 
drôil^ma?i.£Lx.  Assignation  de  rentes,   de 

'^^'ofcroi'iSueïJl'er  d'une  chose  par  assenimis, 
c'étoit  en  parler  d'après  ^"elques  renseignemens 
d'après  quelque  connoissance  acquise.  (V.  A^.eneh.) 

Cil  bastart  Jongleour  qui  vont  par  ces  viliaus. 
Chantent  de  Guileclin,  aussi  Par  «*-*'L"  '";^-  .        ,^y 
Mais  cil  qui  plus  en  set,  en  est  tout  fuis  muiaus  (l) , 
Car  il  ne  sevent  mie  les  riches  vers  nouviaus. 
Ne  la  Chançon  rimée.que  fist  Jehans  Bodiaus. 

Guileclin  de  Sassoigne,  MS.  dcGaignal,  fol.  -J,  \    col. 

On  expnmoit  une  idée  relative  à  celle  du  verbe 
«sSer,  assigner  à  quelqu'un  sa  part  dans  mie 
Jhose  lorsque  dans  la  Coutume  de  Lorraine,  Tit. 
vv  on  disoi  •  «  Il  y  a  règlement  au  bois  de  maro- 
.  \me  S   s^avoir  que  celui  qui  a  droit  d'en  prendre 
pourbastir,  n'en  pourra  coupper  et  abattre  quM 
nS  lui  soit  marqué  et  assigné......  Aussi,  estant 

Sar  Vusagier,  ou  de  sa  part,  l'ass/ryn^Z  demande 
Sour  bois  de  maronage,  en  est  tenu  le  bailler 
:  IZ  vingt  quatre  heures;  à  faute  de  quoi  pourra 
«  ledit  usagier,  etc.  »  Coût.  gen.  1.  U,  P-  i«'^-) 
De  it  l'expression,  prendre  bois  de  maronage  par 
nnr  n'^sinnal.  (Coût.  gén.  Ibid.) 
^  C'S  en  ce  même  sens  d'assignation  de  part  dans 
une  chose,  de  part  assignée  dans  cette  même  chose, 
qu'on  a  dit  : 

Or  lor  ferai  un  moût  bon  ^>n^L^  ^^.^  ^  ,,^ 

I  p  don  par  lequel  un  Père  faisoitpart  de  son  bien 

•^  ses  ms  Puine^s  ou  à  ses  filles,  en  leur  assignant 

de  nuo  s'Slir,  se  marier,  étoit  un  assniat  et  plus 

ïic  ïnieiSent  un  assené.  «  Les  termes  assenne  et 

alv  s  nui  sont  anciens,  signifient  ce  que  nous 

5  son    à  présent  assinat  ...  don  faicl  et  assigne 

parleperè  à  ses  enfans  puinez,  ou  a  ses  filles 

:  5îur  les  marier.  .  (Bouteiller,Som.  rur.  Tit.Lxxv, 

«Mac    n    i'i'^     —  VOV.  AsSENER.)  , 

ians^ia  coutume  de  Bourgogne,  chap.x.  un  do- 
maine un  héritage  sur  lequel  o"  avoit  assgne  un 

f2?n^2^r^rd^i-?cïï!;e:^St^s 

e?  a  son  action  pour  les  arrérages  à  luy  deuz  de 

:  SS  «"te,  contre  l'^^^'î/î'C^St'll^rde 
Tenementier  d'icelui,  sans  ce  qu  il  soit  tenu  de 
:  3Ster'  faction  personnelle  contre  le  pr.ncipa^^ 
„  obligé  ou  ses  hoirs.  »  (Cout^ gén.  1  •  ^  P-  8^»- 
Yoy.  Laurière,  Glos. .  du  Dr.  Fr.  T.  I,  p.  80.) 


(1)  Muet.  -  (2)  Merrain. 


AS 


—  249  — 


Anciennement  rassignation  d'un  nombre  de  livres 
de  terre,  ou  de  livres  de  rentes  en  terre,  opéroit  en 
certain  cas  1  aliénation  et,  par  conséquent,  la  prisée 
du  domaine  de  rhéritage  sur  lequel  elles  étoient 
assignées.  Dans  la  Coutume  de  Nivernois  par 
exemple,  une  femme  avoil  la  propriété  de  YassigmL 
de  1  héritage,  du  domaine  qui  lui  étoit  assigné  pour 
surefede  son  douaire  et  autres  droits  ;  «'sauf  aux 
-■  héritiers  du  mari  à  le  recouvrer  dans  trente 
«  années  ,  en  remboursant  le  prix  pour  lequel 

lX'T.TCl%  efsV)"  ^'''-  ''^""^'''^'  «'°-- 

L'assignai,  dans  la  Coutume  de  Bourgogne  étoit 
le  domaine,  héritage  assigné  à  une  femme  pour 
surele  de  sa  dot  et  mariage,  comme  dans  la  Cou- 
tume de  Nivernois,  mais  sans  aliénation  de  pro- 
priété   ..  La  femme  jouit  de  son  assignai  h  titre  de 
..  mort-gage,  parce  que  les  héritieis  du  mari    e 
«  peuvent  avoir,  et  le  recouvrer  en  quelque  temps 
«'  que  ce  soit,  en  rendant  les  deniers  du  n  aria-e  » 
(Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  T.  I,  p.  80.  -  V  A™  ) 
Il  est  probable  que  dans  Bouteiller,  (Som  Rur 
lit.  xcviu   p.  5(JG,)  un  assignat  de  conventions  ma- 
tnmoniales  etoit  la  même  chose  qua.ssi^H.,/  dans 
totgrave;  c'est-à-dire,  domaine,  héritage  assigné  à 
une  f;emme  pour  en  jouir  jusqu'à  ce  qu'elle  en  ait 
retire  ce  quelle  a  apporté  en  mariage;  doma  né 
héritage     bien  assigné  à  une  femme  pour    "on 
douaire  et  autres  droits.  ^ 

On  a  défini  assignai,  et  l'on  définit  encore  «  assi- 
"  gnal  assignation  d'une  renie  sur  un  héritaot 
:  IZ      fvn"^d'^"e«"  d'"ne  rente  sur  unK 
'   lage.  »  (Voy.  Lauriere,  Gloss.  du  Dr.  Vv.  -  Dict 
de  Trévoux  -  Dict.  de  l'Acad.  Fr.)  Peut-être  ceUe 
définition  devroit-elle  être  celle  d'assignat  on 9  n 
S'hérS  ^^'"'''Onal,a  surfout'r«S«« 
est  1  heiitage,  le  domaine  assigné  pour  le  pavemeu 
d  une  rente;  et  non  l'assignation  de  cette  reUe  s  , 
ce  même  héritage.  On  a  dit  néanmoins  dans  "é 
sens  d  assignation,  assignai  de  rente.  (Laurière 
Gloss.  du  Dr.  Fr.  -  Cotgrave,  Dict.)  ^'^'*"""e. 


AS 


VARIANTES  : 

Assené,  subst.  masc.  et  fém.  Désignation  de 
valeur,  évaluation,  estimation  Don  par  leouer  .in 
père  assigne  à  des  enfans  de  quoi  s'é  abli7se  ma 
rier.  Assignation  de  douaire  et  autrerdroits  ma  ri 
momaux;  biens  sur  lesquels  ce  doSai'e  e  SSs 
droits  sont  assignés  ;  douaire  prélix 

Dans  un  sens  relatif  à  celui  du'verbe  asse7ipr 
assigner,  designer  une  chose,  la  faire  connoitre  o„' 
a  dit  assigne  pour  désignation  de  valeur  évalua tio^i 
estimation  d'après  laquelle  on  conno  t  la  4le  ,' 
d  une  chose.  ..  L'assigne  desdites  bestes  c  es  assa 
«  voir  ce  que  povo.t  monter  le  prouffit  d  iSiies,   . 

spéciiîe'^S  kT  ""'  *'-«"^^'"'^^i°"  <^^  propriété  en  cas 

H. 


«  povoit  valoir....  la  somme  de,  etc.  »  (D    Garoen- 


h  stfS''™^t"''/f  "'^  ^«'^""^  ^  ses  fils  puînés  ou 
paitage  ,les  pourvoir,  en  leur  assignant,  en  eur 
donnant  de  quoi  s'établir,  se  marier.  (Voy  As  ener  ) 
«  Lassenne  etoit  un  don  faict et  assigné  Jar  le  père 

«  mariei.  »  (Bou  eiller,  Som.  rur.  tit.  i.xxv,  notes, 
P-  ^^'^■~  Laurière,  Glossaire  du  Dr.  Fr  -  Cot- 

fTn^^M"  ^'  •"  ,<^«it'lhomme  a  plusieurs  en- 
«  fans,  et  par  especial  filles,  et  il  leur  veut  faire 
■<  assenne  ou  advis  qu'on  appelle  don,  pour  eUes 
«  avancer  entre  leurs  aisnez  frères  qui  par  iiaturi 

rnTirZ''''''.l^!''r!^  '''■  "   (Boutei'ller,  lom 
rui.  tit.  LxxN,  p.  43;.    Dans  la  Coutume  de  Valen- 

«  aZ»;,;''^'-'"'^^  "  ^"  Parastre  ne  peut  liai  îer 
sfitmm!  '"'^f  •'^'"S'  J"s^""^  ^^  que  Yassenne  de 

»  sa  femme  soit  faite.  ..  Coût.  gén.  T.  II,  p.  9(34  — 

Voy.  AssENAL  et  Assener.)  '  ' 

Le  douaire,  nommé  dot  dans  la  Coutume  d'An- 

goumois,  chap.  vi,  en  latin  dos  dans  Ses  les 

p  r  hmien;"™"''''-'^'?"'  ""^^  ^«P^'^«  ^e  do.iation 
pai  laque  le  un  mari,  dans  le  cas  de  mort,  assigne 
de  .[uoi  vivre  à  sa  femme  et  à  ses  enfans,  on  a  dU 
SnT(rr''''''^"'''°"  de  douaire,  pour Touaire 
assigne  (1).  Les  «ss^-h^s,  en  général,  étoient  les  biens 
sur  lesquels  la  dot  et  autres  droits  d'une  fem ml 
etoient  assignés.  (Bouteiller,  Som.  rur.  p  330 
notes.-  Cotgrave,  Dict.  -Voy.  Assenal.)  .  Assennes 
»  promises  ou  non  par  Iraicté  de  mariage,  se  pZ! 
«  ront  faire  devant  ou  après  espouseï',  sur  pen- 
X  sions,  rentes  viagères,  ou  biens  immeubles 
«  Apres  le  mariage  consommé,  le  traicté...  dicel'uv 
»  ne  se  pourra  changer,  n'est  pour  accroissement 
l/^fcmes  ,.  (Coût  de  Hainaut,  au  Nouv.  Coût, 
^en.  1 .  11,  p  04.J  Par  la  même  Coutume,  chap.  xxxir 

Ln'n.;"..     '^  ""e  femme  a  esté  fait  assenne  par 

^0    premier  mary,....  son  second  mary  ne  pourra 
..     endreny  aliéner  iceluy«.ss.„H.  plus  avant  que 

1.1  vie  de  lui  seulement;  comme  en  paieil  ne 
«  pourron  les  créditeurs  dudit  second  mary,  soit 
"  que  ledit  assenne  fut  fait  sur  pensions  viagères 
«  ou  sur  quelques  biens  héritiers.  »  (Ibid.  p  72 ') 
«  Les  douaires  et  assennes  commenceront  avoir 
«  cours  dès  le  trépas  du  mary.  »  (ibid.  p.  72  ) 
"  t^nn  nf^T  '"'■'  fognoissance....  de  renoncia- 
mirn  '^M^^'fT'  ^^  'J?.l«"'"s  douaires  et  assennes.  » 
Svi'rl^H-fn  "  '^•^Pï'fiyanl  (assenne  par  douaire 
assigne,  1  Editeur  a  voulu  sans  doute  indiquer  une 
différence  entre  Yassenne  et  le  douaire  ;  et  cette 
différence  est  réelle. 

Ouelqu'étendue  que  fût  l'acception  à'assene  assi- 

SIII'h  nt've'''"'  f  '""'r'  '''''''  rnatrJmonia  IX, 
PtM^  p  ^  '^  ''"^  '^'-''"s  '«'S  Coutumes  où  douaire 
m^SuITT''^'^''  ^^""'S'  ilfautentendrl 
I  le  douafpp  'nï^ir'^""""''"'.'*"'"'^'':  «»  par  assené, 
le  aouaire    piefix,  nomme   assetie  conventionnel 

de  non  remploi  de  la  dot,   ou   seulement  une  hypothèque 

32 


AS 


250 


AS 


dans  la  Coutume  de  Lille,  citée  par  Du  Gange, 
(Gloss.  lat.  au  mot  assenatio,  col.  773.)  «  La  Dame 
«  ou  la  Damoiselle  n'a  droit  de  douaire,  si  le  mary 
«  l'avoit  en  mariage  avancée  d'aucune  chose,  ou 
«  assenée  desur  son  héritage  ;  car  deux  douaires 
«  ne  peut-elle  avoir  ensemble.  Mais  il  convient 
«  qu'elle  se  tienne  auquel  qui  mieux  lui  plaira  ;  ou 
«  à  Vassenne  ou  au  douaire  coutumier.  »  (Bouteiller, 
Som.  rur.  liv.  I,  lit.  xcvn,  p.  555.)  De  là,  "  les  assen- 
«  nés,  ou  avancemens  de  mariage,  sur  terres  non 
«  nobles  et  lenure  de  mainferme,  encore  distingués 
«  des  douaires  apparlenans  aux  Dames  ou  Damoi- 
«  selles,  pour  cause  des  iîefs  et  nobles  tenemens.  » 
(Voy.  Id.  ibid.  tit.  xcvui,  p.  563.  —  Voy.  Assener.) 

VARIANTES  : 
ASSENE.  Bouteiller,  Som.  rur.  p.  330,  notes. 
AssENNE.  Bouteiller,  Som.  rur.  tit.  xxv,  p.  138. 
Assigne.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  lat.  de  Du  Gange,  à  Assieta. 

Assené ,  partie,  et  stibst.  masc.  Ce  qui  est 
assigné  pour  douaire  et  autres  droits  matrimoniaux. 
Celui  qui  a  un  assignat.  Celui  qui  est  désigné  comme 
ayant  cause.  Dut  désigné,  but  auquel  on  doit  viser. 

C'est  par  ellipse  d'un  substantif  masculin  ou  fémi- 
nin, comme  rente,  héritage,  que  ce  qui  étoit  assigné 
à  une  femme  pour  son  douaire  et  autres  droits  étoit 
un  assené,  uneasscnée.  «  Les  Dames  etDamoiselles, 
«  et  autres  ayans  renoncé,  auront...  tous  et  quel- 
«  conques  les  héritages  venans  de  leur  costé,...  et 
«  leurs  assennées,  s'aucuns  elles  en  ont....  Tels 
«  assetmesse  pourront  faire...  sur  fiefs,  alleuts,  ou 
«  main-ferme,  soit  devant  ou  après  espouser.  » 
(Coût,  de  Hainaut,  au  Coût.  gén.  T.  l,  p.  803.)  «  Une 
o  femme  peut  renoncer  aux  biens  et  debtes  de  son 
«  mari,  et  soy  tenir  à  son  rtsse/twe  conventionnel.  » 
(Coût,  de  Lille,  ibid.  p.  777.  —  Laurière,  Gloss.  du 
Dr.  Fr.  —  Voy.  Assené  et  Assignai.) 

Dans  le  second  sens,  un  assené  étoit  celui  qui 
avoit  un  assignat,  à  qui  l'on  avoit  assigné  un  fief, 
une  aumône.  «  Les  receveurs....  payeront  fiez  et 
«  aumosnes  aux  assenés,  et  en  monoie  tele  comme 
«  il  recevront  de  nos  Fermiers.  »  (Ord.  T.  L  p.  713.) 

Les  Assignés,  en  latin  Assignat!,  que  les  Loix 
d'Angleterre  distinguoient  des  Ileirs,  en  latin 
Hœredes,  étoient  ceux  que  par  cession,  donation, 
ou  par  quelque  autre  litre,  on  désignoit  comme  ses 
ayans  cause.  «  Purrount  plusurs  purchaser  cncom- 
<•  mune  à  eux  et  à  lour  heires  et  à  leur  assignés.... 
«  Et  si  un  nequedent  se  lesse  morir  seisi  de  sa 
«  partie  avaunt  la  devision  de  sa  partie,  ele  acrest 
"  à  ses  parceners  et  à  lour  heires,  et  issint  de  tres- 
«  tous  jusques  al  dareyn  ;  et  si  le  dareyn  moerge 
«  sauns  heire  et  sauns  assigné,  adonques  serra  le 
«  héritage  al  Seignour.  »  (Britton,  des  Loix  d'An- 
gleterre, chap.  xx.\v,  fol.  91.)  «  Si  home  purchace 
«  terres  par  ceux  parolx,  à  aver  et  tener  à  lui  à 
»  touts  jours  ;  ou  par  tielx  parolx,  à  aver  et  lener  à 
«  luy  et  à  ses  Assignés  à  touts  jours;  en  ceux  deux 
«  cases  il  n'y  ad  estate  forsque  pur  terme  de  vie, 
«  pur  ceo  que  il  fault  ceux  parolx,  ses  Heires  ;  les- 
«  queux  parolx  tant  solement  font  l'estale  d'enhé- 
«  ritaunce.  »  (Tenures  de  Littleton,  chap.  i,  fol.  i. 


—  Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Assignatus, 
col.  782.) 

Enfin,  une  chose  désignée  comme  le  but  amiuel 
«  il  falloit  viser,  étoit  une  assegnée.  «  Cellui  qui 
«  mettoit  la  bille  plus  loing  que  Vassegnée  ou  bonne, 
«  etc.  »  (D.  Carpentier,  Suppl,  Gloss.  lat.  de  Du 
Gange,  au  mol  Assieta,  col.  3.i2;  tit.  de  1383.) 

Après  avoir  prouvé  les  acceptions  du  participe 
assené,  pris  comme  substantif,  on  ajoutera  que 
relativement  à  l'idée  du  signe,  du  coin  dont  les 
monnoies  sont  mar(|uées,  on  a  dit  d'une  monnoie 
frappée  en  1423,  qneWeiulasennée.  C'est  ainsi  qu'il 
faut  lire  en  ce  passage  :  «  Fut  monnoie  noire  de 
"  trois  tournois  la  pièce....  Pour  ce  que  celle  de 
«  deux  tournois  esloit  blanche,  et  celle  de  trois 
«  tournois  noire,  le  Peuple  en  fui  si  mal  content 
«  que  la  convînt  laisser;  et  si  esloit  tant  assenme.« 
(Journal  de  Paris  sous  Charles  VI  et  Charles  VU, 
p.  94.) 

C'est  probablement  dans  un  sens  analogue  à  celui 
du  verbe  asse7ier,  indiquer  une  chose  à  quelqu'un, 
la  lui  désigner,  la  lui  assigner  pour  le  rembourse- 
ment de  frais,  que  l'on  aura  dit  :  «  Si  voloit  estre 
«  assenés,  s'il  al  règne  m'étoit  nul  cosl,  où  il  s'en 
«  tenroit.  »  (Chron.  d'Outremer,  ms.  de  Berne, 
n°  113,  fol.  128.  —  Voy.  Assener  et  Assensé.) 

On  croit  que  dans  les  vers  suivans,  aseené  est  une 
variation  d'orthographe  du  participe  assené,  con- 
traction à' assensé  : 

....  Franc  vouloir  arbitre  de  pensée 
Puet  sur  les  cours,  par  raison  ascenée, 
Seigneurir  par  vertu  vertueuse. 

Eust.  Desch.  Poès.  MSS.  p.  130,  eol.  i. 

VARIANTES    : 

ASSENÉ.  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr. 
Ascené.  Eust.  Desch.  poës.  MSS.  p.  130,  col.  1. 
AssENNÉ.  Coût,  de  Hainaut  au  Coût.  gén.  T.  I,  p.  786. 
Assigné.  Britton  des  Loix  d'Angleterre,  chap.  xli,  toi.  lOC. 
Assegnée,  jmrlic.  cl  suhst.  fém.  D.  Carpentier,  Sup.  Gl. 
lat.  de  Du  G.  au  mot  Assiela. 
Assenme.  (Lisez  .4sse))))ée.)  Jour,  de  P.  s.  Charles  VI,  p.  94. 
Assennée.  Coût,  de  Hainaut,  au  Coût.  gén.  T.  I,  p.  803. 

Assenemeiit ,  subst.  masc.  Action  de  faire 
signe;  signe,  indication.  Action  d'assigner  part 
ou  portion  ;  donation  par  laquelle  on  assigne  de 
quoi  subsister;  don  par  lequel  un  père  assigne 
à  son  fils  de  quoi  vivre  comme  chevalier;  assigna- 
tion de  douaire.  Assignat,  Assignation  d'une  dette, 
d'une  rente  sur  un  héritage.  Action  de  placer  ; 
position;  disposition.  Saisie;  main-mise. On  ne  prou- 
vera point  ici  l'analogie  et  la  réalité  de  ces  accep- 
tions, parce  que  les  acceptions  du  verbe  assener 
nous  semblent  être  une  preuve  suffisante  de  celles 
du  substantif  Assenement  (Voy.  Assener.) 

Dans  un  sens  analogue  à  celui  à'assenement, 
signe,  indication  ,  on  disoit  que  le  bâillement, 
comme  signe  du  besoin  de  se  coucher,  étoit  une 
assignation  de  couche  ;  en  parlant  d'une  jeune  fille 
dont  les  yeux  indiquoient  le  désir,  qu'elle  donnoit 
des  assignations  ;  par  une  allusion  assez  ridicule, 
qu'elle  é"loit  fille  de  Sergent,  qu'elle  avoit  les  yeux 


AS 


—  251 


AS 


pleins  d'assignations.  (Voy.  Oudin,  Cur.  fr.  —  Id. 
ibid.  Additions.) 

VARIANTES    : 
ASSENEMENT.  G.  Guiart,  MS.  fol.  352. 
ACENEMENT.  Parton  de  Blois,  MS.  de  S'-Germ.  fol.  151. 
AsENEMKNT.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  237. 
AssAiNEMENT.  D.  Garp.  S.  GI.  1.  de  D.  C.  à  Assenamentum. 
AssiGNEMENT.  S'-Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  78. 
Assignation,  s.  f.  Orth.  subs.  —  Oud.  Cur.  fr. 

Assener,  verbe.  Faire  signe  ;  appeler  en  faisant 
signe,  appeler  delà  voix.  Faire  apercevoir  par  signe, 
indiquer,  faire  connoître,  donner  connoissance, 
désigner  ;  enseigner,  donner  des  renseignements. 
Assigner,  destiner  ;  assigner  en  partage.  Partager 
en  assignant  de  quoi  vivre;  pourvoir,  douer.  Pla- 
cer, introduire  en  faisant  signe;  placer,  marier, 
établir,  préposer,  déposer.  Frapper  en  visant,  frap- 
per juste  ;  blesser  en  frappant  ;  frapper  sans  viser  ; 
adresser,  toucher,  atteindre,  parvenir.  Mettre  un 
signe  de  saisie  ;  saisir,  mettre  en  sa  main  ;  réunir 
en  vertu  de  saisie. 

On  observera  que  dans  notre  langue,  assener  et 
(tësigner{\)  sont  de  même  ancienneté,  comme  ils  sont 
de  même  origine.  On  disoit  assener  de  la  main,  de 
la  tête,  de  l'œil,  pour  faire  signe  de  l'œil,  de  la  tête, 
delà  main  ;  appeler  en  faisant  signe  de  la  main,  de 
la  tête,  de  l'œil.  «  S'en  vint  le  Chastelain  sur  les 
"  carneaux,  qui  acheva  (lisez  achena)  de  la  main; 
"  et  Bertran  monta  à  cheval,  et  ala  parler  à  lui  sur 
«  les  fossez.  »  (Hist.  de  B.  du  Guesclin  par  Ménard, 
p.  I'i4.) 

...  Se  g'estoie  en  Paradis, 

Et  la  Belle  m'acenast  fors. 

Que  g'aim  plus  que  marne  et  mon  cors, 

Ou  de  chief,  ou  d'ueil,  ou  de  doi  ; 

Tost  me  feroit  venir  à  soi. 

Parton.  de  Blois.  MS.  de  S.  Germ.  fol.  151.  V.  col.  3. 

En  général,  assener  quelqu'un,  ou  l'assigner, 
c'étoit  l'appeler  en  lui  faisant  un  signe,  un  geste 
auquel  il  pût  connoître  qu'on  l'appeloit.  il  est 
même  vraisemblable  que,  par  extension,  c'étoit 
l'appeler  de  la  voix,  comme  du  geste.  «  Quant  il 
■'  orent  hardoié,...  si  trast  d'une  part  un  cheva- 
«  liers  Sarrasin,  et  acena  un  Turcople  qu'il  alast 
«  parler  i^i  lui.  »  (Chron.  d'Outremer,  ms.  de  Berne, 
n"  113,  fol.  126.)  «  Si  voit  ung  de  leurs  Escuyers;... 
«  il  le  assigne,  et  celuy  vient.  >>  (Lanc.  du  Lac, 
T.  I,  fol.  145.) 

Un  Damoisel  à  lui  acesne. 

Par  le  frain  le  cheval  li  tent,  etc. 

Siège  de  Troje,  MS.  du  R.  n-  G987,  fol.  95,  R'  col.  2. 

Que  ce  même  signe  soit  indicatif  d'un  objet, 
il  le  fait  apercevoir;  c'est  en  ce  sens  qu'on  a  dit: 

Une  herde  de  cers  trouvèrent. 
Ly  pères  au  fîlz  les  acenist,  etc. 

Rom.  de  Brul,  MS  fol.  ï,  R»  col.  1. 

Au  figuré,  quelle  que  fût  la  manière  d'indiquer 
une  chose,  de  la  faire  connoître  en  la  désignant 
aux  yeux  de  l'esprit,  en  l'enseignant,  c'étoit  Vasse- 


ner  ou  Y  assigner.  On  diroit  encore  aujourd'hui, 
avec  Gace  de  la  Bigne,  assigner  des  raisons,  pour 
les  indiquer,  les  faire  connoître.  (Voy.  Poëme  des 
Déduits,  MS.  fol.  134.)  Anciennement,  assener  quel- 
qu'un d'une  chose,  et  même  d'une  personne,  ou 
l'en  assigner,  c'étoit  la  lui  faire  connoître,  lui  en 
donner  connoissance,  lui  donner  des  renseigne- 
mens  sur  cette  personne,  ou  sur  cette  chose. 
«  Dictes-moy  plus  cleremenl  aucune  chose  du 
«  Chevalier,  pour  veoir  se  vous  en  sçauroys  assi- 
»  gner.  »  (Parcef.  Vol.  II,  fol.  79.)  «  Voicy  cestui 
«  qui  te  peut  assener  de  ce  que  tu  quier.  »  (Lanc. 
du  Lac,  T.  I,  fol.  86.) 

Maistre,  moult  par  te  doi  amer. 
Qui  de  tôt  me  ses  assenei-. 

Lucidaires,  MS.  de  Giberl,  fol.  20,  V. 

Dans  la  ''arce  de  Pathelin,  le  Juge  ne  pouvant 
rien  connoître  à  la  demande  du  Drapier,  qui  dit 
drap,  lorsqu'il  faut  dire  moutons,  s'écrie  : 

Véez  !  suis -je  bien  assené  9 
Il  ne  cessera  huy  de  braire. 

Farce  de  Palhelin,  p.  95. 

oi  l'on  désignoit  des  greniers  pour  certains  usa- 
ges, c'étoit  les  assigner,  quelle  que  fût  la  manière 
d'en  indiquer  la  destination.  (Coût,  de  Bretagne, 
art.  ccLxvi,  citée  par  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr.) 
Dans  ce  même  sens  général  de  désigner,  on  disoit 
assigner  ou  asse«er  le  temps  de  faire  une  chose; 
en  termes  de  procédures  dans  les  champs  de 
bataille  et  les  cours  de  justice,  assener  jour  aux 
parties.  «  Si  assenèrent  {aliàs  assignèrent)  jour  de 
«  partir  au  roi  Sigebert,  ou  à  ceulz  que  il  i  vou- 
«  droit  envoler.  »  (Chron.  S'  Deiiys,  Rec.  des  Hist. 
de  Fr.  T.  III,  p.  301.)  «  Furent  tuit  occiz  en  la  nuit 
«  qui  fu  assenée  pour  faire  si  grant  cruauté.  » 
(Ibid.  p.  292.)  «  Li  juge  assenait  jour  aux  parties, 
«  etc.  »  (Coul.  de  Beauvoisis,  chap.  xx.xix.)  »  Le 
«  Seignor  doit  le  gage  recevoir,  et  assener  le  jour 
«  de  bataille,  etc.  »  (Assises  de  Jérus.  chap.  Lxxin. 
—  Établissemens  de  S'  Louis,  liv.  II,  chap.  xxix,  etc.) 
De  là  sans  doute  notre  verbe  assigner  dans  le  sens 
d'ajourner. 

Anciennement,  ass/r/HéT  une  chose  à  quelqu'un, 
c'étoit  la  lui  désigner  comme  son  partage,  quoi- 
qu'elle ne  lui  fût  pas  absolument  propre.  «  La 
«  Fontaine  assigne  al  Peire  de  cuy  li  Fils  naist,  et 
«  de  cuy  ist  li  Sainz-Espiris.  La  lumière  assigne  al 
«  Fil,  etc.  La  paix  assigne  al  Sainz-Espirit,  etc. 
«  Ceu  ne  dis-je  mies  assi  cum  ces  choses  soyent 
«  propres  à  un  chascun  ;  car  li  Peires  est  assi  lu- 
«  mières,  etc.  »  (S'  Bernard,  Serm.  fr.  mss.  p.  95.) 
0  Fontem  assigyia  Patri  ex  quo  nascitur  Filius, 
"  etc.  X  (S"  Bernard!  opéra,  T.  I,  col.  775.) 

Encore  aujourd'hui  l'on  dit  assigner  des  terres, 
des  rentes  à  quelqu'un,  pour  les  lui  désigner 
comme  destinées  aux  besoins  de  sa  vie,  ou  à  l'ac- 
quit d'une  dette,  les  lui  désigner  comme  son  par- 


(1)  Assener  et  assirjner  viennent  tous  deux  d'assignare;  mais  assigner,  quoiqu'on  en  ait  des  exemples  au  xiii«  siècle,  est 
de  formation  savante.  Le  g  de  assigner  ne  se  prononçait  pas  au  xvii»  siècle,  non  plus  que  dans  les  chartes  du  xi^  siècle,  où 
l'on  trouve  assinare.  La  Fontaine,  au  livre  VI,  fable  20,  dit  :  «  L'auberge  enfin  de  l'hyménée  Lui  fut  pour  maison  assenée.  » 
Chifflet  le  remarquait  encore  dans  sa  grammaire  française,  publiée  en  1700.  (n.  e.) 


AS 


—  252  — 


AS 


tag'e,  ou  comme  destinées  à  lui  tenir  lieu  de  ce 
même  partage.  C'éloit  aussi  une  ancienne  accep- 
tion d'wsseHer  le  même  qu'nô's/V/»''?*-  "  Diront...  les 
«  sommes  assenées  pourMvres,  et  pour  douaires.  » 
(Ord.  T.  I,  p.  463.)  ■>  Li  Abbés  el  li  Covens  nous 
«  prièrent  ke  nous  lor  tornismes  de  lor  à  unne 
«  part;  et  nous  ;\  lor  prières....  lor  assenâmes 
«  pour  lor  partie  del  bos,  unne  pièce  debos  à  toutte 
•c  la  terre  ((ui  est  divisée  par  certaines  bousnes.  » 
(Ducbesne,  llist.  généal.  delà  M.  de  Béthune,  pr. 
p.  131.  tit.  de  1243.)  «  Geste  terre  que  mes  freires 
«  m'asanne  et  assènera  por.l'esclioite  mon  frère, 
«  tan^-je  de  lui  en  fié  lige.  "  (Ducbesne,  Hisl. 
généal.  de  la  M.  de  Bar-le-Duc,  p.  31  ;  tit.  de  1249.) 
«  Il  tint  sens  nul  reclain,  bien  dix  ans  ou  plus,  ce 

«  que  li  fu  assegnel  en  partie; el  de  cèle  terre 

"  qui  li  fu  assenée  et  asisse  por  sa  partie,  reçut 
«  Mesire  Renais  les  hommages.  »  (Id.  ibid.  p.  30.) 

De  là,  on  aura  dit  assener  quelqu'un  pour  le 
partager  en  lui  assignant  de  quoi  vivre,  en  lui 
assignant  des  rentes  pour  lui  tenir  lieu  de  sa  part 
dans  les  héritages:  acception  particulière  que 
semble  indiquer  l'opposition  d'assener  à  ireter  dans 
le  passage  suivant:  «  Safadins  ot  xv  fix,  dont  il  dona 

«  as  vu  irelages,  et  as  vni  rentes Or  avésoi  des 

«  vu  fix  Sapbadin,  coment  il  furent  ireté  ;  or  vos 
«  dirai  comment  li  vni  furent  asenés.  »  (Lett.  du 
Patriarche  de  Jérusalem,  mss.  de  Berne,  n°  113, 
fol.  175.) 

C'est  par  comparaison  d'un  Roi  à  un  Père,  qui 
doit  partager  ses  enfans  et  les  pourvoir,  en  leur 
faisant  part  de  son  bien,  en  leur  assignant,  en 
leur  donnant  de  quoi  vivre,  qu'un  ancien  Poëte  a 
dit  allégoriquement  : 

Si  fet  le  Chief  contre  nature 
Quant  à  ses  membres  norreture 
Tost  (1),  qui  les  deust  assener. 
Hisl.  de  Fr.  en  vers,  à  la  suile  du  Rom.  de  Fauvel,  fol.  74,  V*  col.  2. 

Anciennement,  ce  don  d'un  père  à  ses  fils  puînés 
et  à  ses  filles,  se  nommoit  assené,  comme  l'espèce 
de  donation  par  laquelle  un  mari  assignoit  à  sa 
femme  un  douaire  sur  ses  biens  et  héritages. 
Ainsi,  l'on  disoil  d'un  mari  qui  douoit  sa  femme, 
qu'il  Vassenoit  sur  son  héritage,  qu'il  Yassenoit  de 
douaire.  (Bouteiller,  Som.  rur.  tit.  xcvni,  p.  562  et 
563.  —  Voy.  Assené  et  Assenal.) 

Si  l'on  pourvoyoit  ù  l'administration  d'un 
Royaume  en  la  partageant,  en  assignant  à  différens 
Officiers  une  part  dans  l'administration  de  ce  même 
Royaume,  c'étoit  l'assener.  «  Richars  en  ala  en 
"  Engleterre,  et  porta  coronc  à  Londres,  et  rechut 
«  ses  homages  de  chiaus  de  la  terre.  Après  si  laissa 

«  ballius  et  gardes  en  Engleterre Quant  il  ot 

«  ensi  faitement  assenée  sa  terre,  etc.  »  (Chron. 
d'Outremer,  ms.  de  Berne,  n°  113,  fol.  143.) 

L'extension  de  cette  acception  à'assener,  par- 
tager, pourvoir,  éloit  telle  qu'on  disoit  d'une 
troupe  pourvue  d'armes  et  d'habillemens  de  luxe, 
qu'elle  étoit  assennée  d'atours  et  d'armeures;  d'une 
femme  pourvue  de  mari,  qu'elle  en  étoit  assenée  ; 


d'un  homme  pourvu  de  maîtresse,  et  partagé  de 
toutes  les  ((ualilés  propres  à  s'en  faire  aimer,  qu'il 
en  étoit  assené  ;  etc.  ((î.  Guiart,  ms.  fol.  287,  345,  et 
31.  —  Rom.  de  la  Rose,  vers  21808,  etc.) 

Grant  guerredon  doivent  à  Dé, 
Quant  il  si  bien  sont  assené. 
Et  de  beauté,  et  de  proesce, 
Et  de  famés  ;  c'est  grant  richece. 

Alhis  MS.  fol.  91,  R-  col.  2. 

On  place  quelqu'un  dans  un  lieu,  on  l'y  introduit 
en  lui  faisant  signe  d'entrer  et  de  s'asseoir  ;  de  là 
le  verbe  assener,  pour  introduire,  placer.  «  Alla 
«  seoir  le  Damoisel  où  le  maistre  d'hostel  Vassena; 
«  et  fut  moult  près  du  Roi.  »  (Percef.  vol.  VI, 
fol.  97.) 

...  En  ce  pourpris  l'amena, 
Et  dedans  si  droit  l'assena. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  2970  et  2971. 

En  voyant  les  différens  états  de  la  vie,  comme 
autant  de  lieux  dans  lesquels  on  se  trouve  placé, 
on  aura  dit  d'une  personne  placée  dans  l'état  reli- 
gieux, qu'elle  étoit  assenée  en  Heligion.  (Vie  d'Isa- 
belle, à  la  suite  de  Joinville,  p.  172). 

Dans  un  sens  non  moins  figuré,  un  amant,  un 
mari  content  de  la  femme,  de  la  maîtresse  en  qui 
il  avoit  placé  son  choix,  se  félicitoit  en  disant  qu  il 
étoit  bien  assené,  bien  placé,  qu'il  se  tiendroit  où 
il  étoit  assené,  etc.  «  Le  jonne  homme...  a  trouvé 
«  femme  telle  qu'il  la  demandoit  ;  et  à  l'advanture 
«  il  luy  fust  bien  mestier  d'en  avoir  trouvé  une 
«  autre.  Mais  il  ne  le  voudroit  pour  riens  ;  car  il 
«  luy  semble  qu'il  est  mieux  assené  que  nul 
»  autre.  >•  (Les  Quinze  joies  du  Mariage,  p.  100.) 

Aseués  sui  là  où  je  me  tenrai. 

Ane.  Poët.  fr.  MSS.  avant  1300,  p.  1164. 

Si  li  ai  mon  cuer  doné  ; 
Bien  le  tieng  assené. 

Chans.  fr.  du  13'  siècle,  MS.  deBouhier,  fol.  118,  V. 

On  disoit  d'une  femme,  ou  d'un  homme  qui 
plaçoit  son  alfection  en  la  personne  désignée  pour 
objet  de  son  choix,  qu'en  cette  personne  ils  seroient 
bien  assenés.  »  Elle  seroit  en  vous  bien  assenée, 
«  d'avoir  ung  tel  amoureux.  «  (Petit  Jean  de  Sain- 
tré,  p.  127.) 

Je  la  voudrai  marier  bien. 
Ne  sai  Prince  dedens  cest  Raine  (2), 
Ne  de  ci  jusqu'en  Loheraine, 
Qui,  tant  soit  preudom  et  senez, 
Ne  fu  en  li  bien  assenez. 

Fabl.  MS.  du  R.  n*  7218,  fol.  350,  R*  col.  2. 

L'acception  générale  d'assener,  placer,  étant 
particularisée,  l'on  a  dit,  dans  un  sens  relatif  à 
celui  de  cette  dernière  expression,  assener  une 
fille,  ou  l'assigner  pour  la  marier,  l'établir  en  la 
donnant  à  celui  qu'on  lui  désigne  pour  mari,  et 
auquel  elle  est  destinée  pour  femme.  Encore  au- 
jourd'hui, placer  une  fille,  l'établir,  c'est  la  marier, 
la  donner  en  mariage  à  un  homme.  ■<  On  ne  pou- 
«  voit  mieux,  ne  plus  hautement  assigner  Madame 
«  Bietrix  de  Portugal,  qu'au  roi  d'Espaigne.  >■ 
(Froissart,  Vol.  II,  p.  171.)  «  Ma  fille,  si  Dieu  plaist. 


(1)  Enlève,  en  latin  tollit  —  (2)  Royaume  ;  en  latin  Regnum. 


AS 


-  253  — 


AS 


«  sera  assenée  h  tel  homme  dont  elle  recevra  hon- 
«  neur.  »  (Percef.  Vol.  V,  fol.  108.) 

Cil  siens  oncles  la  fist  mener 
A  un  chastel,  tant  qu'assener 
La  peust  à  aucun  preudomme  ; 
Et  vous  savez,  ce  est  la  somme. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7'218,  fol.  289,  V"  col.  2. 

On  disoit  absolument,  assigner  une  fille,  ou 
Yassener,  pour  la  marier,  l'établir,  la  placer.  «  Sire, 
«  vous  congnoissez  bien  tous  les  Chevaliers  et  les 
«  Dames  aussi  ;  si  les  assenez-,  si  comme  droit 
«  est.  »  (Lanc.  du  Lac,  T.  II,  fol.  29.)  «  Quant  vous 
«  mariastcs  les  autres,  se  vous  eussiez  esté  cour- 
«  tois,  elle  ne  eust  pas  esté  oubliée  :  car  elle  est 
«  plus  vaillante  que  nulles  des  autres  ;  si  deust 
«  estre  la  première  assignée.  «  (Ibid.  fol.  30.) 

Marier  vueil,  tout  sans  respit. 
De  vous  toutes  sui  li  ainsnée  ; 
Si  doi  première  estre  assenée. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7218,  fol.  257,  V  col.  2. 

Peut-être  jugera-t-on  qu'en  ces  derniers  passages, 
comme  en  plusieurs  autres,  il  faudroit  rendre 
assener,  ou  assigner,  daus  un  sens  analogue  à 
celui  de  l'expression  assener  de  mari,  pourvoir  de 
mari.  Car  si  l'on  dit  d'une  fille  mariée,  qu'elle  est 
placée,  qu'elle  est  établie,  on  dit  aussi  qu'elle 
est  pourvue.  Le  verbe  Assener  paroît  susceptible 
de  Tune  et  l'autre  explication  dans  les  vers  sui- 
vans  : 

Chascune  fu  si  assenée, 

Que  grandes  dames  toutes  trois 

Fm-eut  ;  ce  fu  raisons  et  drois. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  69,  V-  col.  i. 

La  fièvre  quarte  et  la  double  tierçaine... 
Puist  avoir  qui  mari  me  donna  ; 
Et  penduz  soit  qui  ainsy  m'assena 

Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  220,  col.  4. 

En  nommant  à  une  place,  on  désigne  celui  qu'on 
y  établit,  qu'on  y  prépose.  C'est  donc  encore  rela- 
tivement à  l'idée  générale  d'assener  ou  assigner, 
placer,  que  dans  le  sens  de  préposer,  on  a  dit  : 
«  A  la  garde  de  mesmes  les  terres,  desul  le  Roy 
«  nostre  uncle  avantdit,  avum  ass/ff«e  le  honorable 
«  père  Waut,  éveske  de  Everwyk.  »  (Rymer,  T.  I, 
part.  2,  p.  110,  col.  1,  tit.  de  1270.) 

Enfin  assener  une  chose,  dans  le  sens  propre, 
c'étoit  désigner  le  lieu  où  elle  seroit  placée,  la  pla- 
cer, la  déposer  en  ce  même  lieu.  On  a  feint  que 
Charlemagiie,  pour  obtenir  de  l'empereur  de  Cons- 
lantinople  et  du  patriarche  de  Jérusalem,  quelques 
instrumens  de  la  Passion  de  Jésus-Christ,  leur  fit 
cette  promesse  : 

Si  m'en  donnés, 

S'ière  noblement  asenés  ; 

Et  s'en  iert  moult  France  onorée. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  288. 

On  se  trompe  en  croyant  que  le  verbe  Assener, 
encore  usité  dans  le  sens  de  frapper,  exprime  la 
violence  du  coup.  C'est  parce  qu'il  en  exprimoit  la 
justesse,  que  Joachim  du  Bellay,  dans  son  Illustra- 
tion de  la  Langue  françoise,  fol.  30,  le  mettoit  au 
nombre  des  mots  antiques  dont  il  recommandoit 
aux  Ecrivains  de  son  siècle  de  renouveler  l'usage, 
comme  propre  à  «  donner  grande  majesté  tant  aux 


«  vers  qu'à  la  prose.  »  Il  semble  que,  conformément 
à  sa  définition  d'assener,  frapper  oii  l'on  vise,  par 
conséquent  frapper  juste,  Brantôme  ait  dit  :  «  Il 
«  faloit  bien  que  celuy  fut  asseuré  qui  ne  bransloil 
«  sous  son  coup,  tant  il  sçavoit  bien  et  très-à-pro- 
«  pos,  et  à  temps  le  donner,  ou  ainsi  que  l'on  disoit 
«  anciennement  assener.  »  (Brantôme ,  Cap.'ifr. 
T.  Il,  p.  162.) 

On  ne  frappe  juste  qu'autant  que  l'on  adresse|au 
point  désigné  par  l'œil,  au  point  où  l'on  vise. 
(Voy.  AssEGNEE.)  C'est  donc  en  passant  de  l'idéejde 
ce  qui  précède  à  l'idée  de  ce  qui  suit,  qu'on  a^dit 
assener,  le  même  qu'assigner,  dans  le  sens  de  frap- 
per, frapper  juste,  blesser  en  frappant.  «  Il  assegna 
«  le  bras  de  l'enfant,  et  le  brisa  en  deux  moytiés.  >> 
(Chron.  S'  Denys,  T.  Il,  fol.  13.)  «  Il  faillit  le  chien, 
«  et  assena  le  maître  du  chien.  »  (Monet,  Dict.) 

Sache  l'espée 

•        Fort  dure  et  encienne, 

Et  il  un  Persant  en  asan}te. 

Parlon.  de  Blois,  MS.  do  S'  Germ.  fol.  158,  V*  col.  2. 

Cis  fu  assenez  laidement 
En  l'yaume,  sus  la  visagière. 
D'un  alenaz  parmi  l'uillière. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  128,  V. 

.  .  .  Messire  Gauvain  Vasane 
En  son  escu,  desoz  la  pane. 

Rom.  de  Perceval,  MS.  de  Uerne,  n"  354,  fol.  268,  V  col.  2. 

Amours  à  point  ce  dart  lança, 
K'à  un  coup  deux  cuers  assena. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  13,  V  col.  1. 

Ung  vireton  que  l'en  tira, 

La  vint  en  la  jambe  assener,  etc. 

Vlgil.  de  Charles  VU,  part.  I,  p.  Ht. 

L'artillerie  adonques  c'est  monstrée. 
Mais  une  pièce  est  rompue  et  oultrée, 
Dont  il  advint  trop  merveilleux  dommaige  ; 
Car  elle  occist  ung  gentilhomme  et  paige, 
Par  les  esclats  dont  furent  assiijnez. 

Œuv.  de  J.  Marot,  p.  83. 

Il  résulte  de  ces  divers  passages,  qu'assigner  ou 
assener,  ce  n'étoil  pas  toujours  frapper  en  vi.sant, 
en  adressant  au  point  désigné  par  l'œil  ;  mais  que, 
par  extension,  c'étoit  frapper,  frapper  sans  viser. 
Peut-être  n'a-t-on  dit  assener  pour  frapper,  qu'en 
particularisant  l'acception  générale  d'assener, 
adresser,  loucher,  atteindre. 

Soit  que  les  personnes  ou  les  choses^  auxquelles 
on  adressoit,  on  touchoit ,  fussent  désignées  ou 
indiquées  par  la  vue,  soit  qu'on  y  adressât,  qu'on 
y  touchât  de  la  main  sans  les  voir,  on  disoit  qu'on 
les  assenoit,  qu'on  y  assenait.  «  Avons...  ordené  et 
«  establi  que  toutes  les  armeures  es  menues  gens, 
«  soient  ensemble  mises...  en  lieus  sehurs  et  con- 
«  venables,...  et  que  chascun  mette  son  seing  et 
«  son  brevet  en  ce  qui  sien  sera;  et  que  toutes  ces 
«  chosessoientsiseurementgardées,  que  chascun... 
1  peust  au  sien  assener,  et  le  prendre.  "  (Ord.T.  I, 
p.  636.  —  Voy.  Rassener.) 

....  Par  les  chevilles  aloit 

Li  chevaux,  quel  part  c'on  vouloit. 

Vers  la  poitrine  retasta  ; 

A  une  cheviUe  assena, 

Qui  en  tel  fourme  faite  estoit.  etc. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  11,  R'eol.  3. 


-  354  - 


AS 


AS 

Liprieus  le  va  boulant; 

Tant  ccrquierent  qu'il  ass..,e.«Ht 

AU  moine  ;  ^^„^"/^.Ul  mervelliés. 
t?rs^kstrvrrs^?spié.^etc.^^^^.^,., 

femme'qui  nous  auno  t  CH^^d^^«„,.„,,  ^'assener, 
s'adresso.t  a  elle  Ou  U  ne  P     ^^^  ^^.^^ 
(Voy.  Fabl.  m.  du  R.  n  j       ,     ^^^^^.^.^ 


(Voy. 


Leaux  amors  et  faire  e   es  ^^^.^  ^^^^^^ . 
ruetnra^-^^-i!'p^,^fW.av»^ 


eue,  onjV^J^^f^^:^%l%^,,e^n-'.U  paa  que 
assener  a  P^i^'  ^  ^^^  '^  "^      ^ 

^'«"''"''Tses  songiez  commande 

ou  en  un  Ueu  quelconque  P^^^   Y^P^  ^^  1        vers 
géant  ses  pas   en  es  aai^  ^,^^       ant  1300, 

cette  maison,  etc.  lAnc.  ^«e^  ^^^^  16;,.  __  G. 

p  176.  -  Ff ,  «^etc)  \iquenUenrjs,  si  manda 
Guiart,Ms.fol.287,eic.)    1^  H  ^  j^gg.  si  h 

„  un  sien  sergant  ^^J^î^l^  eTlapi'éce  de  terre  ou 
.  demanda  sU  savero  t  «ler  en  y  ^^^  oil  moult 
.  la  bataille  avoit  este  •  ^t^  ^      i^ce  de 

.bien;  et  bien  saverœ    a.;3eje^^^^^^    d-Outremer, 

«terreoùURosJujib^     ^„^^,  2.) 
„s.deBerne,nli3,fol.J^^,^^^ 

hué  ii  droit  au  lieu  assena 

,„  „,„é,  von  a  «\psssit  L'sr  • 

nŒtrS"S'àïï«.ie„.  .(0„..n,  cur. 
•%",ÎU  ,ue  nos  -/--  S.-Tîrsïl'Sè 

5m«  oH  f»'!»"''rMmêu4  un  signe  'Je  saisie,  à 

•^t'rdfrirofèrsrriu .»,.«  su». 


n  652;  tit.  de  1218)  "  ^VnvPvinces  fere  tenir 

l  ladite  contesse  ^\f,l'llTJ^fàienconiv,^^^^ 
„  Et  se  Gaucher  ne  sa  fan^e/^Y^?poi  que  il  tient  de 
.  porroitassene/'alaconteae  4       ^^^^  ^^^ 

.  Lien  fié  et  en  demame    et  ien.i^^  ^^^^^^^_  „ 

«  mesfaire,  jusqua  tant  que  d^astiUon,  pr. 

(Duchesne,  Hist.  geneal^de  la  M.  ûe  .^Q^^^^^ 

p.45;tit.dem6.)«  beiiarm       ^^^^  ^^         ^ 

„  mefeist  à  nous  ledit  '^^'l'J^'VeceluY  Olivier  tient 
pourrions  assener  aux  tf^  «Jf  f=f '"^y,  in_  Morice, 

:  Te  nous,  m-rJX'nT^^  !%•  '^^^  '  l'"' ?' 
Preuv.  de  l'Hist  de  Bielagne^^^  i         ^^.  ^.^^^g^g- 
1^261 .)  Philippe-Auguste  'necone^^  ^^^^^ 
terre,  son  vassal,  «  proposa  eu  bannie.  » 

'^'auM,  et  k  entrer  en  s>    t  ire  à^  o^^^^  ^^^^ 

(Cbron.  S'  Denys  T.  "vW^-  ^  „  ^^^ap.  xxik,  que  e 
Etablissemensdeb  Lou^^,liv^  ,^^.^  ^^  ^^^^  ^e 
fief  possède  par  le  passai  ne         ^^.^^^^  ^  on 

fief  du  seigneur.  G  est  par  ce  ^  ^  ,^  ^  g 

disoit  :  "  Se  f',nenns  Ge^U^\Xt,       ^^  roncin  de 
„  par  défaut  d'ome,  ou  de  racnai,  ^^ 

„  service,  ou  por.  autre  ^hose    eu  ^.^^^  ^ 

"  ^'oit,  et  cU  qui  t;   ,tSsU' rendra  la  seue 
«  tenir  la  cnose  ue  luj-, 

.  chose.  ••(<^r'i-'f-:.P,,:s  répression  assener  ou 
On  croit  apercevoii  dan.  lexp 

assio-ner  à  un  fief,  la  i^'^^^^f,"  ip  sens  général  de 
^it  assi-ner  ou  assener,  dans  le  seub  ^       ^^^^^^ 

sàish   îl  est  néanmoins  P«jJi\5s''iJ  «î'soit  rela- 

lïp  ession  le  sens  d  «ssene,  ou  «ssigri ^^,^  ^^ 

liU  celui  de  toucher  à  une «^^^      ^^^^.^^  ^^^  ^ef 

et  q^^e  de  là  on  ait  d  -,  «  s^tre  sa  main  sur  un 
„  cie  son  vassal  assigne»  e  héritage,  saisir  efiet 
„  héritage,  »  P,9,^l^T'^rière,  Gloss.duDr.fr.  T.  l, 

de  son  Vassal.  (Voy.  t^'^^^'^^^t'^rave,  Dict. 
p  ?é,aumot,Assener.-Cot.^^^^^^^         ^^^^a    au 
^"  vnhn  la  réunion  des  domauies  ^^ 

fiefdè  son  seigneur,  étant  une  suite  dej^^ 

ïes  mêmes  domaines    ^1/  Plaisir,  ^  celle  de 
d'étendre  l'acception  d  "fsene/  ,  ^^^g  les 

?éun?rL^  vertu  d'une  saisie.  «  11  sa       „  ^Chron. 
fîentes,  et  les  assena  à  la  sme  ^^^  ^.^^ 
d'Outremer,  ms.  de  Beine,  u  ,.  .;^  son  fief  les 

ce  même  sens  qu  on  lit,  "  Jf  colgrave,  Dict. 
«  terres  de  son  Valsai, 

•  .>   .réterindiqua  par  signe.  (Rom. 

derS.tl^!|f,^^al....deB.^^^ 
Aisseneis,  part.  Place,  v»^  (Duchesne,  Hist 

,/„S»ïia?."Sr«-auc.pr%-^»-> 


ACHEVER.   (1^'=''^^ 


AS 


-  255  — 


AS 


ASENEIR.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  part.  2,  fol.  20,  R°. 

ASENER.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  288. 

ASENNER    Fabl.  MS.  S'-Germ.  fol.  52.  V»  col.  2. 

AssEGNER.  Chron.  S'-Denys,  T.  II,  fol.  13,  V». 

AsSEiGNER.  Chron.  S'-Denys,  T.  V,  p.  277. 

AssENNER.  Athis,  MS.  fol.  ai,R°  col.  2.  -  Cotgrave,  Dict. 

Assigner.  Orth.  subs.  -  S'-Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  95. 

Assenete,  siibst.  féni.  Copeau,  ou  bardeau. 

On  a  écrit  aselle  pour  aiscelle,  ais,  bardeau  ;  et 
peut-être  asselle.  De  cette  dernière  variation  d'or- 
thographe, que  l'on  suppose  avec  tant  de  vraisem- 
blance, on  aura  formé  le  diminutif  asselete,  et 
même  assenete,  par  un  changement  de  lettre  de 
même  organe.  (Voy.  Assenne.) 

Quoi  qu'il  en  soit,  l'acception  d'assenete  paroît 
être  relative  à  celle  d'aisceau,  ou  d'aiscelle,  dans 
ces  vers  où  des  bardeaux,  des-  copeaux,  choses  de 
nature  très-combustible,  paroissent  avoir  servi 
d'objet  de  comparaison  au  Pocte,  pour  rendre  sen- 
sible l'idée  de  la  vitesse  avec  laquelle  le  feu  prenoit 
à  des  villes  que  l'on  vouloit  réduire  en  cendres: 

Plus  vistement  qu'aus  assenetes  (I) 
Fichent  les  feus  par  les  villetes. 

G.  Guiarl.  MS.  cilé  par  D.  Carpcnlier,  Suppl.  Gloss.  lai.  de 
Du  Cangc,  au  mol  Assiela,  col.  342. 

Il  nous  semble  que  D.  Carpentier  s'est  mépris  en 
disant  qu  assenete,  en  ces  vers,  est  de  même  signi- 
fication qu'assegnée,  but  désigné.  (Voy.  Aiscelle  et 

AiSCEAU.) 

Assenne,  subst.  fém.  Ais,  bardeau. 

On  a  la  preuve  que  aiscelle,  ais,  bardeau,  s'écri- 
voit  aiscièle,  aiselle,  aselle,  essele.  Ces  variations 
d'orthographe  une  fois  prouvées,  quiconque  étudie 
les  ancîens  monumens  de  notre  langue,  saura  bien, 
étant  guidé  d'ailleurs  par  l'identité  de  signification, 
réunir  sous  l'article  aiscelle,  toute  orthographe  de 
même  terminaison  que  assielle,  asseille,  et  autres 
à  peuprès  semblables,  que  ses  lectures  peuvent  lui 
offrir.  C'est  un  de  ces  supplémens  qu'on  se  plaît  à 
faire  soi-même,  et  duquel  nous  nous  serions  dis- 
pensés comme  de  plusieurs  autres,  si  nous  n'eussions 
craint  que  l'on  n'eût  eu  quelque  peine  à  reconnoître 
le  mot  aiscelle ,  aisselle,  aselle  ou  essele,  dans  les 
orthographes  essalle,  essaule,  ou  aissaule,  essaime, 
aissenne  ou  assené ,  d'où  probablement  s'est  formé 
le  diminutif  assenete.  (Voy.  Assenete.) 

Cependant  les  voyelles  a  et  e,  comme  les  con- 
sonnes /  et  n,  sont  si  communément  substituées 
l'une  à  l'autre  dans  la  prononciation ,  qu'avec 
un  peu  de  réflexion,  il  semble  aisé  d'apercevoir 
que  essalle,  essanne,  et  aissenne  sont  des  va- 
riations d'orthographe  du  mot  aiscelle ,  comme 
aisselle,  esselle,  ou  essele.  Enfin  si  l'on  réfléchit  que 
«/prononcé  «i<,  est  pour  le  moins  aussi  fréquent 
dans  notre  langue  que  cl  ou  en  prononcé  al  ou  an, 
peut-être  avouera-t-on  sans  peine  l'identité  à'ais- 
saule ,  essaule,  essaulne ,  et  même  à'essaugne, 
eschaugne,  avec  essalle,  essanne,  aissenne;  les 
mêmes  qu'aisse/Ze,  esselle,  ou  esst'/e.  D'ailleurs  elle 
semble  justifiée  par  l'identité  de  signification.  «  Es- 
«  tienne  Noquin  dist que  s'il  avoit  une  petite 


«  essaulne  de  boys ,  qu'il  retourneroit  bien  toutes 
«  leurs  flèches.  »  (D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat. 
de  Du  Cange.  au  mot  Essana,  col.  277  ;  lit.  de  1483.) 
On  Irouve  essaitgne  et  eschaugne ,  avec  le  même 
sens,  dans  un  ancien  Cartulaire,  cité  ibid.  «  Icelle 

«  maison estoit  couverte  d'essil  ou  d'essaule 

«  vieille.  «  (Id.  ibid.  lit.  de  1426.)  «  Voult  frapper 
i<  Jehan  Blandel  d'une  essalle,  laquelle  il  print  en 
«  la  couverture  de  la  maison.  »  (Id.  ibid.  tit.  de 
1483.)  «  Monstroil....  une  essanne  de  bois,  dont  il 
«  avoit  fait  la  semblance  d'un  coustel.  »  (Id.  ibid. 
tit.  de  1374.)  «  Comme  Jehan  Auberi  eust  acheté 
«  certaine  quantité  à'aissenne,  etc.  »  (Id.  ibid.  T.I, 
col.  134,  au  mot  aissella;  tit.  de  1389.)  «  Comme 
«  les  supplians  eussent  marqué  ou  signé  de  la 
«  marque  contrefaite  deux  charges  de  aesou  assen- 
«  nés,  etc.  »  (Id.  ibid.  col.  96;  tit.  de  1412.  —  Voy. 
Aiscelle.) 

variantes  : 

ASSENNE.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  Du  C.  au  mot.4è.s. 

Aissenne.  Id.  ibid.  au  mot  Aissella,  col.  134;  tit.  de  1389. 

Aissaule.  Id.  ibid.  au  mot  Acssella,  col.  97;  tit.  de  1374. 

Aselle.  Bouteiller,  Som.  rur.  p.  875. 

Asseille.  D.  Carp.  S.  G.  1.  de  D.  C.  au  mot  A.tccUa. 

Assené.  Id.  ibid.  au  mot  Aès,  col.  96  ;  tit.  de  1412. 

Assielle.  Id.  ibid.  au  mot  Aissella,  col.  134  ;  tit.  de  1470. 

EscBAUNGNE.  Id.  ibid.  au  mot  Essana,  col.  277. 

Ess.\LLE.  Id.  ibid.  col.  277  ;  tit.  de  1483. 

Ess-\NNE.  Id.  ibid.  col.  277  ;  tit.  de  1374. 

EssAUGNE.  Id.  ibid.  col.  277  ;  tit.  de  1421. 

Essaule.  Id.  ibid.  col.  277  ;  tit.  de  1426. 

Essaulne.  Id.  ibid.  col.  277  ;  tit.  de  1467. 

Assens,  subst.  masc.  Sentiment  d'après  lequel 
on  croit,  on  veut,  on  se  confie,  on  consent,  on 
acquiesce.  Droit  féodal,  espèce  de  cens. 

Le  peuple,  en  basse  Normandie,  dit  encore  au- 
jourd'hui :  agir  et  parler  d'assens,  pour  agir  et  par- 
ler de  bon  sens,  avec  le  sentiment  de  la  raison  qui 
dirige  nos  paroles  et  nos  actions.  (Voy.  Assensé.) 
Telle  est  probablement  la  vraie  signification  du  mot 
assens,  expliqué  ailleurs  par  celui  de  prévoyance. 
(Voy.  Assen.) 

En  général ,  ce  même  mot  assens  désignoit  le 
sentiment  d'après  lequel  on  croit ,  on  veut  une 
chose  avec  plus  ou  moins  de  raison,  avec  plus  ou 
moins  de  confiance  dans  sa  façon  de  sentir,  ou  dans 
celle  des  autres. 

Icelle,  selonc  mon  assens, 
Estoit  Rétorique  apelée  : 
Sage  estoit  et  bien  enperlée. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  258,  R-  ool.  1, 
Ma  suer  ait  ;  c'est  bien  mes  assens. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  9,  R-  col.  3. 
A  ce  ot  torné  son  assens 
Que  mais  de  là  ne  mouveroit 
Tant  que  èle  vivre  porroit. 

Ibid.  fol.  49,  y-  col.  2. 

Quelquefois  c'étoit  le  sentiment  raisonné  d'après 
lequel  on  se  confioit  en  quelqu'un,  comme  dans  ces 
vers  où  Charlemagne  dit,  en  parlant  de  son  neveu 
Roland  : 

Boins  cevaliers  et  de  grant  sens, 
A  vous  estoit  tous  mes  asens. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  221. 


(1)  Assenâtes  est  ici  une  faute  de  lectiu'e  ;  il  faut  asscllettes  pour  rimer  avec  villettes.  (n.  e.) 


AS 


-  25G  — 


AS 


f/  Mais  plus  souvent  céloit  le  sentiment  d'après 
lequel  on  se  confioiten  sa  propre  raison,  pour  vou- 
loir une  chose,  y  consentir,  y  acquiescer.  «  Les 
"i.ordonnances  touclians  le  commun  proufit  de  la 
«.^ville,  soient  faites...  par  Vassenz  des  trois  con- 
«  cistoires.  »  (Ord.  T.  V,  p.  p.  376.) 

Nos  seigneurs  sont  d'assens 
De  mettre,  et  tenir  en  leurs  mains, 
Tous  leurs  privilléges  aux  mains. 
Sentences  de  Liège,  à  la  s.  du  Journ.  de  Paris,  sous  Cliarles  VI,  p.  377. 

...  Si  fisent,  par  buen  asois, 

En  tous  lius  despondre  (1)  lors  sens, 

Por  avancier  crestientet. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  73. 

On  jugera  sans  doute  qu'en  ces  trois  derniers 
passages,  il  éloil  plus  simple  d'expliquer  le  mot 
flsse?is  par  celui  de  consentement;  mais  la  signifi- 
cation de  consentir  est-elle  bien  la  même  que  celle 
d'assenfir.'' Quelle  qu'en  soit  l'analogie  ,  a-t-on  eu 
raison  de  confondre  ces  deux  significations  ?  Il 
semble  qn  assentir  à  une  chose,  c'est  la  vouloir,  y 
acquiescer  d'après  un  sentiment  que  l'on  conçoit 
comme  nous  étant  particulier  ;  au  lieu  que  consen- 
tir à  celte  même  chose,  c'est  la  vouloir,  y  acquies- 
cer d'après  un  sentiment  que  l'on  conçoit ,  comme 
nous  étant  commun  ou  avec  plusieurs  autres. 
Quand  cette  distinction  seroit  purement  idéale,  au 
moins  est-il  prouvé  qu'en  certains  cas  la  significa- 
tion à'asseutcr   difïéroit  de    celle   de   consentir. 

(Voyez  ASSENTER.) 

11  seroit  possible  que  dans  une  signification  figu- 
rée et  relative  à  celle  à'assens,  sentiment  d'après 
lequel  on  consent,  on  acquiesce  à  une  chose,  on 
eût  nommé  assens,  certains  droits  féodaux  consen- 
tis au  profit  de  seigneurs  de  forêts  ou  de  châteaux, 
pour  exemption  de  service,  ou  pour  concession  de 
glandée,  de  pacage.  Mais  lorsqu'on  a  la  preuve  que 
l'on  a  écrit  sens  pour  cens,  et  assenser  pour  acen- 
ser,  il  paroit  plus  vraisemblable  de  dire  que,  dans 
les  Ordonnances  des  Ducs  de  Bretagne  et  dans  la 
coutume  de  ce  Duché,  Vassens  étoit  un  droit  féodal, 
une  espèce  de  cens  que  le  seigneur  d'un  château 
ou  d'une  forêt  exigeoit  de  ses  vassaux,  soit  pour 
concession  de  droits,  tels  que  ceux  de  pacage  et  de 
glandée,  soit  pour  exemption  de  service,  tel  que  le 
guet.  (Voy.  AcENsEuet  Cens.)  «  Combien  en  plusieurs 
<•  parties  de  nostre  Duché  y  aitpluseurschasteaulx, 
"  places  et  forteresses  démolies  et  abatues,  ou  par 
«  avant  la  démolition  d'icelles  les  subgitz  d'iceulx 
«  à  qui  appartiennent  les  dictes  places  avoint  ac- 
«  coustumé  à  faire  guect  et  poier  asseois;  ce  que 
«  depuis  ycelles  démolitions  a  esté  tiré  à  consé- 
«  quence,  et  les  a  l'en  contrains  à  ceulx  assens 
«  poiez.  »  (Ord.  des  D.  de  Bretagne,  fol.  225.)  >■  Les 
«  bois  de  haute  fustaye,  forests,....  et  autres  bois 
«  non  accoustumez  d'estre  émondez,  en  partage 
«  d'entre  frères  et  sœurs  et  auties  parents  nobles, 
«  ne  seront  esfimez,  et  n'entrent  en  partage  ;  mais 
"  seront  estimez  les  pasnages,  glandées,  «ss('»s,  et 
«  autres  émoluments  accoustumez  et   provenans 


«  desdites  forests.  "  (Coût,  de  Bretagne,  au  Coût, 
gén.  T.  II,  p.  769.  —  Voy.  Laurière,'Gloss.  du  Dr. 
fr.  —  Cotgrave,  Dict.) 

VARIANTES  : 
ASSENS.  Carpentier,  Hist.  de  Cambray,  pr.  p.  31. 
AsENS.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  73. 
AssENZ.  Ord.  T.  V,  p.  376. 

Assensé,  participe.  Pourvu  de  bon  sens;  sensé. 
C'est  en  cette  signification  qu'on  disoit  d'un 
homme  fait  pour  agir  et  parler  d'assens,  qu'il  étoit 
assensé.  «  Le  suppliant  qui  estoit  tout  assensez, 
«  homme  de  raison,  et  personne  notable,  etc.  » 
(D.  Carpentier,  nbi  supra.  —  Voyez  Assens  et 
Assenser.) 

Il  semble  évident  qu'assené  est  une  contraction 
à'assensé,  dans  ces  vers  : 

Trop  me  tendriez,  je  croi,  peu  assenée, 
Si,  selon  vostre  conseil,  j'estois  atinée  (2). 

Percef.  Vol.  VI,  fol.  83,  R*  col.  2. 

En  parlant  déjuges  iniques  et  prêts  à  se  laisser 
corrompre  par  des  présens,  on  a  dit  : 

Une  fois  font  leur  jugement 
Estroit,  d'autrefois  largement. 
Chil  sont  de  conseil  assené, 
Qui  font  à  lor  main  ongement  (31. 

Rom.  de  Charité,  strophe  xill. 

VARIANTES  : 
ASSENSÉ.  D.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  Du  C.  à  Sensatus. 
Assené.  Hist.  des  trois  Maries,  en  vers,  MS.  p.  369. 

Assenser,  ve?'i>f.  Faire  part,  instruire.  Parta- 
ger, douer.  (Voy.  Assener.) 

On  observera  qu'anciennement  l'on  disoit,  ap- 
prendre sens  :  expression  qu'il  étoit  assez  naturel 
d'abréger,  en  disant  flssf/îser,  pour  rendre  sensé, 
pourvoir  de  bon  sens.  (Voy.  Sens.)  Quoique  l'exis- 
tence d'rtssfjïSff,  avec  cette  significafion,  soit  encore 
pour  nous  sans  preuve,  elle  peut  du  moins  être 
présumée  d'après  celle  du  participe  assensé,  pourvu 
de  bon  sens,  sensé.  (Voy.  Assensé.) 

En  prononçant  et  écrivant  assené  pour  assensé. 
on  s'est  exposé  à  confondre  deux  mots  essentielle- 
ment différens  par  l'étymologie  :  confusion  d'autant 
moins  sensible,  qu'ils  exprimoient  des  idées  quel- 
quefois très-analogues,  puisqu'avec  le  bon  sens  on 
acquiert  la  connoissance  des  choses.  En  consé- 
quence, l'on  aura  cru  que  si  l'on  disoit  assené  pour 
assensé,  l'on  pouvoit  dire  assenser  pour  assener. 
C'est  relativement  à  la  signification  de  ce  dernier 
verbe  assener,  indiquer  une  chose,  la  faire  connoî- 
tre,  qu'en  parlant  de  la  Magdeleine  qui  fit  part  aux 
onze  Apôtres  et  les  inslru'isit  de  la  résurrection  du 
Fils  de  Dieu,  on  a  dit  : 

De  la  nouvelle  a  assensés 

Ceaux  qui  remésent  en  l'onzaine. 

Miserere  du  Recl.  de  Molicns,  MS.  de  Gaignat,  fol.  224.  R-  col  2. 

Enfin,  la  signification  à'assenser  étoit  la  même 
que  celle  d'assener,  assigner  une  chose  en  partage, 
partager,  douer,  lorsqu'on  disoit  : 

.  .  .  Si  as  ta  langue  dorée, 
Et  de  grant  vertu  assensce, 
Qui  de  tôt  me  sçais  raison  rendre. 

Lucidaires,  MS.  de  Gibert,  fol.  *9,  R'. 


(1)  Exposer.  —  (2)  Hâtée,  pressée.  —  Onguent. 


AS 


257  — 


AS 


Assent,  sitbst.  masc.  Consentement.  11  sem- 
ble qu'en  certains  cas  la  distinction  entre  les 
substantifs  assent.  et  consent,  ait  dû  être  la  même 
qu'entre  les  verbes  consentei'  et  assenter.  ^Voyez 
AssENTER.)  Mais  quelque  réelle  que  puisse  être  la 
différence  de  signification  entre  assentir  et  con- 
sentir, différence  indi(iuée  au  mot  Assens;  on  dira 
qu'assent  signifioitconsentement,  sentimentd'après 
lequel  on  acquiesce  à  une  chose,  soit  que  ce  senti- 
ment fût  particulier  à  une  personne,  soit  qu'il  fui 
fût  commun  avec  d'autres.  «  If  ne  me  semble  que 
«  la  bataille  puisse  demorer,  puisque  fes  gages  sont 
«  donés  et  receus....  par  V assent  et  fa  volenté  des 
"  trois  parties.  >>  (Assises  de  Jérusalem,  ciuip.  xiv.) 
«  Avons  les  Leys....  fait  mettre  en  escript;....  save 
"  à  nous....  de  amender  à  foutz  fes  foilzque....  bon 
«  à  nous  serra,  par  Vassent  de  nos  Countes  et  de 
»  nos  Baions.  »  (Brilton,  des  Loix  d'Angleterre, 
fol.  i.)  ><  Se  aucuns  de  mes  homes  ou  de  mes  fa- 
«  mes....  viennent  pour  demorer  en  fa  communilé 
«  de  Bar-sur-Saine,...  n'en  porront  aucun  retenir, 
«  se  n'est  par  mon  assent  et  par  ma  volenté.  » 
(Rec.  de  Perard,  p.  'iSO  ;  fit.  de  1235.)  «  Remis  li 
«  Archevesque  de  Bourges  mourut  :  Suplices  fu 
«  après  li  en  la  dignité,  par  Vassent  le  Roy  Gon- 
-  trans.  n  (Chron.\le  S'  Denys,  Rec.  des  Hist.  de 
Fr.  T.  m,  p.  237.) 

La  signification  û'assence  ou  acence,  étoit  fa 
même  que  celle  A'assent  dans  ces  deux  derniers 
passages,  lorsqu'on  disoit  :  «  Ne  pourront  fes  Mais- 
»  1res  d'iceulz  Ilostelz- dieux  ,  bailler  leurs  diz 
«  Hostelz  à  ferme,  pour  brasser  et  faire  brasser 
«  cervoises,  et  les  vendre  en  icenlz,...  se  eulz  ou 
"  autres  ne  le  faisoient  par  nostre  congié  et  acence.» 
(Ord.  T.  V,  p.  223.  -  Voy.  Cotgrave,  Dict.) 

VARIANTES  : 
ASSENT.  Rec.  de  Perard,  p.  430  ;  tit.  de  1234. 
Assent.  Chron.  S' Denys,  Rec.  des  Hist.  de  Fr.  T.  III,  p.  237. 
AssENCE.  subst.  fùm.  Cotgrave,  Dict. 
Agence,  .\cense,  nuhst.  fém.  Ord.  T.  V,  p.  223. 

Assentateur,  suhst.  masc.  Celui  qui  acquiesce 
servileineiil  an  si'nliinentd'un  autre. 

En  lalin  iissenlator.  C'estune  desépithètesduniot 
parasite  dans  M.  de  la  Porle  ;  et  ce  n'est  pas  la 
moins  juste.  «  Afin  de  sçavoir  mieux  discerner  fes 
"  opinions  fibres  d'avec  celles  des  ussentateurs  et 
«  blandisseurs,  etc.  »  (Du  Bellay,  Mém.  Liv.  VII, 
fol.  204.  -  Voy.  Borel,  Dict.) 

Assentation,  suhst.  fém.  Acquiescement  ser- 
vile  au  sentiment  des  autres. 

En  fallu  assentatio.  On  a  dit  qu' assentation  est 
"  adjutrice  de  toute  méchanceté.  >-  (L'Amant  ressus- 
cité, p.  134.)  «  Combien  que....  l'adulation  et  asscn- 
"  tation  soit  fort  pernicieuse,  si  ne  peut-elle  nuyre, 
■<  sinon  à  celui  qui  la  reçoit.  »  (Ibid.  p.  137.  —  Voy. 
Cotgrave  et  Oudin,  Dict.) 

Assentement,  substantif  masc.  Consentement. 
Chose  à  laquelle  on  consent.  Chose  sensible  à  l'odorat. 


Au  premier  sens,  Assentement  désigne,  comme 
assent,  le  sentiment  particulier  ou  commun  d'après 
lequel  on  acquiesce  à  une  chose.  (Voy.  Assert.)  Il 
est  évident  que  la  sentenscc  est  une  faute  d'ortho- 
graphe, et  qu'or,  doit  lire  Vassentenee,  avec  la  signi- 
licalion  A' assentement,  dans  la  Chi^on.  de  S"-Denys, 
Rec.  des  Hist.  de  Fr.  T.  III,  p.  307.  «  Si  che  ke  par  fe 
«  otri  e  fe  assentement  de  f'avanldit  Rey  nostre 
«  père,  avum  ordiné  et  establi,  etc.  »  (Rymer,  T.  I, 
part,  n,  p.  114,  lit.  de  1270.)  .<  S'if  avenoit  que  au- 
«  cuns  de  mes  homes...  venoient  por demorer  en  fa 
«  commune  de  Chasteillon  et  de  Dormanz,  li  Bor- 
«  jois...  n'en  porroit  nuz  retenir,  se  n'est  par  mon 
«  assantement,  ou  par  ma  volante.  »  (Hist.  généal. 
de  la  M.  de  Chaslillon,  pr.  p.  14;  til.  de'  1231.) 
«  Nous,  à  lor  prières,  par  consel  de  bonnes  gens, 
«  et  par  le  gré  et  Vassentement  .Iakemon  de  Condé, 
«  etc,  »  (Hist.  généal.  de  la  M.  de  Bélhune,  pr. 
p.  131,  tit.  de  1243.)  «  Viel  et  commans,o  l'assenfe- 
«  mt'H/ et  o  fa  propre  vofenté  de  fadite  ïhomasse, 
«  etc.  "  (Hist.  généal.  de  fa  M.  de  Montmorency, 
pr.  p.  387  ;  til.  de  1265.) 

Il  est  évident  qu'en  ces  deux  dci  uiers  passages, 
la  signification  û'assenteineni  est  analogue  à  celle 
de  l'expression  commun  assentement  dans  ces 
vers  : 

B'ansenlement  commun  li  distrent 
Que  plus  delà  ne  séjournast  ; 
-Mes  en  France  s'en  relornast. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  36,  V. 

C'est  par  une  espèce  de  métonymie  très-familière 
aux  Grammairiens,  que  ce  même  mot  assentement  a 
signifié  cfiose  à  faquelle  on  consent  ;  par  exempte, 
une  donation  faite  du  propre  consentement  du  dona- 
teur. «  Tel  ottroit  et  tel  assentement  ke  me  Dame 
«  me  mère  fist  à  l'abeie  de  Biaupret,...  de  treize 
«  livres  et  de  quarante  sols  de  parisis  de  parme- 
«  naule  rente,  etc.  »  (Hist.  généal.  de  la  M.  de 
Bélhune,  pr.  p.  144  ;  tit.  de  12G5.) 

Enfin  Vassentement  [l]  étoit  une  chose  sensible  à 
l'odorat,  forsqu'en  terme  de  vénerie  on  disoit  en 
parlant  des  corpuscules  qui  émanent  du  corps  des 
fièvres,  des  cerfs,  etc.  «  Lièvres  de  leur  nature  por- 
"  tent  <ïassentement  plus  les  uns  que  les  autres,  et 
«  pour  ce  les  chiens  assentent  niielx  des  uns  que 
«  des  autres;  ainsy  comme  une  rose  a  plus  de  flai- 
«  reur  que  une  autre.  »  (Chasse  de  Gaston  Phébus, 
MS.  p.  45.)  «  Quant  le  cerf  fuit  aval  l'yeaue,  el  les 
«  chiens  sont  au-dessus,  l'yeaue  emporte  tout  Vas- 
«  sentement  du  cerf  contre  aval  devant  eulx.  » 
(Id.  ibid.  p.  239.  —  Voy.  Assentiment  et  Assentir.) 

VARIANTES  : 

ASSENTEMENT.  Chasse  de  Gaston  Phébus,  MS.  p.  239. 
ASCENTEMANT.  Ord.  T.  III,  p.  577. 

Assantement.  Hist.  gén.  de  la  M.  de  Chastillon,  pr.  p.  14. 
AS.SONTEMENT.  Ord.  T.  III,  p.  480. 

Antessetkment.  (Corr.  Assentement)  Ord.  T.  II,  p.  11. 
Sentensce  (la),  subst.  fém.  (corr.  l'Assentetice).  Chron.  de 
S'  Denys,  T.  III,  p.  307. 


(1)  C'est  l'odeur  qui  frappe  le  nez  du  chien  et  qui  le  porte  à  se  rabattre  sur  la  piste  de  l'animal  poursuivi.  Le  mot 
s'emploie  encore  dans  ce  sens.  (n.  e.) 

11-  33 


AS 


—  2r.8  — 


AS 


Assenter,  verbe.  Acquiescer  par  un  sentiment 
de  justice.  Drilton  dislingiioit  assenter  de  consan- 
^er  ;  distinction  suivant"  iatiuelle  consenter  h  une 
présentation  de  l)éiiclice,  c'étoil  y  ac(iuiescer,  lors 
même  qu'on  y  avoit  quelque  droit  ;  au  lieu  qu'assm- 
ter  à  celte  même  présentation,  c'étoit  y  acquiescer 
après  s'y  être  opposé  sans  droit  quelconque,  y  ac- 
quiescer par  un  sentiment  de  justice.  »  Une  chose  est 
«  assfH/É!r,eluneautreconsenler.^tss('»<«'estcome 
«  ascunquiii'ad  nul  droil  de  présenter,  dit  aprèsceo 
«  que  il  avéra  mys  desturbaunce  ;  jeo  me  assente  ù 
•  ce  présentement,  sauve  mon  droit  après.  Et  tel 
«  assent  n'est  mye  préjudiciel  ai  verrey  palron  ;  ne 
«  rien  del  droit  par  taunt  ne  acresl  al  deslurbour. 
"  Consenter  est  corne  ascun  qui  est  en  seisine  de 
«  avowson,  consent  al  présentement  celuy  que  ad 
«  plus  de  droit  car  l'un  purra  estre  en  seisine  del 
«  droit  possessory  et  l'autre  de  la  propreté  ;  et  qui 
»  plus  ad  dans  la  piopreté,  plus  ad  del  droit.  » 
(Britton  des   Loix  d'Angleterre,  fol.  225.  —  Voy. 

ASSENTEME.NT.) 

Assentiment,  siibst.  masc.  Sentiment.  En  ter- 
mes de  vénerie,  impression  (\ue  le  loup  et  autres 
animaux  reçoivent  par  l'odorat.  «  Le  loup  n'ira 
«  contre  le  vent,  s'il  sent  que  les  lévriers  y  soient  ; 
«  et  aval  le  vent  n'en  peut  avoir  aucun  assentl- 
«  ment.  »  (Du  Fouilloux,  Vénerie,  fol.  118.  —  Voy. 
AssENTiR.)  C'est  par  métonymie  que  les  corpuscules 
mêmes  qui  occasionnent  cette  impression  sur  le 
sens  de  l'odorat,  ont  été  désignés  par  le  mot  assen- 
tement.  (Voy.  Assentement.) 

Assentir,  verbe.  Sentir  en  tâtant,  en  flairant, 
etc.  Pressentir,  prévoir;  savoir,  connoitre.  Ressen- 
tir. Rendre  sensible,  affecter  d'un  sentiment,  pas- 
sionner. Réunir  au  même  sentiment,  rendre  con- 
forme en  sentiment.  Consentir,  acquiescer.  Rendre 
consentant.  (Voy.  Assent.) 

Du  verbe  simple  sentir,  avoir  connoissance  de 
son  être  et  de  ce  qui  y  est  relatif,  par  l'action  interne 
et  externe  du  principe  moteur  de  ce  même  être,  l'on 
a  fait  le  composé  assentir  qui  signifioit  tâter,  sentir 
en  tàtant  : 

En  l'estable  s'en  vient  tout  droit, 

Où  li  prestres  repus  estoit. 

Tout  sans  lumière  et  sans  chandeille, 

Les  brebis  eschace  et  esveiUe; 

Et  va  querrant  et  assenlant 

Où  li  prestres  ert  estupant. 

Fail.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  145.  I\"  col.  2. 

En  termes  de  vénerie,  flairer,  sentir  en  flairant  ; 
«  Si  les  chiens  y  mettent  les  nazeaux  pour  assentir, 
«  la  poudre  entre  dedans,  qui  les  estouppe  et  osie 
«  le  sentiment.  ■>  (Du  Fouilloux,  Vénerie,  fol.  43.) 
«  Cerf  fuit  les  voies  dures  et  saiches,  afiin  que  les 
«  chiens  qui  léchassent,  ne  le  puissent  assc/Uir  ; 
«  et  puis  va  à  l'eaue  pour  soy  baigner,  aftin  qu'il 
«  perdent  le  sentir  de  luy.  Ainsi  doit  fouir  homme 
<■  quant  le  Dyable  le  chasse...  et  courre...  à  l'eaue 
«  benoiste,  affin  que  le  Dyable  ne  sente  et  cong- 
«  noisse  sa  trasse.  »  (Modus  et  Racio,  fol.  38.) 

C'est  en  ce  même  sens  qu'on  disoit  d'un  chien, 
bon  pour  la  quête  du  cerf  : 


...  Ne  se  faint  pas  de  quérir 
Si  en  pourra  riens  assentir. 

Gace  de  la  Bigne,  des  Héduils,  MS.  fol.  101,  R'  et  V. 

En  supprimant  le  mot  riens  dans  cette  expres- 
sion, «  riens  assentir  .d'un  cerf,  »  l'on  aura  dit 
qu'un  cliien  asscnlolt  d'un  cerf,  ou  d'une  autre 
bête.  (Voy.  Gace  de  la  Digne,  des  Déduits,  ms.  fol.  72. 
—  Dict.  de  la  Chasse,  ms.  du  R.  ir  7930,  p.  1 42,  etc.) 
«  Quant  le  cerf  sort  de  l'eau,....  les  chiens  n'en 
«  pourroienl  avoir  aucun  sentiment;  mais  à  dix  ou 
«  douze  pas  loiiig  du  bord,  ils  en  pourroient  assen- 
«  tir  plus  aisément.  »  (Du  Fouilloux,  Vénerie , 
fol.  ii.)  «  Quand  les  chiens  cuident  «isc/t/jr  de  la 
«  beste  qu'ils  chascent,  le  tlaiieur  et  l'oudeur  des 
«  herbes  leur  oste  moult...  r«s,se?iii?'de leur  beste.  » 
(Chasse  de  Gaston  Phébus,  ms.  p.  12Ï).)  Dans  ce  der- 
nier passage,  asse)itir  pris  substantivement,  est  de 
même  signification  que  assentiment.  (Voy.  Assen- 
timent.) 

Il  seroit  possible  quassentir  eût  désigné  toute 
impression  faite  sur  notre  âme  par  le  moyen  des 
organes  de  nos  sens;  et  que  dans  un  sens  analogue 
à  celui  de  sentir  en  voyant,  il  eût  signifié  pressentir 
une  chose,  la  prévoir,  la  savoir,  en  avoir  connois- 
sance avant  qu'elle  se  réalise.  Telle  est  l'acception 
d'assentir  dans  les  passages  suivans.  ^  Avoit.... 
«  envoyé  le  dit  ambassadeur  du  Duc  devers  nostre 
»  dit  Sainct-Pere,  pour  assentir  de  lui  la  vérité.  » 
(Lett.  de  Louis  XII,  T.  IV,  p.  293.)  «  Nous  avons 
«  assenli  et  appris  que,  etc.  »  (Négociations  de 
Jeannin,  T.  H,  p.  187.)  «  Prièrent  Balian  d'Ibelin 
"  qu'il  alast  à  Salehadins,  por  asenlir  quel  pais  il 
«  poroient  faire.  «  (Chron.  d'Outremer,  ms.  de 
Berne,  n°  113,  fol.  138,) 

Dans  un  sens  physique  et  moral,  assentir  une 
peine,  c'étoit  la  ressentir. 

Por  11  me  convient  assentir 
Les  maus  c'on  apele  d'amer: 
Une  eure  douz,  et  autre  amer. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  267,  V  col.  1. 

Si  l'on  étoit  sensible,  si  l'on  s'affectoit  d'un  senti- 
ment d'amour  pour  Dieu,  si  l'on  se  passionnoit  pour 
une  personne  ou  pour  une  chose,  on  disoit  que  l'on 
s'y  assentoit. 

Cil  pape  Gerbers 

Ne  fu  pas  en  la  fin  bobiers  ; 
Mais  del  tout  à  Dieu  s'assenti. 
Si  que  pour  mort  vie  senti. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  405. 

N'est  droiz  qu'à  autre  amer  m'assente, 
Puisque  j'aim  personne  si  gente. 
Chaiis.  fr.  à  la  suite  du  R.  de  Eauv.  MS.  du  R.  n-  6812,  fol.  6»,  R*  col.  3. 

Que  je  vous  die  sanz  mentir, 
Cornent  on  se  doit  assentir 
A  chevalerie  embracier. 
L'en  doit  en  sus  de  li  chacier 
Tous  les  vices  et  tous  les  maus. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7G15,  fol.  162  V  col.  2. 

On  exprimoit  la  réunion  de  plusieurs  personnes 
au  même  sentiment  sur  une  chose,  une  conformité 
de  sentiment  entre  elles  sur  cette  même  chose,  en 
disant  : 

Pais  vint  ;  tout  fumes  assenti. 
Dits  de  liaudouin  de  Condé,  MS.  de  Gaignat,  fol.  319,  R*  col.  1. 


AS 


—  259  — 


AS 


Tous  communément  s'assentirent 
K'à  Cléomadès  offerroient, 
K'à  ses  besoins  le  serviroient. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  35,  V  col.  1. 

Si  la  chanson  d'un  amant  n'étoit  pas  conforme 
aux  sentimens  de  son  cœur,  on  disoilque  "  la  voix 
«  au  cœur  ne  s'assentoU.  » 

En  plorent  me  convient  chanteir  : 
Et  si  le  doi  faire  ausiment. 
Laissier  deusse  lou  chanteir, 
Quant  la  voix  à  cuer  ne  s'asent. 

Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  n-  389,  part.  I.  fol.  66,  R'. 

Le  xerhe  assen tir,  dans  la  signification  de  con- 
sentir, désignoit  le  sentiment  particulier  d'après 
lequel  on  acquiesçoit  à  une  chose,  lorsqu'on  disoit  : 

Chevalier  se  doit  contenir 
En  Testât  où  il  veut  fenir  , 
Et  doit  vivre  honnestement. 
Il  ne  doit  jurer,  ne  mentir, 
Ne  à  nul  raalfait  aseiilir; 
Et  doit  faire  bon  jugement. 

ModuselRacio.MS.  fol.  221,  V*. 

Enfin,  s'assentir  à  une  chose,  c'étoit  s'y  rendre 
consentant,  y  acquiescer  d'après  son  sentiment  par- 
ticulier. «  Se...  ne  se  voloient  assentir  à  ceste 
"  devise,  come  il  seront  en  aage,  il  porroient  de- 
«  mander  leur  droiture,  et  leur  devise  demorroit.  « 
(Hist.  généal.  de  la  M.  de  Chastillon,  pr.  p.  57;  tit. 
de  1246.) 

Bien  s'assent  à  ce  mariage. 

Cléomadès,  MS.  de  Gaignat,  fol.  17,  R-  col.  1. 

CONJUG. 

Asenti  (s'),  indic.  prêter.  S'affecta  d'un  sentiment. 
(Ph.  Mouskes,  ms.  p.  405.) 

Asentist  (s),  indic.  prêter.  Se  rendit  consentant. 
(Poës.  à  la  suite  du  Rom.  de  Fauvel,  fol.  I.) 

Asentu,  partie.  Senti  en  flairant.  (Modus  et  Racio, 
MS.  i^ol.  67,  V'.) 

Assent,  Asent  (m'),  indic.  prés.  Je  m'affecte  d'un 
sentiment,  je  m'y  conforme.  (Fabl.  ms.  du  R.  —  Ane. 
poët.  fr.  Mss.  avant  1300.) 

Assentus,  partie.  Rendu  consentant.  (Beauma- 
noir,  Coût,  de  Beauvoisis,  chap.  xv.) 

V.\R1ANTES  : 
ASSENTIR.  Cotgrave,  Oudin,  Nicot  et  Monet,  Dict. 
ABSENTin.  Modus  et  Racio,  HS.  fol.  221,  variante  d'i4sa)î(i>. 
AccENTiR.  Id.  ibid.  fol.  63. 
ASANTIE.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7G15,  fol.  165. 
A.SENTin.  Chron.  d'Outremer,  MS.  de  B.  n"  113,  fol.  138. 
Ass.\NTiR.  Fabl.  MS.  du  R.  ii»  7615,  fol.  163. 

Asseoir ,  verbe.  Faire  asseoir ,  faire  prendre 
séance.  S'asseoir,  prendre  séance.  Mettre  dans  une 
position  fixe  et  stable,  établir,  fixer  ;  établir,  fixer 
en  évaluant,  en  assignant,  en  enchâssant,  etc.  Poser, 
déposer,  disposer.  Seoir,  être  séant,  convenable. 
Toucher ,  adresser.  Imposer.  Préposer.  Entourer, 
environner,  assiéger,  enfermer.  (Yoy.  Assikger.) 

L'orthographe  asseoir ,  encore  subsistante,  n'est 
pas  moins  ancienne  que  les  autres,  dans  notre  lan- 
gue. En  retranchant  la  voyelle  o,  l'on  êcrivoit 
asseir  ;  orthographe  qui  semljle  indiquer  que  la 
prononciation  d'asseoir  étoit  quelquefois  différente 
de  la  nôtre. 


Ne  sai  coument  on  puist  cuer  aseir 

Plus  hautement  qu'amours  m'a  fait  coisir. 

Ane.  Poés.  fr.  MS.  du  Vatican,  n"  1490,  fol.  85,  V". 

Au  moins  est-il  évident  qu'asseir  se  prononçoit 
comme  assir ;  autre  variation  d'orthographe  qui 
prouve  que  le  participe  assis  appartient  à  la  conju- 
gaison du  verbe  asseoir,  de  même  origine  et  sou- 
vent de  même  signification  qu'flssm'.  (Voy.  Asséer.) 
C'est  par  ellipse  d'un  nom  féminin,  et  quelque- 
fois masculin,  que  ce  participe  assis,  au  féminin 
assise,  s'est  pris  comme  substantif.  «  Hugues  de 
«  Borgoigne....  nos  doit  asseoir  cinc  cent  livres 
«  de  terre  de  tornois  de  rente,...  à  laquelle  assisse 
«  li  dux  Robertz  s'est  consenliz.  »  (Rec.  de  Perard, 
p.  514  ;  tit.  de  J20C.  —  Voy.  Assis  et  Assise.) 

La  signification  d'asseoi?'  étoit  la  même  que  celle 
d'asséer,  faire  asseoir,  faire  prendre  séance,  lors- 
qu'on disoit  : 

Certes  moult  grant  enor  vos  fist. 
Quant  il  de  lez  lui  vos  assist. 

Rom.  de  Perceval.  MS.  de  B.;rnc,  n'  354,  fol.  237,  R'  col.  1. 
Tuit  estoit  illec  délivre. 
Et  assis  sanz  faire  dangier  ; 
Sans  eulx  demander,  au  mangier. 
Dont  estes  vous  ?  Qui  vous  a  assis  ? 

Eusl.  Desch.  Poës.  MS=^.  p.  464.  col.  3. 

Comme  il  est  ordinaire  qu'en  buvant  et  mangeant 
l'on  soit  assis,  défendre  aux  taverniers  et  cabare- 
tiers  d'asseoir,  de  faire  asseoir,  ou  donner  à  s'as- 
seoir avant  et  après  certaine  heure,  c'étoit  leur 
défendre  de  donner  à  manger  et  à  boire  avant 
et  après  cette  même  heure  ■<  Taverniers,  depuis 
"  que  couvrefeu  sera  sonné  en  l'église  de  Paris, 
"  ne  pourront  asseoire,  ne  traire  vins  en  leurs 
te  maisons  à  beuveurs.  "  (Ord.  T.  II,  p.  3.55.) 
«  Nul  ne  pourra  aller  es  tavernes  et  cabarets  pour 
«  y  boire  et  manger...  durant  la  messe  parochiale 
«  et  vespres,  sur  encheoir  en...  amende,  tant  ceux 
«  qui  y  seroient  trouvez,  comme  l'hoste  et  Ihos- 
«  tesse  que  les  assiroient.  ><  (Coût,  de  Hainaut,  au 
nouv.  Coût.  gén.T.  II,  p.  71.) 

Rien  de  plus  fréquent  dans  notre  ancienne  langue 
que  l'usage  de  ce  verbe  avec  le  pronom  personnel, 
pour  signifier  s'asseoir,  prendre  séance.  «  Les 
«  tables  furent  mises...  et  il  s'asistrent.  Li  sires  les 
«  fist  aler  aseoir,  et  la  dame  s'assist  au  chief  de 
«  la  table.  «  (Rom.  de  Dolopathos,  ms.  de  N.  Dame, 
n"  2,  fol.  57.)  Mais  dans  ce  passage  qui  prouve  l'an- 
ciennelé  de  l'acception  encore  usitée  de  notre  verbe 
s'asseoir,  on  voit  que  sans  pronom  personnel, 
asseoir  étoit  de  même  signification.  Peut-être  fau- 
droit-il  lire  asseoir,  au  lieu  d'asseor,  en  cet  autre 
passage  où  il  s'agit  de  l'adoration  des  Mages  ?  «  Li 
«  troi  roi  ki  vienentjai,  ne  mies  solement  devers 
«  occident,  por  flsseo/' ensemble (1)  Abraham,  Ysaac 
«  et  Jacob.  »  (S'-Bernard,  Serm.  fr.  mss.  p.  118.) 

Probablement,  c'est  par  allusion  à  l'idée  de  repos, 
cessation  de  mouvement,  signifié  par  le  verbe 
asseoir,  s'asseoir,  que  ce  même  verbe,  pris  subs- 
tantivement, aura  désigné  la  cessation  accidentelle 
du  mouvement  d'un  corps  qui  tombe  ;  un  repos. 


(1)  Avec. 


AS 


—  260  — 


AS 


une  cessation  de  mouvement,  telle  que  seroit  celle 
d'un  gant  jeté  en  l'air,  sur  un  bataillon  assez  épais 
et  serré  pour  en  arrêter  la  chute  à  terre. 

François  qui  la  bataiUe  reuvent  (1), 
De  toutes  parties  s'esmeuvent. 
Chascun  conroi,  lente  aleure, 
S'en  va  joint  comme  en  quarreure  ; 
Si  bien  que  s'un  gant  preissiez, 
Et  entr'eus  haut  le  gelissiez, 
Il  paroist  qu'à  son  asseoir 
Ne  deust  mie  test  cheoir. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  345,  R'. 

C'est  par  extension  de  cette  même  idée  de  repos, 
à  celle  d'une  position  fixe  et  stable,  que  le  verbe 
s'asseoir  a  signifié  s'établir,  se  fixer  dans  un  lieu  : 
«  Pour  ce  que...  Juyfs  et  Juyfves...  sont  de  telle 
•  condicion  qu'il  n'ont  pais  ne  lieu  propre  aucun 
«  en  toute  chrétienté  où  il  puissent  demourer,... 
«  se  ce  n'est  de  la  propre  et  pure  licence  et  volenté 
«  du  Seigneur...  soubz  quiilsevouldroientasst'o/»', 
«  pour  demourer  souz  eulz,  comme  leurs  subgiez, 
«  etc.  »  (Ord.  T.  111,  p.  471.)  «  Nous  Thiébaut 
«  escuier...  avons  franchi  Hersant...  et  avons 
«  encore  ([uitlé  et  quittons  an  Seigneur  à  qui  elle 
«  se  donra,  ou  dessouz  qui  elle  se  asserra,  ou  ma- 
«  riera,  tout  le  droit...  que  nous  avons.  »  (D.  Car- 
pentier,  suppl.  au  Gloss.  lat.  de  du  Gange,  au  mot 
Asselare;  tit.  de  1293.) 

Au  figuré,  se  fixer  à  un  avis,  comme  dans  le  pas- 
sage suivant  ;  à  moins  qu'on  ne  dise  que  se  assei- 
rent  est  une  faute  |)ours(^  assen tirent.  «  Les  com- 
«  paignonsdela  Table  ronde.,  demandèrent  l'ung 
«  à  f  autre  t|ue  ils  feroient  :  et  monseigneur  Gau- 
«  vain  deist;...  donnons  à  celluy  qui  a  vaincu,  en 
«  signe  de  victoire,  ceste  couronne  de  laurier  ;  et 
«  se  asseirent  tous.  »  (Lanc.  du  Lac,  T.  III,  fol.  38.) 

On  exprimoit  toutes  idées  relatives  à  celles  d'éta- 
blir, de  fixer,  lorsqu'on  disoit  figurément  :  asseoir 
jour  pour  une  chose  ;  asseoir  rentes  de  conils,  en 
fixer  l'évaluation  en  argent  ;  asseoir  «/i  échange, 
un  partage,  une  loi;  asseoire  une  cause,  une 
affaire  devant  un  Juge,  etc.  «  Oblatiuns  faire,  e  sacri- 
«  fieras  jurs  asis  e  par  la  Lei  establiz.  »  (Livres  des 
Rois,  Jis.  desCordel.  fol.  1.)  ^  Quia  rentes  de  conils, 
"  le  connil  se  assit  pour  douze  deniers.  »  (Coût,  de 
Bourbonnois,  au  nouv.  Coût.  gén.  T.  111,  p.  12'28.) 
'<  Noz  remenl  par  ceste  pez  loz  les  demaenes  que 

<'  iceli  Herveu  avoit  o  Bosic; li    an  douant 

«  égnnge  an  noire  terre  demaene  au  Plogaslel,  au 
«  dit  monsignor  Salomon...  et  Ermallon  de  Tre- 
«  gurn...  qui  devent,  sur  les  choses  que  iceli  Her- 
«  veu  le  vodra  apprécier,  Yasseir  léaument,  ausi 
«  ben  por  celi  llerveu  coine  por  noz.  »  (D.  Morice, 
preuv.  de  lllist.  de  Bretagne,  T.  1,  coi.  984;  tit. 
de  1262.)  «  Furent  pris  bones  gens  por  les  parties 
«  asseoir  ;  et  bien  apertque  les  parties  furent  faites 
«  au  grei  monsignor  Renaut;...  et  de  celé  terre  qui 
<«  li  fu  assenée  et  asisse  por  sa  partie,  reçut  mesire 
«  Renalz,  les  homagcs.  »  (Duchesne,  Hist.  de  la  M. 
de  Bar-le-Duc,  p.  30;  tit.  de  1249.) 


.  .  .  Teils  est  la  loi  asise. 
Ke  la  feme  soit  conquise 
Pues  K'elle  ait  l'ome  conquis. 

Clians.  fr.  ilS.  de  Btrne,  n'  389,  pail.  I,  fol.  98,  R'. 

...  Je  V  fis  par  leal  jostice 
Qui  esl  estaljlie  et  assise 
Par  tote  la  terre  le  Roi. 
Rom.  de  Peiceval,  MS.  de  Berne,  o-  354,  fol.  2G6,  V  col.  2,  et  267,  R*  col.  1 

En  portant  une  cause,  une  affaire  dans  une  Cour 
de  justice,  on  l'y  établit  de  façon  que  le  juge  puisse 
fixer  les  droits  ou  les  torts  respectifs  des  parties. 
De  là,  on  aura  dit  :  ■■  Se  il  avenoit  que...  tançon  fût 
«  entre  eulz,...  et  le  fait  et  tançon  soit  tel...  par 
»  <iuoy  homme  ou  femme  en  doie  recevoir  mort, 
<'  nous  voulons  que  il  soient  recreus  par  pièges,... 
«  pour  estre  à  droit  assise  par  devant  le  Prévost,... 
«  et  d'ilecques  par  appel,  par  devant  les  autres 
•<  juges.  »  (Ord.  T.  III,  p.  574  et  575.)  »  En  la  Court 
«  de  céans,  s'est  assis  un  procès  entre  les  héri- 
«  tiers,  etc.  »  (.\rest.  amor.  p.  203.) 

Dans  un  sens  moins  figuré,  asseoir  une  fille, 
c'étoit  l'établir,  fixer  son  état  en  la  mariant.  «  Quant 
«  le  Duc  vit  que...  sa  fille  ne  se  vouloit  déporter 
«  d'aimer  Gérard,  il  se  pensa  en  lui-mesme  qu'il  lui 
"  donneroilîi  mariage,  en  lui  semblant  que  mieulx 
«  ne  povoil  estre  assise.  ■»  Gér.  de  Nevers,  part.  II, 
p.  22  et  23.)  On  établit  quelqu'un,  on  fixe  son  étal, 
en  fixant  ce  qui  doit  lui  être  assigné  en  teries,  eu 
rentes,  ou  en  autres  choses.  De  là  on  aura  dit  : 
«  Livreisunli  asist;  si  Tout  à  tut  son  vivant.  »  (Livres 
des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  154.)  Suivant  Vasise, 
l'état  de  la  maison  du  roi  Salomon  ;  «  à  suu  pestrin 
«  furent  chascun  jur  asiz.  nuef  cenz  muis  de  flur 
«  deliéemenl  buletée,e dise uil cenz  muis  de  farine 
«  de  altre  baillie  ;  e  à  sa  quesiue  furent  asis  chas- 
«  cun  jur  dis  bues  gras  de  guarde,  e  vint  ki  veneient 
«  de  la  cumune  pasture  ;  e  cent  multuns,  estre  (2) 
'<  la  veneisun.  »  (Ibid.  fol.  83.)  «  Por  quatre-viiis 
«  livrées  de  terre,  lesquelles  je  devoye  rtssfo/;' à... 
«  mon  Signer  Thomas  de  Coucy,  etc.  »  (Duchesne, 
Hist.  de  la  M.  de  Bar-le-Duc,  p.  28;  tit.  de  12'i3.) 
«  Les  trois  mile  livrées  de  terre  que  .lehan  auroil 
«  assises,  ou  devroil  asseoir  à  lluet,  etc.  •»  (Hist.  de 
la  M.  de  Chastillon,  p.  56  ;  tit.  de  1246.)  «  Qui  assit 
«  rentes  de  terres,  il  faut  qu'il  baille  les  deux  par- 
«  ties  en  bleds,  et  la  tierce  en  deniers.  »  (Coût,  de 
Bourbonnois,  au  Nouv.  Coût.  gén.  T.  111,  p.  1127.) 

Cent  sospirs  fais  chascun  jor  ; 

C'est  ma  rente  assise, 
Et  le  bien  que  j'ai  d'amours. 

Ane.  Poël.  Fr.  MSS.  avant  1300,  p.  45. 

La  signification  de  ce  même  verbe  asseoir  cessoit 
d'être  figurée,  lorsqu'on  disoit,  asseoir  une  chose 
en  or  et  en  argent,  pour  l'y  fixer  en  fenchàssant  ; 
d'oîi  fou  auradit  d'une  couronne  d'or  en  laquelle 
étoient  enchâssées  des  pierres  précieuses,  qu'elle 
en  étoit  assise.  (Voy.  Livres  des  Rois,  ms.  des  Cord. 
fol.  55.) 

Li  Clerc  de  Rouen  son  cuer  pristrent, 
Qu'en  or  et  en  argent  assistrent , 
Con  se  ce  fust  un  saintuaire. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  52,  V. 


(1)  Demandent;  en  latin,  rayant.  —  (2;  Hors;  en  latin,  extra. 


AS 


201  - 


AS 


Asseoir  sa  main,  pour  la  fixer,  la  tenir  dans  une 
position  fixe  :  «  Arc  de  quoy  arcliier  doit  traire  à 
.  fust,  doit  estre  plus  doux  et  moins  fort  que... 
«  celuy  de  quoi  on  tire  à  veue....  11  ne  peult  asscoli' 
«  sa  main,  ne  tenir  ferme,  se  l'arc  est  trop  fort.  » 
(Modus  et  Kacio,  impr.  fol.  42.  —  Ibid.  ms.  fol.  70.) 

Asseoir  le  dé,  pour  le  fixer  en  larrètaut,  en  le 
rompant  (1)  ;  peut-être  aussi  en  fixer  la  position  dans 
le  cornet,  en  jouant  sans  l'avoir  remué. 

Hoche  le  dé  ;  ne  l'assia  mie. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  235,  V  col.  1. 

Encor  ne  vos  poez  tenir 
De  dez  changer  et  asxeir. 

Fabl.  MS.  de  S'-Germ.  fol.  K,  R-  col.  3. 

Quant  on  ne  fait  sa  volenté, 
Si  dit  c'en  li  assiet  le  dé. 

Ibid.  ubi  supra. 

.  .  .  Diex  fet-il,  j'ai  là  six. 
Va,  si  te  pent  ;  tn  l'as  astis. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  235,  V  col.  8. 

Lorsqu'en  donnant  un  baiser,  la  liouclie  se  fixoit, 
on  disoitque  le  baiser  éfoit  bien  assis.  "  Geste  dame 
«  sera  tenue....  de  donner  à  son  amy...  demy  dou- 
•  zaine  de  baisers  bien  assis,  et  dont  chascun 
«  d'iceulx  pourra  durer  autant  qu'on  mettroil  à  dire 
«  un  De  profundis.  »  (Arest.  amor.  p.  203.) 

On  élendoit  l'acception  d'asseoir ,  mettre  dans 
une  position  fixe  et  stable,  à  toute  espèce  de  ma- 
nières de  poser  les  choses,  de  les  déposer,  de  les 
disposer,  en  disant  :  Asseoir  une  couronne  sur  la 
tète  de  quelqu'un  ;  asseoir  une  herbe  sur  sa  plaie  ; 
asseoir  l'orifiamme  dans  un  trésor;  figurément 
asseoir  la  vérité  dans  une  histoire  ;  asseoir  des 
tables  pour  manger  ;  asseoir  des  étaux  dans  un 
marché  ;  asseoir  pieds  et  mains  pour  bien  danser, 
etc.  (Voy.  Livres  des  Rois,  ms.  des  Cordel.  fol.  55. — 
Rom.  de  Perceval,  .vs.  de  Berne,  n°  35i,  fol.  265.  — 
G.  Guiart,  ms.  fol.  30.  —  Idem.  fol.  201. —  Fabl.  ms. 
du  R.  ir  7615,  fol.  147.  —  Jean  de  Sainlré.  p.  172. 
—  Ord.  T.  V,  p.  512.  —  Danse  des  Aveugles,  etc.) 

C'est  dans  le  sens  général  de  poser,  qu'on  disoit 
asseoir  le  guet,  asseoir  une  embusche,  etc.  «  Lesdits 
«  clers  dudit  office  de  clergie  de  guet...  asserront, 
«  mestroiit,  et  envoleront  ledit  guet  des  gens  de 
«  mestier,  es  lieux,  etc.  ■>  (Ord.  T.  III,  p.  670.  — 
Voy.  Rob.  Estienne  et  Mcot,  Dict.) 

Si  l'on  a  désigné  la  saisie  du  fief  d'un  Vassal,  en 
disant  que  le  Seigneur  asseyait  sa  main,  c'est  sans 
doute  relativement  à  l'idée  de  poser  la  main  sur 
une  chose  pour  s'en  saisir.  «  Il  n'est  loisible  au 
«  Seigneur  féodal  d'asseoir  sa  main\2),  n'empescher 
«  le  fief  de  son  Vassal  décédé,  jusques  à  quarante 
«  jours  après  le  décez  de  son  dit  Vassal.  »  (Goût,  de 
Troyes.  au  Goût.  gén.  T.  I,  p.  414.  —  Voy.  Laurière, 
Gloss.  du  Dr.  Fr.) 

En  termes  de  fauconnerie,  on  disoit  d'un  oiseau 
de  proie  bien  posé  sur  ses  pieds,  qu'il  étoit  «  ne 
"  trop  haut  assis,  ne  trop  bas.  »  (Modus  et  Racio, 
MS.  fol.  109.  -  Ibid.  fol.  135.) 


On  observera  qu'en  ce  dernier  passage,  le  parti- 
cipe ass/'s  désigne  une  idée  de  proportion,  de  jus- 
tesse, de  convenance  qu'exprimoit  en  général  le 
verbe  asseoir  dans  le  sens  de  disposer.  On  faisoit 
l'éloge  d'une  bouche  bien  proportionnée,  en  disant 
qu'elle  étoit  bien  assise.  (Voy.  Ane.  Poët.  Fr.  mss. 
avant  1300,  p.  1140.) 

La  signification  d'asseoir  étoit  relative  à  des 
idées  de  convenance,  de  proportion  en  naissance 
et  en  fortune,  lorsqu'on  disoit  : 

Si  j'estois  fix  à  Roi, 
S'asserics  vous  bien  à  moi. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7989,  fol.  75,  V-  col.  2. 

Il  semble  que  dans  un  sens  relatif  à  une  idée  de 
justesse  dans  le  coup  d'œil  et  dans  le  mouvement 
du  bras,  ce  même  verbe  asseoir  ait  signifié  toucher 
eu  visant  juste,  adresser,  toucher  droit  où  l'on  vise. 
Quoiqu'il  en  soit,  dans  les  joutes  ou  dans  les  com- 
bats à  la  lance,  courir  sans  asseoir,  c'étoit  courir 
sans  adresser,  sans  toucher.  «  Le  Ghevalier  esclave 
"  se  trouva  mal  armé  de  sa  venue,  et  lui  fut  advis 
«  qu'il  courroit  sans  asseoir,  et  pourroit  faire  per- 
«  dre  le  temps  aux  autres  coureurs.  ■■  (Mém.  d'Ol. 
de  la  Marche,  Liv.  II,  p.  555.)  On  disoit  du  Ghevalier 
qui  avoitété  louché,  qu'il  étoit  assis;  que  la  lance 
même  de  celui  qui  avoit  adressé,  étoit  assise  «  Si 
«  assemblerons  desdictes  lances  une  fois,  et  assis 
«  d'icelles  lances,  ou  non  assis,  chascuns  estera  sa 
«  large  à  part  luy,  et  prendra  sonespée  sans  ayde.  » 
(Monstrelet,  Vol.  I,  fol.  7.)  «  Ils  dévoient  faire  armes 
«  à  cheval ,  d'abondant  de  lances  et  d'espées;  c'est 
•<  à  sçavoir  l'un  contre  l'autre;  chacun  d'une  seule 
«  lance,  fust  assise  ou  non.  »  (Mathieu  de  Coucy, 
Hist.  de  Gharles  VII,  p.  555.) 

Dans  l'imposition  des  tailles,  des  charges  publi- 
ques, on  doit  garder  certaine  proportion  (jue  sem- 
ble désigner  le  verbe  asseoir,  lorscjue  dans  le  sens 
imposer,  on  dit  asseoir  les  tailles,  les  gabelles,  etc. 
Quelque  usitée  que  soit  cette  acception  figurée 
d'asseoir,  on  ne  diroit  plus  d'un  homme  imposé  à 
la  taille,  qii'ily  est  ass/s.(Voy.  du  Gange,  Gloss.  lat. 
T.  I,  col.  778.)  «  Ceux  qui  voulurent  deinourer 
«  dedans  la  ville,  leur  convint  bailler  caution,  clia- 
«  cun  en  droit  soy,  de  payer  ce  de  quoy  ilsseroienl 
«  assis.  "  (Monstrelet,  Vol.  I,  fol.  274.) 

Encore  aujourd'hui ,  la  préséance  indique  une 
supériorité  que  signifioit  le  verbe  asseoir  dans  le 
sens  général  de  préposer.  «  Tôt  avant  obéisse  en  au 
'<  commandement  de  l'Abé,  et  as  personnes  qui  par 
«  lui  sunt  assises.  »  (Règle  de  S'-Benoit,  ms.  de 
Bouhier,  p.  93.)  On  a  la  preuve  que  faire  du  haiilf 
assisiS),  c'étoit  affecter  une  supériorité  tyrannique. 
«  Où  sont  les  traistres...  qui  en  celle  forest  veulent 
<•  faire  dit  haut  assis  ?  Sire,...  nous  vous  les  mons- 
«  trerons....  Quant  Passelion  vit  les  six  Ghevaliers 
«  qui  tenoienl  le  peuple  en  leur  subjection,  etc.  » 
(Percef.  Vol.  IV,  fol.  133.) 

Enfin,  s'asseoir  entour,  comme  on  lit  d  ".ns  les 


(1)  Rompre  le  dé,  c'est  le  brouiller  avant  qu'on  ait  vu  ce  qu'il  porte,  (n.  e.)  —  (2)  Main  a  ici  le  sens  de  puissance,  de 
même  que  dans  main-morle.  (n.  e.)  —  (3)  Il  vaudrait  mieux  donner  à  cette  expression  le  sens  de  haute  assise ,  haute 
justice.  (N.  E.) 


AS 


262  - 


AS 


Fables  d'Esope,  ms.  du  R.  ir  7989,  fol.  181  ;  ou  se 
mettre  dans  une  position  propre  à  environner  son 
ennemi,  à  l'entourer,  c'étoil  l'asseoir. 

Rommainz  à  granz  oz  les  assisirent, 
Souvenles  foiz  sus  leur  coururent  : 
Mes  onc  tant  grever  ne  les  surent, 
C'un  seul  d'eus  s'en  daingnast  remambre. 

G.  Guiart,  MS.  fol.UO,  R*. 

Gent  asfiise  se  doivent  bien  tenir  ordenée. 

Buenon  de  Commarchis,  MS.  de  Gai^nal,  fui.  19G.  R"  col  1. 

En  asseyant,  en  posant  son  camp  devant  une 
\'ille,  un  château,  on  l'entoure,  on  l'environne;  ou 
du  moins  on  se  met  dans  une  position  propre  à  y 
enfermer  l'ennemi.  De  là,  le  verbe  asseoir,  de 
même  signification  qu'assiéger.  »  Là  prirent  consel 
«  et  s'accordèrent  d'aler  Andrinople  aségier....  Si 
«  murent  et  alerent  aseir  Andrinople.  »  (Chron. 
d'Outremer,  ms.  de  Berne,  n"  113,  fol.  156.)  «  Sal- 
«  manasar...  vint  en  terre  de  Israël,  si  asist  le  rei 
«  Osée,  sil  prisl.  »  (Livres  des  Rois,  ms.  des  Gordel. 
fol.  142.) 

A  Rome  vindrent,  si  Vassistrent  ; 
De  plusieurs  pars  le  siège  pristrent. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  23,  V-  col.  i. 

.  .  .  Quant  uns  Rois  a  ennemis, 
De  primes  les  va  assnoir, 
Gaster  lor  terres  et  ardoir. 

Lucidaircs,  MS.  de  Gibert,  fol.  7,  V'. 

CONJUG. 

Acist  (s'),  ind.  prêt.  S'assit.  (Fabl.  ms.  du  R.) 
Aisist,  ind.  prêt.  Fit  asseoir.  (Anseis,  fol.  1.) 
Aséront,  ind.  fut.  Assiégeront.  (Ibid.) 
Aserra,  ind.  fut.  Assiéra.  (Duchesne,  hist.  de  G.) 
Aserroit,  subj.  imp.  Assiéroit.  (R.  de  Perceval.) 
Asidrerit,  ind.  prêt.  S'assirent.  (Hist.  de  la  fête  de 

la  Conception,  ms.  de  la  Clayette.) 
Asiet,  ind.  prés.  Assiège.  (Anseis.) 
Asis,  partie.  Fixé.  (Livres  des  Rois.) 
.4sJse«<(s'),  ind.  prêt.  S'assirent.  (Fables  d'Esope.) 
Asisse,  partie,  fém.  Assise,  fixée.  (Duchesne,  His. 

de  la  M.  de  Bar-le-Duc,  p.  30.) 
Asist,  ind.  prêt.  Assit,  fixa  ;  assiégea.  (Livres  des 

Rois,  MS.  des  Cordel.) 
Asistrent,  ind,  prêt.  Assirent,  posèrent.  (Livres 

des  Rois,  MS.  des  Cordel.) 
Asitreiit,  ind.  prêt.  Assiégèrent.  (Yillebardouin.) 
Asseivent  (s'),  ind.  prêt.  'S'assirent,  se  fixèrent. 

(Lanc.  du  Lac,  T.  111,  fol.  38.) 
Asseiront,  ind.  fut.  Assiéront.  (Ord.  T.  \,  p.  186.) 
Asseist  (s'),  subj.  imparf.  Qu'il  s'assît,  se  repo- 
sât. (G.  Guiart,  ms.  fol.  143.) 
Assera,  ind.  fut.  Assiéra,  fixera.  (Rec.  de  Perard, 

p.  518,  lit.  de  1269.) 
Asseric:i,  subj.  imparf.   Siêriez ,   conviendriez. 

(Fabl.  MS.  du  R.  fol.  75.) 
Assevra  (s'),  ind.  fut.  S'assiéra,  se  posera.  (Gace 

de  la  Digne,  des  Déduits,  ms.  fol.  92.) 
Asserre':,,  ind.  fut.  Assiérez,  poserez.  (Fabl.  ms.  du 

R.  fol.  137.) 


Asserront,  ind.  fut.  Assiéront,  poseront.  (Ord. 
T.l,  p.  186.) 

Assesint  {s'),  subj.  prés.  Qu'il  s'asseye,  se  repose. 
(Ane.  poës.  Fr.  ms.  du  Vatican,  fol.  126.) 

Assiroient,  subj.  imp.  Feroient  asseoir,  donne- 
roient  à  asseoir.  (Nouv.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  61.) 

Assis,  partie.  Posé,  fixé  ;  assiégé.  (Rom.  de  Brut, 
ms.  fol.  109.) 

Assist,  ind.  prés.  Assiège.  (G.  Guiart,  fol.  84.) 

Assist,  ind.  prêt.  Assist,  posa  ;  assiégea.  (Rom.de 
Perceval,  fol.  237.) 

Assistrent,  ind.  prêt.  Assirent,  posèrent.  Assié- 
gèrent. (Liv.  des  Rois,  ms.  des  Cordel.  fol.  46.) 

Assit,  ind.  prés.  Assied.  Coût,  de  Bourbonnois,  au 
Nouv.  Coût.  Gén.  T.  111,  p.  1228. 

VARI.4NTES  : 
ASSEOIR.  Orth.  subsist.  -  Rom.  de  Brut.  MS.  fol.  109. 
Aseir.  Ane.  Poët.  fr.  MS.  du  Vatican,  n»  1490,  fol.  85,  V». 
AsEoiR.  Fabl.  MS.  du  R.  n°  7615,  fol.  105,  V»  col.  1. 
AsiR.  Pli.  Mouskes,  MS.  p.  97. 

ASSEIR.  D.  Morice,  preuv.  de  l'Hist.  de  Bret.  T.  I,  col.  984. 
AssEOR.  S'-Bernard,  Serm.  tr.'MSS.  p.  118. 
AssiR.  Ord.  T.  V,  p.  512. 

AssoiR.  Borel,  Dict.  —  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr. 
AssoiRE.  Ord.  T.  II,  p.  355. 

Assereiner,  verbe.  Rasséréner.  Du  verbe  simple 
sereiner,  rendre  serein,  que  l'on  trouve  dans  les 
Essais  de  Montaigne,  au  sens  propre,  et  au  figuré 
dans  les  Poésies  de  Loys  le  Caron,  s'est  formé  le 
composé  assereiner,  de  même  signification  que  ras- 
sénérer  qui  vieillit,  et  dont  l'ancien  usage,  ainsi 
que  celui  d'assereiner  (1),  est  attesté  par  le  Dict.  de 
Cotgrave.  (Voyez  Serei.ner.) 

VARIANTES  : 
ASSEREINER.  Cotgrave,  Dict. 
AsEREiNER.  Oudin,  Dict. 

Assérement,  subst.  7nase.  Crépuscule  du  soir. 
Telle  paroil  être  la  vraie  signification  d'rtssc'rÉ'meyif, 
que  D.  Carpentier  présente  comme  une  allêration 
d'assettremeiit,  en  le  définissant  siiretê  donnée  de- 
vant un  .luge.  (Voy.  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange, 
T.  IV,  col.  50.)  C'est  avec  raison  que  dans  le  Glos- 
saire latin-françois  (2)  qu'il  cite  (ibid.  T.l,  col.  1196); 
le  mol  erepusculum  est  traduit  en  ancien  franyois, 
par  ajournement  ou  par  assérement;  puisqu'en 
latin  ci'epusculum  signifie  le  commencement  du 
jour  ou  de  la  nuit;  l'ajournement,  le  crépuscule  du 
matin,  ou  Vassérement,  le  crépuscule  du  soir. 
(Voy.  AssÉRiR.) 

Assérer,  verbe.  Affirmer.  En  latin  asserere. 
(Oudin,  Dict.  —  Voy.  Asserrer.) 

Assergentir,  verbe.  Assujettir,  obliger. 

Du  participe  latin  serviens,  qui  dans  la  basse  lati- 
nité a  désigné  un  sergent,  un  vassal  obligé  et  sujet 
à  quelques  services  envers  son  seigneur  féodal, 
s'est  formé  l'ancien  verbe  françois  assergentir  ;  et 
l'on  a  dit,  en  parlant  de  l'homme  obligé  au  travail, 
assujetti  h  la  mort  par  la  désobéissance  d'Eve  et  la 


(l)  Brébeuf,  La  Fontaine  et  Saint-Simon  l'employèrent  communément.  On  trouve  au  xiii'  siècle,  dans  les  chansons  du 
sire  de  Coucy  :  «  Quand  la  saison  del  dous  tens  s'asseiire,  Que  biaus  estes  se  rasraine  et  esclaire.  »  (n.  e.)  —  (2)  C« 
Glossaire  latin  est  le  manuscrit  latin  de  la  B.  N.  7692.  (n.  e.) 


AS 


263  — 


AS 


complaisance  d'Adam,  qu'il  étoil  asscrgenii  sous 
cette  double  peine.  «  La  miséricorde  perdit  assi  li 
«  home,  quant  Eve  fut  si  ardans  en  son  cuvise  qu'il 
«  le(l)  à  lei  mismes  n'en  espargnet,  n'en  à  son  baron, 
«  n'en  à  ses  filz  qui  estoient  ti  avenir;  anz  les  as- 
«  sergentit  toz  desoz  horrible  maldeceon,  et  desoz 
«  la  necessiteit  de  mort.  »  (S'  Bernard,  Serm.  fr. 
Ms.  p.  373.  —  Voy.  Sergent.) 

Asséri,  participe,  subst.  adv.  Soir.  Sur  le  soir. 
(Voy.  AssKRiR.)  Anciennement,  on  désignoitle  temps 
où  le  jour  finit  et  la  nuit  commence,  en  disant  qu'il 
assérissoit,  qu'il  ensérissoiL  C'est  sans  doute  par 
ellipse  que  le  participe  de  ce  verbe  assérir,  ensérir, 
signifioit  le  temps  où  il  est  soir,  le  soir,  la  fin  du 
jour  et  le  commencement  de  la  nuit.  «  Estoitalez.... 
•>  pour  faire  prendre  nostre  gent,  quant  il  seroit 
«  enscrit.  »  (Villehardouin,  p.'iO.)  »  Comme  le  sup- 
«  pliant,  environ  heure  de  Vanséry,  eust  envoyé 
«  pour  lui,  sur  les  murs  de  la  ville  de  Reims,  et  pour 
«  la  garde  d'icelle,  un  jeune  lilz,etc.  »  (2)  (D.  Car- 
penlier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  T.  II,  aux 
mots  hora  seralis,  col.  70'J.  —  Voy.  Enséree.) 

Il  est  possible  que  pour  signifier,  sur  le  soir,  on 
ait  dit  à  séri,  comme  l'attesie  D.  Carpentier,  qui 
cite  le  verssuivant, tiiéd'unechroniquemanuscrite 
de  Bertrand  du  Guesclin. 

Lui  sisiesme  sans  plus  y  entra  à  sert. 

Suppl.  Gloss.  lai.  de  Du  Gange,  T.  III,  au  mol  sera. 

De  cette  même  expression  à  séri,  peut  s'être 
formé  un  adverbe  tel  que  asséri,  et  qui  ait  signifié, 
sur  le  soir,  comme  dans  ces  vers  : 

Puis  l'en  ont  mené  tôt  ainsi, 
Céléement  et  a.-iiéri  (3), 
Tresqu'à  une  chambre  soltive 
Où  ne  manoit  nule  riens  vive. 

Parlon.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  151,  R-  col.  3. 

VARIANTES  : 
ASSERT.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  s'  Germ.f.  151,  R»  col.  3. 
Anséry.  d.  Carpentier,  S.  Gl.  1.  de  Du  C.  T.  II,  col.  7C9. 
Enséuit.  ViUehardouin,  p.  -iO. 

Assérir,  verbe.  Faire  soir.  Rasséréner,  calmer, 
tranquilliser.  (Voy.  Assereuner  et  Asserisek.) 
Dans  le  premier  sens,  on  disoit  : 

Mes  por  ce  qu'il  voit  asérir. 
Cil  s'entremet  de  lui  servir  ; 
Et  tôt  droit  à  l'ostel  lo  moinne. 

Fabl.  MS.  de  Berne,  n"  354,  fol.  31 ,  R-. 
Tote  jor,  jusqu'à  \'a>isèrir, 
Fu  li  Tornois  devant  la  porte  : 
Qui  gaaing  i  fist,  si  l'enporte. 

Rom.  de  Perceval,  MS.  de  Berne,  n°  354,  fol.  250,  R"  col.  2. 

Ains  Vassérir, 

Verres  voslre  songe  avenir. 

Rom.  du  Roi  Guillaume  d'Angleterre,  MS.  du  R.  n'  6987,  fol.  246. 

En  adoptant  pour  le  mot  séri,  dans  la  significa- 
tion de  soir,  l'origine  hébraïque  indiquée  par 
M.  Gébelin  (Etym.  fr.  col.  1)'J8),  on  pouroit  dire  que 
faire  noir  est  le  sens  primitif  ô'assérir,  et  qu'on 
semble  l'avoir  conservé  à  ce  verbe,  en  disant  : 


La  nuit,  quant  fu  bien  asséri, 
Que  moingnes  furent  endormi,  etc. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  151. 
La  nuyt,  quant  bien  fu  euséri, 
Que  l'en  devoit  estre  endormi,  etc. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  4,  R°  col.  J. 

Mais  on  croit  qu'en  ces  deux  derniers  passages, 
le  verbe  assérir,  dans  une  signification  relative  à 
celle  de  l'ancien  adjectif  séri,  calme,  tranquille, 
silencieux,  désigne  f  idée  du  calme  et  de  la  tran- 
quillité de  la  nuit,  et  plus  spécialement  une  idée  de 
silence  dans  cet  autre  passage  : 

Nus  ne  set  pas  les  maus  que  sens 
La  nuit,  quant  je  sui  aséi-i. 

Ane.  Po«.  Fr.  MS.  avant  1300.  p.  1446. 

C'est  peut-être  encore  relativement  à  une  idée  de 
calme  et  de  silence,  qu'il  faudroil  expliquer  le  sens 
à'asséri,  dans  les  vers  où  on  l'a  défini  comme  un 
adverbe  signifiant  sur  le  soir.  (Voy.  Asséri.) 

Au  moins  est-il  évidemment  prouvé  que  de  l'an- 
cien adjectif  séri,  de  même  origine  que  serein,  l'on 
a  fait  le  verbe  assérir,  qui,  soit  au  sens  propre,  soit 
au  figuré,  signifioit  rasséréner,  calmer,  tranquilli- 
ser. (Colgrave  et  Oudin,  Dict.) 

Adont  ly  vens  s'est  abaissiés, 
Encontinent  est  rapaisiez  ; 
Et  la  mer  est  toute  assérie  : 
Plus  n'y  ot  vent,  ne  lumerie. 

Hist.  des  Trois  Maries,  en  vers,  .MS.  p.  374. 

Ainsy  se  sont  lors  asséries 
La  Chambrière  et  les  deux  Maries. 
Ibid.  p.  299. 

VARIANTES  : 
ASSÉRIR.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  151. 
Ansérir.  Rom.  de  Perceval,  MS.  de  B.  n»  354,  fol.  250. 
Asérir.  Rom.  d'Erec,  MS.  du  R.  n»  6987,  fol.  292,  V»  col.  4. 
Ensérir.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  4,  R"  col.  I. 
Ensiérir.  Anseis,  MS.  fol.  67,  R»  col.  2. 

Assériser,  verbe.  Rasséréner,  calmer,  rendre 
coi,  etc.  (Voy.  Assérir  et  Séri.)  C'est  dans  le  sens 
propre  et  figuré  tout-à-la-fois,  que  fon  a  dit,  en 
parlant  de  Louis  IX  :  «  El  tens  de  son  benoict  gou- 
<>  vernement,  les  ondes  d'assaus  de  toutes  parz 
«  furent  assérisiées,  et  turbacions  nuisibles  loing 
«  chaciées.  «  (Vie  de  S"  Louis,  p.  292.) 

D'après  l'indication  de  l'acception  générale  et 
figurée  de  fancien  adjectif  séri,  d'où  s'est  formé  le 
verbe  assériser,  altéré  dans  l'orthographe  asségri- 
ser  (4),  on  conçoit  par  quelle  analogie  ce  même  verbe, 
avec  le  pronom  personnel,  signifioit  se  tenir  coi,  et 
probablement  se  taire,  lorsqu'on  disoit  :  «  Le  sup- 
«  pliant  ne  se  pouvoit  app:iiser  ne  assegriser  du 
.'  meschief.  »  (D.  Carpentier,  suppl.  Gloss.  lat.  de 
Du  Gange,  T.  I,  col.  334  ;  tit.  de  1414.) 

Quant  il  oirent  la  criée 
Des  pèlerins  qui  laiens  érent. 
Un  petitet  s'assérisérent  : 
Et  dit  li  Leus,  j'oi  laiens  gens. 
J'irai  veoir,  ce  dit  Hersens. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7218,  fol.  48,  V  col.  I. 


(1)  Le  représente  divise,  désir,  (n.  e.)  —  (2)  Citation  tirée  du  registre  JJ.  171,  pièce  479,  de  l'année  1421.  (n.  e.)  —  (3)  Vers 
7384,  édition  Crapelet,  1834,  2  vol.  in-S".  Au  vers  3220,  on  lit:  <i  Tôt  coiement  et  à  sert  »,  en  secret,  clandestinement,  sans 
bruit.  Il  y  a  dû  avoir  confusion  entre  sero  et  serenus,  car  on  trouve  aussi  :  La  nuis  est  soes  et  série.  »  (Partonop. 
vers  697.)  (n.  e.)  —  (4)  Nous  voyons  ici  un  dérivé  fort  éloigné  de  secwus.  (n.  e.) 


AS 


—  264 


AS 


VARIANTES   : 
ASSÉRISER.  Conf.  du  Renard,  Fabl.  MS.  du  R.  fol.  48. 
AssÉr.niBER,  Assérisier.  D.  Carpentier,  suppl.  Gloss.  lat. 
de  Du  Gange,  T.  I,  col.  334. 

Assernienter,  verbe.  Prendre  à  foi  et  à  ser- 
ment. Lier  par  un  serment.  Jurer  avec  serment. 

Anciennement,  lorsqu'on  faisoil  un  prisonnier, 
on  s'assuroil  de  lui  en  le  prenant  à  foi  et  à  serment, 
en  Vdssrrnientaiit  ;  et  dès  lors  ce  prisonnier  n'eu 
fon\o\l assprineii ter  un  autre;  ou  le  serment  qu'il 
recevoit  de  son  prisonnier  étoit  nul.  suivant  lesloix 
de  la  guerre.  «  Les  prindrent  et  asscrmentérent  de 
«  nouvel,  et  disrentque  ceulxqui  les  avoient  asser- 
«  mentez,  n'avoient  point  de  puissance;  car  depuis 
«  que  ung  homme  a  donné  sa  foy,  il  ne  peut  plus 
«  prendre  la  foy  d'un  autre.  »  (Le  Jouvencel,  ms. 
p.  506.)  "  Quant  aucun  prent  ung  prisonnier,  il  lui 
0  fait  ceste  grâce  de  le  recevoir  à  la  foy;  il  lui 
'<  donne  la  vie....  Pour  ce  ne  peut  le  prisonnier 
«  assermenter  homme  ne  porter  armes,  tant  que 
«  son  maistre  l'ait  quicté  de  sa  foy.  Depuis  qui)  a 
«  donné  sa  foy  à  son  maistre,  il  est  esclave  et  son 
«  serf,  pour  faire  de  lui  toujours  à  son  plaisir.  » 
(Ibid.)  Les  prisonniers  que  l'on  faisoit,  s'ils  n'étoient 
pris  à  foi  et  à  serment,  s'ils  n'étoient  assermentés 
sur  le  champ  de  bataille,  devenoient  les  prison- 
niers du  Capitaine  de  la  ville  où  on  les  assermen- 
toit.  «  Ainsi  furent  adjugez,  l'un  àl'hommed'armes 
«  de  Crathor;  c'est  assavoir  celluy  qu'il  avoitrtssf?*"- 
«  mérité...  hors  les  barrières  :  et  celluy  qu'il  eust 
«  assermenté  dedans  la  ville,  fut  adjugé  au  cappi- 
«  laine  de  Crathor  :  et  pour  ce  n'oblient  pas  les 
«  compaignons  A' assermenter  leurs  prisonniers, 
«  quant  ifz.vont  aux  champs,  s'ilz  font  que  saiges.  » 
(Ibid.  p.  3.-J1.) 

En  Justice,  pour  s'assurer  d'un  témoin,  et  l'obli- 
ger à  déposer  la  vérité  d'un  fait,  on  le  prend  à  ser- 
ment. C'étoit  la  signification  A' assermenter , 
lorsqu'on  disoit  de  ce  même  témoin  ,  qu'il  étoit 
assermenté  par  un  Juge;  qu'il  étoit  assermenté 
d'une  chose  sur  laquelle  on  le  prenoit  à  serment. 
«  J'entre  par  fois  en  pensée,  qu'il  puisse  assez  bien 
«  convenir  à  un  Théologien,  à  un  Philosophe,  et 
«  telles  gens  d'exquise  et  exacte  conscience  et  pru- 
«  dence,  d'escrire  l'Histoire.  Comment  peuvent-ils 
«  engager  leur  foy  sur  une  foy  populaire?....  Des 
»  actions  à  divers  membres,  qui  se  passent  en  leur 
«  présence,  ils  refuseroient  d'en  rendre  tesmoi- 
«  gnage,  assermentez  par  un  Juge.  »  (Essais  de 
Montaigne,  T.  I,  p.  136  et  137.) 

Assermenté  de  la  mellée, 

Nous  declaira  à  haute  voix 

Qu'il  en  diroit  sa  ratellée; 

Et  fist  serment  de  plaine  entrée, 

Qu'il  congnoissoit  les  personnaiges, 

Tant  la  Simple,  que  la  Rusée. 

l'oes.  de  Coquillarl,  p.  408. 

La  pièce  d'où  ces  vers  sont  tirés,  est  un  badinage 
assez  ingénieux,  intitulé  l'Enquête  d'entre  la  Simple 
et  la  Rusée.  Probablement,  c'est  par  allusion  à  l'an- 
cien usage  des  serniens  sur  les  châsses  des  Saints, 


que  ce  Poëte  du  xr  siècle.  Officiai  de  l'église  de 
Reims,  aura  dit  d'un  des  témoins  dans  l'E'nquête, 
qu'il  étoit  assermenté  sur  un  crible,  pour  désigner 
la  frivolité  de  son  serment. 

Assei-menlé  sur  un  crible, 
Respondit  :  que  homme  ne  bouge. 
Vous  orrez  une  droite  bible  ; 
Et  déposa  chose  impossible. 

M.  ibid.  p.  101  et  102. 

On  disoit  d'un  homme  que  le  serment  lioit  à  un 
autre,  qu'il  lui  étoit  assermenté.  (Juvenal  des 
Ursins,  Hist.  de  Charles  VI,  p.  218.) 

Enfin  jurer  avec  serment  l'exécution  d'une  chose, 
c'étoit  Vassermcnter.  (Cotgrave  et  Oudin,  Dict.) 
Ainsi  l'on  disoit,  jiromesse  assermentée.  Epithètes 
de  M.  de  la  Porte.  (Voy.  Sermenter.) 

VARIANTES  : 
ASSERMENTER.  Pasquier,  Pech.  L.  VI,  p.  572. 
AsERMENTER.  Le  Jouvencel,  MS.  p.  351. 
AssERMANTER.  Monet,  Dict. 

Asserrer,  verbe.  Affermir.  Serrer,  retenir. 
Assembler,  amasser.  (Voy.  Enserrer  et  Serrer.) 

On  observera  qu'en  hébreu,  en  chaldéen,  en 
arabe,  les  verbes  qui  signifient  ceindre,  lier,  ont 
une  analogie  remarquable  avec  le  verbe  laimserare. 
d'où  le  frânçois  serrer^  et  les  composés  asserrer, 
enserrer.  (Voy.  Ménage,  Dict.  étym.  —  Gébelin, 
Etym.  fr.  col.  1007.)  On  ajoute  que  cette  même  ana- 
logie semble  indicative  d'une  identité  d'origine  et 
d'acception  entre  serare  et  serere  pris  dans  le  sens 
de  nectere.  (Voy.  Vossius,  Elym.  ling.  lat.  p.  467.) 
Peut-être  (\vCassérer  (l)en  françois, comme  en  latin 
asserere,  n'a  signifié  affirmer,  que  parce  qu'affir- 
mer une  chose,  c'est  en  quelque  façon  l'affermir, 
comme  dans  le  sens  propre  on  affermit  une  chose 
physique  en  la  retenant  par  un  lien,  en  la  serrant. 
(Voy.  AssÉRER  et  Asserter.)  La  grâce  affermit  la  vertu 
de  l'homme  et  la  rend  méritoire;  d'où  l'on  aura  dit 
figurément  : 

Or  lui  faut  vertu  enquerre. 
Et  grâce  de  Dieu  e.'iquerre 
Qui  mérites  lui  asserre, 
Par  qui  il  puisse  conquerre 
Ceulx  qui  le  viennent  surquerre. 

Al.  Cliarlicr,  de  l'Espérance,  p.  384. 

Quelque  vraisemblable  que  puisse  être  l'analogie 
ci-dessus  indiquée,  on  ne  réunit  ici  assérer  que 
comme  variation  d'orthographe  du  verbe  asserrer, 
de  même  origine  que  serrer,  en  latin  serare.  C'est 
relativement  à  l'idée  d'une  chose  qui  échappe  et  que 
l'on  veut  retenir,  qu'on  a  dit  figurément  :  «  Si  par 
«  quelcque  désastre  s'est  santé  de  vos  seigneuries 

»  émancipée,....  la  puissiez-vous  incontinent 

«  rencontrer.  En  bonne  heure  de  vous  rencontrée, 
"  sus  rinslant  soit  par  vous  assérée,  soit  par  vous 
"  vendicquée,  soit  par  vous  saisie  et  mancipée  : 
«  les  loix  vous  le  permettent.  »  (Rabelais,  Liv.  iv. 
Nouv.  prolog.  p.  30.)  C'étoit  probablement  dans  un 
sens  non  moins  figuré,  qu'eu  parlantde  Juges  rete- 
nus par  la  difficulté  de  prononcer  sur  un  fait,  on 


(1)  Assérer  vient  du  latin  a,swre/'(irfl.  (n.  e.) 


AS 


-  265 


AS 


disoit  qu'ils  en  étoient  enserés.  (Voy.  Assises  de 
Jérusalem,  ch.  cclxxxvu  et  cclxxxvui,  p.  901  et  '202.) 
En  serrant  plusieurs  ctioses  les  unes  avec  les 
autres,  en  les  retenant  par  un  lien,  on  les  assemble 
on  les  amasse.  De  là  l'accepLion  figurée  du  verbe 
asserrer  dans  ces  vers  : 

Regardons  bien  comment  on  fait  la  guerre. 
Est-ce  à  bon  droit,  et  pour  garder  sa  terre ' 
Non  pas  tousjours  ;  mais  plus  pour  se  venger 
Pour  moins  que  rien  Gens  d'armes  on  asserre,  etc. 

Trionl|ilics  do  la  noble  Dame,  fol,  34,  V. 
En  ta  verdeur,  plaisir  donques  asserre; 
Puis  tu  diras,  si  vieillesse  te  serre, 
Adieu  le  temps  qui  si  bon  ha  esté 
Par  seule  amour. 

Clém.  Marot,  p.  291. 

VARIANTES    : 
A.SSERRER.  Al.  Chartier,  de  l'Espérance,  p.  384 
AssÉRER.  Rabelais,  Liv.  iv,  nouv.  prolog.  p.  30. 

Asserter,  verbe.  Essarter.  Serrer,  retenir. 

Il  est  évident  qu  assorfer,  dans  la  Coutume  de 
Troyes,  est  de  même  significMtion  qu'assarte?-  dans 
les  Loix  d'Angleterre.  «  Soit  enquis  de  mesme  le 
«  boys  combien  chescune  acre  vault  par  an  pour 
«  tenei-  à  boscage,  ou  pour  assarter,  ou  pour  cur- 
«  tiver.  »  (Britton.)  .<  Accreues  de  bois  joignans,  à 
«  bois  et  foresls....  ensuyvent  la  nature  et  condition 
"  desdils  bois  et  forests...;  lesquelles  accreues  le 
«  seigneur  peut  faire  assorter,  quand  bon  luy 
«  semble.  »  (Coût,  de  Troyes.)  En  marge,  on  li't 
escharter.  (Voy.  Essauter.) 

Mais,  quelque  décisive  que  puisse  être  l'autorité 
de  Launère  et  de  Du  Cange,  on  doute  qu  asserter 
soit,  comme  assorter  et  assarter,  une  vari-tion 
d'ortbographe  du  verbe  essarter,  dans  la  Coutume 
de  Berry  :  «  Les  fermiers  et  accenseurs  des  vignes 
«  seront  tenus  de  provigner  par  chacun  an,  encha- 
«  cun  arpent  d'icelles,  de  quatre-vingts  provins 
«  pour  le  moins  ;  et  les  faire  bien  labourer,  coupper 
«  et  tailler  en  temps  dut  :  asçavoir,  les  deschausser 
'<  tailler,  marrer  et  asserter  dedans  le  quinzième 
«  jour  d'Avril,  et  biner  en  Mai,  de  sorte,  etc  » 
(Goût.  gén.  T.  II,  p.  341.)  Peut-être  qu'en  cette  Cou- 
tume, asserter  les  vignes,  c'étoit  les  échalasser 
Dans  celte  supposition,  asserter,  formé  du  participe 
assertiim.  auroit  un  sens  relatif  à  celui  de  serrer 
retenir  par  un  lien,  affermir. 

Au  reste,  asserter  est  le  même  que  serrer  dans 
le  Dictionnaire  de  Cotgrave,  à  moins  qu'on  ne  dise 
que  c'est  une  faute  d'impression,  et  qu'on  ne  lise 
asserrer  (1).  (Voy.  Asserrer.) 

VARIANTES  : 

ASSERTER.  Du  Cange,  Gl.  lat.  T.  III,  col  205 
Assarter.  Britton,  des  Loix  d'Angleterre,  foi  184  V° 
Assorter.  Coût,  de  Troyes,  au  Coût,  gén.'  T.  i,  p.  4231 

Asserteui-,  subst.  mase.  Qui  affirme  son  droit  • 
qui  allermit  celui  d'un  autre.  Qui  tient  ferme  pour 
son  droit,  ou  pour  celui  d'un  autre  ;  en  latin  asser- 
tor,   de  même  origine  qixassertuvi,  participe  du 

s4nVÎLle"si^tef  di?;i^h^?qu^^fir^^^^^  ^-'-'e  fautive  j'un  copiste, 

c'est  travaiUer  à  la  marre  (/,cie'^?.)"îahouTdésViS^^^^^  entrelacer,  et  vent  du  lafn  serUan,  guirlande.  yiL-er, 

34 


verbe  flss^mr.  (Cotgrave,  Dict.  —Dict.de  Trévoux 
au  mot  assertion.  -  Voy.  Assérer  et  Asserrer.)       ' 

Assertion,  subst.  fém.  Affirmation  ;  Confirma- 
tion. Significations  relatives  à  celles  du  verbe  .4sse- 
rer,  atlirmer  une  chose,  laconfirmerpardes raisons 
qui  en  prouvent  la  vérité  avec  plus  ou  moins  d'évi- 
dence. (Cotgrave  et  Oudin,  Dict.)  Comme  la  simple 
assertion  n  est  souvent  rien  moins  (lu'une  preuve 
on  disoit  qu'elle  étoit  une  affirmalion  douteuse! 
«  ^  a  légation  des  deux  acteurs  si  très-renommez 
"  ^?^\  f'i^."  suffire  encontre  la  seule  assertion, 
«  cest-à-dire  affirmation  douteuse.  »  (J.  Le  Maire, 
Illustr.  des  Gaules,  L.  II,  p.  262.)  C'étoit  une  asser- 
tion de  parole,  insuffisante  pour  prouver  la  vérité 
d  une  chose.  Le  Roi  Jean,  par  son  Ordonnance  du 
-iii  décembre  13o5,  défendit  que  les  Capitaines  des 
compagnies  de  Gens  d'armes  fussent  reçus  à  «  faire 
«  monstre  par  assertion  de  parole.  «  a  iXulz  ne 
«  sera  doresnavanl  receu  à  faire  mouslre  par 
"  cedule,  ou  par  assertion  de  sa  parole  ;  mais  sera 
«  chascuns  tenus  desores-mais  de  faire  monstre 
■'  armée.  »  (Ord.  T.  III,  p.  35.) 

Véez  la  condempnacion 

Du  Peuple,  à  l'acercion 

D'un  faulx  et  faint  messagier. 

Eust.  Desch.  l'uês.  MSS.  p.  101.  col.  2. 

Ce  mot  assertion,  en  latin  assertio,  dont  on  se 
sert  encore  en  style  de  pratique,  et  comme  terme 
didactique,  n  est  plus  guère  en  usage.  (Voy.  Asserer.) 

VARIANTES  : 
ASSERTION.  Orth.  subsist.  -  Oudin  et  Cotgrave,  Dict. 
AcERciON.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  101,  col.  2. 

Assertivement,  adverbe.  Avec  affirmation  • 
avec  confirmation.  (Voy.  Assertion.)  «  Dist  et  con- 
«  tessa  vrayement  et  assertivement,  etc.  »  (D.  Car- 
pentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au  mot 
assertive,  tit.  de  1409.)  .  Le  Philosophe  parfaict, 
"  tel  qu  est  frouillogan,  respond  assertivement  de 
"  tous  doubtes  proposez.  »  (Rabelais,  T.  III,  r.  IGO 
—  ^oy.  Cotgrave  et  Oudin,  Dict.) 

Asservagir,  verbe.  Asservir  ;  obliger.  Cotgrave 
Oudm,  Rob.  listienne,  Nicot  et  Monet,  Dict  — 
voy.  Servage.) 

Asservir,  verbe.  On  peut  voir  Gebelin  (Etym. 
Ir.  col.  1008),  sur  l'origine  de  ce  verbe,  qui  subsiste 
avec  la  signification  des  anciens  verbes  asservaair 
et  ussergentir. 

Il  paroit  qu'on  exprimoit  une  idée  relative  aux 
obhgalions  d'un  père  et  d'une  mère  envers  leurs 
eiifans.  lors(iu'on  disoit  qu'ils  étoient  asservis  d'en- 
lans.  (Coût,  de  Cambresis,  au  Coul.  gén.  T.  II 
p.  84C,  elc.)  «  Une  personne  asservie  d'enfant  de 
"  mariage  précèdent,  ne  peut  par  testament  legater 
«  plus  avant  que  porte  la  faculté  de  ses  biens  ineu- 
«  blés,  et  acqiiesls  faits  en  son  vel'vé.  »  (Ibid 
p.  8r)4.  —  Voy.  E.nserver.) 


AS 


—  266  — 


AS 


Anciennement,  la  conjugaison  à'asservir  éloit  la 
même  que  celle  de  noire  verbe  simple  servir. 

CONJUG. 

Assert,  indic.  prés.  Asservit,  oblige.  (Eust.  Desch.) 
j^sscrre,  subj.  pr.  Qu'il  asservisse.  (Eust.  Desch.) 
Asservent,  ind.  pr.  Asservissent.  (Tahureau.) 

Asservisage,  subst.  inasc.  Asservissement; 
obligation.  On  disoit  même  d'un  bien-fonds,  que 
l'on'  obligeoit  au  payement  d'une  dette  ou  d  une 
redevance,  que  c'étoit  un  asservisage.  (Cotgrave, 
Dict.  —  Voy.  AssEHVisER.) 

Asserviser,  verbe.  Concéder  sous  obligation  de 
service,  de  redevance.  Telle  paroit  avoir  été  la 
signification  à' asserviser,  lorsqu'on  disoif.  «  Terres 
.  lui  ont  esté  asservisées  au  service  annuel  de 
«  douze  deniers  Viennois.  »  (D.  Carpentier,  Suppl. 
Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  asservisare,  tit. 
de  141'i.  —  Voy.  Asservisage.) 

Assès,  participe  et  subst.  masc.  Subside  établi, 
fixé-  impôt,  droit  imposé.  Satisfaction,  action  de 
satisfaire  à  ce  qui  est  établi  et  fixé  par  une  loi,  par 
un  contrat,  par  une  demande  judiciaire.  Demande 
judiciaire  en  dommages  fixés  à  certaine  somme. 

Il  est  possible  que,  relativement  à  l'idée  de  taille, 
imposé  à  la  taille,  on  ait  vu  dans  aecismn,  parti- 
cipe du  verbe  latin  rtt'c/dtTC,  en  françois  tailler  au 
sens  propre,  l'origine  du  mot  Accès,  espèce  de 
subside.  On  craint  néanmoins  de  s'être  trop  prévenu 
pour  une  étymologiequ'a  pu  réaliser  l'idée  de  tadle, 
devenue  nécessairement  familière,  lorsqu'en  consé- 
quence on  a  réuni  Assès,  comme  variation  d  ortho- 
graphe, sous  ce  même  mot  Accès.  (Voy.  Accès.)  En 
relisant  la  citation  des  Mémoires  de  Sully,  T.  XII, 
p    478,  où  l'on  trouve  accès,  impôts,  tailles  et 
tributs,  on  seroit  tenté  de  croire  qu'impôts,  tailles 
et  tributs  sont  l'explicalion  du  sens  général  d'.lcccs; 
et  que  ce  mot  n'est  lui-même  qu'une  altération  du 
participe  isscs,  qui  par  une  ellipse  semblable  à  celle 
que  Ton  remarquera  sous  farticle  Assis,  a  signifie 
comme  substantif,  un  subside  établi,  fixé  ;    un 
impôt,  un  droit  imposé  par  la  loi,  par  la  coutume, 
ou  par  la  raison  qui   le  rend  légitime.  Au  moins 
est-il  certain  que  dans  les  Annotations  sur  l'art,  iv 
du  tit.  Lxvui  de  la  Somme  rurale  de  Bouteiller,  ou 
l'on  dit  «  coment  treux,  péages  et  assès  furent  mis 
«  sus,  "  ce  mot  Assès  est  rendu  par  le  participe 
pluriel  féminin  Assises,  de  même  signification  que 
Assis.  (Voy.  Assis  et  Assise.) 

On  avoue  qu'il  paroit  tout  simple  d'expliquer 
.Issès  comme  variation  d'orthographe  de  l'adverbe 
Asseis,  spécialement  dans  l'expression  «  faire  asses 
«  à  quelqu'un  de  ses  damages.  »  Mais,  en  réfléchis- 
sant que  visses  et  ^sscssc,  comme  les  participes 
Assise  et  Assis  ont  signifié  substantivement  chose 
imposée,  chose  établie,  chose  fixée,  on  soupçonne 
que  dans  Britton  (des  Loix  d'Angleterre),  Asses  pour- 
roit  être  le  même  que  .Isscssc  dans  les  Tenures  de 


Littleton.    Cette  dernière  terminaison,  qui  paroit 
féminine,  n'est  d'aucun  genre  ;  parce  qu'en  Anglois, 
la  distinction  du  genre  masculin  et  féminin,  est 
nulle  pour  les  participes  comme  pour  les  adjectifs. 
D'ailleurs  l'orthographe  assessc,  qui  sembleabrégée 
dans  -Isses,  n'est  qu'imitative  de  la  prononciation 
siffiée  du   participe  anglois  ussessed,  en  françois 
assis,  fixé,  imposé  ;  en  latin  assessHW.  (^  oy.  Assesse.) 
En  supposant  donc  que  Asses  soit  le  même  que 
Assesse,  ce  seroit  comme  participe,  et  non  comme 
adverbe,  que  ce  mot  pris  substantivement  auroit 
signifié  satisfaction,  l'action  de  satisfaire  à  ce  qui 
étoit  établi,  fixé  par  les  clauses  d'une  donation, 
u  Si  ascun  doun  soit  fait  par  plusurs  condicions, 
«  li  satisfaction  soit  faite  à  un  des  condicions,  adon- 
«  ques  ert  le  don  estable,  si  les  condicions  soient 
..  severales  ;  mes  si  eles  soient  joyntes ,  adonques 
"  covient  fasses  de  toutes,  à  ceo  que  le  purchas 
..  soit  estable.  »  (Id.  ibid.  fol.  94.) 

Ce  seroit  par  la  même  figure,  suivant  laquelle  on 
exprime  la  chose  qui  précède,  pour  rendre  sensible 
celle  qui  doit  en  être  la  conséquence,  que  Ton 
auroit  dit  :  i"  "  Faire  asses  d'une  chose  a  un  Sei- 
gneur, "  pour  satisfaire  à  la  justice  de  ce  Seigneur, 
en  subissant  une  peine  établie  et  fixée  par  la  Cou- 
tume ou  par  la  loi.  «  Si  il  se  mette  en  pays  et  se 
.  acquitte  de  la  félonie,  et  cely  que  fait  la  suyt,  eit 
«  mvs  à  veier  que  la  chose  chalenge  soit  la  sue,  et 
«  que  ele  lui  fuit  emblé  hors  de  sa  garde,  adonques 
<i  luy  coviendra  respondre,  et  de  faire  «sses  au  Sei- 
«  gniour  de  la  chose  ;  et  soit  le  jugement  tyel  que 
«  le  demandaunt  recovere  sa  demaunde.  »  (Britton, 
des  Loix  d'Angleterre,  fol.  23.) 

2°  «  Faire  «sses  d'un  dommage,  »  pour  satisfaire 
à  une  demande  judiciaire,  par  laquelle  ce  dommage 
étoit  fixé  à  certaine  somme.  «  Si  ascun  délaye  à  tort 
«  de  rendre  dower,  il  est  tenu  de  faire  «sses  a  la 
«  femme  de  ses  damages.  «  (Id.  ibid.  fol.  245.)       _ 
Enfin,  si   l'on  croit  pouvoir  rapporter  a  l  idée 
générale  de  chose  établie  et  fixée  par  une  loi,  par 
une  donation,  par  une  demande  judiciaire,  la  signi- 
fication d'Asses  en  ces  divers  passages,  c'est  qu  une 
donation,  une  loi  que  désignoit,  comme  substantif, 
le  participe  féminin  Assise,  pouvoit,  par  la  même 
raison    être  également  désignée  par  le  participe 
Ascs  (Voy.  Assi'sE.)  Au  moins  a-t-on  la  preuve  qu'il 
a  signifié  demande  judiciaire  en  dommages,  parce 
que  les  dommages  étoient  fixés  à  certaine  somme 
par  le  demandeur.   «   Le  plus  commun  brefe  de 
»  dower  qui   soit,  si  est  le  brefe  de  dower  clos, 
„  dount  femme  riens  n'ad  ;  et  pour  ceo  fan  à  com- 
..  mencer  de  cel  brefe,  dount  le  count  est  tel.  Ceo 
„  vous  monstre  :  A  qui  fuit  la  femme  B  que  B  fad  a 
..  tort  deforcé  la  tierce  party  de  launt  de  terre  ove 
,.  les  apurtenaunces,  en  tele  ville,  à  ses  damages 
«  de  XL  sols,  et  pour  à  tort  que  favaundit  B,  jadys 
»  son  baron,  de  ceo  luy  dowa  al  huys  de  monster  (1) 

«  le  jour  que  il  fesposa A  ceo  que  est  contenu 

»  en  le  brefe  dount  rien  n'ad,  purra  le  tenaunt 


(1)  A  la  porte  de  l'église,  (n.  e.) 


AS 


267  — 


AS 


«  respondre  que  ele  en  ad  party  ;  mes  à  ceo  covien- 

«  dra  distincte!'  lequel  la  pleintife  eyt  resceu  party 

«  de  son  dower  avaunt  le  purchas  del  brefe,  ou 

«  puis.  Car  si  puis,...  jà  par  taunt  n'est  le  brefe 

«  abatable  ;  car  ele  purra  dire  que  del  surplus  fuit 

«  fait  son  asscs;  et  si  ele  receust  party  avant  te 

«  brefe  purchacé,  donques  est  le  brefe  abattable.  » 
(Britton,  des  loix  d'Angleterre,  chap.  civ,  fol.  249.) 

Assesse, partie,  et  subst.  Imposé,  fixé  ;  imposée, 
fixée.  Satisfaction,  action  de  satisfaire  à  une  peine 
imposée,  fixée  par  la  loi.  On  peut  voir  sous  Asscs  la 
raison  pour  laquelle  le  participe  Assesse ,  assessed 
en  anglois,  en  françois  assis,  imposé,  fixé,  n'est  pas 
plus  féminin  que  masculin.  Si  l'on  disoit  au  fémi- 
nin que,  pour  un  fieffataire  à  qui  étoit  imposée  la 
charge  de  payer  une  rente  à  un  étranger,  telle 
rente  n'étoit  pour  lui  qu'une  peine  assesse;  on 
disoit  de  même,  au  masculin,  (|ue  le  fieffataire 
défaillant  de  payer  au  jour  fixé  ne  payoit  point  au 
jour  assesse.  «  Si  feoffement  soit  fait  sur  tiel  con- 
«  dicion  que...  le  fefïée  payra  al  feoffor,  al  tiel  jour 

«  enter  eux  limit,  xx  livres; et  s'il  faite  de 

«  paier  les  deniers  i^  le  jour  assesse,  etc.  »  (Tenures 
de  Littlelon,  liv.  III,  Sect.  336,  fol.  76.)  «  Si  home 
'<  enfeoffa  un  auter  sur  condition  que  il  et  ses  hei- 
»  ros  rendront  à  un  estrange  home....  un  annuel 
«  rent  de  .«  sols,...  tiel  rent  n'est  fors  que  une 
0  peine  assesse  h  le  tenant.  »  (Id.  ibid.  Sect.  345, 
fol.  79.) 

C'est  par  ellipse  et  dans  un  sens  analogue  fi  celui 
d'.lssc's,  satisfaction,  action  de  satisfaire  à  ce  qui 
est  établi  et  fixé  par  la  Loi,  ([ue  l'on  a  dit  figuré- 
ment  :  «  Ceux  queux  fuent  en  Cymiterie  ou  Eglise, 
«  puys  s'en  vont  saunz  fayre  Vassesse,  etc.  »  (Carta 
magna,  fol.  90.  —  Voy.  Assés  et  Assesser.) 

Assesser,  verbe.  Asseoir ,  fixer ,  imposer.  Du 
latin  assessuin,  participe  du  Verbe  assidere,  dont  on 
a  fait  les  verbes  Asséer  et  asseoir,  avec  l'acception 
figurée  ù' Assesser  en  ce  passage.  «  Il  est  encounter 
•<  reason  que  si  tort  soit  fait  h  un  home,  que  il  de 
«  ceo  serra  son  judge  ;...  car  pai'  tiel  voy  s'il  avoit 
«  damage  fors  que  al  value  d'un  maile,  il  puissoit 
«  assesser  et  aver  pur  ceo  C  sols,  lequel  serroit 
«  encounter  reason.  «  (Tenures  de  Littlelon,  Liv.  II, 
Sect.  'il'i,  fol.  .46.)  L'identité  de  signification  des 
verbes  assesser  et  asseoir  est  évidente  dans  les  pas- 
sages suivans.  «  Si  home  parle  généralement  d'Es- 
"  cuage,  il  serra  entendus...  d'Escuage  non  certain, 
«  qui  est  service  de  Chivaler...  L'Escuage...  est  non 
«  certain  pur  ceo  que  n'est  certain  cornent  le  Par- 
«  liament  asséra  l'escuage...  Quant  Escuage  est 
•i  tielment  assesse  per  àuthoritie  de  Parliiiment, 
«  chescun  Seigniour  de  qui  la  terre  est  tenus  par 
«  escuage,  etc.  »  (Id.  ibid.  Sect.  98,  99  et  100.  — 
Voy.  Assesse.) 

Assesseur,  subst.  masc.  Espèce  d'Officier  de 
Judicature.  de  Conseiller,  Espèce  d'Officier  de  Ville. 
Anciennement  les  Assesseurs  n'étoient  pas,  comme 
aujourd'hui,  des  Officiers  de  judicature,  des  Juges, 
des  Conseillers  créés  en  titre  d'office  ;  mais  des 


hommes  versés  dans  l'étude  des  Loix,  que  les 
Baillis,  les  Sénéchaux  et  les  Prévôts,  gentilshom- 
mes, et  presque  toujours  ignorans,  choisissoient 
pour  les  guider,  les  représenter  même,  dans  l'exer- 
cice de  la  Justice  qui  leur  étoit  confiée.  «  Li  Bailli 
«  ou  li  Prévost,  quand  ils  en  ont  mestier  pour  leur 
«  essoine,  pueent  (ère  Assesseurs.  Chil  sont  appelé 
«  Assesseurs  qui  représentent  la  personne  dou  Bailly 
«  ou  dou  Prévost,  en  fezantleur  office  ;  mes  bien  se 
«  doivent  prenre  warde  li  Bailli  et  li  Prévost  quiex 
«  gens  il  metent  en  leur  lieu,  quant  il  n'i  pueent 
«  astre.  Car  se  il  mesfesoient,  chil  qui  les  i  aroit 
«  mis,  en  .seioient  blasmés  et  li  Assesseurs  meisme 
«  pugni.  »  (Beaumanoir ,  Coût,  de  Beauvoisis, 
chap.  I,  p.  14.)  On  peut  voir  dans  Bouteiller,  (Som. 
rur.  Liv.  II,  lit.  2,  p.  667,)  quelles  étoient  les  fonc- 
tions de  ces  Officiers  de  judicature,  de  ces  Conseil- 
lers nommés  Assesseurs,  parce  qu'ils  siégeoient  en 
place  des  Baillis,  des  Sénéchaux,  des  Prévôts;  ou 
seulement  parce  qu'ils  siégeoient,  qu'ils  s'asseoient 
auprès  d'eux,  et  les  assistoient  au  jugement  des 
causes  et  procès.  Dans  ce  dernier  cas,  les  Asses- 
seurs ne  jugeoient  point  ;  ils  n'étoient  que  les  Con- 
seillers des  Juges.  On  peut  donc  avoir  eu  raison  de 
dire  que  les  Assesseurs,  avant  d'avoir  été  créés  en 
titre  d'office,  •<  n'estoient  du  nombre  des  Magistrats 
«  et  Officiers;  ains  certains  hommes  versez  en 
«  droict  ou  praclique,  que  le  Magistrat  appelloit  au 
«  conseil.  »  (Voy.  Bouteiller,  ubi  supra,  Annot. 
p.  691.) 

C'est  sans  doute  relalivement  à  la  même  idée  de 
siéger  en  place  d'un  Officier,  de  le  remplacer  dans 
ses  fonctions,  que  certains  Officiers  de  ville  ont  été 
désignés  par  le  mot  Assesseurs,  altéré  dans  Acces- 
seur,  en  latin  Accessor.  (Voy.  D.  Carpentier,  Suppl. 
Gloss.  de  Du  Cange,  T.  I,  col.  33,  tit.  de  1454.)  «  De 
"  contribuer  aux  tailles  et  impos....  se  veulent 
«  exempter  les  aucuns,  pour  ce  qu'il  dient  estre  ou 
«  avoiresté  Capitouls,  Sindics,  Trésoriers,  ou  Aeces- 
«  seurs,....  ou  autres  Officiers  de  villes.  »  (Ord. 
T.  VII,  p.  452.) 

VARIANTES  : 
ASSESSEUR.  Orth.  subsis.  -  Nicot  et  Monet,  Dict. 
AccEssEUR.  Ord.  T.  VII,  p.  453. 

Assessoriat,  subst.  masc.  Office  d'Assesseur. 
(Cotgrave,  Dict.  —  Voy.  Assesseur.) 

Assévération,  subst.  fém.  Affirmation,  En 
latin  Asseveratio.  (Voy.  Assévérer.) 

Assévérer,  verbe.  Affirmer.  En  latin  Asseve- 
rare,  verhe  qui,  dans  le  sens  étymologique,  signifie 
severè  dicere.  (Voy.  Martinius,  Lexic.  philolog.  — 
Vossius,  Etym.  ling.  lat.—  Gebelin.  Dict.  étymol.  de 
la  Langue  latine ,  au  mot  Severus.)  Il  semble  en 
effet  qu'on  ait  voulu  exprimer  une  idée  de  sévérité 
philosophique,  lorsqu'on  parlant  de  Platon,  l'on  a 
dit  :  «  Quand  il  fait  le  Législateur,  il  emprunte  un 
«  style  régentant  et  assévérant  ;  et  si  y  mesle  har- 
«  diment  les  plus  fantastiques  de  ses  inventions, 
«  autant  utiles  à  persuader  à  la  Cohimune,  que 


AS 


268  — 


AS 


«  ridicules  à  persuader  à  soi-même.  »  (Essais  de 
Moiitaiprnc.  Liv  H,  p.  3'2i  et  325.) 

PeiU-èlic  Irouvera-t-oii  plus  naturelle  l'étymolo- 
gie  d'après  laquelle  on  expliqueroit  le  verbe  latin 
asscvcrare,  dans  un  sens  relatif  à  l'idée  de  verum 
asserere?  Dans  la  Coutume  de  Saintonge,  lit.  m, 
art.  XXX,  K  asse'i'cVe?' un  contrat  en  jugement,  »  c'est 
comme  on  lit  plus  bas,  art.  xxxni,  affirmer  par  ser- 
ment qu'il  contient  vérité,  en  affirmer  la  vérité. 
«  Quand  quelqu'un  a  vendu...  aucuns  biens  immeu- 
«  blés,....  le  parent  du  vendeur...  peut  venir  au 
«  retrait,  en  payant  le  sort  principal  dans  la  hui- 
«  taine,  après  que  l'acquéreur  aura....  exhibé  et 
«  assévéré  son  contrat  en  jugement.  »  (Nouv.  Coût. 
gén.  T.  IV,  p.  88i.)  «  Dans  huitaine  à  compter 
«  auroit  exhibé  et  assévéré  son  contrat,  et  jusqu'à 
«  l'exhibition  et  assévération,  le  Seigneur,  etc.  » 
(Ibid.  p.  883.  —  Voy.  Assevkration.) 

Assevir,tv^)'ô<'(l).  Achever,  finir,  rendre  parfait, 
faire  parfaitement.  Satisfaire  parfaitement,  faire 
avoir  satisfaction  parfaite,  combler.  (Voy.  Assevisse- 

MENT.) 

En  se  figurant  une  chose,  soit  physique  ,  soit 
idéale,  comme  ayant  un  chef,  un  point  capital 
auquel  finit  l'accroissement  et  commence  la  perfec- 
tion de  cette  chose,  l'on  aura  dit  qu'elle  étoit  ache- 
vée, pour  signifier  qu'elle  étoit  finie,  qu'elle  étoit 
parfaite.  Telle  étoit  l'acception  du  participe  eschavi, 
eschevi,  assevi,  lorsqu'on  disoit  en  parlant  d'une 
femme  : 

Ai  tos  jors  de  mon  fin  cuer  araé 

La  grant,  la  trente,  la  belle,  Veschavie. 

Ane.  Po6l.  fr.  MSS.  avant  1300,  p.  1129. 

Plus  bêle  est  cent  tans  que  ne  devis. 
Ses  très  biaus  cors,  li  gens,  U  eschevis 
Me  plait  tant  que,  etc. 

Ibid.  p.  693. 

En  parlant  d'un  lévrier  dans  ces  vers  : 

Granz  ert,  et  forz,  et  escheviz, 

Et  beax,  et  genz,  et  bien  formez,  etc. 

Parton.  de  lilois.  MS.  de  S.  Germ.  fol.  165.  V"  col  1. 

On  a  dit  proveibialement  :  «  Tex  commence,  qui 
«  ne  peut  assevir.  «  (Voy.  prov.  rur.  et  vulg.  ms.  de 
N.  Dame,  N.  2,  fol.  .12.) 

On  désignoit  une  chose  imparfaite,  en  disant 
qu'elle  n'éloit  «  de  tous  points  assevie.  »  (Voy.  Eust. 
Desch.  Poës.  mss.  p.  75.) 

Ainsi  assevir  une  chose,  c'étoit  l'achever,  la  faire 
parfaitement,  la  faire  de  manière  qu'il  en  résultât 
une  satisfaction  parfaite. 

.  .  .  Tout  droit  pris  mon  chemin  ay, 
Pour  bien  mon  voyage  assevir, 
Et  aussi  pour  ma  dame  veir. 

Machaul,  MS.  fol.  178,  V  col.  1. 
...  De  fin  cuer  ai  loialement  ameit  ; 
Onkes  amors  où  j'avois  fiance, 
Ne  m'asevit  riens  de  ma  volentei. 

Chans.  Fr.  MS.  de  Berne,  n*  389,  part.  Il,  fol.  30,  R*. 

L'acception  du  verbe  Assevir,  altéré  dans  esche- 


vir,  eschavir,  est  si  évidemment  la  même  que  celle 
d'Achever,  que  si  l'existence  de  ces  variations 
d'orthographe  (2i  nous  eût  été  connue,  lors  de  la  ré- 
daction de  l'article  AciiEvta,  on  les  y  auroit  réunies, 
même  celles  d'assovir  (3)  et  assouvir,  comme  étant  de 
même  signification  et  sans  doute  de  même  origine. 
«  Quand  le  Roi  ot  assouvi  la  forteresse  du  bourc 
«  de  .laphe,  il  s'en  partit.  •>  (Joinville,  ms.  p.  292.) 
«  Ensi  lu  la  convenance  faite  et  assovie,  et  la  paix 
a  faite  des  Grex  et  des  Francs.  »  (Villehard.,  p.  156.) 

Ay  ceste  euvre-cy  à  fin  traitto. 
Qui  fu  asouvie,  et  parfaitte,  etc. 

t'ontaines  Gueriu,  Trésor  de  Vénerie,  p.  67. 

Le  beau  soleil,  père  de  vie, 

Sa  circonférence  assouvie. 

En  passant  par  un  chacun  signe, 

Justement  un  an  y  assigne 

Et  six  heures,  pour  tout  le  compte. 

J.  de  Meung,  Reinoutrances  de  î<ature,  vers  191-195. 

Il  est  probable  qu'une  prononciation  plus  sonore 
de  Ye  muet  dans  assevir,  aura  été  l'unique  cause 
de  l'orthographe  assovir,  d'après  laquelle  on  se 
sera  imaginé  qu'assovir,  variation  d'orthographe 
d'assei^ir,  étoit  le  même  que  notre  verbe  assouvir, 
anciennement  prononcé  et  écrit  assovir.  Il  est  vrai 
que  dans  nos  anciennes  poésies,  par  exemple, 
dans  celles  d'Eustache  Deschamps,  (p.  529,  col.  4.) 
les  verbes  assovir  et  assevir  semblent  être  de 
même  signification  ;  mais,  lorsqu'on  a  la  preuve 
que  dans  le  sens  d'asscvir,  achever,  on  a  dit 
assovir,  et  même  assouvir  une  forteresse,  on  en 
saisit  la  différence,  et  l'on  fait  attention  à  ne  pas 
confondre  l'idée  de  satiété,  avec  celle  de  satisfac- 
tion parfaite  qu'exprime  le  verbe  assevir  dans  les 
passages  suivans:  «  Vostre  doulce  volenté  seroit 
«  assevie,  et  laisseroie  la  volenté  des  autres.  » 
(Machaut,  ms.  fol.  185.) 

Assevir  puist  toutes  ses  volentez. 

Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  1300,  p.  529. 

.  .  .  ,Te  te  promet  ce  tenir, 

Que  je  te  feray  assevir 

De  ce  dont  yes  en  si  grant  double. 

Macliault,  MS.  fol.  28,  V°  col.  2. 

Enfin,  avoir  le  cœur  assevi  de  joie,  et  tout  sim- 
plement le  cœur  assevi  signifioit  avoir  le  cœur 
parfaitement  satisfait  et  comblé  de  joie.  (Ane.  Poët. 
Fr.  MSS.  avant  1300,  p.  693.  —  Eust.  Desch.  Poës. 
MSS.  p.  188.) 

On  disoil  d'une  personne  comblée  d'honneurs 
et  de  tous  les  dons  de  la  nature,  qu'elle  en  étoit 
assevie,  parce  qu'au  figuré  le  comble  de  la  satisfac- 
tion est  le  point  capital  où  finit  la  possibilité  rai- 
sonnable de  l'accroitre. 

....  Vostre  chief,  à  toute  gent  agrée, 
Blont  com  fin  or;  vairs  oeulx,  et  les  sourcils 
Avez  petits,  la  denture  serrée. 
Manette  blanche  com  fleur  de  Us  : 
Et  au  surplus  est  vo  corps  assevis 
De  tous  les  biens  qui  sont  en  flour  nouvelle. 
Eust.  Desch.  PaSs.  MS.  p.  250,  eol.  2. 


(1)  L'étymologie  est  adsequi,  devenu  adsequire  à  la  basse  latinité,  où  les  verbes  déponents  avaient  disparu.  Le  «  se  sera 
consiinnifié,  le  q  sera  tombé,  comme  dans  prosevere  (proseipiere) ,  qu'on  trouve  dans  les  Formalœ  Andeijavenses  ;  la 
dérivation  est  donc  adtetjuire,  adseqvire,  assevire,  assevir.  (n.  E.)  —  (2)  Ces  variations  d'orthographe  viennent  de  différences 
étymologiques  ;  achever  vient  de  adcapitare,  non  de  assequi.  (n.  e.)  —  (3)  .Assovir  vient  du  latin  adsopire,  endormir,  (n.  e.) 


AS 


-  269  - 


AS 


...  De  tout  le  bien  qui  peut  estre 
Par  honneur,  estoie  anseviz 
Et  saoulés  à  mon  devis. 

Machaut,  MS.  fol.  186,  R'  col.  i. 

La  réunion  du  participe  saoulé,  de  même  signi- 
fication que  assouvi,  avec  le  participe  assevi,  dans 
ces  vers,  semlMe  très-propre  à  indiquer  comment 
assevi  et  assouvi,  quoique  d'origine  différente, 
peuvent  avoir  été  sulislitués  l'un  à  l'autre  dans 
nos  anciennes  poésies.  On  seioit  même  tenté  de 
croire  qu'assevi  étoit  quelquefois  une  altération 
d'assouvi,  si  l'on  ne  faisoit  rétlexion  que  l'accep- 
tion d'assevi  peut  être  relative  à  l'idée  de  satisfac- 
tion parfaite,  même  dans  les  passages  suivans. 

James  nii  huit  (1)  ne  fussent  asseviz 
De  regarder  sa  douce  face  tendre,  etc. 

Ane.  Pofs.  fr.  MSS.  avanl  1300,  p.  307. 

L'en  ne  pourroit  peuple  esrau  retarder 
Qu'il  n'ait  avant  sa  folour  asfevie.  etc. 

Eusl.  Dcsdi.  Poés.  MSS.  p.  38,  col.  1. 

VARIANTES    : 
ASSEVIR.  Ane.  Poët.  fr.  MSS.  avant  1300,  p.  529. 
ASEVIR.  Chans.  fr.  MS.  de  Berne,  Part,  ii,   fol.  30,  R». 
AsouviR.  Fontaines  Guérin,  Trésor  de  Vénerie,  p.  67. 
AssoviR  Villehardouin,  p.  150. 
Assouvir.  Joinville,  MS.  p.  292. 
EscHAViB.  Ane.  Poët.  fr.  JISS.  avant  1.300.  p.  1229. 
EscHEVEB.  Lett.  de  Louis  XIL  T.  U,  p.  246. 
EscHEViR.  Partoii.  de  Blois,  MS.  de  S'-Germ.  fol.  165,  V». 

Assevissenient,  subst.  7nnsc.  Achèvement, 
Perfection.  (Voy.  Achevissance.)  Signification  analo- 
gue à  celle  du  verbe  Assevir,  achever,  rendre 
parfait.  (Voy.  Assevir). 

Je  ne  puis  trop  longuement 
Loer  voslre  douce  figure. 
En  laquelle  a  fourni  Nature 
Tout  son  noble  assevissenient. 

Eust.  Desch.  Poès.  MSS.  p.  100,  col.  2. 

Asseuler,  verbe.  Isoler,  réduire  à  être  seul,  à 
être  solitaire;  éloigner  des  autres.  De  Tadjectif 
seul,  en  latin  solus,  sur  l'étymologie  duquel  on 
peut  voir  Vossius,  (Etym.  Liiig.  lai.)  et-Couit  de 
Gébelin,  (Dict.  étym.  de  la  Lang.  Vr.  col.  97G),  on 
a  formé  le  verbe  asseuler  ou  essculer,  proprement: 
isoler,  réduire  à  être  seul,  à  être  solitaire.  Il 
semble  qu'on  ait  dit  en  ce  sens  :  "  Le  duc  de 
«  Berrys'en  alla  en  la  comté  d'Estampes,  le  duc 
«  d'Orléans  à  Bloys,  le  duc  de  Bourbon  en  Bour- 
«  bonnois  ;  et  le  duc  de  Bourgongne  estoit  en 
«  Bourgongne.  Ainsi  demouia  le'  duc  de  Guyenne 
"  fort  esseulé  du  sang  royal.  »  (J.  le  Fevre  de 
«  S"  Remy,  Hist.,  de  Charles  VI,  p.  78.)  <■  Quant 
«  Gérard  eut  bieii  advisé  le  chaslel,  il  fut  moult 
«  esbahy  que  ce  povoit  estre  d'une  telle  place 
"  ainsi  asseullée,  et  que  tout  autour  estoit  gasté.  » 
(Gérard  de  Nevers,  part.  II,  p.  54.) 

Loes  qu'estoie  esseulés,  m'enfermoie  ; 

Lors  par  semblant  me  trouvoie 

Près  de  li  tout  abaubi. 

Ensi  mes  maus  à  la  fois  entr'oubli. 

Ane.  Poet.  Fr.  MSS.  avanl  1300,  p.  U2i. 

Quant  il  est  très-bien  asseulé. 

Et  de  chascun  assez  loingtains,  etc. 

Al.  Charlier,  Poès.  p.  748. 


On  observera  que  dans  ces  vers,  asseulé  ou 
esseulé  paroit  être  le  participe  du  verbe  s'esseuler 
ou  s'asseuler,  s'éloigner  des  autres,  pour  être  seul 
et  solitaire.  «  Après  ce  que...  Jehannot  ot  soupe 
«  avecques  le  gardien  des  moulins,  se  esseula  et 
«  destourna.  »'(D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de 
Du  Gange,  au  mot  exsolare;  tit.  de  1382.) 

Ma  Dame  s'esloit  asseuléc, 
Delès  rosiers,  près  d'une  alée. 

Froissarl,  Poès.  MSS.  p.  137,  col.  1. 

VARIANTES  : 
ASSEULER.  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  137,  col.  1. 
Aseuler.  Chans.  fr.  du  xiii=  siècle,  MS.  de  Bouh.  fol.  253. 
Asseuler.  Percetorest,  Vol.  6,  fol.  98,  V»  col.  2. 
EssEULER.  Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  1300,  p.  1422. 

Asseur,  adv.  el  adject.  Avec  sécurité,  en  sûreté, 
en  assurance.  Sûr,  qui  a  une  sûreté,  une  assurance. 

(Voy.  ASSEURER.) 

On  observera  qu'en  supprimant  le  substantif 
Estât,  l'on  a  pu  dire  d'une  personne  assurée  de 
quelque  chose,  qu'elle  en  étoit  mise  à  seur,  comme 
on  a  dit  qu'elle  étoit  mise  en  seur  de  cette  chose. 
(Voy.  Seuiî.)  Peut-être  faut-il  lire  à  seur,  en  sépa- 
rant la  préposition  de  l'adjectif,  dans  les  vers 
suivans  où  mettre  aseur,  signifie  mettre  en  état  de 
sûreté? 

Li  Sire  ot  fait  dedens  ce  mur, 
Por  sa  femme  mettre  ascur, 
Cambre  ;  sous  ciel  n'avoit  si  bêle. 

Fabl.  MS.  du  Roi,  ri- 7989,  fol.  49,  V  col.  1. 

Quoi  qu'il  en  soit,  c'est  sans  doute  par  ellipse 
que  l'adjectif  Seur,  en  latin  securus,  précédé  de 
la  préposition  à  devenue  inséparable,  a  signifié 
comme  adverbe,  avec  sécurité,  en  sûreté,  avec 
assurance.  (Voy.  Asseurte.)  «  Monseigneur  Gauvain... 
o  se  fist  armer  à  grant  haste,  et  tous  les  autres 
«  Barons  aussi,....  comme  ceulx  q*ui  n'estoient  pas 
«  asseur  de  leurs  vies.  »  (Lanc.  du  Lac,  Vol.  IJf . 
fol.  141.)  «  Quant  guerre  estoit  commencée  entrj 
«  Gentixhommes,  il  laisoit  à  la  partie  qui  vouloit 
«  estre  asseurs,  h  requerre  de  quatre  voies  lequele 
«  que  li  plesoit.  »  (Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis, 
p.  304.)  «  Si  entrèrent  enz,  et  s'i  herbergiérent,  et 
«  lors  furent  «sscîf?'.  n  (Villehardouin,  p.  154.) 

Vraisemblablement,  l'orthographe  aseiire  esl  une 
faute  dans  ces  vers  : 

.  .  .  Chascune  eut  de  la  veoir  si  grant  peur, 
Que  de  long  temps  nulle  ne  fut  asewe. 

Faifeu,  p.  37. 

La  rime  exige  qu'on  lise  aseur,  comme  dans  les 
vers  suivans  : 

Tant  eurent  de  peur. 

Que  la  pluspart  d'un  moys  ne  fut  aseur. 

Ibid.  p.  76  et  77. 

Soubz  bon  pasteur,  les  ouailles  sont  asseur. 

Poës.  de  J.  Marot,  p.  45. 

L'inobservation  des  règles,  pour  le  nombre  et  le 
genre,  dans  la  terminaison  d'asseur  en  ces  diffé- 
rens  passages,  semble  une  preuve  évidente  que 
l'on  disoit  adverbialement  estre  asseur,  comme 
parler  asseur,  dormir  asseur,  s'esbatre,  se  déduire 


(1)  Mes  yeux. 


AS 


270  -  AS 


ttsseur,  etc.  «  Envolèrent  un  Héraut  dire  à  ceulx 
«  de  la  ville,  comment  Us  estoient  venus-lfi  pour 
»  parler  à  la  roine  Racio,  asseur.  »  (ModuselRacio, 
Mss.  fol.  290.) 

Dame,  fait-il,  encor  annuit, 
Pourrois  dormir  tôt  nsciir,  etc. 

Fabl.  MS.  du  R.  n*  7615,  fol.  128,  \  •  col.  î. 

.  .  Se  peust  en  honneur 
ksbatre  avec  sa  femme,  asseur. 

Rom.  de  la  Uosc,  vers  18978  ol  79. 

Je  n'aira  pas  mon  mari  del  cuer  plus  que  del  coûte  ; 
Si  me  contieng  vers  lui  que  nule  rien  nel  doute 
Asseur  me  dédui,  etc.  ^^^  ^^  ^  __,  ^^^^^  ^^^  ^^^  ^.  ^^  , 

Hom  qui  famé  a  encore,  coment  auroit  mesaise  ? 
C'est  une  médecine  qui  toz  les  maus  apavse  : 

L'en  i  peut  aussi  estre  asseur  et  a  aise,  

Commi  plain  poing  l'estoup^s  en  une  ardem  fomaise. 

Ce  mot  asseur  est  encore  assez  visiblement 
adverbe  en  ce  dernier  passage  :  mais  dans  nombre 
d'autres,  on  n'ose  décider  s'il  est  adverbe  ou 
adiectif  «  Noveles  vindrent  à  Salahadin  que  le 
«  Roi  de  France  et  le  Roi  d'Angleterre  estoient 
a  crolslés  .  por  aler  sus  lui.  Il  n'en  fut  raie  lies  ne 
.  aseur.  -  (Contin.  de  G.  de  Tyr;  Martene,  ampl. 
coUect.  T.  V,  col.  62G.)  «  Sire,  je  ne  suis  pas  bien 
«  asseur  en  ce  lieu  ;  car  l'en  m  y  hayt.  >.  (Lanc.  du 
Lac,  Vol.  Il,  fol.  5.) 

Ne  scay  comment  il  est  asseur, 
Et  qu'ose  vivre  sans  peur. 

Testament  de  J.  de  Meung,  vcis  1337  et  38. 

On  a  désigné,  la  sûreté  qui  naît  d'une  timidité 
nrévovante,  d'une  défiance  sage,  en  disant  prover- 
bialement :  «  Qui  a  peur,  il  est  asseur.  »  (Cotgrave, 
Dlct.) 

.  .  Nus  qdi  soit  en  ceste  vie. 
N'est  si  preudon  ne  de  tel  estre, 

^"^^Twii'  '^'!^  H.  n.  6987,  fol.  3.3.  V  col.  3, 

Quoiqu'en  ces  dernières  citations,  comme  dans 
une  Infinité  d'autres  qu'on  supprime,  asseur  puisse 
être  assez  Indifféremment  expliqué  comme  adverbe 
ou  comme  adjectif,  il  est  possible  qu'on  préfère  a 
seconde  explication  à  la  première,  et  que  cette 
préférence  paroisse  d'autant  plus  raisonnable,  que 
dans  les  vers  suivans,  aseure  semble  être  le  lemi- 
iiln  de  l'adjectif  composé  aseur. 

.  .  .  Fu  clos  de  chascun  costé, 

Si  bien  que  toute  créature 

Puet  estre  dedanz  aseure    .   ,  „^  , ,   „  „. 

G.  Guiarl,  Mïi.  fol.   l6,  R'. 

Ce  fémlnliî  aseure  pourrolt  néanmoins  être 
adverbe,  quelle  que  soll  la  raison  de  le  croire 
adjectif;  car  on  a  la  preuve  que,  soit  pour  la  com- 
modité de  la  rime,  soit  par  ellipse  d'un  substantif 
féminin,  tel  que  Situation,  l'on  a  dit  adverbiale- 
ment mellre  asseure,  comme  l'on  disolt  mettre 
asseur.  L'Amour  personnifié,  comparant  la  vertu 
d'une  femme  que  l'Intérêt  domine,  à  une  forteresse 
que  Vénus  sa  mère  lui  met  asseure,  dont  elle  lui 
assure  l'entrée  après  s'en  être  rendue  maîtresse  a 
force  d'argent,  s'exprime  ainsi  : 


Elle  a  prins  mainte  forteresse. 
Qui  coustoit  bien  mille  besans, 
Où  je  ne  fu  jamais  presens. 
Si  le  me  mettoit  on  nsseure; 
Mais  je  n'y  entray  en  nulle  heure  ; 
Ne  ne  me  pleut  oncques  la  prinse 
De  forteresse  sans  moi  prinse. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  11340-11346. 

On  le  répète  ;  il  est  souvent  très  douteux  que  le 
mot  asseur  soit  plutôt  adjectif  qu'adverbe,  à  moins 
qu'il  ne  soit  suivi,  comme  11  l'estquelquefois,  d  une 
préposition  Indicative  de  la  chose  dont  on  est  sur, 
de  laquelle  on  a  une  sûreté,  une  assurance  :  nulle 
preuve  cependant  (ju'avec  cette  préposition  1  on  ait 
dit  asseure  au  féminin,  ni  au  pluriel  asseurs. 

C'est  dans  les  variations  d'orthographe  de  l'adjec- 
tif seur,  qui  s'écrlvolt  sceur,  segur,  que  l'on  trouve 
la  raison  pour  laquelle  le  composé  asseur  s  est 
écrit  aseur,  et  peut-être  asseeur  ou  asseeur.  On 
croit  que  c'est  ainsi  qu'il  faut  lire,  au  lieu  û'asseeur 

en  ce  passage:  »  Comme afin  que  chacun  fust 

«  asseeur  de  sa  chevance  et  peust  chascun  marchan- 
«  der  seurement,  alons  fait  faire  bonnes  monnoies, 
«  etc  »  (Ord.  T.  lll,  p.  520.)  «  Fist  tant  qu'il  fust 
..  asseur  des  convenances  que  les  Amiraus  li  avoient 
«  promises  et  jurées.  ••  (Contin.  de  G.  de  Tyr; 
Martene,  ampl.  CoUect.  T.  V,  col.  723.) 

....  Cuers  qui  sent  d'amours  le  point, 
N'est  mie  tondis  en  un  point, 
S'asseur  de  joie  ou  de  pâme. 

M.ichaul,  MS.  fol.  23,  R"  col.  2. 

VARI.\NTES  : 
ASSEUR.  Fabl.  MS.  du  Roi,  n-  7'218,  fol.  201,  V». 
AscuR.  Contin.  de  G.  de  Tyr  ;  Martene  T.  V   col.  626. 
Aseur.  Fabl.  MS.  du  Roi,  n°  76lo,  fol.  128  V". 
ASEURE.  G.  Guiart.  MS.  fol.  76,  R».  -  Faifeu,  p.  37. 
ASSEEUR.  Ord.  T.  m,  p.  520. 
Asseure.  Rom.  de  la  Rose,  vers  Uàiô. 
ASSEURS.  Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis,  p.  M*. 

Asseur.ince,  s«bs^  fém.  Assurance,  sûreté,  sé- 
curité; confiance,  hardiesse,  etc.  parole,  promesse, 
caution,  affirmation,  promesse  de  fidehte,  serment, 
sauf-conduit,  sauvegarde,  etc.  espèce  de  paix. 

Ce  mot  asseurance  qu'aujourd  huil  on  écrit  assu- 
rance, et  dont  on  a  restreint  l'acception,  pouvoit 
signifier  toute  cause  active  ou  passive  de  sécurité, 
tout  moyen  acUf  et  passif  d'être  en  sûreté,  en  assu- 
rance, comme  il  a  signifié  et  signifie  encore  parole, 
promesse,  etc.  confiance,  hardiesse,  etc.  C  est  la 
métonymie  de  l'elTet  pour  la  cause  «  Il  n  y  a  rien 
„  plus  mal  aisé  à  cognolstre,  et  ou  il  y  ait  moins 
<■  d'rtss(;»)'«/uT,  que  le  commun  Peuple.  »  (Nicot, 
Dict  —  Voy.  Cotgrave,  Rob.  EsUenne,  Monet,  Dict. 
Dlct.  de  Trévoux.  —  Dlct.  de  l'Acad.  fr.) 

Lv  Rovs  mande  Girart  paix,  amour,  concordance, 

Et  qu'il  vienne  vers  luy  par  droitte  assenurance. 

'  Ger.  de  Roussillon,  Mb.  p.  174. 

On  a  dit,  en  parlant  d'une  ruse  ordinaire  au 
cerf,  lorsqu'il  se  sent  moins  ferme  sur  jambes,  et 
par  conséquent  moins  capable  de  cette  force  de 
vitesse  dans  laquelle  11  cherche  sa  surele  :  «  Bien 
,<  souvent  11  fermera  l'ongle.,  comine  sU  alloi 
«  A-asseurance;  puis  tout  soudain  il  s  efforcera,  et 
«  l'ouvrira  faisant  de  grandes  glissées.  »  (Du  l'ouii- 
loux,  Vénerie,  fol.  40,  V°.) 


AS 


—  271  — 


AS 


Après  avoir  indiqué  la  raison  pour  laquelle  on  a 
pu  nommer  figurément  asseunuice,  une  caution, 
une  affirmation,  une  promesse  de  fidélité,  un  ser- 
ment, etc.  on  croit  inutile  de  multiplier  les  preuves 
de  ces  acceptions  particulières.  «  Quiconque  soit  à 
«  qui  succédera  mon  héritage  après  moy,  soit  con- 
«  traint  jurer  de  devoir  entretenir  ceste  liberté  et 
«  le  contenu  en  ceste  charte,  avant  recevoir  quelque 
«  asseurance  ou  serment  des  Bourgeois.  »  (Coût. 
de  Landrechies,  au  nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  2G5. 
—  Voy.  Cotgrave,  Nicot,  Monet,  Dict.) 

Quelque  difîérens  que  fussent,  pour  le  fond  et 
pour  la  forme,  les  actes  judiciaires,  par  lesquels 
les  Officiers  des  seigneuries  et  des  villes,  ainsi  que 
les  Officiers  royaux,  s'opposoientau  penchant  de  la 
Nation  pour  les  voies  de  fait ,  ces  actes  étoient 
néanmoins  semblables,  en  ce  que  tous  opéroient  la 
silreté  de  celui  que  la  Justice  aidoit  à  se  mettre  à 
couvert  de  la  violence.  D'après  cette  idée  générale 
de  sûreté,  on  aura  quelquefois  confondu  les  paix  et 
les  trêves  sous  le  nom  d'asseiirances,  et  les  asseu- 
rances  sous  celui  de  trêves  ou  de  paix.  On  croit 
apercevoir  une  preuve  de  cette  confusion  dans  la 
Coutume  de  Tournay,  oîi  la  paix,  quoiiiue  distin- 
guée de  l'asscHrajiff,  semble  en  partager  la  déno- 
mination. «  Les  Prevosts  et  Jurez,  ex  officio,  peu- 
«  vent  et  ont  accoustumé  mander  les  manans  qu'ils 
"  sçavent  nourir  haine  et  malveillance  les  uns  aux 
«  autres,  et  à  iceux  donner  la  paix  de  la  ville,  leur 
«  dcffendant  la  voye  de  fait,  sur  peine  de  mort, 

«  bannissement,  ou  autre  peine  arbitraire Et 

«  au  cas  que  les  Parties  soient  absens,  lesdits 
"  Prevosts  et  Jurez,  quant  il  y  a  grand  apparence 
«  decombat,  sontaccoustumez,  après  icelles  Parties 
«  appelle  es,  prononcer  de  leur  office  seur  estât  et 
«  asseuratice  enive  elles,  et  tous  leurs  parens,  amis, 
«  allez,  aydans,  complices  et  adhérens,  bastards  et 

«<  autres, leur  défendant  la  voye  de  fait  sur 

«  confiscation  de  corps  et  de  biens.  »  (Coût.  gén. 
T.  II,  p.  94G.) 

S'il  ne  résulte  pas  évidemment  de  ce  passage, 
qu  asseurance  soit  de  même  signification  que  paix 
de  la  ville,  au  moins  prouve-t-il  <\\ie  les  tisseur ances 
prononcées  d'office  étoient  différentes  de  celles  que 
les  Juges  prononçotent  à  la  réquisition  de  la  Partie 
qui  craignoit  la  voye  de  fait.  «  Quant  aucun  craint 
«  eslre  injurié  ou  outragé  de  son  ennemy,....  est 
«  accoustumé  de  faire  adjourner  sommairement 
<■  pardevant  lesdits  Prevosts  et  Jurez...  celuy 
«  duquel  il  a  double  ou  crainte,  ou  aucun  de  ses 
«  parens  lignagers  ou  affins,  et  pardevant  eux 
«  requérir  qu'il  jure  asseurance  pour  luy  et  ses 
«  parens  lignagers,  affins,  bastards  ou  légitimes, 
«  de  non  battre,  outrager,  injurier  ou  faire  desplai- 
«  sir  de  fait...  à  sa  Partie  ou  aux  siens,  à  peine  de 

«  mort,  bannissement  ou  autre  peine  arbitraire  ; 

"  lesquelles  asseuranees  l'adjourné  est  tenu  de 
«  prestement  accorder  et  jurer,  comme  est  sa  Partie 
'<  réciproquement  tenue  de  faire.  «  (Coût.  gén. 
iibi  supra.  —  Voy.  Asseurement.) 

Cependant,  lorsqu'après  avoir  vu  l'expression 


Seur  estât,  employée  comme  synonyme  d'Asseu- 
rance,  on  lit  ensuite  que  «  seurs  estais  et  paix  de 
«  la  ville,  en  quelsconques  manières  qu'ils  ayent 
>'  esté  donnez  et  accordez,  se  mettent...  à  néant  du 
«  mutuel  consentement  des  Parties  principales, 
«  comme  dit  est  des  asseuranees,  «  on  est  bien 
tenté  de  croire  que  réellement  dans  le  sens  de  paix 
on  a  dit  asseurance.  Au  reste,  la  Coutume  de 
Tournay  paroit  indiquer  une  différence  essentielle 
entre  cette  asseurance  prononcée  d'office,  et  celles 
qu'elle  distingue  des  seurs  estats  et  paix  de  la  ville  ; 
lesquelles  asseuranees,  si  les  Parties  n'en  consen- 
tent mutuellement  la  révocation  en  présence  des 
Prévôts  et  Jurés,  «  durent  tant  du  vivant  de  ceux 
«  qui  les  ont  accordées  et  jurées,  que  de  leurs 
«  lignagers  vivans  au  jour  qu'elles  auroicnt  esté 
«  données.  Quant  à  la  paix  de  la  ville,  celle  paix 
«  n'avoit  lien  que  durant  les  vies  de  ceux  ausquels 
0  on  avoit  défendu  la  voye  de  fait.  «  (Voy.  Coût, 
gén.  uhi  supra.) 

Probablement,  c'est  sans  égard  à  la  diversité  des 
usages  coutumiers  pour  les  Paix,  Trêves  et  /1ss<?m- 
rances,  que  Bouteiller,  Jurisconsulte  du  xiv«  siècle, 
en  a  généralisé  les  effets,  ainsi  que  les  formalités. 
Il  y  a  différence,  dit-il,  à  demander  trêves,  ou  paix, 
ou  asseurance  ;  et  lorsqu'elles  sont  obtenues,  elles 
diffèrent  encore  en  ce  que  les  Trêves  ne  durent 
qu'un  an  et  un  jour;  la  Paix  ou  V Asseurance  dure 
à  toujours.  Mais  quoique  la  Paix  dure  à  toujours, 
comme  l'Assurance,  il  observe  ensuite  que  »  autre 
«  chose  est  de  Asseurance,  que  de  Paix  qui  se  met- 
«  troit  jus  par  nouvel  cas  sourdant,  ou  pour  boire 
«  ou  pour  menger  ensemble  ;  car  pour  boire  et 
"  pour  menger,  ne  pour  communication,  ne  pour 
«  autre  cas  nouveau,  l'Asscurancc  ne  se  casse  no 
«  abolisl  que  la  peine  ne  soit  tousjours  criminelle, 
"  quiconques  l'enfraint.  »  (Voy.  Somm.  Rur.  Liv.l, 
til.  XXXIV,  p.  232  et  234.) 

On  faisoil  sans  doute  allusion  à  ces  asseuranees 
judiciaires  par  lesquelles  la  voie  de  fait  étoit  inter- 
dite, en  disant  : 

Li  une  partie  et  l'autre  s'arme. 
Sans  entendre  à  asseuranees,  etc. 

G.  Guiart,  MS.  M.  220,  R-. 

Une  connoissance  exacte  des  différences  admises 
par  les  diverses  Coutumes  du  Royaume,  dans  la 
nature  et  la  dénomination  de  ces  actes  judiciaires, 
peut  être  curieuse;  mais  on  ne  voit  pas  qu'elle  soit 
plus  utile  aujourd'hui  qu'elle  ne  l'étoit  dès  le 
XVI'  siècle.  Les  voies  de  fait  autorisées  par  plusieurs 
de  ces  Coutumes,  au  mépris  de  la  raison  que  récla- 
moit  eu  vain  un  Jurisconsulte,  contemporain  de 
Routeiller,  et  qui  écrivoit  sous  le  règne  de  Charles 
VI,  étoient  enfin  absolument  proscrites  en  France. 
Aussi  Charondas,  qui  cite  souvent  cet  ancien  Pra- 
ticien, dans  ses  Annotations  sur  la  Somme  rurale, 
dit-il  que  commenter  ce  qu'a  écrit  Bouteiller  sur 
les  Trêves,  Paix  el  Asseuraiices,  >•  étuitdês-lorsune 
»  peine  inutile,  puisque  les  forcies  d'armes  apparte- 
a  noient  au  Roy.  Toutefois,  ajoule-t-il,  on  observe, 
«  quand  il  y  a  des  menaces  faictes  par  aucun,  de  le 


AS 


272  — 


AS 


«  faire  appeller  en  cas  à'assritremntt  pour  eslre 
«  mis  en  la  sauves;ardeclu  Roi  et  de  liiy  ;  afin  d'évi- 
«  1er  que  les  Parties  n'entrent  en  voye  de  faict, 
«  querelles  et  armes  :  du(iucl  asseuremcnt  et  sau- 
«  vegarde  peut  co^noistre  le  Juge  royal,  mesnie- 
«  ment  le  Baillif.  Senesclial,  ou  son  Lieutenant  qui 
«  préside  en  la  Province,  parce  que  c'est  au  Roy  et 
«  à  ses  Officiers  de  conserver  le  repos  et  tianquil- 
«  litc  entre  ses  Subjects.  «  (Bouteiller,  Som.  rur. 
tit.  XXXIV,  Annot.  p.  243.  —  Voy.  Asseurement.) 

VARIANTES    : 
ASSEURANCE.  G.  Guiart,  MS.  fol.  220. 
AsÉGURANGE.  Ane.  Poët.  fr.  MSS.  avant  13()0,  p.  1233. 
AssÉGURANCE.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p   174. 
AssÉGUBANGHE.  D.   Carpeiitier,  Suppl.  Gloss.  lat.   de  Du 
Cange,  au  mot  Afisrrjuramenlum  ;  tit.  de  1424. 

Asseiiréeinent,  adverbe.  Assurément,  en 
sûreté,  avec  assurance,  avec  sécurité.  Cet  adverbe, 
qui  ne  désigne  plus  aujourd'hui  qu'une  idée  d'assu- 
rance, fondée  sur  une  parole  ou  promesse  affirma- 
tive, a  désigné  autrefois,  non-seulement  cette  idée 
particulière  de  sûreté,  mais  une  idée  générale  de 
sûreté,  d'assurance  avec  laquelle  on  se  confie  en  sa 
force,  en  son  courage,  en  la  bonté  de  son  armure, 
en  sa  facilité  de  parler,  etc.  «  David  prist  cunseil 
.  de  noslre  Seignur,  s'il  ireit  encuntre  les  Philis- 

«  tiens Nostre  Sires  li  respundi,  alez-i  bakle- 

„  ment David  s'enlurnad  aseitrémcnt  e  les  Phi- 

«  listiens...  descunfit.  »   (Livres  des  Rois,  ms.  des 
Cordel.  fol.  4G.)   «  Quand   ils   véoient    l'ennemy 
«  approcher  d'eux  trop  asseuremcnt,  et  que  sans 
«  se  bazarder  témérairement,  ils  luy  pouvoient 
■-  donner  quelque  venue,  etc.  »  (Du  Bellay,  Mém. 
L.  7,  fol.  219.)  «  De  Bonnifacese  trouva  malflsse«- 
«  renient  armé  de  la  teste,  pour  combalre  à  pié.  » 
(Mém.  d'Ol.  de  la  Marche,  L.  i,  p.  30i.) 
.  .  .  Montjoye  avec  toute  silence, 
Asseurimieid,  comme  au  cas  bien  instruit, 
Leur  proposa  le  narré  qui  s'ensuit. 

*^  J.  Marot,  p.  70et"l. 

On  a  dit  proverbialement,  en  parlant  de  l'homme 
à  qui  sa  pauvieté  permet  de  vivre  joyeusement,  en 
assurance  et  avec  sécurité  :  «  Asseiirémenl  cbante 
>.  qui  n'a  que  perdre.  >>  (Colgrave,  Dict.  —  Voyez 

ASSEUR.) 

VARIANTES  : 
ASSEURÉEMENT.  Cotgrave,  Rob.  Estienne,  Nicot,  Dict. 
AsEURiMENT.  L.  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  119,  R»  c.  1. 
AssEunÉMANT.  Mouet,  Dict. 
AssEURÉMENT.  Du  Bellay,  Mém.  L.  7,  fol.  220,  R". 

Asseurement,  subst.  masc.  Sauvegarde,  sauf- 
conduil,  caution,  etc.  Terme  de  pratique,  délaisse- 
ment. Terme  de  Coutume,  espèce  de  Paix. 

C'est  relativement  à  une  idée  de  sûreté,  d'assu- 
rance opérée  par  une  sauvegarde,  un  sauf-conduit, 
une  caution,  (|u'en  ce  sens  on  a  dit  asseurement. 
(Voy.  Colgrave,  Dict.)  Le  roi  Jean,  établissant  pour 
Gardien  et  seul  Juge  des  Juifs,  Louis,  Comte  d'Etam- 
pes,  lui  enjoint  par  ses  Lettres  du  mois  de  mars 
13G0,  de  leur  faire  «  doner,  et  à  cbascun  d'eulx, 
«  bon  et  lovai  asseurement,  selon  la  coustume  du 
«  pais.  »  (Voy.  Ord.  T.  111,  p.  472.)  i'ar  Lettres  de 


Charles,  son  fils,  datées  du  mois  d'avril  1363,  il  fut 
ordonné  que  les  marchands  et  voituriers  qui  ame- 
noienldes  provisions  ù  Paris,  «  auroient  bon  et 
«  loyal  asseurement,  selon  la  coustume  des  pais, 
«  des  personnes,  desquelles  ilslesrequiéreroient  à 
«  avoir.  »  (Ibid.  p.  031.1  «  En  Anlioche  ne  poroient 
«  il  mie  aler,  s'il  ï\'^\o\e,n\.\'aseurementAn  Soutan 
«  de  llalape,  parmi  cui  terre  il  dévoient  passer.  » 
(Chron.  d'Outremer,  ms.  de  Berne,  n°  113,  fol.  152.) 

Cils  li  met  certaine  journée 

Destre  en  sa  court  pour  soi  deffendre 

De  ce  dont  l'en  le  veult  reprendre  : 

Mes  asseuremcnt  il  n'envoie,  etc. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  56,  V'. 

Amender  li  covient,  ains  qu'il  isse  de  cage, 
Et  bailler  de  l'amende  asseurement  ou  gage. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  1G15,  fol.  Ul,  R  col.  1. 

C'est  évidemment  dans  le  sens  de  caution,  que 
l'on  a  dit  :  «  Fist  convenir  ledit  Escuier  en  la  Court 
«  de  l'Eglise  de  Tournay,  en  cas  à'asseurement 
«  juratoire,  pour  lui  donner  plus  de  peine.  » 
(D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au 
mot  Assetiracio;  tit.  de  1375.) 

Au  second  sens,  on  nommoit  asseuremcnt  dans 
la  Coutume  de  Metz,  le  délaissement  d'un  héritage 
hypothé(|ué  au  payement  d'une  censé  ou  rente, 
parce  qu'au  moyen  de  ce  délaissement,  le  possesseur 
de  l'héritage  procuroil  la  sûreté  de  la  censé  ou 
rente,  et  se  meltoit  lui-même  en  sûreté  contre  la 
poursuite  du  créancier  hypothécaire,  pour  les  arré- 
rages échus,  tant  avant  sa  possession  qu'après  son 
délaissement.  «  Le  détenteur  de  l'héritage  hypothé- 
»  que  au  payement  d'une  censé  ou  rente ,  est  tenu 
a  personnellement  et  hypothéquairement  des  arré- 
»  rages  depuis  qu'il  est  détenteur,  et  pour  les  pré- 

«  cédents  hvpothéquairemcnt Il  se  peut  des- 

«  charger  dès  arrérages  précédents  et  à  l'advenir, 

«  en  asseurant  fhérilage  qu'il  possède Le  seul 

a  asseurement  ne  dépossède  point;  et  faut  que 
«  celuy  au  profit  duquel  il  est  fait,  se  face  conduire 
«  et  rendre  possesseur  de  fliérilage  asseuré  dedans 
«  l'an  et  jour,  pour  en  déposséder  le  débiteur  de  la 
«  rente.  »  (Nouv.  Coul.  gén.  T.  II,  p.  399.)  Les 
Ordonnances  de  Metz  et  Païs  Messin  ont  pourvu  :^ 
fabus  que  les  détenteurs  de  pareils  héritages 
auroient  pu  faire  de  cette  disposition  de  la  Coutume, 
en  prononçant  qu'ils  «  ne  seront  reçus  à  faire 
»  asseurement  ne  quitter  la  possession  desdits  héri- 
«  tages,  qu'ils  n'avent  payé  les  arrérages...  escheus 
«  de"" leur  temps,  et  depuis  la  demande....  faite  en 
«  jugement.  »  (Voy.  Lauriere,  Gloss.  du  Dr.  Fr.  au 
mot  Asseurement.) 

11  paroit  que  la  Paix  nommée  Asseuranee  dans 
quelques  Coutumes  et  spécialement  dans  celle  de 
Tournay,  ou  Asseureté  dans  celle  de  Lodunois,  a 
été  plu.s  généralement  connue  sous  le  nom  d'.lsse;.'- 
rement.  Quelque  réelles  que  fussent  les  différences 
établies  entre  Vasseurement,  la  paix,  la  trêve,  la 
sauvegarde,  il  y  a  lieu  de  croii  e  qu'elles  ne  furent 
pas  to'ujours  exactement  observées.  En  opposant 
sans  cesse  la  sauvegarde,  la  trêve  et  la  paix  à 
Vasseurement,  on  les  rapproclioit  sans  cesse  ;  et  de 


AS 


—  273  — 


AS 


ce  rapprocliement,  ainsi  que  de  l'habitude  si  natu- 
relle d'assimiler  les  choses  dont  TefTet  est  à  peu  près 
le  même,  sera  résulté  une  confusion  d'idées  d'après 
laquelle  on  aura  dit  assez  indifféremment  que  la 
sauvegarde,  la  trêve,  la  paix  étoit  un  asscurement, 
comme  Vnsseuretnent  étoit  une  paix,  une  trêve,  une 
sauvegarde.  «  Celuy  qui  est  requis  de  bailler 
"  asscurement...  est  tenu  de  bailler  ledit  «sst'î/jY^- 
«  ment...  et  jurer  de  le  tenir,...  sur  peine  d'estre 
«  puny...  selon  la  qualité  de  l'infraction  dudit  sauf- 
»  conduit  ou  sauvegarde.  »  (Coût,  de  Chaumont  en 
Bassigny,  au  Coût.  gén.  T.  I,  p.  441.)  Quoi([ue 
Beaumanoir,  dans  le  Chapitre  lx  des  Coutumes  de 
Beauvoisis,  pose  en  principe  «  qu'entre  gens  de 
«  poole  qui  ne  pueent  guerroier,  nules  trives 
«  n'appartient,  »  il  semble  confondre  la  trêve  avec 
Xasseurcment  dans  le  Chapitre  lxi  des  mêmes  Cou- 
tumes, lorsqu'il  dit  :  »  Se  il  avient  que  aucun  des 
«  houmes  le  Conte  ait  fet  donner  trives  ou  asseiire- 
«  ment  à  aucun  de  ses  Sougiés,  et  le  trive  brisiée 
«  et  li  asseuremens,  li  Sire  le  doit  fere  apeler  en  se 
«  Court  par  trois  quinzaines,  se  il  est  hons  depooté, 
«  et  puis  par  quarantaines...  se  il  estoitapelés,  etc.  » 
(Coût,    de    Beauvoisis ,    p.    304  et  310.   —  Voy. 

ASSEIIRANCE  et  ASSEURETÉ.) 

Que  la  distinction  propre  à  Vasseurement  ait  été 
négligée  quelquefois,  il  n'en  est  pas  moins  vrai  que 
d'après  les  usages  coutumiers  attestés  par  Bouteiller 
et  Beaumanoir^  VAsseurement  différoit  essentielle- 
ment de  la  Paix,  de  la  Trêve,  etc.  Il  y  a  différence, 
disoit  Bouteiller,  entre  paix,  trêves  ou  asseurances, 
la  même  chose  que  les  asseuremens.  (Voy.  Som. 
rur.  tit.  XXXIV.)  La  Trêve ,  selon  Beaumanoir  qui 
écrivoit  un  siècle  avant  Bouteiller,  »  est  une  chose 
«  qui  donne  seurté  de  le  guerre  ou  tans  que  ele 
«■  dure  ;  et  asseurementiidi  pês  confermée  à  tousjours 
>■  par  lorche  de  justiche.  »  On  remarquera  qu'il  ne 
fixe  pas  à  un  an  et  un  jour  la  durée  de  la  Trêve, 
comme  a  fait  Bouteiller.  11  dit  seulement  que  la 
Trêve  est  différente  de  Vasseurement,  en  ce  que 
«  Trieves  si  durent  à  terme,  et  asscurement  dure  à 
«  tousjours.  >>  (Voy.  Coût,  de  Beauvoisis,  chap.  lx, 
p.  304.)  Dans  le  chapitre  lix,  on  lit  :  «  Tout  soit  che 
■■  que  bons  liens  et  fors  de  pès  qui  est  fet  par  amis, 
«  et  de  pês  qui  est  fête  par  Justiche,  encore  est  li 
<■  liens  à'asseurcment  plus  fort.  «  (Ibid.  p.  302.) 

Aussi  Vasseurement  fut-il  un  des  moyens  par 
lesquels  on  tâchoit  de  s'opposer  au  progrès  de  ces 
vengeances  personnelles,  dont  nos  histoires, 
entr'autres  celle  de  Grégoire  de  Tours,  et  les  Capi- 
tulaires  de  Charlemagne  et  de  Charles-le-Chauve, 
attestent  le  barbare  usage  sous  la  première  et  la 
seconde  race  de  nos  Rois.  La  fureur  de  ces  ven- 


geances s'étant  insensiblement  accrue  sous  la 
troisième,  à  la  faveur  de  l'anarchie  féodale,  OQ 
nomma  la  voie  de  fait  une  guerre  privée  ;  en 
assimilant  aux  guerres  d'une  féodalité  rivale  et 
ennemie,  des  guerres  qui  n'avoient  souvent  pour 
objet  que  la  vengeance  d'un  crime.  «  Coustume 
o  sueffre  les  guerres  en  Beauvoisins  entre  les 
«  Gentix-houm'es  pour  les  vilenies  qui  sont  fêtes 
«  aparans.  »  (Beaumanoir,  Coût,  de  Beauvoisis, 
chap.  LIX,  p.  300.)  On  trouve  dans  le  chapitre  suivant 
la  définition  de  ces  vilenies.  «  Quant  aucun  fet 
«  avenoil  de  mort,  de  mehaing,  ou  de  bateure,  chil 
«  à  qui  le  vilenie  avoit  esté  faite,  etc.  »  (Id.  ibid. 
p.  300.)  On  peut  voir,  ibid.  chap.  lix,  p.  301  et  302, 
quelles  étoient,  après  la  paix  et  Vasseurement,  les 
deux  autres  manières  de  faiie  faillir  ces  guerres 
privées,  en  les  assujettissant  à  des  loix  que  piîl 
adopter  une  Nation  chez  laquelle  on  ne  se  croit 
encore  aujourd'hui  bien  vengé,  qu'après  s'être 
exposé  au  danger  de  la  vengeance. 

La  plus  sage  de  ces  loix  (i),  et  la  plus  essentielle  à 
la  sûreté  publique,  fut  sans  doute  celle  que  nos 
anciens  Praticiens ,  Bouteiller  entr'autres ,  ont 
nommé  la  Quarantaine  du  Roi ,  ou  la  Quarantaine- 
le-Roi,  parce  que  c'étoit  une  Tivve  de  quarante 
jours  ordonnée  par  le  Roi.  A  la  faveur  de  cette 
Trêve  ou  Quarantaine,  les  parens  et  amis  de  ceux 
entre  lesquels  étoit  survenue  une  guerre  qu'ils 
ignoroient,  et  à  laquelle  ils  étoient  néanmoins 
obligés  de  prendre  part,  pouvoient  se  mettre  en 
garde  contre  les  hostilités  auxquelles  les  exposoit 
celte  même  guerre.  (Somme  rurale,  tit.  xxxiv,  p.  235.) 
Avant  cette  Loi,  dit  Beaumanoir,  «  Trop  mauvese 
"  coustume  souloit  courre  en  cas  de  guerre  el 
«  royaume  de  France...  Chil  à  qui  vilenie  avoit  esté 
«  fête,  regardoit  aucun  des  parens  de  chaus  qui  li 
«  avoient  fet  le  vilenie,  et  qui...  ne  savoient  riens 
«  doufet  ;  etpuisaloient....  de  nuit  etde  jour  ;  et  si 
«  tost  comme  il  le  trouvoient,  il  l'ocioient  ou  mé- 
«  haignoient,  ou  batoient,  ou  en  faisoient  toute 
«  leur  volenté,  comme  de  chelui  qui  garde  ne  s'en 
»  donnoit...  Et  pour  les  grans  périus  qui  en  ave- 
«  noient,  le  bon  roi  Phelipe  en  fist  un  Establissement 
■■  tel,  que...  luit  le  lignage  de  l'une  partie  etde 
a  l'autre  qui  ne  furent  présens  au  fet ,  ont  par 
'•  l'Establissement  le  roy  quarante  jours  de  Tri- 
«  ves  ;....  el  par  ces  quarante  jours  ont  les  lignages 
«  loisir  de  savoir  ce  que  avient  en  leur  lignage  ,  si 
«  que  il  se  pueent  pourveoir  de  guerroier,  ou  de 
«  pourcachier,4sse;nrH(rn/,  Trives  ou  Pês.  «(Coût, 
de  Beauvoisis,  chap.  lx,  p.  306.) 

Selon  M.  de  Lauriêre,  le  bon  roi  Phelipe  qu'en  ce 
passage  Beaumanoir  fait  auteur  de  cette  Loi,  est 


(1)  Les  baillis  araient  été  institués  par  le  roi  pour  combattre  la  féodalité  ;  ils  créèrent  d'abord  les  c  cas  royaux.  »  Toute 
atteinte  portée  à  la  paix  publicpie,  même  hors  du  domaine  royal,  était  cas  royal,  et  les  baillis  en  connaissaient  :  on  les  voit 
intervenir  dans  un  fief,  quand  le  seigneur  laisse  impunis  les  coupables.  Les  nobles  étaient  les  premiers  à  troubler  la  paix 
du  royaume  :  1»  Par  leur  droit  de  guerre  privée  ;  le  roi  n'abolit  pas  ce  droit,  mais  il  fait  respecter  une  trêve  de  40  jours 
entre  l'offense  et  les  hostilités.  Pendant  cette  quarantaine,  le  bailli  intervenait;  souvent  on  s'accordait  sous  sa  médiation. 
2»  Des  violences  s'élèvent  entre  les  nobles  et  les  roturiers.  Le  roturier  menacé  se  rendait  prés  du  bailli  et  lui  demandait  de 
se  mettre  sous  la  protection  du  roi.  Le  bailli  faisait  alors  prêter  au  noble  un  serment  à' asscurement ,  prêté  sous  caution  ;  le 
seigneur,  par  là,  s'engageait  à  s'abstenir  de  la  violence.  Les  actes  du  xiu'  siècle,  qui  Tit  naître  ces  mesures^  confondent 
rarement  la  quarantaine  et  Vasseurement.  (N.  E.) 

II.  35 


AS 


274 


AS 


Philippe-Auguste  qui  étoit  mort,  (ce  que  désigne, 
dit-il,  le  mot  bon.l  et  non  Pliilippe-le-Hardi  encore 
vivant,  lorsque  Beaumauoir  finit  son  Ouvrage  en 
1283,  deux  ans  avant  la  mort  de  ce  Prince.  iVoy. 
Ordonn.  T.  1.  Observ.  p.  46  et  47.)  Mais  est-il 
impossible  que  le  mot  bon  ait  eu  pour  Beaumanoir 
une  signification  moins  rigoureuse  que  pour  M.  de 
LaurieVe ,  et  qu'il  ait  nommé  Philippe-le-Hardi 
encore  vivant,  le  bon  roi  Phelipe?  Ce  Prince,  sans 
être  le  premier  auteur  d'une  Loi  que  Beaumanoir 
même  nomme,  quelques  lignes  plus  haut,  «  l'esta- 
«  blissement(l)  au  bon  roy  Loois,  »  pouvoit  l'avoir 
renouvelée  après  la  mort  du  Roi  son  père.  M.  Du 
Gange,  dans  sa  xxix'  Dissertation  sur  Joinville,  où 
il  traite  des  Guerres  privées  avec  toute  l'étendue  et 
la  profondeur  de  son  érudition,  croit  (|ue  Beauma- 
noir a  voulu  parler  de  Philippe-le-Hardi,  et  non  de 
Philippe-Auguste  ;  mais  il  attribue  ni  à  l'un  ni  à 
l'autre  l'établissement  de  la  Quarantaine ,  de  la 
Trêve  de  quarante  jours.  11  se  fonde  sur  une  Ordon- 
nance du  roi  Jean,  en  date  du  9  avril  i353,  où  se 
trouve  exactement  rapportée  la  disposition  de  celle 
de  S'  Louis,  concernant  les  Guerres  privées,  pour 
affirmer  que  S'  Louis  fut  le  premier  auteur  d'une 
Loi  à  laiiuelle  toute  la  Nation  auroit  applaudi,  si 
toute  une  Nation  pouvoit  être  raisonnable.  (Voy. 
Rec.  des  Ordonn.  T.  I,  p.  56.  —  Du  Gange,  Disser- 
tations sur  Joinville,  p.  334.) 

Durant  la  Trêve  ou  Quarantaine ,  par  laquelle  le 
Souverain  assuroitla  personne  et  les  biens  de  tous 
ceux  qui  dévoient  prendre  part  à  une  guerre  com- 
mencée en  leur  absence,  et  qu'ils  n'avoient  pas 
provoquée,  tout  acte  d'hostilité  commis  envers  eux 
avant  l'expiration  de  cette  Trêve,  étoit  une  trahison 
pour  laquelle,  dans  le  cas  de  mort,  il  y  avoit  peine 
capitale.  »  Quant  aucuns  se  venge  de  che  que  l'en 
«  li  a  meffet,  à  aucuns  de  chaus  qui  ne  furent  pas 
'<  au  fet,  dedens  les  quarante  jours  que  il  ont  Trives 
«  par  l'Establissement  au  bon  roi  Loois,  l'en  ne  le 
«  doit  pas  appeler  vengeance,  mais  traison  ;  et  pour 
"  che,  chil  qui  en  cheste  manière  meffout,...  se  il  i 
«  a  houme  mort,  il  doivent  estre  trainé  et  pendu, 
«  et....  perdre  tout  le  leur;  et  se  il  n'i  a  forsba- 
«  teure,  il  doit  avoir  longue  prison,  et  l'amande  à 
«  la  volenté  dou  Seigneur,  etc.  »  (Goût,  de  Beau- 
voisis,  chap.  lx,  p.  306.) 

Gette  même  Loi  otîroit  au  Gentilhomme  qui 
répugnoit  à  partager  les  périls  d'une  guerre  privée, 
un  moyen  de  s'affranchir  dans  l'espace  de  la 
Quarantaine,  d'une  obligation  à  laquelle  il  étoit 
assujetti  par  la  Goutume.  «  LiGentil-houmechieent 
«  en  guerre  pour  le  fet  de  leurs  amis,  tout  ne 

"  fussent-il  pas  au  fet quant  li  quarante  jours 

«  sont  passés Et  ne  pourquant  se  aucuns  se 

«  vient  osier  de  le  guerre,  fere  le  puet....  se  il  fet 
«  ajourner  ses  amis...  En  leur  présence  et  par 
■<  devant  Justiche,  il  doit  requerre  qu'il  ne  soit  pas 


«  tenus  en  guerre,  si  comme  chelui  qui  est  appa- 
«  reillié  de  forjurer  chaus  qui  firent  le  meffet. 
"  Adonc  le  forjurement  fet,...  li  Sires  le  doit  fere 
«  asseurer,  et  en  se  personne  tant  seulement.  » 
(Goût,  de  Beauvoisis,  ch»p.  lix,  p.  302.) 

La  Noblesse,  impatiente  du  joug  des  Loix  que 
les  successeurs  de  S'  Louis  continuèrent  d'opposer 
avec  plus  ou  moins  d'avantage  au  progrès  de  ces 
guerres,  réclamoit  sans  cesse  et  avec  indignation 
contre  les  Asseuremens  auxquels  elle  se  voyoit  for- 
cée, lorsqu'un  gentilhomme  croyoit  ne  pas  se 
déshonorer  en  recourant  à  la  Justice  pour  les 
obtenir.  C'est  sur  une  pareille  réclamation  de  la 
part  des  Nobles  du  duché  de  Bourgogne,  desdiocêses 
de  Langres  et  Aulun,  et  du  comfé  de  Forés,  que 
Louis  X,  par  son  Ordonnance  du  mois  d'avril  1315, 
leur  octroya  «  les  armes  et  les  guerres,  en  la  ma- 
«  niêre  qu'ils  en  avoient  usé  et  accoutumé  ancien- 
«  nement.  «  (Voy.  Ord.  T.  I,  p.  559.)  11  est  très 
probable  que  ces  Nobles  prétendoient,  ainsi  que 
ceux  du  bailliage  d'Amiens  et  de  Vermandois, 
«  guerroier  les  uns  aux  autres  sans  meffait,  n'être 
«  tenus  de  donner  trêves;  ne  contraint,  se  partie  le 
"  requieroit....  à  donner  asségurement ;....  mais 
«  chevauchier,  aller,  venir  et  estre  à  armes  en 
"  guerre  et  forfaire  les  uns  aus  autres,  lautost  après 
«  fait,  ou  défiaille  aux  presenz,  ou  aux  absenz 
■<  après  la  quarantaine.  »  Le  Roi,  par  une  Ordon- 
nance de  la  même  année,  en  date  du  15  mai,  promit 
de  commettre  deux  personnes  de  son  Conseil,  pour 
voir  les  registres  de  S'  Louis,  et  savoir  d'elles  si  la 
prétention\le  cette  Noblesse  étoit  autorisée  par  les 
anciens  usages,  et  s'il  devoit  lui  en  donner  Lettres. 
(Voy.  ibid.  p.  364.) 

Les  Gentilshommes  à  qui  la  Goutume  permettoit 
de  guerroier,  ne  pouvoient  à  la  vérité  être  con- 
traints à  donner  «sse!<?'e?wens,  sans  la  réquisition 
de  l'une  des  parties  qui  se  Irouvoient  en  guerre. 
Mais  avec  cette  réquisition,  la  Justice  les  y  forçoit. 
comme  sans  réquisition  elle  les  foryoit  à  faire 
paix,  ou  à  donner  trêves.  C'est  un  principe  cons- 
taté par  la  Goutume  de  Beauvoisis  et  par  les  Eta- 
blissemens  de  S'-Louis.  «  Li  Quens  ou  li  Roix,  se  li 
"  Quens  ne  le  vient  faire,  puet  contraindre  les  Par- 
"  lies  à  fere  pès,  ou  ii  donner  trives  ;  mais  de  l'as- 
«  seuremenl  se  doivent-il  souffrir,  se  l'une  des 
>'  parties  ne  le  requiert.  >>  (Beaumanoir,  chap.  Lrx, 
p.  300.)  "  Se  ainsint  esloit  que  uns  bons  eust  guerre 
«  à  un  autre,  et  il  venist  à  la  Justice  pour  li  faere 
«  asseurer,  la  Justice  le  doit  faere  asseurer,  puis- 
■'  que  il  le  requiert.  »  (Ord.  T.  I,  p.  129.) 

On  a  vu  qu'en  requérant  asseurement  dans  les 
quarante  jours  de  la  Trêve  ordonnée  par  S"-Louis, 
on  contraignoit  son  ennemi  à  le  donner.  Alors,  s'il 
exerçoit  quelqu'acte  d'hostilité  au  mépris  de  la 
Trêve  et  de  \' Asseurement,  on  pouvoit  dire  sans 
confondre,  comme   on  a  pu   le  faire  quelquefois. 


(1)  Lorsque  Beaumanoir  cite  les  Etablissements  de  S'  Louis,  il  se  rapporte  aux  ordonnances  mêmes  de  ce  prince,  et  nos 
au  recueil  ainsi  nommé.  C'est  une  compilation  d'un  jurisconsulte  qui  a  préféré  demeurer  inconnu,  pour  rendre  son  ouTrag» 

Çlus  célèbre,  en  le  mettant  sous  le  nom  du  roi.  On  le  place  en  1269,  époque  à  laquelle  le  roi  pensait  plus  à  la  croisade  de 
unis  qu'à  des  lois  nouvelles,  c'est-à-dire  difficiles  à  faire  appliquer,  (n.  e.) 


AS 


—  275  — 


AS 


YAsseuremeyit  avec  la  Trêve,  qu'il  étoit  coupable  de 
Trêve  enfrainte  et  d'Asscurement  brisé.  Dans  les 
Etablissemeiis  de  S'-Louis,  Liv.  I  et  II,  chap.  xxviii, 
on  lit  :  «  Se  aucuns  donne  asseiirement  en  la  Cort 
«  le  Roy,  à  aucun  plaintif,  et  puis  Vassenrement  11 
«  ait  la'trive  enfrainte  et  l'assf  »;■?)« ('HMirisié,  etc.  » 
(Ord.  T.  I,  pag.  276.)  Vers  la  fin  du  wi'  siècle,  après 
l'abolition  des  anciennes  formes  de  la  Trêve  et  de 
VAsseuronent,  on  dislinguoit  encore  V Asseurement 
de  la  Sauvegarde  royale,  sous  laquelle  étoit  mise 
»  la  Partie  appelante  en  cas  d"flssc»)"fHiP?ii,  quand 
"  aucun  avoit  faict  menaces.  »  (Bouteiller,  Som. 
rur.  tit.  XXXIV,  Annotations,  p.  2i3.  —  Voy.  Asseu- 

RANCE.) 

Comme  la  Justice,  sans  être  requise  par  une  des 
Parties  qui  étoient  en  guerre,  ordonnoit  Trêves 
entre  Gentilshommes;  entre  Bourgeois  et  Gens  de 
poote,  elle  ordonnoit  asseuremens.  «  Il  avient  sou- 
"  vent  que  merlées  muevent  entre  Genlixhoumes, 
«  ou  entre  Gens  de  poote,  et  puis  chacune  Partie 
«  est  si  orgueilleuse,  que  ele  ne  daigne  demander 
"  Trive  ne  Asseurement.  }ilA'të....])Ouv  Testablisse- 
«  ment  au  bon  roy  Loois,....  le  Quens  de  Clermont 

«  et  li  autres  Barons doivent  fere  penre  les 

c>  Parties  et  contraindre  les  à  donner  Trives,  se  se 
«  sont  Gentil-houme;  et  se  se  sont  Gens  de  poote, 
«  ils  doivent  estre  contrains  à  fere  droit  asseuve- 
«  ment.  "  (Coul.  de  Beauvoisis,  chap.  i.x,  p.  30(i.) 
Mais  le  Roturier  ou  le  Bourgeois  qui  auroit  demandé 
la  Trêve,  ne  l'auroit  point  obtenue. 

Dans  le  cas  où  Gens  de  pooté  avoient  «  méfait  les 
«  uns  aux  autres  de  fait  apparent,  »  la  .Justice  fai- 
soit  plain  asseurement,  si  paix  ne  se  faisoit  entre 
les  Parties.  (Coutume  de  Beauvoisis,  ubi  supra, 
p.  304.)  Le  bourgeois,  Vhomme  de  poote,  pour  se 
garantir  de  la  violence  d'un  Gentilhomme  qui  vou- 
loit  l'outrager,  ou  de  la  vengeance  de  celui  qu'il 
avoit  outragé  lui-même,  n'aVoit  que  la  voie  de 
y  Asseurement,  parce  que,  ditBeaumanoir,  »  guerre 
«  ne  se  pouvoit  faire  entre  Gens  de  poote.  et  Gen- 
<•  tilshommes.  »  Qui  requéroit  Y  asseurement  en 
pareil  cas,  devoit l'obtenir;  «  car  seli  Gentilhoume, 
«  ajoute  Beaumauoir.  lenoienl  en  guerre  les  Bour- 
«  jois  ou  chaus  de  poote,  et  li  BÔurjois  et  cil  de 
«  poote  (1)  ne  povoient  tenir  en  guerre  les  Gentix- 
«  houmes,  ils  seroient  mort  et  mal  bailli.  »  En 
dédaignant  le  seul  secours  que  leur  olTroil  la  Loi, 
ils  métloient  leur  vie  et  leur  fortune  à  la  discrétion 
des  Gentilshommes  qui  dès-lors  n'avoient  rien  à 
redouter  de  la  Justice,  quels  que  fussent  les  excès 
dont  ils  pouvoient  se  rendre  coupables.  (Coût,  de 
Beauvoisis,  chap.  ux,  p.  300  et  SOI.) 

En  général,  les  Guerres  privées  dont  la  Noblesse 
étoit  si  jalouse,  commençoient  par  voies  de  fait,  ou 
par  paroles.  «  Guerre....  muet  par  paroles,  dit 
«  Beaumanoir,  quant  li  un  manache  l'aulre  à  fere 


"  vilenie  ou  annui  de  son  cors,  ou  quant  il  le  défie 
«  de  lui  et  des  siens  ;  et  si  muet  par  fet,  quant 
«  chaude  merlée (2)  sourt en treGentix-houmes d'une 
»  part  et  d'autre.  Si  doit  l'en  savoir  que  quant  ele 
«  muet  par  fet,  chil  qui  sont  au  fet,  chient  en  le 
«  guerre,  si  tost  comme  li  fais  est  fais.  «  (Coût,  de 
Beauvoisis,  chap.  lix,  p.  300.)  Quoique  la  Loi  cou- 
tumière  fût  la  même,  lorsque  la  guerre  commen- 
çoit  par  menace  ou  par  défi ,  il  semble  qu'à  raison 
de  ce  que  «  grans  baras  pouvoit  avenir  en  tel  cas,  » 
le  Gentilhomme  défié  ou  menacé  pouvoit  profiter 
de  la  Quarantaine  pour  se  mettre  en  état  de  défense, 
comme  en  profitoit  le  Lignage  qui  n'étoit  en  guerre 
qu'après  que  la  Trêve  de  quarante  jours  étoit  expi- 
rée. «  Se  aucuns  avoit  espié  son  fet  avant  que  il 
«  eust  fet  menaches  ne  défié,  et  après  seur  le  fet 
«  manachoit  ou  déficit,  il  ne  se  pourroit  escuser 
«  dou  fet  par  tele  menache  ne  pour  tel  deffiement. 

«  Doncques se  doit  souffrir  que  li  défiés  se  puist 

«  garder  et  garantir;  ou  autrement....  devra  estre 
«  justiciés  se  il  meffet.  »  (Ibid.  ubi  supra.) 

Quand  nos  anciens  Barons  s'accoutumèrent  à  res- 
pecter la  Loi  souveraine  qui  contraignoit  les  Nobles 
à  faire  Trêves,  comme  les  non  N  blés  à  donner 
asseuremens  ;  Loi  qui,  comme  on  l'a  vu,  faisoit  aux 
Chefs,  aux  Chevelaignes  des  guerres  privées,  un 
devoir  de  V Asseurement,  même  pour  les  Nobles  qui 
le  demandoient  en  Justice,  on  pût  dire  :  «  Guerre 
"  faut...  par  asseurement,  si  comme  quant  li  Sires 
«  contraint  les  Parties  chevetaignes  à  asseurer  li 
«  un  l'autre.  «  (Coût,  de  Beauvoisis,  chap.  ux, 
p.  302.)  Alors  les  asseuremens.  non-seulement  pré- 
cédèrent, mais  suivirent  l'expiration  de  la  Quaran- 
taine. Lorsqu'on  répugnoit  à  s'engager  dans  une 
guerre,  ou  que  l'on  désiroit  en  finfr  une  déjà  com- 
mencée, on  recouroit  au  Seigneur  suzerain  pour 
être  asseuré,  et  jugé  en  sa  cour  de  Justice.  (Voy. 
Ord.  T.  III,  p.  264,  note.  —  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au 
mot  Assecurare)  Cette  loi,  si  sage,  est  un  principe 
du  Droit  écrit.  «  Quand  aucuns  se  doute,  il  doit 
«  venir  à  la  Justice,  et  requerre  asseurement,  selon 
.'  Droit  escrit.  ..  (Ord.  T.  I,  p.  135.) 

La  foi  des  Asseuremens  et  des  Trêves  étoit  si 
sacrée,  «  qu'enfraindre  ou  briser  ceux  ou  celle  que 
«  les  Parties  pouvoient  faire  entr'elles  par  paroles, 
«  tout  sans  Justiche,  n'emportoit  menre  peine  que 
«  se  le  Triève  avoit  esté  donnée,  ou  li  Asseuremens 
«  de  parle  Roi.  »  (Voy.  Coût,  de  Beauv.  chap  lvhi, 
p.  295.)  Mais  dans  le  cas  de  Trêve  enfrainte,  l'in- 
fracteur  étoit  le  seul  à  qui  la  Loi  s'en  prenoit,  tandis 
qu'en  cas  d' Asseurement  brisé,  elle  s'en  prenoit 
non-seulement  à  celui  qui  l'avoit  brisé,  mais  à  celui 
qui  l'avoit  donné,  quand  même  il  auroit  prouvé 
qu'il  n'étoit  pas  au  fait,  qu'il  n'en  étoil  point  com- 
plice. «  Asseurement  a  telle  vertu  que  cis  qui  le 
«  donne,  prent  seur  soi  tout  son  lignage,  fors  que 


(1)  Poote  peut  venir  de  potesla,  dérivé  bas-latin  de  la  première  déclinaison,  ou.  de  potestalem.iyi.  E.)  —  (2)  Merlée  vient  de 
tnisculata,  devenu  misclala  par  la  chute  de  n  bref  précédant  la  tonique;  dans  le  groupe  se,  la  deuxième  consonne  tombe, 
et  s  se  change  en  r,  par  un  phénomène  de  rhotacisme,  comme  dans  ele)nos(ii)>nt,  transformé  en  ahnonie.  Voir  le  traité  de 
M.  C.  Joret,  de  rhotacismo  in  indoeuropasis  ac  potissimum  in  germanicis  linguis  (Collection  philologique in-8»,  p.  p.  Vieweg, 
Paris,  1875).  (,n.  e.) 


AS 


276  — 


AS 


«  chaus  que  il  en  puet  mellre  hors  par  reson;  car 

•  il  y  a  cliertiiines  personnes  qu'il  en  puet  mettre 

•  liors,  au  [cTeVassctiremcnt  »  (Ibid.  cIi.lx  p.3(M.) 
Il  pouvoit  excepter  les  parensqui,  lors  de  l'asseu- 

rement,  ëtoient  hors  du  royaume,  et  qui  avoient  la 
liberté  d'y  revenir  ;  ceux  qui  en  étoient  bannis  et 
qui  pouvoient  être  rappelés  ;  les  bâtards  même, 
«  pour  clie  qu'ils  sont  meu  pai'  amour  naturel  à 
«  aidier  à  leurs  parens.  »  Cette  précaution  étoit 
même  insuffisante  pour  le  soustraire  à  la  peine  à 
laquelle  l'exposoit  un  acte  d'hostilité  commis  par 
ces  bâtards  et  ces  parens  exceptés  de  Yasseuremeiit. 
Il  devoit  encore  veiller  à  ce  que  pouvoit  avoir  à 
craindre  de  leur  part,  celui  qu'il  avoit  assci/re,  et 
lui  en  donner  avis.  S'il  lui  étoit_^  impossible  de 
réussir  à  les  empêcher  de  lui  mal  faire,  il  devoit  le 
faire  savoir  à  la  Partie  et  au  Souverain,  et  jiti'er 
Sains  sur  qu'il  n'avoit  pu  leuri'endre  commun  Vas- 
seuremeni  qu'il  avoit  donné  ;  autrement  il  étoit  puni 
comme  coupable  à'asseurement  brisé.  (Voy.  Coût. 
de  Beauvoisis,  tibi  supra,  p.  304  et  305.)  Beauma- 
noir  a  distingué  certràns  cas  où  la  Justice  devoit 
prononcer  qu'une  Trêve  étoit  ou  n'étoit  pas  en- 
frainte,  qu'un  Asscurcment  étoit  ou  n'étoit  point 
brisé.  (Voy.  Ibid.  p.  307.)  Lorsque  Paix  succédoit  à 
un  Asseurement,  la  çaix  l'anéantissoit  ;  et  si  celui 
qui  avoit  été  asseuré  prouvoit  quelque  dommage, 
il  ne  pouvoit  s'en  plaindre  comme  d' asseurement 
brisié  oa  enfraint.  "  En  tel  cas,  n'a  point  d'asseu- 
«  rement  enfraint,  mais  doit  l'en  punir  le  délin- 
«  quant  d'amende  pécunielle.  »  (Pithou,  Coul.  de 
Troyes,  p.  450.)  Suivant  l'ancienne  Coutume  d'Au- 
xerre,  Y  asseurement  qui  étoit  rompu  par  battre 
ou  frapper  inducment,  ne  pouvoit  l'être  par  injures 
verbales.  Celui  qui  injurioit  verbalement,  étoit  puni 
pécuniairement  à  l'arbitrage  du  Juge.  (Coût.  gén. 
T.  I,  p.  224.)  Mais  il  y  avoit  peine  de  la  hart  contre 
celui  qui  enfraignoit  ou  laissoit  enfraindre  Y  asseu- 
rement «  qu'il  avoit  promis  et  juré  de  tenir  et  gar- 
«  der  par  lui  et  les  siens.  »  (Voy.  Coût,  de  Troyes, 
au  Goût.  gén.  T.  T,  p.  420.)  Dans  la  Coutume  de 
Tournay,  les  asseurances,  comme  les  Asseuremens 
dans  plusieurs  autres  qu'il  seroit  superllu  de  citer, 
étoient  inviolables  ;  et  quiconque  les  violoit,  ou 
souffroit  qu'on  les  violât,  étoit  ordinairement  puni 
de  peine  capitale.  (Voy.  Coût.  gen.  T.  H,  p.  940.  — 
Bouteiller,  Som.  rur.  tit.  xxxiv,  p.  234.) 

Selon  les  Elablisscmens  de  S'-Louis  et  les  Cou- 
tumes de  Beauvoisis,  la  connoissance  des  Asseure- 
mens brisés,  comme  celle  des  Trêves  enfraintes, 
appartenoit  de  droit  aux  Comtes  et  autres  Barons 
du  royaume,  qui  pouvoient  et  dévoient  les  ordon- 
ner. Le  lioi,  comme  souverain,  faisoit  ce  qu'ils  rel'u- 
soient  ou  négligeoient  de  faire,  et,  dans  le  cas 
d'iniraction,lecoupable,  quoique  homme  «  levantet 
«  couchant  en  seigneurie  de  Baron,  devoit  répondre 
«  par-devant  la  Cent  le  Boy.  »  11  semble  même  que 
le  Baron  ne  pouvoit  s'opposer  à  ce  que  l'on  s'adres- 
sât au  Boi,  de  préférence  à  lui,  pour  obtenir  un 


Asseurement  ou  une  Trêve.  •  Se  aucuns  donne 
«  rt.ssr»/T/«<'?(i  en  la  Cort  le  Roy  à  aucun  plaintif, 
«  et  puis  Yasseurenient  li  ait  la  trive  enfrainte  et 
"  Yasseureme]U  brisié,  et  il  en  .soit  semons  par- 
><  devant  la  Cent  le  Hoy,  il  respondra  par-devant 
«  aus,  tout  soit  il  levant  et  couchant  en  autre  Sei- 
«  gnorie.  ».(Ord.  T.  L  p.  27(!.  —  Voyez  ibid.  p.  129 
et  130.  —  Beaumanoir,  ebap.  x,  p.  5i;  chap.  lix, 
p.  300,  et  chap.  Lx,  p.  306.) 

Au  reste,  ce  que  pouvoit  le  Roi  dans  le  ressort 
de  la  juridiction  des  Barons,  relativement  aux 
trêves  et  asseure7nens,  les  Barons  le  pouvoient 
dans  le  ressort  de  la  juridiction  de  leurs  Vas- 
saux, Seigneurs  hauts-justiciers.  «  Tuit  chil  qui 
«  tiennent  de  fief  en  le  contée  de  Clermont,  ont  en 
«  leur  fiés  toute  justiclie  haute  et  basse,  et  la  cog- 
«  noissanche  de  leurs  sougés.  »  (Coût,  de  BeauvoV 
«  sis,  chap.  X,  p.  53.)  Quoique  ces  possesseurs  de 
fiefs  pussent,  à  titre  de  Seigneurs  hauts-justiciers, 
connoitre  des  asseuremens,  ils  ne  pouvoient  empê- 
cher que  «  li  ostes  (!)  couchanset  levans  soubz  eux,  » 
n'eussent  recours  au  Seigneur  suzerain,  «  quant 
«  aucuns  vouloit  avoir  asseurement  par  le  Conte  ; 
«  car  li  Quens  puet  miex  juslichier  chaus  qui  bri- 
"  sent  trieves  ou  asseurement,  que  ne  feroient  si 
■■  sougiet.  »  (Voy.  Beaumanoir,  tibi  supra,  p.  54.) 
Néanmoins,  lorsque  le  Seigneur  haut-justicier, 
«  houme  le  Conte,  avoit  fait  donner  le  trieve  ou 
■>  Yasseurenient  en  sa  Court,  l'infraction,  ou  li  mef- 
"  fets  devoit  estre  vengiés  par  luy.  »  Il  est  probable 
que  la  Trêve  dont  il  s'agit  ici,  n'est  point  une  trêve 
de  l'espèce  de  celles  qui  étoient  particulières  aux 
Gentilshommes ,  puisque  les  hommes  le  Comte, 
•Seigneurs  hauts-justiciers,  ne  connoissoient  des 
asseuremens  qu'avec  exception  pour  les  asseure- 
mens en\ve  Gentilshommes;  «  car  d'aus,  dit  Beau- 
«  manoir,  n'a  nul  la  connoissance  en  tel  cas,  fors 
«  que  le  Quens.  »  (Coût,  de  Beauvoisis,  ubi  supra.) 

Qu'il   suffise  d'avoir  indiqué  comment  on  a  eu 

raison  de  dire  :  «    Uasseurement peult  estre 

«  donné  par  le  Roy,  ou  Ilault-juslicier,  par-i^evant 
"  lequel  il  sera  demandé  et  requis.  »  (Pithou,  Coût. 
de  Troyes,  p.  263.) 

Rien  ne  semble  plus  conforme  à  la  raison,  que  le 
principe  d'après  lequel  l'Auteur  du  Grand  Coutu- 
mier  de  France,  et  Bouteiller  son  contemporain, 
attribuoient  au  Roi  seul  "  la  cognoissance  et  cor- 
«  rection  des  asseuremens  donnés  et  jurés  en  sa 
«  Cour.  Le  Roy  a  la  cognoissance  de...  trefves,  et 
«  par  espécial  des  asseurances  baillées  par  ses 
«  Juges  et  Officiers,  se  ainsi  advenoit  que  quelque 
«  infraction  fust  sur  ce  faicte  ;  jafoit  que  ce  soit 
«  fait  en  terre  de  Haut-justicier.  »  (Bouteiller,  Som. 
rur.  Liv.  II,  tit.  i,  p.  648.  -  Voy.  Gr.  Coût,  de  Fr. 
Liv.  I,  p.  19.) 

En  conséquence  de  ce  même  principe,  il  semble- 
roil  que  tout  autre  Juge  qu'un  Juge  royal  n'eût 
jamais  dû  connoitre  de  l'infraction  do  la  Trêve 
nommée  la  Quarantaine-le-Roi.  Toutefois,  malgré 


(1)  Voir  Du  Gange  à  Hospites.  (n.  e.) 


AS 


277  — 


AS 


les  réclamations  réitérées  des  Juges  royaux,  les 
Officiers  des  hautes  Justices  en  partasèrent  avec 
eux  la  connoissance.  «  Il  a  esté  délibéré  que  si  le 
«  cas  est  advenu  en  la  terre  de  Haut  justicier,  et 

«  ledict  Haut-justicier  en  prend  la  cognoissance 

«  avant  lesdits  Officiers  du  Roy,  à  luy  comme 
«  Haut-justicier  doit  demeurer.  Mais  si  lesdits 
«  Officiers  du  Roy  encommencent  premièrement 
«  leurs  exploits  sur  ce,  et  la  cognoissance,  sçachez 
«  qu'à  eux  appartiendra.  »  (Bouteiller,  Som.  rur. 
tit.  xxxiv,  p.  230.) 

Peut-être  la  raison  qui  autorisoit  les  Officiers  du 
Roi  à  vouloir  connoitre  eux  seuls  de  ce  qui  se  fai- 
soit  en  sa  Cour,  auroit-elle  été  plus  écoutée,  si  Ton 
n'eilt  cru  qu'il  étoit  sage  de  favoriser  une  concur- 
rence qui,  en  excitantl'activité  vigilante  de  Juges 
rivaux  les  uns  des  auti^es,  assureroit  d'autant  plus 
la  tranquillité  publique  ?  Cependant  les  Officiers  des 
Justices  royales  réclamoient,  comme  on  l'a  déjà  dit, 
contre  cette  concurrence  attestée  par  Bouteillier  ; 
mais  ce  ne  fut  pas  toujours  avec  avantage.  S'il  fut 
jugé  par  arrêt  de  fan  1278,  rendu  contre  les  Maïeur 
et  Jurés  de  Péronne,  que  la  connoissance  des  «ssé"»- 
remens  appartcnoit  au  Juge  royal ,  par  un  autre 
arrêt  de  l'an  1287,  les  Maïeur  et  Echevins  d'Amiens 
furent  maintenus,  malgré  les  allégations  du  Bailli 
royal,  en  la  connoissance  du  hris  des  asseuremens 
faits  en  leur  Juridiction.  (Voy.  Du  Gange,  xxix*  Dis- 
sert, sur  Joinville,  p.  340.  —  Pitbou,  Coutumes  de 
Troyes,  p.  2G4.  —  Laur.  Gloss.  du  Dr.  fr.  T.  I,  p.  77.) 
On  observera,  d'après  FAuteur  du  Grand  Coulu- 
mier  de  France,  que  les  Maïeur  et  Jurés  de  la  ville 
de  Péronne  n'avoient  qu'un  droit  de  basse  Justice. 
«  Toutes  fois,  ajoute-t-il  (L.  IV,  p.  526),  ils  pouvoient 
«  contraindre  leurs  subjecls  à  donner  flsseHre)H(?wi; 
«  mais  leur  assciirement  ne  s'estendoit  pas  à  autres 
«  choses  qu'à  celles  qui  estoient  de  basse  Justice, 
'<  ne  autrement  n'en  pouvoient  punir  ceux  qui  se- 
»  roient  contre  leur  asseurement.  »  Quelle  que  soit 
f  autorité  de  ce  Jurisconsulte,  qui  affirme (Ibid.  L.  I, 
page  19),  que  les  bas  justiciers  pouvoient  donner 
asseurement  comme  lès  hauts  justiciers,  on  soup- 
çonne que  la  connoissance  des  asseurentens ,  pré- 
tendue par  les  Maïeur  et  Jurés  de  Péronne,  ne  leur 
fut  interdite  par  l'arrêt  de  1278,  que  parce  qu'ils 
n'avoient  pas  la  haute  Justice.  C'étoit  sans  doute 
comme  «  Hauts-justiciers  de  tous  crimes  publics  et 
«  privés,  »  que  les  Prévôts  et  Jurés  de  la  ville  de 
Tournay  connoissoient  des  assenrances.  (Voy.Coul. 
gén.  T.  II,  p.  944  et  94C.)  Beaumanoir,  qui  écrivoit 
dans  le  temps  où  fut  rendu  ce  même  arrêt  de  1278, 
dit  positivement:  «  Doivent  estre...  li  asseurement 
«  fet  par  ceux  qui  ont  haute  Justice ,  et  non  par 
«  chaus  qui  ont  le  basse  ;  et  puis  que  chil  qui  n'ont 

«  fors  le  basse  Justiche,  ne  pueent  contraindre  à 

'■  fere  asseurement,  doncques  ne  doivent  pas  avoir 
«  la  connoissanche  des  enfraintures.  »  (Cout.  de 
Beauvoisis,  chap.  lviii,  p.  295.)  On  retrouve  la  même 


disposition  dans  les  Coutumes  d'Auxerre,  rédigées 
en  1507.  «  Asseurement  pourra  estre  donné  par  le 
^  Seigneur  haut  justicier  ou  son  Juge,  quel  qu'il 
«  soit  ;  non  pas  par  un  moyen  ou  bas  Justicier.  » 
(Cout.  gén.  T.  I,  p.  224.  —  Voy.  Cout.  de  Sens,  art. 
cLxxi,  citée  par  Pithou,  Cout.  de  Troyes,  p.  203.) 

Quels  étoient  donc  ces  asseuremens  dont  l'infrac- 
tion ne  pou  voit  être  punie  que  comme  un  cas  de 
basse  Justice?  Probablement  ils  n'étoient  autre  chose 
que  les  défenses  qu'un  moyen  ou  bas  Justicier, 
selon  l'autour  du  Grand  Coutumier  de  France,  et 
son  commentateur  Carondas,  «  pouvoit  faire  à 
«  ses  subjects,  sur  certaine  peine,  de  s'entremes- 
«  faire  ne  mesdire  :  >•  défenses  qui  n'avoient  sans 
doute  qu'un  effet  coercitif,  et  auxquelles  on  con- 
trevenoit  sans  encourir  la  peine  prononcée  contre 
les  infracteurs  des  asseuremens  ordonnés  par  les 
Seigneurs  hauts-justiciers.  (Voy.  Grand  Cout.  de 
Fr.^L.  I,  p.  16  et  17.  —  Ibid.  L.  IV,  p.  533.)  «  Les 
«  Haults-justiciers  peuvent  bien  faire  donner 
"  asseurement  entre  leurs  subjects.  "  (Ibid.  L.  1, 
p.  19.)  «  Au  Haut-justicier  appartient  donner  asseu- 
"  rement.  »  (Cout.  de  Meleun,  au  Cout.  gén.  T.  I, 
p.  101.)  «  Donner  asseurement  est  exploict  de 
«  Haulte-Justice.  »  (Cout.  de  Troyes,  art.  cxxiv, 
p.  262.  —  Voy.  Cout.  de  Sens,  a;  t.  clxx  ;  celles 
d'Anjou,  art.  xui  ;  du  Maine,  art.  xlix,  et  du  Loudu- 
nois,  chap.  iv,  art.  i,  citées  par  Pithou,  Cout.  de 
Troyes,  p.  263,  et  par  l'Editeur  des  Ordonnances, 
T.  I,  p.  130,  Notes.  —  Loisel,  Instit.  cout.  T.  l, 
p.  338.  —  Lauriere,  Gloss.  du  Droit  Fr.  T.  1,  p.  77.) 

On  ne  conyoit  pas  pourquoi  Carondas,  sans 
égard  à  l'assertion  de  l'Auteur  qu'il  coinmentoit, 
assertion  justifiée  par  les  Coutumes,  spécialement 
par  celles  de  Beauvoisis  et  d'Auxerre,  se  soit  cru 
permis  de  le  contrarier,  en  niant  positivement 
qu'on  ait  rien  pratiqué  de  ce  que  dit  son  Auteur, 
relativement  à  la  connoissance  des  asseuremens. 
Que  le  moyen  Justicier  n'ait  pas  connu  des  asseu- 
remens, tels  qu'étoient  ceux  dont  connoissoit  le 
Seigneur  haut  Justicier,  ce  n'étoit  pas  une  raison 
de  dire,  en  les  confondant  l'un  avec  l'autre  : 
«  Encore  que  le  hault  ou  moyen  Justicier  (1)  puisse 
«  faire  défenses  à  ses  subjects  de  s'entremesfaire 
>(  ne  mesdire,  si  est-ce  qu'il  ne  peut  bailler  asseu- 
«  rement;  ains  au  seul  Juge  royal  appartient  ce 
..  faire.  »  (Gr.  Cout.  de  Fr.  L.  IV,  p.  533.)  Il  raison- 
noit  plus  conformément  aux  usages  coutumiers, 
lorsqu'il  disoit  ailleurs  que,  de  son  temps  même, 
«  aucuns  estimoient  qne  le  hault  Justicier  pouvoit 
«  donner  asseurement,  bien  que  pour  l'avoir,  le 
«  demandeur  pût  se  pourvoir  par-devant  le  Juge 
«  royal  ;  et  que  l'on  tenoit  que  le  Juge  du  Seigneur 
■(  hault  justicier  pouvoit  le  donner,  comme  le 
«  Bailli  ou  autre  Officier  du  Roi.  •  (Ibid.  L.  I,  p.  26, 
et  Liv.  H,  p.  286.) 

S'il  paroit  incertain  que  les  moyens  et  bas  Jus- 
ticiers aient  partagé  avec  les  hauts   Justiciers  le 


(1)  Il  y  avait  peu  de  différence  entre  les  attributions  de  la  haute  et  de  la  moyenne  justice;  la  haute  justice  connaissait 
seule  :  1°  de  l'assassinat  avec  préméditation  et  guet-apens  ;  2»  de  l'incendie  ;  3°  du  rapt  et  du  viol.  Certains  crimes  étaient 
toujours  réservés  ;  mais  ils  différaient,  selon  les  provinces,  (n.  e.) 


AS 


278  — 


AS 


droit  à'assenrer  leurs  sujets,  au  moins  est-il 
ti'ès-certain,  de  l'avis  même  de  Carondas,  que  les 
OHiciers  des  hautes  Justices  ont  connu  des  fls- 
scin-emens,  en  concurrence  avec  les  Officiers  des 
Justices  royales.  «  Mais  le  Roy  donnoit  entre  ses 
«  subjects  sauves;arde,  ce  que  les  autres  Justiciers 
«  ne  pouvoient  faire.  »  (Voy.  Gr.  Coût,  de  Fr.  L.  I, 
p.  16.  —  Coût.  deMelun,  au  Coût.  gén.T.  I,  p.  101.) 
Quoique  le  Juge  du  Seig;neur  haut  justicier  pût 
donner  asseurement,  disoit  Carondas,  il  ne  pouvoit 
donner  sauvegarde.  «  Celle  noblesse....  n'appartient 
«  fors  au  Roy  seulement,  qui  est  souverain  ;  car 
«  nul  autre  Hault-justicier  subject  ne  peut  donner 
«  sauvegarde.  »  (Grand  Coût,  de  Fr.  L.  I,  p.  19.  — 
Ibid.  p.  2().)  «  Cependant  le  Hault-justicier,  ou  son 
«  Juge,  pouvoit  bailler  à  ses  suhjets  ou  aucuns 
«  d'eux,  une  sauvegarde  »  que  les  Coutumes 
d'Auxerre,  rédigées  en  1507,  nommoient  spéciale, 
en  la  distinguant  de  la  sauvegarde  générale  et  spé- 
ciale, que  fe  Roi,  ou  ses  Baillis,  pouvoit  «  bailler 
«  à  toute  personne  du  Royaume,  soit  en  général  ou 
<>  en  particulier,  réserve  aux  subjets  en  général 
■■  contre  leSegneur.  »  (Voy.  Cout.gén.  T.  I,p.224.) 
Avec  les  guerres  privées,  cessèrent  insensible- 
ment les  Paix,  les  Trêves  et  les  anciens  Asseure- 
meiis.  Cependant  on  continua  de  mettre  enasseiire- 
ment  ou  sauvegarde  les  sujets  du  Roi  qui  le 
requéroient.  (Pithou,  Coût,  de  Troyes,  p.  203.)  On 
a  indiqué  ailleurs  en  quoi  ces  noùveaux^ss(?i/?'e- 
mens  difïéroientdes  Sauvegardes.  (Voy.  Assel'r.\nce.) 

VARIANTES  : 
ASSEUEÎEMENT.  Fabl.  MS.  du  Roi,  n°  7615,  fol.  141. 
Asseurement.  Chron.  d'Outremer,  n»  113,  fol.  152,  V». 
ASSÉGUREME.NT.  Ord.  T.  I,  p.  5fti. 
ESEHUREMENT.  Ibid.  T.  IV,  p.  ^QS. 

Asseureiiter,  verbe.  Assurer,  mettre  en  état 
de  sûreté. 

Signification  relative  à  celle  du  substantif  Asseu- 
reté,  acte  par  lequel  l'Officier  du  Roi,  ou  d'un 
Seigneur  haut  justicier,  mettoit  en  sûreté  la  vie  et 
la  fortune  d'un  citoyen  en  exigeant  de  son  ennemi 
qu'il  jurât  de  ne  lui  nuire  directement  ni  indirec- 
tement.  «   Allèrent    asseurenter  le    Curé  devant 

«  nostre  Prévost  de  Meleun, avant  ce  que  le 

<>  jour  escheist,  auquel  il  esloient  adjournez  pour 
"  donner  ledit  asseurement.  »  (D.  Carpentier, 
Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Asscurare, 
tit.  de  1377.  —  Voy.  Asselreté.) 

Asseurer,  verbe.  Assurer,  certifier,  assurer, 
rendre  certain  ;.  dire,  affirmer,  promettre,  jurer, 
ratifier,  etc.  Assurer,  rentre  certain  d'un  état; 
établir,  marier,  fiancer.  Asseurer,  mettre  dans  un 
état  de  sûreté,  de  sécurité  ;  rassurer,  tranquilliser, 
enhardir,  apprivoiser.  Rendre  sûr  l'usage,  l'essai 
d'une  chose;  refroidir,  nettoyer,  écurer;  purger, 
guérir  ;  purifier,  épurer. 

C'est  à  la  faveur  d'une  disposition  plus  ou  moins 
prompte  à  croire  ce  qu'un  autre  dit  et  affirme 
d'après  ses  connoissances  et  l'usage  de  sa  raison. 


ce  qu'il  promet  et  jure  d'après  ses  obligations  et  le 
sentiment  de  son  devoir,  que  nous  éprouvons  une 
sécurité  plus  ou  moins  dangereuse,  relativement 
à  ce  dont  on  nous  assure,  en  disant,  affirmant, 
promettant,  jurant,  ratifiant,  etc. 

...  Se  cil  le  mescroit  de  rien, 
PolUnice  (1)  Vasseurt  bien. 

Siège  de  Tliébes,  MS.  du  Roi,  n-  9987,  fol.  47,  V-  col.  *. 

Li  mires  de  garir  moult  bien  les  asseure. 

Rom.  d'Aleiaodre.  MS.  du  Roi,  n-  6987,  fol.  479.  V*  col.  S. 

Amis,  de  cou  m'a/isenrés, 
Vostre  cemise  me  donrés. 

Fabl.  MS.  du  R.  n*  7989.  fol.  51.  V  col.  2. 

De  qu'ele  dit  n'a  cure  ; 
Tort  a,  de  rien  ne  l'aseure. 

Ibid.  fol.  62,  R'col.  1. 

On  assure  l'exécution  d'un  traité,  en  le  ratifiant; 
le  payement  d'une  rente,  en  l'assignant  sur  le  pro- 
duit d'un  impôt,  etc.  De  là  on  a  dit  :  «  Seignor,  de 
«  ce  avons  nos  plain  pooir...  de  seurer  cesteconve- 
«  nance,  se  vos  le  volez  asseurer  devers  vos.  • 
(Villehardouin,  p.  36.)  «  Les  quarante  sous  de  Parisis 
u  ke  medame  Béatrice  me  taye  ;'2)  donna....  pour 
«  vin  et  oistes  (3)  à  chanter  messe,  jou  les  asseure 
<■  à  prende  chascun  an...  à  mon  toiilieu,  à  Ander- 
«  wic.  »  (Ilist.  généal.  de  la  M.  de  Guines,  pr. 
p.  '291,  tit.  de  1270.)  On  ne  retracera  point  ici  les 
idées  d'assurance,  de  sûreté,  d'après  lesquelles 
Asseurer,  comme  terme  de  pratique,  signifioit  dé- 
.laisser  «  Le  détenteur  de  l'héritage  hypothéciué  au 
«  payen\ent  d'une  censé  ou  rente....  se  peut  des- 
»  charger  des  arrérages  précédents  et  à  l'advenir, 
«  en  asseurant  l'héritage  qu'il  possède.  »  (Coût, 
de  Metz,  au  nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  399,  col.  2.  — 

Voy.  AsSEl'REMENT.) 

Anciennement  «ss?<ré!r  un  Roi,  un  Duc,  un  Sei- 
gneur féodal,  c'étoit  Vassurer,  le  rendre  certain  de 
son  état,  l'établir  Roi,  Duc,  Seigneur,  en  lui  prêtant 
serment  de  fidélité,  en  jurant  de  lui  être  fidèle; 
comme  en  mariant  une  fille,  en  la  fiançant,  on  l'é- 
tablissoit,  on  Vassuroit  d'un  état.  «  J'ay  ma  fille  à 
«  marier,  ou  j'ay  grant  estude  la  bien  asseurer; 
«  et  vous  en  verrez  l'apparence  aincois  que  la 
<■  fesle  .se  parte.  »  (Percef.  Vol.  V,  fol.  107.) 

Li  Rois  les  ot  asseurées  : 

Guida  bien  fuissent  mariées 

As  deux  Vassors  qu'il  vit  combatre. 

Siège  de  Thèbes,  MS.  du  Roi,  n-  6987,  fol.  66.  V  col.  î. 

Asseurer  le  fist  li  Dus, 

Des  Barons  que  plus  a  creus  : 

Et  puis  fist  les  Princes  mander  ; 

Si  leur  a  fait  à  tous  jurer 

Que  cil  sien  fins  auroit  sa  tiere. 

Ph.  Slouske»,  MS.  p.  «6. 

Li  Roi  Jehan  ont  entière  ; 
Mais  il  ne  l'ont  gaires  ploré. 
Henris  ses  fms  ot  la  couronne  ; 
Si  hourae  Tout  asseure. 

Idem,  p.  609. 

Si  l'on  étoit  en  guerre,  en  querelle  avec  quel- 
qu'un, si  on  lui  avoitfait  des  menaces,  en  jurant  à 
la  Justice  de  ne  lui  nuire  directement  ni  indirecte- 
ment, on  Yasseuroit,  on  le  mettoit  dans  un  état  de 


(1)  Polynice.  -  (2)  Aïeule,  grand'mère.  Voir  Du  Gange  à  Tayetum.  (n.  e.)  -  (3)  Hosties. 


AS 


Î79  -^ 


AS 


sûreté,  qu'il  n'étoit  plus  permis  de  troubler.  «  Se 
«  aucuns  manans  en  le  villes  a  werre  à  autre 
«  manant  en  li  villes,  li  Sires  le  doibt  faire  asseurer 
>'  deden  li  franchise  de  le  villes.  »  (Carpentier, 
Hist.  de  Cambray,  pr.  p.  28.  til.  de  1237.)  «  Mont- 
«  faucon  dist  audit  Grisart  qu'il  avoit  bien  besoing 
«  de  charroier  droit:  à  quoy  ledit  Grisart  li  respon- 
«  dit  que  c'étoienl  menaces,  et  qu'il  se  feroit 
«  essegurer  de  lui.  »  (D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss. 
lat.  de  Du  Gange,  au  mol  Asscciirare,  til.  de  1369.) 
Il  étoit  de  principe  féodal  que  le  Vassal  ne  devoit 
asseurer  son  Seigneur,  après  lui  avoir  fait  hom- 
mage, parce  que  l'hommage  portoit  asseurement. 
(Voy.  Pithou,  Coût,  de  Troyes,  p.  265.) 

On  ne  fait  que  rappeler  ici  l'idée  d'une  significa- 
tion relative  à  celle  de  Vx{sseure7nent  jmlieiaire, 
que  dédaignoit  une  Noblesse  accoutumée  à  braver 
le  péril  des  vengeances  personnelles.  Probable- 
ment, c'étoit  delà  part  d'un  Gentilhomme  un  repro- 
che de  lâcheté,  que  de  dire  à  quelqu'un  :  «  Si  vous 
«  avez  peur,  si  vous  faites  asseurer.  »  (Voy.  Frois- 
sart,  L.  III,  p.  145.)  Qui  forçoit  son  ennemi  à 
Vasseurer,  contrevenoit  aux  Loix  de  la  guerre,  et 
n'étoit  pas  en  sûreté.  «  On  ne  doit  pas  contraindre 
«  ung  homme  à  faire  ne  à  dire  chose  contre  son 

•  honneur; ce  n'est  pas  l'usance  de  la  guerre. 

«  Aussi  ne  vous  doit-il  pas  asseurer;  car  vous  ne 
«  vous  devez  fier  ne  deffier  en  la  parole  de  vostre 

•  ennemy.  »  (Le  Jouvencel,  ms.  p.  345.) 

Suivant  les  Loix  de  l'ancienne  Chevalerie,  le  défi 
éloit  un  refus  à'asseurer  son  ennemi.  «  Se  vous 
«  estes  un...  des  Chevaliers  delà  royne  Genièvre, 
«  si  vous  gardez  de  moy  ;  car  je  ne  vous  asseure 
«  pas...  Donc  vous  gardez  de  moy,  dist  Lancelot  ; 
«  car  je  vous  deflie.  »  (Lanc.  du  Lac,  T.  II,  fol.  19.) 
«  Le  Chevalier...  se  met  derrière  ung  chesne,  et 
<■  demande  au  Duc  comment  il  luy  est,  et  se  il  a 
«  garde  de  luy.  Et  il  dist  que  il  le  deffie;  car  il 
«  n'asseurera  jà  homme  qui  à  Dame  ou  Damoyselle 
«  face  honte.  »  (Ibid.  T.  I,  fol.  145.) 

Dans  un  sens  relatif  à  l'idée  des  asseuremens  que 
l'on  disoil  contraires  à  l'usance  de  la  guerre , 
lorsqu'ils  n'étoient  pas  libres,  s'engager  à  ne  point 
tirer  sur  son  ennemi,  c'étoit  Yasseurer  sans  traire 
à  lui,  Yasseurer  du  trait,  comme  on  lit  dans  l'Hist. 
de  B.  du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  379  et  440. 
«  Requist...  qu'ilz  Yasseui'assent  sans  traire  ne 
«  lancier  à  lui.  »  (Id.  ibid.  p.  490  et  492.) 

Les  paroles,  les  promesses,  les  sermens  sont  des 
engagemens  plus  on  moins  solennels,  qui  doivent 
opérer  un  état  de  sûreté.  Le  verbe  Asseurer  dési- 
gnoit  cette  sûreté  comme  celle  qu'opère  une  paix, 
une  trêve,  une  sauvegarde,  un  sauf-conduit. 
«  Quant  il  sceut  que  la  ville  estoit  à  la  Comtesse, 
«  d'Aumarle  ..  il  asseura  la  ville  et  les  paiis  qui  à 
><  la  Dame  appartenoient.  »  (Froissart,  L.  I,  p.  149.) 
«  Un  Messagier  vint...  lequel  dit  aux  trois  Seigneurs 
«  que  le  Roi  ne  les  asseuroit  point.  »  (Monstrelet, 
Vol.  II,  fol.  171.)  «  Promettant  de  les  asseurer  et 


«  faire  accompagner  jusques  en  lieu  de  sauvelé, 
.  etc.  >•  (Du  Bellay,  Mem.  L.  VI,  fol.  189.) 

Li  Rois  qui  païens  asseure, 
Pensse  bien  ceste  encloeure,  etc. 

Fabl.  MS.  du  Roi.  n*  7218,  fol.  326,  V-  col.  1. 

.  .  .  Pour  avoir  paiz  plus  seure, 
Veult  que  les  Contes  asseure 
En  chemin  et  en  destournée. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  55,  V'. 

En  se  fortifiant,  en  .se  précaulionnant  contre  un 
ennemi,  en  se  défiant  d'un  piège  qu'on  nous  tend, 
on  se  met  en  état  de  sûreté.  De  là  on  disoit  :  «  Man- 

«  gunels il  fit  aséer  as  turs  e  as  angles  des 

«  murs,  pur  darz  lancer  e  pierres  grosses  jeter, 
«  Mais  puis  que  il  S('  fud  asseurez,  etc.  »  (Livres 
des  Rois,  hs.  des  Cordel.  fol.  138,  V-  col.  2,  et  139 
R°  col.  1.  —  Voy.  Athis,  ms.  fol.  69,  V-  col.  1.) 

Li  forestiers  ne  s'asegwre  ,• 

Ainsi  vint  à  l'ostel  roide  et  cointe. 

La  Dame  s'est  prés  de  lui  jointe 

Moult  bien  en  sout  la  Dame  traire 

L'anel  et  ce  que  pot  avoir. 

A  son  Seignor  (•!)  a  fait  savoir 

Qu'il  s'an  veigne,  etc. 

Fabl.  MS.  de  Berne,  n-  354,  fol.  85,  V  col.  9,  et  86,  II*  col.  1. 

On  conçoit  que  ce  verbe  Asseurer  peut  avoir  eu 
plusieurs  autres  significations  relatives  aux  moyens 
de  procurer  ù  soi  ou  aux  autres  un  état  de  sûreté. 
Il  désignoil  l'idée  d'un  état  de  sécurité  dans  lequel 
nous  met  une  confiance  plus  ou  moins  raisonnable, 
une  expérience  plus  ou  moins  constante,  lorsqu'on 
disoit  &  asseurer,  pour  se  confier,  se  tranquilliser, 
se  rassurer.  «Tuitli  poplesdelaterreseesléescat(2), 
«  e  la  cited  a'usenrad.  »  (Livres  des  Rois,  ms.  dés 
Cordel.  fol.  138,  R"  col.  1.) 

.  .  .  Quant  il  fu  en  son  cliemin. 
Ne  samble  raie  pèlerin  ; 
Ains  chevauche  grant  aleure. 
Et  Trubert  point  ne  s'asseure. 

Fabl.  MS.  du  Roi,  n-  7996,  p.  *7. 
A  l'abé  Jehan  parleras , 
De  ses  oeilles  praingne  cure. 
Tele  i  a  qui  trop  s'asseure  ; 
De  les  amender  ont  mestier. 

Fabl.  MS.  du  Roi,  ù-  7218,  fol.  321,  R-  col.  S. 
Moult  fut  cil  de  crueil  nature 
Ki  amors  fist  sens  raison... 
Bien  est  fos  ke  s'usegure 
En  11  ne  en  son  dous  nom. 

Fabl.  MS.  de  Berne,  n-  389.  pari.  2,  fol.  llu,  Vv 

L'amant  qui  se  tranquillisoit  avec  la  confiance 
que  sa  maîtresse  le  rendroit  toujours  heureux,  étoit 
un  asseure.  «  Mieulx  et  plus  sagement  ayinent  les 
•  asseurez;  et  mieulx  sçavent  garder  la  paix  et 
«  honneur  de  ce  qu'ilz  ayment,  que  ne  font  ceulx 
.  qui  ayment  enragéement.  »  (Percef.  Vol.  VI  , 
fol.  99,  R°  col.  2.) 

L'expérience  et  la  confiance,  en  nous  tranquilli- 
sant, en  nous  rassurant,  nous  enhardissent  ;  et  c'est 
probablement  dans  le  sens  de  hardi,  que  l'on 
nomma  Philippe,  fils  de  Jean  Sans-peur,  Duc  de 
Bourgogne,  Philippe  YAsseuré,  en  mémoire  peut- 
être  «  de  ce  qu'en  ses  jeunes  jours  combattant  les 
«  François,  devant  Sainct  Riquier,  pour  mieux 


(1)  Mari.  -  (2)  Entra  en  liesse. 


AS 


—  280 


AS 


<«  éprouver  sa  personne  et  gaigner  sa  chevalerie  et 
«  ses  espérons  dorés,  il  se  para  en  simple  habit  et 
«  comme  un  commun  homme  d'armes.  »  Quelle 
que  soit  la  cause  de  ce  surnom,  «  Le  Duc  Philippe 
«  de  Bourgongne....  que  l'on  nommoit  le  bon  Duc 
«  Philippe...  eut  deux  noms  acquis....  Le  premier 
«  fut  Philippe-l'-lsscH/'e;  et  en  longue  continuance 
«  d'expériment  de  ses  mœurs  et  vertus ,  il  fut 
«  nommé  le  Bon  duc  Philippe.  »  (Mém.  d'Ol.  de  la 
Marche,  p.  49  el  nO.) 

Dans  une  signification  relative  à  celle  A'Asseurer, 
enhardir,  rendre  hardi,  signification  attestée  par 
Monet,  ondisoit.  en  termesde fauconnerie,  asseurei' 
un  oiseau,  pour  l'apprivoiser  ;  comme  l'on  dit 
encore  assurer  un  cheval,  en  tirant  des  coups  de 
pistolet  à  ses  oreilles.  «  C'est  une  chose  qui  moult 
«  asseitrc  un  oisel  que  le  baing.  »  iModus  elRacio, 
Ms.  fol.  140.)  Il  est  évident  que  l'usage  actuel  de  ce 
verbe  est  toujours  analogue  à  l'ancien  usage, 
lorsqu'il  n'est  pas  absolument  le  même.  (Voy. 
Cotgrave,  Rob.  Estienne,  Mcot,  Monet,  Dict.  —  Dict. 
de  Trévoux.  -^  Dict.  de  l'Académie  Fr.) 

On  abusoil  et  l'on  abuse  encore  delà  signification 
du  verbe  Asseurer,  lorsque  dans  un  sens  relatif  à 
celui  de  rendre  certain,  el  en  faisant  abstraction  de 
toute  idée  de  sécurité,  de  sûreté,  on  disoit  comme 
aujourd'hui,  asseurer  quelqu'un  de  la  mort,  Vasseu- 
rer  qu'il  mourra.  «  Vous  devez  estre  ioule  asseurée 
«  que  demain  vous  recevrez  mort  honteuse.  » 
(Lanc.  du  Lac,  T.  III,  fol.  132.] 

Terminons  cet  article  par  la  preuve  que  Esseurer, 
et  même  Escurer,  que  peut-être  il  faudroil  écrire 
esçurer,  étoienl  de  même  signification  que  Asceu- 
rer,  Asseurer.  «  Souhaittoit  plustost  une  laide 
«  femme  qu'une  belle,  parce  qu'il  esloit  esseuré 
'  qu'elle  ne  le  coupauderoit.  »  (Contes  de  Cho- 
iières,  pag.    217.)  »  Li  Troien...    se    férirent  es 

<'  palus et  les  Alains  trouvèrent  escurés,  qui 

«  d'euls  ne  se  prenoient  garde  ;  car  ils  cuidoient 
«  que  nus  ne  peust  jusques  à  eulz  venir.  »  (Chron. 
S'  Denys,  Rec.  des  Ilist.  de  Fr.  T.  III,  p.  156.) 

...  Je  puis  bien  conclure  sanz  péchier, 
Par  ces  signes  que  l'Evangeliste  escure, 
Que  le  monde  veult  sa  fin  adrescier. 

Eust.  Desch.  Focs.  MSS.  p.  131,  col.  1. 

A  cette  preuve,  on  ajoutera  qu'une  chose  mise 
dans  un  état  de  sûreté  relative  à  l'essai  ou  à  l'usage 
qu'on  vouloit  en  faire,  étoit  une  chose  asseurée  ; 
d'où  l'on  aura  dit  :  «  Or  me  dictes  de  la  fontaine  ; 
u  ne  sera-il  jamais  que  l'eau  n'en  buylle?  Comment 
«  deist  le  Prudhomme,  n'est-elle  pas  encor  asseu- 
«  rée?'Senn\  vrayement;...  ains  boult  aussi  fort 
"  comme  elle  fist  oncques.  »  (Lanc.  du  Lac,  T.  III, 
fol.  3,  II- col.  1.) 

On  ne  se  dissimule  point  qu'il  paroît  naturel  de 
croire  que  le  verbe  Escurer ,  dans  le  sens  de 
nettoyer,  est  formé  du  latin  Curare.  Mais  lorsqu'il 
est  prouvé  qu'anciennement  ce  même  verbe  a  été 
une  variation  d'orthographe  d'asseurer,  et  qu'rtssf  ;/- 
rcr  de  l'eau  bouillante,  c'étoit  en  rendre  sûr  l'essai 
ou  l'usage,  en  la  refroidissant ,  il  semble  qu'on 
pourroiten  conclure  avec  assez  de  vraisemblance, 


que  l'on  a  pu  dire  indifféremment  asseurer  ou 
escurer  un  vase,  puisque  Vescurer,  le  nettoyer, 
c'est  Vasseurer,  le  mettre  dans  un  état  de  sûreté 
relative  à  l'usage  qu'on  en  veut  faire. 

Cele  alume  le  feu  d'estrain, 
Si  a  mis  au  haster  sa  cure  ; 
Et  Robins  le  paele  etcure. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7989.  fol.  i5,  V  «1. 1. 

En  généralisant  l'acception  d'escurer,  nettoyer, 
on  aura  dit  dans  le  sens  physique,  escurer  un  jardin 
de  certaines  herbes,  escure/r  un  mal,  escurer  un 
homme,  etc.  (Rabelais,  L.  IV,  p.  180.  —  Rom.  de 
Charité,  MS.  strophe  100,  etc.)  «  L'homme  bien 
«  escuré  et  estné....  ne  s'applique  plus  à....  com- 

«  plaire  à  sa  femme  ; et  pour  ce  que  la  livrée 

«  se  diminue  chaque   jour,   les   plaisances,  les 

«  délits tournent  en  noises  et  riottes.  »  (Les 

Quinze  joies  du  mariage,  p.  105  et  106.) 

Dans  le  sens  moral  : 

Pucele  nete,  sainte  et  pure 
Si  me  netoie,  si  m'escure. 

Fabl.  MS.  du  Roi.  n-  7218,  fol.  174,  R-  col.  1. 

Amours  netie  et  escure 
Le  cuer  k'ele  a  bien  saisi; 
Vaillant  le  fait  et  hardi. 

Ane.  Poês.  lis.  du  Vatican,  n- 1490,  fol.  94,  R*. 

CONJUG. 

Asegur,  indic.  prés.  Il  assure.  (Fabl.  us.  du  Roi.) 
Aseheur,  indic.  prés.  J'assure.  (Fontaines  Guerin, 
Trésor  de  Vénerie,  ms.  p.  10.) 
Aseurad  (s'),  ind.  prêt.  Se  rassura.  (L.  des  Rois.) 
Asseurist,  subj.  imp.  Qu'il  assurât.  (J.deMeung.) 
Asseurt,  indic.  prés.  11  assure.  (Siège  de  Thèbes.) 
Escuîissiez,  subj.  impart.  Nettoyassiez.  (Le  Cheva- 
lier de  la  Tour,  Instr.  à  ses  filles,  fol.  5.) 

VARIANTES  : 
ASSEURER.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  405. 
AscEURER.  Rabelais,  L.  4,  p.  288. 
ASEGURER.  Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  1300,  p.  1125. 
ASEHURER.  Ane.  Poët.  Fr.  MSS.  avant  1300,  ï.  I,  p.  409. 
AsEURER.  Livres  des  Rois,  MS.  des  Cordel.  fol.  139,  R». 
Escurer.  Ch.  S'  Denys,  Rec.  des  Hist.  de  Fr.  T.  III,  p.  156. 
EsSEGURER.  D.  Carp.  S.  Gl.  1.  de  D.  C.  au  mot  Assecurare. 
Esseurer.  Contes  de  ChoUeres,  p.  217. 

Asseiireté,  subst.  fém.  Assurance  judiciaire; 
sauf-conduit,  sauvegarde. 

Au  premier  sens,  ce  mot  signifioit  l'état  de  sûreté 
que  l'on  obtenoil  de  la  Justice,  en  ajournant  son 
ennemi,  pour  jurer  qu'il  s'abstiendroitdes  voies  de 
fait,  de  tout  acte  d'hostilité.  «  S'estoit  mis  au 
«  chemin  à  aler  quérir  un  Sergent,  pour  faire 
«  adjourner....  Tourin  et  ses  complices  (jui 
«  l'avoient....  menacié,  pour  lui  donner  «ssfHj'fe.  • 
(D.  Carpentier,  Suppl.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au 
mot  Asseurare,  tit.  de  1415.)  «  Le  Juge  donne 
«  asseureté  h  celui  qui  la  demande,  et  fait  promet- 
«  tre  au  convenu  en  asseureté,  de  la  tenir....  sur 
«  peine  de  la  hart.  »  (Coût,  de  la  Ferté-Ymbaut,  au 
Coût.  gén.  T.  II,  p.  286.  —  Voy.  Asseurenter.) 

Dans  le  second  sens,  l'état  de  sûreté  où  l'on  se 
trouve,  au  moyen  d'une  trêve,  d'un  sauf-conduit, 
d'une  sauvegarde.  (Voy.  Cotgrave,  Dict.) 


I 


AS 


-  281  - 


AS 


VARIANTES  : 
ASSEURETÉ.  Coût,  de  Lodunois,  au  C.  gén.  T.  II,  p.  565. 
AssEURTÈ.  D.  Carp.  S.  Gl.  lai.  de  D.  C.  au  mot  Asseurare. 

Assiduel,  adj.  Assidu,  continuel.  (Voy.S'Bern. 
Serra,  fr.  mss.  p.  132,  où  il  répond  au  latin  Creber. 
—  Godefr.  Annot.  sur  Charles  VIII,  p.  173,  et  Epilli. 
de  Martin  de  La  Porte.) 

Assiduellement,  adv.  Assidûment,  continuel- 
lement. (Dict.  de  Cotgr.  —  Voy.  les  Mémoires  de 
Sully,  T.  IV,  p.  213.) 

VARIANTE  : 
AssiDUiEMENT.  S'  Bem.  Serm.  fr.   MSS.  p.   329 ,   dans  le 
latin  Assidue. 

Assiégement,  suhst.  masc.  Siège.  (Voy.  Dict. 
de  Kob.  Est.,  d'Oudin  et  de  Cotgr.)  «  Avoient  pris 
«  l'administration  de  l'armée,....  ensemble  de  Vas- 
«  siégement  du  chasteau.  »  (Mém.  de  Du  Bellay, 
Liv.  III,  fol.  73,  W.) 

VARIANTES  : 
ASSIÉGEMENT.  Oudin,  Dict. 
ASSIEMENT.  Cotgr.  Dict. 

Assiégeur,  subst.  masc.  Qui  assiège.  (Voy.  Dict. 
d'Oudin  et  de  Cotgr.) 

Assistant,  ])art.  Qui  se  trouve  présent.  De  là 
l'expression  marcliandise  assistante,  pour  signifier 
marcliandise  qui  se  trouve  dans  la  maison  où  elle 
se  fabrique.  (Contrcd.  de  Songecreux,  fol.  38,  R°.) 

Assister,  verbe.  Etre  présent.  Ce  mot  subsiste. 
Nous  remarquerons  seulement  le  sens  des  deux 
expressions  suivantes:  i°  Assister  à  droict  sedisoit 
autrefois  pour  ester  à  droit,  se  représenter,  terme  de 
pratique  qui  lui  a  été  substitué  suivant  Pasquier. 
(Rech.  Liv.  VIII,  p.  705)  ;  2°  Assister  au  compte  signi- 
fioit  être  présent  à  une  chose  sans  en  profiter,' ou 
sans  en  tirer  sa  part.  (,Oudin,  Dict.  et  Cur.  fr.) 

Association,  subst.  fém.  Traité  de  société  par 
lequel  plusieurs  personnes  s'associent  ensemble. 
..  Ce  mol  association  fut  donné  au  traité  de  société 
«  que  le  lioy  proposa  de  faire  dans  son  royaume 
«  en  1570.  On  y  substitua,  quelque  temps  après,  le 
«  mol  ùe  confédération  du  Roy.  »  (Vov.  les  Mém. 
de  Montluc,  T.  1,  p.  172  et  173.) 

Associenient,  si//)sL  inasc.  Association.  .<  Que 
•  l'un  ny  l'autre  prince  ne  pourroit,  par  cy  après, 
u  faire  traité,   ny  alliance  avecques  aucun  autre 

"  prince, sans  le  sceu,  et  associement  l'un  de 

«  l'autre.  »  (Mém.  de  Du  Bellay,  Liv.  IV,  fol.  99,  R°.) 

Assochier,  verbe.  Apatroniier  le  bois.  Ce  mot, 
qui  paroil  venir  de  souche ,  signifie  apatroner  le 
bois  cmtpc  en  l'appliquant  sur  la  souche;  on  disoit  de 
même  almnctiicr  (1).  (Voy.  ce  mot.)  On  Miassoelùer 
dans  l'iUiou.  (Coût,  de  Troyes,  p.  146.) 

Assodé,  adj.  Malade  sans  ressource.  Homme 
accablé  par  la  maladie,  et  qui ,  selon  l'expression 


vulgaire,  ne  tient  plus  compte  de  soy.  (Gelt-Hell  de 
L.  Tripp.  —  Voy.  Dict.  de  Cotgr.) 

Assolé,  jaa?'L  Mis  au  ras  du  sol.  A  raz  terre. 

«  La  tour  où  la  magicienne  faisoit  ces  en- 

"  chantemens  el  diableries  fondit  en  abismes,  et 
«  en  notre  présence.  Le  lieu  demeura  aussi  assolé  et 
«  aplany,  que  s'il  n'y  eut  onques  en  forme  de  bas- 
«  timent,  n'y  pierre  sur  pierre.  ->  (Dont.  Flor.  de 
Grèce,  fol.  xcxix,  R°.) 

Assoler,  verbe.  Assoler  les  terres  se  dit  de  celles 
qu'on  laboure  la  première  année ,  et  qu'on  ense- 
mence la  suivante.  (Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot 
Assolare.) 

Assolleiller,  vfrfte.  Eclairer.— Mettre  au  soleil. 
Dans  le  premier  sens,  on  a  dit  : 

De  celui  soit  maudit  qui  le  mont  assoleille. 

■Rom.  de  Rou.  »1S.  p.  89. 

On  disoit  aussi  s' assolleiller,  se  mettre,  se  chauf- 
fer au  soleil.  «  Il  faisoit  froid,  et  il  faisoit  beau  s'as- 
«  solleiller.  «  (Brant.  Cap.  fr.  T.  IV,  p.  81.) 

Assoltan,  subst.  masc.  Le  Roy  des  Rois.  Le 
Sultan.  (Voyez  Du  Cange,  Glossaire  latin  au  mot 
Sultanns.) 

Assomaige,  subst.  JHflsr.  L'action  d'assommer. 
C'est  en  ce  sens  qu'on  a  dit  : 

h'asso-iiiaige 

De  mes  bestes,  et  le  domaige. 

Farces  de  Palhelin.  p.  G9. 

Assommeillé,  part.  Endormi.  «  Tant  estoit 
«  assommé,  par  fort  dormir,  qu'il  ne  s'en  estoit  de 
«  rien  meu  (2).  »  (Percef.  Vol.  VI,  fol.  56,  V"  col.  1.) 

Vus  compains  estoit  assommez 
Oui  romuoit  dessus  une  escame  (3). 

Poês.  MSS.  d'Eust.  Uesch.  fol.  392.  mI.  t. 

VARIANTES    : 
ASSOMMEILLÉ.  Baïf.  fol.  5U,  R». 
Assommé.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  392,  col.  4. 

Assommeillens,  verbe.  Endormir.  (Voy.  Dict. 
de  Borel,  Oudin  et  Cotgr.) 

VARIANTES  : 
ASSOMMEILLENS.  Oudin  el  Cotgr.  Dict. 
Assommer.  Borel,  Dict. 

Assominement  (i),  sulist.  wrtsc.  Achèvement, 
action  de  consommer,  d'accomplir.  (S'  Bern.  Serm. 
fr.  MSS.  p.  141  et  191,  dans  le  latin  consummatio.) 

Assommer,  verbe.  Terminer,  venir  à  fin, 
accomplir.  —  Calculer.  —  Elever.  —  Accabler. 

Ce  mot  a  été  employé  avec  la  signification  de 
terminer,  venir  à  fin,  dans  les  vers  suivans  : 

Ou  n'est-il  riens  qui  ne  s'assomme, 
Et  qui  par  nL.lure  ne  fine. 

Pnês.  de  Froissart,  MSS.  p.  349,  col.  î. 
Li  derrains  (5)  qui  fait  l'euvre  asoumer 
Clôt  l'uis  (6),  c'est  li  mieus  logiers. 

Ane.  foH  au  AISS.  du  Valicao,  n"  U90,  fol.  155. 

Avec  la  signification  d'accomplir,  on  a  dit  :  -  Si 


(l)  Littré  donne  un  exemple  du  xiF  siècle  cité  par  Du  Cange.  (Tahular.  S"  Pétri  Insnlensis,  f"  112,  V.)  (N.  E.)  —  (2)  Remué. 
—  (3)  Banc.  —  (4)  Ronsard  l'employait  encore  au  x\ï'  siècle:  «  Et  (la  maladie)  dure,  m'accabla  A' assommemein  «i  lourd.  » 
(Edition  de  1623,  p.  8-13.)  (n.  e.1  -  (5)  le  dernier.  -  (6)  ferme  la  porte. 

II.  36 


AS 


282 


AS 


«  tout  le  monde  melouoit,  ouconseilloilunechose, 
«  et  li  contraire  vous  plaisoit,  vostre  douces  volenté 
«  seroit  asscmée  et  laisseroit  la  volenté  des 
«  autres.  »  (Mactiaut,Mss.  p.  185,  R°.) 

Dans  le  sens  de  calculer,  ou  a  dit  :  «  L'on  a  cous- 
«  tume  de  deviser  ([ue  vaut  la  ferme  en  dix  ans 
«  continuels,  et  getler,  et  assommer  quelle  somme 
«  aura  valu  pour  les  dix  ans.  »  (Coût.  gén.  T.  I, 
pajre  42 i.) 

Ce  mol  siguifioit  élever,  dans  les  vers  suivans  : 

Juie  gent  que  je  vous  nomme, 
Que  orguex  essauce,  et  assomme. 

Fabl.  MSS.  de  R.  n-  7-218,  fol.  310,  R*  col.  2. 

Enfin  asso7nmersesl  pris  dans  le  sens  d'accabler, 
exterminer.  C'est  une  extension  de  la  première 
acception  krmhier;  cette  acception  subsiste  en 
partie,  et  l'on  diroit  encore  assommer  la  nature, 
pour  étouffer  la  nature,  expression  qui  se  trouve 
dans  une  llist.  de  Fr.  en  vers,  à  la  suite  du  Rom. 
de  Fauv.  (ms.  du  R.  n''6812,  fol.  7G),  maison  ne  pou- 
roit  plus  dire,  comme  dans  l'iiist.  des  Xeuf  Preux, 
p.  158  :  il  Le  cueur  luy  assomma,  »  au  lieu  de  son 
cœur  fut  accablé. 

VARIANTES    : 
ASSOMMER.  Froiss.  Poës.  MSS.  p.  349,  col.  2. 
ASOU.MER.  Pcët..et  MSS.  Vat.  n«  1490,  fol.  155. 
AssuMMER.  S.  Bern.  Seim.  fr.  MSS.  p.  328,  dans  le  latin 
cwxsumare  pour  Assemer.  —  Machaut  cité  ci-aprés. 

Assomption,  suhst,  fém.  Avènement,  éléva- 
tion. «  Ils  s'acheminent  en  la  cour  de  l'empereur 
«  pour  en  premier  lieu  se  coujouir,  au  nom  de  sa 
«  majesté,  de  son  heureuse  ossoïH/^iïOJi  à  l'empire.  » 
(Mém.  de  Viller.  T.  V,  p.  273.  —  Voy.  Ibid.  p.  284, 
et  les  Mém.  de  Sully,  T.  V,  p.  385,  et  cy  après 
assumpUon.) 

Asson.  Venir  à  bout,  obtenir.  Etre  au  bout,  être 
à  la  lin.  On  a  dit  : 

Tex  s'efforce  qui  conquiert, 
Mais  cil  qui  en  est  asson 
James  partir  ne  s'enquiert  (1) 
Par  nus  pris,  d'avoir  s'amie. 

Poct.  MSS.  avoni  1300,  T.  1,  p.  358. 

«  Quant  ils  oient  payé,  si  ne  furent  ne  en  mi  ne 
«  assum  (2),  et  lor  paiierent  li  Baron  ensemble  et 
•<  distrent.  »  (Villehard.  p.  22.)  L'Editeur  explique 
ainsi  ce  passage  :  «  Ils  trouvèrent  qu'ils  étoient 
«  bien  éloignés  de  leur  compte.  » 

VARIAiSTES  : 
ASSON.  Poët.  MSS.  av.  1300,  T.  I,  p.  358. 
Assum.  Villehard.  p.  22. 

Assonneine,  subst.  fém.  Sonnerie. 

Joint  du  moutier  l'assotmene 
Qui  tout  l'entendement  destruit 
A  gens  qui  sont  en  maladie. 

PoBS.  MSS.  (l'Eusl.  Desch.  fol.  325,  col.  3. 

Assopir  (3),  verbe.  Assoupir,  endormir.  (Dict.  de 
Nicot,  R.  Est.  et  Cotgr.  au  mot  assopir.)  Dans  les 
vers  suivans,  le  poète  donne  ce  conseil  : 


Sage,  pourvox  (4),  et  ne  t'assoupe 
Emmy  les  femmes,  ne  demeure, 
Car,  ainsi  que  tigne  deveure  (5) 
Les  vestemens  et  les  mangue, 
Ainsis  femme  qui  ne  se  jue 
Destruit  les  hommes,  et  sousprent 

Poés.  MSS.  d'Eusl.  Desch.  fol.  532,  col.  l. 

VARIANTES  : 
ASSOPIR.  Rab.  T.  III.  p.  178. 
AssoupER.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  532,  col.  1. 

Assopissement,  subst.  7Hasc.  Assoupissement. 
(Voyez  Dict.  de  Cotgr.) 

Assordir,  verbe.  Retentir. 

On  lit  dans  les  Fabl.  ms.  du  R.  ir  7218,  fol.  353  : 

Toute  la  grant  route  asorcii 
Des  chevaliers  et  des  Barons. 

Ce  mot  asordl  peut  signifier  retentir  en  tirant 
l'Elymologie  de  ce  verbe  du  substantif  sourd.  Il 
peut  signifier  fut  remplie  tout  à  coup,  en  regardant 
le  verbe  asordir  comme  un  composé  de  l'ancien 
mot  soudre,  jaillir,  ou  faire  jaillir  en  parlant  des 
eaux.  (Voy.  Assoudue.)  Au  reste,  on  trouve  assordir 
pour  retentir,  dans  cet  autre  passage  des  mêmes 
Fabliaux  : 

Trop  seroit  Arras  assortis 

De  IJiaus  contes,  et  de  biaus  dis. 

l'bi  supra,  fol.  62,  V*  col.  1. 

Assortable,  adj.  Sortable.  (Voy.  Dict.  de  Cotgr.) 

Assorter,  verbe.  Assortir.  —  Unir,  appareiller. 
—  Empresser  et  efforcer.  (Gloss.  du  R.  de  la  Rose.) 

Au  premier  sens,  ce  mot  signifie  fournir  de  choses 
nécessaires.  «  11  assorta  et  mist  son  chastel  de 
'<  Japhe  en  tel  point  qu'il  ressembloit  bien  une 
«  bonne  ville  deft'ensable.  "  (Joinv.  p.  97.) 

On  a  dit  aussi  s'assorter  pour  s'unir,  dans  le 
même  sens  que  s'assortir  : 

Souvent  voyt  on  aucun  faire  le  fin, 
Qui  le  plus  tost  est  trompé  à  la  fin  ; 
Comme  il  advint  d'un  qui  si  bien  se  assorte 
D'une  fille,  cuydant  estre  sa  sorte  (6) 
Qu'il  se  fyoit  en  elle  de  son  bien. 

Faifeu,  p.  67. 

Enfin  s'assorter  s'est  employé  pour  faire  en  sorte, 
s'efforcer,  s'empresser  : 

Donc  ung  chascun  s'assorte 

Les  festyer,  et  luy  faire  grant  feu. 

Faifeu,  p.  103. 

Assortir,  verbe.  Fournir.  —  Mettre  en  état, 

disposer.  * 
Dans  le  sens  de  se  fournir,  on  a  dit  : 
....  Maudit  est  qui  de  grâce  dévie. 
Mais  à  celui  qui  s'en  veult  assortir 
La  mort  est  fin,  et  principe  de  vie. 

Cléni.  Maiol.  p.  730. 

Avec  la  signification  de  mettre  en  étal,  disposer, 
on  trouve:  «  Faire  assortir  et  tirer  les  bombardes.  » 
(Berry,  Chr.  depuis  1402-1401,  p.  41 7.  —  Le  P.  Labbe, 
Gloss.  p.  408,  traduit  par  des/pere  le  verbe  assortir  ; 
mais  on  sent  qu'il  faut  lire  assolir.) 

Xssosez,  part.  Associés.  (Voy.  Villon,  p.  14.) 


(1)  jamais  ne  veut  se  détacher.  —  (2)  M.  de  Wailly  (§  58  de  l'édition  de  1872)  corrige  <i  sum;  donc  l'étymologie  est 
ad  sumtnum.  (N.  E.)  —  (3)  Le  normand  a  encore  assouir,  assommer,  étourdir  ;  la  racine  est  adsopire.  (n.  e.)  —  (4)  Pourvois. 
(5)  teigne  dévore.  —  (6)  Croyant  en  être  assorti. 


AS 


—  283  - 


Assoler  verbe.  Apprivoiser,  rendre  familier 
«  Encores  n  avez  vous  point  de  plus  vray  proçnos- 
«  tiqueur  que  voslre  mouton  débonnaire  nommé 
■'  sonnaillier  ou  clocheman  ,  lequel  vo.  s  devez 
"  assoto-  )parniignotise,  et  souvent  luyoffrirdu 
«  pain.  .  (J.  leMan^e,  llluslr.  des  Gaules,  L  l  p  gT) 

cete1fs?'lt7ôë;el!iu'""""'  ^'^  ""^''^  -''  °-- 

Tenir  m'en  puis  pour  assotlâ 

yuant  des  lors  d'aymer  ne  recreuz  (2) 

Et  le  conseil  Rayson  ne  creuz. 

Roni.  de  la  Rose,  vers  1243-4216. 

.oi^pSip;îsSi?^^^^°^-^p^*^--^^- 

a.w''''""*^^'"*^"*'  ^"'«'-  '»asc.  Soulagement 

adoucissement  .  Me  vient  de  vostre  paro  le Tt  de 

l^JZTf'^  ""^'  ^'''^'"Oemcnt  de  mesmeinbres 

i,/      H^"^  je  ne  croys  pas  que  vous  sovez 


AS 


Par  fausseté  n'enquier  nul  asouhaigement 

Poès.  MBS.  avant  1300,  T.  III.  p.'  H37 
t'ai-  vos  faire  assoagemeni. 

Blanch.  MS.  de  S'  Germ.  fol,  173,  V  col.  1. 

ASSOUAGEMENT.  Eus'u  DesYh 'pl,ës   MSS  fol  S4S 

Uans  le  premier  sens,  le  poëte  a  dit  • 

Amour  qui  a  tel  usage  ! 
t-arlalee  est  précieuse, 
i'arole  délicieuse, 
Et  le  veoir  assouage. 

Poès.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  173   col  « 

En  parlant  des  qualités  qu'il  faut  avoir  pour  réus 
leieiia  animaux,  le  même  poëte  dit  • 

Taupe  te  tiens  (4),  qui  ne  voit  nullement 

Et  hérissons  qui  sa  houche  assouaiie      ' 

Ibid.  fol.  15,  col.  2. 

br^tfhaV,  '"^  ^'^"^''^  S'Snifie  ici  (5)  soula-er  sa 
bouche,  lui  donner  un  libre  essor,  dSrl,  ce  quf  l'on 

PirHn'î'''L''  r^'^  ^""P'^y*^  PO"i-  «aimer,  apaiser 
aSicfâiST2Vo?ïïn^^*l  Si/"  ^ 

sa4' sïiS  ''"S^'  .^i8"i"f  applaudir,  dans  le  pas- 

.  ,  CONJUG.  1 


VARIANTFS  ' 

ÏTotlf.^,l'f-^^^-  d,«  s.  Ger,n:fol  si-,  V«  Jol'f  '■ 
Alsoro^rL^'be.t^^ss^^'svf '•  '"■  ''''•  ''■  "''  P-  "30. 

iïï=^^!^k^'^ff;--?'f<!f',^-,\ 

ASSOUAIGER.  Ibid.  fol.  80    col     1  '  ''°'-  ^• 

ASSO0LAGER.  Chron.  S'  Denys   f  I   n  "no  r„ 
AssouL.^GiER.  Monstr.  Vol  I   fol   ooi^bo    '  ^  " 

iluïoEf  si  n"'-  Il  """'^^  êt°de  Corn^  ' 
AssuAGEn.  S>  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  105  et  289. 

Assoubtiver,  verbe.  Diminuer,  amincir 

Les  fais  amoureux  sont  teuLv  (i^)  ■ 
Toujours  vont  en  assouh/want- 
Jamais  ne  scaurez  faire  tant 
yu  Us  ne  vous  trompent. 

Chasse  el  Dep.  d'Am.  p.  K4. 

In.^P^^r*^!'*;*^^"''^,'^*'  "'*^^-  '««s^-  Origine,  ^énéa- 

nuques  tapet  de  Witikind,  dt-   «   TpIIp  «niir>h^ 

"  eust  este  plus  digne  destre  mise  au  feu  L5? 

ses  perfidies  et  perjuremens)  que  d'estre  emnC 

(S-7ufï^î{Jk^?Sr'"^^^  ''  "^"^'^^  ^ 

da^Kl^f'^?Uï-^l,.foy-   ObUn^ere 
Assouffis,  adj.  Suffisans,  accomplis,  parfaits 

Voyez  les  traits  s',  s  sont  point  assot^'/is. 

J-  Lf  Maire,  Couronne  Margariliquo  p  71 

nô.l       souhaite  qu  avoir  puisse  de  mes  désirs 
«  assou?ssanee.  ..  (La  Col.  Th!  d'hon.  T.  lî  p  Ii9) 

AslT)"''""'  '"'^'-  -'''"■■'  '^  '''  de  terre'.  (Voyez 
Mot  languedocien.  (Voy.  Du  Can^'e  rinsc  int    o 

mot  .Ulsolare.)  On  dikt'^i' dafs  leS:;nè'sens" 
Assouvie,  participe.  Rassasiée. 

La  Royne  si  très  aasouvie 
Ue  plaisir  que  nulle  plus. 

J.  Le  Maire,  lllustr.  des  Gaules.  Ut.  I,  p.  US. 

Assovi    part.  Assouvi.  -  Satisfait  -  Achevé 
termine  -  Kemplir.  -Accompli.  -  Complet       ' 
Dans  le  sens  d'assouvi,  le  poëte  a  dit   ^ 

Car  de  tout  le  bien  qui  peut  estre 
bon  honneur  estoit  axsevif:, 

E' à  mon  désir. 

Macliaut,  MS.  fol.  162,  col  i 
Uieurs  desconfiz  en  soat  en  dueil  confitz 
Non  assouffis  de  regrets  et  de  pleurs         ' 
JloIIinel,  p.  137. 

Avecla  signification  de  satisfait,  on  a  dit  • 

Mes  désirs  sont  en  partie  asscvis. 

nnno  1^  J-      ,-         .  '="*'•  Desch.  fol.  183.  col.  î. 

Dans  le  sens  d  achevé,  terminé,  on  a  dit  • 

De  cet  hostel  leur  conqueste  assnume. 

Id.  Poès.  MSS. 


(l)  Il  f 

ï=-f si  zIj  iKs.r;r=àr,^.i.s^  * 

f  •       KO  rie  laudrait-il  pas  lire 


AS 


284  - 


AS 


Pour  rempli,  on  a  dit  : 

De  tout  honneur  est  si  bien  assevie. 
Qu'il  me  semble  qu'autre  veoir  ne  doye. 

Id.  ibid.  fol.  166.  col.  2. 


De  tous  biens  estes  si  assouvie. 
Id.  ibid.  fol.  141,   col.  3. 


Ce  mot  a  été  pris  dans  le  sens  d'accompli,  parfait, 
dans  ces  vers  : 

Plus  belle  que  le  biau  jour 
Plus  doulce  que  n'est  doulcour 
Corps  asserli  (pour  «.vset'i) 
De  riche  maintien  joly. 

Machaut,  MS.  fol.  174,  V'  col.  2. 

Rendez  notre  joye  assouvie. 

Les  Marguerites  de  la  Mar^erite. 

Ce  mot  a  été  employé  dans  le  sens  de  complet  : 
«  arbalesle  à  deux  pieds  garnie  et  assouvie  comme 
«  dessus.  »  (Etat  des  Ofî.  du  Duc  de  Bourg,  p.  151.) 

VARIANTES    : 
ASSOVI.  ViUehardouin,  p.  175. 
AsouFFi.  Molinet,  p.  137. 
AssEVi.  Ibid.  fol.  250,  col.  2. 
AssouFFiB.  Molinet,  p.  137. 
Assouvi.  Percef.  Vol.  IV,  fol.  100,  V  col.  1. 
Assouvï.  Roman  de  la  Rose,  vers  1422. 

Assovir,  verbe.  Assouvir,  satisfaire ,  contenter. 
—  S'assouvir.  —  Effectuer,  achever. 

Nous  disons  encore  assouvir  pour  contenter, 
satisfaii-e  un  désir  immodéré.  On  employoit,  autre- 
fois, ce  mot  en  bonne,  comme  en  mauvaise  part  : 

Et  je  te  promets  tenir 
Que  je  te  ferai  assevir 
Ce  dont  tu  as. 

Mâchant,  MS.  toi.  2U,  V-  col.  3, 

Se  vous  auriez  aussi  parfaictement 
Comme  nuls  hommes  aura  onques  sa  dame, 
Vouldriez-vous  bien  assovir  vo  talent 
Pour  une  fois,  sanz  ressongnier  (1)  son  blâme. 

Poës.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  438,  col.  4. 
L'en  ne  pourroit  peuple  esinu  retarder 
Qu'il  n'ait  avant  sa  folour  assevie. 

Ibid.  fol.  38,  col.  1. 

Assouffirent  a  été  employé  pour  accomplirent  : 

C'est  le  séjour  des  âmes  bienlieurees. 
Des  animaux  qui  onques  ne  messeirent, 
Ains  de  tout  bien  leurs  œuvres  assoufirent  (2). 
J.  Le  Maire,  2'  Ep.  de  l'Amant  Verd. 

Assevir  peust  toutes  ses  volontez. 

Poél.  MSS.  avant  13u0,  T.  I,  p.  529. 

On  disoil  assouvir,  pour  s'assouvir,  se  rassasier: 
«  ils  n'ont  pu  assouvir  de  parler.  » 

On  se  servoit  aussi  de  ce  mot  dans  le  sens  d'effec- 
tuer :  «  dedeiiz  si  cort  terme,  ne  puis  vostre  couvent 
«  assouir.  »  (Villetiard.  p.  77.)  «  Ensi  fu  la  couve- 
»  nance  faite  et  assoivie,  et  la  paix  faite  des  Grecs 
«  et  des  Frans.  »  (Ibid.  p.  17.5.)  «  Jusques  à  ce  que 
«  qu'il  eut  premiers  assouvis  l'ouvrage  qu'il  avoit 
«  entrepris.  »  (Ord.  T.  III,  p.  591.) 

Après  ce  je  m'acheminay 

Et  tout  droit  pris  mon  chemin  ay 

Pour  bien  mon  voyage  assevir 

Et  aussi  pour  ma  dame  veir  : 

Si  montai  sur  ma  jaquenée. 

Macliaut,  MS.  fol.  178,  V  col.  1. 

(1)  Craindre.  —  (2)  «  Mêlèrent  à  leurs  œuvres  ce  qu'il  y  faut  de  bien.  »  Asouilreiit  est  donc  ici  un  composé  de  suffue.    — 
(3)  Orgueil.  —  (4)  Forteresse.  —  (5)  Fut  embarrassé. 


Pour  le  Siiint  voyage  assevir. 

Ibid.  fol.  217,  R*  col.  3. 

VARIANTES  : 
ASSOVIR.  Eust.  Deschamps,  Poës.  MSS.  fol.  438,  col.  4. 
AssEViER.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Assoviare. 
Assevir.  Poët.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  529. 
AssoiviR.  ViUehardouin,  p.  175. 
.issoi'FFiRE.  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  401. 
As.souiR.  ViUeliardouin.  p.  77. 
Assouvir.  Mathieu  de  Coucy,  Hist.  de  Charles  VII,  p.  672. 

Assovissemeut,  suhst.  masc.  Achèvement. 

Et  lui  semble  proprement 
Que  l'oKtel  ait  jà  assovissvinen  t. 

Poè3.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  54.  col.  3. 

Assouper,  verbe.  Arrêter,  retenir. 

«  Le  Seigneui'  du  fief  peut  empescher  et  assouper, 
«  par  la  puissance  de  son  fief,  la  chose  féodale ,  et 
i<  la  mettre  en  sa  main ,  par  default  dénommée, 
«  et  de  dénombrement  à  luy  non  baillés  dans  le 
«  temps  deu.  »  (LaThaumas.  Coût.  deBerri,  p.  323.) 

De  là,  on  a  dit  au  passif,  être  rtssoitpe  d'une  chose, 
en  être  dépouillé  : 

Prince  à  telle  fin  que  ne  soie  assoupé 
De  mes  estats  que  vous  m'avez  donné. 

Eust.  Desch.  Pofs.  MSS.  p.  341.  col.  4. 

Assouplir,  verbe.  Devenir  et  rendre  souple.  — 
Plier  et  faire  plier.  —  Abaisser,  humilier. 

Le  premier  sens,  qui  est  le  sens  propre  et  littéral, 
se  trouve  dans  les  Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave,  au 
mot  Assouplir. 

Ce  mot  s'est  employé  pour  plier  et  faire  plier,  au 
figuré  abaisser,  humilier,  etc. 
Mais  par  fol  me  tenez 


Se  ge  cel  povre  orgueil  n'assoploi  tôt  abés 
Et  se  ge  de  Gautier  le  grant  bobanne  (3)  bès. 

l'arton.  de  Blois,  IIS.  de  S.  Gerra.  fol.  174,  R'. 

Mouskes,  en  parlant  de  la  guerre  de  Simon  de 
Montfort  contre  les  Albigeois,  dit  : 

Si  li  fu  Toulouse  rendue 
Leur  forteraice  est  abaluë  (4) 
Et  si  fist  des  fossés  emplir 
Dont  ce  dedens  fist  usoplir. 

MS.  p.  600. 

Eichard,  Roy  d'Angleterre ,  passant  par  l'Autri- 
che, est  reconnu  aux  barils  de  vin  qu'il  rapportait, 
et  qui  le  firent  arrêter. 

Et  quant  çou  entcndi  li  Rois 
Moult  s'enbronça  (5),  et  asoupH, 
Et  dist  que  mal  fussent  empli 
Li  Baril,  ne  mandés  li  vins 
Dont  li  chevalier  iert  devins. 

Pli.  Mouikes,  MS.  p.  530. 

VARIANTES  : 
ASSOUPLIR.  Oudin,  Cotgr. 
AsOPLiR.  Ph.  Mouskes,  p.  600. 
Asoploier.  Ibid.  p.  587. 
AsouPLiR.  Ibid.  p.  530. 

Asouploier.  Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  fol.  21,  V»  col.  2. 
AssoPLOiER.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  174. 
Assouploier.  Fabl.  MSS.  du  R.  n°  7218,  fol.  62,  R»  col.   2. 

Assouply,  part-  Souple,  soumis.  —  Consterné, 
affiigé.  —  Réduit,  détruit. 


AS 


—  285  — 


AS 


Dans  le  sens  de  souple,  soumis  : 
....  Qui  mettra  hors  de  l'Eglise 
Perversité,  qui  tant  nous  scandalise  ? 
Qui  remettra  la  noblesse  en  son  ply  ? 
Ayant  le  peuple  aiiltrement  assouply. 

Cretia,  p.  141. 

Dans  le  sens  de  consterné,  affligé  : 

Li  Rois  n'en  fu  pas  asoplis, 
Ains  en  fu  liex  et  par  grant  joie 
Prist  congié,  pour  aller  sa  voie  (1) 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  ^T2  et  173. 

Dans  le  sens  de  détruit  :  «  Par  l'aide  de  Bacchus, 
«  c'est  le  bon  vin  friant  et  délicieux,  sont  hault 
«  élevez  les  Esperits  des  humains,  leurs  corps  évi- 
«  demment  alaigris  (2),  et  assouplij  ce  qu'en  eulx 
«  esloit  terrestre.  »  (Rabelais,  T.  IV,  p.  279.) 

VARIANTES  : 
ASSOUPLY.  Crétin,  p.  141. 
ASOPLIR.  Ph.  Mouskes,  MS   ,,,  172  et  173. 
AssiMPLiR.  (Lisez  Assoti-    .;  Monstr.  'Vol.  I,  fol.  820,  V». 

Assourdi,  part,  ou  adj.  Etourdi. 

Les  preux  et  les  hardis 

Sont  u-isourdts  de  tempeste  et  d'orage. 

Moiin.  p.  140. 

Si  aucuns  ditz 

Ont  été  dit."!, 
Qui  l'honneur  des  dames  entame  ; 
S'ont  été  des  gens  estourdiz. 
Qui  sont  tous  folz,  et  assourdiz  ; 
Pour  meschans  gens  je  les  réclame. 

Le  Loyer  des  Faulccs  iViaours.  p.  317. 

VARIANTES  : 
ASSOURDI.  MoUnet,  p.  140. 
AsouRDY.  Percef.  Vol.  I,  fol.  145,  V"  col.  2. 
AssoRDi.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1120. 

Assourdir,  verbe.  Devenir  sourd,  avoir  les 
oreilles  rompues  par  le  bruit  ou  le  fracas  qu'on 
entend.  (Ortli.  subsist.)  Il  signifie  faire  un  bruit 
sourd,  dans  ces  vers  : 

Pour  ce  que  louange  assourdise 
En  bouche  qui  de  lui  le  dise. 

Machaut,  MS.  foL  22,  V  coL  3. 

C'est-îi-dire  que  la  louange  qu'on  se  donne  à  soi- 
même  n'est  qu'un  vain  biuil,  un  son  perdu  que  les 
autres  n'écoutent  point. 

Assourdissement,  subst.  inasc.  inaction  d'as- 
sourdir. (Ltict.  d'Oudin.) 

Assourdre,  verbe.  Survenir.  Du  lalin  Assur- 
gère.  (Voy.  Assordir.) 

A  propos  se  un  bon  point  luy  assourd. 

Contred.  de  Songecreux,  foL  169,  R*. 

Assouré,  adj.  Accusé  ou  convaincu.  Au  titre  de 
ceulx  qui  accusent  autres  de  crime,  etsont  accusez, 
on  lit  :  «  Nul  ne  nulle  ne  peut  appeller,  ne  accuser 
«  autre  de  fait  de  crime  ,  puisqu'il  est  prins  par 
«  court,  ou  assouré  de  quelque  crime,  tant  qu'il 
«  en  soit  en  tout  délivré  et  exempt  par  droit.  » 
(Ane.  Coût,  de  Bret.  fol.  8i.)  «  Si  est  ainsi  que  ung 
«  fust  prins,  et  assouré  de  fait  de  meurtre.  »  (Ibid. 
fol.  57.) 


Assoutillance,  subst.  férn.  Subtilité.  Ce  mot 
est  employé  en  ce  sens  dans  une  Chans.  du  xin' 
siècle,  (ms.  de  Bouhier,  ch.  lvu,  fol.  85,  R°.) 

Assoutillé,  part.  Subtilisé.  Ce  mot  est  employé 
avec  cette  signification  dans  les  Prouffites  champ, 
etruraulx  de  Crescens.  (Liv.  I,  fol.  148,  V°.) 

Assouver,  verbe.  Se  nourrir,  se  suffire.  Se  dit 
d'un  étang  qui  produitdu  poisson  lorsqu'une  rivière 
le  traverse.  (Laur.  Gloss.  du  Dr.  fr.  —  Gloss.  sur 
les  Coût,  de  Beauvoisis.  — Du  Gange,  Gloss.  lai.  au 
mot  A ssewlare  [S).  «  Etang  qui  n'assouve  point  de 
«  luy-mesme,  s'il  est  d'agoust,  est  prisé,  chacun  ar- 
«  pent,  vingt  sols,  et  s'il  est  de  fontaine,  vingt-cinq 
«  sols,  et  s'il  assouve  de  luy-mesme ,  trente  sols, 
«  déduits  toutes  fois  les  frais  et  mises  nécessaires.  » 
(Coût.  gén.T.  I,  p.  905.) 

Assubjetir,  verbe.  Assujétir,  soumettre.  Laur. 
Gloss.  du  Dr.  fr.  au  mot  Assubgir,  a  employé  ce 
mot dansce  sens:  «  Item  que  doresnavant  un  homme 
«  allié  par  mariage  sans  génération ,  ne  pourra 
«  vendre,  ne  assubgir  les'fiefs,  alleuz,  et  main- 
«  ferme  venant  du  costé  de  sa  femme  plus  avant  que 
«  durant  le  mariage.  »  (Coût.  gén.  T.  I,  p.  801.) 

VARIANTES  : 
ASSUBJETIR.  Clém.  Marot,  p.  261. 
AssouBJECTiR.  Dict.  de  Rob.  Estienne  et  de  Cotgr. 
AssouGiR.  Froiss.  Poës.  MSS.  p.  399,  col.  I. 
AssuBJiR.  Laur.  Gloss.  du  Dr.  fr. 

Assuca,  verbe.  Assommer.  Ce  mot  est  langue- 
docien. (Dict.  de  Borel,  au  mol  Sugtte.) 

Assuefaction,  subst.  fém.  Accoutumance,  ha- 
bitude. (Dict.  d'Oudin  et  de  Colgrave.) 

Assuie,  verbe  à  la  3'  pers.  du  prés,  de  l'indic. 
Suit,  poursuit.  —  Sue,  travaille.  «  Celluy  est  riche 
«  à  qui  demeure  joye  ;  non  mie  celluy  qui  au  trésor 
«  assuic,  et  double  l'eschainpie  l'i).  >■  (Percef.  Vol.  V, 
fol.  111,  R°  col.  1.) 

Assuir,  verbe.  Poursuivre.  —  Avancer.  —  Ac- 
célérer. 

Assumer,  verbe.  Prendre.  Du  latin  Assumere. 
(Voy.  la  Coût,  de  Bruxelles,  au  Nouv.  Coût.  gén. 
T.  1,  p.  1274,  col.  2.) 

Assumeté,  adj.  Ce  mot  semble  désigner  le  bois 
couronné,  «  attendu  que  le  bois  mort  et  mort  bois, 
«  ne  peut  servir  aus  dits  suppliants,  sinon  pour 
«  chauffer,  et  ardoir,  et  que  le  vergisant  et 
«  assummetté  est  gros  bois  vieil  qui  ne  peut  servir 
«  en  aucune  partie  des  édifices,  sinon  seulement 
«  à  faire  poullres,  pousteaux  et  soUeaux.  «  (La 
Tiiaumas.  Coût.  deBerry,  p.  411  —  Voy.  Du  Gange, 
Gloss.  lat.  au  mot  Arbores  jacentivas,  où  il  cite  le 
même  passage.) 

Assumpcion,  subst.  fém.  Enlèvement.  —  Terme 
de  Logique.  —  Feste  de  la  Vierge. 
Dans  le  premier  sens,  les  -luifs  parlant  à  Joseph 


(1)  Prendre  sa  route.  -  (2)  Déri\és  de  nlacres.  (m.  e.)  —  (3)  Du  Gange  le  traduit  avec  raison  par  ussécher.  (n.  e.)  • 
à  mot  l'échappement;  redoute  de  s'en  écarter,  (n.  e.) 


■  (4)  Mot 


AS 


—  280  - 


AS 


d'Arimation  qui  avait  été  délivré  de  leur  prison  par 
miracle,  s'expriment  ainsi:  «  Esmerveillés  nous 
«  sommes  de  Ion  assuinption.  »  (Percef.  Vol.  VI, 
fol.  124.)  Ce  mol,  comme  terme  de  logique,  signifie 
la  mineure,  ou  la  seconde  proposition  d'un  syllo- 
gisme. (Voy.  Fabr.  art.  de  Ulielor.  Liv.  I,  fol.  5',».) 
«  Le  samedi  prochain  après  Vassumpcion  Nostre- 
«  Dame  12C3.  »  (Rymer,  T.  I,  page  92.) 

Assvimpt,  part.  Elevé. 

«  Nostre  S'  Pure  nous  dit  que  quand  il  fut  assumpt 
'  au  S' Siège  apostolique,  avant  son  assumption, 
»  luy  et  tous  les  autres  Cardinaux  tirent  certains 
«  sermens  solennels  dedans  le  conclave,  et  depuis 
«  qu'il  fut  assumpt,  il  les  ratifia  de  rechef,  les  jura 
»  et  promit.  >-  (Preuves  de  Louis  XI,  p.  3i8.) 

Assunipter  (s'),  verbe.  Pour  élever,  faire  mon- 
ter. «  Si  Jupiter  le  Boy  des  hommes  et  des  dieux 
«  vouloit  béatifier  un  corps  terrestre  sans  l'assion/J- 
«  ter  au  supernel  habitacle ,  si  ne  le  pourroit-il 
«  mieux  faire  qu'en  le  laissant  user  familièrement 
«  de  ton  regard,  et  de  ta  souefve  collocution.  » 
(J.  Le  Maire,  Illustr.  des  Gaules,  Liv.  I,  p.  70.) 

Assumptivenient,  adverbe.  Par  présomption. 
Opposé  à  absolument,  affirmativement.  (Voy.  Fabr. 
art.  de  Rhétor.  Liv.  I,  fol.  40,  V'.) 

Assumptuosité ,  subst.  fém.  Somptuosité. 
<'  Puis  fist  Priam  réédifier,  et  drecer  le  fort  chasleau 
a  d'Ylion  (l)  au  milieu  et  ou  plus  appai'ent  de  toute 
«  la  cité,  en  tant  grant  haultesse,  et  assumptuosité 
«  d'ouvrage ,  qu'il  est  chose  moult  mirable  à 
«  croire.  »(IIist.  d'Hector.  Triomp.  des  Neuf  Preux, 
page  224,  col.  2.) 

Assuré,  partie.  Taxé,  fixé.  «  Nul  buscher  (mar- 
«  chand  de  bois),  vendeur  de  busches  ou  de  cbar- 
"  bon,  puis  que  sa  busclic,  ou  charbon  aura  esté 
«  une  fois  à  prix,  ou  assuré,  nele  pourra  renchérir, 
«  ne  mettre  à  plus  haut  prix.  »  (Ord.  des  R.  de  Fr. 
T.  II,  p.  375.) 

Assuyé,  ;;nr/.  Essuyé.  (Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  V, 
page  118.) 

Assyetaz,  subst.  masc.  L'action  de  s'asseoir,  de 
se  mettre  à  table.  «  Quant  v  vint  à  Yassiieta::,  du 
«  disné.  •  (Lett.  de  Louis  XII,  T.  1,  p.  200).  On 
disoit  dans  le  même  sens  assiette  et  assire. 

Ast,  subst.  masc.  Vû{,  bois  de  lance. 

J'aime  autant  trieve  comme  ast, 
Ou  que  bringnole. 

B.  N.  iMS.  fr.  837,  fol.  174,  V  col.  1. 

La  citation  est  tirée  d'un  morceau  intitulé 
«  Resveries  »  dans  un  Recueil  de  Fabliaux,  (xm'  s.) 
Le  sens  général  doit  être  :  je  préfère  la  paix  aux 
coups  de  bois  de  lance.  Ilringiwle  rimant  avec 
escole,  serait  mieux  écrit  brimjuole  pour  bricole. 

Astans  et  présents,  loeut.  Assistans  et  pré- 
sents. (Preuv.  de  l'IIist.  de  Beauv.  par  un  Beaed. 
p.  279;  tit.  de  1182.) 


Astenant,  adj.  Abstinent,  modéré.  Le  poète  a  dit  : 

Tele  est  il'amors  poi.ssanco 
Qu'ele  fait  l'orne  antenaiit. 
Désirer  sans  atrenprance  (2) 
Et  fait  hardi  le  doutant  (3.) 

Ane,  Poe3.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1387. 

Astenir,  verbe.  Abstenir. 

Foie  amor  guerpirai,  se  m'en  pois  asienir. 

Fal)l.  MSS.  du  R.  n-  7-218,  fol.  339,  R'  c«l.  2. 

CONJUG. 

Astiegne,  subj.  prés.  Abstienne.  (Chasse  de  Gast. 
Pheb.  m.  p.  398.) 

Astens  (me),  verbe  h  la  1"  personne  du  prés,  de 
l'indic.  Je  m'en  tiens,  je  consens.  «  Si  me  astens 
«  à  votre  conseil,  »  (Percef.  Vol.  II,  fol.  13.) 

Asterean,  subst.  masc.  Diminutif  d'astre.  (Voy. 
les  Poës.  de  Loys  le  Caron,  fol.  44,  R°.) 

Asterion,  subst.  masc.  Nom  d'un  animal.  (4) 
(Rabelais,  T.  IV,  p.  274.  —Voy.  le  Dicl.  de  Cotgr.) 

Asterique,  subst.  masc.  Astérisque.  Terme 
d'imprimeur.  C'est  une  pelile  marque  faite  en  forme 
d'Etoile  pour  les  renvois  à  la  marge.  (Du  Gange, 
Gloss.  lat.  au  mot  asteriscus.) 

Astinance,  subst.  fém.  Abstinence,  modération, 
retenue.  —  Trêve. 

Dans  le  premier  sens,  un  poète  a  dit  : 

avoir  mal  aquis  avance 

Plus  que  ne  fait  astinance. 

Poés.  MSS.  du  Vatic.  n'  1522,  fol.  166. 
En  vos  n'a  point  d'asienance. 

Chans.  MS.  du  G"  Thib.  p.  153. 

En  parlant  de  la  prison  de  Richard,  et  des  prières 
publiques  qui  furent  faites  pour  obtenir  la  liberté, 
on  dit  : 

Mandez  fu  as  Evesques,  mandé  fu  az  Barons, 
Et  il  li  firent  faire  partout  processions 
Auraosnes,  et  geunes,  et  granz  asiensions. 
Rom.  de  Rou,  MS.  p.  80. 

Ce  mot  a  été  employé  sous  les  orthographes  ate- 
nanche  et  attenance  pour  trêve,  retardement  d'hos- 
tilités ou  suspension  d'armes  que  les  amis  communs 
obtenoient  des  gentils  hommes  qui  étoient  en 
guerre.  (Laur.  Glbss.  du  Dr.  fr.  et  Du  C.  Gloss.  lat. 
au  mot  Astenancia.)  «  A  che,  respondit  Pierres,  que 
»  il  ne  voloit  pas  les  trives  donner,  car  pour  le  fait 
«  que  il  proposoit,  il  estoit  en  attenanclie  en  vers 
"  lui  par  amis.  »  (Beaumanoir,  p.  304.) 

Attenance  par  amis,  espèce  de  trêve,  ou  d'accom- 
modement. (Gloss.  sur  les  Coût,  de  Boauv.  —  Voy. 
Dict.  de  Cotgr.) 

VARIANTES  : 
ASTINANCE.  Poës.  MSS.  Vat.  n»  1522,  fol.  160,  R»  col.  1. 
ASTENANCE.  Poës.  MSS.  av.  1300,  T.  IV,  p.  138G. 
AsTENsioN.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  80. 
AsTiNENCE.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  427. 
Atenance.  Thib.  de  Nav.  poës.  MSS.  av.  1300,  T.  I,  p.  86. 
Aten.anche.  Beaum.  p.  30i. 
Attenance.  Gloss.  sur  la  Coût,  de  Beauv. 

Astipiilateur,  subst.  masc.  Complaisant,  flat- 
teur. Mot  formé  du  latin  aslipulator  (5)  (jui  est  de 


(1)  Ilion.  —  (2)  Tempérance.  —  (3)  Timide,  peureux.   —  (4)  Sorte  d'araignée;  nous  avons  encore  aatérie ,  étoile   de 
mer.  (n.  e.)  —  (5)  C'est  celui  qui  permet  à  une  jeune  fille  d'entrer  en  religion,  dans  VOrdo  Romanus.  (n.  e.) 


AS 


—  287  — 


AS 


même  avis.  «  N'estoit  point  en  ceste  sienne  per- 
»  suasion,  sans  y  avoir  aucuns  aslipulateuis,  et  qui 
n  se  servissent  d'agréable,  au  lieu  de  véritable 
«  conseil.  »  (Mém.  du  Bellay,  liv.  VI,  fol.  193,  R°.) 

Astisane,  snbst.  féminin.  Nom  de  pays. 

C'est  le  comté  d'Ast  en  Italie,  Comté  û'Ast,  ou  de 
V Astisane.  (Godefr.Annot.  sur  l'Hist.  de  Charles  VI, 
p.  585.)  «  Laissa  lesurplusde  sa  suite  hl'Asti:^anne 
"  et  en  la  duché  de  Milan.  »  (,,].  d'Aut.  annal,  de 
Louis  Xll,  p.  289.) 

VARIA.NTES  : 
ASTISANE.  Godefr.  sur  Charles  \'I,  p.  585. 
ASTiZANNE.  J.  d'Aut.  Louis  Xll,  p.  289. 

Astiveté  (1),  subst.  fém.  Activité,  promptitude. 
«  Se  mes  serjant  par  se  folie,  ou  par  sastiveté, 
«  melTet  en  cas  de  criei::e  (2),  l'en  ne  s'en  puet 
«  prenre  à  me  personi  ;,  mes  à  lui  qui  lîst  le 
«  meflet.  »  (Beaum.  \ .  i  ï3.) 

VAIUANTES  : 
ASTIVETÉ.  Leaum.  p.  143. 
AsTiviTÉ.  Iiict.  de  Cotgr. 

Astniatie,  adj.  Asthmatique.  (Dict.  de  Nicot.) 

Astragale  (3),  subst.  fém.  Osselet. 
«  Tel  os  du  talon  à  jouer  à  guise  de  dez.  »  (Voyez 
Dict.  de  Monet.) 

Astralabe ,  subst.  masc.  Astrolabe.  (Voyez 
l'Inveulahe  des  ducs  deBerry,  rapporté  par  Le  La- 
boureur au  commencement  de  l'Hist.  de  Charles  VI, 
p.  79,  où  l'on  voit  l'e.xplication  de  ce  mot  donnée 
dans  le  texte  même.) 

Nous  trouvons  ce  mot  pris  dans  un  sens  méta- 
phorique très  forcé,  pour  conduite;  mais  ces  méta- 
phores forcées  sont  communes  dans  nos  anciens 
poètes.  Voici  le  passage  : 

Par  tel  don,  par  tel  asiralcibe 
Le  Roi  plus  povre,  et  de  là  vient 
Que  tailler  le  Reaume  convient. 
Géofroi  de  Paris,  à  la  suite  du  Rom.  do  Fauvel,  MS.  du  U.  fol.  53. 

VARIANTES  : 

ASTRALABE.  Le  Laboureur,  Hist.  de  Charles  VI,  p.  7'.i. 
AsTRELABE  (4;.  Dict.  de  Cotgr. 

AsTRALEiBE.  Gecfr.  de  Par.  à  la  s.  du  Rom.  de  Fauv.  f.  53. 
Atreslebe.  h.  de  Fr.  en  vers,  à  la  s.  du  R.  de  Fauv.  f.  75. 

Astrapade  (5),  subst.  fém.  Estrapade.  Supplice 
militaire.  (Dict.  de  Cotgr.  —  Voy.Clem.  Mar.  p.424. 
—  Les  Dialogues  de  Tahur.  p.  13  et  lesTriomp.  de  la 
Noble  Dame,  fol.  58.) 

Astre,  adj.  Plein  d'astres.  —  Heureux.  —  Nom 


d'une  couleur.  On  trouve  astre  pour  plein  d'as- 
tres, dans  le  Dict.  d'Oudin.  On  ^Aiibien astre \iO\iv 
bien  heureux,  né  sous  un  astre  heureux.  «  Je  ai 
«  aussi  le  moyen  de  contempler  à  loysir,  et  de  pré- 
«  cognoistre  vostre  gentille  nature,  et  bien  astrée 
«  inclination  aux  choses  vertueuses.  »  (Alector, 
Rom.  Epil.  de  d.  p.  3.)  On  voit  mal  astrée  dans  le 
sens  contraire,  d'oîi  l'on  a  fait  malotru  (G).  Enfin 
astrée  éloit  le  nom  d'une  couleur.  (Voy.  le  Dict. 
Etym.  de  Mén.  au  mot  Céladon.) 

Astreiche,  verbe  à  la  3'  pers.  du  pr.  de  l'indic. 
Serre,  lie. 

Dame  moult  séant,  son  pareil  astreiche. 

Percef.  Vol.  V,  fol.  IH,  Y-  col.  1. 

Astrenomie,  subst.  fém.  Astrologie.  —Algèbre. 

Dans  le  premier  sens,  on  disoit  fausses  astrono- 
mies.  (Modusetltacio,  ms.  fol.  231,  V)  ou  «  astrono- 
«  mie  au  deable.  »  (Ibid.  fol.  320,  R°.) 

Astrenomie  est  employée  pour  algèbre,  dans  les 
vers  suivans  : 

Cil  set  trop  d'astrenomie  : 

Wistasses  ne  se  doute  mie. 
Quant  il  passe  le  ré  dun  bos  (7) 
Tant  i  ait  arbres,  ne  halos  (8) 
Qu'il  ne  cuit,  tout  deli,  savoir 
Quentes  fuelles  i  puet  avoir. 

l'oés.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p,  I3G0. 

VABIANTES  : 
ASTRENOMIE.  Poës.  MSS.  av.  1300,  T.  IV,  p.  1360. 
Astronomie.  Orth.  subsis. 

Astrenomien,  subst.  mase.  Astronome.  (Voir 
Hist.  de  Fr.  à  la  suite  du  Rom.  de  Fauvel,  ms.  du  R. 
Il"  0812,  fol.  79,  V'col.  1.) 

Astrenoinyer,  verbe.  Parler  astronomie  ou 
prédire  par  le  moyen  des  astres. 

Ki  bien  set  raisnier  (9) 

De  compleusion  d'astrenumyer  (M) 

Poës  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1297. 

Xstvev,  subst.  masc.  Serf  ou  vassal  domicilié. 
Qui  proprement  a  sou  àtre,  son  domicile,  «  Si  le 
«  Seigniour  soit  seur  que  la  prove  (11)  se  fera  en- 
«  countre  le  villein  que  il  fuit  son  astrer  resant  (12) 
«  en  son  villeynage.  •>  (Britl.  Loix  d'Angl.  f.  217,  V.) 
On  lit  »  home  astrer  «  au  fol.  151,  V°.) 

Astrer,  verbe.  Rendre  heureux. 
Un  ancien  poète  a  dit  dans  le  sens  de  faire  naître 
sous  une  heureuse  constellation  : 

Pour  bien  astrer  ta  geniture. 

Œuv.  de  Baif,  fol.  225,  R-. 


(1)  C'est  un  dérivé  de  hâte.  (N.  e.)  —  (2)  Crime.  —  (3)  Du  grec  darçàya'^oç,  qui  signifie  proprement  une  des  vertèbres  dti 
cou,  puis  un  os  du  tarse.  (N.  E.)  —  (4)  On  trouve  cette  forme  dés  le  xiii'  siècle  (CompuI,  f"  16)  :  «  En  ceste  manière  saras  tu 
mesurer  le  lonc  et  le  ley  de  totes  coses  par  Vastrelabe.  »  Ce  mot  vient  du  grec  daiçoXaGoi'  [aarçov  Xan6àyu>.  prendre  un 
astre,  prendre  sa  position).  (N.  e.)  —  (5)  Ce  mot  nous  est  venu  d'Italie  au  xvf  siècle,  oii  cette  torture  fut  appliquée  aux 
protestants.  Sous  François  I"  et  ses  successeurs,  il  y  eut  des  estrapades  à  Paris  comme  il  y  avait  des  auto-da-fé  en  Espagne. 
C'était  une  réjouissance  populaire  que  présidèrent  le  roi  et  la  cour  eo  1523,  1535,  1560.  On  hait  les  mains  et  les  pieds  du 
patient  par  une  même  corde,  et  on  le  suspendait  à  l'extrémité  d'un  poteau.  Puis,  à  plusieurs  reprises,  on  le  bissait 
retomber  à  deux  ou  trois  pieds  de  terre,  et  le  poids  du  corps  disloquait  les  membres.  C'est  le  supplice  de  la  cale  sèche,  en 
usage  dans  la  marine  de  l'Etat  jusqu'en  1850.  Les  protestants  ne  retombaient  pas  dans  l'air,  mais  dans  un  bûcher  aUumé 
au-dessous.  Le  lieu  de  ces  exécutions  se  nomme  encore  place  de  la  Vieille  Estrapade,  (n.  e.)  —  (6)  Malotru  vient  par  le 
français  mateslrut  de  malè  instructus  ;  le  provençal  s'y  est  mêlé  avec  la  forme  malastrug,  de  ma!c,  plus  astruin,  qui,  dans 
Pétrone,  signifie  la  chance,  (n.  e.)  —  (7)  Le  long  d'un  bois.  —  (8)  Bûches.  —  (9)  Raisonner.  —  ,(10)  Pour  complections  ou 
influences.  —  (11)  Preuve.  —  (12)  Résident,  domicilié. 


AS 


—  288  — 


AS 


Astriptz,  partie.  Astreint.  (Voy.  AsTUEir.!!!:.)  Du 
latin  astricltis,  obliîié.  (Voy.  les  Coat.  de  Troyes, 
au  Nouv.  Coût.  gén.  T.  III,  p.  283.) 

Astrologe,  suhst.  fém.  Astrologie. 
L'auteur,  aprèsavoir  parlé  de  la  grammaire  et  de 
la  logi(iue,  dit  : 

Astrotoije  des  beneurtez,  des  raaiilx, 
Des  temps  futurs  juge  natui-elment 
Aux  estoiles,  et  à  son  jugement. 

Poès.  MSS.  d'Eusl.  Desch.  fol.  347.  eol.  4. 

Astrologie,  suhst.  fém.  Astronomie.  —  Astro- 
logie. L'astrologie  ctoit  prise  pour  l'astrologie 
judiciaire.  «  Astrologie-  est  scienche  qui  enchier- 
«  que  (11  les  moyens  des  corps  célestres,  et  si  les 
«  monstre  :  astronomie  est  une  science  qui  regarde 
«  les  effets  des  corps  célestes  et  si  les  observe.  » 
(Compilation  de  la  science  des  estoilles  par  Leuppol 
fils  du  Duc  d'Ostriche,  ms.  de  la  Bibl.  du  R.  n°  7095, 
immédiatement  après  le  prologue.) 

Clém.  Marot,  p.  204,  semble  établir  entre  Vas- 
t.rologie  et  l'astronomie  la  même  distinction  (jue 
nous  y  mettons  aujourd'hui. 

Astrologien,  su})st.  mase.  Astrologue  et  astro- 
nome. (Dict.  deCotgr.  et  d'Oud.  au  mot  astrologien.) 
Thomas  de  Boulogne  est  qualifié  conseiller  et 
astrologien  du  feu  roi  Charles  V  dans  Godefr. 
Annot.  sur  l'IIist.  de  Charles  VI,  p.  790  et  7D1. 
Astrologien  (Vigil.  de  Charles  VII,  et  Auils  de 
Strapar.)  —  Aslronomiens.  dans  la  Chron.  S'  Denis, 
î.  Il,  fol.  12,  répond  dans  le  latin  au  mot  astrologi. 
Le  P.  Labbe  traduit  aussi  astourmiens  par  astro- 
logi. (Gloss.  p.  490.)  Nos  aslrologiens  assignent 
semblables,  puissances  et  dominations  aux  corps 
célestes.  (.1.  le  Maire,  Hlustr.  des  Gaules,  Livre  I, 
p.  117.) 

YAIUANTES    : 
ASTROLOGIEN.  Vig.  de  Charles  VII,  T.  II,  p.  25. 
AsTROLOGiENS.J.le  Maire,  Illustf.  dss  Gaules,  Liv.I,p.ll7. 
ASTR    NOMIEN.  Cotgr.  Dict. 
ASTROPHILE.  Du  Verd.  Bibl.  p.  .56. 
Astourmiens.  Gloss.  du  P.  Labbe,  p.  49(1. 

Astrologiqiiement,  adv.  A  la  manière  des 
astrologues. 

Le  vieiUard  nous  parloit  aslrolorjiqueme.nt . 

l.e  feint  Asir.  Cora.  du  Th.  de  Corn.  ad.  II,  swnc  V. 

Astrologiser,  verbe.  Prédire  par  les  astres. 
«  Aulu  Celle  tenoit  tel  langage  à  ceux  quicroyent  à 
«  ce  qu'ils  entendoit  arioler  f2i,  astrologiser  et 
«  matliématiser,  gardez  vous  de  vous  fier  aux 
«  astrologues  »  (Co'ntes  de  Cholieres,  fol.  190,  Vv) 

Astrologissime,  subst.  an  superl.  Très  astro- 
logue. Mot  ridiculement  forgé  par  un  valet  dans  le 
feint  Astrolcgue  du  Th.  Corn.  act.  n,  scène  n. 

Astuce,  subst.  fém.  Ruse,  finesse.  Industrie, 
art.  (Nicot,  Oudin,  Dict.  —  Orth.  subsist.) 

Sur  le  premier  sens,  voy.  Dict.  de  Kicot  et 
d'Oudin,  R.  Est.  Cotgr.  et  Gloss.  de  Marot.  «  Pour 
«  industrie,  art  ou  métier trouverez  peu  de 


«  gens  qui  n'aient  compassion  de  l'inconvénient 
«  d'un  homme,  ou  femme,  de  leur  astuce,  état  ou 
«  vocation.  »  (Les  Triomp.  de  la  noble  Dame,  f.  78, 
V°  et  ])as.)  On  trouve  luitntes  dans  Bor.  et  Corn, 
qui  l'expliquent  par  allechemens  :  ils  dévoient  lire 
hastuces  pour  astuces,  ruses,  finesses. 


ASTUCE.  Nicot,  Oudin,  Dict.  -  Orth.  subsist. 
Hatute.  Dict.  de  Borel  et  de  Corn. 

Asturcier,  subst.  masc.  Fauconnier  d'autour. 

«  La  faulconnerie  au  devant  d'icelles,  gouvernée 
«  par  asturciers  bien  experts  dans  l'art  «  (Rab. 
Pronost.  au  T.  Y.) 

Asturcoy,  adj.  Qui  est  des  Asturies.  Nom 
donné  autrefois  aux  chevaux  qui  venoient  des 
Asturies.  «  Laquelle  sorte  de  chevaux  souloit  (3) 
«  le  temps  passé,  venir  d'Espaigne,  d'un  lieu 
«  appelle  Astnrie,  et  les  appeloit  on  au  moyen  de 
»  ce  asturcoy  ou  asturcon.  »  (Percef.  Vol.  1,  fol.  3.) 

VARIANTES  : 
ASTURCOY.  Percef.  Vol.  I,  fol.  3,  R»col.  1. 
Asturcon.  Ibid. 

Asturs,  locution.  A  cette  heure,  à  présent. 
(Marbod.  col.  1014.) 

Astut,  adj.  Fin,  rusé.  (Dict.  de  Cotgr.  et  Celth. 
de  Léon  Trippault.  —  Epitliète  de  cautelle  et  de 
malice  dans  les  Epith.  de  Martin  de  la  Porte.) 

Asur,  subst.  masc.  La  pierre  d'azur,  dite  lapis 
kr.uli  dans  les  Poës.  de  Rem.  Bell.  T.  I,  fol.  G8,  V°. 

•^  .4x«J'  est  ainsi  dit  pour  l'amour  de  l'air.  »  (Sic. 
Blas.  des  Couleurs,  fol.  28,  V".)  On  lit  Yazur  d'aire 
dans  les  œuvres  de  Théophile,  I"  part.  p.  7. 

On  distinguoit  trois  couleurs  d'azur  suivant  ce 
passage:  «  Après  ce,  suivoit  Lizeus  qui  son  escu 
«  avolt  paré  de  trois  couleurs  d'axw?'.  »  (Percef. 
Vol.  VI,  fol.  74,  R°col.  2.) 

Guillaume  de  Machaut  ,voulant  expliquer  la  signi- 
fication des  couleurs  en  Amour,  commence  ainsi  : 

Saches  de  veoir  qu'en  tout  endroit 
On  en  escript  armes  c'est  droit  ; 
La  colour  de  pers  est  clamée 
As\u\  elle  est  à  droit  nommée  ; 
Le  rouge  gueuUe,  le  noir  sable. 
Et  le  blanc  argent  ;  mais  sanz  fable. 
Je  te  di  c  on  appel  encor 
Le  vert  sinople  et  le  jaune  or. 

Machaut,  MS.  fol,  28,  R'  col.  i. 

Variantes: 
ASUR.  Dict.  de  R.  Est.  et  de  Cotgr. 
Azur.  Percef.  Vol.  VI,  fol.  74. 

Asurer,  verbe.  Peindre  d'azur.  En  couleur 
d'azur.  (Dict.  de  Nicot,  au  mot  asi/rer  et  Dict.  d'Oud. 
et  de  Cotgr.  au  mot  a~urer.) 


ASURER.  Nicot. 
AzuRER.  Oud.  Cotgr. 


(1)  Recherche.  —  (•-)  Augurer  et  prédire.  —  (3)  \.\o\\.  coutume. 


AT 

Asupin,  adj.  Qui  est  de  couleur  d'azur  ou  de 
couleur  bleue. 

Ses  écrits  tous  d'or,  tous  asseurez. 

Les  Warg.  du  la  Marg.  fol.  3,  R». 

«  Puis  venoit  le  ciel,  paille  à  fonds  de  draps  d'or 
«  Irise,  et  les  courtines  de  veloux  cramoisi    violet 
«  azuré.  »  (Mém.  du  Bellai,  noies,  T.  VI,  p.  133.)   ' 

VARIANTES  : 
ASURIN.  Nie.  R.  Est.  Cotgr. 
Azuré.  Petit  ,Iehan  de  Saintré,  p.  .360 
AzuREUX.  Poës.  de  Loys  le  Car.  fol.  46  R» 
AzuRiN.  Monet,  Oud.  Cotgr. 
AssEURÉ.  Les  Marg.  de  la  Marguer.  fol   3  R» 
Adure.  Lisez  fir!„7i  dans  Geofr.  de  Paris  à' la  suite   du 
Rom.  de  Fauv.  MS.  du  R.  n»68i'2,  fol.  54,  V»  coL  3. 

Asyle,  SMfcs^  rnasc.  Franchise,  immunité.  iLaur 
Gloss.  du  Dr.  fr.) 

Atabal,  subst.  masc.  Tambour  ù  la  moresaue 
timbale.  (Dict.  Etym.  de  Mén.,  d'Oudin  et  de  Cotgr.j 

VARIAMES  ; 
ATABAL.  Oudin,  Dictionnaire. 
Ataballe.  Ibid. 
Attabale.  Cotgrave. 

stagné,  part,  actif  et  passif.  Parent,  allié  En 
gênerai  qui  appartient,  on  à  qui  on  appartient 
Nous  avons  vu  le  verbe  ataimlre,  et  ses  orthoora- 
phesdans  la  signification  d-appartenir.  «  Ceux'^nui 
«  sont  conjoincts,  et  attaiouans  au  deffunl  des  deux 
«  costez  cest  à  S(;avoir  de  père,  et  de  mère 
"  ensemble.  ..  (Coul.  gén.  T.  I,  p.  77.] 

VARIANTES  : 
ATAGNE.  Mot  languedocien.  (Borel,  au  mot  Al/euir  ) 
Attagne.  Mol  languedocien.  (Du  C.  Gl.  à  Auiucuia) 

p-tîiiiSrp'Sso  '''"''''  ''''''''■  ^''''-  •^■'«^«'  ''" 

Ataindi-e,  verbe.  Atteindre,  obtenir.  -  Toucber 
-oindre  approcher.  -  Tenir,  accomplir  -1: 
Appartenir,  dépendre.  —  Convaincre.  —  Allectpr 

Aveim  atains  dans  S'  Bern.  Serm  fr  mss  n  ^Vi 
repond  au  latin  a;;;?7r/(«(d;s//.  '     '       •l'-^^'' 

Ce  mot,  sous  toutes  ses  orthographes,  est  visii,ie- 
raent  notre  mot  atteindre.  11  s-employoit  ai  t  é    fs 
dans  le  même  sens  qu'il  conserve  encore  ;  il  i "    S  0 
obtenir,  parvenir  à  une  chose.  ^"nioii 

Je  n'ai  rien  en  amour  ataint. 
r,     ■,.  _,.       .  P»*^'- WSS.  av.  1300,  T.  IV.  p.  1390. 

De  là,  on  disoit  alcindre  pour  gagner  la  cause 
^Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis  t 

Pour  toucher,  sonder  une  plaie,  on  disoit  •  .  Car 
«  tout  autre  si  comme  li  mires  (1)  pour  pitié  de 
"  maladie  de  cheli  (>2)  qui  est  entre  ses^i  ains 
«  l^se  [^)katamdre  bien  la  plaie  de  laquelle  H^ 

doit  ganr,  le  met  en  péril  de  mort,  tout  ai  s 
«  etc.  >.  ^Beaumanoir,  p.  8.)  .  Or,  veuillez  de  votre 
«  amour  actaindre.  (4)  »  (Percef.  Vol.  V,  fol  Vl2 

Pour  approcher,  on  disoil  au  figuré  :  „  Jenescay 


(1)  Médecin  ou  chirurgien    —  l'2^  Pplni        .qn  «i„  .  ,. 

déjà  d^,..  le.,  lois  de  Guillaiinie  11 '^f    «  F,f  ^^'^"'ï"^   néglige 

II. 


59-  AT 

«  don  qui  puisse  attendre  à  celluy,  et  aussi  il  est 

fol    sr?  ^T'^  '^^T  P^"''  ™oy-  »  (Percef.  Vol.  lîî 
101.  8o.)  «  Comme  les  vaisseaux  des  nostres  ne 

n-'^rT' n'^^'"'^'""'  "e  venir  jusqu'à  terre.     (Cln 
ft.  MS.  de  Nangis,  an  1249,  p.  2.)  i  Prenoit  paciem^ 

EUe  ne  puet  plus  bel  veoir 
We  niU  si  preu  ne  si  cortois 
A  Im  n'aluint,  ne  dus,  ne  rois. 

Athis,  MS.  f.  H2,  R.  col.  1. 

Pour  tenir,  accomplir,  acquitter,  on  a  dit:  «  Boni- 
"  l.ices,  h  marchisdeMontferrat,  li  requist  ses 
«  convenances  (5)  que  il  U  attendik.  „  (vïïlehard 
p.  lus.j  «  Li  Venissiens  nous  ont  moult  bien  altev- 
«  dues  nos  couvenances.  »  (Ibid  n  9^^]  "^" 

Pour  appartenir,  dépendre,  on  a  dit":  «  du  résidu 
«  des  cous  urnes,  usages  et  manières  au  d  t  1  ieï 
"  ri?fp'FT''"''?.'"^  coustumes  géneralles  de  la 
«  dite  Eglise  et  abbaye  de  Saint-Vaast,  et  aussy  de  la 
..prevosté  de  Beauquesne auxquels  ilss'fl/^mrfm^.  » 
(N   Lout.  gen.  T.  I,  p.  422.)  On  lit  à  la  page  420 

«  s niPff  "ô'^'P  «^"'i^'-ement  pareille, .  dont  ils  sont 

o  w  ff'oL."    '^"n^  "  '^"-^'l^els  i!.s  s-attendent.  » 

On  dit  encore  au  Barreau  >.  atteint  et  convaincu  » 

fi.K       .f  même  sens  que  .Joinville  dit:  «  Tous 

"  ceul^  qu  11  pouvoit  actaindre  d'avoir  fait  aucun 

"  ^"^'^.'n  serement il  les  faisoit  griefvement 

de  i4i  On  îf'î?'  '^i'"-  ''  Chaslillon,  p.  14,  tit. 
Pernr^  mil  p"*"'  ^^  '"'^"'^  "t''*^  rapporté  par 
aueifées.  ^"'^^  P'  ^'^^^'  «"-^«^^s  (arguées). 

Nous  disons  atteint  de  mal,  et  on  disait  de 
même.-  «  de  jeûner  étoit  si  actainte,  que  sa  couleur 
«  avoit  perdue.  »  (Cer.deNev.  i"  part,  p.  68.)  C'est  en 
ce  même  sensqu'on  lit  : .  Aucunschevaliers  ontesté 
■■  requis  de  cette  besongne  achever,  moy-.nSmes 
:  ^"^"f/'"«'f  de  la  meilleure,  de' la  plus  beTle 
«  et  de  la  plus  discrette  pucelle  du  monde,  »  c'est-à- 

(Percif'vnfT  r'i^'i^L  ^X  ^"'^  P«'''é  P»'',  etc. 
(Feicel.  \ol.  V,  fol.  4."),  K°col.2.) 

CONJL'C. 

Aciaing,  ind.  prés.  Atteint.  (Crétin,  p.  17  ) 
Aclainte,  part,  passé.  (Gérard  de  Nevers!  p  68  ) 
Magnant,  part.  prés.  Atteignant,  frappant.  ' 

Si  laisierenl  lot  seul  Marsile 

A  petit  de  gent  combattant, 

El  Rollans  le  vit  atagnanf. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  206  et  207 

avaS'(i^i;;wrrî?'' ''"'"• 'pp''"^''^"' 
(Faï'r5i;'!^.';^'S]i.^i!5lf'î?ïof'rr^""^^- 

(Gonf  .'îfr'"iA'^''P''';;''-  ^'"  sul'jonctif.  Atteignissent. 
(Gont.  de  G.  de  Tyr  Marten.  T.  V,  coi.  703  ) 
Ataintre,  passe  défini.  Atteignirent.  (K.  de  Brut.) 


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290  — 


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AteiH,  ind.  près.  Atteint,  joint. 

Tous  les  encontre,  et  atent, 
Moult  si  combat  fièrement. 

Huon  d'Oisy.  Poès.  MS.  avMl  1300,  T.  III.  p.  1284. 

Attaindist,  passé  dér\n\.  Atteignist.  (Percef.  Vol. 
11,  fol.  34,  H°  col.  2.) 

/l «a/HS/,  passé  défini.  Atteignit.  (Cont.  de  G.  de 
TyrMarten.  T.  V,  col.  679.) 

Attenoit,  imp.  de  l'ind.  Approchoit.  (Ger.  de  Rouss. 
MS.  p.  58.) 

Atienent,itià.  prés.  S'atteignent.  (Arch.  ms.  f.  110.) 

VARIANTES  : 
ATAINDRE.  Du  Chesne.  Gén.  de  Chast.  p.  14,  tit.  de  1231. 
ACTAINDRE.  Percef.  Vol.  V,  fol.  112,  col.  2. 
Adaindhe.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1392. 
Ateinure.  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauv.  Ord.  T.  I,  p.  540. 
Ateingre.  S>  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  13. 
Atenir.  Athis,  MS.  fol.  96,  V»  col.  1. 
Attaindre.  Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose,  au  mot  Atlalgue. 
Atteyndre.  Britton,  Loi.x  d'Angleterre,  fol.  87,  V". 
Attendre.  Percef.  Vol.  III,  fol.  85,  V°  col.  1. 
Atindre.  Chron.  fr.  MS.  de  Nang\s,  an  i,  chap.  ix,  p.  2. 

Atainement,  subst.  masc.  Persécution ,  que- 
relle. "  Par  estrif  d'alainement,  et  d'ennui  que  l'en 
«  lor  faisoit.  ..  (Cont.  de  G.  de  Tyr  Marlene,  T.  V, 
col.  732.  —  Voy.  Aatie.)  Le  mot  Atahin  est  du 
Breton.  (Voy.  Dii  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  .ym(I).) 
variantes  : 

ATAINEMENT.  Gloss.  de  Martine. 

Atahir.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Atia. 

Atains,  adj.  Malade,  faible.  On  disoit  être  ateint, 
ou  atains  de  maladie,  d'où  le  mot  atains  fut  em- 
ployé seul  pour  signifier  malade,  affoibli  par  le 
mal. 

Estoit  si  noir,  et  si  atains, 
Qu'à  paines  se  puet  soustenir. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  1218,  fol.  4,  R-  col.  2. 

Atainte,  subst.  fém.  Atteinte.  —  Fin ,  but.  — 
Plainte  en  justice. 

Au  premier  sens,  c'est  l'action  par  laquelle  on 
atteint,  on  frappe,  on  blesse.  »  Brochant  son  des- 
«  trier,  s"enLrecoururent  de  telle  roideur  que,  sans 
«  faillir  d' atainte,  le  chevalier  à  l'escu  aux  bandes 
<•  faus(;a  celuy  de  son  ennemy.  »  (D.  Florès  de 
Grèce,  fol.  cxx.xui,  R°.) 

On  disoit  en  ce  sens,  faillir  d'atteinte,  pour  man- 
quer son  coup.  (Ess.  de  Mont.  T.  I,  p.  420.) 

On  disoit  aussi  «  pour  prendre  une  grande  at- 
•'  teinte,  »  pour  atteindre  loin,  s'étendre. 

Les  tentes  de  toile  tainte 

Qui  pourprenent  si  grant  atainte. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  92,  R'. 

Dans  le  sens  de  fin,  but  ou  approches,  on 
disoit  :  "  Quiert  au  loing,  de  petit  à  petit ,  com- 
«  ment  il  puisl  venir  à  ses  atteintes.  »  (Froissart, 
Liv.  Il,  p.  57.) 

Aussi  toujours  il  parvenoit. 
Dix  contre  cent,  à  ses  attaintes. 

Vigil.  de  Charles  VII,  T.  II,  p.  il. 


Qui  Dieu  prie  et  sa  Mère,  et  ses  Saints  et  ses  Saintes, 
Jà  n'est  si  loing  de  Dieu  qu'il  n'en  viengne  aux  attaintes. 
J.  de  Meung,  Cod.  vers  1440. 

Dans  le  sens  de  plainte  eu  justice,  accusation,  on 
disoit  :  «  Aussi  doit  atteynte,  remeindre  au  cas 
«  où  le  pleyntife  est  tenant  del  lenement,  par  sa 
»  intrusion.  »  (Britton,  des  Loix  d'Angl.  fol.  240.) 

VARIANTES  : 
ATAINTE.  D.  Fier,  de  Grèce,  fol.  133,  R". 
Attainte.  Gloss.  des  .Arr.  d'Amor. 
Atteinte.  Froiss.  Liv.  II,  p.  âl. 
Attaincte.  Coquillart,  p.  138. 
Atteynte.  Britton,  Loix  d'Angl.  fol.  237,  R». 

Atainter,  verbe.  Teindre,  colorer  (2). 

Sousis,  qui  la  chiere  m'atainle 

Me  met  ensi  conplaindre  et  esmoier. 

De  la  Courroierie,  Poés.  MSS.  avant  1300,  T.  Il,  p.  654. 

VARIANTES  : 
ATAINTER.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  654. 
Attainter.  Villon,  p.  71. 
Atteinter.  Mémoires  de  Sully,  T.  XII,  p.  308. 

Atake,  subst.  fém.  Attaque  ou  l'action  d'atta- 
quer. (Voy.  le  Bec.  des  Poës.  mss.  avant  1300,  T.  IV, 
page  1350.) 

Atancher,  verbe.  Cesser  de  couler.  Nous  disons 
étancher,  pour  faire  cesser  de  couler.  On  trouve 
atancher  pour  cesser  de  couler,  dans  des  Fabl.  mss. 
du  R.  ir  7015,  T.  II,  fol.  109,  V"  col.  2. 

Atanet,  subst.  masc.  A'om  de  lieu  situé  en  An- 
gleterre (3). 

D'autre  part  on  l'ille  Atanel, 
U  il  faisoit  moult  biel,  et  net. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  606. 

Atant,  adv.  Alors.  —  Ainsi.  —  Lu,  à  ce  point. 
Employé  dans  le  sens  d'alors,  les  poêles  ont  dit  : 

Robin  vers  l'autre  atant 
Cort  grant  aleure. 

Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1359. 
La  ville,  et  chastel  si  rendirent  ; 
Et  atant  s'en  partirent  lors. 

Vigil.  de  Charles  VU,  T.  I,  p.  181. 

Dans  le  sens  d'ainsi,  nous  lisons:  «  ^1  tant  Allerie 
"  avoit  mis  fin  ù  sa  nouvelle  quand,  sans  attendre 
«  aucun  commandement,  elle  raconta  son  énigme 
«  en  ceste  manière.  »  (Nuits  de  Strap.  T.  II,  p.  284.) 
Atant  l'auteur,  c'est-à-dire  :  •<  Ainsi  s'exprime  l'au- 
«  leur.  »  (Pasq.  Rech.  Liv.  IV,  p.  360.) 

Aient  ai  vostre  commandement, 
Si  chanterai,  par  vos,  joiaux  et  liez. 

Poès.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  159. 

Avec  le  sens  de  là,  à  ce  point,  on  a  écrit  :  «  Par 
»  grant  dueil  commença  sa  playe  à  seigner,  et  ne 
<c  resta  par  atant,  car,  de  la  grant  angoisse  qu'il 
«  avoit,  le  sang  luy  print  à  saillir  par  le  nez.  » 
(Percef.  Vol.  V,  fol.  33,  V^col.  2.) 

VARIANTES  : 
ATANT.  Borel,  Mén.  et  le  Supl.  au  Gl.  du  R.  de  la  Rose. 
Atent.  Poës.  MSS.  avant  l'3U0,  T.  I,  p.  159. 


(1)  Les  formes  aatie  (Ph.  Mouskes),  ahutie  (G.  Guiart),  hasiie  (CuveUer),  viennent  de  l'allemand  liael,  haine  ;  de  là  le  dérivé 
alinc,  que  donne  aussi  G.  Guiart,  les  verbes  aalir  et  alainer,  le  substantif  verbal  altaine  (.1,1.  178.  p.  69),  allongé  dans 
attayneiiieut  (,1,I.  108,  p.  56).  (n.  e.)  -  (2)  Les  exemples  suivants  prouvent  que  laindyi:  et  ses  composés  étaient  synonymes 
de  pâlir  :  «  Dont  raoult  m'a  fait  pâlir  et  laindre  »  (Ch.  de  Couci,  vers  3156);  —  «  Fais  mon  vis  taindre  et  pâlir,  »  (Laborde, 
p.  218.)  (N.  E.)  -  (3)  C'est  l'ile  de  Thanet,  à  l'embouchure  de  la  Tamise,  premier  séjour  des  Saxons,  (n.  e.) 


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A  tanto.  Terme  de  droit.  C'esl-à-dire  en  partie. 
«  Droits  censuels,  et  autres  droicts  seigneuriaux  ne 
«  se  peuvent  prescrire  à  tôto,  mais  bien  à  tanto.  » 
(Coutumier  général.) 

Atarge,  siibst.  fém.  Asile  (1).  Mot  du  Boulonnois. 
Il  signifie  «  retraite  pour  ceux  qui  s'estans  trop 
«  retardez,  ne  peuvent  entrer  dans  la  ville.  »  (Dict. 
de  Borel.) 

Atargement,  sitbst.  jnasc.  Retardement.  C'est 
en  ce  sens  qu'on  a  employé  ce  mot,  dans  le  passage 
suivant  :  «  Le  chevalier"  s'en  vint  adressant  par 
«  devant  elle,  et  luy  dist  :  pucelle,  à  vous  me  pré- 
«  sente  pour  vostre  vouloir  acomplir.  Par  ma  foy, 
«  sire  chevalier,  dist  la  pucelle,  maintenant  j'en 
«  tenoye  propos  pouryo&tie  atargement.  »  (Percef. 
Vol.  T,  fol.  14.5,  col.  1.) 

VARIANTES  : 
ATARGEMENT.  Percef.  Vol.  I,  fol.  145,  col.  1. 
Atargier.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  93,  V.col.  1. 

Atarger,  verbe.  Tarder.  —  Retarder. 

Atarger,  dans  S'  Bern.  (Serm.  fr.  jiss.),  répond  au 
latin  (li/ferre,  eunctaii,  remorari ,  tardare.  (Voy. 
sur  le  double  usaf;e  de  ce  mot  :  le  Dict.  de  Borel,  le 
Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis,  au  moi  Atarger, 
et  Du  Gange,  Gl.  lat.  aux  mots  Athargrati  et 
Targa  (2).) 

Dans  le  sens  de  tarder,  on  disoit  : 

Sur  toutes  autres  vous  désir, 
Tant  que  je  seray  vray  martlr 
En  amours,  sans  plus  alargier. 

l'of-s.  MSS.  d'Eùst.  Desch.  fol.  19Î,  col   1. 

«  Fust  toutes  fois  la  besongne  attargiée  par  les 
«  dessus  dils  seiuneurs.  >•  (J.Le  Fev.  de  S'  Remy, 
Hist.  de  Charles  Vl,  p.  87.) 

VARIANTKS  : 
ATARGER.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1-268. 
Att.arger.  Monstrelet,  Vol.  I,  fol  17,  V". 
Atarjer.  Estrab.  Fabl.  MSS.  du  H.  n»  7996,  p.  61. 
Atargier.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  192,  col.  1. 
Att.argier.  Le  Fev.  de  S'  Remv.  Hist.  de  Ch.  VI,  p.  137. 
Atarder.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  227,  V»  col.  2. 
Atarzer.  S'  Rernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  62  et  passim. 

Ataster,  verbe.  Tàter. 

Vint  atastant  Sire  Combers 
Au  lit,  etc. 

Fabl.  MS.  duR.  n-  7089,  fol  2il,  R°  col  2. 

Ataus,  subst.  7nasc.  pliir.  Etaux.  «  Nuz  ne  soit 
«  contraint  de  lever  nos  rtffl;;sdou  marchié.  «  (Ane. 
Coût.  d'Orléans,  à  la  suite  de  Beaumanoir,  p.  466.) 

Ataut,  subst.  masc.  Une  Bière.  Dans  le  patois 
languedocien.  (Dict.  de  Borel  au  mot  Athaver.) 

Atefi,  subst.  Ce  mot  paraît  signifier  art,  dans  les 
vers  suivants  : 


Le  patrimnne  à  Crucefi 
Par  les  goles  vous  ont  loié 
Cil  qui  sovant  ont  rimoié  : 
Dieu  lessie  par  son  atefi  ; 
Dou  remenant  vous  di  je  fi  ; 
N'en  aurez  plus,  je  vous  afi. 

B.  N.  MS.  fr.  1593,  fol.  10-2.  V-  col.  1. 

Peut-être  doit-on  corriger  artefi  et  lessient  :  les 
poètes  abandonnent  Dieu  pour  leur  art. 

Ateignanz,  adj.  Emu,  palpitant,  haletant. 

Cueur  bateiz,  et  ateignanz  (S). 

Parlon.  de  Blois.  MS.  de  S.  Germ.  fol.  155,  V.  col.  3. 

Ateiver,  verbe.  Attiédir,  devenir  tiède.  (Voyez 
S'  Bernard,  Serm.  fr.  mss.  p.  301  et  361.) 

VARIANTE  : 
Atevir.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  301  et  361. 

Atel,  adj.  Tel.  —  Tellement,  disposé. 

Seignors,  je  ms  sens  si  atel, 
Que  jo  mourrai,  je  croi,  ennuit  (4) 
Hisl.  de  Fr.  en  vers,  à  la  suiie  du  R.  de  Fauvel,  MS.  du  R.  fol.  86. 

Atelé,  partie.  Pourvu.  On  disoit  d'un  chasseur, 
passant  avec  sa  meute.  «  S'en  va  de  chiens  bien 
«  atelé.  »  (Voy.  Gace  de  la  Bigne,  ms.  fol.  107,  V°.) 

Atempreure,  subst.  fém.  Trempe.  «  Espéetem- 
c  Tporel  si  eaià'iiuU'e  atempreure.  «(Beaura.  p.261.) 

Atemproire,  S!//^s^  Pièce  d'un  moulin  (5).  Dans 
une  poésie  qui  comp^ire  un  moulin  aux  vantards 
et  aux  menteurs,  on  lit  : 

.  .  .  Wauteles  Eskitezounes, 
De  li  vauroie  faire  atempi-oii-e 
Pour  cou  que  nus  ne  le  puet  croire. 

Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1362. 

Atendrier,  verbe.  Attendrir.  —  Affoiblir. 
Le  premier  sens  :  Attendrir  est  le  plus  usité  : 

Ce  me  font  aprendre 

Dont  fine  amours  puet  plus  atendrier. 

Laralierl  Fcrris,  Poês.  MS.  avani  1300,  T.  I,  p.  294. 
Vous  me  priez  et  requérez  d'amours, 
Et  me  faictes  vos  piteuses  clamours 
Qui  font,  vers  vous,  mon  cuer  atendrier. 

Poës.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol   192,  col.  3. 
Tant  li  atenria  11  cuers. 

Hist.  des  Trjis  Maries,  en  vers,  MSS.  p.  210. 
Vus  fils  en  aki  m'atenrie. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  762. 

Borel  rend  le  mot  atténerir  par  atténuer,  sans 
doute  dans  le  sens  d'affoiblir,  comme  dans  le  passage 
qui  suit  :  <■  Trop  tenir  la  bride  roide  aux  jeunes 

o  gens leur  fait  souvent  affoiblir,  et  aetendrir 

«  îe  cueur,  et  les  fait  devenir lasches  et  songeurs.  » 
(Jouven.  MS.  p.  46.) 

vjvriantes  : 

ATENDRIER.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  192,  col.  3. 

Atenrier.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  762. 


(1)  Ce  sont  des  mâts  munis  d'échelons,  plantés  sur  les  plages  sablonneuses  et  bordées  de  dunes  du  nord  de  la  France  : 
miand  on  monte  à  leur  sommet,  on  dépasse  le  niveau  des  marais.  On  plante  de  ces  sortes  de  mâts  le  long  des  côtes  de 
Poitou,  d'Aunis  et  de  Saintonge.  Ces  mâts  ont  des  noms  spéciaux  dans  chacune  de  nos  provinces  maritimes.  (N.  E.)  — 
(2)  Le  dernier  éditeur  de  Du  Gange,  Hœnschel,  redresse  cette  confusion  entre  tardare  et  atharijrati  ;  ce  mot,  qu'on  trouve 
dans  la  loi  des  Bavarois  (titre  3),  vient  de  .ider,  veine,  et  de  kratzen{<l'o\x  gratter),  ouvrir.  Il  ne  faut  pas  non  plus  réunir  targe 
(targa),  mot  d'origine  allemande,  signifiant  concilier,  avec  targer,  fait  sur  tardicare.  La  forme  atarrje  se  trouve  dans  la 
Chanson  de  Roland,  str.  xxil.  (N.  E.)  —  (3l  Cœur  qui  bat.  —  (4)  Je  mourrai  en  ce  jour,  aujourd'hui.  —  (5)  Lisez  atemptoire  ; 
ce  mot  sliinifie  entreprise,  comme  atemptorium  dans  Du  Cânge.  La  forme  pourrait  aussi  être  ad  temporalia,  ce  qui  se  fait 
en  temps  voulu,  (n.  e.) 


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Attendrier.  Hist.  de  U.  du  Guescl.  par  Men.  p.  201. 
Attenduver.  Ibid.  p.  71. 
Attenkrir.  Horel,  Dict. 
AcTENDRiR.  Jouvencel,  MS.  p.  Wi. 

Aténébi'ir,  verbe.  Obscurci.  —  Être  obscurci. 
On  lit  parmi  les  présages  de  la  mort  de  Charle- 
magne  : 

Le  Solaus,  et  la  clere  Lune, 

Que  Dieux  a  fait  partout  coumune, 

Par  huit  jors  continuelment 

Furent  oscuri  durement, 

Iço  fu  une  grans  merveille, 

?or  totes  autres  non  pareilles, 

Et  li  jours  [u  aténébris 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  302, 

L'air  entour  eus  aténcbrist. 
De  sa  fumée  et  des  alainnes. 

G.  Guiarl,  MS.  Toi.  131,  R*. 

Atenerge,  partie.  Attendri,  affoibli.  C'est  le 
participe  d'aténérir.  (Voy .  les  diverses  orthographes 
du  verbe  atendrier.) 

jitcner(jc  furent  li  oel, 

N'i  avôit  ore  point  d'orguel. 

Vio  des  SS.  MS.  de  Sorb.  chif.  L.  Lxi,  col.  15. 

Ateneusement,  adv.  Avec  animosité.  (Voyez 

Aatine,  At.unr.) 

Geste  besoingne 

Emprise  ateneusement. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  32,  R«. 

Atenir,  verhe.  Tenir,  avoir,  posséder.  —  Entre- 
tenir. —  Etre  proche,  avoisiner.  —  Etre  pa.eiit, 
appartenir. 

Dans  le  sens  de  tenir,  on  trouve  : 

Miex  aiai  de  li  avoir  dure  pensée, 
Que  d'une  autre  grignors  biens  atenir. 

Poès.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1006. 

On  lit  attenir  pour  entretenir,  dans  le  Gloss.  sur 
les  Coût,  de  Beauvoisis. 

Ce  même  mot  si;jnifie  aussi  être  proche,  avoisi- 
ner,  et  même  appartenir,  dépendre.  (Du  Gange, 
Gloss.  lat.  au  mot  Attinere.)  Labbe,  dans  son  Gloss. 
p.  490,  traduit  aussi  attenir  pour  attinere. 

Enfin  les  deux  orthographes  ont  été  employées 
pour  être  parent.  «  Appartenir  de  parenlage,  ou 
«  alliance.  »  (Voyez  Dict.  de  Monet,  .Nicot',  Rob. 
Estienne,  Borel  et  Cotgrave,  au  mot  Attenir.  — 
Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  A  ttinentia.)  Le 
dixième  article  des  chefs  d'accusations  intentées 
contre  les  Templiers  étoit  que  leur  ordre  ne  devoit 
'<  aucun  enfant  batisier,  ne  lever  des  sains  fons, 
<>  tant  comme  ilz  puissent  atenir.  »  (Chr.  fr.  ms.  de 
Nang.  sous  l'an  1310.) 

On  l'a  employé  pour  appartient,  dans  ces  vers  : 

Mieux  me  plairoit  avoir  emprins  la  queste 
De  retirer  par  une  grand  conqueste, 
Des  mains  des  Turos  le  Troyen  territoire, 
Qui  nous  allient,  par  droit  ample  et  notoire. 

J.  Le  Maire,  suite  de  l'UIustr.  des  Gaules,  p.  375. 


VARIANTES  : 
ATENIR.  D.  Morice,  Hist.  de  Bret.  p.  935;  tit.  de  124S. 
Attenir.  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis. 

Atenri  (I),  ailj.  Enclin.  (G.  Guiart,  ms.  fol.  23,  V°.) 
Le  poète  a  dit  dans  ce  sens  : 

Par  quoy  l'Emperere  Henris 
Del  retraire  fu  atenrix. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  535. 

Atenu,  partie.  Tenu  obligé,  redevable.  «  U  vous 

«  est  si  atenu des  faveurs.  »  (Negoc.  de  Jeann. 

T.  II,  page  472.)  «  Tant  que  l'ame  fera  résidence  en 
«  ce  mien  corps,  je  m'en  sentiray  leur  redevable, 
«  et  attenu.  »  (Pasq.  Rech.  p.  871.)  <>  Je  vous  suis 
«  bien  atténue.  »  (Moyen  de  parvenir,  page  61.) 

VARIANTES  : 
ATENU.  Negoc.  de  Jeann.  T.  II,  p.  472. 
Attenu.  Pasquler,  Rech.  p.  871. 

Ater,  verbe.  Elever.  (Voyez  Atir  ou  Aatir.)  Ce 
mot  a  été  employé  avec  ce  sens,  dans  ces  vers  : 

Le  Roi  de  la  lune  embraça. 
Ses  piez,  et  ses  mains  il  ata  (21. 

Fabl.  MSS.  de  S.  Germ.  fol.  II,  V  col.  2. 

Aterei*  (s')  (3),  verbe.  S'Adonner.  —  S'avancer, 
s'approcher,  arriver. 

Mon  cuer  si  m'a  donné  matere. 
Et  me  semont  que  je  matere 
Et  qu'à  un  ditié  ferai  essai. 

Fabl.  MSS.  du  R.  a'  7218,  fol.  238,  R"  col.  1. 

Atermer,  verbe.  Donner  terme  ou  délai.  — 
Assigner  un  terme,  terminer.  —  Fixer,  placer, 
poster.  —  Remettre,  différer  le  terme.  —  Enceindre. 

Nous  trouvons  ce  mot  avec  le  premier  sens,  dans 
le  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis. 

Dans  le  sens  d'assigner  un  terme,  on  a  dit  :  «  Se 
«  aucuns  se  plaint  d'un  autre  ù  la  justice  d'héritage, 
«  la  justice  li  doit  mettre  jour,  et  se  cil  qui  sera 
«  atermés  deffaut,  cil  (lui  se  plaint  doit  dire  en  tele 
«  manière:  Sire,  je  vous  requiers  droit.  »  (Ord.des 
R.  de  Fr.  T.  I,  p.  "159  )  On  hiatenniner {lb\â.)  dans 
le  même  sens.  «  Celluy  jour  mesme,  le  Roy  Artus 
«  atténua  ses  hommes  qu'ilz  fussent  à  Karmaiot, 
«  et  ilz  y  vindrent.  ..  (Lanc.  du  r..ac.  T.  III,  fol.  139  ) 

Dans  ce  même  sens,  on  disoit  aterminer  pour 
assigner  le  jour  d'un  jugement.  (Du  Gange,  Gloss. 
lat  au  mot  Adterminave .)  ou  pour  fixer  le  jour 
d'une  bataille.  (Lanc.  du  Lac.  T.  Ili,  fol.  53.)  On 
disoit  atermoyer  (4)  pour  fixer  un  terme  à  un  débi- 
teur. (Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  moi  Aterminare.) 

Dans  le  sens  de  fixer,  placer,  poster,  on  disoil  : 

Si  divisa  Dunoy  l'armée. 

Et  en  fist  illec  deux  batailles, 

Dont  l'une  si  fut  alnrmée. 

Près  li  gibet,  vers  les  murailles, 

Vigil.  de  Charles  VII,  T.  III.  p.  60. 

(Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat  au  mot  Acterminare.) 

Dans  le  sens  de  remettre,  différer  le  terme,  on  a 

dit  :  «  Vrament  il  y  a  assez  longtemps  que  vous 


(1)  C'est  une  variante  orthographique  d'attendri,  (n.  e.)  -  (2)  U  faut  lire,  pour  la  rime,  U  aca.  (N.  E.)  -  (3)  C'est 
le  français  f(»(;)Tec,  écrit  à  iori  altérer  dans  le  Dictionnaire  de  l'Académie,  puisque  terra  en  est  la  racine;  je  m'atere 
signifie  donc  je  m'applique,  je  m'attache  comme  le  laboureur  à  la  terre.  (N.  e.)  —  (4)  .ilennoifer  fait  sur  ternie,  comrae 
rudoyer  sur  rude,  ne  se  rencontre  guère  avant  le  xvi"  siècle;  il  est  bien  plus  récent  qa\il.:nnin jr,  qu'on  trouve  dé.» 
le  XII'  siècle,  (.n.  e.) 


AT 


—  293  — 


AT 


«  m' aUermmjex;  je  vous  prie  que  ce  soit  à  cette 
«  heure.  »  (Moyeu  de  parvenir,  p.  165.) 

Enfin  on  a  employé  ce  mot  pour  enceindre,  dans 
les  vers  suivants  : 

La  ville  assiéent, 

Oui  lors  estoit  bel  alermée. 
De  deux  paire  de  murs  fermée. 

G.  Guiart,  T.  I,  p.  196. 

VARIANTES  : 
ATTERMER.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Acterminare. 
Atermineb.  Ibid.  au  mot  Adterminare. 
Atermoyer.  Ibid.  et  Colgrave. 
Attermer.  Lanc.  du  Lac,  T.  IIL  foL  1.39,  R"  col.  2. 
Atter.moyer.  Moyen  de  parvenir,  p.  165. 

Aterminer,  verbe.  Fixer,  dessiner. 

Li  lit  furent  apariUié 
Tout  premerain 
Qui  la  joie  ont  désirée 
Que.  .  .  .  lor  a  aterminée. 

Arch.  MS.  fol.  56,  V  col.  2. 

Atermoyement,  subst.  masc.  Terme  pris 
avec  ses  créanciers  pour  le  payement  d'une  dette. 
(Dicl.  de  Cotgr.  atermynement  de  dettes.  —  Carta- 
magna,  fol.  141.  —  Voyez  Atter.moyeur.) 

VARIANTES  : 
ATERMOYEMENT.  Cotgrave. 
.\TER.MYNEMENT.  Cartamagna,  fol.  141,  H". 

Aternis,  adj.  au  masc.  plur.  Ternis,  obscurcis. 
(Voy.  Moiiiiet,  p.  441.) 

Athalac,  subst.  masc.  Drogue.  Matière  qui 
entre  dans  lesL-oinpositious chimiques.  (Voy.  Merlin 
Cocaie,  T.  I,  p.  65(5.) 

Athaner,  verbe.  C'est  encore  un  dérivé  de 
Atine  (Voir  ce  mot).  Tuer.  (Voy.  Dict  de  Borel, 
Cotgrave.)  Le  Cellheil.  de  Léon  tripp.  dit  que  c'est 
un  "mot  en  usage  en  Bourgogne. 

Athas,  subst.  masc.  Nom  propre  d'une  divinité. 
C'est  peut-être  Datan,  compagnon  de  Coré  et 
d'Abiron.  On  lit  d'Abyran  dans  les  vers  qui  suivent 
le  passage  où  le  mot  .ithas  est  employé  : 

Ou  temple  d' Athas  pourras  advertir, 
Aux  ydoles  qui  seulent  de  ce  voir 
Par  leurs  respons  doubles,  et  amortis 
Les  requerraiis. 

Focs.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  7,  col.  i. 

Atheiste,  subst.  masc.  Athée.  (Voy.  Dict.  de 
Monet,  d'Oudin  et  de  Cotgrave  au  mot  atheiste.  — 
La  Sagesse  de  Charon,  p.  310,  et  Apol.  pour  Héro- 
dote, p.  118,  etlesLeltr.  de  Pasquier,  T.  III,  p.  283.) 

VALANTES  : 
ATHEISTE.  Oudin  et  Cotgrave. 
Ateiste.  Les  Touches  des  .\ccords,  p.  OL 
Athéen   Pasquier,  Lett.  T.  III,  p.  283. 

Atheisterie,  subst.  fém.  Athéisme.  (Voy.  Dict. 
de  Cotgrave.  —  L'Apol.  pour  Hérodote,  p.  48.) 


Athenienciens,  subst.  masc.  plur.  Athéniens. 
(Voy.  les  Poës.  mss.  d'Eust.  Desch.  fol.  547.) 

VARIANTES  : 
ATHENIENCIENS.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  517,  col.  4. 
Athenie.nsiens.  Ibid.  fol.  118,  col.  4. 

Atheologien,  subst.  masc.  Impie.  Dans  le 
sens  propre,  ce  qui  est  contraire  à  la  théologie  : 
"  Ainsi  que  le  diable  ne  manquejamais  de  passages 
«  de  la  S"  Escriture,  aussi  ce  granl  Alhcologien, 
«  pour  revestir  sa  détestable  opinion  de  quelque 
«  prétexte,  s'aide  de  quelques  exemples  du  vieux 
«  testamment.  ■>  (Pasq.  Rech.  Liv.  111,  p.  316.) 

Athie,  subst.  fém.  Nous  trouvons  Atliie  ta  dé- 
solée comme  expression  proverbiale. 

Athie,  adj.  C'est  une  variante  d'aatie.  (Voir 
Atine.)  Qui  est  en  langueur.  (Dict.  de  Borel,  et  de 
Cotgrave.)  Celthell.  de  Léon  Trippaull  dit  que  c'est 
un  mot  usité  en  Bourgogne. 

Atholaïcas.  Ce  mot  singulier  se  trouve  employé 
et  expliqué  dans  le  passage  que  nous  allonsrappoV- 
ter:  «  E  le  lieu  ou  l'escriplure  fu  posé,  si  estoit 
»  l'oralorie  ou  Adam  pria  Dampnedeu  ,  a  donc 
«  li  dist  li  Angles,  Saloaion  Jeopte  command  que 
«  tu  facetz  iloques  une  meson  de  oreyson ,  et 
•<  sera  appellée  la  meson  de  Dampnedicu.  Ensi  fu 
«  ceste  chose  seue,  qi  list  entendre  à  ceux  qi  vin- 
«  drent  après  lui,  et  Salomon  appella  ceste  lettre 
«  Athotaïcas,  ceo  veut  dire  lettre  sa  doctrine, 
«  ces  livres  fut  lescripiure  que  Selh  escrit  à  son 
«  doi.  »  (Hist.  de  la  S"  Croix,  ms.  p.  12.) 

Ati,  subst.  masc.  Sa  signification  est  peu  déter- 
minée dans  ces  vers  : 

Au  llun  .lordan  en  va  Marie  : 
Le  (1)  nuit  i  prist  herbegerie, 
Bien  près  del  rnostier  S'  .lehan 
Sor  le  rive  del  flun  .Tordan 
Se  herbega,  sans  nul  ati  : 
Un  de  ses  pains  mangu  demi; 
But  de  l'iaiie  sainte  fle. 

Vie  des  S3.  MS.  de  Sorb.  chilT.  Liv,  XI,  col.  li. 

Peut-être  le  mot  ati  doit-il  s'entendre  ici  dans 
quelqu'une  des  significations  du  mot  Aatie  (2). 

Atif  er  (3),  verbe.  Coiffer,  parer  la  tète  des  femmes. 
Ajuster.  (Voy.  Dict.  de  Nicot,  Monet,  Borel,  Ménage 
et  Cotgrave.) 

VARIANTES  : 

ATIFER.  Nuits  de  Strapar.  T.  II,  p.  361. 
Attifer.  Monet,  Cotgrave,  Borel. 
Attiffer.  Nicot,  Monet. 
Atyfer.  Celthell.  de  Léon  Trippault. 

Atiffet(4),'s^(?>s^  luasc.  Coiffure,  ajustement,  pa- 
rure de  tête.  Ornement,  ou  parure  de  femmes. 
Alilfet  des  demoiselles,  etc.,  est  le  litre  d'un  livre 
composé  par  Guill.  Taissonnien.  (Voy.  du  Verd. 


(1)  C'est  là  un  manuscrit  picard  qui  emploie  l'article  féminin  pour  le  masculin,  (.v.  e.)  —  (2)  La  signiQcation  est  doule  ur 
(Voy.  Atine).  On  nous  parle  ici  de  S'"  Marie-Madeleine  se  retirant  au  désert,  (n.  e.)  —  (3)  Attifer  vient  du  flamand  tippen, 
couper  le  bout  des  cheveux  ;  en  ancien  anglais,  tife  signifiait  parer  la  tête.  (.N.  e.)  —  (4)  Ou  appelait  ainsi,  au  XVF  siècle,  des 
cercles  de  fer  qui  soutenaient  la  passe  d'un  bjnnet,  fort  porte  en  ce  temps  là  par  les  dames  désireuses  de  paraître  sévères 
en  leur  mise;  c'est  ainsi  que  sont  le  plus  souvent  coiffées  Marie  Stuart  et  Catherine  de  M.JJicis.  Il  ne  faut  pas  confondra 
ïatifet  avec  l'arcelet,  moins  élevé  et  qui  relevait  seulement  la  chevelure  aux  tempes,  (n.  e.) 


AT 


294  — 


AT 


Bibl.  p.  510.)  Brantôme,  parlant  de  la  mort  de  Marie 
Stuart,  dit:  «  Le  Bourreau  lui  donna  un  cjrand 
«  coup  de  liache,  dont  il  lui  enfonça  ses  aUifcts 
n  dans  la  tôle  ;  laquelle  il  n'eniporlaqu'au  troisième 
«  coup.  »  (Dames  Illustres,  p.  153.) 

VARIANTES  : 
ATIFFET.  Du  Verd.  BiW.  p.  510. 
Attifet.  Brantôme,  Dames  illustres,  p.  153. 
Atvfet,  Celthell.  de  Léon  Trippault. 
Attiffement.  Dict.  de  Robert  Estienne. 

Atille,  subst.  masc.  Nom  propred'liomme.  Peut- 
être  Altila? 

Ou  est  Atille  le  tyrant  ? 

Poës.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  iH.  col.  3. 

Atiller  (1),  verbe.  Disposer. 

Puis  cà  li  amer  s'atil'.e 
Ne  li  caut  ki  le  soucourre 

Poês.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1040. 
Le  commun  maint  engin  atille, 
Por  geter  en  l'ost  par  dehors. 
Hist.  de  Fr.  en  -vers,  à  la  suite  du  Rom.  de  Fauvel,  MS.  du      .  fol,  75. 

VARIANTES  : 
ATILLER.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1040. 
Attiler.  Cotgrave,  Dict. 

Atiltrei",  verbe.  Placer,  poster,  aposter,  dispo- 
ser. Qualilier.  InUtuler. 

Au  premier  sens,  ce  mot  s'est  dit  anciennement 
des  chiens  placés  au  passage  des  sangliers  qu'on 
chassoit,  d'où  il  a  été  transposé  à  l'artillerie  : 

Et  veist  on  lor  à  Tung  tendre  les  teilles, 
L'autre  tenir  les  lévriers  atiltrez. 


Mectre  soubdain  le  sangler  aux  abboys. 
Hue;ue  Satol,  Poës,  MS.  de  chas.  Roy.  du  sanglier  discord  par  François  I",  p.  24. 

«  L'artillerie  du  dedans  ne  pouvoit  nuire  aux 
«  ennemis,  et  ne  se  osoient  monstrer  ceulx  de  la 
«  place  à  la  défense  delà  Brèche,  car  estoit  subject 
«  aux  monlaignes,  où  les  Gennevois  avoient  faict 
«  leurs  remparts,  et  la  leur  artillerie  atUtrée.  « 
(D'Auton  Annal,  de  Louis  XII,  de  1.506  et  1507, 
p.  74.) 

On  a  dit  aussi  atiltrer  avec  le  sens  de  qualifier. 
tVoy.  Savar.  de  l'Epée  française,  p.  3.) 

Enfin  on  l'a  employé  dans  le  sens  propre  de  son 
étymologie,  pour  intituler.  Clément  Marot,  dans  la 
préface  à  la  tête  des  œuvres  de  Villehard.  p.  5,  dit  : 

«  Outre  plus trouvères les  mots   obmys 

»  remys,...  et  les  tiltres  myeulx  atlittrés.  » 

VARIANTES  : 
ATILTRER.  Jean  d'Aut.  Annot.  de  Louis  XII,  p.  74. 
Atistrer.  Crétin,  p.  230. 
Attistrer,  Ibid.  p.  135. 
Attilther.  Clém.  Marot,  préf.  des  Œuv.  de  Villehard,  p.  5. 

Atiné,  partie.  Pourvu,  muni.  »  Ung  tant  bien 
«  chastil....  moult  atiné  de  Gantes.  »  Percef. 
Vol.  III,  fol.  5,  R»  col.  2.) 

Atliiter,  vcrlje.  Ajuster,  orner,  équiper.  —  Dis- 
poser, arranger.  —  Coiffer,  enivrer. 
Le  sens  propre  est  ajuster,  équiper.  «  Si  tost  qu'il 


"  fut  armé  et  atinté,  il  monta  à  cheval,  la  lance  au 
«  poing.  »  (Percef.  Vol.  III,  fol.  5,  R-  col.  2.) 

Besoin  sera  que  je  Vatlincte 
Comme  si  ce  fut  pour  un  comte. 

L'An,  dos  sept  Dames,  cité  par  Borel,  Dict.  au  mot  Atinclé. 

Ce  mot  a  signifié  aussi  accommoder,  disposer, 
arranger  :  «  Je  vous  prie  que  vous  atintiez  si  bien 
«  tout,  que  vous  n'ayez  point  de  besoin  de  vous 
«  excuser  sur  dire  ijue  vous  ne  cuidiez  pas  qu'ils  y 
«  vinssent.  »  (Duclos,  Preuv.  de  Louis  XI.)  «  Elle 
"  les  mist  en  une  bouteille  juste,  l'estouppa,  et 
"  attintn  pour  la  porter  sûrement.  ■>  (Percef.  Vol. 
VI,  fol.  117,  R''col.2.) 

Enfin  altinter,  pris  au  figuré,  se  disoit  pour 
coiffer,  enivrer,  comme  on  le  disoit  en  parlant  de 
vin  bu  avec  excès  :  «  Pippes  et  tonneaux,  plains  de 
«  vin  furent  là  mis  sur  le  cul,  et  deffoncez,  pour 
•■  altinter  les  testes  de  ceulx  qui  debvoient  aller  à 
«  l'assault.  >•  (J.  d'Auton,  Annal,  de  Louis  XII,  p.  44.) 

Attintées  a  été  aussi  employé  avec  le  sens 
d'ajustées:  «  Quand  donques  toutes  les  trois  déesses 
«  furent  prestes  et  attintées,  chacune  s'esleva  de 
«  terre,  et  .se  meirent  en  la  voye.  »  (.F.  Le  Maire, 
Illustr.  des  Gaules,  Liv.  I,  p.  97.) 

VARIANTES  : 
ATINTER.  Duclos,  Preuv.  de  Louis  XI,  p.  373. 
Atincter.  Dict.  de  Corn. 
Attincter.  Borel,  citât,  au  mot  Atiiicté. 
Attinteler.  Percef.  Vol.  III,  fol.  23,  R»  col.  1. 
Attinter.  Monet,  Nicot,  Cotgrave. 

Atinté,  participe.  Paré,  orné,  ajusté,  équipé. 
<■  La  fist  coucher  en  un  lict  li  plus  noblement  atinté 
"  qu'il  peust  faii'e  ordonner.  »  (Percef.  Vol.  III , 
fol.  128,  R"  col.  1.) 

Sera  aujourdhui  atlincté 

Comme  ung  duc,  comme  ung  conneslable. 

Coquillarl,  p.  16. 

«  11  fist  son  armée  par  mer  non  grande  ;  mais  de 
"  peu  de  navires  forte,  et  puissante,  bien  attintée, 
»  et  garnie  de  gens  preux  et  vaillans.  »  (Ilisl.  de  la 
Toison  d'Or,  Vol.  I,  fol.  78.)  «  Y  trouva  trois  beaux 
«  bains  honnestement,  et  richement  attintelez.  » 
(Chron.  scandai,  de  Louis  XI,  p.  120.) 

variantes  : 
ATINTÉ.  Percef.  Vol.  III,  fol.  128.  R»  col.  1. 
Attincité.  Coquillart,  p.  16. 
Attinté.  Hist.  de  la  Toison  d'Or,  Vol.  I,  fol.  78. 
Attintelé.  Chr.  scandai,  de  Louis  XI,  p.  120. 

Atii'éement,  adverbe.  Avec  ordre.  Atiréement 
et  par  ordêtie,  avec  ordre  et  par  rang  ;  en  latin 
disposite  et  in  ordinem.  (Dans  la  RegL  de  S'  Ben. 
lai.  fr.  MS.  de  Beauvais,  chap.  ii.) 

Atiremcnt,  subst.  masc.  Arrangement.  — 
Traité,  accommodement. 

On  trouve  atirement  expliqué  par  dispositio , 
distribtitio  dans  la  Rède  de  S'  Ben.  lat.  fr.  ms.  de 
Beauvais.  «  Atiremens des  psalmes,  distributio  psal- 
"  morum.  »  (Ibid.  chap.  xviii.) 


(1,1  Atiller  a  le  sens  d'artilla- ;  on  trouve  dans  Du  Gange  altillium  et  altiltiatoi:  (.\.  e.) 


AT 


295  — 


AT 


Lors  firent  tel  atii-ement 
Que  Guillaume  pour  Iveri 
Prist  Brionne,  et  si  li  guerpi. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  -175. 

On  lil  attirs  des  armes  dans  Brilton  des  Lois 
d'Angleterre,  fol.  42,  pour  préparatif  de  combat.  Le 
P.  Martène,  dans  son  Glossaire,  explique  atirement 
par  composition, 

De  \h,  il  résulte  qu'il  faut  expliquer  autrement 
que  l'éditeur  des  Ordonnances  le  mot  attirement, 
dans  le  passage  suivant:  «  Li  attirement  que  le 
«  Roy  a  fait  des  monoyes  est  liex.  >■  (Ord.  des  Rois 
de  France,  T.  I,  p.  94.)  L'éditeur  dit  dans  une  note  : 
«  L'attirement  estoit  ce  semble  une  ordonnance 
«  par  laquelle  le  Roy  attiroit  à  ses  hostels  les  mon- 
«  noyés  à  refondre,  ou  reformer,  ou  c'estoit  plustost 
"  une  ordonnance  par  laquelle  le  Roy  remetloit,  ou 
"  attiroit  les  monnoyes  affoiblies  à  leur  juste 
«  valeur.  >>  Le  mot  attirement  est  ici  pris  dans  le 
sens  d'ajustement,  arrangement,  ordre. 

Dans  le  sens  de  traité,  accommodement,  ce  mot 
se  trouve  dans  Duchesne.  Gén.  de  Béthune,  p.  134  ; 
titre  de  1247. 

VARIANTES  : 
ATIREMENT.  Reg.  de  S' Ben.  lat.  fr.  MS.  de  Beauvais,col.22. 
Atihance.  Duchesne,  Gén.  de  Béthune,  p.  134  ;  tit.  de  1247. 
Attire.ment.  Ord.  T.  I,  p.  94. 

Ativement.  (Lisez  aliremcnt.y'Reg.  de  S'  Ben.  ubi  suprà. 
Attirs.  (Plur.)  Britton,  Loix  d'Angleterre,  fol.  42,  R<'. 

Atirer,  verbe.  Préparer,  apprêter.  —  Ajuster.— 
Prouver.  —  Traiter,  composer,  arrêter.  —  Avancer. 

Ateiver,  dans  S'  Bernard,  répond  au  latin  covipu- 
nere,  disponere. 

Dans  le  sens  de  préparer,  apprêter,  on  a  dit: 
'<  De  ceux  qui  cmblaunchent  quirs  a  escient  de 
«  bestes  emblés,  de  redoublours  achantaunlz  ù 
«  scient  dras  emblés,  et  les  attire  en  autre  forme.  » 
(Britton,  Loix  d'Angl.,  fol.  71,  V°.) 

On  disoit  aussi  ^'atirer  pour  s'ajuster  : 

Mi  cavalier  de  prime  barbe 
Si  n'ont  cure  d'escouse  barbe  ; 
Mais  armes,  et  cevaus  désirent 
Et  les  Biaus  de  ras  dont  ils  s'atirent 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  145. 

Parlant  de  l'ajustement  des  femmes  aux  anniver- 
saires pour  donner  de  l'éclat  à  leurs  yeux  et  à  leur 
figure,  un  poète  a  dit  : 

Voyez  comment  elles  scaivent  tout  leur  corps  attirer. 

J.  de  SIeung,  vers  1219. 

Dans  le  sens  de  procurer,  on  a  dit  :  «  J'ay  por- 
«  chasée,  et  atirié.  » 

Qu'en  sospirant  m'en  vois  au  port. 

Poes.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  H3i. 

Selon  le  Gloss.  du  P.  Martène ,  atirer  et  attirer 
signifioient  :  traiter,  composer,  arrêter.  Ph.  Mous- 
kes, parlant  de  l'entrevue  d'Henry,  Roy  d'Angle- 
terre, et  de  Ph.  Auguste,  dit  en  ce  sens  : 

Li  parlemens  lues  (1)  asanbla, 
Si  lirent  pais,  et  aiuerent, 
Si  com  leur  hom  devisèrent. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  508. 


La  pès  fù  atirée  (2).  (Contin.  de  G.  de  Tyr  Martène, 
T.  V,  col.  634.) 

Enfin  on  disoit  s'atirer  pour  s'avancer,  «  à  lui 
«  satire.  »  (Gace  de  la  Bigne,  ms.  fol.  07,  R°.) 

VARIANTES    : 
ATIRER.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  145. 
Ateirer.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.j).  125. 
Atirier.  Poés.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1134. 
Atteiœr.  D.  Carp.  S.  au  Gl.  de  Du  Gange,  à  Alirimentum. 
Attirer.  Britton,  Loix  d'Angleterre,  fol.  71,  V». 
Attirier.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  114. 

Atirés,  part.  Orné,  paré.  —  Exécuté.  —  Mal- 
traité. 

Dans  le  premier  sens,  d'orné,  paré,  on  employoit 
aussi  le  mot  tiré,  qui  n'est  peut-être  qu'une  con- 
traction du  mot  ati)'é,  dans  celle  acception. 

Ph.  Mouskes,  parlant  du  sacre  de  Louis  VIH,  dit  : 

....  Messire  Loeisvint 
Si  atirés,  cora  lui  convint. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  051. 

Atiré,  pris  dans  le  sens  d'arrangé,  réglé,  s'est  dit 
aussi  pour  exécuté,  en  parlant  du  testament  de 
Charlemagne. 

Tôt  ensi  com  li  Rois  ot  dit, 
Fti  atiré,  sans  contredit. 

Ph.  Mouskes,  MS. 

Enfin  nous  trouvons  rt//»'e',  attyré,  pour  ajusté, 
accommodé,  et  au  figuré  pour  maltraité.  «  Battuz, 
«  emprisonnez,  on  autrement  si  attire:^  qu'ils  ne 
"  pussent  servir.  »  (Britton,  des  Loix  d'Angleterre, 
fol.  .Vi.)  «  Chemins  debrisés  (3)  ou  autrement  maie 
-  attirez.  -.  (îbid.  fol.  31,  R°.) 

VARIANTES    : 
ATIRÉS.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  a54. 
Atirée.  Gloss.  du  Roman  de  la  Rose. 
Attiré.  Britton,  Loix  d'.\nglelerre,  fol.  52,  R". 
Attyré.  Ibid.  fol.  31,  R». 

Atisement,  subst.  masc.  L'action  d'attiser, 
d'embraser.  —  Instigation. 

Au  premier  sens  on  disoit,  en  parlant  des  pein- 
tures qui  étoient  sur  la  tente  de  Sadoine  (4)  : 

Escrit  i  sont  le  jugement 
D'amors,  et  li  atisement 
Des  acolers,  et  des  baisers 
Des  dames  et  des  chevaliers, 
Et  li  grant  soupir  des  puceles. 

Blanch.  US.  de  S'  Germ.  fol.  187,  V  col.  i. 

Au  figuré,  pour  instigation,  agacement,  provoca- 
tion, l'action  d'inciter  ou  d'exciter.  (Voy.  Dict.  d'Ou- 
din,  au  mol  Attisement.)  «  Fut  donnée  en  mariage 
«  par  \'atisement  de  la  Cour  de  Rome  ii  Henry.  .> 
(Chron.  de  S'  Denys,  T.  I,  fol.  270.)  «  Pour  Vattise- 
"  ment  (5)  de  sa  femme,  le  mary  qui  est  de  noble 
"  courage  et  haut,  se  combat  en  camp.  »  (Les  15 
Joyes  du  Mariage.) 

VARIANTES  : 
.\TISEMENT.  Chron.  S'  Denys,  T.  I,  p.  270,  V°. 
Attisement.  Oudin,  Dict. 

Atiser,  verbe.  Attaquer,  exciter,  inciter.  On  a 
dit  atisa  (0)  dans  le  patois  breton.  Voyez  le  Gloss.  de 


(1)  Sur  le  champ.  —  (2)  La  paix  fut  arrêtée.  —  (3)  Rompus.  —  (4)  Dérivé  de  Sade  (Sapidus),  agréable,  employé  comme 
nom  propre  dans  les  allégories  du  moyen-âge.  (n.  e.)  —  (5)  L'Editeur  l'explique  à  la  persuasion  de  sa  femme,  et  on  lit  en 
marge  invitation.  —  (6)  Le  mot  vient  du  bas-latin  atticinari,  dérivé  lui-même  de  titio,  tison.  (N.  E.) 


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ruist.  de  Bretagne,  au  mot  Attiser,  où  on  lil  ces 
vers  : 

Pour  ce,  beau  fils,  veux  raisonner, 
Aflin  que  mieux  sois  avisé. 
Si  en  tel  fait  es  attise. 

Les  acceptions  de  ce  mot,  et  plusieurs  de  ses 
orthographes,  rentrent  dans  celles  du  verbe  Aatir. 

Mais  nul.  pour  grant  elergie  ne  se  doit  trop  priser 
Ne  ceux  qui  bien  luy  font  grever,  ne  depriser, 
Ne  par  ses  grans  paroles  haynes  attaisier. 

J.  de  MeuDg.  Cod.  vers  1033-1035. 

v.\RiANTf:s  : 
ATISER.  Gloss.  du  Roman  de  la  Rose. 
Atisa,  mot  breton.  Gloss.  de  l'Hist.  de  Bretagne. 
Atizkr.  Cotgrave,  Dict. 

Attiser.  Oudin,  Gloss.  de  IHist.  de  Bretagne. 
AcTissER.  Lanc.  du  Lac,  T.  I,  fol.  132,  V»  col.  1. 
Attisonner.  Oudin  et  Cotgrave,  Dict. 
Aticer.  Gloss.  du  Roman  de  la  Rose. 
Aticieu.  Gloss.  du  Roman  de  la  Rose. 
Atisser.  Fabl.  MS.  du  B.  n"  7G15,  T.  I,  fol.  120,  R»  col.  2. 
Attaisier. 

Atitiiler,  verhr.  Intituler,  qualifier.  «  Ce  puis- 
«  sant  lîoy  Matliins,  tils  du  Blanc  chevalier  de  la 
"  Valaquie,  à  présent  «///î^/c' l'.oy  du  dict  royaume.  » 
(Méin.  d  Olivier  de  la  Marche,  p.  12.)  «  Lorsque  les 
«  gens  de  guerre  se  nommoient,  et  attituloient 
«  guvsières  et  Philippus,  etc.  »  (Lettres  de  Louis  XII, 
T.  i,  p.  143.) 

vAniA^TKs  : 

ATITULER.  Mém.  dOlivier  de  la  Marche,  p.  12. 

Attitller.  Lettres  de  Louis  XII,  T.  I,  p.  Î43. 

Atoillié,  s?ii;si.  [cm.  On  trouve  dans  Froissart 
la  l'orme  atoillié  pour  atteler  ;  le  présent  mot  doit 
éire  le  substanlil'  verbal  de  ce  verbe  et  signifier 
action  d'atteler,  au  figuré  -  sans  tarder.  »  (ms.  de 
Froissart,  Poës.  p.  224,  col.  2.) 
Y  atoile  quatre  chevaus. 

Atoivre,  subst.  masc.  Equipage  ou  agrès. 

Quar  nus  ne  voit  sa  bêle  nef 
Ne  son  atoivre  (1),  ne  son  tref. 

Parlon.  de  Hlois,  MS.  de  S-  Gemi.  fol.  140,  R-  col.  2. 

Atoniber,  verbe.  Couvrir  d'une  tombe.  "  Fust 
«  noblemenl  mis  en  sépulture,  et  honorablement 
«  atornbé  d'or  et  d'argenl.  »  i,Cliron.  fr.  ms.  de  Nan- 
gis,  an  1224,  p.  2.) 

Atome,  svbsl.  fém.  Atome.  Ce  mot  subsiste, 
mais  comme  masculin  ;  on  l'employait  autrefois 
comme  féminin.  En  voici  un  exemple  : 

Encor  es  tu  plus  petit 

Que  n'est  une  atome  parfaite. 

Les  Touches  de  Des  Accords,  fol.  45,  Y*. 

Atonner,  verbe.  Etonner,  élourdir.  «  Ou  pays 
»  de  France,  et  Normandie  niilz  ne  porte  telz  ins- 
«  Irumens,  se  ne  sont  pouvres  avugies,  ou  autres 
«  gens  quérans  leurs  vies  dont  iîz  atonnent  les 
.  gens.  .'  (Hisl.de  13.  Du  Guesclin,  par  Mén.  p.  230.) 

Atorny,  subst.  musc.  Trocurateur.  «  Abusion 


"  est  11  reteiner  fl/orni/,  sans  brève  de  la  chancerie.  • 
(Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Atturnatus.  — 'Voy. 
Attourné.) 

A  toto.  Terme  de  droit.  C'est  un  mot  latin  qui 
signifie  du  lout,  «  droicis  censuels  et  autres  droits 
«  seigneuriaux  ne  se  peuvent  prescrire  à  toto,  mais 
"  bien  à  tanto  »  (Coutumes  générales.) 

Atoiiclier,  verbe.  Toucher,  toucher  de  près.  — 
Dire,  parler,  faire  mention. 

Atocher  ei  Atochier,  dans  les  Serra,  fr.  mss.  de 
S'  Bernard,  répond  au  latin  Tangere  et  Attingere. 
Ce  mot  s'employoit  pour  toucher,  au  propre  et  au 
figuré. 

Adieux  Picart,  adieu  douce  Biétrix  ; 
A  ce  départ  fault  que  je  vous  atouche  : 
Baisir  vous  vueil. 

Pocs.  MSS.  d'EusI.  De.sch.  fol.  233.  col.  3. 
■  Amors  ctoche,  a  droit  essai 
Qui  plus  essaucs  cuer  verai 
Quant  il  plus  s'nmelie. 

Gautier  d'Esfinais.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  172. 

'<  Ey.cep\.é  ]e  cas  qui  a toiKj lient  au  souverain,  si 
coiiie  se  il  li  font  despit.  »  (Beaumanoii',  p.  181.) 

Certes  onc  n'atotisa  ma  main. 

Fabl.  MSS.  de  S  Gcrm.  fol.  36.  V-  col.  1. 

On  trouve  aussi  le  mot  Attoucher,  pour  toucher 
de  près,  être  pareni,  acception  qui  appartient  aussi 
à  notre  mol  loucher.  Ainsi  on  disoit  :  «  Le  meurdre 
«  commis  en  la  personne  d'un  parent  noslre,  ou 
«  allié,  est  crime  beaucoup  plus  horrible  que  celuy 
«  qui  seroit  commis  en  la  personne  d'un  qui  ne 
!•  nous  attoucheroit  [)Oinl.  »  (Apol.  poui- Hérodote, 
pages  282  et  283.) 

"  Attoucher  \e  droit  de  l'empire,  »  c'est-à-dire 
avoir  des  droits  à  l'Empire.  »  Laquelle  Katerine 
«  atouchoit  de  droit  le  droit  de  l'Empire  de  Cons- 
"  tentinoble.  »  (Chron.  Fr.  ms.  de  iNangis,  sous  l'an 
1300.)  On  lit  dans  le  latin  :  Jus  imperiicontingebat. 

Ce  mot  a  été  employé  dans  le  sens  de  dire,  faire 
mention  :  «  Ceu  keju  briement  vos  ai  atocliiet  me 
«  semble!  estre  assez.  »  (S'  Bernard,  Serin,  fr.  mss. 
p.  348.)  On  lit  dans  le  latin  :  Sufficit  corda  breviter 
tetigisse. 

VARIANTES  : 
ATOUCHER.  Eust.  Pesch.  Poës.  MSS.  fol.  236,  col.  3. 
Atocher.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  93. 
Atociiier.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  iOO  et  pnssim. 
Atouquer.  Beaumanoir,  p.  181. 
Atouser.  Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  fol.  36,  V  col.  1. 
Attoucher.  Apol.  pour  Hérodote,  p.  283. 
Atouchier.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  2IG,  V». 
Tucher.  Marbodus,  col.  1056. 

Atouper  (2),  verbe.  Boucher,  fermer.  «  Qui 
«  atoupe  chemins  doit  soixante  sols.  »  (Ane. 
Coût.  d'Orléans,  à  la  suite  de  Beaumanoir,  p.  468.) 

Atour,  subst.  7nasc.  Piéparatif.  —  Parure,  ar- 
mure. —  Figure,  maintien.  —  Coiffe  ou  coiffure  et 


{\)  Cf.  Rom.  du  Renart,  t.  I,  p.  44,  vers  1137  :  «  Fors  tant  c'un  pertuis  i  avoit  Qui  des  vilains  fait  i  estoit,  Où  il  menoient 
lor  atoivre  Chascune  nuit  juer  et  boire.  »  On  trouve  aussi  dans  Parton.  de  Blois  le  simple  toitrrp:  <i  Qu'il  puet  véir  tôt  cler 
le  tref  Et  loi.  la  toivra  de  la  nef  (vers  753).  »  Voir  une  note  de  Grimm.  }h-i»!itirt  Fucks  (p.  Livj.  (N.  E.)  -  (2)  Ce  nio!  a  le  sens 
de  l'italien  loj^o  (rat;  et  du  latin  utoiiivare  (Muratori  XVI,  491),  faire  des  trous  comme  les  rats.  (n.  e.) 


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sorte  de  coiffure  particulière.  —  Statuts.   (Voyez 
Attouhnfmem  et  Attouriner.) 
Dans  le  premier  sens,  de  préparalif,  on  a  dit  : 

Quist  (1)  gent,  si  se  mist  en  la  tour, 
Pour  deflendre  fist  son  aloiir. 

Pli.  Moufkes,  MS.  p.  415. 

Nequedent  bel  utor  fait  laire 
De  menger,  et  de  luminaire. 

Fabl.  MSS.  de  s.  Gcrra.  fol.  ii,  V"  col.  2. 

Ce  mot,  pris  dans  le  sens  de  piéparatif  de  guerre, 
s'employoit  quelquefois  pour  désigner  une  armée  : 

Ot  fait  son  père  Garnier 

De  son  aloio-  confannonnier. 

l'h.  Mouskes,  MS.  p.  260. 

Appliqué  aux  préparatifs  de  toilette ,  ce  mol  a 
signilié  parure,  ajustement.  On  dit  encore  au  plu- 
riel atours,  en  ce  vers  : 

Prendre  et  avoir  trop  curieux  atours. 

Eusi.  Descli.  Pocs.  MSS.  fol.  250,  col.  4. 

On  disoit  dans  le  même  sens,  atlour,  astour. 
(Voy.  lesDict.  de  Nicot,  (^otgr.,  Rob.  Estienne,  etc.) 
On  nommoit  chambre  d'atour,  celle  où  les  femmes 
se  paroient.  (Petit  .Jean  de  Saintré,  p.  .575.) 

On  trouve  souvent  le  mot  Atoiir  employé  pour 
armure,  comme  dans  les  vers  suivants  : 

Les  armes  trenchanz  rebondissent 
En  pluseurs  lieus  au  deslacier 
Sur  les  riches  atours  d'acier. 

G.  Gularl,  MS.  fol.  125,  R'. 

Ator  s'est  pris  aussi  pour  tournure,  figure,  main- 
lien. 

Simple  et  de  bel  ator. 

Jthan  Eras,  Poêt.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  191. 

11  y  avoit  autrefois  une  sorte  de  coifl'ure  de  fem- 
mes qu'on  nommoit  yl^oi<?'.  (Voy.  Monet,  Dict.,  et 
Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mol  Atorna.) 

On  lit  ailleurs:  «  Atours  tout  rond  à  la  façon  de 
«  Portugal  (2),  dont  les  bourrelets  étoient  à  la  ma- 
«  nière  de  franges  et  passoient  par  derrière,  ainsi 
"  que  pattes  (3)  de  chapperons  pour  hommes.  » 
(Mémoires  d'Olivier  de  la  Marche,  Liv.  T,  p.  432.) 

Une  autre  coiffure  se  nommoit  atour  de  gibet, 
parce  qu'elle  éloit  montée  fort  haut.  (Le  Chevalier 
de  la  Tour,  Instructions.)  De  là  on  appeloit  toile 
d'atour,  la  toile  qui  servoit  aux  coiffures.  (Voy. 
Petit  .J.  de  Saintré,  p.  H5  et  288.) 

Enfin  on  appeloit  atours,  les  statuts  et  ordon- 
nances faites  par  les  maires  des  villes,  oîi  ces  offi- 
ciers étoient  nommés  atournés.  (Voy.  la  Coût,  de 
Metz,  au  Coût.  gén.  T.  I.)  Suivant  le  Gloss.  du 
R.  de  la  Rose,  Atour  doit  être  pris  dans  le  sens 
de  préparatifs  servant  à  leur  deffense,  ou  de  leurs 
entours,  soit  remparts ,  soit  soldats,  soit  artil- 
lerie, etc. 


VARIANTES  ." 
ATOUR.  Dict.  de  Monet.  -  Gloss.  du  Roman  de  la  Rose. 
Attour.  Dict.  du  Rob.  Estienne. 
Astour.  Nicot  Pt  Cotgrave. 
Ator.  Dict.  de  Borel. 

Atournure,  subst.  fém.  Coiffure. 

Atournez-vous  d'une  atournure  plaine. 

Eust.  Desch.  Po6s.  MSS.  fol.  327,  col.  *. 

Atout,  adv.  Tout,  avec  et  quoique.  On  lit  dans 
Marbodus,  col.  1GG8  :  «  Des  le  matin  lot  le  eveil- 
«  tant  »  qu'on  doit  expliquer  ainsi,  «  avec  le  jour 
«  croissant,  au  jour  croissant.  »  —  Pour  quoique, 
comme  qui  diroit  :  avec  tout  celù  que.  On  lit  dans 
Duchesne,  Gén.  de  Bar-le-Duc,  p.  31,  titre  sansdate, 
à  la  suite  des  lettres  de  t2'i9:  «  Tout  estoient  h 
Rois  et  ses  gens  en  defance.  >• 

Les  Italiens  ont  conservé  l'analogie  qui  e.xiste 
entre  ce  mot  et  avec  dans  cette  phrase.  «  Con  tutto 
«  cio  sia  cosa  che  »  qui  signifie  quoique. 

A  tout,  est  employé  avec  le  sens  d'avec,  dans  le 
passage  suivant  :  «  Ces  trois  vénérables  mignonnes, 
«  ces  trois  chiennes  enragées  ministres  d'enfer  et 
«  députées  au  service  de  Pluton,  a  tout  leurs  che- 
«  veux  colubrins,  furent  celles  qui  tindrent  les 
«  flambeaux  préjudiciables,  et  les  malheureuses 
«  torches  autour  du  lict  des  deux  adultères,  Paris 
«  et  Heleine.  >>  (.1.  le  Maire,  Illuslr.  des  Gaules, 
Liv.  II,  p.  193.) 

Atout  a  été  employé  dans  le  sens  d'encore,  en 
outre.  Ce  mot,  dans  les  Serm.  Fr.  mss.  de  S' Bernard, 
répond  au  latinCHm.  (V.leGlos.  des  arrêts  d'amour, 
le  Glos.de  rilist.de  Paris  et  le  Dict.de  Monet,  comme 
ce  mol  se  décline.)  Cela  pourroit  faire  conjecturer 
qu'il  est  formé  de  la  pérposition  à,  qui  s'est  dit  pour 
avec,  et  du  moi  tout...  «  A  atoutes  haches  »,  c'est- 
à-dire  avec  des  haches.  (Chron.  de  S'  Denis,  T.  Il, 
fol.  219.)  «  A  toute  sa  gent  »  c'est-à-dire  avec  sa 
suite.  (Petit  .1.  de  Saintré,  p.  405.)  «  Il  monta 
«  tantost  à  cheval  a  tout  tant  qu'il  peut  avoir  de 
«  gens.  ..  (Percef.  Vol.  I,  fol.  30,  R°  col.  2.  -  Voy. 
aussi  Arresta  amor,  p.  21.  —  Coquillart,  p.  127.  — 
Ger.  de  Nevers  I"  part  p.  19.  —  Clëm.  Marot. 
—  Essais  de  Montaigne.  —  Rabelais.)  «  A  toute 
«  neiz.  »  (Rom.  du  Brut,  ms.  fol.  109.)  «  A  toute 
«  nois.  »  (Ibid.  fol.  39),  c'est-à-dire  avec  des 
navires. 

On  disoit  aussi  : 

\'  Atout,  pour  dire:  pendant  tout...  «  Disant  qu'il 
«  s'en  souviendroit  a  tout  le  temps  de  sa  vie.  » 
(Nuits  de  Strapar.  T.  I,  p.  20.) 

2°  Jouer  a  tout,  pour  dire  :  jouer  de  son  reste, 
ou  n'épargner  rien,  faire  tous  ses  efforts,  c  Quant 
«  ils  se  virent  ainsi  assiégez  si  jouèrent  a  tout,  car 


(-1)  chercha.  —(2)  Vatour  prit  naissance  vers  le  milieu  du  règne  de  Charles  V.  On  remplaça  le  fronteau  de  perles  ou 
d'orfèvrerie  placé  en  avant  de  la  coifle  par  des  bourrelets  en  forme  de  cœurs,  de  trèfles,  de  cornes  montantes  et  rabattues. 
Au  temps  d'Olivier  de  la  Marche,  la  femme  de  Philippe  le  Bon  était  Portugaise  et  mit  en  honneur  les  modes  de  son  pays. 
Elles  étaient  d'une  bizarrerie  inimaginable.  Vatour  du  portrait  du  Louvre,  n»  59'2,  où  le  bourrelet  est  un  pain  fendu  dressé 
sur  calotte,  avec  pièce  d'étoffe  retombant  sur  le  cou,  donne  une  idée  de  la  coiffure  ainsi  décrite,  (n.  e.)  —  (3)  Lorsqu'on 
mettait  sa  tète  dans  la  visagère  du  chaperon,  ouverture  réservée  au  visage,  la  coiffe  ou  cornette  ne  retombait  plus  sur  la 
nuque,  mais  était  roulée  comme  un  turban  :  s>ir  le  côté  descendaient  alors  les  plis  du  cjuleron,  c'est-à-dire  Tencolure,  qui 
était  appelé  pattes.  Le  chaperon,  qui  était  à  l'origine  un  domino,  devenait  ainsi  une  casquette.  (N.  e.) 

II.  38 


AT 


-  298  — 


AT 


«  ils  avoient  assez  canons  et  artillerie.  »  (Journ. 
de  Paris  sous  Charles  VI  et  VII,  p.  185.) 

ii"  Atout-  par  soy,  pour  dire:  tout  seul.  «  Quand 
.  ils  vindrent  onla  salle  si  encontrerent  le  père 
«  qui  encontre  eulx  veuoit,  si  comme  il  pareil,  car 
«  il  avoit  eu  tant  de  mal  qu'il  ne  alloil  ne  que  atout 
«  par  soy  une  toise  de  terre.  »  (Lanc.  du  Lac,  T.  I, 
fol.  14-2.1 

4"  Atout,  pour  dire:  alors,  en  même  temps, 
aussitôt.  «  Quand  le  guet  apperceut  nos  gens,  il 
«  sonna  atout,  et  les  Anglois  saillirent  à  l'escar- 
•  mouche.  »  (Ilist.  d"Artus  111,  Connest.  de  Fr.  duc 
de  Bretagne,  p.  7G6.) 

VARIANTES  : 

ATOUT.  J.  de  Meun.  test.  295. 

Ato.  Perard,  Hist.  de  Bourg,  p.  450  ;  lit.  de  1241. 

Atot.  S'  Bernard,  Serni.  Fr.  MSS.  p.  46  et  passim. 

Atote,  et  Atotte  pour  le  fém.  S'  Bernard,  Serra.  Fr.  MSS. 
p.  190,  et  Duchesne,  Gén.  de  Chatillon,  p.  283  ;   tit.   de  1241. 

Atotes,  fem.  plur.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  p.  216. 

Atoutte,  fém.  singul.  Duchesne,  Gén.  de  Bethune,  p.  131  ; 
tit.  de  1243. 

Atrabile,  adj.  Atrabilaire.  (Dict.  d'Oudin,  au 
mot  A  trahlle,  elDicl.  de  Colgrave  au  mot  Atrebi- 
liaire.) 

■VARIANTES  '. 
ATRABILE  Oudin. 
Atrebiliaire.  Cotgrave. 

Atraction,  mbst.  fém.  Attraction.  «  Par  l'a^rac- 
«  tion  des  mauvaises  planètes  seront  élevées 
«  fumées  corrompues.  »  (Modus  et  Racio,Ms.  fol.  319.) 

Atraiance,  subst.  fém.  Attrait.  (Voy.  ce  mot, 
avec  ce  sens,  dans  les  Fabl.  mss.  du  R.  n°  /"il 8, 
fol.  224.) 

Atraichant,  part.  Atlrayaul.  On  trouve  cette 
orthographe  dans  une  Chans.  du  \m'  siècle,  (ms.  de 
Bouh.  fol.  t>80.) 

Atraicté,  partie.  Acheminé.  Ce  mol,  formé  du 
substantif  traî/f?  pris  pour  rowfe,  se  trouve  employé 
en  ce  sens  dans  un  ancien  ouvrage  de  Vénerie  ; 
il  s'agit  d'une  truie  que  les  chiens  chassent,  au 
lieu  d'un  sanglier:  «  Elle  fuira  deux  jours  devant 

«  les   chiens, et  puis   qu'elle  est  atraictée, 

«  jamais  ne  la  preudroient  à  force.  »  (Modus  et 
Racio,  fol.  27.)  On  trouve  atratlé  dans  le  même 
ouvrage,  et  pris  dans  le  même  sens,  fol.  .51.) 

VARIANTES   : 
ATRAICTÉ.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  27,  V». 
Atraté.  Ibid.  fol.  28,  R°. 

Atraires,  subst.  masc.  plur.  Action  d'attirer, 
de  séduire.  (Voy.  Attraire.)  C'est  le  participe  actif 
du  verbe  atraire,  et  c'est  rinfinilif  «/rai/'e  employé 
comme  substantif,  non  pas  selon  l'usage  fréquent 
d'y  joindre  un  article,  mais  en  le  déclinant  et  le 
mettant  au  pluriel. 

Miex  vaut  services,  et  alraircs,  etc. 

Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  lU,  p.  1056. 

Atrait,  adv.  (Voy.  Trait.) 


Atrament,  subst.  masc.  Encre  à  écrire.  (Dict. 

d'Oudin),  au  mot  Atrament «  estoient  de  cou- 

«  leur  plus  noire  que  atrament.  »  (Percef.  Vol.  IV, 
fol.  22.)  <■  Ung  sarrazin  aussi  noir  que  arrement.  » 
(Cliron.  de  S'  Denis.)  On  lit  dans  le  lat.  de  Turpin  : 
suracenum  atrum. 

Plus  sont  noirs  que  arremciit. 

Pues.  MSS.  avaiil  1300,  T.  IV,  p.  U78. 

VARIANTES  : 

ATRAMENT.  Froissart,  Liv.  II,  p.  182. 

Attrament.  Oudin,  Dict. 

Attrement.  Percef.  Vol.  V.  fol.  24,  "V"  col.  1. 

Atrkment.  Cotgrave,  Dict. 

Artement.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  fol.  190,  V  col.  2. 

Arrement.  Poës.  MSS.  d  Eiist.  Desch.  fol.  212,  col.  4. 

Arement.  Percef.  Vol.  VI,  fol.  58,  R»  col,  1. 

AiKEMENT.  Id.  Vol.  V,  fol.  68,  V"  col.  1. 

Atraver,  verbe.  Attrouper,  assembler.  Il  semble 
formé  du  mol  Tref,  tente,  qu'on  verra  ci-après. 
Henri  lils  de  Guill.  le  Bâtard  se  fait  couronner  Roi 
d'Angleterre,  au  préjudice  de  Robert  son  frère  aîné 
qui  éloit  allé  à  la  croisade  d'outre-iner  : 

Apriés  moult  petit,  demora 
Que  li  dus  Robiers  repaira 
De  Surie,  et  fu  moult  irés. 
Que  Henris  ses  frères  mains  nés  (1) 
Rois  estoit  fais,  s'il  deust  i  estre  : 
Apriés  atorna  tout  son  iesLre  (2) 
A  moult  grant  gens  k'il  atrava 
En  Engletiere  s'arriva. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  469. 

«  Atravé  sont  à  la  mue.  »  (ms.  cité  par  Du  Gange, 
Gloss.  lat.  au  mot  Trebudcbetum.) 

Soixante  mille  du  roi  furent  esmé. 
Prennent  le  lieu  où  il  sunt  atravé. 

Agol.  y.  693. 

Atraverser,  verbe.  Traverser.  Percer  de  part 
en  part. 

A  une  foiz  qu'il  n'ost  joster. 
Le  voit  armant  atraverser. 

Parlon.  de  Blois,  MS.  do  S'  Germ.  (ol.  158,  V  col.  1. 

Atreiner,  verbe.  Entraîner,  amener,  attirer. 
Les  poêles  ont  dit  : 

plus  que  les  nuits  sont  sombres 

Puissent  les  jours  ombreu.K  pires  moux  atreiner. 

(Euv.  de  Baif,  fol.  67,  Vv 
Piétons  alrahicnt  eschieles 

G.  Guiart,  MS.  fol.  35.  R*. 

VARIANTES  : 
ATREINF.H.  Baïf.  fol.  67,  V». 
Attrainer.  Percef.  Vol.  VI,  fol.  62,  R»  col.  1. 
Atrainer.  g.  Guiart,  MS.  fol.  35,  R". 

Atrès,  adi).  au  masc.  J9/«j'.  Atteints,  convaincus. 
«  Gens  atrès  ,  et  condainpnez  de  vilains  cas.  » 
(Beau m.  p.  il.) 

Atrever,  verbe.  Faire  trêve.  «  Les  Royaumes 
«  d'Anglelerre  et  d'Ecosse,  s'estoienl  atrevés  en- 
«  semble.  »  (Froissart,  Liv.  11,  p.  268.) 

VARIANTES  : 
ATREVER.  Froissart,  Liv.  II,  p.  268. 
Atriver.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  169,  V». 

Atrie,  subst.  L'estre,  le  lieu.  C'est  le  sens  ap- 
parent de  ce  mol  dans  le  passage  suivant  ot"!  l'on 


(1)  Moins  né,  cadet.  —  (2)  Tout  ce  qu'il  avait,  tout  son  bien. 


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-  29»  — 


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parle  de  Philippe-Auguste    avant   la    bataille   de 
Bouvines : 

La  Truie  s'est  d'entraux  partis, 
Al  Roi  s'en  vint  tous  aatis 
Tout  droit  en  Vatrie  de  Bovines. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  581. 

Atrier  (1),  subst.  mase.  Le  lieu  où  se  tient  la  jus- 
tice du  Seigneur.  Laurière  (Gloss.  du  Dr.  Fr.lprétend 
que  ce  mot  est  d'usage  en  ce  sens  en  Normandie. 

Atrimer,  verbe.  Piller,  prendre,  voler.  Mot  de 
jargon.  (Voy.  le  Dict.  d'Oudin.) 

Atriquei*(2),  verbe.  Ajuster,  préparer.  Voici  plu- 
.sieurs  passages  qui  peuvent  aider  à  faire  sentir  la 
signification  peu  déterminée  de  ce  mot  : 
Li  kaillo  qui  issent  des  fondes. 
Qu'aucuns  pour  droit  geler  alriqucnt. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  69,  R'. 
Mais  escoutez  ce  gaudisseur 
Pourveu  qu'il  soit  bien  atrUjué, 
Et  vostre  gozier  apliqué, 
Il  vous  fera  grand  bien,  ma  seur. 

Œuv.  de  R.  de  Collerye,  p.  78. 
Quand  la  dame  est  bien  atriquée, 
Alors  congnoist-on  son  couraige. 
Ibid.  p.  79. 

Atroce,  adj.  Grave.  Ce  mot  se  dit  surtout  pour 
qualifier  une  injure.  <■  Atroce  injure  est  quand  on 
«  dit  blasme,  où  injure  à  son  père,  ou  à  sa  mère, 
«  ou  à  son  seigneur,  ou  à  ses  gens,  ou  officiers, 
«  et  qui  ses  robes  ont  vestues,  ou  à  ceul.x  de  la  loy, 
«  ou  de  la  ville  où  on  demeure,  à  son  prélat,  ou  à 
«  son  curé,  et  selon  aucuns  à  son  maisire,  et  en 
«  cette  forme  est  airoce  injure  appellée,  et  fait  trop 
.  griesvement  à  punir,  plus  que  à  autres  personnes, 
«  si  dicte  leur  estoit.  ■>  (Bouteiller,  Somm.  P.ur. 
p.  815.) 

Atrocement,  ariv.  D'une  manière  atroce.  (Dict. 
d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Atrocher  (s'),  verbe.  S'assembler,  s'attrouper  (3). 
Nous  citerons  deux  passages  où  ce  mol  semble  pris 
en  ce  sens  : 

Leur  vienent  tel  noise  menant 
Sanz  ce  qu'omme  ne  leur  responde, 
Qu'il  pert  (4)  que  la  contrée  fonde, 
Par  touz  les  lieux  où  il  s'atrochent. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  227,  V. 

Cil  de  la  contrée  saïment; 
Targes  aux  cols,  testes  armées, 
Banieres  es  lances  fermées  (5) 
S'en  vont,  jà  soit  ce  qu'il  foloient 
Vers  Sestraringue,  où  les  feus  voient, 
Devant  la  gent  le  Roi  s'ati-ochent. 

Ibid.  fol.  2i3,  V*. 

Atronchement,  substantif  masculin.  L'action 
d'apatroner  le  bois.  (Fjaurière,  Gloss.  du  Dr.  fr.) 
«  Atronchement  de  bois  est  un  droit  qu'un  Seigneur 
«  a  de  faire  saisir  par  son  juge  un  arbre  qui  a  été 
«  coupé  et  emporté,  de  le  faire  scier  par  le  pied,  et 


«  ensuite  d'appliquer  ce  qui  en  a  été  coupé  sur  le 
«  tronc  resté  en  terre,  pour  découvrir  ceux  qui  ont 
«  fait  le  vol.  »  (Laur.  Gloss.  du  Dr.  fr.) 

Atronchier,  verbe.  Apatroner  le  bois  coupé. 
Cela  se  fait  en  appliquant  sur  le  tronc  le  morceau 
de  bois  coupé  pour  reconnoitre  s'il  est  effectivement 
sorti  du  tronc.  On  a  dit  assochier  dans  le  même 
sens.  (Pithou,  Coût,  de  Troyes,  p.  46G.  —  Voyez 
Assochier  et  Atronchement.) 

Atropeller,  verbe.  Attrouper,  assembler.  Nous 
trouvons  ce  mot  pour  «  réunir  en  troupe,  »  dans 
les  vers  suivants  : 

Chacez  ces  loups  et  se  nulz  s'atropelle 
En  vos  marchés,  ne  souffrez  le  loRis. 

Poës.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  232,  ool.  4. 
Si  Gerbiers  sa  gent  alropiele. 

Ph.  Mouskcs.  MS.  p.  27. 

VARIANTES  : 
ATROPELLER.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  33i,  col.  4. 
Atropielkr.  Ph.  llouskes,  MS.  p.  27. 
.\TnopELER.  G.  Guiart,  MS.  fol.  42,  V". 
Atrui'ER.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  196,  R°  col.  2. 

Atroté,  part.  Arrivé,  accouru.  —  Acheminé. 
Au  premier  sens,  on  écrivoit  : 

Or  sui  tantost  cy  airotez. 

Hisl.  des  Trois  Maries,  en  vers,  MSS.  p.  274. 

On  trouve  aussi  atroté  pour  acheminé,  en  train 
de  courir,  de  fuir.  En  parlant  d'une  truie  qui  fuit 
devant  les  chiens,  on  disoit:  «  Et  puis  qu'elle  est 
'<  attrottée,  jamais  ne  la  prendroient  à  force.  • 
(Modus  et  Racio,  ms.  fol.  51,  V°.) 

VARIANTES  : 
ATROTÉ.  Hisl.  des  Trois  Maries,  en  vers,  MS.  p.  274. 
Atrotté.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  51,  V». 
Attrosté.  Ibid.  fol.  51,  R». 

Atroter(6),  i'C)'/>c.  Accourir.  Le  poëte  a  dit  dans 
ce  sens  : 

Denier  fet  pautonniers  monter, 
Denier  fet  putains  atrotcr. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n'  7218,  fol.  167,  R*  col.  1. 

Attache,  subst.  Ce  qui  sert  à  attacher  (parure 
de  tête  ou  épingle  de  diamant.)  —  Affiche,  placard. 
—  Insulte,  injure. 

Dans  le  premier  sens,  on  ^  i\\\ei  attaches  des 
chausses.  noucii]uaut  ne  veut  point  s'asseoir  aux 
pieds  de  trois  dames,  et  demande  des  quarreaux  ou 
un  siège,  de  crainte  qu'étant  assis  trop  bas,  \es  atta- 
ches (7)  ne  rompissent,  et  qu'elles  ne  l'attribuassent 
h  une  cause  indécente.  (Voy.  le  Chev.  de  la  Tour, 
Instr.  àsesfilles,  fol.  13.)Onappeloit  bas  d'attaches 
de  grands  bas  qui  alloient  jusqu'au  haut  des  cuisses, 
et  qu'on  attachoit  aux  culottes.  (Voy.  le  P.  Menestr. 
des  Tournois,  p.  199.)  Dans  ce  sens,  on  disoit 
«/ac/ics  pour  agrafîes:  «  EuAtoe/ies,  ou  enjoyaux.  " 
(Fabl.  MSS.  du  R.  n°  7'218,  fol.  176,  R"  col.  2.) 

Attaclie  signifioit  aussi  parure  de  teste,  ou  épingle 


(1)  Se  trouve  dans  Gérard  de  Vienne,  v.  2253,  pour  autr'ier,  l'autre  jour.  (m.  e.)  -  (2)  C'est  sans  doute  comme  étriquer, 
un  dérivé  de  l'allemand  stvekhen,  racler,  puis  ranger.  (N.  E.)  -  (3)  Ce  m  't  se  trouve  encore  chez  ce  même  auteur  (édition 
Buchon,  I,  57),  où  il  signifie  touchant  à  :  «  Et  conquis  Baruch  et  Damas  Et  toute  l'autre  atrochc.  »  (n.  e.)  —  (4)  Pert  pour 
apert,  semble.  -  yZ^)  Par  opposition  à  bannières  déployées,  (n.  e.)  -  (6)  C'est  un  composé  de  trotter,  qui  vient  du  latin 
to^Mfare.  On  trouve  déjà  «o/!((ani(s  pour  trotteur,  dans  Sénèque;  ile  tolutim.  aller  au  trot,  dans  Pline;  lolutare  a  pu  s» 
contracter  en  trotter,  comme  tit'lum  a  fait  titre.  (N.  e.)  —  (7)  Voir  tome  I,  p.  254,  note  1, 


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-  300  - 


AT 


de  diamant.  Le  poëte,  parlant  de  Pygmalion  qui 
essayoil  toutes  sortes  de  coiffures  pour  parer  sa 
statue,  dit  : 

Et  dessus  la  crespine  attacha 
Une  moull  précieuse  attache 
Et  par  dessus  la  crespinete  (1) 
Une  couronne  d'or  pourtraicte. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  21880-21888. 

On  a  dit  aussi  attache  et  atacJie  pour  la  cliose 
attachée,  pour  afficlie,  placard,  écrileau.  (Laurière, 
Gloss.  du  Ltr.  fr.  et  Dict.  de  Monet.)  •>  En  seront 
«  mises  attaches,  ou  affiches  par  escrit  à  la  porte 
.  de  l'Eglise.  »  (Coût.  gén.  T.  I,  p.  3'2:,.) 

Enfin  attache  s'est  employé  pour  insulte,  injure, 
pour  noire  mol  vulgaire  lardoti  :  «  Si  cette  exécra- 
«  ble  inhumanité  commise  à  la  veue  de  toute  la 
«  France  estoit  vraye,  ce  preudhoinme  eust  eslé 
«  grand  mociiueur,  s'il  n'en  eust  baillé  quelque 
«  attache  h  celle  princesse.  »  (Pasquior,  Rech.  Liv. 
V,  p.  427.)  «  Qui  est  donc  aujourd'huy  l'historien 
«  auquel  ces  juges  faicls  à  la  hasle,  ne  donnent 
><  quelque  attache,  et  quelque  coup  de  bec.  » 
(Apologie  pour  Hérodote,  Préface,  p.  111.) 

VARIANTES  : 
ATTACHE.  Laurière,  Glossaire  du  Dr.  fr. 
Atace  et  EsTANCHE.  Arch.  MS.  fo!.  44,  R»  col.  2. 
Atache.  Monet,  Dict. 

AT.V1CHES  (plur.)  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  252,  col.  2. 
Attachez.  Kom.  de  Rou,  MS.  p.  389. 

Attaché,  participe.  Qui  a  des  bas  d'attache.  — 
Lié,  garoLto.  —  Enfoncé,  embourbé.  —  Contraint, 
forcé. 

Nous  avons  vu  qu'il  y  avoit  des  bas  nommés  bas 
d'attache.  De  là,  s'est  formée  celte  expression  : 
Jacques  de  ki  Pnvière  fut  trouvé  mort  dans  sa  prison, 
«  vestu  d'une  robbe  noire  fourrée  do  martres,  avec 
«  un  tissu  dont  il  estoit  ceint  et  serré  qui  estoit 
«  ferréd'or;  et  estoit  chaussé  et  afîac/ié.  «(Jacques 
le  Bouvier,  Chr.  de  1402.) 

Attaché    a    été  employé   avec  le  sens  de  lié, 

garotté:  «  Countes  et  Barons soient  avaunt 

«  semouns  pardetle  que  destreyntz  cl  attachés  par 
«  lourcors;  les  uns  pour  révérence  de  leur  per- 
«  sonnes,  et  les  autres  pour  révérence  de  nostre 
«  service.  >■  (Brilton,  des  Loix  d'Angleterre,  fol.  08.) 

Attaché  s'esl  dit  pour  enfoncé,  embourbé  : 

Povres  bons  qui  es  nez 
En  cort  de  sainte  Eglise 
Est  aussi  alachiez 
Com  chiens  à  terre  glise. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7615,  T.  II,  fol.  Lil,  R'col.  1. 

Attaché  a  été  employé  avec  la  signification  do 
sommé,  contraint,  forcé:  «  Attachés  de  vener 
«  par  personale  détresse.  «  (Britton ,  des  Loix 
d'Angleterre,  fol.  31,  P,°.)  En  ce  sens,  ce  mot  venoit 


ù' attache,  ou  Ôl' attachement  pris  pour  placard, 
affiche,  citation,  ajournement. 
variantes  : 

ATTACHÉ.  Orthographe  subsistante. 

Atachié.  Faljl.MSS.  duR.n"7G15,  T.  II,  fol.  141,  R»  col.  l. 

Attachement,  subst.  masc.  Ajournement  ou 
contrainte  par  corps.  —  Sorte  de  machine. 

Pour  le  premier  sens,  voyez  le  chapitre  \\s\  qui 
porte  pour  titre  de  attaclicmcnls  dans  Britton,  Loix 
d'Angleterre.  On  disoit  aussi  en  ce  sens  atlaclie- 
menles.  (Ibid.  fol.  8,  R".) 

On  trouve  altachemens  à  merces  dans  un  passage 
cité  par  Du  Cange  :  «  Le  marescal  doit  avoir  un 
«  clerq,  ou  un  sergeant,  pour  faire  les  attachemens 
«  amerces  (2),  et  à  prender  ce  que  appent  au 
1  mareschal.  »  (Citation  de  Du  Cange,  Gloss.  lat. 
au  mol  Marescallus  forinsecus.) 

Attachement  étoit  aussi  le  nom  d'une  machine; 
«  Quiconques  fait  nn  puys  a  marne,  et  y  met  atta- 
"  cliement  pour  tirer  la  marne,  il  est  tenu  de 
«  restoupper  bien  et  duement  le  dit  puis,  dès 
«  l'instant  que  Y  attachement  est  oté.  ><  (Nouv.  Goût, 
gén.  T.  L  p.  605.) 

variantes  : 

ATTACHEMENT.  Britton,  Loix  d'Angleterre,  chap.  xxvi. 

Atache.mentes.  Ibid.  fol.  8,  R». 

Attacher,  verbe.  Appliquer.  —  Attacher.  — 
Sommer,  ajourner.  —  Etre  attaché.  —  Attaquer. 

Pour  le  premier  sens,  voy.  le  Dict.  de  Borel  au  mot 
Atager.  «  Si  vous  leur  flWac/ics  un  bon  coup  d'épée, 
«  en  la  poitrine.  »  (Ess.  de  Mont.  part,  n,  p.  198.) 

On  a  dit  avec  le  sens  attacher  : 

Son  escu  à  un  arbre  alairje 
A  un  chesne,  dedans  un  bas. 

Fabl.  MSS.  de  S'  Gcrm.  fol.  SI,  R"  col.  3. 

At lâcher  s'est  dit  pour  sommer  en  justice,  ajour- 
ner, forcer,  contraindre  :  <■  Si  le  pàrty  semounsé 
«  face  defaute,  soit  attaché  de  estre  à  un  autre 
«  jour,  et  si  le  pleyntife  face  de  faute,  et  la  party 
«  seraounsé  ou  ataché  se  profre  (3),  si  chet  la 
«  brefe.  »  (Britton,  Loix  d'Angleterre,  fol.  244,  V°.) 
Vojez  le  chap.  xxvi  de  ce  même  auteur,  oîi  attacher 
est  pour  obliger,  contraindre. 

A  tlacher  a  été  employé  dans  le  sens  d'être  attaché, 
être  collé,  tenir  :  «  Si  se  print  à  plourer  sur  le  col 
«  de  la  pucelle  tant  amèrement  qu'en  peu  d'heure, 
«  il  y  eut  tellement  arrousé  la  guimple  qu'elle  luy 
«  attachoit  à  la  chair  niie,  qui  estoit  aussi  blanche 
«  que  fleur  de  lys.  »  (PerccL  Vol.  111,  fol.  08.) 

On  prononce  encore,  parmi  le  peuple  en  Norman- 
die, attaquer  au  lieu  et  dans  le  sens  subsistant 
d'attacher  [i).  On  écrivoit  autrefois  au  contraire  at- 
tacher dans  le  sens  actuel  d'attaquer  :  «  Après  suy- 
«  voient  douze  cens  arquebusiers  en  quatre  troupes, 
"  ayant  charge  d'altaclier  les  corps  de  garde  de 


(■1)  C'était  une  coiffe  de  soie  recouverte  d'une  résille  et  enfermant  les  cheveux,  (n.  e.)  —  (2)  Il  s'agit  ici  d'un  droit  sur  les 
marchandises,  car,  trois  articles  plus  loin,  on  lit  :  «  Le  Clerq,  qui  est  attorné  d'aller  as  marchies  de  par  le  Boy,  et  de  par  le 
conte  marescal,  doit  avoir  un  contrerole  encontre  le  sergeant  du  marc/de...  »  (N.  E.)  —  (3)  Se  pmfort,  se  présente.  — 
(4)  Af/ai/Kfc'r  n'est  que  la  prononciation  picarde  et  noi'mande  d'i(((«c/i«/' ;  aussi  les  deux  sens  se  confondent-ils  jusqu'au' 
xvi"  siècle  ;  lî.-iudoin  de  Sebourc  (xiv«  siècle)  écrit  :  «  Elle  attaque  au  mantel  une  riche  cscarboucle  »,  tandis  que  dans  les 
lettres  de  Calvin  (édition  Bonnet,  II,  201),  nous  lisons:  «  Tous  ensemble  méritent  bien  d'estre  reprimés  par  le  glayve  qui 
TOUS  est  commis,  veu  qu'ils  s'attaclient  non-seulement  au  roy,  mais  à  Dieu...  »  (n.  e.) 


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—  301  - 


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«  l'infanterie  ennemie,  puis  donner  dans  leur 
..  quartier.  »  (Disc,  polit,  et  mil.  de  La  Noue,  p.  077.) 
.  Les  attacha  si  vivement  qu'il  les  deflit  d'une 
->  victoire  plus  sanglante  que  n'avoit  été  celle  qu'ils 
«  avoient  obtenue.  »  (Pasquier,  Recherch.  Liv.  J, 
p.  25.)  Remarquons  également  l'emploi  du  mot 
attaclier  dans  les  expressions  suivantes  : 

1°  Le  loup  attaché  de  lévriers,  c'est-à-dire  saisi 
parles  lévriers.  (Du  Fouilloux,  Vénerie,  fol.  ll'J,  R°.) 

'.:"  L'escarmouche  attachée,  c'est-à-dire  commen- 
cée. (Mémoires  de  Du  Bellay,  Liv.  Vil,  fol.  225,  V°.) 

VARIANTES  ; 
AÏT.VCHER.  Orthographe  subsistante. 
ATAGHiEn.  Fabl.  MSS.  de  S'  Germain,  fol.  77,  V»  col.  2. 
.\TAGER.  13orel,  Dict. 

Ataiger.  Faljl.  MSS.  de  S'  Germain,  fol.  54,  R»  col.  3. 
.^TTAcjUEn.  Celthell  de  Léon  Trippault. 

Ailachcur,  suhst.  masc.  Sorte  d'artisan.  (Voy. 
la  Table  des  Métiers  de  Paris,  ms.  de  M.  de  Meinière, 
p.  11.) 

AttaJnct,  subst.  masc.  Sorte  d'amende.  On  voit 
par  le  passage  suivant,  qu'il  y  avoit  autrefois  une 
amende  ainsi  nommée  :  «  Le  condamné  doit  au  Roy 
«  l'amende  de  sept  solz  six  deniers  parisis,  qui  se 
•'  appellent  vulgairement  uiig  n'y  atlaiiict.  »  (La 
Tiiaumassière,  Coût,  de  Derry.) 

Attainctes,  subst.  Atteintes.  (Vcy.  Atai.me.) 

Attulique,  adj.  Très  précieux.  Epith.  d'habille- 
ment dans  les  Epith.  de  Martin  de  la  Porte.  Ce  mot 
esl  formé  du  nom  Attalus  (l). 

Aitamer,  verbe.  Entamer,  commencer.  (Voyez 
RiitUjn,  des  Loix  d'Angleterre,  fol.  81,  R°.) 

Attaquement,  subst.  m«sc.  Attaque.  (Mém. 
de  Si'.lly,  T.  I,  p.  3i.) 

Allaryeassion,  subst.  fém.  Retardement.  En 
parlant  de  la  reddition  d'une  place,  on  dit:  «  La 
«  rendirent  au  plus  longuement  qu'ils  purent , 
«  tant  que  par  leur  a^frtrycrt^îOK,  le  Roy  ne  ceux 
«  qui  estoient  avec  lui  ne  le  prindrent  pas  bien  en 
.  gré.  »  (Moastr.  Vol.  I,  fol.  99,  R".) 

VARIANTES  : 
.\TT.\.RGE.\SSION.  Monstrelet,  Vol.  I,  fol.  21,  R". 
Atargeation.  Ibid.  fol.  99,  R". 

Attarjance.  Hist.  de  Fr.  en  vers,  à  la  suite  du  Rom.  de 
Fauv.l,  MS.  du  R.  n»  C812,  fol.  87,  R»  col.  2. 

Attarges,  subst.  masc.  plur.  Retards  de  paye- 
ment, arrérages.  «  En  payant  tous  allarges  et  dé- 
«  pens.  »  (Coutumes  de  Valencienncs  au  Coût.  gén. 
T.  H,  p.  902.) 

Attayner,  verbe.  Toucher,  discuter,  traiter, 
dire.  «  Volons  attayner  en  party  par  queles  ac- 
«  cions,  et  par  queux  Brefs  et  coment  un  parce- 
«  ner  doit  chacer  ses  parcenemens.  »  (Britton,  Loix 
d'Angleterre,  fol.  183,  ÏW) 


Attédiation,  subst.  fém.  Ennuy.  (Dict.  de  Cotgr. 
—  Voy.  Rabelais,  T.  II,  p.  177.) 

Attedier,  verbe.  Ennuier,  fâcher.  (Voyez  Du 
Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  AttœcUare.)  «  Le  commun 
«  peuple  a</erf/(?' des  grandes  Tyrannies,  et  extor- 
'<  sions  qui  se  faisoient  dans  la  ville.  »  (Pasquier, 
Rech.  Liv.  III,  p.  2'i8.)  »  Je  vous  laisse  une  infinité 
«  d'autres  particularités  concernans  la  réformation 
'<  de  Testât,  desquelles  si  je  me  voulais  amuser, 
«  ]attiédirois\e  \ectem\  »  (Pasq.  Rech.  L.  II,  p.  80.) 

variantes  : 
ATTEDIER.  Xicot,  Monet,  Borel,  Oudin  et  Cotgrave. 
.*iTEDiER.  Ménage,  Dict.  étym.  —  Oudin  et  Cotgrave. 
Attiédir.  Pasquier,  Rech.  Liv.  II,  p.  80. 

Attefits,  subst.  masc.  Ente.  Arbre  enlé,  dans  le 
patois  de  Bombes.  (Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au 
mot  Âltefi'ctum.  —  Voy.  Ate,  du  latin  Aptus.) 

Attejgncnient,  rtrfy.  D'une  façon  pressante, 
instamment.  «  Pour  ce  que  celle  personne  contrai- 
«  gnist  plus  atteignement  nostre  Seigneur  par  orai- 
•<  son.  »  (Vie  d'Isab.  à  la  suite  de  Joinville,  p.  170.) 

Atteinour,  suhst.  masc.  Témoin  ou  peut-être 
caution.  «  Que  chescun  jurour  eyt  deux  atteinours 
«  au  iiieyns....  et  atîert  que  ilz  soient  d'ausi  bone 
«  condicion,  ou  de  meilloure.  »  (Britton  ,  des  Loix 
d'Angleterre,  fol.  238,  R°.) 

Attelabes,  subst.  masc.  plur.  Espèce  de  repti- 
les (2).  (Rabelais,  T.  IV,  p.  271.) 

Attelé,  /mrt.  Attaché.  Ea  parlant  de  deux  che- 
valiers du  Roi  d'Angleterre  qui  subirent  le  supplice 
de  mort  :  »  A  la  vue  de  ce  prince  enfermé  dans  la 
«  Tour  de  Londres,  furent  amenés  en  la  court,  et 
«  là  chacun  attelé  à  deux  chevaux.  •■  (Froissart, 
Liv.  IV,  p.  335.) 

Atteîemens,  subst.  masc.  plur.  Attelages  de 
chevaux.  (De  Peyssel,  Hist.  de  Louis  XII,  p.  133.) 

Atleliei",  subst.  masc.  Râtelier  à  mettre  des 
armes.  «  A  la  reveue  de  leur  royaume,  l'on  garnis- 
«  soit  les  rues  d'atleliers  garnis  d'armes  et  d'es- 
«  pées.  »  (Savaron,  traité  de  l'Epée  francoise,  p.  22.) 

Attemprance,  subst.  fém.  Mesure.  —  Tempé- 
rance, modération.  —  Proportion  dans  la  nature 
des  choses  de  tempérament.  —  Voie  de  conciliation. 

Ce  mot,  dans  les  Serm.  fr.  .mss.  deS'Bern.  répond 
au  latin  modestia,  temperanlia.  «  Les  vertus  car- 
«  dinales  sont  :  justice,  prudence,  force,  attemp- 
«  ranee.  »  (Ord.  de  Chev.  fol.  11,  R°.) 

Tele  est  d'amour  la  poissance 
Qu'ele  fait  l'home  astenant 
Désirer,  sans  atrenpranche. 

Poès.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1387. 

«  Pour  ce  que  11  advocat,  et  procureur  mengent 
«  tout  le  pays,  par  les  gians  salaires  que  il  pren- 


ds .\tt:!le,  roi  de  Pergame,  célèbre  par  ses  i-ichesses,  avait  institué  le  peuple  romain  sou  héritier.  On  disait  riche  comme 
Attale.  comme  nous  disons  riche  comme  Crésus  ;  «  .\tUUicis  cuiiditiuuibus  »,  dans  Horace,  (n.  e.)  —  t2)  Du  grec 
dxTikaGoç  et  dzxéXiGoç,  sauterelle.  On  lit  dans  S'  Jérôme,  à  propos  d'un  passage  d'Esaii,  ch.  33  :  «  Sicut  colligitur 
brucus.  etc.  »  Ex  locusta  brucus  nascitur,  et  quousque  habeat  a'as,  sic  vocatur.  Cum  autem  aire  oreseere  creperint, 
atel  ,bm  dicitur  ;  cum  autem  plenè  volare  cœperit,  est  locusta.  (.N.  e.) 


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a  nenl si  y  scroit  bon  mettre  attemperance,  en 

«  la  manière  dessus  dite.  »  (Oïd.  des  Rois  de  France, 
T.  I,  notes,  col.  1,  art.  8.)  I.e  mot  Àltrempnnce  est 
expliiiué  par  température  de  l'air  dans  le  Glossaire 
de  Marot. 

Le  Gloss.  du  Roman  de  la  Rose,  sous  lorlliographe 
attrempancc,  explique  encore  ce  mot  par  tempéra- 
ture, proportion  dans  la  nature  des  choses,  au  vers 
16925.  Il  y  ajoute  que  ce  mot  signitie  aussi  tempé- 
rament, voie  de  conciliation,  et'cite  le  vers  17833. 
Ces  délinilions  paraissent  très  justes. 

VARUN'TES  : 
ATTEMPRANCE.  Ord.  de  Chev.  fol.  14,  R». 
Atempr.\nce.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  M  et  328. 
Atresipance.  Labbe,  Gloss.  p.  503. 
Atrenpr.\n-ciie.  Poës.  MSS.  avant  ISno,  T.  IV,  p.  13X7. 
Atte.mper.^nce.  Ord.  T.  III,  p.  30. 
Attrvmpan'ce.  Vigiles  de  Charles  VII,  T.  II,  p.  7G. 
Attrempance.  Sag.  de  Char.  p.  467. 
Attrempence.  Essais  de  Mont.  T.  Il,  p.  413. 
Attrempure.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  105,  col.  't. 

Attempré,  part.  Mesuré,  tempéré,  modéré,  ré- 
servé. —  Accordé.  —  Réglé.  —  Ralenti. 

Dans  le  premier  sens,  on  a  dit  de  S'  Louis  :  «  En 
«  ses  paroles  fu-il  at trempez;  car  onques  jour  de 
«  ma  vie  je  ne  li  ov  mal  dire  de  nulluy.  »  (Joinville, 
édition  de  Wailly,  §  22.) 

Le  lieu  est  gras  et  dru,  et  bons  et  delictable 
En  li  air  attrem}ié,  de  tous  biens  abondable. 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  17. 

Atrempée  s'est  dit  pour  acco7'clêe.  mise  d'accord, 
en  parlant  d'une  vielle  : 

Il  a  endroit  soi  sa  vielle  atrempée. 

Fauch.  Lang.  et  PoOs.  fr.  p.  HO. 

Dans  le  sens  de  réglé,  on  disoit  mal  atlrempé 
pour  mal  réglé.  (Voy.  l'Hist.  de  Floridan.  p.  701.) 

Toutes  les  significations  du  mot  Attcmprcr  déri- 
vent de  son  sens  propre  modérer.  .Uiisi  modérer 
son  pas  étoit  le  ralentir:  de  là,  on  a  dit  attrempé 
pour  ralenti...  «  Nous  avions  grand  désir  et  imagi- 
«  nation  d'aller,  à  puissance  cle  gens  d'armes,  à 
«  Homme,  pour  destruire  tous  incrédules;  mais 
«  nostre  chemin  est  retardé ,  et  attrempé  grande- 
«  ment.  »  (Froissart,  Liv.  IV,  p.  30.) 

VARIANTES  '. 
ATTEMPRÉ.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  p.  352,  col.  1. 
Atempéré.  Ord.  T.  II,  p.  23. 
Atemprat.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  10. 
Atrampé.  .loinville,  p.  4. 
Atrempé.  Gloss.  de  Labbe,  p.  507. 
Attrempé  et  Estrampé.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  87. 
Attrempé.  Gloss.  de  Marot. 
Atempreiz.  S'  Bernard,  Serra,  fr.  MSS. 
Atempres.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  359,  R"  col.  1. 
Estrampé  et  Attrempé.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  17. 

Attemprement,  adv.  Posément,  avec  modéra- 
lion.  Alempreiment ,  dans  les  Serm.  fr.  mss.  de 
S"  Bernard,  répond  au  latin  Ad  sobrietatem. 

«  Il  se  tenoit  attemprement,  etgravementen  son 
«  pas,  sans  aucunement  se  desroyer.  »  (Math,  de 
Coucy,  Ilist.  de  Charles  VII,  p.  755.)  «  Grand  mes- 
«  trier  est  que  la  largesse  soit  démenée  sagement, 
«  et  atrempéement.  »  (Beaumanoir,  Coutumes  de 
Beauvoisis,  p.  9.) 


Jupiter  fut  hors  de  l'ardure 
Du  fou  qui  trop  art  et  pou  dure 
Et  Baisoit  atremprénicnt. 

Poé».  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  462,  col.  î. 

VARIANTES  : 
ATTEMPREMENT.  Math,  de  Coucy.  Hist.  de  Ch.  VII,  p.  555. 
Ate.mpi\iement.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  99. 
Atrempéemext.  Ord.  T.  I,  p.  42t). 

Atremprement.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  462,  col.  2. 
Attrempéement.  Petit  Jean  de  Saintré,  p.  50  et  64. 
Attrempement.  Froissart,  Liv.  I,  p.  315. 

Attemprer,  verbe.  Tempérer,  modérer.  — 
Adoucir,  accorder.  —  Régler,  ajuster.  —  Tremper. 

Ateinprer,  dans  les  Serm.  fr.  mss  ne  S'  Bernard , 
répond  au  latin  Temperare. 

Dans  le  premier  sens,  de  tempérer,  modérer,  on 
a  dit  : 

Brandon  devenus  rigoureux, 
Qui  son  ardeur  jamais  n'attempre. 

Clém.  Marot,  p.  T. 
Ses  douz  Espris,  par  usage 
De  grâce  donnez, 
Doute  le  sauvage, 
Aleiiipre  les  detemprez. 

Poés.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  459. 

Employé  pour  adoucir  ou  accorder,  en  parlant 
d'instruments  de  musique,  on  a  dit  : 

S'ateiipre  sa  musette. 

Ibid.  T.  II,  p.  668. 

«  Il  fl,'?/v'm/)<3  sa  harpe,  et  puis  en  commence  à 
«  chanter  le  lay.  —  Attrempa  sa  vielle,  »  c'est-à-dire 
l'accorda,  suivant  l'Editeur  de  Ger.  de  Nev.  I'^ 
partie,  p.  .50. 

En  parlant  d'une  horloge,  on  disoit  Vattremper 
pour  la  régler. 

Pour  mieux  allremper  l'oreloge. 

Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  425,  col.  2. 

AIreuijier  ses  engins,  les  ajuster.  (Fabl.  mss.  du 
R.  ir  7r.i5,  T.  II,  fol.  170,  R°  col.  2.) 

On  disoit  aussi  tremper  son  vin.,  dans  le  même 
sens  que  nous  disons  tremper  son  vin,  y  mettre  de 
l'eau,  pour  en  modérer  la  force.  (Voy.  Joinv.de  W., 
§  22.) 

CONJUG. 

Atemprest.  [S'Jievnm-à,  Serm.  fr.  mss.  p.  128, 
dans  le  latin  Temperaret.) 

Allrcmperoij,  cond.  prés.  Je  tempérerois,  je  mo- 
dérerois.  (G.  Durand,  à  la  suite  de  Bonnef.  p.  153.) 

VARIANTES  : 
ATTEMPRER.  Clém.  Marot.  p.  7. 
Atemperer.  Ord.  T.  II,  P-  23. 

Atemprer.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  74  et  passim. 
Atenprer.  Ibid.  T.  il,  p.  668. 
Attramper.  Monet,  Dict. 

Attremper.  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose.   —   Nicot  , 
Oudin  et  Cotgrave. 
Atremper.  La  Thaumas.  Coût.  d'Orl.  p.  465,  tit.  de  1147. 

Attempter,  verbe.  Attenter,  entreprendre.  «  Ont 
«  altempté  de  tout  mettre  à  internecion  et  destruire 
"  totalement  leurs  ennemis.  »  (Rabelais,  T.  I,  p. 
272.  —  Voy.  les  Preuv.  sur  le  Meui  tre  du  Duc  de 
Bourg,  p.  252.  —  Ord.  des  Rois  de  Fr.  T.  I,  p.  558.) 

VARIANTES  : 
ATTEMPTER.  Ord.  T.  V,  p.  495. 

Actempter.  Poës.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  466,  col.  3. 
Attrkmpter.  (Lisez  AUemptev.)  Eust.  Desch.  Poës.  p.  376. 


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Attendans.  Ce  verbe  signifie  Maison  des  Sols, 
C'éloit  une  maison  dans  la  rue  Daruelal  (Grenela). 
qui  apparlenoit  à  une  société  appellée  la  Sotlse  ;  elle 
a  subsisté,  à  Paris,  jusques  dans  le  siècle  passé.  Le 
chef  de  celte  société  s'appelloit  le  Prince  des  Sots 
ou  de  la  Sotise.  Il  avoit  une  loge  distinguée  àriiotel 
de  Bourgogne  pour  y  assister  aux  représentations 
des  pièces  de  Théâtre,  y  jouissoit  du  droit  de  prési- 
der aux  assemblées  qui  s'y  leiioienl.  (Voy.  lllisl. 
dn  Th.  fr.  T.  II,  p.  200  et  f.  I,  p.  55.) 

Attendant,/J«J'L  Faisant  attention,  considérant. 
«  Attendant  que  hi  dite  ordonnance  ail  esté  faite 
"  par  noslre  dit  seigneur  et  père ,  eiie  bonne  et 
"  meure  délibération  de  noslre  conseil,  sur  ce 
«  avons  ordonné.  »  (Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  II,  p.  GOG.) 

VARIANTES    '. 
ATTENDANT.  Ord.  T.  II,  p.  666. 
Attendens.  Ibid.  T.  III,  p.  182. 

Attendre,  verbe.  Ce  mot  avoit  quelques  signi- 
fications qui  ne  subsistent  plus;  nous  en  avons 
parlé  sous  les  mots  dont  il  n'étoit,  en  ce  cas,  qu'une 
altération.  Quant  au  sens  subsistant  el  propre  de 
ce  verbe,  il  nous  donnera  lieu  de  recueillir  quel- 
ques proverbes  anciens. 

Tout  vient  à  point  qui  peut  attendre. 

Uîuv.  de  Kog.  de  CoUeryo,  p.  190. 

vVoy.  aussi  Rabelais,  T.  IV,  p.  '200.  —  Clém.  Marol, 
p.  08.  —  Poës.  Mss.  de  Froiss.  et  Apol.  pour  Ilérod.) 

On  dit  aussi,  et  bien  l'eutent, 
Que  trop  auoye  qui  attent. 

Hist.  des  Trois  Maries  en  vers,  MS.  p.  26-2. 

On  le  retrouve  dans  la  Chasse  et  le  Départie 
dainours,  d'Oct.  de  Saint-Gelais,  et  dans  Percef. 

l'en  pert  bien  par  trop  ateiidve. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  lUlS,  T.  Il,  fol.  147,  V  col.  1. 

Atendés-moi  sous  l'orme. 

Voyez  l'origine  de  cette  façon  de  parler,  dans  le 
Journ.  de  Verd.  (1)  déc.  1750,  p.  142Gelsuiv. 

CONJUG. 

Atcndai.  (S'  Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  225,  dans  le 
latin  expectavi.) 

Atendomes,  indic.  prés.  Attendons.  (Fabl.  mss.  du 
R.  n"  7218,  fol.  244,  R°  col.  2.) 

Atendrommcs  et  entendromes,  pour  nous  atten- 
drons, futur  prés.  (Arch.  mss.  fol.  99,  V°  col.  2.) 

Atenge,  indic.  prés.  Attend.  (Règle  de  S'  Benoit, 
lat.  fr.  MS.  de  Beauvais,  ch.  49.) 

VARIANTES  : 
ATTENDRE.  Orlh.  subsist. 
A.STENDRE.  Proc.  de  .1.  Cuer,  MS.  p.  12  et  13. 
Atandre.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  I,  fol.  119. 
Ateindre.  Cont.  de  G.  de  Tyr  .Martène,  T.  V,  col.  721. 
Entendre  et  Atendhe.  Arch.  MSS.  fol.  09,  V"  col.  2. 

Attentat,  subst.  masc.  Ce  mot,  qui  en  terme  de 
palais  est  encore  en  usage  au  figuré,  semble  avoir 
une  signification  parliculière  dans  le  passage  sui- 
vant :  "  En  cas  de  nouvelleté,  depuis  ce  que  la 


«  chose  est  mise  en  la  main  du  Roy,  la  partie  fait 

«  aucun  attentat,  l'on  la  doit  faire  adjourner  sur 

«  Yatlentat,  de  requérir  qu'elle  soit  condamnée  à 

.1  reparer,  et  à  amender  au  Roy;  ainsi  est-il  en  cas 

«  d'appel  ;  mais  où  il  n'y  a  appel,  ou  main  mise, 

'■  l'on  ne  peut  dire  attentat.  «  (G.  Coût,  de  Fr. 
liv.  II,  p.  1 19.  —  Laur.  Gloss.  du  Dr.  fr.) 

Attente,  subst.  fém.  But,  point  où  l'on  tend.  — 
Attente. 

Atendue  dans  les,  Serm.  fr.  mss.  de  S'  Bernard, 
répond  au  latin  expectatio. 

■<  Laquelle  chose  ne  l'ut  onques  noslre  attente.  » 
(Ord,  des  R.  de  Fr.  T.  I,  p.  751  )  Attente  dans  celte 
citation  pouiroit  y  être  pour  entente,  c'est-à-dire  ce 
que  nous  entendons. 
On  disoit  aussi  alendance  pour  but  : 
Mais  n'avoit,  ne  vigne,  ne  terre  ; 
En  tournoiement,  et  en  guerre 
Estoit  trestote  à  tendance 
Quar  bien  sçavoit  ferir  la  lance. 

Fabl.  MSS.  de  S'-Germ.  fol.  58,  R=  col.  1. 

Le  passage  que  nous  venons  de  ciler  peut  égale- 
ment s'entendre  dans  le  sens  d'ullenle  ;  on  trouve 
en  ce  dernier  sens  l'ortliographe  atendue  : 

Si  dis  li  que  je  li  mande, 
Que  n'a  fuce  nule  atendue. 

FaLl.  MSS.  de  S'  Germ.  fol.  50,  R"  col.  2. 
I  i  Boiilangier,  sans  attendue 
Revint,  mais  ne  la  trouva  point. 

Villou,  Rep.  fr.  p.  15. 

Le  jeu  d'attente  semble  une  façon  de  parler, 
usitée  parmi  les  joueurs. 

Et  celluy  pert  le  jeu  d'attente. 
Qui  ne  scet  l'aire  son  point  double. 

Poës.  d'Al.  Charlier,  p.  515. 

C'est  apparemment  à  cette  façon  de  parler  que  je 
rapporte  cette  plaisanterie  de  Marot  à  Franyois  I". 
«  Vous  n'y  perdrez  que  le  jeu  et  l'attente.  »  (Voyez 
Poës.  d'Al.  Charlier,  p.  707  et  Jean  d'Anton,  Ann. 
de  Louis  XII,  p.  286.) 

Un  proverbe  dit  :  «  Bonne  fue  vault  mieux  que 
«  mauvaise  attendue.  »  C'est-à-dire  qu'il  vaut 
mieux  fuir  à  propos  que  d'attendre  à  se  sauver  qu'il 
n'en  soit  plus  temps. 

Attendue  est  pris  pour  défense,  résistance,  dans 
les  vers  suivants  : 

Pour  eschapper  de  mort  vault  trop  iniL!U.<  bonne  fue 
(Ce  disent  ly  couars),  que  mauvaise  attendue. 

Ger.  de  Roussiilon,  MS.  p.  117. 

VARIANTES   ; 
ATTENTE.  Gloss.  de  Marot. 
Atente.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1026. 
Atendance.  Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  fol.  58,  R»  col.  1. 
Atendanche.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  10,  p.  1199. 
Atendue.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  47. 

Atténuation,  subst.  fém.  Terme  de  pratique. 
On  trouve  répondre  par  atténuation,  et  on  l'expli- 
que :  «  Après  l'instruction  d'un  procès,  el  les  con- 
«  clusions    prises,    elles    sont  communiquées    à 


(1)  Attendre  sous  l'orme  a  deux  significations  ;  1»  Etre  confiant  dans  sa  cause  ;  ce  sens  est  aujourd'hui  inusité  et  dérive 
diieclement  de  l'ancienne  habitude  de  plaider  sous  l'orme;  2»  Donner  un  rendez-vous  auquel  on  n'a  pas  dessein  de  se 
tru\iv(^r.  Les  justices  seigneuriales  se  tenaient  généralement  aux  portes  des  châteaux,  sous  un  orme  qui  y  était  planté  ; 
souvent  les  parties  assignées  manquaient  au  rendez-vous  et  se  faisaient  attendre  sous  l'arme.  (N.  E.) 


AT 


304  — 


AT 


«  l'accusé  pour  y  répondre  par  atténuation,  ce  qui 
«  s'entend  tant  pour  le  justifier,  et  dcscliarger  du 
«  crime  dont  il  est  :;ccusc,  par  dénégation,  alléga- 
«  tion  d'alibi,  ou  autre  semblable  défense  que  pour 
«  adoucir,  exténuer  et  diminuer  le  faict,  et  la 
«  peine.  »  (Bout.  Som.  rur.  p.  2'i2.  —  Voy.  Laur. 
Closs.  du  Dr.  fr.  —  Le  Dict.  de  Cotgr.) 

Attemirir,  verbe.  Rendre  menu,  délié,  mince. 
(Voyez  Dicl.  de  Mcot,  Monet,  R.  Eslienne,  Oudin  et 
Cotgrave.) 

Altérer,  verbe.  Jeter  par  terre.  —  Se  mettre  à 
terre.  —  Echouer. 

Le  premier  sens  de  jeter  par  terre,  se  trouve 
dans  Grelin,  p.  80.  —  Froissart,  liv.  I,  p.  318  et 
dans  le  Recueil  des  Poës.  mss.  av.  1300,  T.  IV,  p.  1438. 

Crétin  a  dit  aussi  s'altérer  pour  se  mettre  à  terre  : 

atléré  m'estoye 

Soubz  un  rosier,  où  par  escrit  mestoye 
Leur  playdoyé. 

Crétin,  p.  85. 

Enfin  aterré  s'est  dit  d'un  navire  échoué,  d'un 
bateau  engravé.  «  Encores  fumes  nous  à  granl 
«  meschies  Là  où  nous  estions  atterrez-,  car  chacun 
«  cuida  estre  noyé,  et  perdu,  et  que  la  gallée  se 
«  fendist.  »  (Joinville,  p.  112.) 

VARIANTES  : 
ATTERER.  Crétin,  p.  85.  -  JoinviUe,  p.  112. 
Aterrer.  Froissart,  liv.  I,  p.  318.  —  Crétin,  p.  80. 

Attermoyeur,  subst.  Celui  qui  prête  à  ferme 
ou  sur  gage  ; 

Mais  regardez  que  de  deniers 
Ont  usuriers  en  leurs  greniers, 
Faulx  monnoyeurs,  altennoyeiirs 
Baillifs,  Bedeaulx,  Prevostz,  Mayeurs,  etc. 

Rom.  de  la  Rose,  12257-12260. 

Atterrassement,  subst.  masc.  L'action  de  ter- 
rasser, de  jeter  par  terre.  (Dict.  d'Oudin.) 

VARIANTES  : 
ATTERRASSEMENT.  Oudin,  Dict. 
Aterrement.  Ibid. 

Atterrasser,  verbe.  Terrasser.  (Oudin,  Dict.) 

Atterrasseiir,  subst.  masc.  Qui  terrasse.  (Dict. 
d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

VARIANTES  : 
ATTERRASSEUR.  Oudin. 
Atterasseur.  Cotgrave. 

Attester,  verbe.  Pour  témoigner,  certifier  ou 
pour  accuser,  ou  soupçonner. 

Semblant  avoit  aulreffois  veu  ; 


Faulx  estoit;  mais  de  fausseté 
Ne  l'eust-il  jamais  attesté. 

Rom.  de  la  Rose,  12854-12857. 

Attexter,  verbe.  Attester. 

comme  texte 

De  la  sainte  Escripture  aticxle. 

Grelin,  p.  35. 

Atteynenient,  subst.  masc.  Ajournement,  cita- 
tion en  justice.  «  Nul  ne  peut  attexjnement  doner 
«  fores  que  cil  en  qui  person  repose  la  possession, 
«  el  la  propriété.  »  (Britlon,  Loix  d'Angl.  f.  87,  V°.) 


Attinées,  subst.  fém.  plur.  Lettres  de  défî. 
«  Il  y  eut  attinés  ou  lettres  de  deffy  faits  de  six  Dau- 
«  phinois  contre  six  Bourguignons.  »  (Mém.  de 
Charles  VI,  p.  486.) 

Attique,  aâj.  Antique.  «  Lettres  attiques  qu'on 
«  dit  autrement  lettres  antiques.  »  (Du  Verdier, 
Bibl.  p.  447.) 

Attiqiiet,sî/bs^  masc.  Etiquette,  affiche,  placard. 
«  Si  est  tenu  le  sergent  exécuteur  raeitre  par  escrit 
"  en  un  Billet,  ou  altiquet,  devant  l'auditoire  du 
«  lieu  oîi  l'on  fait  les  délies,  quatre  criées,  etl'adju- 
«  dicalion,  et  déclaration  de  l'héritage,  ou  héritages 
«  saisis,  le  nom  de  celuy,  ou  ceux  auxquels  appar- 
»  tiennent,  de  celuy  qui  les  fait  crier,  et  pour  quelle 
«  somme.  »  (Coul.  gén.  T.  I,  p.  421.) 

Attiquete,  subst  fém.  Etiquette.  Brevet.  Ecrit 
en  forme  de  sommaire  et  de  mémorial.  (Dict.  de 
Monet.) 

Attii'age,  subst.  masc.  L'action  de  tirer.  — 
Tirage.  Peut  être  attirail,  équipement. 

Equiper  la  charrue,  et  pour  son  atlirage, 
Tresser  du  poil  de  chèvre,  à  faire  du  cordage. 

bevg.  de  R.  Bellcau,  T.  I,  fol.  130,  V'. 

Attirant,  participe.  Fugitif.  Dans  le  passage 
suivant,  attirant  semble  être  synonime  de  fugitif. 
«  Advenant  que  quelque  personne,  soit  homme  ou 
«  femme,  est  tombée  en  décadence  de  biens,  Vatti- 
«  rant  ou  fugitif,  ou  la  maison  mortuaire  aban- 
»  donné,  sera'  incontinent  tout  le  bien  meuble  et 
«  imeuble  inventorié.  »  (N.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  308.) 

Attisé,  adj.  Excité,  incité. 

Ce  sont  meschans  apostats  attisez 
Ceditieux,  poignans,  mal  baptisez. 

Faifeu,  p.  4. 

Attise-querelle,  adj.  Qui  excite  des  querelles. 
(Dicl.  d'Oudin  el  de  Cotgrave.) 

Tu  es  une  attise-quereUe 
Tu  es  sorcière  et  maquerelle. 

Œuv.  de  Joachim  du  Bellay. 

Attoiiassé,  partie.  Abattu.  <■  Depuis  les  cor- 
a  neilles  Romaines  aislebrenées  et  attouassées,  les 
«  gei'faulx  revenants  de  Septentrion  en  leurs  pro- 
«  près  et  anciennes  ayres,  je  parle  des  François  el 
"  des  Bourgongnons,  les  François  s'arresterent  en 
«  la  Belgique,  et  les  Bourgongnons  en  la  Celtique, 
«  el  fut  Lyon  de  la  conquèste'de  ceux  cy.  »  (S' Jul. 
McsI.  Hist.  p.  .^30.) 

Attouchement,  subst.  masc.  Coup  donné, 
mainmise.  «  Quarantaine  ne  s'ensuit  point,  s'il  n'y 
«  a  attouchement  car  pour  paroles  ne  s'engendre 
«  point  ;  et  s'il  y  a  attouchement,  combien  qu'il  ne 
«  soit  à  sang,  si  engendre  il  quarantaine  à  peine 
«  de  meurdre  qui  sur  celuy  enfraint.  »  (Bouteiller, 
Somm.  rur.  p.  230.) 

Attournance,  subst.  (cm.  Laurière  définit 
ainsi  ce  mot,  dans  le  Glossaire  du  Droit  françois  : 
«  C'étoit  un  changement  de  la  part  des  sujets,  ou 
<•■  des  vassaux  qui  renonçoient,  du  consentement 


AT 


—  305  - 


AT 


<■  de  celui  qui  avoit  été  leur  seigneur,  à  l'obéis- 
«  sance,  et  à  la  fidélité  qu'ils  lui  avoient  jurée,  et 
«  qui  sengageoient  ensuite  par  serement  à  la  même 
«  obéissance,  et  à  la  même  fidélité  envers  celui  qui 
«  étoit  devenu  leur  nouveau  seigneur,  par  achat, 
•  ou  autre  acquisition.  » 

VARIANTES  : 
ATTOURNANCE.  Laurière,  GIoss.  du  Dr.  fr 
Atournance.  Id.  ibid. 
AviRANCE.  Id.  ibid. 

Attourné,  sitbst  masc.  Procureur.  Celui  qui 
fondé  de  procuration,  gère  les  affaires  d'un  autre' 
(Laurière,  Gloss.  du  Droit  françois,  au  mot, i;io;n'?a') 
Il  signifie  aussi,  en  quelques  lieux,  suaire  de  ville 
(Voy.  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  fr.,  au  mot  Atoiir  ) 
C'est  peut-être  dan;?  ce  dernier  sens  qu'il  faut  en- 
tendre les  altoumez  de  Cojnpiegne,  quoiqu'on  lise 
à  la  marge  du  Coût.  gén.  T.  I,  p.  333,  où  ces  mots 
se  trouvent  :  «  C'éloit  ceux  qui  en  géroient  les  affai- 
«  res.  Au  reste,  le  maire  de  ville  est  chargé  de 
«  veiller  aux  affaires  de  la  ville....  Li  atome  est  cil 
«  qui  par  devant  justice  est  a/mte,  par  aucun,  en 
«  Echi(iuier,  ou  en  assise,  ou  il  a  et  recort  pour 
"  poursuivre,  et  pour  deffendre  sa  droicture  » 
(Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au  mot  Attimmtiis  )  L'a- 
tourné  de  la  Reine  en  Angleterre,  en  IGOl ,  c'étoit 
son  procureur  général.  (Voy.  l'IIist.  de  Thou,  trad. 
T.  XIII,  p.  GG4.)  Attorné  des  procureurs,  c'est  le 
procureur  qui  représente  les  autres.  (Ord.  des  Rois 
de  France,  T.  II,  p.  398,  note.) 

On  disoit  aussi  actourné  pour  procureur  consti- 
tue. On  distinguoit  les  actournés,  des  autres  procu- 
reurs, »  les  actournés  ne  servoient  qu'aux  causes 
«  speciliées  en  Vactoiirnerie,  en  quov  ils  différoient 
«  des  procureurs  qui  occupoient  en  toutes  actions 
«  soit  en  demandant,  soit  en  défendant.  »  VovezLa 
Roque,  Tr.  de  la  Nobl.  p.  511,  ch.  cxlvii,  où  il  pro- 
pose la  question:  Si  les  acloimiés  dérogeoient,  ou 
non.  ' 

VARIANTES  : 
ATTOURNÉ.  Ane.  Coût,  de  Normandie,  fol.  86  R» 
ACTOURNE.  Nicot  et  Cotgra-pe.  ' 

Atornk.  Rymer.  T.  I,  p.  60,  titre  de  -1260 
Atoirné.  Hist.  de  Tliou,  T.  XIII,  p.  664. 
Attorné.  Du  Cange,  Gloss.  latin  au  moi  Atturnatus 
ATTOunNON.s.  Britton,  Loix  d'Angleterre   fol  28   V» 
Atturné.  Ibid.  fol.  31,  R».  ,      .  -o,  y  . 

Mionvné,  part.  Paré,  ajusté.  —  Entouré,  ob- 
sède. —  Couvert.  —  Garni. 

Dans  le  sens  de  paré ,  ajusté ,  Rabelais  a  dit  ■ 
«  Uamoiselles  bien  pimpantes,  et  atourées  »  (T  IV 
page  44.)  ^  ■     ' 

Ce  mot  est  employé  pour  obsédé,  dans  ce  vers  : 

Les  regrets  dont  je  suis  atournée. 

Les  Triomphes  de  la  Noble  Dame,  fol.  25i.  V. 

Pris  dans  le  sens  de  couvert,  on  a  dit  :  «  A  tourné 
de  fange  pour  couvert  de  boue.  »  (Percef.  Vol  III 
fol.  138.)  »  Il  fit  couper  les  esclues,  si  furent  il 
«  ajopie  de  l'eue  que  le  Soudan  si  lor  donna  cono-ié 
«  d  aler  ariere.  »  (Coût,  de  G.  deTyr,T.  V,  col.  C93  ) 

Dans  le  sens  de  garni,  on  trouve  :   «  Chanfraïn 
n. 


«  atourné  de  fer,  »  c'est-à-dire  garni  de  fer.  (La 
Colomb.  Th.  d'IIonn.  p.  426,  T.  II.) 

VARIANTES  : 
ATTOURNÉ.  Lanc.  du  Lac,  T.  II.  fol.  60,  V»  col  2 
Atournk.  Percef.  Vol.  III,  fol.  138,  R"  col  2 
Atouré.  Rabelais,  T.  IV,  p.  44. 

Attourné,  adj.  «  Obligations  attournées,  »  étoit 
une  expression  dont  on  se  servoit  pour  désigner 
une  procuration.  (Voy.  Laurière,  Gloss.  du  Dr   fr.) 

Attoiirnement,  subst.  masc.  Procuration  — 
Préparant.  -  Parure  ,  ajustement.  -  Revirement 
de  parties. 

Atornemenl,  dansles  Serm.  fr.  mss.  de  S' Bernard 
repond  au  latin  dtspensatio  et  deliberatio 

Sur  le  premier  sens,  de  procuration,  vovez  Lau- 
rière, Gloss.  du  Dr.  fr.,  au  mot  Attornamentum 
INous  ne  1  avons  trouvé  employé  en  ce  sens  nue 
sous  sa  première  orthographe  ;  mais  les  diverses 
orthographes  du  substantif  rt//0Mrae,  dans  le  sens 
de  procureur,  donnent  lieu  de  croire  qu'on  pouvoit 
aussi  employer,  dans  le  sens  de  procuration  les 
orthographes  (|ue  nous  rassemblons  ici.  ' 

On  \\\.  mAïïïéremmeni  attonrnement  et  atourne- 
'"'-"'  l**^/"'  préparatifs  du  siège  de  Montpaon ,  en 
lo/U.  «  Les  Anglois  ordonnent  attournemens  d'as- 
«  saux  »  (Froiss.  Liv.  I,  p.  409.)  On  lit  dans  le 
même  historien,  ..  appareiller  grans  atournemens 
"  a  assaut.  »  (Livre  I,  p.  412.) 

De  l'attirail  de  la  guerre  on  faisoit  passer  l'usafe 
de  ce  mot  a  l'attirail  de  la  toilette,  avec  le  sens  de 
parure,  ajustement,  et  l'on  disoit  : 

Elevées  furent  forment 

En  orgueil,  en  atoumemenl. 

Eusl.  Desch.  Poés.  MSS.  p.  531,  col.  4. 

Enfin  Vatournement,  ou  aturnement ,  désignoit 
en  termes  de  pratique,  un  revirement  de  parties  là 
cession  d'une  créance  faite  d'un  créancier  à  un 
autre.  «  Quand  il  luy  baille  son  delteur  en  lieu  de 
«  luy.  »  (Bouteiller  Som.  Rur.  p.  147.  -  Voy.  aussi 
Britton,  Loix  d'Angleterre,  fol.  105,  V°.) 

VARIANTES  : 

ATTOURNEMENT.  Ane.  Coût,  de  Normandie,  fol    145    V» 
ATOURNE.VENT.  Froissart,  Liv.  I,  p.  4.31  '       •     '^'    '  • 

ATURNEMENT.  Britton,  Loix  d'Angleterre,  fol  105  V» 
Atornement.  S<  Bernard,  Serm.  fr.  MSs!  p.  161.  '      ' 

Attourner,   verbe.    Accommoder,    arranger 
apprêter,  disposer.  —Ajuster,  parer.  —  Diriger* 
tourner.  —  Transporter,   faire  un    virement   de 
parties.  —  Changer. 

Dans  le  premier  sens  d'accommoder,  arranger 
apprêter,  disposer,  on  a  écrit  :  ' 

Ung  jour  faingnit  aUer  aux  champs  :  de  fait 
11  s'en  partit,  et  dist  ne  retourner 
A  la  maison,  qu'il  n'ayt  fait  attourner 
Et  accoutrer  certaine  son  affaire. 

Faifeu. 

,„.", ,'^,'  atorna  son  affaire,  et  ordena  ses  Batailles.  . 
(\illehardouin,  p.  133.) 

39 


AT 


—  306  - 


AT 


.  La  baiesse  (1)  atome  à  mengier.  »  (Fabl.  mss.  de 
S'  Germ.  fol.  65,  R'  col.  2.) 

Ne  pensez  riens  a  me  puerir 
Atoniez  sui  tout  à  mourir. 

Arch.  USS.  fol.  Î8,  R-  col.  î. 

Ce  mot  a  été  employé  pour  parer,  ajuster:  «  Quand 
*  elle  fut  si  bien  attournée  que  nulle  mieulx,  si 
«  vint  dehors.  »  (Lanc.  du  Lac,  T.  II,  fol.  60.) 

Encor  estoit  en  sa  courtine 


S'en  issirent  de  la  cité 

Sor  leur  cheval  bien  acesmé  et  atome. 

Arch.  MS.  fol.  57,  R*  col.  1. 

«  A  Vatournev  de  la  reine,  »  c'est-à-dire  à  la  Toi- 
lette, lorsque  la  reine  se  pare  de  ses  atours.  Selon 
l'éditeur  de  Petit  Jean  de  Saintré,  p.  191,  atourner 
est  ici  employé  comme  substantif.  Cet  usage  des 
infinitifs  des  verbes,  employés  comme  substantifs, 
se  rencontre  dans  notre  langue. 

Avec  le  sens  de  diriger,  tourner,  on  a  dit  : 

A  la  miller  del  roiaume  de  France, 
Voire  del  mont,  ai  mon  cueur  alorné. 

Guisnes,  Poês.  MSS.  avanl  1300,  T.  III.  p.  986. 

L'auteur,  ayant  posé  un  cas  dont  il  rapporte  la 
décision,  il  en  pose  un  autre,  el  rapportant  une 
décision  contraire,  dit  :  «  La  raison  atourne,  »  pour 
signifier  :  c'est  tout  le  contraire.  (Bouteiller,  Soin. 
Rur.  p.  -420.) 

Enfin  on  a  dit  alourner  pour  faire  un  virement 
de  parties.  On  a  vu  attourncment  dans  le  même 
sens.  (Voy.  ce  mot.)  On  lit  dans  Bouteiller:  «  Jaçoil 
«  ce  que  on  ne  puisse  sa  dette  atourner,  etc.  » 
(p.  147),  c'est-à-dire  échanger  une  créance  contre 
une  dette. 

C'est  par  allusion  à  l'acception  précédente,  qu'on 
a  dit  s'attourner,  en  parlant  de  changer  de  seigneur. 
(Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lai.,  au  mot  Atlornamen- 
lum,  et  ci-dessus  Attournance.) 

CONJUG. 

Ator  (m'),  ind.  prés.  Je  me  tourne.  (Chans.  fr.  du 
xiii'  siècle,  .MS.  de  Bouhier,  ch.  ccxcvi,  fol.  248,  R°.) 

Atort  (s"),  ind.  prés.  S'ajuste,  sépare. (Voy. Fabl. 
MSS.  de  S'  Germ.  fol.  78,  R°  col.  1.) 

Atoiu\  impér.  Atourne,  dispose.  (Gloss.  du 
Roman  de  la  Rose.) 

Atourt,  impér.  Tourne.  (Poës.  à  la  suite  du 
Rom.  de  Fauvel,  ms.  du  R.  n-  0812,  fol.  1,  V-  col.  2.) 


.J^TTOURNER.  Gloss.  de  Marot  et  de  Cotgrave. 
ATORNEin.  S*  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  3  et  passiin. 
Atorner.  Villehard,  p.  17. 

Atourner.  Du  Cange,  Gloss.  latin  au  mot  Atornare. 
Atourer.  g.  Guiart,  MS.  fol.  327,  R». 
Atourrier.  (Lisez  Alourner.)  Ibid.  fol.  68,  V». 
Attorner.  D.  Morice,  Hist.  de  Bret.  col.  934,  tit.  de   1248. 
Entouner  (s')  et  s' Atourner.  Ger.  de  Rouss.  MSS.  p.  115. 

Attourneresse,  sitbst.  fém.  Coiffeuse  ou 
femme  qui  loue  des  parures.  (Voy.  Monet,  Oudin  et 
Rob.  Estienne,  Dict.) 


VARIANTES  : 
ATTOURNERESSE.  Dict.  de  Monet. 
Atourneresse.  Dict.  d'Oudin  et  de  Rob.  Estienne. 

Attourneur,  subst.  masc.  Coiffeur,  homme  qui 
pare.  (Dict.  de  Cotgrave.) 

Attractifs,  subst.  masc.  plur.  Attraits.  «  Lui 
«  estant  en  cette  perplexité,  ambition  retourna  qui 
«  le  vint  embrasser,  et  baiser,  et  par  ces  amoureux 
«  attractifs  fut  par  elle  gaigné,  sans  pouvoir  don- 
«  lier  résislence  de  lui  mesme.  »  (Les  Triomphes 
de  la  Noble  Dame,  fol.  114,  V".) 

Attraiable,  adj.  Qu'on  peut  poursuivre  en  jus- 
tice. «  Vefves,  femmes,  enfans,  et  familles  ne  seront 
«  attraiables  autre  part,  en  première  instance ,  en 
«  actions  personnelles  civiles,  ou  criminelles,  qu'en 
«  nostre  dite  cour.  ■>  (Coût,  de  Hainault,  au  Nouv. 
Coût.  gén.  T.  II,  p.  95,  col.  1  et  2.) 

Attraictable,  adj.  Qu'on  peut  attirer. 

Attraicteuse,  non  attraictable. 

Eusl.  Desch.  Poés.  MSS.  fol.  17,  col.  3. 

Attraiement,  subst.  masc.  Attrait,  l'action 
d'attirer.  (Voy.  les  Dict.  de  Cotgrave  et  de  Rob.  Est.) 
Le  P.  Labbe,  dans  son  Gloss.,  p.  500,  traduit  i //;•««>- 
ment  par  Ilaustus.  C'est  quelque  méprise.  Le  Gloss. 
de  Labbe  en  fourmille. 

VARIANTES  : 
ATTR.UEMENT.  Cotgrave. 
Attrayement.  Dict.  de  Rob.  Estienne. 

Attraiute,  adj.  au  fém.  Serrée,  restreinte, 
étroite.  (Voy.  Bouteiller,  Som.  rur.  p.  728.) 

Attraire,  verbe.  Attirer,  faire  venir  à  soi,  ap- 
peller.  Ce  mot,  dans  S'  Bernard,  Serm.  fr.  mss.  p. 
10  et  passiin,  répond  au  latin  abstrahere ,  allicere 
et  provoctire.  (Gloss.  de  llarot  et  Gloss.  sur  les 
Coût,  de  Beauvoisis.)  «  Il  astrait  merveilleusement 
«  à  luy  les  cueurs  de  sa  gent.  »  (Chron.  fr.  ms.  de 
Nangis,  sous  l'an  190.)  On  lit  dans  le  latin,  «  gentis 
«  sufe  corda  mirabiliter  ad  se  traxit.  «  Dames  qui 
«  sont  atraites  en  tesmoignage.  •  (Glossaire  sur  les 
Coutumes  de  Beauvoisis.) 

On  disoit  : 

1°  Atraire,  ou  attraire  à  son  fié,  c'est-à-dire  atti- 
rer, faire  rentrer  dans  son  fief.  (Voy.  les  Assises  de 
Jérusalem,  p.  63.) 

2°  Attraire  témoins,  les  appeller,  les  assigner. 
(Dict.  de  Cotgrave.) 

CONJl'G. 

Atraisistes,  passé  défini.  Attirâtes.  (Poës.  iiss. 
avant  1300.) 

Certes  molt  m.'atraisistes. 

Pofs.  WSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  950. 

Atlraict,  ind.  pré.  11  attire.  (Glossaire  de  Marot.) 
Atracel,  ind.  prés.  Attire.  (S' Bernard,  Serm.  fr. 
MSS.  p.  10,  dans  le  latin  Alliciat.) 
V.4B1AMES  : 

ATTRAIRE.  Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose. 
Astraire.  Chron.  fr.  MS.  de  Nangis,  an  196. 


(1)  Servante;  voir  Du  Cange  à  ISaila. 


AT 


—  807  — 


AT 


ÀTRAHER.  d'où  le  participe  Atraham.  S'  Bernard,  Serm. 
fr.  MSS.  p.  382. 
Atraire,  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis. 
A.TRERE.  Ord.  T.  I,  p.  371,  notes,  col.  2. 
Atreire.  Fabl.  MSS.  du  R.  n'  7615,  T.  I,  fol.  65,  R»  col.  1. 

Attrait,  ;)arf.  Appelle  en  justice.  —  Atteint, 
frappé.  —  Attribué,  octroyé. 

Dans  le  premier  sens,  d'appeUé  en  justice,  on  lit  : 
«  Quand  celuy  qui  est  convenu,  et  attrait  en  ma- 
«  tière  de  retraicl,  obtient  congé  contre  le  re- 
«  trayant,  à  faute  de  comparoir,  ou  autrement,  en 
«  quelque  estât  que  la  cause  soit,  en  ce  cas,  icelluy 
«  retrayant  perd  sa  cause.  "  (Coutumes  générales.) 

Employé  pour  atteint,  frappé,  on  a  dit  :  «  ou  cas 
«  qu'il  soit  attrait  de  la  jouste  à  moy,  demandez 
«  luy  s'il  luy  suffit,  et  s'il  luy  en  faut,  ou  veut 
«  plus.  »  (Froissart.) 

On  disoit  attraie  au  féminin  ;  on  le  trouve  avec 
cette  orthographe  pour  attribuée,  octroyée.  «  L'a- 
«  mour  de  la  dame  fusl  attraie  au  mieulx  jous- 
«  tant.  »  (Modus  et  Racio,  ms.  fol.  256.) 

VARIANTES  : 
ATTRAIT.  Coutumes  générales. 
Attraie,  au  fém.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  256,  R». 

Attrait,  adv.  Posément,  lentement,  à  loisir. 
«  Ils  seront  enquis  sur  les  faitz,  neances  et  défen- 
«  ces  de  l'intendit  de  la  dite  preuve,  qui  entendible- 
«  ment  (intelligiblement)  et  «i/ra/neur  sera  leu.  ■> 
(Ordonn.  Royàulx  ;\  la  suite  de  l'Ane.  Coût,  de 
Normandie,  fol.  33.)  «  Luy  feist  chanter  le  lay  moult 
«  atraict.  »  (Percef.  Vol.  III,  fol.  10.) 

Li  crestiens  ce  sont  retrais 
Tout  bellement,  et  sont  attrai.t. 

Machaut,  MS.  fol.  ï-28,  V-  col.  1. 
La  souspasmes  bien  et  atrait. 

Machaut.  MS.  fol.  186,  R*  col.  3. 

variantes  : 
ATTRAIT.  Ane.  Coût,  de  Normandie,  fol.  .33,  V». 
Atraict.  Percef.  Vol.  III,  fol.  10,  R"  col.  2. 
Attrais.  Machaut,  MS. 
Atrect.  Molinet,  p.  171. 
Attret.  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  368  et  410. 
Atrait.  Régi,  de  S'  Benoît,  lat.  fr.  ch.  xliii. 
Atret.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  184,  R". 

Attrait,  siibst.  masc.  L'action  d'attirer,  d'exci- 
ter. —  Accueil.  —  Attirail,  équipage,  bagage.  — 
Provision,  amas.  —  Apprêts,  préparatifs,  matériaux. 
—  Poste,  guet,  embuscade. 

Ce  mot  signifioit  aussi  plaisir,  agrément;  accep- 
tion qui  subsiste.  Nous  ne  devons  parler  que  de 
celles  qui  ne  subsistent  plus.  Ce  mot  se  prenoit 
dans  les  sens  suivants  : 

Pour  l'action  ou  moyen  d'attirer,  d'exciter,  insti- 
gation, suggestion.  »  Par  rrt/?'a//du  Roi  d'Ermenie, 
o  li  Tarlar  s'esmeurent  îi  venir  contre  eux.  » 
(Contin.  de  G.  de  Tyr,  Martène,  T.  V,  col.  737.) 

Dans  le  sens  d'accueil,  nous  lisons  ; 

Et  quant  la  Duchoise  la  voit, 
Tantost  tos  li  sans  li  fremist 
Com  celé  del  mont  que  plus  het  ; 
Mes  son  corage  celer  set. 
Se  li  a  fet  plus  bel  atrct. 
Conques  devant  ne  li  ot  fet. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  9,  V-  col.  2. 


On  a  employé  ce  mot  avec  la  signification  d'at- 
tirail, dans  les  vers  suivans  : 

Et  tant  fit  aporter  d'airait, 
Qu'avant  furent  li  engin  trait. 
Et  furent  tost  prest  d'asalir. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  7U  . 

On  a  employé  ce  mot  dans  le  sens  d'amas, 
provision. 

Roy  Balthazar  qui  fîst  ces  grans  atrays 
D'or  et  d'argent,  que  sur  ses  subgiez 
Pourchace,  fut  prins  de  denz  en  Baljiloine. 

Poés.  MSS.  d'Eust.  Dosch.  fol.  339,  col.  4. 

On  lit  dans  le  sens  d'apprêts,  pi'éparatifs.  «  En 
«  my  septembre  l'en  commence  à  faire  les  atroiz, 
«  de  faire  les  gaigneries.  »  (Anciennes  Coutumes 
de  Bretagne,  fol.  150.) 

Ce  mot  désignoit  des  matériaux,  ou  tout  ce  qui 
sert  pour  bâtir  une  maison.  «  Quand  aucun  fait 
»  édifier,  ou  réparer  en  son  héritage,  et  ne  le  peut 
«  faire  sans  endommager  son  voisin,  ou  sans  pas- 
•  ser  par  sa  maison,  ou  héritage,  celuy  voisin  est 
«  tenu  luy  piester,  et  donner  patience  à  ce  faire,  et 
«  luy  souffrir  (permettre)  que  par  sa  maison  ou 
«  héritage,  celuy  bâtisseur  passe  ses  attraicts, 
«  soient  poutres,  goutières  ou  autres  choses,  si 
«  le  dit  bâtisseur  ne  le  peut  conduire,  ne  passer 
«  par  ailleurs.  »  (Coût.  Gén.  T.  II,  p.  795.  —  Voy. 
aussi  Laurière,  Glossaire  du  Droit  Français.) 

Enfin,  l'on  a  dit  attrait  pour  poste,  guet,  einbiis- 
cade,  ou  peut-être  pour  retraite,  refuge.  «  Si  prin- 
«  drent  à  chasser  celluy  jour  aux  bestes  saulvages 
«  a  grant  déduyt,  si  firent  leur  attrait  par  dessoulz 
<■  ung  merveilleux  chesne  en  grandeur,  pour  le 
«  soir,  avoir  leur  recept.  »  (Percef.  Vol.  VI, 
fol.  lifl.)  «  A  ces  motz  se  partit  le  Roy  du  veneur  et 
«  se  traist  avccques  sa  compaignie  vers  la  montai- 
gne  oîi  ils  arrivèrent  sur  le  soir,  et  firent  leur 
«  attrait  sur  une  fontaine  qui  sourdoit  au  pied  de 
«  la  montaigne.  »  (Ibid.) 

variantes  : 

ATTRAIT.  Percef.  Vol.  VI,  fol.  119,  V  col.  2. 

Atrait.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  711. 

Attraict.  Hist.  de  Loys  III,  duc  de  Bourgogne,  p.  95. 

AcTRAiT.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  59. 

Attriel.  Vig.  de  Charles  VII,  T.  II,  p.  84. 

Atrez  (plur.)  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  130. 

Atrays  (plur.)  Eust.  Desch.  poës.  MSS.  fol.  a39,  col.  4. 

Atroiz  (plur.)  Ane.  Coût,  de  Bret.  fol.  1.50,  V». 

Attraicts  (plur.)  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  795. 

Attraiture,  mbst.  fém.  Attrait.  (Voy.  Eust. 
Desch.  Poës.  MSS.  fol.  83.) 

Attrampement,  subst.  mase.  Modération, 
«i  Nous  ayent  sopployé  que  nous,  sur  ce,  de  grâce, 
«  voulissons  aucun  attrcmpement  mettre.  »  (Ord. 
des  R.  de  F.,  T.  I,  p.  44G.) 

VARIANTES  '. 
ATTRAMPEMENT.  Monet,  Dict. 
Attrempement.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  intnmperium. 

Attrape,  subst.  fém.  Ruse,  tromperie.  Piège. 
Ce  mot  est  encore  employé  au  premier  sens,  en 
Normandie.  Il  .semble  signifier  eroe  en  jambe,  lors- 
qu'il s'agit  de  joutes  à  pied.  «  Messire  Jacques  em- 
«  prit  deux  fois  de  porter  son  homme  par  terre, 


AT 


—  308  — 


AU 


«  comme  par  manière  d'une  atrape.  »  (Mém.  d'Oli- 
vier de  la  Jfarche,  Liv.  l,  p.  315.)  Parlant  de  deux 
lutteurs  que  Louis  XII  fit  combattre  devant  les 
Dames  à  Milan:  «  Se  donnèrent fl«r«/;/J('s,  trousses, 
.  et  Êtrands  saults.  »  (J.  d'Aut.  Ann.  de  Louis  Xll, 
de  1506  et  1507.) 

On  trouve  altmpe  pour  piège  dans  le  Triomphe 
des  neuf  Preux,  p.  314,  col.  1.  "  Hz  avoient  fléchi 
«  les  tendres  branches  des  bois,  le  bout  d'en  hault 
•■  fiché  en  terre  fermement,  la  tige  de  hors  deux 
«  piez,  ou  environ  comme  ung  cercle,  à  manière 
«  d'atrape,  entre  la  chées  par  telle  façon  qu'impos- 
«  sible  estoit  à  aucun  cheval  y  traverser  sans  soy 
«  enchoper,  et  cheoir,  tant  estoit  la  baye  espesse 
«  et  drue.  »  (Hist.  de  César,  Triomphe  des  neuf 
Preux,  p.  314.) 

VARUNTES    : 
ATTRAPE.  J.  d'Aut.  Annal,  de  Louis  XII,  an  150C  et  1507. 
Attuappe.  Olivier  de  la  Marche,  Liv.  I,  p.  273. 
Atr.\pe.  Mém.  d'Olivier  de  la  Marche,  Liv.  I,  p.  273. 
Attraperie.  Cotgrave. 

Attrapedeniers,  suhst.  inasc.  Escamoteur. 
(Voy.  des  Accords  Bigar.  préf.  p.  2.) 

Attrapé,  partie.  Accroché.  «  Vindrent  au  pied 
.  de  la  Tour,  où  ils  trouvèrent  Eschellesa^^rrtpecs, 
»  aux  créneaux  du  mur,  mais  n'y  eut  celluy  qui  ne 
•  refusast  monter  le  premier.  »  (Triomphe  des 
neuf  Preux,  p.  473.) 

Atrapez,;jflr/ic.  ou  adj.  Pour  dupe  ou  crédule. 

Moult  iert  demain  dur  li  esters 

Si  périlleux  et  si  empris, 

Moult  vous  iert  Diex,  sire,  amis 

Se  vous  sanz  perle,  sire,  en  eschapez  ; 

Ne  soiez  pas  si  atrapei 

Oue  les  doiez  par  force  prendre. 

Aich.  MS.  fol.  93,  V"  col.  2,  et  04.  R-  col.  1 . 

Attrapoire,  suhst.  masc.  Trebuchet,  souricière. 
(Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Attrappeur,  suhst.  masc.  Trompeur.  (Voy. 
Oudin,  Dict.  et  Cur.  Fr.) 

Attrayamment,  adv.  D'une  manière  attrayante. 
(Dict.  de  Cotgrave.) 

Attrendedor,  suhst.  masc.  Qui  est  dans  l'at- 
tente. (Dict.  de  Borel,  au  mot  Anador.)  C'est  sans 
doute  une  faute  pour  attendedor. 

Altrette,  suhst.  fém.  Agacerie. 

Un  regard,  unedouce  attrelle... 

Friiissarl,  Poês.  MSS.  p.  U9,  col.  1. 

Attrit,  adj.  Plein  d'atlrition.  (Dict.  d'Oudin,  et 
de  Cotgrave.) 

Attyrer,  verbe.  Tirer,  se  retirer. 

Le  jour  passa,  chascun  se  retira, 
Mesme  Faifeu  vers  sa  femme  attyra. 

Faifeu,  p.  109. 

Atufier,  verhe.  Bâtir,  édifier.  (Voy.   une  Epi- 


taphe  rappoiiée  dans  le  Journ.  de  Trévoux,  août 
153!»,  p.  1885.) 

Atiirré,  adj.  Buté,  entêté,  endurci.  »  Pour,  sur 
«  ce,  convaincre  les  aturre%,  au  vieil  abus.  »  (S' Jul. 
Mesl.  Ilistor.  p.  10.)  «  Aturré  à  une  opinion.  » 
(Dict.  de  Cotgrave.) 

Au,  art.  Du.  (Dict.  de  Borel,  Carpentier,  Hist. 
de  Cambray,  p.  27;  tit.  de  1230.  —  Suppl.  au  Gloss. 
du  li.  de  la  Rose.) 

Au  a  été  employé  avec  la  signification  de  en, 
ainsi  on  disoit:  au  témoignage  pour  en  témoignage. 
(Perard,  Hist.  de  Bourgogne,  p.  486;  lit.  de  I'257.) 

A  ù,  Là  où.  (Poës.  MSS.  du  Vat.  n"  1490,  fol.  32.) 
Au  et  A  sont  souvent  convertis fun  dans  f autre  : 

comme  Au  et  A  et  VAutrier  et  VAdrier  dans  le 

Boman  d'.l.  (ms.  fol.  24  et  44.) 

Aubadat,  suhst.  masc.  Funérailles  des  enfans. 
Ce  mot  est  en  usage  dans  le  diocèse  de  S'  Flour. 
(Voyez  Du  Cange,  Gloss.  latin,  au  moi  Alhaderum.) 
Peut-être,  ajoiile-t-il,  parce  qu'elles  se  font  avec 
des  ornements  blancs. 

Aubade,  suhst.  fém.  Concert  donné  le  plus 
souvent  à  Yaubc  du  jour,  danse.  —  Pièce  de  vers. 
Ce  mot,  qui  est  encore  en  usage  pour  exprimer  une 
sérénade,  se  disoit  aussi  autrefois  d'une  sorte  de 
poésie  destinée  à  cette  espèce  de  concert  que  nous 
nommons  aubade.  H  s'est  dit  aussi  des  danses  que 
l'on  y  dansoit.  (Voyez  Du  Verdier,  Bibliothèque, 
p.  88.  — La  Croix  du  .Maine,  Bibliothèque,  page  23.) 

VARIANTES  : 
AUBADE.  Orthographe  subslst. 
AuLBADE.  J.  Marot,  page  137. 

Aubader,  verbe.  Donner  des  aubades.  (Voyez 
Alector,  Bom.  fol.  125.) 

Aubain,  adj.  et  subst.  masc.  et  fém.  Etranger 
et  Etrangère.  «  Nous  avons  naturalisé  en  France  le 
«  droit  civil  des  Romains  qui  du  commencement 
«  Q'iio'û  aubain.  «  (Pasquier,  Recherches,  livre  IX, 
p.  835.)  «  Si  aulcun  aubain,  autrement  appelle 
«  chevaulx  aulbains  (1),  »  c'est-à-dire  chevaux  étran- 
gers; mais  spécialement  ce  mot  désignoit  certains 
chevaux  d'Ecosse  dont  l'allure  étoit  plus  douce  que 
l'allure  des  chevaux  anglois,  et  on  les  distinguoit 
par  le  mot  aulbains  des  autres  chevaux  delà  Grande- 
Bretagne.  (Voyez  Le  Duchat  sur  Rabelais,  T.  I, 
page  ÔO,  note  3.) 

VARIANTES  : 

AUBAIN.  Pasquier,  Recherche,  livre  IX,  page  835. 

Albain.  Coût,  de  Perrone,  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  603. 

Aubaine.  Preuve  de  VHistoire  de  Paris,  page  752. 

AuBEiN.  Coût.  gén.  T.  II,  page  672. 

Ai'LBAiN.  Laurière,  Glossaire  Ju  droit  françois. 

AuLBAiNE.  Lettres  de  Pasquier,  T.  I,  page  6. 

AuLBAN.  style  de  procédure  en  Normandie,  fol.  80. 

AuLBiN.  Cotgrave,  Dictionnaire. 

AuLBiNE.  La  Thaumassière,  Coût,  de  Berri,  page  147. 


(1)  Il  y  a  là  deux  mots  distincts;  1°  aubain,  qui  vient  peut-être  d'Albanus,  Ecossais;  2»  anbin,  se  dit  d'un  cheval  qui 
galope  des  pieds  de  devant  et  trotte  du  train  d'arrière,  et  il  vaudrait  mieux  l'écrire  hoblii  (voir  à  Atibercau).  (N.  E.) 


AU 


—  309 


AU 


Aubaineté,  subst.  masc.  et  fcm.  Aubainage, 
aubaine,  droit  d'aubaine.  (Dict.  de  Cotgrave,  au  mot 
Aubaineté,  et  Du  Gange,  Gloss.  lai.  au  mot  Aubenœ.) 

VARIANTES    : 
AUBAINETÉ.  Dictionnaire  de  Cotgrave. 
AUBANITÉ.  Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mot  Aubcsiin. 
AuLBAiNETi';.  Coût.  d'Anas,  au  Coût.  gén.  T.  I,  page  756. 
AuBEiNAGE.  Cout.  de  llainaut,  au  Nouv.  Coût.  gén. 
AUBENAiGE.  Cout.  gén.  T.  I,  page  .390. 
AuBENAGE.  Laurière,  Glossaire  du  droit  François. 
AuBENE.  Duchesne  ,   Gén.  de  Béthune,  page  152.  —  Du 
Cange,  Glossaire  latin  au  mot  Aubesiie. 
AUBENNAGE.  Glossaire  de  l'iiistoire  de  Paris,  T.  II,  page  93. 
AuBEVNAGE.  La  Thaumassiére,  Cout.  de  Berri,  page  202. 
AuBiNAGE.  Cotgrave,  Dictionnaire. 
AUBiNAiLLE.  Poët.  MS.  du  Vatican,  n»  1400,  fol.  151,  V». 
AUBUNAiLLE.  Poët.  MS.  du  Vatican,  n»  1522,  fol.  IGG,  R°. 
AULBINAGE.  Cotgrave,  Dict.  —  Cout.  gén.  T.  I,  page  910. 
AuLTENAGE.  {Lisez  Aulbenage.)  Cout.  Gén.  T.  I,  page  910. 

Aubarde [l),subst. masc. Matelas.  Froissart,  par- 
lant de  l'iene-le-Cruel,  Roy  du  Casiille,  et  d'Henri 
de  Transtamare  son  frère,  dit  :  «  A  ces  mots  Pierre 
«  print  à  bras  le  Roy  Henry  son  frère,  et  le  tira  à 
«  luy  en  luitant,  et  i'ut  le  plus  fort  de  luy,  et  l'abba- 
«  tit  dessous  luy  sur  une  aubarde,  (ju'on  dit  en 
«  françois  coestes  de  materais  de  soye  ;  cl  meit  la 
•  main  à  sa  couslille,  et  là  l'enst  occis  sans  nul 
«  remède,  se  n'eust  esté  le  Vicomte  de  Roque- 
«  berlin.  »  (Froissart,  livre  I,  page  339.) 

Aubarede,  sitbst.  féni.  Arbre  de  bois  blanc. 
Du  Cange,  Glossaire  latin,  au  mot  Albarela,  croit 
que  ce  pouirait  èlre  un  lieu  planlé  d'arbres,  formé 
comme  ïUaWen  Albere  ;  mais  il  paroit  qu'il  vient 
à'albus,  blanc,  et  qu'il  désigne  un  arbre  de  bois 
blanc.  (Cout.  gén.  T.  II,  p.  672.)  En  Gascogne,  c'est 
une  espèce  particulière  de  saule. 

VARIANTES  : 
AUBAREDE.  Laurière,  Glossaire  du  droit  françois. 
AuBEHEDE.  Cotgrave,  Dictionnaire. 

Aubati'i,  subst.  La  matrice.  Aiibatrl  et  Aupalris 
se  trouvent  dans  le  Roman  d'Audigier.  (.m.;,  de 
S.  Germ.  fol.  68.)  Labatuesl  une  (auie  pour  Labatri 
qu'il  faut  lire  Yatibalri. 

VAIIIASTES    : 
AUBATRI,  AuPATRis.  Rom.  d'Audigier,  MS.  de  S.  Germ. 
fol.  68,  R°  col.  2  et  V»  col.  3. 

Aube,  subst.  fém.  L'aube  du  jour.  —  Vêtement. 
—  Linceul. 

Dans  le  premier  sens,  on  disoit  à  l'aube  crevant, 
pour  à  la  petite  pointe  du  jour.  (Froissart,  livre  I, 
p.  220.)  «  Au  point  du  jour  que  l'aube  crevoil.  » 
(Ibid.)C'étoitla  même  chose  que  l'aube  entr'ou  verte. 
Expression  de  G.  Guiarl  (ms.  fol.  220.)  On  disoit 
aussi,  par  allusion  à  cette  acception  du  mol  aube, 
à  l'aube  des  inouches,  pour  dire  à  l'entrée  de  la 
nuit.  (Le  Duchal  sur  Rabelais,  T.  IV,  page  33  et  la 
note.  —  Dictionnaire  de  Cotgrave,  et  Oudin,  Diction- 
naire et  Curiosité  française.) 


Aube  a  signifié  aussi  les  vêtements  bbmos  qu'on 
donnoit  aux  enfans  quand  on  les  baptisoit.  «  Le  fils 
«  de  Clovis  mort  fut  en  aubes  assez  tost  après  son 
«  baptisemenl.  »  (Chroniq.  de  S.  Denis,  T.  I,  fol.  11.) 
«  Maudite  soit  l'heure  que  je  fus  oncques  née,  et 
«  que  je  ne  mourus  en  mes  aubes.  »  (Les  Quinze 
Joyes  du  Maria.ge,  p.  27.)  Nous  nommons  encore 
aube  un  vêtement  de  toile  blanche  dont  se  servent 
les  prêtres. 

Aube  semble  signifier  drap,  linceul,  dans  le  pas- 
sage suivant.  En  parlant  de  la  mort  de  Hugues-le- 
Grand,  on  a  dit  : 

A  grant  ounor  antierrés  fu 


Rice  tombe,  et  moult  rice  aube. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  330. 

Peut-être  ce  mot  signifioit-il  en  cet  endroit  bière 
ou  cercueil,  et  alors  il  seroit  employé  pour  auge. 

Enfants  d'aubes.  Ce  nom  se  donnoit  autrefois 
aux  Enfants  de  chœur.  (Voyez  Lebeuf,  histoire  des 
Evoques  d'Auxerre,  page  568.) 

VARIANTE  : 
ABE.  Attis  et  Parfilias,  MS.  fol.  114,  R»  col.  -1. 

Aubé,  participe.  Ordonné  prêtre.  Du  Cange 
(Glossaire  latin,  au  mot  alba,)  cite  ces  vers  de  l'Epi- 
taphe  de  Frodoard,  prêtre  du  diocèse  de  Rheims, 
qui  se  trouve  dans  le  P.  MabiUon  : 

Vequit  caste  clerc,  bon  moine.  Meilleur  abbé, 
Et  d'.\gapit  li  Romain  fut  aubé. 

Aiiboaii,  subst.  ma?x.  Peuplier. —  Aubier. 

Le  premier  sens  est  le  sens  propre.  On  appelloit 
ainsi  cet  arbre  du  latin  Albellum,  à  cause  de  la 
blancheur  du  dessous  de  ses  feuilles.  (Voy.  Ménage, 
Dict.  élym.)  C'étoit  le  peuplier  sauvage,  selon  Ou- 
din; le  peuplier  blanc,  en  général  le  peuplier,  sui- 
vant Cotgrave;  une  espèce  d'arbre  qui  aime  le  bord 
de  l'eau,  dans  J.  d'Aulon,  Ann.  de  Louis  XII,  1502, 
p.  70  et  77.  (Voy.  AcoR.) 

Dans  la  seconde  signification,  l'aubeau,  de  même 
qu'abor  ou  abour[2),  désignoit  la  partie  du  bois  qui 
est  près  de  l'écorce,  et  qui  est  plus  blanche  que  le 
reste.  "  Il  fautlroit  une  colle  bien  forte  pour  joindre 
ce  sans  dislocation  tant  de  membranes  qui  sont 
«  toutes  d'aubean  et  peu  de  cœur  de  bon  bois.  » 
(Sully,  Mém.  T.  IX,  p.  385.) 

Du  chesne  ils  estent  Vaiibel 

Car  à  brusler  est  condampné. 

Fabri,  .\rt.  de  Reth.  Liv.  II,  fol.  10,  Vv 

(Voy.  AuBEc  et  Albin.) 

VARIANTES    : 
AUBEAU.  Ménage,  Dict.  étym.  -  Dict.  dOudin. 
AUBEL.  Cotgrave,  Dict. 
AuLBiER.  ,1.  d  Auton,  Ann.  de  Louis  XJI,  1502,  p.  76  et  77. 

Aubec,  subst.  masc.  Aubier.  —  Merrain. 

On  trouve  ce  mot  au  premier  sens  A' aubier,  dans 
l'article  115  de  la  Coutume  de  Bordeaux.  (Voy. 
Laurière,  Gloss.  du  Dr.  fr.)  Cet  article  porte  «  qu'au- 


(1)  .\ubardc  est  le  mot  espagnol  albarda;  il  a  dans  quelques  provinces  le  sens  de  selle,  et  se  rattache  à  barde,  lames  de 
1er  adaptées  au  poitrail  d'un  cheval.  L'étymologie  est  le  persan  bardazet,  couverture  placée  sous  le  bât.  (N.  E.)  —  (2)  Les 
charpentiers  de  marine  appellent  encore  aubuur  {albunuim,  bois  blanc)  le  cœur  vert  de  l'aubier  qu'ils  coupent  par 
crainte  de  la  pourriture,  (n.  k.) 


AU 


—  310  - 


AU 


«  cun  charpentier  ne  feront  mauvaises,  puantes, 
«  ne  faulses  doiielles,  bois  gelis,  et  bois  où  y  ait 
«  auhec  (1),  bois  cussonné  ne  autrement  fausses 
«  doiielles  en  pipes,  barriques,  tonneaux,  caves, 
«  doits  (2)  et  autres  sortes  de  vaisselle  à  vin  grande 
«  ne  petite.  "  (Coût.  gën.  T.  II,  p.  GT2.  -  Voy. 
Albin.) 

Ce  mot,  dans  le  Bordelois ,  signifioit  merrain, 
selon  Colgrave,  sans  doute  le  merrain  dont  on  fait 
des  douves  de  tonneaux.  Encore  cette  explication 
ne  seroit-elle  pas  juste,  si,  comme  je  le  soupçonne, 
elle  n'est  appuyée  que  sur  l'article  de  la  Coutume 
de  Bordeaux,  ci-dessus  rapporté. 

Aubelière  (3),  subst.  fém.  Espèce  de  licou.  Ce 
licou  ou  muselière  est  composé  de  cinq  pièces  de 
cuir  blanc,  comme  le  cuir  de  cheval,  selon  Le 
Duchat  sur  Rabelais,  T.  I,  p.  73,  note  20.  (Voyez 
aussi  le  Dict.  de  Cotgrave.) 

Aubenable ,  adj.  Sujet  au  droit  d'aubaine. 
(Voyez  le  Dict.  de  Cotgrave.) 

Aubepin,  subst.  masc.  Aubépine. 

A  ubepin  est  sans  doute  une  faute  pour  aiibifoin  (4), 
bluet,  dans  ce  vers  de  Clém.  Marot,  p.  76.'5,  où  le 
premier  aubepin  signifie  aubépine  : 

Aubepins  blancs,  aiibepins  azurés. 

VARIANTES  : 
AUBEPIN.  Du  Cange,  GIoss.  lat.,  au  mot  Albepinus. 
AUBESPiN.  Régnier,  Satires,  p.  193  ;  Stances,  p.  200. 
AULBESPIN.  Cotgrave,  Dict. 
AuLBESPiNE,  s.  /'.  Arresta  amor,  p.  164. 

Aubère,  subst.  masc.  Cheval  grisûtre  marqué 
de  taches  noires.  (Voy.  les  Dict.  de  Nicot,  de  Monet, 
de  Ménage  et  de  Cotgrave.) 

Aubereau  (5),  subst.  masc.  Oiseau  de  proie. 
C'est  une  espèce  de  petit  aigle.  (Voy.  les  Dict.  de 
Nicot,  d'Oudin  et  de  Monet,  au  mot  Aubereau.) 

Et  comme  quand  Vaubereau 
Assuit  la  race  de  Nise  (6), 
L'empiétant,  le  fauperdreau  (7) 
Survient,  fait  lascher  prise. 

ŒuY.  deBaif,  fol.83,  R'. 
Que  tout  ausi  coume  l'alloé 
Fuit  le  mousket  et  l'espervier 
Plus  que  i'aubaiii,  ne  le  bruhier  ; 


Tout  ansement,  al  destraver, 
Fuient  païen  devant  les  Frans. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  <86. 

VARIANTES    : 
AUBEREAU.  Dict.  de  Nicot,  d'Oudin  et  de  Monet. 
AuLBEREAu  et  Haubereau.  Idem. 
AiBERET.  Cotgrave,  Dict. 

Aubebt.  Gace  de  la  Bigne  des  Déduits,  MS.  fol.  22,  R». 
AuBAiN.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  186. 
Aubez.  Gace  de  la  Bigne  des  Déduits,  MS.  fol.  83,  R». 

Aubergade,   subst.    fém.  Droit   de  gîte.  Ce 
droit  est  usité  dans  le  Béarn,  où  l'on  dit  Aubergada. 


Anciennement  les  Seigneurs,  en  plusieurs  lieux, 
avoient  droit  de  loger  chez  leurs  sujets.  Ce  droit  a 
été  converti  en  une  rente  payable  en  grain,  ou  en 
argent.  (Laurière,  Closs.  du  Dr.  fr.,  aux  mots  Au- 
bergada ei  Aubergade. —  Du  Cange,  Gloss.  latin, 
au  mot  Albergata.  — Voy.  Aldergue.) 

VARIANTES    : 
AUBERGARDE,  Aubergada.  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  fif. 

Auberge,  subst.  fém.  Alberge.  Sorte  d'abricot. 
"  Pavies,  auberges ,  muscats.  »  (Lettres  de  Pas- 
quier,  T.  II,  p.  159.) 

Aubert,  subst.  masc.  Argent,  en  terme  d'argot. 
(Voy.  Le  Duchat  sur  Rabelais,  T.  III,  p.  221,  note  13.) 

Aubicon,  subst.  masc.  Espèce  de  figuier.  (Voy. 
les  Dict.  d'Oudin  et  Cotgrave.) 

Aubiers,  subst.  masc.  plur.  Sorte  de  raisins. 
Raisins  blancs,  les  mêmes  qn'aubi7is.  (Voy.  Albin.) 
«  Leur  donnèrent  ung  cent  de  quecaset  trois  pane- 
«  rées  de  francs  aubiers.  »  (Rabelais,  T.  I,  p.  182.) 

Aubijoie  (Terre  d").  Le  pays  des  Albigeois.  On  a 
vu,  à  l'article  Albigeois,  que  ce  mot  s'écrivoit  aussi 
Aubijois. 

Aubit,  subst.  masc.  Prière  pour  les  morts.  Nom 
formé  du  mot  latin  Obiit,  il  est  mort. 
J'ay  ung  vieil  harnoys  qu'on  forbit. 
Sur  lequel  je  fonde  ung  aubil, 
Et  du  surplus  Dieu  le  parface. 

Villon,  Dialoj.  de  Mallepaye,  p.  60. 

Aubourdie,  subst.  fém.  Bourbier. 

Mais  amor  qui  tout  maistrie 

M'a  remis  en  Vaubourdie, 

Et  fait  amer  de  nouvel  amistié. 

Poét.  MS.  du  Vatican,  n- 1490,  fol.  77,  R". 

Aubreaux,  subst.  masc.  plur.  Hobereaux. 
Terme  de  dérision  qui  signifie  un  petit  gentilhomme 
de  campagne  sans  fortune.  (Voy.  le  Moyen  de  par- 
venir.) On  dit  aujourd'hui  Hobereau  dans  le  même 
sens.  Il  vient  peut-être  du  mot  Aubereau  ,  et  alors 
aubreaux  voudrait  dire  un  petit  gentilhomme  qui 
n'a  pas  le  moyen  de  nourrir  des  oiseaux  de  proie 
plus  forts  que  Vobereau,  ou  bien  qui  ne  vit  que  de 
la  chasse  de  cet  oiseau. 

Auc,  subst.  Une  oie.  C'est  un  mot  Languedocien. 
(Voy.  Du  Cange,  Gloss.  latin,  au  mot  Auca.) 
variantes  : 
AUC,  Auco,  AuQUETO.  Du  Cange,  Gloss.  lat.,  au  mot  Auca. 
Atrvuc.  Bouteillier,  Somm.  rurale,  p.  506. 

Au  cas  que,  conjoncf.  Puisque.  Ce  mot  a  cette 
signification  suivant  l'éditeur  des  Ordonn.  des  Rois 
de  France,  T.  III,  p.  70. 

Aucerre,  subst.  fém.  Auxerre.  Nom  propre  de 
ville.  «  Li  Buveor  d'Aucore.  >>   Ce  proverbe  se 


(1)  Ne  faudrait-il  pas  lire  atibcl,  comme  à  l'article  précédent  ?  (s.  e.)  —  (2)  Dol'nim.  —  (3)  Ce  mot  est  peut-être  à  rapprocher 
A'nubnrdi',  ayant  le  sens  de  selle,  (n.  e.)  —  (4)  Nom  vulgaire,  mais  d'origine  inconnue,  de  la  centaurée  bleue,  (n.  e.)  — 
(5)  Mieux  orthographié  hobereau;  i\  vient  de  l'anglais  hobhc,  qui  signifie  à  la  fois  petit  cheval,  petit  vautour;  de  là  aussi 
hobhi,  cheval  qui  va  l'arable,  (n.  e.)  —  (6)  Nisus,  métamorphosé  en  epervier,  poursuivait  sans  cesse  Scylla,  métamorphosée 
en  alouette,  (n.  e.)  —  (7)  Le  fauperdrieux,  faucon  à  perdrix,  (n.  e.) 


AU 


-  3H  — 


AU 


trouve   cité  dans  le  Rec.  des  Poëtes,  mss.  avant 
1300,  T.  IV,  p.  1651. 

VARIANTES  : 
AUCERRE.  Poët.  MS.  avant  -1300,  T.  IV,  p.  1651. 
AucEURE.  Chartul.  MSS.  de  la  Ch.  des  Comptes  de  Nevers. 
AucuERRE.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  T.  II,  fol.  193,  V». 

Aucerrois,  adj.  Qui  est  d'Auxerre. 

Devers  VAucerrois  Saint-Germain. 

Fahl.  MS.  du  R,  n-  7218,  fol.  323,  R-  col.  1. 

Aucié,  adj.  Réparé.  Ce  mot,  dont  le  commence- 
ment est  tronqué,  semble  répondre  au  mot  amendé, 
réparé,  qu'on  voit  dans  l'auteur  que  nous  allons 
citer  :  •<  11  fut  Irespercié,  et  navré  à  mort,  et  mou- 
«  rut  présentement  en  la  place,  dont  François  fu- 
«  rent  dolenz  au  cuer  ;  mais  à  qui  est  fait  ne  peut 
«  estre  aucié.  »  (Hist.  de  B.  du  Guesclin,  par  Mé- 
nard,  p.  534.) 

Aiiçor,  adj.  Plus  haut.  Du  lalin  altior.  (Voyez 
Partonopex  de  Blois,  ms.  de  S'  Germ.  fol.  1C4,  V°.) 

Aucteur,  suhst.  masc.  Auteur.  —  Demandeur. 

Au  premier  sens,  c'est  le  mot  lalin  Aitctor.  (Voy. 
sur  ce  sens  le  Dict.  de  Cotgrave,  au  mot  Aucteur.) 
On  lit  a(//ors  au  pluriel,  dans  le  Rec.  des  Poëtes, 
MS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1655. 

Au  second  sens,  c'est  le  mot  Actor,  opposé  à 
Reus.  En  terme  de  barreau,  le  demandeur  opposé 
à  défendeur.  De  là  on  lit  :  «  Vous  estes  auteur  à  la 
«  cause,  si  devés  premièrement  dire,  et  commen- 
"  cer.  "  (Modus  et  Racio ,  ms.  fol.  230.)  On  lit  nu 
sujet  d'Aman  et  de  Mardocliée  : 

En  ce  cas  lut  ly  ung  auctour 
L'autre  venqueuz  et  reus. 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  42. 

VARIANTES  : 
AUCTEUR.  Cotgrave,  Dict. 

AUCTOR.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  1U7,  R"  col.  2. 
Alctour.  Ger.  de  Rou.ssiUon,  cité  ci- après. 
AUTOR  (plur.)  Poiit.  MS.  avant  13(J0,  T.  IV,  p.  1655. 
Autour.  G.  Guiart,  MS.  fol.  352,  V°. 

Auctif,  adj.  Actif.  Ce  mot  est  pris  en  ce  sens 
dans  les  vers  suivans  : 

Et  c'est  assavoir  du  passif, 
Et  les  autres  sont  de  Yauctif. 
Hisl.  de  Fr.  en  vers,  à  la  suite  du  R.  de  F.  MS.  du  R.  n-  6812,  fol.  75. 

Auctorisation,  subst.  févi.  Autorisation.  On 
lit  en  ce  sens:  «  Lettres  d' auctorisation,  »  dans 
Laurière,  Gloss.  du  Dr.  fr. 

Auctoriser ,  verbe.  Vanter,  louer,  exalter. 
«  Seigneurs,  disl  le  chevalier,  vous  estimez  mon 
«  petit  faict  de  trop  plus  haute  recommandation 
«'  qu'il  n'est.  Certes,  Sire,  dist  le  Roy  Lucides ,  si 
«  yousne\ousauctorise%,  vous  ne  valez  pas  de 
«  pis:  car  qui  se  humilie,  s'exaulce.  »  (Perceforest. 

—  Voy.  l'IIist.  de  B.  Du  Guesclin,  par  Ménard.) 
Auctorité,  subst.  fém.  Avantage,  supériorité. 

—  Pouvoir.  —  Prérogative.  —  Authenticité.   — 
Axiome,  maxime. 

Ce  mot  est  employé  pour  avantage ,  supériorité, 
dans  le  passage  suivant:  «  Fortune  luy  fut  con- 


«  traire  à  celle  bataille,....  il  n'eut  pas  auctorité  âe 
«  ses  ennemis.  »  (Chron.  de  S'  Denis,  T.  I,  fol.  123.) 

Auctorité,  dans  l'acception  de  pouvoir,  posses- 
sion, se  trouve  dans  le  passage  suivant  :  «  Elle 
«  avoit  moult  grant  désir  d'avoir  en  son  auctorité 
«  une  canise.  »  (Percef.  Vol.  I,  fol.  1-13,  R°  col.  1.) 

On  a  dit,  dans  le  sens  de  prérogative  :  «  Droits, 
«  auctorités  et  prééminences  appartenans  au  dit 
«  sieur.  »  (Coût.  gén.  T.  I,  p.  405.) 

Aussi  ly  donna  il  semblable  auctoi-ité 

Car  jusques  au  tiers  ciel  fut  ravy,  et  porté. 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  189. 

Plusieurs  auteurs  ont  donné  à  ce  mot  la  signifi- 
cation d'authenticité. 

Enfin,  on  trouve  ce  mot  employé  pour  maxime, 
axiome.  (La  Thaumas.  Coût.  d'Orléans.)  «  Retenez 
«  ceste  auctorité.  «  (llist.  du  Th.  fr.  T.  II,  p.  406.) 

Cy  dist  X'auclorilé  : 

Souffisance  est  un  très  riches  trésors. 

Poes.  MSS.  d'Eusl.  Desch.  fol.  104,  col.  3. 
Car  vray  est  comme  auctorité. 
Que  qui  n'a  pas  la  paix  temporelle, 
A  peine  a  l'espirituelle  ; 
Et  l'une  et  l'autre  de  Dieu  vient. 

ll)id.  fol.  527,  col.  1. 

VARIANTES  : 

AUCTORITÉ.  La  Thaumassière,  Coût.  d'Orléans  ,  p.  464, 
tit.  de  1137.  -  Froissart,  Liv.  III,  p.  &i. 

AcToniTÉ.  Vigil.  de  Charles  VII,  T.  I,  p.  17. 

AuGTHORiTÉ,  La  Thaumassière  ,  Coût.  d'Orléans  ,  p.  465, 
tit.  de  1147  et  de  1168. 

Autorité.  Rom.  d'Alexandre,  MS.  du  R.  n»  7190,  fol.  90. 

Aiictroyé,  iJrtri.  Octroyé,  accordé.  (Voyez  La 
Thaumassière,  Goût,  de  Berry,  p.  431.) 

Aucun ,  adj.  Un.  —  Quelque.  —    Quelqu'un, 

quelques-uns.  —  Aucun.  -  Autre. 

Au  premier  sens,  ce  mot  signifie  un,  dans  les 
vers  suivans  : 

En  ce  dur  choc  aucun  reistre  de  guerre 
Va  rencontrer  d'Alvian,  qui  acquerre 
Voulait  honneur,  luy  donne  tel  caterre, 
Qui  le  mect  jus. 

J.  Marol,  p.  123. 

Dans  le  second  sens,  ce  mot  est  employé  pour  : 
quelque.  «  Aucun  Prince.  »  (Traité  de  Noblesse, 
MS.  du  R.  n"  7005,  fol.  41.) 

Ce  mot  est  employé  pour  :  quelqu'un,  quelques- 
uns.  »  Je  donne  h  diner  à  aucuns  de  mes  amis.  » 
(Nuits  de  Straparole,  T.  I,  p.  52.)  >>  L'amour  que  li 
»  auquant  des  sers  ont  à  leur  Seigneur.  »  (Beau- 
manoir,  p.  7.) 

Les  auquantes  iteles  sont, 
Mais  ne  sont  mie  totes  maies  ; 
Aucunes  en  i  a  loiales. 

Fabliaux.  MS.  de  S.  Gemi,  fol.  7,  h'  col.  3. 
Ausqxmntes  gui  s'en  echaperent. 
Qui  entre  paiens  arrivèrent, 
0  aises  (1)  furent,  ou  vendues, 
Ou  en  servage  retenues 

Rom.  de  BruI,  MS.  fol.  47,  R*  col.  2. 

On  disoil  proverbialement  : 

Aucuns  ont  souvent  batu  la  gerbe, 

Qui  n'en  ont  pas  pourtant  reçu  le  grain. 
J.  Maroi,  p.  14. 


(1)  Libres. 


AU 


—  312  — 


AU 


Ce  mol  se  disoit  aussi  pour  :  aucun,  ou  quelque. 
«  Quand  ancan  Seigneur  fait  saisir  les  fruits  et 
«  profits  des  liérilages  deluy  tenus.  »  (Coût.  Gén.) 

Enlin  ce  mol  a  été  employé  avec  la  significalion  : 
autres.  «  Les  uns  et  les  aucuns.  «  (L'Amant  ressus- 
cité, p.  170.)  (1) 

VARIANTES  : 
AUCHUN  et  Auchune.  Duples.  Hist.  de  Meaux.  T.  II,  p.  67. 
AucuEN.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  p.  22. 
AucuNG  (le  plur.  Aucungz.)  Perard,  Hist.  de  Bourg,  p.  430. 
AUKUN  et  AUKUNE  (masc.  et  fém.)  Rymer,  T.  I,  p.  13. 
AuLCUENZ.  Pei'ard,  Hist.  de  Bourg,  p.  430  ;  tit.  de  1234. 
AuQUN.  Duchesne,  Gén. .de  ChastiUon,  p.  14. 
Aucun  et  Aucune  (masc.  et  fera.)  Ortliog.  subsist.  —    La 
Ttiaum.  Coût.  d'Orléans,  p.  465  ;  tit.  de  1168. 
AscoNs.  Loix  Norm.  art.  50. 
AucuNQ.  Dict.  de  Robert  Estienne. 
AuLcuN.  Villon,  Repues  franches,  p.  21. 
AULCHUN.  Faifeu.  p.  9. 
AucAN.  Coût.  Gén.  T.  I,  p.  603. 
AucoN.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7989,  fol.  52. 
AUQUANT.  Fabl.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  9. 
Anquant.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  T.  II,  fol.  165. 
AUQUANTES  (léni.  plur.)  Fabl.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  7. 
AusQUANTES  (fém.  plur.)  Rom.  de  Brut,  fol.  47. 
AUQUEX  (plur.)  Rom.  de  Brut,  fol.  93. 

Aucunement,  adverbe.  Un  peu.  —  Quelque 
peu,  guère.  —  En  quelque  façon.  —  En  partie. 
Dans  le  premier  sens  de  :  un  peu,  on  a  dit  : 

Je  l'ayme  (wcuuemoit. 

Non  pas  jusqu'à  troubler  vostre  contentement. 
La  Suivanle,  Com.  de  P.  Corneille,  act.  2,  scène  vu. 

Dans  la  seconde  acception,  ce  mot  signifie:  quel- 
que peu,  guère.  Mouskes,  parlant  de  la  sobriété  de 
Charlemagne,  dit  : 

De  mangier  avqves  (2)  de  viande, 
N'estoit  mie  li  Rois  engrande  (3)  : 
A  hautes  fiestes,  une  fois. 
Si  avoit  moult  de  gent  li  Rois 
A  son  mangier  ;  et  quatre  mes 
Avoient,  sans  plus,  et  non  mes. 

■Ph.  Mouskes,  MS.  p.  81. 

On  a  dit  de  même  de  Richard,  fils  de  Cuillaume- 
Longue-épée  : 

Le  poil  avoit  auqs  rouz,  le  vis  apert,  et  cler. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p,  65. 

Les  sorciels  bruns,et  bel  le  front, 
Et  le  chef  cresp  et  aiitjtiel  blont. 

Fabl.  MS.  du.  R.  n-  7889,  fol.  87,  V  col.  2. 

Ce  mot  signifioit  aussi  pour  :  en  quelque  façon. 
On  a  dit  en  ce  sens.  «  11  est  aticunement  néces- 
«  saire.  »  (Sagesse  de  Charron,  p.  20.)  «  La  liberté 
«  et  la  Poligamie,  qui  semble  aucunement  natu- 
«  relie.  (Ibid.  p.  185.)  «  L'assiette  d'un  homme 
«  meslant  îi  une  vie  exécrable  la  dévotion,  semble 
«  estre  aucunemeni  plus  condamnable  que  celle 
«  d'un  homme  conforme  à  sov,  et  dissolu  partout.  » 
(Essais  de  Montaigne,  T.  I,  p."538.) 

Enfin,  ce  mot  a  été  employé  pour  :  en  partie.  On 
lit  dans  les  négociations  de  Jeannin,  «  dont  il  est 
«  demeuré  aucunement  content,  mais  non  du 
«  tout.  »  (Négociation  de  Jeannin,  T.  II,  p.  30-1) 

Des  diverses  façons  d'écrire  cet  adverbe,  que 


nous  avons  rassemblées,  la  plus  ordinaire  parmi 
nos  anciens  auteurs,  est  nuques,  contraction  d'au- 
cunement. Selon  Borel,  on  l'employoit  quelque 
fois  pour  :  autant,  aussi. 


AuLCUNEMENT.  J.  Marot,  p.  32. 

AucuNESFOis.  Dict.  de  Robert  Estienne  et  de  Cotgrave. 

Aucun  pou.  Dict.  de  Borel. 

Aucun  pov.  Gloss.  du  P.  Labbe. 

AucQUES.  Rom.  du  Brut,  MS.  fol.  96,  R". 

AuKES.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  273. 

AuQES.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  81. 

AuQUEs.  Parton.  de  Rlois,  fol.  139. 

AuQUEz.  Beaunianoir,  p.  135. 

AusQUES.  Gaut.  d'.\rgis,  Poët.  MS.  av.  1300,  T.  III.  p.  1137. 

AuQs.  Rom.  de  Rou,  p.  65. 

AUQUEL.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7989,  fol.  87. 

Audafi'ida.  Mot  de  jargon  qu'on  trouve  dans 
le  discours  d'un  chailatan  qui  va  débiter  sa  mar- 
chandise. •<  Audafrida  fabuli  fabula,  quant  il  la 
"  bacula  sua  jor  le  fossé.  »  (Erbene,  ms.  de  S.  Germ. 
fol.  89.) 

Audax,  adj.  Audacieux.  Ce  mol  est  purement 
latin.  11  est  employé  comme  françois  en  ce  passage. 
«  Ce  ne  seroit  point  fait  de  audax,  et  vertueux 
«  courage.  »  (Triomphe  des  ÎNeuf  Preux,  p.  147.) 

Audessement,  adv.  Audacleusement,  hardi- 
ment. On  a  employé  ce  mot  dans  ce  sens,  au  pas- 
sage suivant:  ><  Ce  sont  efforcés  à  priver,  et 
«  corrompre  nos  dites  ordonnances  en  plusieurs 
«  manières,  spécialement  en  marchandises,  en 
«  contract,  en  prest,  en  deniers  d'or,  et  à  gros 

«  tournois si  audessement,  au  dommage  de 

«  nous,  et  de  noslre  peuple,  dont  moult  'nous 
«  deplaist.  »  (Ordonn.  des  Rois  de  France,  T.  II, 
p.  57.) 

Audessus,  adv.  Pris  substantivement.  Avan- 
tage, supériorité. 

«  De  par  toy  ly  soit ly  ne  veult(Atvvas)  courre 

«  pas  quoique  tu  ayes  tout  fait  ce  que  tu  soyes  par 
«  tout  bon  audessus.  »  (Ger.  de  Roussillon,  ms. 
p.  130.) 

Audicion,  sulst.  (ém.  L'action  de  se  faire 
entendre.  —  L'action  d'entendre.  —  Office  d'audi- 
teur, ou  d'audiencier. 

Ce  mot  se  trouve  dans  le  premier  sens,  au  pas- 
sage suivant  : 

Pierres,  ne  Pois  n'ont  plus  audicion, 

Ne  .lerome  li  bon  biblislique; 

Leur  successeur  ont  autre  entencion, 

Tous  veulent  l'or,  mais  s'il  ne  sonne  et  clique. 

Car  s'il  est  clerc  sans  or,  mourra  de  faim. 

Poès.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  251,  col.  1. 

Audicion  est  un  terme  de  palais,  qui  signifie: 
l'action  d'entendre.  (Voy.  Ordonn.  des  Rois  de 
France,  T.  111,  p.  130.) 


(1)  On  combinait  aussi  ai(c«)i  avec  }ieu,  dans  le  sens  de  quelque  peu:  «  Aucun  peu  en  y  eut  de  prins.  »  (Froissart, 
éd.  Kervyn  de  Lettenhove,  XV,  295.)  (N.  E.)  —  (2)  .inquci,  en  provençal  ahpies,  a  le  sens  du  latin  ali(iui(i  ;  parfois  il  est 
accompa;-né  de  l'adverbe  priés  :  «  H  se  fuissent  embatu  en  icelui  part  ou  auqucs  pries.  »  (l'roissart,  éd.  Kervyn  de 
Lettenhove,  II,  67.)  (n.  e.)  —  (3)  Engrande,  qui  se  trouve  dans  G.  Guiart,  a  le  sens  de  engrant,  désireux  de.  (n.  e.) 


AU 


—  313  — 


AU 


Enfin,  on  nommoit  autrefois  audition,  l'état  ou 
office  d'auditeur,  ou  d'audiencier. 
Il  faut  le  bien  commun  amer, 
Que  justice  en  tous  cas  se  fasse, 
Que  nulz,  pour  chose  qu'il  pourchace, 
N'ait,  fors  que  par  Election, 
Estât,  office,  audicion, 
Par  port,  par  prière,  ou  achat. 

Poës.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  386,  col.  3. 

Audience,  suhst.  fém.  L'action  d'entendre  et 
de  se  faire  entendre.  —  Crédit.  —  Avantage.  — 
Jugement,  siège  de  justice. 

Dans  le  premier  sens  (1),  on  a  dit:  «  A  Vandience 
«  de  cette  harmonie.  »  (Rabelais,  T.  V,  p.201.)  «  Dist 
«  à  V audience  de  tous,  »  c'est-à-dire  parla  de  façon 
à  se  faire  entendre  de  tous.  (Ilist.  de  B.  Duguesclin, 
par  Ménard,  p.  250.)  «  Le  nomma  hautement,  et  en 
"  audience  de  tous.  »  (Chron.  de  S'  Denis,  T.  II, 
fol.  200.)  »  Dire  devant  tous  cm  audience.  »  (Machaut, 
Ms.  fol.  187,  V°  col.  3.  -  Id.  f"220.)  «  \M{  en  au- 
«  dience.  «  (Ger.  de  Roussillon,  ms.  p.  48.) 

J.  de  Meung,  rapportant  le  beau  trait  d'humanité 
de  Néron,  dans  sa  jeunesse,  dit  : 

Et  dist  en  audience  à  Romme, 
Quant  il  pour  condamner  ung  homme 
Fut  requis  de  la  mort  escrire 


Qu'il  voulsist  mieux  non  sçavoir 
Le  tor  que  sa  main  pour  escrire. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  6831-6835. 
Grâces  rendent  ly  chapelain, 
En  audience,  tout  à  plain. 

Hist.  des  Trois  Maries  en  vers,  MSS.  p.  470. 

L'action  de  se  faire  entendre  suppose  souvent 
du  crédit,  de  la  faveur;  de  là  on  disoit  : 

Audiancc  point  n'avoient 

Devers  le  Roy... 
Hist.  de  Fr.  en  vers,  à  la  suile  du  Rom.  de  Fauvel.  MS.  du  R.  ii*  6812,  fol.  85. 

Le  crédit  est  un  avantage,  et  emporte  l'idée  de 
préférence,  de  supériorité  (2).  Ainsi  on  lit  : 

Si  apert  bien  que  Sapience 
Doit  avoir  sur  force  audience. 
Hist.  de  France,  à  la  suile  du  Rom.  de  Fauvel,  MS.  du  R.  u-  6812,  fol.  49. 

Mes  les  Anglois,  par  escu  de  France, 
Orent  sus  Escoz  (3)  audiance. 

Hist.  de  Fr.  en  vers,  fol.  75,  R-  col.  3. 

On  a  dit  aussi  audience  pour  jugement  ou  siège 
de  justice.  <■  Nous  ou  nostrc  Prévost  de  Lengres  ne 
«  devions  avoir  que  six  solz  tournois  pour  amande, 
«  de  cellui  qui  appelloit  de  Vandience  de  nostre 
«  Prévost.  »  (Ord.  des  Rois  de  France,  T.  III,  p.  656.) 

En  ce  sens  on  disoit: 

1°  Droit  de  première  audience,  pour  droit  de 
première  instance.  «  Les  subjecis  des  Justiciers 
<i  hauts,  moyens  ou  bas,  aians  d'ancienneté  eu  le 
«  droict  de  première  audience,  et  qui  en  sont  en 
«  possession,  ne  peuvent  procéder  l'un  contre 
«  l'autre,  par  voye  de  justice  ordinaire,  avant 
«  qu'avoir  faict  appeller  leur  partie  par  devant  le 
«  dit  Seigneur,  ou  son  officier,  pour  veoir  s'il  y  a 


<-'  moyen  d'accomoder  leurs  différents  par  voye 
«  d'appoinctement  amiable.  »  (Coût,  de  Lu.vembourg, 
au  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  344,  col.  i.) 

2°  On  disoit,  dans  le  sens  à'audience  pour  se 
faire  écouter,  auriez  mieulx  audience  de  dire, 
pour  vous  feriez  mieux  de  dire,  ou  vous  seriez 
mieux  écouté  si  vous  disiez,  ou  vous  seriez  plus 
autorisé  à  dire.  <•  Certes  chevalier,  vous  este  trop 
«  présumptueux,  et  oultrecuydé,  qui  pensez  avoir 
«  pour  aymer  la  plus  belle  pucelle  du  Royaulme; 
«  en  vérité  vous  auriez  mieulx  audience  de  dire 
«  ces  motz  devant  autruv  qu'en  ma  présence.  » 
(Perceforest,  Vol.  V,  fol.  21.) 

3"  Avoir  audience  de  parler.  C'est  pouvoir  se 
faire  écouter.  «  Pour  ce  qu'il  luy  souvenoil  très 
«  bien  que  jamais  il  n  aurait  audience  de  parler  à 
«  la  créature  du  monde  qu'il  aymoit  le  mieulx,  si 
«  auioit  achevée  l'aventure  de  l'espée  vermeille.  » 
(Perceforest,  Vol.  V,  fol.  42.) 

4°  Grandes  et  petites  audiences,  sont  des  droits 
seigneuriaux  compris  dans  les  droits  et  les  revenus 
du  Roy.  (Voy.  les  Mém.  de  Sully,  T.  X,  p.  228.) 

\Ani.4NTES  : 
AUDIENCE.  Gace  de  la  Bigne  des  Déduits,  fol.  68,  V». 
Audiance.  Hist.  de  Fr.  à  la  suite  du  Rom.  de  Fauvel. 

Audience,  participe.  Plaidé.  Porté  à  l'audience, 
ou  même,  selon  Cotgrave,  mis  au  rôle  pour  être 
plaidé  à  l'audience.  (Voy.  le  Dict.  de  Cotgrave,  au 
mot  Audience.)  «  La  cause  est  audiancée,  là  se 
»  trouvent  les  deux  parties.  »  (Pasquier,  Recherches, 
Liv.  VIII,  p.  749.) 

VARIANTES  : 
AUDIENCE.  Dict.  de  Cotgrave. 
Audiance.  Pasquier,  Recherches,  Liv.  Vtll,  p.  749. 

Audiencier,  subst.  masc.  Titre  d'office.  On 
trouve  ce  mot  employé  pour  désigner  un  officier  de 
justice  ou  agent  de  la  Ville  d'Anvers,  aux  Provin- 
ces-linies,  en1()07.  Il  est  souvent  nommé  dans  les 
Négociations  de  Jeannin.  (T.  I,  p.  2.52  et  suivantes.) 
Il  est  qualifié  :  «  Chevalier  audiencier  et  premier 
«  secrétaire  de  leurs  altesses  l'archiduc  et  l'archi- 
«  duchesse.  »  (T.  II,  p.  448.)  On  nommoit  audian- 
cier  un  officier  particulier  de  la  maison  du  Duc  de 
Bourgogne.  Ce  nom  est  synonyme  de  Contrôleur 
des  finances.  «  L'audianci'er  ou  conlroUeursignoit 
«  tous  les  actes  de  finances,  et  gardoit  tous  les 
«  registres.  "  (Etat  des  officiers  du  Duc  de  Bourgo- 
gne,"p.  23.)  L'audiencier  en  chancellerie  de  France, 
ou  de  parlement,  portoit  le  nom  de  G7-and  Audien- 
cier. (Voyez  Laurière,  Glossaire  du  droit françois.) 

VARIANTE   : 
AUDL\NCIER.  (Etat  des  off.,  p.  23.) 

Au  Dieu  plaisir.  C'est-à-dire  :  Selon  Dieu,  au 
gré  de  Dieu  : 

Tels  homs  \  it  bien  au  Dieu  plaisir. 

Poës.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  66,  col.  4. 


(1)  Ajoutons  dans  ce  sens  la  locution  adverbiale  en  audience,  de  manière  à  être  entendu,  ouvertement  ;  c'est  l'équivalent 
de  l'expression  poétique  en  oiani  (Voir  Froissart,  1.1.  XV,  00).  (n.  e.)  —  (2)  Froissart  emploie  sovivenl  ce  mot  dans  le  sens 
d'autorité,  considération,  qualité  de  se  faire  écouter  :  «  Ne  le  duc  de  Berry  ne  le  duc  de  Bourgoigne,  qui  voulentiers 
euissent  amodérés  ces  besongnes,  n'y  avoieiit  point  d'audience.  »  (Edition  citée,  XV,  2S.)  (n.  e.)  —  (3)  Ecossais.  C'est  déjà 
le  dicton  du  xvii'  siècle  ;  «  L'Ecossais  traître  à  sa  foi  Pour  un  liard  vendit  son  roi.  »  (n.  e.) 

U.  .  40 


AU 


314  — 


AU 


Audi  nos,  subst.  mase.  C'est  un  mot  latin  qui 
signifioit  :  Prières.  C'étoitla  finale  de  la  prière  de  : 
Rogamvs,  aitdi  nos.  (Voyez  Boucliel  Serées,  livre III, 
page  74.)  "  Dire  ses  audinos.  »  (Ibid.  page  180.) 

Auditeur,  snbst.  masc.  Sorte  d'officier  de 
justice.  On  en  donna  aux  Juifs,  pour  maintenir  le 
règlement  qui  fut  fait  à  leur  égard,  et  qui  se  trouve 
dans  l'ordonnance  de  Louis-le-Hulin,  en  1315.  (Voy. 
les  Ordonnances  des  R.  de  Fr.  T.  I,  page  Sfiô  et  sui- 
vantes.) Dans  le  royaume  de  Jérusalem,  c'étoit  un 
officier  de  justice  qui  connoissoit  des  dettes  en  1310. 
(Voyez  les  Assises  de  Jérusalem,  page  208,  où  l'on 
écrit  auditonr.) 

Dans  la  Coutume  d'Amiens,  de  Ponthieu,  de 
S.  Paul,  de  Lille,  et  dans  l'ancienne  Coutume  du 
Boulonois,  «  les  Auditeurs  sont  des  officiers  par 
«  devant  lesquels  on  recognoit,  et  passe  tous  con- 
«  tracts  de  vendition,  ou  d'assignation,  pour  les 
«  réaliser,  et  acquérir  droit  d'iiypoleque.  »  (Lau- 
rière.  Glossaire  du  droit  françois.)  Ils  étoient  aussi 
les  juges  des  causes  d'appel.  Ils  tenoient  leurs 
séances  à  Nevers,  trois  fois  l'an,  par  forme  de  grands 
jours,  et  les  appellations  interjetées  de  leurs  sen- 
tences, ressorlissoient  au  Parlement,  à  cause  de  la 
Pairie.  (Voyez  Ibid.)  Dans  la  Coutume  de  Beauvoisis, 
c'étoit  ceux  qui  étoient  commis  pour  ouïr  des 
témoins.  (Voyez  Ibid.  elle  Glossaire  sur  les  Coutu- 
mes de  Beauvoisis.  —  Beaumanoir,  p.  206  et  218.  — 
Coût.  Gén.  T.  I,  p.  338.)  11  y  avoit  des  auditeurs, 
des  témoins  au  Chàtclet,  qui  furent  supprimés  en 
1302.  (Voy.  les  Ordonm.nces  des  Rois  de  Fr.)  On 
trouve,  dans  les  Orduinumces  des  Rois  de  France 
(T.  I,  p.  073),  que  le  lioni  d'(n;d/7fH/'s  fut  donné  aux 
Commissaires  envoyés  par  le  Parlement  dans  les 
Provinces,  pour  faire  les  enquêtes.  En  Picardie,  ce 
nom  a  été  donné  aux  Notaires.  (Voy.  La  Roque,  sur 
la  rsoblesse.  p.  514.)  Pasqaier,  dans  ses  Reclierches, 
livre  II,  p.  08,  observe  que  ce  mot  a  été  mis,  pour 
la  première  fois,  en  usage,  par  l'Ordonnance  de 
1454.  Pasquier  s'est  trompé,  puisque  nous  avons 
dit  plus  haut  qu'il  se  trouve  dans  une  Ordonnance 
de  1315(1). 

Dans  le  passage  suivant,  A  uditeur  semble  le  même 
que  les  Juc/es  auditeurs  du  Cliàtelet  de  Paris;  ce  sont 
des  Juges  qui  rendent  des  jugements,  sommaire- 
ment, à  l'audience,  concernant  toutes  les  causes, 
jusqu'à  la  somme  de  cinquante  livres.  Leurs  sen- 
tences s'exécutent  nonobstant  appel.  «  En  amende- 
«  ment,  demande  sur  taxation  de  despens  n'a  point 
«  d'amende;  mais  qui  en  appelleroit  de  Juge  à 
«  autre,  comme  d'un  Maire  à  un  Bailly,  s'il  en 
«  payeroit  amende  ;  mais  d'unaudileuron  Prévost, 
«  non  :  car  c'est  une  même  Cour.  »  (Grand  Coût, 
de  France,  livre  III,  page  471,  etc.)  Voyez  ce  qui  est 
dit  de  cette  espèce  de  Juges  dans  les  Ordonnances 
des  Rois  de  France  (T.  I,  p.  460  et  suivantes),  et  un 
règlement  touchant  cet  objet.  (Ibid.  p.  352.)  Sur 
Yaudileur  de  l'Oost  Flandre,  on  lit  ce  qui  suit,  dans 


le  Nouv.  Coût.  Gén.  (T.  I,  p.  1023.)  «  L'acte  du 
«  Conseil  privé  de  Sa  Majesté,  sur  le  premier  arti- 
"  cle  de  la  rubrique  vingt-quatre,  par  lequel  il  a 
«  esté  interdit  et  deffendu'à  Yaudileur  de  l'Oost  de 
«  Flandre  de  prendre  connoissance  des  Maisons 
«  mortuaires,  ou  successions  des  Bourgeois  décé- 
«  dez,  et  qui  ont  été  dans  le  service  militaire  du 
"  9  octobre  1641.  » 

VARIANTES  : 
AUDITEUR.  Orthographe  subsist. 
AuDiTOUR.  Assises  de  Jérusalem. 

Audivi,  subst.  masc.  Droit  de  se  faire  écouter  ; 
autorité.  «  Il  sera  assis  au  hault  bout,  on  luy  tran- 
■<  chera  du  meilleur;  il  aura  Yaudivit,  et  le  caquet 
«  par  dessus  tous.  »  (Cymbalumfmundi,  p.  97.) 

L'ung  est  secouru,  l'aulre  aydé, 
L'ung  est  chassé,  l'autre  \'uydé, 
L'ung  a  support,  l'autre  audivy. 

Œuv.  deR  de  Collerye,  page  59. 

(Voy.  Coquillard,  p.  48  et  Clém.  Marot,  p.  443.) 
Parmi  les  proverbes  ruraux  rapportés  par  l'Oisel 
(Instit.  Coût.  T.  II,  page  238),  on  lit  :  «  Un  seul  œil 
«  a    pluz    de   crédit,    que    deux    oreilles    n'ont 
"  A'audivi.  » 

VARIANTES   : 
AUDIVI.  Loysel,  Instit.  Coût.  T.  II,  p.  238. 
AUDiviT.  Cymbalum  mundi,  p.  97. 
AuDivy.  Œuv.  de  R.  de  Collerye,  p.  59. 

Audous,  subst.  masc.  Doux.  Mot  languedocien 
qui  signifie  proprement,  "  celui  qui  ne  fait  point 
'<  de  douleur  en  traitant  une  playe.  »  (Voyez  le 
Dictionnaire  de  Borel  qui  le  dérive  du  grec.) 

Audriettes,  subst.  fém.  plur.  Sorte  de  reli- 
gieuses. Il  faudrait  dire  Odriettes.  Ce  nom  fut 
donné  à  des  Religieuses,  à  cause  de  leur  fondateur 
Etienne  Odry  qui  fonda,  en  1252,  une  maison  pour 
loger  de  pauvres  femmes  veuves.  Elles  ont  donné, 
elles-mêmes,  leur  nom  à  une  rue  de  Paris  dans  le 
quartier  du  Marais.  (Voyez  Lebeuf,  Histoire  civile 
d'Auxerre,  page  534.) 

Aufaige,  subst.  masc.  Nom  de  dignité.  Nos 
anciens  auteurs,  qui  défigurent  les  noms  orientaux, 
supposent  qu'aufaige  est  chez  les  Sarrazins  le  nom 
d'une  dignité  approchant  de  celle  de  Roi. 

Roy.  ne  aumacor,  ne  ou/'aiV/e 

Blanchaiidin,  MS.  de  S'  Germ.  M.  18i,  Y»  col.  i. 
Ne  sai  s'il  est  Roy,  ou  aufaige. 

Ibid.  fol.  187,  R-  col  1. 
Profilias  point  le  destrier 
C'on  ne  savoit  contrepoisier 
Et  fiert  Vuiifa^Hje  0-)  de  Salerne. 

Alhis,  MS.  fol.  111,  V  col.  1. 

VARIANTES  : 
AuFAGE  et  AuFANGE.  Athis,  MS.  fol.  lit,  V"  col.  1. 

Aufelis,  nom  de  baptême  d'une  femme.  (Perard, 
Histoire  de  Bourg,  p.  484  ;  titre  de  1256.) 

Auïertes ,  subst.  fém.  plur.  (Voyez  Offerte.) 
Offrandes.  (Voyez  fAmant  ressuscité,  p.  210.) 


(-1)  On  le  trouve  aussi  dans  Beaumanoir,  v.  par  ex.  xxxi.k,  7.  (n.  e.)  -  (2)  Le  même  mot  ne  désigne-t-il  pas  à  la  fois  le 
guerrier  et  le  cimeterre  dont  il  se  défend  :  «  Contre  nous  de  pied  ferme  ils  tirent  leurs  alfainjcs.  »  (Corn.  Cid,  IV,  3.)  (N.  e.) 


AU 


—  315  — 


AU 


Auffet,  subst.  masc.  Effet. 

Auffort,  subst.  masc.  Nom  propre.  C'est  peut- 
être  Alphonse.  (Voy.  le  Rom.  de  Baudoin,  fol.  29  et 
36,  où  on  lit  auffort.)  On  trouve  Aitfons  dans  Borel. 

VARIANTES  : 
AUFFORT.  Rom.  de  Baudoin,  fol.  29. 
AuFONS.  Dict.  de  Borel. 

Auffrique,  subst.  fém.  L'Afrique. 

Ayse,  Europe  et  Aufrique. 

Poês.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  250,  col.  3. 

VARIANTES  : 
AUFFRIQUE.  Chron.  de  S'  Denis,  T.  I,  fol.  137. 
AuFRiKE.  Marbodus,  col.  \^% 

AuFRiQUE,  Eust.  Deschamps,  Poës.  MSS.  fol.  250,  col.  3. 
Afbike.  Marbodus,  col.  1664. 

Aufin,  adverbe.  Enfin. 

Auge,  s^/&s^  fém.  Cercueil.  Ce  mot,  qui  subsiste 
dans  un  autre  sens  (t),  a  été  employé  pour  cercueil 
dans  le  passage  suivant,  où  il  s'agit  du  corps  de 
Charles  VII,  mort  en  lî(M.  Il  y  estait:  «  Estoit  le 
«  Roy  dedans  un  coffre  de  cyprès  enchâssé  en  un 
«  auge  de  plomb.  »  (Monstrelet,  Vol.  III,  fol.  92,  V°.) 

Augette,  subst.  fém.  Petite  auge.  ><  Cocasses 
«  de  limas  pour  servir  d'abrevoir  et  d'augettes 
«  pour  lesoyseaux(2).  »  (Bergeries  de  RemyBelleau, 
T.  I,  page  74.) 

Augié ,  participe.  Averti  par  l'ouïe.  Les 
Chrestiens  postés  sur  une  éminence  attendent  les 
Mahomélans  qui  les  y  viennent  attaquer  : 

Se  nous  qui  somes  eu  somet 
De  ces  montaigne  logié, 
Bien  avisé  et  bien  duijié  (3), 
A  si  grant  gent  que  nostre  page 
Les  devroient  sans  avantage, 
Enchaoier,  tuer  et  occire  ; 
S'il  nous  povoient  desconfire  , 
Et  si  nous  devroit-on  prendre; 
.^  vant.  Seigneurs,  or  du  delTendre. 

Machaut,  MS.  fol.  228,  R»  col.  1. 

Augmant,  subst.  masc.  Augmentation.  (Voyez 
les  Dict.  de  Monet  et  d'Oudin ,  aux  mots  Augmant 

et  Augment.)  »  advenant  que  le  dit  survivant 

«  augmente  le  dit  bien  par  nquels, ,  tel  augmente 
«  sera  communiqué  aux  enfants.  »  (Coût,  de  Bouil- 
lon, au  Nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  857,  col.  1.) 

Sur  le  mot  augment,  qui  est  encore  usité  comme 
terme  de  droit,  voyez  le  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au 
mot  augmentum.  C'étoit  le  présent  que  l'époux 
faisoit  à  sa  femme  le  lendemain  du  mariage. 
D'autres  l'apellent  ouelage.  [C'est  occelage,  du  latin 
osculum.)  On  le  désigne  en  Normandie  sous  le  litre 
de  chambrée,  bagnes  etjoijauj:.  (Voyez  une  Lettre  in- 
sérée dans  le  Mercure  du  mois  d'août  1733,  p.  1707.) 

VARIANTES  : 
AUGMANT.  Dict.  de  Monet  et  d'Oudin. 
Auge  ANGE.  Carpentier,  Histoire  de  Cambray,  p.  31. 


Augment.  Laurière,  Glossaire  du  Droit  françois. 
Augmente.  Nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  857,  col.  2. 

Augmentateur,  subst.  inasc.  Qui  augmente. 
(Voyez  les  Dict.  de  Rob.  Estienne  et  d'Oudin,  et  les 
Contredits  de  Songecreux,  fol.  75,  R°.) 

Augsi,  adverbe.  Aussi. 

■.  .  .  Diex 

Onques  mais  ne  fist  auf/si  gente. 

Ovide  de  arte,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  97,  R'  col,  1. 

Aiiguermer.  Ce  mot,  dont  on  ne  peut  faire 
connaître  la  signification,  se  trouve  dans  un  tarif 
de  droits  sur  différentes  marchandises,  où  on  lit  : 
«  LesTonneldeguede(4),septsols,  et  auguermema 
«  feur  ;  payelles  de  batterie  le  cent  pezant  trois 
«  solz  ([uatre  deniers.  »  (Ord.  des  Rois  de  France.) 
C'est  peut-être  une  faute  pour  augmente. 

Augure ,  snbst.  fém.  Violence ,  contrainte.  Il 
faut  peut-être  lire  augure,  du  latin  anguriare. 
«  Est  aussi  à  scavoir  qu'il  ne  sera  licite  au  Seigneur, 
«  pour  occasion  de  quelque  exaction,  ou  angure, 
«  faire  aller  les  bourgeois  en  telles  chevauchées.  » 
(Coût,  de  Landrecies,  au  Nouveau  Coutumier 
général,  T.  II,  page  2()'t.) 

Augui'einent,  subst.  masc.  Augure, devination. 
(Voy.  les  Dict.  de  Cotgrave  et  d'Oudin.) 

Augures,  subst.  fém.  ptur.  Semble  une  faute 
pour  augive  ou  ogives  :  arceaux  de  voûte.  Parlant 
des  convives  sur  lesquels  Samson  renversa  les 
voûtes  de  la  salle  du  festin ,  l'Histoire  de  la  Toison 
d'Or  dit:  «  Ces  deux  colonnes  reposoient  les  «Huîtres 
»  de  tout  l'édiffice  ;  car  elles  étoient  au  milieu  de 
«  la  salle.  «  (Vol.  I,  fol.  34,  V°.) 

Augureur,  subst.  masc.  Augure,  devin.  (Voyez 
le  Dict.  d'Oudin.) 

August,  subst.  jnasc.  Août.  C'est  le  nom  d'un 
des  mois  de  l'année.  •<  A  la  feste  Monseignor  Saint- 
«  Pierre  entrant  august.  »  (Villehardouin,  p.  76.  — 
Voyez  le  Roman  du  Brut,  ms.  fol.  84,  V»  col.  2.) 

Augustaires,  subst.  masc.  ptur.  Espèce  de 
monnaie  d'or.  Cette  monnoie  étoit  de  la  valeur 
d'un  fiorin  et  un  quart  d'or,  ainsi  appelée  parce 
qued'un  costé  elle  porloit  l'empreinte  de  l'Empereur 
Frédéric,  et  de  l'autre  un  aigle,  suivant  l'usage  du 
temps  des  Empereurs  romains.  (Voyez  Du  Cange, 
Glossaire  lalin,  au  mot  Augustarius,  et  une  citation 
fi'ançoise  ibid.  au  mot  foeulare.  (Voyez  Augustins 
couronnés.) 

Auguste,  subst.  masc.  Titre  de  dignité.  —  Nom 
d'un  jour. 

Dans  le  premier  sens,  ce  titre  équivaloit  à  celui  • 
d'Empereur.  11  est  donné  à  plusieurs  de  nos  rois, 
dans  plusieurs  Chartres,  et  sur  plusieurs  raonnoies, 
sans  qu'ils  en  eussent  réellement  la  qualité.  (Voyez 


(1)  Au  passage  cité,  auge  a  été  employée  avec  intention,  pour  désigner  un  coffre  où  la  forme  est  usuelle,  si  la  matière 
est  différente.  Le  mot  se  trouve  au  xiil=  siècle,  dans  le  Liure  des  Métiers  dEt.  Boileau.  (N.  e.)  -  (2)  Nous  employons  en  ce 
sens  le  diminutif  masculin  auget  ;  le  Méimgier  de  Paris  disait  déjà  au  xiv«  siècle  :  «  Nettoiez  aux  pouçains  leur  auget  ou 
abreuvouer.  »  (n.  e.)  -  (3)  Bien  instruits  par  des  espions  ;  c'est  un  participe  refait  sur  duit,  de  duive.  .iugié  est  une  faute 
•de  lecture,  (n.  e.)  —  (4)  Pastel. 


AU 


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AU 


l'Abbé  de  Vertot,  Etablissement  des  Bretons,  T.  1, 
p.  3-28.  —  DuTillet,  Rec.desRoisdeFrance,  p.  171.) 
Le  nom  d'auguste  éloit  aussi  le  nom  que  l'on 
avoit  donné  au  jour  de  la  Sainl-Barlhélemy,  par 
allusion  au  mois  d'août  dans  lequel  celte  fête  arrive. 
(Voyez  rilist.  de  M.  de  Thou,  T.  YI,  Liv.  ui,  p.  41G.) 

Auguste,  subst.  féin.  Augsbourg.  C'est  une  ville 
d'Allemagne. 

Auguste,  adj.  Impérial.  André  de  la  Aligne,  par- 
lant de  l'entrée  de  Charles  VIII  à  ^'aples ,  en  1495  , 
dit  :  «  Ce  (|u'il  fit  en  grand  triomphe,  et  excellence, 
«  revêtu  d'un  habillement  impérial  surnommé 
«  auguste.  » 

Augustins  (couronnes) ,  subst.  maso.  plur. 
Espèce  de  monnoie  d'or.  C'est  peut-être  la  même 
monnoie  que  les  augustaires  donl  ce  Dictionnaire  a 
parlé.  On  lit  dans  une  citation  au  Glossaire  latin  de 
Du  Cange,  au  mol  Leoiies  :  «■  Couronnes  augustins 
«  de  6i 13  den 48  gr.  14  mites  (1).  » 

Aujoulet.  subst.  masc.  Vieillard.  Mot  langue- 
docien traduit  par  vieillard,  dans  des  vers  cités  par 
Borel,  au  mot  Marelle.  Peut-éirc  est-ce  le  diminutif 
A'aiol,  aïeul? 

Aul.  S'  Julien,  dans  sesMesl.  historiques,  p.  450, 
remaïque  que  de  son  temps,  ceux  qui  se  piquoient 
de  bien  parler  disoient  al  au  lieu  de  aul,  comme 
dans  ce  mot  la  Imlme  au  lieu  de  la  baulme. 

Aulbe,  subst.  fém.  Ais.  De  cette  acception  géné- 
rique, ce  mot  a  passé  ;i  diverses  signillcalions 
particulières.  Ainsi  on  nommoit  aubes  ou  auves  les 
ais  qui  entroient  diuis  la  composition  d'une  selle, 
d'un  bat;  peut-être  ù  cause  deia  couleur  blanche 
du  bois  dont  elles  étoient  faites.  Le  mot  aube  sub- 
siste encore  pour  signifier  les  petits  ais  de  la  roue 
d'un  moulin  ù  eau,  et  on  les  appelloil  aussi  auves. 
(Voyez  C.  Guiart,  ms.  fol.  334,  R°.) 

.Aulnes  est  une  faute  dans  le  passage  suivant,  où 
il  faut  lire  aulbes  :  «  Le  hourt  descend  le  long  des 
«  aulnes  de  la  selle  devant,  en  embraissant  la  poi- 
«  trine  de  cheval.  « 

On  distingue  les  auves  de  l'arijon  dans  les  passa- 
ges que  nous  allons  citer;  il  pareil  que  les  atives 
éloienl  proprement  des  ais  qui  suppléoient  aux 
panneaux,  ou  les  soutenoient  : 

Porter  la  fault  au  bourrelier. 
Pour  rembourer  communément, 
Et  pour  l'arçon  qui  veult  briser, 
Et  les  auves  semblablement. 

Pots.  MSS.  d'Eust.  Dcsch.  fol.  îôi,  col.  2. 
Sele  ot  de  moult  riche  façon, 
D'ivuire  furent  li  arçon, 
•  Les  auves  sont  d'autre  manière. 

Floirc  et  Blanchenor.  MS.  do  S.  Germ.  fol.  195,  V  col.  I. 

VARIANTES  : 
AULBE.  Le  Duchat  sur  Rabelais.  T.  IV,  p.  .58. 
Aube.  Dict.  d'Ouiiin  et  tle  Cotgrave. 
Aulnes,  s.  p.  Lisez  Aulbes. 
Auves,  s.  p.  G.  Guiart,  MS.  fol.  :J3l,  V«. 


Aulberge,  subst.  féin.  Auberge,  hôtellerie. 
(Voy.  le  Dict.  de  Borel.) 

Aulge,  subst.  fém.  Auge.  (Voy.  l'Histoire  -de  la 
Toison  d'Or,  T.  II,  fol.  107.)  On  nommoit  ««/(/e  rf'wM 
estang,  le  canal,  conduite  ou  rigole  par  laquelle 
s'écoule  l'eau  d'un  étang,  et  qui  en  va  fournir  à  un 
autre  étang:  «  Un  seigneur  d'estang  peut  suivre 
«  son  poisson  qui  seroit  monté  par  creue  ou  des- 
«  bordement  d'eaues ,  jusques  et  dedans  la  fosse  et 
«  aulge  de  l'estang  prochain.  "  (Coût,  du  Duché 
d'Orléans,  au  Coût.  gén.  T.  1,  p.  958.) 

Aulliours,  adverbe-  Ailleurs. 

Aulnage,  subst.  mase.  Aunage.  Le  droict  d'aul- 
nage  éluit  un  dioil  qu'on  payoit  pour  certaine 
quantité  d'aunes  d'étolTe.  (Voy.  Du  Cange,  Glossaire 
lalin,  au  mol  Vlnagium.) 

Aulue,  subst.  fém.  Aune,  mesure.  (Voy.  le  Dict. 
de  Cotgrave,  au  mot  Aulne,  le  Glossaire  latin  de 
Du  Cange,  au  mot  Mena.) 

Aulne  de  Provins.  C'est  une  mesure  de  deux  pieds 
et  demi.  ■>  La  lieue  de  Bourgogne  contient  cinquante 
«  portées  de  longueur  ;  la  portée,  douze  cordes  ;  la 
«  corde,  douze  aulnes  de  Provins;  Vaulne,de\ix 
«  pieds  et  demy.  «  (Coût,  du  Comté  de  Bourgogne, 
au  Coût.  gén.  T.  I,  p.  8G0.)  L'aune  semble  avoir  été 
de  deux  coudées  en  Angleterre.  «  Lq  aune  ûe'deux 
«  contes esprovés.  »  (Brillon,  des Loix d'Angleterre, 
fol.  75,  V°.) 

L'aune  de  terre  étoit  certaine  mesure  de  terre. 
(Voyez  Du  Cange,  Glossaire  latin,  au  mot  Olna.) 

Tout  au  long  de  l'aune,  pouce  et  tout  :  Fa.;on  de 
parler  qui  signifie  oultre  mesure,  ou  h  bonne 
mesure.  «  Faire  le  glorieux  tout  au  long  de  Vanne, 
«  pouce  et  tout.  »  (Contes  d'Estrapal,  p.  188.)  Il  est 
pris  au  figuré  dans  ces  vers,  où  une  jeune  fille 
compare  ses  charmes  auprès  de  ceux  de  sa  mère 
encore  belle  : 

Endroit  li  est  nonne  passée 
.Jamais  sa  biaulez  ne  vendra; 
Mes  a  granz  ânes  passera 
De  la  moie,  si  est  avenir  ; 
Se  je  me  voll  chière  tenir 
Bien  longuement  poura  durer. 

.\this  MS.  fol.  119,  R-  col.  \  cl  2. 

11  est  encore  employé  au  même  sens  figuré  dans 
ces  vers  : 

.Te  rabatrai  à  moult  grans  aunes 
Les  corages  des  becs  trop  /jaunes. 

Athis,  MS.  fol.  67,  V- col.  1. 

VARIANTES  : 
AULNE.  Cotgrave,  Dict. 

Alne.  Rec.  des  Ord.  des  Rois  de  France,  T.  III,  p.  il3. 
Ane  et  Ausxe.  Atbis,  MS.  fol.  lOi,  V»  col.  1. 
Aune.  Orthographe  subsistante. 
An.\e  et  Ane!^  Atliis,  MS.  fol.  61,  V»  col.  2. 
EiNNES.  Ord.  T.  III,  p.  587.  C'est  une  faute  ;  on  lit  aunes 
dans  tous  les  autres  Règlements,  suivant  l'éditeur. 

Auluée,  subst.  fém.  L'étendue  d'une  aune. 
(Voyez  le  Dict.  de  Cotgrave.) 


(I)  C'est  un  texte  de  mars  14.53. 


AU 


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AU 


Aulneiir,  subst.  ma&c.  Qui  aune.  {Voyez  le 
Dictionnaire  de  Colgrave.) 

Aultresfois,  adv.  Autrefois.  (Voy.  Faifeu,  p.  23.) 

Aumacor,  subst.  masc.  Nom  de  dignité  parmi 
les  Sarrazins. 

Rois,  et  contor,  et  aumacor. 

Fabl.  MS.  de  S.  Gerra.  fol.  U,  V  col.  3. 

Le  cheval  point  vers  Vaumacor 
Qu'Espagnol  tiennent  à  singnor  : 
De  cordy  et  la  signorie. 

Alhis,  MS.  fol.  99,  R"  col.  2  et  V"  col.  1. 

Aumatour.  (Lisez  aumacour.)  Dans  la  notice  du 
Rom.  d'Alexandre,  c'est  un  titre  donné  à  ce  Prince. 

VARIANTES  : 
AUMACOR.  Blanchandin,  MS.  de  S'  C.erm.  fol  184,  V»  col.  1. 
Amotor  et  AuM.vcoR.  Athis,  MS.  fol.  99,  R»  col.  2. 
AUM.4.C0URS.  Phil.  Mouskes,  MS.  p.  l.W. 
AUM.\T0UR.  Notice  du  Roman  d'AÎe.xandre,  fol.  77. 

Auniisllle,  subst.  et  adj.  Bétail.  —  Viande  de 
boucherie. 

On  a  beaucoup  varié  sur  la  signification  de  ce 
mot.  (Voy.  le  Dict.  de  Borel,  au  mot  .iumall.)  Lau- 
rière  l'ex[)lique  par  animaux  domestiques,  bestiaux 
privés.  (Voy.  son  Gloss.  franc,  au  mo\.  Aumaille.) 
On  le  trouve  pour  gros  bétail  dans  le  Gloss.  sur  les 
Coût,  de  Beauvoisis.  Du  Gange,  dans  son  Glo.çsaire 
latin,  le  dérive  de  Manualia,  comme  bêtes  venant 
([uand  on  leur  tend  la  main.  Ménage,  dans  son  Dic- 
tionnaire Etymologique,  dit,  d'après  Joachim  Perion 
qu'il  cite,  que  les  paysans  appellent  les  brebis  et 
les  moutons  du  seul  nom  d' aumaille  ;  Perion  le 
dérive  du  Grec  :  mais  dans  ce  dernier  sens  ne 
poun'oit-il  pas  venir  du  latin  albus  (puisqu'on  a 
écrit  aubmaille  (1)'0  Au  reste,  on  trouve  ce  mot  plus 
communément  employé  pour  gros  bétail,  et  plus 
communément  encore  pour  un  ferme  générique  qui 
signifie  toute  espèce  de  bétail  :    - 

D'aiguës,  de  prairies  et  de  très  bons  gagnages 
De  vignes  et  de  bois  y  a  grant  signorage  ; 
De  très  grands  nourissons  et  de  porcs  et  d'ouailles 
Et  de  très  grands  preries,  et  grand  foison  (Varmailles. 
Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  17. 

Machaut,  peignant  le  grand  Polyplième,  s'exprime 
ainsi  : 

A  senestre  a  un  aviron 
Lonc  de  C.  piez,  ou  environ 
Et  gros  à  l'avenant,  sanz  faille 
Dont  il  retourne  son  aumaille. 

Macliaul,  MS.  fol.  201,  V-  col.  1. 

Faisant  parler  le  grand  Polyphème,  le  poète  lui 
fait  dire  : 

Et  se  tu  de  la  moie  aumaille 
Me  requiers  que  je  la  te  nombre. 
J'en  ay  tant  que  n'en  say  le  nombre. 

Ibid.  fol.  202,  R»  col.  2. 

On  voit  dans  la  Thaumassière,  Coutume  de  Borri, 
p.  163,  article  3,  un  droit  levé  sur  les  bouchers 

«  pour  chaque  chef  à'atimaiHe  qu'ils  tuent 

■I  de  sept  deniers,  »  et  dans  un  autre  endroit  du 
même  auteur,  «  le  chef  d'fl»/Mfl///^  »  est  distingué 


de  «  chef  de  bestes  à  laine,  boucs,  chèvres,  etc. 
«  Nul  ne  peut  mener  bestes  aumailles,  cheva,lines, 
"  chèvres,  ou  autres  qui  peuvent  porter  dommages 
«  au  reject  es  bois  taillis,  jusqu'à  ce  qu'ils  soient 
.•  defensables.  »  (Coutumier  Gén.  T.  I,  page  210.) 
«  Chars,  aumaille,  vache,  toute  manière  d'aitb- 
0  maille.  »  Dans  une  citation  au  Gloss.  latin  de  Du 
Cange,  au  mot  Manualia  3.  «  Ne  leur  laissoient 
«  aubmaille  grosse,  ne  menue  que  ilz  n'emmenas- 
><  sent.  ><  (Ilist.  de  B.  du  Guesclin,  par  Ménard, 
page  70.) 

On  a  étendu  la  signification  de  ce  mot  aumaille, 
et  on  l'a  dit  pour  toute  espèce  de  viande  de  bouche- 
rie en  l'opposant  à  volaille  : 

....  servi  et  peu 
De  pain,  de  vin  et  de  vitaille 
De  toute  volaille  et  d'atimaille 
Et  poissons,  et  autre  viande. 

Machaut,  MS.  fol.  216,  V  col.  1. 

On  a  dit  aumaille,  et  bestes  aumailles;  par 
conséquent  ce  mot  a  été  employé  non-seulement 
comme  substantif,  mais  aussi  comme  adjectif. 

VARIANTES    : 
AUMAILLE.  Ménage,  Dictionnaire  Etymologique. 
Armailles.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  17. 
Aubmaille.  Histoire  de  R.  Du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  70. 
Au.MALEs.  Histoire  des  Trois  Maries,  en  vers,  MSS.  p.  57. 
AusMAiLLE.  Chronique  S'  Denis,  T.  II,  fol.  269,  V». 
AuMAiL.  Dictionnaire  de  Borel. 
AUMEX.  Cortois  d'Artois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  83,  R"  col.  1 . 

Aumalines,  adj.  au  fém  plur.  Qui  est  d'au- 
maille.  On  a  dit  bestes  aumalines  ou  omnalines, 
pour  bestes  d' aumaille,  ou  simplement  aumaille. 
(Voyez  Du  Cange,  Glossaire  latin,  au  mot  Manualia.) 

VARIANTES  : 
AU.MALINES,  Abmeline,  Ormaline. 
Armaline.  Hist.  du  Comté  d'.Aussonne,  page  25. 

Aumarie.  Nom  de  pays. 

Couvert  d'un  paile  d'^4mo)'(e. 

Athis,  MS.  fol.  39,  R-  col.  \ . 

Et  de  pailes  Alexandrins 

De  cendaus  d'Inde,  et  tV Aumarie. 

Athis,  MS.  fol.  30,  R"  col.  1. 

Ceux  de  Bile,  ceux  de  Sartois  {al.  (2)  Cartagois) 
Ceux  d'Aufrique,  et  ceux  de  Sardine, 
Ceux  de  Corsie  et  de  Soutine,  {al.  Soltaigne) 
Et  ceux  de  Mittre,  et  AWmarie, 
Et  de  Salmande  et  de  Candie, 
De  Cordes,  et  de  Portugal. 

Athis,MS.fol.  87,  V*  col.  1. 

VARIA.NTES  : 
AUMARIE,  Amarie,  AM.ATIE.  Athis,  MS. 

Aumant  (à  V),  adv.  A  l'avenir.  (Voyez  le  Dic- 
tionnaire d'Oudin.) 

Aiimaster,  subst.  masc.  Officier  municipal  de 
la  ville  de  S'  Omer.  (Voyez  Godefroy,  Observ.  sur 
l'hist.  de  Charles  VIII,  page  328.) 

Auinblei"  (le  Bay),  subst.  masc.  Nom  d'un  che- 
val. U  liroit  peut-être  ce  nom  de  son  poil  bai,  et  du 


(1)  C'est  le  neutre  pluriel  animalia,  pris  pour  un  singulier  féminin.  Par  un  phénomène  de  rhotacisme,  an'malia  a  donné 
arinailles.  (n.  e.)  —  (2)  Al  signifie  alias,  (n.  e.) 


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mot  arnble  qui  étoit  son  allure.  (Voyez  une  citation 
au  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mol  Ueriolum  (1).) 

Aumelette,  mbst.  fém.  Omelette,  œufs  battus 
et  cuits.  On  lit  dans  le  Dictionnaire  de  Cotgrave  : 
Aumelette  d'ceufs,  et  Viveurs  d'omelettes  (2). 

VARIANTES  : 
AUMELETTE,  Homelette,  Haumelotte.  Dict  de  Cotg. 
HOMELAICTE.  Rabelais,  T.  IV,  page  36. 
Homelette.  Cclthel.  de  Léon  Tripault.  —  Dict.  de  Cotgrave. 
Omelette.  Ménage,  Remarques  sur  la  langue,  page  68. 
Ommelette.  Oudin,  Curiosité  françoise. 

Aumiers  (Li),  subst.  masc.plur.  Sorte  de  cliiens. 
Il  faut  peut-être  lire  en  un  seul  mot  Liaumiers  pour 
Limiers,  espèce  de  chiens  de  chasse  : 

As  veneors,  et  as  Valiez 
Fist  mener  chiens,  et  brachez 
Et  11  aumiers  (3)  par  autre  voie. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  155. 

Au  niieulx  venir,  expression  adverbiale. 
Pour  le  moins.  —  Pour  le  mieux. 

Cette  expression  adverbiale  signifioit  quelquefois 
pour  le  moins.  «  Elle  racompta  comme  il  les  avoit 
«  rescousses  sur  la  mer,  là  où  elles  cuydoient 
«  jamais  eschappersanseslre  mortes,  ou  emprison- 
«  nées  au  mieulx  venir.  »  (Percef.  Vol.  VI,  fol.  54.) 

La  même  expression  signifioit  aussi  pour  le 
mieux,  en  supposant  le  mieux  dans  la  supposition 
la  plus  avantageuse.  «  .Sy  entendons  bien  que  au 
a  mieux  venir,  le  secours  d'Angleterre  sera  long  et 
«  petit.  »  (Lettres  de  Louis  XII,  T.  I,  p.  71.) 

Auinoins,  adv.  Le  moins.  «  Nos  Baillis  se 
«  prengnent  bien  garde,  et  aussi  nos  autres  Officiaux 
«  que  il  n'ayent  multitude  de  Bedeaux,  ainçois  s'en 
«  facent  aumoins  que  eulx  pourront.  »  (Ordon- 
nance des  Bois  de  France.) 

Aumône,  subst.  Aumône.  —  Bonne  œuvre.  — 
Hôpitaux.  —  Queste. 

Ce  mot  dans  S'  Bernard,  Serm.  fr.  .mss.,  répond  au 
latin  Eleeinosijnu. 

Nous  disons  encore  aumône  dans  le  premier  sens. 
Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Elemosina  pura,  cite 
l'orthographe  .l/mo?VHC.  Elle  semble  piouverque 
notre  mot  aumône,  s'est  plutôt  formé  AWlimonia 
que  de  Elemosina. 

Nous  avons  parlé  du  territoire  des  Amognes,  au- 
trement territoire  des  moines,  et  qu'on  doit  peut- 
être  expliquer  par  territoire  des  aumônes  (4).  Nous 
ne  trouvons  cette  orthographe  nulle  part  ailleurs. 

«  Tenure  pas  aulmone  ou  osmone,  ce  sont  les 
a  héritages  qui  ont  été  donnés  à  l'Eglise  pour  servir 
«  Dieu,  et  dont  les  donateurs  se  sont  réservés  la 
«  seigneurie  de  patronage,  tenure  est  la  manière 
«  par  quoy  les  tenemens  sont  tenus  des  seigneurs.  » 
(Ancienne  Coutume  de  Normandie,  fol.  52r) 


Le  mot  aumosne  a  été  pris  dans  un  sens  étendu, 
pour  toute  bonne  œuvre,  et  on  a  dit  :  i  Par  vostre 
"  courtoisie  me  veuilliez  rendre  à  celuy  à  qui  j'ai 
«  esté  aujourdhuyespouséegrant  «Mmosne  feriez.  » 
(Ger.  de  Nevers,  2'  part,  page  40.) 

C'est  aumosne  d'abattre  noise. 

Poët.  MSS.  avant  1300,  T.  tV,  p.  1309. 

Aumosne  elpechié  sont  mis  en  opposition,  dans 
ces  vers  : 

Oui  fait  ce  que  faire  doit 
Tout  pechié  de  toute  aumosne 
Bel  parler,  et  de  ramposer. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  18635  à  18633. 

De  lii,  on  a  nommé  aumônes  les  hôpitaux.  lion- 
nes maisons  et  auviosues.  «  J'entends  par  ce*  mots 
«  les  hôpitaux,  et  les  hôtels  Dieu,  et  les  autres  mai- 
«  sons  consacrées  au  soulagement  des  pauvres  » 
dit  l'éditeur  des  Ordonn.  (T.  V,  page  136,  note  a.) 

Ce  mot  a  aussi  signifié  quête  :  «  Aussi  me  plaist 
«  que  il  voisent  à  Vaumosne  ;  mais  je  vueil  que  ils 
«  ne  la  despendent  point  sans  le  conseil  de  leur 
«  maistre.  »  (Duplessis,  Hist.  de  Meaux,  Pr.  p.  67; 
tit.  1180.)  (5) 

On  disoit  proverbialement  : 

1°  L'aumosue  est  faicte  :  c'est-à-dire  tout  est  fait, 
il  n'est  plus  teins.  (Eust.  Desch.  Poës.  mss.  fol.  299.) 

2'  Aumône  pure  ou  franche,  étoit  celle  que  le 
Seigneur  faisoit  sans  se  retenir  aucune  jurisdiction 
sur'le  territoire  aumône.  (Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat. 
au  mot  Tenetura.) 

3'  Il  ne  faut  pas  voler  pour  faire  l'aumône.  Ce 
proverbe  se  trouve  en  latin  dans  les  sermons  de 
Barlel  1,  part.  fol.  50.  «  Vulgo  dicitur  non  expedit 
«  furare  pro  danda  eleemosina.  » 

4°  Donner  en  aumône  pour  donner  gratuitement. 

VARIANTES  : 
AUMONE.  Orthographe  subsist. 
Aumosne.  Assises  de  Jérusalem,  page  184. 
Aulmosne.  Ancienne  Coutume  de  Normandie,  fol.  52,  R". 
AULMÔNE.  Doctrine  de  Sapience,  fol.  37,  V". 
Ausmogne.  Messire  Quene  Poët.  WSS.  av.l300,T.  III,  p.  983. 
AuMOiGNE.  Britton,  des  Loix  d'Angleterre,  fol.  2,  R». 
Amognes.  Née  Hist.  du  Niv.  page  281. 
Amoignes.  Bourg,  de  Orig.  voc.  vulg.  fol.  76,  V». 
Almoigne.  Du  Gange,  Gl.  lat.  au  mot  Elesmosina  pura. 
Aljiosne.  Duchesne,  Gén.  de  Chastillon,  fol.  58-60. 
Annosme.  (Lisez  Aumône.)  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  II,  p.  177. 
Almone.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  page  34et  passii». 
Au.'ïiONXE.  Duchesne,  Gén.  de  Guines,  page  283. 
Amone.  Fabl.  MSS.  du  R.  n>  7615,  T.  I,  fol.  54. 
Amonne.  Perard,  Hist.  de  Bourg,  page  474. 
Amosne  et  AiNNONE.  Athis,  MS.  fol.  116,  R»  col.  1. 
O.MOSNE.  Anciennes  Coutumes  de  Normandie,  ch.  32. 
Olmosnes.  Carpentier,  hisi.  de  Cambrai,  page  28. 

Aumonement,  subst.  m«sc.  Aumône,  donation 
faite  ti  une  église.  (Voy.  la  Coutume  de  Normandie 
en  vers,  mss.  fol.  43,  V°.) 


(1)  Les  Bénédictins  empruntent  par  ce  mot  Heriotum  plusieurs  citations  à  Guil.  Dugdal  {.\nt.  du  Comté  de  Warwick, 
p.  680).  Les  chevaliers  ordonnaient  par  testament  de  mener  devant  leur  tombe  leur  destrier,  qu'on  offrait  ensuite  à  l'Eglise. 
Ainsi,  dans  un  testament  de  1408,  on  lit  :  «  Item  lego  equum  meuni  vocatum  le  Bmj  aumble)-,  ut  ofTeratur  ante  corpus 
meum  in  die  sepuUuraj  mère,  noniine  principal!.  »  (n.  e.)  —  (2)  La  forme  actuelle  omelette  serait  une  corruption  de 
alumele,  alumete  (xiv  siècle,  .Hénarjier  de  Paris,  II,  ô).  L'omelette  est  en  effet  plate  comme  une  lamelle,  (n.  e.)  —  (3)  Il  faut 
lire  linumiers.  Le  provençal  a  liamer,  du  latin  lirjamen,  proprement  chiens  qu'on  tient  en  laisse.  (N.  E.)  —  (4)  Au  ix=  siècle, 
eleemosyna  est  devenu  elmosna,  almosna.  d'où  aumosne,  par  la  vocalisation  de  /.  (x.  E.)  —  (5)  Aumosne  signifie  encore 
Charité,  acte  méritoire  :  «  Et  si  seroit  grande  aumosne  et  grant  grâce  enviers  nostre  signor.  »  (Froissart,  1.1.  V,  211.)  (n.  e.) 


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Aumônier,  stihst.  masc.  Légataire,  héritier.  — 
Administrateur  des  tiôpitaux.  —  Aumônier. 

Ce  mot  est  employé  pour  liéritier,  légataire,  dans 
le  passage  suivant  :  «  Pour  héritier,  légataire,  on 
«  ne  peut  estre  aulmosnier,  et  parchonnier,  en 
«  sorte  que  en  appréhendant  l'un,  l'on  se  prive  de 
«  l'autre,  et  pour  venir  en  succession  de  quelque 
«  trespassé,  l'on  est  tenu  de  rapporter  tous  dons 
«  à  luy  faiLs,  tant  par  mariage  entre  vif,  comme 
«  autrement.  »  (Coût,  de  Richebourcq-Saint-Wast, 
au  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  I,  p.  451.) 

Dans  le  sens  d'administrateur  des  hôpitaux,  on  a 
dit  :  "  Il  y  a  aussi  dans  la  ville  quatre  grands  au- 
«  mosniers,  ou  maîtres  de  la  charité;  deux  hors 
«  des  lignées,  et  deux  hors  des  nations,  deservants 
«  quatre  ans  de  suite,  ayant  la  surintendance  de 
«  toutes  les  maisons  de  Dieu,  du  S'  Esprit  et  des 
«  hôpitaux  de  la  ville.  »  (Coût,  de  Brusselles  au 
Nouv.  Coul.  Gén.  T.  I,  p.  l'iSG.) 

Aulmosnier  est  pour  aumônier,  dans  les  Ordon- 
nances des  Rois  de  France  (T.  V,  p.  G41);  ce  dernier 
sens  subsiste  sous  la  première  orthographe. 

VARIANTES  : 
AUMONIER.  Orthographe  subsist. 
Aulmosnier.  Bouteiller,  Somme  rurale,  page  GOO. 
AuMONNiER.  Duchesne,  Gén.  de  Montmorency,  p.  388. 
Au.MOsNiER.  Laurière,  Glossaire  du  Droit  françois. 
AusMONiER.  Ancienne  Coutume  de  Bretagne,  page  "179. 

Aumoniere ,  subst.  (éin.  Bourse,  gibecière. 
C'étoit  proprement  la  bourse  ou  l'on  mettoit  l'ar- 
gent, pour  faire  des  aumônes  (1).  (Voy.  les  Diction- 
naires de  Borel  et  de  Ménage.) 

Li  moines  trait  une  uumosnicre  ; 
Dix  sols  i  ot. 

Fabl.  WS.  de  S.  Gerin.  fol.  36,  V'  col.  2. 
M'atiinonière  est  mal  garnie, 
Et  ma  borse  mal  farsie. 

eolin  Muscl,  Po5l.  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  718. 

L'auteur  du  Roman  de  la  Rose  a  fait  de  ce  mot 
un  usage  très  indécent  aux  vers  20572  et  20575. 
(Voy.  le  suppl.  au  Gloss.  de  ce  Roman.) 

VARIANTES    : 
AUMONIERE.  Glossaire  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis. 
AuMOSNiERE.  Joinville,  page  176. 
AusMENiERE.  Fabl.  MSS.  du  Roy,  n»  7218,  fol.  283. 
AusMONiERE.  J.  le  Maire,  lUustr.  des  Gaules,  liv.  I,  p.  142. 
AuLMOSNiERE.  Fauchet,  Lang.  et  Poës.  fr.  page  124. 
AuLMONiERE,  Almonière.  Percef,  Vol.  VI,  fol.  82. 
Amoniere.  Alhis,  MS.  fol.  91,  V»  col.  1. 

MOSNIERE. 

Aumône.  Borel,  au  mot  Fermai. 

Aumosnei",  verbe.  Donner  en  aumône,  en  pur 
don,  à  des  églises,  à  des  pauvres.  J.  de  Meung  cen- 
sure, dans  les  vers  suivants,  les  moines  qui  s'enri- 
chissoient  par  les  testaments  qu'ils  faisoient  faire  à 
leur  profit  : 

Ils  osent  bien  en  don  ou  en  aumosne  prendre 
Quanque  bons  et  maulvais  leur  oseroient  tendre 
S'ils  font  bien,  Dieu  le  sçait  ;  mais  ne  le  scay  entendre 
Que  l'on  puisse  aumosner  ce  que  l'en  doit  tout  rendre. 
J.  de  Meung,  Cod.  1109-H12. 

VARIANTE    : 

AUMONNER.  Duchesne,  Gén.  de  Bar-le-Duc,  page  30. 


Aumuce,  subst.  fém.  Chaperon.  —  Aumusse. 

L'aumuce  étoitun  habillement  qui  anciennement 
couvroit  la  tête,  et  peut-être  tout  le  corps.  Il  semble 
venir  du  mot  allemand  ail,  qui  signifie  tout,  et  de 
l'ancien  mot  françois  mncer,  cacher,  couvrir. 
D'autres  le  dérivent  de  amicio. 

Ce  mot  s'est  dit  aussi  pour  aumusse  de  chanoine. 
(Voy.  le  Dict.  de  Colgrave,  au  mol  aumuce,  et  Du 
Cange,  Glossaire  latin,  aux  mots  alimutia,  almia- 
eum,  atmuchan,  alinnechhim,  armutia  et  mussa.) 
Les  officiers  de  cuisine  de  Monseigneur  le  Dauphin 
porloient  sur  leurs  têtes,  à  l'entrée  de  l'Empereur 
dans  Paris,  en  1377  «  des  aumuces  fourrées  et  à 
"  boulons  de  perle  par  dessus.  »  (Chron.  S'  Denis, 
T.  III,  fol.  35.) 

Dans  des  lettres  de  Charles  VI,  du  i7janvier  1419, 
qui  sont  au  fol.  49,  R"  du  Reg.  du  Pari,  intitulé: 
Livre  croisé,  cotte  B.  données  contre  Charles  Dau- 
phin, qui  avoit  fait  assassiner  le  Duc  de  Bourgogne, 
on  lit  :  «  Le  dit  Charles  mist  tantosl  la  main'à  son 
«  aulmuce,  faisant  semblant  de  saluer  nostre  dit 
«  cousin,  et  à  l'ombre  de  son  bras  guigna  les 
«  yeulx  et  fi  si  signe  à  ses  gens  pour  venir  férir  sur 
«  nostre  dit  feu  cousin  dont  tanloust  après  les 
>'  dictes  gens,  comme  avoit  esté  precogité  et  cons- 
«  pire  entre  le  dit  Charles  et  eulx,  vindrent 
"  dehachier,  et  murdir  devant  luy  nostre  dit  feu 
«  cousin.  »  . 

Ostent  mmutccs,  font  inclinacions. 

Pots.  MSS.  d'EusI.  Desch.  fol.  30,  col.  i. 

Aumuce  est  distingué  de  chaperon  dans  ces 
vers,  pris  pour  un  vêtement  à  l'usage  des  gens, 
du  monde  comme  des  gens  d'Eglise  : 

....  Telle  rie  va  queranl 

Le  jeune  homme  quant  il  se  rend, 

Ja  si  grans  souliers  n'aura 

.la  tant  faire  ne  scaura 

Chapperon,  ne  large  aumuce. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  U793-U"97. 

VARIANTES  ; 
Aumuce.  Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose. 
Aulmuce.  Reg.  du  Parlement  de  Paris. 
Aul.musse.  Chron.  Fr.  MSS.  de  Nangis,  an.  1377. 
Aumusse.  Preuv.  sur  le  Meurtre  du  Duc  de  Bourgogne,  à 
la  suite  du  Journal  de  Paris,  sous  Charles  VI  et  VU,  p.  273. 
Aumuche.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  176,  V». 

Auniuciers,  subst.  fém.  plur.  Faiseurs  de 
chaperons  et  d'aumusses.  (Voy.  Du  Cange,  Gloss. 
lat.  au  mol  almucium.) 

Année,  subst.  fém.  Espèce  de  plante.  (Voy.  Du 
Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Ilelna.) 

Aiinement,  subst.  masc.  Assemblée,  assem- 
blage. Ce  mot,  dans  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  mss. 
p.  141,  répond  au  latin  unio.  On  a  dit  en  ce  sens, 
«  ^vàxii aunci)ienl{T)  «  pourgrand  assemblage. 'Voy. 
Fabl.  MS.  du  R.  n"  7218,  fol.  326,  V°.) 

Aiineor,  adj.  Qui  réunit.  «  Aiineor  de  choses.  » 
(S'  Bernard,  Serm.  Fr.  mss.  p.  135,  dans  son  latin 
vlnitor  rerum.) 


(1)  Le  mot  se  trouve  aussi  dans  Bcrte  aux  grans  pies.  (n.  e.)  -  (2)  Adiinimentum. 


AU 


—  320  — 


AU 


Aiiner,  verbe.  Réunir,  joindre,  assembler.  — 
Embrnsser. 

Du  lalin  fl(/!/)!fl?r  suivant  le  Gloss.  du  Rom.  de 
la  Rose,  au  mol  aduncr  et  suppl. 

Au  sens  propre  et  littoral,  c'est  mettre  en  un. 
(Voy.  le  Dict.  de  Cotgrave,  au  mot  aiiner.)  On  a  dit 
aiiner  ses  os/s,  pour  assembler  son  armée.  (Voy.  le 
Gloss.  du  P.  Martene.) 

Bateaux,  clialans,  nefs  aïnm. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  72,  R"  col.  2. 
Quant  les  eut  ensemble  avetiez  (1) 
Le  bel  Adonys  en  fut  aez. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  22121-2212i. 
En  tout  ce  peut  on  pécher 
Trop  longuement  jeûner 
Trop  de  delicux  achmcr. 

Rom,  de  la  Rose,  »crs  17881-11883. 
Convoitise  est  entre  nous  trop  commune 
Despitez  est  qui  grant  avoir  n'aime. 

Pocs.  MSS.  d'Eust.  Dcscli.  fol.  288,  eol.  1. 

(Voy.  Britton,  des  Loix  d'Angleterre,  fol.  Sn,  et 
l'Hist.  de  S"  Léocade,  ms.  de  S'  Germ.  fol.  32,  R-.) 
On  a  dit  aiiner  pour  embrasser. 

La  feme  tint  l'orne  por  fol  et  por  musart 
Qui  bien  l'aime  et  aûnc,  et  atret  à  sa  part. 
Tant  c'on  a  doner,  les  lobe  par  son  art  ; 
Et  quant  n'a  mais  que  penre,  sel  commande  à  la  hart. 
Chastie-Musart,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  106,  V-  col.  2. 

V,\RIANTES    : 
AUNER.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  72.  R». 
Aduner.  Gloss.  de  l'Hist.  de  Paris. 
AvENER  (cor.  AuNER.)  Rom.  de  la  Rose. 
AuNiR.  Dict.  de  Cotgrave. 

Auner,  verbe.  Frapper  avec  un  bâton.  Ce  verbe 
est  formé  du  substantif  aune,  sorte  de  bâton  qui 
sert  à  mesurer. 

Foubert  tantost  un  baston  prent, 
Vert  et  gresle  tel  corne  une  aune 
Le  Duc  en  fiert,  et  bat,  et  aune. 

Eslruberl,  Fahl.  MS.  du  R.  n-  7996,  p.  -il. 

Auniaus,  subst.  masc.  plur.  Aulnes,  espèces 
d'arbres. 

les  auniaus, 

Les  cornilliers,  et  les  franiaux. 

Poés.  MSS.  de  Froissart,  p.  277,  col.  2. 

Aiinoir,  subst.  masc.  Paire,  couple. 

Ce  mot  paroit  pris  en  ce  sens  dans  le  passage 
suivant  :  «  Quiconque  trespasse  par  Bourges,  quel- 
«  ques  denrées  que  ce  soit,  soit  blé  ou  vin,  draps, 
«  ou  aunoir  de  porcs,  ou  toutes  autres  manières  de 
«  marcbandises,  il  doibt  du  cbeval  chargié  un  denier 
«  Parisis.  »  (La  Tbaumassière,  Coul.  de  Berrv, 
p.  332.) 

Aunois  (2),  subst.  masc.  et  fém.  Lieu  planté 
d'aulnes.  (Voy.  le  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis.) 

VARIANTES  : 
AUNOIS.  Gloss.  sur  la  Coût,  de  Beauvoisis. 
AuNoi.  Chron.  du  xuv  siècle,  MS.  Bouh.  ch.  Lin,  fol.  388. 
AULNAY.  Menestrier,  Ornemens  des  Armoiries,  p.  451. 


AusNAi.  Chasse  de  Gaston  Phebus,  MS.  p.  262. 
AuLNOis.  Poës.  MSS.  d'Eust.  Deschamps,  fol.  335,  col.  3. 
AUSNOI.  Poët.  MS.  du  Vat.  n"  1490,  fol.  161. 
AULNAIE,  AuNETTE.  Du  Cange,  Glossaire  latin,  aux  mots 

Alncta  et  Abiidus. 

Auparager,  verbe.  Anoblir.  Ce  mot  est  employé 
avec  celle  signitication  dans  les  vers  suivants: 

Denier  fit  vinde  meson,  plaine, 
Denier  taint  escarlate  en  graine, 
Denier  auparafje  vilaine. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218.  fol.  167,  R-  col.  1. 

Auprès,  adverbe.  Auprès.  Cet  adverbe  «  formé 
«  de  l'article  au  et  de  la  préposition  yjm,  comme 
"  au  reste,  feroit  croire  que  le  mot  de  près  avoit 
«  esté  autrefois  en  usage  comme  adjectif,  de  mesme 
«  que  loin  l'est  aujourd'bui.  »  (Grammaire  de 
l'abbé  Régnier.) 

Auprès  a  été  aussi  employé  pour  :  «  â  peu  près 
«  autant.  »  C'est  ainsi  que  ce  mot  est  expliqué  à  la 
marge  du  passage  suivant  :  «  Sa  présence  et  auto- 
"  rite  ouvra  (opéra,  produisit)  si  non  tant,  auprès 
«  que  feroit  celle  du  dit  sieur  de  Gurce.  »  (Lettres 
de  Louis  XII,  T.  IV,  p.  42.)  Mais  cette  expression 
sera  peut-être  mieux  rendue  par  au  prix  ;  c'est 
certainement  sa  vraie  signification  dans  cet  autre 
passage:  «  Ils  ne  sont  rien  «î/;;n's  de  vous.  »  (Le 
Jouvencel,  ms.  p.  141.) 

Aiiquaise,  adj.  au  fém.  Ce  mot  est  employé 
pour  exprimer  une  difformité  de  la  bouche. 

Auquelier,  subst.  masc.  Arbuste  ou  plante  qui 
produit  l'auquelie. 

Et  tout  au  lonc  maint  violier 
Auquelier  et  mariolier 
Sus  l'erbelte. 

Poës.  MSS.  de  Froissart,  p.  45.  col.  2. 

VARIANTES  : 
AUQUELIER.  Poës.  MSS.  de  Froissart,  p.  45,  col.  2. 
AUQUELUER.  Ibid.  p.  23,  col.  2. 

Auqiieton  (3),  subst.  masc.  Espèce  de  chemise 
courte.  (Voyez  le  Dict.  de  Borel ,  au  mot  Uoqueton.) 
Ce  mot  s'est  dit  aussi  pour  casaque.  Favin,  dans 
son  Théâtre  d'honneur  (T.  I,  p.  94,)  dit  que  «  Vau- 
'  quelon  étoit  comme  un  corps  de  femme  contre- 
«  pointé,  il  se  metloit  sur  la  chair  nue  de  celuy  qui 
«  devoit  être  reçu  chevalier.  >>  La  Colombière  con- 
firme celte  explication;  il  dit,  en  parlant  de  la 
réception  d'un  chevalier  :  "  l'un  luy  metloit  sur  la 
c<  chair  nue  un  gauluson  ou  auqueton,  autrement 
«  Uoqueton,  c'estoit  comme  un  corps  de  cotte  de 
«  femme  conlrepointé  ;  et  pardessus  iceluy  l'on  luy 
«  metloit  une  chemise  de  gaze  ou  de  fine  toile.  » 
(La  Colombiôre,  Théâtre  d'honneur,  T.  I,  p.  572.) 
Dans  Mathieu  de  Coucy,  Hist.  de  Charles  VU,  p.  594, 
on  trouve  «;«'to«s  et /(oc/ohs  pour  casaque  d'archer. 


(i)  Il  faut  lire  a» «e:  au  lieu  d'avcnez..-  (2)  On  trouve  dans  Froissart  cette  forme  masculine  au  tome  .X.,  12i,  XIV,  308 
(éd.  Kervyn)  ;  elle  correspond  à  aunoic,  aujourd'hui  aunaie,  et  est  encore  employée  comme  nom  de  lieu.  (N.  E.)  -  (3)  La 
chanson  d'Huon  de  Bordeaux  au  Nord,  le  poème  de  la  Guerre  des  Albigeois  (xm«  siècle)  au  Midi,  mentionnent  déjà 
1  auijucloii,  alcoto  en  provençal.  C'était  un  justaucorps  rembourré,  un  qambeson  placé  eBtre  la  peau  et  le  haubert.  Il  dut  son 
"°?„^„'^  ouate  de  coton  dont  il  était  piqué.  Les  gentilshommes  de  la  manche  et  de  la  prévôté  portaient  encore  le  hoqueton 
en  1789.  (n.  e.)  »-  i  d  e  v  h 


AU 


-  321 


AU 


Yoici  le  portrait  d'un  jeune  chevalier  très  légère- 
ment ou  simplement  vêtu  : 

En  un  jupel  cort  d'anquelo?i  (alias  alcoton) 
Porpoint  a  force  de  coton 
Reuiest  sans  plus,  etc. 

Allus,  MS.  fol.  US,  R'col.  1. 

Tel  est  le  sens  de  ces  vers:  «  avec  un  jupon  court 
«  ou  anqueton  piqué  de  fort  coton,  il  estoit  sans 
«  rien  de  plus:  un  manteau  fourré  de  gris  fut  ensuite 
«  mis  au  col  du  chevalier.  « 

VARIANTES  : 
AUQUETON.  Hist.  de  B.  Du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  358. 
AcoTON  et  Anquetot. 

Anqueton  et  Alcoton.  Athis,  iMS.  cité  plus  haut. 
AucTON.  Mathieu  de  Cuucy,  Histoire  de  Charles  VII,  p.  593. 
Haucqceton,  Hocqueton,  HoctoNjHoqueton,  Oqueton, 

HOCTONS. 

AuquetonjSwôsfflJî^i/".  Espèce  d'étoffe  semblable 
à  celle  dont  étoient  faits  les  auquetons  ou  les 
housses  de  piqûre  rembourrées. 

Auraison,  subst.  fcm.  Oraison.  (Voyez  la  Vie 
d'Isabelle  à  la  suite  de  Joinville,  p.  171.) 

Aurande,  suhst.  fém.  Sorte  de  fleur  odorifé- 
rante. 11  faut  peut-être  lire  lavande  ou  peut-être 
aurosne ,  auroene.  «  Semez  de  roses,  œillets, 
«  marjolaine,  aneth,  aurande  et  autres  fleurs 
«  odorantes.  »  (Rabelais,  T.  IV,  p.  211.) 

Aure,  subst.  fém.  Vent.  (Voyez  le  Dict.  d'Oudin, 
au  mot  Aure.) 

Quant  la  douce  eure  vente, 
Ki  vient  de  cel  doue  pais 
Pierre  Kin  de  la  Coupole. 

Poêt.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  lOSG. 

VARIANTES  : 
AURE.  Fabl  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  8,  R»  col.  1. 
Eure.  Poët.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  lOSG. 

Aure  de  grâce.  Exclamation  dans  le  patois  de 
Languedoc,  suivant  Le  Duchat  sur  Rabelais.  (T.  111, 
p.  '274,  note  1.) 

Aurea  alexandrina ,  subst.  fera.  Sorte  de 
drogue.  Elle  servoitdansla  fauconnerie  pour  guérir 
les  oiseaux  malades.  <•  Vvenés&e  aurea  alexandrina., 
«  environ  la  grosseur  de  deux  pois  chiches.  » 
(Arteloque,  Fauconnerie,  fol.  9.5,  R°.) 

VARIANTES  : 
AUREA  ALEXANDRINA.  Arteloque,  Faucon,  fol.  95,  R". 
AUREAU  ALEXANDiiiNE.  FouiUoux,  Faucon.  fol.  71,  V». 

Aurecq  ,  subst.  masc.  Nom  de  lieu.  Surnommé 
en  latin  aquosus,  opposé  à  un  autre  nommé  le  sec, 
et  appelé  ly  aurecq  dans  le  cartulaire  de  Corbie. 

Aureille,  subst.  fém.  Oreille.  (Voyez  le  Dict.  de 
Robert  Eslienne,  au  mot  Aureille.) 
Remarquons  les  locutions  suivantes: 
1"  Aureille  de  Judas.  C'est  un  champignon,  appro- 
chant de  la  ligure  de  l'oreille  de  l'homme,  qui  croit 
sur  les  vieux  sureaux.  Ce  surnom  lui  est  donné  parce 
qu'on  prétend  que  Judas  se  pendit  à  un  arbre  de 
cette  espèce.  «  Sallades  cent  diversitez,  de  cresson, 

•  de  obelon de  responses,  à'aureilles  de  Judas; 

«  c'est  une  forme    de    funges  issans   de  vieulx 
"  sureaulx.  »  (Rabelais,  T.  IV,  p.  253.) 
II. 


2°  Vin  à  une  aureille ,  c'est-à-dire  vin  excellent, 
par  allusion  au  mouvement  que  les  buveurs  font  en 
penchant  )a  tête  d'un  seul  côté,  quand  ils  trouvent 
le  vin  bon.  (Voyez  Rabelais,  T.  V,  p.  210.) 

3"  L'estomach  affamé  n'a  point  d'aureiUes.  Façon 
de  parler  pour  dire  que  quand  on  a  bien  faim,  on 
n'est  pas  disposé  à  écouler  des  propos.  (Voyez 
Rabelais,  T.  IV,  p.  269.  —Le  Ducliat,  ibid.  note  10.) 

4°  Dormir  sur  toutes  les  deux  aurrilles,  pour 
dormir  profondément.  Nous  disons  doi'mirsur  l'une 
et  l'autre  oreille.  (Contes  d'Eutrapel,  p.  212.) 

5°  Aureilles  seront  courtes  et  rares  en  Gascogne, 
plus  que  de  coustume,  c'est-à-dire  plus  communé- 
ment encore  que  par  le  passé  ;  tel  Gascon  n'aura 
qu'une  oreille  qui  souvent  même  se  trouvera  rognée. 
(Le  Duchat  sur  Rabelais,  Pronost.  T.  V,p.  7,  note  1.) 

6°  Aureilles  adoublieres,  pour  oreilles  fausses, 
trompeuses.  (Perceforest,  Vol.  VI,  fol.  72,  V-col.l.) 

'•'.Aureilles  de  Bourbonnois.  Expression  passée 
en  proverbe,  pour  dire  de  longues  oreilles.  (Vovez 
Le  Duchat  sur  Rabelais,  T.  II,  p.  10.) 

VARIANTES  : 
AUREILLE.  Dict.  de  Robert  Estienne. 
Areille.  Dict.  de  Cotgrave. 

Aureille,  adj.  Qui  a  des  oreilles.  On  trouve  ce 
mot  dans  quelques  auteurs  pour  épithète  de  sot  et 
de  chêne  :  celle-ci,  à  cause  des  fourches  qu'on  voit 
aux  vieux  chênes;  et  celle-là,  à  cause  des  cornes 
ou  oreilles  qu'on  inetloit  aux  fous.  (Voyez  Epilhètes 
de  Martin  de  la  Porte.)  On  lit  dans  Rémi  Belleau  : 

Les  tronches  aurillés 

Des  vieux  chesnes  branchus. 

Pops,  de  Renii  Belle,nu,  T.  1,  fol,  3-2,  V. 
VARIANTES  : 
AUREILLE.  Epithètes  de  Martin  de  la  Porte. 
.\URiLr.É.  Poës.  de  Hemi  Belleau,  T.  I,  loi.  32,  V°. 

Aureillette,  subst.  fém.  Diminutif  d'oreille.  — 
Partie  du  chaperon. 

Ce  mot  est  pris,  dans  le  premier  sens,  au  propre 
par  Des  Accords,  Bigarrures,  fol.  137,  V". 

Au  figuré,  on  donnoit  ce  nom  à  une  partie  du 
chaperon  qui  en  formoit  comme  les  oreilles.  «  Les 
«  aureiliettes  étoient  une  dépendance  du  chaperon 
«  que  les  femmes  portoient  en  France  dans  le 
«  seizième  siècle.  «  (Le  Duchat  sur  Rabelais,  T.  I, 
p.  77,  note  3.) 

Aurein,  adj.  Qui  est  d'or.  (.J.  Le  Maire,  Illustr. 
des  Gaules,  Liv.  I,  p.  70.) 

Aureine,  subst.  fém.  Médaille  d'or.  Ce  mot 
désignoit  une  sorte  d'écusson  ou  de  médaille  d'or. 
Dans  les  vers  suivants,  c'est  la  marque  de  l'ordre 
de  la  Toison  d'Or  : 

Trois  bons  bergers  portant  une  aureine 
A  leur  poitrine,  ung  mouton  de  Colchos, 
Sont  assemblés,  en  frontière  flandrine. 

Molinet,]!.  139. 

Aui'elot,  subst.  masc.  Un  coup  sur  l'oreille. 
C'est  le  sens  que  paroit  avoir,  dans  les  vers  sui- 
vans,  le  mot  aurelot,  d'où  s'est  peut-être  formé 
notre  mot  horion  : 

41 


AU 


—  322  — 


AU 


Si  uns  le  fiert  d'ung  aurelot 

Et  li  autre  d'un  aurelot: 

Ore  est  raison  qu'il  se  deffenge. 

Poël.  MSS.  avaiil  1300,  T.  IV,  p.  1318. 

Aurentin,  subst.  masc.  Nom  de  pays.  Il  faut 
peut-être  lire  il i'7T«f/". 
Et  si  donna  à  l'Ospital 
Une  viUequ'ot  en  uns  val, 
En  Aurentin  s'ot  non. 

Ph.  Mouskcs,  MS.  p.  481. 

Auréole  triomphale,  loculion.  «  couronne 
«  liunineuse,  rayon  de  gloire  en  ligne  de  triomphe.  » 
(J.  le  -Maire,  Couronne  Margaritique,  p.  20.) 

Aurer,  verhe.  Guetter.  «  Speculari,  ensercher, 
«  agaitier.  «  (Glossaire  du  P.  Labbe,  p.  52G.) 

Aureues,  subst.  masc.  Evreux.  Nom  d'une 
ville  de  Normandie.  (G.  Guiart,  ms.  fol.  40,  R°.) 

Aurichalque,  subst.  Espèce  de  métal.  <■  Pala- 
«  frenières  de  Pliebus  establircnt  les  quatre  mer- 
«  veiUeux  clievaux  au  freinz  dorez  de  leur  Seigneur, 
.  ayans  les  crins  recercellez  et  rulilans  de  fin  or, 
«  à  l'ongle  des  piedz  d'un  métal  nommé  aurichal- 
.  que  en  lieu  de  corne.  »  (J.  le  Maire,  Uluslr.  des 
Gaules,  Liv.  I,  p.  92.) 

Auriex,  subst.  masc.  Le  mois  d'avril. 

Le  très  douz  mois,  et  avriex. 

Adam  li  Bocus,  Poel.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  UOO. 

Aupigateur,  subst.  7nasc.  Cocher.  Du    latin 
aurUja. 
Auriqe,  subst  masc.  Cocher.  (Voyez  Anrigatcur.) 

Aurillaye,  subst.  masc.  Droit  Seigneurial.  Le 
même  qu'abeillage.  «  Borel  et  Chrestien  du  Burau 
«  ont  Vauritlene  par  tote  la  forest  de  Burçai  et  de 
«  Cloipas  et  poent  prendre  les  ées  en  cette  ma- 
"  nière; ....  se  tes  ées  sont  encrons  de  chesne,  etc.  » 
iDu  Cange,  Glossaire  latin,  au  moi  .ipicularii.) 

C'est  aussi  «  le  profil  des  ruclies  des  mouches  à 
»  miel  qui  appartient  au  Seigneur  ou  an  Roi  comme 
«  en  Provence.  »  (Laur.  Glossaire  du  Dr.  Fr.) 

Ce  mot  ne  seroit-il  point  une  corruption  A'aveil- 
lagciormé  d'avcilh',  pour  abeille  r  En  lisant,  on 
auroit  pu  prendre  l'epour  unr.  Peut-être  aussi  on  a 
pu  faire  venir  avrillage  du  mot  avril,  parce  que 
c'est  entre  avril  et  mai  que  les  essaims  sortent  de 
Jeurs  ruches. 

VARIANTES  : 

.■VURILL.\GE.  Cotgrave,  Dict. 
AuRiLAGE.  Mém.  de  Sully,  T.  X,  p.  228. 
AuBisLAGE.  Cotgr.  Dict.  Laur.  Gluss.  du  Dr.  Fr. 
AuRiLLERiE  (S.  /.)  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Apicularii. 

Aurilleur,s((bs<.  masc.  Ce  mot,  formé  à'au- 
rillagc,  signifie  celui  qui  jouit  de  ce  droit. 
«  Se  il  trovent  aucun  emblanl  ées  (1)  en  la  fo- 
«  rest,  cil  qui  i  seront  trové,  feront  au  Seignor 
1  soixante  sols  Cen.  d'amende  et  li  aurUleor 
.<  auront  lor  ées.  »  (Du  Cange,  Glossaire  latin,  au 
mot  Apicularii.) 


Aiirilleus  adj.  Ce  qui  est  du  mois  d'avril.  — 
Doux,  joli. 

Pour  designer  le  tems  du  mois  d'avril,  on  a  dit 
tempus  aurieus,  c'est-à-dire  le  temps  d'avril,  le 
beau  temps,  dans  les  chansons  de  N.  D.  au  ms.  du 
Vatic.  n- 1400,  fol.  120,  R°. 

Li  dous  tens  avrilleus. 

Raoul  de  Biauvés,  Poèt.  MSS.  avant  1300.  T.  M,  p.  671. 

De  lii  et  par  allusion  à  la  saison  agréable  du 
mois  d'avril,  du  printems,  on  a  employé  le  mot 
aurillous,  pour  signifier  agréable,  doux,  joli  ;  et 
c'est  peut-être  dans  ce  sens  qu'il  a  servi  d'épithète 
au  rossignol,  parce  que  cet  oiseau  chante  en  avril. 

Li  rossignoles  aurilloii.r. 

IVill.  li  Viniers.  Poèl.  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  819. 

Mais  ce  mot  a  signifié  seulement  agréable,  joli, 
doux  dans  l'expression  suivante  : 

La  regine  aurilloiise. 

Poèt.  MSS.  avajil  1300.  T.  IV,  p.  1657. 

VARIANTES  : 
AURILLEUS.  Poës.  MSS.  avant  1300.  T.  II,  p.  671. 
AURIEUS.  Poët.  MSS.  du  Vatic.  n»  1490,  fol.  120. 
AVRILLOUSE  (au  fém.)  Poët.  MSS.  avant  13(X),  T.  IV,  p.  1657. 
AVRILLOLX.  Vill.  li  Vinier,  Poët.  MSS.  av.  1300,  T.  II,  p.  819. 

Auripeaiilx,  subst.  masc.  plur.  Maladie  de 
l'oreille.  Mot  de  l'Anjou,  où  il  signifie  ce  mal 
d'oreille  qu'on  appelle  orillons  h  Paris.  (Le  Duchat 
sur  Rabelais,  T.  I,  p.  252,  note  15.) 

VARIANTES  : 
AURIPEAULX.  Rabelais,  T.  I,  p.  252. 
AuRiP£.\ux.  Dict.  de  Cotgrave. 

Auripelade,  subst.  masc.  Richement  accompa- 
gnée. Motgascon,  qui  signifie  <<  accompagnée  comme 
«  d'une  pellicule  d'or,  »  suivant  Borel  dans  son 
Dict.  où,  au  mot  Marelle,  il  cite  les  deux  vers 
suivans  : 

Une  piUule  de  science, 

Auripelade  d'éloquence. 

Aurora,  subst.  fém.  L'aurore.  C'est  le  mot 
latin  qui  se  trouve  employé  comme  françois  dans 
le  Triomphe  des  neuf  Preux,  p.  25G,  col.  i. 

Aurorin,  adj.  Qui  ressemble  h  l'aurore.  Qui  a 
la  couleur,  la  fraîcheur  de  l'aurore;  éclatant, 
brillant  comme  l'aurore,  dans  les  vers  suivans  : 

Teint  aurorin. 

Poës.  de  Loys  le  Carron,  fol.  20. 
Dessoulz  les  loix  de  Vaurorine  astrée. 

Ibid.  fol.  33.  R'. 

Aurosnc,  subst.  [cm.  Aurone(2).  Plante  qui  ap- 
proche de  l'absinthe  par  son  port. 

VARIANTES  : 
AUROSNE.  Valois.  Notice,  p.  211,  col.  1. 
AuROESXE.  Dict.  de  Cotgrave. 

Ans,  pronom  plur.  Eux.  (Voy.  le  Dict.  de  Borel.) 
«  Se  aucuns  vient  devant  fu/s  et  muet  question  de 
«  marchié  qu'il  ait  fait.  »  (Ordon.  des  Rois  de 
France,  T.  1,  p.  108.) 


<1)  Abeilles.  -  (2)  Vient  du  grec  degoiovov.  (x.  e.) 


AU 


—  323  — 


AU 


VARIANTES  : 
AUS.  Poët.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1328. 
Aux.  ViUehardouin,  p.  6. 
Ax.  Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  fol.  5,  R»  col.  3. 
Ayus.  Assises  de  Jérusalem,  p.  87. 

Ans,  article.  Des.  —  Dans  les.  On  employoit 
quelquefois  l'article  «i/.r  pour  des,  c'est-à-dire  le 
datif  pour  le  génitif.  «  Par  l'accort  et  par  11  conseil 
«  ans  autres  Barons.  "  (ViUehardouin,  p.  55.) 

Aus  a  été  employé  pour  dans  les.  (Voy.  Kuicts  de 
Straparole,  T.  1,  p."  98.) 

VARIANTES    : 
AUS.  ViUehardouin,  p.  55. 
Aux.  Nuits  de  Straparole,  T.  I,  p.  98. 

Aus,  adv..  Peu  à  peu.  On  a  dit  auq  dans  le  même 
sens. 

Ausels,  sitbst.  Diasc.  plur.  Oiseaux.  Mot 
languedocien.  (Voy.  le  Uict.  de  Borel,  aux  mots 
gargaillot  et  glouper.)  On  dit,  en  Picardie  et  en 
Normandie,  oisels  pour  oiseaux,  et  au  singulier 
oisel  pour  oiseau. 

Ausez,  participe.  Avancé,  ou  qui  ose  s'avancer. 
Ce  mot  est  employé  en  ce  sens  dans  les  vers 
suivans  : 

Ainz  qu'il  soit  sor  lui  ausez, 
Li  Damoiseax  s'est  si  hastez, 
Si  est  sailliz  sor  le  destrier. 

Floire  et  BlancheDor.  MS.  de  S.  Gerra.  fol.  197,  R*  col.  1. 

Ausine,  subst.  inasc.  Chêne  vert.  Mot  langue- 
docien. 

Auski.  (Lisez  Al;s-ki),  pronom.  A  ceux  qui. 

Ausner,  verbe.  Mesurer  à  l'aune. 

Mie.x  qa'ausiwr  ne  sevent  drapier. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  133,  R». 

Ausquieux  pronom.  Auxquels.  (Voy.  les  Ordon. 
des  Rois  de  France,  T.  1,  p.  521.) 

YAniANTEs  : 
AUSQUIEUX.  Ord.  des  Rois  de  France,  T.  I,  p.  5'21,  art.  viii. 
AUSQUIEX.  Ibid.  p.  80,  art.  vi. 

Aussai,  subst.  masc.  L'Alsace.  Nom  de  pays. 

Tout  cil  qui  son  jusqu'en  Auxsai. 

Pics.  MSS.  deFroissart. 
Moult  en  i  vint  devers  Ausai. 

Fh.  Mouskcs,  MS. 

VARIANTES  : 
AUSSAI.  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  4.  col.  1. 
Aucois.  Chron.  Fr.  MS.  de  Nangis,  an  386. 
AusAi.  Ph.  Mûuskes,  MS.  p.  295. 
AussAis.  Froissart,  L.  IV,  p.  122,  an  1394. 
AussAY.  Eust.  Deschamps,  Poës.  MSS.  fol.  254,  col.  2. 
Aussois.  Monstrelel,  Vol.  II,  fol.  158,  R». 
Auxois.  Le  Jouvencel,  MS.  p.  637. 

Aussiau.  Mot  languedocien  qui  paroit  signifier 
tuoient  A3iX\s,  la  Chronique  ms.  de  Montpellier,  citée 
par  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Vaccarius  (1). 


Aussiin,  subst.  masc.  Nom  propre  d'homme. 
Brantôme  cite  ce  proverbe:  «  Hardiesse  d'.U/ssHn.  » 
(Brant.  Cap.  Fr.  T.  II,  p.  217.)  C'étoit  un  proverbe 
auquel  avoit  donné  lieu  le  Seigneur  à'Aussun, 
célèbre  par  sa  bravoure. 

Austades,  subst.  fém.  Espèce  de  serge.  (Voyez 
les  Ordonnances  des  Rois  de  France,  T.  II,  p.  383.) 

Austant  que,  adv.  Autant  de.  «  Austant  que 
«  picques,  que  h^cquebustes.  »  C'est-à-dire  autant 
de  piques  que  d'arquebuses.  (Voy.  les  Lettres  de 
Louis  XII,  page  49.) 

Austarde,  subst.  fém.  Outarde.  Sorte  d'oiseau. 
(Voyez  le  Dictionnaire  de  Nicot,  au  mot  Austarde.) 

VARIANTES    : 
AUSTARDE.  Dictionnaire  de  Nicot. 

OSTARDE... 

Auster,  substantif  masculin.  Vent  du  midi. 
(Voy.  les  Dictionnaires  d'Oudin  et  de  Cotgrave,  au 
mot  Austre.)  «  Auster,  espèce  de  vent. "Laquelle 
«  nieble  bruineuse  est  aucunes  fois  amenée  par  le 
«  vent.lî/s/crsurla  cruppedes  hautes  montagnes.  » 
(J.  le  Maire,  Iliustr.  des  Caules,  livie  II,  p.  22G.) 
Ce  fut  tout  droit  au  temps  d'esté 
Quant  temps  d'aiister  est  en  saison. 

Hist.  des  Trois  Maries,  en  vers,  MS.  p.  110. 

Com  les  flots  font  plungier  la  nasselle, 

Par  le  tempest,  et  par  le  souffleraent 
De  bise,  austère,  et  galerne  ensement. 

Poës.  MSS.  d'Eust.  Dcsch.  fol.  60,  col.  3. 

VARIANTES  : 
AUSTER.  Hist.  des  Trois  Maries,  MS.  page  110. 
AUSTERE.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  60,  col.  3. 
AusTRA.  Navig.  d'Emer.  Vesp.  fol.  1,  R». 
Ai'STRE.  Dictionnaire  de  Cotgrave  et  d'Oudin. 
.\USTR1E.  Dictionnaire  d'Oudin. 

Austère,  adj.  Dur,  sévère,  rigide.  «  Chastel  du 
"  comté  de  Ventadour  en  Auvergne,  lequel  fut 
«  vendu,  et  trahi  à  un  Breton  le  plus  cruel,  et 
«  austère  de  tous  les  autres.  «  (Froissart,  livre  II, 
page  51.) 

Austérité,  subst.  fém.  Rigueur,   peine,  souf- 
france. —  Force,  vigueur. 
Dans  le  premier  sens,  Melin  de  Saint-Gelais  dit  : 

.le  n'ay  douceur  qu'en  dormant,  et  en  songe, 
Et  en  veillant,  je  n'ay  qn'auslérité. 

Welin  de  Saiiit-Gelais,  page  130. 

Austérité,  dans  ce  passage,  est  employé  pour 
force,  vigueur.  «  En  l'osl  de  César  estoient  aucuns 
a  marchans  qui  dirent  aux  Romains  la  contenance 
«  et  fierté  de  leurs  ennemis,  leur  grandeur,  et 
«  austérité  de  corps.  »  (Triomphe  dès  IX  Preux, 
page  30.) 

Austraçois,  S!<&s/.  masc.  plur.  Les  Austrasiens. 
"  Quantité  de  gens  de  guerre,  tant  d'Anglois,  Aus- 


(1)  Voici  la  citation  complète:  «  Item  aquol  an  meteis  se  mogron  autra  manieira  de  gens  que  se  appellavon  Vaquiers,  e 
volian  passar  et  aussiau  e  casanou  los  mesels.  »  Traduction:  «  Ce  même  an,  se  murent  autre  espèce  de  gens  qui 
s'appelaient  Vachers,  et  voulaient  passer  et  chassaient  (?)  de  leurs  boutiques  les  bouchers.  »  Ne  faut-il  pas  rapprocher  ce 
mot  du  verbe  atisseï;  employé  par  Froissart  (Kervyn,  XIV,  308),  et  qu'a  omis  Buchon  :  «  Tant  en  but  et  à  tel  outrage  que  le 
sain  (sang)  du  corps  luy  refroida,  et  coraxnenca  à  ausser  et  à  entrer  en  foiblesse  de  popUsie.  »  (N.  E.) 


AU 


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AU 


«  trelins,  Flamans,  Picards,  et  aultres.  »  (Chroni- 
que scandaleuse  de  Louis  XI,  an  li7(),  p.  172.) 

Par  orgueil  finerent  Gregois,... 

Par  chelis  le  Règne  nustraçois. 

Eusl.  Desoh.  Poês.  MSS.  fol.  244,  col.  4. 

VARIANTES    : 
AUST1\.VC0IS.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  244,  col.  4. 
AusTiiiiLÎ.Ns.  Chron.  scand.  de  Louis  XI,  page  172. 

Austras,  adj.  Australe. 

La  terre  auslras  délicieuse.       < 

Poês.  MSS.  d'Eust.  Dcsch.  fol.  537,  col.  2. 

Au.striche,  subst.  fém.  Autruche.  (Voyez  les 
Epilh.  de  Martin  de  la  Porte.)  C'est  une  faute  pour 
austrnclte. 

Austrin,  adj.  Vent  du  Midi.  (Voyez  les  Diction- 
naires d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Austruciors,  subst.  niasc.plur.  Ceux  qui  chas- 
sent à  l'autour.  11  faut  peut-être  lire  austrussiers 
dans  le  passage  suivant  :  «  Les  austrulliers,  fau- 
«  conniers  et"  chasseurs.  »  (Brant.  Cap.  fr.  T.  III, 
page  335.) 

VARIANTES  : 
AUSTRUCIEUS.  Gace  de  la  Bigne,  MS.  fol.  125,  R°. 
AsTRUCiERS.  Gace  de  la  Bigne,  MS.  fol.  11,  R». 
AUTRUCIER.  Ibid.  fol.  12,  R». 

AuTOURSiER  et  AuTûURSiERs.  Autourserie  de  G.  Luzancy, 
chapitre  I,  fol.  1. 

Aususer,  verbe.  Exhausser,  exalter,  élever. 
(I  Pour  ceu  que  tu  as  esteis  feaules,  sur  petites 
«  coses,  je  Vausurcray  sus  grans  coses.  «  Bulle 
d'Alberon,  évesque  de  Metz  de  l'an  040,  citée  dans 
la  préface  du  Dict.  de  Borel  qui  le  traduit  par  «  je  te 
«  constituerai  sur  beaucou-).  »  C'est  le  latin  de 
l'Evangile  supra  multa  te  constituam. 

Autan,  subst.  maso.  Nous  disons  encore  les 
autans.  Ce  sont  les  vents  que  Pline  nomme  en  latin 
Altanos. 

VARIANTES  : 
AUTAN.  Salnove,  Vénerie,  page  148. 
Autant.  Ibid.  page  191. 

Aiitansions,  subst.  fém.  plnr.  Intentions.  Il 
faut  lire  antansions  : 

Or  nos  dites,  se  vos  savés, 

Keis  est  la  lor  autanshns. 

Poêl.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1662. 

Autant,  adv.  Nous  remarquerons  les  façons 
d'employer  cet  adverbe  qui  subsiste  : 

1°  Pas  n'en  eut  voulu  autant  imur  une  cité. 
(Gérard  de  Nevers,  2'  part.  p.  02.)  L'éditeur  l'expli- 
que :  «  >ie  l'auroit  pas  donné  pour  la  valeur  d'une 
..  ville.  » 

2°  IHus  d'autant  et  demi,  c'est-à-dire  la  moitié 
plus  :  "  il  y  a  voit  grand  foison  de  bannières,  et  de 
«  pennons,  et  estôyent  par  semblant,  yy/(is  d'autant 
>■  et  demi  qu'ils  ne  furent.  »  (Froissart,  livre  I, 
page  271.) 

3°  Autant  quant,  c'est-à-dire,  autant  les  uns 
comme  les  autres,  autant  d'un  ctMé  que  de  l'autre, 
à  nombre  égal. 


Demain  peut  assaier  Normanz 
Ou  ost  contre  ost,  autant  quant. 

r.om.  de  llou,  MS.  p.  250. 

4»  .1/  tant  cum.  Dans  S'  Bernard,  Serm.  fr.  mss. 
page  358,  on  lit  :  «  Nazareth  valt  al  tant  cum  flars 
«  de  la  racine  de  .Jell'é.  »  Dans  le  latin  u  Nazareth 
«  interpretatur  nos  de  radice  Jeffe.  »  Altretant  iM 
même  sens.  (Ibid.  p.  14.) 

VARIANTES  : 
ALTANT  CUM. 
Altret  \nt.  Marbodus,  col.  1070.  S' Bern.  S.  fr.  MSS.  p.  14. 

Autel,  adj.  Semblable,  tel.  pareil.  (Voyez  les 
Dict.  de  Borel.)  «  Leur  respondit  autelle,  et  sem- 
«  blable  response.  ■>  (.loinville,  page  G7.) 

On  a  employé  aulretel  avec  la  même  signification. 
(Duchesne,  Gén.  de  Béthnne,  p.  IGi.)  On  a  dit  autel 
pour  autel,  pour  dire  tel  pour  tel  dans  .1.  de 
Saintié.  «  Jour  autel  comme  quant,  »  c'est-à-dire 
à  pareil  jour  que  «  celui  jour  estoit  de  Pasques, 
«  autel  comme  quant  nostre  Seigneur  ressuscita.  » 
(Histoire  de  B.  du  Guesclin,  par  Ménard,  page  205.) 

VARIANTES    : 
AUTEL.  Glossaire  de  l'Histoire  de  Paris. 
AuTiEC.x.  (plur.)  Poët.  MSS.  du  Vatic.  n°  1522,  fol.  180. 
AUTRETEL.  Marbodus,  col.  1642. 

Autel,  adv.  Pareillement,  de  même,  ainsi. 

Non  pas  aulf]  fer.iy. 

Poês.  MSS.  d'Eust.  Dcsch.  fol.  214,  col.  2. 

Autel,  subst.  masc.  Autel,  église.  >■  Les  mots 
«  d'autel  et  à'église  sont  des  termes  dont  la  dis- 
«  tinction  fut  inventée  par  les  laïques  usurpateurs 
«  des  dismes  des  églises.  »  (Félibien,  Histoire  de 
l'abbaie  de  S'  Denis,  p.  125.)  On  voit  que  ces  mots 
avoient  la  même  signification  en  1005,  à  en  juger 
par  la  citation  suivante  tirée  du  concile  de  Clér- 
mont,  rapportée  par  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot 
Altare  :  «  Ecclesia  quœvulgari  vocabulo  apud  eos 
»  Gallos  altaria  nuncupatur.  » 

Qui  autel  sert  d'autel  doit  vivre. 

Prov.  dans  les  Prov.  du  Vilain,  MS.  de  S'  Gcrm.  fol.  75. 

Voici  des  citations  où  ce  mot  est  employé  :  «  La 
«  construction  deVaultier  et  Finimolatioh  des  sa- 
«  crifices.  »  (Nef  des  Dames,  fol.  25,  V°.)  «  On  leur 
«  monsfra  crucifix  et  rt!///?crs.  »  (Faifeu,  page  06.) 
«  Sur  le  grant  auter  de  l'église  de  Saint  Bénigne 
«  de  Dijon.  »  (Ordonn.  des  Rois  de  Fr.  T.  V,  p.  230.) 

.\u  temple  viennent,  si  descendent 
Lor  droiture  à  l'ater  rendent. 

Alhis,  MS.  fol.  55,  V  col.  2. 

VARIANTES  : 

AUTKL.  Orthogr.-ïphe  subsi.st. 

AinEiT.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  151,  dans  le  lat.  .Altaria. 

Hautel.  Etat  des  officiers  du  D.  de  Bourg,  page  86. 

AUTER.  Ordonnance  des  R.  do  Fr.  T.  V,  page  239. 

AuTiER.  Glossaire  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis. 

AuLTiER.  Kaifeu. 

AuTEUS.  tplur.)  Phil.  Mouskes,  MS.  page  284  et  suivantes. 

Alttex.  Fabl.  MS.  du  R   n"  7218,  fol.  132,  R-  col.  1. 

AuTiEULX.  (plur.l  Glossaire  du  Rom.  de  la  Rose. 

Ater  et  Autel,  .\lhis,  MS.  fol.  55,  V»  col.  2. 

Autelet,  subst.  masc.  Diminutif  d'autel.  (Voyez 
les  Bergeries  de  RemiBelleau,  T.  I,  p.  7.) 

Auteneaux,  subst.  )nasc.  plur.  Espèce  de  pois- 
sons. «  Aucuns  ne  prendent  bcctiueteaux  du  fours 


AU 


—  325  — 


"  ce  1  eauwe,  s'il  n"a  douze  pouchs  ou  plus;  ven- 
«  doises  cinq  pouchs,  braismeaux  sept  pouchs 
-  auteneaux,  huyt  pouchs.  »  rCoustume  de 
Hayiiault,  au  Coutumier  Général,  T.'l,  p.  813.) 

Autenticque,  adj.  Authentique,  célèbi'e,  consi- 
dère, notable.  L  auteur  du  Glossaire  du  Roman  de  la 
Kose  explKiue  ce  mol  par  magnifiques,  éclatantes 
brdlantes  dans  le  vers  07  de  ce  lioman  :  c'est  une 
lausse  indication.  .  La  vindrent  les  plus  notables 
"  ']^'","ies  et  les  plus  «Mtot^«y;iÊ>s  des  bonnes  villes 
«  de  Handres,  en  grand  Estât  et  puissant.  .,  (Frois- 
sar  livre  I,  page  163.)  (1)  „  Deux  conjoincts  par 
«  mariage  ne  se  peuvent,  par  disposition  d'entre 
«  vils,  ou  testamentaire,  ou  autrement,  advancer 
«  1  un  laiiti'o,  directement  ou  indirectement  ny  les 
«  réserves,  et  stipulations  autemplicles  faites  au 

\^!^'}Vl  T-K''^?''^-  "  (^«"f-  ''e  Lessines,  au 
^ouv.  Cout.  Gen.  T.  II,  page  215.)  Le  Poi  écrivant  ù 
ses  ministres,  pour  la  paix  deVervinsen  151)8-  leur 
niaiide,  en  parlant  des  articles  dont  on  vouloi't  une 
expédition  aulhentiQue  :  ..  mais  prenez  garde  mie 
«  sur  ce  mot  authentique,  et  en  la  forme  accoutu- 
«  niee  ils  ne  pussent  prétendre  qu'ils  soient 
«  vérifiez  et  omologuez  au  Parlement  »  (Mém  de 
Bellièvre  et  de  Sillery,  T.  I,  page  120  ) 

On  disoit  autenticque  pour  accrédité,  considéré 
Froissart,  parlant  de  la'  mort  injuste  que  subit  Jean 
Desmarelsenl382,dit:  «  On  l'avoit  toujours  v-eï 
<■  bomme  de  grand  prudence,  et  de  bon  conseil  e" 
"  avoit  toujours  esté  l'un  des  greigneurs  auctenti- 
«  questn  Parlement,  sur  tous  autres.  »  (Froissar 
livre  II,  page  233.)  \'  i^iasdi  i, 

On  âiso\{  ms,i\autcmtticquépo\\r  rendu  authenti- 
que   autorisé.  Collation  faite  ausdites  coustunes 
«  non  signez,  ny  autantticque-^  et  neantmoins  en 
«  bonne  forme.  »  (Nouv.  Cout.  Gén.  T.  I,  p  405  ) 
variantes: 
AUTENTICQUE.  Beaurnanoir,  page  16 
AucTE.NTiQUE.  Froissarl,  livre  Ii:  paeé  '>a'î 
AUTANTTICQUE.  Nouv.  Cout.  gén  T.  L  pa-e  405 
AUTEMPTiCLE.  Ibid.  T.  II,  pa|e  215  ° 

AuTENTiQUE.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  470  col  « 
Authentique.  Orthographe  subsist.  '  "" 

Autenticque,  subst.  masc.  et  fém.  .Autorité 
vente  reconnue,  axiome  (2).  «■  -»uioritc, 

Pour  ce  avons  nous  ung  autenticque 
Uui  en  defflnit  sainement. 

Coquillarl,  p.  12. 

• c'est  une  autcntique  ■ 

lout  se  pert,  le  monde,  et  leglise 

Poës.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  337,  col.  1. 

AUTENTICQUE.  Coquililrtf  p^ia  ' 

AUTENTIQUE.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  337,  col.  1. 


AU 


Autentiquement,  adv.  D'une  façon  remarqua- 


marbS''p^t™^,fH*^^'-  "  dedans  la  dicte  chasse  de 
marbre     est  enclose  une  autre  petite  d'aro-ent 

le'iÊ^!^ m.  "''"'''■  "  (^""^'e«  dVLÔÏîsXli 

Autentiquer,  verbe.  Rendre  authentique  ren- 
dre public.  (Voyez  le  Dictionnaire  d'Oudin  et  îe 
Cout.  gen.  T.  II,  page  980.)  ^ 

Authorisable,  adj.  Qui  peut  servir  d'autorité 
Brantôme  emploie  ce  mot,  eu  ce  sens,  au  passa-e 
suivant:  «  Sur  quoy  j'allegueray  un  exemple  plaf 
«  san  non  pourtant  qu'il  doixeestre anthorSbe. 
(Brantôme,  Dames  gall.  T.  II,  p.  207.)      '""''""''^■ 

rv^'^^Yi^'^:-  *"^^.^'  ^^'''"-   Le  féminin    d'auteur 
0  oyez  le  Dictionnaire  de  Cotgrave.)  ' 

VARIANTE  • 
AUTRICE.  Du  parfait  amour. 

Autographe,  subst.  mase.  Ecrit  original,  écrit 
de  la  main  de  l'auteur.  Ménage,  dans  ses  rerl'^^r 
quessur  la  Langue,  page  280,  prétend  qu^rfai't 
prononcer  a ftographe.  '  "' 

Autom,subst.  masc.  Automne. (Voy.  les  Dict  de 
INicot  et  de  Cotgrave.)  ■*  "*^ 

VARIANTES  : 
AUTOII.  Dict.  de  Nicot. 

AUTROMPNE.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol  '>9  col   -î 
AUTUMNE.  Glossaire  du  P.  Labbe.  '  ' 

Automates,  adj.  Ce  mot  subsiste,  mais  comme 
substantif.  Ménage,  dans  ses  remarques  suMa 
langue,  prelend  qu'il  faut  prononcer  «/VoSLs 

(.ajg.,  I,  24.  Engeins  automates;  c'est-à-dire  ma- 
chines automates.  "  uuc  Uld 

Automnal,  adj.  Qui  est  propre  à  l'automne 
(\oyez  les  Dictionnaires  d'Oudin  et  de  Colgra \e  ) 
On  rouve  au  pluriel  automnaux,  pour  épitlîète  de 
fruits,  dans  les  épithètes  de  .Martin  de  la  Porte 

VARI.\.NTES  • 

AUTOMNAL  Dictionnaire  dOudin  et  de  Cotgrave 
AUTO.MNEL.  Dictionnaire  de  Cotgrave.        °^^'^*^*'- 

Anton,  subst.  masc.  Autan,  vent  du  midi. 

■  ,-, l'impétueuse  haleine 

D  Auton  qui  la  pluie  ameine. 

Poès.  d'.\raadis  Jamjn,  fol.  61,  V". 

Autorizé,  participe.  Privilégié. 

Bien  deust  pieça  estre  par  droit  canonisé 
berviz  et  honoré  et  plus  autorizé  et  auctoryiez. 
Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  203. 
VARIANTES  : 
AUTORIZE,  AcTORiziEz. 


,  Autouv,  préposition.  En  dedans.  Ce  mot  qui  ne 
s  emploie  que  pour  signiner  ce  qui  est  autour  de 


AU 


—  326  — 


AU 


quelque  chose  exlérieurement,  est  mis  ici  dans  ua 
sens  contraire.  L'auteur  de  la  Chronique  scanda- 
leuse de  Louis  XI,  pat;e  '28,  parlant  d'une  proces- 
sion générale  en  141)."),  faite  pour  la  santé  du  Roi, 
dit  :  «  La  dicle  assemblée,  et  congrégation  se  faisoit 
«  pour  la  santé,  et  bonne  prospérité  du  Roy,  et  aussi 
«  de  la  Royne,  et  du  t'ruicl  qui  estoit  autour  d'elle.  « 
Nos  auteurs,  par  un  même  renversement  d'idées, 
ont  dit  une  femme  enceinte  d'enfants,  pour  dire 
une  femme  grosse. 

Autour,  subst.  Espèce  d'oiseau  de  proie. 
VARIANTES  : 

AUTOUR.  Du  Cange,  au.K  niots.-lti?i(r,  .4!(s(or;us,  llosiorius. 
Eust.  Desch.  MS.  fol.  229,  col.  2. 
EsTOiH.  Assises  de  Jérusalem,  pages  211-212. 
EsToiHE.  Mouskes,  MS.  pages  4i9-450. 
OiTOUR.  Glos.saire  du  P.  Labbe,  page  486. 
OsToiR.  Borel,  1"^  addit. 
OsTOR.  Du  Gange,  au  mot  Uon. 
OsTOUR.  Eust.  Desch.  Poës.  MS.  fol.  113,  col.  1. 

Autour,  adverbe.  Absolument,  tout-à-fait.  On  a 
dit  en  ce  sens  :  «  vuider  la  selle  autour  ;  »  c'est- 
à-dire  la  quitter  tout  à  fait.  (Voyez  Perceforest, 
Vol.  I,  fol.  147,  R°  col.  2.) 

VARIANTES  : 

ASTOU.  Mot  languedocien.  Du  Gange,  Glossaire  latin,  au 
mot  Astur. 

AULTOUR.  Coquillart,  page  108. 

AusTOR.  Mot  béarnois.  Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mot 
Axiatorhis. 

.A.USTOUR.  Dictionnaire  d'Oudin  et  de  Cotgrave. 

AuTOER.  Gace  de  la  Bigne  des  Déduits,  MS.  fol.  87,  R". 

Autran,  suhst.  masc.  L'année  précédente.  C'est 
comme  s'il  y  avoit  aulr'an.  Cette  expression  est  du 
patois  de  Cahors.  (Voy.  Borel,  Dict.  au  mot  Glouper.) 

Autre  année  (F.)  Pour  à  l'avenir,  à  jamais. 

Si  te  renonce  et  or,  et  l'autre  année: 

Car  désormais  par  créature  née 

Ne  sera  veu  qu'en  me  nommant  je  rie. 

J.  Le  Maire,  suite  de  niluslr.  des  Gaules,  p.  407. 

Autre,  ndv.  Aulrcmcnt.  Ils  ne  le  pouvoicnt 
autre.  (Monstrelet,  Vol.  I,  fol.  92,  R".) 

Autre.  Ce  mot,  qui  subsiste,  s'est  employé  quel- 
quefois (1)  : 

1°  Pour  désigner  le  diable.  (Voyez  l'Histoire  de 
Fr.  en  vers,  à  la  suite  du  Rom.  de  Fauvel,  ms.  du  R. 
n^  G812,  fol.  82,  V°  col.  3.) 

2"  Pour  le  reste  :  "  sont  coupés  la  teste  et  la 
«  queue,  et  tout  l'autre  est  mis  en  un  pot.  »  (Modus 
etRacio,  MS.  fol.  129,  R".) 

3°  Li  ou  soit  autre. 

Autres  (vous),  pour  vous  parlant  avec  respect  ;  de 
l'ancien  mol  e^itre-vous  ;  «  ainsi  qu'il  me  semble 
a  (souz  la  bénigne  grâce,  et  supportation  de  voz 
«  bautesses)  madame  Venus  surpasse  en  linéature 
«  et  droitesse  de  corsage  vous  autres  deux,  mes 
«  très  redoutées  dames  et  déesses.  »  (J.  le  Maire, 
lUustr.  des  Gaules,  livre  1,  page  110.) 


Autre  endroit,  adv.  A  l'envers.  (Voyez  une 
citation  dans  Un  Gange.  Glossaiie  latin,  au  mot 
Tuniea'2,  col.  1341.) 

Autrefois,  adv.  Une  seconde  fois. 

Ma  coulpe  une  fois,  autrefois  et  tierce  fois.  (Bou- 
teiller.  Soin.  rur.  p.  873.)  Ge  mot  s'entendoit  aussi 
dans  le  sens  qui  subsiste.  On  disoit  aussi  à  Vautre- 
fois  pour  une  autre  fois.  (Ordonn.  des  R.  de  Fr. 
T.  I,  p.  671;  et  autrefois  pour  aucune  fois.  —  Ibid. 
page  774.) 

VARIANTES  : 
AUTREFOIS.  Orthographe  subsist. 
AuTRESFOis.  Froissart,  livre  III,  page  108. 

Autreget.  Mot  gascon  qui  signifie  ordonna, 
octroya,  enjoignit,  dans  une  citation  rapportée  par 
Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mot  Vassalaticum, 
col.  14.33. 

Autre  hier,  adv.  Avant-hier  et  l'autre  jour, 
comme  on  le  dit  familièrement  : 

Parla  l'autre  lujer  au  Roy,  et  si  très  bandement 
Ly  Sire  a  son  garçon  n'oseroit  pas  tant  dire 
Gon  Girart  dit  au  Roy,  et  toujours  en  grand  ire. 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  page  33. 

Les  Italiens  disent  altrohieri  dans  ce  sens.  On 
employoit  aussi  le  mot  autrehier  d'une  fatjon  plus 
générale  pour  ci-devant.  (Voyez  le  Glossaire  de 
Miirot."!  Il  en  est  de  même  de  l'expression  «  autre 
jour  d'hier.  >■ 

VARIANTES  : 
AUTREHIER.  Glossaire  de  Marot. 
AuTREHVER.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  cité  ci-après. 
AuTRiER.  Poët.  JIS.  avant  1300,  T.  III,  page  1189. 
Atrier  (!'.■)  Athis,  MS.  fol.  24,  R"  col.  2. 
Autrejoukd'hier.  La  Golomb.  Tbéat.  d'honn.  T.  II,  p.  420. 

Autrement,  adv.  D'ailleurs  ou  assez.  —  Guères. 
Mot  subsistant.  Se  trouve  écrit  altrement  dans 
S'  Bern.  Serm.  fr.  mss.  p.  721  et  passim;  dans  le 
latin  alioquin. 

Ge  mot  est  mis  pour  d'ailleurs,  ou  assez,  dans  le 
passage  suivant,  oii  il  s'agit  de  la  manie  des  anti- 
quaires qui  rassemblent  «  des  testes  sans  oreilles,  des 
«  bus  sans  bras,....  chose  autrement  laide  h.  voir.  » 
(Fauchet,  Langue  et  Poës.  fr.  épitre,  p.  1.) 

Pour  guères,  on  lit  dans  Joinville,  p.  80:  «  Il  nelui 
tenoit  auirenicnl  compaignie  (2).  >. 

VARIANTES  : 

AUTREMENT,  Altrement. 

Autrement  venu,  adj.  Contrevenu.  (Ordonn. 
des  R.  de  Fr.  T.  III,  page  150.) 

Autreplus,  rtr/yer&f!.  Surplus.  (Voyez  Ordonn. 
des  Rois  de  France,  T.  III,  p.  54.) 

Autre  que  tel.  Expression  qui  signifie  tout 
autre,  dilTérent:  «  Vous  ne  povés  pas  faire  les 
«■  hommes  autres  que  tels  que  Dieu  les  a  fais.  » 
(Le  Jouvencel,  ms.  p.  402.) 


(1)  On  trouve  dans  Froissart  (\.\.  XIII,  76)  l'expression  an  par  autre,  bon  an  mal  an  :  «  An  par  autre,  les  Frères  y  ont 
bien  et  largement  entre  cens  et  six-vings  queues  de  bon  vin.  (N.  E.)  —  (2)  Autrement  signifie  aussi  :  «  Les  Flourentins 
estoient  venus  à  merchy  au  pape  et  autrement  bien  les  Pérousins.  »  (.Froissart,  1.1.  XIV,  301.)  (N.  E.) 


4 


-d 


AU 


—  327  - 


AU 


TARIANTES  : 
AUTRE  QUE  TEL.  Le  Jouvencel,  MS.  p.  402. 
AUTREQU.\TEL.  Fabl.  MS.  du  R.  n°  761û,  T.  I,  fol.  58. 

Aiitresfois  vous.  On  a  employé  cette  expres- 
sion au  lieu  de  autre  que  vous. 

Qu'autresfois  vous,  ne  quier  jamais  ser\-ir. 

Eusl.  Desch.  Poés.  MSS.  fui.  168,  col.  1. 

Autrestant  (1),  adverbe.  Autant. 

Nil  ne  heent  rien  autreslant, 
Comme  il  heent  loial  amant. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218.  fol.  205,  R-  col.  1. 
Et  jeûnent  autvctanl  et  plus  que  d'autres  gens. 

J.  de  .Meung.  Cod.  vers  1012. 

VARIANTES  : 
AUTRESTANT.  Chasse  de  Gaston  Phébus,  MS.  p.  266. 
Altret.\nt.  Marbodus,  col.  ICTO. 
AuTRETANT.  l'oës.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  529,  col.  3. 
AUTRETENT.  Kymer,  T.  I,  p.  109,  col.  1  et  2;  Ut.  de  1208. 

Autrhoiii,  suhst.  masc.  Autre  homme.  Ce  sont 
les  deu.x  mots  réunis.  (Voy.  la  Citation  de  Borel,  au 
mol  amesurats.)  Au  reste,  ces  sortes  de  réunions 
sont  fréquentes  dans  nos  anciens  Poètes.  ISous  ne 
nous  astreignons  pas  à  rapporter  tous  les  mots  qui 
en  résultent,  dès  qu'il  est  facile  de  démêler  ceux 
(lui  les  composent. 

Autrou,  subst.  masc.  Maître,  seigneur.  Mot 
breton.  (Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  auctor.) 

Autrui,  subst.  7nasc.  Les  autres.  Ce  mot  subsiste 
sous  la  première  orthographe.  On  disoit  autrefois 
par  autrui  main  pour  par  la  main  d'aulrui.  (Beau- 
manoir,  Coul.  de  Beauvoisis,  p.  8.)  «  Tout  a  esté  à 
'<  autruy  et  sera  à  autruy.  »  Proverbe.  C'est-à-dire  : 
Tout  a  changé  de  maître  et  en  changera  encore. 
'Dict.  de  Cotgrave.)  C'est  dans  le  même  sens  qu'on 
lit  dans  les  Poès.  .mss.  d'Eust.  Desch.  fol.  260,  col.  3  : 

Tout  fu  et  tout  sera  autruy. 

Vautrui.  C'est-à-dire  ce  qui  appartient  à  autruy. 

Le  monstre  infâme  d'envie 

A  qui  rien  de  Vaulnaj  ne  plaise. 

Ménage,  en  commentant  ces  vers  de  Malherbe, 
observe  que  "  le  mol  autrij  se  met  quelquefois  avec 
«  l'article  défini,  et  alors  il  signifie  le  bien,  et  non 
«  pas  la  personne  ;  mais  cette  façon  de  parler  est 
"  du  vieux  temps.  »  (Mém.  sur  Mallierbe,  Liv.  iv, 
p.  •421.)  Vaugelas  a  fait  les  mêmes  remarques. 

On  écrivoil  autrui  estait  pour  dire:  appartenoit 
à  un  autre.  (Duchesne,  Gén.  de  Bar-le-Duc,  p.  32.) 

VARIANTES  : 
AUTRUL  Orthographe  subsist. 
AUTRUY.  Eust.  Uesch.  Poës.  MSS.  fol.  260,  col.  3. 
.VUTRI.  Loix  normandes,  art.  xiv. 
AUTRY.  Les  15  Joyes  du  mariage,  préf.  p.  3,  et  note. 
.\UTRUZ.  (plur.)  Ordonn.  des  Rois  de  France,  T.  II,  p.  603. 

Autruschier,  subst.  masc.  Titre  d'office.  C'étoit 
le  titre  d'un  des  officiers  de  Charles  VI,  sans  doute 
celui  qui  avoil  soin  des  autruches.  Peut-être  faut-il 
lire  autouschier.  (Voy.  Godefroy,  Annot.  sur  l'Hist. 
de  Charles  VI,  p.  704,"  et  Ai;strullier  ci-dessus.) 


Antrnsse  (2),  subst.  féru.  Autruche.  C'est  une 
espèce  d'oiseau.  On  lit  idumes  d'autrusse  dans 
Petit  Jean  de  Saiiitré,  p.  181». 

Auve,  subst.  Pour  les  panneaux  ou  autre  partie 
de  la  selle  qui  estoient  faits  de  bois  blanc. 

Poitras  et  cengles  de  rompues 
Et  les  auves  parmi  fendues. 

Athis,  MS.  fol.  105,  R'col,!. 

Auve,  subst.  fém.  Saindoux.  Ainsi  nommé  à 
cause  de  sa  blancheur,  du  latin  alhus. 

Auvent,  subst.  7nasc.  Auvent.  Petit  toit  mis 
au-dessus  des  boutiques.  Portique.  (Voyez  le  Dict.  de 
Cotgrave,  aux  mots  aulven  et  aulvent.)  On  lit  dans 
la  Coul.  de  Senlis:  «  lia  également  cognoissance 
«  des  aiilvens  sur  rue.  •■  (Coût,  de  Senlis  au  Coût. 
Général,  T.  I,  p.  312.) 

On  lit  auvan  et  avautvens  dans  Du  Cange,  Gloss. 
lat.  au  mol  auvaua,  on  trouve  uuvant^ùnns  les 
Oidon.  des  liois  de  France,  T.  III,  p.  313.  Voy. 
Felibien,  Ilist.  de  Paris,  Preuv.  T.  II,  part,  ii,  p.  10."», 
col.  2,  où  on  lit  :  ■•  fera  bastir  six  ou  sept  loges,  ou 
«  haultsneufs  pour  mettre  (;eu.\  qui  auront  alîaire 
«  au  dict  marché  à  couvert.  »  Il  falloit  peut-être 
lire  haults  vents.  (Voy.  le  Gloss.  de  la  même  Hist. 
de  Paris.) 

Li  auvent  des  palais  trestuit 
Qui  luisent  contre  menuit 
Devers  la  ville  sont  tornés. 

Parlon.  de  Rlois.  MS.  de  S.  Gcrm.  fol.  127.  R'  col  2. 

VARIANTES  : 
AUVENT.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  127,  R». 
AuvA.NT.  Ordon.  des  Rois  de  France,  T.  III,  p.  313. 
Auvan.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  à.  Auvanna. 
.\ulvent.  Dict.  de  Cotgrave. 
Aulven.  Idem. 

Avautvens  (plur.)  Du  Cange,  Gloss.  lat.  à  Auvanna. 
I1.\ultsneufs  (plur.)  Gloss.  de  l'Hist.  de  Paris. 

Auvergnaus,  adj.  Qui  est  d'Auvergne. 

VARIANTES  : 
AUVERGNAUS.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»7615.  T.  II.  fol.  189,  R». 
Auvergnois.  J.le  Maire,  lUustr.  des  Gaules,  Liv.  III,  p.  288. 
AuvERNOis.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  164,  R»  col.  1. 

Auvernas,  subst.  masc.  Espèce  de  raisin  noir. 
(Voy.  le  Dict.  de  Cotgrave.) 

Auvoire,  subst.  Imagination,  vision,  croyance 
sans  fondement.  «  Autant  vaut  auvoire  comme 
"  bourdes  proposées  en  justice.  »  (Beaumanoir, 
p.  323.)  Il  paroît  que  ce  mot  signifioit  de  simples 
idées  sans  fondement,  des  choses  que  l'on  se  per- 
suadoit  être  sans  en  avoir  aucune  preuve.  Ainsi 
quand  on  lit  dans  une  Ordonnance,  T.  V,  p.  712: 
«  Un  nostre  sergent  par  lui  seul  en  accusant  un 
»  homme  de  la  dicte  ville,  ne  seroit  et  n'est  cru, 
«  ne  les  hommes  de  la  dicte  ville  par  devant  nous 
«  ne  respondront  à'auvoirie  »,  cela  paroît  signifier 
qu'ils  ne  déposeront  pas  par  des  il  semble.  L'éditeur, 
qui  avoue  ne  pas  entendre  cet  endroit,  s'est  trompé 
dans  les  conjectures  qu'il  a  hasardées  sur  ce  mot. 


(1)  Autrelant  représente  alterum  tantum,  comme  autant  représente  aliud  tantum.  On  trouve  aussi  la  formule  à 
l'autretant  :  «  Et  donnèrent  là  à  l'axUretant  et  si  longuement  que  vens  lor  revint,  s  (Froissart,  II,  436.)  (N.  E.)  —  (2)  Do 
iiris-slruthio,  mot  à  mot  oiseau  autruche,  (n.  e.) 


AV 


—  328  — 


AV 


On  lit  dans  le  même  sens  : 

Jés  sai  tots  sanz  mivnirre. 

l'arlon.  de  Blois,  WS.  du  S.  Cerm.  fol.  160,  V'. 

C'esl-à-dire  je  sais  tout  avec  certitude. 

n'est  pas  amoirc  (lisez  auvoire.) 

Dont  je  parle,  mais  chose  voire. 

Ibiil.  fol.  148,  V  col.  2. 

VARIANTES  : 
AUVOIRE.  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis. 
AuvoiRRE.  Parton.  de  Blois,  p.  100,  V"  col,  3. 
Amoirk  (pour  auvoiro).  Ibid.  p.  148,  V". 
AuvoiRiE.  Ordon.  des  Rois  de  France,  T.  V.  p.  712. 

Aux,  suhst.  masc.  Nom  propre  de  ville.  Peut- 
être,  Ausch  ou  Aix.  Il  est  mis  avec  Nîmes  et  Albi, 
dans  le  dénombrement  des  villes  où  l'on  battoit 
monnoie,  dans  les  Ordon.  des  Rois  de  France,  T.  I, 
p.  r>48. 

Aux,  est  peut-être  ici  pour  cbasteaux,  dont  le 
Poêle  n'a  conservé  que  la  finale,  afin  de  racourcir 
et  trouver  la  mesure  de  son  vers  : 

Je  les  secours  je  les  conforte 
Contre  désir,  qui  les  assaut, 
Et  fait  maint  doloreux  assaut  : 
Je  leur  ....  aux  el  forteresse. 

Slachaut,  MS.  fol.  29,  R"  col.  1. 

Auxentit.  L'auteur  du  Gloss.  du  Roman  de  la 
Rose,  au  vers  379  du  Test,  de  J.  de  Meung,  croit 
que  ce  mot  signitie  :  esteignit,  dissipa.  Il  me  paroist 
plus  simple  de  corriger  le  texte,  et  de  lire:  «Jixm/i/. 
Voici  les  vers  où  il  se  trouve,  et  dans  lesquels  il  est 
parlé  de  la  rédemption  du  genre  humain  par  le 
sang  de  N.  S.  : 

Précieux  sang  decurant 

Qui  amortit  mort  et  mourant, 

Qui  auxentit  pleurs  en  plourant. 

i.  de  Meung,  Test.  377-379. 

Auxiliateur,  subst.  masc.  Qui  donne  du  se- 
cours. {Voy.  le  Dict.  de  Cotgrave.) 

Auxilintion,  subsL  fém.  Secours,  aide,  assis- 
tance. (Voy.  les  Mém.  de  Sully,  T.  l.\,  p.  17.) 

Auxpete,  s!/fcs^ /■!!'»). Inquiétude,  perplexiié.  «  Il 
«  vivra  toujours  en  crainte,  et  ne  sera  jamais  sans 
«  aujcpete,  et  sans  ennuveux  soucy.  »  (Du  A'erdier, 
Biblioth.  à  l'art,  de  J.  de'Rely,  p.  752.) 

Auwan.  En  cette  année. 

Sire,  jou  ne  dirai  auv'aii 
K'avielles  soie,  ne  ja  siens 
Ne  serai  mais,  si  cou  j'entens. 

Poét.  anonyme  au  MS.  du  Valic.  n°  U90. 
Jà  ne  perdrai  marcées  ne  foire 
Là  ùjou  puisse  mais  moan... 
Gaaignerai  moan  assés. 

Roi  Guillaume,  p.  119. 

Avable,  adj.  Convenable.  -  Toutes  les  choses 
«  profitables,  arables  et  nécessaires.  »  (Gloss.  de 
l'Hist.  de  Bretagne.) 

Si  est  mentir  souvent  avabte 
Car  mentir,  .lucune  seson 
Donc  bien  colar  à  reson. 

Fabl.  MSS.  du  U.  n-  7218,  fol.  280,  R*  col.  i. 


Avable,  adj.  ITahile,  capable.  Convenable. 

Dans  le  premier  sens  d'habile,  capable,  ce  mot 
semble  le  même  que  able;  on  lit  en  ce  sens  ^  avons 
«  habileté  et  vendeurs  avables,  à  trùiiers,  etc.  » 
(Ord.  T.  V,  p.  271.) 

Dans  la  seconde  acception  de  convenable,  avable 
vient  du  verbe  avoir  ;  il  a  été  employé  pour  signifier 
ce  que  l'on  doit  avoir,  ce  qui  est  convenable. 
«  Toutes  les  choses  prohtables,  avables  et  néces- 
«  saires.  »  (Gloss.  de  l'Hist.  de  Bretagne,  p.  077.) 

Avachi,  «f/y.  Flasque,  pendant.  On  disoit:  les 
oreilles  avachies.  Ce  mot  existe  encore. 

Avachir,  verbe.  Rendre  lâche,  paresseux,  pol- 
tron. (Dict.  de  Borel,  Monet,  Oudin  et  Cotgrave.) 
«  Jamais  la  coutume  n'auroit  vaincu  la  nature, 
«  elle  est  invincible;  mais  nous  avons  empoisonné 
«  noslre  jugement  par  les  délices,  la  molesse,  l'oisi- 
"  vêlé,  la  paresse,  la  lâcheté;  nous  l'avons  encore 
«  avachy,  l'oignant,  l'huilant  et  tlattant  de  folles 
«  opinions,  et  de  mauvaises  mœurs.  »  (Essais  de 
Montaigne,  T.  I,  p.  420.)  On  diroit  aussi  s'avachir 
pour  devenir  lâche,  etc. 

Avail,  subst.  masc.  Chèvre  sauvage.  (Dict.  d'Ou- 
din  et  de  Cotgrave.) 

Ava'i'leable,  adj.  Valable.  (Voy.  les  Tenures  de 
Littleton,  fol.  119.) 

Availlon,  sh/)S^  7nasc.  Espèce  de  poisson  armé. 
(Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Avaindre,  verbe.  Aveindre,  tirer  dehors.  — 
Attaindre. 

Sur  le  premier  sens,  voyez  les  Dict.  de  Monet, 
Mcot  et  Cotgrave,  au  mot  avaindre  et  les  Vigil.  de 
Ch.  vu  (T.  1,  p.  78.)  On  disoit  aussi  aveindre  et 
avaindre  pour  atteindre.  (Voy.  les  Dictionnaires 
ci-dessus  cités.) 

Sera  mis  hault,  ou  nul  ne  peut  aveindre. 

Les  Marg.  delà  Marg.  fol.  162,  R*. 

VAHIA>'TES  : 
AVAINDRE.  Monet,  Nicot,  Dict. 
Aveindre.  Essais  Je  Montaigne,  T.  II,  page  450. 

Avaine  (1),  subst.  fém.  Avoine.  Ce  mol.  qui 
subsiste  sans  avoir  même  essuyé  de  grands  chan- 
gements dans  son  orthographe,  a  donné  lieu  ii 
diverses  façons  de  parler,  que  nous  placerons  ici  : 

1"  Piquer  Vaveine,  pour  être  en  sentinelle,  atten- 
dre. (Des  Ace.  Bigar.  liv.  IV,  fol.  15.) 

2°  Escouter  à  l'avoine  (1),  pour  perdre  son  temps. 
(Voy.  le  MS.  de  la  Bibl.  du  R.  ir  8053,  fol.  18.) 

3°  Je  n'ay  riens  emblé,  tout  mon  argent  est  en 
avoyne.  Equivo(iue  de  emblé  avec  en  bled. 

4°  Gaingnier  l'avoine  se  trouve  dans  une  pièce 
de  vers  d'Eust.  Deschamps,  où  celui  qui  parle  dit 
ce  qu'il  feroit  s'il  étoit  à  cheval  : 

J'osteroie  ma  selle. 

Pour  dormir  en  blanche  litière, 
Tourneroie  avant  et  arrière, 


(1)  C'est  encore  la  proronciation  de  l'Ouest  de  la  France:  e  long  en  patois  normand  devient  d,  et  non  oi,  comme  ea 
français,  (n.  e.)  -  (2)  On  dit  encore:  «  Escouter  les  avoines  à  lever.  »  (n.  e.) 


AV 


-  329  — 


AV 


Pour  Vai'oine,  mademoiselle 
Gaingnier,  et  avoir  le  gré  d'elle. 

Eusl.  Deschanips,  Poi-s.  MSS.  fol.  439,  col.  2. 

5°  Jouer  à  l'avainne,  se  trouve  dans  Froissart, 
Poës.  MSS.  p.  86,  col.  2. 

Jutons  nous  au  Roy  qui  ne  ment  (1), 


A  Vavainne,  et  aux  reponniaux. 

Mais  nous  n'osons  assurer  que  le  mot  avainne 
doive  ici  s'entendre  dans  le  sens  d'avoine. 

6°  Avoijne  du  bois  étoit  le  droit  que  l'on  nommoit 
aulremenl  avenage.  (Voy.  Pithou,  sur  la  Cout.de 
Troyes,  p.  354,  et  le  mot  avenage  ci-après.) 

VARIANTES    : 

AVAINE.  Duchesne,  Gén.  de  Eéth.  Pr.  p.  16-2  ;  tit.  de  1267. 

AvEiNE.  Robert  Estienne,  Gram.  fr.  p.  107. 

Avainne.  Froissart,  poës.  MSS.  page  86,  col.  2. 

AvoYNE.  Test,  de  Palh.  page  138. 

Avoine.  Orth.  subsist. 

AvONE.  Notice  du  Rom.  d'Alex,  fol.  83. 

A\a.l,  préposition  Au  long;  dans;  parmi;  des- 
sous. (Voy.  le  Gloss.  de  l'Hist.  de  Paris,  et  celui  du 
Rom.  de  la  Rose,  le  Gloss.  de  Marot,  les  Diction- 
naires d'Oudin  et  de  Cotgrave,  au  mot  aval.)  Nous 
avons  dit  qu'ainont  et  aval  signifioient  le  haut  et  le 
bas  des  mots  7nont  et  val,  vallée.  De  là,  le  sens  de 
ces  mots  aval,  avaux,  etc. 

Il  est  même  facile  de  sentir  que  cette  préposition 
est  composée  de  l'article  à  et  du  mot  val,  qu'on 
emploie,  tantôt  au  singulier,  tantôt  au  pluriel. 
Insensiblement  le  mot  aval  s'estemployé  en  général, 
pour  dans,  parmi;  ainsi  on  disoit  : 

laissiez 

Vos  aigniaux  paistre 
Aval  les  prez. 

Poet.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1431. 

«  Tout  le  monde  esloit  aval  les  champs.  »  (Chron. 
deS'Denys,  T.  1,  fol.  131.) 

Cette  expression  :  nos  Baillis  d'amont  et  d'aval, 
qui  se  trouve  au  Coût.  gén.  T.  I,  page  868,  signifie 
des  pays  d'en  haut  et  d'en  bas. 

On  disoit  aussi  : 

1°  Avaux  Van,  dans  le  cours  de  l'année.  (Fav. 
Th.  d'honn.) 

2°  En  aval,  au-dessous  :  «  Que  nuls  prevosts  ne 
«  taxent,  amende  en  leur  jugementque  de  sept  sols 
«  en  aval.  «  (Etat  des  Ofî.  du  D.  de  Bourg.) 

3°  Amor  d'aval  semble  signifier  :  amour  mal  reçu, 
maltraité,  ou  peut  être  l'amour  profane,  opposé  à 
l'amour  de  Dieu  : 

Dex,  se  je  pooie  coiUir 
Dou  fruit  nieur  de  vos  amer, 
Si  con  vos  m'avés  fait  sentir 
L'amor  d'aval,  et  comparer: 
Lors  porroie  saoler, 
Et  venir  à  repentement. 

Thibaut  de  Navarre,  poês.  MSS. 

4*  Descendre  aval,  par  une  sorte  de  pléonasme, 
descendre  en  bas.  (Du  Cange,  Gloss.  latin,  au  mot 
Avalare.) 


5'  Aval  le  poing,  ou  aval  poing,  au  poing,  sur  le 
poing,  s'employoit  en  langage  de  fauconnerie.  (Voy. 
Gace  de  la  Bigne  des  Déduits,  .vs.  fol.  5.) 

6°  Aval  lèvent,  au-dessus  du  vent.  (Modus  et 
Racio,  Ms.  fol.  83.) 

VARIANTES    ." 
AVAL.  Glossaire  de  Marot  et  de  l'Hist.  de  Paris. 
AvAU.  Dictionnaire  d'Oudin. 
AviAU.  Fabliaux,  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  287. 
AvAUX.  Favin,  Th.  d'honn.  T.  I,  page  39. 

Avalaige,  subst.  masc.  Pente  douce,  chemin 
pour  descendre  :  «  On  ne  peut  pour  ceste  heure, 
«  aultre  chose  sur  les  ennemis,  et,  pour  le  traict  à 
«  poudre,  le  dict  comte  et  .lacques  se  retirent  en  un 
«  avalaige.  «  (Lett.  du  D.  du  Bourg,  au  sieur  Dufay, 
page  363.) 

Avalange,  subst.  fém.  Qui  descend  avec  impé- 
tuosité. Substantif  formé  du  mot  Aval  et  qui  s'ap- 
plique dans  quelques  pays  aux  chutes  de  neiges,  ou 
aux  pelotons  de  neige  qiii,  en  croulant  du  haut  des 
montagnes,  deviennent  d'une  grosseur  prodigieuse. 
(Dict.  de  Cotgrave  et  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot 
lavanchia.)  Dans  les  Alpes,  on  dit  lavange,  qu'on 
verra  ci-après.  Dans  d'autres  pays,  il  signifie  une 
chute  impétueuse  qui  vient  des  grosses  pluies.  (Du 
Cange,  Gloss.  latin  au  mot  Eslavcidium.)  On  dit  en 
ce  sens,  avalasse  (2)  en  Normandie,  et  availles  à 
Dombes. 

On  prenoit  aussi  les  mots  avalée  et  avalison  pour 
la  foule  des  poissons,  qui,  emportés  par  les  crues 
des  eaux,  tombent  dans  les  nasses  préparées  pour 
les  prendre.  (Voy.  Du  Cange,  Glossaire  latin,  au 
mot  advaleia,  et  au  mot  avalison  sous  avalare.) 

VARIANTES    : 
AV.^LANGE.  Du  Cange,  Glossaire  latin,  au  mot  Lavanchia. 
Avalanche.  Dict.  de  Cotgrave. 
AvALLANUHE.  Oudin,  Cotgrave. 

Av.i^LisoN.  Du  C.  Gloss.  lat.  au  mot  Avaliso)i  sous  Avalare. 
Avallasse.  Oudin,  Cotgrave. 

Avalée.  Du  Cange,  Glossaire  latin,  au  mot  Advaleia. 
Availles  (plur.)  Il)id.  au  mot  Eslaveidium. 

Avalant,  participe  actif.  Descendant.  De  là, 
l'expression  en  avalant  pour  au-dessous  :  «  Milles 
«  lettres  des  cent  livres  en  amont,  ne  montent  point 
"  en  avalant  que  h  \ingtso\s.  »  (Etat des  Offic.  des 
Ducs  de  Bourgogne,  p.  306.) 

Avalé  (3),  participe  passif.  Descendu,  abaissé, 
pendant.  Baissé,  diminué.  Voyez,  sur  le  premier 
sens,  le  Glossaire  de  Marot,  au  mot  avallée  : 

Femme  au  chaperon  avalé, 
Qui  va  les  crucifi.x  rongeans 
C'est  signe  qu'elle  a  estallé, 
Et  dutrefoys,  hanté  marchans. 

Coquillart,  p.  30. 

«  Bragues  avalades.  »  (Rabelais,  T.  III,  p.  39.) 
<>  Les  cheveux  nonchallemment  avallés.  »  (Dict.  de 
Cotgrave.  —  Voy.  aussi  le  Dict.  d'Oudin.) 

Avalée  est  épithète  de  nourrice,  dans  Coquillard. 


(1)  On  lit  dans  les  instructions  du  chevalier  de  La  Tour  à  ses  filles  :  «  Il  advint  une  fois  que  beaucoup  de  chevaliers  et  de 
dames  jouoyent  au  roy  qui  ne  ment,  pour  dire  vérité  du  nom  de  s'amie.  »  (n.  e.)  —  (2)  Avalasse  et  avalaison  se  disent 
non-seulement  des  torrents  d'eau,  mais  des  pierres  qu'ils  entraînent.  Avalasse  est  en  terme  de  marine  un  vent  d'aval 
continu,  (n.  e.)  -  (3)  Dans  la  Chanson  de  Roland,  strophe  79  ;  «  Si  comme  il  put,  du  pin  est  avalet.  s  (N.  e.) 

II.  42 


AV 


—  330 


AV 


«  Couroit  à  bride  avallée,  »  c'est-à-dire  à  bride 
abattue.  (Voyez  l'Amant  ressuscité,  page  213,  et 
Crétin,  page  154.) 

On  disoit  avalé  pour  baissé,  diminué,  extension 
de  l'action  précédente  :  «  Lesquelles  denrées  deus- 
«  sent  estre  descheues,  et  avalées  de  prix.  »  (Ord. 
des  R.  de  Fr.  T.  II,  page  49.) 

VARIANTES    : 
AVALÉ.  Coquillart,  page  30. 
Av.\LLÉ.  L'amant  ressuscité,  page  213. 
AvALADE.  Rabelais,  T.  III,  page  39. 

Avaler,  verbe.  Descendre.  —  Abaisser.  — 
Abattre.  —  Annuller.  —  Déposer. 

Toutes  ces  significations  viennent  de  celle  du  mot 
aval,  qui  signifie  en  bas. 

La  pi'emière  de  ces  acceptions,  est  rapportée 

dans  !e  Glossaire  du  P.  Martène;  on  trouve  aussi  en 

ce  seus  :  «  Yindrenl  en  avalant  le  mont.  »  (Chron. 

de  S'  Denys,  T.  II,  fol.  175.) 

En  ung  val  ou  j'avallay. 

Poés.  d'Al.'  Chartier,  p.  60i. 

Pour  abaisser  :  »  Les  autres  se  haussent,  et 
«  avalenl,  selon  le  haussement  et  abaissement  de 
«  la  monnoie.  »  (Ord.  des  R.  de  Fr.T.  III,  page 43.) 
«  Destacha  ses  chausses....  et  les  avalla  sur  les 
«  genoux.  .1  (Petit  Jehan  de  Saintré,  page  631.) 

En  parlant  d'un  pont  levis,  on  a  dit  : 

Le  portier  seul  ne  pouvoit  pas 
Aisiément  le  pont  avaller. 

Vijil.  de  Charles  VII,  page  8. 

Avaler  pique  signifioit  donc  baisser  la  pique,  la 
présenter  pour  en  frapper.  Cette  expression  se 
trouve  dans  la  Coût,  de  Hainaut.  (Nouv.  Coût.  Gén. 
T.  II,  page  GO.) 

Ce  mot  a  été  employé  pour  abattre,  dans  les  pas- 
sages suivans  :  «  Vouloit  luy  avaller  la  teste.  » 
(Rabelais,  T.  II,  p.  '242.)  «  Ez  aullres  demolloit  les 
«  reins,  avalloit  le  nez,  poschoit  les  yeulx.  »  (Id. 
T.  I,  p.  193.)  «  Avalloit  en  taille  ronde,  »  terme 
usité  dans  l'ancien  combat  de  la  hache  d'armes. 
(Ibid.  p.  103.)  On  disoit  dans  ce  même  sens,  avaler 
pour  abattre.  «  Un  homme  de  cheval  l'alla  saisir  au 
«  corps,  et  Vavalla.  »  (Essais  de  Montaigne,  T.  III, 
page  234.) 

Dans  le  sens  de  casser,  annuler,  on  lit  :  «  Avaller 
"  le  second  mariage.  "(Lettresde  Louis  XII,  T.  I,  p.  69.) 

Enfin  avaller  signifie  déposer,  serrer  au  fond 
d'un  chartrier,  dans  le  passage  suivant  :  »  Seront 
«  toutes  personnes  de  loy,  sortissantes  au  dit  chef- 
«  lieu  de  Mons,  tenues  de  mettre,  el  avaller  en  leur 
«  forme  les  chirographes,  et  escrits  des  besongne- 
«  mens  faicts,  et  cogneuz  par  devant  eux.  »  (Coût, 
de  Mons,  au  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  I,  p.  829.) 

VARIANTES  : 
AV.\LER.  Glossaire  du  P.  Martene. 
Avaller.  Glossaire  des  Arrêts  d'Amour. 

Avalir,  verbe.  Disparoître.  Avalirea  Languedoc, 
signifioit  se  perdre  et  disparoitre.  (Le  Duchat,  notes 
sur  Rabelais,  T.  V,  prol.  page  V,  note  3.) 


Avalisque  satanas.  C'est  le  vade  rétro  Sala- 
rias de  Scarron,  dans  sa  comédie  de  l'Héritier 
ridicule.  (Voy.  le  Dict.  de  Cotgrave.)  Cavalische  est 
une  interjection  fréquente  dans  le  patois  de 
Languedoc. 

Avallées,  subst.  féin.  plur.  Descente  de  la 
gamme  en  chantant.  (Gloss.  latin  de  Du  Gange,  au 
mot  Avalare.)  11  est  employé  pour  signifier  des 
sons  bas,  et  opposés  à  destraignans,  sons  poussés 
avec  force,  sons  éclatans.  (Ovide  de  Arte,  ms.  de 
S'Germ.  fol.  97,  R- col.  1.) 

Avallement,  subst.  musc.  Action  de  descen- 
dre. —  Action  d'abaisser.  —  Action  d'avaler, 
d'engloutir. 

Ce  mot,  dans  S' Bernard,  répond  au  latin  descen- 
sus. 

VARIANTES    : 
AVALLEMENT.  Dictionnaire  d'Oudin. 
AvALEMENT.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  page  92. 
Av.\LLEMANT.  Dictionnaire  de  Monet. 

Avaller,  verbe.  Engloutir.  Ce  mot  subsiste  en 
ce  sens;  on  disoit  autrefois  : 

1°  Avaller  sans  mascher  pour  en  passer  par  là, 
sans  rien  dire.  Dans  la  Farce  de  Pathelin,  où  le 
marchand  fait  une  confusion  perpétuelle  de  ses 
brebis  et  de  son  drap,  le  juge  lui  dit  : 

Laissez  en  paix  cest  accessoire, 
Et  venons  au  principal. 

Le  drapier  répond  : 

Monseigneur,  mais  le  cas  me  touche; 

Toutes  fois,  par  ma  foy,  ma  bouche 

Meshuy  un  seul  mot  n'en  dira  ; 

Une  autrefois  il  en  yra, 

Ainsi  qu'il  en  pourra  aller  : 

Il  le  me  convient  avaller  sans  mascher. 

Pathelin,  Farce,  p.  87. 

2°  Avalle:^,  ce  sont  herbes.  Façon  de  parler  pro- 
verbiale en  usage  en  Languedoc  et  en  Dauphiné, 
dont  on  se  sert  avec  les  malades  qui  répugnent  à 
boire  une  potion  trouble.  (Le  Duchat  sur  Rabelais, 
T.  I,  p.  30,  note  45.) 

Avalleur,  subst.  masc.  Qui  avale.  Remarquons 
ces  expressions  proverbiales  : 

1°  Avalleur  de  frimats,  fainéant.  (Dict.  d'Oudin, 
de  Cotgrave,  et  Oudin,  Cur.  franc.) 

2°  Avalleur  de  pois  gris ,  c'est-à-dire  gourmand, 
glouton  (1).  (Dict.  de  Cotgrave,  Oudin,  Dict.  et  Cur.  fr.) 

Avalloiiere,  subst.  fém.  Avaloire,  gosier. 
(Dict.  de  Cotgrave,  au  mot  Avallouere.)  On  lit 
avalouere  dans  les  Ord.  des  R.  de  Fr.  (T.  II,  p.  371.) 

VARIANTES    : 
AVALLOUERE.  Cotgrave. 
Avalouere.  Ord.  T.  II,  p.  371. 

Avaloire,  subst.  fém.  Sorte  de  harnais.  C'est  là 
partie  du  harnais  qui  sert  au  cheval  de  timon  pour 
retenir  la  charge.  Ce  mot  subsiste  en  Normandie,  en 
parlant  des  chevaux  de  charrette.  On  le  trouve,  en 


(1)  On  dit  encore  avaleur  de  charrettes  ferrées,  potir  rodomont,  fanfaron,  (n.  e.) 


AV 


331  — 


AV 


ce  sens,  dans  les  Fabl.  mss.  du  R.  (n»  7615,  T.  II, 
fol.  212,  R°  col.  1.) 

Avaloirs,  subst.  masc.  Engins  à  pêcher.  Sur  la 
rivière  de  Loire,  ce  sont  les  nasses  où  l'on  prend 
les  poissons.  (Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  moi  Avalerio. 

—  Voy.  Av.\LÉE  et  AvALisoN  sous  AvALANGK  ci-dessus.) 

Avalois,  subst.  masc.  Nom  de  peuple.  Peut-être 
les  peuples  des  Pays-Bas  qui,  autrefois,  ont  été 
nommés  terre  d'aval,  ou  aval  terre  :  «  Le  Roy 
«  d'Angleterre  étoil  si  riche  homme  qu'il  avoit  tous 
«  les  Àvalois,  et  les  bouchiers  avec  luy  par  son 
ec  grant  avoir,  et  par  cecy  endommageoit  moult  le 
«  Royaume  de  France.  »  (Chron.  de  Flandre  citée 
par  Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mot  Avalterrœ.) 

Normant,  Breton,  vindrent  voirement, 
Et  Avalais,  Flamenc,  et  Lohéranc. 

Rom.  de  Garin,  cité  par  Du  Gange,  Glossaire  latin. 

On  trouve  dans  le  même  Glossaire  beaucoup 
d'autres  citations  (1).  (Voyez  au  mot  Theotisci,  ibid. 

—  Voyez  aussi  le  mot  Aval.) 

Avaloison,  subst.  fém.  L'action  de  frapper  de 
haut  en  bas.  De  là,  on  disoit  frapper  à  gi'wnz  ava- 
loisons.  (G.  Guiart,  ms.  fol.  348,  V°.) 

Avalon,  subst.  masc.  Fruit.  —  Nom  propre  de 
ville. 

Dans  le  premier  sens,  c'est  un  ancien  mot  gaulois 
et  breton,  selon  Valois  (2).  (Notice  des  Gaules,  p.  1.) 

Avalon  est  aussi  le  nom  d'une  ville  en  Rourgogne  ; 
«  Ces  allusions  que  l'on  a  fait  par  forme  de  pro- 
«  verbe,  il  y  a  plus  de  six  vingts  ans,  sur  les  villes 
«  de  Bourgogne,  qu'aucuns  trouvent  assez  corres- 
«  pondantes  aux  mœurs  ;  Avalon,  avale,  grand 
«  gosier  d'at>rt/o/i.  »  (Des  Accords,  Bigarr.  p.  91.) 

Avalterre,  subst,  férii.  Les  Pays-Bas.  (Voyez 
Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mot  Avalterrœ.  — 
Voyez  Aval  et  Avalois  (3).) 

Avaluation,  subst.  fém.  Evaluation.  (Voyez  le 
Dict.  de  Gotgrave.) 

variantes    ! 
AVALUATION.  Gotgrave,  Dict. 
Advaluation.  Ibid. 

Avalueinent,  subst.  masc.  Evaluation.  — 
Diminution. 

Ce  mot  est  employé  avec  la  signification  d'éva- 
luation, dans  le  Glossaire  de  l'Histoire  de  Paris,  au 
mot  Avaluement  dans  les  Ord.  des  Rois  de  France, 
T.  I,  p.  018,  etc.,  et  le  Coût.  gén.  T.  II,  p.  408.  En 
ce  sens,  avaluement  vient  de  valeur,  prix. 

On  a  dit  aussi  avaluement  pour  signifier  dimi- 
nution, et  l'on  a  mis  ce  mot  en  opposition  avec 
«  crue,  ou  avaluement  de  deux  solz  pour  sextier, 
«  le  pain  ne  croistra,  ne  appetissera.  »  (Ord.  des 
Rois  de  France,  T.  V,  p.  555.)  En  ce  sens,  avalue- 
ment vient  d'avaler,  baisser. 


variantes  : 
AVALUEMENT.  Ord.  T.  I,  p.  4i7. 
Advaluement.  Glossaire  de  l'Histoire  de  Paris. 

Avaluer,  verbe.  Evaluer,  apprécier.  Diminuer. 

Dans  le  premier  sens  d'évaluer,  ce  verbe  est 
formé  du  mot  valeur,  prix.  Voyez  sur  cette  acception 
les  Dictionnaires  de  Nicot,  Monet,  Gotgrave. 

Quand  ce  mot  vient  d'avaler,  il  signifie  baisser, 
diminuer  ;  il  est  mis  en  opposition  avec  monter, 
augmenter,  dans  ce  passage  :  «  Faire  pain  de 
«  certain  pris,  selon  ce  que  le  pris  du  blé  avalueroit 
«  ou  monteroit  en  plain  marcbié.  »  (Ord.  des  Rois 
de  France,  T.  V,  p.  553.  —  Voyez  Avaluement.) 

VARIANTES  : 
AVALUER.  Monet,  Nicot,  Dict. 
Advaluer.  Gotgrave,  Dict. 
AvALLUER.  Oudin,  Dict. 

Avalué,  participe.  Evalué ,  apprécié.  —  Rendu 
valable,  confirmé. 

Dans  le  sens  d'évalué,  on  a  dit:  «  Ez lieux  où 
«  l'en  ne  met  pas  le  vin  en  tonneau  ,  il  sera  avalué 
«  selon  le  tonneau.  «  (Ord.  des  Rois  de  France, 
T.  I,  note,  p.  783.)  «  Pour  ceo  le  fait  sera  entendu, 
«  et  pris  pour  le  pluis  ndvantage,  et  availé  pour  ce 
»  puis  estre  pris.  »  (Ten.  de  Littleton,  fol.  123.) 

On  a  employé  aussi  avalué  pour  rendu  valable, 
confirmé:  «  Les  Rois  dessus  dits  seront  tenus  de 
'<  faire  confirmer  toutes  les  choses  dessus  dites, 
«  par  nostre  Sainct  Père  le  Paspe,  et  seront  icelles 
«  avaluées  par  serment,  sentences  et  censures  de 
«  court  de  Rome,  et  par  tous  autres  lieus,  en  la 
«  plus  forte  manière  que  faire  se  pourra.  »  (Frois- 
sart,  livre  I,  page  341.) 

VARIANTES  : 
AVALUÉ.  Ord.  T.  I,  p.  783. 
AvAiLÉ.  Tenures  de  Littleton,  fol.  123,  V». 

Avance,  subst.  fém.  Préférence,  supériorité, 
avantage.  —  Reste. 

On  disoit  dans  le  premier  sens:  «  Qui  vous  ayent 
«  fait  bailler  l'avance,  »  c'est-à-dire  qui  aient  fait 
donner  la  préférence  sur  vous. 

Or,  je  VOUS  demande,  beau  Sire, 
Si  la  Dame,  ou  estiez  submis, 
Vous  a  brassé  si  dur  martire, 
Que  secours  n'y  puisse  estre  mis, 
Y  avoit-il  nul  compromis 
Entre  vous  deux,  et  alliance  ? 
Ou  s'ele  avoit  nulz  autres  amys, 
Qui  vous  ayent  fait  bailler  l'avance. 

L'Amant  rendu  Cordelier,  p.  515  et  516. 

Avance  signifioit  aussi  le  reste  : 

Et  sitost  que  le  forchn  faut 
A  la  cuirée  sans  delîaut 
Retournent  pour  mangier  Vatmnce. 

Fontaine  Guérin,  Trésor  do  Vénerie,  MS.  fol.  53. 

Avancement,  subst.  masc.  Supériorité,  avan- 
tage. —  Aide,  assistance.  —  Ce  qui  est  donné  en 
avance. 


(i)  Elles  sont  même  plus  probantes;  on  lit  au  Miserere  du  Reclus  de  Moliens  :  «  Ainsi  font  tout  Estrelinois  ;  Et  li  Escot  et 
h  Danois,  Thyoïs,  Braibant  et  Aimlois  Tiennent  des  Estrelins  les  lois.  »  (N.  E.)  -  (2)  Avalou  signifie  en  effet,  en  bas-breton, 
des  pommes  ;  mais  i\  n'y  a  pas  de  rapprochement  à  faire.  Avnllon  est  en  latin  Aballo.  (N.  E.)  -  (3)  On  trouve  aussi,  dans  les 
Chroniques  de  Saint-Denis  (Dom  Bouquet,  t.  VII,  p.  136),  la  forme  avauterre.  (n.  e.) 


AV 


—  332  — 


AV 


Dans  le  sens  d'avantage,  on  a  dit:  «  Un  chevalier 
«  avoit  un  compagnon  qui  avoitrtiiflnfCJ?if«<  devant 
«  luy,  estant  estimé  et  honoré  du  Roy,  et  des  sei- 
«  gneui  s  dont  il  prit  envie,  et  haine  contre  ce  com- 
"  pagnon,  et  le  tua.  »  (Olivier  de  la  Marche,  Gage 
de  Bataille,  fol.  8.) 

On  a  employé  ce  mol  dans  le  sens  d'aide,  assis- 
lance  :  «  Quand  un  serviteur  despril  sa  maîtresse, 
••  ou  dit  mal  de  ceux  dont  il  doil  n\oiv  avaiicement, 
«  il  doit  estre  réputé  infâme.  «  (Arrest.  Amor.  p.  389.) 

Nous  disons  encore  avancement  d'hoirie  pour  ce 
qui  est  donné  en  avance  d'une  succession.  On  disoit 
aussi  avancement,  de  mariage  :  «<  Puisque  dict  ay 
«  des  douaires  appartenans  aux  dames,  ou  damoi- 
«  selles,  pour  cause  des  fiefs,  et  nobles  Tenemens, 
«  il  s'ensuit  dire ,  et  montrer  des  assennes  ou 
«  avance7nens  des  mariages  sur  terres  non  nobles, 
>•  et  tenure de  main  ferme.  >>(Bout.  Som.rur.  p.5G3.) 

VARIANTES  : 
AVANCEMENT.  Bouteiller,  Somme  rurale,  p.  5râ. 
Advancement.  Bouteiller,  Somme  rurale,  p.  556. 

Avancer,  verbe.  Devancer,  prévenir.  —  Mettre 
en  avant,  avancer.  —  Faire  avancer.  —  S'ingérei', 
s'aviser.  —  Se  charger.  —  Se  hâter.  —  Surpasser. 
—  Aider,  assister,  avantager.  —  Augmenter.  — 
Préférer. 

Dans  le  sens  de  devancer,  de  prévenir,  on  a  dit  : 
«  Se  mort  ne  m'avance,  ou  as  folure  de  membres.  » 
(Perccf.  Vol.  I,  fol.  127.)  On  lit  dans  un  autre  pas- 
sage du  même  auteur  :  «  Se  mort  ne  m'adevance.  » 
(Vol.  I,  fol.  P20.)  «  Pour  advancer  ceux  qui  s'en- 
«  fuyoienl,  montèrent  à  cheval.  »  (Monslrelet, 
Vol.  m,  fol.  57,  Y".) 

Pour  mettre  en  avant,  on  a  dit  : 

En  désespérance 

Ne  doit  estra  qui  loiautez  avance. 

Poël.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1460. 

Ce  mot  a  signifié  faire  avancer,  faire  marcher  : 
«  Ne  faites  point  la  beste,  si  vous  estes  sage,  que  je 
"  ne  vous  avance  bien  de  ce  baston.  »  (Gymbalum 
mundi,  p.  l'i'i.) 

Dans  le  sens  de  s'ingérer,  de  s'aviser,  on  a  dit  : 
«  S'avança  de  luy  dire,  avant  ce  que  l'escuyer  en 
«  parlast.  «  (Ger.  de  Nevers,  ii'  partie,  page  52.) 
L'éditeur  l'explique  par  s'avisa  de  Imj  dire,  etc. 

Ce  mot  a  été  employé  pour  se  charger,  dans  le 
passage  suivant;  «  AvanceX'  vous  de  moy  faire 
«  avoir  une  nef,  car,  à  toutes  fins,  je  veulx  aller 
«  celle  part.  ..  (Percef.  Vol.  IV,  fol.  15,  R"  col.  1.) 

On  a  dit  dans  le  sens  de  se  hâter:  «  ,I'ai  laissé 
■<  mon  cul  à  la  maison  et  me  suis  tant  advancée, 
«  que  je  suis  ici  venue  sans  mon  cul.  »  (Bouchet, 
Sérées,  Liv.  111,  p.  65.) 

On  a  employé  ce  mot  dans  le  sens  de  surpasser. 
Les  Italiens  disent  Avan::,are  dans  le  même  sens  : 

A  la  dame  qui  toz  les  biens  avance. 

Poet.  MSS.  «vani  1300,  T.  I,  p.  142. 

On  trouve  ce  mot  employé  pour  aider,  assister, 
donner  quelque  avanlage,  dans  les  vers  suivants  : 

Me  sot  Simon  cuer  embler 
Ke,  se  pitiés  ne  m'avance, 


Siens,  sans  prendre,  et  sans  quiter, 
Me  rent,  et  sans  délivrer. 

Poét.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  998. 

Ce  mol  signifie  donner  quelque  avantage,  dans 
ce  passage  :  «  Deux  conjoincts  par  mariage  ne 
«  peuvent,  directement,  ne  indirectement,  advan- 
«  cliier  l'un  l'autre.  »  (Goût.  gén.  T.  1,  p.  768.) 
C'est  notre  mol  avantager. 

Avance  signifie  augmenter,  dans  ce  vers  : 

Ma  douleur  croit,  et  avance. 

Les  Marij.  de  la  Marj.  fol.  220,  Rv 

Enfin  ce  mol  signifioit  préférer,  donner  l'avan- 
tage :  «  De  tant  qu'il  y  auroil  vers  elle  plusieurs 
«  requerans,  et  serviteurs,  qu'elle  Vavanceroit  et 
«  aynieroit  encores  mieulx  par  dessus  tous  les 
«  autres,  de  tant  auroit-il  plus  de  bien.  »  (^Arresta 
Amorum,  p.  115.) 

Remarquons  que  le  mot  avanger  dans  le  sens 
d'avancer  est  particulier,  suivant  Le  Duchat,  à  la 
Basse-Normandie,  à  l'Anjou  et  au  Maine. 

PROVERBES    : 

On  disoit  proverbialement  :  mal  œuvre  qui  ne 
s'advance.  (Percef.  Vol.  I,  fol.  34.) 

Tel  Guide  avancier  qui  reculs. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7-218,  fol.  E29,  V  col.  1. 

CONJUG. 

Avanci,  passé  défini.  Prévint,  devan^'a. 

Li  dus  en  ot,  ire,  et  annui  ; 
Son  frère  de  guerre  avanci. 

Ph.  Mrmskes,  MS.  p.  411. 

Avancissent,  subj.  prés.  Prévinssent.  (Règle  de 
S'  Benoit,  lat.  fr.  ms.  de  Beauvais,  ch.  37.) 
Avant,  ind.  prés.  Avance. 

Diex  vous  avant. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n'  7218,  fol.  67,  V  col.  S. 

VARIANTES  : 
AVANCER.  Orthographe  subsist. 
Adev.\ncer.  Perceforest,  Vol.  I,  fol.  12G,  R"  col.  1. 
Advancer.  Ibid.  Vol.  IV,  fol.  47,  V»  col.  2. 
Advanchier.  Coul.  gén.  T.  I,  p.  7GS. 
AvANCHiER.  Ord.  T.  I,  p.  437,  note,  col.  1. 
Avancier.  Beaumanoir,  p.  9. 
AvANGER.  Rabelais,  T.  II,  p.  159. 
AvENGiER.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  200. 
Avencier.  Fontaine  Guérin,  Trésor  de  Vénerie,  p.  49. 

Avaiiceur,  subst.  masc.  Qui  donne  d'avance.  — 
Qui  donne  des  avantages.  —  Qui  avance.  —  Aggres- 
seur,  spadassin.  —  Coureur,  découvreur,  espion. 

Au  premier  sens,  on  a  employé  le  mol  avanceur, 
dans  les  vers  suivants  : 

Si  faictes  sçavoir  à  tous  les  successeurs, 
Que  plus  ne  soient  de  l'armes  avanceurs... 
Car  sa  vertu,  et  grâce  paladine 
Rendront  ses  sens  de  vie  possesseurs 
Si  j'ay  crédit. 

Grelin,  p.  66. 

Ce  mol  est  employé  pour  qui  donne  des  avan- 
tages, dans  le  passage  suivant  : 

Par  eux  ont  eu  l'avancement 

Qui  de  bonté  les  avanceuva  renomme. 

Poés.  MSS.  d'Eusl.  Desch.  fol.  153,  col.  1. 

Oii  a  dit  aussi  Avenceur  pom-  qui  avance,  qui  met 
en  avant  sans  preuve,  menteur  : 

Diffamateurs,  avenceurs,  ventereaux. 

Œuv.  de  R.  de  Collerye,  p.  142. 


AV 


333 


AV 


Advanceur  se  disoit  aussi  pour  aggresseur,  spa- 
dassin, comme  en  ces  vers,  où  l'on  fait  parler  la 
France  : 

Venise  aussi  m'a  mis  ses  advanceurs. 
Qui  de  leurs  riz  d'hostelier  m'ont  traitée  ; 
Mais,  vu  leurs  dicts,  et  manière  escontée, 
Si  quelqu'un  veult  contre  moy  son  arc  tendre, 
Tantost  seray  en  armes  apprestée. 

J.  d'Auton,  Annal,  de  Louis  XII,  page  3-9. 

Enfin  on  nommoit  avanceurs  ceux  qui  étoieiit  en 
avant,  les  coureurs,  découvreurs  ou  espions.  <<  Si 
«  avint,  par  bonne  aventure,  que  les  avanceurs 

«  du  dit  bastard  rencontrèrent  les  Gandois; le 

<■  rapport  fait,  le  bastard  de  Bourgongne  donna 
«  dedans  sans  les  marchander,  et  moult  en  occit  et 
«  prit,  y  (,Mém.  d'Olivier  de  la  Marche.) 

VARIANTES    ." 
AVANCEUR.  Crétin,  page  66. 

Advanckur.  j.  d'Auton,  Ann.  de  Louis  XII,  page  329. 
AvENCEUR.  Roger  de  Collerye,  page  142. 

Avanchaye,  siibst.  masc.  Lieu  planté  d'osiers. 
(Dictionnaire  dOudin  et  de  Cotgi'ave.) 

Avancier,  verbe  actif.  Favoriser,  distinguer, 
faire  prospérer,  combler  d'honneurs:  «  Il  fu  retenus 
«  dou  plus  secret  conseil  le  roi  et  moult  avancés 
«  en  sa  court.  »  (l'roissart,  1.1.  II,  308.) 

Faire  avancer,  au  propre:  «  Monseigneur,  se  il 
«  vous  plaist,  n'avanchés  ce  varlet.  »  (Froissart, 
VII,  30.-).) 

Au  sens  actuel,  on  le  trouve  dès  le  xir  siècle: 
«  Monjoie  escrient,  chascuns  forment  s'avance.  » 

Au  rétléchi,  il  signilie  se  mettre  en  avant  (Frois., 
II,  45),  se  montrer'favorable  (II,  40-2),  s'entremettre 
(V,  104);  s'offrir,  s'empresser  (VI,  203);  se  hûter 
(XI,  296);  prospérer  (II,  293);  se  faire  fort  (XV,  352). 

Ce  mot  a  aussi  le  sens  de  prématuré  (XVI,  1%)  ou 
distingué  (XVI,  211). 

Avanczon,  siibst.  masc.  Avance,  éminence. 
Partie  avancée ,  comme  le  bout  de  la  brayette  : 
«  Avoir  ez  bragues  brayer  de  toile,  o  avancx-on 
«  garni  de  boucles  et  ardillons.  »  (Glossaire  de 
l'histoire  de  Bretagne.) 

Avani,  participe.  Diffamé,  avili.  «  Son  droict 
«  n'est  amoindry  ne  son  honneur  avanie.  »  (Ord. 
de  Ph.  le  Bel  sur  les  Duels,  rapportée  par  Basiiage 
sur  les  duels,  page  171.) 

Avanies  (\),  siibst.  fém.  plur.  Extorsions.  «  Ne 
•<  seront  payées  nulles  extorsions,  fouages,  et  Bre- 
«  vêts,  ne  autres «oaHifîs  quelconques.  «(Glossaire 
sur  l'histoire  de  Bretagne.)  Ce  mot  paroit  signifier 
plutôt  dommages  ou  avaries. 

Avant,  adj.  Entreprenant.  Ce  mot,  qui  paroit 
venir  du  verbe  avancer,  se  trouve  dans  le  sens  que 
nous  lui  donnons,  en  ce  passage  : 

Li  premiers  est  uns  chevaliers 
Preuz,  et  hardiz,  et  bien  ava>if. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n'  7615,  T.  II,  fol.  133,  V  col.  1.  | 


Avant,  adverbe.  Ci-après.  —  Plus.  —  Devant  et 
ci-dt   ant.  —  Plutôt.  —  Avec.  —  Ça,  vite. 
Da..s  le  sens  de  ci-après.  (Voy.  Borel,  Dict.) 
Ce  mot  est  employé  pour  plus,  davantage,  dans 
les  vers  suivans  : 

Sans  mettre  y  vostre  estudie. 

Vous  eus  avés  là,  et  avant. 

Poès.  MSS.  de  Froissart,  p.  139,  col.  1. 

Ce  mot  a  aussi  signifié  cij-devant,  par  le  passé  ; 
avant  dit  pour  d'ici  devant  : 

M'en  proiates  vos  avant. 

Pots.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1359. 

On  trouve  ce  mot  employé  pour  plutôt,  préféra- 
blement,  dans  le  passage  suivant  :  «  Ce  marché  ne 
«  feroye-je  jamais,  je  la  mariroye  avant  en  Angle- 
«  terre.  »  (Froissart,  livre  III,  p.  325.) 

Avant  est  employé  pour  avec,  dans  le  passage 
suivant  :  «  Il  prit  trois  prisonniers  de  ses  Capitai- 
•<  nés,  scavoir  des  principaux,  lesquels  il  emmena 
«  avant  luy  en  son  pays.  »  (Mathieu  de  Coucy, 
Ilist.  de  Charles  VII,  p.  690.)  On  lit  à  la  marge  avec. 

Cette  façon  de  parler  est  en  usage  parmi  le  peuple 
en  Normandie,  mais  le  mot  avant  n'y  signifie  pas 
proprement  avec.  On  dit:  «  Faites  cela  «vah^  vous,  » 
comme  si  l'on  disoit:  faites  marcher  cet  ouvrage, 
cette  besogne  devant  vous. 

Enfin  ara/(isigninoitçavite.  «  Un  chanoine  ayant 
«  caché  les  clefs  de  la  Ville,  et  ayant  été  rencontré 
«  par  ceux  qui  le  cherchoient,  ils  luy  disent  : 
«  avant  prestrc  rendez  les  clefs.  «  (Ilist.  de  Loys 
III,  duc  de  Bourb.  pages  1 16  et  147.) 

On  disoit  aussi  : 

1°  Le  plus  avant,  pour  le  plus  vivement.  «  L'as- 
«  siégea  le  plus  avant  qu'il  puet.  »  (Froissart, 
livre  I,  page  112.) 

2°  En  avant,  c'est-à-dire  davantage,  plus. 

Or  voi  je  bien  qu'en  avant  ne  vivrai. 

Poët.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  U70. 

3°  Ne  pouvoir  en  avant,  c'est-à-dire  ne  le  pouvoir 
plus,  ne  le  pouvoir  d'avantage  : 

Uui  ne  s'aquitera,  moult  sera  mescheant, 
Fox  est  qui  tant  enprunte,  fjui  ne  puet  en  avant, 
Chante  pleure. 

MS.  de  s.  Germ.  fol.  103,  Y*  col.  3. 

i"  Avant  que,  c'est-à-dire:  avant,  avant  queli; 
avant  lui.  (Vie  d'Isabelle,  à  la  suile  de  Joinville, 
p.  Ml.) Avant  çH^sa femme,  pour:  avantsa  femme. 
(Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  I,  p.  122.)  Avant  que  moy, 
c'est-à-dire:  avant  moi.  (J.  Marot,  p.  215.)  J.  de 
Meung  avoit  dit  en  faisant  le  portrait  d'une  jeune 
et  jolie  personne: 

Les  yeulx 

Qui  ryoient  toujours  avant 

Que  la  bouche,  le  plus  souvent. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  8601-8603. 

5"  Tôt  OU  tout  avant,  c'est-à-dire  :  d'abord, 
avant  tout,  préférablement. 

Car  raoi,  non  li  lot  avant. 

Se  cueur  avoie  envers  li  de  fausser. 

Poèt.  MSS.  aiant  1300,  T.  I,  p.  180. 


(1)  De  l'arabe  kotiàn,  mépris,  en  grec  moderne  dSavîa.  (n.  e.) 


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Et  se  j'en  suis  pafjurs  a  esciant, 
L'en  me  devroit  trahiner  lot  avant, 
Et  puis  pendre  plus  haut  qu'autre  clochier. 
Poiis.  MSS.  avaut  1300,  T.  I,  p.  206. 

Aussi  avant,  pour:  autant.  (Duchesne  Gén.  de 
Gaines,  p.  291  ;  lit.  de  12(50.) 

Aussi  avant,  pour:  autant  que.  (Duchesne,  Gén. 
de  Bétiiune,  p.  383  ;  tit.  de  1259.) 

6°  7oH^rt!<ss/ava/i/,  c'est-à-dire  avec  autantd'éten- 
due.  <>  Li  dit  Maires  et  Eskevin  ont  et  doivent  avoir 
«  par  dedens  clies  bournes,  semonces,  ajourne- 
<■  mens,  bourneries,  la  connoissance,  le  jufijement, 
«  l'exécution,  et  le  pourfit  de  toutes  manières  de 
<i  prinses  faites  dedens  ches  bournes,  desmelées 
«  tout  aussi  avant  comme  ils  ont,  et  usent,  ou 
«  pueent  avoir  en  touz  les  biens  de  leur  banllieue.  » 
(Ord.  des  Rois  de  France,  T.  III,  p.  294.) 

7°  Aussi  et  plus  avant,  c'est-à-dire:  autant  et 
plus.  Les  Flamans,  voulant  engager  leur  Comte  à 
épouser  la  fille  du  Roy  d'Angleterre,  disoient 
qu'ils:  «  ly  rendroient  et  livreroyent  toutes  ses 
«  justices,  et  juridictions,  et  les  droitures  de  Flan- 
0  dres,  aussi  et  plus  avant  que  nul  Comte  ne  les 
«  avoit  oncques  eues.  «  (Froissart,  Liv.  I,  p.  102.) 

8°  Aussi  avant,  c'est-à-dire:  autant.  «  L'enfant 
«  bastard  succède  es  biens  délaissez  par  sa  mère, 
«  aussi  avant  que  s'il  esloit  légitime.  »  (Coût,  de 
Lessines  au  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  2G.) 

9°  Si  avant,  c'est-à-dire:  tant.  «  A  donc  luy 
«  racompta  le  sire  de  Beaumont  toutes  les  nouvelles 
«  si  avant  qu'il  les  sceut.  «  (Froissart,  Liv.  I, 
p.  23.) 

10"  Si  avant  que,  c'est-à-dire:  d'autant  que  et 
tant  que.  Parlant  des  registres  que  les  greffiers 
doivent  tenir.  «  A  sçavoir  celuy  des  causes  qui  se- 
«  ront  présentées,  et  expédiées  au  Rolle,  lequel 
«  renouvellera  tous  les  ans,  à  commencer  au  pre- 
«  miers  plaids,  et  Rolles  qui  se  tiendront  après  les 
«  grandes  vacances  de  chacune  année,  et  si  avant 
«  que,  pour  le  grand  nombre  de  causes,  un  seul 
«  registre  ne  suffiroit,  en  seront  faits  deux,  et 
«  renouveliez  de  deniy  à  d'autre.  »  (Coût,  de 
Hainault,  au  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  108.) 

Si  avant  que  pour  tant  que,  se  trouve  dans 
Percef.  (Vol.  II,  fol.  61.) 

Il"  Avant  et  arrière,  c'est-à-dire:  en  tout,  partout. 
Parlant  du  privilège  que  Chilpéric  donna  àl'Evéque 
de  Tournay,  Mous'kes  a  dit  : 

Et  de  luy  tient  on  la  majere 
I  C'on  prent,  et  avant  et  arriére 
Et  si  leur  donna  la  justice, 
Dont  la  Signorie  et  moult  rice. 

Ph.  Mouskes,  MSS.  p.  33. 

12°  Avant  n'arriére,  c'est-à-dire  :  nulle  part,  nul- 
lement, point  du  tout. 

Cherchié  n'avoit,  avant  7i'arrière. 

Pocs.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  565,  col.  2. 
L'autre  n'y  yint,  ne  avant  ne  arrière. 

Ibid.  fol.  138,  eol.l. 

13'  Une  heure  avant  et  l'autre  arrière,  c'est-à- 
dire  :  tantôt  d'un  côté  et  tantôt  de  l'autre.  «  Hector 
«  chevaucha  parmy  le  pays,  une  heure  avant  et 
«  l'autre  arrière,  et  tant  que  l'adventure  le  mena 


»  à  l'hermitage  oîi  Lancelot  estoit.  •  (Lanc.  du 
Lac.)  Cette  expression  se  trouve  souvent  répétée 
dans  le  Récit  des  Aventures  des  Chevaliers  errans. 

1-1"  Tout  avant  œuvre,  c'est-à-dire  :  avant  que  de 
rien  commencer.  «  Ne  puisse  commander  son 
«  mestier  sans  parler  tout  avant  œuvre,  audit 
"  maistres,  ou  son  lieutenant.  »  (Ord.  des  Rois  de 
France,  T.  I,  p.  761.)  «  Sur  laquelle  supplication 
«  nous  avons  voulu  estre  enformés  avant  toute 
•  euvre.  »  (Ibid.  T.  III,  p.  262.)  L'éditeur  l'explique 
par  avant  que  de  décider. 

15°  Avant  âgée,  c'est-à-dire:  plus  âgée  : 

L'une  n'estoit  de  l'autre  avant  aarjée. 

Crétin,  p.  85. 

16°  Venir  avant,  c'est-à-dire  :  avancer,  approcher. 

Puis  li  dist  que  venist  avant. 

FM.  MSS.  de  S'  Germ.  fol.  5,  V. 

Vienne  avant  et  mette  soij  avant,  c'est-à-dire: 
qu'il  avance.  Ces  expressions  étoient  usitées  pour 
défier  quelqu'un  au  combat.  (Ilist.  de  Loys  III,  Duc 
de  Bourbon,  p.  185.) 

17°  Alcr  avant  sur,  pour:  poursuivre.  «  Nous 
«  vous  mandons  que,  tant  que  pour  le  désir  que 
«  nous  avons,  que  les  forfaiz  de  nos  mauves  officiers 
«  soient  punis  et  adreciez,  avons  ordené  ceste  voie 
«  qui  s'ensuit,  laquelle  nous  vous  ajoustonscoment 
«  vous  doiez  aler  avant  sur  eux.  »  (Ord.  des  Rois 
de  France,  T.  I,  p.  541.)  Aller  avant  du  fait,  c'est- 
à-dire  aller  en  avant.  (Coût,  de  G.  de  Tyr  Martene, 
T.  V,  col.  727.) 

18°  Mètre  avant,  c'est-à-dire:  dépenser,  avancer. 

Por  un  poi  mètre  avant,  ne  se  doit  repentir 
Qar  poi  de  chose  fet  un  dépens  embelir. 

Fail.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  335,  R"  col.  2. 

19°  L'un  avant  l'autre,  comme  nous  disons  l'un 
après  l'autre. 

L'un  avant  l'autre  pars  lors  noms. 

Arch.  MS.  fol.  54,  V-  col.  2. 

Avant  [en),  pour:  à  l'avenir.  (Perard,  Hist.  de 
Bourgogne,  p.  483  ;  tit.  de  1255.) 

Avantage,  subst.  masc.  Gain,  profit,  pillage.  — 
Avance.  —  Distinction,  récompense,  gratification. 
—  Préférence,  acception  de  personnes.  —  Argent 
payé  pour  égaler  un  échange. — Avantage,  primauté. 

Au  premier  sens,  pour  gain,  profit  ou  pillage, 
on  a  écrit  :  «  Vindrent  AUemans  robeurs  et  pillards, 
«  qui  ne  tenoyent,  ne  faisoyent  ne  trêve,  ne  paix  ; 
«  mais  vouloyent  tousjours  aller  à  l'avantage.  » 
(Froissart,  Liv.  III,  p.  350.)  Avantaige  est  employé 
avec  la  même  signification  dans  Percef.  (Vol.  I, 
fol.  152.) 

Si  se  cuident  faire  avantaige 
Mais  ils  font  leur  cruel  dommaige. 

Roman  de  la  Rose,  vers  7997. 

Ce  mot  a  la  signification  d'avance,  dans  le  pas- 
sage suivant:  «  iCdit  au  Roy  que  s'il  n'étoit  question 
«  que  de  l'avantage  d'un  million  d'or,  pour  faire 
«  subsister  les  affaires  de  sa  Majesté,  que  Beau- 
«  marchais  les  trouveroit  sur  son  crédit,  et  sur 
«  celuy  de  ses  amis.  »  (Mém.  de  Bassomp.  T.  III» 
page  194.) 


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AV 


Ce  mot  est  employé  pour  grâce,  faveur,  distinc- 
lion,  récompense,  gratification,  dans  les  citations 
suivantes  : 

Dido  la  Royne  de  Cartage 

Qui  tant  luy  eut  fait  d'uvaiUage. 

Roman  de  la  Rose,  vers  13944-1391G. 

«  Des  récompenses  ordinaires  qui  se  donnent 
«  aux  soldats  Espagnols,  quand  ils  ont  commis 
"  quelque  acte  signalé,  ce  qui  s'appelle  entre  eux 
«  avantages.  »  (Discours  Politiques  et  Militaires  de 
la  Noue,  p.  3G0.) 

Ce  même  mot  est  aussi  employé  pour  une  autre 
sorte  de  récompense,  dans  ces  vers  : 

La  vint  li  uns  de  leurs  enfans, 
Qui  voloit  aler  à  l'escole, 
Et  demanda  à  Dame  Cole, 
Sa  mère  :  ça  mon  avantage. 

Pocs.  MSS.  de  Froissart,  p.  289,  col.  î. 

Ce  mot  est  pris  pour  préférence,  acception  de 
personnes,  dans  les  vers  suivans: 

Combati  soi,  puis  i  moru, 

Quar  la  mort  n'a  point  d'avantage. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  661. 

Ce  mot  a  signifié  ce  qu'on  donne  de  surplus  dans 
un  échange  ou  marché,  pour  rendre  égal  le  sort 
des  deux  parties.  »  De  permutation  et  d'eschange 
n  passé  justice,  sans  argent,  ou  aucun  avanlarje,  il 
«  n'eschet  poinct  de  rètraict,  et  donneroit  ou  de 
«  l'avantage,  ou  soulte,  il  y  auroit  lieu  au  rètraict, 
«  a  proportion  de  la  soulte.  »  (Nouv.  Coût.  gen. 
T.  I,  p.  1)71,  col.  2.) 

Enfin  nous  trouvons  dans  les  poésies  (Mss.d'Eust. 
Desch.  fol.  391,  col.  3),  le  mot  avantaige  pour 
signifier  :  primauté,  en  parlant  du  jeu. 

Citons  les  expressions  suivantes  : 

1°  D'avantage,  c'est-à-dire  d'avance,  tout  d'abord, 
de  prime  abord.  «  Les  Anglois  ne  pouvoyent  aller 
«  à  eux,  qu'ils  ne  fussent  tous  morts  ou  prins 
«  d'avantage.  «  (Froissart,  Liv.  I,  p.  21.) 

2°  A  l'avantage ,  c'est-à-dire  avantageusement, 
relativement  au  prix  de  la  chose,  ou  relativement  à 
la  chose,  ou  peut-être  à  l'envi.  «  Qui  est  celuy, 
«  considérant  l'amitié  de  ces  deux  personnages,  qui 
«  ne  s'en  treuve  fort  aise  et  ne  la  prise  à  l'avan- 
«  tage.  »  (L'Amant  ressuscité,  p.  173.) 

Doulx  yeux,  singlans,  et  desvoyez, 
Qui  gectent  ung  maintien  sauvage 
Dont  communément  vous  voyez 
Les  povres  varletz  de  village 
Porter  dessoubz  leurs  bras  la  targe 
Ou  ung  bouquet  à  la  saincture, 
Et  puis  saulter  à  l'avantage  : 
Hz  ont  bon  temps,  mais  qu'il  leur  dure. 

L'Amant  rendu  Cord.  p.  iSi. 

3*  Coiffure  à  l'avantage,  c'est-à-dire  coiffure  qui 
sied  bien.  (Voy.  Poës.  de  Jacques  Tahureau,  p.  209.) 

4°  Vivre  d'avantage,  c'est-à-dire  vivre  de  pillage. 
(Voyez  Monstrelet,  Vol.  II,  fol.  75,  R°) 

5°  Boire  et  manger  à  l'avantage  (1),  c'est-à-dire 
vivre  aux  dépens  d'autruy.  (Froissart,  Liv.  IV,  p.  168.) 


6»  Vivre  d'avantage  se  disoit  aussi  dans  le  même 
sens  : 

Qui  n'a  or,  ne  argent,  ne  gaige, 
Comment  peut  il  faire  grant  chère? 
Il  faut  qu'il  vive  d'avanlaigs 

Villon,  Rep.  ftanch.  p.  19. 

YARI.'INTES  : 
AVANTAGE.  Orth.  subsist. 
AvANTAGEMENT.  D.  Flor.  de  Grèce,  fol.  38,  R». 
Avantaige.  Vigile  de  Charl.  Vil,  ï.  II,  p.  9.-  Beaum.  p.  12. 
AVENTAIGE.  Villehardouin,  p.  10. 
AvENGE.  Le  Jouvencel,  MS.  p.  3G7. 

Avantagé,  participe.  Avancé,  distingué.  Ce  mot 
a  aussi  signifié  préféré,  favorisé,  entreprenant, 
hardi,  présomptueux  :  «  Estoit  soldat  très  signalé 
«  de  cette  compagnie,  et  fort  avantagé.  »  (Bran- 
tôme, Capitaines  français,  T.  IV,  p.  331.) 

Avantager  (s'),  verbe.  Prendre  de  l'avantage. 
—  Se  prévaloir,  s'ingérer. 

C'est  dans  le  premier  sens  qu'on  trouve  s'aven- 
taiger,  dans  les  Poésies  de  Crétin,  p.  lOG.  On  disoit 
aussi  avantager  son  corps,  pour  s'avancer,  faire 
fortune,  se  distinguer.  Froissart,  parlant  de  la 
guerre  contre  les  Turcs  proposée  aux  princes 
chrétiens  par  le  Roi  de  Hongrie,  dit:  «  Si  furent 
«  les  lettres  lantost,  et  les  nouvelles  de  Hongrie 
«  publiées,  certifiées  et  signifiées  en  plusieurs  lieux, 
«  et  esciiles  en  plusieurs  pais,  pour  émouvoir  les 
«  cœurs  des  Gentils  hommes  et  Escuyers  qui 
«  désiroyent  à  voyagea  et  avantager  leurs  corps.  » 
(Froissart,  Liv.  IV,  p.  218.) 

S'avantager  se  disoit  aussi  pour  se  prévaloir,  s'in- 
gérer, prendre  sur  soy  :  «  Nuls  tuteurs  ne  s'avanta- 
<<  gérant  de  faire  ou  se  faire  faire  aucun  rachat  ou 
«  eschange,  en  aucunes  maisons  mortuaires,  où 
"  leurs  pupilles  sont  héritiers.  »  (Coût,  de  Bergh. 
S'  Winox,  au  Nouv.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  522.)  «  Que 
«  personne  ne  s'avantage  de  coupper  les  fruits,  les 
«  bois ,  ou  quelque  chose  croissant  sur  terre.  » 
(Coût.  d'Ypre,  ibid.  T.  I,  p.  843.) 

VARIANTES  : 
AVANTAGER  (s').  Froissart,  Liv.  IV,  p.  218. 
AvENTAiGER.  Crctio,  p.  106. 

Avantaigeux,  adj.  Avantageux,  favorable. 

De  mot  à  mot  voit  les  Argus  et  dictz, 

Frians  caquets,  avantaigeux  Editz 

Que  dames  font,  chascune  en  son  endroict. 

Crétin,  poésies, 

Avant-arretz,  subst.  masc.  plur.  Arrêts  anté- 
rieurs. (Voyez  la  Coût,  de  Gorgue,  au  Nouv.  Coût, 
gén.  T.  II,  p.  1007,  col.  1  et  2.) 

Avant-avant.  Cri  souvent  employé  à  la  guerre, 
pour  animer  les  combatlans  ou  pour  provoquer 
l'ennemi.  (Voyez  Froissart,  Liv.  1,  p.  59.) 

Avant-bras,  subst.  masc.  Partie  de  l'armure. 
Celle  qui  couvroit  l'avant-bras  (2).  (Dict.  de  Nicot, 
Monel,  Cotgrave  et  d'Oudin,  et  Du  Cange,  Gloss.  lat. 
au  mot  Ante-brachia.)  «  Le  vicomte  blessa  l'An- 


(I)  A  l'avantage  avait  plutôt  le  sens  de  gratuitement,  sans  frais  ;  «  Chiés  soy  il  ne  despendoit  pas  tous  les  jours  deux  sols 
de  parisis,  mais  aloit  boire  et  mengier  à  l'avantage  où  il  povoit.  »  (Froissart,  édition  Kervyn,  XV,  78.)  (N.  E.)  —  (2)  la 
brassière  se  décomposait  en  épauliére,  bras,  coudière  et  avant-bras.  (N.  E.) 


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«  glois,  du  dernier  coup  de  lance,  entre  Vavant- 
«  bras  et  le  garde-bras.  •■  (Ilist.  de  Loys  111,  duc  de 
Bourb.  p.  ICI.  —  Voy.  PetitJeaudeSaintré,  p.  240.) 

VARIANTES  : 
AVANT-BRAS.  Petit  .Tean  de  Saintré,  p.  266. 
Advant-bhas.  D.  Flor.  de  Grèce,  fol.  23,  R». 
AvANT-HAS.  (Lisez  Avant-bras.)  H.  du  Chev.  Bayard.  p.  395. 
Vant-bras.  (Usez  Avant-bi-as.)  Du  Gange,  Gloss.  lat. 

Avant-chambre ,  subst.  fém.  Antichambre. 
(Dict.  de  Monet.)  «  Croy  qu'il  y  avoit  plus  de  raison 
«  de  dire  avant-chambre  que  ce  que  nous  disons 
«  antichambre.  »  (Pasquier,  Rech.Liv.  VllI,  p.  662.) 

Avant-chien,  subst.  niasc.  Nom  d'une  étoile. 
Celle  qui  paioit  pendant  la  canicule.  (Dict.  d'Oudin.) 

Avant-conseil ,  subst.  masc.  Conseil  pris 
d'avance  ou  consultation  préliminaire,  préalable  : 
«  En  toutes  les  causes  pour  dettes,  au  sujet  de  XXX 
«  francs  et  de  plus,  en  toutes  autres  causes  civiles 
«  ou  criminelles,  les  procureurs  seront  tenus  de 
«  prendre  leur  avant-conseil  avec  quelque  avocat 
«  oujurisconsulte,  soit  de  cette  villeouchaslellenie, 
«  ou  autres  de  dehors,  avant  que  d'entrer  en 
«  consultation.  »  (Nouv.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  G77.) 

Avant-courement,  subst.  masc.  L'action  de 
précéder.  (Dict.  de  Hob.  Estienne  et  de  Cotgrave.) 

Avant-coureux ,  subst.  masc.  Avant-coureur. 
(Dict.  de  Cotgrave.) 

Avant-coureuze,  adj.au  fém.  Qui  précède. 
(Lettres  de  Pasquier,  T.  I,  p.  739.) 

Avant-coiirir,  verbe.  S'avancer,  courir  en 
avant. 

Estradiotz,  qui  désiroient  la  prinse , 
Jusqu'aux  murs  viennent  avant-courir. 

i.  Marot,  p.  86. 
Lors  fut  crié  par  l'ost,  en  mainte  part, 
De  par  le  Roy,  sur  peine  de  la  hart, 
Que  nul,  pour  lors,  ne  allast  avant-courir. 
Ibid.  p.  99. 

Avantement,  subst.  masc.  Avance,  début.  On 
dit  de  l'amour: 

C'est  un  moult  grant  avantement  (2) 
A  jone  homme,  et  moult  proufitables  ; 
Il  s'en  troeve  courtois,  et  ables. 

Po5s.  MSS.  de  Froissarl,  p.  1«,  col.  i. 

Avant-fani,  adj.  Fané  avant  le  temps. 

Ton  nom  rendoyent  sans  fluers  avaiit-fani. 

Pocs.  de  J.  Tabureau,  p.  172 

Avant-fiés,  subst.  masc.  Avant-fief.  C'est  peut- 
être  ce  que  nous  nommons  arrière-fief.  «  Li  montrai 
«  les  tenanches  des  fiés,  et  des  avant-fiés  que  je 
«  tenoie  de  li.  «  (Citation  faite  par  Du  Cange,  dans 
le  Gloss.  latin,  au  mol  Estagicnm,  sous  Stagium) 
Peut-être  aussi  sont-ce  les  liefs  de  qui  relèvent  d'au- 
tres fiefs,  qu'ils  reportent  au  lief  suzerain. 

Avant-goutte ,  suhst.  fém.  Essai ,  épreuve. 
(Dict.  d'Oudin.) 


Avant-huïs,  subst.  masc.  Portière.  (Diction- 
naire d'Oudin.). 

Avantiei",  suhst.  masc.  Tablier.  On  dit  encore 
devantier  en  ce  sens,  en  Normandie  et  en  Bourg. 
On  trouve  Avantier  dans  les  Fabl.  mss.  du  R.  n* 
7218,  fol.  100,  V-col.  1. 

Avantier.  L'autre  jour.  Avant-hyer,  dans  les 
Serm.  fr.  mss.  de  S'  Bern.,  répond  au  latin  ante- 
positos  dies.  Nous  disons  avant-hier  pour  désigner  le 
jour  qui  précède  immédiatement  le  jour  d'hier  ;  on 
disoit  autrefois  avantier  pour  désigner  en  général, 
et  d'une  fa(;on  indéterminée,  un  temps  passé,  dans 
le  sens  ou  nous  disons  l'autre  jour. 

Tel  me  requist  avantier, 

N'd  pas  encore  un  mois  entier. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n- 1218.  fol.  350.  R-  col.  2. 

Avantin,  subst.  masc.  Greffe  de  vigne.  (Dict.  de 
Monet,  d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Avant-jen,  subst.  masc.  Prélude.  (Dict.  de  Nicot, 
de  Monet,  d'Oudin  et  de  Cotgr.,  au  mot  Avant-jeu.) 

Henry  sage,  vaillant,  attendant  que  je  face 
Un  ouvrage,  qui  soit  plus  digne  de  ta  grâce; 
De  ma  dévote  main,  veuilles  avoir  à  gré. 
Ce  petit  avaiiljeu  que  je  t'ay  consacré  : 
Avantjeu  qui  sera  d'un  bien  rare  exemplaire. 

Œuv.  de  Baif,  fol.  246,  V'. 

C'est  en  ce  même  sens  que  avant-jeu  est  mis 
comme  synonyme  t\  préface,  dans  Beauch.  (Rech. 
duTh.  P.  I,  p.  41ôet41(j.) 

variantes  : 
AVANT-JEU.  Nicot,  Monet,  Oudin,  etc. 
Advantjeu.  Bouchet  Sérées,  Livre  III,  p.  196. 

Avant-jeu  (pour),  adv.  Préalablement.  «  Il  ne 
«  sçait  pas  la  Rhétorique,  ny  pour  avant-jeu  ca^iter 
«  la  bénévolence  du  candide  lecteur.  »  (Essais  de 
Montaigne,  T.  I,  p.  258.) 

Avant-joueur,  adj.  Qui  prélude.  Epithète  de 
Fredon,  et  de  prologue  de  comédie  dans  les  Epithè- 
tes  de  Martin  de  La  Porte. 

Avant-jugé ,  subst.  masc.  Préjugé.  (Dict.  de 
Cotgrave.) 

Avant-juin,  subst.  masc.  Le  mois  de  mai.  (Les 
Contes  de  Cholières,  fol.  186,  V°.) 

Avant-la-main,  adv.  Auparavant,  d'avance. 
Ce  mot  est  formé  de  main,  comme  maintenant, 
présentement.  «  L'en  luy  rebatra,  avant-la-main, 
"  la  somme  que  montera  le  meuble  de  son  ma- 
«  riage.  »  (La  Thaum.  Coût,  de  Berry ,  p.  300.  — 
Sag.  de  Charron,  p.  33.  —  Al.  Chnrtier,  Quadrilog. 
invectif.,  p.  419.  —  Brantôme,  Dames  Gallantes, 
T.  1,  p.  390,  etc.)  "  Année  payée  avant-main,  c'est- 
«  îi-dire  payée  d'avance.  »  (Goût,  de  Hainaut,  au 
Nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  101,  col.  1.) 

VARIANTES  : 
AVANT-LA-MAIN.  Le  Jouvencel,  fol.  47,  R». 
Atant-main.  Essais  de  Mont.,  T.  I,  p.  378. 


(2)  Pourquoi  ne  pas  lire  avancement?  «  Si  croy  que  Dieu  m'ait  pourveu  de  ceste  emprise  pour  mon  nuanc/iewenf. 
(Froissart,  1.1.  Il,  62.)  (n.  e.) 


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—  337  — 


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AA'ant-l'eau  (lisez  Avau-reau),  dans  l'Amour 
à  la  mode,  de  Thomas  Corneille,  act  i,  scène  v.  (Voy. 
Aval.) 

Avant-le-vent ,  lisez  Avau-îe-vent.  (Mém.  de 
Du  Bellay,  Liv.  IX,  fol.  291,  V°.  —  Yoy.  Aval.) 

Avant-logis,  subsl.  masc.  Vestibule.  (Dict.  de 
Nicot,  Monet  et  Cotgr.) 

Avant-montre,  subst.  fém.  Montre  de  bouti- 
que. Nous  appelons  seulement  montre,  cette  espèce 
d'avance  faite  au  devant  d'une  boutique,  pour  éta- 
ler la  montre  ou  l'échantillon  des  marchandises 
que  l'on  vend  :  «  Bien  entendu  néantmoins  qu'un 
u  homme  de  mestier  pourra  faire  un  avant-montre, 
«  avec  un  petit  toit  au-dessus  servant  à  son 
«  commerce,  pourveu  qu'il  le  fasse  faire  si  court 
"  et  si  commode  que  les  voisins  n'en  souffrent  aucun 
><  empeschement,  ou  incommodité.  »  (Nouvelles 
Coutumes  générales,  T.  I,  p.  526,  col.  2.) 

Avant-mur,  subst. masc.  Parapet,  barbacane  (1). 
(Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgr.) 

VARIANTES  : 
AVANT-MUR.  Oudin  et  Cotgrave. 
AvANT-AMUK.  Hist.  de  la  Popeliniére,  T.  I,  fol.  42,  R». 

Avantoict,  subst.  masc.  Toit  avancé.  (Dict.  de 
Cotgrave.) 

Avant-panser,  verbe.  Préméditer.  (Dict.  de 
Nicot,  Monet,  d'Oudin  et  de  Cotgr.) 

VARIANTES  *. 
AVANT-PANSER.  Monet,  Dict. 
AvANT-PENSER.  Dict.  de  Nicot,  d'Oudin  et  de  Cotgrave. 

Avant-pas,  S!(/*sL  masc.  Supériorité,  préémi- 
nence. Pasiiuier  dit,  au  sujet  d'une  dispute  où  l'on 
discutoit  laiiuelle  des  deux  langues,  de  la  Toscane 
ou  de  la  Françoise,  devoit  avoir  le  dessus  :  «<  L'autre 
"  au  contraire  soutenoit  qu'il  n'y  avoit  aucune 
«  rencontre  de  l'une  à  l'autre ,  et  que  la  Toscane 
"  passoit  d'un  grand  avant-pas  la  Françoise.  » 
(Pasquier,  Rech.  Liv.  VU,  p.  620.) 

Avant-peau,  subst.  fém.  Prépuce.  «  Au  lieu  de 
«  prépuce  usant  de  ce  mot  Avant-peau.  »  (Apologie 
pour  Hérodote,  p.  128.) 

Avant-pié,  subst.  masc.  Espèce  de  chaussure. 
—  Pointe  du  bas,  ou  de  la  chaussure. 

Dans  le  premier  sens,  c'est  celte  chaussure  que 
l'on  a  appellée  aussi  souliers  à  poulaine ,  ou  pou- 
leine  ;  c'etoit  une  chaussure  qui  par  devant  avoit  de 
longs  becs  recourbés  en  haut,  imitant  assez  les 
patins  des  IloUandois  et  par  derrière  comme  des 
éperons  qui  sortoient  du  talon.  (Yoy.  Le  Duchat 
sur  Rabelais,  T.  I,  p.  100,  note  8;  T.  II,  p.  12,  note 
32,  et  p.  146,  note  1,  sur  le  chap.  xxv.  —  Du  Cange, 
Gloss.  latin,  au  mot  Antepedes.) 


On  a  aussi  nommé  axiant-pied  la  pointe  d'un  bas, 
ou  d'une  chaussure.  (Dict.  d'Oudin.)  Dans  les  Ord. 
des  Rois  de  Fr.,  dans  un  article  qui  concerne  les 
chaussetiers,  on  lit:  «  Ceux  qui  les  appareillent  ne 
«  prendront,  pour  mettre  un  avant-pied  en  une 
«  chausse,  que  deux  deniers.  »  (Ord.  des  Rois  de 
Fr.  T.  II,  p.  372.  —  Voy.  Lanc.  du  Lac,  T.  I,  fol.  137.) 

Et  mes  houseaulx  sans  avant-piech  (2). 

Villon,  p.  G. 

VARIANTES  : 
AVANT-PIÉ.  Le  Duchat  sur  Rabelais,  T.  t,  note  8. 
Avant-pied.  Ord.  des  Rois  de  France,  T.  II,  p.  372. 

Avant-portail,  subst.  7nasc.  Vestibule  ou  bar- 
rières devant  les  portes.  (Dict.  de  Nicot,  Monet  et 
Cotgrave.)    ■ 

Avant-porte,  subst.  fém.  Barrière.  «  Y  avoit 
«  une  avant-porte,  où  moul  y  ol  fier  assaut;  et 
"  gangnerent  les  François  l'avant  tour  à  celle  fois, 
"  et  non  plus.  »  (Hist.  de  B.  Du  Guesclin,  par  Mé- 
nard,  p.  533.)  On  lit  avant-porte  ou  barrière,  en 
parlant  d'une  ville,  dans  Monstr.  Vol.  III,  fol.  75. 

Avant-seigneur,  subst.  masc.  Seigneur  supé- 
rieur. (Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis.)  Seigneur 
suzerain.  (Du  Cange,  Gloss.  latin,  au  mot  Dominas 
principalis.)  «  Seigneur  suzerain ,  seigneur  par 
«  dessus,  seigneur  par  amont,  chez  les  praticiens 
»  angiois.  »  (Notes  sur  Beaumanoir.) 

Avant-solier,  subst.  masc.  Espèce  de  portique 
ou  de  bâtiment  avancé,  et  soutenu  sur  des  colon- 
nes, peut-être  avant-toit.  (Voy.  le  Gloss.  latin  de 
Du  Cange,  au  mot  Anterolarium.)  Il  semble  mis 
comme  synonyme  à  lierthesca,  crête  dans  une  cita- 
tion latine,  ibid.  au  mot  Avant-soliers,  col.  823,  et 
au  mot  flertlœsca  (3).  (Voy.  une  autre  citation,  ibid. 
au  mot  Orbus  vicus,  où  il  paroit  signifier  avant-toit.) 

Avant-tour,  subst.  fém.  Tour  avancée.  —  Ou- 
vrage extérieur  qui  précède  une  tour.  «  Y  avoit 
«  porte,  ou  moût  y  ot  fier  assaut,  et  gangnerent  les 
«  François  Vavant-tour  à  celle  fois.  »  (Hist.  de  B. 
Du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  533.) 

Avant-vandangeur,  subsl.  masc.  Nom  d'une 
étoile. 

C'est  l'avant-vaiidaugeui- 

De  lumière  pareille,  et  pareille  grandeur. 
Que  celle  qui  se  voit,  par  la  noire  carrière, 
Sur  la  queue  d'Helicie  (4)  espandant  sa  lumière  : 
Cette  estoille  est  ardante,  et  les  autres  aussi, 
Qui  sont  voisines  d'elles. 

PoL-s.  deR.  BelI.T.  I,  fol.  179.  V. 

Avai'ement,  adv.  Sordidement.  —  Avidement. 
(Voyez  sur  le  premier  sens  le  Dict.  d'Oudin.) 
On  a  dit  aussi  avarement  pour  avidement,  avec 
l'avidité  d'un  avare. 

Excusez  donc  mes  yeux,  si  trop  avarement 
Fichez  sur  vos  beautez,  ils  prennent  aliment, 
Scachans  combien  de  faim  l'absence  leur  prépare. 
Poès.  d'Am.  Jamia,  p.  272. 


(1)  Cest  un  mur  adossé  à  un  autre  mur,  ou  l'enceinte  la  plus  éloignée  du  corps  de  place.  En  blason,  c'est  un  pan 
de  mur  crénelé  joint  à  une  tour.  (n.  e.)  —  (2)  Le  statut  des  chaussetiers  de  Poitiers,  en  1472,  explique  que  dans  une  aune 
de  drap  de  5/4  de  large  on  taillait  deux  paires  de  chausses  d'hommes,  à  coins  et  talons  sans  avant-pieds,  c'est-à-dire 
découvertes  sur  le  cou  du  pied.  (n.  e.)  —  (3)  La  bretéche  n'était  pas  un  portique,  ni  une  crête,  mais  un  ouvrage  de  bois  à 
plusieurs  étages,  crénelé,  dont  on  se  servait  pour  attaquer  et  défendre  les  places  fortes,  (n.  e.)  -  (4)  La  Grande  Ourse. 
n.  43 


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-  338  — 


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VARIANTES  : 
AVAREXrENT.  Poës.  d'Am.  Jamin,  p.  272. 
AvOREMENT.  (Lisez  /li'aco/itJi/  dans  le  Gl.  de  Labbe,  p.  490.) 

Avarice,  subst.  (ém.  et  mase.  Avidité.  Ce  mol 
subsiste  sous  la  première  ortliograplie,  mais  il  est 
toujours  féminin.  Nous  le  trouvons  au  masculin,  et 
dans  le  sens  (l'avidité,  au  passage  suivant:  «  Des 
«  anciens  harangueurs  qui  ue  faisoient  point  état 
«  de  l'argent,  ains  d'un  plus  noble  avarice,  à  sca- 
«  voir  de  pouvoir  consacrer  la  renommée  sur  l'au- 
«  tel  d'immortalité.  »  (Contes  de  Cholières,  fol.  77.) 
Ce  même  mol,  sous  l'orthographe  avarises,  est 
encore  masculin  dans  ce  vers: 

Certes  cou  es  crans  ai'urises. 

Poôs.  MS.  avant  1300.  T.  IV,  y.  1356. 

Proverbe. 
Avarice  de  prouvoire ,  c'est-à-dire  avarice  de 
prêtre.  (Prov.  dans  le  Rec.  des  Poët.  mss.  avant  1300.) 

VARIANTES  : 
AVARICE.  Orthographe  subsist. 
AVAUISES.  Ane.  Poës.  MS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1356. 

Avai'icieux,  subst.  masc.  et  adj.  Avide,  qui  a 
de  la  coiivoilise.  —  Avare. 

Ce  mot  est  employé  au  premier  sens  dans  ce  pas- 
sage :  »  Devint  avaricieux  de  la  couronne  qui  tant 
«  esloit  belle.  »  (Lancelot  du  Lac,  T.  111,  fol.  73.) 

Jesu  Christ  que  pas  ne  trouvasmes 
De  sa  grâce  aver,  ne  eschar. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  17303  cl  17304. 

Peut-élre  doil-on  donner  la  même  signification 
au  mot  Aver,  dans  les  vers  suivans  : 

En  convoiteux,  et  en  aver 
Ne  se  doit  nus  trop  affier. 

Fabliaux,  MS.  Je  S.  Germ.  fol.  18,  R-. 

Avère  signifie  avare  dans  ces  vers  : 

Amours  est  large  et  avère. 

Fauclicl,  Lang.  cl  Toëi.  Fr.  p.  UO. 
Ja  nul  avers  homme  ne  puet  pris  monter. 

Ibid.  p.  111. 

Riches  princes  avers  qui  avoir  a  sans  compte 
Ne  scait  qu'est  donner,  vivre  doibt  a  grand  honte. 

Ger.  de  Rouss.  MS.  p.  29. 
Thiebaut  li  quens  de  Chartres  fu  fol,  et  engingnious. 
Moût  ot  chestaux  et  villes,  et  moût  fut  avérons. 

Abarre  semble  être  le  même  mot  qu'avare  (1),  sui- 
vant la  prononciation  languedocienne.  Noitsse 
abarre  se  dit  dans  le  Languedoc  pour  une  noix  de 
la  coquille  de  laquelle  on  a  de  la  peine  à  tirer  le 
noyau.  (Dict.  de  Borel,  au  mot  Aver.) 

VARIANTES  : 
AVARICIEUX.  Orthographe  subsist. 
.AvARisciEux.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7G15.  T.  II,  fol.  163. 
AvORiAcuz.  Ordonn.  T.  I,  p.  614. 
AvEROus.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  114. 
AVER.  Borel,  Dict.  p.  27. 
AVERE.  Fauchet,  Lang.  et  Poës.  Fr.  p.  140. 
AvoR.  (Lisez  Aver.)  Thib.  de  Nav.  T.  I,  p.  359. 
AVER.  Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose. 
Avers.  Ger.  de  RoussiUon,  MS.  p.  28. 

Ave,  subst.  musc.  Oiseau.  Ce  mot  a  cette  signi- 
fication dans  le  passage  suivant: 


A  Foulambroy  puet  grant  sires  manoir: 
Daims  a  ou  parc,  qui  moult  vault  de  finance. 
Et  ores  aussi. 

Eusl.  Descliarops,  Poés.  MSS.  fol.  32,  col.  2. 

Avec,  préposition.  Avec.  Dans  S'  Bernard,  Serm. 
Français,  avec  répond  au  latin  ctwi  et  apitd. 

Li  Piois  veut  bien  c'on  jeté  as  aves 

Poès.  MSS.  avanl  1300,  T.  IV.  p.  1368. 

Otot,  Otout,  Oloiis  (2),  Otoutes,  signifient  avec, 
suivant  les  divers  genres  et  les  divers  nombres. 
(Duchesne,  Gén.  de'Chalillon,  p.  45.) 

Avec  A  signifié:  encore,  aussi.  «  Jean  des  Temps, 
«  escuyer  de  fEmpereur  Charles  le  Grand,  qui 
«  n'esloit  pas  parent  de  Dieu  :  vescut  trois  cens 
■<  ans,  comme  tesmoignent  toutes  les  histoires  de 
«  France  et  d'Allema'igne  et  d'Italie  avec.  »  (J.  le 
Maire,  lUustr.  des  Gaules,  Liv.  lll,  p.  28G.)  Voy.  le 
Dict.  de  Borel,  au  mot  auqucs  dont  il  fait  mal  à 
propos  dériver  avec.  »  Xous  n'eûmes  paix,  ne  trêve, 
«  ne  au  soudan,  ne  aux  adiniraux.  »  (.Joinville.) 
«  Je  ne  vay  pas  encore  au  baston.  »  (Petit  Jean  dé 
Sainiré,  p.  385.)  »  Sa  face  desrompoilrtî/o;  ongles.  » 
(Chron.  de  S'  Denis,  T.  1,  fol.  148.)  «  Etlfustes 
«  flî'CHS  les  Barons.  » 

C'est  une  faute  pour  aveuc  dans  un  Poëte  ano- 
nyme, (ms.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1602.) 

Amour  convient  avoc  moy  remanoir. 

Poës.  anon.  MS.  avanl  1300,  T.  III,  p.  1189. 

Diex  li  dona  si  grant  biauté  fuison 
Et  avoec  fist  sens,  et  bonté  venir.  • 

Symon  d'Aulie,  Poës-  MS. 

On  disoit  as  moy  pour  avec  moi.  Nous  avons  vu 
la  seule  lettre  a  signifier  avec,  et  la  lettre  o  avoir 
la  même  signification. 

On  employoit  quelquefois  avec  adverbialement, 
etsans  régime,  pour:  ensemble,  avec  eux:  «  Elavec 
ce  sont  plusieurs  faucons,  etc.  (3)  »  (Modus  et  Racio, 
Ms.  fol.  123,  V".) 

VARIANTES    : 
AVEC.  Orth.  subsist.  —  Serm.  Fraiii,ais. 
A.  Duchesne,  Gén.  de  Béthune,  p.  :i73. 
As.  Rymer,  T.  I,  p.  13,  cul.  2  ;  tit.  de  1256. 
Advecques.  Borel,  \"^  additions. 
Anvec.  Borel,  Dictionnaire. 
As.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1527. 
AuvECQUES.  Ordon.  des  Rois  de  France,  T.  I,  p.  493. 
Ave.  D.  Morice,  Hist.  de  Bret.  col.  1013. 
AvECQ.  Joinville,  p.  32.    . 
AvECQUES.  Ger.  de  RoussiUon,  MS.  p.  121. 
AVEIQUES.  Estrub.  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7996,  p.  17. 
AvENC.  Lisez  aveuc.  Borel,  Dict. 
AvEsouE.  Rymer,  T.  I,  p.  116. 
Aveuc.  Duchesne,  gén.  de  Chastillon,  p.  14. 
.'VvEuc.  Ordon.  des  Rois  de  France,  T.  III,  p.  469. 
jVveucques.  Le  Févre  de  Saint-Rémy,  Hist.  de  Charles  VI. 
Aveu.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1662. 
AVEX.  Pérard,  Hist.  de  Bourg,  p.  4-30. 
Avoc.  Poës.  MSS.  avanl  1300,  T.  III,  p.  1189. 
Avocii.  Beauman.  p.  418. 
Avoec.  Chans.  du  comte  de  Thib.  p.  24. 
Avoecoues.  Chron.  du  xm"  siocle,  MS.  deBouh.  fol.  281. 
Avoeqles.  Fabl.  MS.  du  Roi,  n"72l8,  fol.  252. 
.\voic.  Duchesne,  gén.  de  Chastillon,  p.  33. 
AvoiQUEs.  Idem  p  33. 
Avoc'CEs.  Gantiers  d'Argis,  T.  III,  p.  1148. 


(1)  Avarus,  avec  l'accent  sur  le  deuxième  a,  a  dû  donner  aver.  Pour  abai-re,  il  faut  y  voir  la  racine  barrer.  (N.  E.)  — 
(2)  C'est-à-dire  ojaid  totum.  (N.  E.)  —  (3)  Il  faut  remarquer  que  Froissart  combine  hors  de  et  avecques:  «  Et  mettoit  grant 
paine  à  ce  que  le  roi  Richart  eust  osté  hors  d'uvecques  iuy  tous  ses  marmousets.  »  (éd.  Kervyn,  XII,  259.)  (N.  e.) 


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Au.  Petit  J.  de  Saintré,  p.  385. 

AuQUES.  Chron.  Fr.  MSS.  de  Nangis,  an  1290. 

AvuEC.  Duchesne,  pén.  de  Chastillon,  p.  45. 

Aux.  Chron.  de  S'  Denis,  T.  I,  fol.  148. 

O.  Carpentier,  Hist.  de  Cambray,  p.  IS. 

Ob.  Ordon.  des  Rois  de  Fr.  T.  lï,  p.  342. 

Od.  Mouskes,  MS.  p.  8,  passim. 

Ot.  Viilehard,  p.  1. 

Otot.  Fauohet  et  Percef.  p.  147. 

Otout.  Joinville,  p.  70. 

Ou.  Brut,  MS.  fol.  14,  R«  col.  2. 

OvE.  Gloss.  de  l'Hist.  de  Bret. 

OvEC.  Borel. 

OvECQUES.  Ord.  des  Rois  de  France,  T.  III,  p.  221. 

OvENO.  Rou,  MS.  p.  26,  passim. 

OvEQUEs.  Ord.  des  Rois  de  Fr.  T.  I,  p.  582. 

OvESQUES.  Ord.  des  Rois  de  France,  T.  I,  p.  561. 

OuTOUT.  Rou,  MS.  p.  421. 

OuvECQUEs.  Ord.  des  Rois  de  France,  T.  III,  p.  405. 

OwEQUEs.  E.  de  Courtoisie,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  40. 

Aveillette,  subst.  fém.  Petite  abeille.  Ce  sont 
les  diminutifs  d'aveille  sons  abeille.  (Voyez  Bonr- 
going,  ubi  siipvà.)  Ils  ont  la  même  étymologie.  (Id. 
ibid.  Dict.  de  Nicot,  au  mot  aveille.)  La  signification 
même  d'avette  ne  différoit  point  de  celle  d"rtwi//e, 
surtout  dans  la  Touraine  et  l'Anjou ,  comme 
l'observe  Nicot.  Nous  appuierons  sa  remarque  par 
le  passage  de  la  Coutume  du  Bailliage  de  Tours  : 
«  Le  bas  justicier  est  fondé  d'avoir  espaves  d'avettes 
«  qui  sont  mouches  à  miel.  »  (Coût.  gén.  T.  II,  p.  2.) 
Un  de  nos  poêles  du  xvi'  siècle  a  dit  : 

Desjà  la  diligente  avelle 

Boit  la  marjolaine  et  le  thin 

Et  revient  riche  du  butin 

Qu'elle  a  pris  sur  le  mont  Hymette. 

Œuv.  de  Théophile,  !■•  [larlie,  p.  US. 


VARIANTES  : 


A\'EILLETTE.  Bourg.  Orig.  Voc.  Vulg 
AvETTE  (1).  Coût.  gén.  T.  II,  p.  542. 


p.  9,  V». 


Avel,  suhst.  masc.  Désir,  joie,  satisfaction, 
empressement.  Ce  mot,  e-\pliqué  dans  le  Gloss.  du 
Roman  de  la  Rose,  au  mot  avcaux  pour  divertisse- 
ments, bombances,  bonne  chère,  paroît  s'être 
formé  du  latin  avère,  aveo. 

Si  font  plusieurs  en  leur  po\Te  demaine. 
Oui  vivent  bien  sous  l-urs  povres  drapeaulx, 
Et  Cils  ne  font  au  monde  leurs  aveaulx. 

Poès.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  238,  col.  1. 

Ses  maux  raconte  trespassez  ; 
Cou  sait  Partonopex  li  beax. 
Qui  consent  à  ses  aveax. 

l'arlon.  deUlois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  )63,  V  col.  1. 

Ou  fil  aubrée 

A  moût  beau  damoisel. 

Cil  li  agrée, 

Et  ele  à  lui  bée: 

Sofirez  lor  avel. 

Robins  dou  Chaslel.  Poës,  MSS,  avant  (300,  T,  I,  fol.  57. 

Il  menoit  les  grans  aveaux 

Des  dons  qu'il  eut  de  raoy  fort  beaux. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  15299-15300. 


Pour  moy  punir  de  ce  defTault 
Moy  trousser  mes  paneaux 
Faillir  lors  des  dits  aveaulx. 

Ibid.  vers  15101-1570G. 

Ce  mot  a  signifié  besoin  et  désir.  J.  de  Meung, 
parlant  des  gens  qui  frêquentoient  la  cour,  a  dit  : 

Souvent  mangeassent  oefs,  et  choux,  et  naveauLx  : 
Ils  trouvent  à  la  court  trop  plus  leurs  avianlx 
Poissons,  bonnes  chairs;  et  vins  virils  et  nouveaulx 
Ly  tiennent  en  joye,  gras  et  blancs  et  nouveaulx. 

J.  de  Meung,  Cod.  vers  769-772. 

variantes: 
AVEL.  Poës.  MS.  du  Vatican,  n»  1490,  fol.  112,  V». 
AviAU.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7215,  fol.  287,  V»  col.  1. 
AvoY.  Eust.  Deschamps,  Poës.  MSS.  fol.  202,  col.  3. 
AuvûiTE.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  153. 
AvEAX,  suhK.  p.  Parton.  de  Blois,  fol.  163,  V»  col.  1. 
AviAUX,  s.  p.  Machaut,  MS.  fol.  202,  R«  col.  2 
AviAULx,  s.  p.  .J.  de  Meung,  Cod.  vers  770. 
A  VEAUX,  s.  p.  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose. 
Aveaulx,  s.  p.  Coquillart,  p.  165. 

Avelaigner,  suhst.  masc.  Avelinier,  coudrier. 
(Voy.  les  Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave,  et  Du  Cange, 
Gloss.  lat.  au  mot  Avellanarius.) 

VARIANTES  : 
AVELAIGXER.  Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave. 
AvEi-.MGNiEi!.  Dict.  d'Oudin. 
AVELI.NIER.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  .Avellanarius. 

Avelaine,  subst.  fém.  Aveline,  noisette.  (Voyez 
les  Dict.  de  Nicot,  de  Monet,  d'Oudin  et  de  Cotgrave. 

—  Voyez  la  Confession  de  Vaudreton.  —  Trésor  des 
Chartes,  Layette  V  de  Navarre,  Pièce  xi.) 

Aulanie  se  dit  dans  le  patois  d'Auvergne  pour 
aveline.  (Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  à  aulaneriitm  (2).) 

VARIANTES  : 
AVELAINE.  Dict.  de  Nicot  et  d'Oudin. 
AvELANE.  Dict.  de  Monet  et  de  Cotgrave. 
AvELLAixE.  Dict.  d'Oudin. 
AuLANiE.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Aulanerium. 

Avemai'ia,  exclamation.  «  Avemaria,  fait-elle, 
«  j'aimasse  mieux  qu'elles  fussent  en  leurs 
«  maisons.  »  (Les  15  Joies  du  Mariage,  page  48.  — 
Voyez  ibid.  page  99.) 

Avemaria.  Remarquons  cette  façon  de  parler 
où  ce  mol  semble  pris  ou  pour  la  S"  Vierge  même, 
ou  pour  le  miracle  de  l'Annonciation  : 

Foi  que  doi  avemaria. 

Fabl.  .MS.  du  R.  n-  7615,  T,  II,  fol.  130,  V  col.  1. 

Avenage  (3),  subst.  masc.  Redevance  en  avoine. 

—  Droit  de  bourgeoisie. 

C'est  un  droit  seigneurial  que  les  sujets  doivent 
à  leur  seigneur  pour  le  pâturage  de  leurs  bestiaux 
dans  les  bois  et  dans  les  prés.  (Laurière,  Gloss.  du 
Droit  françois,  et  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot 
Avenagium.  —  Voyez  le  Dict.  de  Cotgrave.)  On  lit 
avenaige  dans  l'Ane.  Coût,  de  Bret.  Ce  droit  est 
appelé  avoyne  du  bois  dans  Pithou.  (Coût,  de  Troyes.) 
(Voyez  AvAiNE.) 


prit  ensuite  une  acception  générale  et  s'entendit  de  toute  espèce  de  redevance.  Dans  une  bulle  dianocent  II  a  198)'  on  lit  • 
«  Avenagium  anarum  et  arietum.  »  Comparez  <i  avena  de  fimo,  de  molta  »  (Du  Cange,  sous  Avena),  droit  payé  pour  là 
junuer,  pour  la  mouture,  (n.  e.)  »  v  d  i  /,  ^.ui..  t«.jo  puui  n» 


AV 


—  MO  — 


AV 


Avenage  s'est  dit  pour  bourgeoisie,  «  parce  que 
'"  le  serf  peut  se  faire  bourgeois  du  Roy  en  payant 
«  un  seplier  d'nvene  à  certaine  église.  »  (Laurière, 
Gloss.  du  Droit  françois.  —  Voyez  Beaumanoir, 
Coût,  de  Beauvoisis,  p.  iW.  —  Bouteiller,  Somme 
rurale,  p.  107.) 

VARIANTES  : 
AVENAGE.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  nvenaghim. 
AvENAiGE.  Ane.  Coût,  de  Bretagne,  fol.  120. 
Adven.\ge.  La  Thaumassiére,  Coût,  de  Berri,  p.  354. 

Avenaire,  adj.  Qui  se  tient  dans  les  avoines. 
{Voyez  le  Dicl.  de  Cotgrave.)  On  lit  aveniêre,  cpiLli. 
de  Cigale,  dans  les  Epithètes  de  Martin  de  la  Porte. 

VARIANTES  : 
AVENAIRE,  AvENiER.  Dict.  de  Cotgrave. 

Avenarie,  suhst.  fém.  Champ  d'avoine.  (Voyez 
Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  avenarlœ,  où  on  Ht 
avenarie  (1).)  »  Les  chaumes  millerines  etavcneris 
«  ne  sont  aucunement  de  garde,  sinon  tant  que  le 
«  fruit  est  dedans  les  dites  terres.  »  (Coût,  de  la 
Ferté-Joabault,  au  Coût.  gén.  T.  II,  p.  287. 

VARIANTES  : 
AVEN.AP.IE.  Du  Cange,  Gloss.  lat. 
AVAiNEr^iEUL,  subst.  masc. 
AvENERis,  subst.  masc.  plur. 

'  Aveuas,  subst.  masc.  Pain  ou  farine  d'avoine. 
Ce  mot  est  pris  en  ce  sens  dans  les  vers  suivants  : 

Soiippe  à  huile  leur  donne,  et  l'avenus. 

Poês.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  116,  col.  2. 


En  Karesme  avenus  et  ris. 
Or  veult  ris,  or  veult  avenus. 


Ibid.  fol.  418,  col.  i. 


Avéné,  part.  Ce  mol  désigne  l'épuisement. 

Aveneron,  subst.  masc.  Avoine  stérile.  (Voyez 
les  Dictionnaires  cités  sur  les  diverses  orthographes.) 

VARIANTES  : 
AVENERON.  Dict.  de  Rob.  Estienne. 
AVERON.  Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave. 
AvoiN,  AvoiNFOLLE.  Dict.  de  Cotgrave. 
AVHON.  Dict.  de  Nicot,  d'Oudin  et  de  Cotgrave. 
Haveron.  Dict.  de  Nicot,  d'Oudin  et  de  Cotgrave. 

Aveneux,  adjectif.  Garni  d'avoine  ou  qui  est 
d'avoine.  (Voyez  le  Dict.  de  Cotgrave.)  On  trouve 
avoiiieiix  pour  épithète  de  picotin  dans  les  Epith. 
de  Martin  de  la  Porte. 

VARIANTES  : 
AVENEUX.  Dict.  de  Cotgrave. 
AvoiNEUx.  Epithète  de  Slarthi  de  la  Porte. 

Aveiire,  verbe  à  la  3°  personne  du  singulier  du 
présent  de  l'indicatif.  Vend,  met  à  prix  : 

Feme  set  trop  de  mal  qui  ses  chieres  uvenre, 
Feme  qui  vent  sa  chère  au  deable  la  quit. 

Chaslie-Musart,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  106,  V*  col.  2. 

Avent,  adverbe.  Avant.  (Voyez  Hues  de  la  Ferté, 
poës.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1150.) 

Aventé,  part.  Eventé.  —  Placé  sous  le  vent. 
Ce  mot  paroit  pris  au  premier  sens  dans  ce 
passage  : 


Si  jamais  jour  ne  vantoit  icy  vens. 
Si  seroit  bien  ly  mondes  uventez. 

Poes.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  222.  col.  3. 

On  disoit  aussi  aventé  pour  placé  au  bon  vent: 
«  Garde  que  le  cuer  de  ta  baye,  où  tu  tendras  tes 
"  las,  soit  bien  aventé  ;  c'est-à-dire  qu'il  le  soit  au 
"  dessoubs  du  vent  du  pays  où  les  bestes  seront 
«  demarées.  »  (Modus  et  Racio,  ms.  fol.  63,  V°.) 

Aventer,  verbe.  «  Si  ascuns  se  sentent  grevés 
«  par  ascune  fraunchise  graunle  par  nous ,  et 
«  ascun  sus  franchise,  ou  de  tout  aventer  nostre 
«  fait  en  taunt  semble  que  il  despise,  par  ount  il 
"  est  grevement  amerciable,  et  en  despyt  de  sa 
«  force,  retendra  l'autre  sa  fraunchise,  lequel  que 
"  ele  soit  préjudiciable  h  luy  ou  non.  »  (Britton, 
des  Loix  d'Angleterre,  fol.  159,  V°.) 

Average,  subsl.  masc.  /BéiAû.  —  Droit  pour 
exemption  de  corvées. 

Au  premier  sens,  c'étoit  le  mot  collectif  d'fci'frs 
pris  pour  bestiaux  :  «  Est  commandé  ii  toute  per- 
«  sonne  qu'aura  en  son  pouvoir  â'averages  étran- 
«  gers,  ou  qui  saura  qui  les  détient,  de  les 
«  révéler,  etc.  «  (Coût,  de  Bueil,  au  Nouv.  Coût, 
gén.  T.  II,  p.  1243.) 

C'étoit  aussi  un  droit  payé  pour  l'exemption  des 
corvées  de  charrettes.  (Voyez  Du  Cange,  Gloss.  lat. 
au  mot  averpennis.) 

Averdir,  verbe.  Reverdir  ou  verdir. 

Au  tens  Ice  je  vois  urerdir, 
Ke  foille  et  Hors  vois  aparoir, 
Amors  ki  mon  cuer  fait  frémir, 
Rejouir,  et  sovent  doloir 
Me  fait  chanter,  et  joie  avoir. 
M.  Adrius,  Contredit,  Pues.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  Mil. 

Avéré,  part.  ElTectné,  accompli,  proprement 
vérifié.  (Voyez  le  Dict.  de  Cotgrave,  au  mot  averge.) 
On  lit  aviiiré  dans  les  Poës.  mss.  d'Eust.  Deschamps  ; 
et  avolries  dans  Al.  Chartier,  de  l'Espérance. 

Verrai-je  ja  aucré 

Que  joie  m'en  soit  promise. 

Bestornés,  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1274. 

Fu  averie 
La  prophétie. 

Poés.  .MSS.  de  Froissarl,  p.  272,  col.  2. 

Ha,  Salemon,  ta  prophétie. 
Est  trop  cruelment  uvertie. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  95,  R"  col.  1. 

VARIANTES  : 
AVÉRÉ.  Poes.  MSS.  avant  1300,  T.  IH.  p,  1274. 
AvEUAÈ.  D.  Morice,  Hist.  de  i3ret.  préf.  col.  983  et  984. 
AvEM.  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  420,  col.  1. 
AvEiîSÉ  pour  avéré,  vérifié. 

AvoinÉ.  Eust.  Deschamps.  Poës.  MSS.  fol.  413,  col.  3. 
AvoiRi.  Al.  Chartier,  de  l'Espérance,  p.  388. 
Averti.  Fabl.  MS.  du  R.  n'>72l8,  fol.  95,  R«  col.  1. 

Averement,  subst.  inasc.  Vérification.  L'action 
de  vérifier,  ou  de  prouver  la  vérité.  Du  Cange, 
Glossaire  latin,  au  moi  Averainentum.  (Voy.  Britton, 
des  Loix  d'Angleterre,  fol.  50.) 


(1)  D'après  la  Coût,  de  Solesmes.  (n.  e.) 


AV 


—  341 


AV 


Avérer,  verbe.  Eclaircir,  démêler,  vérifier, 
éprouver  (1). 

Helas  que  faut-il  que  je  fasse? 
Pour  montrer  quel  est  mon  amour  ; 
Quand,  brûlant  pour  vous,  nuit  et  jour, 
Vous  pensez  que  je  soys  de  glace  ; 
Afin  d'oi'erer  toute  feinte. 
Ouvrez  mon  cœur  que  vous  avez  ; 
Et  mes  vœux  plus  ne  recevez. 
Si  dedans  vous  n'estes  emprainte. 

ŒuvTes  de  Des  Portes,  page  200. 

Axeresses,  subst.  fém.phir.  Aisances.  Fosses 
d'averesses,  semble  employé  pour  fosses  d'aisances 
en  ce  passage  :  «  Par  la  coustume  n'est  loisible  à 
«  personne'faire  édifier  retraits,  ou  fosses  cravcres- 
«  ses  à  trois  pieds  près  rhérilage  de  son  voisin.  » 
(Coût,  de  Tournay,  au  Coût.  gén.  T.  II,  p.  O'ilt.) 

Averiaiix.  Ce  mot  se  trouve  à  la  marge  du  Rom. 
de  Rou,  Ms.  On  lit  dans  le  texte  avoir  aux.  Il  faut 
lire  à  voir  aux;  c'est-à-dire  :  h  voir  eux,  à  les  voir. 

Les  Biars  i  fu  avoir  aux. 

Roman  de  Rou,  MS.  p.  357. 

Averierie,  subst.  fém.  Mauvaise  action.  Œuvre 
de  l'aveisier,  ou  du  démon.  Ce  mot  est  employé  en 
ce  sens  dans  la  Vie  de  S"  Thaysie.  (Vies  des  SS.  ms. 
de  Sorb.  ch.  xxvu,  col.  18.) 

Averlan,  subst.  masc.  Débauché,  bon  compa- 
gnon. —  Camarade. 

On  trouve  le  premier  sens  de  ce  mot  dans  les 
Dictionnaires  d'Oudin  et  de  Cotgrave,  au  mot  aver- 
lan. Il  est  employé  comme  une  épithète  injurieuse 
dans  Rabelais.  Le  Ducbat,  dans  ses  notes  sur  cet 
auteur,  T.  I,  page  16,  note  2,  dit  qu'il  signifie  gros- 
sier, brutal. 

Ce  mol  est  employé  pour  camarade,  par  Brantôme. 
Il  s'agit  d'une  offense  que  le  prince  de  Portianavoit 
faite  à  la  maison  de  Guise,  en  la  personne  du 
cardinal  de  Lorraine.  «  Si  nous  voulons  croire  la 
«  légende  de  S'  Nicaise,  bastard  prétendu  de  la 
"  maison  de  Cuise,  il  en  eut  la  vengeance  deux 
«  cens  ans  après,  au  moins  :  car  par  le  moyen  de 
«  Sainct  Bartbellemy,  son  bon  averlant,  il  le  fit 
«  mourir.  »  (Brantôme,  sur  les  Duels,  page  325.  — 
Voy.  le  Moyen  de  parvenir,  p.  161.) 

VARIANTES  : 
AVERLAN.  Dict.  d'Oudin. 
AVERLANT.  Brantôme,  sur  les  Duels,  p.  325. 
AVERLIN.  Rabelais.  T.  I,  page  t6. 

Avernal,  adj.  Infernal.  (Voyez  les  Dictionnaires 
d'Oudin  et  de  Colgrave.) 

Avers  ou  Aver,  subst.  masc.  plur.  Animaux 
domestiques,  bestiaux.  Bcles  à  laine  dans  le  Dau- 
phiné,  selon  Laurière,  Glossaire  du  Dr.  fr.  Ce  mot 
est  expliqué  par  bestiaux  dans  Du  Gange,  sur  Join- 
ville.  «  Pestre  ses  avers.  »  (Britlon,  Lois  d'Angle- 


terre, fol.  141.)  «  11  occist  mes  avers,  »  (dans  les 
Tenures  de  Littleton,  fol.  lô.)  A  Caen  et  à  Valogne 
en  Normandie,  on  nomme  encore  un  cochon  aver. 
(Voyez  Afer.) 

On  trouve  avère  minutum,  pour  menu  bétail, 
dans  le  Cart.  de  S'  Victor  dé  Mars.  «  Avoirs  de 
•u  charrue,  pour  bœufs.  »  (Ancien  Coût,  de  Bretagne, 
fol.  150.)  Avoii's  étoit  donc  un  terme  générique.  De 
\h  on  disoit  redevance  ûe  vif  avoir,  pour  redevance 
d'animaux  vivans.  (Nouv.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  61.) 

VARIANTES  * 
AVER.  Loi»  Norm.  art.  7  et  32. 
Avers.  Du  Gange,  sur  Joinville,  page  100. 
AvEiR.  Loix  Norm.  art.  6,  7,  25,  29  et  32. 
Avoirs.  La  Salade,  fol.  25,  R"  col.  2. 

Avers,  préposition.  Envers,  au  prix,  en  compa- 
raison. 

La  chienne  qi  prent  soif 

Ne  leus  qi  est  fameilleus. 
N'est  avers  moi  dolereus. 
PoSs.  du  Roy  de  Navarre,  paraii  les  Poët.  MSS.  du  Vatican,  n'  1490,  col.  8,  R". 

Averté,    subst.  fém.    Avarice.  —  Résistance, 
rigueur. 
Ce  mot  signifie  avarice,  dans  ces  vers  : 

Li  vient  de  grant  averté 
Quant  de  ce  dont  a  tel  planté 
Me  fait  avoir  si  grant  aerlé. 

Focs.  MSS.  avant  1300,  T.  UI,  p.  1152. 

C'est  dans  le  sens  de  résistance,  rigueur,  qu'on 
a  employé  ce  mot,  dans  les  vers  suivans  : 

Ah  !  fait-il,  tant  d'avcrlé 

Ai  fait  de  moi.  et  tant  dangier. 

Fabl.  MS.  de  S  Germ.  fol.  86,  R°  col.  1. 

Averticœur,  subst.  masc.  Maladie  des  cbe- 
vaux('2).  (Voy.  le  Dictionnaire  d'Oudin.)  Nous  disons 
avant-cœur  ou  anti-cœur. 

Avertin,  subst.  masc.  Vertige.  Ce  mot  est 
formé  du  latin  Vertex{â].  (Voy.  les  Dictionnaires  de 
Nicot,  de  Monet,  d'Oudin,  le  Glossaire  sur  les  Coût, 
de  Beauvoisis,  et  Bourgoing  de  Orig.  Voc.  vulg. 
au  mot  Avertin,  fol.  54.)  Il  signifie  à  la  fois  folie, 
caprice,  maladie  de  l'esprit  et  foiblesse  du  cerveau, 
éblouissement,  etc.  Borel,  dans  son  Diclionnaire, 
l'explique  par  défaut  de  vue.  (Voy.  au  mot  Verve, 
p.  565.)  On  a  dit  avertin  de  chief  dans  le  même 
sens.  (Voy.  Erberie,  ms.  de  S.  G.  fol.  90.)  Le  mal 
S'  Avertin  étoit  une  maladie  qui  dispensoit  de  sou- 
tenir le  gage  de  bataille  en  personne.  iVoy.  Beau- 
manoir,  p.  308,  et  Oudin,  Curios.  franc.  —  Voyez 
aussi  les  Fabliaux,  ms.  de  S'  Germ.  fol.  123.  —  Les 
Poës.  MSS.  d'Eust.  Deschamps,  fol.  220,  elles  Contes 
de  Desperriers,  T.  II,  p.  216.) 

.lii(";'f/x- est  pris  aussi  pour  la -tête  même,  dans 
Parlonopex  de  Blois,  ms.  de  S.  Germ.  fol.  143.) 

VARIANTES  : 
AVERTIN.  Dictionnaire  d'Oudin,  de  Borel,  de  Nicot,  etc. 
Avertiz.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  143,  V». 


(1)  Froissart  donne  la  forme  nverir:  '<  En  tesmoing  de  laquelle  cose  averir,  nous  avons  à  ces  présentes  fait  mettre  nostre 
seel.  »  (Ed.  Kervyn,  V,  302.)  Ce  mot  avait  aussi  le  se'n»;  d'accomplir  ;  «  Tout  ce  qu'il  avoit  promis,  il  avery.  »  (Id.,  XIV,  292.) 
11  se  rencontre  dés  le  xif  siècle,  (n.  e.)  —  (2)  Tumeur  charbonneuse  au  poitrail,  (n.  e.)  —  (3)  L'étyinologie  est  avertcre,  mal 
qui  détourne  l'esprit.  On  le  trouve  dès  le  xir  siècle  et  jusque  dans  J.-B.  Rousseau.  C'est  aussi  le  synonyme  de  tournis, 
maladie  des  moutons,  (n.  e.) 


AV 


—  342 


AV 


ESVERTIN,  EVEBTIN,  OsVERTIN,  VERTIOO,  VERTIN,  VeRTI  • 

•GINE,  fém.  Veutiginosité. 

Avortinei"  (s'),  verbe.  S'opiniàtrer.  (Voyez  les 
Dictionnaires  de  Nicot  et  de  Cotgrave,  et  les  Œuv. 
meslées  de  Pasquier,  p.  '203.) 

Avertineux,  aclj.  Qui  a  des  vertiges,  bizarre, 
frénétique,  etc.  (Voy.  les  Dictionnaires  de  Nicot, 
d'Oudin  et  de  Ménage,  et  celui  de  Cotgrave;  au  mot 
avertineus.)  Il  estemployé  comme  épithète  de  vieux 
mulet,  dans  les  Epithètes  de  Martin  de  la  Porte. 
«  Un  avertineux  destruira  plus  que  plusieurs  bien 
«  rassis  de  cerveau  ne  scauroient  accouster.  « 
(S' Julien,  Mesl.  hist.  p.  G23.) 

VARIANTES  : 
AVERTINEUX.  Dict.  de  Nicot,  d'Oudin,  etc. 
Avertineus.  Dict.  de  Cotgrave. 
VEiniGiNEU.\,  Vertigneu.x,  Vertineux. 

Avesnes,  snbst.  fém.  Nom  propre  de  lieu.  C'est 
le  nom  d'une  ville  du  Ilainaut,  dont  le  territoire 
porte  divers  fruits  excellens,  et  entre  autres  des 
prunes  nommées  Prunes  d'Avesne.  Parmi  les  droits 
qui  se  lèvent  sur  les  marchandises  vendues  h 
Orléans,  on  lit  :  «  Chastaignes,  prunes  d'Avesnes 
«  et  fruict  de  bois,  ne  doivent  rien.  "  (Ane.  Coût. 
d'Orléans,  à  la  suite  de  Beaumanoir,  p.  472.) 

Avesprée  (1'),  subst.  fém.  La  soirée.  (Voyez 
Vesprèe.)  On  lit  en  ce  sens  à  l'avesprée  dans  les 
Fabliaux,  ms.  du  Roy  (n°  7G15,  T.  I,  fol.  105.) 

Advesprement  (sur  le),  subst.  musc.  Le  soir. 
(Voyez  le  Glossaire  du  Rom.  de  la  Rose  et  les  Dic- 
tionnaires de  Borel,  d'Oudin  et  de  Cotgrave.)  «  Il  a 
«  estoit  près  de  Vavesprer  et  annuitier.  «  (Athis, 
MS.  fol.  124.)  «  Lors  alerentnoz  gens  fusler  la  ville, 
B  laquelle  ils  prindrent  h  un  avesprement.  »  (Hist. 
de  B.  du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  185.) 

L'auteur  du  Glossaire  du  Rom.  de  la  Rose,  dit 
q^ue  dans  le  vers  20,901,  il  signifie  nuit  ou  obscu- 
rité; mais  je  ne  vois  pas  la  nécessité  de  lui  donner 
cette  acception,  puisqu'il  y  est  opposé  au  matin. 
Le  suppl.  au  même  Glossaire,  dit  qu'en  Bourgogne 
les  paysans  disent  la  Vesprée  pour  l'après-dînée. 

VARIANTES  : 
ADVESPREMENT  (sur  le).  Hist.  de  Bertr.  du  Guesclin,  par 
Ménard,  page  43. 
Avesprement. 
Vesprée.  Suppl.  au  GIoss.  du  Roman  de  la  Rose. 

Avesprer,  verbe.  Se  faire  tard.  —  Tarder.  Ce 
mot,  dans  le  latin,  répond  au  moiadvespcrascere. 

Dans  le  premier  sens,  ce  mot  s'emploie  pour 
désigner  l'approche  de  la  nuit.  (Voy.  les  Dictionnai- 
res de  Nicot,  de  Monet,  de  Rob.  Est.  d'Oudin  et  de 
Cotgrave.  —  Voy.  aussi  le  Gloss.  lat.  de  Du  Cange, 
au  mol  Vesperatus.)  Phil.  Mouskes,  parlant  de  la 
reine  Erédégonde,  dit  : 

Et  fist  un  soir,  quant  avespri, 
Ocire  son  signour  Celpri. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  3i. 
Un  soir,  si  com  il  avicspri. 

Ibid.  page  20. 


On  disoit  aussi  avesprer  pour  tarder,  se  laisser 
surprendre  par  la  nuit.  (Voy.  l'IIist.  de  France  en 
vers,  à  la  suite  du  Roman  de  Fauvel,  ms.  du  Roi, 
n''G812,  fol.  79,  V  col.  1.) 

VARIANTES  * 
AVESPRER.  Dict.  de  Nicot,  Monet  et  Oudin. 
AVESPERiR.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  11. 
AvEspRiR.  Glossaire  du  P.  Labbe. 
AviESPRiR.  Pli.  Mouskes,  MS.  p.  20. 

Avet,  subst.  maso.  Sapin.  Ce  mot  vient  du  lalin 
abies  (I).  (Voy.  les  Dict.  de  Monet,  de  Ménage, 
d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Aveugle  (2),  adj.  et  partie.  Aveugle,  aveuglé.  — 
Qui  aveugle.  —  Absorbé,  évanoui,  disparu.  —  Qui 
ne  prend  point  jour. 

Le  mot  aveule,  dans  S'  Bernard,  répond  au  latin 
eœcus.  Il  est  opposé  i^i  oscur  dans  cette  phrase, 
p.  212:  «  Sei  oyl  ki  oscur  estoient  purdevinrent 
«  plus  aveule.  »  Dans  le  lalin  «  oculi  ejus  caligan- 
«  tes  mullo  magis  excœcantur.  « 

On  disoil  autrefois  aveugletté,  pour  qui  va  en 
aveugle,  qui  va  à  l'aveuglette,  comme  on  le  dit 
dans'le  langage  populaire.  Parlant  de  la  vie:  «  Bien 
«  va  que  l'on  y  est  dedans  avant  qu'en  voir  l'entrée, 
«  l'on  y  est  porté  tout  aveugletté.  »  (Sagesse  de 
Charron,  p.  254.) 

On  disoit  aussi  aveuli  pour  aveugle. 

Or  oies  corne  fortune  vole, 
Et  refait  l'un  et  l'autre  afole  ; 
Com  celé  ki  trop  est  isniele 
Tourne  et  retourne  sa  roielle  ; 
Ne  de  tourner  ne  s'umelie, 
Quar  ele  est  forbe,  et  aveulie. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  662. 

Ce  mot  est  employé  avec  la  signification:  évanoui, 
qui  a  disparu  dans  les  vers  suivans  : 

Entre  Lu.xure  qu'à  trop  maie  entrée 
Pejor  maintenue  et  fin  desespérée 
Quant  acoulumance  l'y  est  enveloppée 
Et  foy  de  Dieu  part  comme  chose  avmiglée. 
i.  de  Meu.ig,  Cod.  1761-1764. 

Au  féminin,  o\\[voww&aveuglcssecoïame  épithète 
d'ambition,  dans  les  Epilhèles  de  Mart.  de  la  Porte, 
avec  la  signification  :  qui  aveugle. 

On  lit:  PHf/('/(//fl!'r'»,'7/t',  pour  absorbé dechagrin, 
dans  la  Chronique  Française,  ms.  de  Nangis,  sous 
l'an  1199;  le  latin  porte  dolore  absorptus. 

Dans  un  sens  beaucoup  plus  figuré,  on  a  nommé 
feuestres  aveugles,  des  fenestres  qui  ne  prenaient 
point  jour.  (Voy.  le  Coul.  Gén.  T.  II,  p.  1072  et 
Nouv.  Coul.  Gén.  p.  1137.) 

VARIANTES  : 
AVEUGLE.  Orthogr.  subsist. 

Aveule.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  46  et  passim. 
AvuGLE.  Fabl.  MS,  de  S.  Germ.  fol.  52,  R«  col.  1. 
Veugle,  Veule,  Veules,  Wule. 
AvuLLES.  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis. 
Avule.  Vies  des  SS.  MS.  de  Sorb.  ch.  lx,  col.  21. 
Aveuli.  Phil.  Mouskes,  MS.  p.  662. 
AvuGLÉ.  Chron.  fr.  MS.  de  Nangis,  an  1306. 
Aveugletté.  Sag.  de  Cheirron. 
Aveuglesse  au  fém.  Triomphe  de  la  Noble  Dame,  fol.  274. 


(1)  Ou  plutôt  abietem.  (N.  E.)  —  (2)  La  racine  est  ab  privatif  et  oculo,  mot  à  mot  sans  œil.  (n.  e.) 


AV 


—  343  — 


AV 


Aveugler,  vei'be.  Devenir  aveugle.  —  Rendre 
aveugle.  Ce  mot,  dans  S"  Bernard,  répond  au  latin 
excœcare. 

On  trouve  ce  mot  avec  la  signification  :  devenir 
aveugle,  dans  le  passage  suivant:  «  Donnèrent  au 
«  héraut  de  beaux  dons  qui  depuis  lui  vindrent 
«  bien  a  point  :  car  depuis  il  aveugla.  »  (Fioissart, 
Liv.  IV,  p.  yi.) 

Ce  mot  signifie  rendre  aveugle,  dans  les  vers 
suivans  : 

De  grâce,  amour,  aveurjle  moy  les  yeux. 

Œuv"  de  Des  Portes,  fol.  561. 

Cil  ont  bien  le  siècle  avulé, 
Qui,  par  mentir,  vont  recouvant  : 
Miex  aim  languir,  en  attendant 
Que  joie  avoir  de  folseté. 

Andcfrois  li  Bastars,  PoC-s.  MSS.  avant  1300.  T.  II,  p.  848. 

VARIANTES  : 
AVEUGLER.  Orthographe  suljsist. 

AvuGLEii.  Chron.  du  xiii»  siècle,  MSS.  de  Bouh.  ch.  XL. 
AvEUGLiK.  Contes  de  la  R.  de  Nav.  p.  52. 
AvEULER.  S'  Bern.  Serm.  Fr.  MSS.  p.  257  et  259 
AVEULiER.  Adam  li  Bocus,  Poës.  MSS.  av.  1300,  T.  IV,  p.  1423. 
AvEULisEii.  Th.  Mouskes,  MSS.  p.  315. 
AvuLER.  Andefrois  li  Bastars,  Poës.  MS.  av.  1300, T.  II.  p.  848. 
AVEULEB.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  61,  R»  col.  2. 

Aveugleté,  subst.  fém.  Aveuglement.  Ce  mot, 
dans  S'  Bernard,  répond  au  latin  cœcitas.  (Voy.  les 
Dict.  de  Borel  et  de  Cotgrave.) 

VARIANTE   : 
AVEULETEIT.  S-  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  p.  48  et  pctssi)ii. 

Aveuglettes,  adv.  En  aveugle. 

Mais  d'aller  ainsi  avewjlettcs, 

L'on  chet,  s'on  ne  s'en  donne  garde. 

L'Aoïaiit  rendu  Cordelier,  p.  541 . 

VARIANTES  : 
AVEUGLETTES.  L'amant  rendu  Cordelier,  p.  541. 
A  L'AVEUGLETTE.  Dict.  d'Oudin. 

En  aveuglon.s.  Mém.  des  C"«  de  Champ,  à  la  suite  de  la 
Coût,  de  Troyes,  par  Pilhou,  p.  533. 

Aveiiglissement,  suhsl  masc.  Aveuglement. 
(Voy.  Cartheux,  Voyage  du  Cliev.  errant,  fol.  (iOO.) 

Aviander  (s'),  verbe.  Se  repaitre.  (Voy.  le  Dict. 
de  Nicot.)  Se  fournir  d'alimens,  suivant  le  Dict. 
d'Oudin.  (Voy.  le  Dict.  de  Cotgrave.)  Le  mot  s'avian- 
rfer  est  pris  au  figuré  dans  les  vers  suivans,  tirés 
de  Grevin  : 

T'aviandant  aux  secrets 
Des  auteurs  latins  et  grecs. 

Goujot,  Biblioih.  Fr.  T.  XII,  p.  153. 

Avichoix,  subst.  masc.  Avis.  —  Qui  donne  des 
avis,  conseiller. 

Ce  mot  signifie  avis  dans  le  passage  suivant  : 
"  Il  print  habit  d'hermile,  aux  avichoix  d'un  très 
•>  faulx  hypocrite.  »  (Monstrelet,  Vol.  II,  fol.  161.) 

Dans  cet  autre  passage,  du  même  auteur,  ce 
même  mot  signifie  qui  donne  des  avis,  conseiller. 
«  A  député,  pour  électeurs,  avichoix  et  proclama- 
"  leurs,  certains  hommes  ou  diables,  soubs  figures 
"  et  espèces  d'hommes  mussez.  »  (Monstrelet,  Ann. 
1439,  Vol.  II,  fol.  161.) 


Avidité,  subst.  fém.  Ce  mot  subsiste.  Nous 
remarquerons  seulement  qu'il  étoil  nouveau  du 
temps  oîi  Ménage  écrivoit  ses  remarques  sur  la 
Langue  françoisè  ;  on  croit  qu'il  a  été  mis  en  usage 
par  Ronsard  (1).  (Remarques  de  Ménage,  p.  76.) 

Avier,  verbe.  Animer,  donner  la  vie.  —  Se  for- 
tifier. —  Enduire  d'argent  vif. 

Sur  le  premier  sens,  voyez  le  Dict.  de  Monet  aux 
mots  Avier  et  Aviver,  et  Du  Gange,  Gloss.  latin,  au 
mol  Avivare. 

Et  tout  adès  en  regardant 
Aviveras  le  feu  ardant. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  2371. 
Car  mes  voloirs  à  ce  s'avive, 
Ne  dou  faire  ne  serai  jà  lassez 
Tant  qu'en  ce  mond  vous  plaira  que  je  vive. 

Machaut,  MS.  fol.  4. 

On  lit  aviver  dans  le  Dict.  de  Cotgrave.  "  La  par- 
>'  faite  révolution  des  lumières  célestes  qui  guident, 
«  et  avivent  notre  \ie.  »  (Ponlus  de  Thyart,  Dis- 
cours du  temps,  fol.  14.) 

Avivre  un  corps,  c'est-à-dire  l'animer,  lui  donner 
la  vie.  (Dict.  d'Oudin.) 

Aviver  signiHoil  aussi  fortifier,  prendre  une  nou- 
velle vigueur,  dans  les  vers  suivans  : 
Voslre  prouesce  tout  temps  croist 
Tout  temps  avive,  qui  qu'en  poist. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  9i,  V°  col.  2. 

On  disoit  dans  le  même  sens  s'aviver  pour  s'ani- 
mer, s'exciter. 

Cilz  de  Poitou  bien  assaillent 
Et  ly  Breton  pas  ne  leur  faillent  : 
Ly  uns  pour  les  autres  s'avivent, 
Et  aux  Rommains  abatre  estrivent. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  93,  V*  col.  1. 

Enfin  avfvfr  signifioit,  selon  Monet,  «  enduire 
"  quelque  mélaird'argentvif  (2).  »  (Voy.  le  Diction- 
naire de  Monel.) 

VARIANTES  : 
AVIER.  Budé  des  Oiseaux,  fol.  113,  V». 
Aviver.  Dict.  de  Monet  et  de  Cotgrave. 
.VvivRE.  Dict.  d'Oudin. 

Avier  (s'),  verbe.  Commencer  à  vivre,  naître. 

Ung  hom  devient  bien  sainct  à  la  fin  de  sa  vie 
Aussi  lost  comme  fait  cils  qui  de  premiers  s'avie. 
Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  213 

Avieiise,  adj.  au  fém.  Envieuse.  «  Le  fabel  de 
«  sirellains,  et  dame  Aviciise  su  femme  qui  se 
<c  combattirent  h.  qui  porteroit  les  braies.  »  (Fau- 
chet,  Lang.  et  Poës.  franc,  p.  181.) 

Aviez,  part,  au  plur.  Animés ,  pleins  de  vie. 
«  Encores  que  les  jumeaux  soient  d'un  même  sexe, 
«  si  sont  ils  plus  délicats  et  foibles,  et  moins  aviez 
<'  que  les  autres.  »  (Bouchet,  Serées,  Liv.  II,  p.  205.) 
C'est  dans  ce  même  sens  qu'on  a  dit  d'un  tableau 
dont  les  figures  sembloient  animées  :  «  Comme  s'ils 
"  eussent  voulu  empescher  ceux  qui  estoieiit  aviez 
«  en  ce  tableau,  de  bouger  de  là.  »  (Bouchet,  Se- 
rées, Liv.  III,  p.  105.) 


(1)  On  trouve  en  efîet,  dans  l'édition  de  ce  poète  de  1625,  page  615:  «Incontinent  que  la  soif  futesteinteet  de  la  faim  l'ai-irfiVé 
restreinte.  »  Et  en  note  :  «  L'ardeur  de  manger,  .le  ne  sçache  point  de  mot  françois  plus  propre,  encores  qu'il  soit  mendié 
du  latin.  »  (n.e.)  -(2)Denos  jours  encore,  nrii'er  l'or,  c'est  l'étendre  après  qu'il  a  été  amalgamé  avec  le  vif-argent,  (n.  e.) 


AV 


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AV 


Avignon,  subst.  masc.  Nom  propre  de  ville, 
a  Braves  d'Avignon  »  semble  être  un  proverbe  dans 
les  Contes  de  Desperiers. 

Trois  choses  rares  en  Avignon, 
Beau  mur,  belle  femme,  et  beau  pont. 

Favin,  Théâtre  d'Honneur,  T.  I,  p.  455. 

Avigourir,  verbe.  Donner  de  la  vigueur.  (Voy. 
les  Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave ,  et  les  Œuv.  de 
Baïf,  fol.  t2G,  Y°.) 

Aviiens,  subst.  masc.  piiir.  Avignonois.  Les 
habitnns  d'Avignon.  Phil.  Mouskes,  parlant  de  cette 
ville  prise  par  Louis  VIII,  dit  : 

Et  de  ces  derniers  feroit-on, 
Par  deçà  l'aiguë  d'.\vignon, 
A  l'aheie  Saint-.\ndrieu, 
Uns  Castiel,  u  en  autre  lieu 
A  oes  le  Roy,  en  son  pooir, 
Pour  Aviiens  faire  cremoir. 

l'hil.  Mouskes.  MS.  p.  733. 

Avilance,  sîii/si.  fém.  Opprobre,  injure,  ou- 
trage, infamie. 

Arviragus  ot  grant  pesance, 
Sy  ly  sembla  grant  avilance 
Que  si  estoit  en  clos  tenus. 

Rom,  de  Brut,  MS.  fol.  39,  I\'  col.  1. 

On  a  dit  en  parlant  de  Guillaume-Longue-Epée , 
qui  étoit  en  guerre  contre  Riouf  : 

Fuir,  se  dit,  s'en  veut,  si  s'en  ira  en  France. 
Guillaume,  dit  Boton,  tu  dis  grant  avillance: 
Encor  n'i  as  féru  d'espée,  ne  de  lance, 
Et  ja  t'en  veulx  fuir. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  5G  et  57. 

VARIANTES  : 
AVILANCE.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  39,  R»  col.  1. 
Avii.LANCE.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  56. 
ViLLANCE.  Rom.  de  Rou,  MS.  de  Bombardes. 

Avilemant,  subst.  masc.  Diminution.  On  lit 
dans  le  Dict.  de  Monet  :  Avilemant  de  daurées, 
pour  rabais  de  denrées. 

Avilement,  s;(/;s^  mase.  Avilissement,  oppro- 
bre. 

Qui  blâment  les  preudomes,  à  conseil  seulement. 

Bien  sachiez  que  il  font  lor  grant  avillement. 

Doctrinal,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  101,  V  col.  3. 

Avilement  [faire  un) ,  pour  s'abaisser,  faire  un 
acte  de  bassesse;  parlant  d'un  Prince  qui  étoit 
descendu  de  son  cliar  à  la  vue  de  deux  hommes 
pauvres,  mal  vêtus  et  hideux,  pour  se  jeter  à  leurs 
genoux,  il  est  dit  qu'un  frère  de  ce  prince  : 

L'en  reprisl  durement 
De  ce  qu'il  avoit  fait  si  grand  avilement. 
Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  92. 

VARIANTES  : 
AVILEMENT.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  334,  V»  col.  2. 
AviLi-EMENT.  Rom.  de  la  Rose,  vers  2965. 
AviLLEN.NE.MENT.  Dict.  de  CotgravB. 

Aviler,  verbe.  Avilir,  dégrader,  gâter,  faire  tort 
ou  injure.  (Voy.  le  Dict.  de  Monet  au  mot  Aviler, 
celui  de  Cotgrave  au  mot  Avilener.)  Dans  le  sens 


propre,  aviler  signifie  baisser  de  prix.  On  emploie 
ce  mot  au  figuré  pour  dégrader,  avilir. 

Qui  vorroit  raison  faire,  l'en  devroit,  par  S'  Gile, 
Riche  feme  qui  sert  de  barat,  et  de  guile. 
Et  qui  pour  gaaigner  vent  son  cors,  et  avile, 
Aussi  con  un  Mesel,  chacer  fors  de  la  vile. 

Chastie  Musart.  MS.  de  S.  Germ. 

»  Les  gens  d'église  ont  si  avilenné  par  leurs 
«  coulpes,  eux  et  leur  estât,  qu'ils  sont  ja  desdai- 
«  gnez  et  des  grands,  et  des  menus  du  monde.  » 
(Al.  Charlier,  de  l'Espérance.) 

N'est  mes  cuers  tant  soit  avilennis, 
Se  il  se  velt  à  servir  atorner, 
Amors,  ke  lues  ne  le  faice  muer 
En  tote  honor,  et  tote  cortoisie. 

Vilains  d'Arras,  Po^.  MS. 

Comment  se  puet  avilonnir 
Fins  cuers,  et  loiaux  volentez. 

Poës.  MS.  du  Vatican,  n»  1522.  fol,  151,  R-  col.  2. 


Trop  s'avilonist  pucele 
Ki  d'amer  va  proiant. 

Ernous  Compains,  ToC-s.  MSS.  : 


lant  1300,  T.  III,  p.  1259. 


Guillaume  vit  le  peuple  tout  a  Riouf,  torné. 
De  ses  hoimnes  mesmes  se  vit  avionni. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  5C. 

Trop  mesprent  Dame  qui  proie 
Son  ami  avant,  por  quoi 
S'aveillevoit  ele  si'? 
Se  chil  à  le  cuer  failli. 

Pocs.  MS.  du  Vatican,  n"  U90,  fol.  140.  R-  col.  2. 

VARIANTES  : 
AVILER.  Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose.  -  Dict.  de  Monet. 
AviLLER.  Chastie  Musart.  MS.  de  S.  Germ.  fol.  106,  V°. 
AviLiER.  Fabl.  MS.  de  S.  Germ.  fol.  80. 
AviLLiER.  S.  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  87. 
AviLLiR.  Fabl.  MS.  du  R.  n°  7218,  fol.  347,  X"  col.  2. 
AviLENiR.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  858. 
AviLTiR.  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7615,  T.  I,  fol.  66,  V»  col.  2. 
Avilener.  Dict.  de  Cotgrave. 
AviLLENNER.  Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose. 
.\vilenner.  Al.  Chart.  l'Esp.  p.  389. 
AviLLANNER.  Anc.  Cout.  de  Bret.  fol.  92,  V". 
AvioNNER.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  56. 
Avilonnir.  Poës.  MS.  du  Vat.  n«  1522,  fol.  151,  R». 
AviLONiR.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  293,  col.  2. 

Aviné,  adj.  Rouge.  —  Ivre,  ou  qui  a  bu  du  vin. 

Le  premier  sens  se  lire  de  la  couleur  du  vin  ; 
de  là.  on  trouve  aviné  pour  épithète  de  cuivre,  et 
de  feu,  dans  les  Epithètes  de  Mart.  de  la  Porte. 

Aviné  ou  Eviné.  qui  a  pris  du  vin  plus  qu'il  ne 
lui  en  faut.  (Celt-IIel  de  Léon  Trippault),  ou  seule- 
ment qui  a  bu  du  vin  par  opposition  à  celui  qui 
étoit  à  jeun;  ceux  qui  estaient  avitiex-,  sont  ainsi 
désignés  pour  les  distinguer  de  ceux  qui  surent 
jeûner.  (Ger.  de  Roussillon,  ms.  p.  198.) 

Avirer,  verbe.  Regarder  ou  tourner  autour. 
»  Les  autres  jooyent  aux  tables,  et  aux  dez  sur  le 
a  pré  qui  esWDit  ■v'ert,  et  li  aucuns  musoient  sur  les 
«  fossez  parlons  et  aviroioit  la  muraille  dessus 
a  dite.  »  (Hist.  deB.  DuGuesclin,  par  Ménard,  p.  491.) 

Aviron  (1),  stibst.  masc.  Moyen.  Ce  mot  subsiste 


(1>  C'est  proprement  l'instrument  qu'on  vire,  qu'on  tourne  ;  le  châtelain  de  Coucy,  au  xii'  siècle,  et  JoinviUe,  au  xin«, 
l'emploient  dans  ce  sens.  (n.  e.) 


AV 


—  345  — 


AV 


dans  la  signification  de  Rame.  De  là  on  l'employcil 
au  figuré  pour  moyen. 

Ainsy  je  dois  voler  outre  la  nue, 
Par  l'aviron  d'une  aële  non  connue. 

Poès.  d'Araad.  Janiin,  p.  1G6. 

Avironner,  verbe.  Environner  (1).  Ainsi  on 
disoit  au  figuré. 

granz  pourelez  Vavironne. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  lU,  V"  col.  2. 

VARIANTE  ; 
AVIRONER.  S'  Bern.  Serm.   Fr.  MSS.  p.  206  et  297,  dans 
le  latin  circumdare  et  le  participe  circumamicta. 

Aviscerne,  subst.  fém.  Avicenne.  Nom  propre. 
C'est  ainsi  qu'est  écrit  le  nom  du  célèbre  Avicemie 
dans  le  ms.  intitulé:  Modus  et  Kacio,  fol.  40,  R°. 

Avisonner,  verbe.  Avoir  des  visions,  rêver.  Ce 
mot  est  pris  en  ce  sens  dans  les  vers  suivaus  : 

....  Quant  avient  que  je  sui  endormiz 
Solaz  en  ai  tout  celui  qui  doit  plaire, 
Mes  cruelment  le  m'estuet  comparer 
Au  resvoillier,  quant  je  ne  puis  trover 
Ce  qu'en  dormant  m'estuet  avisonner. 

Gates  Brullés,  Poès.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  102. 

Aviter,  verbe.  Eviter. 

Renaut  qui  amor  avite. 

Thibaut  de  Navarre,  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  228. 

Avitin,  adj.  Patrimonial.  «  Bens,  biens,  et  héri- 
«  tages  avitins,  «  c'est-à-dire  propres.  Patrimoine 
qui  vient  des  aïeux,  wilgAirement papoaux  ('2).  (Voy. 
Laurière,  Gloss.  du  Droit  Français,  les  Dict.  de 
Borel,  de  Cotgrave  et  le  Gloss.  lat.  de  Du  Cange, 
aux  mots  avitinus  et  aviatica  hœreditas.) 

Avivoir,  subst.  ma^c.  Qui  donne  la  vie,  qui 
anime.  (Voy.  les  Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Avivres  (3),  subst.  fém.  Avives.  Maladie  du 
cheval. 

Avoer.  Ce  mot  semble  corrompu  dans  le  passage 
suivant,  oi!i  il  paroit  employé  comme  substantif  ; 
Il  ne  m'échapera  devant  le  fruit  meur  ; 
Si  li  ferai  souffrir  mon  greu  ai'oere. 

Rom.de  Rou,  MS.  p.  79, 

Avoi,  Interjection  ou  exclamation.  L'Editeur 
des  Quinze  Joyes  du  Mariage,  l'e.Kplique  par 
Mon-Dieu! 

Amors  velt  que  le  tiene  à  oste  : 
Avoi,  qu'est  mes/sens  devenus? 
Ge  sui  toz  vifelz,  et  tos  chenus. 

Alexandre  et  Aristote,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  73,  R*  col.  2. 
Dant  Coûtant  d'une  part  l'acorte: 
Que  requiert  cete  Dame  ci  ? 
Avoy,  Coûtant,  por  Dieu  merci 
Ge  suis  venue  mainte  fois. 

Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  fol.  79,  V*  col.  2. 
VARIA.NTES  : 
AVOI.  Fabl.  MS.  du  R.  n°7989,  fol.  213,  V  col.  I. 
Avoy.  Les  Quinze  Joyes  du  Mariage,  p.  45. 

Avoie,  subst.  fém.  Couleuvre.  (Voy.  les  Dict.  de 
Monnet  et  de  Cotgrave.) 


Avoieinent,  subst.  masc.  Inslitralion.  C'est 
proprement  l'action  de  mettre  sur  la  voie,  indica- 
tion, renseignement,  instigation,  suggestion.  «  Galle- 
«  tiault  prie  à  la  Damoiselle  qu'elle  îuy  dye  nouvelle 
«  de  Lancelot,  et  aucun  avoyement,  et  elle  dist 
«  qu'elle  n'en  sçavoit  rien.  »  (Lancelot  du  Lac. 
T.  1,  fol.  161.) 

Ce  mot  avoiement  est  mis  dans  le  passage  suivant 
pour:  instigation,  suggestion;  parlant  de  ceux  qui 
étoient  choisis  pour  élire  les  echevins  de  la  ville  de 
Douay  :  «  avant  qu'il  se  partent  des  Eglises,  jureront 
>c  main  levée  contre  les  sainz,  qu'il  ne  recevront 
«  parole,  escripture,  avoiement  d'autrui,  pour 
«  aucun  faire  Echevin.  »  (Ordon.  des  Rois  de  Fr.) 

VARIANTES    : 
AVOIEMENT.  Ordon.  des  Rois  de  France,  T.  IV  p    131 
Avoye.ment.  Assises  de  Jérusalem,  p.  193. 

Avoier.  Mettre  sur  la  voie,  s'acheminer,  rentrer 
dans  le  droit  chemin.  —  Diriger,  conduire.  — 
Aboutir.  —  Instruire,  enseigner.  —  Ecarter  et 
peut-être  égarer,  mettre  hors  de  la  voie. 

Sur  le  premier  sens,  voy.  les  Dict.  de  Borel  et 
de  Monet,  au  motayo?«';les  Dict.  de  Aicot,  d'Oudin, 
et  le  Gloss.  de  Marot,  au  molavoyer. 

Il  est  au  propre  et  au  figuré  dans  les  deux  pas- 
sages suivans  : 

Prist  congié;  chascun  &'avoie  à  la  maison. 

Machaut,  fol  216,  V»  col.  3. 
La  fin  a  requis  à  ta  court  jugement 
Sommes  de  l'acort,  Bon  Roy,  que  l'on  ly  face 
Avoyer,  se  veult  que  tu  ly  face  grâce. 

Ger.  de  Roussillou,  .MS.  p.  25. 
Bien  faire  sont  avoié. 

Athis,  MS.  fol.  76,  R»  col.  2. 

Ce  mot  a  été  employé  dans  le  sens  de  diriger, 
conduire,  mener. 

Biaus  servirs,  et  solïrance, 

Fait  fin  ami  auoier, 

Et  s'onor  croistre,  et  haucier. 

Gilbert  de  Bernevillo,  Poès.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p  212. 

Dieu  ait  mercy  de  Iuy,  et  ou  les  siens  l'ame. 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  15i. 

Dans  le  sens  d'arriver,  aboutir,  on  a  dit  : 

Dame  ou  tos  biens  s'aboie. 

Pierre  Kins  de  le  Coupele,  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  111,  p.  1083. 

Ce  mot  a  signifié  instruire,  enseigner. 

S'il  ne  vous  en  set  conseillier, 
N'ulz  ne  vous  en  peut  avoier. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  66,  R'  col.  i. 

On  lit  aidier  dans  le  ms.  de  M.  de  Bombarde. 
D.  Maitène  dans  son  Gloss.  explique  ce  mot  par 
égarer. 

Il  est  employé  pour  écarter,  repousser  ou  dissi- 
per, dans  ces  vers  (4)  : 

En  leur  venir  si  les  effroient 
Come  granl  pièce  les  avoient. 

Athis,  MS.  fol.  82,  V  col.  2. 


(1)  Comme  chercher  (circare)  dérive  de  circa;  ce  mot  a  le  sens  de  parcourir:  «  Ainsi  avironnoient-ïls  le  pays.  »  (Froissart 
éd.  Kervyn,  \VI,  227.)  (n.  e.)  -  (2)  «  Biens,  abilins  vulgairement  dits  pappoaux.  »  (Coutume  de  Dax,  titre  I,  art.  1.)  Ce 
dernier  mol  vient  du  grec  nariTKooç,  patrimonial,  (n.  e.)  -  (3)  C'est  un  engorgement  des  glandes  parotides.  L'étyraologie 
est  1  arabe  ad-ckiba  (même  sens).  (N.  e.)  -  (4)  Avoier  signifiait  plutôt  suivre  la  bonne  route  :  i^  Si  vous  poriés  aussi  bien 
fourvoyer  que  Qivoyer.  »  (Froissart,  éd.  Kervyn,  V,  67.)  (n.  e.)  l'  ■> 


44 


AV 


—  346 


AV 


Celui  qui  me  eonnoist  et  voit 
Qu'il  me  consuet,  et  qu'il  tn'avoil 

Fabl.  MS.  du  Roi,  n"  7218,  fol.  U2,  R'  «ol.  1. 

VARIANTES  : 
AVOIER.  Dict.  de  Borel  et  de  Monet. 
Anûyer.  Lisez  Avoier.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  176. 
AviER.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  15.  —  Dict.  d'Oudin. 
AvovER.  Ger.  de  RoussiUon.  p.  25.  —  Gloss.  de  Marot. 
Ravoier,  Ravoyer,  Reavoyer. 

Avoiié,  participe.  Rempli,  comblé.  —  Instruit, 
appris. 

Tiels  fu  l'abbé  de  S'  Denis 
Clers,  débonnaires,  et  ounis, 
Et  de  tous  les  biens  avmié. 

Ph.  Wonakes,  US.  p.  "09. 

Avoillée,  participe.  Eveillé,  vigilant. 

Si  soyens  doisormais  avoillié  et  adroit 
D'amender  en  ce  monde.... 
(Et  plus  bas  ;) 

Ainsin  poult  ly  bon  dux  Girart  estre  avoillie: 
Et  d'amender  ses  vices  de  cuer  apparoillié. 

Ger,  de  RoussiUon,  MS.  p.  190. 

Avoine,  participe.  Nourri  d'avoine. 

Li  miens  i  ert  dois  ier  (1)  avoine. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7315,  T.  II,  fol.  151,  R°  col.  1. 

Avoii*,  suhst.  musc.  Biens,  facultés,  richesses. 
(Voy.  le  Gloss.  du  P.  Martene,  (Jloss.  de  Marot, 
Gloss.  de  Du  Gange,  sur  Yillehardouin,  Gloss.  sur 
les  Coût,  de  Beauvoisis,  Gloss.  sur  le  Rom.  de  la 
Rose  et  Dict.  Etym.  de  Ménage,  au  mot  Avoir.  — 
Yoy.  aussi  le  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  aux  mots 
Averium  et  Afferi,  et  le  Gloss.  sur  les  Coût,  du 
Beauvoisis,  au  mot  Aver.) 

Large  d'avoir,  et  tenant  de  Merchi. 

Hughes  de  Brogi,  Poes.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  999. 
Il  fist  tant  en  pou  de  temps 
Son  avoir  et  par  son  sens 
Qu'il  ot  G  et  XL  voeles. 

Wachaut,  MS.  loi.  231,  V-  col.  2. 
Science  vault  mieuLx  que  ne  fait  avoir, 
Car  tu  en  puez  aidier  toy  et  les  tiens. 

Poês.  MSS.  d'Eusl.  Desch.  fol.  H8,  col.  3. 
J'ay  toujours  oï  dire 
Que  li  cors  gaaigne  Vavoir. 

Li  Cuens  de  Brel.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  76. 

Fy  d'avoir  qui  n'a  joie, 

Et  d'amours  sans  monnoye. 

Proverbe  dans  le  Dict.  de  Cotgrave. 

Remarquons  les  expressions  suivantes  : 

1°  Vif  avoir  se  disoit  pour  animaux  vivans. 
(Voy.  Avers.) 

2°  Avoir  en  terre,  non  extrayé,  c'est-à-dire  biens, 
choses  enfouies  dans  la  terre.  (Voy.  la  Coirt.  de 
Hainaut,  au  :Nouv.  Goût.  gén.  T.  II,  p.  145.) 

3°  Avoir  de  pois,  ou  de  poids  Ci),  c'est-à-dire  toutes 
choses  ou  marchandiscsemballéessusceptibles  d'être 
pesées.  «  Tout  avoir  de  pois,  pour  chascun,  vingt 
«  sols  quatre  deniers,  et  en  seront  creuz  les  mar- 
«  chands,  ou  les  conduiseurs  de  dire,  par  leur 
«  serment,  ce  qui  sera  ez  balles  sans  defardeler.  » 
(Ordonn.  des  Rois  de  Fr.  T.  I,  p.  783,  notes,  col.  2.) 

Et  pour  ce  que  marchandise 
Estoit  toute  perdue  à  Pise 


A  Venise,  à  Rome,  à  Gennes 

De  draps  d'or,  de  soye  et  de  pennes 

O'avoir  de  pois,  d'espicerie. 

Machaul,  MS.  fol.  233,  R-  col.  2. 
Avoir  de  pois,  ou  saffran  dort. 

Id.  fol.  220,  V-  col.  2. 

4°  Avoir  de  prix,  c'est-à-dire  marchandises  qu'on 
peut  apprécier,  qu'on  perut  marchander.  ••  Les  drap- 
«  piers  en  gros,  ou  en  détail,  les  espiciers,  frippiers, 
"  cordiers,  vendeurs  de  hanaps  et  tous  autres 
"  marchands  d'avoir  de  prix,  pourront  prendre  de 
«  leurs  marchandises,  et  en  leurs  marchandises 
"  deux  sols  parisis  pour  livre  d'acquest.  •  (Ordonn. 
des  Rois  de  France,  T.  II,  p.  364.) 

Avoir  à  clers,  toison  à  chien 
Ne  doivent  pas  venir  à  bien. 

Fabl.  MS.  du  R.  n"  7615,  T.  1,  fol.  72,  V  col.  2. 

variantes  : 
AVOIR.  Gloss.  de  Du  Gange  sur  Villeh. 
AVER.  Gloss.  sur  les  Goût,  de  Beauvoisis. 
Aveir.  Loix  Norm.  art.  xxxi  et  XLI. 
AvoiRE.  Coquillart,  p.  129. 
Avers.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7989,  fol.  75. 

Avoiraux.  Il  faut  peut-être  lire  a  voir  aux, 
a  vers  iaux,  pour  avoir  eux,  à  les  voir,  ou  peut- 
être  sont-ce  des  adjectifs  qui  signifient  avare. 

Les  Biars  i  fu  avoiraux. 

Rom.  de  Rou.  MS.  p.  357. 

On  lit  averiaux  dans  une  autre  copie. 

variantes  : 
AVOIRAUX.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  357. 
Averiaux.  Ibid.  autre  MS. 

Avoisinement,  subst.  masc.  Proximité,  voi- 
sinage. "  Les  herbes,  et  plantes  sont  affectionnées 
"  les  unes  aux  autres,  et  entre  autres  n'en  y  a  de 
»  si  ardente  qu'est  le  palmier,  desquels  ils  sont 
«  deux  espèces,  masle  et  femelle,  et  que  le  masle 
«  convoite  Y  avoisinement  de  sa  compagne  ;  que, 
«  s'il  arrive  que  la  femelle  soit  plantée  loin  du 
«  masle,  il  dessèche  peu  à  peu.  »  (Du  Verdier, 
Bibliolh.  p.  5.) 

Avoisiner,  verbe.  Etre  proche,  être  voisin  ; 
approcher.  (Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot 
vicinare  et  le  Dict.  de  >'icot.) 

De  grasse  cuisine 

Pauvreté  s'avoisine.  '" 

Prov.  dans  le  Dict.  de  C  'tgra\e. 

Avoiti'ement,  subst.  masc.  Avortement.  (Voy. 
Dictionnaire  de  Nicot.) 

Avolé,  subst.  et  adj.  Etourdi.  —  Etranger.  — 
Bâtard. 

Au  premier  sens  avolé  signifie  un  étourdi,  un 
homme  qui  ne  prend  conseil  que  de  lui-même, 
selon  le  Dict.  de  Borel,  et  Celthel.  de  Léon  Trip- 
pault,  au  mot  Avolé. 

Ce  mot  signifioit  aussi  étranger  et  on  le  trouve 
en  ce  sens  sous  les  diverses  orthographes.  Il  signi- 
fioit proprement  qui  est  venu  d'ailleurs,  qui  n'est 
pas  originaire  du  lieu  où  il  s'est  établi.  (Voyez  Du 


(1)  Dès  hier.  —  (2)  Les  Anglais  donnent  à  la  livre  de  16  onces  le  nom  d'nvoii-  du  poids,  (n.  e.) 


AV 


-  347  — 


AX       AY 


Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Advoli.)  «  Ceux  qui 
«  estoient  ainsi  bannis,  dont  il  y  avoit  foison,  se 
«  tenoyent  à  S'  Orner  le  plus,  et  les  appelloit-on 
«  avoués  (1).  »  (Froissart,  éd.  Kervyn,  II,  417.) 
«  Par  ma  foy,  dist-il,  c'est  meschef  de  celluy  avollé, 
«  que  l'on  ne  scet  qui  il  est,  qui  emporte  honneur  de 
«  tous  les  chevaliers  de  la  grant  Bretaigne.  »  (Per- 
oeforest,  Vol.  VI,  fol.  115.  —  Voy.  les  Poës.  mss.  de 
Froissart,  p.  122,  col.  4.—  Ph.Mouskes,  ms.  p.  779.) 

Ce  mot  est  employé  comme  épithète  d'étranger 
dans  les  Œuv.  de  Baïf,  fol.  177. 

On  trouve  avolé,  expliqué  par  Bâtard,  dans  l'Hist. 
du  Théâtre  français,  T.  III,  p.  492,  et  il  est  employé 
en  ce  sens  dans  Perceforest,  fol.  110. 

VARIANTES  : 
AVOLÉ.  Celthel.  de  Léon  Trippault. 
Avollé.  Perceforest,  VoL  VI,  fol.  115,  V»  coL  1. 
Advollé.  Fabri,  Art.  de  Rhét.  livre  1,  fol  149,  R". 

ESVOLÉ,  EVOLLÉ,  EVOLLÉE. 

Avoleinent,  substantif  mascuUn.  L'action 
d'accourir,  de  venir  en  volant.  (Voy.  les  Dict.  de 
Nicot  et  d'Oudin,  au  mo\,  Avolement.) 

VARIANTES  : 
AVOLEMENT.  Dict.  de  Nicot  et  d'Oudin. 

ESVOLEMENT. 

Avoleiiter,  verbe.  Inspirer  de  la  bonne  volonté. 
Avoir  bonne  volonté. 

Ce  mot  s'est  dit  dans  le  sens  de  gagner  le  cœur, 
mettre  dans  ses  intérêts.  <•  Ce  fut  fait  sur  l'espérance 
«  que  le  dit  duc  de  Bretaigne  viendroil  servir  le 
«  Roy  avec  ses  Bretons,  et  déclairroit  les  Oiiéannois 
«  ausquels  il  avoit  promis  de  les  servir  et  pour  lui 
«  avolenter.  »  (Monstrelet,  Vol.  I,  fol.  99.) 

Il  a  été  employé  aussi  pour  :  avoir  bonne 
volonté  : 


De  lui  servir  s'avolenloU. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7211 


,  fol.  51.R-C0I.  !!. 


VARIANTES  : 
AVOLENTER.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  57. 
AvouLENTER.  Monstrelet,  Vol.  II,  fol.  128. 

Avoler,  verbe.  Venir  en  volant,  accourir.  (Voy. 
le  Dict.  de  Nicot.)  «  Lors  luy  estant  à  la  dite  fenestre 
«  vint  soudainement  delà  cité  avollanl  la  pierre 
«  d'un  veuglaire  qui  ferit  ù  la  fenestre  ou  estoit  le 
«  dit  comte.  «  (Monstrelet,  Vol.  I,  fol.  99.) 

.  .  .  S'aucuns  bcsoings  te  court  seure, 
Vrais  amis  est  qi>!  en  celle  heure 
Aporte  le  sien,  et  avole. 

Poës.  MSS.  d'Eust.  Desch. 

VARIANTES  : 
AVOLER.  Dict.  de  Nicot. 
Advoler. 
AvoLLER.  Monstrelet,  Vol.  II,  fol.  39,  R«. 

ESVOLER. 

Avon,  subst.  musc.  Rivière.  (Voy.  le  Dict.  de 
Borel,  2'  addit.  au  mot  Aven.) 

\\orte,  participe.  Avortée  au  fém.  On  lit  dans 
la  complainte  d'Alain  Chartier  : 

Quand  sa  Dame  fut  avorte. 


Avorter,  verbe.  Haïr.  —  Faire  avorter. 
Ce  mot  a  signifié  haïr.  (Voyez  le  Dict.  de  Borel.) 
On  disoit  aussi  avorter  pour  faire  avorter,  et, 
dans  le  sens  moral,  rendre  inutile.  «  Avorte  le  fruict 
«  dans  le  ventre.  »  (Sagesse  de  Charron,  p.  114.) 
«  Accidents  qui  rti'Of/e?ii  les  fruits  de  la  dite  trefve.  » 
(Négociât,  de  Jeannin,  T.  II,  p.  470.) 

Avortonne,  subst.  fém.  C'est  le  féminin  d'avor- 
ton. Terme  d'injure.  Satan,  parlant  de  S"  Barbe  : 
«  Barbe  la  faulce  avortonne.  »  (Hist.  du  Théàt. 
franc.  T.  II,  p.  73.) 

Avouiller,  verbe.  Ouiller,  remplir. 

Avouillette,  subst.  fém.  Entonnoir. 

Avoytrer,  verbe.  Avorter. 

VARIANTE   : 
AvoRTiR.  J.  le  Maire,  lUustr.  des  Gaules,  livre  I,  p.  55. 

Axis,  subst.  musc.  Essieu.  Froissart,  parlant  de 
Phaéton  emporté  par  les  chevaux  de  son  père,  dit  : 

Li  (2)  axis  ront,  le  char  renverse 
Pheton  cheit  la  teste  enverse. 

Poes.  MSS.  de  Froissart,  p.  184,  col.  2. 

On  trouve  assis  pour  essieu,  dans  le  Glossaire  du 
P.  Labbe,  p.  490. 

VARIANTES  : 
AXIS.  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  184,  col.  2. 
Assis.  Labbe,  Gloss.  p.  490. 

Ay.  Diphthongue  que  Des  Accords  reproche  aux 
Parisiens  de  prononcer  comme  s'il  y  avoit  oué. 
(Voyez  Des  Accords,  des  Equivoques, 'fol.  C8.)  Pas- 
quier  remarque  que  Ramus  la  prononce  comme  un 
e  pur.  (Voyez  les  Lettres  de  Pasquier,  T.  I,  p.  137.) 
On  employoit  indistinctement  aij  et  ax  pour  al. 
Ainsi  Lanval  s'appelloit  aussi  Lanvax  et  Lanvaij. 
(Voy.  Fabl.  ms.  du  R.  n"  7989,  fol.  50,  V-  col.  1.) 

Ayde,  subst.  fém.  Ide.  On  lit  en  ce  sens  :  «  En 
«  l'uiliesme  ayde  du  mois  d'aoust.  »  (Chronique 
françoise  de  Nangis,  année  1224.) 

Ayemans,  subst.  masc.  plur.  Aimant.  On  lit 
dans  Perceforest  :  "  Les  fli/6'?»flHs  auraient  le  fer.  » 
(Perceforest,  Vol.  II,  fol.  35,  R"  col.  1.) 

Ayes,  subst.  fém.  Haie. 

Vignes  n'y  a,  ne  rivière,  ne  gloe, 

N'oyes,  buisson,  pour  les  leups  demourer. 

Poës.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  178,  col.  3. 

Aygle.  Ce  mot  semble  une  exclamation  ou  peut- 
être  un  nom  propre,  dans  ce  passage  : 

Aygle,  j'ai  toujotirs  appris 
A  estre  loyaux  amis. 

Chans.  MSS.  du  C"  Tliib.  p.  60. 

Aymant,  subst.  masc.  Diamant.  (Voyez  le  Dict. 
de  Borel.  —  Marbodus,  col.  1640.) 

Vers  raoy  la  truis  plus  dure  qn'aymant. 

Richard  de  Fomival,  Poés.  MSS.  av.  1300,  T.  I,  p.  124. 

Aymes,  exclamation.  Elle  est  souvent  employée 


(1)  On  surnommait  ainsi  les  chevaliers,  écuyers  et  bourgeois  que  Jacques  d'Artevelde  exilait  de  Flandre,  (n.  e.)  — 
(2)  C'est  la  forme  latine  transportée  en  français,  (n.  e.) 


AZ 


—  348 


AW 


comme  exclamalion  de  douleur,  dans  rilisl.  (les  Trois 
Maries,  en  vers,  mss.  (Voy.  aussi  Molinet,  p.  155.) 

Ayiî  de  gré.  Cette  expression  semble  signifier 
de  plein  gré.  On  lit  dans  Britton,  des  Loix  d'Àngie- 
terre  :  «■  Par  son  inin  de  gré  et  ove  sa  franclie 
«  volunté.  »  (Fol.  '2CÔ,  V".) 

Aynncs  (quarante).  11  faut  lire  quarantaines  en 
un  seul  mot,  pour  quarantaine  que  l'auteur  a 
séparé  afin  d'avoir  une  syllabe  de  plus.  (Voyez  le 
Calendrier  de  Molinet,  p.  195.) 

Ayrer,  verbe.  Prendre  l'air. 

Azelle,  subst.  Espèce  d'injure.  Machaut,  pour 
exprimer  une  multitude  innombrable,  a  dit: 

Et  autant  comme  de  poil  a 
Sur  quanque  Dieu  onques  créa 
Comme  il  est  plumes  et  fincelles 
Mouches,  mouchettes,  et  azelles. 

Machaut,  MS.  fol.  209,  Y-  col.  2. 

Azemin,  ndj.  Persan.  Altération  du  mol  az-erni 
qu'on  a  souvent  employé  en  ce  sens.  De  là,  on 
trouve  :  «  ouvrage  à'a-^emine  »  pour  ouvrage  per- 


san; dans  Rabelais,  T.  IV,  p.  3,  on  lit:  «  porfilée 
a  d'oràouvraiged'aiewiitte.  »  Onlitencoredansun 
autre  endroit  du  même  auteur  :  "  fol  A'a::,emine.  » 
(Ibid.  p.  207.  —  Voy.  Le  Duchat  sur  Rabelais,  loc.  cit.) 

Aziman,  subst.  masc.  Aimant.  (Voy.  Ayemans.) 

Awan,  adv.  Désormais,  ci-devant.  Ce  mot  sem- 
ble formé  du  latin  hoc  anrio.  11  exprime  indistincte- 
ment le  passé  et  l'avenir,  désormais  et  ci-devant 
On  a  vu  ces  deux  significations  contraires  au  mot 
Avant.  Borel,  au  mot  Auwan,  l'explique  par:  celte 
année. 

Grans  amis,  et  mescheance 

Li  puis  awan  avenir 

Lie  est  ke  me  fait  languir. 

Jehan  do  Renli,  Poès.  MS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1195. 

VARIANTES  : 
AWAN.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1195. 
AvAN.  Poët.  MS.  du  Vatican,  n»  1522,  fol.  153,  R»  col.  1. 
AWEN.  Poës.  MSS.  de  Froissart,  p.  281,  col.  2. 
Auwan.  Poës.  MS.  du  Vatican,  n°  1490,  fol.  137,  V». 
AuwEN.  Dict.  de  Borel,  2'^^  add. 

Auv.vN-MES.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  48,  R»  col.  1. 
Oen,  Ouan,  Ouen. 


B 


B 

B.  Cette  lettre  oloit  un  mol  dans  les  expressions 
suivantes  : 

1°  B  ne  R  (1).  Façon  de  parler  qui  répond  à  la 
nôtre  :  Ni  A  ni  B. 

Je  ne  cognols  ne  B  ne  R. 

Froiss.  Poës.  MSS.  fol.  288,  V. 

2°  Marqué  au  B.  Façon  de  parler,  pour  désigner 
ceux  qu'on  peut  qualiiier  d'un  nom  qui  commence 
par  un  B.  «  Ceux  qui  sont  marqués  au  B,  comme 
«■  Bastards,  Bossus,  Bigles,  Boiteux,  Borgnes,  etc., 
«  sont  ordinairement  vicieux.  »  (Oudin,  Gur.  fr.) 

3°  B  carre,  B  quarre.  Bécarre,  B  mol.  Bémol. 
Expression  connue  en  musique.  Elle  a  donné  lieu 
aux  expressions  proverbiales  ci-après  :  Fou  de  B 
quarre  et  de  B  mol;  fou  à  toute  outrance.  (Voy. 
Rabelais,  T.  111,  p.  202.)  Par  Becare  et  par  Bémol 
et  à  toute  game.  (Voy.  Du  Tilliof,  Hist.  delà  Fesle  des 
Fous,  p.  125.)  On'liU'lbid.  p.  123):  «  Poète  par  Becare 
«  et  Bémol.  »  Nous  écrivons  aujourd'hui  B  carre  (2). 

i°  Passer  de  B  dur  en  B  mol.  Façon  de  parler 
empruntée  à  la  musique,  et  qui  souvent  avoil  une 
signification  indécente.  Elle  se  disoit  aussi  pour 


BA 

passer  d'un  discours  à  un   autre ,    extravaguer. 
(Oudin,  Cur.  fr.  p.  25.) 

5°  Mettre  quelqu'un  de  Bémol  enBédur,  c'étoitle 
rendre  plus  misérable  qu'il  n'étoit  auparavant. 
Le  conseil  que  le  Roy  ot  dur 
Nous  mis  de  Bémol  en  Bedur. 

Hist-  de  Fr.  à  la  suite  du  R.  de  F.  MS.  du  R.  n-  6812,  fol.  82. 

On  a  retranché  la  lettre  B  d'un  grand  nombre 
de  mois  où  elle  s'employoit  autrefois.  Ainsi  on  écri- 
voit  lebvres  pour  lèvres,  debvons  pour  devons,  etc. 
(Mém.  Du  Bellay,  T.  VI,  p.  414.) 

Baa.  C'est  une  exclamation  remplacée  par  celle 
de  ha  !  ha  !  (Voy.  les  Contes  de  Des  Per.  T.  I,  p.  140. 
—  Fabl.  MSS.  de  S"  Germ.  fol.  i'i,  R".) 

VARIANTES  : 
BAA.  Contes  de  Des  Per.  T.  I,  p.  140. 
Banon.  Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  fol.  46,  R». 

Baaillemeut,  subst.  masc.  L'action  de  bâiller, 
bâillement. 

Comblé  d'ennuy,  vuide  de  tous  esbats 
Et  de  douleur  portant  sanglots  et  baatx. 

.MSS.  des  Mém.  de  Paris,  cités  par  Borel.  Dict.  2*»  add. 


(•1)  C'est  la  rime  qui  a  fait  choisir  ces  deux  lettres.  On  lit  en  effet  au  vers  suivant  :  «  Mais  .je  sçai  bien  qu'en  celle  terre 
N'avéra  paix,  ne  ou  pays.  Se  le  poovoir  des  flours  de  lys  Ne  vient  la  chose  refourmer.  »  ^Pastourelle.)  (N.  e.)  —  (2)  On 
plaisantait  encore,  au  .wii'  siècle,  sur  le  bécarre  et  le  bémol  ;  voir  Molière,  Sicilien,  se.  4.  Dans  la  série  des  lettres  prises 
comme  notes  de  musique,  a  est  le  la.  b  le  si,  etc.  Le  plain-chant  abaisse  souvent  d'un  demi-ton  le  si,  qu'on  représente 
alors  par  un  b  arrondi,  nommé  bé  mol  ;  quand  au  contraire  le  si  était  naturel,  on  le  représentait  par  un  b  carré,  ou  b  dur. 
Depuis,  le  bécarre  est  devenu  le  sign^  de  toutes  les  notes  remises  au  ton  naturel,  comme  le  bémol  est  devenu  celui  de 
toute  note  baissée  d'un  demi-ton.  (n.  e.) 


BA 


—  3-i9  - 


BA 


VABUNTES    : 
BAAILLEjrENT.  Oudln,  Dlct. 
Baat.  Borel,  2"  add.  p.  462. 

Baailler  (1),  verbe.  Bâiller,  avoir  la  bouche 
ouveile.  —  Elre  oisif. 

Sur  le  premier  sens ,  voyez  Oudin  et  Rabelais , 
T.  1,  p.  102  et  132. 

Ou  s'est  servi  de  ce  mot  pour  exprimer  l'air  cons- 
terné de  quelqu'un  qui  a  peur. 

Li  couart  de  peur  boaiUent, 

Et  li  hardis  des  portes  saillent,  etc. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  223,  V'. 

Comme  l'inaction  fait  naître  l'ennui ,  et  l'ennui 
l'envie  de  bâiller,  de  là  baaster  s'est  employé  pour 
être  oisif. 

Un  seul  d'entr'eux  plus  ne  baaste  (2), 
Vers  le  pont  destelenf  a  haste  : 
Granl  erre  celé  part  remenent 
Li  autre  qui  le  contretiennent. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  235,  F.'. 

VARIANTES  : 
BÂ\ILLER.  Oudin,  Dict. 
Baisler.  Rabelais,  T.  I,  p.  102. 
Baaster.  G.  Guiarl,  MS.  fol.  235. 
Bayer.  FouiUoux,  Fauconnerie,  fol.  68,  R». 

Baaingne,  suhst.  fém.  Bohème. 

Son  fd  qui  vint  en  Alemaingne 
Tenu  fu  par  Roy  de  Baaimjne  (3), 
Moult  palle  l'en  de  sa  proesce, 
Envorque  tout  de  sa  largesse. 
Hisl.  de  Fr.  à  la  suile  du  Rom.  de  Fauvel,  MS.  du  R.  n'  0812,  fol.  82. 

Baance,  sitbst.  fém.  Espérance,  attente. 

J'ay  servi  si  longuement 
En'pardon,  et  en  baanche. 

Poét.  MSS.  avant  1300,  T.  111,  ji.  1195. 

Mais  paor  ai  qu'ailiers  n'ait  sa  baiaiice. 

Ibid.  ï.  IV,  p.  1195. 

On  disoit  dans  lemèmesensa&eeirtHCC,  abajance, 
etc.  Un  se  servoit  particulièrement,  en  termes  de 
jurisprudence,  des  droits  en  litige,  des  droits  non 
encore  échus,  mais  qui  doivent  naturellement 
écheoir  ;  ils  se  noramoient  des  droits  en  abcianee. 
(Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Abeynntia.)  Ces 
acceptions  viennent  toutes  du  verbe  Baër,  dans  la 
signification  d'aspirer. 

variantes  : 
BAANCE.  Poës.  MSS.  avant  1300,  ï.  IV,  p.  1061. 
Baanche.  Ibid,  T.  III,  p,  1190. 
Baiance.  Ibid.  T.  IV,  p.  13il. 

Abeeianck.  Du  Gange,  Gloss.  latin,  au  mot  Abajanlu'. 
Abeyance.  Ibid. 
Béement,  subst.  iiiasc.  Cotgrave. 

Baates,  subst.  Bataillons  ou  sentinelles.  Parlant 
de  deux  armées  en  prée^'nce.  Alhis  a  dit  : 

Les  baates  se  sont  choisis. 

Alliis,  MS.  fol.  40,  R' col.  1. 


Baates  est  peut-élre  une  faute  (4)  pour  batailles, 
escadrons,  bataillons,  ou  peut-être  faut-il  lire 
Waites,  c'est-à-dire  guettes,  sentinelles.  On  lit 
Espies  dans  le  ms.  du  Roi. 

Babat  (5),  subst.  masc.  (Voy.  le  Dict.  de  Cotgr.) 
Ce  mol,  comme  on  le  verra,  en  a  produit  beaucoup 
d'autres;  il  s'est  formé  vraisemblablement  de  la 
première  articulation  des  enfans  qui  n'ont  pas 
encore  la  facilité  de  parler. 

Babeau  (6),  subst.  masc.  Fête,  cadeau. 

Il  vous  faut  mener  par  rivages, 
En  beau  temps  aux  pèlerinages, 
Et  vous  donner  tant  de  babeaulx. 

La  Cbasse  et  Départ.  d'Ajnours,  p.  167. 

Babelé,  adj.  Turlupiné,  tourné  en  ridicule. 

chascune  est  là  babelée, 

Mais  au.x  maris  en  est  la  coulpe. 

Eust.  Uesch.  Poés.  MSS.  fol.  555,  col.  1. 

Babelu,  subst.  masc.  Railleur,  plaisant.  Ce  mot 
ne  nous  paroit  avoir  été  employé  que  dans  cette 
expression  :  (aire  le  babelu,  c'est-à-dire  fairejle 
railleur,  le  plaisant  : 

On  rit,  on  fait  le  babelu. 

Coquillart,  pag*  169. 

Babicbon,  subst.  masc.  Espèce  de  petit  chien. 
C'étoit  une  espèce  de  chiens  petits  et  à  poils  longs, 
selon  le  Dict.  d'Oudin. 

Babille,  suhst.  fém.  Babil.  (Voy.  le  Glossaire  de 
Marot  et  le  Dict.  d'Oudin.)  On  lit  :  commancher  la 
babilloire,  pour  dire  babiller,  dans  les  Contes  de 
Gholières,  fol.  203.  Nicot,  dans  son  Dictionnaire,  et 
Bouchot,  dans  ses  Sérées,  livre  I,  p.  438,  dérivent 
le  mot  babil,  de  Babel  (7). 

VARIANTES  : 
BABILLE.  Glossaire  de  Marot. 
Babillerie.  Oudin,  Dictionnaire. 
Babilloire.  Contes  de  Gholières,  fol.  263,  V». 

Baboc  (ordre  de  la).  Cet  ordre  singulier,  com- 
posé de  buveurs,  subsistoit  vers  le  règne  de 
Charles  VI. 

Un  ordre  scay  de  nouvel  p^^t.i.hlie, 

Dont  maintes  gens  se  doivent  foi\t,  loer, 

Et  où  l'on  doit  boire  jusqu'à  la  lie,    ■"■  ' 

Tant  qu'es  henaps,  ne  doit  riens  derT  dire  -.^ 

Et  si  doit  on  toudis  du  pot  verser     rlu   mariaffe 

Vin  es  vaisseaulx,  l'un  l'iiutre  reque  ,^        / 

Les  requerans  y  doivent  obéir 

Sanz  refuser,  tout  boire,  et  sanz  esc        : 

Ainsi  se  doit  cest  ordre  maintenir,    '" 

Qui  s'appelle  l'ordre  de  la  biihiic. 

Eust.  Desch.  Po.i's.  MSS.  T.  II,  fol.  241. 

Baboles,  subst.  fét".  Bijoux,  joyaux.  —  Flat- 
teries. —  Bagatelles. 


(1)  L'étymologie  est  badaculare,  forme  allongée  de  badare.  (n.  e.)  -  (2)  H  faudrait  peut-être  rapprocher  cette  forme  de 
baaier,  guetter,  observer  à  dessein  de  nuire  :  «  Mais  ja  ne  si  baateni  Que  l'om  ne  le  prenge  es  sons  laz.  »  (Chron.  des  ducs 
de  Norm.,  éd.  F.  Michel,  I,  vers  14907.)  Et  au  vers  15020:  «  Celui  qui  a  toz  jors  baaie  Cornent  ta  corone  t'abate.  »  Voir 
Baaies.  (N.  E.)  -  (3)  On  trouve  aussi  Behaujne.  (N.  E.)  —  (4)  Ce  n'est  pas  une  fiute,  car  nous  avons  d'autres  exemples  du 
mot:  «  Quant  les  baates  de  lator  Virent  les  enseignes  deslors.  n  (Chron.  de  Norm.,  id.,  II,  v.  18590.)  On  Irouve  en  provençal 
et  dans  les  chartes  latines  du  Midi  la  forme  bada.  (n.  e.)  -  (5)  Ne  faut-il  pas  en  rapprocher  le  mot  baba,  sorte  de 
pâtisserie  ?  (N.  E.)  —  (6)  Babeau  doit  être  une  ancienne  forme  remplacée  au  xvi=  siècle  par  babiole,  venu  d'Italie.  La  racine 
serait  une  corruption  de  babulus,  nigaud.  (N.  E.)  -  (7)  Il  vaut  mieux  voir  là  une  onomatopée  qui  se  trouve];en  d'autres 
langues  ;  babbelen  en  allemand,  (n.  e.) 


BA 


—  350 


BA 


Sur  le  premier  sens  :  l)ijoux,  joyaux,  voyez  Du 
Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  baiibella,  qui  a  la  même 
signification. 

On  disoit  aussi  haboles,  pour  fiatteries,  douceurs 
feintes  :  "  Ce  sont  paroles  courtoises,  et  emmielées 
«  desquelles  on  séduit  la  simplicité  des  personnes 
«  non  déniaisées.  »  (Epitli.  de  Martin  delà  Porte.) 

Nous  disons  encore  babioles,  pour  bagatelles.  On 
trouve  en  ce  même  sens ,  baboyes.  «  Tout  le  reste 
«  n'est  que  baboijes.  »  (Sagesse  de  Charron,  p.  473.) 
On  disoit  de  même  :  «  l'entretenoyent  de  jongles  et 
«  de  bobes  (1).  »  (Froissart,  livre  IV,  p.  ■22.) 

VARIANTES    : 
BAJ30LE3.  (plur.)  Epith.  de  la  Porte. 
Babioles,  (plur.)  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au  mot  Banbella. 
Baboye.  Sagesse  de  Charron,  p.  473. 
BoBE.  Froissart,  livre  IV,  page  22. 

Baboleur,  subst.  masc.  et  adj.  Conteur  de 
fables,  trompeur,  fabuleux.  Martin  de  la  Porte, 
dans  ses  Epilhètes,  fait  un  adjectif  de  ce  mot,  et 
l'emploie  comme  épithète  de  mensonge. 

VARI.\NTES   : 
B.^BOLEUR,  B.A.BOULEUR. 

Babou,  subst.  fém.  Moue,  grimace.  —  Epouvan- 
tait d'enfant. 

Moue,  grimace  est  le  sens  propre  de  ce  mot. 
«  Panurgelui  feist  la  babou,  en  signe  de  dérision.  « 
(Rabelais ,  T.  IV  ,  p.  238.)  Jouer  à  la  babou  , 
c'est-à-dire  jouer  à  se  faire  réciproquement  la 
moue.  (Id.  T.  I,  p.  195.) 

Comme  les  grimaces  épouvantent  les  enfants,  on 
a  employé  le  mot  babouë  pour  le  nom  factice  d'un 
épouvantail  d'enfant.  «  Trouvons  en  Théocrite 
«  qu'une  femme  nourrice  menace  son  enfant  de  la 
»  baboue,  et  du  marmot.  »  (Bouchet,  Sérées, 
page  347.) 

VARIAiNTES   : 
BA.BOU.  Rabelais,  T.  IV,  page  238. 
Babau.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  page  1660. 
Babaye.  Cotgrave,  Dict. 
Baboue.  Bouchet,  Sérées,  T.  IV.  page  347. 
Babouye.  Cotgrave,  Dictionnaire. 

Babouin  ('2),  subst.  masc.  Singe.  —  Petit  enfant. 
Homme  difforme.  -  lUais,  imbécile.  —  Lâche, 
poltron.  —  Fip-ares,  statues  mal  faites. 

La  sig"^;  ,  .^'":>n  primordiale  de  ce  mot  paroîtétre 
(.p^p  i.tpressior-j,^  jg  t,.Quve  (j^n^g  cejtg  acception  au 

Giussaf^^_^^P'"!^de  Du  Cange,  au  mot  Babewijnus. 
(Voy.  lèV'iCi.f':-  Nicot.)  Dans  le  passage  suivant,  il 
est  mis  pouf-  .'eprésentalion  de  singe  qu'on  em- 
ployoit  comme  ôrne.meat  d'architecture  :  «  Sunt 
u  sicut  isti  baboulni  a''  lonuntur  in  lurribus  et 
>i  pilariis.  »  (Sermon  <ict.  fol.  28.) 

Il  a  eu  des  signifie;.  plus  étendues,  mais 

presque  toujours  employé^  mme  termes  d'inju- 
res. On  les  a  appliquées  aux  'ans  comme  dans  ce 
vers  de  la  Fontaine  :  '^ 

Ah  !  le  petit  babouin. 

La  Fontaine,  Fables,  l,  19. 


On  s'est  servi  de  ce  mot  pour  désigner  un  homme 
d'une  figure  difforme  :  «  La  fille  du  Roy  considé- 
«  rant  la  laide  contenance  du  Sarrazin  avoit  une 
«  grande  douleur  en  son  cœur  de  ce  qu'un  tel 
"  monstre  et  babouin  emportoit  le  prix  de  telle 
«  joute.  »  (Nuicts  de  Strapar.  p.  236.)  C'est  de  là 
qu'on  a  trouvé  ce  mot  adressé  à  un  nain,  comme 
interpellation  injurieuse,  dans  D.  Florès  de  Grèce, 
fol.  GO,  »ù  il  est  écrit  babouyn.  Il  est  employé  avec 
la  même  signification  dans  la  Farce  de  Pathelin, 
page  30,  et  les  Essais  de  Montaigne,  T.  III,  p.  378. 

De  là  aussi,  ce  mot  a  signifié  un  enfant,  ou  un 
homme  de  petite  taille,  comme  dans  le  passage  sui- 
vant. Le  P.  Menestrier,  parlant  d'un  carrousel, 
s'exprime  ainsi  :  <■  La  quadrille  d'Hercule  étoit 
«  d'autant  plus  belle  que  tout  y  étoit  extraordi- 
»  naire;  deux  centaures  en  étoient  les  trompettes, 
«  douze  babouins  portoient  après  eux  des  flam- 
«  beaux  allumés.  »  (Le  P.  Menestrier,  T.  des  Tourn. 
etc.,  page  50.) 

De  la  difformité  du  corps,  on  a  appliqué  ce  mot  à 
la  difformité  de  l'esprit,  et  on  a  dit  babouijn,  pour 
sot,  niais,  imbécile.  (Voyez  le  Dictionnaire  de  Nicot 
et  deMonet.) 

J'ay  agencé  moy-même  le  pulpitre 

Pour  vous  batif,  et  dresser  ceste  Epistre, 

Par  ung  esprit  qui  n'est  pas  babouijn 


Ce  mot  a  aussi  signifié  lâche,  poltron  : 

Es  tu  de  si  peu  de  dessence. 

Si  couard,  et  si  babouin, 

De  n'oser  parler  que  de  loing? 

Clém.  Marot.  T.  I,  p.  141. 

Ce  mot,  s'employant  pour  les  figures  difformes, 
a  pu  servir  à  désigner  les  figures  souvent  mal  re- 
présentées de  nos  saints.  L'auteur,  après  avoir  dit 
qu'il  suffit  de  la  représentation  de  la  Croix  et  de  la 
S"  Vierge  pour  servir  d'objet  à  la  piétéj  continue 
ainsi  : 

Sanz  brasser  ce  mauvais  levain 
Ne  croire  en  tant  de  marioles. 
De  babouins  et  de  fyoles, 
Ou  trop  de  fois  ydolatrons 
Contre  les  divines  escoles 
Telz  simulacres  n'aourons. 

Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  T.  Ut,  p.  453. 

C'est  par  une  extension  de  ce  même  sens  qu'on  a 
nommé  ainsi  les  fausses  reliques.  Henry  Estienne, 
parlant  d'un  prétendu  charbon  de  S'  Laurent  pré- 
senté par  un  imposteur  comme  une  relique,  dit 
d'une  femme  qui  avoit  d'abord  fait  difficulté  de  la 
baiser,  »  qu'elle  alla  baiser  le  babouin  après  tous, 
«  et  toutes  les  autres.  »  (.\pol.  pour  Hérodote, 
page  665.) 

Baiser  le  babouin  étoit  d'ailleurs  une  façon  de 
parler  qui  signifioit  rendre  une  obéissance  forcée  et 
servile.  (Voy.  Oudin,  Cur.  fr.)  «  Le  S'  Duc  de  Rohan 
«  a  été  contraint  de  baiser  le  babouin  (1).  ■•  (Caquet 
de  l'accouchée,  p.  123.) 


(1)  Bobe  (ou  baube)  doit  remonter  au  latin  balbus;   baboles,  au  contraire,  a  la  même  origine  que  babeau.  (s.  e.)   — 
(2)  L'étymologie  doit  être  dans  le  mot  des  patois  allemands  bappe,  muffle  ;  babouin  équivaudrait  donc  à  lippu,  (n.  e.) 


BA 


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BA 


TABIANTES  : 
BABOUIN.  G.  Guiart,  MS.  fol.  54,  R». 
Babouvn.  Clém.  Marot,  T.  I,  p.  141. 
Babion,  Nicot,  Dictionnaire. 

Babouinaff,  verbe  breton.  Baiouinaff  au 
visage,  gallice,  concilier,  c'est-à-dire  barbouiller 
le  visage.  C'est  l'explication  que  l'on  trouve  de 
ce  mot  dans  le  Catholicum  armoricum  cité  par  Du 
Gange,  Gloss.  lat.  aux  mots  Dabewynus  et  Gersa. 
(Voyez  Babouinerie.) 

VARIA>TES  : 
BABOUIN.\FF.  Du  Cange,  Gloss.  latin,  au  mot  Babeivynus 
et  Gersa. 
Babouineff.  Id.  ibid. 

Baboiiiner,  verbe.  Tromper.  —  Marmotter 
comme  les  enfans,  remuer  les  lèvres  comme  les 
singes. 

Sur  le  premier  sens  de  tromper.  (Voyez  les  Dic- 
tionnaires d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Ce  mot  signifioit  aussi  remuer  les  lèvres,  marmot- 
ter, remuer  les  mâchoires. 

Il  bahirjna  pour  son  salut. 

Villon,  p.  H6. 

On  trouve  babiner  en  ce  même  sens,  dans  le  Dict. 
d'Oudin  où  il  est  rendu  en  italien  par  ces  mots  : 
muover  le  ganascie. 

variantes  : 

BÂBOUINER,  Babouinner,  Baboiner,  Babbiner,  Babi- 
ner, Oudin  et  Cotgrave,  Dict. 

Babigner.  Villon,  p.  116. 

Baboyer.  Cotgrave. 

Babouinere,  sub&t.  fém.  Figures  bizarres  et 
difformes.  Ces  mots  sont  formés  de  barbe  ou 
babouin.  La  babouinere  étoitune  espèce  démasque 
cornu  et  barbu,  représentant  le  diable.  Les  Sarra- 
sins, voulant  épouvanter  les  chevaux  de  l'armée  de 
Charlemagne,  placèrent  devant  eux  des  gens  de 
pied  »  dont  chacun  avoit  une  babouniere  cornue, 
«  noire  et  horrible,  ressemblant  diables,  et  tenoit 
«  chacun  d'eux  tympannes  dans  ses  mains  qu'ils 
«  heurtoient  ensemble.  »  (Chron.  de  S'  Denys,  T.  I, 
fol.  143.)  On  lit  babouineres  quelques  lignes  plus 
bas.  (Ibid.)  Le  même  fait  est  rapporté  par  l'Arch. 
Turpin,  en  ces  termes  :  «  Habenteslarvasbarbatas, 
«  cornutas  dœmonibus  consimiles,  etc.  »  On  trouve 
barbadouires  pour  masque,  dans  le  Gevaudan.  (Voy. 
Du  Cange,  sur  Joinville,  p.  274.)  Barbants  signitie 
la  même  chose  en  Auvergne.  (Ibid.)  On  a  appelé 
barbiere  de  fer,  la  mentonnière  d'un  casque.  (Voy. 
le  Glossaire  de  l'Histoire  de  Bretagne  et  un  inven- 
taire d'armures,  rapporté  par  Du  Cange,  Gloss.  lat. 
au  mot  Armatura.)  Barboire  paroit  aussi  avoir  été 
employée  dans  le  sens  de  mascarade.  (Voy.  Carlheny, 
Voyage  du  Chevalier  Errant,  fol.  51.  —  Rabelais, 
T.  IV,  p.  220.) 

De  là,  babouijnerie  s'est  employé  pour  les  orne- 
mens  ridicules,  imaginés  par  les  peintres,  ou  autres 
ouvriers,  pour  décorer  les  armoiries  des  nouveaux 
nobles,  »  Ils  mettront  en  tymbre,  c'est-à-dire  sur  le 


"  haut  des  armes,  ou  un  masque,  ou  le  portraict 
11  d'un  visage  de  faune  ou  quelque  inepte  et  ridi- 
«  cule  babouynnerie,  et  au  pis  aller  un  babouijn 
«  baillant  à  gueule  ouverte.  »  (S'  Jul.  Mesl.  Ilist. 
page  576.) 

variantes  : 

BABOUINERE.  Chron.  S'  Denys,  T.  I,  fol.  143. 

Babouniere.  Ibid. 

Babouynerie.  S'  Jul.  Mesl.  hist.  p.  576. 

Barbadouires.  Du  Cange,  sur  Joinville,  p.  274. 

Barbauts.  Id.  ibid. 

Barrière.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  A7'matura. 

B.\RB0IRE.  Id.  ibid.  au  mot  Barbatoria. 

Babouinerie,  subst.  fém.  Tromperie.  (Dict. 
d'Oudin  et  de  Cotgrave.)  Nous  avons  vu  le  verbe 
babouiner  employé  pour  tromper. 


BABOUINERIE.  Oudin,  Cotgrave,  Dictionnaires. 
Babouynerie.  Ibid. 

Bac,  subst.  masc.  Bateau.  —  Bassin.  —  Vaisseau 
à  boire. 

(Voy.  l'élymologie  de  ce  mot,  dansPezron,  Antiq. 
des  Celtes,  pages  334  et  423.) 

Back  est  un  mot  allemand  qui  signifie  toute 
espèce  de  vase.  (Voy.  Valois,  notice  sous  le  mot 
Baciiivi.)  On  trouve  bacca  et  baccns,  dans  la  signi- 
tlcalion  de  bateau,  au  Gloss.  lat.  de  Du  Cange. 
^Voy.  l'erceforest.  Vol.  III,  fol.  22),  oîi  le  mot  bac 
est  employé  dans  le  sens  qui  subsiste  encore 
aujourd'hui.) 

Bac,  employé  pour  bassin,  se  trouve  dans  les 
Mém.  d'Ol.  de  la  Marche,  Liv.  II,  p.  52G,  et  dans 
Rabelais,  T.  III,  p.  2G2. 

De  là,  il  a  signifié  un  vase  pour  boire.  Borel,  qui 
cite  Pontanus,  l'explique  en  ce  sens. 

On  disoit  : 

1°  Droit  (le  bac  ou  de  pontenage.  (Voy.  sur  ce 
droit.  Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.  et  le  Dict.  de  Cotgr.) 

2°  Bac  passager,  c'est-à-dire:  bac  à  passer  la 
rivière.  "  Eux  arrivez  au  dit  lieu,  ne  trouvèrent  le 
«  moyen  de  passer  la  rivière  que  par  le  bac  passa- 
»  ge?' accoutumé.  "  (Mém.  du  Bell.  Liv.  II,  fol.  38.) 

3°  Passer  le  bac,  façon  de  parler  pour  dire  qu'il 
faut  faire  une  chose.  C'est  en  parlant  du  mariage 
qu'on  a  dit  : 

Une  fois  fault  jyasser  ce  bac. 

Eust.  Desch.  Toës.  MSS.  T.  III,  fol.  553. 

4°  Etre  passé  au  bac,  être  perdu,  être  bien  loin. 
Guillemette,  à  qui  Pathelin  demande  son  sac  à  ses 
causes,  qu'elle  ne  veut  pas  lui  rendre,  lui  répond  : 

Il  est  passé  au  bac. 

Test,  de  Pathel.  p.  113. 

5°  Mener  le  bac,  c'est-à-dire  ;  gouverner.  (Voy. 
Poës.  MSS.  d'Eust.  Deschamps,  fol.  26.) 

variantes  : 
BAC.  Mém.  d'Ol.  de  la  Marche,  li\Te  II,  p.  526. 
Back.  Valois,  notice.  —  Borel,  Dictionnaire. 
Bacq.  Pezron,  Antiq.  des  Celtes,  p.  334. 


(1)  Le  babouin  était  une  figure  ridicule  charbonnée  sur  le  mur  d'un  corps  de  garde  par  les  soldats,  qui  la  faisaient  baiser 
aux  infracteurs  des  lois  étabUes  entre  eux.  (n.  e.) 


BA 


—  352  — 


BA 


Barcq.  Percef.  Vol.  IV,  fol.  32. 
Bars.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  III,  p.  435. 
Bekkh.  Rorel,  Diot. 

Bacaudes,  subsl.  inasc.  pliir.  Paysans.  En 
Gascogne,  ces  mots  signifient  paires,  bergers, 
paysans.  tVoy.  les  Dict.  de  Borel  et  de  Ménage,  au 
mol  Dayaus.)  Fauchet  le  dérive  du  mot  Bagaiides, 
nom  de  peuple  qui  vivoil  du  temps  d'Elien. 

VARIANTES  : 
BACAUDES,  Bagaus.  Borel,  Ménage. 

Baccalas,  subst.  masc.  On  nommoit  ainsi  les 
bâtons  qui  avancent  en  dehors  de  la  couverture 
d'une  galère,  en  llalien  baccalarl  (1).  (Dict.d'Oudin.) 

Bacces,  subst.  fém.  plur.  Anneaux.  —  Terme 
de  vénerie. 

Ou  trouve  au  premier  sens  d'anneaux,  les  mois 
bacœ  et  baccœ,  employés  pour  aiimili  catenarum 
et  pour  uniones  dans  le  Gloss.  lai.  de  Du  Gange. 
«  Pour  porter  au  col  eut  une  chaîne  d'or  pesante 
«  vingt  cinq  mille  soixante  et  troys  marcs  d'or, 
«  faite  en  forme  de  grosses  bacces,  entre  lesquelz 
«  estoyent  en  œuvre  gros  jaspes  verds  engravez 
«'  taillez  en  dracons.  »  (Uabclais,  T.  I,  p.  46.) 

Ce  motsignilioit  aussi  brisées  en  termes  de  véne- 
rie. "  Quant  aux  brisées,  elles  se  peuvent  nommer 
«  bacces,  ou  brisées,  lequel  on  voudra  :  il  y  a 
»  manière  de  les  mettre;  car  il  faut  que  le  bout 
«  rompu  soit  mis  par  ou  entre  une  beste.  »  (Du 
Fouill.  Yen.,  eh.  37,  fol.  29,  \\) 

Bacchanalerie,  subst.  fém.  Bacchanal.  L'ac- 
tion de  faire  bacchanale.  (Dict.  de  Colgrave.) 

Bacchanaliser,  verbe.  Faire  bacchanale.  (Dict. 
d'Oudin.  —  Voy.  Contes  de  Chol.  fol.  88.) 

Bacchar,  subst.  masc.  Plante.  Nous  la  nom- 
mons cabaret,  les  latins  l'appeloient  asarum.  (Voy. 
Borel,  n"  add.  —  Pline  et  Tournefort.) 

variantes  : 
BACCHAR.  Dict.  de  Borel,  n«  add. 
Baccar.  Dict.  de  Cotgrave. 

Bacche,  subst.  masc.  Bacchus.  Nom  propre. 
(Voy.  Epith.  de  Mart.  de  la  Porte.) 

Bacchide,  adj.  Bachique.  (Voyez  Epith.  de 
Mart.  de  la  Porte.) 

Baces,  subst.  plur.  Espèce  de  chiens  de  chasse. 
Peut-être  doit-on  lire  Braces.  (Voy.  Brac.) 

Eu  l'épesie  d'un  grand  buisson, 
Voit  une  bisse,  à  son  faon, 
Tote  estoit  blance  celé  beste 
Verer  de  celif  ot  sor  la  teste  ; 
Par  l'abai  des  baccs  sailli. 

Fabl.  MSS.  du.  R.  n-  7989,  fol.  48,  V  col.  1. 

Bâcha,  subst.  masc.  Nom  de  dignité  chez  les 
Turcs.  Ménage,  dans  ses  Observ.  sur  la  langue  Fr. 
2'  par.  p.  137,  dérive  ce  mol  du  turc  bac  qui  si- 
gnilie  tète.  Le  mot  bassa  se  trouve  pour  bâcha 
dans  le  Gloss.  lat.  de  Du  Gange.  I 


variantes  : 
BACHA.  Orthographe  subsist. 
Bassa.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  à  Bassa. 

Bacharat,  subst.  masc.  Ce  mot,  encore  usité 
dans  quelques  villages,  aux  environs  de  Paris, 
pour  désordre,  tumulte,  sédition,  pareil  employé 
pour  un  nom  de  lieu  dans  ce  passage  :  «  Viendroit- 
«  il  du  via  do  Bacharat  pour  lequel  l'empereur 
«  Venceslas,  foit  yvrogne,  dégagea  la  ville  de 
«  Nuremberg,  du  serment  de  "fidélité  qu'elle  lui 
«  avoit  prêté.  »  (Vie  de  Charles  VI,  p.  253.) 

Bâche,  subst.  Instrument  servant  à  la  pèche. 

Pour  faire  des  engins,  des  bâches,  du  vervain. 

Bcrg.  de  R.  Bdlcau,  fol.  115. 

Bachelage,  subst.  masc.  Apprentissage.  L'ap- 
prentissage pour  devenir  chevalier.  (Voy.  les  Dict. 
de  Nicot,''Monet,  Borel  et  Robert  Estienne.)  Celle 
acception  est  propre  à  juslilier  le  sentiment  de  ceux 
qui  dérivent  le  mot  bachelier  du  latin  baculus. 
Les  exercices  des  jeunes  gens  et  des  enfans  aux 
tournois  avec  des  basions,  ou  des  baguettes,  au 
lieu  de  lances  ou  d'épées,étoient  l'apprentissage  de 
la  chevalerie. 

Bachele,  subst.  fém.  Seigneurie.  Chàlellenie de 
haute  moyenne  et  basse  justice.  11  falloit  quatre 
bachelcs  pour  former  une  baronnie.  (Voy.  les  Dict. 
de  Nicot  et  de  Monel.)  Suivant  Borel,  dans  son  Dic- 
tionnaire, c'est  une  Seigneurie  ou  Cualellenie 
tenue  par  un  bachelier  qui  n'a  pas  encore  droit  de 
chevalier,  ni  de  banière;  mais  il  se  trompe,  puisque 
bachelier  étoit  le  même  que  chevalier.  (Voy.  sur  le 
mot  Bachelles,  les  Ordon.  des  Rois  de  France,  T.  II, 
p.  46G,  note.) 

variantes  : 

BACHELE.  Nicot,  Monet,  Borel. 

Bacele... 

Bachelle.  Ord.  T.  Il,  p.  466. 

Bachelerie,  subst.  fém.  Espèce  de  fief.  —  Nom 

colleclif  de  baciielier.  —  Qualité  de  bachelier. 

Sur  la  première  acception.  (Voy.  le  Gloss.  lat.  de 
Du  Cauge,  aux  mots  Baccalaria  et  Vasselaria.)  II 
conjecture  que  dece  dernier  mot  s'est  formé  celui  de 
baccalaria,  bachelerie.  «  Il  y  avoit  des  terres  de 
«  haulbert  et  bannière,  comprises  sous  le  nom  de 
«  milili;e,  et  dehnutberl:  d'autres  fiefs  et  terres 
«  nommées  baculariœ  ou  de  bachelerie,  dont  il  est 
«  parlé  dans  les  coutumes  d'Anjou  et  du  Maine,  et 
«  encore  d'autres  appelées  vavassories  ;  le  vavas- 
"  seur  élanl  celui  qui  a  des  vassaux,  mais  dont  la 
«  seigneurie  dépend  d'un  autre  seigneur.  »  (La 
Roque,  Traité  de  la  Noblesse,  p.  27.) 

On  employoit  aussi  le  mot  bachelerie,  comme 
colleclif  de  bachelier. 

Serapres  ot  la  cour  remplie 
De  moult  gente  bachelerie. 

Rom.  de  Brut.  MS.  fol.  53. 

Ger.  de  Roussillon  trace  ce  portrait  de  Fourqaes, 
seigneur  également  brave,  noble  et  généreux  : 


(1)  Ce  mot  est  dérivé  peut-être  du  gaélique  bachall,  bâton,  (n.  e.) 


BA 


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BA 


Il  est  ly  colombiers  de  touts  les  égarés 
11  est  de  toutes  gens  si  orné,  si  paré      ' 
Que  toujours  est  garny  de  grand  chevalerie, 
tt  de  très  excellent,  pour  voir,  bachelene. 

Gcr.  de  Roussillon,  MS.  p.  59. 

•  Jehan  de  Hainaut  qui  vint  à  luv  moiilt  puis- 
«  samment  avecques  grand  bachelefie  deHaiiiault 
«  et  d  ailleurs.  »  (Froissart,  Liv.  I,  p.  143.) 

La  bachelerie  de  Beauvés. 

Prov.  à  la  suite  des  Pots.  JISS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1651 

On  verra  ci-après  ce  que  l'on  entendoit  par 
bacheliers.  C  etoit  communément  ceux  qui  faisoient 
apprentissage  de  chevaliers.  On  distinguoit  deux 
états  dans  la  chevalerie:  la  bachelerie  et  la  va- 
msserie.  Le  vavasseur  se  bornoit  à  régir  son 
aieniures  ''^''^'"^''    '^"    contraire,  cherciioit  les 

Cil  qui  trueuve  chemin  forahié 
Moult  est  fols  quant  il  se  desvoye 
Por  aller  une  fausse  sente,  ' 

Dont  chacun  forvoye  la  sente 
L|un  for  si  est  bachelerie,  ' 
L'autre  si  est  vavassorie. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  256,  R-  col    1 

De  là,  on  désigna  par  bachelerie,  les  qualités 
ordinaires  d'un  bachelier,  telles  que:  radolesïence 
la, bravoure,  le  savoir,  la  vigilance,  iSSn' 
même  l'imprudence,  l'étourderie.  Nous  en  allons 
citer  des  exemples:  d'ions 

Pour  jeunesse,  âge  d'adolescence,  on  a  dit-  ..  Il 
«  apprint  legiùrement  le  jeu  des  echetz,  des  tables 
«  et  tous  les  autres  jeux  dont  il  veoit  jouer  et 
«  quant  il  vint  en  aage  de  bachelerie,  nul  ne  fe 
«  povoit  enseigner.  »  (Lanc.  du  Lac,  T.  I  fol  lo  1 

Bachelerie   signifie    bravoure,    valeur     mérite 
dans  ces  vers:  '«"cui,    meriie, 

Cilz  aussi  qui  de  m'araour  me  prie 
!•  ust  SI  garnis  de  grant  bacelerie 
Que  son  bon  los  et  sa  chevalerie 
Por  tout  le  monde  aust  prisie. 

Poës.  MSS.  de  Froissart,  p.  116 
Afiert  bien  que  soit  chevaliers 
Uouz  et  humbles  et  pois  parliers 
Mes  dou  cors,  de  fors  et  de  dens 
Pour  1  ordre  de  chevalerie  • 
Si  doit  amer  bachelerie, 
Et  tous  maux  usages  fuir 
Et  les  armes  par  t'bt  suir 

Fabl.  M.SS.  du  R.  n-  7615,  T.  II,  fol.  16:),  R.  col   » 

^Bachelerie  est  employé  pour  habileté,  dans  ces 

C'est  belle  bachelerie 

De  trouver  ce  qui  n'est  mie 

Poe».  MSS.  du  Vatican,  n-  1522,  fol.  165.  Vcol   1 

Bachelerie  désignoit  vigilance,  dans  ces  vers: 

•  •  ••••.•  amours  endormie 

Ne  vaut  rien,  bachelerie 
Convient,  que  son  estauvoir 
Veut  en  amour  recevoir. 

Poes.  51SS.  du  Vatican,  n-  1490,  fol.  151  V 

daStpâ£a?e!^°""  '''''  ^"^'^■^'-'  --'^"«n. 

Qui  cors  a.  membre  et  vie 
Se  tout  a  dies  n'estudie 
En  plus  grand  avanchement  ■ 
K  en  vivre  moiiennement 
N  a  point  de  bachelerie. 

Poês.  MSS.  du  Vatican,  n-  U90,  fol.  169,  y.. 


.  Enfin  &rtcfte/m'e,  désignoit:  action  de  jeunesse 
imprudence,  étourderie.  C'ost  en  ce  sens  ou 'un 
amant,  piqué  de  se  voir  renvoyé  par  une  femme 
galante  qui  lui  avoit  fait  partager  sel  faveurs  a\^c 
beaucoup  d  autres,  a  dit  :  •'l^eu^b  a\ec 

Si  je  conquis,  ce  fu  bachelerie. 

Poés.  MSS.  du  Vatican,  n-  1522,  fol.  157.  Y-  col   o 

.  ;^n  ,voit,  par  les  passages  cités,  qu'on  écrivoit 
indifféremment  bachelerie  et  bacelehe  ISlfv- 
nièie  orthographe  se  trouve  quelquefois  dns  les 
Ph  MouskJs."'"  '  ■''  '^"'""^  '^^^'^  '^^"'^^  de 
Nous  verrons  ci-après  la  qualité  de  bachelier  se 
confondre  avec  celle  de  chevalier.  H  en  fu  de 
même  du  mot  bachelerie,  qui  se  disoit  indistîn^tï 
ment  pour  la  chevalerie.  L'âge  plus  avancé  et  unt 
fortune  plus  aisée  faisoient  peut-être  la  seule  sudI 
riorite  des  chevaliers  sur  lehacheliers.  ^ 

Moult  par  fu  granz  sa  renomée 
Ou  tens  de  sa  bachelerie 
Qu'il  demenoit  chevalerie. 

Athis,  MS.  fol  64,  V"  col.  1. 
Tout  nostre  chevalerie 
C'est  jovent,  et  bachelerie. 

Athis,  MS.  fol   113.  R- col.  o 

Lorsqu'un  de  ces  mss.  du  même  roman  emploie 
le  mol  bachelerie,  l'autre  y  substitue  ce  lii  de 
chevalerie.  (Voy.  fol.  07  et  82.)    ^""^"'"^  '^'^'"^  «^ 

„    „  VARIANTES    : 

BACHELERIE.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  à  Baccalar,a 
Bacelerie.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  175.   '""''"""'"'• 

Bachelier,  siihst.  maso.  Bachelier.  -  Jeune 
homme.  -  Homme  de  métier.  -  Chevalier  - 
Lcuyer.  -  Homnie  de  médiocre  condition'  - 
Homme  noble.  -  Officier  municipal.  -  Tenancier 
d  une  bachelerie.  -  Valet.  -  Titre  d'étude 

Il  est  aise  de  voir,  par  ce  grand  nombre  de  signi- 
fications, combien  le  sens  de  ce  mot  a  rem  d'exten- 
sion au  point  de  désigner  quelquefois  des  choses 
absolument  contraires,  telles  que  noble,  homme  dl 
métier,  chevalier,  valet,  etc. 

Dans  le  Gloss  lat.  de  Du  Gange,  on  trouve  bacul- 
«n/  pour  bacheliers,  et  on  dérive  ce  mot  lati"i  de 
bacellaria,  bacele  ou  bachele,  qu'on  verra  ci-anrès 
Caseiieuve  le  dérive  de  bacillarii  ou  baculares  ou 
baciilus  à  cause  des  bâtons  avec  lesquels  s'exer- 
çoient  les  jeunes  gens  qui  vouloienl  parvenir  à  la 
chevalerie.  Par  là,  ils  supposent  que  les  bacheliers 
n  etoient  pas  les  mêmes  que  les  chevaliers  ;  mais  on 
verra  le  contraire  dans  les  citations  qui  Suivront 
selon  Gujas,  les  bacheliers  étoient  des  espèces  de 
gardes  du  corps  attachés  aux  princes  et  aux  o-rands 
seigneurs,  et  qui  avoient  bouche  à  cour-  «"ouasi 
«  buccellaru,  qui  posteriori  aetate  eiant  milites 
"  corporis  custodes,  siveprotectores,  qui  patronis 
«  suis  assistunt  semper.  »  (Lib.  de  Fendis  5  et  7) 
Fauchet  veut  que  ce  soit  l'abrégé  de  bas  chevalier 
Borel  croit  qu  il  est  plus  simple  de  le  former  de 
baccœla,m,k  cause  du  rameau  de  laurier  qu'on 
leur  donnoit,  comme  on  fait  encore  à  ceux  qui 
passent  maîtres  ès-arts  après  leur  philosophie. 
Borel  a  suivi  en  cela  le  sentiment  de  Louis  Vives 

45 


BA 


354  - 


BA 


savant  espagnol,  qu'il  ne  cite  pas.  Plusieurs  gram- 
mairiens uni  dérive  ce  mol  de  bataille.  Fauchet,  au 
coulrnire.  prétend  qu'ils  se  sont  trompés,  qu'il  vient 
de  bachelier  (|ui,  en  picard,  sigailie  jeune  homme, 
mais  il  ne  dit  pas  d'oîi  vient  le  mot  picard.  Il 
paroîtroil  assez  naturel  de  tirer  son  étymoloi;ie  de 
vassal,  vassus  ou  vassallus,  sujet  dépendant,  valet, 
varlet,  vaslet,  c'est-ù-dire  tout  liomme  qui  doit 
hommage  ou  service  à  un  supérieur.  Cette  dernière 
étymologie  pourroit  être  juslillée  par  les  mots 
bassalus  et  liasalarius  qui  se  trouvent  employés 
dans  le  même  sens  au  Glossaire  latin  de  Du  Gange. 
Ge  mot  a  signifié  primordialement  jeune  homme, 
adolescent.  (Voyez  le  Dict.  de  ilénage .  au  mot 
Bachelier.)  11  cite  plusieurs  auteurs  anciens,  aux- 
quels je  joindrai  le  Roman  de  Brut.  Artus,  ayant 
achevé  la  conquête  de  la  France ,  renvoya  les 
vieillards  qui  l'avoient  suivi  dans  son  expédition  : 

Les  hucltelcrs  et  la  jouvente 
Qi  de  conquerre  orent  entente, 
Qi  norent  femme,  ne  enfans 
Retint  o  sov  U  rois  neuf  ans. 

honi.  de  Brut,  MS.  fol.  77,  V*. 

«  Quarante  autres  chevaliers  jeunes  fertc/icZ/crs.  » 
(Froissart,  Liv.  1,  p.  37.)  Ph.  Mouskes,  parlant  de 
Philippe-Auguste  mourant  et  des  regrets  qu'il 
inspiroit  aux  seigneurs  de  sa  cour  qu'il  avoit 
tendrement  aimés,  dit  : 

Quar  onques  bacclers  sa  touse 
N'ama  tant,  coum  U  les  aimoit. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  6i2. 

Tout  cil  et  toutes  celles 

Soient  bacelers  ou  pucelles. 

Froissart,  PoJs.  .MSS.  p.  37. 

Bacheler  en  ce  sens  renfermoit  quelquefois  une 
idée  désavantageuse  : 

Quant  l'apelastes  hachder 
De  se  ne  le  voliez  blasmer. 

Fabl.  MS.  de  S-  Gcrra.  fol.  133,  R°. 

Ce  mot  s'est  dit  dans  une  signification  fort 
étendue  en  ce  passage,  où  Pathelin,  voulant  fialter  le 
drapier  et  lui  parlant  de  son  père,  s'exprime  ainsi  : 

Vous  luy  ressemblés  mieulx  que  goutte 
D'eaue  ;  je  n'en  fais  nul  doubte. 
Quel  vaiÛant  bachelier  c'estoit, 
Le  bon  preudhomme,  et  si  prestoit 
Ses  deniers  à  qui  les  vouloit. 

Farce  de  Pathelin,  p.  12. 

Et,  en  effet,  le  nom  ou  le  titre  de  bachelier  a  été 
donné  même  aux  serruriers,  dans  un  édit  de  Fran- 
çois 1",  servant  à  régler  les  droits  qu'ils  dévoient 
payer.  (Voyez  Freron,  année  littéraire  1758,  T.  VI, 
Lettre  .\,  p.  229.)  On  donnoit  en  général  ce  titre  aux 
hommes  de  toute  espèce  de  métiers,  passés  maîtres, 
mais  non  jurés.  (Voyez  Fauchet,  Orig.  Liv.  I,  p.  84.) 

Le  mot  bachelier  se  trouve  très  souvent  employé 
comme  synonyme  à  chevalier,  comme  épithète  de 
ce  même  mot,  et  pour  signifier  simple  chevalier, 
distingué  de  chevalier  ha'nneiet  et  autre  chevalier 
en  dignité  ;  les  simples  chevaliers  inférieurs  à  ceux 
qu'on  appelloit  bannerets  ne  prirent  le  nom  de 
bacheliers  ou  de  chevaliers  bacheliers  que  dans  le 


XIV'  siècle,  suivant  le  sentiment  de  Brussel  sur  les 
Fiefs,  T.  1,  p.  1G5. 

Dans  un  grand  nombre  de  revues  faites  par  les 
chefs  de  la  gendarmerie,  les  hommes  d'armes  n'y 
sont  jamais  divisés  qu'en  trois  classes  ;  à  savoir, 
les  chevaliers  bannerets,  les  chevaliers  appelés 
dans  les  unessimplementc/;<'('rt//t'rsetdansd'autres 
clievaliers  baclielicrs,  et  enfin  les  écuye>s.  On  n'y 
trouve  aucune  distinction  entre  les  clievaliers  et  les 
chevaliers  bacheliers.  Ils  y  sont  toujours  pris  pour 
chevaliers.  (Voyez  l'Hist.  de  B.  Du  Guesclin,  par 
Du  Ciiatelet,  p.  325.)  «  Sire  chevalier,  si  j'avois  en 
«  ma  compagnie  de  telz  bacheliers  que  vous  êtes, 
«  je  me  doublerois  peu  de  mes  voisins,  se  mal  me 
«  vouloient.  »  (Perceforest,  Vol.  II,  fol.  22.)  L'auteur 
de  ce  roman  et  Lancelot  du  Lac  confondent  toujours 
ensemble  les  mots  de  bachelier  et  de  chevalier 
comme  synonymes  ;  ils  le  sont  en  effet.  Pour  con- 
firmer cette  opinion,  qui  se  trouve  appuyée  des 
variantes  de  plusieurs  mss.,  dont  les  uns  disent 
bacelier  lorsque  les  autres  (ï\s,tn[  chevalier,  voyez 
Athis,  MS.  fol.  70,  R°  col.  2.  Si  un  ms.  dit  bachelers, 
on  lit  dans  un  autre  >.is.jouvenchiaits.  (Ibid.  fol.  17.) 

Il  suffit  de  consulter  le  Traité  de  la  Noblesse,  par 
la  Roque,  et  les  Ordonnances  des  Rois  de  France, 
dans  lesquelles  on  trouve  que  la  paye  étoit  différente 
entre  le  chevalier  banneret ,  le  ctievalier  bachelier 
et  Véciujcr.  Celle  du  toHWH'ei  étoit  double  de  la  paye 
du  bachelier,  et  celle  de  Véciiijer  n'étoit  que  la 
moitié  de  la  paye  du  hachelier.  On  n'y  voit  point 
d'autre  distinction.  A  toutes  ces  autorités,  on  peut 
joindre  celle  de  Froissart,  par  laquelle  on  voit  que 
les  bacheliers  étoient  le  troisième  des  ordres  dans 
lesquels  étoit  divisée  toute  la  chevalerie.  Cet  auteur, 
parlant  des  seigneurs  qui  accompagnoient  le  roi 
Edouard,  nomme:  l  les  princes,  2"  les  barons, 
3°  les  bacheliers,  ><  telz  que  monseigneur  Jehan 
«  Ghandos  »  et  autres  qui ,  étant  tous  qualifiés 
messeigneurs,  ne  peuvent  être  regardés  que  comme 
des  chevaliers.  On  peut  voir  encore  le  Traité  des 
Droits  d'armes,  au  n°  818,  p.  321.  —  Labbe,  Eibl. 
MS.  in-4°.  (Voy.  encore  les  Ord.  des  Rois  de  France.) 

Si  ces  citations  ne  suffisoient  pas ,  j'ajouterois 
encore  qu'on  a  été  dans  l'usage  d'employer  le  mot 
bachelier  et  hachelerie  (1)  pour  valeur,  bravoure, 
comme  on  avoit  employé  ceux  de  chevalier  et  de 
chevalerie  pour  dire  brave  : 

Li  Romain  furent  bacheler. 
Et  convoitûuz  de  l'assembler. 

Athis,  MS.  fol.  46,  R"  col.  i. 

C'est  donc  mal  à  propos  que  Fauchet,  Liv.  I,  p.  83 
de  ses  Orig.,  dit  que  «  bachelier  étoit  une  dignité 
«  entre  celle  de  chevalier  et  d'escuyer.  »  (Voyez  le 
Gloss.  latin  de  Du  Gange,  au  mot  militare,  et  D. 
Morice,  Ilist.  de  Bret.  Préf.  p.  xiv.) 

Dans  les  vers  suivans ,  ce  mot  signifie  chevalier  : 

Trois  jours  dura  la  fête  ainsi. 
Quant  vint  au  quart,  au  mercredi 
Ly  Rois  ses  bacelers  faussa 
Honneur,  de  livres  devisa. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fui.  80. 


(1)  <  De  belles  apertises  d'armes  et  de  grans  bacheleries  et  de  hardies  emprises.  »  (Froissart,  éd.  Kervyn,  II,  10.)  (n.  e.) 


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Ce  mot  paroît  signifier  écuyer  dans  le  passage 
suivant.  On  sait  que  les  clievaliers  s'exerçoient  aux 
tournois,  et  les  escuyers  à  escrimer,  lutter,  sauter 
et  jeter  la  pierre  : 

En  la  guise  qui  dont  couroit 
A  déduit  ont  le  jour  tourné, 
Li  chevalier  ont  boourdé, 
Li  bachelier  ont  escremy, 
Pierre  jette,  luitié,  sailly. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  33. 

Ce  mot  s'est  employé  pour  homme  de  médiocre 
condition,  seigneur  d"un  état  inférieur  aux  comtes, 
vicomtes,  barons  et  châtelains:  «  Outre  les  sei- 
«  gneurs  dessus  dits  y  a  au  dit  pays  aucuns  autres 
«  seigneurs  qui  ne  sont  comtes,  vicomtes,  barons, 
«  ne  chastellains,  qui  ont  chasteaux,  forteresses, 
«  grosses  maisons,  places  qui  sont  parties  de 
«  comtés,  vicomtes,  baronnies  ou  chastellenies  des 
«  dits  pays,  et  tels  s'appellent  6«r//c/?é'rs.  »  (Coût. 
d'Anjou,  dans  le  I-^'  vol.  des  Coût.  gén.  p.  66.) 

Ce  mot,  avec  la  signification  de  seigneur,  est  mis 
en  opposition  avec  un  seigneur  de  plus  haut  rang. 
Le  comte  de  Foix,  prince  du  sang  royal,  s'adressant 
à  la  princesse  de  Galles:  «  Madàme'fdit  le  comte), 
«  je  suis  un  petit  homme  et  un  petit  bachelier,  si 
«  ne  puis  faiie  nuls  grans  dons,  mais  le  don  que 
«  vous  me  demandés  (s'il  ne  vaut  plus  de  soixante 
«  mille  francs)  je  vous  le  donne.  «  (Froiss.  Liv.  III, 
p.  6.)  Bertrand  Du  Guesclin,  à  qui  l'on  offroil  la 
dignité  de  connétable,  »  s'excusa  grandement  et 
«  très  sagement,  et  dit  qu'il  n'en  estoit  mie  dianeet 
«  qu'il  estoit  un  povre chevalier  el  un  peliibaclwlier 
«  au  regard  des  grans  seigneurs  et  vaiiians  hommes 
«  de  France,  combien  que  fortune  l'eust  un  peu 
«  advancé.  »  (Id.  Liv.  I,  p.  403  ;  an  I370.)Du  Guesclin 
ajoute  plus  bas  :  «  Mais  il  est  vérité  que  je  suis  un 
«  pauvre  homme  et  de  basse  venue  en  l'office  de 
«  connétable  qui  est  si  grand  et  si  noble.  » 

Bacheler  est  employé  dans  le  passage  suivant  pour 
tout  homme  noble  opposé  à  celui  qui  ne  l'étoit  pas  : 

N'avoit  homme  au  pays  si  o?, 
Ne  bacheler,  ne  paisant, 
Tant  orguiUeus,  ne  tant  vaillant 
Qui  s'osast  au  jaiant  combattre. 

Rom.  de  BruI,  MS,  fol.  77,  V'. 

Ce  mot  semble  signifier  officiers  municipaux  dans 
le  passage  suivant  :  «  Les  bacheliers  de  la  dite  ville 
«  et  bourgeoisie.  »  (Coût.  loc.  de  Chaleauneuf  en 
Berry,  T.  IH,  art.  iv,  citée  par  Du  Cange,  Gloss.  lat. 
au  mot  Baccalarii.) 

On  nommoit  aussi  ^flcfteZier  l'espèce  de  tenancier 
qui  occupoit  une  bachelerie  qu'on  a  vu  ci-dessus, 
ou  qui  tenoit  à  ferme,  ou  qui  cultivoit  des  bacliele- 
ries  appartenantes  aux  églises.  (Voyez  le  Glossaire 
latin  de  Du  Cange,  au  mot  Baccalarii.) 

Bachelier  s'est  dit  -pour  valet  dans  le  passage 
suivant  :  «  Tantost  que  Passelyon  entendit  le  bache- 
«  lier,  il  commença  à  frongner  des  narines,  puis 
«  print  ung  baslon  et  queurt  sus  au  varlet  » 
(Percef.  Vol.  IV,  fol.  102.) 


Enfin,  bachelier  étoit  el  est  encore  un  titre  qu'on 
acquiert  par  l'étude.  Il  y  avoit  : 

i'  Bacheliers  en  chirurgie.  C'éloit  ceux  qui 
avoient  obtenu  le  premier  degré  que  prenoient  les 
étudians  en  cet  art. 

2°  Bacheliers  d'église.  C'étoit  des  ecclésiastiques 
d'un  ordre  inférieur  aux  chanoines,  ceux  qu'on 
appelle  communément  prébendier.  (Voy.  Du  Cange, 
Glossaire  latin,  au  mot  Baccalarii.) 

S'  Bacheliers  formés.  On  appelloit  ainsi  ceux  qui 
avoient  fait  dix  années  d'étude  en  théologie.  (Voy. 
Laurière,  Glossaire  du  Droit  françois.) 

4*  Le  bacheler  d'armes  étoit  le  jeune  chevalier 
qui  veut  s'instruire  aux  armes  : 

Car  puisque  Dieus  ensemble  adresse 

Biauté,  force,  sans  et  proesce, 

En  cuer  de  haut  home  puissant, 

Celui  vait  proesce  croissant 

Qui  grant  terre  à  main  burnir 

A  donc  à  voloir  de  furnir 

La  mester  d'armes  à  son  droit 

Celui  claim  bacheler  a  droit 

Celui  claim  bacheler  d'anacs. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n*  7GI5,  T.  II,  fol  1G4,  R-  col  2. 

5°  On  a  dit  proverbialement  : 
Vin  de  Soissons,  vin  d'Auviler 
Vin  d'Espernay  le  bacheler. 

Ibid.  n'7-2i8.  fol.  231,  V'col.  3. 

VARIANTES  : 
BACHELIER.  Orth,  subsist.  -  Voy.  le  Gl.  du  R.  do  la  Rose. 
Baccheuer.  Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  fol. 
Bacheler.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  77,  V». 
Bachelehs.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7'21«,  fol.  178,  R»  col.  2. 
Bachelet.  Abrégé  de  l'Histoire  de  Charles  VI. 
Baicheler.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  10G8. 
Bacelier.  Fabl.  MSS.  de  S'  Germ. 
Baccler  (Lisez  Baceler).  Dict.  de  Cotgrave. 
Baceler.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  6't2. 
Bakelers.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Baccularii. 
Bacillier.  Fauchet,  Orig. 

Bachelière,  subst.  téin.  Jeune  fille.  —  Demoi- 
selle. —  Femme  de  chambre. 

Le  mot  de  Bachelctle  servoit  à  désigner  de  jeunes 
filles  aimable*;  c'est  dans  ce  sens  que  Froissart  dit  : 

Un  chapelet  de  violettes 
Pour  donner  à  ces  bachelettes. 

Pocs.  MSS.  p.  87,  col.  2. 

/Îflîss<'/Z(^  étoit  un  simple  nom  d'amitié,  et  c'est 
ainsi  que  le  nom  de  Baiselle  est  donné  à  une  jeune 
bergère,  dans  le  Recueil  des  Poës.  fr.  avant  1300, 
Vatican,  fol.  112. 

Les  noms  de  Baisselette,  Bachelctle,  etc.,empor- 
toient  toujours  une  idée  ou  honorable  ou  gracieuse  ; 
quelquefois  ils  annonçoient  un  titre  correspondant 
à  celui  d'écuyer,  comme  dans  ce  versd'Eust.De.sch. 
fol.  554,  col.  1  : 

Qui  a  escuyer  ou  baisselle. 

On  disoit  bachelière  pour  femme  de  chambre. 
Delà  les  diminutifs  bachelete,bachelote,  etc.,  appli- 
qués, non-seulement  aux  jeunes  servantes,  aux 
demoiselles  d'honneur,  mais  aux  jeunes  filles  en 
général  ;  on  prenoit  dans  le  même  sens  baisse  et 
ses  diminutifs  baisselle,  baiselette  (1). 


dpr2i?r°n,^^t'',A®-^"'-''^*^"''  '"  diminutif  de  basse,  servante,  en  ancien  français  et  en  normand,  et  l'on  veut  voir  dans  ce 
dernier  mot  le  feminm  de  vassus.  Bachelette,  qu'on  ne  trouve  pas  au  xiw  siècle,  aura  été  assimilée  lhachelieJ%Z 


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VARIANTES  : 
BACHELIÈRE.  Villon,  p.  7;i. 
Bachelette.  Gloss.  du  Ilom.  de  la  Rose. 
Bachelote.  Fabri,  Art.  de  Rhétorique. 
Bacelote.  Ane.  Poës.  fr.  avant  VMO,  MSS.  Vatic.  fol.  ■112. 
Basselette.  Froiss.  Poës. 
B.USSE.  Fabl.  MSS.  p.  121. 
Baisselle.  Anr.  Poes.  fr.  fol.  112. 
Baisele.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  14S,  V"  col.  1. 
Baisselette.  Id.  ibid. 
BoiSELETTE.  Fabl.  MSS.  p.  120. 

Baclicryndc,  stibst.  Ce  mot  paroit  employé 
comme  leriiie  de  pratique  dans  la  justice  criminelle 
d'Angleterre.  (Voy.  Dritton,  Loix  dWngl.  fol.  7-i.) 

Bachet,  siibst.  masc.  Bassin.  Bachet  de  fontaine, 
c'est-à-dire  le  bassin  destiné  à  recevoir  l'eau  d'une 
fontaine.  (Monet,  Dict.)  De  là  on  a  dit ,  au  figuré  : 
lâcher  le  baquet,  vuider  le  bassin,  c'est-à-dire  ren- 
dre par  haut  et  par  bas,  en  parlant  d'une  femme 
qui  avoit  trop  bu  et  trop  mangé.  (J.  Marot,  p.  20*2.) 

VARIANTES  : 
B.\CHET.  Monet,  Dict. 
B.\CQUET.  J.  Marot,  p.  202. 

Bacbevaleureiix ,  adj.  Brave.  —  Guerrier. 
(Voy.  les  Dict.  de  Borel  et  de  Corneille.  —  Laur. 
Gloss.  du  Droit  fr.  au  mot  Bachevaleureux.)  «  Il 
«  commanda  tantost  à  ses  mareschaux  ferir  en 
«  l'eau,  au  nom  de  Dieu  et  de  Saint-George.  Lors  se 
«  ferit  dedans  le  plus /jadiei'rt/ewî'eiixfl  jet  le  mieux 
«  monté  de  tous.  »  (Froissart,  Livre  I,  p.  1 10.) 

Bachière,  subst.  fém.  Bascule.  Partie  ajoutée 
à  un  pont  rompu  pour  servir  d'entrée  aux  voitures. 
On  dit,  en  parlant  d'un  pont  de  bateaux  :  «  Il  y  avoit 
«  faute  au  bout  du  pont  par  devers  Vitry,  et  y 
«  metloit-on  une  chariere  hachiere,  et  quant  on 
«  estoit  passé,  la  dite  haeliiere  étoit  ostée  du  bout 
'■  du  pont,  et  estoit  mise  contre  le  dit  pont  au- 
«  dessus  aussi  comme  au  milieu,  en  sorte  que  les 
«  ennemis  qui  vouloient  après  passer  dessus  es- 
«  toient  obligés  de  se  mettre  dans  l'eau  jusqu'au 
«  nombril.  >>  (Chron.  de  S' Denys,  T.  II,  p.  252.)  Au 
lieu  de  hachiere,  on  lit  bachière,  dans  la  Chron.  fr. 
Ms.  de  Xangis,  qui  paroit  être  le  véritable  mot. 
Charriere,  dans  le  passage  cité,  paroit  une  épithète 
employée  pour  désigner  des  charrettes. 

VARIANTES  : 
BACHIÈRE.  Chron.  fr.  MS.  de  Nangis. 
H.\CHiERE.  Chron.  S'  Denys,  T.  II,  p.  252. 

Bachinou,  su])St.  masc.  Vase  à  boire.  C'étoit 
une  tasse  de  bois ,  selon  Borel ,  au  mot  Bacin. 

Bachole,  subst.  fém.  Sorte  de  hotte  ou  de  vais- 
seau servant  à  porter  la  vendange  ou  autre  liquide. 
(Voy.  Nicot,  et  Du  Gange,  Gloss.  latin  au  mot  Basta.) 

VARIANTES  : 
B.ACHOLE.  Du  Gange,  Gloss.  latin  au  mot  Basta. 
B.\CHOUE.  Nicot  et  Cotgrave. 

Bachot,  subst.  masc.  Petit  bateau;  Imcelus; 
en  bas-latin  baicha,  batellus. 


BACHOT.  Nuits  de  Strapar.  p.  85. 

Bachet.  Monet,  Dict. 

Baquet.  Bouteillier,  Som.  rur.  p.  507. 

Bacquet.  Ibid.  p.  8(iO. 

Barquet.  Froissart,  Liv.  II,  p.  207. 

Bacequin.  Hist.  de  la  Toison  dOr,  Vol.  I,  fcU.  26. 

Bacicoter,  verbe.  Tromper.  (Voyez  Dict.  de 
Corneille  au  mot  Bacicoter.)  On  lit  baciquotei'  (2) 
dans  le  Dict.  de  Borel,  qui  cite  le  Rom.  de  la  Rose,  ms. 

VARIANTES  : 
BACICOTER.  CorneiUe,  Dict. 
Baciquoter.  Borel,  Dict. 

Bacin,  suhst.  masc.  Bassin.  —  Vase  à  boire.  — 
Vase  de  garde-robe.  —  Cloche,  tocsin.  —  Armure 
de  tête. 

On  employoit,  dans  le  premier  sens,  les  quatre 
premières  orthographes.  Les  mots  bacinus  sous 
bacca ,  bacigna,  bacynis,  bassile ,  bassimis ,  se 
trouvent  dans  le  sens  de  bassin,  au  Gloss.  latin  de 
Du  Gange.  On  lit  basehln  pour  bassin,  dans  le  Dict. 
de  Borel ,  et  basin  dans  les  Poës.  mss.  d'Eust. 
Desch.  fol.  241. 

Le  droit  de  bassin  étoit  une  sorte  de  droit  sei- 
gneurial. "  Nous  avons  un  droit  appelle  le  droit  du 
"  ?;assi«,  qui  est  tel  que  dame,  vidame  peuvent, 
«  par  chacun  an,  prendre  un  bassin  d'environ  un 
«  sestier  plein  de  raisins,  en  quelque  vigne  qu'il 
>i  voudroit,  ès-eaviron  de  S' Michel.  "  (Laur.  Gloss. 
du  Droit  fr.  —  Voy.  le  Gloss.  latin  de  Du  Cange  au 
mot  Bacinagium.)  Ce  mot  subsiste,  sous  la  seconde 
orthograpiie,  avec  cette  même  acception. 

Bassin  signifioit  un  vase  ou  tasse  à  boire.  «  Il 
«  avoit  soif,  atant  il  print  le  bassin  pour  puyser 
«  l'eau.  »  (Percef.  Vol.  V,  fol.  28,  R°.) 

On  trouve  bacin  et  bassin  pour  vase  de  garde-robe. 

Pour  enfans,  fault  bers,  et  drapiaux, 
Nourice,  chaufete  et  baci)i. 

Eust.  Desch.  Pues.  MSS.  T.  Ill,  fol.  442,  col.  I. 

Je  ne  sçay  mais  ou  seoir. 
Fors  au  bas  sur  le  bacin. 

Ibid.  T.  I,  fol  78,  col.  2. 

On  lit  bassin  à  selle  percée,  dans  la  même  accep- 
tion. (Voy.  Dict.  de  Cotgrave.) 

Bacin,' bassin  et  batsain  se  sont  employés  pour 
cloche  et  tocsin.  On  dit  de  B.  Du  Guesclin  ,  qu'au 
siège  de  Valongnes  il  fit  venir  de  «  S'  Lô  six  engins 
»  gettant  pierres,  lesquelz  nos  gens  firent  getter 
«  contre  la  toup;  mais  il  y  avoit  une  guérite  qui 
«  sonnoit  un  bacin  quand  la  pierre  devoit  eschap- 
«  per.  --  (Hist.  de  B.  Du  Guesclin,  par  Ménard,  p. 
123.)  Bassin  s'est  dit  pour  tocsin.  «  Fut  publié  que 
«  se  ceux  de  Bruges  vouloient  faire  aucunes  cour- 
«  ses  ou  emvahyes  sur  ceux  de  la  Chastellenie, 
-'  qu'on  soiinastles  cloches  aux  églises  et  les  bas- 
li  sins  poursoy  assembler  et  résister  à  rencontre 
«  d'eux.  »  (Mônsir.  Vol.  II,  fol.  153.  —  Voy.  le 
Nouv.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  813.) 


(1)  Il  faut  lire  bachelereus,  comme  le  prouve  cet  exemple  emprunté  au  même  auteur  :  «  Ung  très  hardis  et  bachelereux 
chevaliers.  »  (Froissart,  éd.  Kervyn,  II,  (3.)  —  (2)  Bacicoter  peut  signifier  berner.  Bacicot,  diminutif  de  basse,  est  encore  une 
caisse  de  bois  pour  enlever  les  blocs  d'ardoise  de  la  carrière  ;  ils  y  sont  secoués,  bassicotés  (?)  (N.  E.) 


BA 


-  357  — 


BÂ 


Enfin  bacin  signifioit  une  armure  de  tête.  (Voyez 
Bacinet.) 

Rassemblons  les  expressions  suivantes  : 

1°  Bassin  de  jongleur.  C'étoit  une  sorte  d'instru- 
ment de  musique  à  l'usage  des  jongleurs,  sansdoute 
fait  à  peu  près  comme  un  petit  bassin ,  dont  ils 
tiroient  des  sons.  De  là  ce  proverbe  :  Tout  avocat 
beau  diseur  resscvible  à  bassin  de  jongleur.  C'est-à- 
dire  qu'il  produit  du  son  et  rien  de  plus.  (Du  Verd. 
Lee.  div.  p.  510.) 

2°  Faire  la  perruque  au  bacin,  semble  désigner 
un  jeu  de  société.  Le  mot  Bacin,  dans  ce  passage, 
pourroit  s'entendre  peut-être  d'un  plat  à  barbe  : 

Faire  la  perruque  au  hacin. 
Rire,  chanter,  deviser  franc, 
Ce  n'est  meurtre  ne  larrecin. 

Coquill.  Monol.  des  Perruq.  p.  167. 

3°  Dire  à  plain  bacin,  c'est-à-dire  sans  rien 
omettre.  Jean  de  Veuet,  finissant  l'Hist.  des  Trois 
Maries,  s'exprime  ainsi  : 

Dit  en  ay,  sans  estre  esmaris. 
De  leur  enfans,  et  de  S'«  Anne 
Vous  ay-je  aussi  à  plaine  aune, 
De  ses  maris  (1)  à  plain  hacin. 

4°  Cracher  au  bacin.  Expression  proveibiale 
employée  par  Rabelais,  T.  I,  p.  05. 

5"  Chanter  de  basin,  c'est-à-dire  se  moquer.  (Voy. 
lesPoës.  Mss.  d'Eust.  Desch.  fol.  2-41.) 

6°  Bacin  d'eve  chaude.  Façon  de  parler  pour 
désigner  une  chose  de  peu  de  valeur  ou  dont  on  fait 
peu  de  cas  : 

Et  quant  la  sinagogue  s'oi  clamer  ribaude 
D'ire  devint  plus  pale  et  plus  jaune  que  gaude  : 
Tais-toi,  dit-elle,  garce,  trop  es  de  parler  baude  (2): 
Li  tien  diex  ne  vaut  pas  plain  bacin  d'ère  chaude. 
Fabl.  MSS.  du  R.  n°  ';218,  fol.  342.  R°  col.  1. 

7°  Bassin  de  salle.  Grand  bassin  (3).  «  Prens  ung 
«  gianl  basin  de  salle  si  parfond  que  le  faulcon 
«  soit  en  l'eaue  jus(iues  aux  cuisses,  et  mectz  le 
«  bassin  en  ung  lieu  bien  secret,  et  soyt  einply 
«  d'oaue,  puis  apporte  le  faulcon.  »  (Modus  et  Ra- 
cio,  fol.  G3,  V°.) 

VARIANTES  : 

BACIN.  Gloss.  latin  de  Du  Cange  au  mot  Bacimts. 

B.issiN.  Orthographe  subsist. 

Baghin.  Gace  de  la  Bigne  des  Déduits,  MS.  fol.  94,  V». 

Baschin,  Borel,  Dict. 

Basin.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  241. 

Batsain.  Mém.  de  Montluc,  T.  II,  p.  458. 

Baeine,  subst.  fém.  Poêle  à  feu.  «Trois milliers 
<<  de  charbon  de  saulx,  deux  milliers  de  charbon 
"  de  chesne,  vingt  /yrtcàics  de  trois  piezchascune.  » 
(Le  Jouvencel,  fol.  85.) 

variantes  : 

BACINE.  Le  Jouvencel,  fol.  85. 

Bassine.  Cotgrave,  Dict. 

Baciner,  verbe.  Sonner  les  cloches.  —  Echauf- 
fer un  lit. 
Dans  le  premier  sens,  en  parlant  des  réjouissan- 


ces publiques  faites  à  Paris,  à  l'entrée  du  Roi  en 
1414,  on  lit:  «  Environ  huit  heures  de  nuyt 
"  commencèrent  les  bonnes  gens  de  Paris,  sans 
«  commandement,  à  faire  feus  et  à  baciner  le  plus 
«  grandement  qu'on  eust  veu  passé  cent  ans  de- 
«  vaut.  «  (.lourn.  de  Paris,  sous  Charles  VI  et  Vil, 
p.24.)  On  lit  ?)«ssjncr.  (Ibid.  p.  12  et  p.  177.)  Le 
Gloss.  de  ce  Journal  explique  le  mot  bassiner  par 
jouer  des  instrumens.  Cette  explication  n'est  pas 
juste.  On  a  vu  ci-dessus  bacin  pour  cloche. 

Nous  disons  encore  bassiner  pour  échauffer  un 
lit.  On  disoit  baciner  dans  le  même  sens.  (Voyez 
Coquillart,  p.  IGG.) 

variantes  : 

BACINER.  Coquillart,  p.  1G6. 

BassIxNer.  Journ.  de  Par.  sous  Charles  VI  et  VII,  p.  12. 

Bacinet.  subst.  masc.  Armure  de  tète.  —  Sorte 
de  fleur.  —  Bassin,  mesure. 

Au  premier  sens,  ce  mot  signifioit  sous  toutes 
ses  orthographes  un  chapeau  de  fer,  pot  en  tête, 
armel  ou  autre  espèce  de  casque.  (Voy.  l'étymologie 
de  ce  mot  dans  le  P.  Menestrier,  Oiig.  des  Orn.  des 
Arm.  p.  28.  —  Voy.  aussi  le  Gloss.  latin  de  Du 
Cange,  aux  mots  Bacinetum  et  Armatura;  les  Dict. 
de  Borel,  Cotgrave  et  Monet,  au  mot  Bacinet.  — 
\o\.  enfin  Fauchet,  des  Orig.  Liv.  Il,  p.  lOG,  et  le 
P.  Daniel,  ilil.  fr.  T.  I,  p.  389  et  400.)  L'auteur  des 
Contes  d'Eutrapel  censure  l'abus  oi^i  l'on  étoit  de 
son  temps  d'emprunter  sans  besoin,  des  langues 
étrangères,  de  nouveaux  mots,  pour  les  substituer 
à  ceux  qui  étoient  en  usage.  Il  se  récrie  sur  ce, 
qu'au  lieu  de  cabasset,  casquel  et  bassinet,  onavoit 
introduit  le  mot  ;Uo)voH.  (Voy.  les  Contes  d'Eutra- 
pel, p.  479.)  Le  passage  suivant  feroit  presque 
croire  que  le  bassinet  étoit  une  armure  de  tête 
plus  légère  et  moins  forle  que  le  heaume.  Il  y  est 
parlé  d'un  chevalier  qui  fut  tué  d'un  coup  de 
lance  qui  perça  son  bassinet.  (Voy.  Froissart,  Liv. 
II,  p.  lOG,  année  1380.)  Mais,  en  général,  il  est 
employé  pour  lieaume.  Eust.  Desehamps,  dans  la 
description  de  l'armure  d'un  chevalier,  dit  : 

Escu  luy  [ault,  espée  et  lance. 
Cotte  d'acier,  et  parde  bras, 
Ilernoys  de  jambes  pour  le  bas, 
Solers  de  fer,  et  une  pièce 
Que  la  poitrine  ne  despièce 
Plates,  jaques  et  gantelès 
Braconnières  et  bacinés 
Hache,  dague,  camail,  visière 
Mais  qu'il  y  ait  bonne  lannière 
Cottes  d'armes  pour  pairement . 

Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  504. 

«  Il  print  son  bacinet  et  le  meit  en  sa  teste  et  son 
«  escuyer  le  lui  laça  par  derrière.  «  (Froissart, 
livre  I,  p.  400.) 

Il  est  employé  au  figuré,  dans  un  passage  que 
nous  allons  citer.  Les  Etats  de  150G,  parlant  au  roy 
Louis  XII  et  faisant  l'éloge  de  leur  gouvernement, 
lui  dirent  :  <"  qu'il  avoit  maintenu  son  royaume  et 


(1)  Joachim.  —  (2)  Tu  es  trop  joyeuse  de  parler.  —  (3)  Bassin  nous  paraît  être  le  diminutif  de  basse,  sorte  de  tonneau 
qui,  en  Saintonge,  sert  à  porter  la  vendange.  Comme  on  trouve  dans  Grég.  de  Tours  le  mot  ethnique  bacchinon,  il  faudrait 
peut-être  remonter  au  celtique  bac,  creux,  cavité.  (N.  E.) 


BA 


-  358 


BA 


«  son  peuple  en  si  bonne  paix,  que  par  le  passé 
«  n'avoit  este  en  plus  grande  tranquilité  et  telle- 
«  ment  qu'ils  sçavoient  (lue  les  poulies  portoienl  le 
«  bacinet  sur  la  teste  en  fa^on  qu'il  n'y  avoit  si 
«  hardy  de  rien  prendre  sans  payer.  «  (Lettres  du 
Roy  Louis  XII  et  du  Gard.  d'Amboise,  T.  I,  p.  4i.) 
On  peut  voir  dans  la  Colombière  (Th.  d'honn.  T.  I, 
p.  58),  une  description  détaillée  du  bacinet,  tel 
qu'on  le  porloit  en  Brabant,  en  Flandres  et  en 
Allemagne. 

Le  bacinet  semble  signifier,  dans  les  trois  cita- 
tions suivantes,  une  calotte  de  fer  qui  se  mettoit 
sous  le  casque  (1)  : 

Le  Roy  saisit  au  froin  :  tel  cop  ly  donne  en  teste, 
Qu'il  ly  .sembla  qu'il  fust  féru  d'une  tempeste  : 
Ly  yeaume  l'escartelle,  Iv  bacinet  fendist. 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  158. 

On  voit,  par  le  dernier  passage,  que  le  bassinet 
esloit  une  calotte  que  couvioit  le  heaume,  recou- 
vert d'un  bonnet  d'acier  ou  coiffe.  «  L'espée  qui 
«  estoit  trenchante  descend  sur  le  heaulme  et  luy 
«  va  trencber  jusques  au  bassinet.  »  (Perceforest, 
Vol.  I,  fol.  116,  V°.)  «  Luy  couppa  le  bonnet  d'acier 
«  et  fendit  le  heaulme  jusques  au  bassinet.  »  (Ibid. 
Vol.  I,  fol.  24.)  Dans  les  Orig.  de  Faucbet,  livre  II, 
p.  106  et  110,  on  lit  que  le  bassinet  étoit  un  bassin. 

Le  bassin  renversé  ne  couvroit  pas  toujours  le 
visage  ;  cependant  quelques-uns  avoient  des  visiè- 
res, comme  on  le  voit  dans  le  passage  suivant  : 
«  Si  fit  appareiller  son  coursier  et  meit  son  bacinet 
«  à  visière  par  quoy  il  ne  peust  estre  congnu.  » 
(Froissart.) 

Le  bacinet  à  bannière  étoit  un  casque,  ainsi 
nommé  de  la  bannière  ou  banderolle  dont  il  étoit 
orné.  (Voy.  S'  Rémy,  Hist.  de  Ch.  VI,  p.  89),  oîi  on 
écr'ûbacliinet. 

On  trouve,  dans  G.  Guiart,  bacinez,  à  visières, 
pour  une  espèce  de  casque  : 

Hauberjons  et  tacles  entières 

Escus,  bacinez  à  visières 

De  tous  costez  y  resplandissent. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  309,  V'. 

On  nommoit  aussi  bacinet  ou  bassinet,  une  fleur 
jaune  ('2)  qui  croit  dans  les  prés. 

Les  bassinets,  l'œillet  et  le  narcis. 

CEuv.  de  Baif,  fol.  251. 

Dans  le  blason  des  herbes,  on  voit  que  bassinets 
signifient  contcnte%-vous.  (Voy.  les  Récréations  des 
devis  amoureux,  p.  58.) 

Bacin,  espèce  de  fleurs.  On  disoit:  blond  comme 
un  bassin. 

Nous  trouvons  dans  Guillaume  de  Lorris,  les 
vers  suivans  : 

Le  guyschet  qui  estoit  de  charme 
M'ouvrit  adonc  une  pucelle 
Qui  estoit  assez  gente  et  belle  : 


Cheveulx  eut  blons  comme  un  bassin, 
La  chair  plus  tendre  qu'un  poussin. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  537-541 . 

J.  Le  Maire  fait  cette  nomenclature  de  fleurs, 
parmi  lesquelles  figure  le  bacinelz  :  »  Marjolaines, 
»  paliot,  cyprès,  spic,  romarin,  euroine,  mente, 
«  basilisque,  marguerites,  soucie,  ancolies,  rennetr 
"  tes,  giroflées,  coqueletz,  percelles,  bacinet^, 
«  passeroses  ,  passeveloux  ,  glays  noyelles ,  liz , 
«  pencées,  muguets,  roses  et  œillets  herbuz.  » 
(.1.  Le  Maire,  lUustr.  des  Gaules,  livre  I,  p.  92.) 

On  nommoit  aussi  bacinet,  le  bassin  où  l'on  fait 
le  sel.  Ce  mot  signifie  aussi  la  mesure  de  sel  que 
l'on  présume  égale  à  la  gelonnie  commune,  c'est- 
à-dire  le  galon.  (Voy.  les  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  III, 
note,  p.  660.) 

VARIANTES  ." 

BACINET.  Froissart,  Liv.  L  p.  400. 

Bassin-et.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  184,  col.  3. 

Bacuinet.  J.Le  Fev.  de  S'  Reray,  Hist.  de  Charles  VI,  p.  89. 

Bacin.  Cit.  dans  le  Gloss.  latin  de  Du  Gange  à  Bacinetum. 

Bacinics,  plw:  Eust.  Dcsch.  Poës.  MSS.  fol.  1S4,  col.  3. 

BACiNEY,;j/t(i-.  G.  Guiart,  MS.  fol.  231,  V». 

Bacinot  et  Bacinoy.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  158. 

Bâcles,  subst.plur.  Le  sens  de  ce  mol  est  fort 
peu  déterminé  dans  le  passage  suivant,  le  seul  où 
nous  l'ayons  trouvé.  Il  désigne  peut-être  des  bâtons 
d'armes,  peut-être  aussi  le  nom  propre  d'un  peuple. 

Ja  cis  bncles  (3),  si  rauseis, 
En  lors  bobans  servit  mateis. 

Poès.  MSS.  avant  1300,  p.  1662. 

Bacon  (4),  subst.  masc.  Chair  de  cochon  salée. 
(Voy.  l'étymologie  de  ce  mol,  dans  les  Dictionnaires 
de  Nicot,  Borel,  Oudin  et  Ménage,  au  mot  bacon.  — 
Voy.  aussi  Du  Gange,  Gloss.  lat.  aux  mots  baco, 
bacco,  bacho,  et  ibid.  au  mot  penellum.) 

Bacons  mal  salez 
En  charnier  empire 
Ce  dit  li  villanis. 

Prov.  du  Vil.  MS.  de  S.  Germ.  fol.  70. 

«  Deux  flèches  de  lard  apelez  bacons,  d'où  vient 
«  le  mot  de  baeoner  pour  saler.  »  (Fauch.  Ane. 
Poët.  fr.  livre  II,  p.  175.)  C'est  ainsi  qu'il  traduit  le 
mot  bacon,  qui  se  trouve  souvent  répété  dans  le 
Fabliau,  ms.  du  Moine  et  du  Sacristain.  Son  opinion 
peut  être  confirmée  par  l'auteur  du  Moyen  de  par- 
venir, qui,  à  la  page  131,  dit  qu'à  Genève  bacon 
signifie  lard.  Le  Duchat(sur  Rabelais,  T.  I,  p.  05),  dit 
aussi  :  «  que  dans  le  Lyonnois,  dans  le  Dauphiné, 
«  dans  le  Poitou  et  dans  la  Lorraine  bacon  c'est 
<■  du  lard ,  en  Angleterre  même  ;  »  après  il 
ajoute  :  «  qu'en  Provence,  bacon  veut  dire  du  porc 
«  salé.  i>  On  nommoit  bacquiers,  les  porcs  engrais- 
sés pour  les  saler.  (Voy.  ce  mot.) 


(1)  Le  heaume,  après  1300,  ne  fut  guère  qu'un  objet  de  parade  accroché  à  l'arçon  de  la  selle  .  le  bassinet  ou  la  cervelière 
devinrent  la  coiffure  habituelle  ;  il  avait  les  dimensions  du  heaume,  avec  plus  de  légèreté;  il  n'avait  pas  de  nasal  et 
emboîtait  mieux  la  tête.  Sous  Charles  VII,  la  salade  remplaça  le  bassinet,  (x.  e.)  —  (2)  C'est  le  bouton  d'or;  on  nomme 
encore  ainsi  diverses  renoncules,  (n.  e.)  —  (3)  Si  c'était  un  nom  de  peuple,  ne  faudrait-il  pas  le  rapprocher  de  Baclois, 
ajouté  par  D.  Carpentier  à  Du  Cangc,  d'après  le  poème  d'Alexandre:  «  Sor  l'escu  vet  ferir  .Amaudrus  li  courtois,  Sires  iert 
des  barons  et  sires  des  Baclois.  Il  ne  resemble  mie  Provencel,  ne  Baclois:  Ains  semble  que  il  soit  un  naturel  François.  »  (N.  K.) 
—  (4)  Bacho  en  ancien  allemand,  back  en  allemand  moderne,  signifie  dos,  échine.  (N.  e.) 


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—  359 


BA 


VARIANTES  : 
BACON.  La  Thauraassière,  Coût.  d'Orl.  p.  47i. 
Bascon.  Fabl.  MSS.  de  S.  Germ. 

Baconner,  verbe.  Saler.  C'est-à-dire  saler  en 
mettant  dans  un  baquet  d'eau  salée.  (Voy.  Fauchet, 
Ane.  Poët.  fr.  livre  II,  p.  175.)  «  Quiconque  acheté 
«  haron  de  fronelaye,  et  morues  baconnées ,  il 
«  convient  qu'ils  soient  ouverts  dedans  tierce  et 
»  clos  dedans  vesprcssonnans.  »  (Ord.  desR.de  Fr.) 

Bacques,  siihst.  fém.  plur.  Ce  mot  est  employé 
dans  un  sens  obscène  par  Crétin,  p.  15(5. 

Bacqueter,  verbe.  Vider  l'eau.  «  Soit  d'une 
«  rivicre,  soit  d'autre  lieu  par  bacquet,  ou  grandes 
«  auges,  pour  mettre  à  sec  l'endroit  oîi  l'on  veut 
«  piloter  et  hastir.  »  (Dict.  de  Nicot.) 

Delà,  on  disoit  bacqiieler  le  moust  d'une  cuve  ; 
c'est-ù-dire  tirer  le  moût  d'une  eiive  avec  un 
baquet.  (Dictionnaire  de  Monel.) 

Bacquiers,  subst.  masc.  Cochon  qu'on  en- 
graisse. «  Que  l'on  ne  meine  paistre  aux  champs, 
u  ains  faict-on  garder  le  toict  pour  l'engraisser  et 
«  puis  tuer.  »  (Cellhell.  de  L.  Trippault,  au  mot 
porc.)  Cette  explication  semble  nous  donner  l'Elymo- 
logie  de  bacon.  (Voy.  ce  mot.) 

Baciil,  subst.masc.  Partie  du  harnois.  Morceau 
de  bois  en  demi-cercle  qui  fait  partie  du  harnois  du 
mulet  ou  de  l'âne  ;  on  le  met  au-dessous  de  la 
croupière.  Rabelais  fait  parler  ainsi  le  cheval  au 
baudet:  «  Pauvre  et  chélif  baudet,  j'ay  de  toy  pitié 
«  et  compassion  :  tu  travailles  journellement  beau- 
«  coup,  je  l'apperçoy  à  l'usure  de  ton  bacul.  » 
(Rabelais,  T.  V,  p.  28.)  On  appelle  baculs,  en  diver- 
ses provinces,  les  palonneaux  d'un  chariot,  les 
morceaux  de  bois  où  l'on  attache  les  traits. 

VARIANTES    : 
BACUL.  Rabelais,  T.  V,  p.  28. 
Bacoul.  Contred.  de  SongecreiLx,  foL  25,  R". 

Bacule,  siibst.  fém.  Machine  de  guerre.  —  Sorte 
de  peine. 

Dans  le  premier  sens,  c'est  une  machine  propre  à 
jeter  des  feux  d'artifice,  à  tirer  de  l'eau,  à  baisser 
ou  lever  un  pont-levis,  une  bascule.  (Voy.  le  Dict. 
de  Ménage,  Cotgravc,  Monet  et  Oudin.)  Ce  dernier 
l'explique  encore  par  trappe,  trébuchet,  souricière. 

On  nommoit  aussi  bacule  :  «  une  peine  imposée 
«  pour  faute  indécente  an  son  office,  bâtant  le  der- 
«  rière  du  coupable,  avec  le  plat  d'une  paele,  ou  le 
«  faisant  heurter  du  derrière  contre  chose  dure.  » 
(Dict.  de  Monet.) 

De  là,  on  disoit  : 

Donner  la  bacule  ;  ce  qu'Oudin  interprète  fort 
imparfaitement  par  jeter  à  terre,  renverser  sur  le  dos. 

Jouer  à  la  bacule,  ou  à  la  bassectile,  est  une 
sorte  de  jeu  d'enfant,  dont  il  est  mention  dans 
Rabelais,  T.  I,  p.  152. 

Baculer,  vei'be.  Frapper  avec  un  bâton.  — 
Frapper  sur  le  derrière.  —  Maltraiter.  —  Mettre  le 
bacul  à  une  béte  de  charge. 

La  première  acception  vient  du  mot  Baculus, 


bâton.  Elle  se  trouve  dans  le  Glossaire  latin  de  Du  ■ 
Cange,  au  mot  Bacnlare.  (Voy.  le  Dict.  de  Borel, 
secondes  add.  —  Les  Dict.  de  Rob.  Estienne  et  de 
Ménage.) 

La  seconde  signification  vient  de  cul.  Nicot,  dans 
son  Dictionnaire,  la  dérive  de  batueiido  culo. 
Ménage  critique  celle  élymologie.  On  lit  dans  le 
premier  article  de  l'Ordonnance  pour  les  tournois, 
attribuée  à  l'empereur  Henry  l'Oiseleur  :  «  que  si 
«■  pour  la  noblesse  de  leur  extraction,  ils  sont  si 
«  téméraires  que  de  se  présenter,  nous  ordonnons, 
•<  voulons  et  nous  plaisi,  qu'ils  soient  desmontez  et 
«<  privez  de  leur  cheval  et  baculez,  et  pour  note 
«  d'infamie  à  l'advenir,  qu'ils  chevauchent  la  bar- 
«  riere.  «  (Fav.  Th.  de  Chevalerie,  p.  1745.) 

Le  mot  baculatus  est  employé  dans  le  même  sens 
et  pour  le  même  usage,  dans  Mathieu  Paris,  cité 
par  Favin,  ibid.  p.  1808,  et  par  Du  Cange,  sur  Join- 
ville,  p.  202.  11  n'est  pas  aisé  de  décider  si  baculer, 
en  cet  endroit,  se  doit  entendre  dans  le  premier  ou  le 
second  sens;  mais  il  est  pris  certainement  dans  cette 
seconde  acception  en  ce  passage  :  «  Fut  dit  que 
a  Perrin  Dandin  avoit  le  plus  mal  rencontré,  dont 
«  il  fut  contraint  tendre  les  fesses  et  bacule  à 
«  demeurant.  »  (Des  Accords,  Escr.  Dijon,  fol.  57.) 

Des  deux  acceptions  précédentes  s'est  formée  la 
signification  générale  de  maltraiter  :  «  Nos  amis 
«  dedans  le  Royaume  ne  se  osent  déclarer,  ni  les 
«  gens  d'armes  n'osent  laisser  leurs  ordonnances 
«  pour  venir  à  nous  d'autant  que  nous  les  avons 
«  laissés  baculer.  »  (Godefroy,  Observ.  sur  l'Hist. 
du  Roi  Ch.  VII,  p.  507.) 

Enfin,  baculer  s'est  dit  pour  :  «  Mettre  le  bacul  à 
«  une  bête  de  charge.  »  (Dict.  de  Monet.) 

Baculler  sans  elle;  façon  de  parler  employée 
dans  un  sens  obscène.  (Chasse  et  Départie  d'amour, 
fol.  104.) 

VARIANTES  : 
BACULER.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Baculare. 
Baculleu.  Chasse  et  départ,  d'amours,  foL  164. 

Badal,  subst.  masc.  Espèce  d'huissier.  (Dict.  de 
Borel,  au  mot  Bedeau.) 

Badanages,  subst.  masc.  plur.  .Juifs.  «  Mantoue 
«  n'est  point  sans  des  badanages  et  patarins;  à  iceux 
«  il  offre  sa  saye,  sa  cappe  et  sa  chemise,  plusieurs 
«  donnent  à  ces  Juifs  asseurance  pour  luy.  » 
(Merlin  Cocaye,  T.  I,  p.  08  et  09.) 

Badaudage,  subst.  masc.  Caractère  de  badaud. 
Un  poêle  a  dit,  en  parlant  des  Parisiens  : 

Votre  ane  fut  d'autre  nature... 
Il  étoit  bourgeois  de  Paris, 
Et  de  fait,  par  un  long  usage, 
Il  retenoit  du  badaudage. 

G.  Durant,  à  la  suite  de  Bonnefons,  p.  223. 

Badaudaille,  subst.  fém.  Collectif  de  badaud. 
Le  duc  de  Sully,  parlant  de  M.  de  Joyeuse  que  les 
prêtres  avoient  annoncé  dans  les  chaires  de  Paris, 
comme  destiné  par  le  ciel  pour  la  destruction  des 
Huguenots^  ajoute.  «  Si  bien  qu'après  s'estre  fait 
«  adorer  comme  tel  par  toute  la  badaudaille  de 
"  cette  grande  ville,  ou  plustost  petit  monde  de 


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<■  Paris,  il  forma  son  armée  de  toutes  les  meilleures 
«  troupes  qu'eut  le  Roy.  »  (Mém.  de  Sully.) 

Badandement,  adv.  Sottement.  (Diot.  d'Oud.) 

Badauderie,  subst.  [cm.  Sottise,  niaiserie. 
(Dict.  de  Cotgrave  etd'Oudin.) 

VARIANTES  : 
B.\DAUDERIE.  Cotgrave. 
Badaudise.  Oudin,  Cotgrave. 

Badault,  adj.  Sot,  nigaud,  imbécile.  —  Engin 
suspendu  au  planclier. 

Dans  le  premier  sens,  ce  mol  subsiste  ;  mais  on 
écvïibadaiid.  (Voyez-en  l'étymologie  dans  le  Cellhell. 
de  Léon  Trippault,  et  dans  la  conformité  du 
françois  avec  le  grec  par  Henry  Estienne.  —  Voy. 
aussi  le  Dict.  de  5'icot  et  le  Gloss.  lat.  de  Du  Gange, 
au  mot  harjaudie.)  Le  Duchat,  sur  Rabelais,  T.  "v, 
p.  201,  croit  que  ce  mot  pourroit  venir  de  Vitlellus. 
Il  paroitroil  plus  naturel  de  le  dériver  de  badcr  ou 
baer,  bayer. 

Henry  Estienne,  parlant  de  l'abondancede  la  lan- 
gue fran(,'oise  pour  exprimer  un  sot,  dit:  «  Les 
«  frères,  ou  pour  le  moins  cousins  germains  de 
«  sot,  sont  niais  que  le  vieil  françois  disoit  nice, 
"  fat,  badaut,  que  le  vulgaire  en  quelques  lieux 
«  appelle  badlori,  nigaud,  badin  et  plusieurs 
«  autres.  »  (Apol.  pour  Hérod.  p.  19.)  Rabelais,  par- 
lant de  l'auteur  du  livre  intitulé:  le  Blason  des 
couleurs,  dit  :  «  Sa  besterie  ba  existimé  que,  sans 
«  aultres  démonstrations  et  arguments  vallables, 
»  le  monde  reiglcroit  ses  devises  par  ses  imposi- 
«  lions  badaudes.  »  (Rabelais,  T.  L  P-  52.) 

Badaut  de  Paris,  semble  une  expression  prover- 
biale, dans  le  Moyeu  de  Parvenir,  p.  200. 

On  nommoit  aussi  badaut  «  un  engin  qui  tient 
«  au  plancher  sur  lequel  on  plaçoit  diverses  choses 
«  dans  les  ménages  de  campagne.  »  (Voy.  le  Moyen 
de  Parvenir,  p.  159.) 

variantes  : 

BADAULT.  Celthell.  de  Léon  Trippault. 

Badaut.  Apo)ogie  pour  Hérodote,  Liv.  I,  p.  19. 

Badelori.  Oudin,  Cotgrave,  Rab.  T.  III,  p.  155. 

Badlori.  Apologie  pour  Hérodote,  ubi  suprà. 

Badde,  subst.  féni.  Babil.  —  Terme  de  mon- 
noie.  Ce  mot,  au  premier  sens,  se  dit  encore  en 
Touraine  parmi  le  peuple  : 

Ses  quacquetez,  et  ses  baddps. 

Faifeu.  T-  9%. 
A  Rennes  sont  venus  à  la  couchée 
Ou  maintes  bades  ils  ont  descochée. 
Id.  p.  54. 

Dans  un  sens  fort  différent,  bade  étoit  un  terme 
de  monnoie.  Il  existoit  plusieurs  façons  de  véri- 
fier le  poids  des  monnoies  :  dans  la  première  on  se 
contentoit  de  justifier  que  la  totalité  des  pièces 
pesoit  le  marc  qui  avoit  été  réglé  pour  leur  fabri- 
cation ;  on  appeloit  cette  façon,  à  bade  saiis  recours. 
Dans  la  seconde  façon,  outre  celte  première  opéra- 
tion, on  pesoit  encore  au  trébuchet  les  pièces  deux 
à  deux,  pour  savoir  si  elles  étoient  d'un  poids  égal 
entre  elles;  cette  façon  s'appelloit  à  recoiirs.  (Voy- 
les  Ordonn.  des  Rois  de  France,' T.  III,  p.  94.)  Les 


nouveaux  éditeurs  du  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  pro- 
posent de  substituer  le  mot /irtr/e  au  molbade,  mais, 
outre  qu'il  est  toujours  écrit  bade,  on  ne  trouve 
aucune  autorité  pour  justifier  cette  correction. 

variantes  : 
BADDE.  Faifeu  p.  93. 
Bade.  Id.  p.  54. 

Badé  (au).  Terme  de  chasse.  G'est  le  terme  où 
l'on  haye,  où  l'on  épie  le  moment  auquel  la  béte 
paroilra  pour  la  chasser.  «  Tantost  les  chiens  avoir 
"  esté  découpiez,  voicy  le  levraut  qui  sort  en  cam- 
«  pagne  «H  badé.  »  (Gontes  d'Eutrap.  p.  172.) 

Badelaire,  subt.  musc.  Espèce  de  sabre  ou 
d'épée.  Ges  sabres  étoient  larges  et  recourbés; 
tantôt  longs  et  tantôt  courts.  On  trouve  dans  le 
Journ.  de  Paris,  sous  Gh.  VI et  VIL  p.  30:  «  Espées, 
«  ou  badelaircs,  ou  hachets.  »  (Froissart,  Liv.  I, 
p.  18),  dit:  «  Goupoyent  plançons  de  bois  à  leurs 
«  espées  et  badelaires.  »  On  lit  dans  Rabelais,  T.  IV, 
p.  173:  «  Frère  Jean  avecques  son  grand  badelaire 
«  entre  le  dernier.  "  Le  maire  de  Londres,  attaquant 
Tillier,  capitaine  des  Mutins  de  Kent  en  1380,  «  tira 
«  un  grand  badelaire  qu'il  portoit  et  frappa  ledit 
«  Tillier  si  grand  coup  par  la  tête  qu'il  l'abbatist 
»  aux  pies  de  son  cheval.  »  (Froiss.  Liv.  II,  p.  142.) 

Badelaire  turquois,  n'est  plus  en  usage  qu'en 
termes  d'armoiries.  Le  Laboureur,  dans  ses'Origines 
des  armoiries,  dérive  ce  mot  de  bataille.  (Voy.  sa 
préface,  p.  21  et  241.)  A'icoUes  Gilles,  parlant  de 
Farmure  de  Gharles  le  Ghauve,  dit  que  «  le  Prince 
«  toujours  avoit  à  son  costé  un  grand  badelaire 
«  turquois.  «  On  ne  sait  trop  pourquoi  Fauchet, 
qui,  dans  ses  Origines,  Liv.  II,  p.  108,  cite  ce  pas- 
sage, en  infère  que  c'étoit  une  épée  large. 

VARIANTES  : 
BADELAIRE.  Nicot,  Monet,  Borel,  Ménage. 

B.A.DELADRE.  NiCOt,  DiCt. 

Baselarde.  Citât,  dans  le  Gl.  lat.  de  Du  C.  à  Bassillardiis. 

Badelarié,flrfj.  Ge  mot  est  employé  comme  épi- 
Ihète  d'un  terme  obscène  dans  Rabelais,  T.  III,  p. 
155.  (Voy.  le  Dict.  de  Gotgrave.) 

Badian,  subst.  mase.  Espèce  d'oiseau  qu'on 
cbassoit  avec  l'autour. 

Mais  ne  se  faigncnt 

De  prendre  butours  et  badians 
Poclies,  aguettes.  hérons  blancs,  etc. 

Gace  de  la  Bigne  des  Déduits,  MS.  fol.  11,  V*. 

Badigoince,  subst.  fém.  Lèvre.  ■>   Lors  dist 

«  Pantagruel,  plust  à  Dieu  que  chascun  de  vous 
«  eust  deux  paires  de  sonnettes  de  sacre  au  man- 
«  ton,  et  que  j'eusse  au  mien  les  grosses  hor- 
«  loges  de  Renés,  de  Poictiers,  de  Tours  et  de 
«  Gambray  pourveoir  l'aubadequenousdonnerions 
«  au  remuement  de  nos  badigoines.  «  (Rabelais, 
T.  Il,  p.  218  et  219.)  «  Le  pauvre  ayant  accordé  ses 
"  badigoines  gringuenotoit  ce  salve  avec  une  voix 
«  horrifique.  ">  (Moyen  de  Parvenir,  p.  258.) 

On  disoit  : 

1»  Se  declaver  les  badigoinces,  c'est-à-dire  remuer 
les  lèvres,  comme  pour  ruminer  ce  que  l'on  doit 


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dire:  »  Tandis  que  trop  bavards  ils  se  delavoient 
«  les  badigoinces  de  ce  qu'ils  avoient  à  dire.  » 
(Moyen  de  Parvenir,  p.  23.) 

2°  Se  délayer  les  badigoinces,  se  lécher  les  lèvres. 
L'auteur  du  Moyen  de  Parvenir,  après  le  récit  d'une 
aventure  galante  arrivée  à  une  dame,  ajoute:  «  La 
«  bonne  dame,  à  ce  qu'elle  disoit,  en  s'en  délayant 
«  les  badigoinces,  eut  bien  voulu  avoir  souvent 
«  telles  pratiques.  )>  (Moyen  de  Pan'enir,  p.  49.) 

VARIANTES  : 
BADIGOINCE.  Nuits  de  Strapar,  T.  I.  p.  408. 
Badigoine.  Moyen  de  Parv.  p.  258. 
Babine.  Villon,  p.  109,  et  Crétin,  p.  135. 

Badigoincier,  adj.  Epilliète  d'un  cuisinier  in- 
venteur de  la  saulce  madame.  (Rab.  T.  IV,  p.  171.) 

Badin  (1),  subst.  maso,  et  adj.  Bouffon.  —  Sot, 
niais. 

Dans  la  première  acception,  ce  mot,  comme 
substantif,  désignoit  autrefois  un  personnage  de 
comédie,  comme  Gille  ou  Pierrot,  quelquefois  cou- 
vert de  farine.  (Voyez  les  épithètes  que  lui  donne 
Martin  de  la  Porte. — Voyez  aussi,  sur  l'étymologie  de 
ce  mot,  Caseneuve,  Orig.  Fr.)  «  En  ceste  manière 
«  voyons  nous  eatre  les  jongleurs,  à  la  distribution 
«  des  rolles,  le  personnaig^  du  sot  et  du  badin 
<•  estre  toujours  représenté  par  le  plus  périt  et  par- 
«  fait  de  leur  compaignie.  »  (Rab.  T.  111,  p.  1!»0.) 

Pour  sot,  niais,  badin  est  employé  comme 
synonyme  de  ces  mots  et  d'autres  qui  ont  la  même 
signification,  dans  l'Apologie  pour  Hérodote,  p.  19. 
Des  Accords,  en  ridiculisant  les  rébus  de  Picardie 
qui  sont  des  espèces  de  logogriphes,  les  appelle 
fades  et  badi)is.  (fol.  12.)  Molière  l'emploie  dans  la 
même  acception  comme  adjectif. 

Ma  foy  j'en  suis  d'avis  que  ces  penards  chagrins 
Nous  viennent  étourdir  de  leurs  contes  badins. 

Com.  (le  l'Elourdi,  ad.  I,  scène  II. 

Badin  (en),  «dv. Bellement.  Du  grec  eââijy.  Aller 
en  badin,  c'est-à-dire  compter  ses  pas.  (Vovez  le 
Celthell.  de  Léon  Trippault.) 

Badinage,  subst.  mase.  Sottise,  chose  ridicule. 
«  Tenez  vous  gay  et  joyeux,  et  me  jetiez  aux  pieds 
«  ces  badinages  qui  encharircut  voire  pauvre  juge- 
«  ment  dans  des  jalousies  fort  obscures.  >•  (Contes 
de  Chol.  fol.  168.  —  Voy.  le  Dict.  d'Ondin  et  de 
Cotgrave,  au  mot  Badinement.) 

VARIANTES  : 
BADINAGE.  Contes  de  Chol.  fol.  168,  R». 
Badinement.  Oudin,  Cotgrave. 

Badinatoi'ium.  C'est  un  mot  latin  forgé  par 
Rabelais  dans  le  catalogue  ridicule  de  la  bibliothèque 
de  S' Victor,  au  T.  U,  p.  75,  où  on  lit Badinatorium 
Sophistarum,  au  nombre  des  titres  imaginaires  des 
livres  de  cette  bibliothèque. 

Badinement,  adv.  Sottement.  (Dict.  d'Oudin 
et  de  Cotgrave.) 


Badiner,  verbe.  Amuser.  Ce  mot  a  cette  signi- 
fication dans  cette  expression  :  badiner  les  perdrix, 
c'est-à-dire  les  amuser  en  badinant  derrière  elles 
pour  les  faire  entrer  dans  la  tonnelle.  (Voyez  le 
Celthell.  de  Léon  Trippault  et  le  Dict.  de  Cotgrave.) 

Badinerie,  subst.  fém.  Farce.  C'étoit  une  des 
anciennes  significations  de  ce  mot  qui  subsiste, 
mais  qui  n'a  pas  conservé  cette  acception.  «  Ainsi 
«  que  nous  voyons  un  farcereau  estre  bien  loué 
«  en  représantanl  une  parfaite  badinerie.  »  (Dial. 
de  Tahur.  fol.  52.) 

Badoulages,  subst.  masc.  plur.  Rapports  indis- 
crets. On  appelle  ainsi  à  Beauvais,  les  rapports 
qu'on  fait  les  uns  des  autres.  (Voyez  le  Dict.  Etym. 
de  Ménage.) 

Badrans,  subst.  masc.  Nom  propre  de  peuple. 
Alexandre,  dans  l'énumération  des  princes  à  qui  il 
avoit  donné  des  états  à  gouverner,  nomme  «  le 
«  Soudan  des  Badrans  qui  costoye  à  l'autre  coslé 
«  toute  Afîrique  à  la  Mer  Majour.  »  (Perceforest, 
Vol.  1,  fol.  97.) 

Baé,  participe.  Ouvert,  béant.  —  Oiseux. 
Dans  le  premier  sens,  ce  mot  signifioit  ouvert, 
béant.  Nous  le  trouvons  avec  cette  signification  dans 
les  vers  suivans  :  »  Estoit  armé  d'iînes  armes  noi- 
«  res,  à  .111.  testes  d'omme  d'argent,  les  gueules 
«  baées  et  ont  les  langues  rouges.  >■  (Modus  et 
Racio,  Ms.  fol.  285,  V".) 

Quant  li  valiez  la  vit  pasmée, 
Tôt  maintenant  gule  haliée, 
Se  lest  cheoir  come  pannez. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  II,  fol.  182,  R-  col.  2. 

Comme  de  baer,  ouvrir  la  bouche,  l'on  a  fait 
baailler  pour  bâiller,  et  que  de  cette  acception  s'est 
formée  celle  d'être  oisif,  par  la  même  analogie  baé 
a  passé  de  sa  signification  propre  à  celle  d'oiseux. 
C'est  en  ce  sens  qu'on  a  dit  des  espions,  des 
amans  : 

El  pais  sur  ou  celé  est  qui  m'agrée 
Si  ne  puis  pas  à  mon  voloir  veir. 
Car  tant  redoue  la  cruel  gent  baée 
Que  je  n'i  os  ne  aler  ne  venir. 

Poés  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  6ti. 

VARIANTES  : 
BAÉ.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  171,  R»  col.  1. 
Bahé.  Ibid.  n»  7615,  T.  II,  fol.  182,  R"  col.  2. 

Baée,  subst.  fém.  Fenêtre,  ouverture.  Ce  mot 
vient  de  &««■  (2),  ouvrir.  On  a  même  dit:  Fenêtre  bée 
pour  fenêtre  ouverte.  (Ord.  T.  II,  p.  385.)  Baée 
signifie  petite  fenêtre  dans  les  Ord.  T.  III,  p.  580, 
où  l'on  trouve  bâte.  L'éditeur  conjecture  qu'il  faut 
lire  baée,  il  croit  que  c'est  le  même  mot  que  bée, 
petite  fenêtre.  Le  mot  baye  est  encore  usité  dans 
la  maçonnerie. 

Ballotte  est  peut-être  le  diminutif  de  baée:  «  Si 
«  un  propriétaire  veut  en  sa  maison  faire  ériger 
«  quelque  fenestre,  fente  ou  bahotte  en  quelque 

(1)  Ce  mot  a  la  même  origine  que  badaud,  c'est-à-dire  hadare,  bayer,  (n.  e.)  -  (2)  C'est  le  participe  pas.'^é  de  ce  verbe- 
le  mot  se  rencontre  des  le  xii'  siècle:  «  Et  par  l'iiis  dont  cuida  clore  celé  bace  Est  la  veie  descloVe  et  l'ire  Deà 
mustrees.  »  (Tliomas  le  Martyr,  p.p.  Bekker,  Berlin,  1838.)  (N  e)  cic  uesciu.t.,  ei  iire  ueu 

"•  46 


BA 


—  362  - 


BA 


«  muraille,  pour  recouvrer  veue  sur  rhérilage  de 
«  son  voisin,  tel  propriétaire,  en  ce  faisant,  est 
u  tenu  d'ériger  et  eslever  ses  dites  fenestres.  » 
(Coût,  de  la  Ville  d'Orcliies,  au  Nouv.  Coul.  gén. 
T.  Il,  p.  iWy,  col.  1.) 

Quoique  l'éditeur  des  Ordonnances  semble  avoir 
confondu  les  mots  batte  et  baee,  nous  observerons 
cependant  que  leurs  significations  sont  différentes 
aussi  bien  que  leurs  étymologies.  Baée  vient  de 
baer,  comme  nous  l'avo'ns  dit  ;  batte  nous  pareil 
venir  de  battre.  (Voyez  Batte.) 

VARIANTES  : 
BAEE.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  III,  p.  586. 
BÉE.  Ibid.  T.  II,  p.  385. 
B.\CE.  Ibid.  T.  III,  p.  580. 
Bahotte.  Nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  989. 

Ba  en  arrière,  locution.  Il  faut  lire  cha  en 
arrière  pour  ci-devant,  dans  ce  passage:  "  Estoit 
«  de  l'empire  et  du  lignage  au  bon  empereor 
«  Manuel  de  cui  cil  livre  a'parlé  ba  en  arrière.  » 
(Contin.  de  G.  de  Tyr,  Marténe,  T.  V,  col.  703.) 

Baer,  verbe.  Ouvrir  la  bouche.  —  Regarder  ou 
songer,  rêver,  penser  la  bouche  ouverte.  — 
S'étonner,  être  surpris.  —  Aspirer,  désirer. 

Le  sens  pro{u-e  de  ce  mot  est  ouvrir  la  bouche. 
(Voyez  les  Dict.  de  Borel  et  de  Corneille.) 

Mais  li  morcerax  pas  n'a  frist  (1), 
Ki  boulis  (2)  fu  au  fu  d'estiule, 
Et  li  vilains  héc  la  gueule. 

Fabl.  MSS.  du  P..  n-  7989,  fol.  13,  V-  col.  \. 

11  signifioit  aussi  regarder  la  bouche  ouverte  : 

Toutes  les  fois  que  vous  passez 
Devant  autrui  meson,  gardez 
Que  là,  pour  regarder  céens, 
Ne  vous  arestez  :  n'est  pas  sens 
Ne  cortoine  de  baer 
En  autrui  meson,  ne  muser. 

Fobl.  MSS.  du  p..  n-  7218,  fol.  i32,  R"  col.  2. 

De  là,  le  moi  gule  baée,  dans  Marbodus,  ms.  col. 
1674  (et  non  gule  bacce  comme  dans  l'imprimé), 
c'est-à-dire  bouche  béante.  Il  parle  des  moules  qui 
s'ouvrent  pour  recevoir  la  rosée  du  ciel,  et  par  ce 
moyen  conçoivent,  forment  les  perles. 

L'action  de  regarder  la  bouche  ouverte  étant  un 
signe  d'étonnement,  de  là,  baer  s'est  employé  pour 
s'étonner,  être  surpris.  Un  amant,  voulant  excuser 
auprès  de  sa  dame  la  témérité  de  ses  désirs, 
s'exprime  ainsi  : 

Hai,  frans  cuers,  que  tant  conois, 
Ne  baez  à  ma  l'oleté  : 
Bien  sai  qu'en  vos  amer  n'ai 
Droit,  s'amors  ne  m'i  eust  doné. 

Poès.  MSS.  avaiil  1300,  T.  I,  p.  69. 

Par  une  extension  des  acceptions  précédentes,  ce 
mot  s'est  dit  pour  désirer,  aspirer,  soupirer  après 
une  chose: 

Helas  !  comment  porroi-je  estre  liez,  ne  joians 
Se  lamors  m'est  vée  ou  j'ai  fcitt  lonc  tans: 
Et  je  verrai  c'uns  autres  en  fera  ses  commans! 
Jà  Diex  nel  me  leist  veir,  li  pères  touz  poissans. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  l-HS,  fol.  257,  R*  col.  2. 


Or  à  quanques  demandé  a 
Or  à  ce  qu'ele  bca. 

Ibid.  fol.  289,  R' col.  1. 
Oui  viaus  sens  ne  savoit 
El  cortoisie  à  prendre, 
Gart  soi  bien  que  j'a  n'aioit 
Famé  qui  bée  a  prendre. 

On  disoit  aussi  baer  à  folie,  pour  tendre  à  faire 
des  folies.  (Voy.  Fabl.  mss.  du  R.  n-  7989,  fol.  71.) 

CO.NJUG. 

Bel,  au  subj.  aspire.  (Chans.  fr.  du  xiir  siècle,  ms. 
de  Doubler,  fol.  182,  R°.) 

VARIANTES  : 
BAER.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7-il8,  fol.  132,  R»  col.  2. 
Beeb.  Ibid.  n»  7989,  fol.  45,  V»  col.  I. 
Bayer.  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose,  sous  Bayez. 

Baerie,  subst.  fém.  Désir,  attente,  espoir.  Ce 
mot  est  employé  avec  ces  différentes  acceptions 
dans  les  vers  suivans: 

Cuer  désirant  doit  avoir  baerie 
De  bien  servir  adez. 

Poés.  MSS.  Vatic.  n-  1525,  fol.  159,  R'  col.  2. 
On  doit  leissier  sa  foie  baerie 
S'on  puet  aiUors  avoir  son  estounoir. 

Ibid.  fol.  tB2,  V  col.  r. 

VARIANTES  : 
BAERIE.  Poës.  MSS.  Vatic.  n»  1490,  fol.  40,  V°. 
Baierie.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  fol.  1306. 
Be.vrie.  Poës.  MSS.  Vatic.  n»  1400,  fol.  141,  V°. 
BEA^'CE.  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose. 

Bagage  (3),  subst.  masc.  Equipages,  voitures.  — 
Habillement,  ajustement.  —  Embarras.  —  Chose 
supeiilue.  —  Injure. 

Le  sens  propre  de  ce  mot  est  équipages,  voitures. 
Dans  la  Capitulation  de  S'  Dizier  enlSS'i,  on  lit: 
«  Item  que  le  dit  sieur  comte  et  ses  gens  pourront 
«  sortir  de  la  ville  librement,  et  avec  la  suite  de 
■■  leurs  vies,  armes  et  bagues  sauves  et  tout  ce 
«  qu'ils  pourront  charger  et  porter  sur  leur  b«,(7rt(7(?.  » 
(Brantôme,  Cap.  fr.  T.  I,  p.  412.) 

Dans  le  sens  d'habillement,  ajustement,  on  disoit  : 

Hideux  criz,  piteux  langaiges 
Venez  servir  à  mes  gaiges 
Prenez  en  vos  maresquages 

Les  bariaiges 
Et  les  atours  de  tristesse. 

Molinet.p.  124  e*  125. 

Ce  mol  signifioit  aussi  embarras  : 

Bonne  trongne,  bon  visage, 
La  courte  dague,  la  rapière 
Bien  délibéré,  bon  courage. 
D'argent  point,  ce  n'est  que  bagage. 
Aussy  je  ne  m'en  charge  guvere. 

Œuv.  de  R.  de'Collcrye,  p.  48  et  49. 

On  employoit  ce  mot  dans  le  sens  de  chose 
inutile,  superilue  : 

En  trop  parler,  y  a  beaucoup  bar/aige. 

Poés.  deCrcliii.p.  H8. 

Enfin,  ce  mot  étoit  pris  pour  injure.  Le  duc  de 
Sully,  parlant  à  Henry  IV  de  M"'  d'Entraigues  et  de 
son  fi  ère,  lui  dit  :  «  Il  vous  souvient  bien  de  ce 
<■  que  vous  m'avez  autrefois  dit  de  cette  fille  et  de 
«  son  frère,  du  temps  de  madame  la  Duchesse,  des 
«  langages  que  vous  en  tentés  tout  haut,  et  des 


(1)  Frit.  -  (2)  Bouilli.  -  (,3)  C'est  un  dérivé  de  bagues,  qui  aurait  une  origine  celtique,  (n.  e.) 


BA 


—  363  - 


BA 


«  commandemens  que  vous  me  files  faire  à  tout  ce 

"  bagage  (car  ainsi  appelliez-vous  lors  la  maison  et 

«  famille  de  M.  et  M"'  d'Enlraigues)  de  sortir  de 

«  Paris.  »  (Mémoires  de  Sully,  p.  G8.) 

VARIANTES  : 
BAGAGE.  Brantôme,  Capitaines  françois,  T.  I,  p.  412. 
Bagaige.  Molinet,  p.  1-24.  —  Crétin,  p.  118. 
Bacquaije.  Nioot,  Cotgrave. 

Bagare,  subst.  fém.  Vanterie,  fanfaronnade.  — 
Sorte  de  bateaux. 

Le  sens  propre  de  ce  mot  est  vanlerie,  fanfaron- 
nade. (Voyez  Oudin,  Dict.) 

On  appelle  aussi  bagare  sur  la  rivière  de  Seine, 
une  espèce  de  gros  bateaux  qui  vont  ordinairement 
à  la  suite  des  cocbes.  On  dit  gabarre  en  patois 
gascon  pour  gros  bateau,  et  on  trouve  gabarra  avec 
la  même  acception  dans  le  Gloss.  lai.  de  Du  Gange. 
Levrai  motest(/ai)are(l),quieslaussi  le  nom  d'une 
sorte  de  bâlimens  ou  navires  de  transport. 

Bagasse  (2),  subst.  fém.  Femme  de  mauvaise 
vie.  —  Servante.  —  Terme  d'injure. 

Dans  le  premier  sens ,  nous  lisons  :  «  Cette 
«  fortune  s'alla,  comme  une  bagasse,  abandonner 
«  à  d'autres.  »  (Brantôme,  Cap.  fr.  T.  I,  p.  145.) 

On  désigne  quelquefois  sous  ces  noms  une  ser- 
vante ,  mais  ils  emportent  toujours  une  idiée 
désavantageuse  ;  par  exemple,  en  parlant  d'une 
servante  de  cabaret  : 

Voi  com  cel  garse  se  meut  ; 
La  bajassi;  les  entend  bien. 

Fabl.  MSS.  fol.  87. 

Begarde  (3)  est  une  injure  vague  dans  ce  passage 
de  rîlistoire  des  Trois-Maries,  p.  307  : 

Or  ça,  dame  hécjarde. 

Vous  êtes  digne  qu'on  vous  arde. 
variantes  : 
BAGASSE.  Brantôme,  Capitaines  françois,  T.  I,  p.  14,5. 
Bajasse.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  292,  V»  col.  2. 
Bajarse.  Du  Gange. 
Bagare.  Oudin,  Dict. 

Begarde.  Ilist.  des  Trois  Maries,  MSS.  p.  307. 
Béasse.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  Il,  fol.  150,  V°  col.  2. 

Bagatellerie ,  subst.  fém.  Bagatelle.  (Dict. 
d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Bagatin,  subst.  masc.  Petite  monnoie,  ainsi 
appellce  par  les  Vénitiens.  (Voyez  le  Dict.  d'Oudin, 
et  Le  Ducbat  sur  Rabelais,  T.  IH,  p.  226.)  Ce  dernier 
conjecture  que  ce  mol  signifie  batelier,  à  qui  on 
donnoit  un  bagatin  pour  passer  la  rivière.  (Voyez 
Rabelais,  T.  V,  pronostic,  p.  15.) 

Bagaiides,  subst.  masc.  Nom  d'un  peuple  dans 
les  Gaules,  qui  se  révolta  contre  les  empereurs. 
(Voyez  le  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  moi  BagamJœ, 
le  Dict.  de-Borel,  au  mol  Bachard,  et  Ménage,  Dict. 
Etymologique.)  On  peut  voir  aussi  la  dissertation 
sur  les  bagaudes  dans  l'Hist.  de  Carausius,  empe- 


reur de  la  Grande-Bretagne,  imprimée  à  Paris  en 
1740,  in-4°.  Pavin  dérive  ce  mol  de  l'ancien  mot 
goy(i),  bois  ou  forêt.  S' Julien,  dans  ses  Mélanges 
historiques,  les  appelle  baogaudes. 

variantes  : 
BAGAUDES.  Borel,  au  mot  Bachard. 
Baogaudes.  S'  Julien,  Meslanges  historiques. 
Bagad.  Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mot  Barjaadœ. 
Bagat.  Ibid. 

Bagette,  subst.  fém.  Baguelle,  verge.  «  S'il 
«  veut  saillir  dedens  l'eaue,  si  le  laisse  alfer  seure- 
<■  ment,  et  fier  de  la  /wt/c^/c  en  l'eaue,  afin  qu'il 
«  sente  l'eaue,  etc.  »(ModuselRacio,Ms.fol.  118,  R°.) 

Bagoages,  subst.  masc.  plur.  Mallôles.  (Voyez 
Laurière,  Glossaire  du  Droit  frangois.) 

Bagonisier,  subst.  masc.  Gosier.  «  En  ouvrant 
«  le  bagonisier,  il  y  entra  une  aliénée  humide  qui 
«  luy  parfuma...  tout  le  palais.  «  (Moyen  de  Parve- 
nir, p.  19.)  «  Manassès  luy  va  fiaquer  ce  fourmage 
«  mou  dans  le  bagoulier  si  proprement,  qu'il  entra 
«  tout,  et  rien  n'en  sortit.  "  (Ibid.  p.  258  et  259.) 
variantes  : 

BAGONISIER.  Moyen  de  Parvenir,  p.  19. 
Bagoulier.  Ibid.  p.  258. 

Bagottier,  subst.  masc.  Niais,  nigaud.  «  Cou- 
«  vrez-vous  bagottier.  »  (Oudin,  Cur.'fr.) 

Bague,  subst.  fém..  Hardes,  habits,  bagage.  — 
Couvertures  de  bêtes  de  charge.  —  Joyaux.  —  Aug- 
mentation de  dot.  —  Droit  seigneurial.  ~  Baie, 
fruit.  —  Femme  de  mauvaise  vie. 

Dans  le  premier  sens,  ce  mot  signifioil  hardes, 
habits,  bagages:  »  Prendoient  petits' enfans  es  bers, 
«  et  montoient  sur  vaches,  portant  les  dits  petits 
«  enfans  el  baghes  devant  eux.  »  (Le  Fev.  de  S' 
Remy,  Ilist.  de  Charles  VI,  p.  127.)  «  Détroussèrent 
«  dix-huil  charrettes,  chargées  de  vivres  et  autres 
«  bagues.  »  (Monslr.  Vol.  III,  p.  16.)  Nous  disons 
encore,  dans  ce  sens  :  vies  et  bagues  sauves  ,  dans 
les  capitulations. 

Bagues  semble  désigner  des  couvertures  de  bêtes 
de  charge,  en  ce  passage  :  «  Ils  apperçurent  grand 
«  planté  de  sommiers,  dont  les  bagues  de  dessus 
«  sembloient  de  fin  or.  >•  (Percef.  Vol.  IV,  fol.  2.) 

Le  mot  bagues  subsiste  encore  pour  anneau.  Il 
signifioit  autrefois  toutes  sortes  de  joyaux.  C'est  en 
ce  sens  qu'on  lit  dons  et  bagues ,  dans  les  Ait. 
d'Amour,  p.  16. 

En  étendant  cette  acception,  bague,  en  Norman- 
die, a  signifié  ce  qu'on  appelle  ailleurs  augment  de 
dot .  (Voy.  une  lettre  insérée  dans  le  Mercure  d'août, 
175;5,  p.  1707.) 

Bague  semble  un  droit  seigneurial  en  ce  passage  : 
«  Pour  la  part  de  mon  trisayeuil  échurent  les  terres 
«  de  Rosierres  avec  la  cueillère  de  la  mesure, 
«  comme  au  Reingr  afféchut  la  bague  et  au  sei- 


.^1^.5,L°I\.?f:/5PP?rL''l'A.V?.^P''?".°L^''''"'",.^1'f.P"'®^^^  ^^.  '^^".'  '}lleniand  bàcja  (combat),  ou  à  l'irlandais  ha^fair  (menacer), 

■ ,  avec 
comme  les 

dont  ils  faisaient  profession,  (k.  e.)  -  (4)  L'étymologie  serait  plutôrirceÏÏique'l/asaf'raWe'mbïée.'inultUudî^^^  (N.  g^^^"^""^  ^ 


BA 


364  — 


BÂ 


«  gneur  de  Crouy  le  gobelet.  »  (Mém.  de  Bassorap. 
T.  I,  p.  C.) 

Oa  il  d'il  bague  pour  baie,  fruit  du  laurier,  du 
lierre,  etc.  (Voy.  Le  Ducliat  sur  Rabel.  T.  V,  p.  169.) 

EaWn  bague  s'est  dit  pour  une  femme  de  mau- 
vaise vie.  (Voy.  Coquillart,  p.  45  et  54.  —  Clcm. 
Marot,  p.  lî>.  -  Ftabeiais,  T.  V,  p.  176.)  En  ce  sens, 
ce  mot  est  une  contraction  de  bayasse,  bajarce,  etc., 
dont  nous  parlons  ailleurs. 

VARIANTES  : 
BAGUE.  Monstrelet,  Vol.  III,  fol.  96,  R: 
Baghe.  Le  Fev.  de  S'  Remy,  Hist.  de  Charles  VI,  p.  -127. 

Bagué,  adj.  Garni  d'anneaux.  (Dict  d'Oudin  et 
de  Cotgrave.) 

Baguenaude,  subst.  fém.  Baie,  fruit.  —  Sorte 
de  poésie. 

On  a  dit  baguenaude  pour  baie,  fruit  dequelijues 
arbres,  comme  du  laurier,  du  liei're,  du  myrte  et 
du  houx.  (Dict.  Etym.  de  Ménage.) 

On  a  aussi  nommé  baguenaude  une  espèce  de 
poésie  ancienne  toute  masculine  dont  la  rime  étoit 
mauvaise.  (Dict.  de  Borel  et  de  Ménage.)  «  Nota  que 
«  les  Picards  dient  que  baguenaudes  sont  couplets 
«  faicts  à  la,  volonté,  contenans  certaine  quantité 
«  de  syllabes  sans  ritbme  et  sans  raison.  »  (Fabr. 
art.  de  Rhétorique,  Livre  II,  fol.  58.) 

Baguenaudes,  subst.  {ém.  plur.  Plaisanteries. 
—  Sottises,  niaiseries. 

Ce  mot  est  employé ,  dans  le  passage  suivant, 
pour  plaisanteries:  «  Le  remboursant  bas  et  roide 
«  en  sa  conscience  d'aultant  de  baguenaudes 
«  comme  y  ha  de  poil  en  dix-huict  vaschcs  et  aul- 
«  tant  pour  le  brodeur.  »  (Rabelais,  T.  II,  p.  134.  — 
Voy.  la  note  15  de  Le  Duchat,  ibid.  p.  62.) 

Baguenaudes  a  été  employé  pour  sottises,  niaise- 
ries. En  parlant  des  superstitions  des  Mahométans, 
on  dit:  "  Comme  peut  eslre  créance  d'homme  si 
«  legiere,  que  telles  baguenaudes  soient  prinses 
■•  pour  doctrines?  »  (Al.  Chart.  de  l'Espér.  p.  3.5?).) 

VARIANTES  : 
BAGUENAUDES.  Rabelais,  T.  II,  p.  134  et  note. 
Baguenaudebies.  Contes  de  Gholières,  fol.  120. 

Baguenaulder,  verbe.  Baguenauder.  —  Jouer, 
badiner,  s'amuser  à  rien  faire.  (Voy.  Le  Jouvencel, 
fol.  16,  R°.) 

Baguer,  verbe.  Emballer.  —  Charger.  —  Lier. 
Baguer,  dans  le  sens  propre,  signifie  emballer: 

•  Or  convient  au  bon  homme  chanoyer  sa  femme 
«  et  ses  enfans  au  chasteau ,  ou  la  ville  :  et  Dieu 
«  sçait  s'il  a  la  peine  de  monter  et  de  remonter  la 

•  dame  et  ses  enfans,  de  trousser  et  de  baguer,  et 
«  de  loger  quand  ils  sont  en  la  forteresse.  »  (Les 
Quinze  Joyes  du  Mariage,  p.  465.) 

Bacquer  a  été  employé  pour  charger:  "  Ainsyque 
«  fait  la  charge  de  l'asne  quand  elle  est  mal  bac- 

•  quée.  »  (Merl.  Cocaie,  ï.  II,  p.  354.) 
Enfin  ce  mot  a  signifié  lier: 

Navrent  les  uns,  et  les  aulcuns  tuèrent, 
Les  autres  prins  lyerent  et  bayucrenl. 

J.  Marot,  p.  25. 


VARIANTES  : 
BAGUER.  Les  Quinze  Joyes  du  Mariage,  p.  165. 
Bacquer.  J.  Marot,  p.  25. 

Baguete,  subst.  fém.  Petite  bague,  joyaux.  — 
Poche,  gousset. 

Le  mol  baguette  est  le  diminutif  de  bague  ,  et  il 
se  prenoit  en  ce  sens  pour  choses  peu  considéra- 
bles. «  La  devoit  fournir  de  soye  et  de  plusieurs 
«  autres  menues  baguettes.  »  (Arr.  d'Am.  T.  I,  p.  89.) 

Adieu  présens,  baguetes,  affiquets. 

Vigil.  de  Charles  VII,  T.  Il,  p.  32. 

Baguette  signifie  visiblement  poche  ou  gousset, 
dans  le  passage  suivant  : 

Ont  lyards  dessemblez 

Quel  z'il  pousa  en  sa  bource  ou  baguette. 
Faifeu,  p.  40. 

Mais  nous  soupçonnons  qu'il  faut  lire  bougette 
ou  peut-être  brayette. 

variantes  : 
BAGUETE.  Vigil.  de  Charles  VII,  T.  II,  p.  32. 
Baguette.  Arr.  Amor.  T.  I,  p.  89. 

Baguetter,  verbe.  Frapper  avec  une  baguette. 
(Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Baguolet,  subst.  masc.  Nom  propre.  C'est  celui 
d'un  valet  dans  les  vers  suivans  : 

Il  fait  le  maistre  la  dedans, 

Et  diriés  à  voir  barjuollet. 

Que  monsieur  n'est  que  son  vallet, 

Et  madame  sa  chambrière. 

Œuv.  de  Rem.  Belleau,  T.  H,  fol.  U9,  V. 

11  faudroit  peut-être  lire  bagnolet  au  lieu  de  ba- 
guolet. 

Bnhnçinc.  subst.  jém.  La  Bohême.  (Voy.  Dict. 
Etym.  dcMénage,  au  mol  Bahoigne.)  On  Vû'eeintu- 
res  de  lUiliaigne  dans  Petit  Jean  de  Saintré,  p.  119  ; 
(/('  7;('a/.(/Ht'dansleTriomp.  des  ix  Preux,  p.  412,  et 
Balhaigne  A-Am  k\.  Chart.  Hist.  de  Charles  VI  et  VII, 
p.  257,  où  l'on  trouve  «  roi  de  Hongrie,  de  Balhal- 
«  gne  et  duc  d'Autriche.  »  Nous  lisons  Behaigne 
dans  Froissart,  Livre  1,  p.  5.  (Voy.  les  notes  de  l'é- 
diteur des  Mém.  d'Ol.  de  la  Marche,  p.  12.)  On  a 
appelle  Bebaignons  les  peuples  de  Bohème.  (Voy. 
les  Mém.  d'Ol.  de  la  Marche,  Livre  I,  p.  167.)  Il  est 
écrit  Boliaignons  dans  l'Hist.  de  la  Toison  d'Or, 
T.  I,  p.  65. 

VARIANTES  : 
Bahaigne.  Petit  Jean  de  Saintré,  p.  119. 
Bahoigne.  Dict.  Etym.  de  Ménage. 

Balhaigne.  Al.  Chartier,  Hist.  de  Charles  VI  et  VII,  p.  247. 
Behaigne.  Froissart,  Livre  I,  p.  5. 

Bahairiz,  subst.  masc.  plur.  Espèce  d'archers. 
Lorsque  les  rois  d'Orient  étoient  en  guerre,  le  vain- 
queur enlevoit  le  plus  de  prisonniers  qu'il  pouvoit 
et  les  vendoil  à  des  marchands  qui  les  condui- 
soient  en  Egypte  pour  les  revendre.  De  ces  prison- 
niers, il  nafssoit  des  enfans  que  le  Soudan  faisoil 
nourrir  et  garder.  On  leur  apprenoit  à  tirer  de 
l'arc,  et  à  mesure  ([u'ils  avançoient  en  âge,  le  Sou- 
dan en  faisoit  des  archers  qui  étoient  destinés  à  la 
garde  de  sa  personne.  Ces  archers  ou  chevaliers 


BÂ 


365  — 


BA 


étoient  appelles  bahairi%[\).  (Voy.  Jointille,  p.  55.)  Ce 
mot  pounoil  s'être  formé  de  l'allemand  behalten, 
qui  signitie  garder.  Du  Cauge,  Gloss.  latin,  au  mot 
Bahudum,  croit  cjue  ce  même  mot  allemand  a  pro- 
duit 6a/iH/ ou  ^a/iî/<,  que  l'on  a  dit  aussi  bahurs. 
11  n'y  a  qu'une  ditîérence  légère  entre  balutr  et 
huhairi^. 

Baliis,  adj.  Ebahi,  stupéfait.  fV'oy.  Partonopex 
de  Blois,  Ms.  de  S'  Germ.  fol.  156.) 

Partonope.x  n'est  point  baliis. 

Ibid.  fol.  158. 
Partonopex  rest  si  penssis 
Qu'il  en  devient  fox  et  baliia. 

[m  fol.  160. 

Bahu,  subst.  masc.  Espèce  de  coffre.  Il  étoit 
ordinairement  bombé  par  dessus.  Du  Gange,  Gloss. 
latin,  au  mot  Bahudum,  qui  a  la  même  acception,  le 
dérive  du  mot  allemand  hehiiten,  qui  signifie  garder. 

Ainz  prennent  partout  comme  ahurs, 

Tentes  et  cotres  et  bahurs, 

Dont  ils  treuvent  la  bêle  pile  ; 

Et  puis  retournent  vers  la  vile 

Es  pès,  com  l'en  conduit  au  maille. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  263,  R*. 

VARIANTES    : 
BAHU.  L'Am.  Ressusc.  p.  16.  -  Crétin,  p.  180. 
Bahud.  Petit  ,Tean  de  Saintré,  p.  649. 
Bahurs.  Du  Cange,  Gloss.  latin,  à  Bahudum. 
Bahut.  J.  Marot,  p.  66  et  132. 
B.^YEUL.  Cotgrave. 

Bahutier,  subst.  masc.  Ouvrier  qui  fait  des 
bahus.  D'où  est  venue  cette  façon  de  parler.  Faire 
comme  les  baliutiers,  c'est-à-dire  faire  bien  du 
bruit  et  peu  de  besogne.  (Oudin,  Cur.  fr.) 

Bahutier,  adj.  Propre  à  porter  le  bahut.  On 
disoit  en  ce  sens  cheval  bahutier.  (Dict.  de  Cotgr.) 

Bai,  adj.  Blond. 

Quant  je  remis  sa  bouchete, 

Et  son  bel  chief  bai, 

Et  sa  polie  gorgete 

Qui  plus  est  blanchete 

Que  n'est  fleur  de  lis  en  may. 

Chron.  fr.  du  xin"  siècle,  MS.  de  Bouliier,  fol.  183. 

Bai,  sk/*s^  masc.  Cheval  bai.  —  Animal  marqué 
en  tête  d'une  tache  blanche. 

Nous  disons  encore  bai  dans  le  premier  sens.  On 
trouve  presque  toutes  ces  orthographes  dans  Du 
Cange,  Gloss.  latin,  aux  mots  FariUs  equus,  Baucus 
frisca,  Hevioldum. 

Il  a  fait  baielart  sin  ceval  inseler. 

Po5s.  MSS.  avant  1300,  T,  IV,  p.  1365. 

De  là,  on  disoit  : 

Bai  héron,  bai  couleur  de  héron.  (Parton.  de 
Blois,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  149.) 

Bail  brun  (dans  Rabelais.  T.  I,  p.  70.) 

Baxj  aumbler,  cheval  bai  qui  va  l'amble.  (Du 
Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Hariotum.) 

On  trouvera  dans  Champier,  Hist.  de  Louis  XII, 


page  353,  les  allusions  du  mot  haiard,  dans  le 
sens  que  nous  exposons,  avec  le  nom  du  Chevalier 
Bayard. 

Feste  Dieu  Baijart,  est  un  jurement  dans  Rab. 
T.  [,  p.  249,  etï.  IV,  p.  285. 

On  nomiiioit  aussi  baillet  (2)  les  chevaux,  et  même 
les  autres  animaux  marqués  au  front  d'une  tache 
blanche.  (Voy.  Monet  et  Robert  Estienne,  Dict.  et 
Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Frisca.)  On  dit  bai  l 
en  ce  même  sens  en  Bretagne,  et  baiard  en 
Flandres. 

VARIANTES    : 
BAI.  Orth.  subsist.  -  Parton.  de  Blois,  fol.  149,  R». 
Bau>.  Rabelais,  T.  I,  p.  70. 
Baill.  Du  Cange,  Gloss.  latin,  à  Farius  Equus. 
Bailles.  Ibid.  dans  une  citation  au  mot  Baucus. 
Baillet.  Monet,  Dict. 

Balvkt.  Du  Cange,  Gloss.  latin,  à  Baiardus. 
Bayakt.  Mém.  de  R.  de  la  Marck,  MS.  p.  223. 
Bavaud.  Du  Canae,  Gloss.  latin,  ubi  supra.  ' 

Baye.  Mém.  Du  Bellay,  T.  VI,  p.  443. 
Baielart.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1366. 

Baiaus,  partie,  au  plur.  Baillans.  (Chron.  de  S' 
Denis,  T.  I,  fol.  236.)  On  lit  dans  le  latin  de  Suger 
bâtantes. 

Baiart,  subst.  masc.  Oiseau  de  maçon.  Petit 
auge  dans  laquelle  le  maçon  porte  le  ciment. 
«  Brouettes,  civières,  baiars,  sacs,  hottes.  »  (Mém. 
de  Sully,  p.  484.)  «  Portions  le  S'  Gentil  et  moy  le 
«  bayart,  pour  donner  l'exemple.  »  (Mém.  de  Mont 
Luc,  T.  1,  p.  623) 

variantes  ; 
BAIARS  (plur.)  Mém.  de  Sully,  p.  484. 
B.WART.  Mém.  de  Mont  Luc,  T.  I,  p.  623. 

Baie,  subst.  (ém.  Fruit.  —  Objet  de  peu  de 
valeur,  discours  frivoles. 

On  nomme  encore  ainsi  le  fruit  du  laurier  et  de 
quelques  autres  arbres. 

Comme  les  bayes  (3)  sont  de  peu  de  valeur,  ce 
nom  a  été  employé  pour  signifier  chose  de  peu  de 
conséquence,  discours  frivoles,  tromperies.  Ce  mot 
subsiste  en  ce  sens. 

VARIANTES  : 
BAIE.  Nicot,  Dict. 
Baye.  Oudin,  Dict. 

Baien,  adj.  Espèce  de  pois  (4).  Peut-être  pois 
chiche. 

Le  vin  laissent  por  la  fontaine, 
Et  la  char  por  les  pois  baiens. 

Hisl.  de  S'  Luc.  MS.  de  S.  Germ.  fol.  30,  V  col.  1. 

En  parlant  des  mortifications  d'Isabelle,  sœur  de 
S'  Louis,  on  dit  que  :  «  souventes  fois  quand  elle 
>i  avoit  tout  jour  jeusné,  sa  viande  estoit  un  peu 
«  de  poirée  et  de  pois  baiens.  »  (Vie  d'Isabelle,  à  la 
suite  de  Joinville,  p.  171.) 

De  bon  civé  avec  les  poids  bayens. 

Eust.  Desch.  Po5s.  MSS.  fol.  SM4. 


(i)  M.  de  Wailly,  d'après  MM.  Daunou  et  Renaud,  voit  là  un  mot  arabe,  signifiant  maritimes,  de  bahr,  mer  ou  fleuve; 
ils  occupaient  une  caserne  sur  les  bords  du  Nil,  dans  l'île  de  Rauda,  en  face  du  Caire,  (n.  e.)  —  (2)  L'étymologie  est  le 
latin  badius.  (n.  e.)  -  (3)  Molière  et  Corneille  employaient  encore  ce  mot  dans  l'Etourdi  et  le  Menteur.  Mais  baie  de  bacca 
n'a  pas  affaire  ici  :  l'origine  est  bayer,  parce  que  celui  qui  donne  une  baie  fait  baijer  qui  la  reçoit.  (N.  E.)  —  (4)  Pois  n'est 
pas  un  adjectif,  or  le  sens  est  brun,  comme  on  peut  le  voir  dans  Du  Cange,  sous  beretmus.  (n.  k.) 


BA 


3G6  — 


BA 


Au  figuré,  le  mot  baicii,  sigiiinoil  :  sans  valeur, 
rien  : 

Ne  les  pris  ele  un  pois  baien 
Quar  il  sont  luit  demi  paien. 

Hisl.  de  s.  Luc,  fol.  33. 

VARIANTES  : 
BAIEN.  Hist.  de  S"  Leoc.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  .33,  R». 
Bajens.  Vie  d'Isabelle,  à  la  suite  de  Joinv.  p.  171. 
Bayen.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  214. 

Baier,  verbe.  Attendre.  Nous  trouvons  ce  verbe 
avec  cette  signification  dans  les  vers  suivans  : 

Après  toy  ne  fay  abaier, 
Pouvre  marcheans  ne  haier. 
Geofroi  de  Paris,  Pocs.  à  la  suito  du  Roai.  de  Fauvel,  fol.  50. 

Baieves,  sm^s^  Bayeux.  Nom  d'une  ville  en 
Normandie. 

En  Normandie  entrèrent  au  terme  qui  fu  mis 
Li  duc  de  Paris  Hue  et  le  Roy  Loeis, 
Li  duc  vint  vers  Baieves,  tost  gastant  le  païs. 
Rom.  de  Rou,  MS.  p.  85. 


Li  jureor  de  Bniex. 

Prov.  dans  le  Rec.  des  Poël.  MSS. 


vanll300.  T.  IV,  p.  1651. 


VARIANTES  : 
BAIEVES.  Rom.  de  Rou,  MS.  p,  85. 
Baiex.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1651. 

Baïfin,  adj.  Nom  d'une  espèce  de  vers  que  Baïf 
appelle  ainsi  parce  (lu'il  en  éloit  finventeur  (1). 
(Voy.  les  Œuv.  de  Baïf,  fol.  35.) 

Baigner,  verbe.  Se  baigner.   —  Plonger.  — 
Se  noyer.  —  Se  délecter,  se  complaire. 
Ce  mot,  dans  le  sens  propre,  signifie  :  baigner. 

A  tout  le  moins  ayés  compassion 

Du  noble  sang,  et  de  France  et  d'Espagne 

Dedans  lequel  le  cruel  Mars  se  bagne. 

Clém.  Marot,  p.  257. 

Par  une  extension  de  cette  acception,  on  a  dit 
baguer  pour  plonger.  «  Ils  leur  font  leurs  fers 
.  baguer  dedans  les  poitrines.  »  (Percef.  Vol.  I, 
fol.  90.) 

Mal  furent  telz  avoirs  et  acquis  et  gaigné. 
Dont  ly  filz,  et  ly  père  sont  en  enfer  baiqné. 

J.  de  Meung,  Cad.  340  et  3*1. 

Ce  mot  s'est  dit  aussi  pour  se  noyer. 

Trébuchiez  ileuques  se  baignent: 
Piétons  Français  a  eus  s'enpaingnent 
Oui  iusques  à  la  mort  les  paient. 

G.  Guiarl,  MS.fol.275,R-. 

Au  figuré,  ce  mot  signifie  :  se  plaire,  se  délecter, 
prendre  plaisir.  «  Une  colère  qui  se  plaisoil  et 
«  bciignoit  en  ses  inimitiés.  »  (Des  Ace.  Big.  fol.  72.) 

L'usage  de  ce  mot  prouve  l'amour  qu'on  prenoit 
alors  pour  le  bain  et  justifie  l'élymologie  qu'on 
pourroit  donner  aux  mots  gan  (2)  et  s'égayer  comme 
venant  d'aiguë,  aqiia.  J.  de  Meung,  opposant  aux 
pauvres  qui  le  sont  véritablement  ceux  qui  seule- 
ment en  ont  fait  une  profession  tels  qu'étoient  les 
Moines  mendiants,  a  dit  de  ces  derniers  : 

Mais  de  ceulx  qui  povres  se  fai^nent 
Et  de  leurs  mains  "ouvrer  ne  daignent, 
El  tous  en  ricliesses  se  baignent 
Mendians,  et  puissans  de  corps. 


De  ceux  ne  veux  je  pas  entendre 
Que  l'on  leur  doye  aumosne  tendre 
Sans  les  chastier  et  reprendre. 

J.deMeung,  Test.  16iM651. 

De  là,  on  disoit  se  baigner  en  liesse,  nager  dans 
la  joie  : 

Les  premiers  jours  qu'amours  range  sous  sa  puissance 

Un  cœur  qui  chèrement  garde  sa  liberté. 

Dans  des  lilets  de  soye  il  le  tient  arresté. 

Et  l'émeut  doucement  d'un  feu  sans  violence  : 

Mille  petits  amours  lui  font  la  révérence, 

//  se  bagne  en  lienne  et  en  félicité. 

Les  jeux,  la  mignardise  etc. 

Œuv.  de  Des  Perles,  p.  43. 

VARIANTES  : 
BAIGNER.  Orthog.  subsist. 
B.4.IGNIER.  G.  Guiart,  MS.  fol.  35,  R". 
Baingn'ier.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  234,  col.  4. 
B.UNGNER.  G.  Guiart,  MS.  fol.  102,  V°. 
Bagner.  Clém.  Marot,  p.  257. 
Bannier.  Marbodus,  col.  1670. 

Baignei'ie,  subst.  fém.  Lieu  propre  ù  se  bai- 
gner. —  L'action  de  se  baigner. 

Le  premier  sens  signifie  :  lieu  propre  à  se 
baigner. 

Il  semble  à  l'eschanconnerie, 
Que  ce  soit  une  baingnerie 
"Tant  y  a  de  vin  respandu. 

Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  377,  col.  i. 

De  la  première  acception,  ce  mot  a  passé  à  la 
seconde,  pour  signifier  l'action  mêmede  se  baigner. 
«  Les  convis,  et  banquets  plus  grands  et  plus  pro- 
«  digues  qu'en  nul  autre  lieu,  dont  j'aye  en  con- 
«  noissance,  les  baignniries  et  autres  festoyemens 
«  avec  femmes,  grands  et  desordonnez  et  a  peu  de 
«  bonté.  »  (Mém.'de  Comines,  p.  16.) 

variantes  : 
BAIGNERIE.  Gotgrave,  Dict. 
Baignoirie.  Mém.  de  Comines,  p.  16. 
Baingnerie.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  377,  col.  4. 

Baignes,  subst.  fém.  Nom  de  lieu  ou  plutôt 
d'une  ville. 

Et  puis  Baignes  qui  moult  est  belle 
Et  Serres  où  l'on  fait  la  sove. 

Parlon.  de  BloU,  MS.  de  3.  Gerra.  fol.  151,  R-  col.  1. 

Baignoire,  subst.  fém.  Chaudière  à  faire  le  sel. 

—  Ilaignoire. 

On  trouve  le  mol  bagerna  employé  avec  la  pre- 
mière signification,  dans  Du  Gange,  Gloss.  lat. 

Sur  le'second  sens,  voyez  le  Dict.  de  Cotgrave, 
au  mot  Bag noire,  qu'il  interprète  par  vaisseau  oîi 
l'on  se  baigne. 

VARI.^NTES   : 
BAIGNOIRE.  Du  Cange,  Closs.  lat.  à  Bagerna. 
Bag.voire.  Cotgrave,  Dict. 

Bail,  subst.  masc.  Tutelle.  —  Régence,  adminis- 
tration. —  Garde,  défense. 

Voyez  le  Dicl.  de  Corn,  au  mot  Bail,  le  Dict.  de 
Nicot  et  les  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis  et 
sur  le  Hom.  de  la  Rose,  au  mot  BailHe  ;  Laur. 
Gloss.  du  Dr.  Fr.,  et  Dict.  de  Cotgrave,  au  mot 
BailUstrerie,  où  l'on  peut  voir  les  différentes  ac- 


(1)  Il  croyait  l'être,  mais  on  en  trouve  avant  lui.  (N.  e.)  -  (2)  Gai,  qui  vient  peut-être  de  Gains,  Gavius,  noms  latins  de 
bon  augure,  n'a  rien  à  voir  avec  aqua  et  balucare.  (N.  E.) 


BA 


—  367  — 


BA 


ceplions  données  ii  ces  mois.  Avrait,  nous  renvoyons, 
sur  l'origine  du  mol  bail,  à  Boulainvilliers,  Essay 
sur  la  Noblesse,  Table,  p.  41,  sous  le  mot  baillis; 
Du  Gange,  Gloss.  lat.  aux  mots  hailleta,  Bajuliis, 
BajuUvi,  Balia,  Ballium,  Ballive,  hœredes  et 
miindium.  Voy.  aussi  les  divei'ses  acceptions  de  ce 
mot  bail  dans  Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.  et  dans  les 
Ordon.  des  Rois  de  France,  T.  I,  p.  58;  Ibid.  p.  106, 
et  T.  III,  p.  427.  On  trouve  l'ancien  usage  de  ce 
mot  dans  le  nouveau  traité  de  Diplomatique,  T.  I, 
p.  394. 

Ce  mot  a  été  employé  pour  tutelle.  »  Le  jeune 
«  Prince  d'Antioche  dit  que  sa  mère  le  tient  en 
■•  bail.  "  (.loinv.  p.  98.)  «  Et  si  parlerons  en  quelle 
«  manière,  l'on  puet  et  doit  osier  enfans  de  son 
«  baailij,  à  che  que  il  ne  puisse  riensdemander  par 
«  rez  ou  de  compaignie.  »  (Beaumanoir,  p.  110.) 

Bail  semble  un  droit  appartenant  au  tuteur,  et 
dont  l'héritier  de  la  maison  de  Vendôme  est  exempt, 
même  en  minorité,  par  des  Lettres  de  Ch.  Vlil. 
(Voy.  Godefr.  Observ.  sur  Cb.  VIII,  p.  428.) 

On  a  dit  aussi  bail  pour  régence.  «  La  Reyne 
•  Blanche  avoit  la  garde  de  Louis  neuf  son  fils  par 
«  raison  de  tutelerie,  et  de  bail  (1).  »  (Chron.  de 
S- Denis,  T.  II,  fol.  49.) 

Chascuns  vouloit  avoir  prébende. 
Et  tenir  le  royaume  en  bai/. 

Eu6l.  Desch.  Po5s.  MSS.  fol.  558. 

On  a  employé  ce  mot  dans  le  sens  de:  garde, 
défense  : 

,1'ain  le  chevalier 
Qui  bien  met  sa  terre 
En  Uaat. 

Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1661. 

VARIANTES  : 
BAIL.  D.  Morice,  Hist.  de  Bretagne,  col.  959.  —  Boulainv. 
Ess.  sur  la  Nobl.  Tabl.  p.  41. 
Baailg.  Beaumanoir,  p.  HO. 
Baal.  Poës.  MSS.  avant  13(K3,  T.  IV,  p.  1661. 
Ban.  (lisez  Bail.)  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  à  Warda. 
Bailaoe.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Baijlia. 
Baliage.  Contin.  de  G.  de  Tyr,  Martin.  T.  V,  col.  702. 
Bailli.\ge.  Dict.  du  Droit  Français  de  Laurière. 

Bailage ,  subst.  masc.  Baillage,  juridiction. 
(Voy.  Du  Gange,  aux  mots  Baglia  et  Baillagimn.  — 
Rech.  de  Pasquier,  p.  3.53,  et  le  Gloss.  sur  les  Coût, 
de  Beauvoisis.) 

variantes  : 

Baillie  (s.  /'.)  Loix  Norm.  art.  ii,  dans  le  latin  Bailliva. 

Baylie  (s.  f.)  Rymer,  T.  I,  p.  114,  col.  '2,pasi<im.  lit.  de  1270. 

Bailet,  subst.  7)iasc.  Valet.  Mot  gascon.  (Dict.  de 
Borel,  au  mot  Ligne.) 

Baillance,  subst.  fém.  Action  de  donner,  de 
livrer.  «  Et  si  sur  la  tradition  et  baillance  de  telles 
«  charges,  etc.  »  (Nouv.  Coût.  Gén,  T.  II.  p.  702.) 


Baille,  subst.  fém.  Servante.  —  Nourrice.  — 
Palissades. 

Ces  mots,  selon  Du  Gange,  sont  dérivés  du  mot 
latin  Bajula,  qui  signifie  nourrice,  celle  à  qui  on 
confioit  la  garde  des  enfans,  ou  peut  être  en  géné- 
ral femme  de  charge,  servante. 

Dans  le  Recueil  des  Poës.  Françaises,  avant  1300, 
je  trouve  dans  une  pièce  d'Adam  li  Bocus,  au  sujet 
de  la  S"  Vierge  :  «  à  sa  nation  n'eut  baïesse.  »  Ce 
qui  signifie,  il  ne  se  trouva  point  de  nourrice  ou 
de  servante  pour  avoir  soin  de  l'enfant,  lorsqu'il 
vint  au  monde. 

Le  mot  baille  a  signifié  Palissades  (2).  Elles  éloient 
composées  de  pieux  plantés  dans  la  terre,  quelque- 
fois t'i  distance  d'un  demi  pied  les  uns  des  autres. 
On  .s'en  servoit  pour  défendre  aux  ennemis  les 
approches  des  faubourgs  et  portes  des  villes,  d'un 
chàleau,  d'une  tour.  Gemot  semble  venir  de  bataille 
qui  s'est  pris  dans  le  même  sens,  ou  de  bal  mis 
pour  pal,  pieu.  On  l'employoit  souvent  dans  le 
sens  de  barrière,  barricade  :  «  Adonc  avoit  un  abbé 
«  à  Bonnecourt  de  grand  sens  et  de  grand  hardiesse 
"  entreprins,  lequel  fit  au  dehors  de  Bonnecourt 
«  faire  et  chaipenter  unes  bailles,  et  asseoir  au 
«  travers  de  la  rue,  et  y  pouvoit  avoir  entre  deux 
«  de  l'un  pillier  et  de  l'autre,  demi  pié  d'ouverture.  » 
(Froissart,  Liv.  I,  p.  48.) 

Dedens  la  ville  s'enfermèrent. 
Et  li  nostre  el  baille  remeserent 
Entre  la  cité  et  uns  pont. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  698. 

variantes  : 
BÂILLE.  Ph.  Mouskes,  MS,  p.  698. 
Balle.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  701. 
Beille.  Lancelot  du  Lac,  T.  I,  fol.  115,  Y». 
Belle.  Ibid.  fol.  1.50,  R»  col.  2. 
Bolle.  Ibid.  T.  I,  fol.  79,  V»  col.  1. 
Baile.,  Du  Gange. 
Baïesse.  Poës.  Fr.  avant  1300,  notice  67S. 

Baillée,  subst.  fém.  Bail  à  ferme,  bail.  «  11  n'y 
"  a  point  de  nécessité  au  seigneur  de  renouveller 
"  les  baillées,  n'y  à  l'homme  de  faire  reprise,  si  ce 
«  n'est  que  le  seigneur  l'en  requière,  ce  qu'il  peut 
«  faire,  (juand  bon  lui  semble,  après  le  bail 
«  expiré.  »  (Nouv.  Goût.  gén.  T.  IV,  p.  413.) 

Baillée,  subst.  fém.  Action  de  bailler,  de  donner 
don,  cession,  donation.  (Voyez  Duchesne,  Gén.  de 
Montmorency,  p.  380.) 

Bâillement,  subst.  masc.  Action  de  donner  à 
ferme.  «  Par  la  diste  coustume,  il  loist  à  un  chacun, 
«  si  bon  luy  semble,  bailler  son  héritage  à  lui  venu 
«  de  succession  à  rente,  et  sourcens  annuel  et 
«  heritable,  pourveu  que  le  dit  bâillement  soit  fait 
«  pour  juste  prix.  »  (Nouv.  Coût.  gén.  p.  356.) 


(1)  Lorsqu'à  la  mort  d'un  vassal,  l'héritier  était  encore  en  bas-âge,  les  services  dus  par  le  fief  ne  pouvaient  être  remplis. 
11  suit  de  là  que  le  suzerain  confisquait,  reprenait  le  fief,  usait  du  droit  de  commise.  La  pratique  tempérait  ce  droit 
rigoureux  :  le  suzerain  jouissait  du  revenu  et  recevait  les  services  du  plus  proche  parent  de  l'enfant  mineur.  Mais  les 
collatéraux,  héritiers  présomptifs,  soignaient  plutôt  le  fief  que  l'enfant  mineur.  On  dut  donc,  à  côté  du  représentant  féodal 
de  l'enfant,  établir  un  gardien  qui  prenait  le  nom  de  sa  charge,  un  bai/.  Le  bail  ne  cessait  qu'à  la  majorité;  il  fut  aussi 
désigné  sous  le  nom  de  yanie-noblij.  (n.  e.)  -  (2)  On  peut  regarder  ce  mot  comme  le  substantif  verbal  de  baculare,  former 
de  bâtons,  ou  de  baju/ure,  protéger.  La  bai//e,  dans  les  châteaux  forts,  était  l'avant-cour,  la  cour  des  ouvrages  extérieurs, 
la  basse  cour  ;  on  y  disposait  d'ordinaire  l'écurie  et  les  communs,  (n.  e.) 


BA 


—  368  — 


BA 


Bailler,  verbe.  Donner.  —  Raconter,  débiter. 
—  Défendre,  soutenir. 

Le  premier  sens  de  ce  mot  est  donner.  (Voyez  le 
Dict.  de  Nicot.l  On  trouve  bulliare  dans  le  même 
sens  au  Glossaire  latin  de  Du  Gange.  Baila  est  un 
mot  du  patois  de  Cahors.  (Voyez  le  Dict.  de  Borel, 
au  mot  Clouper.) 

Le  mot  baille  s'employoit  aussi  pour  débiter  une 
nouvelle,  la  raconter  : 

Si  con  l'ystoire  le  me  baille, 
Que  i'ay  à  S'  Denis  veue. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  123,  V. 

En  tel  guise  con  ge  vous  baille, 
Atendent  Flamens  la  bataille. 

G.  Guiar!,  MS.  fol.  340.  V*. 

Enlîn,  on  disoit  bailler  pour  défendre,  soutenir, 
avoir  soin  :  «  Si  povez  bien  dire  que  nostre  lignage 
«  est  plus  abaissé  par  vous,  que  il  ne  sera  jamais 
«  baillé.  "  (Lancelot  du  Lac,  T.  III,  fol.  55.  — 
Voy.  les  Mém.  d'Olivier  de  la  Marche,  T.  II,  p.  578.) 

C'est  en  ce  même  sens  qu'on  cmployoit  se  bailler, 
se  soutenir,  se  défendre  : 

César  ot  en  sa  corapaignie 

Le  mieulx  de  sa  chevalerie 

Oui  moult  s'argue,  et  moult  se  baille 

Moult  se  combat,  moult  se  travaille. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  31. 

Remarquons  cette  expression  dans  les  vers  sui- 
vans  :  «  Mes  pensées  me  baillent  »  qui  signifient  : 
je  pense. 

Selonc  ce  que  l'en  puet  esmer. 
Et  que  mes  pensées  me  baillent. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  278,  V-. 

On  disoit  aussi  :  «  soupirs  en  larmes  baillies  » 
pour  soupirs  mêlés,  trempés  de  larmes.  (Machaut, 
MS.  fol.27,  Rocol.  1.) 

CONJUG. 

Baillege.  imp.  du  subj.  Donnasse.  (Ane.  C.deBr.) 
Baillesins,  imp.  du  subj.  Donnassions.  (Perard, 

Hist.  de  Bourg,  p.  450  ;  lit.  de  1241.) 
liaillet,  part,  passé.  Donné.  (Carp.  Ilis.  deCamb.) 
Bailli,  passé  défini.  Je  donnai.  (Eust.  Desch.) 
Bailliens,  imp.  de  l'ind.  Donnions.  (Perard,  Hist. 

de  Bourg,  p.  451.) 

Baillié,  part,  passé.  Donné.  (La  Tbaum.  C.d'Orl.) 
Bâillon,  impératif.  Donnons.  (Crétin,  p.  163.) 
Ba//gnï,ind.  prés.  Donnent.  (L'Am.ressusc.  p. 248.) 
Banrra,  futur.  Donnera.  (Ord.  T.  III,  p.  592.) 
Bandera,  futur.  Donnera.  (15,Ioyesdumar.  p.75.) 
Baudrai,  futur.  Je  donnerai.  (Fabl.  mss.  du  R.) 
Baudrons,  futur.  Donnerons.  (G.  Guiart,  ms,  f.  347.) 
Baudront,  futur.  Donneront.  (Ord.  T.  I,  p.  78.) 
Bauldra,  futur.  Donnera.  (Villon  Rep.  fr.  p.  12.) 
Bauldroit,  coud.  prés.  Donneroit.  (Vig.de Cli.  VII.| 
Baurira,  futur.  Donnera.  (Eust.  Desch.  Poés.  mss.) 
Baut,  impér.  Donne.  (G.  Guiarl,  ms.  fol.  79,  R°.) 
Baylé,  Baill,  part.  pas.  Donné.  (Rymer,  T.  I,  p.  114.) 


Bendés,  part.  pas.  Baillies,  donniés.  (Rymer,  p.  71 .) 
Bendesiés,  imp.  du  subj.  Donnassiez.  (Id.) 

VAIUANTES  : 
BAILLER.  Mém.  d'Olivier  de  la  Marche,  T.  II,  p.  578. 
lÎAiLLiER.  Duchesne,  Gén.  de  Chastillon,  p.  45. 
Baileb.  Duchesne,  Gén.  de  Chastillon,  p.  46. 
Baier.  Fabl.  MSS.  du  K.  n»  7989,  fol.  71,  R"  col.  1. 
Baller.  Duchesne,  Gén.  de  Chastillon,  p.  45. 
Baila.  Borel,  Dict. 
Ballier.  Duchesne,  Gén.  de  Chastillon,  p.  45. 

Baillet,  adj.  Paillet,  couleur  de  paille  (1),  couleur 
de  chair.  (Dict.  de  ÎNicot,  Rob.  Estienne,  Oudin  et 
Cotgrave.)  En  terme  de  Vénerie,  l'on  disoit  : 

Il  est  ung  petit  baillet  au  front, 
N'a  si  bon  lièvre  en  tout  le  mont. 

Gaco  de  la  Bigne,  des  Déduits,  MS.  fol.  H3,  Rv 

Baillette,  subst.  fe'm.  Bail.  Le  mot  baillette 
équivaut  à  un  bail  à  fief  nouveau,  qu'un  Seigneur 
consent  en  faveur  de  quelque  particulier.  Il  signifie 
proprement  le  contrat  qui  porte  la  concession  d'un 
terrain.  (Laurière,  Glossaire  du  Dr.  Fr.  au  mot  bail 
de  justice.) 

Bailleu,  subst.  mase.  On  appelle  ainsi  à  Paris 
celui  qui  remet  les  os  disloqués.  Ce  mot  est  formé 
du  nom  propre  Bailleul,  père  du  Président  à  mor- 
tier de  ce  nom  au  Parlement  de  Paris.  (Dict.  Etvm. 
de  Ménage.)  (2) 

\ariaktes  : 

BAILLEU.  Ménage,  Dict.  Etym. 
Bailleul.  T.  Il  du  Novenn.  en  1592,  p.  18. 

Bailleur,  subst.  masc.  Donneur.  —  Terme  de 
jeu  de  paume. 

Bailleur,  dans  le  sens  propre,  signifie  donneur. 

Comme  terme  de  jeu  de  paume,  il  est  opposé  à 
naequet  qui  étoit  le  marqueur  : 

Au  beau  fiaî7/t'!(i- ferme  naequet 
Qui  sache  rachasser  derrière. 

Coqaillart,  p.  27. 

Bailleur,  adj.  Qui  donne.  Le  mot  baillart,  qui 
se  trouve  dans  le  Roman  de  la  Rose  vers  2201,  est 
expliqué  dans  le  Supl.  au  Gloss.  de  ce  roman  par 
bailleur,  donneur.  Sans  admettre  ce  mot  et  cette 
explication,  je  m'en  tiendrois  à  la  le(.;on  de  Galiot 
qui  [Mv[eGaillart. 

variantes  : 

BAILLEUR,  Baillart. 

Bailli,  adj.  Affecté. 

Las  itex  sni  jou  baillis, 
Ke  jolis  estre  soloie. 

Pocs.  MSS.  avant  1300. 

On  disoit  aussi  7nal  bailli  dans  le  même  sens  : 

Li  membre  foible,  et  mal  bailli. 

Fau(.h.  LaDj.  et  Poi-s.  fr.  p.  107. 

Et  mal  menés,  et  mal  baillis. 

Partoii.  de  Blois,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  Ut,  V  col  1. 

On  trouve  aussi  mal  baillie  pour  mal  renommée 


(l)  C'est  plutôt  la  couleur  rousse  tirant  sur  le  blanc.  On  trouve  dans  G.  Guiart,  t.  Il,  p.  106,  la  forme  baille:  «  Et  destriers 
de  pris  hennissans,  Blans,  noirs,  bais,  baucens  et  bailles.  »  L'italien  a  la  forme  bagliore,  éblouissement  ;  mais  nous  ne 
connaissons  pas  la  racine  commune  expliquant  la  couleur  et  l'état  de  la  vup.  (n.  e.)  —  (2)  C'est  un  diminutif  de  bajulus, 
celui  qui  porte,  celui  qui  soigne.  On  le  trouve  au  xiii»  siècle,  dans  le  Lai  de  l'utnbre,  et  au  xiv",  dans  Froissart  :  f  liaiUeu, 
j'obéirai  volontiers,  car  c'est  raison.  »  (Poésies,  II,  III,  36.)  (N.  E.) 


BA 


369  - 


BA 


et  pour  mal  gouvernée.  Borel  cite  Perceval  sur  le 
premier  sens,  et  Faucliet  sur  le  second.  Il  suit  de 
là  que  le  mot  bailli  a  été  pris  dans  une  acception 
fort  générique,  qui  n'étoit  souvent  déterminée  que 
par  le  sens  même  de  la  phrase. 

VARIANTES    ; 
BA.ILLI.  Fauch.  Lang.  et  Poos.  Fr.  p.  107. 
Baillis.  Poës.  MS.  avant  1300. 

Baillial  (sergent),  subst.  7nasc.  Sergent  du 
bailli.  (Yoy.  La  Thaum.  Coût,  de  Berry,  p.  160.)  On 
trouve  Sergent  juré,  autrement  baillial.  (ibid.  p.  164.) 

Baillie,  subst.  fém.  Santé.  R'estreen  sa  baillie, 
signifie  :  Avoir  repris  ses  forces,  revenir  en  meil- 
leure sanlé  : 

Tôt  dolereuz  en  ai  le  dos, 
Si  n'ai  mestier  fors  de  repos  ; 
Ains  que  la  trive  soit  faillie, 
Reserai  bien  en  ma  baillie. 

Alhis,  MS.  fol.  118,  R'col.  1. 

Baillier,  verbe.  Gouverner.  —  Prendre  soin.  — 
Enlever,  déplacer. 

Ce  mot,  au  premier  sens,  dérive  du  mot  bailli, 
tuteur,  ou  peut-être  le  mot  baillir,  du  latin  bajttlare, 
a-t-il  formé  le  substantif  bailli? 

Caii/té^rsignilioil  aussi  prendre  soin  de  quelqu'un, 
le  dominer,  le  subjuguer,  le  conduire  : 

Je  puis  riche  homme  bal  lier: 

Vous  le  me  verres  si  tailler 

Qu'il  n'aura  jà  tant  marcs,  ne  livres 

Qu'il  n'en  soit,  en  brief  tems,  délivres. 

Voler  feray  tous  ses  deniers. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  11471-11475. 

Gautier,  ce  dist  li  Sires,  ne  vous  quier  anvier  ; 
Por  l'amor  votre  père  vous  ai-je  forment  chier; 
Ma  fille  vous  donrai,  si  la  volez  baillier, 
Pour  que  vueilliez  prendre  a  per,  et  à  moillier. 
Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218.  fol.  348,  R"  col.  1. 

On  a  employé  ce  mol  avec  la  signification  d'en- 
lever, de  déplacer  : 

Venez  avant,  dit-il,  venez, 
Or  poez  les  pierres  bailler, 
A  vos  nés  porter  et  charger. 

Rom.  de  Brul,  MS.  fol.  62. 

Bailler  a  signifié  prendre  ou  porter  dans  les  vers 
suivans  : 


D'armes  bailler  s'aparillerent  : 
Chances  de  fer  premiers  chaucerent. 

Alliis.MS.fol.  94,  Vcol.  1. 

Baillir    s'est   dit    pour   commander ,    mener , 
conduire  : 

Ces  m  en  lait  11  dus  issir. 
Et  celle  gent  c'ont  à  baillir. 

Alhis,  MS.  fol.  95,  R"  col.  1. 

Mal  baillir  se  disoit  pour  malmener  ou  peut-être 
ici  pour  mal  garder  : 

L'enmaine  pris  Ermagoras  ; 
Cil  nel  laira  mal  baillir  pas. 

Alhis,  MS.  fol.  lOG,  V'col.2. 

Ballier  a  été  employé  pour  garder,  conserver, 
dans  ces  vers  : 

Plus  de  .C.  lances  froissèrent  ; 
Et  si  que  une  n'en  baillèrent. 

Alhis,  MS.  fol.  IIG,  V"  col.  2. 

Nous  trouvons  baillir,  avec  la  signification  de 
tenir,  garder  : 

lUec  encontre  son  destrier 
Tout  atïraé,  moult  estraier  ; 
N'est  qui  le  baut  ne  qu'il  le  gart, 

Alhis,  MS.  fol.  100,  V"  col.  1. 

Enfin,  on  s'est  servi  de  ce  mot  dans  le  sens  de 
tenir,  manier  : 

Onques  cors  de  famé  mielz  taillies 
Ne  fu  par  mains  d'ome  baillies. 

Alhis,  MS.  fol.  65,  V*  col.  2. 

VARIANTES  : 
BAILLIER.  Rom.  de  la  Rose,  vers  15780. 
Ballier.  Id.  cité  ci-aprés. 
B.ULLin.  Alhis,  MS. 

Baillionner,  verbe.  Mettre  un  bâillon.  (Laur. 
Glossaire  du  Dr.  Fr.) 

Baillir,  verbe.  Traiter.  11  est  pris  en  mauvaise 
part  dans  ce  passage  : 

Dame  je  te  disoie  bien  : 
Onques  croire  ne  vausise  rien 
Que  il  m'osast  ensi  baillir: 
Dieu  toi  a  il  fait  faillir. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7989,  fol.  62,  R-  col.  1. 

Baillis,  subst.  masc.  Bailli,  chef  de  justice, 
régent,  tuteur,  gardien  (1).  La  signification  la  plus 


(1)  En  partant  pour  la  croisade,  où  il  emmène  avec  lui  le  sénéchal  (1189),  Philippe-Auguste  fit  son  testament.  C'est 
dans  cet  écrit  qu'il  établit  les  baillis,  ou  du  moins  qu'il  leur  donne  des  fonctions  précises  :  baillivus,  avant  lui,  ne 
signifiait  pas  autre  chose  qu'olficier  en  général.  Les  baillis  devinrent  dans  chaque  province  supérieurs  aux  prévôts,  qu'ils 
durent  obliger  à  une  bonne  administration  de  la  justice.  A  de  certaines  époques,  ils  devaient  se  rendre  à  la  cour  du  roi, 
pour  y  remplacer  le  sénéchal  absent.  Ils  étaient,  dans  leurs  bailliages,  responsables  de  l'administration.  Quand  le  sénéchal 
mourut,  en  1191,  les  baillis  le  remplacèi-ent  tout  naturellement.  Est-ee  à  l'imitation  du  roi  que  les  seigneurs  créèrent  des 
baillis,  est-ce  au  contraire  le  roi  qui  imita  ses  vassaux?  C'est  là  une  question  qu'il  est  difficile  de  résoudre.  Nous  voyons, 
dans  les  grandes  seigneuries,  le  bailli  au-dessus  du  prévôt,  qu'il  remplace  dans  les  petites.  Au  midi,  les  deux  degrés 
d'administration  restent  aux  mains  du  bayle  et  du  sénéchal,  qui  semble  parfois  trop  puissant  et  voit  ses  attributions 
partagées  entre  plusieurs  fonctionnaires  portant  son  titre.  Le  IkiHIi,  au  xiii«  siècle,  est  un  chevalier  lettré  (Pierre  de 
Fontaine,  Philippe  de  Beaumanoir).  Au  nord,  c'est  plutôt  un  homme  d'épée,  choisi  dans  la  noblesse  des  environs  de  Paris. 
Sous  Philippe-le-Bcl,  on  choisit  souvent  des  roturiers.  Représentants  du  roi,  agents  révocables,  ils  touchaient  jusqu'à 
6,000  francs  d'appointements. 

1»  Agents  financiers,  ils  reçoivent  des  prévôts  les  revenus  des  domaines  royaux  et  les  portent  eux-mêmes  au  Trésor,  à 
Paris,  où  ils  rendent  leurs  comptes.  2»  Agents  de  justice,  ils  la  rendent  en  première  instance  et  en  appel:  ils  président  les 
assises  des  nobles,  prennent  en  main  les  procès  des  ecclésiastiques  ou  des  mainborés.  3°  Officiers  militaires,  ils 
convoquent  les  nobles  du  bailliage  et  les  conduisent  au  roi.  4°  Agents  politiques,  ils  surveillent  les  seigneurs,  créent  les 
cas  royaux,  entravent  ou  apaisent  les  guerres  privées  par  la  quarantaine  le  roi,  et  protègent  par  Vasseurement  le  roturier 
contre  les  violences  de  la  noblesse.  La  royauté  déplaçait  souvent  les  baillis  et  les  surveillait  étroitement  ;  elle  ne  tarde 
pas  à  les  redouter  et  les  annule  peu  à  peu.  Dès  le  xiv^  siècle,  au  nord,  des  lieutenants  de  robe  longue  remplacent  les  baillis 
dans  l'admmistration  judiciaire.  On  crée  pour  les  revenus  ordinaires  des  receveurs  de  bailliage,  et  les  revenus 
extraordinaires  sont  perçus  par  les  élus.  L'année  soldée  devient  nécessaire  ;  l'inspection  du  ban  et  de  l'arrière-ban  n'est 
plus  qu'une  formalité,  et  sa  levée  une  mesure  extraordinaire,  (n.  e.) 

II.  47 


BA 


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BÂ 


générale  de  ce  mot  est  celle  de  bai/Zi,  chef  de  justice, 
en  un  bailliage.  Il  siç^nifie  aussi  gardien,  tuteur, 
gouverneur,  régent  d'un  royaume.  iVoyez  les  Dict. 
de  Monet,  Borel  et  Laur.  Gloss.  du  Dr.  Vr.  au  mot 
Bailli.  —  Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  aux  mots 
Ballivus  et  liajidus.)  Hailleu  répond  au  latin  dapi- 
fer,  dans  l'IIist.  de  Beauvais  par  un  bénédictin,  pr. 
p.  271»,  tit.de  1182. 

Les  auteurs  ne  s'accordent  pas  sur  l'étymologie 
de  ce  mot.  Pasquier  le  dérive  du  mot  bailler,  don- 
ner. «  Or  furent  ainsi  appelles,  à  mon  jugement  ces 
«  bailli fs  pour  autant  que  de  leur  première  origine, 
«  ils  esloient  bailler  et  envoyez  en  diverses  provin- 
u  ces  comme  conservateurs  et  gardiens  du  peuple, 
«  encontre  les  oITences  qu'il  eust  pu  encourir  des 
<■  juges  ordinaires.  »  11  njnule  plus  bas  :  «  Le  mol 
«  baillif  en  vieil  langage  t'iauçois  ne  signifioit 
«  autre  chose  que  gardien  et  bailiie  garde.  »  (Pasq. 
Rech.  p.  105.)  La 'Roque,  dans  son  traité  de  la 
Noblesse,  p.  2G2,  dit  que  Ragueau  contredit  celte 
étymologie;  il  ajoute  que  Bodin  en  parle  de  cette 
sorte  :  «'  Et  bailïivos  custodes  vocant.  »  11  dit  aussi 
que  «  d'autres  sont  de  ce  sentiment  que  bailly 
«  vient  de  bailler,  parce  qu'ils  étoient  envoyés  et 
«  baillés  en  nos  provinces  par  nos  Rois  pour  y  faire 
«  administrer  la  justice,  ou  bien  que  le  baiUij  signi- 
«  fie  conservateur,  et  gardien  du  peuple.  »  Le 
même  auteur  prétend  que  la  charge  du  baillij  ne 
devoit  être  exercée  que  par  des  gentilshommes  de 
nom  et  d'armes.  Quelques  auteurs  ont  placé  la 
création  de  celle  charge,  sous  le  règne  de  Philippe- 
Auguste,  lorsqu'il  alla  à  la  Terre-Sainte  ;  ils  disent 
que  par  son  testament,  ce  prince  donna  la  garde  de 
ses  états  aux  baillis.  Ménage,  dans  son  Dict.  étym., 
dérive  ce  mot  de  Bajulare,  porter,  comme  étant  ceux 
qui  portoient  le  poids  de  l'administration  du  royaume. 

Comme  toutes  les  acceptions  données  à  ce  mol 
sont  justifiées  dans  la  dissertation  qu'on  vient  de 
lire,  il  suffit  d'avoir,  d'ailleurs,  indiqué  dans  quels 
auteurs  on  trouve  lesdifîérentes  orthographes  sous 
lesquelles  on  le  présente. 

Nous  remarquerons  seulement  que  : 

1°  Baili  s'est  dit  aussi  pour  syndic  de  confrérie. 
(Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Bajtili  confratriœ],  et 
pour  ceux  qui  levoient  les  impôts  et  cens  dus  aux 
Seigneurs.  (Ord.  des  R.  de  F.,  T.  III,  p.  274.) 

2°  Baillies  chevetains  étoient  ceux  qui  étoient 
commis  par  le  duc  de  Normandie  sur  ses  sujets. 
(Voy.  Laur.  Gloss.  du  Dr.  fr.) 

3°  Baillif  est  synonyme  de  maire,  dans  la  Chr.  Fr. 
Ms.  de  Nangis,  an  1292.  Il  répond  au  mot  major 
qu'on  lit  dans  le  latin. 

Il  est  employé  pour  bailly,  dans  le  Gr.  Coût,  de 
Fr.  livre  IV,  ch.  v  ; 

Pour  tuteur,  dans  les  Recherches  de  Pasquier, 
page  105  ; 

Pour  ceux  qui  ont  la  garde  noble  ou  bourgeoise 
de  leurs  en  fans; 


Pour  avocat,  dans  le  Moyen  de  parvenir,  p.  104; 

Pour  gouverneur,  dans  la  Chr.  de  Berry,  p.  402; 

Entin,  pour  officier  préposé  à  la  garde  du  trésor 
des  deniers  du  Roy,  appelé  la  secrète  royale,  dans 
Du  Cange,  Gloss.  fat.  au  mot  Sécréta  regia. 

4°  fkiill  étoit  le  nom  qu'on  donnoit,  dansl'Orient, 
au  chef  de  la  République  de  Venise,  en  1370.  On  le 
nomme  encore,  h  la  Poite,  le  baile  de  Venise.  (Voy. 
Assis,  de  Jérus.  p.  205.) 

5"  Baillisseur  s'est  dit  pour  tuteur,  qui  a  la  garde 
des  personnes  nobles  mineurs.  (Laur.  Gl.  du  D.  Fr.) 

0°  Baillistre  signifioit  proprement  tuteur  ou  gar- 
dien. (Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.  —  Du  Cange,  Gloss. 
lat.  au  mot  Bajuliis.)  Il  est  cependant  distingué  de 
tuteur,  et  semble  signifier  curateur,  dans  les  Ord. 
des  R.  de  Fr.  T.  II,  p.  64.) 

1"  Le  port  baillijéio'û  un  officier  de  justice  infé- 
rieur au  grand  baillij.  On  l'appelloit  aussi  bailly  des 
bourgeois.  (Nouv.  Coût.  Gén.  T.  I,  p.  1059.) 

S°  Le  bailly  portatif  élo'ii  une  espèce  de  lieute- 
nant du  bailly  ;  «  Vices  ipsius  gerens.  »  (Voyez  les 
Chartes  dupaysetComtédellainaul,  au  Nouv.  Coût. 
Gén.  T.  II,  page  44.)  ^-^ 

9"  Enfin  le  bals  de  l'Empire  étoit  le  vice-empe- 
reur. (Dict.  de  Bore),  qui  cite  Villehardouin.) 

VARIANTES  : 

BAILLIS.  Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose. 

Bailly.  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  I,  p.  10.59,  col.  1. 

Baillif.  Ord.  des  Rois  de  France,  T.  I,  p.  91. 

Bailliffes.  Britton,  Loix  d'Angl.  fol.  4,  V». 

Baili.  Du  Cange,  Gloss.  latin  au  mot  Bajiilus. 

Bail.  Buris;ny,  Hist.  de  Constantinople,  T.  II,  p.  405. 

Baile.  Nouv.  Coût.  Gén.  p.  1238,  col.  1. 

Baill.  Assises  de  Jérusalem,  p.  189. 

Baille.  Procès  de  Jacq.  Cuer,  MS.  p.  168  et  169. 

Bayle.  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  IV,  p.  905,  col.  1. 

Baeles.  La  Thaum.  Coût,  de  Berry,  p.  102. 

Bailleus.  Beaum.  p.  7,  Poës.  MSS.  av.  1300,  T.  IV,  p.  1309. 

Baillie.  Gloss.  du  Dr.  Fr.  par  Laurière. 

Bailliée.  Ane.  Coût.  d'Orléans,  à  la  suite  des  Coût,  de 
Beauvoisis,  page  467. 

Bailliens.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  454,  col.  2. 

Baillieus.  Poës.  MSS.  du  Vatic.  n»  1490,  fol.  130,  V". 

Bailliex.  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis. 

Baillisseur.  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr. 

Bailliste.  Etat  des  Offlc.  du  duc  de  Bourgogne,  p.  76. 

Baillistre.  Coût.  Gén.  T.  I,  p  294  et  passim. 

Baillius.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1362. 

Baiule.  Borel,  Dictionnaire. 

Bal.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  377. 

Ballius.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  752. 

Bailleu.  Duchesne,  Gén.  de  Béthune,  p.  164. 

Bals.  Borel,  Dictionnaire. 

Baus  (plur.)  Du  Cange,  Glossaire  de  Villehardouin. 

Baux  (plur.)  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  247. 

B.WLius.  Glossaire  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis.     1*'Sîii^ 

Vaillies.  Rymer,  T.  I,  p.  116  et  117,  titre  de  1270;  dans  le 
même  titre,  en  latin,  on  lit  BajuUs, 

Baillistre,  siibst.  masc.  Bélître  (1).  Ce  mot  a  plu- 
sieurs significations.  Elles  sont  toutes  injurieuses. 
(Voy.  Boulainvilliers,  Ess.  sur  laNob.  Tab.  p.  41.) 

Baillistrei'ie,s?/&sf.  fém.  Domination,  autorité, 
pouvoir.  —  Tutelle.  —  Propriété. 
Dans  le  premier  sens  de  domination,  autorité. 


(1)  Bélître,  qui  d'après  Diez  vient  de  BcHler,  mendiant,  ne  doit  pas  être  confondu  avec  baillistre,  patent  qui  accepte  la 
garde,  le  bail  d'un  mineur,  (n.  e.) 


BA 


—  371  — 


BA 


pouvoir,  on  disoit  :  <•  S'il  avoit  son  cuer  en  sa 
«  bailUe,  qu'il  en  puest  faire  à  sa  volunté.  »  (Lanc. 
du  Lac,  T.  III,  fol.  122,  P»  col.  2.) 

Nous  trouvons  le  mot  de  halistcrie  avec  la  signi- 
fication de  tutelle,  dans  le  passage  suivant  :  «  La 
«  femme  qui  est  baliste,  administratresse,  ou  tu- 

«  triée  de  ses  enfants ne  perd  point  la  dite 

«  balisterie,  etc.  «  (Coût.  Gén.  T.  I,  p.  8il.  —  Voy. 
Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.) 

Prendre  quelqu'un,  et  le  bouter 
En  sa  tutelle,  en  sa  baillie. 

Coquillarl,  p.  82. 

Ce  mot  a  signifié  la  propriété  d'une  chose.  En 
voici  un  exemple  : 

Toute  sa  terre  ot  en  baillie. 

Qui  moult  ert  riche  et  bien  garnie. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n'  7ï>18,  fol.  355,  R'  col.  2. 

VARIANTES  : 
BAILLISTRERIE.  Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr. 
Balisterie.  Coût.  Gén.  T.  I,  p.  S41. 

Bailliu,  subst.  7nasc.  Sujet,  vassal.  Dans  le  pas- 
sage suivant,  l'Amour  dit,  en  parlant  d'un  jeune 
indifférent  adoré  des  femmes  : 

N'onques  service,  ne  homage 
Ne  le  fist  en  tous  que  li  lut, 
Por  ce  qu'il  ne  se  reconnut 
A  son  hom,  n'a  son  bailliu. 
Si  li  fist  en  temps,  et  en  lieu. 
Sentir  son  pooir  et  sa  force. 

Fabl.  IIS.  de  S.  Germ.  fol.  3-21. 

Bailliveaux,  subst.  masc.  plnr.  Baliveaux. 
En  termes  des  Eaux  et  Forêts,  ce  sont  de  jeunes 
chênes  au-dessous  de  .'<0  ans.  (Dict.  de  Borel  et 
Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.  au  mot  Bailliveaux.) 
<•  A  temps  passé  les  maîtres  en  faisant  et  vendans 
«  ventes  de  bois  ont  oublié  par  inadvertance  à  faire 
«  retenue  de  bayneaux  ou  estalons  pour  repeupler 
«  des  forêts.  >^  (Grand  Coût,  de  Fr.  p.  55.)  Peut-être 
faut-il  lire  baijveaux  comme  dans  le  passage  sui- 
vant :  «  Les  baijveaux  laissez  de  la  dernière 
«  coupe.  >'  (Pitliou,  Coût,  de  Troyes,  p.  37G.) 

VARIANTES    : 
BA.ILLIVEAUX.  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr. 
B.wvEAUX.  Pith.  Coût,  de  Troyes,  p.  370. 
Bayneaux.  Grand  Coût,  de  Fr.  p.  55  (pour  hayveaux.) 

Bâillon,  Billon  (pont  à),  subst.  masc.  Ce  mot 
semble  mis  pourunnom  de  lieu  dans  Villon  (Repues 
franches,  p.  i  et  7.) 

Baillorge,  subst.  Espèce  de  grain,  de  l'orge. 
Voyez  le  Dict.  de  Colgrave,  au  mot  Baillarge  et  le 
Coût.  Gén.  T.  II,  p.  5G4,  où  l'on  trouve  :  «  tiers 
«  froment,  tiers  seigle  et  baillerge  et  avoyne.  » 

VARIANTES  : 
BAILLORGE.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  564. 
Baillarge.  Cotgrave,  Dict. 
Baillerge.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  585. 

Baillot,  subst.  masc.  Espèce  de  vase.  «  Parce 
a  qu'aucune  fois  on  n'a  pas  commodité  d'avoir  fon- 
«  taines,  ou  ruisseaux,  il  est  requis  faire  de  petits 


«  baillots  de  bois pour  mettre  leur  eau.  »  (Fouil- 

loux,  Vénerie,  fol.  10,  V°.) 

Bailou,  subst.  masc.  Valeur.  Dans  le  patois 
gascon,  il  est  employé  sous  la  même  acception  dans 
ie  Rec.  des  Poës.  mss.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1364. 

Bain,  subst.  masc.  Bain.  —  Effusion  de  larmes. 
Pour  la  signification  de  bain,  voyez  bagnum  dans 
le  Glossaire  latin  de  Du  Cange. 

Et  combien  parez-vos  de  moi  ? 
Dame,  dit-il,  foi  que  vos  doi. 
Se  ge  ai  vingt  sols,  et  mon  baaing, 
Et  ge  ai  mon  convoi  de  gaaing 
Gel'  voldrai  molt  bien  de  servir. 

Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  p.  125. 
Li  a  fait  pranre  une  poison, 
Enprés  a  fait  temprer  un  bainrj 
Donc  fu  gariz  de  son  mehaing. 

Blanch.  MS.  de' S.  Germ.  fol.  189. 

«  Après  que  la  petite  fille  eusl  été  bien  lavée  et 
«  netoyée  dedans  le  baing.  »  (Nuits  de  Straparole, 
T.  I,  page  112.) 

Dans  un  sens  très  figuré,  le  mot  boing  a  été  em- 
ployé pour  effusion  de  larmes.  Coquillarl,  parlant 
d'une  femme  qui  plaide  pour  les  intérêts  d'une 
autre  femme  auprès  de  son  mari,  dit  : 

En  usant  de  pleurerie, 
Remonstrera,  s'il  est  besoing, 
Que  sa  femme  est  seiche  et  tarie, 
Et  n'a  pas  de  vie  plain  poing  ; 
Et  s'il  faut  qu'elle  prenne  soing, 
Elle  y  demourra  toute  roide. 
Et  cela  à  l'aide  du  boing. 
Trouvera  sur  ce  cas  remède. 

Coquillarl,  p.  U  et  15. 

Le  passage  suivant  justifie  pleinement  cette  ex- 
plication : 

On  feroit  de  larmes  un  boii>g 
Qu'ay  pleurez  de  desplaisance. 

La  Chasse  et  Dép.  d'Amours,  fol.  283. 

Locutions  remarquables  : 

i"  Bain  d'une  gisante:  c'est-à-dire,  bain  d'une 
femme  en  couche 

2°  Bain  de  Marie  (1).  Monet  l'explique  ainsi: 
«  Fourneau  d'alembic ,  ou  plantes  à  distiller  se 
«  cuisent  et  résolvent  à  sec,  mais  dans  l'eau  bouil- 
«  lante.  " 

3°  Chevaliers  du  bain.  Voyez,  sur  cette  expression, 
le  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au  mot  Miles  ;  on  y 
trouve  une  grande  dissertation  sur  l'usage  du  bain 
dans  les  cérémonies  qui  préparoient  à  la  chevalerie  ; 
on  y  avoit  aussi  »  rordoiinance  et  manière  de 
«  créer  et  faire  nouveaulx  chevaliers  fin  baing  (2)  au 
«  temps  de  paix,  suivant  la  Coutume  d'Angleterre.  » 
(Voy.  aussi  La  Salade,  fol.  54.) 

4°  Argenté  à  bain.  En  termes  d'orfèvrerie, 
argenté  à  bain  se  disoit  vraisemblalilement  par 
opposition  h  argent  bruni.  A  la  bataille  d'Arqués, 
«  Sagonne  étoit  monté  sur  un  cheval  turc  armé 
<■<  d'armes  argentées  à  bain,  et  un  petit  manteau 
t  d'écarlate.  »  (Mém.  d'Angoulême,  p.  85.) 

5°  Bains  de  Valentin.  Façon  de  parler  prover- 


(1)  Le  bain-marie  aura  été  ainsi  nommé  par  allusion  à  sa  douce  chaleur,  (n.  e.)  —  (2)  L'ordre  du  bain  fut  établi  par 
ichard  II.  Le  nom  de  l'ordre  vient  de  l'usage  de  se  baigner  avant  de  chausser  les  éperons  d'or.  (n.  e.) 


BA 


372  — 


BÂ 


iiale  ii  laquelle  a  donné  lieu  l'aventure  d'un  mari 
qui  prenoit  un  bain  pour  se  disposer  îi  coucher 
avec  sa  femme,  tandis  que  le  galant  profite  de  son 
absence  pour  occuper  sa  place.  (Voy.  le  Francien, 
cité  dans  Oud.  Cur.  Fr.) 

()°  Ikdtifj  du  diable.  Expression  singulière  pour 
signifier  humeur  mélancolique.  (Voyez  Malad. 
d'Amour,  p.  159.) 

7°  Baiiig  cruel,  pour  bain  d'eau  froide.  Cette 
fa(,;on  de  parler  se  trouve  dans  les  vers  suivans  : 

Après  lor  a  deiïendu 
Qu'ils  ne  soient  jamés  veu 
En  la  maison,  ne  el  porprès, 
Qiiar  si  il  y  estoient  représ 
Il  auroient  un  bainrj  cruel 
De  la  froide  eue  du  chanel. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  IHS.  fol.  239,  R-  col.  1. 

VARIANTES  : 
BAIN.  Orthographe  snbsist. 
Baaing.  Fabl.  ^ÎSS.  de  S.  Germ.  p.  125. 
Baing.  Nuits  de  Strapar.  livre  I,  p.  112. 
Baig.  Blanch.  MS.  de  S.  Germ.  fol.  189. 
BoiNG.  La  Chasse  el  Départ,  d'amour,  fol.  283. 

Baincheres,  suhst.  Engin  h  pêcher.  (Voy.  les 
Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  Il,  p.  l'i.) 

Baine,  subst.  Droit  sur  le  poi.sson.Ce  mot  vient 
apparemment  de  l'ancien  mol  Bc/ma,  qui  signifie  un 
panier.  (Gloss.  de  l'IIist.  de  Paris.) 

variantes  : 
HAINE,  Benne.  Gloss.  de  l'Hist.  de  Paris. 

Baiocque,  subst.  fém.  Espèce  de  monnoie  (1). 
Elle  étoit  de  peu  de  valeur.  (Voy.  Dict  de  Colgrave, 
au  mot  Baiocque.)  En  parlant  d'un  empirique, 
qui  avoit  promis  de  guérir  de  la  goutte  un  cardinal, 
on  a  dit:  «  11  luy  envoya  son  maistre  d'hostel  pour 
«  emprunter  dix  mille  écus,  auquel  ce  gentil  gué- 
«  risseur  respondit  eslre  un  pauvre  compagnon,  et 
«  n'avoir  pas  une  baijoque  pour  passer  l'eau.  » 
(Contes  d'Eutr.  p.  78. j 

VARIANTES  : 
BAIOCQUE.  Cotgrave,  Dict. 
Bayaqlie.  Contes  d'Eutrap.  p.  78. 

Baion,  subst.  fém.  Nom  de  Ville.  Bayonne.  Ce 
mot  répond,  dans  le  lit.  de  1259,  p.  50,  au  latin 
Bayona. 

VARIANTES    : 
BAION.  Bymér,  T.  I,  p.  45;  tit.  de  1259. 
Baone.  Rymer,  T.  I,  p.  50;  tit.  de  1259. 

Baioniers,  subst.  viasc.  plur.  Arbalétrier. 
Borel,  sur  ce  mot,  cite  la  Chroniq.  de  Flandres.  11 
prétend  qu'il  vient  de  Banonne,  parce  qu'on  y  fai- 
soit  de  meilleures  arbalètes  qu'ailleurs.  (Voy.  Laur. 
Gloss.  du  Dr.  Fr.)  Au  lieu  de  bayoneier  dans  le  Dict. 
de  Colgrave,  peut-être  faudroil-il  lire  baioniers  ou 
baionniers,  du  mot  Bajoue,  pris  pour  joue,  à  cause 
de  l'attitude  que  prennent  ceux  qui  se  servent  de 
l'arbalète,  et  qui  mettent  la  joue  sur  cette  arme 
pour  tirer. 

(1)  Cette  monnaie  de  cuivre,  en  usage  dans  les  Etats  Romains,  serait  ainsi  nommée  à  cause  de  sa  couleur  baie  (bajo)  ; 
de  même  en  Irançais,  on  dit  un  blanc,  un  jaunet.  (N.  e.) 


VARIANTES  : 
BAIONIERS.  Borel,  Dict. 
Bayoneiers.  Cotgrave,  Dict. 
Bayonniers.  Laur.  Gloss.  du  Droit  Français. 

Baire,  subst.  fém.  Barre.  C'est  la  traverse  qui 
soutient  le  fond  d'un  tonneau.  «  Quiconque  vend 
«  vin,  cervoise,  ou  autre  bruvage  es  mettes  de  la 
«  jurisdiclion  desdits  Seigneurs  hauts  justiciers, 
«  viscontiers  ou  l'un  deux,  il  doit  au  Seigneur  droict 
«  d'afforage,  tel  que  de  chacun  fond  bairé  deux 
«  lolz,  el  de  chacun  fond  non  portant  baire,  un  lot 
«  seulement.  »  (Coût.  Gén.  p.  885.) 

Bairé,  part.  Barré.  Se  disoil  des  tonneaux.  (Voy. 
la  citation  de  l'article  précédent.) 

Bais,  adj.  Décrié.  Au  propre,  abaissé. 

Lors  fus  d'aus  huiez,  et  baiz 
Lors  fus  enginnez,  et  traiz 
Par  les  tiens,  etc. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  I,  fol.  73,  V  ool.  2. 

Baiselle,  subst.  Gouvernante  d'une  princesse. 
Un  amant  ayant  fait  l'éloge  de  sa  dame,  compte 
ainsi  la  cour  qu'elle  doit  avoir  : 

Pour  ce,  sera  Venus  vo  damoiselle. 
Et  vous  dressé  serez  plus  haute  qu'elle. 
Et  SI  sera  Juno  vostre  pucelle. 
Aussi  Pallas  vostre  sage  baiselle 
Sanz  huece 

Machaut,  MS.  fol.  197,  R"  col.  2. 

Baisemain,  subst.  niasc.  Hommage.  —  Com- 
pliment. 

Le  sens  propre  est  l'hommage  qu'un  possesseur 
defiefrendoit  à  son  Seigneur.  «  Cela  estoit  tenu 
«  pour  fiefd'honneur.  Le  greffier  du  Tillet  le  nomme 
«  baisemain.  «  (S'  Jul.  Mesl.  Histor.  p.  G76.) 

On  disoit  en  ce  sens  pris  au  figuré  : 

1°  Venir  à  baise  main,  c'est-;Vdire  :  se  soumettre. 
En  parlant  du  refus  que  fit  le  Comte  d'Armagnac 
de  rendre  à  Charles  Vil  le  Comté  de  Comminge,  que 
le  Prince  lui  demandoit,  on  ajoute: 

Pour  le  contraindre  à  ce  faire, 
Si  y  fut  a  tout  mille  lances 
Et  vint  devant  l'isle  Jourdain, 
Où  là,  sans  grandes  résistences, 
Le  Comte  vint  à  baise  main. 

Vigil.  de  Charles  VII.  T.  I,  p.  9U. 

2°  Donner  à  bese  main,  c'est-à-dire  :  prodiguer 
les  bienfaits  pour  quelqu'un. 

Richart  outremer  demeura 
Salehadin  tant  l'ounoura. 
Et  li  donna  à  bese  main 
Si  largement,  hui,  et  demain, 
Qu'il  laissa  perdre,  etc. 

G.  Guiarl ,  MS.  fol.  37,  R'. 

S'  Julien  se  récrie  sur  l'introduction  de  ce  mot 
dans  les  usages  franyois  pour  compliment.  11  le 
regarde  comme  contraire  à  la  liberté  et  à  la  fran- 
chise de  la  nation,  et  le  met  au  nombre  «  d'infinies 
«  autres  solises  et  dépravations  de  l'antique  vertu, 
«  francise  et  générosité  françoise  corrompues,  de 
>'  tant  de  façons  par  les  étrangers.  »  (S' Julien,  Mesl. 


BÂ  -  373  - 

Histor.  p.  427.  —  Voy.  Ibid  p.  586.  —  Voy.  aussi 
les  Div.  Letions  de  Du  Verdier,  p.  234.) 

Baisement,  siibst.  masc.  Baiser.  —  L'action 
de  baiser. 

Vers  lui  courut,  si  l'enbraça  ; 
Iluec  ot  gra?it  enbracement, 
Et  moult  merveillox  haiscmenl. 

Floiro  e(  BlancheQor,  MS.  do  S.  Germ.  fol.  203,  V'  col.  1. 

par  un  bais 

Sol  à  sol. 

Pois.  MSS.  avant  1300. 

Baiserct  éloit  le  diminutif  de  baiser;  baiser  de 
paix,  c"étoit  le  baiser  qui  se  donnoil  en  signe  de 
réconciliation  et  de  répiiration  pour  un  homicide. 
On  observoit  pour  le  recevoir  Tordre  et  le  degré  de 
parenté.  Les  mâles  en  ligne  directe  avoienl  la  pré- 
férence sur  les  collatéraux,  et  les  deniers  qui  pro- 
venoient  de  la  réparation  étoient  partagés  entre  les 
héritiers,  comme  des  effets  de  succession.  Les 
bâtards  n'avoient  ce  droit  que  dans  les  homicides 
qui  regardoient  la  famille  de  leur  mère.  (Voy.  le 
Nouv.  Coût.  Gén.  T.  I,  p.  804,  8.-.O.  <)!)4  et  1113.) 

Baiser  doulce  margot,  et  le  elier  baiser  margot 
sont  deux  quolibets  usités  vraisemblablement,  au- 
trefois, dans  le  style  burlesque: 

Mais  voyons  si  déduit  de  chiens 

Donne  si  largement  ses  biens  : 

Nenni,  il  faut  païer  l'escot  ;  ' 

C'est  le  baiser  douce  Marqol. 

Gace  de  la  Signe,  des  Uéduils,  MS.  fol.  1211,  R- 

Mais  après  dit  ung  mauvais  mot, 
Que  c'est  le  cher  baiser  maryot. 

Ibid.  fol.  13i,  V'. 

VARI.-INTES  : 
BAISEMENT.  Dict.  de  Rob.  Est.  et  de  Cotgr. 
Baissement.  Dict.  de  Rob.  Est. 
Baiser.  Orth.  subsist. 

Baisier.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  439,  col.  1. 
Boiser.  Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  fol.  69. 
Bais.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  900. 
B.useret.  Poës.  de  Jacq.  Tahur.  p.  250. 

Baiseï",  verbe.  Baiser.  On  trouve  le  mot  basiare 
dans  le  même  sens,  au  Gloss.  hit.  de  Du  Gange  : 

Las  se  cou  avient  jamsis  k'ele  me  bâche 
Pis  arai  que  forsenés  ki  porte  mâche  (1). 

Poês.  MSS.  avanl  1300,  T.  III,  p.  1046. 

On  lit  bâche  pour  bace,  dans  une  autre  copie 
MS.  de  la  même  pièce. 

Doucement  le  racaulli 
Les  eus  li  baisse,  et  le  vis. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n'  7989,  fol.  8,  V  col,  2. 

Baisotter,  est  proprement  le  diminutif  de  baiser. 
(Voy.  ce  mot  dans  Cotgr.  et  dans  Gilles  Durand,  à 
la  suite  de  Bonnefons,  p.  91.) 

Brtiisierse  trouve  pour  baiser  dans  le  Rec.  des 
Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  Il,  p.  605,  mais  c'est  pro- 
bablement une  faute. 

Locutions  remarquables: 

1°  Baiser  les  mains,  c'est-à-dire  saluer.  «  L'usage 
«  de  baiser  les  mains  est  venu  des  anciens  Empe- 
«  reurs  qui  bailloient  premièrement  à  baiser  leurs 
«  mains  aux  nobles,  et  après    la  bouche,  et  le 


BA 


«  menu  peuple  leur  baisoit  le  genouil.  »  (Du  Verd. 
dans  ses  Div.  Lee.  p.  105.) 

2°  Baiser  la  terre,  toucher  la  terre.  «  Il  n'afiert 
«  pas  que  pour  moy  vostre  pied  la  terre  baise.  » 
(Percef.  Vol.  I,  fol.  140.) 

3°  Se  baiser  publiquement  l'un  l'autre.  Autrefois 
cet  usage  s'observoit  par  les  gens  mariés  pour  mar- 
quer d'une  manière  solennelle  la  liberté  cl  la  bonne 
foi  avec  lesquelles  on  faisoi  t  les  contrats  et  la  volonté 
qu'on  avoit  de  les  exécuter.  (Laurière,  Glossaire 
du  Droit  Français.) 

4°  Baiser  le  verroul.  «  C'est  le  signe  de  l'hom- 
■■  mage  que  le  vassal  fait  à  son  seigneur  feudal  au 
«  manoir  du  fief  dominant,  en  l'absence  du  sei- 
«  gneur,  en  lieu  de  la  bouche  et  des  mains  que  le 
«  seigneur  présente  à  son  vassal,  en  recevant  le 
«  serement  de  fidélité.  "  (Laur.  Gloss.  du  Dr.  fr.) 

5°  Baiser  la  paix  après  sa  dame.  G'étoit  une 
galanterie  de  nos  ancêtres,  de  baiser  à  l'église  la 
paix,  après  sa  maîtresse.  (Gloss.  des  Arr.  d'Amour. 
—  Voy.  l'Amant  rendu  Cordelier,  p.  530  et  531.) 

6°  Miser  le  babouin.  Acte  de  soumission.  (Dict. 
d'Oudin.) 

7°  Baiser  son  ami  à  la  bouche.  On  disoit  prover- 
bialement :  «  Il  ne  faut  pas  tant  baiser  son  ami  à  la 
«  bouche  que  le  cœur  lui  en  fasse  mal  ;  »  c'est-à- 
dire  il  ne  faut  pas  tant  importuner  un  ami  qu'enfin 
il  s'en  fâche.  (Oudin,  Cur.  fr.) 

On  disoit  proverbialement  : 

Bon  fait  maie  bouclie  appaiser  ; 
Aucunes  fois  on  seuU  (2)  baiser 
La  main  qu'on  vouldroit  qui  fust  arse. 

Roman  de  la  Rose,  7755-7757. 

CONJUG. 

Baisarent  [se],  passé  défini.  Se  baisèrent.  (S"  Bern. 
Serm.  fr.  mss.  p.  369.) 

Cftis/,  indicatif  présent.  Il  baise.  (Ghans.  mss.  du 
comte  Thibaut,  p.  61.) 

Bes,  indicatif  présent.  Je  baise.  (Poës.  mss.  avant 
1300,  T.  IV,  p.  1576.) 

Best,  subj.  Baise.  (Blanch.  ms.  de  S'  G.  fol.  180.) 

VARIANTES    : 
BAISER.  Orlh.  subsist. 
Beser.  Ord.  T.  1,  p.  268. 

Baisser.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7982,  fol.  90,  V°  col.  2. 
Baissier.  Ibid.  fol.  79,  V"  col.  1. 
Baisier.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1427. 
Besier.  Ibid.  p,  1403. 
Besser.  Athis,  MS,  fol,  39,  V»  col.  t. 
Bacer.  Ibid,  T.  III,  p.  1046. 
Bâcher.  Ibid,  dans  un  autre  MS. 
Bruisier.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  605. 
Baisotter.  Durant  à  la  suite  de  Bonnef,  p,  91. 

Baiseresse,  adj.  au  fém.  Qui  baise. 

Quand  ma  langue  piUeresse, 
Sur  ta  bouche  baiseresse 
Aura  ravi  tes  esprits 
Repren  ce  que  j'aurai  pris. 

G.  Durant,  à  la  suile  de  Bonnef.  p.  96. 

VARIANTES  t 
BAISERESSE.  Oudin,  Dict. 
Baisarde.  Epith.  de  la  Porte. 


(1)  Masse,  massue.  -  (2)  On  a  coutume. 


BA 


—  374  — 


BA 


Baiserie,  siihst.  fém.  L'action  de  baiser. 

Ains  a  laissié  la  baiserie.  • 

Eust.  Dcsch.  Pws.  MSS.  fol.  4C3,  col.  1. 

Baisez,  subst.  masc.  jilur.  Pièces  d'un  lit.  Il 
peut  venir  du  mol  baz,  qui,  eu  breton,  signifie  bâton. 
(Gloss.  de  rilist.  de  Bretagne.)  «  Quilance  d'azelis 
«  femme,  à  Rouaull  de  kaiisoit,  chastelain  d'Auray, 
«  pour  60  sols  à  elle  dus  pour  un  covertor,  dous 
«  linceus,  une  cortepoinle  et  dous  baise:i  portez  l'i 
«  Pontquelec  à  l'usage  du  duc.  »  (Histoire  de  Bre- 
tagne, T.  II,  p.  i58.) 

Baislement,  subst.  tnasc.  Ouverture.  C'est  en 
ce  sens  qu'il  faut  l'entendre  en  ce  passage  : 

Le  feu  ceignant  l'obscur  creuse  le  ciel  :  ainsi 
Quand  l'exalaison  grande,  ou  large,  s'amoncelle, 
S'il  est  desmesuré,  baislement  ou  l'appelle  : 
Mais  s'il  est  plus  petit,  et  serré  tellement 
Qu'il  ne  s'étende  au  loin,  c'est  un  muy  seulement. 

Œuv.  deBaif,  fol.  10. 

Baisse,  subst.  fém.  Terrain  affaissé,  que  le 
séjourneinent  des  eaux  a  fait  baisser.  Montluc,  par- 
lant du  mouvement  de  son  armée  et  de  celle  des 
ennemis:  »  Je  commençay  à  marcher  (dit-il),  et 
«  comme  les  ennemis  descouvrirent  les  gens  de 
«  pied,  ils  firent  alte  à  l'endroit  d'une  grande  baisse, 
«  que  l'eau  avoit  faicl  par  succession  de  temps... 
«  Je  les  vis  dans  la  plaine  portans  leur  lance  droicte 
«  sans  s'avancer  et  vis  aussi  le  capitaine  Ascaigne 
«  sur  un  petit  cheval  gris  qui  faisoit  mettre  ses 
«  picquiers  dans  la  baisse.  ■•  (Mém.  de  Montluc, 
T.  I,  p.  131 .)  De  là  on  a  dit  baisse  d'un  marest,  pour 
fond  d'un  marais.  (Voy.  Oudin,  Dict.) 

Baissement,  subst.  masc.  Diminution.  (Voy. 
Du  Gange,  Gloss.  latin  au  mot  Baissamentum ,  qui 
a  la  même  signification.) 

Baisser,  verbe.  Baisser.  (Voyez  Bassere  dans  le 
même  sens,  au  Gloss.  latin  de  Du  Gange.)  «  Et  quant 
a  ce  vint  as  lances  baissier,  et  li  Greu  lor  tornerent 
«  le  dos.  »  (Villehardouin,  p.  59.) 

Quant  il  se  baisa,  et  il  boit, 
Dedens  en  la  fontaine,  voit 
L'ombre  qui  sort  de  l'autre  part  ; 
Avis  U  est  qu'il  le  regart. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7989,  fol.  6i,  V  col.  2. 

VARIANTES  : 
BAISSER.  Orthographe  subsist. 
Baissier.  Villehardouin,  p.  59. 
Baiser.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7989,  fol.  62,  V  col.  2. 

Baiver,  subst.  7nasc.  Bavarois. 

VARIANTES  : 
BAIVER.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  157. 
B.\iuviERS.  Ph.  Mouskes,  p.  320. 

Baix  (en),  adv.  En  bas.  (Voy.  S"  Bernard,  Serm. 
fr.  MSS.  p.  6Ô.) 

Bajouere,  subst.  fém.  Médaille.  —  Monnoie. 

Selon  le  Dict.  de  Corneille,  bajouere  est  une  mé- 
daille sur  laquelle  on  voit  deux  têtes  en  profil  (I). 

C'est  aussi  une  monnoie  des  Pays-Bas ,  suivant 
Le  Duchat,  notes  sur  Rabelais,  T.  III,  p.  110  et  111. 


Bii\ula.tion,  subst.  fém.  Commission,  emploi. 
C'est  en  ce  sens  qu'on  a  dit:  bajulation  en  gabelle, 
pour  recette  des  gabelles.  (Laur.  Gloss.  du  Dr.  fr.) 

Bal,  subst.  masc.  Danse.  —  Assemblée  de  danse. 
On  disoit  autrefois  bal  pour  danse ,  l'action  de 
danser. 

Du  luth,  et  du  pinceau,  j'esbattray  ma  vie 
De  l'escrime  et  du  bal. 

Œuv.  de  Joach.  du  Bell.  p.  391. 
Sor  un  ormel 
Mainent  baudet. 

Poês.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1461 . 

L'auteurdu  Roman  de  la  Rose,  parlantdes  moyens 
employés  par  les  dames  pour  cacher  les  défauts  de 
leurs  tailles,  a  dit  : 

Et  s'ele  a  trop  grosses  espaules 
Pour  plaire  à  dances  et  à  baulles. 
De  deiyé  drap  robe  porte  : 
Si  sera  de  moins  lait  déport. 

Rora.  de  la  Rose,  14089-14092. 

Baleries  baudes  se  trouve  dans  le  Roman  de  la 
Rose  et  signifie  danses  dissolues .  prises  dans  un 
sens  détourné  et  plus  obscène. 

Bal  signifioit  aussi  toute  assemblée  où  l'on  dan- 
soit,  même  l'après-dinée.  Brantôme,  parlant  de  la 
reine  d'Ecosse,  auparavant  reine  de  France ,  dit  : 
«  Les  nopces  donc  solemnellement  célébrées  dans 
«  la  grande  église,  et  le  palais  de  Paris,  où  l'on  vit 
«  cette  reyne'paroistre  cent  fois  plus  belle  qu'une 
a  déesse  du  ciel,  fut  après  disner  à  se  pourmener 
<i  au  bal,  et  fût  sur  le  soir,  à  s'acheminer  d'un  pas 
«  modeste,  et  façon  desdaigneuse  pour  offrir  et  faire 
«  son  vœu  au  Dieu  hyménée.  »  (Brantôme,  Dames 
illustres,  p.  119.) 

On  disoit  : 

Mener  le  grand  bal,  pour  désigner  une  espèce  de 
danse,  peut-être  celle  par  où  commençoit  le  bal , 
ou  celle  que  toute  l'assemblée  dansoit  en  commun. 
(Voy.  les  Mémoires  de  Brantôme,  p.  142.) 

Au  figuré,  on  disoit  baule  dolente  : 

Douloureuse  danse,  pour  une  playe  terrible 
De  sou  branc  fiert  le  duc,  par  si  très  grand  hayr 
Que,  d'un  pied  en  parfond,  ly  porfendist  l'espaule  : 
Le  duc  tout  mort  chaist;  vecy  dolente  baule. 

Ger.  de  RoossiUon,  MS.  p.  ICI. 

V.\RIANTES  : 
B.\L.  Orthogi-aphe  subsist. 

Baules  (plur.)  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  318,  V»  col.  2. 
Baus  (;>'"'■•>  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7989,  fol.  79,  R"  col.  1. 
Baux  (phi>\)  Ane.  Coût,  de  Bret.  p.  142. 
Baudel.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1461. 
Balement.  Gloss.  du  P.  Labbe. 
Balerie,  subst.  fém.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  257. 
Ballerie,  subst.  fém.  Gloss.  du  R.  de  la  Rose. 
Bale,  subst.  fém.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  I,  fol.  119. 
B.wle,  subst.  fém.  Ibid.  n»  7218,  fol.  311,  V"  col.  1. 
Baulle.  subst.  fém.  Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose. 
Boule,  subst.  fém.  Ibid.  fol.  260,  R»  col.  1. 

Balade,  subst.  fém.  Chanson.  —  Danse.  Ce  mot 
subsiste  encore  aujourd'hui.  On  connoitroit  impar- 
faitement ce  qu'il  signilloit  autrefois,  si  l'on  s'en 
tenoit  à  l'explication  qu'en  donnentMonet  et  Borel. 
Ils  définissent  la  balade:  «  Epigramme  ancien,  tout 
«  ou  presque  tout  d'une  cadence.  »  A  en  juger  par 


(1)  Ce  serait  une  corruption  de  baisoire,  parce  que  les  deux  tètes  semblent  se  baiser,  (n.  e.  ) 


BA 


—  375  — 


BA 


les  anciens  auteurs  qui  en  ont  composé,  nous 
croyons  pouvoir  la  dclinir  par  une  espèce  de  poëme 
que  ion  trouve,  nommé  indifleremment  chanmi 
0^  balade,  dans  les  Poës.  mss.  de  Froiss.  foi.  102  et 
103  Le  nombre  des  stroplies,  ainsi  que  des  vers  qui 
y  entroient,  etoit  indéterminé.  Les  vers  en  étoient 
ordinairement  à  rime  croisée  ;  chaque stropliefinis- 
soit  par  le  même  refrain,  et  la  pièce  étoit  terminée 
par  un  renvoi  où  le  refrain  éfoit  encore  répété  Le 
nombre  des  vers  de  renvoi  devoit  être  réduit  à  la 
moitié  de  ceux  qui  composoient  chaque  couplet  Je 
crois  que  la  balade  éloil  originairement  une  chan- 
son à  danser,  comme  son  nom  et  son  refrain  sem- 
blent le  designer.  Elle  étoit  composée,  le  plus  ordi- 
nairemen  ,  de  trois  couplets,  et  quelquefois  de  cinq. 

Ppf.rA^-'Jf  "'^'^?"'^,®  ''"''  "«"S  ayons  vue,  est 
celle  de  Uillaume  Li  \iniers,  parmi  les  Poës  fr 
MSS  avant  1300,  T.  II,  p.  8J7.  Elle  commence'par 
cette  strophe  :  ^ 

En  tout  tans  se  doit  fins  cuers  resjoir 
tl  joie  mener,  et  son  cors  cointeir 
Car  on  voit  celui  de  samour  joir 
Qui  loyaument  proie  : 
Bonne  est  la  dolours 
De  quoy  naist  doucours, 
Et  soûlas  et  joye. 

..^^'/^,?1"P'^  ^"•'■^  PO"''  '"efuter  Fopinion  de  l'au- 

i«/L/.       ['P°^^"I"^''''^"fO'^''  <?"•  P' étend  que  la 

ftl^à'î    w  ^?"  o"8"^e,  s'adressoit  aux  princes, 

•  et  ne  raitoil  que  matières  graves  et  dignes  dé 

dan^'i-À H  X^il  "■  (^'^y-  '^'  '"^g'^^s  de  la^  balade 
danb  1  Art.  de  Rhétorique,  par  Fabri,  Liv.  II    n    a\ 

rL^^M^"'^^-^  "  ""^-^  ^''''''  ^'"''^"st.  Deschamps,  dans  le 
recuei  de  ses  poésies,  fait  deux  arlicles  séparés 
aes  balades.  L  un  sous  le  simple  litre  de  balaie  et 
1  autre  sous  celui  ûechanronsrondauLr;  nousn'ap- 
percevons  d'autre  distinction  entre  les  unes  et  les 
seulenteni'^nf  *  T  '''  ''^'""'  «"^ '«.issti^ophe 

?«\S/i^?''''''^'';?'V''.'  ^^P^'^es  de  balades. 

ï  naïade  leonime.  Fabri,  dans  son  art  de  Rhét 
écrit  Leomne.  Les  rimes  en  étoient  pleines  comme 
l'ônVcSte  ?"'  ""'  "'''''  '^■^"^*-  l'e«'^''î4?  ou 

dolente 

présente 

conception 
p    .   n     .,   „    coiîsteUation. 
tust.  Desch.  Pul's.  WSS.  fol.  396,  col,  3. 

.  Fabri  appelle  aussi  Léonine,  la  balade  où   Ipq 

"'TnainTr'  '"^édiatement.  (Art  de  Rhitïr.f  ' 

i    Balade  leonime  et  moitié  sonant   Elle  étoit 

composée  de  rimes  pleines  et  de  rimes  simplemen 

sonnantes,  comme  dans  ces  vers  •  ^'n^P'^ment 


El 


monde 
onde 


présentement 

innocent 

calmer 

u       ,  ostir. 

bu»!.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  396,  col.  i. 


S  Balade  équivoque  et  leonimc.  On  désie-noit 
ainsi  la  ft«/arfe  où  la  dernière  syllabe  drchlaue 
vers  etoit  reprise  au  commencement  du  vers  sui- 
vant, dans  une  autre  signification.  Elle  étoi't  très 
difficile.  On  en  jugera  par  la  citation  suivante  • 

Lasse,  lasse  maleureuse  et  dolente 
Lente  me  voy  fors  de  soupirs  et  plains 

Mei'l  qui  VêuU,^  e?c"  ''"""^  ''  ''  '°"™^"t«  ■ 

Eusl.  Desch.  Poés.  MSS.  fol.  397,  col    « 

4"  Balade  dorée.  On  trouve  une  balade  sous  ce 
titre,  dans  le  Départie  d'amours.  Elle  est  intitïîée^ 
MorpheusDieu  des  songes  dit  à  sou  père  Deudu 
7SoSsT"'  '""''''''"'  ''i'"'oques  fanem 

Père  gentil  à  qui  je  dois  obéissance 
lout  mon  vivant  vous  veu.x  obéir  sans  ce 
Que  par  vous  soit  dit,  sans  mectre  plaizance 
Quant  cognoistray  que  soit  vostre  plaisance 

Chasse  et  départie  d'Amours,  p.  235. 

Celte  sorte  de  poésie,  comme  on  vient  de  le  voir 
eto.t  composée  de  rimes  qui  consistoient  dans  rS 
voque  et  1  analogie  du  son  du  dernier  mot  dû 
second  vers  avec  le  dernier  mot  du  vers  précèdent 
Peut-être  aussi  le  mot  dorée  n'est-il  qu'une  eSètP 
de  balade  pour  marquer  son  excel  ence  comml 
dans  ces  mots,  légende  dorée  et  sentence  dorée 

o  Balade  pleine  unisonatite  et  retronrade  on 
balade  de  ryme  autrement  dite  enchaînée  Téloff 
la  balade  dont  la  dernière  syllabe  de  chaque  rime 
commençoit  le  vers  suivant  :  ^"-me  urne 

0  faulce  mort  et  pourquoy  luy  donnas'' 
N  as-tu  pas  tort,  et  fait  grand  vilennie  '' 
Nye  le  donc,  certes  tu  ne  pourras 
Has  est  son  corps;  elle  fa  prest  suivie 
Vie  luy,  etc. 

Chasse  et  déparlie  d'Amours,  p.  235,  col.  2. 

0°  Balade  unisonante.  Celle  qui  rimoit  nar  les 
mots  pris  dans  une  acception  différente  •      '        '"' 

I  Meurtrière  mort  !  je  vois  que  tes  trésors 

Ne  sont  ja  beaux,  mais  sont  laitz,  très-orts 
Plus  de  mal  faiz  que  les  cornes  dès  beufz  ' 
Jamais  poison  tant  amere  ne  beuz. 

Chasse  et  déparlie  d'Amours,  p.  237.  col.  l. 

7-  Balade  unisonante  et  batelée.  Dans  cette  sorte 
de  poésie,  1  hémistiche  nmoit  avec  le  den  er  mot 

hffisrsS^;^-î^,^,f-^sS 

Adversité  m'a  durement  cité, 
Sans  charité  ;  las  trop  me  maîtrise 
Et  sans  faintise,  j'ai  trouvé  récité   ' 
Félicité,  etc. 

Chasse  et  déparlie  d'Amours,  fol.  251. 

8°  Balade  couronnée.  Le  dernier  mot  de  chacun 
des  vers  qui  la  composoient,  avoit  une  analSe  de 
son  avec  les  deux  mots  qui  le  précédoient  : 

Haultain  fatal  par  très  pouans  vens  vente 
Aux  amoureux  dessoubz  venus  nuz  nue 
Ue  griefz  tourmens  faict  pargrevans  liant?  hanto 
Une  douleur  des  advenuz  ne  eulx  nue. 

Chasse  et  départie  d'Amours,  fol.  251. 

9°  Balade  double  couronnée  à  double  unison- 
nance.  L'hémistiche  et  la  fin  du  vers  rimoien"  aîec 


BA 


37G  — 


BA 


les  mots  qui  les  précédoient,  et  formoienl  une 

espèce  d'ccho  : 

Par  disoors  cors  appeliez,  accords  corps 
Tu  soumis  meis  plusieurs  tes  amys  mis. 

Cliasse  el  d^iiarlic  d'Amours,  fol.  254. 

10°  Ftalade  recoupée.  On  en  trouve  plusieurs  dans 
les  Poésies  de  Guillaume  Macbault,  à  la  suite  duMs. 
du  Livre  d'Ovide  de  la  Vieille,  en  vers  Fr.  par  J.  Le 
Fèvre.  (Bibl.  du  R.  n"  7236.) 

11°  Daladea  couronnées,  enchaînées  et  batelées. 
(Yoy.  l'Art,  de  Pierre  de  ÎNogerolles,  Bibliothèque 
de  Du  Verdier.) 

12°  ISaluûe  baladant  ou  batelée.  (Idem.) 

13°  Balade  fratisée  ou  jumelle.  (Voy.  l'Art,  de 
Rliét.  par  Jean  Molinet,  .ms.  du  R.  n»  7984  et  l'Art, 
de  Rbét.,  par  Fabri,  fol.  45,  11"  et  Y'.) 

14°  Balade  sotte  et  pastourelle.  C'éloit  une 
balade  dont  le  sujet  éloit  grossier  et  rustique. 
(\'oy.  Eust.  Descb.) 

VARIANTES  : 
BALADE.  Orthographe  subsist. 
Ballade.  Dial.  de  Tahur.  fol.  50,  V. 

Baladelie,  subst.  fém.  Diminutif  de  balade  : 

En  chantant  ceste  baladelie, 
Qui  me  sembla  jolie  et  belle. 

Froissarl,  Poes.  MSS.  fol.  50. 

Baladeur,  subst.  masc.  Danseur.  (D.  de  Borel.) 

Balafreiix,  adj.  et  jiart.  Déchiré.  —  Balafré. 

Dans  le  premier  sens  de  déchiré,  nous  lisons  : 
"  N'est  estimé  Cordelier,  ni  Jacobin  qui  avecques 
«  habits  balafrez,  va  vagabond  parmy  le  monde.  » 
(Pasq.,  Mono.  p.  188.)  «  Ils  portoient  les  chausses 
«  plus  bigarrées,  découpées,  déchiquetées,  et  balla- 
«  frées  et  la  pluspart  montroient  la  chair  de  la  cuisse, 
«  voire  les  fesses.  »  (Brant.  Cap.  Fr.  T.  IV,  page  44.) 

Nous  disons  encore  ?*«/«/'/'('.  (Voyez  dans  Uudin  et 
Cotgrave,  le  mot  balafreux  (1)  pris  en  ce  sens.) 

Ont  plusieurs  membres  coupez  : 
Aucuns  ont  piedz  et  poingz  griffez 
Pour  approcher  les  horions, 
Et  les  autres  fort  J/re/o/fî-ez, 
Plaindaiis  leurs  grandes  passions. 

Molinet.  p.  193. 

VARIANTES  : 
BALAFREUX.  Oudin  et  Cotgrave,  Dict. 
Balafré.  Pasquier,  Mono,  page  188. 
Ballafhé.  Brantôme,  Cap.  Fr.  T.  IV,  page  4i. 

Brelafé.  Cotgrave,  Dictionnaire. 

Brelaffré.  Molinet,  p.  193. 

Balai,  adj.  et  subst.  Qui  est  de  couleur  claire. 
Epitbète  de  Hubis.  Il  est  quelquefois  substantif.  Le 
Rubis  balais  est  pâle,  couleur  de  rose.  Ce  mot 
pourroit  venir  de  l'ancien  mot  françois  baillet  (2), 
qu'on  a  vu  ci-dessus  pour  clairet,  paillet,  couleur 
de  chair,  et  pour  épilhètedevin.  Gautier  d'Epinais, 
dans  ses  Poës.  mss.  dit  qu'il  n'y  a  pas  plus  de  com- 
paraison h  faire  de  la  beauté  de  sa  dame  avec  celle 
des  autres,  (lue  du  mois  de  mai  avec  celui  de 
février,  et  du  rubis  au  rubis  balais  : 


Ausi  con  de  février  mais, 
Et  li  rubiz  dou  balais 
N'a  de  beauté  nule  igance. 

G.1U1.  d'Epinais,  Pocs.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  36. 

VARIANTES  : 
BALAIS.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  36. 
Ballais.  Petit  .1.  de  Saintré,  p.  267. 
Bailay.  Rabelais,  T.  V,  p.  196. 
Baloy.  Glossaire  du  Rom.  de  la  Rose. 

Balaier,  verbe.  Enlever,  piller.  Au  figuré,  c'est 
le  sens  de  ce  mot  en  ce  passage  : 

Fromraanz  et  seigles  habondoient 
Es  liens  où  les  deus  os  estoient, 
Qu'aucuns  sorent  si  balaier 
Que  poi  i  remest  que  saier. 

G.  Cuiart,  MS.  fol.  21,  V. 

Balaine,  sȔ>sL  On  lit  dans  Froissart,  livre  II, 
p.2i'J,qu'àlahatailledeRosebecq,enl382,  plusieurs 
Flamands  avoient  des  gans  de  fer  à  balaine  (3). 
L'éditeur  soupçonne  que  c'est  une  faute  et  qu'il  faut 
lire  :  de  Boulogne,  de  Matines  ou  de  quelque  autre 
lieu. 

Ba\siii,  subst.  masc.  i\Iol  obscène.  (Voy.  le  Dict. 
d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Balance,  subst.  fém.  Instrument  qui  sert  àcon- 
noitre  l'égalité  du  poids.  —  Bon  ordre.  —  Puissance. 
—  Perplexité.  —  Peine.  —  Péril.  —  Caducité.  — 
Usage. 

Ce  mol,  qui  subsiste  dans  la  première  significa- 
tion, est  formé  de  lanx,  plat  ou  bassin,  et  de  bis. 
(Voy.  Fauchet,  des  Orig.  livre  IL  —  Pasquier,  Rech. 
p.  Gt)8.  —  Le  Glossaire  latin  de  Du  Cange,  au  mot 
Balanx,  el  le  Dict.  de  Borel,  au  mot  Bes.)  On  disoit 
en  ce  sens  :  d'une  même  balance,  pour  signifier 
également.  «  Ainsi  est  mort  ce  grand  capitaine  et 
«  guerrier,  aimé  et  hay  d'uns  et  autres  d'une  mesme 
«  balance.  »  (Lettres  de  Pasq.  T.  I,  p.  244.) 

Balance,  au  figuré,  s'employoit  pour  bon  ordre. 
Ph.  Mouskes,  parlant  du  désordre  de  la  bataille  de 
Roncevaux,  et  de  l'ordre  qui  y  fut  rétabli  par  Ro- 
land, dit  : 

Sa  bannière  avoit  retrouvé... 
Si  firent  es  gens  Marsile 
Com  cil  qui  n'orent  soin  de  gille  : 
Tout  s'est  remis  dans  la  balance 
Rollans  tint  une  grosse  lance. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  205. 

Dans  la  seconde  acception,  balance  a  signifié 
puissance  : 

Faveur  n'as,  amour,  ne  congnoissance 
A  homme  ;  nul  riens  ne  te  puet  estordre 
Josne,  ne  viel  luit  sont  en  ta  balance. 

Eust.  Deschamps,  Poés.  MSS.  fol.  32*. 

Balance  s'est  dit  pour  perplexité,  doute  : 

J'ay  été  entrepris. 

En  péril,  et  en  balance 

D'avoir  grant  maie  meschance  : 

J'en  suis  hors,  bien  m'en  est  prins. 

Eust.  Desch.  Poés.  MSS.  fol.  173. 

Dans  ce  même  sens,  on  disoit  :  être  en  balance. 


(1)  Le  bas-latin  a  balafardus,  balasardus ,  épée  courte,  qui  rappelle  balisarde,  si  disputée  entre  les  paladins  de 
l'Ârioste.  (n.  e.)  -  (2)  En  bas-latjn  balascius,  de  Tarabe  balchasch,  de  Balakschan,  près  Samarcande  ;  beaucoup  de  termes 
de  joaillerie  sont  ainsi  venus  de  l'Orient,  (n.  e.)  —  (3)  La  phrase  est  :  oc  Armés  d'auquetons  et  de  gans  de  balaine.  »  (Edition 
Kervyn,  X,  159.)  (n.  e.) 


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~  377  — 


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expression  qui  subsiste,  mais  que  nous  trouvons 
dans  Ph.  Mouskes,  ms.  p.  ii"i9. 

On  trouve  le  mot  balance,  employé  pour  peine. 
Sarrette,  servante  des  Trois  Maries,  ayant  perdu  ses 
maîtresses,  s'exprime  ainsi  : 

Desa  seray  en  grant  balance, 
S'eUes  de  moy  n'ont  souvenance. 

Hist.  des  Trois  Maries,  eu  vers,  MS.  p.  442. 

Balance  a  signifié  péril,  danger,  risque,  hasard  : 

Et  sera  s'arae  en  grant  balance 
Se  il  n'a  en  luy  repentance. 

Eusl.  Uesch.  Poës.  MSS.  fol.  472. 

Ce  mot  est  pris  au  même  sens,  dans  Athis,  ms.  fol. 
50,  où  il  est  question  du  danger  d'un  combat.  On  y 
lit  encore  : 

Prison  se  rent,  et  li  fiance 

Qui  ne  soit  onques  en  doutance  (ou  balance.) 

Alliis,  MS.  fol.  '35,  R°  rx)l.  2. 

Le  même  auteur,  parlant  des  dangers  de  la 
Cour,  dit  : 

Car  trop  est  court,  périlleuse  balance. 

Ibid.  fol.  70. 
J'y  mettray  le  corps  et  l'avoir 
Voire  certe  l'ame  en  balance. 

Rom.  do  la  Rose,  vers  15583-15584. 

Ne  scay  pourquoy  on  n'ose  dire  voir, 
Quant  on  se  voit  de  tout  perdre  en  balance. 
Froissart,  Poès.  MSS.  fol.  335. 

L'un  aime,  craint,  et  sert  sa  dame 
Sanz  penser,  ne  désirer  blasme, 
Sanz  plus,  pour  venir  ù  vaillance  ; 
Et  se  met  souvent  en  balance 
De  tost  valoir,  ou  tost  mourir, 
Sanz  demander  autre  merir. 

Maclmul,  MS.  fol.  186,  R"  col.  2. 

«  Toutes  femmes,  qui  tels  signes  font,  et  qui  se 
"  laissent  baiser  à  homme,  à  qui  elles  ne  le  doivent 
»  faire,  elles  mettent  leur  honneur  et  leur  estât  en 
«  grant />rt/rtHce  et  en  grant  péril  d'estre  diffamées.  » 
(Le  Chevalier  de  la  Tour,  Instr.  à  ses  tilles,  fol.  65.) 

Enfin,  on  a  dit  balance  pour  exprimer  la  caducité 
de  la  vieillesse.  C'est  en  ce  sens  que  Charlemagne, 
forcé  de  reprendre  les  armes  après  la  déroute  de 
Roncevaux,  a  dit  : 

Or  m'estuera  porter  ma  lance 

Et  jou  sui  vious  et  en  balance; 

Or  m'estuera  espée  çaindre, 

Qui  deuce  em  mes  cambres  maindre. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  227. 

On  s'est  encore  servi  de  ce  mot  pour  usage  : 

II  ne  se  mue  onques  deci 
Mes  ades  avec  aus  sejorne  : 
C'est  lor  balance  et  lor  coustume. 

'Fabl.  MSS.  du  H.  n-  7615,  T.  1,  fol.  117,  R-  col.  1. 

Remarquons  quelques  expressions  auxquelles  ce 
mot  a  donné  lieu  : 
!•  Traire  à  sa  balance,  attirer  de  son  côté  : 

De  toutes  manières  de  gens 
Par  fallace  et  decevance, 
Tout  avoit  trait  à  sa  balance. 
Hisl.  de  Franco,  à  la  suile  du  Rom.  de  Fauvcl,  MS,  du  R.  w  6812,  fol.  87. 

2°  Monnoye  en  dure  balance.  Je  crois  que  cette 
expression,  dans  le  passage  suivant,  désigne  une 
monnoie  de  mauvais  aloi  : 


Cele  en  fu  monnoië  en  France 
Tornée  en  dure  balance... 
Dont  le  roy  en  fu  moult  repris. 

Hisl.  de  France,  à  la  suile  du  Rom.  de  Fauvel,  MS.  du  R.  n»  6812,  fol.  87. 

3"  Vin  en  balance,  c'est-à-dire  on  verse  souvent 
du  vin  : 

Toz  jors  est  le  vin  en  balance. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n'  7218,  fol.  238,  R°  col.  1. 

4°  Porter  droite  balance.  Façon  de  parler  figurée  : 

Bien  le  voit  en  reaume  de  France 
Qui  porte  plus  droite  balance. 

Geofroy  de  Paris,  à  la  suile  du  Rom.  de  Fauvcl,  fol.  49. 

5'  Contre  moi  poise  la  balance,  pour  dire  :  j'ai 
du  dessous  : 

Moult  sui  cheuz  en  grant  vitance  : 
Contre  moi  poise  la  balance. 

Alhis,  MS.  fol.  51,  R"  col.  2. 

Balancer,  verbe.  Hésiter.  —  Etre  agité,  palpi- 
ter. —  Agiter,  remuer,  rouler.  —  Lancer,  jeter. 

Ce  mot  subsiste  sous  la  première  orthographe. 
En  termes  de  chasse,  on  disoit,  en  parlant  des 
chiens  qui  ne  tiennent  pas  une  route  certaine  et  se 
jettent  tantôt  d'un  côté,  tantôt  de  l'autre,  qu'ils  se 
balançoient  :  «  Celui  qui  veut  afaitier  son  chien  doit 
a  suivir  après  le  limier  qui  fait  la  suyte,  non  pas  de 
"  près ,  mais  un  petit  loing ,  car  l'un  limier  se 
»  balcnccroit  pour  l'autre  (1).  »  (Chasse  de  Gaston 
Phébus,  MS.  p.  '211.) 

Balancer  signifie  palpiter,  être  agité ,  dans  ce 
passage  : 

A  l'entrant  d'esté,  que  li  tans  commence, 
Quant  j'oi  ces  oiseaux  sor  la  flour  tentir, 
Sopris  sui  d'amours,  dont  mes  cuers  balance, 
Dex  m'en  doint  joïr  tôt  à  mon  plaisir. 

Poès.  MSS.  avanl  1300,  T.  I,  p.  32  et 33. 

On  s'est  servi  du  mot  balancer  pour  agiter, 
remuer,  rouler.  Nous  lisons  dans  la  description  du 
martyre  de  S' Jean  : 

Ly  firent  ce  glout  pautonnier 
Eri  un  tonnel  d'oile  boullant... 
Mettre  tout  nu,  et  balancier  : 
Sa  mort  vouloient  avancier. 

Hisl.  des  Trois  Maries,  en  vers,  MSS.  p.  383. 

On  disoit  aussi  balancer  pour  lancer,  jeter  : 

Si  Va.  en  l'eue  balancic 
A  tout  le  sac  qu'il  ot  lié 
Quar  paor  avoit  durement 
Qu'il  encore  ne  l'alast  sivant. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  240,  R'  col.  1. 

Enfin,  on  a  dit  balancher  pour  compenser,  établir 
une  balance  entre  deux  choses  ditîérentes.  Le  pape 
Herbert,  voulant  en  quelque  façon  effacer  les 
péchés  dont  sa  langue ,  ses  pieds,  ses  mains,  qu'il 
avoit  consacrés  au  diable,  avoient  été  l'occasion,  se 
les  fit  couper  par  son  valet  : 

Mains,  et  langue,  et  pies  li  trencha. 
Les  pechiés  fors  en  balancha. 

Ph.  Mouskes,  MS. 

VARIANTES    : 
BALANCER.  Poës.  MSS.  avant  130U,  T.  I,  p.  32. 
Balancier.  Hist.  des  Trois  Maries,  MS.  p.  383. 
Balencier.  Chasse  de  Gaston  Phébus,  MS.  p.  232. 
Balencer.  Djid.  p.  211. 
Bai.ancher.  Ph.  Mouskes,  MS. 


(1)  Molière  l'employait  encore;  «  Chasser  tous  aTec  crainte,  et  Finaut  balancer,  i  (Fâcheux,  II,  7.)  (N.  E.) 
II. 


BA 


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Balamiran  '  1),  subst.  masc.  Espèîce  de  manteau. 
11  ctuit  l'endu  sur  les  côtés,  pour  passer  les  bras,  et 
boulonné  par  devant.  iDicl.  de  Monet.  —  Voyez  Du 
Caniçe,  Glossaire  latin,  au  mot  Balandrand.)  Dans 
une  citation  latine  du  même  Glossaire,  au  mol 
Supoidiis,  on  lit  hulandrava  pour  baUDulrancu  au 
lieu  de  yaUnuIraviou  qu'on  y  trouve  aussi  pour 
signilier  balandran.  (Lisez  lialaudranum.) 

Le  duc  de  iSemours  étant  à  la  cour  de  Turin, 
«  un  des  écuyers  (du  duc  de  Savoye)  offrit  de  sa  part, 
«  à  M.  le  duc  de  iNemours,  un  chapeau  couvert  de 
«  lanctillé  d'or,  avec  des  plumes  de  diverses  cou- 
«  leurs,  un  balandran  de  toille  d'argent,  bandé  de 
«  clinquant  d'or.  »  (La  Colomb.  Th.  d'honn.  p.  304.) 
Penscs-vous,  sans  avoir  ses  raisons  toutes  pi-estes, 
Que  le  sieur  de  Provins  persiste  en  ses  requêtes, 
Et  qu'il  ait,  sans  espoir  d'être  mieux  à  la  cour, 
A  .son  long  balandran  changé  son  manteau  court. 

Régnier,  salyre  XIV,  p.  2ii. 

Balati'on,  subst.  masc.  Gourmand.  (Dict.  de 
Borel,  l"'"  additions.)  11  cite  sur  ce  mot  les  satires 
chrétiennes. 

Balay,  subst.  masc.  Champignon.  11  est  rendu 
par  le  mot  latin  Baletus,  dans  le  Glossaire  du 
P.  Labbe,  p.  491. 

Balbucie,  subst.  fém.  Bégaiement.  Montaigne 
dit  des  réponses  simples  et  na'i'ves  des  Indiens  aux 
Espagnols:  «  Voilà  un  exemple  de  la  balbucie  de 
«  celle  enfance.  «(Essais  de  Mont.  T.  Ill,  p.  220.) 
Malherbe  a  dit  de  lui-même  »  qu'il  étoit  de  balbus 
«  en  balbucie  (2).  »  (Balzac,  Soir.  Chrét.  T.  Il,  p.  229.) 

Balcanifer,  subst.  masc.  Borel  explique  ainsi 
ce  mot:  «  Portant  l'esleiidard  des  Templiers  (3).  » 

Baie,  subst.  fém.  Ballon.  —  Caisse,  malle. 

Au  premier  sens,  c'éloit  une  boule  de  cuir  rem- 
plie de  vent,  qui  la  rendoit  propre  à  rebondir: 
«  Autres  qui  estoient  plus  grands  le  delîent  au  jeu 
"  de  la  baie,  de  cette  baie,  dis-je,  qui  a  accoustumé 
«  d'enfler  avec  une  seringue.  »  (Merl.  Coc.  T.  1, 
p.  67.)  Rabelais,  T.  1,  p.  1C3,  l'appelle  grosse  balle. 

La  balle  beliniere,  ou  de  bélier,  étoit  une  espèce 
de  ballon  fait  d'une  des  parties  du  bélier,  et  plus 
petit  que  le  ballon  ordinaire.  Les  gens  du  commun 
en  jouoient  autrefois  el  le  poussoient  avec  des 
bâtons  courts.  C'étoit  aussi  le  jeu  des  pages. 
Brantôme  prend  de  là  occasion  d'en  faire  un  conte 
très  malhonnête  sur  une  des  dames  de  la  reine. 
(Voyez  Brantôme,  Dames  galantes,  T.  11,  p.  458.) 

Ce  mot  signifie  caisse,"  malle,  dans  le  passage 
suivant  :  «  11  atteignit  les  Impériaux ,  lesquels 
«  s'estant  mis  à  la  fuite  abandonnèrent  les  mulets,... 
«  sans  jamais  avoir  eu  loisir  de  rompre  les  balles.  » 
(Mémoires  de  Du  Bellay,  Liv.  VllI,  fol.  208,  V°.) 


Voici  des  expressions  auxquelles  ce  mot  a  donné 
lieu  : 

1°  C'est  ma  baie  ;  c'est  mon  fait,  c'est  mon  balot. 
«  Les  historiens  sont  ma  droite  baie ,  car  ils  sont 
"  plaisans  et  aisez.  «  (Essais  de  Mont.  T.  11,  p.  148.) 

2'  Halle  à  emporter  semble  désigner  le  jeu  de  la 
paume  dans  ce  passage,  où  il  s'agU  des  exercices 
du  roi  Henry  second  :  >■  S'il  ne  jouoit  à  la  balle  à 
«  emporter,  ou  au  ballon,  ou  au  maille.  »  (Brant. 
Capitaines  fran(.;ois,  T.  II,  p.  40.) 

3°  Garder  les  balles.  Façon  de  parler  empruntée 
du  jeu  de  la  paume.  On  dit  familièrement:  garder 
les  manlcaux. 

Et  moy  pendant  ce  temps,  je  garderay  les  halles. 

P.  Corn.  Place  royale,  Coin,  acte  II,  scène  vu. 

4°  Jiales  à  feu,  sacs  à  feu,  autrement  carcasses  : 
"  >'ouvelle  manière  de  bombes ,  faisant  d'abord 
«  l'effet  des  fusées,  et  mettant  enfin  le  feu  où  elles 
«  sont,  furent  employées  au  siège  de  Condé,  en 
«  1070.  »  (Pelisson,  Lett.  hist.  T.  îll,  p.  17.) 

5°  Balles  ardentes  ou //«//^sà /'('«.  Boulets  rouges. 
Bassompierre  dit  «  qu'il  lit  tirer  la  nuit  du  fort 
«  Louis,  pour  divertir  les  ennemis,  six  canonades 
«  dans  La  Rochelle,  àxec  àes  balles  à  feu.  »  (Mém. 
de  Bassompierre,  T.  111,  p.  359.)  c  Je  fis  tirer  force 
"  balles  ardentes  du  fort  Louis.  »  (Ibid.  p.  362.) 
«  Je  fis  tirer  la  nuit  dans  la  ville  des  balles  à  feu 
a  qui  le  mirent  en  deux  endroits.  »  (Ibid.  p.  414.) 

VARIANTES    : 
BALE.  Merl.  Coc.  T.  I,  p.  67. 
Balle.  Rabelais,  T.  I,  p.  163. 

Balé  (4),  subst.  masc.  Galerie.  (Dict.  de  Monet  et 
Glossaire  du  Roman  de  la  Rose.)  Ce  mot  se  dit  en 
Languedoc  pour  saillie,  avance,  en  forme  de  balcon. 
Le  Dict.  de  Borel  cite  ces  vers  du  Rom.  de  la  Rose  : 

Elle  est  dehors  araonnée 
D'un  balé  qui  vet  tout  entour. 

Balegnier.  subst.  masc.  Espèce  de  vaisseau  de 
mer.  11  a  vraisemblablement  pris  son  nom  du  mol 
baleine,  à  la  pèche  de  laquelle  il  étoit  originaire- 
ment destiné.  (Voyez  le  Gloss.  latin  de  Du  Cange, 
au  mot  Balneriùm.)  On  trouve  communément  ce 
mot  dans  différents  auteurs  pour  vaisseau  de  trans- 
port et  pour  avant-coureur  d'une  armée  navale.  Les 
corsaires  s'en  servoient  ordinairement,  parce  qu'ils 
approchoient  de  terre.  En  1385,  le  duc  de  Lancastre 
s'étant  approché,  avec  sa  flotte,  des  côtes  de  Nor- 
mandie ,  les  vaisseaux  normands  <•  sçurent  par 
«  leurs  balengers  que  l'armée  d'Angleterre  venoit, 
«  si  se  retirèrent  au  Havre  de  Herfleur.  »  (Froiss. 
Liv.  III,  p.  110.)  «  Les  Anglois  avoient  en  leur 
«  armée  vaisseaux  qu'on  dit  baleniers ,  qu'escu- 
■I  meurs  de  mer  par  coustume  ont  volontiers,  et 


(I)  Le  fcaiojidcas  était,  au  xn"  siècle,  \&  chape  à  pluie  Aes  méridionaux:  ouverte  dans  toute  sa  longueur,  ou  fermée  à 
l'encolure  ;  elles  avaient  ou  des  manches,  ou  de  simples  fentes  pour  passer  les  bras;  le  tissu  en  était  grossier,  et  c'était  là 
les  parapluies  de  l'époque,  (n.  e.)  -  (2)  Diderot  lui-même  employait  ce  mot  :  «  Le  temps  me  poursuit  et  voilà  que  je  m'en 
retourne  à  la  balhuiic.  {s.  e.)  -  i3)  Le  mot  se  trouve  dans  Math.  Paris,  aux  années  1237  et  12'(6  ;  Du  Cange  y  voit  imc 
variante  de  baU/ali'tniler.  (.\.  e.)  -  (i)  Le  mot  balct  était  employé  en  Poitou  au  temps  de  Du  Cange  ;  il  désigne  le  retrait 
qui  s'enfonce  sous  un  balcon,  ou  le  balcon  lui-même.  Les  registres  du  Trésor  des  Chartes,  aux  .kiv»  et  xv=  siècles,  en  font 
un  fréquent  usage;  on  trouve  même  en  1416  (JJ.  169,  p.  279):  «  Le  suppliant  trouva  icelle  femme  toute  nue  en  sa  chemise 
sur  les  valez  ou  galeries  de  son  hostel  à  la  lune  au  serin.  »  (n.  e.) 


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—  379  — 


BA 


«  qui  approchent  les  terres  de  plus  près  que  les 
«  autres  vaisseaux  ne  l'ont  (1).  »  (Ibid.  p.  3H  ; 
an  1388.) 

VARIANTES  : 
BALEGN7ER.  Froissart,  T.  II,  Liv.  III,  p.  189. 
Balenief(.  Ibid.  p.  111. 

Balleniers.  Monstrelet,  Vol.  III,  fol.  102,  V". 
Balleniez.  Vieil,  de  Charles  Vif,  p.  132. 
Balinier.  Le  Jouvencel.  MS.  p.  458. 
B.M-NIER.  Froissart,  Liv.  111.  p.  297. 
Balengers.  Id.  T.  II,  p.  110. 
B.\.LLANGERS.  Ibid.  p.  109. 
Ballengers.  Ibid.  p.  143. 

Ballinger.  Daniel,  Milice  française,  T.  II,  p.  634. 
Ballinjer.  Id.  ibid. 

Baleis,  subst.  masc.  Verge.  Il  est  employé  en 
ce  sens,  comme  un  mot  vulgaire,  par  Mathieu 
Paris  cité  dans  le  Glossaire  latin  de  Du  Gange,  au 
mot  Disciplina. 

Balen ,  subst.  masc.  Berceau ,  ou  peut-être 
lange  ou  couverture  de  laine.  (Voyez  le  Gloss.  lat. 
de  Du  Gange,  aux  mots  Balenja,  BalÙnia  et  Batlinia.) 

VARIANTES    : 
EALEN.  Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mot  Baleiija,  etc. 
Ballen.  Ibid. 

Balena,  subst.  masc.  Le  petit  d'une  baleine. 
(Voyez  les  Mém.  de  Bassompierre,  T.  Il,  p.  244.) 

Balendre  (2),  subst.  Espèce  d'oiseau. 

Si  chantoil  si  bien  et  si  bel , 
Chans  d'aloué,  ne  de  mavis  (3) 
Ne  de  loigtaing,  ne  de  balendre, 
N'estoit  si  plesans  à  entendre. 

Fabl.  MSS.  du  R.  11°  7015,  T.  H,  fol.  ICtl,  Y-  col.  2. 

Balendrior,  subst.  masc.  Garde-fou.  «  Nous 
«  passions  sur  le  ponl  d'Anne,  et  le  balendrier,  id 
»  est  garde-fous,  estoil  osté.  »  (Moyen  de  Parvenir, 
page  363.) 

Balenus,  subst.  masc.  Nom  d'un  devin.  Suivant 
le  suppl.  au  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose,  «  ce 
a  pourroit  bien  estre  Ilelenus,  fils  de  Priam  et 
«  d'Hecube,  qui  eut  en  partage  le  don  de  prévoir 
«  l'avenir.  >>  (Itoman  de  la  Rose,  15181.) 

Balcr,  verbe.  Danser.  —  Remuer,  s'agiter.  — 
Sortir,  s'affranchir. 

Sur  le  premier  sens,  voyez  les  Dict.  de  Monet  et 
d'Oudin,  les  Gloss.  du  Roman  de  la  Rose  elle  suppl. 
de  l'Histoire  de  Bref,  de  dom  Morice.  Baler  est  traduit 
en  latin  par  tvipudiarc,  danser,  dans  le  Gloss.  du 
P.  Labbe,  p.  531.  Il  est  employé  dans  le  même 
sens,  par  AVill.  Liviniers  (Poës.  mss.  av.  1300,  T.  II, 
p.  820.)  Baller  a  la  même  signification,  dans  les 
Nuits  de  Strapar.  p.  401. 

Ce  mot  se  disoit  de  là,  pour  remuer,  s'agiter  : 

Aufrique  avons  conquise,  jusqu'à  la  mer  qui  baie. 

Notices  du  Roman  d'Alexandre,  fol.  H4, 

Baie  semble  signifier  agité,  tourmenté,  dans  ces 
vers  : 


Ung  ours,  quant  il  est  bien  betez. 
N'est  si  batif,  ne  si  b(dez 
Que  serez,  se  vous  y  alez. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  10619-10G21. 

De  là,  on  étendit  cette  acception  jusqu'à  signifier 
sortir,  s'affi'anchir.  Un  malade,  se  plaignant  de  ce 
que  le  régime  l'exténuoit,  dit  : 

Des  jeunes  me  fault  bâter. 

Eust.  Desch.  PoSs.  MSS.  fol.  170. 

Voici  quelques  expressions  auxquelles  ce  mot  a 
donné  lieu  : 
1  '  Baler  du  talon,  c'est-à-dire  jouer  des  talons  : 

Fille  Juliette 

Qui  sçait  baler  du  talnn. 

Eusl.  Deschamps,  Poês,  MSS.  fol.  199. 

2°  Baler  la  queue,  c'est-à-dire  la  remuer.  Au 
figuré,  cette  expression  signifioit  faire  l'agréable. 
Un  jeune  militaire  résolut  d'aller  à  la  cour';  «  ung 
«  de  ses  compaignons  lui  dit  pour  l'en  détourner  : 
«  voulés-vousjà  allerlà  baler  la  queue.  »  (Le.Iouven- 
cel,  fol.  11.  —  Voy.  Ballequeue,  espèce  d'oiseau.) 

VARIANTES  : 
BALER,  Gloss.  du  P.  Labbe,  p.  531. 
Baller.  Suppl.  au  Glossaire  du  Rom.  de  la  Rose. 

Balesaniite,  subst.  fém.  Espèce  de  plante. 
«  Prenez  jus  de  balesaniite,  et  métez  les  deux  pars 
«  de  let  de  chèvre,  et  le  tiers  du  jus,  et  moeilliez 
«  le  char  que  vous  donnerés  à  vostre  oisel,  dedens, 
«  et  lui  donnés  pardeux  fois,  et  il  guérira.  »  fModus 
et  Racio,  ms.  fol.  131,  R°.) 

VARIANTES  : 
BALESAMITE.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  131,  R°. 
Balsaun-icte.  Modus  et  Racio,  fol.  70,  V°. 

Balesteaiix,  subst.  masc.  plur.  Chansons  à 
danser.  (Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Balistcum 
sous  Balare.  —  Voy.  les  Poës.  mss.  d'Eust.  Desch.) 

Balestrier,  subst.  masc.  ;  au  fém.  Balestrière. 
Arbalétrières.  «  Les  als  sur  quoy  sont  les  soldats 
«  dans  un  vaisseau.  »  (Dict.  de  Cotgrave  et  d'Oudin.) 

Balestrille,  subst.  fém.  Instrument  astronomi- 
que. Il  scrvoit  à  trouver  la  hauteur  du  pôle  et  des 
étoiles.  (Dict.  d'Oudin.) 

Balet,  subst.  masc.  Sorte  de  spectacle.  On  nom- 
moit  autrefois  ainsi  une  sorte  de  spectacle  qui 
servoit  à  l'amusement  des  convives,  dans  les  inter- 
valles des  services  d'une  table,  ce  que  nos  anciens 
auteurs  appellent  entremets.  Bassompierre  raconte 
qu'étant  en  Angleterre,  en  1G.2G,  «  le  Roy  soupa  en 
«  une  table  avec  la  Reine,  et  lui,  qui  fut  servie  par 
"  des  balets  entiers  à  chaque  service,  et  des  repré- 
*  senlations  diverses,  changemens  de  théâtres,  de 
«  table  et  de  musique.  "  (Mém.  de  Bassompierre, 
T.  III,  p.  306  et  307.  —  Voy.  Entremets.) 

Balet,  subst.  masc.  Balai.  Ustensile  de  ménage, 
propre  à  ôter  les  ordures.  On  disoit  : 
1»  Traîner  le  balet.  —  Bâtir  le  balaij.  «  Ceux  qui 


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380  — 


BA 


«  ont  prntiqué  les  courlisannes  d'Italie,  aucuns  on 
«  a  vu,  et  voit  on  choisir  toujours  les  plus  fameu- 
«  ses  et  antiques,  et  qui  ont  plus  traisné  le  balet 
«  pour  y  trouver  quelque  chose  de  plus  gentil,  tant 
«  au  corps  qu'à  l'esprit.  »  (Brantôme,  D"Gall.T.  II, 
page  lt)7.) 

'i-  Chcvauclier  le  ballatj  Façon  de  parler  fjui 
répond  à  l'expression  courir,  ou  chevaucher  l'escou- 
velle.  C'est  une  pratique  des  magiciens;  quelques- 
uns  l'attribuent  aux  hérétiques,  suivant  Fabri  (Art 
de  llbétoriii.  livre  I,  fol.  110.)  Cotgrave,  dans  son 
Dict.  y  l'ail  allusion  par  ces  mots,  donner  trois  tours 
de  ballay  par  la  cheminée. 

VARIANTES  : 
BA-LET.  Brantôme,  D«  Gai.  T.  II,  p.  197. 
Ballay.  Fabr.  Art  de  Rhétor.  livre  I,  fol.  110. 
Baloy.  Contes  d'Eutrapel,  page  80. 

Balette,  suhst.  fém.  Belette.  C'est  une  faute. 
(Voy.  les  Contes  de  Des  Perriers,  T.  I,  p.  200.) 

Balevre,  suhst.  fém-  Lèvre.  —  Mâchoire. 

Il  semble  que  ce  mot  ne  devroit  pas  avoir  d'autre 
signification  que  la  première.  Pris  en  ce  sens. 
Ménage  et  l'auteur  du  Suppl.  au  filoss.  du  Roman 
de  la  îîose,  le  dérivent  de  bis  et  de  labra  (1).  Pasquier 
lui  donne  la  même  élymologie,  dans  ses  Recher- 
ches, p.  "(81.  11  dit,  en  parlant  d'un  jeune  homme 
qui  avoill'art  de  contrefaire  la  voix  de  toute  sorte 
d'animaux,  et  qu'il  représente  encore  comme  un 
ventriloque  :  <i  mais  surtout,  dans  son  estomach, 
«  sans  ouvrir  que  bien  peu,  les  balevres,  à  manière 
«  qu'eslans  près  de  vous,  s'il  vous  appelloit,  vous 
«  eussiés  crû  que  c'eust  esté  une  voix  qui  venoitde 
<•  bien  loin.  »  Le  passage  suivant  paroit  aussi  con- 
firmer le  sentiment  de  Ménage  :  «  Encores  vont 
«  descendre  les  coups  parmy  les  testes  deschevaulx 
«  droit  sur  les  oreilles,  et  leur  vont  fendre  jusques 
«  parmi  les  dents,  en  telle  manière  que  les  oreilles, 
«  les  yeux  et  les  dens  dessus  étoient  à  terre,  et  les 
«  baiiievres  de  dessus,  et  la  denture  avecques  la 
«  langue  demeurent  tenant  au  hasterel.  »  (Percef. 
Vol.  I,  fol.  45.) 

Cependant  Borel,  dans  son  Dictionnaire,  croit  que 
le  mot  balevres  signifie  joues  et  mâchoires.  Il 
s'appuie  sur  ce  vers  de  Froissart  : 

Perçolent  bras,  têtes  et  bah^vres. 

Le  passage  suivant  est  plus  décisif  : 

Je  vous  di  bien  que,  par  ce .  est 
Un  moine  plus  cras  que  un  fevres 
Que  il  jeu  miex  des  haulevres. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7218,  fol.  198,  R-  col.  1. 

On  trouve  aussi  bault  fves  (2),  en  ce  sens,  dans  les 
Poës.  Mss.  d'Eust.  Deschamps. 


variantes  : 

BALEVRE.  Borel,  Ménage,  Dict. 
Baslevre.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  II,  p.  283. 
Baulevre.  Lanc.  du  Lac,  T.  II,  fol.  118,  R»  col.  1. 
Baulievhe.  Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose. 
Banlevre.  Cotgrave,  Dict. 
Baillevre.  Perceforest,  Vol.  I,  fol.  45. 
Balievre.  Le  Duchat  sur  Rabelais,  T.  III,  p.  111,  note  6. 
Baulievre.  Ph.  Mouskes,  p.  41. 

Bolievre,   Bolieuvre.    Dictionnaires  de  Bob.  Estienne, 
Oudin,  Nicot  et  Cotgrave. 
Boliéfvre.  Godefr.  sur  Charles  VI,  p.  681. 
Baultfres.  Eust.  Deschamps,  Poës.  MSS. 

Balhes,  subst.  /'em.pZH)'.  Baguettes  de  tambour. 
C'est  le  sens  que  je  crois  pouvoir  donner  à  ce  mot. 
Le  P.  Menestrier,  parlant  d'un  carrousel,  dit  : 
«  Pour  la  seconde  quadrille  étoit  celle  de  Thésée 
«  retournant  des  enfers  pour  accepter  le  cartel  de 
«  Soloon  :  elle  estoit  composée  de  trois  furies,  avec 
«  quatre  monstres  infernaux  montés  sur  des  dra- 
«  gons,  avec  six  trompettes  torses  et  des  tambours 
«  entourés  de  vipères,  et  balhes  de  deuxserpens.  » 
(Le  P.  Menestrier,  des  Tournois,  p.  48.) 

Ballant,  participe.  Brillant.  —  Flottant,  vol- 
tigeant. 
Au  premier  sens,  nous  citons  les  vers  suivans  : 

Vindrent  d'une  tige  si  franche. 
Et  en  si  haut  lieu  ballant, 
Com  du  noble  Roy  Priant. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  7,  R-.  " 

Dans  la  seconde  acception,  ballant  (3)  a  signifié 

flottant  : 

Que  vos  crins  n'aillent  balant. 

Eusl.  Desch.  MSS.  fol.  216. 

variantes  ' 
BALIANT.  G.  Guiart,  MS.  fol.  7,  R». 
Balant.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  216. 

Balier  (4),  verbe.  Balayer. 

Il  fait  un  gros  balay,  si  va  tout  baloy er. 

Ger.  de  Rouss.  MS.  p.  1  et  2. 

On  disoit  en  parlant  des  longues  robes  des  fem- 
mes :  «  Ne  les  faisoit-il  pas  bon  voir,  quand  elles 
«  avoyent  les  grandes  queues  troussées,  ou  quand 
«  d'icelles  traînantes  elles  balioijent  les  Eglises.  >• 
(Apol.  pour  Ilérod.  p.  334.)  Nous  nous  servons  de 
ce  mot  en  ce  sens. 

11  est  parlé  d'un  peuple  et  d'un  clergé  qui  vont  en 
procession  recevoir  un  monarque  à  son  arrivée  : 

Li  champs  furent  bien  balez 
Car  il  turent  plus  de  xx  miUe 

Machaut.  MS.  fol.  216,  R"  col.  \. 

variantes: 
BALIER.  Apol.  pour  Hérod.  p.  334. 
Rallier.  Nuits  de  Strapar.  p.  168. 
Baloyer.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  172. 
Râler.  Alachaut. 


(1)  Du  Can'-'e  voyait  là  un  composé  de  ban  et  de  lèvre,  comme  dans  banlieue,  et  l'expUquait  par  le  pourtour  des  lèvres.  Il 
s'appuyait  sur  ce  passage  des  Ordonnances  (II,  283)  :  «  Nous  voulons...  qu'on  lui  fende  la  lèvre  de  dessus  d'un  fer  chaud 
(au  blasphémateur),  et  que  les  dens  hii  apparoissent.  A  la  tierce  fois,  la  lèvre  de  dessous,  et  à  la  carte  toute  la  bas-levre.  » 
Il  ajoute  entre  parenthèses  :  lisez  banlevre.  Mais  au  même  volume  des  Ordonnances,  page  48,  on  lit  :  «  La  banlicvre  dessus, 
c'est  assavoir  ce  qui  est  entre  le  nez  et  le  banlyevre  dessous.  »  M.  Littré  voit  là  un  préfixe  péjoratif  ba  ajouté  au  mot 
lèvre.  Le  mot  se  trouve  au  xni«  siècle  dans  Joinville  (édition  de  Wadly,  S  68.5)  et  dans  le  Roman  de  la  Rose,  vers  10202 
(édition  Méon).  (n.  e.)  —  (2)  Cle  doit  être  une  faute  de  lecture  ou  de  copie  pour  bauteffres,  qu'on  trouve  dans  le  registre 
ÎJ.  77,  p.  412  (an.  l.'i'iQ).  (n.  e.)  —  (3)  jBo/ayer  avait  dans  l'ancienne  langue,  outre  sa  signification  actuelle,  celle  de  flotter 
au  vent,  peut-être  restée  dans  cette  expression:  une  robe  qui  baUuje  la  terre;  haliant,  ici  traité,  ii'est  donc  que  le  participe 
présent  de  balayer,  (n.  e.)  —  (4)  Le  genêt  se  dit  en  breton  balann  ;  de  là  peut-être  vient  balai,  puis  balayer,  (n.  e.) 


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ou  recueil  de  ballades  ;  comme  nous  disons  un 
barjuier  pour  écrin  à  meltre  des  bagues.  L'abbé 
Goug-el,  dans  sa  Bibliothèque  Fr.  T.  X,  p.  45,  cite 
des  rondeaux  mss.  qu'il  a  trouvés  dans  le  balladié 

lin  duc  frorh'ans. 

Balle  de  Flandres,  siibst.  Nom  de  diamant. 
(Voy.  Lussan,  Ilist.  de  Louis  XI,  T.  V,  p.  135.) 

Ballé,  adj.  Où  il  y  a  des  balles,  ou  petites 
pailles.  C'est  en  ce  sens  qu'on  trouve  pain  balle, 
dans  Rabelais,  T.  I,  p.  179.  (Voy.  la  note  de  Le 
Duchat,  Ibid.) 

Ballequeue,  suhst.  masc.  Sorte  d'oiseau.  Peut- 
être  celui  que  l'on  appelle  hochequeue  (2). 

Baller,  verbe.  Atteindre.  Parlant  d'une  espèce 
de  jeu  de  pelotte  où  les  joueurs  couroient  les  uns 
après  les  autres,  il  est  dit  de  l'une  des  parties  : 

Cil  s'avesturent  ques  sievoient 

Dieiit  jamais  nés  cousuivroient,  (al  baUeyont). 

Alliis,  MS.  fol.  18,  R-  col.  2. 

Ballet,  subst.  masc.  Danse. 

Donna  deduiz,  donna  halez. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  80. 

Balet  de  chevaux  ou  ballet  à  cheval,  étoit  une 
espèce  de  danse  qui  se  faisoit  à  cheval.  On  en 
dansa  trois  h  Paris,  en  1581  et  1606;  le  dernier 
fut  exécuté  au  carrousel  pour  le  mariage  de 
Louis  XIII.  (Voy.  Sauvai,  Ilist.  de  Paris,  'T.  II, 
p.  693.  —  Voy.  sur  les  Ballets,  Brant.  Cap.  Fr. 
T.  II,  p.  162,  398  et  399.) 

VARIANTES  : 
liALLET.  Brant.  Cap.  Fr.  T.  II,  p.  162. 
Balet.  Mém.  de  Bassomp.  T.  I,  p.  324. 
Balez.  Rom.  de  Brut,  MS.  p.  80. 

Balletrou,  subst.  masc.  Mot  obscène  forgé  par 
Rabelais,  T.  II,  p.  222.  (La  note  de  Le  Duchat.  Ibid. 
—  Voy.  aussi  le  Dict.  de  Cotgrave  ) 

Balleur,  subst.  masc.  Danseur,  sauteur.  (Gloss. 
de  Marot.) 

Ballongner,  verbe.  Mettre  un  bâillon.  «  Luy 
«  faisant  par  force  ouvrir  la  bouche,  la  ballongne 
«  avec  un  gros  baston.  »  (Merl.  Cocaï,  T.ll,  p.  106.) 

Ballonner,  subst.  masc.  Garçon,  homme  vil. 
Sorte  d'injure. 

N'autre  garçon,  ne  bialcmicr. 

l'hil.  .Mouskcs,  MS.  p.  08. 

Le  surnom  de  ballomer  est  donné  par  mépris  à 
Gondovaldus,  dans  Grég.  de  Tours  (3),  p.  341. 

VARIANTES  : 
BALLOMER.  Grég.  de  Tours,  p.  341. 
BiELE.MiER.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  98. 

Balmer,  subst.  masc.  Tempête.  Il  paroit  que 
c'est  le  sens  de  ce  mot  dans  les  vers  suivans  : 

C'est  ce  que  j'ajTTi,  c'est  mes  joyeux  depors. 
C'est  11  doulx  temps  qui  en  balmer  fait  calme, 
Et  les  vaissiaulx  arriver  à  bons  pors. 

Eust.  Desch.  Pot's.  MSS.  fol.  159,  col.  3. 

(1)  Le  bas-latin  a  balinvernia,  voile  de  navire.  (N.  e.)  —  (2)  C'est  encore  la  bergeronnette.  —  (3)  Au  livre  VI,  ch.  14,  et  dans 
bien  d'autres  passages,  ^n.  e.) 


BalieureSi  subst.  fém.  plur.  Balayures.  (Dict. 
deRob.  Eslienne.) 

VARIANTES  : 
BALIEURES,  Baliures. 

Baligaiit,  adj.  Maussade,  impertinent.  (Dict.  de 
Nicotet  de  Monet.) 

Balin,  subst.  masc.  On  appelle  ainsi,  aux  envi- 
rons de  Cosne,  des  nuages  très  épais  et  passagers 
qui  fondent  tout  à  coup  et  inondent  une  petite 
étendue  de  pays.  C'est  ce  qu'on  nomme  en  Champa- 
gne et  en  Brie  un  chameau. 

Balinges,  subst.  fém.  plur.  Couches  ou  langes. 
Mot  du  patois  Limousin.  (Du  Gange,  Gloss.  latin, 
au  mot  lialtinia.) 

Baliser,  verbe.  Terme  d'eaux  et  forêts.  Il 
signifie  débarrasser  le  cours  d'une  rivière,  pour  en 
faciliter  la  navigation.  (Dict.  de  Monet  et  Cotgr.) 

VARIANTES  * 
BALISER.  Dict.  d>-  Monet. 
Ballizkr.  Cotgrave. 

Balissage,  subst.  wflsc.  Droit  seigneurial.  Celui 
de  faire  baliser  le  cours  des  rivières,  peut-être 
aussi  le  droit  d'imposer  des  amendes  sur  ceux  qui 
embarrassoient  la  navigation.  Dans  l'état  sommaire 
que  le  duc  de  Sully  donne  au  roi  de  tous  les  droits 
et  redevances  qui  composoient  alors  les  revenus  du 
royaume,  on  lit  :  «  Passages,  barrages,  travers, 
«  péages,  pontonnages,  balissages.  »  (Mém.  de  Sully, 
T.  X,  p.  228.) 

Balisse.ment,  subst.  masc.  L'action  de  balayer. 
Ce  mot  est  employé  flgurément  dans  les  Contes  de 
Cholières,  fol.  246. 

Baliverner  (I),  verbe.  S'arrêtera  dos  bagatelles. 
La  difficullé  de  bien  faire  un  conte  et  le  petit  nom- 
bre de  ceux  qui  possèdent  ce  talent,  ont  fait  dire  à 
Montaigne  :  «  Entre  les  pertinents  même,  j'en  voy 
«  qui  veulent,  et  ne  se  peuvent  detTaire  de  leur 
«  course  ;  cependant  qu'ils  cherchent  le  poinct 
«  de  clorre  le  pas,  ils  s'en  vont  balivernant  et 
"  traisnant,  comme  les  hommes  qui  défaillent  de 
«  foiblesse.  »  (Essais  de  Montaigne,  T.  I,  p.  45.) 

Baliverneries,  subst.  fém.  plur.  Balivernes. 
Discours  inutiles.  (Dict.  d'Oudin.) 

Baliwike,  subst.  L'affiche  du  bailli.  fVoyez 
Tenures  de  Littleton,  fol.  89.) 

Baliz,  subst.  masc.  plur.  Pieux. 

Quant  un  edefieraent 

Est  de  terre  en  baliz  boutée, 
Prist  est  tost,  et  inellement  : 
N'avoir  ne  peut  longue  durée. 
Geofr.  de  Par.  à  la  suite  du  Rom.  de  Kauv.  MS.  du  R.  n'  6812,  fol.  53. 

Ballader,  verbe.  Faire  des  ballades.  (Voy.  les 
Œuv.  de  Roger  de  Collerye,  p.  159.) 

Balladié,  subst.  masc.  Le  collectif  de  ballades. 


BA 


—  382 


BA 


Balmier,  subsl.  nuise.  L'arbre  qui  porte  le 
baume. 

Le  bahnier  sui  qui  bien  scay  pure  et  nette 
Ou  tel  lleur  croist  à  loi  noble  vergier. 

Eusl.  Desch.  t'ocs.  MSS.  fol.  155,  col.  3. 

Baloier,  verbe.  Flotter,  voltiger.  —  Briller. 
Au  premier  sens,  de  flotter,  voUiger,  nous  lisons  : 

Li  confanon  sont  desploié 
Qui  tuit  erent  de  rice  soie 
Et  Taure  doce  lor  buloie. 

Alhis,  MS.  fol.  102.  V"  col.  2. 

fialoicr  s'est  dit  pour  briller,  en  parlant  d'un 
gazon  éniaillé  de  fleurs: 

C'est  en  may,  quant  reverdoie 

L'erbe  que  voi  («i/o/er 

Pocs.  MSS. avant  1300,  T.  IV,  p.  1494. 

VARIANTES  ', 
lî.\LOIER.  Athis,  MS.  fol.  102,  V«  col.  2. 
lÎALOYER.  Borel,  au  mot  Ori/!ame.    • 
B.\i,LOiER.  Athis,  MS.  fol.  50,  R»  col.  2. 
Ballûyer.  Lanc.  du  Lac,  T.  II,  fol.  70,  V°  col.  1. 
Banlûier.  Athis,  MS.  fol.  79,  R»  col.  2. 
Bauloier.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Bandum. 
Balier.  Ci.  Guiart,  MS.  fol.  320,  R». 

Baloine,  suhst.  fém.  Herbe  odoriférante.  Il 
faut  peut-être  lire  baume  (ou  balme).  La  mesure  du 
vers  seroit  plus  exacte  : 

Je  n'y  voi  rose,  ne  bouton 
Lavende,  violette  driie, 
Marjolaine,  Basilicon, 
Baloine,  ne  douce  odeur  en  rue. 

Eusl.  Desch.  Pocs.  MSS.  fol.  7,  col.  3. 

Balonges,  siibst.  plitr.  Sorte  de  cuves  de  bois. 
Les  marchands  de  poissons,  à  Langres  et  ailleurs, 
étoient  dans  l'usage  de  tenir  leur  marchandise 
«  dans  de  grands  vaisseaux  de  bois,  de  deux  fois 
«  plus  longs  que  larges,  quasi  comme  demi  ba- 
»  longes.  »  (Des  Accords,  Escr.  Dijonn.  p.  22.) 

On  trouve  barlogiws  dans  des  Lettr.  de  septembre 
1387,  au  Bailli  et  Prévôt.  (Très,  des  Chart. 
Regisl.  131.) 

VARIANTES   : 
BALOMGES.  Des  Ace.  Escr.  Dijonn.  v.  22. 
B.ARLOGNE.  Très,  des  Chartr.  Reg.  131. 

Balons,  siibst.  7nasc.  Bombes.  (Dict.  d'Oudin.) 

Baloquement,  subst.  masc.  Trafic,  échange. 
C'est  le  sens  que  présente  ce  mot  dans  le  passage 
qui  suit  : 

Baloquement  de  marchandise 
Y  sera  fait,  eu  mainte  guise. 

Eusl.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  407,  col.  1. 

Baloste,SH7vs^/'c?H.  Fleur  du  grenadier  (1).  (Dict. 
d'Oudin.)  ^  ^  '  ^ 

Balotade,  subst.  fém.  Rebondissement,  bricole 
(Dict.  d'Oudin.) 

Balotte,  subst.  fém.  Grosse  balle,  boulet. 
«  Dedans  ung  faulconneau  de  bronze,  il  meltoit 
«  sur  la  poudre  une  balotle  de  fer  bien  qualibrée.  » 
(Rabelais,  T.  IV.  p.  8G2.) 


Balous,  subst.  masc.  Balle  d'avoine.  Ce  mot  est 
employé  dans  le  passage  suivant,  pour  chose  de 
peu  de  valeur  : 

Qui  n'acomptent  deux  balous, 

Aux  biens  mondains  fuitis  et  faulx. 

Eusl.  Desch.  Pots.  MSS.  fol.  344. 

Balsamée,  subst.  fém.  Jus  de  baume. 

De  vin,  d'uille,  et  de  balsamée 
Sont  chargiez. 

Eust.  Desch.  Poês.  MSS.  fol.  85,  col.  3. 

Balsamer,  subst.  Espèce  d'arbre  qui  produit  le 
baume. 

Balsami,  subst.  masc.  «  On  luy  donne  poudre 
«  de  gomme  balsami,  elcastorei,  avec  jus  de  men- 
"  tastre,  autrement  nommée  herbe  contre  les 
«  puces.  »  (Du  Fouilloux,  Fauc.  fol.  70,  V°.) 

Balseme,  partie.  Embaumé.  Dans  la  descrip- 
tion d'une  tente  merveilleuse  en  tous  points  on 
lit: 

Moult  furent  riche  li  pesçon 
Et  bel,  et  noble  de  façon 


Car  tout  erent  de  balsamer 
Qui  sor  toz  arbres  a  mestries. 

Amis,  MS.  fol.  39,  R-  col.  1. 

Baltée,  subst.  masc.  Baudrier,  du  \a.{mBalteus. 
Borel,  sur  ce  mot,  cite  la  Nef  des  folles. 

Balvard,  subst.  masc.  Boulevard.  «  Le  Rous- 
«  sillon,  le  meilleur  balvard,  que  peut  avoir  le 
»  Languedoc.  »  (Godefr.  Observ.  sur  CharFes  VIII, 
p.  072.) 

Balzan,  adj.  Qui  a  des  Balzanes,  c'est-à-dire 
des  marques  blanches  à  un  ou  plusieurs  pieds. 
(Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave.)  Ce  mot  est  formé 
du  substantif  bal:ian  (2),  qui  désigne  celte  même 
marque. 

Balsane,  subst.  fém.  Marque  blanche  au  pied 
d'un  cheval.  (Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave.)  On  juge 
de  la  iionté  des  chevaux  selon  les'  pieds  oîi  les 
balzanes  se  rencontrent. 

Poil  chastain,  astre  au  front,  au  jambes  deux  bahans. 
Des  Ace.  Bijar.  fol.  141). 

VARIANTES  : 
B.\LS.\NE.  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 
B.\LZ.\NE.  Oudin,  Dict. 

Bambe,  adj.  Surnom  d'un  prince  d'Antioche. 
Il  faut  probablement  lire  baube  qui  signifie  bègue. 

(Voy.  baube,  ci-après.) 

Bamberge,  subst.  Ce  mol,  dont  nous  n'avons 
pas  d'exemple,  semble  avoir  été  françois,  et  avoir 
signifié  l'armure  des  jambes.  Je  le  dériverois  du 
mot  allemand  bein,  qui  veut  dire;«m/^('.  On  trouve 
dans  le  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  Dainberga,  et 
Bcmberga  dans  des  citations  latines  où  se  trouvent 
ces  autres  mots,  Itrunia,  helmum,  halsberga  et 
manica,  qui  répondent  aux  mots  françois  Broigne, 
heaume,  aubergeon  et  manche. 


(1)  C'est  plutôt  kl   marrube;  vient  du  grce  ,3aAA(urn.  (n    e) 
bordure,  (n.  k.) 


(2)   Dicz  remonte  avec  bonlieur  jusqu'au  latin  halteus, 


BA 


—  383  — 


BA 


Bamboche, s!<fcsi.  fém.  Bâton.  Canne  à  nœuds. 
On  s"esl  servi  de  ce  mot  pour  désigner  une  personne 
de  petite  taille.  En  Italien,  il  signifie  marionnette, 
du  mol  Bambo,  quiveutdire  enfant.  (Dicl.  Etym.  de 
Ménage.) 

Bamboches,  sut)st.  mase.  plnr.  Nom  qui  fut 
donné  à  des  comédiens  établis  'i  Paris  en  1674. 

Bamille.  C"est  une  faute  dans  le  passage  que 
nous  allons  citer. 

Il  faut  lire  bataille.  «  Ses  sot  assembla  isnelle- 
»  ment,  et  vint  à  bamille,  à  grant  ferveur  de  soy 
«  vanger.  »  (Chr.  de  S.  Den.  T.  II,  fol.  3.) 

Bamievir,  verbe.  Devenir  blême.  Pâlir.  (Celthel. 
de  Léon  Tripp.  et  Dict.  de  Borel.) 

Ban,  suhst.  masc.  Publication.  —  Convocation. 
—  Hommage.  —  Ordonnance.  —  Règlement.  — 
Territoire  d'une  seigneurie.  —  Corvée.  —  Droit 
seigneurial.  —  Amende.  —  Saisie.  —  Terme  de 
pratique. 

Au  premier  sens,  ban  signifioit  toute  proclama- 
tion publique,  les  publications  faites  h  haute  voix, 
au  son  du  tambour,  de  la  trompette,  au  son  même 
de  la  cloche,  pour  ordonner  ou  défendre  quelque 
ciiose.  (Voy.  Beaum.  p.  330  et  '140.  —  l'.ech.  de  Pas- 
quier,  p.  704,  le  Gloss.  du  R.  de  la  Rose  ;  les  Dict. 
de  Monet  et  de  Nicot,  et  Laur.  Gloss.  du  Droit  Fran- 
çois où  Ton  trouve  que  la  cloche  du  ban  étoit  celle 
qu'on  sonnoit  pour  assembler  les  habitans  d'une 
paroisse.) 

De  cette  première  acception  dérivent  les  sui- 
vantes, avec  plus  ou  moins  d'analogie. 

Pris  dans  une  signification  beaucoup  moins  géné- 
rique, ce  mot  désignoit  les  publications  qui  se 
faisoient  pour  convoquer  les  nobles  d'une  province, 
tenant  immédiatement  du  Roi ,  â  venir  le  servir 
dans  son  armée,  suivant  qu'ils  y  étoient  obligés 
par  la  loi  des  fiefs.  (Voy.  La  Roque,  du  ban  et  arrière 
ban,  p.  2,  et  suiv.;  les  Ordonnances  des  R.  de  Fr. 
T.  I,  p.  152.  —  Bout.  Som.  rur.  annot.  p.  488,  etc.) 

Ban  s'étantdit  ^om-  publication  q\\  général,  a  pu 
signifier  celle  que  les  seigneurs  faisoient  faire  pour 
obliger  leurs  vassaux  â  leur  rendre  hommage,  et 
c'est  par  une  extension  de  cette  dernière  acception 
que  ce  mot  est  employé  pour  l'hommage  même 
dans  le  passage  suivant  : 

Et  Engletiere,  et  Danemarce, 
Qui  moult  estoit  lontaine  marce 
Si  en  ot  le  Dunois  Ogier, 
Pour  Gaufroy  son  père  ostagier, 
Et  diut  rendre  Treu  et  ban 
De  IV  deniers,  cascun  an. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  125. 

Ban  s'est  dit  pour  ordonnance,  règlement.  «  Chas- 
«  cun  an  qu'il  plaist  au  Seigneur,"peut  faire  bans 
u  pour  un  bien  commun  de  toute  la  dite  commu- 
«  nauté  d'icelui  village  et  eschevinage,  laquelle 
«  communauté  est  tenue  tous  ensemble  y  compa- 
«  roir,  pour  ieeux  voir,  et  justement  garder  et  tenir, 
u  sur  la  demande,  et  peine  de  deux  sols  tournois.  » 
(Coût.  gén.  T.  II,  p.  520.) 


Juner  les  devenres  de  l'an 
Ne  trespasseront  si  fait  ban. 

Pofs.  MS.  a\anl  1300,  T.  IV,  p.  1372. 

Le  ban  de  mars  et  d'aoust  estoit  une  défense  de 
mener  «  des  bêtes  dans  les  terres  emblavées,  ou 
«  autres  héritages  qui  pouvoient  en  être  endom- 
«  mages.  »  (Coût.  gén.  T.  I,  p.  688.)  Bouteiller,  sous 
le  titre  des  bans  et  défences  d'aoust,  en  étend  la 
signification  jusqu'aux  défenses  qui  regardent  la 
voirie,  la  chasse,  la  pêche,  et  même  les  mauvais 
lieux,  les  jeux  de  hasard,  etc.  (Voyez  Bout.  Som. 
rur.  p.  50G  et  suiv.) 

Ban  s'est  dit  pour  territoire  d'une  seigneurie. 
"  Le  Seigneur  haut  justicier  peut  empescher  ses 
«  sujets  de  lever  ou  mettre  bornes  faisans  sépara- 
«  lions  de  bans,  à  peine  d'amende  arbitraire  ;  ne 
«  les  peut  aussi  le  dit  seigneur  du  ban,  lever  ny 
«  poser,  sans  en  avertir  le  seigneur  du  ban  join- 
.  dant.  »  (Nouv.  Coût.  gén.  T.  il,  p.  397.) 

Dans  la  signification  de  corvée,  &rt?i  désignoit  une 
sorte  de  droit  appartenant  au  seigneur  sur  ses  vas- 
saux. «  Tout  homme  tenant  servement  son  héritage, 
«  ou  morlaillablement,  doit  faire,  pour  chacune 
«  sepmaine  à  son  seigneur,  le  ban  ou  arban,  c'est- 
«  â-dire  une  corvée  a  bras  du  mestier  qu'il  sçait 
«  faire,  et  s'il  fait  arban  avec  deux  bœufs,  il  en 
a  vaut  deux,  etc.  »  (Voy.  le  Coût.  gén.  T.  II,  p.  508.) 

On  appeloit  ban  de  four  et  de  moulin,  un  droit 
en  vertu  duquel  le  seigneur  d'un  fief  peut  obliger 
ses  vassaux  à  venir  cuire  au  four  banal,  à  moudre 
à  son  moulin.  (Dict.  de  Monet.)  Plusieurs  seigneurs 
avoient  aussi  le  droit  de  vendre  leur  vin  à  l'exclu- 
sion des  habitans  de  leur  territoire;  c'est  ce  que 
signifie  ban-banneaii,  dans  ce  passage.  «  Je  ne  puis 
«  vendre  vin,  pour  raison  de  ban-banncau,  en  la 
"  ville  de  Vaydun,  fors  que  vin  mouys.  »  (La  Thau. 
Coût,  de  Berry,  p.  103.)  On  disoit  aussi  ban-vin.  Ce 
droit  a  subsisté  en  Touraine,  en  Bourgogne  et  autres 
lieux.  Le  seigneur  en  jouissoit  pendant  40  jours.  Il 
duroit  pendant  tout  le  mois  d'août,  suivant  un  litre 
de  122t),  rapporté  par  Jurain.  (Ilist.  du  comté  d'Aus- 
sonne,  p.  27.)  Ce  droit  est  appelle  ba^ic  de  vin. 
(Pérard,  IIist.de  Bourg,  p.  317;  titre  de  1247),  et 
ban  de  vin  vendre.  (Id.  p.  430,  titre  de  1246.) 

Ban  s'est  employé  pour  amende,  peine  pécu- 
niaire. C'est  en  ce  sens  que  Laurière  le  définit, 
0  peine  qui  se  paye  par  celui  dont  les  bestiaux  ont 
«  fait  dommage  â  autrui.  »  (Gloss.  du  Dr.  Fr.) 

On  disoit  ban  pour  saisie  de  meubles.  "  Si  aucun 
o  habitan  de  la  dite  ville  et  cité  de  Bayonne  veut 
a  mettre  &an,adveu,  arrest,  ou  autre  empeschement 
0  sur  aucune  chose  meuble,  ou  sur  les  fruits  pen- 
«  dens  en  chose  immeuble,  pour  raison  de  ce  qu'il 
a  prétend  la  chose  meuble  luy  apartenir,  ou  aucun 
»  deble  luy  estre  deu  par  le  possesseur  des  dites 
o  choses  meubles,  ou  immeubles,  etc.  »  (Coût, 
gén.  T.  II,  p.  714.) 

Ban  de  trelfond  désignoit  la  saisie  réelle  d'un 
héritage  hypothéqué  à  une  rente.  ■<  Auparavant  la 
«  guerre,  estoit  couslume  de  procéder  par  ban  de 
<•  treffond  sur  les  héritages  hypotéqués  aus  dits 
•  censés,'  et  ventes  indiîéremment  ;  de  manière 


BA 


38  i  — 


BA 


«  qu'il  advenoit  que  cehiy  qui  avoit  esté  contraint 
■  ■■  prendre  quelques  deniers  à  rente  en  sa  nécessité, 
«  pour  petite  rente,  i  cnidit  héritages  de  grand 
«  valeur,  au  giand  préjudice  des  propriétaires,  et 
«  autrescréancier3,etau  seuravanlagedurentier.  « 
(Coul.  gcn.  T.  I,  p.  IIGI.) 

On  donnoit  autrefois  une  sauvegarde  à  un  héri- 
tage, de  même  qu'à  un  homme,  et  l'on  se  servoit 
du  mot  ba)i  pour  signifier,  en  termes  de  pratique, 
les  écussons  que  le  seigneur  faisoit  mettre  sur  le 
fond  qui  était  en  sauvegarde,  pour  l'empêcher 
d'être  endommagé,  ou  pour  conserver  les  meubles 
et  autres  elfets  hypothéqués  à  des  créanciers.  >•  Le 
■i  maire,  ou  son  "lieutenant,  quand  il  est  question 
«  dedebte,  si  le  requérant  lui  en  fait  apparoir  par 
«  letties,  ou  autres  enseignemens  suflisans,  doit 
«  bailler  un  sergent  au  requérant  pour  aller  poser 
«  le  dit  ban  aux  ciioses  meubles,  ou  immeubles  qui 
«  ne  meuvent  et  fiuicts  pendans,  ou  cliose  immeu- 
»  ble,  le  dit  sergent  doit  mettre  une,  ou  plusieurs 
«  croix  en  enseigne  du  dit  ban  ou  y  mettre  pan- 
«  nonceaux,  ou  autre  signe  de  ban.  »  (Coût.  gén. 
T.  II,  p.  714.) 

Voici  quelques  expressions  remarquables  aux- 
quelles ce  mot  a  donné  lieu  : 

1°  Sauvegarde  de  ban.  C'étoit  la  sauvegarde 
accordée  à  celui  qui  craignoil  d'être  troublé  dans 
sa  possession  ;  elle  le  mettoil  à  l'abri  de  la  saisie 
qu'on  auroit  pu  obtenir  contre  lui.  Masnerius,  litre 
de  possesso,  parle  d'une  sauvegarde  de  ban  «  qu'on 
«  appelle  autrement  interdicl  de  simple  ban,  qu'ob- 
«  tient  celui  qui  craint  d'être  troublé  en  sa  posses- 
«  sion  auparavant,  le  trouble  réel,  et  seulement 
»  pour  les  menaces,  ou  jactances  qu'on  faict  de  le 
«  troubler.  »  (Gr.  Coût,  de  Fr.  Liv.  I,  ch.  111,  p.  27.) 

2°  Donner  à  ban,  pour  abandonner,  mettre  à  la 
discrétion  du  public.  (Pasq.  Rech.  Liv.  VIII,  p.  704.) 

3"  Dati  le  roi,  expression  qui  semble  signifier  la 
même  chose  que  de  par  le  Roy,  dans  ces  vers  : 

Aucune  faiz,  ce  m'est  avis, 
Crie  on  le  ban  le  Roi  Loys. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  246,  V-  col.  2. 

4°  Corner  le  ban,  sonner  la  retraite.  On  a  dit  en 
ce  sens,  en  parlant  d'un  tournoi  : 

A  tant  est  partis  le  tournois, 
Que  plus  n'i  font  à  celé  fois  : 
Li  Bannier  ont  le  ban  corné 
Par  tant  sont  as  estes  aie. 

Parton.  de  Blois.'MS.  de  S'  Gcrra.  fol.  154,  V"  col.  1. 

5°  Procéder  à  ban,  c'est-à-dire  poursuivre  une 
instance  criminelle,  par  cri  public.  «  En  cas  cri- 
«  minel,  Von  procédoit  à  ba7i.  »  (Gr.  Coût,  de  Fr. 
Liv.  m,  p.  350.) 

G-  Mettre  ban,  c'est-à-dire  «  faire  bans,  édits,  cris 
«  et  proclamations;  mettre  et  induire  peine  sur  ses 
«  sujets,  selon  la  qualité  et  nécessité  des  cas.  >■ 
(Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  I,  p.  lt>G,  note  e.) 

7°  Uan  brisé.  On  appelloit  ainsi  le  délit  commis 
par  ceux  qui  se  battent  sur  une  seigneurie  difïérente 
de  celle  oii  la  querelle  s'est  élevée.  (Voyez  le  Nouv. 
Coût.  gén.  T.  II,  p.  1051.)  On  y  lit  que  «  l'amende 


"  du  ban  brisé  appartient  au  haut  justicier  du  lieu 
«  ou  le  débat  a  esté  faict.  » 

8°  lianes  francs.  Temps  de  l'armée  pendant  lequel 
on  ne  pouvoit  faire  prise  de  corps,  ou  saisie  de 
biens,  excepté  pour  les  cas  et  criminels,  et  dettes 
contractées  pendant  les  dits  banqs.  (Coût.  gén. 
p.  805,  T.  II.) 

VARIAMES  : 
BAN.  Bout.  Somm.  rur.  annot.  p.  488. 
Banc  et  Arrière- Banc.  Ger.  de  Rouss.  MS.  p.  122. 
Bancq.  Nouv.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  450,  col.  2. 

Banage,  subst.  masc.  Territoire  de  la  bana- 
lité. —  Sorte  de  droit  seigneurial. 

Dans  le  premier  sens,  banage  signifioit  l'étendue 
du  district  d'un  moulin  banal.  «  Musniers  et  servi- 
«  leurs  de  musniers  ne  peuvent  aller  sur  le  ban- 
"  nage  d'autruy  charger  bled,  et  y  mener  farine.  » 
(Coût.  gén.  T.  I,  p.  713.) 

On  appelloit  aussi  droit  de  bancage ,  le  droit  de 
Banvin.  (Voy.  Ban.)  «  Seigneur  qui  a  droit  de  ban 
«  vin,  peut  vendre  le  vin  de  son  creu,  de  son  fief 
«  pour  raison  duquel  il  a  le  droit  de  bancage,  et 
«  ne- durera  le  dit  bancage  que  quatre  jours.  » 
(Coût.  gén.  T.  Il,  p.  54G.) 

VARIANTES  : 
BANAGE.  Grandes  Coutumes  de  France,  p.  125. 
Bannage.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  713. 
B.\NCAGE.  Ibid.  T.  II,  p.  542. 
B.\NCQUAGE.  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  fr. 
Baxquage.  Id.  ibid. 

Ban-arban,  subst.  masc.  Droit  seigneurial.  — 
Corvée.  (Voy.  le  Dict.  de  Borel.)  «  Doit  faire  à  son 
«  seigneur  ban,  ou  arban,  c'est-à-dire  une  corvée 
X  à  bras.  Et  s'il  fait  arban  avec  deux  bceufs  il  en 
«  vaut  deux,  etc.  »  (Coût.  gén.  T.  II,  p.  508.) 

Banai'd,  subst.  masc.  Gardes  des  forêts. —  Gens 
qui  présidoient  à  la  garde  des  fruits  et  des  forêts , 
sergent.  (Voy.  Dict.  de  Borel  au  mot  Danards.)  II 
dit  qu'on  les  appelle  bandiers  dans  le  patois  du 
Languedoc.  «  Fortiers  (lisez  forestiers)  hangars,  ou 
«  messiers  peuvent ,  dans  vingt-quatre  heures , 
«  poursuivre  les  mesusans,  et  sont  crus  en  leurs 
«  rapports.  »  (Coût.  gén.  T.  II,  p.  423.) 

VARIANTES  : 
BANARD.  Borel,  Dict. 
Banar.  Id.  ibid. 
Baxnar.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  864. 
Bannard.  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  fr. 
Ba.n-g.\r.  Nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  423,  col.  3. 
Bangard.  Ibid.  p.  407. 
Bangarde.  Ibid.  p.  407,  col.  1. 
Banvar.  Gloss.  sur  les  Coutumes  de  Beauvoisis. 
Banward.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  1073. 

Bauvvard  (.lisez  Banward.)  Nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  1096. 
Baxdier.  Borel,  Dict. 

Bancacles,  subst.  plur.  Terme  de  marine. 

Il  dérobe  le  mast,  la  poupe,  et  le  fanon, 
Raze  voile,  et  bancs,  bayicades,  et  antennes 
Apostis,  et  fougons  jusques  à  la  carène. 

Berger,  de  Rémi  Belleau,  T.  I,  p.  125. 

Banchel,  subst.  masc.  Diminutif  de  banc. 

...  El  estoit  sor  un  banchel... 

Parton.  de  Bluis,  MS.  de  S.  Gxnn,  fol.  150,  Y'  col.  1. 


BA 


-  385  — 


BA 


VARIANTES  : 
BANCHEL.  Parton.  de  Blois,  MSS.  de  S<  Germ.  fol.  151. 
Bancselle,  subsl.  fétn.  Fav.  Th.  d'honn.  T.  II,  p.  1830. 

Baiichier,  subst.  niasc.  Tapis.  Celui  dont  on 
couvre  un  banc.  Ce  mot  désigne  spécialement  les 
tapis  que  l'on  met  sur  les  bancs  placés  dans  le 
cha'ur  des  églises,  suivant  Du  Gange,  Gloss.  latin 
aux  mots  Bancale  et  Banquerium.  On  s"en  servoit 
cependant  pour  désigner  les  lapis  dont  on  couvroit 
toutes  sortes  de  ba)ics.  «  Près  de  la  chaire  y  aura 
«  place  où  l'on  peut  mettre  un  petit  banc  sans 
<■  appois,  couvert  d'un  banquier  et  des  quarreaux 
«  de  soye,  ou  autres  pour  s'asseoir,  quand  on  vient 
«  voir  l'accouchée.  »  (Honn.  de  la  Cour,  à  la  suite 
des  Mém.  sur  la  Chev.) 

VARIANTES  : 
BANCHIER.  Du  Gange,  Gloss.  latin  au  mot  Banquerium. 
Banquiek.  Bcuteillier,  Som.  rur. 

Banqueke.  Journ.  de  Paris  sous  Charles  VI  et  VII,  p.  85. 
B.\NC.\L.  Du  Gange,  Gloss.  latin  au  mot  Bancale. 

Bancloche,  SM&si.  fem.  Cloche,  tocsin,  beffroi. 
Ce  mot,  composé  de  ceux  de  ba7i  et  de  cloche,  slgni- 
fioit  la  cloche  que  l'on  sonnoit  pour  assembler  les 
habitans  d'une  commune.  (Yoy.  cloche  du  ban,  sous 
l'article  Ban.)  Crtwc/od/e  est  une  faute:  il  faut  lire 
bancloclie  dans  le  passage  suivant  :  »  Us  firent 
Cl  commander  qu'on  sonnast  la  bauclochc ,  et  que 
«  chacun  s'allast  armer.  »  (Froissart,  Liv.  I,  p.  9G.) 
L'éditeur  l'explique  ainsi  :  «  C'est  en  plusieurs  lieux 
«  de  France  le  tocsin,  ou  befroy.  « 

VARIANTES  : 
BANGLOGHE.  Dict.  de  Borel  et  de  Corneille. 
Banclocque.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Campana. 
Bancloque.  Id.  ibid. 
Baucloche.  Froissart,  Liv.  I,  p.  96. 
BoNCLOCHE  {lisez  Bancloche.)  U.  deB.  Du  Guesc.  parMén. 

Bande,  subst.  fém.  Ceinture.  —  Galon.  — 
Echarpe.  —  Parti.  —  Troupes.  —  Guerre,  querelle, 
division.  —  Terme  de  blason.  —  Frontière.  — 
Terme  de  marine.  —  Terme  de  fauconnerie.  — 
Pièce  d'un  moulin. 

Ce  mot,  qui  subsiste  sous  la  première  orthogra- 
phe, pour  signifier  en  général  tout  morceau  de 
toile  ou  d'étoffe  plus  long  que  large,  s'employoit 
pour  désigner  spécialement  une  ceinture. 

Plicons,  hendes  d'orfrois 
Elance  cemise  autresi. 

Pocs.  MSS.  du  Vatican,  n-  U90,  fol.  99,  V°. 

Delà,  il  s'est  dit  pour  galon.  «  Après  ces  parol- 
«  les,  se  départit  le  doulphin,  et  s'en  vint  à  la 
«  fueillée  par  devant  Mynerve,  et  luy  baille  l'habit 
«  de  révérence,  etluydist:  Pucelle,  vecy  ce  dont 
«  me  priastes.  Lors  le  print  à  regarder  et  dessoubz 
»  et  dessus  pour  les  affrois  et  les  bendes  lissues  à 
«  or  qui  entour  estoient.  »  (Percef.  Vol.  I,  fol.  140.) 

Ce  mot  s'est  dit  pour  écharpe.  Dans  les  guerres 
civiles  des  maisons  de  Bourgogne  et  d'Orléans, 
sous  Charles  VI,  l'Orléanois  portoit  des  escharpes 
que  Ton  appeloit  bandes;  et  ce  n'est  que  depuis  ce 


temps  que  ce  mot  a  eu  cette  signification.  Originai- 
rement ilétoit  pris  pour  étendard,  du  mot  bandum. 
(Voy.  Du  Gange,  Gloss.  latin.)  La  Roque,  en  le  déri- 
vant du  mot  allemand  Bandt  (1),  lui  fait  signifier  la 
même  chose.  «  Portoient  tous  les  princes  des 
«  alliances,  et  aussi  toutes  leurs  gens...  pour  Fen- 
«  seigne  bendes  étroites  qui  estoient  de  linges  sur 
«  leurs  épaules,  pendans  au  senestre  bras  de  tra- 
«  vers  ainsy  que  le  porte  un  diacre  en  faisant  le 
«  service  de  l'église.  »  (Monstrelet,  Vol.  I,  an.  1410, 
chapitre  lxv,  fol.  101.) 

Baiide  s'étant  pris  pour  la  marque  distinctive  de 
ce  parti,  passa  de  là  à  la  signification  du  parti  même. 
(Voy.  les  Rech.  de  Pasquier,  p.  733.) 

Bende  s'est  pris  pour  le  côté,  la  partie.  «  En 
«  l'effort  de  la  bataille,  la  bende  des  François 
"  commenijast  à  décliner,  et  estre  foullée  de  la 
>'  puissance  et  multitude  des  Allemans.  »  (J.  Le 
Maire,  Illuslr.  des  Gaules,  Liv.  111,  p.  3'iO.) 

Dans  la  suite,  on  s'est  servi  du  mot  bande  pour 
exprimer  toute  espèce  particulière  de  troupes  qui 
faisoient  corps.  André  de  La  Vigne,  parlant  de  l'en- 
trée de  Charles  VIII  à  Florence,  en  1494,  dit  :  »  Les 
«  bandes  du  roy  commencèrent  à  marcher,  la 
«  bande  des  picquiers ,  la  bande  des  hallebar- 
«  diers,  etc.  »  (André  de  La  Vigne,  voyage  de  Naples, 
chapitre  viii,  p.  118.)  Depuis,  lorsque  la  légion  eut 
été  instituée,  on  la  composa  de  deux  bandeï  de  gens 
de  pied  qui  furent  appelées  bandes  légionnaires. 
Elles  furent  supprimées  pendant  quelque  temps,  et 
Charles  IX  les  rétablit.  (Voy.  Daniel,  Mil.  fr.  p.  338.) 
F]utrapel  nous  apprend  que,  de  son  temps ,  le  mot 
bande  commençoit  à  vieillir,  et  qu'on  y  substituoit 
celui  d'escadre.  (Voy.  Contes  d'Eutrapel,  p.  479.) 

On  distinguoit  les  bandes  coronales.  Dans  le  pro- 
cès verbal  de  la  Coutume  d'Estampes,  de  1550,  on 
lit:  «  Messire  Loys  d'Arbouville,  lieulenant  des 
«  bandes  coronales  de  France.  »  (Coutumes  géné- 
rales, T.  I,  page  274.) 

Les  bandes  noires  étoient  un  corps  de  troupes, 
composé  de  soldats  italiens.  A  la  mort  du  capitaine 
qui  les  commandoil,  ils  prirent  une  enseigne  noire 
et  des  habits  noirs;  de  là,  le  nom  de  bandes  noires. 
Ils  se  distinguèrent  dans  les  guerres  d'Italie.  Ils 
passèrent  du  service  de  l'Empereur  à  celui  de 
François  1"('2),  auquel  ils  demeurèrent  attachésjus- 
qu'à  sa  mort.  (Voy.  Mém.  de  Montluc,  T.  I,  p.  50.) 
Pierre  Desrey  les  appelle  lansquenets,  et  dit,  en 
parlant  de  François  I"  qui  s'avançoit  pour  faire 
le  siège  de  Navarre  :  «  Cependant  vint  de  renfort 
«  au  Roy  une  bande  de  Lansquenets  qu'on  appelloit 
«  la  bande  noire  (3).  »  (Chr.  de  Pierre  Desrey,  à  la 
suite  de  Monstrelet,  fol.  120,  R".) 

Ce  mot  signifioit  aussi  guerre,  querelle,  division  : 

Envie  court  à  tout  sa  houpelande  : 
Mais  en  dépit  de  la  vieille  truande 
Vueil  de  liesse  estre  vray  soudoier  : 
Se  m'espée  ay  je  li  ferai  grief  bande. 

Eust.  Desch.  Poes.  MSS.  fol.  230,  col.  S. 


(1)  Il  vaut  mieux  remonter  jusqu'à  l'allemand  binclen.  (n.  e.)  —  (2)  Elle  combattit  à  Marignan.  (N.  e.) 
.encore  en  anglais  hand,  la  musique  d'un  régiment,  (n.  e.) 


(3)  On  nomme 
49 


BA 


—  38G  — 


BA 


«  Pour  les  hendes  et  hrouillis  de  la  maison  du 
«  Roy,  son  père,  il  se  relira  en  Dauphiné.  »  (Mém. 
de  Côiniiies,  p.  517.) 

En  termes  de  blason,  bande  est  une  des  pièces 
qu'on  appelle  honorables  (1)  dans  l'Ecu.  (Voy.  Le 
Labour.  Ori2,'.  des  Arm.  p.  170.)  On  trouve  ce  mot 
dans  une  citation  latine  de  Du  Gange,  au  mot 
umhra  Leoiiis,  dans  le  même  sens. 

Dans  un  sens  aussi  figuré  que  celui  dans  lei[uel 
nous  employons  aujourd'hui  le  mot  lisière,  bande  a 
signifié  autrefois  frontière,  les  bornes,  les  confins 
d'un  champ,  d'un  pays,  d'une  province,  etc.  «  11 
«  envova  hastivemenl  devers  le  sire  de  Coucy,  et  le 
«  seigneur  de  la  Rivière,  et  remontrant  ses  beson- 
«  gnès,  qu'ils  se  délivrassent  de  reconquérir  ses 
«  chasteaux  par  trailté,  convenances  ou  accords, 
«  et  parspécial,lesplusprochainesdes  bendes{2)âe 
«  la  mer.  »  (Froissart,  livre  II,  p.  24.)  11  faut  lire 
bandes  pour  bondes,  dans  cet  autre  passage  du 
même  auteur  :  «  En  costoyant  Cornouaille  et  les 
«  bondes  d'Angleterre,  ils  arrivèrent  sauvement.  » 
(Froissart,  livre  111,  p.  89.) 

En  termes  de  marine,  on  appeloit  bandes  ce  que 
les  marins  désignent  aujourd'hui  par  tribord  et 
bâbord  :  les côlés,  les  flancsd'un  vaisseau,  h  L'avant 
Cl  garde  ayant  fait  plusieurs  bordées  pour  prendre 
«  le  vent,  vint  enfin  sur  les  sept  heures  et  demie  à 
«  la  portée  du  canon  de  nostre  Hotte,  et  des  deux 
«  pointes  :  puis  tournant  le  bord  tirèrent  tous  les 
«  canons  de  la  bande,  puis  ayant  tourné  en  firent 
«  de  même  de  l'autre  bande.  »  (Mém.  de  Bassom- 
pierre,  T.  111,  p.  450.) 

Le  même  mot  signifioit,  en  terme  de  fauconnerie, 
le  côté  du  bec  de  cet  oiseau.  «  Car  aucunes  fois,  le 
«  bec  croist  et  surmonte  d'une  bande  plus  que  de 
•1  l'autre,  et  fait  ceste  excrescence  que  l'oiseau  ne 
«  peut  pas  resserrer  le  bec  à  son  droit  point.  » 
(Fouilloux,  Faucon,  fol.  121,  R°.) 

Enfin,  nous  trouvons  bandes  pour  pièces  d'un 
moulin,  dans  ce  passage:  «  Au  fief  appartient  l'ar- 
«  bre  du  moulin,  les  bandes,  et  ce  qui  ne  se  mouve 
»  pas  au  moulin.  »  (Nouv.  Coût.  Gén.  T.  1,  p.  700.) 

On  disoit  : 

1°  Bande  d'artillerie,  pour  batterie.  «  La  nuict 
«  sequente,  laissant  des  pièces  pour  battre  à  la  dite 
«  brèche,  pour  empescher  de  la  remparer,  meit 
«  une  autre  ba^ide  d'artillerie  pour  battre  l'encoi- 
«  gneure  du  costé  de  Montdevis.  »  (Mém.  du  Bell, 
livre  Vlll,  fol.  2G4.) 

Cette  expression,  dans  cet  autre  passage,  désigne 
seulement  un  nombre  de  pièces  d'artillerie  :  «  M.  de 
«  la  Palice  estoit  venu  avec  cinq  cent  lances  fran- 
«  çoises,  deux  mille  piétons  et  une  bande  d'artille- 
«  rie.  "  (Lettr.  de  Louis  Xll,  T.  111,  p.  32.) 

2°  Bende  de  lard.  C'étoit  une  façon  de  parler  figu- 
rée pour  tranche  ou  pièce  de  lard.  (Dict.  d'Oudin.) 

3°  Tenir  part,  ne  bande,  signifioit  ne  pencher 


d'aucun  côté.  On  lit  dans  l'Histoire  du  mareschal 
de  Boucicaut,  p.  17G  :  "  Si  n'cstoit  favorable  à  nul, 
«  par  corruption ,  ne  par  quelconque  familiarité, 
«  tenir  part  ne  bande.  »  Montaigne  a  dit  en  ce 
sens  :  -  A  quekiue  bande  qu'on  panche.  »  (Essais, 
T.  11,  p.  592.) 

4°  Tenir  sa  bende,  être  de  son  parti.  «  Le  dit 
«  Antimachus  avoit  esté  corrompu  par  Paris 
<<  Alexandre,  à  force  de  dons  et  d'argent  pour  tenir 
«  sa  bende.  »  (J.  Le  Maire,  lUuslr.  des  Gaules, 
livre  XI,  p.  221.) 

5°  Estaient  de  sa  bande,  pour  :  parti,  faction. 
«  Avoit  despouillé  tous  les  trésors  et  reliques  de 
«  l'Eglise,  pour  souldoyer  ceux  qui  estoient  de  sa 
«  be7ide.  »  (J.  Le  Maire,  Schismes  et  Conciles,  p.  47.) 

G°  La  grande  bande.  Cette  façon  de  parler  semble 
faire  allusion  aux  24  Violons  de  la  Chambre.  Dorine 
dit  à  Marianne,  que  Tartuffe  veut  épouser  et  mener 
en  province  : 

La  danse  au  carnaval  vous  pourrez  espérer 
Le  bal,  et  la  grand'bunde,  à  savoir,  deux  musettes 
Et  parfois  fagolin  (3),  et  les  marionnettes. 
L'Imposleur,  de  Molière,  acl.  2,  se.  3. 

«  Les  amoureux  de  la  symphonie  y  estoient  aussi 
»  attirés  par  un  concert  des  vingt-quatre  violons  de 
<■  la  grand  bande.  «  (Rom.  Bourg,  p.  7.) 

7°  La  petite  bande.  C'est  ainsi  que  Brantôme  dési- 
gne le  petit  nombre  choisi  des  Dames  qui  étoient 
ordinairement  des  parties  du  roi  et  auxquelles  il 
envovoit  quelquefois  des  plats  de  sa  table.  (Voyez 
Brantôme,  D"  Gai.  T.  Il,  p.  442  et  413.) 

8"  Bande  royale.  Nous  lisons  dans  la  description 
d'une  colonne  :  «  Dessus  l'architrave  est  la  frize, 
«  appellée  autrement  bande  royale.  »  (Vray  et  parf. 
Amour,  fol.  215,  R°.) 

9°  Faire  bande  et  lice.  Façon  de  parler  empruntée 
des  tournois,  pour  :se  liguer.  L'ingratitude  du  peu- 
ple envers  ceux  qui  le  gouvernent  avec  douceur  a 
fait  dire  : 

Soudainement  font  leur  bande  et  leur  lice 
Contre  les  bons,  et  rendent  bénéfice 
De  cruauté  ;  par  Boece  apparra. 

Eust.  Desih.  fol.  340,  col.  3. 

V.\RIANTES    : 
BANDE.  Orthographe  subsist. 
Bende.  Monstr.  Vol.  l,  fol.  101,  R°  et  V». 
Bonde  (4).  Froissart,  Livre  III,  fol.  89. 

Bandé,  part.  Galonné.  —  Terme  de  blason.  — 
Pansé.  —  Qui  a  une  lisière.  —  Attentif. 

Au  premier  sens,  on  lit  :  «  Estaffiers,  habillés  de 
«  velours  noir,  tous  bandez  de  passement  d'or.  » 
(Mém.  de  Bassompierre,  T.  1,  p.  323.) 

Et  la  fu  li  siens  cors  trouvés, 
En  un  sarqu  ki  fu  bendés. 

Ph.  Mouskcs,  MS.  f.  305. 

En  termes  de  blason,  bandé  signifioit  orné  d'une 
bande  : 

Le  noir  escu  bendé  de  nuit, 
Ot  larrecins  au  col  pendu, 


(1)  Elle  représente  le  baudrier  du  cavalier,  et  prend  d'ordinaire  depuis  le  haut  de  l'angle  droit  de  l'écu  jusqu'à  l'angle 
gauche  du  bas  de  l'écu.  (n.  e.)  —  (2)  Cette  forme,  employée  par  le  chroniqueur  de  Valenciennes,  se  rapproche  du  namurois 
bainde.  (N.  E.)  —  (3)  Bouffon  d'un  théâtre  de  foire  ;  proprement  ces  singes  qu'on  habille  comme  un  fagot.  (N.  E.)  — 
(4)  Bonde  nous  paraît  être  là  pour  bonne,  borne,  du  latin  bodina.  (n.  e.) 


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Et  d'une  forches  apendu, 
Et  en  l'escu  un  cheval  fust. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7015,  T.  II,  fol.  191,  V'  col.  1. 

On  disoit  dans  le  sens  de  pansé  :  «  Bandé  de  sa 
«  navreure  ;  «  pour  pansé  de  sa  blessure  ou  dont 
la  blessure  a  été  bandée.  (Percef.  Vol.  IV,  fol.  83.) 

Bandé  signifioit  :  «  Qui  a  une  bande,  une 
«  lisière  »  en  termes  de  manufactures  de  draps. 
(Voy.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  III,  p.  413.) 

Enfin  bandé  s'est  dit  pour  attentif,  en  parlant  de 
l'attaque  d'un  bastion  :  «  Ceulx  d  embas  estoyent 
«  toujours  bandez  à  trouver  leurs  gens  au  descou- 
«  vert.  »  (J.  d'Auton,  Ann.  de  Louis  XII,  p.  2(58.) 

Le  même  mot  signifioit  aussi  faire  bande  à  part  : 

Sur  l'heure  entra  une  assez  grosse  bende 
De  survenans,  et  ainsi  qu'on  se  bende 
Homme  n'y  eut  qui  ne  print  sa  pareille 
Pour  deviser. 

Crelin,  p.  108. 

Expressions  à  remarquer  : 

1°  Bander  sa  part  d'cs^nz/Js  (1).  Terme  du  jeu  de 
paume.  «  Il  vint  entrer  au  jeu  de  paume  et  appelle 
«  Fouquel  qui  avoit  déjà  bandé  sa  part  de  deux 
«  douzaines  d'esteufs,  et  jouoit  à  l'acquit.  »  (Contes 
de  Desperriers,  T.  I,  p.  82.) 

2°  A  bander  et  à  racler.  Façon  de  parler  prover- 
biale empruntée  de  la  paume  ;  comme  la  première, 
elle  sert  à  exprimer  toutes  sortes  d'excès  en  tout 
genre.  La  Noue,  parlant  des  liorreurs  que  commet- 
toient  les  gens  de  guerre  qui  n'avoient  à  la  bouche 
que  ces  mots  :  «  L'honneur  du  Roy,  la  religion  ca- 
«  tholique,  l'évangile,  la  patrie,  »  ajoute  :  «  on  void 
«  après  la  plus  grande  partie,  prendre  du  tout  le 
»  contrepied,  et  jouer,  comme  dit  le  proverbe  de  la 
«  paume,  à  bander  et  à  racler,  et  plus  sur  les  amis 
«  que  sur  les  ennemis;  c'est-à-dire  saouler  sa  ven- 
«  geance,  son  ambition,  sa  cupidité  et  son  avarice 
«  de  tout  ce  que  la  guerre  fait  indiféremment 
«  ployer  sous  soy.  «  (Disc,  polit,  et  milit.  de  la 
Noue,  p.  415.)  Ce  même  proverbe  est  appliqué  à  la 
gourmandise, dans  les Div. Lee.  deDuVeid.  p.  123.) 

3°  Bander  sa  quaisse.  C'est-à-dire,  en  termes  bur- 
lesques, s'en  aller.  (Oudin,  Cur.  Fr.) 

VARIANTES  : 
BANDÉ.  Mém.  de  Bassompierre,  T.  I,  p.  323. 
Bendé.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  II,  fol.  191,  V°  col.  1. 
Bendés.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  305. 

Bandée,  subst.  fém.  Ban  de  vendange.  Laur. 
Gloss.  du  Dr.  Fr.  définit  ce  mot:  «  temps  et  ouver- 
«  ture  des  vendanges  que  l'on  fait  publier  par  or- 
«  donnance de  Justice...  On  nedoitaller  aux  vignes, 
«  pour  icelles  grappeter,  que  trois  jours  après  que 
«  les  dites  vignes  sont  vendengées,  sur  peine 
«  d'amende,  et  n'est  partant  entendu  que  les 
«  Seigneurs  des  dittes  vignes  ne  les  puissent  gar- 
«  der  plus  longuement  que  du  jour  assigné  de  la 
«  bandée,  pour  en  faire  leur  profit,  si  bon  leur 
«  semble.  »  (Coût.  Gén.  T.  II,  p.  394.) 

Bander,  verbe.  Tenir  en  inquiétude.  —  Liguer, 
conspirer.  —  Faire  bande  à  part. 


Au  premier  sens,  ce  mot  a  signifié  :  tenir  en 
inquiétude.  (Voy.  le  Gloss.  de  Marot.) 

On  disoit  se  bander,  se  bender,  pour  se  liguer, 
conspirer.  Ce  mot,  dans  ce  sens,  vient  de  bande, 
faction.  ■•  Lorsqu'il  eschel  que  plusieurs  machinent 
«  une  conspiration,  nous  disons  qu'ils  se  bandent  k 
«  telle  entreprise.  «  (Pasq.  Rech.  p.  733.) 

VARIANTES    : 
BANDER.  Pasq.  Rech.  p.  733. 
Bender.  Crétin,  p.  108. 

Banderet,  subst.  masc.  Chef  de  bande.  (Dict. 
deBorel  et  d'Oudin.)  «  Banderets...  ceux  qui  ont 
«  eu  le  gouvernement  de  la  ville  de  Rome,  et  la 
«  puissance  de  vie  et  de  mort  sur  un  chacun.  » 
(Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.) 

VARIANTES  : 
BANDERET.  Borel. 
Benderet.  Oudin. 

Bandez,  snbst.  plur.  Ce  fut  le  nom  que  le  peu- 
ple donna  aux  partisans  de  la  maison  d'Orléans, 
sous  Charles  VI,  à  cause  de  la  bande  ou  écharpe 
qu'ils  portoient.  (Voy.  Pas([.  Rech.  p.  733.)  On 
appela  aussi  bende:i,  la  faction  du  duc  de  Berry 
contre  le  duc  de  Bourgogne.  (Voy.  le  Journ.  de 
Paris  sous  Charles  VI  et'VÎI,  p.  4.) 


BANDEZ.  Pasquier,  Rech.  p.  733. 

Bendés.  Journ.  de  Paris  sous  Charles  VI  et  VII,  p.  4. 

Bandolier,  subst.  masc.  Bandit,  brigand.  Ban- 
dolier  se  trouve  dans  la  préface  des  Contes  de  la 
Reine  de  Navarre,  p.  4  et  .5.  Borel,  dans  son  diction- 
naire au  mot  Bandouillers,  dit  que  c'étoient  des 
voleurs  du  pays  de  Foix  et  des  Pyrénées,  ainsi 
nommés  parce  qu'ils  alloient  par  bande.  (Voyez  le 
Dict.  Etym.  de  Ménage  et  Cotgrave.)  Bouchet,  dans 
ses  Serees,  le  dérive  de  l'espagnol  vando,  faction. 
(Livre  II,  p.  95.)  En  1502,  c'étoit  des  troupes  au  ser- 
vice de  France.  (Voy.  .1.  d'Auton,  Ann.  de  Louis  XII, 
p.  170.)  On  en  faisoit  la  levée  dans  les  Pyrénées, 
selon  M.  de  Thou.  (Voy.  son  Hist.  T.  IV,  p.  391.) 
Nous  avions  encore  de  ces  troupes  dans  nos  ar- 
mées, en  1.50G.  (Mém.  deMontluc,  T.  II,  p.  69  et  71.) 

Les  bandoliers  de  la  garde  étoient  peut-être  les 
archers  de  la  garde  de  Louis  XII  ;  ils  furent  ainsi 
nommés  de  la  bandoliêre  qu'ils  portoient.  (Voyez 
J.  d'AuL  Ann.  de  Louis  XII,  de  1500  et  1507,  p.  134.) 

VARIANTES  : 
BANDOLIER.  Bouchet,  Serées,  livre  II,  p.  95. 
Bandouiller.  Goujet,  liibl.  fr.  T.  XIV,  p.  177. 
Bandouillier.  Borel,  Ménage,  Cotgrave,  etc. 
Bandoulier.  Favin,  l'h.  d'honn.  T.  I,  p.  431. 

Bandon,  subst.  masc.  Permission,  liberté.  — 
Possession,  partage.  —  Abandon. 

Sur  le  premier  sens,  voyez  le  dictionnaire  de 
Rob.  Estienne.  «  Le  Roy  avoit  tous  les  jours  ftandora 
a  d'aller  parler  à  la  dame  du  chasteau.  "(Voy.  Lanc. 
du  Lac,  T.  I,  fol.  107,  R"  col  1.) 


(1)  i?antter  une  balle,  c'est  la  pousser  dans  les  filets  avec  la  raquette,  quand  elle  roule  sur  le  pavé.   L'éteuf  est  ainsi 
nommé  parce  qu'il  était  fait  d'étoffe,  (n.  e.) 


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Ainors  est  foie  et  vaine 
Ki  trop  est  mise  à  batidoii. 

Poes.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1025. 

Laisser  aller  à  son  bandon,  pour  abandonner, 
laisser  aller.  Venir  h  quelqu'un,  à  son  bandon,  le 
charger  à  corps  perdu,  en  s'abandonnant  sur  lui. 
(Ger.'de  Koussillon,  ms.  p.  158.) 

Ce  mot  a  signifié  possession,  partage  : 

Honneurs  divins  au  ciel  sont  ordonnés, 
Pour  tous  humains  aux  lettres  adonnés  ; 
Se  par  vertuz  leur  sont  habandonnez 
Les  biens  haultains,  ceux  à  tel  bandon  nez 
Mériteront,  s'ils  font  bons  labouraiges, 
Honneurs  divins. 

Crétin,  p.  65. 

Bandon  a  été  employé  pour  abandon.  (Dict.  de 
Monet.)  «  Si  dist  au  Roy  :  vous  promets  sur  le  bandon 
<■  de  ma  teste,  que  se  vous  arrivez  lu,  vous  y  pren- 
«  drez  terre  à  voslre  voulenté.  »  (Froissart,  livre  I, 
p.  150. j  J.  de  Meung  fait  ainsi  parler  la  Raison,  per- 
sonnage allégorique  : 

Oncque  pucelle  de  mon  pariage 
N'eusl  d'aymer,  tel  bandon  que  j'ay  ; 
Car  j'ay  de  mon  père  congeay 
De  faire  amy,  et  d'estre  amée, 
Et  n'en  serây  de  luy  blasmée. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  6056. 

Bandon  (à),  adv.  En  abondance,  en  quantité, 
entièrement,  tout  à  fait.  —A  disposition,  à  volonté. 
(Gloss.  du  Roman  de  la  Rose.) 

Dans  le  sens  d'abondance,  nous  trouvons  ce  mot 
employé  dans  les  vers  suivans  : 

La  terre  est  si  mouillée  de  sanc  à  tel  bandon. 

Ger.  de  Roussillon,  p.  116. 
.  .  .  Estranges  coups  s'assemblent  à  bandon 
Oui  ne  lairont  à  nul,  ce  n'est  advis 
Geline,  o  e,  ne  poucin,  ne  chapos. 

Eusl.  Desch.  Poos.  MSS.  fol.  237. 

Ce  mot  s'est  dit  pour  :  entièrement,  tout  à  fait. 

Les  portes  œinrent  à  bandon. 

Athis,  MS.  fol.  102.  R°  col.  2. 

De  là,  on  disoit  à  grand  bandon,  pour  à  profu- 
sion. En  parlant  des  femmes  qui  se  remarient,  et 
du  peu  de  soin  qu'elles  ont  des  enfans  du  premier 
lit,  on  disoit:  <■  Ses  enfans,  que  le  bon  homme 
a  aymoit,  sont  déboutés,  et  leur  despendon  le  leur 
«  à  grand  bandon.  »  (Les  quinze  Joyes  du  Mariage, 
page  171.) 

A  bandon ?,i^\n{ïo'û  aussi:  îi  disposition,  à  volonté, 
à  discrétion. 

Le  mieulx  joustant  n'aura  pas  lange 
Mais  d'argent  fin  chapel  à  son  bandon. 

Eust.  Desch.  Pois.  MSS.  fol.  119. 
Mais  quant  j'ay  à  mon  bandon, 
De  ce  bon  vin  dont  liaune  fait  don 
Estre  ne  quier  clers,  ne  parler  latin. 

Ibid.  fol.  ... 

On  lit  dans  la  Chr.  fr.  mss.  de  Nangis,  sous  l'an 
1191  ;  «  La  prist,  et  à  bandon  la  récent.  Nous  serons 
«  bien  maistres  de  ceste  ville,  et  nous  mettrons 
«  voulonliers  hommes  et  femmes,  tout  le  leur  à 
«  nostre  bandon.  »  (Froissart,  Vol.  I,  p.  145.) 

Baneré,  adj.  Ayant  une  bannière. 

Banerolle,  subst.  [cm.  Banderolle.  Petit  éten- 
dard plus  étendu  en  longueur  qu'en  largeur,  quel- 


quefois il  étoit  carré.  «  Chascun  avoit  ung  meistre 
«  logeur,  et  ce  maistre  logeur  portoit  une  petite 
«  banerole  comme  d'ung  pié  et  demy  en  carré,  en 
«  quoy  estoit  la  livrée  du  capitaine.  »  (Le  Jouvencel, 
MS.  p.  176.) 

VARIANTES    : 
B.\NEROLLE.  Le  Jouvencel,  MS.  p.  176. 
Banerote.  (Lisez  Banerole).  Ibid. 

Banfiee,  subst.  masc.  Bénéfice.  ^  Quant  au- 
«  cuns  esloit  accusés  d'aucun  crime,  dont  il  deust 
"  estre  noyez,  s'il  n'estolt  coupable,  il  ne  pooil 
«  noyer,  mais  ce  n'est  mie  voirs,  car  ce  faisoit  li 
»  banfices  de  l'air  qui  le  retient,  non  mie  autre 
«  chose.  "  (Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Aquce.) 

Baniée,  part,  au  fém.  Abandonnée.  (Dict.  de 
Borel.)  11  auroit  peut-être  dû  lire  Bannie. 

Banisseur,  subst.  masc.  Proclamaleur.  Du 
verbe  banir,  proclamer. 

Il  n'est  qu'ung  gaudisseur, 

Joueur,  pipeur,  de  follycs  banisseia: 

Faifeu,  p.  99. 

Banisseur  de  follyes  signifie,  e^  cet  endroit,  celui 
qui  propose  d'en  faire. 

Banisure,  subst.  fém.  Bannissement.  Exil.  C'est 
en  ce  sens  que  nous  lisons  :  «  Punir  les  uns  par 
«  banisure,  les  autres  par  mort.  »  (Chr.  S'  Denys, 
T.  II,  fol.  17G.) 

Banlieue,  substantif  féminin.  Territoire. 
Juridiction  d'un  bien  comprenant  le  pays  auquel 
elle  s'étend.  Cette  définition  est  de  Borel.  (Voyez  sur 
ce  mot  une  note  savante  du  P.  Sirmond,  T.  ÏII,  sur 
les  Epitres  de  Godefroy  de  Vendosme,  Liv.  II, 
Ep.  16.)  L'auteur  du  Grand  Coutumier  de  France, 
qui  écrivoit  sous  Charles  VI,  ayant  distingué  la 
prévôté,  la  vicomte  et  la  banlieue  de  Paris,  ù  la 
page  10.  ajoute:  <•  L'on  appelle  banlieueàeVa.r\s,  là 
«  où  Paris  est,  et  la  circuitude  contenant  environ 
«  une  lieue.  »  Il  fait  ensuite  le  dénombrement  des 
lieux  qu'ellecomprend,  et  l'éditeur  interprète  le  mot 
banlieue,  par  «  le  circuit  et  destroict  dans  lequel 
«  s'étend  le  ban,  et  publication  que  fait  faire  le 
«  prevost  de  Paris.  »  (Voy.  le  Gr.Gout.  de  Fr.  p.  12.) 

Eust.  Deschamps,  parlant  des  négociations  pour 
la  paix  avec  les  Anglois,  en  I3G0,  dit  : 

Combien  que  de  par  les  deitx  Rois, 
Près  de  Paris,  à  une  lieue 
A  un  lieu  qu'on  dit  la  banlieue 
Fussent  en  la  œaladerie 
Assemblés,  ne  traittièrent  mie. 

Eust.  Desch.  Poos.  MSS.  fol.  575. 

Dans  quelques  pays,  la  banlieue  étoit  de  l'étendue 
de  cent  vingt  cordes,  dont  chaque  corde  étoit  de 
cent  vingt  pieds.  (Voy.  le  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  778.) 
"  La  banleue  a  trois  cens  soixante  neuff  perches 
«  de  terre,  chascune  perche  de  24  pies.  »  (Ane. 
Coût.  deBret.  fol.  i3G.) 

Expressions  remarquables  : 

1°  Banlieue  de  moulin  signifie  :  «  l'étendue  et  la 
«  lieue  au  dedans  de  laquelle  les  sujets  sont  tenus 
«  mener  moudre  leur  bled  au  moulin  bannier.  » 
(Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.)  Dans  la  Coût,  du  Loudu- 


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nois,  la  banlieue  de  moulin  éloil  de  deux  mille  pas, 
chacun  valant  cinq  pieds  ;  en  Anjou,  de  mille  tours 
de  roue  valant  quinze  pieds.  (Ordon.  des  R.  de  Fr. 
T.  I,  p.  i97,  note.) 

2"  Plate  à  banlieue.  Expression  singulière  pour 
désigner  la  blessure  pour  laquelle  celui  qui  l'avoit 
faite,  étoit  punissable  dans  le  lieu  du  délit.  Dans 
une  charte  citée  par  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot 
plagaad  Bannileugam,  on  lit  :  «  Quiconque  enfrain- 
«  dra  les  trièves  por  fait  dont  mort,  allblure.  ou 
«  playe  ouverte  que  l'on  dil;j/ayc  à  banlieue,  s'en- 
«  suit,  puni  sera  de  peine  capitale.  » 

VARIANTES   ; 
BANLIEUE.  Orth.  subsist. 
Banliue.  Ord.  T.  I,  p.  533,  art.  ii. 
Banleue.  Ano.  Coût,  de  Bret.  fol.  153,  R»  et  136,  V". 
Banlée.  Ordon.  des  R.  de  Fr.  T.  III.  p.  518. 
Be.\ulieu,  subsl.  MUSC.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  079. 

Bannal,  adj.  Prohibé,  réservé,  défendu. 
(Orth.  subsist.)  Ce  mot  s'est  dit  des  bois  et  des 
forêts  ;  selon  Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.  il  s'est  dit 
aussi  des  eaux  et  des  rivières  qui  étoient  en  pro- 
priété, et  que  l'on  donnoit  à  ferme  ou  à  cens.  (Id. 
Ibid.)  «  En  caves  et  rivières  bannales,  si  aucun  y 
«  pesche,  sans  le  congé  du  Seigneur,  ou  de  son 
«  fermier,  il  y  a  amende  de  soixante  sols  tournois, 
«  avec  restitution  de  poisson,  pour  chacune  fois.  » 
(Coût.  Gén.  T.  I,  p.  423.) 

Banne,  subst.  fém.  Vanne,  chute  d'une  rivière, 
l'endroit  où  elle  se  décharge  dans  une  autre  rivière. 
Le  lieu  appelle  lombe  de  Lysoire  (1),  dans  la  Chron. 
Fr.  Ms.  de  Nangis,  est  appelé  banisoire,  au  fol .  262  des 
Chron.  de  S'  Denys.  C'est  peut-être  comme  s'il  y 
avoit  bannlsoirc,  ysarœ  banna,  la  vanne  ou  la  chute 
de  l'Oise  ;  peut-être  :  Pontoise,  ou  quelque  lieu  voisin. 

VARIANTE  : 
BANISOIRE.  Chr.  S'  Denys,  fol.  262. 

Bannelle,  subst  fém.  Petite  vanne.  Conduit, 
passage,  chute  des  eaux  d'une  maison.  C'est  ce 
qu'on  appelle  en  certains  lieux  venelle,  c'est-à-dire 
la  séparation  qui  est  entre  deux  maisons  voisines 
dans  laquelle  tombent  les  eaux  des  toits.  «  Si  l'on 
«  donne  une  maison  avec  ses  appartenances,  pour 
<'  les  appartenances  est  entendu  qu'il  donne  les 
«  bannelles,  entrées  et  issues,  conduits,  jettemens 
"  d'eaues  de  la  maison  donnée  seulement,  et  non 
"  pas  terres,  ou  autres  choses  adjacentes  ù  la  dite 
«  maison.  »  (Coat.  Gén.  T.  II,  p.  070.) 

Banneresse,  sm/)s/.  fém.  Femmed'un  banneret. 
«  Princesses,  femmes  d'étal  et  banneresses.  »  (Ilonn. 
delà  Cour,  à  la  suite  des  Mém.  de  l'Ane.  Cheval.) 

I/auteur  du  R.  de  Ger.  de  Rouss.  après  avoir  fait 
rénumération  de  provinces  et  des  grandes  seigneu- 
ries que  son  héros  possédoit  en  France,  en  Flandres, 
en  Allemagne,  en  Espagne  et  en  Lombardie,  ajoute: 

Cent  et  quatorze  comtes  erent,  pour  voire  ses  hommes 
Deux  Dan,  et  quatre  Bers,  et  trois  dalphin  par  sommes, 
De  très  hauts  haiierel.^  :  des  chastellain  sans  nombre 
Avoit  en  son  hommage  ;  les  autres  plus  ne  nomme. 
Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  7. 


Banneret,  adj.  et  subst.  masc.  Qui  a  droit  de 
bannière.  Il  y  avoit  des  chevaliers  bannerets,  des 
écuyers  bannerets  et  des  doubles  bannerets. 

1°  Le  chevalier  banneret  étoit  un  chevalier  d'un 
ordre  supérieur  et  qui  étoit  assez  riche  pour  mener 
à  la  guerre,  sous  son  enseigne,  un  certain  nombre 
de  vassaux.  (Voy.  le  Dicl.  de  Nicot,  au  mot  Baron; 
les  Dict.  de  Monet,  Oudin,  .Cotgrave,  Ménage, 
Corneille  et  Laur.  Gloss.  du  Droit  Fr.  au  mot 
Banneret.)  On  faisoit  un  chevalier  banneret  &n  cou- 
pant les  deux  pointes  qui  pendoient  à  l'enseigne 
des  simples  chevaliers,  qui  par  ce  moyen  devenoit 
carrée.  (Voy.  Petit  J.  de  Saintré,  Avertiss.  p.  H, 
et  l'ancien  cérémonial  cité  par  P.  Daniel,  Mil.  Fr. 
Liv.  III,  ch.  V.)  «  Ils  avoient  à  la  guerre  une  paye 
«  double  de  celle  des  chevaliers.  >>  (Du  Tillet,  Rec. 
des  R.  de  Fr.  p.  319.)  La  Salade  fixe  au  nombre  de 
dix  chevaliers,  ou  écuyers,  bacheliers,  les  vassaux 
nécessaires  à  celui  qui  vouloit  lever  bannière. 
(Voy.  La  Salade,  fol.  54.) 

Cet  ordre  étoit  inférieur  aux  ducs,  comtes, 
barons  et  prélats.  «  Les  ducs,  les  comtes, 
<■  les  barons  et  les  prélats  tiui  feront  contre  ceste 
«  ordonnance  payeront  cent  livres  tournois,  pour 
«  peine,  et  sont  tenus  faire  garder  ceste  establis- 
.<  sèment  à  leurs  subjets,  en  quelque  estât  qu'ils 
<c  soient,  et  en  telle  manière  que  si  aucun  bannier 
«  fait  encontre,  il  payera  cinquante  livres  tournois, 
«  et  les  chevaliers  ou  les  vassaux  vingt-cinq 
«  livres.  »  (Ord.  de  Ph..le  Bel,  de  1294.)  Cette  or- 
donnance n'est  pas  dans  le  recueil.  On  trouve 
chevalier  banneret  dans  Froissart,  Liv.  I,  p.  278;  et 
dans  l'Inventaire  de  Joyaux  et  meubles  de  Ch.  V, 
à  la  suile  de  son  Hist.  par  Choisy,  p.  540,  on  lit 
chevalier  bnnnicourt. 

2"  L'écuijcr  banneret  étoit  celuy  qui,  ayant  par 
son  fief  le  droit  de  bannière  et  un  nombre  de  vas- 
saux suffisans  pour  la  lever,  n'avoit  cependant  pas 
encore  été  reyu  chevalier.  Il  en  est  fait  mention 
dans  les  revues  rapportées  par  Du  Chatelet,  Hist. 
de  B.  Du  Guesclin,  p.  431.  Suivant  la  Roque,  les 
écuyers  bannerets  précédoient  les  chevaliers,  et 
cela  sur  l'autorité  de  leur  bannière  et  le  comman- 
dement qui  leur  étoit  attribué  par  le  roi.  (Voyez  la 
Roque,  Traité  de  la  Noblesse,  p.  397.  —  Voyez  les 
Dict.  de  Borel  et  de  Corneille.) 

3°  Le  double  banneret  étoit  celui  qui  avoit  double 
bannière.  Eust.  Deschamps  le  qualifie  ainsi ,  parce 
que  deux  rivaux  partageoient  avec  lui  les  faveurs 
de  sa  maîtresse: 

J'ai  grant  joye,  quant  je  lui  asséné 
A  si  doulx  cuer,  et  qui  tant  s'umilie 
Que  banneret  serait  double  clamé 
Deux  compagnons  ayant  ma  compagnie. 

Eust.  Desch.  Poès.  MSS.  fol.  209. 

VARIANTES  : 
BANNERET.  Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr. 
liANNEREL.  Froissart,  Liv.  I,  p.  178. 
Bannie».  Ord.  de  Ph.  le  Bel,  de  1294. 
Bannicourt.  Inv.  deCh.  V,  à  la  suite  de  son  Hist. 


(1)  C'est  Tombe-Issoire,  village  de  200  habitants,  réuni  à  Paris  (14"  arrondissement),  (n.  e.) 


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Danneret,  suJist.  iniisc.  Porle-enseigne.  (Voyez 
Borel,  Dict.)  C'éloil  celui  qui  cloil  chargé  de  porter 
l'enseigne  du  seigneur  i);uiuereL:  «  (Juillaunie  de 
«  Montlieu  avoue  tenir  du  mcme  à  foy  et  liommage 
»  lige,  à  devoir  d'être  son  bannier  et  porter  sa 
«  bannière,  etc.  »  (Ueaumanoir,  sur  les  Coutumes 
de  Beauvoisis,  p.  407.) 

VARIANTES  : 
BANNERET.  Borel,  Dlct. 
B.vNNiER.  Beauman.  notes  sur  les  Coût,  de  Beauv.  p.  407. 

Banni,  partie.  Outre  les  acceptions  qu'il  tire  du 
verbe  bannir,  il  en  avoit  une  remarquable  dans 
cette  expression  :  Baiini  de  lignage ,  c'étoit  celui 
qui  déclaroit  n'être  pas  coupable  d'un  meurtre  ou 
autre  offense,  et  ne  vouloir  prendre  aucune  part  à 
la  guerre  ou  querelle  que  le  coupable  et  toute  la 
parenté  auroient  à  soutenir  contre  les  parens  du 
mort  qui  voudroient  en  poursuivre  la  vengeance 
par  la  voie  des  armes.  (Voy.  Deauman.  p.  302.) 

Bannier,  adjectif.  Qui  a  droit  de  banalité.  — 
Sujet  à  la  banalité.  —  Commun. 

Sur  le  premier  sens,  voyez  Laurière,  Glossaire  du 
Droit  francois,  au  mot  liandier.  On  disoit  en  ce 
sens:  «  Nul  ne  peut  avoir  torel  bannier  [l],  s'i\  n'est 
«  hault  justicier.  "  (Grand  Coutumier  de  France, 
p.  181.)  Il  se  dit  des  fours,  des  pressoirs,  etc.  (Voyez 
Recherches  de  Pasquier,  p.  704.) 

Bannier  a  signifié  sujet  à  banalité:  «  Le  suject 
«  du  seigneur  qui  a  droict  de  baniere  ne  peut,  ne 
«  doit  aller  cuire ,  ne  mouldre  ;^  autre  four,  ne 
«  moulin  que  de  son  propre  seigneur,  dont  il  est 
«  bannier.  >^  (Bouteiller,  Somme  rurale,  p.  904.) 

Moulin  bannable  dans  Pérard  est  cité  aux  ortho- 
graphes. 

Dans  le  sens  de  commun ,  le  pocte  J.  de  Meung  a 
dit: 

Mort  est  à  tous  commune,  mort  est  à  tous  bannière. 
Mais  nul  n'en  peut  sçavoir  ne  l'heure,  ne  la  manière. 

J.  de  lleung,  Cod.  21  et  22. 

Ces  vers  ont  été  expliqués  dans  le  sens  de 
commun,  banal,  par  Borel  et  par  l'auteur  du  Glos- 
saire sur  le  Roman  de  la  Rose.  Nous  disons  encore 
banal  en  ce  sens  pour  désigner  une  chose  dont 
l'usage  est  public. 

On  lit  dans  les  Loix  normandes,  art.  xviii,  en 
parlant  du  denier  de  S'  Pierre  :  «  Le  seigneur  pur 
«  IV  deniers  que  il  dourad,  si  erunt  quites  ses 
«  bordiers,  e  ses  boner  et  ses  serjanz.  «  L'un  des 
traducteurs  latins  explicpie  boner  par  le  même  mot 
boner,  et  l'autre  par  bonnarii.  11  est  expliqué  par 
scabini  dans  l'édition  de  Wilkins.  Je  crois  que  sa 
véritable  signification  est  bannier  (2),  sujet  à  la 
banalité. 

VARIANTES  : 
BANNIER.  Borel,  Dict. 
Banier.  Cotgrave,  Dict. 
Bennier.  Beaumanoir,  p.  140. 


Bandier.  Laurière,  Glossaire  du  Droit  francois. 
Bannable.  Perard,  Hist.  de  Bourg,  p.  483  ;  tit.  de  1255. 
lioNNiER.  (.Lisez  Bannier.)  Nouv.  Coût.  gén.  p.  276. 
Banquier.  Glossaire  du  Droit  francois. 
liANNET.  Nouv.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  3dl,  col.  2. 
Banxeret.  La  Thaumassière,  Coût,  de  Berry,  p.  129. 
Biennable.  Glossaire  sur  les  Coutumes  de  Beauvoisis. 
BONNAL.  (Lisez  Bannal.)  Nouv.  Coût.  gén.  p.  276,  col.  1. 
Boner.  Loi.\  normandes,  art.  xviii. 

Bannier,  sub&t.  ma&c.  Qui  proclame  le  ban. 
Trompelle  public.  Dans  le  Dict.  de  Borel,  celui  qui 
crie  imbliquement  quelque  chose.  C'est  en  ce  sens 
qu'on  a  dit  : 

Lors  fait  faire  commandement 

Par  le  bannier,  qui  eu  l'ost  crie,  etc. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  337,  V. 

On  trouve  sergent  bannier,  pour  celui  qui  fait 
les  proclamations  ou  cris  publics  appelés  bans  , 
dans  les  Assises  de  Jérusalem,  p.  28,  etc.  Son  office 
éloil  de  faire  payer  les  amendes,  de  saisir  et  de 
faire  vendre  les  effets  de  ceux  qui  refusoient  de 
payer.  (Ord.  des  Rois  de  France,  T.  JII,  p.  268.) 

VARIANTES  : 
BANNIER.  Borel,  Dict. 
Banier.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  159. 

Bannière,  subst.  fcm.  Marque  de  dignité.  — 
Banderole.  —  Enseigne,  étendard.  —  Partie  du 
harnois  du  cheval. 

On  distinguoit  le  pennon  de  la  bannière  que  les 
seigneurs  bannerets  avoient  coutume  de  porter.  La 
bannière  étoit  de  forme  carrée  ;  le  pennon ,  au 
contraire,  se  terminoit  en  pointe.  Lorsqu'on  rece- 
voit  un  chevalier  banneret,  on  coupoit  cette  queue, 
et  son  pennon  représentoit  alors  cette  bannière 
dont  il  s'agit.  Plusieurs  auteurs  prétendent  qu'elle 
étoit  propre  aux  seigneurs  bannerets.  Cependant 
nous  lisons  dans  La  Salade,  fol.  54,  «  qu'elle  appar- 
«  tenoit  aussi  îi  tous  royaulx  et  tous  leurs  lieute- 
«  nans,  connestables ,  admiraulx ,  maistre  des 
"  arbalestriers,  et  tous  les  maréchaulx,  sans  estre 
«  barons  ne  banneretz ,  de  tant  qu'ils  sont  officiers 
«  pour  dignitez  de  leurs  offices,  et  non  aultre- 
«  ment.  »'Par  ce  mot  de  baron,  il  faut  entendre 
tout  seigneur  de  fief  érigé  en  comté,  vicomte  ou 
baronnie. 

Les  armoiries  en  bannière,  c'est-à-dire  en  carré, 
éloient  beaucoup  plus  honorables  que  celles  qui 
étoieat  en  écusson,  dont  le  bas  tlnissoit  en  pointe. 
(Voyez  Laurière,  Glossaire  du  Droit  francois.)  Ainsi 
l'on  trouve  ifue  «  le  comte,  vicomte  ou  baron  peut 
c<  porter  baniere,  c'est-à-dire  qu'il  peut  en  guerre 
«  ou  armoirie  porter  ses  armes  en  quarrë,  ce  que 
«  ne  peut  faire  le  seigneur  chastelain,  lequel  seule- 
«  meut  les  peut  porter  en  forme  d'écusson.  » 
(Coût.  gén.  p.  570.  —  Voyez  la  Roque,  Traité  de  la 
Noblesse,  p.  25.) 

Ce  mot,  sans  changer  d'acception ,  a  été  souvent 
employé  pour  signifier  une  autre  espèce  d'étendard 
plus  petit,  une  banderole.  C'est  en  ce  sens  que  l'on 


(1)  Taureau  banal.  -  (2)  Bon«r  correspond  ici,  selon  Du  Cange,  au  latin  bonnarii,  qu'on  trouve  dans  une  Constitution  de 
Charles  le  Gros:  ce  sont  les  possesseurs  d'ua  bonnier  (1  liectare  28  ares),  comme  les  bordiers  sont  les  possesseurs  d  une 
borde.  (N.  E.) 


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a  dil,  en  parlantdeSainIré,  lorsqu'il  enlroit  clans 
les  lices,  il  lenoit  «  en  sa  main  droicle  sa  haniiiere, 
«  là  où  esloit  Nostre-Dame  et  son  enfant,  de 
«  laquelle,  de  pas  en  pas,  il  se  seinnoit.  »  (Petit 
Jean  de  Saintré,  p.  240.)  Olivier  de  la  Marche,  par- 
lant du  même  acte  de  dévotion,  se  sert  du  mot 
ianerole.  (Olivier  de  la  Marche,  Liv.  I,  p.  182.) 

On  disoit  aussi:  «  La  bannière  de  heanlme  » 
pour  la  banderole  qui  se  mettoit  au  haut  du  casque  • 
«  Us  promettent,  estant  arrivés  en  Turquie,  de 
«  prier  qu'on  leur  donne  congé  d'eslre  les  avant- 
«  coureurs,  et  qu'en  ce  cas  ils  porteront  l'enseigne 
.  de  Nostre-Dame  en  baneroles,  alias  bannières, 
«  sur  leurs  salades  ou  sur  les  habillements  de  teste 
«  qu'ils  auront.  »  (Mathieu  de  Coucy,  an  1453 
Hist.  de  Charles  Vit,  p.  G75.)Dans  une  enumératioiî 
des  armures  de  tête,  on  lit  :  ..  Bacinets,  salades  ou 
«  bannières  ou  heaulmes.  -.  (Petit  Jean  de  Saintré, 
p.  253.)  C'étoit  apparemment  cette  bannière  dont 
on  faisoil  le  signe  de  la  croix  dans  les  lices. 

De  lîi,  ce  mot  s'est  pris  pour  drapeau,  étendard, 
enseigne  militaire,  dans  ce  passage  : 

Destriers  entre  Flamens  s'embatent, 
Des  quiex  Tiin  verse,  l'autre  blesse, 
Au  travers  d'eux  rompent  la  presse 
En  tel  manière  qu'en  alant 
Va  leur  frontière  dévalant 
A  plus  de  Lxxx  banieres, 
Jusqu'es  tentes  le  roi  premières. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  3G0,  V. 

On  appeloit,  en  ce  sens,  bannière  de  France,  le 
drapeau  de  nos  anciens  rois,  lorsqu'ils  alloient  à  la 
guerre.  C'etoit  le  plus  grand  étendard  de  tous  et 
le  plus  orné.  Il  étoit  semé  de  fleurs  de  lis  sans 
nombre.  On  le  plaçoit  toujours  au  centre  de  l'ar- 
mée, et  l'oiin'étoit  censé  vaincu,  que  lorsque  les 
ennemis  l'avoient  enlevé.  Cet  étendard,  qui  fut 
depuis  appelé  co?wWc  blanche\\),  étoit  différent  de 
la  bannière  de  S-  Denis.  On  ne  portoit  l'orillamme 
que  dans  les  cas  extraordinaires.  (Dict.  de  Borel 
et  de  Nicot.) 

Enfin ,  le  mot  bannière  semble  mis  pour  une 
partie  du  harnois  du  cheval,  dans  un  compte  de 
1  argentier  du  roi,  en  1351,  cité  par  Du  Gange,  au 
mo  Tumca.Ow  y  lit  :  «  Pour  six  pièces  de  camocas 
«  mans  :\  faire  deux  harnois  de  cheval-  c'est 
■■  assavier  colliere,  crupiere,  bannière,  panonceaux 
«  ettumcle.  »  (Voyez  le  Closs.  latin  deDu  Cange 
au  mot  Tunica.)  Froissart  se  sert  de  l'expression 
bannières  de  chevaux  pour  désigner  ceux  nui 
avoient  été  tués.  Il  ajoute  qu'on  les  releva  pour 
dire  qu  on  en  fournit  de  nouveaux  ;  ce  qui  fait 
présumer  que  l'on  mettoit  des  banderoles  sur  la 
tête  des  chevaux.  (Voyez  Froissart,  Liv.  I,  n  23  ) 

Expressions  à  remarquer  : 

1°  Prince  à  bannière,  seigneur  banneret  : 

Va  li  rois  la  ville  assegier, 

0  lui  mainz  princes  à  bannières. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  149,  R». 

2'  Chefs  de  bannière.  (Voyez  le  Glossaire  latin  de 


Du  Gange,  au  mot  Bandornenses.)  G'étoient  les  capi- 
taines de  quartiers  dans  une  ville. 

3°  Majeur  de  bannière  semble  signifier  la  même 
chose  que  chef  de  bannière.  Dans  la  liste  des  gens 
du  tiers-etat  de  la  ville  d'Abbeville,  on  lit  :  «  David 
«  dii  Groq,  majeur  de  bannière.  (Nouv.  Coutumier 
gênerai,  p.  108.) 

4°  Fief  de  bannière  désigne  un  fief  de  dignité  • 
on  en  donnoit  l'investiture  par  une  bannière.  (Vov' 
le  ^loss.  lat.  de  Du  Cange,  au  moi  FeudumvexilltS 

f  lanniere  allumée.  Robert  d'Artois,  après  la 
bataille  de  S'  Orner,  en  1340,  rentra  dans  son 
camp    «  L!i  bannière  esloiiimoulealinnée;  mais 

DenisMfoTloi^Vy  '"'''''•  "  ^'^"'^"-  '' '' 
G"  Les  danies  de  grande  bannière  étoient  les 
femmes  des  chevaliers  bannerets  :  «  Item  les  dames 
«  de  bannières  grandes  ont,  en  leur  gésine,  le  grand 
«  lict  et  une  couchette  à  un  coing  de  la  chambre.  » 
(Honn.  de  la  Cour,  ms.  p.  54.) 

7°  Cent  ans  bannière,  cent  ans  civière.  C'étoit 
une  façon  de  parler  proverbiale,  pour  exprimer 
1  instabilité  des  choses  humaines  et  les  révolutions 
quelles  éprouvent.  C'est  en  ce  sens  que  le  peuple 
dit  des  maisons  nobles,  qu'elles  sont  «  cent  ans 
-^^bannieres    cent  ans  civières.  .  (Rech.  de  Pasq. 

8°  Entrer  en  bannière,  la  lever,  la  porter,  la 
relever  el  la  développer.  Toutes  ces  expressions 
dillerenles  ont  aussi  diverses  significations.  On 
disoit  : 

Entrer  en  bannière,  pour  être  reçu  chevalier 
banneret. 

Lever  la  bannière,  c'étoit  acquérir  un  fief  à 
bannière. 

l'or  ter  bannière,  c'étoit  marcher  en  guerre 

Relever  bannière,  c'étoit  succéder  à  une  maison 
éteinte  de  bannerets,  et  obtenir  du  prince  la  per- 
mission de  relever  la  bannière. 

Développer  bannière,  c'étoit  être  fait  chevalier 
banneret  par  le  prince,  ou  général  d'armée,  parce 
qu  ayant  celte  cérémonie,  la  bannière  estoit  enve- 
loppée. (Menest.  de  la  Chev.  p.  156  et  159.) 

9"  Emporter  la  bannière  étoit  une  expression 
figurée,  en  parlant  de  Dieu  : 

Dieu  qui  tout  flst,  emporte  la  bannière. 

Percef.  Vol.  I,  fol.  64,  V  col.  ). 

10°  Faire  porter  bannière  se  disoit  figurément 
pour  donner  l'avantage,  assurer  la  supériorité  : 

Fi  de  li  nulul  ne  tient  à  anui, 
S'il  n'est  et  faus,  et  trichieres  ; 
Celui  fait  porter  banicre  ; 
Le  loial  mal  endurer  ; 
Jou  ne  mi  voel  plus  fier. 

Poès.  MSS.  du  Vatican,  n"  1490,  fol.  84,  R-  col.  1. 

11°  Porter  l'escu  et  la  banicre  d'avarisce  signifioit 
être  avare  : 

Li  clergiez,  où  honor  deust  estre  pleniere. 
Portent  d'avarisce  l'escu  et  la  baniere. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  337,  R'col.  S. 


18^4,  ki°-&J).'(x.  E.r  '^""°"  ''  controversée,  les  Recherches  mr  les  Drapeaux  français,  de  M.  Desjardins  (Paris,  Morel, 


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BA 


12°  Faire  bannière,  c'esl-ii-dire  faire  Iropliée,  se 
vanter  : 

Ce  bel  honneur  dont  vous  faites  bannière. 

Les  Marg.  delà  Marg.  fol.  316,  V. 

Pasquier,  faisant  le  parallèle  des  Romains  et  des 
Gaulois,  dit:  »  En  tant  (|ue  louelie  le  Camille  tant 
«  recliaiilé  par  les  Romains,  et  dont  à  cliaque  propos 
«  ils  l'onl  bannière  contre  nous,  pour  quehiue 
«  victoire  qu'il  rapporta  de  nous  pendant  le  siège 
«  du  Capitole,  je  croy  qu'il  leur  eustestédu  tout 
«  plus  séant  de  s'en  taire.  »  (Recli.  de  Pasquier, 
Livre  I,  page  13.) 

VARIANTES  : 
BANNIERE.  Orth.  subsist. 

Baniebe.  Fabl.  MSS.  du  R.  nû  7218,  fol.  127,  R»  col.  2. 
Banyere.  Gace  de  la  Bigne  des  Déduits,  MS.  fol.  58,  R". 
Beniere.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  T.  I,  fol.  101,  Y»  col.  1. 

Bannir,  verbe.  Pulilier,  ordonner.  —  Convo- 
quer. —  Défendre,  prohiber. 

Au  premier  sens,  bannir  a  signifié  publier,  or- 
donner. (Voyez  le  Dict.  de  Borel.) 

Par  toute  Normandie,  fist  crier,  et  banir 
Qu'il  y  ait  tant  hardi  qui  ost  autre  assaillir 
Meson  ne  viUe  ardoir,  ne  rober,  ne  tollir. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  50. 
A  chacun  rouva,  et  bany, 
Que,  au  terme  qu'il  estably, 
Venist  chascun  o  sa  navie. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  85. 

De  là,  on  a  dit  bannir  pour  convoquer  par  une 
proclamation.  Ainsi  osl  banni  signifioit  les  vassaux 
convoqués  par  cri  public  pour  se  trouver  à  la 
guerre.  (Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.) 

Enfin  bannir  signifioit  aussi  prohiber,  défendre 
par  un  ban  ou  cri  public.  (Voyez  La  Roque,  de 
l'Arrière-ban,  p.  8.) 

VARIANTES  : 
BANNIR.  Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr. 
Banir.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  50. 

Bannis  et  Caboches,  subst.  ma&c.  plttr.  Noms 
de  faction.  Ces  noms  furent  donnés  aux  bouchers 
de  Paris,  partisans  du  duc  de  Bourgogne,  qui  se 
retirèrent  dans  son  pavs  en  1413.  (Yoy".  Al.  Chart. 
Hist.  de  Charles  VI  et  VII,  p.  28.) 

Bannois,s!( /s/.  )««sc.  Ce  mot  devoit  signifier  une 
cloison  formée  de  claies  ou  de  pieux,  pour  renfermer 
le  poisson  dans  l'eau.  Nous  trouvons  dans  une  con- 
cession de  privilège,  en  faveur  des  bourgeois  de 
Maisière-sur-Meusè,  Eibl.  de  Cangé  :  «  Chascun 
«  bourgeois  puelt  avoir  sa  nasselle  au  rivage  du  dit 
«  Mézières,  sa  huge,  bannois,  bondiers,  et  autres 
«  vaisseaux  à  mettre  poissons.  » 

Banoier,  verbe.  Voltiger,  flotter.  Du  mot  ban- 
nière. (Voyez  ce  mot.) 

Armeures  luisanz  flamboient, 
Baniéres  panons  banuient 
Quant  encontre  le  vent  se  plient. 

G.  Guiart.  ils.  fol.  301,R'. 


Banque,  snbst.  niase.  Banquier.  «  Le  Roy 
«  entend  que  le  dit  tributvienneès-mainsde  nostre 
«  dit  S.  Père,  comme  il  a  accoustumé  et  baillera  le 
«  dit  sieur  banques  pièges,  et  respondans  à  Rome 
«■  de  bailler  les  dits  deniers  qui  viendront  du  dit 
«  tribut  de  quarante  mille  ducats,  à  nostre  dit 
«  S'  Père,  ainsi  que  l'on  accoustumé.  «  (Lettr.  de 
Rab.  p.  75.) 

Banque  (lettres  de),  subst.  fém.  Lettres  de 
change.  (Voy.  Mém.  du  Bell.  Liv.  IV,  fol.  101.) 

Banque,  subst.  fém.  Théâtre.  C'est  la  significa- 
tion de  ce  mot  dans  cette  expression  :  monter  en 
fertHr/(/t',  qui  signifie  faire  le  baladin;  de  là  le  mot 
saltimbanque.  «  .Je  ne  croyois  pas  qu'un  jésuite 
«  voulust  dépouiller  sa  gravité,  et  monter  en  ban- 
«  que  (1)  pour  nous  faire  monstre  de  ses  folies.  » 
(Préf.  de  la  Défense,  par  Est.  Pasq.  p.  6.) 

Banquerie,  subst.  fém.  Métier  de  banquier. 
«  Ce  bon  docteur  estoit  nommé  Pseudomanthanon, 
«  très  sçavant  maistre  es  ars  de  sa  profession,  qui 
«  estoit  magie  cabale,  Thalmud,  hypocrisie....  tian- 
«  querie,  usure,  intéresserie,  etc.  »  (Alector,  Rom. 
fol.  35.) 

Banquei'otier,  subst.  masc.  Banqueroutier. 

(Dict.  de  Cotgrave.) 

Banquet,  subst.  masc.  Repas.  Banquet  entre 
les  repas  et  après  souper.  «  Le  lundy  quinzième  le 
«  roy  Charles  VII  disna  à  l'hostel  de  la  ville,  et  alla 
«  souper  en  l'hostel  d'un  cardinal  joignant  la  grand 
«  Eglise,  oi^i  les  dits  seigneurs  de  Siene  envoyèrent 
>'  leurs  trompettes,  clairons  et  autres  instrumens 
«  pour  rejouyr  le  Roy.  Après  souper  le  Roy  alla  à 
»  un  banquet  (2)  à  l'hostel  de  ville.  »  (André  de  la 
Vigne,  Hist.  de  Charles  VIII,  p.  152,  an  141)5.) 

Banquetenient,  subst.  masc.  L'action  de  ban- 
queter, de  manger  à  un  banquet.  (Dict.  de  Monet, 
de  Rob.  Est.  et  de  Cotgrave.) 

Banquetei'ie,  subst.  fém.  L'action  de  tenir 
table.  Rob.  Estienne  l'explique  par  banquet. 

Banqueteui*,  subst.  masc.  Convive.  (Dict.  de 
Rob.  Estienne  et  d'Oudin.)  Platon  veut  «  que  les 
«  banqueteurs  soient  couronnés.  »  (Bouchet,  Ser. 
Liv.  I,  p.  32.) 

Bant,  subst.  mase.  Limite,  borne.  Vieux  mot 
flamand. 

Banz,  subst.  masc.  Banc,  siège.  —  Officiers  de 
justice.  —  .luridiction.  —  Question.  —  Torture.  — 
Etau.  —  Table.  — Banque.—  Instrument  de  pécheur. 

Ce  mot  signifie  ordinairement  un  siège  dans 
son  acception  propre,  à  la  réserve  de  ban  qui 
signifie  communément  proclamation,  comme  je  l'ai 
dit  à  son  article.  Il  semble  cependant  avoir  désigné 


(i)  On  trouve  dans  la  Satyre  Ménippée  :  «  Le  charlatan  estoit  monté  sur  un  petit  eschaffaut  jouant  des  regales  (epinette), 
et  tenant  banque  comme  on  en  voit  assez  à  Venise  en  la  place  S'-Marc.  »  Le  «  banquiste  »,  comme  on  dit  encore  dans  la 
peuple,  est  comparé  à  un  changeur  :  les  planches  sont  un6a?ic  sur  lequel  il  débite  des  plaisanteries  pour  marchandises,  (n.  e.^ 
—  (2)  Le  mot  se  trouve  au  xiv  siècle,  dans  Froissart.  Au  xvn«  siècle,  les  puristes  ne  rappliquaient  qu'au  banquet  sacre 
de  l'Eucharistie.  (N.  E.) 


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-  393  — 


BA 


aussi  quelquefois  de  grosses  pièces  de  bois  ou  de 
pierre  que  l'on  roulait  sur  les  tissiégeans,  lorsqu'ils 
donnoient  l'assaut.  On  a  employé  cette  même 
orthographe  pour  désigner  des  espèces  de  bancs 
qui  servoient  d'étais.  »  ils  firent  soutenir  sur  bonnes 
<■  étales  et  sur  grans  bans  pesans,  eic.  »  (Ilist.  de 
Du  Guescl.  p.  98.)  Il  est  probable  que  ces  pièces  de 
bois,  ces  étais  étoient  ainsi  nommés  parce  qu'ils 
étoient  taillés  comme  des  bancs. 

Le  P.  Labbe  assure  qu'on  a  dit  banquet  pour 
petit  banc.  Nous  disons  encore  dans  ce  sens  ban- 
quette. Ainsi  le  mot  dont  il  s'agit  ici,  selon  toutes 
les  orthographes  que  j'ai  citées,  a  servi  pour  dési- 
gner un  siège,  ce  ([ue  nous  nommons  encore  un 
banc.  On  lit  dans  Alhis,  ms.  fol.  114,  V°  col.  2: 
En  un  lit  sistrent  leza  lez  ad  hanc. 

Ce  même  mot,  pris  au  figuré,  avoit  plusieurs 
acceptions  différentes  que  je  vais  marquer. 

Comme  les  officiers  de  justice  siégeoient  sur  des 
bancs,  on  a  employé  le  mot  de  banc  pour  désigner 
les  officiers  mêmes.  «  Un  banc  entier  de  la  loi, 
«  c'est-à-dire  composé  de  sept  échevins  au  moins.  » 
(Coût.  gén.  T.  I,  p.  992.)  «  Les  officiers,  hommes  de 
«  fief,  échevins,  représentant  les  trois  banqs  du 
c  pays.  ..  (Ibid.  p.  311.) 

On  opposoit  les  justices  en  bank,  aux  justices 
ambulantes,  et  qui  faisoient  des  tournées.  «  Ascune 
«  foitz  par  devant  nos  justices  errauntz,  et  ascune 
"  foitz  en  bank  à  "Westminster.  »  (Brit.  Loix  d'Ang. 
fol.  222.) 

Les  officiers  de  ces  justices  «i  banc  étoient  dis- 
tingués entre  eux,  comme  le  prouve  ce  passage,  oîi 
nous  lisons  :  «  Les  bailly  et  les  eschevins  du  haut 
«  ifl»f  ont  la  police,  et  le  gouvernement  d'icelle 
«  ville.  ..  (Coût.  gén.  T.  I,  p.  047.) 

On  disoit  aussi  bancq  esclievinage,  pour  un  corps 
de  ville.  (Voy.  Nouv.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  37G.) 

Par  une  extension  naturelle  de  celte  dernière 
acception,  ce  mot  a  signifié  juridiction,  le  res- 
sort d'une  justice,  dans  le  passage  qui  suit  :  «  Les 
«  fiefs  et  autres  biens  cens  aux  cens  et  rentes  situez 
«  dans  la  ville  et  sa  franchise,  resortans  sous  les 
«  bancs  de  S'°  Gertrude,  les  aliénations,  transports 
0  en  charges,  et  obligations  desquels  se  doivent 
«  faire  par  devant  les  dits  bancs.  »  (Coutumes  géné- 
rales, T.  I,  p.  1245.) 

Le  mol  banc,  pris  dans  le  sens  de  question,  tor- 
ture, semble  faire  allusion  au  tréteau  sur  lequel  on 
étendoit  le  criminel.  (Voy.  Nouv.  Coul.  gén.  T.  I, 
p.  740),  oîi  nous  trouvons  banc  de  la  torture.  On  lit 
(Ibid.  p.  1001)  :  «  Lorsqu'on  veut  aller  au  banc,  ou 
«  à  la  torture,  elle  se  fait  en  la  présence  du  grand 
«  bailly,  sous-bailly,  et  du  collège  des  eschevins 
«  au  moins  de  sept.  » 

On  se  servoit  aussi  du  mot  banc,  pour  signifier 
un  étau,  une  boutique,  «  pour  chascun  banc,  ou 
«  estai  de  quelque  denrée  que  ce  soit.  »  (La  Thaum. 
Coût,  de  Berry,  p.  129.)  Bail  est  employé  en  ce 
même  sens  dans  les  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  V,  p.  681. 

Danc  est  mis  pour  table  en  ce  passage  :  "  Après 
«  le  conseil,  disnoient  tous  ensemble,  "et  se  mettoit 
II. 


"  le  duc  de  Berry  et  de  Bretagne  au  banc,  le  comte 
»  de  Charolois  et  le  duc  Jean  de  Calabre  au  devant, 
«  et  portoit  le  dit  comte,  honneur  à  tous  comme  à 
«■  l'assiette.  ■>  (iMém.  de  Comines,  p.  59.) 

La  nape  mise  au  long  d'un  hanc. 

Coijuillart,  p.  167. 

Ba7ic  signifioit  quelquefois  le  lieu  où  les  ban- 
quiers paient  à  bureau  ouvert,  la  caisse,  le  colïre 
où  ils  enferment  leurs  effets.  «  Vingt  mille  ducats 
«  contans  qu'il  avoit  à  son  banc  en  la  ville.  »  (Mém. 
de  Comines,  p.  578.)  «  Sous  couleur  qu'on  n'auroit 
«  le  loisir,  eu  égard  à  la  proximité  de  l'ennemy  de 
«  faire  le  payement  des  gens  de  pied  à  la  banque 
«  fut  ordonné  h  chacune  enseiane  son  Ihrésorier.  » 
(Mém.  de  Du  Bellay,  Livre  X,  fol.  321.) 

Enfin  ce  mol  désigne  un  instrument  de  pêcheur, 
dans  les  Ordonn.  des  Rois  de  France ,  où  nous 
lisons  :  «  Puissent  pescher  par  le  dit  temps,  depuis 
«  my-mars  jusqu'à  my-mai,  en  la  manière  qu'ils 
«  ont  fait  du  temps  de  nos  prédécesseurs,  et  du 
<•  nôtre,  c'est  à  syavoir,  à  banc,  raooles  loyaux ,  et 
«  hamessons.  »  (Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  V,  p.  208.) 

Nous  placerons  ici  quelques  expressionsqui  nous 
ont  paru  mériter  d'être  remarquées  : 

1°  Bancs  plaijdoyables,  c'es,l-h-A'ne\e  lieu  où  Ton 
plaidoit  les  causes.  «  Les  bancs  playdoyables  de  la 
«  seigneurie.  >•  (Coul.  gén.  T.  II,  p.  918.) 

2°  Banc  dossier  et  doulcier.  Banc  à  dos.  (Dict.  de 
Monet.) 

3°  Sans  baiics  et  sans  selles,  c'est-à-dire  sans 
formalité.  «  Ils  font  les  nopces  sans  bancs,  et  sans 
«  selles  à  l'advanlure.  »  (Les  Quinze  Joyes  du  Ma- 
riage, p.  157.) 

4"  Ne  tenir  banc,  ne  lice,  c'est-à-dire  n'observer 
pas,  transgresser. 

Or  vient  le  terme  brief 

De  cet  aige  convoiteux  en  malice  ; 

Ses  dix  commans  ne  tenons  banc,  ne  lice. 

Eust.  Desch.  Po5s.  MSS. 

5°  Crier  bancs  et  le  cbalUct.  Façon  de  parler  fai- 
sant allusion  à  la  publication  des  bans  de  mariage. 
«  Deshuy  au  soir  fais  en  crier  les  bancs  et  le  chal- 
a  lict.  ..'(Rabelais,  T.  III,  p.  146.) 

Proverbes  : 
1»  L'on  ne  prent  mie  lou,  ne  goupil  souz  son  banc. 

Rom.  de  Rou,  MS. 

2°  Je  n'en  irai  pas  ch(  banc  au  feu. 

Dicl.  de  Col^rave. 

TARUNTES  : 
BANZ.  Hist.  de  Du  Guescl.  p.  98. 
Banc.  Percef.  Vol.  III,  p.  86,  col.  1. 
Banch.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7989,  fol.  210,  V». 
Bancq.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  313. 
Bank.  Britt.  Loix  d'Angl.  fol.  222,  V». 
Banke.  Id.  ibid.  fol.  37,  V». 
B.VNQUE.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  601. 
Banquet.  Labbe,  Gloss. 

Baonnois,  subst.  masc.  Bayonnois. 

Baptisement,  sul)S.  masc.  Baptême. — L'action 
de  baptiser. 
Au  premier  sens,  nous  trouvons  ces  vers  : 

Jurez  le  saint  sacrement 
Vostre  foy,  vo  baplisewcnt 

Eusl.  Desch.  Poês.  MSS.  fol.  374,  col.  3. 

50 


BA 


—  39i 


BA 


Au  second  sens,  ce  mot  signifie  raction  de  conférer 
le  baptême,  dans  ces  vers  : 

Isayes  prophétisa, 
Dame,  le  doux  avènement 
De  celui  qui  vous  baptisa  ; 
Et  après  le  bapUscmciit,  etc. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  18G,  V  col.  2. 

VARUNTES  : 
BAPTISEMENT.  Chron.  S.  Den.  T.  III,  fol.  10. 
Batissement.  Etat  des  offîc.  des  D.  de  Bourg,  p.  228. 
Bautestire.  Rom.  de  Hou,  MS.  p.  37. 
Baptestire.  Du  C.  Gloss.  lat.  au  mot  Baplislerinin. 
Batestire  Ph.  Mousk.  MS.  p.  198. 
Batame.  Id.  ibid.  p.  141. 
Bauptesme.  Poës.  MSS.  av.  1300,  p.  880,  T.  II. 
Bautesme,  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  II,  fol.  180. 
Baittesme.  Ibid.  fol.  186,  Y°  col.  1. 

Baptiser,  verbe.  Baptiser.  —  Ordonner,  taxer. 
—  Nommer,  qualifier. 

Sur  le  premier  sens  baptiser,  voyez  le  Dict.  de 
Borel  et  le  Glossaire  du  Roman  de  la  Hose,  au  mot 
Baptoyer  (I). 

Tu  es  le  fils  Dieu  baployé. 

J.  de  Meung,  Tesl.  238. 

L'auteur  du  Roman  d'Atliis,  exprimant  les  regrets 
d'une  mère  payenne  sur  la  perte  d'un  fils,  lui  fait 
dire  : 

Chevalerie  t'engendra. 
Et  Largece  te  buplisa. 

Alhis,  MS.  fol.  127,  R-  col.  2. 

Baptiser  signifioit  aussi  ordonner,  taxer,  selon 
Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr. 

Enfin  baptiser  se  disoil  pour  nommer,  spécifier, 
qualifier.  «  Qu'il  y  eust  alliance  ou  promesse  parti- 
«  entière  entre  eulx  deux,  et  telle  qu'il  l'avoit 
«  baptisée,  il  ne  la  trouveroit  point.  »  (Arrest.  amor. 
p.  137.) 

Expressions  à  remarquer: 

1°  Baptiser  un  héraut  ou  un  poursuivant,  c'étoit 
leur  donner  un  nouveau  nom.  Cette  cérémonie  se 
faisoit  en  leur  versant  sur  la  tète  une  coupe  d'or 
pleine  de  vin.  (Voy.  Fav.  Th.  d'Honn.  p.  59.) 

2°  Enfant  difficile  à  baptiser.  Expression  prover- 
biale qui  paroit  avoir  servi  de  titre  à  quelque  conte. 
(Voy.  Menagiana,  T.  II,  p.  21.) 

3°  Baptiser  le  temps,  le  fixer,  le  déterminer.  -<  Le 
«  Bailly  doit  donner  souffrance  une  fois  seulement 
«  et  non  plus....  et  encore  à  celle  seule  fois  doit-il 
«  baptiser  le  temps.  «  (Gr.  Goût,  de  Fr.  p.  190.) 

4°  Haptiser ai)jiellntion,grief  et possession,c'étOii 
spécifier  les  preuves,  les  moyens  et  les  raisons  sur 
lesquels  on  les  fonde.  (Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.) 

variantes  : 
BAPTISER.  Mém.  du  BeU.  Liv.  IV,  fol.  108,  V°. 
Baptizer.  Style  de  proc.  au  pari,  de  Norm.  fol.  81. 
Baptoyer.  liorel,  Dict. 
Bautiper.  Fabl.  MSS.  du  R.  n°  7982,  fol.  70. 
Bautisier.  Ibid.  fol.  73,  R»  col.  1. 

Baptistle  et  Baptistles.  Surnom  de  S'  Jean. 


(Voy.  S.  Bern.  Serm.  Fr.  mss.  p.  41.)  Dans  le  latin 
Baptista. 

Baptizons  (jour  des).  Expression  forgée  par 
Molinet. 

Les  cendres,  se  nous  ralizons. 
Aurons  le  jour  des  haptizoxs. 

Molin.  Caleiidr.  Burletq.  p.  195. 

Baptu,  partie.  Battu. 

Baquete,  subst.  fém.  Monnoie  de  Béarn.  On  la 
nomme  ainsi  à  cause  des  vaches  qui  y  sont  repré- 
sentées. «  Six  baquets  font  un  double.  »  (Dict.  de 
Borel,  au  mot  Yaquete.) 

variantes  : 

BAQUETE.  Rab.  T.  III,  p.  226. 

Vaquete.  Borel,  Dict. 

Bar,  subst.  masc.  Barbeau.  «  D'où  vient  qu'on 
«  parle  ès-armoiries  des  bai's  adossés.  »  (Dict.  de 
Borel.) 

Sur  les  côtes  de  Normandie  (2),  il  y  a  un  poisson  de 
mer  qu'on  appelle  Jiar  et  qui  tient  beaucoup  du 
mulet,  sinon  qu'il  est  un  peu  moins  rond  et  que 
l'écaillé  en  est  plus  petite  et  plus  argentée. 

Menquent  les  bars 

Les  saumons  et  les  truites. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7615,  T.  II,  fol.  lil,  R°  col.  2. 

VARIANTES  : 
BAR.  Borel,  Dictionnaire. 
Babt.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  I,  fol.  104,  V»  col.  2. 

Bar,  subst.  mase.  Le  sens  de  ce  mol  est  difficile 
à  déterminer  dans  ce  passage  : 

Mors  qui  pris  ou  mors  de  pome 
Primes  en  famé,  pus  en  home 
Qui  bar  le  siegle  comme  toille, 
Va  moi  saluer  la  grant  Rome..,. 
Rome  est  li  mail  qui  tôt  assome. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7015,  T.  I,  fcl.  lO-!  bis,  V°  col.  î. 

La  signification  de  ce  mot  paroit  moins  incer- 
taine dans  ces  vers,  où  l'on  pourroit,  ce  semble, 
lui  assigner  celle  de  Irébuchet  en  un  sens  figuré  : 

Vous  ne  povez  fouir  le  cours , 
Nous  savons  les  pas,  les  passages, 
Ci  demorrez  por  les  ostages 
Au  bar  vous  a  le  pape  pris. 

Hisl.  de  Fr.  en  vers,  à  la  suile  du  R.  de  F.  MS.  du  R.  fol.  66. 

Bar  étoit  un  nom  propre  de  ville.  Les  écrevisses 
de  Bar  éloient  passées  en  proverbe  dès  avant  l'an 
1300.  (Voy.  Prov.  mss.  T.  IV,  p.  1G53.) 

Bar  (3),  adv.  Heureusement,  bien.  Ce  mot 
étoit  presque  toujours  uni  au  participe  né,  du 
verbe  naitre. 

Cil  bar  fu  nez  qui  est  à  ese 

Et  ne  sent  riens  qui  li  desplaise. 

Parlon.  de  Blois.  MS.  de  S  Gerra.  fol.  163,  V°. 
Tout  cil  seroit  boer 
Né,  dont  eUe  proiera. 

Poès.  MSS  avant  1300,  T.  II,  p.  831. 

variantes  : 
BAR.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  156. 
Boeu.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  831. 
BuER.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  55. 


(1)  Le  mot  se  trouve  dans  la  Chanson  de  Roland  (str.  268).  Comme  disait  Calvin  (Instit.,  p.  1062,  Genève,  1561)  :  «  Le  mot 
mesme  de  baptiser  signifie  plonger.  »  Il  vient  en  effet  du  grec  ^anxCÇuv,  à  cause  de  l'immersion  complète  en  usage  dans 
la  primitive  Eglise,  (n.  e.)  —  (2)  Il  porte  aussi  ce  nom  sur  les  côtes  de  Bretagne,  de  Vendée,  d'Aunis,  de  Saintonge.  (N.  e.) 
—  (.3)  On  dit  encore  barlomj.  (n.  e.) 


BA 


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BA 


Bara  (1),  subst.  masc.  Pain,  pays.  On  trouve  dans 
Borel,  pour  explication  de  ce  mot,  »  pain  comme 
«  aussi  champ  et  région.  >■  (Dict.  de  Borel.) 

Baragouin,  subst.  inasc.  On  entend  ce  que 
signifie  ce  mot.  On  trouve  son  étymologie  dans  les 
Lettres  de  Freron,  sur  les  Ecrits  du  Temps.  (T.  XII, 
Lettre  n,  p.  2G-2.) 

Barat  (2),  subst.  masc.  Litige ,  controverse.  — 
Trouble,  peine,  embarras.  —  Intrigue  d'amour.  — 
Ruse,  tromperie,  trahison.  —  Combat,  déroute.  — 
Profusion. 

Barat  est  explique^  par  litige,  controverse,  dans  le 
Grand  Coutumier  de  France,  p.  343.  Britton  ,  Loix 
d'Angleterre,  fol.  '■2'2i,  s'est  servi  du  mol  bave t  dans 
le  même  sens. 

On  employoit  ce  mot  pour  trouble,  peine,  em- 
barras : 

L'empereur  folie  fist. 

Et  en  grant  banile  se  mist, 

Qui  de'ffiance  te  manda. 

Rom.  de  Brut.  SIS.  fol.  83. 
A  cel  temps  commencha  la  guerre, 
Dont  grant  harate  out  en  la  terre 
Du  duc  Robert,  de  Henry, 
Pour  Costentln  qu'il  li  toUi. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  401. 

Le  mot  baret  a  signifié  mouvement,  agitation.  Il 
est  dit  d'une  grande  ville  où  l'on  entend  des  mou- 
lins qui  tournent  et  oîi  l'on  voit  aller  et  venir  des 
ouvriers  de  toute  espèce,  charpentiers  et  maçons. 

Car  ne  puet  estre  en  la  cité 
Casses  n'I  ait  barat  mené 

Athis,  MS.  fol.  CO,  V'col.  1. 

De  l'embarras  nait  l'intrigue.  De  là,  barat  s'est 
employé  pour  signifier  une  intrigue  d'amour  : 

A  Cambrai  avint  l'autrier, 
Que  Soliers  li  cuveliers, 
Par  son  angin,  et  son  art 
Se  raella  de  grant  barat, 
A  Cam  d'ipre  s'en  ala. 
As  Béguines  s'accointa,  etc. 

Ctiron.  fr.  du  xiu"  siècle,  MS.  de  Bouhier,  ch.  LXvi,  fol.  84.  V°. 

On  trouve  barat,  bar  ad,  bavas,  pour  ruse,  trom- 
perie, trahison,  dans  les  Dict.  de  Borel,  Nicol,  Rob. 
Estienne  et  Ménage,  etc.  Les  François ,  dans  une 
action  contre  les  Espagnols  qui  étoient  armés  pesam- 
ment, les  commencèrent  à  prendre  par  les  épaules 
'<  et  les  trébucher  à  terre  entre  les  piez  des  che- 
«  vaux;  quant  ils  apperçurenl  ce  barat  que  les 
»  François  leur  faisoient,  etc.  »  (Ghroa.  deS'Denys, 
Tome  II,  folio  87.) 

Trop  de  barat  a  en  femme. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  18987. 

Ce  mot  a  été  employé  pour  combat,  déroute  : 

Lors  voissiez  entre  serjans, 

Granz  coupz  d'Engleiz  et  de  Normanz, 

Granz  barates  et  granz  mellàes. 

Roman  de  Rou,  MS.  p.  335. 

Les  François  s'obstinent  à  vouloir  faire  abattre 


au  duc  Richard   de   Normandie   son  château  de 
Tillières. 

Mez  ja  ne  remaindra  par  perte, 

Tant  est  l'ire  entr'euls  descouverte, 

Qui  qu'en  seuffre  puis  la  barate, 

Que  il  Tuillieres  n'abate. 

Roman  de  Rou,  MS.  p.  183. 

De  là  cette  expression  :  mettre  à  la  barate,  pour 
mettre  en  déroule  : 

Ni  ot  François,  n'el  sien  abate  : 
Tous  les  ont  mis  à  la  barate. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  585. 

Enfin  barate  a  signifié  profusion.  En  décrivant 
la  magnificence  du  sacre  de  S'  Louis,  le  poëte  dit  : 

Et  si  avoit  assés  encor 

De  rices  dras  batus  à  or  ; 

Et  de  dras  tains,  et  d'escarlates, 

De  tranciés  à  grans  barates. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  653. 
Quand  je  voi  à  ces  festes, 
Et  de  dras,  et  de  bestes, 
Faire  si  granz  baraz 
Tant  sui-je  plus  iriez. 

Prov.  du  Vilains.  MS.  de  S.  Germ.  fol.  74. 

VARIANTES  : 
BARAT.  Grandes  Coutumes  de  France,  p.  343. 
Barad. 

Barag.  Fabl.  MSS.  du  H.  n»  7615,  T.  I,  fol.  66,  R»  col.  1. 
Baras  (phir.) 

B.\RAZ  (.pli'r.)  Prov.  du  Vil.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  74. 
Baret.  Britton,  Loix  d'Angleterre,  fol.  224. 
Bar.\te,  subst.  fém. 

Barateaulx,  subst.  masc.  Trompeur.  (Dict.  de 
Borel.  —  Yoy.  le  Gloss.  sur  les  Cout.de  Beauvoisis, 
au  mot  Bareteur,  qu'il  explique  par  chicaneur.) 

Je  cuis  que  c'est  un  baresterre. 

Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  p.  121. 

«  En  droit  parler,  l'en  ne  doit  nul  desloial  appe- 
"  1er  sage,  mes  bareteeur.  »  (Beaumanoir,  p.  11.) 

Il  n'a  soz  le  ciel  tel  tiaretel. 

Corloisd'Arl.  MS.  de  S.  Germ.  fol.  83,  V»  col.  1. 

J.  de  Meung,  parlant  de  la  cupidité  des  moines 
mendians,  dit  : 

Mais  s'ung  grant  usuriers  ou  ung  baretieres 
Combien  qu'il  ait  esté  desloyal  ou  pechierres 
Leur  veult  estre  à  la  mort  larges  et  grant  donnierres  : 
Il  mourra  cordelier,  se  il  veut,  ou  preschierres. 

J.  de  Meunj,  Cod.  729-932. 

Ce  mot  fait  au  féminin  b'iratcresse,  trompeuse. 
(Voy.  Rom.  de  la  Rose,  vers  22381-22392.) 

VARIANTES  : 
BAR.\TEAULX.  Borel,  Dictionnaire. 
Barateuu.  Nicot  et  Cotgrave. 
Barateus.  Glossaire  de  Labbe,  p.  532. 
Barateqx.  Cotgrave,  Dict. 
Bareteur.  Beaumanoir,  p.  11. 
Baretel.  Cort.  d'Artois,  MS.  de  S'  Germ,  fol.  83. 
B.\RETERE.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1335. 
Bareterre.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS. 
B.\RETiERE.  Glossaire  du  Roman  de  la  Ro.se. 
Barrelerres  (Rsez  Barelerres.)  Labbe.  Gloss.  p.  498. 
B.vresterre.  Fabl.  JISS.  de  S'  Germ.  p.  12L 
Barretors.  Tenures  de  Littleton. 
Baratëresse,  fém.  Gloss.  du  Roman  de  la  Rose. 


(1)  C'est  le  mot  breton  pain,  uni  dans  l'article  suivant  au  mot  goitin,  vin.  C'était  une  plaisanterie  française  que  de  répéter 
aux  gars  de  la  province  :  «  Baragouinez,  cars  de  Basse-Bretagne,  Baragouinez,  gars,  tant  qu'il  vous  plaira.  »  (n.  e.)  — 
(2)  On  a  voulu  voir  l'origine  de  ce  mot,  qui  sa  retrouve  dans  toutes  les  langues  rom.ines,  dan-s  l'arabe  barthala,  corruption 
d'un  juge,  le  nordique  baratta,  combat,  le  grec  Ttçàttuv,  faire  des  affaires,  d'où  le  verba  haràtati  ;  il  faudrait  encore  tenir 
compte  du  kymri  brad.  (n.  e.) 


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Barater,  verbe.  Tromper.  —  Détruire.  —  Tro- 
quer, éclKinger.  —  Négocier,  traiter.  —  Agir,  se 
remuer.  —  Emprunter, "prendre  à  crédit.  —  Pren- 
dre par  la  tète. 

On  trouve  ce  mot  au  premier  sens,  dans  lesDict. 
de  Nicot,  Monel  et  d"Oudin. 

Feme  s'ele  Tait  mal,  sait  bien  que  faire  doit, 
Quar  se  feme  fait  mal,  et  elle  l'aparçoit, 
Elle  guilo  et  barate,  et  engingne,  et  déçoit. 

Chaslie  Musart,  MS.  de  S.  Gerin.  fol.  105. 

«  Tieing  et  garde  secreltes  touttes  les  clioses 
«  contenues  ès-dites  lettres,  jusques  au  jour  de  la 
•<  ditte  publication,  pour  ce  que,  par  ces  choses, 
X  celuy  qui  avant  les  savoit  ne  puist  baréter  ne 
"  décevoir  celuy  qui  rien  n'en  savoit.  «  (Ord.  des 
Rois  de  France.) 

On  trouve  haretter  pour  frauder,  tromper,  dans 
le  Coût.  gén.  (T.  I,  p.  810.) 

On  disoit  aussi  barater  et  baréter,  pour  détruire, 
ravager.  En  parlant  des  prêtres  qui  font  le  con- 
traire de  ce  qu'ils  prêchent,  on  s'exprime  ainsi  : 

Lor  doctrine  tue,  et  confont 
Ce  qu'assez  dlent,  et  poi  font, 
Diex  ensaigna,  mais  avant  fist  : 
Celé  barate,  et  desconfist 
Que  par  lor  œuvres  contredient, 
Et  sont  contraire  à  ce  qu'il  dient. 

HisU  de  S"  LéocaJe,  MS.  deS.  Germ.  fol.  31. 

Et  cist  avoient  si  graté 
Et  canchié,  et  barète 
Trestout  le  pa'is  environ, 
Qu'il  estoient  clamé  laron. 

Ph.  Slouskes,  MS.  p.  700. 

Baréter  signifioit  aussi  troquer,  échanger.  On 
voit  baratare  pour  permiitare ,  dans  le  Glossaire 
latin  de  Du  Gange. 

Car  peciés  est  de  baréter 
Son  droit  oir,  ne  desireter. 

Ph.  Mouikes,  MS.  p.  670. 

Ce  mol,  SOUS  cette  même  orthographe,  est  pour 
traiter,  négocier,  dans  le  passage  suivant  : 

Li  mariages  présentés 
Par  offisses,  ne  barètes, 
A  soi  li  maie  flame  larde. 

Poës.  MSS.  QTanl  1300,  T.  IV,  p.  1321. 

Baréter  a  été  employé  pour  se  remuer,  agir  ou 
faire  du  bruit.  On  a  dit ,  en  parlant  d'une  armée 
qui  assiégeoit  Rouen  et  qui  décampa  la  nuit  : 

Ceuls  de  Roem  oirent  ceuls  de  l'ost  baréter, 
Mettre  seles,  et  frainz,  et  armes  demander. 

Rom.  de  Ruu,  MS.  fol.  m. 

Dormir  se  velt,  et  reposer 
Car  moult  ert  las  de  baréter. 

Alhis.  MS.  fol.  41,  V  col.  1. 

Baréter  semble  mis  pour  emprunter  ou  prendre 
à  crédit,  dans  ces  vers  : 

Qui  trop  velt  baréter, 
Ne  se  puet  desdeter. 

Prov.  du  Vilain.  MS.  de  S.  Germ.  fol.  57,  R°. 

Enfin,  dans  le  passage  suivant,  baréter  semble 
signifier  prendre  par  la  tête,  par  le  bonnet  ;  alors 
ce  mot  viendroit  de  baret  (1),  bonnet  d'enfant,  peut- 


être  aussi  s'est-il  dit  pour  attraper.  Guillaume,  duc 
d'Aquitaine,  ayant  épousé  un  diable  sous  la  figure 
d'une  jeune  fille,  eut  recours  à  un  prêtre,  qui 
trouva  le  secret  de  le  saisir. 

S'a  la  benoite  aiguë  aprestée 
Qu'uns  clers  li  avoit  aportée 
Pour  mieus  saisir  et  baréter. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  496. 

Remarquons  cette  expression  :  Se  baréter  crun  et 
(Tel  (2),  pour  se  donner  beaucoup  de  mouvement. 

Tant  .Sfc'  baréta  d'un  et  d'el 
Que  toz  jors  sauva  son  chatel, 
Et  ot  assez  de  remanant. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  150,  R-  col.  i. 

VARIAMES  : 
D.YRATER.  Nicot,  Rorel,  Oudin  et  Monet,  Dict. 
Bak.\tter.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  II,  fol.  141. 
Haretter.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  810. 
Careter.  Pli.  Mouskes,  MS.  p.  670,  700,  etc. 

Barateressement ,  adv.  Frauduleusement. 
(Glossaire  sur  la  Coutume  de  Beauvoisis.) 

Baraterie  (3),  subst.  fém.  Tromperie,  trahison, 
fourberie. 

Ly  renars,  qui  tant  est  subtils, 
Estudient  et  est  ententes 
A  tout  barat  et  tricherie, 
Pensa  très  grand  baraterie. 

Eust.  Desch.  Poês.  MSS.  fol.  4Ï4,  col.  2. 

On  ne  parle  fors  de  baraterie 

De  demander,  et  deçà  et  delà, 

Du  bien  d'autruy. 

Ibid.  fol.  261,  col.  2. 

Et  soit  donc  fait  sans  barterie. 

Hisl.  des  Trois  Maries,  MS.  p.  14. 

On  a  dit,  en  parlant  des  joueurs  qui  étourdissent 
de  leurs  cris  ceux  avec  lesquels  ils  jouent,  pour  les 
distraire  de  leur  jeu  et  les  duper  plus  facilement 
par  ce  moyen  : 

Ribauz  qui  portent  les  berlenz 
Ne  resont  pas  de  jouer  lenz  : 
Moult  demainent  grant  braiterie 
A  chascune  baraterie,  etc. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  332.  R'. 

variantes': 
BARATERIE.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  484,  col.  2. 
Bareterie.  Ibid.  fol.  261,  col.  2. 
Barterie.  Ilist.  des  Trois  Maries,  en  vers,  MSS.  p.  14. 

Baratre,  siibst.  masc.  Lieu  inaccessible.  (Dict. 
de  Borel  et  de  Cotgrave.) 

variantes  : 
1ÎAR.\TRE.  lîorel,  Dict. 
Barathre.  Cotgrave. 

Baratresse,  subst.  fém.  Trompeuse.   ^Dorel , 
Dict.)  C'est  le  féminin  de  barateur. 
Baratron,  subst.  masc.  Tdole  des  Sarrasins. 

Sadoine  fait  porter  Mahon 
Et  Apolin,  et  baratron. 

Blanch.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  185. 

Barbacane,  subst.  fém.  Sorte  d'ouvrage  de 
défense.  —  Ornement  de  broderie.  —  Caverne,  sou- 
terrain. 


(1)  Baret  est  pour  barrette,  qui  lui-même  vient  de  birrkus,  roux.  (N.  e.)  -  (2)  El  vient  là  de  aliud.  (n.  e.)  -  (3)  Le  mot 
se  trouve  aussi  dans  Froissart  :  a  Li  autre  disoient  que  ce  estoit  une  bareterie  couverte.  »  ^Froissart,  édition  Kervyn, 
V,  233.)  (N.  E.) 


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BA 


On  appelloit  d'ordinaire  barbacane  (1)  un  retran- 
chementfait  avec  des  nis  et  des  planches  enformede 
parapet  crénelé,  pour  se  mettre  à  couvert  des  traits 
des  ennemis.  (Dict.  de  Moiict,  au  mot  Barbacane.) 
C'étoit  aussi  une  espèce  de  redoute  couverte  de 
madriers,  pour  meltre  les  Iroiipes  à  l'abri,  selon  ce 
passage  de  Joinville  :  "  Pour  retraire  ses  gens  aisé- 
«  ment,  le  roy  fist  faire  une  barbacane  devant  le 
«  poncel,  dont  je  vous  ay  devant  parlé,  et  estoit 
«  faite  en  manière  que  on  pouvoit  assez  entrer 
«  dedans  par  deux  cousiez  tout  ù  cheval.  «  (.foinv. 
p.  58.)  Yoy.  aussi  le  P.  Dan.  Mil.  fr.  T.  I,  p.  604,  où 
il  explique  ce  mot  par  avant-mur.  Il  croit  que  c'est 
le  même  que  baille.  Borel,  au  mot  Barbacane,  cite 
Vigenere,  qui  le  rend  par  créneau. 

On  lit,  au  sujel  d'une  descente  faite  sur  une  côte 
maritime,  au  lieu  nommé  Candelour  : 

A  la  terre  sont  descendu, 
N'a  riens  qui  soit  n'ont  entendu, 
Fors  a  Candelour  assaillir  : 
Car  il  n'y  cuident  pas  faillir. 
La  harbucamic  ont  de  prinsault 
Guingnée,  et  du  premier  assault 
Et  puis  le  chaste!  assaillirent. 

Machaul,  MS.  fol.  124,  R°  col,  2. 

Il  y  avoit  aussi  des  barbacancs  sur  les  vaisseaux. 
«  Es-greigneurs  vaisseaulx  de  guerre  fait  on  la  fois 
«  tours,  créneaux,  et  barbacanes,  ainsi  que  on  fait 
«  de  hauts  murs  et  puissans.  "  (Le  Jouvenc.  p.  8'J.) 

On  nommoit  aussi  barbacanes,  des  ornemens  qui 
se  nietloient  en  broderie  sur  les  habits ,  sur  les 
enseignes  et  les  housses  des  chevaux ,  et  qu'on 
appeloit  ainsi  parce  qu'ils  représentoient  cette 
espèce  de  fortification  qu'on  appelloit  barbacane. 
«  Habillé  d'un  riche  palleto  de  drap  d'or,  houssié 
u  de  brodeure  et  d'orfaverie,  et  sa  devise  de  bar- 
«  Jjacancs.  »  (Du  Till.  Rec.  des  R.  de  Fr.  p.  408.) 
"  Saillit  le  chevalier  à  l'arbre  d'or,  son  cheval 
«  couvert  de  velours  tanné,  à  grandes  barbacannes 
«  de  fil  d'or  en  brodure,  et  lettres  de  même,  à  sa 
u  devise,  et  d'icelles  barbacannes  issoyent  flammes 
«  de  feu.  »  (Mém.  d'Ol.  de  la  March.  Liv.  l,  p.  548.) 
Au  pas  d'armes  de  l'Arbre  d'Or,  en  1408  (Ibid.  p. 
350),  on  lit  :  «  Anlhoine  bastard  de  Bourgogne  por- 
«  toit  pour  enseigne  un  grand  estendar  blanc  à 
"  une  barbacane  de  brodure.  » 

Enfin,  on  disoit  barbacana  pour  souterrain,  ca- 
verne : 

....  En  unglieu,  vers  lamer  Adriane, 
Qu'elle  congneut  en  basse  barbacane, 
Dedans  un  gouffre  obscur  et  bruyneux. 

Jean  Marot,  p.  55. 

Le  même  auteur  l'employé  dans  un  sens  obscène, 
page  198. 

VARI.4NTES  : 
BARBACANE.  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose. 
Barbaquane.  Monstrelet,  Vol.  III,  fol.  59  et  60,  R». 
Barbaquenne.  Ibid.  fol.  59,  V°. 


B.\RBAQmNE.  Fabl.  MSS.  du  R.  n^TllB,  fol.  359,  R»  ool.  2. 
Babbecane.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  à  Sarabara. 
Barbog.\ne.  Borel,  Dictionnaire. 

Bîii'bajan  (2),  stibst.  masc.  Duc.  —  Sorte  d'oi- 
seau. (Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

VARIANTES  : 
RARBAJAN.  Oudin  et  Cotgrave,  Dict. 
Barbazane.  Merl.  Cocaie,  T.  II,  p.  153. 

Bai'baresque,  arfj.  Barbare.  Montaigne,  dans 
ses  Essais,  T.  I,  p.  71,  s'est  servi  de  ce  mot.  On  y 
lit:  »  commandement  &rt/'/^rt?Y'S'y»t'.  »  Labbe  traduit 
barbarin  par  le  mot  latin  barbarus.  On  le  trouve 
au  féminin,  barbarine,  dans  Molinet,  p.  130. 

VARIANTES  : 
BARBARESQUE.  Mont.  Essais,  T.  I,  p.  71. 
Barbarin.  Labbe,  Gloss.  p.  49.  —  Molinet,  p.  130. 

Barbaresquemeiit,  adv.  D'une  façon  bar- 
bare. (Dict.  de  Colgr.  et  Gelthel.  de  Léon  Trippault.) 

Barbarie,  subst.  fém.  Barbarisme,  vice  de 
langage.  (Dict.  de  Monet.) 

Barbarie  (faucon  de),  subst.  fém.  On  distingue 
le  faucon  de  Barbarie  du  faucon  de  Tartarie.  «  Il 
«  se  prend  lorsqu'il  passe  de  Tartarie  en  Barbarie, 
«  estant  passager,  comme  le  pèlerin,  toutes  fois  de 
"  plus  grande  corpulence,  roux  dessous  les  aisles, 
«  et  moult  empiété  de  longs  doigts.  »  (Budé,  des 
Oiseaux,  fol.  114,  R°.) 

Barljarin,  subst.  masc.  Diminutif  de  barbot.  — 

Surmulet,  poisson. 

Ce  mot  est  pris  au  premier  sens,  dans  les  Epith. 
de  Martin  de  La  Porte. 

C'est  aussi  le  nom  d'un  poisson,  appelle  autre- 
ment surmulet.  (Dict.  d'Oudin.) 

Barbarin,  adj.  On  disoit  or  barbarin,  pour 
désigner  une  sorte  d'or. 

D'oc  barbavh>,  st  d'argent  de  copelle 
D'anis,  d'œillets,  de  roses,  et  de  lis, 
Et  de  boutons  avec  l'aube  cueillis, 
J'ay  façonné  cette  couronne  belle. 

Dict.  Etym.  de  Ménage. 

Barbarine,  subst.  fém.  Espèce  de  monnoie  (3). 
(Dict.  d'Oudin.) 

Barbariser,  verbe.  Parler  d'une  façon  barbare. 
—  Nouveauté  dans  le  langage.  «  De  jour  en  jour 
«  les  bons  mots  sont  décriez  entre  ceux  qui  s'écou- 
o  tans  pindariser  à  la  nouvelle  mode,  barbarisent 
«  aux  oreilles  de  ceux  qui  suivent  l'ancienne.  » 
(Apol.  pour  Hérod.  préf.  p.  25.) 

Barbarissime,  adj.  au  superl.  Très  barbare. 
(Yoy.  l'Apol.  pour  Hérod.  préf.  p.  10.) 

Barbasse,  sulist.  fém.  Grande  barbe.  —  Sorte 
d'augmentatif  dans  le  goiit  des  Italiens.  (Oudin , 
Dict.  et  Cur.  franc.) 


(;\)  C'est  une  défense  extérieure  protégeant  une  entrée  et  permettant  de  réunir  un  assez  grand  nombre  d'hommes  cour 
disposer  des  sorties  ou  protéger  une  retraite.  Il  y  avait  des  barbacanes  construites  en  maçonnerie,  en  terre  ;  ce  n'était 
même  parfois  qu'une  simple  palissade.  Elles  affectent  toujours  la  forme  circulaire.  On  donne  pour  étymologie  l'arabe 
bârbâk-klianeh,  galerie  servant  de  rempart  devant  une  porte.  (N.  E.)  —  (2)  C'est  un  nom  du  chat-huant  ;  l'étymologie  est 
barbe  à  Jean.  (N.  E.)  —  (3)  C'est  aussi  une  variété  de  la  courge,  (n.  e.) 


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Barbasse,  subst.  innse.  Barbon.  <■  là  demeure 
«  uu  vieil  barbasse  qu'on  appelle  le  Temps.  »  (Merl. 
Cocaïe,  T.  II,  p.  8.) 

Bai'bass«'s  adj.  n;irbu.  Epillièle  de  bouc,  dans 
les  Epithètes  de  Martin  de  La  Porte. 

Barbaude ,  subst.  fém.  Bière ,  cervoise.  — 
Apprèl  de  laines. 

Le  prumier  sens  se  trouve  attesté  par  les  Dict. 
de  Nicùt,  Monet,  Oudin  et  Cotgrave.  De  là,  barbau- 
dier  pour  bra.sseur  de  bière.  (Ibid.) 

nnrbaude  semble  aussi  signifier  une  espèce  d'ap- 
prêt donné  aux  laines  et  aux  cuirs  en  les  lavant. 
On  a  appelé  barhaudiers  ceux  qui  l'aisoienl  cette 
préparation.  Une  ordonnance  de  police,  pour  la 
ville  de  l'aris,  en  1553,  défend,  pendant  le  danger 
de  peste,  «  à  tojas  pelletiers,  megissiers,  teinturiers 
«  de  toille,  barbaitdiers ,  et  autres  de  semblable 
a  estât  de  faire  leurs  confis,  megis,  et  barhaudes 
«  au  dedans  de  leui-s  maisons...,  et  de  porter  ou 
«  faire  porter  leurs  laines  et  icelles,  tremper,  ou 
«  laver  en  la  dite  rivière  de  Seine,  au-dessus  des 
.<  Tliuillericis.  "  (Ord.  des  H.  de  Fr.  T.  II,  p.  385.) 
D.  Félibien  rapporte  le  même  passage  et  explique 
le  mot  harbandiers  par  teinturiers.  (Voy.  le  Gloss. 
de  l'Histoire  de  Paris.) 

Barbaudier,  subst.  masc.  Brasseur  de  bière. 
—  Apprèteur  de  laines.  (Voy.  sur  les  deux  accep- 
tions de  ce  mot,  les  citations  rapportées  au  mot 
Barbaude.) 

Barbe,  subst.  féin.  Age.  —  Face.  —  Oncle.  — 
Ministre  des  Vaudois. 

Le  mot  barbe  est  employé  pour  âge  dans  le  pas- 
sage suivant  :  «  Avec  dix  6u  douze  jeunes  hommes 
«  de  sa  barbe.  »  (Des  Ace.  Escr.  Dijon,  fol.  28.) 

De  là  on  disoit  : 

l'riine  barbe,  pour  adolescent,  jeunes  gens.  Ghar- 
lemagne  étant  à  table,  fait  remarquer  à  Agolant, 
roi  Sarrasin,  les  guerriers  qui  l'environnent  : 

Cil  sont  mi  arbalestriers,... 

Mi  eevalier  de  prime  barbe  (1), 
Si  n'ont  cure  d'escoudre  barbe, 
Mais  armes,  et  cevaux  désirent. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  145. 

Barbe  est  pris  pour  face  dans  les  expressions  que 
nous  allons  citer  : 

Faire  barbe,  faire  tête,  faire  face.  «  Par  là  affa- 
«  raoient  ceux  qui  estoient  dedans  la  ville  de 
«  Vérone,  et  faisaient  barbe  à  ceulx  qui  vouldroient 
«  partir  de  Milan  pour  leur  faire  porter  des 
«  vivres.  »  (Hist.  du  Chev.  Bayard,  p.  262.)  «  Com- 
«  mençaà/'rt/re  baj'ôeàceuxqui  le  poursuivoient.  » 
(Chron.  de  S'  Denys,  T.  1,  fol.  I-U.)  On  lit  dans  le 
latin  de  Suger,  in  hostes  regredilur. 

En  barbe,  en  face. 


Lors  Talebot  si  arrivn 

A  tout  cinq  mille  co.Tibatans, 

Oreîî  barbe,  là  se  trouva. 

Vig.  de  Chartes  Vit,  T.  I,  p.  182. 

Barbe  à  barbe,  c'est-à-dire:  face  à  face.  »  îls 
"  vindrent  et  rencontrèrent  barbe  à  barbe  ceste 
«  arrière  garde,  et  frappèrent  dedans.  »  (Le  Jouv. 
fol.  65,  Y°.) 

Bailler  en  barbe,  locution.  Opposer  de  front 
mettre  ep  tète.  «  Luy  fut  par  les  Grecs  baillé  en 
»  barbe,  Ajax  Telamonius.  Le  combat  fut  entre  eux 
n  deux  grand,  impétueux  et  horrible.  «  (J.  le  Maire, 
lUustr.  des  Gaules,  Liv.  III,  p.  281.) 

Barbe  [faisant),  locution.  Faisant  tète,  résis- 
tant, contre  ledit  Gelaise.  (J.  le  Maire,  Schismes  et 
Conciles,  p.  47.) 

Barbe  a  signifié  quelque  fois  oncle,  suivant 
Borel,  Dict.  Voy.  aussi  le  Journal  de  Trév.  aotît 
1738,  p.  1658.  Les  Vénitiens  se  servent  du  mot 
Barba  dans  le  môme  sens. 

Barbe  fut  aussi  le  norn  des  ministres  des  Vaudois, 
selon  Borel.  On  trouve  ce  mot  Barba,  employé 
dans  cette  acception  par  Catauée,  Hist.  lat.  des  R. 
de  Fr.  publiée  par  Godefr.  (Rec.  des  Hist.  de  Fr. 
T.  VIII,  p.  281.) 

Il  nous  reste  à  rapporter  diverses  façons  de  par- 
ler autrefois  en  usage,  oîi  le  mot  barbe  se  trouve: 

1^  Faire  barbe  de  foin,  de  foirre,  on  fourre,  ou 
de  paille,  à  quelqu'un  (2),  c'étoit  l'insulter.  (Oudin, 
Dict.  et  Cur.  Fr. — Voy.  Régnier,  Satyre  vt.)  S' Julien, 
dans  ses  Meslanges  historiques,  p.  108,  prétend 
qu'il  faut  dire  gerbe,  au  lieu  de  barbe.  Cepen- 
dant cette  façon  de  parler  est  encore  usitée  en  quel- 
ques endroits  de  la  Normandie,  où  l'on  dit  :  «  Faire 
«  barbe  defeure  à  quelqu'un,  pour  le  recevoir  naal, 
«  l'accueillir  froideiTient. 

2°  //  sait  bien  qui  barbe  il  lèche,  façon  de  parler 
proverbiale. 

Bien  l'a  maté,  et  nu  chiié. 
Et  bien  vaincu  par  son  barat 
Li  vilains  reproche  du  chat. 
Qu'il  sel  bien  qui  barbes  il  bêche 
Cestui  a  servi  de  la  mèche. 

Fal)l.  MSS.  du  R.  n"  7218,  fol.  119,  R"  cot.  2. 

3"  Barbe  rane.  On  disoit  des  commensaux,  dans 
les  cours  des  Rois:  «  Bouche  à  cour,  barbe  raze, 
«  et  pied  ferré.  »  C'est-à-dire  qui  avoient  droit  d'y 
manger,  d'y  faire  raser  leur  barbe,  et  d'y  faire  fer- 
rer leurs  chevaux  ou  mulets.  (Favin.  Th.  d'Honn. 
T.  II,  p.  1090.) 

A°  Commerce  de  S"  Barbe,  c'est-à-dire  îa  com- 
munauté des  fabricans  de  tapisserie.  (Voy.  le 
Nouv.  Coût.  Gén.  T.  l,  p.  1060.) 

5"  S"  Barbe.  C'étoit  le  jurement  de  M.  de  Bourbon. 
(Voy.  Cap.  Fr.  T.  I,  p.  102.) 

G"  Barbe  secouade,  semble  une  allusion  aux  se- 
cousses données  dans  le  supplice  de  l'estrapade. 
(Voy.  les  Contes  d'Eutrap.  p.  153.) 


(1)  Déjà,  dans  la  Chanson  de  Roland,  on  lit  :  «  Et  par  la  barbe  qui  au  pis  me  ventelet  (st.  IV).  »  (n.  e.)  —  (2)  Il  y  là  deux 
proverbes  réunis  en  un  seul  :  le  premier  est  «  faire  la  barbe  à  quelqu'un,  »  avoir  l'avantat;a  sur  lui,  et  particulièrement 
l'avantage  de  la  ruse  ;  le  deuxième  est  «  faire  à  Dieu  barbe  de  feiirre,  »  lui  donner  une  gerbe  de  feurre  (paille),  pour  une 
gerbe  de  blé  ;  c'est  donc  être  hypocrite.  Régnier  (Sat.,  VI),  disait  encore  :  «  Et  l'hypocrite  fit  barbe  de  paille  à  Dieu.  »  (x.  e.) 


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399  — 


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7°  Barbe  de  Pagny.  Sobriquet  donné  à  Philippe 
de  Vienne.  (Voy.  S'  Jul.  Mesl.  Histor.  p.  345.) 

8°  Barbe  forte.  Autre  sobi  iquet.  (Voy.  les  contes 
d'Eutrap.  505.) 

9°  Barbe  de  Neptune.  Nom  donné  par  les  Dames 
à  une  espèce  de  couleur  que  nous  ne  connaissons 
point.  (Voy.  le  Dict.  Etym.  de  Ménage,  au  mot 
Céladon.) 

ii)"  Bai-be  d'Oribiis.  Sorle  de  jeu  dans  Rabelais. 
(T.  I,  p.  143.)  Selon  Le  Duchat,  «  c'est  un  jeu  où 
"  l'on  bande  les  yeux  ù  (luelqu'undela  compagnie, 
»  puis  sous  ombre  de  vouloir  luy  l'aire  une  barbe 
"  dorée,  on  le  barbouille  avec  de  l'ordure.  » 

11°  Barbe  de  Niwiidie.  (Voyez  Bouch.  Serées, 
Liv.  I,  p.  427.) 

12"  Déchiqueter  en  barbe  d'écrevisse.  Egratigner 
comme  un  chat.  «  Au  diable  soit  le  diable,  il  m'ha 
"  icy  deschiquelé  la  peau  en  barbe  d'escrevisse.  » 
(Rab.  T.  IV,  p.  288.) 

Barbé,  adj.  Barbu.  —  Empenné. 

Au  premier  sens,  barbé  signifie  barbu.  Nous  le 
trouvons  avec  cette  signification  dans  les  vers 
suivans  : 

Plus  fuiable  et  plus  effraée, 
De  cerf,  ou  de  biche  barbée. 

ilachaut,  MS.  fol.  202,  R-  col.  1. 
Une  aultre  estoille  estrange,  et  fort  barbée. 
Molinel,  p.  «4. 

Par  une  extension  naturelle  de  la  première 
acception,  ce  mot,  pris  ligurément,  signifioit 
empenné. 

Dars,  et  saietes  barbelées, 
Equarriaux  pas  lesquiex  l'air  sonne 
Y  courroucent  mainte  personne. 

G.Guiart,  MS.  fol.220,  R-. 

VARIANTES  : 
BARBÉ.  Monet,  Oudin,  Cotgrave.  Dict. 
Barbelé.  G.  Guiart,  MS.  foi.  220,  R". 
Barbelu.  Cotgrave,  Dict. 

Barbeau,  sitbst.  masc.  Partie  du  fer  d'une 
flèche.  '•  Le  sixième  enseignement  d'archerie  est 
»  que  la  sajete  de  quoy  tu  tireras  doit  avoir  dix 
«  poigniés  de  long,  depuis  la  couche  de  la  sajele 
»  jusques  aux  barbeaulxàe  fer.  »  (ModusetRacio, 
fol.  39,  V°.) 

VARIANTES  : 
BARBEAU.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  39,  V». 
Barbiau.  Chasse  de  Gast.  Phéb.  MS.  p.  325. 
Barbel.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  72,  V». 

Barbeel,  subst.  masc.  Nom  de  l'abbaye  où 
mourut  Louis  VIL  11  semble  que  cette  expression 
réponde  à  l'expression  latine  sanctus  portas,  ùSini 
le  passage  suivant:  «  LudovicusrexFranciœmorbo 
"  paralysi,  et  senio  fatigatus  obiit,  in  abbatia  cister- 
«  ciensis  ordinis  à  se  constructa,  quœ  sanctus 
>•  portus  dicilur,  id  eslBarbeel.  »  (Chron.  de  Nangis, 
sous  l'an  ilSO.) 

Barbel,  subst.  masc.  Barbeau,  sorte  de  poisson. 

Le  gros  barbel,  la  crasse  anguile. 

Hisl  de  S.  Leocade,  MS.  du  S.  Germ.  fol.  31. 
Carpes,  lus,  braime,  barbiuttlx. 

Euit.  Descb.  Toes.  MSS.  fol.  346,  col.  4. 


Barbelet  est  le  diminutif  de  BarbeL  (Ord.  des 
R.  de  Fr.  T.  11,  p.  12.) 

VARIANTES  : 
BARBEL.  Ord.  T.  I,  p.  593. 

Barbiaulx  iplur.)  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  foL  346. 
Barbelet.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  II,  p.  12. 

Barbelé,  adj.  Hérissé  de  pointes.  (Voyez  Dict. 
de  Monet,  au  mot  Barbelé.)  Les  fers  barbclex:,  c'est- 
à-dire  les  armes  hérissées  de  pointes,  étoient  mises 
au  nombre  de  celles  dont  l'usage  étoit  défendu  dans 
les  tournois,  ou  gages  de  bataille.  Nous  trouvons 
dans  des  lettres  d'armes  de  1402:  «  Ayant  basions 
«  accoutumez,  c'est  à  sçavoir  lance,  hache,  espée, 
«  et  dague,  et  chacun  de  tel  advantage  comme  mes- 
«  tier  et  besoing  luy  sera  pour  sa  seurté,  et  pour 
«  son  ayder,  sans  avoir  alesnes,  ne  crocs,  broches, 
»  poinsons,  fers  barbelez,  aiguilles,  poinctes  enve- 
«  iiimées,  ne  rasoirs.  »  (Monstr.  Vol.  I,  fol.  8.)  La 
Colombière,  Th.  d'honn.  T.  II,  p.  243,  rapporte  les 
mêmes  lettres  ;  au  lieu  ù&fers  barbelés,  il  a  lu  fers, 
barbellcs,  aiguilles.  Ensuite,  après  le  motrasoirs,i\ 
ajoute  :  «  Ne  giet  de  chausses  trappes.  » 

Saëtes  barbelées. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  327. 
Aine  Diex  ne  fit  sajete,  tant  fut  bien  barbelé, 

l'oi-s.  MSS.  avant  1300,  T-  IV,  p.  1366. 

On  lit  dans  une  autre  copie  : 

Aine  Dex  ne  fist  sajete,  tant  fut  bien  barbellie. 

Nous  trouvons  sajetles  barbelées,  dans  le  Rom. 
de  la  Rose,  vers  10000.  L'auteur  du  Gloss.  de  ce 
Roman  dit  que  c'est  ce  queJ.  de  Meung  «  appelle 
«  ailleurs  empennées  pour  marquer  les'barbes  des 
«  plumes.  » 

<"  Les  chemins  estoient  tant  barbus,  et  plaines  de 
«  roseaux  et  buissons.  »  (PerceL  Vol.  IV,  fol.  87.) 

VARIANTES  : 
BARBELÉ.  Poës.  MSS.  av.  laX),  T.  IV,  p.  I3C5. 
Barbelué.  Ibid.  p.  366. 
Barbu.  Percef.  Vol.  IV,  fol.  87. 

Barbelet,  subst.  masc.  Voici  le  passage  où  nous 
trouvons  ce  mot  : 

....  S'a  un  col  si  acesmé 

Qui  est  de  gorge  si  formé, 

Plus  blanc  qu'argent  seur  estamé 

Gras  et  rondet. 

Droite  gorge  de  barbelet  : 

Il  est  si  biaus,  il  est  si  net,  etc. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  •7218,  fol.  204,  R"  ool.  2. 

Barbelette,  subst.  fem.  Diminutif  de  barbe. 
(Voy.  les  Poës.  de  Jacq.  Tahureau,  fol.  200.) 

Barbelote,  subst.  fém.  C'est  une  .sorte  d'insectes 
qui  se  tient  dans  les  fontaines,  selon  le  Dict.  de 
Borel,  qui  cite  le  Rom.  de  la  Rose.  Oudin,  dans  son 
Dictionnaire,  l'explique  par  espèce  de  grenouille  ou 
de  crapaud;  ces  petites  grenouilles  qui  se  trouvent 
dans  les  buissons,  en  espagnol  ?■«/;«.  Cette  expli- 
cation est  confirmée  par  Ménage,  Dict.  Etym.  On 
lit  dans  R.  de  la  Rose,  1384  et  1385  : 

Par  lieux  y  eux  cleres  fontaines 
Sans  barbelotes,  et  sans  raines. 

L'auteur  du  Gloss.  l'explique  bien  par  espèce 
d'insectes  qui  se  trouvent  dans  les  eaux  doimantes, 


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mais  ce  qu'il  ajoute  dans  son  Suppl.  n'est  pas 
clair,  et  semble  faire  voir  qu'il  n'enlendoit  plus 
le  sens  de  ces  vers.  Il  i)aroil  que  c'éloit  aussi  un 
insecte  qui  se  trouvoit  dans  les  maisons.  Une  reli- 
gieuse, qui  avoit  l'esprit  aliéné,  «  seboutoit  dessoubs 
«  les  tables,  et  qucroil  araignées,  et  barbelotes 
«  esclotes,  et  partout  où  elle  les  pouvoit  trouver, 
«  elle  les  mangeoit  ^1).  »  (Vie  d'isab.  à  la  suite  de 
Joinv.  p.  17G  et  177.) 

VARIANTES  : 
BABBELOTE.  Vie  d'isab.  à  la  suite  de  Joinv.  p.  176. 
Barbelotte.  Oudin,  Dict. 

Barbequené,  adj.  Fortifié  de  barbacanes,  cou- 
verte par  le  dessus,  comme  blindée.  (Voy.  Barba- 
cane.)  «  La  barrière  qui  esloit  faite  à  crenaulx  étoit 
«  barbequcnée,  et  avoit  aux  cotez  des  canons  tous 
«  chars^iez.  »  (Preuv.  sur  les  Meurtr.  du  Duc  de 
Bourg,  p.  288.) 

Barber,  verbe.  Faire  la  barbe.  (Dict.  de  Nicol, 
de  Monet,  d'Oudin  et  de  Cotgrave,  au  mot  Barber.) 
«  Le  raareschal  de  Ballan  qui  étoit  notaire  et  aussi 
«  barbier,  et  quand  on  le  demandoit,  il  disoit  me 
«  voulez-vous  pour  ferrer,  ou  barber,  ou  escrire,  ou 
«  ajourner,  parce  que  depuis  il  fut  sergant.»  (Moy. 
de  Parv.  p.  304.)  On  a  dit,  en  parlant  de  la  mort  de 
Guillaume  Flavy,  en  1464  :  «  Sa  femme  à  la  vérité 
<>  qui  esloit  de  bon  lieu,  feit  son  mary  meurdrir,  et 
«  coupper  la  gorge  par  son  barbier  en  le  harbiant, 
«  et  pour  ce  que  le  barbier  ne  luy  couppa  pas  la 
«  gorge  tout  outre,  elle  la  parcouppa  du  rasoir 
«  mesme.  »  (Monstr.  Vol.  111,  fol.  102.) 

VARIANTES    : 
BARBER.  Monet,  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 
Barbier.  Monstr.  Vol.  111,  fol.  102. 
Barbover.  Moyen  de  Parvenir,  p.  175. 

Barberie,  subst.  fém.  Métier  de  barbier.  (Dict. 
d'Oudin  et  de  Cotgrave.)  «  Un  barbier  avoit  son 
«  ouvroir  de  i;flr/ye7V(?surleportdePirec  en  la  ville 
«  d'Athènes.  >>  (Bouch.  Serées,  Liv.  III,  p.  71.) 

Barberiot,  subst.  masc.  Diminutif  de  barbier. 
(Voyez  Dicl.  de  Cotgrave.) 

VARIANTES  : 
BARBERIOT.  Cotgrave,  Dict. 
B.4.RBER0T.  Rabelais,  Pronostication,  T.  V,  p.  11. 

Barbete,  siibst.  fém.  Terme  de  fauconnerie.  On 
a  dit,  en  pariant  des  qualités  d'un  bon  faucon,  qu'il 
doit  «  avoir  les  sourcils  un  peu  bauts  et  gros,  et  les 
«  yeux  grandz  et  cavez,  et  la  tète  ung  peu  voultée 
«  et  rondette  pardessus,  et  quand  il  est  seur,  qu'il 
«  face  un  peu  de  barbette  soubs  le  bec  de  la 
«  plume,  r,  (Budé,  des  Oiseaux,  fol.  122,  R°.) 

VARIANTES   : 
BARBETE.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  109,  V". 
Barbette.  Budé,  des  Oiseau.x,  fol.  115,  R». 

Barbets,  subst.  masc.  Religionnaires  vaudois. 


des  montagnes  de  Piémont  et  autres  lieux  voisins. 
(Dict.  étymologique  de  Ménage.) 

Barbette,  subsl.  fém.  Sorte  d'habillement  de 
deuil.  Il  faisoit  partie  de  l'ajustement  des  veuves  et 

autres  femmes  en  deuil  :  «  Barbette manteau. 

«  et  chappcron fourrez  de  menu  vair durant 

»  (lu'on  porte  barbette  et  mantelet,  il  ne  faut  porter 
«  nulles  ceintures,  ne  ruban  de  soye,  ne  autre  que 

«  ce  soit Pour  autres  frères  (que  l'aîné)  et  sœurs, 

«  on  ne  porte  que  la  barbette  et  le  couvre-chef 

«  dessus Pour  marit,  on  portera  demy  an  le 

«  manteau  et  cbapperon,  trois  mois  la  barbette  et 
«  le  couvre-chef  dessus,  trois  mois  le  mantelet,  et 
«  trois  mois  le  touret.  »  (Honn.  de  la  Cour,  à  la 
suite  des  Mém.  sur  l'Ane.  Chev.) 

/?ff9'?^c</csignifioit aussi  moustache,  la  moustache: 

Tout  Grec  portant  la  barbette  moustaclic, 
Qu'il  n'y  ait  respit,  au  moins  s'il  ne  se  cache. 

i.  Le  Maire,  suite  de  l'Illuslr.  des  Gaules,  p.  37i. 

Barbie,  subst.  fém.  Ce  mot  semble  une  faute 
pour  marbre.  En  parlant  de  l'église  IN'ot"e-Dame  que 
Charlemagne  fonda  à  Aix-la-Chapelle,  on  dit  :  «  La 
«  barbie,  et  colombes  fit  apporter  de  Bavennes.  » 
(Chron.  de  S'  Denis,  T.  I,  fol.  120.)  On  lit  dans  le 
latin  d'Eginhard  :  »  Ad  cujus  structuram  cum  colum- 

"  nas,  et  marmora a  Roma,  et  Ravenna  adve- 

«  henda  curavit.  » 

Barbier,  subst.  7nasc.  Chirurgien.  Ce  mot  a 
conservé  son  ancienne  signification  dans  plusieurs 
endroits  de  la  Normandie  :  «  Il  falloit  que  les 
«  barbiers  arrachassent  et  coupassent  aux  mala- 

«  des de  grosse  char  qui  surmontoit  sur  les 

<<  gencives.  «"(Joinville,  p.  60.) 

Les  barbiers  sont  distingués  des  chirurgiens  dans 
l'Ordonn.  de  1372,  selon  laquelle  ils  avoient  seule- 
ment «  le  droit  de  panser  les  clous ,  bosses , 
«  aposlumes,  et  les  playes  qui  ne  sont  pas  mcr- 
«  telles.  »  (Ord.  T.  V.  p.  530.)  Le  passage  suivant 
marque  encore  mieux  cette  distinction  :  «  Ordonne 
■•  que  les  maîtres  barbiers,  ehirurgieus  (2),  ainsi 
"  sont- ils  appelles  dans  cet  arrest,  ne  seroient  h 
«  l'advenir  compris  aux  affiches  et  proclamations 
«  des  chirurgiens.  »  (Pasquier,  Recherches,  p.  833.) 

Secrez  doit  estre  li  barbiers 
Dessus  tous  les  autres  mestiers  : 
Plusieurs  secrez  voit  de  nature 
Qu'om  ne  doit  dire  à  créature. 

Eust.  Descli.  Poês.  MSS.  fol.  443. 

Barbier  de  bos.  Expression  employée  pour  dési- 
gner un  bûcheron,  dans  les  Poésies  mss.  d'Eust. 
besch.  fol.  205,  col.  4. 

Barbillon,  subst.  masc.  Barbe  d'épi.  —  Pointes 
dont  on  hérissoit  le  fer  des  flèches.  —  Maladie 
d'oiseaux. 

Au  premier  sens,  ce  mot  a  signifié  barbe  d'épi  : 

Perçant  le  festu  d'un  petit 
Barbillon  naissant  d'un  espit. 

Les  Touches,  Des  Accords,  fol.  44. 


(1)  C'est  peut-être  l'insecte  qu'on  nomme  babarottes  dans  le  Midi,  le  cancrelat,  (n.  e.)  —  Les  barbiers-barbaiîls ,  qui 
n'avaient  pour  outils  que  le  peigne  et  le  rasoir,  fiu-ent  constitués  en  corporation  par  lettres  patentes  de  1637.  Ils  curent  de 
longs  procès  avec  les  barbiers-chirurgieiis.  (n.  e.) 


BA 


—  401 


BA 


Barbillon  s'est  dit  pour  les  pointes  donlonhéris- 
soit  quelquefois  le  fer  des  flèches  :  •<  La  flesche 
«  ayant  le  fer  dressé  en  harhillon  esloit  demeuré 
«  en  la  playe.  »  (Vray  et  Parf.  Am.  fol.  'âOS.) 

En  termes  de  fauconnerie,  barbillon  désigne  une 
excroissance  dans  le  bec  des  oiseaux,  qui  leur  ôte 
l'appétit,  et  devient  assez  considérable  pour  les 
empêcher  de  serrer  le  bec  et  pour  les  faire  mourir. 
(Voyez  Du  Fouilloux,  Fauconnerie,  fol.  19,  \'°.) 

Barbillonner,  verbe.  Incommoder.  On  a  dit 
barbillonner  les  oreilles,  dans  un  sens  figuré,  pour 
étourdir,  incommoder  les  oreilles,  comme  on 
pourroit  faire  avec  un  barbillon  ;  nous  disons 
bourdonner  aux  oreilles  :  «  Quand  les  moines 
«  disnent,  il  y  en  a  un  qui  est  en  chaire,  qui  leur 
«  fait  lecture  des  actions  des  Satrapes,  et  ainsi 
«  legendant,  il  barlnllonne  les  oreilles  de  ses  con- 
«  frères.  »  (Moyen  de  Parvenir,  p.  '230.) 

Barbirie,  subst.  féni.  Lieu  où  l'on  fait  la  barbe, 
où  l'on  épile  :  «  Par  dessouz  une  gallerie  allasmes 
«  veoir  les  baings,  estuves  et  barbiries  du  palais.  » 
(Cartheay,  Voy.  du  Chevalier  errant,  fol.  46.) 

Barbite,  subst.  fém.  Brebis.  «  Si  comejeobaile 
«  à  un  homme  mes  bavbites  à  composter  son  tre 
«  ou  mes  beofes  à  arer  la  terre  et  il  occit  mes  aveis, 
a  jeo'puissoy  bien  avoer  une  action  de  trespas 
«  envers  luy,  nient  obstant  le  bailement.  »  (Tenures 
de  Litlleton,  fol.  15.) 

VARIANTES  : 
BARBUE.  Tenures  de  Litlleton,  fol.  15. 
Barbitez.  Carta  Magna,  fol.  100.- 

Bai'boires,  subst.  fém.  Espèce  de  mascarade. 
«  Tantôt  survindrent  jeux,  comédies,  morisques, 
«  mommeries,  barboires,  et  autres  diverses  maniè- 
«  res  des  batemens  telz  que  es  grands  courts  des 
«  princes  se  souioient  faire.  «  (.1.  Le  Maire,  lUusti'. 
des  Gaules,  Liv.  1,  p.  144.) 

Barbons,  suMst.  masc.  plur.  Sorte  de  sobriquet. 
Ce  nom  fut  donné  à  trois  des  principaux  du  Parle- 
ment, à  cause  de  leur  longue  barbe,  vers  l'an  1500. 
(Voyez  les  Mém.  de  Tavannes,  p.  130.) 

Barbore  ,  subst.  fém.  Espèce  de  poisson.  (Dict. 
d'Oudin.) 

VARIANTES  : 
BARBORE.  Oudin,  Dict.  français-italien. 
Barbote.  Id.  Dict.  français-espagnol. 

Barbot,si(te/.îHffsc.  Espèce  d'insecte.  «  Si  c'est 
B  au  printemps,  ou  esté,  les  lièvres  ne  se  gistent 
«  pas  au  fort  h  cause  des  fourmis  et  autres  barbots, 
«  et  des  serpents  et  laisards  qui  les  chassent  des 
«  forts.  »  (Fouilloux,  Vénerie,  fol.  09,  R".) 

Barbotage,  snbst.  musc.  Breuvage.  Montaigne, 
parlant  de  la  facilité  avec  laquelle  les  malades 
prennent  toutes  sortes  de  remèdes,  dit  :  «  Il  n'est 
«  pas  une  simple  femmelette  de  qui  nous  n'em- 
"  ployons  les  barbotages  et  breuets.  »  (Essais  de 
Montaigne,  T.  Il,  p.  817.) 

Barbote,  subst.  fém.  Espèce  de  bateau.  C'étoit 
II. 


un  bateau  propre  à  aller  sous  l'eau,  comme  dessus: 
«  Donc  se  conseillièrent  ensemble  k'il  feroient  ce 
«  di  cent  quatre  barbotes,  et  seront  toutes  couvertes 
»  de  cuirs  bien  joins  et  siérés,  et  iront  aussi  bien 
«  dessous  aiguës,  comme  dessus.  »  (Histoire  de  la 
Guerre  S'%  ms.  cité  par  Du  C.  Gl.  1.  au  mot  Barbota.) 

Barbotin  ,  subst.  masc.  Barbon.  Vieillard  qui 
radote.  (Contredits  de  Songe  creux,  fol.  121,  V°.  — 
Voyez  Barbasse.) 

Barbotine,  subst.  fém.  Absinthe  de  mer.  (Dict. 
de  Borel.)  Nous  lisons  :  «  Barbotine  des  marmi- 
><  teux  »  dans  Rabelais  qui,  par  cette  expression,  a 
voulu  exprimer  les  prétendues  amertumes  de  la  vie 
des  hypocrites.  (Voy.  Le  Duch.  sur  Rab.  T.  II,  p.  72.) 

Barbottement,  subst.  masc.  L'action  de  mur- 
murer, de  marmotter  entre  ses  dents.  (Dict.  de 
Monet,  Oudin  et  Cotgrave.) 

VARIANTES  : 
RAR7Î0TTEMENT.  Monet,  Dict. 
Barbotage.  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 

Barbotter,  verbe.  Trembler,  frissonner.  — 
Marmotter,  bredouiller. 

Au  premier  sens,  ce  mot  a  signifié  trembler, 
éprouver  des  frissons.  (Voyez  Nicot  et  Monet,  Dict.) 

Dans  la  seconde  acception,  on  a  employé  barbotter 
pour  marmotter  entre  les  dents,  bredouiller.  (Voy  . 
Nicot,  au  mot  Barboter.) 

Tout  en  barbetant  ba  ba  ba 
Et  sans  dire  parole  nulle. 

Coquillart,  p.  U9. 

Par  le  corps  bien,  il  hurbelote 

Ses  mots,  tant  qu'on  n'i  entend  rien. 

Pathelin,  Farce,  p.  63. 

Borel,  dans  son  Dict.,  cite  ces  mêmes  vers  au 
mot  Barbeloter,  qu'il  explique  par  aboyer. 

Ce  mot,  en  généi'al,  désignoit  une  sorte  de  mou- 
vement de  lèvres,  tel  que  le  froid  l'occasionne,  ou 
tel  qu'on  le  fait,  lorsqu'on  prononce  entre  ses  dents 
des  paroles  mal  articulées. 

VARIANTES  : 

BARBOTTER.  Monet,  Dict. 
Barboter.  Nicot  et  Monet,  Dict. 
Barbeter.  Coquillart,  p.  149. 
Barbeloter.  Pathelin,  Farce,  p.  63. 

Barbouquet,  subst.  masc.  Gourmade.  Coup 
sur  la  mâchoire.  Il  étoit  évalué  à  cinq  sols  ,  dans  la 
taxe  des  droits  pour  les  coups  donnés.  On  trouve 
cette  taxe  à  la  suite  de  la  Charte  aux  Normands  qui 
est  jointe  à  l'Ancien  Coutumier  de  Normandie, 
édition  de  1510,  fol.  100. 

Barbu,  adj.  Qui  appartient  aux  vieillards.  On  a 
dit,  en  ce  sens,  enfance  barbue  pour  exprimer  la 
sottise  des  barbons.  (^Voy.  Cymbalum  mundi,  p.  90.) 

Barbue,  subst.  fém.  Greffe,  marcotte.  (Dict. 

d'Oudin.) 

Barbue,  subst.  /■(?'?«., Habillement  de  tète.  — 
Armure  de  tête. 

Dans  la  première  acception,  c'étoit  un  habillement 
de  tête  en  fagon  de  domino,  masqué  et  non  masqué, 

51 


BA 


402  - 


BA 


dont  on  se  servoit  pour   se  garantir  du  froid. 
(Dict.  de  Nicot.) 

Chanoine  de  longue  barbullc. 

Coquillarl,  p.  107. 

La  barbue  (1)  étoit  aussi  une  espèce  d'armure  de 
tète  qui  avoit  une  mentonnière.  On  la  nommoit 
ainsi  du  mol  barbe.  Cette  étymologie  est  bien  plus 
naturelle  que  celle  donnée  par  le  P.  Montl'aucon. 
(Monum.  de  la  Monar.  fran.  T.  II,  p.  S/iO.JIl  conjec- 
ture qu'elle  étoit  ainsi  appelée,  parce  que  la  pointe 
de  devant  l'aisoit  une  espèce  de  barbe.  Les  gens  de 
guerre,  qui  portoienl  cette  espèce  de  casque, 
avoient  nom  barbues.  (Voyez  les  Dict.  de  Borel, 
Nicot,  Ménage,  au  mot  Mrbule. )0n  lit  barbue  dans 
les  Statuts  mss.  de  l'Ordre  du  S"  Esprit. 

VARIANTES  : 
BARBUE.  Du  Cange,  Glossaire  lalin,  au  mot  Barbuta. 
Barbuette.  Mérn.  d'OUv.  de  la  Marche,  Liv.  I,  p.  314. 
Bakbute.  Dorel,  Nicot,  Ménage,  Dict. 

Bîirbiite,s!/^s^  /'c'hj.  Nielle. — Baie.  — Bouchon. 
On  trouve  ce  mot  pour  nielle,  sorte  de  plante, 
dans  le  Dict.  d'Oudin. 
Pour  baie,  fruit  du  laurier,  du  lierre,  etc.  (Ibid.) 
Enlin  pour  bondon,  bouchon,  dans  le  même  Dict. 

Barceloiinois,  adj.  De  Barcelonne.  On  disoit 
en  ce  sens  boucliers  barceloiinois,  de  la  ville  de 
Barcelonne  oii  on  les  faisoit.  On  s'en  servoit  sous 
Henri  H.  (Voy.  Brant.  Cap.  Fr.  T.  II,  p.  14.)  On 
trouve  picque  barcelonnoise  dans  les  Epilhètes  de 
Martin  de  la  Porte. 

VARIANTES  : 
BARCELONNOIS.  Brant.  Cap.  Vt.  T.  II,  p.  14. 
Babselonnois.  Montluc,  T.  l,  p.  534. 

Barchacer,  verbe.  Chasser  mal  : 

Barchace  le  leu, 

Qui  sa  proye  ne  resqueut  (2): 

Ce  dit  Li  vilains. 

Prov.  du  Vil.  MS.  de  S.  Geim.  fol.  74,  V°. 

Bard,  snbst.  masc.  On  appelle  encore  bards  (3)  en 
Bretagne,  les  joueurs  de  vielle  et  de  violon  qui  vont 
par  les  villages.  (Voy.  le  Mercure  de  France,  décem- 
bre 1735,  p.  2587.)  Les  anciens  bardes  étoient 
poêles,  chantres,  historiens,  faiseurs  de  généalogie. 
Ces  bardes  cbantoient  les  faits  des  héros"  et  étoient 
diiïérens  des  druides.  (Dict.  de  Borcl,  2"  add.)  Le 
mot  Dagobart  ou  Dagobert,  selon  Borel,  signifie 
chantre  héroïque.  (Voy.  Ibid.  au  mot  Dagobart.) 
Joachim  du  Bellay,  parlant  des  vers  rimes,  cite 
J.  Le  Maire,  qui  dit  que  :  «  Bardus  V,  Roy  des  Gau- 
«  les,  en  fut  l'inventeur,  et  introduisit  une  secte  de 
•  poètes  nommés  bardes.  «  (Voy.  .Joach.  du  Bellay, 
fol.  32.)  Dans  le  dictionnaire  de  Borel,  1"'  add.,  on 
trouve:  «  Bardus,  druidis  hlius,  musical  et  carmi- 
«  num  inventer  apud  Gallos.  «  Borel  donne  au  mot 
barde  la  signification  d'homme  fort,  ou  de  fils. 
Selon  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Bardicatio,  les 


mots  bardie  et  barzie  signifient  en  Gaulois  ou  Bre- 
ton, chanteur  ou  joueur  de  flûte  dans  les  assemblées 
du  peuple. 

VARIANTES  : 
BARD.  Borel,  2«  add. 
Barde.  Joachim  du  Bellay,  fol.  32. 
Bardie,  Barzie.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mol  Bardicatio. 

Bardable,  adj.  A  qui  on  peut  mettre  une  barde. 
(Voyez  Brantôme,  Dames  Gall.  T.  II,  p.  437,  et  le  mot 

Barde.) 

Bardane,  subst.  fém.  Punaise.  (Dict.  de  Nicot.) 

Barde,  subst.  fém.  Armure  de  cheval.  Elle  se 
plaçoit  sur  les  flancs  et  sur  la  poitrine  :  elle  étoit 
composée  de  lames  de  fer  (4).  (Dict.  de  Nicot,  de 
Monet.)  On  en  trouve  la  description  dans  la  Mil, 
Fr.  du  P.  Daniel,  T.  I,  p.  402. 

Ordonnez  nos  avant  gardes, 

Sellez  chevauLx,  mettez  bardes, 

Tirez  canons,  et  bombardes. 

Molinel.  p.  Iî9. 

Delà,  on  disoit  : 

Javeline  de  barde  ou  pour  la  barde.  C'étoit  une 
pique  assez  forte  pour  attaquer  des  chevaux  bardés. 
A  l'entrée  de  la  princesse  de  Ferrare  à  Paris,  en 
1548:  «  les  compagnies  des  archers,  arbalestriers, 

«  et  hacquebutiers  de  la  dite  ville vêtus  de 

«  hocquetons,  bien  montés,  ayant  chacun  \xwq  jave- 
«  Une  de  barde  en  la  main.  »  (Félibien,  Hisloirede 
Paris,  preuves,  T.  V,  p.  359.)  «  Là  à  tous  venaus 
«  très  hardyment  avecques  une  javelline  pour  la 
«  barde,  tint  pié  ferme.  »  (Jean  d'Auton,  Ann.  de 
Louis  XII,  MS.  an  1503,  p.  4.) 

Barde  est  expliqué  par  bois  fngonné  à  la  varlope 
dans  le  Glossaire  de  l'IIisloire  de  Paris  ;  mais  cette 
explication  est  sans  fondement.  Nous  lisons  dans 
Brantôme,  Dames  Gall.  T.  I,  p.  348,  découppé  en 
barde  d'écrevisse.  11  est  aisé  de  s'apercevoir  que 
c'est  une  faute  pour  barbe  d'écrevisse,  (-[ue  l'on  a  vu 
au  mot  Barbe. 

VARIANTES  : 
BARDE.  A.  de  la  Vigne.  Voy.  de  Ch.  VII  à  Naples,  p.  162. 
Balde.  (Lisez  Barde.)  Etat  des  OfT.  des  D.  de  Bourg,  p.  287. 

Bardée,  subst.  fém.  Charge.  C'est  en  ce  sens 
qu'on  disoit  bardée  de  bois.  (Oudin,  Dictionnaire.) 

Bardelle,  subst.  fém.  Sorte  de  selle.  EUe  étoit 
plate  et  sans  arçons.  (Dict.  d'Oudin.) 

Barder,  verbe.  Armer  de  bardes  un  cheval. 
(Dict.  de  Nicot,  Monet,  Oudin  et  de  Cotgrave.  —  Le 
P.  Daniel,  Mil.  Fr.  T.  I,  p.  403.) 

Bardiac,  subst.  masc.  Habit  saintongeois.  — 
Habit  des  anciens  bardes. 

Selon  Borel,  bardiac  et  bardocucul  étoit  le  nom 
d'un  habillement  des  Saintongeois,  qui  couvroit  la 
tète  et  le  corps.  11  cite  Fauchet,  et  ajoute  ;  "  C'est 


(1)  C'est  plutôt  un  casque  à  large  couvre-nuque  et  à  m?sque  emboîtant  le  menton,  qui  fait  partie  de  la  plus  ancienne 
panophe  du  Musée  d'artillerie  (voir  la  représentation  dans  Vllistoh-e  tlu  Coslunw  de  M.  Quicherat,  p.  307).  (N.  E.)  — 
(2)  Recouvre.  -  (3)  La  forme  est  plutôt  burz  ou  bars.  (N.  E.)  -  (4)  Elle  est  employée  au  temps  de  Charles  Vli,  pour  être 
délaissée  sous  Henri  IV,  dés  la  bataille  d'Ivrv.  L'étymologie  est  le  mot  arabe  bardahet,  couverture  placée  sous  le  bât  ; 
certaines  provinces  ont  encore  pour  selle  la  forme  uubaide.  (n,  e.) 


BA 


-  403 


BA 


«  ce  que  nous  appelions  une  cape,  dont  on  use  fort 
«  en  Bearn.  » 

Le  même  Borel  dit  aussi  que  l'on  nommoit  bardo- 
eucullcs,  riiabillement  des  anciens  bardes. 

VARIANTES  : 
BÂRDIAC,  Bardocucul,  Bardocuculles.  Borel,  Dict. 

Bardit,  subst.  masc.  On  appeloit  bardit,  une 
sorte  de  cbaut  très  connu  chez  les  Germains.  Peut- 
être  faut-il  lire  barit,  de  l'allemand  baren  ou 
baeren,  ci  ler,  d'oîi  s'est  formé  notre  mot  braire. 
(Voy.  La  Bleterie,  trad.  des  mœurs  des  Germ. 
p.  5  et  97.) 

Bardo,  subst.  masc.  Crête  de  coq.  Bochart,  que 
Borel  cite  dans  son  Dictionnaire  au  mot  Ilardiacus, 
nous  donne  cette  explication. 

Bardococullé,  adj.  Encapuchonné.  «  Mona- 
«  gaux  que  voyez  là  bardococullez  d'une  chausse 
«  d'Hippocras,  comme  une  alouette  sauvaige.  » 
(Babelais,  T.  V,  p.  11.  —  Voyez  Ibid.  la  note  de  Le 
Duchat.) 

Bardot,  subst.  masc.  Ane  ou  mulet.  (Diction- 
naire d'Oudin.) 

Bardot.  Ces  mots  se  rencontrent  quelquefois 
dans  ces  expressions /)flsse?'/wr  bardelot,  passer  par 
bardot  (1).  Elles  signifient  être  franc  d'écol,  passer 
sans  payer.  (Oudin,  Dict.  Cur.  Fr.  au  mot  Bardot.) 
«  Il  a  fallu  que  j'aye  fait  cette  digression,  il 
«  fautqu'elle  passe  par  &flnte/o^  sans  payer  péage.  » 
(Brant.  Gap.  Estr.  T.  I,  p.  28.) 

Il  semble  cependant  que  l'expression  :  passer  par 
bardot  soit  prise  en  un  sens  contraire  dans  le  pas- 
sage suivant  du  même  auteur  :  «  Si  en  a-t-il  tous- 
«  jours  quelques-unes  de  ces  pauvres  vieilles  hères 
<<  qm  passent  par  bardot,  et  départent  leurs  larges- 
«  ses  aux  dépens  de  leurs  bourses.  »  (Brantôme, 
Dames  Gall.  T.  I,  p.  225.) 

VARIANTES  : 
BARDOT.  Brantôme,  Daines  Gall.  T.  I,  p.  225. 
Bardelot.  Id.  Cap.  Estr.  T.  I,  p.  28. 

Bardoii,  adj.  Lourd,  lent.  Borel  le  dérive  du 
grec.  (Voyez  Oudin,  Cur.  Fr.  et  Celthell.  de  Léon 
Trippault.) 

Bardoul,  subst.  masc  Bardulf.  Surnom  de 
Hugues,  fils  de  Barthélémy  de  Broyés.  De  l;i,  on  a 
nommé  le  village  de  Trie  au  diocèse  de  Meaux  : 
«  Trie  le  Bardoul,  en  latin  trajectum  Bardulfi.  « 
(Hist.  de  l'Eglise  de  Meaux.) 

Bare,  subst.  masc.  Sorte  de  mesure.  Ce  mot  a 
peut-être  la  même  signification  que  barant,  que 
l'on  trouvera  sous  l'article  Baril.  «  Loisible  aux 
«  maire  et  eschevins  de  la  ville  de  leur  fialrir  ou 
«  faire  flatrir   toutes   et  chacunes   les    mesures. 


«  bareaux,  poids  et  balances  et  autres  choses  dont 
«  l'on  use  en  la  ville  et  eschevinage,  et  bailliage 
«  de  Lens,  en  tous  stils  (genres  ou  espèces,  sortes) 
<'  quelconques  de  marchandises.  »  (Nouv.  Coût. 
Gén.  T.  I,  p.  32G.) 

VARIANTES  : 
B.ARE.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  825. 
Bareau. 

Barette,  subst.  fém.  Bonnet.  (Dict.  Etym.  de 
Ménage.)  «  Les  gens  du  daulphin  prindrent  le  corps 
«  du  duc  de  Bourgongne  (2),  si  le  deveslirent,  et  ne 
«  luy  laissèrent  que  son  pourpoint,  les  houseaulx 
«  et  la  barrette  en  son  cliief,  et  le  mirent  dans  un 
«  moulin  qui  là  au  plus  près  estoit,  oii  il  fut  toute 
«  la  nuict.  »  fj.  Le  Fèv.  de  S'  Rem.  Histoire  de 
Charles  VI,  p.  139.) 

On  a  dit  baret  pour  bonnet  d'enfant,  selon  Borel, 
et  on  a  donné  le  nom  de  birette  à  une  sorte  de 
bonnet  à  l'usage  des  jésuites  novices.  (Voy.  sur  le 
mot  Barrette[Z),  leGloss.  latin  de  Du  Gange,  au  mot 
Baretum.) 

Parler  à  la  barette  ou  à  la  barrette,  se  disoit 
pour  battre,  frapper,  étriller  : 
La  Flèche. 

Je  parle  à  mon  bonnet 

Harpagon. 
Et  moy  je  pourrois  bien  parler  à  ta  barrette. 

L'Avare,  de  Molière,  aci.  I,  scène  III. 

Parler  à  la  barrette,  se  trouve  dans  les  Vigil.  de 
Charles  VII,  T.  I,  p.  117.  Gholières,  dans  ses  Contes, 
fol.  0,  R°,  s'en  est  servi  dans  ce  même  sens  :  laver 
le  bonnet,  laver  la  têle  à  quelqu'un. 

variantes  : 
BABETTE.  J.  le  Fèv.  de  S-  Rem.  Hist.  de  Ch.  VI,  p.  139. 
Bavette.  (Lisez  Barelie.)  Petit  J.  de  Saintré,  p.  81. 
Barrette.  Dial.  de  Tahur.  p.  106. 
Barecte.  Petit  J.  de  Saintré,  p.  613. 
Bkrrete.  Lett.  de  Pasquier,  T.  I,  p.  104. 
Birette.  Ménpjfe,  Dict.  Etym. 
Birrette.  Borel,  Dictionnaire. 
Baret,  subst.  masc.  Borel,  Dict. 
Babret,  subst.  masc.  Ibid.  au  mot  Birrette. 
BlREZ,  subst.  masc.  ptur.  Felib.  Hist.  de  Paris,  T.  IILp.  536. 

Barettide,  subst.  fém.  Coup  de  bonnet,  salut. 
(Dict.  d'Oudin.)  «  Cestuy-ci  aime  l'argent,  l'autre 
«  veut  qu'on  luy  face  de  grandes  révérences,  et 
«  baretades.  >- _(Contes  d'Eutrapel,  p.  13.)  Rabelais 
a  dit  en  ce  sens  :  «  Pantagruel  après  la  petite  acco- 
«  lade,  et  barretade  gracieuse,  etc.  »  (Rabelais, 
T.  IV,  p.  11.) 

variantes  : 

BARETTIDE.  Oudin,  Dictionnaire. 
Baretade.  Contes  d'Eutrapel,  p.  13. 
Barretade.  Rabelais,  T.  IV,  p.  11. 

Barfjaigne,  subst.  fém.  Commerce.  —  Marché. 

—  Gain,  profit.  —  Affaire.  —  Délai.  —  Sollicitation. 

—  Tromperie. 

Au  premier  sens,  ce  mot  a  signifié  :  commerce. 


(1)  C  est  un  dérive  de  barde,  (n.  e.)  -  (2)  Les  portraits  dé  Jean  sans  Peur  le  représentent  presque  tous  avec  une  barrette 
noire  pointue  ;  c'était  sa  coiffure  de  prédilection.  C'est  vers  ce  temps  que  cette  coiffure  toute  eccléfiiastique  fut  de  mode 
pour  les  laïques.  Les  paysans  de  Guissény,  les  derniers  pilleurs  d'épaves  dans  le  Finistère,  la  portent  encore;  elle  est  de 
laine  bleue  tricotée,  (n.  e.)  -  (3)  L'étymologie  est  Inrretum,  qu'on  trouve  au  vp  siècle,  et  qui  nous  ramène  à  birrum 
(burrhus,  bijrrhus),  étoffe  de  couleur  rousse,  (n.  e.) 


BA 


—  404  — 


BA 


trafic.  Nous  le  trouvons  employé,  avec  cette  signifi- 
cation, dans  les  vers  suivans  ; 

Dedens  Jérusalem  ot  un  temps  molt  estrange  : 
Mult  i  ot  de  vitail  delirose  baiyaintie: 
On  i  prant  un  denier  d'une  soie  cliastaigne 
Morte  est  la  povre  gent,  n'i  a  cel  ne  se  plaigne; 
Mult  ont  fait,  en  cest  an,  doloirose  bargaïnne. 
Rom.  de  la  Frise  de  Jcrus.  MSS.  cilé  par  Du  C.  Gloss.  lat.,  sous  barganizator. 

Dans  la  seconde  acception,  bargaigne  s'est  dit 
pour  marché.  Au  sujet  de  l'union  de  l'âme  et  du 
corps,  et  des  avantages  et  des  peines  qu'ils  se  pro- 
curent réciproquement,  on  lit  : 

l'ame,  et  li  cors  sont  à  perte,  et  à  gaaigne  ; 

Sa  il  fait  bien,  ou  mal,  entr'ax  en  sont  copaigne  : 
Or  se  gart  bien  li  cors  s'il  fait  maie  bargair/ne. 
Chanleplcure,  MS.  de  S.  G.  fol.  "l04. 

On  a  employé  ce  mot  avec  le  sens  de  gain,  profit  : 

Cil  est  liés  de  sa  banjayne 
Qui  sa  grant  perte  regaagne. 

Pli.  liouskes,  MS.  p.  104. 

On  a  dit  aussi  bargagne  pour  affaire  : 

En  apriés  icele  bargagne. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  478. 

Qui  de  gré  se  mehaigne, 
N'est  pas  droiz  c'on  le  plaigne, 
Mielz  valt  que  l'en  s'en  rie  ; 
Et  cil  qui  li  ensaigne. 
Caste  bien  sa  bargaigne. 

Prov.  du  ComW  de  Bret.  MS.  de  S.  G.  fol.  114. 

Dans  le  sens  indéterminé  d'affaire,  chose  quel- 
conque, on  a  dit  : 

Onques  pour  faire  grant  gaaingne 
Ne  commencé  cesti  barijuine. 

Ailiis,  MS.  fol.  14,  Vcol.  1. 

On  trouve  bargaigne  employé  pour  délai  : 

Mourir  m'estuet,  sans  plus  longue  bargaine. 

Poês.  MSS.  du  Val.  n-  14y0,  fol.  9,  V". 

Vint  sor  un  cheval  d'Espaigne  brochant  ; 
Ne  fait  pas  longhe  bargaùpie. 

Huoii  d'Oisy,  Pofs.  MSS.  av.  1300. 

On  s'est  servi  encore  de  ce  mot  pour  sollicitations, 
instances.  Les  Anglois,  fuyant  devant  les  François, 
se  sauvent  vers  Bressuire  en  Poitou,  «  h  laquelle 
-i  ville  vindrent  les  Anglois,  pour  cuider  entrer 
.<  dedans,  et  barguynoient  fort  à  ceux  de  Bressuire 
■'  qui  les  recueillissent,  et  à  celuy  barguygnement 
«  vint  Messire  Loys  de  Sancerre.  »  (Hist.  de  LoysIII 
de  Bourbon,  p.  30.) 

Enfin  on  lit  barguyns  pour  tromperie,  malversa- 
lion,  dans  la  Carta  magna,  fol.  148,  "R°. 

^1  bargaigne  signifie  :  à  l'envi,  dans  le  passage 
suivant  : 

Si  ert  li  avoez  d'Espaigne 

Qui  Dames  aiment  à  bargaigne. 

Parton.  dc'Bl.  MS.  de  S.  G.  fol.  IGO. 

V.\niANTES  : 
BARGAIGNE.  Poës.  MSS.  avant  -1300,  T.  II,  p.  905. 
Barg.ugne.  {Usez  Bargaigne.)  Du.  Cange,  Gloss.  lat. 
Baraigne.  (Lisez  Bargaigne.)  Not.  du  Rom.  d'Alex,  f.  107. 
Bargaïnne.  Rom.  de  la  Prise  de  Jérusal.  dans  Du  Cange, 
Gloss.  lat.  au  mot  Barganizalio  sous  Barcaniare. 
Bargagne.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  478. 
B.VRGAiNE.  Poës.  MSS.  du  Vat.  n»  1490,  fol.  9,  V». 
Barouaigne.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  13.S. 


Barguygnement,  subst.  masc.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS. 
Babgeyns.  subst.  masc.  plur.  Cartamagna,  fol.  148,  R». 

Bargaigiier,  verbe.  Commercer,  trafiquer.  — 
Marchander.  —  Faire  un  marché,  acquérir.  — 
Débaucher,  mettre  à  mal.  —  Disputer,  défendre, 
batailler,  résister.  —  Négocier.  —  Amuser,  trom- 
per. —  Agir,  solliciter. 

Voyez  sur  ce  mot  le  Dict.  de  Nicot,  le  Gloss.  sur 
les  Coût,  de  Beauvoisis,  au  mot  Barguigner,  et  Du 
Cange,  (llossaire  latin,  au  mot  Barcaniare. 

Bargaigner  est  mis  pour  trafiquer  dans  un  sens 
figuré  en  ce  passage  : 

Quant  les  batailles  sont  rangiés, 
Sovent  i  perdent,  et  gaaignent, 
Quar  ce  savez  issi  bargaignent. 

Blanch.  MS.  de  S.  G.  fol.  179,  R-  col.  1. 

Au  second  sens,  ce  mot  signifie  marchander  (1): 

peu  pris. 

Celui  qui  en  ceste  plaine 
Bargaigne,  et  achate  au  pis. 

Will.  li  Viniers,  Poos.  SISS.  av.  1300,  T.  H,  p.  815. 

«  Un  marchant  vint  barquigner  dviips  de  soye,  et 
«  de  mercerie  d'un  mercier  de  Tournay.  »  (Bout. 
Som.  rur.  p.  832.) 

Bargigner  a  été  employé  avec  la  signification  de  : 
faire  un  marché,  acquérir.  On  a  dit  au  sujet  de  la 
mort  de  Louis  VIII  : 

N'ains,  Paradis  ne  bargigna 
Si  bien,  ne  tant  ne  gaegna  ; 
N'ains  mais  France  n'ot  tel  desroi, 
Puis  Charlemainne  le  bon  Roy. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  745. 

Bargaigner  s'est  dit  pour  débaucher,  mettre  à 
mal.  «  Disoit  outre  queveu  que  la  dite  nourrice,  ne 
«  se  plaignoit  de  luy,  et  qu'elle  ne  veult  pas  dire 
«  qu'il  l'ayt  vouUu  séduire  à  bargaigner  sa  maîtresse 
«  n'est  aucunement  recevable  à  s'adresser  à  l'en- 
«  contre  de  luy.  »  (Arrest.  amor.  p.  290.) 

Au  figuré,  on  a  donné  à  ce  mot  le  sens  de  dis- 
puter, défendre,  batailler. 

Ge  n'i  vig  mi  porsoir, 
Mais  por  la  pucele  garir 
Que  vos  eussiés  for  jugiée  ; 
Mais  moult  ert  ençois  bargeniée. 

Floire  etBlanchell.  MS.  de  S.  G.  fol.  197,  R°  col.  3. 

En  mainte  guise  ont  bargenié  at  tournoie 
Ici  perdu,  ici  gaaigné. 

Alhis,  MS.  fol.  112,  R- col.  1. 

On  trouve  barginer  employé  pour  :  négocier. 

Messire  Jofrois,  au  desroi, 
La  tente  le  Roy  guegna  ; 
N'onques  à  luy  ne  bargigna. 

Ph.  Mousk.  MS.  p.  848. 

«  Or  fut  ainsi  que  les  dits  seigneurs  en  chevau- 
«  chant  entre  Beauvais  et  Rouen,  rencontrèrent 
«  cent  ou  six  vingts  Anglois,  lesquels  Anglois  se 
»  deffcndirent  si  vigoureusement,  qu'ils  barqul- 
«  gnerent  tant  les  uns  avecques  les  autres,  qu'à  la 
«  fin  les  François  retournèrent  à  Beauvais,  et  les 
«  Anglois  demeurèrent  au  champ.  »  (Al.  Chart. 
Hist.  de  Ch.  VI,  etc.) 


(1)  Diez  propose  comme  étymologie  barcaniare,  porter  en  barques  marchandes,  harca,  qu'on  trouve  dans  Isidore   de 
Séville.  (n.  e.) 


BA 


—  405  — 


BA 


On  s'est  serti  de  ce  mot  pour  :  amuser,  tromper. 

nos  harçjaiync 

De  foi  parler  mençongier. 

Poês.  MSS.  av.  1300,  T.  TI,  p.  902. 

Enfin  on  a  employé  bargaigner  pour  :  agir,  solli- 
citer. "  Une  folle  damoiselle  qui  pour  ung  chap- 
«  peron  que  ung  chevallier  luy  donna,  fisl  tant  et 
«  barguigna  que  sa  dame  fist  la  voulenté  du  che- 
«  vallier,  et  qu'elle  la  fist  deshonnorer.  »  (Le  Chev. 
de  la  Tour,  Instruct.  à  ses  filles,  fol.  30.) 

Cil  qui  aquite  le  marchié 
Et  premeraiii  l'a  bcrijenié. 
Le  doit  avoir,  et  par  raison. 

Alhis,  MS.  fol.  15,  R-  col.  i.. 

VARI.\NTES    : 
BARGAIGNE.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  902. 
Barbigner.  Ph.  Mousk.  MS.  p.  8'i8. 
Barbignier.  Poës.  MSS.  av.  1300,  T.  II,  p.  905. 
Baigenier.  Fabl.  MSS.  de  S.  G.  fol.  198,  R°  col.  1. 
Barcheignier.  Poës.  MSS.  av.  1300,  T.  II,  p.  Tfô. 
Bargeigner.  Poës.  MSS.  Vat.  n»  1522,  fol.  106,  R»  col.  2. 
Bargenier.  fi.  et  Blanchen.  MS.  de  S.  G.  fol.  197,  R». 
Bargigner.  Ph.  Mousk,  MS  p.  74.5,  Ger.  de  Rou.  MS.  p.  131. 
Bargignier.  Poës.  MSS.  n»  7615. 

Barginer.  Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7615,  T.  I,  fol.  59,  V°  col.  2. 
Bargingnier.  Du  C.  Gloss.  latin,  à  llai-iiiiinare. 
Barqlienner.  Ibid.  au  mot  Vanjaiiizalio. 
Barquiner.  Percef.  Vol.  I,  fol.  140,  R"  col.  2. 
Barquigner.  Bout.  Som.  rur.  p.  832. 
BEr.GUiGNER.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  à  Barcaniare. 
Barguignier.  Eust  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  380,  col.  2. 
Barguingnier.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  f"  296,  R»  col.  1. 
Barguingner.  Ibid.  fol.  294,  V»  col. .2. 
Barguiner.  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauv. 
Barguigner.  Le  Chev.  de  la  Tour,  Instr.  à  ses  filles,  t»  30. 
Bergernier.  Athis,  MS.  fol.  15,  R"  col.  2. 

Barge  (1),  subst.  fém.  Bâtiment  de  mer,  bateau  de 
rivière.  —  Bords  des  rivières,  des  chemins.  —  F^ossé. 

Au  premier  sens,  barge  signifioit  toutes  sortes  de 
vaisseaux  de  différentes  grandeurs  ;  il  se  prenoit 
souvent  pour  bâtiment  de  transport,  et  quelquefois 
pour  barque,  chaloupe,  esquif: 

Ne  remest  nez,  bâtez,  ne  barge 
Ne  fust  chargié  à  sa  manière. 

Athis.  MS.  fol.  87,  V°  col.  2. 
Les  barges  foni  appareillier. 
Puis  i  entrent  li  chevalier  ; 
Les  sigles  font  dresier  as  vents. 

Blanch.  MS.  de  S.  G.  fol.  189. 

«  Iceluy  souldan  seit  équipper  vingt  quatre  ou 
«  vingt  cinq  voiles,  que  trustes ,  que  Darches  et 
«  Galiions,  très  bien  armez  et  empanaisez  ù  la  mode 
<•  de  pardeça,  et  très  bien  fournis  de  traict  à  poul- 
«  dre.  »  (J.  le  Maire,  suite  de  l'IUustr.  des  Gaules, 
p.  420.)  "  11  convient  plus  grosse  eaue  à  une  grosse 
«  barge  que  une  gallée  qui  court  bien  en  platte 
«  eaue,  ou  une  grosse  nef  periroit.  >■  (Ilist.  de  B. 
Du  Guescl.  par  Mon.  p.  404.)  Le  passage  latin  des 
annales  de  S.  Berlin,  navibus  magnis  qitas  et  nos- 
trates  bargas  vacant,  est  traduit  par  barges,  dans 
la  Chron.  de  S.  Den.  (T.  I,  fol.  180.)  Barge  est  aussi 
employé  pour  un  gros  bâtiment  de  mer  dans  les 
Poës.  de  Machaut,  fol.  210.  «  11  estoit  entré  en  une 
■'  grosse  barge  à  Lyon  sur  le  Bosne.  >>  (Froissart, 
Vol.  IV,  p.  13.)  Les  Anglois  étant  en  mer  envoyèrent 


aux  François  un  Breton,  «  et  le  firent  mettre  hors 
«  par  une  berge  sur  le  sablon.  »  (Ibid.  Vol.  III, 
p.  312.)  «  Le  seigneur  Louis  de  Lucnar  conducteur 
«  des  ambassadeurs  me  vint  trouver  avec  la  berge 
«  de  la  Reine  qu'elle  m'envoya.  »  (Mém.  deBassomp. 
T.  III,  p.  280.) 

Nous  disons  encore  berge  pour  signifier  le  bord 
des  rivières  ou  des  chaussées.  On  disoit  aussi  autre- 
fois barge.  (Yoy.  le  Dict.  d'Oudin.) 

Ilarge,  selon  Monet,  étoit  le  nom  «  d'un  fossé  à 
'<  recevoir  et  écouler  les  goutières  des  couverts.  » 
(Dict.  de  Monet.) 

Ilurgc  est  une  faute  par  barbe,  dans  le  passage 
suivant  :    «   Chevaux,  coursiers,   genêts,  chevaux 
«  d'Espagne ,   barges   et  autres.  »   Lisez  Barbes. 
(Brant.  Dames  Gai.  T.  II,  p.  207.) 
variantes  ' 

BARGE.  Athis,  MS.  fol.  54,  R»  col.  1. 

Barche.  j.  le  Maire,  à  la  suite  de  l'IUnstr.  des  G.  p.  420. 

Berge.  Mém.  de  Cassomp.  T.  III,  p.  286. 

Bargot,  subst.  niase.  Petite  bai-que,  petit  bateau. 
Diminutif  de  barge.  »  Il  n'y  avoit,  ny  barge,  ny 
«  bargot.  »  (llist.  de  B.  Du  Guescl.  par  Mén.  p.  330.) 

Li  Rois  est  en  une  bargotle. 

G.  Guiarl,  cité  par  Du  C.  Gloss.  lat.  au  niot  Barca. 

VARIANTES   : 
BARGOT,  subst.  masc.  Hist.  de  B.  du  Guescl.  par  Mén. 
Bargotte,  subst.  fém.  Du  C.  Gloss.  lat.  au  mot  Barca. 
Bargette,  subst.  fém.  G.  Guiart,  MS.  fol.  325,  V». 
Barquette,  subst.  fém.  Mém.  du  Bellay,  T.  V,  p.  349. 

Barguetin,  subst.  masc.  Espèce  de  monnoie. 
On  l'appeloit  ainsi  parce  qu'elle  étoit  le  prix  ordi- 
naire des  barques  dans  lesquelles  on  traversoit  les 
canaux  de  Venise.  (Bob.  Cenault,  cité  par  Le  Duchat 
sur  Babelais,  ï.  III,  p.  220.) 

Barguignard,  adj.  Qui  barguigne,  qui  trafique, 
qui  marchande. 

Ménage,  dans  ses  Observations  sur  la  langue 
françoise,  T.  II,  p.  401  et  402,  explique  ce  mot  par 
barbarus,  ce  qui  le  confirme  dans  l'opinion  que 
baragouin  s'est  formé  de  barbaracuinus.  Il  s'ap- 
plaudit de  cette  découverte,  et  triomphe  du  P.  Bou- 
liours,  qui  avoit  osé  le  combattre.  S'il  m'est  permis 
de  dire  mou  sentiment,  je  crois  que  bargiiius,  dans 
les  passages  cités,  doit  signifier  faux,  trompeur,  et 
qu'il  s'est  formé  de  barge,  vaisseau,  d'oîi  a  pu  venir 
barguigne  ,  commerce  ,  tromperie  ,  et  le  verbe 
bargaigner. 

variantes  : 

BARGUIGNARD.  Cotgrave,  Epith.  de  la  Porte. 

Barguigneur.  Rab.  T.  II,  p.  112. 

Barginus.  Ménage,  sur  la  Lang.  fr.  T.  II,  p.  40!. 

Baricave,  subst.  masc.  Fondrière,  précipice. 
(Dict.  de  Nicot,  Monet  et  Oudin,  au  mot  Baricave.) 
Au  lieu  de  baricace,  dans  le  Dict.  de  Corneille,  il 
faut  lire  baricave.  Baricane,  dans  D.  Flor.  de  Grec, 
fol.  120,  n'est  aussi  qu'une  faute  d'orthographe. 
«  Acier  château  situé  dans  un  fort  laid  pais  qui  est 
"  le  Quercy,  pierreux,  rabotleux,  montagneux,  et 


(I;  C'est  une  embarcation  plate,  à  voile  carrée.  On  propose  un  diminutif  du  grec  ^àgoç,  canot  ;  des  termes  grecs  de 
marine  ont  en  effet  passé  dans  le  Ponant,  (n.  e.) 


BA 


—  400 


BA 


(Brantôme,  Cap.  Fr. 


«  tout  plein  de  barricaves. 
T.  I,  p. '214.) 

VARIANTES    : 

BARICAVE.  Fav.  Théat.  T.  II,  p.  1232. 
Barricave.  Mém.  de  Cominos,  p.  147. 
Baricace.  (Lisez  Baricai<e.)  Dict.  de  Corneille. 
Baricane.  (Lisez  Baricave.)  Id. 
Barmaque,  subst.  fém.  (Lisez  Baricave.)  Ibid. 
Baricaut.  Dict.  de  Cotgrsve. 

Barignin,  subst.  masc.  Sorte  de  jeu.  Un  des 
jeux  de  Gargantua.  (Rabelais,  T.  I,  p.  140.)  Le 
Duchat,  qui  cite  l'abbé  Guyet,  dit  que  c'est  une 
espèce  de  jeu  de  trictrac  appelé  par  les  Italiens 
Baraglino. 

Baril,  subst.  masc.  Baril.  Le  baril  faisoit  partie 
des  marques  distinctives  que  portoient  les  lépreux, 
et  qui  servoient  à  les  faire  connaître.  «  En  plu- 
«  sieurs  lieux  on  ne  trouvoit  maison  qui  ne  fut 
«  garnie  d'une  croix,  et  d'une  cloche,  et  devant 
"  la  porte  d'un  tronc  avec  les  armoiries  des  ladres: 
«  la  cliquette,  et  le  baril  (1).  »  (Bouchet,  Serées, 
Eiv.  III,  p.  290.) 

On  disoit  v'm  à  baris,  pour  vin  en  barils.  «  Si 
«  comme  vins  en  pos,  ou  à  baris.  »  (Beaumanoir, 
page  12.) 

Et  puis  si  ont  al  vin  tramis 

Deus  Barjus,  que  d'Acre  aportoient, 

A  la  Taverne  le  envoient 

Ph.  Mouskes,  cite  par  Du  Gange,  GIoss.  lat.  au  mot  Barile. 

L'orthographe  barrox,  étoit  en  usage  dans  le  pays 
du  Maine.  Il  falloit  quatre  barro::,  (2)  pour  faire  une 
pipe.  (Voy.  Aimon.  (jest.  Fr.  note  de  l'édit.  p.  204.) 

Le  pluriel  barucheaulx  étoit  un  mol  du  patois  de 
Marseille.  (Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot 
Barutellus.)  Le  barrai  devoit  contenir  trente-cinq 
mesures  appelées  pichiers.  (Voy.  Ibid.  aux  mots 
Soquetum  et  Ikirtassus.) 

Expressions  remarquables  : 

1°  Baril  foudroyant  et  /lamboijant.  Espèce  de  feu 
d'artifice  dont  on  se  servoit  dans  l'attaque  ou  la 
défense  d'une  place.  (Voy.  le  P.  Daniel,  Mil.  Fr. 
T.  I,  p.  589.) 

2°  Baril  de  poudre.  Espèce  de  grenade.  «  Il  feit 
«  renouveller  l'assaut  de  8  enseignes  d'Allemens, 
«  avec  force  petits  barits  de  poudre,  lances,  et 
«  autres  artifices  de  poudres.  »  (Mém.  du  Bell. 
Liv.  X,  fol.  332.) 

3"  Courir  au  baril  plein  d'eau.  Sorte  de  jeu.  «  Les 
«  festes  des  Tupineiz,  ou  table  ronde,  estoient 
«  plutost  des  débauches  et  des  mascarades  que  des 
«  exercices  de  chevalerie,  car  on  y  courait  au 
«  faquin,  au  pot  cassé,  au  baril  plein  d'eau,  au  sac 
«  mouillé,  et  à  d'autres  courses  ridicules,  qui 
«  estoient  indignes  de  la  noblesse.  "  (Le  P.  Menestr. 
de  la  Chev.  p.  246.) 

variantes  : 

BARIL.  Bouchet,  Serées,  Liv.  III,  p.  290. 

Barril.  Id.  ibid.  p.  308. 


Bareil.  Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7218,  fol.  242,  V»  col.  2. 

Baris.  lîeauman.  p.  12. 

lÎARAS.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  II,  fol.  166,  V»  col.  2. 

Barrai.,  Rabelais,  T.  V,  p.  168. 

Barant.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  à  Barallus. 

Barrault.  Rabelais,  T.  IV,  p.  3. 

Barroz  (plier.)  .\imoin.  not.  de  l'Edit.  p.  264. 

Barreaulx  (pliir.)  Rabelais,  T.  V,  p.  168. 

Baiullaus  (pliir.)  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  IV,  R». 

Barisiaus  (plur.)  Ibid.  fol.  3,  R"  col.  1. 

Barissiaus  (phir.)  Ibid.  fol.  5,  R»  col.  2. 

Barucheaulx  (plur.)  Du  Gange,  Gloss.  lat.  à  Barutellut. 

Barjus.  Ibid.  au  mot  Barile. 

Barillage,  suist.  masc.  Sorte  de  droit.  On  l'im- 
posoil  sur  les  barils  à  mettre  le  vin.  (Voy.  Du 
Gange,  Gloss.  lat.  aux  mots  Barilagium,  ou  Baril- 
lagium  ?,ons,  Barile.) 

Bariller,  subst  masc.  Officier  de  l'échançon- 
nerie  du  roi.  Il  étoit  chargé  du  soin  du  vin.  (Voy. 
le  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  aux  mots  Barillarius  et 
Somarii,  sous  Sagma.)  Dans  l'état  des  officiers  de  la 
reine  femme  de  Louis  XI,  on  lit  :  «  Jean  le  Pré,  dit 
«  Grelin,  et  Mathelin  du  Bois  barilliers,  chacun 
»  soixante  livres.  »  (Observ.  sur  l'Hist.  de  Ch.  VIII, 
par  Godefroy,  an  1483,  p.  305.) 

VARIANTES  : 
BABILLER.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Barillarius. 
Barillier.  Ord.  du  R.  de  Fr.  T.  III,  p.  33. 
Barrellier.  Etat  des  off.  du  D.  de  Bourg,  p.  251.   " 

Barillet,  subst.  masc.  Petit  baril,  diminutif  de 
baril. 

Or  me  fêtes  seulement  tant. 
Par  amor  Dieu  le  tout  poissant. 
Que  portez  mon  bariselet, 
Ci  devant,  à  ce.st  ruisselet. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n'  7218,  fol.  3,  R-  col.  1. 

variantes  : 

BARILLET.  Oudin,  Dict. 

liARRILLET.  Nicot,  DiCt. 

Bariselet.  Fabl.  MSS.  duR.  n»  7218,  fol.  3,  R"  col.  1. 

Barillié,  adj.  Qui  sent  le  fût.  On  disoit  en  ce 
sens,  vin  barillié.  Un  ancien  poëte,  parlant  de  la 
façon  de  vivre  à  la  cour,  dit  : 

On  dort  le  jour,  et  y  veille  l'on  la  nuit  ; 
Et  y  fait  on  trop  de  gourmanderie, 
Vin  barillié,  et  viande  pourrie 
Y  ont  plusieurs. 

Poës.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  55,  col.  1. 

Barillier,  subst.  masc.  Faiseur  de  barils. 
(Boileau,  Livre  des  Mestiersdu  Chàtelet,  mss.  fol.ll.) 

Barion,  subst.  masc.  Nom  de  démon.  Nous  le 
trouvons  souvent  répété  dansleprocèsdu maréchal 
de  Rais.  (ms.  du  Roi,  p.  40,  V%  etc.) 

Bariquer,  subst.  masc.  Cri  de  l'éléphant.  (Dict. 
d'Oudin.) 

Barisel(3),  subst.  masc.  Gapitaine  de  sergens  ou 
d'archers  (Dict.  de  Borel  et  de  Ménage.  —  Voy. 
Régnier,  Satyre  VI.) 

VARIANTE  : 
BARIZEL. 


(1)  Baril  a  ici  le  sens  d'écuelle,  comme  le  prouve  ce  passage  d'Ambroise  Paré  :  «  Pour  ceste  cause  les  magistrats  leur 
enjoignirent  [aux  ladres]  ne  boire  qu'en  leur  baril.  »  (Edition  xMalgaigne,  ISiO,  XXII,  8.)  (N.  E.)  -  (2)  Amyot  emploie  aussi 
cette  forme  (les  Graajues,  23);  chez  Ponsard  on  trouve  barrau.  (Edition  citée,  I,  p.  616.)  (n.  e.)  —  (3)  En  bas-Iatin 
barigildus.  Nous  avons  affaire  à  un  radical  allemand,  encore  inconnu.  (N.  E.) 


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407  — 


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Baritonner,  verbe.  Fredonner.  (Dict.  de  Cotgr.) 
Borel  explique  baritoniser  par  chanter  et  cite  les 
vers  suivans,  tirés  d'un  ancien  livre  intitulé  l'Art 
de  Rhétorique  : 

Pan  oncques  mieux  ne  barilonisa 
Diapason,  au  son  de  ses  musetes. 

Mais  cette  explication  ne  paroit  pas  juste.  Ce  mot 
signilie  proprement  faire  du  bruit  comme  l'élépliant, 
autrement  &ar?vsser.  11  s'employoit  de  là,  au  figuré 
pour  fredonner;  c'est  en  ce  sens  qu'il  paroît  devoir 
être  pris  dans  le  passage  cité.  Le  participe  de  ce 
verhe,  mis  pour  épithète  de  basse  contre,  dans  le 
passage  suivant,  sert  encore  à  condamner  Borel. 
«  Basse  contres  barytonnantes,  tailles  douces,  et 
«  agues  haut  contres.  »  (Alect.  Rom.  fol.  H8.) 
Rabelais  donne  h  ce  mot  une  acception  particulière. 
(T.  I,  p.  39,  et  T.  111,  p.  207.) 

Barytonnant  est  aussi  un  terme  de  musique. 

Là  naaint  gosier,  barytonnant  bondit. 
Qui  iay  prononce,  ou  balade  accentue, 
Virelay  vire  ou  rondel  arondit. 
Maint  servenlois  là  endroit  se  ponctue 
Chant  royal  maint  si  chante  et  psalmodie. 

j.  Lo  Maire,  suite  de  l'Illustr.  des  Gaules,  p.  3Sl. 
VARIANTES  : 
BARITONNER.  Cotgr.  Dict. 
Barytonner.  Alector.  Rom.  fol.  118. 
Baritoniser.  Borel,  Dict. 

Barles  (1),  sxib^t.  plur.  Engins  ù  pêcher.  Paniers 
ou  autres  inslruuiens  à  prendre  du  poisson.  «  Qui 
«  est  trouvé  à  chacun  bacquet,  qui  ait  plus  de  huit 
<'  barles,  et  de  cinquante  vievins,  cliet  en  amende 
«  de  soi.xante  sols,  et  pert  le  surplus.  »  (Bout.  Som. 
rur.  p.  8G0.)  Ce  qui  nous  feroit  croire  que  biuie 
désignoit  spécialement  un  engin  à  prendre  des  an- 
guilles, c'est  que  nous  trouvons  (Ibid.  p.  507),  la 
même  disposition  répétée  avec  cette  différence  seu- 
lement, qu'au  lieu  de  huit  barles,  on  lit,  Imit 
bouche  lies  aux  anguilles. 

Bai'ley,  subst.  masc.  Orge.  On  disoit  :  «  pain 

'<  fait  de  barley,  »  en  latin  panis  hordeacei,  dans 

une   citation  de  Du  Cange,    Gloss.  lat.    au  mol 
Panis  furtis. 

Bai-long,  subst.  masc.  Parallélogramme.  Carré 
plus  long  que  large.  (Voy.  les  Dict.  de  Monet, 
Ménage,  Borel.)  «  On  a  donné  le  nom  de  barloug, 
«  en  armoiries,  aux  figures  plattes,  et  longues  en 
«  quarré  comme  les  peaux  d'Arragon.  »  (Menestr. 
Orn.  des  Arm.  p.  342.) 

VARIANTES    : 
BARLONG.  Monet  et  Nicot,  Dict. 
Barlang.  (Lisez  Baiiong.)  Borel,  Dict. 
Berlong.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  à  Bislonntis. 
Belong.  Gloss.  de  l'Hist.  de  Bret. 
Balong.  Cotgrave,  Dict. 

Baiiong,  adj.  Oblong.  «  En  forme  ovale,  et 
barlongue.  «  (Uist.  de  la  Popelinière,  T.  1,  fol.  35.) 
Barloug  s'est  dit  aussi  d'un  habit  plus  long  d'un 
côté  que  de  l'autre.  (Dict.  de  Nicot.) 


variantes  : 
BARLONG.  Hist.  de  la  Popel.  T.  I,  fol.  35,  Ro. 
Bellong.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  230,  V»  col.  2. 

Barlue,  subst.  fém.  Berlue.  Nicot,  dans  son 
dictionnaire,  définit  ce  mot:  »  Otruccation  des  yeux 
«  qui  fait  que  l'œil  ne  peut  discerner  une  chose  de 
«  l'autre.  "  Selon  Monet,  barlue  signifie  lumière 
obscure  et  ombragée,  et  Oudin  fe  traduit  par 
l'Italien  barlume  (2)"qu'il  explique:  «  entre  chien  et 
«  loup.  » 

Dea  pourtant  si  g'ay  la  barlue, 
Désormais  je  suis  un  vieillard. 

Test,  de  Palhelin,  p.  HO. 

Barn,  subst.  ■masc.  Jugement.  Mot  breton.  (Voy. 
Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Matiberiii,  qu'il  expli- 
que psii-  judices  probi,  et  boni.) 

Barna,  verbe.  Juger.  Mot  breton.  (Voy.  Babn.) 

Barnabe,  subst.  masc.  Nom  d'un  saint.  On 
disoit  proverbialement  :  «  A  la  S'  Barnabe,  sont  les 
«  plus  longs  jours  d'été,  ou  la  S'  Barnabe  le  plus 
'>  long  jour  d'été  ;  à  la  S'°  Luce,  les  jours  augmen- 
«  tent.  »  Mais  ces  proverbes  ne  peuvent  plus  être 
véritables  depuis  la  réforme  du  calendrier  par 
Grégoire  Xll,  en  1582. 

Barnart,  subst.  masc.  11  est  écrit  Banarf  dans  le 
passage  suivant,  où  ce  mot  semble  désigner  le  roi 
d'Angleterre,  en  guerre  avec  le  roi  de  France. 

Il  ot  jadis,  selon  la  fiction, 
Guerre  mortel,  périlleuse,  doutable 
Qui  trop  dura,  et  fist  d'afliction, 
Entre  Banart,  l'archiprêtre  invocable, 
Et  Briquemerle  cerf  non  defensable. 
Qui  gasterent  l'un  de  Tautre  pais 

Eusl.  Desch.  fol.  ia9,  col.  i.  pois.  MSS. 

Barnei,  subst.  ou  nom  de  lieu.  Bureaux  de 
Barnei.  Expression  proverbiale  qui  se  trouve  dans 
le  Recueil  des  poës.  mss.  av.  1300,  T.  IV,  p.  1652. 

Barnelment,  adv.  Courageusement.  Ce  mot, 
dans  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  Mbs.  répond  au  latin 
Viriliter. 

La  Virge  li  dist,  douce  amie, 
Ne  soies  de  riens  esmarie. 
Mais  barnelment  vos  continez 
Car  hui,  en  cest  jor,  reclievrés 
Por  ceste  fraisle  vie  brieve, 
La  grant  joie  qui  ains  n'akieve. 

Vie  des  SS.  HS.  de  Sorb.  chif.  LX,  col.  57. 

VARIANTES  : 
BARNELMENT.  Vies  des  SS.  MSS.  de  Sorb.  Liv.  X,  col.  57. 
Bernilement.  S'  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  319  et  331. 

Barnes,  subst.  plur.  On  appeloit  ainsi  les  lieux 
où  il  y  avoit  des  fontaines  dont  l'eau  étoit  salée. 
C'est  de  ce  mot  que  s'est  formé  celui  de  bruneau, 
en  latin  brunellum,  qu'on  trouve  dans  les  titres  de 
la  Bourgogne,  pour  signifier  une  mesure  de  sel. 
(Peliss.  Hist.  de  Louis  XIV,  Liv.  VI,  p.  339,  etc.) 

Le  mot  de  barnes,  employé  au  masculin  pluriel, 
signifioit  le  nom  de  peuples,  peut-être  des  habitants 
de  Berne.  «  L'an  1476,  le  duc  de  Lorraine  qui  esloit 


(1)  Barle,  dans  les  mines  exploitées,  est  aujourd'hui  synonyme  de  faille,  (n.  e.)  -  (2)  Le  mot  italien  assure  l'étymolosie  : 
nous  avons  là  le  préfixe  péjoratif  bar,  plus  la  forme  lue,  dérivée  de  lucere,  luire,  (n.  e.) 


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408  — 


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0  au  pays  de  Suisse,  avecques  les  Suisses,  liâmes, 
«  Allemans,  Lorrains.  •>  [Cliron.  Scand.de  Louis XI, 
p.  200.) 

Bai-nez,  s!(/^s/.  masr.  plur.  Les  juges  des 
Hébreux.  Ce  mol  est  employé  en  ce  sens  dans 
l'Hisl.  des  trois  Maries,  en  vers,  mss.  p.  196.  Il  est 
formé  visiblement  du  mot  barn,  jugement;  d'où  est 
aussi  venu  notre  mot  t)rt?'orî,  le  premier  attribut  des 
barons  étant  de  rendre  la  jusiice  à  leurs  vassaux, 
et  de  former  même  le  tribunal  de  la  nation. 

Barnis,  adj.  Mâle,  viril.  Li  barnis  Manière-^, 
dans  S.  Bern.,  répond  au  latin  Vlrilis  conslantia. 

—  Àige  bernil,  iclas  virilis.  —  neriiil  coraigc, 
virilis  animas.  —  Demis  li  cucrs,  virilis  auimus. 

VARIANTES    : 
BARNIS.  s.  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  269. 
Bernil.  S.  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  207  et  219. 
Bernis.  S.  Bern.  Serm.  fr.  MS.  p.  269. 

Bariio,  subst.  inasc.  Fils  libre.  (Dict.  de  Borel, 
2"  add.)  Cet  auteur  n'appuie  cette  explication  d'au- 
cune autorité.  (Yoy.  Bauoî;.) 

Baron,  subsl.  masc.  Homme.  —  Homme  illustre. 

—  Titre  de  fief.  —  Titre  de  noblesse.  —  Fils  aine 
d'un  sei-sneur.  —  Titre  de  l'archevêque  de  Tours. 

—  Homme  du  commun.  —  Voleur.  —  Mari.  —  Titre 
donné  aux  saintes. 

Les  mots  baron  et  hcrs,  dans  S.  Bern.  Serm.  fr. 
MSS.,  répondent  au  latin  vit;  dans  le  sens  d'homme 
et  dans  le  sens  de  mari.  Nous  ne  considérerons  pas 
ce  mot  dans  la  signification  qu'on  lui  donne  aujour- 
d'hui. Nous  nous  contenterons  de  rapporter  les 
différentes  acceptions  que  les  anciens  auteurs  lui 
ont  données,  et  nous  ferons  un  article  particulier 
de  chacune  d'elles.  Voyez  d'abord,  sur  les  diverses 
origines  de  ce  mol  (1):  Ruinarl,  sur  laChron.  deFré- 
dégaire,  p.  021  ;  le  Gloss.  lai.  de  Du  Cange,  au  mot 
Ri'ci  homines;  le  Gloss.  du  R.  de  la  Rose  et  le  supl. 
d'Argenlré,  Coût,  de  Bret.  p.  2188  ;  Fauchet,  Origine 
des  dignités  de  France  ;  Le  Laboureur  de  la  Pairie, 
p.  250^  et  le  Cellhell.  de  L.  Trippault. 

Le  mot  baron  s'est  employé  pour  homme.  (Laur. 
Gloss.  du  Droit  fr.) 

Dans  la  seconde  acception,  il  a  signifié  :  Homme 
par  excellence,  homme  illustre  en  vertu  et  en  nais- 
sance, brave  seigneur,  homme  vaillant.  (La  Roque, 
sur  la  Noblesse,  p.  352.) 

Noble  ou  nouble  baron,  ce  titre  est  pris  dans  les 
actes  par  les  comtes  et  les  ducs  de  Bourgogne. 
(Voy.  Pérard,  Hist.  de  Bourg,  p.  450,  lil.  de  1242  ; 
p.  46f),  tit.  de  1246  et  autres,  jusqu'il  1269.)  En  y 
ajoutant  :  par  la  grâce  de  Deu,  (Voy.  Pérard,  Hisl. 
de  Bourg,  p.  486,  tit.  de  1257)  et  quelquefois  :  el 
Prince.  (Pérard,  p.  518  et  519,  tit.  de  1269.)  Ce  titre 
est  donné  aux  comtes  de  Savnve  et  Bourgogne, 
dans  Pérard  (pages  518  et  519,  lit.  de  1269),  et  aux 
comtes  deNevers  et  aux  comtes  de  Bar,  dans  Pérard 


(p.  408,  lit.  de  1247.)  On  lit  7Wbles  bers,  parlant  du 
duc  de  Bourgogne,  du  duc  de  Bretagne  et  d'autres 
seigneurs.  (Voy.  Pérard,  Hist.  de  Bourg,  p.  -482,  tit. 
de  1255  ;  et  Morice,  Hist.  de  Brel.  col.  112  et  1 1.3,  tit. 
de  1268;  et  Rymer,  T.  I,  p.  13,  tit.  de  1256.)  Hono- 
rable ou  onorable  baron,  monseignor  éloit  la  quali- 
fication de  l'Abbé  de  S'  Etienne  et  du  Doyen  de  la 
S"  Chapelle  de  Dijon.  (Pérard,  Hist.  de  Bourg,  page 
52(1,  lit.  de  1209.)  Onorable  baron  étoit  le  litre  d'un 
Archidiacre  de  Langres.  (Pérard,  Hist.  de  Bourg, 
p.  478,  tit.  de  1254.)  Onorables  barons  est  dit  de  deux 
personnes,  dont  lune  estoil  arcedlacre  et  l'autre 
arceprevene  (c'esl-à-dire  archipreslre)  de  Beaune. 
(Pérard,  Hist.  de  Bourg,  p.  500,  tit.  de  1260.) 
Ber  est  pris  en  ce  sens  dans  ce  vers  : 

Ne  sui  pas  si  preux,  ne  si  her. 

Fabl.  MSS.  du  P..  n-  7996.  p.  2.'). 

Il  est  comme  synonyme  à  prodome.  On  lit  :  pro- 
domes  et  barons,  dans  Athis,  ms.  fol.  .54,  V"  col.  2. 

Baron  est  employé  comme  terme  générique  et 
comme  terme  spécifique.  «  Trestout  li  Baron,  Prin- 
«  ces  Barons  Ducs  Comtes.  »  (Ger.  de  Rouss.  ms. 
p.  80.)  Ce  mot  est  aussi  employé  en  mauvaise  part 
comme  en  parlant  du  grand  Polyphôme. 

Ainsi  se  scet  li  bers  esbatre 

Mais  loing,  et  prés,  toiiz  ceulz  qui  l'oient 

De  son  encontre  se  desvoient. 

Macliaut,  MS.  fol.  201,  V-  col.  1. 

Baron,  comme  titre  de  fief,  désignoil  tous  ceux 
qui  tiennent  leur  pinncipale  seigneurie  immédiate- 
ment de  la  Couronne.  ^La  Roque,  sur  la  Nob.  page 
350  ;  Du  Tillet,  Recueil  des  R.  de  Fr.  p.  341.  —  Voy. 
aussi  un  long  article  à  ce  sujet  dans  le  Supl.  au 
Gloss.  du  R.  de  la  Rose.) 

Le  titre  de  grands  barons  exprimoit  une  supé- 
riorité éminenle  sur  les  nobles  et  les  riches,  dans 
ces  vers  : 

A  tous  ses  grands  barons  manda  en  commandant 
A  tous  nobles  et  riches  commanda  en  mandant.    . 

Gérard  de  Rouss.  MS.  p.  193. 

Le  titre  de  baron  royal,  qu'on  voit  dans  Petit  J. 
de  Saintré,  p.  325,  étoit  apparemment  celui  sous 
lequel  on  désignoil  les  hauts  barons.  On  trouve 
proceres-^our  barons,  dans  le  Gloss.  du  P.  Labbe. 
C'étoil  le  premier  ordre  de  la  noblesse  en  Béarn. 
«  Dans  le  Bearn,  il  y  a  trois  ordres  de  noblesse,  les 
«  barons  (lui  sont  les  grands  seigneurs  de  la 
«  noblesse  titrée,  les  cavèrs  qui  sont  les  chevaliers 
«  armez,  et  les  domengers  qui  sont  les  écuyers, 
»  baclicliers,  damoiseaux  et  autres,  non  encore 
«  chevaliers.  »  (Le  P.  Menestr.  de  la  Cheval,  p.  100.) 

Le  baron,  pris  en  ce  sens,  étoit  supérieur  au  châ- 
telain. «  Avant  qu'aucun  se  puisse  dire  seigneur 
<.  baron,  il  convient  qu'il  ayt  souz  lui  plusieurs 
.<  chaslelains,  ou  deux  pour  le  moins,  et  est  fondé 
»  d'.avoir  ville  close,  collège,  abbaye  ou  prieuré,  ou 
.<  autres  droits  déclarez  au  chapitre  des  droits  de 
»  seigneur  chaslellain.  »  (Coût.  Gén.  T.  H,  p.  545. 


(1)  On  hésite  entre  le  celtique- fcar,  héros,  et  le  barus  de  la  loi  des  Allemands,  qu'on  rattacherait  à  beran,  porter,  avec  le 
sens  d'homme  robuste,  de  noble.  L'étymoloaie  allemande  est  assez  probable,  le  mot  baro  ayant  en  latm  populaire  le  sens 
péjoratif  dhomme  stiipide.  de  valet  d'armée.  C'est  là  le  sort  des  mots  allemands  dans  le  français;  de  même  Hoss,  cheval 
de  prix,  est  devenu  ce  que  l'on  sait.  (,n.  e.)  ' 


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BA 


—  Voy.  Les  Ordoii.  des  ft.  de  Vr.  T.  I,  p.  271  ;  les 
Annot.  sur  la  Soin.  rur.  de  Bout.  p.  901.) 

Le  bcn'on  devoit  avoir,  au  moins,  dix  hommes 
nobles  pour  vassaux.  (Voy.  La  Salade,  fol.  53.)  Sui- 
vant le  même  auteur,  le  vicomte  étoit  supérieur  au 
baron  ;  mais  ce  sentiment,  peu  fondé,  est  contredit 
par  l'arlicle  suivant  : 

Ou  dislinguoit  les  barons  simples  et  les  barons 
doubles.  Le  "baron  simple  éloit  celui  qui  avoit  une 
cliatellenie  avec  un  ressort:  il  étoit  distingué  du 
haut  baron,  qui  relevoit  immédiatement  du  Roi. 
(Voy.  Bruss  sur  les  Fiefs,  p.  89:)  )  Le  baron  double 
avoit  deux  baronnies.  «  Une  aulre  exemple  vous 
'<  diray  d'une  grant  U;.me  qui  fut  femme  à  ung 
<<  baron  double.  »  (Le  Cliev.  de  la  Tour,  Instr.  à  ses 
filles,  fol.  07.)  Les  auteui's  sont  partagés  sur  le 
nombre  des  cbatellenies  qui  devoit  composer  une 
baronnie,  et  sur  le  nombre  des  baronnies  néces- 
saires pour  former  un  comté,  un  marquisat,  un 
duché.  (Voyez  La  Salade,  fol.  53.  —  Le  Coût.  gén. 
T.  II,  p.  05;  et  Fauch,  de  l'Orig.  des  Dign  deFr. 
page  M.) 

tout  baron,  par  la  nature  de  son  fief,  étuil  ban- 
nerel  et  avoit  droit  de  lever  bannière.  Le  simple 
bannerel  n'avoit  ce  droit  que  par  une  concession 
particulière.  «  Le  comte  de  Laval  debatil  que 
"  monsieur  Raoul  de  Conequen  n"estoit  baron  , 
«  mais  seulement  bannerel,  et  qu'il  avoit  levé  baa- 
«  nière,  dont  ou  se  mocquoil,  et  l'appelloit  le  che- 
»  valier  au  drappeau  quarré  ;  et  le  dit  Conequen 
«  se  maintenoit  baron  ayant  près  de  cinq  cents 
«  vassaux,  et  grandes  rentes.  »  (Du  Till.  Rec.  des 
R.  de  Tr.  p.  318. —  Voy.  La  Roque,  traité  de  la  >;ob. 
p.  28.;  Cependant  on  voit  souvent  dans  différens 
auteurs  le  mot  baron,  pris  pour  chevalier  banneret, 
servir  à  le  distinguer  du  simple  chevalier.  (Voy.  Du 
Cange,  sur  Joinv.  p.  190.) 

Le  titre  de  baron,  pris  comme  titre  de  noble, 
signifioit  toute  la  haute  noblesse  supérieure  aux 
simples  chevaliers.  «  Les  Roys  doivent  avoir  des- 
"  soubz  eux  contes,  et  viconles,  ducs,  princes, 
>'  valvasseurs,  et  dessoubz  ces  /^«ro?fs  doivent  estre 
"  chevaliers  d'ung  Escu,  lesquels  doivent  gouver- 
«  ner  selon  l'ordonnance  des  barons  qui  "sont  es 
«  haulx  degrés  de  chevalerie,  devant  nommez.  » 
(Ord.  de  Chev  fol.  5,  R°.) 

La  dignité  de  baron  venoil  immédiatement  après 
celle  des  ducs.  «  Le  baron  de  Raiz  auroit  supplié 
«  qu'il  ne  fust  rien  changé  au  rang  premier  que, 
«  de  toute  ancienneté,  les  barons  ont  après  les  ducs, 
«  de  ne  prescrire  aucune  forme  de  partage  entre 
"  les  héritiers  des  comtes  barons.  »  (Coût.  gén. 
T.  II,  p.  832.)  Par  ce  passage,  les  comtes  paroissent 
confondus  avec  les  barons. 

Baron,  désignoit  le  fils  aine  d'un  seigneur  de 
village,  suivant  la  façon  de  parler  de  quelques  pro- 
vinces. (Boulainv.  Ess.  sur  la  Nobl.  Tab.  page  44.) 
C'est  sans  doute  ce  que  Borol  entend  p;ir'le  mot 
barno,  qu'il  explique  par  fils  libre  dans  les  2''  add. 


de  son  Dict.  Il  y  a  tout  lieu  de  croire  qu'il  a  mal  lu. 
En  Bretagne,  le  titre  de  baron  se  donne  aux  puînés; 
les  aines  s'appellent  co»//<rs.  (Voy.  La  Roque,  sur  la 
Nobl.  p.  150.) 

Baron  éloit  un  titre  attaché  à  l'archevêché  de 
Tours.  «  Révérend  père  en  Dieu,  messire  Simon  de 
«  Maillé,  archevêque,  seigneur,  baron  du  palais 
«  archiépiscopal  de  Tours.  »  (Coût.  gén.  T.  II,  [1.20.) 

Baron  se  disoit  aussi  pour  désigner  un  homme 
du  commun.  (Dict.  de  Borel,  et  Suppl.  au  Gloss.  du 
R.  de  la  Rose.) 

Ce  mot  a  même  servi  pour  signifier  un  voleur,  en 
italien  barone.  (Dict.  d'Oudin.)  «  Louis  le  Débonnaire 
"  commanda  aux  messagiers  qu'ils  cherchassent  les 
«  contrées  pour  les  barons,  et  les  robeurs  qui,  en 
«  ce  temps,  faisoient  moult  de  maulx.  »  On  lit  dans 
le  latin  »  prœcepit  ut  missi  irent  qui  immanilalem 
<■  prœdonum  at(iue  latronum  quœ  inaudila  emer- 
«  serai,  cohiberent.  »  (Chion.  S.  Den.  T.  I,  p.  173.) 

Baron  se  disoit  quelquefois  pour  le  maître  d'une 
maison    et   pour  mari.   (Glossaire  du   P.   Labbe.) 
Le  comte  ou  duc  époux  de  la  duchesse  Berthe  est 
appelé  son  baron,  dans  Gérard  de  Rouss.  p.  185.) 
Aussis  semblablement  occis 
Très  deloyaument  son  baron, 
Clitemnestra,  Agamemnon. 

Eust.  Desch.  Pous.  IISS.  fol.  506,  col.  1. 

C'est  en  ce  sens  qu'en  parlant  d'une  paysanne 
qui  répond  à  son  mari,  l'on  a  dit: 

Elle  respond  à  son  baron. 

Fabl.  MSS,  de  S.  G.  fol.  21. 

De  là,  femme  covertc  de  baron  signifioit  femme 
en  puissance  de  mari.  (Britt.  Loix  d'Angl.  fol.  67. 
—  Voy.  Beauman.  p.  230  et  237;  les  Ord.  des  R. 
de  Fr.  T.  I,  p.  119;  et  le  Gloss.  du  P.  Martene.) 

Enfin /;«; OH  a  été  une  qualification  donnée  aux 
saints  :  le  baron  Saint-Jacques.  (Froiss.  Liv.  III, 
p.  IH.)  Le  glorieux  baron  M-'  Saint-Antoi)ie. {A\)o\. 
pr.  Hérodote,  p.  6Ti7.)Lebaronde  Berhanie  pour  le 
Lazare  et  autres,  dans  nos  anciens  sermonnaires, 
cité  dans  le  Suppl.  au  Gloss.  du  R.  de  la  Rose. 

Baronet  étoit  le  diminutif  de  baron. 

»  Le  ber  [i]  qui  est  le  terme  dont  on  se  sert  en 

"  Flandres  el  en  Picardie est  la  même  chose  que 

"  baron.  »  (La  Roque,  sur  la  Noblesse,  p.  01.  — 
Voy.  aussi  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Barones  et 
Gloss.  sur  Villehard.)  On  a  employé  le  mot  ber, 
comme  celui  de  baron,  pour  désigner  un  homme 
brave,  v;iillant  : 

l'ovres  estoit,  mes  de  cuer  estoit  ber. 

Nol.  du  Rom.  d'Alex,  fol.  23. 
Henry  est  tant  sage,  tant  puissant  et  tant  ber. 

Rom.de  Kou,  MS.  p.  136. 

(Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Barnagium.) 
On  s'est  servi  du  mot  bers  ironiquement  dans  ce 

vers  : 

Promettre  sans  donner  est  bers. 

rocs.  MSS.  avant  1300.  T.  IV,  p.  U91. 

Ou  disoit  au  féminin  baronesse,  barronnesse, 
barncsse,  femme  de  baron.  Nous  trouvons  aussi  bar- 


il) Li  ber  est  le  cas  sujet  et  vient  de  baro,  avec  l'accent  sur  a  ;  le  baron  est  le  cas  résime  et  vient  de  baronem.  (N.  E.) 
II.  -  52 


BA 


-  410  — 


BÂ 


ncssc,  pour  femme  en  gcnéml,  dans  Ph.  Mouskes, 
Ms.  page  352. 

Heniaïquons  celle  expression  : 

Ilaron  de  Fa'ueslc  (1)  semble  signifier  fanfaron, 
suivant  une  (lazelle  de  1031,  elle  I*.  Meneslriei'.  On 
lit,  au  sujet  d'un  ballet  joué  en  1031  :  «  Puis 
«  descendit  des  Alpes,  une  autre  femme  représen- 
«  tant  la  vraye  l^enommée  qui  au  son  de  ses 
«  trompetles  list  paroisire  la  vanité  des  barons  de 
«  Fd'iicslc  ei  introduisit  en  leur  place  neuf  cava- 
«  iici  s  encore  plus  ricliemenl  vêtus,  auxquels  elle 
"  laissa  libre  le  champ  de  la  gloire.  »  (Beaucb. 
Rech.  des  Th.  T.  III,  p.  98.) 

VAF.IANTES  : 
BARON.  Orlh.  siibsist.  S.  Bern.  Serm.  fr.  MSS.  p.  177. 
Barron.  Poës.  MSS.  av.  i300,  T.  IV,  p.  13H. 
Baronet.  Valesiana,  p.  202  et  203. 
Baran.  Chr.  S'  Den.  T.  II,  fol.  169. 
Barat.  Notice  des  Vœux  du  Paon,  fol.  163. 
Barnes  et  Barons.  Ger.  de  Rouss.  MSS.  p.  110. 
Barno.  (Lisez  Baron.)  Borel,  Dict. 
Barnies  at  Bernes.  Ger.  de  Rouss.  MS.  p.  112. 
Bauron  at  Baron.  Athis,  MS.  fol.  87,  R»  col.  2. 
Barlm.  Pérard,  Ilist.  de  Bourg,  p.  473. 
Ber.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  179. 
Bernes  ou  Barnies.  Ger.  de  Rouss.  MS.  p.  112. 
Bers.  Ger.  de  Rouss.  MS.  p.  7. 
Barnesse,  subsl.  féru.  Ph.  Mousk.  MS.  p.  352. 
Baronesse,  suhul.  l'ém.  Froissart,  Liv.  I,  p.  67. 
Baronnesse,  sicbst.  fém.  Ger.  de  Nev.  2  part.  p.  100. 

Baronage,  suhst.  mase.  Corps  de  noblesse.  — 
Train,  éi|uipage.  —  Seigneurie,  domaine.  —  De- 
meure, habilalion.  —  Gouvernement.  —  Droit 
seigneurial.  —  Valeur,  vertu.  —  Acte  de  vertu,  de 
valeur.  —  (Jloii-e,  honneur,  magnilicence. 

(Voyez, surce  mat,  leDict.  deNicot  etLaur.  Gloss. 
du  Dr.  Fr.  ;  les  Dict.  de  Rob.  Est.  Borel  et  Cotgrave, 
au  mot  lîarnrtge;  Du  Cauge,  Gloss.  lat.  au  mot 
Ileriiugium  ;  le  Dict.  d'Oudin,  au  mot  liernaige) 
Dans  toutes  ses  acceptions,  ce  mol  dérive  du  mol 
bavun. 

Ce  mot  s'est  employé  pour  corps  de  noblesse. 
C'est  en  ce  sens  qu'on  lit  :  «  Le  Roy  a  tout  son  riche 
«  barnage  ;-2;i.  »  (Chroniq.  de  S' Denis,  T.  I,  f°  152.) 

Sou  havnmjc  ol  par  grant  poésie 
Tuit  asseniblé-à  une  feste. 

Blanch.  MS.  de  S'  Genil.  fol.  183. 

Charlemagne,  ayant  perdu  les  principaux  chefs 
de  son  armée,  à  la  "journée  de  Roncevaux,  s'exprime 
ainsi  : 

Dieux  ou  est  mes  baniarjcs  tous. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  223. 
Lors  parla  liautement  oyant  tout  le  barney 

Ger.  de  Uoussillon,  .MS.  p.  lli. 

Dans  la  seconde  acception,  barnage  a  signifié  : 
train,  suite,  équipage. 

Or  li  verrons  son  barnuUje, 
Et  son  beubans  démener. 

Tocs.  MSS.  avant  130O,  T.  11.  p.  1008. 


Vaillants  chevalier  de  l'aller  s'appareille 
Trestout  son  barnage. 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  45. 

Onaditaussi6aj'Ha(/e,  pour  seigneurie,  domaine. 

.le  vous  donray  un  fief,  voyant  tout  mon  bornez  (3). 

Faucli.  Dign.  de  Fr.  li»re  I,  p.  34. 

.  .  .  Qui  ne  croist  conseil  des  sages 
Tost  apetice  ses  bernayes. 

Hisl.  des  Trois  Maries,  en  vers,  MS.  p.  22. 

De  là,  on  lit  dans  Coquillart,  nobles  bernages,  au 
figuré,  pour  demeure,  habitation  : 

Vous  espritz,  et  vertueux  courages, 
Plaisans,  honnestes,  loyaux  et  pacifiques, 
S'allez  à  cop  (4)  de  vos  nobles  bernaqp.s. 
Coiiuillart,  p.  1^2. 

On  a  dit  aussi  liernaige,  dans  un  sens  figuré,  pour 
gouvernement.  Un  de  nos  anciens  écriv^iins,  par- 
lant de  l'action  d'Appius,  el  de  sa  violence  ù  l'égard 
de  Virginie,  jeune  fille  romaine,  dit  :  »  Dès  lors 
n  Rome  enchangea  son  bernaige  et  liberté;  on  vit 
«  à  chacun  faire.  «  (Triomphe  de  Pélr.  trad.  du 
B.  d'Oppède,  fol.  40.) 

Barnage,  comme  droit  seigneurial,  éloil  un  droit 
qui  se  payoit  au  roi  et  aux  seigneurs,  à  raison  des 
feux,  dont  les  nobles  et  les  ecclésiastiques  étoient 
exempts.  (Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.  au  mol  Barnage.) 
Les  maisons  situées  dans  l'étendue  du  duché  d'Or- 
léans y  étoient  sujetles.  Ce  droit,  t)u'on  appelle 
fouagc  en  Normandie,  changeoit  de  dénomination 
suivant  les  dilférentes  provinces  où  il  se  levoit. 
(Bruss.  sur  les  Fiefs,  préf.  p.  19.) 

Ce  mot,  pris  dans  le  sens  qui  lui  est  propre  et 
naturel,  ayant  signifié  un  corps  de  noblesse  el  la 
bravoure  étant  regardée  comme  un  altribul  essen- 
tiel de  ce  corps,  de  là,  barnage  (5)  se  prenoitpour 
valeur,  courage,  vertu  : 

Demain  verra  l'en  mon  barnage. 

Fabl.  MSS.  du.  R.  n-  70%,  V  col.  0). 
Lors  se  leva  emprés  Fourques  le  preux,  le  sage 
Qui  estoit  son  droit  neps,  plain  de  trestout  bernaqe. 
Ger.  deKoussillon,  MS.  p.  108. 

De  là  aussi  barnage  s'omployoil  pour  exprimer 
l'acte  même  de  valeur  : 

.\nques  n'oi  loer  ottrage 

Senz  etmesuie  sont  barnaige  : 

Uns  pois  hardis  puet  moult  bien  faire 

Dont  maint  prodome  ont  moult  contraire. 

Albis,  MS.  fol.  42,  R-  col.  2. 
Les  felonniers  des  félons. 
Et  les  burnages  des  barons. 

Rom.  de  Kou,  MS.  p.  1. 

Enfin,  par  une  extension  de  ces  deux  dernières 
acceptions,  on  a  étendu  la  signification  de  ce  mot 
à  celle  de  gloire,  honneur,  magnificence  : 

Vielles  gens  doivent  séjorner 
Et  jovenceax  doivent  errer 
Por  conquierre  pris,  et  barnage 
Et  proesce  par  vasselage. 

Blanch.  MSS.  de  S'  Germ.  fol.  184. 


(1)  C'est  une  allusion  aux  aventures  du  Barcm  de  Fœneslc,  imaginé  par  d'Aubigné,  et  qui  préférait  les  apparences  du 
luxe  à  la  réalité  du  bien-être.  Les  quatre  livres  parurent  successivement  de  1617  à  1630.  (N.  e.)  —  (2)  Le  mot  barnage  se 
trouve  déjà  avec  ce  sens  dans  la  Chanson  de  Roland  (édition  L.  Gautier,  v.  1349);  «  Dist  l'arcevesque  :  Ben  ait  nostre 
barnage.  »  (N.  E.l  —  (3)  La  forme  barnrt  se  trouve  aussi  dans  la  Chanson  de  Roland,  vers  536  :  «  Meilz  voelt  mûrir  que 
guerpir  sun  barnei.  »  (N.  E.)  —  (4)  Aussitôt.  —  (5)  On  a  ce  même  sens  dans  la  Chanson  de  Roland,  v.  535  :  «  De  tel  barnagi: 
l'ad  Deus  enluniinet.  »  (n.  e.) 


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—  411  - 


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Barnatge  étoil  un  mot  languedocien,  et  dans  ce 
patois,  fa  barnatge  sigiiilioit  faire  du  train,  faire  du 
désordre.  (Dict.  de  Borel,  au  mot  Bernagc.) 

VARIANTES  : 
Bargnage.  Borel,  Dictionnaire. 
Barnage.  Ph.  Mouslves,  MS.  p.  225. 
Barnaige.  Athis,  MS.   fol.  42,  R»  col.  2. 
Barnatge.  Borel,  Dictionnaire. 
Bernage.  CoquiUart,  p.  182. 
Bernaige.  La  Colomb.  Th.  d'honn.  T.  I,  p.  73. 
Barnail.  Fabl.  MSS.  du  R  n»  7218,  fol.  190. 
Baronail.  Ibid.  fol.  191,  R»  col.  I. 
Barnè.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  140. 
Barney.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  114. 
Barnez.  Fauch.  Dign.  de  Fr.  livre  I,  p.  34. 

Baronie,  suhst.  fém.  Collectif  de  barons.  — 
Titre  de  dignité.  —  Vaillance. 

Au  premier  sens,  on  lit  dans  La  Colombière  (Tli. 
d'honn.  p.  73)  :  .<  La  baronnie  soubs  vous  ici  pré- 
«  sente.  » 

Le  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose  l'explique  par 
compagnie,  assemblée  de  seigneurs. 

Comme  titre  de  dignité,  la  baronie  étoit  confondue 
avec  la  pairie.  Dans  l'acte  de  cession  de  terres  faite 
h  Jeanne,  fille  de  Louis-le-IIulin,  on  lit  :  «  Pour  les 
«  tenir  eu  pairie  et  baronie.  «  (Voyez  le  Glossaire 
latin  de  Du  Cauge,  au  mol/'rt)"cs.) 

Le  titre  de  baronie  (1)  étoil  affecté  particulièrement 
aux  terres  de  Coucy  et  Beaujeu.  (Voy.  Gr.  Cout.de 
Fr.  livre  II,  p  182.)  Tenir  une  tere  en  baronie, 
c'étoit  la  posséder  en  qualité  de  duc,  comte,  prince 
ou  roi.  On  disoil  aussi  :  «  Tenir  en  baronnerie  \)0\ir 
"  tenir  du  Roy  immédiatement ,  aVec  tiltre  de 
«  baron,  d'un  seigneur  qui  peut  avoii'  des  barons 
«  tenans  de  luy.  comme  de  duc  au  comte.  »  (Bout. 
Som.  rur.  p.4'i(>;  noie  de  l'éditeur.) 

On  a  dit  aussi  baronnie  pour  vaillance,  qualité 
qui  distinguoit  particulièrement  les  baVous  ou 
nobles.  Cemot  est  employé  en  ce  sens,  dans  leRec. 
des  Poés.  .MSS.  av.  1300,  f .  IV,  p.  1360.  On  a  vu  le 
mot  barnage  avoir  cette  même  acception,  et  en 
général  toutes  celles  du  mot  baronie. 

variantes  : 
BARONIE.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Pares. 
Baronnie.  La  Colomb.  Th.  d'honn.  p.  73. 
Baronnerie.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  72. 

Barqiiei'ol,  subat.  ninsc.  Batelier.  «  Se  fait 
«  mettre  à  bord  par  le  burqueroUe.  «  (Apol.  pour 
Hérodote,  p.  18!).) 

variantes  : 

BARQUEROL.  Berg.  de  R.  Bell.  T.  I,  fol.  97. 

Barquerolle.  Apol.  pour  Hérodote,  p.  189. 

Barquerot.  Mém.  du  Bell,  livre  IX,  fol.  279,  R». 

Barqlierotier.  Jlerl.  Coc.  T.  I,  p.  256. 

Barfiuei"ole,S!<Z;sf.  fém.  Diminutif  de  bateau  (2), 
nacelle.  (Voy.  les  autorités  citées  sur  chacune  des 
orthographes  rapportées  en  cet  article.) 


variantes  : 
BARQUEROLE.  Monet,  Dict. 
Barquerote.  Div.  Lee.  de  Du  Verd.  p.  119. 
Bariquelle.  Nicot,  Oudin  et  Monet. 
Barquette.  Essais  de  Mont.  T.  II,  p.  448. 

Barquiaii,  snbsl.masc.  Bassin.  Réservoir  d'eau. 
Ce  mot  est  employé  dans  le  patois  de  Marseille. 
(Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  liarquelius.) 

Barracan,  subst.  masc.  Espèce  de  camelot.  — 
Manteau. 

On  trouve,  dans  le  premier  sens,  harracanns  et 
boracanus,  dans  le  Gloss.  lat.  de  Du  Gange. 

Les barracans (3)  étoient  des manteauxainsi nom- 
més, sans  doute,  parce  qu'ils  étoient  de  l'étoffe 
appelée  barracan.  Les  iiabitans  del'ile  de  Zerbi  ou 
de  Gerbes  étoient  vêtus,  en  l.">(jO,  de  manteaux  de 
laine,  avec  une  frange  de  soie  en  bas  ;  ils  appeloient 
ces  manteaux  barracans.  (Ilist.  de  M.  de  Thou, 
T.  III,  p.  395.) 

liavviichexix, adjectif.  Rabacbcux.  Motvulgaire. 
(Gelthel.  de  L.  Tripp.) 

Bai-rage,  subst.  masc.  Sorte  de  droit.  C'est  un 
droit  de  passage  ou  péage  à  la  barrière.  Il  est  doma- 
nial à  Paris  et  dans  d'autres  villes.  On  Ulbeirages 
dans  les  Ord.  T.  III,  p.  3Ci.  C'est  une  faute  pour 
barrages  et  l'éditeur  se  trompe  lorsqu'il  dit  qu'on 
peut  lire  berrages. 

variantes  : 

BARRAGE.  Cotgnve,  nictionnaire. 
Barage.  Borel,  .Ménage,  Dict. 
Barraige.  Rabelais,  T.  II,  p.  70  et  275. 
Beir.\ge.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T,  III,  p.  364. 

Barraux,  subst.  masc.  plur.  Voici  le  passage 
oii  nous  trouvons  ce  mot:  «  Le  sommelier  doit 
«  venir  avec  trois  bons  chevaux  chargez  de  bons 
■t  instrumens  pour  arrouser  le  gosier,  comme 
«  coutrets,  barrau.r,'\)nv\\s,  flacconset  bouteilles.  » 
(Fouilloux,  Vénerie,  fol.  34,  V°.) 
variante  : 

B.VRREAU.  La  Thaum.  Goût,  de  Barri,  p.  451. 

Bnvve,  subst.  fém.  Cour  ou  siège  de  justice.  — 
Délais,  exceptions.  —  Barrière.  "—  Obstacle.  — 
Empêchement. 

Au  premier  sens,  ce  mot  signifioit  cour  ou  siège 
de  justice. 

On  lit  dans  Du  Gange,  sur  les  établissements  de 
S'  Louis,  p.  190  :  «  Ordonnons  que  en  toutes  les 
«  barres  ou  jurisdictions  de  nostre  duché  et  sei- 
«  gneurie  d'icelle,  les  sénéchaux  dessus  les  lieux, 
«  chacun  en  sa  barre  et  auditoire,  s'enquièrent, 
«  etc.  »  (Ord.  des  ducs  de  Bret.  fol.  219.) 

Barres  duehables  se  disoit  pour  justice  ducale. 
(Ibid.  fol.  308.) 

Havre  signifie  aussi  défense,  exception  en  justice, 
délai.  Quelquefois  même  on  s'en  est  servi  pour  : 


(1)  Dans  la  hiérarchie  des  fiefs,  ta  baronnie  venait  au  second  rang,  après  les  fiefs  de  dignité  :  elle  se  composait  d'une 
ville  fortifiée,  entourée  dp  douze  bourgs  au  moins,  (x.  E.)  -  (2)  C'est  ce  mot,  et  non  barcarolle,  qu'aurait  dû  employer 
V.  Hugo  dans  sa  5«  Orientale  :  «  Adieu  la  barcarnllr,  Dont  l'humble  banderolle  Autour  des  vaisseaux  vole.  »  La  barcarolle 
est  une  chanson  particulière  aux  "ondoliers  de  Venise.  (N.  E.)  -  (3)  L'étymologle  est  l'arabe  harrakan,  de  berck,  vêtement 
en  poil  de  chameau.  On  emploie  encore  la  forme  bouracan.  (n.  e.) 


BA 


-  412  — 


BA 


procès.  (Voy.  Loisel,  Institut.  Coût,  au  titre  des 
barres  et  crccpliuns,  T.  Il,  p.  'iUi.)  On  lit  delai:^  au 
lieu  de  /;rtm's,  dans  d'autres  ouvrages.  (Voy.  Pithou, 
Coul.  de  Troyes,  p.  004.) 

Iluri'e  se  \iviinu  pour  procès.  (Bout.  Soui.  rur. 
p.  'iOG,  note  de  l'éditeur.) 

On  lit  bare  pour  allégation,  ou  exception  en  jus- 
tice, dans  Pli.  Mouskes,  .ms.  p.  823.) 

I>e  mot  barre  a  été  employé  pour  barrière  (1). 

Au  propre,  c'est  un  morceau  de  bois  qui  se  met 
derrière  les  portes.  M.  Valois,  d:ins  sa  notice  p.  ;i5r>, 
remari|ue  que  le  mot  barre  a  plus  de  000  ans  d'an- 
cienneté. Il  conjecture  que  ce  mol  a  formé  celui  de 
bar  (2)  qui  s'est  dit  pour  porte.  (Voy.  ibid.  p.  75.) 
«  L'huis  ferment  h  bonnes /narres  coulices.  »  (Lanc. 
du  Lac,  T.  I,  fo!.  112.)  «  Ces  t;ens  d'armes  bretons 
«  el  frauçois  s'en  vindrent  de  grand  vonlenté  au 
«  guet  :  et  gais'aereut,  de  plaine  venue,  la  barre 
«  du  guet.  »  (Froissnrt,  Vol.  1!,  p.  100.)  »  La  dite 
«  ville  et  les  barri:^  d'icelle  ont  besoiug  de  repara- 
«  lion  et  forlificalion.  »  (Ord.  des  l\.  de  Fr.  T.  V, 
p.  390.)  L'éditeur  l'explique  par  barrière. 

Sa  garnison  y  mit,  très  fort  bien  y  fait  faire  : 
De  bars,  et  de  chaflaulx,  l'a  clouse,  tout  entour. 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  53. 

Pris  flgurément,  le  mot  barre  signifioit  aussi 
obstacle,'résislance,  empêchement  : 

I  metront  contrediz,  et  barres. 

G.  Gniart.  MS.  fol.  68,  V. 
Pour  faire  là  escu  et  barre. 

Machaut,  MS.  fol  -219,  U"  col.  -2. 

Citons  les  expressions  suivantes  : 

1°  Jeter,  ruer,  ou  tirer  la  barre.  Sorte  d'exercice. 
Ce  jeu  consistoil  à  jeter  une  bari'e  de  fer,  le  plus 
loin  ([ue  l'on  pouvoit.  (Voy.  la  Mil.  fr.  du  P.  Daniel, 
T.  1,  p.  228.)  On  voit,  dans  les  Mém.  d'Olivier  de  la 
Marche,  Liv.  1,  p.  338,  que  «  le  comte  Charolois 
«  jouoit  aux  barres  à  la  façon  de  Picardie.  » 

2"  Tenir  barre,  c'esl-îi-dire  résister:  «  Ses 
>>  ennemis  le  combattirent,  et  luy  tinrent  bonne 
«  barre,  car  ils  éloient  grand  quantité  de  gens.  » 
(Cliron.  de  S'  Denis,  Vol.  1,  fol.  78.) 

3"  Partir  des  barres  (3).  Expression  usitée  en 
termes  de  vénerie,  en  parl.iut  du  sanglier.  (Gace  de 
la  Digne,  des  Déduits,  ms.  fol.  118,  V°.) 

-4"  Par  la  barre  .S"  Just.  Espèce  de  jurement  : 
«  Ha  par  la  barre  S'  Just,  je  n'avois  garde  de 
»  dormir.  »  (Contes  d'Eutrapel,  p.  391.) 

Barre,  employé  comme  terme  de  vénerie,  signifioit 
mâchoire  du  sanglier:  «  Hz  ontquati'edenz,  deuxen 
«  la  ftrtrre  dessus,  et  deux  en  la  barre  dessoubz.  Des 
><  petits  ne  parle-je  qui  sont  teles  comme  d'un  autre 
«  porc.  »  (Chasse  de  Gaston. Pliébus,  ms.  p.  01.  i 


VARIANTES  : 
Barre.  Valois,  Notice,  p.  3T)5. 
Bar.  Ger.  de  Roussillon,  ilS. 

Barr.  (Lisez  Barre.)  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Barra. 
Barriz,  subst.  masc.  plur.  Ord.  T.  V,  p.  396. 

Bari'endegui,  subst.  muse.  Bois  clos  el  fermé. 
fLaurière,  Glossaire  du  Droit  françois.)  «  Le  beslail 
«  qui  entre  au  temps  de  gtandage  dedans  un  bois 
«  vulgairement  appelle  barrendegui ,  clos  et  fermé 
«  raisonnablement  comme  est  accoustumé  clorre, 
«  peut  estre  prins  par  le  seigneur  du  dit  bois.  » 
(Coulumier  général,  T.  II,  page  723.) 

Barrer,  verbe.  Exclure.  —  P.ayer. 

Au  premier  sens,  c'est  un  terme  de  droit: 
«  Félonies  et  baslirdies  et  teles  autres  générales 
«  exceptions  purront  tielx  pleintyfs  barrer  de  lour 
«  p'jrpartyes  recoverer.  »  (Brilton,  Loix  d'Angle- 
terre, fol.  191.) 

On  a  dit  aussi  barrer  pour  rayer.  (Voyez  Dict.  de 
Borel.) 

L'un  porte  sa  chance  barrée 
L'autre  la  porte  dessirée. 

Eusl.  Desch.  Pocs.  MSS.  fol.  40 1. 

Barres  (jeu  de).  On  lit  dans  les  lettres  d'Henri, 
roi  de  France  et  d'Angleterre,  datées  de  septembre 
•I42'<,  adressées  au  bailli  d'Amiens:  «  Comme  le 
•'  mercredy  d'après  Pasques  communiaus  dernier 
«  passé,  que  les  compaignons,  et  gens  de  la  ville 
>.  de  Warloy,  avoient  fait  crier  et  savoir  aux  villes 
«  d'entour  que  au  jeu  de  barres  qui  se  devoit  faire, 
«  et  list,  le  dit  mercredi,  ilz  donroieut  à  la  plus 
•■  belle  compaiguie  de  une  ville  et  parroisse  un 
«  mouton  à  laine.  «  (Trésor  des  Charles,  P.eg.  172, 
pièces  022  et  050.) 

Barresches,  subst.  fém.  Nous  ne  trouvons  ce 
mol  que  dans  ce  passage  : 

.le  dis  que  Vanterres  n'a  droit 
En  bonne  amour,  ne  j'à  n'aura  ; 
Cist  n'est  pas  sages  qui  fera 
S'araonr  crier  à  la  barresches. 

Kabl.  MSS.  du  R.  n-  -GIS,  T.  II,  fol.  r33,  V»  col.  2. 

Barrez,  part.  plur.  mase.  Raj'é.  Barrées  sert 
d'épilhèle  à  Messiers  dans  le  >'6uv.  Coul.  gén. 
(T.  Il,  p.  1090.)  11  désigne  leurs  habits  rayés  ou 
bigarrés.  On  se  servoit  aussi  du  mol  barrez-  pour 
épllhète  de  carmes,  à  cause  de  leurs  habits  bigarrés 
et  barrés  de  diverses  couleurs.  (Dict.  de  Borel,  Du 
Cange,  à  Barrati  et  Birrati.)  De  là,  il  s'est  employé 
substantivement  pour  signifier  des  religieux  mêmes  : 

Li  barrez  sont  près  des  béguines, 
Septante  en  ont  a  lor  voisines  ; 
Ne  lor  faut  que  passer  la  porte. 

Fabl.  MSS.  du  R.  ii"  7015,  T.  I,  fol.  05,  V  col.  1. 


(1)  Les  barres  étaient  ainsi  nommées ,  parce  que  souvent  elles  étaient  de  simples  barres  de  bois  qui  se  tiraient 
horizontalement  comme  les  barrières  des  forêts,  ou  qui,  relevées  par  un  contre-poids,  s'abaissaient  au  moyen  d'une  chaîne. 
Elles  ne  servaient  alors  qu'à  arrêter  un  corps  de  cavalerie  ou  les  gens  et  voitures  soumis  au  péage.  D'autres  étaient  des 
palissades  à  parties  mobiles  et  formaient  de  véritables  barbacanes.  Les  barrières  étaient  enfin  des  barricades,  et  Ton  peut 
voir  une  attaque  curieuse  de  ces  sortes  d'obstacles  dans  Froissart  (éd.  Kervyn,  t.  III,  p,  24-25),  en  l'339.  Les  barres  étaient 
aussi  de  simples  poutres  engagées  dans  la  muraille  et  tirées  au  dehors  pour  renforcer  le  vantail  ;  parfois,  elles  étaient  à 
coulisse  et  pivotaient  sur  un  axe.  (N.  k.)  —  (2)  Bar,  de  Tallemand  Barhe,  est  une  civière:  «  Si  fu  h  corps  mis  sur  un  bar 
vesti  de  noir.  »  (Froissart,  éd.  Kervyn,  111,  85.)  (N.  E.)  —  (3)  C'est  sortir  au  moment  précis  où  l'on  doit  se  mettre  on 
route.  (N.  E.) 


BA 


—  413  — 


BA 


VARIANTES  : 
BARREZ.  Rorel,  Dict.  2"  additions. 
Carrée.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  723. 

Barri ,  subst.  musc.  plur.  Maisons  de  faubourg. 
Ce  mol,  dans  le  patois  d'Auvergne,  signifie  maisons 
dans  les  fauliourgs ,  ou  dani'.  les  deliors  d'une  ville. 
(Voyez  Du  Gange,  à  Barrium.)  On  a  dit  les  barri  de 
S'  AI  lyre,  d'un'f:;ubourg  de  la  ville  de  Clennont. 

Barrier,  subst.  masc.  Commis  qui  reçoit  les 
barrages.  Le  barrage  est  un  droit  qui  se  paie  aux 
barrières.  (Voyez  les  Ord.  des  Rois  de  France,  T.  V, 
p.  "216,  et  Du  Gange  à  Bicarium.) 

Barrière,  subst.  fém.  Xous  ne  citerons,  sur  ce 
mot  qui  subsiste,  ([ue  les  expressions  suivantes  : 

1°  Combat  à  la  barrière.  Espèce  de  tournoi  qui 
consistoit  à  attaquer  et  ù  défendre  une  barrière. 
(Voyez  Petit  Jean  de  Saintré,  p.  83.)  «  La  barrière 
«  amoureuse  fut  tenue  devant  Plancy  contre  les 
.<  Anglois,  en  -1372.  »  (Voyez  l'Histoire  de  Loys  III, 
duc  de  Bourbon,  p.  59.) 

2"  Chevaucher  la  barrière,  c'est-à-dire  être  mis 
à  cbeval  sur  les  barres  ou  les  barrières  des  lices,  et 
y  demeurer  exposé  à  la  risée  de  toute  l'assemblée, 
tant  que  le  tournoi  duroit.  C'étoil  une  punition 
imposée  pour  les  cas  ■<  plus  griefs  et  principaux 
"  des  tournois.  «  (Voyez  La  Colombière,  Théâtre 
d'iionneur,  T.  I,  p.  G5.)  On  éloil  ainsi  exposé  «  léte 
■<  nue,  et  sans  armes,  avec  sa  cotte  d'armes  pour 
«  être  recognu  de  toute  l'assemblée.  »  (Faviu,  Th. 
d'honneur,"T.  II,  p.  1745.) 

3°  Faire  barrière  signifioit  faire  obstacle,  mettre 
obstacle  : 

Je  ne  cuidasse  jamais 
Que  ma  douce  dame  chiere 
Me  queist  tant  de  délais, 
Ne  qu'elle  f\sl  barrière. 

Eusl.  Ueschamps,  Poès.  MSS  fol.  -231,  cul.  4. 

Barriquer,  verbe.  Barricader.  (Dict.  d'Oudin  et 
de  Gotgrave.)  «  Le  peuple  commencedese  barriquer 
«  vers  la  rue  Gailande.  »  (Lettres  de  Pasquier, 
T.  1,  p.  787.) 

Barrisser  (1),  verbe.  Grier  comme  l'éléphant. 
«  Barrissent  les  éléphants.  »  (Rab.  T.  III,  p.  71.) 

Barroir,  subst.  masc.  Longue  tarière.  J^es 
tonneliers  s'en  servent  pour  faire  les  trous  à  mettre 
les  chevilles  qui  tiennent  la  barre  du  fond  d'un 
tonneau.  (Dict.  de  Nicot  et  d'Oudin.) 

Barrois  de  Brabant,  subst.  inasc.  plur.  Sorte 
de  monnoie.  (Dict.  de  Bore),  au  mot  .So/s.}  Ondisoit 
sols  et  deniers  de  Brabant. 

Barroque  (2),  arfj. Inégal,  irrégulicr.  Il  se  disoit 
des  dents  lui  éloient  d'inégale  grandeur.  (Dict. 
étymologique  de  Ménage.)  Ge  terme  est  encore 
usité  parmi  les  joailliers,  en  parlant  des  perles  qui 
lie  sont  pas  parfaitement  rondes. 

Barroyement ,  subsl.  masc.  Exception  dila- 


toire. Bouteiller  ayant  usé  de  ce  mot,  l'éditeur 
ajoute  en  marge:  «  Barroijement  signifie  ici,  comme 
«  en  mon  praticien,  quit  ù  la  main,  exceptions 
«  dilatoires  pour  avoir  barre  sur  le  demandeur.  » 
(Bouteiller,  Somme  rurale,  p.  231.) 

Barroyer,  verb.  Retarder.  —  Débattre,  contester. 

Au  premier  sens,  ce  mot  pareil  venir  de /;flnT, 
pris  dans  le  sens  d'exception  dilatoire,  délais.  On 
trouve  liarroijer  sous  ces  deux  orthographes,  avec 
cette  acception  dans  le  Dict.  d'Oudin. 

Barroijer,  pris  pour  débattre,  contester,  semble- 
roit  venir  encore  de  barre,  juridiction,  siège  de 
justice.  Cependant  l'éditeur  de  Bouteiller  dit,  au 
contraire,  que  barre  vient  de  barroyer,  lorsqu'il 
signifie  procès.  (Voyez  Somme  rurale,  p.  206.) 

VARIANTES  I 

BARROYER,  Barroier.  Oudin,  Dict. 

Barriiier,  subst.  masc.  Brayer.  «  Deux  attaches 
«  larges  pour  attacher  à  son  barruier.  "  (Du  Gange, 
sur  Joiuville,  p.  184.) 

Barsene,  subst.  fém.  Bar-snr-Seine.  Nom  de 
ville.  Les  loches  de  Barsene  éloient  passées  en  pro- 
verbe d:^s  avant  1300.  (Voyez  Recueil  des  Poésies  ms. 
avant  1300,  T.  IV,  p.  1653.) 

Bartas,  subst.  masc.  Buisson.  Mot  languedo- 
cien. (Itict.  élym.  de  Ménage,  elDu  Gange,  à /<ar/fl.) 

Bartavelo,  adj.  Ouvert.  Mot  du  patois  langue- 
docien. (Dict.  de  Borel,  au  mot  Desvertoillé.) 

Barthemien,  subst.  mase.  Barthélemi.  Nom 
propre.- 

Nulz  ne  veult  estre  Barthemieu, 
Cliascuns  doubte  l'escorcherie. 

Eust.  Deschamps,  Pocs.  MSS.  fol.  292,  col.  4. 

VARIANTES  : 
BARTHE.MIEU.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  272,  col.  4. 
Berte.mieu.  Duchesne,  Gén.  de  Bélhune,  p.  -137. 
Berthemieus.  Froissart,  Poës   MSS.  p.  208,  col.  l. 
Berthelomer.  Pérard,  Hist.  de  Bourg,  p.  400. 
Bertholemy.  Pérard,  Hist.  de  Bourg,  p.  460. 
Barthulo.mier.  Cout.  gén.  T.  I,  p.  879. 
Bertiiomier.  Beaumanoir,  p.  407. 
B.\RTHOMiEnE.  Proc.  lie  ,Iacq.  Cuer,  MS.  p.  9.^. 
BERTREMiE.ii.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  132,  V»  col.  2. 
Berthre.my.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  195,  col.  4. 
BiETRE.Miu.  Duchesne,  Gén.  de  Béthune,  Preuv.  p.  140. 

Barthoiomistes,  subst.  masc.  plur.  On  nom- 
moit  ainsi  les  partisans  de  l'anti-pape  Barthélemi. 
(Voy.  le  Méin.  de  Secousse,  sur  le  procès  fait  à 
Ghauveron,  prévôt  de  Paris.) 

Bartole,  sul)St.  masc.  Nom  propre  d'homme. 
Bariole  est  la  vraie  orthographe. 
Proverbe  : 

Bésolu  comme  Barthole ,  c'étoit  une  façon  de 
parler  proverbiale  à  laquelle  Bartole  a  donné  lieu, 
par  l'autorité  qu'avoient  acquises  les  décisions  de 
ce  jurisconsulte  dans  les  parlemens  et  autres  tribu- 
naux (Voy.  Pasquier,  Rech.  p.  G82),  ou  plutôt  par 


(1)  De  nos  jours  on  dit  bar 
haroco.   (N.  E  ) 


•ir,  du  latin  barrire.  (N.  E.)   -   (2;  L'étyraologie  est   peut-être   le  terme  dj   Scolastique 


BÂ 


-  Ali  — 


BA 


une  îilUision  à  l'ouvrnse  déco  célèbre  jurisconsulte, 
inliliilc  Itcsolutiones  Haiioli. 


VAIUANTKS  : 

mi. 


RAnTOLE.  Pasquier,  necli.  d,  ( 
Hertuolle.  Coquillart,  p.  liO. 


Barzelottes,  siibst.  fém.  plur.  Espèce  de  poé- 
sie. Ce  mol  semble  avoir  quelque  analogie  avec 
celui  de  harcarolles,  dont  on  se  servoit  à  Venise 
pour  désigner  une  sorte  de  chanson. 

....  Chansoi;s,  ballades,  trioUetz, 
Mettez,  rondeaux,  servantz,  et  virelaix, 
Sonnet-/,,  strambotz,  harzelotles,  chapitres, 
Lvririues  vers,  chants  royaux,  et  epistres. 

Uoujet.  Bibl.  fr.  T.  \I,  p.  1 18. 

Bas,  siibst.  masc.  lias.  —  Fosse,  tombe.  — 
Chausse. 

On  trouve  bas  pour  bast,  dans  la  Farce  de  Pathe- 
lin,  page  89. 

fias  ètoit  aussi  un  mol  languedocien,  qui  signi- 
(ioit  fosse,  tombe.  (Voy.  Borel,  au  molI>as>j.) 

EnTin,  on  écrivoit  ^«s  et  baas ,  dans  le  sens  de 
chausse,  sens  qui  subsiste  encore. 

Ou  distinguoit  autrefois  : 

1°  Le  bas  d'atlaclie.  C'étoient  les  bas  qui  s'atla- 
choient  sous  le  tonnelet,  ou  bas  de  saije.  (Diction- 
naire d'Oudin.) 

2"  Le  bas  de  chausse,  le  bas  qui  ne  couvroit  que 
la  jambe.  (Dict.  de  Nicot.) 

On  disoil  aussi  : 

3°  Bas  de  colet,  pour  gorgerette  ou  colet  de 
femme.  (Dict.  d'Oudin.) 

4°  lias  de  manches,  pour  le  bas  des  manches,  les 
manches  pendantes,  opposé  au  liaut  des  manches, 
comme  le  bas  des  chausses  l'éloit  au  liaut.  des 
chausses.  (Voy.  Rabelais,  T.  V,  p.  69.) 

5°  Bas  de  saye,  pour  tablier  plissé  ou  tonnelet 
qui  se  meltoit  autour  de  la  ceinture.  «  Il  y  avoit 
»  huict  enseignes  de  gens  de  pied  ,  et  de  huict  à 
«  neuf  cents  hommes  de  cheval,  bien  montez,  et 
«  armez  ;\  ecu,  avec  le  bas  de  saije,  là  où  défault  le 
«  harnoys,  à  la  façon  des  ordonnances  de  Bourgo- 
«  gne.  »  'Mémoires  du  maréchal  de  Vieilleville, 
T.  ni,  page  201.) 

VARIANTES  : 
R.\S.  Orthographe  subsist. 
Baas.  Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mot  So!elus. 

Bas,  adj.  Petit,  léger,  peu  considérable.  —  Af- 
faibli, exténué. 

On  a  dit,  au  premier  sens:  «  Toutes  battures, 
«  contusions  ou  playes  ouvertes,  sont  de  la  con- 
«  noissance  de  la  haute  justice  ;  autres  batiures 
«  plus  l)asses  sont  de  la  connoissancedu  maveur.  » 
(Nouv.  Coût.  gén.  T.  II,  p.  871.)  On  a  ûd'hasses 
réparations,  pour  réparations  légères.  (Ibid.  page 
1  !()().)  Nous  lisons /w.se  au  féminin,  pour  basse,  infé- 
rieure, dans  les  Tenures  de  LitUeton,  fol.  17.  Cette 
acception  subsiste,  et  cette  même  orthographe  se 
trouve  encore  dans  ce  vers  : 

Le  cors  ot  gent,  hase  la  liance. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7989,  fol  57,  V-  col  •:. 

Bas  s"esl  pris  aussi  pour  affoibli,  exténué:  »  .Soit 


«  advisé  le  fauconnier  qui  son  oiseau  ne  soit  trop 
"  maigre,  et  alTamé,  lorsqu'il  le  voudra  orpigmen- 
«  ter  :  car  l'orpigment  luy  pourroit  nuire,  s'il  le 
«  Irouvoit  bas.  »  (Fouilloux,  Fauconnerie,  fol.  49.) 
De  lu  cette  expression:  mettre  an  bas,  pour  affoiblir. 
«  11  fa.'.t  entretenir  l'oiseau  de  quelque  bon  past 
«  vif,  et  chant,  car  autrement  on  le  pourroit  mettre 
«  au  bas.  (Budé,  des  Oiseaux,  fol.  119.) 

Expi'essions  remarquables  : 

i"  En  ce  bas ,  c'est-à-dire  en  ce  bas  monde. 
«  Pour  nostre  regard  nous  nous  confessons  chres- 
«  tiens,  mililans  en  ce  t)as  pour  prix,  sous  l'ensei- 
«  gne,  et  estendart  de  nostre  grand  capitaine 
«  Jésus-Christ.  »  (Pasquier,  Itech.  p.  303.) 

2"  Bas  de  poil,  pour  tondu  de  près,  qui  a  le  poil 
court.  Cette  expression  est  employée  figurément 
dans  ce  passage,  pour  malheureux,  infortuné  : 
Le  près  tondu,  besoing  n'est  qu'on  le  tonde  ; 
Dire  on  luy  doibt  :  rustre,  couvres  la  blonde 
Quant  bas  de  poil  est  surtout  les  chrétiens. 

Œuv.  de  RoLjer  ds  Collerye,  p.  IGO. 

3°  Bas  du  devant,  épithète  d'un  mari,  jirise  dans 
un  sens  obscène.  (Voyez  les  Serées  de  Bouchet , 
Livre  I,  page  198.) 

4°  Bas-sergents ,  signifioit  sergents  d'un  ordre 
inférieur.  (Voy.  l'Ane.  Coût,  de  Xorm.  fol.  lôO.) 

5"  Bas-instrument,  désignoil  un  instrument  d'un 
son  plus  doux  (jue  d'autres.  «  Trompettes  et  menes- 
«  triers  cornoient,  et  si  y  avoit  bas-instrumens.  » 
(Juven.  des  Ursins,  Histoire  de  Charles  VI,  p.  7ô.) 
«  Près  deulx  jouoient  plusieurs  bas-instrumens 
«  qui  rendoient  de  grandes  mélodies.  »  (Chron.  de 
Louis  XI,  page  19.) 

6"  Bas-mestier.  Cette  expression  est  employée 
dans  un  sens  obscène,  dans  les  Poës.  mss.  d'Eûst. 
Deschamps,  fol.  32.j. 

7°  Bas-rebouer  ou  rembouer.  C'étoit  un  engin  à 
pêcher,  selon  l'éditeur  des  Ordonnances  des  Rois 
de  France,  T.  I,  page  792. 

8-  Estre  de  bas-renom,  pour  avoir  mauvaise 
réputation. 

Pour  con  qu'il  iert  de  bas  renom. 

Plu  Mouskes,  MS.  p.  38(i. 

9°  Temps  bas ,  pour  saison  avancée  ou  courts 
jours.  On  a  dit,  au  sujet  do  l'expédition  contre 
l'Angleterre,  projetée  par  Charles  Vf,  eu  1386  :  «  Si 
>■  fut  bien  sept  jours  à  l'F.scluse,  que  tous  les  jours 
«  on  disoil,  nous  nous  partirons  demain  au  matin, 
«  véritablement  le  vent  étoit  si  contraire,  pour 
«  singler  sus  en  Angleterre,  que  plus  ne  pouvoit: 
«  si  étoit  le /cm/«  tout  bas,  après  la  sainct  An- 
a  drieu.  »  (Froissart,  Livre  III,  p.  150.) 

10"  Bas-ton,  mis  en  opposition  avec  liaut-ton, 
signifioit:  de  quelque  manière  que  ce  soit. 

.Toliveté,  ne  vostre  hault  parage. 
Ne  vous  vauldront,  que  mors,  de  son  basion, 
Ne  vous  iiert,  soit  à  bas,  ou  hniiU  Ion 
Tuit  y  mourront,  et  li  fol  et  li  saige. 

Eust.  Desch.  Poos.  MSS.  fol.  1?.6,  col.  4. 

II'  Vcspres  t>as  OU  basses-vesprcs,  c'est-à-dire  à 
l'entrée  de  la  nuit. 

Vespres  est  bas  et  près  du  soir. 

Aihis,  MS.  fol.  70.  n»  col.  2. 


BA 


-  415  — 


BA 


On  disoil  encore  en  ce  sens  : 

Quant  il  fu  vespres,  bas. 

Vies  des  SS.  MS.  deSorb.  chif.  LXl.col.  il. 

12°  De  basse-heure,  c'est-îi-dire  tard.  »  Ses  chiens 
«  le  treuveni  aussi  bien  de  haulte  heure,  comme 
«  de  basse,  etc.  »  (Chasse  de  Gast.  Phéb.  »is.  p.  263.) 

13°  liasse- chambre ,  c'esl-à-dire  lalrines.  (Du 
Gange,  à  Bacia.) 

14°  Cour-basse.  C'est  celle  du  seigneur  bas  justi- 
cier, à  la  diflérence  du  seigneur  qui  a  moyenne  ou 
haute  justice.  (Laur.  Gloss.  du  Dr.  fr.  —  Du  Cange, 
Gloss.  latin,  au  mol  Bassa  curlis.) 

15"  Basse-demoiselle,  pour  demoiselle  de  médio- 
cre étal.  (Voy.  Petit  Jean  de  Saintré,  p.  140.) 

10"  Basse-danee,  pour  danse  grave  ou  terre  à 
terre,  opposée  ;i  la  danse  par  haut  ou  celle  des 
baladins.  (Voy.  Clém.  Marot,  T.  I,  p.  213.  —  Dict. 
de  Nicot,  d'Oudin  et  de  Cotgrave.)  Cette  expression 
se  prenoil  aussi  dans  un  sens  obscène.  (Voyez  Ou- 
din,  Cur.  fr.) 

17'  Momioye  de  basse-gresse,  de  peu  de  valeur. 
(Voy.  Rabelais,  T.  IV,  p.  22.) 

18"  Basse-main,  pour  la  main  gauche.  «  Après 
«  eulx  venoient  les  rois  d'armes  et  heraulx  du  roy, 
«  per  à  per  à  ceulx  de  France,  et  à  leur  basse- 
«  7nain.  »  (Petit  .Jean  de  Saintré,  p.  205.) 

Basse-main,  pour  bas-estat,  grief,  dédain  mêlé 
de  colère. 

19°  Gens  de  basse-7nain,  pour  gens  du  bas  étage, 
inférieurs  au  bourgeois.  «  Rainbaud  d'Orenge  s'a- 
«  musa  à  l'amour  d'une  damoyselle  de  basse-main 
«  de  Provence,  de  laquelle  il  n'en  rapporta  aucun 
«  proufit  ne  honneur.  »  (.J.  de  Notre-Dame,  Vie  des 
Poët.  Provenç.  page  94.  —  Voyez  les  Assises  de 
Jérusalem,  page  14.) 

Gentilhomme  de  basse-main.  C'est  une  plaisante- 
rie que  fait  le  bourreau  Daru,  en  parlant  de  lui- 
même  dans  le  Mystère  des  Actes  des  Apôlres,  qui 
se  trouve  dans  l'Hist.  du  Th.  fr.  T.  II,  p.  420.  C'est 
une  équivoque  avec  main-basse. 

20"  Basses-marches.  Façon  de  parler  obscène, 
dans  les  Arrêts  d'Amour,  p.  495. 

21°  Basse-musette.  G'étoitnne  espèce  d'instrument 
de  musique  champêtre,  peut-être  une  cornemuse. 

....  Chantoient  par  nos  gentieus 
Avec  une  ba  use-mu  sel  te. 

Froissarl,  ToCs.  MSS.  p.  270. 

22°  Basse-noise,  signifioit  petit  bruit.  «  Lors 
«  entendit  le  chevalier  que  la  figure  dit;  faisons 
«  basse-noise,  car  venu  est  le  chevalier  i^i  l'estrange 
«  signe.  «  (Percef.  Vol.  VI,  fol.  47.) 

23°  Basse-taille.  C'étoit  un  bois  nouvellement 
coupé.  C'est  le  sens  de  cette  expression  dans  ce 
passage:  «  Trairez  de  si  près  comme  vous  vouldrés, 
«  et  en  ceste  manière  faire  à  revenir  d'une  hasse- 
«  taille,  et  faut  que  la  lune  raye  bien  cler.  »  (Modus 
etRacio,  ms.  fol.  84.) 


24°  Basse-none.  C'étoit  l'heure  de  midi.  (Voyez 
Perceforest,  Vol.  IV,  fol.  158.) 

25°  Basse-relevée.  C'étoit  la  fin  du  jour.  «  Tu 
«  feras  un  grant  noise  sur  le  terrier,  et  batras  la 
«  terre  de  basions  en  telle  manière  que  le  renart 
«  l'oé  se  il  est  dedens,  et  ainsi  le  feras  jusque»  à  la 
<'  basse-relevée.  »  (Modus  et  Racio,  ms.  fol.  105.) 

26*  En  bas,  pour  à  voix  basse. 

Vers  la  dame  sa  voix  atome, 
Se  dit  en  bas,  non  pas  en  haut  : 
Chier  suei-,  dit-il,  iJex  vos  saut,  etc. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  ■;615,  T.  H,  fol.  183,  R"  col.  1. 

27°  Bas  et  hault,  pour  entièrement. 

Amours  qui  scet  tout  ^«.5,  et  hault. 

Pois.  d'Al.  Chartier,  p.  6(XI. 

28°  De  bas  et  de  haut,  se  disoit  aussi  pour  entiè- 
rement. "  Taillable  de  haut  et  de  bas  à  voulenté.  » 
(Ordonnances  des  Rois  de  France.) 

29°  Xe  fcflSJtt; /ia(i/,  pour  nullement,  aucunement. 

J'a  n'en  quier  don,  ne  bas  ne  haut. 

Chans.  MSS.  du  Corale  Tliibaul,  p.  9. 

30°  Prendre  bas  signifioit  peut-être  prendre  par 
dessous.  «  Si  le  print  bas  de  le  frapper  si  durement 
«  qu'il  le  porta  à  terre.  »  (Lanc.  du  Lac,  T.  III, 
fol.  50.) 

31°  Tenir  le  bas,  pour  être  asservi. 

Scai-lu  pourquoy  je  ne  veux  pas 
Epouser  Jeanne,  riche  et  grande  ? 
Parce  que  fiere  elle  commande, 
Et  me  leroit  tenir  le  bas. 

Les  Touches  de  Des  Ace.  p.  59. 

VARIANTES  : 

BAS.  Orthographe  subsist. 

liAis  et  Baisse.  Bas  inférieur  et  basse  inférieure.  S'  Bern. 
Serm.  fr.  MSS.  p.  61  et  passim  ;  répond  au  latin  infimus 
et  inferior. 

Base,  au  fém.  Tenures  de  Littleton,  fol.  17. 

Basaach  [\),subst.  musc.  Bâcha.  Bajazet  s'élant 
reposé  quelque  temps  après  la  victoire  sur  les  chré- 
tiens à  Mcopolis,  en  1390,  «  monta  fi  cheval  et 
«  grand  nombre  de  nobles  de  son  ost  en  sa  corapai- 
«  gnie,  et  estoient  les  prochains  du  Roy,  et  de  son 
«  conseil,  le  basaach,  et  le  sourbasaacli.  •>  (Froiss. 
Liv.  IV,  p.  254.)  L'éditeur  croit  que  basaaeiiest  mis 
ici  pour  lassa,  et  sourbasaacli  pour  visir  bassa. 
Nous  prononçons  hacha.  (Voy.  Le  Fèv.  Orig.  des 
Fiefs,  p.  125.) 

Basach ,  subst.  masc.  Bajazet.  Nom  propre 
d'un  Empereur  turc. 

ayons  tuit  souvenance 

Des  prisonniers  que  tient  Basach  soubz  lame. 

Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  357,  col.  i. 

VARIANTES  : 
BASACH.  Eust.  Dosch.  Poës.  MSS.  fol.  357,  col.  4. 
Basaq.  Monst.  Vol.  I,  ch.  xvi,  fol.  -16,  R". 
Bazac.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  383,  col.  3. 
Bazat.  Ibid.  fol.  357,  col.  1. 
Basant.  Froiss.  Liv.  IV,  p.  233. 

Bas-allemand,  subst.  masc.  et  adj.  Qui  est 
des  Pays-Bas. 


(1)  iSasaach  est  la  forme  turque  de  Bajazet,  que  Froissart  nomme  tantôt  «  le  roi  Basaach,  »  et  tantôt  «  Y Amorath-Bucquin.  » 
(Froissart,  t.  XV,  p.  322.)  M.  Kervyn  imprime  à  la  page  suivante  ;  «  Et  estoient  les  plus  prouchains  du  roy  et  de  son  conseil 
Alis-Basauch  tt  le  Sour-Hasaach.  Aucunes  gens  disoient  que  c'estoient  ses  frères  (à  Bajazet),  mais  il  ne  les  vouloit  point 
reconguoistre  et  disoit  que  il  n'a^oit  nul  frère.  »  (n.  e.) 


BA 


410  — 


BA 


Basanner,  verbe.  Ileiuhe  basané.  «  Il  ne  faut 
«  (4u'uii  haie  qui  basainieiii  .  ou  noircira  voslre 
«  femme.  »  (Contes  du  Cliul.  loi.  5'J.) 

VAIUA.NTKS: 
BASANNER.  Contes  de  Chol.  fol.  59. 
liAZANEU.  Colgiave,  Dict. 

liasché  (1)  {nopces  de).  E.vpression  populaire 
pour  siLMiilier  une  balterie  à  coups  de  poing:,  ou  au- 
tremeni.  ^Voy.  les  Serées  des  Boucli.  Liv.  111,  p.  92.) 

Basclieur,  adj.  Plein  de  bois.  En  latin  Nemo- 
rosus.  (Gloss.  du  \'.  Labbe.) 

Baschoe,  subat.  fém.  Panier,  corbeille.  (Dict.  de 
Borel,  '2"  add.  au  mol  Baacauda.)  Au  figure,  ce 
mot  s'est  appliqué  à  une  femme  mal  faite  : 

Ele  est  plus  noire  c'une  choe 
Et  plus  grosse  c'une  baschoe. 

Fabl.  MSS.  du  H.  n'  7218,  toi.  2r.6,  V-  col.  2. 

VARIANTES  : 
BASCHOE.  Godefr.  Annot.  sur  Ch.  VI,  p.  111. 
Baschoues.  Id.  Ibid.  p.  719. 
Bascade.  Borel,  Dict.  2"  addit. 

Bascliouier,  siibst.  mase.  Soile  d'officier (2).  Il 
y  avoil  des  officiers  qui  porloient  ce  nom,  dans  la 
maison  de  Charles  VI.  ..  Un  bascliouier  mangera  en 
«  salle,  et  aura,  chacun  jour,  trois  sols  quatre 
<i  deniers,  pour  deux  chevaux  qui  menront  le  pain 
«  es/'  aehoes.  »  (Godefr.  Annot.  sur  l'Histoire  de 
Ch.  VI,  p.  111.) 

VARIAMES  : 
BASCHOUIER.  God.  Annot.  sur  Ch.  VI,  p.  111. 
Baschoyer.  Ibid.  p.  719. 

Bascon ,  sub.  masc.  Titrededignité.  —  Biscaïen. 

Au  premier  sens,  c'étoit  un  titre  particulier  comme 
celui  de  captai. 

Ce  mot,  au  second  sens,  ne  se  trouve  que  sous 
rortliographe  de  bascon. On  lit:  »  pais  des  buscons, 
«  ou  de  Biscaye,  »  dans  les  Div.  lec.  de  Du  Verd. 
p.  315.  On  faisoit  cas  des  chiens  courans  qui  en 
venoient.  (Voy.  Chasse  de  Cast.  Pheh.  Jis.  p.  i->2. 

variantes  : 
BASCON.  Hist.  de  B.  Du  Guesel.  par  Mén.  p.  75. 
Pascon.  Ibid.  p.  72. 

Bascontre,  subsl.  masc.  Basse  contre.  (Dicl.  de 
Monet.) 

Baseille  (3) ,  subst.  fém.  Porte  de  la  ville  de 
Rbeims. 

VARIANTES  : 

BASEILLE.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  à  Basilicaris. 
Bazée.  Id.  ibid. 

Basele,  subst.  fém.  La  Biscaye.  •■  Fist  obéis- 
a  santés  à  luy  toutes  les  terres  d'Espaignes,  de 
«  Galice,  de  Landalus,  de  Portingai,  de  Castelon- 


«  gne,  de  Navarre,  de  Jîase/e  (4),  et  maintes  autres.  » 
(Triump.  des  IX  Preux,  p.  437.) 

Basenne,  subst.  fém.  Basane. 

variantes  : 
BASENNE.  Nicol,  Oudin,  Cotgravc,  Dict. 
Bazenne.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  I,  p.  ©X). 
Bes.\nne.  Ane.  Coût.  d'Orl.  p.  475. 
Bezanne.  Cotgrave,  Dict. 

Basennier,  subst.  fém.  Marchand  de  basane  ou 
de  souliers  de  basane  ;  ouvrier  en  basane.  (Dict. 
de  Mcol,  au  mot  Basennier.)  On  lit  basanie>'  et 
ba~.:nnier,  dans  le  Gloss.  de  l'Hist,  de  Paris. 

variantes  : 
BASENNIER.  Nicot,  Dict. 
Basanier.  Gloss.  de  l'Hist.  de  Paris. 
Bazanier.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  V,  p.  106. 
Bazannier.  Du  Gange,  à  Stallus  et  Camerarius. 
Bazennier.  Tobl.  des  Mestiers  de  Paris,  MS.  de  Meinière. 

Basi,  adj.  Mort. 

Je  suis  hasi,  si  Dieu  ne  m'aide. 

Testam.  de  Path.  p.  117. 

Guillemetle  sa  femme  le  voyant  expirer  s'écrie  : 

Le  bon  maistre  Pierre  est  basi. 

Ibid.  p.  145. 

Le  même  mot  Basi  a  été  employé  avec  la  signifi- 
cation de  basilic,  serpent  fabuleux.  Œil  basil,  œil 
de  basilic. 

Vostre  œil  hasil  mon  cueur  a  si  surpris, 
Que  son  demeure  totalleraent  ai  pris 
En  vous,  sans  plus. 

La  Chasse  et  Départ.  d'Amours,  p.  179. 


BASI.  Testam.  de  Path.  p.  117. 
Basy.  Borel,  Dict. 

Basilic,  subst.  masc.  Sorte  de  serpent.  —  Pièce 
d'artillerie. 

Ce  mot  subsiste  au  premier  sens,  sous  la  première 
orthographe.  Nous  le  trouvons  employé  dans  ce 
passage  : 

Bien  cuident  de  leurs  gorges 
Que  ce  soient  reliques  ; 
Plus  venimeuses  sont 
Que  n'est  un  basclicjues. 

Fabl.  MSS., du  R.  n'  7615,  T.  II,  fol.  Ui,  R"  col.  I. 

On  s'est  servi  aussi  du  mot  basilic  pour  signifier 
une  pièce  d'artillerie,  un  canon  de  la  plus  grande 
longueur.  (Voy.  Fauchet,  des  Orig.  Liv.  II,  p.  122.) 
«  Plus  de  muraille  deinolist  ung  coup  de  basilic  (5) 
«  que  ne  feroieiit  cent  coups  de  foudre.  »  (Rabelais, 
T.  IV,  p.  2(j0.) 

variantes  : 

BASILIC.  Rabelais,  T.  I,  p.  289. 

Bazilic.  Lelt.  de  Louis,  XII,  T.  III,  p.  40. 

Baselic.  Rabelais,  T.  I,  p.  185. 

Baseliques.  Fabl.  .MSS.  du  R.  n»  7615.  T.  II,  fol.  144. 

Basilisque,  subst.  fém.  Monet,  Dict. 


(1)  liasché  ne  serait-il  pas  pour  bazoche,  comme  baschea  est  pour  basilica  ?  (n.  e.>  —  (2)  C'est  celui  qui  mène  les  chevau.\ 
chargés  de  baschocs.  (n.  e.)  -  (3)  C'est  peut-être  le  mot  latin  6asi/ica,  avec  le  premier  i  long;  dans  l'Orne,  on  trouve 
BaseiUe,  dérivant  de  6ns,  plus  scillc  (sylva).  (N.  e.)  -  (4)  Ne  faut-il  pas  en  rapprocher  Basele,  qu'on  trouve  dans  la  Chanson 
de  Roland,  au  vers  3474.  (x.  e.)  -  (5)  «  Des  baztitcs  qui  portoient  48  Uvres.  »  (d'Aubigné,  hist.,  III,  146,  éd.  de  1616,  in-fol.) 
Et  au  livre  I,  246  :  «  La  furent  gagnées  plusieurs  choses  remarquables,  comme  des  basilics  de  divers  calibres,  jusqu'à  80 
livres  de  balles.  »  (n.  e.) 


BA 


417 


BA 


Basilicon  (1),  stibst.  masc.  Basilic.  Espèce  de 
plante. 

Je  ne  voy  rose,  ne  bouton, 
Lavende,  violette  drue, 
Marjolaine,  basilicon. 

Eust.  Desch.  fol.  7.  col.  3 

VARIANTES  : 
BASILICON.  Fouilloux.  Fauconnerie,  fol.  13,  R». 
liASiLinuoT.  Ici.  Ibid.  fol.  155,  col.  3. 

Basille  (coq).  Terme  de  Blason.  «  L'escu  basi- 
«  lides  d'or,  a  un  coq  basille.  »  (Percef.  Vol.  II,  f°  129.) 

Basil",  verbe.  Ecrouler.  -  Toutes  fois  ceulx  qui 
«  l'eurent  sains,  montèrent  sur  les  nuii-ailles,  et  la 
»  feirent  sonner  trompetes,  et  tabourins  en  tirant 
«  artillerie  au  travers  de  la  ville,  comnie  si  tout 
«  deust  basir.  »  (Jean  d'Auton,  Ann.  de  Louis  XII, 
page  159.) 

Basis,  subst.  masc.  Basse.  Terme  de  musique. 

Basine,  subst.  masc.  Baume.  Chose  excellente. 

Ce  mol,  qui  dans  les  Sermons  Fr.  mss.  de  Saint- 
Bernard,  répond  au  latin  //«/sawHfîfs,  signifioit  à  la 
fois  la  plante  qui  produit  le  parfum,  et  le  suc  de 
cette  plante  qui  est  le  parfum  même,  liasmc  signifie 
parfum,  selon  les  Dict.  de  Borel  et  d'Oudin.  C'est 
un  arbrisseau,  selon  Nicot. 

C'est  droitement  la  fontaine  de  Balme. 

Eust.  Desch.  Pu«.  MSS.  fol.  159,  col.  2. 

Au  figuré,  on  s'est  servi  de  ce  mot  pour  désigner, 
une  chose  excellente,  dans  quelque  genre  que  ce 
soit,  relativement  au  goût,  à  rodoral,"et'même  à  la 
vue.  «  La  chair  en  est  tant  délicate,  lanl  savoureuse 
«  que  c'est  basme  {'2).  »  (Rabelais,  T.  IV,  p.  25.)  «  Ce 
«  sera  basme  de  me  voir  briber.  »  (Ibid.  T.  II,  p.  103.) 
L'hoste  s'écrie,  et  la  femme  se  pasme  ; 
Les  regarder,  mon  serment,  c'est  ung  baume. 
Faifeu.  p.  SI. 

VARIANTES  : 
lîASWE.  Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7218.  fol.  358,  R»  col.  2. 
Balme.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  159,  col.  2. 
Blasme.  (Corruption  Basme.)  Machaut,  MS.  fol.  18G. 
Balsismes.  S.  Bern.  Serm.  Fr.  MSS.  p.  360. 

Basoche  (3),  subst.  fém.  C'est  le  titre  d'une 
comédie  représentée  par  les  clercs  de  la  juridiction 
appelée  basoche.  Brantôme,  parlant  de  Louis  XII, 
dit:  «  11  pardonnoit  aux  comédiens  de  son  royaume 
«  comme  escoliers,  et  clercs  du  palais  en  leurs 
«  basoches,  de  quiconque  ils  parleroient,  fors  de  la 
«  Reyne  sa  femme,  et  de  ses  dames  et  demoiselles.  » 
(Brant.  Dames  Gall.  T.  II,  p.  .'i39.) 

VARIANTES    * 
BASOCHE.  Brantôme,  Dames  Gall.  T.  II,  p.  i3'J. 
Basoge.  Bouch.  Serées,  Liv.  I,  p.  101. 

Basochial,  adj.  Qui  est  de  la  Basoche.  Au 
pluriel  basochiaux.  On  lil-souvent  ces  mots  dans 
les  Statuts  de  la  Basoche. 

Basochiens,  subst.  masc.  plur.  Clercs  de  la 


basoche.  «  Ils  furent  nommés  basilicahis,  du  mot 
«  Ilasilica  qui  a  signifié  palais  et  maison  royale  de 
"  nos  rois,  et  par  eux  délaissée  au  parlement  pour 
•<  y  rendre  la  justice.  »  (Des  Cours  souv.  p.  623.) 

VARIANTES  '. 
BASOCHIENS.  Cotgrave,  Dict. 
Basauchiens.  Rabelais,  T.  I,  p.  315. 
liAsiLicAiNS.  Des  Cours  souver.  p.  623. 

Basquain,  subst.  masc.  Basque.  Nom  de  peuple. 

VARIANTES  : 
BASQUAIN.  Cotgrave,  Dict. 
Baste.  Oudin,  Dict. 

Basque,  subst.  [cm.  Biscaye.  Nom  de  pays.  On 
dit  en  quelques  endroits  tour  de  Basque  pour  signi- 
lier  une  fourberie. 

Basquine,  subst.  fém.  Espèce  de  vêtement. 
C'étoit  une  robe  fort  ample.  Elle  se  tenoit  ouverte, 
et  étendue  au  moyen  d'un  cercle.  C'étoit  aussi 
une  espèce  de  corset  que  les  dames  meltoient  entre 
la  chemise  et  la  cotte.  (Voy.  le  Dict.  de  Borel,  et  Le 
Duchat,  sur  Rabelais,  T.  I,  p.  323.) 

Basquiner,  verbe.  Ensorceler.  «  Ce  qui  semble 
«  venir  de  Vascons,  ou  Basques,  où  on  assure  y 
»  avoir  eu  toujours  beaucoup  de  sorciers.  » 

VARIANTES  : 
BASQUINER.  Borel,  Dict. 
Uasquinier.  CellheU.  de  Léon  Trippault. 

Basse,  subst.  fém.  Base.  La  base  d'un  pilier 
piédestal.  (Borel,  Dict.) 

Bassecourt(4),  subst.  fém.  Esplanade.  Terrain 
fortifié  de  murailles  qui  se  trouvoit  entre  la  cita- 
delle et  la  ville  ;  dans  un  temps  de  siège,  elle  ser- 
voitde  retraite  au  peuple,  et  on  y  retiroit  aussi  les 
chevaux,  les  bestiaux  de  toute  espèce  et  les  effets 
mobiliers.  Au  siège  du  château  neuf  de  la  ville  de 
Naples,  par  Charles  VIII,  en  1W4,  «  l'on  avoit 
■I  mené  une  quantité  d'artillerie  devant  un  lieu  fort 
«  où  y  avoit  une  bassecourt  assés  forte  de 
«  muraille.  »  (André  de  la  Vigne.  —  Voyage  de 
Charles  VIII,  à  Naples,  p.  134.)  «  Fut  la  bassecourt 
«  prise  d'assaut,  et  le  lendemain  la  place  rendue.  » 
(Hist.  d'Artus  III,  Conn.  de  Fr.  Duc  de  Bret.  p.  761.) 
»  Fit  assaillir  la /vassfcoi/î'id'iceluycbastel,  laquelle 
«  fut  prinse  par  force,  et  y  gaignerent  les  assail- 
«  lans  grand  foison  de  chevaux,  vaches,  brebis  et 
«  jumens.  »  (Monslrelet,  Vol.  I,  fol.  19.)  ><  Avoit  en 
.'  sa  compaignie  deux  cens  combattans  logez  en  la 
"  bassecourt,  tous  leurs  chevaux  et  autres  biens.  » 
(Ibid.  Vol.  III,  fol.  13.) 

Bassegne,  subst.  fém.  Espèce  de  jeu.  (Dict. 
d'Oudin.)  C'est  peut-être  le  jeu  de  cartes  des  Italiens 
appelé  Bazzica. 

Basseleur,  subst.  masc.  Boisselier.  Nous 
croyons  pouvoir  expliquer  ainsi  ce  mot  dans  ce 


(1)  Chez  Amb.  Pare  (xvF  siècle),  c'est  un  onguent  ;  «  J'appliquai  un  petit  emplastre  de  basilicon,  de  peur  que  la  plave 
ne  sagglutenast  (Vlll,  40).  »  (n.  e.)  -  (2)  Du  temps  de  La  Fontaine,  on  disait:  «  Ma  loi!  c'est  bàme.  »  (N.  E.)  -  (3)  C'était 
al  origine,  la  cour  qui  jugeait  au  parlement  les  différents  entre  clercs;  l'étymologie  est  basilica,  bourse,  tribunal  à 
Rome.  (N.  e.)  -  (4)  C'est  la  baille  de  la  forteresse,  (n.  e.) 

"•  53 


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passage  :  «  Un  mercier  portant  ses  denrées  à  col 
«  deux  deniers,  un  basseleur  cinq  déniées.  »  (,Cartu- 
lairc  de  Jumiège,  T.  I,  p.  G.) 

Basselle,  suhst.  /■<'?«.. Javelle.  Mol  Languedocien 
ainsi  expliqué  dans  le  Dict.  de  Borel,  au  mot 
Marelle. 

Bassenne,  subst.  fém.  La  voile  de  misaine. 
(Dict.  d'Oudia.) 

Basset,  adj.  Ras,  court.  —  Abaissé. 
iBasse/ est  le  diminutil'de  ftrts.  Au  premier  sens, 
il  signilioit  ras,  court,  comme  dans  ce  passage  : 

Le  poil  avoit  liasset,  aussi  noir  c'une  meure, 
Et  les  cornes  agues,  plus  c'un  coutiaus  à  meure, 
l'abl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  343,  V"  col.  2. 

On  a  dit  au  second  sens  :  espaules  hassettes,  pour 
abaissées. 

Vos  espaules  très  bien  fêles, 

Ounies,  et  a  point  basseles. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n*  218,  R-  col.  2. 

Bassetaille,  subst.  fém.  Bas  relief.  Terme  de 
sculpture.  (Dict.  d'Oudin.) 

Basseté,  subst.  fém.  Bassesse.  «  L'envie  est 
"  vilté  de  courage,  bassenr  d'esprit  indigence  de  la 
«  vertu  ou  du  bien  qui  abonde  en  autrui,  noncha- 
«  lance  manifeste.  »  (Antoine  Chapuis,  cité  par  Du 
Verd.  Bibl.  p.  55.) 

VARIANTES  : 
BASSETÉ.  Oudin,  Dict. 
Basseur.  Robert  Estienne,  Dict. 

Bassetement,  adv.  A  voix  basse,  tout  bas.  «  Il 
«  lui  dit  basseltement  un  pileux  adieu,  qui  à  peine 
«  luy  peult  sortir  de  la  bouche.  »  (J.  le  Maire,  lllusl. 
des  Gaules,  Liv.  II,  p.  107.)  «  Il  respond  moult 
«  bassettement  qu'il  ne  mangera  pas  ores,  car  il 
«  n'est  pas  bien  baitlié.  »  (Lanc.  du  Lac,  T.  II, 
fol.  3,  V°  col.  2.) 

VARIANTES  :' 
BASSETEMENT.  Vies  des  SS.  MS.  de  Sorb.  ch.  lviii. 
Bassettement.  Lanc.  du  Lac,  T.  II,  fol.  3,  V"  coL  2. 
Basset.  Percef.  Vol.  III,  fol.  113,  V»  col.  2. 
Baset.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  648. 

Bassier,  subst.  masc.  Terme  de  vénerie.  «  Les 
«  fientes  que  les  besles  noires  laissent  sont  appel- 
«  lées  lapes  qui  sont  dites  fumes  en  la  vennerie  du 

«  cerf ce  qui  est  dit  es  doulies  bestes  souraller 

«  est  dit,  es  noires  bestes,  bassier.  »  (Modus  et 
Racio,  fol.  23.) 

Bassier  signifioit  aussi  :  pupille,  jeune  enfant 
Voy.  le  Dict.  de  Borel,  qui  cite  ce  vers  : 

De  bassier  qu'il  estoit  il  est  devenu  gars. 

Bassiere,  subst.  fém.  Vallée.  —  Baissière. 
Ce  mot  est  mis  au  premier  sens  dans  ce  passage  : 

Il  regarde  en  une  bassiere 
Si  a  veu  mayncte  banyere. 

Gace  de  la  Bigne,  Des  Déduits,  MS.  fol.  53,  R'. 

bassiere  signifioit  aussi  le  fond  d'un  tonneau,  le 
vin  qui  est  près  de  la  lie. 

(-1)  Ne  faudrait-il  pas  lire  l'chast?  (n.  e.) 


C'est  trop  enchery  la  bassiere 
Du  tonneau  qui  est  deffoncé. 

Goquill,  p.  27. 

De  là,  mettre  à  ^assicres  pour  mettre  en  déroule, 
renverser. 

Fist  valoir  si  fort  son  enseigne 
Qu'Angloys  furent  mis  à  bassieres. 

Vigil.  de  Ch.  VII,   T.  I,  p.  80. 

Bassinage,  subst.  masc.  Droit.  Le  bassinage 
de  sel  étoit  un  droit  qui  se  levoit  sur  les  salines. 
(Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Bacinagium.) 

Bassiné,  adj.  Que  l'on  a  mis  dans  un  bassin. 
Mol  employé  pour  épithèle  de  poudre  à  tirer,  que 
l'on  a  mis  sécher  dans  un  bassin  chaud.  (Voy.  le 
Pèlerin  d'Amour,  T.  I,  p.  194.) 

Bassinenient,  sî<^sL  masc.  L'action  d'asperger 
d'eau,  de  bassiner  un  lit.  Ces  deux  acceptions  se 
trouvent  dans  les  Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave. 

Bassouer,  verbe.  Bâtir,  faufiler,  coudre  à 
grands  points.  (Le  Duchat,  sur  Rabelais,  T.  I, 
p.  12,  n.  15.) 

Bast,  subst.  masc.  Tromperie.  Lisez  baste  dans 
le  Dict.  de  Monet,  et  voyez  Baste  ci-apiès,  pris  en 
ce  sens. 

On  disoit  fils  de  bas  ou  bast  pour  bastu7-d,  etc. 
Voici  les  passages  oîi  nous  trouvons  cette 
expression  : 

Quant  Dagobiers  d'EscIavonie 
Eu  revenus,  od  sa  mesnie, 
Si  donna  il  en  celi  pas 
A  Sigebert,  son  /il  de  bas, 
Austrie  c'on  dist  osterike. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  «. 

«  L'archevêque  de  Rheins  Arnoul  frère  avoit  esté 
«  au  roi  Lothaire  de  bast.  »  (Chron.  S'  Denys,  T.  I, 
fol.  211,  A'°.)  Hugues  Capet  vouloit  le  faire  déposer 
«  parce  qu'il  estoit  homme  bastard,  »  est-il  dit 
au  fol.  212.  Ibid. 

Bast  a  signifié  aussi:  ébattement.  C'étoit  un  usage, 
dans  plusieurs  endroits,  lorsqu'une  personne  se 
marioit,  d'aller  chez  elle  chanter  le  bast,  la  pre- 
mière nuit  de  ses  noces;  alors  le  nouveau  marié 
régaloit  ceux  qui  avoient  chanté.  Pour  donner  un 
idée  plus  précise  de  cette  sorte  de  cérémonie,  nous 
citerons  ce  qui  suit:  »  Comme  le  dit  Gorbin,  de  la 
«  paroisse  de  S'°  Croix  de  Bernay,  s'en  alloit, 
«  encontra  un  sein  compère...  qui  lui  dit  qu'il  re- 
«  tourneroit  avec  lui  et  qu'ils  iroient  chanter  le 
«  &fls^(l)que  onaaccoustumédechanterauditpaïs, 

'■  la  première  nuyt  des  nopces se  fassent  adres- 

'<  siez  à Jehan  de  Bryere lequel  distribuoit 

«  le  vin,  et  les  viandes, en  luy  disant  qu'il 

"  leur  voulist  bailler  à  boire,  et  de  la  viande  pour 
«  aller  chanter  une  forme  d'esbatteinent  appelle 
«  le  bast,  etc.  »  (Lett.  de  Henry,  R.  deFr.  et  d'Angl. 
septembre  1424,  au  Très,  des  Charl.  Reg.  172, 
pièces  G21  et  624.) 

Bastaqe,  subst.  inasc.  Droit  seigneurial.  Devoir 
que  le  seigneur  péager  prend  d'un  cheval  basté 


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sans  charge  ou  chargé,  pour  raison  du  bast,  outre 
le  pénge,  pour  raison  de  la  marchandise.  (Laur. 
Gloss.  du  Dr.  Fr.) 

Bastangue,  stibst.  fém.  Sorle  de  poisson.  En 
Italien  jiasUnacca  marina.  Oudin,  dans  son  Dict. 
italien,  interprète  ces  mots  par  «  tareronde,  sorte 
«  de  raye,  bougnette,  Bastangite,  Vastangue.  « 

Bastai'd ,  subst.  masc.  Ce  mot,  qui  subsiste, 
n"a  point  besoin  d'explication.  Nous  le  trouvons 
employé  par.!.  Lemaire,  dans  le  passage  suivant: 
«  La  délient  iceluy  Telamon  tousjours,  depuis  en 
«  vile  servitude,  sans  loy  de  mariage  et  délie  ha 
«  eu  un  beau  filz,  nommé  Theucer,  lequel  à  peine 
«  veult  advouer  pour  son  bastard.  »  (J.  Le  Maire, 
lUustr.  des  Gaules,  Liv.ll,  p.  180.)  [On  trouve  dans 
Froissart  la  forme  bascle:  »  Le  bascle  de  Maruel.  » 
(Ed.  Kervyn,  VI,  31.)  Le  Glossaire  provençal  de 
Baynouard  donne  le  diminutif  de  basclot  avec  le 
sens  de  vaurien.  Froissart  le  transforme  en  bascot: 
«  Et  s'appelloit  le  bascot  de  Mauléon  (XI,  A\).  » 
Faut-il  voir  là  bascli,  basciili.  Basques,  de  Du 
Gange,  avecle  sens  d'hérétiques,  puis  voleurs?]  (n.  e.) 

Nous  rapporterons  les  expressions  suivantes  : 

1°  Simples  bastards,  c'est-à-dire  ceux  qui  sont 
nés  de  personnes  libres  :  «  Ce  qui  est  dit  cy-devant 
«  a  lieu  au  regard  des  simples  bastards  ;  mais  ceux 
«  engendrés  en  adultère  de  personnes  mariez ,  soit 
«  mary  ou  femme,  ou  de  religieux  ou  de  personnes 
«  parentes  l'une  de  l'autre,  en  degré  prohibé,  ils  ne 
«  pourront  succéder  à  leurs  mères,  ou  aux  pareus 
"  du  costé  maternel.  »  (Nouv.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  777.) 

2°  Le  grand  bastard.  On  appeloit  ainsi  Antoine 
de  Bourgogne,  fils  naturel  de  Pliilippe-le-Bon,  1 477. 
(Lussan,  Illst.  de  Louis  XI,  T.  VI,  p.  08.) 

3°  N'être  point  bastards.  Façon  de  parler  pour 
dire  aller  de  pair  avec  quelqu'un  : 

Et  pour  monstrer  qu'ils  n'estoient  point  bastards 
Françoys  leur  feirent  leur  part  honnestement. 

i.  Marot,  p.  2i. 

4"  17)1  bastard.  Sorte  de  vin  nommé  ainsi  entre 
plusieurs  vins  exquis  trouvés  à  la  prise  du  château 
de  Naples,  par  Charles  VIII,  en  1495.  (Voyez  André 
de  la  Vigne,  Voyage  de  Naples,  p,  143.) 

5"  Caractère  bastard.  On  a  dit,  en  parlant  d'une 
traduction  de  l'Iliade  par  Jean  Samxon  ,  qu'elle 
étoit  impi'imée  in- 4°  en  caractères  bastards  (1). 

G"  Bastard  de  chant  royal  ou  demi  chant  royal. 
C'étoit  ainsi  que  l'on  nommoit  la  ballade  qui  excé- 
doit  huit  lignes  et  huit  syllabes.  (Voyez  Fabri,  Art. 
de  Rhétor.  Liv.  II,  fol.  42.) 

7°  £'s/)e'esbas;an/cs.C'étoientcellesqui  pouvoienl 
«  servir  à  une  main  et  à  deux,  les  gardes  d'icelles 
<i  faites  à  une  croisette  seulement,  et  pas  d'asne 
«  ouvert.  »  (La  Colombière,  Théâtre  d'honneur, 
T.  II,  p.  461.)  C'étoit  la  seule  dont  les  Suisses  se 
servoient,  suivant  Brantôme,  sur  les  Duels,  p.  5. 
(Voyez  Rabelais,  T.  I,  p.  163.) 

8°  Galles  bastardes  [Galles  est  ici  pour  gâtées  ou 


galères.)  «  Le  dit  sieur  roy  m'a  dit  qu'il  a  preste  au 
«  dit  Gennes  ses  galles ,  asscavoir  sexe  subtiles ,  et 
«  quatre  bastardes,  pour  en  user  toulles  et  quantes 
«  fois  qu'il  sera  mestier.  »(Lett.  deLouisXII,p.  169.) 

9°  Couleuvrines  bastardes.  Pièces  d'artillerie  de 
campagne  (2).Ellesétoient  si  légères,  qu'on  pouvoit 
les  mener  au  trot  dans  les  escarmouches.  On  disoit 
aussi  simplement  bastardes.  (Voyez  les  Mémoires 
de  Bassompierre,  T.  II,  p.  36.)  On  disoit,  en  ce 
sens,  artillerie  bastarde. 

10"  Censés  ou  rentes  bastardes.  On  appeloit  ainsi 
«  celles  qui  ne  sont  pas  foncières,  mais  constituées 
«  à  prix  d'argent.  »  (Laurière,  Glossaire  du  Droit 
françois.  —  Voyez  Coût.  gén.  T.  I,  p.  Il.'ï6.) 

11°  Traimes  bastardes-  L'éditeur  des  Ordonnances 
des  Rois  de  France  dit  :  «  On  ne  se  sert  plus  de  ce 
»  terme  ;  mais  il  y  a  grande  apparence  que  les 
«  tresmes  et  les  estains ,  ou  chaînes  bastardes  estoient 
«  d'une  qualité  inférieure  à  celle  qu'on  employoit 
u  ordinairement.  »  (Ord.  des  Rois  de  France,  T.  III, 
p.  516.)  Ou  trouve  dans  le  même  volume  «  filez 
«  bastards  et  estains  bastards  »  dans  la  même 
acception. 

12°  Chiens  bastards.  C'étoit  une  espèce  de  chiens 
«  engendrez  de  chiens  courans  et  matines.  » 
(Salnov.  Vénerie,  p.  304.) 

13°  Armé  à  la  bastarde.  On  désignoit  ainsi  la 
manière  dont  étoient  arniés  les  génétaires ,  les 
archers  et  autres  troupes  employées  à  faire  des 
courses.  (Voy.  J.  d'Auton,  Ann.  de  Louis  XII,  p.  149.) 

Bastards  étoient  supérieurs  aux  gentils  hommes 
dans  les  maisons  des  pères  qu'ils  servoient  : 
«  Devoit  delîendre  le  pas,  un  des  enfans  légitimes 
>>  du  roy,  un  des  bastards  et  un  des  gentilz  hommes 
«  de  l'hostel.  »  (J.  Le  Maire,  lUustr.  des  Gaules, 
Liv.  I,  p.  131.) 

Bastards.  «  Messieurs  les  bastards  servirent  les 
«  autres  dames  estrangeres.  »  (J.  Le  Maire,  lUustr. 
des  Gaules,  Liv.  I,  p.  144.) 

Bastards  [jeunes]  pour  les  derniers  nés  d'entre 
les  bastards;  le  premier  étoit  le  grand  bastard. 
a  L'un  des  jeunes  bastards,  nommé  Mistor,  avec 
"  l'un  des  maislres  d'hostel  de  la  royne,  et  ceilains 
«  autres  gentilz  hommes  se  vindrent  adiouster  en 
«  leur  bende.  »  (.1.  Le  Maire,  Illustr.  des  Gaules, 
Liv.  I,  p.  142.) 

Bastardage,  subst.  masc.  Bâtardise.  Etat  de 
bâtard.  (Dict.  de  Cotgrave  et  Du  Cange,  Glossaire 
latin,  au  mot  Bastardia.)  «  Si  une  femme  franche 
«  a  bastards  d'un  homme  serf,  les  enfans  demeurent 
«  en  bastardage  et  ne  seront  point  serfs.  »  (Coût, 
gén.  T.  II,  p.  383.) 

VARIANTES  : 
BASTARDAGE.  Du  Cange,  Glossaire  latin,  à  Bastardia. 
Bastarderie,  subst.  fcin.  Oudin,  Dict. 
Bastardie,  subst.  fém.  Cotgrave,  Dict. 

Bastardaille,  subst.  fém.  Collectif  de  bâtards. 
Race  de  bâtards. 


(1)  C'est  récriture  que  nous  nommons  bâtarde.  (N.  E.)  —  (2)  La  bâtarde  était  longue  d'environ  neuf  pieds  et  demi,  avec 
trois  pouces  dix  lignes  de  calibre.  On  la  trouve  dans  d'Aubigné  (Hist.,  I,  304).  (n.  e.) 


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Borel  à  la  page  48  de  son  Dict.)  Molière  a  souvent 
employé  ce  mot  dans  le  même  sens.  (Voyez  Baster.) 

Baste  (couche).  Nous  trouvons  couche  baste 
dans  les  Contredits  de  Songecreux,  fol.  119,  pour 
grabat,  clialit.  Ce  qui  nous  détermine  à  lui  donner 
cette  siguificaiion,  c'est  que  l'on  dit  encore  en 
Touraine  soubustement  pour  soubassement,  et  qu'il 
y  a  apparence  que  ce  mot  tourangeau  s'est  formé 
de  baste. 

Bastel,  suhst.  masc.  Petit  bateau.  —  Vaisseaux. 
Ce  mot  signifioit  bateau,  nacelle,  canot,  selon 
Borel,  Dict.: 

Tost  ont  les  voiles  abbessies 
Entor  les  verges  bien  liées 
Et  fors  des  nez  les  balias  mis. 

Athis,  MS.  fol  60,  R-  col.  2. 
Aux  encres  traire  o  le  batel 
Se  mettent  tuit  li  plus  Isnel. 

Athis,  MS.  fol  CO,  R'col.  1. 

«  Elles  voyent  ung  bastel  qui  estoit  attaché  à  la 
«  nef,  duquel  on  alloit  de  la  nef  à  terre,  quand 
«  la  dite  nef  estoit  ancrée.  »  (Percef.  Vol.  VI,  fol.  44.) 

On  employoit  aussi  ce  mot  pour  vaisseaux,  navi- 
res. L'empereur  Maximilien,  écrivant  en  1512  à 
l'archiduchesse  sa  fille,  sur  le  traité  qui  devoil  se 
conclure  avec  le  roi  d'Angleterre,  dit:  ■■  Le  dit 
"  traitié  fait,  nous  luy  ferons  bien  des  gens  assez. 
"  tant  de  lanskneckts,  que  suyches,  et"  bastiaulx 
«  autant  qu'il  sera  en  nostre  puissance.  »  (Lettres 
de  Louis  XII,  T.  IV,  p.  17.) 

VARIANTES  : 
BASTEL.  rerceforest,  Vol.  VI,  fol.  44,  R°  col.  2. 
B.VTEL.  Borel,  Dict.  -  Athis,  MS. 
Bateaulx  (plur.)  Vigil.  de  Charles  VII,  T   II,  p.  177. 
Batteaux  (plur.)  DIas.  des  Fol.  Am.  p.  229. 
Bastiaulx  (plur.)  Lettres  de  Louis  XII,  T.  IV,  p.  18. 
Bateux  (plur.)  Britton,  Loix  d'Angleterre,  fol.  281. 
B.\TEZ.  Athis,  MS.  fol.  87,  V»  co).  2. 
Batias  (plur.)  Athis,  MS.  fol.  60,  R"  col.  2. 

Bastelage,  subst.  masc.  Charlatanerie,  ruse, 
artifice.  Tours,  finesse  de  bateleur:  «  (Juelqu'un 
«  proposoit  contre  Cleanthes  des  finesses  dialecti- 
«  ques,  à  qui  Chrysippus  dit  :  joue  toy  de  ces 
«  battelaiies  avec  les  enfans.  »  (Ess.  de  Montaigne, 
T.  II,  p.  2C0.)  •■  Il  frappe,  il  mord,  il  jure,  le  plus 
«  tempestalif  maistre  de  France,  il  se  ronge  de 
«  soin  et  de  vigilance,  tout  cela  n'est  qu'un  baste- 
«  lage,  auquel  la  famille  mesme  complote.  ■>  (Ess. 
de  Montaigne,  T.  II,  p.  lOG.)  «  Pour  ceux  qui  les 
"  ont  subjuguez  ,  qu'ils  ostent  les  ruses  et  les 
«  batelages.  »  (Ibid.  T.  III,  p.  221.) 

variantes  : 
BASTELAGE.  Essais  de  Montaigne,  T.  II,  p.  106. 
Batelage.  Essais  de  Montaigne,  T.  III,  p.  221. 
Battel.\ge.  Ibid.  p.  260. 

Basteler,  verbe.  Faire  le  bateleur,  le  charlatan. 

On  a  dit  des  médecins  :   «  Voilant  comme  ils  vont 

_     ^      «  bastelant  et  baguenaudant  à  nos  despens.  »  (Ess. 

Estienne.  (Uial.  du  Lang.  fr.  italianisé,  cité  par  I  de  Montaigne,  T.  H,  p.  307.)  «  Ce  que  j'auray  pris 


variantes  : 
BASTARDAILLE.  Oudin,  Dict. 
Bataudaille.  Monet,  Dict. 

Bastardeau  (I),  subst.  masc.  Espèce  de  canon. 
(Dict.  dOudin.)  Nous  ne  trouvons  aucune  autorité 
qui  justifie  cette  acception. 

Baste,  subst.  fém.  Espèce  de  Une.  —  Tour, 
supercherie,  moquerie.  —  Chaton  de  bague.  — 
Cercle.  —  Partie  de  couronne  ducale.  —  Enclos, 
territoire. 

Au  premier  sens ,  baste  désigne  un  vaisseau  de 
bois  garni  de  cercles  et  ayant  deux  anses.  (Du 
Gange,  Glossaire  latin,  au  mot  Basta.)  De  là,  on 
disoit  au  figuré  porter  la  baste  pour  porter  la 
peine  ou  le  dommage.  (Oudin,  Dict.  et  Cur.  fr.) 

Baste  se  disoit  aussi  pour  tour,  supercherie , 
tromperie,  moquerie.  (Oudin,  Dict.  et  Cur.  h\)Don- 
ner  la  basie  à  quelqu'un,  c'étoit  le  décevoir  par 
raillerie.  (Monel,  Dict.) 

Ce  mot  signifioit  de  plus  le  chaton  d'une  bague  : 
«  Que  toutes  pièces  qui  auront  bastes  soudées,  soit 
»  pour  mettre  sur  soye,  ou  ailleurs,  ne  puissent 
«  estre  clouées,  mais  couzues  à  l'aguille.  »  (Ord. 
des  Rois  de  France,  T.  III,  p.  12.) 

Baste  paroît  désigner  un  cercle  (2i  dans  le  passage 
suivant  :  «  Le  collier  de  l'ordre  de  l'Hermine  et 
«  de  l'Epie  étoit  fait  d'épics  de  blé  d'or  passés  en 
«  sautoir,  liez  haut  et  bas  par  deux  bastes  et 
»  cercles  d'or.  »  (Le  P.  Honoré  de  S"  Marie,  sur  la 
Chevalerie,  p.  471.)  On  voit,  dans  la  planche  à 
côté,  la  figure  de  cet  ordre  montée  sur  deux  cercles. 

Baste  étoit  employée  pour  signifier  partie  d'un 
chapeau  ducal,  ou  couronne  ducale,  vraisemblable- 
ment la  bordure  :  «  Cosme  de  Médicis  fut  déclaré 
«  grand  duc  de  Toscane,  et  en  ceste  qualité  cou- 
<■  ronné  par  le  dit  pape  Pie  d'un  chappeau  d'or,  à 

«  fleurons  relevés  de  pierreries en  la  baste  de 

«  ce  chapeau  ducal  furent  gravez  et  burinez  ces 
«  mots:  Plus  T,  Pont.  max.  et  fav.  »  (Théâtre 
d'honneur,  p.  1504.) 

Enfin,  Ijttste  signifioit  enclos,  enceinte  ou  ter- 
ritoire, ressort:  »  Tous  les  sujets  de  la  baste  de 
«  Clugny.  »  (Légende  du  duc  Charles  de   Guise, 

p.  36.)  «  Baillons aux  habilans  le  ditcoppon,  ou 

«  la  dite  pièce  d'eau  étant  entre  la  dite  baste  d'une 
«  part,  et  le  dit  yslel.  »  (Charte  de  Josse  de  Halwin 
pour  ceux  de  Maisiere  sur  Meuse,  en  1387.)  On 
disoit,  dans  le  même  sens  bateis  et  bateys.  (Voyez 
ces  mots.) 

Baste,  adv.  Il  suffit,  c'est  assez.  C'est  propre- 
ment la  troisième  personne  singulière  du  présent 
de  l'indicatif  du  verbe  baster  ;  nvA\?,  ce  mot  est 
devenu  adverbial.  (Voy.  le  Dict.  d'Oudin  et  Rabelais, 
T.  H,  p.  222,  et  T.  III,  p.  90.)  Le  mot  baste,  formé 
de  l'italien  (3),  s'est  introduit  en  France  depuis  le 
mariage  de  Catherine  de  Médicis,  suivant  Henry 


(l)  En  terme  de  fortification,  c'est  un  massif  de  maçonnerie  pour  retenir  l'eau  d'un  fossé,  (n.  e.)  -  (2)  Nous  employo.is 
encore  ce  mot  dans  le  sens  de  cercle  d'une  boite  de  montre,  (n.  e.)  -  (3)  Baslare,  suffire  ;  c'est  en  ce  sens  q  ji2  La  l'ontaiue 
disait:  «  Somme  bastante.  »  (n.  e.) 


/ 


BA 


—  421  — 


BA 


«  à  dire  en  batelant  et  en  me  moquant,  je  le  diray 
«  le  lendemain  sérieusement.  «  (Ess.  de  Montaigne, 
T.  m,  p.  101.)  «  Jongler,  g&uàir  et  bâte  1er.  »  (Borel, 
Dict.  au  mol  Jongleour.  11  cite  Perceval.)  Batteler, 
dans  le  Celtliell.  de  L  Trippault,  est  rendu  par 
bavarder,  parler  beaucoup  et  ne  rien  dire.  (Voyez 
Cotgrave,  Dict  ) 

Ce  mot  est  pris  pour  railler,  tourner  en  ridicule, 
dans  les  Contes  de  Des  Périers,  T.  11,  p.  59. 

VARIANTES  : 
BASTELER.  Montaigne,  Essais,  T.  II,  p.  307. 
Bateler.  Ibid.  T.  III.  p.  161. 
Batteler.  Celthell.  de  L.  Trippault. 

Basteleresque,  adj.  Qui  est  propre  aux  bate- 
leurs. (Dict.  de  Cotgrave,  au  mot  Bateleresque.) 
»  Tout  ainsi  qu'en  nos  bals  ces  hommes  de  vile 
«  condition,  qui  en  tiennent  école,  pour  ne  pouvoir 
»  représenter  le  port  et  la  décence  de  nostre 
«  noblesse,  cherchent  à  se  recommander  par  des 
<<  sauts  périlleux,  et  autres  mouvemens  estranges 
"  et  basteleresques.  »  (Ess.  de  Mont.  T.  II,  p.  140.) 

VARIANTES  : 
BASTELERESQUE.  Montaigne,  Essais,  T.  II,  p.  140. 
Bateleresque.  Cotgrave,  Dict. 
Bateleuse,  fcin.  Taïiureau,  Dial.  Epit.  p.  9. 

Bastelerie,  subst.  féni.  Charlatanerie.  (Voyez 
l'Apologie  pour  Hérodote,  p.  474.  —  Les  Dialogues 
de  Tahùreau,  fol.  46.) 

VAIilANTES  : 
RASTELERIE.  Dial.  de  Tahùreau,  fol.  46,  V". 
B.\TTELLEHiE.  Dict.  de  Cotgrave. 

Basteleur,  subst.  masc.  Bateleur.  —Batailleur. 

Ce  mot  est  pris  dans  le  sens  de  bateleur,  en  ce 
passage  :  «  Il  y  a  trois  sortes  de  gens  qui  n'ayment 
«  point  estre  appeliez  par  leur  nom,  comme  vous 
«  diriez  chien  et  chat,  moines,  ministres,  presires 
>>  pu....  et  beateleur.  «  (Moyen  de  Parvenir,  p.  189.) 
On  disoit,  dans  ce  même  sens,  «  acte  de  basteleurs 
«  qui  font  le  fait  et  le  défait.  •>  Façon  de  parler  em- 
ployée dans  les  Lettres  de  Rabelais,  p.  18.  C'étoit 
peut-être  te  jeu  appelé  basteax  awque]  se  disoit  fort 
habile  un  jongleur  ou  bateleur  dont  il  est  fait  men- 
tion dans  les  Fabl.  mss.  de  S'  Germ.  fol.  70.  Plusieurs 
auteurs  veulent  que  le  mot  basteleur  se  soit  formé 
de  celui  de  bateliers,  h  cause  de  l'agilité  avec 
laquelle  ils  parcourent  les  cordages  et  les  bords  de 
leurs  bàlimens.  Ils  se  fondent  sur  ce  que  Rabelais, 
T.  II,  p.  '250,  et  T.  V,  p.  15,  vante  l'adresse  des  bate- 
liers de  Lyon,  et  des  gondoliers  de  Venise  dans 
leurs  jeux  d'exercice.  Cependant,  je  crois  qu'il  est 
plus  naturel  de  le  dériver  de  basteaux  (1),  sorte 
d'instrumens  dont  les  basteleurs  se  servoient  dans 
leurs  jeux  pour  amuser  le  peuple.  (Voyez  Bateaux.) 

Basteleur  est  employé  pour  batailleur  dans  ce 


passage  :  «  Je  ne  suis  basteleur,  ne  homme  d'ar- 
"  mes.  »  (Petit  Jehan  de  Saintré,  p.  027.) 
variantes  : 

BASTELEUR.  Lett.  de  Rabelais,  p.  18. 

Bastelleur.  Trésor  des  Chartres,  Reg.  16i,  p.  195. 

Besteleur.  Moyen  de  Parvenir,  p.  189. 

Basteller,  verbe.  Frapper.  Batailler,  s'escrimer  : 

Quoique  le  mail  d'Atropos,  vous  martelle 
Il  forge  en  vain,  et  ne  sçait  qu'il  bastelle. 
Creliu.  page  (U. 

Bastendant,  participe.  Déclinant.  Eustache 
Deschamps,  parlant  de  la  révolution  des  siècles  et 
des  choses  de  ce  monde,  disoit  : 

Son  tour  a  fait  le  cercle  en  descendant, 
Qui  a  couru  par  mainte  région  ; 
Or  s'en  rêva  monter  en  bastendant , 
Tant  par  midi  com  par  septentrion... 
Riens  estabte  ne  scoy  dessoubz  la  Nice. 

Eust.  Desch.  PoCs,  MSS.  fol.  122,  col.  4. 

Bastent.  Voici  le  passage  où  nous  trouvons 
ce  mot  : 

Escoute,  de  ceste  anémie, 
Fit  Simon,  qu'ele  a  respondu? 
Au  pais  en  as  tu  entendu? 
Oil'voir,  Sire,  bien  l'entent. 
.\nieuse,  je  te  basii'iit 
Que  tu  respons  si  feleraent. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  1218.  fol.  51,  R"  col.  1. 

Baster,  verbe.  Badiner,  niaiser,  s'amuser  à  des 
riens.  —  Suffire.  —  Balancer,  flotter. 

Oudin  explique  ce  mot  dans  le  premier  sens. 
Crétin  s'en  est  servi  dans  cette  acception  : 

Vault-il  pas  mieulx  veoir  un  sanglier  es  teilles. 
Que  tout  le  jour  6Hs?ec  jusques  aux  estoilles 
Pour  regarder  faulcon  que  vent  soubz  tient. 

Grelin,  page  91. 

Un  autre  poëte,  partant  des  regards  séduisans 
des  coquettes,  dit  : 

.  .  .  Faisant  bcister  aux  étoilles 

.  .  .  Font  gallans  jour  et  nuyt  coiu-re. 

L'Amant  rendu  Cordelier.  p.  581. 

Les  Italiens  disent  bastare  pour  suffire,  et  nous 
avons  emprunté  d'eux  le  verbe  baster,  pris  en  ce 
sens.  (Voy.  le  Dict.  de  Monel.)  »  Scanderberch,  bon 
«  juge  et  très  expert,  avoit  accoutumé  de  dire  que 
«  dix  ou  douze  mile  combalans  fidèles  dévoient 
«  baster  a  un  suffisant  chef  de  guerre  pour  garantir 
«  sa  réputation  en  toute  sorte  de  besoin  militaire.  » 
(Essais  de  Montaigne,  T.  II,  p.  739.)  «  Donna  pour 
"  Dieu  la  pluspart  de  ses  biens,  retenant  seulement 
«  ce  qui  luy  estoit  bastant  pour  soy  vivre.  »  (Nuits 
de  Straparole,  T.  I,  p.  30.  —  Voyez  te  mot  Baste.) 

11  semble  que  Crétin  ait  employé  baster  dans  le 
sens  de  badiner,  dans  le  passage  suivant  : 

Croy  pour  certain  que  adonc  ung  combatant 
Homme  de  bien  n'est  çà  et  là  liasiant 
Mais  seullement  devant  luy,  et  ne  songne 
Se  ung  aultre  faict  bien  ou  mal  la  besogne. 
Crétin,  page  135. 


(1)  Basteau  est  un  instrument  d'escamoteur  dans  ce  passage  du  Ménagier  de  Paris  (xiv"  siècle)  :  «  L'autre  dit  que  sa 
femme  avoit  respondu  qu'elle  n'estoit  venue  ne  yssue  d'enchanteurs  ne  de  sorciers,  et  qu'elle  ne  savoit  jouer  des  basteaxdx 
de  nuit  ne  des  balais  (I,  6).  »  Au  reg.  ,IJ.  162,  p.  175  (an  1408),  on  lit  aussi  :  «  Comme  Perrinet  Sanson  joueur  de  bateaus..., 
en  sa  compagnie  sa  femme,  enffans,  un  ours,  un  cheval  et  une  chievre,  à  trompes  et  labours  eust  assemblé  le  peuple 
après  disner  pour  le  veoir  jouer  de  son  mestier  et  de  ses  dites  bestes  ;  —  en  fesant  sondit  mestier  et  jouant  de  ses 
basteaux,  etc.  »  Comme  bastaxius  signifie  à  la  fois  crocheteur  et  jongleur,  bateau  signifie  un  bâton,  et,  par  suite,  bateleur 
est  un  joueur  de  bâton  ;  les  physiciens  amusants  ont  encore  une  baguette  à  la  main.  (n.  e.) 


BA 


BA 


Bustier,  adj.  Qui  porte  bât.  —  Sot,  bète. 

On  disoit  au  premioi-  sens,  clieval  bastier  pour 
cheval  de  but.  (Dict.  de  Cotgrave  et  Epitli.  de  Mart. 
de  la  Porte.) 

Delà,  ou  nominoit  un  grand  bastier,  un  sot,  un 
badaud.  (Dict.  d'Oudin.) 

Basticrrcs,  subi.  masc.  Qui  bat,  qui  a  battu. 
«  Qu'il  i  a  coups  orbes  de  poing  garni,  counie  de 
0  baslon,  ou  autre  chose,  li  basticrres  doit  estre 
«  prins  et  tenu  sans  recreanche  fere  dusques  a  tant 
«  que  l'en  voie,  par  la  dite  bature,  il  n'i  a  point  de 
«  péril  de  mort.  »  (Reaumanoir,  p.  149.) 

liateur  à  loijer  signilie  un  homme  qu'on  prend  à 
gages  pour  battre  queliju'un  ou  pour  faire  de  mau- 
vais coups.  (Voy.  les  Poës.  mss.  d'Eust.Desch.  f°330.) 

VABIANTKS    : 
BASTIERRES.  Beaumanoir,  p.  -149  et  150. 
Bateur.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  330,  col.  1. 

Bastille,  subst.  fém.  Forteresse;  rempart.  Ce 
mot  signifioit  toute  espèce  de  forts,  soit  en  maçon- 
nerie, soit  en  bois,  quelquefois  entouré  de  fossés, 
de  palissades  et  de  barrières.  On  les  construisoit  en 
pleine  campagne,  sur  les  chemins  et  dans  les  postes 
les  plus  importans  :  ils  étoient  plus  communément 
élevés  autour  des  villes  attaquées.  Les  assiégés  les 
employoient  pour  leur  défense,  et  les  assiégeans 
pour  investir  la  place  et  la  priver  de  toute  espèce  de 
secours  (1).  (Voy.  les  Dict.  de  Nicot,  Monet,  Borel  et 
de  Colgrave;  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr.)  Froissart, 
parlant  d'une  escarmouche  des  Anglois  devant  la 
ville  de  Troyes,  dit  :  <■  Tantost  veez-cy  les  grosses 
«  batailles  du  comte  de  Bourquinguam  :  lesquelles 
«  s'en  vindrent  toutes,  tout  à  pié,  devers  ces  gens 
«  d'armes  qui  estoient  en  la  bastide  laquelle  on 
«  avoit  faite  d'huis,  de  fenestres  et  de  tables.  » 
(Froiss.irt,  Vol.  II,  p.  93.) 

Le  même  auteur  a  dit,  en  parlant  du  siège  de 
Brest,  en  1.386  :  «  S'armèrent  toutes  gons  et  se  tire- 
«  rent  par  bon  arroy  et  bonne  ordonnance  devers 
«  le  chastel,  et  la  bastide  qui  estoit  faite  ouvrée  et 
«  charpentée  de  grand  manière  :  et  fut  ce  pour 
»  demourer  là  neuf  ou  dix  ans,  car  il  y  avoit  autour 
«  de  la  bastide,  fossés,  portes,  tours  et  bons  murs, 
«  et  tout  de  gros  bois.  »  (Ibid.  Vol.  III,  p.  112.) 

Ce  mot  est  employé  pour  signifier  la  Bastille  de 
fe  porte  de  S'  Antoine  à  Paris,  dans  l'Hist.  Chronol. 
depuis  1 5(10,  jusqu'à  1467,  p.  360. 

Le  mot  de  bastide  ("2)  s'est  conservé  à  Marseille  et 
dans  plusieurs  autres  lieux  de  la  Provence,  pour 
signifier  métairie  ou  maison  de  campagne.  Voyez 
les  noms  françois  formés  avec  ce  mot  dans  le 
P.  .Meneslrier,  Orn.  des  Armoir.  p.  462.  «  Le  privi- 
«  lege  de  bastide  nouvelle  est  compris  avec  celui 
«  de  l'Ost  et  de  la  Croix.  »  (Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  I, 


p.  398.)  C'étoit  vraisemblablement  le  privilège 
accordé  à  ceux  qui  faisoient  élever  des  forteresses 
nouvelles  pour  l'utilité  d'un  pays. 

VARIANTES  : 
BASTILLE.  Froissart,  livre  I,  page  460. 
Bastilde.  Cotgrave,  Dict. 
Bastide.  Froissart,  livre  I,  p.  127. 
Bastie.  Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mot  Bastia. 

Bîistiller,  wrbe.  Garnir  de  bastilles;  fortifier. 
—  Investir. 

Le  premier  sens  est  le  plus  usité  :  «  Le  duc  Phi- 
«  lippe  de  Bourgogne,  et  depuis  le  duc  Jean  aussi, 
«  avoient  fait  faire  plusieurs  grands  engins  de  bois 
«  pour  bastiller  Calais.  ■■  (Juvenal  des  Ùrsins,  Hist. 
de  Ch.  VI,  p.  202.)  «  D'autres  places  et  villes  y  a-t-il, 
«  qui  d'elles-mêmes  sont  si  mal  baslie:,  de  la  for- 
«  tune,  et  si  malheureuses,  qu'ordinairement  elles 
«  sont  sujettes  à  prises  et  reprises,  sacs  et  ruines.  » 
(Brantôme,  Cap.  Franc.  T.  II,  p.  288.)  «  Quand  le 
"  duc  de  Lanclaslre,  et  les  barons  et  chevaliers  de 
«  sa  route  furent  venus  devant  le  chastel  de  Mont- 
«  paon,  si  l'assiégèrent  et  s'y  baslirent  aussi  bien 
«  et  aussi  fort,  que  s'ils  deussent  y  demourer  sept 
«  ans.  »  (Froissart,  livre  I,  p.  408.) 

Bastiller  signifioit  aussi  assiéger,  comme  dans  le 
passage  que  nous  allons  citer,  quoique  l'éditeur 
l'explique  par  fortifier  :  »  Quand  il  fut  à  Compiegne 
«  là  si  rendirent  Poton  et  la  Hire,  qui  luy  requirent 
«  qu'il  leur  baillast  deux  cent  lances,  et  les  archers 
"  pour  les  secourir  à  Laon  qui  estoit  bastille.  » 
(Hist.  d'Artus  III,  connétable  de  Fr.  duc  de  Bref, 
p.  759.)  Z?«s^/7/t' en  cet  endroit  signifie  investi;  ce 
qui  rentre  dans  l'acception  de  fortifier  à  cause  des 
lignes  que  les  assiégeans  élevoient  autour  de  la 
place,  soit  circonvallation,  soit  contrevallation. 

VARIANTES  ' 
BASTILLER.  Vigil.  de  Ch.  VII,  p.  42. 
Batiller.  Borel,  Dict.  -  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  561. 
Bastilloner.  Epith.  de  la  Porte. 
Bateiller.  Notice  du  Rom.  d'Alex,  fol.  16. 
Batailler.  Le  Jouvencel,  MS.  p.  288. 
Bataillier.  Blanch.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  178,  R»  col.  1. 
Bataller.  Chron.  de  Fland.  —  Du  Gange,  Gloss.  lat. 
Bastier.  Brantôme,  Cap.  Fr.  T.  II,  p.  288. 
Bastir.  Froissart,  Vol.  I,  p.  408. 

Bastillon,  siibst.  masc.  Petit  fort.  Diminutif  de 

bastille.  «  Ace  siège  furent faites bastides 

•'  et  bastillons.  »  (Mém.  d'Olivier  de  la  Marche, 
livre  II,  p.  515.) 

Bastille,  subst.  fém.  Espèce  de  bât  ou  de  selle. 
(Dict.  d'Oudin,  Cotgrave  et  de  Ménage.)  ■<  Quelqu'un 
«  de  notre  temps,  escrit  avoir  vu  en  ce  climat  là, 
«  des  pays  où  on  chevauche  les  bœufs  avec  bastines, 
'<  estriers  et  brides,  de  s'estre  bien  trouvé  de  leur 
«  porture.  »  (Essais  de  Montaigne,  T.  I,  p.  500.) 


(1)  On  entendait  par  bastide,  au  moyen-âge,  un  ouvrage  de  défense  isolé,  mais  faisant  cependant  partie  d'un  système 
gênerai  de  fortification.  On  doit  distinguer  les  baslillcs  permanentes  des  bastille/s  élevées  provisoirement  ;  les  bastilles 
tenant  aux  fortifications  d'une  place  de  celles  construites  par  les  assiégeants  pour  renforcer  une  enceinte  de  circonvallation 
et  de  contrevallation.  Le  mot  bastide  est  plutôt  employé,  jusqu'à  la  fin  du  xiri»  siècle,  pour  désigner  des  ouvrages  provisoires 
destinés  à  protéger  un  campement  que  des  constructions  à  demeure  ;  ce  n'est  que  par  extension  que  l'on  désigne,  à  partir 
de  cette  époque,  par  ias/irfe  ou  bastille,  des  forts  de  maçonnerie  se  reliant  à  une  enceinte.  (Voir  Le  Duc,  Dictionnaire 
a  Architecture,  II,  p.  16G,  d'après  Du  Gange,  (n.  e.)  -  (2)  Le  patois  provençal  les  nomme  cabanou,  cabanons,  (n.  e.) 


BA 


—  423  — 


BA 


Bastion  (l),  sttbst.  masc.  Espèce  de  jtournol.  Il 
consistoit  dans  l'attaque  simulée  d'un  bastion. 
i.  d'Auton  parle  »  d'un  bastionque  messire  Charles 
«  d'Amboise,  lieutenant  du  Roy,  feit  tenir  à  Milan, 
«  où  le  Roy  fut  présent  avec  tous  les  princes  et 
«  seigneurs  qui  là  estoienl  et  grand  nombre  de 
«  dames.  »  (Annales  de  Louis  Xll,  p.  2G2.)  On  écri- 
voit  aussi  bastillon,  et  c'est  ainsi  qu'on  écril  le  nom 
de  celui  de  15G4,  dont  il  est  mention  dans  Beauch. 
Recli.  des  Théat.  T.  III,  p.  13.  Ces  sortes  de  jeux 
coùtoient  quelquefois  la  vie  ii  plusieurs  de  ceux  qui 
les  donnoient.  «  Il  y  eut  de  gros  festins,  et  esbate- 
«  ments  et  entr'autres  ung  /;«si;7/o«oufutmerveil- 
«  leusement  grand  désordre,  car  il  y  eut  plus  de 
«  40  gentilshommes,  que  tuez,  que  atîolez,  etc.  » 
(Mémoires  de  Rob.  de  la  Marck.  Seigneur  de  Fleur,  m. 
page  63.) 

VARIANTES  : 
BASTION.  J.  d'Auton,  Ann.  de  Louis  XII,  p.  262. 
Bastillon.  Rech.  des  Th.  T.  III,  p.  13. 

Bastir,  verbe.  Nous  citerons  sur  ce  mot,  qui 
subsiste,  les  fayons  de  parler  suivantes  : 

1°  Sur  aultry  cuyr  bastir  trop  large  courroye. 
Façon  de  parier  qui  semble  signilier,  avoir  trop  de 
confiance  en  quelqu'un,  compter  trop  sur  lui,  s'y 
flej» inconsidérément.  (Voy.  l'ercef.  Vol.  VI,  fol.  i.) 

2°  Bastir  assaut.  Livrer  assaut. 

Maint  dur  assaut  m'aura  amor  bastis. 

Chans.  MSS.  du  G"  Tliib.  p.  153. 

3°  Bastir  plait.  Faire  un  accord,  une  convention, 
un  traité. 

Il  fist  au  roy  Charles  savoir 
Que  s'il  osoit  tel  plait  bastir 
Qu'à  ce  voulsisl  en  hastir  etc. 

G.Guiart,  MS.  fol.  208,  V-. 

Nous  disons  bâtir  un  système,  à  peu  près  dans 
le  sens  que  nous  venons  de  voir.  On  adonné  même 
cette  acception  subsistante  à  ce  mot,  lorsqu'on  a 
dit,  en  parlant  de  M.  de  Boisy  et  de  Chievres:  »  Ils 
«  batissoient  les  choses  tant  pour  l'Empire,  que 
«  autres  matières,  pour  mettre  en  paix,  et  union 
«  ces  deux  princes.  »  (Mém.deRob.  de  la  Marck. 
Seig.  de  Fleur,  ms.  p.  359.) 

Bastissage,  subst.  masc.  L'action  de  bâtir.  — 
L'action  de  mettre  un  bât. 

Sur  le  premier  sens,  voy.  le  Dict.  de  Robert 
Eslienne. 

On  trouve  ce  mot  expliqué  par  l'action  de  mettre 
un  bat  dans  le  Dicl.  d'Oudin. 

Bastissenient,  subst.  masc.  Bâtiment.  (Gloss. 
de  l'Hist.  de  Paris.) 

Baston  (2),  subst.  masc.  Arme.  —  Fût  de  lance. 
—  Echalat.  —  Houlette.  —  Verge  d'huissier.  — Auto- 
rité, juridiction.  —  Terme  d'investiture.  —  Marque 
d'ordre  de  chevalerie.  —  Marque  du  rang  des 
convives. 

On  trouve  bâton  pour  arme,  dans  le  Dict.  de 


Monet,  qui  le  rend  par  arme  de  fust  au  mot  Bâton 
On  lit  dans  le  Glossaire  du  P.  Labbe,  bâton  fust 
fustis,  et  dans  le  suppl.  au  Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose 
il  est  pris  pour  épée  ou  hache. 

Jean  Marol  s'en  sert  aussi  pour  armes.  Parlant 
du  Roi  qui  sortoit  de  Milan  pour  aller  chercher 
l'armée  des  Vénitiens,  il  dit  : 

Regarde  en  la  praerie, 

Voit  ses  souidars  faisans  cher  raarrye 
Nudz  sans  battons,  n'aulcune  armeurerie, 

J.  Marot,  p.  90. 

En  ce  sens,  on  distinguoit  le  baston  de  gnierre, 
le  baston  d'armes,  le  baston  de  défense,  le  baston 
de  trait,  ou  à  tirer. 

Nous  trouvons  ce  mot  employé  en  ce  dernier 
sens  dans  ce  passage,  où  nous  lisons  que  «  arc 
«  estoit  un  baston  d'instrument  trop  prouffitable, 
«  tant  pour  soy  déliter  et  déduire  comme  pour  le 
«  prouffit  de  la  deffense  de  son  corps.  «  (Modus  et 
Racio,  MS.  fol.  71.)  En  général,  le  mot  Bâton  signi- 
lioit  toute  sorte  d'armes  offensives  ou  deffensives. 
«  Onleurosta  tous  leurs  l)astons  qu'ilz  n'ozoient 
«  pas  porter,  non  pas  mesme  un  cousteau.  »  (Hist. 
d'Arlus  m,  Connest.  de  Fr.  Duc  de  Bref.  p.  743.) 
«  Des  bastons  que  les  parties  entendent  porter  pour 
»  otTendre,  et  defîendre,  sont  espées,  dagues  seu-r 
<•  lement,  sans  poinçons,  couteaux,  ne  autres 
'■  pointes  mussées,  et  le  reste,  comme  lances, 
«  masses  ou  autres  basions  devises  tant  pour  l'un 
«  que  pour  l'autre.  »  (La  Jaille,  du  Ch.  de  Bat.  fol.  45.) 

De  là,  ce  mot  s'est  pris  pour  fût  de  lance. 

Lances  brisent,  basions  eschardent 
Tai'ges  fendent,  serjanz  frémissent 

G.  Guiart.MS.  fol.  230,  R'. 

Baston  signifioit  aussi  échalas. 

Qui  fait  vignes,  li  coux  est  grans  ; 
Bastons  y  faut  à  outraige. 

Eusl.  Desch.  Poês.  MSS.  fol.  2(i3. 

Baston  se  prenoit  quelquefois  pour  houlette. 
«  Si  les  babitans  envoyoient  pasturer  leur  bcstail 
«  outre  les  dittes  esquarres  et  limittes,  et  ilz 
«  estoient  reprins  et  gagez  ils  seroient  amendables 
«  de  soixante  sols  d'amende  pour  chacune  proye  y 
»  trouvée  sous  une  garde,  ou  baston,  avec  res- 
«  titution,  ou  dommage.  »  (Nouv.  Coût.  Gén. 
T.  II,  p.  1057.) 

On  s'est  servi  du  mot  baston,  pour  désigner  la 
verge  que  portent  les  huissiers. 

Por  coï  ne  font  sanz  demorance 

Joustice  de  laie  poissance 

Qui  Dieu  guerroie  apertement  : 

Bastons  ont,  pour  faire  venjance, 

Et  cornes,  en  senefiance,  ' 

Qu'il  vellent  hurler  durement. 

Fabl.  WSS.  du  R.  n-  7015,  T.  1,  fol.  103,  R-  ool.  2. 

Le  bâton  dans  les  mains  de  ceux  qui  commandent 
étant  souvent  regardé  comme  une  marque  du  pou- 
voir qu'ils  exercent,  de  là  ce  mot  s'employoit  pour 
autorité,  juridiction  :  «  Firent  composition  que  le 
«  Genevois  guerpirent  lor  tor,  et  lor  rue,  et  s'en 
«  alerent  à  Sur  et  durent  porter  confanon  sur  lor 


<1)  Le  mot  n'a  été  employé  dans  la  fortification  qu'à  partir  du  xw  siècle  ;  le  bastion  remplace  les  tours  du  moyen-âge.  (n.  e.) 
—  (2)  On  trouve  dans  la  Chanson  de  Roland  :  «  Livrez  m'en  ore  le  gant  et  le  baslun.  n  (Str.  XVII.)  (n.  e.) 


BA 


—  424 


BA 


«  veissiaiis  au  port  d'Acic,  ne  avoir  corl,  ne  haston 
«  dedcnsAcre.  »  (Conl.  de  C  deTyr,  Marlene,  T.  V.) 

ISaston,  comme  terme  d'iiiveslilure.étoit  le  signe 
de  la  mise  en  possession,  ou  investiture  d'un  lief 
dans  une  adjudication  que  le  crieur  remettoit  au 
nouvel  acquéreur.  (Voy.  les  Assis,  de  Jérus.  p.  433.) 
«  Le  prevost,  ou  son  lieutenant  doit  mettre  le 
«  requérant  en  la  choze  par  luy  requise  par  Rain 
«  etbaslon.  «  (Coût.  Gon.  T.  1,  p.  709.)  «  Se  fait 
«  communément  la  dille  veslure  par  tradiction  du 
«  petit  haston  ou  bûchette.  «  (Ibid.  p.  481.  —  Voy. 
Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.  aux  mots  Basion,  Fust  et 
liain.  —  Le  Gloss.  lat.  de  Du  GanL;e,  au  mot 
Investi lura,  et  le  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauv.) 

Haston,  comme  marciue  distinctive  d'un  ordre 
de  chevalerie,  se  trouve  dans  les  Vigil.  de  Charles 
VII,  où  l'on  parle  du  Captai  de  Buch. 

Et  son  lilz  qui  avoient  le  haslo)i 
De  l'ordre,  et  serment  de  jartiere. 

Vigil  de  Ch.  VII,  T.  II,  p.  120. 

liaston  éloit  aussi  une  marque  donnée  aux  con- 
vives pour  assigner  le  rang  qu'ils  dévoient  avoir  à 
un  festin.  «  Alors  fui  heure  de  disner:  car  tout 
«  estoil  prest  :  et  combien  que  le  haston  ne  fut 
«  point  encores  donné,  toutes  fois  GadilTer 
«  d'Escosse,  le  chevalier  doré,  et  aucuns  autres 
«  mangèrent  à  la  table  de  la  belle  Priandre.  » 
(Percel'  Vol.  III,  fol.  134.) 

Citons  maintenant  les  expressions  anciennes  où 
ce  mol  étoit  employé  : 

1"  ItasliDis  à  (eu,  Bastonsde  pouclreet  à  feu[\). 
Basions  invasililes  et  invnsifs,  éloient  les  canons, 
et  toute  espèce  d'artillerie,  soit  grosse,  soit 
menue.  «  Le  roi  avoit  bonne  artillerie' sur  la  mu- 
«  raille  de  Paris;  laquelle  tira  plusieurs  coups 
«  jusques  à  noslre  ost  qui  est  grand  chose,  mais  je 
«  crois  que  l'on  avoit  le  nez  bien  haut  aux 
«  haslons.  »  (Mém.  de  Comines,  p.  09.)  «  11  fut  tué 
«  de  la  main  d'un  paysan  qui  luy  tira  une  arque- 
«  busade  de  derrière  un  buisson  :  voyez  quel 
«  malheur  qu'un  grand  capitaine  meure  de  la 
X  main  d'un  vilain  avec  son  haston  k  feu.  » 
(Mém.  de  Montluc,  T.  I,  p.  370.)  «  Jetlant  par  eux 
«  serpentines,  et  aulres  hastons  de  pouldre  et  à 
«  feti,  avecques  traicls  de  basions  iiivasibles  et  à 
«  main.  »  (Chron.add.  à  la  suitede  Monslr.  fol.  2.) 

2°  Baston  à  feu,  se  disoit  aussi  pour  fusée.  Nous 
lisons  qu'à  l'entrée  du  roi  à  Courtray,  «  les  feux 
«  d'artifice  commencèrent  le  soir.  M'  le  Duc  de 
"  Foix  allant  des  rues  eut  !e  gras  de  la  jambe  percé 
«  d'une  fusée,  ou  basion  à  feu.  »  (Lelt.  Histor.  de 
Peliss.  T.  I,  p.  42.) 

3"  Baston  à  sept  hallais,  se  trouve  dans  l'Inven- 
taire de  Joyaux  el  meubles  de  Charles  V,  à  la  suite 
de  son  Hist.  par  Choisy,  p.  522. 

A°  Son  de  liaston.  C'étoit  un  signal  que  donnoit 
un  crieur  public  ou  autre  officier,  en  frappant  de 
son  biîton.  «  Se  au  troisième  jour,  cry  et  son  de 
«  baston  à  la  ditte  feneslre,  personne  ne  compare 


«  pour  soy  opposer  à  la  ditte  plainte,  etc.  »  (Coût. 
Gén.  T.  il,  p.  928.) 

5"  Mettre  la  main  au  baston,  dit  ailleurs  vei'ge 
de  justice,  éloit  une  formalité  par  laquelle  le 
vendeur  marquoit  qu'il  se  dépouilloit  de  son  héri- 
tage ou  autres  biens,  et  l'acquéreur  en  prenoit 
possession.  «  S'ils  ont  acqueslez  quelques  héritages, 
«  ou  terres  par  ensemble,  en  leur  mariage,  ne  les 
«  peuvent  vendre  qu'Us  ne  comparent  devant  jus- 
«  lice,  el  mettent  tous  deux  la  main  au  baston.  » 
(Nouv.  Coût.  Gén.)  «  En  acquisitions  d'héritages 
«  colliers  ou  de  main  ferme,  ja  soit  ce  que  la 
«  femme  n'ayt  esté  présente  à  telle  acquisition,  et 
«  saisine,  ne  mis  la  main  au  haston,  néant  moins 
«  elle  est  acquesteresse,  comme  son  mary.  »  (Coût. 
Gén,  T.  I,  p.  749.)  «  De  noslre  baston  mismes  nos 
«  bat,  si  cum  ou  suelt  dire.  »  (S'  Bern.  Serm.  fr. 
Mss.  p.  330);  dans  le  latin  «  el  ut  dicitur,  baculo 
«  nosiro  noseœdit,  »  parlant  du  démon  qui  se  sert 
de  la  chair  même  pour  perdre  les  hommes,  c'est-à- 
dire  qui  les  bal  de  leurs  propres  verges. 

0"  Baston  du  gouvernement.  C'est-ti-dire  gouver- 
nement, supériorité,  autorité.  Froissart,  parlant  de 
Frère-Jean  de  la  Bochetaillade,  espèce  de  prophète 
en  137.5,  dit  de  lui:  «  De  la  prise  du  roi  Jehan  il 
«  parla  moull  bien,  el  monsira,  par  aucunes  choses 
«  raisonnables,  que  l'église  avoit  encores  moult  à 
«  soufrir,  pour  les  gràns  superfluités  qu'il  veoit 
'■  entre  ceux  qui  le  baston  du  gouvernement 
«  avoyent.  »  (Froissart,  Liv.  III,  p.  84.) 

7°  Prendre  le  baston,  c'esl-îi-dire  prendre  le 
dessus,  avoir  la  préférence.  Un  amant  fidèle,  indigné 
de  voir  son  rival  peu  sincère  l'emporter  sur  lui 
auprès  de  sa  maîtresse,  se  plaint  ainsi: 

Kant  celé  aim  se  moynon 
Kai  servi  à  m'enfance 
Tex  en  a  pris  le  haslon, 
Ke  je  tieg  à  compaignon. 

Focs.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  lOiiG. 

8"  Basions  de  eliassc.  Ces  basions  étoienl  gros 
comme  le  pouce,  el  longs  de  deux  pieds  el  demi, 
(Voy.  Salnove,  Vénerie,  p.  135.)  «  Le  maislre  valet 
«  de  chiens  doit  avoir  ces  basions  de  ehasse,  devant 
«  luy  ù  cheval,  et  en  donner  trois  aux  lieutenants 
«  de  la  vénerie,  pour  en  présenter  deux  au  grand 
«  veneur,  afin  que  le  grand  veneur  en  donne  un 
«.  au  rov.  »  (Id.  ibid.  p.  138.) 

9°  Basion  blanc.  C'éloil  le  bâton  de  commande- 
ment. «  Monta  le  roy  sur  un  petit  pallefroy,  un 
«  basion  blanc  à  la  main.  L'un  de  ses  mareschaux 
<c  à  dexlre,  el  l'autre  à  seneslre.  >•  (Froissarl,  Vol.I, 
p.  150.)  «  Jean  de  Lyon,  à  la  teste  des  rebelles  fla- 
«  mans,  avoit  un  haslon  blanc  à  la  main,  comme 
«  un  bâton  de  commandement.  »  (Ibid.  Vol.  II, 
p.  08.)  Le  bâton  étoit  aussi  la  marque  que  portoient 
les  pestiférés,  et  ceux  que  logoient  avec  eux. 
«  Commande  el  enjoint  à  toutes  personnes  qui  ont 
«  esté  malades  de  peste,  et  à  tous  ceux  de  la 
«  maison,  et  famille  ou  auront  esté,  et  seront  ma- 


il) Cette  expression  désigne  surtout  les  armes  à  fen  montées  sur  tût  o\i  hampe,  comme  les  espingoles,  les  couleuvrines, 
les  fusils  ;  elle  ne  s'attribue  donc  pas  à  la  grosse  artillerie,  ^n.  e.) 


BA 


—    420    — 


BA 


«  lades  les  dites  personnes,  qu'ils  ayent  i^  porter 
«  en  leur  main,  en  allant  et  venant,....  une  verge 
«  blanche,  ou  baston  blanc  sur  la  dite  peine.  » 
(Ord.  desR.  de  Fr.  T.  li,  p.382.) 

10"  Lebasloii,  ou  le  bastun  blanc  à  la  main.  On 
lit  dans  plusieurs  auteurs  que  les  garnisons  qui 
sortoienl  d'une  place  assiégée  et  prise,  étoient  ren- 
voyées désarmées,  et  un  bâton  blanc  à  la  main  : 
«  Ainsi  rendirent  cette  place  d'importance,  et  s'en 
«  aile:  ent  chacun,  un  baalon  à  leur  poing,  tant  le 
«  capitaine,  que  les  autres  gens  d'armes.  i^A.  Charl. 
Hist.  de  Charles  Vil,  p.  '■im.)  «  Ont  été  llnablement 
«  contraints  de  s'en  aller  tousnuds,  avec  un  baston 
«  blanc  à  In  main.  »  (.\pol.  p'.  Hérodote,  p.  43.) 

11°  Le  gel  à  uns  basions.  C'étoil  une  distance  ou 
mesure  de  terrain  évalué  au  jet  d'un  bâton. 

Jà  ne  perdra  de  terre  le  yet  à  uns  basions 
Tant  corne  nos  puissons  caucher  nos  espérons. 

Rom.  de  Hou.  MS.  p.  Ti. 

12°  Tourner  au  baston,  signifioit  être  soumis, 
respecter  l'autorité  d'un  supérieur.  Cette  façon  de 
parler  paroit  empruntée  aux  jongleurs  ou  char- 
latans qui,  avec  le  bâton  à  la  main,  font  faire  des 
tours  aux  bêles  qu'ils  montrent  au  peuple.  Brantôme 
dit,  en  parlant  de  Charles  VJll:  «  Enlin  ce  fut  un 
«  grand  roy,  lequel,  s'il  ne  fust  mort,  vouloit 
«  redresser  nouvelle  armée  résolument,  et  plus 
«  forte  qu'auparavant,  pour  apprendre  au  Pape,  et 

•  aux  potentats  d'Italie  ù  tourner  mieux  au  baston 
«  qu'ils  n'avoient  fait.  »  (Brant.  Cap.  Fr.  ï.  1.) 

12°  Tirer  au  court  baston  (1),  pour  disputer  d'auto- 
rité, de  puissance.  C'est  en  ce  sens  que  Sully,  par- 
lant de  deux  princes  de  puissance  égale,  dît: 
«  Pour  le  regard  de  vous  deux  qui  luitez  ,  et  tirc% 

•  au  court  baston.  «  (Mém.  de  Sully,  T.  XII,  p.  478.) 
13°  Rompre  le  baston  de  sa  maison{2),  c'est-à-dire 

ruiner  ses  affaires.  On  a  dit,  en  parlant  des  risques 
que  couroient  les  chefs  de  la  ligue,  si  Henri  IV  avoit 
Tavantage  sur  eux  :  »  Au  moyen  de  quoy  ils  seroient 
«  contraints  de  renverser  leur  marmite,  et  non- 
«  seulement  rompre,  comme  l'on  dist,-le  baston 
«  de  leur  maison,  mais  aussi  de  faire  banqueroute 
«  à  une  grande  ([uantité  de  personnes  d'honneur, 
<>  et  gouverneurs  des  places  à  qui  ils  donnoient 
«  certaine  pension  annuelle ,  pour  les  entretenir 
«  en  leur  considération.  »  (Mémoires  de  A'evers, 
Tome  II,  page  84.) 

14°  Etre  assuré  de  son  baslon,  pour  être  sûr  de 
son  fait.  (Mém.  de  Villeroy,  T.  H,  p.  139.) 

15°  Se  battre  de  son  baston,  se  battre  de  ses  pro- 
pres verges.  (Voy.  le  Chev.  de  La  Tour,  Inslr.  à  ses 
tilles,  fol.  21.)  On  trouve  aussi  :  «  Batre  quelqu'un 
«  de  ses  propres  basions.  «  (Histoire  de  la  Popel. 
T.  I,  fol.  33,  R°.) 


■  16°  A  basions  rompus  (3),  sans  ménagement,  à  ou- 
trance. (Rabelais,  T.  III,  p.  ô2.)  Nous  disons  aujour- 
«  d'hui  :  «  Parler  à  bâton  rompu,  pour  parler  sans 
«  suite  el  sans  oi dre.  >>  (Roger  de  Colleiye,  p.  73.) 

17°  Aller  aux  ineures  sans  baslon:  d'autres  ont 
dit,  sans  crochet,  c'est-à-dire  aller  sans  précaution. 

N'allez  aux  meures  sans  baston, 
Advisez  ce  qui  vous  est  bon. 

Eust.  Desch.  Poês.  MSS.  fol.  299. 

18°  D'autre  baston  faut  batre  la  rosée.  C'est  une 
façon  de  parler  qui  semble  prise  ici  au  figuré,  pour 
dire  qu'il  faut  se  consoler  de  ses  malheurs  par  la 
vue  de  ceux  d'autrui. 

Quant  la  douleur  est  au  cueur  enchâssée, 
D'autre  bastim  fault  batre  la  rousée  ; 
Pensant  en  dueil,  la  douleur  amoindrist. 

La  Cliasse  el  Déiiarlie  rt'Aiiiour,  p.  239. 

19°  Baston  de  broche  signifie  une  brochette  de 
bois,  dans  ce  passage  :  ><  Prent  l'escu  par  la  pointe, 
"  et  le  lieveamonl  aussi  légèrement  «lue  luig  baston 
«  de  broche.  »  (Perceforesl,  Vol.  II,  fol.  O.-).) 

20°  Fêle  à  baston.  Feste  annuelle  à  baston.  Fesle 
double  à  bâton.  C'éloit  une  fête  où  l'on  portoit  des 
bâtons  de  confrérie.  (Rabelais,  T.  II!,  p.  25.) 

21°  Faire  essuijer  le  baston.  Façon  de  parler 
pour  signifier  exposer  aux  premiers  coups.  «  Le 
«  Roy  Philippes  devoit  ainsi  bazarder  une  bataille, 
»  par  ces  guerriers  mercenaires,  et  estrangers,  car 
«  c'est  une  vraye  curée,  puisqu'ils  se  sont"mis  à  ce 
«  meslier  mercenaire,  el  voilà  pourquoy  il  les  faut 
«  les  premiers  perdre,  et  leur  faire  bien  essuyer  le 
"  baston  et  comme  il  dit,  réserver,  et  bien  garder 
«  ces  vieux  soldats  Espagnols.  »  (Mém.  de  Brant. 
Cap.  fr.  T.  111,  page  .54.) 

22°  Savoir  le  tour  du  baston  (4).  C'étoit  savoir  bien 
s'escrimer  de  la  lance,  de  l'épée,  du  bâton  ou  autre 
arme.  (Voy.  Perceforesl,  Vol.  I,  fol.  55.)  C'est  de  là 
que  paroit  venir  notre  expression,  le  tour  du  bâlon; 
celle  conjecture  paioit  plus  vraisemblable  que  celle 
que  Borel  propose  dans  son  Dict.  au  mot  Baston. 

23°  Le  roij  de  baston.  Celte  expression  désignoit 
un  des  quatre  rois  du  jeu  de  cartes  espagnoles  ou 
suisses.  (Voy.  Des  Accords,  Bigarr.  fol.  29.) 

24°  Le  baston  à  ung  bout.  Expression  obscène, 
dans  Rabelais,  T.  III,  p.  97. 

25°  Bâton  joli.  Même  signification  que  le  bâton 
de  Jacob  (5),  des  joueurs  de  Gobelets. 

Jacob,  en  sustantacion 
Portoil,  pour  consolacion, 
La  verge,  et  le  bâton  joli. 

Eusl.  Descli.  Poâs.  MSS.  fol.  539. 

26°  Souloir  le  cabas  battre  bâton.  Nous  disons, 
dans  le  sens  de  celte  expression,  ferrer  la  mule. 

Ainsy  seult  on  le  cabas  battre 
Bâton,  et  aler  souvent  fait  ; 


(1)  C'est  l'analogue  de  «  tirer  a  la  courte  paille.  »  (n.  e.)  -  (2)  Rapprocher  cette  expression  de  «  mettre  la  main  au 
bâton.  »  (N.  E.)  -  (3)  Battre  à  bâtons  rompus,  c'est  frapper  le  tambour  deux  fois  de  suite  d'une  main,  puis  de  l'autre  :  quand 
le  mouvement  s'accélère,  on  entend  un  bruissement,  et  non  une  batterie  d'ordonnance;  de  là  notre  locution  «  à  bâtons 
rompus,  )i  à  plusieurs  reprises.  (N.  E.)  -  (4)  Le  mot  désigne  ici  non  le  bàtoit  tenu,  mais  le  bateleur  qui  le  tient  ■  c'est  là  une 
figure  de  rhétorique  fréquente  au  moyen-age.  Tour  du  hotun  signihe  donc  tour  de  passe-passe.  (N.  E.)  -  {à)  Le  bâton  de 
Jacob  se  dit  :  l»  d'un  instrument  géométrique,  composé  de  deux  règles  mobiles  avec  i)innules  aux  extrémités,  et  qui  servait 
aux  anciens  astronomes  à  prendre  les  hauteurs  et  les  distances  par  la  méthode  des  angles  ;  2"  des  trois  étoUes  du  baudrier 
d'Orion  qui  sont  en  ligne  droite  ;  3»  de  la  baguette  de  l'escamoteur  ;  4°  de  l'asphodèle  jaune,  (n  e.) 

"■  54 


BA 


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A  ceuls  qui  siiyent  ce  fait, 

Ou  bout  de  l'an  y  a  grant  somme. 

Kiisl.  Deech.  Pois.  MSS.  fol.  .M3. 

•  VARIANTES  : 
B.\STON.  La  Jaille  du  Ch.  de  liât.  fol.  45. 
Bâton.  Le  .louvenc.  MS.  p.  563. 
Batton.  ,1.  Marot,  p.  90. 

Bîistoncel,  suhst.  masc  Diminutif  de  bâton. — 
lîûlon  dccoiiiinandement.  —  Baguette  de  tambour. 

Dans  le  pi'emier  sens,  Froissart,  parlant  des  jeux 
de  son  eniance,  dit  : 

Et  sai  souvent,  d'un  basioncel  (1), 
Fait  un  cheval. 

Froissart,  Poës.  MSS.  p.  86. 

Bastonciaii  se  trouve  pour  baguettes  de  tambour, 
dans  Ph.  Mouskes  : 

Si  ferioient  sur  leurs  taburs, 
De  hasloiiciaiis  d'espine  durs. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p,  162. 

Thésée  fait  une  sortie  contre  les  ennemis  qui 
venoient  Tassiéger. 

Theseus  vint  devers  la  porte  : 
D'un  basieiicel  qu'en  sa  main  porte 
Départ  la  route,  et  ront  la  presse. 

Alhis,  MS.  fol.  M,  Y- col.  2. 

VAIilANTF.S  : 
BASTONCEL.  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  86. 
Bastencel.  Athis,  MS.  fol.  94. 
Bastonneau.  Oudin  et  Cotgrave,  Dict. 
Bastonceaulx.  (ptur.)  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  228. 
Bastonceaus.  g.  Guiart,  MS.  fol.  309. 
Bastonxïaus.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  161. 

Bastonnade,  suhst.  fém.  Défaite,  échec.  (Orth. 
subsistante.)  Proprement,  ce  mot  signilie  un  nom- 
bre de  coups  de  bâton.  «  Le  seigneur  Jean  mécon- 
«  tent  d'avoir  eu  cette  bastonnade  se  voulut 
.  venger.  »  (Mém.  Du  Bell.  Liv.  11,  fol.  67.) 

Bastonnée,  subst.  fém.  Piston  d'une  pompe. 
(Dictionnaire  d'Oudin.) 

Bastonnement,  subst.  masc.  Bastonnade. 
(Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Bastonnier,  subst.  masc.  Sergent.  —  Bedeau. 
—  Gouverneur. 

Au  premier  sens,  «  le  sergent  bastonnier,  ou 
«  porte  verge  cloit  une  espèce  d'officier  de  justice, 
«  peut  étrele  même  que  sergent  à  verge.  »  (Voy. 
Bouteiller,  Som.  rurale,  p.  S'jl.)  On  trouve  ce  mot 
employé  comme  synonymed'liuissiervendeu7\  dans 
le  Nouv.  Coût.  gén.  T.  1,  p.  1005.  Le  bastonnier 
especial  étoit  peut-être  un  sergent  nommé  d'office. 
«  Pour  ce  que  nos  subgez  sont  une  foys  grevez  par 
«  les  especiaus  sergens  que  nous  donnons  aucunes 
«  foys,  ou  nostre  bailly,  ez  religieux  ,  et  ez  autres 
«  personnes,  nous  delfeudons  que  uuls  religieux, 
«  ou  séculiers,  aient  bastonniers  especiaus  pour 
«  eulx  garder,  se  n'estoil  pour  cause  manifeste, 
«  cognuë,  et  seue  par  le  bailly.  »  (Etat  des  Offic. 
du  D.  de  Bourg,  p.  308.) 

Bâtonnier  se  trouve  employé  pour  bedeau ,  dans 
Du  Gange,  Gloss.  latin,  au  mot  Batonarius. 


Bastonnier  est  le  titre  du  gouverneur  de  l'ordre 
de  S'  Georges  en  Franche-Comté.  (Voy.  le  P.  Honoré 
de  S"  Marie,  sur  la  Chevalerie,  p.  '206.) 

Ces  trois  acceptions  si  différentes,  ont  au  fond  le 
même  sens  ;  elles  désignent  le  bâton  qui  servoit  de 
marque  dislinctive  au  gouverneur,  au  sergent,  au 
bedeau. 

VARIANTES  : 
BASTONNIER.  Nout.  Coût.  gén.  T.  I,  p.  584. 
B.\TONNlER.  Du  Gange.  Gloss.  latin,  à  Batonarius. 

Bastoiier,  subst.  masc.  Battoir.  (Voy.  l'Amant 
rendu  Cordelier,  p.  503.) 

Bixt,  suhst.  masc.  L'action  de  battre  du  pied  ou 
des  ailes.  «  Par  son  hennissement,  il  faisoit  retentir 
«  tout  le  ciel,  et  sous  le  hat  de  ses  pieds  la  terre 
«  trembloit.  »  (Mer!.  Cocaie,  T.  Il,  p.  309.) 
Mille  tritons,  mille  nayades  belles. 
Oui  souslevoyent,  sur  le  bat  de  leurs  ailes, 
Geste  déesse. 

Berger  de  Remy-Bellcau,  T.  I,  fol.  101.  V'. 

De  là,  on  employoit  bat  pour  désigner  le  bruit 
que  font  les  chevaux  en  marchant  :  «  Ouït  le  bat  de 
»  quelques  chevaux  qui  le  suivoient:  qu'est  là'i' 
«  dit-il  ;  holà  demeurez  un  peu;  escoutez  :  j'oy  le 
«  hat  de  quelques  chevaux.  »  (Merlin  Cocaie, 
Tome  11,  page  1%.) 

Batage,  subst.  masc.  L'action  de  battre.  Ce  mot 
s'employoit  en  termes  de  guerre  :  «  Chastel  si  fort 
"  qu'il  n'y  a  balaige...  de  canons...  qui  puet  y  faire 
«  mal.  »  (Al.  Chart.  Hist.  de  Ch.  VI  et  VII,  p.  199.) 

On  l'employoit  aussi  en  parlant  du  blé.  Batage 
de  bled  se  trouve  dans  le  Cart.  de  Clielles,  p.  35. 

VARIANTES  : 
BATAGE.  Cort.  de  Chelles,  p.  35. 
Bataioe.  Al.  Chart.  Hist.  de  Ch.  VI  et  VII,  p.  199. 

Batail,  suhst.  masc.  Battant  de  cloche.  (Ménage, 
au  mot  Datait,  et  le  Gloss.  latin  de  Du  Gange,  au 
mot  7?fl/fa/Hj?i.)  Ce  mol  est  pris  dans  un  sens  obs- 
cène, dans  les  Contes  d'Eutrapel,  p.  462.  Eust. 
Deschamps,  parlant  des  suites  de  la  sédition  de 
Montpellier,  dit: 

Des  portes  ont  les  clefs  en  ses  mains  mis 

De  la  cloque  qui  fist  la  mocion 

Fut  le  bateaulx  destachiez. 

Eust.  Descli.  Poes.  MSS.  fol.  111,  col.  *. 

On  lit  batel  dans  la  Chronique  fr.  ms.  de  Nangis, 
sous  l'an  1379,  et  batan  dans  la  Chron.  de  S' Denis, 
au  même  passage. 

VARIANTES  : 
BATAIL.  Nicot,  Monet  et  Oudin,  Dict. 
Batel.  Chron.  fr.  MS.  de  Nangis,  an  1379. 
Bateaulx.  Eusi.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  -114,  col.  4. 
Batlws.  Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7218,  fol.  311. 

Bataille,  subst.  fém.  Combat.  —  Armée.  — 
Centre  de  l'armée.  —  Corps  de  troupes.  —  Escadre. 
—  Gage  de  bataille.  —  Terme  de  chasse. 

Ce  mot  subsiste  au  premier  sens.  Voyez-en  l'ori- 
gine dans  Fauchet,  p.  81.  11  le  dérive  du  mot  latin 


(1)  C'est,  comme  dit  Horace  :  «  Equitare  in  arundine  longd.  »  (n.  e.) 


BA 


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BA 


Mluere  (1),  qui  vouloil  dire,  ajoute-t-il,  s'escrimer 
avec  un  bàlon  de  bois.  Voyez  aussi  Ménage,  Rem. 
sur  la  Lang.  fr.  T.  II ,  p.  398.  Il  paroit  avoir  été 
employé  d'ans  cette  acception,  prise  à  la  vérité 
moins  génériquemeat,  pour  signifier  un  combat, 
une  joute  à  la  lance,  dans  le  passage  suivant: 
«  Quand  le  roy  Modus  ot  veu  les  joustes ,  et  la 
«  bataille,  il  fu  tout  lié  de  la  bonne  avanture  qui 
«  estoit  avenue  à  ses  chevaliers,  et  fist  amener  les 
«  trois  chevaliers  au  roy  des  vices,  en  une  cham- 
«  bre.  »  (Modus  et  Racio,  ms.  fol.  2.58.) 

On  disoil  aussi  bataille,  pour  armée:  «  Se  les 
<•  ennemis  du  dit  royaume  venoient  par  iceluy, 
«  pourquoy  il  nous  fausist  à  grosse  bataille,  aler 
«  contre  eiils,  en  nostre  propre  personne,  les  capi- 
«  taines  des  pays  seront  tenus  de  venir,  à  tout  ce 
«  que  il  pourront  avoir  de  genz  d"arnies.  ■■  (Ord. 
des  Rois  de  I^r.  T.  III,  p.  229.) 

Bataille  signifioit  quelquefois  seulement  le  corps 
d'armée,  le  centre  de  l'armée.  Saintré,  après  avoir 
parlé  dans  une  ordonnance  des  batailles,  de  l'avant- 
garde,  de  l'aile  droite  et  de  la  gauche,  dit  que  «  la 
«  bannière  des  empereurs...,  avecques  celles  des 
•  aullres  ducs,  princes,  barons  et  nobles  hommes 
«  qui  estoient  à  cheval  de  25  à  30  mille  comhatans, 
<■  feroient  la  bataille  et  que  le  duc  de  Migraine,  et 
<<  autres  feroient  l'arrière-garde.  »  (Petit  Jean  de 
Saintré,  p.  487.) 

On  nommoit,  en  général,  bataille,  tout  corps  de 
troupes,  soit  cavalerie,  soit  infanterie,  dont  le  nom- 
bre éloit  quelquefois  limité,  et  d'autres  fois  ne 
rétoit  point  «  Ils  sont  trois  batailles  qui  sontnom- 
«  mées,  selon  l'usage  de  Romme ,  trois  légions , 
«  dont  chacune  légion  tient  six  mille  six  cent 
<■  soixante  chevaliers  d'armes.  »  (Percef.  Vol.  IV, 
fol.  8.)  «  Les  Sarrazins  avoient  fait  trois  batailles, 
«  c'est  à  svavoir,  trois  à  cheval,  et  trois  à  pied.  » 
(Petit  Jean  de  Saintré,  p.  490.)  On  tiouve  ce  mot 
employé  comme  synonyme  d'échelles ,  dans  la 
Chron.  de  S'Denis,  T.  II,  fol.  40.  A  la  vérité,  il 
signifie  un  corps  de  troupes,  mais  eschielles  en 
désigne  un  plus  nombreux,  et  plus  considérable, 
comme  on  va  voir  par  le  passage  suivant  :  «  Com- 
.  manda  Merlin  chascun  s'aprester  à  la  bataille; 
»  si  ordonnèrent  leurs  csc/i?t^//f's,  et  en  firent  dix 
»  batailles.  «  (Triomphe  des  IX  Preux,  p.  402.) 

Bataille  est  pris  au  figuré,  en  parlant  des  sur- 
veillans  d'une  dame,  dans  les  Arr.  d'Am.  p.  384. 

Cinq  sont  en  lor  halaille 
Tuil  ont  lacies  les  ventailles 
Et  armes  ont  de  chevaliers 
Fors  k'il  i  ot  bien  vu  archiers. 

Nous  venons  de  voir  bataille  employée  pour 
signifier  une  division  d'armée,  un  corps  de  troupes; 
de  là,  ce  mol  se  disoit,  en  termes  de  marine,  pour 
une  division  d'une  flotte,  d'une  escadre. 


La  flotte  espandue  s'aune  : 
De  leur  III  batailles  font  une. 

G.  Guiart.MS.fol.SH,  V. 

Ce  mol  a  été  employé  pour  gage  de  bataille,  duel 
juridique  en  champ  clos.  (La  Tbaumassière,  Coût. 
d'Orléans,  p.  465,  lit.  de  I1C8.)  Bataille  vaincue, 
pour  le  combat  en  champ  clos,  oîi  l'un  des  deux 
combattans  a  succombé.  (Pérard,  Hist.  de  Bourg, 
p.  486,  tit.  de  1257.) 

Enfin  on  a  dit,  en  termes  de  chasse  :  «  Il  verra 
«  passer  le  cerf  devant  luy,  et  le  fort  huera  et  verra 
«  quielx  chiens  viennent  îi  la  première  bataille,  ne 
«  en  la  seconde,  ne  en  la  tierce,  ou  quarte.  » 
(Chasse  de  Gast.  Pheb.  ms.  p.  9.) 

Expressions  remarquables  : 

1°  Faire  la  bataille  d'escus  au  soleil.  Nous  trou- 
vons celle  expression  dans  le  passage  suivant  : 
«  Les  Suisses  en  1512,  estoient  descendus  à  Milan, 
»  deux  ou  trois  fois,  et  pour  ce  qu'à  chacun  coup 
«  le  grand  nombre  des  chevaliers  françois  leur 
«  couppoit  les  vivres,  s'en  retournoient  avec  cin- 
«  quante  mil  escus  qu'on  leur  donnoil,  et  leur 
«  faisolton  ]n.  bataille  (l'escns au  soleil  {2),  ei  en  ap- 
"  prirent  la  f;isson  de  monsieur  le  grand  maistre 
"  Chaumont.  »  (Mém.  de  la  Marck.  Seig.  de  Fieu- 
ranges,  ms.  p.  141.) 

2°  Mis  en  bataille,  rangés,  signifie  peut-être  mis 
en  réserve.  Cette  expression  pareil  un  sens  figuré, 
dans  le  passage  suivant.  Après  y  avoir  parlé  de 
plusieurs  amendes  dont  les  sommes  sont  exprimées 
par  besans,  sorte  de  monnoie,  on  lit  :  «  Tous  les 
«  besans  que  l'on  recevrai  de  ceaux  qui  seront 
'<  encheus,  as  peines  devant  devisées,  doivent  eslre 
«  mis  en  bataille.  »  (Assis,  de  Jérus.  p.  213.) 

3°  Bataille  campale,  ehampal,  campeus,  campée 
ou  puldique.  C'est-à-dire  bataille  rangée,  bataille 
générale.  (Du  Cange,  Gloss.  lai.  au  mot  Bellum 
campale.) 

4°  BcUallle  nommée.  C'éio'ûuf\e  bataille  fixée  à  un 
certain  jour  par  les  chefs  des  deux  armées.  (Ord. 
des  R.  dé  Fr.  T.  V,  p.  713.) 

5°  Bataille  roïal.  Celle  où  le  Roi  assiste  en 
personne. 

6°  Bataille  ou  gage  de  bataille,  se  disoit  pour 
duel.  (Voy.  le  Gloss.  sur  les  Coul.  de  Beauvoisis.)  On 
lit,  Batalias  omnes  quas  grammatici  dueLla  vocant, 
dans  la  Tbaumass.  (Coût,  de  Berry,  p.  704.)  On  se 
servoil  de  l'expression  bataille  vaincue,  ({nnnà  l'un 
des  deux  champions  avoil  siiccoiiibé.(Voy.  le  Gloss. 
lai.  de  Du  Cange,  au  mot  Duelluin  victum.) 

7°  Loi  de  bataille.  C'éloit  la  loi  qui  concernoil  les 
duels.  (Voy.  le  Gloss.  lai.  de  Du  Cange,  au  mol  Lex 
patrice.) 

8°  De  bataille  et  d'estoc.  Nous  disons  encore  de 
taille  et  d'estoc.  «  Tanl  ferirent  sur  iceulx  Engloiz, 
«  de  bataille  et  d'estoc  que  tous  fussent  mors,  ou 


(1)  Battre  vient  de  hatuerc,  mais  bataille  vient  du  dérivé  batlalia.  On  lit  en  effet,  dans  .4damantius  martyr  :  «  Batttalia 
gusii  vulgo  battalia  dicitur.  »  (N.  E.)  —  (2)  Lris  écus  d'or  au  soleil,  ou  écus  .50/,  furent  ainsi  nommés  du  soleil  gravé 
au-dessus  de  la  couronne  qui  timbre  l'écusson  :  cette  monnaie  fut  mise  en  cours  sous  Louis  .X.I  et  put  donc  payer  des 
Suisses  au  temps  de  François  l".  Quant  à  l'expression  même,  elle  rappelle  ie  mot  d'autres  mercenaires  qui,  dans  ces 
Blâmes  guerres  d'Italie,  demandaient  «  argent,  congé  ou  bataille.  »  (n.  k.) 


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428  — 


BA 


«  prins.  »  (Histoire  Je  B.  Du  Cuescl.  par  Ménard, 
page  \-n.) 

liataille  est  peut-être  une  faute  pour  baille , 
guérite,  dans  le  passage  suivant,  où  il  s'agit  de  gens 
assiégés  : 

Souvent  lor  traient  des  quarreax 
Des  batailles  et  des  creneax. 

Blajichand.  JIS.  de  S.  G.  fol.  189. 

PROVliRItE. 

Anciennement  on  disoit  «  qu'il  falloit  fuir  un 
«  assaut  de  cent  lieues,  et  chercher  une  bataille  de 
«  cent.  »  (Uicl.  Polit,  et  mil.  de  la  Noue,  p.  303.) 

Bataillie,  adj.  ou  partie.  Crénelé. 

Toz  ensemble  voient  la  ville 
Mesons  ot  plus  de  XX  mille 
Et  M  tors  hautes  bataillies. 

Athis,  MS.  fol.  60,  V  col.  1. 

Haute  tors  bien  batellie. 

IbUI.  fol.  87,  V-  col.  1. 

VARIANTES  : 
B.i^.TAILLIE,  Batellie. 

Bataillere,  adj.  et  snbst.  Fort  guerrier.  — 
Champion.  —  Adversaire. 

Ce  mot  est  adjectif  dans  le  premier  sens;  on 
disoit  :  Tours  batailleres,  c'est-à-dire  propres  à 
soutenir  un  siège  ou  combat.  (Ane.  Coût,  de  Norm. 
fol.  53.)  Cartilage  la  batailleresse,  c'est-à-dire  la 
guerrière.  (Al.  Chart.  Quadr.  invect.  p.  iOi.) 

Ce  même  mot  est  substantif  dans  les  deux  autres 
acceptions.  Il  est  employé  pour  champion  dans  le 
passage  suivant,  où  l'on  parle  de  gages  de  batailles, 
ou  duels  :  «  Si  le  dit  champ  de  batailles  est  fait  de 
«  hommes  légitimes,  les  bataillons  vaincus  paye- 
«  ront  cent  deux  sols.  »  (LaThaum.  Coût,  de  Berri, 
p.  436.)  Il  faut  peut-être  lire  les  bataillans. 

Enfin  ce  mot  a  clé  mis  pour  adversaire:  «  Puis 
«  reboulèrent  leurs  espées;  alors  dist  Passelion  à 
«  son  batailleur  :  s'we  chevalier,  je  vous  prie  que 
«  devers  inoy  ne  teniez  rancune.  »  (Percef.  vol.  V, 
fol.  03.) 

VARIANTES  : 

B.iTAILLEP.E.  Ane.  Coût,  de  Norm.  fol.  53. 
Batailleres.  Corneille,  Dict. 
Bataillieres.  Borel  et  Corneille,  Dict. 
Bataillons.  La  Tliaum.  Coût,  de  Berri,  p.  436. 
Batillereux.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  548,  col.  '2. 
B.\TEILLEREUX.  Gloss.  du  P.  Labbe,  p.  491. 
Bateilleux.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  à  Eiiiissarius. 
Batailleur.  J.  Marot,  p.  133. 
B.\tailleresse.  (fém.)  Al.  Chart. 

Bataillereusement,  adv.  En  bien  combattant. 
(Dict.  de  Borel.) 

Bataillir,  verbe.  Batailler,  combattre. 

J'ay  veu  Roy  d'Angleterre 
Ung  grant  trésor  cœillir, 
Pour  la  françoise  terre 
Conquerre,  et  bataillir. 

iMoIinel,  p.  178. 

VARIANTES    : 
BATAILLIR,  B.\Tn.LiER.  Machaut,  MS.  fol.  219. 


Batailloles,  subst.  fém.  plur. 

....  Sitost  qu'il  les  veid,  il  range  flanc  à  flanc, 
Galères  en  bataille,  et  soldats  ranc  à  rano  ; 
Fait  dresser  les  parois,  contre  les  batailloles 
Fait  recresper  au  vent  bandiere  et  banderolles. 

Berger,  de  Rem.  Bell.  fol.  1*4. 

Bataillon,  subst.  niasc.  Ce  mot,  qui  subsiste, 
n'a  conserve  qu'une  partie  de  son  ancienne  accep- 
tion. Autrefois,  il  s'employoit  pour  signitier  un 
corps  de  troupes,  soit  d'infanterie,  soit  de  cavalerie. 
(Voy.Mém.  Du  Bell.  Liv.  X,  fol.  314.)  Brantôme  s'est 
servi  de  ce  mot  en  parlant  d'un  corps  de  dix  mille 
Allemans.  (Cap.  Fr.  T.  III,  p.  31)  11  censure  ceux 
qui  usent  de  mois  impropres,  et  qui  «  pour  dire  un 
«  bataillon  de  gens  de  pied,  disent  un  escadron  de 
«  gens  de  pied.  «  (Ibid.  T.  IV,  p.  227.)  Pasquier  se 
plaint  de  ce  qu'on  substituoit  des  mots  nouveaux 
aux  anciens  comme  celui  d'escadron,  au  lieu  de 
bataillon  ([u'on  avoit  dit  autrefois.  »  Si  en  useray- 
<'  je,  ajoute-t-il,  puisque  l'usage  commun  là  gagne, 
«  contre  lequel  je  ne  seray  jamais  d'avis  que  l'on 
«  se  heurte.  «  (Lett.  de  Pasq.  T.  1,  p.  105.) 

Batailloz,  subst.  Nom  propre  de  ville  ou  de 
province. 

Et  puis  Baignes  qui  moult  est  belle, 
Et  Serres  où  l'on  fait  la  soie 
Dont  l'en  se  vest  bien,  et  conroie. 
Et  Batailla:  la  grant,  la  riche. 

Parton.  de  niois,  MS.  de  S.  Germain. 

Batalogie,s!/&sf.  fém.  Discours  efféminé.  (Dict. 
d'Oudin  et  de  Cotgrave.)  Nous  disons  baltollogie  (1) 
dans  un  sens  fort  différer.l,  pour  discours  vide  de 
sens,  aflluence  de  paroles  inutiles.  Je  soupçonne 
fort  Oudin  de  s'être  mépris. 

Bâtant,  subst.  masc.  Jambage,  pied  droit  de 
porte.  (Dict.  de  Nicot  et  de  Monet") 

Batardiere,  subst.  fém.  C'étoit  le  nom  qu'on 
donnoit  à  un  terrain  destiné  à  planter  de  jeunes 
arbres  sauvages,  et  des  cçps  de  vigne.  (Diction,  de 
Monet.) 

Batbeure,  subst.  masc.  Instrument  à  battre  le 
beurre.  (Dict.  de  Nicot  et  de  Cotgrave.) 
variantes  : 

BATBEURE,  Nicot,  Dict. 
B.\.BEURRE.  Cotgrave,  Dict. 

Bâte,  subst.  fém.  Chaton  de  bague.  (Monet,  Dict.) 
Voyez  Baste,  pris  dans  le  même  sens. 

Bateaux,  subst.  masc.  plur.  C'est  une  sorte 
d'instrument  dont  les  bateleurs  se  servent  lorsqu'ils 
amusent  le  peuple.  Nous  lisons  dans  des  Lettres 
de  Henry,  roi  de  France  et  d'Angleterre,  datées  du 
31  août  ii23,  adressées  au  bailli  de  Sentis  «  qu'un 
«  joueur  de  bateaux  étant  entré  audit  Compiegne, 
"  pour  jouer  son  dist  mestier,  et  gangner  la  vie  de 
«  luy,  et  de  son  mesnage,  auquel  basteleur  un 
«  nommé  Aubelet  Baudon  nostre  sergent  en  la 
«  ville  de  Compiegne  delTendi  qu'il  ne  jouast  des 


(i)  Battos,  roi  de  Cyrène,  était  bègue  et  répétait  toujours  les  mêmes  paroles,  (n.  k.) 


BA 


-  429  — 


BA 


«  dits  bateaux,  etc.  >>  (Très,  des  Chart.  Reg.  172, 
pièce  C"20.) 

De  là,  ces  expressions  : 

1°  Jeu  de  basteaiix.  Jeux  degol^elets  (1).  Dans  des 
Lettres  de  Charles  VI,  du  mois  de  septembre  lilS, 
adressées  au  bailli  de  Tournay  et  de  Tournesis,  on 
lit  :  "  Qu'environ  le  mois  d'aoust  1112,  par  un  jour 
«  de  fesle  plusieurs  gens  s'étoient  assemblez  en  une 
«  place....  à  un  jeu  de  basteaux.  »  (Très,  des  Chait. 
Reg.  107,  pièce  171.) 

2°  Joueur  de  bateaux.  «  Bateleur  jouoyt  devant 
«  les  lois,  mettoil  plain  sa  bouche  d'aguilles,  et 
«  faisoit  semblant  de  les  menger,  ce  que  les  fols 
«  croyent  véritablement,  et  par  cestuy  seul  enchan- 
•  leur,  joueur  de  bateaux,  ou  autrement  sont  invi- 
«  tez  tous  autres  qui  se  mesleiit  de  telles  folies.  » 
(Nef  des  Fols,  fol.  99.)  Ce  passage  confirme  notre 
conjecture  au  mot  basteleur. 

3°  Jouer  de  bateaulx,  pour  jouer  des  gobelets. 

Ceux  qui  sont  auprès  des  royaulx 
Quant  vient  qu'on  jode  de  haleaux, 
Ou  qu'on  fait  quelque  esbat  ou  jeu, 
Hz  n'en  verront  rien. 

Conlred.  de  Songocreux,  fol.  1G6,  V". 

4°  Perdre  ses  bateaulx.  C"étoit  une  expression 
figurée  qui  signifie  perdre  ses  pas  ou  sa  peine. 
Eust,  Descbamps,  demandant  au  Roi  une  augmen- 
tation de  pension,  finit  sa  requête  par  ces  deux  vers  : 

Vueillez,  ou  il  pert  ses  haleaulx. 
Sur  ces  poins  estendre  vo  grâce. 

Eusl.  Desch.  Pous.  MSS.  fol.  S8(i. 

5"  Quiller  le  batteaux,  signifioit  figurément  aban- 
donner une  chose,  y  renoncer,  y  mettre  fin.  On 
disoil,  en  parlant  de  Tamour  : 

Puis,  quand  vient  sur  l'aage  ancienne 
C'est  bien  raison  qu'on  se  contienne, 
Et  qu'on  en  quitte  ses  batteaux. 

Le  Blason  des  Fol.  Amours,  p.  229. 

VARIANTES   : 
BATEAUX.  Très,  des  Chart.  Reg.  in,  pièce  620. 
Basteaux.  Ibid.  Reg.  167,  pièce  171. 

Bateillesches,  adj.  au  fém.  plur.  Cet  adjectif 
se  trouve  toujours  réuni  avec  le  mot  villes.  Il 
désigne  que  ces  villes  n'avoient  point  droit  de  com- 
mune, et  qu'il  n'y  avoit  ni  maire,  ni  échevin.  (Gloss. 
sur  les  Coût,  de  Beauvoisis,  au  mot  Ilaeleresclies. 
—  Voy.  la  note  B,  au  T.  1,  des  Ord.  des  R.  de  ¥r. 
page  788.)  i>  Entendons  nous  pai"  villes  Hatciches  (2), 
«  hors  de  communes,  car  les  villes  de  communes 
«  ont  leurs  maires  et  leurs  jurez.  »  (Beaum.  p.  115.) 

VARIANTES  : 
BATEILLESCHES.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  I,  p.  788,  note  6. 
Bateleresches.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  I,  p.  788,  note  0. 
Batleresches.  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauv. 
Bateiches.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  I,  p.  788,  note  b. 
Bateices.  Ibid. 

Batiches.  Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauv. 
Baptices.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  à  Villa  legis. 
Bastices.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  III,  p.  227. 


Bateis,  suhst.  musc.  plur.  Enclos,  territoire. 
•<  Oter  du  dit  ressort  et  bateijs  de...  »  (Ord.  des  R. 
de  Fr.  T.  111,  p.  250.) 

variantes  : 
B.VTEIS,  Bateys.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  III,  p.  250. 

Bateiz,  partie.  Qui  bat,  qui  est  agité.  «  Cœur 
«  t)atei:i.  "  Cœur  agité.  (Parton.  de  Blois,  ms.  de 
S'  Germ.  fol.  155.) 

Batelage,  subst.  masc.  Droit  de  batelier.  Soit 
pour  passage  ou  transportde  marchandises.  (Oudin, 
Dictionnaire.) 

Batelée,  adj.  au  fém.  On  disoil  rhétorique  ou 
poésie  batelée.  C'étoit  la  même  chose  que  balade 
batelée.  (Voy.  le  mot  Balade.) 

Bateliers  (francs),  subst.  masc.  plur.  Espèce 
de  jurés  qui  avoient  la  connoissance  et  la  justice 
du  commerce  par  eau.  (Nouv.  Coût.  Gén.  T.  I, 
page  1108.) 

Batelilis,  subst.  mase.  Bateliers.  11  y  a  lieu  de 
croire  que  ce  mot  est  une  faute.  On  le  trouve  dans 
les  Ord.  des  Rois  de  France,  T.  111,  p.  576.  L'éditeur 
cite  en  marge  un  autre  registre  on  on  lit  Bateliers 
au  lieu  de  Batelilis. 

Batemaere,  sut)St.  fém.  Bergeronnette.  Sorte 
d'oiseau.  (Dict.  de  Nicot,  Monet,  Cotgrave  et  Oudin.) 
On  dit  encore  batemare  en  Normandie. 

VARIANTES  : 
BATEMARE,  B.^ttemare. 

Batequeue,  subst.  fém.  Hochequeue.  Sorte 
d'oiseau.  (Dict.  de  Monet,  au  mot  Batemare.) 

VARIANTES  : 
BATEQUEUE.  Monet,  Dict. 
Battequeue.  Cotgrave,  Dict. 

Baterie,  suhst.  fém.  Brèche.  11  semble  que  ce 
soit  le  sens  de  ce  mot,  en  ce  passage:  «  Au  siège 
a  de  Peronne,  en  153G,  se  trouve  avoir  fait  quatre 
«  batteries,  à  scavoir  deux  avec  l'artillerie,  et  deux 
«  avec  les  mines.  »  (Mém.  du  Bell.  T.  VI,  p.  325.) 

On  appeloit  pièces  de  Ijatterie,  les  canons  à  battre 
en  brèche.  «  Y  avoit  trente-six  pièces  d'artillerie, 
«  pièces  de  batterie,  et  huit  cents  arquebutes  à 
«  croq!  »  (Mém.  de  Rob.  de  la  Marck.  S*'  de  Fleur. 
MS.  p.  -'120.) 

Les  pièces  de  batterie  désignoient  aussi  les  pièces 
de  campagne,  suivant  ce  passage  où  l'on  dit,  en 
parlant  d'Olivier  de  Daim:  «  Ses  armes  se  voyent 
«  encore  maintenant  audit  fort  de  Meulant,  sur  la 
«  porte  du  corps  de  garde,  et  sur  deux  petites 
«  pièces  de  campagne,  ou  de  baterie.  »  (Mém.  de 
Comines,  Preuv.  et  Observ.  p.  253.) 
variantes  : 

BATERIE.  Mém.  de  Comines,  Preuv.  et  Observ.  p.  2.53. 

Batterie.  Mém.  de  R.  de  la  Marck.  MS.  p.  420. 


(1)  Voir  plus  haut,  sous  bastel.  Le  mot  apparaît  dès  "1392  :  «  Ledit  Mery  dist  à  Icellui  Régnant,  Tu  fais  les  basteaulx,  me 
ouides  tu  espoventer  ?  »  (Tr.  des  Ci.,  JJ.  143,  p.  278.)  (n.  e.)  -  (2)  On  trouve  dans  Froissart  batice,  en  latm  baticium  :  «  Et 
trouvères  en  Normendifi  grosses  villes  et  batices,  qui  point  ne  sont  fermées.  »  (Ed.  Kervyn,  IV,  381.)  Ces  villes  étaient 
placées  sous  Tautorité  d'un  seigneur.  Le  mot,  d'après  Du  Gange,  signifie  juridiction  ;  faut  -il  remonter  jusqu'à  bastir  ?  (N.  E.) 


BA 


430 


BA 


Baterie,  subst.  (cm.  Nom  de  pays.  Peut-être 
Baclriine.  Un  ancien  poule,  parlant  des  arts  libé- 
raux, dit:  «  Lesquels  arts  trouva  au  tiers  aige  du 
«  monde  et  au  temps  d'Abraliam,  maistres  qui 
«  reanoit  en  lialerie.  «  (Kust.  Descti.  Poës.  mss. 
fol.  ;V.)'4.) 

Batestal,  subst.  masc.  Druit,  train,  tapage.  — 
]/d  mêlée,  le  fort  du  combat. 

Les  deux  passages  suivans  doivent  être  expli- 
qués, pour  la  mêlée,  le  fort  du  combat,  où  se 
faisoient  le  plus  grand  abatis,  l'enclume  où  l'on 
battoil  le  fer,  la  forge  où  Ion  forgeoil  l'honneur 
avec  le  fer,  comme  on  disoit  : 

Puis  est  venu  au  balcslal 
Ou  se  combattent  li  vassal 
Et  les  II  os  ont  assamblées 
D'ambe  m  pars  entalentées 
De  lor  ennor  a  porchacier. 

AlUis,  MS.  fol.  87,  V  col.  1. 
Il  sont  moult  près  de  grant  dehait  : 
De  gent  à  pié  et  à  cheval 
Voient  moult  grant  /ri  6a'es(a/; 
S'il  ont  paour,  ne  m'en  raerveil. 

Alhis,  MS.  fol.  80,V'col.2. 

Partonopex  met  les  Norois  en  déroute  dans  les 
vers  suivans  : 

Des  qans  el  val 

Ne  fine  de  son  balestal. 

Parlon.  de  Blois,  MS.  de  S.  Gcrm.  fol.  13-2,  V  col.  1. 

A  cop  férir, 

Me  trouveroit  ou  vassal, 
Et  faisant  grant  bastelal 
A  celi  qui  maineroit 
Tel  vie,  et  me  despiroit. 

Poês.  MSS.  du  Valioan,  n-  1490,  fol.  171,  V. 

Dans  le  passage  suivant,  il  s'agit  d'une  fée  irritée 
contre  Partonopex.  La  sœur  de  la  fée  demande 
grâce  pour  lui  inutilement;  elle  répond: 

S'un  poi  eussiés  de  ma  cure, 
Moult  perdriez  l'envoisure  ; 
N'en  tenriez  tel  balestal  : 
Soef  conforte  qui  n'a  mal. 

Parlon.  de  Blois,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  U2,  V-  col.  ». 

VARIANTES  : 
HATESTAL.  Parton.  de  Blois.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  132. 
Bastet.\l.  Poës.  MSS.  n»  1490,  fol.  171,  V». 
Batista  at  Batestal.  Athis,  MS.  fol.  47,  V"  col.  1. 

Batliié,  subst.  fém.  Demoiselle.  Instrument  de 
paveur. 

Batière  (Sele  ou  Siele.)  Ces  mots  semblent 
signifier  escabeau,  ou  sautoir  pour  monter  à 
cheval. 

Par  une  sele  batiere  sali  sour  Walopin. 

Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1367. 

Une  siele  batiere  fist  Marquesai  porter  ; 
Il  saut  sur  Baielart. 

Ibid.  p.  1365. 

Batiffol  (moulin),  adj.  Moulin  à  papier  (1).  (Voy. 
Du  Gange,  Gloss.  lal.  au  mot  Maliens.) 


Batifolage  {'2),  subst.  masc.  Niaiserie,  occupa- 
tion ridicule.  (Voy.  Le  Duchal,  sur  Rabelais,  T.  II, 
p.  73,  noie  8.1.) 

Batoil  (3),  subst.  masc.  Le  son  des  trompes  ou 
cliiics;  en  latin  taralantara.  (Gloss.  du  P.  Labbe, 
p.  128.; 

Bâtonnet,  subst.  masc.  Canne.  Petite  baguette. 

Il  vint  droit  à  la  halte  d'Ypre  : 
Un  bâtonnet  tint  en  sa  main 
Et  de  sa  mie  li  souvint. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n°  7615,  T.  Il,  fol.  134,  R-  col.  2. 

Battable,  aitj.  Qui  peut  être  battu.  On  a  dit  en 
ce  sens  :  ville  mal  batable  d'Engins.  C'esl-îi-dire 
qu'on  peut  battre  difficilement  avec  l'artillerie. 
(Monslrelet,  Vol.  III,  fol.  .52.) 

VARIANTES  : 
BATTABLE.  Sagesse  de  Charron,  p.  574. 
Batable.  llist.  de  la  Popelinière,  T.  I,  Liv.  II,  fol.  42,  V». 

Battant,  adv.  En  hâte,  tout  courant.  —  Tout 
récemment. 

L'usage  de  ce  mot  a  été  fréquent  dans  le  premier 
sens.  On  disoit:  «  Il  envoya  un  homme  battant 
«  devers  Monseigneur.  »  (Hist.  d'Artus  III,  Connest. 
de  Fr.  Duc  de  Bret.  p.  766.)  Borel  l'explique  par  :  à 
,9raHf/t'fo;//'st'.  (Voy.  sonDict.au  mol  BafrtH^)  C'est  de 
là  qu'est  venue  cette  façon  de  parler  encore  usitée, 
mener  bâtant  (4).  Le  P.  Martène,  dans  son  Gloss. 
écrit  Batan,  et  l'explique  par  grand  courrier,  mais 
c'est  sans  fondement. 

Dans  le  second  sens,  ce  mot  paroit  signifier  «  tout 
récemment,  »  dans  le  passage  suivant:  «  D'Italie 
«  arriva  hier  au  soir,  mon  beau  fils  qu'en  vient 
«  ballant.  »  (Lett.  de  Louis  XII,  T.  IV,  p.  85.)  C'est 
en  ce  sens  que  le  peuple  dit:  «  Un  habit  tout 
«  battant  neuf.  »  Comme  qui  diroit  arrivé  tout 
nouvellemeut.  Voy.  embattre  pour  arriver,  et  tout 
claquant  neuf,  expression  populaire,  comme  pour 
"  arrivant  et  faisant  encore  claquer  son  fouet.    » 

VARI.ANTES  : 
BATTANT.  Lett.  de  Louis  XII,  T.  IV.  p.  85. 
BATANT.  G.  Guiart,  MS.  fol.  128,  R». 
Batan.  Gloss.  de  Martène,  T.  V. 

Batte,  subst.  fém.  Filières  pour  placer  le  bois 
des  fenêtres.  C'est  ainsi  que  le  mot  batte  est 
expliqué  dans  le  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  1090  el 
passim.  C'est  aussi  l'explication  du  mot  bedde. 
(Ibid.  p.  9i9),  etdu  mot  battement.  (Ibid.  p.  /i08.) 
Il  paroit  donc  que  ces  mots  viennent  de  battre, 
parce  que  c'éloit  dans  ces  filières  que  seposoientles 
ballans  des  fenêtres,  le  bois  qui  bat  ou  porte 
contre  le  mur;  nous  disons  encore  battant  en  ce 
sens.  Nous  croyons  donc  qu'il  ne  faut  pas  confon- 
dre le  mol  batte,  et  ses  orthographes,  avec  les 
orthographes  du  mot  i*ae>,quidésignent  l'ouverture. 


(1)  Dans  les  textes  d'origine  italienne,  batifollum,  bacifoUum  paraît  désigner  un  bastion,  une  machine  de  guerre,  tin 
beffroi,  (n.  e.)  —  (2)  lialtifoller  el  batLifolaç/e  sont  venus  d'Italie  au  Wl'  siècle  ;  c'était,  au-delà  des  monts,  des  combats 
simulés  au  pied  des  remparts,  (n.  e.)  -  (3)  Nous  avons  la  forme  batnil,  battant  de  cloche,  au  propre  et  en  terme  de  blason. 
Rabelais  écrit  :  «  Le  bâtait  estoit  d'une  queue  de  renard.  »  (Edition  de  1711,  IV,  27.)  Le  P.  Labbe  a  ici  pensé  fort  mal  à 
propos  au  vers  d'Ennius:  «  At  tuba  terribilis  sonitum  taratantara  dixit.  »  ISaluU  n'est  pas  une  onomatopée,  mais  un  dérivé 
de  battre.  (N.  E.)  —  (4)  La  locution  mener  battant  est  abrégée  de  mener  en  battant,  en  pressant  l'ennemi  ;  de  là  au  sens  de 
récemment,  de  nouveUement,  la  dérivation  est  facile,  (n.  e.) 


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la  fenêtre  même.  Ce  qui  a  donné  lieu  ti  celte  con- 
fusion, dans  laquelle  est  tombé  l'éditeur  du  T.  III' 
des  Ordonn.  des  R.  de  Fr.,  c'est  que  le  mol  bace, 
fenêtres,  et  le  mol  batte  ou  battement,  ont  servi 
également  de  nom  aux  marques  qui  servent  à 
prouver  que  le  côté  du  mur  où  elles  sont  appartient 
à  celui  qui  les  a  fait  faire.  (Voy.  le  Nouv.  Coût. 
Gén.  aux  lieux  cités.) 

VARIANTES  : 

BATTE.  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  1090. 

BATE.  Onl.  des  R.  de  Fr.  T.  III,  p.  586. 

Baide.  Coût,  de  Haynaut,  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  145. 

liEDDE.  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  948. 

Batticment,  stibsl.  masc.  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  lOÎM. 

Battecul,  subst.  masc.  Partie  de  l'armure,  celle 
qui  couvre  les  fesses.  (Dicl.  de  Cotgrave.)  «  Tout 
«  plat  s'en  alla  parterre,  en  manière  que  au  clieoir, 
«  les  pièces  de  son  battecul  lui  renversèrent  sur 
«  le  dos,  tellement  qu'il  eut  le  derrière  tout  descou- 
«  vert.  >'  ;.iean  d'Auton,  Ann.  de  Louis  XII,  de  150G, 
page  27  i  ) 

Battelessifve  [l],  subst.  fém.  Lavandière.  Sorte 
d'oiseau,  celui  que  «  les  Latins  nomment  motacilla 
«  les  François  hochequeue,  lavandière  et  hatle- 
.  lessive,  laquelle  faisoit  affoler  d'amour.  »  (Maiad. 
d'Amour,  p.  224.) 

VARIANTES  : 
BATTELESIFVE.  Cotgrave. 
Battelessive.  Malad.  d'Am.  p.  224. 

Battement,  subst.  masc.  Coup,  blessure.  «  S'il 
«  y  a  aucuns  qui  se  combattent,  ou  se  font  sang, 
«  ou  autres  injures,  ou  battemens.  »  (Ord.  des  It. 
del'r.  T.  m,  p.  312.) 

Batterie,  subst.  fém.  Action  de  battre.  Oudin 
expliiiue  ce  mol  par  dispute,  noise.  On  lit  dans  les 
Tenur  de  Lilll.  fol.  98  :  «  Pour  doubl  de  baltery,  » 
c'est-;"!  dire  pour  crainte  d'être  battu,  et  p.  199: 
"  Pour  doubl,  ou  pavor  de  <;a//m(?,  «c'est-à-dire 
pour  peur  d'être  battu. 

On  disoit  :  batterie  de  tambours,  pour  l'action  de 
battre  le  tambour.  (Oudin,  Dict.  et  Brantôme, 
Capitaine  Estr.  T.  II,  p.  169.) 

VARIANTES  : 
BATTERIE.  Oudin,  Dict. 
Batekie.  LiUl.  Ten.  fol.  99,  V». 
Battery.  Ibid.  fol.  98,  V». 

Batteur  (2),  sî/fcsf.  7nasc.  Terme  d'art.  On  disoit 
batteur  d'archal,  baleur  d'or  à  filer,  d'estain  d'or 
en  feuilles  C'éloit  le  nom  des  ouvriers  en  ces 
divers  genres  d'ouvrages.  (Voy.  la  table  des  Métiers 
de  Paris,  ms.  de  Meinière,  p.  10  et  12.) 

VARIANTES  : 
BATTEUR.  Tabl.  des  Mestiers  de  Paris,  MS.  p.  12. 
Bateur.  Ibid.  p.  10. 

Battre,  verbe.  Battre,  frapper.  Ce  mot  subsiste 
et  a  conservé  presque  toutes  ses  acceptions  ancien- 
nes. Il  faut  cependant  remarquer  diverses  expres- 


sions dans  lesquelles  on  l'employoil  et  qui  ne  sont 
plus  d'usage. 

On  dil  de  l'âme  qu'elle  bat,  pour  exprimer  la 
durée  de  la  vie.  «  Tout  com  l'ame  leur  bal,  »  pour 
tant  qu'ils  vivent,  tant  qu'ils  respirent.  (J.  deMeung, 
Cod.  1074.) 

1°  Battre  à  la  porte,  pour  heurter,  frapper. 
«  Quand  il  fut  arrivé  vers  le  compère  sire  Pierre, 
>.  //  bâtit  à  la  porte.  »  (Nuits  de  Strap.  T.  I,  p.  387.) 

2-  Battre  à  froid ,  pour  perdre  sa  peine  et  soii 
»  tems.  »  (Voy.  le  Peler.  d'Amour,  T.  I,  p.  96.) 

3°  Se  battre  les  joues,  pour  être  content,  satisfait 
ou  se  moquer,  tirer  avantage.  «  Parce  qu'ils  font 
«  profit,  au  grand  dommage  du  peuple,  de  la  levée 
«  des  deniers  qu'ils  font  sur  luy,  pour  ce  qu'ils 
«  s'en  battent  les  joues  à  leur  bon  plaisir,  ne  dési- 
<•  rant  aucunement  que  ces  troubles  cessent.  » 
(Mém.  de  Nevers,  T.  II,  p.  136.)  Oudin  ,  dans  son 
Dictionnaire,  donne  à  celte  exiiression  un  sens  tout 
contraire  :  il  l'explique  par  se  repentir. 

4°  Batre  ses  paumes ,  pour  frapper  des  main* 
l'une  sur  l'autre.  Nous  trouvons  celle  expression 
dans  ces  vers  : 

Lues  que  (3)  li  prestres  entre  en  l'huis 
Commença  à  lire  ses  saumes 
Et  la  dame  à  batre  ses  paitmcs. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  laiS,  fol.  2i3,  R"  col.  l. 

5°  Battre  bief  en  la  grange  ou  en  autrmj  grange, 
pour  avoir  un  commerce  illicile  avec  une  femme 
ou  fille.  (Voy.  les  Poës.  mss.  d'Euslache  Deschamps, 
folios  423  et  495.) 

0°  Batre  bone  moisson ,  pour  façon  de  parler 
figurée. 

Einsi  menrez  vos  bone  vie  ; 
Car  mauves  vilain  ne  doit  mie 

Por  li  batre  bone  moisson. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7615,  T.  II,  fol.  18.'.,  R-  col.  2. 

7°  Battre  sa  coulpe,  pour  se  frapper  sur  la  poi- 
trine en  signe  de  repentir  de  sa  faute.  (Vov.  la 
Chron.  de  S'  Denis,  T.  1,  fol.  175.) 

8°  Battre  de  l'esté,  c'est-à-dire  voler. 

Encore  y  a  d'autres  oyseaulx, 
Esmerillons,  et  haubereanlx, 
Qui  butleitt  tellement  de  Icsle 
Tant  l'ont  viste,  etc. 

Gacc  de  la  Bignc.  des  Déduits,  MS.  fol.  122,  R'. 

En  termes  de  fauconnerie,  battre,  sans  être  joint 
à  aucun  autre  mol,  signifioit  voler:  »  Se  l'espervier 
>'  veoit  devant  il  plumeroit  aval  le  poing,  quant  il 
«  batroit,  et  s'il  veoil  derrière ,  il  batroit  contre 
»  mont,  et  prendroit  bons  esbas.  »  (Modus  etRacio, 
MS.  folio  136.) 

9"  Battre  son  cul  au  chant,  pour  perdre  son 
tems  et  sa  peine.  (Voy.  les  Poës.  mss.  d'Eustache 
Deschamps,  fol.  23.) 

10°  Battre  le  chien  devant  le  lion  (4),  pour  faire 
peur  aux  grands  en  châtiant  les  petits.  (Oudin, 
Cur.  fr.) 


(T)  EUps  ont  l'air,  en  effet,  en  battant  de  leur  queue,  de  battre  le  tinsse,  (n.  e.)  —  (2)  «  Quiconques  veut  estre  bateret 
d'archal  à  Paris,  estre  le  puet,  mes  qu'il  sache  le  mestier.  »  (Liv.  des  Met..  55.)  (N.  E.)  —  (3)  Dès  que,  aussitôt  que.  — 
(4)  On  dit  aussi  battre  le  chien  devant  le  loup,  de  gens  qui^  étant  d'accord,  se  disputent  pour  faire  croire  qu'ils  ne  s'entendent 
pas  et  attraper  leur  dupe.  (n.  e.) 


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i\°  liatlre  à  la  clialr.  On  i\)so\i,  en  pailanl  du 
faucon,  lorsqu'on  lui  présenle  l'appàl:  «  Se  Ion 
«  oiseau  se  trouve  seur,  et  qu'il  mange,  et  batte  à 
«  la  chair,  »  pour  donne  sur  la  viande.  (Budé,  des 
Oiseaux,  fol.  123.) 

i'i"  Veslemcnt  battus  en  or,  vêtemens  sur  les- 
quels il  y  avoil  de  l'or  appliqué  ou  imprimé.  (Per- 
ceforest.  Vol.  IV,  fol.  59.)  On  disoit  de  même  : 
.  lmï\([\x&  ba&tuc  de  /leur  de  Ik,  ■>  c'est-à-dire 
parsemée  de  lleur  de  lis.  (Voy.  les  Vigiles  de  Char- 
les Vil,  T.  I,  p.  170.)  «  Treize  bannières  batues  des 
•  armes  du  roy.  »  (Voy.  un  inventaire  ù'armeures, 
cité  par  Du  Gange,  Gloss.  latin,  au  mot  Armatura.) 

13°  Les  battus  paijOient  l'amende.  Façon  de  par- 
ler proverbiale  encore  eu  usage  aujourd'hui.  Elle 
vient  d'une  ancienne  coutume,  qui  punissoit  ceux 
qui  se  battoieut  en  duel  et  qui  étoient  vaincus.  On 
leur  coupoit  le  poing,  et  quelquefois  on  les  pen- 
doit.  (Voy.  Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mot  Cani- 
pionis  in  duello.  —  Voy.  Oudin,  Gur.  l'r.  —  Savaron, 
contre  les  Duels,  p.  41  et  59.) 

Le  battu  bien  souvent,  ainsi  paye  l'amende. 

Ce  proverbe  se  trouve  dans  les  Poésies  de  Le 
Yasseur.  Ge  poète  l'applique  à  Jésus-Ghrist,  inno- 
cent et  souffrant  pour  les  coupables.  (Voy.  Goujet, 
Bibl.  fr.  T.  XV,  p.  315.) 

14°  Battus  bleux  est  une  expression  burlesque. 
(Voy.  Du  Tilliot,  Hist.  de  la  Kéte  des  Fous,  p.  120.) 

GoNJUG. 

Butut,  au  prétérit.  Battit.  (Fabl.Mss.  du  R.  n°7G15, 
T.  II,  fol.  139,  R°col.  1.) 

Buttera  [ferra  ou),  au  futur  prés,  pour  frappera 
ou  battra,  espèce  de  tautologie.  (La  Thaumassière, 
Coutumes  d'Orléans,  p.  464.) 

VARIANTES  : 
BATTRE.  Orth.  subsist. 
Batre.  Nuits  de  Strap.  T.  I,  p.  387. 

Bastre.  Eust.  Descb.  Poës.  MSS.  fol.  298.  -  Faiteu,  p.  47. 
Baptre.  Lett.  de  Louis  XU,  T.  II,  p.  257. 
Bactre.  Modus  et  Racio,  fol.  51,  V». 

Battu,  partie.  Abattu.  «  Fut  la  ville  bien  batue 
«  d'artillerie;  il  y  avoil  des  boulevaits,  et  moineaux 
«  qui  furent  bains  auparavant  que  on  peust  assail- 
«  tir.  »  (Histoire  d'Art.  III ,  Gonnest.  de  France , 
an  1437,  page  771.) 

Battue,  subst.  fém.  Sorte  de  pèche.  —  Terme 
de  marine. 

Sur  le  premier  sens,  voy.  le  Gloss.  latin  de  Du 
Gange,  au  moi  Bastuda.  Ce  mot  signifie  une  espèce 
de  pèche  que  l'on  faisoil  par  le  moyen  d'une  bat- 
tue ou  en  battant  l'eau  pour  rassembler  le  poisson, 
On  fait  aussi  des  battues  dans  certaines  chasses  ;  et 
ce  mot  subsiste  en  ce  sens. 

Ce  mot  a  été  employé  comme  terme  de  marine. 
Nous  n'en  déterminerons  point  la  signification  pré- 


cise. Voici  le  passage  oîi  nous  le  trouvons  :  «  Leur 
«  intention  esloit  de  suyvre  nos  galleres,  en  tant 
■•  qu'ils  le  pourroient  faire ,  sans  rien  bazarder, 
"  esperans  nous  attirersur  les  bans  et  i;ft//!/cs  (1).  » 
(Mém.  Du  Bellay,  Liv.  X,  fol.  340.) 

Batture  (2),  sm/;s/.  fém.  L'action  de  battre,  donner 
des  coups.  —  Grêle.  —  Corvée.  —  Ornement.  — 
Air  de  symphonie. 

Sui-  le  premier  sens  de  battre,  donner  des  coups, 
voyez   les  Dict.   d'Oudin   et  de  Gotgrave,  au  mot 

Batture.  «  Son  compagnon  battu  de  telle  bat- 

«  ture.  "  (Perceforest,  Vol.  V,  fol.  87.)  «  La  dame 
«  estoit  toute  couverte  de  sang  des  batlures  qu'ils 
«  luy  avoient  faites.  »  (Ger.  de  Nevers,  part.  p.  37.) 
Juven.  des  Ursins,  parlant  de  rassassin;it  commis 
par  ordre  de  Graon,  en  1392,  contre  Olivier  de 
Glisson,  dit  qu'il  ne  mourut  pas  de  la  dite  batture. 
(llisloire  de  Charles  VI ,  p.  89.)  On  disoit  en  ce 
sens,  batture  de  bombarde,  pour  l'action  de  battre 
une  place  à  coups  de  canon.  (Mémoires  d'Olivier 
de  la  Marche,  p.  72.) 

C'est  par  une  extension  de  ce  genre  que  l'on  a 
nommé  bature  les  grêles  qui  gâtent  les  vignes. 
«  La  bohade  (3)...  est  due  au  plus  prochain  vinoble, 
«  si  en  iceluy  n'y  a  batture  ou  gelée.  »  (Coutumes 
générales,  T.  H,  p.  400.) 

Go  mot  s'est  employé  pour  corvée,  dans  le  pas- 
sage suivant:  «  Les  chrestiens,  qui  dedans  la  cité 
«  demeuroient,  estoient  à  trop  grandes  misères  de 
«  bastures,  et  autres  œuvres  servilles  pour  aider  à 
«  ceulx  qui  la  cité  avoient  à  deffendre.  »  (Tiiomphe 
des  IX  Preux,  p.  484.) 

Nous  ne  trouvons  point  dans  la  seconde  acception, 
que  nous  venons  d'exposer,  l'orthographe  bateure. 
Elle  est  employée,  aussi  bien  quebàltureel  bature, 
pour  désigner  une  espèce  d'ornement  de  métal  ou 
de  peinture  qui  se  mettoit  sur  les  étotfes,  les  habits 
ou  les  meubles,  et  qui  y  étoient  appliqués;  on  les 
trouve  quelquefois  opposés  aux  ouvrages  en  cou- 
ture que  l'on  cousoit  sur  les  étoffes  ou  sur  les 
babils,  et  aux  ouvrages  en  brodure  ou  broderie. 
Voyez  Godefr.  Hist.  de  Charles  VI,  p.  735,  où  l'on 
a  dit,  en  parlant  de  l'équipage  des  chevaux  et  des 
hommes  qui  dévoient  accompagner  les  obsèques 
du  connétable  Louis  de  Sancerre:  «  Les  selles  des 
»  deux  dits  chevaux,  l'une  sera  pour  la  guerre, 
"  armoyéede  cousture,  et  l'autre  pour  le  Tournoy 
«  armoyée  de  bateure  ;  et  porteront  les  deux  dits 
«  gentils  hommes,  chacun  une  bannière  ;  c'est 
"  assavoir,  celui  à  la  selle  de  guerre,  la  hannièrede 
«  guerre  de  cousture,  et  celuy  à  la  selle  de  Tournoy, 
<i  la  bannière  de  Tournoy  de  bateure,  et  seront  les 
«  dites  bannières,  c'est  assavoir  celle  de  la  guerre, 
■'  de  cousture,  et  celle  de  Tournoy,  de  bateure.  » 
On  lit:  Batture  de  soije  et  de  feuille,  c'est-à-dire 


(1)  Il  y  a  là  deux  termes  de  marine  qui  ont  été  confondus  :  1°  battue  du  poisson ,  creux  qu'il  fait  dans  la  boue  où  il 
s'enfonce  l'hiver;  2"  Imtlure,  fond  mêlé  de  sables  ou  de  roches  qui  s'élève  vers  la  surface  de  reau.  C'est  le  mot  qu'il  faut 
lire  ,i  rexemple  cité,  et  c'est  ainsi  qu'il  a  été  imprimé  à  la  page  598  de  l'édition  de  1569.  La  Curne  emploie  l'édition  de 
1592.  (N.  E.)  —  (2)  Batture  se  trouve  au  sens  propre  dès  le  xiiF  siècle  ;  «  Ke  li  mal  ke  il  solirent  ne  soient  mie  pie  bateure 
de  rhastiement,  mais  durs  tlaeaz  de  droite  venjance.  »  {Job,  v.  471,  dans  les  Ouatre  Livres  rie.t  I^ois,  p.  p.  Leroux  de  Lincy, 
lK41.>i,N.  E.)  -  Ci)  Corvée  de  bœufs. 


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ornemens  en  soie  et  en  feuilles  d'or  baUus.  (Poës. 
Mss.  d'Eust.  Desch.  fol.  504.) 

Enfin,  batlnre  se  disoit  d'un  air  de  symphonie 
sonné  par  une  trompette  :  «  Ils  jouèrent  de  leurs 
«  trompettes  une  batture.  »  (Math,  de  Coucy,  Hist. 
de  Charles  VII,  p.  609,  —  Voy.  les  Mémoires  d'Oli- 
vier de  la  Marche,  p.  551.) 

VARIANTES  : 
[ÎATTURE.  Oudin,  Dict.  -  Villon,  Poës.  p.  100. 
Bature.  Vigiles  de  Charles  VII,  T.  II,  part.  p.  187. 
Hasture.  Beaumanoir,  p.  149. 
Bateure.  Godefr.  Hist.  de  Charles  VI,  p.  735. 
Batiture.  Cotgrave,  Dict. 

Battui'ier,  sitbst.  inasc.  Cap  dans  le  Canada. 
Les  François,  lorsqu'ils  le  découvrirent,  en  1607, 
le  nommèrent  BaUurier,  à  cause  du  danger  qu'ils 
coururent  d'y  faire  naufrage.  (Rigaiilt,  à  la  suite  du 
P.  de  Thou,  T.  V,  p.  14.) 

Battus  (i),  suhst.  masc.plur.  Confrérie  de  flagel- 
lans.  (Dict.  d'Oudin  et  de  ^'icot.) 
variantes  : 
BATTUS,  Batus. 

Baubans,  adj.  ou  part,  au  pliir.  Aboyans.  On 
disoit  chiens  haubans.  (Alector,  Hom.  fol.  111.)  On 
trouve  chiens  bayens,  dans  l'IIist.  des  Trois  Maries, 
en  vers,  mss.  p.  449. 

variantes  : 

BAUBANS.  Alector,  Rom.  fol.  111. 

Bayens.  Hist.  des  Trois  Maries,  en  vers,  MSS.  p.  449. 

Baubau,  subst.  masc.  Aboyement.  Mot  formé 
par  onomatopée.  Il  exprime  le  bruit  que  fait  le  chien 
eu  aboyant.  «  Le  mastin  du  logis  commence  à 
«  abbayer,  et  avec  son  baubau  appelle  son  mais- 
«  tre.  »  (Merl.  Cocaie,  T.  I,  p.  38.) 

Baube,  suhst.  masc.  et  adj.  Bègue.  (Dict.  de 
Borel,  au  mot  Daube).  Ph,  Mouskes,  parlant  de 
Charles-le-Chauve,  dit  : 

D'une  feme,  ki  fu  gentius 
Avoit  uns  fils  ki  fu  soutius  : 
Loeys  li  baubes  ot  non, 
Et  saciés  k'il  ot  cest  sornon 
Pour  cou  k'il  esloit  baubiUerre  (2) 
Mais  il  n'iert  fos,  ne  abetere. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  328. 

On  lit,  en  parlant  du  même  prince,  Louis  le 
Barbe  (3).  (Chron.  de  S'  Denis,  T.  I,  fol.  195.)  C'est 
sans  doute  une  faute  pour  baube. 
Remarquons  cette  expression  : 
Droit  parlant  et  baube,  c'est-à-dire  tous. 

Cil  d'armes  droit  parlant  et  batibe, 
Lendemain  bien  matin  à  l'aube, 
Partent  les  veluz  et  les  cheus. 

G.  Guiart.  MS.  fol.  !94,  V. 


VARIANTES  : 
BAUBE.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  328. 
Balbe.  J.  Le  Maire,  Sch.  et  Conc.  p.  33. 
Baulbe.  La  Salade,  fol.  51,  V"  col.  1. 
Barbe  (lisez  Baube.)  Chron.  de  S'  Denis,  T.  I,  p.  195. 
Bambe  (lisez  Baube.)  Lignages  de  Camer,  p.  224. 
Baubeterre.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  328. 
Beille.  Dict.  de  Borel. 
Bijous.  Dict.  d'Oudin. 
Bley.s.  Fav.  Théâtre  d'Honneur,  T.  II. 
Bley.  Mot  languedocien. 

Baubillonner(4),  verbe.  Radoter.  C'est  un  mol 
breton. 

Bauboier,  verbe.  Balbutier.  «  La  hasle  de  par- 
«  1er  luy  enlrerompoit  la  voix,  et  faisoit  sa  langue 
«  bauboijer.  «  (Al.  Chartier,  de  l'Espérance,  p.  26G.) 

VARIANTES  : 
BAUBOIER.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  150. 
Bauboyer.  Al.  Chartier,  l'Espérance,  p.  277. 
Beii.ler.  r.orel,  Dict. 

Bauc,  subst.  masc.  Sorte  de  tablette  semblable 
à  celles  dont  nous  nous  servons  pour  exposer  des 
fromages  à  l'air. 

Le  banc  et  le  loier, 
Et  la  table  à  mangier 
Si  li  covient  en  haut 
Le  chassier  su  le  bauc 
A  fromages  garder. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7615,  T.  II,  fol.  212,  V-  col.  2. 

Baucades(5),  stilist.  masc.plur.  Nom  de  faction. 
«  C'étoit  une  sorte  de  mutins  gaulois  qui  s'éloient 
«  élevés  du  temps  de  Diocletian.  »  (Dict.  de  Borel.) 

Baucens,  adj.  Pie.  Bai-pie.  Couleur  du  poil  d'un 
cheval.  (Dict.  de  Borel,  au  motBaucens,  et  leGloss. 
latin  de  Du  Cange,  au  mot  Saurus.) 

Chevauls  ont  gaaingné  blans,  et  baucens  et  sors. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  103. 

Les  costes  à  baucans,  et  fauve  le  crespon. 

Notice  du  Rom.  d'Alex,  fol.  4. 

A  tant  brocent  bruns,  et  bauçans. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  187. 

Nulle  saiete  qui  descoche 

Ne  vait  plus  que  li  destriers, 

Uns  bruns  baucans,  qui  estoit  fiers. 

Alhis,  MS.  fol.  7;!,  v*  col.  2. 

On  nommoit  beanséant  (6)  le  drapeau  des  Tem- 
pliers, qui  étoit  noir  et  blanc,  selon  Guill.  de  Tyr, 
cité  par  Favin,  Théàt.  d'honn.  T.  II,  p.  1617. 

VARIANTES  : 

BAUCENS.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  103. 

Beaucens.  Du  Cange,  Glossaire  latin,  T.  I,  p.  1077. 

Bauçans.  Not.  du  Rom.  d'Alex,  fol.  4. 

Bauçant.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  249,  V"  col.  2. 

Baucein.  Athis,  MS.  fol  104. 

Baucent.  Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  fol.  64,  V». 

Bauch.\nt.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  170. 

Bausan.  Du  Cange,  Glossaire  latin,  au  mot  BaMceiis. 


(1)  C'était  leur  surnom  sous  Henri  III  ;  on  les  nommait  encore  blancs  battus,  parce  que  ce  roi  établit ,  en  1583,  trois 
confréries  distinguées  par  trois  couleurs  différentes,  le  blanc,  le  bleu,  le  noir.  (n.  e.)  —  (2)  Trompeur  ;  on  trouve  le  verbe 
abeter  dans  le  Roman  du  Renard.  (N.  E.)  —  (3)  Le  /  de  balbiis  a  pu  devenir  »•  par  un  phénomène  de  rhotaoisme.  (N.  e.)  — 
(4)  On  dit  encore,  dans  le  Finistère  (Dial.  de  Léon),  balnlleitreitxs  pour  babillarde,  mais  ce  n'est  que  le  mot  français 
babillercssc,  durement  prononcé.  Il  en  est  de  même  de  baubiltoner  ;  batibe  a  donné  le  diminutif  baubillon,  sur  lequel  on  a 
créé  le  verbe  cité.  (n.  e.)^  —  (5)  Les  formes  latines  citées  par  Du  Cange  sont  :  Bacaudœ,  Baccharidœ,  Baijaudœ,  Baogandœ, 
Baogaudœ,  Bav 
balzan,  dérivé  i 
baauseant  ferait  croire  à  la  fausse  élymologie  bien  séant,  (n.  e.) 

II.  55 


Tugaredœ.  Borel  devait  sans  doute  aussi  peu  connaître  le  latin  que  le  français,  (n.  e.)  —  (6)  C'est  le  mot  actuel 
î  de  balteus,  bordure,  avec  le   sens  particulier  de  bordure  blanche.   Il  vaudrait  mieux  écrire  bauçant,  car 


BA 


434  — 


BA 


Baussant.  Eusl.  Desch.  Poës.  MSS.  iol.  410,  col.  4. 
Beauseant.  Citât,  de  Favin,  Th.  dhonn.  T.  II,  p.  1617. 
BOUÇANT.  Not.  du  Rom.  d'.^le.s'.  p.  20. 
Baçardent.  Poes.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1363. 

lîaucli,  culj.  Fou  grossier.  (Du  Cange,  Gloss.  lat. 
au  mol  neboyschalus  (1).) 

Baiiche,  sitbst.  fém.  Boutique.  Dict.  étym.  de 
Ménage,  au  moi  Vébuuclicr.  (Voy.  Bauge.) 

Baud,  subst.  masc.  Espèce  de  cliien  courant. 
(Dicl.  de  Monet,  Oudin,  Cotgrave,  Ménage  et  Cor- 
neille.) «  A  le  chien  baull  la  meilleure  tache,  car  il 
«  scet  bien  quant  il  chasse  le  droit,  etc.  »(Moduset 
Racio,  fol.  19.)  «  B«i(s  l'appellent  pour  ce  qu'ilz  sont 
«  baus  et  bons  et  sages  pour  le  cerf.  »  (Chasse  de 
Gaston  Phébus,  ms.  p.  120.)  On  les  nommoit  aussi 
baux  retifs.  (Voyez  Modus  et  Racio,  ms.  fol.  o7.)  On 
trouve  ibid.  au  fol.  19,  beaulx  rectis. 

VARIA.NTES  : 
BAUD.  Oudin,  Dict. 
Bauds.  Cotgrave,  Dict. 
Baut.  Chasse  de  Gaston  Phébus,  MS.  p.  233. 
Bault.  Modus  et  Racio,  fol.  19,  V°. 
Baus.  Chasse  de  Gaston  Phébus.  MS.  p.  127. 
Baux.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  37,  R». 
Beiaulx.  Modus  et  Racio,  fol.  19,  V». 

Baud  (2),  adj.  Joyeux,  gaillard.  —  Libertin, 
effronté. —  Fier,  hautain.  —  Fin,  rusé. 

Dans  le  premier  sens,  ce  mot  signifie  joyeux, 
gaillard.  (Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose,  -au  mol Baitlde, 
et  Suppl.  au  mot  Baux,  de  mine  friande)  :  «  Sont 
«  baux  et  joyeux  et  liez  en  leur  courage.  » 

Femme  riant,  safTre  de  chiere, 
Baude,  alaigre,  de  belle  monstre. 

Coquillart,  pa^e  32. 

Dans  le  second  sens,  ce  mot  a  été  employé  pour 
libertin,  dissolu.  (Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose,  au 
mot  liaulde  et  Baulx.)  «  Ou  les  pucelles  principale- 
«  ment,  et  les  femmes  deussent  être  humbles,  et 
«  simples,  celles  sont  plus  baudes,  et  plus  effrénées 
«  que  les  hommes  ne  sont.  »  (Nef.  des  Fols,  fol.  7.) 
"  Trop  estoit  baude,  et  hardie.  «  (Chron.  S"  Denis, 
T.  I,  fol.  36.) 

Le  mal  déception  et  fraude, 

Qui  se  fait  par  femme  trop  baude 

Et  aussi  par  l'omme  trop  baitl 

Qui  vault  pis  assez  que  ribaut. 

Eust.  Ucsch.  Pocs.  MSS.  fol.  568. 

Tais-toi,  dist-elle,  garce: 

Trop  es  de  parler  baude. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n'  7518,  fol.  3i2.  R*  col.  t. 

On  a  employé  ce  mot  avec  la  signification  de 
hautain,  allier.  i^Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose,  au  mot 
Baull.)  Charlemagne,  regrettant  la  mort  de  Roland, 
s'exprime  ainsi  : 

Vous  n'aviez  pas  la  ciere  baude; 
Aine  estiez  la  fine  esmeraude. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  228. 


Si  lui  a  dit  de  baude  chiere 
Qui  que  tu  sois,  va  arrière. 

Eust.  Descli.  Poi'S.  MSS.  fol.  459,  ool.  1. 

On  a  dit  aussi  haut  pour  fin,  rusé  ; 

Le  renard  qui  est  trop  baut. 

Eust.  Desch.  Pocs.  MSS.  fol.  482,  col.  4. 

Remarquons  l'expression  suivante,  qui  semble 
avoir  un  sens  différent  des  acceptions  du  mot  baut 
exposées  ci-dessus.  Avoir  le  haut,  paroît  signifier 
avoir  l'éveil  :  «  Je  cuiday  avoir  le  haut,  et  estre  de 
■<  guet  d'après  minuit.  »  (Contes  d'Eulrapel,  p.  390.) 
variantes  : 

BAUD.  Dict.  de  Borel,  Nicot,  Ménage,  etc. 

Bauld.  Gace  de  la  Bigne,  des  Déduits,  MS.  p.  34,  R". 

Baulde,  fém.  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose. 

Bault.  Chron.  S'  Denis,  T.  I,  p.  180. 

Baut.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218.  fol.  283. 

Balch.  Mot  breton.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Baltha. 

Bals.  Borel,  Dictionnaire. 

Bault.  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose. 

Bauls,  plw.  Gace  de  la  Bigne  des  Déduits,  MS.  fol.  107. 

Baus.  Poës.  MSS.  avant  13Û0,  T.  III,  p.  1205. 

Baux.  Borel,  Dict.  au  mot  Baus. 

Bauz.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  529. 

Bandais,  subst.  masc.  Nom  de  lieu  ou  de  pays. 
Nous  trouvons  le  ro\j  de  Baudais  mis  avec  le  roij 
d'Afrique,  dans  Blanchand.  >is.  de  S'  Germ.  fol.  177. 
(Voy.  Bai  riAs.)  Ces  deux  mots  semblent  signifier  la 
même  chose. 

Baudas  (3),  subst.  masc.  Nom  de  pays. 

Li  Roy  de  Baudas. 

Parlon.  de  Blois,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  156. 

Dans  une  lettre  de  Ph.  de  Valois,  portant  imposi- 
tion sur  toutes  les  marchandises  vendues  à  Paris, 
on  lit,  entre  autres  choses  :  «  En  cenz  azur,  laque 
«  et  mastic  blanc,  mine  borrois,  inde  de  Baudas, 
«  yvoire,  etc.  »  (Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  II,  p.  320.) 

Baudeloiei',  subst.  Nom  propre  de  lieu.  La 
porte  Baudeloier,  c'est-îi-dire  la  porte  Baudoyer, 
à  présent  une  place  publique  de  Paris.  (Voy.  Juv. 
des  Ursins,  Ilist.  de  Charles  VI,  p.  201.)  L'orlhogra- 
phe  buldement  sembleroit  indiquer  l'origine  de  ce 
mot,  ainsi  que  ces  mots  baud  et  baudvie,  comme 
étant  dérives  de  valde,  validus  et  valetudo.  Dans 
celle  supposition,  il  faudroil  l'expliquer  d'abord  par 
fortement,  dontlesaulres  significations  ne  seroient 
qu'une  extension.  Dans  les  passages  de  S' Bernard, 
oîi  se  trouve  le  mot  haldement,  le  sens  le  plus  pro- 
pre seroit  celui  de  valde.  (Serm.  Fr.  p.  137.) 

Baudemeut,  adv.  Joyeusement.  — Bravement, 
hardiment,  hautement,  insolemment,  avec  pré- 
somption. —  Doucement. 

Ce  mot,  dans  les  Serm.  Fr.  mss.  de  S'  Bernard, 
p.  137  et  passim,  répond  au  latin  certe.  (Voy.  les 
Dict.  de  Nicot  et  de  Cotgrave  ;  Le  Duchat ,  sur 
Rabelais,  T.  I,  p.  20,  et  Gloss.  de  l'Hist.  de  Bret.) 

On  disoit  au  premier  sens  :  «  Ils  vinrent  tous 


(1)  Le  mot  latm  se  trouve  dans  un  texte  narbonais  de  1367,  mais  s'applique  à  un  objet  matériel  et  non  à  une  infirmité 
morale  :  «  Item  legamus...  utium  salinum  argenti,  in  quo  quidem  salino  est  deboyscliatus  unus  draco  ermantatus  cum 
signis  sive  armis  nostris.  »  (Mart.  I,  col.  1524.)  (N.  E.)  -  (2)  Si  le  sens  dilTére,  l'étymologie  est,  comme  pour  l'article 
précédent,  Tallemand  bald,  joyeux,  hardi,  (n.  e.)  -  (3)  C'est  Bufjdad  :  «  Tandis  que  li  roys  fermoit  sayete,  vindrent 
marcheanl  en  l'nst,  qui  nous  distrent  et  conteront  que  li  roys  des  Uartarins  avuit  prise  la  citei  de  Baudas  et  Tapostole  de? 
Sarrazins,  qui  estoit  sires  de  la  ville,  lequel  on  appeloit  le  calife  de  Baudas.  (JoinviUe,  éd.  de  W.,  §  584.)  (n.  e.) 


BA 


435  - 


BA 


«  hamlement  et  allaigrement.  «  (Juv.  des  Ursins, 
Hist.  de  Ch.  VI,  p.  380.)  «  Uelournerent  en  la  ville 
«  /)rt(/f/(?m(??if,  et  à  grand  joye.  »  (Froissart,  Vol.  I, 
page  91.) 

Bauilemcnt  signifioit  hardiment,  effrontément, 
hautement,  insolemment,  avec  présomption.  Frois- 
sart, parlant  des  amours  du  jeune  Boucicaut,  dit  : 
«  Il  ne  fut  mie  si  hardy  dé  plainement  dire  sa 
«  pensée,  comme  font  les  jeunes  gens  du  temps 
«  présent  qui,  sans  deffeste,  vont  baudement  aux 
«  dames  requérir  qu'ils  soyent  aimez.  »  (Histoire 
de  Boucicaut,  p.  30.)  «  Trouvèrent  les  Navarrois 
«  d'icelle  garnison  qui  ardoyent  un  village,  si  leur 
«  coururent  sus  baudement.  »  (Froissart,  Vol.  I, 
p.  222.  —  Voyez  Bout.  Som.  rur.  p.  181,  et  Monstr. 
Vol.  II,  fol.  172.) 

Il  se  prenoit  aussi  pour  doucement.  Voyez  le 
Gloss.  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis,  qui  renvoie  au 
passage  suivant  :  «  Le  bon  pledeoirdoit  ses  paroles 
"  dire  tout  baudement  et  entendement.  »  (Assis. 
de  Jérusalem,  p.  2G.)  Entendement  est  expliqué  par 
intelligiblement  dans  le  même  Glossaire. 

VARIANTES  : 
BAUDEMENT.  Froissart,  Vol.  I,  p.  91. 
Baldemknt.  S<  Bernard,  Serra.  Fr.  MS.  p.  137  et  passim. 
Baudemant.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  I,  fol.  107. 
Bauldement.  Gace  delà  Bigne,  des  Déduits,  MS.  fol  115. 

Baudequiii  (1),  subst.  inasc.  Baldaquin.  — 
Etoffe.  —  Monnoie. 

Sur  le  premier  sens  de  baldaquin,  voy.Du  Gange, 
Gloss.  lai.  au  mot  Baldakinus. 

Ge  mot  se  prend  aussi  pour  étoffe.  Froissart, 
parlant  de  l'entrée  de  la  reine  Isabelle  de  France  à 
Paris,  dit  :  «  Estoyent  des  bourgeois  de  Paris  douze 
«  cens...  parés,  vestus  tous  d'un  parement,  de 
«  gonnes,  de  baudequiaxerd  et  vermeil.  »  (Frois- 
sart, Vol.  IV,  p.  2.)  On  lit  à  la  marge  c\uegonnesesl 
pour  habillement  et  baudequhi  pour  le  drap. 

Enfin  ce  mot  a  signifié  une  espèce  de  monnoie 
ainsi  appelée,  parce  que  le  roi  étoit  représenté  assis 
sur  un  trône  couvert  d'un  baldaquin.  Les  mon- 
nayeurs  en  demandèrent  la  suppression  en  1308  : 
«  Item  qu'en  l'en  face  faire  dellense  des  ?^ft»f/(?fy;<îMS 
«  qui  courent  communément  pour  six  deniers.  » 
(Gloss.  latin  de  Du  Gange,  au  mol  Batdaliinus.) 

VARIANTES  : 
BAUDEQUIN.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  Il,  fol.  190. 
Baudekix.  Du  Gange,  Gloss.  latin,  au  mot  Baldakinus. 

Bauderie,  subst.  fém.  Joie,  gaieté  ou  cri,  ou 
bruit  de  joie.  —  Bravoure,  acte  de  valeur.  —  Van- 
terie,  fanfaronnade. 

Dans  le  DicLionnaire  de  Borel,  au  mot  Bauderie; 
on  V\ibandon  dans  la  traduction  de  Guill.  de  Tyr, 
édit.  du  P.  Martène,  T.  V,  de  sa  collection  p.  733. 
C'est  mal  à  propos  qu'il  renvoie  au  mot  Bandositas 
du  Glossaire  latin  de  Du  Gange.  Bandon  est  une 
faute  pour  baudor,  de  même  bandor  que  le  P.  Mar- 
tène explique  dans  son  Glossaire  par  en  public. 


Ce  mot  a  été  employé  avec  la  signification  de 
gaieté,  dans  les  vers  suivans  : 

J'ay  mainte  fois  chanté, 
De  joye,  et  de  baudor. 

Poès.  MSS.  avant  1300,  T.  Ill,  p.  1150. 

Il  s'est  dit  aussi  pour  cri  ou  bruit  de  joie  : 

Ils  mesnent  si  grand  joye,  tel  bruit,  et  tel  boudotir, 
Comme  se  chacun  eust  tout  plain  un  grand  voul  d'or. 
Ger.  de  Roussîllon,  MS.  p.  115. 

Ce  mot  a  signifié  bravoure  :  «  Vouloir  par  une 
«  présomptueuse  bndise,  »  dans  les  Serm.  Fr.  mss. 
de  S"  Bernard,  p.  319. 

Qui  en  toute  honnour, 

En  valour, 
Sanz  faul.K  tour, 
De  prouesse,  et  de  haudour 
Surmontoit  toute  contrée. 

Eust.  Desch.  Poès.  MSS.  fol.  97,  col.  1. 

On  s'est  servi  de  ce  mot  pour  vanterie,  ostenta- 
tion, fanfaronnade  : 

Le  trop  parler  me  deffendoit. 

Parler  à  point  me  commandoit 

Sanz  baudouv  et  sanz  vanterie  ' 

Sanz  mentir,  et  sanz  llaterie. 

Machaut,  MS.  fol.  22,  V  col.  3. 

VA^.IA^•TEs  ; 
BAUDERIE.  Borel,  Dictionnaire. 
Baudeche.  Atliis,  MS.  fol.  10,  R"  col.  1. 
Baudise.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  116. 
B.\DisE.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  p.  319. 
Baudorie.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  653. 
Baudoire.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  360,  V»  col.  1. 
Baudor.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1117. 
Bandor.  (Lisez  nàudor.)  Gloss.  de  Martèn.  T.  V,  p.  733. 
Baudon.  (Lisez  Haudor.)  Ibid. 
Baudour.  Marc,  et  Salem.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  116. 
Bautor.  Fabl.  MSS.  du  R.  n«  721S,  fol.  346,  R"  col.  1. 
BouDOUR.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  115. 

Bande wiiis,  nom  propre.  Baudouin. 

Baudi,  adj.  Entonné.  Il  semble  que  ce  soit  le 
sens  de  ce  mot  dans  ce  passage  : 

N'y  ot  trompe  sonnée,  ne  autre  cor  baudi. 
Chron.  MS.  de  B.  Du  Guesclin,  citée  par  Du  Gange,  Gl.  1.  au  mot  CalamelUi. 

Baudir,  verbe.  Réjouir.  (Dict.  de  Nicot  et  d'Ou- 
din.)  Ge  mot  se  trouve  très  souvent  employé  dans 
nos  anciens  livres  de  vénerie.  On  disoit  :  baudir  les 
chiens  (2),  pour  les  animer,  les  agacer:  «  Quant  ils 
"  auront  presque  mengé,  tu  tireras  le  loup  par  les 
«  jambes  et  le  reveriras,  et  ainsi  baudiras  tes 
«  chiens,  et  en  vauldront  mieulx.  »  (Modus  et 
Racio,  fol.  28,  V°.) 

Bandons,  3ubst.  masc.  plur.  Mot  factice,  pour 
l'action  de  faire  de  beaux  dons,  dans  ces  vers  : 

Beaulx  dons  de  vins  et  de  viandes 
Ont  fait  donner  ;  maintes  prébendes 
Beaulx  dons  si  font,  n'en  doublez  mye, 
Porter  tesmoings  de  bonne  vie  ; 
Moult  tiennent  partout  grans  baudons  (3)  : 
Qui  beau  don  donne  il  est  preud'homs: 
Les  dons  donnroit  loz  aux  donneurs. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  8625-8630. 

Baudoninaige,  subst.  masc.  L'acte  du  baudet. 
(Voyez  Rabelais,  T.  V,  p.  31.) 


(1)  Baudeguin,  baldaquin,  sont  des  dérivés  de  baldaco,  nom  corrompu  de  Bagdad,  où  se  fabriquait  une  étoffe  fine  servant 
à  faire  des  tentures,  (n.  e.)  —  (2)  On  a  encore  bauder,  aboyer  en  terme  de  chasse,  et  baudir,  encourager  un  faucon  à 
combattre  un  héron,  en  terme  de  fauconnerie,  (n.  e.)  —  (3)  Il  faut  lire  beaux  dons.  (n.  e.) 


BA 


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BA 


Baudouiner,  verbe.  Faire  l'acte  de  baudet.  — 
Dresser  des  poulains.  —  Aller  à  cheval. 

Le  premier  sens  de  faire  l'acte  de  baudet  se 
trouve  dans  Habelais,  T.  V,  p.  31.  Cotgrave  écrit 
baudinei'. 

On  disoit  aussi  baudouiner  pour  dresser  ou 
dompter  les  poulains.  (Dict.  d'Oudin.) 

Le  même  mot  désignoit  encore  aller  à  cheval  : 
«  S'en  alla  voir  un  sien  voisin,  selon  la  coustume 
»  qu'ils  avoient  de  voisiner  en  leurs  maisons, 
«  comme  de /w«f/oi(;'«x')' par  les  chemins.  «(Contes 
de  Des  Périers,  p.  77.) 

VARIANTES    : 
BAUDOUINER.  Rabelais,  T.  V,  p.  31. 
Badouiner.  Lisez  Bcmdomner. 
lîAUDiNER.  Cotgrave,  Dict. 

Baiulreotant,  adj.  Epithète  de  chien.  (Epilh. 
de  Martin  de  la  Porte.) 

Baudrier,  mbst.  masc.  Bourse,  escarcelle, 
écharpe,  pris  dans  le  sens  de  bourse  :  «  Bien 
«  faschés  d'avoir  si  mal  employé  l'argent  de  leur 
.<  baudrier.  «  (Brant.  Cap.  fr.  T.  IV,  p.  315.) 

Baudrillée,  subst.  fém.  Quantité.  (Dict.  d'Ou- 
din.) «  A  Metz,  en  Champagne  et  en  Lorraine,  on 
«  nomme  baudrillée  une  (luanlilé  d'espèces,  ou  de 
«  jetions  qu'on  voit  couler,  comme  un  à  un ,  d'une 
«  bourse,  ou  d'un  espèce  de  boiau,  tel  que  les 
..  marchands  en  portent  quelquefois  en  forme  de 
«  ceinture.  »  (Le  Duchat,  sur  Rabelais,  T.  I,  p.  181, 
note  24.) 

Baudroierie,  subsi.  fém.  L'art  et  le  métier  de 
corroyeur;  le  lieu  oîi  l'on  apprête  les  cuirs.  (Dict. 
de  >;icot  et  d'Oudin.) 

Baudroy  (1),  subst.  masc.  Espèce  de  poisson  de 
mer.  (Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Baudroyer,  subst.  masc.  Corroyeur.  Propre- 
ment faiseur  de  baudriers.  C'éloit  la  qualité  que 
prenoient  les  corroyeurs  qui  préparoienl  les  cuirs 
et  qui  faisoient  des  baudriers.  (Voy.  les  Ord.  des 
R.  de  Fr.  T.  II,  p.  305,  et  le  Dict.  de  Cotgrave.) 

VARIANTES  : 
BAUDROYER.  Ord.  des  Rois  de  France,  T.  II,  p.  365. 
Baudraveur,  liAUDRYEUR.  Cotgrave,  Dict. 

Baudroyer.  verbe.  Corroyer.  «  Préparer  les 
«  cuirs  tannés  à  recevoir  les  couleurs.  »  (Dict.  de 
^'icot  et  d'Oudin.) 

VARIANTES  : 
BAUDROYER,  Baudroier   Monet,  Dict. 

Bauduffe,  subst.  fém.  Toupie.  (Dict.  étym.  de 
Ménage,  et  Le  Duchat,  sur  Rabelais,  p.  75.) 

Bauduffle,  subst.  fém.  Espèce  d'étoupe  gros- 
sière. »  Je  me  torchay  de  foin,  de  paille,  debau- 
«  dufllc,  de  bourre  de  laine,  de  papier.  »  (Rabelais, 
T.  I,  p.  78.  —  Voyez  le  Dict.  étym.  de  Ménage.) 


Bauduin,  adj.  Epithète  d'âne. 

Ausi  com  asnes  hauduins 
Se  doit  servir  li  auduins. 

Poës  JISS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1340. 

Bauerie,  subst.  fém.  Moquerie:  «  On  peult 
«  entendre  irrision,  bauerie,  moquerie,  ou  brague- 
"  rie  en  paioles  :  et  par  rusticité,  vilenie,  rudesse, 
«  ineptitude  et  malplaisance  en  langage.  »  (J.  Le 
Maire,  Couronne  margaritique,  p.  47.) 

Bauffrée,  subst.  fém.  Lardon,  brocard,  coup  de 
dent  : 

La  rusée 

Ne  taschoit  sinon  à  pigner. 
Et  de  lascher  quelque  bauffrée, 
A  mordre,  ou  à  esgratigner. 

Coquillarl,  p.  lOfl  el  107. 

Bauffrer,  verbe.  Bâfrer,  manger  goulûment. 
(Dict.  de  Nicot,  Monet,  Cotgrave  et^Rob"  Estienne.) 
Ce  mot  vient  de  baultfrés,  mâchoire. 

VARIANTES  : 
BAUFFRER.  Rabelais,  T.  Il,  p.  219. 
Baufrer.  Dict.  de  Cotgrave. 

Bauffres,  subst.  plur.  Tranches,  morceaux. 
Voici  le  passage  oîi  ce  mot  se  trouve  ;  entre  autres 
préceptes  sur  la  manière  d'écorcher  le  cerf,  de 
l'habiller,  nous  lisons  celui-ci:  «  Coupe  le  cuyr 
<i  par  derrière  les  oreilles,  en  allant  au  travers,  en 
«  laissant  grans  beauffrées  du  cuir  pendant.  » 
(Modus  etRacio,  fol.  14,  V".) 

VARIANTES  I 
BAUFFRES.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  29,  R». 
Beauffrées.  Modus  et  Racio,  fol.  14,  V». 

Bauffreur,  subst.  masc.  Gourmand.  (Dict. 
d'Oudin  el  de  Cotgrave.) 

VARIANTES  : 
BAUFFREUR.  Oudin,  Dict. 
Baufreur.  Cotgrave,  Dict. 

Bauffreure ,  subst.  fém.  L'action  de  manger 
goulûment.  (Dictionnaire  de  Cotgrave.)  «  Après  les 
«  premières  bauffreures,  »  c'est-à-dire  après  les 
premiers  morceaux.  (Rabelais,  T.  V,  p.  22.) 

V.4.RIANTES  : 
BAUFFREURE.  Rabelais,  T.  V,  p.  22. 
Baufreure.  Cotgrave,  Dict. 

Bauge,  subst.  fém.  Demeure.  (Dict.  de  Borel, 
au  i\wi  Embaucite.)  Il  prétend  que  le  nom  Tolosto- 
boges  (2)  donné  aux  habitans  de  Toulouse  s'en  est 
formé,  ^otre  mot  bouge  pourroit  en  venir  aussi  : 
Sur  la  mer  de  Triple  chevauche 
Mais  il  n'y  a  maison  ne  bauche 
De  terre  ne  d'autre  merrien. 

Machaut,  MS.  fol.  232.  R"  col.  3. 

VARI.iNTES  : 
Bauche.  Machaut,  fol.  232. 

BOGE. 

Baugeart,  subst.  masc.  Terme  d'injure: 
«  Comme  qui  diroit  misérable  païsan  dont  les 
«  cabanes  n'ont  que  des  murs  de /'«»;/<'.  »  ^LeDuch. 
sur  Rab.  T.  I.  p.  170.  —  Voy.  le  Dict.  de  Cotgrave. 


(l)  C'est  le  nom  vulgaire  de  la  lophie  pêcheuse.  On  la  nomme  ainsi  à  cause  de  sa  large  bouche,  qui  semble  être  une 
bourse,  un  baudrier,  (n.  e.)  -  (2)  Il  faut  lire  Tolhloboii.  C'est  une  des  tribus  gauloises  qui  s'etabUrent  en  Asie-Mineure.  (N.  ï.) 


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—   437 


BA 


Baugié,  subnt.  masc.  Le  Bugey  (1).  Nom  de  pays  : 
«  Les  comtés  de  Bresse,  et  de  Itaiigié,  réunies  îi  la 
«  sacrée  couronne  de  France  par  eschange  du 
■«  marquisat  de  Salusses.  »  (Fav.  Th.  d"liO!i.  p.  1855.) 

Bauke,  siibst.  Pièce  d'un  moulin  à  vent. 
L'auteur,  faisant  allusion  des  vanteriesd'unhàbleur, 
à  un  moulin  à  vent,  s'exprime  ainsi  : 

L'eureus  wagons  a  en  covent 
Qu'il  fera  un  moulin  de  vent, 
En  la  vue  dame  Sarain  : 
Mais  n'i  aura  hauke,  ne  rain 
Ne  soit  laite  d'un  menteeur. 

PoCs.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  13ri7. 

BauUlrier,  suhst.  Baudrier.  —  Armement 
d'homme  qui  servoit  à  porter  Fépée.  (Gloss.  du  R. 
de  la  Hose.) 

Baiilx(2),Sî</;sf.?HftSC.;j/î<r.  Soliveau.  «  .SousTan 
«  44G'(,  en  plaidoyant  une  cause  en  parlement  à 
«  Paris,  la  chambre  se  prit  à  trembler,  et  cheut 
«  illec  une  grosse  pierre  de  la  massonnerie,  et  le 
«  lendemain  advint  le  péril  (pour  pareil)  en  plai- 
«  dant  celte  cause,  et  saillit  un  des  haulx  de  la 
«  chambre  hors  de  son  lieu.  »  (Chron.  de  14(10- 
14G7,  dans  l'Hist.  de  Ch.  VU,  de  Den.  Godefr.  p.  3.-9.) 
Au  4'  T.  de  Louis  XI,  de  Théod.  Godefr.,  ce  mot  est 
expliqué  par  soliveaux  mis  de  travers.  On  dit 
encore  baux  pour  signifier  les  pièces  de  bois  ou 
poutres  qui  soutiennent  les  ponts,  ou  tillacs  des 
navires. 

VARIANTES  : 
B.\ULX.  Hist.  de  Ch.  VII,  de  Den.  Godefr.  p.  359. 
Baux.  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  289. 

Baume,  subst.  fé)ii.  Grotte,  caverne.  (Dict. 
d'Oudin  et  de  Ménage.)  Balrne,  en  Bourgogne,  si- 
gnifie grotte,  d'oi^i  se  sont  formés  plusieurs  noms 
de  lieux.  (Yoy.  la  P>oque,  Orig.  des  noms,  p.  65.)  Il 
se  dit  pour  colline  dans  quelques  lieux  de  France. 
(Voy.  Du  Gange,  Gloss.  latin,  au  mot  Balma.)  En 
Provence,  ce  mot,  sous  l'orthographe  baume,  dési- 
gne un  nom  de  lieu.  «  Et  fùsmes  au  lieu  de  la 
«  liasme  (3),  en  une  roche  moult  haull,  lu  où  l'on 
«  disoit  que  la  Sainte  Magdelaine  avoit  vesqu  en 
«  hermilage,  longue  espace  de  temps.  »  (.Joinv. 
page  118) 

Baumo  se  dit  en  Auvergne  pour  tombe,  ou  cavité 
d'un  rocher.  (Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Balma.) 

VARIANTES  : 
BAUME.  Oudin,  Dict. 
Balme.  La  Roque,  Orig.  des  noms,  p.  65. 
Basme.  Joinv.  p.  H8. 
Baumo.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Balma. 

■  Bauson,  subst.  fém.  Saison  d'abattre  les  bois. 

«  uni  coupe,  ou  abat  les  branches  d'un  cliesne, 

«  quinze  sols  parisis,  qui  est  trouvé  foyant  bois,  et 

«  fauchettes,  et  taillis,  amende  de  trente  sols  pari- 

•  sis,  se  les  bois  abattus  ne  sont  relevés  dedans  la 

«  margette  en  suivant  la  bauson  à  coupe,  amende 


«  de  soixante  sols  parisis.  »  (Coût,  de  Peron,  au 
Nouv.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  601.) 

Baiit,  suhst.  masc.  Peut-être  ce  mot  n'est-il 
qu'une  corruption  de  l'orthographe  bail.  (Voyez 
Bail.)  Alors  il  signiiieroil  disposition,  puissance 
dans  ces  vers  : 

Li  maus  d'amors,  qui  ne  me  faut, 
.le  sui  du  mont  tout  en  leur  haut. 

Falil.  MSS.  du  R.  n"  7i!18,  fol.  304,  V"  col.  2. 

Baut,  adj.  Terme  de  chasse.  «  Le  veneur  doit 
«  choisir  de  sa  meute  un  chien  le  plus  beau,  hardy, 
«  ardant,  gaillard,  et  baut,  c'est-à-dire  secret,  qui 
«  n'ait  encore  chassé,  etc.  ■>  (Du  Fouilloux,  Vén. 
fol.  113.) 

Bavardin,  subst.  masc.  Bavard.  (Lettres  de 
M°"  de  Sévigné  (4),  T.  I,  p.  132.) 

Bave,  subst.  fém.  Bavardage.  Discours  inutiles, 
babil,  caquet,  sornettes  et  moqueries.  (Dict.  de 
Borel  et  Gloss.  de  llarot,  au  mot  Bave.) 

Nous  devisasmes  là  de  baves. 

Coquillart,  p.  t4G. 

«.Partout  oîi  il  sera  sceu,  on  en  tiendra  rys  et 
«  baves.  ..  (Perceforest,  Vol.  III,  fol.  80.) 

On  disoit:  estre  en  bave,  pour  être  en  enfance. 
(Voyez  Garasse,  Rech.  des  Rech.  p.  862.) 

VARIANTES  : 
BAVE.  Le  Duchat,  sur  Rabelais,  T.  II,  p.  123. 
BAVEniE.  Nicot,  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 
Bavardinage,  subst.  masc.  Lett.  de  Sévigné,  T.  I,  p.  132. 

Baver,  verbe.  Bavarder.  Parler  inutilement, 
liàbler.  (Dict.  de  Nicot,  Borel  et  R.  Est.  au  moi  Baver.) 

Et  quant  ils  eurent  bien  bavé. 
Disant  de  luy  des  maulx,  par  voye. 
Il  dist,  eulx  ayans  achevé  : 
Gardez  que  le  roy  ne  vous  oye. 

\'\gi\.  de  Charles  Vil,  T.  I,  p.  38. 

VARIANTES  : 
BAVER.  L'Amant  rendu  Cordelier,  p.  .590. 
B.WASSER.  Essais  de  Montaigne,  T.  III,  p.  31. 
Bavardiner.  Lett.  de  Madame  de  Sévigné,  T.  I,  p.  148. 

Bavernes,  subst.  fém.  plur.  Balivernes.  Mo- 
queries. (Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Baverolle ,  subst.  fém.  Banderolle.  On  lit  : 
Lance  et  baverolle  (5),  dans  les  Mém.  Du  Bellay, 
T.  VI,  page  267. 

Bavesche ,  subst.  fém.  Bobèche.  (Dict.  de 
Cotgrave.  —  Voy.  Serées  de  Bouchet,  Liv.  Il,  p.  207.) 

Baveur,  subst.  masc.  Bavard,  hâbleur.  (Dict. 
de  Nicot,  Gl.  de  Marot  et  Celthell.  de  L.  Trippault, 
au  mot  Baveur.)  On  disoit,  au  diminutif  et  au 
pluriel,  bavereauLx.  (Œuvres  de  Collerye,  p.  141.) 

Bavus,  dans  Marbodus,  est  dans  le  sens  propre 
de  baveux  :  «  Refaire  enfanz  bavus.  » 

VARIANTES  : 
BAVEUR.  Clém.  Marot,  p.  683. 
Baveux.  Dict.  de  Nicot.  -  Le  Jouvencel,  MS.  p.  228. 


(1)  La  forme  latine  est  probablement  Baugiacum,  pays  couvert  de  bauges,  (n.  e.)  -  (2)  .Bau  vient  sans  doute  de  l'allemand 
Balken.  (N.  E.)  -  (3)  Ceiie  Baume  est  une  montagne  du  Var;  si  l'on  en  croit  A.  Thierry,  baou  serait  un  mot  ligurien.  (N.  E.) 
-  (4)  Elle  emploie  aussi  bavai-dino- :  «  Nous  n'avons  fait  que  bavardiner  et  nous  n'avons  point  causé.  »  (Edition  de  1735, 
p.  40.)  (N.  E.)  —  (5)  Ne  faut-il  pas  lire  baneroUe  ?  (N.  E.) 


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Bavaceux.  Contredits  de  Songecreux,  fol.  120,  V». 
liAVARDiN.  Lett.  de  Madame  de  Sévigné,  T.  I,  p.  132. 
liAVEREAULX  (plur.)  Roger  de  Collerye,  p.  141. 
Baveuse,  suhsl.  fé»i.  CoquilUut,  p.  78. 
Bavebesse,  suhsl.  fém.  Ibid.  p.  :i7. 
B.WAURESSE,  mlisl.  féin.  Iljid.  p.  3. 
Bavl'S,  suhs(.  fém.  Marbodus,  col.  IGiS. 

Bavière  (1),  subst.  fém.  Bavette.  —  Mentonnière 
d'un  casque  ou  le  casque  même  garni  de  men- 
tonnière. 

Dans  le  premier  sens,  Rabelais  dit  des  frères 
Fredons:  «  Quand  ils  vouloieiit  boire,  ou  manger, 
«  ils  rabaloient  les  cahuets  de  leurs  caputions,  par 
»  le  devant,  et  leur  servoil  de  baincrc.  »  (Rabelais, 
T.  V,  p.  13i.) 

On  disoit  aussi  baviere  pour  la  mentonnière  d'un 
casque.  «  Jean  Stuari  duc  d'Albanie  eut  là  un  coup 
«  de  traict  d'un  arcTurquois,  duquel  fut  sa  baviere 
«  faulsée,  avec  sa  gorgerette,  tout  au  travers,  et 
<i  luy  atteint  jusques  au  sang.  »  (J.  d'Auton,  Ann. 
de  Louis  XII,' p.  208.)  Le  P.  Daniel,  dans  sa  Mil.  Fr. 
T.  I,  p.  400,  croit  que  c'éloit  une  espèce  de  cornette 
de  taffetas  dont  on  ornoit  Farmet.  Nous  ne  trou- 
vons rien  qui  autorise  cette  conjecture. 

VARIANTES  : 
BAVIÈRE.  Crétin,  p.  82. 

Baverete.  Monet,  Dict. 
Baverette.  Rab.  T.  IV,  p.  222. 
B.WEROTTE.  Cotgrave,  Dict. 
B.WEROLLE.  Oudin,  Dict. 

Baville,  subsl.  Nom  de  lieu.  Endroit  de  Paris, 
près  la  porte  S'  Antoine.  (Voy.  Brant.  Cap.  Fr.  T.  III, 
p.  40'2.)  Il  faut  peut-être  lire  Bastille  ou  Belleville. 

Bavois  (2),  subst.  masc.  «  C'est  le  tableau,  ou 
«  feuille  de  compte  qui  contient  le  fondement  de 
«  l'évaluation  desdroictsdeseigneurinage,  foiblage, 
«  escharté  et  brassage,  selon  le  prix  qui  court,  et 
«  qui  est  attribué,  par  l'ordonnance  du  Roy,  à  l'or, 
«  argent,  et  billon,  tant  en  œuvre,  que  œuvré.  » 
(Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.) 

VARIANTES  : 
BAA'OIS.  Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr. 
Bavouer.  Cotgrave,  Dict. 

Bavolée,  adj.  au  fém.  Coiffée  en  bavolet.  Il  est 
employé  comme  uintliète  de  chambrière,  dans  les 
Epithètes  de  Mart.  de  la  Porte. 

VARIANTES  : 
BAVOLÉE,  B.A.VOLETTÉE.  Epith.  de  Mart.  de  la  Porte. 

Bavoler,  verbe.  Voltiger.  (Dict.  d'Oudin  et  de 
Cotgrave.) 

Ce  petit  archerot  amour, 
lia  volant,  s'esgayoit  un  jour 
Dedans  les  Vergers  de  Cythère. 

Pocs.  de  Rem.  Bcll.  T.  I,  p.  5G. 

On  disoit  aussi  :  bravolerdes  estes,  pour  voltiger, 


battre  des  ailes.  »  La  chuette  bravolera  des  estes, 
«  cl  (juant  l'esprevier  la  verra  ;  il  vendra  llaler  en 
«  my  les  pans,  ainsi  sont  pris  les  espreviers  à  la 
«  perche.  »  (Modus  et  Racio,  ms.  fol.  168.) 

VARIANTES  : 
B.4. VOLER.  Poës.  de  Rem.  Bell.  T.  I,  p.  56. 
BR.A.VOLER.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  108,  V. 

Bavolette  (3),  stibst.  fém.  Paysanne,  femme  en 
général  portant  un  bavolet.  (Dict.  d'Oudin.  —  Vov. 
le  Dict.  Etym.  de  Ménage,  au  mot  Bavette.) 

Bavon,  subst.  masc.  Bavette.  (Dict.  d'Oudin  et 
de  Cotgrave.) 

Bayette,  subst.  fém.  Revesche.  Espèce  d'étoffe 
de  laine.  (Dict  d'Oudin.) 

Bayoïmes  (i),  subst.  fém.  plur.  Baïonnettes. 
(Dict.  de  Borel,  au  mot  Baioniers.) 

Baze,  subst.  fém.  La  partie  inférieure,  la  queue. 
On  a  dit  aux  médecins:  «  Otez  la  baze  de  vos  R  ; 
«  vous  ferez  D,  et  ainsi,  au  lieu  de  recipe,  nous 
«  aurons  decipe.  »  (Contes  de  Chol.  fol.  53.) 

Bazestan,  subsl.  masc.  Le  marché  des  esclaves 
en  Turquie.  ■-■  Il  faudroit  visiter  telles  dames  avant 

«  les  aimer,  et  espouser de  mesmes  en  font  les 

«  Turcs  en  leur  bazestmi, quand  ils  acbeplent 

>'  des  esclaves  de  l'un  et  de  l'autre  sexe.  »  (Brant. 
Dames  Gai.  T.  I,  fol.  302.) 

Bazille,  subst.  fém.  Criste  marine.  Espèce  de 
plante  appelée  herbe  de  S'  Pierre.  (Dict.  d'Oudin.) 

Bazille  (curé  de  Sainte-).  Nom  factice.  (Voy. 
Coquin,  p.  107.) 

Beanfet,  subst.  Bénéfice  ou  fief  donné  en 
récompense  des  services.  «  Nos  Herveu  de  Léon, 
«  avons  donné  à  pur  et  perpétuel  héritage  à  fin  et 
«  à  jamais  audit  Herveu  Ilequier  et  aux  seans  tote 
«  la  tarre  et  la  sasine  que  le  devant  dit  Cuiomarc 
«  le  peire  au  devant  dit  Herveu  tenet  par  son 
«  beanfet,  et  quant  qu'il  avoet  eu  de  noire  per  et 
«  de  notre  hœul.  »  (D.  Morice,  Hist.  de  Bretagne, 
col.  983.)  Peut-être  aussi,  faudroit-il  lire  beaufet 
pour  beau  fait  de  guerre,  service  rendu  à  la  guerre. 

Béant,  part.  Ouvert,  fendu.  —  Surpris,  étonné. 

Ce  mot  subsiste  au  premier  sens.  Mart.  de  la 
Porte  s'en  est  servi  pourépilhètede  la  terre  entr'ou- 
verte  par  la  trop  grande  chaleur. 

Lorsque  l'élonnement  ou  l'admiration  agissent 
sur  nous  avec  force,  nos  sens  sont  comme  enchaî- 
nés et  notrebouches'ouvresansnousen apercevoir; 
de  là  béant  s'est  dit  figurément,  pour  étonné,  saisi 
d'admiration.  «  Caton  et  Scipion  accusés  en  public 
«  ont  fait  rougir  leurs  accusateurs,  entraîné  les 
«  juges,  et  toute  l'assemblée  béante  à  leur  admira- 


(1)  La  mentonnière  fut  élevée  sous  le  règne  de  Charles  VII  jusqu'au-dessus  des  narines,  avec  une  projection  suffisante 
en  avant  et  des  ouvertures  pour  qu'il  fût  possible  de  respirer  à  l'aise  ;  c'est  ce  qu'on  a  appelé  la  baviere.  C'était  un  peu 
une  bavette.  (N.  T..)  -  (2)  On  trouve,  dans  Du  Cange,  6ama»-di(.s,  ftni«'ia)-(i».s,  monnaie,  (n.  e.)  -  (3)  La  bavolette  était  ua 
agrément  ajoute  aux  coiffes  des  servantes,  vers  le  temps  de  Richelieif  ;  elle  consistait  en  une  sorte  de  drapeau  qui  pendait 
par  derrière,  entre  les  épaules.  L'étymologie  est  sans  doute  bas  voler,  (n.  e.)  -  (4)  Des  Accords,  au  xvi»  siècle,  dans  ses- 
Kebvis  de  Picardie,  écrit  :  «  iinsi  que  l'on  dit  bayonnettes  de  Rayonne.  »  D'autres  voudraient  voir  dans  bayonnettes  ua 
dorive  de  buynela,  coutelas  en  espagnol,  (n.  e.) 


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«  tion,  et  suite.  »  (Sagesse  de  Charron,  p.  387.  — 
Voy.  Baer.) 

Beat,  adj.  Nous  ne  rapportons  ce  mot,  qui 
subsiste,  que  pour  remarquer  son  ancien  usage.  Il 
désignoit  autrefois  toutes  sortes  de  religieux;  ainsi 
l'on  disoit  beats  pars,  pour  exprimer  les  moines 
en  général.  (Dict.  de  Cotgrave.  —  Voy.  Pasquier,  Liv. 
VIII,  p.  731,  et  le  Moyen  de  Parvenir,  p.  224.) 

Béate,  subst.  fém.  Aumône.  Ce  mot,  formé  de 
beat,  signifioit  spécialement  l'aumône  faile  îi  un 
moine.  «  La  besasse  des  religieux  s'appelloit  beati- 
«  quorum,  et  l'aumosne  qu'on  leur  faisoit  se  nom- 
"  moit  la  béate.  «{Garasse,  Rech.  des  Rech.  p.  280.) 

Beatilles  (1),  subst.  fém.  plur.  Colifichets.  — 
Femme  de  petite  taille- 

Au  premier  sens,  on  comprenoit  sous  ce  mot 
toutes  sortes  de  petits  ouvrages  et  d'ornemens 
d'un  prix  médiocre.  (Voyez  Du  Cange,  Glossaire, 
latin,  au  mot  Beatillœ.  —  Oudin,  Cur.  Fr.) 

Par  une  extension  de  cette  première  acception, 
bealUes  a  signifié  une  petite  femme  ;  du  moins 
lisons-nous  que  ce  mot  «  s'est  dit  en  quelques  en- 
«  droits  des  femmes  de  petite  hauteur.  »  (Celthel. 
de  Léon  Trippault.) 

VARIANTES  : 
BEATILLES.  Oudin,  Cur.  Fr. 
Beatiles.  CeltheU.  de  Léon  Trippault. 

Béatitude,  subst.  fém.  M.  de  Villeroy,  dans 
ses  Mém.  T.  I,  p.  181,  donne  ce  titre  au  Pape,  et  le 
qualifie  plus  bas  Sa  Sainteté.  (Voy.  aussi  La  Roque' 
de  la  Nobl.  p.  362.)  ' 

Beau,  adj.  Grand.  —  Terme  d'amitié.  —  Terme 
de  mépris. 

Ce  mot  avoit  beaucoup  de  significations.  Comme 
la  plupart  subsistent  encore,  nous  ne  parlons  que 
de  celles  qui  sont  hors  d'usage. 

Beau  se  disoit  pour  grand.  C'est  en  ce  sens  qu'il 
est  employé  dans  les  expressions  suivantes  : 

1°  Boire  à  son  beau  plaisir  et  aise.  «  Entrèrent 

«  les  gens  du  Jouvencel  tous    armez, et  la 

•<  beurent,  et  repeurent  à  leur  beau  plaisir  et  aise.  » 
(Le  Jouvencel,  ms.  p.  574.) 

2°  Faire  beau  bruit.  Façon  de  parler  encore  usi- 
tée. (Le  Jouvencel,  ms.  p.  88.) 

3'  Belle  fiebvre,  pour  fièvre  violente.  (Mém.  de 
Rob.  de  la  Marck,  S«'  de  Fleur,  .vs.  p.  94.) 

Ce  même  mot,  qui,  lorsque  nous  le  joignons  à 
ceux  de  père  et  mère,  fils,  frère,  sert  encore'aujour- 
d'hui  à  marquer  la  parenté  qui  nait  d'une  alliance, 
n'étoit  autrefois  que  l'expression  de  l'amitié  et  de 
la  familiarité  entre  les  personnes  du  sang  royal,  et 
d'un  rang  égal  entre  elles.  Ce  n'est  pas  que  celles 
d'un  rang  inférieur  n'usassent  aussi  de  ce  terme, 
mais  c'étoit  par  un  excès  de  vanité.  C'est  ainsi  du 
moins  que  s'en  explique  l'auteur  des  Honneurs  de 
la  Cour.  «  Quand  les  Roys  et  Roynes,  ducqs,  duclies- 


«  ses,  princesses  ont  des  parents,  niepces,  cousins 
■>  germains  et  autres  de  grand  lignage,  puis(|u'ils 
«  sont  de  sang  royal,  les  doivent' appeller  beaux 
"  nepveux,  etc..  et  doibt  estre  ce  nom  de  beau  ou 
«  belle,  et  des  uns  aux  autres  aussy  en  escripture, 
«  mais  qu'ils  soient  de  mesme  degré  et  d'une 
"  mesme  noblesse,  et  toutes  ces  choses  dessus 
0  diltes  ne  se  doibvent  faire  ez  maisons  de  plus  bas 
«  degré,  sy  comme  de  comtesses,  vicecomtesses, 

«  baronnesses, et  ne  leur  appartient  aussi  d'ap- 

«  peller  leurs  parents  beaux  cousins  et  belles 
«  cousines,  sinon  autrement  que  mon  cousin  et  ma 
«  cousine  ;  et  quiconque  en  use  autrement  que  dict 
«  est,  il  doibt  estre  notoir  à  chacun  que  cela  se  fait 
«  par  gloire  et  présomption,  et  doibt  estre  réputé 
«  pour  nul.  »  (Les  Honn.  de  la  Cour,  ms.  p.  74.)  Si 
le  rang  et  la  dignité  mettoient  quelque  différence 
entre  les  personnes  de  sang  royal,  alors  il  n'appar- 
tenoit  qu'au  supérieur  de  se  servir  du  terme  de 
6eflH,  et  l'inférieur  n'en  usoit  pas,  lors  même  que 
le  degré  de  parenté  sembloit  devoir  lui  donner  la 
supériorité  et  autoriser  cette  dénomination.  L'auteur 
cité  dit  :  «  Quand  monsieur  le  ducq  Philippe,  eut 
«  espousé  madame  Michèle  sa  première  femme,  qui 
«  fut  fille  du  Roy  de  Fiance,  monsieur  le  ducq 
«  Jean,  père  d'iceluy  ducq  Philippe,  la  vouloit 
«  toujours  servir  d'espices,  mais  elle  ne  le  vouloit 
>■  sousfrir,  toulesfois  il  s'agenouilloit  toujours 
«  jusques  à  terre  devant  elle,  et  l'appelloit  madame, 

«  et  elle  l'appelloit  beau  père quand  madame 

"  Catherine,  fille  au  Roy  Charles  de  France,  eut 
«  espousé  Monsieur  de  Charrolois,  Madame  la 
«  duchesse  de  Bourgogne  sa  belle  nure  (2)  mettoit 
«  toujours,  la  ou  elle  pouvoit.  Madame  Catherine 
«  devant,  et  luy  faisoit  grand  honneur;  et  aussy 
«  faisoit  Monsieur  le  Ducq  Philippesetl'appelloient 
«  Madame,  et  elle  les  appelloit  beau  père  et  belle 
«  mère.  »  (Ibid.  p.  17.) 

On  pourroit  citer  plusieurs  autres  exemples  qui 
confirment  cet  usage.  Le  roy  Charles  V,  parlant  à 
ses  frères,  les  appelle  beaux  frères,  et  Louis  XI,  qui 
use  de  la  même  expression,  en  parlant  h  ses  frères, 
se  contente  d'appeler  frère,  le  duc  de  Bourbon, 
mari  de  sa  sœur.  (Voy.  Froissarl,  an  1380,  p.  97,  et 
Mém.  de  Comin.  T.  III,  preuv.  p.  70.)  Bel  et  biel 
frères  est  souvent  répété  dans  Carpentier,  Histoire 
de  Cambrai. 

On  trouve  beau  fils  pour  propre  fils,  dans  la 
Chron.  S'  Denis,  T.  I,  p.  256.  Ces  règles  du  cérémo- 
nial, dont  nous  venons  de  parler,  n'empêchèrent 
pas  que  ce  mot  beau  ne  passât  dans  le  langage 
familier,  comme  une  expression  obligeante  et  ami- 
cale, commune  à  tout  le  monde  : 

Beau  filz,  belle  fille  et  beau  père, 
BiaiLc  oncles,  cousins,  hiaux  nepveux, 
Biait  compains,  bêle  suer,  biau  frère, 
Belle  cousine,  i>iaux  filleux, 
Biaux  voisins,  s'appellent  entr'eulx 
Plusieurs,  en  langaige  commun, 


(X)  Beatilles  esi  un  diminutif  de  beatus  et  s'appliquait  aux  petits  om-rages  des  religieux,  agnus,  pelotes,  boîtes;  les 
religieux  y  mêlaient  peut-être  des  reliques  de  béaiifiés.  (n.  e.)  -  (2)  Du  latia  nurus. 


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Qui  s'entr'ainent  comme  chiens  et  leux. 
On  ne  doit  pas  croire  chasoun. 

Eusl.  Descli.  l'ois.  MSS.  fol.  14i,  col.  2. 

De  là,  les  différentes  farons  de  parler  suivantes  qui 
ne  sont  employées  que  p;ir  honnéleté,  par  amitié  ou 
par  confiance.  Beaux  amis.  Un  chevalier  appelle 
ainsi  un  pauvre.  (Percef.  Vol.  IV,  fol.  28.)  On  trouve 
beaux  cotnpains  ou  compagnons,  dans  l'Histoire  de 
Du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  408.  Le  comte  de  Flan- 
dres, parlant  au.\  i-'lamands,  qui  lui  promettoient 
deux  cent  mille  hommes  armés  à  son  service,  les 
appelle  beaux  enfants.  (Froissart,  livre  II,  p.  48.) 
C'est  en  ce  sens  encore  que  l'auteur  plein  de 
confiance,  adressant  la  parole  à  Jésus-Christ, 
s'exprime  ainsi  dans  ces  vers  : 

A  vos  me  rent,  heau-perc  Jhesu  Criz; 
Si  bon  Seignor  avoir  je  ne  porroie 

Chans.  MSS.  du  G"  Thib.  page  8. 

Un  père  parlant  à  son  fils  lui  dit  :  «  Biax  filz,  et 
«  celui-ci  li  repond  fecrtHjjpr^?.  »  (Athis,  ms.  f°  126.) 

Beaul  doux  oncle.  Terme  d'amitié  d'un  neveu 
parlant  à  son  oncle.  (Ger.  de  Rouss.  ms.  p.  108.) 

Nous  remarquerons  qu'on  appeloit  aussi  les  reli- 
gieux beaux  pères.  Sur  cet  usage,  voyez  Pasquier, 
Rech.  livre  VIII,  p.  731. 

Beau,  joint  au  mot  sire,  se  trouve  employé  par  le 
secrétaire  de  Machaut,  prêtant  la  parole  à  son 
maître  qui  le  consultoit  :  ><  Sire,  quant  il  m'ayt,  il 
«  prisl  à  rire  et  me  disl  en  riant  biau  sire,  vous 
«  n'avez  mestier  de  conseil.  »  (Machaut,  ms.  f"  200.) 
Mais  il  emportoit  presque  toujours  une  idée  ironi- 
que et  piquante.  Louis  .\1  écrivant  au  chancelier,  et 
voulant  lui  faire  sentir  qu'il  étoit  roi,  se  sert  du 
ternie  de  beau  sire.  (Duclos,  Preuv.  de  l'Histoire  de 
Louis  XI,  p.  452.)  Une  demoiselle  parlante  un  nain 
l'appelle  beau  sire,  dans  Florès  de  Grèce,  fol.  62. 
Dans  Eust.  Deschamps,  une  femme  emploie  la 
même  expression,  en  parlant  de  son  mari.  (Poës. 
MSS.  fol.  515,  col.  2.)  Cette  interpellation  ne  s'est 
conservée  parmi  nous  qu'en  parlant  aux  masques. 

Plaçons  ici  quehiues  expressions  où  le  mot  beau 
se  trouve  employé  sous  différentes  acceptions  : 

Estre  mont  bon,  suffisant  et  mont  beil  la  Deu 
merci,  se  disoit  d'une  personne  qui  étoit  en  bonne 
santé;  comme  qui  diroit  assez  bonne  et  belle 
situation.  (Rymer,  T.  I,  p.  102.)  On  lit  biel  dans  le 
même  titre,  rapporté  par  D.  Morice  (Histoire  de 
Bretagne,  Preuv.  col.  997.) 

1°  Faire  le  beau  beau,  pour  faire  le  joli.  (Dict. 
d'Oudin.) 

2*  Faire  beau  beau,  pour  caresser,  flatter  : 

Cela  me  desplairoit 

Quelque  beau  beau  que  la  cour  ne  sceust  faire 
Et  qui  ce  tour  bien  souvent  me  feroit, 
Possible  n'est  que  luy  sceusse  complaire. 

Chasse  d'Amours,  fol.  35,  col.  1. 

3°  Tuer  de  beau  faict.  C'est-à-dire  de  bonne 
guerre,  à  son  corps  défendant.  »  Tu  as  occis,  non 
«  pas  de  beau  fait,  mais  par  trahison.  »  (Percttf. 
Vol.  IV,  fol.  30.) 

4"  Bar  beau.  On  disoit  :  Par  beau  ou  par  lait, 

pour  degré  ou  de  force  :  «  Une  demoiselle ung 

"  grant  Seigneur  vouloit  avoir  par  beau  ou  par  lait. 


«  à  faire  son  fol  plaisir.  »  Par  beau  ou  autrement, 
s'est  employé  dans  le  même  sens.  (Voyez  Froissart, 
livre  H,  p.  133.)  On  disoit  aussi  : 

Cil  ont  son  commandement  fait, 

Ou  eus  soit  IjcI,  ou  eus  soit  lait. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7980,  fol.  5C.  V  col.  2. 

5°  A  beau  Jeu  beau  retour.  On  se  servoit  de  cette 
façon  de  parler  pour  dire  que  deux  adversaires  sont 
de  force  égale.  «  Il  le  pressoit  de  si  prez  que  bien 
«  souvent  il  ne  luy  donnoit  loysir  de  se  parer,  n'y 
«  mettre  l'escu  au  devant  des  coups;  mais  à  mau 
«  chat,  mau  rat,  a  beau  jeu,  beau  retour.  »  (D.  Flo- 
rès de  Grèce,  fol.  7d.) 

La  devise  de  la  maison  de  Beaujeu,  étoit  :  »  A  tout 
«  venant  beaujeu.  »  (Menestr.  Orn.  des  Arm.  p.  241.) 

Bial  eage,  pour  le  bel  âge,  la  jeunesse. 

6°  Par  bel  et  /jarora je.  Bel,  dans  celle  expression, 
mis  en  opposition  avec  orage,  semble  employé 
substantivement,  mais  il  est  aisé  d'apercevoir  que 
son  substantif  est  sous-entendu.  Au  propre,  on  a  dit  : 

M.  et  cccc  Troiens 
Mena  jiar  bel  et  par  orage. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  139,  R'. 

Au  figuré,  on  a  dit  : 

Après  le  bian,  après  la  belle  chière, 
Tu  t'esmerveilles  s'il  a  sus  toy  pieu. 

Geofr.  de  Par.  à  la  suite  du  Rom.  de  Kauv.  MS.  n'  6812,  fol.  55. 

7"  Dire  bel.  Louer,  dire  du  bien  de  quelqu'un,  en 
parler  avantageusement  : 

Devant  vous,  vosire  bel  diront, 
El  derrières  vous  trahiront. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  205,  U-  col.  1. 

8"  Se  Dieu  est  bel.  Nous  disons  en  ce  sens,  s'il 
plaît  à  Dieu.  (Fabl.  mss.  du  R.  n°  7218,  fol.  128.) 

9"  Beaubout,  pour  le  haut-bout.  «  Après  que  le  mes- 
«  lier  fut  servy,  les  quatre  siraines,  fines  ouvrières, 
«  filles  du  fieuve  Achelous,  et  de  Calliope  la  Muse, 
«  compagnes  de  Proserpine,  fille  de  Ceres,  déesse  de 
«  fertilité,  se  présentèrent  sur  le  beau  bout.  »  (J.Le 
Maire,  Illustr.  des  Gaules,  livre  I,  p.  93.) 

10"  Beau  /î/s.  C'est-à-dire  joli  garçon  ou  bel 
enfant  :  «  Si  ce  nouveau  champion  emporte  leprys, 
«  vous  vous  pourrez  bien  moquer  de  moy  et  dire 
«  que  ie  l'auray  mal  deffendu.  Neantmoins  vous  y 
«  aurez  moins  de  regret,  pour  autant  qu'il  est  beau 
«  filz.  "  (J.  LeMaire,'^Illustr.desGau!es,L.I,p.l37.) 

11°  Beau  matin.  Façon  de  parler  usitée  :  "  Un 
«  beau  matin,  (\\\e  le  vent  fut  bon  et  propice,  chacun 
«  print  congé  de  ses  parents  et  amis.  »  (.1.  Le  Maire, 
Illustr.  des  Gaules,  Livre  II,  p.  167.) 

variantes  : 

BEAU.  Orth.  subsist. 

Heaubout.  J.  le  Maire,  Illustr.  des  Gaules,  T.  I,  p.  93. 
BiALAT,  Bkl.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  l'J2. 
BiAU.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  I,  fol.  112. 
BiAUL  at  Be.vl.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  203. 
BiAux  iplur.)  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  144,  col.  2. 
Baus  at  Bax.  Athis,  MSS.  fol.  53,  V°  col.  2. 
Beil.  Rymer,  T.  I,  p.  102,  til.  de  1265. 
Baul.  6er.  de  Roussillon,  MS.  p.  210. 

Beals,  Béas.  S'  Bern.  Serm.   Fr.  MSS.  p.  32,  passiin.  et 
373,  sous  le  lalin  Baciostis  et  Pulcher. 
Bibles  pour  Bel.  Carpentier,  Hist.  de  Cambrai,  T.  II,  p.  18. 
BiA.\.  Fabl,  MSS.  du  R.  n»  71),  fol.  58. 
Beaulx  (jilur.)  Ger.  de  Nev.  2«  part.  p.  25. 


BE 


BE 


Beal.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  203. 
Bel.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  229. 
Bels  pour  Beaux.  Marbodus,  col.  1644. 
Beu.  Ibid.  p.  7G15,  T.  I,  fol.  119,  R»  col.  2. 

Beau,  adv.  Bien.  Comme  adverbe,  ce  mot  étoit 
d'un  usage  aussi  étendu  que  notre  adverbe  bien.  Il 
en  avoit  toutes  les  significations.  On  disoit  :  «  Il  fit 
«  un  pas  de  clerc,  et  luyméme  l'aprit  à  ses  dépens, 
«  car  pour  beau  dragmer  ses  drogues  infusives,  il 
«  ne  sceut  signe,  etc.  »  (Contes  de'Chol.  fol.  195.) 

Bial  pai'olle,  bien  le  sot  faire.  (Athis,  m.  fol.  90.) 

Les  vessiaux  sont  si  bel  menez, 
Que  je  croi  que  mie.x  ordenez 
Ne  vit  homs  nus,  en  un  tas  tel. 

G.  Guiart,  MS.  fui.  309,  V'. 

Plus  biati  signifioit  quelquefois  mieux  : 
S'en  conforta  plus  biaii  qu'il  pot 

Fabl.  MSS.  du  R.  n°  7-218,  fol.  355,  R'  col.  1. 

Bel  (par),  pour  bien,  convenablement  : 

Qui  a  grâce,  et  qui  prye  amesuréement 

Et  qui  parle  par  bel  et  aviséeraent 

Prier  peut,  et  requerre  le  tout  présentement. 

J.  de  Meung,  Cod.  1349  cl  13.')1. 

Ainsi  comme  plus  beau  jmet,  pour  du  mieux 
qu'il  peut.  (Ger.  de  Roussillon,  ms.  p.  53.) 
On  disoit  proverbialement  : 

Qui  biau  dit,  biau  veut  oir. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  150,  R-  col.  l. 

VARIANTES  * 
BEAU.  Contes  de  Cholières,  fol.  195,  R». 
Bial.  Athis,  MS.  fol.  90,  R»  col.  2. 
Biau.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  I,  fol.  111,  R»  col.  1. 
Bel  et  Bel  (par).  Ibid.  u»  7218,  fol.  313,  V"  col.  1. 

Beaucoup,  adv.  Beaucoup.  Borel  et  Ménage 
dérivent  ce  mot  de  beau,  grand ,  et  de  coup,  en 
latin  copia.  Cette  élymologie  me  paroît  d'autant 
plus  vraisemblable  que  je  trouve  un  passage  propre 
à  l'appuyer.  On  lit  dans  l'Histoire  des  Albigeois,  en 
languedocien,  par  un  anonyme,  dans  les  preuves 
du  3'  T"  de  rnist.  de  Languedoc,  de  D.  Vaisselle, 
col.  4:  «  Lor  avia  iait  grand  cop  de  mal  »,  c'est- 
à-dire  leur  avoit  fait  beaucoup  de  mal.  (Ibid.) 
Bclcop  de  gens  pour  beaucoup  de  gens.  (Id.)  Rien, 
dans  les  passages  que  nous  allons  citer,  ne  contre- 
dit l'origine  que  nous  donnons  à  cet  adverbe  : 

«  Sire,  dictes  nous s'il  vous  plaist   aucune 

«  advenlure Beaulx  coups,  dist  le  Seigneur, 

«  vous  en  puis-je  dire,  car  j'en  vis  plus  de  mille.  » 
(Lanc.  du  Lac,  T.  II,  fol.  84.)  On  le  disoit  aussi  pour 
signifier  :  une  grande  partie.  «  Clotaire  se  vit, 
«  avant  mourir,  monarque  delà  Gaule,  el  de  beau- 
«  coup  de  l'Allemagne.  »  On  trouve  aussi  autre  cop 
pour  une  autre  fois.(Hist.  des  Albigeois,  M/>i  suprà.) 

VARIANTES    : 
BEAUCOUP.  Orth.  subsist. 
Beaulcoup.  Rabelais,  T.  I,  p.  31. 
Beaulxcoups.  Perceforest,  Vol.  V,  fol.  92,  'V»  col.  2. 
BiAUcop.   Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7615,  T.  II,  f«  163,  V»  col.  2. 
Beacob.  Œuv.  de  Rog.  de  Collerye,  p.  189. 
Belcop.  Hist.  des  Albig.  preuv.  de  l'Hist.  de  Languedoc. 
Belcops.  Ibid.  col.  46. 

Beaufils,  subst.  7nasc.  Rabelais  a  dit  :  "  Le 
«  monde  est  deveuu  beau  fils.  »  C'est-à-dire  plus 
rusé,  plus  savant.  (T.  III,  p.  195.) 
II. 


Beateit,  subst.  fém.  Beauté.  Ce  mot,  dans  les 
Serin.  Fr.  mss.  de  S'  Bernard,  répond  au  latin  décor, 
pulchritudo  et  species.  Voyez  les  autorités  citées 
sur  chaque  orthographe  : 

Rose  de  niay  ne  flors  novelle 
Premièrement  quant  elle  est  née 
N'est  pas  tant  fort  encoulorée 
Que  la  bialcz  cardyones. 

Athis,  MS.  fol.  5,  R-  col.  1. 

Sa  biatés  qui  me  rapele. 

Quant  m'en  voeil  partir,  me  ratrait. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7989,  fol.  62,  R'  col.  2. 
Moul  boinement  a  esgardé 
Son  cors,  son  vis,  et  sa  biaté, 
A  lui  parla  cortoisement. 
Et  il  li  respont  simplement 
Ne  li  dist  qui  bien  ne  sièce. 

Ibid.  fol.  C5,  V  col.  2. 

VARIANTES    : 
BEATEIT,  Beateiz,  Beatez.  S'  Bernard,   Serm;  Fr.  MSS. 
page  19  et  passim. 
Bateil.  Atbis,  MS.  fol.  23,  R-  col.  1. 
Batel  at  BiAUTÉ.  Athis,  MS.  fol.  50,  V°  col.  1. 
Belté.  Jlarbodus,  col.  1644. 
Beaultè.  Perceforest,  Vol.  II,  fol.  35,  V»  col.  1. 
Baulté.  Faifeu,  p.  18.  i 

Biaté.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7989,  fol.  68,  R»  col.  1. 
Biatés.  Ibid.  fol.  62,  R»  col.  2. 
BiATE.  Athis,  MS.  fol.  5,  R»  col.  1. 
Bialte.  Villehardouin,  page  48. 
BlAUTÉ.  Beaumanoir,  page  15. 
Beanté.  (Lisez  Beauté.)  'Borel,  Dict. 

Beaupere,  subst.  inasc.  Confesseur,  directeur. 
(Glossaire  de  l'Histoire  de  Paris.) 

Beauregard,  subst.  masc.  Belvédère.  (Dict. 
d'Oudin.) 

Bec,  suhst.  masc.  Visage.  —  Nez.  —  Langage. 
—  La  crête  d'un  fossé.  —  Le  sommet  d'une 
montagne. 

Dans  le  premier  sens  de  visa:;e,  on  a  dit  : 

Tournez  toudis  le  bec  pardevers  France. 

Eust.  Deschamps,  Poês.  MSS.  fol.  lOG,  col.  1. 

"  Ils  avoient  le  bec  au  vent  pour  tirer  à  leur 
"  pais.  "  (Le  Jouvencel,  ms.  p.  5G7.) 

Ce  mot  a  signifié  le  nez  :  «  Crestien  penront  par 
«  le  bech,  »  pour  prendront  par  le  nez;  «  nous  nous 
«  rendrons  maisires  d'eux.  »  (Machaut,  Mss.fol.230.) 

Bec  a  été  employé  pour  langage,  babil,  discours  : 
«  Sçavez-vous  pas  qu'il  n'a  que  le  bec,  et  que  par 
»  ses  belles  raisons  et  persuasions,  etc.  »  (Cymbal. 
mundi,  p.  92.)  Villon  a  fait  une  ballade  sur  les 
femmes  de  Paris,  qui  a  pour  refrain  : 

Il  n'est  bon  bec  que  de  Paris. 

Villon,  p.  73. 

On  trouve  ce  mot  avec  la  signification  de  la  créle 
d'un  fossé,  ou  levée  de  terre  :  «  Ceux  qui  ont  leurs 
»  terres  voisines  aus  dits  chemins,  et  joignans  à 
«  iceux,  sont  tenus  les  entretenir,  en  telle  manière, 
"  que  la  sainct  Jean  Baptiste  passée,  s'ilz  sont 
«  trouvez  non  ayant  relevé  les  becques,  et  fossés 
■<  eslans  selon  les  dits  chemins,  et  que  les  eaues 
«  dorment  et  ne  se  puissent  escouler,  par  faute  des 
«  dites  becques,  ou  autres  choses  non  relevées,  les 

«  hommes  de  la  cour  du  dit  bailliage peuvent 

«  condemner  ceux  qui  ont  et  d&tiennent  les  dites 
«  terres  voisines,    à  faire  ouverture  de  ce  qui 

56 


BE 


—  442  - 


BE 


«  empesche  l'cscoulement  des  eaues.  »  (Ord.  des 
Rois  de  France,  ï.  II,  p.  '207.) 

Enfin,  bec  signifie  le  sommet  d'une  montagne, 
dans  le  passage  suivant:  -<  Souffit  bien  de  laissier 
«  courre  dix  ou  douze  chiens  de  muete,  et  faire  au 
«  moins  quatre  reliez  cliascun  de  quatre  chiens  es 
«  becs,  et  i)lus  haut  des  montaignes,  etc.  »  (Chasse 
de  Gaston  Piichus,  .ms.  p.  2'iG.) 

Expressions  remarquables  : 

1°  Donner  du  bec  et  de  l'aisle ,  c'est-à-dire  faire 
ses  efforts,  employer  toutes  sortes  de  moyens.  (Voy. 
Brantôme,  Capitaines  frangois,  T.  III,  p.  39(j.) 

2°  Faire  bec,  c'est-à-dire  caresser: 

Plus  de  trente  fois  la  baisa, 
Ele  demande  que  c'estoit  : 
Il  dit  que  liée  H  feaoil. 

Fal)l.  MSS.  du  R.  a"  7G15,  T.  II,  fol.  ISi,  V  col.  1. 

3°  Faire  le  bec.  Terme  de  chasse.  On  s'en  servoit 
en  parlant  des  autours. 

4°  Garder  le  bec.  Une  mère  encore  belle,  étant 
jalouse  de  sa  fille  encore  plus  belle  qui  avoit  excité 
l'admiration  d'une  assemblée  nombreuse  de  cheva- 
liers, se  promet  de  ne  la  plus  faire  paroilre  de 
longtemps  à  de  pareilles  fêtes,  et  dit  : 

Au  départir  verrois  qu'en  iert; 
Je  l'en  cuit  bien  le  bec  garder 
A  pièce,  mais  n'ira  muser 
La  ou  veoir  puise  chevaliers. 

Alhis,  MS.  fol.  H7,  V  col.  2. 

5°  Entretenir  qiielfiii'un  te  bec  en  l'eau.  L'amuser, 
le  leurrer.  ÎSoiis  (li.sniis  encore  en  ce  sens  :  tenir  le 
bec  dans  l'eau.  (Méui.  Du  Bellay,  Liv.  IV,  fol.  90.) 

6°  Le  bec  des  ongles.  En  termes  de  vénerie,  on 
disoit  bec  pour  le  bout  des  ongles  d'un  chien  : 
«  S'ilz  ont  trop  séjourné,  faites  leur  accourcir  le 

«  bec  des  ongles, pour  ce  que  les  ongles  ne  se 

«  rompent  au  courre,  quant  ilz  sont  trop  longs.  » 
(Chasse  de  Gaston  Phé'jus,  ms.  p.  107.) 

7"  Becs  de  cane.  Espèce  de  souliers  qui  succédè- 
rent à  la  chaussure  appelée  poulaine  :  «  L'on  fit 
«  d'autres  souliers  qu'on  nommoit  becs  de  cane, 
«  ayans  un  bec  devant  de  quatre  ou  cinq  doigts  de 
«  longueur.  »  (Citation  de  Du  Gange,  Gloss.  latin, 
au  mot  Polainia.) 

S°  Avoir  bec  de  casne ,  c'est-à-dire  être  las, 
fatigué  :  «  De  tant  parler,  j'ay  bec  de  casne.  »  (Recr. 
des  dev.  amour,  demand.  d'am.  p.  90.) 

9"  Bec  de  corbin ,  Bec  de  faucon.  Hache  à  bec  de 
faucon ,  Bec  d'oustarde.  Espèce  d'armes  qui  fut 
atTectée  particulièrement  aux  cent  gentilshommes  à 
bec  de  corbin.  (Voyez  Dict.  étym.  de  Ménage;  le 
Gloss.  lat.  de  Du  Gange  ;  le  Père  Daniel,  Mil.  fr. 
T.  II,  p.  104,  et  Brantôme,  sur  les  Duels,  p.  14.) 
«  Tantôt  après,  voyans  les  dessus  dits  Angiois,  ceste 
«  division  en  l'avantage  de,  tous  ensemble  entre- 
«  rent  en  eux,  et  jetlerent  jus  leurs  arcs  et  saietles, 
«  et  prindrent  leurs  espées,  haches,  mailles,  becs 
"  de  faucons  et  autres  bastous,  frappans,  abatant  et 
«  occisant  iceux  François.  »  (Monstrelet,  Vol.  1, 

fol.  229.)"  Convient  avoir quatre  cens  haches 

«  de  guerre,  tant  à  bec  de  faulcon  que  aullres.  » 
(Le  Jouvencel,  fol.  85.) 


Cannoniers  laissez  vos  bombardes, 
Piétons  laissés  voler  vos  picques, 
Mignons  laissez  chevaulx,  et  bardes, 
Vos  grands  battons,  vos  becs  d'oustarcles. 

Coquillart,  p.  S. 

10°  Le  bec,  bech  ou  becq  de  faucon  étoil  aussi,  à 
ce  qu'il  paroit,  une  espèce  de  grue  portée  sur  les 
galères  :  elle  servoit  à  élever,  au-dessus  des  plus 
hautes  tours,  un  esquif  ou  petit  bateau  qui  conte- 
noit  des  gens  de  guerre  et  les  faisoit  descendre  sur 
la  tour  ou  autres  lieux  dont  ils  vouloient  faire 
rattaijue.  Parlant  du  siège  d'Afrique,  ville  de  Bar- 
barie, vers  1390  :  «  D'autre  partie  devers  la  mer 
"  (dirent  Genevois)  avons  intentions  de  faire  sur 
«  quatre  galères,  deux  becqs  de  faulcon,  et  en 
«  chacun  becq  de  faulcon  un  eschis  à  mettre  quinze 
«  hommes  d'armes  et  dix  arbaleslriers  ;  et  n'y  a 
«  bech  de  faucon  qu\  ne  soit  plus  haut  que  n'est  la 
«  tour  du  port  qui  tant  est  forte,  et  si  celle  tour 
«  pouvons  avoir,  nous  aurons  tout.  »  (Histoire  de 
Loys  m,  duc  de  Bourbon,  p.  300.) 

1 1"  Saigner  du  bec.  Façon  de  parler  qui  revient 
à  la  nôtre  :  saigner  du  nez.  (Voyez  fllistoire  du 
Théâtre  française  T.  I,  p.  161.) 

12°  Un  lourde  bec,  c'est-à-dire  un  baiser.  (Dict. 
d'Oudin.  —  Voyez  Coquillart,  p.  107.) 

13°  Bec  d'oxje  est  le  nom  d'une  sorte  de  poisson, 
aiguillât,  dauphin.  (Dict.  d'Oudin.) 

"li"  Faire  le  bec  à  l'oye.  Achever  une  affaire. 
(Oudin,  Cur.  fr.) 

VARIANTES  : 
BEC.  Orthographe  subsist. 
Bech,  Becq.  Machaut,  MS.  fol.  220,  R°  col.  1. 
BiEC.  Ph.  Mouskes,  MS. 
Bes.  Chans.  MSS.  du  comte  Thibaut. 
Bêche,  féin.  Cotgrave,  Dict. 

Becque.  Molière,  Ecole  des  femmes,  acte  iv,  scène  vi. 
Beccus.  Borel,  Dict. 
Becquillon.  Coquillart. 
Bequillon.  Niool,  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 

Becîice,  subsl.  fém.  Bécasse.  Du  mot  bec, 
comme  le  brochet,  bécard.  (Voy.  les  autorités  citées 
sur  les  orthographes.)  On  disoit  :  "  tendre  le  sac 
«  aux  becacès  »  pour  tendre  un  piège,  attraper, 
séduire  : 

Bien  a  la  borgoise  tendu 

Au  bouriîois  le  sac  as  becaccs. 

Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  fol.  31:2. 

VARIANTES  : 

DEGAGE.  Orthographe  subsist. 

Becdasse.  Cotgrave,  Dict. 

Begage.  Brantôme,  sur  les  Duels,  p.  39. 

Begasse.  Modus  et  Racio,  fol.  92,  R». 

Beguasse,  mot  de  Marseille.  Rabelais,  T.  II,  p.  «S. 

Bequache.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  188,  V". 

Becaïiler  (compaignons  du).  Mot  factice,  pour 
dire  une  société  de  gens  qui  causent  beaucoup, 
société  de  bavards  : 

Compaignons  du  beeafiler. 
Et  de  merveilles  controuver. 
Pensez  des  nouvelles  à  prandre 
Par  ce  vous  ferez  couronner  : 
La  se  peut  chascun  eslever, 
Pour  compte  de  ses  bourdes  rendre. 

Eusl.  Descl).  Poês.  MSS.  fol.  il5,  col.  2. 


BE 


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Beccade,  stibst.  fém.  Béquée.  On  a  dit,  en 
parlant  de  la  manière  dont  il  faut  dresser  un  fau- 
con :  «  Se  tu  le  treuves  mengant ne  lui  fais 

«  nulle  froiterie  ne  ennuy,  mais  le  reprens  au 
«  loerre  s'il  a  mengié,  et  lui  donne  une  bcchiéc  de 
«  char,  et  lui  met  le  chapperon.  »  (Modus  et  Racio, 
Ms.  fol.  120.)  Ce  mot  est  pris  dans  un  sens  figuré  en 
ce  passage:  «  Vint  le  duc  d'Orléans  à  Paris,  pour 
«  prendre  une  beschée  sur  la  pouvre  ville.  » 
(Journal  de  Paris  sous  Charles  VI  et  VU,  p.  191.) 

VARIANTES  : 
liECCADE.  Oudin,  Dict. 
Becquade,  Besquée.  Cotgrave,  Dict. 
Beschée.  .Tournai  de  Paris  sous  Charles  VI  et  VII,  p.  191. 
Bêchée.  Monet,  Oudin,  Dict. 
Bechiée.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  lUf,  R°. 

Beccasse,  stibst.  fém.  Terme  d'injure.  Iteccasse 
est  une  injure  dite  à  une  femme  dans  Coquillart, 
p.  11'2,  et  dans  le  Moyen  de  parvenir,  p.  (32.  On 
disoit  begaiisse,  pour  une  femme  grosse  et  grasse, 
selon  le  patois  normand.  (Moy.  de  parvenir,  p.  204.) 
Begarde  est  une  injure  dans  l'Histoire  des  Trois 
Maries,  en  vers,  mss.  p.  204. 

VARIANTES  : 
BECCASSE.  Coquillart,  p.  112. 
Begarde.  Hist.  des  Trois  Maries,  MS.  p.  204. 
Begauce.  Moyen  de  parvenir,  p.  204. 

Beccher,  verbe.  Donner  des  coups  de  bec.  — 
Becqueter,  manger. 

Au  premier  sens,  nous  trouvons  ce  mot  employé 
dans  les  vers  suivans  : 

Si  durement  les  cuit  bechei 

Qu'ils  n'auront  gaire  mon  bec  cher, 

Parce  qu'il  me  vont  debéchant. 

Hisl.  de  S"  Léocade,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  29. 

Ce  mot  a  signifié  manger  :  «  Les  poulets  lors 
«  ne  daignèrent  fcfc/iW'.  »  (Machiavel,  sur  Tite-Live, 
page  89.) 

VARIANTES  : 
BECCHER.  Machiav.  sur  Tite-Live,  p.  89. 
Bêcher.  Hist.  de  S"  Léocade,  MS.  de  S.  Germ.  p.  29. 
Beschier.  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7218,  fol.  47,  R»  col.  1. 
Becquier.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  187,  V». 
Bekier.  Vies  des  SS.  MS.  de  Sorbonne,  chiffre  lx,  col.  33. 
Bequier.  Histoire  de  B.  Du  Guesclin,  par  Ménard,  p.  396. 
Bequer.  Monet,  Borel,  au  mot  Beccus. 
Debecher.  Histoire  de  S'«  Léocade,  ubi  s^^prà. 

Becchus,  adj.  Qui  a  le  nez  long  et  aquilin.  — 
Pointu.  —  Arrondi  en  bec  de  cane. 

Dans  le  premier  sens,  on  lit:  «  Beccli us  i\qm\i- 
«  nus:  qui  a  long  nez.  »  (Glossaire  du  P.  Labbe.) 
Bechu  est  au  même  sens  dans  le  Dict.  de  Borel. 
(Voyez  ibid.  Becu.  —  Voy.  aussi  le  Dict.  de  Cotgrave, 
et  les  Œuvres  de  Roger  Collerye,  p.  189.)  Monet 
explique  ce  mot  par 'garni  de  bec.  Il  est  mis  en 
opposition  avec  camus,  sous  l'orthographe  bescu, 
dans  le  Blason  des  Faulces  Amours,  p.  263,  et  dans 
les  Poésies  de  Machaut,  ms.  fol.  205,  où  bescuz  est 
employé  comme  épithète  de  suette,  qui  signifie 
chouette. 


Becu  signifie  pointu ,  aigu ,  dans  la  Farce  de 
Pathelin,  qui,  parlant  de  pifules  à  son  médecin,  dit: 

Ces  tiois  petits  morceaux  becus. 

Pathelin,  Farce,  p.  4fi. 

On  trouve  bescu  mis  en  ce  sens,  dans  Coquillart, 
page  128. 

Enfin,  le  mot  &£'C7»H  a  signifié  aussi  arrondi  en 
bec  de  cane. 

Les  demy  pantoufles  hecquues, 
Rondes  par  devant  comme  un  œil. 

Coquillart,  p.  17. 

VARIANTES  : 
BECCHUS.  Labbe,  Glossaire,  p.  488. 
Bechu.  Borel,  Dict. 
Becu.  Roger  de  Collerye,  p.  489. 
Becquu.  Coquillart,  p.  17. 
Bescu.  Blason  des  Faulces  Amours,  p.  303. 

Becco,  subst.  masc.  Herbe.  Celle  qu'on  nomme 
en  latin  rostrum  avis.  (Dict.  de  Borel.) 

Becdassée.  Epithète  ou  sobriquet  donné  à  un 
cuisinier,  dans  Rabelais,  T.  IV,  p.  171. 

Becgueter,  verbe.  Imiter  la  voix  de  la  chèvre. 
(Voy.  Rab.  T.  III,  p.  143,  et  la  note  de  Le  Duchat.) 

Bêche  (fils),  subst.  mase.  Agneau.  Ainsi  appelé 
de  son  cri  ,  comme  l'ânon  est  appelé  plus  bas 
fils  han,  par  la  même  raison  dans  les  Fables  mss.  de 
S.  Germ.  fol.  48. 

Becliebois  (1),  subst.  mase.  PWerl.  Sorte  d'oi- 
seau. (Voy.  les  autorités  citées  sur  les  orthographes 
diverses  de  ce  mot.)  Entre  autres  injures  dites 
à  une  vieille,  on  lit: 

.  .  .  Vos  talons  sont  plus  flairans 
Que  becque  holts,  et  que  hairans. 

Récr.  des  Dev.  Araour.  p.  92. 

VARIANTES  : 
BECHEBOIS.  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 
Beschebois.  Cotgrave,  Dict. 
Becquebo.  Nicot,  Oudin,  Ménage,  Dict. 
Bequebo.  Nicot,  Dict. 
Becqueholts.  Récréât,  des  Dev.  Amour,  p.  93. 

Becheinent,  subst.  mase.  L'action  de  bêcher, 
de  fouiller  la  terre.  (Voy.  les  Dict.  d'Oudin  et  de 
Cotgrave,  au  mot  Besehagc.)  «  Thresor  d'or,  ou 
«  d'argent  trouvé  en  terre,  par  bechement,  ou 
«  ouverture  est  au  prince.  »  (Coût.  Gén.  T.  U, 
p.  758.) 

VARIANTES  : 
BECHEMENT.  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  258. 
Besche.ment.  Cotgrave,  Dict. 
Beschage.  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 

Bechet,  subst.  mase.  Brochet.  Sorte  de  poisson 
dont  la  hure  se  termine  en  pointe,  et  forme  une 
espèce  de  bec  (2),  d'oîi  on  l'a  nommé  beehet.  (Voy.  les 
Dict.  de  Monet,  d'Oudin  et  de  Cotgrave.)  «  Que  nul 
«  ne  preigne  ftec/i(?^  en  la  rivière  de  Sonne,....  de- 
«  vaut  la  feste  de  S'  Laurent.  "  (Ord.  des  R.  de  Fr. 
T.  II,  p.  350.)  BeequeteauQii\eà\m\ïm\,iî(}iQbecquet 
et  répond  à  notre  diminutif  brocheton.  (Voy.  le 
Coût.  Gén.  T.  I,  p.  813.) 


(1)  On  emploie  encore  la  forme  beschois.  (n.  e.)  -  (2)  La  forme  broche!  a  la  même   origine.   Le  nom  le  plus  ancien  est 
celle  de  luz  {luciiis).  (n.  e.) 


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VARIANTES  : 
BECIIET.  Nicot,  Monet,  Oudin,  Colgrave,  Dict. 
Becquet.  Ordon.  des  R.  de  Fr.  T.  Il,  p.  207. 
Bequet.  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  20O. 
lÎECQUETEAU.  Coul.  Gén.  T.  I,  p.  813. 
Begus.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  3i3,  V"  col.  1. 

Beclicterre,  subst.  masc.  Homme  qui  bêche 
ou  laboure  la  terre.  (Dict.  de  Cotgrave,  au  mol 
Beclicur.) 

Jamais  un  brave  cœur,  cependant  qu'il  a  vie, 

Ne  se  peut  contenter  ; 

Ores  il  est  content  avec  six  pieds  do  terre, 

Partage  égal  à  tous  ; 

Car  autant  en  emporte  un  c\\eti{  becheterre 

Que  le  plus  grand  de  nous. 

Tomb.  de  Mouline,  à  la  suilc  do  ses  Mcm.  fol.  582. 
VAHIANTES  : 
BECHETERRE.  Tomb.  de  Montluc,  Mém.  fol.  582. 
Bêcheur.  Cotgrave,  Dict. 

Bechevet,  subst.  masc.  A  tête-bêche,  pieds 
contre  tête  et  réciproquement.  Ce  mot,  suivant 
Ménage  (Dict.  Etym.)  ,  se  dit  de  deux  choses 
placées  à  contre-sens,  ou  dont  l'une  a  les  pieds  à 
la  tête  de  l'autre.  Il  signifie  tête  à  tête,  suivant  le 
Dict.  de  Cotgrave,  et  la  tête  en  bas,  suivant  Le 
Laboureur  (Orig.  des  Arm.  p.  148),  ce  qui  est  con- 
firmé par  un  passage  du  Moyen  de  Parvenir,  p.  188. 
Faucliet  prétend  (\Vie.beschevelovibeschevet,?>\gn\^\^ 
double  chef  ou  chevet.  (Des  Orig.  Liv.  II,  p.  120.) 
Selon  Monet,  c'est  un  double  chevet  en  un  lit,  l'un 
à  la  tête  et  l'autre  aux  pieds.  On  lit  dans  Rabelais 
que  c'est  un  jeu  d'eufans,  qu'ils  jouent  avec  deux 
épingles  que  l'un  d'eux  cache  dans  la  main.  Quand 
la  tête  de  lune  est  tournée  vers  la  tête  de  l'autre, 
elles  sont  ;i  bescltevel.  (Voy.  Le  Duchat,  sur  Rab. 
T.  I,  p.  loi,  note  18.) 

VAniANTES  : 
BECHEVET.  Ménage,  Dict.  Etym. 
Beschevet.  Fauch.  Orig.  Liv.  II,  p.  120. 
Beschevel.  Le  Duchat,  sur  Rabelais,  T.  I,  p.  151,  note  18. 

Becheul,  subst.  masc.  Sorte  de  cage.  Nous  en 
trouvons  la  tléliuition  dans  ce  passage  :  «  Doitestre 
«  carrée,  et  doit  avoir  chascun  costés  m  pies  à  pié 
«  main,  et  trois  doies  et  est  fait  ainsi.  «  (Modus  et 
Racio,  Ms.  fol.  175.) 

VARIANTES  : 
BECHEUL.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  175,  R». 
Bercheul.  Ibid.  fol.  17G,  R". 
Becueu..  Ibid.  fol.  175,  R". 
Becul.  Modus  et  Racio,  fol.  85,  V°. 
Beiiuel.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  175,  R». 

Becjaulne,  subst.  et  adj.  Innocent,  niais,  sot. 
—  Droit  de  bienvenue.  —  Main-mortable.  (Voy.  sur 
ce  mot  le  Gloss.  de  Du  Gange,  au  mot  Beamis,  et 
les  Dict.  de  Rorel  et  de  CotgTave.) 

Le  premier  sens  se  lire  de  l'allusion  aux  oiseaux 
qui  pour  la  plupart  ont  le  bec  jaune  avant  d'être 
drus: 

Fait  qui  jeunes  gens  conseille  ; 
Sans  faille,  ce  n'est  pas  merveille  ; 


S'ous  n'en  savés  quartier  ne  aulne, 
Car  vous  avez  le  fcf.'c  trop  jaune. 

Rom.  de  la  Rose,  {Son  e(  13575. 
Batrai  à  moult  grant  armes 
Orages  bes  trop  jancs. 

Athis,  MS.  fol.  6",  V'col.t. 

On  nommoit  becjaulne  ou  becjaune  un  droit  de 
bienvenue  payé  au  trésorier  de  la  Basoche,  par  les 
nouveaux  clercs  du  palais.  Ceux  qui  étoient  nobles 
payoienl  le  double.  (Voy.  Miraum.  des  Cours  Souv. 
p.  G61.)0n  expédioitdes  lettres  de  bec  jaunes  à  ceux 
qui  étoient  nouvellement  reçus.  (Voy.  le  Rec.  des 
statuts  de  la  Bazoche,  p.  Cl.) 

Enfin,  les  mains-mortables  sont  appelées  becjau- 
nes,  en  quelques  lieux.  (Voyez  Laurière,  Glossaire 
du  Dr.  Fr.) 

VARIANTES  : 
BECJAULNE.  Jliraum.  des  Cours  Souv.  p.  661. 
Becjaune.  Path.  Farce,  p.  25. 
Bejaulne.  Vill.  Rep.  Fr.  p.  16. 
Bejaune.  Monet,  Dict. 
Begaune.  Cotgrave,  Dict. 

Bejane.  Du  Cange,  Gloss.  latin,  au  mot  Beanus. 
Beane.  Id.  Ibid. 
Bes  janes  (pliir.)  Athis,  MS.  fol.  67. 

Becqueneau,  adj.  Babillard,  causeur,  rappor- 
teur. (Oudin,  Dict.  et  Gur.  Fr.)  On  trouve  presque 
toutes  ces  orthographes  dans  le  Dict.  de  Nicot.  On 
a  dit  de  mademoiselle  d'Entraigues  qu'elle  étoit  im 
bec  affilé,  et  on  lit  plus  bas:  «  Il  vous  fallut.... 
«  trouver  cent  mille  ecus  pour  donner  à  cette 
«  Bequenaut.  »  (Mém.  de  Sully,  p.  63.) 

VARIANTES  : 
BECQUENEAU.  Nicot,  Oudin,  Dict. 
Becouenau.  Ibid. 
Bequenauld.  Cotgrave,  Dict. 
Bequenaud.  Nicot,  Dict. 
Bequenaus.  Mém.  de  Sully,  p.  63. 

Becquerelles,  subst.  fém.  plur.  Brocards. 
(Dict.  de  Borel,  qui  cite  les  Rebours  de  Mathiolus.) 

Becquerelles,  adj.  au  fém.  plur.  Médisantes, 
mordantes.  Proprement  qui  donnent  des  coups  de 
bec.  «  Je  n'ignore  pas  quelle  fut  la  vengeance  des 
^>  Muses  contre  les  becquerelles.  «  (S'  Jul.  Mesl. 
Ilistor.  p.  1G2.) 

Becquetement,  subst.  masc.  L'action  de 
becqueter.  (Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Becudel.s,  subst.  masc.  plur.  Pois  chiches. 
Ainsi  nommés  dans  le  patois  de  Montauban,  parce 
qu'ils  ont  une  pointe  comme  un  bec.  (Dict.  de  Borel, 
au  mol  Beccus.) 

Bedaine(l),  subst.  fém.  Espèce  de  canon  gros  et 
court.  Le  même  que  Dondaine.  Il  signifioit  aussi 
les  boulets  dont  ils  étoient  chargés.  (Dict.  de  Borel 
et  de  Ménage.  —  Voy.  Boullainv.  Ess.  sur  la  Nobl. 
Tabl.  et  Rab.  T.  IV,  p.  1G8.) 

Bedats,  subst.  masc.  plur.  Garennes  ou  bois 
prohibés.  Le  même  que  bois  vêtez.   (Voy.  Laur. 


(1)  Bedaine  peut  être  rapproché  de  bedon  et  même  de  bidet.  C'était  aussi  un  vase  à  grande  panse  :  «  Deux  besdaines 
d'airain  pour  servir  à  porter  l'eaue  des  bains  de  madame  la  duchesse  de  Tourraine.  »  (De  Laborde,  Emaux,  p.  162,  d'après 
les  Comptt'S  de  l'Argenterie  du  xiv«  siècle.)  (N.  e.) 


BE 


—  445  — 


BE 


Gloss.  du  Dr.  Fr  ;  le  Dict.  de  Cotgrave  et  Du 
Gange,  Gloss.  lat.  aux  mots  Bedatum,  Vetatnm, 
defensum  forestœ  et  silva'  defensœ.) 

Bedaud,  sitbst.  masc.  Terme  de  caresse.  —  Un 
œuf. 

Sur  le  premier  sens,  voy.  Rab.  T.  II,  p.  152, 
T.  m,  p.  90,  et  la  note  de  l'éditeur. 

Suivîint  le  Dict  d'Oudin,  ce  mot  signifie  un  œuf 
que  les  enfans  appellent  coquarl. 

VARIANTES    : 
BEDAUD.  Rabelais,  T.  II,  p.  152.  -  Oudin,  Dict. 
Bedault.  Rabelais,  T.  III,  p.  96. 

Bedeau,  subst.  masc.  Sergent.  (Voy.  Du  Gange, 
Gloss.  lat.  aux  mots  BedelU,BedeUana  eiBidellus; 
les  Dict.  de  Gotgrave,  Borel,  Ménage,  et  Le  Dujliat, 
sur  Rab.  T.  I,  p.  i09.)  Joinville  semble  mettre  une 
difTérence  entre  sergens  et  bedeaux  {[).  (Voy.  Joinv. 
p.  123.)  Cette  dislinclion  est  bien  marquée  dans  le 
passage  suivant  :  «  Les  bedeaux  sont  les  meudres 
«  sergens  qui  doivent  prendre  les  namps  et  faire 
«  les  "offices  qui  ne  sont  pas  si  honnêtes,  et  les 
.<  meudres  semonces.  »  (.-Vnc.  Coût,  de  Normand, 
fol.  9.)  Plus  baut  elle  fait  mention  de  sergens  d'un 
ordre  supérievir  appelés  sergens  de  Vespée.  Cepen- 
dant on  voit  dans  la  même  Coût,  au  fol.  "150,  que 
les  sergens  du  premier  ordre  y  sont  désignés  par  le 
mot  de  bedeau,  et  ceux  d'un  ordre  inférieur  parles 
mots  de  bas  sergens.  Suivant  Faucbet,  qui  dérive 
le  mot  bedeau  de  Bidellus,  «  les  bedeaux  servent 
«  aux  justices  subalternes,  de  même  que  font  les 
«  sergens  aux  royalles,  pour  différence,  ainsy  je 
«  crois,  et  marque  d'autorité  ;  car  il  semble  <iiie  les 
«  sergents  roijaux  fussent  de  franche  condition,  et 
«  les /'('(/('rt«.f  paysans  :  qui  est  la  cause  pom-quoy 
»  l'on  dit  que  les  sergents  estoientles  Cœsariani  du 
«  temps  passé,  et  en  Normandie  sergenterie  est 
«  non  de  fief.  »  (Fauch.  des  Orig.  Liv.'ll,  p.  105.) 
Selon  Pasquier,  Rech.  p.  83,  les  sergens  et  les 
bedeaux  étoientla  même  chose  du  temps  de  S' Louis. 
Il  a  dit,  à  la  page  688,  «  qu'au  four  l'Evesque  de 
«  Paris,  les  sergens  sont  appelles  bedeaux.  »  (Voy. 
l'Ane.  Coût.  d'Orl,  à  la  suite  de  Beauman.  p.  404, 
etlesOrd.  R.  de  Fr.  T.  I,  p.  71.) 

A  tant  vint  le  hedeax  corant 
Qui  aloit  un  Larron  querant 

Falil.  MSS.  de  S.  Germ.  fol.  15,  R«  col.  1. 

Ce  mot  est  employé,  ibid.  fol.  8,  dans  le  même 
sens.  On  voit  que  leur  office  éloit  de  publier  les 
choses  perdues,  et  les  récompenses  promises  à 
ceux  qui  les  avoient  trouvées. 

Bc'f/;«((a"  signifioit,  quelquefois,  une  sorte  d'offi- 
ciers des  universités  (2).  Eust.  Deschamps,  dans  ses 
Poës.  Ms.  s'en  est  servi  en  ce  sens.  Il  les  dislingue 
des  sergens,  fol.  441,  col.  1. 


VAWANTES  : 
BEDEAU.  Ane.  Coût,  de  Norna.  fol.  150. 
Bediau.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  451,  col.  1. 
BEDI.A.US  (pliii:)  Poës.  MSS.  av.  1300,  T.  IV,  p.  1441. 
Bede.\x.  Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  fol.  V,  V»  col.  1. 
Bedel.  Gloss.  de  l'Hist.  de  Paris. 

Bedegar,  subst.  masc.  Eponge  qui  se  forme 
sur  l'églantier.  Borel  le  définit  «  espine  blanche, 
«  ou  e'sponge  qui  se  trouve  sur  le  rosier  sauvage.  » 
(Voy.  le  Dict.  de  Cotgrave.) 

Bedelarv,  subst.  févi.  Office  de  bedeau.  (Voy.  les 
Ten.  de  LittL  fol.  89.) 

Beder,  verbe.  Tourner  le  dos. 

Depuis  s'en  vindrent  par  la  ville, 
Pour  Francoys  cuider  suborner. 
Mais  l'en  les  fist,  sur  pié,  sur  biUe, 
Bientost  beder,  et  retourner. 

Vi!;il.  deCh.  VII,  T.  I.  p.  119. 

Bedier,  adj.  et  subst.  Sot,  ignorant,  grossier. 
(Dict.  de  Borel.  -  Celtell.  de  Léon  Tripp.  et  Dict. 
de  Cotgrave.)  «  M.  de  Cesarée,  évesque  portatif,  qui 
«  faisoit  la  visite  par  le  dioceze  d'un  qui  l'en  avoit 
<■  prié,  et  où  il  avoit  autrefois  tenu  les  ordres,  il  se 
«  trouva  qu'il  interrogea  un  prestre  qu'il  trouva 
«  ignorant;  ô,  dit-il,  gros  bedier,  asne  que  tu  es, 
«  qui  t'a  fait  prestre;  riui  est  le  veau  d'évesque  qui 
>'  fa  conféré  cet  ordre'?  —  C'est  vous,  monsieur.  » 
(Moyen  de  Parvenir,  p.  30.j.) 

Bedon,  subst.  masc.  Tambour  ou  tambourin.— 
.Joueur  de  tambour  ou  de  tambourin.  —  Ventre.  — 
Jeune  cheval. 

Au  premier  sens,  ce  mot  signifie  tambour  ou  tam- 
bourin (3).  (Voy.  Dict.  de  Nicot,  Monet,  Oudin,  Cotgr. 
et  Ménage,  au  mot  Bedon.)  Borel  hésite  mal  à  propos 
entre  le  mot  cloche  et  celui  de  tambour.  (Voyez  Le 
Ducb.  sur  Rab.  T.  II,  p.  80;  les  Vig.  de  Ch.  VIT, 
T.  II,  p.  31,  et  Coquill.  p.  28.) 

Alors  firent  beau  bruit,  trompes,  filTres,  bedons 

J.  Marot,  p.  103. 

On  lit  bedondon,  dans  les  Contes  d'Eutrapel,  page 
230.  Nous  ne  trouvons  celte  orthographe  employée 
qu'en  ce  premier  sens. 

Bedon  signifioit  aussi  le  joueur  de  tambour  ou  de 
tambourin. 

....  nostre  droit  a  fait  deffendre 
Aux  maistres  jurez  du  mestier 
Qu'ilz  n'ayent  à  recepvoir,  ou  prendre 
Aucun  bedon,  ou  menestrier, 
Sans  premier  les  faire  jurer,  etc. 

Coquillart,  p.  44. 

On  nommoit  bedon  ce  que  nous  appelons  bedaine, 
ventre.  (Dict.  d'Oudin,  au  mot  Bedon.) 

Enfin  bedon  désigne  un  jeune  cheval,  dans  le 
patois  de  Dombes.  (Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot 
Bklogius.) 


(1)  Bedeau  a  pour  origine  le  haut  allemand  piUil,  crieur  public  ;  on  le  trouve,  au  xii«  siècle,  dans  le  Roman  de  Ron 
(v.  5975):  «  Tant  i  a  prevoz  et  bedels,  Et  tant  bailliz  viez  et  nouvels  [que  les  paysans].  Ne  puent  aveir  paiz  nule  heure.  » 
C'étaient  des  sergents  d'ordre  inférieur,  de  caractère  aussi  peu  déUcat  que  leurs  missions.  Au  xui"  siècle,  ils  s'étaient 
multipliés  dans  les  bailliages  et  sénéchaussées,  et  S'  Louis  ordonna  en  125i,  à  ses  officiers,  de  restreindre  le  nombre  de 
ces  voleurs,  auxquels  on  ne  pouvait  échapper,  même  par  la  fuite.  Ils  paraissent  avoir  exercé,  en  outre,  les  fonctions  de 
percepteurs  d'impôts  et  de  publicains.  (N.  E.)  —  (2)  L'Université  de  Paris  avait  quatorze  bedeaicx  ou  appariteurs  à  masse 
d'argent,  deux  par  nation  et  par  faculté,  l.e  bedeau  de  la  nation  de  France  portait  le  titre  de  grand  bedeau.  (N.  E.)  —  (3)  On 
nomme  encore  bedon  de  Biscaije,  un  tambour  de  basque  garni  de  castagnettes.  (N.  e.) 


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VARIANTES  : 
BEDON.  Oudin,  Nicot,  Monet,  etc. 
Bedondon.  Contes  d'Eutrapel,  p.  230. 

p[  Bedondaine  ,  suhst.  fém.  Bedaine ,  ventre. 
(Voy.  Borel,  Dict.  el  Rab.  T.  II,  p.  8G.) 

Bedonner,  verbe.  Jouer  du  tambour  ou  du 
tambourin.  (Dict.  de  Nicot,  de  Monet,  d'Oudin  et  de 
Cotgrave.) 

Tabours  adoncque  bedonnèrent. 

J.  Marot,  p.  16i. 

Bedonnerie,  suhst.  [cm.  Bruit  du  tambour. 
«  Telles  bedonneries,  fanfares,  et  musiques  cordées 
«  me  déploisent.  »  {Contes  d'Eutrap.  p.  260.) 

Bedonnique,  adj.  Qui  sonne  comme  un  tam- 
bour. C'est  en  ce  sens  qu'un  poète  a  dit  : 

Après,  en  rimes  héroïques, 
Tu  fais  de  gros  vers  bednniqtics. 

Œuv.  do  Joach.  du  Bell.  fol.  «2. 

Beduins(Ij,SK/).î?iasc. /?/»?'.  Peuples  de  l'Arabie. 
—  Bédouins.  (Voyez  du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot 
Bedidni.)  Ce  mot,  selon  son  étymologie  arabe  , 
signifie  les  peuples  du  désert  de  la  partie  de 
l'Arabie  qu'on  nomme  Arabie  déserte.  «  Illuec 
«  s'esloient  logiés  Turs  d'Arabe,  que  l'on  appelle 
«  Beduins,  etc.  »  (Contin.  de  G.  de  Tyr.  Martène, 
T.  V,  col,  585.) 

Et  Turc,  et  Arabi,  Bednin  et  Persant. 

Faucli.  Lang.  et  Poes.  fr.  p.  94. 

Nous  trouvons  dans  Froissart  l'orthograpbe  Bec- 
tuaires.  L'éditeur  explique  ce  mot  par  Beduins... 
«  Persans,  Tartares,  et  Arabes,  Bectuaires  (2),  et 
«  Suriens.  »  (Froiss.  Liv.  IV,  p.  254.) 

VARIANTES  : 
BEDUINS.  Pasq.  Rech.  p.  690. 
Beduins.  Blanch.  MS.  de  S.  G.  fol.  183. 
Baudouins.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7615,  T.  I,  fol.  60,  R». 
Bectuaires.  Froiss.  Liv.  IV,  p.  254. 

Bée,  subst.  fém.  Moquerie,  risée.  —  Sorte  de 
fruit  ou  de  couleur.  —  Désir,  espoir. 
On  disoit  au  premier  sens  de  moquerie,  risée  : 

Chascuns  fera  de  moy  la  bée, 
Desor  seroy  de  tous  gabée. 

Hist.  des  Trois  Maries,  en  vers,  MS.  p.  163. 

Bée  est,  selon  Borel,  une  sorte  de  fruit,  ou  de 
couleur;  c'est  probablement  la  couleur  baye,  et  la 
baye,  fruit  du  laurier,  du  genévrier,  etc. 

On  a  dit  bée  dans  le  sens  de  baerie,  pour  désir, 
espoir. 

Soffrés  au  moins  ma  folle  bée. 

Pocs.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  Î50. 

Il  semble  même  que  l'acception  de  ce  mot  a  été 
étendue  au-delà  du  désir,  dans  ces  vers  : 

Cil  faux  amans  qui  vont  par  la  contrée,.... 
Et  des  dames  ne  quierent  que  la  bée. 

Ibid.  fol.  333. 


Démarquons  cette  expression ,  oîi  le  mot  bée 
est  employé  comme  exclamation  ou  espèce  de 
jurement  : 

Lors  dist  bee,  sano  de  Meulant, 
Argentueil,  je  sui  moult  dolent 
Que  tu  despistes  compaignons. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  232,  R'  col.  1. 

Béel.  Ce  mot  se  trouve  joint  avec  celui  de  bar, 
dans  la  Chron.  lat.  de  Nangis.  L'un  et  l'autre  de  ces 
mots,  qui  semblent  être  de  la  langue  vulgaire, 
répondent  à  Sanetus  Petrus,  nom  de  l'abbaye  oîi 
mourut  Louis  VII.  «  Abbatia  cisterciensis  ordinis 
«  quœ  Sanetus  Petrus  dicitur,  id  est  Barbéel.  • 

Beeleur,  subst.  masc.  Criard.  (Dict  d'Oudin.) 

Béer,  adj.  Brave. 

Ceuls  qui  sont  à  clieval  faites  tantost  monter  : 
Au  ferir,  sauron  nos  lequel  est  heer. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  39. 

Bees,  subst.  masc.  Sot,  qui  baye.  «  Sot,  chetif, 
«  meschant,  assoté,  bées,  laisse  là  ta  folie.  »  (Percef. 
Vol.  II,  fol.  113.) 

Beessin,  subst.  masc.  Nom  de  pays.  Ce  mot 
est  pour  Dayeux,  dans  ce  vers  : 

En  Beessin  moult  près  de  Vire. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  199,  R-  col.  2. 

Beesonfle,  subst.  musc.  Gâteau.  Il  semble  que 
ce  soit  le  sens  de  ce  mot  dans  ces  vers  : 

Une  vieille  ot  entour  se  nape 
Envelopé  grant  beesonfle  (3); 
Une  truie  qui  bée  et  soufle 
Saisi  le  tourtel  en  sa  gueule. 

Poês.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1310. 

Beffer(4),  verbe.  Mentir,  tromper,  jouer,  duper. 
Les  Italiens  disent  be[t'are  en  ce  sens.  (Voyez  Du 
Gange,  Gloss.  latin,  au  mot  Befax  sous  Bifax  ;  les 
Dict'  d'Oudin,  de  Cotgrave  et  de  Ménage,  au  mot 
Bef/ler,  etc.)  «  Il  ne  contoit  à  sa  Majesté,  touchant 
«  les  affaires  d'Espagne,  que  des  niaiseries  et  bali- 
«  vernes,  afin  de  le  bef/ler,  et  l'amuser.  »  (Mém.  de 
Sully,  T.  VII,  p.  192.  —  Voyez  Rab.  T.  I,  p.  315; 
Mém.  de  Seguier,  p.  84  ;  Négot.  de  Jeann.T.  I,  page 
182,  etc.) 

VARIANTES  : 
BEFFER.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Befnx. 
Befer.  Hist.  de  Fr.  à  la  suite  du  Rom.  de  Fauv.  fol.  39. 
Beffler.  Nicot,  Oudin,  Cotgrave,  Ménage,  Dict. 
Befler.  Naudé,  des  Coups  d'Etat,  T.  III,  p.  28. 
Besfleu.  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 
Beufler.  Négoc.  de  Jeann.  T.  II,  p.  168. 
Buffler.  Oudin,  Dict. 

Befflorie,  subst.  fém.  Tromperie.  (DicL  d'Oudin 
et  de  Cotgrave.) 

VARIANTES  : 
BEFFLERIE.  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 
BÉFLURE.  Villon,  p.  105. 


(1)  Ce  mot,  assez  fréquent  chez  .loinville,  se  trouve  déjà  au  xii»  siècle,  au  Livre  des  Macchabées  :  «  E  li  bedowin  li  sont 
venu  aidier  et  ont  mises  lor  herberges  outre  le  flom.  »  (I,  ch.  5.)(N.  E.)  —  (2)  M.  Kervyn  imprime  au  t.  XV',  p.  324,  de  son 
édition  :  «  Aveuc  tout  ce  il  estoit  bien  advenu  que  plusieurs  Sarrazins,  payens,  Persains,  Tartres,  Arabes,  Lectuaires,  Turcs 
et  Suriens  avoient  pris  des  prisonniers  [à  la  bataille  de  Nicopolis].  »  (^N.  E.)  —  (3)  Ce  doit  être  une  pâtisserie  soufflée,  (n.  e.) 
—  (4)  Comparez  biffe,  encore  employé  dans  le  sens  de  pierre  précieuse  contrefaite.  (N.  e.) 


BE 


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BE 


Beffleiir,  suhst.  masc.  Trompeur. 

Tous  gens  flateurs  sont  diaboliques, 

Je  les  maintiens  pour  heflleufs  repudlques 

De  rapporteurs  vient  tout  mal,  et  discord. 

Œuv.  de  Rog.  de  Colkrye,  p.  184. 

VABIANTES  : 
BEFFLEUR.  Rog.  de  CoUerye,  p.  ISi. 
BÉFLEUR.  Villon,' p.  105. 
BuFEOR.  Poës.  MSS.  av.  1300,  T.  II,  p.  549. 

Beffray,  subst.  masc.  Ce  mot  désigne  propre- 
ment les  tours  de  bois  (1)  élevées  par  les  assiégeants 
à  la  hauteur  des  murs  de  la  villequ'ils  atlaquoient. 
Elles  éloienl  traînées  sur  des  roues,  ou  portées  sur 
des  bateaux  ou  des  galères  ;  elles  avoient  commu- 
nément plusieurs  étages,  et  renfermoient  des  gens 
de  guerre.  On  a  aussi  donné  ce  nom  aux  prisons 
parce  iiu"on  mettoit  les  prisonniers  dans  des  tours. 
La  cliarpente  sur  laquelle  portent  les  cloches  des 
églises  et  des  villes,  s'appelloit  aussi  beljroy.  Ce 
nîot  s"est  dit  enfin  des  cloches  mêmes,  et  particu- 
lièrement de  la  cloche  destinée  à  appeler  les 
citoyens  pour  les  faire  assembler.  On  a  dit  sonner 
le  befroij,  pour  sonner  le  tocsin.  Faute  de  savoir 
la  gradation  des  diverses  significations  qu'on  a 
données  à  ce  mot,  S'Jul.  dans  ses  Mesl.  historiques, 
page  355;  Pasquier,  dans  ses  Recherch.  page  754,  et 
Ménage,  dans  son  Dict.  Etymologique,  l"ont  fait 
venir'de  bel  ejfroy,  de ejlvoij  et  de  bec  effroij  {'2).  Borel 
ajoute  qu'il  signifie  quelquefois  une  couverte  de 
cuir  bouilli.  11  paroit  qu'il  a  été  trompé  par  l'usage 
où  l'on  éloil  de  couvrir  avec  des  peaux  ou  des  cuiVs 
bouillis,  les  tours  de  bois  ou  beffrois ,  afin  de 
garantir  les  assiégeans  des  feux  et  des  traits  des 
assiégés.  Nous  allons  rapporter  quelques  exemples 
de  ces  différentes  acceptions.  (Voy.  d'abord  le  Dict. 
de  Nicot,  de  R.  Est.,  de  Borel,  1"  et  2"  add.  ;  Laur. 
Gloss.  du  Dr.  fr.  ;  le  Gloss.  de  l'Ilist.  de  Bret.  ;  Case- 
neuve,  Orig.  de  la  Langue  fr.  ;  le  Gloss.  lai.  de  Du 
Gange,  aux  mots  Batif'olium,  Beffredus,  Belfredus, 
Benfrcdum  et  Biiff'redus  ;  et  le  Laboureur,  Orig. 
des  Arm.)  «  Les  Angiois  ([ui  scssoient  devant  îa 
«  Riole....  avoyenl  fait  charpenter  deux  beffrois  de 
«  gros  mesrien,  à  trois  estages,  et  séant  chacun 
«  beffroij  sur  quatre  roeles  et  estoient  ces  beffrois 
"  au  lez  devers  la  ville,  touscouvers  de  cuir  boulu, 
»  pour  deffendre  du  feu  et  du  trait.  »  (Frois.  Liv.  I, 
page  '■27.) 

11  paroit  employé  pour  prison,  dans  le  passage 
suivant  : 

La  vieille  vint  à  luy  en  la  prison  tout  droit, 
Si  luy  dit,  mon  amy,  le  tien  corps  mourir  doit  ; 
Mais  si  faire  voulois  ce  que  l'on  te  diroit. 
Tu  serois  délivré,  et  mis  hors  de  befroit. 

Roui,  de  G.  de  Monlbrune,  cilé  par  Eorel,  au  mot  Befroy. 

Ce  mot  semble  avoir  signifié  quelquefois  la  char- 
pente servant  à  porter  les  meules  de  moulin.  «  La 
»  croisée,  estache,  arbre  naiele,  gisant,  maison, 
«  beff'roy,  pierres,  et  tout  ce  qui  est  édifié  sur  mou- 


«  lins  II  vent  et  à  eaiie  est  réputé  héritage.  »  (Coût, 
gén.  T.  II,  p.  88'2.  —  Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au 
mot  Haevia,  où  il  cite  la  Coût.  d'Artois.)  Laurière 
Gloss.  du  Dr.  fr.  l'explique  par  «  la  maison,  ou 
«  l'édifice  auquel  le  moulin  à  eau  est  attaché.  »  On 
lit  bclfroij,  dans  le  Coût.  gén.  T.  1,  p.  761.  On  se 
sert  encore  du  mot  beff'roij  pour  désigner  la  cloche 
destinée  à  sonner  l'alarme  dans  les  villes  de  guerre. 

VARIANTES    : 
BEFFRAY.  Nicot,  Laur.  Gloss.  du  Dr.  fr. 
Beffroi.  Hist.  de  D.  Duguescl.  par  Mén. 
Beffroy.  Molinet,  p.  18i. 
Befroy.  Le  Jouven.  fol.  86,  R". 
Beffroit.  J.  d'Aut.  ann.  de  Louis  XII,  p.  30. 
Belfroit.  Du  Gange,  Glos.  lat.  à  Balfious  et  BUefioits. 
Bellefroit. 

Belefroy.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Campana. 
Belfrûy.  Le  Jouven.  MS.  p.  293. 
Baffroy.  Oud.  Cur.  fr.  Cotgr.  Dict. 
B.\UFROY.  Cotgrave.  Dict. 

Beaufroi.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Belfredi. 
Beauffroi.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS. 
Beaufray.  Le  Laboureur,  Orn.  des  Arm.  p.  -146. 
Bouffa  Y  (peut-être  Beffroi.)  Ord.  des  Ducs  de  Bret.  f°  381. 
BuFROY.  Gotgrave,  Dict. 
Beuffroy.  Le  Jouven.  MS.  p.  293. 
Berfray.  Hist.  de  B.  Duguescl.  par  Mén.  p.  22. 
Berfroi.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  3,  V»  coL  1. 
Berfroy.  Dict.  de  Borel,  au  mot  Befroy. 
Berfroit. 

Berfreid.  Froissart. 

Berefreid.  Du  Gange,  Gl.  lat.  à  Berfreit  sous  Belfredmn. 
Bekfreit.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Belfredum. 
Brov  (abrév.  de  Beffroy.)  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  3,  V". 

Bcgai"{3),  siibsl.masc.  Pauvre,  mendiant.  Terme 
angiois.  (Gloss.  de  l'Histoire  de  Bretagne.) 

Begauder,  verbe.  Bayer,  niaiser,  s'amuser. 
(Dict.  de  Gotgrave.)  «  Ils  vont  niaisans,  betjaudans 
«  et  s'amusans  par  les  chemins.  >•  (Contes  d'Eulra- 
pel,  p.  306.) 

Begault  (4),  adj.  Sot,  niais.  «  Et  bien  grand 
«  begaut,  m'as-tu  regardé  assez.  »  (Contes  d'Eulrap. 
«  p.  324.)  Ceux  qui  n'auront  jamais  bougé  d'entre 
«  les  bras  de  leurs  mères,  ne  seront  que  niais  et 
«  beyaux.  »  (Apol.  pour  Hérodote,  p.  461.)  On  lit 
begault,  dans  le  Dict.  d'Oudin,  où  il  est  expliqué 
par  bigot.  On  ne  sait  sur  quelle  autorité. 


BEGAULT.  Apol.  pour  Hérodote,  p.  4(rl. 
Begaut.  Oudin,  Dict. 

Bégayer,  verbe.  Bégayer.  Ce  mot  subsiste  sous 
celte  orlhographe.  On  l'a  employé  au  figuré  dans 
quelques  expressions  : 

1°  Bégayer  des  aureilles.  C'est  une  métaphore 
outrée  reprochée  à  Pasquier  par  Garasse.  (Rech.  des 
Rech.  p.  555.)  «  Ausone  eut  bégayé  des  aureilles  de 
«  dire  que  la  lettre  de  V  rapportait  un  son  furieux.  » 
(Lett.  de  Pasquier,  T.  I,  p.  148.)  «  Si  les  oreilles  ne 
c<  me  besgayent,  je  pense  ainsi.  »  (Id.  Rech.  p.  671.) 


(t)  M.  Viollet-Le-Duc,  dans  son  Dictionnaire  d'Architecture  (t.  II),  distingue  la  machine  de  Buerre,  le  beffroi  de  charpente 
et  le  beffroi  de  commune.  (N.  E.)  —  (2)  L'étymologie  est  l'allemand  bercvril,  de  berc,  tour^  et  de  vrit,  fred,  conserver.  (N.  E.) 
—  (3)  Du  tlaraand  begijen,  demander,  à  cause  de  la  pauvreté  à  laquelle  se  condamnaient  les  becjards  ou  béguins,  hérétiques 
du  xnp  siècle,  (n.  e.)  —  (4)  Le  radical  inconnu  de  bègue  doit  être  l'origine  de  ce  mot  et  du  précédent,  (n.  e.) 


BE 


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BE 


2°  Faire  unjean  bégayer,  seml)le  un  terme  du  jeu 
de  trictrac  clans  ces  vers  : 

Comme  recluz,  en  ce  bois  de  Vincennes, 
Ou  conviendroit  getter  des  fois  vingt  sennes, 
Ains  que  en  tablier /'aire  unrj  jehan  bégayer. 

VARIANTES    : 
BEGAYER.  Lett.  de  Pasquier,  T.  I,  p.  148. 
Besgayeb.  Id.  Rech.p.  671. 
Begeher.  Froissart,  l'oës.  MSS.  p.  296,  col.  2. 
liEGUYEn.  Cotgrave,  Dict. 

Begeaux,  siibst.  inasc.  plur.  Nom  de  faction. 
Ce  nom  fut  donné  à  une  espèce  de  séditieux,  ou  de 
brigands  armés.  (Voy.  un  mandement  du  Roy  rendu 
contre  les  Bourguignons  en  lil6.)  On  lit  dans 
Monstrelet  :  «  Une  compagnie  de  fuzelaires,  qui  se 
«  nomment  les  Bei/eaii.v  accompagnez  de  plusieurs 
«  séditieux  et  par  Iroubleurs  de  paix.  »  (Monstrelet, 
Vol.  I,  fol.  238.) 

Begehent,  adj.  Qui  bégaye.  «  Je  ne  suis  point 
«  éloquent,  et  j'ay  la  langue  empescbée,  grasse  et 
"  bcgehentc.  »  (Histoire  de  la  Toison  d'Or,  Vol.  II, 
page  82.) 

Beggaunt,  partie.  Extorquant.  (Voyez  Britton, 
Loix  d'Angleterre,  fol.  30.)  Il  faut  lire  beggaant; 
c'est  le  participe  du  verbe  suivant. 

Begger,  verlie.  Extorquer.  (Voyez  Britton,  Loix 
d'Angl.  fol.  37.) 

Begoyement,  subst.  ma&c.  Bégaiement.  (Dict. 
de  Cotgrave.) 

Beguards,  mbst.  mase.  plur.  Sorte  d'héréti- 
ques. «  On  les  appelloit  aussi  fraticelles.  Il  y  en  eut 
«  de  brûlés  en  ditïérentes  villes  de  Languedoc 
«  en  1319.  «  (Voy.  D.  Vaisselle,  Ilist.  de  Languedoc, 
T.  IV,  page  182.) 

""Begude  (1),  subsl.  fém.  Nous  lisons  :  «  Le  pont 
«  de  Lunel  renomé  par  sa  bégudc  blanche.  »  (Favin, 
Th.  cVhonn.  T.  I,  p.  450.) 

Begué,  subst.  masc.  Sorte  d'officier  de  justice. 
«  C'est  un  sergent  ou  officier  qui  est  autre  que  bail, 
«  et  qui  exécute  les  mandements  et  commissions 
«  de  justice.  »  (Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr.  aux  mots 
Beguer  et  Ileguée.)  On  lit  begué,  dans  Ragueau,  cité 
dan^  le  Dict.  de  Borel. 

VARIANTES    : 
BEGUÉ.  Borel,  Dictionnaire. 
Beguée,  Beguer,  'Vegué,  Veguée.  Laur.  Gloss.  du  Dr.  Fr. 

Begiii,  subst.  masc.  Bonnet,  coiffe.  Mot  langue- 
docien. (Dict.  de  Borel,  au  mot  Béguines,  qu'il 
soupçonne  venir  de  begui.)  Nous  disons  encore 
béguin  pour  une  sorte  décoiffe  ou  bonnet. 

Béguin,  S!<fcsï.  masc.  Moine.  — Bigot,  hypocrite. 


On  a  dit,  au  premier  sens  :  «  Ung  faulx  prophète 
«  qui  faiîiioit  mener  sainte  vie  sous  l'habit  de 
«  béguin.  «  (Chron.  de  S'  Denis,  fol.  138.)  On  lit 
dans  le  latin  de  Nangis  :  «  Sub  habitu  benigno.  » 

Le  même  mot,  qui  désignoit  un  moine,  signifioit 
souvent  aussi  un  hypocrite,  un  bigot  : 
Veés  vous  celle  qui  fait  la  papelarde, 
Et  celuy  la  qui  bien  fait  le  begui». 

Eust.  Desch.  Poès.  MS.  fol.  20G. 
Bien  savez  fere  le  coilart, 
Le  brriuin  et  le  papelart, 
Et  si  iia  plus  raestre  boulier  (2) 
D'Arras  jusqu'à  Montpellier. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  260,  R-  col.  2. 

Eude,  comte  de  Provence,  est  emporté  mourant, 
hors  du  combat,  sans  avoir  près  de  lui  aucun  de 
ses  trois  fils  qui  le  puisse  secourir;  ils  étoient 
occupés  d'un  autre  côté,  et  ils  y  faisoient  un  hor- 
rible carnage.  Ses  trois  enfans  ailleurs,  dit  le  poëte, 
ne  font  pas  le  béguin.  (Ger.  de  Roussillon,  ms. 
page  127.) 

Béguin.,  dans  ces  vers,  est  pris  pour  moine  dont 
la  vie  est  très  différente  de  celle  des  gens  de  guerre. 

Béguine  est  employé  pour  religieux,  ou  espèce 
de  religieuse,  dans  Duchesne.  (Gén.  de  Chastillon, 
p.  60,  "lit.  de  12G8.)  On  y  lit  :  Béguines  de  Guise. 

Un  saint  homme,  envoyé  dans  un  monastère  de 
filles  pour  y  découvrir  une  sainte  personne  qui  s'y 
tenoit  cachée,  demande  à  voir  toute  la  communauté. 
Comme  il  n'y  reconnaît  point  celle  qu'il  cherchoit, 
une  des  religieuses  lui  dit  : 

Nous  n'avons  plus  nonnain,  ne  béguine 

Qu'une  meschante  folle  qu'est  en  nostre  cuisine. 

Gtr.  de  R.'ussillon,  MS.  p.  80. 

Nonnain  semble  être  une  religieuse  de  chœur,  et 
béguine,  une  scjcur  converse  (3). 

Voyez  les  reproches  faits  aux  bégards  sur  la  vie 
déréglée  qu'ils  mènent  avec  leurs  sœurs  béguines, 
ou  beguettes.  (Nef  des  Fols,  fol-  100.)  Le  mot 
Bajards  se  trouve  ailleurs  pour  signifier  les  reli- 
gieux de  S"  Bègue. 

On  disoil  habillement  de  béguin,  pour  habit  de 
deuil.  i^Voy.  les  Preuves  de  l'Histoire  de  Bretagne, 
T.  II,  page  1373.) 

VARIANTES  : 
BEGUIN.  Le  Duchat,  sur  Rabelais,  T.  IV,  p.  195. 
Begix.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  784. 
Beghin.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  837. 
Begard  et  Beguard.  Nef  des  Fous,  fol.  100. 
Besgard.  Borel,  au  mot  Béguin,  2«  addit. 
r>iG.\RD.  Oudin,  Dict. 
BiGAUT.  Cotgrave,  Dictionnaire. 
Begaclt.  Oudin,  Dict. 

Béguinage,  subst.  masc.  Collectif  de  religieux 
ou  religieuses.  —  Hypocrisie. 

Au  premier  sens,  nous  citons  le  passage  suivant  : 
«  Les  maisons  des  prestres  séculiers  et  des  begui- 


(1)  En  bas-latin  begula,  en  provençal  begudo,  hôtellerie. 'On  lit,  au  Roman  du  Chevalier  délibéré  :  «  Le  portier  me  fut  ung 
peu  rude.  Et  me  dist  :  Aiez  pacience,  Ce  n'est  pas  cy  une  begude  ;  C'est  le  lieu  qui  s'appelle  estude.  »  (n.  e.)  —  (2)  Débauché, 
libertin  ;  voir  Du  Can^e  sous  Indice.  (N.  e.)  —  (3)  "Dans  l'ordre  des  frères  prêcheurs  et  mineurs,  les  frères  convers  se 
nommaient  bégxtins.  Quant  aux  béguines,  ce  sont  des  filles  ou  femmes,  vivant  en  communauté  et  qui  ne  prononcent  que 
les  vœux  simples  d'obéissance  et  de  chasteté.  Elles  furent  instituées  à  Liège,  d'où  elles  allèrent  s'établir  à  Nivelles.  S'  Louis 
en  fit  venir  en  France  (JoinvUle,  S  7'25  de  l'édition  de  Wailly).  EUes  étaienl  400,  de  1250  à  1300;  mais  il  ne  restait  que  trois 
veuves  en  1480.  Leur  nom  vient  peut-être  de  leur  habit  gris  blanc  (bis,  beine,  en  français,  bigio  en  italien).  (N.  E.) 


BE 


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BE 


«  nagee,  ne  sont  pas  plus  franches  que  les  maisons 
«  des  autres  boui'geois  et  liabitans  de  la  ville.  » 
(Coût.  d'Oudenardé,  au  Nouv.   Coût.  Gén.  T.  1, 
pa{;c  10G8.) 
Béguinage  a  signifié  hypocrisie,  dans  ces  vers  : 

Se  li  liom  maint  en  tel  usage. 
Et  covrir  veut  de  heghinage 
Sen  ort  peeié,  et  sa  lussure, 
Teux  vie  elle  est  amère  et  sure. 

Poès.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1321. 

VARIANTES    : 
BEGUINAGE.  Fabl.  MS.  du  R.  n«  7218,  fol.  297,  U»  col.  1. 
Becuignage.  Monstrelet,  T.  11,  fol.  40,  R". 
Beguinaige.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  233,  col.  2. 
Beghin'AOE.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1321. 
Beginage.  Du  Gange,  Gl.  1.  k  Beguinaçiiurii  sous  Beghardi. 
Beginaie.  Poës.  MSS.  du  Vat.  n»  1490,  fol.  128,  K». 

Béguine,  subst.  fém.  Religieuse.  —  Hypocrite, 
bigote.  —  Sorte  de  religieuse  mentionnée  dans  le 
Glossaire  du  Roman  de  la  Rose. 

Le  sens  propre  de  ce  mot  est  celui  de  religieuse  : 

Béguines  avons  mont 
Qui  larges  robes  ont, 
Desor  lor  robes  ont 
Ce  que  pas  ne  vos  di. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n'  7615,  T.  I,  fol.  6G,  V  ool.  2. 

Voyez  la  ?\efdes  Fous,  fol.  90,  ofi  il  est  dit  que 
c'est  un  ordre  nouveau.  On  lit  (ibid.  fol.  1(10) 
qu'elles  gardoient  les  malades  et  ferinoient  les  yeux 
aux  morts.  L'auteur,  au  folio  991,  leur  reproche  de 
mener  la  vie  la  plus  dissolue  avec  les  Lotthars  ou 
bigots. 

De  là,  on  trouve  begliine  pour  hypocrite,  dans 
Ph.  Mouskes,  ms.  p.  83'7.  (Voyez  Béguin.) 
variantes  ' 

BEGUINE.  Fabl.  MSS.  du  R.  n°  7218,  fol.  297. 

Beghine,  Begutte,  Beguyne.  Gloss.  du  Rom.  de  la  Rose. 

Beguiner,  i^erbe.  Faire  le  dévot.  (Dict.  d'Oudin, 
au  mot  Iteguigner.) 

Voulez-vous  gouverner  la  contrée, 
En  beguinanl  faire  la  précieuse. 

Eust.  Desch.  Pois.  MSS. 

VARIANTES  : 
BEGUINER.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  ,334,  col.  2. 
Beguigner.  Oudin,  Dict. 

Beguinet,  subst.  nmsc.  Beignet,  pâle  frite  h  la 
poêle.  jNom  factice  d'un  cuisinier,  dans  Rabelais, 
T.  IV,  p.  171. 

Behemoc,  subst.  viose.  Nom  de  démon.  «  Insti- 
«  tuons  pour  nous,  et  en  nostre  nom,  et  pour  tous 

«  les  infernaulx,   nos    procureurs    geiieraulx 

«  c'est  assavoirSalhan,Bersclius, Démon,  Leviaton, 
«  Asmodus,  Behemoch,  tous  ensemble,  chascun 
<•  pour  le  tout.  »  (Modus  et  Racio,  ms.  fol.  30,  V°.) 

Behistre,  subst.  Tempête,  malheur,  calamité  : 


Après  fouldre,  esclitre,  i 

Tempeste  behistre, 

Qui  leur  administre  ; 

Mars  le  fier  ministre. 

Molinet,  p.  14&. 
Les  grands  meehiefs,  et  les  behistes  '• 

Que  devoit  faire  assés,  tost  tristes, 
Et  les  pères  des  Vespasiens 
Aux  faux  juis  pharisiens. 

Hist.  des  Trois  Maries,  en  vers,  MS.  p.  346. 

VARIANTES  : 
BEHISTRE.  Nicot,  Borel,  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 
Behithe  Borel,  Dict.  i^s  add. 
Behite.  Histoire  des  Trois  Maries,  MS.  p.  346. 
Behiste.  Ibid,  dans  \m  autre  MS. 
Bechisthe.  Oudin,  Dict. 

Beliistreux,  adj.  Tempétueux.  Epithète  d'orage 
dans  les  Epitbèles  de  Martin  de  la  Porte.  (Voyez  le 
Dictionnaire  de  Cotgrave.) 

Behonrtill),  subst.  mnsc.  Joute,  tournoi.  —  Ap- 
parence. —  Dissension,  querelle,  orage  ou  tempête. 

Ce  mot,  pris  au  premier  sens,  signifie  quelquefois 
tournoi  en  général,  et  quehiuefois  une  des  espèces 
particulières  dos  tournois.  Nicot,  dans  son  Dict.  au 
mot  ndiourl,  le  dérive  du  mot  lartarearcla.  Je  crois 
que  bchourt  l'i)  est  un  mot  composé  de  béer,  regarder, 
et  de  lionvl,  Itcurt,  combat,  action  de  se  heurter. 
Ainsi  le  behourl  seroit  proprement  le  spectacle  d'un 
combat.  (Voy.  les  Dict.  de  Borel,  de  Cotgrave  et  de 
Ménage;  Du"Cange,  Gloss.  lat.  aux  mots, Bohordicum 
et  nàgiirdare;  id.  sur  Joinv.  p.  181;  la  Colomb. 
Th.  d'ilonn.  p.  20,  etc.  etc.) 

De  behoui-s,  de  joustes,  de  vaultes, 
Faut-il  payer  les  malletaiiltes? 
Pour  ung  plaisir  raille  doulours. 

Wolinel,  p.  127. 

Le  mot  bouliourt  est  employé  au  figuré  pour 
apparence  ;  les  tournois  étant  en  effet  la  simple 
apparence  des  combats. 

Pour  un  bouhouri  de  vaine  gloire, 
Ensi  sont  li  povre  boni. 

Poës.  MSS,  du  Vatican,  n-  1490,  fol.  128,  R'. 

On  employoit  aussi  ce  mot  au  figuré  pour  que- 
relle, dissension,  tempête.  (Voy.  Eust.  Desch.  Poës. 
MSS.  fol.  '208.) 

Les  behoxirdis  des  vens 
De  la  mer  eslevans. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  19835  0119838. 

Le  jour  del  bouhourdie  ;3),  dans  Duchesne,  Gén.  de 
Bétliune,  p.  140,  tit.  de  r257,  me  pareil  être  le 
même  que  le  premier  dimanche  de  carême  auquel 
les  beourdis  ou  joutes  recoinmençoient;  ainsi 
j'expliquerois  pareillement  le  lendemain  des /wn/es, 
dans  Perard,  Hist.  de  Bourg,  p.  460,  tit.  de  1246, 
par  le  lendemain  du  premier  dimanche  de  carême. 

VARIANTES    ! 
REIIOURD.  Borel,  Dict, 
Beheûurt.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  151,  col.  4. 


(1)  Le  premier  sens  est  lance;  au  moyen-âge,  dans  le  sens  de  brandons  ou  béquilles,  on  le  contractait  en  bourdes;  nous 
faisons  encore  de  même  quand  bourde  désigne  un  mât  soutenant  un  navn-e  échoué.  (N.  E.)  -  (2)  C'est  la  lance  qui  sert  à 
jouter  au  pied  des  hourds,  ces  échafauds  eDcourlinés  qui  fermaient  la  lice  d'un  tournoi.  L'étymologie  est  le  haut  allemand 
hurt  (moderne  hïirdé),  claie.  (N.  e.)  -  (3)  Bmiliourdie  est  le  jour  où  l'on  fait  des  bordes,  comme  l'indiquent  les  deux 
passagee  suivants  ;  «  Ce  fu  donné  à  Tricb.istel,  ion  lundi  après  les  bordes,  en  l'an  de  grâce  l.StH.  »  (Cart.  de  Langres.)  Et  au 
registre  JJ..74,  p.  68,  an.  1341  :  «  Item  ledit  habitant...  auront  esdiz  bois  usage  de  prendre  et  coper  desdiz  bois,  pour  faire 
les  bordes  le  jour  des  brandons.  »  Nous  sommes  bien  là  au  premier  dimanche  de  carême,  où  l'on  portail  des  brandon 
allumés,  (n.  e.) 

II.  57 


BE 


—  450  — 


BE 


HElloi'ns.  Nicot,  Dict. 

BlîHOi'Rs.  Petit  Jehan  de  Saintro,  p.  542. 

Behouhdis.  Siippl.  au  Gloss.  du  Uom.  de  la  Rose. 

Beuourdier.  Borol,  Dict.  au  mot  liehourd. 

Beiiorueis.  Du  Gange,  Glossaire  lat.  au  mot  Behm-dicum. 

JJL'I.HOS,  BEHORT,  lil'HORS,  Baiioubs. 

lî AUDUHS.  Suppl.  au  Gloss.  du  R.  de  la  Rose,  à  Behourdii. 

lluiioUKU.  Nicot,  Dict. 

lîoiiuuns.  Du  Gange,  sur  .ToinviUe,  p.  181. 

BiiiioriiT.  Monstrelet,  Vol.  IIl,  fol.  lOl,  R". 

BoHniiums.  Histoire  des  Trois  Jlaries,  MS.  p.  466. 

lioiioiuMiis.  Du  Gange,  Gloss.  latin,  au  mot  Bohordicum. 

BoNiiOKT.  Gotgrave,  Dict. 

BoNHOiJHT.  Eust.  Deschamps,  poës.  MSS. 

BounoMSDis.  (Lisez  Bouhourdiji.)  Ibid. 

IÎOUI10RDE1S.  Du  Gange,  sur  Joinviile,  p.  164. 

Behoi'RS.  J.  Le  Maire,  Illustr.  des  Gaules,  Uvre  I,  p.  123. 

BouHOURDic.  Duchesne,  Gén.  do  liéthune,  p.  140. 

Bordes.  Perard,  Histoire  de  iîourgogne,  p.  460. 

BouHOURD.  Gotgrave,  Dict. 

Bouhourdeix.  Glossaire  de  l'Histoire  de  Bretagne. 

BouHOURDis.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS. 

BouHOURS.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  page  1417. 

BouiiouRT.  Poës.  MSS.  du  Vatican,  n»  1493,  fol.  128,  R°. 

Behourder,  verbe.  Jouter.  —  Jouer,  jaser, 
causer.  —  Quereller. 

Au  premier  sens  de  jouter,  nous  lisons  :  «  Prin- 
«  drent  leurs  escus  à  leur  eou,  et  allèrent  dehors 
.  behourder.  ■■  (Lanc.  du  Lac,  T.  II,  fol.  29.) 

Sous  l'acception  de  jouer,  baorder  figure  dans 
ces  vers  : 

Ez  dances  et  quarolles  se  vont  un  accorder. 
Es  tables  et  eschals  ly  autre  baorder. 

Ger.  de  Roussillou,  MS.  p.  87. 

Border  a  été  employé  dans  le  sens  de  jaser,  cau- 
ser, badiner. 

.  .  .  Quant  ce  vint  après  souper. 
Si  commencèrent  à  border, 
Et  contèrent  de  lor  aviaus, 
Leur  aventures,  etc. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7615,  T.  II,  fol.  182,  R'. 

Borel.  dans  son  Dict.,  donne  le  même  sens  au 
mol  behorder,  et  cite  Percevul  pour  autorité. 
De  là,  ce  mot  signiiioit  quereller. 
Dame  que  je  n'os  nommer 
Ne  voz  esraoiez  mie, 
Lessiez  le  vilain  border 
Ne  vos  corrociez  mie. 

Poés.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  660. 

Le  verbe  bouhoiirder  est  employé  comme  actif,  et 
dans  un  sens  obscène,  dans  ce  vers  : 

Se  la  buuhourdier  m'y  veissiez. 

Kom.  de  la  Rose,  Î25i3. 

VARIANTES  : 
BEHOURDER.  Beaumanoir,  p.  350. 
Baorder  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  87. 
Behorder.  Borel,  Dict. 
Beorder.  .\this,  MS.  fol.  55,  V»  col.  1. 
Behourdir.  Gotgrave,  Dict. 

Bouhourder.  Glossaire  du  Rom.  de  la  Rose,  et  le  Suppl. 
BouHOURDiER.  Hisl.  de  B.  Duguescl.  par  Ménard,  p.  11. 
Bohorder.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Bohordicum. 
BouHORDiER.  Athis,  MS.  fol.  56,  R»  col.  2. 
BouoURDER.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  80,  V". 
Bogurder.  Ibid.  fol.  33,  V"  col.  2. 
BoURDER.  G.  Guiart,  MS.  fol.  238,  R». 
Border.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S>  Germ.  fol.  135,  R". 

Behoiirdciir,  mbst.  masc.  Jouteur.  Le  com- 
battant d'un  tournoi. 


VARIANTES  : 
CEHOURDEUR.  Fav.  Th.  d'Honn.  T.  II,  p.  1750. 
Behourdier.  Ibid. 

Behoiirdis,  adj.  plur.  Ce  mot  se  disoil  des 
combaltans  qui  avoient  été  maltraités  dans  un 
tournoi,  et  qui  étoient  étourdis  des  coups  qu'ils 
avoient  reçus.  «  Nos  anciens  romanciers  appeloient 
(I  behourdls,  et  mal  atournez,  c'est-à-dire  estourdis 
«  du  bateau,  et  hors  d'haleine,  les  uns  moulus  de 
"  coups  de  masse,  et  les  autres  de  la  presse.  » 
(Fav.  Th.  d'Honn.  T.  Il,  p.  1750.) 

Beichiad,  snhst.  7nasc.  Bouvier.  Mot  breton. 
(Dict.  de  Borel,  ii"  add.  au  mot  Baehardœ.) 

Beire,  verbe.  Voir.  Mot  du  patois  de  Caliors. 
(Dict.  de  Borel,  au  mot  Glouper.) 

Beis,  subst.  mase.  plur.  Biens.  Dans  le  patois 
Languedocien,  très  beis  signifie  :  trois  biens.  De  là 
s'est  formé  le  nom  de  Trebez-,  petite  ville  du  diocèse 
de  Carcassonne,  du  latin  tribus  bonis.  (Ord.  des 
R.  de  Fr.  T.  III,  p.  204.) 

Beisse,  subst.  fém.   Bêche.   Ce  mot  se  dit  en 

Auvergne.  (Voy.  Gloss.  lat.  de  Du  Cange,  au  mot 
Bessus,  sous  celui  de  Becca.) 

Bejannie,  subst.  fém.  Sottise,  niaiserie.  Alain 
Charlier,  en  parlant  des  effets  de  l'amour  sur  les 
jeunes  gens,  s'exprime  ainsi  : 

Et  tient  sur  eux,  sa  court,  et  sa  justice, 

Et  leur  oste  la  bejannie,  et  nice. 

Et  les  retrait  de  maint  oultrageux  vice. 

Tocs.  d'Al.  Chart.  p.  564-. 

VARIANTES  : 
BEJANNIE.  Al.  Ghartier,  Poës.  p.  564. 
Bejaunerie.  Oudin,  Dict. 
Eejaunisse.  Gotgrave,  Dict. 
Bejaunage,  subst.  niasc.  Gotgrave,  Dict. 

Bel,  adj.  Méchant.  Lisez  fel.  Un  ancien  poêle 
a  dit  eu  parlant  d'Hérode  : 

Tant  fut  bel,  et  forsennez 

Qui  fit  les  innocens  mourir. 

Hisl.  des  trois  Maries,  en  Ters,  MS.  p.  227. 

Bel  ou  Belle.  Ces  mots  se  trouvent  plusieurs 
fois  dans  des  litres  rapportés  à  la  suite  d'un  mé- 
moire pour  la  ville  de  Montbard,  p.  8.  Ils  semblent 
signifier  place.  D'autres  villes  du  même  canton 
usent  aussi  de  ces  mots  dans  le  même  sens. 

Bel  ou  Sel,  subst.  masc.  Borel,  dans  son  Dicl. 
explique  ces  mots  par  citonicum  indum  et  cite 
hortus  sanitatis. 

Belaud,  adj.  au  masc.  Diminutif  de  beau.  (Voy. 
Oudin,  Gotgrave,  Borel  et  les  Poës.  de  Jacques 
Tahureau.) 

Les  baisers  de  sa  meline, 
De  sa  meline  beline. 

Pocs.  de  J.  Tahureau,  p.  155. 

VARIANTES  : 
BELAUD.  Fabl.  MSS.  du  R.  n'  7989,  fol.  239,  V»  col.  1. 
lÎELLOT.  Oudin,  Gotgrave,  Dict. 
Bellette,  fcin.  .)eh.  de  l'Escur.  Ghr.  Fr. 
Beline,  fé»i.  Poës.  de  .1.  Tahureau,  p.  155. 
Belonne,  fém.  Ibid.  p.  270. 
Beloye,  Beroye,  fém.  Mots  Languedocien.  —  Borel,  Dict. 


BE 


451  — 


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Belaus,  subst.  7nasc.  Mot  obscène  dans  les 
contes  de  Cholieres,  fol.  104. 

Bêle.  Nous  ne  pouvons  déterminer  le  sens  de 
ce  mot  dans  ce  passage  : 

Or  vieng  proier 
A  vous,  Dame,  et  merci  crier, 
Que  ne  gart  l'eure  qu'asproier 

Me  viengne  cil 
Qui  m'a  mis  à  si  grant  exil  ; 
Tu  me  tenis  jà  pour  ton  fil 

Comme  bêle. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  302,  R-  col.  1. 

Belee  (coulée).  Sorte  de  jeu.  Peut-être  le  même 
que  bellinii're(BA\\e)c\-i\près.  Froissart,  parlant  des 
jeux  de  son  enfance,  dit  : 

Juïens  nous  au  roy  qui  ne  ment,... 

Puis  à  la  coulée  belée 

Qu'on  fait  dune  carrelle  tée. 

Froissart,  Poës.  MSS.  p.  8f.. 

Bêlement,  adv.  Doucement,  lentement. 

Tout  bêlement,  s'est  arrestée. 

Alliis,  MS.  fol.  94,  V- col.  1. 
Piétons  passent  les  roiUées, 
Targiez  acueillent  leur  sentiers. 
Vers  les  murs  rompus,  et  entiers  : 
Les  uns  tost,  les  autres  bêlement. 

G.  Guiart,  MS.fol.  3i,  V'. 

V.\RIANTES    : 
BELEMENT.  Fabl,  MSS.  du  R.  n°  7218,  fol.  179,  R«  col.  1. 
Balement.  Atliis,  cité  ci-après. 
Bellement.  Chasse  de  Gast.  Phéb.  MS.  p.  2G0. 

Belerue.  Ce  mot  est  expliqué  par  dernier  pro- 
montoire, dans  Borel,  Dict.  w"  add.  Vcll,  qui  en 
breton  signifie  dernier,  lire,  selon  lui,  son  origine 
de  ce  mot. 

Belet,  subst.  masc.  Joyau. 

Donc  prist  li  Roiz  le  Duc  e  1'  baisa  et  joi  : 
Ses  bclez,  ses  deduitz,  ses  aveirs  li  offri. 

Roman  de  Rou,  MS.  p.  03. 

VARIANTES  : 
BELEl'.  Prov.  MS.  de  S-  Germ.  fol.  74,  R»  col.  3. 
Bêlez,  plu)-.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  63. 

Beleter,  verbe.  Bêler.  (Voy.  le  Dict.  de  Cotgr.) 

Belgie,  mbst.  fém.  Bougie.  Province  d'Afrique, 
sur  l'orthographe  Bougie  que  nous  trouvons  dans 
Froissart,  Vol.  IV.  L'éditeur  fait  remarquer  que  cet 
auteur,  ■<  use  de  cet  ancien  nom  pour  le  nom  géné- 
ral du  païs  que  nous  disons  maintenant  Barbarie.  » 

VARIANTES  : 
BELGIE.  Hist.  de  Loys  III,  Duc  de  B.  p.  294. 
Bougie.  Froissart,  Vol.  IV,  p.  81. 

Belle  (1),  subst.  fém.  Bêle.  Il  est  aisé  d'apercevoir 
que  les  orthographes  de  ce  mot  se  sont  toutes  for- 
mées du  latin  Bellua. 

La  belic  qui  chey  morte... 
Mais  ce  leur  fist  confortement 
Que  la  beste  s'y  tost  morut, 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  27. 


TABIANTES  : 
BELIE.  Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  27. 
Belue.  Borel,  Dict. 

Bellue.  J.  d'Anton,  Ann.  de  Louis  XII,  p.  271. 
Belude.  Corneille,  Dict. 

Relues.  J.  le  Maire,  lUustr.  des  Gaules,  Liv.  I,  p.  89. 
Bleve.  (Lisez  Bette).  Rom.  de  Brut. 

Beliere  (2),  subst.  fém.  Anneau.  Ce  mot,  qui  est 
usité  pour  signifier  l'anneau  qui  lient  le  battant  d'une 
cloche  et  celui  des  lampes  des  églises,  est  employé 
pour  l'anneau  auquel  étoit  suspendue  la  colombe 
de  l'ordre  de  l'Annonciade.  (Favin,  Th.  d'Hon. 
T.  Il,  p.  1526.)  En  Normandie,  hesliere  se  dit  pour 
la  courroie  qui  tient  !o  battant  d'une  cloche.  (Dict. 
Etym.  de  Ménage.) 

VARIANTES  : 
BELIERE.  Favin,  Th.  d'Uonn.  T.  II,  p.  1586. 
Besliere.  Ménage,  Dict.  Etym. 

Belif,  subst.  mase.  Rouge.  Terme  de  blason, 
gueule,  de  couleur  rouge.  «  Armoiries  de  gueule, 
«  ou  belif  qui  est  rouge.  »  (S'  Jul.  Mesl.  Histor. 
p.  291.)  «  Les  herauds,'et  roys  d'armes  appellent 
«  cesle  couleur  rouge  de  quatre  divers  noms, 
«  cinabre,  belic,  gueules,  et  riche  couleur.  »  (Fav. 
Th.  d'Honn.  T.  1,  p.  îl.) 

Nous  trouvons  ce  mot  dans  Modus  et  Racio, 
fol.  88,  où  «  l'on  devise  comment  on  prend  les 
«  mauvis  à  breter  «  (à  la  glu,  à  la  pipée.)  De  beliz 
signifie  peut-être  de  biais  (3),  dans  ce  passage: 

«  Qui  veult  faire  un  brel, qu'il  soit  fait  au  rabat, 

«  ainsi  comme  une  flèche, et  doit  avoir  quatre 

«  piedz  de  long,  et  a  pied  de  main,  ou  environ 

«  de  quoy  la  plus  grosse  (verge)  sera  cavée  tout  du 
«  long,  et  l'aulre  entrera  dedans  si  justement  que 

u  le  pied  du  plus  petit  oisel ne  pburroit  yssir; 

«  el  quant  ilz  sont  l'ung  dedans  l'autre,  ilz  sont 

«  perchés  de  bf/i:; y  est  mise  une  bien  déliée 

«  cordelette,  etc.  «  (Modus  et  Racio,  fol.  89.) 

VARIANTES  : 
BELIF.  S'  .lui.  Mesl.  Histor.  p.  294. 
Bellif.  Lanc.  du  Lac,  T.  I,  fol.  37,  R»  col.  1. 
Belic.  Favin,  Th.  d'Honn.  T.  1,  p.  11. 
Bellic,  Belli.  Monet,  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 
Benouhic.  Mém,  d'Olivier  Je  la  Marche,  Liv.  I,  p.  280. 

Belifres,  subst.  On  lit  aussi  besifles,  dans  une 
ballade  de  \illon,  p.  109;  mais  ce  mot,  sous  l'une 
et  l'aulre  orthographes,  est  tout  à  fait  inintelligible, 

Belin,  subst.  mnsr..  et  adj.  Bélier.  Mouton  mâle. 
(Voy.  les  Dicl.  de  Nicol,  Monet,  Oudin  et  Cotgrave, 
au  mot  Belin.)  Borel  lui  donne  deux  significations: 
celle  de  mouton  qui  esl  sa  signification  propre,  et 
celle  de  sol,  ([ui  est  une  acception  figurée.  Nous 
trouvons  ce  mol  employé  comme  adjectif  dans  le 
vers  suivant  : 

Assommer  gens  comme  moutons  bellins. 

Vigil.  de  Charles  VII,  T.  II,  p.  187. 


(1)  Belie,  au  xv«  siècle,  signifiait  plutôt  bergerie  ;  «  Icellui  Regnault  se  vouloit  aler  esbatre  en  une  belie  du  prieur  de 
Blessac.  »  (.IJ.  164,  p.  188,  an.  1401.)  (N.  E.)  -  (2)  L'étymologie  est  le  flamand  hel,  cloche  ;  de  là  vient  aussi  bélier,  qui 
n'apparaît  qu'au  xv  siècle,  le  mouton  qui  porte  la  cloche.  (N.  E.)  —  (3)  Ce  mot  a  le  sens  de  en  bellivant,  à  besloi,  qu'en 
trouve  dans  G.  Guiart  (v.  11790;  et  dans  Renart  (v.  14257),  de  travers,  à  l'écart,  (n.  e.) 


BE 


—  /i52  — 


BE 


On  disoit  crier  hurte  belhis  pour  :  crier  sus. 

L'éveequc  l'a  aperoeu, 

Si  ne  s'en  p\iet  eslre  teu  ; 

Ains  on  sermone, 

Et  à  toz  cels,  dix  jors  pardonne, 

Oui  ci-ii-r(wt  à  tel  persoue 

Hurle  belin. 

FM.  J)S<.  du  R.  n"  7218,  fol.  237,  R-  col.  î. 

VAR1.\?<TES  : 
BELIN.  Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7218,  fol.  47.  V". 
Bellin.  Vig.  de  Charles  VU,  ï.  II,  p.  1S7. 

Belinaige,  siibst.  masc.  Acte  de  bélier.  11  est 
employé  avec  un  sens  obscène  dans  Rabelais,  T.  III, 
p.  (54.  ' 

Beliné  (jeu  du).  C'est,  suivant  Le  Duchat,  c  une 
«  espèce  de  jeu  comme  le  boutehors,  où  l'on  traite 
«  les  gens,  ou  béliers,  qu'on  tire  par  les  cornes 
«  pour  les  faire  sortir  de  la  bergerie.  »  (Voy.  Rab. 
T.  I,  p.  138.) 

Beliner,  verbe.  Sauter.  —Tromper. 

Dans  le  premier  sens  de  sauter,  il  signifie  sauter 
comme  un  bélier,  et  en  général  sauter.  [Voy.  Dict. 
d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

En  la  Champaigne  ont  un  fossé... 
En  bclinant  l'orent  passé. 

Rom.  de  Rou,  MS.  ]>.  337. 

Oudin  lui  donne  un  sens  obscène  dont  Rabelais 
s'est  servi.  (T.  111,  p.  (ii,  et  T.  V,  p.  176.) 

Ce  mot  signiOoil  aussi  tromper.  (Voy.  le  Dict. 
d'Oudin.)  Rabelais  a  dit  en  ce  sens:  «  Par  leur 
'<  astuce  sera  belline,  corbiné,  trompé,  et  affiné.  » 
(Rab.  Nouv.  Prol.  T.  IV,  p.  55.) 

VARIAiNTES  : 
BELINER.  Roman  de  Rou,  MS.  p.  337. 
Belliner.  Rabelais,  Nouv.  Prol.  T.  IV,  p.  55. 

Belingc,  snhst.  fém.  Tiretaine.  Sorte  d'étoffe 
ou  de  droguet.  Belinge  est  un  mot  du  patois 
Normand.  (Dict.  de  Nicot,  au  mot  Tiretaine.) 

Belinier  de  Malniinet.  Ternie  d'injure,  dans 
Rabelais,  T.  IV,  p.  t>0. 

Beliocande,  suhst.  fém.  L'herbe  de  mille 
feuilles.  (Dict.  de  Borel.) 

Belis,  subst.  Marguerite.  Fleur  de  printemps. 

Belissors,  siib&l.  musc. 

[Di>it  avoir  le  sens  de  belliqueux  ou  de  plus  beau, 
comme /;e//(?;;o«?"  dans  la  cantilène  de  Sainte  Eulalie.] 

Il  est  employé  par  l'auteur  du  roman  d'Athis, 
parlant  d'une  dame  qui  aimait  un  beau  et  brave 
chevalier  : 

Li  tens  est  clers  du  belissors  : 
Del  tôt  en  tôt  à  11  se  tient. 

Athis.  .MS.  fol.  lis,  R'col.  2. 

Bclistraille,  sulist.  fém.  Canaille.  Mot  collectif 
de  bélitre.  (Dict.  de  >'icot,  Oudin  et  Cotgrave.) 


VARIANTES  : 
BELISTRAILLE,  Belitraille.  Nioot,  Oud.  Cotgr.  Dict. 

Belistral,  adj.  Qui  appartient  à  un  gueux,  à  lui 
bélitre.  (Voy.  les  Dialog.  de  Tahureau,  fol.  132.) 

Belistrandier,  subst.  masc.  et  adj.  Bélître, 
gueux  mendiant.  (Voy.  Rabelais,  T.  III.  p.  138,  et 
T.  IV,  p.  o'i.)  On  lit  beloicte,  dans  le-  Celthell.  de 
Léon  Trippault. 

VARIANTES  : 
BELISTRANDIER.  Rabelais,  T.  III,  p.  138. 
Bellistrandier.  Cotgrave,  Dict. 
Belistrandike.  Rabelais,  T.  IV,  p.  51. 
Beloictre.  Celthell.  de  Léon  Trippault. 

Belistréement,  adv.  A  la  façon  d'un  gueux, 
d'un  mendiant.  (Dict.  de  Nicot  et  de  Cotgrave.) 

variantes  : 
BELISTRÉEMENT,  Belitrement.  Nicot,  Cotgrave,  Dict. 

Belistrer,  verbe.  Gueuser,  mendier.  (Dict.  de 
Rob.  Eslicnne,  Nicot,  Cotgrave.)  «  Faineans  qui 
«  vont  bclifitrunt  d'huis  en  huis.  »  (Nuits  de  Strapar. 
T.  II,  p.  391.) 

Bclistverie,  subst.  fém.  Gueuserie.  (Dict. 
d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

variantes  : 
BELISTRERIE,  Belitrerie.  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 

Belistresse,  subst.  fém.  Femme  qui  gueuse, 
qui  mendie.  (Dict.  d'Oudin.}  Il  est  adjectif  dans  le 
passage  suivant.  «  La  flaterie  est  un  vice  d'ame 
«  lasche,  basse  et  belistresse.  »  (Sagesse  de  Charron, 
page  494.) 

variantes  : 

BELISTRESSE.  Sagesse  de  Charron,  p.  494. 

Belitresse.  Oudin,  Dict. 

Bellamie,  subst.  fém.  Espèce  d'habit.  (Voy.  une 
citation  au  Gloss.  latin  de  Du  Cange,  au  mot 
Belamia  (I).) 

BellancCii),  subst.  masc.  Cornet  àjouer  aux  dés. 
C'est  dans  ce  sens  qu'un  poète  a  dit  : 

Un  bellanc  i  porte,  et  trois  dez... 
Amis,  fait-il,  vels  tu  joer? 
Voiz  que  bellenc  por  dez  jetter. 

Fabl.  MSS.  de  S'  f.erra.  fol.  45. 

variantes  : 
BELLANC,  Bellenc.  Fabl.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  45. 

Bellart,  adj.  Sujet  à  bAiller.  Qui  baille  ou  qui 
gronde  souvent. 

Voas  sentez  trop  vostre  vieil  l'art, 
Dont,  pour  plus  en  amours  vous  mectre, 
Amy,  vous  estes  trop  vieillart  : 
Dormez,  ne  soyez  point  bellart. 

Bellastre,  adj.  Qui  a  quelque  beauté.  «  Sa 
«  femme  laquelle  estoil  assez  bellastre.  »  fRabelais, 
T.  III,  p.  13(j  ) 

Belle  (la),  subst.  fém.  La  lune.  (Voy.  Du  Cange, 


(1)  Cette  citation  est  tirée  de  la  règle  de  Fontevrault,  ch.  IV:  «  Ut  non  habeant  vestimenta  fimbriata,  neque  in  dorso, 
neque  in  leclo,  prieter  Brlamiam,  sed  incisa  consuantur,  ut  tunica;  et  chlamydes.  »  Du  Gange  ajoute  :  «  Vestis  species  sic 
dicta  ex  Gallico  lielle  aiiùe.  »  Mais  s'il  suppose  ce  mot,  il  n'en  affirme  pas  le.xistence  ;  d'autant  plus  que  belamia  doit  être 
le  belaiiuje,  la  tiretaine.  (N.  E.)  —  (2)  Bellanc  est  notre  mot  brelan,  de  l'allemand  brelling,  petite  planche,  petite  table  sur 
laquelle  on  jette  les  dés.  (n.  e.) 


BE 


-    153  — 


BE 


Gloss.  lat.  au  mot  Fibella.)  Un  ancien  poSle  dit  des 
chats-huants: 

Le  jour  héent  et  la  chandelle  ; 

Par  nuit  volent,  et  à  la  belle. 

Eu6t.  Desch.  PoSs.  JKS.  fol.  320. 

....  En  terre  et  ciel  voy  obscurcir  la  belle. 

Ibid.  fol.  326. 

Belleem.  Nom  de  lieu.  Bethléem.  Bellem  Jiule, 
répond  au  latin  Bethléem  Judœ,  dans  S'  Bern. 
Serm.  Fr.  ms.  p.  110. 

En  Belleem  naqui  li  Sire  ; 

Mes  oncques  n'i  ot  drap  de  sire, 

N'i  ot  cortine,  ne  buschaut; 

Ouar  Dame  Diex  d'orgueil  ne  chaut. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7218,  fol.  IOj,  U'  ool.  1. 

Bellemariae  subst.  Roi  Sarrasin. 

.<  Les  Mois  de  Fez  de  la  maison  des  Benemerims 
"  qui  regnoient  il  y  a  trois  cents  ans,  sont  appeliez 
«  de  beùemarine  par  nos  vieux  écrivains.  »  (Iluet. 
Orig.  des  Rom.  p.  87.)  On  dit  roy  de  belmarin, 
dans  l'Hist.  de  B.  Duguesclin,  par  Ménard,  p.  157. 

VARIANTES  : 
BELLEMARIXE,  Belmarin.  Petit  J.  de  Saintré,  p.  171.  - 
Hist.  de  B.  Duguesclin,  par  Ménard,  p.  157. 

Bélier,  verbe.  Crier.  Ce  mot  exprime  dans  les 
vers  suivaus  les  cris  d'un  enfant  qui  pleure  : 

Alegiez  nous  de  cest  forment, 
Très  dous  Diex  ,  ausi  vraiement 
Qui  nasqiiittes  en  belleanl  (1), 
En  guise  de  petit  enfant. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n»  -218,  fol  59,  V  col.  2. 

Ce  mot  paroit  signifier  hurler,  pousser  des  cris 
efl'rayaiis,  dans  cet  autre  passage  :  «  S'assemblèrent 
«  eniour  de  luy  tous  les  màulvais  esperits  qui 
•1  estoient  en  celle  place,  cruellement  tonnans, 
«  bruyans  et  bellans  sans  dire  une  seule  parole.  » 
(Percef.  Vol,  VI,  fol.  7.) 

Il  est  pris  dans  le  sens  subsistant  de  bêler  sous 
forthograpbe  balialcr,  dans  S'  Bern.  Serm.  fr.  mss. 
p.  35G.  "  La  barbix  qui  entr'ous  bahaleivel,  »  dans 
le  latin  oviculœ  inter  eos  balantes. 

VARIANTES  : 
BELLER.  Crétin,  p.  210. 
Bahaler.  S'  Bern.  Serm.  Fr.  MSS,  p.  350. 
Belléer.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  59,  V"  col,  2. 
Bellier.  Poës,  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1367. 

Bellesse,  subst.  fém.  Beauté.  (Voyez  Pasq. 
Moiioph.  p.  10.) 

Bellevesée  (2),  subst.  fém.  Billevesée.  Ce  mot 
semble  avoir  été  introduit  dans  notre  langue  par 
Catherine  de  Médicis.  (Voy.  Brant.  Dames  lit.  p.  83.) 

Bellevidere ,  subst.  masc.  Belvédère.  (Dict.  de 

Cotgrave.) 

Belleyan  ,  aâj.  Velleien.  Bénéfice  belleijan  , 
c'est-à-dire  bénéfice  de  la  loi  Velleyenne.  (Voy.  une 
cit.  fr.  dans  Du  Gange,  Gl.  lat.  au  mot  Velleyanum.) 


Belliant,  subst.  masc.  Betlhéem. 

Diex,  dist-elle,  de  Belliant 
Oui  descendis  honestement 
El  cors  de  la  Vierge  pucele. 

Blanch,  MS.  do  S.  G.  fol.  192,  R°  col.  3, 

Belliateur,  subst.  masc.  Guerrier,  combattant. 
(Voy.  les  Triomph.  de  Pétr.  Trad.  du  Bar  d'Oppede, 
fol.  84.) 

Bellicosité,  subst.  fém.  Amour  des  combats. 
«  Ung  notable  personnage,  natif  du  Dauphiné.... 
.  s"est  employé  à  escrire  quelque  chose  qui  puisse 
«  aucunement  servir  à  exciter  la  bellieosité,  tant 
«  de  la  noblesse,  que  aussi  du  peuple  de  France,  et 
«  de  Dauphiné.  »  (De  la  Forge,  des  Hommes  belliq. 
MS.  de  la  Bibl.  du  U.  n»  785,)" 

Bellicossent,  subst.  mase.  et  adj.  Guerrier, 
belliqueux.  On  a  dit  de  la  Grande  Bretagne  :  «  Ceste 
»  ysle  est  moult  habondante  en  or,  en  argent,  et 
"  autres  metaulx,  aussi  de  bestiaux,  et  sont  genl 
«  de  bellicossent,  et  à  sang.  »  (La  Salade,  fol.  28.) 
On  lit  :  «  0  vertus  et  puissances  belliques,  »  dans 
les  Mém.  du  Bell.  T.  VI,  p.  290. 

En  subjuguant  les  forces  belliquanles 
Vénitiennes. 

J.  Marot,  p.  157. 

VARIANTES  : 
BELLICOSSENT.  La  Salade,  fol.  28. 
Belliquant.  j.  Marot,  p.  157. 
liELLiQUEUH.  Gloss.  do  Marot. 
Bellique.  Essais  de  Montaigne,  T.  III,  p.  114. 
Belligereux.  Triorap,  des  Neuf  Preux,  p.  16,  col.  i. 

Belliniere  (balle).  Sorte  de  ballon.  Il  étoit  fait 
de  peau  de  bélier  avec  ses  poils.  On  s'en  servoit  du 
temps  dllenry  II.  (Voy.  Brant.  Dames  Gall.  T.  II, 
p.  558.  —  Voy.  Balle.) 

Belliric,  subst.  masc.  Sorte    de  fruit.   (Dict. 
d'Oudin,  de  Colgrave  et  de  Borel.) 
variantes  : 
BELLIRIC.  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 
iJERELis.  Borel,  Dict. 

Bellistrandie,  subsl.  fém.  Lésine  ,  avarice. 
(Voy.  Le  Duch.  sur  Rab.  T.  II,  p.  75.) 

Belliver,  verbe.  Biaiser.  Il  paroit  que  c'est  le 
sens  de  ce  mot  dans  ces  vers  : 

François  se  metent  es  rueles 
Que  Flamens,  comme  genz  senées, 
Orent  es  charroy  ordenées, 
En  bellivant,  non  mie  droites. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  3ôO,  R». 

Belloce  (3),  subst.  fém.  Sortes  de  prunes  nom- 
mées encore  ainsi  suivant  le  Gloss.  du  Roman  de  la 
Rose,  sous  Belloe.  Ce  mot,  formé  de  Bellocier  ci- 
après,  a  été  aussi  employé  pour  dire  rien  ou  chose 
de  peu  de  valeur,  dans  lès  vers  suivans  : 

Quant  dame  Catherine  voit  l'espreuve  dant  ,Ioce, 

Oui  por  l'amour  sa  femme  ne  donne  une  bclnre. 

"  J.  de  Meung,  Cod.  iiU  et  4ti2. 


(1)  Belleanl,  comme  plus  bas  belliant,  est  une  corruption  de  Bethléem,  -  (2)  Déjà,  dans  le  Chevalier  au  Cygne  (xm' 
siècle),  on  trouve  ;  «  Car  Mahomes  ne  vaut  une  belle  venaie.  »  De  là  est  venu  ce  mot  du  xvF  siècle  ,  qu'on  trouve  aussi 
dans  Rabelais  :  «  Ayez  en  révérence  le  cerveau  caséiforme,  qui  vous  paist  do  ces  belles  bille-vezées.  »  (Prol.  du  1"  livre.) 
tN.  E.)  —  (3)  Ces  prunes  sauvages  sont  encore  ainsi  nommées  en  Normandie,  et  même  en  Bretagne,  (n.  e.) 


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—  4.>4  — 


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BoIIocler,  subst.  masc.  Prunier  sauvage.  (Dict. 
de  Cotgrave.) 

Bellottc,  subst.  fém.  Belette. 

Belluer,  verbe.  Maltraiter  :  a  pu  être  fait  sur 
beliies,  pauvreté,  qu'on  trouve  dans  Isid.  de  Séville, 
mais  qui  est  peut-être  une  faute  pour  hœc  lues  ; 
nous  pouvons  aussi  remonter  à  bellua,  bête  fauve, 
ou  i^  bclugue,  sorte  de  machine  de  guerre. 

Mors  qui  en  toz  leuz  as  tes  rentes, 
Et  de  toz  marchiez  à  les  ventes, 
Qui  les  riches  sez  desRuer, 
Et  les  plus  fors  sez  tressuer, 
Et  les  plus  riches  belluer.... 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7615,  T.  I,  fol.  10-2  bis.  R*  col.  2. 

Bellues,  subst.  fém.  plur.  Sornettes.  Propre- 
ment, ce  mot  signifie  bluelte,  étincelle,  du  mot 
provençal  Béluga. 

quant  famé  a  fol  debonere 

Et  elle  a  rien  de  lui  a  fere. 
Elle  li  dit  tant  de  bellues, 
De  trufes  et  de  fafelues,  etc. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7615,  T.  I,  fol.  fil,  V  ool.  ». 

Belluque,  subst.  fém.  Bagatelle.  Curiosité  de 
peu  de  valeur,  breloque.  De  1:\,  on  a  nommé  brelu- 
qiies  les  pièces  d'or  vieilles  et  défectueuses.  (Dict. 
d'Oudin.) 

VARIANTES  : 
BELLUQUE.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Belluga. 
Balluque.  Cotgrave,  Dict. 
Beluque.  Colgra^e,  Dict. 
Beloce.  Borel,  Dict. 

Breluque.  Du  Gange,  GIosb.  lat.  au  mot  Belluga. 
Brelaque.  Ibid. 

Belonc  (de),  adv.  De  travers,  de  biais.  Expres- 
sion formée  de  bélong  ou  barlong.  On  disoit  bar- 
long,  en  parlant  d'un  habit  plus  long  d'un  côté  que 
de  l'autre. 

Tout  alla  de  travers  et  belonc. 

Eusl.  Desch.  Poos.  IISS.  fol   12S,  col.  3. 

Le  mot  bellongues  est  expliqué  par  longues  ou 
berlongues,  dans  le  Gloss,  du  R.  de  la  Rose.  On  lit 
dans  le  vers  19042  : 

Ymages. 


Droictes  bellongues  et  enverses. 

Bêlions,  dans  ce  vers,  signifie  qui  est  placé  en 
long  ou  en  travers. 

Belouart,  subst.  masc.  Boulevard.  (Gloss.  de 
l'Hist.  de  Bret.) 

Belourd,  adj.  Balourd.  (Voy.  Moyen  deParven. 
page  2'»!.) 

Belouze  (1),  subst.  fém.  Le  trou  d'un  jeu  de 
paume.  (Oudin,  Dict.) 

Belues  (Droits  de),  subst.  Fouage.  Droit  dû  au 
roi  ou  au  seigneur  sur  chaque  feu.  Dans  l'Etat  som- 
maire des  Droits  du  Royaume,  on  lit:  «  Droits  de 
«  lattes,  belues,  de  Champagne,  de  Logres,  de 
«  Stipes.  <•  (Mém.  de  Sully,  ï.  X,  p.  220.)  Ce  mot. 


ainsi  que  Belugues.  s'est  formé  de  Béluga,  mot 
provençal  qui  signifie  bluette,  étincelle. 

Belugues,  subst.  plur.  On  appeloit  bclugues  les 
divisions  des  douze  cents  feux  de  la  généralité  de 
iMoutauban  ;  ils  furent  divisés  en  cent  "belugues  par 
les  Règlemeiis  rendus  pour  celte  généralité,  pour 
les  années  IGGG  et  1072. 

Belusteur,  subst.  masc.  Qui  blutte,  qui  sasse. 
(Dict.  d'Oudin.) 

Beluteau,  subst.  masc.  Sas  à  passer  la  farine. 

—  Espèce  de  jeu.  —  Sorte  d'étoffe. 

Ce  mot,  dans  le  premier  sens,  vient  du  mot  breton 
Bleut[%.  (Gloss.  de  l'Hist. 'de  Bret.  au  mot  Delutiau. 

—  Ibid.  au  mot  Blavez\  où  il  est  dit  que  les  mots 
Beluteau  et  Beluter  viennent  du  breton  Blawd,  qui 
signifie  farine. 

De  \h,  on  a  nommé  belusteau  une  espèce  de  jeu 
qui  se  fait  en  se  plaçant  de  face,  en  s'entrelaçant 
les  mains  de  l'an  avec  celles  de  l'autre,  et  en  se 
poussant  tour  à  tour.  (Voy.  Le  Ituchat,  sur  Rab. 
T.  L  p.  151.)  C'est  l'imitation  de  l'action  de  passer 
la  farine  dans  le  tamis,  lorsque  deux  personnes  le 
tiennent,  chacun  d'une  main,  et  le  poussent  et 
repoussent  alternativement. 

De  là  encore,  on  a  donné  le  nom  de  beluteau  ou 
belutiau  h  une  sorte  d'étoffe.  C'est  un  velours,  si 
nous  en  croyons  le  Gloss.  de  l'IIist.  de  Bret.  Il  ren- 
voie au  passage  suivant  qui  ne  paroit  pas  confirmer 
cette  explication.  «  Et  sera  le  cheval  covert  de 
«  covreture  de  belutiau  et  de  telles  et  de  cen- 
»  dreux.  »  (Hist.  de  Bret.  p.  1639.)  Ce  Glossaire  dit 
encore  que  ce  mot  a  une  acception  difïérente,  dans 
ce  second  passage,  mais  il  ne  la  détermine  pas  : 
«  La  souzaine  couverte  de  linges  de  beluteaux, 
«  appeliez  estamine  de  linge.  "  (Ibid.  p.  675.)  Il 
pourroit  signifier,  du  moins  dans  ce  dernier  pas- 
sage, l'étoffe  dont  on  fait  les  sas  ou  tamis. 

VARIANTES  : 
RELUTE.\U.  Gloss.  de  THist,  de  Bret. 
Belusteau.  Rabelais,  T.  I,  p.  151. 
Belutiau.  Hist.  de  Bret.  p.  675. 
Bulleteau.  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 
Bur.ETEA.x.  Fabl.  MSS.  de  S.  G.  fol.  42,  Y»  col.  2. 
Bluteax.  Erber.  MS.  de  S.  G.  fol.  90,  V»  col.  1. 
BuLTEL.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Bulellux. 
BuDEL,  mot  flamand.  Du  Gange,  Gloss.  bit.  à  Budele. 
Buretel.  La  Bible  Guiot,  MS.  dans  Du  Gange,  à  Bren. 
Bureteau.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Bren. 

Belutcment,  subst.  masc.  L'action  de  bluter. 

—  Discussion,  examen. 

Au  propre,  ce  mot  signifie  l'action  de  passer  la 
farine  dans  un  tamis.  (Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Au  figuré,  on  disoit  belutement  pour  discussion, 
examen.  «  Remettons  à  vostre  retour,  le  grabeau, 
«  et  belutement  de  ces  matières.  ••  (Rabelais,  T.  III, 
p.  8.  —  Voy.  la  Note  de  l'éditeur.) 
variantes  : 

BELUTEMENT.  Bluttement.  Cotgrave,  Dict. 

Belustage.  Oudin,  Dict. 


(1)  Ce  sont  les  blouses  des  billards,  (n.  e.)  —  (2)  D'ordinaire,  on  cite  l'allemand  Beittel,  bourse.  Mais  Diez  remarquant  le 
bourguignon  burteau,  le  provençal  barutel,  veut  remonter  à  bure,  bureau,  (-n.  e.) 


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-  455  - 


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Belutaige.  Rabelais,  T.  III,  p.  165. 

Blutage.  Oudin,  Dict. 

Blutis.  Monet,  Dict. 

Bluttis.  Monet  et  Cotgrave,  Dict. 

Beluter,  verbe.  Bluter.  —  S'agiter,  se  remuer. 

Ce  mot  signifie  proprement  séparer  la  farine 
d'avec  le  son,  en  la  passant  dans  un  blutoir.  (Dict. 
Elym.  de  Ménage.) 

On  a  dit  aussi  beluter  dans  un  sens  plus  vague, 
pour  s'agiter,  se  remuer.  «  Veismes  aussi  nombre 
«  infiny  de  poissons  en  espèces  diverses  dançants, 
"  volans,  voltigeants,  belutants,  chassants.  »  (lîab. 
Nouv.  prol.  T.  IV,  p.  156.)  Il  est  pris  dans  un  sens 
obscène.  (Ibid.  T.  III,  p.  59,  et  dans  les  Nuits  de 
Strapar.  ï.  I,  p.  408.) 

VARIANTES  : 

BELUTER.  Ménage,  Dict.  Etym. 

BuLETER.  Hist.  de  B.  Dugnescl.  par  Ménard,  p.  505. 

BuLLETER.  Oudin,  Cotgrave,  Dict. 

BULTER.  Britt.  Loix  d'Angl.  fol.  75,  R". 

Belzebus,  stibst.  masc.  Nom  de  démon. 

Ha  hai  !  hai,  hai,  je  sui  venus  : 
Salus  vous  mande  Behebus. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  242,  R'  col.  2. 

VARIANTES    : 
BELZEBUS.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  182,  R"  col.  1. 
Bersebus.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  230,  V°. 
Behebus.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  242,  R»  col.  2. 

Belzebut  (1),  subst.  mase.  Dieu  des  mouches. 
C'estainsi  qu'il  est  expliqué  dans  les  Diverses  leçons 
de  Du  Verdier,  page  41  ;  il  est  mis  avec  Mercure  et 
Bacchus  dans  la  Chasse  et  Départ.  d'Am.  page  2i9. 

Belzoin  (2),  subst.  masc.  Benjoin.  Sorte  de 
résine.  (Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Benii,  adj.  Faible,  nigaud  : 

Lors  le  hetni 
Gist  endormi. 
Qui  ne  voit,  ni  oyt,  ni  entend. 

Le  Blason  des  Faulces  Amours,  p.  260- 
VARIANTES  : 
BEMI.  Le  Blason  des  Faulces  Amours,  p.  260. 
Bemy.  Citât,  dans  Gouj.  Bibl.  fr.  T.  X,  p.  114. 
Bemus.  Contes  de  Cholières,  fol.  178,  V». 
Besmus.  Contes  d'Eutrapel,  p.  06. 

Bemont,  subst.  masc.  "  En  vieil  bourguignon, 
<>  estoil  autant  que  ftcZmonf  ou  beaumont.  »  (S'Jul. 
Mesl.  hist.  p.  3()8.) 

Ben,  subst.  masc.  Vent,  dans  le  patois  de  Cahors. 
(Voyez  Dict.  de  Borel,  au  mot  Glouper.) 


Ben,  adv.  Bien.  (Hist.  de  la  S'"  Croix,  ws.  p.  18.) 

Bien  sai  que,  patf  ma  coulpe.ai  sa  grâce  perdue, 
Se  par  vostre  conseil  ne  puet  eslre  rendue 
Que  je  à  la  fin  ne  soie  dampnée  et  confondue  : 
Bien  entrastes  çaiens,  hen  vi  vostre  venue. 

Vies  des  SS.  MS.  de  Sorb.  cbif.  xxvii,  ool.  7. 

Benafort,  adv.  Presque.  Voyez  le  Dict.  de 
Borel,  ([ui  cite  le  vers  suivant  au  mol  Kuscun  : 

Kascun  jour  m'es  a  benafort  un  an. 

C'est-à-dire  selon  Borel  : 

Chaque  jour  m'est  presque  une  année. 

Ce  mot  pourroil  s'expliquer  par  beaucoup  plus. 
Crescenbeni,  dans  ses  vies  des  Poètes  provençaux, 
p.  142  de  l'édition  de  1714,  rend  benafort  mays  par 
hen  via  pui,  qui  signifie  bien  plus. 

Benari,  subst.  masc.  Ortolan.  Dans  le  patois  de 
Languedoc.  (Dict.  étymologique  de  Ménage.) 

Benberge,  subst.  fém.  Armure  de  la  jambe. 
(Voyez  Du  Cange,  Gloss,  latin,  au  mot  Bainberga.) 

Bendage,  subst.  masc.  Pièce  de  l'arbalète.  Celle 
qui  servoit  à  la  tendre  ou  bander.  (Glossaire  lalin 
de  Du  Cange,  au  mot  Labaiidago.) 

Beiidel,  subst.  masc.  Bandage.  Rouge  bendel, 
dans  les  vers  suivans,  semble  désigner  une  bande 
de  toile  qui  sert  à  lier  une  plaie  : 

Se  tu  viens  mes  hui  après  moi, 
Et  je  truis  baston,  ou  espoi 
Tel  te  donrai  el  haterel  (3), 
Dont  tu  auras  rouge  bendel. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  239,  V  col.  î. 

Bendiaux ,  subst.  masc.  plur.  Nous  trouvons 
ce  mot  dans  ce  vers  : 

Et  Gaifiers  li  rois  de  Bordiaus 
Donne  paiens  cos,  et  bendiaux  (4). 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  197. 

Benedicaniiis.  Prière  pour  rendre  grâces  ùDieu 
de  quelque  bienfait  :  il  est  dit  que  des  moines  frap- 
pés d'un  miracle  qui  s'estoit  passé  sous  leurs  yeux: 

Lors  font  sonner,  et  chantent  haut  benedicamus  ; 
Et  mains  ymne  des  anges  Te  Deum  l'audamus 
Chantent  a  haulte  voix. 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  204. 

Bénéfice,  subst.  masc.  Fief  ou  cession  de  terre. 
—  Bienfait.  —  Derniers  devoirs.  —  Tenue  du  jeu 
de  la  blanque. 

Au  premier  sens,  ce  mol  désiguoit  une  cession 
de  terre  (jue  faisoit  le  seigneur,  le  prince  ou  le  roi. 
(Voyez  Du  Cange,  Gloss.lat.au  mot  Ileiie/lchun  (5).) 


(1)  En  phénicien  et  en  arabe,  le  nom  du  démon  viendrait  de  ce  mot  Beel-Zebub.  (n.  e.)  —  (2)  L'étymologie  serait  l'arabe 
Imibjàn  djuuui,  encens  javanais,  nom  qui  se  trouve  dans  Ibn  Baloutu.  (n.  e.)  —  (3)  Au  cou.  —  (4)  C'est  le  pluriel  du  mot 
précédent,  qui  signifie  IJlessure  en  forme  de  longue  bande,  d'estafilade.  (N.  E.)  —  (5)  Bénéfice  a  d'abord  le  sens  du  latin 
bene/icium,  bienfait.  Puis,  sous  les  Mérovingiens,  il  signifie  usufruit  opposé  à  propriété.  Ce  sont  alors  des  concessions  faites 
à  des  fidèles  qui,  devenant  usufruitiers,  doivent  en  retour  des  cens.  C'est  ce  qui  distingue  le  plus  nettement  cette  forme 
de  bénéfice  du  bénéfice  féodal,  qui  oblige  à  des  services  personnels  envers  le  concédant.  Les  bénéfices  mrrvciii'ficns  étaient 
détenus  parles  fidèles  des  diplômes,  les  leiides  des  chroniqueurs.  L'acte  par  lequel  se  concède  un  liénci'icc  est  dit  preslaria; 
il  est  souvent  précédé  d'une  demande  fictive,  precaria  ou  ccnamendatio,  lorsque  le  possesseur  d'une  terre  cherche  un 
propriétaire  qui  le  défende  :  ces  deux  actes  s'inscrivent  àla  suite  l'un  de  l'autre,  puis  se  mêlent,  tout  en  conservant  le  nom  de 
jn-écaire.  Sous  les  Carlovingiens,  le  bénéfice  doit  le  service  militaire  comme  l'alleu  (Cap.  de  807,  811,  Baluze  I,  494, 
d.  Bouquet  V,  678):  la  propriété  étant  la  base  du  service  militaire,  il  fallut  remplacer  par  des  bénéjicicrs  les  hommes  libres 
possesseurs  li'alleux,  qui  commençaient  à  disparaître.  En  même  temps  les  fonctions  publiques,  sous  le  nom  A' honores, 
constituent  une  seconde  classe  de  bénéfices  :  les  rois  ne  donnent  plus  de  traitements  à  leurs  oriiciers,  mais  leur  assignent 
des  terres  qui  sont  l'apanage  de  leurs  fonctions.  Enfin  le  bénéfice  devient  définitivement  héréditaire  par  le  capitulaire  de 
Kiersy-sur-Oise  (877),  prend  son  rang  dans  la  hiérarchie  des  terres,  pour  le  transporter  à  son  détenteur;  il  doit  alors  le 
service  militaire,  (n.  e.) 


6E 


456  — 


BE 


Au  xn'  siècle,  on  se  servoit  indistinctement  du  mot 
feodiim  et  benelkiiim ,  pour  exprimer  la  même 
chose.  On  en  voit  la  pi'euve  dans  une  charte  de 
l'empereur  Frédéric  1",  de  l'an  IIG'2,  en  faveur  do 
Raimond  ,  son  neveu,  portant  don  en  fief  du  comt(5 
de  Forcalquier.  Cette  charte  est  cilée  parBrussel, 
sur  les  Fiefs,  cli.  v,  p.  78.  On  trouve  aussi  bénéfice 
pour  bienfait  ou  concession,  dans  la  Preuv.  de  l'Hist. 
de  Beauvais,  par  un  Bénédictin,  p.  '273;  lit.  de  1 1G7. 
Quelques  auteurs  prétendent  que,  sous  la  première 
et  la  deuxième  race  ,  les  fiefs  et  ce  qui  s'appeloil 
béuélicesétoieu  t  la  même  chose  ;d'autresont  soutenu 
le  contraire.  Ces  différens  senlimens  sont  discutés 
parlemêmeBrussel,auch.  n,  p.  57.  Bou'.ainvilliers, 
dans  son  Ess:ii  sur  la  Noblesse,  p.  0-2,  dit:  «  qu'il 
«  y  avoit  des  terres  qui  éloienl  proprement  le 
•  domaine  de  l'Etat,  parce  qu'elles  éloienl  destinées 
«  à  la  récompense  des  soldais,  des  officiers  et  des 
«  seigneurs  distingués:  on  les  nommoit  honneurs 
«  ou  bénéfices,  parce  qu'il  y  eu  avoil  d'attachés  aux 
«  emplois,  comme  magistratures,  et  gouveruemens, 
«  et  d'autres  qui  servoient  simplement  de  récom- 
«  pense:  mais  la  possession  des  uns  et  des  autres 
»  n'étoit  que  viagère.  »  (Voy.  sur  le  mot  Bénéfice, 
le  P.  Daniel,  Mil.  fr.  p.  41  et  53,  etc.) 

«  Benevis dans  le  Lyonnois  et  les  pays  voisins, 

«  signifie  en  général  toute  concession  faite  par  un 
"  seigneur  à  quelqu'un,  sous  une  redevance,  mais 
«  particulièrement  une  concession  d'eau  pour  faire 
«  tourner  les  moulins,  et  pour  arroser  des  prez.  » 
(Laurière,  Glossaire  du  Droit  franrois.)  On  trouve 
benevis  pour  fief  ou  bénéfice,  dans  le  Glossaire  latin 
de  Du  Gange,  au  mot  Beuevisum,  qu'il  explique  par 
beneficium. 

Le  sens  que  nous  venons  d'exposer  étoit  une 
application  du  sens  propre  et  générique  du  mot 
bénéfice,  qui  signifioit  en  général  bienfait:  «  Il 
«  reprocha  au  comte  Regnault  les  bénéfices  qu'il 
«  luy  avoit  faits.  >■  (Chron.  de  S' Denis,  T.  II,  fol.  43.) 
Ce  mot  est  employé  pour  bienfait,  bonne  œuvre, 
dans  ces  vers  : 

Et  si  bien  employer  sçavoi  ses  bénéfices 
Comme  s'il  eust  toujours  maintenu  telz  offices. 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  93. 

De  Ui,  on  nommoit  aussi  bénéfices  les  derniers 
devoirs  que  l'on  rend  ù  un  mort.  L'auteur,  parlant 
des  funérailles  de  la  reine  Anne,   duchesse   de 

Bretagne,    dit:    ..  Le  héros  d'armes appella 

«  tous  les  princes  et  officiers  d'icelle  dame pour 

»  eux  tous,  et  un  chacun  d'eux  accomplir  les 
«  bénéfices  envers  le  dit  corps.  »  (Brantôme,  Dames 
illustres,  p.  21.) 

Enlin  le  mol  bénéfice,  comme  teiaiie  du  jeu  de  la 
blanque,  désignoit  le  billet  ïiagnant.  lOudiu,  Cur. 
fr.,  et  Pasquier,  Rech.  p.  730.)  il  est  opposé  à  blanque 
qui  étoil  le  billet  perdant  :  «  .Nos  eufans  sont  tels 
«  que  le  hazard  de  leurs  naissances  nous  les  donne, 
«  qui  est  cause  que  recevons  d'eux  plus  de  Manques 


»  que  de  bénéfices.  »  (Lettres  de  Pasquier,  T.  I. 
p.  699.  —  Voyez  Brantôme,  Dam.  gai.  T.  I,  p.  285.) 

Expressions  remarquables  : 

\°  Courir  le  bénéfice,  c'est  hanter  les  mauvais 
lieux.  'Oudin,  Cur.  fr.) 

'i°  Aller  au  bénéfice,  c'est  aller  à  la  garde-robe  : 

Tenez  que  vous  êtes  garis. 
Si  vous  ulez  au  bénéfice  (1)  : 
Quoy  que  nu!  phisicien  dise, 
Mieulx  vous  vaudra  que  un  cristere. 

Eusl.  Desch.  Poes.  M9S.  fol.  407,  ool.  1. 

3°  Par  le  bénéfice  des  yeux.  Par  le  moyen  des 
yeux  :  ■>  De  quoy  ne  pouvant  faire  jugement  certain 
«  par  le  bénéfice  des  rjeux,  à  cause  de  la  trop 
<>  épaisse  obscurité.  »  (Mém.  de  Sully,  T.  I,  p.  247.) 

VARIANTES  : 
BENEFICE.  Du  Cange,  Glossaire  latin,  au  mot  Beneficium. 
Ben'EVIs.  Laurière,  Glossaire  du  Droit  français. 
liENNEVis.  Du  Cange  ,  Glossaire  latin,  au  mot  Benevisiim. 
EiENKET.  D.  Morice,  Hist.  de  Bretagne,  p.  981. 

Bénéficence,  subst.  fém.  Bonté,  bienfaisance. 
(Dict.  de  Cotgrave  et  Glossaire  de  Marot.) 

VAniANTES  : 
BÉNÉFICENCE.  Cotgrave,  Dict. 
BÉNÉFiciENCE.  Oudin,  Dict. 

Bénéficié ,  part.  Qui  a  des  bénéfices  :  «  Etoit 
«  très  bien  bénéficié  en  plusieurs  et  divers  lieux.  » 
(Juv.  des  Urs.  Hist.  de  Charles  YI,  p.  103.) 

Bénéficier,  verbe.  Avantager:    "  Les  parans 

«  voulants  bénéficier  aucuns  de  leurs  enfans, 

«  le  peuvent  faire  par  partage,  testament,  dona- 
«  tion,  etc.  »  (Nouv.  Coût.  gén.  p.  1250.) 

Beneficque,  adj.  Bienfaisant.  (Voy.  Le  Duchat, 
sur  Rabelais,  T.  V,  p.  153.)  On  lit:  «  Clément  ei 
<■  bénéfique  à  tous  ses  sujets,  »  dans  les  Mémoires, 
Du  Bellay,  T.  VI,  p.  386. 

VARIANTES  : 
BENEFICQUE.  Le  Duchat,  sur  Rabelais,  T.  V,  p.  153. 
BENEFIQUE.  Mém.  Du  Bellay,  T.  VI,  p.  38G. 

Beneir,  verbe.  Bénir,  sanctifier.  (Dict.  deBorel, 
au  mot  Beneisson  (2).)  Voyez  les  autorités  citées  sur 
chaque  orthographe. 
J.  de  Meung  a  dit: 

Amer  Dieu,  et  le  veoir,  le  louer,  et  beneistre 
C'est  l'office  des  anges. 

J.  deMeunj,  Cod.  113et  lU. 

CONJl'G. 

Beneie ,  subj.  prés.  Bénisse.  (Fabl.  jiss.  du  R. 
11°  7218,  fol.  171,  V°col.  2.) 

Benesqui,  ind.  prés.  Bénit.  (Hist.  de  la  S"  Croix, 
51S.  page  10.1 

Bencstrai,  futur  prés.  Bénirai.  (Ibid.  p.  6.) 

Bencijront,  futur  prés.  Béniront.  (Font.  Guér. 
Trésor  de  Vénerie,  ms.  p.  21.) 

Bénie,  subj.  prés.  Bénisse.  (N.  deSlrap.  T.  I,  p. 24.) 

Benions,  dans  le  latin  Benedicimus.  (S'  Bernard, 
Serm.  fr.  mss.  p.  159.) 

Benoi'i:,  dans  le  latin  Benedictus.  (S'  Bernard, 
Serm.  fr.  mss.  p.  160.) 


(1)  Bénéfice  de  i^enlre  se  trouve  encore  dans  Perrot  d'Ablancourt,  traducteur  de  Tacite,  avec  le  sens  de  diarrhée  spontanée 
qui  soulage  :  «  11  [UaudeJ  lut  délivre  du  premier  danger  [le  poison]  par  un  b'niéfice  de  ventre.  »  (n.  e.)  -  (2)  On  trouve,  dans 
la  Chanson  de  Itoland,  la  forme  beneï.'isent  (v.  3667)  :  «  Et  li  evesques  les  ewes  beneissent.  »  (n.  e.) 


BE 


-  457  — 


BE 


VARIANTES  : 
BENEIR.  Joinville,  p.  GO.  -  Clém.  Marot,  p.  684. 
Benevr.  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose. 
BEiGNin.  Petit  Jean  de  Saintré,  p.  83. 
Benitre.  Monet,  Dict. 

Benistre.  La'jbe,  Glossaire,  p.  491.  —  Glossaire  de  Marot. 
Beneistre.  Borel,  Dict. 
Benoistre.  Doctr.  de  Sap.  fol.  9,  V». 
Benoier.  Borel,  Dict. 

Beneison,  subst.  fém.  Dénédiction  (1).  (Voyez  le 
Dict.  de  Borel,  au  mot  lieneison,  et  les  autorités 
ci-dessus.)  Ce  mot,  dans  les  Sermons  français,  mss. 
de  S'  Bernard,  p.  17,  88,  et  passim,  répond  au  latin 
Benedietio. 

VARIANTES  : 
BENEISON.  Coquillart,  p.  127. 
Begnisson.  Hist.  du  Théâtre  français,  T.  I,  p.  457. 
Bienadiceon.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  349-383. 
Beneiçon.  Eust.  Deschanips,  Poës.  MSS.  fol.  430,  col.  4. 
Benfisson.  Petit  Jean  de  Saintré. 
Beneizon.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  262. 
Benesson.  Ger.  de  Nevers,  i""  partie,  p.  117. 
Beneysson.  Perceforest,  Vol.  IV,  fol.  136. 
Beniçon.  Ménage,  Dict.  étymologique. 
Benission.  Perceforest,  Vol.  IV,  fol.  119,  R»  col.  1. 
Benisson.  Eust.  Deschamps,  Poës.  MSS.  fol.  489,  col.  1. 
Benizon.  S'  Bernard,  Serm.  fr.  MSS.  p.  17  et  88. 
Benoicion.  Ord.  des  Rois  de  France,  T.  I,  p.  607,  col.  2. 

Beneoite,  subst.  fém.  Il  est  dit  des  lois  de 
Romulus,  que  le  meurtre,  suivant  ces  lois,  étoit 
puni  par  la  mort  du  coupable  : 

Et  se  feme  estoit  mariée, 
Beneoite,  ne  espousée 
Qui  puis  la  troveroit  à  hontaige 
A  mavaitié  ne  à  putaige, 
C'om  la  feist  morir  à  honte. 

Alhis,  MSS.  fol.  1,  Vcol.  2. 

Beneoite,  dans  ce  passage,  semble  signifier  fian- 
cée, promise  en  mariage,  qui  a  donné  sa  foi. 

Benestier,  subst.  masc.  Bénitier  : 

Quand  une  femme  est  du  mestier, 
Et  sa  voisine  l'accompagne. 
Elle  a  sa  part  au  beiioislicr, 
Par  la  coustume  de  Champagne. 

Rlojen  de  parveûir,  p.  383. 

VARIANTES  : 

BENESTIER.  Monet,  Dict. 
Benoistier.  Oudin,  Dict. 

Beueiirement ,  adv.  Heureusement.  ■>  Plus 
«  bencurcment  furent  ainsi  détruis  par  les  ennemis 
«  de  la  foy.  »  (Cbron.  de  S'  Denis,  T.  I,  fol.  264.) 
On  a  dit  en  langage  ascétique  boneneseurement 
pour  bienheureux,  comme  les  bienheureux  : 

Onques  ne  fist  nule  gent 
Qui  plus  boneneseurement 
Servissent  à  lor  Creator, 
Que  faisoient  icil  Seignor, 
II  n'avoient  soing  de  mal  faire. 

Vies  des  SS.  MS.  de  Sorb.  chiff.  LXI,  col.  17. 
VARIANTES  : 
BENEUREMENT.  Chron.  de  S-  Denis,  T.  I,  f"  264. 
Boneneseurement.  Vies  des  SS.  MS.  de  Sorb.  ch.  lxi. 

Beneviser,  subst.  masc.  Possesseur  de  fief. 
(Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mot  Benevisum  et  au 


mot  Alodum.)  Ce  mot  vient  de  benevis,  dit  pour 
bénéfice,  fief. 

Beneviser,  verbe.  Fixer,  aborner,  mettre  des 
bornes.  (Voy.  Laurière,  Glossaire  du  Droit  françois.) 

Bénévole,  adj.  Bienveillant,  bienfaisant.  (Gloss. 
de  Marot.) 

Benevolence,  subst.  /iem.  Bienveillance,  bonté. 

Mais  le  feu  roy  qui  fut  piteux, 
Par  pitié,  et  benivolance. 

Vigil.  de  Charles  VII,  T.  II,  p.  165. 

VARIANTES  : 
BENEVOLENCE.  Nicot,  Dict. 
Benivolance.  Vigil.  de  Charles  VII,  T.  II,  p.  165. 
Benivolence.  Ibid.  T.  I,  p.  191. 
Begnivolence.  Contredits  de  Songecreux ,  fol.  129,  R». 

Beuigna  (faire  l'O).  Expression  formée  du  latin 
ô  benigna,  exclamation  sur  la  bonté,  la  douceur 
d'une  personne.  Ce  mot  signifie  flatter,  rendre  ses 
devoirs.  (Oudin,  Dict.  et  Cur.  Fr.) 

Benifjnaige,  subst.  masc.  Avantage.  On  lit: 
<•  Par  faulle  de  lieu  ténébreux,  il  habite  de  jour  en 
«  la  clarté  du  soleil  qui  luy  oste  son  benignaige.  » 
(Percef.  Vol.  III,  fol.  l'20.) 

Bénigne,  subst.  fém.  Favorite  : 

S"'  Avoye  vous  a  fait  sa  bénigne. 

Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  206,  col.  i. 

Benigneté,  subst.  fém.  Bénignité.  (Dictionnaire 
de  Cotgrave.) 

Bening,  adj.  Bénin,  doux. 

Hé  bon  roi  Loeys,  gentis  hom  et  hegnignes, 

De  jor  en  jor,  devient  li  mondes  si  malignes,  etc. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  lilS,  fol.  341,  K-  col.  2. 

Ce  que  plus  tost  entre  aux  cueurs  féminins 
D'autant  qu'ilz  sont  douz,  piteux,  et  hcnings. 
Clém.  Marot,  p.  259. 

De  lîi,  on  a  nommé  querelles  bénignes,  les  que- 
relles douces  ou  de  peu  de  conséquence.  (Voyez 
l'Ane.  Coût,  de  Norin.  citée  par  Du  Gange,  Glossaire 
latin,  au  mot  Senescallus.) 

Nous  n'entendons  pas  le  sens  de  ce  mot  dans  ces 
vers  : 

Il  fut  begnin  d'honneurs 

Et  qui  de  bruit  s'alectoit  à  merveille. 

Contred.  de  Songecreux,  fol.  148,  R'. 

VARIANTES  '. 
BENING.  Clém.  Marot,  p.  259. 
Begnin.  Coquillart,  p.  125. 

Bénigne.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Senescallus. 
Begnignes.  Fabl.  MSS.  du  R.  n°  7218,  fol.  341,  R»  col  2. 

Benings,  subst.  masc.  plur.  Sorte  de  religieux. 
On  nommoit  en  Flandres  benings  et  beningnes  des 
hommes  et  des  femmes  qui,  sans  faire  de  vœux,  se 
dévouoient  particulièrement  aux  œuvres  de  charité 
et  de  miséricorde.  On  les  a  désignés  depuis  sous  les 
noms  de  béguins  et  béguines.  (Voyez  Le  Duchat,  sur 
Rabelais,  T.  IV,  p.  194,  note  10.) 

Benist,  adj.  Béni.  —  Saint.  —  Bon.  —  Sot, 
benêt. 


(1)  «  Levé  sa  main,  fait  sa  bcneïcun. 
II. 


(Ch.  de  Roland,  y.  2194,  v.  2245.)  (n.  e.) 


58 


BE 


—  458  — 


BE 


Au  premier  sens,  ce  mol  signifie  béni.  H  a  été 
employé  avec  celle  signilication  dans  ces  vers  : 

Beneois  soit  le  jornal 
Qu'elle  me  voudra  occire. 

Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  25. 

On  a  dil  aussi  :  le  vendredi  henaist,  c'est-à-dire 
le  vendredi  siiinl.  (Chron.  de  S"  Denis,  T.  II,  f°  2CI.) 
Vivant  au  bois,  comme  un  très  bon  herœite  ; 
Au  monde  n'a  vie  plus  hcnediclc. 

Itu  Fouilloux,  Vénerie,  fol.  92,  Y". 

Enlin,  on  disoil  aussi  benoist  jour,  pour  bonjour  : 
Le  benoist  jour  vous  soit  donné. 

FarcedePalhelin.p.  ('.6. 

Dieu  vous  doint  benoistc  journée. 

Ibid.  p.  08. 

VARIANTES  : 
BENIST.  Cotgrave,  Oudin,  Dictionnaire. 
Heneyte.  Faifeu,  p.  83. 

Benect.  Poës.  MSS.  avant  -1300,  T.  IV,  p.  1449. 
Bexedit.  Clém.  Marot,  p.  4.56. 
Benedict.  Du  Fouilloux,  Vénerie,  fol.  92,  V». 
Benaist.  Chron.  de  S'  Denis,  T.  II,  fol.  61,  V". 
Beneoit.  Alhis,  MSS.  fol.  1,  V»  col.  2. 
Benoict.  Clém.  Marot,  p.  88. 
Benoist.  Chron.  de  S'  Denis,  T.  Il,  fol.  207. 
Benoit.  Cotgrave,  Dictionnaire. 
Benois.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  II,  p.  1075. 
Beneois.  Ibid.  ï.  III,  p.  994. 

Benne,  mbst.  fém.  Sorte  de  panier.  —  Char- 
rette, tombereau.  —  Bateau  ou  boutique  à  poisson. 

Benne  signifiolt  proprement  un  vaisseau  de  bois 
fait  en  forme  de  panier.  (Gloss.  latin  de  Du  Gange, 
au  mot  Banastiim.)  Borel,  dans  son  Dictionnaire  au 
mot  Lester,  dérive  le  mol  Balasta  de  Wi.s  et  de  Lnst. 
Il  paroit  plus  simple  de  le  dériver  de  Yenna,  d'où 
Benna,  panier  à  prendre  des  poissons.  (Voyez  le 
Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  aux  mots  Benna  et  Venna.) 
Le  mol  balaste  est  en  usage,  dans  certains  pays, 
avec  la  signification  de  panier.  (Voyez  Du  Gange, 
Glossaire  latin,  au  mot  Basta.)  On  lit  ibid.  au  mot 
Kalendœ  : 

Avec  una  plena  halusfa  depardos. 

Banasta  est  expliqué  par  corbeille,  panier,  man- 
nequin, par  M.  Lancelol.  (Voyez  l'IIisl.  del'Acad.  de 
B.  an  1727,  p.  290.)  L'aichevéque  d'Arles,  dans  son 
mandement  du  5  septembre  1732,  appelle  banaste 
d'infer,  les  paniers  des  femmes  (1).  Ges  deux  mots 
sont  du  patois  provençal.  Une  banne,  selon  INicot, 
étoit  un  grand  panier  d'osier. 

De  lu,  ce  mol  a  servi  à  désigner  :  «  une  sorte  de 
«  charroy  à  ridelles  closes  pour  porter  du  sablon  ou 
«  autre  chose  qu'on  veut  épandre  par  la  voye.  » 
(Fauchet,  Lang.  et  Poës.  Fr.  p.  33.)  C'est-à-dire  un 
tombereau.  Peut-être  même  celte  signification 
est-elle  la  signification  primitive;  car  benna  (2) 
signifioil  une  sorte  de  chariot  des  anciens  Gaulois, 
selon  Festus,  cité  par  Borel. 


Banne  signifie  charrette,  dans  le  passage  suivant: 
«  Que  tout  harenc  qui  vient  à  Paris,  eiï  panier  ou 
«  en  charrette,  c'est-à-dire  en  banne,  doit  estre 
«  mis  aussi  bon  dessous  comme  dessus  et  au 
«  milieu.  »  (Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  Il,  page  575.  — 
Voyez  Ibid.  note  G.) 

Bannel  signifie  tombereau  dans  cet  autre  pas- 
sage :  «  Furent  amenez  moult  honteusement  sur 
«  un  bannel  du  Louvre.  •>  (Monstrelel,  Vol.I,  ^52.) 
On  fait  encore  usage  de  ces  mots,  dans  quelques 
cantons  de  la  Normandie.  Banne  y  signifie  un  cha- 
riot clos;  bannean  ou  bannel  un  tombereau.  Il 
semble,  selon  ces  acceptions,  que  bannel  soit  pris 
pour  le  diminutif  de  banne. 

Enfin  la  signification  de  banne  s'est  étendue 
jusqu'à  signifier  un  panier  à  garder  les  poissons, 
comme  nous  l'avons  dit  déjà.  Le  mot  bannois 
signifie,  dans  le  passage  suivant,  cette  espèce  de 
bateaux  que  nous  appelons  boutiques  et  qui  sert  à 
conserver  le  poisson.  «  Ghascun  bourgeois  puelt 
«  avoir  sa  nasselle  au  rivage  dudil  Maisière,  sa 
«  huge,  bannois,  bondiers  et  autres  vaisseaux  à 
«  mettre  poissons.  »  (Privilège  de  ceux  de  Maisière- 
sur-Meuse,  Bibl.  de  Gange.) 

Le  mot  barreau  pour  charrette  est  encore  en 
usage  en  Champagne,  et  le  mot  benaslnn  en  Bour- 
gogne et  en  Beauce.  (Voy.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  aux 
mots  Barrolnm  elGrassale.) 

VARIANTES  : 
BENXE.  Du  Cange,  Glossaire  latin,  au  mot  Banastum. 
Banne.  Robert  Estienne,  Nicot,  Oudin,  Dict. 
Benna.  Fauchet,  Lang.  et  Poës.  fr.  p.  13. 
Ben.\te.  Du  Cange,  Glossaire  latin,  au  mot  Baiinstum. 
Banaste.  Mand.  de  l'Archev.  d'Arles,  ô  septembre  1732. 
Banasta.  Hist.  de  l'.^cad.  des  B.  L.  an  1727,  p.  256. 
Balasta.  Du  Cange,  Glossaire  latin,  au  mot  Kalendœ. 
Beneau,  subsl.  masc.  Du  Cange,  Gl.  latin,  au  mot  Benna. 
Benneau,  subst.  masc.  Ord.  des  B.  de  Fr.  T.  II,  p.  575. 
Bannel,  subst.  masc.  Monstrelet,  Vol.  I,  fol.  52,  V». 
Beneton,  subsl.  masc.  Du  Cange,  Gloss.  lat.  à  Greagiuni. 
Ben.\ston,  subst.  masc.  Ibid.  au  mot  Grassale. 
Baneston,  subst.  masc.  Froissart ,  Poës.  MSS.  p.  102. 
Bannois,  subst.  tnasc.  Bibl.  de  Cangé. 
Barreau,  subst.  masc.  Du  Cange,  Gl.  1.  au  mot  Barvolum. 
Barrot,  subst.  masc.  Id.  ibid. 

Beveaux,  plur.  (Lisez  Benneaux.)  J.  le  Fèv.  de  S'  Rem. 
Hist.  de  Ch.  VI,  p.  105. 
Bouveaux,  plui:  (Lisez  Beneatix.)  Monstrelet,  T.  I,  p.  235. 

Bennerette,  subst.  fém.  Petite  bannière,  ban- 
derole. (Voyez  La  Salade,  fol.  47.) 

Benny,  adj.  Bani,  proscrit.  (Dict.  de  Borel.) 

Benoist,  subsl.  masc.  Nom  de  saint.  Nous  ne 
citons  ce  mot  que  pour  parler  de  la  loi  de  S' Benoist, 
loi  ainsi  appelée  dans  le  pays  de  Labourt.  (Voyez  le 
Goût.  gén.  T.  Il,  p.  732.) 


(1)  Les  paniers  dont  il  est  ici  question  sont  les  ancêtres  de  la  crinoline  et  du  pouf;  il  est  devenu  banal  de  les  associer  à 
la  poudre  et  aux  mouches  pour  figurer  aux  yeux  le  siècle  de  Louis  XV.  Les  souliers  à  la  poulaine  et  les  hennins  du 
xiv  siècle  furent  également  mUudits  par  les"  prédicateurs  et  les  évèques.  (N.  E.)  —  (2)  C'est  Festus  qui  nous  apprend  que 
benna  était  un  mot  gaulois  :  c'était  un  chariot  à  quatre  roues  ou  une  voiture  faite  d'osier,  comme  on  le  peut  voir  sur  un 
li:is-relief  de  la  colonne  de  Marc-Aurèle.  Ce  sens  lui  est  resté  dans  les  patois  picard,  normand  (lîayeux),  wallon, 
nuniurois.  Le  vieux  français  eut  la  forme  augmentative  banastre,  comme  balashuin,  qu'on  trouve  dans  Isidore  de  Séville, 
pûur  balneum.  De  voiture  d'osier,  on  passa  facilement  au  sens  de  panier  :  c'est  eniin  une  toile  abritant  une  voiture  ou  un 
1  ateau.  (n.  e.) 


BE 


—  459  — 


BE 


Benus  (1),  siibst.  masc.  Ebèiie.  Borel,  sur  ce 
mol,  cite  Perceval. 

Beofes,  subst.  masc.  plur.  Bœufs.  (Voyez  les 
Tenures  de  LiUlelon,  fol.  15.) 

Beoirsterchelt,  subst.  masc.  Tilre  d'office. 
Nom  d'un  officier  principal  de  justice.  «  Bailly  de 

«  Tournay Rent  maistre  de  Bewest,  et  beoh'S- 

«  terchcU  en  Zéélande.  »  (Nouv.  Coût.  Gén.  T.  I, 
page  463.) 

Beol,  subst.  masc.  Cuve,  cuvier,  cuvette  (2). 
(Gloss.  latin  de  Du  Gange,  au  mot  BaeoL) 

Ber,  subst.  masc.  Berceau.  —  Cerceau.  —  But 
oîi  l'on  tire.  —  Treille.  —  Coffre.  —  Cercueil.  — 
Brancard. 

Le  mot  berXiCl,  dans  S'  Bernard,  répond  au  mot 
Cunœ. 

On  dit  encore  ber  pour  berceau  en  Normandie. 

Ce  qu'on  apprend  au  ber 
Dure  jusques  au  ver. 

Gloss.  sur  les  Coul.  de  Beau-v.  au  mot  Diers. 

«  Fredegonde conserva  le  royaume  à  Clotaire 

«  son  second  fils  qui  étoit  en  barcelores,  lorsque 
«  Cliilperic  son  père  fut  tué.  »  (Pasq.  Piech.  Liv.  YI, 
p.  565.) 

Le  conte  d'Artoys  Robers 

Des  lors  qu'il  issit  du  hers 

Chanta  tons  les  jours  de  sa  vie 

Largesse,  honneur,  chevalerie. 

nom.  do  la  Rose,  19588-19591. 

Ce  mot  a  été  employé  pour  cerceau  dans  le 
passage  suivant  :  »  A  tout  bers  de  chariots  en  lieu 
«  d'échelles.  »  (J.  Lefebvre  de  S'  Rem.  Hist.  de 
Charles  VI,  p.  Ii2.)  On  appelle  aujourd'hui  en 
Normandie  bers  de  chariot,  le  coffre,  la  caisse  du 
chariot  ;  ainsi,  il  se  pourroit  que  bers,  dans  le  pas- 
sage cité,  signifiât  non  les  cerceaux  d'un  chariot 
couvert,  mais  la  caisse,  la  cage  même  du  chariot. 

Ce  mot  a  signifié  but  ou  butte.  (Gloss.  du  Roman 
de  la  Rose.)  Le  suppl.  au  mot  bersault,  elle  ces  vers 
qui  parlent  de  l'amour  : 

A  mon  cueur  dont  il  fit  bcrsault 
Bailla  nouvel  et  fier  assault. 

«  Je  suis  le  bersaull  contre  qui  chacun  tire 
<'  sagettes  de  tribulation.  »  (Al.  Chartier,  Quad. 
Invect.  page  266.) 

Bersel  est  pris  dans  le  même  sens,  au  Gloss.  lat. 
de  Du  Gange,  au  mol  Bersarii.  On  y  trouve  cette 
expression  mettre  au  bersel,  pour  mettre  au 
supplice,  mettre  en  danger  de  perdre  la  vie. 

On  nomme  encore  une  treille,  un  berceau  comme 
autrefois. 

.  , en  bersauU 

L'ombre  tenir,  et  disner  matinet. 

Pois.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  240. 

C'est  de  ber,  berceau,  que  s'est  formé  le  mot 


bière  (3),  pour  signifier  coffre.  «  Sire,  dist  la  damoy- 
«  selle,  c'est  ung  chevalier  navré  qui  veoir  le  veult, 
«  il  convient  qu'il  essaye  à  le  gecter  hors  de  ce  coffre 

«  ou  il  est lors  commancie  la  damoyselle  aux 

«  escuyers  que  ils  descendent  et  qu'ilz  mette  la 
»  bière  jus,  et  si  font  ilz.  » 

Le  mot  biei'C  s'emploie  pour  cercueil.  On  a  dit 
aussi  biers,  dans  le  même  sens. 

Si  sui  plus  bas  que  biers, 

Quant  je  me  voy  de  tous  mault  personners. 

Eusl.  Desch.  Po6s.  MSS.  fol.  213. 

Du  Bellay  semble  distinguer  la  bière  du  cercueil, 
lorsqu'il  dit  bierc  ou  sarcueil.  (Mém.  T.  VI,  p.  133.) 

On  disoit  proverbialement,  en  parlant  de  la 
chasse  au  cerf: 

Après  le  cerf  faut  la  byere. 
Et  après  le  sanglier  le  myre. 

Gace  de  la  Bigne,  des  Déduits,  MS.  fol.  76,  V 

Ce  proverbe  se  trouve  répété  dans  Du  Fouilloux, 
Vén.  fol.  52,  R" 

Enfin  nous  trouvons  i)/Vre  pour  brancard,  civière, 
dans  ce  passage  :  ■■  Eschelles  demeurèrent  là  qui 
«  servirent  de  bierc  pour  emporter  les  morts.  » 
(J.  d'Auton,  Ann.  de  Louis  XII,  de  1506  et  1507, 
page  79.) 

VARIANTES  : 
BER.  Glossaire  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis. 
Bers.  Monet,  Dict.  -  Lett.  de  Pasquier,  T.  I,  p.  423. 
Bkrsel.  Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mot  Bersarii. 
BERSAur.T.  Eust.  Deschamps,  Poës.  MSS.  fol.  240. 
Bersaulx.  Id.  ibid.  fol.  348,  col.  4. 
Bersaut.  Froissart,  Poës.  MSS.  fol.  240,  V». 
Berseau.  Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mot  Bersa. 
Bercei.  Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7989,  fol.  241,  R"  col.  2. 
Bercheau.  Triomphe  dos  Neuf  Preux,  p.  43.1,  col.  2. 
Berciuiel.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7989,  fol.  240,  V°  col.  2. 
Bercuel.  Ibid.  n»  7218,  fol.  319,  R"  col.  2. 
Bercueil.  Eust.  Deschamps,  Poës.  MSS.  fol.  418,  col.  4. 
Berseuil.  Chasse  de  Gaston  Phébus,  MS.  p.  365. 
Berceus.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  175,  V»  col.  2. 
Berselet.  Dimin.  .1.  Le  Maire,  111.  des  Gaules,  L.  I,  p.  140. 
Bercelores.  Recherches  de  Pasquier,  Livre  V,  p.  403. 
BER7.UEL.  S>  Bern.  Serm.  Fr.  MSS.  p.  81  et  214. 
Biercuel.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  296. 
Biers.  Eust.  Deschamps,  Poës.  MSS.  fol.  213. 
BiERE,  subst.  fém.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  214. 
Byere,  subst.  fém.  Gace  de  la  Bigne,  des  Déduits.  MS.  f»76. 
Bere,  subst.  fém.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  f«  3t5. 

Berangene,  sul)st.  fém.  Pomme  d'amour. 
(Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Beranguière,  subst.  fém.  Bassin  de  chaise 
percée.  (Dict.  de  Monet.) 

Berbère,  subst.  Epine  vinelte.  (Dict.  de  Borel 
et  de  Monet.) 

variantes  : 
BERBERE.  Borel,  Dict. 
Berberis.  Monet,  Dict. 

Berbette,  subst.  fém.  Nous  trouvons  ce  mol 
dans  ce  passage,  où  il  s'agit  des  signes  auxquels  on 


(1)  On  trouve  dans  Flore  et  Blanceflor,  v.  615  :  «  Cix  arbres  a  à  non  bonus,  .la  un  seul  point  n'en  ardra  fus.  »  Et  au  Livre 
des  Métiers,  173:  «  Nuls  tabletier  ne  puet  mètre  avec  buis  nule  autre  manière  de  fust  qui  ne  soit  plus  chier  que  buis  c'est 
à  savoir,  cadre,  benus,  bresil  et  ciprès.  »  (N.  E.)  -  (2)  C'est  peut-être  le  même  mot  que  bol.  (n.  e.)  -  (3)  Le  mot  vient'  dans 
ce  cas  de  l'allemand  Bahre,  civière,  (n.  e.) 


BE 


—  400  -  BE 


reconnoit  la  boulé  d'un  faucon  :  "  Quant  il  est  seur 
.  (lu'il  face  un  peu  de  la  bcrbelle[\),  soubz  le  bec  de 
«  sa  plume,  il  doit  avoir  col  long,  et  baulele  poic- 
«  trine,  etc.  »  (Modus  el  Uacio,  fol.  59.) 

Bercail,  subst.  niasc.  Collectif  de  brebis.  «  Na- 
.  ture  a  donné  celte  faculté  au  bercail,  de  suivre 
«  toujours  la  première  qui  va  devant.  »  (Merl.  Coc. 
T.  1,  p.  :W'<.) 

Bercaude,  subst.  fém.  Grillade. 

Sire,  je  vous  tieng  à  bercon  : 
N'avez  vous  encore  un  bacon? 
Si  en  faites  bones  hcrcaudes  : 
Or  sus  nous  les  mangerons  caudes. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7089,  fol.  9),  R-  col.  1. 

Berce,  subst.  fém.  Artillerie  d'un  vaisseau.  — 
Oiseau.  .       ,  ,  , 

Oudin,  dans  son  Dictionnaire,  donne  a  ce  mot 
la  si"  uilication  d'artillerie  d'un  vaisseau.         . 

Le  même  mot,  selon  Monet,  étoit  le  nom  de 
l'oiseau  qu'on  appelle  communément  rouge-gorge. 

Bercement,  subst.  masc.  L'action  de  bercer. 
(Dict.  d'Oudin  et  de  Colgrave.) 

Berccros,  subst.  masc.  plur.  Tireurs,  chasseurs 
qui  tirent  de  l'arc.  ■<  Lors  feit  le  roy  demeurer  ses 
c<  chevaliers,  et  maine  deux  de  ses  veneurs  avec 
«  luy  sans  plus,  et  de  se^berceres.  »  (Lanc.  du  Lac, 
T.  I,  fol.  128.  —  Voy.  Bekcier  ) 

Berceresse,  subst.  fém.  Femme  qui  berce. 
Dans  l'Etat  des  officiers  de  la  maison  de  M.  le 
Dauphin,  an  liOi,  on  lit:  "  Catherine  Mallegrap 
«  nourrisse,  deu.K  cens  livres,  Marie  Dezest  berce- 
«  resse,  deux  cens  quarante  livres.  »  (Godefr. 
Observ.  sur  Chartes  VUl,  p.  703.) 

Berche,  subst.  fém.  Artillerie  d'un  vaisseau. 
(Voy.  les  Dict.  de  Borel,  Nicol  et  Oudin.) 

VARIANTES  : 
BERCHE.  Nicot,  Borel,  Dict. 
Bercherie.  Nicot,  Oudin,  Dict. 

Bercherete  (2),  subst.  fém.  Espèce  d'oiseau. 
Nous  en  trouvons  la  définition  dans  le  passage 
suivant  :  «  Met  grant  peine  d'avoir  menus  oiseaux 
«  qui  hanlent  les  rivières,  qui  sont  appelez  berche- 

«  retes,  el  sont  pelis,  el  ont  la  queue  longue il 

«  y  en  a  de  plusieurs  manières.  "  (Modus  et  Racio, 
Ms.  f.  128.) 

VARIANTES  t 
BERCHERETE.  Modus  et  Racio,  MS.  fol.  128,  V°. 
Bergeronnette.  Du  Fouilloux,  Faucon,  fol.  73,  R". 

Bercier,  verbe.  Tirer  de  l'arc.  —  Blesser. 
Ce  mot  est  employé  au  premier  sens,  dans,  les 
vers  suivans  : 

Li  Rois  dient  à  Devée 
Qu'il  n'i  ait  cliacié,  ne  bercié 
Ne  adesée  venoison. 

En  la  forest,  se  par  lui  non.  „  , ,  „  „     ,  , 

Rom.  do  Brut,  MS.  fol.  7,  R°  col.  1. 

On  a  dit,  dans  le  même  sens,  en  parlant  de 
Guillaume  Longue-Epée: 

(1)  Petite  barbe.  -  (.2)  C'est  le  diminutif  de  berce.  (N.  E.) 


En  bois  sont  cointement,  et  berser,  et  vener. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  f)5. 

Gérard,  voulant  poursuivre  le  roi,  dit  : 

Et  tant  chevaucheray,  par  le  mont,  par  le  val, 

Oue  le  rov  trouveray  ;  volontiers  chasse  et  herse. 

^  ••  Ger.  de  RoussiUon,  MS.  p.  70. 

Ce  mot  signifie  blesser  dans  ces  vers,  où  il  est 
parié  de  Gérard  qui  voit  détruire  tous  ses  guerriers, 
dans  un  combat  très  sanglant  : 

Quant  Girard  voit  ses  gens  tresbuclier,  et  verser, 
Les  uns  ferir  d'espées,  et  les  autres  verser. 

Gcr.  de  RoussiUon,  MS.  p.  158- 

Berser  ou  verser,  dans  le  second  vers,  est  pris 
pour  blesser  à  coups  de  fièches.  On  voit  encore 
berser  el  chasser,  termes  de  chasse  réunis  dans  les 
Poésies  de  Machaul,  fol.  20. 

Ont  a  trop  grant  gent  à  faire, 

Qui  leur  clievaus  navrent,  etjjersent. 

G.  Guia'-l,  MS.  fol.  268,  V*. 

Dans  un  sens  moral,  il  s'est  dit  en  parlant  des 
blessures  que  fait  l'amour  : 

J'en  nommeroie  ja  un  cent. 
Voir  par  Dieu  un  grant  millier, 
Qui  tout  en  ont  été  bersé 
Ardamment  espris,  et  arsés. 

Froissarl,  Poes.  MSS.  p.  390. 

VARIANTES    : 
BERCIER.  Roman  de  Brut,  MS.  fol.  7,  R»  col.  i. 
Bercer.  G.  Guiart,  MS.  fol.  255,  R". 
Bercer  at  Beser.  Athis,  MS.  fol.  o6,  V'  col.  2. 
Berser.  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  238. 
Bersser.  g.  Guiart,  MS.  fol.  80,  R». 
BiERSER.  Athis,  MS.  fol.  60,  V  col.  1. 
Berseler.  Percef.  Vol.  I,  fol.  55,  V°  col.  i. 
Behseiller.  Percef.  Vol.  V,  fol.  91,  R"  col.  1. 
Bersaillek.  Mém.  d'Ol.  de  la  Marche,  Liv.  I,  p.  dbd. 
Bersaulder.  Molinet,  p.  120. 
Bersauder.  Dict.  Etym.  de  Ménage. 
Bersander  (Lisez  Bersamler.)  Molinet,  p.  Ibi. 
Verser.  Ger.  de  RoussiUon,  MS.  cité  ci-dessus. 

Berducat,  subst.  masc.  Nom  propre  d'homme. 
Nous  lisons  dans  l'Hist.  de  B.  Duguesclin,  par 
Ménaid,  p.  536:  «  Un  grant  chevalier  baron  nomme 
«  Berducat  d'Albret.  »  Le  moi  Berducat  est  explique 
en  marge  par  Perdicas. 

Berechte,  subst.  fém.  Sorte  de  tribunal.  Peut- 
être  ce  mot  désigne-t-il  une  juridiction.  «  Personne 
«  ne  peut  diviser  aucune  somme  par  deux,  ou  trois 
u  demandes  pour  les  porter  en  la  berechte,  à  peine 
«  de  succomber.  La  dite  berechte  est  assemblée 
..  par  les  paroisses  ;  et  quiconque  perd  son  procès, 
..  ou  qui  ne  poursuit  pas  son  instance  tombe  en 
»  l'amende  de  vingt  sols  parisis  au  profit  du  Bailly 
«  de  la  berechte.  »  (Nouv.  Coût.  Gen.  T.  1,  p.  bi4.) 

Berelle,  subat.  fém.  Sorte  de  jeu.  Peut-être  le 
même  que  mcrelle.  Pris  dans  un  sens  figure,  ce 
mot  paroit  signifier  embarras.  On  disoit: 

i'  Demeurer  à  la  berelle.  Le  passage  qui  suit 
rendra  clair  le  sens  de  celte  expression  : 

Beaulté  ne  faict  l'homme  estre  industrieux. 
Ne  son  parler  le  rend  victorieux  : 
Sans  bon  etfect  demeure  à  la  berelle. 

Crétin,  p.  118. 


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BE 


2°  Etre  en  bereîe,  c'est-à-dire  être  embarrassé. 

Prenez  en  cure  mon  afere. 

Que  sans  vous  sui  en  fort  bereîe  : 

Sans  vous  ai  perdu  la  querrelle. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7218,  fol.  318,  R°  col.  2. 

3°  Mettre  quelqu'un  en  la  hcrcle,  le  laisser  en  la 
herele,  se  disoit  pour  mettre  quelqu'un  dans  l'em- 
barras, l'y  laisser.  (Voy.  G.  Guiart  (1),  ms.  fol.  264,  V°, 
et  229,  R°.)  Le  sens  du  mot  berele  nous  paroît  plus 
difficile  ù  saisir  dans  cet  autre  passagie.  Un  amant, 
d'intelligence  avec  sa  maîtresse,  lui  dit  : 

En  ceste  praele, 
Seur  la  verdure, 
Merrons  no  berelle. 

Poés.  MS.  T.  IV,  p.  1532. 

VARIANTES  : 
BERELLE.  Crétin,  p.  118. 
Berele.  G.  Guiart,  MS.  fol.  264,  V». 

Berement.  Ce  mot,  suivant  l'éditeur  des  Ord. 
des  R.  de  F.,  paroit  être  corrompu.  (Voy.  les  Ord. 
des  R.  de  Fr.  T.  Y,  p.  70G,  et  la  note.) 

Berengaiidiser,  verbe.  Mot  factice  qui  semble 
signifier  forger  des  mots  françois  sur  des  mots 
latins.  Fabri,  dans  son  Art  de  rhétorique,  après 
avoir  blâmé,  «  la  manière  barbare  appellée  vice 
«  de  innovation  commis  par  ignorans,  voulans 
«  apparoislre  escumans  termes  latins  en  les  barba- 
«  risant,  sans  prendre  leur  commun  significat, 
«  comme  luder  à  la  pile  de  ludere  a  pila,  »  dit  : 

En  prohibant  le  berengaudiset; 
Ne  s'aimez  point  vocabules  latins. 

Fabri,  Arl  de  Rhél.  fol.  Sfi,  V°. 

Berenger,  subst.  masc.  Parc  d'ours.  Mot  alle- 
mand qui  signifie  un  parc  d'ours,  le  lieu  oîi  les  met 
celui  qui  lès  dompte.  (Caseneuve,  Orig.  de  la 
Lang.  Fr.) 

Bergainasque,  adj.  Qui  est  de  Bergame.  Ber- 
game  est  une  ville  d'Italie.  «  Bouclier  s'a  femme  à 
.<  la  bergamasque,  »  c'est-à-dire  lui  mettre  une 
ceinture  de  chasteté.  (Rabelais,  T.  III,  p.  194.) 

Bergat,  adj.  Tacheté.  Mot  languedocien  qui 
signifie  «  marqueté  de  diverses  couleurs  comme 
«  certaines  chenilles  qu'il  y  a.  »  (Dict.  de  Borel,  au 
mot  Virgœ.) 

Berge,  subst.  fém.  Espèce  d'oiseau.  Peut-être 
est-ce  le  même  que  Berce  ci-dessus? 

Chez  le  dit  prince  ilz  prindrent  leur  herberge 
Qui  leur  donna  de  maint  pouUet  et  berge, 
Et  les  traicta  comme  homme  a  ce  congnu. 

Faifeu,  p.  107. 

Bergée,  subst.  Verger.  (Gloss.  lat.  de  Du  Gange, 
au  mot  Viridarlum.) 

Berger  (2),  subst.  masc.  Nous  citerons  sur  ce 
mot,  qui  subsiste,  les  expressions  suivantes  : 

1°  L'enseigne  du  berger.  Expression  obscène 
dans  les  Œuv.  de  Roger  de  Gollerye,  p.  138. 


2°  Berger  A  peu  de  bruit.  C'est-à-dire  un  pendu. 
(Oud.  Gur.  Fr.) 

Bergère,  subst.  masc.  Nom  donné  à  une  bom- 
barde. «  Alerent  visiter  l'arlilleiie,  et  une  bom- 
«  barde,  nommée  le  bergère  qui  moult  bien  faisoit 
«  la  besongne.  »  (Mém.  d'Ol.  de  la  March.  Liv.  I, 
p.  39'i.) 

Bergerette,  subst.  fém.  Diminutif  de  bergère. 
—  Sorle  de  poésie. 

Sur  le  premier  sens,  voy.  Crétin,  p.  150,  et  les 
Epith.  de  Miirt.  de  Laporte,  etc. 

On  nommoit  aussi  bergerPtle  une  espèce  de 
poésie  ou  rondeau  double.  (Voy.  sur  ce  mol  une 
explication  détaillée  dans  l'Art  de  Rhét.  P.  Fabr. 
Liv.  II,  fol.  34.)  «  Les  petits  enfans  de  chœur  de  la 
«  Sainte  Chapelle,  qui  illec  disoient  de  beaulx  vire- 
«  lais,  chançons,  et  aultres  bergerettes  (3),  moult 
«  mélodieusement.  »  (Cbron.  scand.  de  Louis  XI, 
p.  116.) 

VARIANTES    : 
BERGERETTE.  Crétin,  p.  156. 
Bergierette.  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  279. 
Bregerette.  Poës.  MSS.  du  Vatican,  n"  1490,  fol.  112. 
Bergerotte.  Rabelais,  T.  III,  p.  241. 
Bergerolle.  Epith.  de  La  Porte. 
Bergeronete.  Dict.  de  Nicot. 

Bergerie,  subst.  fém.  Sorle  de  poésie.  — 
Troupeau. 

Selon  la  première  acception  de  ce  mot,  Sibilet 
aiiprouve  que  les  François  aient  substitué  le  m.ot 
de  bergerie  à  celui  d'églogue  qui  étoit  en  usage 
parmi  les  Grecs,  pour  désigner  ce  que  nous  nom- 
mons aussi  idylles.  (Voy.  Sibilel,  Art  Poët.  Liv.  II, 
p.  120.1 

On  disoit  aussi  bergerie  de  vaclies  pour  troupeau 
de  vaches  :  «  Emilian  avoit  un  fort  beau  troupeau 
«  de  brebis,  avec  un  grand  nombre  de  jeunes 
«  taureaux,  et  une  bergerie  de  vaches.  »  (Nuits  de 
Stiapar.  T.  I,  p.  250.)  Ce  mot  désigne  un  troupeau 
de  moutons,  dans  ces  vers  : 

Bergerie  moult  bêle  menot. 
Mes  s'amie  souvent  regretot. 

Chans.  Fr.  du  Xlir  siècle,  MS.  de  Bouh.  fol.  112,  R°. 

Bergeron,  subst.  masc.  Diminutif  de  berger. 

L'autre  jour,  par  .i.  raatinet. 
M'en  aloie  esl)anoiant, 
Et  trovai,  sans  son  bercheret, 
Pastoure  plaisant,  etc. 

Chans.  du  xiii-  siècle,  MS.  de  Bouh.  fol.  284,  V  col.  1. 

VARIANTES  : 
BERGERON.  Chans.  MSS.  du  C"  Thib.  p.  39. 
Bregeron.  Poës.  MSS.  avant  130O,  T.  HI,  p.  1011. 
Bekgerot.  Oudin,  Dict. 
Bercheret.  Ch.  Fr.  du  xin=  siècle,  MS.  de  Bouh.  fol.  284. 

Berghière,  subst.  fém.  Bergère. 

Delez  l'ombre  d'un  bosquet, 
Là  trovai  gentil  berghière. 

Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1591. 


(1)  Berellus  est  le  nom  du  dauphin  dans  le  ms.  lat.  5838.  c:  «  Nonnulli  berellos,  dolphinos  vocant,  eo  quod,  ut  Albertus 
Magnus  ait,  ante  naves  aquas  evomant.  »  Dans  G.  Guiart,  il  a  le  sens  de  querelle  ;  à  l'année  1293,  on  lit  :  «  En  la  saison  de 
ces  berelles.  Desquelles  lonc  est  li  comprandres  »  ;  à  l'année  1304  :  «  Tant  que  l'en  maintint  les  berelles  Des  serjans  aus 
noires  gonnelles.  »  (.n.  e.)  —  (2)  Voir  plus  loin  Bergier.  (n.  e.)  —  (3>  Ces  sortes  de  poésies  se  chantaient  le  jour  de  Pâques, 
et  l'on  buvait  à  ce  propos  une  boisson  composée  de  vin  et  de  miel,  et  nommée  comme  le  rondeau  bergerette.  (n.  e.) 


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Bergier  (1),  subst.  masc.  nerjrer.  Ce  mol  est  pris 
aussi  pour  sol,  bêle,  imbécile,  extravagant.  Il  est 
souvent  employé  pour  lionune  rustique,  et  peu 
instruit. 

Guillaume,  c'est  grand  folie, 
Quant  ensi  avez  chanté, 
Li  bergiers  d'une  abbaïe 
Eust  assez  mieuz  parlé. 

Pocs.  MSS  avant  1300,  T.  I,  p.  473. 
Vous  me  tenez  pour  hrerj'iKr 
Qui  volez  que  jou  chou  pris, 
A  oncques  noient  ne  pris 

Pofs.  MSS.  du  Vatican,  n"  IWO,  fol.  131,  R-  col.  2. 

Cueur  ne  peut  quiung  seul  hoste  dedens  soi  hébergier 
Pour  ce  doit  l'en  tenir  à  fol,  et  a  befrjier 
Qui  veult  Dieu,  et  pechié  en  son  cueur  enfergier  ; 
Nus  ne  puet  ces  deus  erbes  planter  en  ung  vergier. 
J.  de  Meung,  Tcsl.  1530. 
S'uns  hom  a  fit  el  siècle  toutes  ses  volenlés. 
Et  il  laisse  pour  Dieu  trestoutes  mauvestez, 
Tantost  est  des  mauves  escharnés  et  gabez: 
Ou  il  est  ypocrites,  ou  bcrqicrs  apelés. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  721S,  fol.  338,  R"  col.  1. 

VARIANTES  : 
BERGIER.  Rabelais,  T.  I,  p.  175 
Bergiers.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  I,  p.  473. 
Bregier.  Poës.  MSS.  du  Vat.  n»  1490,  fol.  -134,  R»  col.  2. 
Berger.  Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7615,  T.  I,  fol.  67,  V»  col.  2. 

Bergiere,  suhst.  fém.  Espèce  de  danse.  Un  air 
de  danse  pour  avertir  de  réliograder,  de  retourner 
en  arrière.  C'est  aussi  une  expression  figurée,  telle 
que  chanter  la  palinodie.  J.  de  Meung,  après  avoir 
censuré  la  conduite  des  femmes,  et  celle  de  tous 
les  grands  seigneurs, 

Soit  comte,  ou  roys,  ou  ducz,  ou  prince,  ou  sénateurs, 

qui  se  ruinent  pour  assouvir  la  fureur  qu'elles  ont 
pour  la  parure,  donne  enfin  cette  dernière  leçon, 
pour  corriger  ces  seigneurs  de  leurs  folles  com- 
plaisances : 

Je  leur  dis  qu'ilz  appreignent  le  chant  de  la  bergiere 
Ou  la  gent  qu'ilz  carolent  dient  ;  retourne  arrière; 
Je  me  tayray  atant  d'endroit  ceste  matière  ; 
Car  les  femmes,  espoir,  ne  l'ont  mye  trop  chiere, 

J.  deMeunj,  Cod.  1301. 

S'on  joue,  peut  estre  la  carrière, 

Petit  Rouen,  le  grand  Tourrin 

La  gorgiase,  la  bergiere  : 

Ils  se  courroucent  au  tabourin. 

Coquillart,  p.  40. 

Bergil,  subst.  masc.  Bergerie,  bercail. 

En  son  cortil  avoit  des  cho.x 
Et  en  son  bergil  des  bret)is. 

Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  fol.  150. 

VARIANTF.S  : 
BERGIL,  Berchil.  Fabl.  MSS.  de  S'  Germ.  p.  150. 
Bergil.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  227,  V»  col.  2. 
Berguel.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  228,  R»  col.  1. 
Bercoal.  Chron.  Fr.  MS.  de  Nangis,  an  IIIO. 
Bersault.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  531,  col.  1. 

Bergine,  subst.  masc.  Brebis.  On  trouve  au 


mot  berblt  du  Gloss.  lai.  de  Du  Gange  :  "■  Tous 
«  pourceaulx,  bcrgines  et  chievres  doient,  la  pièce. 
«  une  obole.  » 

VARIANTES  : 
BERGINE.  Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mot  Berbix. 
Barbix.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  p.  354. 
Berbiette.  La  Marg.  des  Marg.  fol.  216. 
Berbis.  Poës.  MSS.  avant  1300,  p.  462. 
Berbi.k.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  p.  9. 
Berbz.  Loix  Norni.  art.  vi,  passim. 

Bergue,  subst.  masc.  Nom  de  lieu.  «  Il  les  fit  tirer 
«  au  pays  Lionnais  et  de  Bergue  qui  est  du  pays  de 
«  Languedoc.   >>   (On  lit,  à  la    marge,   peut-être 

.BlGORRK  C^).) 

Bei'îchet  (3),  subst.  masc.  Roitelet.  Sorte  d'oi- 
seau. (Dict.  de  Monet  el  de  Nicol.) 

VARIANTES    I 
BERICHET.  Monet,  Dict. 
Bericiiot.  Nicot,  Dict. 

Bericle  (4),  subst.  masc.  Verre.  Lisez  Yericle  : 
«  Nul  ne  puet  faire,  ne  faire  faire,  tailler  diamans 
«  de  bericle,  ne  mettre  en  or,  ne  en  argent.  » 
(Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  III,  p.  12.  —  Voy.  l'bid.  la 

note  n.)  «  Gens  qui  portentlunetles,  ou  bericles 

«  ne  peuvent  pas  voir  de  si  loing.  »  (S"  Jul.  Mesl. 
Histor.  p.  358.) 

Bei'ier,  adj.  Dernier.  Ménage,  dans  son  Dict. 
Etym.  cite  sur  ce  mol,  Helinand,  dans  le  poëme  de 
la  mort.  Peut-être  est-ce  une  faute  pour  derrier  et 
derrière. 

VARIANTES   : 
BERIER,  Berrier.  Dict.  Etym.  de  Ménage. 

Bei'il  (5),  subst.  masc.  ou  fém.  Pierre  précieuse. 
(Dict.   de  Monet,  de  Gotgrave  et  d'Oudin,  au  mot 

Beril.) 

Le  licril  que  je  chante  est  une  pierre  fine 
Imitant  le  verd  gay  des  eaux  de  la  marine. 

Œuv.  de  Rem.  Bell.  T.  I.  p.  r,5. 

Voy.  le  Suppl.  au  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose, 
et  les  Remarques  de  l'Auteur,  qui  dit  entre  autres 
que  celte  pierre  «  estoit  d'un  verd  pâle  (6),  et  que 
«  c'estoil  une  des  douze  pierres  qui  ornoit  le  ralio- 
«  nal  du  Grand  Preslre  chez  les  Hébreux.  » 

Ce  mol  semble  employé,  dans  le  passage  suivant, 
pour  signifier  une  pierre  de  composition.  «  Voilà  le 
«  diamant  que  je  vous  avois  jà  voué,  ce  n'est  pas 
«  un  beril,  non,  ni  une  hapelourde,  il  est  vrayment 
«  oriental.  »  (Div.  Lee.  du  Du  Verdier,  p.  349.) 

Voyez  lier\jl,  dans  Marbodus  de  Lapidlbus,  à  la 
suite  des  (Euv.  de  Ilildeberl,  p.  1650. 

VARIANTES    : 
BERIL.  Œuv.  de  Rem.  Bell.  T.  I,  p.  65. 
Beryle.  Dict.  de  Rob.  Estienne. 
Bervl.  j.  le  Maire,  Couronne  Margaritique,  p.  69. 


(1)  Letymologie  est  berbicarius,  dérivé  de  berbix,  employé  en  bas-latin  pour  vervex.  (n.  E.I  -  (2)  C'est  plutôt  le 
Rmtergue.  (N.  E.)  -  (3)  On  rappelle  encore  berichon.  (n.  e.)  -  (4)  On  lit  au  compte  du  testament  de  la  royne  Jehanne 
dEvreux  (xiv«  siècle)  :  «  Pour  un  vericlc  encerné  en  manière  de  lunette,  prisé  xx  frans.  »  Bericles  est  aujourd'hui  bcsicle, 
comme  rhaire  est  devenu  chaise;  l'étymologie  est  berylhis,  détourné  de  sa  signification  de  pierre  précieuse.  Quant  à  vericle, 
il  suppose  vitricula,  diamant  faux  de  verre  ou  de  cristal.  (N.  E.)  —  (5)  Voir  le  mot  précèdent;  la  forme  se  trouve  déjà 
au  Roman  de  la  Rose  ;  «  Et  quant  el  l'ot  du  fuerre  traite.  Plus  fu  clere  que  nul  beril  (v.  15723).  »  (n.  e.)  -  (6)  On  Ut  dans  le 
propriétaire  (tes  choses,  cité  par  de  Laborde  (Emaux,  p.  164)  ;  «  Beril  est  une  pierre  qui  croist  eu  Inde,  qui  est  semblable 
a  1  esmeraulde  en  verdeure.  »  (xiv»  siècle.)  (n.  k.) 


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163  — 


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Beriche.  Elanchandin,  MS.  de  S'  Germ.  fol.  190,  R»  col.  3. 

Bericle.  Froissart,  Pocs.  MSS.  p.  347. 

Beril.  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose  et  le  suppl. 

Berille.  Rabelais,  T.  I,  p.  324. 

Béryl.  Marbodus,  col.  1650. 

Berlan,  subst.  masc.  Lieu  de  débauclie.  —  Jeu 
de  hasard.  —  Table  de  jeu.  —  Cornets  à  dés. 

Sur  le  premier  sens,  lieu  de  débauche,  voyez  le 
Dict.  de  Monel.  Le  P.  Meneslrier  dit  que  ce  mot 
signifioit  autrefois:  «  une  espèce  de  taudis  de 
«  planches,  dressé  à  la  campagne,  au  proche  des 
«  murs  des  villes,  et  de  la  clôture  des  villages  oîi 
«  les  fainéants  alloient  jouer.  »  (Menestr.  Bibl.Cur. 
T.  II,  p.  184.) 

Ce  mot,  sous  les  orthographes  berîeng,  brelenc, 
brclengl,  désignoit  aussi  un  jeu  de  hasard,  le 
brelan.  Nous  trouvons  brelenc  en  ce  sens,  dans 
Bout.  Som.  Rur.  p.  50G.  Dans  des  lettres  de  décembre 
1382  (Trésor  des  Chartr.  Reg.  141),  on  lit  brelengh. 

De  là.  Ton  a  étendu  la  signification  de  berlan  h 
celle  de  table  de  jeu  : 

L'un  met  sur  le  berlenz  son  gage, 
Et  l'autre  met  argent  encontre,  etc. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  332,  P.'. 

Ce  mot  est  encore  usité  en  Normandie  pour 
signifier  un  comptoir,  un  bureau. 

Enfin  berUnis,  ([ui  vraisemblablement  s'est  dit 
dans  son  origine  pour  exprimer  la  chance  du  jeu, 
après  avoir  signifié  le  jeu  même,  par  une  extension 
de  ces  acceptions,  s'èmployoit  pour  désigner  les 
cornets  dont  on  se  sert  pour  jeter  les  dés  (1)  : 

Ribauz  qui  portent  les  berlenz, 
Ne  resont  pas  déjouer  lenz  ; 
Moult  demainent  grant  braiterie. 

G.  Guiarl.fol.  331,  V. 

On  a  dit,  en  prenant  au  figuré  le  mol  berlan, 
dans  la  signification  de  jeu  : 

1°  Venir  sur  le  berlan.  c'est-à-dire  venir  sur  le 
jeu,  sur  le  moment  de  décider  une  alîaire  : 

N'avons-nous  pas  l'ystoire 

De  Ajadus,  quant  il  fut  assailly 
D'Alixandre-le-Grant,  et  accueilly 
Par  puissance,  devant  Hierusalem, 
Comment  alors  il  vinl  sur  le  lierlan 
Prier  à  Dieu. 

Vigil.  de  Charles  VU,  T.  11,  p.  104. 

2°  Berlant  de  fortune  signifioit  l'inconstance,  le 
jeu  de  la  fortune:  «  Ainsy  est  l'heur  des  plus 
«  haulles  peignez,  au  berlant  de  fortune  souvent 


«  mis    au    hazard. 
Louis  XII,  p.  110.) 


(J.    d'Auton ,    Annales    de 


T.\RJANTES  : 


BERLAN.  Vig.  de  Charles  VII,  T.  II,  p.  194. 

Berland.  Menestr.  Bibl.  Cur.  T.  II,  p.  184. 

Berleng.  Du  Gange,  Gloss.  grec. 

Berlenz.  (plur.)  G.  Guiart,  MS.  fol.  331,  V». 

Brelenc.  Bout.  som.  rur.  p.  506. 

Brelengh.  Lett.  de  décembre  1382.  —  Très,  des  Chartr. 

Berle  (2),  subst.  fém.  Cresson  de  rivière.  (Dict. 
d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Deviens,  subst.  masc.  plur.  Espèce  d'office.  Il 
est  compris  avec  les  clergies,  sergenleries  et  autres 
offiees,  que  le  duc  de  Bourgogne  veut  être  réunies 
à  son  domaine,  dans  le  cas  de  vacance,  dans  son 
Ordonnance  de  1446.  (Voyez  l'Etat  des  Officiers  du 
Duc  de  Bourgogne,  p.  175.) 

Berlin,  subst.  masc.  Espèce  de  poisson  à  écaille. 
(Dict.  de  Nicol.) 

VARIANTES  : 
BERLIN,  Berdin.  Nicot,  Dict. 

Berlingot  (3),  subst.  masc.  Sorte  de  monnoie 
vénitienne.  Dans  le  Dictionnaire  d'Oudin,  ce  mot  est 
employé  figurément  avec  une  signification  obscène. 

Berlue  (4),  adj.  Ebloui,  aveuglé.  (Dict.  d'Oudin  et 
de  Cotgrave.)  Les  maquignons  disent  encore  un 
cheval  berlu ,  pour  un  cheval  lunatique. 

Berms  (5),  subst.  masc.  plur.  "Valets.  Ce  mot  est 
employé  comme  synonyme  de  valés,  valets,  dans 
le  passage  suivant:  «  Leurs  valés,  ou  berms.  » 
(Ord.  des  Rois  de  France,  T.  II,  p.  13G.)  Il  est  dit 
(ibid.  note  D)  qu'au  registre  71,  il  y  a  ;  «  Bermans 
«  touchant  les  valets.  » 

Bern,  subst.  masc.  Amas.  —  Le  Béarn. 

Au  premier  sens,  c'est  un  mot  brelon  qui  signifie 
amas,  monceau.  (Voyez  Gloss.  lalin  de  Du  Cange, 
au  mot  Berna.) 

On  a  dit  aussi  Bern  pour  le  Béarn  :  »  C'est  la  loi 
«  du  pays  de  Bmi,  que  le  batu  paye  l'amende.  » 
(Dict.  de  Cotgrave,  au  mot  Bearn.) 

Bernache  (6),  subst.  fém.  Macreuse.  C'est  ainsi 
que  cet  oiseau  se  nomme  à  Dieppe ,  selon  le  Dict. 
étymologique  de  Ménage. 


(1)  C'est  plutôt  la  table  où  l'on  jette  les  dés  que  le  cornet  où  on  les  agite  :  «  Plusieurs  compaignons  jouans  aus  dez  sur 
une  table  ou  brelenc.  »  (JJ.  1C3,  p.  295,  an.  1409.)  (N.  E.)  —  (2)  C'est  le  siiwi.  avgustifolinm,  de  la  famille  des  ombellifères.  On 
la  regarde  comme  antiscorbutique  ;  «  Des  calaplasmes  faits  avec  des  herles  ou  cresson  d'eau.  »  (0.  de  Serres,  éd.  de  1605, 
p.  926.)  (N.  E.)  —  (3)  C'est  plutôt  une  sorte  de  pâtisserie.  Voici  ce  qu'on  lit  dans  la  vie  de  S'"  Colombe  de  Rieti  (Acta  SS. 
Mai,  t.  V,  p.  337):  «  Ut  primo  sex  magnos  imo  majores  panes  formaverint,  demum  très  placentas,  postmodum  quos 
berlingotios  dicunt  multos  ;....  »  (N.  E.)  —  (4)  Ce  mot  a  été  formé  sur  berlue,  où  l'on  voit  le  préfixe  péjoratif  ber,  plus  lue, 
pour  lucem  ou  lumen.  Ce  qui  assure  la  dérivation  est  l'italien  bariuine,  fausse  lueur.  (N.  E.)  —  (5)  Il  y  a  eu  sans  doute  là 
une  abréviation  oubliée,  comme  le  remarque  Du  Cange  sous  le  mot  bennarius  (voir  J,I.  72,  p.  508).  On  trouve  aussi  les  formes 
bermen  et  beaiiien  :  «  Ledit  Courtoysie  dist  audit  Colin  que  il  avoit  veu  une  femme,  appelée  .lehanne  la  Crasse,  qui  parloit  à 
un  bermen.  et  creoit  que  elle  eust  achaté  une  queue  de  vin.  «  (J,T.  100,  p.  214,  an.  1374.)  Et  JJ.  87,  p.  130,  an.  1358: 
«  Guillaume  Davarieux,  bresmen  de  vins  et  deschargeur  de  darrées  en  la  ville  de  Dieppe.  »  Caen  possédait  aussi  une 
corporation  mtitulée  les  «  francs  bréments  canonniers,  »  qui  est  l'objet  d'un  mémoire  publié  par  la  Société  des  Antiquaires 
de  Normandie,  entre  1840  et  1842.  (n.  e.)  —  (6)  C'est  le  nom  vulgaire  du  canard  érythrope  de  Gmelin,  qu'on  nomme  aussi 
oie  nonnette.  On  trouve,  même  en  français  moderne,  les  variantes  barnacke,  barnaclc,  bernacle.  Cet  oiseau  est  ainsi  nommé 
parce  qu'une  opinion  vulgaire  le  fait  naître  des  barnuclen  ou  bernicl.es  (anatifes  lisses),  coquillages  attachés  aux  végétaux 
du  bord  de  la  mer,  où  il  place  son  nid.  Le  nom  savant  du  conuillage  lui-même,  analife,  vient  de  la  même  superstition  ; 
anas  est  un  canard  en  latin,  (n.  e.) 


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-  404  — 


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Bernacles  (1),  subst.  féin.  Terme  d'armoiries. 
C'est  le  sens  que  ccriaiiis  ailleurs  donnent  à  ces 
mots;  ils  désignoient  un  inslrument  servant  à 
broyer  le  chanvre  ou  le  lin.  Le  Laboureur,  qui  les 
avoit  expliqués  ainsi  dans  son  Orig.  des  Arm.  p.  243, 
se  rétracte  dans  sa  préface,  et  dit  que  ce  sont  des 
caveçons  ou  moraiUcs.  (Voyez  p.  2)  et  22  de  la 
Préface.)  On  voit,  dans  les  deux  passages  qu'il  cite, 
la  figure  de  ces  bernacles.  Le  mot  renâcler,  qui  se 
dit  d'un  cheval  qui  roulle  des  naseaux,  etquiparoit 
venir  de  bernacle,  semble  confirmer  la  dernière 
explication.  (Voyez  Broyé.) 

VARIANTES  : 
BERNACLES,  Benacle,  Bernicles.  Le  Laboureur,  Orig. 
des  Arra.  page  243. 

Bei'nagoe,.si//ys/.  masc.  Sorte  d'outil. 

Si  a  marcheans  de  lin. 
De  mueles,  de  fer  de  molin, 
De  haces,  et  de  heniagoes  (2), 
De  pelés ,  de  pis,  et  de  hoes. 

Fa))l.  MSS.  du  R.  n"  721R,  fol.  283,  V  col.  1. 

Bernard,  subst.  masc.  Selon  Ménage,  ce  mot 
signifie  le  génie,  le  naturel  d'un  ours;  de  l'allemand 
art,  génie,  et  bar,  ours.  (Voy.  Caseneuve,  Orig.  de 
la  langue  fr.)  Borel,  2"  additions,  au  mot  ilrd,  le 
dérive  du  mol  art,  naturel,  et  dit  qu'il  signifie 
naturel  (ïun  fils.  Nous  trouvons  souvent  ce  mot 
employé  dans  les  Fabliaux  mss.  du  Roi,  pour  le  nom 
d'un  âne,  que  nous  appelons  aujourd'hui  Martin  : 

Treuvent  Bernard  l'archeprêtre 

En  un  fossé  les  chardons  pestre  : 
Bernarl,  dist  Renart,  Diex  te  saut. 

Fal)l.  MSS.  du  R.  ii-  --218,  fol.  48,  P.-  col.  1. 

VARIANTES  : 
BERNARD.  Fabl.  MSS.  du  R.  n»  7218,  fol.  48,  R»  col  1. 
Bernart,  Bernars.  Ibid.  fol.  49,  R»  col.  1. 

Bernard  (S").  Nous  citerons  ici  un  proverbe 
auquel  donna  lieu  le  savoir  prodigieux  de  ce  saint: 
Bernard  n'a  pas  tout  vu.  On  disoit  en  latin  :  iieque 
Bernardus  vidit  omnia.  (Voyez  les  Nouv.  Litt.  de 
Florence,  1749,  n°  17,  col.  205.) 

Bernart  (3),  subst.  masc.  Terme  d'injure. 

On  le  claime  en  disant  bernart. 

Eust.  Desch.  Poês.  MSS.  fol.  211,  col.  4. 

On  disoit  aussi: 

1°  Parler  d'autre  bernart,  c'est-à-dire  parler  d'un 
autre  ton,  ou  changer  de  langage  : 

Se  Diex  me  gart. 

Vous  parlerez  d'autre  bernart. 

rail.  MS.  de  S.  Gcmi.  p.  180. 


2*  Chanter  de  bernart  semble  avoir  signifié  se 
dédire,  se  rétracter  : 

Il  semble  que  vos  m'apregniez, 
Fait-il,  à  chanter  de  bernart  : 
Ains  me  lairroie  à  une  hart 
Lacer  el  col  que  gel  preisse. 

Fabl.  MSS.  de  S.  Germ.  p.  352. 

Berne  (4),  subst.  masc.  Cresson  sauvage.  -  Pre- 
«  mierement  faut  avoir  une  grande  poisle,  tenant 
«  dix  sceaux  d'eau,  puis  prendredixbonnesjoinctées 
«  d'une  herbe  nommée  bern,  ou  cresson  sauvage... 
«  et  faire  bouUir  le  tout  ensemble.  »  (Du  Fouilloux, 
Vénerie,  fol.  12,  V°.  —  Voyez  Berne  ci-dessous.) 

VARIANTE.S  : 
BERNE.  Salnove,  Vénerie,  p.  332. 
Bern.  Du  Fouilloux,  Vénerie,  fol.  -12,  V". 

Berne ,  subst.  féin.  Espèce  de  saie  ou  de  man- 
teau. —  Moquerie. 

Ce  mot,  au  premier  sens,  signifie  saie,  ancien 
vêtement  militaire.  (Voyez  les  Dict.  de  Borel  et 
d'Oudin.)  Le  Duchat(5),  dans  ses  notes  sur  Rabelais, 
T.  I,  p.  324,  note  3,  dérive  ce  mot  de  l'arabe  burnous, 
qui  signifie  un  mantelet  à  cape.  (Dict.  étymologique 
de  Ménage.)  De  lu,  s'est  formé  berner,  faire  sauter 
sur  la  couverture,  et  par  extension  se  moquer, 
railler,  tourner  en  ridicule. 

De  là  aussi,  on  a  employé  le  mot  même  de  berne 

pour  moquerie  :  »  La  fiaterie, et  la  berne 

«  sont  au  degré  de  cousins  issus  de  germains.  » 
(Le  Roman  bourgeois,  Liv.  II,  p.  151.  —  Voyez 
Berne  ci-dessus.) 

Bernement,  subst.  masc.  Raillerie,  moquerie. 

Pour  vous  mettre  au-dessus  de  tous  les  bernemens. 

Molière,  Ecole  des  Maris,  acte  m,  scène  V. 

Bernenx,  adj.  Qui  donne  le  dévoiement. 

Cidres  berneux  qui  le  ventre  amolie. 

Eust.  Descliaraps,  Pofs,  MSS.  fol.  214,  col.  3. 

Bernicles  (6),  subst.  plur.  Espèce  de  torture. 
Supplice  en  usage  chez  les  Sarrazins.  (Voyez  Borel, 
Dict.)  »  Voians  les  Sarrazins,  que  le  roy  ne  vouloii 
"  obtempérer  à  leurs  demantles,  ilz  le  menasserent 
«  de  le  mectre  en  bernicles  ;  qui  est  le  plus  grief 
«  tourment,  qu'ilz  puissent  faire  à  nully.  »  (.Joinv. 
p.  07.  —  Voy.  la  10'  Dissert,  à  la  suite  de  cet  auteur, 
et  le  Glossaire  latin  de  Du  Cange,  au  mot  Boia.) 

Bernie  {1),  subst.  fém.  Sorte  de  drap.  C'étoit  un 
«  drap  grossier,  rude  et  velu,  dont  les  Iiiandois 
"  s'emnîantellent.  »  (Dict.  de  Nicot.  —  Voy.  le  Dict. 


(1)  Ces  bernacles  doivent  être  des  canards  ressemblant  aux  merlettes.  (n.  e.)  —  (2)  Le  texte  est  peut-être  fautif,  et  l'outil 
cité  serait  la  besaiyuc,  qu'on  trouve  dès  le  xiF  siècle,  (n.  e.)  —  (3)  Bernart  avait  le  sens  de  sot,  hébété,  ensorcelé  ;  ainsi  on 
lit  au  reg.  .U.  153,  p.  305,  an.  1397  :  «  Lambert,  Lambert  tu  as  enchanté  ou  ensorcelé  mon  frère,  il  est  tout  bernart  de  toy,  et 
te  monstre  plus  grant  amour  qu'il  ne  fait  à  moy.  »  Et  au  reg.  142,  p.  20,  an.  1391  ;  «  Lequel  Duchesne  respondit  au  dit 
Bernart  qu'il  n'estoit  point  coquart  ;  mais  que  ledit  Rernart  estoit  bien  coquart,  bernart,  et  tous  sos  :  car  il-  n'estoit  si 
mauvaise  cornardie  que  sotie.  »  Nous  conservons  encore  le  mot  bénarde,  plus  anciennement  bernarde,  pour  désigner  les 
serrures  dont  la  clé  n'est  pas  forée  et  qui  s'ouvrent  des  deux  côtés  :  «  Icelle  Marion  s'en  coury  à  l'uis,  qui  fermait  à  serrure 
bernarde  et  l'ouvry.  »  (J.l.  170.  p.  191,  an.  1442.)  (>f.  E.)  —  (4)  Voir  à  Berle.  —  (5)  Diez  tire  ce  mot  de  Hibernia,  Irlande, 
parce  que  cette  étoffe  se  fabriquait  dans  cette  île.  (n.  e.)  —  (6)  On  lit  au  §  341  de  l'édition  de  Wailly:  «  Bernicles  est  li  plus 
griez  tourmens  que  l'on  puisse  souffrir;  et  sont  dui  tison  ploiant,  endentei  ou  chief  ;  et  entrent  li  uns  en  l'autre,  et  sont 
liés  à  fors  corroies  de  buef  ou  chief.  Et  quant  il  vveulent  mettre  les  gens  dedans,  si  les  couchent  sus  lour  costez  et  lour 
mettent  les  jambes  parmi  les  chevilles  dedans;  et  puis  si  font  asseoir  un  home  sur  les  tisons;  dont  il  advient  ainsi  qu'il  ne 
demourra  jà  demi  pié  entier  de  os  qu'il  ne  soit  touz  debrisiés.  Et  pour  faire  au  pis  que  11  peuent,  ou  chief  de  trois  jours  que 
les  jambes  sont  enflées,  si  remettent  les  jambes  enflées  dedans  les  bernicles,  et  rebrisent  tout  derechief.  »  (.N.  e.)  — 
(7)  Comparez  berne,  (n.  e.) 


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465  — 


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étymologique  de  Ménage,  et  le  Glossaire  latin  de 
DÛ  Gange,  au  mol  Berniscrist.) 

Bernier,  subst.  masc.  Valet  de  chiens.  Celui 
qui  avoit  soin  des  chiens  de  chasse  ;  celui  qui  leur 
donnoit  le  pain  de  brcn,  c'est-à-dire  de  son.  (Voyez 
Du  Gange,  Glossaire  latin,  au  mol  Brcnarii.)  On  y 
lit  ces  vers  du  Roman  de  Garin  : 

Sire,  en  ce  gaut  a  trouvé  un  bernier 

Le  plus  bel  homme  qui  onques  fu  sor  ciel, 

S'a  un  sanglier  retenu  à  trois  chiens. 

Plus  bas  : 

Par  devant  vos  a  occis  un  bernier. 

La  nuit  semont  ses  cavaliers. 
Ses  veneors,  et  ses  berniers  : 
Au  matin  vont  en  la  lorest,  etc. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7980,  fol.  48,  V-  col.  1. 

Bernifler,  verbe.  Mortifier,  maltraiter. 

Mes  ennemis  ont  mon  las  cueur  riflé 
Escorniflé,  celé,  musse,  niilé,  et  bernijlé. 

Chasse  et  départie  d'.\ruours,  fol.  41,  V'  col.  t. 

Bernine  (coiffure  ou  chevelure  à  la).  On  l'appe- 
loit  ainsi  du  nom  du  clievalier  Bcrnin.  11  s'en  servit 
quand  il  fit  le  buste  de  Louis  XIV,  en  1665.  (Voyez 
la  Vie  du  Bernin,  en  italien,  par  Baldinucci,  in-i°, 
168-2,  page  47.) 

Berniscrist,  s»/;sL  masc.  Sac.  Mot  breton  (I)qui 
signifie  sac ,  ou  poche  servant  à  mettre  le  froment 
qui  n'est  pas  encore  nettoyé.  (Glossaire  latin  de 
Du  Gange,  au  mot  Berniscrist.) 

Berohete  (2),  subst.  fém.  Brouette.  (Voyez  les 
autorités  citées  sur  chaque  orlhographe.) 

VARIANTES  : 
BEROHETE.  Du  Cange,  Glossaire  latin,  au  mot  Traga. 
Berroete.  Cotgrave,  Dict. 
BouROAiTE.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  571. 
BouROUAiTE.  Du  Cange,  Glossaire  latin,  au  mot  Ribaldi. 
BouETTE.  Bouteiller,  Somme  rurale,  p.  897. 
Brûuere.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  213,  col.  2. 

Berole,  subst.  fém.  Chicane.  Il  paroit  que  c'est 
le  sens  de  ce  mot  dans  ce  passage: 

Por  lui  achoisonner 
Li  lais,  comme  riens  ne  set 
De  plat,  ni  de  berole. 
Tout,  sans  conseil  d'autrui, 
Commence  sa  parole. 

Fabl.  MSS.  du  R.  m*  TOtS,  T.  Il,  fol.  141,  R"  col.  1. 

Berqiie,  adj.  Borgne.  C'est  la  signification  de  ce 
mot  dans  le  livre  que  nous  allons  citer,  où  on  lit  le 
berque  de  la  lieuse.  (Voy.  l'Ilist.  de  Charles  VI,  par 
Godefr.)  On  explique  ce  mot  à  la  marge  par  le  borgne 
de  la  lieuse,  et  c'est  ainsi  que  ce  la  lieuse  est  nommé 
par  tous  les  autres  historiens  ;  ainsi  berque  ne  doit 
être  remarqué  que  comme  une  faute  de  copiste  ou 
d'imprimeur. 


Berqui,  subst.  masc.  Ce  mot  est  usité  dans 
l'Auxerrois  pour  signifier  une  mare,  un  lieu  aqua- 
tique ;  il  y  a  même  un  village  qui  porte  ce  nom. 

Berret,  subst.  masc.  Paysan  des  Landes.  Ce  nom 
vient  dune  espèce  de  honnèl  appelé  birette  (3),  que 
les  habitants  des  Lande?  ont  coutume  de  porter, 
(Voy.  L'année  Litt.  p.  276,  note.) 

Berrie,  subst.  fém.  Du  Cange.  sur  Joinville, 
explique  ce  mot  par  campagne  plate  (4).  «  Les  Tarta- 
«  rins  disoient  qu'ils  estoient  venuz  nez,  et  con- 
«  créez  d'une  grant  berrie  de  sablon  là  où  il  ne 
«  croissoit  nul  bien.  »  (Joinville,  p.  90.) 

Berrois,  subst.  masc.  plur.  Berruyers.  C'est 
ainsi  que  sont  désignés  les  peuples  du  IBerri,  dans 
un  des  Poët.  mss.  avant  1300,  T.  IV,  p.  1662. 

VARIANTES  : 
Barruyers  at  Berruyers.  Ger.  de  Rouss.  MSS.  p.  52. 

Bersans,  adj.  plur.  Ce  mot,  dans  le  passage  sui- 
vant, paroit  servir  à  désigner  les  bêtes  douces,  appri- 
voisées, opposées  aux  bêtes  féroces  et  carnassières: 

Des  roces,  et  forés  issent... 
Toutes  les  bestes  conversans 
Ou  pays,  hors  mis  les  bersans  (5)  ; 
Mes  les  sauvages,  qui  se  vivent 
De  dévorer,  illuec  arrivent. 
Et  viennent  au  commandement. 

Froissarl,  Poës.  MSS.  p.  179. 

Berse,  subst.  fém.  Bêche.  «  Ils  ne  sçavoient 
«  que  c'estiMt  de  rasoir,  de  ciseaux,  de  lancette,  de 

«  compas,  de  marteau,  de  hache, de  houe,  de 

«  pioche,  de  berse,  de  coulre.  »  (Contes  de  Ghol.) 

Bcrser,  verbe.  Bercer.  —  Amuser,  endormir. 

On  trouve  ce  mot  dans  Oudin,  avec  la  significa- 
tion propre  de  bercer. 

Ce  mot  est  employé  au  figuré  avec  le  sens  d'amu- 
ser, dans  le  Gloss.  du  Roman  de  la  Rose,  et  pour 
endormir  dans  les  vers  suivans,  où  il  s'agit  de  la 
reine  Blanche  et  de  S'  Louis  : 

C'estoit  la  chançon  et  la  berse  (6) 
Dont  la  saincte  femme  le  berse, 
Et  les  mes  dont  il  fut  servis. 

Eust.  Desch.  Pocs.  MSS.  fol.  559. 

Berseres,  subst.  masc.  Ce  mot  a  probablement 
le  sens  de  berseil  (en  italien  bersaglio),  cib\e,  blanc 
auquel  on  vise.  La  racine  est  celle  de  berser,  verbe 
dont  Du  Cange  donne  de  nombreux  exemples  sous 
bersa,  avec  Te  sens  de  chasser,  de  poursuivre  les 
bêtes  par  les  bers,  les  berceaux  d'une  forêt. 

Li  veneor  corent  devant, 

Li  damoisiaux  s'en  va  traiant  ; 

Son  arc  li  portoit  im  vallés, 

Son  hausart  (7),  et  son  berseres  (8). 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7989,  fol.  48,  V  col.  1. 


(1)  Ce  mot  se  trouve  dans  une  charte  de  799  (ap.  Malbrancum,  lib.  5  de  Morinis,  cap.  38)  :  «  Ad  emendos  drappos,  et 
kamisias  ultramarinas,  qua'  vulgo  berniscrist  vocitantur.  (N.  e.)  —  (2)  La  brouette  avait  autrefois  deux  roues,  d'où 
rétymologie  bis,  plus  un  diminutif  de  rota.  (N.  E.)  —  (3)  Cette  forme,  mieux  que  béret,  rappelle  l'éty.rologie  birruin,  tjyrrhus, 
étoffe  rousse,  (n.  e.)  —  (4)  Ce  mot,  dont  la  forme  latine  est  beria,  est  l'origine  des  noms  de  lieux  lierre  (Bouches-du-Rhône), 
Berriac  (Ardèche,  Aude),  Berry  (Aisne,  Cher,  etc.),  Berru  (Marne),  Berrieux  (Aisne),  Berrie  (Morbihan),  Berrien 
(Finistère).  (N.  E.)  —  (5)  Bersans  paraît  être  le  participe  présent  de  berser,  tirer  de  l'arc  :  «  La  coromencièrent  il  à  traire  et 
à  berser  sur  ces  bidaus.  »  (Froissart,  éd.  Kervyn,  II,  229.)  (N.  E.)  —  (6)  C'est  ce  que  nous  nommons  une  berceuse.  (N.  E.)  — 
(7)  A  peut-être  le  sens  de  poignard,  comme  faussart.  On  le  trouve  dans  Partonopex,  vers  5127  :  i<  Et  com  à  sele  à  hareor 
le  hausart  et  l'escorcheor.  »  (N.  E.)  —  (S)  Pour  la  rime  il  faudrait  bersés.  (n.  e.) 

II.  59 


BE 


—  466 


BE 


Bertain  (1).  Nom  propre,  le  même  que  Berthe, 
femme  du  comte  Gérard.  (Ger.  deRouss.  sis.  p.  17G.) 

Bertaiidé,;jflj7/c. Tondu.  Cemolsis'nirioitquel- 
quefois  tondu  inégalement.  (Voy.  le  Dictionnaire  de 
Colgrave,  au  mot  liertaudé,  et  le  Dicl.  Etym.  de 
Me'nage,  au  mot  Baiiondii.) 

Furent  les  brebis  herlolilées, 
Et  doubles  diziénnes  levées. 
Hist.  de  France,  à  la  suite  du  Rom.  de  Fauvol,  iMS.  du  R.  u-  6812,  fol.  72. 

VARIANTES  : 
BERTAUDÉ.  Colgrave,  Dictionnaire. 
Bektoldé.  Hist.  de  Fr.  à  la  suite  du  Rom.  de  Fauvel, 
Bertoudé.  Rom.  de  Flor.  MS.  de  S'  Germ.  fol.  41. 
Bretaudé.  Lett.  de  M""-  de  Sévigné,  T.  I,  page  103. 
B.\RTONDU.  Dict.  Etym.  de  Ménage. 

Bertaiider,  verbe.  Tondre  irrégulièrement. 
(Dicl.  de  Monet  et  de  Borel,  au  mot  Bcrtauder.) 
Oudin  l'explique  par  couper  les  oreilles  et  la  queue 
d"uii  ciieval,  mais  nous  ne  savons  sur  quelle  auto- 
rité. »  Le  list  bevtauder  et  tondre  en  crois,  puis  le 
«  list  monter  sur  une  asnesse  à  devant  derrière,  et 
«  lenoit  la  couedesa  main  com  frain.  »  (Contin.  de 
Guill.  de  Tyr,  Martin.  T.  V,  col.  591.) 

V.iRIANTES  : 
BERTAUDER.  Contin.  de  G.  de  Tyr,  Martine,  T.  V,  col.  591. 
Bertouder,  Bertourder.  Nicot,  Borel,  Dictionnaire. 
Bertouser.  Oudin,  Ménage,  Dict. 
Bretauder.  Cotgrave,  Dictionnaire. 

Bertaux,  suhst.  maso.  Roitelet,  oiseau.  On  lit  : 
tant  de  petits  rois  bertaux,  dans  les  Mém.  de 
Nevers,  T.  II,  p.  41. 

Berte,  adj.  Voici  le  passage  oîi  nous  trouvons 
ce  mot  : 

Arras,  Arras,  ville  de  plaist 
Et  de  haine,  et  de  detrait, 
Qui  soliez  estre  si  nobile 
On  va  disant  c'on  vous  refait  ; 
Mais,  si  Dius  le  bien  n'i  retrait 
Je  ni  vois  qui  vous  réconcilie  : 
On  i  aime  trop  crois  et  pile. 
Chascuns  fu  berle  en  ceste  vile 
Au  point  com  estoit  à  la  mait. 
Jeliann.  de  l'Escur.  à  la  suile  du  R.  de  !•'.  MS.  du  R.  n'  6812,  fol.  62. 

Berlin  et  Gille.  Noms  communs  de  femmes. 
J.  de  Meung,  ayant  parlé  de  la  négligence  des  héri- 
tiers à  rendre  ce  qu'ils  doivent  aux  morts  dont  ils 
héritent,  se  plaint  des  maris  qui  n"ont  pas  plus  tôt 
perdu  une  femme  qu'ils  en  cherchent  une  autre  : 

Pou  refont  pour  leurs  femmes  les  maris,  est  certain  ; 
Si  tost  com  Gillt'  est  mort,  veulent  avoir  Berlin. 

3.  de  Meung,  Cod.  i33  et  43  t. 

Bertoiinoau,  siihsl.  viasc.  Turbot.  Espèce  de 
poisson.  Uerlonucau  est  un  luot  du  patois  Normand, 
selon  le  Dicl.  Etym.  de  Ménage.  (Voy.  Cotgr.  Dict.) 

Bertran,  subst.  masc.  Nom  de  singe.  —  Nom 
de  cheval. 
Selon  Oudin,  ce  mot  désignoil  une  espèce  de  sin- 


ges ;  c'est  peut-être  pour  celte  raison  qu'on  lit  dans 
Montluc  :  «  Marc  Antoine  mon  aisné,  Bertrand, 
»  auquel  par  chaffre  je  donnai  le  nom  de  Peyiot 
«  qui  est  un  mol  de  notre  Gascongne,  parce  que  ce 
«  nom  la  de  Bertrand  me  deplaisoit.  »  (Mém.  de 
Montluc,  T.  II,  p.  537.) 

Ce  nom  propre,  dit  Ménage,  dans  son  Dict.  Etym. 
signifie  fort,  robuste,  du  mol  iJer/,  éclatant,  illustre, 
et  Ravi,  force. 

Le  elieval  Bertran  semble  un  proverbe  : 

Miox  vault  le  cheval  Bertran 
Qui  souvent  menjue  avaine, 
Que  cil  qui  fait  la  crevaine. 

Poes.  MSS.  du  Vatican,  n*  1522,  fol.  153,  Rv 

Deschausser  Bertrand  étoitune  sorte  d'expression 
proverbiale  qui  signifioil  boire  excessivement, 
s'enivrer.  (Oudin,  Cur.  Fr.)  «  S'appercevent,  après 
«  le  soupper,  qu'un  des  nôtres  avoit  desehaussé 
«  Bertrand,  et  qu'on  ne  s'esloit  pas  moqué  de  luy, 
«  ne  lui  ayant  pas  tenu  le  bec  en  l'eau.  »  iBouchet, 
Serées,  p.  6.) 

VARIANTES  : 
BERTRAN.  Poës.  MSS.  du  Vatican,  n°  155-2,  fol.  153. 
Bertrand.  Montluc,  T.  II,  p.  537. 

Bei'tri,  subst.  jnusc  Noms  de  lieux.  Ce  sont  les 
noms  de  deux  châteaux  ou  maisons  dans  l'Auxer- 
rois,  aux  environs  de  Vermanton.  En  patois  du 
pays,  un  bertri  signifie  une  élévation  de  terre. 

VARIANTES   : 
BERTRI,  Bertreau. 

Bcrulistes,  snbst.  masc.  plur.  Les  PP.  de  l'O- 
ratoire ("2).  (Voy.  les  Caquets  de  l'Accouchée,  p.  17C.) 

Beryder,  subst.  masc.  Receveur  des  tailles. 
«  Le  beryder  ou  receveur  des  tailles,  ou  cela  arri- 
«  vera,  est  tenu  de  faire  arrester  les  dites  maisons.  » 
(Nouv.  Coût.  Gén.  T.  I,  p.  GIO.) 

Bes  (ce  dont  me).  Nous  trouvons  celle  expres- 
sion pour  signifier  :  ce  dont  je  me  vante,  je  me 
flatte. 

Joster  sai  mielz  de  lui,  c'est  ce  dont  plus  me  bès. 

Parlon.  de  Blois,  MS.  de  S.  Gerni.  fol.  ni,  R*  col.  ». 

Besa,  subst.  masc.  Deux  as,  bezet.  (Voy.  le  Dit  t. 
d'Oudin  ;  Fauchet,  des  Orig.  p.  120,  et  Pasquicr, 
Rech.  p.  698.) 

VARIANTES  : 
BESA.  Oudin,  Dictionnaire. 
Besas.  Borel,  Dictionnaire. 

Besael,  sî//>s^  masc.  Instrument  îi  deux  tran- 
chants. Bisagiie  est  encore  le  nom  d'un  outil  de 
charpentier.  (Voy.  Rob.  Est.  et  Borel,  au  mol  Bes; 
Du  Gange,  Gloss.  latin,  au  mol  Bisacuta,  el  Fau- 
chet, dans  ses  Orig.  livre  II.  p.  VU).)  Ce  mot  a 
signifié  une  hache  tranchante  des  deux  côtés.  (Voy. 
le>.  Daniel,  Mil.  Fr.  T.  I,  p.  411.) 

S'a  une  espée  longue  et  dure, 
Et  bien  molue  à  sa  mesure  : 


(!)  Voir,  sur  ces  formes  en  am,  le  tome  I",  note  de  la  page  -468.  (N.  e.)  -  (2)  Congrégation  fondée  par  le  cardinal  P. 
Berulle,  et  approuvée  en  1613  par  le  pape  Paul  V.  (n.  e.) 


BE 


467  — 


BE 


Un  autre  à  son  arçon  pendue, 
D'autre  part,  une  hesague. 

Parlon.  deBlois,  lilS.  de  S'  Gerra.  fol.  135,  R»  col.  2. 

Et  le  princes  ne  se  mouvoit 
Que  sa  bataille,  ainsois  tenoit 
L'espée  en  la  main  toute  nue, 
Et  chascuns  lance  ou  hesague. 

Macliaul,  MS.  fol.  228,  R"  col.  2. 

De  là,  ce  même  mot  a  été  employé  pour  signifier 
un  lioinme  double  et  sans  foi.  On  disoit  de  Tévêque 
de  Laon,  qui  négocioit  entre  Ciiades,  duc  de  Nor- 
mandie, fils  du  roy  Jean,  et  le  roi  de  Navarre  : 
«  qu'il  étoit  la  besague  qui  taille  par  les  deux 
«  bouts.  »  (Chron.  de  S'  Denis,  T.  II,  fol.  240.) 

De  là  aussi  cette  expression,  tourner  de  besague, 
pour  tourner  de  la  tête  à  la  queue  : 

De  coclielet  tournant  de  besague, 

nu  temps  soudain  et  de  tempest  de  nue, 

Se  gart  ciiascun,  et  de  perilleur  jour. 

Car  de  tout  ce  ne  vient  fors  que  dommaige. 

Eusl.  Desc;i.  Pofs.  MSS.  fol.  314,  col    2. 

VARIAiNTES  : 
BES.\EL.  Britton,  Loix  d'Angleterre,  fol.  181,  R». 
Bes.\eul.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  [,  p.  593. 
Bes.\ieul.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  I,  p.  652. 
Bes.weul.  Chron.  S'  Denis,  T.  I,  fol.  139. 
Besayoul.  Quinze  .Toyes  du  mariage,  p.  25  et  54. 
Besaiex.  lieaumanoir,  p.  103. 
BiSAEL.  Ord.  des  R.  de  Fr.  1.  I,  page  588. 
Besague,  subst  fém.  Chron.  de  S'  Denis,  T.  II,  fol.  240. 
Besaïve,  suhsi.  fihn.  Chr.  Fr.  MS.  de  Nangis. 
BiSAGUE,  subst.  féiii.  Cotttrave   Dictionnaire. 
Besagu,  suhsl.  fém.  FabK  MSS.  du  R.  n"  7615,  T.  II,  f»212. 
Besaguz,  sulist.  fém.  Ibid.  T.  I,  fol.  67,  V»  col.  2. 

Besague,  adj.  Qui  est  à  deux  faces.  »  A  cela 
«  respondit  le  bien  apprins  disciple  par  une  contre 
«  raison  cornue  et  besague.  »  (Alector,  Roman.) 

Besaine,  subst.  fém.  Brebis.  Du  latin  Bidens. 
En  parlant  des  droits  levés  par  le  duc  de  Berry, 
dans  les  divers  lieux  de  son  domaine,  on  dit  : 
«  Fenestrelay,  qui  a  deux  besaines,  une  qui  a  onze 
«  aigneaux,  "un  etc.  »  (La  Thaum.  Coût,  de  Berry, 
page  332.) 

variantf.s  : 

BESAINE.  La  Thaumassière,  Coût,  de  Berry,  page  332. 

Bezaine.  Glossaire  latin  de  Du  Gange,  au  mot  Berbix. 

Bezeine.  La  Thaumassière,  ubi  suprà. 

Besanne.  Ane.  Goût.  d'Orl.  à  la  suite  des  G.  de  Beauv. 

Bide.  Mot  du  Gâtinois. 

Besan,  subst.  masc.  Sorte  de  monnoie  et  peut- 
être  un  poids.  On  Yû  besan,  /«/{'«/«m,  dansle  Gloss. 
du  P.  Labbe.  Le  talent  de  serviteur  de  l'Evangile, 
est  rendu  parlemot  besant{l),  dansLancelotduLac. 
(T.  III,  fol.  77.)  C'étoit  une  sorte  de  monnoie  d'or 
dont  le  poids  et  le  prix  ont  varié  suivant  les  lieux 
et  les  temps.  (Voy.  le  Dict.  de  Borel,  et  ses  ii"'  add. 
Glossaire  du  Roman  de  la  Rose.) 

Des  jongleurs  ayant  contribué  aux  plaisirs  d'une 
fête,  sont  récompensés  : 


Auquant  de  robe,  auquant  d'argent 
Les  plus  prisiés,  les  plus  vaiUans 
Sont  bien  loez  à  fins  besar.s. 

Athis,  MS.  fol.  15,  R'col.  ). 

Por  paresis  (2)  a  mis  besans. 

Poês.  MSS.  avant  1300,  T.  IV.  p.  1370. 

Les  ^esans  (3)  ont  passé  dans  les  armoiries  oîi  on 
les  trouve  souvent.  Ils  y  sont  toujours  «  d'or  ou  d'ar- 
>■  gent,  et  si  quelque  fois  on  en  a  fait  d'hermine,  ou 
»  de  vaii',c'estqueles  besans  en  armoi''ies  tiennent 
"  lieu  de  metail,  et  qu'en  celte  qualité  elles  doivent 
«  toujours  être  mises  sur  les  couleurs.  »  (Le  Labou- 
reur, Orig.  des  Arm.  p.  23  et  suivant.)  Voyez  Le 
Blanc,  sur  les  Monnoies,  p.  157  :  On  y  trouve  les 
différentes  espèces  de  besans,  avec  leur  poids  et 
leur  valeur.  (Voy.  aussi  Fauchet,  de  la  Langue  et 
Poésie  Franc,  p.  165.)  Le  besan  d'or  fut  fabriqué 
sous  la  première  et  la  seconde  race  de  nos  rois. 
On  n'en  voyoit  presque  plus  sous  Charles  VI. 
Ce  mot,  joint  à  un  verbe  de  prix,  signifioit  sou- 
vent le  peu  de  cas  qu'on  faisoit  de  quelque  chose. 

J'aim  par  amours,  n'est  mie  doute. 
Une  pucelle  si  estoute 
K'ele  ne  me  prist  un  besant  : 
S'en  ai  le  cuer  triste,  et  dolant. 

Vies  des  SS.  MS.  de  Sorb.  chif.  LViii,  col.  1. 

Fief  de  bezans  est  expliqué  par  fief  de  boiivec 
en  deniers,  dans  le  Glossaire  sur  la  Coutume  de 
Beauvoisis. 

Le  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose,  donne  au 
besan  la  signification  de  poids,  dans  ces  vers  : 

Les  doux  furent  d'or  épuré. 
Par  dessus  le  tissu  doré. 
Qui  estoient  grans  et  pesans  ; 
En  chascun  avoit  deux  besans. 

Rom.  de  la  Rose,  1094-1097. 

VARIANTES  : 
BESAN.  Poës.  MSS.  avant  1300,  T.  III,  p.  1281. 
Besant.  Lanc.  du  Lac,  T.  III,  fol.  77,  R»  col.  2. 
Bezant.  Fauch.  Lang.  et  Poës.  Fr.  p.  164. 
Besonds.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Salus. 
BiSANTiN.  Oudin,  Diot. 

Besancé,  participe.  Chargé  de  besans.  C'est  un 
terme  de  blason.  «  Targe  d'o'r  bendée  d'argent,  à 
«  une  bende  besancée.  »  (Fabl.  mss.  du  R.  n-  7615, 
T.  II,  fol.  190.) 

Besch,  subst.  masc.  Vent  d'Afrique.  Ce  vent  est 
appelle  la  bêche,  par  les  Provençaux.  (Voy.  le  Dict. 
dOudin,  et  Rabelais,  T.  IV,  p.  181.) 

Besclie  (4),  subst.  fém.  Il  s'agit  de  la  peine  portée 
contre  celui  qui  s'est  rendu  caution  d'un  voleur.  Il 
est  dit  qu'il  rendra  calallum  (la  chose  volée)  et  qu'il 
payera  xx  sols  pro  capile  pour  la  personne  du  vo- 
leur), qu'il  donnera  iv  deniers  (U  i'c7J(?r(ouceptierou 
chepier,  c'est-à-dire  geôlier),  «  une  maille  pour  la 
»  besche,  et  quarante  sols  au  roy.  »  (Loix  Normandes, 
art.  IV.) 


(1)  Le  mot  se  trouve  dans  la  Chanson  de  Roland  (v.  132):  «  Tant  i  avrat  de  6asan;  esmerez.  »  L'origine  est  Byzanlius 
s.  ent.  nummus,  pièce  de  Byzance,  parce  que  les  empereurs  de  G.  P.  firent  frapper  cette  monnaie,  (n.  e.)  —  (2)  Monnaie 
parisis.  —  (3)  Les  ôesoîîts  qu'on  appliquait  sur  les  boucliers  étaient  des  pièces  d'or  sans  marque  ;  elles  indiquaient  qu'on 
avait  fait  le  voyage  de  Terre-Sainte,  (n.  e.>  —  (4)  On  trouve  l'expression  haunii'  sur  la  besche  ou  sur  le  pic  et  sur  la  pelle, 
quand  il  s'agit  du  supplice  d'une  femme  ;  c'est  qu'on  ne  les  pendait  pas,  niais  qu'on  les  enterrait  dans  une  fosse  creusée  à 
la  besche  :  «  L'an  de  grâce  1383,  Marote  la  Flamenge,  Mehalot  de  Gisors...  furent  banies  de  la  terre  sur  la  besche,  pour  ce- 
qu'elles  estoient  foies  de  leurs  cors.  »  (Coût,  de  S"  Gmev.,  ms.  fol.  26,  R».)  (n.  e.) 


BE 


—  468  - 


BE 


Besciaulx,  subst.  masc.  phir.  Poissons  de  mer. 
Un  ancien  poêle,  en  parlant  des  poissons  nuisibles 
à  la  sanlé,  dit  : 

Eschuez  ceulx 

De  mer  qui  ont  besciaulx  (1)  noms; 
Chiens  de  mer,  marsouins,  saumons, 

Pocs.  MSS.  d'Eusl.  Descliaiups,  fol.  485,  col.  2. 

Bescle  (2),  subst.  Foie.  C'est  ainsi  qu'on  a  expli- 
que ce  mot  provençal,  dans  l'IIist.  de  l'Acad.  des 
Belles  Lettres,  an  17'27,  Mém.  de  M.  Lancelot, 
p.  'ir^G.  On  le  trouve  traduit  par  jeciir,  dans  le 
Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mol  Kaiendœ.  (Voyez 
du  Tillot,  llisl.  delà  J'este  des  foux,  p.  4'J.) 

Bcscocer  (se),  verbe.  Se  méprendre.  Froissart 
ayant  fait  l'énumération  de  ses  bienfaiteurs,  se 
reprend  ainsi  : 

Haro  que  fai-je?  me  bescoce  (3)  ; 
J'ai  oublié  le  roy  d'E.scoce. 

Pois.  MSS.  de  Froissart,  p.  343. 

Bescoiiffe,  subst.  fém.  Le  sens  de  ce  mot  est 
obscur.  Peut-être  faudroit-il  lire  rescousse,  dans 
les  vers  suivans  : 

Dont  sont  si  compaignon  sailli 
Quant  ils  cirent  la  bescouffe, 
Et  le  sas  à  sa  main  escousse 
De  quoi  il  tenoit  le  fer  chaut 
Aval  le  rue. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n"  7-218,  fol.  278,  V  col.  1. 

Beseau,  partie.  Voyant.  Ce  mot  a  cette  signifi- 
cation dans  le  Patois  de  Cahors.-(Voy.  le  Dict.  de 
Borel,  au  mot  Glouper.) 

Beseole,  subst.  (Voy.  Aiot.) 

Besiadonien,  adv.  Mignardement.  Ce  mot  est 
languedocien.  (Voy.  le  Dict  de  Borel,  aumotBesmL) 
Il  se  récrie  sur  le  charme  et  la  délicatesse  de  cette 
expression  et  cite  ce  vers  : 

Petits  rieux  dont  l'argen  besiadonien  gourrine. 

C'est-h-dire,  petit  ruisseau  dont  l'eau  argentine 
murmure  mignardement. 

Besiadure,  sul)st.  fém.  Mignardise.  On  lit  dans 
le  Dict.  de  Borel,  au  mot  Besiat  : 

La  besiadure  de  nostre  alge. 

C'est-à-dire  la  mignardise  de  notre  siècle. 

Besiale  (4),  adj.  Commun,  conligu.  Le  champ 
besiale,  ou  besialle,  étoit  une  terre  ou  lande  com- 
mune à  plusieurs.  (Laurière,  Glossaire  du  Droit 


Français.)  On  explique  aussi  cette  expression  par 
champs  contigus,  du  mot  beser,  baiser,  toucher. 
(Voy.  le  Coût.  Gén.  T.  II,  p.  081.) 

VARIANTES  : 

BESIALE,  Besialle.  Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr. 

Besicles,  subst.  fém.  plur.  Lunettes  à  deux 
verres.  «  Besicles  que  nous  appelions  autrement 
"  lunettes....  les  anciens  les  appellerent  bisoculi, 
«  doubles  yeux,  par  le  mot  abrégé  de  besicles  (.5).  » 
(Pasquier,  Recher.  p.  G98.)  «  Gens  qui  portent 
•<  lunettes,  ou  bericles.  »  (S'  Jul.  Mesl.  llist.  p.  358.) 

VARIANTES  : 
BESICLES.  Dict.  de  Borel,  Nicot  et  Monet. 
liEcvcLES.  Epith.  de  la  Porte. 
Bericles.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  .388,  col.  i. 
Besygles.  Dict.  de  Nicot. 
Bezicles.  Babelais. 

Besiclier,  subst.  masc.  Faiseur  de  besicles. 
Lunettier,  faiseur  de  lunettes.  (Voy.  les  Dict.  d'Oud. 
et  de  Cotgrave.) 

VARIANTES  : 
BESICLIER,  Besyclier... 

Besiers  (G),  subst.  masc.  plur.  Sorte  de  plante. 
(Voy.  les  Contes  d'Eutrapel,  p.  212.) 

Besil,  subst  masc.  Massacre,  carnage.  Du 
Gange,  dans  son  Gloss.  lat.  au  mot  Besilium,  dit 
qu'il  est  difficile  d'assigner  la  véritable  signification 
de  ce  mot.  Il  conjecture  qu'il  pounoitôtrele  même 
que  bersel,  qui  signifie  torture.  Cependant,  dans  les 
passages  cités  par  cet  auteur,  il  semble  que  besil 
signifie  carnage  ou  massacre  (7)  ;  et  c'est  ainsi  qu'il 
faut  l'entendre  dans  les  vers  suivans,  d'autant 
mieux  qu'on  verra  ci-après  besiller,  pour  massa- 
crer, égorger. 

De  femmes  fait  si  grant  hesil  : 
Moult  par  y  ot  nez  perilliés, 
Et  meschines  a  dueil  noies. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  47. 

Oncques  sy  faite  occision, 
Ne  si  laide  destruction. 

Ne  tel  besil,  no  tel  dolour 
Ne  fut  des  Saisnes  en  .i.  jour 

ibid.  fol.  "0,  R». 

Besilier,  verbe.  Egorger,  massacrer,  détruire. 
Si  nous  en  croyons  le  Glossaire  du  P.  Martène,  ce 
mot  signifie  exiler.  Il  est  pris  pour  estropier,  muti- 
ler, dans  le  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  aux  mots 


(1)  Il  faut  lire  les  ciaulx,  pour  les  ceux,  ou  plus  simplement  ces.  (n.  e.)  —  (2)  Aux  fêtes  du  1"  janvier  que  présidait 
l'évèque  des  sots,  voici,  d'après  un  cérémonial  manuscrit  de  Viviers,  écrit  en  13G5,  quelle  était  la  formule  des  indulgences  : 
«  De  par  mossenhor  l'evesque,  Que  Dieus  vos  donne  gran  mal  al  bescle,  Avec  una  plena  balasta  de  pardos  E  dos  das  de 
raycha  de  sot  lo  mento.  »  (n.  e.)  —  (3)  Ce  doit  être  le  même  verbe  que  bescochicr,  qu'on  trouve  au  Roman  de  la  Rose  : 
«  C'est  celé  Oa  concupiscence)  qtii  Fauteur  fet  prendre,  Rober,  tolir  et  baréter,  et  bescochier  et  mesconter.  »  Au  sens  de 
tromper,  se  joint  celui  d'enlever  furtivement:  «  Que  tant  comme  on  torne  sa  main.  Nous  a  une  ame  bescochée.  »  (Miracles 
de  la  Vierge,  1"  vol.)  (n.  e.)  —  (4)  Besal,  aujourd'hui  beseau,  pour  les  agriculteurs  et  les  meuniers,  est  un  canal,  une 
rigole.  (N.  E.)  —  (5)  La  racine,  comme  nous  l'avons  déjà  indiqué,  est  benjUus.  (s.  E.)  -  (6)  C'est  le  poirier  sauvage.  De  nos 
jours  encore,  bczi  est  un  nom  générique  ajouté  au  nom  du  pays  d'où  sont  tirées  certaines  espèces  de  poires  :  besi  d'Heri, 
besi  Chaumontel.  L'origine  serait  le  hollandais  besie,  ancien  aUemand  bese,  gothique  basi .  qui  est  l'allemand  actuel 
Beere.  (n.  e)  —  (7)  Le  sens  est  fixé  par  le  passage  suivant  de  G.  Guiart  :  «  Que  pais  fut  si  oiitreement.  Qu'il  n'i  ot  besil  ni 
maçacre.  »  Ce  mot  devait  avoir  encore  le  sens  de  capture,  car  au  reg.  ,).f  l't'J,  p.  126,  an.  1395,  on  lit  •  «  Le  suppliant  veant 
que  on  avoit  ostée  l'espée  de  son  serouge,  et  que  on  lioit  et  besilloit.  »  C'est  ce  qu'indique  la  forme  besistro  employée  avec 
le  sens  de  drisse  par  G.  Guiart  (an.  1304):  «  Cil  des  galles  font  besislre,  qui  es  haus  mas  pas  ne  messiéent.  »  Il  y  a  là  un 
préfixe,  plus  la  racine  du  mot  essilier.  (n.  e.) 


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Besilamentum    et  Besilium,  où  il  cite  ces  vers 
de  Guiart,  ms.  : 

Car  huis,  et  portes  en  refraignent  ; 
Besilent  (1)  tous  ceux  qu'ils  ataignent, 

Mais  il  nous  paroit  signifier  plutôt  égorger, 
massacrer,  détruire.  Les  passages  que  nous  allons 
citer  décideront.  «  Et  tanta  laior  atTairequededens 
«  trois  ans  furent  si  besillé  qu'il  n'en  remest  nul 
«  u  pais.  »  (Contin.  de  G.  de  Tyr.  Marlène, 
T.  V,  col.  730.) 

Las  !  je  ne  puis  le  deffunct  oublier, 

Et  sont  nobles  tenuz  pour  luy  prier  ; 

Car  les  cheoit,  et  aymoit  chierement, 

Ne  n'eusl  souffert  jamais  les  beziller 

A  son  povoir. 

Vig.  de  Charles  vu,  T.  I,  p.  7). 

Therouene,  le  chancelier 
Mohier,  et  autres  vrays  Angloys, 
Si  se  Guidèrent  beziller. 
D'ainsi  veoir  crier  les  François. 

Ibid.  p.  150. 
Quant  il  s'en  print  a  souvenir, 
Se  vint  tuer  et  bezillier, 
Afin  de  justice  tenir. 

Ibid.  p.  210et2H. 

vAm.\NTEs  : 
BESILIER.  Martène,  Gloss.  T.  V. 
Besiller.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  à  Besilamentum. 
Beziller.  Vig.  de  Charles  VII,  T.  I,  p.  71. 
Bezillier.  Vigil.  de  Charles  VII,  T.  I  p.  211. 

Besin,  adj.  Voisin.  Ce  mot  est  du  patois  de 
Gahors. 

VARIANTES  : 
BESIN,  Besis.  Dict.  de  Borel,  au  mot  Glouper. 

Beslantlé,  adjectif.  Echancré.  On  lit  en  ce  sens 
dans  Perceforest,  Vol.  111,  fol.  120  :  »  Le  chevalier 
«  à  l'escu  beslandé.  » 

Besloi,  sitbsl.  masc.  Tort,  dommage,  injustice. 
Ce  mot  semble  s'être  formé  de  bis  et  de  loi,  comme 
qui  diroit  loi  double,  balance  à  double  poids,  injus- 
tice, tort,  et  par  extension,  discorde,  division,  trou- 
ble, désordre,  et  toute  espèce  de  mal  : 

Par  traison,  et  par  besloi. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  2"9. 

Le  même  poëte,  parlant  de  l'hérésie  de  Félix  et 
de  son  livre  apporté  au  Concile,  dit  : 

Quant  li  rois  oit  le  besloi, 
Pour  le  mal  oster  ki  ens  fu. 
Le  rouva  ardoir  en  un  fu. 

Ibid.  page  85. 

Ce  mot  se  trouve  dans  plusieurs  autres  Poètes 
jiss.  avec  la  même  signification. 

1°  On  disoit  à  besloi  pour  à  tort,  opposé  à  à  droit 
qu'on  disoit  à  loi  : 

Ne  burson  vin,  ge  1"  di  par  bone  foi, 

Ainz  que  n'ession  josté  à  droit  où  à  besloi. 

Parlon.  de  Bl.  MS.  de  S.  G.  fol.  172,  col.  1. 

2°  A  tort  et  à  besloi,  pour  à  tort  et  à  travers  : 


Tu  destruiz  S'"  Eglise  à  toi-t  et  à  besloi. 

Rom.  de  Rou,  MS.  p.  IM. 

3°  Mettre  à  besloi,  pour  détruire,  ruiner  : 

Nous  meternioit  A  besloi, 

Mais  ils  orientent  les  chevaliers. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7-218.  fol.  154,  R-  col.  2. 

VARIANTES  : 
BESLOI.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  154,  R»  col.  2. 
Besloy.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  85  et  279. 
Belloy.  Parton.  de  Blois,  MS.  de  S'  Germ. 

Besoche  (2),  subst.  fém.  Bêche.  Outil  propre  à 
remuer  la  terre  : 

Tousjours  avec  la  besoche, 
La  tranche,  le  piq,  le  hoyau. 
Nous  faisons  si  bien  une  approche. 
Que  nous  renversons  le  chasteau. 

Poes.  d'Amad.  Jamio,  fol.  226. 

Dans  Du  Gange,  Closs.  latin,  au  mot  Suffossorvum, 
on  lit  cette  citation  :  «  SufTossorium  quod  bessam 
«  vocant.  » 

VARIANTES  : 
BESOCHE.  Dictionnaire  d'Oudin. 
Besoge.  Dictionnaire  de  Cotgrave. 

Besfe.  Glossaire  latin  de  Du  Cange,  au  mot  Suffossoriunt. 
Besce.  Vies  des  SS.  de  Sorb.  chif.  Lxi,  col.  36. 
Bezoche.  Fouilloux,  Vénerie,  fol.  76,  R". 
Biece.  Dictionnaire  de  Cotgrave. 

Besogne,  sm/;s;.  fém.  Ouxrage.  —  Combat.  — 
Aventures.  —  Affaires.  —  Meubles  ,  bardes.  — 
Besoin. 

Ce  mot  désignoit  en  général  œuvre,  ouvrage,  et 
nous  l'employons  encore  quelquefois  en  ce  sens. 

De  là,  on  s'en  est  servi  pour  signifier  un  combat, 
une  bataille;  comme  on  dit  aujourd'hui  une  action, 
appliquant  le  mot  générique  à  l'espèce  particulière. 
«  Quand  les  nouvelles  y  vindrent  de  la  besongne  de 
«  Poictiers  (de  la  bataille  de  Poitiers.)  »  (Froissart, 
livre  1,  p.  199.) 

Ce  mot  a  signifié  averitures  :  «  Pas  ne  vueil 
«  oublier  aucunes  des  besognes  qui  arrivèrent  en 
«  Egypte  tandis  que  nous  y  estions.  »  (Joinville, 
page  77.)  ' 

Ce  mot  a  été  employé  pour  :  affaires,  causes, 
procès (3;.  «  Venrra  toutes  les  semaines,  deux  fois  ou 
«  trois,  selon  ce  que  plus  y  aura  de  besoignes  con- 
«  seillées  ramentevoir  à  ceux  de  nostre  conseil  les 
«  dites  besoignes  pour  déterminer,  et  mettre  à  fin, 
«  selon  ce  que  il  garderont  que  les  besoignes  le 
«  requerront.  ••  (Oidonn.  des  R.  de  Fr.  T.  I,  p.  733.) 

Besoigne,  dans  S"  Bernard  et  dansRymer,  répond 
au  mot  Xegotium. 

Ce  mot  a  eu  la  signification  de  meubles,  de  bardes. 
On  trouve  dans  les  Essais  de  Montaigne,  T.  1, 
p.  423,  besognes  de  nuit,  pour  bardes  de  nuit. 

Enfin,  on  a  dit  quelquefois  besoingne  pour  besoin. 

Qui  a  besoir/ne  d'au. 

'Pocs.  MSS.  avant  1300.  T.  IV,  p.  1393. 


(l)  On  trouve  dans  Froissart  hersillier,  diminutif  de  berser,  tirer  avec  une  flèche  ou  un  trait  d'arbalète  :  «  Ils  furent  chaciés 
et  bersiliès  tous  mors.  »  (Ed.  Kervyn,  XI,  248.)  (N.  E.)  —  (2)  La  forme  besoche  a  été  faite  sur  besse,  qui  a  le  même  radical 
que  bec.  Il  en  est  souvent  parlé  dans  les  lettres  de  rémission  transcrites  aux  registres  du  Trésor  des  Chartes.  Les 
laboureurs  et  terrassiers  se  donnaient  des  coups  de  besoches,  comme  aujourd'hui  ils  se  frappent  à  coups  de  pioche.  Voir 
Du  Cange.  sous  besoyium.  (n.  e.)  —  (3)  Besongne,  dans  Froissart,  a  aussi  le  sens  de  négociation  :  «  Li  roys  leur  acorda  ceste 
besongne  et  fist  cesser  les  enghiens.  »  (Ed.  Kervyn,  II,  263.)  (N.  e.) 


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I{emarf,aons  les  expressions  suivanles  : 
Action  de  hesoigac  [dicte  6Un[  l'action  qu'on  avoit 
en  justice  contre  celui  dont  on  avoit  géré  les  affai- 
res à  son  avantage.  «  Action  de  hcsoigne  faicte,  si 
«  comme  si  je  fais  pour  autre  absent  aucun  profit 
o  en  ses  besoignes.  »  (Bouteiller,  Somme  Rurale 
page  157.) 

Exercer  les  besoignes  de  quelque  prince,  c'est- 
à-dire,  le  servir,  faire  ses  affaires.  (Chron.  de 
S'  Denis,  T.  Ill,  fol.  40.)  Macliaut,  da.is  les  vers 
suivans,  semble  faire  allusion  à  un  proverbe  dont 
le  sens  est  (ju'en  vain  l'on  travaille  si  l'on  ne  fait 
pas  son  métier  ou  ce  qu'on  doit  faire  : 

Mais  cilz  petitement  besoigne 
Qui  riens  ne  fait  de  sa  hesokine. 

Machaut,  lilS.  loi.  103,  V  col   :!. 
VARIANTES  : 
BESOGNE.  Histoire  de  la  Pucelle  d'Orléans,  p.  482. 
Besoigne.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  I,  p.  73. 
Besoingne.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  I,  p.  74. 
Besongne  (pour  affaire.)  Al.  Chartier,  Hist.  de  Charles  VI. 
Beso.nne.  Faifeu,  page  7. 
Besoygne.  Rymer,  T.  I,  p.  114. 

Besogner,  verbe.  Travailler.  —  Agir.  —  Avoir 
besoin. 

Ce  mot  est  donné  avec  le  sens  de  travailler,  dans 
le  Dict.  de  Borel,  le  Gloss.  des  Arrêts  d'amour,  etc. 
Dans  cette  acception,  il  a  été  souvent  employé  en 
un  sens  obscène. 

Besongnier  signifie  agir,  dans  ces  vers  : 

Mais  belle  chose  oy  testnoignier 
Pou  parler,  et  bien  hesoiiujider. 

Machaiil,  MS.  fol.  27,  V  col.  2. 

Remarquons  l'usage  de  ce  mot  pris  en  ce  même 
sens,  dans  les  expressions  suivantes  : 

1"  Bien  leur  besongna,  c'est-à-dire  bien  leur  en 
prit.  (Froissart,  Vol.  1,  p.  SO'-i.) 

2°  Besongner  à  son  entente,  c'est-à-dire  manquer 
l'objet  qu'on  se  propose,  manquer  son  coup.  (Arresta 
Amor.  page  174.) 

Besongner  signifioit  quelquefois  avoir  besoin. 
Ainsi  l'on  disoit  :  «  Si  vous  avez  à  besongner  cinq 
«  ou  six  cents  lances  »,  pour  si  vous  avez  besoin 
de  cinq  ou  six  cents  lances.  (Froissart,  Vol.  Il, 
page  144.) 

VARIANTES  : 
BESOGNER.  Borel,  Dictionnaire,  1"'  add. 
Besoigner.  Glossaire  des  Arrêts  d'amour. 
Besoingner.  Rom.  de  Rou,  MS.  p.  137. 
Besoinonier.  Eust.  Ueschamps,  Poës.  MSS. 
Besongner.  Glossaire  de  Marot. 

Besoig  (1),  subst.  masc.  Résolu.  Ce  mot,  dans 
S'  Bernard,  répond  au  latin  Inopia,  Indigentia  et 
nécessitas.  On  disoit  proverbialement  : 

1°  Besoing  fait  la  vieille  trotter.  (Perceforest, 
Volume  m,  fol.  61.) 

2°  .1;;.  besoig  voit  on  son  ami.  (Chron.  fr.  du 
XIII'  siècle,  MS.  fol.  200.) 

Le  Laboureur  déiive  le  mot  besoing  du  gaulois 
soin.  (Orig.  des  Arra.  p.  197  et  suiv.)  On  lit  buisson. 


dans  le  Roman  de  Brut,  ms.  fol.  59,  mais  il  faut  lire 
besoeing,  cemme  dans  le  m.  de  Bombarde. 

VAr.IANÏES  : 
BESOIG.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  III,  page  55. 
Besoigne.  Fabl.  MSS.  du  R  n»  7615,  T.  II,  fol.  151. 
Biîsoeing.  Roman  de  Brut,  MS.  de  Bomb. 
Besoing.  Le  Loboureur,  Orig.  des  Arm.  page  197. 
Buisson.  (Lisez  Besoeing.') 
Busien.  Loi.K  Norm.  art.  38. 

Besoigne,  s!/&sL  rnnsc.  Opération.  C'est  propre- 
ment un  participe  employé  comme  substantif.  Le 
besoigne,  c'est-à-dire  ce  qui  s'est  fait.  (Voy.  leNouv. 
Cout.Gén.  T.  II,  p.  34i.)  «  Tost  après  envoyèrent 
«  une  ambassade  en  Angleterre,  devers  le  Roy 
«  Edouard,  du  /;esom(7tt/e' desquels  je  ne  mets  icy 
«  riens  pour  ce  que  je  n'en  sçay  rien.  »  (Monstrelet, 
Volume  m,  fol.  129.) 

Besoingne'::^  de  loi,  se  trouve  souvent  employé 
dans  la  coutume  de  Binch,  pour  signifier  contrats 
ou  autres  actes  judiciaires  ou  obligatoires.  (Voyez 
leNouv.  Coût.  Gén.  T.  Il,  p.210,et"ibid.  passim.) 

VARIANTES  : 
BESOIGNE.  Nouv.  Coût.  Gén.  T.  II,  page  344. 
Besoignié.  Monstrelet,  Volume  III,  f"  129. 

Besoignement,  subst.  masc.  Besogne.  Ce  mot 
est  pris  en  ce  sens  dansle  passage  suivant:  «  ouand 
«  sera  besoin  de  mander  pair  pour  se  trouver 
«  à  quelque  besoignement.  »  (Nouv.  Coût.  Gén. 
T.  II,  p.  48.) 

Besoignette,  subst.  fém.  Diminutif  de  besogne. 
(Voy.  les  bicL  d'Oudin,  au  mot  Besoignette,  et  de 
Rob.  Estienne,  au  mot  Besongnette.)  Il  est  mis 
comme  synonyme  à  bardes,  dans  Faifeu,  p.  72. 

VARIANTES  : 
BESOIGNETTE.  Oudin,  Dictionnaire. 
Besongnette.  Robert  Estienne,  Dict. 

Besoigneur,  subst.  masc.  Qui  agit.  En  latin 
Negociato'r,  dans  le  Glossaire  du  P.  Labbe.  (Voyez 
Bouteiller,  Somme  Rurale,  p.  107.) 

Besoigneus,  adj.  Nécessiteux.  Qui  est  dans  le 
besoin.  Voy.  les  autorités  citées  dans  les  variantes. 

Besoinnex  sui  par  l'abondance. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  "615,  T.  I,  fol.  13,  R-  col.  1 . 

VARIANTES  : 
BESOIGNEUS.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  I,  page  eS,  col.  2. 
Besoigneux.  Glossaire  du  P.  Labbe. 
Besoingneus.  g.  Guiart,  MS.  fol.  290,  V». 
Besongneur.  Chron.  S'  Denis,  T.  I,  fol.  148. 
Besongneux.  Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  102. 
Besougnolis.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  148. 
Besoignf.x.  Fabl.  MS.  du  R.  n«  7615,  T.  I,  fol.  73. 

Besoignols.  Ce  mot,  dans  S' Bernard,  répond 
aux  mots  egens,  egenus,  indigens  et  inops. 

Le  mot  besoignols,  dans  S'  Bernard,  Serm.  Fr. 
MSS.  p.  56,  est  pris  dans  un  sens  particulier.  Il  parle 
de  ceux  qui,  sans  en  être  dignes,  veulent  approcbei' 
de  la  communion  et  les  représente  sous  la  ligure 
de  ceux  qui  veulent  aller  trouver  Jésus  à  Bétliléem 
nouvellement  né.  «  .lai  n'en  est  mies  besoignols, 
«  k'il  ne  voillel  assi  estre  receuz  en  ti.  » 


(1)  On  le  trouve  sous  la  forme  bosuigit  dans  la  Chanson  de  Roland  (v.  306):  «  Kar  de  ferir  ci  jo  si  grant  bosuign.  »  (n.  e.) 


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VARIANTES    : 
B^SOJGNOLS.  S'  Bei.iard,  Serm.  Fr.  MSS.  ppge  31. 
Besognols.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  page  132. 
Besignols.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  page  137. 

Besois.Nomdecanton.Jenesaisquelostlecanlon 
de  la  Bourgogne  dont  il  est.  parlé  sous  le  nom  de 
Castillon  en  Besois  (1);  seroit-ce  l'Auxols?  (Voy. 
Perard,  Hisl.  de  Bourg,  p.  503,  tit  de  1262.) 

Besoncle,  subst.  masc.  Grand  oncle.  (Voyez 
ï.aurière,  Gloss.  du  Droit  Fr.)  Oncle  ou  besoncle; 
on  lit  dans  le  latin  :  «  Palruum,  aut  patruum 
>'  magnum.  »  (D'Argentré,  Coût,  de  Bret.  p.  1927.) 

Besongne,  adj.  Nécessaire.  On  disoit  en  ce 
sens  œuvres  hesongnes;  c'est-à-dire,  actions  néces- 
saires, devoir,  obligation.  «  La  royne  envoya  à 
■'  plusieurs  bons  chevaliers  qui  n'estoient  mye  du 
«  franc  pallois  de  la  blanche  rose,  et  retenu  à  ses 
"  bons  et  preux  chevaliers,  affin  que  ils  fussent 
»  encore  plus  preux,  plus  hardys  et  plus  voulen- 
«  taires  en  toutes  leurs  œuvres  heso)ignes,  d'eulx 
«  avant  advancer.  »  (Perceforest,  Vol.  II,  fol.  148.) 
On  trouve  hesoignables  en  ce  sens  dans  la  Règle  de 
S"  Benoit,  lat.  et  fr.  et  rendu  par  le  mot  «(?cessarîa. 

VARIANTES  : 
BESONGNE.  Percef.  Vol.  II,  fol.  148. 
Besoignable.  Règle  de  S'  Benoît,  MS.  de  B.  ch.  lvi. 

Besou,  subst.  masc.  Voie,  chemin,  roule.  Ce 
mot  est  du  patois  de  Cahors.  (Voyez  le  Dict.  de 
Borel,  au  mot  Glouper.) 

Besoynnablement,  adv.  Nécessairement. 
(Voy.  Rimer,  T.  I,  p.  114,  col.  2,  tit.  de  1270.) 

Besser  (se)  (2),  verbe.  Se  baisser.  —  Tomber, 
descendre,  diminuer. 

Ce  mot  subsiste  au  premier  sens,  avec  une  légère 
altération  dans  l'orthographe. 

Arbalestriers  de  France  tendent. 
Et  ordonnéement  se  bessent 
Vers  leur  ennemis  aler  lessent 
Quarriaux,  etc. 

G.  Guiart,  MS.  fol.  255,  Rv 

Par  une  extension  de  cette  première  acception, 
besser  a  signifié  diminuer,  tomber,  descendre.  «  Et 
«  oster  la  bride  a  son  cheval,  et  le  laisser  pestre, 
«  et  reposer  les  chiens,  et  bessier  la  grant  chaleur.  » 
(Chasse  de  Gast.  Phéb.  ms.  p.  228.) 


VARIANTES  : 
BESSER  (se).  G.  Gahrt,  MS.  fol.  255,  R°. 
Bessier.  Chssse  de  Gaston  Phébus,  MS.  p.  ^23. 

Besses  (3),  subst.  ptur.  Pacages,  Pâturages.  Mot 
du  patois  d'Auvergne  et  du  Limousin.  (Voy.  Du 
Cange,  Gloss.  lat.  au  mot  Bessœ.) 

Bessie,  subst.  fém.  Vessie.  On  a  dit  des  Alpes  : 
"  Ces  montagnes  ne  sont  que  petits  bouillons,  ou 
«  bessies,  en' comparaison  des  ondes  de  la  mer.  » 
(L'Amant  Ressuscité,  p.  16.) 

Bessiere  (4),  subst.  fém.  Vallée.  «  Le  temps  est 
«  dur  et  sec.  qui  fait  le  bestail  traire  aux  bes- 
«  sieres,  et  auxprez.  »  (Percef.  Vol.  VI,  fol.  102.) 

Bessihuets,  subst.  masc.  plur.  Ce  mot,  que 
nous  ne  trouvons  que  dans  le  Dict.  Fr.  Ital.  d'Oud. 
signifioit  peut-être  une  bêche.  Oudin  renvoie  au 
mot  Italien  benocchi,  qu'on  ne  trouve  point  dans 
les  Dict.  Italiens. 

Bessin,  subst.  masc.  On  nomme  ainsi  un  lan- 
gage particulier  du  faubourg  de  Haut-Pont  à  S' 
Orner.  H  n'est  ni  flamand,  ni  wallon  (5).  (Pelisson, 
Lettres  Kistoriq.  T.  lll,  p.  264.) 

Besson,  adj.  Jumeau.  —  Double.  Au  premier 
sens,  ce  mot  vient  de  bishomo  (6).  (Voyez  les  Dict.  de 
Nicot,  de  Monet.  de  Borel,  au  mot  lies,  d'Oudin  et 
de  Ménage.)  «  Elle  fut  bessonne,  et  d'une  même 
«  ventrée,  avec  une  autre  qui  mourut  aussitost  née.  » 
(Brantôme,  Dames  lUustr.  p.  337.) 

Deux  aignelets  bessons. 

CI.  Marot,  p.  90. 

De  là,  le  mot  besson  s'est  employé  pour  signifier 
double. 

De  ton  sein  blanchissant  le  petit  mont  besson. 

Berger,  de  Rémi  BeUeau,  T.  I,  fol.  Ul. 

Cette  tresse  bessonne, 

Tresse  dont  Cupidon  tous  ses  biens  façonne. 

G.  Durant,  à  la  suite  de  Bonncf.  p.  136. 

Besson,  subst.  masc.  Doublet.  Terme  du  jeu 
de  Trictrac.  «  Les  plus  grands  bessotis,  et  accouplez 
>.  il  nommoit  fones.  «  (Rabelais,  T.  V,  p.  42.) 

Bestail,  subst.  masc.  Bétail  (7).  Ce  mot,  pris  dans 
un  sens  générique,  signifioit  toute  sorte  d'animaux. 
.<  Moutons,  brebis,  et  autre  bestiaille.  »  (Ord.  des 
R.  de  Fr.  T.  II,  p.  232.)  «  Les  habitans  des  Iles 

«  Baléaires envoyèrent    à    Rome,   demander 

«  secours  d'armes  pour  combattre  les  connins  leur 


(1)  Ce  doit  être  ChâtiUon  en  Bazois.  Ce  petit  pays  occupe  la  partie  orientale  du  Nivernais,  et  a  pour  localités  principales, 
le  chef-lieu  de  canton  précité,  Mont-en-Bazois  et  Moulins-Angilbert.  (n.  e.)  —  (2)  La  Chanson  de  Roland  emploie  les  formes 
orthographiques  baisse  et  basse;  on  trouve  au  xii"  siècle  be.^se,  dans  Aliscans,  v.  985.  (N.  e.)  —  (3)  La  forme  provençale 
actuelle  est  bais.w;  c'est  un  lieu  bas  et  marécageux,  couvert  de  ronces  et  de  broussailles.  L'article  suivant,  bessières,  a  le 
même  sens  et  la  même  racine  bas  (voir  Du  Cange  sou>  baissa).  (N.  E.)  —  (4)  On  ht  au  registre  JJ  187,  p.  291,  an.  1457  :• 
1  Procès  se  meut....  pour  raison  du  droit,  posse'ssion  et  saisine  de  certain  bois  ou  bcssiei-c,  ou  des  usages  d'icellui.  (n.  e.) 
—  (5)  Serait-ce  le  patois  normand  du  Bessin,  des  environs  de  Bayeux?  (N.  E.)  —  (6)  Le  mot  se  rencontre  au  xiii«  siècle, 
dans  H  livre  de  jostice  et  de  plait,  p.  p.  Rappeti  (Paris,  in-4",  1850),  p.  55  :  «  Ausi  sera,  se  Johana  enfanloit  deus  enfans  et 
emprés  deus  beçons.  »  Le  suffixe  on.  comme  le  mot  complet,  est  d'origine  romane.  Rapporter  besson  à  bishomo,  qui 
d'ailleurs  ferait  contre-sens,  et  non  à  bis,  c'est  méconnaître  la  force  de  création  propre  au  français.  On  rencontre  encore  le 
nom  propre  Bisson.  (n.  e.)  —  (7>  Lapin,  du  latin  cunicidus,  mot  espagnol  selon  les  auteurs  anciens.  Ce  fait  nous  est  raconté 
par  Pline  l'ancien,  au  VHP  livre  de  son  histoire  naturelle;  il  le  place  au  temps  d'Auguste.  L'édition  de  la  Vénerie  de  du 
Fouilloux  (L.  Favre,  Niort,  1864,  in-4"),  qui  reproduit  celle  de  1635,  imprime  au  fol.  88.  "V»,  bestial.  Cette  forme  se  trouve 
aussi  au  t.  IV,  p.  397  du  Froissart  (édition  Kervyn)  ;  M.  Scheler,  auteur  du  Glossaire  (t.  XIX),  corrige  bestail.  En  Berry, 
on  écrit  encore  besïia^ ;  bestail  vient  de  bestiale,  tandis  que  bestaille,  qu'on  rencontre  dés  le  xiii'  siècle,  vient  de  beslialia, 
comme  aumaillu  vient  de  animalia.  (N.  E.) 


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«  faisant  mortelle  guerre,  comme  aussi  à  la  vérité 
«  ce  petit  bestail  est  d'incroyal)lc  fécondité  oil  il 
«  s'adonne.  »  (Fouilloux,  Vénerie,  fol.  121.)  Ce  mot 
générique  s'étoit  restreint  à  ne  signifier  qu'une 
seule  espèce;  ainsi  on  disoil  bétail  lanu,  pour  dési- 
gner les  bestes  à  laine.  (Coût.  Cén.  T.  II,  p.  474.) 

VAKIANTKS   : 
BEST.ML.  Cont.  Gén.  T.  II,  p.  474. 

Bestauxe.  Duchesne,  Gén.  de  Guines,  p.  283,  lit.  de  1241. 
Besteau.  Cotgrave,  Dict. 
Bestiail.  Perceforest. 
Bestial.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  p.  263. 
BE.STIAILLE,  suhst.  fém.  Ord.  des  R.  de  Fr.  T.  II,  p.  232. 

Bestance,  sidist.  fém.  Dispute,  débat,  différent, 
division.  —  Inquiétude. 

Au  premier  sens,  ce  mot  csl  formé  de  bis  (1)  et  de 
tancer,  selon  le  Gloss.  de  Villehardouin,  au  mot 

Bestance.   «    Le  lendemain s'assemblèrent   à 

«  Parlement bestance  i  ot  assez  d'unes  ctioses 

«  et  d'autres.  »  (Villehardouin,  p.  56.) 
Il  n'i  ot  noise  ne  licsleuc. 

Phil.  Mouskes,  MS.  p.  754. 

Le  même  poète  semble  avoir  employé  hestenc 
pour  inquiétude,  dans  le  passage  suivant  : 

Par  cremance,  et  par  beslenc 

I  fist  fermer  castiel  fiamenc. 

Ph.  Mouskes,  MS.  p.  851. 

VARIANTES  : 
BESTANCE.  Gloss.  de  Villehardouin. 
Bestens,  suhut.  masc.  Hist.  des  3  Maries,  MS.  p.  475. 
Besteng,  suhst.  masc.  Ph.  Mouskes,  MS.  p.  516,  passim. 
Bestent,  subst.  masc.  Froissart,  Poës.  MSS.  p.  296,  col.  1. 

Bestats  (2),  adj.  au  masc.  plnr.  Sot,  inepte.  Des 
Perriers,  dans  ses  contes,  l'a  employé  en  ce  sens 
lorsqu'il  a  dit  en  parlant  des  petits  d'une  pie:  «■  Ils 
«  faisoient  les  bestats  et  vouloient  toujours  retour- 
«  ner  au  nid,  pensans  que  la  mère  les  deut  toujours 
«  nourrir  ù  la  bêchée.  »  (Contes  de  Des  Perriers, 
T.  II,  p.  ia2.) 

Beste,  subst.  fém.  Bête.  Ce  mot,  au  pluriel, 
répond  dans  les  Serm.  Fr.  mss.  de  S'  Bernard,  au 
latin  animalia  eljumenta. 

Assez  font  paier  de  musages,  et  d'analoignes, 
A  ces  poures  bestes  lointaines. 

Fabl.  MSS.  du  R.  n-  7615,  T.  I,  fol.  101,  V  col.  1. 

Après  avoir  observé  que  les  animaux  à  quatre 
pieds  sont,  par  le  mot  de  bestes,  distingués  des 
oiseaux  dans  ces  vers: 

Tout  ainsi  le  redoublent,  bestes  le  lyon, 
Et  com  font  tout  oiseaux  le  fort  alerion. 

Ger.  de  Roussillon,  MS.  p.  127. 

Nous  remarquerons  les  expressions  anciennes 
dans  l('S(iiiellts  ce  mot  éloit  employé.  On  disoit  : 

1°  [lestes  blanclies  pour  brebis,  moutons,  chèvres. 
«  Les  bestes  blanches  se  peuvent  mener  si  loin  que 
»  l'on  veut,  pourveu  qu'elles  retournent  de  jour  au 
«  giste  en  leur  linage.  .<  (Coût.  Gén.  T.  I,  p.  442.) 

2°  liesles  rouges,  pour  bœufs  ou  vaches.  «  N'est 


<■  permis  aux  habilans,  ou  porteriens  de  la  terre 
«  et  seigneurie  de  Gorze,  d'avoir,  et  tenir  tioupeau 
«  à  part,  soit  de  bestes  rouges,  ou  blanches,  sur  les 
«  bans  des  lieux  où  ils  font  leur  résidence,  ny  les 
«  lieux  circonvoisins.  »  (Xouv.  Coût.  Gén.  T.  II, 
p.  1095.)  On  appelle  aussi  bestes  rouges  les  bêles 
fauves.  (Voyez  Modus  et  Racio,  ms.  fol.  30.) 

3°  Bestes  royal,  pour  bestes  dont  la  chasse  est 
réservée  au  roi. 

Quant  il  avoit  déserté 

Aucune  grand  beste  royal, 
Adonc  querroit  le  desloial 
Contrée  pour  autre  destruire. 

Poes.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  483,  col.  1. 

4"  Bestes  (le  nuict,  pour  oiseaux  nocturnes. 
Budé  en  compte  de  dix  espèces  :  «  Le  grand  duc, 
«  le  moyen  duc,  ou  hibou  cornu,  hibou  sans  cor- 
«  nés,  ou  chahuant,  chevêche,  huette,  l'effraye  ou 
«  fresaye,  corbeau  de  nuict,  faucon  de  nuict  ou 
«  chaleis,  et  souris  chauve.  »  (Budé,  des  Oiseaux, 
fol.  119.) 

5"  Bestes  doutées  et  bestes  puantes,  distinguées 
les  unes  des  autres.  «  Les  bêtes  douces,  sonllecerî, 
«  la  biche,  le  daim,  le  chevreuil  et  le  lièvre.  » 
(Modus  et  Racio,  fol.  46.)  «  Or,  nous  dirons  des 

«  autres  cinq  bestes  qui  sont  dictes  puantes 

«  parceque  la  senteur  qui  vient  d'eulx  est  forte  et 
«  puante.  »  (Modus  et  Racio,  fol. -18.) 

6'  Bestes  noms.  Sous  cette  dénomination,  on 
comprenoit  les  animaux  tel  que  le  sanglier.  «  L'a- 
«  prentis  demande  comment  on  doit  parler  de 
«  vennerie,  du  sanglier,  et  des  bestesqui  sontdicles 
«  noires.  »(Modus  et  Racio,  fol.  23,  Rv) 

7"  Beste  mî((?  (3),  opposée  à  besie  féroce.  «  Lors  s'en 
«  vint  le  cerf  luy,  et  va  ferir  son  lyon  sur  le  doz 

«  du  pied  dexlre quand  le  lyon  se  sentit  ainsy 

«  frappé  de  une  beste  mue,  il  le  print  à  grand  des- 
«  daing,  et  lance  après  le  cerf  de  tant' qu'il  peut 
«  courir,  qui  s'en  alloit  parmy  la  forest  bruyant 
«  comme  fouldre.  •■  (Perceforest,  Vol.  II,  fol.  80.) 
«  Bestes  mues  signifioit  aussi  les  brutes,  et  les 
«  bétes  en  général,  distinguées  des  bêtes  humaines 
«  qui  sont  les  hommes.  »  (Modus  et  Racio,  p.  17.) 

8"  Bestes  enlieudées,  pour  bêtes  retenues  par  les 
liens  qu'elles  ont  aux  pieds  de  devant.  iLaurière, 
Gloss.  du  Droit  Français.) 

9°  Bestes  liumaincs.  Ce  senties  hommes.  «Quand 
«  Dieu  fist  et  ordonna  le  monde,  il  créa  deux  ma- 
a  nières  de  bestes,  les  unes  qu'il  appelia  bestes 
«  humaines,  et  les  autres  furent  appellées  mues.  ■> 
(Modus  et  Racio,  sis.  fol.  33.) 

10°  Bestes  de  fer  ou  bestiaux  de  fer,  étoient  ceux 
qu'un  fermier  tenoit  ù  bail,  ou  à  cheptel,  ainsi 
appelées  parce  qu'elles  ne  meurent  pas  pour  le 
seigneur.  (Voy.  Laurière,  Glossaire  du  Droit  Fr. 
au  mot  CJiaptèl,  et  Beaumanoir,  eh.  68,  p.  346.) 

11°  Beste  ferrée,  pour  cheval,  ou  toute  bête  que 


(1)  Non  pas  bis,  mais  le  préfixe  péjoratif  bes.  (n.  e.)  —  (2)  Nsus  avons  encore  la  forme  bêla  ;  bétail  se  prononce  ainsi  dans 
la  banlieue  de  Paris,  (n.  e.)  —  (è)  On  appelle  mue  du  cerf,  le  bois  qu'il  a  mis  bas.  Dans  le  passage  suivant,  mue  parait  venir 
de  muta,  muette  :  «  Eulx  mors,  leur  a  esté  denyée  sépulture,  mesmement  en  terre  prophane;  mais  ont  esté  geltez  sur  terre 
pour  eslre  mengiez  par  les  chiens,  oiseaulx  et  bestes  mues.  »  (Lettre  de  Ch.  VI,  1413,  d'après  le  mem.  H.  de  la  Ch.  des 
Comptes  de  Paris,  fol.  18,  Y».)  (n.  e.) 


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l'on  ferre.  «  Leshabitans  des  dits  lieux,  et  paroisses 
«  ne  peuvent  nourrir  bestes  aux  pâturages  com- 
«  muns,  si  ce n'estlebestail qu'ils  peuventhiverner, 
•>  et  nourrir  de  leurs  foins,  et  pailles  escrois- 
«  saiis  en  la  dite  paroisse,  et  d'avantage  une 
«  bcste  ferrée,  pourceaux,  et  chèvres  nécessaires 
«  pour  les  alimenter.  »  (Coût.  Gén.  T.  Il,  p.  484.) 

12*  Au  bois  qui  aura  bonne  beste.  Façon  de  parler 
empruntée  de  la  cbasse;  c'est-à-dire  aller  au  com- 
bat bien  accompagné.  On  lit  dans  le  passage  sui- 
vant, parlant  d'un  défi  d'armes  :  «  La  seule  inimitié 
«  de  nous  deux,  avec  la  justice,  ou  injustice  de  l'un 
«  et  de  l'autre,  sera  juge  et  tesmoing  de  ce  qui 
«  aviendra  entre  noas  deux,  ou  plus  grand  nombre, 
«  s'il  désire  estre  plus  accompagné,  soit  de 
«  Mondragor  son  cousin,  ou  autre,  si  bon  luy 
«  semble,  et  lors  au  bois  qui  aura  bonne  beste.  » 
(D.  Flores  de  Grèce,  fol.  38.) 

i?>°  Ouvrés  a  bestes,  étoient  des  étoffes  sur  les- 
quelles il  y  avoit  des  bêles  brodées  ou  appliquées  : 

Entendre  fait  sur  le  rivaige 

Un  drap  qui  fu  faiz  à  Quartaige  (1), 

Ovre:  à  bestes  tôt  faitiz, 

Blanch.  MS.  de  S.  G.  fol.  190,  R'  col.  3. 

Ceinture 

A  bestes  d'or  brodées. 

Parlonopex  de  Dlois,  MS.  de  S.  C.erm. 

14°  Bestes  mortes  (2).  Espèce  de  jeu  compris  dans 
le  dénombrement  des  jeux  de  Gargantua,  (llabelais, 
T.  1,  p.  152.) 

l'y  Faire  la  beste,  pris  dans  un  sens  obscène. 
(Voyez  Ménage,  Remarques  sur  la  langue,  p.  109.) 

iO°  Fonc  de  bestes,  se  dit  d'une  certaine  quantité 
de  bètes  qui  exige  les  soins  d'un  garde  ou  d'un 
berger.  Il  ne  se  dit  proprement  que  des  brebis  et 
des  pourceaux.  (Voyez  Beaumanoir,  p,  72.) 

17°  Beste  parist,  paroîl  signifier  une  bête  pleine 
qui  porte  des  petits  :  -  Qui  gamaflre  beste  parist  et 
»  plainct  en  est,  doit  cinq  sols  d'amande  et  rand  le 
«  doaimage  sans  loyer.  «  (Ane.  Coût.  d'Orléans  ,  à 
la  suite  des  Coût,  de  Beauvoisis,  p.  408.)  C'est-à- 
dire  qui  maltraite  une  bête  pleine,  si  l'on  en  rend 
plainte  eu  justice,  l'amende  sera  de  cinq  sols,  etc. 

18°  Vostre cheval  n'estqu'wie beste. GeHefaron  de 
parler  vulgaire,  qui  est  encore  en  usage (3),  semble 
venir  d'un  conte  rapporté  dans  la  huitième  iNuit  de 
Straparolo,  T.  II,  p.  145. 

19°  Snnz  de  besle,  paroi t  être  pris  pour  bêtise, 
action  de  bête,  où  il  n'y  a  pas  plus  de  sens  que  dans 
une  bête  : 

Car  c'est  chose  trop  deshonneste, 
Laide,  vilainne  et  sanz  de  bcste; 
Ne  telle  chose  à  roy  n'appartient. 

Machaut,  WS..fGl,  2^7,  R'  col.  2. 

VARIAiNTES  : 
BESTE.  Orth.  subsist. 
IJEESTE.  S'  Bernard,  Serm.  Fr.  MSS.  p.  C. 
Uestes,  plur.  Fahl.  MS.  du  R.  n«  761.5,  T.  I.  fol.  101,  V». 


Bestelette,  subst.  fém.  Diminutif  de  bête. 

Cailles ,  pleuviers,  et  tant  de  beslelettes 
Pour  vous  servir,  quant  besoing  en  avez. 

Vigil.  de  Charles  VU,  T.  H,  p.  189. 

VARIANTES    : 
BESTELETTE.  Vigil.  de  Charles  VIT,  T.  II,  p.  189. 
Bestelete.  Chasse  de  Gaston  Phébus,  MS.  p.  41. 
Betelete.  Monet,  Dict. 
BiESTEL  at  Bestelete.  Athls,  MS.  fol.  44,  R»  col.  1  et  2. 

Bester,  verbe.  Faire  la  bête.  (Dict.  d'Oudin.) 
Besterie,  subst.  fém.  Bêtise. 

S'on  voit  nostre  besterie 

Nous  serons  naocquez  de  chacun. 

Les  Marp.  de  la  Marg.  fol.  347. 
VARIANTES  : 
BESTERIE.  Bict.  de  Cotgrave. 
Bestesce.  Chasse  de  Gaston  Phébus,  MS.  p.  2il. 

Besteste,  subst.  fém.  Bête.  «  Se  aucune,  ou 
«  plusieurs  de  leurs  bestes,  y  estoit  trouvée  paissant 
«  devant  la  cinquième  fueille,  et  sans  garde,  il 
«  paieront  à  Nous,  ou  à  ceulx  qui  cause  auront  de 
«  Nous,  douze  deniers  d'amende  pour  la  besle,  et 
«  se  beste  y  est  trouvé  et  a  garde  faite,  il  paieront 
«  pour  la  ft^'s/fsie  douze  deniers.  .<  (Ord.  des  Rois 
de  France,  T.  V,  p.  514.) 

Bestiaire  (4),  subst.  masç.  Fable  ou  moralité. 
Faisant  allusion  aux  bêtes,  Froissart  a  dit  : 

Ce  petit  plaint,  et  grand  assez, 
Ançois  que  je  fuisse  lassés, 
Assis  dedens  mon  vestiaire 
Figure  sur  le  bestiaire. 

Poês.  MSS.  de  Froissart,  p.  206. 

Bestial,  adj.  Bête,  sot,  inepte.  —  Brutal. 
J.  de  Meung  disoit,  dans  le  premier  sens: 

Si  l'homme  est  si  bestiaulx. 

Qu'il  n'ait  de  nul  mestier  science  ; 

Se  n'en  désire  congnoissance. 

Mendicité,  se  peut  traire 

Sanz  qu'il  saiche  aucun  mestier  faire 

Dont  il  puisse  sans  truandie 


«  Jamais  homme  aymant  sa  gorge,  et  son  ventre, 
«  ne  fist  bell'œuvre;  aussi  sont-ils  de  gens  de  peu, 
«  elbestials.  »  (Sagesse  de  Charron,  p.  OU.) /Jes^/o/e 
est  un  mot  languedocien.  (Voyez  des  vers  cités  dans 
le  Dict.  de  Borêl,  au  mot  Marelle.) 

Bestial  est  mis  pour  brutal,  dans  ce  passage  de 
Straparole  :  «  Tourmenté  de  l'ennuieuse  et  ftesfia^e 
«  tempesle.  »  (Nuits  de  Straparole,  p.  189.) 

VARIANTES  : 
BESTIAL.  Sagesse  de  Charron,  p.  611. 
Bestiaulx.  Roman  de  la  Rose,  cité  ci-dessus. 
Bestiole.  Dict.  de  Borel,  au  mot  Marelle. 
Bestion.  Moyen  de  parvenir,  p.  200. 

Bestialement,  adv.  Bêtement,  brutalement. 
(Voyez  le  Dict.  d'Oudin.) 


(1)  Carthage.  -  (2)  Il  est  encore  un  jeu  de  cartes  qui  demande  quatre  ou  cinq  partners,  et  qu'on  appelle  la  beste.  (N.  E.) 
-  (3)  Dans  le  Crispin  médecin  d'Hauteroche  (1736,  2  vol.  in-12),  o.i  lit  encore:  «  .le  lui  ferais  bien  voir  que  son  cheval  ne 
serait  qu'une  bêle.  »  (l,  2.)  Le  sens  est  se  tromper  lourdement.  (N.  E.)  —  (4)  On  appelait  bestiaire,  dans  l  histoire  littéraire 
du  moyen-âge,  un  recueil  de  fables  et  de  morahtés  sur  les  bétes  ;  c'était  de  tort  longs  potimes  en  vers  de  huit  pieds, 
comme  le  ms.  (anc.  6838  B.)  de  la  B.  N.  écrit  au  xiv  siècle,  (n.  e.) 

II  00 


BE 


474  — 


BE 


Bestialité,  subst.  masc.  Action  de  bêle.  (Voyez 
le  Dict.  tic  Monct.) 

C'est  vivre  en  bestialité, 
Qui  n'a  quelque  félicité, 
Fors  de  pleisus  mondains  ensuyvre. 

Le  Dl9<ion  des  Faulccs  Amours,  p.  22C, 

Bestiam,  subst.  masc.  Bêle.  «  Va  bestiam,  mon 
«  goviai,  scais-lu  point  que  l'Eglise  ne  peul  faillir.  » 
(Moyen  de  parvenir,  p.  83.) 

Bestiaux,  subst.  masc.  plur.  Pâtres,  hommes, 
bestiaux.  Les  gens  qui  mènent  paitre  les  bestiaux. 
(Voy.  la  Chron.  de  S'  Denis,  T.  I,  fol.  252.)  On  lit 
dansSuger:  «  Pecorales  homines.  » 

Bestion,  s«^s^  î?;asc.  Petite  bête.  On  lit  dans 

Brantôme:  «  Tout  ouvré  d'or en  personnages 

»  et  petits  bcstions  (1).  »  (Brant.  Cap.  fr.T.  I,  p.  96.) 

Bestors,  adj.  Oblique,  tortueux.  (Voy.  Du  Gange, 
Glossaire  latin  i  au  mot  liestulinus,  et  le  Dict.  de 
Borel,  au  mot  Bestors,)  où  licite  ce  vers  d'Ovide, 
Ms.  dans  lequel  il  est  question  d'un  labyrinthe  : 

Tant  fit  les  chemins  bestors. 

Bcstoiirné  (2),  participe.  Changé,  bouleversé. 
—  Henversé,  tourné  à  l'envers.  —  Troublé.  — 
Travesti,  déguisé. 

Ces  dillérentes  acceptions  ont  entr' elles  beaucoup 
d'analogie,  et  dérivent  toutes  évidemment  de  la 
première.  Ainsi ,  nous  nous  contenterons  d'en 
rapporter  des  exemples. 

Avec  la  signification  de  changé,  bouleversé,  on 
a  dit: 

Li  siècles  est  si  bestornez, 
Que  je  sui  trop  pis  atornez, 
Por  le  siècle  qui  se  bestorne. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7218,  fol.  197,  F.'  col.  1. 
Bien  est  telz  gens  dénaturée, 
Qui  contre  son  chef  est  meslée  ; 
Nature  est  en  eux  beslournée. 

Geofroy  de  Paris,  à  la  suite  du  Rom.  de  Fauvcl,  fol.  53. 

Un  ancien  poëte,  dans  une  complainte  contre  les 
mcdisans,  dit  : 

.Tugement  m'ont  besiort, 

Tort  a  amour,  se  par  amour  n'ay  grâce. 

Poés.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  153,  col.  i. 

De  là,  ce  mot  signifioit  renversé,  tourné  à 
l'envers  : 

Li  G.  est  lettre  bestornée, 


Si  li  G.  ne  fu  bestornez. 
En  guise  de  P.  fust  tornez. 

Fabl.  MS.  duR.  n-  7218,  fol.  127,  P.-  col.  1. 

C'est  en  ce  sens  que,  pour  exprimer  le  désordre 
que  la  peur  met  dans  tous  nos  sens,  l'on  a  dit  au 
figuré  : 

Au  feu  s'en  vint  toz  bestorne-:. 

Fabl.  lus.  du  R.  n-  721S,  fol.  117,  V  col.  2. 

Enfin  on  trouve  reynard  beslournc,  pour  renard 
déguisé,  travesti.  (Fabl.  ms.  du  R.  n°  7015,  T.  I, 
fol.  101,  R"col.  1.) 


VARIANTES  : 
BESTOURNÉ.  Geofroy  de  Pans,  fol.  53. 
Bestornk.  Fabl.  MS.  du  R.  n»  7218,  fol.  ICI,  R»  col.  1. 
Bestort.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  153,  col.  4. 

Bestourneis,  subst.  Revers,  côté  d'une  chose 
opposé  à  celui  qui  se  présente  d'abord  ou  qu'on 
regarde.  J.  de  Meung  fait  ainsi  la  description  des 
olijets  (lue  la  lune  présente  à  nos  yeux  dans 
quelqu'une  des  portions  de  son  disque  : 

Et  la  part  de  la  lune  obscure 

Nous  représente  la  figure 

D'une  très  merveilleuse  beste  ; 

C'est  d'ung  serpent  qui  tient  sa  teste 

Vers  occident  ades  encline; 

Vers  orient  sa  queue  fine. 

Sur  son  dos  porte  ung  arbre  estant, 

Ses  rains  (3)  vers  orient  portant  ; 

Mais  en  estendant  les  bestourne 

Et  sur  ces  bestourneis  séjourne, 

Ung  homs  sur  les  bras  apuyez, 

Qui  vers  occident  a  ruez 

Ses  piedz,  ses  cuisses  ambedeux, 

Comme  il  appert  au  semblant  d'eulx. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  177.-4-17767. 

Bestourneys,  dans  ces  vers,  est  mal  expliqué  par 
mauvais  plis  dans  le  Gloss.  du  Roman  de  la  Rose. 

v..\Ri.\xTE  : 
Bestourneys.  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose. 

Bestourner,  verbe.  Bouleverser.  —  Changer, 
déguiser.  —  Détourner,  faire  prendre  un  autre  cours. 
On  a  dit  dans  le  premier  sens  : 

Moût  va  li  siècles  bestournant, 
Car  che  derrière  va  devant , 
Et  che  devant  si  va  derrière. 

Vers  anciens  cités  par  Duchcsne,  Annot.  sur  Al.  Cbart.  p.  855. 

Machaut  emploie  bestourner  et  destourner  comme 
estant  à  peu  près  synonymes  dans  ces  vers  : 

Cela  du  tout  bestourner 

Fait  ton  vouloir,  et  destourner. 

Machaut,  JIS.  fol  21,  R"  col.  2. 

Par  une  extension  de  cette  acception,  on  disoit 
bestourner  la  vérité ,  pour  la  déguiser  :  »  Les 
«  advocats  vendent,  et  beslournent  vérité.  »  (Le 
Chevalier  de  la  Tour,  Instruct.  à  ses  filles,  fol.  37.) 
De  là,  bestourner  l'écriture  s'est  mis  pour  en  forcer 
le  sens  : 

Il  tornciit,  et  bestornent, 
Les  droiz,  et  l'escripture, 
Et  coulourent  les  fous, 
Et  leur  donnent  painture. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7615,  T.  II,  fol.  143,  R-  col.  ». 

Enfin ,    nous    trouvons   ce  mot  employé  pour 
détourner,  faire  changer  le  cours  d'une  rivière  : 
Après  vint  le  flo  de  la  mer 
Qui  la  rivière  a  bestournée 
Le  cours,  etc. 

G.  Cuiart,  MS.  fol.  313,  V. 

VARIANTES  : 
BESTOURNER.  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose. 

IlESTONNER,  BESTORNER,  DETOURNER. 

Bosnehoi",  verbe.  Le  sens  de  ce  mot  nous  paroit 
difficile  à  déterminer  dans  le  passage  suivant.  Peut- 


(I)  Comparez  ce  passage  des  Emaux  de  Laborde,  p.  225  (xiv=  siècle):  «  Un  cordon  de  chapeau,  fait  en  façon  de 
triomphe,  où  sont  représentées  phisieurs  figures  de  personnages  et  besiiu/is.  »  (n.  e.)  —  (2)  L'ancienne  égli-e  S'-I!enoit,  da 
Paris,  porta  d'abord  le  nom  de  Bestournée,  parce  que  le  grand  autel  regardait  encore,  en  125J,  l'Occident  ;  elle  prit  le 
nom  de  Bien  tournée  quand  il  eut  été  transporté  à  l'Orient.  (N.  E.)  —  (3)  Rameaux. 


BE 


475  — 


BE 


être    esl-il    mis   pour    reculer,    peut-être    aussi 
signifie-t-il  frapper  à  faux,  manquer  son  coup  : 

Li  chapples  commence  hydeus, 

Car  cil  des  fronz  pas  ne  bcsuchcnt  (I). 

G.  Guiart  ,  MS.  fol.  238,  V°. 

Besuqueix  (2),  verbe.  S'amuser  à  des  bagatelles. 
Mot  du  patois  languedocien.  (Voyez  Dict.  de  Borel, 
au  mot  Ih'suqiie.) 

Betas,  siibst.  7nasc.  Terme  de  marine. 

Dont  veissiés  ancres  lever, 
Estrans  traire,  hobens  fermer, 
Mariniers  saillir  par  ces  nez, 
Desharnechier  voiles  et  trez  ; 
Les  uns  s'efforcent  au  vuindas  (3), 
Ly  autre  à  lof  et  au  belas. 

Rom.  de  Brut,  MS.  fol.  85. 

Betaiimis,  subst.  inasc.  La  pierre  de  foudre. 
(Voy.  le  Lapidaire,  à  la  suite  de  la  traduction  de 
Vegue,  par  J.  de  ^Ieung,  ms.  du  H.  ir  79il,  fol.  IIG.) 

Bete,  subst.  fém.  Poirée.  —  Capuchon. 

Dans  le  premier  sens,  c'est  un  mot  normand  et 
angevin  qui  subsiste  encore  dans  ces  provinces,  où 
l'on  nomme  bette  l'herbe  potagère  que  nous  appe- 
lons poirée.  Le  passage  suivant,  dans  lequel  on 
trouve  porrée  qui  est  iine  autre  herbe  potagère  que 
nous  nommons  porrcan  ou  poireau  (4),  du  latin 
porrus,  confirme  notre  explication  : 

Les  chois,  la  bette,  la  porée. 

Poé3.  MSS.  d'Eust.  Desch.  fol.  514,  col.  1. 

Bete,  dans  le  patois  de  Beauvais,  signifie  un 
capuchon  noir  dont  se  couvrent  ceux  qui  vont  aux 
enterremens.  (Voyez  Du  Gange,  Glossaire  latin,  au 
mot  Beta  (5).) 

Saug  bete  (6),  se  disoit  pour  sang  caillé  :  «  Quand 
«  ce  veiioit  sur  la  garison  ,  ils  jettoient  grant 
«  foison  de  sanc  beté  par  la  bouche  et  par  le  nez,  et 
"  pardessous,  qui  moult  les  ébahissoif,  et  neant- 
«  moins  personne  n'en  mouroit.  »  (Journ.  de  Paris, 
sous  Charles  VI  et  VH,  p.21.) 

vAni.\NTEs  : 
HETE.  Dict.  de  Monet,  d'Oudin  et  de  Colgrave. 
Bette.  Eust.  Desch.  Poës.  MSS.  fol.  514. 

Betée,  adj.  au  fém.  Mer  belée.  Peut-être  mer 
Baltique  (7)  : 

Dusqn'en  la  mer  betée. 

Poês.  MSS.  avant  1300,  T.  UI,  p.  1028. 


Sire,  dist  li  valés,  jusqu'à  la  mer  salée 
N'a  nul  plus  biau  serjans,  ne  jusqu'en  la  belêe. 
Fabl.  MSS.  du  R.  n"  ■J218,  fol.  348,  R'  col.  2. 

Betelole,  subst.  fém.  Sorte  d'herbe.  C'est 
l'herbe  nommée  bardane  en  françois,  et  en  latin 
personata.  (Voyez  le  Dict.  de  Borel,  2"  add.) 

Beter.  Il  est  dit  en  parlant  des  exercices  des 
jeunes  gens  pour  leur  plaisir  : 

Cil  damisel  vont  escremir. 
Traire,  lancier,  corre,  saillir, 
Et  font  beter  ors  et  lions 
Et  menus  veatres  et  bracons 
Ces  vers  comoatre  et  escumer, 
Ces  chevax  corre  et  raviner. 

Alhis,  MS.  fol.  56,  V'  col.  2. 

On  pourroit  s'en  tenir  l'i  la  leçon  de  beter,  qui 
signifieroit  que  l'on  faisoil  combattre  des  ours  et 
des  lions.  Le  reste  s'entendoit  des  petits  vautours  (8), 
c'est-à-dire  épervierou  autre  petit  oiseau  ù  qui  l'on 
faisoit  voler  le  brahon;  enfin  ils  combattoient  le 
verrat  ou  sanglier  écumant,  et  faisoient  des  courses 
de  chevaux. 

Betez  et  Betls  (9)  sont  expliqués  par  hébété, 
dans  le  Glossaire  du  Roman  de  la  Rose  : 

Ung  ours,  quant  il  est  bien  betez, 
N'est  si  betif,  ne  si  balez 
Que  serez,  si  vous  y  alez. 

Rom.  de  la  Rose,  vers  10G19-10G21. 

Béton,  subst.  masc.  Lait  caillé.  (Voy.  le  Dict  de 
Monet,  au  mot  Béton.)  On  lit  dans  les  Contes  de 
Cholières,  fol.  204.  «  Betton,  c'est-à-dire  premier 
«  laict  d'une  accouchée  qui  se  fait  dur  et  troué 
«  comme  une  éponge.  » 

VARIANTES  : 
BETON.  Dict.  de  Monet. 
Betton.  Contes  de  Cholières. 

Bétonne,  subst.  masc.  fém.  Betoine.  Sorte  de 
plante.  (Voy.  les  Dict.  de  JN'icot  et  de  Cotgrave.) 

De  la  soussie  et  dou  bétonne  (10). 

Poes.  MSS.  de  Froissart,  p.  105. 

VARIANTES  : 
BETONNE.  Dict.  de  Nicot. 
Betosne.  Dict.  de  Cotgrave. 

Betresche  (11),  subst.  fém.  Brèohe.  Nous  som- 
mes d'autant  plus  porté  à  croire  que  c'est  le  sens  de 
ce  mot,  dans  le  passage  que  nous  citons,  qu'on  lit 
bi'eche  plus  bas  : 

Dau  fossé  de  la  betresche, 

Venus  s'en  ist,  plus  droit  que  flèche, 


(1)  Ne  s'amusent  pas  à  des  niaiseries.  (N.  E.)  —  (2)  L'ancien  provençal  avait  6e:(tcor,-  voir  Raynouard,  lexiaue  Roman,  (n.  e.) 
—  (3)  L'Anglais  dit  encore  :  to  wind,  hisser  ;  c'est  le  guindeau.  (N.  E  )  —  (4)  Le  pnrreau  (allium  cyclum)  n'est  pas  la  poirée 
(beta  cyciti):  les  feuilles  du  premier  ressemblent  au.x  pousses  des  oignons;  celles  delà  seconde  ressemblent  aux  feuilles 
de  la  betterave,  (n.  e.)  —  (5)  On  trouve  cette  forme  au  Cartulaire  de  S'-Martin-des-Champs  ;  l'origine  est  ^aixrj,  qu'on 
trouve  dans  les  glossaires  grecs.  (N.  E.)  —  (6)  Le  mot  a  ce  sens  dés  le  xii=  siècle,  dans  la  bataille  d'A'eschans  :  «  Desoz 
l'auberc  h  esl  le  sanc  betez  »  (v.  715)  ;  et  au  v.  5413  :  «  Del  sanc  des  cors  est  la  terre  betée.  »  Il  faut  rapprocher  de  ces 
exemples  l'article  betée.  —  (7)  La  mer  betée,  c'est  la  mer  gelée  ;  «  11  voient  l'eve  felenesse,  Et  tant  périlleuse  ei  parfonde.  Qu'il 
n'est  riens  nule  en  tôt  le  monde,  S'ele  i  cheoit,  ne  fust  aiée,  Aussi  com  en  la  mer  betée  (v.  3009  de  la  Charrette,  xiii'  siècle).  » 
Béton,  qui  vient  ensuite,  est  un  dérivé  de  ce  verlie  beter,  dont  la  suite  des  sens  est  coaguler,  cailler,  geler;  Diez  le  fait 
venir  de  l'allemand  beizen,  proprement  mettre  un  mors,  mais  par  dérivation,  coaguler  à  l'aide  d'acides,  ^w.  E.)  —  (8)  Les 
viautres  sont  des  chiens  ;  il  ne  faut  pas  lire  brahon,  mais  bracons,  petits  braques.  (N.  E.)  —  (9)  Betez  est  le  participe  passé 
du  verbe  beter,  qui  vient  ensuite,  et  signifie  museler,  mettre  un  mors  :  «  On  fit  as  noces  beter  ors  Et  vers  (verrats)  et  à 
chiens  et  à  viautres.  »  (Roman  de  l'Escouffle.)  L'étymologie  est  l'allemand  beizen,  cité  à  la  note  précédente,  pris  dans  son 
sens  primitif,  (n.  e.)  —  (10)  Au  xiii"  siècle,  on  trouve  ;  «  Rue,  veloine  o  termenline  (térébenthine).  »  (Ms.  S'  Jean.)  L'origine 
est  Vetlones,  peuple  de  la  Lusitanie.  (N.  E.)  —  (11;  C'est  une  variante  de  breièche,  sorte  de  tourelle  en  bois,  crénelée,  placée 
devant  les  villes  pour  les  attaquer,  au-dessus  du  portail  d'un  château  pour  le  défendre,  enfin  sur  les  édifices  civils  pour 
les  orner  comme  un  balcon,  (n.  e.) 


BE 


—  476 


BE 


A  l'uis  derrière  de  la  bourjoise 
Oui  la  l'eslendoit  com  cortoise: 
Ele  ouvre  luis,  el  il  s'i  boute. 

Fnbl.  MSS.  du.  R.  n-  TiUS,  T.  II,  fol.  127,  V  col.  2. 

Bette,  sitbst.  fém.  Boisson.  «Je  ne  peulx  entrer 
«  en  bette  %  c'est- iVdire,  je  ne  puis  me  mettre  en 
train  deljoire.  (Hnbelais,  T.  I,  p.  21.)Cemotsubsiste 
encore  en  ce  sens,  dans  plusieurs  cantons  de  la 
Normandie. 

Betiin  f  I),sHfts^  niasc.  (Glossaire  du  P.  r^abbe.)  Ce 
mot  semble  employé  pour  immondices  dans  l'Hist. 
du  vicomte  de  Turenne,  par  Ramsays,  livre  III, 
page  '215. 

Betunniere,  sitbst.  fém.  Fondrière.  «  Mais 
«  pour  ce  (|ue  aucunes  foiz  on  ne  puet  mis  chevau- 
«  cliier  menée  ou  parmontaignes,  ou  parcroulieres 
«  ou  betiiniiiers,  que  on  appelle  graves  en  Gas- 
•  coigne.  »  (Chasse  de  Gaston  Phéblis,  >is.  p.  220.) 
Betuniiiêres,  qui  n'est  qu'une  faute  d'orthographe, 
se  corrige  par  cet  autre  passage,  où  on  lit  : 
«  Aucunes  foys  aux  raseleiz  ou  l'en  fait  le  millet, 
«  aucunes  foys  aux  gravez  que  l'en  appelle  en 
«  France  croùllières  ou  betumieres,  aucunes  fois 
«  es  marlieres  ou  la  terre  qui  s'appelle  marie  yst.  » 
(Chasse  de  Gaston  Phébus,  ms.  p.  15.) 

VARIAMES  : 
nETUNNIERE.  Chasse  de  Gaston  Phébus,  MS.  page  15. 
liETL'MiÈRE.  Chasse  de  Gaston  Phébus,  MS.  page  2'20. 

Beu,  sitbst.  masc.  Dieu.  Le  mol  beu  eibieii  sont 
des  altérations  de  celui  de  Dieu  dans  les  espèces  de 
sermens  suivans  :  «  Je  regnl  beu.  »  (Journal  de 
Paris,  sous  Charles  VI  et  VII,  p.  19.) 

Vais,  fait-il,  par  la  geule  bieu. 
Bien  sui  homs,  chi  a  beau  sjieu. 

Falil.  MSS.  du  R-lii-  19S9,  fol.  2i0,  R-  col.  1. 
Par  le  cuer  beu,  ou  sont  mes  braies? 

Fabi.  MS.  de  S.  G.  fol.  52,  V-. 

Nous  disons  aujourd'hui  par  la  corbieu  : 

Voire,  fait- il,  par  les  elz  beu. 

FM.  MS.  de  S.  G.  fol.  46.  R'. 

VARIANTES  : 
BEU.  Journ.  de  Paris  sous  Charles  VI  et  VII,  page  19. 
Bieu.  Fabl.  MS.  du  R.  n"  7989,  fol.  240,  R»  col.  1. 

Beucle,  subst.  fém.  Terme  d'armoirie.  Peut-être 
une  boucle.  «  Esloit  la  bannière  d'argent,  à  une 
«  beucle  (2)  de  guettes.  (Froissart,  Vol.  I,  p.  243.) 

Beuf,  subst.  masc.  Bœuf.  On  dit  boé  dans  le 
Poitou,  suivant  Le  Duchat,  sur  Rabelais,T.  I,  p.  179. 

Expressions  proverbiales  : 

!•  Dieu  donne  le  beuf  et  non  pas  la  corne.  Façon 
de  parler  proverbiale  qui  signilie  que  Dieu  donne 
le  bien,  el  que  c'est  à  l'homme  ù  travailler  pour 
l'obtenir.  »  Jaçoit-ce  que  la  grâce  est,  el  vient  de 
«  nostre  Seignor,  toutes  voies  se  doit  l'om  pener,  et 
«  travailler  de  poursuivre  la  grâce,  lousjours  en 
«  amendement,  et  à  prandre  pour  meaus  ouvrer  I 


«  qùanquel'on  peut  de  bien,  car  l'on  dit  en  pro- 
«  verbe  :  Dieu  donne  le  t>euf  et  non  pas  la  corne, 
«  et  en  l'autre  leue  :  qui  s'évertue  Dieu  ly  ayde.  » 
(Assises  de  Jérusalem,  p.  18ï.) 

2°  .1  lion  beuf  meut  on  la  chair.  Façon  de  parler 
proverbiale,  pour  dire  que  comme  un  bon  beuf  a 
besoin  d'aiguillon,  de  même  un  homme  brave  a 
besoin  d'être  excité  pour  bien  faire  :  «  Quelque  soit 
«  le  corps  de  moy,  si  a  le  cueur  lousjours  servy 
«  amours  dès  son  enfance.  Madame,  mon  cueur 
«  ne  peut  parler.  Il  est  paoure,  pourchasser  le 
«  convient;  A  Iwn  beuf  meut-on  la  chair.  Premier 
«  vous  demande,  el  à  toutes  celles  de  vostre  com- 
«  paignée  des  hourdis,  tant  dames,  comme  pucel- 
"  1ère  uug  seul  don  que  demander  voudray,  sauf 
«  toutes  honneurs;  si  aurez  mon  cueur  asté  de 
«  villannie,  paoureté,  el  me  aurez  rendu  la  vie.  » 
(Perceforest,  Vol.  VI,  fol.  74.) 

VARIANTES  : 
BEUF.  Assises  de  .Jérusalem,  p.  1S4. 
IJOÉ.  Le  Dnchat,  sur  Rabelais,  T.  I,  page  179. 
BuEF.  Borel,  Dictionnaire.  —  Loix  Normandes,  art.  G. 
Bues.  Glossaire  sur  les  Coût,  de  Beauvoisis 
BuEZ.  Histoire  de  Fr.  à  la  suite  du  Roman  de  Fauv.  f»  67. 
lîUEUs.  Ane.  Coût.  d'Orléans,  à  la  suite  de  Beaum.  p.  ^S. 
BuF.  Loix  Normandes,  art.  29. 

Beufle,  subst.  masc.  Pièce  d'artillerie  : 

Lors  cognoissans  que,  par  artillerie, 
Ce  non  obstant  la  grande  batterie 
De  leur  lézarde,  et  le  beufle  de  Pize, 
Hz  ne  pourroient  usurper  seigneurie. 
Sur  les  Francoys,  vindrent  par  tricherie, 
Peusans  pour  vrav  qu'ilz  l'auroient  par  tel  guise. 
Jcaii  Marot,  p.  18. 

Beurate,  subst.  fém.  Une  sereine  ou  baratte  ti 
battre  le  beurre.  (Voy.  le  Dict.  d'Oudin.) 

Beiiroer,  subst.  Abreuvoir.  On  trouve  le  mot 
bcuroer  dans  le  Gloss.  de  l'Hisl.  de  Paris;  c'est  une 
faute,  lisez  Vabeuroer. 

Beurre,  subst.  masc.  Beurre.  Burre,  dans 
.S'  Bernard,  répond  au  latin  butyritm.  Ce  mot 
subsiste  sous  cette  orthograplie,  mais  nous  devons 
ciler  les  expressions  suivantes  : 

î"  N'estant  beurre  net  C'est-^-dire  n'étant  pas 
sans  reproche.  «  l^e  père  de  la  fille  qu'on  vouloil 
<■  lui  bailler  en  mariage,  ayant  grand  envie  de  s'en 
«  défaire,  n'estant  beurre  net,  pi  esche  tant  le  sotard 
«  qu'il  lui  fait  accroire  que  sa  fille  avec  qui  il  le 
«  vouloil  marier,  avoil  sous  mesme  couverture, 
«  et  l'une  bien  près  de  l'autre,  deux  bons  moulins 
"  à  eau  el  l'autre  à  vent.  »  (Bouchet,  Serées,  p.  256.) 

2"  Hcnrre  d'amendes,  sorte  de  friandise  que  l'on 
trouve  dans  l'énumération  de  différents  mets,  dans 
Rabelais,  T.  IV,  p.  256. 

3"  Un  seiç/neur  de  beurre  combat  bien  un  vassal 
d'acier.  Façon  de  parler  pour  marquer  la  supério- 
rité de  la  puissance  des  souverains  surdes  vassaux. 
(Dict.  de  Cotgrave.) 


(1)  L'exemple  suivant  assure  le  sens  :  «  Qui  ont  mis  aucuns  fumiers,  terres  et  autres  betuns  ez  place  de  la  ville  de  Dijon.  » 
(Hist.  de  Bourg.,  t.  III,  p.  132,  col.  2,  an.  1389.)  On  hésite  pour  létyraologie  entre  ()(•(('.■,  précédera.nînt  cité,  elbitam'.n.  (N.  E  .J 
—  (2)  D'ordinaire,  on  buurdait  de  gueules  ;  il  faudrait  donc  lire  bourde  ou  bowle.  (n.  e.) 


BE 


477  - 


BI 


VARIANTES  : 
BEURRE.  Orthographe  subsist. 

BiEURRE.  Eust.  Deschamps,  Poës.  MSS.  fol.  H6,  col.  2. 
BuiRE.  Eust.  Desehamps,  Poës.  MSS.  fol.  232,  col.  4. 
BuBRE.  Nicot,  Dict. 

Beiise.  Ce  mot,  dont  le  sens  n'est  pas  clair,  a 
donné  lieu  à  celle  façon  de  parler  :  dire  beuse,  pour 
narguer  quelqu'un  : 

Lai  moi  ester, 

Ne  fust  por  ma  chose  haster, 

Poraler  au  marchié  demain, 

Tu  le  comparaisses  a  par  main  : 

Comparaisses  fet  anieuse  : 

Par  mon  chief  je  vous  en  dis  beuse. 

Fabl.  MS.  du  R.  n*  7-218,  fol.  49,  V*  col.  2. 

Beusse,  subst.  Nous  ne  tenterons  pas  de  déter- 
miner la  si?,nificalion  de  ce  mot  que  nous  trouvons 
dans  Rabelais  :  «  Luy  mist  au  doisl  médical  une 
«  verge  d'or  bien  belle,  en  laquelle  esloit  une  cra- 
«  pauldine  de  beusse  maanifiquement  enchâssée.  « 
(Rabelais,  T.  III,  p.  !H  et  i)'i.) 

Beuvasser,  verbe.  Grenouiller.  De  l'augmen- 
tatif italien  bevazzare,  boire  à  s'enivrer.  (Voyez  les 
Dict.  de  Nicot  et  Oudin.) 

VARIAMES  : 
BEaVASSER.  Oudin,  Dict. 
Beuvailler.  Nicot,  Oudin,  Dict. 

Beuvette,  sîibsf.  fém.  Buvette.  —  L'action  de 
boire.  —  Mauvais  vin. 

Au  premier  sens,  ce  mol  signifie  un  régal  fait 
entre  amis,  une  collation.  (Voy.  Dict.  de  Borel,  au 
mol  Hoiliire,  qu'il  explique  par  beuete,  collation.) 

Beiivetle  désignoit  aussi  l'action  de  boire,  comme 
dans  le  passage  suivant:  «  Ces  paroles,  et  beitvettes 
«  achevées,  «'c'est-à-dire  ayant  cessé  de  parler  et 
de  boire.  (Rabelais,  T.  V,  p.  tiOi.) 

Nous  le  trouvons  aussi  pour  mauvais  vin,  dans 
le  Gloss.  du  P.  Labbe,  où  il  est  rendu  par  le 
mot  lalin  vappa.  C'est  alors  la  même  acception  que 
celle  du  mot  buvandc. 

VARIANTES  : 

BEUVETTE.  Rabelais,  T.  V.  p.  204, 
Bevette.  Dict.  de  Borel,  au  mot  Boitui-e. 

Bevier,  subst.  musc.  Mesure  de  lerre.  »  Ils  aca- 
«  terent  quatre  beviers  à  monseigneur  Régnier  de 
«  Cais  »  (dans  une  citation  françoise  (I)  employée 
par  Du  Cange,  Gloss.  la  t.  au  mol  Bivarium.) 

Beuzi,  adj.  Etre  plongé.  Mot  du  patois  Breton. 
(Voy.  Du  Cange,  Gloss.  lal.°  au  mol  Buz-ereus.) 

Bezan,  subsf.  niasc.  Mauvais  grain.  «  Comme 
«  le  pur  froment  dégénère  bien  souvent  en  bezan, 


»  lus  et  yvraye,  aussi  de  bons  parens  sortent  quel- 
«  quefois  des  vaut-rien,  et  meschanls  enfans.  » 
(S' Julien,  Mesl.  Uist.  p.  598.) 

Bezeines  (2),  subst.  fém.  plur.  Ruches  à  miel. 

Ou  il  vait  veoir  ses  bezeines, 

Qui  sont  de  cire  et  de  miel  plaines. 

Ovide  de  Arte  Amandi,  MS.  de  S.  Germ.  fol.  91. 

Bezei"  (3),  verbe.  Courir.  C'est  un  mot  Normand. 
Il  s'appli(]iie  communément  aux  vaches  qui  courent 
lorsqu'elles  sont  piquées  des  mouches.  (Mén. 
Dict.  Etym.) 

De  là,  on  disoil  proverbialement:  «  Aller  à 
«  S"  Bezel,  ou  Troltel,  »  pour  courir  comme  une 
vache  pi(iuée  de  mouches.  (Voy.  les  Dict.  de  Nicot 
et  de  Cotgrave.) 

VARIANTES  : 
BEZER.  Nicot,  Dict. 
Beser.  Ménage,  Dict.  Etym. 

Beziklhery,  subst.  masc.  Sorle  de  poire.  Nous 
disons  besidheri  (i).  (Voy.  le  Dict.  d'Oudin.)  Cette 
espèce  de  poire  est  fort  connue  dans  l'Anjou. 

Bezole,  subst.  fém.  Espèce  de  truite  (5).  (Voy.  les 
Dicl.  de  Nicot  et  d'Oudin.) 

Bi  (maille  de).  Maille  d'un  filet  dont  la  petite 
maille  étoil  delà  largeur  d'un  tournois,  et  la  plus 
grande  de  la  largeur  d'un  gros  tournois.  «  Qui  est, 
a  en  quelque  temps  que  ce  soit,  trouvé  peschanl 
«  d'autre  harnas  qu'a  maille  de  bi;  c'est  à  scavoir 
«  que  la  plus  petite  maille  peut  passer  le  tour  d'un 
»  vieil  tournois,  et  par  la  haute  maille,  un  gros 
«  tournois,  chel  en  amende  de  soixante  sols.  » 
(Boulciller,  Somme  Rurale,  p.  800.)  On  lit  dans  une 
disposition  pareille  (Ibid.  p.  507):  Maille  le  roij. 

Biafora  (6).  En  Béarn,  c'est  le  cri  par  lequel  celui 
qui  est  outragé  appelle  du  secours  pour  poursuivre 
ou  prendre  le  criminel.  (Laurière,  Gloss.  du  Dr.  Fr. 
au  mot  Biafora,  el  Du  Cange,  Gloss.  bit.  sons  le 
même  mol.  —  Voyez  aussi  le  Coût.  Gén.  T.  Il, 
p.  «85.) 

VARIANTES  : 
BI.\FOR.\..  Laur.  Gloss.  du  Droit  Français. 
Biahoras.  Du  Cange,  Gloss.  lat  au  mot  Biafora. 
BiAHORES.  Coût.  Gén   T.  il,  p.  685. 
BlHORE  Essais  de  Montaigne,  T.  II,  p.  790. 

Biailliere,  subst.  fém.  Canal,  ruisseau.  La 
rivière  qui  passe  près  de  Turin  «  ne  laisse  pas  de 
«  porter  par  deux  binillieres,  une  partie  de  ses 
«  eaux  dans  la  ville,  tant  pour  ses  commoditez  et 
«  sa  netteté,  que  pour  faire  tourner  plusieurs 
«  moulins.  »  (Mém.  de  Feuquiere,  T.  IV,  p.  87.) 


(\)  Carlulaire  d'Amiens,  an.  -1267,  fol  106.  (N.  E.)  —  (2)  On  trouve  encore  les  formes  be.ianne,  bezanne,  bezenne.  (N.  E.)  — 
(3)  Les  patois  lombards  ont  bisia,  besia,  piquer,  bisient,  mordant,  bisiell,  aiguillon  d'abeille  ;  on  peut  en  rapprocher  le  mot 
normand  et  remonter,  comme  fait  Diez,  à  l'allemand  biss,  morsure.  (N.  E.)  —  (4)  Il  vaut  mieu.x  écrire  bezi  ci'Hi'.ri.  (n.  e.)  — 
(5)  Comment  bezole  sisnifierait-il  truite,  si  besolet,  qui  semble  être  le  diminutif,  veut  dire  hirondelle  de  mer  dans  le  parler 
génevsis?  (n.  e.)  —  ((î)  Le  premier  sens  n'est  pas  celui-là;  à  ce  cri,  les  bourgeois  de  la  commune  et  tous  les  autres  habitants 
devaient  sortir  en  armes  de  leurs  maisons  et  suivre  le  prévôt  ou  le  vlguier  (Regestrum  Constabularise  Burdegalensis  ;  f.  92). 
Enfi  1  le  registre  .1.1.  207,  p.  66,  an.  1480,  lui  donne  un  autre  sens:  «  Lequel  GUabert  s'escrya  à  haulte  voix  à  biaffora,  qui 
e.st  un  mot'du  langaige  du  pais  disant  qu'il  esloit  mort.  »  La  forme  bikore  qui,  d'après  les  variantes,  se  rencontre  dans 
Montaigne,  est  employée  dès  1451  au  reg.  ,TJ.  185,  p.  281  :  «  Le  suppliant  soy  sentant  ainsi  navré  et  blecé  dudit  cop,  cria  à 
haulte  voix,  bihore,  bihore,  audit  Martin  son  maistre,  disant  qu'il  estoil  mort.  »  (n.  e.) 


BI 


478 


BI 


VARIANTES  : 
BIA.ILLIERE.  Salnovo,  Yen.  p.  109  et  171. 

Bi.vi.LiEiiE.  Salnove,  Yen.  p.  158. 

Biais,  adj.  Qui  est  de  travers.  «  Interprétation 
«  détournée,  contrainte  et  biais  (1).  »  (Essais  de 
Montaigne,  T.  III,  p.  517.) 

ïiinquo,  subst.  fém.  Céruse.  Drogue  vénitienne 
à  l'usage  des  femmes  qui  se  fardoient.  (Dict.  de 
Nicot,  d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Biard,  subst.  masc.  Béarn.  C"est  le  nom  d'une 
province.  «  Le  baron  des  guerres  estoit  de  Lorraine, 
«  ses  prédécesseurs  esfans  pourtant  sortis  de 
«  Basque,  ou  de  Biard.  »  (Brantôme,  sur  les  Duels, 
page  3.) 

VARIANTES  : 
RI.iRD.  Brantôme,  sur  les  Duels,  p.  3. 
BiARN.  Cotgrave,  Dict. 

Biarcla,  verbe.  Fuir  promptemeiit.  (Voy.le  Dict. 
de  Borel,  qui  le  dérive  de  Via.) 

Biarnois,   adj.  Béarnois.  (Voy.  les  Epith.   de 
Mart.  de  la  Porte,  oiî  ce  mot  sert  d'épithète  à  Cape 
.  Lagnati.) 

VARIANTES  : 
BIARNOIS,  BlERNOlS. 

Biaiiine,  subst.  masc.  Heaume.  Vraisemblable- 
ment, il  faut  écrire  hiaume  dans  le  passage 
suivant  : 

Fer,  ne  fust,  platine,  n'escorce 
Ne  puet  contre  ses  cops  durer; 
Et  puet  tant  le  biaumc  endurer, 
Qu'à  dormir,  ne  a  sommeiller 
Ne  li  covient  autre  oreillier. 

Fabl.  MS.  du  R.  n-  7-218,  fol.  222.  V  col.  2. 

Biauvoisinois,  adj.  Qui  est  de  Beauvoisis. 

Aveuc  eus  les Biauvoisiuois, 
De  Champaigne,  et  de  Gastinois, 
D'Orlenois,  de  Chartrains,  de  France. 

G.  Guiarl,  MS.  fol.  69,  Rv 

Biliaillc,  subst.  fém.  Don,  présent.  Ce  mot  est 
expliqué  ainsi  dans  les  Dict.  d'Oudin  et  de  Cotgr. 
C'est  peut-être  l'action  de  donner  pourboire. 

Biaune.  Nom  de  lieu.  Beaune.  (Voy.  Pérard, 
Hist.  de  Bourg,  p.  500,  tit.  de  12G0);  on  lit:  Beaune, 
ibid. 

Biauvais.  Nom  de  ville.  Beauvais.  (Loisel, 
Hist.  de  Beauvais,  p.  206,  tit.  de  IP22,  etPreuv.  de 
l'Uist.  de  Beauvais,  par  un  bénédictin,  p,  273,  titre 
de  1107.) 

VARIANTES  : 
BUUVAIS,  BiAUVEZ. 

Bibat  et  Vivat  (2).  Sorte  d'exclamation,  quand 
quelqu'un  avoit  dit  un  bon  mot.  Brantôme,  parlant 


d'un  livre  contre  les  duels,  et  de  ce  que  M.  le 
garde  des  sceaux  en  avoit  dit  aux  Etats  de  Blois, 
raison  pour  laquelle  i!  falloit  lui  donner  Vinum  et 
Species,  ajoute  que  cependant,  pour  le  bon  mot  à 
son  avis,  il  ne  méritoit  qu'on  ciàt:  bibat  et  vivat. 
(Brant.  sur  les  Duels,  p.  189.)  On  voit  par  là  que 
ces  termes  servoient  d'applaudissement  pour  ceux 
qui,  dans  quelque  genre  que  ce  fût,  réussissoient 
dans  une  assemblée  publique.  On  peut  aussi  en 
inférer  que  c'étoit  dans  nos  anciennes  cours  la  ré- 
compense ordinaire  des  béros,  jongleurs  et  menes- 
triers  qui  avoient  obtenu  le  suffrage  des  assistans. 

Bibaux,  subst.  7nasc.  plur.  Ce  mot  nous  paroît 
le  môme  que  pitaux  ou  petaux,  paysans  qu'on  fai- 
soit  aller  anciennement  à  la  guerre,  suivant  Borel, 
au  mot  l'itaux.  Je  crois  que  c'est  une  faute  pour 
bidaux  qu'on  va  voir  ci-après.  Cependant  Corneille, 
dans  son  Dict.  au  mot  Bacinet,  et  Boulainvilliers, 
Essais  sur  la  Noblesse,  citent  Monslrelet,  comme 
ayant  fait  usage  du  mot  Bibaux.  (Voy.  Bidallx.) 

Bibelotier,  subst.  masc.  Faiseur  et  mouleur  de 
petites  images  de  plomb,  qui  se  vendent  aux  pèle- 
rins et  autres  :  «  Cela  est  uni  aux  miroitiers.  » 
(Sauvai.  Hist.  de  Paris,  T.  III.) 

Bilîclots  (3),  subst.  Mot  de  jargon.  (Voy.  les  Dict. 
d'Oudin  et  de  Cotgrave.) 

Biben,  subst.  masc.  Vivant.  Mot  du  patois  de 
Cahors.  (Dict.  de  Borel,  au  mot  Glouper.) 

Biberon,  subst.  masc.  Espèce  d'aiguière.  (Voy. 
les  Dict.  de  R.  Eslienne  et  de  Monet.) 

Biljet.  subst.  masc.  Vase  à  boire.  (Voy.  le  Dict. 
de  Cotgrave.)  «  Jamais  je  ne  combaly  que  sous  la 
«  courtine  ensemble  le  pot  et  le  voerre,  et  croye 
«  que  je  n'oseroye  assaillir  un  bibet,  s'il  estoit 
»  armé.  »  (Fabri,  Art  de  Rhétor.  fol.  157,  R».) 

Biljeton,  subst.  masc.  Bec  d'un  vase.  «  Estoit 
«  le  bec  de  l'un  des  bassins  dont  on  donnoit  à 
«  laver  au  baptême,  et  duquel  on  versoit  dans  un 
"  autre  bassin.  »  Ce  bec  étoit  semblable  à  celui 
d'une  aiguière.  (Honneurs  de  la  Cour,  m.  p.  00.) 

Bilïle,  subst.  fém.  Livre.  —  Kyrielle.  —  Machine 
de  guerre. 

Au  premier  sens.,  ce  mot  signifie  livre.  Guyot  de 
Provins  (i),  et  Hugues  de  Brégy  (5)  ont  fait  deux 
ouvrages  sous  le  titre  de  Bible. 

Ce  mot,  dans  le  passage  suivant,  est  employé  dans 
le  sens  de  kyrielle,  litanie.  Un  témoin  commence 
ainsi  sa  déposition  : 

Yous  avez  une  droicte  bible. 

Coquin,  p.  102. 


(1)  Dès  le  xiv  siècle,  Oresme  (Eth.  66)  nomme  une  diagonale  traverse  de  biais,  (n.  e.)-(2)  Il  y  a  là  une  sorte  d'allitération 
conservée  par  la  tradition;  dans  les  universités  allemandes,  on  répète  encore  en  choeur:  «  Vivamus  et  bibainus ,  Dum 
juvenes  sumus  ;  Ubi  sunt  qui  ante  nos  In  mundo  fuère?  »  (N.  E.)  —  (3)  C'est  une  variante  de  bimbelols,  oii  l'on  voit  le  même 
radical  que  dans  bambin,  (n.  e.)  —  (4)  Guyot  de  Provins,  trouvère  du  xiii'  siècle,  avait  toutes  les  qualités  requises  pour 
être  un  satirique;  c'est  dire  qu'il  avait  tous  les  défauts.  Voici  le  prologue  de  la  Bible  Gwjot :  «  Dou  siècle  puant  et  orible 
M'estnet  commencier  une  bible,  Por  poindre  et  por  aiguillone'-,  Et  por  grant  essample  doner.  »  (n.  e.)  —  (5)  Ce  trouvère  du 
xii'  siècle  fit  partie  de  la  croisade  de  1204  ;  son  poëme  est  intitulé  :  la  Bible  au  seigneur  de  Brèze.  (n.  e.) 


BI 


479  — 


BI 


Peut-êlre  veut-il  dire  une  suite  de  témoignages, 
ausLi  vrais  que  l'Evangile. 

11  y  avoit  aussi  une  machine  de  guerre  qu'on 
nommoil  bible.  Elle  servoit  à  lancer  des  pierres. 
On  voit,  dans  le  Gloss.  lai.  de  Du  Gange,  liiblia  et 
Bibliela,  employés  dans  celte  signification.  Barlete, 
dans  ses  Sermons,  1"  part.  fol.  122,  fait  usage  du 
mot  biblia,  pour  un  cornet  à  dés.  De  là,  on  peut 
juger  que  la  machine  de  guerre  appellée  B/^/e,étoit 
une  espèce  de  tube,  et  que  le  cornet  à  des  en  étoil 
une  imitation.  Ainsi  nous  pourrons  expliquer  le 
mot  Bible,  dans  Joinville,  par  cornet  ou  mf,chine 
servant  à  jeter  des  boules  ou  petites  balles.  «Je  vous 
<'  conterai  des  jeus  que  li  cuens  d'Eu  nous  fesoit. 
«  J'avoye  fait  (dit-il),  une  maison  là  ou  moy  et  mes 
«  chevaliers  mangions  à  la  clarté  de  l'huys  :  estoit 
«  l'huys  devers  le" conte  d'Eu ,  et  il  qui  estoit  moult 
«■  subtil,  llst  une  petite  bible  qui  gectoit  œufs,  et 
'■  faisoit  espier  quant  nous  estions  au  manger  assis, 
«  et  adressoit  sa  bible  (1)  du  long  de  nostre  table,  et 
»  la  faisoit  gecter,  et  nous  brisoit  nos  potz,  et  nos 
«  voirres.  «"{.Joinville,  hs.  du  Roy.)  Le  mot  wufs  est 
peut-être  employé  dans  ce  passage  pour  estœufs. 
Peut-être  aussi  que  l'auteur  se  servoit  du  mot  œuf 
pour  faire  allusion  au  comte  d'Eu,  quiéloit  l'auteur 
de  la  plaisanterie. 

Bibliens,  adj.  Oui  concerne  la  Bible.  Discours 
bibliens,  pour  discours  sur  la  Bible,  illisl.  du  Th. 
Fr.  T.  II,  p.  383.) 

Bibliothèque,  subst.  fém.  Ce  mot,  qui  subsiste, 
s'iniroduisit  sous  le  règne  de  Charles  IX.  à  la  place 
de  librairie  dout  on  usoit  auparavant.  (Ménage, 
Bem.  sur  la  Langue,  p.  295.)  Il  se  trouve  employé 
dans  l'Amant  ressuscité,  p.  7. 

Bil)listique.  reut-être  éciivain  sur  la  Bible  ou 
interprèle  de  l'Ecriture  sainte  : 

Pierres  et  Pois  n'ont  plus  auclicion, 
Ne  Jerosme  li  bon  hiblistiqiie. 

Pofs.  MSS.  d'Eust.  Dcsch.  fol.  251,  col.  1. 

Bibotun,  sîibst.  vtasc.  Commandements.  (Dict. 
de  Borel,  2"  add.)  Je  ne  sais  oîi  il  a  pris  ce  mot,  ni 
l'acception  qu'il  lui  assigne. 

Bilïule,  adj.  Altéré.  «  Aucuns  insassiables,  mar- 
«  l'vdiix  et  bibulcs  de  sang  humain,  ce  qui  ne  leur 
«  appartenoit,  s'esmeurenl  et  suscitèrent  les  esprits 
11  de  la  reste  de  leurs  gens  d'armes.  »  (P.  Defrey,  à 
la  suite  de  Monslrelel,'fol.  113.) 

Bic.  On  trouve  ce  mot  dansCociuillart,  qui  l'em- 
ploie adverbialement  :  de  bic  ou  de  bec,  pour  d'un 
côté  ou  d'un  autre. 

Aincoys  qui  erent  à  délayer, 
A  fouir  de  bic,  ou  de  bec. 

CociuiUarl,  p.  37. 

Bicanne,  subst.  fém.  Sorte  de  raisin.  On  le 
trouve  en  ce  sens  dans  les  Dict.  de  Nicot  et  de  Colgr. 


BIC.\NNE,  BiCARNE. 

Biche,  subst.  fém.  Sorte  d'insecte.  —  Serpent. 

Nous  ne  déterminerons  point  quelle  sorte  d'in- 
secle  désigne  le  mot  biche.  Il  y  a  apparence  que 
c'est  une  sorte  de  ver  qui  perce  les  vaisseaux.  (Voy. 
Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  liiceialis  vcrDti'i  (2).) 

On  s'est  servi  du  mol  biche  dans  un  seasliguré  : 

En  sa  court  avoit  mouche  et  biche, 
.    Qui  durement  l'ont  esraouchié  : 
Si  lor  a  le  roy  tout  couchié, 
Si  en  demeura  sanz  argent. 
Hisl.  de  Fr.  en  vers,  à  !a  suite  du  R.  de  Fauvil,  MS.  du  R.  fol.  6'J. 

Ce  mot  signifioit  aussi  un  serpent.  (Voy.  le  Dict. 
de  Borel,  2"  add.  au  mot  Bisse.) 

En  terme  de  blason,  c'est  la  givre  des  Visconti 
«  portant  d'argent  à  un  serpent  d'azur  :  cestuy  ser- 
«  peut  se  nomme,  à  blasonner,  une  biche,  et  doit 
11  avoir  sept  tournans  dont  l'un  est  noué  près  la 
Il  teste,  saillant  de  la  gorge  un  enfant  marrissant 
11  de  gueules.  »  (Mém.'d'Ol.  de  la  Marche,  p.  13.) 

Bichechotterie,  subst.  fém.  Caresse.  «  Son 
i<  amy  luy  fera  tous  les  plaisirs  qu'il  pourra,  et  luy 
11  fera  mille  petites  bichecliotleries  où  elle  prendra 
11  grand  plaisir  que  nul  mary  ne  scauroit  faire.  » 
(Les  15  Joyes  du  Mariage,  p.  67.) 

VAI.IANTES  : 
rilCHECHOTTERIE.  Les  Quinze  Joyes  du  mariage,  p.  67. 
liiciiECOTTERiE.  Cotgrave,  Dict. 

Bichecorne  (porter  à  la).  On  se  sert  de  ce 
terme  dans  quelques  provinces  pour  dire  :  porter 
sur  ses  épaules.  On  voit  dans  Rabelais,  T.  III, 
[).  126,  porter  à  la  cabre  morte,  dans  le  même  sens. 

Bichenage,  subst.  inasc.  Droit  sur  les  grains. 
C'est  celui  qui  se  levoil  au  marché  sur  les  grains  ou 
autres  marchandises  qui  se  mesuroienl  au  boisseau. 
(Laurière,  Glossaire  du  Droit françois,  et  Du  Gange, 
Gloss.  lat.  au  mot  Bichetum.) 

Bichet,  subst.  masc.  Sorte  de  mesure.  Elle  sert 
à  mesurer  le  blé  et  autres  grains.  (Dicl.  d'Oudin  et 
de  Cotgrave,  au  mot  lliclier,  et  Gloss.  latin  de  Du 
Gange,  au  mot  Biclielus.)  Il  s'est  dit  aussi  pour 
mesurer  du  vin  et  autres  liqueurs.  On  dit  encore  en 
ce  sens  piché  en  Touraine.  On  a  employé  le  mot 
biehel  (3)  au  figuré  pour  quantité. 

En  te  rendant  de  salus  un  bichet. 

Œuv.  de  Roger  de  CoUcryc,  p.  iO. 

VARIANTES  : 
BICHER.  La  Thaiim.  Coût,  de  Berry,  p.  429. 
Bichet.  Roger  de  Collerye,  p.  40. 
BiCHEZ.  Du  Gange,  Gloss.  lat.  au  mot  Modius. 
BiCHiER.  Gloss.  de  Du  Gange,  au  mot  Picarium. 
BiCHOT.  Coût.  Gén.  T.  I,  p.  850. 
Bicnoz.  Gloss.  lat.  de  Du  Gange,  au  mot  Gillo. 
BiscHF^ .  Cotgrave,  Dict. 

PiCH''     PiCHER,  PlCHEZ,  PiGlIIÉ,  PlCHIER,  PiCHIEZ. 


(-1)  Ce  n'est  pas  une  faute  du  manuscrit,  car  on  lit  au  Roman  de  Claris  :  «  Li  rois  fet  ses  engins  dreciers,  Et  vers  les  haus 
murs  charroier.  Bibles  et  mangoniau.K  gâter.  »  (n.  e.)  —  (2)  Biscialis  vennis  doit  être  rapproché  de  binse,  variante  de  biclie, 
quand  ce  mot  signifie  serpent,  et  particulièrement  la  couleuvre  de  Milan,  en  lombard  bissa,  en  piémontais  biesso.  Voir  plus 
haut  Bezcr,  qui  a  la  même  étymologie.  (n.  e.)  —  (3)  La  racine  est  peut-être  le  grec  ^ixos.  (n.  e.) 


BI 


480  — 


BI 


Bichettcs,  suhst.  (ém.  plur.  Sorte  de  jeu. 

Item  et  si  ne  jouerez 

A  la  queue  le  leu,  aux  billettes, 

Au  tiers,  au  perier.  aux  hicheltes. 

L'Amant  rendu  Cordelier,  p.  591. 

Bichon,  suhst.  masc.  Diminutif  de  barbichon, 
sorte  de  barbet.  (Gram.  de  Tabbé  Régnier,  p.  175.) 

Bicle,  adj.  Rii;le,  louche.  (Voy.  les  Dict.  de 
Cotgrave  et  de  Ménage.) 

VARIAMES  : 
BICLE.  Essais  de  Montaigne,  T.  II,  p.  (>i8. 
BiscLE.  Crétin^  p,  88. 

Bicler,  verbe.  Bigler,  loucher.  (Voy.  les  Œuvr. 
deDaïf,  fol.  174.) 

Bicocque,  sulist.  fém.  Xom  d'une  maison.  Ce 
mot  subsiste  encore  aujourd'hui  pour  signifier  une 
petite  ville,  une  place  peu  fortillée  ;  il  s'est  formé  du 
nom  de  la  maison  d'un  gentilhomme  où  les  impé- 
riaux s'élant  postés,  en  lô^'i,  soutinrent  l'assaut  de 
l'armée  fran^oise  conduite  par  le  maréchal  de 
Laulrcc,  du  temps  de  François  1"'.  «  Allèrent  loger 
«  à  la  bicocque  (1)  sur  le  chemin  de  Laude  (Lodi),  à 
«  Milan,  et  estoit  la  dite  bicocque,  la  maison  d'un 
«  eentilhomme,  circuite  de  <;rands  fossez.  »  (Mém. 
de'Du  Bellay,  livre  II,  fol.  39.) 

Bicoquet,  subst.  masc.  Sorte  de  coifïure  à 
l'usage  des  hommes  et  des  femmes.  (Dictionnaire 
de  Corneille,  au  mot  Bicoquet.) 

Le  bicoquet,  la  capeline. 

Coquillart,  p.  -4^. 

•  Estoit  habillié  d'une  brigandine  couverte  de 
«  velou.x  noir,  à  doux  dorez  et  en  sa  teste  ung 
«  bicoquet  garnix  de  bouillons  d'argent  dorez.  « 
(Chron.  scandai,  de  Louis  XI,  p.  55.)  «  Le  comte  de 
»  S'  Pot  avoit  quatre  pages  très  richement  habillez, 
.  chacun  salade  ou  bicquoquet  (2)  très  richement 
«  garnis.  »  (ms.  du  Procès  verbal  de  l'entrée  de 
Louis  XI  à  Reims,  parmi  les  recueils  de  l'abbé  Le 
Grand,  sur  Louis  XI.) 

VARIANTES  : 
BICOQUET.  CoquiUart,  p.  42. 


Bicquoqut;t.  Procès  verb.  de  l'entrée  de  Louis  XI  à  Reims. 

BiQUOQUET.  Cotgrave,  Dict. 

Bicorne,  subst.  fém.  Fourche  ou  enclume.  — 
Terme  d'injure. 

Sur  les  deux  premiers  sens,  voyez  le  Dict.  de 
Nicot.  On  a  nommé  bigorne  une  enclume,  à  cause 
de  l'espèce  de  corne  qu'elle  forme  d'un  côté. 
«  Quiconques  fait  bigornes  à  Bourges,  mez  qu'elles 
a  soient  neuves,  il  doit  deux  bicornes,  la  moitié  à 
«  M''  le  duc,  et  l'autre  moitié  à  S"  Sulpice  et  au 
«  voyer.  »  (La  Thaum.  Coût.  deBerry,  p.  334.) 

Le  château  semble  tonner 
Tandis  qu'on  tourne,  et  retourne. 
Le  harnois  sur  la  bigourne 
Pour  le  buste  façonner. 

Poos.  d'Amadis  Jamin,  fol,  58. 

On  s'est  servi  du  mot  bigorne  (3)  comme  d'un 
terme  d'injure.  Vieille  bigorne  se  trouve  en  ce  sens 
dans  les  Contes  de  Cholières,  fol.  163. 

VARIANTES  : 
BICORNE.  La  Thaumassière,  Coût,  de  Berry,  p.  334. 
Bigorne.  Nicol,  Dict. 
iîiGOURNE.  Poës.  d'Amadis  Jamin,  fol.  58. 

Bicorneurs,  subst.  masc.  plur.  Nom  ancien 
donné  îi  la  milice  de  Valenciennes.  (Pelisson,  Lettr. 
Hist.  T.  111,  p.  173.) 

Bicornu,  adj.  Biscornu.  Qui  a  deux  cornes  ou 
deux  fourches.  (Dict.  deColgraveet  d'Oudin,  aumot 
liicornu.)  Bigornue  est  épithète  d'enclume  dans  les 
Epithètes  de  Martin  de  la  Porte. 

VARIANTES  : 
BICORNU.  Oudin  et  Cotgrave,  Dict. 
BiGORNU.  Epith.  de  la  Porte. 

Bicque,  subst.  fém.  Chèvre.  "  Chèvres  ou 
«  bicques  n'y  peuvent  estre  menées  ,  à  peine 
«  d'amende  arbitraire.  »  (Coût.  Gén.  T.  I,  p.  423.) 
On  lit  Bique  dansleDict.  Etym.  de  Ménage.  Biquette, 
diminutif  de  BJ(?we,  se  trouve  dans  les  Poésies  de 
R.  Belléau,  T.  I,  fol.  108,  V". 

VARIANTES    : 
BICQUE.  Pilhou,  Coût,  de  Troyes,  p.  357. 
Bique.  Ménage,  Dict.  Etym. 
Biquette.  Rémi  BelIeau,  T.  I,  fol.  108,  V°. 


(1)  En  italien,  c'est  un  petit  château  sur  une  hauteur;  en  espagnol,  bicoca  signifie  guérite,  (n.  e.)  —  (2)  Le  bicoquet,  fort  à 
la  mode  pendant  la  minorité  de  Charles  VIII,  est  un  chapeau  ou  plutôt  une  vaste  casquette  aux  bords  relevés  contre  la 
forme;  sur  le  devant  est  couché  nu  pluniCt  ;  le  tout  s'enfonce  sur  une  calotte.  (Voir  une  miniature  du  ms.  fr.  2692, 
reproduite  par  M.  Quicherat  à  la  p.  342.)  (n.  e.)  —  (3)  Dans  les  viU^.ges  bas-bretons,  les  enfants  poursuivent  leurs  camarades 
qui  n'ont  pas  su  leur  catéchisme  ou  qui  ont  «  manqué  l'école  »  du  cri  de  biijoriiic.  M.  Max-Radiguet  (A  travers  la  Bretagne, 
M.  Lévy,  in-12,  1863,  p.  262-3)  associe  le  coquillage  nommé  dans  l'Ouest  bigorne,  au  cancre,  ce  crustacé  que  doivent 
connaître  tous  les  paresseux.  Mais  autrefois  la  minîique  a  dû  accompagner  les  huées  ;  on  faisait  les  cornes  aux  déhnquants  ; 
peut-être  les  leur  avait-on  mises,  comme  bonnet  d'âne.  Les  soldats  d'infanterie  de  marine  se  nomment  aussi  bigorneaux, 
du  chapeau  à  deux  cornes  qu'ils  portaient  sous  le  premier  Empire,  (n.  e.) 


Niort.  —  Typographie  de  L.  Favre. 


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