DICTIONNAIRE HISTORIQUE
DE
L'ANCIEN LANGAGE FRANÇOIS
NIORT. — TYPOGRAPHIE DE L. FAVRE.
DICTIONNAIRE HISTORIûnE
L'ANCIEN LANGAGE FRANÇOIS
GLOSSAIRE DE LA LANGUE FRANÇOISE
DEPUIS SON ORIGINE JUSQU'AU SIÈCLE DE LOUIS XIV
Par LA ÇURNE DE SAINTE-PALAYE
MEMBRE DE L'ACADÉMa DES INSCRIPTIOKS ET DE L' ACADÉMIE FRANÇOISE
Publié par les soins de L. FAVRE, membre de la Société de l'Histoire de France,
avec le concours de M. PAJOT, Archiviste-paléographe,
CONTENANT :
SIGNIFICATION PRIMITIVE ET SECONDAIRE DES VIEUX MOTS
Vieux mots employés dans les chants des Trouvères,
Acceptions métaphoriques ou figurées des vieux mots français. — Mots dont la signification est inconnue.
ETYMOLOGIE DES VIEUX MOTS
Orthographe des vieux mots. — Constructions h-régulières de tours de phrases de l'ancienne langue.
Abréviations ; études sur les équivoques qu'elles présentent dans les anciens auteurs.
Ponctuation ; difficultés qu'elle présente.
Proverbes qui se trouvent dans nos poêles des XII^, XlIIe et XIV*- siècles.
Noms propres et noms de lieux corrompus et défigurés par les anciens auteurs.
Mots empruntés aux langues étrangères
Usages anciens.
SUIVI DES
CDRIOSITEZ FRAiÇOlSES. pour supplément aux Dictionnaires
Ou Recueil de plusieurs belles propriété^, avec une infinité de proverbes et quolibets pour l'application de toutes
sortes de livres, par Antouin OUDIN.
TOME SECOND
NIORT
L. FAVRE, éditeur du GLOSSARIUM de Du Cange,
Rue Saint-Jean, 6.
Te
Si
DICTIONNAIRE HISTORIQUE
L'ANCIEN LANGAGE FRANÇOIS
AP
Ap, préposition. Avec. On observe que les lettres
p e\ b étant de même organe, on a pu prononcer et
écrire indifféremment «p ou ab; préposition qui,
dans le langage méridional de la France, paroil être
une abréviation de l'adjectif ambe, pris dans le sens
conjonclif de cette même préposition ap ou ab, avec.
(Voy. Ambe ci-dessus.)
Aut Apostols cumtet (1)
E dis c'ap Deu parlet.
Fragmcnl du MS. de S' Martial de Limoges, fol. 50, Rv
Molt lo laudaven (2) e amie e paront
C'ab (3) Damnedeu se ténia (4) forment.
Vie ae Boêce, frag:m. MS. de S' Benoil-sur-Loire. p. 273.
E (5) sa ma dextra la Domna u libre ten (G),
Tôt aquel libres ara de fog (7) ardent.
Zo's (8) la jiisticia al Rei omnipotent ;
Si l'om o forfai, e pois no s'en repent...
Ab aquel fog s'en pren so vengament.
Cel bonai vai (9) qui amor ab lei pren.
Ibid. p. 275.
Que le p ou le b, ait été changé en v, autre lettre
de même organe, il n'en faut point d'autre preuve
que la préposition composée avoec. (Voy. Avoec.)
C'est proprement à l'oubli et à l'ignorance de la
prononciation du v toujours écrit u, et au retran-
chement de ce même u prononcé v, que l'on doit
attribuer l'origine d'au et À, préposition qui dans la
signification d'avec, paroit avoir la même étymolo-
gie qu ap ou ab. (Toy. Au ci-après.)
TARIAiNTES :
AP. Fragment du MS. de S' Mailial de Limoges, fol. 50, R».
Ab. Vie de Boèce, Frag. MS. p. 270, passim.
Apaer, verbe. Pacifier, accommoder, etc.
Apaiser. Payer, satisfaire, contenter, soulager, etc.
Il est évident que le principe de la formation des
verbes apaier, apaiser, est le substantif latin pax ;
mais en remontant à l'origine la plus vraisemblable
de ce même substantif ;ja.i', pacis, dérivé de l'ancien
verbe pacere ou pagere, le même que pangere, au
supin pactum, on croit apercevoir une analogie
marquée entre les verbes françois apactir, apaier,
apaiser. (Voy. Appactir.) L'ordre de la société géné-
rale, ou particulière, est établi sur des pactes, sur
des obligations fixes et réciproques : ainsi, pacifier
une ville, Vapaieren ancien langage, c'est en fixer
l'état par le rétablissement de ce même ordre.
AP
. . . Artus remest en Bourgoigne :
Tout river iUec séjourna ;
Les citez prist et apaia.
Rom. de Brut, MS. fol. 99, R' col. 2.
Lorsqu'il s'agissoit de particuliers désunis par
l'intérêt, ou par quelqu'autre passion, les apaier
c'étoit faire la paix entre eux, les lier, les obliger
par un jugement, un accommodement, etc. en
général, par un pacte qui fixoit leurs prétentions ou
îeurs droits respectifs. « Comme conlens fut entre
« Jeanne comtesse de Flandres... etJean deNéelle...
« li Rois fit la Comtesse semondre par-devant lui,
« par deux Chevaliers. La Comtesse comparant
« à jour, proposa quellen'avoitpasété suffisament
« semonse par deux Chevaliers; quar elle devoit
« estre semonse par ses Pers, les parties eux (10)
« appayant en jugement. » (Daniel, Mil. Fr. T. \,
p. 181 ; tit. de 1324.) Il seroit inutile de multiplier
les preuves de cette acception du verbe apaier,
pacifier un différent, l'accommoder, le juger, etc.
On ajoutera seulement qu'il étoit quelquefois réci-
proque dans le sens d'accommoder.
Si s'est au vilain apaié.
Bestiaire. MS. du R. n" 7989, fol. 164 ; fable xvn.
Il existe entre le Ciel et la Terre un pacte d'al-
liance qui se renouvelle autant de fois que l'homme
fait sa paix avec Dieu, en satisfaisant à sa justice par
l'humble et douloureux repentir de son audace ou
de sa foiblesse. On disoit en ce sens, apaier Dieu,
apaer le Seigneur. >■ Pur co que li Reis Roboam eli
» suen se humilièrent devant nostre Seignur,
« alches (il) le apaèrent de sun maltalent; si que il
» ne's volt del tut destruire. « (Livres des Rois, ms.
desCordel. fol. 104, V° col. 1.)
Qui ci corrouce Deu, ci Testuet apayer.
Fabl. MS. du R. n» 7615, T. Il, fol. 144. R* col. 2.
Et preslz de Dieu prier soyez ;
Ainsi ramez et appayez, etc.
J. de Meun, Test, vers 1657 et 1658.
En satisfaisant à une obligation contractée par un
pacte civil, on procure la paix, la tranquillité de la
personne que ce pacte intéresse. On l'apaise, pour
ainsi dire, et elle se tient apaiée. De là l'acception
des verbes apayer, payer.
(1) Conta, raconta. - (2) Louoient. — (3) De ce qu'avec, etc. — (4) Se tenolt. - (5) En sa main, etc. — (6) Tient. —
(7) Feu. - (8) C'est. - (9) Il en va bien à celui. - (10) Eux; c'est-à-dire les Pairs. - (11) Quelque peu, un peu.
II. 1
AP
- 2 -
AP
En tes ditez, qui bien entendent,
Pevenl veer qu'à trois fins tendent...
La premier e.st de bien paier
Pour faire ses gens upaier.
Geufioi de Taris, U la suite du R. de Fauvcl, MS. du R. fol. 4G.
El de leurs gaiges si paiez
Qu'ilz en soient si appuie-:, etc.
Gace de la Digne, des Déduits, WS. fol. 153, V*.
On disoit, se tenir apaië ou apaisé, dans le même
sens. « Nous avons eu el receu trois mille lloriiis
« d'or... desiiuels nous nous tenons bien upaije:i et
« les en (|uilons du tout. ■> (Oïd. T. 111, p. 3;{2
et 333.) « Cuiivenances tenir dusqu'à mil livrées de
« terre dont elc se tendra apaiée avec la conté de
« S. l'ol. " (Ducliesiie, Hist. de la M. de Cliàlillon,
pr. p. /i,"); til. de l'23tj. — Yoy. Apaiser ci-dessous.)
L'idée particulière de celle espèce de satisfaction
étant généralisée, le vei'be apaer ou apaier,
abstraction laite de toute idée de pacte, signifioit
l'état paisible dont on nous fait jouir en satisfaisant
un besoin physique ou moral, réel ou idéal ; en sou-
lageant les douleurs du corps; en contentant les
passions de l'âme, du cœur ou de l'esprit.
. . . Par les mires sont li navré upaié.
\'ab\. MS. du R. n- 7615, ï. 1, fol. 63, V' col 2.
. . . Por Dieu, çaienz vos traiez
Et mon desirrer m'o/inic:.
Aleïaudre et Arislote, MS. de S. Gcrm. fol. 73, V col. I.
Jà por regarder son vis
Apaicz ne me tenroie,
S'auire cose n'en avoie.
Chans. du Comte Thibaut, MS. p. 154.
Ne se tient de riens appuyé
Le desloyal, le renoyé :
N'est riens quiluy puisse souffire.
Rom. de la Rose, vers 20084-2008C.
... Je me tieg apaiés del atendre,
Puiske chascuns vos aime ensi sans prendre.
Ane. Poêt. fr.MSS. av. 13UU, T. UI, p. 997.
Les foulz sont apaié
De ce de coi li sages est honnis, etc.
Ane. Poës. 1>>. MS. du Valic. n- 1J2"2, fol. 162, R° col. 1.
On trouveroit inutile un plus long détail des
acceptions particulières du verbe upaier, soulager,
tranquilliser, etc. puisque toutes se réunissent d'ans
l'acception générale à'upaler, satisfaire. (Yoy.
Apaiemekt et Apaier ci-dessous.)
VARIANTES :
APAER. L. des Rois, MS.desCordel. fol. 104. - D. Morice,
preuv. de IHist. de Bretagne, T. I, col. 959; tit. de 1254.
Apaier. L. des Rois, MS. des Cordel. fol. 25. - Geofroi de
Paris, à la s. du Rom. de Fauvel. — Athis, MS. fol. 114,
V" col. 1, etc. - Borel, Dict.
Ap.mier. D. Carpent. S. G. 1. de Du Gange, au mot Apacare.
Apayeu. J. de Meun, Cod. -.'ers 572. - Fabl. MS. du R.
n» 7218, loi. 2(i6, R» col. 2.
Apoier. D. Carpent. S. G. 1. de Du Gange, au mot Apacare.
Appayer. J. de Meun, Test, vers 1545. - Id. ibid. vers 1658.
Apai, subst. masc. Amorce. L'origine de l'ancien
mol apai semble être la même que celle d'apast.
(Voy. Apasï.) On a dit figurément :
Oel riant et gai
Garni d'amourous apai.
Ane. Poei. fr. MSS. avant 1300, T. III, p. 1205.
Apaicmont, subst. luasc. Action d'apaiser,
expiation, satisfaction. Dans une signification rela-
tive à celle du verbe npaer, apaièi', on nommoit
apnirmcus : \° les expiations par lesquelles on
(ijxiisdit la Divinité. « Les offrandes et les sacrifises
« et les upuieinen% qui se faisoient à Deu au
« temple. » (Livres des iUachabées, ms. des Cordel.
fol. 15G, R-col.S.)
2" Les complaisances dont une maîtresse paye et
satisfait son amant.
Fausse piliez est as nices chetis
Apaieinots, e li sage enragié
En sont : partant vault fausse piliez pis, etc.
Ane. Poës. fr. MS. du Vatic. n- 1522, fol. 1G2, R- col. 1.
Apaier, verbe. Amorcer. Attirer en présentant
un appât : délinilion conforme h notre première
conjecture sur l'origine du substantif apai. (Voy.
Apai ci-dessus.)
Chesl goupil qui tant set barat...
A cliascun qui vit charneument,
Se fait tout mort chertainement
Pour chou que plus près les apaie.
D. Carpentier, S. Gl. lat. de Du Gange, au mot .\pacare.
Quoiqu'on ait soupçonné avec quelque vraisem-
blance, une analogie entre apast et apai, il seroit
possible qu'ff/;fli et apaiement fussent de même
origine, et que dans un sens relatif à celui
iV apaiement, satisfaction, l'on eût désigné par œil
iraiiiorous apai, un œil dont l'expression vive et
leiidrc satisfait un désir amoureux. Alors le verbe
apaier, dans les vers qu'on a cités, seroit le même
qu'apaer, apaier, satisfaire. 11 ne signifieroit
amorcer qu'autant qu'on satisfait l'homme charnel,
en lui présentant l'amorce des plaisirs. (Voy. Apaer.)
Apaisement (l),s;/&si. masc. Pacification; rem-
boursement, dédommagement, elc. satisfaction. On
a dit et l'on dit encore apaiser dans le sens de paci-
fier. De là, le substantif apaisement a signifié paci-
fication. •< L'Empereur, le Roy d'Angleterre et le
« Duc de Bourgogne convinrent ensemble à Calais,
« pour traicler de Yappaisement de France et
« d'Angleterre. » (Hist. chron. 1400. — l-'i67; an.
141G.) '< Accord et appaisement des divisions qui,
« elc. •' (Preuves sur le meurtre du D. de Bourgo-
gne, page 295.)
11 semble qu'en particularisant cette acception,
l'on a nommé apaisement, acte d'apaisement, l'acte
par lequel on pacifioit, on apaisoit une contestation
née ou à naître sur la nécessité des réparations et
améliorations à faire par l'acquéreur d'un héritage
dont il doit prévoir le retrait; sur l'obligation d'un
dédommagement, d'une indemnité, etc. « L'achep-
« leur devra, pendant l'an accordé par la Coustume
« pour user du retrait lignager, conserver et main-
« tenir le bien vendu en aussi bon estât comme il
« estoit au jour de la vente... et s'il y a fait aucunes
« mises ou impenses nécessaires... elles luy seront
« resliluées par ledit lignager, sans que néantmoius
« luy soit permis de faire' démolition, ny édifices
(1) Ce mot, qu'on emploie encore fréquemment et qui date au moins du xv« siècle, ne se trouve pas au Dictionnaire de
l'Académie, (.n. e.)
AP
3 -
AP
« nouveaux que par ordonnance de Justice, et
« après appaiscment pris de la nécessite ou utilité
« évidente. » (Coût, de Cliimay, nouv. Coût. gén.
T. II, p. "II').) « Les censiers avant pouvoir préten-
« dre quittance à leurs maistres pour cause des
• pertes qu'ils auroient supportées en leurs adves-
« tures... seront tenus de monstrer leurs pertes et
« dommages à leurs maistres... et en cas de refus
. ou déUiy, les faire visiter par gens de Loy et
« laboureurs à cecognoissans... pour par ce moyen
« en appointer amiàblement. Et s'ils ne s'accor-
« dent, s'adresseront à notre Cour... par requeste,
« à laquelle joindans les actes des (ippaiscmens et
« refus cy-dessus, ils contendront ;\ telle modéra-
« tion que de raison. » iCout. de Haiuaut, ibid.
page 13i, col. 2.)
C'est dans le sens d'apaiser, payer, rembourser,
dédommager, etc. qu'on lit : « diront vérités de
« toutes les restitucionset apaisemenx- qu'il auront
« fait, ou fait faire de fait, ou de promesse. » (Ord.
T. I, page 544.)
La signification A' apaisement en cet autre pas-
sage, semble relative à celle d'apaiser une demande,
satisfaire à une question, y répondre. « Pourremé-
« dier et pourveoir aux abus et larcins que l'on
« commet journalièrement par tous nos bois et
« ceux de nos vassaux, nous avons consenty... que
« l'on puisse faire Visitation... en toutes maisons de
« ceux qui seront suspectez desdits larcins ; et si
« on y trouvoit bois verd ou autre, et que les resi-
>. dcns esdites maisons ne voulussent donner appai-
" sèment d'où ledit bois trouvé procéderoit, etc. »
(Coût, de Ilainaut, nouv. Coût. gén. T. II, p. 148.)
En termes de procédure, l'apaisement sur lequel
un défendeur étoit admis à requérir le profit d'un
défaut contre le demandeur qui ne comparoissoit
pas au jour assigné, étoit probablement l'acte qui
conslaloit que le défendeur ayant satisfait îi l'ajour-
nement , devoit être tranquillisé par absolution
d'instance. « Si... le demandeur est défaillant de
« comparoir au jour assigné, le dePfendeur devra...
« prolester d'iceluy défaut, et en la journée ensui-
« vante, en requérir le profit, à qiioy il sera admis
« sur appaisement prins tant du registre que des
« exploits du Sergeant; et emportera la contumace
« du demandeur congé de Court et absolution d'ins-
« tance. » (Coût, de Hainaut, nouv. Coût. gén. T. II,
p. 113.) Peut-être aussi que « prendre appaisement
<i tant du registre que des exploits du Sergeant. »
c'étoit les vérifier, satisfaire à une formalité en les
vérifiant. Quelque variées que puissent être les
acceptions particulières du substantif fl/w/srmmf,
il suffit ici de marquer celles dont l'analogie paroit
moins sensible avec les acceptions du verbe dont il
est formé.
On pouvoit « faire appaisement de l'amende du
« poing coupé, » en satisfaisant à la Loi qui pro-
nonçoit cette peine contre celui qui frappoit un
Serg'ent; ou plutôt en modérant cette peine, en la
commuant en une peine pécuniaire dont on se con-
tentoit par humanité. « Si sur calenge faite par
« Sergent, le calengé ou autres assistans... touche
« par' main mise ledit Sergent, celuy ou ceux
« encherront en l'amende du poing couppé, dont
« le Seigneur ou maistre du Sergent pourra faire
« Vappaisement ; et si la poursuyie s'en fait par
« noz Officiers, elle se fera en nosfre Court à Mons,
« veu que c'est cas de hauteur. » (Coût, de Hainaut,
Coût. gén. T. I, p. 793. — Voy. Apaiser.)
TARUNTES :
AP.USEMEXT. Ord. T. I, p. 54i.
Ap.wsemext. Gloss. fr. lat. MS. du R. n" 7684. - D. Car-
pentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au mot Expiare.
Appaisem.\xt. Monet. Dict.
Appaisement. Percef. Vol. V, fol. 106, R" col. 1. —
Cotgrave, Oudin, Rob. Estienne et Nicot, Dict.
Apaisenter, verbe. Etre apaisé. Apaiser, paci-
fier. La signification de ce verbe est neutre dans le
passage suivant : « Deus... à poines encomenzat à
« apaisenteir al tens Abraham son amin. » (S' Bern.
Serm. fr. jis. p, 16G.) 11 semble que plus ordinaire-
ment elle étoit active. Dans le sens d'apaiser, paci-
fier, on a dit : « Despoz que Criz... fut devenuz
" moyeneres de Deu et des homes, et qu'il apaisen-
« tat parmei son sanc celés choses ki estoient en
« Ciel et celés qui estoient sor terre, etc. » (S" Bern.
Serm. fr. ms. p. 259.)
C'est encore dans le sens d'apaiser, qn' apaisanter
signitîoit disposer Dieu ou l'homme à pardonner,
en satisfaisant à la Justice divine et humaine.
« Pues que nostre Sires ne welt mies ma mort... ju
>■ volentiers... li offre ma vie. Cist est li sacrifices
« ki apaisantet nostre Signor. » (S' Bern. Serm. fr.
MS. p. 269.) « Petiz enfès est ki legierement puet
« eslre apaisantei:> ; car . . . li enfès paVdonet legiére-
« ment. » (Id. ibid. p. 19G. — Voy. Apaiser et Apaisir.)
VARIANTES :
APAISENTER. S> Bern. Serm. fr. MSS. p. 259.
Apaisanter. Id. ibid. p. 269. - G. .Machaut, MS. fol. 208.
Apaisexteir. S' Bern. Serm. fr. MS. p. 166.
Apaisenteur , suhst. masc. Pacificateur. La
signification à'apaisenteur est la même que celle
à'apaiseur. (Voy. D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat.
de Du Cange, au mot Paciarii.) « Arbitres et amia-
« blés app'aisen tiers, etc. « (Lett. de grâce, an 1427,
citées par D. Carpentier, (//)/ supra. — Voy.APAiSEUR
et Apaisiteur ci-dessous.)
VARIANTES :
APAISENTEUR. D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du
Cange, tome IV, col. 36.
Appaisenteur, Appaisentier. Id. ibid. T. III, col. 117.
Apaiser, verbe. Procurer la paix, tranquilliser ;
satisfaire, payer, rembourser, dédommager, indem-
niser, soulager, etc. Le verbe apaiser, de même
origine que îe verbe apaier, avoil les mêmes signi-
fications. C'est à l'idée générale de pacte que
paroissoient être liées les idées signifiées par ce
verbe, lorsqu'on dit apaiser les troubles, les divi-
sions d'une société générale ou particulière, apaiser
la colère de Dieu , ou des hommes, etc. Ces accep-
tions et autres ne sont pas moins anciennes dans
notre langue que celles du verbe apaier.
On a déjà observé que satisfaire à une obligatioa
AP
— 4 —
AP
contractée par un pacte , c'est procurer la paix , la
tranquillité de la personne envers laquelle on est
obligé. Elle s'appaise, elle se tient appaisée, lors-
qu'on satisfait à celte même obligation. (Voy. Ai-aer.)
De là, se tenir appaisé, ou s'âppaiser, signifioit,
1" être satisfait, se contenter du payement d'une
rente : » Convenances tenir dusqu'ù mil livres de
« rente dont elle se tenra appaisé avec le fief de
« Saiut-Pol. » (Ducliesne, Ilisl. généal. de la M. de
Chàlillon, pr. p. 4G; til. de l'23G.)
2° Se contenter, être satisfait d'un dédommage-
ment, du remboursement d'une créance; se dédom-
mager, s'indemniser, se rembourser. « Lesdeffenses
« données par les Maîtres des foires du temps passé,
« contre plusieurs pays... seront suspendues jus-
« ques à quatre ans, dedans lesquiex la Justice et
-' les Créanciers se puissent apaisier ; et iceux
" passez, se apaisiez ne sont, les deffenses vaillent
« comme devant. » (Ord. T. I, p. 795.)
3° Se contenter, être satisfait d'une caution qui
tranquillise. » Un nouveau Crand-bailly de Ilainaut,
« sur remonstrance que luy feroit le Bailly précé-
« dent ou ses hoirs, se devra appaiser des cautions
« de chacun Sergeant... si elles sont suffisantes ou
« non ; et oîi elles ne seroient suffisantes par pleige
« ny autrement, pourra demander nouvelle cau-
« tion. » (Coul. de Ilainaut, nouv. Coût. gén. T. II,
page 110, col. 2.}
4° Dans un sens plus étendu, se contenter, être
satisfait d'un état que la confiance en Dieu, la
soumission à notre sort, ou quelqu'autre chose rend
paisible et tranquille. <> Le vray Dieu tout-puissant
>' est tel que devant luy toute chose ne luy est
« impossible ; si m' appaisé bien en ses œuvres qui
-' tant sont merveilleuses. » (Percef. Vol. VI, f- 128.)
Qui ne peut, ne peut ; si s'appaise.
Poès. de Charles D. d'Orléans, p. 92, col. 3.
C'est par une suite de la même extension, qu'rt-
paisev désignoit l'état paisible que procurent en
général les besoins et les désirs satisfaits :
Moult font femmes à Dieu granl honte,
Comme foies et desvoyées,
Quant ne se tiennent appaisécs
De la beaulté que Dieu leur donne.
Rom. de la Rose, vers 9461-946-S.
L'état paisible que procure le soulagement d'un
mal, la guérison d'une blessure :
Moult aléja sa maladie
La coucha por miex aaisier,
Et por les plaies apaisier.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 292, R" col. t.
L'état paisible que procure la satisfaction d'ap-
prendre des nouvelles qui tranquillisent sur !e sort
d'une personne à qui le cœur s'intéresse : « Sire,
« dist la Royne, appaisez-moy de mon filz, ou
«jamais je n'auray liesse. » (Percef. Vol. II, f° 150.)
L'état paisible que procure la satisfaction de connoi-
tre la cause d'un elTel qui excite la curiosité de
l'esprit, et qui en trouble la tranquillité :
.... Une fois se pourpensa
Que le Vilain apeseroit
De la demande qu'il fesoit.
Fabl. as. du R. n- 7615, T. I, fol. 87, V col. 1.
L'état paisible que procure à un coupable la cer-
titude, ou l'espérance d'un pardon qui le tranquillise :
Te proierai de cuer vrai,
Dame ; vers ton fil tous fais xa'apais,
U damnés serai.
Ane. PoSs. fr. MS. du Valic. n° 1490, fol. 127, V.
On conçoit que la signification du verbe apaiser
pouvoilêlre aussi variée que le sont les obligations,
les besoins et les désirs auxquels on peut satisfaire.
(Voy. Ai'AisEME.NT et Ai'AisENTER ci-dcssus.)
CONJIG.
Apais (f), subj. prés. T'apaises. (Rom. de la
Rose, vers 7429.)
VARI.^NTES :
APAISER. Orth. subsist. - Ane. Poës. fr. MS. du Vatican,
n» 1490, fol. 127, V.
Apaisier. Duchesne, Ilist. srénéal. de la M. de Béthune,
p. 145. - Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 292, R» col. 1.
Apaysier. Gloss. fr. lat. MS. du R. n» 7684. - Voy. D.
Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au mot Expiare.
Apeser. Bestiaire, MS. du R. n" 7989, fol. 173 ; fable lui.
Appaiser. Duchesne, H. gén. de la M. de Chàtillon, pr. p.
46. - Percef. Vol. Il, fol. 150. - Cotgrave, Rob. Estienne,
Nicot et Monet. Dict.
Apaiseur, subst. masc. Pacificateur. Celui qui
apaise, qui pacifie les troubles , les dissensions, les
différens d'une société en général. Dans la signifi-
cation de pacificateur d'un différent entre particu-
liers, on distinguoit l'arbitre et l'arbitrateur de
Vaniiable apaiseur ou apaisenteur , parce que
« amiable compositeur on appaiseur est celuy qui
« du consentement des parties, les met en accord;
« c'est-à-dire que chacune partie sçait bien qu'avoir
" en deveroit avant l'édict de famiable composi-
« tion. » (Bouleiller, Som. rur. p. 694.) « Dit,
« ordenance et appointenient de nous arbitres
« dessus nommés, comme arbitres, arbitraleurs,
« ou amiables appaiseurs, etc. » (D. Carpentier,
Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, T. III, p. 117; tit.
de 1404. — Voy. Apaisenteur ci-dessus.)
variantes :
APAISEUR. Cotgrave, Dict.
Appaiseur. Cotgrave, Nicot et Monet, Dict .
Apaisir, verbe. Apaiser. On procure la paix en
faisant cesser la guerre. De là, on a dit :
La guerre n'a pas apaisie ;
Toute la Conté a saisie, etc.
G. Guiart, MS. fol. 217. Rv
Apaisiteur, substantif masculin. Pacificateur.
La signification d'apaisiteur étoit relative à l'ac-
ception particulière à'apaiseur, lorsqu'on disoit :
« Fu rapporté par arbitres ou appaisiteurs, etc. »
("D. Carpentier, ubi supra; tit. de 1404. — Voyez
Apaiseur ci-dessus.)
variantes :
APAISITEUR, App.\isiteur. D. Carpentier, Suppl. Gloss.
lat. de Du Gange, au mot Paciarii.
Apalir, verbe. Etre pâle, devenir pâle; être
ému, consterné, etc. Changer de couleur, se faner,
se flétrir, etc. Languir, s'àffoiblir. On ne voit pas
que dans notre ancienne langue, la préposition à ou
en, réunie au verbe simple pâlir, ait rien ajouté à
la signification de ce verbe qui subsiste.
AP
— 5 —
AP
Pensser, veiller, soupir, sangloz,
Et soupirers m'avoient toz
Fait pâlir et descoulorer.
Ovide, de Arte, MS. de S' Germ. fol. 96, R* col. 3.
Et jà avoit apalie la bouche
Pour le grant grief qui si au cuer li touche.
Froi^sart, Poès. MS. p. 73, col. 2,
... Tu qui d'amor es à niestre,
Dois enpalir et maigres estre.
C'est la coulor qui mielz avient
A celui qui amors maintient.
Ovide, de Arle, MS. de S' Germ. fol. 95, R" col. 3, et V" col.l.
C'est la traduction du vers latin :
Palleat omnis amans ; hic est color aptus amanti.
Que l'œil compare deux beautés dont l'une soit
plus vive, plus animée que l'autre, celle qui le sera
moins, paroitra devenir pâle. Il semble qu'on ait
désigné l'effet de celle comparaison , lorsqu'on a
dit : » Je fais double que la beaulté de vostre Dame
« ne vous apallisse en la veue de la mienne qui
<• toutes passe. « (Percef. Vol. V, fol. 21, V» col. 2.)
On sait que la pâleur est un effet ordinaire de ces
émotions de l'âme qui font refluer le sang avec pré-
cipitation vers le cœur. De là, le verbe upalir aura
signifié l'émotion excitée dans l'âme d'un Chevalier
amoureux, par la beauté d'une femme qui dans un
Lai où elle le compare au cèdre, dit que le cèdre en
fut apalij. " Elle te compare là au cèdre qui est l'ung
« des plus haulx arbres du monde ; et par ce cèdre
« qui de sa beaulté fut appaUj, elle veult dire que
« quant tu veiz sa beaulté, tu en fuz moult esmer-
« veillé. » (Percef. Vol. 111, fol. 36, \'°col. 1.)
Il pareil que ce même verbe signifioil la pâleur
d'un ennemi mort ou consterné , lorsqu'on disoit
par métonymie, le camp jut appalij. « Tant fis que
« le camp fut appalij pour avoir la veue munde :
u c'est-à-dire que quant les trois Chevaliers le ap-
« pellèrenl de la jouste, tu les feiz Irébuscher par
« terre, afin qu'ils ne te donnassent empeschement
« à regarder sa beaulté. " (Percef. ubi supra.)
L'idée particulière du changement de couleur
signifié par le verbe pâlir ou apâlir, élant généra-
lisée, on disoit qu'une fleur éloil apalie, qu'une
feuille rt^jfl/issoi/, etc. lorsqu'en se fanant, en se
flétrissant, elle changeoit de couleur. (Voy. Frois-
sart, Poës. mss. p. 26, col. 2. — Eust. Desch. Poës.
Mss. p. 202, col. 4, etc.)
Peut-être aussi que ce verbe signifioil se faner, se
flétrir, comme il a signifié languir, s'affoiblir, parce
que la pâleur est un signe de foiblesse et de langueur.
Un peu de mal ou fièvre aguë
Qui de legier te santé mue ,
Et fait ton visage pâlir
Et tes membres si apdlir
Qu'a peines te peus-tu aidier.
D. Carpentier, Suppl, Gloss. lat. de Du Cange, au mot Apalus.
VARIANTES :
APALIR. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 202, col. 4. - Rom.
du Riche homme et du Ladre, MS. etc.
Apallir. Percef. Vol. V, fol. 21, V» col. 2.
Appalir. Ibid. Vol. III, fol. 36, V° col. 1. - Du BeUai,
Mém. T. VI, p. 304.
Enpalir. Ovide, de Arte, MS. de S' Germ. fol. 95, R" col. 3.
Pâlir. Orth. subsist. - Id. ibid. fol. 96, R» col. 3. - Rom.
du Riche homme et du Ladre, MS. etc.
Apan, subst. masc. Empan. On observe qu'a/)«n
et empan sont des variations de l'orthographe
espan. (Voy. Espan.) « Courtelas long de deux bras-
« ses (1) et large d'un grand apan. » (D. Florès de
Grèce, fol. 157, R°.)
ApapeIardir,w?'/)C.Fairerhypocrite. Significa-
tion analogue à celle de notre ancien mol papelard.
James n'apapelardirai :
Mais fi des papelars dirai.
Hist. de S" Léocade, MS. de S. Germ. fol. 31, R° col. 3.
A-par, prép. Par ; moyennant, au moyen , etc.
On sait que la préposition par, en latin per, désigne
une idée de mouvement progressif, une idée de
passage dans les expressions par terre, par mer, etc.
En comparant un espace de temps à un espace de
lieu, on a dit et l'on dit encore par un temps, par
un tel jour, etc. C'est probablement en cette signi-
fication qu'avec ellipse du mol temps, on disoit que
deux choses se faisoient à-per-mesmes ou à-per-
mismcs, lorsqu'elles se passoient dans le même
temps, par le même temps. « A-per-mesmes ke vos
« oyste ceste chose anoncier . . . par droit rendisles
« grâces, etc. » (S' Bern. Serm. fr. mss. p. 112.)
« Cav à-per-mismes que li soels (2) fut brisiez, si
« vint à-per-mêmes a[wès li amers deparleraenz (3)
« elli triste discorde. » (Id. ibid. p. 137.) « Li mes-
" saige célesliien se hastent, et à-per-mismes qu'ils
« virent la misère des hom ... si ploreivent amei-
« remenl. » (Id. ibid. p. 376.)
Dans tout espace de temps, il existe un milieu
par lequel les choses succèdent plus ou moins
immédiatement les unes aux autres. De là, ces
expressions au-par-mé , à-par-main , en latin per
médium, per medianum tempus, prises dans le
sens oîi nous dirions tandis, tout de suite, bientôt,
dans peu de temps, etc. Le peuple de Normandie
dit encore moyennant que, pour tandis que. « Le
« Mareschal . . . jettera le gand au milieu des lices.
« Alors part à pied, ou monte à cheval qui voudra ;
" car en gages de querelle, se il n'est emprins, face
« chascun le mieux qu'il pourra: et au-par-7né que
« les combaleurs feront, les Conseilleurs d'honneur
« sailliront hors delà prochaine lisse voir comment
« la chose se passera. » (Oi-d. de Philippe-le-Bel sur
les Duels. — Voy. Du Cange , Gloss. lat. au mot
Duellum.) Une preuve que l'origine et la significa-
tion de mé sont les mêmes que celles de ??u dans
parmi, en latin yjcr médium, c'est qu'au féminin
on disoit )?;t'V, en latin ?»erf?rt. De medianum, ce
qui est au milieu, s'est formé par contraction l'ad-
jectif moyen, qu'anciennement on écrivoit meien,
mein, main.
Ne fust por ma chose haster
Por aler au marchié demain,
Tu le compraisses à-par-main.
Comparaisse, fet Anieuse ?
(l) Mesure de longueur qu'on prend de l'extrémité du pouce à celle du petit doigt, quand la main est ouverte le plus
possible. Ce mot, d'origine germanique, vient de spannen. (N. E.) — (2) Scel, sceau. — (3) Division.
AP
— 6 —
AP
Par mon chief, je vous en di beuse ;
Quant vous volez, si commenciez.
Fal)l. JIS. (lu R. n- lUS, fol. 49, V col. 2.
Se Dex ne li ajue, il est mors ù-pcr-main.
Ane. PoC'l. Fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1349.
Araors m'ont si par tôt le cors saisi,
Que rt par-mniii iert ma joie finie.
Se vos n'avés pitié de vostre ami.
Id. T. Il, p. 947.
Peut-être la préposition par n'a-l-elle marqué les
causes et les moyens par lesquels on ao:it, que parce
qu'agir, c'est en quelque manière passer des moyens
ou des causes aux elTets. Le moyen étoit exprimé
par l'adjecUf mU lorsqu'on disoiL parmi un subside,
parmi payant, etc. 11 n'étoit que désigné, lorsque
pour sii^iiilier à peu de chose près, à peu près, on
disoil à-jiar-un-pou, et simplement 7Jfl>'ywî{; façons
de parler dans lesquelles l'acception âe. par, à-par,
semble être analogue à celle de parmi, c'est-à-dire,
moyennant, au moyen. (Voy. PAniii.) Ainsi l'expres-
sion à-par-iin-jxni siguirieroil: 1° moyennant quel-
ques personnes de plus: « Moult de Evesques et de
« Prélats, et à-par-un-peu tous les Barons , etc. »
(Cbron. fr. de G. de A'angis, Jis. an. 1190.) 2» Moyen-
nant quelque chose de plus: « A-par-un-pou avoil
B toute Normandie acquise, fors Rouen. » (Ibid.
an. \'H)i.) 3° Moyennant quelque temps de plus :
« Autant de temps à-par-unpou avoit-elle esté
« tenue des nostres, comme elle avoit esté tenue
« des Sarazins. » (Ibid. an. 1187.)
Lorsque les moyens et la puissance, la faculté
d'agir et de produire un effet en général , étoient
propres à un Etre et dans sa nature, on disoit qu'il
agissoit à-par-soi, par soi, dans le sens oîi l'on dit
soi-même, de soi, de soi-même. (Voy. Par.) « Je
« vouldroye que Lyonnel . . . fust apporté ça-siis ,
« s'il ne povoit ft-yw/r-soy venir. » (Lanc. à\x Lac,
T. II, fol. 130, li" col. 2.)
En agissant à-par-soi ou par-soi, en lalin per se,
on agit seul et pour ainsi dire à part. On soupçonne
donc que cette idée particulière étant généralisée,
l'expression à-par-soi aura signifié tout seul, sépa-
rément; et que la signification de par étant deve-
nue la même que celle du substantif ;jarf, on aura
substitué le substantif à la préposition , laquelle
étant précédée de l'a, paroissoit elle-même être un
substantif. « Pour ce mesme effait vous pouvez
« pareillement user del'orpigmenttout à-/;flr^sol/,
« et du poivre aussy sans orpigment. >> (Fouilloux,
Fauconnerie, fol. 49.) « Tous ensamble et chacun
« à-par-soi, etc. » (Beaum. Coût, de Beauvoisis, p. 2.)
En tout temps fait bon couchier ô-par-smj.
Eusl. Desch. Pocs. MSS. p. 271, col. 1.
Telle pourroit être l'ancienne origine de notre
expression à part, à-part-soi. Quoi qu'il en soit, la
préposition à étant supprimée, par soi signifioit en
particulier, seulement, séparément. (Voyez Appar
et Par ci-après.)
VARIANTES :
A-PAR. Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis , p. 2. — Fabl.
MS. du R. n» 72-18, fol. 11. - Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 359.
A-PART. Le .Touvencel, MS. p. 509. - Fouilloux, Faucon-
nerie, fol. 49 R». - Du Bellay, Mém. L. VII, fol. 198, R" etc.
A-PER. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 27, 112, 150, passim.
Au-PAR. Du Gange, Gloss. lat. au mot Duellum, col. 1688.
Aparageor, subst. masc. Qui tient en parage.
On observera que dans les principes de l'ancien
Droit féodal, lorsque des puînés ne dévoient pas à
leur aine l'hommage de la portion héréditaire d'un
fief partagé entre eux suivant les Coutumes, l'ainé
et les puinés étoient pairs es parties de ce même
fief; ils étoient égaux en noblesse féodale. De là, le
mot aparageor qui désignoit et les parageaux , les
puînés tenans en parage de leur aîné, elle /j^mgrewr
ou l'aîné sous l'hommage duquel ils étoient garan-
tis en parage. « Nus hons qui tient en parage , ne
« fet aide à son aparageor, se il ne le fel au Chief-
« seigneur; et se aucuns est qui ait aparageors qui
« tiennent de lui en parage, il ne lor puet terme
c< mettre hors du parage. -> (Ord. T. I, p. 139.) « Se
« li Vavasor avoient aparageors qu'il deussent met-
« Ire en l'aide, il leur doit mettre jor que il auront
« lors aparageors ; et li Vavassor doit dire as autres
« aparageors que eus viegnent à tel jour voir fère
« l'aide. » (Ibid. p. 138. — Voy. Parageau, Parager,
Paragecr ci-après.)
Aparager, verbe. Comparer, égaler. Doter,
maiier. Oiî ne croit point que le partage d'un fief
héréditaire entre un aîné et ses puînés , ait été
nommé parage, par la seule raison qu'ils étoient
pairs en lignage. Il n'y auroit donc eu nulle dis-
tinction réelle à faire enire le parage et le frérage,
dans les cas où le frérage étoit aussi le partage
coutumier qu'un frèi'e aine et ses puînés, pairs en
lignage, faisoient d'un fief dont l'hommage étoit
indivisible. On sait pourtant qu'ils difïéroient; mais
la différence consiste en ce que les puinés tenans
en frérage, faisoient à l'aîné un hommage dont les
puinés tenans en parage, étoient affranchis. L'af-
franchissement de cet hommage semble donc cons-
tituer essentiellement le ;jrtm^e qu'on peut définir
égalité de noblesse féodale. (Voyez Aparageor ci-
dessus et Parage ci-après.)
Il est possible que cette idée particulière d'égalité
qui n'existoit jamais qu'entre Nobles de même
lignage, étant généralisée, le molparage aitsignifié
noblesse, parenté, etc. égalité entres nobles, entre
parens ; égalité entre personnes de même mérite,
de même état, de même fortune. De là, on aura dit
s'aparager on s'emparager, pour s'égaler, aller de
pair avec la noblesse , en s'alliant ou en vivant
noblement.
. . . Tant se veulent enhaucier
Et en tel lieu aparar/ier
Qui n'avient pas à leur corsage,
En-seur que tout (1) à leur parage.
Fabl. MSS. du R. n- 7615, T. I, fol. 78, R' col. 1.
Quant li hom possède muison.
Qu'il est auques souraagiés
Rioes d'avoir, emparagiés ;
Et s'ait le cuer plain de noblèce
Et qu'il ait kier feste et léèce,
(1) Sur-tout.
AP
— 7
AP
Li enviex par moquerie
Dit lues que c'est redoterie.
Ane. Poêl. fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1315.
C'est relativement à l'espèce àe pavage ou d'éga-
lité qui existe entre parens, qu'on a dit :
. . . Maie chose est envie.
A traïson de paraige
S'apai-aiye ;
Car nul temps ne prant déduit
Fors en haineux ouvraige.
Eusl. Desch. Poès. SISS. p. 295, col. 3.
On s'aparageoit en se comparant à un homme de
mérite, en croyant aller de pair avec lui et l'égaler.
Dont Aiax à moi s'aparage.
Ovide, MS. Voy. Borel, Dicl.
En terme de Coutumes, apparager suffisamment
ou deucment une fille, Yemparager noblement,
c'étoil égaler, proportionner la dot d'une fille h son
état, la doter et marier à une personne qui lui étoit
paire et noble comme elle. (Du Cange , Gloss. lat.
T. V, col. 157. — Laurière, Gloss. du Dr. fr. — Cot-
grave, Dict.) « Le Seigneur noble peut doubler ses
« devoirs sur ses hommes . . . pour le mariage de
« sa fille aisnée, emparagée noblement. » (Coût.
d'Anjou, Coût. gén. T. II, p. 72.) En général, fl??ijyfl-
rager ou emparager une fille, c'étoit la marier h
un homme égal à elle par la naissance, l'état et la
fortune. (Oudin et Monet, Dicl.)
VARIANTES :
APARAGER. Borel, Dict. - Dict. de Trévoux.
A.MP.^RAGER. Monet, Dict.
Aparagier. Fabl. MS. du R. n» 7615, T. I, fol. 78, R» col. 1.
Aparaiger. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 295, col. 3.
Apparager. Cotgrave, Dict. — Laurière, Gloss. du Dr. fr.
Emparager. Coût. gén. T. II, p. 72.
Emparagier. Ane. Poët. fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1315.
Apareill, subst. masc. Préparatif, viandes,
tables, etc. Préparatif, engins, armes, etc. Préparatif,
charrue, paire de bœufs, etc. Il est probable que le
verbe appareiller a signifié en général préparer,
dans un sens analogue à celui de comparer, égaler;
et que par la même analogie, le substantif appareil
signifioit: 1° les préparatifs d'un repas, d'un festin,
comme les viandes, les tables, etc. « Moult fut grande
« la teste au chastel, quant les Chevaliers furent
« desarmés; car ilz estoient assis à l'entour de
« Y appareil. » (Percef. Vol. IV, fol. 43, R° col. 1. —
Rob. Eslienne et Nicot, Dict.)
2° Les préparatifs d'un triomphe, d'un arc de
triomphe. « L'ng haubert, ung hault appareil asseré,
« une hasche. . . et ainsi de tout appareil requis à
« un arc triumphal ou trophée. » (Rabelais, T. II,
p. 223. — Rob. Estienne et Nicol, Dict.)
3° Les préparatifs d'une guerre, d'un assaut, d'un
combat, engins, armes, etc. « Quant li Empereres
« Challes sot que il faisoit tel apareil, il manda ses
« Barons, etc. « (Chron. S' Denys, Roc. des Hist. de
Fr. T. V, p. 273.) « Feit commencer à faire plusieurs
<• apparaux pour iceux prendre el subjuguer, mais
« quand les assiégez apperceurent le&âii&apparaux,
« ils commencèrent à parlementer. » (Jlonstrelet,
Vol. I, fol. 253.) « Le haut appareil éloit une armure
« complette, l'armure de toutes pièces de l'homme
« d'armes, avec la grande pièces ou plastron. »
(Voy. Mcot, Dicl. — Rabelais, T. II, page 244. — S'
Julien, îlesl. hist. p. i42, etc.)
4° Les préparatifs pour le labourage, une charrue,
une paire de bœufs, etc. « Chacun des supplians
« ayans son appareil ou charrue de beufs pour
« labourer... et quant furent chacun en son appareil
« pour ilec labourer, etc. >• (Lett. de grâce, an. 1466.
— Voy. D. Carpentier, Sup. Gloss. lat. de Du Cange.
au mot Apparamenta, col. 242.)
On pourroit aussi rapporter la signification à'ap-
pareil, charrue attelée d'une paire de bœ'ufs, a celle
de notre verbe appareiller, joindre à une chose une
autre chose qui lui soit pareille.
En termes d'Architecture, appareiller signifie en-
core préparer la pierre, les matériaux pour la cons-
truction d'une maison^ d'un édifice; proportionner
la mesure, la forme de ces matériaux à la place où ils
doivent être posés. On a dit dans un sens analogue:
Géométrie est ars bien autentiques
De mesurer et de faire apparaulx,
Pour maisonner, forgier choses antiques,
Compasser tours, églises et chasteauLx.
Eust. Desch. Poés. MSS. p. 348, col. 1.
Il semble même qu'on ait désigné par le mot
appareil, celle justesse de proportion dans l'assem-
blage des matériaux, et l'effet qui en résulte pour
la beauté d'un édifice, lorsqu'on a dit :
On faisoit celle sainte abbaye
Qui en sus la montagne est hautement dressie
De très- grand apparuil, par merveilleuse estude, etc.
Ger. de Roussillon, MS. p. 177.
L'orthographe apparat est sans doute une altéra-
tion d'upparoi. (Ibid. Variantes du jis. de la Cathéd. de
Sens. — Voyez Aparoi.) Enfin l'acception particulière
dans laquelle on prend encore aujourd'hui le pluriel
apparaux, n'est pas moins relative que les autres à
l'acception générale d'appareil, préparatif. (Voyez
Apakeillement ci-dessous.)
VARIANTES :
APAREILL. Ch. S' Denys, Rec. des H. de Fr. T. V. p. 273.
Apparaulx (plur.). Eust. Desch. Poës. MSS. p. 348, coL 1.
Apparaux (plur.). Monstrelet, Vol. I, foL 253, R».
Appareil. Orth. subsist. - Percef. Vol. IV, f° 43, R" col. 1,
etc. — Rob Estienne, Nicot et Monet, Dict.
Apparoil. Ger. de RoussiUon, JIS. p. 177.
Apareillé, participe masc. et fém. Préparé,
disposé; préparée, disposée. Les significations du
participe apareillé, quelque multipliées qu'elles
puissent être, sont toutes analogues à celles du
verbe apareiller. On se bornera donc ici à une
remarque sur l'espèce de formule que le roi d'An-
gleterre, Edouard I", et Jean I", duc de Bretagne,
ont employée dans l'inscription de lettres écrites au
roi de France. C'étoit peut-être comme vassaux
qu'ils se disoient apareillés à son service (1), à son
(1) Joinville emploie aussi cette expression au commencement de son livre, et d'une lettre datée de 1315, s'adressant
dans l'un et l'autre cas au roi Louis X: « .^. son bon signour Looys, fils dou roy de France, par la grâce de Dieu roy de
Navarre, de Champaigne et de Brie conte palazin, Jehans, sires de Joinville, ses senecbau.\ de Champaigne, salut et
amour et honneur, et son sei-vise appareillié. ï M. de Wîiilly traduit; et son service disposé, (n. e.)
AP
AP
plaisir, etc. ° A très-haut Prince et Seigiior Pliilipe...
« Rey de France, Edward... Rei de Englelerre,
« Sei£!;nor de Irelaunde, Duc de Guyene, saluz ; e se
o apàraillé h son jilesir. » (Rymer, T. I, part, ii,
p. 168; lit. de 1-278.) - A son 'très-liault Seigneur
« Louis... Roy de I-'rance, .Jelum Duc de Bretaigne,
« salus; et soit (1) appareillé à son service en toute
<■ chose. » (D. Morice, preuv. de l'Hist. de Bretagne,
T. I, col. 998; tit. de 1265.)
Ce même duc de Bretagne et Jean son fils aîné
qui épousa Béalrix fille de Henri III roi d'Angle-
terre, devinrent les vassaux de ce Prince, par la
restitution qu'il leur fit du Comté de Richemont, à
la charge de l'hommage et du service féodal. Ainsi
leurs femmes Blanche et Béatrix semhleroient avoir
affecté de se reconnoître vassales du roi d'Angle-
terre, lorsqu'en lui écrivant, elles se disoient apa-
reillies à faire sa volonté. « A son très-haut et
« très-cher Seignor Henri... Roe d'Englcterre
« Blanche, Duchesse de Brelangne, salit et révé-
« rence cum à son Seignor, e soc apparellic alTerre
« sa volenté en totes choses. » (Rymer, T. I. part, n,
p. 53, col. 1 ; til. de 1200. — Id. ibid. p. 102, col. 2;
tit. de 1205.) Il faut lire soi upparellie, etc. au lieu
de foi apparellie, etc. (D. Morice, preuv. de l'Hist.
de Bretagne, T. I, col. 997.) >■ A très-haut Seignor e
" à son très-chere pière... Henri... Roe d'Engle-
« terre... Béatrice sa dévote file, feme à Monsor
« Jehan de Bretaigne, salut e amor cum à son
« cher Seignor, a (2) soe aparellie à fère sa volenté
K en lolesdioses. » (Rymer, T. I, part, n, page 71,
col. 2; lit. de 1262.)
Quel qu'ait été l'usage de cette espèce de formule,
soi apareillé etc. on a pu l'adopter comme une
reconnoissance spéciale de vasselage. « A haut home
« e noble moun Seiguur le Roy d'Englelerre, Jo
« Giies de iNueville, voz orbs (3), saluz e îoial amour,
« e aparailez à tote vos volenté faire. " (Rymer,
T. I, part, u, p. 170, col. 1 ; tit. de 1278.) « L'accepta
" pour son Seigneur, en luy offrant d'estre apareillé
« de faire tout ce qu'il luy seroit possible. » (Nuits
de Straparole, T. I, p. 209. — Yoy. Apareiller.)
VARIANTES :
APAREILLÉ. Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis, p. 478.
Aparailé. Rymer, t. I, part, ii, p. 176, col. 1; tit. de 1278.
Aparaillik. Id. ibid. p. 17i, col. 1 ; tit. de 1278.
Apareillié. Estrubert, Fabl. MS. du R. n» 7996, p. 3.
Apariliet. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 97.
Apparill. Livres des Machabées, MS. des Cordel. fol. 173.
Apareillié Prov. du Vilain, MS. de S' Germ. fol. 75, V».
Aparellie. Rymer, T. I, part, n, p. 71, col. 2; tit. de 1262.
Appareillie. Rom. de la Ro.se, vers 3804.
Apparellie. Rymer, T. I, part, ii, p. 102; tit. de 1265.
Apparillie. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 376.
Apai'eillenient, sithst. m. Action de préparer,
préparation, préparatif. C'est dans un sens analogue
a celui d'apaieiller, préparer, qu'on a dit : « Long
« appareillemcnt de bataille fait victoire avoir. »
(Le Chev" de la Tour, instruction à ses filles, f° 78.)
On emploie les choses, les moyens convenables
pour se préparer à ce qu'on veut, à ce qu'on doit
faire. De là, le mot apareillement a signifié, 1° pré-
paratif, chose convenable pour une noce: « Parceu
« mismes pues-tu awertement aparzoivre ke si soit
« li apparillement des noces. » (S" Bern. Serm. fr.
MSS. p. 239.) 2° Préparatif au combat dans les vers
suivans :
Son bon cheval a demandé.
Or verrai, dist-il, qui vendra,
Et or verrai qui me suivra.
Ne fist autre uppareillemeiit.
Rom. de Rou, MS. p. 299.
3° Préparatif, chose convenable pour l'ajustement,
la parure d'une femme :
Si ai tôt YapareiUnment
Dont feme fait forniement.
Fabl. MS. de S' Germ, fol. «, V- col. 3.
4° Préparatif, chose convenable au dessein de
plaire. C'est l'amour qui parle dans ces vers:
Nus hom n'ert jà de ma mesnie
Qui ne soit plains de cortoisie.
Ce sont li appareillement
Desquels j'appareille ma gent.
Fabl. MS. du R. n- 1218, fol. 362, R* col. 2.
Qu'il suffise d'avoir indiqué le développement des
idées particulières qui peuvent avoir été comprises
dans l'idée générale A' apareillement, apareil prépa-
ratif. (Voy. Apareill et Apareiller.)
variantes :
APAREILLEMENT. Fabl. MS. du R. n» 7218, foL 281, V».
Aparillemext. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 32.
Apparaillement. Liv. des Machabées, MS. des C. f° 168.
Appareillement. Rom. de Rou, MS. p. 229. — Fabl. MS.
du R. n» 7218, foL 362, R» col. 2. - Cotgrave, Dict.
Apparillement. S' Bern. Serm. MSS. p. 31, etc.
Apareiller, verbe. Etre pareil, être égal, être
semblable. Comparer, égaler, rendre pareil, rendre
semblable, peindre. Réparer, raccommoder, panser,
Préparer, accommoder, parer, ajuster, habiller,
armer, disposer. On croit que l'adjectif latin ;jfl77Zis,
en frangois pareil, comparable, égal, semblable, est
l'origine du verbe apariller, apareiller, dans la
signification de ressembler, être pareil.
... De serur et de raoiUier
Ne puet amours apareiller...
Car en l'un n'a fors seul nature ;
Nia point d'autre conjointure.
L'autre est nature et si est lois, etc.
Alliis, MS. fol. 23, V» col. 1 ; Var. du MS. du Roi.
C'esll'unique preuve qu'on ail de la signification
neutre du verbe apareiller. Dans le ms. en marge
duquel sont les variantes du ms. du Roi, on lit :
.... De serur et de moillier
Ne peut nuns bons apparillier, etc.
Alors il signifie comparer , faire comparaison ,
égaler ; il étoit actif en ce sens et plus souvent
réciproque.
Lors te viendra à remembrance
Et sa façon et sa semblance
A qui nulluy ne s'appareille.
Rom. de la Rose, vers 2458-2460.
Encore i a autre merveille
A cui nulle ne s'apareille
Fabl. MS. du R. n- 7615, T. II, fol. U8, V col. 1.
1) Corr. soi. - (2) Corr. e, et. - (3) On croit qu'il faut lire Chrs, abréviation de Chivalers, Chevalier.
AP
-.9 —
AP
Clos de girofle, lis et rose
Où toute doucor se repose,
A vous, Dame, ne s'aparaille.
Fabl. MS. du R. n" 7218, fol. 217, V col. 1.
Quelque variées que soient les acceptions de ce
verbe, il seroit possible que toutes ne fussent que
des modifications de racccption génévn]eapareiller,
comparer, égaler, rendre semblable. La peinture
ayant ordinairement pour objet la ressemblance, il
paroit assez naturel qvi' apareiller ait signifié
peindre.
Geste chievre que ci véez.
Pour combien vous la me peindrez '!...
Amis, trois francs de les deniers
M'en donras, et je volentiers
La te paindré, et bien et bel...
Li maislres la chievre. apareille
Inde, jaune, vert et vermeille, etc.
Estrub. Fabl. MS. du R. n" 7996, p. i.
On réalise cette ressemblance avec les couleurs,
le vernis, etc. De là, on aura dit :
A un huis est arestez
Où ot peint un viez crucefiz
Et apareilUé de vernis.
Estruberl, fabl. MS. du R. n- 7996, p. 3.
En réparant une vieille cbose, une chose usée,
en la raccommodant, on lui donne une forme
pareille, une forme semblable à celle qu'elle avoit
étant neuve; on la rend d'une utilité égale. C'est
Srobableinent ce que signifioit le verbe apareiller
ans le sens de réparer, raccommoder. « Les
« Chausseliers... n'auront pour la façon d'une paire
« de chausses î» homme que six deniers, et à femmes
« et enfans quatre deniers, et non plus. Ceux qui
« les appareillent, ne prendront pour mettre un
« avant-pied en une chausse, que deux deniers. »
(Ord. T. Il, p. 372.) « Bourreliers n'auront, ne
« prendront d'une selle de limons que douze sols
« de la meilleure,... du collier de limons, garni de
« brasseures, d'astellets, douze sols et pren-
« dront d'appareiller aucunes des choses dessus
« dites, etc. » (Ibid. p. 37. — Voy. Rapareiller.)
Celte analogie étant reconnue, l'on voit comment
les significations parliculières des verbes par
lesquels on exprime diverses façons de réparer les
choses, pourroient être rapportées à la signification
générale à' apareiller. Par exemple, panser un
blessé, lui mettre un appareil, c'est employer les
médicamens propres à le rétablir dans un état
pareil à celui où il étoit avant sa blessure.
« Ordonna faire appareiller les blécez. » (Saintré,
page 603.)
Confortez-vous d'autre manière :
Faites vos mors mètre en litière,
Et vos navrez appariUier.
Alhis, MS. fol, 52, R' col. 1.
On conçoit une espèce de comparaison, d'égalité,
de proportion, de convenance nécessaire entre les
choses qu'on prépare et l'objet pour lequel elles
sont préparées ; entre un besoin et le moyen par
lequel on en prépare la satisfaction; entre la réso-
lution, le projet de faire une chose, et les moyens
par lesquels on s'y prépare; entre la volonté et la
faculté d'agir, etc. Il est donc possible que par une
II.
même analogie d'idées, le verbe apareiller ait
signifié préparer la voile à recevoir le vent, prépa-
rer un vaisseau à faire voiles :
Et ses Barons et ses Parens
S'aparlièrent isnellement.
Lors nez ont tost appnreillies.
Rom. de Brul, MS. fol. 70, R' col. 1.
Préparer une somme d'argent pour le prix d'une
chose, et la payer en deniers comptans : « Acheta
« le Roy d'Angleterre, le Connestable de France et le
« Comte de tancarville, de Monseigneur Thomas
« de Holande et de ses compaignons, et en paya
« vingt mille Nobles tous appareillés. » (Froissart,
Vol. I, page 145.)
Préparer des viandes, les accommoder, en pro-
portionner la qualité et la quantité au besoin et au
goût des convives; préparer un festin ; préparer à
manger, etc. « En ces festivalz jors... appariUier
« les délicieuses viandes, etc. « (S* Bern. Serm. fr.
Mss. p. 24. — Voy. Rob. Estienne et Nicot, Dict.)
S'il faut aparlier à mangier.
Eust. Dcsch. Poè's. MSS. p. 500, col. i.
L'an aparoille\e maingier.
Et cil n'an fist onques dangier.
Fabl. MS. du R. n' '7615, T. II, fol 149, V- col. 2.
Préparer, accommoder un hôtel, pour recevoir
convenablement la personne qui doit l'occuper :
L'ostel apparechier et prendre
U ilh voloit primes descendre, etc.
Lus IV Filles le Roy. MS. de Turin, fol. 39, R- col. 2.
Préparer la réception d'une personne, la recevoir
avec les, égards convenables, en la faisant servir
par des Écûyers, etc. « Quant ilz furent emmy la
« Court, ilz furent appareiller de deux Escuyers
« qui misrent jus la Damoiselle, et tindrenl aux
« Chevaliers leurs estriers, etc. » (Percef. Vol. I,
fol. 35, R" col. -1.)
Préparer les choses dont on a besoin pour se
vêtir, se coucher, etc. « Por-kai apparailles-ln ta
« vesture par si grant cuvise ? » (S' Bernard,
Serm. fr. mss. p. 24.) « Ses gens ne lui avoient riens
«' appareillé, comme de robbes, lit, cousche, ne
« autre bien. » (Joinville, p. 79.)
Préparer à une personne le moyen de paroitre ce
qu'elle est, lui préparer le moyen de plaire, la
parer, l'ajuster d'une manière convenable : « Faistes
« vostre fil apareiller comme fil d'Emperour. «
(Rom. de Dolopathos, ms. du R. n» 7534, fol. 294.)
La Dame sa fille apareille ;
Moult fut gente, clere et vermeille.
Fors la malne ; li Quens Va prise
Par la main et lez lui assise.
Moult li fu sa biautè loèe, etc.
Fabl. MS. du R. n" 7615, T. II, fol. 174, V' col. 1.
Le sens ironique dans lequel nous employons les
verbes s'ajuster, s'accommoder, en parlant d'un
homme qui s'est incommodé par un excès de vin,
étoit quelquefois celui du verbe apareiller. « Des
« vins avoyent-ilz assez à foison; mais ils estoyent
« si chaux et si fors que... ceux... qui grand'foison
o d'eaue au boire n'y metloienl, s'en trouvoient
« tellement appareillés qu'ils ne se pouvoyent
« aider au matin. » (Froissart, Vol. III, p. 204.)
On conclura d'après notre observation sur l'ori-
AP
-10 —
AV
grine de l'acception générale du verbe apareiller,
s'aparciller, piépurcr, se préparer, qu'il pouvoit
avoir la signification de tout verbe par lequel on
désigne un moyen de se préparer à une chose.
« En toutes besongnes, avant que l'en les com-
« nience, on se doit appareiller... àgrant diligence
« et à grant délibération. » S'il falloit s'habiller,
s'armei', etc. le verbe s'rt/jare/Z/n'signifioil s'armer,
s'habiller, etc. (Voy. Ai'areill et Ap.\iieillement.)
« Commanda Jonalhas as suens que il veillassent,
« et eslre apparill por combattre. » (Livres des
Machabées, ms. des Cordel. fol. 173. — Voy. Nicot,
Dict.) « Quand il eut un petit reposé sur son licl,
« il se leva et appareilla ; et quand il fut appareillé,
« il m;mda en sa chambre, etc. " (Froissart,
Vol. III, page 'iOO.)
Lors te fauldra appareitler,
Vestir, chausser et alourner, etc.
Rom. de la Rose, vers 2533 el 2534.
Enfin, être apareillé, préparé à une chose, y être
disposé, c'est avoir de l'inclination à faire cette
chose, en avoir la volonté et la faculté dans une
proportion qui la rende possible ou naturelle.
« Aparillie~~i est mes cuers... as aversitez, aparilUe:^
« as propéritez ; aparllliez est as humles choses ;
« aparilliez est à hallesce ; aparilliez est à lot ceu
« ke tu me comanderas. « (S' Bernard, Serm. fr.
Mss. p. 2!)6.) « Je suis... dattres (1).... à justise et à
« vériteit cui vos véez estre si aparillie por faire
« veniance. (S' Bernard, Serm. fr. mss. p. 37G.)
« Li fil Adam estoient molt aparilliet à non-greit-
» sachance {'2). » (Id. ibid. p. 11.)
Se l'ire jalousie engaigne,
Elle est moult fiére el moult estrangne
El de tencer appareUlie, etc.
Rom. de la Rose, vers 3802-3804.
On terminera cet article, en observant que les
significations d'apareiller, et â'aparier étoient quel-
quefois les mêmes. (Voy. Aparier ci-dessous.)
CONJLG.
Aparaut (s'), subj. prés. Qu'il se prépare. (Fabl.
MS. du R. n* 7G15, T. l, fol. 102, V col. 1.)
Aparelt, subj. prés. Qu'il prépare. (Fabl. ms. de
S'Germ. fol. 37, R° col. 2.)
Apparaillet, ind. prés. Il prépare. (S'Bern. S. F.)
AppariUieret, ind. imp. Préparoit. (Id. ibid.)
VARIANTES ".
APAREILLER. Rom. de Dolopathos, fol. 294. - Fabl. MS.
du R. n» 7-218, fol. 112. - Fabl. MS. du R. n» 7615, T. II, f° 148,
V» col. 1. - Clém. Marot, p. 408, etc.
Aparailler. Fabl. MS. du R. n" 7218, fol. 217, V col. 1. -
Rymer, T. I, part, ii, p. 168, col. 2 ; lit. de 1278.
Apareller. Vie du monde, MS. de N. D. n» 2, fol. 14, Y»
col. 1. - Fabl. MS. du R. n" 7615, T. I, fol. 113, R° col. 1.
Apariller. Atliis, MS. fol. 55, R» col. 1.
Aparillier. S' Rern. Serm. fr. MSS. page 296. — Rom. de
Dolopathos, MS. du R. n» 7534, fol. 294, V» col. 1.
Aparlier. Rom. de Brut, MS. fol. 70, R». — Gloss. sur les
Coût, de Beauvcisis, p. 478. - Eust. Desch. Poës. MSS. p. 500.
Aparoillf.r. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 24. — Ane. Poët.
fr. MSS. avant 1300, T. I, p. 104. - Fabl. MS. du R. n» 7615,
T. II, fol. 149, V» col. 2.
Apparailler. S> Bern. Serm. fr. MSS. p. 24 et 94.
Appabechier. Les iv filles le Roy, MS. de Turin, fol. 39.
Appareiller. Orth. subsist. — Rom. de la Rose, vers 2533.
— Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis. — Joinville, p. 79. —
Ord. T. II, page 371. - Froissart, Vol. III, page 200. - Rob.
Estienne, Nicot et Monet, Dict.
Appareillier. Rom. de Dolopathos, MS. du R. n» 7534,
fol. 294. - Rom. de la Rose, vers 16979 - Ord. T. I, p. 314.
Appareller. Fabl. MS. du R. n» 7615, T. II, fol. 211, R»
col. 1. - Ord. T. I, p. 314.
Apparillier. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 24. - Athis, MS.
fol. 23, V» col, 1.
Apperieillier. Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, p. 244.
Apperiller. Britlon, des Loix d'Angleterre, fol. 60, V".
Aparenter, verbe. Avoir pour parent. Traiter
de parent, cousiner, reconnoitre pour parent.
Traiter comme parent, accueillir, obliger, aider,
secourir, soutenir, fortifier. On devientle parent de
ceux ;\ qui on s'allie; on les a pour parens. De là,
l'acception du verbe réciproque s'apparenter, qui
subsiste. Mais on ne dit plus en parlant des person-
nes à qui on s'allie, à t]ui on est allié, qu'on les
apparente. (Monet, Dict.) La signification du verbe
apparenter, traiter de parent, cousiner, reconnoitre
pour parent, est plus ancienne dans notre langue.
Povres parens nus n'aparente.
Fabl. MS. du R. n' 7615, T. I, fol. 72, R' col. 2.
Tant ai de sa manière aprise dès piéga,
C'oume de laschelé jà n'aparentera.
Buenon de Comniarchies, MS. de Gaignat, fol. 198, V* col. 1.
On lit que Henri IV « étoit fort respectueux
« envers ses prochains.... n'y ayant Prince ni Gen-
« tilhomme de quelque loin qui lui pût appartenir,
« qu'il n'apparentât. » (Mém. de Sully, T. XII,
p. 130.) Après sa mort, la politique de Marie de
Médicis dédaigna le cousinage. « Pour faire anéan-
« tir toutes les civililez, familiaritez et courtoisies
" de tout temps pratiquées au royaume, le Roi son
« fils, ni ses autres enfans n'aparentoient en
« saluant qui que ce soitdans le royaume intro-
« duisant de plus en plus un tel mépris des Gentils-
«■ hommes d'illustre extraction, et une si grande
« indifférence entr'eux et toutes sortes de gens de
" néant qui avoientaccèsà la faveur, qu'ils vivoient
<> comme pairs et compagnons ensemble. » (Ibid.
page 98.)
Ce verbe aparenter n'est pas moins ancien dans
le sens de traiter, accueillir comme parent, en obli-
geant, aidant, etc. Peut-être même a-t-il dans le
premier vers qu'on a cité, la même signification que
dans les vers suivans :
Fox est qui aparente
Ne parent ne parente
De quoi il ait villance.
Mais loinz de lui le meta,
N'onques ne li promette
Chose où il ait fiance.
Prov. du Vilain, MS. de S. Germ. fol. 74, V col. 2.
Il est naturel de s'aider entre parens ; c'étoit une
espèce de loi dans les principes du système féodal
et de la chevalerie. On se fortifioit donc en s'appa-
rentant, en s'alliant à une famille nombreuse et
puissante, à une famille dont on avoit droit d'espé-
rer l'aide, le secours dans une entreprise, une
(1) Débiteur, redevable. - (2) Ingratitude.
AP
— n
AP
guerre, une querelle. Cette idée particulière de se-
cours étant généralisée, l'on aura dit, par extension,
qu'un ennemi étoit mal apparenté, lorsqu'il n'étoit
pas en force, en nombre suffisant pour soutenir un
siège, un combat, etc. « Les Espaignols de la Ceri-
« gnolle, congnoissans que trop mal apparentes
« estoienl pour attendre le siège des François, etc. »
(J. d'Auton, Annal, de Louis XII, an. 1502, p. 41.)
« Tousjours estoient en picque, etlfi où les François
« les trouvoient mal apparente--, , très-mauvaise
« compaignée leur faisoient, et eulx de même aux
« François. » (Id. ibid. an. i50G-ir,07, p. 188. —
Voy. EsiPARENTER ct Pare.nter ci-après.)
VARIANTES :
APARENTER. Mém. de SuUy, T. XII, page 98.
App.\ranter. Monet, Dict.
Apparenter. J. d'Auton, Annal, de Louis XII, an. 1502. —
pages 17, 41, etc. — Mém. de Sully, T. I, page 94.
Apariage, suhst. masc. Apanage. Dot. On adou-
cit la rigueur nécessaire des Lois qui proscrivent
l'égalité" si naturelle entre frères et sœurs dans le
droit de succéder à leur père, en pourvoyant à la
subsistance de ceux qu'elles excluent ; en égalant,
en proportionnant ù l'état qu'ils doivent avoir dans
la société, les fonds en terre ou en argent, qui leur
tiennent lieu de partage et de patrimoine. C'est
relativement à cette idée de proportion, d'égalité,
qn'apariage a signifié la même chose qu'apanage.
(Voy. ArPANAGE ci-dessous.) « Jà soit ce que nous
<■ sachions certainement... que... le Seigneur de
« Beaujeu et ses prédécesseurs Seigneurs dudit
« lieu, aient tousjours tenu et doivent tenir en foy
« et hommage de nous et de noz prédécesseurs Roys
« de France, h cause de la Corone de France, toute
« la terre et baronie de Beaujeu et aussi eux et
<■ leurs dictes terrez et baronie... et subgès de leur
« dicte terre et baronie aient ressorti et doienl de
« tout temps ressortir îi nous et à nos prédeces-
« seurs ne que ladicle foy, hommage et ressort
« aient esté, ne puissent ou "doïenl estre séparés en
« tout ne en partie,... soit à cause de partaige,
• appariage, ou doaire qui ait esté ou soit faitou
« constitué, etc Que jamais ledit fief et ressort
« puissent estre séparés de la Corone de France, en
« tout ne en partie, à perpétuité, ù vie ne à temps,
« soit à cause de partaige, d'appanage, de doaire,
« de donacion , vendicion , transport ou alienacion
« que l'en face, ou constitue à Royne de France, à
« enfans , frère ou neveu de Roy de France , etc. »
(Ord. T. V, p. 112 et 113.)
La dot des filles étant une espèce d'apanage qui
doit être proportionné à leur état et à leur naissance,
il est possible qu'on ait désigné celle dot par le mot
apariage. Charles VI, par le contrat de mariage de
sa fille Isabelle de France avec Richard II, roi
■ d'Angleterre, s'oblige îi payer « la somme de sept
« cens mille francs d'or... lesquels... il donne et
« octroyé à sadile fille pour et en lieu de tous par-
« tages, apariages, successions de père et de mère.
c. et autres droicts quelconques qu'elle, ses enfans
» et les descendans d'eux... pourroient demander,
« reclamer et avoir en meubles ou héritages, au
« royaume de France, ou autre part. » (Godefroy,
Annot. sur l'IIist. de Charles VI, p. 581.) On remar-
quera que la signification du mot simple pariage est
très ditTérente de celle du composé apariage. (Voy.
Appariation ci-dessous.)
VARIANTES :
APARIAGE. Godef., Annot. surTHist. de Charles VI, p. 581.
Appari.\ge. Ord. T. V, p. 113.
Aparier, verbe. Unir, joindre, conjoindre, ac-
coupler. Rendre pareil, égaler, comparer. On sait
que les êtres mâles et femelles qui produisent leur
semblable et se perpétuent en s'uuissanl l'un à
l'autre, sont d'espèce pareille. De là, le verbe
apairer, ou aparier, formé de pair, paire, en latin
par, a signifié joindre le pair au pair, joindre
l'homme à la femme, joindre le mâle à la femelle;
en général, les unir, les conjoindre, les accoupler.
(Voy. Nicot et Monet, Dict.)
Par foi, vous estes tout d'un grant ;
Ce seroit une belle paire.
Et Diex doinst qu'amours vous apaire.
Froissant, rocs. MSS. p. 134, col. 2.
Bien seras çains, se te maries,
Se vers autrui ne te desçains
K'à celi à cui Vaparies.
Miserere du Red. de Moliens, MS. de Gaignat. fol. 212, R* col. S.
. . . Puisque Sainte Yglise apaire
Deus gens, ce n'est mie à refaire.
Fabl. MS. du R. n' 7218, fol. 250, V" col. î.
On a désigné l'union, le commerce d'un mari avec
une autre femme que la sienne, en disant qu'il
apairoit une autre femme. Les hommes sont si
constans dans leurs préjugés, qu'on peut dire encore
avec un de nos anciens Poêles :
S'uns horas autre famé apaire,
Petit (1) en voi blastengier (2)
Sa mouiller (3) : mes à tout dis
Est li preudoms escharnis (4)
Puisque sa lame folie (5).
Abc. Poês. fr. MS. du Vatic. n- 1522, fol. 158, R- col. 1.
Lorsque le bonheur d'aimer et d'être aimé éloit
<c la pasture et l'embrasement aux jeunes Cheva-
« liers, pour estre preux, hardis, larges, courtois
« et gais, '• il paroissoit bien naturel de favoriser
l'amour, ce principe général de leurs vertus guerriè-
res et sociales. On le voyoit souvent naître à table et
s'exalter avec cette gaieté franche et honnête qu'ins-
piroit à chaque Chevalier le plaisir « d'avoir une
Dame h son escuelle et de lui être aparié, » c'est-à-
dire uni pour manger avec elle et la servir. « Beaulz
•> Seigneurs, aura chascun une mienne niepce à
« son escuelle à ce soupper... car c'est la pasture
« et l'embrasement, etc. » (Percef. Vol. 1, fol. 125,
V° col. 2.) « Sire, dist la damoiselle,.... ores vous
« séez plus près de moy, si me livrerez ce qu'il me
" faudra... et la Royue d'Escosse sera près de vous,
« et le Roy après, qui la servira à son vouloir, et
« Lys'ine près de luy, mais le Tors sera à sa dextre
« qui la servira ; si serons appariez.... Regardez le
(1) Peu. — (2) Mésestimer, mépriser. — (3) Femme ; en latin muHer. — (4) Ridiculisé. — (5) Fait une folie, est infidèle.
AP
— 12 —
AP
1 Roy Alexandre, il ne lairroit pas une miette de
« pain devant la Damoisellle avec qui il mangue. »
(Ibid. fol. l'i'i, Vcol. 1 et 2.)
En particularisant l'acception générale du verbe
aparier, joindre le pair au pair,'joindre le mâle à
la femelle, les unir, les accoupler, on dit encore que
les pigeons, les tourterelles, les perdrix s'apparient.
Plus anciennement ce verbe, le même qu'apairei;
désignoit l'accouplement de toute espèce d'oiseaux.
(Voy. Ari'AiiiATio.N et ArrAniRMENT ci-dessous.) « Au
« tempsquelesoiseauxsonten amouvei s' apparient
" pour faire génération. » (Nicot, Dict.)
Quant li beax Esté repaire,
Qu'arbre sont flori,
Que chascun oiseaux s'ajjaire
Por ii temps joli, etc.
Anu. Poël. fr. MSS. avant 1300, T. I, p. 465.
Il y a une telle analogie entre les verbes apareiller
et aparier, qu'on a pu dire : « Quand la tourterelle
" a perdu sa compagne, elle ne s'appareille jamais
« avec une autre. »"(Dict. de Trévoux.) On ajoutera
que l'un et l'autre ont signifié rendre pareil, égaler,
comparer. (Voy. Nicot ef Monet, Dict.)
Si l'en remonstre une autre père ;
Et li Chapelains les apère.
Si les truéve quarrés et drois.
Fabl. MS. du R. n" 7218, fol. 235, V col. 2.
La douceur attrayante d'une femme l'a fait com-
parer à l'abeille.
Trop bien vous puis apparer, sans mesdire,
A la mouche qui porte miel et cire :
Le miel est doulz et le sire à lui tire.
G. Macbaul, MS. fol. 197, R' col. 1.
Encore aujourd'hui, apparier et appareiller signi-
fient joindre à une chose, une autre chose qui lui
soit pareille. (Voy. Apareiller ci-dessus.)
VARIANTES :
APARIER. Miserere du Recl. de Moliens, MS. de G. fol. 212.
Apairer. Ane. Poës. fr. MS. du Valic. n« 1490, fol. 162, R".
- Froissart, Poës. MSS. p. 134, col. 2.
Aperer. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 235, V" col. 2.
Apparer. G. Machaut, MS. foi. 197, R» col. 1.
Apparier. Peroef. Vol. 1, fol. 122, V° col. 1.
Aparir, verbe. Accoupler. Satisfaire , contenter
également. Le premier sens est le même que celui
du verbe aparier, s'aparier, accoupler, s'accoupler.
Les oyseaulx , au printemps de may,
S'appurisseiit et font leur glay.
Eust. Desch. Poés. MSS. p. 477, col. 4.
Si le verbe aparir au second sens n'est pas une
altération d'orthographe du verbe apaer, apaier,
contenter, satisfaire, on peut dire que dans un sens
analogue à celui d'aparier, égaler, il a signifié sa-
tisfaire, contenter également, lorsqu'en parlant de
l'acceptation d'une trêve, on a dit:
Donnée en fu la seurté ;
Si que ambes-deux les parties
S'en tinrent très bien aparien.
Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 2, V* col. 2.
VARIANTES '.
APARIR. Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 2, V» col. 2.
Apparir. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 477, col. 4.
Aparlement, subst. inasc. Pourparler, paroles,
etc. Significations analogues à celles du mot simple
parlement, en latin cnlloquium , eloquium. (Pseau-
tier, MS. du R. n° 7837, fol. 17ô. — Voy. Parlement.)
Aparier, verbe. Parler. Anciennement, aparier
une personne, s'aparier à elle, l' aparier d'une chose,
c'étoil lui parler, lui transmettre ses sentimens,
ses idées par l'organe de la voix. (Voy. Aparoler ci-
dessous.) « Il Vapavlerent de faire pais. » (Chron.
d'Outremer, ms. de Berne, n» 113, fol. 130, V°col. 3.)
« Auquel Mareschal le suppliant s'apparia et lui
" dist, etc. » (D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de
Du Gange, au mot Arrationare ; lit. de 1451.)
.... Tuit cil de sa contrée
L'aiment et plus fier s'en font ;
Ne jai n'en iert apairlée ;
.Tai tant hardi ne seront.
CUans. fr. MS. do Berne, n' 389, pari, il, fol. 2, R».
. . . Feist bien as povres, et bel les aparloit.
Doctrinal, MS. de S' Germ. fol. 102, R- col. ï.
Quand ne vous plait ke je sois escoutés,
■frop sui de vous cruelment apartés.
Ane. PoÈt. fr. MS. avant 1300, T. IH, p. 1109.
Les messagiers a honnorés
Et festiés et apartés.
Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 60, V* col. 3.
On dit aujourd'hui parler à une personne ; mais
V aparier est plus rapide. Lorsque le rapport indiqué
par la préposition initiale et inséparable A' aparier,
étoit vague et incertain, ce verbe paroissoit être
neutre et ne rien signifier de plus que noire verbe
simple parler.
Se plus i ot, plus n'en dirai ;
Car d'autre chose aparterai.
cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 63, V* col. 2.
Ains de tel trayson n'oy aparter nus.
Berte as grans pies, MS. de Gaignat, fol. 124, V" col. 1.
VARIANTES :
APARLER. Ane. Poët. fr. MSS. avant 1300, T. I, p. 423. -
Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 62. — Enfance d'Olivier le D.
MS. de Gaignat, fol. 86. - Le Jouv. MS. p. 235, etc.
Apairler. Chans. fr. MS. de Berne, n" 389, part. II, fol. 41.
Aparller, Apparler. d. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de
Du Cange, au mot Arrationare.
A-par-main, express, adverb. Tout de suite,
bientôt, dans peu de temps, etc. En latin, per me-
dianum (1); suppl. tempus. (Voy. A-par et Au-par-mé.)
VARIANTES :
A-PAR-MAIN. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol 49, V col. 2.
A-PER-MAIN. Ane. Poët. fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1349.
A-par-mesmes, express, adverb. Dans le
même temps.
VARIANTES :
A-PAR-MESMES. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 178, passim.
A-PER-MEMES. Id. ibid. p. 186.
A-PER-MiSMES. Id. ibid. p. 381.
Aparoi, subst. masc. Préparatif. Parure ou ap-
parence. Paroi, porte, fenêtre, etc. Il semble que
dans un sens analogue à celui du verbe apareiller,
ajuster, préparer en général , on a dit que les pen-
nons, les plumes ajustées aux côtés d'une flèche
pour la diriger en l'air, en font les apparais.
(1) Ou plutôt per manè; de même demain est de manè. (n. e.)
AP
— 13 —
AP
. Hai ! Amors, devant tes elz
Ne pwet garir joenes ne vielz...
Contre ton dart n'a nul essoine...
Li fers navre à l'esgarder ;
La flèche coule el pensser ;
Li penon font les apparais, etc.
firime el Tysbé, MS. de S. Germ. fol. 98, R° col. 1.
On sépare, on s'ajuste d'une façon proportionnée
à l'idée qu'on veut que les personnes prennent de
nous en jugeant par l'apparence. Ainsi la significa-
tion d'aparoi peut être relative à celle d'aparoir ou
d'apareiller dans les vers suivans :
Les bestes si sont sans Pastor ;
Nul n'i pense qu'à bel ator
Et biau apurai par dehors,
Et l'ame lessent por le cors.
Hist. de Fr. à la suite du Rom. de Fauvel, MS. du R. n' 6812, fol. 67.
Enfin, le mot aparoi qui dans le sens de prépa-
ralif a signifié les matériaux convenables et propres
à la construction d'un édifice, d'une maison, auroit
pu signifier par la même raison d'analogie, les
choses convenables et propres à la distribution, à
la commodité, à la sûreté d'un logement, cloison,
porte, fenêtre, etc. » Il convint abatre les apparoir
« de la chambre où se tenoit le Roy; et estoit tel le
« vent que onques n'y oza demourer en celle cham-
« bre personne, de paeur que le vent ne le gectast
« en mer. « (Joinville, p. 113. — Voyez Ap.^reill.)
Quelles que soient en cet endroit l'origine et l'ac-
ception d'aparoi, il signifie paroi, muraille, dans
les passages suivans. •< Getta le voirre contre le mur
« ou apparoy de la maison. •> (D. Carpentier, Sup.
Gloss. lat. de Du Gange, au mot Paries; — Lett. de
grâce, an 1454.) « Se tenoit musse... contre le
« torchis ou apparoy de son hostel. » (Id. ibid. Lett.
de grâce, an 1468. — Voy. Appare ci-dessous.)
VARIANTES :
APAROI. Hist. de Fr. à la suite du Rom. de Fauvel, MS.
du R. n° 6812, fol. 67, V» col. 3.
Appaboi. Pirame et Tysbé, MS. de S" Germ. fol. 98, R"
col. 1. - Joinville, p. 113.
Apparût (corr. Apparoi.) Ger. de Roussillon, MS. p. 177.
Apparoy. D. Carpentier. S, G. lat. de Du C. au mot Paries.
Aparoler, verbe. Pailer. G'est le verbe simple
paroler qui, précédé de l'a, préposition initiale et
inséparable , acquéroit une signification active ,
comme «jyaj'/er contraclion A'aparoler.{^. Aparler.)
Quant li Prestres entent et ot
C'on dist de lui itel parole,
Doucement .\loul aparole.
Fabl. .MS. du R. n» 7218, fol. 148, R* col. î.
Cortois set bien, s'on X'aparole,
Rendre raison de quanqu'il ot ;
Jà ne dira un vdain mot.
Diz d'amurs fines, MS. de Turin, fol. 14, R' col. 1.
A-par-soi, express, adv. Tout seul, séparément,
à part. On croit avoir suffisamment expliqué ailleurs
comment l'expression à-par-soi, à-part-soy, ou par-
soi, en latin per se, c'est-à-dire soi-même, de soi,
de soi-même, aura signifié tout seul, à part, sépa-
rément. (Voy. A-PAR ci-dessus, et Appar ci-dessous.)
VARIANTES :
A-PAR-SOI. Reaumanoir, Coût, de Reauvoisis, p. 2.
A-PAR-soY. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 371, col. 1, etc.
A-PABT-SOY. Fouilloux, Fauconnerie, fol. 49, R».
Apartenance, subst. fém. Appartenance. Pro-
priété. Parenté. On observe que la signification
d'appartenance est plus générale que celle d'appen-
dance, puisque appendre n'est qu'un moyen parti-
culier par lequel une chose tient à une autre.
L'idée particulière d'appendance étant donc com-
prise dans l'idée générale d'appartenance, il est
possible que ces deux mots réunis n'aient signifié
rien de plus que le mot seul appartenance. " Nus
« avons rendu à nostre cher le Duc de Bretagne...
« la cunté de Richemund ave totes les upurtenan-
« ces... lequel cunté ove lesquèles apurtenances,
« les auncestres meimesceluy Duc autrefi Is lindrent,
« etc. » (D. Morice, Preuv. de l'Hist. de Bret. T. I,
col. 1013 ; tit. de 1268.) On décomposoit en quelque
façon, l'idée générale d'appartenance, lorsqu'on
disoit : « Laquelle maison dessusdite, si comme elle
« se comporte , o Loutes ses appartenances et
« appendances, le devant dit Jehan Arrode, etc. »
(Ilist. de la ville de Paris, T III, p. 297; til.de 1302.)
" Que nostre hostel , tout ainsi comme il se com-
« porte en long et en large, en toutes ses parties
» haut et bas, avec tous les jardins, appartenances
» et appendances d'icelui quelconques, etc. » (Ibid.
p. 483; tit. de 1364.) Si l'on eût fait réflexion que
Vappendance est une espèce d'appartenance, et que
par cette raison appartenances signifie, dans le
premier de ces trois titres, tout ce que dans les
autres peut signifier appartenances et appendances,
on auroit senti l'inutilité de réunir deux termes
dont l'un signifie en particulier ce que l'autre signi-
fie en général. Peut-être aussi les a-t-on employés
comme termes synonymes 'f Au moins est-il certain
que l'idée particulière d'appartenir â une chose en
y appendant, étant généralisée, l'acception d'appen-
dances peut avoir été la même que celle d'appen-
ditiœ , qui dans un titre latin équivaut seul aux
termes réunis pertinentiœ et appenditiœ, en fran-
çois appartenances et appendances. « Domum
« nostram... unà cum suis appenditiis et adjacentiis
« quibuscumque dedimus.... Concedimus insuper...
« quod prœnominata domus cum suis pertinentiis,
« appenditiis et adjacentiis supradictis, etc. » (Hist.
de la ville de Paris, T. III, p. 484 ; lit. de 1368.)
Il semble donc qu'on se soit trompé, lorsqu'on a
dit en général : » Les appartenances sont les pri-
« mordiales consistances de la seigneurie, en hom-
" mes, terres labourables, prez, bois, cens, rentes,
« coutumes, droitures, péages, etc. Les appendances
« sont au contraire tout ce qui a été nouvellement
« attaché à la seigneurie, tant en domaine qu'en
« mouvances. » (Brussel, Usage des Fiefs, T. I,
p. 17.) Quand cette distinction seroit vraie, relati-
vement à quelques titres, à quelques coutumes où
ces deux mots auroient une signification aussi
différente, oii appartenance désigneroit des objets
évidemment distincts de ceux que désigneroit
appendance, elle deviendroit fausse, en devenant
générale. Les lois Anglo-Normandes, qui sont nos
anciennes lois, distinguent à la vérité « les choses
« regardants des choses appendants à manor, à
AP
— 1-:
« terres, etc. ■> (Voy. Tenurcs de Littleton, fol. 41.)
Mais on n'en conclura pas que, selon ces mêmes
lois, « tout ce qui entre dans la constitution pri-
« mordiale du tlef, le regarde ; que tout ce qui a été
« attaché ù une Icrre, depuis son érection en fief,
« en dépend. « (Voy. Hoiiard, anc. Loix des Fran-
çois, T. I, p. 2GI.) Ce seroit dire que la distinction
des choses rcfjanlants et des choses appendants
n'est autre que celle qu'on a peut-être imaginée
entre appartenances et appendances ; et ce seroit
se méprendre.
« Les choses regardants al manor, ou al terres
« et teuements, ne sont point tout ce que Brussel
« nomme appartenances , puisque nul chose est
« nosmé regardant à un manor, etc. fors que
« villeine. » (Voy. Tenures de Littleton, fol. -iL)
Ce mot regardant ne désigne donc que le villain, et
le désigne comme un serf que l'impossibilité de
s'éloigner de la terre i> laquelle il est attaché, force
à teni'r ses regards tournés vers un maître qui veut
être obéi au premier signal. D'ailleurs, lorsqu'on
lit, (id. ibid.) que « certèines auters choses, come
« advowson, common de pasture, etc. sont nosmés
« appendants al manor, etc. » on voit que les
choses appendants étant des droits honorifiques et
utiles, sont des choses incorporelles, et par consé-
quent de la nature de celles que Britton nomme
appartenances. « Ore fait à dire de disseisines de
« choses nent corporelles, si come des apurte-
« naunces... ascuns apurtenannces sont fraunches,
« si come à regard des personnes et des tenementz
« à quex ils sont dues : enserves quant à regard
« des tenementz dont ilz issent En plusurs
« manères purra un home enserversont tenement,
« si come cascun à graunter î'i autre que rien n'ad,
« que il eyt lyens droit de pescher, ou de laver, ou
« de carier, et par autres servages que purrount
« estre sauns nombre, solonc ceo que ilz sount
« simples ou compountz de autres apnrtenatl)ices :
« car il y ad apurtenaunces.. et si nà apurtenannces
« des apurtenaunces. » (Britton, des Loix d'Angle-
terre, fol. 139.) Ainsi la distinction des choses regar-
dants et des choses appendants, par laquelle on ne
peut justifier celle (Y appartenances et d'appendan-
ces, est une nouvelle preuve que ces deux mots
employés indifféremment ont eu même signification,
soit qu'on la restreignît aux choses incorporelles,
soit qu'on retendit aux corporelles.
Ces mêmes choses étant vues relativement aux
personnes à qui elles appartiennent comme leur
bien propre, le mot appartenance, qui ne subsiste
plus qu'au premier sens, signifioit propriété. (Voy
Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict.) En supposant
avec les Etymologistes latins, que propè soit l'ori-
gine de proprium, supposition d'autant plus vrai-
semblable que par une façon de voir très-naturelle,
rien ne nous est plus proche que ce qui nous est
propre, l'idée de propriété seroit analogue à celle
de proximité et même î» celle d'appartenance, puis-
qu'entre les choses et les personnes appartenantes
les unes aux autres, il y a nécessairement une
proximité réelle ou idéale.
Quoi qu'il en soit, le mot appartenance, comme
terme collectif des personnes à qui l'on tient par la
proximité du sang, signifioit parenté. (Nicot, Dict.)
Mollit en fil grant le pleur en France
De ceus de leur apartenance.
G. Guiarl, MS. M. 37, V.
VARIANTES :
AP.\.RTE.\ANCE. G. Guiart, MS. fol. 37, V».
Aportenaunce. Rymer, T. I, part, ii, p. 109, col. 1.
AppunTENANCE. Id. ibid.
Apurtenance. Id. ibid. p. H4, col. 2. — Livres des Rois,
MS. des Cordel. fol. 8.5, R» col. 1.
Apurten'aUiVce. Britton, des Loi.x d'Angleterre, fol. 139, R*.
Apurtenauxse. Rymer, T. I, part, ii, p. 109, col. 1.
Apaptenant, participe. Qui appartient comme
mari et femme, comme parent, ami, serviteur, etc.
Les hommes que rapprochent diverses relations
physiques ou morales, tiennent les uns aux autres
par ces relations. De là, on a dit, 1° en parlant d'un
mari et d'une femme, qu'ils étoient apartenants :
Cil Rois bastars,
Guillaumes ki ne fu couars,...
Funda S' Estievene à Kaan ;
Et sa feme, par karité,
I funda Sainte Trinité.
Mehaus (1) ot non ; et pour itant
Qu'il estoient apartemint,
Fist li Dus ces deux abeïes,
Ki seront à tousjors siervies.
Par le conseil de l'Apostole
Qui leur commanda par estole.
Pour cou que SIehaus, ki l'avoit
Auques priés, li apartenoit.
Ph. Mouskes, MS. p. 459 et 460.
2° En parlant de personnes entre lesquelles il y
avoit relation de parenté, qu'elles étoient aparte-
nantes. « Celui qui le fié a et tient, estoit apartenant
■> à celui de par qui le fié est escheu. » (Assis, de
Jérus. chap. clxv, p. 115.)
Cil ert amis Buenon et ses apartenan.i.
Biienon de Commarchies, MS. de Gaignal. fol. 193, R' col. 1.
Li Dux Fagons fu Chevaliers vaillans...
Armes ot bleues, si ot d'or trois croissans ;
Tes armes ot li Quens Hues dou Mans ;
Mais que labiaus de gueules biens seans
Y ot ; car l'uus ert l'autre apartcnans.
Enfance d'Ogier le Danois, MS. de Gaignat, fol 101, V- col. 2.
Enfin, quelle que fût l'espèce de relation par
laquelle un homme tenoil à un autre, comme rela-
tion d'amitié, de services, etc. on disoit qu'il lui
étoit apartenant. « Hieu {-2) ocist tuz ces ki aparte-
« nant furent à Achab en Jesrael, les mielz vaillanz,
« e ses privez, e ses pruveires. » (Livres des Rois,
MS. des Cordel. fol. 13i, V° col. 2.)
Ne m'ont leissié soror, ne frère.
Ami, parent, ne apertinant.
Rom. de la guerre de Troycs, MS. Voy. Du Cange, Gloss. lat. T. V, col. 416.
VARIANTE :
APARTENANT. Anc. Poët. fr, MSS. av. 1300, T. IV, p. 1371 .
Aparten.\ns. Enfance d'Ogier le Danois, MS. de Gaignat,
fol. 101, V- col. 2.
Apertement. (Cor. ApiHenant.) Athis, MS. fol. 85, a.'.
1) Matheculdis se transforme au moyen-âge en Maheu, Mahaut, etc.; c'est le nom Matliilde. (n. e.) - (2) Jehu.
ÀP
— 15 —
AP
Apektinant. Rom. de la guerre de Troyes, MS. — Voyez
Du Gange, Gloss. lat. T. V, col. 416.
Apurtenant. Livres des Rois, WS. des Cordel. fol. 134.
Apartenir, verbe. Etre attenant, être proche.
Approcher, être comparable. 11 semble qu'où ait
dit au premier sens : « Mesons qui appartcnoient
« à ladite église.... et une meson asise à porte
« Garnaul. » (Hist. généal. de la M. de Chastillon,
pr. p. 61 ; tit. de 1273.) « Le cemetiere de celle
« église et la meson qmapcn-tient-àu presbitoière. »
(Ibid. p. 63; tit. de 1274.) On disoil, en parlant de
personnes ou de choses qui n'étoient pas compara-
bles, qui n'approchoienl point l'une de l'autre,
qu'elles ne pouvoient s'appartenir.
Nul ne s'i puet à vous appartenir.
Eust. Desch. Poës. MSS. p. 225, eo!. i.
Fleiir ne se peut à fueille appartenir.
Id. ibid. p. 203, col. 2.
Nulle joie ne s'apartient
Au cuer qui bonne amour maintient.
Fabl. MS. du R. n» 7615, T. Il, fol. 137, R'col. 1.
Les autres significations du verbe appartenir,
aussi anciennes que notre langue, n'ont point varié.
Etre parent de quelqu'un , lui être proche , c'est
encore lui appartenir. « Nous vodrions que vos
«' eussiés bien et honor, por ce que vous m'aperte-
« nés de si près, etc. » (Assis, de Jérus. chap. cccv,
p. 206. — Ibid. chap. clxv, p. 115.) Enfin, plus on y
réfléchit, plus on se persuade qu'entre les idées
à' appartenance et de proximité, le rapport est le
même que celui de la cause à l'effet ; que tout ce
qui est propre, relatif, convenable aux personnes
ou aux choses, a été vu comme étant proche d'elles,
lorsqu'on a dit : « Donanz . . . ceu qu'ù unchascun
« apartenivet ; à Deu l'onor et à l'ome la pitiet. »
(S' Bern. Serm. fr. mss. p. 385.) « A Père aparlignet
» k'il anzois ait pitiet k'iror. » (Id. ibid. p. 157 et
148.) « Mainte gent . . . oyent la parole de Deu assi
« cum il ois n'en apartignet de niant ceu c'undist. «
(Id. ibid. p. 272.) « Juront ces choses à tenir tant
« come a chescun apertendra, etc. « (Rymer, T. I,
part, n, p. 46, tit. de 1259.) « Quand il fera aucunes
« choses là où il appartendra liardiement , que il
« le fâche sagement. » (Beaumanoir, Coût. deBeau-
voisis, p. 8. — Voy. Ai'arten.\nce ci-dessus.)
CONJUG.
Apartenist, subj. imp. Appartînt. (Cléomadès.)
Apartenivet, ind. imp. Apparlenoit. (S' Bern. S.)
Apartent, ind. prés. Appartient. (Ilist. généal. de
la M. de Chastillon, pr. p. 61 ; tit. de 1268.)
Apartièncnt, ind. prés. Appartiennent. (S" Bern.]
Apartignent, ind. prés. Appartiennent. (Id. ibid.)
Apartignet, indic. prés. Appartient. (Id. ibid.
p. 157.) Subj. prés. Qu'il appartienne. (Id. ibid.)
Apartigniens, subj. prés. Que nous appartenions.
(Id. ibid. p. 119.)
Apertendra, ind. futur. Appartiendra. (Rymer.)
Appartendra, ind. f. Appartiendra. (Beaumanoir.)
Appartenist, subj. imp. Appartînt. (Ord. T. I.)
Appartinra, ind. futur. Appartiendra. (Ibid.)
VARIANTES :
APPARTENIR. S» Bern. Serm. fr. MSS. p. 107. - Assis, d»
Jérus. chap clxv, p. 115, etc.
Apertenir. Assis, de Jérus. chap. cccv, p. 206.
Appartenir. Hist. généal. de la M. de Chastillon, pr. p. 61 ;
tit. de 1273 ; - Rob. Estienne, Nicot et Monet. Dict.
Appertenir. Modus et Racio, MS. fol. 7, R». - Rabelais,
anc. Prolog. T. IV, p. 17, note 32.
Apurtenir. Brilton, des Loi-\ d'Angleterre, fol, 139, V».
Apartir, verbe. Partager, donner part. Partir,
se séparer. Le rapport de l'action signifiée par un
verbe neutre, comme parler, paroler, etc. étant
désigné par la préposition initiale et inséparable a,
dont le sens est relatif à la préposition latine ad,
on disoit aparter une personne, Vaparoler, etc.
Donner à quelqu'un ;;«?■; à une chose, la partager
avec lui, c'étoit l'y apartir, comme Charles V apar-
tit à ses cendres le Connétable du Guesclin avec
lequel il partagea sa sépulture, en le faisant enter-
rer à Saiiit-Denys, auprès du tombeau qu'il s'étoit
fait préparer. « La mort empescbée de treuver
« successeur à tant de vaillances, luy fit mériter le
« plus honorable prix que sceptre donnast jamais
» à sujet : le jeune Charles à la teste du convoy,
« couvert de ses lauriers, suyvre son corps, et pour
« tiltre solemnel des obligations qu'il avoit à sa
« loyauté Vappartir à ses cendres. » (Hist. de B. du
Guesclin, par Ménard; épit. à la Nobl. Fr.) On sait
qu'à la mort de Turenne , Louis le Grand imita
Charles le Sage.
11 semble qu'au second sens du verbe a;;a?'/n-, l'a
initial soit de même signification que ab, préposi-
tion latine que souvent en françois on rend par de.
Ainsi l'expression apartir son cœur, signifieroit se
départir, se séparer de son cœur, dans ces vers oîi
le Poêle dit qu'une pareille départie ou séparation
lui seroit plus chère qu'une vie sans amour.
. . . Mis en amour mon vivre ay
D'une volenté si très-vraie,
Que jà, pour nul mal que j'en traye,
Ne pour nul bien, n'en partiray ;
Plus chier mon cuer apartiraij.
Et quant mes cuers en partiroit,
Hélas ! li las, quel part iroit?
Certes il le faudroit partir,
Se de lui se véoit partir.
G. Machaut, Poês. MSS. fol. 21, R- col. 3.
VARIANTES '.
APARTIR. G. Machaut, Poës. MSS. fol. 21, R» col. 2.
Appartir. Hist. de B. du Guesclin, par Ménard.
Apas, subst. masc. Pas. Mouvement progressif
qui se l'ait en étendant, en avançant une jambe ou
un pied devant l'autre. De là, on aura nommé pas,
apas, l'espace parcouru et mesuré par ce mouve-
ment. (Voy. Pas ci-après.)
.... Un petit en sus alai,
Environ x ou xi apas,
Par quoi ne les oisse pas.
Froissart, PoSs. MSS. p. 384, col. 1.
On gardoit sans doute une certaine proportion
relative à la mesure de ce mouvement, en posant
des pierres d'espace en espace, pour faciliter le
passage d'un fossé, d'un mauvais chemin; et ces
pierres ainsi disposées s'appeloientja/e/ré's d'appas,
ou simplement appas. « On publie par chacun an
AP
— 16 -
AP
« les bancqs de mars, afin que chacun ait nettoyer
« les rivières et cours d'eaux, réédificr les chaùs-
« séesetchemin.cliacun à l'encontreson héritage....
« à faute de quoy faire ... les deffaillans succom-
« bent eu amende, scavoir pour les cours d'eaues
u qui se trouveront au devant d'une pièce de terre,
« de cinq gros ; et pour les j)icm's d'appas, de trois
« gros. " (Coût, de Ricliebourg S' Vaast, au nouv.
Coût. gén. T. I, p. 450.) " L'on ne peut faire fouir
« en manière (|uelconque sur les chemins, ny don-
« ner em[)esclienient au cours des eaux .... sinon
n pour la réparation des chemins et remettre les
« pierres et appas en lieu et place ordinaire. »
(Ibid. p. 450.) 11 est vraisemblable que c'est par la
même raison de proportion, qu apas a signifié pas,
degré. On a dit figurément, en exhortant unejeune
personne à monter au dernier degré de la perfec-
tion :
Qu'elle monte au septime apas,
Et que de la ne parle pas.
Froissart, Poês. MSS. p. 43, col. î.
VARIANTES :
APAS. Froissart, Poës. MSS. p. 34, col. 1, etc.
Appas. Nouv. Coût. gén. ï. I, p. 450, col. 2.
Apasser, verbe. Passer. La préposition initiale
dans apas et apasser, semble relative au lieu où
l'on est et au lieu oîi l'on passe.
Tuit cil de la cité s'amassent ;
"Vers l'ost le Roy le pont apassent
Pour leur contrée chalengier.
G. Guiart, MS. fol. 84, V.
Apatissement, siibst. masc. Contribution. Les
citoyens dont la vie et la propriété sont à la discré-
tion de l'Ennemi , n'obtiennent souvent qu'avec
peine, la liberté de vivre misérables, en s'obligeant
par des pactes, à payer des contributions ruineuses.
Delà, le mot apatissement dont l'origine est la
même que celle â'appaclis (i), a signifié contribution.
« Prendrons Iribuz el appatissemens sur nos adver-
« saires le plus que nous pouvrons; el sur ceulx
« de noslre party, ferons aucune cueillette la moin-
« dre et la plus douce que nous pouvrons. » (Le
Jouvencel, m. p. 78. — Voy. Apatissube ci-dessous.)
VARIANTES :
APATISSEMENT. Le Jouvencel, impr. fol. 31, R".
Appatissement. Ibid. MS. p. 78.
Apatissure, subst. fém. Pacte qui fixe une
contribution. Cette définition du moi apatissure, en
indique l'étymologie. « Tanneguy, bastard de Cois-
« menet, autrement dit le Borgne apalissa
« la Villeneuve S. George ; ains la ville et tout le
« pays entièrement . . . Après \equel\es apatissures
« faiz et après les deniers par luy receus , non
« contant de ce, bouta les feux tant en ladite
« ville, etc. » (Preuv. sur le meurtre du Duc de
Bourgogne, p. 308 et 309. — Voy. Apatissement ci-
dessus et ArPACTis ci-dessous.)
Apatrié, participe. Qui a un pays pour patrie.
On observera que le mot patrie ne se trouve point
dans le dictionnaire de Robert Estienne, imprimé
en 1539; que lors de la publication du dictionnaire
de Nicot, en 1C06, patrie étoit francisée du latin
patria, qu'on disoil pays de naissance. Ce n'est
donc qu'au xvii' siècle que l'usage du mot patrie
prévalant sur celui de pays, est devenu aussi com-
mun qu'il étoit rare dans le xvr siècle. Joachim du
Bellay, disoit indifléremment pays ou patrie. (Voy.
lUust. delaLang. Fr. fol. 1. — Id. ibid. fol. 6.)
Mais on le biftmoit d'affecter l'usage d'un mot
« obliquement entré et venu en France nouvelle-
>■ ment, et dont les anciens Poètes et Prosateurs
« françois n'avoient voulu user, craignant l'escor-
« chérie du latin. « (Voy. Quintil. Censeur, p. 191.
— Ménage, Observ. sur'la Lang. fr. p. 408.) Quoi-
que le mot patrie fût alors peu usité, il n'étoit pas
nouveau, puisque .lean Chartier (Hist. de Charles
VII, p. 147) s'en étoit servi longtemps avant Joachim
du Bellay, et que le participe apatrié, formé de
patrie, se trouve dans le livre du Jouvencel, dont
l'auteur étoit contemporain de Jean Chartier, histo-
rien du XV siècle. « Il faut faire chose qui soit au
« bien du Royaulme et y pourveoir. Vous y avez
" tous vos pères, vos mères, vos parens, et le lieu
« de vostre nativité ; vous y estes apatriez naturel-
« lement. » (Le Jouvencel, ms. p. 442. — Voy. Patrie.)
Apavit, subst. masc. Espèce de tenement. Espèce
de droit seigneurial et domanial. Ferme de ces
mêmes droits. Dans les constitutions canoniques et
synodales de l'église de Nicosie, la signification
à'apaltus et à'appaltum est la même que celle
à'apaut, dans les Assises de Jérusalem. Quelques
Etymologistes croient que ces mots appaltum et
apallus, en françois apaitt, sont des allérations du
com\)Osé appactîim, pacte. (Voy. Du Gange, Gloss.
lat. T. I, col. 541. — D. Carpentier, Suppl. Gloss.
lat. de Du Gange, T. I, col. 241. — Ménage, Orig.
de la Ling. liai. p. 53 et 54.) 11 est vrai que dans
ces mêmes constitutions on lit une fois appactis
pour appaltis et apattibus. Mais quelle raison d'é-
crire une seule fois fl;j/}flc/!(??i et d'altérer un mot
qu'on suppose être le véritable, en l'écrivant plu-
sieurs fois appaltum et apaltus? (Voyez Labbe,
Goncil. T. XI, col. 2412. — Id. ibid. col. 2395, 2399,
2417et243G.) Peut-être seroil-il plus rai.sonnable
de ne voir dans l'orthographe appftc/;/?» que l'alté-
ration d'un mot propre au langage d'une nation
avec laquelle les Croisades nous avoient mis en
relation d'intérêts politiques et de commerce. Il est
possible que les Italiens doivent à des relations
semblables avec la même Nation, les mots appalto,
appattatore , appaltone, etc. Quant au françois
apaut, la conjecture qu'on hasarde, paroit d'autant
plus vraisemblable qu'on ne trouve ce mot que
(1) On lit dans Froissart, tome 3, cap. iO\, page 276, édition 1560: « Encore avez vous bien oui conter Geoffroi
Teste-Noire Breton qui le tenoit à ta garnison et fort chatel de Ventadour en Limosin. Ce Geoffroi ne s'en fut jamais parti
pour nul avoir. Car il tenoit ledit chatel de Ventadour comme sien et son propre héritage, et avoit mis tout le pays a
certains pactis, et parmi toutes ces pactions touttes gens labouroient en pai.\ dessous lui et demeuroient. » (n. e.)
AP
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AP
dans les Assises de Jérusalem, où il semble désigner
une espèce de tenement de la nature du caseau, en
latin casale, un tenement sujet à la taille serve ou
franche, à une redevance arbitraire ou convention-
nelle, soit en argent, soit en grains. « Alors , de-
« meurerdans la terre d'un Seigneur par apaiit ou
« sodées, signifieroit être à la solde, aux gages
« d'un Seigneur, ou être son tenant. Se aucun vilain
« s'en part, ou fuit de la terre de son Seignor et
« vait en autre terre, et y demore auci com par
« apaut ou sodées dou Seignor, il doit torner en la
« terre de son Seignor, se il est , etc. » (Assis, de
Jérus. chap. cclxxvu, p. 183.)
De là. on auia nommé apaus, les droits que les
Seigneurs tiroient de ces mêmes tenemens, par
extension toute espèce de droit seigneurial et do-
manial. « L'oflice des Enquestes sera de tout abatue,
« et... tous les droictures et apaus que les Maistres
« des Enquestes et autres ont mis et usé, sans
« Tassent des homes. » (Assis, de Jérus. chap. cccxiv,
page. 214.)
La difficulté de percevoir en détail ces mêmes
droits, obligeant à les affermer, on en désignoit la
ferme par le mot apaut. « Des dons, et ventes, et
« eschanges, et apaus qui touchent en la haute
« Court et en la segrete, lesquels ont deniers donés,
* doivent recouvrer lors deniers et rendre le surplus
« qu'ils auront reçu , acuillant etc. » (Assis, de
Jérus. chap. cccvni, p. 209. — Voy. Apauteor.)
VARIANTES :
APAUT. Assis de Jérus. chap. ccLxxvii, p. 185.
Apau. Ibid. chap. cclxxxix, p. 192.
Apauteor, subst. masculin. Fermier de droits
seigneuriaux et domaniaux. Une preuve assez vrai-
semblable (|ue Vapaut étoit une espèce de tenement
de la nature du caseau, pour lequel il étoit dû
certain droit que le même mot aura désigné, c'est
que dans les Assises de Jérusalem, la signification
d'apeauteor est la même que celle d'apallatores
casalium aut rcddituum, dans les Constitutions de
l'église de Nicosie. « De tous les propres apaus dou
« Roy, que l'on ne puisse eslre de trop engigné et
« que il sache lor value de tout le gain que les
• apauteors gaigneront en chascun apau, le Se-
« neschal doi"t avoir deux caroubles franchement. »
(Assis, de Jérus. chap. cclxxxix. page 192. — Voyez
Apaut ci-dessus, et Apauter ci-dessous.)
Apauter, verbe. Affermerdes droits seigneuriaux
et domaniaux. On ne peut guère douter que la défi-
nition qu'on a donnée d'apauteor, ne soit vraie,
puisque les apauteors étoienl ceux à qui les rentes
du Roy éioient apautécs, c'est-à-dire affermées,
a Les rentes dou Roy, quels qu'elles soient dehors
« ou dedens, quant il ou celui qui tendra son leu
« vodra que elles soient apautécs, il les doit co-
« mander; et le Seneschau les doit faire crier et
« multiplier au maus que il porra. ... De tous les
« propres apaus dou Roy, que l'on ne puisse estre
« de trop engigné, etc. » (Assis, de Jérus. chap.
CCLXXXIX, p. 192. — Voy. Apauteor et Apaut.)
II.
VARIANTES :
APAUTER. Assis, de Jérus. chap. cclxxxix, p. 192.
Apautrer. (corr. Ajiauler.) Du Cange, Gl. l.T. VI, col. 361.
Apédefte, adj. et subst. masc. Ignare, ignorant.
En grec dnàiôevioç. Les deux orthographes du mot
françois sont relatives à la diverse prononciation
du mot grec que les uns prononcent apaideutos, et
les autres apaidcvtos. Rabelais, conformément à la
dernière prononciation, a introduit le mot apédefte
dans notre langue. « Par Dieu, dist Panurge à
« Gaigne-beaucoup,.... menez-nous à ces Apéde'ftes;
« car nous venons du pays des Sçavans où je n'ay
« guières gaigné Mais pourquoy, mon compère,
« mon amy, appelle-on ces gens icy ignorans ? Par
« ce, dist Gaigne-beaucoup, qu'ils ne sont et ne
« doibvent nullement estre clercs, et que céans par
« leur ordonnance tout se doibt manier par igno-
« rance,etn'y doibt avoir raison, sinonque Messieurs
« l'ont dict ; Messieurs le veulent ; Messieurs l'ont
« ordonné. >■ (Rabelais, T. V, page 70 et 75.) En
adoptant la première façon de prononcer le mot
grec, on a écrit apédeute. « Le célèbre M. Huet
« croyoit avoir survécu aux Lettres, parce que de
« son temps il se formoit une cabale d'apédeutes.
« de gens ignares et non lettrez, qui sentant leur
« incapacité, et ne pouvant se résoudre à une étude
« assidue de plusieurs années entreprenoient
« de se faire un mérite de leur incapacité, de ridi-
« enliser l'érudition, et de traiter la science de
« pédanterie. » (Voy. Huetiana, p. 2 et 3.) De là, le
suhstainiii apédeutisme encore usité pour désigner
l'ignorance qui vient du défaut d'instruction. (Dict.
de l'Acad. fr.)
VARIANTES :
APÉDEFTE. Rabelais, T. V, p. 68 et suiv. - Cotgr. Dict.
Apédeute. Huetiana, p. 2, etc.
Apelé, participe. Qui a sa peau. C'est en ce sens
que pour signifier l'état glorieux du Lazare après
sa mort, on a dit que son corps étoit apelé; participe
forzué du substantif /)e/, en latin peliis.
De ses deux lès
Fut la piaus en chaut venin frite,
Tant que il fu tous despelés...
Par-tans iert ses cors apelés,
Et mis en gloire o l'Esperite ;
Dont aura il joie partite,
Quant de sa pel iurt rempelés.
Dil de Charité, MS. de Gaignal, fol. 224, V" col. 3.
VARIANTES :
APELÉ. Dit de Charité, MS. de Gaignat, fol. 225, R» col. 1.
Appelé. Ibid. Variante du MS. de N. D.
Apert, participe. Ouvert, découvert, évident,
etc. Ouvert, franc, indiscret, impudent, effronté, etc.
Qui fait voir de l'expérience, de la force, de l'agilité,
de l'adresse, de la valeur, etc. connu par des qua-
lités naturelles et acquises. Chose évidente et connue.
La signification propre et figurée d'apert, en latin
apertus, étoit la même que celle d'aouvert. (Voyez
AouvERT ci-dessus.)
Ot vairs iex, rians et fendus,
Les bras bien fés et estendus,
AP
Blanches mains, longues et ouvertes
Aux templières (1) que vi apertes
Apparut qu'èle ol leste blonde
^^ Fabl. MS. du R. n- 72
- i8 —
AP
7218, fol. 280. V* ool. 1.
Diex ! comme est apei-le folie
Coutivér'(2),' comme une image,
Son cors. Certes, c'est Une rage;
C'est comme une mahommene. ^^^ ^^_^_ ^_ ^^^ ^
Dans les expéditions où Von employoit la force
. ouverte, comme pour mener prisonniers, ou pour
„ aucun autre cas par lequel aucun youloit aler en
. s'i justice elïorciement, on s arnioit de liaubeis et
. des armes qui avecque aparliennent ; et ces armes
„ éloicnt nommées armes apertes. Mais lorsque
« pour aller dans sa justice, il falloit passer parmi
« autre justice, on devoit les porter vestues couver-
„ tement car bien sachent tuit li Seigneur qui
.< sont sougès as Barons, que ne pueent pas donner
« conaié que l'en voit à armes aperles parmy les
« Terres pour che que de l'establissement le Roy
.< tèles ciievauclnées de foiclie et de armes son
« défendues. » (Beaumauoir, C. de Beauv., p. i'JO.)
Pour nos ancêtres qu'une confiance téméraire en
la Justice divine, a trop souvent rendus barbares et
superstitieux, révéuement d'un duel doit un juge-
ment de Dieu qui leur découvroit la vente, et que
dans celte persuasion ils nommo\en[ Loij aperte.
(Voy. Du Gange, Gloss. lat. T. IV, col. IbO et 161.)
L expression adverbiale en apert, en appert, c est-
à-dire ouvertement, à découvert, évidemment, en
évidence, étoil très-usitée. On lit en apart, en
appart. (Ord. T. 111, p. 246 et 656.)
On désignoit une personne dont 1 extérieur laissoit
voir à découvert une âme franche et vraie, en disant
fio-urémenL quelle avoit un visage apert, quelle
étoit anerte; acception encore usitée du participe
ouvert (Voy. Ouvert.) « Si avoit ung visage appert
« et esveillé. » (Percef. Vol. II, fol. IM, V° col. 1.)
S'encontrèrent un Chapelain
Seur un bai palefroi ambiant,
^per< et dehailié (3) samblant
^ Fabl. JlS. du R n" 7218, fol. 23o, R' col. 2.
Peut-être a-t-on dit en ce sens que Clovis étoit
a moult appert et de noble contenance. » (Chron.
S- Denys, fol. 9, V°.)
.... Elle est bonne et preude femme,
Sage, honneste, cointe et apperte;
Et n'est ombrage, ne couverte. , , ^„, „ , „
^ G. Machaut, MS. fcl. 203, R" col. 2.
L'extrême franchise d'une âme qui pense a dé-
couvert, est si naturellement indiscrète qu on ne
sait si l'on faisoit, il y a plusieurs siècles, l'éloge ou
la satvre du caractère François, en disant : ^ Li plus
., apèrt home sont en France. » (Voy. Ane. Poet. l-r.
Mss avant 1300, T. IV, p. 1652.) Quelquefois, ce mot
avért signilioit l'indiscrète franchise d'une jeune
Bersonne trop prompte à découvrir le secret de son
cœur Le Chevalier de la Tour étant allé faire une
première visite h la Demoiselle que son père lui
destinoit pour femme, s'alarma d'en être aime trop
franchement, trop ouvertement, et refusa de lé-
pouser. « Elle fut dit-il: bien aperte ; car elle me
« pria deux fois ou trois que je ne demeurasse point
« a la venir voir. » (Le Ch" de la Tour, Instr. à ses
tilles fol. 8. " On ne pardonne point à une pucelle
.. qu'elle, à la premier requeste, face appert octroy,
.. ne descouvre son couraige. ■> (Voy. Percef. \ ol. M,
fol. 86, V° col. 2.) .. ,
Il y a une esoèce de franchise proscrite par la
décence, à penser et faire le mal ouvertement, a
être impudent, effronté; de sorte que le mot apert.
qui désignoit en général les qualités propres a
caractériser une franchise aussi aimable que 1 autre
est odieuse, a pu désigner non-seulement 1 indis-
crétion, mais l'impudence, l'etTronterie. (^oy. Le
Ch" de la Tour, Instr. à ses filles, fol. 13, \° col. 2.)
Ou'il suffise d'avoir indiqué l'étendue de 1 ac-
ception figurée à'apert; mot dont les orthographes
aouvert et ouvert sont des altérations aussi visibles
que celles û'aspert et espert dans les passages
suivans. « Li larrecins qui n'est pas appers, mes
« toute vois il se prueve par présomptions, si est
« de chaus qui sont pris par nuit en autrui meson»
(Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, page Ib-i.) « Li
« aspers larrechins est chil qui est trouves sezis et
« vestus de la chose emblée ne plus espers lar-
.< recins ne puet estre que chil qui est trouves sésis
.< et vestus de la chose emblée. » (Id. ibid. p. ib4.)
Après avoir prouvé que l'orthographe espert etoit
quelquefois une altération d'apert, évident; on re-
marquera que plus souvent l'orthographe apert
sembloitêtre une altération d'expert. « Noz ancestres
« ont usé de ce mot appert. . . pour expert. . . ou
« adroit aux armes. » (Froissart, Vol. 1, annot. à.)
L'ancienne Chevalerie étant une expérience, une
épreuve continuelle de force, d'agilile d adresse,
de valeur, de bravoure et d'intrépidité, le moi apert
aura signifié fort, agile, adroit vaillant, brave, in-
trénide- acceptions peu faciles à distinguer les unes
des autres. « Aucuns des Seigneurs de la compaignie
« au Duc de Bourgongne se vauldrent mettre a
I « deffence mais che leur valut moult peu ; car
« tous furent prins et menez prisonniers excepte
' « le Seit-neur de îlontagu qui estoit moult appert
« et viste : et l'espée ou poing toute nue saillit
« dehors les barrières. » (J. le Fevre de S' Remy,
Hist. de Charles VI, p. 138.) , ^ ,• • „
Il semble qu'on ait compare au vol de 1 oiseau
l'a-ilité avec laquelle un homme intrépide court à
l'ennemi et le renverse, lorsqu'on a dit :
Trop nous eussent fait de contraire
Cil Sarrasin de pute affaire,
Se ne fussent cil Daraoisel
Qui sont aussi appers qu'oissel. „<, „ wyj
^ Hist. des trois Marks, en -vers, MS. p. 468.
On recommandoit à la Noblesse l'exercice de la
AP
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AP
chasse, comme propre à former un appert homme
d'armes; et l'on disoit on parlant du Chasseur :
Telz homs (1) communément devient
Et chevauchant et bien trayant,
Bien appert et bien combatant,
Bien assaillant bestes terribles...
Pourquoy vient le hardement,
Sans craindre péril nullement :
Il s'accoustume à fort courir,
Et à grans labeurs soustenir :
Toutes telz choses sont reqises
Aux Nobles à qui sont commises
Grans seigneuries et grans terres
Pour plus vaillances avoir ez guerres.
Gace de la Bigno, des Déduits, MS. fol. 99, VS
Les qualités et les vertus qu'indiquent ces vers,
étant nécessaires aux personnes destinées par leur
naissance ii la profession des armes, il est probable
qu'un Chevalier dont la force, l'agilité, l'adresse, la
valeur et l'intrépidité avoient été éprouvées, étoit
ce qu'on nommoit un apert homme d'armes. « Si
« appela tantost le Prince un Chevalier de son
« hostel.... nommé Messire Pierre Ernaut, du pais
« de Bearn, apcrt homme d'armes, et cousin au
o Comte de Foix. » (Froissart, A'ol. III, p. 7. —
Monstrelet, Vol. II, fol. 66.) Mais il paroit très dou-
teux que dans cette expression, appert homme d'ar-
mes, le mol appert soit de même origine qu'expert.
L'un et l'autre existoient en mémetemps dans notre
ancienne langue.
à découppler sont appcrs,
Et en ce qu'ont à faire expers.
Gaco de la Bigne, des Déduits, MS. fol. 102, V*.
S'il faut en croire Le Duchat, appert en ce sens
vient à'adperitus. (Voy. Rabelais, T. IV, p. 166 et
167. note 3.) C'est le même qu apert, en latin
apertiis, suivant l'opinion de Nicot, qui dit (\\x appert
a signifié expert dans l'art militaire, dans un art
quelconque, « parce qu'à celuy qui n'ignore rien
« d'aucun art, discipline et exercice, rien ne luy en
« est clos, ains luy est le tout ouvert, cogneu et en
« main. » (Nicol, Uict. au mot Apertise.) Peut-être
auroit-il mieux raisonné sur la cause de celte
acception figurée à'appert, en latin apertus, s'il eût
dit que l'aptitude acquise ou naturelle, qui se décou-
vre et se fait voir dans un homme, ou dans un ani-
mal, pour certains exercices, a été désignée par le
mot apert, comme l'on désigne encore par le mot
ouvert, l'aptitude, l'ouverture de l'esprit pour cer-
taines sciences. Telk pouvoit être l'origine des signi-
fications û'apert, lorsqu'on disoit en "parlant d'un
homme agile, adroit, vaillant, courageux, inlrépide,
qu'il étoiî apert. (Voy. Nicot et Mônet, Dict.) Les
coups d'un homme fort et adroit, éloienl des coups
apperts ; èlveapert, avoir la jambe aperte A' aWer,
c'étoit être agile, prompt à aller, à courir. « Com-
« mencèrentà traire, à lancer et ù chacer les uns
« les autres, et donner grans coups et apperts. »
(Froissart, Vol. ï, p. 307.) <• Sire Damoysel.... les
« chausses de fer qui vous environnent les pieds et
« les jambes, vous donnent à congnoistre que...
« devez avoir... la jambe... légère et appjerte d'em-
o batre en tous jeulx, pour soustenir justice et
« droicture. » (Percef.Vol. II, fol. 119, R» col. 1 et 2.)
Trois varletz qui sont bien espars
De lièvres garder, et apers
De tost aller, et bien entendre
A leurs lévriers tantost reprendre.
Gace de la Bigne, des Déduits, MS. fol. 110, V'.
Etre apert, avoir la main aperte, c'étoit être
adroit, faire voir de l'adresse, de la dextérité, de la
grâce, en faisant une chose. « Aussi on en a la main
'< plus aperte, etc. » (Ch. de G. Phébus, ms. p. 213.)
Les uns sont hardiz et appers,
Autres couars et mal appers
Eust. Descli. Poës. MSS. p. 471, col. 1.
Gardez-vous, Dames, bien aoertes
Qu'au mengier soiez bien apertes.
C'est une chose c'om moult prise
Que là soit Dame bien aprise.
Fabl. MS. du K, n- 7218, fol. 13-2, R- col. 2.
Un cheval dans lequel on découvroit une inclina-
lion naturelle à regimber, étoit un cheval appert de
regiber.
... Se ton cheval est appert
De regiber la jambe haulte,
Chascun dira que c'est ta faulte, etc.
Contrediz de Sougecreux. fol. 141, R".
On faisoil plus souvent l'éloge des qualités que
l'on découvroit dans un cheval, un chien, etc. en
disant qu'il étoit apert. « Cheval appert (2), léger, et
« bien courant , et bien tournant à la main. »
(Froissart, Vol. IV, p. 82.)
Bien nous appert
Que cbiens sont hardiz et appert,
Et qu'ilz ont proesse et vaillance,
Et sont de grant recongnoissance.
Gace de la Bigne, des Déduits. MS. fol. 75, V».
Au reste, en faisant voir par ses actions, en dé-
couvrant certaines qualités reçues de la Nature, ou
acquises par l'expérience qui les découvre elle-
même, on se fait connoître comme possédant ces
mêmes qualités. De là, le mot apert aura signifié
1- connu pour être agile, adroit, vaillant, etc.
Ne sont mie poindre couvers.
Mais biax, et riches, et apers.
Moult est lor oevre bien veue,
Et d'ans et d'autres conneue.
Athis, MS. fol. 115, V col. 1.
2° Connu pour être expert, non-seulement dans la
science des armes, mais dans toute autre science
en général. Telle paroit être la raison de l'analogie
fiu'on remarque entre les mots apert et expert;
analogie qui les aura fait probablement employer
l'un pour l'autre, sans égard à la diflérence étymo-
logique. « Que bonnes personnes et apertes pour
« délivrer (3), soient aux requestes de la Langue
« d'oc et de la Frani;oise. » (Ord. T. I, p. 675.)
« Appelés à ce plusieurs Sages, connoissans et
« esperts en fait de monoyes. » (Ibid. p. 770.)
On croit aptircevoir l'origine delà formation et de
la signification tîu substantif aperte, dans l'ellipse
par laquelle le participe féminin aperte, désignoit
(I) L'analogie a donné le z au cas sujet de liom, comme aux noms masculins de la 2» déclinaison, (n. e.) — (2) Appert
est ici le contraire d'ombrageux, (n. e.) — (3) Expédier.
AP
— 20
AP
une chose aperte, une chose évidente, une chose
connue :
Quant vous à cui que soit parlés,
En sus de lui si vous t^nés,
Qu'à lui voslre alaine ne viegne ;
Et d'une aperte vous soviegne, etc.
Fabl. MS. du R. n- 7218, toi. 131, V' col. 2.
Une action de valeur, une action connue, ou qui
mérite de l'être. « Les Ilainuyers s'asseml)!èrent
« pour les rebouter; mais ils estoient si puissans
« ([u'ils s'en retournèrent en leur pays sans faire
« aperte qui soit à raconipter, n'escrire. » (Mons-
trelet, Vol. I, fol. 27. — Voy. Aperte ci-dessous.)
VARIANTES :
APERT. Livres des Machabées. MS. des Cordei. fol. 188
Apart. Liv. des Machabées, MS. des Cordei. fol. 188, R".
Apers (plur.) Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 142, V" col. 1.
Appart. Ord. T. 111, p. 246.
Appers. Eeaumanoir, Coût, de Beauvoisis, p. 164.
Appert. Marbodus, de Gemm. Art. viii, col. 1648.
ASPERS. Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, p. 164.
EsPERS (sing. et plur.). Id. ibid. p. 238. - Ord. T. I, p. 770.
EsPERT. Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, p. 192.
Aperte, subst. fém. Qualité par laquelle on se
fait connoitre. Action connue et par laquelle on se
fait connoitre. Au premier sens, les qualités dési-
gnées par le mot aperte, étoient l'expérience, la
force, l'agilité, l'adresse, la valeur, etc. (Voy.ApERT.)
Resaut en piez com hom plains d'aperlé.
Enfance d'Ogier le Danois. MS. de Gaignat, fol. 109, R" col. 2.
. . . D'armes est tex li mestiers
Que il i convient aperte,
Et de bien faire volenté.
Ciéomadès, MS. de Gaignal, fol. 62, R' col. 1.
Peut-être la beauté, dans ces vers :
Dame de grant apperteté.
Plus que palmes hauls et parens;
Dame plus noble et plus flairans,
Plus vermeille et mielx coulourée
Que pomme doulce et savourée ; etc.
G. Machaut, MS. fol. 201, V- col. 3.
Il étoit naturel que ce même mot aperte désignât
spécialementles faits d'armes, les exploits guerriers,
dans un temps où l'on n'avoit guère d'autre moyen
de se faire connoitre et de se distinguer.
Li Dus Tierris, ou poing le bran letré,
Fist celui jour mainte grant aperte :
De lui ert bien, as coups ferir, monstre.
Enfance d'Ogier le Danois, IIS. de Gaignat, fol. 104, V" col. 2.
VARIANTES :
APERTE. Ciéomadès, MS. de Gaignat, fol. 62, R» col. 1.
Apperteté. G. Machaut, MS. fol. 201, V" col. 3,
Apertelet, adj. Vaillant. Signification analogue
î» celle du participe apert, doiu'on a formé le dimi-
nutif fl7;^r/e/ci, en faveur de la rime.
Là fu li Sires de Clervaus,...
Et le Seigneur de Nantoullet
Qui est cointe et apeiielrt.
G. Machaul, MS. fol. 225, V- col. 3.
Apertement, adverbe. Ouvertement, évidem-
ment, etc. Ouvertement, fanchement. De manière
à faire connoitre certaines qualités naturelles et
acquises. Les significations de V^àyerhë apertement
sont toutes relatives ù celles du participe «joerL On
disoit au premier sens : « Pur co véez apertement
« que nient n'est arrière de ce que, etc. » (Livres
des Rois, ms. des Cordei. fol. 13i, V" col. 2.)
Diex t'a monstre, de ce n'en doutes,
En celi songe espertement,
Ce qu'est venu nouvellement.
Geofroi de Paris, ,i la suite du Rom. de Fauvel, MS. du R. n' 6812, fol. 52.
Dans le second sens, apertement signifioit ouverte-
ment, franchement. (Rob. Est., Nicot et Monot. Dict.)
Enfin, agir ou se tenir de manière à faire con-
noitre qu'on avoit certaines qualités, qu'on étoit
expert, adroit, leste, agile, prompt, etc. c'étoit se
tenir ou agir apertement. « Lors print apertement
" son cheval par le frain, et saillit en la selle. »
(Percef. Vol. II, fol. 119. — Voy. Nicot, Dict.)
Moult apartement s'arréèrent
Cil qui par raison tenu èrent
D'aler à ces tabliaus lancier.
Ciéomadès, MS. de Gaignat, fol. 67, V" col. 1.
Moult lvès-aperteme>ît s'arma
Ciéomadès, ne détria.
Ibid. fol. 38, V" col. 3.
Mestres, feites apertement ;
Car je sui ci en grant forment...
Sire, ne me puis plus haster.
Esirubert, Fabl. MS. du R. n" 7996, p. 43.
Bien doit haus hom estre jolis devant la gent,
Cointes et acesmans, se il est de jovent ;
Et doit son cors tenir bel et aperloneiit,
Et si se puet vestir et bien et richement.
Fabl. MS. du K. n" 7218, fol. 335. R- col. 2.
VARIANTES :
APERTEMENT. Livres des Rois, MS. des Cordei. fol. 134.
,\P-\RTEMENT. Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 67.
Apertem.\nt. Monet, Dict.
Appertrment. r.om. de la Rose, vers 22, Percef. Vol. II,
fol. 119, V° col. 1. - Nicot, Dict.
Espertement. Geofroi de Paris, à la suite du Rom. de
Fauvel, MS. du R. n» 6812, fol. 53, V" col. 3.
Apertise, subst. fém. Evidence. Franchise
indiscrète. Aclion qui découvre certaines qualités
et les fait connoitre. Qualité qui se découvre et par
laquelle on est connu. Du participe apert, évident,
s'est formé le substantif apertise, dans le sens
d'évidence. (Voy. Oudin, Dict.) C'est encore dans un
sens relatif à celui d'apert, ouvert, franc, etc. que le
mot apertise signifioit franchise indiscrète. On
craint d'être l'époux d'une Demoiselle, « pour la
« trop grande apertise et la légiéreté et la manière
■' qu'il semble à veoir en elle. " (Le Ch'' de la Tour,
Inst. à ses filles, fol. 8. — Id. ibid. fol. 13.)
En général, une action par laquelle on faisoit
connoitre son expérience, sa force, son agilité, son
adresse, sa valeur et autres qualités naturelles et
acquises, étoit une apertise; par conséquent, un
fait d'armes, un exploit militaire, étoit une apertise
ou expertise d'armes. Il paroit que l'orthographe
expetise est une faute pour expertise qu'on subsli-
tuoit quelquefois au mot apertise. (Voy. Apert.)
« Nécessité luy feist faire une moult belle fl/;/)er-
« tisse : car quant il sentit ce, il ahert les arsons
« du Chevalier h deux mains;... lors se lance... par
« derrière luy sur la crouppe de son cheval. »
(Percef. Vol. I, fol. 143.) « Un maistre Engingneur
« d'appertise... issit de son échaufaut... et tout
« chantant sur la corde... moult fit d'appertises,
« tant que la légèreté de lui et de ses œuvres fut
AP
— 21 —
AP
« moult prisée. » (Froissart, Vol. IV, p. 4.) « Entre
« les autres assaux en firent un qui dura un jour
« tout entier. Là eut mainte grand appertise faite. »
(Id. Vol. I, p. 70.) « En ce temps y eut à Bordeaux
•• sur Gironde une appertise d'armes à courir
« à tout trois lances à cheval et en férir trois coups,
« trois d'espée, et trois coups de dague, et trois
« coups de hache. Si furent les armes faites devant,
'< etc. " (Id. Vol. m, p. 159.) « Furent faites de fort
» belles apertises d'armes d'un costé et d'autre. »
(J. Charlier, Ilist. de Charles VII, p. 14.) « Le Baron
« de Biron n'avoit point faict tant à'expetises
« d'armes comme il en a fait despuis. » (Brantôme,
sur les Duels, p. 103.) Telle éloit encore la signifi-
cation particulière du mot apertise, au commence-
ment du xvu' siècle. « On l'approprioit aux faits
<c militaires; mais rien n'empeschoil que le mesme
« mot ne se pîit employer es autres arts, disciplines
« et exercices. » (Voy. Nicot, Dict.)
On désignoit aussi par le mot apertise ou exper-
tise, les qualités qui se découvrent dans une per-
sonne, et par lesquelles elle se fait connoitre, comme
l'expérience, la force, l'agilité, l'adresse, la valeur,
etc. " Le pont rompit sous luy ; mais par grand ap-
« pertise de corps il se sauva. » (Froissart, Vol. Il,
p. '203. — Voyez Cotgrave, Oudin, Borel, Mcot et
Monet, Dict.) Montaigne se plaignoit de ce que de
son temps on prodiguoit à la vaillance l'Ordre de
S" .Michel, ancienne récompense « d'une expertise
« bellique plus universelle et qui embrassas! la
« pluspart et les plus grandes parties d'un homme
« militaire. » (Essais de Montaigne, T. Il, p. 87.)
\ARIA>TES :
APERTISE. J. Charlier, Hist. de Charles VII, p. t4.
Apertisse. Ch. S' D., Reo. de.s Hist. de Fr. T. III. p. 288.
Appertese. D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Cange,
au mot Apparentia, 3; tit. de 1470.
.\ppertise. Froissart, Vol. I, p. 70, etc. — Borel, Oudin,
Nicot et Monet, Dict.
Appep.tisse. Percef. Vol. I, fol. 143, V" col. 2.
Expertise. Essais de Montaigne, T. il, page 87. — Cotgrave,
et Oudin, Dict.
Expetise. Brantôme, sur les Duels, p. 280.
Apesant, participe. Pesant. (Voir Apeser et
Apoiser.) L'ancienne acception figurée du participe
apesant, étoit la même que celle de pesant, onéreux,
fâcheux.
Ec-vos (1) Boeci cadegu (2) en afan,
E grant ledenas (3) qui l'estan (4) apesayit.
Fragm. de la Vie de Boèce, MS. de S. Benoit-snr-Loire, p. 271.
Apesart, suhst. ?»asc. Cauchemar. Incube. Dans
le premier sens, sorte d'oppression nommée ape-
sart, parce que lorsqu'elle se fait sentir durant le
sommeil, il semble qu'on ail un poids, un corps qui
pèse sur l'estomac. (Voy. Borel, Dict.) La fable des
Incubes est une vieille erreur populaire qui n'a
d'autre fondement que les elîets de cette oppres-
sion. Cependant, Guillaume de Paris, entre autres,
a beaucoup parlé de ces Démons imaginaires, de
ces Incubes que nos ancêtres nommoient Appesarts.
Il discute si leur prétendu commerce avec les fem-
mes est réel, et s'il peut être fécond. (Voy. Mém. de
l'Acad. desB. Lettres, T. XIII, p. G4GetG48. — Borel,
Dict. — Dict. de Trévoux, T. III, col. 938.)
VARIANTES :
APESART. Borel, Dict.
.Appesart. Raoul de Presles, Cité de Dieu, liv. xv, ch. 23.
Apeser, verbe. Faire peser. (Voir Apoiser.) Faire
qu'une chose pèse, qu'elle ait un certain poids. Par
une comparaison tirée de l'action de peser deux
choses, de manière que le poids de l'une l'emporte
sur celui de l'autre , on a dit en parlant des Clercs
dont la science indigente devoit l'emporter sur
l'opulente ignorance des Prélats :
Pour Dieu, Seigneurs Prelatz, embracez diligence ;
Car par -trop de maulx naissent de vostre négligence ;
Ayez pitié des Clercs et de leur indigence
Car ilz savent trop bien ton povoir souspeser,
Et à leurs advantaiges leurs engins apeser ;
Si ne peut-on povoir contre leurs sens peser.
J. de Meun, Cod.vers 645-68i.
Apetisement, suhst. masc. Amoindrissement.
Espèce d'impôt. La signification du substantif ape-
tisement, appel'issement, relative à celle du verbe
apetiser, appetisser, faire plus petit, faire moindre,
amoindrir, n'étoit pas moins générale. « Ne sous-
>i tiendront fait de quelconque Seigneur.... à Vape-
« ticement de la chevance du Roy. » (Ord. T. V,
p. 540. — Voy. Apetiser.) Il semble que parce que
la vente du vin en détail se l'ait à la petite mesure
dans plusieurs villes du Royaume, on ait nommé
appetissement de mesure, et tout simplement appe-
tissement, une espèce d'impôt sur la vente du vin
en détail. (Voy. d'Argentré. Coût, de Bretagne, page
1327, note. — Cotgrave, Dict. — Dict. de Trévoux.)
VARIAJiTES :
APETISEMENT. Règle de S- Benoît, chap. ii.
Apeticement. Ord. T. V, p. 540.
Appetissem.^nt. Monet, Dict.
Appetissement. Cotg. Oudin, Rob. Estienne et Nicot, Dict.
Apetiser, verbe. Amoindrir, diminuer, abréger,
accourcir, etc. On a cherche l'origine de l'adjectif
petit, d'où s'est formé le verbe apetiser, apetisser,
dAns, putitus (5), diminutifdumot;jH/Hsqui nesigni-
fioit petit, petit enfant, qu'en présentant à l'esprit
l'image d'une partie naturelle que voile la pudeur ;
putaen latin, en italien potta. (Voy. Petit.) Mais
croira-t-on qu'il y ait une analogie entre cette
acception particulière ûepulitus et l'acception géné-
rale de petit ; que l'une puisse être une extension
de l'autre? Quel que soit le principe de cette exten-
sion, le verbe apetiser ou apetisser, dans un sens
relatif à celui de l'adjectif petit, signilioit en général
faire plus petite l'étendue, la ((uanlité d'une chose
physique ou morale, la faire moindre, l'amoindrir,
la diminuer. (Voy. Ord. T. III, p. 229, 443, 503 et
521. — Hist. de B. du Guesclin, par Ménard, p. 512,
(!) Voilà. — (2) Chû, tombé. — (3) Opprobres. — (4) Etoient. — (5) Nonius cite le vieux mot latin pe(t/i(s, qu'il rend par
tenuis et e.cilis, et qui se trouvait dans Plaute et dans Lucilius ; Mabillon donne à l'an 775 pitito vitlare. Diplom., p. 498. (n. e.)
AP
22 —
AP
etc. — Cotgrave, Oudin, Rob. Estienne, Nicot et
Monet, Dict.)
Povres homz qui est trez en cort de Sainte Eglise,
Est ausi atachiez, cora chiens à terre glise.
Ce petit que il a, chacun li npalise.
Ce sont gens sans pitié et plain de covoitise.
F»bl. MS. du R. n- 7G15, T. II, fol. 141, R° col. 1.
On conçoit que tout verbe qui désigne une façon
d'amoindrir les choses, de les diminuer, peut être
l'explication du verbe apetissri', comme accourcir,
abréger, etc. « Se la matière est longue ou obscure,
« l'on la doit npcticcr h. mots briefs et entendibles. »
(Fabri, Art de Rétbor. L. I, fol. 3!).) On regrettoit
l'âge d'or, lorsqu'on parlant de .lupiter, on disoit :
Moult eut en luy mol justicier ;
Il fist printemps appelicier, etc.
Uom. de la Rose, Terâ 21097 el 21098.
Dans ces vers, la signification d'apetisser étoit
neutre, comme lorsqu'en parlant d'un homme gé-
néreux et libéral sans diminuer sa fortune, sans
l'endommager, on disoit figurément : » Li saiges
« larges... despent... ce que il peut souffrir sans
« apcticic)'.... Doncques li loons-nous que il soit
« large, etc. » (Beaumanoir, C. de Beauv., p. 9.)
Ce verbe actif et neutre étoit aussi réciproque,
comme il Test encore aujourd'hui sous l'orthographe
apetissev. « Prenés un pot de terre neuve... rempli
« d'eaue bien clère ; puis mettes la poulrlre dedens,
« et... soit tant bouUi que elle s'apelice de la
« moitié. » (Modus et Racio, ms. fol. 130.) « Largesse
« maintenir sans soy fl/;c</c/ej", etc. » (Beaumanoir,
tibi supra.)
VARIANTES '
APETISER. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 206, R" col. 1. -
Eust. Desch. Poës. MSS. p. 385, col. 3.
Apeticer. Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, p. 10. — G.
Guiart, JIS. fol. 67, V». - Modus et Racio, MS. fol. 1.30, R».
Apeticuer. Chron. S' D. Reo. des H. de Fr. T. III, p. 238.
Apeticier. Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, p. 9. — Hist.
de B. du Guesclin, par Ménard, p. i5I2.
Apetisier. Fabl. ilS. du R. n» 7218, fol. 167, R» col. 2.
Apetisser. Orth. subsist. - Ord. T. III, p. .503.
Apetissier. Psautier, MS. du R. n° 7837, fol. 12, V» col. 2.
Appeticer. Ord. T. III, p. 229.
Appeticier. Ibid. p. 443 et 521.
Appetisser. Gace de la Bigne, des Déduits, MS. fol. 116,
R". - Percef. Vol. I, fol. 58, R» col. 1. - Cotgrave, Oudin.
Rûb. Estienne, Nicot et Monet, Trévoux, Dict.
Apie, subst. fém. Douceur. La douceur de la
langue latine étant comparée à la douceur du miel
de l'abeille, on a dit que César « composa un œuvre
« très-élégant, de la raison et manière de bien
« purement et nettement parler, dédiant cest œuvre
« et l'envoyant à Cicero, comme prince et inventeur
« de l'élégant et apie de la langue latine. >• (L'amant
ressusc. p. 263.) La signification figurée de ce mot
apie, formé du latin apis, en françois abeille,
semble caractériser l'atTectation érudite d'un Ecri-
vain du XVI' siècle.
Apiécer, verbe. Assembler les pièces, les parties
d'un tout. Dans une signification particulière ,
assembler les parties d'un pourpoint, faire un pour-
point, le coudre après l'avoir taillé. « Xe fut trouvé
« en la maison du... cousturier, tant seulement que
« ung pourpoint taillé , encores à apiécer et à
<■ quouldre. » (D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de
Du Cange, au mot Appire ; tit. de 1403.)
Apier , subst. masc. Place où l'on met des
abeilles. En latin apiarium. (Voy. Cotgrave, Dict.)
. Apigi-atis, subst. masc. Grapilleur. Telle paroit
être la signification d'apigratis, sobriquet d'un
cuisinier, dans Rabelais, (T. IV, p. 170.)
Apiler, verbe. Mettre en pile, en masse. (Cot-
grace, Dict.) C'est relativement à la signification
propre du substantif pile, en latin pila, d'où s'est
formé le verbe réciproque s'apiler, ou s'appiler,
qu'on a dit dans un sens métaphorique : « La société
«' des hommes se tient et se coust à quelque prix
« que ce soit. En quelque assiette qu'on les couche,
« ils s'appilentei se rangent en se remuant et s'en-
« tassant, comme des corps mal unis qu'on empoche
« sans ordre, trouvent d'eux-mesmes la façon de
« se joindre et s'emplacer les uns parmy les autres,
« souvent mieux que l'art ne les eust sceu disposer. »
(Essais de Montaigne, T. III, p. 307.) On disoit en
parlant d'un homme dont le corps étoit ramassé,
par conséquent robuste et fort, qu'il étoit apilé.
<> Il esloit demeuré petit, mais fort et apilé, les
« épaules grosses. » (Mém. de Montluc, T. I, p. 570.)
Dans un sens plus figuré, sappiler c'étoit se forti-
fier en ramassant toutes les forces de son âme, s'en
faire un appui, comme d'un pilier, d'une digue
contre la violence des passions. « Regardez dans
« vous , reconnoissez-vous , tenez-vous à vous :
« vostre esprit et vostre volenté qui se consomme
« ailleurs, ramenez-la en soy : vous vous escoulez,
« vous vous respandez : appilovous, soustenez-
« vous : on vous trahit, on vous dissipe, on vous
« desrobe. •> (Essais de Montaigne, T. III, p. 391.)
VARIANTES :
APILER. Mém. de Montluc, T. I, p. 570. - Cotgrave, Dict.
.Vppiler. Essais de Montaigne, T. III, p. 356. — Cotg. Dict.
Apilletter, verbe. Rendre aigu. Il semble qu'un
fer apiletté étoit un fer aigu comme celui d'une
espèce de javelot qu'on nommoit pile, pilète; d'où
le verbe apiletter, dans la signification d'aiguiser,
rendre aigu. (Voy. Pile.) « Une sayette ou volet, où
" avoit ou bout ung fer apilletié, etc. » (Lett. de
grâce, an. 1 i76. — Voy. D. Carpentier, Sup. Gloss.
lat. de Du Cange, au mot Pilatus.)
Apincer, verbe. Pincer. On a dit figurément :
Luxure emboe tout et en riens ne la rainco;
Car en tous les estatz mort, acroiche, ou apince :
D'un Duc fait ung villain, et d'un villain ung Prince.
J. de Meun, Cod. vers 1781-1783 .
Apinianlx, subst. masc. pluriel. Bateleurs,
farceurs. On a conjecturé avec assez de vraisem-
blance, que les apinïaulx dont le Cartulaire de
l'abbaye de Lagny fait mention, étoient des bate-
leurs, des farceurs ù qui l'on permettoit d'amuser
le public dans les foires, en exigeant d'eux un tribut
que sans doute on comprenoit dans la ferme des
droits quisepercevoient durant les foires, u Ce sont
« aucunes fermes qui estoient de prouffit à l'abbaye
AP
— 23 -
AP
« de Laigny, es foires de Champaigne el Brye....
« Cil d'apiniaulx et autres menues trueues, lxx
« livres. » (D. Carpentier, Suppl. Ciloss. lat. de Du
Gange, au mot Apinarii.) Celte conjecture est fondée
sur la possibilité que le mot franrois apiniaulx soit
dérivé du latin apinarii, qui désignoit l'espèce vile
et méprisable de ces hommes qu'on appelle au-
jourd'hui bateleurs, farceurs, saltimbanques. On
croit apinarii formé à'apinœ. (Voy. D. Cange Gloss.
lat. T. I, col. 551 et 552.)
Apiter, verhe. Etre ému de pitié. Ce verbe dont
la signification intéresse l'humanité, est encore
usité parmi le peuple en province, où l'on dit apiter,
s'apiter. « Le Uuc se appitoija, si que l'en luy véoit
« les larmes aux yeux. » (Monstrelet, Vol. III, f° 118.)
Quelquefois la signification de ce verbe réciproque
étoit neutre.
Le cueur lors luy appilo'ia.
Vigil. de Charles VII, p. 157.
Dans le temps où nos ancêtres s'amusoient dévo-
tement à voir jouer nos mystères, celui de la Passion
de Nolre-Seigiieur étoit sans doute fait pour émou-
voir la pitié. Aussi lisons-nous qu'à l'entrée des rois
de France et d'Angleterre dans l'aris, le 1 " décembre
1420, « n'estoil homme... à cui le cueur ne apiteasi,
« en voyant le mystère de la passion Nostre-Sei-
« gneur au vif, selon que elle estoit tigurée autour
« du cueur de Rostre-Dame de Paris. » (Journ. de
Paris, sous Charles VI et Charles VII, p. 72.)
VARIANTES :
APITER. D. Carpentier, S. Gl. 1. du Du C. au mot rielosiis.
Apitèer. Journ. de Paris, sous Charles VI et Charles Vil,
p. 72.
Apitoyer. Colgrave, Dict.
Appitoïer. Vigil. de Charles VII, p. 157.
Appitoyer. Monstrelet, Vol. III, fol. 118, V°.
Aplaider, verbe. Obtenir, ou demander. Il
semble que dans un sens analogue à celui du mol
latin placitum, dont on a formé le françois plaiel,
plaid, aplaider une femme à un homme, signifioil
lui obtenir une femme en mariage, la demander
pour lui à des conditions qui plaisent aux parties
que ce mariage intéresse.
Ses parages par force
De la prison d'Aniurs renforce.
Si porchacent tant et li aident
C'une autre feme li aplaidenl.
l'rison d'Amour, MS. de Turin, fol. 30, V° col. 1.
Apleit, sitbst. mase. Ilarnois. Joug. Filet pour
la pèche. On croit (\uap])lect, ajiploil ou apleit est
un mot formé du latin appiieitum, comme A'impli-
citiim s'est formé emploicte, et eiploict û'expli-
cituni; que dans le sens étymologique, il signifie
chose pliée, appliquée, employée a certain usage,
et que relativement à cette acception générale, on a
nommé spécialement apleit, le harnois d'une bête
de somme, d'un cheval de charrue, etc. » Des for-
« faitures que les Sergans prendront... de ce qui
« sera porté à somme, auront la somme et les bas
« etaplail, aulrement harnois. » (Ord. T. VI, p. 228.)
Un jour com autrefoiz li païsant ala
A l'ore de disner, à l'ostex repaira;
A la charue apleiz, soc et coutre lessa.
Rom. deRou, MS. p. 51.
Dans la Bresse, on nomme encore applis, >> les
« cordages et autres choses semblables que le pro-
« priélaire fournit à son métayer, lorsqu'il entre
« dans sa terre. » (Laur. Gl. du Dr. fr.) (Juelquefois
V apleit étoit le joug, la pièce de bois traversant
par-dessus la tête des bceufs qu'on attèle. « Icellui
« Messent donna d'un applect à beufs dont on lye
« ou attelé les beufs. » (D. Carpentier, Suppl. Gloss.
lat. de Du Cange, au mot Aploidum; tit. de 1452.)
La signification A' apleit, filet pour la pêche, est
encore familière aux pêcheurs, sur les côtes de
Normandie. « Comme Jehan Mignot et Jehan Colin
« se feussent accompaigniez pour estre à un [iroffit
« à peschier, advinl que Yapploit ou harnois
« dudit Colin fut plus grevé. » (D. Capentier, iibi
supra; tit. de 1379. — Colgrave, Dict.)
Aotre opinion sur l'étymologie de ce mot et sur
l'analogie des acceptions particulières , harnois,
joug, etc. avec l'acception générale, chose pliée,
appliquée, employée à certain usage, paroit au
moins vraisemblable, \ovs,qu' applect^est rapproché
â'emploicle et cxploict. [Voy. Emploicte et Exploict.)
VARIANTES :
APLEIT. Rom. de Rou, MS. p. 51.
Aplait. Ord. T. VI, p. 228.
Apleiz (plur.). Rom. de Rou, MS. p. 51.
Aplet. Du Cange, Gloss. lat. au mot Aploidum.
Applect. D. Carpentier, S. Gl. 1. de D. C. au mot Aploidum.
Applis (plur^. Laur. Gloss. du Dr. fr.
Apploit. d. Carpentier, S. Gl. 1. de D. C. au mot Aploidum.
Apleitage, mbst. masc. Lieu où des vaisseaux
abordent pour charger ou décharger des marchan-
dises. 11 semble que la signification à'apleilage est
relative à celle de plaele ou plat te, en latin placta;
soit que ce mot signifie ballot, marchandise pliée
en ballot, soit qu'il signifie une espèce de bateau
plat, un vaisseau de transport, ou une place com-
mode pour l'embarquement, ou pour le débarque-
ment. « Si a une pièce de lière sor le Mueeze, ù on
« met faissel, se l'apièle-on apleitage.... Encor i a
« li Cuens sor Meuze une pièche de terre, c'on apele
>' apleitage; si vaut par an xx sols. » (Reg. de la
Ch. des Comptes de Lille. — Voyez D. Carpentier,
Suppl. Gloss. lat. de Du Cange, aux mots Placta,
Placlata, etc.)
Aplenner, verbe. Venir en foule. Signification
analogue h celle du verbe affouler (Voy. Affoiler.)
qu'on croit être dérivé d'un mot dont le sens est
le même que celui de l'adjectif latin pleniis, en
françois plein, d'où le verbe aplenner.
Tous ensemble el cellier aplcnnciit,
Duquel les huis verrouilliez tennent.
G. Guiart, MS. fol. 80, R'.
Aplier, verbe. Plier. (Voyez Plier.) Ce verbe,
composé, de même origine qu'aploier, est une
preuve que le verbe simple plier n'est pas moins
ancien que ploier dans notre langue. Au figuré,
s' aplier signifioitse plier à une chose, s'y soumettre.
AP
— 24 -
AP
Sens solais, sens déport,
Me fait fine amor chanteir;
Et veult ke je soutire et port
Tous mais, sens gueridoneir.
Je seux sil ke s'i np/;>.
Clians. fr. MS. Je Berne, n- 389, part. II, fol. il, V'.
Aploier, verbe. Appliquer. Plier. (Voy. Ploier.)
L'origine de ce verbe aploier est la même que celle
du verbe appliquer, en latin applicare. C'étoit aussi
la même signification, lorsqu'on disoit:
Se Diex me voie,
Tiex fet semblent qu'à Dieu s'aploie,
Que c'est l'éve qui pas ne cort.
FaW. MS. du R. n- 7615, T. I, fol. 101, R* col. 1.
Cil qui ne quiert esongne,
Doit bien à sa besongne
Soi meisme aploiicr.
Prov. du Vilain, MS. de Gaijnat, fol. 276, R" col. 1.
On croit que dans le sens étymologique, i aploier,
s'apiiliquer, c'est se faire un pli, former son corps
ou son esprit ii l'habitude de se plier à certains
mouvemens, à certaines inclinations, comme une
étoffe se plie à la l'orme ([u'on veut lui faire prendre.
Au reste, s'aploier signilloit se plier, plier le corps
en signe de soumission :
Et quant on escrie monjoie,
N'i ot llamen qui ne s'apploie...
Cis molt esniaia les llamens.
Ph. Mou^kes, MS. — D. Carpentier, S. Gl. 1. de Du C. au mot Àplegiare.
Figurément, se plier, plier son esprit, sa raison à
croire une chose, ou à la faire : « Moult est granz
« merveille cornent li humains cuers se polt onkes
« aploier à... croire ke Deus fust hom et ke virgine
« permanust cèle k'enfant avoitporteitetenfantèit. »
(S' Bern. Serm. fr. mss. p. 81.)
Bien fait à desplaire,
Puisk'elle s'est aploïe
Del tout à ma faire.
Clans, fr. MS. de Berne, n' 389, part, il, fol. 37, V'.
Dans cet autre passage, se plier, plier sa volonté
au désir de quelqu'un, incliner à lui faire une grâce.
Je vous requier, dist-èle, Sire,
C'a ce vous voelliés aploier
Que vous me voelliés otroier, etc.
D. Carpenlier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au mot Aplegiare.
Enfin, aploier l'homme aux choses raisonnables,
c'étoit plier ses passions au joug de la raison et du
devoir.
Ma Dame est tant douce à regarder,
Que mauvetiés ne pouroit demourer
En cuer d'ome qui le voie.
Coument donc li fausseroie,
Qui mieus doit s'onneur garder.
En tant qu'amours m'i aploic,
Qui fet tant vice eschiver et redouter?
Ane. Poël. fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1398.
VARIANTES :
APLOIER. S' Bernard, Serm. fr. MSS, p. 81. - Fabl. MS
du R. n» 7989, fol. 64, V» col. 2, etc.
Aploiier. Prov. du Vilain, MS. de Gaignat, fol. 276, R".
Apploier. D. Carpentier, S. Gl. 1. de D. C. au mot Apleyian'.
Aplomber (s'), verbe. Tomber à plomb. Tomber
perpendiculairement. (Cotgrave et Oudin, Dict. —
Voy. Plomber ci-après.)
Aplommer, verbe. Etre amassé, s'amasser.
Tomber en masse. Etre assommant, accablant. Etre
accablé, accabler de sommeil. Enduire, revêtir de
plomb. Il est évident que par une comparaison tirée
des effets de la pesanteur d'une masse de plornb, le
verbe aplommer, de même origine qu'aplomher. a
signifié 1° s'amasser pour tomber sur un ennemi et
l'accabler.
Endroit ceus qui viennent serre?.
Et armez d'armeures chiéres.
En a es chans deux granz et fières.
Où grant flo de flamens aplomme.
G. Guiarl, MS. fol. 264, V'.
2° Tomber en grande quantité, et pour ainsi dire
en masse :
La gresle ne verrez jà
Si dru, com sajettes et dars
Aplonincrciit de toutes pars.
G. Macliaut. MS. fol. 220, V col. 3.
3° Etre assommant par son poids, être accablant :
Noslre fais apoise et aplomme.
Miserere du Recl. de Molicns. MS. de Gaignaf . fol. 203, V" col. 1.
4° Etre accablé, accabler de sommeil. Le verbe
aplommer en ce sens étoit neutre et actif, et l'on
disoit aplommer de sommeil, ou tout simplement
applommer. (Voy. Borel, Cotgrave, Oudin, Rob.
Estienne, Nicot et Monet, Dict.)
Je n'ose
Parler haut ; je croy qu'il repose.
Il est un petit aplomme.
Hélas? il est si assomé, etc.
Farce de Pathelin, p. 36.
On voit que les acceptions figurées d'aplommer
ont précédé dans notre ancienne langue, l'acception
propre enduire, revêtir de plomb. On ne trouve
applommer en ce sens que dans Monet, Dict. (Voy.
Plommer ci-après.)
VARIANTES :
APLOMMER. G. Guiart, fol. 264. - Farce de Pathelin, p. 36.
Aplomer. Borel, Dict.
Aplonmer. g. Machaut, JIS. fol. 220, V° col. 3.
Applomer. Oudin, Dict.
Applommer. Cotgr. Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict.
Apluvoir, verbe. Tomber du ciel en pluie. Tom-
ber comme une pluie. Affluer, abonder. (Voy.
Pllvoir.) Le verbe latin appluere,en (rançois apleu-
voir, semble avoir été formé à l'imitation d'fl/'//îier(?,
pour peindre la fluidité des nuages qui tombent en
pluie, la fluidité de l'eau qui tombe du ciel. C'est la
signification û'apleiivoir dans ces vers :
Salemons qui bien fait à croire,
Il conmenda son flU à boire
L'yaue qui de son puis venist ;
Et avoec, à ce se tenist.
Que entresait (1) l'yaue beust,
Qui en sa citerne aplcusl.
Alars de Canibray, MS. de Gaignat, fol. 144. R* col. 1 et 2.
Par un abus semblable à celui que nous faisons
de l'expression propre tomber du ciel ou des nues,
le verbe apleuvoir signifioit paroitre dans un lieu,
y arriver sans être connu ni attendu.
.... Lor est puis apleuz
Un Chevaliers qui fu perduz.
Farton. de Blois. MS. de S. Gêna. fol. 133. R- col. 3.
(1) de suite, sur-le-champ ; en provençal, atrasag. (N. E.)
AP
— 25 —
AP
Les nuages pluvieux qui flottent dans l'air, sont
une image naturelle des flots qui, lorsque la mer
monte, s'élèvent et retombent en pluie sur le rivage
où ils se brisent. De là, on aura désigné le flux de
la mer, en disant que la mer ou le flot apleul.
. . . Est, pour peur de marée,
Chascune aus deux bouz aancrée ;
Si que flot qui doie aploitvoir,
Ne les a povoir de movoir.
G. Guiart,MS. fol. 312, R-.
Passèrent couart et liardi,...
Tout droit la seconde semaine
De Juignet, outre la rivière
Dont ge vous ai parlé derrière,
Où la mer estoit apleue.
Id. fol. 283, R-.
C'est encore relativement à l'idée d'une pluie qui
tombe en abondance, qn'apleuvoir signifioit les
flots, l'affluence du monde qui abonde dans un lieu,
en y tombant comme la pluie, •■ Cume Absalon fist
« le sacrelise, ces ki od lui furent firent cunjureisun
« encuntre David, e li poplesapluveitde tûtes parz,
« e fud e se teneit od Absalon. » (Livres des Rois,
Ms. des Cordel. fol. 59, R° col. 2.)
Li villains des villes aplovoient.
Rom. de Rou, MS. p. 319.
Ileuc viennent, ileuc apleuvent ;
Depuis vers S' Orner s'esmeuvent.
G. Guiart, MS. fol. 27i. R'.
Il semble que dans les vers suivans on ait écrit
aparleuvent à cause de la mesure.
Mansiaus, Berruiers, Orlenois
A granz compaignies aparleuvent ;
Les oz Loys de Chinon meuvent.
Id. fol. Hi, R'.
VARIANTES :
APLUVOIR. Livres des Rois, MS. des Cordel. fol. 59.
Aparlkuvoih. g. Guiart, MS. fol. 114, R°.
Aj>leuvoir. Id. fol. 65, R».
Aplovoir. Ch. S' Denys, Rec. des H. de Fr. T. VII, p. 127.
APLOuvoiR. G. Guiart, MS. fol. 312, R». - J. Le Febvre de
S' Remy, Hist. de Charles VI, p. 98.
Apocalipse, suhst. fém. Apocalypse. On jugera
sans doute qu'Adam de Cambray, Premier Président
du Parlement de Paris, ne respéctoit pas assez l'au-
teur mystérieux de VApocalijpse, lorsque pour dési-
gner ces Jurisconsultes ignorans et décisifs, à qui
l'origine obscure des Droits coutumiers et de nos
anciens usages semble avoir été révélée, il disoit
« avoir veu que gens coustumiers et non clercs, en
« parloient comme S' Jehan de l'Apocalipse. » (Voy.
D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Cange, au
mot Apocalijpsis.) Rabelais paroit avoir abuse de la
même comparaison, en dé\]gur3inl\e mol Apocalipse.
Le Frère Jean des Entommeures, supposant que
Gymnaste parle de ce qu'il n'entend pas, de ce qu'il
ignore, lui dit : « Voire, voire, vous en parlez
« comme Sainct Jean de la Palisse. - (Habelais,
T. IV, p. 7i et 75.) On croit que la Palisse est l'allé-
ration du mot Apocalipse, ou Apocalice, précédé de
l'article. 11 est possible qu'on ait écrit apocalice;
mais cette orthographe citée par Le Duchat {ubi
supra, note 9), ne se trouve point dans Froissart
(Vol. II, chap. cLNxin,édil. de Le Sauvage.) C'est pro-
bablement au chap. axxm du Vol. Il d'une édition
peu connue que renvoie la note de Le Duchat.
L'auteur du Roman de la Rose, après avoir per-
sonnifié V Abstinence-contrainte , la compare au
cheval de V Apocalipse, au pallidus equus qui dans
V Apocalypse porte la mort.
Tantost Abstinence-contrainte
Vest une robe cameline
Et s'aourne comme béguyne...
De belle taille est à devys;
Mais ung pou fut pale de vis ;
Et ressarabloit la pute lice
Le cheval de l'Apocalipse
Qui signifie la gent maie
D'ypocrisie taincte et pale ;
Car ce cheval sur soy ne porte
Nulle couleur fors paie et morte.
Rom. de la Rose, vers 12169-1Î797.
VARIANTES :
AP0C.4.L1PSE. Rom. de la Rose, vers 12793.
Apocalice. Rabelais, T. IV, p. 74, note 9.
Apodixie, siibst. (cm. Démonstration, explica-
tion. On croit que le mot françois apodixie est une
altération du mot grec dniâiqiç, et que Y Apodixie
pour la Messe, ouvrage de Barthélémy du Poix, ou
de Beau-Poix, auteur du \\i' siècle, étoil la démons-
tration de quelque vérité relative au sacrifice de la
Messe, ou l'explication des cérémonies qu'on y
observe. (Voy. }>a Croix du Maine, Biblioth. p. 33.)
L'adjectif apodictique, terme didactique, de même
origine qu'apodixie, signifie encore évident, dé-
monstratif.
Apodytère, subst. maso. Lieu où l'on se dévêt,
où l'on se déshabille. En grec dnoâvrijQioy. (Voy.
Monet, Dict.)
Apoigner, verbe. Prendre avec le poing. Pren-
dre une chose et la tenir en fermant la main, en
serrant le poing. « Bourdon apoigna ledit coustel ;
« mais ledit Piene lira si fort que il lui trancha les
« mains. » {D. Carpentier, ubi supra; tit. de 1374.
— Voy. Empoigner.) On soupçonne que ce même pré-
térit apoigna, dans un autre titre de 1389, est moins
le prétérit d'apoigner, que celui du verbe apoindre,
prendre en piquant avec la pointe d'un couteau,
d'une fourchette, etc. « Joudon appoigna dudit
« poulet en l'escuèle. » (D. Car penûer, ubi supi-a.
— Voy. Apoindre ci-dessous.)
VARIANTES :
APOIGNER. D. Carpent. S. Gl. 1. de Du C. au mot Arpagare.
Appoigner. Id. ibid. tit. de 1389.
Apoindre, verbe. Piquer, coudre. Piquer, don-
ner des éperons. Venir en piquant des deux. (Voy.
Poindre.) Le premier sens est coudre, attacher une
chose à une autre, en les piquant, en y faisant des
points. On lit qu'au moment où Adam et Eve rougi-
rent de leur nudité,
Por lor humanité repoindre,
Conmenchièrent lors à apoindre,
Et à noer et à lyer
Ensole fuelhes de figier.
Les IV filles le Roy, MS. de Turin, fol. 39, R' col. t.
AP
26 —
AP
Dans le second sens, on disoit :
Garins li Dus vint apoignant ;
Tint une lance à fier trençant.
Ph. Mouskcs, MS. p. 191.
Apoingnant vint ; à haute vois s'escrie :
Rois Anseis, li miens cors te défie.
Anscis, MS. fol. 30, V col. 2.
De là, le verbe apoindre signifioit piquer droit à
un adversaire, pour le comballre, pour le vaincre;
venir à lui eu piquant des deux, en poussant un
cheval à sa rencontre. « Si laissa courre Agravain
" qui aussi luy apoignoit. Hz s'entrefièrent des
0 glayves, si qu'ilz en font voiler les esclatz. »
(Lanc. du Lac, ï. II, fol. 70, V- col. 1.)
Normanz comparurent ;
D'un pendant (1) sortent où il furent...
Li Roiz lierait de loing les vist ;
Guert apela, si li a dit :...
II apoitujnent à nos C(jnquerre, etc.
Rom. de Rou, MS. p. 395.
Il paroit assez naturel que dans un temps où la
Noblesse combattoit ordinairement à cheval, on ait
désigné un ennemi qui venoitdansun pays pour en
faire la conquête, en disant qu'il apoingnoit à le
conquérir. Au reste, apoindre d'un lieu à un autre,
c'étoit venir d'un lieu à un autre, en piquant des
deux, en poussant son cheval, en lui appliquant aux
flancs les pointes des éperons.
A tant, ez le Barnage qui apoingnoit detriés,
L'Empereres devant, qui s'estoit avanciés.
Guiteclin de Sassoigne, MS. de Gaignal, fol. 248, R" col. i.
Cil vindrent volentiers, n'i a cil qui n'i apoingne ;
Nul n'i requiert respit, ni terme, ni aloingne.
Rom. de Rou, MS. p. 41.
Apoingnant, participe. Piquant, donnant des
éperons. Telle étoil la signification de ce participe,
formé d'après l'ancienne conjugaison du verbe
apoindre, lorsqu'on disoit venir apoignant, s'en
venir appoignant. (Ph. Mouskes, ms. p. 191. —
Percef. \ol. 1, fol. 153. — Voy. Poingnant.)
VARIANTES :
APOINGNANT. Anseis, MS. fol. 30, V° col. 2.
Apoignant. Ph. Mouskes, MS. p. 191.
Appoignant. Percef. Vol. I, fol. 153, V» col. I.
Apoiser, verbe. Peser; être pesant, fâcheux.
Fâcher. Rendre pesant, appesantir. Il est probable
que l'orlhographe apeser n'a d'autre cause que la
prononciation vicieuse de la diphthongue oi dans
apoiser ('2). (Voy. Apeser.) La préposition initiale du
verbe composé apoiser, désignoit un rapport idéal,
lorsqu'on disoit :
Nostre fais apoise et aplomme.
Recl. de Moliens, MS. de Gaignal, fol. S03, V col. 1.
Un de nos anciens Poètes, qu'une femme avoit
plaisanté sur son âge, observoit malignement qu'il
y avoit longtemps qu'elle étoit belle, et que la
durée de sa beauté en étoit nécessairement la déca-
dence. Il croyoit le prouver en disant :
Cou c'on a tant porté
Tost chiet, k'adès apoise.
Ane. Poêt. Fr. MSS. ayant 1300, T. m, p. H5J.
La préposition initiale de ce même verbe apoiser,
peser sur un corps, étoit absolument inutile, lorsque
dans le sens de poiser, peser en appuyant, on disoit
apoiser sur, etc.
Si l'adoise (3)
A l'esperon, et pas n'apoise
Sore celui ; si resvoilla.
Rom. de Perceval, MS. de Cerne, n" 354, fol. 262, R" col. 2.
C'est dans un sens analogue à celui de notre
verbe peser, être fâcheux, qu'on disoit figurément:
Ce sachez, dur m'en poise :
Mais dictes-moy comment le fait apoine.
Percef. Vol. V. fol. 112. V col. 2.
On comparoit et l'on compare encore en ce sens
une chose fâcheuse, à un poids sous lequel on
souffre.
Quelquefois le verbe apoiser, comme aparîer,
aparoler, etc. étoit actif par la force de la préposi-
tion initiale, et signifioit fâcher, faire une chose
qui poise ou pèse à quelqu'un, qui lui est fâcheuse.
(Voy. Peser et Poiser ci-après.)
Mors apoise les envoisiés (4).
Poème de la Morl, MS. de Berne, n' H3, fol. 199, V» col. 3.
Dans la signification de rendre pesant, appesan-
tir, on a dit en parlant de Dieu : « Si apoeset sor
« noz toz sa main ; car nos péchâmes tuit en Adam. »
(S' Bern. Serin, fr. ms. p. 5. — Voy. Apeser.)
VARIANTES :
APOISER. Ane. Poët. Fr. MSS. avant 1300, T. III, p. 1I5I. -
Rom. de Perceval, MS. de Berne, n» 354, fol. 262.
Apoeser. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 5.
Apollien, adj. Qui appartient à Apollon. Adorer
dans sa maîtresse la grâce d'Apollon réunie à la
gravité de Pallas, est une galanterie d'un Poêle du
xvr siècle.
Si je veux veoir quelque perfection ;
Je veoi en toy la grâce Appollienne,
La gravité plus que Palladienne,
Où gist l'espoir de mon intention.
Poês. de Lojs le Caron, fol. 13, V-.
Apollin (5), subst. masc. et adj. Apollon. Faux
Dieu ; Faux Prophète. Qui appartient à Apollon,
L'imagination de nos anciens Poètes, affectée du
spectacle des Cours qu'ils fréquentoient, semble
n'avoir voyagé en Enfer que pour y voir des fêtes
et des tournois, où les faux Dieux et les faux Pro-
phètes, tels qu'Apollon et Mahomet, s'ébattoient
avec les Diables. Un de ces Poètes, feignant d'arri-
ver avec des nouvelles de la Cour infernale, dit en
s'écriant :
Ha liai ! ha hai ! je suis venus.
Salus vous mande Behebus,
Et Jupiter et Apollin.
Je vieng d'Enfer le droit chemin ;
Novèles conter vous en sai...
A mengier oi à grant plenté...
(1) terrain en pente. — (2) Le premier e de pensare, après la chute de n, a donné régulièrement poiser : on s'explique
plus difficilement que ii soit resté dans penser, venu du même mot latin appliqué à une opération intellectuelle, (n. e.) —
(3) ou ucleise; touche; vient à'adeser, fait peut-être sur adhœsum. (N. E.) — (4) ceux qui se divertissent. — (.5) Ce mot se
trouve déjà dans la Chanson de Roland : « Mahummet sert e Apollin recleimet (v. 8). » (N. E.)
AP
- 27 —
AP
J'aporte d'Enfer grant pardon
De Tervagan et de Mahom, etc.
Fabl. MS. du R. n- 7-21S, fol. 242, R' col. 2, et V' col. 1.
On lit ailleurs qu'au Tornoiement-Anleclirist :
Vint Jupiter
Et tuit li bon Baron d'Enfer,
Dont il i ot dix mille et plus.
Jupiter avec Saturnus
Chevauche, et Apolin le preu, etc.
Fabl. MSS. du R. n' 7615, T. U, fol. 189, V- col. 1.
Ce nom propre à'Apollin étoit, par une espèce
d'antonomase, un nom commun aux faux Dieux,
même aux faux Prophètes. Pour nos Poètes et
Romanciers du temps des Croisades , croire à un
Dieu tel qu'Apollon, ou à un Prophète tel que Maho-
met, c'étoit une même chose. Aussi nommoienl-ils
Gent-Apollin, toute nation ennemie du Christia-
nisme, soit Payenne, soit Mahométane. On pourroit
imaginer qn' Apollin dans celte expression est adjec-
tif, si l'on ignoroit que dans notre ancienne langue,
la suppression de la préposition relative de étoil
très-ordinaire.
Moult ot en Rorame cèle nuit grant hustin,
Au deslogier de la gent Apolin.
A l'ajorner, quant la nuit ot pris fin,
Erent monté Païen et Sarrazin.
Enfance d'Ogier le Danois, MS. de Gaijnal, fol. 100, R* col. 2.
Dans un autre Roman, le fils d'un Roi Sarrazin
annonce sa conversion et celle de ses sujets , en
disant :
Ci guerpisson tuit Apolin,
Et Mahomet et Tervagant :
Ne pueent faire home garant.
Jà croi-ge bien el Creator
Qui du siècle est justiseor.
Blanchandin, MS. de S. Germ. fol. 186. V" col. 1.
Ailleurs, jurer son Apollin, c'est jurer au nom de
ses faux Dieux ou de ses faux Prophètes.
Li Soudans vient parmi la presse,
" Haut tient l'escu, la lance bes^e :
Si a juré son Apolin, etc.
l'arlon. de Blois, MS. de S. Germ. fol. 156. V' col. 2.
Il a plu à un Poète du xvr siècle, de faire Apollin
adjectif de même signification qu'/lj^oZ/ïe», dans ces
vers où, dédaignant le laurier d'Apollon, il offense
les Muses pour flatter sa maîtresse:
Je ne fay point aux Muses révérence
Pour m'enrichir du laurier Apollin ;
J'admire plus d'une toille de lin
Les blancz mouchoirs cantillez d'espérance.
Poès. de Loys le Caron, fol. 14, R°.
VAR1.\NTES :
APOLLIN. Fabl. MS. du R. n° 7218, fol. 242, R» col. 2. -
Poës de Loys le Caron, fol. 14, R".
Apolin. Enfance d'Ogier le Danois, MS de G. fol. 106, V».
Appollin. g. Machaut, Prise d'Alexandrie, MS. fol. 226.
Apollinaire, adj. et subst. Qui appartient à
Apollon. Espèce de plante, hanebane, jusquiame. Il
est vraisemblable que dans un recueil d'Epithètes,
tel que celui de M. de la Porte, auteur du xvr siècle,
la peur apollinaire est la fleur du laurier, arbre
consacré h Apollon, le Dieu des Sciences. (Voyez
Apollin et Apollinee.) Le Dieu des Sciences étoit le
Dieu de la Médecine. De là, on aura nommé apol-
//)w/?'^, la jusquiame, spécialement celle dont la
fleur et la graine sont blanches, et qui au témoi-
gnage de Galien est très-bonne en Médecine. Il la
distingue de deux autres espèces de jusquiame que
l'expérience a reconnues pour être d'un usage
dangereux La graine de l'une est noire, et celle de
l'autre est roussàtre. C'est en sous-entendant le
substantif plante ou herbe, en latin herha ou planta,
que l'adjectif (T/;o///Hfl/rc, en latin apollinaris, a si-
gnifié seul hanebane, jusquiame. {Voy. Cotgr. Dict.)
Apollinée, adj. fém. Qui appartient à Apollon.
La fleur apollinée est sans doute la même que la
fleur apollinaire. (Epilh. de M. de la Porte. — Voy.
Apollinaire ci-dessus.)
Apolloniseï*, verbe. Versifier comme Apollon.
En général versifier. On lit dans la Muse historique
de Loret, qu'Apollon, sensible ù la mort de Charles
Deys, Poète du xyu- siècle, en avoil bien grondé :
Car il aimoit ce galant homme
Plus qu'un Normand n'aime la pomme ;
D'autant qu'en son art studieux
Il apollonisoit des mieux.
Goujct, Biblioih. Fr. T. X\l, p. 291.
Apologème, subst. mase. Apologie. Du verbe
grec dTToXoyéofiae, loquor pro alicujus defensione, a
été formé le substantif apologème, de même signi-
fication qu'apologie, en grec dnoXoyia. On a imprimé
en 1577, V Apologème de Guillaume Paquelin, pour
le grand Homère, contre la repréhension du divin
Platon. (Voy. Du Verdier, Biblioth. p. 500.)
Apologiqne, adj. Apologétique. On ne voit pas
trop pourquoi ce mol apologétique a été substitué
à l'adjectif apolor/iquc, formé si naturellement du
substantif apologie. Charles Fontaine, auteur du
XVI' siècle, vanloît l'utilité des préfaces apologiques,
et croyoit en prouver la nécessité par celle de
François Aretin « sur la translation des grecques
« epistresde Phalaris. » (Voyez Quintil. censeur,
pages 227 el 228.)
Apoltronner (s'), verbe. S'accoutumer à la
paresse. On observera que le mot italien poltrone,
francisé par nos Auteurs du xvr siècle, a pu se
former de /JoZiro, autre mot dont la signification
vuls;aire et analogue à celle de fallemand polster^
oreiller, lit, coussin, couche , est attestée par des
Etymologistes Italiens et par le Dict. ilal. fr. d'Ou-
din. Il esl possible que relativement à celte étymo-
logie, le verbe latin pultronizare ou poltronizare,
d'orio'ine italienne, ait signifié dans une bulle du
Pape'^Jean XXII, datée del'an 1317, « vilampinguem
» volvere cum liberlate et sine labore deditus
« somnc, et vagalioni continuée. » (Du Gange, Gloss.
lai. T. V, col. 978 ) Cette définition du verbe latin
poltroni'Mre, seroit par la même raison celle du
verbe françois s apoltronner, proprement s'accou-
tumer au lit(I), y faire le paresseux; de là, s'accoutu-
mer à la paresse, par conséquent à l'oubli de ses
devoirs. On a dit en ce sens que s'appoiltronner
(1) On trouve encore en portuguais poUrona, grand fauteuil, en italien boldrone, couverture de lit. (N. E.)
AP
— 28 -
AP
autour d'une femme, cétoit « pour elle contaminer
« celle unicque et suprême affection que doibt
. l'homme à Dieu ; laisser les offices qu'il doibt
« naturellement à sa patrie, à la république, à ses
• amis; mettre en nonclialloir ses estudes et né-
• goces pour continuellement à sa femme com-
« plaire. » (Rabelais, T. 111, p. 191.) Un chien de
chasse accoutumé à la paresse par le défaut d'exer-
cice, étoit un chien apollronné. •• Les chiens, pour
« s'estre apoltroiinez et rendus trop gras,
« perdent le sentiment. » (Fouilloux, Vénerie, fol.
124, R°. — Voy. Apoltron.mr ci-dessous.)
VARIANTES "
APOLTRONNER (S'). Fouilloux, Vén. fol. 124, R».
Apoitronner (s'). Cotgrave, Dict.
Appoiltronner (s'). Rabelais, T. III, p. 191.
Apoltronnir, verbe. Accoutumer k la paresse,
rendre lâche, énerver. Etre accoutumé à la paresse,
devenir lâche, s'énerver. On a indiqué quelle pou-
voit être l'oriyine de ces significations figurées du
verbe apoltronnir. (Voy. Afoltronner.) Il étoit actif
au premier sens : « Toute gourmandise, yvrongne-
« rie, paillardise, et toute volupté infâme . . . apol-
" tronit et relâche le soldat. « (Sagesse de Charron,
p. 441.) Il Le mariage . . . apoltronit ou accroupit
• les bons et grands esprits. •• (Id. ibid. p. 179. —
Voy. Appaillardir ci-dessous.) Il semble qu'apol-
tronni soit neutre, lorsqu'on disoit :
. . . J'ayme mieux oysif, me sauvant de l'envie,
Traîner apoltroni le reste de ma vie.
(Euv. de Baif. Epil. au Roy, p. U.
En s' accoutumant à la paresse, on devient lâche.
De là, ce verbe a signifié devenir lâche. (Voy. Oudin.
Dict.) Un Prince « appollronni à des occupations
« lasclies et vaines, étoit un Prince énervé et devenu
« lâche par l'habitude d'une vie paresseuse et
« inutile. Il n'est rien qui puisse si justement
« dégoûter un sujet de se mettre en peine et en
« hazard pour le service de son Prince , que de le
« voir appoltronnij cependant luy-mesme à des
« occupations lasches et vaines. » (Essais de Mon-
taigne, T. II, p. G28. — Voy. Apoltrowiser.)
On terminera cet article, en remarquant que les
opinions varient sur l'origine de poltron, apoltron-
nir, etc. Saumaise, et après lui Savaron , Lindem-
brog, Bourdelot, Vossius, la font remonter à une
loi de Valentinien et Valens, contre les soldats qui
s'exemptoient lâchement du service militaire, en se
coupant le pouce ; et croient que poltron est formé
de poUice truncus.W &emh\e qu'on ait eu en vue
cette étymologie plus érudite que vraisemblable ,
lorsqu'on a dit qu'en termes de Fauconnerie, apol-
tronnir un oiseau c'étoit le rendre lâche , en lui
coupant les ongles des pouces, qui sont les doigts
de derrière. (Dict. de Trévoux. — Voy. Poltron.)
VARIANTES :
APOLTRONNIR. Oudin, Dict. - Dict. de Trévoux.
Apoltronir. Sagesse de Charron, p. 411, 576, etc.
Appoltronnir. Essais ie Montaigne, T. II, p. 6'28.
Apoltronniser, verbe. Rendre poltron, rendre
lâche. Signification figurée, de même origine que
celle du verbe apoltronnir. Mont-Bourcher pensoit
que « le moyen de rendre le François vaillant ,
» comme son naturel l'y porte assez, s'il n'avoit
« esté flyjoZ/ronH /se d'ailleurs, étoit de rétablir le
» gage de bataille en champ clos, de prescrire des
« lois au duel, et d'interdire l'usage des pistolets de
« poche, des poignards et autres armes traîtresses
•< avec lesquelles les plus gens de bien et coura-
« geux .... seront tousjôurs malmenez par les
« poltrons. » (Mont-Bourcher, des Gages de Bataille,
fol. 23, R° et V°. — Voy. Apoltronnir ci-dessus.)
Apoure (s'), verbe. Se disposer. C'est proba-
blement d'après l'infinitif aponre ou apondre, formé
du latin apponere (comme de reponere s'est formé
répondre ou réponre) qu'on a dit figurément :
Joie aurai; mes ne sai dont (1),
Se à merci ma Dame ne s'nponf.
Aiic. Poét. fr. .MSS. avant 1300, T. II, p. 637.
CONJLG.
Apont (s"), indic. prés. Se dispose. (Ane. Poël. fr.)
Aporétique, adjectif. Embarrassant, douteux-.
(Oudin, Dict.) Ce mot formé du grec Snoçoç, qui est
sans passage, en latin invius, a pu signifier au
figuré douteux, embafrassant, qui ne laisse aucun
passage, aucune voie pour arriver au point d'une
question à résoudre.
Aposer, verbe. Poser. Imposer. Disposer. On
indi([uera l'origine des acceptions usitées et Inusitées
du verbe apposer et du substantif apposition en
observant qu'ap])0ser signifie poser une chose contre
une autre chose, ajouter l'une à l'autre, poser deux
choses de manière qu'elles soient contiguës ou rela-
tives, les appliquer, les joindre par apposition.
(Monet, Dict. — Dict. de l'Acad. Fr.) La préposition
initiale et inséparable qui désigne l'idée de cette
position relative, est superflue dans les expressions,
« apposer la main à la poitrine, apposer une mar-
« que à une chose, etc. » (Rob. Estienne et Mcot,
Dict.) Plus anciennement, en parlant dune personne
à laquelle il sembloit naturel de croire, on disoit
figurément que « créance lui étoit tost apuse; n
littéralement, qu'en elle créance étoit bientôt posée,
que foi lui étoit bientôt ajoutée.
Que ma vie soit laide ou bêle,
N'est pas à mon sergant (2) repuse.
Et on a tost créance apuse
A mon ser£;ant, de ma querèle.
Miserere du'Rcc!. d» Moliens. MS. de Gaignal, fol. 222, R° col. 1.
On dit encore •< apposer une clause à un contrat. »
Peut-être » qu'apposer une peine à ceux qui rom-
« proient l'alliance, » c'étoit apposer au traité
d'alliance une clause relative aux infracteurs de ce
traité, et qui les soumettoit h une peine. Peut-être
aussi qu'en ce cas, la signification d'apposer éloil
la même que celle d'imposer à quelqu'un une peine
relative à sa faute. (Rob. Estienne et Nicot, Dict.) La
position de la main est relative à celle de la chose
(1) D'où ; en latin undé. — (2) Serviteur, domestique; en latin servtens.
AP
— 29 —
AP
qu'on saisit. Ainsi, « apposer sa main à happer des
« mouches, » c'étoit disposer sa main, se disposer
à attraper des mouches.
Mousches à las viendrent faire repos
Dedens >ing plat quel devant lui on pose;
A les happer soudain sa main appose.
'^'^ Faifeu, p. 87.
On sait qu'une inclination trop naturelle à l'homme
Sour le mal, est une disposition, un acheminement
sa perte, lorsqu'il n'est pas arrêté par cette crainte
salutaire dont on a désigné l'effet, en disant :
Paours ainsi tout son tans use
Que mors le truist en bon estai;
Que ne soit par péchié mortal
Sa vie à maie fin apuse.
Miserere du Uecl. de Moliens, MB. de Gaignat, fol. 2H , R" col. 1 .
CONJUG.
Apiis, part. Posé, disposé. (Miserere du R. de M.)
Quoiqu'on n'ait pas sous les yeux la preuve de
l'infinitif apuser, variation d'orthographe du verbe
aposcr, on croit pouvoir former cet inliiiilif d'après
le participe apus, abréviation à'apusé. L'omission
de Vé final dans les participes apus et repus, n'est
pas plus extraordinaire que dans apost et rcpost,
participes des verbes aposter et reposter, dont l'ori-
gine semble être commune aux verbes reposer et
aposer. (Voy. Apost et Aposter.) 11 n'y auroit donc
entre apus et apost qu'une différence de termi-
naison; ce qui paroit d'autant plus vraisemblable
que dans le Miserere du Recl. de Moliens, ms. de N. D.
le participe féminin reposte est synonyme de repuse
dans ce même Miserere, ms. de Gaignat, fol. "i'il.
On ajoute qn'apus étant le participe du verbe com-
posé apuser, aposer, il seroit possible que dans la
préposition depuis et la conjonction puisrjue, le mot
/)h/s(1) qu'anciennement on écrivoil7-»H('s,7;î(s, fût le
participe dont on auroit formé le verbe simple
puser, poser. En effet, lorsqu'on dit, depuis ce lieu,
depuis ce temps, il désigne ce temps, ce lieu, dans
une position plus ou moins distante d'un autre
temps, d'un autre lieu. Les causes d'après lesquelles
on agit, on parle, sont vues comme étant dans une
position relative aux effets qui succèdent, lorsqu'on
dit: puisque vous le voulez, j'agirai, je parlerai, etc
Il semble enfin que c'est en comparant les actions,
les paroles, les choses dites ou faites dans un certain
ordre successif, à des choses posées les unes avant
les autres, qu'on ait dit avec ellipse d'un nom ou
d'un pronom: faire une chose, puis une autre, dire
une chose, puis une autre, etc. Cette ellipse une
fois méconnue, l'on n'a plus vu qu'un adverbe dans
le participe puis. (Voy. Depuis, Puis et Puisqle.)
VARIANTES :
APOSER. Cotgrave et Oudin, Dict.
Apposer. Orth. subs. — Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict.
Apuser. Miserere du Recl. de Moliens, MS. de G. fol. 211.
Apost, partie. Apposé. On vient de remarquer,
à l'occasion du participe apus, qu'en certains par-
ticipes Vé final étant omis, on écrivoit apost pour
aposté, repost pour reposté, etc. Dans le premier
sens, le participe apost, en latin appositus, signifioit
apposé. . Deffandons par cet présent Escritde nostre
« séel et de l'aucthorité de nostre réal non que est
« dessouz apost, etc. » (La Thaumassière, Coût.
d'Orléans, p. 465; tit. de 11G8.)
Les faux cheveux et autres choses postiches que
l'Art ajoute à la Nature, pour en réparer les défauts,
étoient choses apostes, c'est-à-dire apposées, ajou-
tées. (Voyez Aposer.) En observant que ces mêmes
choses sont apposées, ajoutées pour en imposer, on
aperçoit un rapport d'idées accessoires entre la
signification de ce participe du verbe aposter et celle
d'imposer, tromper.
N'i aura chevel mort, ne autre chose aposte.
L'en porra tout veoir et devant et en coste ;
Car n'i aura là chose celée ne reposte.
Fahl. MS. du R. n" 7615, T. II, fol. 143, V* col. !.
Apostate, adj. et subst. Qui s'est éloigné d'un
lieu. Proprement, qui en est distant. Celle définition
littérale est conforme à l'élymologie d'apostate, en
grec dnoazàzrjç. Dans un sens relatif à cette même
étymologie, on a dit en parlant des courtisans qui
ne s'éloignent qu'avec peine de la Cour :
Pou en est qui de Court veulent estre apostate.
Je ne m'en merveil pas ; car chascun les y flate,
Ou ilz fiaient autruy pour que Ven n'en s'embale.
J. de Meun, Cod. -vers 841-843.
La signification de ce mot apostat ou apostate,
n'est donc odieuse qu'autantqu'il désigne figurément
un homme qui s'est éloigné des principes de la Re-
ligion et de l'honneur. Anciennement, on flélrissoit
le malhonnête homme, l'homme infidèle à ses
sermens et traître au parti dont il s'éloigne, en le
nommant apostat, comme on nomme encore « apos-
« tats, ceux qui se départent et desvoyent du tout
« de la Religion Chrestienne, ceux qui abondonnant
« l'Ordre de religion duquel ils ont faict profession,
« se rendent fugitifs de leur abbaye •• (Voy. Bou-
teiller, Soin. rur. Liv. Il, tit. xii, p. 700. — Id. ibid.
Annot. p. 76'2. — Nicot et Monet, Dict. — Dict. de
Trévoux.)
VARIANTES :
APOSTATE. J. de Meun, Cod. vers 841.
Apostat. Orth. subsist. - Bouleiller, Som. rur. p. 760.
Apostater, verbe. Apostasier. C'est relativement
au sens littéral d'a/jos/fl/c, qu'on a dit apostasier, ou
apostater de la foi, apostater d'un Ordre religieux.
(Monet, Dict. — Voyez Apostate.) On abrégeoit en
disant tout simplement apostater, parce que la signi-
fication de ce verbe étoit restreinte à la désertion
de la foi et du cloître. « Les Religieus cloistiiers,....
« s'ils desvoient du grant chemin de leur obser-
" vance régulière et prennent les sentiers et voies
« obliques. . . d'apostater, trouvent plusieurs en-
« nemis qui sont. . . ministres de la chair, ennemi
« mortel de tous humains, soient religieus ou
« autres. » (Triomphes de la noble Dame, fol. 246.
— Voy. Oudin et Nicot, Dict.)
(1) Puis vient de post : il est vrai que positum, où i est bref, devenait postum ; par la chute de la terminaison, il est
identique à post. (n. e.)
AP
3Ô
AP
Apostatiser, verbe. Apostasier. (Oudin, Dict.
— Voy. Apostater ci-dessus.)
Aposte, adverbe. A la disposition, à propos, à la
volonté, etc. 11 semble qu'on se soit figuré l'homme
dans une position de corps ou d'esprit, relative Â
celle des choses dont il peut ou veut disposer, dont
il jouit ou se propose de jouir, lorsqu'on a dit que
ces choses étoient ou se faisoient à sa poste. De là,
l'acception de l'adverbe aposte, composé de la pré-
position à réunie au mot poste. On ne trouve
l'expression à poste réunie en ce seul mot aposte
que dans Monel, Dict. (Voy. Postf, ci-après.)
Aposte, partie. Disposé. Mis hors d'une position
ordinaire. Il est possible qu'on ait voulu reprocher
à nos anciens historiens François, trop de dispo-
sition à natter la vanité nationale, lorsqu'en parlant
d'eux, on a dit qu'ils étoient « apostés de flatterie
« et de vanité, >■ peut-être disposés à la flatterie et
à la vanité. Peut-être aussi vouloit-on dire figu-
rément qu'ils étoient apostés par la vanité et la
flatterie, pour trahir la vérité historique? « Mal-
« veullance, ... ce vice par trop commun aux
« Escrivains de la nation Gallicane, faict que leurs
« histoires sont peu receues,.... principalement où
« ilz traitlent la matière de leurs adversaires : tant
« s'y exhibent-ilz apostez de flatterie et vanité. »
(Mém. d'Ol. de la Marche, Avis aux Lecteurs, p. 2.
— Voy. Aposter ci-dessous.)
En supposant que dans aposte, comme dans
aparllr, partir, se départir, l'a initial soit de même
signification que la préposition latine a ou ab, ce
même participe désignera une personne ou une
chose « mise hors de sa position ordinaire. » Si l'on
en croit Léon Trippault, (Celt-hell. p. 'îl±) c'est le
mot grec àn6»caToç, en latin depositns, rejecttts. On
ne parle de cette étymologie qu'autant qu'elle nous
rappelle qu'en Normandie on dit, en parlant d'une
personne affectée de se voir « hors de sa position
« ordinaire, » qu'il lui fait apos, qu'il lui est tout
apos : expressions dans lesquelles apos sembleroit
'être une altération du participe apost , le même
qu'aposté dont on supposera initial de même signi-
fication que la préposition latine a ou ah. (V. Apost.)
Aposteinent, siibst. masc. Action d'aposter.
On a dit que « le Capitaine Bernardo, bon Capitaine
« et bon François, avoil été tué d'un coup de pis-
« tolet à Paris, par Vapostement et pourchas du
« Duc Cosme de Florence. » (Brantôme, Cap. Fr.
T. IV, p. 39. — Voy. Aposter ci-dessous.)
Aposter, verbe. Poster. On croit que l'origine
du verbe aposter est commune au verbe aposer, et
que l'un et l'autre sont formés de l'ancien participe
apost, en latin apposittis. 11 est probable qn'apost
étant prononcé comme nous prononçons dépost,
sitppost, l'on aura, sans égard à l'étymologie, sup-
primé le t, en écrivant apos; A' où aposer, verbe de
même origine qu'aposter. (Voy. Aposer.) La signi-
fication d'aposter est aussi la même que celle
à' aposer; mais dans le sens de poser ou poster
quelqu'un en un lieu, en un passage, la préposition
initiale du verbe aposter désignoit et désigne encore
une position relative à de mauvaises fins, comme
dans ces expressions: « aposter un assassin à un
" passage, aposter des gens pour faire une insulte,
« etc. » (Nicot et Monet, Dict. — Voy. Aposte.)
VARIANTES :
APOSTER. Nicot, Dict.
Apposter. Nicot et Monet, Dict.
Apostil, subst. masc. Apostille. (Cotgrave Dict.
— Voy. Apostille ci-dessous.)
Apostille, subst. fém. Disposition. On croit voir
forigine de ce substantif dans le participe a;;os^ (1),
apposé, ajouté; signification à laquelle est relative
celle de notre mot apostille, écrit apostile ou appos-
tile dans Cotgr. Dict. (V. Apostil, Postil et Postille.)
Il semble que ce même mot apostille, pris dans un
sens différent, et pourtant analogue à celui dans
lequel on l'emploie encore, ait signifié certaines
dispositions relatives au succès d'une affaire.
.... Le chasteau de Cremonne
Estoit le plus fort des Italles,
Imprenable à toute personne...
En celluy temps aulcun noble homme
De Cremonne la bonne ville,
Avec une Dame qu'on nomme
Au pays ma Dosne Camille,
Firent si bien leur apostille,
Que sans faire aulcun desarroy
Le chasteau fut rendu au Roy.
Ainsi concludz qu'en c'este affaire
Femme a sceu plus que force faire.
J. Marot, p. U9.
VARIANTES :
APOSTILLE. Orth. subsist. - J. Marot, p. 149.
Apostile, Appostile. Cotgrave, Dict.
Apostiller, verbe. Disposer. On connoit l'origine
de l'acception encore usitée de notre verbe apos-
tiller, qu'on écrivoit apostileron appostiler. (Cotgr.
Dict.) Il n'a peut-être signifié disposer, que par un
effet de cette singularité d'expression qu'affectoient
nos Poètes du xv'et du xvi' siècle. Quoi qu'il en soit,
il semble que le poète Crétin ait désigné la France
se disposant à continuer une guerre destructive et
ruineuse dans le Milanois, lorsqu'il a dit :
Milan mauldict.
En faict et dit
As foy perverse...
Soubz ton faulx stille,
France distille
Somme d'argentz ;
Et aposlille
Manière hostille
De perdre gens.
Crétin, p. tK.
VARIANTES ".
APOSTILLER. Orth. subsist. - Crétin, p. 122.
Apostiler, Appostiler. Cotgrave, Dict.
(1) Ce sont des annotations; Du Gange propose deux étymologies : 1» Post illa varha, mots par lesquels on annonçait la
place d'une explication à mettre en marge; 2» Posta, poste; postille en serait le diminutif avec le sens de manchette,
position. (N. E.)
AP
— 31 -
AP
Apostis, subst. pluriel. Terme de marine. Les
apostis d'une galère sont deux longues pièces de
bois (i) sur lesquelles on pose les rames de la
chiourme. (Oudin, Dict.)
Il desrobe le mats, la poupe et le fanon;
Raze voiles et bancs, bancades et antenes,
Aposlis et fougons jusques à la carène.
Bergeries de R. Belleau, T. I, fol. 125.
Apostoire, subst. mnsc. etadj. Apôlre. Evêque,
Pape. Apostolique. On observera que par le chan-
gement de / en r, on a écrit Apostoire pour Apostoile.
Peut-être que Saint Sonplice V Apostoire étoit du
nombre de ceux qu'on appelle Apôtres, parce qu'ils
ont les premiers annoncé l'Evangile en quelque pays.
De Saint Souplice V Apostoire,
Laquelle ame ait repos en gloire,
Ert Waluam nouvelement venus.
Rom. de Brut, MS. fol. 75, V col. 1.
Anciennement on désignoit le Pape, l'Evéque de
Rome , en l'appelant Apostoile ou Apostoire de
Home. (Voy. Apostole ci-dessous.)
Ce est la som
De par Y Apostoire de Rom,
Qui grant pert de prévilége don.
Fabl. MS. du R. n' 7218, fol. 191, R- col. 1.
Le substantif Apostoire semble comme adjectif
avoir signifié apostolique. >< Ils s'en obligèrent es
« mains de deux Notaires apostoires, voulans et
« accordans estre incontinent excommuniez se par
« eulx etc. » (Chron. scandai, de Louis XL p. 3i. —
Voy. ArosTûLic ci-dessous.)
Apostole (2), sî(bst. musc. Qui a une mission,
Envoyé. Apôtre, l'Apôtre S" Paul. Evêque, Pape.
Lettres d'appel. On sait que du mot grec dniazoXnç,
en latin apostolits, s'est formé le fiançois apostoles
ou apostole qu'on écrivoit apostoile, par le chan-
gement du second o en la diphthongue oi dont la
prononciation vicieuse a probablement occasionné
les orthographes apostèle et apo telle. C'est par l'effet
d'une prononciation très-sourde que ce même o,
transformé en oi et en e dans apostèle et apostoile,
disparoit dans apostle. L'orthographe apostel est la
preuve d'une transposition de ïe final, très-usitée
autrefois dans les mots terminés, comme apostle,
apostre, etc. 11 faudroit ignorer que dans les prin-
cipes du mécanisme du langage, le changement de
l en r et de r en / est réciproque, pour ne pas
reconnoitre dans apostoil, apostoile et apostle, l'ori-
gine des orthographes apostoir, apostoire et apostre.
(Voy. Apostoire ci-dessus.)
Dans le sens étymologique, un Apostre est celui
qui a une mission, un Envoyé. Ainsi les Juifs nom-
moient Apostres, certains Officiers qu'ils envoyoient
dans les provinces, avec commission de veiller à
l'observation de la Loi, et de recevoir les deniers
destinés, soit à la réparation du Temple, soit au
payement du tribut qu'ils dévoient aux Empereurs.
Les Apostres, les Envoyés des synagogues furent
les modèles de ceux à qui les Eglises donnoient
commission de secourir les Fidèles et d'adoucir
leur misère par des charités proportionnées ù leurs
besoins. En disant que les uns et les autres étoient
les Apostres de l'humanité, on ne croit pas profaner
un mot spécialement consacré à désigner les Apos-
tres du ChrisUanisme. Les Apostres par excellence
sont les douze Disciples qui reçurent de Jésus-
Christ même leur mission , pour annoncer son
Evangile aux nations. S' Paul, à qui l'on contesta
cette mission divine, répondit qu'il étoiL Apostre;
non de la part des hommes, ni par aucun homme;
mais par Jésus-Christ et Dieu son père. Enfin, ce
nomd'Apostre, qui lui éloit commun avec les douze
premiers Disciples, lui est devenu si particulier que
par antonomase, l'Apostre a signifié et signifie
encore Saint Paul, l'Apostre des Gentils.
Cant j'oi de V Apostle parler,
Lor sai bien que ce est Sains Polz
Ki les bons cuers met à repoz.
Fabl. MS. dj Turin, fol. 4, R" col. 2.
On est sans doute scandalisé de voir Pantagruel
étant avec dix ou douze compagnons de ses exploits
burlesques, comparé à Jésus-Christ au milieu de ses
Apôtres. ■> Laissons ici Pantagruel avecq ses Apos-
« /o/£'s, et parlons du RoyAnarcbe et de son armée »
(Rabelais, T. II, page 232.) Peut-être a-t-on voulu
accoutumer le Peuple Vénitien à une sorte de respect
religieux pour la Noblesse, lorsque par un autre
abus du mot Apostre, une classe de Nobles a été
nommée les douze Apostres, et une autre classe les
quatre Evangelistesr Une imagination qui n'est pas
moins extraordinaire, c'est d'avoir donné ù douze
canons le nom des douze Apostres. Henri VIll, roi
d'Angleterre, allant de Calais à Thérouanne, pour
en presser le siège, fut poursuivi par le Chevalier
Bayard qui lui enleva une pièce d'artillerie, dite
Sainct-Jean. ■■ Et en avoit le Roy d'Angleterre encore
« onze autres de ceste façon, et les appelloit ses
« tlouz-e Apostres. » (Hist. du Ch" Bayard, p. 345.)
Les Espagnols, dit le P. Daniel, (Mil. Fr. T. I, p. 445.)
donnoient quelquefois par dévotion des noms de
Saints aux canons, témoins les douze Apostres que
l'Empereur Charles-Quint fit faire à Malaga pour
son expédition de Tunis. Il sembleroit, d'après de
pareilles comparaisons, que détruire les hommes
ou les convertir, c'est une même chose. Cette idée,
toute fausse qu'elle est, a dû paroitre vraie aux
Américains convertis par les Espagnols.
Quoique les anciens monumens de l'histoire
attestent que le nom d' Apostole fut dans la primitive
Eglise, commun à tous les Evêques, successeurs des
Apostres, on l'a spécialement affecté au successeur
de l'Apôtre S' Pierre, c'est-à-dire au Pape nommé
autrefois VApostole de Rome, et tout simplement
Y Apostole. (Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis, au
mot Apostoiles. — Gloss. du Rom. de la Rose, sup.
p. 110 et 111.) « Al tens Innocent III, Apostoille de
(1) On le voit, ces pièces de bois forment bastingage. (N. e.) - (2) Il est curieux qn'apostolus soit apostole quand il
signifie pape, et apostle, apostre, quand il se rapporte aux compagnons de Jésus-Chrisl. Ce dernier cas est la règle:
epist{o)la donne épistre, capit{u)lum, chapitre. (N. E.)
AP
- 82 —
AP
« Rome, etc. » (Villehard, p. 4. — Voy. Fabl. ms. du
R. n" 7G15, T. II, fol. 1 i". - Fabl. ms. du R. n° T2\8,
f» 324. — Lanc. du Lac, T. 1, f° 13G, etc.) « Gerberz,
« grant Clercs et Philosophes. . . esleus à l'arce-
« veschie deRavane... tint l'archeveschie jusques
" à tant que li Apostres morut. Lors requist li poples
• de Home que il leur fust donez , et ensi fu
« Aposlres. " (Chron. S" Denys, Rec. des Ilist. de Fr.
T. X, p. 304.) « Se plet est devant le Doien, l'en puet
« appeller à TEvesque, et de l'Evesque à l'Arche-
« vesque, et de l'Arciievesque à YApostoile. Mes du
« Juge envoie de par l'Apostoile, etc. » (Beaumanoir,
Coût, de Beauvoisis, p. 22.)
Gentil Roys, je l'ose bien dire,
Que ceux du Réaume et de l'Empire,
Ce sunt Roys et Enipereours,
Plus de honours et de biens maours
Ont à Sainte Eglise donné
Qu'onques n'ont fait Clerc couronné.
Abbé, Prélat et Apotelle.
Géofroi do Paris, à la suite du Rora. de Fauvcl, MS. du R. n' 6812, fol. 50.
C'est avec une allusion peu respectueuse pour
l'Apostre, (lu'un de nos anciens Poètes a feint qu'un
Roi de France, nommé Philippe, prononçant en
gourmet sur l'excellence des vins, avoit nommé
Apostole, c'est-à-dire Pape, celui dont la qualité lui
sembloit n'admettre aucune comparaison avec celle
des autres vins.
Li Rois les bons vins corona,
Et à chascun son nom dona.
Vin de Cipre fist Apostoile,
Qui resplendis! comme une estoile ;
Dont fist Chardonal et Légat
Du bon gentil vin d'.\quilat.
FaW. MS. du R. n- 7218, fol. 232, V' col. 1.
On conçoit à peine comment des Chrétiens, qui
dans les siècles d'ignorance s'opiniàtroient à ne
vouloir pas distinguer le Mahométisme du Paga-
nisme, aient osé assimiler au successeur de S" Pierre,
à leur Apostole, un Calife des Sari'asins, le succes-
seur du faux prophète Mahomet qu'ils atfectoient de
confondre avec le faux dieu Apollin. « Li Soutans...
« manda al Calife de Baudas, qui Apostolcs est des
« Sarrasins... qu'il fesistansi prechierparPaienime,
« com !i Apostoles des Cresliens faisoit par Cres-
« tienté,' et si le secorust. » (Chron. d'Outremer, ms.
de Berne, n" 113, fol. IGI, R" col. 2. — Martène,
Contin. de G. de Tyr, T. V, col. 685.)
On a sans doute eu raison de réclamer contre
l'abus de ces appels qui, en étendant la juridiction
des Papes, bornoient trop celle des Evéques, et
l'auroient anéantie, si l'on avoit moins insisté sur
la nécessité des Lettres d'appel, nommées Apostoli
en latin, en françois Apostoles ou Apostres. Par ces
Lettres, qu'on appeloit aussi Lettres dimissoires ou
Lettres de renvoi, le Juge à quo certifioit de l'appel
interjeté, et renvoyoit la connoissance de l'affaire au
Juge devant le tribunal de qui l'appelant demandoit
qu'elle fût portée. On ne pouvoit être admis îi pour-
suivre cet appel sans Apostres, qui dans les causes
ecclésiastiques étoient expédiés par l'Evèque, par
son Officiai, et par le Chapitre de la cathédrale
durant la vacance du Siège. (Voy. Du Cange, Gloss.
lai. T. I, col. 506. — Nouv. Traité de Diplom. T. I,
page 253. — Laur. Gloss. du Dr. Fr. — Cotgrave et
Borel, Dict.) <i Plusieurs fois avoient été devers ledit
« Evéque h S. Mor des Fossez porter et intimiter
« certaine appellation faite par mondit Seigneur
" de Bourgogne, ses Vicaires et Officiers, pour
« requérir et obtenir les Apostres nécessaires à
« ladite appellation. » (Etat des Officiers des D. de
Bourgogne, p. 107. — Félibien, Hist. de la ville de
Paris, T. III, pr. page 404, col. 1 ; Ut. de 1381. —
Rabelais, T. III, p. 210, etc.) Les Apostres refutatoires
avoient lieu lorsque le Juge dont on appeloit, ne
vouloit pas déférer à un appel qui lui paroissoit
frivole et illusoire. » Le Pape en faveur du Roy de
« Sicile, ordonna un dixiesme.... Les Gens d'Eglise
« s'y opposèrent et l'Université, et appellèrent des
« Commissaires ordonnez, et eurent Apostres refii-
• tatoires. Mais il leur fut dit pleinement que
0 nonobstant leurs appellations et oppositions, ils
« le payeroient. » (Juvenal des Ursins, Hist. de
Charles VI, p. 94. — Voyez Dict. de Trévoux, T. I,
col. 480.) ^'on-seulement les Lettres données sur
appels interjetés de l'Evèque au Métropolitain, du
Métropolitain au Pape, du Pape au Concile, mais
encoi e celles où il s'agissoit d'appels au Roi, à un
Juge séculier, ont été nommées Apostoles ou Apos-
tres. (Voy. Du Cange, Gloss. lat. T. I, col. 566 et 567.
— Nouv. Traité de Diplom. T. I, page 253 et 254.)
Enfin, l'usage de ces Lettres a été aboli. « On n'use
» plus, même en Cour d'Eglise, à' Apostres, ou
« Lettres de renvoi que l'appellant devoit obtenir
« du Juge à quo. Mais l'appel s'interjette par un
« acte et se relève par requête ou par commission
« du Métropolitain. » (Fleury, Institut, au Dr. Eccl.
T. II, page 218.)
VARIANTES :
APOSTOLE. Martene, Contin, de G. de Tyr, T. V, col. 635.
- Chrou. S' Denys, T. X, page 304. - Ane. Poët. Fr. T. IV,
p. 1312. - Anseis, fol. .51. - Lanc. du Lac, T. I, fol. 136.
Apostel. Le Carpentier, H. de Cambray, T. II, pr. p. 29.
Apostele. Très, des Chartes, Reg. xxii, pièce 10.
Apostle. S' Bern. Serm. fr. — Rymer, T. I, p. 13. — Fabl.
MS. de Turin, fol. 4, R» col. 2. - Ph. Mouskes, .MS. p. 130.
Apostoil. 'Très, des Chartes, Inv. de P. d'Etampes, pièce 2.
Apostoile. Ane. Poët. Fr. T. IV, p. 1341. - G. Guiart, MS.
fol. 107. - Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 175, V» col. 2, etc.
Apostoille, Ane. Poët. Fr. T. IV, p. 165. — Villehard, p. 1.
Apostoir. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 191, V» col. 1.
Apostoles. Chron. S' Denvs, T. III, p. 314. — Dits et Moral,
fol. 286. - Fabl. MS. du R. ii° 7615, T. I, fol. 65, V" col. 2.
Apostre. Hist. de Fr. à la s. du Rom. de Fauvel, fol. 82. —
Eust. Desch. p. 485. — Hist. du Ch'^ Bavard, p. 345, etc.
Apostres. Chron. S' Denys, T. X, p. 304 et 306.
Apotelle. Geofroi de P. à la s. du Rom. de Fauvel, fol. 48.
Apoustre. Joinville, p. 383.
Apoutre. D. Morice, preuv. de l'Hist. de Bret. T. I, c. 981.
Appostre. Félibien, Hist. de la Ville de Paris, T. III, pr.
p. 404. — Mém. de Rob. de la Marck, p. 197.
Apostolic, adject. et subst. Qui a rapport aux
Apôtres. Pape, Successeur des Apôtres. Dans le
premier sens, on a nommé souliers à Vapostolique,
des souliers tels qu'en portoient encore les Cor-
delieis du xvr siècle, « des souliers traversés de
« plusieurscourroies qui tenoient lieu d'empeigne, •
et dont la forme avoit rapport à la chaussure avec
laquelle les Peintres ont représenté les Apôtres.
Les Evêques de la primitive Eglise, comme suc-
AP
— 33 —
AP
cesseurs des Apôtres, s"appeloient Apostolics ou
Apostoliques. C'est par ellipse qu'Apostolic, en latin
Apostolicus , pris substantivement , désignoit un
Evèque, un successeur des Apôtres en général, en
particulier le Pape, le successeur de S" Pierre. {Voy.
Du Gange, Gl. 1. T. I, col. 568. — Dict. de Trévoux.)
Li Apostoles Innocens
Fu mors adonques à cel tans ;
AposloHc fisent d'Onorie,
Par eslection et glorie.
Ph. Mouskes, MS. p. 61i.
VARIANTES :
APOSTOLIC. Ph. Mouskes, MS. p. 614.
Apostolique. Le Duchat, sur Rabelais, T. IV^ p. 58.
Apostoliscr, verhe. Imiter les Apôtres, affecter
de leur ressembler. (Voy. Cotgrave et Oudin, Dicl.)
On a prétendu que « si l'Aulheur des Jésuites eust
« esté tant soit peu nourry en l'ancienneté de nostre
« Religion, il eust trouvé que ce n'estoit pas apos-
« toliscr, mais bien apostatiser, que luy Religieux
» voulust comme les Apostres administrer les saints
« Sacremens, mesme au milieu des villes, revestu
« d'un babiilement qui n'a rien de commun avec les
« Moines. » (Pasquier, Rech. liv. III, p. 304.)
VARIANTES ;
APOSTOLISER. Oudin, Dict.
Apostolizer. Cotgrave, Dict.
Apostolité, subst. fém. Apostolat; Papauté.
(Voyez Rom. de Brut, fol. 55. — Ph. Mouskes, ms.
p. 843.) On sait que l'Empereur Henri IV, fit déposer
le Pape Grégoire VII dans un concile :
Desposa le pape Grigorie ;
Ce nos raconte li estore.
Par oquoisson le mist en trape
Pour cou que Grigore cil Pappe
De son avoir ot acaté
Le don de V Apostolité,
Trois mile livres de deniers.
Ph. Mouskes, MS. p. 451.
Apostume, subst. viasc. (1) Aposlôme. En grec
à7xiai)],ua. 11 Semble que conformément à l'étymo-
logie, on auroit dû toujours écrire aposlcmc ;
oi'thographe très-ancienne dans notre langue, et
adoptée par quelques Auteurs, quoique de leur
temps elle fût moins usitée que celle à'apostume.
(Voy. Psautier, ms. du R. n- 7837, fol. 192, R" col. I.
— Essais de Montaigne, T. I, page 34ï>. — Nuits de
Straparole, T. I, page 219 et 352. — JNicot, Dict.) On
avoit sans doute moins égard à l'étymologie qu'à la
terminaison du mot apostume, lorsqu'on le faisoit
du genre féminin. « L'an mille cinq cens trente-
« huict, le Roy estant à Compiegne tomba malade
« d'une apostume.... dont il fut en grand danger
« de mort. » (Du Bellay, Mém. liv. vin, fol. 270. —
Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict. — Dict. de
Trévoux.) La comparaison de l'effet d'un deuil ou
cbagrin intérieur, à celui d'une apostume dans
l'estomac, paroitroit aujourd'hui fort dégoûtante.
Gectoit sangloux, gémissemens parfonds.
Et gros souspirs, comme s'il eust au fonds
De l'estomach venimeuse apostume.
D'extrême dueil et doulente amertume.
Crétin, p. 1U. — Id. 52.
VARIANTES :
APOSTUME. Crétin, p. 52. - Du Bellay, Mém. liv. x, f'SSO.
— Cotgrave, Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict. — Dict.
de Trévoux.
Aposthème. Oudin, Cur. Fr. — Dict. de Trévoux.
Apotume. Dit de Jehans li Rigolez, fol. 150, R" col. 2.
Apostume , participe. Qui a un apostème.
Proprement formé en apostème. (Voy. Apostumer.)
De là, on a dit en parlant d'une personne ayant un
apostème dans la tète, dont une blessure à la tête
s'éloil formée en apostème, que sa teste étoit apos-
tumée. (Voy. Froissart, Vol. III, p. -354.)
Apostumer, verbe. Se former en apostème, se
tourner en abcès, s'ulcérer. Il paroitroit raisonnable
qu'ayant réformé l'orthographe du substantif fl;;os-
tume, on réformât celle du verbe apostumer, et
qu'on écrivit apostémer, comme l'on écrit apostème.
Un abcès est un apostème ouvert. De là, le verbe
apostumer a non-seulement signifié se former en
apostème, mais se tourner en abcès, rendre du pus,
s'ulcérer. (Voy. Monet, Dict.)
Tu le sçais bien, France : mais je n'essaye
Icy pourtant de refraischir la playe
Qui tousjours saigne et qui ne guarit or,
Et qui pourroit apostumer encor, etc.
Bergeries de R. Belleau, T. I, fol. 105. R'.
On préfère aujourd'hui l'usage du verbe s'ulcérer
à celui à'apostumer. Mais on ne trouvera point
dans la nature la raison de cette préférence, puisque
l'idée d'ulcère n'est pas moins révoltante que celle
d'apostU7ne. (Voy. Apostume ci-dessus.)
VARIANTES :
APOSTUMER. Orth. subsist. - Bergeries de R. Belleau,
T. I, p. 105. - Fouilloux, Faucon, fol. 40 et 79. - Cotgrave,
Oudin, Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict.
Apostemer. Cotgrave et Oudin, Dict.
Aposthemer. Oudin, Dict.
Aposume, subs. maso. Apozème. L'orthographe
apozème, qui se trouve dans Cotgrave et Monet,
Dict. est conforme à l'origine de ce mot dérivé du
grec dnouù), en latin defervesco. L'humanité a des
obligations si réelles à la Chirurgie, qu'on s'étonne
aujourd'hui que la Médecine lui ait interdit en 1507,
le droit d'ordonner des aposumes et des clystères.
;Voy. Pasquier, Rech. liv. ix, p. 825 et 828 )
VARIANTES :
APOSUME. Pasquier, Lett. T. II. p. 551 et 556.
Aposème. Monet, Dict. — Dict. de Trévoux.
Apozime. Cotgrave et Nicot, Dict.
Apothecairaisse, subst. fém.. et adj. Femme
d'Apothicaire. Qui est fait par l'Apothicaire, qui est
relatif à l'état d'Apothicaire. Ce mot encore usité
dans les couvens, pour désigner comme substantif,
la Religieuse qui a soin de l'apothicairerie, a signifié
femme d'Apothicaire. (Dicl. de Trévoux.) « Que
« dira-on de VApotiqiiaresse? Elle contrefaict si bien
« la belle, qu'il luy semble bien qu'ouy. » (Caquets
(1) Dès le Roman de la Rose, le mot est féminin ; Furetiére et Richelet lui donnent ce genre : l'Académie (pourquoi?) l'a
fait masculin, (n. e.)
n. 5
AP
34 —
AP
de l'AcoviclK^e, p. 74.) 11 cloit adjectif, lorsque dans
le second sens on disoit médecine (ipotliccairaisse
ou (ipoticirirc'sse, etc. (Epilli. de M. de la Porte. —
Cotgnive, Dict. — Voy. Apotiiecaire ci-dessous.)
VAHIANTES :
APOTHECAIRAISSE. Cotgrave, Dict.
Apothicairesse, APOTiiicAiiESSE. Dict. de Trévoux.
APOTiCAHtESSE. Epilli. de M. de la Porte, p. 250.
Apotiquaresse. Caquets de l'Acouchée, p. 74.
Apotiiecaire, subsl.masc. Apothicaire. Lemot
grec iino»i^xij, origine du Irançois apotiiecaire qu"au-
jourd'liui l'on écrit apothicaire, sigiiilie assez géné-
ralement un lieu où sont déposées les choses qu'on
veut vendre ou conserver, un magasin, une bou-
tique, etc. \\. Ai'ûTiiEycE.) Ainsi tout homme tenant
bouli(iue ou magasin, pouvoit cire nommé Apotiie-
caire. On trouve la preuve de celte acception
générale, dans le Ciloss. lat. de Uu Gange, au mot
Apotliecarii. Mais en Irançois, le mol A})otliecuire
a signilié par excellence celui qui tient boutique de
drogues; boutique où l'ordre dans lequel on pose
les drogues médicinales, est si nécessaire pour
éviter les quiproquo qui ont donné lieu à ce pro-
verbe : « Dieu nous guarde de qui-pro-quo d'Apo-
« thicquaires! » (Apol. pour Hérodote, page 45.) Le
danger de ces quiproquo d'ApolItecaires èloit sans
doute bien plus à craindre qu'il ne l'est aujourd'hui,
lorsque Pasquier regieltoit « l'ancienneté qui faisoit
« marcher sous une mesme cadence Testât de Me-
« decin. Chirurgien et d'Apolicaire. » Il croyoilque
l'Apothicaire étant \' adopérateur du Médecin, on
éloit d'autant moins assuré de sa guérison, que
« l'exéquution de l'ordonnance du Médecin des-
« pendoit de la miséricorde d'un maistre Apoti-
« caire;... ains le plus souvent d'un vallet auquel
« il n'y avoit ny science ny conscience. » (Voyez
Pasquier, Lett. T. Il, p. 551 et 552.)
VAIllANTES :
APOTHECAIP.E. Rabelais, T. I, Prolog, p. 41. - Id. T. IV,
p. 286. - Cotgrave, Dict.
ApoTHicQUAinE. Apol. pour Hérodote, p. 45.
Apoticaire. Dialûg. de Tahureau, fol. oO, V».
Apoticquaire. Oudin, Cur. fr.
Apotikaire. Hist. de Job, en vers, MS. de Gaignat, f» 169.
Apotiquaire. Monel, Dict.
Appoticaire. Poës. de Charles, D. d'Orléans, MS. fol. 92.
Apothecairei'ie, mhst. féni. Apolhicairerie.
Etal et art de l'Apothicaire. (Cotgrave, Dict.)
Apothème, subst. viusc. Apophlhegme. En grec
d7ié<f»iy/^a. Il seroit atîieux que le fanatisme eût
consacré l'apophlliegme de M. de Montpensier, qui
croyant imiter par sa haine contre les Hérétiques,
le zèle du Koi S' Louis contre les Infidèles, disoit
« qu'il un hérétique on n'estoit nullement obligé de
" garder sa foy... 11 le pratiqua bien à l'endroit du
■< Capitaine des Marais, qu'il prit dans le chasteau
« de Rocliefort sur Loire, par honeste capitulation
" et sur sa foy; et puis le fist exécuter aussitost,
" se fondant sûr son apotireme (I) que je viens de
« dire. » (Brantôme, Cap. Fr. T. III, p. 280.)
Apotheque, sulist. /'t'/H. Boutique (2). Acte sujet
à la lormalilé du dépôt. Ce mol purement grec signifie
bouti(iue, lieu où l'on expose des marcliandises en
vente. « Il l'ault, dict Galon, que le Pere-fauiillesoit
» vendeur perpétuel. Parce moyen est impossible
« qu'enfin riche ne devienne, si tousjours dure
« V apotheque. » (Rabelais, T. 111, page 12.)
H est possible quapotheque, dans un sens relatif
à l'iicception générale du mot grec dno»i]y.tj, lieu où
sont déposées les choses dont la garde intéresse,
ait désigné certains actes juridiques, par la raison
qu'ils étoient sujets à la formalité du dépôt; c'est-
à-dire qu'une expédition de ces actes devoil être
déposée au greffe de la juridiction où ils étoient
passés. « Leftres et instrumens faicts et passez par
>' Eschevinage qui se faict en deux parties cyrogra-
« phées, ou en trois parties dont le Juge garde l'ure
" des parties; et les parties à qui touche, gardent
« les autres. Et sont telles lettres selon le Droict
« civil appellées apotheques. » (Bouleiller, Som.
rur. lit. cvn, p. C36.)
Apotliérapic, subst. Récréation. Ce mot qu'on
trouve dans Cotgrave Dict. est une altération
d'apo thérapie.
Apothérapie, subst. fém. Récréation. En grec
àno^içaniia. « Par, manière â'apothcrapic s'esba-
« toieut, etc. •> (Rabelais, T. I, p. I7(i.; C'est ainsi
qu'il faut lire dans les éditions où il y a apotliérapic.
(Id. ibid. note de Le Duchat. — Voy. Apotiiérapic.)
Appactir, verbe. Obliger à payer une contri-
bution fixée par un pacte. On se souvient encore de
ces temps malheureux où l'habitant des villes et de
la campagne, exposé à la fureur avide et meurtrière
des ennemis étrangers et domestiques qui désoloieut
la France, n'obtenoit la vie avec la liberté de faire
son commerce et de labourer la terre, qu'en se
mellant à pactis, ou en pactis; qu'en s'obligeanl à
payer les contributions fixées par des pactes, sur
lesquels étoit établie une espèce de paix ruineuse
et tyrannique. (Voyez Apaer.) Telle est l'origine du
verbe, quelquefois réciproque, appactir ou em-
pactir, et de la signification dans laquelle on a dit :
« Ne pouvant plus souffrir eslre raen^'onnez et
« apactis auxdits ennemis depuis six ou sept ans,
« etc. » (D. Carpenlier, au mol Apaluare.) « Tous
.< les villaiges d'entour Paris estoient upali% aux
« Arminaz (3). » (Journal de Paris, sous Charles VI,
p. 427.) « Ils ne pouvoyent labourer leurs terres...
« pour la dou tance des pillars, s'ils n'estoyent bien
« acconvenancés et appactis. » (Froissarl, Vol. III,
p. 258.) Peut-être faul-il lire apactis en un seul mot,
(1) Il y a là une faute d'orthographe ; apolkinip. de dnà et ziBr^^i est seulement employé en chimie et en géométrie ;
c'est la perpendiculaire menée du centre sur le côté d'un polygone régulier, ou la hauteur d'une quelconque des faces
triangulaues d'une pyramide régulière ; c'est enfin un précipité brun qui se forme peu à peu dans les dissolutions des
extraits végétaux. (N. e.) - (.2) JJoulique vient lui-même d'dnoe7,xT], par l'italien boltega, comme le rend probable l'apocope
de la. (N. E.) — (3) Armagnacs.
AP
— 35 —
AP
SiU Vieu de à pactis dans cel auL: i..,jsage. «Ceux
« de Lourde et de Malvoisin raiiçoniioycnt aussi
« bien les marchands du royaume d'Arragou el de
« Catelongne, comme ils fâisoyent les François,
« s'ils n'esloyent à 7;aci/s à eux. » (Id. ibid. p. 8.)
Au reste, on a pu dire estre à pacfis, comme l'on
disoit se mettre à pactis, estre à appactis. (Voyez
Appactis, Appactizer el Pactis.) La violence qu'un
désir lyrannique fait h notre volonté, étant com-
parée à celle que souffroient des citoyens obligés
malgré eux de s'appaclir, on aura dit figurément:
. . . Desir tient tout apastis
Mon voukiir qui est amatis.
Al. Charlier, Liv. des iv Dames, Du Gange, Gloss. lal. au mot Apatisatio.
VARIANTES :
APPACTIR. Froissart, Vol. III, p. 258.
Apactir. Id. ibid. p. 67. — D. Carpentier.au mot Apatiiare.
Apastir. Du Gange, Gloss. lat. au mol Apalisatio, col. 546.
Apatir. ,Iour. de Paris, sous Cliarles VI, p. -127.
E.MPACTIR. Froissart, Vol. III, p. 8, note margin.
Appactis, subst. masc. Contribution fixée par
un pacte. Pacte qui fixe une contribution. C'est
probablement d'après les expressions estre à pactis,
se mettre à pactis, qu'a été formé le substantif
composé appactis ou a])pactix:, ainsi que les verbes
appactixer, appaclir, s'appactir. (Voy. Pactis.) Il
semble que l'usage de ce mot ait commencé et fini
avec les malheurs de ces temps d'anarchie oi^i ceux
qui dévoient être le soutien de la I^'rance, se réunis-
soient ;'i ses ennemis pour en être le fléau. On
croiroit que la tyrannie militaire du xiv et du xv
siècle alfectoit de pallier l'odieux de ces contribu-
tions auxquelles le citoyen étoit forcé de souscrire,
en les nommant appactis, comme si elles eussent
été fixées par un pacte volontaire. « Les appactis....
« montoyent bien par an es terres dessus dites
« autant comme la rédemption des fors et des gar-
« nisons devoit monter. » (Froissart, Vol. IIT, p. 258.)
« îv'estoit année, à cause de ladite place, qu'ils
B n'eussent d'appactis sur le pais bien vingt-quatre
« mille escus. « (Juvenal des Ursins, H. de Charles
VI, page 17'2.) « Ne seront faites aucunes prises de
Cl personnes, courses, voleries, pilleries, logis,
o appatis . rançonnement de bestes ou d'autres
« biens quelconques, sur les terres, villes. ... et
o autres lieux estansdu parti et obéissance du Roy. »
(Mém. de Comines. T. III, pr. p. 180. "i Le brigandage
multiplioil ces contributions nommées appactis, h
tel e.xcès qu'un « pauvre village estoit à appatis à
« huict ou dix places. » (Œuv. d'Al. Chartier, Annot.
p. 839.) De là, on disoit en parlant d'un Capitaine ou
Soldat avec qui une ville, un pays étoit à appactis,
qu'il tenoil ce pays, celte ville en composition d'ap-
pactis, en rente d'appactis, ou tout simplement en
appactis. « Tindrent tousjours le pais en guerre et
« en composition à'appactiz. » (Froissart, Vol. IV,
p. 32.) .< Sur les marches de la duché de Luxem-
« bourg... le Signeur de Commersy... faisoit guerre
<« au premier rencontré, et prenoit el ravissoit de
« toutes pars prisonniers el butin Sur les
« marches de Mets. . . se tenoil Henry de la Tour,
« au lieu de Pierrefort et tenoil les citez de Tout et
« de Verdun en rente d'apatis et tous ses voisins
« en sujeltion. » (Mém. d'Ol. de la Marche, liv. I",
page 1j1 et 152.) « Se retrait le Roy en la cité de
» Bourges. . . . laquele cité un pauvre soudoyer
« Bourgongnon, nommé Pernet Grasset, tenoit en
« apatis, le Roy estant dedens. » (kl. ibid. p. 124.)
« Prospère Colonne, Lieutenant général du Pape,...
« tenoil tout le pays en appatis et en faisoit ce qu'il
« vouloit. » (Hist."du Ch" Bayard, p. 363. — Voyez
Apatissemext et Apatissure.)
Il semble que la signification d'appactis étoit
quelquefois celle d'apatissure, et que les Lettres
seellécs d'apacli~~^ éloient des pactes qui fixoient les
contributions au payement desquelles on s'obligeoit
sous le scel de celui qui les avoit exigées. « Les
» Bourgongnons... voulans vivre delà guerre, se
« boultoieiît avec les Anglois; et en portaiil la croix
« rouge prenoient les François et leur faisoient
« guerre: par lequel moyen regnoit contre le
« peuple et gens d'Eglise Ir'ès-innumérables et tyran-
« niques pilleries. Et combien que pour vivre en
« paix au dessouhs de ceux qui faisoient la guerre,
0 ils donnassent et promeissent du leurs très-lar-
» gement, en prenant d'iceux, ou de leurs Capi-
« Faines, saufconduits, lettres de gardes, ou seellées
« à'apacli:^, néant moins peu, ou néant leur estoit
« entretenu. » (Monstrelet, Vol. II. fol. 83. — Voyez
Appactir et Appactizer.)
variantes :
APPACTIS. Froissart, Vol. III, p 258.
Apactiz. Monstrelet, Vol. II, fol. 83, R».
Ap.\tis. Mém. d'Ol. de la Marche, liv. i, p. 124.
Appactiz. Froissart, Vol. IV, p. 32. — Monstrelet, V. II, p. 86.
Appastis. Du Gange, Gloss. lat. au mot Appatiamentum.
Appatis. Ib. ibid. au mot .ipaii.'iatin, col. 545. — Mém. de
Comines, T. III, p. 180. - Hist. du Cii"- Bayard, p. 303.
App.^tiz. D. Garpentier, S. Gl. I. de D. C. au mot Apatuare-
Appactizer, verbe. Obliger à une contribution
fixée par un pacte. Telle a été la signification du
verbe appactizer, apaticlier, ou apatisser, dont
quelques étymologistes, trompés sans doute par
les orthographes apastir el appastis qui sont des
altérations d'aj)jiactis et d'appactir, ont cru voir
l'origine d'àw?, pasl'is ou past, en latin pastus. (Voy.
Borel, Dict. — Du Cange, Gl. 1. au mot Apatisat'io.)
On l'a même défini conformément à celte fausse
étymologie. Mais il est évidemment formé de pactis,
pacte, en lartin paclum, et signifie mettre à contri-
bution , obliger au payement d'une contribution
fixée par un pacte. (Voy. Pactis.) « La plus grande
« partie des villes estoient toutes appactizées à
« eux, cl rançonnées à certaine somme d'argent et
« de fromens pour chacun mois. " (.Monstrelet.
Vol. II, fol. 183.) « Tanguy... apatissa la Villeneuve
« S" George.... et après lés deniers par lui receus,
« etc. " (Preuv. sur le meurtre du D. de Bourgogne,
page 309.) Ce même verbe est réciproque dans une
lettre o\x Juvenal des Ursins, représentant aux Etats
de Blois la misère du peuple, disoit : " Le [iauvre
« peuple de tous estats cuidant y mettre remède,
« délibéra de soy apaticher à la garnison plus pro-
« chaîne; mais tantost toutes les autres garnisons
AP
— 3G —
AP
« commenci'rent à courir villages, voulant avoir
« palis. » (Du Cange, Gloss. lat. au mot Apatisatio.
— Voy. Ai'i'ACTm.)
VARIANTES :
APPACTIZER. Monslrelet, Vol. II, fol, 18,3, R°.
Apaticher. Du Cange, Gl. lat. à Apatisatio. — Borel, Dict.
Ap.\tiser. Id. ibicl.
Ap ATissER. Preuv. sur le meurtre du D. de Bourgogne p . 309.
Appaticiier. Œuv. d'.\l. Chartier, Annot, p. 860.
Appatisser. Id. ibid. p. 839. — Le .louvencel, MS p. 335.
Appatissier. D. Carpentier, S. Gl. 1. de D. G. à Appalicire.
Appaillarder (s'I, verbe. Se livrer à une luxure
honteuse et iiilàme. (Cotgr. Dict. — V. AppAiLLAnom.)
Appaillai'dir, vcvb. Devenir paresseux et lâche.
Rendre gueux. Devenir luxurieux, impudique. On
subslituoil à l'idée d'être couché sur la paille, celle
d'être couché sur un lit, en substituant le verbe
apoltronnit; devenir paresseux et lâche, au verbe
appaillarder plus ancien dans notre langue en cette
même signification figurée. ;Voyez Apoltron.mr et
Apoltron.ner.) Longtemps avant que Charron eût dit
que le mariage apoltroiuiisoit les Savans, on s'étoit
plaint que non-seuieuieiit les Clercs, mais les Che-
valiers, en se mariant appaillarJissoieiit, qu'ils
devenoient paresseux et lâches.
Car nulz d'eulz ne puet les mestiers
Exercer, li uns de Clergie,
Li autres de Chevalerie,
Et servir aux femmes ensemble.
Ainsi chascun son l'enom amble,
Se destruit, et apaillardit .
Eust. Desch. Poës. MSS. p. o46, col. i.
C'est probablement en faisant allusion â la paille
sur laquelle couchent les gueux, tiuappaillardir a
signifié rendre gueux, réduire à la paille comme un
gueux.
Faulte d'argent et les grans prestz
Nous ont Ung peu appaillardis.
Dialog. de Mallepaye, p. 57.
On répugne à retracer l'idée du vice inhérent â la
paresse des gueux qui couchent sur la paille, en
disant qu' appui llardi7- c'est devenir luxurieux, im-
pudique. (Oudin, Dict. — Voy. Paillarder.)
VARIANTES 1
APPAII.LARDIR. Dialog, de Mallepaye, p. 57.
Apaillardir. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 349, col. 1.
Appanage, siilist. inasc. Dot. Apanage. On peut
voir dans Ménage, Dict. étym. combien Tes opinions
ont varié sur l'origine du mot appanage. En suppo-
sant qu'il fût dérivé du substantif latin appemlagiuin
formé du verbe nppendere, l'ortliographe appcnage
que l'on croit une altération d'appanage, seroit la
vraie orthographe. Cette opinion de Spelman, pré-
férable sans doute â celle d'Antoine Loisel qui veut
qa'appennage ait été formé de penne, en latin
penna, parce que les enfans appennés commen-
çoient à voler d'eux-mêmes, ne mérite cependant
d'être remarquée qu'autant que la signification
d'apanage semble y être relative, lorsqu'on dit que
les infirmités sont les apanages, les dépendances
do la nature humaine. C'est dans le mot pain, en
latin panis, qu'on trouve l'origine aussi simple que
naturelle du mot appanage. (Voy. Du Gange, Gloss.
lat. T. I, col. ô'd. — Nicot, Dict. - Dict. de Trévoux.)
Il suffit que le pain soit une chose essentielle à
la nourriture de l'homme, pour qu'on ait nommé
pain tout ce qui est nécessaire à sa subsistance, et
appanage ce que les pères et mères donnent à leurs
. enfans, ou les frères aines à leurs puiiiés, tant pour
leur nourriture que pour leur entretien. Dans cette
signification générale, la dot des filles étoit une
espèce d'ajB/jfljîflg'e. « Père et mère, ou fun d'eux,
« entant que â luy est permis et leur est loisible,
« peuvent par contract de mariage appaner leurs
" filles et leur laisser pour leur dot de mariage et
" pour tous droicts de leurs successions , ce que
« bon leur semblera; tellement que leurs dictes
'< filles ainsi appanées ne peuvent aprez le déceds
« et trespas de leurs dicts père et mère demander
" ne quereller aucune chouse ez biens et succes-
« sions de leurs dicts père et mère, sinon leurs
« dicts appanages, au cas que les dicts père et mère
« ou l'un d'eux ne les eussent rappelés. « (La
Thaumassière, Coût de Berry, p. 209 et -210.) « Fille
« mariée et appanée, ou dotée, par père et mère
« vivans... ne peut retourner à la succession des-
« dits père et mère... tant qu'il y aura hoir masle,
« ou hoir descendant de masle , soit masle ou
« femelle.... Et ne peut ladite fille impugner ladicte
» dotation et appanage... sauf par supplément de
« sa légitime, eu esgard à son dit dot, ou appanage,
" et aux biens de ses dits père et mère délaissez
« par leurs décès. )> (Coût, de Mvernois, au Coût,
gén. T. L p. 892.)
On a dit en parlant des Filles de France, e.vcluses
en tout temps de la succession à la Couronne, que
« c'est une espèce d'abus de leur donner des appa-
« nages en fonds » de terres domaniales. Cette
observation de Le Laboureur paroit d'autant plus
judicieuse qu'elTectivement fabus dont il indique
l'époque, (Hist. de la Pairie, p. 20.5,) est un écai*t
de l'ancien principe des usages Saliques ; principe
d'après lequel il semble que Charles V ordonna pai-
ses Lettres du mois d'octobre 1374 (1), que « pour
« tout droict de partage ou appennage que ses iilles
« pourroient demander en ses Domaines, Droicts,
» Noblesses et Seigneuries royaux, l'ainée auroit en
« mariage cent mille francs, et les autres filles
« soixante mille francs, avec tels garnisons et esto-
« remens comme il appartient à filles de Roy de
« France. » Il est probable que ce n'est pas sans
raison qu'en parlant de ses filles, il a dit, « pour
« tout droict de partage ou d'appennage qu'elles
" pourroient demander, etc. » S'il eût reconnu leur
droit à demander un partage ou appen)iage en fonds
de terre, un appennage de même nature que celui
de leurs frères, il se seroit exprimé sans doute à
l'égard de ses filles Marie et Ysabelle, comme à
(1) Cette sage mesure demeura sans effet, et ce fut seulement à partir de 1566 que les rois s'astreignirent à l'observation
rigoureuse d'une loi précise. Lhospital fit rendre alors une ordonnance en vertu de laquelle tous les apanages rentraient
francs et quittes de toute obligation à la eourop-ne, après l'extinction de la ligne masculine directe, (n. e.)
AP
— 37 —
AP
réirard de son fils Louis ; il auroit dit, pour « tout
« droict de partage ou appennaqe à elles apparte-
« liant, » comme en parlant de leur frère, il avoit
dit : « Ordonnons que... nostre très-cher et aimé
« fils Louys aye pour tout droict de partage ou
«' appcunage à luy appartenant en nos Terres et
« Seigneuries, pour raison de nostre succession ,
« ou autrement, selon les vieils usages, observan-
« ces et coustumesde nostre Royaume, douze mille
« livres de Terres, etc. » (Godefroy, Aunot. sur
fHist. de Charles VI, p. 571 et 57'i.)
Quoique cette Ordonnance semble confondre le
partage et Vappanage, la signification de ces deux
mots n'en étoit pas moins essentiellement différente,
puisque les filles, bornées à une dot qu'on nommoit
appanage, n'ont jamais partagé les terres Saliques,
conjointement avec leurs frères ; et (lu'antérieu-
rement à l'Ordonnance de Charles Y, Vappanage,
tel qu'on le conçoit encore aujourd'hui, excluoit,
même entre frères, le partage de ces terres. Une
preuve de cette exclusion commune aux fils puînés
des grands Seigneurs avec les fils puînés de nos
Rois^ c'est ([ue dans un titre de 1323, « Guy de
« Chastillon, Comte de Blois, après avoir dit* et
" maiutenu (iue....lohan son frère ne devolt, ne ne
« pooit demander en la comté de Blois, ne es ap-
" parlenances que appenage tant seulement, fixe
» cet appanage à doze cenz livres tournois de rente
« en fonds de terre, quoique son frère prétendit
« avoir droit de partage en ladite conté et es appar-
« tenances. » (Voy. Ilist. de la M. de Chastillon, pr.
p. 100.) L'appanage des puînés n'éloit même pas
toujours un appanage en fonds de terre. Guillaume,
Seigneur de Montpellier, fils de la Duchesse Ma-
thilde, déclara par son testament du 4 novembre
1202, son fils puîné exclus du droit de parlager
avec l'aiaé l'hérédité paternelle , moyennant un
appianage de mille sous de rente annuelle : « Volo
« quod filius meus major natu... det ei tempore
'< vitse suœ annualim 1000. sol. et pro his sit con-
" leulus omnibus aliis bonis meis. » (Du Cange,
Gloss. lai. T. I, col. 543.) Dans un autre testament
d'un Seigneur de Montpellier, aussi nommé Guil-
laume, fils d'Ermessinde, le puîné, désigné pour
l'état ecclésiastique, subit la même exclusion, sans
pouvoir exiger de l'ainé autre chose qu'une éduca-
tion et une subsistance proportionnées à la noblesse
de sa naissance. C'est relativement à cette idée géné-
rale de proportion, particularisée dans le testament
et indiquée par l'adverbe honorificè, qu apariagc a
signifié la même chose (\n appanage. (Voy. Aparl^ge.)
On peut dire que ce testament, en date du li
décembre 1146, est une cession faite au fils aine,
de tous les droits de l'autorité paternelle sur le
puîné. " Rernardum Guillelmum filium meum
« dimillo Guillelmo filio meo majori, ita scilicet ut
<' usque ad aîtalem xviu annorum benè faciat eu m
<• docere et in lilteris studere ; et si tune voluerit
« clericus fieri et ad sacros ordines promoveri ,
« Dominus Montispessulani teneat illum honorificè
•< secum, ita scilicet ut equos et ai'ma, et armige-
« ros, et victum et vestitum sibi honorificè adminis-
« tret , et Bernardus nihil aliud in Loto honore
« ipsius aliquo jure petere possit; vilis enim h;ere-
« ditas nobilem'hominem non decet. •• (Du Cange,
Gloss. lat. uhi supra.) Il seroit à désirer pour les
mœurs qu'il suffit d'être vertueux pour être noble
avec décence. Mais telle est la force des préjugés
vulgaires, qu'on sent encore aujourd'hui que dans
le xn' siècle on pouvoit avoir raison de dire qu'un
médiocre patrimoine messied à la Noblesse. La
crainte que cette médiocrité n'exposât la noblesse
d'une Maison illustre à l'obscurité et à l'avilisse-
ment, parut un motif raisonnable d'exclure les
enfans puînés de la succession pnternelle. On les
força de se contenter d'un appanage (I), au moyen
duquel ils pouvoient subsister décemment, et se
venger, en acquérant l'honneur et la richesse dans
la carrière ecclésiastique et militaire, de l'espèce
d'injustice qu'on leur faisoit éprouver.
Ces appanages durent sans doute paroitre encore
plus contraires à la Nature que les partages dont le
droit d'aînesse autorisoit l'inégalité. « Aussi nos
>< premiers ancestres ne se pèurent aisément in-
« duire à introduire en leur monarchie des droits si
« contraires à l'égalité qui semble naturelle entre
" les enfans d'un même père. Et de fait ne furent,
« ny les droits d'ainesse, ny les apanages, conneus
« sous la première, ny mesme sous la seconde lignée
« de nos Roys. » (Pasquier, Rech. liv. ii, p. 128.)
Mais la Nature qui dicte la loi de l'égalité, excuse
elle-même l'amour propre d'un père de famille qui
s'occupe des moyens de perpétuer l'illustration de
sa noblesse. C'est ce même amour-propre devenu
dominant qui proscrivit enfin l'égalité du partage
entre frères. « On reconnut, sous la troisième Race,
« le droict d'aisnesse si essentiel à l'entretenement
« des familles, et que la Nation Françoise a eu en
« grande recommendation, voire sur toutes autres
« nations. » (Pasquier, ubi supra.) Vappanage anéan-
tissoit quelquefois toute espèce de droit de partage,
même inégal, lorsque les fils et les frères puînés
des Seigneurs particuliers étoient appanages comme
l'ont été et le sont encore les fils et les frères puinés
des Rois de France.
On sait que sous les deux premières Races de
nos Rois, le Royaume qui est terre Salique par
essence, se partageoit, suivant les mêmes Lois
qu'une hérédité particulière ; que le partage étoit
égal entre les fils, à l'exclusion des filles ; que pour
obvier aux inconvéniens de cette égalité de partage,
on établit, sous la troisième Race, la maxime de
l'indivisibilité de la Couronne : maxime qui devint
loi fondamentale de l'Etat, et dont les Seigneurs
particuliers ont profité eux-mêmes, en la faisant
valoir pour leurs fiefs nobles ou seigneuries.
(1) L'apanage était donc la pension annuelle, la rente assignée d'ordinaire sur certains fonds, que faisaient les seigneurs
à leurs frères puînés. Il nous en reste des exemples assez nombreux au xii' siècle. La tenure en pavage, la division des
flefs firent tomber en désuétude Vapanage seigneurial, (n. e.)
AP
— 38
AP
Le rtomniiiede ia Couronne étant ainsi devenu
indivisible, le .. ■ pour assurer i^i ses puinés un sort
cligne de leur naissance, leur donna la jouissance
de ïeii'os et de titres, aux charges de reversion à
l'extinction de leur postérité masculine ; et cette
jouissance ainsi donnée, fut par la suite nommée
appanage(\). « Au lieu où premièrement tous enfans
o du Roy estoyent recompensez en t^oyaumes, pour
« leurs partages, et (jue depuis on leur donuoit les
« grandes contrées par forme de Duchez , avec
« grandes prérogatives et soy l'essentans au plus
« près de la Royauté sous le titre de Ducs ; nos
« Roys par une innovation très-politiiiue et prolita-
« ble pour l'accroissement de ce royaume, commen-
« Gèrent à retrancher cette grandeur à leurs frères,
« leurs donnans Terres et Seigneuries en apanaçie.
« Quoy faisans ils n'entendoient leur avoir rien
« donné en partage, fors le domaine et le revenu
« annuel. » (Voy. Pasquier, Rech. liv. u, p. 129.)
En effet, l'idée d'une propriété indivisible ou impar-
table, exclut nécessairement l'idée d'un appnnage
qui diviseroit cette propriété, en la partageant. Il
est donc de la nature d'un appanage de n'être pas
un partage. On l'a déjà prouvé par quelques anciens
titres relatifs aux enfans puînés des Seigneurs par-
ticuliers. Mais il s'agit ici de Yappanage que Saint-
Julien, (Mesl. hist. p. G.) dit avoir en soy quelque
excellence réservée pour les fils de Roys. Cet appa-
nage, disoit l'Avocat général Talon, parlant dans
une cause d'appanage en 16'd, n'étoit point un par-
tage; ce n'étoit point une légitime, mais un droit
spécial, une concession particulière, par grâce, par
bonté, par bienfait. (Voy. Journ. desAud. T. 1. p.
347.) Le P. Hesnault dit que sous le règne de
Philippe-le-Bel, « Yappanage étoitune sorte de con-
« cession, qui sans morceler le domaine de la
« Couronne, en suspendoit seulement la jouissance
« pour quelque temps et pour quelque portion ,
" mais sans toucher à la propriété. » (Abr. chron.
de l'Hist. de Fr. T. I, p. 2G0 ; édit. de 1768.)
Il paroit aujourd'hui tellement constaté que
l'essence de Yappanage est de rester domaine de la
Couronne, qu'il seroit inulile d'insister long-temps
sur la preuve d'une vérité établie par la' Loi et
attestée par les Jurisconsultes. « Terrœ appanagii
« sunt pars domanii Régis, concessa? per modum
« provisionis, filiis masculinis Regum. .. (Du Mou-
lin, sur la Coût, de Paris, titr. i", § 4.3, n" 185.)
L'Avocat général Talon, dans son plaidoyer que j'ai
cité plus haut, prouvoit que le Domaine donnij à
titre d'appanage, conservoit la nature de Douuiine
de la Couronne, en alléguant les articles xv et xvi
de l'Ordonnance de 15GG, sur le Domaine.
Ces ailicles portentque dans les terres domaniales
cédées par engagement, (Rec. des Ordonnances,
édit. de 1720, T. 1, p. IIOG.) la réception de l'hom-
mage demeurera au Roi , mais que lorsqu'elles
seront cédées en appanage, l'hommage sera reçu
par le Prince appanage, aux charges par lui d'eii-
voyer une copie de la réception "à la Chambre des
Comptes de Paris ; « ce qui justifie (ajoutoit-il) que
" les terres de Yappanage demeurent domaine de
« la Couronne. » (Voy. Journ. des Audiences, ubi
supra.) « L'appanage, dit du Tillet, n'est point un
« partage qui importe Seigneurie.... Les droicls
« royaux qui sont adhérens à la Couronne, insépa-
« râbles d'icelle, sont réservez et ont toujours esté ;
« et souloit ou Duché ou Comté qui estoit baillé
« estre retenue par le Roy quelque ville où il éri-
« geoit un Bailliage royal pour la cognoissance
« desdits cas royaux... Depuis ont esté créez Juges
« des Exempts. » (Vov. Du Tillet, Rec. des Rois de
Fr. p. 208, 209 et 213. — Pasquier, Rec. liv. u,
p, 129.) Henri 111 ne fit aucune exception pour les
appanages, lorsque par l'article cccxxxi de son Edit
du mois de mai l,->79, « il ordonna qu'es aliénations
« et délaissemens des terres du Domaine de la
" Couronne, à quelque titre que ce fût, ne pourroit
« estre faite... aucune cession des droits de nomi-
« nation des offices extraordinaires des dites terres,
" ni semblablement des droits royaux dépendans
« de la Couronne, comme y étant inséparablement
« unis et annexés. >• (Ord. 1. 1, p. 645 ; édit. de 1720.)
VARIANTES !
APPANAGE. Laur. Gloss. du Dr. Fr.
Apannage. Pasquier, Rech. liv. vm, p. 690.
Appaxaige. S' Julien, Mesl. hist. p. 7, 12, etc.
Appannage. Monet, Dict.
Appenage. Hist. de la M. de Chastillon, pr. p. 100.
Appennage. Du Tillet, Rec. des Rois de Fr. p. 209.
Appennaige Crétin, p. 80.
Empanage. Laur. Gloss. du Dr. Fr. — Cotgrave, Dict.
Empannage. Monstrelet, Vol. III, fol. 121, R».
Appanager, verbe. Apanager ; Doter. Faire
pâturer. On a pu nommer appanage en général, ce
qu'on donnoit en deniers ou en terres aux enfans
exclus de toutes successions paternelles et mater-
nelles, pour leur nourriture et entretien, pour leur
subsistance. (Voy. Appanage.) Aussi trouve-t-on que
donner à une fille ou à une sœur, à un fils ou â un
frère, pour .son droit successif, une somme d'argent
ou une portion d'héritage en usufruit et même en
propriété, c'étoit les appanager ou appaner. (Laur.
Gloss. du Dr. Fr. p. 50. — Dict de Trévoux, T. I,
col. 461. — Voy. Appaner.) Il semble en effet que les
appanages en fonds de terre varioient relativement
à la nature des biens et à la disposition des Cou-
tumes, qu'ils ii'étoient pas toujours une cession de
simple usufruit, \)ms,q\i' appanager signifioit non-
seulement donner à quelque sien fils ou fille, frère
ou sœur, pour tout droit d'hoirie présente et future,
certaine portion â tenir par voie d'usufruit; mais
encore lui assigner portion de bien , moyennant
(1) Les règles de l'fl/ifDinf/e royal auraient alors pu ne pas différer essentielleme.it de l'apanage seigneurial: mais la
faiblesse des rois laissa introduire l'usage désastreux deriiérédité; c'était constituer des familles rivales de la maison
royale elle-même et plus puissantes qu'elle. La plus puissante fut celle des ducs de Bourorogne, fondée, pour la première
fois, par la donation de Robert en faveur de son fils, éteinte par la mort de Philippe de Ro'uvre, en 1362, et rétablie à cette
époque par Jean II, en faveur de Philippe le Hardi, sans exclusion de la tige féminine. (N. e.)
AP
— 39
AP
quoi il renonçoit à tout héritage présent et futur
(\oy. ilouet, Dict.) Cette seconde délinition ne seroit
qu une répétition inutile de la première, si la pro-
priété de la portion de bien donné en appunaqe n\
eloit tacitement réunie à l'usufruit. Une preuve
plus évidente que le don d'un appamtge étoit quel-
quelois une espèce de partage, une cession de pro-
priété, c est que le père, la mère ou autre cmpamqeoit
son fils. Il le ou parent, en lui délaissant quelques
terres ou héritages; en l'apporlionnant, comme dit
Ja Lqulume dAcs, quand fainé donne part à ses
pûmes en cas de succession. fLaur. Gloss du Dr
rr. iibi supra.)
Il est si naturel d'égaler, de proportionner la dot
Uippanarje d'un fils et d'une liUe à l'état qu'ils
doivent avoir dans la société, qnappmmner et
apparager ont pu réciproquement siamlier la même
chose. .Vinsi la raison de subslituer,\lans (jiielques
toutiimes, au verbe appanagerle verbe apnaraner
semble moins essentielle que ne l'ont cru Uaaueau
e les Auteurs du Dict. de Trévoux. (Voyez ApIruge
et APAR.iGER.)
La signification i'appamiger, faire pâturer, est
i eiative a celle de panage; mot formé de pain (1) et
qui par e.vtension aura désigné toute espèce de
nourriture propre aux bestiaux, aux cochons, etc
« Le suppliant, pour nourrir et appaiicu/er ses
" pourceaulx, a |irins du Seigneur de Courtenav les
« haj-es et bois d'icelle seigneurie. » (D. Carpentier
tiKe rS '^^ °" ^'"^'^' "" ™°' -^PPamghm]
De là, on aura dit en parlant de l)estiaux qu'on
n avoit pas le droit de faire pâturer dans une torêt
qu lis n eloient pas appanagés ou (ipparuaigés. « Hz
•■ ont droits de franchises et libériez, tels que nous
" avons en nostre dite forest de Charnie- et en-
« tr autres sont en possession de prendre.! toutes
« les bestes porchines, aumailles et autres nu'ilz
<• treuyent au dedans de leur dict parc, non her-
« i)iiigeeselapparn(iigées, comme à eux annartenans
« par confiscation » (Id. ibid. tit. de 1480.)
VARUXTES :
APPAN.\GER. S- Julien, Mesl. hist. p. 6
Appannager. Lett. de Pasquier, T. II, p. 578. - Monet D
Afpenxager. Cotgrave, Nicot et Monet, Dict.
Appaner, verbe. Apanager; Doter. La signi-
hcation propre d appaiicr, c'est trancher et donner
a chacun de pain ce qu'il lui en faut; par extension
" tranclier et diviser entre les séants à table autant
(vif ^?|ef. servis comme on juge estre nécessaire. »
l!f] •',"'"^,'î' *'^^'- ^"s'- P- ♦^•) H semble qu'on ait
as ez naturellement comparé à des convives ainsi
paitcigeb, les enfans qu on exclut des sucpessinn«
paternelles et matern'elles, en leur as"iSnan le
quoi vivre et s entretenir, lorsqu'on a dit figurément
qu'au moyen d'une dot en argent, ou d'un rCTenu
en fonds de terre, ds etoient appanés ou appanagés
l\oy. Appaxager.) « i-^iiie mariée et appanée ou doté^
'- par père et mère vivans... ne peut retourner à la
« succession des dits père et mère.... et ne neuf
<• impugner la dicte dotation et appamige. » (Coul
de Nivernois, au Coût. gén. T. I p 89-> )
On a veillé à la conservation du rovaume de
l-rance, « en voulant que tout le droict de la Cou-
« ronne fut attribué aux aisnéz, et que les frères
« cie nosF.oys fussent senlemenl appennez. » (Pas-
quier, liech. hv. n, p. m. - Voy. Appanage.) ^
APE.NNER.J le.Mairè,must des-GàuIes MV'rr'^OO
Appanner. Cotgrave et Monet, Dict ' ^'
Appe.xner Du Tillet, Rec. des Rois'de Fr p 4G5
Ejipaner. Laur. Gloss. du Dr. Fr. p 52. ^'
Appar, préposition. Par. On a indiqué ailleurs
quelle pourroit être la cause de la persuasion où
Ion est que dans ces expressions, à-par-moi à nar-
nous, etc. a-par-soi, à-par-lui, à-par-eux eV li
ïs:^s;!SLf ""'' «•^^''^"«" '^ ^^^^
L'a et par étant réunis, on écrivoit anpar ou
appar t; préposition composée qui ne signSt rieS
ce p us que la préposition simple pal lorsqi'oS
disoit appar ou appart-soi, dans le sens ôé S" Si
ou de par-soi tout seul, séparément, à-part F Mour-
" ront m.eulx ensemble qu'ilz ne eroiei t chacïn
« appar-soy, etc. » (Le Jouvencel, ms. p 431 v! /is
(ibid. p. 023. - \oy. A-PAR-soi et Par-soi.)
VARIANTES :
APPAR. Le Jouvencel. MS. p. 431
Appakt. Ibid. p. 023. '
Appai-able, adj. Qui se décide par Tévidence
du droit. Signification relative à celle du verbe
W/'d'/-, paroitre, être visible, évident. (Voyez
AiPARER.) pans la Coutume de Normandie, en vers
es querelles apparubles sont celles que la me^mè
Coutume nommoit querelles apparismntes parce
que la Loi qui les décidoit, faisoit paroitre le droU
des parties, et le mettoit en évidence
Or convient veoir des querelles
De possession, qui sont telles :
Une naouvable, autre imniouvable-
L une simple, autre apparable.
Coul. de Norm. en vers, MS. fol. 68, V col. 1 el 2.
Apparaument, adverbe. De façon à être vu II
semble que la formation de cet adverbe ait quekiue
analogie avec celle de l^ndjectif «j.p«,r^6/,/(vï.ez
Apparaple.) Peut-être a-t-on écrit apparableiuent et
apparaument m une espèce de contiadiui, •) don
h preuve n est pas rare dans notre ancienne la^i-ue-^
Quoi qu 11 en soit, radverbeû;^;;flr«M,«t'«/. pris dans
un sens relatif à celui du verbe apparei-, paroitre
se faire voir, signifioit de façon à é re vu « Où es
(2|lle;^'<^'^ls'ai^S«'^S;;;/c^?-^^c^C^ Signifie fabrication du pain. (.. e.) -
cheval est devenu c/ievau, etc. (n. e.; '-""S'Onne ( s est cbangee en la voyeUe tt; ainsi léalmeut est dev-enu leaumenl,
AP
40 —
AP
« Archiers fauklront, l'en doit asseoir les autres qui
« n'ont nulz arcs. . . . mais ilz doivent estre assis
« plus au descouvert et plus apparemment que les
« Archiers » (Modus et Racio, ms. 1" 78.) Ouelquefois
l'acception de cet adverbe étoit la même que celle
à' apparemment. (Voy. Apparemment.)
VARIANTES :
APPARAUMENT. Modus et Racio, MS. fol. 78, R".
Aparau.ment. Psautier, MS. du R. n° 7837, fol. (31.
Appare, siibst. fém. Paroi. Ce mot semble être
de uiêuie origine et de même signification qu'«/j-
paroi, paroi, muraille. « De si grant force getta
0 l'escuelle en quoy ilz buvoient, que elle lompy
<■ en pluseurs pièces encontre une fl;;;^?'^ oii elle
" fery. ■> (D. Carpentier, Suppl. Gloss. lai. de Du
Cangè, au mot Paries; lit. de 1409. — Voy. Aparoi.)
Apparement, suhst. masc. Action de paroitre.
L'action de se faire voir en public, de se faire
counoitre. (Voy. Apparer.) » Damoiselles, comment
Il nous maintiendrons-nous jusques au jour de
« nostre feste et de mon apparement? car je n'ai
« voulenté... de moy monstrer, ne faire cognoistrc
« en appert, fors que entre vous. » (Percef. Vol. II,
fol. 48, V" col. 2. — Voy. Apparition.)
Apparemment, adverbe. De façon apparente,
visiblement, évidemment, vraisemblablement. On
regarde l'ortbographe appareil lenienl comme une
preuve de l'affectation avec laquelle les Ecrivains
du -wi' siècle préféroient à l'orlliograpbe vulgaire,
une orthographe plus étymologique. 11 semble en
effet qu'en écrivant apparentement pour apparem-
ment, on ait voulu rendre l'orthographe plus con-
forme à l'étymologie (1), et désigner ainsi le rapport
de cet adverbe avec le participe apparent dont il est
formé par une espèce de contraction ordinaire dans
la formation des adverbes différemment, fi'équem-
mcnt, et autres de même terminaison. (V. Apparent.)
C'est dans un sens relatif à celui du verbe apparer,
paroitre, être visible, évident, vraisemblable, que
l'adverbe apparemment ou apparentement a signifié
visiblement, évidemment, vraisemblablement, en
apparence. On en a restreint l'usage à cette dernière
acception ; mais anciennement on disoit : « Se le
« dit bois n'estoit apparement marquié, etc. « (Ord.
T. VIll, page 100.) « Les Baillis. . . soupeçonnés de
« usures, ou menions, apparemment âGè\\oï\Qè\&\ie,
« ifs ne soulendront en leur erreur. » (Ibid. T. I,
p. 69. — Voy. Apparaument.)
VARIANTES :
APPAREMMENT. Orth. subsist. - Ord. T. I, p. 69.
Apparammant. Monet, Dict.
Apparéejient. II. Carpentier, S.Gl. 1. deD.C. a. Apparenter.
Apparement. Ord. T. VIII, p. 100.
Apparentement. Contreditz de Songecreux, fol. 90 et 95.
Apparence, ,s;(/^s/. féminin. Représentation,
prestance, extérieur. Etat visible d'une chose. Vérité
évidente, réalité. Le substantif apparence, dans un
sens analogue à celui du verbe apparer, pai'oitre,
a signifié représentation, prestance, extérieur par
lequel on se distingue en paroissant, en se pré-
sentant. >' L'homme est de sa nature de plus grande
" apparence et plus honorable que la femme. »
(Nicot, Dict.) « Les petites gens sont sujets... à estre
" choqués et coudoyez, à faute à'appareiiee. » (Essais
de Montaigne, T. 111, page 570.) De là, on a nommé
hommes (l'apparence ceux à qui la nature ou la for-
tune a donné les moyens de paroitre avec cet
extérieur qui les distingue. » Se celuy qui est trouvé
« de jour en l'héritage, en temps de fruicts, avec
» brisure de porte ou closture, est Jiome cogneu et
>' d'apparence, celuy qui l'a prins ne le peut' mener
« que jusques à quelque lieu ofi il puisse trouver
" tesmoings. » (Coût, de Bayonne, au Coût. gén.
T. II, p. 701. — Voy. Apparent et Apparoissance.)
L'apparence d'un lieu où s'est fait quelque dom-
mage, est sans doute l'étal dans lequel on voit ce
lieu, l'état dans lequel il paroit depuis qu'il a été
endommagé. « Bien se gart qui fet à autrui damage
« en blés semés, ou en mars, ou en bos, ou en prez,
« que chil qui est pris en damage fesant, est tenus
" à rendre tout le damage qui est trouvés ou prouvés
« par Yaparance du lieu. » (Beaumanoir, Coût, de
Beauvoisis, chap. xxx, p. 157.)
Ce même mot, qui relativement à la signification
A' apparer, être vraisemblable, désignoit et désigne
encore une apparence plus ou moins sensible de
réalité, a signifié la vérité évidente, la réalité même
des choses. « Tout ainsi que avez veu à l'heure du
« Sacrement, il se assiet... et tant attent... que le
« Prestreluy apporte son Saulveur.... Merveilleuse
« chose est; car autre substance n'a eu depuis...
« plus de deux mois. . . . Molt fut Arfaran esmer-
« veillé... et dist : Sire, merveilleuse chose m'avez
« icy déclairée et forte t'i croire, si n'en visse Vap-
« parenee. » (Percef. Vol. VI, fol. 128, R- col. 1 et 2.
— Voy. Apparent et Apparer.)
VARIANTES :
APPARENCE. Orth. subsist. - Percef. Vol. \'I, fol. 128.
Aparance. Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, p. 157.
App.\rance. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 27, col. 1.
Apparent, participe. Paroissant, qui se fait
voir, qui se voit. On observe que ce participe du
verbe apparer a toujours eu les significations avec
lesquelles il subsiste. Dans un sens relatif îi celui
du substantif apparence, représentation extérieure,
il a signifié et signifie encore une personne qui re-
présente dans une ville, en y paroissant avec un
extérieur qui la dislingue. Mais quelle que soit
aujourd'hui la représentation d'un Ambassadeur
extraordinaire, on ne le qualifie plus de « très-
" haut et Ivès-apparent extraordinaire Ambassa-
« deur. » (Mém. de Bassomp. T. II, p. 208.)
L'acception d'apparent étoit la même que celle
(I) L'étymologie condamne la forme inventée an K\v siècle; en effet, les adjectifs en eus, aus, n'avaient qu'une forme
au singulierpour le masculin et le féminin ; de là vient qu'aux xif et xiir' siècles on disait formait, léahnoit; au xiv» siècle,
on dit par analogie rjrandewcnt, comme bonnement, mais prudemment, apparemment et quelques autres, restèrent luiéles
à l'étymologie. (n. e.)
AP
— 41 —
AP
û'apparer, paroitre, lorsqu'on disoit, l'« l'apparent
de quelqu'un, pour signifier dès qu'il parut :
Pas ne me vit si tost que je le vi ;
Bien l'aperçus à l'apparant de li.
Froissart, Poès. MSS. p. 74, col. 1.
2" A Vapparent de tous, pour signifier en se
faisant voir, en se faisant connoitre à tous : « La
« condicion de la maulvaistié est telle que d'elle-
« niesme, où elle n'a nuls conlredisans, sideschiet-
« elle et se publie à /'fly;a?'rt«/ de tous. ■> (Sainlré,
page 91.)
3° A l'apparent du monde, pour signifier au vu et
au sç.u de tout le monde. « Le Comte de Nevers...
« venoit d'un loingtain voyage... Si fut voulontiers
« veu.... en toutes les seigneuries et terres de son
« père; desquelles il estoit à l'apparent du monde,
« héritier et successeur. » (Froissart , Vol. IV ,
p. 288 et 289.)
La préposition à étant supprimée, on disoit en
parlant d'une personne triste et qui paroissoit l'être,
qu'elle étoit triste l'aparent ; façon de parler ellipti-
que qui semble particulière à Ph. Mouskes :
Et sa maisnie et si parent
Furent moult triste l'aparent.
Ph. Mouskes, MS. p. 6-18, etc.
Dans le même auteur, être joiant et par deçà et
l'aparent signifie probablement être plus joyeux
qu'on ne le paroit.
Joiant en furent leur parent
Et par deçà et l'aparent.
Idem, p. 623.
Enfin le participe apparent précédé de l'article
le, étoit de même signification que le substantif
apparence, existence visible ou intelligible, exis-
tence réelle ou idéale. (Voy. Apparence et Appareh.)
n'entendoit
Fors au chanter, ainsi qu'il le monstroit.
Par l'apparent.
Froissart, PoSs. MSS. p. 74, col. 1 et 2.
Les Lettres patentes sont des Lettres dont on voit
le contenu, parce qu'on les délivre tout ouvertes ;
de là, elles auront été nommées Lettres apparans.
(Voy. Chron. Fr. de G. de Nangis, .ms. an. 1291.)
On distingue dans l'ancienne Coutume de Nor-
mandie, deux espèces àeLoix apparentes, que plus
communément on appeloil Loix apparissantes.
(Voy. Apparoissant.)
VARIANTES :
APPARENT. Orth. suhsist. - Froissart, Vol. IV, p. 289.
Af.^rant. Saintré, page 91.
Aparent. Ph. Mouskes, MS. p. 623, 648, etc.
APPARANT. Percef. Vol. IV, fol. 115, R» col. 1.
Apparer, verbe. Faire apparoitre. Apparoître,
s'apparoitre. Comparoître. Paroitre, se présenter,
se faire voir. Paroitre, être visible, évident, vrai-
semblable, intelligible. Faire paroitre, rendre évi-
dent, prouver.
On ne croiroit pas que la signification d'un verbe
essentiellrment neutre ait quelquefois été active, si
on n'en donnoit la preuve.
Or dist li uns des mors as vis (li :
Seignor, regardez-nous as vis (2)...
Diex nous a à vous aparits,
Pour ce que vous melons à voie
De bien ; et Diex vous i avoie.
Dits de Baudoin de Condé, MS. de Gaignat, fol. 311, V col. 3.
Dans le sens d'apparoître, s'apparoitre, verbe qui
signifie particulièrement l'apparition d'une subs-
tance spirituelle et invisible, ([ui se fait voir sous
une forme matérielle, on a dit en parlant de l'at-
tente et de la venue du Messie : « Près est nostre
" Sires... et tost apparrit; ne défaillis mie, etc. »
(S'Bern. Serm. fr. mss. p. 96.) « Quant nos eswar-
" dames oîi il venoit, si nos apparaît une mervil-
« louse humiliteiz. (Id. ibid. p. 9.) Les apparitions
de la Divinité sont attestées par l'Ecriture sainte.
H Derechief s'a/j;jrtr(/< Deus en Sylo; kar révélé se
« fud à Samuel en Sylo, selunc sa parole. » (Livres
des Rois, MS. des Cord. fol. 5, V° col. 1.)
On désignoit le Juge à qui l'on se présente, et
non la partie adverse avec laquelle on paroit devant
lui, lorsque dans le sens de comparoître, on disoit
apparer ou apperer. « Nul ne doit départir, depuis
■< que renablement avéra esté somouns, ne dédei-
« gner de apper (3) en Court, sinon par renables
« excusacions. » (Britton, des Loix d'Angl. fol. 281.)
Cette abréviation apper qu'on retrouve (id. ibid.
fol. 280,, prouveroit seule la réalité de l'infinitif
apparer ou apperer, quand d'ailleurs elle ne seroit
pas démontrée par la conjugaison oîi l'on voit à
l'indicatif présent, 1" pers. 'du plur. apparons ou
apperons, etc. à l'indicatif imparfait, 3= pers. du
sing. apparoit ou appéroit, etc.
La signification de cet ancien verbe apparer ou
s apparer, n'étoit pas moins générale que celle de
notre verbe paroitre, se présenter, se faire voir.
« Ensi ke nos, à moens appariens vestit de confes-
" sion, ki ne poons mie aparoir en vesture d'inno-
« cence et de justice. « (S* Bcni. Serm. fr. mss.
page 63.)
Se tan tost armez n'apparons
Pour secourir ce fin amant.
Perdu est : à Dieu le commant.
Rorn. de la Rose, vers 15887-15889.
Mon père voi dedens seoir :
Mais ge ne l'oserai veoir...
Trop sui mesfez : mais tote voie
M'estuet que devant li m'apere
Ge sui ses filz, il est mon père.
Corlois d'Artois, MS. de S' Gerni. fol. 85, R» col 2.
Ce verbe qui désignoit la présence, l'existence
visible des personnes, désignoit aussi celle des
choses physiques et morales ; les signes plus ou
moins vrais de cette existence; une existence plus
ou moins sensible de choses visibles ou seulement
intelligibles. « xipeiret donkes li jors, etc. »
(S- Bern. Serm. fr. mss. p. 187.)
La nuiz s'en vet, li jors aperl.
Fabl. MS. du R. n' 7615, T. H, fol. 176, V- col. I.
On a dit en parlant de Dieu : « Sa poxance appa-
« rut d'avant en la création des choses, et sa
« sapience apparoit el governement des choses ke
(1) Vivans.
a.
(2) Visages. - (3) Ne serait-ce pas un simple oubli de l'abréviation per'i (n. e.)
AP
- 42
AP
« créeies estoicnl : mais li benigiiiteiz de sa mis(5ri-
« corde est or maisineuienl apparue en son liuma-
" nileil. » (S' Bern. Serm. fr. m^s. p. 124.)
Dame, la foiz apparra jà
Que vous menez à vos Seigneurs ;
lit la loiauté des amours
Que les Uaraoiselles demainent,
Pour qui les Chevaliers se painent.
Fabl. MS. du R. n" •!C15. T. I, fol. 113. V- col. 2.
En parlant des traces du sanglier, on a dit : « Les
« os du pie apparent partout où il marche. »
iModus et lUicio, ms. fol. 44, R°.)
C"esl par une comparaison très naturelle de ce
qui est intelligible avec ce qui est visible, ([u'appa-
rer ou apperer signifioit élre intelligible.
Il barbelole
Ses mots, tant qu'on n'y entend rien.
Il ne parle pas Chrestien,
Ne nul langage qui apure.
Farce de Palhelin, p. 63 et 64.
L'acception d'apparer ou apperer, être intelligi-
ble, est une extension de Tacception propre et figu-
rée paroîti'e, être visible, évident, ou seulement
vraisemblable.
Dans le sens de paroilre, être visible, être évident,
on dit encore au Palais, « il appert \^Av tel acte, s'il
" vous appert que cela soit : » expressions dans
les(iuelles appert conserve une signiOcalion qui a
été très-générale , et dont on trouve partout la
preuve. Qu'il suffise donc ici de remarquer que cette
signification neutre A' appert étoit active, lorsqu'on
disoit : » Nul ne sera receu ii dire que Advocat luy
« ait esté baillé par distribucion, se partie adverse
« le débat; se celuy qui l'alègue, ne \' appert par
« procès et acte présentement. » (Ord. des D. de
Bretagne, fol. -li»0, 11".)
Peut-être qu'en parcourant les passages dans
lesquels nous avons cherché la preuve des significa-
tions du verbe apjparer, on s'étonnera d'y lencon-
Irer ajiperl, apparut, appuritst, etc. Quoique la
formation de ces modes et temps n'ait aucune ana-
logie avec linlinitif des verbes apparoir et appa-
raître, il suffit qu'ils aient suppléé et qu'ils sup-
pléent encore quelques-uns de ceux qui manquent
à ces mêmes verbes, pour faire croire qu'ils appar-
tiennent à la conjugaison de l'un ou de l'autre. Il
est vrai qu'on n'aperçoit pas plus le principe de la
formation de ces modes dans l'infinitif françois du
verbe apparer, que dans celui des verbes apparoir
et apparaître. Aussi croit-on qu'ils sont étrangers
à la cuiijiigaison françoise de chacun de ces trois
verbes ; qu'ils n'appartiennent pas plus à celled'a/j-
paroitre qu'à celle A' apparoir ou à' apparer ; qu'ils
sont un supplément de modes, commun à la conju-
gaison de chacun de ces trois verbes défectifs. (Voy.
Ai'rAnoiu et Ari'ARoisTiu:.) On préfère cependant pour
la réunion des modes dont il s'agil, sous une même
conjugaison, linlinitif apparer, parce que dans
l'origine de notre langue, les verbes françois se
modifioienl à l'imitation des verbes latins, souvent
même avec une lelle exactitude que l'infinitif amer,
en latin amare, faisoit à la 3' pers. du sing. de l'in-
dicatif présent amet , en latin amat, ù'ia même
personne de l'indicatif imparfait amevet, en latin
amabal, etc. 11 est donc assez probable que suivant
la règle de cette modification imitative, les modes
appert, apparut, appurrit et au très n'appartiennent
pas moins à la conjugaison du verbe apparer, en
latin apparere, que ceux dont la formation et la
terminaison semblent plus propres au génie de
notre langue. On ajoute que ces modes françois ne
sont eux-mêmes que les coniraclions et altérations
des modes latins. En comparant la conjugaison du
verbe latin apparere a.\eG celle du françois fl/;;;a;'er,
on acciuiert la preuve d'une vérité particulière qui
peut être généralisée.
CûNJCG.
Apurai, ind. fut. J'apparoitrai. (Psautier, ms. du R.)
Aparege, subj. pr. Apparoisse. (Ane. Cout.deBret.)
Aparruiii, ind. fut. Apparoitrons. (Liv. des Rois.)
Aparuit, ind. prêt. Parut. (S" Bern. Serm. fr.^
Aparust, subj. impaif. Parût. (Id. ibid. p. 2.3.)
Apeirt, ind. pr. Paroit. (Chans. fr. .ms. de Berne.)
Aperche, subj. prés. Paroisse. (Règle de S' Benoit.)
Apierge, subj. pr. Comparoisse. (Britton, des
Loix d'Angleterre, fol. 172, V°.)
Appaira, ind. fut. Apparoilra. (Ord. T. 111, p. 1G9.)
Appaire, subj. prés. Paroisse. (Crétin, p. 213.)
Appara, ind. fut.Comparoitra. (Brit. Loixd'Angl.)
Apparent, apperent et aperent, ind. prés. Appa-
roissent, paroissent. (Le Jouvencel, .mss. p. 301.)
Appariensai apuriens, subj. prés. Paroissions;
en latin appareaiitus. ;S' Bern. Serm. fr. mss. p. G3.)
Apparuient et apperoient, ind. imp. Paroissoient ;
en latin apparebant. (S' Bern. Serm. fr. mss. p. 11.)
Apparoit et apperoit, ind. imp. Paroissoit; en
latin apparebat. iS' Bern. Serm. fr. mss. p. 124.)
Apparons et appcrons , ind. prés. Paroissons.
'Rom. de la Rose, vers 15887.)
Apparra et apperra, ind. fut. Paroitra. (Rom. de
la Rose, vers 2007.)
Apparrat, ind. fut. Apparoîtra, paroitra ; en latin
apparebit. (S' Bern. Serm. fr. mss. p. 101 et 154.)
Apparrit, ind. fut. Paroitra. (Id. ibid. p. 96.)
Apparrunt et apperront, ind. fut. Apparoitront,
paroîtront; en latin apparebnnt. (Id. ibid. p. 34.)
Apparut, ind. prêt. Parut. (S' Bern. Serm. fr.)
Appeiret e[ a pe ire t, suh'}. prés. Apparoisse, pa-
roisse; en latin appareat. [là. ibid. p. 118 et 119.)
Apper, impér. Parois ; en latin appare. (Id. ibid.)
Apper (J'). Je parois. (Rob. Estienne, Gram. fr.)
Appere et apere, sub]. prés. Paroisse. (Rom. de
la Rose, vers G944.)
Apperez, ind. prés. Vousparoissez. (R. Estienne.)
Appérois, ind. imp. ïu paroissois. (Id. ibid )
Appcroije [y], ind. imp. Je paroissois. (Id. ibid.)
Appers, ind. prés. Tu parois. (Id. ibid.)
Appert et apert, ind. prés. Paroit; en latin appa-
ret. (S' Bern. Serm. fr. ms. p. 92 et 217.)
Apperte, subj. prés. Paroisse. (G. Macliaut, .ms.i
VARIANTES :
APPARER. S' Bern. Serm. Ir. MSS. page 124.
Aparer. S' Bern. Serm. Ir. MSS. page 101, etc.
-Aperer. Id. ibid. p. 350.
Apperer. Percef. Vol. lY, fol. 122, R» col. 1, etc.
AP
- 43
AP
Apparesser, verbe. Rendre paresseux et lâche,
affoiblir. Devenir paresseux et làctie , s'affoiblir. Il
semble que ce soit dans un sens analogue à celui du
mot g:rec7ràe£<r(f(l), en latin remisf<io, debilitatio,
qu'on a dit au propre et au figuré : « Le feu apparesse
« le cors et débilite l'entendement et le cerveau. "
(Triomph. de la noble Dame, fol. 110, V°.) « Nous
« apparesserons nos cueurs qui maintenant pensent
« petit une grant chose. » (Le Jouvencel, ms. p. 138.)
.... Oidive (2> atrait mauveistié,
Et maint homme a aparaicié.
Rom. de Brut, MS. fol. 81, V" col. 2.
La signification de ce verbe étoit neutre , lors-
qu'en parlant d'un Yavasseur parvenu à certain
degré d'élévation, on disoit :
Est si haut mis que nul lionte
Ne puet à son cors aprocliier,
S'il n'en chiet par aperecier :
Or se gart qu'il ne s'apérèce,
Si ert toz jors en grant haulèce.
Fabl. MS du K. n" 7218, fol. 255, V' col. 2.
On voit qu'il s'employoit aussi d'une manière réci-
proque. « Pour garder que les forces de nostre
« estomach ne saparoissent, il est bon une fois le
<> mois les éveiller en s'enivranl. » (Essais de Mon-
taigne, T. II, p. 18. — Voy. Ai'PARESsiR.)
V.\RIANTES :
APPARESSER. Le Jouvencel, MS. p. 138.
Aparaicier. Rom. de Brut, MS. fol. 81, V» col. 2.
Aparasser, Aparecer. Celthell. de L. Trippault.
Ap.\roisser. Essais de Montaigne, T. II, p. 18.
Aperecer. Fal)l. MS. du R. n» 7218, fol. 118, V» col. I.
Aperecier. Ibid. fol. 255, V» col. 2.
Apparessir (s'), verbe. Devenir paresseux, s'af-
foiblir par l'inaction. (Yoy. Nicot , Dict.) « Quelle
•• raison y avoit-il qu'ayans les grandes forces que
V le Roy avoit assemblées si chèrement, ils s'arres-
« lassent et apparessissent au même camp où ils
« s'étoienl fortifiés. •> (Du Bellay, Mém. liv. vu, fol.
234, Ro. — Voy. Apparesser et Paresse.)
Apparfondir, verbe. Faire plus profond. Faire
profond.
On ne voit dans l'orihographc apparfondir qu'un
etïet de la prononciation foible et adoucie de pro (3)
dans approfondir. (Voy. P.\nFo.ND ci-après.)
Il semble que ce soit en vertu de la préposition
à, i\\i apparfondir, le même qu'approfondir, signi-
floit rendre plus profond, faire plus profond. (Cot-
grave et Nicot, Dict.) « Fist très-bien garnir la ville
« et derrière et devant, haucier les murs, et les
>' fossez d'environ aparfondir. » (Hist. de B. du
Guesclin, par Ménard, p. 183.)
L'énergie de la préposition n'étant pas sentie, ce
verbe n'aura signifié rien de plus que pnrfondre,
rendre profond , faire profond. (Cotgrave , Dict.)
« On doit aparfondir les fossez tellement que nulle
« mine ne puisse passer. « (Le Jouvencel , fol. 87.
— Voy. Parfondre ci-après.)
variantes :
APP.\RFONDIR. Cotgrave, Oudin et Nicot, Dict.
Aparfondir. Hist. de B. du Guesclin, par Ménard, p. 183.
Appariation, snhst. fém. Appariement, accou-
plement. Espèce d'association.
Le verbe aparier signifloit joindre le pair au
pair, accoupler. De là, la première acception du
?,ubsti\\\\.ii appariation. (Cotgrave et Oudin, Dict. —
Voy. AiTARiE.MENT ci-dcssous.)
Anciennement, lorsqu'un Seigneur ecclésiastique,
un Evêque, un Abbé, craignoit qu'on n'attaquât les
droits de sa seigneurie et de sa justice, il s'associoil
un Seigneur laïque, un Duc, un Comte assez puis-
sant pour faire respecler ces mêmes droits ; et
l'association au moven de laquelle le Seigneur laï-
que devenoit pair, égal au Seigneur ecclésiastique
dans l'administration de la justice seigneuriale,
étoit une appariation plus connue sous le nom de
pariage. {\oy. Cotgrave, Dict. — Laurière, Gloss.
du Dr. fr.) Il étoit de la politique des Rois de la
troisième Race, de multiplier ces associations entre
eux et les Seigneurs justiciers, ecck'siastiques ou
laïi|ues, parce qu'en s'associant à leur pouvoir, ils
étendoient les bornes de l'autorité royale (4). (Voyez
Pariage ci-après.)
Appariement, subst. masc. Accouplement.
Comparaison. Significations analogues à celles du
verbe aparier, accoupler, comparer. (Voy. Aparier.)
variantes :
APPARIEMENT. Orlh. subsist. - Dict. de Trévoux.
Appariem.\nt. Monet, Dict.
Apparisiaire, subst. masc. Nonce, Légat. C'est
le mot .ipocrisiaire défiguré par une faute d'im-
pression. Lorsqu'on lit (Traité de l'Orig. des Cardi-
naux, p. 19 et "20, que « les Àpparisiaires envoyez
« anciennement par les Papes en la Cour de Cons-
« tantinoples auprès des Empereurs, estoient vray-
« semblablement .... des Diacres Cardinaux . . .
« qui depuis à la différence de simples Diacres
« furent appeliez Archidiacres », il est visible que
ces .ipparisiaires ne sont autres que les Apocri-
siairc's qui résidoient à Consfantinople en qualité
de Légats ou Nonces du Pape. Ces Nonces ou Légats,
qui éloient ordinairement Diacres, recevoient les
réponses de l'Empereur aux demandes du Pape et
l'en informoient. De là, on les nommoil .ipocrisiai-
res, mot formé du grec dnixonnç, en \alin responsio.
(Voy. Du Cange, Glôss. lat. T. I, col. 55G. — Dict. de
Trévoux, au mot Apocrisiairc )
Appariteur, s/(^s^ masc. Domestique ; Sergent;
Huissier ; Bedeau ; Bourreau. On a regardé les
Domestiques, les Sergens , les Huissiers , les Be-
(1) Paresse vient de pigritia, par la forme intermédiaire perece, en provençal pereia. (n. e.) — (2) Oisiveté. — (3) Nous ne
voyons pas que par ait un son plus faible que pro : on a formé le composé parfoml, comme parmi, parjure. (N. E.) —
(4) Ainsi les évêques de Mende, de Viviers et du Puy, seigneurs de leurs diocèses, furent tellement inquiétés par les baillis,
qu'ils donnèrent au roi la moitié de leurs domaines en pariage. L'administration restait indivise, mais était exercée une
année par les agents du roi, une autre par ceux de l'évêque. Parfois encore, le prélat, comme l'archevêque de Lyon en
1312, était dédommagé par le don de belles terres éloignées de son diocèse. (N. e.)
AP
AP
deaux, les Bourreaux, comme asservis à paroitre,
à être lonjours présens devant ceux ;\ qui ils doi-
vent obéir, en hdin parère, lorsqu'on les a désignés
par le mol Appariteur, en latin Apparitor. <• Quand
« jadis en Caulc, par l'insUlulion des Druides, les
« serfs, varlets et appariteurs estoieut touts vifs
« bruslez aux l'unerailles ('l exèques de leurs Mais-
« 1res et Seigneurs , n'avoienl-ils belle paour que
« leurs Maislres et Seigneurs mourussent ;■ » (Rabe-
lais, T. III, p. 17.)
Les Apparileiirs étoleut à Rome, ce que sont en
France les Sergens et les Huissiers qu'on a aussi
nommés Apjiariteurs. (Voy. Mém. de Dassomp. T. I,
p. 314. — Cotgrave, Oudin et Nicot, Dict.) ■< Chic-
« quanous ... le pria ne prendre en mal, si de la
« part du gras Prieur il le citoit ; remontra par
« harangue diserte comment il estoit personne pu-
'< blic(iue, Serviteur de moynerie. Appariteur de la
« mitre abbatiale. » (Rabelais, T. IV, p. G2.) Les
Sergens de la Justice ecclésiastique, les Bedeaux
qui portent des masses devant le Recteur de l'Uni-
versité et les quatre Facultés, sont connus encore
sous le nom d'Appariteurs : nom qui dans la signi-
fication de Bourreau, étoit sans doute aussi odieux
en France qu'il le fut jamais ;i Rome, où la condi-
tion des Appiirileurs étoit si méprisée que pour
marque d'ignominie, le Sénat ordonna qu'une cer-
taine ville dontles habitanss'étoient révoltés, seroit
obligée de fournir des Appariteurs aux Magistrats.
« L'Appariteur estoit venu pour les occire. » (Triom-
phe des neuf Preux, p. 130, col. 2. —Voy. Cotgrave
et Nicot, Dict. — Dict. de Trévoux.)
VARI.\NTES :
APPARITEUR. Cotgrave, Oudin et Nicot, Dict.
Apariteur. Percef. Vol. II, fol. 39, V» col. 2.
Apparition, subst. féin. Epiphanie. Action de
paroitre, de se faire voir. Espèce de trappe.
Dans l'origine du Christianisme, la naissance de
Jésus-Christ , sa première apparition , comme
homme, étoit propiement l'Epiphanie; mot dont la
signification est la même que celle d'apparition.
Mais lorsque le Pape Jules eut appris aux Chrétiens
du IV' siècle, à distinguer la Nativité de l'Epiphanie,
le mot Epiphanie signifia Vapparition de Jésus-
Christ, moins comme homme que comme Dieu ;
Vapparition, la manifestation de sa Divinité. Quoi-
qu'il parût homme, il fut reconnu pour Dieu, par
les trois Rois qui lui offrirent de l'encens et l'ado-
rèrent; par le peuple attentif à la voix céleste qui
se fit entendre le jour de son baptême dansleseaux
du Jourdain ; par les témoins de son premier mira-
cle, lorsqu'en Souverain de la nature , il changea
l'eau en vin aux noces de Cana. Telles sont les trois
apparitions ou manifestations de la Divinité de
Jésus-Christ, célébrées peu de temps après sa Nati-
vité, sous le nom d'Epiphanie ou de fête de VAppa-
rition; « car épifaine valt altretant cum appari-
« dons. » (Voy. S' Bern. Serm. fr. mss. page 211.)
Non-seulement il a voulu naître, mais il a voulu
être connu; «et por cette conissance faisons nos
« ceste feste de VAparicion Li troi Roi ... .
« ensevirent lo conduit de la novele estoile et si
« aorerent le novel enfant de la Virgine si
« cum Deu De cesle sole aparition ne fait-
« om mies selement la feste, mais aussi d'une
•< altre, etc. » (Id. ibid. p. 198 et 200.) « Quoiqn'en
« la primiere il apparut vraiz hom, l'adoration des
" trois Rois, et l'otîraude de l'encens mostret bien
" qu'il conurent k'il Deus estoit. » (Id. ibid. p. 204
et 20.").) « En la seconde aparicion mostrat awerte-
'< ment li tesmoignages del peire k'il estoit vraye-
« ment li filz de Deu ; et en la tierce apparut bien
" k'il estoit vrais Deus , lai où par son comande-
■1 meut fut mueye li nature mervillous fut
« li muemenz de l'awe ; mervillous fust li tesmoi-
■< gnaiges Saint Johans et del Colon, et de la voix del
" Peire ; mais ceu fut ancor plus mervillouse chose
« ke li troi Roi lo porent conoslre. » (Id. ibid.)
C'est donc à cause de la manifestation de la
Divinité de Jésus-Christ, et non à cause de l'appa-
rition de l'étoile qui annonça sa naissance, qu'on
a nommé fête de l'apparition, la fête de l'Epiphanie,
de la manifestation de la Divinité de Jésus-Christ
aux Gentils, et particulièrement aux trois Rois qui
l'adorèrent. Il semble néanmoins qu'en appelant le
jour de cette fête, le jour de l'apparition aux Rois,
on ail eu en vue l'étoile qui leur apparut. En disant
que « le dimenche xir jour de janvier étoit le jour
" de Vapparicion au Rois ou environ, » l'on a sans
doute voulu désigner un des derniers jours de l'Oc-
tave de cette fête que l'Eglise célèbre le G janvier.
Il est visible qu'il faut lire apparicion aux Rois,
dans les Lettres de Charles VI, en date du mois de
février i41.j. « Comme le Dimenche xir jour de
« janvier dernier passé qui fu le jour de l'rtyjyjrtrt-
« cion au Rois ou environ, Girart le Bicorgne.... et
« autres feussent allez boire, etc. » (Reg. du Très,
des Chartes.)
On soupçonne avec assez de vraisemblance, que
ce fut relativement à l'idée de l'apparilian de cette
même étoile, que le Roi Jean ayant rétalili l'Ordre,
la Compagnie des Chevaliers de l'Etoile, par ses
Lettres du'6 novembre 1351, « voulut faire la pre-
« mière feste et entrée de la dite Compaignie à
« Saint-Oùin, la veille et le jour de V Apparition
« prouchene. » (Voy. Ord. T. II, p. 466.)
La signification de ce mot spécialement consacré
à désigner la divinité de Jésus-Christ manifestée aux
Gentils, étoit quelquefois la même que celle d'rt/j;m-
rement, action de paroitre, de se faire voir en pu-
blic. « Le Roy Perceforest est gary de sa maladie....
« si faict assavoir... h tous Gentilz-hommes.... et à
•' toutes Dames et Damoyselles qu'ils soient à sa
« venue et ù son apparition devant le neuf chastel,
« au dernier jour de may. ■• (Percef. Vol. II, fol. 55,
R° col. 2. — Voy. API'AREMENT.)
On sait qu'aujourd'hui le mot apparition ne se
dit plus que des phénomènes qui apparoissent, et
des objets qui d'invisibles se rendent visibles. C'est
relativement à cette dernière signification, que par
une espèce de métonymie assez ordinaire, on nom-
mo'\l, apparitions les trappes par où les diables, les
AP
— 45 —
AP
fantômes, les ombres apparoissoient sur le Théâtre
dans les anciennes représentations des mystères'
On voyoït dans celle du mystère de S' Denvs "Lucifer
évoquant tous les démons qui sortoient chacun par
une trappe ou apparition. (Voy. Ilist. du Th fr
T. II, p. 542. — Ibid. p. 331.)
VARIANTUS :
APPARITION. Orth. subsist. - Ord. T II n 460
Aparicion. S> Bern. Serm. fr. MSS n 217
Aparition. Id. ibid. p. 102
Apparicion. Id. ibid. p. 205.
Apparoir, verbe. Paroître, se faire voir. L'inli-
nitifdece verbert;;/wroh-, encore usité en termes
de Palais, ne diffère de rinlinitifrt/j/wm- que par
le changement assez ordinaire de la voyelle é- en la
diphthongue oi (1). 11 semble même prouvéquVw;«-
roir. plus ancien dans notre lan-ue que l'infinitif
opparer eloil aussi d'un usage plus général On a
dit que Dieu voulant se faire voir au.x hommes et en
être reconnu, .< si non-digne chose ne fu mie h lui
•' apparoir en son ymagine à ceos qui en sa subs-
« lance n el poient mies conoistre ; ensi ke cil mis-
" mes aparust hom as homes, ki avoit fait l'orne à
« son ymagine et à sa semblance. » (S- Bern Serm
vvn Kf-^ " ^^ ^-'^^ ''" l"*^ 'e mesaise que le
« \adlant homme a en son cueur ne lui doit avna-
« voir au visage. » (.loinville, p. UO )
Plus les objets sont saillans, plus'ils paroissent
et mieux ,1s se font voir. De Ih, l'expression appa-
ro?/; /(ors,cest-à-dire saillir, être saillant, en latin
nmnere. (Monet, Dict. - Voy. Api-aroissa^ce )
Les modes dont la conjugaison d'apparer est
lormee, étant communs à apparoir, on auroit rénn
çcb deux verbes de même origine et demêmesi-ni-
ication, SI la terminaison en or,- ne sembloit être
le principe de plusieurs modes et temps particuliers
au xerhe apjmron-; tels que r.ndicatif présent !w
paro/s, etc. 1 indicatif imparfait fannaroissois eu-
l'impératif apparais, le subjonctif p^?ent7iï:
rom. etc. Il y a eu dans Torlhographe de ciSo-
des, des variations que l'on croit devoir remarquer.
CONJUG.
Aparege, subj. pr Apparoisse. (Ane. Coût. deBr )
^pam^e, subj près. Apparoisse. (Ibid fol M v°'\
Appar esse. snhi. prés. Apparoisse. (Faifeu, p'so'i
Apparest, indic. prés. Apparoit. (C. Marot )
Apparo/ssoye (j'), indic. imparf. J'apparo ssois
iRob. Estienne, Gram. fr. p 63) "PP-" «issois.
-4/;/;flro/s/ ind, prés. Apparoît. (Desperiers )
Apparoy (j ), ind. prés. J'apparois. (R. Estienne.)
Dans un sens analogue à celui de l'expression
" apparoir hors, Vapparoissance d'une chose nui
« passe outre une autre, une apparoissance an
" aehors, « etoit ce qu'en termes d'Architecture on
nomme sai le, en latin e.rsfantia, cminentia. (Rob
tstienne, Nicot et Monet, Dict. - Voy. ArrARom.)
Il seroit possible que relativement à l'idée d'un
objet qui paroit et se voit d'autant mieux qu'il est
plus saillant, plus éminent, on eût désigné un
homme a qui la vertu ou la fortune donne une cér-
ame prééminence, en disant qu'il étoit apparent,
liomme d apparence. (Voy. Apparence.)
ro^'^'^'^-^v?'*^''*']'' Participe. Paroissant. Appa-
rent, visible, évident. ^^
On n'aimoit bien et l'on ne méritoit d'être aimé,
dans les principes très rigoureux de l'ancienne
galanterie, qu autant qu'on paroissoit pâle et mai-
g e et qu on 1 etoit réellement par l'effet d'un
amour extrême.
El bien sçachiés qu'amours ne laisse
bur Im amant couleur, ne gresse
De ce ne sont apparissaiit
Ceulx qui Dames vont trahyssant •
tA. dient pour eulx loseneiei-
Qu;ilz ont perdu boire ct"mangier
fct je les voy comme Jengleurs,
Plus gras qu'Abbés, ne que Prieurs.
fiom. de la Rose, vers 257G-2583.
Dans le sens où nous dirions il y paroît, il y na-
roitra, on disoit il est aparissant, il est aparissant.
W, ■ ■ ' ; ■•„■ •„■ • ■ ^^ 'i'^''' si vis devant
Que ventaille d'auberc ne li fu ainz garant ■
loz les jors qu'il vivra, li ert aparissant.
Psrton. de Blois, MS. de S. Gerra. fol 127, \" col 2.
Vos fustes longues (2) Clers, bien est aparissant
Ibid. fol. 171 V" cDl.l.
''appar
VARIANTES :
APPAROIR. Orth. subsist. - S- Bern. Serm fr n ''"2
Aparoir. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 63 ^' "
^n^i?o^n-c^!r''^''^^' '"''*'• A'w. Apparence. Saillie.
La signidcation d apparoissance étoit la même en
gênerai que celle d'apparence, lorsqu'on disoiVm-
Tnvf n .''■""^ chose. physique ou moraîè ffi-
grave, Oudin, Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict )
«innn.? '^"'^"* *''''?'!'''"^'l^'^ 'ï'^ ^e'-btî apparoir
nIvH J 'î qu'a signilie et signifie encore apparent,
paiticipedu verbe rt/jywr^/', le même qu'wro/r
[\ oy. Apparoir.) On a désigné el l'on désigne par le
mol apparent , un homme dans lequel on voit de^
qualités qui le distinguent, un homme qui, parois-
sant avec certains avantages naturels ou acquis
semble devoir obtenir sur les autres une sorte de
prééminence. (Voy. Apparoissa.nce.) C'étoit aussi la
signitication d apparaissant. . Hyrcan-Tobie étoit
« moult apparissanl home, » eii latin vir valdè
f^ "".«i^ 'n'^^'- f^'^'^' '^^^ Machabées, ms. des Cordel.
loi. 18J.) On croît qu'il faut lire apparissant ou
apparaissant dans cet autre passage où la signin-
cation d appaissant semble analogue ;\ celle d'»-
rant employé quelques lignes plus haut •■ J'av
" fnli''^'l"' ^'^ ^'' "ouvelles d'ung mien cousin
« nomme Passelyon, auquel tout mon désir s'encline
« que de luy je soye fait Chevalier... Quant Passe-
« yon entendit Pedracus qui son cousin se disoit,
« Il en fut joyeulx à merveilles ; car il le veoit fort
«appaissant, etc. . (Percef. Vol. IV, fol. 115.) L'ac-
ception à apparissant étoit encore la même que
celle A apparent, lorsqu'il signifioit une chose
-\%nte"mT^"*^'^^P"'^^P-'-é'«c"'e:elongaccentué,donne^
(N. E.)
AP
_ /,f. —
AP
apparente sans réalité .« Vos ne "^^^f^'/^Sel
„ maraslrevosdisf? Nonyoïrs, f'^Ui Emperere. .
« mais aparissant fait croire » (J^m e Doiopa
thnc; fnl "'l'î^ Plus souvent il desi^iioit la itaiiie
ri^mipcho'se apparente, visible, évidente, dans le
s^i ph s qu?o 1 moral. On nommoit /,a's ajm-
,Ss«E les lices d'un champ-clos lorsquelle^
éSiSÏS^ez hautes, pour 'l^^e^ comMUan^s^ ;
«pnt les voir, et qu en les voyant il» se ga dasstiu
dPles fra^d ir. « En toutes batailles. .. doit justice
„ baiuèi c àmp à combattre advenant et lices
< amaresSeï: c'est assavoir à gens qui se com-
baftent de cheval, si fortes que les cHeyaulx ne
:^ÏÏul5eiUysir;etàgensde^e^
Tpôur le profit commun de nostre royaume, etc. -
^*^DanIVancieS Coutume de Normandie, la Loi
««»« -LIS opposée à la Loi simple, étoil a même
nïe a ïo apparente, aussi nommée Lo> aperte
?Vov Api'ARrNT ) Ces dénominations semblo.ent d au-
taSt plus raisonnables qu'on étoit persuadé que par
ce te Si, qui étoit souvent la Loi du duel il appa-
?? ssoit évidemment du bon droit des parties
Les Querelles personnelles nées de dict ou de
faict se tel mino ont par » simple loy qm se nom-
f lit Besrene (1). « EUes n:étoient appelées crimi-
nelles qu'autant qu'elles naissoient « de tel ciime
de quoy l'en devoit et ponvoit perdre vie o
membre. » Alors elles éloient décidées par Loy
amassant. (Voy.. Anc^ Coût, de Norniandie, cbap.
ivMi fol 88 — Ibid. cbap. i.xxxiv, fol. 10 1.)
la même Coutume divise les querelles de posses-
sion Si querelles de meuble et en querelles de
?èîre Toute querelle de meuble ou de possession
mouvable, ciu n'excédoit pas dix sous, ctoit termi-
ï par simple Loy ; si elle excédoit celte somme,
elle éïït terminée par Loy appanssant[^ oy- Ane
Coût de Normandie, cbap. lxxxvii, fol. 106, \ et
108 R° ] Ouant aux querelles de terre ou de posbcs-
sion non mouvable, qu'on nommoit nnssx querelle^
Saiil.r par la raison qu'en Normandie a posses-
sio on mouvable, soit noble ou roturière, etoi
communément appellée fief ; comme el es avo.en
diverses causes, il y avoit;. diverses Loix es ab ic.
„ k les terminer. - (Voy. Ibid. cbap. L>^,^^^:";fo\- Y^' •
On ajoute que .- les unes querelles fieffaulx »
étoient\erminées par «nqueste et es aultres pa
I mide deresne ; " que lenqueste faicte par juge
« ment de saigés hommes, par raison et par cous-
« ume gardée de longtemps étoit une enquesle ce
« droitetdecoustume; ^^^ l'enqueste de quoy la
« matière estoit contenue es bnefz de «ou/f 'e des-
« saisine , de mort d'ancesseurs et autres bre b
« dénommés au chapititrexç, étoit une enqueste
« d'establissement. « (Voy.lhid.chap.xcn fol. 112.
En voyant les querelles fieffaulx qu oji termino.t
par enqueste , opposées aux querelles lieffaulx tei-
minées par 'a Lov de Desrcne, Laurière a juge qu ici
SîSes^te est opposée à la Loy de Desrene, comme
l'est ailleurs à la Loy simple, V, Loy apparissm
que par conséquent toute Enqueste, même 1 mi-
ùes e le droic et de couslume, étoit Loy appans-
Sf; qu'enfin il n'y avoit d'autre Loy simple que
la Loy de Desrene. (Voy. Gloss. du Dr. 1-k T i,
p 6i et 65.) On croit néanmoins avoir quelque
Maison de douter qu'il n'y eût de simp e Loy que
celle qu'on nommoit Desrene ; cest-à-due « dene-
f 'ation ou espurgement de ce dont aulcun est
nuèrele-. . par son serment et le serment de
pnlvmiiiv aident -. (Voy. Ane. Coût, de Nor-
^aS e cbap \x XV, fol. 103. Il est probable qu'elle
n'étoit qu'une espèce de Loy simp e dont la deno-
mSion particulière peut à la vente avoir ete gê-
né 3iséë.(Vov. DEsnAiNT..) S'il étoit vrai que dans le
; siïe dont il est question , la Çesrene opposee^^
l'Enqueste, signifiât en gênerai Loy s mpie pai
opïïsiUon'à Loy m>arissant \\ semm^n^^^
•ivoir parlé des querelles fieffaulx terminées pai
Su .e? e ou par Desrene, on n'auroil pas ajouté
'r ^ou diions'de Loy apparissant de quoy la que-
„ re'le doibt estre menée en ces e forme en con-
« tendz fieffal. .- (Ane. Coût, de Normandie, chap.
''ouoïïue^ouT'le nom générique d'Enqueste, on
ait d'abord réuni à l'Enqueste d'establissement
Î-En ueSède droict et de coustume, on les a ensuite
iivSs comme étant essentiellement différentes;
e cette différence paroit consister principalement
en ce aue outes deux n'étoient pas Loij de reeoi-
'.îofssS. Les Enquesles «i'e^ljl'f e™enl dis m
suées des Enquestes de droict et de cousiume,
I oient appellées de recongnoissant.O oyez Ane.
rout de Normandie, chap. xcu, fol. 112.) Oi la Loy
^P .pcon-noissant, ainsi nommée, pour ce que, dit
îî .i:?,wip H o ose « par icelle il estoit à con-
l^îoi trelaqulle desifarties avoit droit ou tort
ers s àsr:iSi;ï^=f f
éisoeït la forme, on appeloit Enqueste d'esta-
^tre connue que la même Enqueste s'appeloit En-
S'/sl^d Somiaatlo'n Tune même E».l»e^JJ,S »»,'
pn? eSencri semble que «s termes Loy de
par enquebic, uijp>.'.=>-^-^ ""— 1- n„ Pnnrrp t V,
p. 597, c. 2. (N. E.)
AP
— 47 —
AP
recongnoissant éloient colleclifs de bataille et cVEn-
questedu pays ou cVestablissemeiit, lorsqu'on disoit :
.< L"en appelle simple querelle de possession, qui
« est terminée par simple loy. Querelle (ipparissant
« est celle qui est terminée par loy de recongnois-
" saut ou par bataille, ou par lenquesle du pays
>' que l'en appelle recongnoissant. » (Ane. Coût, de
Normandie, cliap. i.xxxvu, fol. 107.) Dans ce passage,
les querelles sont, comme on le voit, désignées par
le nom de la Loi qui devoit les terminer. Or la
querelle apparissant étoit celle qui se terminoil par
Loy de recongnoissant ; donc l'expression par Loy
de recongnoissant semble être synonyme de l'ex-
pression par Loy apparissant., et signifier collecti-
vement, ou par bataille, ou par enqueste du pays,
par enqueste d'establissement. On croit que si Lau-
rière eût eu l'idée de cette signification collective,
il n'auroit pas, en citant le même passage, mis après
ces mots par Loy de recongnoissant, une virgule
qui n'est pas dans le texte, et qu'il auroit besité à
décider que cette Loi étoit l'Enqueste de droit et de
coutume, appelée improprement Loi de reconnois-
sant. Pcut-éire auroit-il prononcé moins affirmati-
vement contre l'opinion de l'auteur de la glose sur
ce même texte, que l'Enqueste de droicl et de
coustume éloit Loy apparissant. (Voy. Gloss. du Dr.
Fr. T. II, p. 64 et (55.) Eu effet, ce n'esl pas sans
raison que l'auteur qu'il contrarie, a prétendu que
« Loy apparissant n'est aultie cbose que bataille,
•' ou recongnoissant, c'est-à-dire Enqueste du pays
'< ou d'establissement; et simple Loy, toute preuve
« qui se fait par serment de partie, ou par tesmoings
« de certain, ou par enqueste de droict. » (Voyez
Ane. Coût, de Normandie, Glose, fol. 107.)
Il résulte évidemment de celte définition de simple
Loy, que la Desraine ou dénégation avec serment,
n'étoit par la seule Loi qu'on nommât Loy simple.
Il paroit même que lorsqu'on combattoit pour une
querelle de possession, la Loy du duel, celte Loy
apparissant par excellence, se'nommoitquebiuefois
Loy simple par opposilion ;i Loy apjuirissant ; lu
signification de Loy apparissant étant restreinte
alors à la Loy du duel pour une querelle criminelle.
La preuve est que dans le chapitre i.xxxi du même
Coutumier, on lit que durant le temps où » les
« mariages ne se pouvoient assembler, les Loix ne
« dévoient paseslre faictes ne simples ne apportes;
" que Saincte Eglise défendoit à faire Loy apparis-
« sant tous les jours de fesle, etc. » 11 est probable
qu'en ce passage, les Loix appei'tes ou apparissuntes
sont celles qui étoient criminelles, et que les simples
sont celles dont on combattoit en aucuns cas de
propriété d'héritage et aultres cas, avant que « telles
« simples Loix fussent ramenées à preuves par
« enqueste. » (Voy. Gr. Couf. de Normandie, f»i01.)
On a déjà observé que les querelles étoient dési-
gnées par le nom de la Loy à la décision de laquelle
elles éloient soumises. De là, les querelles simples
opposées aux querelles apparoissantes. (Voy. \fv.\-
R.\Di.E et Apparext.) Aujourd'hui que tout cet ancien
droit est aboli en Normandie, l'action intentée pour
la propriété d'un héritage, s'appelle encore Loy
apparoissante. (Voy. Coût, de Normandie, au Coût.
gén.T. I, p. 1006. - Laur. Gl. du Dr. Fr. T. II, p. 65.)
VARIAMES :
APPAROISSANT. Coût. gén. T. I, p. 1007.
Apareissant. Marbodus, de Gemm. Art. col. 1668.
Aparisant. Ane. Poët. Fr. MSS. avant 1300, T. I, p. 344.
Aparissan't. Parton. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 171.
APPAISSANT. (Usez Appariasaut ou Apparoissanl.) Percef.
Vol. IV, fol. 115, R° col. 1.
Appareissant. Ord. T. I, p. 6i6.
AppARESSANT. Anc. Cout. de Bretagne, fol. 71, R.».
Apparissant. Gr. Cout. de Normandie, fol. 151, R».
Apprti'oisti'e, verbe. Apparoître, paroître. On
croit qu'apparoistre, moins ancien dans notre langue
qu'apparoir , a été formé d'apparoist (1), troisième
personne de l'indicatif présent de ce même verbe;
et qu'à l'exception de \' apparoitrai , etc. i'appa-
roîtrois, etc. il n'a point de modes et de temps qui
n'appartiennent à la conjugaison d' apparoir, verbe
dont l'infinitif est aujourd'hui presque aussi inusité
qu'anciennement celui A'apparer. (Voy. Apparer et
Apparoir.)
variantes :
APPAROISTRE. Cotgrave, Rob. Estienne et Nicot, Dict.
App.\RESTRE. Faifeu, p. 6.
Apparoyssaiiimeut , adverbe. Visiblement,
évidemment. Signification analogue à celle d'appa-
roissant, visible, évident. (Voy'ez Lanc. du Lac,
ï. III, fol. 68, V» col. 1.)
Apparreure, subst. féminin. Apparence. C'est
probablement en ce sens que pour obvier à ce que
les marchands trompassent leurs acheteurs en
cachant la mauvaise qualité de la marchandise sous
une superficie de belle apparence, « il étoit ordonné
« que aucun marchant... ne mist plus belle appar-
« reure par dessus que par dessous. ■ (Voyez D.
Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Cange, au mot
Apparalura; tit. de 1415.)
Apparu, part. Paru, qui a paru. On remarquera
qu'en général les participes de même terminaison
que celui-ci, ont tous été formés de la troisième
peisonne de l'indicatif prétérit du verbe, comme
apparu d'apparut (2; ; encore ne relranchoit-on pas
toujours, comme on voit, le t final dans l'ancienne
orthographe. La signification de ce même participe
du verbe apparer, le même qu'apparoir, a été plus
générale qu'elle ne l'est aujourd'hui. (Voy. Apparer
et Apparoir.)
VARIANTES :
APPARU. Orth. subsist. - S' Bern. Serm. ii. MSS. p. 124.
Ap.\ruit. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 124.
Apparuiz. Id. ibid. p. lUl.
Appéru. Rob. Estienne, Gram. fr. p. 63.
Appast, subst. mase. Repas, nourriture. Pâture,
mangeaiile. Appât, attrait. La signification d'appast
étoit quelquefois la même que celle du mol simple
(1) Il vient d'appui-escere, forme qu'on a dû employer à la basse latinité, (n. e.) — (2) C'est un participe de seconde
formation, qui, en latin, était terminé en utus, comme uabutus. (n. e.)
AP
48 —
AP
past, en latin paslus, repas, nourriture. (Cotgrave,
Dict. — Voy. Past.)
Quoiqu'il ait, relativement à l'idée générale de
nourriture, désigné celle de l'homme, plus souvent
il désignoit celte des bêtes et des oiseaux, leur
pâture et leur mangeaille. iCotgrave et Nicot, Dict.)
On a restreint la signification de ce mot appast à
celle de pâture ou de mangeaille qu'on met, soit
à un piège pour attirer les bètes à quatre pieds et
les oiseaux, soit à un hameçon pour pécher les
poissons. De là, celte comparaison prise dans la
Kature, et d'apf-ès laquelle appast ou appât a
signifié et signifie encore figurément tout ce qui
attire en excitant la cupidité odieuse d'une àme vile,
ou la sensibilité aimable d'une âme honnête. On
sait qu'en ce dernier sens il n"est plus d'usage qu'au
pluriel, et qu'il s'écrit «/)/;«« (l).(V. Dict. de Trévoux.)
Il y a de l'art dans les appas 4'une belle femme;
dans ses charmes il n'y a que la nature. Par la
vertu invisible de ses charmes naturels elle retient
et fixe auprès d'elle les hommes que l'artifice
éblouissant de ses appas y avoit attirés. Malherbe
avoit probablement l'idée de quelque distinction de
cette espèce, puisqu'il « faisoit toujours quelque
« ditïérence entre charmes et appas. » (Ménage,
Observ. sur Malherbe, p. 313.)
VARIAMES :
APPAST. Cotgr. Nicot et Monet, Dict. - Dict. de Trévoux.
Apast. Cotgrave et Nicot, Dict.
Ap.\t, Appât. Monet, Dict. au mot Appast.
Appasteler, verbe. Repaître, nourrir. Appâter,
faire manger. La première acception du verbe
appasteler, plus ancien dans notre langue qu'ap-
paster, est relative à celle d'appast, repas, nourriture.
Après trop longe june
Wapasteloit d'oes pourris.
Adc. Pocs. fr. MS. du Valic. ii- 1490, fol. 152, R'.
Des ans y a demy douzaine.
Qu'en son hostel, de cochons gras
Me apaaiela une sepniaine.
Villon, p. 57.
Pris dans le sens général de nourrir, il désignoit
non-seulement la nourriture des hommes, mais
celle des bètes, leur pâture, (l'oyez Appast.) « Se
« print Sarra à fioter son poullafn et à luy donner
« à manger... ne autre œuvre ne faisoit la" Damoy-
" selle jour et nuyt que de YapasteUer de tout ce
« qu'elle scavoit que bon luy estoit pour croistre et
« amender. » (Percef. Vol. Il, fol. 45.) « Sera tenu
« le fermier de apasteller les poissons et trouver la
« pasture à ses coûts et frais. » (D. Carpentier, Sup.
Gloss. lat. de Du Gange, au mot Pastus.)
Ce même verbe appasteler signifioit plus parti-
culièrement le soin qu'on prend de nourrir un
animal, un enfant, ou un homme privé de l'usage
de ses mains, en le faisant manger, en l'appâtant.
(Voy. Cotgrave, Oudin, Rob. Estiènne et Nicot, Dict.
— Dict. de Trévoux.) C'est par allusion sans doute
à celte acception particulière d'appasteler, que pour
uienacer un homme de lui donner un coup de cou-
teau, l'on a dit : « Se tu me approches, je le appas-
<■ tcleraij de cesle-cy; et trait un grant coustel. »
(D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au
mot Pastus; til. de 1389. — Voy. Appaster.)
VARIANTES :
APPASTELER. Cotgr. Oudin, Rob. Estiènne et Nicot, Dict.
Apasteler. Ane. Poës. fr. MS. du Vatic. n" 1490, f» 152, R».
Apasteller. Percef. Vol. 2, fol. 45, R" col. 1.
Apateler. Monet, Dict. au mot Appast.
Appasteller. Rob. Estiènne et Nicot, Dict.
Appaster, verbe. Repaître, nourrir. Attirer avec
un appât, appâter. Mettre un appât. Il paroît que le
verbe appaster, formé du substantif appast, nour-
riture, pâture, a signifié nourrir dans un sens aussi
général qn appasteler. (Voy. Cotgr. et Mcot, Dict.)
On a même dit figurément :
Je ne ra'appaste pas d'une vaine espérance.
Coujet, Bibliotli. Fr. T. XIV, p. 1\.
C'est relativement à l'idée particulière d'appast,
pâture avec laquelle on attire un animal dans le
piège, que ce même verbe, soit au propre, soit au
figuré, signifioit attirer avec un appât. (Voy. Cotgr.
Oudin, Mcot et Monet, Dict.) L'acception propre est
encore usitée.
Enfin appaster un hameçon, c'est y mettre un
appât. Mais on ne diroit plus, appaster certaines
choses dans un lieu, pour y mettre des choses de
nature à attirer les animauxau piège, à les appâter,
comme l'on dit encore dans le sens propre. (Voyez
Monet, Dict. — Dict. de Trévoux.) « Pour le renard,
« blereau, foine ou putois, suffira d'appaster autour
« des lieux labourez, des rougets de poulaille... ou
« appaster des rôties de pain bis fricassées avec
» graisse. » (Fouilloux, Vénerie, fol. 121, R°.)
On sait qu'appaster ou appâter a remplacé dans
notre langue, l'ancien verbe appasteler, faire
manger. (Voy. Appasteler.)
variantes :
APPASTER. Cotgrave, Oudin et Nicot, Dict.
Apaster. Cotgrave, Dict.
Apater. lylonet, Dict. au mot Appast.
Appasteiix, adjectif et subst. masc. Trompeur.
Ce mot appasteux, dans un sensrelatifà l'acception
figurée du mot appast, désignoit un homme qui en
trompe un autre, en lui présentant un appât par
lequel il est attiré dans le piège tendu à sa simpli-
cité et â sa bonne foi. (Cotgr. Dict. — Voy. Appast.)
VARIANTES :
APPASTEUX. Cotgrave, Dict.
Apasteux. Celt-hell. de L. Trippault.
Appastis, subst. masc. Pâturage. Pâture. (Voy.
Appaster.)
Le premier sens est celui d' appastis. « Il vint en
« ung moult £;rand appastiz . . si mist paistre son
« cbeVal. » (Percef. Vol. III, fol. ir.8, R- col. 2.)
Quoiqu'«;;a///s et rt/jj^as//^ soient de même origine
et à peu près de même terminaison , ils différent
(1) On a eu tort, dès le xvn* siècle, d'employer cette forme pluriel an singulier. Ainsi Corneille, dans Sertorius : « Si
jamais une flamme eut pour vous quelque appas; » Molière, dans l'Ecole des Fenwies: « Qui dort en sûreté sur un pareil
appas. » (N. E.)
AP
49
AP
en ce que la signification à'apatil n'est point celle
A'appastis, pâturage ; mais celle d'appast , pâture.
(Voy. ArPAsT.) Dans un sens analogue à l'acception
figurée d'appâter, nourrir, repaître, on a dit :
Espérance paist les chetifz.
Assez promect et peu contente ;
Les grans et haultains appetitz
N'ont cure de ses apatitz.
Molinet, p. 126.
VARIANTES :
APPASTIS. Chasse et départ d'Amours, p. 8.
Apatilz (plur.) Molinet, p. 126.
Appastiz. Percef. Vol. III, fol. 158, R».
Appel, subst. masc. Convocation. Provocation
au combat, provocation en Justice, accusation, de-
mande. Provocation d'un Juge h un autre Juge.
Invitation, ordre, ordonnance. Exécution d'un ordre,
d'une ordonnance.
Quelles que soient les acceptions usitées et inu-
sitées du substantif «/v^^/, toutes sont analogues à
celles du verbe appeler, pousser, faire approcher,
faire venir, etc. En termes d'escrime, l'appel est
une feinte par laquelle on essaye de surprendre son
adversaire, en le faisant venir imprudemment à
l'attaque ou îi la parade. Pour attirer les oiseaux
dans les filets, pour les y faire venir, on se sert
d'un oiseau, ou d'un sifflet avec lequel on contre-
fait la voix de l'oiseau de mêm.e espèce. De là , le
sifflet et l'oiseau ont été et sont encore désignés
par le mot appeau. C'est probablement dans un
sens relatif à celui de l'expression , la cloche ou
l'heure appelle, qu'en termes d'horlogerie , on a
nommé appeau, un timbre, une petite cloche qui
sonne les quarts et les demi-heures. Il y a dansées
trois dernières acceptions un abus de métonymie,
très-connu des Grammairiens.
Anciennement, faire appeau de quelqu'un à un
fait, c'étoit l'y appeler, le faire venir comme aide,
comme témoin ou complice de ce même fait.
Alors Faifeu de liiy soubdain s'empart,
Et va songer une bonne cautelle
Que vous orrez, et pour tout vray fut telle.
Il va trouver ung cheval mort de frays
En ung foussé qui estoit là auprès...
Et amassa les petiz ousselletz
Et de la char de petiz morselez ;
Et les pousa en partie de la peau,
Sans à ce faict de nuUy faire appeau.
Lors s'en alla de nuict en sa pasture, etc.
Faifeu, p. U el 42.
En réfléchissant sur le rapport de ces acceptions
du substantif rty>i;«'/ ou appeau, avec racceplion éty-
mologique du verbe appeler, pousser, faire appro-
cher, faire venir, on aperçoit la raison pour laquelle
dans un sens analogue à celui d'appeler, convo-
quer, on a dit :
Quinze Roi coroné vienent à son apel ;
Si vient li Chanceliers qui porte le séel.
Parlon. de Blois, MS. de S' Gerni. fol. 169. V° col. 2.
Quoiqu'appel soit aujourd'hui distingué d'appeau,
il est prouvé qu'anciennement on disoit appeau el
appel sans aucune distinction de signification. Sou-
vent les appels ou appeaux éloientdes provocations
à venir combattre en champ clos, ou à venir plai-
der en Justice. (Voy. Appeller.) On étoit provoqué
par une accusation, une demande ; de là , ces ex-
pressions, appel de mort ou de vwurtrc, appel de
félonie, appel de foi mentie, appel de fere fere, etc.
expressions dans lesquelles appel sinaille accusa-
tion, demande. (Voy. Tenures de Littleton, fol. 41.
— Id. ibid. fol. 45. —Britton, des Loix d'Angleterre,
fol. 49. — Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, chap.
Lxi, p. 317, etc.) L'accusation d'un crime commis
par une personne, à l'instigation d'une autre, par
son conseil ou par son ordre, étoit un appel de
faire faire. « Cas si est A'apeler de fere fere , si
« comme quant cheli qui apele ne met pas sus à
« cheli que il apele, que il l'ut presens à fere le fet,
« mais il le feist fere pour louier, ou par pramesse,
« ou par prière, ou par quemandement ; et de
« chesle manière d'apel vismes nous apeler, etc. »
(Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, chap. lxi, p. 312.)
On connoissoit peu sans doute Vappel de défaute
de droit, lorsque les Comtes et autres Juges se mon-
troient si actifs à rendre la Justice , qu'il falloit
modérer cette activité funeste au repos et à la for-
tune des citoyens, par des Ordonnances qui défen-
doient de tenir plus de trois assises par an. Mais
les petites seigneuries s'étanl mullipliées avec dif-
férons degrés de vasselage, la Justice commença à
languir dans les juridiclions subalternes des Sei-
gneurs vassaux, qui faute d'Hommes ou de Pairs
en nombre suffisant, négligèrent souvent de tenir
leur Cour. Alors les appels de défaute de Droit
furent d'autant plus fréquens qu'ils produisoient
des amendes au Seigneur suzerain devant qui le
Seigneur vassal étoit accusé de négligence à rendre
justice. Celte négligence étoit toul-à-fait inexcusa-
ble lorsqu'elle éloit volontaire. « Nous veons aucuns
« Seigneurs en malice contre chaus à qui il ne
« vuelent fere droit .... Si convient à chaus qui
« ont meslier d'apeler, que il soient soutil de som-
" mer les souffisaument, si que il puissent avoir
« droit en la Court de chaus où il le requièrent, si
« que il puissent avoir seur apel de défaute de
« droit, etc. » (Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis,
chap. Lxn, p. 319.) Les formalités dont on peut voir
le détail. (Id. ibid.) varioient suivant l'état des per-
sonnes intéressées à poursuivre celte sorte d'appel.
L'appel de défaute de droit étoit toujours une
accusation, une simple provocation en Justice, et
jamais une provocation au combat en champ clos,
à moins qu'on « n'ajoustast vilaine cause aveques
" défaute de droit. » (Voy. Beaumanoir, Coul. de
Beauvoisis, chap. Lxvii, p. 339.) « Se aucuns veut
« appeler son Seigneur de de/faute de droit, il
« convendra que la detfaute soit prouvée par tes-
« moins, non pas par bataille. ■> (Ord. T. I, p. 92.)
« Li apel fet par défaille de droit, ne sont pas . . .
« démené par gages de bataille, mais par monstrer
« resons par quoi la défaute de droit soit clère : et,
« ches resons convient-il avérer par tesmoins
« loiaux. » (Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, chap.
Lxi, p. 315.) Cependant la preuve par témoins pou-
voit occasionner le combat judiciaire. « Quant li
7
AP
— 50 —
AP
« tesmoing viennent pour tesmoigner en tel cas, de
« quelque partie que il viengnent, ou pourapeleur,
« ou pour clielui qui est apelés, cliil eucoatre qui
1 il vuelent tesuioiguer, puet . . . lever le second
« tesmoiu et lui inellre sus que il est faux et par-
" jure ; aussiut pueent Ltieu naistre gages de l'apel
« qui est fet seur défautc de droit. ■> (Id. ibid.) Les
principes de celte Loi iiui défend le combat en cas
de simple appel de défaille de droit, sont indiqués
par M. de Montesquieu. 11 ajoute que s'il étoit per-
mis d'appeler au combat les témoins , c'est qu'en
les appelant, « on n'offensoit ni le Seigneur, ni son
.< tribunal. » (Voy. Espr. desLoix,T. II, chap.xxvm.
pages 345 et 34G.)
Il paroit que les peines auxquelles exposoit l'ap-
pel de dé faute de droit, n'éloient pas les mêmes
dans toutes les Coutumes. « Se la deff'aule n'est
'< prouvée, cil qui appelera le Seigneur de la def-
« faute, il aura tel dommage comme il doit par
<' l'usage du pais; et se la deffaute est prouvée, li
« Sire î'amandera et perdra ce que l'en li doit, par
'• la Coutume del pais et de la terre. » (Urd. T. I,
p. 92.) Dans la Coutume de Beauvoisis , lorsque la
défaute de droit n'étoit pas suffisamment prouvée,
l'appelant payoit une double amende , l'une au
Seigneur qu'il avoit accusé de négligence à lui
rendre jushce, l'autre au Seigneur devant lequel il
l'avoit accusé de cette négligence. Pour un Gentil-
homme, l'amende étoit de soixante livres ; de soi-
xante sous pour « l'Homme de pooté. » Au contraire,
si la preuve étoit jugée suffisante, le Seigneur
appelé de défaute de droit, éloit condamné à l'a-
mende de soixante livres, et perdoit le Jugement et
la Justice de sa terre. (Voy. Besiumanoir/Cout. de
Beauvoisis, chap. lxi, p. 312.) On observera d'après
M. de Montesquieu i,Espr. des Loix , T. II , chap.
xxiv, p. 329, note), que dans les auteurs contempo-
rains de Beaumanoir, l'expression perdre sa Justiee
n'avoit pas une signification générale, qu'elle étoit
restreinte à l'affaire dont il s'agissoit.
Quoique l'appel de dé faute de droit fût déjà connu
du temps de Philippe-Auguste, il n'est pas à beau-
coup près aussi ancien dans noti'e Jurisprudence,
([ue l'appel de faux Jugement. On voit que dès l'an
755, les Comtes et leurs Officiers étoient sujets à
rfly;/Jt'/ d'un homme qui se croyoit jugé contre la
Loi. >' Si reclamaverit quôd legem ei "non judicas-
" sent, tune licentiam habeat ad Palatium veuire
"■ pro ipsà causa, et si ipsos convincere potuerit
<' quôd legem ei non judicassent secundum legem,
« contra ipsum emendarefaciat. » (Synod. Yernens.
art. XXIX, et Capitul. Metens. art. ix. — Voy. Baluz.
Gapitul. r.eg. Fr. T. I, col. 170 et 180. — Espr. des
Loix, chap. xxviii, p. 314 et 345.)
L'appel de faux jugement n'étoit point alors ce
([u'il fût le plus souvent au commencement de la
troisième Race, une provocation au combat. On
provoquoit les Juges à combattre, en les accusant
d'avoir faussement et méchamment jugé, en disant
à la Justice : « Sire, chis jugemens qui est pronon-
« ciés contre moi, et auquel P. s'est accordés, est
'< faux et mauves à desloiaux, et tel le ferai contre
" le dis P. par moi ou par mon houme ... en la
" Court de eheens ou en autre là où Droit me merra
« par reson de cet appel ; et ([uant il a ainsint dit,
« chil qui est apelés doit dire que li jugement est
« bon et loiaux, et offrir loi à fère par li ou par
« autre qui, etc. » (Beaumanoir, Coût de Beauvoi-
sis, chap. Lxi, p. 314.) On conçoit que les formalités
et les peines de cet appel xanoienl comme presque
tous les usages coulumiers. Lorsqu'un des Pairs ou
des hommes de fief avoit déclaré qu'il soutiendroit
le jugement, le Juge recevoil les gages de bataille
et prenoit sûreté de l'appelant, qu'il soutiendroit
son appel. « Mais àcheliquidetrendoit lejugeraent,
« ne conveuoit-il point de seurlé fere par le reson
« de che que il étoit lions au Seigneur, et qu'il
« devoit faire le jugement bon. Autrement il per-
« doit le jugier et chéoit en l'amande de soixante
" livres au Seigneur. » Si l'appelant ne prouvoit
pas que le jugement avoit été faux et mauvais, il
payoit au Seigneur une amende de soixante livres,
la môme amende au Pair ou à l'Homme de fief qu'il
avoit appelé, autant à chacun de ceux qui avoient
ouvertement consenti au jugement. (Voy. Beauma-
noir, «bj supra, p. 313 et 314. — Défonlaines,
chap. XXII, art. 1,9, 10 et 11.)
On sait que dans les principes de l'ancien système
féodal, un homme ne pouvoit appeler son Seigneur,
le provoquer à combattre, sans être coupable du
crime de félonie, à moins que son appel devant le
Seigneur suzerain, ne fût précédé d'une renoncia-
tion juridique au fief qu'il tenoit de celui qu'il accu-
soit de lui avoir méfait. « Nus ne puet apeler son
« Seigneur à qui il est bons de cors et de mains,
« devant que il li a delessé l'ounuige et che que il
« tient de luy ; donques se aucuns vient apeler son
« Seigneur d'aucun cas de crime ou quel il chiet
o apel, il doit ains l'apel venir à son Seigneur en la
« présence de ses Pers, et dire, etc. « (Beaumanoir,
Coût, de Beauvoisis, chap. lxi, p. 310et311.)C'étoit
sans doute afin d'éviter ce crime de félonie, qu'au
lieu cl'aj)peller pour faux jugement le Seigneur, on
appeloit les Pairs ou les Hommes de fief qui avoient
jugé. Lorsqu'un Seigneur n'avoit pas d'Hommes
de fief en nombre suffisant pour former sa Cour, il
pouvoit en emprunter de son Seigneur suzerain.
Mais les hommes qu'il empruntoit, s'ils étoient
prudens, se dispensoient de juger, en déclarant
qu'ils n'étoient venus que pour conseiller. Alors si
le Seigneur jugeoit lui-même, et si l'on appeloit
contre lui de faux jugement, « le péril de l'apel
« tournoit sur lui et non pas sur les hommes de
« son Seigneur. » (Voy. Beaumanoir, ubi supra,
chap. Lxii,"p. 322.) Il est probable qu'en ce cas par-
ticulier, comme dans tous ceux où l'appel éloit une
provocation au combat, la renonciation au fief étoit
une formalité nécessaire. En général, si l'homme
d'un Seigneur « appeloit avant qu'il eût renoncé
>' au fief, il n'y avoit nul gage ; ainchois ainandoit
« à son Seigneur la vilenie qu'il lui avoit dite, etc. »
De même, le Seigneur ijui appeloit son homme,
AP
— 51
AP
devoit avant l'a/jpe/, » lui quitter l'hommage en
« présence du Souverain. » (Voy. Id. ibid. cliap.
Lxi, page 31 1 .)
11 paroit qu'au moyen de cette renonciation à
l'hommage, tout vassal appelé par son Seigneur
pour un attentat quelconque, pouvoit sans félonie,
garder son fief et combattre pour sa justification,
ainsi que l'homme de fief appelé de faux jugement
par le Seigneur contre lequel il avoit jugé dans sa
propre Cour. « Quant li Sires plede en se Court
« meisme contre son houme, il n'est pas Juges...
<> et quant li houme rendent le jugement, se il le
« font contre li, apeler en puet comme de faus ju-
« gement Se il dit à chelui contre qui il vient
« fausser le jugement, vous avés fet jugement faus
« et mauves, comme mauves que vous este, ou par
« louier ou par pramesse, ou par autre mauvèse
« cause,... li apiaus se demaine par gages: car il
« loit bien à l'Oume h soi deffendre contre son Sei-
« gneur quant il l'accuse de mauvestié ; ne jà pour
« che se il se deffent de mauvestié contre son
« Seigneur, ne convenra que il lesse le fief que il
« tient de li. » (Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis,
Chap. Lxvn, p. 337.)
Lorsque le Seigneur n'attaquoit pas l'honneur du
Juge, en l'accusant de prévarications personnelles,
et « qu'il appelait simplement, en disant que le
« jugement étoit faux et mauvais, » son appel
n'ètoit qu'une requête en amendement du jugement
dont il se plaignoit, et n'obligeoit point aux gages
de bataille. « Quant li Sires apèle simplement, si
« coume il est dit dessus, le erremens seur quoi li
« jugemens fu fès doivent estre aporté en le Court
« où li apiaus est, et doivent regarder li Iloumes
« de le Court se li jugemens fu bons ou mauves
« selonc les erremens de le Court oii li apiaus fut
« fès; et se il est trouvé mauves, chacun des
« Houmes qui s'assenti au jugement chiet en
« l'amande de soixante livres vers le Seigneur et si
« perdent le jugier. >• (Beaumanoir, Couf. de Beau-
voisis, chap. Lxvir, p. 337.) Au contraire, s'il se plai-
gnoit du Juge même et le provo inoit par des impu-
tations personnelles, « s'il ajoustoit avec Vapel
« vilain cas, il y avoit gages de bataille ; et li vain-
« eus, soit li Sires, soit li Hons, perdoit le cors et
« l'avoir. « Quant aux autres Hommes qui avoient
« consenti au jugement, ils ne perdoienl fors le ju-
B gement et l'amande de chacun de soixante
« livres. » Mais cette distinction particulière dans
la manière de fausserjugement, é!ant devenue plus
générale, on crut que dans le cas même d'appel de
faux jugement sans outrage personnel, il falloit con-
server au Juge « le choix'de faire bon le jugement
« par gages devant le Comte et devant son Conseil ;
« car le Comte pouvoit bien tenir la Cour de ses
« Hommes appelés de faux jugement. » (Vov. Beau-
manoir, tibi supra, p. 337 et 338.)
n est vraisemblable qu'à moins d'être animées
par une passion de haine ou de vengeance, les
Parties profitèrent d'une distinction au moyen de
laquelle on pouvoit fausser un jugement sans
s'exposer au péril de combattre, et que les Juges
dont on faussoit le jugement, sans outrager leur
personne, usèrent rarement du droit qu'ilsavoient
d'y forcer ces mêmes Parties, en choisissant le gage
de iKitaille. C'est ainsi qu'aura prévalu insensible-
ment dans les Cours mêmes des Barons, la Loi par
laquelle S' Louis avoit sagement proscrit le combat
dans les appels de faux jugement.
La ressemblance paroit sensible entre ces appels-
sans combat et les requêtes ou supplications en
amendement de jugement, usitées dans les Cours
royales, où l'on « demandoit amendement de juge-
« ment, en suppliant, en requérant; car supplica-
« tion devoit estre faite en Cour de Boi, et non pas
« appel; par la raison que Y appel contenoit
« félonie. « (Voy. Ord. T. I, p. 171 et 264. — Beau-
manoir, Coût, de Beauvoisis, chap. lxvu, p. 337.)
Quant aux jugemens des Cours seigneuriales
qu'on pouvoit fausser, non-seulement on en appe-
loit comme de faux jugement ; mais le plus souvent
cet appel étoit une provocation au combat. Il paroit
que l'ordonnance de fausser sans combattre, ne
s'étendoit pas aux appels qui se faisaient à une autre
Cour qu'à celle du Souverain. Les appels de faux
jugement, comme les appels de défaute de droit,
étoient de degré en degré, c'est-à-dire « selonc che
« que li houmage descendoient dou plus bas au
« plus prochein Seigneur après, si comme du Pre-
« vost au Baillif, et du Baillifau Boy, es Cours où
« Prévost et Baillif jugent ; et es Cours où les
« Hommes jugent, selonc che que li houmages
« alloient et descendoient, li appel dévoient estre
« faits en montant de degré en degré sans nul
« Seigneur trespasser. » (Voy. Beaumanoir, Coût,
de Beauvoisis, chap. lxi; p. 317.) On ne voit dans
cette citation, qu'un commentaire du chapitre lxxxi
des Etablissemens de S' Louis. « Si le Seigneur dont
« on faussoit le jugement, étoit Bers, il falloit s'en
« clamer en la Court le Roy, ou en la Court de celui
« de qui il tenoit; en la Court au Bers ou de celui
« de qui il tenoit, s'il étoit Vavasor. L'appelant
« disoit : Sires, cil m'a fet faux jugement, pour
« laquelle reson je ne vuel plus tenir de luy, ainçois
« tendre de vous qui estes Chiefsires. Si le Vavasor
" vouloit s'en deffendre, il ajoutoit : Je ne viiel mie
« qu'il s'en puisse deffendre, car il me fist le juge-
» ment faux à veiie et asseùe de moi qui foi li doit,
« et le sui prest de monstrer contre son cors, se il
« le veut deffendre. Et tout ainsi appeloit l'en son
« Seigneur de faux jugement et en pouvoit l'en
« bien jugier une bataille. » (Voy. Ord. T. I,
p. 171 et 172.)
Plus on réfiéchit sur le sens de ce passage, qui
semble devoir être expliqué relativement à la Loi
par laquelle en cas d'appel de faux jugement, le
combat étoit défendu, plus on doute que le pouvoir
de juger bataille s'étendît à Y appel de faux jugement
à la Cour du Souverain. S' Louis en abolissant dans
les Cours du Roi, l'usage du combat judiciaire, le
laissa subsister dans les Cours des Seigneurs. 11 est
vrai qu'en même temps il ordonna qu'on fausseroit
AP
— 52 -
AP
leurs jucremens sans combattre ; mais c'étoil proba-
blemeiif lorsqu'en les f;uissant on appellcroit à la
Cour du Hoi, et non à celle d'un Seigneur où l'usage
du combat judiciaire éloit autorisé. Ainsi le pouvoir
de juger bataille, que l'Editeur des Ordonnances
étend à ïappel de faux jugement à la Cour du Roi,
seroit restreint à V appel fait à la Cour du Chef-
.âeigneur du Vavasseur; et le cbapitre lxxxi des
Eta'blissemens de S' Louis, dans lequel on a vu une
exception aux chapitres n et m des mêmes Etablis-
semens, et à l'article vm de l'Ordonnance de l'2G0,
seroit une conlirmaliun de la Loi généiale qui sup-
primoit les gages de bataille dans les appels de faux
jugement îi ia tour du Roi. « Se aucun veut fausser
■< jugement ou pais où il appartient que jugement
« soit faussé, il n'i aura point de bataille ; mes les
" clains et les respons et les autres erremens de
« plet seront apportez en nostre Court, et selon les
« erremens du plet l'en fera dépécier le jugement
« ou tenir; et cil qui sera trouvé en son tort,
" l'amandera selon la Coutume de la Terre. » (Ord.
T. I, p. 1)1 et 92. — Ibid. p. 113.) Quand on ignore-
roit la défense de fausser dans les Cours royales,
il est impossible qu'à ces mots, « les erremens du
" plet seiont portés à nostre Cour, » on ne recon-
noisse qu'il s'agit ici de faux jugemens des Cours
seigneuriales, dont Y appel se fâisoit à la Cour du
Roy. Au reste, il pouvoit y avoir de la sagesse
à s'écarter en certains cas, des principes d'une Loi
si raisonnable, mais odieuse à la Noblesse, dans la
crainte de trop révolter des hommes dont le génie
étoit aussi ennemi des procès qu'il étoit ami des
combats (1).
Quoi qu'il en soit de la réalité des exceptions à la
Loi qui proscrivoit le combat dans les appels de
faux jugement à la Cour du Roi, cette Loi n'opéra
pas moins une révolution qui, en changeant la
Jurisprudence Françoise, prépara les moyens de la
perfectionner. La raison l'ayant enfin adoptée
comme Loi générale, tout a}tpel à un tribunal supé-
rieur, pour réformer le jugement d'un tribunal
inférieur, ne fut plus qu'une simple provocation en
Justice. On provoqua longtemps encore le Juge
même (lui avoit prononcé le jugement; mais le fait
du Juge étant enfin devenu le fait de la partie, on
provoqua la partie en faveur de laquelle avoit été
prononcé le jugement qu'on accusoit d'être injuste.
L'appel dont on abandonnoil la poursuite, étoit un
appel désert; celui dans la poursuite duquel on
succomboit, un fol appel, qu'on nommoit aussi
faux appel. (Voy. Laur. Gloss. du Dr. Fr. —
Colgrave, Dict. — Tenur. de Littleton, fol. 45, V°
et /lO, R°. — Ord. T. III, p. 4'i8, etc.)
On regarde Vappel volage comme un abus parti-
culier de la nouvelle Jurisprudence qui, en facilitant
les appels d'un tribunal à un autre, les avoit peut-
être trop multipliés. Cet appel qu'en latin on nom-
moit appellatio Laudunensis, parce qu'il étoit plus
commun dansleLaonois(iu"ailleurs, étoit tel qu'une
partie ajournée devant le Juge, pouvoit l'empêcher
de passer outre, en se présentant devant lui, et en
disant : « Sire Juge, vous m'avez faict adjourner
« par devant vous i\ la requeste de tel ; si ay cause
« d'appeller de vous et de vostre jurisdicùon, et
«' pour ce en appellé-je (ïappel volage... Et pour
« soustenir dès maintenant mon appel volage, je
« vous adjourne par devant Monseigneur le Baillif
» de Vermandois,... au jour de la prochaine assise,
« contre moy à voir soustenir mon dit volage
>' appel : et "si vous cuidez que bon soit, soyez-y.
« Dès maintenant intime ma partie adverse qu'elle
« y soit, si bon luy semble... El n'y falloit adjour-
<i nement, ne puis aussi le Juge appelle n'y osoit
« procéder en outre. » (Bouteiller, Som. rur.
liv. II, tit. XIV, p. 773. — Yoy. Du Cange, Gloss. lat.
T. I, col. 578.) C'est probablement L'usage de ces
a/ijiels que Philippe-le-Bel avoit aboli dans quelques
villes du Laonois, et qu'il y rétablit ensuite par son
Ordonnance de 129G, lorsque mieux informé à cet
égard, il comprit que ces appels avoient été intro-
duits en faveur des habitans et pour leur utilité.
(Ord. T. I, p. 328.) Il paroit néanmoins que cette
faveur leur devint nuisible, puisque ce fut à leur
requête, et même aux offres de payer un fouage
annuel de deux sous parisis, que Philippe de Valois
renouvela l'abolition âes appels volages, par Lettres
du 23 mars 1334, confirmées par autres Lettres du
roi Jean, en date du mois d'août 1351. (Ord. T. II.
page 444.)
Dans la prévôté foraine de Laon, lorsqu'un pos-
sesseur étoit troublé par voie de fait en son héri-
tage, il pouvoit « sans commission et ordonnance
« du Juge, de luy-mesme appcller promptement au
« Juge royal; car le Roi avoit seul la connoissance
(1) Vappel existait en Gaule sous l'administration romaine; sous les Mérovingiens, il disparut, car il était incompatible
avec les jugements de Dieu et le jury des Rachimbourgs. Cliarlemagn.? le rétablit ; on put en appeler du dizenier au
centenier, du centenior au placituni du comte, et de ce dernier à l'empereur lui-même. Mais ['aj)pel était porté non contre
la partie adverse, mais contre les juges eux-mêmes", et, si le jugement n'était pas réformé, le réclamant payait quinze sous
d'amende ou recevait quinze coups de bâton.
A l'époque purement féodale, Vuppei disparut. Comment aurait-il existé, puisque les jugements étaient rendus par les
pairs? En allant à une juridiction supérieure, on n'eût plus été devant ses pairs. — Le noble prévenait la condamnation en
prenant ses juges à partie ; il les accusait d'avoir sciemment rendu un jugement inique et menti à leur conscience. Le duel
était la conséquence de cette provocation ; si le juge était vaincu, sa sentence était annulée, et la cause portée devant le
tribunal du seigneur immédiatement supérieur. Mais le bourgeois et le paysan, auxquels la justice était rendue par le
seigneur ou ses agents, ne pouvaient les accuser de mensonge, ni les provoquer.
Cependant dés le xii' siècle, au Midi, le droit romain reparut, et avec lui l'appel, on Ton n'accusait pas le juge de mauvaise
foi, mais d'erreur.
Dans le Nord, dés Philippe le Bel, une nouvelle doctrine prévaut; on « fausse jugement » comme par le passé, mais le
juge n'est plus obligé de se battre : un tribunal supérieur révise sa sentence. On appelait par « defaute de droit, » si l'on
prétendait qu'on ne voulait pas vous rendre justice.
Au Midi, on ne pouvait appeler que deux fois; au Nord, des causes passèrent par sept juridictions, (n. e.)
ÂP
53
AP
« de celte sorte A'appel qu'on nommoit aussi appel
« volage. » On peut voir quelle éloit la façon d'y
procéder suivant la Coutume de Laon, dont le
procès-verbal semble prouver que les appels vola-
ges, après avoir été abolis, furent encore en usage
en quelques lieux. (Laur. Gloss. du Dr. Fr. — Ord.
T. Il, page 81, note.)
Lorsqu'on étoit semons irrégulièrement en Cour
de Chrétienté, c'est-à-dire en Cour ecclésiastique,
on comparoissoit devant le Juge, et on lui deman-
doit justice de l'irrégularité de la semonce. Si le
Juge ne la faisoit pas, on pouvoil appeler, et cet
appel étoit un appel de Chrétienté. On a observé
qu'en « Cour laie, il falloit appeler en montant de
" degré en degré sans nul Seigneur trespasser ;
" mais il n'en étoit pas ainsi à la Cour de Chrétienté
« pour qui ne vouloit ; car de quelque Juge que ce
« fût; l'on pouvoil appeler àl'Apostoile, etquivou-
" loil, il pouvoil apeler dedegréen degré si comme
• du Doien à l'Evesque, et de l'Evesque à l'Arche-
« vcsque, et de l'Archcvesque à l'Apostoile. Quant
« à l'appel d'un Envoyé de l'Apostoile, il devoit se
« faire directement à la Cour de Rome. » (Beauma-
noir. Coût, de Beauvoisis, chap. lxi, p. 317. — Id.
ibid. chap. n, p. "i'i. — Voy. Appellation.)
11 y avoit des appels hors des Champs clos et des
Cours de Justice; et ces appels, tels que ceux de
boire, de manger, de jouer, de rire, d'être galant,
de plaire aux Uames par son adresse dans les exer-
cices de chevalerie, éloient des provocations, des
invitations auxquelles on cédoit d'autant plus
volontiers qu'on y étoit poussé, excité parle gotit
du plaisir.
Ne sai quel cuer autres genz ont ;
Mais je pris poi trestol le mont,
Et quanqu'el siècle est bon ne bel,
Envers Dame qui sert d'appel
Et de joir et de joer,
Et de rire et de beau parler.
Parlon. «leBlois, MS. de S. Gcrm. fol. 150, R» col. 2.
vinrent trusqu'à lor chastel.
Où l'en lor fist meiUor appel
De beax inengers et de beax vins.
Ibid. fol. 152, R- col. 1.
L'on vit ailleurs maint mystère nouveau,
Chevaulx bondir, soubz l'acueil et appeau
De doulx regars.
En ceUuy temps Cupido par ses arcs,
Alloyt jectant par feneslres ses darcs.
i. iMaroi, p. 166.
En général, la signification d'appel pourroil être
aussi variée que les mots par lesquels on désigne
les différens moyens de pousser quelqu'un, de l'exci-
ter, de le forcer à faire ou à dire une chose. Ainsi
le mot appel dont l'acception est analogue à celle
des mots convocation, sommation, dans un passage
de la Coutume d'Alost, peut signifier en ce même
passage, un ordre public, une ordonnance ;i laquelle
on est sommé, forcé d'obéir. « L'on publie à chacune
« demi-mars les appeaux ; ce sonl de boucheries
« endroits qui doivent estre bouchez pour les grains
« d'hiver, les paslurages, les grains d'esié, les
« courans d'eaux, et les chemins qui ne sont point
« d'usage, les champs et les préries, de vuider les
« fossez, etc. » (Nouv. Coût. 2;én. T. I, p. 1114.)
Il semble même qu'on ait étendu cette acception
à l'exécution de ces mêmes appeaux ou ordonnan-
ces. « Les appiaux, comme aussi les bonchures, ou
« estoupemens des terres, des préries, des pastu-
» rages, des bois, sont visitez par les Praters
« accompagnez de quatre paysans connoissans ,
« etc. » (Nouv. Coût. gén. T. I, p. 1115. — Voyez
Appeller.)
variantes :
APPEL. Orth. subsist. - Britton, des Loi-x d'.Vngl. fol. 38.
Apel. Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, chap. lxi, p. 307.
Apiau. Id. ibid. chap. Lxii, p. 319.
Apiaus (plur. et sing.) Id. ibid. chap. Lxni, p. 323.
Apiaux (plur. et sing.) Id. ibid. chap. lxi, p. 318.
Appeal. Tenures de Littleton, fol. 41, V".
Appeau. Nouv. Coût. gén. T. I, p. 1114, col. 1.
Appeauls (plur.) Ord. T. III, p. 48.
Appeaulx (plur.) Gloss. de l'IIist. de Bretagne.
Appeaus. Beaumanoir, Coat. de Beauvoisis, chap. i, p. 13.
Appiau. Id. ibid. chap. i, p. 14. - Ord. T. III, p. 448.
Appiax. Id. ibid. chap. i, p. i3.
Appellable, adj. Sujet à l'appel. On a dit en ce
sens, ([u'une juridiction ou un jugement dont on
pouvoit appeler, étoit appellable. (Voy. Nouv. Coût,
gén. T. II, p. 101, col. t>. — Coût. gén. T. II, p. 976.)
Appellation, subst. féin. Action d'appeler, de
crier, de nitmmer. Action d'appeler, de provoquer
d'un Juge à un autre Juge. Quelque différentes que
soient en apparence lès signilicalions du verbe
appeler, elles sont toutes analogues. (Voy. Appel-
ler.) C'est parla même analogie que le substantif
ajipellalion a signifié action d'appeler en général,
action de crier, de nommer. (Cotgr., Hob. Éstienne
et .Monet, Uict. — Voy. Appellement.)
Ce mot, qui n'est plus guère usité que dans les
formules des arrêts et des sentences, semble être
moins ancien en notre langue que le mot appel
dont il éloit synonyme dans'la signification parti-
culière, action d'appeler, provocation d'un Juge à
un autre Juge. Lorsqu'on appeloit sans raison, les
appellations éloient folles, frivoles. (Voy. Appel.)
On dislinguoil plusieurs sortes d'appellations :
Vappellatioii judiciaire et extrajudieiaire, l'appel-
lation verbale, l'appellation que nécessita l'abus
des appellations à la Cour de Rome, et que par cette
raison on nomma appellation comme d'abus. (Voy.
Cotgrave, Nicot et Monet, Dicl. — Laurière, Gloss.
du Dr. Fr.)
L'abus des appellations à la Cour de Rome,
excitoit dans le xa' siècle le zèle de S' Bernard, qui
se plaignant au Pape Eugène III, de ce qu'on appe-
loit à lui de toutes les parties du monde Chrétien,
l'exhortoit à user avec modération et sagesse, d'un
hommage qu'on rendoit à sa suprématie : « Mihi
<• videtur et in mullam posse eas [appellationes]
« devenire perniciem, si non summo moderamine
« aclilentur. Appellalur de loto mundo ad te ; id
« quidem in teslimonium singularis primatùs tui.
" At tu, si sapis, non primatu gaudebis, sed fructu. »
(Voy. S. BernardideConsider. ad Eugenium lib. III,
cap. II.) Cette leçon n'inléressoit pas moins les Rois
AP
AP
que les Papes. Mais les Rois Chrétiens, en reconnois-
sanl le l'ape pour Juge île leurs (luerelles el arbitre
de leurs traités, autorisèrent de plus en plus les
peuples trop souvent moins citoyens que Chrétiens,
à croire (lue le Chef de la Chrétienté en étoit le
Monarque universel, et qu'à ce titre il étoit le Juge
souverain des Rois et de leurs sujets. Ainsi, les
Cours de Chrétienté, c'est-à-dire les Cours ecclé-
siastiques, dont on appeloit à la Cour de Rome, au
mépris même de la Juridiction épiscopale, parurent
supérieures aux Cours laïques, et elles furent pré-
férées, même pour la décision d'affaires purement
civiles. « Voirs est que en cas de convenanches et
« d'obligations, se les parties s'assemblent à plai-
0 dier en la Cour de Sainte Eglise.... et se metent
« ou plet tant que il soit entamés, la Cour de Sainte
« Eglise en a la connoissance.... et quant l'une des
« parties est condemnée, elle puet contreindre le
« condemné à fère paier le jugié par forche d'escom-
« muniement. » (Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis,
chap. XI, p. GO.) Cette préférence accéléroit chaque
jour le progrès des usurpations de la puissance
spirituelle sur la puissance temporelle. Il fut si
rapide que dans le xnr siècle et au commencement
du XIV les Ecclésiastiques se trouvèrent en posses-
sion déjuger presque toutes les causes des séculiers.
La Cour de Rome ayant été transférée à Avignon,
en 1308, par le Pape Clément V, on vit les appel-
lations à cette Cour se multiplier en proportion de
l'activité des Juges ecclésiastiques à empiéter sur
la juridiction des Juges laïques. Enfin la nécessité
de marquer les bornes respectives de l'une et de
l'autre Juridiction , et de les fixer , fut sentie.
Philippe de Valois assembla le Clergé de son royaume
et tint un Lit de Justice en 132i), où Pierre de
Congneres, Avocat du Roi, soutint contre Pierre
Bertrandi , Evêque d'Autun , que la Juridiction
ecclésiastique étant purement spirituelle, ne pou-
voit être devenue temporelle que par une extension
abusive et dangereuse. Mais le Roi dont la politique
suspendit l'arrêt, se contenta (dit Pasquier) de
recommander aux Evêques la réforme des abus
dans leurs diocèses, et il enjoignit sous main à la
Cour de Parlement d'y veiller. Quelle qu'ait été
dès lors la vigilance du Parlement à restreindre la
Juridiction ecclésiastique , et à en réformer les
abus, les moyens par lesquels il y parvint, ne furent
connus que longtemps après, sous le titre d'rt/j;)e/-
lations comme d'abus. « Enfin comme nous voyons
« l'ours en léchant souvent ses petits, les rendre
« en la perfection de leur espèce, lesquels aupara-
„ vaut ne paroissoient estre qu'une lourde masse
„ de chair ; aussi discourans souvent dans le Parle-
„ ment, des abus qui se commettoient en Cour
, d'Eglise, et reblutans cette mesme paste, furent
„ formées entre nous, sur la fin du règne de Louis
„ XII, ces appellations comme d'abus... et establies
„ sur quatre pilliers, sur lesquel sont aussi fon-
„ dées les libériez de nostre Eglise Gallicane. »
(Pasquier, Rech. liv. ni, p. 257. — Voy. Id. ibid.
p. '254 et suiv. — Fleurv, Institut, au Dr. Ecoles.
T. II, p. 9 et 222.)
Appellement, subst. masc. Action d'appeler,
de convoquer, de nommer, d'épeler. Ces significa-
tions, dont on trouve la preuve dans Cotgrave .
Oudin, Rob. Estienne et Nicot, Dict. sont "toutes
analogues à celles du verbe Appeller. (Voy. Appel-
LATio.x et Appelleb.)
Appelle!', verbe. Pousser, presser, faire appro-
cher, faire venir. Citer à comparoitre. Crier, heurter.
Invoquer. Convoquer. Provoquer à combattre et à
plaider ; assigner, sommer, accuser, etc. Requérir,
prier, questionner, interroger, etc. nommer, épeler.
En supposant, avec les Étymologistes Latins, que
le verbe simple et inusité péllare (1) ait été formé du
verbe pellere dont l'acception est relative à celle
du grec ncXàv, faire approcher, le composé appellare,
en françois appeler, signifiera pousser vers un lieu,
en latin appelleve, peilerc ad locum. (Voy. Marti-
nius, Lexic. Philolog.) Il semble que ce soit la
signification de notre verbe appeler, lorsque pour
désigner une personne que sa volonté ou la néces-
sité "pousse à faire ou à aimer une chose, on dit
figurément qu'elle y est appelée. C'est peut-être
encore dans un sens analogue à celui de pousser,
qu'en parlant d'une rançon dont on avoit poussé,
porté le prix trop haut, l'on a dit : « Salehadins
« apela si haut le raen(;on Bauduin, que, etc. »
(Chron. d'Outremer, ms. de Berne, ir 113, fol. 121.)
On approche du lieu ou de la personne vers
lesquels on est poussé, ou pressé de venir. De là, le
verbe appeller aura signifié faire approcher quel-
qu'un, le faire venir, quelle que soit la façon dont
on le pousse, on l'excite, on le force à s'approcher,
à venir, à paroître, à comparoitre.
Si Vapicmi U lerres à soi.
Dame, fait-il, délivre-moi.
Va, fait-ele, ne doutes riens,
Jou te délivrerai moult biens.
Bestiaire. MS. du R. u" 7989, fol. 172, V col. 2.
Au figuré, l'on disoit en parlant d'une femme qui
approchant du terme oii elle devoit accoucher, se
sentoit pressée de mal d'enfant, qu'elle étoit appellée
de maladie. « Celle Dame estoit moult enceincte de
« son mary. . . . mais. . . . comme celle qui estoil
« appellée lie maladie luy vint au devant au mieulx
« comme elle peut. « (Percef. Vol. IV, fol. 11(3.)
11 seroit inutile de prouver l'acception particulière
d'appeller, faire approcher, faire venir en Justice,
citer à paroître, à comparoitre devant un Juge. On
a dit relativement à cette acception , que Dieu
appelle le monde, que Dieu nous appelle à lui.
Par Dieu qi li raons apele,
Mult doit estre chil irés
Qi pert tout outréement
Chou dont il a bonement.
Ane. POBS. fr. MS. du Vatic. n" U90, fol. 145, R'.
Richard, Duc de Normandie, se sentant afîoiblir.
(1) Ce mot signifiait parler.
AP
— 55 -
" Mi ?M ^^r "'^'^'^^ ^0™^- et parla en tel manere •
« Ml Chevalier et mi compaignon, je ai esté Sîe
. Sires terriens jusques'aujordùi ; mes puiscml
-' nostre Sires me veut à soi apcler, il meSn?
Hist de"/r TPx''o\'o/?r"- ^'' "^"J'^' «^^ ^"«
niM ue rr. i. \, p. sno.) On remarque en oénéral
que les acceptions usitt4s de notre verbe fSr
sont anciennes dans notre lan"-ue fW^<?/é;r
Qu'un homme, un animal vienne, qu'il approche
au son dune voix, d'une cloche, ou de ehme
autre instrument, il obéit toujo ,rs à i„,e Se
d impu sion dont ce verbe partit dés onéi vïïïl
simplemenUw,,/,,son domestique, son ciiie," etS
Le bruit qu'on fait à une porte, soi en crhi ' snu
en heurtant fait venir quelqu'un qui fSuv e De i '
on aura dit appeler un mot, appeler à la m,,,-
açons de parle,- de même èspèie que plusieurs
autres qu on a déjà remarquées, et par iKouei is
h7ur£poïrtfaii?(Sii';' ""^ '"'■'^' ^'^'^'^^^
AP
A son ostel vint, si apele
Un mot; et sa famé l'oi
yui moult forment s'en esioi
Lors couru coumo preus et saçe •
L uis ouvn sanz autre message '
FM. MS. du R. n- TBIS^t/ii, fol. 125, R. col. 2.
• • . Oui bonne nouvelle aporte
Seurement apèle à la porte.
Rom, de Rou. MS. p %•■>
3^;î^™^s^fïïŒ'Hn=F
Namies le voit ; Nostre Dame en ow/e
dillerens moyens étant commr.'c ^ ^^i -'^ ,"^' ^^^
appeller, kapSf si-n nUn 1 '"""' «'^'^''^'a
criminelles el c v S [™J t^Misioi] des alfaries
cours .es Bn^;'i';-,-i«,'s,rifs,îs,is
une preuve évidente de la justice nnripnn,^
fie l'accusation ou de la dPmnnrip f. ■ ^"^''^®
=,?erii;SV!i™--s
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« Oes fFf.m (^ ^'Çcuse laisoit le serment su vant :
ws (Ecoute), homme que je tiens par là
<.. «,.U . ,-.„ou.e„e.. .3 .„.„«„ ,,„3 „„,.,.„, „,^^ ^„^ ^_, ^^^^^ ^^^ ^^^^^^^^ ^^
AP
— 56 —
AP
« main seneslre et qui L. le fais appeller-en bap-
« tesme • telle personne ne meurdry en felonnie :
a ainsi ui-aist Dieu et ses Saincls. " L'accusateur
lui reprochoit clans les mêmes termes et avec le
même serment, qu'il s'étoit parjure. Le premier
serment éloit suivi d'un second, par lequel chacun
des deux Champions juroit de n'avon- sur lui aucun
sortiléo-e qui pût l'aider, ou nuire à son adversaire.
Alors on leur donnoit l'escu et le baston, et les
Quatre Chevaliers élus à la garde du champ de
bataille, se placoient entre les Champions et }es
tenoieiit éloignés l'un de l'autre, » tant qu ils
« eussent aouré, c'est-à-dire prié avenaument. "
Leur prière Unie, les quatre Chevaliers se retiroient
aux quatre coins du champ-clos, et les Champions
marchoient l'un contre l'autre et se joignoient.
.. Si Vappellé pouvoit se défendre tant que les es-
., toilles apparussent au Ciel, il avoit la victoire »
(Voy. Ane. Coût, de Norm. chap. lxviii, fol. 88 et 90.)
Peut-être qu'en étendant l'usage de ces combats
aussi odieux au Clergé(l) qu'ils étoient agréables a la
Noblesse on voulut les rendre moins sanguinaires.
Telle pourroit être la raison de la défense de com-
battre avec d'autres armes que l'écu et le balon.
Par une Constitution de Charlemagne, (Loi des Lom-
bards, liv. 11, tit. V, §'i3,) le bâton etoit la seu e
arme permise dans le combat judiciaire. Mais la
liberté du choix des armes fut autorisée par un
Capitulaire que Louis-le-Débonnaire ajouta a la Loi
Salique.
On croit voir dans l'abus de la preuve négative
admise par la Loi des Francs Ripuaires et celle de
presque tous les peuples barbares, une cause géné-
rale de l'établissement et de l'extension de la loi du
combat « Il me paroît, dit M. de Montesquieu, que
« la Loi du combat étoit une suite naturelle et le
a remède de la Loi qui établissoit les preuves
„ néo-atives. » Si Gondebaud , Hoi des Bourgui-
enonl l'autorise, c'est afin que ses sujets ne fassent
Dlus de serment sur des faits douteux, et ne se par-
lurent pas sur des faits certains. « Multos in populo
.. nostro... ita cognoscimus depravari ut de rébus
„ incertissacramentaplerunqueofferrenondubitent
.. et de cognitis jugiter perjurare. Cujus scelens
« consuetudinem submoventes prœsenti lege decer-
<. nimus ut quotiens inter homines nostros causa
« surrexerit, etc pugnandi licentia non rie-
« aetur >■ (Voy. Burgund. Leges, cap. xlv.) Si 1 Lm-
Dereur Othon II veut que celte même Loi décide les
contestations sur la propriété des héritages, ces
nu'on étoit sûr d'être usurpateur dès qu on osoit
être parjure. « H s'étoit introduit depuis long-
« temps une détestable coutume, à la faveur
« de laquelle un homme se rendoit propriétaire
« d'un héritage, en faisant serment sur les Evan-
« giles que là charte qu'il presentoil et qu'on atta-
« quoit de faux, étoit vraye. >• (Voy. Loi des Lom-
bards, liv. II, tit. Lv, chap. xxxiv.) Si plusieurs Cons-
.titutiôns générales de Charlemagne et de Louis-le-
Débonnaire, antérieures à celle d utnoii, et insérées
comme elle dans la Loi des Lombards, (liy. II, tit. lv,
S '>3 ) étendirent l'usage du combat judiciaire ,
d'abord aux affaires criminelles, et ensuite aux
civiles, c'est qu'avec autant de facilite d abuser uti-
lement de la preuve négative, il étoit presque im-
possible que l'accusateur ou l'accusé, le demandeur
ou le défendeur ne se parjurassent. On acquiesça
donc aux représentations de la nation qui demandoit
qu'à la preuve par serment on substituât la preuve
par le combat.
Quoique la Loi des Francs Saliens, plus sage que
la Loi des Francs Ripuaires et des autres peuples
qui admettoient les preuves par serment, eut obvie
à la nécessité des preuves par le combat, en ordon-
nant que toute demande ou accusation fut prou-
vée, et que pour s'en défendre. Il ne suffiroit pas
de la nier, les constitutions insérées dans la Loi
des Lombards, furent ajoutées a la Loi Salique
Ainsi lusage de la preuve par le combat, devint
.Général en France. On n'exclut cependant pas des
tribunaux, les autres preuves : mais la na ion, libre
de suivre son génie guerrier, préféra la Loi du
combat et retendit ; extension qui paroit avoir été
la principale cause de l'oubli ou tombèrent insen-
siblement les Loix Saliques les Loix Romaines et
les Capitulaires. (Esprit des Loix, T. II, chap. xiii,
^''0^116 tongea plus dès lors qu'à réduire en prin-
cipe l'usage de cette Loi, et à former le corps de
celte lurisorudence militaire qui changeoit toutes
les acliSns dvlfes et criminelles, en faits sur lesquels
elle ordonnoit le combat. On y réussit même au
point de prouver que s'il y a, comme 1 observe à ce
siî et de Montesquieu, « ""<^ i".fi">\e de choses sages
u qui sont menées d'une manière très folle, il y a
.< aussi des folies qui sont conduites d'une manière
« très sage. « (Voy. Esprit des Loix, T. II, chap. xxv,
P- 331.)
La sao-esse avec laquelle on fixa les règles et les
bornes du combat judiciaire, est particulièrement
attestée par Beaumanoir. (Coût, de Beauvoisis, chap.
Lx-ixiv) 11 arrive souvent, dit cet Auteur, que
dans les Cours laïques « li plet chieent en gages de
? batailles, ou que apensément li un apele l autre
. e vilain fet par devant Jusliche ; si est bons que
« ous en façons propre chapitre, qui ensaignera
„ desquiex cas l'en puet apeler. et quelles personnes
.. pueent apeler et estre apeles et lesque es non e
„ comment l'en doit fourmer son ay;^/ et le per 1
« qui est entre tex apiaux, et lesquels ay*î««.rli be -
„ gneur ne doivent pas soulfnr, si que chil qu
louront apeler sachent comment il se doivent
: Silënir en plet de gages et la fin en quoi il en
„ pueent venir se il enchieent dou plet. » (Coût, de
Reauvoisis, ubi supra, p. 307.)
Si le bàtôn étoit encore d'usage dans ces combats,
ce n'éloit plus qu'entre Vilains. Les Gentilshommes
combaltoient à cheval et avec telles armes qu il leur
(1) Le jugement de Dieu admis par VEglise était le serment, (n. e.)
AP
— a/ —
AP
plaisoit de choisir, « excepté coustel à pointe et
« mace d'arme molue. « Mais lorsqu'un Gentil-
homme appeloit ou provoquoit un Vilain, il devoit
se présenter comme lui à pied, sans autres armes
que l'écu et le bâton, parce que « s'abaissant en
« apeler si basse personne, sa dignité étcit ramenée
« en cel cas à telles armeures comme chil qui estoit
« apelé. 0 (Voy. Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis,
chap. Lxi, p. 308. — Id. ibid. chap. lxiv, p. 328.)
La précaution de ceux qui louoient pendant un
certain temps un Champion pour combaltre dans
toutes leurs querelles bonnes ou mauvaises, nous
paroît une preuve singulière de l'extension prodi-
gieuse de l'usagedu combat judiciaire. Beaumanoir,
pour qui cette Coutume éloit ancienne, remarque
d'ailleurs que du temps de S' Louis, il suffisoit
encore qu'une demande excédât la valeur de douze
deniers, pour être jugée par la Loi dn combat : Loi
à laquelle on peut dire que toutes les autres Loix
étoient presque toujours forcées de céder, jusqu'à
ce que ce Prince, abolissant les preuves par le com-
bat, s'occupât du soin de rétablir les preuves par
chartes ou par témoins. (Voy. Beaumanoir, Coût.
de Beauvoisis, chap. .xxxvui, p. 203. —Id. ibid. chap.
Lxni, p. 325.) C'étoit ramener la Jurisprudence aux
premiers principes de la Loi Salique ; Loi conforme
à celles de presque toutes les nations du monde,
en ce qu'elle assujetlissoit les accusations et les
demandes, les défenses et les juslilications à la
nécessité des preuves positives. « Nous deffendons
" les batailles, par tout nostre demaine, en toutes
« querelles : mais nous n'ostons mie les dénis, les
" responses, les contremans qui ayent esté accous-
« tumés, selon les usages des divers pays, fors itant
« que nous en osions les batailles. Et en lieu des
« batailles, nous mettons priieves des tesmoins, ou
« des Chartres. » (Ord. T. I, p. m.)
On pouvoil s'opposer à l'abolition de l'usage du
combat dans les Juridictions seigneuriales, et S'
Louis l'y laissa subsister, excepté dans le cas
A'appel de faux jugement. (Voy. Ord. T. I, p. 113.
— Ibid. p. 25G-258.) La prudence de ces ména-
gemens nécessaires avec des Seigneurs jaloux de
leurs prérogatives, les prépara à souffrir que leurs
vassaux partageassent avec les sujets du Roi, le
bienfait de la nouvelle Jurisprudence.
Beaumanoir qui écrivoit peu de temps après la
mort de ce Prince , nous apprend qu'il étoit « à la
« Yolenté des houmes dou Comte de Clermont de
« tenir leur Court., selonc l'anchienne Coustume,
« ou selonc l'Establissement le Roy : mais se li plès
« estoit lamés (1) seur l'Establissement par le souf-
« rance dou Seigneur, li Sires ne le pouvoit puis
« mettre à gages, etc. » (Voy. Coût, de Beauvoisis,
chap. Lxi, p. 309.) Le progrès de cette tolérance de la
part des Seigneurs fut tel que la nouvelle Jurispru-
dence, aussi conforme à la raison naturelle et à la
Religion, que l'ancienne y étoit contraire, s'étendit
de proche en proche, et devint univei'selle dans les
tribunaux de Justice. Le cri des appels au combat
cessa d'y retentir et d'alarmer le citoyen dont l'inno-
cence où la propriété étoit attaquée. Mais hors de
ces mêmes tribunaux, il fallut à ce cri prendre les
armes, et au mépris des Loix politiques et reli-
gieuses dont la Noblesse regardoit le respect comme
une lâcheté déshonorante, combaltre pour la gloire,
l'amour et la vengeance. Ainsi la l'aison victorieuse
d'une superstition ignorante et barbare, fut soumise
au préjugé fanatique et impérieux de l'honneur. De
là, l'usage de ces expressions si familières à nos an-
cêtres Gentilshommes, ajipcllerde gage, de combat,
de duel, de joute, etc. Les exemples en sont si fré-
quens, surtout dans les romans de Chevalerie et
dans les ouvrages qui traitent des duels, des gages
de bataille, qu'il suffira de les avoir indiqués.
Ces expressions ont d'ailleurs la même signification
que celles encore usitées, appeler en duel, appeler
au combat.
Souvent le verbe appeller a signifié seul , provo-
quer à combattre, provoquer à venir en champ-clos,
y faire venir en provoquant au combat ; et dans
les tribunaux où l'usage du combat toit aboli, pro-
voquer à venir en Justice , y faire venir quelqu'un
en l'assignant, en lui faisant une sommation, en
formant contre lui une accusation, une demande.
C'est dans le sens d'assigner, qu'on dit encore
aujourd'hui «y^y^cZa- en Justice, appeler en témoi-
gnage, etc. On ajoute qu'anciennement appeller
quelqu'un de meurtre, c'éloit l'en accuser ; que
Vappeller de servage, c'étoit le redemander, le
réclamer comme serf, proprement le pousser, le
forcer par cette accusation, ou par cette demande,
à venir en Justice prouver sa liberté ou son inno-
cence. <■ Se nus hom veut aj>peller un autre de
« murtre, que il soit ois, ententivement ; et ([uand
« il vodra faire sa clameur, que l'en li die
'< Soies bien certain que tu n'auras point de
« batiiilles ; ains te conviendra jurer par bons tes-
« moins jurez.... Et se cil qui veut aj/pcller, quand
« l'en li aura ainsi dit, ne veut poursuivre sa cla-
« meur, laissicr la puet. » (Ord. T. I, p. 111 et 112.)
« Se aucuns est appelle de servage , ou de murtre,
« ou d'aucun autre meffet, etc. » (Ibid. p. 113et285.)
Bernart, cist preudom vos ajiele
D'une chose qui n'est pas bêle.
F^. MS. de Berne, n- 354. fol. 7, V* col. i.
Lorsqu'on appelle d'un jugement, on l'accuse en
quelque façon d'être injuste, et on provoque la
partie en faveur de laquelle il est rendu, à venir
devant le Juge supérieur à qui l'on demande répa-
ration de l'injustice dont on se plaint. (Voy. Appel.)
En requérant, en priant quelqu'un d'une chose,
on le provoque à la faire ; on provo ;ue sa réponse
en le questionnant, en l'interrogeant sur ce qu'il
fait, sur ce qu'il pense. De là, "le verbe appeller
signifioit requérir, prier, questionner, interroger,
etc. dans un sens analogue à celui de pousser, pres-
(1) Ne faut-U pas lire tancé? Tamer se trouve dans la Chronique des ducs de Normandie, mais ce peut être une
erreur, (n. e.)
II. 8
AP
— 58 -
AP
ser, provoquer. « Me promistes tous quatre que...
« vous me délivreriez de mort cliascun une fois
« quant je vous eu ro(iuerroye, dont tous en ont
« fait leur devoir, fors vous que je appelle de pro-
« messe. » (Percef. Vol. III, fol. 157, Vcol. l.j
Arriers s'est à la voie mise,
Ainz n'enporta que sa chemise.
Et la Contesse l'an apele ;
Si li demande, quel novèle ?
Por qu'as laissié le Chevalier ?
Fabl. MS. de Berne, n' 354, fol. 172, V col. 2.
On nomme les personnes qu'on a quelque raison
ù'appeller, de faire approcher, de faire venir à soi.
Ainsi le sens littéral de noire expression appeller
quehiu'un par son nom, seroit faire venir, faire
approcher quelqu'un, l'y provoquer en le nommant,
le nommer pour qu'il approche, pour qu'il vienne;
expression qui est ancienne dans notre langue.
« Nuls n'apiaut l'autre par son nom purement. »
(Règle de S' Benoit, ms. de Bouhier, p. 84.) Telle
paroit être effectivement la signification du verbe
appeller : i° nommer, prononcer à haute voix les
noms de personnes qui doivent venir ou être
venues dans un lieu à certaine heure; 2° nommer,
lire tout haut le nom des parties dont on appelle la
cause, pour qu'elles viennent plaider. Enfin,
lorsqu'au lieu d'épeler, on disoita/jyjfZZé'/'leslellres
d'un mot, c'étoit les nommer, afin que venant, pour
ainsi dire, l'une après l'autre, elles composassent le
mot qu'on vouloit prononcer. Ce ne seroit donc que
par abstraction de l'idée d'une cause finale, analo-
gue à celle qui est indiquée, que le verbe appeller
ou ujjpcler auroit signifié et signifieroit encore nom-
mer les personnes et les choses, en dire les noms
et qualités, sans autre raison que celle de les
désigner.
GONJUG.
Apeaut, subj. prés. Qu'il appelle, qu'il nomme.
(G. Guiart, ms. fol. 88, V°.)
Apelecent, subj. prés. Qu'ils appellent. (Règle de
S" Benoit, lat. et fr. ms. de Beauvais, chap. lxui.)
Apeleil, participe. Appelé, accusé, nommé. (Loix
Norm. art. iv, vi et xvii.)
Apeleit, part. Appelé, nommé. (S'Bern.)
Apeleiz, participe. Appelé, nommé. (Id. ibid.)
Apelerad, ind. fut. Appellera. (Loix. Norm.)
Apelet, ind. prés. 11 appelle, il nomme. (S' Bern.)
Apiau (j'), ind. prés. J'appelle, j'accuse. (Ane.
Poès. fr. MS. du Vatic. n" 1490, fol. 55, ^'°.)
Apiaut, ind. prés. Il appelle. (Fabl. ms. du R.)
Apiaul, subj. pr. Qu'il appelle, qu'il invoque. (Id.)
VARIANTES ;
APPELLER. Rom. de la Rose, vers 22665.
Apaller. Chans. Fr. WS. de Berne, n°389, fol. 57, R».
Apeler. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 14, 35, passim.
Apeller. Chans. Fr. MS. de Berne, n» 389, fol. 15, V».
Apieler. Ph. Mouskes, MS. p. 247.
Appeler. Orth. subsist. — Cotgr. R. Estienne, Nicot, Dict.
Appelleur, sub&t. masc. Appelant. Les ac-
ceptions de ce mot appelleur ou appelierres, plus
usité dans notre ancienne langue qu'appellant ou
appelant, sont relatives à celles d'appel , soit
qn'appclleiir désigne un champion, un accusateur,
un demandeur en Justice; soit qu'il désigne un
oiseau qui en fait venir d'autres dans les filets, un
oiseau à la suite duquel les autres volent. Si l'on en
croit Cotgrave, la signification d'appelleur étoit
quelquefois analogue à celle du verbe appeller,
épeler. (Voy. Appel et Appeller.)
VARIANTES :
APPELLEUR. Du Cange, Gloss. lat. au mot Campiones.
Apeleres. Id. ibid. col. 113.
Apelel'R. Id. ibid. — Loix. Norm. art. xvi.
Apeliere. g. Guiart, MS. fol. 87, V».
Apelieres. Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, p. 312.
Apeliers. Id. ibid. n. 22.
Apelierres. Id. ibid.
Apellieres. Id. ibid. p. 312.
Appelleres. Du Cange, Gl. lat. au mot Campiones.
Appellerres. Id. ibid. col. 114.
Appelloir. Assis, de Jerus. p. 49 et 60.
Appellour. Skinner, Yoc. forens. expositio.
Appepd, adv. et express, adv. En pendant.
On soupçonne Monet d'être l'auteur de l'expression
à-pend, et d'en avoir formé l'adverbe append. Il est
possible au reste que dans une signification relative
à celle de pendre, suspendre, on ait dit qu'une
colomne, une vis suspendue étoit une colunine, une
vis append. Mais c'est une méprise d'avoir confondu
cet adverbe avec le participe appens, en disant que
le guet appens ou ù-pens étoit embusches en lieu
comme penchant et désavantageux à celui qu'on
guette. (Monet, Dict. — Voy. Appens.)
VARIANTES :
APPEND, A-PEND, A -PENS, appens. Mouet, Dict. au mot
Appens.
Appendances, substantif féminin pluriel.
Appartenances. Dépendances.
11 est prouvé que l'idée particulière de tenir à une
chose en y appcndanl, étant généralisée, on a pu
dire appendances pour appartenances. (Voy. Appar-
tenance.)
Peut-être aussi a-t-on dit appendances pour dé-
pendances. « Je suis natif des appendances du
« royaulme de la grande Bretaigne. « (Percef.
Vol.VI, fol. 43.) Il sembleroit qu'alors la préposi-
tion initiale à' appendances seroit de même signi-
fication que la préposition latine ah, qu'en françois
on rend souvent par de. Au reste, comme ce qui
dépend d'une chose, y est nécessairement appen-
dant et par conséquent appartenant, il est possible
que sans égard à la différence de la préposition, les
mots dépendances et appendances aient été récipro-
quement substitués l'un à l'autre, pour signifier
appartenances, en général ce qui tient ou appar-
tient à une chose, soit en appendant, soit en dé-
pendant. (Voy. Dépendance.)
Appendices, subst. fém plur. Appartenances
et dépendances. Il est constant que dans un grand
nombre d'anciens titres latins, le mol appenditiœ
ou appendiciœ, en françois appendices, signifie
seul ce que dans un aussi grand nombre d'autres
signifient les mots réunis pertinentiœ et appendi-
tiœ. Soit qu'une chose appende à une autre chose
ou qu'elle en dépende, soit qu'elle y soit soupendue
AP
- 59 —
AP
ou suspendue, elle y tient. Or, ces façons particu-
lières de tenir, d'appartenir à une chose, étant
généralisées, on a pu désigner \es, appartenances et
dépendances d'une terre, d'une fief, d'une maison,
en les nommant seulement appendances ou appen-
dices, dépendances ou dépendlces, quelquefois sup-
pendices. Ce dernier mot est synonyme ù'appendi-
ces dans un titre de 12C8, publié par Dubouchet.
(Preuv. de l'Hist. de la M. de Coligny, p. 58. — Voy.
Ap^ENDA^■cEs et App.\rte.nance.) « Contens fut entre
« moy... et l'Abbé et le Convens dou mont Saint-
« Eloy.... des Justices, desostes(l), des terres et des
« appendisses de la Court de Faveril. » (Duchesne.
Hist. généal. de la M. de Béthune, pr. p. 13i ; tit.
de 12i7.) « Don li fit deLinei et des apendises, en
« mariage. » (Id. Hist. généal. de la M. de Bar-le-
Duc, pr. p. 32. — Voy. Dépe.ndices.)
V.-iRlANTES :
APPENDICES. Duchesne, H. g. de la M. de Béthune, p. 37.3.
Apendises. Dubouchet, ubi supra, p. 63.
Appendisses. Duchesne, H. g. de la M. de Béthune, p. 134.
Appendis, subst. masc. (2) Appentis. Bâtiment
attenant aux murs, aux portes d'une ville. Coteau.
Anciennement, un appendis étoit ce qu'on
nomme encore appentis, un bâtiment dont le toit
en pente d'un seul côté, append ou tient au mur
contre lequel il est appuyé. (Voy. Appendue.) « Un
o appendeis qui se fiert en la rue S. Abrahamj etc. »
(D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au
mol appoidaria ; tit. de 1295.) C'est relativement à
l'idée de la possibilité d'atteindre ù certaine hauteur,
en montant sur un appentis, qu'on disoit figuré-
ment : « Vostre promotion en l'office de Conseiller
« aux Généraux, c'est un appentij... pour monter
" à une magistrature plus relevée. » (Pasquier,
Lett. T. III, p. 60G.)
Dans une signification plus étendue qu'elle ne
l'est aujourd'hui, les bâtimens, les maisons attenant
aux murs ou aux portes d'une ville, peut-être aux
faubourgs de la ville, en étoientles appentis. « Cou-
« rurent les Mareschaux du Roy d'Angleterre jus-
« ques bien près de Paris.... Adonc s'émeut le Koy
» Philippe, et fit abbattre les appentis de Paris, et
« s'en vint à Sainct Denis. » (Froissart, Vol. I,
page 146.)
Il seroit possible que par la même extension, un
terrain^ un lieu attenant à des vignes eût été
nomme l'rtyj/^eHf/is aux vignes. Peut-être aussi que
le coteau étant à la montagne ce qw'wnappentis est
au mur contre lequel il est appuyé, \q moi appendis
aura signifié coteau. » Monterez sur ceste petite
« montaigne auprès de \' appendis aux vignes, pour
« garder qui sauldra. » (Le Jouvencel, ms. p. 86. —
Voy. Pendant.)
VARIANTES :
APPENDIS. Le Jouvencel, MS. p. 86.
Apentis. Cotgrave et Nicot, Dict.
ApPENDEts. D. Carpentier, S. Gl. 1. deD. C. à Apiiendavia.
Appentis. Orth. subs. — R. Estienne, Nicot, Monet, Dict.
Appenty. Pasquier, Lett. T. III, p. 606.
Appendre, verbe. Pendre. Etre attaché, tenir,
appartenir. (Voyez Appe.ndance.) Quelques Etymolo-
gistes latins croient que le verbe pendere, pendeo,
formé de pendere, pendo (3), signifie un effftt de la
pesanteur; opinion d'autantplus vraisemblable que
c'est par sa pesanteur, par son poids qu'une chose
pend, en latin pendet. On citera comme une preuve
de l'analogie de ces deux idées, le vers suivant :
Moult granz fez (4") à preudomme apent.
Fabl. MS. duR. n" 7-218, fol. 223, R- col. 1.
Les rapports qu'indique la préposition initiale
de ce verbe composé appendre, étant signifiés par
une seconde préposition, il semble que l'acception
d'appendre étoit la même que celle du verbe simple
pendre, lorsque dans un sens actif on disoit, appen-
dre une chose à une colonne, Yappendre contre un
mur, Yappendre en haut. (Voy. Monet, Dict.) Ron-
sard et Du Bellay afïectoient peut-être un air d'éru-
dition, en consacrant spécialement ce verbe à
désigner l'action de pendre, de suspendre à la
voûfe d'un temple les choses qu'on d'Jdieaux Dieux.
(Voy. Nicot, Dict.) Il est encore usité en cette signi-
fication particulière, maison a la preuve qu'ancien-
nement l'usage en étoit plus général.
Le noir escu bendé de nuit
Ot Larrecin au col pendu,
Et d'une torches apundu.
FaM. .MS. du R. n- 7615, T. II, fol. 191, V col. 1.
Plus souvent aussi l'acception à'appcndre étoit
neutre comme celle du verbe latin appendere,
pendre, être pendant. « Le ray du feu faisoit à
« l'estoille queue de trois toises de longueur, et celle
« queue estoit en appendant du costé de la
« Grand'Bretaigne. " (Percef. Vol. IV, fol. 68.) On
pourroil à ce passage en réunir d'autres où il seroit
possible que dans un sens relatif à celui des prépo-
sitions latines ab et ad, la préposition initiale et
inséparable du verbe ajipendre indiquât tour-à-tour
le point duquel s'éloigne la partie inférieure d'une
chose pendante, et le point vers lequel elle appro-
che en pendant. Dans le premier cas, appendre
seroit de même signification que le verbe dépendre.
(Voy. Dépendre.)
On sait qu'en général une chose pesante ne pend
qu'autant qu'elle est retenue par une autre chose,
qu'autant qu'elle est attachée et tient à cette même
chose, par un moyen quelconque. De là, l'usage
figuré du verbe s'appendre, être appendant, s'atta-
cher, être attaché à servir l'amour et à mériter ses
faveurs.
Veillier, ploreir, poene, travels, ahans.
Tout ceu covient as fins amans sentir :
Mais jai (5) por ceu ne se doit ébahir
Li hons ki est à haus dons apendayis.
Chans. Fr. MS. de Barne, n* 389, pari, n, fol. 18, V'.
(1) hospilcs, tenure et condition intermédiaire entre la liberté et le servage, (n. e.) — (2) Ce mot nous semble fait sur
pente ; appendiciuin, qui est ordinairement cité, aurait été, comme les mots en itia, termmé en esse ou en ice. (n. e.) —
(3) La forme romaine vient même de pendere avec e bref, et non de pendere avec e long : pendeo est à pendo, ce que jaceo
est àjacio. (N. E.) — (4) Faix, fardeau pesant. — (5) C'est le mot jamais (jain magis) interverti, (s. k.)
AP
— 60 -
AP
Moût est fox qui ne s'apent
A amors servir toz dis ;
Qu'amors tient celui joiant
Qui à li est ententis.
Ane. Poët. Fr. MSS. avant 1300, T. I, p. 217.
Les lieux où un amant, consei-voit un attachement
aussi heureux qu'honnête, étoient des lieux où
appeiuloient sa juie et son honneur.
Se j'ai tors dou paix esteit
Où ma joie et m'onors apent ;
Por ceu n'ai-je pas oblieit
Coinent on aimine loiaulment.
Clmns. fr. .MS. de Berne, n- 389, part. II, fol. 7, R°.
Ces acceptions llgurées prouvent combien l'on a
abusé de la siu;nification propre de ce verbe. On
considéroit comme appoidantes les unes aux au-
tres, les personnes entre lesquelles il y avoit une
relation, quelle que fût l'espèce de relation par
laquelle elles étoient attachées les unes aux autres,
par laquelle elles se teuoient. Ainsi, pour désigner
les relations de la créature au Créateur, les relations
de l'homme à l'homme, comme inférieur, comme
parent, etc. on disoit : « Fiz furent Remon ki fu de
« Beroth et des Hz Benjamin, e Beroth apenileif à
'< Benjamin. » (Livres des Rois, ms. des Cordel.
fol. 45, V°col. 1.)
Là est Guillaume de .Inliers,
A qui ilz sont touz apendanz, etc.
G. Guiart, MS. fol. 261, R".
La Corone de France doit estre si avant
Que tout autre Roi doivent estre à li apendant.
Guiteclin de Sassoigne. MS. de Gaignat, fol. 229, R* col. 2.
Diex où tout est apendant,
Qui de la Sainte Virge nasqui en Belléant, etc.
Buenon de Comraarchis, Ms. de Gaignat, fol. 200, R* col. 1.
Mais au fort Roi où tout apent,
En rendent grâces bonement.
Lucidaires, MS. do Gibert, fol. 6, V'.
On voyoit comme appcndant, non-seulement aux
personnes, mais aux choses, tout ce qui leur étoit
relatif, propre, convenable. « Yaissèle d'or... ki al
>i servise apencleit, etc. « (Livres des Rois, ms. des
Cordel. fol. 138.) « Co ne li apendeit pas à faire. »
(Ibid. fol. 139.)
Puisque Dame aura ami,
Et èle li veut douner
S'araour ; mis l'a en la voie
De rechevoir la grant joie
K'al olroi d'amours apent.
Ane. Poès. fr. .VS. du Valic. n* li90, fol. 143, Rv
Mais ce n'est pas amors qu'à moi apende.
Ane. Poét. Fr. MSS, avant 1300, T. I, p. 411.
Richart par prière
Ne fera chose qu'il requière,
Ne qui a loiauté s'apande.
G. Guiart, MS. fol. 25, V'.
Dame, fet-èle, à vous qu'apent de cest afère''
Fabl. MS. du R n- 7218, fol. 338, V-col. 1.
C'est ainsi qu'en généralisant l'idée d'une chose
qui tient à une autre chose en y appendant, on a
fait du verbe appcndre un synonyme d'appartenir.
« Si ascun (1) face purchas de comune de pasture en
« autruy soil (2), et ne eit nul tenement à qui cèle
« Commune purra appendre, tiel purchas, etc. »
(Britlon, des Loix d'Angl. fol. 144.) •< Tenement à
« qui l'avowson (31 appenl ove toutes les apurte-
« naunces. » (Id. ibid. fol. 23î.) « Advowson et
>' common de pasture.... sont nosmés appendants
» al maiior, ou al terres et tenements. •> (Tenures
deLitUelon, fol. 41.)
Et qui li voudroit fere droit,
Normendie il apcndmit.
Roiu. de Rou, MS. p. 232.
Uns riches Chevaliers estoit
Moult franc, à qui il appendoit
Assez grant terre et grant honor.
Fabl. MS. du R. n- 7615,T. 11, fol. 173, V col. 1.
VARIAiSTES :
APPENDRE. Britton, des Loix d'Angl. fol. 144, V°.
Apandre. g. Guiart, MS. fol. 25, V».
Apendre. Livres des Rois, MS. des Cordel. fol. 4.
Appens, pari, et subst. Pensé, réfléchi. Pensée,
réflexion (4). Temps pour penser, pour réfléchir.
Il semble que l'usage du participe appens, abré-
viation d'appensé, ait toujours été restreint à l'ex-
pression encore usitée, guet appens. (Nicot et Monet,
Dict. — Dict. de Trévoux et de l'Acad. Fr. — Voy.
Appensé.) On pourroit regarder l'addition de ce par-
ticipe appens au substantif guet, comme superflue,
puisqu'il n'y a point de guet ou â'agiiet sans
pensée, sans réflexion. Mais Pasquier observe qu'en
François, comme en Latin, il n'est pas extraordi-
naire de réunir deux mots de même signification,
pour rendre ce que l'on veut dire plus poignant ;
qu'ainsi le guet ou Vaguet paroit d'autant plus
odieux, qu'il est appens. (Voy. Pasquier, Rech. L.
VIII, p. 099 et 700.) C'est par ignorance que l'on a
écrit à-pend ou append. (Voy. Âppend.)
Quelquefois on écrivoit guet-à-pens. Alors, le
participe pens signifioit ce que signifie encore le
mot pensée qui n'est autre chose que le féminin du
participe pensé, pris substantivement au moyen
d'une ellipse. Par conséquent, le guet-à-pens étoit
la même chose que le g net -à-pensée, c'est-à-dire
guet avec pensée, avec réflexion. (Voy. Pens et
Pensée.) Il résulte de celte observation, que le par-
ticipe composé apens peut aussi avoir signifié
réflexion, pensée. (Voy. Borel, Dict.)
On croit même que dans un sens relatif à celui
de l'expression jour d'appensement, on a nommé
appens un délai accordé en Justice, pour penser et
réfléchir aux objections qui pourroient être faites à
des témoins. « Qui delTault en sa prouve, doit faire
« les despens, et luy doit cheoir li jour de la def-
« faulte en producion ; et s'il deffault à veoirs
« donner tesmoins que l'en donneroit contre lui, il
« n'aura plus appens îi dire après. Ainczois dira,
« etc. " (Ane. Coût, de Bretagne, fol. 102. — Voyez
Appensement et Appe.nseb.)
VARIA^iTES :
APPENS. Nicot et Monet, Dict.
Apens. Pasquier, Rech. L. VIII, p. 699.
(1) aucun : ahquns unus. (s. e.) — (2) fonds de terre ; on trouve la forme féminine soile se rattachant à solum, devenu en
bas-latin suluim. - (3) Voir Du Gange à Aduotia. - (4) Comme on le voit par ces vers (3609) du Roman de la Rose : a Mes
ge metrai tout mon apens, Dès ore en Bel-Acueil garder. » (n. e.)
AP
— 61 —
AP
Appensé, participe. Qui est pensé, réfléchi.
Qui a pensé, réfléchi. Occupé, insirait; qui a des
idées, de la raison, de la prudence, etc.
La signification d'appensé étoit passive et la
même que celle à'appens, Inrsqu'en disant cliose
appensée, fait appensé, advis ou guet ap/icnsé, l'on
exprimoit une pen.sée, un dessein réfléchi de nuire.
(Chron. S' Denys, T. l, p. 53. — Ord. T. I, p. 57,
col. 2. — Coquillart, p. 112. - Pasquier, Rech.
L. vin, p. 700. — Hob. Eslienne, Xicol et Monet,
Dict. — Voy. Appens.)
Plus généralement, le participe appensé signifioit
la pensée sans dessein de nuire. Il étoit actif, c'est-
à-dire qu'il désignoit l'état de l'homme ayant été
pensant, et non celui de la chose ayant été pensée,
toutes les fois qu'en parlant d'une personne qui
avoit pensé, réfléchi, l'on disoit qu'elle étoit ap-
pensée.
Amours, se bien y suis appensée,
Est maladie de pensée.
Rom. de la Rose, ïers 448) et 4482.
Apensels sui c'une chose feroie,
S'amors voloit et li venoit en greit, etc.
Chans. fr. MS. de Bei'ne, n" 389, part, i, fol. 21, V.
C'est par l'analyse de l'expression elliptique être
appensé, qu'on aperçoit la raison pour la(iuelle un
participe passé semble avoir quelquefois la signifi-
cation d'un participe présent, comme en ce passage :
Lors esgarde avant et arriéres,
Et voit couvertes les gaschieres (1)
Des siens qui, serrez vers le val.
S'en vont à pié et à cheval.
De vuidier le champ ape}if:fz.
G. Guiart, MS. fol. 368, Rv
En pensant, on s'occupe, on s'instruit, on acquiert
des idées, on se fait une habitude de raison, de
prudence, etc. De là, ce même participe appensé
signifioit, 1° occupé :
Garde ta bouche soit de proier upeusée,
Tant que de t'amor soit esprise et eschaufée.
Fabl. MS. du R. n- 7G13, T. U, fol. 178, V col. 2.
2" Instruit :
... De quanlques li demanda
Le trouva si très-apensé.
Si courtois et si avisé, etc.
Cléomadès, .MS. de Gaigual, fol. 40, R» col. 9.
3° Qui a de la prudence, de la raison, etc. » Grant
« partie s'accorda à ce que l'en li devoit aidier
« et s'offrirent por li aidier; li autres disoient qu'il
« n'estoient mie appensé. - (Martène, Conlin. de
G. de Tyr, T. V, col. 710.)
... Sa mère Done Ynabele
Le reconfortoil coume celé
Qui ert apensée tousjours.
Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 57, Y- col. 3.
Qu'il suffise d'avoir indiqué l'analogie par laquelle
tout mot signifiant une idée relative aux qualités
habituelles d'un être qui s'occupe l'esprit et qui
pense, pourroit être l'explication du participe ap-
pensé. (Voy. Appenséement et Appensememt.)
VAJUANTES :
APPENSÉ. Nicot et Monet, Dict.
Apensé. Cléomadès, fol. 1, passim. — R. Estierme, Dict.
Apenseis. Chans. Fr. MS. de Berne, n» 389, fol. 21.
Appenséement, adverbe. En pensant, avec
examen, avec poids et mesure. A dessein. Avec
réflexion, avec prudence, etc. (Voyez Appensé et
Appe.nser.)
Anciennement, faire ou dire une chose, enj'y
pensant, en examinant les raisons de faire ou de
ne pas faire cette chose, de la dire ou de ne la pas
dire, c'étoit agir ou parler apenséenient ou empen-
séement, agir ou parler avec poids et mesure, avec
examen. « Quand elle parloit c'esloit... mont apen-
« séement. » (Vie d'Isabelle, à la suite de Joinville,
p. 174.) « Choses qui sont par adventure et non mye
« apenséement faictes, etc. » (Fabri, Art de Rélhor.
L. I, fol. 51.1 On lit, empensécment. (Id. ibid. f° 52.)
>' Le Roy Richart férit par adventure , non mie
" apenséement; si que luy fist mortelle playe. »
(Chron. S' Denys, T. II, fol. 26.)
On forme un dessein en pensant, en pesant les
raisons de faire une chose ou de ne la point faire;
de là, l'adverbe appenséement signifioit à-dessein.
■< Sire, je le vous diray, et suy cy venu apenséement
« pour vous en parler. » (Modus et Racio, ms. fol.
249.) « Ce faisoit Patience appenséement pour deux
« causes. » (Ibid. fol. 258.)
U y a de la réflexion, de la prudence,' [du bon
sens, du jugement à n'agir, à ne parler qu'après
avoir pensé. Ainsi l'adverbe appenséement signifioit
avec jugement, avec bon sens, avec prudence, avec
réflexion. (Voy. Cléomadès, ms. de Gaignat, fol. 14.
— Ibid. fol. 31».) u Li sages hardis, si est chil qui
« sagement et apenséement monstre son harde-
" ment. » (Beaumanoir , Coût, de Beauvoisis ,
chap. I, page 8.)
... .là nus hom feme ne prisera
Ki aime trop baudeinent (2).
En canpion qui apenséement
Conbat, a on plus seure atendance
Ken benbancier de foie contenance.
Ane. Pocs. Fr. MS. du Valic. tl- 1490, fol. 166, R'.
VARIANTES :
APPENSÉEMENT. Modus et Racio, MS. fol. 25.
Apenséement. Ane. Poës. fr. MS. du V. n" 1490, fol. 166.
Apensémënt. Chron. S' Denys, T. II, fol. 26, V».
Empensée.ment. Fabri, Art de Rhétor. L. I, fol. 52, R».
Appensement, sul)st. masc. Action de penser,
de réfléchir ; pensée, réflexion. Qualités d'un être
pensant, prudence, etc.
(Voyez Appe.nséeme.nt et Appensé.)
On a dit au premier sens, « que de de fol apen-
« sèment naist le mal consentement. » (Voy. Rom.
de la Rose, vers 18C62 et 18663.)
S'uns Clercs est trop fos par nature,
Nus sages hom n'a de luy cure :
S'il est trop sages ensement
Il entre en tel apensement
De quoi bien Ten puet meskair.
Ane. Poèt fr MSS avant 1300, T. IV, p. 13U.
(1) Voir Du Cange à Gascaria : terres nouvellement défrichées, (ji'ttines. (n. é.) - (2) de l'allemand bald : avec trop
a expansion, (n. e.)
AP
— 62
AP
. . . A bataille, ce dist-on,
Est adès prouece en saison,
Et avis et apensoneiis
Et senrtés et hardemens.
Clëomadès, MS. de Gaigtul. fol. G3, R- col. 2.
En termes de procédure, le jour d'appensement
étoit un délai accordé à des héritiers, pour penser,
réfléchir aux raisons qu'ils pouvoient avoir de
reprendre un procès, ou de l'abandonner. « Jour
« ù'appc lise ment est et sert tant seulement en cas
« où l'on seroit ndjonrné à reprendre ou délaisser
« la cause et erremens d'un procez dont le deman-
« deur ou défendeur seroit allé de vie h trespas. »
(Bouteiller, Som. rur. tit. vu, p. 39. — Voy. Appens.)
On a indiqué ailleurs par quelle analogie ce mot
appensement a désigné les qualités d'un' être pen-
sant, la prudence, etc.
Moult durement les assailloit ;
Car de très-grant vaillance estoit
Et de très-grant apensement.
Cléomadès, MS. de Gaignat fol. 4, V col. 1.
VAR1.\NTES :
APPENSEMENT. Laurière Gloss. du Dr. Fr.
Apensement. Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 58.
Appenser, verbe. Penser, examiner ; avoir une
idée, former un dessein, projeter. (Voy. Appensé.)
On sait qu'en Latin, pensare signifie proprement
peser une chose, l'évaluer au poiclsen la pesant, en
la tenant suspendue dans la balance ; qu'en François,
penser a signifié et signifie encore figurérnent cette
opération de l'àme par laquelle on pèse, on examine,
on évalue les choses en idée. De là, les anciens
verbes composés ajipenser et enpenser qui étoient
de même signification que le verbe simple penser,
en Latin pensare. (Voy. Penser.)
Il semble qn'appenser des témoins, c'étoit penser
à ce qu'on pourroit opposer à leurs témoignages,
peser ces témoignages, les examiner avant que
d'y souscrire. « S'il deffault à veoirs donner
« tesmoins que l'en donneroit contre lui dira
« de surs comme se il les veistpour tous appenser,
« les luy nommant; et les gréera. >> (Ane. Coût, de
Bretagne, fol. 102, V°. — Voy. Appens.)
On a réuni appenser et enpenser, parce que la
difîérence de la préposition initiale n'en opéroit
aucune dans la signification de ces deux verbes, soit
qu'ils désignassent la pensée, ou l'idée, le dessein,
le projet formé d'après la pensée. « Se aucuns gens
« avoient enpensé h aler tuer un bons, etc. » (Ord.
T. I, p. 134.)
Cuer orgueilleux veult trop estre honoré,
Et si ne veult à nullui faire honneur.
Tout est bien fait quanqu'il a cmpensé;
Ce qu'autrui fait lui semble deshonneur.
Eust. Desch. poës. MSS. p. 125, col. 4.
La preuve que cette acception A'enpenser étoit
aussi celle à'appenser, alongeroit inutilement cet
article. On le terminera en remarquant que dans le
sens de penser, peser ses idées, peser, examiner les
raisons de faire ou de ne point faire une chose, de
la juger bonne ou mauvaise, fausse ou vraie,
le verbe appenser, h la différence d' enpenser, étoit
plus ordinairement réciproque. " Ele s'apensa
« d'une grant Iraïson comme malicieuse. » (Rom.
de Dolopathos, ms. du R. n° 753i, fol. 293, V" col. 2.)
Lors s'assist sor l'esponde (1) et tint le chief embron (2);
Lors s'dptvîsse et porponsse à oui dira son bon.
Fabl. MS. du R n- 7218. fol. 347, V- col. i.
Quand bien m'apense,
Il ne me semble pas par m'ame,
Qu'amans Hons, n'amoureuse Dame,
Puist avoir greignor joie au monde
Que d'amour, quant el s'i habonde.
Poi-s. i. la suile du R. de Fauvel, MS. du R. n" 681i, fol. 1, V col. 1.
VARIANTES :
APPENSER. Ane. Coût, de Bretagne, fol. 102, V".
Apanser. Fabl. MS. du R. n» 7615, T. II, fol. 126, R» col. 1.
Apenser. Ane. Poët. Fr. MSS. avant 13()0, T. IV, p. 1368.
Apensser. Fabl. MS. du R. u« 7218, fol. 3i7, V» col. 1.
Empexser. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 125, col. 4.
Enpenser. Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 59, V» col. 2.
Apperceii, participe. Connu par quelques
qualités éminenles. Ce participe apperccu, dont
l'acception générale et figurée étoit la même que
celle du verbe apercevoir, avoit une signification
absolue, toutes les fois qu'en parlant d'une per-
sonne dans laquelle ou apercevoit, on connoissoit
des qualités éminentes, on disoit qu'elle étoit
apperçue, connue par son intelligence, sa prudence,
son courage, son intrépidité, etc.
Mes Theseus les ot veu3
Qui vassauz ert aperceus.
Cinq batailles issir en fait, etc.
Athis, MS. fol. 99, V- col, 2.
Il est sages, aperceus.
Si ne vuet pas estre déceus.
Fabl. MS. du R. n' 7615, T. II, fol. 134, R- col. 1.
Luxure est un péohié ; qui trop s'y laisse vivre,
Si vit jusques à la mort à paine sans délivre...
David et Salomon en furent si deceu.
Et maint autre grant homme, et sage et apparceu.
S. de Meun, Codic. vers 1705-1770.
Il semble que les Soldats qu'en Franche-Comté
l'on noitiiwoW, Apperçus (3), soient des Soldats con-
nus par le patriotisme intrépide et courageux avec
lequel on les avoit vus servir leur pays et le défen-
dre. Les trois Bailliages de cette province dévoient
entretenir trois Légions ou Régimens de cette espèce
de milice toujours prête à marcher au premier
ordre ; milice à la vérité peu aguerrie, mais à
laquelle « on avoit vu autrefois que l'amour de la
« patrie... avoit inspiré beaucoup de courage. »
(Pelisson, Ilist. de Louis XIV, T. II, p. 260, 267 et
268. — Voy. Appercevoir.)
VARIANTES :
APPERCEU. S' Bern. Serm. fr. MSS.p. 7.
Aparceus. Fabl. MS. du R. n» 7615, T. II, fol. 13t.
Aparceut. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 230.
Aperceus. Athis, MS. fol. 99, V" col. 2.
Apercheu. Anseis, MS. fol. 14, R» col. 1.
Aperzuiz. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 169.
Apparceu. J. de Meun, Codic. vers 1770.
(1) châlit ; on le trouve dans Virgile : , „
propose in et pronus; Cachet, dans son Glossab-e'clu Chevalier au Ûyipie, ne se prononce pas ; M. Gautier, dans' sa Chanson
ae tU)land, déclare cette étymologie très difficile, (n- e.) - (3) Paraît avoir ici le sens i'appoincté (Voir c
Ati!o;is qmtm se regina superbis Aui-ea coynposuit sponda. (n. e.) — (2) penché : Diez
ir, dans sa Chan
ce mot). (N. K.)
AP
AP
Appercevable, rtrfj. Apercevable. (Voyez Oudin
et Monet, Dictionnaire.)
Appercevance, subst. fém. Faculté d'aperce-
voir, de sentir, de connoitre. Perception, idée,
notion, connoissance. Cliose apercevable.
Les significations du ènbilànWi appercevance sont
toutes analogues à celles du verbe apercevoir.
C'est avec raison qu'au premier sens, l'on a dit :
« Les sens sont l'extrême borne de noslre apperce-
« vance.... Ils font Irestous la ligne extrême de
« nostre faculté. » (Essais de Montaigne, T. II,
p. 472.)
Chien a grant Icgeresce et grant apercevance.
Chasse de Gaston Phébus, MS. p. 89.
Dans le second sens, appercevance désignoit
l'effet de cette faculté d'apercevoir, la perception,
l'idée, la notion, la connoissance qu'on prend des
personnes ou des choses, en les apercevant. (Voy.
Oudin, Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict.) Ainsi,
lorsqu'une personne avoit peur d'être aperçue,
d'être connue, on disoit qu'elle nwoit paor d' aperce-
vance. (Fabl. MS. du R. n° 7218, fol 330, Y° col. 1.
— Voy. Appercevement.)
Quelquefois V appercevance étoit la chose même
qu'on apercevoit, une chose apercevable. (.Nicot,
Dict.) « Ce dont nous avons encore veu de nostre
« temps quelques restes et appercevances en la rue
» Nostre-Dame, etc. " (Pasquier, Rech. L. i.\, p. 708.
— Voy. Appercevoir.)
VARIANTES :
APPERCEVANCE. Oudin, R. Estienne, Nicot, llonet, Dict.
Apercevance. Chasse de Gaston Phébus, MS. p. 89.
Appercevant, ;j«î'f('cijJ^. Qui voit de loin, qui
voit bien. Qui peut être vu, qui est visible. (Voyez
Appercevance et Appercevoir.)
Dans le premier sens, on disoit : « Le Roy qui
« estoit assez fl;'7J<'/T('i'«H/, leva amont le visaige,
" et veit venir... les deux Chevaliers. » (Percef.
Vol. VI, fol. 106, V° col. 1.)
Celte acception est figurée dans les vers suivans :
Ll mesengue (1) qui ert molt sage,
Aperchevaiis et enscgnie ;
Qui molt estoit de sens garnie, etc.
Bestiaire, MS. du R. a' 7989, fol. 171, V" col. 2.
On trouve qu'abstraction faite de l'idée de celui
qui voit une chose, qui l'aperçoit parce qu'elle est
visible, le participe appercevant a signifié ce qui
peut être vu, ce qui peut être aperçu comme visi-
ble. » Donnant à iceulx deniers blancz telle diffé-
« rence comme bon vous semblera à faire, et la
« moins apparcevant que l'en pourra. » (Ord.
T. III, p. 430. — A^oy. Appercevoir.)
variantes :
APPERCEVANT. Percef. Vol. VI, fol. 106, V» col. 1.
Aperchevant. Bestiaire, MS. du R. n» 7989, fol. 171.
Apparcevant. Ord. T. III, p. 430.
Appercevement, subst. masc. et fém. Action
d'apercevoir, vue, connoissance. On a voulu justi-
fier un égarement de l'amour dans le philosophe
Aristote, en disant qu'il avoit été séduit, non par
Vapersure, par la vue d'une femme, mais par le pen-
chant de la Nature qui peut égarer la philosophie.
Donc n'a li maistres, ce me sanble,
Nule coupe en sa mespresure,
Quant ne mesprist par apersure,
Mais par nature droite et fine.
Alex, et .\ri5t. MS. de S. Geriu. fol. 73, V* col. 3.
Anciennement, les amans craignoient qu'on ne
s'aperçût de leur amour, et làchoient d'en dérober
la connoissance.
. . . Li proie que sagement
Me vueiÛe fere enseignement
Et demonstrer en quel manière
J'ai joie de ma proiere ;
Et que ce soit céléement.
Qu'il n'en soit apercevement.
Fabl. MS. du R. n" 7218, fol. 205, V col. 1.
Ils préféroient leurs peines amoureuses à des
plaisirs pleins iVappercevemens, à des plaisirs dont
la connoissance échappe rarement à la curiosité
maligne des médisans.
A pais ameroie
Miex grant déduis qui fust lens,
C'un bien hastié ne feroie
Tous plain d'appercevemens.
Ane. Poës. fr. MS. du Vatic. n" 1522, fol. 153. R- col. I.
On a personnifié la honte ; et pour signifier
qu'elle redoute la vue, les regards de la curiosité,
on a dit :
Honte... portoit une espée
Bonne, clère et très-bien trempée
Qu'elle forgea doubteusement
De soucy d'aparçoijveinenl.
Rom. de la Rose, vers 16284-16287.
VARIANTES 1
APPERCEVEMENT. Ane. P. fr. MS. du Vat. n» 1522, f. 153.
Ap.\rcoy\'e.ment. Rom. de la Rose, vers 16287.
ArERCEVE.MENT. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 205, V" col. 1.
Apersure. Alex, et .Arist. MS. de S' Germ. fol. 73, V» col. 3.
Appercevoir, verbe. Apercevoir, voir, ouïr.,
goûter, sentir, connoitre, juger. Percevoir, toucher,
recevoir. Ou observera que du verbe simple capere,
prendre, s'est formé le composé latin percipere, en
françois percevoir. (Voy. Percevoir.) Il semble qu'en
réunissant à la préposition per la préposition a
dans apercevoir, l'on indique tout-à-la fois l'objet
et le moyen de la perceplion. C'est par le moyen
des sens sur lesquels agissent les objets, que l'àme
saisit ces mêmes objets, qu'elle en reçoit l'idée,
qu'elle en prend connoissance. De là, l'usage figuré
du verbe appercevoir qui signifioit voir, ouïr,
goûter, sentir en général, connoitre par les sens,
juger d'après cette connoissance réfiéchie. « Porons
'< aperzoïjvre par nostre esprueve mismes, cum
■^ convenaule chose soit, etc. » (S' Dern. Serm. fr.
Mss. page 3.) « Par la grandesce del pardon, pues
« aparwivre la grandesce de la veniance. » (Id.
ibid. page 198.)
(1) mésange; en bas-lalin »ie:e/i:t(, de l'allemand mcise, avec suffixe, (n. e.)
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En l'oslol fu plus de douze ans,
Tant que li Enfes fu jà grans
Et se sot bien o()eir«îî'o?V (1).
Kabl. M5. du II. 11' 7218, fol. 151, R' ool. 1.
Dans une signification relative à la différence des
sens par lesquels on prend connoissance des per-
sonnes et des choses, on disoit : « Cil ki aparceut
«'ont le deleit de l'espiritel vitaille, etc. » (S' Bern .
Serm. fr. mss. p. -230.)
Au Roi a dit parole (qyercheue;
Sire, dist-il, c'est ventés seue, etc.
Anseis, lis. fol. 14, R- col. 1.
Par sous le chaperon l'esgarde...
Si connut bien et aperçoit,
C'est son mary qui la decoit.
Fabl. MS. duR'. n" 7218, fol. 163 V col. 1.
.le ne vos puis de jor veoir.
Car trop redout ['apercevoir.
;, Cliaus. Fr. MS. de Berne, n- 389, part. 1, fol. 45, V'.
Ce même verbe apercevoir, dont on a restreint
l'ancienne acception figurée, signifioit dans le sens
propre, toucher, prendre avec la m.ain, recevoir,
percevoir. « Huit deniers de cens... avoit q{ aper-
« cevoit chascun an es mesons de Saint Salveor. >>
(Hist. généal. de la M. de Chastillon, pr. page Gl ;
titre de 1273.)
CONJl'G.
Aperceifii), ind. prés. J'aperçois. (Liv. des Rois.)
AparceifiV), imp. Aperçois-toi. (Ibid. fol. 32.)
Aparchut, indic. prêt. Aperçut. (Ibid. fol. 82.)
Aparçoeve (s'), subj. prés. S'aperçoive. (Rymer.)
Aperçoif, indic. prés. J'aperçois. (G. Guiart.)
Apercuit (s'), ind. prêt. S'aperçut. (Liv. des Rois.)
V.\RIA>TES :
APPERCEVOIR. Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict.
Aparcevoir. Fabl. MS. du R. n" 76-15, T. II, fol. -124, V».
Ap.\rzoivre. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 198, 239, etc.
Apercevoir. Orth. subsist. — Fabl. MS. du R. fol. 151.
Aperçoivre. Ane. Poës. fr. MS. du Vatic. n» 1522, fol. 161.
Apersoivre. Chans. Fr. MS. de Berne, n° 389, fol. 78.
Aperzoivre. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 17 et 35.
Aperzoyvre. Id. ibid. p. 3.
Apparcevoir. Cotgrave, Rob. Estienne et Nicot, Dict.
Appétence, snbst. févi. Convoitise, appétit.
(Cotgrave et Oudin, Dict.)
Appeler, verbe. Convoiter, vouloir, désirer,
rechercher, demander, etc. On sait qu'au xyi" siècle,
on affectoit de parler latin en françois. De là, le
verbe appeler, en latin appetere, qui dans la signi-
fication de convoiter, vouloir, désirer, rechercher,
demander, etc. désignoit l'effet de toute espèce de
sentiment par lequel l'âme est invitée à satisfaire
un besoin physique ou moral. Il ne se dit plus que
d'un appétit dont la cause est physique, comme en
ces phrases. >■ L'estoma£ appelé les viandes; la
« femelle appelé le mâle. » (Voy. Appétisser.)
VARIANTES :
APPÉTER. Orth. subsist. - J. Marot, p. 72.
ApéTEr. Gloss. de Marot. — L'Amant ressusc. p. 75,
Apetter. Du Bellay, Mérn. piéc. justif. T. YI, p. 311.
Appétisser, verhe. Inviter à manger, mettre
en appéfit. On excite l'appétit des oiseau.x qu'on
veut faire chasser, en leur donnant « desestouppes
» couvertes de chair, en forme de pillule.... Parce
« moyen seront rendus plus sains, plus appetissez,
'• plus avides, plus légers et plus promps à la
" proye. » Budé, des Oiseaux, fol. 120. — Cotgrave
et Monet, Uict. — Dict. de Trévoux. — V. Appéter.)
Appétit, subst. masc. Convoitise, volonté, désir,
besoin. On a déjà observé qu'en général V appétit
est l'effet d'un sentiment qui invite l'àme à vouloir
et à rechercher la satisfaction d'un besoin physique
ou moral. (Voyez Appeter.) Quoiqu"rt;;/;t7/^ subsiste
dans le sens de convoitise, désir, il ne signilieroit
plus la volonté, le désir de voir une personne qu'on
aime.
Et Moigne, et Clerc, et Prestre, ly Grands et ly Petit
De veoir leur Patron avoient aypétil.
Ger. de Roussillon, MS. p. 201.
Dans le sens oîi l'on dit que l'honneur veut
qu'on se venge d'une parole outrageante, on disoit
figurément :
Combien voit-on de dangers courir
Pour quelque bruit d'un faux raport qui vole !
Combien voit-on dliommes braves mourir
A l'oppvlit d'une seule parole!
Poés. à la suite des Dialog. de Taliureau, fol. 191, R'.
On dit encore à l'appétit d'un écii; expression
adverbiale dans laquelle appétit signifie la volonté,
le désir, le besoin d'épargner un écu.
Anciennement le besoin de vomir, comme le
besoin de manger, étoit désigné par le mot appétit.
On disoit, appétit de vomir. (Voy. Rob. Estienne et
Nicot, Dict.) « Les Chevaliers qui n'avoient mangé,
« et qui le travail du Tournoy avoient souffert,
« dévoient bien avoir appétit de manger. » (Percef.
Vol. V, fol. 108, R°col. 1.)
Enfin, l'acception générale à'appétit étant parti-
cularisée, ce mot a signifié seul et signifie encore le
besoin, le désir de manger. Montaigne ne sentoit
jamais le besoin de manger qu'en se mettant à table.
« Pour moy (dit-il) je ne mange jamais trop tard :
« Vappétil me vient en mangeant, et point autre-
« ment. Je n'ay point de faim qu'à table. » (Essais
de Montaigne, T, III, p. 341. -- Voy. Appetitif.)
L'insatiabilité de nos désirs est si naturellement
exprimée par ces mots l'appétit vient en mangeant,
qu'on en a fait un proverbe dont on a cru que
Jacques Amyot, évêque d'Auxerre, étoit l'auteur.
On raconte qu'ayant paru d'abord ne désirer rien
de plus qu'un Bénéfice qu'il obtint, il demanda
ensuite l'évéché d'Auxerre; et que le Roi l'ayant
plaisanté sur l'accroissement de ses désirs, il ré-
pondit: Sire, l'appétit vient en mangeant. (Voyez
Dict. de Trévoux.) Mais l'abbé Lebeuf croit qu'Amyot
(1) Le sens juger du latin percipere permet de rendre compte de ce vers. Mais il est difficile d'expliquer la locution
s'apercevoir de, qui, du sens de voir scn, a passé au sens de remarquer: on en trouve des exemples dans la Chanson de
Roland : « Li amiraiz auquesi s'en aperceit. » Le verbe, neutre, aura ensuite pu s'adjoindre le pronom réfléchi, comme se
taire, se pâmer, etc. (n. e.)
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n'est intéressé pour rien dans ce proverbe, « en
« mangeant V appétit vient, comme dit l'évêque
« d'Auxerre. " Cet évéque d'Auxene lui paroit être
Philippe de Lenoncourt qui fui longtenis appelé en
Cour l'Evêque d'Auxerre, depuis la résignation qu'il
avoil faite de cette prélature, et qui accumula grand
nombre de bénéfices. (Voyez Hist. ceci, et civ.
d'Auxerre. T. I, p. G'(5.) Au reste, l'intempérance
des désirs est si naturelle à l'homme, qu'il n'en est
presque aucun dont le cœur n'ait senti que l'appétit
vient en mangeant. On ne voit donc pas trop pour-
quoi ce proverbe seroit plus propre à Philippe de
Lenoncourt qu'à Jacques Amyot. Une chose qui
paroit plus vraie, c'est que l'un dé ces deux évèques
d'Auxerre, et peut-être tous deux ont répété ce
qu'avant eux nombre de personnes auroient pu dire
aussi raisonnablement que l'avoit dit Angeston.
(V. Rabelais, T. 1, p. 27.) Si l'on en croit Le Duchat,
« Angeston est Jérôme le Hangest, Docteur de Paris
« et grand Scholastique. » Rabelais, qui semble le
désigner comme auteur du proverbe, Yappétit vient
en mangeant, prouve évidemment qu'il n'y a pas
plus de raison d'en attribuer l'origine ù Philippe de
Lenoncourt qu'à Jacques Amyot, puisqu'il écrivoit
plusieurs années avant que l'un et l'autre fussent
évèques d'Auxerre.
VARIANTES :
APPÉTIT. Orth. subsist. - Géi'. de RoussiUon, MS. p. 201.
Apétit. Poës. à la suite des Dialog. de Tahureau, fol. 191.
Appetitif, adj. Convoiteux, désireux, concupis-
cible. Appétissant. Dans le premier sens, on a dit :
Pourquoy sont-ilz d'honneur appetitifz?
C.onliedilz de Songecreiix, fol. 106, R".
La faculté appétitive (1) de l'âme est ce qu'en style
dogmatique, on nomme appétit concupiscible. (Voy.
Gotgr. Oudin et Monet, Dict. — Dict. de Trévoux.)
On connoît l'espèce de métonymie par laquelle le
substantif appétit a désigné et désigne encore cer-
taines choses qui donnent de Yappétit et l'excitent.
Delà, vraisemblablement l'adjectif appetitif ([ui,
dans un sens analogue à celui du verbe appctisscr,
signifioit appétissant. (Gotgr. Dict. — V. Ai-petisser.)
Appiéceter, verb. Rapiéceter. Mettre des pièces
à du linge, à des habits, etc. (Gotgr. Dict. — V. Pièce.)
Appigner, verbe. Exhausser un mur, un bâti-
ment, une maison. On observera que dans les
Coutumes de trois bailliages de Lorraine, lit. xiv,
des Servitudes, le verbe rehausser paroit relatif au
verbe appigner dans les Coutumes de lévêché et
comté de Verdun, tit. xv, des Servitudes. « Quand
« aucun édifie et dresse mur qui soit mitoyen à kiy
« et à un autre, celuy qui n'édifie pas et qui a
« moitié audit mur, doit contribuer à la reédifi-
« cation dudit mur, tant en fondement que jus([ues
« à la hauteur de la closture; et au résidu, s'il ne
» veut contribuer, l'autre... peut réédifier ledit mur
« et y faire veue au-dessus, de hauteur de closture.
« Et neantmoins si l'autre en après veut réédifier
« et appigner, il le peut faire et s'aider dudit mur
« en payant la moitié des frais et dépens qui
« auroient esté faits pour réédifier ledit mur, et
« doit celuy qui a premier réédifié, boucher ses
« veues. » (Nouveau Coût. gén. T. H, p;ige 433.)
Lorsque dans l'Ancien Goût. gén. T. Il, p. Î701, on
lit que « si de plusieurs voisins, l'un veut bastir
« pour mieux ou plus commodément se loger, il lui
« est loisible de contraindre par justice ses voisins
« de contribuer aux fraiz de la réparation de murs
« communs; que s'il veut les reliaulser plus qu'à
« leur hauteur première, faire le doit à ses fraiz,
« en y faisant faire pour tesmoignage de ce fenestres
» de maçonnerie qu'il sera néanmoins tenu d'es-
» toupper, si le voisin voulant se servir de ladite
« rehausse, offre contribuer aux fraiz, » on aperçoit
la relation du verbe reliaulser au \evhe appigner,
exhausser un mur, un bâtiment, une maison. Cette
acception du verbe appigner, paroit d'autant plus
vraie qu'elle est analogue à une origine assez pro-
bable du substantif pigîion (2). (Voy. Pignon.)
Appigrets, subst. inasc. Chose où l'on grappille.
Les alfaires qui appartiennent à la Chambre des
Comptes étant comparées par Rabelais à des plants
de vignes, mettre ou remettre une grappe sur le
pressoir, c'éloit mettre ou remettre une affaire sur
le bureau. Pour signifier qu'on tiroit de l'afTaire
peu de gain, peu deproflt, qu'ilyavoit peu de chose
à gagner, à grappiller, Gaigne-beaucoupdisoit qu'on
ne trouvoit pas grand appigrets [3] dans la grappe.
(Voy. Rabelais, T. V, p. 73.) Ce mot que Rabelais a
sans doule forgé d'après sa fantaisie, et dont Got-
grave altère l'orthographe, en écrivant appigrès,
ne désigne aucune chose à l'usage des pécheurs.
C'est une méprise de Golgrave qui l'explique en ce
sens. Il ne s'agit point de pêche dans Rabelais, mais
de vendange. Ainsi, le mol appigrets paroit signifier
chose où l'on grappille, le gain, le profit qu'on tire
d'une afl'aire comparée à une grappe de raisin dont
on exprime la liqueur en la pressurant. On soup-
çonne que dans une signification relative à l'accep-
tion figurée â'appigrets, gain, profit, le sobriquet
Apigratis aura désigné un Cuisinier qui grappille»
qui fait de petits profits injustes. (Voy. Apigratis.)
VARIANTES :
APPIGRETS. Rabelais, T. V, p. 73.
Appigrès. Cotgrave, Dict.
Applauier, verbe. Aplanir, planer, doler, raser.
Polir, rendre doux au toucher. Caresser du plat de
la main, tlatter, adoucir, apprivoiser, accoutumer.
La signification propre d'applanier est aplanir,
égaler fa surface de certaines choses en les planant,
en les dolant. « Prenés un billot qui ayt un demy-
« pied de long, et l'aplanés à un bout, pour, etc. »
(Modus et Hacio, fol. 83, R°. — Voy. Plamer.) Dans
le Dict. lat. fr. ms. qu'a publié le P. Labbe (Etym.
(1) « Selonc Arislote, cinc puissancf-s ou parties de l'àme sont, c'est assovoir la veg. tative, la spnsitive, Vappetitive,
l'intellective, la motive. » (Oresme. thèse de Meunier.) (n. t.) — (2) On p mrr àt remontir jusqu'au latin pJHim, créneau. (N. K.)
— (3) N'y aurait-il pas là le mot apis, abeille ; appigrets signifieri.it alors ce que l'abeille a Ijutiné. (n. e.)
II. ' 9
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fr. p. 498), le verbe latin dolare est rendu par le
françois uplaigner, le même qu'aplaner dans les
vers suivans :
. . . L'un des arcs esloit de bois,
Tout cornu et mal aplani:.
Tout plaiii de neuds et mal tourné.
Rom. de la Rose, vers 925-927.
C'est relativement à l'idée d'une surface plane et
égale, qu'applanier a signifié raser une ville, raser
les murs d'une forteresse. » Frai de Jérusalem
« cume fait l'ai de Samarie... Si la destruirai, aba-
« ferai e aplanierai, si cume l'un sultplanier tables
c< de graife. » (Livres des Rois, jis. des Cordel.
fol. 149, R" col. I.)
Cilz de hors sont au mur monté,
En pluseurs lieux l'ont effondré ;
Après ont tout aplanie,
Fossé et mur égaiUié ;
Puis passèrent tout plainement.
Rom. du Brul, JIS. fol. 48, V" col. 2, et 49, R" col. 1.
On conçoit que ce verbe ait pu désigner plusieurs
autres idées aussi relatives à celle d'une surface
plane et polie; surface qu'en même temps il peint
douce au toucher. Tel est par comparaison le poil
du cbevreuil, lorsqu'il n'est point hérissé. « Quant
« il fuit au commencement devant les chiens, il
» fuit... tout héricié Quant il a fouy longue-
>' ment, il fuit le poil tout aplaignié, et n'est point
<• héricié. » (Chasse de Gaston Phébus, ms. p. 39.)
Peut-être faisoit-on allusion ii l'idée d'une chose
douce au toucher, lorsqu'en parlant d'un jeune
Prince dont on avoit soigné la parure en le
peignant, en le baignant, en le parfumant, ondisoit
qu'il étoit aplanoiié.
Lavés fu et aplanoucs,
Et atournés si coume cil
Qui fius estoit à Roi gentil.
Ph. Mouskes, MS. p. 508.
Quoi qu'il en soit, applanier exprimoit en géné-
ral l'effet de l'action douce et coulante du plat de la
main sur la télé d'un enfant, sur le poil d'un chien,
d'un cheval, sur le plumage d'un faucon, etc.
lorsque dans la signification, caresser du plat de la
main, flatter, on disoit : « Comme ladite nourrisse
" eust respondu que c'estoit une fille.... la Déesse
" lielene la print et luy applania le chef aucune
« espace, puis la rendit à la nourrisse. » (J. Le
Maire, lllustr. des Gaules, liv. n, p. 261.) « Fist
>■ aplainier, et grater, et tirer le lévrier par le col-
« lier... mais il ne se bouga. » (Chasse de Gast.
Phébus, MS. p. 91.) « Quant le cheval.... sentit sa
" main qui luy aplanijoit son doz, etc. » (Percef.
Vol. 11, fol. 45.) « 11 vint h son destrier qu'il apla-
>> niait doucement, et mist le pied en l'estrief. »
(Hist. de B. du Guesclin, par Menard, p. 370 et 371.)
Le ceval forment convoitoit ;
Souvent l'acole et aplanie,
Et le ceval si bel manie,
Por un poi ne le vait baisant ;
Il vit le ceval si plaisant.
Ane. Poft. Fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1350.
il aplanie,
Il li fait chiere trés-Ue,
Que li faucons bien apperçoit
Que son service en gre reçoit.
G. Macliaul, PoCs. MSS. fol. 207, R- col. 2.
Par cette manière de caresser les oiseaux et au-
tres animaux, ils s'adoucissent et s'apprivoisent.
De là, le verbe applanier signifioit apprivoiser,
quelle que fût la façon d'apprivoiser, d'accoutumer
un oiseau ou autre animal, à être docile à la volonté
de l'homme. En parlant du faucon, l'on disoit :
" Qui a ung faulcon nouvel... lui doit faire geclz de
« cuir de cerf mol et une laisse de cuir, laquelle doit
« estre attachée au gant; et doit eslre pendue une
« petiic boiiclele à une petite cordelele, de laquelle
« on doit mener et aplainer le faulcon souvent. »
(Modus et Racio, fol. 59, V".)
Sobresse duit les faulcons et affete ;
A hault voler les duit et apla»ie.
Al. Cliartier, Poës. p. 592.
On adoucit les hommes, on les apprivoise, on les
accoutume à tout, même à la douleur, en les trai-
tant comme l'on traite certains animaux, en les
caressant, en les flattant. De là encore, l'acception
générale et figurée à'applanier, caresser, flatter
l'humeur d'un homme, sa fierté, sa passion, sa
douleur. « 11 ne faisoit sinon dire : Chevalier
« malheureux ! Adonc l'allèrent applanier qu'ilz le
« firent monter sur son cheval. » (Percef. Vol. I,
fol. 156, R°col. 1.)
Espoir par fois le vient applanier.
Œuv. de Rog. de CoUerye, p. 166.
Deus ! ki sauroit com norrist et aplaigne
Amors tous ceux ke ne sont entaichié
De fauceteit, ne de boise enpirié ;
Pouc puet prixier dolor ke l'an avaigne.
Chaus. Fr. MS. de Berne, n- 389. part, n, fol. 44, Vv
. . . Tant n'el sot aplanoier
K'il vosist Gormont renoiier.
Ph. Mouskes, MS. p. 367.
.... Ceaus qui sevent losengier.
Ne les Seigneurs uplanier, etc.
Alars de Comliray, Moral. MS. de Gaignat, fol. 165, V col. 3.
Costume est de traître de que redote aplaigne.
Hist. de Job, envers, MS. de Gaignat, fol. 133, V toi. 1.
Enfin quelle que fût la manière de flatter la sen-
sibilité raisonnable ou déraisonnable d'un homme,
ou la comparoit visiblement à la manière de cares-
ser certains animaux, tels que le chat, le chien, etc.
puisqu'on disoit :
. . . Bien lo sauroiz aplaignier
Si con l'an aplaigne lo chat.
Rom. de Perceval, MS. de Berne, n" 354, fol. 244, R- col. 2.
C'est proprement une caresse du plat de la main
que désigne le verbe applanier employé substanti-
vement dans les vers suivans :
. . . Trop plus douche est la bature
Dou poing qu'on aime par nature,
Que d'un fauls li aplaniicrs
Qui est de llater raaniiers.
Hist. de Job, en vers, MS. de Gaignal, fol. 174, R' col. 1.
VARIANTES :
APPLANIER. Percef. Vol. 1, fol. 156, R»col. 1.
Aplaigneu. Rom. de Perceval, MS. de Berne, n»354. f. 244.
Aplaignieh. Uom. de Perceval, ubi supra.
Aplainer. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 994.
Aplaingner. Chasse de Gast. Phébus, MS. p. 99.
Aplaingnier. Estiubert, Fabl. MS. du R. n» 7996, p. 85.
Aplainier. Chasse de Gast. Phébus, MS. p. 91.
Aplmnxer. Fabl. de Morel, MS. de N. D. fol. 7i.
Aplainnoier. Ibid. fol. 72, R» col. 1.
Aplaner. Rom. de la Rose, vers 926.
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— 67 —
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Aplanier. Livres des R. MS. des Cordel. fol. 149.
Aplaniier. Hist. de Job, eu vers, MS. de Gaignat, fol. 174.
Apl.\noier. Ph. Mouskes, MS. p. 367.
Aplanoiier. Id. p. 508.
/Vplanoyer. Cotgrave, Dict.
Aplanyer. Gace de la Bigne, des Déduits, MS. fnl. 76.
Applaigner. Rom. de la Rose, vers 7302.
Applanoyer. Rom. de la Rose, vers 7802.
Applanyer. Ibid. vers 17267.
Applanieur, snbst. masc. Aplaneur. Ancienne-
meiil, tout homme dont l'occupation étoit d'aplanir
des choses inégales, se désignoit par le mot appla-
nieur. (Voy. Cotgrave et Nicot, Dict.) On observera
néanmoins d'après Nicot, que ce mol ap/)la7iieiir. le
même qu'appUmisseur, a signifié plus particulière-
ment un ouvrier que dans les manufactures de
couvertures et de draps, on nomme encore apla-
neur; par la raison peut-être qu'en faisant venir
avec des chardons la laine aux couvertures et aux
draps, après la première tenture, il les aplanit et
les rend doux à la main. (Voy. ArrL.\NiF,R et Ai-pla-
NISSEUR.)
Applanir, verbe. Polir, rendre brillant. (Voyez
Applanissrmknt et Applanisseur.) On ne trouve le
verbe applanier avec la signification de notre
verbe applanir, qu'en remontant à l'origine de no-
tre langue. (Voy. Applanikr.) Peut-être (\u applanier
n'étant plus connu qu'avec la signification de cares-
ser, flatter, les Auteurs du xvi* siècle éprouvèrent
le besoin du verbe applanir, et crurent en être les
créateurs, avec d'autant plus de vraisemblance
qu'avant eux il paroit avoir été d'un usage très-
rare. C'est relativement aux choses qu'on rend bril-
lantes en les aplanissant, que le verbe applanir a
signifié rendre brillant , polir , comme l'ancien
verbe applanier signifioit polir, rendre doux au
toucher.
Si eut avecques ce Richesse
Ung cadre d'or mis sur sa tresse...
De pierres estoit fort garni
Précieuses, et aphuuj (1).
Rom. de la Rose, vers 1098-1103.
VARIANTES :
APPLANIR. Cotgrave, Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict.
Aplanir. Orth. subsist. — Rom. de la Rose, vers 1103.
Applanissement, subst. masc. Aplanisse-
ment. L'action d'aplanir, de polir. (Voy. Cotgrave,
Bob. Estienne, Nicot et Monet, Dict.) Il paroit que la
formation du iv\\)s,l-AnV\Uipplanissement est relative
au commencement ou au renouvellement de l'usage
du verbe applanir. (Voy. Applanir.)
VARIANTES :
APPLANISSEMENT. Rob. Estienne et Nicot, Dict.
Applanisement. Cotgrave, Dict.
Applanissemant. Monet, Dict.
Applanisseur, subst. masc. Aplaneur. L'ac-
ception générale et particulière à' applanisseur étoit
la même que celle à'applanieur. (Voy. Nicot et
Monet, Dict.) Ainsi la différence de ces deux mots
n'est que dans la terminaison ; l'une analogue à
celle du verbe applanier, et l'autre à celle du verbe
applanir. (Voy. Applanieur.)
Applatir, verbe. Faire tor.:!'^" tout à plat, éten-
dre mort par terre. Le verbe applatir dont on con-
noit l'acception usitée, a signifié faire tomber tout
à plat, étendre mort par terre, ;'( plate terre. « Tant
« de Lombars... t'eurent fl/^/;/«//,s et estendus, que...
« on eust peu dire que guerre atîamée avoit illec
« faict une repeue. » (J. d'Auton, Annal, de
Louis XII, an. 1499-1501, p. 37. — Voy. Platir.)
Applatissement, subst. masc. Aplatissement.
L'action d'aplatir, de rendre plat. (Cotgrave, Dict. —
Voy. Applatir.)
Applaudir, verbe. Rendre favorable. Flatter en
donnant des claques. Quelques Elymologistes
croient avec assez de vraisemblance, que le verbe
simple plaudere, d'où le composé applaudere, en
franç.ois applaudir, est un mot formé à l'imitation
d'un bruit auquel on a comparé celui du battement
de mains, signe ordinaire d'approbation et de
faveur. De \h, notre verbe applaudir a signifié et
signifie encore approuver, favori^-er. Mais on ne
diroit plus qu'un \\omme cowp-AhXe uplaudit son fait,
lorsqu'il le rend favorable, en alléguant des choses
propres à le soustraire à la rigueur de la Loi.
« Thomas dist qu'il l'avoit frappé d'une fourche de
« bois, combien que en vérité il n'en feust riens :
« mais le dist pour aplnudir et coulourer son
" fait. » (Lett. de grâce, an. 1391 — Voy. D. Car-
pentier, Suppl. Gl.'lat. de Du C. h Applausivus.)
Il semble qw'ap/ilaudir, dans le sens de flatter,
désigne le bruit que l'ait la main sur le dos d'un
chien qu'on flatte en lui donnant des claques, en le
frappant légèrement sur le dos. « Il doit approcher
X son limier, Yapplaudissnnt de la main et luy
« donnant queUiuc friandise ; puis l'exciter et par-
« 1er à luy. » (Fouilloux, Vén. fol. 113, V°.)
variantes :
APPLAUDIR. Orth. subsist. - Fouilloux, Vén. fol. 113, V°,
Aplaudir. D. Carpentier, S. Gl. 1. de D. C. à Applausivus.
\pp\sins,ement, subst. masc. Applaudissement.
(Voy. Applaudir.) « Ne cherchons honneur ny ap-
» plausement des hommes, mais la vérité seule. »
(Rabelais, T. II, pag. 178. — Voy. Plaudissement.)
Applégenient, subst. masc. Complainte, action
possessoire. La raison pour la([uelle applégenient,
dans le sens général cautionnement, caution, a
signifié complainte, action possessoire, est que dans
les cas où la Loi aulorisoit l'action possessoire, la
complainte, il fatloit que la Partie complaignante
?>'aplilérieât,(\n'el\e donntàt une caution, sans la-
quelle la Partie adverse restoit saisie. (Voy. Applé-
GER.) Mais la caution de poursuivre le plait, une
fois donnée par le Demandeur en complainte, il
obtenoit la saisine qu'on ôtoit au Défendeur, à
moins qu'il ne donucàt aussi caution, qu'il ne se
(1) De l'existence du participe aplany, il ne faut pas conclure à celle d'aplanir ; la rime a bien pu amener la formation de
ce participe, (n. e.)
AP
— 68 —
AV
contr'applégeât. Ainsi les complaintes, en deman-
dant et en défendant, furent nommées rt/jy^/('Y/'''"<'«s
et conlr'applcfjcniens, parce qu'il y avoit une cau-
tion réciproiiue, au moyen de la(|uelle, la chose
litigieuse éloit séquestrée en main de Justice. (Voy.
Contu'ai'flégement.)
Anciennement, icipplcger, se compla'nidrc d'avoir
été dessaisi de choses dont on ^ avoit été an et jour
« en sezine pcsiblement, c'étoit s'appléger, se
« comphiindre de nouvelle dessaisine. » On venoit
à son Sei;jneuret on lui disoit : " Sire, uns riche
« ou tit>x hons est venus à moy d'une meson, ou
« de pré, ou de vignes, ou de terres, on de cens, ou
« d'autres choses, et m'a desseisi de nouvele des-
« sesine, que je exploitié au seu et au veu , en
« servage de Seigneur jusques ii ores, que il m'en
a a dessaisi à tort et ù force dont je vous pri que
" vous prengniez la chose en vostre main. » Il falloit
dès-lors « mettre pleiges à poursuivre le plet; »
autrement la Partie adverse resloit saisie de la
chose conteutieuse. Si le demandeur en complainte
donnoit caution, s'il « mettoit pleiges bons et souf-
» fisans, selon ce que la querele étoit grande, » sa
Partie étoit mandée par le Seigneur qui lui disoit :
« Cil a mis bons pièges qu'il est dessesi à tort et à
« force de tele chose ... je vuel syavoir se vous
« meltrés pièges au deiïendre. » Dans le cas où le
Défendeur en complainte refusoitde « mettre pièges,
« de se coiitr'ajipU'gev, » le Demandeur avoit la
saisine de la chose conteutieuse, « pour les pièges
« qu'il y avoit mis. » S'il répondoit au contraire:
« Je i mettre bons pièges au deffendre . . . que ce
« est ma droiture, la .Justice devoit mettre jour aus
« deus Parties et tenir la chose en sa main jusques
t> à tant que liquiex que fust, eust gaigniée la sai-
« sinne par droit. » (Voy. Ord. T. I,"p."lâ7 et 158.
— Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, p. 167.)
On pouvoit être dessaisi à tort, sans être dessaisi
à force ; c'est-à-dire que l'injustice dont on se com-
plaignoit en cas de nouvelle dessaisine, n'ètoit pas
toujours accompagnée de violence. De là, Beauma-
noir aura distingué ce qui paroit confondu [ubi
supra, chap. lxv des Etablissemens de S' Louis), en
séparant la nouvelle dessaisine à tort de la nouvelle
dessaisine à force qu'il nomme le casde force. Cette
distinction est d'autant moins essentielle, que le
cas de force étoit au cas de nouvelle dessaisine ce
que l'espèce est au genre; puisque de l'aveu même
de Beaumanoir, « nule tele force n'estoit sans nou-
a vêle desezine. Aussi se complaignoi! on de nou-
« velle dessaisine dans le cas de force : mais lorsque
« forche avoit été fête à le dessaisine , c'est-à-dire,
« lors(iu'on avoit été dessaisi a grant planté de
« gent ou à armes, si qu'on n'i osasl estre pour
« paour de mort, on pouvoit le mettre avant en son
« clain, dans sa complainte de nouvelle dessaisine. »
(Voy. Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, p. 37, 167.)
Alors, la complainte ou l'action possessoire étoit à
la fois civile et criminelle.
Enfin les •< complaintes de nouvelle dessaisine à
'< tort et à force dévoient être applegiées, » par la
raison ((u'eu celte matière il y avoit « condamnation
" de dépens. » Quoique Ragueau, dans son Indice
des Droits royaux , cite en preuve du contraire,
" l'arreslde la Dame de Vierzon contre l'Abbé de
« Foucombaut (1), es Enquestes du Parlement de
« Toussaints 1275, » il semble qu'on n'en doive con-
clure autre chose, sinon que cet Arrêt n'ètoit pas dans
les principes de l'ancienne Jurisprudence établie
par S' Louis. « Quar droit est qui fait autre dessai-
« sir, et il li met sus que il l'a dessesi à tort et à
« force et il perd la querèle, il doit rendre à l'autre
« partie ses coûts et ses despens, pour ce que il l'a
« fet dessaisi!', et pour ce en prend l'en les pièges. »
(Ord. T. I, p. 158. — Voy. Laurière, Gloss. du Dr.
Fr. T. I, p. 55 et 56.)
On avoit les mêmes raisons d'o])server la forma-
lité de Yajiplégement Qldu contr'applégemenl, pour
la « complainte de nouvelle eschoite : » complainte
par laquelle un héritier se reconnoissant dessaisi
par l'usurpateur d'une succession, demandoil à être
mis en possession et saisine des héritages dont étoit
« mort saisi puis an et jour » celui à qui il avoit
droit de succéder. » Quant aucun va de vie à tres-
« passement, et celuy qui doit estre héritier, est
« empesché es choses de la succession, ou en géné-
« rai ou en particulier; s'il veut, il peut
» venir devers le Seigneur, son Seneschal ou Ser-
« gent du Baillage dont les choses sont sujettes,
« dedans l'an après la mort du detTunt du quel il
■< se dit héritier, et déclarer comment il est pro-
« chain parent et héritier dudit deffunt , et à luy
« appartient à venir et eslre l'eceu à la possession
« et saisine des biens dont étoit mort ledit deffunt
« vêtu et saisi puis an et jour .... et suffit s'il dit
« par certains degrés et moyens a declairer en
« temps et en lieu, et que pour ce soy s'applege de
« nouvelle succession ou eschoite, contre tous ceux
« qui opposer ou contr'appleger se voudront. »
(Ane. Coût, de Poitou, chap. xvin.) Lorsqu'il y avoit
« applégement et contr'applégement, la chose con-
« teutieuse étoit mise en main de Cour. » (Voyez
Laurière, Gloss. du Dr. Fr. T. I, p. 55-58.)
En comparant le chapitre xvmdela très-ancienne
Coutume de Poitou avec le chapitre iv du Livre II
des Etablissemens de S' Louis, on pense que « de-
« mander sésine d'héritage » signifie la même chose
que s'appléger de nouvelle eschoite. « Quiconques
« demande sesine d'héritage, il le doit demander
» en tèle manière: Mon père ou mon frère, mon
« cousin ou mon parent morut sesis et vestus,
« tenans et prenans, ploians et desploians tenant
» de Seigneur, et à ilel temps, que il ala de vie à
" mort, et morut en paisible sesine, sans suite de
« nului et de tel héritage, .... et est assis en tel
" sesine, et en tel lieu, et en tel fié , et comme je
« soie le plus prochains hoirs, et de cèle part, dont
« li héritage muet, et cil tienne à tort lesdites cho-
(i) Aujourd'hui Fontgombault, en Berry (Indre).
AP
69 —
AP
« ses, dont je requiex à avoir la sesine; et bien
« m'en enlignageray envers luy, se il le me nie,
« en fesant vers vous ce que je devré, couime vers
« Seigneur, ou Droit; sçavoir mon , se je le dois
« avoir ou non. » (Ord. T. I, p. '2i9.) Pi l'on juge
d'après celle comparaison , que la demande de
« saisine d'héritage « soit ce qu'on nomme applé-
gemcnt de nouvelle eschoite dans la très-ancienne
Coulume de l'oilou, on en conclura que Vapidége-
ment ou coinplahite de nouvelle eselioite n'étoil pas
d'un usage moins ancien que Vapplégenient ou
« complainte de nouvelle dessaisine à tort et à
« force. » Dans le « cas de nouvelle eschoite, »
comme dans celui de « nouvelle dessaisine avec ou
« sans force, » le complaignanl qui s'avouoit des-
saisi, agissoit pour acquérir la saisine et la posses-
sion, ou pour les recouvrer.
Il semble qu'il y avoit aussi dessaisine dans le
cas du nouveau trouble que Beaumanoir définit en
ces termes: « Nouviaus troubles si est se je ai esté
« en sezine an et jour d'une chose pesibiement et
« l'en m'empeesche .... coume se l'en oste mes
« vendengeurs ou mes ouvriers d'une vigne ou
« d'une terre dont j'aurai esté en sezine an et
« jour, ou en assés autiex cas semblables se sont
« nouviau trouble .... et ai bonne action de me
« plaindre si que la chose me soit mise arrière en
" pésible estât. La procédure en cas de nouveau
« trouble, comme en celui de nouvelle dessaisine
« avec ou sans force, devoit se faire selonc l'Esta-
» blissement le Roy. Quand la complainte ou le
« clain seur nouviau trouble estoit fait, le Comte
« ou son Lieutenant devoit contraindre la partie
« adverse à connoislre ou à nier: mes tant i avoit
« de délai que se il vouloit, il avoit jour de voue,
'< et au jour de le veue 11 Quens devoit envoler, et
« se il treuvoit le lieu dessesi , il le devoit faire
« ressesir tout à plain avant que il envoiast nules
« des detl'ences au delfendeur ; et le lieu ressesi ,
•■ les choses dévoient tenir en la main le Comte, et
« puis connoistre la nouvelle dessesine aprez ce
« jour de veue. » (Voy. Beaumanoir, Coût. deBeau-
voisis, p. 1G7.) Peut-être reconnoitra-t-on la pre-
mière trace de celte procédure en cas de nouveau
trouble, dans les Elablissemens de S' Louis, liv. II,
chap. .\u, où on lit: « Quand aucuns est plaintif en
« jugement d'aucune personne qui est venus à son
« droit, et à son fié, ou à sa seignorie, à force et à
« tort d'armes, et.... a portez ou fet porter mes...
« muebles dont je requier que li lieus en soient
« saisis entérinement, et mes dommages amender
« jusques la monstrance de cent livres, etc. »
(Ord. T. I, p. 289 )
Que le nouveau trouble, sous le règne de S' Louis
et du temps de Beaumanoir, fût une « dessaisine
« de meubles ou d'autres choses » dont l'enlève-
ment troubloit la possession d'un an et jour, on
croit en voir la preuve, non-seulement dans la
nécessité de saisir ou ressaisir les lieux, des choses
qui en avoient été enlevées, mais encore dans l'ex-
pression nouvelle dessaisine, que Beaumanoir sem-
ble rendre commune au nouveau trouble, en disant
qu'après jour de vue, les lieux étant ressaisis et les
choses tenues en la main le Comte, on connoissoit
la nouvele dessesine. (Coût, de Beauvoisis, iibi su-
pra.) Il est vrai que dans le cas de nouveau trouble,
le complaignanl ne se disoit pas dessaisi de la terre,
de l'héritage même, comme dans les « cas de nou-
« velle eschoite et de nouvelle dessaisine avec ou
« sans force: » mais il pouvoit se dire dessaisi de
choses essentielles à la possession de ce même
héritage, de cette même terre. Alors Vappléf/emeiit
ou complainte de nouveau trouble n'éloit point un
applégemenl ou « complainte en cas de saisine et
« de nouvelleté ; puisque celuy qui se plaint en cas
« de nouvelleté, » dit l'auteur du grand Coutumier
de France, se doit garder de dire qu'il soit dessaisy
ou despouillé de sa saisine : « car il ne pourroitpas
« intenter la nouvelleté, s'il ne possédoit ou con-
« tendoit posséder. » (Voy. G''. Coût, de Fr. liv. n,
page loi.)
Quelque générale que soit l'opinion oi!i l'on est
qu'anciennement le cas de nouveau trouble étoit le
même que « le cas de saisine et de nouvelleté, » il
est au moins douteux qu'on puisse la fonder sur le
chapitre xxxH des Coutumes de Beauvoisis, où est
défini le nouveau trouble, et sur le chapitre de la
saisine dans les Elablissemens de S' Louis. C'est
néanmoins d'après ces deux prétendues autorités
qu'on taxe l'auteur du grand Coulnmier de France,
d'en avoir imposé, en disant que Messire Simon de
Bucy, Premier Président du Parlement de Paris, fut
le premier qui « trouva et mist sus le casdesaisine
« et de nouvelleté. » (Voy. Gr. Coût, de Fr. liv. n,
p. 15G. — Laurière, Gloss. du Dr. Fr. T. I, p. 274.)
La fausseté du témoignage d'un auteur à peu-près
contemporain de ce Magistrat , paroissant moins
démontrée que la réalité de la dessaisine dans le
cas du nouveau trouble défini par Beaumanoir, on
croit non-seulement que ce nouveau trouble diffé-
roit essentiellement de la « saisine et nouvelleté ; »
mais que le « cas de saisine et de nouvelleté » dont
l'invention est attribuée à Messire Simon de Bucy,
par un .lurisconsulte presque contemporain, n'a
été réellement connu que dans le xiv siècle. On
vouloit alors trouver dans les Loix Romaines qu'on
étudioit avecplusd'ardeur que jamais, tous les prin-
cipes du Droit François et les moyens de le perfec-
tionner. C'est probablement en abusant d'un prin-
cipe de ces mêmes Loix Romaines, principe d'après
lequel « la volonté sulTisoit en certain cas pour
« conserver la saisine, " qu'on établit pour maxime
générale que toute espèce de dessaisine, soit de
choses essentielles à la possession d'un héiitage ou
d'une terre, soit de l'héritage ou de la terre niême,
ne seroit plus qu'un nouveau trouble sans dessai-
sine. Quelle que fût la manière dont on avoit été
réellement dessaisi, on agissoit non pour acquérir
ou recouvrer sa possession, mais pour y être main-
tenu sans trouble ; et cela, sous prétexte qu'on étoit
resté saisi par l'effet de la seule volonté. On ne
connut plus dès lorsque « Vapplégement ou corn-
AP
— 70 —
AP
« plainte de saisine et (le nouvelleté, « parce que
non seulement dans le cas de nouveau trouble,
mais dans « ceux de nouvelle eschoile eî de nouvelle
« dessaisine. » les Parties réciproquement deman-
deresses et défenderesses, ne se disoient que « trou-
o blées dans leur saisine ou possession. Quoiqu'en
« cas de saisine et de nouvelleté, cliascun fust
« demandeur et défendeur, l'un contredisant à
« Taiitre en toutes choses, toutefois ceiuy qui avoit
« faict la complainte, étoil proprement demandeur
« original et luy falloit grâce et à l'autre non ....
« Cefuy n'estoit mie légitime contradicteur qui con-
« tendoil son adversaire posséder; mais convenoit
" que luy mesmes se dist possesseur ... Il conve-
« noit que chascun se dist saisi et empesché. »
(Voy. Gr. Coût, de Kr. p. 151. — Laurière, Gloss.
du Dr. Fr. T. I, p. 274-ti7C.)
Il sembloit qu'on lut d'autant plus fondé « à s'ap-
• piéger, à se complaindre de saisine et de nouvel-
a leté dans le cas de nouvelle eschoile, qu'en
« conséquence de l'axiome coutumier , le mort
« saisit le vif, l'usurpation d'une hérédité paroissoit
« ne pouvoir anéantir la saisine de celui à qui
« l'hérédité apparlenoit. « Aussi la très ancienne
Coutume de Poitou, qu'on a déjà citée en preuve de
dessais'nie dans le cas de nouvelle eschoile, laissoit-
elle ù l'héritier l'option de se dire saisi ou dessaisi.
« S'il veult, il s'en tiendra pour saisi, par la Cou-
« tume générale du royaume de France, le mort
« saisit le vif, et se peut complaindre en cas de
« saisine et de nouvelleté, des troubles et empes-
« chemens fi luy faits : ou s'il veult, etc. » (Ane.
Coût, de Poitou, chap. xvni. — Voy. Laurière, Gloss.
du Dr. Fr. T. I, p. 57 et 58.)
On croit avoir suffisamment expliqué comment
« toute espèce de dessaisine » n'étant plus regardée
que comme un <• nouveau trouble sans dessaisine,
a la complainte de saisine et de nouvelleté fut
« substituée même aux complaintes de nouvelle
« eschoile et de nouvelle dessaisine. » Il seroit
inutile de répéter pourquoi dans plusieurs Coutumes
on les nommoit applégemens et eontrapplégeineiis.
(Voy. Gr. Coût, de Pr. liv. ni, p. 415. — Boutoiller,
Som. rur. lit, xx.^i, p. 198. —La Thaumassière, not.
et observ. sur les Coût, de Beauv., p. ilO. — Lau-
rière, Gl.du Dr. Fr. T. I, p. .55.) Ces applégemens et
contf applégemens, dans le cas même où il s'agissoit
de choses mobiliaires, dilïéroient des adveux et
contr'adveux applégés; et la princip;ile différence
consistoit « en ce que dans l'adveu il étoit question
« non-seulement de la possession, mais aussi de la
« propriété, au lieu que dans Vapplegement il n'étoit
i jamais question que de la possession. » (Laurière,
Gloss. du Dr. Fr. p. 26. — Voy. Advou.)
Quant à ïanplégement de refus de plege , ou
« coiupri.n.L^ faite au Supérieur de ce que l'infe-
« rieur n'avoil voulu ordonner main-levée , ea
« baillant caution ; c'étoit ce qu'on nommoit applé-
'< gement privilégié dans l'ancien Style d'Anjou. »
En effet, il semble qu'en définissant Vapplegement
de refus de plege, Ragueau ait défini le titre d'ap]ilé-
gemenl privilégié, où on lit : « Si aucun Seigneur
« de fié a prins et saisi en sa main aucune chose
« tenue de luy pour aucun cens, ou devoir, ou
« autre cause, le Sujet qui tient icelle chose peut
« venir requérir délivrance du sien o plege, et offrir
« à le bailler à son Seigneur... et le plége présent
« offrir à le piéger. Et si ledit Seigneur, ne ses
» Officiers ne lui veulent faire délivrance, ne faire
« raison, le Sujet peut faire applégement contre le
« Seigneur qui luy a fait tort, force, et de nouvel
« depuis an et jour en ça, en détenant le sien... à
« tort et sur refus de plege. « (Ane. Style d'Anjou,
lit. ii'Apj)lége)n.eiU privilégié. — Voy. Du Gange,
Gloss. lat. T. V, col. 569.)
\j' applégement sur saisine brisée étoil aussi une
espèce A'applégement privilégié. « Si aucun brise
« la saisie d'un Seigneur, il pourra faire applége-
« ment sur saisine brisée, contre celuy qui aura
ce exploicté par-dessus sa main, ou le faire convenir
« à sa Cour ou par-devant son Suzerain, pour en
.. avoir réparation et amende. >> (Coût, de Lodunois,
au Coût. gén. T. II, p. 543.)
En général, Yapplér/ement privilégié, distingué
de Vapplegement simple, étoit « de Seigneur à sujet,
« comme sur le refus de plege, sur saisine brisée
« et en autres cas qui portoient soixante sols, ou le
« meuble d'amende. » (Ane. Coût. d'Anjou, citée
« par Chopin, art. lxix de la même Coutume.)
Les applégemens simples étoient de sujet à Sei-
gneur, comme de « voisin à voisin, en simples
« exploits qui ne portoient que loy d'amende comme
« en succession et exploit de domaine. ■> (Chopin,
ubi supra. — Laurière, Gloss. du Dr. Fr. T. I, p. 58
et 50.) « Les applégemens simples, faits de subjet
« à Seigneur, comme de voisin à voisin, ne portent
« aucune exemption d'iceluy subjet ne de ses hom-
« mes. » (Coût d'Anjou, au tout. gén. T. II, p. 67.)
Il est évident qu'on abuse de la signification de ce
mot, toutes les fois qu'on nomme applégement une
complainte sans caution. « Nos Praticiens ont donné
« sans distinction le nom a'applégement ù toutes
« les complaintes. » (Laurière, Gloss. du Dr. Fr.
T. I, p. 58. — Voy. Appléger.) (1)
(1) Vapplâijenirnl ou plégerie est, comme la caution, un contrat assurant l'exécution d'une obligation, donnant au
créancier une garantie personnelle. Au commencement du moyen-âge, le débiteur principal engageait sa propre personne
par un contrat dit nhtwxicitio. On promettait aussi, dans la caulio, l'ulejussio, vadium, de travailler pour le créancier jusqu'à
complet paiement de la dette.
A l'époque féodale, Vapplegement conserve son caractère de personnnlité contraire au principe actuel, qui est celui de
l'hérédité. Cependant, les héritiers devaient acquitter la dette, si la personne recevait commandement de payer au moment
de mourir. Les femmes pouvaient cautionner, mais en renonçant au bénéfice du sénatus-consulte Velleien.
Quand les parties ne justifiaient pas de ta possession d'un immeuble, le demandeur fournissait une caution garantissant
la solvabiUté, au cas de condamnation (sa «isdddo de expeush rc/iciendis), et le défenseur déposait une somme qui restait
en justice jusqu'à la fin du procès. Si Von agissait au nom d'un tiers la caution attestait l'approbation du mandant et
prenait le nom de satisdatio de restituendo. (n. e )
AP _ 71 _
AP
VARIANTES :
APPLÉGEMENT. Gr. Coût, de Fr. L. m, u 415
Aplegement. Cotgrave, Dict.
Appleigement. Ord. T. I, p. 157, note b.
Appléger, verbe. Donner caution, cautionner
be complaindre, intenter une action possessoire
h.t^u^"?T'^'}} ' '^''^1"^ ^'^"s les Cliamps de
bataille et les Cours de Justice, ou sengageoit à
poursuivre une alTaire criminelle ou civile et à
satistaire aux peines d'une accusation fausse ou
d une injuste demande, le signe assez ordinaire de
cet engagement étoit un .. pan de robe, un sanl
« ploie. » De là, on disoit « ploier un gage, ploier
«une amende , .. e.xpression dans lesquelles on
croit apercevoir le principe de la formation et de la
signilication des verbes appléger, piéger et plévir ( 1 )
(Voy. PLEGp, Plévir et Ploier.) Ainsi piéger ou aimle-
^fninnPo"'™" P'""^f ^^^ ^ donner' cauliSen
ploiant gage ; par extension, donner gage, donner
caution, quelles que fussent la nature du gage etS
manière de le donnei' pour caution des cliSsIs aux-
quelles on sobligeoil de satisfaire.
dPmnnlii'^'î'.'^'î ^°''' "l'P'^'J'^r un adveu, une
demande, cetoit en cautionner la justice, donner
caution pour l'amende, dans le cas où fadveu se"oit
dec are injuste. .< En chose mobiliaire cbet SvSû
« et contr adveu; et qui en déchet, après ce qu'H
« sols » (Goût, de Tours, au Goût. gén. T. II n 25 \
On a observe ailleurs, que V adveu applégé différoi
àelapplegement. (Voy. Aitlegejient.) "'"«'oit
nm.P^iL ^"'^°'''^ relativement à la caution donnée
pour le payement dun fermage, pour rexécution
d un marche, pour les suites de l'accusation ou 32
a dénonciation d'un crime public ou délit partmu
lier, qu on disoit « appléger une ferme, un marché-
« appléger une accusation, une dénonciation ou
« denoncement. » \oy. Ord. T. III, p. 437.- Coût
Gi^£^rb;:w^ït^s^ètï;^^p^^^^"'-^^-'
L'accusation et la dénonciation, dans les Coutn-
mesd Anjou et du Maine, ubl supra, n'éloient Ss
éfoU S'tu.' H ™*^'"'^ ''''''' P"'^'ï"^ raccSsâtfon
etoit laite par la personne que le crime ou le délit
interessoit particulièrement, et la dénonciation ni.
•acï eu Zn''! '^"'J' Jénoncialeur, comme
idtcusaieui, donnât caution ou i)iéoe sulTi^ifinf
« Quand la dénonciation ou le déSëmén éto i
« duemenl^ applégé , on meltoit le deZnc | en
I ?e rilvoirrï^^^'^"}'^""!^"^'''' nn îu îro'cès
ce qui avoit heu seulement lorsque le crime
: Zf,V^'^- P,"'"/- '^oiporelle : car lorsque le déîu
« éto t prive, le dénuncié évitoit la prison en bail-
; lan plege suffisant de fournir et obéir"', droit „
(Laurière, Gloss. du Dr. Fr. T. I p'ïiVonteut
voir dans le Style de Touraine, cbap. xm, imprimé
à la fin de l'ancienne Coutume, quelle éto t Ta'^nïS!
cedure de ces dénonciations, trop favon lies à îâ
haine et à la vengeance, et que pour la i- Silli é
des citoyens, le Parlement a sagement prôscSes
Il ny avoit peut-être point de moyen, point dp
manière de cautionner les engagemens publ éson
particuliers d'une personne, qu'Sn né dé^ g âuï
disau que cette personne éU>it r^^^S ï'eSè
oit iu'eT' fT.'i.r'^ '^"'""^ ''»""■« 1^ Stiïn, !
« 10 ma£JsJ'di'dS;i^;:èîSc^^;sj;i
« qui soient jurez, et sermentez et S; %S df
« ^ute loyauté et bonne renommée et aussVdé viS
•■ marcs d'argent fin. » (Ord. T. m, p 587 fcon
" rat.ers. face applégier et faire ^seremintnï:
(Ibï"p ' loy ciumenl eulx menront ledit coure"Sgr»
^ R^' y- > " ^°"^ '''^ons. . . ordené que noz
« Receveurs se applégassent en la Chambre de Sos
« Comptes par certaine manière, et que il ne
loT?.Tvàt)''' ''"'*'"' '''"'"" '''^"'"'' "
On a vu sous le règne de Louis XIV le Francni.:
encore trop jaloux de cette espèce dé supS?té
que donne un tempéramment fort et robus e se
I faire gloire de vaincre un rival dans c2s appelf
bachiques dont on trouve l'ancienne manierépniS
T I l^n. i ?'??f,"'"-. " (^^'"^<^' Capit. Reg. Fr^
1.1, col. 394.) L obligation d'obéir à un appll où
i hivrÔlff'' '""'^ ""'''' -^^ P^-»" ^1"^ l-amitil étoi"
?,i nP vn n'.''"^ P^"' '""^■•^'" l'honneur d'un am
"ï ion Pn hn .?,? "' P°"''«'^ ^^n^^^n^e à cette obli-
gation en buvant, on croyoit devoir Ymmlêaer 1p
cautionner; c'est-ù-dire boire pour ffi, comme
étant sa caution. Il est probable qu'un dé nos m
ciens Poètes faisoit allusion à cet usage dans u,iê
^izs^r ''' ''"' ^"™*^ ''' -^«^"^
L'oste n'ot pité, ne mercy ;
Trie de ses vins et ses biens ;
A run boit là, à l'autre cy ;
Es voyrres ne demeure riens.
Je boy a toy ; je le retiens,
iJist l'un à l'autre : S'aptà/ié
N'eusse esté, je fusse noyé.
Eusl. Desch. Poés. MSS. p. 365, col. 2 et S.
On ajoute que du temps de Pasquier, il étoit
encore permis à un homme qui dans une partie de
débauche buvoit moins que les autres, ., de prendre
« un second pour le deffendre et jo/t^'ôrfr contre tous
^^B'BiSBsB^^f'"^'^-'^^'^'^
AP
— 72 —
AP
. ceux qui le semondroient de ^oire » Ces à
l'io^norance el à Toubli de cet usage qu il faut att i-
bùl; 1 aZs qu-on faisoit de la significalion du verbe
«m,U;îr ouW(''/n'; toutes les fois qu'abstraction
?a^,e dé toute /e dé cautioi. autre que la parole de
celui nu-o 1 iuovo.iuoit i^ boire une santé.on repon-
doU au buveur qu Favoit portée, •■ je ^ons applegc,
ri vous «W. » (Voy. Pasquier, Rech L. vui,
; ^52) on 1 it «lue Marie Stuarl, Reine d Ecosse,
s'éti^nt n se à table, le soir de la veille de sa mort,
! bu sur la fui du soupper, à tous ses gens, leur
: commandant de la piéger : ^^^ «J «?,^:f f^^
« se mirent à genouil, et meslans leuis larmes
c, avecque leur vin beurent h leur maistresse. » [H.
ihiri 1 vr D 509. — Voy. Plégée.
Il seroU inutile de rappeler ici les d.fférens cas
où ilfalloi s-appléger, ou donnçr caution, en se
2ïm, iSS it, en intentant une action possessoire
qÏ ùtîise de dire que relativement a l.dee de
cette caution donnée ou non donnée, le veibe
s'«ï^;/S a signifié en général, intenter une ac ion
pSs/oire, sicomplaindre. (Voy. Applegement.)
VARlAîsTES : ^ TT r/Q
APPLÉGER. Oïd. T. Il, p. 284. - Coût. gén. T. II, p. ^.
— Col grave, Dict. ,_- .,
APLÉGER. Ane. Coût, de Bret. fol 157 V
Aplégier. Eust. Desch. Poes. MSS. p. àbo, col. à.
expressions dans lesquelles appoincl désignoit
comme substantif une relation entre les choses et
te temps où elles se disoient et f .«^'^^oi^^ • " Le
„ jeune homme voyant son apoin , di , etc » (ConL
de la Reine de Navarre, T. 11, p. Ib6.) <■ ïl^^.euieni
rasseoir leurs garnisons en plusieurs et diverses
: JaVues d'icelle, pour après \leur «pomc . ^.
,< l'assaillir alors universellement^ « (Du Bellay,
Mém. liv. IV, fol. 131. - Cotgrave, Dict.)
VARIANTES :
APPOINCT Cotgrave Dict. Uv. iv, fol. 131, R«.
Apoinct. Id. ibid. — Uu iieuay, meiu. ""■,.' .p^
ApoiNT Contes de la Reine de Navarre, T. II, p. m
Appoint. Cotgrave, Dict. - Le Jouvencel, Mh. p. 302.
Annoinctation, subst. féminin. Tvégociation,
ar~o"ement. Significalion analogue à cet e du
ferbëXÏÏ'S négocier, accommoder, etc. (^oy.
wf™ 1 a gardé laditte ville d'estre pillée,
! nconnie, necmnposée, qui sera une très-bonne
.. apuncliation, et en nos présences api s ^eser
, nipnt ptc » (Lett. de Louis Xll, T. 1, p. !'<>■} .
Onconnoit l'histoire de Perrin Dandin qui n «p-
co?«" S n-accoinmodoit jamais un procès sans
nho Cl lès Parties h boire ensemble par symbo e de
■ .=.?iii.^inn neùi les Taverniers de son village
[voy. Rabelais, T. m, p. t218 et 220.)
VARIANTES :
APPOINCTATION. Rabelais,. T. III, p. 220.
APUNCTiATioN. Lett. de Louis XII, T. I, p. 17;}.
Anooincté, participe. Qui a une gratification,
nnin une haute paye. On observera qu autrefois le
livpment comme aujourdhui Ion emploie le
Se du verbe traiter,, et ^^e Pa^, ^«f^nsei
nn inilé étoitun appoincte. » Le Ro\ et son tonseu
eSent que en. . prenant trefve entre vous et
futTouiT^^^^^^^ à quelque bon appointe M..^
„ pTov mon maistre seroit Irès-joyeulx. » (Letl.de
T •; y\i T I mo-e 89 ) Il n'y a d'ailleurs aucune
SeS esseSieSelaus L significations du
P'rvïpi?lS)Sent dans un sens relatif à celui
d'.?«ÏÏ«cï ordonner, commander etc.. que les
nSrs ou Soldats exempts de tout service mili-
ïïipphors^e combat, se nommoient Appointes. Ils
d^ie^S^o/n'e,y ^f^^rS'SpSS
,i.-.p oi"itificatioii. une haute paye, ue la, le pai uuipc
Appoincter.)
Appoinct, adv. adj. ctsuhst.^ A point à propos
Qui est à propos. Instant d agir ou de pailer à
nrnnos à sa coiumodite, avec succès.
^ En se fiSrant dans l'espace successif du temps
uifîoiîtltfe auquel on vise, PO"/ ,^,Sé ef 1 on
d'agir ou de parler à propos, on f.f'î^'gi e et 1 on
désigne encore tout ce qui est fait a piopos, en
ÊnîyS ^t fait à point. ^ est évident ,jue 6^^
nrénosition à réunie au substantil yjo^Ht/; , s est
formé -ancien adverbe appoinct. (\oyez PoinctO
Gouverner leurs voilles, tirer cordes appoint et
l Si encrer et desencrer, si que besoin est. »
(Le Jouvencel, ms. p. 302.)
Ne deglosez rien auUreraent que o^>po»!^ ^^
niiPiniipfois cet adverbe tenoit lieu d'adjectif et
• ^ c.]? m Pst •'. nronos, la qualité d'une chose
JgaS a2" oS . à f éToù l'oil est POur l'instanU
pou le moment. « Des '^l'0^f^^;i»\/^«Srr tran-
„ I nv la dispute nous en doit estre du loin reiran
l chle- autrement, SI vous en levez les deffences.
: sSretk'ndra un chacun en celle Loy se on le
a pours de ses humeurs ou de ce qu il \eiia luy
: esïi le plus expédient et apoint, pour parvenir
l f son intention. .. (Pasquier, Rech. p. 899.) .
Fnfin aSr ou parler relativement au point, à
l'instàS où on pouvoit le fane à propos, relalive-
mpnt aunoinl, a l'élal où l'on devoit èlie pour le
S à sa' Snodilé et avec succès, c'éloil agir ou
- parier, à son appoinct, envoyant son appoint. »
AP - 73 -
AP
VARIANTES :
APPOINCTÉ. Lett. de Louis XII, T. I, p 90
Appointé. Oudin et Monet, Dict.
Appoiiictement, siibst. masc. Exemption de
tout service militaire, hors le combat. Coup de
poing. On connoitra les significations d'ff»»o/?u'/^-
meiit, par l'explication de celles d-appoincter
Quelque nombreuses et variées que soient les
acceptions du substantif, il n'y en a pas une en
gênerai qui ne soit commune au verbe, et par con-
séquent relative h l'idée de point ou de pointe
(Voy. Appoincter.) ^
Si Vappoinclement étoit une exemption de tout
service militaire, hors le combat, c'est que cette
exemption appartenoit à Thonneur d'être apnoincté
commande pour les actions où il falloit un couraoè
et une expérience plus qu'ordinaires. (V. Appoincte )
Autrefois, maltraiter une personne, la mettre en
mauvais point dans un état à faire compassion,
cétoit misérablement appointe?- son corps. (Vovez
J. Le Maire, Illusl. des Gaules, p. 249 ) il est très-
possible que dans un sens analogue, appnintement
ait sig7iilie mauvais Iraitement; mais dans rexnres-
sion charger à-appontclcmenl, c'est-ù-dire chai-o-er
de coups de poing, on ne voit qu'un abus de la
consonnancedej9o;H^aveclemot;wmf/. ., Pensans
« que ces charretiers se voulussent mocquer d'eux
« commencèrent à les charger û'appoinctcment et
« prenans leurs armes qui estoient leurs esguillo'ns
" f ^ ''l'eut crocheteurs. » (Bouchet, Serées, p 278 )
" f;^" .'^f/'^'i'^^.ayaiit bruit contre un de ses frères
« H 1 attend a 1 yssue de matines, et le surprenant
« en quelque coing du dortoir, le charge cVappoin-
« tement a la faveur des ténèbres; et à ce prSpos
'< despuis on a dit, dangereux comme le retour de
« matines. » (Garasse, Rech. des Rech. p. 850 )
VARIANTES :
Apointement. Modus et Racio, MS. fol 160 V»
Appointemant. Monet, Dict '"", v .
Appointement. Le .Touvencel, MS. p. 60 et Si') - Mathi^,,
Catrerau^^^^^:^];,.^;:;-^-)-;;»^ '^'- '^^^^
Appoincter, verbe. Arrêter à un point, fixer à
ce point; négocier, traiter, accommoder, arranger
régler, juger, raisonner, etc. Diriger vers un nolnt'
mettre a ce point; mettre en étal,nnjustei annré ër'
préparer armer, équiper, approvIsionneî^Ke:
tenir, panser, ordonner, commander nommer
tromper, attraper, etc. Rendre pointu! tèrmher en
Fixe '-dS""" P?'"^l"' '' ^'^™'"^'' e" Ste"
n' ' " "Ser, présenter, opposer la pointe des
armes. Attaquer, se prépare.- à attaquer Mettre
pointe contre pointe, opposer
étanfi~T'i *'"'^''"* nos vues et nos actions,
eidnt legarde comme un pont fixe aiinnpl nn
s arrête, le verbe appointer signifie t^'aiTête, m
point, en fixant les clauses d'une négoc ation d'un
traite, d un accommodement, d'un .arrangement
I ^'^•^" Considéroit que. . . l'ennemy auroit entrée
I >' pour empiéter sou royaume. . . . s'il naimointoit
-avecques ledit Empereur. ,. (Du Bellayf S
pi; J n A-} " :^ ^y ('PPOinté avec Madame de
« Belleville, de la place de Montagu; et Dlanchefort
^■,^''^^T^^" PJ'o'?'^''? '"^ possession. ,. ^Brantôme,
nnl. 1 ^' p- ^f-^ " L^ ^"^y ^e^'''' appoincter avec-
ques eulx pour le passaige et pour les vitailles
'• nécessaires. » (Le Jouvencel, ms. p. 439 ) .. il e«toit
-XirT'lt'p^SSsV *'''"'' '^'' ^ '^' ^'"^
Il y avoit et il y a encore dans la procédure
diverses espèces d-appointe,nms dont Lau.S
semble rapporter les significations particuHèrès à
1 Idée générale d'arrêter, fixer à un point. Ouôi qu'il
en soit, appointement en général étoit un higenen
préparatoire, un règlement en Justice sur une
affaire, pour parvenir à la juger par rapport On
designoitun règlement, un jugement de ce genre
en disant que les Parties étoient appointes i
Mre appointées en droit, appointées au Conseil
appointées contraires et en enqueste, etc. (Voyez
Aresia Amor. p. 48, 108, IIG, 130, 158, 197, passim
- Lauriere, Gl._ du Dr. Fr. - Mcot et Monel, Dict )
11 semble (\n appointer en jugement et dehors
w n! i"^^'^ ^''^.^ '^^ s=^»s formes judiciaires, juger
les Parties, ou les accommoder. .. Que personnes
« sages et dignes de foy... sachent faire justice et
« apointer h^ parties et les causes en jugement et
«dehors. .. (Ord. T. 111, page 081.) On ne voit pas
d ailleurs pourquoi le verbe appointer n'auroit ms
fZ'ii"; "r J^ê'^^^ent fléfinitif, un jugement par
equel on fixe le point où commence et finit le droit
des Parties. Aussi disoit-on en ce sens: « Après
" parties ouyes, et après ce qu'elles furent ««-
" ^^^^/"'^f« en droict, le Viguier appointa que les
" di es lettres et reliefvement ne seroyent point
" interinees et qu'il n'y avoit point matière de
•■ rescinder ledict contraict, . . De laquelle sen-
-' tence. . . ha appelle en la Court de céans. et
« tout considéré, la Court dit qu'il ha esté bien dict
" et appoinete par ledict Viguier, et mal appelle
nnof /«^f/'^i^"^"^ ^' l'amendera. » (Arest. Amor.
page 4s et 49.)
Lorsqu'on jugeoit de ses affaires par soi-même
lorsque par son propre jugement, par le raison-
nement on fixoit le point d'où il falloit partir pour
en assurer la réussite, c'étoit appoijiter de ses
aiiaires. « Les assiégez et enclos en aucune forte-
" resse doivent estre soigneux de. . . savoir par
« subtilz moyens et bonnes Espies, la convine de
" leurs ennemis; car par ce peuent ilz mieulx
« appoineterâe leurs affaires, par quoy ilz ont bon
'. couraige, ilz peuent savoir l'eure que leurs adver-
L^nJ;^! Tof"* ^"'' ''^"'" ^^'''le. » (Le Jouvencel,
On ajoute que relativement encore à l'idée d'un
point fixe auquel on s'arrête, le verbe appointera
signifie arrêter, fixer à certaine somme le salaire
la gratihcalion, l'entretenement de quelqu'un, le
lixer lui-même à certaine somme. « Un Prédica-
10
AP
— 74 —
AP
. leur... appoincté... à cent escus pour prescher
« tout le caresme. » (Boucliet, Serées, liv. m, p. '■22A.)
Le point auquel on se fixe, est souvent le point
vers lequel on a dirigé sa vue, son action. Ainsi,
le verbe apiiohUcr, soit au propre, soit au figure,
sigiiifioil ajuster une chose à une autre, diriger
l'une vers l'autre, comme vers un point auquel on
vise. « Les Arbalestriers. . . n'avoient point remis,
• n'appoincté autres quarreaux au poinct de leurs
« arbaleslres. " (Monslrelet, Vol. \, chap. xxiv, f° 19.)
Cloistriers qui tes dras et ton pié
Dou point de l'ordre as despointié,
Et au point dou siècle apoinlié, etc.
Miserere du Recl. de Moliens, MS. de Gaignal, fol. 222, R" col. 1.
Plus droit qu'ele puet l'i apointe;
Et Trubert ne fet pas le cointe (i) :
Tout li a dedens embatu.
Eslruberl, FaLl. MS. du R. n° 7996, p. 85.
Pour les preudomes acointier,
Si vorrai mon sens apointier
A biaus mos trover et reprendre.
Dits de Baudoin de Condé, MS. de Gaignat, fol. 304, R' col. 1.
L'usage, l'effet pour lequel on ajuste, on apprête,
on prépare les choses, étant vu comme un point
vers lequel on les dirige, on disoit en ce sens:
» Prist le fromage qui estoil appointié pour faire
« laditte tartre, etc. » (D. Carpentier, Supp. Gloss.
lat. de Du Gange, au mot Ajipitnctare; tit. de 1399.)
« Tel poison 1^2] sçay faire et appointer, que pourtant
« que luy en donnez à boire et que après luy en
« beuvez,... sur ton le riens serez aimée de luy. »
(Ger. de Nevers, part, i, p. 131.) Appointerun cheval
automate, comme celui dont il s'agit dans le Roman
de Cléomadès, c'étoit en ajuster les ressorts, le
mettre à certain point, le mettre en état de faire ses
mouvemens ordinaires.
Quant son cheval ot apointié,
Vers le chastel l'a adrécié.
Cléomadès, MS. de Gaignal, fol. 18, R° col. 3.
Quelle que fût la manière d'ajuster, d'apprêter,
de préparer les choses, de les mettre à leur point
en les dirigeant vers l'usage, vers l'effet qu'on avoit
en vue, elles pouvoient être désignées par le verbe
appointer. Aussi l'acception en étoit-elle si générale
qu'on disoit : « battre et appointer les gerbes de
« bled ; appointer un pont sur une rivière ; appointer
« un vaisseau pour naviguer; appointer un ^a\e-
« froi, etc. » (Yoy. Nouv. Coût. gén. T. I, p. 416. —
Yigil. de Charles Vil, p. 96. — Matthieu de Coucy,
lïist. de Charles Vil, p. 684. — Percef. Vol. II, f" 1-22.)
C'est toujours dans un sens analogue à celui de
mettre en état, préparer, qu'appointer son corps ou
s'appointer signifioit s'armer, s'équiper, s'approvi-
sionner, etc. parce qu'en s'appiovisionnant, en
s'équipanl, en s'armant, on se mettoit en état de
combattre, de s'embarquer, de voyager, etc. (Bout.
Som. rur. page 883. — Percef. Vol. III, fol. 64, etc.)
En équipant une femme, en l'entretenant de robes
et autres choses nécessaires t\ sa parure, on lui
prépare les moyens de s'ajuster, de se mettre en
état de paroitre et de plaire. De là, on a dit :
Et de faict l'a appointée
De chaperon rouge, au surplus
De corset de soye, de baudrier,
De robbe : que voulez-vous plus ?
Coquillarl, p. 54.
La signification S'appointer étoit absolue, lors-
qu'on parlant d'une personne préparée à bien faire
une chose, mise en état de la faire à son aise , avec
plaisir, avec décence, on disoit qu'elle étoit appoin-
tée. « Le Roy Palamedes qui esloit notablement
" appointé , pour ce qu'il sçavoit leur venue , s'en
« vint à rencontre d'eulx noblement accompaigné
« de Chevaliers. » (Percef. Vol. III, fol. 77, R° col. 1.)
Le soir vint, il fault préparer
Le souper et le vin tirer.
Monsieur fut scis et appoincté ;
Et dist-on benedicite.
Coquillarl, p. 148.
On prépare la guérison d'une blessure qu'on
panse ; et cette guérison est le point, l'état où le
Chirurgien veut 'mettre son blessé, le point vers
lequel il dirige l'effet de son opération. Ainsi, le
verbe appointer signifioit panser. » Bertran pria à
« sescompaignons qu'ilz le feissento7.'0«Hf(?rparle
« Syurgien. » (Triomphe des neuf Preux, p. 499.)
« Matias icellui Regnault... porta en la maison de
« son maislre pour Vapointier Ensuite il fina
« vie par mort. » (D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat.
de Du Cange, au mot Aplare ; tit. de 1402.)
La chose dont on projette l'exécution, étant com-
parée à un point vers lequel on dirige la volonté,
l'action de ceux à qui elle est ordonnée , l'on aura
dit appointer dans, le sens d'ordonner, commander,
nommer pour faire une chose. <> Le Roy avoit
« fl;;/;o/)i/J que les Templiers feroientl'avantgarde. »
(Joiuville, p. 41.) « Fist barrer son logis et fut
« appoinctié que au plus matin ceulx qui estoient
0 nommez, iroient devant et descouvriroient le
« pays. » (Le Jouvencel , ms. p. 338.) « Le Roy
« appoincta certain nombre de gens pour venir au
« lendemain devers luy. » (Ibid. p. 412.) Peut-être
l'acception particulière du participe appoincté est-
elle relative ii l'ancien usage de nommer, comman-
der, ordonner des gens d'élite pour une action pé-
rilleuse, un assaut, etc. (Voy. Appoincté.)
Si le mensonge et l'artifice étoient les moyens
par lesquels une personne étoit dirigée, mise au
point où l'on avoit en vue de l'amener, le verbe
appointer signifioit tromper, attraper.
Ainsis ly ment, ainsis l'apoinle ;
Ainsis le déçoit et confont ;
Ainsis pluseurs femmes le font.
Eust. Desch. Poës. MSS. p. 517, col. 1.
. . . Son moyen de appoincler estoit tel :
Quant il sçavoit sa mère aller à messe,
Il s'en venoit comme une grande asnesse, etc.
Faifeu, p. 24.
On croit avoir assez clairement démontré que ces
significations, auxquelles on pourroit en ajouter
plusieurs autres, ont entre elles une analogie dont
le principe est l'idée générale d'un point physique
ou moral auquel on vise.
(1) Vient peut-être ici de cunclari : hésiter, (n. e.) — (2) A ici le sens de sa racine potio, boisson, breuvage. (N. E.)
AP
75
AP
C'étoit relativement à l'idée de pointe, que le
même verbe appointer signifioit rendre pointu,
terminer en pointe. (Voy. Nicot et Monel, Dict.)
Aucuns font leur dars ferier,
Et apointier les fers des lances,
Pour miex entrer es connoissances.
G. Guiarl, MS. fol. 329, R".
Il étoit neutre, lorsqu'en parlant d'une chose qui
se terminoit en pointe, on disoit avec comparaison :
Elle va en appointant comme une poire. (Voy.
Nicot, Dict.)
... On voit naistre aux champs une flame légère,
D'un bien petit de feu que la foie Bergère
A laissé par mesgarde au chaume craquetant,
Et ses ondes lancer au ciel, en apoiniaiil.
Pocs. de Perrin. fol. 7G, Vv
Quelquefois, la signification ^'appointer étoit
fixer, diriger, présenter la pointe des armes, l'op-
poser. (Monet, Dict.)
On sait que dans les joutes, les Chevaliers cou-
roient les uns contre les autres, la pointe des lances
fixée et dirigée vers leurs adversaires. De là, le
verbe appointer aura pu désigner l'action de pro-
voquer à la joute et de s'y préparer, en fixant et
dirigeant la pointe de sa lance vers celui qu'on se
proposoit d'attaquer. « Joustay à quatre Chevaliers
« sans blasme recevoir ;.... mais le cinquiesme me
« porta à terre.... Après ce appointa mon compai-
•1 gnon de la jouste, etc. » (Percef. Vol. Il, fol. 70.)
Peut-être a-t-on fait encore allusion à la pointe
des traits avec lesquels on feint que l'Amour attaque
un cœur, lorsqu'on a dit :
Jusqu'à Biauvais fai une pointe :
Si me saluej à cuer haitiè,
Le Chastelam à cui s'apoirite
Amers qui le fait sage et cointe.
Et debonère et afetié.
Fa))l. MS. du R. a' 7218, fol. 61, R' col. 2.
Enfin , le verbe appointer aura signifié par com-
paraison, opposer l'une à l'autre deux personnes ou
deux choses, comme l'on oppose pointe à pointe
deux lances, deux épées: opposition qn appointer
désigne spécialement en termes de Blason, lorsqu'en
parlant d'épées, de flèches dont les pointes opposées
se touchent, on dit qu'elles sont appointées. (Voy.
Monet, Dict. — Dict. de Trévoux.)
Cette comparaison, si l'on en croit l'auteur du
Nouveau Dictionnaire de Droit, est le principe de la
signification de ce verbe, en termes de procédure.
Comme les prétentions des Parties qui plaident,
sont, dit-il, toutes opposées, le verbe appointer,
dans le sens propre mettre pointe contre pointe,
s'est pris au figuré pour donner un règlement en
Justice. Quelque favorable que paroisse être îi son
opinion, l'expression « appointer les Parties, par
o faits contraires, ou les ft/i/;o/Kto' contraires, » il
est possible que même en ce cas d'opposition, l'ac-
ception d'appointer soit relative à l'idée générale
d'arrêter, fixer à un point. (Voy. Appoinctement.)
VARIANTES :
APPOINCTER. Le Jouvencel, MS. page 67. - Monstrelet,
Vol. I, fol. 19. - Percef. Vol. II, fol. i22. - Rabelais, T. III,
p. 218. — Âresta Amor. p. 97. — Coquillart, p. 148, etc.
Apointer. Estrubert, Fabl. MS. du R. n» 7996, page 8.5. —
Ord. T. Itl, p. 681. - Le .louvencel, fol. 89. - Eust. Desch.
Poës. MSS. p. 517, col. 1, etc.
Apointier. Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 18. — D. Car-
pentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au mot Aptare.
Appoinctier. Le Jouvencel, MS. p 338.
Appointer. Orth. subsist. — Le Jouvencel, MS. p. 384. —
Percef. Vol. II, fol. 70. - Lauriore, Gl. du Dr. Fr. - Cotgr.
Nicot et Monet, Dict.
Appointier. D. Carp. S. Gl. 1. de Du Gange, à Appunctare.
Appoincteur, subst. masc. Négociateur. On
sait que l'histoire de Perrin Dandin et de Tenot
Dandin son fils, est une plaisanterie de Rabelais
très agréablement imaginée pour ridiculiser cette
espèce de gens qu'on nomme « Avocats sous
« l'orme. » L'activité du fils, égale à celle du père,
pour appoincter, accommoder les procès, n'est pas
d'abord aussi heureuse. 11 s'en plaint à Perrin Dan-
din qui le console et l'encourage par l'espérance
de mériter comme lui l'honneur et tiltre ù'appoinc-
teur irréfragable, pourvu que fidèle à ses leçons, il
ne songe jamais à faire û'appointement, d'accom-
modement qu'au moment où les Parties lasses de
plaider, s'aperçoivent que « leurs bourses sont
« vuides. » (Voy. Rabelais, T. III, p. ^O et 221.)
On n'avoit pas encore avili la signification de ce
mot appoincteur, lorsque dans un sens relatif à
celui du verbe appoincter, négocier, on disoit :
« Si fust chargé de ceste chose, pour aller en Alle-
« magne, pour traiter ce mariage, un moult sage
« et vaillant Chevalier.... et esloit nommé ce Che-
« valier Messire Simon Burle, sage et grand
« appointeur. » (Froissart, Vol. II, p. 75. — Voy.
Appuincter et Appmnxtation.)
variantes :
APPOINCTEUR. Rabelais, T. 111, p. 218 et 219.
Appointeur. D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du
Gange, au mot Appointamcntum.
Appointir, verbe. Rendre pointu, terminer en
pointe. Devenir pointu, se terminer en pointe.
La signification d'appointir, active dans le DicL
de Cotgrave, est neutre dans Oudin, Dict. Elle étoit
encore neutre , lorsqu'on disoit : » La forme du
« pied du lièvre... aiguë et faite à la semblance
» d'une pointe de coùsleau... vient tousjours en
« appointissant. » (Fouilloux, Vén. fol. CG, V°. —
Voy. Appoincter et Appointuser.)
variantes :
APPOINTIR. Cotgrave et Oudin , Dict.
Apointir. Cotgrave, Dict.
Appointon, subst. masc. Arme pointue. Proba-
blement une espèce de poignard.
Un appointon en la main destre
Et une boiste en la senestre
Tenoit: mais Vappointon rauchoit
Derrière li, et concheloit.
D. Carpentier, S. Gl. lat. de Du Canjô, au mot Pitnctorium.
Appointuser (s'), verbe. Devenir pointu, se
terminer en pointe. Par comparaison, aller en di-
minuant, en se rétrécissant. (Cotgrave, Dicl. —
Voy. Appoi-ntir.)
Apportion, participe. Divisé par portions et
avec proportion, partagé. Il sembleroit qn'apportion
AP
— 76
AP
fût un adverbe composé de la préposition à réunie
au substantif por/ioH, el qu'étant par conséquent
de même espèce que Tadverbe appoinct, il a pu,
comme cet adverbe, tenir lieu d'un adjectif, et
signifier partageable , divisible par portions. On
croit néanmoins qnapportion est le participe du
■verbe apportionner . (Voy. Ai'I'ortionner.)
En se conformant à la prononciation sourde de la
"voyelle e supprimée souvent dans la finale du par-
ticipe anglois apportioned ou apportmid, Littleton
aura prononcé et écrit en françois apportion pour
apportionné, c'est-à-dire divisé par portions, par-
tagé. « Le gard des terres ou tenements durant li
« nonage d'un enfant... sont chateux realx et poyent
« estre apportions et severs. » 'Tenures de Little-
ton, fol. 73.) 11 paroit que ce mot désigne plus spé-
cialement l'idée de proportion, lorsque le même
auteur dit: ■> Le bornage et féaltie... ne sont pas
« annuals services, et ne poient eslve apportion ;
« mes l'escuage poit et serra apportion, solon que
« l'afférence et rate de la terre, etc. » Id. ibid. p.
49. — Voy. Apportionsément.)
Apportionnement, subst. masc. Division,
partage en proportion des produits d'un fonds.
Signification analogue à celle du participe appor-
tion. (Skinner, voc. forens. exposit. au mot Appor-
tionment. — Voy. Apportion et Apportionnement.)
Apportionnement , adverbe. Proportionné-
ment. C'est dans un sens relatif à l'idée d'une divi-
sion proportionnelle, qu'on a dit : <■ Si par un
« mesme contract se treuvent plusieurs pièces
« vendues, aucunes desquelles soient de l'ancien
« du vendeur, autres de son acquest, ou toutes de
« l'ancien et partie de l'une de ses lignes, partie de
« l'autre, le lignagier de chacune ligne, venant
o à retraire ce que'meut de la sienne, y est receva-
« ble en rembourceant au prorata les pris et loyaux
« cousis, distribution d'iceux faite à l'arbitrage du
« Juge sur cbacun , apportionnement à ce qu'il
« emportera desdites pièces. ■■ l'Cout. de Lorraine,
au Coût. gén. T. II, p. 1069. — Voy. Apportion.)
Apportionner, verbe. Parlager en donnant
portion. C'est la signification A' apportionner dans
les Coutumes où l'on partage les enfans ou les frères
puinés, en leur donnant certaine portion d'béritage,
ou certaine somme d'argent proportionnée à "la
valeur de cette portion coutumière. « Au cas que
« les fils puisnez el filles n'auroient esté rt;j/;o)7;i9H-
« ne::: et dotez pendant la vie de leurs père et mère,
« el que leurs dits père et mère ne leur auroient
« rien laissé en testament, l'aisné qui aura succédé
« est tenu apportionner les puisnez, fils ou filles
« raisonnablement, en or ou en argent, ou héritage
« à son choix, etc. » (Coût, de S' Sever, au Coût,
gén. T. II, p. 692.; « Es maisons nobles, vulgaire-
« ment dits héritages gentioux, de plusieurs enfans
« d'un mesme mariage le fils aisné succède univer-
« sellement à ses père et mère décédez sans faire
« testament ;... lequel fils aisné est lenu apportion-
« ner tous les autres fils ou filles raisonnablement
« en argent, ou héritages à son choix, qui sera
« doresnavant, s'ils sont trois puisnez ou plus, la
« tierce partie desdits héritages nobles;... el s'il
« n'y a trois puisnez , mais seulement deux ou un,
« leur portion sera la quarte partie,... ou l'estima-
' tion d'icelle. » (Coût. d'Acs, ibid. p. 673.)
La portion d'héritage des puinés, ou l'estimation
en argent de cette portion, étant vue, non comme
un partage coutumier, mais comme un moyen de
subsister, comme un appanage en général, lé verbe
appanagersignifioitla même chose qn apportionner.
Enfin, comme un appanage, de quelque nature qu'il
soif, est une portion de bien, assignée à quelqu'un
pour sa subsistance, le verbe apportionner signifioit
réciproquement la même chose qn'appanager. On
a dit en parlant de la Reine Brunehaud, que Chil-
péric son époux « la relégua en la ville du Mans,
" apportionnée de quelque pension annuelle pour
<■ son vivre. » (Pasquier, Rech. liv. v, page 399. —
A'oy. App.\nager.)
Appouvrir, verbe. Appauvrir, faire pauvre.
Etre appauvri, être fait pauvre, devenir pauvre.
(Voy. PouvRE.j On peut voir dans Mcot, Dict. au mot
Appauvrir qui subsiste, comment de l'adjectif
paiiper on a fait pauvre, paovre, paoure, paure,
poHvre, poure; et de l'adjectif frangois, le verbe
appourir, apourier, apouvrer, appouvrir, apaurier,
appaourir, appaouvrir, appauvrir, dans le sens
actif faire pauvre. (Voy. Cotgrave, Rob. Estienne,
Nicot et Monet, Dict.;
La signification active est celle d'appauvrir :
signification qui pourtant semble n'avoir pas été si
particulière aux orthographes de même terminaison,
que jamais elle n'ait été commune aux orthographes
apouvrer, apaurier, etc. « Sont les pais gastez, les
« marchandises anullées, et l'Eglise mou\[ apouvrée.
« Si vous prie et conseille le Roy que, etc. » (Hist.
de B. du Guesclin, par Menard, p." 383.) « Ont esté...
« grevez, domagiez el apau)iez par extorsions de
« très-grandes usures. » Ord. T. II, p. 86.
C'est avec raison qu'un ancien Poète historien,
parlant de l'anéantissement du pouvoir souverain
dans le xii« siècle, disoit :
Moult iert li règnes descreuz,
Apouriez, et decheuz
De sa hautesce souveraine,
Puis la mort au Rov Kallemaine.
G. Guiart, MS. fol. 11, R".
11 est possible que, surtout en ce dernier passage,
la signification du participe apourié soit neutre et
relative à celle du verbe apourier, ou apouroier,
être fait pauvre, devenir pauvre.
Cil qi n'a riens ne puet apourier.
Ane. Poés. fr. MS. du Valic. n' liOO. fol. 143, R'.
Riche gent érent à merveille ;
Mais Deable qui tôt tems veille
S'entremist moU d'ax engigner,
Tant qu'il les fist apouroier.
Fabl. IIS. de S' Germ. fol. 36, R* col. 2.
VARIANTES :
APPOUVRIR. Xicot et Monet, Dict.
Apaurier. Ord. T. II, p. 86.
.\POURiER. Miserere du Recl. de Moliens, MS. de G. f" 219.
AP - 77 -
Apouroier. FaW. MS. de S- Germ. fol. 36, R» col 2
Apouvrer. Hist. de B. du GuescUn, parlienard/p '383
Appaourir, Appaouvrir. Nicot, Dict ' ^
Appourir. Rob. Estienne et Nicot, Dict.
Appovrir. Cotgrave, Dict.
Appouvrisseinaiit, subst. mase. Annauvris-
semeut. (Cotgr. Nicot et Monet, Dict. - V. Appouvbir.;
VARIANTES :
APPOUVRIS.SEMANT. Monet, Dict
Appourissement. Nicot, Dict
Appovrissement. Cotgrave, Dict.
Appréhender, verbe. Prendre, arrêter, faire
arrêter. Prendre, l'ecevoir une idée. Comprendi-e
connoitre évaluer, juger. Prévoir, craindre. On
sait qu en latin apprehendere signifie prendre avec
]a main, et que relativement à celte signification
générale apprehemler en françois, désignoit paru"
culièrement une prise de corps, lorsqu'on disoit
appréhender quelqu'un, Vapprehender au corps-
expression encore usitée en style de Palais « Nostrê
« grand Bailly, comme souverain Officier peut
« appréhender tous criminels et malfaicteurs et
« SI le f,ergent de nostre dit Bailly... appréhende
' an corps tmcnnè malfaicteurs en la terre d'un
o-én 't T n -«'i' *'^''V" ^^T'- '^^ "aynault, au Coût.
seil. 1. J, p. /8I. _ Voy. Al'1'REIlE.NDITlON.)
Lest par extension du sens propre qu'on a dit
Srv'utZ'Z ^"^^r^'«"- (Voye. d2s Accord ,'
n ?iô V ' '^°/- '^' ^°- - ^"^"'ts de Strapa. T. II
il '".V^y- A^EiiENsioN.) Le sens llguré dans
lequel on dit qu'on a eu vent d'une chose/ semble
avoir que que analogie avec celui de l'ex preSn
appréhender qnelqwnn du rcuL le prendre^ 'arrêter
sans information précédcile, le faire arrêter sm'
une forte présomption autorisée par n pSence
ou parce qu'un Juge peut avoir appris de la corn:
^a'ue le"B^';:'n '' *^^ «l"*^ 1'^" dif EommunémeTit
. Tent S-J""! seigneur peut appréhender du
' vent doit s entendre a l'égard de l'étrano-er des
" I»f' -f"',"'^'''"'*^^»'^-- lesquels le BaUy peS
« appréhender sans informations précède Ues ou
•< lesquels on trouve actuellement délinqS s n'um
" que ce fussent des habitans et bo3 Ss^Su
iîin Ict^'"?'^ '^'^^ véliémentes présomplons
et ind ces, ou la commune famé ou renommée '^
îcaT^^'^r^'' 1' quelque délict digne delà piSn ?
(Coût, de Gand, au nouv. Coût. ién. T. I p looi )
. Quand la prise de corps étoit justiflée par mVi
information qui changeoit en conviS, Ta nié
eTT,Zr'"''' ^"^''^^"elle on avoUfai prendre
et aireter un malfaiteur, on disoit ou*il étni»
appréhendé et convaincu du fait? On ne peu
« condamner personne à la mort pour délicî sUe
«• nestquil soit appréhe^idé et convainc dû /a't
« lï 'c'SS;^;fV ''' ""'T'' tenues cône
Peut-être aussi que dans un s^us relalifà fi'
ception générale et figurée d' appréhl.S f,prenSe
AP
idée et connoissance d'une chose, en juger d'après
cette Idée et cette connoissance, on auni dit d'uni
personne reconnue et jugée coupable d'un déUt
qu elle en etoit appréhendée ? '
La preuve qu'appréhender, signifioit fiaurément
prendre l'Idée d'une chose en général c'est cmVn
parlant de l'entendement humahi, on d soit «' sSS
« premier office. . . est de recevoir simplement et
(sagesse de Charron, p. loo.)
La simple appréhension de l'idée des choses est
ie l'iSan,^'"*^^ °" '"'% '^'^^P''^"'^ en sScupan
et d'en i, Ipp n",' P,''''' '" '"°>en de lesconnoitre
et cl en juger. Delà, les acceptions (ï appréhender
comprendre, çonnoitre, évaluer, juger.'^tef (Monet;
iJict. — \oy. Appreiiendre.) '
Enfin le verbe appréhender, dans le sens dp
craindre, désignoit et désigne encore l'efflf d'une
connoissance anticipée, de cette prévoyance inquiète
avec laquel e on juge les choses d'après idée
facieuse quon en prend, avant même qu'elles se
réalisent. (Monet, Dict. - Yoy. Appréhensif )
VARIANTES
APPREHENDER. Orth. snbsist -
Apprehander. ironet, Dict.
Coût. gén. T I, p. 781.
Apprehenditiou, subst. fém. Prise de corps
bigni, cation relative à celle du verbe appréhender
prendre arrêter. ^Cout. de Ilaynault, au Coût gén'
1. 1, p. /82. — ^oy. Appréiie.nder.)
ma'^rf''Tpn'{,^"i^*'^' /'''■''''■• ^'^""^''^ en étendant la
main. Tenir dans la main. Prendre l'idée d'une
chose, la retenir dans sa mémoire. Prendre une
1 habitude, çonnoitre par habitude, s'accoutun"er
Reprendre, relever, faire çonnoitre'. Faire pSre
1 idée d une chose, la faire çonnoitre, enseio-ner
instruire, etc. Accoutumer. Il est évident que le
•fi n ., 'F°".'''"P'"^"'^'"e, est une contracthjn du
P pnf^'rî'.f "''• ^''^- P^"" ""e espèce d'asservis"
semen à 1 orthographe étymologique, que dans le
siècle de l'érudition, l'on aura écrit appréleZre-
en transposant Ve final, appréhender {i)%yezAp'.
PREllE.NDER.) ^ ' ^ .jv.^. ^1
n,.?ii^n'' ''"^^ ^^'^ aujourd'hui la différence de signi-
nPP, ,p ^"^e apprendre et appréhender, on a la
preuve que dans un sens très-analogue à celui du
avPr'l-f^^f'''"r^"''f" '^''*" 'W^'^endere, prendre
avec la mam, le verbe apprendre signifioit ancien-
nement prendre eu étendant la main. Tel étôi! saSs
doute le sens d'apprendre, lorsqu'on personnifiant la
Mors, moût os bien apris le monde.
De toutes partz à la reonde,
ru lieves sor toz ta beniere, etc
Fabl. .MS. du R. n- 7615, T. I, fol. 103, V col 1.
«/J!!;.^''/ens'«nJl paroît avoir signifié tenir dans
sa main la chose qu on a prise.
s2SS9aiïs^^Sïî«"=^-
AP
78 —
AP
Envis lait-on cou qu'on aprent (I).
l'rov. rur. et vulg. US. de N. D. n" 2, fol. H. R' col. *.
Au figuro, ce même verbe apprendre signifioit ce
qu'il signilie encore aujourd'liui, prendre l'idée de
ce qu'on veut ou doit connoitre, en retenir l'idée
dans sa tôle, comme l'on retient dans sa main une
cliose qu'on a prise, en prendre connoissance
d'après cette idée retenue dans la mémoire par la
force active de l'entendement humain. (V. Apprise.)
Droiz dit que cil fait à reprendre
Oui ne set, ne ne vuet aprenctre.
Fabl. MS. du R. n' 7615. T. I, fol. 110, R- col. ).
Nuns n'enpire de bien apronlrc.
IbiJ. T. II, fol. 165, V- col.l.
C'étoit la même signification, lorsqu'en employant
comme substantifs le verbe apprendre et le participe
apprenant, on disoit :
.... Je n'ai mie si chier
Le séjor d'Arras, ne la joie,
Que Vaprendre lessier en doie.
Fabl. .MS. du. R. u- 7218, fol. 250, V' col. 1.
Maistre qui désensaigne,
Son aprenant méhagne (2).
Prov. du C-do Bretagne, VS. de S. Gerni. fol. lU, V col. 2.
Dans cette expression apprendre à lettres, la pré-
position à, en latin ad, étoit d'autant plus inutile,
que le rapport de l'action de prendre une idée, une
connoissance, à l'objet de cette action, étoit suffi-
samment indiqué par la préposition initiale du
verbe apprendre, qui d'ailleurs avoit le régime qu'il
conserve encore.
Et puis cou k'il ot XL ans
Fu il à laitres aprcndans.
Ph. Mouskes, MS. p. 416.
On ajoute que l'acception de la préposition fran-
çoise à, étoit relative à celle de la préposition latine
ab, quand pour indiquer la personne de qui l'on
apprenoit une chose, on disoit qu'on l'apprenoit à
cette même personne ; expression dans laquelle à
est de même signification que de, usité comme
aujourd'hui, dans notre ancienne langue. « Si
« covient ke... nos apregniens del Saint des Sainz
« mansuetume et la grâce de comune vie, si cum il
« mismes dist: apremiz à mi ke je suis sueys et
« humiles de cuer ; en latin, discite à me, quia mitis
« sum, et humilis corde. » (S' Bern. Serra, fr. mss.
p. lOi. — Id. ibid. Serm. lai. col. 777.)
Dans le cas oîi l'idée prise d'une chose et retenue
dans la mémoire, en opéroilla connoissance parfaite
et permanente, on disoit que cette chose étoit
apprise du tout, ou tout au long, qu'elle étoit apprise
par cœur. L'apprendre par avant ou auparavant,
c'étoit en avoir une connoissance anticipée, en
prendre une idée que la prévoyance réalise dans
l'avenir. (Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict.)
Quoique ce verbe apprendre, dont l'acception
figurée n'a presque point varié, signifie encore
l'habitude qu'on prend de certaines choses aux-
quelles on s'accoutume en lesconnoissant par cette
même habitude, on ne désigneroit plus, 1° une
personne qui connoîtroit l'agrément d'une compa-
gnie à laquelle elle se seroit accoutumée, en disant
qu'elle a appris compagnie :
. . . Qui a compaignie aprise,
Bien sai de voir que petit prise
L'aise qu'il a sans compaignie.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 213, R' col. 1.
2° Une personne qui ne seroit pas accoutumée à
l'air d'un climat, en disant qu'elle n'en a pas
appris l'air :
... Le mal plus griement l'a pris.
Pour l'air qu'il n'avoit pas apns.
G. Guiart, MS. fol. 36. V-.
3° Une personne qui ne connoîtroit pas la pauvreté
faute d'y être accoutumée, en disant qu'elle n'a pas
appris la pauvreté. « Grant cruauté seroit que l'en
« la laissast. . . désespérer par poureté que elle
« n'auroit pas aprise. >• (Beaumanoir, Coût, de
Beauvoisis, chap. xxx, p. 103.)
A° Une personne qui connoîtroit le plaisir d'être
riche ou à son aise, et s'y seroit accoutumée, en
disant qu'elle a appris ses aises, qu'elle a appris la
richesse. « S'enclinoyeal à la guerre poures Cheva-
» liers... qui avoyent a/;pm leurs aises et souste-
« noyent leur estât sur la guerre. » (Froissart,
Vol. IV, page 111.)
. . . Qui f( (tpris la richèce,
Moult i a dolor et destrèce,
Quant l'en chiet en autrui dangier,
Por son boivre et por son mengier.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 299, R- col. 1.
5° On ne désigneroit plus enfin une jeune per-
sonne dont les membres délicats ne sont point
accoutumés aux blessures, en disant que ses mem-
bres n'ont pas appris qu'on les blesse. " Si bel pié et
« ses bêles mains... n'avoient mie apris c'on les
» bléçast. " (Fabl. ms. du R. ir 7989, fol. 77. — Voy.
Apprentl're et Apprisure.)
Quelquefois l'acception figurée du verbe reprendre
étoit celle d'apprendre; de façon qu'apprendre le
vice signifioit reprendre le vice, le relever comme
on relève une chose en la prenant avec la main,
faire connoître le vice, en faire prendre une idée
odieuse en le présentant aux yeux de l'esprit,
comme on présente à ceux du corps une chose
qu'on lient à la main.
Li Philosophe tel estoient,
Que à nule rien n'entendoient,
Fors qu'à bien dire et à aprendre
Les malvès vices, etc..
Bible Guiot, MS. de N. D. a' E. 6, fol. 89, V° col. 1.
Encore aujourd'hui, apprendre une chose à quel-
qu'un , c'est lui en faire prendre une idée qu'il
retienne dans sa mémoire, lui faire connoître cette
chose en lui en présentant l'idée, en l'enseignant,
en l'inslruisant, etc. (Voy. Apprenture et Apprisfre.)
Mais on ne diroit plus, apprendre quelqu'un les
Sciences, ou tout simplement l'apprendre, pour
enseigner ;\ quelqu'un les Sciences, l'instruire dans
les Sciences. « Glergie vint en France par Alcuin....
u Dui moines Escoz aprenoient les gens sapience
« pour l'amour Nostre Seignour. » (Chr. S' Denys,
(1) C'est à regret qu'on laisse ce.... (n. e.) - (2) blesse, lèse.
AP
— 79 —
Reç. des Hist. de Fr. T. V, pa^e 263.) « Nous
:i^^^p>Jftmes, et il sot moult retenir. .. (Rom de
Dolopathos, Ms. du R. n- 7534, fol '^94 ) ^
On ne supprimoil pas toujours la prénosition à
qui orsqu'elle ne désignoit point la pSnne qu'on
doï 'on ^tr;? 'nf ''^""^'' quelqifefois"lT ?hose
aont on 1 instruisoit, comme en cette exoressinn
; apprendre une Nymphe aux ébas Sour '
ainreS-nt,^''^'' 'i'''^ PI"' ancUnnem n
•eKstîrV^.fi?^^^^ d'une chose, » c'étoit aussi
îa'S^uSre Siilr ''''"''' ''^'^^e de cette chose,
0 lui ara encanteours,
Et moult divers engingneors
yui de tous maus Vaprendront.
Lucidaires, MS. de Gihert, fol. 24, V°.
On disoit d'une chose qu'on pouvoit connoîtrp
sans instruction,qu'elle » nefaisoit mie à «Sï !
- Rom. de Rou, ms. p. no'. - Voy A Îre 't. )
difoiis qui mslruisenl de la v&ilé te Ms
En celui termine meisme
Ou faus devise Uopra»c/,'es,
be boisa h Quens de Flandres.
G. Giiiart, MS. fol. 232, R".
. . . Envoya li Quens de Flandres
A Furnes, ce dit li aprendres
Id. fol. 236, R».
AP
Apprins ou Aprins, participe. Annris insfmif
accoutume. (Rob. Estienne, NicotetZIt dS? '
Apraujnet, s pr. Qu'il apprenne. (S- Bern s fr )
jPrcdnet, subj prés. Qu'il apprenne. (IdibTé f '^
Apregniens. subj. pr. Que nous apprenions rid \
ApnncioU indic. imp. Apprenoit. fCléomadi'"? S
Am'igeH, subj. pr. Qu'il apprenne L des Ro s ^
(Rom Soton!:i£- P'-^t'/PPr^'"*^^^^' enselfn.fmS
^Sis ï> ' S-'i^P- '^"^' '^PP^'t. (S- Bern. S. r.)
^^/çs/.iu's, subj. imp. Que vous apnrissie? aÂ
Apustrent, ind. prêt. Apprirent. (Athis, ms. ^54.)
APPRÉHENDRE. Colgr^ûS' '
ÏT.Z-Àl\tl ëîcT- '''''■ '^ ^- ^^-"- T. n,p. 1391.
pS^C^^Siaî^!^^i|'-^^«r'^°'-'^'P'"^-
Aprendre Rom. de Rou, MS. p ilo '
APRENRE. Beaumanoir, C. de B^eaiv oisis, chap. xl p 22.
" de ce quon ht aux histoires Romaines de cpnv
" qui avant le jour des batailler^ss "ni? ,^^
« moient aussi' P-'ofondément que sf c'estoif [;
« lendemain de leurs nopces : je S- LSll st
" S?pir'''"'"''f- ;(-^'^^'»-deMontlîiT I p'?|9'
Appréhender et APPREHENSION.^ Prevoii . (Voyez
avoir certaines ciuaîte-s b Slfes^'on "rïl'' '
parlant de fumiel^ qu'il est .S".fl^^2^^^ ''' ^"
L'habit de pris,
Fard bien compris,
Font d'un laid corps le parement •
Ainsi que les Heurs du pourpris '
Reparent le fumier appns ^
De puyr natureUement.
J. Marot, p. 200.
. . CONJUG.
(coî5£rp."?5i'?S,!"£5î:?."|^r---
Appréhension, subst. fém Prise snisip- nr.-o^
..o,mnéMaistreWlïï"„lt';v S' Sis" ,,ra*î2
..e ™ u..g, ,.■„, „,. .,,„,.. * ;»= 20.., on „„„v. <ie,a : . Mal, ., .p.j, y „„ .„^,, ,^^^ ^ ^^ _^^ _ ^^^ ^^ ^^^ ^^^
AP
— 80 -
AP
de comprendre, la compréhension. (Cotgrave, Rob.
Estienne, Nicot et Monet, Dict.)
On a désigné même par ce mot appréheimon,
l'idée plus ou moins vraie, la connoissance plus ou
moins certaine qu'on prend des choses, le jugement
qu'on eu l'orme d'après cette idée, cette connois-
sance. " 11 eut une appiélwnsion que c'étoient ses
« enfans. » (Nuits de Strapar. T. I, page 300.) « La
« femme de S' Hilaire... prit une vive appréhension
« de la béatitude élerneiie et céleste. » (Essais de
Montaigue, T. I, page 350.) « Les hommes ont eu
« apprélicnsion de Dieu par les astres qui nous
« a|)paroissent. » (Amyol, Moral, de Plutarque, T. II,
p. -218. - Voy. Monet, Dict.)
Qu'il suffise d'avoir uidiqué ailleurs par quelle
analogie ce mot apprélienslon, qui désigne encore
l'idée qu'on prend d'une chose, a signifié et signifie
crainte. (Voy. Appréhender et Appréhensif.)
Apprentis, adjectif subst. masc. et féni. Qui
apprend une chose, qui est encore à l'apprendre.
(Voyez Ari'HEiiENDiuc.) On voit que l'ortliographe
apprenti, préférée aujourd'hui à l'oiihographe ap-
prcntif, n'est pas nouvelle dans notre langue. L'une
et l'autre ont fait oublier l'ancienne orthogiaphe
apprentis, dont se forme si naturellement le subs-
tantif ap[irentissage qui subsiste (1). Encore aujour-
d'hui, un apprenti est quelqu'un qui apprend un
métier, ou autre chose en général; quelqu'un à qui
il faut apprendre ce métier ou cette autre chose.
Mais on ne diroit plus avec Montaigne : « Je ne
« me prens gueres aux nouveaux livres, pour ce
« que les Anciens me semblent plus pleins et plus
« roides; ny aux Grecs, parce que mon jugement
« ne sçait pas faire ses besognes d'une puérile et
« apprentisse intelligence. » (Essais de Montaigne,
T. II, page 136.)
On a voulu sans doute désigner le chant naturel
des oiseaux, ce chant qu'ils n'apprennent point de
l'art, lorsqu'on a dit :
A chanter furent ententis
Les oyseauLx, non comme aprentis,
Ne aussi comme non sachans.
Rom. de la Rose, vers 692-694.
Anciennement, l'acception d'apprentis éloit si
générale, que pour signifier qu'on étoit encore i\
apprendre des nouvelles de quelqu'un, on disoit
qu'on en étoit aprentis.
En demandoit par tous pays;
Mais aussi en ert apprentis
Que il fu au commencement.
CléomaJès, MS. de Gaignat, fol. 46. R* col. 1.
VARIANTES :
APPRENTIS. Cléomadés, MS. de Gaignat, fol. 46, R" col. 1.
Apprentie. Monet, Dict. au mot Appris. — D. de Trévoux.
Apprenti. Orth. subsist. — Rob. Estienne et Nicot, Dict.
Apprenty. Nicot, Dict. au mot Apprenti.
Aprenti. Rom. de la Rose, vers 693.
Apprentisse. Essais de Montaigne, T. II, p. 136. — Dict.
de Trévoux.
Apprenture, suhst. féminin. Enseignement,
instruction ou coutume, habitude. SignificaUons
relatives à celles du verbe apprendre, instruire,
accoutumer. (Voy. Appréiiendre.) « Peu de gens est
« qui soint hardiz par nature ; mais mains devien-
« nent hardiz par art et par apprenture. « (Instr.
de Chevalerie et exerc. de Guerre, ms. fol. 12, R». —
Voyez At'RENE.ME.NT.)
Apprise, subst. fém. Apprentissage. Connois-
sance d'une chose apprise. Espèce d'Enquête.
Entreprise. Ce mot aprise ou aprinse, dans le sens
d'apprentissage, signifioit l'exercice par lequel on
apprend un métier, par lequel on s'y instruit sous
les yeux d'un Maître. « Pourveu qu'il ait servi trois
» ans en bonne aprise, etc » (Ord. T. VIII, p. 513.
— Voy. Api'RisiRE.)
Il semble qu'être de Vaprinse d'un métier, c'étoit
être né dans un métier dont on a fait l'apprentissage
en s'y exerçant dès l'enfance. « Se il est filz de
« Maistre et de la dicte aprinse, il ne payera, etc. »
(Ord. T. IX, p. 45.)
On a dit d'une personne qui avoit appris une
langue, qui en avoit la connoissance, l'intelligence,
qu'elle « étoit de cette langue par aprise. « (Voyez
ArpRÉiiENDRE.) « Encores que je ne soye, par nature,
« ou par apprise, de la langue d'Alemaigne; si
» ay-j'enquis, à la vérité, de ceste généalogie, le
« plus qu'il m'a esté possible. » (Méin. d'Ol. de la
Marche, p. 12. — Voy. Apprisure.)
L'espèce d'enquête qu'un Juge faisoit d'office
pour apprendre la vérité d'un fait, étoit une apprise.
(Voy. Du Cange, Gloss. lat. au mot apprisia, col. 590
et 591. — Lalirière, Gloss. du Dr. fr.) L'Enquête en
général différoit de Vapprise, en ce que Yapprise,
qui se faisoit d'office et sans le consentement de
celui qu'on soupçonnoit d'être coupable, ne portoit
pas, dit Beaumanoir, fin de querelle. » Quant aucun
« est pris pour soupechon de vilain cas... l'en doit
« demander à cheli qui est pris, se il viout atendre
« enqueste dou fet S'il ne veut atendre l'en-
« queste, adonques i appartient aprise; che esta
« dire que li Juges de son office doit aprenre et
« enchercliier dou fet Mes à che que il fust
« condempnés i^ mort par Vaprise, il convient bien
« que li fès fust sens clers par plus de trois tesmoins
« ou de quatre, si ([ue li jugement ne soit pas fait
« tant seulement par l'aprise, mes pour fet notoire.
« La différence qui est entre aprise et enqueste, est
« tele que enqueste porte fin de querele, et aprise
>< n'en porte point : car aprise ne sert fors de tant
« sans plus que li Juges est plus sages de la besoigne
(1) Les deux formes apprentif et apprentis ont dû être contemporaines. Dans Berthe aux grans pies (vers 1), on trouve:
« Aprentif jugleor et escrivain marri ; » et dans le Livre des Métiers d'Et. Boileau, du xiir siècle, comme le poème
précédent: « Il peut avoir tant d'apprentis et de vallés comme il li plaist. » (Edition Depping, p. 18.) Le féminin était
a/j/j/(,')i/ife; cet archaïsme est encore employé par quelques personnes. — Voir sur l'uppre»*;, YEssai sur l'organisation de
ioulustrie à Paris aux XIII' et XIV' siècles, art. de G. Fagniez. — Bibliothèque de l'Ecole des Chartes, 1874 (p. 479 à.
497). (N. E.)
AP
— 81 -
« quil a apme. » (Beaumanoir, Coût, de Beau-
VOisis, chap. XL, p. 221. _ Voy. Ord. T. I, p. 575 )
Dans la signification d'entreprise, ce mot aprise (1)
étoitlememe qu'emprise. » Les Zassons... s'avan-
« turoyent pour gaigner, par bonne façon ; voire
« jusques h gaigner et emmener de nos gens. De
« telles petites prises et aprises firent... sur nostre
« compaignie Plusieurs chevaux et 4ns
ml^r d'ol* ^I'^^m'""',"' P^^'" ^'^"^^^ emprises, elc. !
VARIANTES :
AP
APRisîf Ord^xT^n'.^'r'- \=''- ^H ^ot^pprisia, col. 590.
Apri'kse. Ord. T l5; l%7 ''"""''■^' '^'°^^- *•" ^r. fr.
Apprisure, siibst. fém. Apprenlissa^-e Ensei
gnement, instruction, etc. Coutume, 1 abii&^^^^^
APPREHE.NDRE et APR.soN.) On a dit au premier sens :'
■ • Il firent leur apresure
U armes, sans nule mespresure.
Pli. Mouskes, MS. p. 823.
Dans le second sens, une histoire à'apresnre
étoit une histoire où Ton pouvoit s'inslru re une
personne de bêle «/.,ï'.«r/étoit une perso ne beii
p. ddj. — Ane. Poet. fr. mss. av. 1300, T. II, p. 70G.)
Amours nélie et escure
Le cuer k'éle a bien saisi.
Vaillant le fait et hardi;
Est de courtoisie apresure ■
Biens, sans li, n'est fors que painture.
Ane. Poés. fr. MS. du Vatican, n- U90, fol. 94, R..
C'est relativement aux effets d'un long annren-
tissage et d'une instruction continuelle, me le S
appnsure paroît avoir signiHé coutume. 'habituSe
C'ert moult fort cho.se d'apresure ■
Mes nature deust pas.ser, etc.
Fahl. MS du R. n" 7-218, fol. 225, R- col. ).
VARfANTFS '
APPRISURE. G. Machaut, Poës. MSS. fol 19 r» col 1
Apreseure. Ph. Mouskes MS. p 331 ' °'- ^•
Apreslre. Vie de S'eThaysies, MS. deS. chif. xxvn, col. 16.
Approbation, subsf. fém. Action d'énrouver
épreuve. Action de prouver, preuve L'acceïïion'
2Tr!uTl'', •?' '' '"^^ appràation, est la Sï
que ce le du latin appvobatio. (Voy. Àpprouvement t
Delà, Il aura signifié, 1° l'action d'ép ouver, e'Jreuve-
« b. ne vous plaist me donner cette petite S S on
« pour m approuver, parce que de telle arnSSi
M^rn'^T'^ '''■ " ^^"""P'' ''' '' niille Dame,
^nni.^ f *^i'-^" ^^ prouver, preuve, comme lorsau'en
pariant dune action qui prouVoit dé H hnnnn
volonté, on disoit qu'elle éK , unetiSS
« de bonne volonté. » (Du Bellay, Mém Km 7
« Dame, vous direz ce qu'il vous plaira mais '
« oncques Monseigneur Lancelot ne se neS de
« faire ce que vous luy mettez sus. Il a bien monshé
« àceste assemblée, ilist la Royne • doTt sr^oy^e
11
j moy que l'approbation en est si apparovssante ,,
(Lanc. du Lac, T. III, fol. 121, R» col 1 )
Approfitement, subst. masc. Action de mettrP
a prolit. L'action de faire valoir une cl ose L^ r sn?
ou pour quelqu'autre. (Cotgrave et S dTc
\oy. Approfiter.) ci. moui, uict. —
Approfiter, verbe. Mettre à profit, faire vilnir
Mettre en état de profiter, de faire valor^rofuér"
Etre profitable. Ce verbe, composé de la préposit on
« reunie au verbe simple profiler, signifioif me tre
a profil une chose, la faire vn ni r nnnr =ni ^ ^
pour 1 usage, 'Utilité des autres. « Les cSnnlfestes
" faictes sur les ennemis... il faut amrS Jl
«^non prodiguer, ny dissiper. » (S^Sseï SSr'ron^!
En cas de » séquestre estably en un bénéficp
*: sS"/' " °.^*^''^" ^"<^ " "^ '-evenu de ce bé, éfice
« seroit approfite par un tiers,... au moven ellZot
« qu'i avoit promis faire le dit rw;nS»iSf la
" Z^'^-^T et„P'?'Ception des fru: s au SJe
se rendre utile, qu'rw^.o/?/^./, Je qu'un éiTens
sgnifioit le mettre en ét;.t de profitei' , le mettre en
qL'on lif P,i;'^''^ '' ^'"■«" '''' P«"'- lui 'le bien
qu on lu lait. . Seigneur, quant je pense en mnv
•■ en quelz ne en quanz biens tu m'as aproufité II
etc. « (Liiasse de Gaston Phebus, ms. p. 387 1
La signification active de ce verbe etoit -ibsoinp
lorsque pour désigner une personne qupontou'
qui faisoit qu'une chose fût p.uir ele en Til'
rendant utile, on disoit qu'elle appo/^ft 'VoStc?
" mes euvres ordene à ton dou x plaisii si oue l
« Que aproup te à ta charité,... si je iS en mn
PeuVÎi't- " (P'^^^sse de Gaston Phébus,' m p'383
Peut-être qu aproufier, en latin proftcere nW
! V."n.?r d «•■n^os-'iaphe dans le Jassaîé sùivLu
« Le meilleur médecine. . . si es . . Tes lessipr
« mengier tout quant qu'iîz voudront ; car aud S
ibif?'VTfr^rf,i°"''''''""''«^^''''»/'^"' ('^)'^ien. '(id^
.,.. P- r?''ù ^*^'"^ conjecture paroit d'autant n ki s
vraisemblable, qu'on trouve plusieurs fois 'nVn n
graphe aproitfiter dans le même o^TagS ""
VARIANTES '
APPROFITER Contes de Des Périers, T I p 151
Aproufier. Chasse de Gaston Phébus MS n 105
Aprûufiter. Ibid. p. 359, 383, etc ^'
Ce'^'ol 'Tn^n^'l'n'**""''"^'. '"*^^- '««^^- P>'Ovision.
ce mot, forme de provende, en latin prœbendu par
AP
— 82 -
AP
contraction de prœhiheiula, désigne une chose que
doit avoir d'avance, ou par provision, celui à qui on
la donne. <• Au regard de Vapprouvandeynent... pour
a la plaine affolure, lequel avoit esté limité à huict
« muids de bled, etc. " (Coutumes de Hainaull, au
nouv. Coût. gén. T. I, p. 59. — Voy. Provende.)
V.4R1A.NTES :
APPROUVANDEMENT. Du Cange, Gloss. lat. à Provenda.
Aprovandement. Coût. gén. T. I, p. 784.
Approuve, subst. fém. Epreuve. Preuve. Il
semble que dans un sens relatif à celui du verbe
approuver, éprouver, l'on ait dit en parlant d'un
Prélat en général :
Les bons et les maulvais sont dessoulz tes approuves :
Qui scet ou qui ne scet, t'appartient que tu preuves (1).
J.de Meun, Codicile, vers 593-595.
Peut-être la rime exige-t-elle que dans ces vers
on lise appreuve, comme dans le passage suivant
où ce mot signiiie preuve. « Hercules en faisant ses
« voyages... passa par le pays que l'on nomme à
« présent Bourgongne, et y prit en mariage... l'une
« de ses femmes nommée Alise ; .... et. .. de ceste
« Alise il eut génération, dont sont... yssus les pre-
« miers Roys de Bourgongne : et pour appreuve,
« vous trouverez au Duché de Bourgongne,... appa-
« rence d'une cité ou ville qui se nommoit Alise. »
(Mém. d'Ol. de la Marche, p. 21. — Voy. Approuver.)
VARIANTES :
APPROUVE. J. de Meun, Codicile, vers 593.
Appreuve. Mém. d'OI. de la Marche, p. 22.
Approuvement , subst. maso. Appi'obation.
(Cotgrave, Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict. —
Voy. Approuver.)
Approuvender, verbe. Approvisionner. (Voy.
Approuvanuement.) Signification relative à celle du
substantif approuvandeincnt, formé de provende.
On a dit figurément :
. . . Carités qui en tous lieus
Est grandement recommendée,
Garnie est et ap}irouvc)idée
De largèce, sans nul dangier.
Froissaii, Poès. MSS. p. 42, col. 2.
Approuver, verbe. Eprouver. Prouver. L'ac-
ception encore usitée du verbe approuver, est la
même que celle du lalin approbare. Martinius la
présente comme acception primitive du verbe sim-
ple latin probare, qui par une espèce de métonymie
signifioit éprouver. (Voy. Aprob.) C'étoit aussi la
signification du verbe françois composé approuver.
<■ Aucune fois Dieu afflige les humains pour les
« approuver; sgavoir est les bons, comme Job et
« Tobie. » (Triomphes de la noble Dame, fol. 277.)
« Nous qui de voslre loial et approviée diligence
« nous fions, etc. » (Ord. T. I, p. 528, notes, col. 2.)
Mais de moult lointains seigneurages,
Par fiez tenir et par hommages,
Grant honneur aprovoil.
G. Guiarl, MS. fol. »,R'.
Dans le sens de prouver, en latin probare, on
disoit : « Je vous prometz que c'est le Chevalier à
« l'aigle d'or ; et ce vous appreuve-je par son escu. ^
(Percef. Vol. 111, fol. 19.) " Pour vous approuver et
<" justifier leurs faicts, etc. » (Du Bellay, Mém. Liv.
VI, fol. 178, R°. — Voy. Prouver.).
variantes :
APPROUVER. Orth. subs. - G. de RoussUlon, MS. p. 188.
Appkeuver. Percef. Vol. III, fol. 19, R° col. 1.
Approer. Ord. T. III, p. 578.
Approvier. Ord. T. I, p. 528, notes, col. 2.
Aprover. g. Guiart, MS. fol. 11, R».
Aprovier. Ane. Poët. Ir. MSS. avant 1300, T. IV, p. 16CQ.
Aphouver. Modus et Racio, MS. fol. 236, V».
Apruever. Fabl. M. du R. n» 7615, T. II, fol. 127, V» col. 1.
Appuy, subst. masc. Appui, accoudoir, dos-
sier, etc. Dans le sens étymologique (2), chose sur
laquelle on pose les pieds afin de se soutenir : par
extension, chose sur laquelle on pose la main , le
coude ; chose contre laquelle on pose le dos : en
général, soutien, tant au propre qu'au figuré. (Voy.
Appuyer.) U semble qu'un banc sans appois, dans
les Honneurs de la Cour, ms. p. 54, est un banc sans
accoudoirs et sans dossier. On conçoit que les
explications de ce mot appuy pourroient être aussi
variées que le sont les noms par lesquels on spé-
cifie, 1° les choses propres à soutenir différentes
parties du corps, les choses propres à soutenir les
personnes, comme un balcon, un garde-fou, une
balustrade, etc. 2° les choses propres à en soutenir
d'autres, comme une étaye, un étançou, etc. (Voy.
Appuyal et Appuyé.)
variantes :
APPUY. Cotgrave, Rob. Estienne et Nicot, Dict.
Appoi. Honneurs de la Cour, MS. p. 54.
Appuyai, subst. masc. Appui, balcon, che-
ville, etc. (Voy. Appuy.) Ce mot appuyai, de même
origine qu'appuy, signifioit soutien en général ; en
particulier un balcon pour s'appuyer, se soutenir:
« Firent les deux Roys loges dresser emmy les
« prez, où il y avoit fenestres et appuyaulx aux
u Dames et aux Damoiselles. » (Lanc. du Lac, T. II,
fol. 82, V° col. 2.)
Une cheville, ou autre chose propre à fermer une
porte, à l'appuyer, à la soutenir contre l'effort de
quiconque voudroit l'ouvrir. « La porte... n'est
« fermée, ne à poste, ne ti barre, ne à nul appoyal,
« sinon à gons où elle est sellée. » (Lanc. du Lac,
T. I, fol. 147, R-col. 1.
Au figuré, la signification à'appuyal étoit la même
que celle de notre mot appui, soutien. « Loys^
« Monseigneur de Luxembourg,... appuyai du peu-
« pie, le parement de Court ell'onneur du royaume
ic de France. » (J. d'Auton, Annal, de Louis XII,
MSS. an. 1503-1505, p. 93.)
Vile roiaus des Cités,
Se tes appoia7(s
Fust vrais et loiaus, etc.
Ane. PoOt. fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1301.
VARIANTES :
APPUYAL. Lanc. du Lac, T. II. fol. 82, V° col. 2.
Apoial. D. Carp. s. Gl. lat. deD. C. d.\imot Apodiamentum.
(1) Tu éprouves, tu juges à l'épreuve. - (2) De ad et podium, pui, élévation, colline. (N. E.)
J
AP
- 83
AP
Apoyal. Lanc. du Lac, T. I, fol. 147, R° col. 1.
Appoiau. Ane. Poët. fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1?01.
Appu.^il. Al. Chartier, de l'Espérance, p. 285.
Appuyé, subst. fém. Appui, galerie à balcon,
balustrade, accoudoir, etc. Dans la signification
particulière de galerie à balcon, balustrade, le mot
appuije étoit le même qu'appuy, galerie et saillie
sur quoi on s'apptiije pour regarder hors la maison.
(Voy. Cotgrave et Nicot, Dict.)
L'acception à'appoiée, accoudoir, est relative à
eelle d'appoi. « Deux pommeaulx des appâtées du
« dit siège despiciés par moittié, etc. » (D. Carpen-
tier, uht supra. — Voy. Appuy et Appuyelle.)
VARIANTES :
APPUYE. Cotgrave et Nicot, Dict.
Appoiée. D. Carp. s. Gl. 1. de D. C. au mot Appodiatorium.
Appuyelle, suhst. (ém. Appui, garde-fou.
Espèce de parapet, ou de barrière sur laquelle on
s'appuie pour ne pas tomber en passant sur un
pont, sur une chaussée, etc. « Les Eschevins ont
« connoissance du fait des cauchies, plaucques et
« appuielles, et es chemins; les dits chemins,
« plancques et appuielles et cauchies, etc. » (Coût.
de Richebourg, au nouv. Coût. gén. T. I, p. 392,
coL 2.) On trouve appuy avec la même signification
particulière, dans la Coût, de Ham. (Ibid, p. 381,
col. 1. — Voy. Appuy.)
VARIANTES :
APPUYELLE. Coût, de Lessines, au n. C. g. T. II, p. 214.
Appuielle. Coût, de Ricjiebourg, ibid. T. I, p. 392, col. 1.
Appuyer, verbe. Soutenir, se soutenir, s'accou-
der, s'adosser, s'asseoir. Poser, mettre, arrêter,
assurer, établir, confirmer. Frapper, presser, fouler,
renverser. Opposer. On sait que du mot grec noiç,
noâôç, pes, pedis en latin, s'est formé nifioy en grec,
en latin podium (4); d'où le verbe latin-barbare ap-
podiare, en françois appuyer. C'est peut-être à l'idée
de pied, partie du corps sur laquelle on est stable,
sur laquelle on se soutient, on s'atïermit et s'élève,
que sont relatives les acceptions des substantifs /;«;/
et appuy, aussi bien que celles du verbe appuyer,
&' appuyer ; proprement se soutenir, s'affermir sur
les pieds, être stable, poser les pieds, se soutenir,
s'affermir en posant les pieds sur une chose qui ail
de la stabilité. Il semble du moins que dans un
sens analogue aux significations indiquées, l'on ait
dit : « Ne n'en atroverons mies trop estroite la sente
« del pont. . . De trois tisons (2) est faite celte sente (3),
« por ceu ke li piet de ceos ki à lei se verront apoier,
« ne puist glacier (4) en la voie. » (S' Bernard, Serm.
fr. MSS. p. 340 (5).)
A un tertre monter s'appuie.
Desoz ert la valée fière ;
Parmi coroit une rivière.
Blanchandin, MS. de S. Germ. fol. 176, R" col. 2.
En comparant à cette façon naturelle de se soute-
nir sur les pieds, de se soutenir en posant les pieds
sur quelque chose, toute autre fa(;on de se soutenir
sur différentes parties du corps ; de se soutenir en
posant la main sur un bâton, le coude sur une
fenêtre, le dos contre une porte, en s'asseyant sur
un fauteuil, en posant partie du corps ou le corps
entier sur une chose qui le soutienne, on aura dit
par extension : « s'appuyer ou s'espuyer du genoil,
" de la main, du côté, etc. s'appuyer d'un bâton ou
« sur un bâton, s'appuiier à une fenêtre, s'appuyer
« à un huis, sur un faudestuel, h un banc, etc. Le
« suppliant cuida tumber h terre, et lui convint
« sojj espuyer d'un genoil et d'une main à terre. »
(D. Carpenlier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au
mot apodiare; Tit. de 1480.) « Se assist emmi le
« chemin, en soy espuyant du costé à terre. » (Id.
ibid. Tit. de 1.381.) « As-tu espérance en cez de
« Egypte ki sont eu me baston de rosel pesceed (6) sur
« qui si l'um, se apuied, tost falsed e depiesced (7.) »
(Livres des Rois, ms. des Cordel. fol. 144, V° col. 1.)
. . . Vos resemblez le gaignon (8)
Qui se venge en abaiant ;
Pour ce avez mors en mon baston
De quoi je m'aloie apuant.
Ane. Poft. fr. MSS. avant 1300, T. I, p. 476.
Quoique appuyer signifie encore soutenir, on ne
diroit plus « appuyer ses memhves » dans le sens
du verbe réciproque s'appuyer.
Faulx-semt)lant qui bien se retourne,...
Après s'en va sans Esouyer ;
Et pour les membres apuijer.
Eut, ainsi que par impotance,
De trahison une potance
Rom. de la Rose, vers 12815-12819.
Sans désigner la chose sur laquelle un soldat
blessé, par exemple, se soutenoit pour fuir dans
une déroute générale, on disoit qu'il s'en alloit
apurant, à la différence de celui qui n'étant point
blessé, s'en alloit droit.
S'en vont l'un droit, l'autre upuiant,
Le plustost qu'il pevent fuiant.
G. Guiart, MS. fol. 256, V'.
Il paroit que la signification de s'appuyer est
s'accouder dans le passage suivant : « La Damoy-
« selle se leva sus, délaissant Liziart s'apoyant à la
« fenestre, la main à la maiselle(9). » (Ger.de
Nevers, Part. I, p. 16.)
Probablement s'adosser, dans ces vers :
Hersent qui n'estoit mie loins,
Qui n'est encore réconcilié,
S'estoit à un huis apoié.
FM. MS. du R. n" 7218, fol. U6, R" col. 1.
Enfin, s'asseoir, dans ces autres vers :
.... Diex vos gart, Sire Prévost ;
Venez vos apoier lez moi.
Cil respont, Dame je l'otroi.
Desor un faudestuel vermeil
S'apoiereiit, en un conseil.
Blanchandin, MS. de S' Germ. fol. 180. R» col. 2.
(1) Le podium était un soubassement peu élevé et formant marche le long du mur d'une chambre ou d'un bâtiment. Dans
l'amphithéâtre, ce soubassement était élevé de dix-huit pieds au-dessus de l'arène ; on y plaçait les chaises d'ivoire (selles
cwules) de l'empereur, des magistrats curules, des vestales. Enfm, en architecture, c'était un socle, une console, (n. e.) —
(2) poutres, pieux. — (3) tablier du pont. — (4) aUsser. — (5) Edition Le Roux de Lincy, Paris, 18il, à la suite du Livre des
ilois. (N. E.) - (6) fait de pièces, (n. e.) — (,7) se désagrège, se dépèce, se rompt, (n. e.) — (8) chien. — (9) ,Toue ; en latin maxilla.
AP
— 84 —
AP
Et Tristan à un banc s'apow.
Fabl. MS. dj Berne, n- 354, fol. 154, R* col. i.
C'est sans doute relativement à l'idée de poser le
pied ou quelinie autre partie du corps sur une
chose qui soutienne, iiu'aiipuyer une chose à une
autre, une chose sur une autre, a signifié et signifie
encore donner du pied îi cette chose, l'affermir, la
poser, la mettre de façon qu'elle soit ferme et
stable, de façon qu'elle soit soutenue par la chose
sur ou contre laquelle elle est mise, elle est posée.
(Voy. Appuy.)
Je montai sans lui dire mot,
Qu'il ne me sorprist à pié ;
Et pris en ma main mon espié
Qu'à un pin apoié avoie.
Fabl. MS. du R. n' 7615, T. II, fol. 187, R- col. 2.
Mes aiisi pense apoier
L'espié à une roche bise, etc.
Ibid. fol. 187, V col. 1
Puis a un rasor desploié ;
Si l'a sor l'anclume apoié.
Fabl MS. de Berne, n' 354, fol. l.'.S, V- col. 2.
Dans un sens analogue à l'idée d'une position
ferme et stable, par conséquent sûre, le verbe ap-
puyer ou s'appuyer aura signifié s'arrêter en sûreté
dans un lieu, s'y mettre en sûreté :
Mordret s'enfuit toute la nuit,
Quérant rechet où il s'apuit.
Rom. de Brul, MS. fol. 100, R" col. 2.
Au figuré, s'arrêter à une personne, à une chose,
s'assurer en cette personne, en celte chose, y met-
tre sa confiance.
Fox est qui va veoir s'amie,
S'il y moine tel compaignie
Où ne se doie moult fier ;
On ne set à cui apuier.
Athis, MS. fol. 11, V col. 1.
. . . Raempliz de couardise
Où leur flo se va apuiciiit.
S'en revont vers Furnes fuiant.
G. Guiart, MS. fol. 241, V-.
. . . Qu'aucune à ce ne s'apuie
Que sa net guerpisse et s'enfuie.
Id. fol. 312, R'.
... Cil qui par son sens se set bien avoier,
Ne doit son bon conseil por autrui sens lessier,
Se on ne le puet fère à meillor apoier.
Fabl. MS. du R. n" 7218, fol. 335, R" col. 2.
En termes de procédure, s'appuyer à droit, s'ap-
puijer à jugement on en jugement, c'étoit établir
en droit une question, établir une demande, la
soutenir en droit, la soutenir, fétablir en justice.
« Un Chevalier qui avoit à plaidier ... se fistesso-
« nier ; et chil qui avoient à lui à faire . . . s'apue-
« rent à droit, savoir mon se il povoit fère en la
« manière dessusdite. » (Beaumanoir, Coût, de
Beauvoisis, chap. m, p. 27.) <■ Toutes resons . . .
« doivent estre mises avant que li jugement soit
» enchargiés: car puisque chil qui doivent fère le
« jugement ont les paroles receues des Parties , et
" ils se sont apuié à droit, ils n'i pueenl ne mètre
« ne ester. •> (Id. ibid. chap. vu, page 45.) « Leurs
« resons oies et apuiées en jugement, nous disons
« par droit, etc. » (Id. ibid. chap. lxvii, page 343.)
« Quant l'en rent jugement, il n'est pas resons de
« tout recorder che qui fu proposé des deux Par-
« ties, sur quoi il s'apuièrent à jugement. « (Id. ibid.)
C'est encore relativement fi l'idée de rendre ferme
et stable, qu'appuyer siguifioit confirmer. « Ordon-
" nous et commandons en appuiaiit et ratifiant
<■ ladite Ordonnance, etc. » (Ord. T. I, p. 580 et 581.)
L'origine de ces significations étant ainsi expli-
quée, il est aisé de saisir l'analogie des significa-
tions actuelles du verbe appuyer avec les anciennes.
Quoiqu'il désigne encore aujourd'hui l'action de
peser sur un corps, en posant les pieds dessus, par
extension les mains, les poings, etc. faction de le
presser, de le fouler en tombant dessus, en le char-
geant, en le frappant, etc. on ne diroit plus :
Lor dona tex cox des basions
Qui s'aponicnl des moignons.
Fabl. MS. de Berne n" 354, fol. 155, V' col. 2.
Il semble que la signification de espoier, est,
presser, fouler, renverser, dans les vers suivans :
. . . Guide bien que nostre guerre
Fausist, quant le Mor vi à pié ; '
Car je le voil de mon espié
Encontre la terre espoier.
Fabl. MS. du R. n" 7615, T. II, fol 187. V col. 1.
Enfin, s'appuyer ù une bataille, c'étoit s'y oppo-
ser en la pressant, en la chargeant, en tombant sur
elle, les armes à la main.
Di.x batailles à trois s'apoient ;
N'est merveille s'elles s'ennoient.
Athis, MS. fol. 73, Vcol. 1.
CONJUG.
Apuied{s'), ind. prés. S'appuie. (Livres des Rois.)
Apuiout{s'), ind. imp. S'appuyoit. (Ibid. fol. 41.)
Apuit (s'), subj. pr. S'arrête, se mette en sûreté.
(Rom. de Brut, ms. fol. 100, R° col. 2.)
VARIANTES :
APPUYER. Orth. subsist. - Lanc. du lac, T. II, fol. 108.
Ap.uer (peut-êlre Apoiier.) .\nc. Poët. fr. T. III, p. 1059.
Apeuer. Fabl. MS. du R. n" 7989, fol. 67, V» col. 1.
Apoier. S' Bernard, Serm. fr. IISS. p. 320, 347, etc.
Apoiier. Fabl. MS. du R. n» 7989, fol. 77, V» col. 2.
Apooier Fabl. MS. de Berne, n^ 354, fol. 155, 'V" col. 2.
Apoyer. S' Bernard, Serm. fr. MS. p. 104.
Apouyer. Chasse de Gaston Phébus, MS. p. 202.
Appoier. Gloss. du P. Labbe, p. 488.
Appouieu. Miserere du Recl. de Moliens, MS. de G. fol. 209.
Appuier. Ord. T. I, p. 581.
AruER. Ane. Poët. fr. MSS. avant 4300, T. I, p. 476.
Apuier. Ane. Poët. fr. MS. avant 1300, T. I, p. 429.
Apuyer. Rom. de la Rose, vers 12817.
Espoier. Fabl. MS. du R. n» 7615, T. II, fol. 187, V» col. 1.
ESPUER. D. Carpentier, s. Gl. 1. de D. C. au mot .ipodiare.
ESPUIER. Id. ibid. Tit. de 1381.
EsPUYER. Id. ibid. Tit. de 1480.
Aprenement, subst. inasc. Enseignement,
leçon. (Voy. Apprenture.) Signification relative à
celle du verbe apprendre, enseigner, etc. Il semble
que dans les saisons du printemps et de l'été, le
spectacle de la Nature renaissante et féconde soit
pour l'homme une leçon d'aimer. De là , on aura
dit:
Ver est plus dous et plus temprés ;
Près son parant il et Estex...
D'amor donnent aprenement.
Athis, MS. fol. 38, Vcol. 1.
Après, part, et prép. Opprimé. Adjoint, associé.
Près, auprès. Après, secondement, d'après. Il esfc
AP
85 —
AP
possible que comme on écrivoit apus pour apusé,
participe du verbe apiiser, le même qu'aposer ci-
dessus, appens pour appen&é , etc. l'on ait écrit
après pour apressé et pour apressée , apresse. Ou
trouve en effet (\uapprcsse est une abréviation du
participe féminin appressée , opprimée , dans ces
vers où l'on a dit, en parlant de Sextus Tarquin ;
S'efforça tant
Qu'il print Lucresse.
Quand l'eut oppresse,
Tost fust Maîtresse
'Vengeance, que Tarquin le Grand
Chassa de Rome en telle presse, etc.
Blason des Faulces amours, p. 252.
Ce participe féminin oppresse suppose le mascu-
lin apprès. Aussi croit-on qu'après est un participe
employé comme substantif, lorsque dans un sens
analogue à celui du verbe oppresser, suivre de
près, suivre, la Prudence personnifiée nomme son
flyw'cs, c'est-à-dire, son adjoint, son associé, un
Poète qui en suivant son parti et ses avis, s'associe
et se joint à elle pour l'exécution de ses desseins.
J'apperceu tost approcher celle Daine...
Elle sentoit meilleur que nul ciprés.
Sa doulce bouche, quant de moi fut auprès,
Pour me parler ouvrit si doulcement,
Disant ainsi : mon amy, mon après, etc.
Nef des Dames, prolog. fol. 2V", et 3 R'.
Peut-êtie faut-il chercher dans le latin pressum,
l'origine des prépositions près et après , en Italien
pressa et oppressa ? On a pu se figurer comme
pressées ou pressant les unes sur les autres , les
personnes et les choses entre lesquelles il y a pro-
ximité, suite, ordre successif dans un espace de
lieu ou de temps ; faire abstraction de cette idée de
presse spécialement exprimée par les participes
j:;m et «/jct's ; prendre ces mêmes participes dans
un sens absolu, et les employer comme préposi-
tions, pour désigner les idées générales de proxi-
mité, de suite, d'ordre successif, lors même que
cette proximité, cette suite, cetordresuccessif n'oc-
casionnoientaucunejuressc. Telle pourroit être l'ori-
gine des prépositions près et après, très-anciennes
dans notre langue (1). Quant à la préposition auprès,
elle paroit formée de la préposition à et de l'article
/(? confondus ensemble, et réunis à la préposition
simple près. (Voy. Aui'Rés.)
Anciennement, la préposition après, qui dans
l'usage actuel ne désigne plus que l'idée générale
de suite, d"ordre successif, désignoit aussi l'idée
générale de proximité, comme les prépositions,
simple et composée, après, auprès. « Oza estendid
« sa main vers l'Arche . . . e nostre Sire s'en cure-
« chad vers Ozam ... e il chaid morz en la place
« «jB?'('S l'Arche Nostre Seigneur. » (Livres des Rois,
Ms. des Cordel. fol. 47.) « Conchioient tôt co qui
« estoit après del Temple. » (Ibid. fol. 177.)
. . . D'eus onbraier (2) après pin
N'ont pas, ce dit-on, tel courage,
Comme d'être de guerre sage.
G. Guiart, MS. fol. 344, R".
C'est relativement à l'idée générale de suite,
poursuite, qu'exprime encore la préposition après,
qu'on a dit, soit au propre, soit au figuré : 1° « Etre
« rt//r(^"s une personne, « poursuivre une personne,
la presser d'agir ; « être après une chose, » pour
suivre une chose, la poursuivre, en presser l'exé-
cution, l'accomplissement, etc.
2° « Quérir, chercher, courir «jun's une personne
« ou après une chose, » pour se mettre à la suite
de cette personne, de cette cliose; être pressé de
voir la personne, de la joindre, être pressé de trou-
ver la chose, de l'obtenir, en cherchant, courant,
désirant, etc.
3° « Crier après une personne ou après une
« chose, » pour être à la suite de cette personne,
de cette chose ; les suivre, les poursuivre en criant,
presser par des cris la volonté, l'action de la per-
sonne, l'acquisition, la jouissance de la chose.
4» » Demander après une personne ou après une
" chose, " pour se mettre à la suite de cette per-
sonne, de cette chose; être pressé de rencontrer la
personne, la chose qu'on demande, presser par sa
demande l'instant do les rencontrer.
5° " Enfin, dans l'expression « dépenser après
« une personne ou après une chose, » la préposi-
tion après peut signifier la suite d'un projet, d'un
dessein relatif à la personne ou à la chose pour
laquelle on dépense : l'empressement de voir arri-
ver la personne, de voir se réaliser la chose qu'on
attend, dans cette autre expression « allendve après
« une personne ou après une chose. « Quelques
citations prouveront que l'usage de la préposition
après n'a point ou presque point varié depuis
qu'elle existe. « Il délibéra qu'il demanderoit . . .
« «Tjj't'sleChaslel. » (Percef. Vol. VT, fol. .52.) « Criad
« Jonathas après le vadlet ; vien hastivement. »
(Livres des Rois, ms. des Cordel. fol. 28.) « Estoit là
« Monsieur de Sedan cherchant après ses enfans;
» lequel les trouva en très-mauvais ordre. » (Mém.
de Rob. delà Marck, Seigneur de Fleuranges, ms.
p. 184.) '< Nos avons jai atroveit trois fontaines ; or
« quarons ajsm la quarte. « (S' Bern. Serm. fr.
Mss. page 130.)
Plus on réfléchit, plus on croit voir que les signi-
fications d'après, quelque variées qu'elles puissent
être, sont toutes relatives à l'idée de suivre, presser
en suivant, en approchant ; idée analogue à celle
de succéder et qui n'est pourtant pas tout-à-fait la
même, par la raison qu'on ne succède pas toujours
à ce qu'on approclie, à ce qu'on suit. On désigne
donc l'idée générale d'ordre successif, plus spécia-
lement que celles de suite et de proximité, lorsque
dans le sens propre ou figuré, l'on dit encore,
comme autrefois, qu'une personne naît , se place ,
marche, agit, parle après une autre ; qu'une chose
existe, qu'elle a lieu, qu'elle se passe, qu'elle se fait
après une autre, etc. « Adonias . . . fud li secundz
I des fiz le Rei, après Absalon. » (Livres des Rois, ms.
(1) Dans la Chanson de Roland, on trouve, vers 1160 : « Sun cumpaignun, après, le vait sivant. » (n. e.) — (2) se tenir
à l'ombre.
AP
— 86 —
AP
des CoPflel. fol. 77.) « Micliiaus li Empereres de
« Coiistaalinoble . . . l'Empire laissa, etpuis devint
« Moines. ii;;ms li reçut la dignité de TEmpire,
<» Leons qui fu filz Bardele palricho. » (Chron. S'
Denys, Rec. des llist. de Fr. T. V, p. 262.) -< Premie-
« rement, se les maisons sont faites d'avoir qui
« malement sont gaainés ; apré , s'on les aimme
« miex ke ces coses qui ja n'auront fin, etc. >> (Lu-
cidaires, .ms. du R. n° 7989, fol. 22C.) On borne à ce
dernier passage où apré, le même qn'après, est mis
pour secondement, la preuve qu'anciennement la
préposition après signifioil comme à présent une
idée générale d'ordre successif entre les personnes
et les choses. Cet ordre successif n'étoit indiqué
que par le sens de la phrase, toutes les fois qu'en
supprimant après, plusieurs Ecrivains des xv et
xvr siècles se servoient des façons de parler suivan-
tes ou d'autres semblables. « Eux avoir pris leur
« lieu, Messire .Jaques se partit de l'Eglise. » (Mém.
d'Ol. de la Marche, L. i, p. 297.) « Avoir le tout
« entendu, Robertet a dit, etc. » (Lett. de Louis XII,
T. I, p. 499.) " Avoir bien beu et bien repeu, Editue
« nous mena en une chambre bien garnie. » (Rabe-
lais, T. V, p. 25.) « Quoy entendant Cœsarin , et
« avoir quelque peu songé, dit , etc. » (Nuits de
Strapar. T. Il, p. 274.)
Enfin, il est possible qu'on ait vu ce qui se
rapproche par la ressemblance ou par l'imitation,
comme étant placé dans un ordre successif, et que
de là on ait dit : « Les daims toutes leurs natures
« ont après la guise d'un cerf, fors tant que le cerf
« va plustost au ruit. » (Chasse de Gaston Phébus,
MS. p. 27.)
Fist la kapièle (1) faire
Ausi biele com nul el monde ;
Et si le fist faire reonde
Apriès l'ongle de son ceval
Ki senti l'aiguë caude el val.
Ph. Mouskes, MS. p. 68.
Après Savis a nom Savine.
Alhis.MS. fol. 122, V col. 1.
On sait qu'aujourd'hui l'on diroit, d'après avec la
même signification.
VARIANTES :
APRES. Orth. subsist. - S' Bernard, Serra, fr. MSS. p. 96.
Apré. Baluze, Hist. généal. de la M. d'Auvergne, pr. p. 9'2.
Apriès. Pli. Mouskes, MS. p. 3.
Apris. Carpentier, Hist. de Cambrai, T. II, pr. p. 31.
Apresser, verbe. Presser, opprimer, fouler,
affaisser. Etre près, presser, approcher, suivre,
poursuivre, etc. Les passions qui captivent l'espèce
humaine el la tyrannisent, les besoins qui l'asser-
vissent et la tourmentent, les maux auxquels l'as-
sujettit la Nature, ceux que lui font souffrir le
despotismeetl'injustice, étant comparés à un poids,
à un pesant fardeau sous lequel elle est pressée,
opprimée, foulée, affaissée, etc. l'on a désigné toute
espèce d'idées relatives à un état d'oppression, par
le verbe apresser, comme le prouvent les citations
suivantes : « Ensi que li Sergenz ne fust apprcissez
« de plus fière sentence par le maltalent del Sei-
0 gnor, etc. » (S' Bern. Serm. fr. mss. p. 305.) « Cil
« qui sont Prélat et Justice de Sainte Eglise,... s'il
« apressent le Pueple crueuement et à tort, si auront
« grant torment devant tous les autres. » (Luci-
« daires, ms. du R. n" 7989, fol. 225.) « Chil qui
« point ne parle par che que il sont muets dès
« nature, ou si apressé de maladie que il ont per-
» dus la parole, etc. » (Beaumanoir, Coût, de Beau-
voisis, chap. xii, p. 71.) « N'avoient que manger;
« si les appressa moult la faim. ■> (Hist. de B. du
Guesclin, par Ménard, p. 104.) « Naissons en cha-
» tiviteit... ensi k'ancor fussiens nos saige et fort,
« si seriens nos tote voies appresseit desoz le jus
•< de ceste chaitive servituit. » (S' Bern. Serm. fr.
MSS. p. 260.) a Li terrienne habitations apresset lo
« sen (2) ki à maintes choses penset, ensi k'il con-
« tremont ne se puist drecier as bien celestiens. >•
(Id. ibid. p. 261.) « Il estoit griefment apresseiz de
« la templacion de sa char. » (Id. ibid. p. 319.)
.... Se pristrent à pensser
Comment se porroient tensser.
"Vers poureté qui les apresse.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 227, V* col. 2.
. . . Bons Clers, Chevaliers en jeunesce,
Ne se doivent pour or, ne pour richesce,
Bouter au feu qui art et qui estrangle
Les mariez ; car tous maulx les apresse.
Eust. Desch. Poês. MSS. p. 256, col. 1.
Qu'au lieu de comparer les maux de l'homme,
ses besoins et ses passions à un poids qui l'opprime
et l'affaisse, on se les figure comme autant d'êtres
actifs qui le poursuivent, qui le pressent en le
poursuivant, en l'approchant, le verbe apresser
désignera plutôt les idées de poursuite et d'approche
que celles d'oppression et d'affaissement. Cette
acception d'apresser paroil d'autant plus vraisem-
blable dans quelques-uns des passages qu'on a cités,
que ce verbe signifioit , soit au propre, soit au
figuré, « être près, approcher de près, suivre,
« poursuivre de près ; presser en approchant, en
« suivant, en poursuivant, en insistant, en pous-
« sant, etc. » (Voy. Après.)
Les Roys ressemblent les painctures...
Se bien y sçavoit prendre garde
Cil qui les painctures regarde,
Oui plaisent qui ne s'en apresse ;
Mais de près la plaisance cesse.
Rom. de la Rose, vers 19147-19451.
Li sages cm ki confiessa
L'Empereis, moult apriesn
De viellaice et de maladie.
Ph. Mouskes, MS. p. 777.
Dans la signification de suivre, poursuivre de
près, approcher, presser en suivant, en poursui-
vant, on disoit :
Turc et Païen moult les apriesent,
Glatissent, cornent et engriesent.
Ph. Mouskes, MS. p. 194.
Au figuré :
Se pitié n'est, de mort suy apresse.
Eust. Desch. Poes. MSS. p. 117, col. 3.
(1) cha elle. - (2) esprit.
AP
- 87
AP
Quelquefois le verbe ajiresser a signifié seul l'étal
de presse où se trouve l'homme aux approches de
la mort.
Et quant li Rois fu apriessés,
Et de la mort fu engriesés, etc.
Ph. Mouskes, MS. p. 638.
En ce sens on l'employoil comme substantif :
Et tout li autre, aine Vapricser,
S'orent fait ausi confieser.
Ph. Mouskes, MS. p. 215.
C'est dans la signification figurée de notre verbe
presser, insister auprès de quelqu'un pour qu'il
fasse une chose, le pousser à la faire, qu'on a dit :
... Il n'a talent d'arrester ;
Pour ce ne l'en veut apresser.
Cléomadès, MS. de Gaignal, fol. 46, V» col. 3.
Enfin, « apresser l'ame dehors d'un corps , »
c'étoit la presser d'en sortir, comme l'on feroit
sortir quelqu'un du lieu où il seroil, en le poussant,
en le jetant dehors.
Un Chevalier moult noble et cointe
Fiert si par ambes deux les flancs
Que d'autre part en saut li sans ;
Et l'ame prent congié au cors
Que cil a apressce dehors.
Rom. de Glygel, MS. du P.. n* C987, fol. 271, P," col. 2.
On terminera cet article en observant qu'entre
les idées de presse et de proximité, il y a une telle
analogie, qu'on peut soupçonner qn'apresser en
certains cas n'est qu'une variation d'orthographe
du verbe aprocher, aprecev, aprescer^ etc. (Voyez
Aprocueu.)
CONJUG.
Appresseit, part. Opprimés ; en latin appressi. (S'
Bern. Serm. fr. mss. p. 8.)
Apjn-esseiz, part. Opprimé, pressé ; en latin pres-
sais, (id. ibid. p. 245.)
Appreijssevet, indic. imparf. Opprimoit. (Id.)
Apresset, ind. prés. Affaisse, abaisse. (Id.)
VARIANTES :
APRESSER. S« Bern. Serm. fr. MSS. p. 276.
Appresser. S' Bern. Serra, fr. MSS. p. 125.
Aprieser. Ph. Mouskes, MS. p. 194, 215 et 777.
ApRiESSER. Id. p. 638.
Aprest, subst. masc. Action de s'apprêter. L'ac-
tion de se mettre en état de défense, dans ces vers :
Un porc espic... voyant l'intérest
Qu'on luy faisoit, bruoyt oultre mesure ;
Ses dars fronçoit tant qu'à veoir son aprest,
Bien se monstroit déhbéré et prest
Garder ses pars et royale pasture.
J. Marut, p. 56.
On reconnoitra dans le verbe apreslerle principe
de la formation et de la signification du substantif
aprest. (Voy. Aprester et Aprestise.)
Aprester, verbe. Etre devant , se mettre, s'arrê-
ter devant. Apprêter, mettre en état, disposer,
habillei', parer, préparer. Etre preste, être vite, être
adroit. Il semble que relativement à la signification
étymologique du verbe latin prœstare, d'où les
verbes françois prester et aprester, on ait désigné
une personne étant devant une autre, se mettant,
s'arrêtant devant elle, en disant qu'elle s'aprestoit
devant cette personne.
Issir voit
De la cave, amont un degré.
Un vilain treslot hérupé...
Devant Gauvains s'est aprestez ;
Si l'a maintenant salué :
Et Gauvains a moult regardé
Sa contenance et sa figure.
Fabl. MS. de Berne, n- 354, fol. 30, V" col. 2 et 31, R" ool. 1.
Nous croyons apercevoir un principe d'analogie
entre celte acception et les acceptions encore usitées
du verbe aprester, ou apprester qu'aujourd'hui l'on
écrit apprêter. Il est possible qu'en généralisant
l'idée particulière de se disposer à faire une chose
en se mettant devant celle chose, en se mettant en
avant, en s'avançant pour la faire, on ait dit par
extension et figurément, s'apprester pour se mettre
en état de faire une chose, quelle que soit la chose,
quel que soit le moyen de se mettre en état de la
faire, de s'y disposer.
Je qui hete les autres, sui li mains aprestez,
Li mains aisiez d'atendre, et li plus endetez.
Fabl. MS. du R. n'7615, T. Il, fol. 144, V col. 2.
En habillant une personne, en la parant, on la
met dans l'étal où elle doit être avanl qu'elle puisse
se montrer avec décence, ou avec rcs|MTaiiL'e de
plaire. De là le verbe aprester a signifié babiller,
parer, etc.
.... Charles, li bons Rois natures,
De main (1) lever estoit acoustumez
Et d'oyr Messe, si tost k'ert aprestez.
Enfance d'Ogier le Danois, MS. de Caignat, fol. 114, V col. 1.
A peines puet estre famé de mal faire tornée (2) ;
Car quant un preudons l'a veslue et atornée
De roubes, et de jouiaus garnie et aprestée, etc.
Fabl. MS. du R. n- 7015, fol. 140, R° col. 2, cl V col. 1.
On apreste les choses, lorsqu'on les met dans
l'état où elles doivent être avanl qu'elles soient
propres à l'usage pour lequel on les préprre. « Que
« nulz, se il n'est Lormier (3), ne puist aprester, ne
« faire aprester ouvre de Lormerie. » (Ord. T. HT,
p. 187.)
Les choses qu on apreste à quelqu'un, sont des
choses que pour ainsi dire, on met devant celui
pour le besoin duquel elles sont préparées.
Qui ce qu'il vait querant
Troeuve apreste, s'il ne le prend errant,
Mal oseroit un grant fais entreprendre.
Com récreans est bien dignes de pendre.
Ane. Poës. fr. MS. du Vatic. n" 1522, fol. 155, V col. 2.
On reconnoîl sans doute qu'elle pouvoit être
l'analogie des significations du verbe simple prester
avec celles du composé aprester, lorsqu'on disoit,
comme l'on dit encore aujourd'hui, prêter à une
personne les choses dont elle a besoin, se prester à
ses besoins, etc.
Enfin, la vitesse et la dextérité avec lesquelles on
fait les choses, étant en proportion de la vilesse
avec laquelle on s'avance pour les faire, de la
dextérité avec laquelle on s'y dispose et s'y prépare,
il est possible qu'aprester ait signifié être preste,
être vite, être adroit.
(1) matin ; en latin manè. — (2) détournée. — (3) sellier et éperonnier. (N. E.)
AP -8
L'on ne poiirroit mieulx apprester
De circonsir plus gentement
Que l'enfant est : benignement
En suit loué Dieu noslre père.
Hisl. du Tliéàlre Fr. T. I, p. UT.
VARIANTES :
APRESTER. Ane. Poës. fr. MS. du Vatican, fol. 155.
AMPRESTiiR. Athis, MS. fol. 87, R° col. 1.
Apprester. Ger. de Nevers, Part, i, p. 5b.
Aprestrer (corr. Aprester.) Ane. Poes. fr. MS. du V. f° IbS.
Aprestise, siihsi. [cm. Apprêt, préparatif. Ce
mot aprestise, que D. Carpeiitier expluine comme
étant une altération à'apertise, pareil avoir une
signification analogue à celle du verbe aprester.
(Voy. Aprester.)
Les essais et les ajicesfises
Qui se font pour son adrecer ;
Ce sont les dévotes aprises
Qui sont pour bataille requises. „„„,,„, „«
Rom. du Ch" Délibéré, D. Carpenlier, h. Gl. 1. de Du C. T. I, col. 243.
On le croit de même origine qu'aprest. (Voy.
Aprest.)
Apretier, verbe. Evaluer en argent, fixer à cer-
tain prix. Quoique apprécier, en latin apprettare,
signilie encore aujourd'hui évaluer une chose, 1 es-
timer en fixer le prix, on ne diroit plus qu'une
redevance en grain évaluée en argent est appréciée
à argent. (Voy. Uob. Esticnne, Nicot et Monet, Dict.
au mot adénérer.) C'est probablement dans la signi-
fication d'évaluer et faire payer en argent une rede-
vance en grain, qu'on a dit, en faisant l'éloge de la
bonté de la femme du Premier Président de Thou :
« Geste bonne Dame... ne changea jamais de Fer-
« miers, ni ne leur aprétia grain ; estans par ce
« moyen tous devenus riches avec elle. « (Lett. de
Pasquier, T. 1, p. 434. — Voy. Aprisagier et
Aprisier.)
variantes :
APRETIER. Lett. de Pasquier, T. I, p. 434.
APPRECIER. Orth. subsist. - R. Est. Nicot et Monet, Dict.
Apreuf, préposition. Après. (Voy.PREUF.) Si l'on
fait réflexion que non-seulement b, mais f, est de
même organe que p, on apercevra la possibilité que
preuf soit de même origine que prob, en latin /«'o;;t^
O'oy ApRoii.) Quoi qu'il en soit, cette préposition
preuf, c'esl-à-dire proche, près, étant précédée de
la préposition o, signifioit (qwès, dans un sens rela-
tif à ridée de deux choses qui s'approchent l'une de
l'autre en se suivant de près, en se succédant.
Un sarouel fist appareillier,
Lez la messière du monstier,
A meilre apreuf sa mort son cors,
Sous la goutiere de deffors.
Rom. de Rou, MS. p. 159.
Apriiner, verbe. Opprimer, accabler: ou appro-
cher, incommoder. Peut-être que dans un sens rela-
tif îi celui du verbe latin premere, A'ovi le compo.se
opprimere, en françois apprimcr, on aura désigné
l'incommodité d'une chaleur accablante, en disant
qu'elle aprimoit.
Enz en un bois espès, ramu,
Sont entrées, moult bien foillu.
Li chauz les vait moult cprimciit, etc.
Fabl. MS. de Beruc, n- 354, fol. 150, V* col. 2.
AP
Peut-être aussi que le verbe aprimer dans ces
vers désigne l'incommodité de la chaleur qui appro-
choit etcommençoit à devenir insupportable. Alors,
il seroit une variation d'orthographe du verbe
aproismer qu'on écrivoit aprismer, aprimer, etc.
(Voy. Aproismer.)
Aprisagement, subst. masc. Evaluation, esti-
mation. Signification relative à celle du verbe apri-
sagier. (Voy. Aprisagier.)
VARIANTES :
APRISAGEMENT. D. Carp. supp. Gl. 1. de D. C. à Apjn-essio.
Apprésagement. Id. ibid. Tit. de 1334.
Aprisagier, verbe. Evaluer, estimer. Dans le
sens étymologique, mettre à prix une chose, la fixer
à certain prix, en l'évaluant, en festimant. (Voy.
Aprétier et Aprisier.) La signification d'aprisagier
étoit évaluer, estimer, lorsqu'on disoit : « Par vertu
« dicelles lettres... eust fait a/jnsa(/i«' les arrérages
« h certaine somme de deniers, contenue au dit
« aprisagement. » (D. Carpentier, suppl. Gloss. lat.
de Du Cange,T.l,col.255.) « .Nous vous mandons...
<. que... vous faciez apprésagier les diz domma-
« ses. » (Id. ibid.) ■■ Lesquelx blés... apresagiez
« valoir en somme en revenue de terre, la somme
« de XX livres de terre par an, etc. » (Id. ibid. —
Voy. Aprisagement.)
VARIANTES :
APRIS.\GIER. D. Carp. suppl. Gl. de Du C. à Appressio.
Apprésagier. Id, ibid. au mot Apprettare ; Tit. de 1334.
Apprisagier. Id. Mem. de la Ch. des Comptes de Paris. -
Aprésagier. Id. ibid. Tit. de 1376.
Aprisier, verbe. Apprécier. (Voy. Aprétier et
Priser.) On prise les choses plus ou moins qu'elles
ne valent; dans le prix qu'on y met, il y a souvent
de l'arbitraire : mais les apprécier, c'est en propor-
tionner le prix à la valeur réelle. Telle étoit la signi-
fication du verbe aprisier, (ovmé comme aprisagier
du substantif prix ou pris, en latin precium ou
pretium, lorsqu'en parlant de choses dont la valeur
réelle ne pouvoit être appréciée, on disoit :
... On ne poroit aprisier
Sa valor, ne sa dignité :
Car je vos dis par vérité
K'ilh est de pierres précieuses, etc.
Prison d'Amours, MS. de Turin, fol. 18, V col. 2.
Aprismement, subst. mase. Action d'appro-
cher. On observera (lue du verbe latin approximare,
s'est formé le français aproismer ou aprismer, de
même oi-igineet de même signification qu aiirocher.
(Voy. Aprociier.) De là le substantif aprismement,
dans le sens d'approcbement, l'action d'approcher,
lorsqu'en « disoit avoir aprismement à une per-
ce sonne » pour l'approcher.
.\insi vet de la poure gent ;
S'aus riches ont aprismement,
Forment les cuident corroucier,
Domage faire et anuier.
Fabl. MS. du R. n- 7615, fol. 85, R' col. l.
Aprison, subst. fém. Enseignement, instruction.
(Voy. Apprisere.) On indiquera le sens propre du mot
simple prison, en observant que le composé aprison
pourroit avoir signifié prise. (Voy. Prison.) La signi-
AP
- 89 —
AP
fication de ce même composé aprison, instruction,
enseignement, est figurée dans ces vers, où on lit
que Richard I" roi d'Angleterre, voulant faire
assassiner Philippe-Auguste son ennemi :
Faisoit enfanz endoctriner,
Pour lui ocire et afiner.
Qui jà ièrent touz embarniz (1),
Et de tele aprisoit (2) garniz,
Que chascun d'eus homme oceist,
Tel con son Mestre li deist.
G. Guiart, MS. fol. 39, R°.
Aprissance, subst. féni. Prééminence. Ce mot
flpn'ss«»f? qui dans une traduction de Lettres de
Charles V, en faveur des bourgeois de Paris, répond
au \Siiin pi'eeminencia, n'est probablement qu'une
altération à'apparoissance pris dans le sens de
prééminence, avantage avec lequel on paroît supé-
rieur aux autres. « 11 appartient à Haultesse royale
« que elle eslieve de plus large honnour et apris-
• sance (3), ceulx envers lesquielx elle a ordonné
« principalement la chaere de sa proppre Majesté. »
(Ord. T. V, note, p. 418. — Voy. Apparoissance.)
Apriver (s'), verbe. S'apprivoiser, se familiari-
ser. (Voyez Priver.) On observe que le mol privus,
dans lequel on croit voir le principe de la formation
des verbes françois priver, apriver, aprivoiser, étoit
en latin de même signUicalion que si iigulus nnicits.
(Voy. Martinius, Lexic. philolog.) Il y a des antipa-
thies naturelles entre les animaux : ceux dont
quelque cause altère et adoucit réciproquement le
naturel antipathique, deviennent uniques et singu-
liers dans leur espèce, en vivant privémenl ensem-
ble et familièrement. C'est peut-être relalivement
à ce sens étymologique, qu'en parlantd'un chien et
d'un loup que la faim nécessitoit à vivre l'un avec
l'autre, on a dit qu'ils s'aprivoieut, et qu'aujour-
d'hui l'on diroit qu'ils s'apprivoisent. (Voy. Apri-
voiser.)
Li chiens va o le leu muiant;
De commune proie vivant,
Chien et leu se vont aprivaiil,
Tant li'ensamble font leur covine (4), etc.
Dit de Charité, MS. de Gaignat.fol. 221, R" col. 1.
Aprivoiser, verbe. Apprivoiser, rendre privé
et familier (5). (Voy. Aprivoisir.) Peut-être qn'apri-
voiser ou apprivoiser un animal, le rendre privé
en adoucissant son naturel farouche, c'est le rendre
unique et singulier dans son espèce, par la docilité
avec laquelle il obéit à l'homme qu'il reconnoit
pour maître. (Voy. Apriver.)
Hours, liepars et lions, leu, guerpil, singe et chien
Donte l'en bien par nature et aprivoise on bien.
Fabl. MS. du R. n- 7615, fol. 140, V- col. 1.
Il paroît qu'anciennement « s,' aprivoiser de
<• quelqu'un, » c'étoit se familiariser, se rendre
avec lui un peu trop privé, être avec lui d'une fami-
liarité singulière et unique.
Faux-semblant, dist Amours, dy moy :
Puisque de moy tant i'uprivoij, etc.
Rom. Je la Rose, vers 12703 et 12704.
VARIANTES :
APRIVOISER. Fabl. MS. de S' Germ. fol. 140, V» col. 1.
Aprevesier. Dit d'Amours flnes, MS. de Turin, fol. 11.
Aprivoisir (s'), verbe. S'apprivoiser. (Voy.
Apprivoiser.) Dans le sens du verbe aprivoiser, chan-
ger le naturel farouche d'un animal sauvage, on a
dit :
S'aprivoisisI mainte beste sauvage...
L'un par douceur, l'autre par oultrage
Que l'en leur fait, changent condicion.
Ainsi est-il, selon m'entencion
En l'aage humain de mainte créature
Qui par doucour ou par contempcion
Mue souvent et change sa nature.
Eust. Deschamps, poc-s. MSS. p. 29, col. 4 et 30, col. l.
Aprob, préposition. Auprès. Après. (Voyez
Apreif (6).) Lorsqu'on sait que p, b et f, comme let-
tres de même organe, se substituent les unes aux au-
tres, que /■ est l'adoucissement de l'aspiration h, que
parmi quelques peuples // se prononce ch, et que
cette prononciation étoit même particulière aux
anciens Francs; on n'est plus étonné que la prépo-
sition latine propê soit l'origine de la préposition
françoise proche : préposition que par le change-
ment de la voyelle o en eu l'on écrivoit quelquefois
preiif, et prob dans le langage des pays Méridio-
naux. De là, la préposition "composée fl/;)'o6 qui
signifioit proche, auprès.
Coms (7) fo de Roma, e ac (8) ta (9) gran valor (10)
Aprob Mallio lo Rei Emperador, etc.
Fragm. de la Vie de Roèce, MS. de S. Benoîl-sur-Loire, p. 270 (H).
La signification à'aprob est la même que celle
à'apreuf, après, dans cet autre passage :
Quan veng la fis (12) Mallio Torquator,
Donc (13) venc Boeci ta (14) grand dolors al cor,
No cuid (15) aprob altre dois (IC) li demor.
Fragm. de la Vie de Boùce. MS. îibi supra.
Qu'on nous permette de hasarder ici une idée
absolument différente de celles des Etymologistes
latins, sur l'origine des verhesprobare et approbare.
Il seroit possible que ces verbes, dont on a fait en
françois prouver et approuver, dérivassent comme
prob et aprob, de la préposition propè qui, dans le
sens étymologique indiqué par Martinius et Vossius,
signifie pro pedibus, aiitè pedes. Alors, prouver une
chose à quelqu'un, ce seroit l'approcher de lui, au
(1) Dans des lettres de rémission de 1447, pièce 581 du registre JJ. 176 du Trésor des Chartes, on lit : « La mère d'iceUe
Magnon s'aperceut que sa fille embaj-yussoit et engrossissoit de corps. » Le sens est donc; devenus gros et grands ; la
racine est la même que celle de baron, banmge (voir ces mots), (n. e.) — (2) Ce mot a été fait sur le participe appris, de
apprendre. (N. E ) — (3) Le sens estime est suffisant, apprissa>7ce venant àe priser, (n. e.) — (4) association. — (5) Ce mot,
dérivé du précédent, vient d'un adjectif fictif pm'ois, en latin privensis, dérivé lui-même de privits. Le n tombe dans ces
formes en ensis, et le c long devient oi : niensis, mesis, mois. etc. (N. E.) — (6) La forme apreuf (aprof au vers 1577 de la
Chanson de Roland), qu'on écrivait plutôt apriief, vient Ijien de propè; Vo bref s'est écrasé en ue. Ye final est tombé, et le p,
comme c'est la tindynce générale des consonnes finales, s'est renforcé en f: de même sepes a donné .soî/' (haie); capul,
chef ; mais 1' forme provençale devrait être aprop, et non aprob, ce qui embarrasse l'étymologiste. (N. e.) — (7) Comte. —
(8) Eut. — (9) Tant. — (10) Crédit. — (11) M. P. Meyer vient de pubher, à la librairie Franck, un recueil de textes bos-latins
et provençaux : la Vie de Boèce, qu'il a revue et corrigée sur le manuscrit, s'y trouve, et doit seule être consultée, (n. e.) —
(12) Fin, mort. - (13) Alors ; en latin tune. - (14) Tant. - (15) Que je ne crois pas que, etc. - (16) Douleur.
II. 12
AP
— 90 —
AP
propre la melire à ses pieds, et par conséquent sous
ses yeux, pour qu'il la voie et la recounoisse.
Approuver une personne ou une chose, dans la
significalion d'éprouver, ce seroit les approcher de
soi pour les voir et les connoilre, pour avoir l'idée
de ce qu'elles sont et de ce qu'elles valent. Enlin,
les approuver, dans le sens contraire à celui des
verbes désapprouver, reprouver, ce seroit les juger
agréables, utiles et bonnes, d'après l'idée qu'on
peut s'en faire en les approchant de soi pour les
voir et les connoilre ; ou les approcher de soi, s'en
approcher d'après une idée, un jugement qui pré-
céderoil l'aclion d'approcher, et dont cette action
seroil pour lors le signe et la conséquence, ^otre
conjeclure sur le principe des significations et de
la formation des verbes prouver, approuver, désap-
prouver et reprouver, paroitra peut-être d'autant
plus vraisemblable, que nécessairement on se figure
l'esprit opérant de même manière que le corps, et
qu'un moyen aussi simple que naturel de voir et de
connoilre corporellement, c'est d'approcher de soi
les personnes ou les choses. De lîi, sans doute,
l'identilé de signification des verbes reprouver et
reprocher. (Voy. Reprocher et REPRorvER.) On trouve
aussi qu'aprocher a signifié approuver dans le sens
de prouver. (Voy. Approuver et Aprocher.)
Aproclie, sitbst. fém. Approche, action d'appro-
cher. L'origine de ce mol aproclie ou approche (1),
est sans doute la même que celle de la préposition
aprob. (Voy. Aprob.) Si l'on fait réflexion que la
préposition simple proche ne semble être adjectif el
substantif, que parce qu'en disant « maisons pro-
« ches de la rivière, un de mes proches, » on fait
ellipse de qui sont, on reconnoitra la possibilité
qu'approche soil réellement une préposition com-
posée el de même origine qxi'aprob, quoiqu'elle
paroisse être un substantif dans noire langue.
(Voy. Proche.) Il résulte de cette observation , qu'au
moyen d'une métonymie par laquelle, en exprimant
ce qui suit, on désigne ce ([ui précède, le mot apro-
che ou approche, fût-il préposition, peut avoir
signifié comme substantif, le mouvement ou la
position d'après lequel une personne ou une
chose se trouve proche d'une autre. Ainsi, l'accep-
tion encore usitée d'approche , éloit la même
que celle d'approchement, l'aclion d'approcher.
(Voy. ApRociiER.)
De là, on a nommé aproches en général, une
aproclie d'assiête, les tranchées el autres travaux
par lesquels on approchoil du corps d'une place
qu'on assiégeoit ; les machines et l'artillerie qu'on
approchoil des murailles de cette place, ou avec
lesquelles on s'en approchoil.
. . . Firent de grans escarmouches
Sans cesser, presque tous les jours,
BastiUes, bollevers, approuches,
Affin qu'il n'y entrast secours.
Vigil. de Charles VU, pari. I, p. 94.
Coitivy pour lors Admirai,
A faire l'api-ouche d'assiette
Eut grant peine, amont et aval.
Ibid. p. 180.
Les approches, en terme de guerre, étoient de
deux espèces ; les aproches découvertes et les apro-
ches couvertes. « On commença... à faire des «pra-
" ches couvertes el découvertes, dont le Bourgeois
« conduisoil une, el Jacques de Chabannes l'autre :
« mais celle du Bourgeois fut la première avancée
« jusques ti la muraille, el puis l'autre arriva, et
<' fui minée la muraille. » (Hisl. d'Arlus III, duc de
Bretagne, p. 788. — Voy. Aprochement.)
VARIANTES :
APROCIIE. llist. d'Artus III, Duc de Bret. p. 788.
Approuche. Vigil. de Charles VIT, part, i, p. 94.
Aprouche. Ibid. p. M.
Aprochement, subst. niasc. et fém. Action
d'approcher, approche. Lieu, position où l'on est
après s'être approché. Anciennement, aprocher à
une personne, ou avoir aprochement h elle, signi-
fioit s'approcher d'elle, rapprocher. « Par ti ayens
« aprocliement al fil, ô lu bien-aurouse troveresse
« de grâce. » (S' Bern. Serm. fr. mss. p. '21. — Voy.
Aprocher.) Le participe féminin de ce verbe aprocher
signifioit par ellipse d'un substantif de même genre,
le mouvement par lequel on approche de quelqu'un,
on s'avance vers lui pour le rencontrer, l'attaquer.
Les Angloys, amont et aval,
Firent des fossez et tranchées,
Affin (jue les gens de cheval,
Ne feissent sur eubc aprouchées.
Vîgil. de Charles VU, part. II, p. 86.
Sous l'idée A' aprochement, action d'approcher,
mouvement par lequel on s'approche, étoil voilée
l'idée du plaisir vers lequel ou s'avance en obéissant
h la Natiire el à l'amour. « Si de aprecement à
« femmes demandés, sacés que dès ier e de avant-
« ier nus eimes guardez. » (Livres des Rois, ms. des
Cordel. fol. 28.) L'expression étoil moins modeste,
lorsqu'on disoit, « connoilre une femme par char-
« nel aprecement. « (Ibid. fol. 76, V" el 77, R°.)
Quelquefois ce qu'on nommoil aprochement
d'amour, étoil un signe démonslralif de l'amitié
qui nous invile h nous approcher, à nous rappro-
cher les uns des autres. « Si eut \h grans approche-
« mens el grans recongnoissances d'amour, quand
« ils se trouvèrent tous ensemble. » (Froissart,
Vol. I, p. 3G3.) « Envoyoit le Roy de Portugal au
« Duc et à la Duchesse... de beaux mulets blancs...
» et avecques ce grans salus et grands approche-
« mens d'amour. » (kl. Vol. III, p. 131.)
En termes de guerre, « {m'e\esapproche7nents »
d'une place qu'on assiège, en faire les approches,
c'éloit s'en approcher à l'aide des tranchées et des
machines , s'en approcher avec l'artillerie qu'on
faisoit avancer vers les murailles de la place assié-
gée. « Ils pressèrent fort la ville de fossez el d'ap-
« prochements. » (Berry, Chron. depuis 140'2-1461,
(1) Approche \ient de ad et pi-opius, comparatif de propè. Propius est devenu propjus, et, comme p était une consonne
forte, j s'est transformé en ch; approcher est dérivé d'approche; il n'est pas besoin de la longue discussion que le lecteur
rencontrera plus loin. (n. e.)
AP
— 91 —
AP
p. 451.) « Firent leurs «p/J/'or/i?/H^HS les François,
« et assortirent canons et bombardes ; et firent de
B grands approuchemens de jour et de nuit, tant
« qu'à la fin les Anglois, etc. » (Al. Chartier, Hist.
de Charles VI et Charles VII, p. 133.)
Si furent faitz approuchemens
A jetter bombardes, canons ;
Et moult divers habillemens
Pour rompre bastilles et pons.
Vigil. de Charles VII, part. I, p. 182.
Enfin, le mot approchement signifioit le lieu, la
position oîi l'on se trouvoit après s'èlre approché,
s'être avancé, lorsqu'on disoit : « Ils approchèrent
« contre ceulx de la cité.... tellement que on pouvoit
« jetter une pierre, de Y approchement d'iceux Fran-
1 çois, dedens la dicte cité. » (Al. Chartier, Hist. de
Charles VI et Charles VII, p. 113. — Voy. Aprociie.)
VARIANTES :
APROCIIEMENT. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 21.
Approchement. Cotgrave, Oudin, Rob. Estienne, Nicot
et Monet, Dict.
Ai'PROUCHEMENT. Al. Chartier, Hist. de Charles VI, p. 133.
Aprecement. Livres des Rois, MS. des Cordel. fol. 28.
Aprouchement. Vigil. de Charles VII, part, i, p. 225.
Aprouchée. Vigil. de Charles VII, part, ii, p. 86.
Aproclier, verhe. Approcher, s'approcher;
avancer, s'avancer. Approcher, rendre proche.
Assigner à comparoir. Rapprocher, faire reconnoître.
Prouver. On peut voir à l'article aprob, comment il
est possible que de la préposition latine propè, c'est-
à-dire pro pedibus, ante pedes, on ait formé la pré-
position françoise proche, d'où naît le verbe apro-
cher, que par le changement très ordinaire de la
voyelle o en ou, en u et même en e muet , on pro-
nonçoit aproitcher, aprucher, aprecher, etc. L'ortho-
graphe aperchier ou apercher, est conforme à la
prononciation adoucie de pre dans aprecher. On
ajoute, qu'en certaines provinces le peuple prononce
encore aprecher, et avec un e ouvert aprescher.
Enfin, l'aspiration /; à laquelle les anciens Francs,
entr'autres peuples, ont substitué ch, se changeant
très fréquemment en s dans toutes les langues, il
est probable que pour apresclier l'on aura écrit
apresser. On a observé ailleurs pourquoi cette
variation d'orthographe du verbe aprocher est sou-
vent peu facile h distinguer du verbe apresser formé
d'aj»'és. (Voy. Apresser.)
Le sens littéral de la préposition latine propè, en
françois proche, étant reconnu, l'on aperçoit par
quelle analogie le verbe aprocher ou approcher a
signifié et signifie encore une idée générale de
mouvement e"t de position, au moyen desquels on
se trouve près, auprès d'une personne ou d'une
chose, devant, à côté, etc. (Voy. Aproismer.)
Il est évident que dans le verbe composé aprocher,
la préposition a est de même énergie qu'en cette
ancienne expression « procher à une personne, se
« procher à elle, » lorsqu'on dit l'ajtprocher. (Voy.
Procher.) « Saul sur sa lance s'apuiout ; e les curres,
«e feschiele des Chevalers Vaprucout , etc. »
(Livres des Rois, ms. des Cordel. fol. 41, R° col. 1.)
« Se le cerf est froyé, neVaprouche m\e. » (Modus
et Racio, MS. fol. 2G, V°.)
On exprimoit deux fois un rapport suffisamment
indiqué par la préposition initiale A'aprocher, en
disant aprocher à une personne, à une chose..
« Por ceu vint en cest munde li soloz de justice...
« ke tuitcil k'enlumineit vorroient estre, aproches-
" sent h lui. « (S' Bern. Serm. fr. mss. p. 71.)
« Aprocheons h la taule (1), et d'un chascun de ces
« maz assaverons (2). » (Id. ibid. p. 350.) « Li Pru-
« veire ki sacrefiouent es munz, ne se apriichonent
« pas al altel Nostre Seigneur en .lerusalem. »
(Livres des Rois , ms. des Cordel. fol. 151 , R" col. 1.)
C'est avec même inutilité qu'en substituant vej's
ou de à cette seconde préposition A, l'on a dit :
« Cume Golias vers David apruçad, David curut
« encontre. » (Livres des Rois, ms. des Cordel. fol.
23.) Cl La Dame aprescad vers celé compaignie. »
(Ibid. fol. 33.) « David vers le Reis s'fl7;resd;rt(/, etc. »
(Ibid. fol. 32, R°col. 1.)
. . . Tant par grâce s'apressa
De nous, qu'en luy nous ennexa,
Sans jamais faire départie.
J. de Meun, Tesl. vers 1251-1253.
Dans un sens relatif à l'idée du mouvement par
lequel on aproche en s'avançant vers les personnes
ou vers les choses, on a dit figurément : » Li termes
« del coronement rt;;roif«, et fu coronez, etc. »
(Villehard, p. inS.) « Ala totejor parmi la foresl....
« et quant il vit que li vespres aperçoit, si comença
« à plorer. » (Fabl. ms. du R. n° 7089, fol. 78.)
Quoique ce verbe désigne encore aujourd'hui
l'approche du temps et des'événemens qu'il amène
à sa suite, on ne diroit plus dans la signification
active d'avancer, qu'on « approche une affaire, un
•< voyage, etc. » (Voy. Ord. T. I, p. 6i3. — Ger. de
Nevers, part, i, p. 1Ô2, etc.)
Dans la signification d'approcher, faire qu'une
personne ou'qu'une chose soit proche d'une autre,
on a désigné la familiarité, la faveur auxquelles on
étoit admis auprès de son maître, en disant qu'on
en étoit aproché. « Le Trésorier Robertel . . . gou-
« vernoit tout le Royaume ; car depuis (jue M. le
« Légat d'Amboise mourut, c'estoit Ihommeleplus
« aproché de son maistre. » (Mém. de Rob. de la
Marck, Seigneur de Fleuranges, ms. p. 218.)
Une façon très-naturelle de comparer les person-
nes ou les choses, c'est de les approcher, de poser
ou mettre l'une devant l'autre , de mettre l'une à
côté, auprès de l'autre. De là, on a dit : « Ce ne sont
« certes que roses de vostre accident, si vous
» Vaproche%, et en faictes comparaison avec ma for-
ci tune. » (L'Amant ressusc. p. 504. — Voy. Aproprier.)
Sans doute que relativement à la même accep-
tion, le verbe aprocher aura signifié en style de
procédure encore usité dans la plaidoirie Normande,
assigner quelqu'un à comparoir devant un .luge, le
mettre en Justice, le meltre pour ainsi dire devant
le .Juge. « Que noz Railliz, Prevoz et autres Justi-
« cieVs, de leur volonté ne de leur office, ne puis-
Ci) Table. - (2) Goûtons.
AP
— 92 —
AP
« sent aucun a/);;?'odi/('c sans aucun fait, détenir,
» ne emprisonner. » (Ord. T. 1, p. ôGi.) « Que au-
« cuns ne soit ajiprueltie~^d'oU\ce, sans information
« soufllsant. » (Ibid. T. 11, p. 407.)
On indiquoit la raison de l'assignation à compa-
roir devant un Juge, en disant qu'on aprochoitune
personne sur le fait d'usure , qu'on « Yaprochoit
« d'un fait en général, qu'on Vaproclioit de coinp-
•' ter, d'abuser d'un privilège, etc. » (Voy. Ord. T. 1,
p. 299. — Coût. géii. T. 1, p. 1043. - Ord. T. 1,
p. 775. — La Tliaumassière, Coutume de Berry,
p. 430, etc.) " Aucun des Mestres ne pourra aucune
« personne upprochiev de ce dont la congnoissance
« li appartiendra, jus(iues à tant qu'il en soit bien
« enfourmé. » (Ord. T. 11, p. 24G.)
Peut-être aussi qu'en plusieurs cas judiciaires
ou non judiciaires, ■^^ aprocher d'un fait » la per-
sonne qu'on soupçonnoit ou qu'on savoit eu être
coupable, c'étoit en quelque sorte la rapprocher de
ce même fait, le lui faire reconnoitre en la rappro-
chant des lieux, des temps el des circonstances qui
pi-ouvoient qu'elle en étoit coupable. « Que l'en ne
« puisse, en cas de crime, aller encontre les Nobles
« par dénonciation, ne par soupe(;on, ne eus juger
« ne condampner par enquestes, se il ne s'y met-
« tenl; jaçoit . . . ([ue la souspeçon pourroit estre
« si grant et si notoire que li souspeçonnez contre
" qui la dénonciation seroit faite, devroit demeurer
« en l'hoslel de son Seigneur... une quarantaine....
« et se en ce termine aucun ne Vajijirocluiit du
« fait, etc. » (Ord. T. I, p. 558.) « Leur plaise uions-
« trer au Roy que il ne veuille se esmovoir envers
« Monseigneur, ne tant Yaprocher de ce qu'il tient
« des Anglois en sa compaignie. » (D. Lobineau ,
Hist. de Bret. T. 11, pr. col. 581.) C'est au contraire
le fait qui est rapproché et mis sous les yeux du
coupable, lorsqu'on le lui reproche. (Voy. Raprociier
et Reprocher.)
Enfin, " approclier son droit, » c'étoit le prouver,
le mettre sous les yeux de celui à qui on vouloiten
faire connoitre la justice. « Enseigner ceaus que
« mester en auront, el auront droit et le requerront,
« de savoir le «yjî'oc/ricr el desreigner ; et à ceaus
« à qui l'on requerra ce que estlor droit, desavoir
« les esloigner et deffendre. » (Assises de Jérusa-
lem, chap. V, p. 16. — Voy. Aprob.)
CONJIG.
Aprecerum, ind. f. Approcherons. (Livres des R.)
Apresçad et Apreschad, passé déf. Approcha. (Ib.)
Aprochessent, sub. imp. Approchassent. (S" Bern.î
yl/»7/('/(«HiHs,passé déf. Approchâmes. (Liv.desR.)
Apruclioiient, ind. imp. Appiochoient. (Ibid.)
Aprucled, part. Approché. (Ibid. fol. 130, R".)
Aprucoud, ind. imp. Approchoil. (Ibid. fol. 41.)
VARIANTES :
APROCHER. S- Bern. Serm. fr. MSS. p. 71.
Apercer. Fabl. MS. du R. n" 7989, fol. 78, V» col. 2.
Aperchier. ilodus et Racio, MS. fol. 163, V».
Appresser. J. de Meun, Test, vers 1251, etc..
Approcher. Orth. subsist. — Rob. Estienne , Nicot et
Monet, Dict.
Approchier. OrJ. T. I, p. 562, etc.
Approucher. J. Marot, p. 57, etc.
Approuchiek. Ord. T. III, p. 138, etc.
Aprescer. Livres des Rois, MS. des Cordel. fol. 33, V».
Aprescher. Ibid. fol. 32, R» col. 1.
Aprocer. Villehard, p. 26.
Aprochier. Assises de Jérusalem, chap. v, p. 16, etc.
Aproicer. Villehard, p. 108.
Aproucher. Modus et Racio, MS. fol. 26, V", etc.
Aprouchier. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 181, col. 1, etc.
Aprucer. Livres des Rois, MS. des Cordel. fol. 23, R' col. 3.
Aprucher. Ibid. fol. 53, R» col. 2.
Apruchier. Modus et Racio, MS. fol. 332, V».
Aprucier. Livres des Rois, MS. des Cordel. fol. 130, R° col. 2.
Apruecher. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 13, R» col. 1.
Aproismer, verbe. Approcher, s'approcher.
Lorsqu'on sait que de propè les Latins ont fait le
superlatif yjrox/Hie, d'oîi le verbe approximare, en
françois aproismer, aprismer, aprimer, apremier,
apermcr, on ne s'étonne plus, qu'abstraction faite
de l'idée superlative, le verbe apruismer, de même
origine qua])rocher, ait eu même signification.
Aussi disoit-on indifféremment aprocher ou aprois-
mer les personnes et les choses, aprocher o\i aprois-
mer à elles, s'aprocher ou s'aproismer d'elles, etc.
(Voy. Aprismement et Aprocher.)
La Dame, quant le vit venir,
Isnelement prent à fuir ;
Le S' hom le vait enoauchant,
Auques le va jà aproisinaiit.
Vie de S" Marie ÉgypI. MS. de Sorb. chif. LXI, col. 21.
Tout li moisnet (1) dehors estoient
Qui au blé aproismier n'osoient.
Bestiaire, MS. duR. ii" 7989, (ol. 181, V" col. 2, fabl. 83.
Delez l'erabuchement passèrent ;
Mes onques point n'i aperinèrent.
Alliis, MS. fol. 95, R- col. 2.
Et empoisonne et envenyme
Tout homme qui de luy s'aprime.
Rom. de la Rose, vers 17iG4 et 17465.
Au figuré, « s'«ion)H.er aux raisons » de quelqu'un,
c'étoit approcher de lui par la façon de sentir et de
raisonner, se rapprocher du sentiment d'après
lequel il raisonnoit. « Les raisons qu'ilz y mettent
« sont moult courtoises ; et toutesfois je ne m'y
<> pourroye pourtant aprimer : car l'ardeur de mon
" amour, etc. >■ (Percef. Vol. VI, fol. 102, V° col. 2.)
C'est encore relativement à la signification pro-
pre d'approcher deux personnes fune de l'autre,
qu'on a dit :
A tant leva un mal talenz
Entre les pères as enfanz...
Geste chose fist destorber
Les deus enfanz à assembler.
D'eus aprimer par mariage.
Pyrame et Tisbé, MS. de S. Germ. fol. 98, R' col. 3.
VARIANTES :
APROISMER. Ph. Mouskes, MS. p. 509.
Apermer. Athis, MS. fol. 95, R° col. 2.
Approimer. Froissart, Poës. MSS. p. 196, col. 2.
Apremier. Rom. de Rou, MS. p. 112.
Apresmier. Ibid. p. 71.
Aprimer. Ibid. p. 94. - Rom. de la Rose, vers 17465.
Aprimier. Rom. de Rou, MS. p. 60.
APRI3.MER. Floire et Blanchetlor, MS. do S' Germ. fol. 197.
Aprismier. Fabl. MS. du R. n" 7615, fol. 79, V» col. 2.
(1) Moineaux.
AP
93 —
AP
Aproimer. Bestiaire, JIS. du R. n» 79
Aproismier. Ph. Mouskes, MS. p. 69
[», fol. 164, V» col. 1.
Api'ompt, part. Emprunté. Dans le sens qu'in-
dique rélymologie la plus vraisemblable de promp-
IHS, participe du verbe //roinere, une chose que /rti
aprompte, est une chose que j'ai fait mienne, en la
prenant de celui qui consent à ce que j'en use
comme d'une chose ù moi, et par conséquent tou-
jours prête pour mon besoin. ^Martinius, Lexic.
philolog. — Vossius, Etym. Liug. lat.) On voit par
cette définition, quelle pourroit être l'analogie de
la signification de l'adjectif prompt , prêt à faire
une chose, avec celle du participe aprompt, em-
prunté. « Obligacion ... est vestue ... de chose,
« quaunt ascune chose est aprompt de rendre à
« certeinjour; et par ceux enpromptz sount les
« dettours obligés as creaunsours de mesme les
« choses apromptes rendre en ausi bon point , ou
« en meillour, corne il les receurent. » (Britlon ,
des Loix d'Angl. fol. G2, R°. — Voy. Ai'romi'te.)
Aprompte, siibst. Emprunt. Il semble qu'rt-
promple soit le féminin du participe rtyjcoHi/yf. (Voy.
Aprompt.) Peut-être que par ellipse du mot somme,
ce participe aprompte aura signifié comme substan-
tif, la même chose (\\xempriuil. « Poit home dever
« par apromptes de deniers. » (Britton , des Loix
d'Angi. fol. G9, R°. — Voy. Emprunt.)
Apropriement, subst, masc. et fém. Action
d'approprier. Appropriation. L'acception figurée
d'approprU'nwnt ou iVajipropriance, est relative au
sens élymolui;ii|ue du vciiie aproprier, soit que ce
substantif signifie l'acliou d'approprier une chose,
de la rendre propre, de la disposer dans un état de
propreté, ou l'action de se l'approprier, de se la
rendre propre, de-s'en assurer la propriété par des
voies légitimes ou illégitimes. (Voyez Cotgrave ,
Oudin et Monet, Dict.)
En Bretagne, Vapproprianee ou Y appropriement
est non-seulement une acquisition de propriété de
chose immobiliaire par bannie ou par laps de temps,
mais une acquisition de propriété avec affranchis-
sement d'hypothèques. (Voy. Laurière , Gloss. du
Dr. fr. T. l, p. 61. — Coût, de Bretagne, au nouv.
Coût, génér. T. IV, p. 417.) C'est par la raison que
les bannies ou proclamations pour Vapproprianee,
l'acquisition de propriété, purgent les hypothèques,
qu'on a dit: « Àppropriance , en la Coutume de
« Bretagne, est la même chose que Décret parmi
« nous. » (Nouv. Dict. de Droit. — Dict. de Tré-
voux. — A'oy. Aproprier.)
VARIANTES !
APROPRIEMENT. Coutume de Bretagne, au Nouv. Coût,
gén. T. IV, p. 417, col. 1.
Appropriement. Cotgrave, Oudin et Monet, Dict.
Appropriance. Cotgr. Dict. — Laurière, Gloss. du Dr. fr.
Aproprier, verbe. Approcher, rapprocher, assi-
miler, comparer, etc. On croit avec les Etymologis-
tes latins, que de j5ro;>é, proche en françois, s'est
îormé proprium, en françois propre. (Voy. Martinius,
Lexic. philolog. — Vossius, Etym. Ling. lat.) Cette
opinion sur l'élymologie de Vud'ieciU proprium , et
par conséquent sur celle du verbe latin barbare
ajipro/irtare, en françois approprier (1 , est d'autant
plus vraisemblable, que dans notre ancienne lan-
gue il y avoit une analogie réelle entre les signifi-
cations des verbes approcher et aproprier. Il est
évident que l'acception d'approprier étoit relative à
celle d'approcher, rapprocher, réunir en rappro-
chant, lorsque dans le sens de l'ancienne expression
<- raprocher un fief, >■ on disoit figurémenl : « Nous
« avons approprié, unie et annexé , . . . . appro-
« prions, unions et annexons perpétuelement à
« nous, à noz Successeurs et au Domaine de la
« corone de France, etc. » (Ord. T. V, p. 413. —
A'Oy. Aprociier et Raprocher.)
C'est encore relativement à la signification d'ap-
procher une chose de l'autre pour juger quel rap-
port elles ont entr'elles , qnapjiroprier signifioit
assimiler, comparer. « Us avoyenl pris or et argent
« pour rendre Bourbourg ... et vouloyent les au-
>' cuns gens en Angleterre ce fait approprier h
" trahison. » (Froissart, Vol. III, p. 2-2 i.) « Le dain
« et le chevi'el . . . ont cornes, et ycelles représen-
« tent . . . couronnes; pour quoy je puis aproprier
« ces deux bestes aux Empereurs et aux Rois. »
(Modus et Racio, ms. fol. 87, \\)
Les significations actuelles du verbe approprier,
ne sont pas moins analogues que les anciennes à
celle d'approcher, pmsqu approprier les choses, les
ajuster, les approprier, les ajuster h d'autres, c'est
les rapprocher en les comparant, les disposer de
façon qu'elles soient entr'elles dans un rapport
conforme à certaines vues d'utilité ou d'agrément.
L'effet agréable de ces rapports est ce qu'on nomme
propreté.
On ajoute qu'une manière très simple de se pro-
curer la jouissance d'une chose et de s'en assurer
la possession, c'est d'approcher de soi cette même
chose, de l'avoir proche de soi. sous ses yeux, sous
sa main. De lu, le verbe approprier, de même ori-
gine qu'approcher, aura signifié les idées de pos-
session et de jouissance à titre de propriété légitime
ou illégitime. (Voy. Apropriement.)
VARIANTES :
APROPRIER. Modus et Racio, MS. fol. 87, V".
Approprier. Orth. subsist. — Froissart, Vol. III, p. 234.
Apte, adj. Qui a certaine disposition. Qui a cer-
taine proportion. Il est probable que l'orthographe
acte ('2) est une altération du mot apte encore usité
au Palais, et que dans un sens relatif à l'acception
générale du latin aptus, on a désigné une personne
qui n'étoit pas formée au vice, qui n'y avoit aucune
disposition acquise ou naturelle, en disant qu'elle
étoit « non acte et non suspecte de quelque vice. »
(Voy. Hist. de la Toison d'or. Vol. II, fol. 139.)
Lorsque cette même personne étoit formée avec
(1) Quoique ce mot se trouve dès le xuv siècle, il est de formation savante. (N. E.) — (2) Il est probable que acle est la
forme aate : une partie de l'a aura été effacée, (n. e.)
AQ
^ 94 —
AR
les dispositions nécessaires pour trouver le bonlieur
dans la vertu, et ne le devoir qu'à elle-même, on
disoit qu'elle étoil apte de soij-mesmes. « 0 ! toy
« paourc fol et insensé, tu ne sçaiz.... de quelle
« force est la vertu Unliomme ne sçauroit estre
« que parfaitement lieureux, qui est comme tout
« apte de soy-mcsmes, ou qui en soy seul met et
« constitue tout le sien. « (L'Amant ressusc. p. 115.)
Il semble qu'un Chevalier «^e ou aate, étoit celui
qui avoit les dispositions acquises et naturelles pour
tous les exercices de Chevalerie, pour monter à
cheval, pour combattre, etc.
Moult .sont andui bon Chevalier,
Et moult aatc, et moult legier.
Parlon. de Blois, MS. de S' Cxerm. fol. 136, R" col. I.
Ce est Atys li bien ates,
Au pié votiz, au cuisses plates,
Au fier corace, à douz semblant, etc.
Alhis, MS fol. ■32, R- col. i.
Peut-être qu'en prononçant et écrivant apte, l'on
a cru, dans le siècle de l'érudition, franciser pour
la première fois l'adjectif latin rtyjfns qu'on nerecon-
noissoit plus dans les anciennes orthographes ate
et aate. Quoi qu'il en soit, la signification û'aate
étoit évidemment la même que celle du latin aptus,
lorsque pour désigner la juste proportion d'une
chose, on disoit qu'elle étoit aate.
Puis a estroit et bel chauciez
Ses bêles janbes et ses piez.
Chances de soie bien aates (1)
Et bons sorchauz d'escarlates.
Parlon. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 143, R' col. 2.
Notre mot aptitude, qui se trouve dans Cotgrave
et Monet, Dicl. paroissoit au P. Bonheurs un peu
barbare. (Dict. de Trévoux.)
VARIANTES :
APTE. Oitb. subsist. - Essais de Montais^ne, T. II, p. 314.
Aate. Parton. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 1.S6, R» col. 1.
Acte. Hist. de la Toison d'or, Vol. II, fol. 139, Ro col. 2.
Ate. Athis, MS. fol. 72, R» col. 1.
Aquilaine, adj. fém. Terme de Droit. On
observe qu'Aquilius Gallus, contemporain de Cice-
ron et son ami, fut l'auteur d'une espèce de stipu-
lation que par celte raison les Jurisconsultes fran-
çois du xiv siècle, à l'imitation des Jurisconsultes
romains, nommoienl aquilaine, en latin aquiliann.
Quelle que fût la cause d'une ancienne obligation
litigieuse, quelle qu'en fût l'incertitude, on'lixoit
cette obligation par la stipulation aquitaine, qui la
changeoit d'ailleurs en une obligation nouvelle et
verbale dont on étoit quitte et libéré par l'acceptila-
lion. « Par stipulation aquilaine les obligations et
« actions de toutes choses estoient transférées en
« stipulation et novées, et ladite stipulation estoit
« périmée par l'acceptilation. » (Bouteiller, Som.
rur. Liv. I, tit. xli, p. 301t.) ■• Transaction de nou-
« velle stipulation, que les Clercs appellent stipu-
« lation aquitaine,... chose incertaine met en obli-
" galion certaine par lien de paroles. » (Id. ibid.
p. 30G.) « Moyennant certaine transaction que nous
« fismes ensemble par acquilaine stipulation, qu'il
« m'en promist à rendre,... je fis à celui quittance,
« et luy promis que rien ne luy demanderoy-ie. »
(Id. ibid. p. 308.)
VARIANTES :
AQUILAINE. Bouteiller, Som. rur. Liv. I, tit. xli, p. 30'j.
Acquilaine. Id. ibid. p. 308.
Aquilant, adj. Bai ou vite. (Voy. Aquilin.) Il est
probable que relativement à la couleur du plumage
de l'aigle, en latin aquila, ou bien à la vitesse de
son vol, on aura désigné par l'adjectif aquilant (2)
un cheval bai ou vite.
Forqueres point le destrier aquilant.
Rom. d'Aubcry, MS. cité par Du Gange, Gloss. lat. T. I, col. 619.
Aqiiilé, participe. Courbé en bec d'aigle. Dans
la signification particulière de notre adjectif aquilin,
l'on a dit, en parlant de la Force personnifiée,
qu'elle avoit les « ieuls fort pénélrans, le nés aqui-
" lés, et la couleur clere et brune. » (Triomphe de
la noble Dame, fol. 23, V°.)
Aquilin, adj. Qui a rapport à l'aigle. Ce mol qui
par comparaison se dit encore d'un nez dont la
forme a quelque rapport à celle du bec de l'aigle,
s'est dit aussi de la pierre qu'on nomme aujourd'hui
pierre d'aigle, parce qu'on la trouve quelquefois
dans le nid de cet oiseau. C'est peut-être d'après
l'observation vraie ou fausse de Mathiole, qui assure
que sans la pierre aquiline ou pierre d'aigle les
petits des oiseaux de proie ne pourroient éclore,
qu'on s'est persuadé que celle pierre attachée au
haut de la jambe d'une femme, avançoit et facilitoit
remaniement. (Cotgrave et Oudin, Dict. — Voy.
Aquilant.)
Ar, subst. Moitié. On observe qu'en langue Alle-
mande, Angloise, Flamande, etc. le mot lialf signi-
fie moitié; dans le sens général et étymologique
indiqué par Skinner, partie d'un tout. (Voy. Junius,
Elym. Angiic. — Skinner, Elym. ling. Anglic ) Le
changement réciproque de / en r et de r en /, étant
commun à toutes les Langues, il seroil possible que
«r fût une altération de ce mot /irt//", prononcé et
écrit sans aspiration et avec retranchement de la
consonne sifllante f. On peut d'ailleurs fonder cette
conjecture sur l'identité de signification, puisque
dans l'expression Françoise et elliptique deux et
rt?-(3), le mot ar signifie évidemment la même chose
que liatf dans l'expression Angloise •< two pence and
« half-peny; » c'est-à-dire deux sous et moitié de
sou, deux sous et demi. La preuve est que dans les
(1) Acijes vient ici do adaplus, « bien justes ; >< le mot se trouve déjà dans la Chanson de Roland en parlant de destriers,
vers 1651 et 3876 : « E lur cheval sunt curnnt el aate; » il ne peut signifier dans notre exemple rapide, comme le croit Diez,
qui le l'ait venir du nordique al. Dans la Chanson de Roland, même, il peut signifier maniable, bien dressé ; au vers suivant
on voit, en effet, gu'on lâche les rênes aux chevaux ; il faut donc qu'ils soient doriles : enfin on ne peut dire qu'un cheval
courant est presse, ce serait une tautologie trop naïve, (n. e.) — (2) Signifie brun, comme le latin ai/uilua, qu'on trouve
déjà dans Plante : « Staturà non magnà, corpore aquilo : ipsa ea est. » (Pasnus, V, 2,152.) (n. e.) — (3) Xe faudrait-il pas lire
deux et as? As signifierait un, comme au jeu de dés. On trouve d'ailleurs dans les mémoires de François de Scepeaux,
publiés en 1757, au tome II, page 8 : « Il demeura sur l'heure en suspens, et, comme l'on dict, entre cieitx et as. » (n. e.)
AR
- 95 -
AR
Œuvres de Rabelais, édition de Dolet, l'expression
six-blancs, c'est-à-dire deux sous et demi, répond
à celle de deux et ar en ce passage. « Aulx funé-
.' railles du Roy Charles, l'on avoit en plain marché
« la toison pour deux etar. » (Rabelais, T. II, p. 130.)
Il est probable que relativementà l'idée de moitié,
de partie d'un tout, on aura nommé rythme de deux
et ar, une espèce de rytlime où deux ou trois lignes
de semblable longueur et léonines étoient croisées
par une autre ligne qui n'ayant qu'une partie de la
longueur des précédentes, étoit sans doute regardée
comme demi-ligne, moitié de ligne. Voici un'exera-
ple de cette espèce de rythme :
Princes et Roys qui estes hault montez
En royaumes, en ducliez, en contez ;
Du hault degré fault que, les pas comptez,
Ou que à ung sault,
Vous chéez bas, sans que on vous donne assault, etc.
Par abus de l'extension, l'espèce de rythme où ces
deux ou trois premiers vers étoient croisés par un
vers d égale mesure, aura été aussi nommée rythme
de deux et ar. « Une espèce de rytlime... s'appelle
" aeiix et ar, pour ce que deux ou trois lignes de
■< semblable longueur sont léonines, et celle qui
« croyse est plus courte; ou de semblable lon-
-• gueur. .. (Fabri, Art de Réthorique, L. II, fol. 23.)
Arabe, subst. fém. Arabie. (Voy. Akabiant.) Pays
d Asie dont on altéroit le nom latin Arabia, en écri-
vant Araibe, Arabe, Arable, etc.
Ematite
Ke de vertu n'est pas petite,
D'Ethyope r'est aportée.
Et d'Afabe o ele est née.
Marbodus, de Gemni. art. xxxii, col. 1CG4.
H est possible que Arage soit formé d'Arabia,
comme le mot rage du latin rabies, et que relative-
ment à l'idée de l'Arabie heureuse si riche en mines
d or et d argent, on ait désigné d'immenses riches-
ses par l'expression grand trésor A' Arage (1).
Li plus rice sont si tenant ;
Ce sont cil ki or vont cloant ;
Parmi lor grant trésor d' Arage
Muèrent de faim et vont à rage.
Ane. Poèt. fr MSS. avant 1300, T. IV, p. 1355.
variantes:
ARABE. Marbodus, de Gemm. art. viii col 1G48
Arable. Fabl. MS. de S' Germ. fol. 1, Ro col 3 '
Arage. Ane. Poët. fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1355
Araibe. Marbodus, de Gemm. art. 1, col 1640
Arrabe. Pb. Mouskes, MS. p. 134.
Ai-al)ech, adj. Qui est propre aux Arabes C'est
avec ellipse du substantif langage, que Montaigne
parlant de son éducation, disoit : « J'avois plus de
" SIX ans avant que j'entendisse non plus de
« François ou de Périgourdin, que à' Arabesque »
(Essais de Montaigne, T. I, p, 205.)
Irbougua bûcha Nassardin :
Si h a dit en son latin,
C'est-à-dire en Arabech, etc.
G. Machault, prise d'Alexandrie, MS. p. 230, R- col. 1.
En sous-entendant le substantif ornement les
Peintres et les Sculpteurs ont désigné et désignent
encore par l'adjectif Arabesque, une espèce d'orne-
mens propres aux Arabes (2), ces neurons ou rin-
ceaux d'où sortent des feuillages faits de caprice, et
dans le goût des Arabes. (Voy. Cotgrave, Dict.)
VARIANTES :
ARABECH. G. Machaut, prise d'Alexandrie, MS n 230
Arabesque. Essais de Montaigne, T. I, p. 265.
Arabeis, subst. masc. plur. Arabes. Les habi-
tans de 1 Arabie; en latin Arabes.
Evax fut un multe riches Reis •
Lu règne tint des Ambais.
Marbodus, de Gemm. prolog. col. 1638.
VARIANTES '.
ARABEIS. Marbodus, de Gemm. prolog. col 1638
ARAB.4IS. Id. ibid.
Arabi, adj. Qui est d'Arabie. Rapide. Les che-
vaux qu aujourd'hui l'on nomme Barbes parce
qu ils viennent de Barbarie, sont de race Arabe de
la race des chevaux qu'anciennement on nommoit
Arabts.
Cbevaulx d'Espaigne et Arabis.
Rom. d'Athis, iMS. cilé par Du Cange, Gl. 1. T. III, col. 120.
On écrivoit arabis au singulier, comme le prou-
vent les deux vers suivans où ce mol semble exuri-
mer la rapidité du cours d'un fleuve, comparée à H
vitesse de la course d'un cheval arabi. Peut-être
aussi qu en ce sens arabis est l'adjectif latin ravi-
dus, rabidus, avec l'« emphatique.
Entr'aus et la terre as formis
Qeurt un llueves molt arabis.
Bestiaire de la Div. Escrit. MS. du R. u» 7989, fol. 195, V col. 1.
VARIANTES :
ARABI. Du Cange, Gloss. lat. T. III, col 3i3
Arabis. Bestiaire de la Div. Escrit. MS. du R. fol. 195.
Ambiant, adj. Qui est d'Arabie. (Voy. Arabe)
L or le plus estimé aujourd'hui est l'or d'Asie, que
nos anciens Romanciers paroissent avoir nommé
or Un arabiant, parce qu'un des pays d'Asie le plus
fécond en mines d'or est l'Arabie heureuse, que
les relations des croisades avoient sans doute fait
connoilre.
En une balancetes d'orfm arrabiant
A mis loel Aristotes : quant ot fait son talant, etc.
Rom. d'Ale.\andre, MS. du R, n" 6987, fol. 208, R" col. 2.
VARIANTES :
ARABIANT. Du Cange, Gloss. lat. T I col 873
Arrabiant. Rom. d'Alex. MS. du R. n" 6987, fol. 208
Arrabien. Lanc. du Lac, T. I, fol. 73, V» col. 1.
Arabie ftf/jf-. Arabique. L'adjectif arabique, qui
est aujourd hui de tout genre, étoit anciennement
le féminin cVarabic. (Voy. Cotgrave, Dict.)
Arabiois, adjectif. Qui est propre aux Arabes.
(Voy. Arabech.) u Salam, c'est Diex en la langue
« Arabioisse. » (Ilist. de Charlemagne, ms. de la
Clayette, p. 93, col. 2.)
Arable, adjectif. Propre à être labouré, qui est
a ^h\btol^'^f!ÊjZZ. t)-\i'ZiX'iron'l San'^l'^ntlâ-^i •'" 'î'^^ '" '^^^^^"'^.^ précédente était douce : de même on
des versets du Coran et non des feumages^lN. e.-^) "^^"^^ ^ «"'"I""^ greco-romame ; Varabesque arabe, d'aiUeurs, entrelace
AR
96 —
AR
labourable. Propre îi labourer, qui est de labour.
On a mille preuves que dans quantité de mots où
la lettre finale s est aujourd'hui le signe du nombre
pluriel, cette lettre n"otoil anciennement qu'un
caractère très-ordinaire de ressemblance entre la
terminaison latine et la françoise. C'est ainsi, par
exemple, que d'après le mol latin arabilis, on écri-
voit au singulier arables. (Voy. Gloss. du P. Labbe,
page 489.)
Il y a sans doute moins de raison que de caprice
à préférer l'expression terres labourables, à l'an-
cienne expression terres arables, qu'on trouve dans
Cotgrave, Oudin, Nicot et Monet, Dict. iD. Lobineau,
Hist. de Paris, ï. V, pr. p. G32, col. 1, etc.) Un de
nos anciens Poêles, comparant la Vierge mère à une
terre féconde sans labour, disoit qu'elle éloil terre
non arable. (Voy. Arer.)
Tu es la terre non arable,
Vierge sacrée et vénérable :
En toy s'est fait œuvre admirable,
Oultre usaige de Nature, etc.
Crêlin, Poés. p. 32 et 33.
Dans le second sens, on nommoil bœuf arable,
un bceuf de labour, un bœuf propre au labourage.
« Fit publier... que homme de guerre... ne fust si
« hartly de tuer ny faire tuer bœuf arable ny vache
« laiclière. » (Mathieu de Coucy, Ilist. de Charles
VII, p. GIO. — Voy. Ar.^toire.)
VARIANTES :
ARABLE. D. Lobineau, Hist. de Paris, T. V, pr. p. 632.
Ar.vbles. Gloss. du P. Labbe, p. 489.
Ar.\ule. D. Carpentier, S. Gl. 1. de Du C. T. I, col. 268.
Arage, subst. masc. Terre labourable. Terrage.
Campagne. La signification de ce mot arage étoit la
même que celle de l'expression terre arable,
lorsqu'on disoit : « Arages seans en ban et ou
« finage de ladite ville, etc. » (D. Carpentier, ubi
sujyra ; Tit. de 13-24. — Voy. Arable.)
On doute qu'il signifie la même chose dans un
Titre de 1255, où on lit : » Ont donné et octroyé...
« quant que ils avoient... en tailles, en bans, en
« justices grandes et petites, en plaiz généraux,
« en araiges, eu prez, en corvées, en terres gaigna-
« blés, etc. » (Perard, Rec. pour l'IIist. de Bourgo-
gne, p. 483.) Peut-être ces «r«/(/es sont-ils des droits
de teirage, de l'espèce de celui qui paroit indiqué
dans une Charte d'alfranchissement en faveur des
habitans de Bourlemontetde Frebecourt. « Devront
« et paieront les habitans au Seigneur autant
« à'araige comme de denré , de toutes labours
« qu'ils feront es bans et linage de Boullaumonl et
« de Frebecourt. » (Ord. T. VI, p. 631.) On sait que
l'obligation de payer ce droit à'arage (1) qu'en cer-
taines Coutumes on nomme terrage, étoit une con-
dition ordinaire des concessions de terres arables
que les Seigneui-s faisoient ii leurs vassaux.
11 est possible que par extension de l'acception
terre labourable, ce même mot arage ait signifié en
général campagne où on laboure, et qu'en opposant
la campagne à la ville, on ait dit :
Li traïsons tout par tout meuce ;...
Par coi no vile, n'o nrage
Nus ne veut faire mariage
Por grant avoir ne por argent ;
Ains le fait on por honir gent.
Ane. Poèt. Fr. MSS, avant 1300, T. IV, p. 1321.
Peut-être que soubmettre Vairage, c'étoit asservir
leshabitans delà campagne, les soumettre à quelque
espèce de servitude aussi odieuse à l'humanité que
nuisible à l'Agriculture.
Qui Seignourir veult amiableraent,
Et en grâce tenir son héritage ;
De tel douçour doit gouverner sa gent,
Non pas conlr'eul.K user de divers langaige.
Eulx retranchier, et soubmettre {2)Vairage,
Leur fait haïr tel dominacion,
Le lieu fuir, etc.
Eust. Desch. Poës. MSS. p. 30, col. 1.
Peut-être aussi que l'expression « soubmettre
« Vairage, « désigne en ces vers les attentats de la
tyrannie féodale contre la propriété des héritages.
On a la preuve qn'airage, de même origine que
hérage, a signifié héritage. (Voy. Hérage.)
variantes :
ARAGE. D. Carpentier, S. Gl. 1. de Du C. T. I, col. 268.
Airage. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 30, col. 1.
Araige. Ord. T. VI, p. 631.
Aragne, sabst. fém. Araignée. Toile d'arai-
gnée. Espèce d'étoffe claire et légère. Treillis de
fil-d'archal. Quelque différente que soit la termi-
naison des noms aragne et aragnée, il est possible
qu'il n'y ait aucune réalité dans la distinction que
Monet semble indiquer, en opposant aragne, en
latin araneus, à aragnée, en latin aranea (3). (Voy.
Monet, Dict.) Il résulteroit de cette distinction appa-
rente, que le nom françois aragne . originairement
masculin, auroit été fait du genre féminin, par une
erreur dont la terminaison ù'aragne peut être la
cause.
.... Uirmiinc ménagère,
Filant ses rez à l'entour
De la mouche passagère, etc.
D. Florès de Grèce, Épil. p. 8, col. 1.
Pour signifier que la Justice n'est inflexible et
rigide que' l'our le coupable sans argent et sans
faveur, on a dit :
. . . .Tustice est la toile de Vyrahujne
Qui ne retient que les poures chetis :
Les grans larrons laisse aler et aplaine,
En tous Estais et par tous les Pais.
Eust. Desch. poës. MSS. p. 251, col. 3.
L'espèce de métonymie par laquelle le nom de
l'araignée a signifié l'ouvrage même de cet insecte,
une toile d'araignée, paroît d'autant plus naturelle,
que le verbe hébreu dans lequel Ménage croit voir
l'origine assez vraisemblable du nom aragne ou
aragnée, en latin araneus ou aranea, en grec
dqàxfi,, désigne l'opération de l'araignée qui tire de
son corps la' substance gommeuse dont elle forme
(1) ou champart. — (2) Veut dire mettre au dernier rang le labourage; arage vient d'une forme araticum, devenue plus
tard aragium. (N. E.) — (3) Anigne est l'animal même et vient d'aranea, avec l'accent sur ra ; araignée était primitivement
la toile de l'insecte et vient de araneata, avec l'accent sur at. (n. e.)
M
AR
— 97
AR
le tissu merveilleux de ses filets, (toy. Ménage,
Dict. élym. au mot aragnée. — Monet, Dict.^ On sait
que les filandres, ces fils blancs et longs qui volent
en l'air dans les beaux jours d'automne, sont l'ou-
vrage d'une espèce d'araignées vagabondes, plus
petites et plus noires que les autres. Les fils que
ces araignées n'abandonnent pas au vent, elles les
étendent sur les chaumes, ou sur l'herbe des prai-
ries, en forme de tissu, de crêpe qu'on nommoit
aragne. « La praerie... estoit ourdye et tissue
« d'arignes que avoient ouvré les arignées, h la
« doulceur de la nuyct et de l'aube du jour. »
(Percef. Yol. V, fol. 72. — (Voy. Abantelles.)
Il est probable que dans un ancien compte de
fournitures pour habillement de Chevaliers et
d.'Ecuyer&,\'iiraing ne [i] est une espèce d'étoffe claire
et légère, comme le crépon, le crêpe ou le voile, et
dont on comparoitle tissu à celui de Varagne, delà
toile d'araignée. « Pour 151 aunes de brunelte, en
« plusieurs pièces, de la petite moison de Louvain,...
« pour 4 escarlates vermeilles de Bruxelles,
« 2 ijmingnes de la grant moison de Louvain, etc. »
(Du Cange, Gloss. lat. T. IV, col. 7iO.)
Enfin, la toile de l'araignée des jardins est un
lissu à claire voie, une espèce de réseau auquel on
a comparé un treillis de fil d'archal, « une contre-
o vitre en treillis de fil d'archal, » lorsqu'on a dési-
gné ce treillis par le nom de Varagne. » Si le
« Maistre à qui est la muraille en laquelle l'on veut
« appuyer, a en icelle muraille fenestrages portant
0 bort, ferrures, ou yraig)ie,.... l'on ne pourra
« appuyer, n'autrement empescher la veuedes dits
« fenestrages. » (Coût. gén. T. II, p. 478. — Lau-
rière, Gloss. du Dr. Fr. — Ménage, Dict. Etym. ~
Monet, Dict. - - Voy. Aragkee.)
VARIANTES :
ARAGNE. Monet, Dict.
AiBAiGNE. Cotgrave et Oudin, Dict.
AiREiGNE. Merlin Cocaye, T. II, p. 379.
Araigne. Riibelais, T. IV, p. 205.
Araine. Doctrinal de Sapience, fol. 35, R».
Aricne. Percef. Vol. V, fol. 72, V» col. 1.
Arreigne. Coût, de Metz, au nouv. Coût. gén. T. II, p. 433.
Eraigne. Borel, Dict.
Iragne. Contes d'Eutrapel, p. 184.
IRAIGNE. Cotgrave, Dict.
Yraigne. Cotgrave et Borel, Dict.
Yraixgne. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 521, col. 3.
Aragnée, siibst. féin. Araignée; Toile d'arai-
gnée, etc. En latin aranea. Ces deux premières
significations ne sont pas les seules qui soient
communes au mot aragnée avec celui A' aragne. Ils
désignoienl, l'un comme l'autre, « une contre-vitre
<i en treillis de fil d'archal, » un treillis de fil
d'archal comparé au lissu, au réseau de l'araignée
des jardins. « Baltes et assiette de ventilions,
" grilles, araignées du dehors de la feneslre... sont
« signes et marques de servitude de jour. » (Coût.
de S- Mihiel, au nouv. Coût. gén. T. II, p. 105G. —
Voy. Aragne.)
11 paroit inutile de multiplier les preuves qu'au
moyen de la comparaison, l'on a pu nommer
araignes ou araignées, les choses qui offrent à l'œil
et à l'esprit quelque ressemblance avec la toile de
l'araignée, ou avec la figure de l'araignée. (Voy.
Ménage, Dict. étym. — Aubin, Dict.dela Marine,elc.)
VARIANTES :
ARAGNÉE. Monet, Dict. - Ménage, Dict. étym.
Araignée. Orth. subsist. - Nouv. Coût. gén. T. II, p. 1056.
Arignée. Cotgrave, Oudin, Rob. Estienne et Nicot, Dict.
Arragnée. Nouv. Coût. gén. T. II, p. 1167, col. 2.
Iraignée. Villon, p. 8.
Iregnie. Rom. dAudisïier, MS. de S' Germ. fol. 66.
Ybaig.nie. Gloss. du P. Labbe, p. 489.
Aragnète, subst. fém. Petite araignée. Dimi-
nutif d'aragne. (Voy. Monet, Dict.)
Aragneus, adjectif. Plein d'araignées. Plein de
toiles d'araignée. Propre ;^ l'araignée. Semblable à
la toile d'araignée. Qui se nourrit d'araignées. On
trouve la première et la seconde signification de
l'adjectif araignens, en latin araneosus, dans
Cotgrave et Oudin, Dict. (Voy. Aragne.)
Il signifioit une chose propre à l'araignée, lorsque
pour toile d'araignée on disoit toile yraigneuse.
(Poës. de Loys le Caron, fol. 13. — Voy. Araignier).
Dans le tableau qu'un Poëte du xvi' siècle a tracé
de la surprise de Mars et de Vénus épiés par Vul-
cain qui les enveloppe d'un filet invisible, le mot
iraigneur exprime la ressemblance fabuleuse de ce
filet avec la toile, le filet dont l'araignée se sert
pour arrêter sa proie.
Celuy qui a veu le tour
De l'iraigne mesnagère
Filant ses rez à l'entour
De la, mousche passagère ;
Il a veu Mars et Venus
Encliaisnez à membres nuds,
Et Vulcan guygnant auprès
De son embusche iraigneuse
Qui la couple vergongneuse
AUoit serrant de si près.
II. Florès de Grèce, Epil. p. 8, col. 1.
On a nommé figurément rets «rfli5'»é;!fj", ce qu'en
parlantd'unecourlisane, on nommeroit aujourd'hui
ses filets, aussi dangereux pour l'homme que le
sont pour la mouche les filets de l'araicnée. (Voy.
Merlin Cocaie, T. 11, p. Gl.)
Enfin, la souris araigneuse, autrement la musa-
raigne, en latin mus araneus, est un peiit animal
quadrupède qu'on a ainsi désigné, comme se nour-
rissant d'araignées, et ressemblant à la souris par
la grosseur et un museau alongé et pointu. (Col-
grave, Dict.)
VARIANTES :
ARAGNEUS. Monet, Dict.
AiRAiGNEUX. Cotgrave, Dict.
Araigneux Cotgrave et Oudin, Dict.
IRAIONEUX. D. Florès de Grèce, Epit. p. 8, col. 1.
Yraigneox. Poës. de Loys le Caron, fol. 13, R».
Araignier, adj. masc. adj. et subst. fém. Pro-
pre à l'araignée. Semblable à l'araignée. Semblable
à la toile d'araignée. Membrane cristalline , Arach-
noïde. Le premier sens de l'adjectif araignier, est
(1) C'était un drap de luxe, fabriqué ordinairement à Ypres, fort à la mode sous les trois premiers Valois, (n. e.)
II. 13
AR
- 08
ÀR
le même que celui à'ciraigneus, dans l'expression
toile (trayneuse. (Colgrave, Dict.)
Dans le second sens, on désignoit par ce même
adjectif certaines choses qui avoient de la ressem-
blance avec la ligure de l'araignée. (Colgrave, Dict.)
Il signifioit aussi la ressemblance d'une chose
avec une toile d'araignée. (Voy. Aragneus.) C'est par
la raison de celle ressemblance que la tunique ou
membrane dont quelques Anatomisles croient l'hu-
meur cristalline de l'œil immédiatement envelop-
pée, a été nommée membrane ou tunique arai-
gnère. (Voy. Colgrave, Dict.)
De là, l'adjectif «r«/;7H('r<' signifioit, avec ellipse
du substantif, tunique ««//;;»(')■(', cette membrane
cristalline qu'en terme d'Anatomie l'on nomme
Arachno'ide. (Voy. Oudin, Dict.)
VARIANTES :
ARAIGNIER. Colgrave, Dict.
Araignère. Colgrave et Oudin, Dict.
Araim, subst. niasc. Airain. On reconnoît le
mot latin œrumeu, formé de œs , œris , dans l'an-
cienne ortho'graphe araim : orthographe qu'on
n'avoit pas encore trouvée, lorsqu'on a réuni sous
Mrin, les variations érain et arain. (Voyez .Erin
et Araine.)
VARIANTES :
ARAIM. Livres des Rois, MS. des Cordai, fol. 72, R» col. 2.
AREI.M. Ibid. fol. 88, V col. 1.
Araine, subst. /"f^'m. Espèce de trompette ; Trom-
pette. (Voy. Araim.) Les trompettes qu'on nommoit
araines, parce qu'elles étoient A'arain, de cuivre
jaune, paroissent avoir été distinguées des trompes,
comme l'on dislingue aujourd'hui le clairon de la
trompette. « Firent . . . huier trompes et arènes
« sonner. » (Chron. S" Denys, Rec. des Hist. de Fr.
T. III, p. 311.)
. . . Lors oist tentir araines
Qu'en fait par les deux oz sonner,
Tabours croislre, corz bondonner,
Flagiex piper et trompes braire.
G. Guiart,MS. fol. 313, V.
Cette espèce de trompette, connue de nos anciens
Historiens et Romanciers, éloit probablement un
clairon semblable à celui que les Portugais ont
emprunté des Maures, faisant le dessus des cors,
des buisines et des trompes ou trompettes qui son-
noient en taille ou en basse-contre, et que parcelle
raison l'on aura quelquefois nommé grosse araine.
« Firent sonner maintes trompettes et maint arai-
«■ nés, et assemblèrent pour combattre. » (Hist. de
B. du Guesclin, par Ménard, p. 357.)
A fait ses cors bondir.
Ses buisines soner, ses araines tentir.
Rom. d'Alexandre, MS. du R. a- 6987, fol. 180, V- col. 2.
1 ot cornés et douçaines,
Et trompes et grosses araines.
CléoBiadès, MS. de Gaignat, fol. 66, V' col. 3.
On conçoit au reste combien il est naturel que
toute espèce de trompette de même métal que celle
dont on a distingué souvent l'espèce particulière,
ail été désignée en général par le mot araine.
Ses arainnes fist haut sonner
Pour les Flamens à estourner.
Vh. Mouskes, MS. p. 586.
Lors si a fait sonner ses trompes
A grans alainnes et à longes.
Moult sonnèrent bien les arainnes.
Id. p. 584.
variantes :
ARAINE. Ph. Mouskes, MS. p. 587.
Arainne. g. Guiart, MS. fol. 131, R».
Areine. Fabl. MS. du R. n» 7615, fol. \9\, R» col. 2.
ARENE. Chron. S' D. Rec. des Hist. de Fr. T. III, p. 311.
Araire, subst. Instrument de labourage; Char-
rue ; Machine à labourer. (Voy. Afaire.) On soup-
çonne que les instrumens de labourage, qu'en
Bresse on nomme araires, sont lesinstrumensdont
les Lyonnois et les Languedociens composent leur
araire, c'esl-à-dire leur charrue ou autre machine
sans roues propre à labourer. (Voy. Laurière, Gloss.
du Dr. Fr. — Dict. de Trévoux. — Colgrave et JNicot,
Dicl. — D. Carpentier, Suppl. Glossaire latin de Du
Gange, T. I, col. 270.)
Ce mot araire encore usité dans plusieurs pro-
vinces, avec la signification de charrue ou autre
machine à labourer, peut être aussi ancien dans
notre langue que le verbe arer. (Voy. Arer.) On dé-
signoit l'inutilité des etîorts amoureux d'un jeune
homme pour s'insinuer dans un cœur dur et insen-
sible par fierté, en disant figurément :
Tu as en dure terre enroyé ton areres ;
Tu deusses amer fille d'une commère.
Fabl. MS. du R. n" 7218, fol. 345, V col. 2.
Il est très probable que relativement à l'idée de
contre, partie essentielle de Varaire, de la charrue,
on aura dit que l'araire vaut peu sans le contre (1),
pour signifier une expédition impossible sans le
secours essentiel d'un Chef. On croit qu'au lieu
i'afaires il faut lire araires dans ce vers :
Peu vaut Yafaires sans le coutre.
Ph. Mouskes, MS. p. 796.
VARIANTES :
ARAIRE. Cotgrave, Nicot et Monet, Dict.
Arere. Fabl. MS. du R. n° 7218, fol. 345, V col. 2.
Areyre. d. Carpentier, S. Gl. 1. de Du C. T. I, coL 270.
Araisiiement, subst. masc. Action de parler,
d'adresser la parole ; entretien, conversation. Signi-
fication analogue ù celle du verbe araisonner ou
araisner, parler, s'entretenir, converser. (Voyez
Araisonner.)
variantes :
ARAISNEMENT. S' Rern. Serm. fr. MSS. p. 149.
Arraisonnement. Cotgrave, Oudin, Nicot et Monet, Dict.
Araisneour, subst. masc. Raisonneur, parleur.
Celui qui perd à raisonner, à parler, un temps qu'il
emploieroit mieux à agir. Telle éloit la signification
d'araisneour, lorsqu'on faisoit l'éloge de la valeur
active d'une Nation, en disant :
Onques en lor contrée n'ot un araisneour :
Ains se fièrent de près, o les brans de coulor (2).
Rom. d'Alexandre, MS. du R. n" 6987, fol. 176, R" col. 3.
(1) L'ai-cii're, en effet, n'a pas de roues, (n. e.) - (2) avec les épées étincelantes. (n. e.)
AR
— 99 -
AR
Araisniement, adv. Avec opiniâtreté d'idées ;
avec une volonté opiniâtre. (Voy. Araisonner.) Signi-
fication relative à celle du verbe amisonner dans
l'expression ?,' amisonner à une chose , la vouloir.
Cilh ne sot pas qu'il covenist
Rechivoir son commandement ;
Si li dist araisnieinaiit
Ke mie ne le laisseroit.
Les IV Filles le Roy, MS. de Turin, fol. 38, R*.
Araisonner, verbe. Questionner, interroger,
demander des raisons. Parler, converser, s'entre-
tenir, donner des raisons, les détailler. Sommer,
accuser. Intenter et poursuivre une action. Appré-
cier. Etre ou devenir raisonnable. Vouloir une
chose, s'y préparer. On ne peut juger, ni parler
raisonnablement des choses transmises à l'âme par
le moyen des sens, qu'autant qu'elles y existent en
idée, telles qu'elles existent en réalité dans la Na-
ture. La conformité de celte existence idéale des
choses avec leur existence physique, est ce qu'on
nomme raison, en latin ratio : terme abstrait dont
on trouve l'origine dans ratus, participe du verbe
latin reor formé du substantif générique res , en
françois chose. Ainsi, notre verbe françois raison-
ner, de même origine et même acception que le
latin 7'eri, signifiera littéralement réaliser en idée,
faire qu'une chose existe en idée, comme elle existe
en réalité; assimiler à l'existence physique des
choses, leur existence idéale, la voir et la juger
conforme ; exprimer cette conformité d'existence,
la faire voir, la rendre sensible , la faire connoitre
aux autres par la parole , qui représente plus ou
moins fidèlement les idées, comme les idées repré-
sentent les choses. (Voy. Raison et Raisonner.)
De là, l'ancien verbe composé araisonner, par
contraction araisner, arainer, signifioit question-
ner, interroger, etc. presser quelqu'un de parler,
de faire connoitre en parlant, en répondant à une
question, aune interrogation, quelles idées il se
fait des choses, quelles sont les raisons de sa façon
de sentir, de penser ou d'agir. « Sis mariz Belehana
« le areisuna, si li dist: pur quel plures? « (Livres
des Rois, MS. des Cordel. fol. 2, R- col. 1.) (1)
Ne se vielt ore plus celer ;
Ains va le Roi amtisoner.
Rois, fait-il, c'as-tu enpensé?
Vie de S" Calherine, MS. de Sorb. chiff. LX, col. 59.
Quant je la veoie,
Le pooir des membres perdoie.
Qui me vousist aresoner,
Ne li peusse mot soner.
Fabl. MS. du R. n- 7-218, fol. 356. V* col. 2.
De toutes pars je fuz environné
Des assistans, et d'euLx arraisonné
Que je queroys, et qui vers eux me meine.
Faifeu. p. 18.
Lorsqu'on étoit moins empressé de connoitre les
idées des autres que de leur faire connoitre les
siennes, araisonner une personne, ou s'araisonner
avec elle, c'étoit lui parler, lui adresser la parole ;
raisonner avec elle, lui exprimer une sensation, en
parlant, en conversant, en s'entretenant avec elle,
lui peindre l'idée qu'on se faisoit de la chose qu'on
sentoit, et dont on lui parloit. (Voy. Araisnement.)
« Nous arainons ceos ki vrai Geu (2) sunt, ceos qui
« sunt semence Abraham. » (S' Bernard, Serm. fr.
Mss. p. 57.) « La pucelle... avoit grant merveilles
« pour quoy le Bachelier ne Yarraisonnoit ; car à
« son advis il devoit premièrement emprendre la
» parole. » (Percef. Vol. VI, fol. -42, R° col. 1.)
« S'fl?T«iso;ina«iavecle Prince, lui demanda, etc. »
(Nuits de Strapar. T. II, p. 209.)
Ne desprisiez pas poure gent ;
Mes aresniez les doucement.
Qui rien ne lor done del sien,
Si lor fet li biaus parlers bien.
Fabl. MS. du R. ir 7-218, fol. 130, R" col. 2.
Dans la signification de parler d'une chose à
quelqu'un, on disoit l'araisonner d'une chose.
Durement me doi merveiller
Que m'oses de cou araisnier.
Fabl. MS. du R. a' 7939, fol. 67, R' col. 1.
Il seroit heureux en amour de toujours croire
aux sermens des femmes ; on croiroit toujours à
leur fidélité.
Qui d'amors les araisonnast,
Ni a cèle qui ne jurast,
S'il fust qui croire l'en vousist,
Que onques n'i mesprist.
Fabl. MS. du R. n- 7615, fol. lU, R" col. 1.
Cet ancien verbe araisonner ou arraisonner, dont
Mézeray faisoit encore usage, a longtemps subsisté
dans notre langue avec la signification de parler (3).
« Faunus, le prince des bocages,... m'ha souvent
« arraisonné d'amours, sans effect de sa prière. »
(J. Le Maire, illuslr. des Gaules, L. I, p. 77. — Voy.
Nicol et Monet, Dict. — Dicl. de Trévoux.)
Quelquefois araisonner un choix, araisonner un
fait, c'éloit exprimer le rapport de ce fait, de ce
choix, à ridée qui l'avoit déterminé, en faire con-
noitre les raisons, les détailler. « Les occasions font
« aucunes fois les causes piteuses, qui amolissenl
« les.Iugesquifontles/■rtù•^x■rt/•ra?so?^Mcr. » (Percef.
Vol. VI, fol. G9, V" col. 2.) « Charles le Sage ayant
« fait mettre sur un carreau de veloux un sceptre et
« une couronne d'or, et sur un autre un armet et
<< une espée. commanda à son fils, Dauphin de
« France, de choisir l'un ou l'autre ; lequel promp-
« tement courut à l'espée et à l'armet, avec ceste
« repartie araisonnant son choix, que c'estoit l'espée
« qui conqueroit et maintenoit les couronnes et les
« sceptres. « (Savaron , Espée françoise, p. 8 et 9.)
En sommant une personne de faire, ou de réparer
une chose qu'on exige d'elle, ou qu'on lui reproche,
en la sommant de comparoitre devant le .Juge, en
l'accusant, on la presse de parler, de faire connoitre
les raisons avec lesquelles elle prétend se défendre,
et l'on fait connoitre celles avec lesquelles on persiste
à la poursuivre. Il est donc possible que, relalive-
(1) Dans la Chanson de Roland : «. Mult fièrement Carie en araisunet (vers 3536). » (n. e.) — (2) ,Iuifs. — (3) Saint-Simon
l'employait encore: « Tandis que i'arraisonnais M. le duc d'Orléans, le roi consultait et sa famille et son conseil. » (Edition
de 1842; ch. 247, p. 209.) (n. e.)
AR
— 100 -
AR
ment aux acceptions indiquées, le verbe araisonner
ou aru'micr ail sifçnilié sommer de faire une cliose,
sommer de la réparer, sommer de comparoilre
devant le Juge, accuser, etc. " Ne fu nus qui les
« osast contraindre, ne rtrra/Hicr de rendre treu. »
(Glu'on. S' Denys, Hec. des Ilist. de Fr. T. III, p. 157.)
'< Ou doit araisonner son Seigneur, avant que on
<' ait bon apel contre la défaute de droit. « (Beau-
manoir, Coût, de Beauvoisls, chap. lxu, p. 319.) Une
preuve évidente qw' araisonner désigne ici une som-
mation en réparation de la défaute de droit, c'est
qu'à la fin de ce même chapitre, on lit qu'il « ensaigne
« comment on doit sommer son Seigneur avant que
« l'en le puistapeler de défaute de dVoit. >> (Id. ibid.
p. 322.1 « Quant je veiz le grant oultraige qu'il me
<' faisoit, si le feiz arraisonner devant le Roy. »
(Lanc. du Lac, T. II, fol. !)(j.) « Qui l'oseroit araisnier
« de ceste chose. » (S' Bern. Serm. fr. .mss. p. 381.)
Les araisonne (i)
De meffait, et les ochoisonne.
Dits do Baudoin de Condé. WS. do Gaignat, fol. 320, R' col. 3.
Dans les anciennes loix d'Anglelerre, l'assise ou
bref en verlu duquel on pouvbit intenter et. pour-
suivre une action en Justice, faisoit connoître les
raisons de cette action. De là, on disoil, « arraigner
« assise de nouvelle dessaisine, arrainer assise de
« mort d'ancestres, etc. » pour intenter, poursuivre
une action de nouvelle dessaisine, de mort d'ancê-
tres, etc. « Puis le lessée (2) arraigne assise de novel
« disseisin de la terre, envers le lessor lequel plede
« que il fist nul tort ne nul disseisin , et sur ceo
« l'assise soit prise, en cest case les Recognitors del
« assise poyent dire, etc. » (ïenures de IJttleton,
fol. 8."), V°.) .' Si le frère pusné soit entré en l'héri-
« tage son piere et hors de sa seisine eyt feffé ascun
« estrau nge, sur qui le frère ey né eyt arrainé assise
<• de mor ifaiincestre, et cel tenaunt voche à garaunt
<■ le frère pusné son feffour , et celuy veigne
« garaunter,... pur ce ne reineyne mie l'asise. »
(Britton, des loix d'Angl. fol. 200, V°, et 201, R-.
Il est évident que c'est relativement à l'idée qu'on
se fait ou doit se faire des choses, qn'araisonner la
marchandise signifioit mettre un prix raisonnable
à la marchandise, l'apprécier conformément à l'idée
de sa valeur réelle. (Voy. Cotgrave, Dict.)
Lorsque la volonté d'une personne, les mouve-
mens de son âme, ses passions, étoienl ou devenoienl
conformes aux idées qu'elle devoit avoir des choses
qui l'affectoient, aux vraies idées de prudence et
de sagesse , on disoit que sa volonté estoit araison-
née, iiue celte personne s araison)ioit on s' araisnoit.
« Les jeunes pucelles ne regardoient pas fort à leur
" voulenté qui n'estoit pas encore araisnnnée. »
(Percef. Vol. II, fol. -128, R° col. 2.) « Tous hommes
« hors des premiers mouvemens, lesquels... durent
» et tiennent aux uns plus, aux autres moins, se
« peuvent modérer et «rraïsoHHfr plus aisément. »
(Montbourcher, des Gages de bataille, fol. 28, R°.)
Tant pécha
Li mondes et folia,
Ke Diex el siècle envola
Le diluve ki noia
Fors Noë ki eschapa...
Par lui donc s'aresna.
Recrut et recommença
Li mondes dès -lors en cha.
Ane. Poél. fr. .MSS. av. 1300, T. H, p. 87i et 875.
On veut une chose, on se prépare à la réaliser
d'après une idée, une raison qui dirige la volonté
ou régare. De là, « s'cn'rt/.so/uicr à faire une chose, »
aura signifié vouloir faire une chose, s'y préparer
conformément à ses idées. (Voy. Araisniemf.nt.)
Cil qui se armisoitite ou se fonde
A parler d'amours tout au long.
Simple est : car hom tout ne veit onc.
Chasse et départ d'Amours, p. 115, col. 2.
Et cils qui au parler s'arine.
Les fist venir en un tropel (3),
Et dist ; Dimence a bonne estrine, etc.
Froissart, Poês. MSS. p. 293.
Il est au moins vraisemblable qu'en ces vers
l'orthographe ariner est une contraction du verbe
ara/sonner, comme l'orthographe urainer qui, dans
S' Bern. (Serm. fr. .mss. p. 57,) répond au latin
alloqui , interprété par arresiner dans le Gloss. du
P. Labbe, où il faut lire aresnier. Si l'orthographe
arranguier, en latin ajfari, n'étoit pas dans lemême
Glossaire une faute pour nrrang)iier, on croiroit
voir dans arrainer, arraigner, arranguier, contrac-
tions et altérations (ï araisonner, l'origine de notre
verbe haranguer (4). (Voy. Haranguer.)
VARIANTES :
ARAISONNER. Cotgrave et Nicot. Dict.
Araigner. Rom. de Perceval, MS. de B. n» 354, fol. 223.
Araignier. Etat des Offic. du D. de Bourgogne, p. 307.
Arainer. S' Bern. Serra, fr. MSS. p. 57.
Araisner. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 236, col. 1.
Araisnier. Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 3S, 'V" col. 2.
ARjUsoner. Laurière, Gloss. du Dr. fr.
Arasoner. Anseis, MS. fol. M, V" col, 2.
Aregnier. Ane. Poës. fr. MS. du Vatican, n» 1522, fol. 162.
Arei-SUNer. Livres des Rois, MS. des Cordel. fol. 2, R».
Arenier. Chron. S' D. Rec. des Hist. de Fr. T. III, p. 157.
Aresner. Athis, MS. fol. 120, R" col. 1.
Aresnier. Ane. Poët. fr. MS. avant 1300, T. I, p. 304.
Aresoner. Fabl. MS. du R. n° 7218, fol. 361, V» col. 1.
.Aresonner. Athis, MS. fol. 71, R» col 2, etc.
Ariner. Froiss. Poës. MSS. p. 293, col. 1.
Arisner. Anseis, MS. fol. 59, 'V» col. \.
Arraigner. Tenures do Littleton, fol. 85, V".
Arrainer. Britlon, des Loix d'Angl. fol. 192, V».
Arrainier. Chron. S> D. Rec. des Hist. de Fr. T. III, p. 157.
Aruaisoner. Vie de S<= Calh. MS. de Sorb. chif. lx, col. 59.
Arraisonner. Percef. Vol. VI, fol. 42, R» col. 1.
Arranguier (peut-être Arraurpiier.) Gl. du P. Lab. p. 487.
Arranner. Britton, des Loix d'Angl. fol. 112, V".
Arrayner. Id. Ihid. fol. 148, R".
Arraysonner. Rom. de la Rose, vers 2394.
Arresiner (lisez Arvesnier.) Gloss. du P. Labbe, p. 488.
Arresneu. Fabl. MS. de S' Germ. fol. I, V» col. 2.
Arantelles, subst. fém. plur. Filandres. On
croit, d'après l'auteur du Spectacle de la Nature,
que les filandres qui volent en l'air dans les beaux
jours de l'automne, et qu'en Poitou l'on nomme
(1) blâme. — (2) Possesseur d'un franc tenement laissé à vie et à charge d'une rente. — (3) en une troupe, c'est-à-dire
les rassembla, (n. e.) — (4) Il n'y a aucun rapport entre ces deux mots : harangue vient de l'allemand rhing, cercle ; parler
à une assemblée rangée en cercle, (n. e.)
AR
— 101 -
AR
arantelles, c'est-à-dire toiles d'aragne, sont l'ou-
vrage d'une espèce d'araignée vagat)onde. (Voyez
Aragne.) Dans le cas où il seroit plus vrai de dire,
avec ie Seigneur du Fouilloux, que « les arantelles
« ne sont point filées des areignées, » la ressem-
blance de ces filandres aux fils d'araignée, seroit la
raison pour laquelle on les ■ànommés arantelles (1).
" Ne faut pas s'arresler à un las de resveurs qui
« disent que, quant on trouve des arantelles dedans
« la forme du pied de cerf, c'est signe qu'il va de
« hautes eri'es ;.... car incessamment les arau^e/Zt's
« tombent du ciel et ne sont point filées des arei-
« gnées : ce que j'ay vu par expérience d'un cerf
« qui passoil à cent pas de moy, là où j'allay sou-
« dainement voir ; je n'y sceu jamais estre à temps
« que les filandres ou aranlelles ne fussent tombées
■' dedans la forme du pied. » (Du Fouilloux, Vén.
fol. 29.— Voy. Mén. Dict. étym. — Dict. de Trévoux.)
VARI.iNTES :
ARANTELLES. Du FouUloux, Vén. fol. 29, R».
-Vrantèles. Dict. de Trévoux.
Arap, subst. masc. Acte de violence ; rapt, vol.
On fait violence à la femme ou à la fille qu'on ravit,
à l'homme dont on ravit le bien. Ainsi, arap peut
avoir signifié rapt, vol, en général acte de violence.
(Voy. Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis. — Du
Gange, Gloss. lat. T. I, col. 623.) . Qui veaut appeller
« homme d'ara/) ou de brisseure du chemin, ou de
« force quel qu'elle soit, ou d'un marc d'argent ou
" de plus, ou d'autre chose de quoi l'on pert vie ou
" membre qui en est attaint ou prové, il doit, etc. »
(Assises de Jérusalem, chap. cv, p. 8i.) « Se feme
" qui ait baron veaut faire apeau de murtre, ou
« d'omecide, ou d'arap, ou de brisseure de chemin,
<' ou de chose en que ait bataille, etc. » (Ibid. chap.
r.vi. — Voyez Araper.)
Araper, vei'be. Prendre avec violence, avec
force. Tenir, se tenir avec force et violence. Il est
évident qu'araper est un verbe tel qu'est en latin
arripere, composé du verbe simple rapere , en
françois ravir ; qu'en le prononçant on exprime
autant qu'on le peut avec l'organe de la voix, une
idée de violence, de force, etc. " Le Suppliant rtm/jff
« ledit Pierre au col et lui donna de la canivete ou
« coustel qu'il tenoit en sa main. >• (D. Carpenlier,
Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au mot Arrapare;
tit. de 1456.)
De là, « s'arraper à une chose » signifioit tenir
fortement une chose, s'y tenir avec force et violence.
" Guillaume.... s'arrapa à l'un des bras de la dilte
« femme, en tirant à soy. » (Id. ibid. tit. de 1382.)
L'analogie de la signification de ce verbe araper
avec celle d'agrapper, agraffer(2), est d'autant plus
naturelle, que l'expression vocale et imitative des
choses et des idées est le principe général de la
formation d'une infinité de mots communs à diffé-
rentes langues. (Voy. Agr.^ffer.)
VARIANTES :
ARAPER. D. Carpentiar, S. Gl. lat. de D. C. T. I, col. 306.
Arraper. Id. ibid. tit. de 1382.
Aratoire, adj. Propre à labourer, qui est de
labour. Dans plusieurs Coutumes, les bœufs ara-
toires sont les bœufs qu'on nommoit quelquefois
arables ou bœufs d'arc^'. (Coût, de Marsan, au nouv.
Coût. gén. T. IV, p. 907. —Goût, de S" Sever, ibid.
p. 928. — Du Gange, Gloss. lat. T. I, col. 1246. —
Voyez Arable et Arée.)
Arbaleste, subst. /'ej/î. Arbalète (3) ; Baliste. Por-
tée d'arbalète. Arbalétrier. On décomposoit le nom
d'arbalesle ou d'arbalestre, formé d'arcus et balista,
en françois arc et baliste, lorsqu'on escrivoit arc à
baleste, ou arcq à balestre. « Soubs le nom de
>' bâtons d'armes emolues, sont compris arcq à
" balestre, arcq à la main, etc. » (Coût, de Hainaut,
au nouv. Coût. gén. T. II, p. 60.)
L'arbalesle portative étoit un arc de bois, de
corne ou d'acier, monté sur un fût que la corde de
l'arc débandé coupoit à angles droits. On peut voir
la figure de cette espèce d'arbalesle que le P. Daniel,
(Mil. Fr. T. I, p. 407,) a fait graver d'a;irès un mo-
nument du xu' ou du xiii' siècle, où étoit représenté
un piéton arbalestrier avec son armure. Il paroit
que la corde de Tare se tendoit avec la main, et que
pour l'amener plus facilement au point où il falloit
l'arrêter, on mettoit le pied et quelquefois les deux
pieds, dans l'espèce d'étrier qui est à l'extrémité
supérieure du fust de l'arbalesle. (Voy. le P.Daniel,
ubi supra. — Fauchet, Milice Fr. p. 121. — Philipp.
L. VII, p. 312.)
Telles furent sans doute les premières arbalestes
portatives , dont l'usage en France remonte au
commencement du xii" siècle (4). C'est avec une nom-
breuse troupe d'Archers et d'.\rbalestriers, en latin
« cum magnà militari Sagitlarià manu et Balista-
« rià, » que Louis VI attaque Drogon de Monchy.
On retrouve ces Archers et Arbaleslriers à l'attaque
et défense du château de Gournay assiégé par ce
Prince, qui occupa les premières années de son règne
à réprimer les violences de ses Vassaux rebelles.
« P>epellentes repellere insistunt, balistarios et
« sagittarios jacere compellunt. " (Du Chesne, Hist.
Franc. Script. T. IV, p. 284, 291, etc.)
Il résulte de ces passages, relatifs à l'histoire des
premières années du règne de Louis VI, parvenu à
la couronne en 1108, que l'usage des arbalestes
étoit connu dès le commencement du xii' siècle, et
(1) .irantetles signifie encore toile d'araignée en Berry, et vient de aranea et tela. Quoi qu'en dise du Fouilloux, les cerfs
ont ordinairement aux pieds des filandres en forme de toile d'araignée, (n. e.) — (2) Arapper a le sens et rétymologie
d'agrapper, agripper, agrafrr; on avait déjà en bas- latin grappa (Voir L. Quicberat, Addenda le.cicis latmis), qui sans Joute
vient du celte ou du haut allemand, (n. e.) — (3) Nous écrivons maintenant arbalète par un accent grave ; l'accent circonflexe
vaudrait mieux, puisqu'on écrit têle pour leste, (n. e.) — (4) On les connaissait à la fin du xi' siècle, comme le prouve le
vers 2265 de la Chanson de Roland ; « D'un {corr. plus qu') arch'xleste ne poet traire un quarrel. a Le moine Richer en parle
et elles sont représentées d^ms des miniatures du temps de Louis d'Outremer ; l<;s armées romaines du Bas-Empire en
firent aussi usage. (N. E.)
AR
102
AR
que par conséquent l'époque de ce même usage en
France, touche à celle de la première Croisade qui
finit en 1099. Peut-être que la forme de Varbniesie
portative, moins simple que celle de l'arc, étoit une
invention des Infidèles ; et qu'en se défendant
contre les Chrétiens, ils leur apprirent de quelle
utilité pouvoit être à la guerre cette arme offensive
et meurtrière, dont le second concile de Latran,
tenu l'an 1139, sous le pontificat d'Innocent II,
anathématisa l'usage, deux ans après l'avènement
de Louis VII au trône. < Artem illam mortiferam et
« Deo odihilem Ballistrariorum et Sagittariorum
« adversùs Christianos et Catholicos éxerceri de
« celero sub anathemate prohibemus. " (Harduini
concil. T. VI, part, n, col. I21i.)
Quelque prompte qu'ait été la soumission des
Franrois à l'autorité de ce Concile, qui semble
réserver pour les Infidèles une arme dont il n'in-
terdit l'usage odieux qu'entre les Chrétiens, il est
peu probable que quarante ou cinquante ans après le
décret du pape Innocent II, au commencement du
règne de Philippe-Auguste, cette arme fût inconnue
en France; et tellement inconnue, que dans ses
armées il n'y avoit pas un seul homme qui sût faire
usage de Vavbaleste. Ce témoignage de Guillaume
le Î3ielon , Poète historien de Philippe- Auguste ,
prouve seulement qu'alors les François respectoient
encore l'autorité apostolique, à laquelle ils avoient
sans doute obéi sous le règne de Louis VII, depuis
1139 jusqu'en 1180, année de la mort de ce Prince.
Mais au retour de la Croisade entreprise l'an 1188,
la guerre ayant duré quelques années entre la
France et l'Angleterre, Philippe-Auguste parut forcé
de partager la désobéissance de Richard, Cœur-de-
lion, qui sans crainte de l'anathème fulminé par le
Pape, avoit renouvelé l'usage de Varbaleste qui lui
fut futaie à lui-même. Il mourut en 1199, d'un coup
de flèche tiré par un Arbaleslrier. C'est une de ces
remarques qui ne prouvent rien, et qu'on aime à
faire parce qu'on aime le merveilleux. (Voy. le P.
Daniel, Ilist. de la MO. Fr. T. II, p. 424-'4'2G.)
Le commencement du xur siècle est donc l'épo-
que à laquelle on peut fixer l'usage constant des
arbalestes; usage que les François avoient pris,
laissé et repris dans le cours du siècle précédent.
Il paroit que le zèle d'Innocent III, pour la conser-
vation du peuple Chrétien, n'étoit pas moins ennemi
des Arbalestriers que celui de son prédécesseur
Innocent II, qui les avoit frappés d'anathème. Dans
le quatrième concile de Latran tenu l'an 1215, il les
appelle des hommes de sang. « NuUus quoque
« Clericusruptariis(l), autbalistariis, authuiusmodi
« viris sanguinum prœponatur. « (Harduini concil.
T. VII, col. 3.">.) On voit dans ce Concile une preuve
que Philippe-Auguste continuoit, au commencement
du xiii" siècle, l'usage de Varbaleste, qu'à la fin du
xn" il avoit renouvelé à l'imitation de Richard, roi
d'Angleterre. Cet usage (2) devint chaque jour plus
commun, puisqu'en 1230, Thibaud VI, comte de
Champagne, vouloit que « chascunsde la commune
« de Vitré qui auroit vaillant vingt livres, eust
« atibeleste en son ostel et quarriaux jusque cin-
« quante; » et que vers l'an 1250 ou 1251, du temps
de la première Croisade de S' Louis, » Symon de
" Monceliart estoit Mestre des Arbalestriers le Roi. »
(Voy. Du Cange, Gloss. lat. T. I, col. 275. — Join-
ville, Ilist. de S' Louis, p. 115; édit. de 1761.) Il
paroit qu'alors l'arc et Varbaleste étoient d'un égal
usage. « Nos Serjans à pié. . . . commencierent à
« hardier à eulx et d'arcz et d'arbalestres. « (Id.
ibid. p. 114.) Mais « on se servit dans la suite beau-
« coup plus des arbalètes que des arcs, par ce que
« les flèches étoient lancées avec plus de force par
« Varbalête ; que l'on miroit plus juste avec cette
« arme qu'avec l'arc ; et que le mouvement de la
« délente qui faisoit partir la flèche étoit bien plus
>< sûr que celui de la main qui débandoit l'arc. »
(Le P. Daniel, Mil. Fr. T. I, p. 426.) Ainsi l'usage de
Varbaleste subsista constamment depuis la fin du
règne de Philippe-Auguste, jusqu'au règne de Fran-
çois I" qui l'abolit presque entièrement en France,
excepté parmi les Gascons. (V. Id. ibid. p. 426 et 427.)
Les arbalestes portatives du xu' siècle et du com-
mencement du xur n'étoient pas aussi composées
qu'elles le furent, après qu'un long et continuel
usage les eût perfectionnées. On peut enjuger par la
comparaison de la forme d'une arbaleste que le P.
Daniel décrit [ubl supra, p. 423), avec la forme de
celle du Piéton-arbalêtrier qu'on voit représenté
(ibid. p. 407), et dont on a déjà parlé (3). L'une ne
ressemble à l'autre que pour les parties essentielles.
Ces premières arbalestes portatives étoient sans
doute très-semblables à celles dont il est mention
dans Fauchet, (Mil. Fr. p. 121 ;) « à ces arbalestes
« qui au hault de l'arbre avoient un fer en façon
« d'eslrier, pour, en mettant le pied dedans et en
« tirant à mont... le bout du bandage encorné, plus
« aisément bander l'arc. ■> Peut-être que Varbaleste
nommée arbaleste simple dans les Chron. d'Outre-
mer, (ms. de Berne, n° 113, fol. 1681) étoit une de
ces premières arbalestes, une arbaleste dont l'arc
se tendoit avec le pied et la main, ou seulement à
force de bras, sans le bandage qu'on nommoit pied
de chèvre, cranequin, à-l'armatot (4).
Ce bandage nommé pied de chèvre, parce qu'il
étoit fourchu du côté qu'il appuyoit sur Varbaleste
et la corde, étoit de bois, de corne ou de fer, comme
le cranequin que les Arbalestriers d'Allemagne, les
Cranequiniers portoient à leur ceinture. Il est pro-
bable que ce bandage étoit nommé cranequin, à
(1) Routiers ; c'était leur beau temps ; Philippe- Auguste en prit à son service pour conquérir la Normandie ; l'un de leurs
chefs, Cadoc, fut créé bailli de Gisors. (n. e.) — (2) L'arbalète alors en usage fut Varbalcte à étriev. (Voir p. 101, col. 2.)
Avant Saint-Louis, on employait Varbalùte à tour, mécanisme disposé le long de l'arme et qui dispensait de la renverser,
quand on tendait la corde, (n e.) — (3) On peut voir à la page 241 de l'Histoire du Costume, de M. Quicherat, un arbalétrier
de 1375 environ (B. N. ms. fr. 281.3), armant une arbalète à étrier. (n. e.) — (4) hu. xv siècle, on employait les arbalètes à.
tilloles, mot qui paraît signifier poulie; c'était Varbcdéte à tour transformée. 0'°''' Quicherat, 1. c, p. 306.) (n. e.)
AR
— 103 —
cause de quelque ressemblance avec le bec de la
mnH nn"i' ^"'''"'', ^T''''^'' Pe"l-èlre aussi le nom-
moû-on a- 1 armât ot, p;irce qu'au moyen du ban-
dage qu on adaptoit au fût de Yarbalelte, on avo t
bientôt mis cette arme en état de lancer une flèche
Dans un duel entre un Italien et un Gascon, celui-
ci ayant le choix des armes, envoya à son adversaire
" une bonne grosse arhaleste de passe, avec son
« bandage qu on appeloit ù-1'armatot et qu'on pen-
" doit a la ceinture. » L'Italien, forcé de combattre
avec une arme dont l'usage lui étoit étranger fut
vaincu par le Gascon à qui cette arme étoU fami-
fm'.ln 'T"' ''"^ ''■:Î"'^*' ^' rebandé, et tiré deux
. fois dans le corps du pauvre Italien, qu'il n'eut
«le loysir ny l'adresse de bander son arballeste. »
(Brantôme, sur les Duels, p. 81 et 82 — Vov Fm.
chet. Mil. Fr. - Le P. Daniel, Mil. Fr. T. 1, p 423)
On trouve dans cette anecdote une' preuve
év dente qu il y avoit des « arba/estes de passe por-
dP Si';; ''T"'''y'';''''/'^'^''«^«''''^'^«nt Catherine
£ f^û ^>™?' /o'^t à tirer, et tiroit fort bien.
Quand elle s alloit promener, faisoit porter son
.. ^'^^aleste a tallet;el quand elle voyoit quelque
« beau coup, elle tiroit. .. (Voy. Brantôme Dames
Illustres, p. 48.) Sans doute qu'il f^nuTlHaS
a jallet, espèce darbaleste avec laquelle on jetoit
des pierres rondes nommées jalet, auiourlrhu
galet, et au dé aut de ces pierres des petites 1 ouïes
de terre cuite. \ oy. Dict. de Trévoux, au mot Jalet)
JS'l'i/'"' e,^"t «'-^'^'s/^ à allais pour arba/csie
jaet dit que 1 arbalesle a gctai, étoit la même uue
kni oiu/p' 1 ^"Vf' ^i^^.^-arbalc.tc avec laquelle on
Kinçoit des boulets de pierre. (Voy. Cotgrave, Dict )
Or larbalese a ,/V//f^ qu'on assure avoii é^ a
même que Varbaleste à boulet, étoit portative • el
spécialement celle dont Catherine de Medicis aimoi
exercice. Il y avoit donc parmi les arbalcstes à
^Si^^;:s'' ''''''"'' '^«"^^ p^™"-
Il semble qu'on ait désigné toute espèce d'rt?-6«-
lesteportative,soaàjalet, soit« boulet ou de passe
en disant qu'on .. pouvoit la bander aus reins .na,'
conséquent sans tour, sans moulinet ni poulie
« Dehusseront... toute la grosse artillerie et autre
« qui n est point portative à cheval et ù pied et
« par especial ar;;«/cs/ts qu'on ne peut bander àus
« reins. »(J.Chartier, Hist.de Charles VII p 033 ^
Quoiqu on ait pu faire usage du tour pour les
arbalestes portatives et faciles à bander aux reins
Il sera toujours vrai de dire en général ni e?es
arbalestes qu-on ne pouvoit bander aux Sus
etoient celles qu'on nommoit arbalestes à tour'
dénomination sous laquelle pouvoient être réunies
nLn'J'f'T 'f *'"'^'' '^^ «'•'^a/estes de /msTlll
arbalestes (leehantelle, et toute autre espèce d'«?-
pSulS' ''^ ''"' '"^P^^^'^'e de bander sans tour ni
L'espèce d'arbalète avec laquelle Monet dit mr^n
lancoitdes boulets de cent livres, dés boulets ëm
celles avec lesquelles les Turcs lançoient anciemTe^ J
AR
foM)cP,''''iH'i"^/v"' riiistoire de Froissart, (Vol. II
t^iJïïHnSrs'iîSiïS^tsS
« a«rS ^^^f,'^^^-^^^ on k^fkoit'S;
chSSn o n riP 1. '^ // jusquau pied des murs du
l'iS rJ "* ;'"*^ " ^'"^l"e"e on vouloit donner
1 assaut. Chaque étage du passavant, ou du passe
étoit garni darbalestes, que par cette raison l'on
aura nommé arbalestes dépasse; . et lés Arïa es"
1' ssn nf/ '^"«f "iPO'^'- faire, quand on vSulo U
D ?, ■• ^^(^°>• froissart, V. III,p. 71 72 el 7S
eijm. J. , p. //. On a déjà observé qu'il v nvnif
rmpnf î'^r -'''1 '^' J""'' Portatives, e?llv consé
uet différentes de celles que Fauchet (Mil Fr
P^ 120 ) assimile aux ribaudequivs, qui, pour leur
pesanteur, demeuroient sur les murs des forte
resses, et qu'on bandoit à l'aide d'un to 1, mÏÏié
par un ou deux et quatre hommes. Lesarl>Steî
de 1 espèce de celles qu'on assimiloit aux r S£!
fjuuis ei qu'on distinguoit des arbalestes de DassP
portatives et faciles à bander aux reins eS les
nommant grandes ou fortes arbalestes de passf
etuient des arbalestes à tour. Aussi trouve-t-on mf^
tendre avec les mains une arbaleste "toui-, ou bS-
la''pîSuve'd'unp"r'?'''7''''^'''^'^ ^'^ passe,'c'étoit
daiSGarointn .-. ""^ de corps plus quhumainfe
uansbaigantua, a qui Rabelais, (T. I n l(î-, Uiif
et !S;. r -^ T:'^'' ^«'^tes «;^i/.i de p .ssè
et dans Gérard de Roussillon, qui, si l'on en croit
Ouf rpPf^r/H*^' demy a de longueur sa toise ".'
a"eval ifnt "v^^'^l ^ ^^^ "'^'"'^ estendoit,
Llieval et Chevaliers tout armés porfendoit •
Et tinllfà'" ''"°'' '"^ '■°^«^' en attour, '
tt tendoit a ses mains une arbalesle à tour.
Rom. de Ger. de Roussillon, MS. p. 8.
En effet, il n y a, dit Brantôme, « homme ni
» gean qui pût de la main, ou aux reins, c'estS dire
« sans tour m poulie, bander une de ces batistes
« de ces arbalestes à tour ou de passe : mais a ec
.' le tour nomme engin, du latin higenium rien de
« plus facile. » Aussi le Grand capital eGonsnKp
de Cordoue, à la gloire duquel l'esprit servit ?n?in?
et plus que la vaillance, prit-il pour ïeVs'e une
grande arba este de passe avec ces mots - ingenium
« superat vires, » pour signifier „ qu'il n'y a ?^
« belle force que l'esprit et l'industrie de l'hlmmè
: tanràPS.nf''*^';''^ P«"'-'^"t n'estouTofnt
AR
— 104 -
AR
La gfrosse arbalcsle de chantelle, ainsi nommée
peul-cire à cnused'une pii''cedel)Ois,d'inu'Iievalet,
en latin cantciius, sur lequel on la posoil comme
en cliantier, 6\o\[ sans doute une balisie de l'espèce
des grandes et fortes cirbalcstcs de passe, qui
étoient des nrbalestes à tour, avec lesquelles on
lançoit des traits qui bien souvent perfoient trois
et quatre hommes tout d"un seul coup, comme
Faucliet (Mil. Fr. p. 120,) l'atleste. « Feist le duc de
« Bourbon metti'c avant les grosses arbalcstres de
0 chanlelle au devant de la bataille des Anglois
« et lendemain par malin vint le comledeBourgui-
« gnan et ses Anglois en bataille rangée... devant la
« bastiedu duc de Bourbon ; et lui estant en bataille,
« Thomas le Genevois et Domiges feirent tirer la
« grosse arbalesle de chantelle en la bataille du
« Comte, qui lua deux hommes; dontfeurent esbahis
« les Anglois : car onques n'avoient veu si gros
« traict. » (Ilist. de Loys III, duc de Bourbon, p. OG.")
Quoique les canons et bombardes aient fait dis-
paroître les balisles et arbalètes, on trouve que
pendant plus de deux siècles l'usage des armes de
trait a subsisté en même temps que celui des armes
à feu ; armes non moins ennemies de prouesse que
les arbalestes et batistes, abhorrées de nos anciens
Chevaliers, comme « armes traiteresses avec quoi
« un coquin se tenant a couvert peu tuer un vail-
« tant homme de loin et par un trou. » (Yoy. le P.
Daniel, Mil. Fr. T. I, p. 411. - Fauchet, Mil. Fr.
p. 121 et 12-2. — M. Gaillard, Hist. de la Rivalité de
la France el de rAngletorre, T. II, p. 87.)
11 seroit facile de multiplier à l'infini les preuves
que pour la baliste et Yarbalête, il y avoit une
espèce particulière de flèches, que rarement on
lançoit avec l'arc. Ces flèches, dont le fer étoit
quarré se nommoient quarreaux; ou viretons,
parce qu'elles viroieni, tournoient en l'air, au
moyen des pennes qu'on y ajustoit pour l'équilibre.
On "lit dai;s la vie de Louis VI, par Suger, que Raoul
de Vermandois eut un œil crevé d'un quarreau
d'arbalète. (Voy. Duchesne, Hist. Fr. T. IV, p. 317.
— Le P. Daniel, Mil. Fr. T. I, p. 417, 418 et 419.)
« Au son du siblet saillirent bien de la sente de la
« galie quatre vingts Arbalestriersbien appai'eillés,
« les arbaleslvcs montées, et misirent maintenant
« les carriaux en coche. " (Joinville, Hist. de-
S' Louis, p. 80; édit. de 1701.) <■ N'avoient point
« remis n'appoincté autres quarreaux au poinct de
« leurs arbalestres. » (Monstrelet, Vol. I, chap. 24,
fol. 19.) « Les Arbalestiers Genevois ne failloyent
« là où ils visoyent; si en y eut de frapés.... de ces
« longs viretons parmy leurs testes. » (Froissart,
Vol. m, p. 68.)
On connoit les différentes mélonymies par
lesquelles arbaleste a signifié 1° portée ù'arbalête :
« Estoil li forest près ù deux arbales^trcs. » (Fabl.
ws. du R. n° 7989, fol. 77. — Voy. Arbalestée.)
2° Arbalétrier : « Menons avec nos.... deux mil
« Arbalestriers qui ont arbalestres à lor, et trois
« mil arbalestres simples. ■> (Chron. d'Outrem«r,
ws. de Berne, n° 113, fol. 1(58. — Voy. Arbalestier.)
3° Peut-être meurtrière, ouverture, fente par
laquelle on pouvoit, étant à couvert, tirer de Yarba-
lête. " Se retira en une tour en bas, oîi il y avoit
>< de petites rt/'ftrt/cî^f.s et fenestres bien estroi-
« tes. Toutes fois on lui percea les deux cuisses
" d'une lance, par une des lucarnes. » (Hist. de la
Pucelle d'Orléans, p. 499. — Voy. Arbalestiere.)
VARIANTES :
ARBALESTE. Gcr. de RoussUlon, MS. p. 8.
Arbalesthe. ViHehardouin, p. 66.
ARBALETE. Monet, Dict.
Ahballeste. Brantôme, sur les Duels, p. 81.
Arrastre (cor. Ai-ba!eslre.) Athis, MS. fol. 66.
Arbei.este. .Toinville, p. 39.
Aubeleste Du Cange, Gloss. lat. T. I, col. 275.
Aubelestre. Id. ibid. Rom. de Garin, MS.
Arbalestée, siibst. fém. Portée d'arbalète.
L'espace que parcourt le trait d'une arbaleste étant
en proportion du plus ou moins de force avec
laquelle il étoit lancé, on ne peut déterminer avec
précision quelle longueur, quelle distance on dési-
gnoit par un trait (\' arbalestée, par une arbalestée.
« Li dux de Venise.... ot ses nés, el ses uissiers, et
« ses vaissiaux ordenez d'un front; et cil front
« duroit bien trois arbalestrées. « (ViHehardouin,
p. 06.) » Quant ilz vindient au fret d'une arbales-
« trée, ilz ferirent des espérons, etc. » (Modus et
Racio, MS. fol. 299 V".)
I.e pas que j'ai ci devisé,
Où cil sont de guerre atisé,...
lert bien à trois arbalentées,
S'au certain dire me déport,
Loin de Gravelingues le port.
G. Guiarl, MS. fol. 279, Rv
On concluroit sans doute du particulier au géné-
ral, si l'on disoit que la distance d'une arbalestée,
d'une portée d'arbalesle étoit de deux arpens, par
la raison qu'être ii un arpent ou à demie arbalestée
paroit avoir désigné une égale distance. ■■ Je vous
" pry que, sitost comme nous serons à un arpent
« près d'eulx, nous descendons tous à pié;....et
« quand ilz furent près d'eulx comme à demie
« arbalestée, illec descendirent à pié et se rengé-
» rentemmi le pré. « (Hist. de B. du Guesclin, par
Ménard, p. 416 et 417.)
VARIANTES :
ARBALESTÉE. ViHehardouin, p. 63.
Arbalestrée. Hist. de Loys III, D. de Bourbon, p. 46.
Arbelestrée. Chron. S' Denys, T. II, fol 197, V».
Arbalestel, stibst. mase. pliir. Arbalètes.
On croit que ce mot est le même qu'arbaleste dont
on alléroit la terminaison en faveur de la mesure
el de la rime.
En la plus maistre tor sont cent arbaleslel ;
El se getent ensanle quatorze mangonel.
Rom. d'Alexandre, MS. du R. n- 61187, fol. 212, R- col. 1.
11 est probable que l'expression barbeoite d'arba-
lestiax, est une allusion aux baibes des plumes
avec lesquelles on garnissoit quelquefois les traits
d'arbalète. (Voy. Fabl. ms. du R. n" 7989, fol. 45,
V° col. 1 ; Var. du ms. de Berne, n' 351.)
Par une métonymie semblable à celle d'après
laquelle arbaleste a signifié arbalétrier, le mot arba-
lestel ou arbalestiaus pourroit avoir la même signi-
AR
— 105 -
ification dans quelques-uns de nos anciens Poètes
Tel est par exemple, celui qui, comparant àlVxPr
çice de l'arbalète ou de Farbal^^trier iSvité d'un
jeune homme plus robuste que délica? en amour"
Li novices petit sent
Damour, ne de ses reviaus •
Li gieus des arbalestiaux '
Soufist si fais emplumés
... . .Li saiges qi est amés,
Kl bien connoist kamours li puet valoir
A plus soufisaument joious voloir '
Ane. Poes. fr. MS. du Valic. n- J490, fol. 107. R-,
ARBALKSTRAus. Fabl. MS. du R no TQsi^ubt'supra.
AR
Arbalestier, stibst. masc. Arbalétrier On
observera que par la raison qu'aujourd'hu il'on hpp
fère à l'orthographe arbalètre celle d'arb'lète n"
En cherchant à fixer les époques auxauellP^ ^
commence et cessé pour un temps reconXencée^
cesse pour toujours l'usage de l\^rba!tHe ^5? '
qu 11 tut aboli, « on ne se servoit plus euère d'Ar
« baletners en France vers le milieu du rè^ned;
« traneois I" : je dis en France ; car on s'en servni^
" "rî^'T f.? Angleterre sur là tin du rèoïe ÏÏ
(Voy T1 'Dànie^t'r"^'^'■|^"'^ deLouls.xflI.'!
V*uy le 1-. Daniel, Mil. l-r. p. 42G et 4t>7 i
S. 1 on en croit Brantôme, les Anglois apprirent
aux Gascons 1 exerces de l'arbalèfe • m^ic if
mmmm
msmm
mâêmm
Philippe de Valois . en envoya quérir jusnue. à
■wvni nf Arbalestriers Genevois, dit Froissart
S nf^r"' P""' ^^P't^""'^ généraUiarquePde
sous le rè'-ne de PhVriAc vt ' • ^- ***"'•) *^" '™"ve
« Convient avnrri, ■ ' ('°y- A"1!aleste.
croc. etc. » (Le Jouvencel, ms. p. '291 ] '
n 9sr. "^ ,V.', 'f-^es Ulfic. des D. de Bour^oo-np
« dit Fauchet (Mil F- n Vi^ '■ '' ^ *^" ^™it'
eto'ttïitsru7irrSe'dret''^ ' ^^-^'
son fils aîné Charles Lie.ftennn '^f^^b P"'''^"^
accepta par ses Let'ris' du 'mo' 'de 1évru7'l r ,■ '
1 otïre que les Etats du Languedoc n t nt'd lîl
mvarbart d- -^" "" -""g"c"w lui nrent de 1 ai-
14
AR
— 106 -
AR
der d-un corps à' Arbalétriers dont moitié seroit à
%;itô^ris^:a^=-'--^T'^
Sm à che^^l, qui eonçourujeut au succès d^^
„ appelloilCranequiniers »(\oy. bauUiei,Hu. ^
^TJfrbalestriers h pied comme les ^rbaZesfWers
T I n S8'»et6Gl. — Ibid. l.ilU P- "— • "
cliet Mifr'-P 121-) ces Gens-d-armes ou sergents
WsÊiséMm
: fourSroltJ Ès paroisses ou aUleurs, s. cens
., des paroisses n-estoient souffisanz . . •,• •/\,"f
=ix il vpii aura deux il r/^a/csinm. » ^Ord. T. I,
; 38i insensiblement les non Nobles, toujours si
rpiiibie 1355, dans lesquelles on lil . « Pour ce que
f Sucuni de'noz Subgiez se «venturero.ent vo on-
„ tiprs "i o-rever noz ennemis en coi ps et en meub
l pf de ceie lefraingnenl aucune fois, pour ce que
nofueultenans, gonnestables, Admiraulx, Mais-
« l^£^Arbalesriers, Trésoriers des guerres e
Sresde noz Officiers demandent et rec ameiU
« aucuns droits, parts ou portions es geignes ou
. es pilles faites sur noz ennemis nous orde-
, nan^ fiiip chascun puisse prendre, gaignier et
S- sur noz diz ennemis, senz ce que aucuns
de noz Officiers dessusdiz, ou autres, y puissent
deiSderoureclamerpailoupourcion,ouaucui
S? se ainsi n'est qu^^eulz ou leurs genz soient
.. •> la besoingne. • (Ord. T. 111, p. 35 et 36.)
La saoesse de Charles V, son (ils et son succes-
seu? ^t dans ce patriotisme les moyens de reparer
e malheur de l'Etat, et les calcula. Par ses Lettres
fin 10 iuillet 1367. « 11 enjoint et commande à tous
\\lS^sllArbalestriÀs demourans en ses bon-
nes villes qu'ils se mettent en estât ; et que pai
es Gouverneurs en chacune d'icelles villes soil
sceu queTnombre d'Archiers et Arbalestriersy
a et combien on en pourroit avoir, se besoin
estoit • et de ce facent registre en cliascune viiie
I sur'lSut le certifient au P'uslost qu ds pour-
ront; et avecques ce enjoignent et induisent
toutes jeunes gens à exerc.ter, continuer ^l ap-
„ nrendre le fait et manière detran-e » (Oïd. i. iv,
p Ï6 1 est probable que le peuple devenu tout-à-
fait -uenier seconda en général la politique de ce
Priife en oubliant les jeux de hasard et en prefé-
rânà'tout exercice non-seulement de l'espri mais
du"tor s'celui de l'arc et de l'arbalète , çon ormé-
menl k l'Ordonnance du 3 avril 1309 ou on ht
Défendons tous geux de dez,de tables de Palmes,
de quilles, de palet, de soûles, de bil es et tous
autres telz geux, qui ne cheenl PO" .^.^^^^/f [
ne habiliter nos Subjez a fait et nsa.ge d armes, à
„ la delTense de nostre 'oyanme ;..... et o.denons
■■ nue noz diz Sub ez prennent.... leuis geux et
Ssbatemenl à eul.exfrcer et habiliter en faïc de
traict d'arc ou à-arbaleslrçs et ^^ent ^^eurs
dons aux mieulx traians. » Ord. T. V, p. 'iii-]
AÎÏrs on V t dans la plupart des villes du royaume
comme Paris, Rouen, Caen, Amiens, Laon , etc. se
forïef des cônfrairiès(l), descoUéges desconne a-
hiips (VArbalestr ers, auxquels le bomerain accoi
Soft des pSiléges et franchises, en reconnoissance
dps services qu'ils avoient rendus, et dans la vue
de les encourager à en rendre qui fussent plus
^^nSaîèment utiles. » Pour ce que dignes sont de
^'?£Suon ceulx qui.pour le bien du rogume
se exDOsent et offrent a exposer ebpetialement
fpufsDropres corps, si comme sont les Arbales-
?mqu?jà très agréables services nous on
a cSsideransquepar eulx pourront avenir
, nnllde biens à nous et au royaume ou fait des
Ses et que es bonnes villes de Rouen , d A-
; ISs, d'Arras, de Saint Omer les Arf,«/.sr.m
» nui V sont ont certains privilèges, no s »"■;
Vrbalcstiers de la confraerie de monsieur Saint
D le nostre dicte ville de Paris , . donnons
. Pt oclrovons . . privilèges , franchises et liber-
tez . (Ord T 111%. sGl.) -> Les Arbalestners du
cSiége de Rouen de la connestabl.e de Laon de
roniDiegne etc. s'obligèrent comme les Aibales-
: SSTaconfrairiedeParis, à servir en ous
;'„*i «"diSVce zèle une nouvelle acu.ite
aCbalétes de la page 290 à la page 292. (n. e.)
AR
— 107 —
AR
par une exemption semblable à celle que les Arba-
lestriers de la Rochelle obtinrent de Charles V.
« Oclroïons... à tous Arbalestriers... demourans et
« residans en ladicte ville de la Rochelle, que pour
« quelconques sièges, osts , chevauchées, ou ar-
« mées.... ne puissent estre contrains.... à saillir
« hors de ladicte ville.... se ce n'estoit par leur
« propre voulante et assentement. » (Ord. T. V,
page 636.)
Ces confrairies, ces collèges, ces connestablies
d'Arhalestriers, qu'on formoit de Télite des Arba-
lestriers des villes, avoient des chefs particuliers
qu'on nommoit Prevosts , Connestables , Maistres
d' Arbalestriers. (Vov. Ord. T. III, p. 360. — Ibid.
T. V, p. 22. — Ibid."T. VI, p. 540. - Coût. gén.
T. I, p. 108.) Les Arbalestriers qui n'étant pas admis
dans ces compagnies, n'avoient point de chefs sous
les ordres desquels ils pussent comme les autres se
rassembler en temps de guerre, étoient sans doute
du nombre de ces « Piétons et Gens-d'armes qui
« sans maistres ne chevetaine se rendoient à l'armée
« par menues parties. Alors le Connestable , les
« Mareschaux, les Maistres des Arbalestriers , ou
« autres à qui il appartenoit, choisissoient un Che-
« valiersouffisantetlui bailloientetaccomplissoient
« une route de vingt cinq ou de trente hommes
« d'armes. On meltôit touz les Piétons par connes-
« tablies et compaignies de même nombre d'hom-
« mes. .. (Ord. T. IV, p. 69 et 70.)
Il est probable que les Prévôts, Connestables, ou
maîtres particuliers d'Arbalétriers marchoient ;'i la
tète de leurs compagnies, sous la bannière d'Offi-
ciers généraux qu'on nommoit aussi Maistres des
Arbalestriers, et auxquels les maîtres particuliers
obéissoient, comme les Capitaines des Arbalétriers
Génois obéissoient îi un Capitaine général. (Voy.
Ord. T. V, p. 651.) « Les Maistres des Arbalestriers,
« sans estre Barons, ne Benneretz , de tant qu'ilz
« étoient Officiers par dignitez de leurs offices ,
« pouvoient porter benniere. » (Voy. La Salade,
fol. 51. ) Peut-être qu'en réunissant plusieurs com-
pagnies d'.lî'/>fl/c7r/É'?'S en corps, on mettoit à la
tête de chaque corps un Maislre général des Arba-
lestriers. On croit avoir quelque raison de soup-
çonner que dans les armées il y avoit plusieurs
Maistres généraux des Arimlestriers, lorsque dans
deux Ordonnances du Roi Jean, on lit : « Nous vou-
« Ions et ordenons que par nostre Connestable ,
« Mareschaux, Maistresdes,lrb«/cs//v>?"s, ou autres
« à qui il appartiendra, soit regardé , etc. » fOrd.
T. IV, p. 69.) « Que aucuns, soit du lignage du Roy,
« ses Lieuxtenans , Connestable, Mareschaulx ,
« Maistres des Arbalestriers, Maistres du Parle-
« ment, etc. » (Ibid. T. II, p. 406.)
Si notre conjecture sur la pluralité de ces Maistres
des Arbalestriers est fondée, l'on reconnoîtra qu'ils
n'ont pas plus de droit que le Capitaine général des
Arbalétriers Génois, à une place parmi les Maistres
des Arbalestriers qu'on a sans doute voulu distin-
guer des autres, en les nommant quelquefois Mais-
tres des Arbalestriers le Roy, Maistres des Arbales-
triers de France, Grands-maistres d&s Arbalestriers.
(Voy. Joinville, llist. de S' Louis, p. 115; édit. de
1761. — Froissart, Vol. I, pages 182, 3.50 et 381 —
Monstrelet, Vol. I, fol. 29 et 154. — Du Tillet, Rec.
des Roys de France , leur Couronne et Maison ,
p. 282. — Brantôme, Cap. Fr. T. IV, p. 42.) Il est
possible que faute de cette même distinction pres-
que toujours omise, quelques Maistres des Arbales-
triers qui n'étoient cas Grands-maislres, aient été
inscrits dans la liste des Grands-maitres des Arba-
létriers de France, comme l'on y a inscrit Marc de
Grimant, Ecuyer, créé Capitaine' général des Arba-
lestriers Génois, par Lettres de Charles V, datées
de Vincennes, le 6 décembre 1373. La preuve que
ce Capitaine général n'éloit pas Grand-maître des
Arbalétriers et qu'on peut se défier de l'exactitude
de la liste de ces Grands-officiers , depuis Symon
de Monceliart, Mestre des Arbalestriers ie Roy, sous
le règne de S' Louis, jusqu'à Aimar de Prie, dernier
Grand-maître des Arbalétriers, sous celui de Fran-
çois I"; c'est qu'en 1374, Hugues de Chastillon,
seigneur de Dampierre, placé dans la liste comme
prédécesseur de Marc de Grimaut, seigneur d'Anti-
bes, étoit encore en possession de cette charge.
Dans une Ordonnance du mois d'octobre 1374, il
est nommé après les Maréchaux et Amiraux, et
avant le Panetier de France, pour assister, comme
Maistre des Arbalestriers, au Conseil de la tutelle
des enfans mineurs de Charles-le-Sage. (Ord. T. 'V,
p. 651. — Ibid. T. VI, p. 52. — Joinville , Hist. de
S' Louis, p. 115; édit. de 1761. — Du Tillet, Rec.
des Rois de France, leur Couronne et Maison, page
283. — Le P. Daniel, Mil. Fr. T. I, p. 198 et 199.)
On trouve partout les preuves de la prééminence
des Maréchaux sur les Maîtres des Arbalestriers. Si
le Maréchal nommoit quatre Lieutenans pour rece-
voir les monstres de toutes manières de gens , le
Maislre des Arbalestriers n'en pouvoil nommer que
ung pour recevoir les gens de son hostel seulement.
(Voy. Ord. T. V, p. 658 et 659.) Néanmoins leurs
fonctions paroissent avoir eu dans le xiv siècle des .
rapports qui, à certains égards , supposoient une
espèce d'égalité. Philippe-le-Long, par ses Lettres
du 10 juillet 1319, ordonne que " l'en ne paie nuls
» deniers à gens d'armes jusques à tant que le
« Mareschal ou le Mestre des Arbalestriers lesayent
« reçeus deuement. » (Ord. T. I, p. 661.) Dans une
Ordonnance du Roi Jean, datée du 30 avril 1351, on
lit : « Von I ans que les Mareschaux, les Mestres des
« A7'balestriers e[ ixulres h qui il appartendra, en
« leurs personnes,.... voient et reçoivent les mons-
« très, afin que les Gens d'armes, etc. » (Ord.
T. IV, p. 70.)
Les Clercs des Arbalestriers étoient, relativement
aux Maistres des Arbalestriers , ce qu'étoient aux
Mareschaux les Trésoriers de la guerre. « Fera
» chascun l'office qui Mui appartient; c'est assavoir
« le Trésorier de la guerre, ce qui li appartient par
« devers les Mareschaux, et le Clerc des Arbales-
« îm?'s, ce qui touche le Mestre des. l/'(*rt/es<?v'é'?'s. »
(Ord. T. I, p. 661.) Charles V, toujours occupé de
ÀR
— 108 —
AR
prévenir les abus ou de les réformer, ordonna, n'é-
tant encore que Régent du Royaume, qn'h l'avenir
il n'y aiiroil qu'un Clerc en l'office de la clergie des
Arbalestriers, et pourvut de cet office Jehan de
rOspital. (Voy. Ord. ï. III, p. 387 et 31)1.)
On conçoit qu'en autorisant une espèce de con-
currence entre les Maistres des Arbalestriers et les
Mareschaux, dans l'exercice de leur cliarge, on
occasionna les débats qui furent enfin terminés, à
l'avantage des Maréchaux, sous le règne de Charles
VI. « Les Arbalestiers, Archers et Canonniersayans
« les Maistres des Arbalestiers et de l'Artillerie
« leurs supérieurs, débatoient n'estre sous la charge
« des Mareschaux. Le Roi Charles VI sur ce débat
« meu entre le mareschal Bouciquault et Jehan
« sieur de Ilangest Maistre des Arbalestiers de
« France, le '22 avril liH, déclara que la congnois-
« sance desdils Arbalestiers, Archiers et Canonniers
« appartenoil et appartiendroit perpétuellement, et
a la réception de leurs monstres et reveues ausdits
« Mareschaux. » (DuTillet, Rec. des Roys de France,
leur Couronne et Maison, p. 282. — Voyez le P.
Daniel, Mil. Fr. T. I, p. 193.)
Quand on sait que parmi les Arbalestriers il y
avoit des Arbalestriers à cheval ; que la charge de
Colonel de l'Infanterie n'avoit point de jurisdiction
sur aucune Cavalerie; que tout ce qui regardoit
l'ancienne et la nouvelle Artillerie n'a jamais eu
aucune dépendance du Colonel général ; enfin que
l'ancienne Artillerie étoit toute sous le Grand-
maitre des Arbalétriers de France ; on ne peut être
de l'avis du savant Du Tillet, qui croyoit qu'au
Maistre des Arbalestiers avoit succédé le Couronnel
de l'Infanterie. Cette opinion que Brantôme adoptoit
comme la plus vraisemblable, l'est pourtant moins
que celle qu'il rejetoil , en contrariant ceux qui
avoientditque « leGrand-maistredes.lr&a/t;s;)7C/'s
Il étoit ce que de son temps on disoil le Grand-
« maistre de l'Artillerie. » (Voy. Du Tillet, ubi
supra, p. 282. -Brantôme, Cap. Fr. T. IV, p. 42 et 43.)
Anciennenientonnommoitartilleiie,les machines
de guerre à l'usage desquelles on a insensiblement
substitué celui dès canons et autres armes à feu,
tant pour les sièges que pour les batailles. Il y avoit
même des arbalestes qui faisoient partie de la grosse
artillerie ; et la signification d'Artillier étoit la même
que celle d'Arbalestrier, selon Cotgrave, un faiseur
d'arbalètes. « Délaisseront en icelle place toute la
« grosse artillerie et par espécial arbalesles
« qu'on ne peut bander aux reins. » (J. Chartier,
Hist. de Charles VII, p. 233.) « Jehan li Ermin qui
<■ estoit Artillier le Roy, ala lors à Damas pour
« acheter cornes et glus pour faire arbalestres. »
(Joinville, Hist. de S' Louis, p. 93; édit. de 1761.)
On peut voir dans le P. Daniel (Mil. Fr. T. I, p. 195
et 196,) la preuve que ces Arlilliers ou Maîtres par-
ticuliers de l'artillerie d'une ville, d'une forteresse,
ou d'un château, faisoient non-seulement les arcs,
les arbalètes, les flèches, mais qu'ils construisoient
toutes les machines nécessaires pour l'attaque et la
défense des places ; qu'on leur conlioit l'entretien
et la garde de cette ancienne artillerie, sous l'ins-
pection du Grand-maitre des Arbalétriers. Il parolt
même qu'au moins pendant quelque temps encore
après l'invention de la nouvelle artillerie, les
Artilliers en général reconnurent sa jurisdiction,
puisque sur la fin du xiv siècle, ce Maistie des
Arbalestriers avoit cognoissance des Maistres d'en-
gins, de Canonniers, de Charpentiers, de Fossiers,
et de toute l'artillerie de l'Ost. Voici quelles étoient
ses anciennes prérogatives et ses fonctions. " Le
« Maistre des Arbalestriers, de son droit a toute la
" cure, garde et administration avec cognoissance
« des gens estans à pied en l'ost ou chevauchée du
« Roy ; de tous Arbalestriers, Archers ; des Maistres
« d'engins, de Canonniers, de Charpentiers, de
« Fossiers et de toute l'artillerie de l'ost, à toutes
« les monstres: a l'ordonnance sur ce ; à la bataille
« premier assiet les escoutes, et envoyé querre le
" cry de la nuict. Et se ville, forteresse ou chasteau
n est prins, à luy appartient toute l'artillerie quelle
« qu'elle soit qui trouvée est ; et se de l'artillerie
« du Roy est commencé à traire sur les ennemis,
« le remanant de l'artillerie est à luy. Item a de
« son droict les oyes et chèvres qui sont prinses en
« fait de pillage sur les ennemis du Roy. » iBouteil-
1er, Som. rur. liv. n, p. 898.) Il est évident que
dans l'Histoire des Grands Officiers de la Couronne
(T. H, p. 1058,) et la Milice Françoise du P. Daniel
(T. I, p. 192,) l'Extrait du registre des titres de
Rochechouart-Chandenier, est une copie de cette
énumération des fonctions et anciennes prérogatives
du Grand-maître des Arbalétriers ; et qu'au îieu de
ces mots « a toute la cour, » il faut lire dans
l'Extrait comme dans la Somme rurale, « a toute la
« cure. » On s'en convaincra par la comparaison.
En résumant ce qu'on a dit relativement, soit à
la différence entre le Colonel d'Infanterie et le
Maître des Arbalétriers, soit à la ressemblance entre
le Maître des Arbalétriers et le Maître de l'Artillerie,
on trouve que le Colonel de l'Infanterie n'ayant
jamais eu d'inspection sur aucune Cavalerie, ne
peut en avoir eu sav les, Arbalétriers achevai ; qu'il
n'en eut jamais aucune sur l'ancienne et la nouvelle
Artillerie ; qu'au contraire l'ancienne Artillerie et
même la nouvelle, ont été sous la dépendance du
Maître des Arbalétriers; que par conséquent il y a
eu un rapport réel entre sa charge ef celle du .Maître
de l'Artillerie; et que ce rapport est une raison de
croire que « la dignité de Grand-maitre de l'Artille-
« ne d'aujourd'hui, représente beaucoup mieux
« celle de Grand-maître des Arbalétriers que la
« dignité du Colonel de l'Infanterie. » (Voy. le P.
Daniel, Mil. Fr. T. I, p. 195.) Peut-être prouveroit'
on encore celte ressemblance en observant que
dans l'Histoire de S" Louis, p. 101, publiée en 1668,
d'après les éditions de Claude Mesnard, et d'Antoine-
Pierre de Rieux qui sous prétexte de polir le texte
de son manuscrit l'avoit défiguré, le titre de Maistre
de l'Artillerie le Roi répond l'i celui de Mestre des
Arbalestiers dans la même Histoire, p. 113, édition
de 1761, conforme à un Manuscrit du xiv siècle.
AR
— 109
AR
Enfin, l'on pense avec le P. Daniel, que toute
l'Artillerie, « même la nouvelle depuis l'invention
« delà poudre, fut dans le district du Grand-maitre
« des Arbalétriers au moinsjusqu'au règne de Louis
« XI, el que sous le règne de ce Prince la charge
« de Mailre de l'Artillerie, c'est-a-dire du canon,
» des armes à feu, des Mineurs et des Officiers qui
« servoient à cette nouvelle artillerie, fut déinem-
« brée de la charge de Grand-maitredes.4 rbalêtriers,
« et soustraite à son intendance (1). ■> (Voy. Mil. Fr.
T. I, p. 197 etl'JS.)
variantes:
ARBALESTIER. Fauchet, Mil. Fr. p. IH.
Arbalestrier. Ord. T. I, p. 383.
Arbaletieh, Arbalétrier. Monet, Dict.
Akbeletrier Ord. T. III, p. 298.
Arbestiek (corr. Arbalesticy.) Ord. T. VI, p. 538.
Hahbeletrieb. Ord. T. III, p. 435.
Arbalestiei-e,s;/bs^/'t!?«. Espèce de meurtrière.
(Voy. Arbaleste.) Fente par laquelle on lant^'Oit, à
couvert, les traits d"arbalête.
Là endroit séoit un moulin,...
Dont les ais n'ièrenl pas entières,
Mes garnies d'arbalestieres.
G. Guiarl, MS. fol. 295, Vv
VARIANTES :
ARBALESTIERE. G. Guiart, MS. fol. 295, V°.
.Arbalatiere. Brantôme, Cap. Fr. T. II, p. 18.
Arban (2), subst. masc. Amende pour défaut de
service militaire, de service exigible par le Seigneur
souverain. Service ou devoir tel que la corvée,
exigible par un Seigneur féodal. Comparaisons
relatives h l'idée des corvées. Service militaire et
personnel, exigible par un Seigneur féodal. Convo-
cation par le Seigneur féodal, de ses vassaux, pour
le service du Seigneur souverain. Convocation
itérative par le Seigneur souverain, des Nobles et
Non-nobles sujets au service féodal el coutumier,
pour service extraordinaire. Convocation générale
par le Seigneur souverain, pour service extraordi-
naire. Réunion, assemblée des personnes générale-
ment convoquées pour service extraordinaire.
Forces réunies, dernier effort. On observera que
dans les principes de l'ancienne constitution de la
Monarchie, tout homme libre, ù raison de sa pos-
session bénéficiaire ou allodiale, devoit le service
militaire. « llomnis //^er /(OHio qui quatuor mansos
« vestitos de proprio suo, sive ùealiciijus beneficio
« habet, ipse se pneparet, el ipse in hoston pergat,
« sive cum seniore suo. » (Baluz. Capitul. Reg. fr.
T. I, col. 489.)
La portion de fonds et terres, pour laquelle on
exigeoit ce service, n'étoit pas toujours la même.
Elle paroit avoir varié relativement à la nécessité
plus ou moins grande de multiplier les défenseurs
de la Patrie. « Quicumque liber mansos quinque
« de proprielate habere videtur, in hostem venial.
« Et qui quatuor mansos habet, similiter facial.
« Qui Ires habere videtur, similiter agat. » (Id.
ibid. col. 457.)
Quant aux hommes libres, possesseurs des deux
tiers, de la moitié, d'un tiers, d'un quart, d'un
sixième de cette portion de fonds el terres, pour la
totalité de laquelle le service d'un homme libre
étoit exigible, on les associoit en nombre suffisant
pour former une portion totale ; et le service mili-
taire auquel cette portion ainsi formée les assujet-
lissoit, se faisoil par un seul homme libre, que son
associé ou ses associés dévoient aider. » Qui verè
<• très mansos de proprio habuerit huic adjungaiur
« unusqui unum mansum habeatetdet illi adjuto-
" rium ut ille pro ambobus ire possit. Qui autem
« duos mansos tanlùm de proprio habet, jungatur
« illi aller qui similiter duos mansos liabeat ; et
« unusexeis,allero illi adjuvante, pergal in hoslem.
« Qui etiam unum tantum mansum de proprio
« habet, adjungantur ei très qui similiter habeant, et
« dent ei adjulorium , et ille tanliim pergal
« Ubicunque autem Ires fuerint invenli quorum
« unusquisque mansum unuin habeal, duo ierlium
« prœparai e faciant ; ex quibus qui melius polest,
« in hoslem venial. Illi verô qui dimidios mansos
« habent, quinque sextum prœparare faciant. »
(Baluz. Capitul. Reg. fr. T. 1, col. 457. 458, 489 et
490.) Il y avoil même telle circonstance où la
jouissance seule de la liberté , sans propriété de
terres , sans possession allodiale , obligeoit les
hommes libres à contribuer en argent à la défense
du Royaume. « Qui sic pauper inventus fuerit qui
" nec mancipia nec propriain possessionem terra-
■< rum habeat, tamen in pretio valente quinque
« solidos, quinque sextum prœparent. » {Id. ibid.
col. 458.)
On a la preuve que sous les règnes de Louis-le-
Debonnaire et de Charles-le-Chauve, la loi du service
militaire étoil la même que sous le règne de Char-
lemagne. « Comités, vel Missi nostri diligenter
« inquirant quanti homines liberi in singulis comi-
» talibus maneant qui per se possunt expedilionem
« exercilatem facere, vel quanti de his quibus unus
« alium adjuvet, etc. » (Id. ibid. T. II, col. 187.)
Lorsque par un Capitulaire déjà cité, Charlemagne
oblige au service militaire tout homme libre, pro-
priétaire ou usufruitier d'une portion de fonds et
terres, déterminée par la loi, il semble que par
rapport à l'obligation de servir, il n'y avoit aucune
différence entre la possession bénéficiaire et la
possession allodiale. Mais lorsqu'en obligeant à une
aide mutuelle les hommes libres, qui ne possédoient
pas en totalité celle portion légale de fonds et
terres, pour laquelle un seul devoit le service, il
parle uniquement des homi^ies libres propriétaires
ou possesseurs d'alleus; lorsqu'après avoir ordonné
ailleurs, que tous usufruitiers ou possesseurs de
bénéfices le suivront à l'armée, il détermine pour
(!) Le dernier grand-maître fut Aimar de Prie, seigneur de Montpoupon, de 1515 à 1527: la bataille de Pavie (l.")25) avait
prouvé l'inutilité des arbal^'lriers ; il n'était plus besoin d'un chef sans soldats. (.N. E.) — (2) Nous renvoyons le lecteur qui
voudra contrôler ce Ion? article sur Varbnn, au livre déjà cité de M. Bautaric, livre II, chap. II (p. 09 à 99), livre IV,
cbap. m (p. 223 à 240), et livre V, chap. V (p. 349 à 358). (N. E.)
AR
— HO -
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les seuls propriétaires ou possesseurs cl"alleus ,
la portion de fonds et terres à raison de laquelle il
les assujettissoit au même devoir ; il semble que le
possesseur usufruitier, sa possession fût-elle moin-
dre que celle du possesseur propriétaire, devoit seul
et sans aide, satisfaire à l'obligation de servir la
Patrie. « Quicunque bene/icia habere videntur,
« omnes in hostem veniant. Quicunque liber mansos
« quinque de proprietate habere videtur, similiter
« in hostem veniat. Et qui quatuor mansos
« habet, etc. » (Baluz. Capitul. Reg. Fr. T. I, col.
457. — Id. ibid. col. 489.)
Si l'on ne proportionnoit pas à la possession
bénéficiaire, comme à la possession allodiale, l'obli-
gation du service qu'on exigeoit d'un homme libre,
c'est probablement que cette obligation, réelle pour
les propriétaires , les possesseurs d'alleus , étoit
personnelle aux usufruitiers , aux possesseurs de
bénéfices, comme l'étoit aux hommes libres sans
propriété, l'obligation de s'associer plusieurs en-
semble, pour aicîer en argent l'un d'eux à faire le
service militaire. Ainsi l'obligation d'obéir au ban
du Prince et de s'armer pour la défense du Royaume,
pouvoit n'être pas la même pour le possesseur d'un
alleu que pour le possesseur d'un bénéfice, quoi-
qu'elle fût commune à l'un et à l'autre. Dans les
Capitulaires, le possesseur d'un alleu est souvent
désigné par la seule qualité d'homme libre. « Qui-
« cunque liber homo in hostem bannitus fuerit, et
« venire conteaipserit, etc. » (Capitulare 11, an.
812, lib. I, leg. Longob. tit. xiv, cap. 13.) « Quicun-
« que homo nostro habens honores in hostem ban-
« nitus fuerit, et ad condictum placitum non vene-
« rit, etc. » (Capit. II, an. 812, cap. 3.) « Quicunque
« exhisqui beneficium Principis habent , parem
« suum contra hostes communes in exercitu per-
« gentem dimiserit, etc. » (Ibid. cap. 5.)
On croit donc que l'obligation du service mili-
taire, contractée par l'homme libre, à raison d'un
usufruit qu'on nommoit honneur ou bénéfice, parce
que la concession de cet usufruit étoit un bienfait
ou une récompense honorable, dilTéroit de l'obli-
gation imposée à l'homme libre ù raison de sa
propriété ; que l'une étoit réelle et l'autre person-
nelle; que pour l'homme libre qui réunissoit à la
possession allodiale, la possession bénéficiaire,
elle étoit personnelle et réelle tout-à-la-fois. Autre-
ment les concessions d'honneurs ou de bénéfices ,
non-seulement inutiles à la Patrie, mais même à la
Souveraineté, auroient été trop désintéressées. Ce
désintéressement est d'autant moins vraisemblable,
qu'il répugne à l'idée de la bienfaisance royale, qui,
lors même qu'elle récompense, doit avoir un objet
utile et politique.
D'ailleurs, plus on fait réflexion que les Francs,
et même les Gaulois, étoient Germains d'origine;
que les Germains naissoient tous soldats de la
Patrie; qu'ils s'honoroienl d'être les compagnons
d'un Chef auquel ils se dévouoient; que ce même
Chef anoblissoit par des distinctions, et justifioit
par des actes de libéralité, un dévouement qui fai-
soit sa propre siireté en temps de guerre , et en
temps de paix sa gloire : plus on trouve raisonnable
de croire que les Leudes d'un Roi Franc avoient
les mêmes idées de noblesse, d'honneur et de
patriotisme que les compagnons d'un Chef de
Germains; que nos premiers Rois, Germains eux-
mêmes, connoissoient ces idées nationales; qu'a-
près leur établissement dans les Gaules, ils songèrent
à fortifier ces mêmes idées , surtout celles qui
étoient relatives îi leur gloire et à leur sûreté , par
des concessions à titre d'honneurs et de bénéfices.
Tel paroît être le motif politique de ces conces-
sions, au moyen desquelles l'obligation d'obéir au
ban et de servir la Patrie, semble avoir été person-
nelle aux Leudes, comme aux hommes libres sans
propriété l'obligation de s'aider à faire ce service.
On ajoute qu'un homme libre possesseur d'un
bénéfice auroit été ingrat, si comme l'homme libre
en général, il n'eût vu que la défense de l'Etat dans
la défense de la personne de son Souverain et de son
bienfaiteur. 11 devoit à la Patrie et au Roi , ce que
l'autre ne devoit qu'à la Patrie. Enfin, nos Rois par
leur bienfaisance, obligèrent sans doute les Leudes
à des services qui leur étoient personnels. Il étoit
naturel qu'à raison de ces services , exigibles
comme hommages de la reconnoissance, les Leudes
fussent les premiers à obéir au ban, et à s'armer
pour la défense du Roi et du Royaume. En l'an 640,
le roi Sigebert se disposant à châtier la révolte de
Raoul, duc de la Thuringe, appela d'abord à son
secours les Leudes d'Austrasie. « Cum Sigibertus
« regnaret, et Radulphus dux Thoringice vehementer
" Sigiberto rebellare disposuisset,"jussu Sigiberti
« omnes Leudes Austrasiorum in exercitu gradien-
« dum banniti sunt, etc. » (D. Ruinart, Fredeg.
Chronic. append. ad. Gregor. Turon. Hist. col. 656.)
L'homme libre qui n'étoit point Leude, devoit
aussi le service militaire : mais comme on vient de
l'observer, il ne le devoit qu'à la Patrie. C'étoit elle
seule qu'il servoit, soit qu'il marchât à une con-
quête, soit qu'il s'opposât à l'invasion d'un ennemi
étranger, ou à la révolte d'un sujet, qui, en s'ar-
mantcontre son Roi, s'armoil contre elle-même.
Cliarlemagne veilloit à la conservation de ses
défenseurs , lorsqu'à dessein d'empêcher qu'un
homme libre, plus lâche que dévot, ne se fit Prêtre
pour être dispensé de servir, il interdisoit aux
hommes libres en général, l'entrée dans les Ordres
ecclésiastiques, sans sa permission. « De liberis
« hominibusqui ad servitium Deisetraderevolunt,
a ut prius hoc non faciant quàm a nobis licentiam
a postulent. Hoc ideo quia audivimus aliquos ex
<i illis non tàm causa devotionis hoc fecisse quàm
« pro exercitu seu aliâ functione regali fugiendâ. »
(Baluz. Capitul. Reg. Fr. T. I, col. 725 et 726.)
11 est probable que sans la crainte de se désho-
norer aux yeux d'une Nation prompte à soupçon-
ner de lâcheté quiconque se dispensoit de faire la
guerre, nos Prélats auroient eu plus de respect
pour les décrets de l'Eglise, et moins d'ardeur pour
la défense du Royaume. Cette ardeur guerrière.
AR
- 111 —
AR
naturelle sans doute à plusieurs d'entre eux , étolt
si générale sous le règne de Cliarlemagne , que le
peuple tremblant pour ses Ministres, dont la mort
ou le danger sembloit lui présager une défaite,
supplia ce Prince d'ordonner qu"à l'avenir les Evo-
ques ne le suivroient point à l'armée. <■ Flexis
X omnes precamur poplitibus Majeslatem vestram
« ut Episcopi deinceps, sicut haclenus, non vexen-
« tur hostibus; sed quando vos nosque in hostem
" pergimus, ipsi propriis residcant in parochiis
« Quosdam enim ex eis in hostibus et prœliis vulne-
« ratos vidimus et quosdam périsse cognovimus
« Novit Dominus, quando eos in talibus videmus,
« terror apprehendit nos, et quidam ex nostris
« timoré perterrili propter hoc fugere soient. »
(Baluz. Capitul. Reg. Fr. T. I, col. 405.)
Par la loi des Francs, tout homme libre , que les
décrets de l'Eglise ou ses privilèges n'e.xemptoient
pas du service militaire, étoit condamné à une
amende de soixante sous, toutes les fois qu'il refu-
soit ou négligeoit d'obéir au ban du Roi. « Si quis
« liber, contemptà jussione nostrà, ceteris in exer-
« citum pergentibus, domi residere prœsumpserit,
« plénum hêribannum secundùmlegem Francorum,
« id est solidos sexaginta sciât se debere compo-
« nere. » (Capitula ad. leg. Longob. addita, an. 801,
imperii Karoli-Magni 1 .) On croit voir dans cette ex-
pression, secitndiuii h'ijon Fraiiconint, une preuve
que l'obligation de servir, et la peine imposée à
l'homme libre qui n'y avoit pas satisfait, étoit
aussi ancienne que les premières loix faites par
les Francs, lorsqu'ils s'établirent dans les Gaules.
Cette opinion semble d'autant plus probable qu'en
578, c'est-à-dire, soixante-sept ans après le règne
de Clovis, le roi Cbilpéric abusoit de cette même
loi, en y assujettissant des hommes que la Religion
ou l'humanité devoit en affranchir. « Cliilpericus
« rex de pauperibus et junioribus ecclesiœ vel
« basilicœ bannos jussit exigi , pro eo quôd in
« exercitu non ambulassent. Non enim oratconsue-
« tudo ut hi ullam exsolverent publicam functio-
« nem. » (D. Ruinart, Gregorii Turon. Hist. tit.
xxvn, col. 237.)
La peine prononcée contre l'homme libre qui
n'obéissoit pas au ban, sous les Rois de la première
et de la seconde race, étoit la même sous ceux de
la troisième, contre l'homme coutumier qui devoit
le service militaire. « Se les Gens le Roy truevent
« les ]ions couslumiers par les chastelleries qui
« fussent remès, fors ceus qui devroient remaindre,
« li Roy en porroit bien lever sus chacun soixante
« sols d'amende , et li Bers ne les en pourroit
" garantir. » (Etal3lissemens de S" Louis, livre I,
chapitre lxi.)
En attaquant la propriété ou possession allodiale
de l'homme libre, on l'auroit mis dans l'impossibilité
de faire à l'avenir le service auquel il étoit tenu
comme propriétaire ou possesseur d'alleu. Cliarle-
magne s'assuroit donc la continuation d'un service
dans lequel consistoit la principale force de l'Etat,
lorsqu'il protégeoit contre la vexation et l'injustice,
la propriété de l'homme libre ; lorsqu'il défendoit
d'y attenter, même pour le payement de l'amende
due par celui qui n'avoit pas obéi au ban ; lorsqu'il
vouloit que celte amende fût perçue en or et en
argent, en habits, en armes, etc. « De oppressione
« pauperum liberorum hominum, ut non fiant à
« potentioribus per aliquod malum ingenium contra
« justitiam oppressi, ita ut coaclirese'orum vendant
« aut tradant. Ideo hœc, et supra et hic, de liberis
« hominihus diximus, ne forte parentes contra
" justitiam fiant exheredati, et regale obsequium
" minuatur, etc. ■> {Baluz. Capitul. Reg. Fr. T. I,
page 427. — Id. ibid. col. 487.) » Ileribannus non
« exactetur neque in terris , neque in mancipiis ;
« sed in auro et argento, palliis atque armis, et
« animalibus atque pecudibus, sive talibus speciebus
« quœ ad utilitatem pertinent. » (Id. ibid. col. 767.)
On exigeoit au reste l'amende dont il s'agit avec
tant de rigueur, que dans le cas d'insolvabilité ,
l'homme libre étoit réduit à se mettre en la servi-
tude du Prince, et d'y rester jusqu'à ce qu'il l'eiit
payée en entier. « Si non habuerit unde illam sum-
« mam persolvat, semetipsum pro wadio in servi-
« tium Principis tradat , donec per tempera ipse
<' bannus ab eo fiât persolutns ; et tune iterum ad
« statum libertatis suœ reverlatur. » (Id. ibid.
col. 493 et 7G6.)
Quant à l'homme libre usufruitier ou possesseur
d'un bénéfice, d'un honneur, on punissoit en lui le
refus de service, par la perte de son usufruit , de
sa possession bénéficiaire. S'i^ n'étoit coupable que
de lenteur, il en étoit quitte pour faire abstinence
de viande et de vin , autant de jours qu'il avoit
différé d'obéir au ban du Prince. « Homo nostros
« habens honores in hostem bannitus quot
« diebus post placitum condictum venisse compro-
« batus fuerit, tôt diebus abstineat a carne et vino. »
(Baluz. Capitul. Reg. Fr. T.I, col. 7G7.) « Quicunque
« ex his qui beneficium Principis habent, parem
« suum contra hostes communes pergentem dimi-
« serit, et cum eo ire vel staie noluerit, honorem
« suum et beneficium perdat. » (Id. ibid.)
L'opinion commune, dit l'Auteur de la Glose sur
le Chapitre lx de la Coutume d'Anjou, est que sous
le règne de S' Louis, les Bers et Arrière-vassaux,
qui refusoient d'obéir au ban, perdoient leurs fiefs,
comme les Leudes perdoient leurs honneurs et
bénéfices sous le règne de Charlemagne. (Voyez
Ord. T. I, p. 154, note (r).
On chercheroit en vain dans les Capitulaires des
Rois de la première et de la seconde race , une
distinction entre les mots bannus et heribannns ,
semblable à celle qu'on trouve entre les mots ban
et arrière-ban, dans les Ordonnances des Rois de
la troisième race. On y voit qu'en général bannus
signifioit publication d'une loi, d'un ordre du Sou-
verain ; en particulier, publication d'un ordre relatif
à la nécessité du service militaire.
De là, on nommoit bannus, bannus dommicus,
la peine à laquelle on condamnoit les infracteurs
du ban ou de la loi publiée par ordre du Seigneur
AR
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souverain; banniis, heribannns, la peine à laquelle
on condaninoit les hommes libres sans bénéfices ni
honneurs, lorsqu'au mépris du ban ou de Tordre
publié de la part du Seigneur souverain , relative-
ment à l'obligation de servir, ils avoient refusé ou
négligé de le suivre ù l'armée, ou de faire quel-
qu'autre service utile ù la Patrie. Il ne s'agit ici que
de la dernière signilication du mot simple bannus,
sigiiilication qui étoit particulière au composé
luh-ibannns. « Nec pro wactà, nec de scarà, nec de
" wardà, nec pro heribergare, nec pro alio banno,
a heribannum Comcs exactare prœsumat, nisi
« missus nosler, etc. « {Baluz. Capital. Reg. Fr.
T. I, col. 767.) « lUi qui in hostem pergere non
« potuerint, juxta aniiquam et aliarum gentium
« consuetudinem ad civitates novas, et pontes , ac
« tiansilus paludium operentur, et in civitate atque
« in marcha waclas faciant, ad defensionem Patriœ
a omnes sine ullà excusatione veniant. Et qui...
« hostem dimiserint, /((?rif)a?i/n<m persolvant. »
(Id. ibid.T. II, col. 187.)
La distinction que dans les Capitulaires on aper-
çoit entre Imnnus et heribannns, consiste en ce que
le mot composé signifie particulièrement la peine,
l'amende pour défaut de service militaire, et que le
mot simple signifie généralement « peine, amende
i< pour infraction de la loi du Seigneur souverain ;
« la peine, l'amende, qu'on nommoit souvent ban-
« nus dominicus. » (Voy. Baluz. Capitul. Reg. Fr.
T. I, col. 3-47, 393, passim. — Id. ibid. col. 197,
198, 207, 254, passim. — Id. ibid. col. 349, 371,
passim.) C'est sans doute en conséquence de cette
acception générale, que bannus, bannus dominicus,
signilioit quelquefois la môme chose que heriban-
nus. ^■^ De Mundoburgio ecclesiarum, viduarum,
« orphanorum et de minus potentum personarurn
a atque et de exercitali placito instituto, ut hi qui
<" ista irruperint, bannum dominicum omnimodis
« componant. » (Baluz. Capitul. Reg. Fr. T. I,
col. 403.) « De heribanno diligenter inquirant
« Missi : qui hostem facere potuit et non fecit, ipsum
« bannum componat. » (Id. ibid. col. 474, etc.)
On ajoute que dans le sens de peine, amende,
non-seulement l'acception de heribannns étoit aussi
particulière que celle de bannus étoit générale;
mais que cette acception est la seule qui paroisse
justifiée par les Capitulaires. En effet, on n'y a ren-
contré aucune itreuve qu'il ait signifié /^a», publica-
tion en général ; pas même en parliculier ban de
l'ost, en latin hostiiis bannus, le to)(,la publication
d'un ordre pour se rendre à l'armée, ou pour faire
quelqu'autre service militaire. C'est néanmoins
d'après f idée contraire qu'on a prétendu que la plus
ancienne signification de heribannus, en fran^'ois
heriban, hereban, étoit le cri public fait de par le
Roi à ses vassaux pour l'aller servir à l'armée, et
qu'ensuite le même mot avoil signifié l'amende que
payoient les mêmes vassaux pour n'avoir pas obéi
a la convocation. Les Etymologistes sont en géné-
ral d'autant plus attachés à cette opinion, qu'elle
leur semble autorisée par la signification du mot
allemand heer, qui, réuni à ban, forme selon eux
le composé hereban, en latin heribannus. (Voy.
Fauchet, Mil. Fr. p. 114. - Rabelais, T. IV, p. 218;
note de Le Duchat. — Ménage, Dict. Etym.)
Il est vrai qu'en allemand heer signifie armée ;
mais comme le droit d'assembler une armée et de
la commander, est un droit de Seigneur, il seroit
possible qu'une armée eût été nommée heer,ie cet
autre mot allemand hei'r, /ie77<senlatin,enfrançois
Seigneur. Quoi qu'il en soit, les Savans, qui ne sont
pas de l'opinion générale des Etymologistes sur la
composition de hereban, le croient formé, non de
lieer, mais de herr réuni au mot ban. (Voy. Coquille,
Hist. de Mvernois, p. 121. — De la Roque, Traité
du Ban et Arrière-ban, chap. xvii, p. 43. — Borel,
Très, de Rech. et Antiq. Gaul. p. 508.) Cette seconde
Etymologie peut être préférable à la première ; mais
on n'en conclura point avec Coquille, que dans les
Capitulaires hereban, en latin heribannus, ait signi-
fié l'ordre publié de la part du Seigneur souverain
pour s'armer et faire le service militaii'e. On a déjà
remarqué qu'il y désignoit spécialement et peut-
être uniquement l'amende due au Seigneur souve-
rain, par tout homme libre qui n'avoit pas obéi à
cet ordre.
Il paroit que cette amende étoit si essentiellement
le droit du Seigneur souverain, qu'on refusoit d'en
compter à toul autre qu'à ses Envoyés, même aux
Comtes. « Dicunt ipsi Comités quod alii eorum
<" pagenses non illis obediant, nec bannum domni
« Imperatoris adimplere volunt ; dicentes quod
« contra Misses domni Imperatoris pro heribanno
>< debeant ratiouem reddere. » (Baluz. Capitul. Reg.
Fr. T. I, col. 486.) Ce refus de la part des hommes
libres, fut autorisé par les loix de Charlemagne.
« Ut haribannum, aut aliquod collectum, pro exer-
« citali causa. Comités de liberis hominibus reci-
« père non prœsumant; excepte si de palatio
« nostro Missus veniat qui illum haribannum
« requirat. " (Id. ibid. col. 532.) Quoique les Comtes
eussent le tiers de cette amende, la concession
qu'on leur en faisoit, étoit une concession de partie
d'un droit qui n'appartenoit sans doute qu'au Sei-
gneur souverain, puisqu'ils ne pouvoient recevoir
le don qui leur en étoit fait, que par les mains de
ses Envoyés. « Herilinnnum Cornes exactare non
« prœsumat, nisi Missus noster prius lieribannuni
« ad partem nostrani recipiat et ei suam tertiam
« partem exinde per jussionem nostram donet. »
(Id. ibid. col. 767.)
Lorsqu'on fait réflexion d'ailleurs, que l'homme
libre à qui il étoit impossible de servir la Patrie en
suivant le Roi ;i l'armée, étoit tenu de la servir et
de travailler pour son utilité ou pour sa défense,
soit en gardant les frontières, soit en aidant à bâtir
de nouvelles cités, à construire des ponts, à rendre
les marais praticables ; lorsqu'on a la preuve que
l'amende pour défaut de travail aux ouvrages
publics, comme l'amende pour défaut de service à
l'armée, pour défaut de service militaire en général,
se nommoit heribannus; on est de plus en plus au-
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il3
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torisé à croire que cette dénomination étoit moins
relative à l'idée particulière du service à Farmce,
qu'à l'idée générale du service que le Seigneur sou-
verain avoit seul le droit d'exiger d'un homme
libre. On a remarqué plus liaut que bannus domi-
niciis signifioit quelquefois amende pour défaut de
service même à l'armée.
Tant que la puissance souveraine fut en état de
protéger la liberté et la propriété contre l'usurpa-
tion et l'oppression des Grands, l'homme libre ne
servit que le Roi et la Patrie. « Liberi homines nul-
« lu m obsequium Comitibus faciant nec Vicariis,
« neque in prato, neque in messe, netiueinaraturà
■1 aut vineà; et conjectum ullum vel residuum eis
« resolvant, excepte servitio quod ad Regem perti-
« net, et ad heribannatores, vel bis qui legationem
« ducunt. » (Baluz. Capitul. Reg. Fr. T.I, col. 400.)
Mais à l'anéantissement presque total de cette puis-
sance, la propriété devint servile, et on vit la
liberté expirer sous les efforts redoublés de la
tyrannie féodale. Le Seigneur féodal exigea pour
lui les services que le Seigneur souverain avoit
exigés pour l'utilité, ou pour la défense du Royaume.
11 appela son homme, celui qui jusqu'alors avoit été
comme lui l'homme du Roi et de la Pairie, et l'as-
servit à des devoirs qu'on nommoit bans, baiis-
arùans, ou tout simplement arbans : mot dans
lequel on reconnoit le \a.['m heribanniis, qu'on écri-
voit liarlbannus, hairbauniis,airbanmis,arbanniis,
e7'baii)uts, etc. (Vov. Du Cange, Gloss. lat. T. III,
col. 1107-1111. — Baluz. Capi\ul. Reg. Fr. T. I,col.
532. — Formulœ vet. Bignon. Form. xxxi.)
Ainsi le mol irtxnçois arban, formé de l'alléralion
du latin heribannus, qui signifioit l'amende pour
défaut de service, exigé de l'homme libre par le
Seigneur souverain, signifia le service même,
exigé de l'homme serf par le Seigneur féodal : dans
la Coutume de la Marche, « les corvées à bras, ou
« de bœufs et charettes que les subjects tenans hé-
« ritages servement ou mortaillablement doivent à
« leurs Seigneurs: » dans la Coutume de Poitou,
« certains devoirs et charges dues sur héritages. »
(Laurière, Gloss. du Dr. Fr. T. 1, p. 02. — Id. ibid.
T. II, p. 9. — Cotgrave, Dict.)
On nommoit arbans ces corvées, ou autres ser-
vices, parce qu'ils se faisoient en vertu d'un ban,
d'un ordre publié de la part du Seigneur. « Outre
« la taille annuelle, l'homme serf tenant feu ellieu
« est encores biennable ; c'est assavoir qu'il doit
« une journée d'homme à bras, depuis soleil levant
« Jusques au couchant, tel jour de l'année qui luy
« est commandé par son Seigneur ou son Sergent
« baillial ; de laquelle semonce ou commandement
0 le Sergent baillial est creu, pour faulcher, faire
« vignes, ou autres œuvres; ou pour le bian, autre-
« meut arban, doit payer à son Seigneur quinze
« deniers tournois, au choix du Seigneur. » (Cou-
tumes locales de la ville et baronnie de Chàleau-
neuf, art. iv.) Dans celles de la ville et comté de
Chàteau-Meillan (art. xxvet xxvi}, on lit : » Leshom-
« mes serfs doivent un chascun mois à leur Seigneur
« un arban à bœufs et charrette, s'ils en ont; sinon,
« une corvée de leur corps. Item, tous les hommes
« et femmes serfs des vassaux demeurans en ladite
" terre, doivent audit Seigneur chascun an, un
« chascun d'eux, un arbdn à bœufs, etc. » (La
Thaumassière, Coût, de Berry , p. -160 et 191.)
Renoul, chevalier, sire de Culant, affranchit en 1273,
les bourgeois de Veydun, « et quita tout arban aux
« hommes et aux femmes de la franchise, » avec
une restriction qui prouve que sous la dénomina-
tion d'arban, étoient compris différens services ou
devoirs exigibles par les Seigneurs. « Je quite tout
« arban aux hommes et aux femmes de ladite fran-
« chise, fors que tant que je relien mon charroi en-
« tierement au besogne de mon chaslel et de mes
« maisons de Veydun, et de vins, et de foingz tant
« seulement ; et je ne les puis fourcer de nul arftare
« ne de charroy aller fors la parroche de Veydun
« por nesun besoin. .. (Id. ibid. p. 103. — Voy. Ban
ci-après.) 1! est évident que dans l'ancienne Coutume
de Poitou, art. xcxv, le mot arbaux, ou berbaux,
dans la nouvelle, art. cm, n'est autre que le mot
arbans ou berbans dont on a altéré la terminaison.
« Tailles, berbaux et autres charges, ensemble
>' toutes rentes roturières foncierts, sont indivisi-
" blés. » (Coutumes de Poitou, au Coût. gén. T. I,
page ô78. — Voy. Laurière , Glossaire "du Droit
français. — Du Cange, Glossaire latin, T. III, col.
moet lin.)
Ce n'est peut-être pas sans raison qu'on a cher-
ché dans le nom de ces corvées, insupportables aux
malheureux qui en étoient surchargés, le principe
d'une comparaison d'après laquelle on disoit pro-
verbialement, « se jeter sur quelqu'un comme
« herbaut sur pauvres gens, pour se jeter avec
« violence sur quelqu'un, lui tomber sur le corps
« aussi lourdement qu'hcrbaut ou le fardeau des
« corvées et autres redevances, tombe sur les pau-
•• vres gens. » Il est possible aussi, que relative-
ment à l'idée des violences faites aux corvéables
par ceux qui les commandoienl, tel chien qu'un
instinct particulier porte à se jeter sur les pauvres,
ait été nommé herbaut. (Voy. Rabelais, T. IV,
p. 218 et 219; note de Le Duchat.) Enfin le Dieu de
misère et de pauvreté, se nommoit Herban, relati-
vement sans doute à l'idée de l'étal pauvre et misé-
rable auquel les hommes sujets aux corvées étoient
réduits. « Si allons querre la chetivelé, que Herban,
« le Dieu de misère et de poureté ne nous faille. »
(Percef. Vol. II, fol. 50, V" col. 1.)
On sait que ces corvées, proscrites par les loix de
Charlemagne comme autant d'attentats à la liberté
de ses sujets, commencèrent à être autorisées vers
la fin de la seconde race, lorsque les Ducs, les
Comtes, les Barons, les Châtelains et autres Officiers,
parvenus à rendre héréditaires les charges et les
terres qu'ils possédoient à vie, en obtinrent enfin la
propriété seigneuriale, avec les moyens de s'asser-
vir des hommes sur lesquels ils n'avoient jamais eu
qu'un pouvoir émané du Souverain, ou d'assujettir
leurs possessions bénéficiaires et même allodiales,
15
Aft
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AU
changées en possessions féodales, :\ d'autres ser-
vices que ceux dûs au Roi et à la Patrie.
Avant l'établissement du système féodal, toute
possession, même la possession d'un bénéfice qu'on
ne tenoit pas immédiatement du Roi, n'obligeoit à
aucun service distinct de celui que devoit le vassal
immédiat du Seigneur souverain. En suivant à
l'armée le Comte ou le Seigneur dont on tenoit un
bénéfice, dont on étoit le vassal, on ne servoit que
la Patrie, et l'on n'obéissoit qu'au ban du Roi.
Aussi a-t-on vu qu'à lui seul étoit due l'amende
pour défaut de service militaire. « Omnis liber
« homo qui quatuor mansos... dealicujusbeneficio
« habet,... ipse in tiostem pergat, sive cum seniore
« suo. » (Baluz. Capitul. Reg. Fr. T. I, col. 489.)
« De vassis dominicis qui intracasam serviunt,
« et tamen bénéficia habere noscuntur, slatutum est
« ut quicunque ex eis cum domno Imperatore
« domi remanserint, vassallos suos casatos secum
« non retineant, sed cum Comité cujus pagenses
« sunt, ire permiltant. « (Id. ibid.col. 495.) « Vassi
« nostri et vassi Episcoporum, Abbatum, Abbatis-
« sarum et Comitum, qui in lioste non fuerunt,
« heribannum rewadient. » (Id. ibid. col. 618.)
Mais la propriété seigneuriale des vassaux immé-
diats du Seigneur souverain une fois légitimée, on
vit naître et s'élever une nouvelle puissance qu'on
nomma suzeraineté; mot, dit Loyseau, « qui est
" aussi étrange que cette espèce de Seigneurie est
« absurde. » "Alors une servitude presque générale
succéda à la liberté; l'homme de la patrie fut un
homme de fief; le possesseur d'un fief qui ne rele-
voit pas immédiatement du Roi, fut le vassal d'un
Seigneur suzerain et intermédiaire, et ce vassal par
sous-inféodation, acquit un autre vassal qui étoit
par rapport à lui ce qu'il étoit lui-même par rapport
à son Seigneur, et ce qu'étoit ce Seigneur par rap-
port au Souverain. Le service militaire auquel les
Seigneurs propriétaires obligèrent leurs hommes et
leurs vassaux , en cas de guerres particulières,
a été désigné comme les corvées et autres devoirs
féodaux, par le mot arbaii ou erban. On croit qu'il
faut lire erband dans une charte de l'an 984, par
laquelle Emenon, seigneur d'Yssoudun, affranchit
de ce service militaire les habitans du bourg
S' Martin. « Concedimus omnes consueludines....
« ita scilicet ut nemo illorum pergat ad pugnam
« quœ alio nomine vocalur eijbanid, neque botta-
* gium vini alicui reddat. » (La Thaumassière,
Coût, de Rerry, p, 697. — Voy. Du Cange, Gloss.
lat. T.m, col. 1109.)
Ou ne confondra point ce service militaire, per-
sonnel aux Seigneurs qui forcèrent en conséquence
leurs hommes et leurs vassaux à prendre les armes
contre le Roi même, avec le service militaire qu'ils
en exigeoient, toutes les fois que le Seigneur sou-
verain faisoit publier son ban, ou l'ordre de s'armer
pour sa défense et celle du Royaume.
Probablement que d'après l'opinion générale et
peu vraisemblable des Etymologistes, qui veulent
qu'arrlère-ban ait été formé comme arban, du mot
heribannus, composé de ban et hère en allemand,
lieras en latin, en franç,'ois Seigneur, l'on aura dit
que V arrière-ban étoit pour les Seigneurs, pour les
Nobles ou lenans tiefs, et le ban pour les roturiers.
On a déjà observé que dans les Capitulaires, ce mot
heribannus signifie toujours l'amende exigible par
le Seigneur souverain pour défaut de service mili-
taire, et jamais la publication de l'ordre relatif à ce
service ; encore moins la publication d'un ordre
particulier à une classe supérieuie d'hommes, tels
que les Seigneurs, les Nobles ou les possesseurs de
fiefs, pour qui l'obligation de servir la Patrie fut
une espèce de prérogative, sous les Rois de la
troisième race. Sous ceux de la première et de la
seconde race, c'est-à-dire, jusqu'à l'époque de
la seigneurie féodale, tout homme, quel que fût son
état, pourvu qu'il fût libre, servoit ou aidoit à servir
le Roi et la Patrie. La publication de l'ordre auquel
il obéissoit en concurrence avec l'homme que la
fortune et le méiite élevoient au-dessus des autres
sujets du Roi, se nommoit ban; et ce ban étoit pour
le Comte, pour le Leude illustré par la faveur,
comme pour le possesseur obscur d'un bénéfice ou
d'un alleu, pour l'homme libre en général. Il n'y
avoit point alors de ban pour les Seigneurs, qu'on
distinguât du ban pour les hommes libres, en le
nommant hériban. Quand il seroit vrai que de ce
mot hériban l'on eût fait arrière-ban, il faudroit
encore prouver qu'on a eu raison de dire ([ue sous
les Rois de la troisième race, V arrière-ban étoit
pour les Seigneurs, pour les Nobles ou possesseurs
de fiefs en général, et le ban pour les roturiers.
(Voy. Laurière, Gloss. du Dr. Fr . au mot Arrière-ban.)
On imagina sans doute le mot arrière-ban ou
riereban, en latin retrobannus, et on le distingua
du ban, lorsque les Seigneurs propriétaires com-
mencèrent à avoir des vassaux, qui, relativement
à l'obligation du service militaire qu'ils dévoient
au Roi, n'éioient plus placés sur la ligne des vas-
saux immédiats du Seigneur souverain; puisque ce
n'étoit plus le Roi, mais ces Seigneurs intermédiai-
res qu'ils suivoient à l'armée, puisque c'étoit
arrière eux qu'ils marchoient et combattoient pour
la défense du Royaume. De là, on aura nommé
arrière-ban, la publication de l'ordre auquel les
vassaux d'un Seigneur intermédiaire obéissoient
en le suivant à l'armée, par opposition au ban, à la
publication de l'ordre adressé aux vassaux immé-
diats du Seigneur souverain. « Le ban éloit la con-
•< vocation des vassaux du Roi sans moyen ;
" Yarrière-bati, la convocation de ceux qui tenôient
<■ du Roi médiatement. » (Voy. Laurière, Gloss. du
Dr. Fr.) On caractérisera encore mieu.N. cette pre-
mière distinction du ban et de Varrière-ban, en
disant avec Charondas : « Le ban estoit la convoca-
" tion que faisoit faire le Roy et souverain prince ;
« et Y arrière-ban, la publication que le Seigneur
« appelle au ban de son Roi ou Prince, faisoit faire
« pour assembler ses vassaux et arrière-vassaux,
« pour l'accompagner à l'ost et armée. » (Voy.
BouteiUer, som. rur. art. lxxxui, annot. p. 486.)
AR
— H5 —
AR
Le service militaire qu'en ce cas les Seigneurs
appelés au bail du Roi exigeoient de leurs vassaux,
ëtoit le service auquel les avoit obligés eux-mêmes
l'inféodation du Seigneur souverain. Quoique leurs
fiefs ou plein-fiefs, au moyen de la sous-inféoda-
tion, fussent, relativement au Roi, changés en
arrière-fiefs, ce changement n'anéanlissoit pas
l'obligation primitive qu'ils avoient contractée.
Mais pour y satisfaire, ils s'associèrent des vassaux
qui en paroissant les servir, ne servoient réellement
que le Roi, comme Seigneur suzerain de toute pos-
session féodale. Il est probable que nos Rois sans
cesse occupés du soin politique de rétablir les droits
de la souveraineté, en faisant valoir ceux de leur
suzeraineté universelle, accoutumèrent insensible-
n\ent les vassaux de ces Seigneurs intermédiaires,
à voir comme une formalité assez indifférente, un
arrière-ban que devoit précéder le ban ou Roi, ban
auquel ils obéissoient en paroissant n'obéir qu'h
l'arrière-ban de leurs Seigneurs. Aussi a-t-on dit
que le ban étoit •< un mandement fait l'i tous Gen-
« tilshommes et tenans llefs et arrière-fiefs, d'assis-
tt ter à la guerre du Prince. » (Voy. De la Roque,
Traité du Ban et Arrière-ban, p. 2.) Si les tenans
arrière-fiefs partageoient la Noblesse avec les
tenans liefs, comme ils partageoient avec eux
l'obligation de faire service personnel avec armes
es guerres; il faut en conclure qu'ils étoient du
nombre de ceux qu'on a désignés comme sujets au
ban, en disant que les Nobles seuls estoient sujets
au ban. (Voy. Ord. T. I, p. 152, note (a.) — Coquille,
Hist. de Nivernois, p. 110.)
On pourroit, d'après cette définition du ban, ima-
giner que Varrière-ban fut alors une convocation
des Non-nobles à la suite des Nobles, comme il avoit
été la convocation des vassaux médiats du Seigneur
souverain, à la suite de ses vassaux immédiats. Il
est vrai qu'au temps où l'on paroit avoir confondu
avec le ban du Roi, un arrière-ban qui en étoit la
conséquence nécessaire, on distinguoit encore
Varrière-ban du ban. Mais cette distinction n'étoit
point relative à celle des Nobles et des Non-nobles,
les uns convoqués à la suite des autres; puisque
par son ban le Seigneur souverain convoquoit tout
homme noble ou non-noble qui lui devoit un service
militaire. En prouvant qu'il y avoit des Non-nobles
obligés à ce service, que les hommes coutumiers,
les bourgeois et habitans des villes, les hommes
des Seigneurs servoient en l'ost du Roi avec les
possesseurs de fiefs et arrière-fiefs, avec les Sei-
gneurs, les Cientilsbommes, les Nobles en général,
on prouve qu'ils obéissoient à son ban, en concur-
rence avec les Nobles et les Seigneurs, lors même
qu'ils marchoient sous leur ban'nière. « Nobles et
« Non-nobles qui à nous et à nos successeurs, en
« nos guerres et osts, doivent certains services,
« etc. » (Ord. T. 1, p. 588.) « Li Barons et li bons
« le Roy doivent le Roy suivre en son ost, quand il
« les en semondra, et le doivent servir soixante
<■ jours et soixante nuits Li bons coustumier
a doivent être en l'ost le Roy quarante jours et
« quarante nuits; et se il en venoit avant, et il en
« fussent prouvé, la Justice le Roy en porroit bien
« lever soixante sols. » (Établissemens de S' Louis,
chap. Lxi.) On ne dispensoit du service de l'ost les
Non-nobles qui y étoient assujettis, qu'autant qu'ils
se soumettoient à l'imposition de certains droits
d'aide. « Les gens des villes, ne les subgiez des
« Nobles, ne seront contrainz à aller en nostre ost,
« durant le temps de nostre imposition. » (Ord.
T. II,p. 39'(,etc.)
Dans le cas oii le Souverain jugeoit que le pre-
mier ban devoit être suivi d'un second ban, par
lequel il exigeoit des Nobles et Non-nobles un autre
service que celui prescrit par les loix féodales et cou-
tumières, on nommoit ce ban, relativement h celui
qui l'avoit précédé, arrière-ban. C'est en ce sens
qu'on a eu raison de dire qu'il n'y a\oil arrièi'e-ban,
lorsque nul ost n'estoit allé devant; (luele ban étoit
pour le service ordinaire, et Varrière-ban pour un
service extraordinaire. (Voy. Chron. Fr. de Nangis,
Ms. an. 1338.— Laurière, Gloss. du Dr. Fr. — De la
Roque, Traité du Ban et Arrière-ban, p. 2.)
On définira donc Varrière-ban ainsi distingué du
ban, en disant que c'étoit une convocation itérative
des Nobles et Non-nobles sujets au service féodal et
coutumier, pour un service extraordinaire : défini-
tion justifiée par les Ordonnances, entre autres par
celle de Louis X, en date du 22 juillet 1315, dans
laquelle on lit : « Que iceux Nobles et Non-nobles
« qui à nous et à nos successeurs, en nos guerres
<• et osts, doivent certains services et homages,
« iceux services payez, demeurent quilles et francs,
« sans ce que par nous, ne par nos successeurs
« puissent estre contrains à autre service d'ost
« faire h nous, fors en cas de Varrière-ban qui con-
« vient eslre raisonnable et de cause apparissant. »
(Ord. T. I, p. 588.) Lorsque le droit de faire publier
cet arrière-ban, fut un droit du Souverain, exclusi-
vcmenl aux Seigneurs qui avoienl pu se l'arroger,
le Souverain s'obligea par amour pour son peuple,
que Varrière-ban exposoit à des vexations, à ne le
faire publier que dans le cas de nécessité évidente
et après bataille; conséquemment après que les
Nobles et Non-nobles auroient acquitté le service
ordinaire. Rien de plus positif à cet égard que l'Or-
donnance du Roi .lean, en date du 28 décembre 1355,
et celle de Charles son fils aîné et son Lieutenant,
datée du mois de mars 1350. « Que desores-mais
« nuls ne pu isse faire arriereban en nostre Royaume,
« fors tant seulement nous en nostre personne et
« nostre ainsné filz ; et ycelluy ne pourrons faire,
« fors seulement en cas de pure et évident néces-
« site, et bien conseilliez sur ce. » (Ord. T. IIl,
p. 31.1 « Que aucuns ne puisse doresnavant faire
« arrierebans, fors tant seulement noslre très-chier
" Seigneur et père et nous ; et icelluy ne pourrons
« faire fors après bataille, et en cas de pure et évi-
« dent nécessité, et bien conseillé sur ce, et eu
« advis et délibération avec les Esleuz de par les
■1 troiz Etats, se bonnement les pouvons avoir. »
(Ibid. p. 138.)
AR
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AR
Il paroît que pour les Non-nobles sujets au ser-
vice militaire, l'exemption de servir au moyen de
certains droits d'aide, ne s'étendoit pas au-delà du
ban, puisqu'ils ne l'obtenoient qu'avec la restric-
tion : si ce n'est h cause à'arrière-baji, si ce n'est en
cas de nécessité évidente ; par conséquent, en cas
de Varricn'-ban, que cette même nécessité rendoit
légitime. •< Les gens des villes ou de nos subgiez,
« ne seront contrains à aller en nostre ost, durant
« le temps de ladicte imposition, si ce n'est h cause
« àeaireban Ml pour bonne et juste cause, sanz
« feinlize. » (Ord. T. II, p. 530, etc.) 11 éloit juste
que pour les Non- nobles, les habitans des villes, et
autres ainsi affranchis de service, l'obligation
d'obéir h Y arrière-ban, fût la même que pour ceux
qui ayant réellement fait le service ordinaire et
exigible par le bandit Roi, n'eu dévoient pas moins
le service extraordinaire et exigible par son
arrière-ban. On a déjà prouvé par l'article ni de
J'Ordonnance de Louis X, datée du mois de juillet
1315, que les Nobles et Non-nobles, après avoir
acquitté le service auquel ils étoient assujettis par
les loix féodales et coutumières, pouvoient, en cas
à'arrière-bnn, être contrains à faire un autre ser-
vice, lorsqu'il étoit jugé essentiel à la défense du
Roi et du Royaume. Dans l'article vu de la même
Ordonnance, l'arrière-ban est désigné par l'évidente
utilité, par la nécessité urgente qui le légitimoit.
Philippe de Valois interprèle ce même article par
lequel, s'il n'y avoit évidente utilité, ou nécessité
urgente, Louis X n'exigeoit des hommes de son
duché de Normandie que les services à lui dûs, en
disant que ces services étoient les seuls auxquels
ils fussent obligés; à moins que la publication de
Y arrière-ban, après celle du ban, ne fût nécessilée
par l'impossibilité de s'opposer aux ennemis qui
envaliissoient le Royaume, ou aux rebelles qui en
troubloient la tranquillité. •< In casu quo per
« primam semonsam seu convocacionem generali-
« ter factam, nos seu nostri successores, et illi qui
« tune essent nobiscum aut cum successoribus
« nostris, non essemus aut ipsi non essent salis
« fortes ad obviandum seu resistendum hoslium
» potencie, aut ad reducendum ad obedienciam
« subditos rebelles, absque faciendo retroban-
« num, fieret et fieri posset retrobannum,
« etc. » (Ord. T. VI, p. 550 et 551.)
Si les Nobles et Non-nobles qui dévoient le ser-
vice militaire, étoient les seuls qui dussent obéir
au ban du Roi, la première semonce ou convocation
généralement faite, par laquelle Philippe de Valois
paroit désigner le ban, n'étoil donc générale que
par rapport aux Nobles et Non-nobles sujets à ce
service. 11 falloit qu'il y eût nécessité de service
extraordinaire, et par conséquent arrière-ban ou
convocation itérative des hommes qui avoient obéi
au ban et fait le service ordinaire, pour que ceux
dont on n'exigeoit pas ce service, ou qu'on en dis-
pensoitau moyen de certains droils d'aide, fussent
tenus de suivre le Roi à l'armée et de le servir en
concurrence avec les autres. La preuve est qu'im-
médiatement après avoir dit que « les Nobles et
« Non-nobles qui auroient fait les services par eux
« dûs, ne pourroient être contraints à faire autre
« service d'ost, fors en cas de l'arrière-ban, »
Louis X ajoute que dans le cas de cet arrièreban,
les hommes même qui ne dévoient aucun service,
seroient tenus d'y obéir. « Queiceiix homes qui ne
« sont tenus envers nous en aucuns certains servi-
« ces, ne puissent estre contrains à aucun service
« estre fait à nous, fors en cas dessus dil et derrai-
« nement déclaré. » (Ord. T. I, p. .588 et 589.) En
ordonnant que l'arrière-ban publié, tous y obéis-
sent, Philippe de Valois réunit sans doute ces hom-
mes qui ne dévoient pas le service exigible par le
ban, à ceux pour qui ce service éloit un devoir
féodal ou coutumier. « In casu quo fieret
" rt;/robfl«/n<m, omnestenerentureidem obedire. »
(Ord. T. VI, p. 551.)
On ne voit pas que les hommes non sujets au ser-
vice ordinaire et exigible par le ban, aient toujours
été tenus d'obéir à l'arrière-ban, à la convocation
itérative des Nobles et Non-nobles pour .un service
extraordinaire. Il paroit au contraire que l'arrière-
ban dont Cliarles VI, par ses Lettres du 8 février
1413, ordonne la publication, n'intéresse que des
hommes sujets au service féodal et coutLunier;
puisque le commandement d'obéir ne doit être
fait qu'aux Nobles, aux Possesseurs de fiefs et
arrière-fiefs , aux Dourgeois et habilans des
bonnes villes. Une preuve évidente que ces
bourgeois et habitans des villes dévoient un service
coutumier, c'est que comme on l'a déjà observé, pour
en obtenir l'exemption, ils payoient certains droits
d'aide. « Enjoignons qu'incontinent ces pré-
" sentes veues, vous faites proclamer solemnelle-
« ment à haute voix et ù son de trompe, en vostre
« bailliage, nostre arrière ban de par nous, en
" faisant commandement... à tous les Nobles....
« qui ont accoustumé d'user et ensuivir les armes
1 et qui sont en état de poursuivir, et Aultres qui
« tiennent fiefs et arrière-fiefs vallans par an vingt
« livres tournois, et outre aux Rourgeois et habi-
« tans de toutes bonnes villes et ressors de vostre
ic dil bailliage; c'est à sçavoir, ausdits Nobles qui
« ont accoustumé d'user et ensuivir armes, sur la
« foy et loyauté et aussi le service qu'ils nous
» doivent, et sur la peine de confiscation de leurs
« biens, fiefs et arrière-fiefs et tenement, ils vien-
« nent lantosten diligence et sans demeure, à tout
« le plus grand nombre et puissance de Gens
« d'armes et de traicl qu'ils pourront, et ausdits
« Bourgeois et habitans des bonnes villes qu'ils
" envoyent le pluslosl qu'ils pourront, des Gens
<■ d'armes et de li'aicl devers nous, montez à cheval,
« et armez, souffisamment accompaignez. » (Ord.
T. X,p. I9-i.) S'ils n'envoyoient pas ces Gens d'armes
et de traict, ils étoient personnellement tenus d'obéir
à l'arrière-ban. (Voy. Ord. T. II, p. 320, etc.)
Il n'y avoit donc réellement convocation générale
pour le service extraordinaire , que lorsque les
hommes qui n'avoient fait ou n'avoient dû faire le
AR
— 117 -
AR
service ordinaire et exigible par le ban , étoient
convoqués avec ceux pour qui ce service ayoit été
un devoir indispensable. Mais alors Varriêrc-lian
ou convocation itérative par rapport aux uns, étoit
par rapport aux autres un ban ou première convo-
cation. Il seroit possible que les mots ban et arrière-
ban réunis, eussent expliqué cette double significa-
tion A' arriére-ban. Peut-être aussi la réunion de
ces deux mots a-t-elle été occasionnée par l'igno-
rance ou par l'oubli de la raison pour laquelle on
les avoit distingués Fun de l'autre. Il paroit même
que l'idée de la distinction du ban et de Varrière-
ban avoit quelquefois été très confuse; puisque
dans une Ordonnance de Philippe de Valois, on lit
qu'au moyen d'une aide qui exemptoil seulement
du service exigible par le lian, » les Bourgeois et
« habitans de la ville de Paris, ne seront tenuz
« d'aller ou envoyer en l'ost pour arrereban ou
« autrement, si ce n'est en cas de évident néces-
.< site. » (Voy. Ord. T. II, p. 320.)
On sait qu'à l'établissement des Compagnies
d'Ordonnance par Charles YII , la Noblesse brigua
l'honneur utile d'y servir ; et qu'en servant dans
ces Compagnies à la solde de nos Rois, en temps de
paix comme de guerre , elle s'affranchit du service
exigible par le ban et arriére-ban. » Ledit Roy
« Charles VII mit sus premièrement les Ordonnances
« de Gendarmerie.... et pour les entretenir en
» temps de guerre et de paix, fit les tailles ordinaires
« sur le peuple.... En ces Compagnies des Ordon-
« nances n'estoient et ne sont receuz que Gentils-
<• hommes qui par ce moyen ont esté exemptés de
« Varricrc-ban ; ce qui ne semble pas raisonna-
« ble quant à la contribution de la bourse. Car
'< c'est une charge réelle que les fiefs doivent ; et
•' es dites Ordonnances ils reçoivent solde pour le
« service qu'ils font à la guerre, et le reçoivent en
'< temps de paix aussi bien comme de guerre ; dont
•' le peuple du Tiers-estat est foullé de tant plus ;
» car il paye les tailles pour l'entretenement de la
-• Gendarmerie » (Coquille , Hist. de Nivernois ,
p. H9.) Alors on négligea sans doute plus que jamais
la distinction du banei de Varrière-ban. Enfin le
ban ou la convocation pour le service ordinaire, fut
confondu avec Varrière-ban, la convocation itéra-
tive , la convocation générale pour un service
extraordinaire; et ces deux mots souvent réunis si-
gnifièrent en général « convocation pour service de
" l'ost. >■ (Voy. le P. Ménest., de la Chevalerie, p. 199.
— DelaRoque. Traité du Ban et Arrière-ban, p. 45.)
C'est relativement à l'idée d'fljvvn'f-fcaii, convoca-
tion générale pour service extraordinaire, qu'on a dit :
(i) En résumé, la propriété fut la base du service militaire sous les deux premières races : les hommes libres propriétaires
d'un missaticinn voisin de l'ennemi étaient convoqués par le missus, et partaient après la proclamation du ban au prône de
Jeur paroisse. Les réfractaires payaient 17ié/'j6n.;, amende montant souvent à 60 sous et pouvant atteindre 600 sous.
Le mot héi-ihaii reparait au temps de Philippe-le-Bel, mais on ne le comprend plus ; on le rapproche à'urban et on le
transforme en arriéve-ban. Ce mot composé est toujours joint au mot simple ban, dont il a la signification; c'est le ban
mérovingien et carlovingien, levée en masse {tunudtus) s'appliquant aux nobles et aux roturiers ; pour guerroyer en
Gascogne et en Flandre, le roi a besoin dune armée et d'argent : la convocation de l'arricrc-ban lui donnait l'un et l'autre.
Il offrait de partir ou de payer : le plus souvent on pavait. Ce fut là l'orii^ine d'abus qui amenèrent la décadence de
Yan-iére-ban : on n'y consentit plus que dans les circonstances graves, et Louis XI l'aurait réuni pour la dernière fois.
A partir du xv siècle, le ban et Yarriére-ban n'est plus que la convocation des possesseurs de fiefs qui doivent le service
militaire gratuit, (n. e.)
Li loa ses consaus
Que mandés fut Varierebatis
Des gens menues et des grans.
Ph. Mouskes, MS. ji. 256.
Se il m'estoit nus mestiers
De Sergans ne de Cevaliers ;
Tous li arrierebans venroit.
Lues que mon mesage veroit.
Id. p. 147.
En doubtance fut qu'il feroit,
Et se à .\rtus se combatroit,
Ou s'ariereba>i atendroit.
Riim. de Brut, MS. fol 9S, V° col. 2.
On voit que dans ces vers, le moi arrière- ban
signifie la réunion, l'assemblée des personnes géné-
ralement convoquées pour un service extraordinaire.
En regardant cette assemblée , cette réunion
comme un dernier effort pour la défense du Roi et
du Royaume, on aura dit figurémentd'un Chevalier
qui réunissoit toutes ses forces et les rassembloit,
qui faisoit les derniers efforts pour vaincre un rival
et réussir dans une entreprise, « qu'il monstroit
■< Varrière-ban de sa force ou de sa prouesse ; que
« l'arrière-ban de sa prouesse « venoit à son
secours. « Voyant le Chevalier sauvage qu'il avoit
« atTaire à ung si preux Chevalier, il pensa bien
« qu'il lui convenoit monstrer Varrière-ban de sa
« force. » Percef. Vol. III, fol. 9.) « Lyonnel du
« Glar pensa que à ce jour monstrer luy con-
« venoit Varriereban de toute sa proesse. » (Ibid.
fol. 126.) « Au besoing de vostre emprise, viendra
« au secours Varriereban de vostre prouesse. »
(Ibid. Vol. V, fol. 103.)
Il est encore possible <iue par allusion à l'espèce
d'hommes qui n'étant sujets qu'à Varrière-ban ,
venoient les derniers à l'armée, on ait désigné le
courage et l'intrépidité de quelqu'un toujours prêt
à marcher des premiers à l'ennemi , en disant qu'il
ne faisoit pas le riereban.
De S' Pol est là Gui le Conte :
0 lui, pour Flamens à mort rare,
Raoul de Neele son frère.
Cil ne sont pas le riereban.
G. Gui.in, MS. fol. 234, R- el V.
Li quens d'Artois est à main destre...
Lez lui, qu'à péril ne li tourge,
Jehan de Henaut son serourge,
Auquel il ot celé journée
L'ordre de Chevalier donnée.
Cis ne fait pas le riereban .
Id. ibid. fol. 254, V el 255, R-.
On n'ignore pas sans doute que pour les Vassaux,
les Hommes d'un Seigneur à qui il étoit dû un
service militaire et personnel, il y avoit le ban et
Varrière-ban comme pour les Vassaux, les Hommes
du Seigneur souverain (1). (Voy. D. Lobineau, Hist.
àïl
— 118
AR
de Bretagne, T. II, col. 947; lit. de 1420. — Ane.
Cûut. de Normandie, fol. G6, R% etc.)
VARIANTES :
ARBAN. La Thaumassière, Coût, de Berry, p. 103.
Arbaux (plur.) Du Gange, Gloss. lat. T. III, col. 1109.
AniEREBAN. Rom. de Brut, MS. fol. 93, V» col. 2.
Arueban. Ord. T. Il, p. 530.
Aruereban. Ibid. p. 320.
AiîRiEREBAN. Ph. Mouskes, MS. p. 147.
Erband. Du Gange, Gloss. lat. T. III, col 1109.
Eybamd (lisez Erband.) La Thaumass. G. de Berry, p. 697.
Herban. Percef. Vol. H, fol. 50, V» col. 1.
Herbault. Rabelais, T. IV, p. 219.
Herbaut. Id. ibid. p. 218 ; note de Le Ducliat.
Herbal-x (plur.) Coût. gén. T. II, p. 578.
Hereban. Coquille, Hist. de Nivernois, p. 121.
Heriis.vn. Fauchet, MU. fr. p. 114.
Herisha.n'. Borel, Dict. p. 260.
HiEREBAN. De la Roque, Traité de l' Arrière-ban, p. 45.
Riereban. D. Lobineau, Hist. de Bretagne, T. II, col. 947.
Arbitrage, S!</vsL wasc. Pouvoir déjuger comme
arbitre. Avis, jugement, volonté. La signification
avec laquelle ce mot subsiste, n'est pas moins
ancienne que l'acception d"après laquelle il désignoit
« le pouvoir de juger comme arbitre ; la volonté ou
« puissance donnée à aucun qui entreprendre le
« vouloit, à déterminer et prononcer sur le débat
« des Parties, ce que raison en donneroit. « (Voy.
Bouteiller, Som. rur. liv. Il, tit. m, p. 693.) Il dési-
gnoit en même temps le jugement qu'en conséquence
de ce pouvoir les arbitres qui prenoient connois-
sance de l'affaire soumise à leur avis et inspection,
prononçoient ou dévoient prononcer ; puisque le
même Jurisconsulte ajoute, qu'ayant accepté, ils
étoient « contraints à procéder avant à Varbitrage
« durant le temps de leur pouvoir ; lequel expiré,
a Yarbitrage estoit failly, et n"avoient plus de pou-
o voir, ne plus contraindre on ne les pouvoit ne
o devoit en outre, se terminé n'avoient à sentence
« diffiritive, ou appointement entre les Parties. »
{Voy. Id. ibid. p. 094.)
On a restreint à cette dernière acception l'usage
d'un mot qui, relativement h l'acception générale
du latin flj'b/7/v»?H,signifioitavis, jugement, volonté
que détermine l'inspection ou la connoissance des
choses. C'est en ce sens qu'un criminel à la volonté
de qui on laissoit le choix du genre de mort qu'il
aviseroit, qu'il jugeroit le plus doux, étoitdit mourir
à son arbitrage. >< Celluy milourl(l) Anglois auquel
« fut fait commandement, pour les crimes desquels
« estoit convaincu , de mourir à son arbitraigc,
« estent mourir nayé dedans ung tonneau de
« malvesie. » (Rabelais, T. IV, p. 14G.)
VARIANTES :
ARBITRAGE. Orth. subsist. - Bouteiller, Som. rur. p. 693.
Abbitraige. Rabelais, T. IV, p. UG.
Arbitrateiir, sitbst. viasc. Arbitre. Quoique les
amiables compositeurs ou appaiseurs, les arbitra-
teurs et arbitres eussent tous le droit de connoitre
d'une affaire soumise à leur avis et inspection, ils
différoient cependant les uns des autres en ce que
le pouvoir de la juger, plus limité pour « l'amiable
« compositeur ou appaiseur que pour l'arbitre, »
étoit presque absolu dans \' arbitrât cnr. (Voyez
Apaiselr et AniiiTRE.) En jugeant, l'arbitre observoit
nécessairement l'ordre de droict : » l'amiable com-
« positeur ou appaiseur » ne jugeoit que du con-
sentement des Parties qu'il mettoit en accord. (Voy.
Bouteiller, Som. rur. liv. 11, tit. m, p. 693 et 694.)
Mais Varbitrateur étoit un juge qui pouvoit ne
consulter que sa conscience el ne s'assujettir à
d'autre règle que celle de l'équité naturelle.
« Arbitrateur, si est celuy qui de la cause est
« chargé à sa conscience, ordre de droict gardé ou
« non gardé, et peut les Parties appoincter selon
a que bon luy semble. » (Id. ibid. p. 69i.)
On conçoit la possibilité que, même avec l'idée
de ces distinctions, idée qui sans doute fut souvent
confuse, la personne nommée pour connoitre d'une
affaire et la juger, fût tout-à-la fois arbitre, arbitra-
teur et amiable appaiseur ou appaisenteur. Alors
la forme du jugement indiquoit en quelle qualité il
étoit prononcé. « Monseigneur Jehan Aubignet,
« abbé de S' Jehan de Laon, arbitre, arbitrateur,
« et amijable appaisenteur, prins et esleu par noble
« homme Charles de Longueval, etc. » (D. Carpen-
tier, Suppl. Gloss. lat. de Du Cange, T. I, col. 273;
tit. de 1489.)
Arbiti'ation, subst. fém. Avis, volonté. On
étoit puni à Varbitration de Justice , lorsque la Loi
laissoit à la volonté des Juges le droit de prononcer
telle punition qu'ils aviseroient être proportionnée
à un délit. « Requièrent les Gens des Estais estre
« remboursez de plusieurs sommes de deniers
« payées à aucuns Commissaires particuliers
« pour illicites exactions ; et que lesdits Commis-
« saires pour l'injuste exaction d'iceux soient
« punis à Varbitration de Justice. » (Godefroy,
Observ. sur THist. de Charles VIII, p. 415. — Voy.
Ardithage et Arbitrement.)
Arbitre, subst. masc. Arbitre compromission-
naire. Inspection, avis. Jugement, volonté, arbitrage.
Anciennement le mot arbitre, en latin arbiter,
dont la signification actuelle, en termes de Droit, n'est
pas moins générale que l'étoit celle du mot inusité
arbitrateur, désignoit spécialement un arbitre
eoinpromissionnaire, un arbitre que le compromis
obligeoit de juger conformément à la règle du
Droit. « Arbitre ne peut et ne doit en la cause à luy
« submise, procéder autrement que par ordre de
« droict gardé, selon qu'il est allégué ou prouvé
« devantluy : car nul traicté n'y peut ne doit faire
« non plus que feroit le Juge, ne plus ne doit avoir
« de faveur à une partie qu'à l'autre ; mais tout
« laisser aller selon la reigle de Droict. » (Bouteil-
ler, Som. rur. liv. II, tit. m, p. 693 et 694. — Voy.
Arbitrateir et Arbitreus.)
Ce même mot arbitre, en \aiin arbitrium, àan&
un sens relatif à l'étymologie latine, signifioit avis,
inspection; jugement, volonté que détermine la
(1) Le duc de Clarence, frère d'Edouard VI. (n. e.)
AR
— 119 —
^ IP,?, nh';^'^""^''^^'^ j"^'« ^t raisonnable.
Lej't bi bs.de ou aide sera levée et cuillie du
« ton . et gardée.... au proffit commun de touz
' \^fr^ P"!' ^}- ''-'^"lé par l'ordenance et arbitre
" des Genz desd.z pais. ,. (Ord. T. m, p. G8G
Ln termes de Jurisprudence, se mettre en arbitre
ce oit se mettre en arbitrage; soumettre à iS
due personne, ù son inspection, la chose dont on
L,S"if ^■'"f ''^'P'"^' en avoir pris connois-
! Los HVF.Ç.f ""' 1T " ^^^'' "^ J' convensde
« LOS, et h Eskevm et h communiiez de Biéthune
" K;/!"/''T ^'' '^ "^^'""^ assenleuS en
fC -P "°^n" H ''"'' Margherite conlesse de
« Handie. » (Duchesne, Hist. généal. de la M de
Bethune pr. p. 145 ; tit. de 1270. - Vov Arbitra-
TION et ARIilTREMENT.) ^ AKKITRA
etdifncilfr/.S^^ ''^ '' naturellement défiant
et dill ule à satisfaire, que toujours on croira rai-
sonnable 1 ancien proverbe : .< Fol est Tbomme aûi
.< de son mantel se met en arbitre; car clé le4r â
« la moyclie perdue. » (Percef. Vol. IV fol ifi)
«inV.'V'P?''^'^'',®'''"^^^"^'^ »^'ec quelle analogie de
signilicalion, la volonté par laquelle on se d^tpV
AR
en latin Arl^orosa (2). (Voy. llfnt^l^TAZil'r'
Arborateur, subst. masc. Planteur d'arhrpc-
Pepinienste. (Voy. Cotgrave, Dict.) fl^'hies,
Arborer, verbe. Planter haut et dmit ^ lo
d-après laquelle le'stSlant a.^rt InuS'Sor
designoit une enseigne, un éte.Ed \loy IÏr Ti
Si 1 on en croit Pasquier, c'est à Vamira 3e cmmV
• Ordonnances q\'é fi ^'adm ?al de ciZ^f^
se^??S^1^ts'lï;?L'Sc"£^^' "■^"-
a.Kdogue à celui ^u SbSîf'^^ï;,.^' ^,?'i ^^.
pesSâ levép-pf- ,' ^'^''' '''^-' ^^"«'"«"t eml
pestnce, ie\ee et close que on n'y oeut ailpp
" ''^, P'çd ny ù cheval; et qui plus est s'efforpp
« d y planter, arborier, et nourrir haj^ à lin 0^^
iii. xxii, p. 111. _ Voy. Arboirie.) '
Arboriser, verbe. Chercher à connoître H
nature et a vertu des plantes; chercherdes p antes
On ne croit point qu-arboliser et arbo S soient
des al erations ûlierboriser et herboriser yerhel
iïSf la.infpf/^.'"^' '''' f'^'"'"*^^ de/,?S(3rd ?n'!
r\v>. M- ^^' ^u'^'*^^ <^^"s arboriste et arboliste
Aoy Ménage, Observ. sur la Lang. Fr. p 31 e 32 )
Il est plus vraisemblable qu'en étendant l'accention
t '"^^»''f .arbre, en latin arbor. à tou e eTpèce
de plante boiseuse ou non boiseuse, on en a Sa
forme le verbe primitif «rôor/sé-r, qui sî?niSt
« chercher à connoitre la nature et la vertu les
" hShf ' 'V'' r^^"'^^'''"^' «^es arbustes et des
" herbes ; chercher à connoitre la nature et la vertu
." Pa;sa'us''n'nr''''''i''''" ""'' P'^"'^^ en'yineVaL
passants par quelcques prez ou aultrês lieux
« herbus visitoient les arbres et plantes e en
. emportoient leurs pleines mains au log s des-
« quelles avoit la charge Rhizotome, ensemble
" des. instruments requis à bien arboriSr^
' « S 11 advenoit que l'aer feust pluvieux et intem':
„^^^,^^^^^^^l^^,subsl. m«sc. Arbitrage Le verbe
arbitrer qui subsiste, n'est pas moins ancieS dans
notre langue que le substantif arbitretSlTln
eto.t forme, « Sur les amendes de ceux dan ai es s2
« m.strent-.l en le arbitrement Aq tiel et de tiel
«ll4^s riSî^?'iSie;i!i~
îrdS:^^^y!1^^5^-^^'^-'-S^:
Arboirie, subst. fém. Arbres et arbrisseaux-
,e mot arbome étoit un nom collectif d'aibres de
ÏS'S^^-^^ï""^?'p-PP-'^'^^-^eK;rs
parmi la terre desquels ces rivières passent «Leurs
« terres et seigneuries vont jusques en l'eaue pÎ
« ont la couppure des ronsses ilarboirtekne
: si'SnS" S£?"î^f^(i)"^PO""-oSu'passe •
"M g ana arboirie ny doivent laisser mrnn
« y puisse tramer ; et s'ils ne le fa so e [es traU
« leurs le pourroient faire et coupper si avant aûe
rinnli*^™'^^'^"" ^,^"^ '^e mot arboirie, formé sans
doute, comme arbrorie, du latin arbor, ^1 f"anyois
f s , i ui. a ou\ e la lome arboUsta, jardinier pour les arbres, (n. e.>
AR
120 —
AR
« péré,... au lieu à'arboriser visiloient les bouli-
« ques des Drogueurs, Herbiers et Apolhecaires. "
(Rabelais, T. I, p. 167, IGO et 171. — Voy. Cotgrave
et Oiidin, Dict.) Ainsi, le verbe herboi'iser qui
subsiste, pourroit être une altération de l'ancien
verbe arboriser. (Voy. ÂRnoiusTi;.)
VARIANTES :
ARBORISER. Rabelais, T. I, p. 171.
Arboliser. Ménage, Observ. sur la Lang. Fr. p. 31 et 32.
Arborizer. Rabelais, T. I. p. 168.
Herboliser. Ménage, Observ. sur la Lang. Fr. p. 31 et 32.
Herboriser. Orth. subsist. — Monet, Ménage, Dict.
Arboriste, subst. masc. Qui cherche à con-
uoitre ou qui connoît la nature et la vertu des
plantes. Il semble qu'on ait méconnu la possibilité
d'étendre l'acception du substantif arbre, à toute
espèce de piaule, lorsqu'à raison de ce que les
arbres, les arbrisseaux et les arbustes intéressoient
moins que les herbes ou les simples, la curiosité
des Botanistes, on a imaginé qu'au lieu à'arbortste
et d'arboriser, il falloit écrire herboriser et herbo-
riste. On prouve cependant, par une citation de
Rabelais, qu'arboriser, c'étoit visiter les arbres et
plantes ; par conséquent les heibes, les simples,
dont la connoissance est l'objet plus particulier de
la Botanique. (Voy. Auboriser.)
De là, arboriste aura signifié la même chose que
herbeur, herbier, et herbiste, mots formés du
substantif herbe ; mais dans herboriste, on ne voit
qu'une altération du mot primitif arboriste. « Her-
B boriste qui est aujourd'hui.... le seul mot d'usage
« ne s'est introduit que par la réflexion qu'on a faite
« que puisque c'étoient les herbes qu'on cherchoit
« et non pas les arbres, on devoit écrire herboriste
« et non pas arboriste : en quoi l'on n'a pas pris
« garde que les deux dernières syllabes du mot sont
« des preuves convaincantes de l'ancienne ortho-
« graphe. » (Rabelais, T. 1, p. 1G8; notedeLeDuchat.)
On trouve l'ancienne orthographe arboriste (1),
dans les Fables de la Fon laine (liv. v, édit. de 1678.)
Un loup, feignant de croire malade un cheval qu'on
a mis au vert, s'offre à le guérir en disant qu'il
connoît la nature et la vertu des simples de la
prairie : mais une ruade le force à se donner à lui-
même cette leçon :
Chacun à son métier doit toujours s'attacher;
Tu veux faire ici VArhorisie,
Et ne fut jamais que Boucher.
VARIANTES :
ARBORISTE. Ménage, Observ. sur la Lang. Fr. p. 31.
Arboliste. La Grant Nef des Fous, fol. 3G, édit. de 1499.
Hebboliste. Ménage. - Dict. Etym. au mot Herboliser.
Herboriste. Orth. subsist. - Nuits de Strap. T. II, p. 426.
Arbre, subst. masc. et fém. Bois. La substance
qui forme le corps des arbres et sert à bâtir.
Desous la tour descent el porce (2)...
Rien n'i avoit qui aine fiist d'arbre;
Car il estoit tos fai.s de marbre.
Siéiçe de Thèbes, MS. du R. n- 6987, fol. 38, R- col. 3.
En se conformant à la règle d'après laquelle on
rapproche, autant qu'il est possible, un mol de tous
ceux dont il est l'origine, on auroit dû pour la
rédaction de l'article entier, préférer à l'orthographe
abrc, l'orthographe primitive arbre; et d'un seul
coup-d'œil on en auroit vu naître arbreau, arbres-
seau, arbroisel, abrisel; arbret d'où le verbe
arbreter ; arbreus; arbri, ou abri d'où le verbe
abrier ; les substantifs arbrier ou abrier, arbriere,
arbroie, arbrorie, etc. (Voy. Abre, Abri, Abrier et
Abrisel.)
variantes :
ARBRE. Orth. subsist. - S' Bern. Serra, fr. MSS. p. 50.
Airbre. Chans. fr. MS. de Berne, n» 389, fol. 119.
Arbreau, subst. masc. Petit arbre ou arbris-
seau. (Voy. Cotgrave, et Rob. Estienne, Dict.)
Arbresseaii. subst. masc. Arbrisseau. Les
orthographes arbruissel elarbraissiau sont un sup-
plément à l'article abrisel, on le pluriel ar/^rcssctii/a;
est une faute pour arbresseaulx, qu'on trouve dans
Molinet (Poës. p. 177. — Voy. Abrissel.)
VARIANTES :
ARBRESSEAU. Molinet, p. 177.
Arbr.\issiau. Lettre du patriarche de Jérusalem, fragm.
MS. de la Clayette, p. 114, col. 1.
Arbruissel. D. Carp. S. Gl. 1. de Du C. au mot Arboreta.
Arbret, subst. mnsc. Petit arbre. Fût d'arbalète.
La signification d'arbret est la même que celle
d'arbreau, petit arbre, dans le passage suivant:
« Quand voslre faucon sera fait et reclamé, toutes
« les fois que vous le leurrerez, jettez luy le leurre
a en quelque arbret, ou petit buisson, afin qu'il
« aprennedesoiarresteretde prendre la branche. »
(Arteloque, Fauconnerie, fol. 91. — Voy. Arbreau.)
On a nommé arbrels, des branches de chêne pré-
parées en façon de petits arbres, pour y tendre des
gluaux et prendre les pinsons. « Ces arbrets au
" nombre de trois ou quatre, faits en trépied aussi
« comme à dix pieds l'un de l'autre, doivent être
« de branches de chêne et n'être mie si haulx que
« l'en ne puisse bien avenir au coupel (3) pour les
.< gluer. » (Modus et Racio, fol. 184-185. — Voy.
Arbreter.)
Quelquefois abret, comme altération de l'ortho-
graphe arbret, désignoit le fût d'un arbalète, nom-
mée plus souvent abre ou arbre, abrier on arbrier.
« Ainsi que le Suppliant ot tendue son arbalestre
« et couchée la vire sur l'abi'ier,.... ne scet se la
« dite vire estoit couchée sur le cours de Vabret de
« sa dite arbalestre- » (D. Carpentier, Suppl. Gloss.
lat. de Du Gange, T. 1, col. 274; tit. de 1429. —
Voy. Abre et Abrier.)
VARIANTES t
ARBRET. Modus et Racio, MS. fol. 184, V".
Abret. D. Carp. S. Gl. 1. de Du Cange, T. I, col. 274.
Arbreter, i>erbe. Tendre des gluaux. Préparer
en façon de petits arbres ou d'arbrets des branches
(1) Ce mot est à la fois un archaïsme et un néologisme : le peuple l'emploie encore pour herboriste, et quelques personnes
en font le synonyme de pépiniériste, (n. e.) - (2) Porche (.porticus), vestibule soutenu ou non par des colonnes, devant les
églises et les palais, (n. e.) - (3) En bas-latin cupci,, branches, sommet d'un arbre, (n. e.)
AR
— 121 —
AR
de chêne sur lesquelles on prend les pinçour en
leur tendant des gluaux. De là, l'ancienne expres-
sion arhreter aiix pinsons, qui signifie un de ces
amusemens qu'on nommoit Zts déduits aux pau-
vres. (Modus et Racio, ms. fol. IGl. — Voy. Arbret.)
Arbreus, adj. Planté d'arbres ; garni d'arbres.
C'est en ce sens qu'on disoit, vallées arbreuses,
arbrctises forêts, bocage arbreus. (Voy. Epilhètesde
M. de la Porte. — Poës. d'Amadis Jamin, fol. 21), V".
— Œuv. de Ba'if, fol. 52, V°.)
Arbrière, subst. fém. Arbres et arbrisseaux.
Nom collectif d'arbres et arbrisseaux formant une
haye. « Ti'ouva quatre escus d'or, lesquelz il enterra
« au pié d'un chesne, en V arbrière ou baye de bois
« de Pousiniere. » (D. Carpenlier, Suppl. Gloss. lat.
de Du Cange, au mol Arborela; tit. de 1457.)
Ai'brisselet, subst. niase. Petit arbrisseau.
Arbrisseau tel que le groseillier. On a désigné la
qualité aigre et acide du fruit du groseillier rouge,
en le nommant arbrisselet d'aigreur. (Cotgrave,
Dict. — Voy. AiiRisEL.)
Arbroet, subst. masc. Lieu planté d'arbres de
la nature de l'aune, du saule, etc. Peut-être faul-il
lire arboret, en latin arborctum ; mot qui, dans un
extrait du troisième registre des Coutumes de la
franche forêt de Mourmal, paroît signifier « un lieu
« planté d'arbres de la nature de l'aune, du
•• saule, etc. » comme dans une charte de l'an 1402,
citée par D. Carpenlier, (Suppl. Gloss. lat. de Du
Cange, T. I, col. 273,) le mot arboreta signifie
salicium, en françois saussaie'? « Pour avoir fait
« faire plusieurs laignes (1) d'aulnes, commen-
1 çant à l'aulnoye desseure la blanche fontaine,
« depuis les arbroets venants du long trouver
« Aletruyr et venant passer au bicquet Mallerir, et
« d'illec aux fossez des autels ; desquelles il en a
« vendu aucunes, et les autres mené à ses cau-
« fours, etc. » (Coût, de Landrecies, au Nouv.
Coût. gén. T. II, p. 269, col. 1.)
Arbi'oie, subst. fém. JNom collectif d'arbres
formant une forêt, un bois, un taillis, un bosquet,
un bocage, etc. On nommoit en ce sens rt?'/i)'0|/<? une
forêt, un bois, un taillis, etc. « Il vint.... à une
" forest que ceux du pays appelloient VArbroye. »
(Lanc. du Lac, T. II, fol. 65.) •• Les racines qui re-
" mestrent en la terre, engendrèrent d'eles-meismes
« granz arbroies autretelles comme perches. »
(Hist. de Charlemagne, ms. de la Clayette, p. 94.)
I,a lune luist parmi Varhroie.
Parton. de lilois, MS. de S. Gerra. fol. 163, V col. 3.
L'autre jour me chevauchoie
De lès une grant arbroie;
Si pi'arestoie un petit.
Si com dedens esgardoie,
Vi pucèle simple et coie
Qui disoit par grant despit :
Il jut anuit en mon lit,
Nuetement en mes bras,
Li chaitis, las !
A pou que je n'ai tout dit :
Mal feu (2) soit il ars ;
Trop est couars.
Chans. fr. MS. de Doubler, fol. 301, V° col. 1.
Parmi cèle a>-broie,
Cil oisèlon s'envoisent
Et mainerit grant baudor.
Quant j'oi là leur joie,
Por riens ne m'i tendroie
D'amer bien amors.
Ane. Poèt. Fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1448.
Ces derniers vers font partie d'une chanson
attribuée au comte Thibaut par M. delà Ravalière,
qui a écrit arboie pour arbroie. (Voy. Poës. du Roi
de Navarre, T. II, p. 95.)
VARIANTES :
ARBROIE. Siège de Troye, MS. du Roi, n» 6987, fol. 92.
Arboie. De la Ravalière, Poës. du R. de Nav. T. II, p. 95.
Arbrove. Lanc. du Lac, T. II, fol. 0.5, R» col. I.
Arbroier, subst. masc. Nom collectif d'arbres.
Peut-être pépinière. « Courtieux où on fait
« plusieurs labourages de vignes, à'arbroiers, et
« d'autre semence. ■• (Bouteiller, Som. rur. liv. II,
tit. X, p. 794.)
Arbi'orie, subst. fém. Bois, forêt. Lorsque la
forêt, le bois ou lieu planté d'arbres étoit très cou-
vert, « c'étoit une arbrorieespesse de grans arbres. »
(Percef. Vol. I, fol. 99.)
Arhroys,, subst. masc. plur. Arbres et arbris-
seaux. Nom collectif d'arbres et arbrisseaux qui
croissent au bord des rivières, et dont l'eau baigne
les souches et les racines. Probablement dans
l'Ordonnance des Eaux et Forêts, que cite D. Car-
penlier, d'après un ms du Roi, la défense de battre
aux arbroys, est relative aux moyens usités par les
Pêcheurs, pour attirer dans leurs filets le poisson
auquel les souches et racines de ces aibres et
arbrisseaux servent de retraite. « Que l'en ne batte
« aux arches, ne aux gors, ne aux arbroys. »
(D. Carp. S. CI. lat. de Du Cange, au mot Arboreta (3).)
Il est évident que le mot ables, altération du
pluriel abres ou arbres, étoit de même signification
qu'arbroys, lorsque Charles VI, par son Ordonnance
du 1"' mars 1388, défendoit « d'abattre aux arches,
« ne aux gors, aux ables. « (Voy. Ord. T. VII, p. 779.)
L'article lxxh de l'Ordonnance de 1402, citée par
D. Carpenlier, réitère la même défense; mais
croiroit-on, sans l'autorité du ms. du Roi, qu'au
lieu de ces mots gors et arbres ou arbroys, un
copiste inattentif et ignorant ait écrit gros herbes
ou seulement herbes, comme on lit (Ord. T. VIII,
p. 535 ; et Gr. Coût, de Fr. p. 73, édit. de 1598.) On
sait que les gors ou gords (4) sont des pêcheries
construites dans les rivières.
Arc, subst. masc. Arc, arbalète. Arc de triomphe.
Arcade, voûte, cintre, enfoncement cintré. Partie
(1) Cordes de bois^ bois en corde ; en latin ligna. - (2) Malè falutus, le mal fortuné, le malheureux, (n. e.) - (3) C'est la
racine du mol étudie : de même suliccliini fait saussaie ; alnetum, aulnoy. (n. e.) - (4) En latin gurges ; ce mot est resté,
sous la forme younis en Nivernais, prés de Decize : il désigne des étangs profonds et poissonneux. (N. e.)
II. 16
AR
122
AR
du corps d'un clieval, d'un chien; les jambes ou
partie des jambes de devant. S'il est vrai que baliste
ou bah'ate soit formé du grec />'«;i;iQ), l'usage de l'arc
avec lequel on lançoil les' traits nommés llèches, ou
les pierres nommées jalets, semlile avoir été désigné
par l'expression arc à baleste, doù le mot composé
arbaleste. (Voy. Ahii^u-este.) On omettoit celte dési-
gnation assez "inutile, en disant arc à flèches, arc à
jalets. (Borel, Rob. Eslieune et Nicol, Uict. —
Voy. Arcajalet.)
Les arcs à tour, distingués des arcs de main et
de COI ps, étoient les arcs qu'on bandoit avec un
tour, uu moulinet, comme les arbalètes qu'on ne
pouvoit bander aux reins. « Pour double de mort
« s'enfuyrent en l'autre tour à garant, où ilz firent
« par force d'Archiers et Arbalestriers reculer : car
« ils avoient leanz plusieurs arbalestes et ars à
« tour. Si gariterenl leur dite tour, etc. » (Hist. de
B. du Guesclin, par Ménard, p. iSi.)
On nommoit les arcs faciles ù bander sans tour
ou sans moulinet, arcs de main, arcs îi main, et
plus anciennement arcs maniers.
Plus que ne giete un ars matiiers,
Les envoient fuiant ariers.
Alhis, US. fol. 79, R- col. 1.
« La longueur d'un arc de main, qu'on faisoit
« d'yf ou d'autre bois, éloit au moins de vingt poi-
« gnées, de l'une ousche où la corde se metjusques
« à l'autre. Quand Yarc étoit tendu, il y avoit entre
« l'arc et la corde qui étoil de soye, tout les cinq
« doigts et la paume large. La flèche ayant en lon-
" gueur huit poignées, dès la bosce de la coche
« derrière jusqu'au barbel, étoit garnie d'un fer
« long de cinq doigts, et large de quatre, au bout
<• des barbiaux ou pennons. » Ces proportions
n'étoient pas si invariables qu'elles ne pussent
avoir plus de longueur, puisqu'en parlant de ce
même arc qu'on tendoit à la main , on a dit qu'« il
« devoil avoir de long entre la coche du bout de
« hault jusques à celles du bout d'embas vingt-deux
« poignées, etc. «(Voy. Chasse de Gaston Phébus,Ms.
p. 324 et 325. — Modus et Racio, ms. fol. 72 et 73.)
L'expression « faire les buissons aux arcs, » signifie
les préparatifs de la « chasse îi l'arc de main, » ou
tout simplement de la chasse ii l'arc. (Voy. Modus
et Racio, ubi supra.) On a la preuve qu'à la guerre,
comme à la chasse, on se servoit d'arcs de main
ou d'arcs à main. «Commencèrent à tirer
« d'arbalestres et arcs à main très-fort contre leurs
« ennemis. >• (Monslrelet, Vol.I, ch.ccxvii, fol.287.)
Il est probable que l'arc de corps étoit l'arbalète,
espèce d'aj-c dont les Turcs paroissent avoir été les
inventeurs (1). Les Chrétiens, qu'on croit n'avoir
connu l'usage de cet arc et ne l'avoir emprunté des
Turcs qu'au retour de la première croisade, l'auront
nommé par celte raison arc turquois. On ajoute
qu'avec l'arc turquois, autrement Tare de corpSj on
lançoitdesiiuarreaux, espèce de tlèches plus particu-
lièivs à faibalèie qu'à toute autre espèce d'arc. « Les
" Seigeans prindrent leurs ars turquoijs (2) et s'en
« vindrent tous renger devant la porte du Chastel
<( GadilTer et le Tors, Lyriope et Lisane.... jouoient
« h tables.... Mais ainsi que Lyriope jecloit les dez
« sur le tablier, ung Sergent tira d'ung arc de
« corps par dedans la tour, et ferit contre le mur.
<•■ Lors cheurentquarreauxsurla main de Lyriope. »
(Percef. Vol. I, fol. 81, R» col. 1.)
Quant en Chippre furent venu,
Il recouvrèrent à planté
De vivres à leur volenté ;
Armes, chevaux, artillerie,
Pour mettre dedenz leur navie ;
Ars turquois, angins et briquoles, etc.
G. Macliaut, piise d'Alaxaudrie. MS. fol. 217.
Cet arc turquois, probablement le même que
l'arc de corps, différoit peut-être de f aî'c à main,
en ce que la force du bras ou de la main étant
insuffisante pour le bander, on y employoit toute
la force du corps. Il seroit possible aussi que par
la raison qu'un arc tendu avec la main est tendu
avec partie de la force du corps, on eûl nommé
indifféremment nrc de corps ou arc de main, toute
espèce d'arc qu'on bandoit sans tour ou sans
moulinet. Ainsi l'arc de main dont on a parlé, étoil
comme l'arc de corps, un arc turquois. « Puet-on
« prendre les bestes à traire aux arcs, et à l'arba-
« leste, et à Varc de main que on appelle turquoys. »
(Chasse de Gaslon Phébus, ms. p. 324.)
On nommoit ce même arc, un arc anglois;
dénomination qui semble désigner l'adresse avec
laquelle on se servoit en Angleterre de l'arc de
main ou de l'arc turquois, qu'on croit être l'espèce
d'arbalète propre aux Turcs, et dont les Anglois
furent les premiers à renouveler l'usage interdit
aux Chrétiens par les Papes. « L'a/"c de main que
« on appeWc. Anglois ou turquoys doit avoir de
« long, etc.... Des arcs ne scay-je pas trop : mais
« qui plus en vouldra sçavoir, si aille en Angleterre ;
« car c'est leur droit mestier. » (Chasse de Gaston
Phébus, MS. p. 324 et 329.)
L'arbalesle étant une espèce d'arc, on la com-
prenoit souvent avec l'arc de main, le même que
l'a?'c anglois ou turquois, sous le nom simple et
générique d'arc. « Les Archiers doivent avoir leurs
« arcs tenduz et estre vestuz de vert, et leurs
« arcs aussi verz ; soyent arbalestes ou autres. »
(Chasse de Gaston Phébus, ms. p. 332.)
On a comparé la santé dont on abuse, à un arc
qui rompt à force d'être tendu.
Santés est ars que fols entoise (3),
Qui à son besoing brisera :
Or peust (4) cascuns quels il sera.
Pofine de la Mort, MS. .lu R. n- 6987, fol. 336, R* col. 4.
Dans le sens figuré, on désignoit une personne
(1) Voir l'article Arbalète : il était déjà connu des armées romaines; le moine Richer en parle et il est représenté sur des
miniatures du temps de Louis d'Outremer, (n. e.) — (2) Cet arc turquoijs, qu'on ne connaît qu'au xav siècle, avait des
branches en os ou en corne, réunies par un ressort d'acier; les arsenaux du temps de Charles V contenaient encore des
provisions de cornes de bœuf pour répondre à cet usage. (N. E.) — (3) D'un fréquentatif intc{n)sare, de intendere. (n. e.) —
(4) Puisi, pèse, vaudrait mieux pour le sens. (n. e.)
AR
- 123 —
AR
toujours prêle à bien dire et h bien faire, en l'assi-
milant a un Arclier, qui tenant Vare tendu est tou-
jours prêt à lancer son trait.
De bien fere et de dire a toz jors l'ace tendu
Fabl. MS. du R. Il" 7218, fol. 202, R-col. 1.
Si l'on exigeoit de quelqu'un autre chose que ce
qu il avoit projeté de faire, on lui disoit :
D'autre arc vous convenra traire.
Fabl. M.S. de S' Germain, fol. 45, V" col. 2.
On blâmoit un homme trop timide pour oser ce
qu 11 s étoit promis d'exécuter, en disant proverbia-
Coart est qui ne trait, quant son arc a tendu.
Chaslie-Musan, MS. de S. Gerra. fol. 105, R" col. 2.
h' arc-en-ciel, ce Météore qui paroîl dans les nues
ligure en arc et diversement coloré, s'est nommé
are celestre; comme signe d'alliance entre Dieu et
es liommes a.rc fédéral, en latin arens fœderis
(Voy. Rom. de la Rose, vers 18900. — J. d'Auton
Annal, de Louis XII, an. I4!)9-ir)0I p '^0 )
Il semble que dans la satire dixième de Régnier
« se préconiser cousin de ïare-en-ciel signifie
« s exalter, s élever jusqu'aux nues. »
S'idolâtre, s'admire, et d'un parler de miel
be va préconisant cousin de Varc en ciel.
Cette expression, imaginée par Régnier a été
dn''vvn.Pi''I'^i"'l"v' d" r^orens, autre poëte satirique
245 ^ ^^' ^"^'^^' '^'•'•'O*'!- <■''• T. XVI,
En comparant à un arc l'espace que le soleil par-
court du levant au couchant, on a pu nommer W
rfHjo«r autrement are diurne, le jour artificiel qui
se prend depuis le lever jusqu'au coucher du solei
(\ oy Co grave, Dict. - Dict. des Arts et Sciences.) '
L arc, la plus simple des armes, et sans doute a
première que la nécessité de combattre de loin ait
tait inventer a 1 homme, même le plus sauvao-e fut
aussi le premier signe de la victoire (1). Les mo'nu-
menselevesàlagloiredesvainqueursreprésentèrent
\irc avec lequel ils avoient triomphé des ennemis
e ces monumens furent nommés arcs, ares triom-
phans, aujourd'hui arcs de triomphe. .. Les Reis
» soldent anciennement faire lever e voidre (2) ars ki
« fussent signe e à remembrance de lur victorie .'
vLivres des Rois, ms. des Cordel. fol, 04, R- col. 2.)
Face chasteaux qui voudra et théâtres,
4!lZ!'''l'T''"""' thermes, amphithéâtres,
lours et dongeons, colosses monstrueux
U or, bronze ou marbre, et palais sumntueux-
Tout cela tombe et déchet en ruine '
Les Marg. de la Marg. fol. 3 v
On ne pouvoit mieux désigner la figure de ces
monumens que par l'expression voidre «m en latfn
arciis volvere; d'où l'on a dit are r./„, « r S's
arc voulte : en un seul mot arvoulu, arvoi^ S'
arvout, e peut-être arbout, en latin «r,-o//«/co,: I
traction dm-cus volutus. Il paroit qu'en Architec
turc 1 arc valu ou Varvoulu, désigna génénlemeSt
tout ce qui étoit figuré en arc, voûté en arc ■ une
arcade une voûte, un cintre; une galerie ou autre
Sn'chitœ"" '"*' ^°™^'^'^ ai^ade! en vSe!
En un arool d'une cortine
De soie ù gisoit la mescine
.Se sont assis privéement.
Rom. de Flo.re et Blanchellor, MS. du R. n" 6987, fol. 252, V col 3
Josep qui enz fu herbergiez
Desouzr<(,Toi(?» et logiez
tn son ht sedormoitla nuit
Concop.ion de la Vierge, MS. de la Clayelle, p. 161, col. 2.
Quant Ulixes s'en est partis
■lus avalent les arvolis.
En lor palefrois sont monté etc
Siège de Troye, MS. du R. n- 6987, fol. 81 , V col 1
Fors des arvols del parleour /
Ut une place grant et lée
Ue haut mur tote avironée.
Ibid. fol. 70, R« col. 1.
Tos. V^' -^^ ^r '^ ^°'™*' «°'-e li sont coru •
Ii^tV Z""^*'"' avoir ochis et confondu. '
Ahxandre s'es trais devers un arc voulu, etc '
Rom. d Alexandre, MS. du R. n- 6987, fol. 182rv- col. 2.
Dans ces différentes citations qui prouvent F'ic
cep ion générale d'arc volu, d'an;««/ , en n seul
mot, d' arvolis et d'arvol, il n' est pns p lus fadle d'en
distinguer les acceptions particulières que cellS
« cSu fde'î.','''':f"'''''^^^'''^'°"' " J«-Vouvri?
cest nujsdela.... et vous serez en cest«rct)oî//«<î
for/oo'Tcnf ï'^'^"^''-^/')- " (L'-'"'^' du Lac T.t
101. 100, R»col. J. — Voy. Arvol-lu.
On designoit sans doute la forme cintrée d'une
espèce d'armoire pratiquée dans répaisseur d"în
mui-^ en nommant cette armoire un arcloum
« La muraille d'.celle tour avoit bien quatorze
par la main dextre.... le mena vers ung arc vanité
" qui es oit par dedans le mur, moytié en terîe et
" moytie dehors, et puis luy dist : Sire Conte vous
« povez veoir ceste armairie qui est dedans ce
« mur » (Percef. Vol. I, fol. 3, V» col 2.) ' ""^
I est probable que dans la Coutume de Blois, le
mot «rc signi le un enfoncement cintré, de même
arc voulte. « Si aucun veut faire cheminée ou arcs
« en un mur commun et moytoien, il ne pourra
« prendre que a tierce partie/dudit mur. .Tout
s,en 1. 11, p. it,4. — Voy. Arcade.) Le narticine
mute, voultis, ou volu étant retranche, on diso^l
tout simplement are pour arcade, voûte, etc. fVov
Gotgrave, Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict )
Un soupt'onne que par une allusion triviale et
révoltante du mot In-eneux au nom de bernard,fon
aura désigne par l'expression arc S' nernard la
pM'fj;°P.';f'^'^'""." '''''^'''^ d'une voûté obscure
et favorable aux besoins naturels des passans et
que de là on aura dit « passer sous ïarc S' èer-
.En.acambre....;»^..^L-î^^^^-(3)0n^^
AR
— 124 —
AR
« tourner un pet de sexe masculin en féminin,
sans passer sous Varc Seinct Ilernard. >• (Des Ac-
cords, Escr. Dijon, fol. 4, V". — Voy. Cotgrave, Dict.
— Oudin, Cur. fr.)
Peut-élre qu'en parlant du clieval et du cliien,
l'on aura nommé arcs dedevunl et tout simplement
an's, les jambes ou partie des jambes de devant,
parce que dans le mouvement pour marcher elles
se courbent en arc. « Leurs chevaulx furent en
« l'eaue jusciues es nrs; lors se mettent à nager. »
(Percef. Vol. I, fol. 51, V" col. 1.) « Estoyent... leurs
« clievaulx tous espaullez à cause qu'ilz avoient
« hurlé au puys, des arcs de devant. » (Ibid. Vol.
YI, fol. 19, V° col. 2.) « 11 faut... seigner le chien des
>< deux venes qui viennent par le dedans des
« espaules des jambes de devant qu'on appelle pour
» les chevaux, les arcs. » (Du Fouilloux , Vén.
fol. 80.) '< A chacune sorte de galle, il est néces-
« saifc de seigner le chien des deux jarrets de
« derrière des veines qui sont au dedans, et des
« arcs. » (Charles IX, de la Chasse, page 82.)
On terminera cet article en ajoutant que l'usage
seul a restreint l'acception d'un mot, par lequel on
auroit pu désigner toute espèce de chose dont la
figure ou la forme a quelque rapport à la courbui'e
et même à l'idée de la courbure d'un ai'C. (Voy.
Arche.)
variantes :
ARC Orlh. subsist. - L des Rois, MS. des Cordel. fol. 50.
AlRC. Chanson fr. WS. de Rerne, n» 389, part, ii, fol. 20.
Arch. Livres des Rois, MS. des Cordel. fol. 24, R" col. 1.
Arcq. Nouv. Coût. gén. T. Il, p. 60, col. 1.
Ark. Britton, des Loix d'Angl. chap. Lxvi, fol. 1U4, R».
Ars. (Plur. et sing.) Athis, MS. fol. 78, R" col. 2.
Xm. Fabl. MS. du R. n» 7615, fol. 102, V» col. 1.
Arz. (Plur. et sing.) Rora. de Perceval, fol. 272, V° col. 2.
Arcade, subst. féni. Arc, demi-cercle. Enfonce-
ment cintré, espèce d'armoire en cintre. Quelles
que soient les acceptions usitées et inusitées du mot
arcade, elles sont toutes relatives à l'idée de la
courbure d'un arc. C'est dans le sens d'arc, demi-
cercle, que par comparaison on a dit : « mettre les
« mains on arcade sur les costes. » (Voy. Cotgrave,
Dict.)
Il est probable que dans les Coutumes de Gorze
et de S' Mihiel, une arcade est la même chose qu'un
arc dans la Coutume de Blois ; un enfoncement
cintré, une espèce d'armoire en cintre, creusée
dans l'épaisseur d'un mur. « Parois commun et
« métoyen peut estre creusé jusques au tiers de
« son espaisseur pour y dresser tuyau de chemi-
" née, armoires, arcades, ou autres commodités. »
(iNouv. Coût. gén. ï. Il, p. 1090. — Ibid. p. 1057. —
Voy. Arc et Arche.)
VARIANTES :
ARCADE. Orth. subs. - N. Coût. gén. T. II, p. 1057, col. 2.
Archade. Cotgrave, Dict.
Arcage, subst. masc. Courbure en arc. (Voy.
Arceure.) Vraisemblablement, une porte à'arcage,
étoil une porte voûtée, courbée en arc.
Prendent lor volage
Vers la Cité qui estoit grans et large :
Ens sont entré par le porte d'accoge.
Anseis, MS. fol. 3i, R- col. 2.
Arcajalet(l), subst. masc. Espèce d'arc ou d'ar-
balète. L'arc ou l'arbalète avec lesquels on jetoit des
pierres rondes nommées jalets, et (lu'on désignoit
par l'expression are à )«/ef; d'où le mot composé
arcajalet, altéré àans, arcanjelet que .Monet définit :
« espèce d'arbalète à la main, tirant à baie et à
« trait. » (Voy. Arc et Arbaleste.)
VARIANTES :
ARCAJALET. Ménage, Dict. Etym.
Arcangelet. Monet, Dict.
Ai'ceau,s(//)sL masc. Petit arc. Arc de triomphe,
arcade, voûte, berceau. On courbe en petit arc la
partie supérieure d'un berceau d'enfant, les deux
pièces de bois qui jointes l'une à l'autre soutiennent
une selle de cheval, les rejetons des ceps de vigne
provignés. De là, les expressions arceau de bers,
arceau de selle, arceau de provin en la vigne.
(Monet, Dict.)
En termes d'Architecture, l'arc, la courbure d'une
voûte se nomme encore arceau. Mais il paroit que
sans égard ;'t la terminaison qui caractérise un
diminutif, la signification d'arceau étoit autrefois la
même que celle d'arc, arc de triomphe, arcade,
voûte, berceau. (Voy. Du Bellay, Mém. pièc. justif.
T. VI, p. 366. — Alector, fol. 136. — Rabelais, T. I,
p. 74.) En termes de jardinage, arceau désignoit
aussi une treille disposée en voûte, en berceau.
(Monet, Dict. — Voy. Arc.)
Arcelor, verbe. Creuser en demi-cercle; can-
neler. Il semble qu'on ait comparé à la courbure
intérieure d'un arc, d'un petit arc, la circonférence
concave d'un creux en demi-cercle, d'une canne-
lure creusée sur une colonne ou sur un pilastre,
lorsqu'on termes d'architecture on a dit, 1° dans le
sens de creuser en demi-cercle : « Perron de mar-
" bre, hault de sept piedz, de figure triangulaire,
« et les costez arcJiele% en dedans en hémicycles,
« faisans trois demi-rondes enfonceures. » (.\lector,
fol. 11, V°.)
2° Dans le sens de canneler : « Ronds pilliers
« bien arcclez, et tous faits à feuillages, selon la
« mode Lombarde. » (.1. d'Aulon, Annal, de Louis
XII, an. 1502, p. 107.)
VARIANTES :
ARCELER. J. d'Auton, Annal, de Louis XII, p. 107.
Arcmeler. Alector, fol. 11, V».
Arceure, subst. Arc, cintre. Pièces de menui-
serie qui entourent les meules d'un moulin. Arc,
portion de cercle. Forme arquée, courbure en arc.
Dans le premier sens on a dit : » Quant ilz vindrent
« a un portail.... le Roi passa devant.... et veil
« escript en Varceure, par dessus les deux huys.
« lettres d'or. » (Percef. Vol. II, fol. 120, R- col. 2.)
Les pièces de menuiserie qui entourent les meu-
les d'un moulin, étant nécessairement courbées en
(1) Mieux écrit arc-à-jalet. Voir, sur les arbatites, le résumé donné par M. Littré, add. au 1V« vol., p. 2573, 2« col. (n. e.)
AR
— 125 -
AR
arc, on en aura désigné l'assemblage par le mot
arcure, dans une pièce de vers où le Poëtc fait une
allusion continuelle de la vanterie à un moulin
à vent.
L'eureus Wagons a encovent
Qu'il fera un molin de vent
Or nos covient faire une suele
Ki bien puist soustenir le muele
Or me covient faire une arcure
De celui qui a mis se cure
En mentir, très cou qu'il lu nés.
Ane. Pofl. Fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1351 et 1358.
Il paroit qu'en ces vers, arcure est de même signi-
fication qn'archure. (Voy. Colgrave, Dict. — Dict.
des .\rts et Sciences. — Du Gange, Gloss. lat. T. I,
col. 04-2, au mot Archeura.)
On sait qu'en Géoméliie l'on nomme arc toute
portion d'un cercle. Le Zodiaque est un grand cercle
de la sphère, imaginé par les Astronomes et divisé
en douze portions. Ainsi, les arcures du Zodiaque
sont les portions de cercle, les arcs qu'avant Coper-
nic on faisoit parcourir au Soleil, en lui attribuant
un mouvement relatif à l'ordre des signes du
Zodiaque. « Le cler Titan (1) passant par les arcures
■' du Zodiaque, par-devant la maison de la Vierge,
<• jettoit son regard en terre. » (J. Le Maire, lUustr.
des Gaules, liv. i, p. 78.)
La forme d'un beau sourcil étant comparée à la
courbure d'un arc, on a dit : « Considéra l'ampli-
« tilde et spaciosité de son cler front bien arrondy,
•< V arcure de ses sourciz noirs, etc. » (J. Le Maire,
lllustr. des Gaules, liv. i, p. 110. — (Voy. Arcage.)
VARIANTES :
ARCEURE. Percef. Vol. II, fol. 120, R° col. 2.
Archure. Cotgrave, Dict. — Dict. des Arts et Sciences.
Arcure. Ane. Poët. fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1358.
Archaïsme, s!//^s^ maso. Ancien mot; expres-
sion ancienne. Mot ou expression de l'ancienne
Langue françoise. On en trouve de cette espèce
dans les Poésies de Malherbe. La dernière Ode qu'il
ait faite, est celle où il y a moins de ces expressions
anciennes, de ces anciens mots, que Ménage a dési-
gnés par le mot archaïsme; en grec a^xancfiis. (Voy.
Observ. sur les Poës. de Malherbe, liv. ii, p. 327. —
Dict. de l'Acad. Fr.)
Archal, subst. masc. Espèce de métal; cuivre;
laiton. En grec, le mot composé ÔQù^aXxoç signi-
fioit œs montanuni; le métal, le cuivre qu'on tire
des montagnes, et que les Latins, à l'imitation des
Grecs, ont nommé oriclialcum. C'est d'après une
idée dont Vossius indique la fausseté, qu'à cette
orthographe primitive ils préférèrent celle d'auri-
chalcum, contractée dans le mot françois arkal ou
archal. Ce mot étoit de même significalion que le
latin, lorsqu'on désignoit une monnoie de cuivre,
une horloge faite en cuivre, en disant monnoie
d'archal, horloge à'arcluil, etc.
Je me gageroie
Un denier d'argent ou d'archal,
Se Bertran et le llaréclial, etc.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 197, R- col. 2.
. . . . Li tramist, se jou n'i fal (2),
Uns moult rice orloge d'arkal.
Ph Mouskes, MS. p. 71.
On percevoit au profit du Roi, en 1315, un péage
de deux sols dix deniers pour cent de Varcha! et fil
A' archal trans;iorlé depuis le lieu où la Seine se jette
dans la mer, jusqu'au' Pont-de-l'Arche. (Ord. T. I,
p. 600.) Le cuivre passé par la filière se nomme en-
core fil d'archal; expression dont on abuse en
l'étendant au fil de fer. Quoique les éi/ingles soient
des brins de fil d'archal ou de cuivre, on ne diroit
plus aujourd'hui :
J'ai bêles espingues d'argent ;
Si en ai d'archal ensement.
Fabl. MS. de S' Geim, fol. 42, V' col. 2.
On substitueroit au mot archal celui de laiton ;
espèce de cuivre moins jaune peut-être que Varchal
dont le laiton paroit avoir été distingué.
J'ai fsrmaiUez (3) d'archal dorez,
Et de laiton sor argentez.
Fabl. MS. do S- Germ. fol. 42. R- col. 3.
VARI.\KTES :
ARCHAL. Orth. subsist. - Fabl. MS. de S> Germ. fol. 42.
Archail. Cotgrave, Dict.
Archant. Labbe, Gloss. lat. fr. au mot Aurichalcum.
Archat. Des .\ccords, bigarrures, fol. 30, R".
.\rich.\l. Bourgoing, de Orig. Voc. Vulg. fol. 65, V».
Arkal. Ph. Mouskes, MS. p. 71.
Archangle, suhst. masc. Archange. En latin
Archangelus. (Voy. Arche, principauté.)
Archarage, subst. masc. Service d'un Archer.
Ce mot qu'on trouve dans les titres féodaux, anté-
rieurs à la cessalion de l'usage de l'arc à la guerre,
signifioit le droit qu'avoit un Seigneur d'exiger d'un
certain nomb; e de vassaux, le service d'un Archer.
(Voy. Borel, Dict. — Dict. de Trévoux.)
VARIANTES :
ARCHARAGE. Borel, Dict. - Dict. de Trévoux.
.\rcair.\ge. Dict. de Trévoux, au mot Archarage.
Archairage. Borel, Dict. au mot Archarage.
.Arquairage. Id. ibid. — Dict. de Trévoux, iibi supra.
ARQUAiR-i^TGE. Borel, Dict. abi supra.
Arche, subst. fém. Arc de triomphe. Arcade.
Archipompe. Coffre, trésor, archive. Cellier ; cuve.
Bâtiment de mer ou de rivière.
Anciennement le mot arche, dont on a restreint
l'acception relative à l'idée générale de courbure en
arc, signifioit arc de triomphe. « Oid la nuvele que
« li Reis ont fait voldru une arche que fust signe
« e demustrance de sa victorie e de sa glorie. »
(Livres des Rois, .ms. des Cordel. fol. 19, R° col. 1.)
Les arches }[ariennes étoient les arcs de triomphe
élevés à la gloire de Marins. >< Ces arches avoient
« fait détruire les Sénateurs; mais César les fist
» redresser et réparer. » (Triomphe des neuf Preux,
page 294, col. 2.)
De là , l'expression arche triomphante , dans
P. Desroy(à la suite de Monstrelet, fol. 118, R°. —
Voy. Arc.)
L'arcade est une voûte en arc comme Varche d'un
pont. Néanmoins on ne diroit plus, en parlant
(1) Le Soleil, petit-fils de Titan, fils d'Hypérion. (x. e.) — (2) Si je no m'y trompe. — (3) Espèce d'agrafes.
AR
— 126 -
AR
d'édifices en général, qu'ils sont faits par arches et
piles. (Voy. Mcol, Dict.) Il semble que \ arche d un
moulin ctoit res[)6ce d'arcade sous laquelle tourne
la roue d'un moulin ii eau. » Le sault du moulin,
« restancbement qui porte le moulage, soit de hois
c< ou de pierre; Varche du moulin la maison dont
« le moulage est couvert, etc. » (Boutedler, Som.
rur. liv. 1, lit. Lxxiv, p. 431.) v , •
Dans un sens qui paroît analogue à celui
û-arccure, archure, le mot arche signifioit en
termes de marine, arcliipompe ; une enceinte de
planches, au milieu de laquelle les pompes d un
vaisseau sont élevées : « une clôture faite entour
« les escoutilles des pompes pour les garantir
« d'estre heurtées. » (Cotgrave et Nicot, Dict. -
Dict. de Marine. — Voy. Akceure.)
On a la preuve que la plupart des significations
du mot arche étoient communes au mol arc, et que
par comparaison l'on nommoit arc, un lieu voûte,
un enfoncement fait en voûte ou en cintre, dans
l'épaisseur d'un mur. Anciennement, les lieux, les
bàlimens faits pour lagarde et la sûreté des trésors,
des titres, et autres choses qu'on y enfernioil,
étoient assez généralement voûtes (1); les cotiies
bombés, etc. Il seroit donc possible que relative-
ment à l'idée de voûte, de courbure en arc, on eut
désigné par le mot arche, ces coffres, ces lieux ou
ces ijàtimens, et même avec extension ceux dont a
structure ou la forme n'avoit rien de relalit à a
figure d'un arc; maison trouvera peut-être celte
conjecture moins fondée que celle des Etymologis-
tes qui rapportent à l'idée de l'usage de 1 arc avec
lequel on éloignoit de soi l'ennemi dont on craignoit
d'être approché, cette signification générale du mol
arche, en latin arca, dérivé comme arc, en latin
arcus, du verbe arcere, en franç.ois éloigner. Quoi
qu'il en soit, les arches à garder des titres et
papiers, des trésors, des pierreries, des habits
et autres choses qu'on vouloit mettre en surele,
étoient des coffres, des archives. (\oy. INicot et
Monet, Dict. - Ord. T. III, p. 437.- Valois, notice,
page 453, col. 2.)
D'une Roi ly souvenoit qui tenoit si grands marches
Que feist, par bel sens, taire quatre petites arches...
Pleines furent d'espices, de pierres précieuses.
Rom. de Ger. de Roussillon, MS. p. 95.
En comparant la gloire établie sur l'opinion des
hommes, à une arche, h un trésor qui n'est pas en
sûreté, l'on a dit : « Celé glore est vaine ke cil
« prennent li uns de l'atre 0 ! tu fols qui el sac
« parlusiet (2) assembles tes merz, ki ton trésor
« estaulis, cuides ke cesle arche soit close el k èle
« ait serres (3). « (S' Bernard, Serm. fr. ms. p. 34.)
Les arches des Amans, espèce d'Officiers déposi-
taires des actes publics, étoient leurs archives.
« N'emporte hypothecque l'obligation passée devant
« Notaire, que du jour qu'elle est mise en arche
« d'Amant. " (Coût, de Metz, au iiouv. Coût. gén.
T. II, p. 399. — Voy. Amman.)
On nommoil arches communes, les archives
d'une communauté, d'une ville, le lieu où sont de-
posés les titres el l'argent des villes qui sont en
communauté. La révolte de la ville de Montpellier
lui fit perdre en 1379, « ses Consuls, Consulat,
« Maison, Arches communes, et cloches. » (Chron.
S- Deny.s, T. m, fol. 46, Vo.)
Les archives de l'Ordre de S' Jean de Jérusalem
à Malte, sont les Arches de la Religion dont parle
(Brantôme, Cap. Fr. T. IV, p. 171.)
On sait que Varche d'alliance, en latin arca
fœderis, mots qu'on reconnoît dans l'ancienne
expression arce fédri, étoit une espèce de coffre.
« Uarce fédri.... en la quelle fu la verge Aaron et
a les tables del Testament, etc. >> (Chron. d Outre-
mer, MS. de Berne, ir 113, fol. 166, R" col. 3.)
Il est possible qu'au moyen de l'extension, ou de
la signification générale qu'on vient d indiquer,
l'on ait désigné en françois par le mot arche,
comme par le mol arca en latin, certains meubles
et bàlimens dans lesquels on gardoit, on metloit en
sûreté, autres choses que des trésors, des titres,
des habits. On soupçonne même que le mo\aiiche,
comme altération d'arche, peut avoir signifie une
espèce de cuve. (Vov. Borel, Dict.) Quoi qu il en
soit, il est prouvé qu'en substituant / à ?• dans
archa, l'on a écrit eu latin alcha pour arca. Peut-
être qu'en françois, par le changement de r en n,
l'on aura écrit anche pow arche. Il paroitd ailleurs
que dans un litre de 1262, ce mol anche (4) es de
même signification que le latin alcha dans un litre
de 1253, el qu'ils y désignent l'un et 1 autre, un
cellier. >■ Li Abbés et li Convens ont quitel à Martin
« une anche qui siet derier sa maison. - (D. Car-
pentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au rnot
^^Iciia. — Id. ibid. aux mots Arca et Archa. - Voy.
Anche et Anse.) . ^„ff„„ Aa
Enfin, il semble qu'on ait comparé à un coffre de
forme bombée, l'espèce de bâtiment de mer ou de
rivière, qu'on a désigné par le mol arche, sans
égard à l'usage qui paroît l'avoir consacre spéciale-
ment à signifier Varche de Noé.
Marchant qui par la mer marche
En nef, en calane ou en acc/te
Percef. Vol. II, fol. 84, V- col. 1.
VARIANTES : ^ j , r,jn
ARCHE. Orth. subsist. - L. des Rois MS. des Cordel., fo 19.
Anche. D. Carpentier, S. Gl. de Du C. au mot -ycha-
Arce. Chron. (f Outremer, MS. de Berne, n° 113, fol. 166.
Arque. Borel, Dict. au mot Arche.
Arche, subst. masc. Principauté. En grec dQxn,
principatus en \alïn. « Macédoine fut jadis nommée
a Emathie, après Emathion qui en fut le P'emiei
a Roi En celle région étoit une arche nommée
<1) On trouve ce mode de conslruction
signifierait donc coin et aurait pour diminutif «ji^iOms. (n. e.)
AR
— 127 —
AR
« Panlhome où régna Thessalus. » (Hist. des neuf
Preux, p. lOG.)
Il paroît évident que dans les mots composés
Archangel, Archiabbé, Archediakene, Archeprestre,
Archite'cleur, et autres dont rénumération seroit
trop longue ; la signification d'arche el archi , est
analogue à celle dii mot grec «c/ôf, en latin pr in-
ceps.\es idées de principauté, de primauté, de
supériorité, de maîtrise, sont tellement liées les
unes aux autres, qu'elles forment une seule et
même idée générale de supériorité qu'on exprime
en nommant, 1° Archangel, Archangeles, Archangle
ou Arcangle, un Ange supérieur, un prince des
Anges. (Voy. S' Bernard, Serm. fr. mss. p. 2. —
FaiJl. Ms. du R. n° 7218, fol. 58, V° col. 1. — Ane.
Poët. fr. MSS. avant 1300, T. II, p. 806. — Chasse de
Gaston Phébus, ms. p. 385, etc.)
Gantés, Arcangles S' Mikieus,
Devant Dieu, ma cançon nouvèle
Soit de vous mes esprits reçus,
Qant mors li taura sa cotele.
Ane. Poës. Fr. MS. du Valic. n" 1490, fol. 120, R".
2° Archiabbé, en latin Arcliiabbas, un Abbé mili-
taire, un Abbé laïque (1) qui s'arrogeoit la supériorité
sur l'Abbé ecclésiastique. « Les Grands et Gens de
« guerre jouissans des abbayes, non-seulement se
« disoient Abbez ; mais aussi Arcliiabbez-, comme
<• qui diroit premiers Abbez et commandans aux
« autres, pour différence d'avec ceux qui faisoient
» lesfonclions. »(Galland,duFranc-aleu,p.294-29C.)
3° Archediakene , en latin Archidiaconus , un
Supérieur ecclésiastique à qui l'on attribue une
espèce de juridiction sur les cures de certaine partie
d'un diocèse. (Voy. Archediakene.)
4° Archeprestre, un Prêtre ou Curé supérieur aux
autres Curés, en quelques diocèses. ;Y. Archeprestre.)
5° Architecteur, le Supérieur, le Maître des
ouvriers employés ù la construction d'un bâtiment
dont rArchilecteur ou l'Arcbitecle a donné les plans
et les dessins. « Commanda venir incontinent mais-
<> très ArchitecteiD's pour deviser sa sépulture. »
(D. Florès de Grèce, fol. 4i, \'°.)
Quel que soit le nombre de ces mots composés,
tous expriment une idée de supériorité dans les
dilîérens genres que désignent les mots simples
auxquels arclie et archl sont réunis. Il y a une
supériorité malheureuse que l'on condamne, ou
qu'on ridiculise en nommant archifripon, archi-
paresseux, archifou, archipédant, un homme d'une
friponnerie, d'une paresse, d'une folie ou d'une
pédanterie extrême. L'usage de ces mots composés,
auxquels on substitue souvent l'expression, maitre
fripon, maitre paresseux, etc. n'est pas nouveau
dans notre langue, et paroit remonter au w siècle.
Ai'chediakene, subst. masc. Archidiacre. Il est
si ordinaire aux Langues en général, de substituer
l'une à l'autre les lettres consonnes ?• et ?(, qu'on
trouve naturel qu'en françois on ait prononcé et
écrit indifféremment Diakne ou Dlahre (2). L'altéra-
tion d'arche et archi dans le mot composé Archedia-
cre ou Arcliediakene, en latin Archidiaconus, est le
principe évident des orthographes Ercliidiakin,
Arcediacre, Accediakre, etc. On a la preuve que
dans la latinité du moyen âge, on contractoit le mot
Archidiaconus en prononçant et écrivant Archiaco-
«»s;dans le langage des Bretons, Archiago)!. (Voy
Du Gange, Gloss. lat. T. I, col. 643.)
Quant à l'orthographe .Issedjflcjr, on la regarde-
roit comme l'elTet d'une prononciation commune
aux deux ss et au c suivi de la voyelle e dans Acce-
diakre, si l'on n'étoit autorisé à croire avec Cotgrave,
que pour ridiculiser le titre d'Archidiacre on écrivoil
Assediacre, ou Astiacre comme Henri Estienne. Cet
Auteur, après avoir parlé de l'indulgence de l'Archi-
diacre du Hardas, pour le libertinage des Prêtres
dont il analhématisoit le mariage en ces termes,
» qu'à tous les Diables soyent donnez ces vilains
« qui se marient, veu qu'on leur permet de paillar-
« der, ajoute ironiquement ; voilà la sentence de ce
« bon Astiacre ou Archidiacre. » (Apologie pour
Hérodote, p. 324. — Voy. Cotgrave, Dict.)
Peut-être que l'expression " se morver en Archi-
» diacre » est une satyre de la grossièreté indécente
avec laquelle certains Archidiacres, dans le cours de
leurs visites, aunoncoient leur supériorité (3). Mais
si l'on en croit Le Duchat, c'est une plaisanterie que
faisoit Rabelais sur l'effet physique de leur embon-
point, lorsqu'il représentoit Gargantua, <• crachant,
" toussant, sanglotant, esternuant, se morvant en
« Archidiacre, et desjeunant pour abbatre la rosée
« et mauvais air. » (Voy. Rabelais, ï. I, p. 132. —
Id. ibid. note de Le Duchat.)
Il est possible que dans le temps oh les Archi-
diacres faisoient en toutes saisons leurs visites à
cheval et même à pied, on se soit avisé de désigner
un homme bien croté, en disant proverbialement
qu'il étoit « croté en Archidiacre. » (Voy. Pasquier,
Rech. Liv. vm, p. 701.) La haine a fait un crime à
Pasquier de l'origine de ce proverbe, que le P.
Garasse regardoit comme une plaisanterie digne
d'un « Huguenot, » d'un « tiercelet de Calvin, »
comme une profanation du mot et Office des
Archidiacres. (Voy. Garasse, Rech. des Rech. p. 838.)
variantes :
ARCHEDIAKENE. Duchesne , Histoire généalogique de la
Maison de Béthune, p. 152, titre de 1257.
AccEDiAKNE. D. Lobineau, Hist. de Bret. T. II, pr. col. 409.
Accediakre. D. Morice.Pr. deTHist. de Bret. T. I, col. 1003.
Arcediacre. Perard, Rec. de pièces p. l'His. de Bourg, p. 501.
Arcediakene. Ph. Mouskes , MS. p. 97.
ARCHEDI.A.CRE. D. Touss. du Plessis, Hist. de Meatix, T. II.
(1) On pourrait les comparer aux laïques qui, au ix= siècle, convoitaient l'autorité des archidiacres et se substituèrent
aux clercs. Charlemagne s'oppose à cet envaliissement dans ses capitulaires ; Orderic Vital, en 1066, le représente comme
habituel ; Innocpnt III s'en plaint encore à la fin du xil' siècle, (n. e.) - (2) De diac'nus : de même tympanum, devenu
twnpniim, a donné timbre; co})hitnis, devenu coph'nus, a donné coffre; et orrfi/iem, devenu Ofd'nem, ordre. {N. E.) —
(à) Les archidiacres, en efîet, dépouillèrent les évêques de leur juridiction, de l'an 1000 à 1200, et devinrent plus passants
que leurs chefs spirituels, (n. e.)
AR
_ 128 - AR
p. 64, litre de 1 177. - Test, . n-, du O' d'Alencon, à la suite
de Joinville, p. 1?5- avantl300,X. lV,p.l349.
AssEDiACRE. Cotgrave, Dict
É^^;;^;;^^^?^:?:t:i,Ï^'^.?oJ^o.. VU. delcos.
Arclielet, subst. masc Petit arc. (Borel, Dict.)
Arohelettc, subst. fém. Petite arche. Petit
corne On t?ou?e clans Cotgrave, Dict ces deux s>gni-
ficaluiiis relatives à celles du mot arche. (Voy . AncE.)
AiThenrebstre, subst. masc. Arcliipretre.
Qudes^iue soient lesorlhographes diiïérenlesdece
mot el esne sont rien moinsquessenlielles; pui.-
Suno%ii du /* changé en t., et du i supprime dans
TfZS>Ttre (l), en latin Archiprcsbyter, se forme
fout Su e en eut Torthographe Archcprovoirc ou
aT^ î; om'", prononcé quelquefois Archcpvemie,
en substituant 'H à la lettre consonne r. ^\oy.
'X^InS^^Q^'lePoëte, auteur d-una,K;ion
Fab au inilulé Confession du Renard, songeoil a
Lvèn-'er de quelque désagrément personnel qu i
lUrSouvé^ la part ^-^J^^f^^^^S^^
flP^io-noii ràne associé au renard dans un p6ierina5,e
fKr, en le nommant Bernard lV4rc/-^.m|S^re ou
YArrhrmvoire (Vov. Fabl. ms. du R. n" i2i8, fol.
48 et 4' R» col 1 ) li seroit possible aussi que ce
fût une uSusîin salyrique ù rigaorance des bccle-
ïasîiques en général, dans les xu' et xi.r siècles.
VARIANTES :
ARCHipROVOiRE. Ibid. fol. 49, R» col. 1.
Archer, subst. masc. et fém. Qui tire de l'arc.
On lîe deffinoit pas toujours un homme de guerre
de iistice ou de police, lorsqu'en général on nommoi
jSer celui - qui tiroit de l'arc qui usoit d aie et
« de flèches. » (Voy. Monet, Dict.)
Ki voit venir son anemin corrant
Por traire à lui grans sietes d aicier,
Bien se devroit destorneir en fuiant,
S'il pooit guerantir, de Vairchier.
Chans. Fr. MS. de Berne, n- 389, pari. I. fol. 8U, R .
Dans le Roman de la Rose, Vénus irritée contre
Honte ei Raison, constamment opposées au bonheui
de V.Unant, combat pour lui avecl arc et les flèches
de l'Amour :
Puis ainsi comme bonne Archiere,
Par une moult petite archiere
nue nature eut par grant maislrise
Entre deux beauLx Vi^lZ'ITi!se!l^^.m,-^.i^^O.
Les œillades amoureuses sont '«^ "è'^'^^s dont on
fpint nu'Amour, à l'aide de son arc, blçbbe nos
Srs Dt^Ui, on a dit l^.gurément que es yeux
^Zni archers de cœur, Archers d'amours.
! Same à Damp Abbez et Damp Abbez à Madame,
ès'STx arc/-zms de cucur, peu à peu commen-
< rèrent l'ung des cueurs à l'aultre traire..... Damp
Abbez qui de ceste queste nouvelle esto.t sur tous
leSs ioveulx.... selieve.... et revient a Madame
et de iove vis-à-vis elle se siet. Lors recomman-
: cè.ïntleurs«rd</VrsdVnKOHrsplusforlatra,re. »
^'ïSS'of âSi en France l'usage de i;arc
à Ui "ueïe et celui de l'arbalète, les Archers for-
. îenune'c les Arbalétriers une ™> '^«Jj ^f^
cinni uarlie combaltoil a pied, et 1 autie sei\ou ae
Cavalerie légère. Le Roi Charles VIll, en insutuan
£ CompS^ies d'Ordonnance dont chacune fu
romnosée de cent Lances , c'est-a-dire de cent
homSes d'ames, voulut qu'à leur suite ils eussent
Ses l Sm à dièval. Ces Archers, les mêmes sans
doui aïe ceux à qui il ordonna de loger chacun
aîeileïÏÏance 2), étoient probablement les Arcbers
â'O donnance.\.''Le Roy ordonna que les A,j-rj;s
„ logeroient chacun avec leur lance. 'M^Jall'ieu de
roucv Hist. de Charles Vil, p. 610.) •• Des Cent, ae
«"uerie de l'Ordonnance du Roy, mourut environ
loTs cens7rc/u.rs de ladite Ordonnance sans
„ lés Francs-archers. » (Chron. scandai, de Loui.
"^l^S-ard^^i étoient ainsi nommés, par la
ra'stn qïfls étoient affranchis Je tout subs.d .
tx Lieux faisans; lesquels enfin esprouvez
: Snîexempts de la taille, ^.^^^^^^.^
„ rhpv auand 1 seroit question d aliei pai pays.^
Ces -ens pour cette exemption et la sorte d armes
nSe'p us communément ils manioient furent
ZlS!z Francs-archers. '^ ^^"-,f„ h.Î " for^
n 15 et 110 ) Cette milice des Francs-arLhns,\oT
p. iij ei Y,, ,.r;^ vil vers l'an 1448, s'aguerrit de
opWé au chorèv^que qull -PP>- ^„^^^y4°rchPprl?;le' on^^^^^^^ 1. plus ?o-ent avec le do,.nJ^^^
SurestafeTpfyll ^Im^^en tetpVdT^aîx^ feTfnstructeurs éta.entdes Suisses. (N. E.)
AR
— 129 —
« leur service celui des Adventuriers et des
« Puisses. » ^Voy. Fauchât, ubi supra, p 117 )
Il paroît qu-anciennement les Archers, comme
les Archers des toutes, étoient OHiciers de la
Vénerie de nos Rois. Dans le procès-verbal des
Coutumes de Vermandois, il est fait mention d'un
" Jul 1^ v'^^n"^* ' mesureur du greniei- à sel de la
ville de Vaily, seigneur de Toute-fille, el Archer
•^des toutes du Roy. » (Voy. Coût. gen. T. I, p. 553 )
m-JlvT^v'' i^'^K' '"' ^^'y etoitsans doute un
Of icier de 1 espèce des Archers placés entre « les
« Louveliers el les Vallels à chiens, sur les estais
« des Roys Phihppes III, Philippes-le-Bel et Philippe t
Frî:i;iS'Sc.'p.'3SJ:) '^' '•"*^'' ''''■ ''' ^-'^^
Quoique l'arc ne soit plus l'arme des hommes qui
accompagnent les Prévôts, soit pour les honorer
SOI pour exécuter quelque ordre relatif ù l'adminis-
trafon de la .îust.ce ou de la Police, on a conli ,é
de les nommer «Archers, parce que les Rois et
" SiL""^^ souverains, et les Prevosts de leurs hos-
mP^;,P "l/n-^'f"" ''*? '^"''= personnes ou autre-
{voT Ni'cot^S.T """ " '""' ''''''' ''''■ '•
VARIANTES :
p. 1652 °''*^" ^"^^- ~ '^"''- ^°^^- '■'■• ^'S- av- ^300, t. IV,
AmcHiER. Chans. fr. MS. de Berne , n« 389, part I fol 80 I
Archier. Lanc. du Lac, T. III, fol 4 V» col '/ '
ARCIEK. Hom. d'Ale.xandre, MS. du R. n. 6987"'fùl "01
Archiere. Hom. de la Rose, vers 19403.
Archerer, verbe. Tirer de Parc, chasser à Parc
On a employé ce mot pour désigner le droit de chas-
ser, dans un temps où Ton chassoit à Parc ■ « droit
^archerer sur une terre, » le droit d'y chasser à
â'ei.lxT ^a" ^''''V'' ^^ (-"-amesni^^dans le ir
siècle, (voy. Arçoieb.)
Archerie, subst. fém. Action de tirer de Parc
On peut voir quels etoient les « dix enseignements
dumestierd'^rc/^cm, » dans Modus et Racio îi
dthf^T^l'^^' ^'?^ traitoit de l'exercice de Parc
etoient des livres ù'Arclœrle. (Voy. Modus et Racb'
Enfin un lieu propre à l'exercice de Parc était une
Archerie. (Voy. Cotgrave, dict.)
/v;^^'A***^*■*'*',f"^^'■ "''*«^- Diminutif d'Archer
(Voy. ARCHEH.-Voy. Oudin elNicot.Dict.) Nos poètes
çonservoient à PAmour son arc et ses 11 Ses
lorsqu'ils le nommoient Archerot '
AR
■ . . D'un nain, d'un bastard, d'un Archcrol ssnq vo,,^
Font, non un Dieutelet, ains un maistre des Dièux^
vp^*'*^'^*^f' ^"^'^*- ""^«^'- Coffret ; trésor. On obser-
vera que les acceptions encore usitées de ce mot
«r^/;^ï sont relatives à l'idée de la couilure d'un
rc I est possible que relalivement .', la mêmeidéS
lait signifie colTrel, trésor, comme arche si< nifoit
K'r/'S ^e'.^T^ ^'^-^ Q"«' "" '• ^" «oit '^oÛt
uueiiet û& sa riche aumo re .. o'éloit en sfviÂ
poétique du xvr siècle, « ouvrir les trésors p S
« esprit, de son imagination. V ^ ^^"
Abbé d'Auton et maistre Jehan le Maire
Ouvrez Varchel de votre riche aumaire^' ' ' '
Lt composez quelque plaincte sommaire etc
et J< • Mv""' delïcndons marchepier à Var.
"fhet etc. » Mais, en rapprochant cette défense riP
celle faite aux Pécheurs par Part xlvh d'imp Orll
iiance de Charles VI, en clatc du mo s de ma'rs m
e re, eree par l'art, lxxh d'une autre 0 do ,S
en dale du mois de septembre 1402, on acnuiért h
preuve évidente qu'au lieu de .. niàrcle S Xi
Heureux ceux-là qui dans les retz surpris
De 1 A rchcrot, filz de la Cithérée, ^
i-euvent donner par leur plume dorée,
A leurs moitiez, des plus belles le prix.
Poés. de J. Taliureau, p, d06.
(1> C'est le diminutif d'arcAe : il en a tous les sens. (n. e.)
Ai-chiabbé, suhst. masc. Premier Abbé En la.
tni Archmbbas. (Voy. Arce, au sensde piSncip^mté.)
Archie, subst. fém. et masc. Portée d'arc L'es-
pace que parcourt une fièche lancée avec un w
; Il estoienl à deus archks de nos, dev ni Baruth »'
OV artene, Ampl. Coll. contin. de G. de Tyr TV col
J '■ ■\''" partent Lancelot et le Nayn en une forest
istt^'^sT^^'^r '^'"'^■- " ^'""""^
. . . Fut ensus de la rivière,
Ausi comme une archie entière.
G- Guiarl, MS. fol. 279 V-
Cest probablement pour le besoin de la mesure
La seconde bataille vient
Qui trois arcMers de front tient
Gace de la Signe, des Déduits, ilS. fol. 57, R-
Devant la porte a une place
Qui tient deux archiez d'espace
G. Machaul, prise d'Alexandrie, MS. fol. 225, V" col. 1.
A tant sont les os aprociés
Assez, à mains de deux arciés.
ri'- Mouskes, MS. p. 181.
Si l'on avoit la preuve que, dans la signification
Aarchoier,on eût dit archier pour lirn eSc
on pourrait croire que l'orthographe archier alté-
rée peu -être dans archie. étoît un verbe qui' pis
busbtantivement, signilioil portée d'un trait d'arc
blemPnf'nn'"f f "' «''^"«''■«Phe «r.ft/.r est v i-'
blemei t une faute pour archiée, dans la citation
Ô';'''ï -n' ' Tr '" ''■* ^"'■'^^f' '"* et ses cômpSf-
« gnons. Quand ilzsontentrez dedans, unearchien:
4T
ÂR
— 130 —
ÂR
« siliève entour eulxungcry. - (Une. du Lac, T. Il,
fol. 10, Y" col. '2. - Voy. Auchiee.)
VARIANTES :
\RCiK Ph. Mouskes, Mb. p. 181.
s . . 'eS lîastué une «rd.e. que, etc. .
(Llnc.duLac,T.l,fol.l41,V"col.l.)
Près des rens, à mains d'une avchwe,
Si comme on ma fait entendant,
se vont les François estendant.^^ ^^^ ^^^ ^.
VARIANTES :
ARCHIÉE G. Guiart MS ff-^^^i f °. ^^^ .^
Archée. Lanc. au Lac, i. .i, lui. i-**!
* i»:»,.*. <:)y//s/ fcm. Espèce de meurtrière,
Arcluere, ««^f -^f '^'^'^ , d^^^^ le premier sens,
l^^L'S;Jn?dèrn,ur^. (Cl.ro,.. de Sa,,,lDe„,s,
T 1, fol. "207, Y°.)
Aux archieres de la tour
Sont arbalestres^tout^entour. ^^^^ ^^^^ ^^ ^^^^
On a dit en parlant de la mort :
Elle est tout ausi en agait,
Probablement, le mot archiere signifioil voûte,
Dorte à V archiere.
Archif subst. masc. et fém. Chartrier; dépôt
nnbUc 11 V a différentes opinions sur 1 etymologie
tj'ii pst de même origine que le mol arcne, c est pai
L ml. irrS'o" que tous deux ont signi^iie coffre^
mSarchifve, coffres à tenir papiers. (Voy.
^Tu'iennement, on écrivoit ard»/' pour archives
. tdonnoTèn mandement à nos amez et féaux
t P^ràndSeneschal de Provence, Gensdenostre
: Conse^royàrMaistres rationaux et Archivaires
: §e nos re Chambre et Archif d'Aix, etc. » (Gpde-
frnv Observ. sur l'ilist. de Charles Ylll, p. ^39
Uorthograihe archil n'est sans doute qu'une alté-
ration de l'orthographe archi . " Si ne puis-je tiou-
! ver desduelz Roys ilz furent faictz Contes ne Ba-
rons ne par les livres et caterves de l'ardu/, ne
: de ?à seJlie de Naples, où se souloient trouver
„ tous les faicts dudit Royaume. » (La Salade,
fol. 45, Y" col. 2.)
VARIANTES :
ARCHIF. Godefroy , Observ. sur rHist. de Charles \ Ill,p. 530.
AncHiL. La Salade, fol. 45, V col. 2.
f.S;vE"MénSè,'obs. sur la Lang. Fr. part. II, p. 412.
Architecteur, subst. masc. Architecte. (Voy.
Arche, principauté.)
Architectonique, subst. (^m. Architecture.
L'art de l'Architecte, en grec «e^^r.xro,». « Meca-
« nique... esloil suivie par Agricultuie, Chasse,
„ PeSerie, Navigation, Marchandise, ^yOitecto-
: «îgSÎ et Laniflce. .. (Les triomphes de la Noble
Dame, fol. 5, Y°.)
Archivaire, subst. masc. Garde des archives.
(Voy. Archif.)
Arcipoles, subst. masc. Il semble qu'on ait dé-
sioi^é le pouvoir de Cupidon arme de son arc, en le
Simanr^rc/i;o/es, 'peut-être du latin aveu
pollens.
Arcipoles tient un arch taint en gramne.
Dont si doit tret qu'un coer perce parmi ,
Et ce sont ceuls quOiseuse ou vregier mainne.
Dont portier sont^le_sJ^ Mercuru.^^^ ^^^_ ^.
Arcoier, verbe. Tirer de l'arc, chasser ù 1 arc,
se courber en arc, plier. (Voy. Arçonner.)
On disoit au premier sens :
Un jour ala li Dus kacier
En sa foriest et arcouer. .,<. „ oju
Ph. Mouskes, MS. p. oa*.
Or devroie-jou rivoiier
Et par mes foriès arcotiei:
Id. ibid. p. 227.
Pc ornnc; fnrès aloient arcoier et berser.
''\^om. Awr?, mI. du R. u- 6987. fol. 201, R' col. 3.
Dans le second sens :
Lances ont droites que ne ploient ;
Ne si ne traignent, "e ,f^-t"7'^!-v. col. 1.
Les lances grosses si roidoient
Que sans brisier toutes^«rcfto,e»>^ ^, ^^ ^
VARIANTES :
ARCOIER. Athis, MS. fol. 107 R« col. 2
ARcnoiER. Anseis, Mb. fol- 2'- R° ^ol. 1.
Arçouer. Ph. Mouskes, MS. p. iîl.
Arçon, subst. masc. Arc. Archet. Demi-cercle;
^'£^f^!sem&Sment pour la rin;e et la me-
sure des vers qu'au lieu d'arc on ecrivoit arçon.
Commande à prendre au garçon
Ses sajetes et son arçon
AR
— 131 —
AR
Si me vault miex ainsi attendre
Que rompre mon arsoit au tendre.
G. Machaut, Poés. MSS. fol. 181. V col. 2.
La signification de ce mot arçon éloit la même
que celle d'archet, lorsqu'on disoit traire Yarçon
pour se préparer à jouer du violon ; traire de \'arço7i
pour jouer de ce même instrument.
Es-vous Nichole au peron,
Trait viele. trait arçon :
Or dist par là sa raison....
Plàiroit vous oir un son
D'Aucassin un fran Baron ?
Fabl. MS. du R. n- 7689, fol. 80, R* col. 1.
Devant que aucuns di.x ou neuf
M'eust donné por mon chanter.
Je me porroie bien vanter :
James de cliar ne mangeroie ;
Quar certes je ne troveroie
Qui tel présent me vousist fere,
Tant seusse bien d'arçon trere.
Fabl. MS. du R. n" 7-218, fol. 176, R- col. 1.
Quelle que soit la ressemblance de l'archet de
violon avec l'arc, on en désignoit une encore plus
sensible en nommant arço)ts ou archons, les demi-
cercles qui forment le tomberel ou la tonnelle, es-
pèce de filet à prendre les perdrix. « Les archons...
« y sont mis que la rois (1) court par dessus, quand
« on la tire ; et sont de ia moitié de deux cercles
« de tonnel, affin que la rois coure plus souef par
« dessus. » (Modus et Racio, .ms. fol 178, Y".)
C'est relativement à la même idée de ressem-
blance qu'arfo» auroit pu signifier en général chose
courbée en arc, comme une petite arcade, dans le
Dictionnaire de Monnet ; le dessus de nos anciens
chars bombés en forme de fourgon, etc.
Fort sunt les roes, et bien fait li limon ;
D'ebenus sunt deseure li archoii ;
De fin argent fu cleés environ.
Enseis, MS. fol. 59, R' col. 1.
II s'estent si qu'il fait croistre et brisier
Les flans del car, et les arçons brisier.
Ibid. fol.63, R-col. 1,
L'acception à laquelle on a restreint l'usage de
ce mot arçon, arçon de selle, est ancienne dans notre
Langue (2).
Par desor son archon devant
Le porte outre l'iaue courant.
Fabl. MS. du R. n" 7989, fol. 210, V col. 1.
Par opposition à Yarçon devant, on disoit arçon
derrier ou daerrain. (Voy. Rom. d'Alexandre, ms.
du R. ir 6987, fol. 181, R° col. 2. — Ibid. fol. 206.)
VARIANTKS :
ARÇOX. Ort. subs. - Cotgrave.Borel, Nicot et Monet.Dict.
Archon. Anseis, MS. fol. 21, R" col. 1.
Arson'. Modus et Racio, impr. fol. 87, R».
Arçoner, verbe. Se courber en arc, plier. Affer-
mir, rendre stable.
On a vu qn'arçon signifioit arc. De là, le verbe
arçoner de même signification qnarçoier, se cour-
ber en arc, plier. « Les lances furent fortes, et point
« ne brisèrent ; mais arconnèrent. » (Froissart,
Vol. IV, p. 44.)
Les lances ploient et arçonenl.
Rom. de Clygcl, MS. du R. n' 6987, fol. 277, R' col. 4.
11 est possible que relativement à l'idée d'un
Cavalier arçonné, c'est-à-dire, ferme entre les
arçons, le verbe arçonner ait signifié affermir,
rendre stable. Au reste, on n'a queCotgrave pour
garant de cette acception, bien moins ancienne que
la première.
VARI.\NTES :
ARÇONER. Rom. de Perceval, MS. de B., n" 3.54, fol. 268.
Arçon.ner. Froissart, Vol. IV, p. 4i. — Cotgrave, Dict.
Arçonneur, subst. masc. En termes de Chape-
lier, Yarçon est un instrument fait en archet de
violon , long de cinq à six pieds et garni d'une
corde, avec lequel on fait voler la laine? On trouve
dans l'ancien usage de cet instrument pour la pré-
paration des laines, la raison pour lai|uelie l'ouvrier
qui les préparoit, se nommoit Arçonneur (?>). (Voy.
Du Cange, Gloss. lat. T. l, col. 668.)
Arçonnenx, Adj. Qui s'attache et tient aux
arçons d'une selle. On a dit en ce sens, malctte ar-
çonneuse. (Voy. Cotgrave, Dict.)
Arçonnier, adj. Qui garnit et orne les arçons
d'une selle. Signification analogue à celle à'arçon-
neux, dont l'adjectif arçonnier ne ditféroit que par
la terminaison , et l'usage qu'on en faisoit lors-
qu'avec ellipse d'un substantif féminin, on désignoit
une chose attachée comme ornement aux arçons
d'une selle, en la nommant arçonnière. « Trois
" selles, l'une de coursier garnie de soye à parer
« Xq?: arçonnières... et en chacun cuigne't desdites
« arçonnières un Angelot d'ivire. » (Extraits des Reg.
du Très, des Chartes, p. H. — Voy. Du Cange, Gloss.
lat. T. VI, col. 1361. — Cotgrave, Dict.)
Arct, part. Astreint, obligé. Dans un sens relatif
à celui de l'adjectif latin arctus, et du participe
arctatus, on a dit figurémcnt : « Est tenus per tout
« le Court que tenant in laile ne serra arct d'al-
« turncr, etc. » (Tenures de Littleton, fol. 128, R"
— Voy. Arcté.)
Arcté, part. Étréci, resserré. En latin arctatus.
« Est le collège des Carmes plus noble que cil de
« Laon ; et ont ceux de Laon grand lieu et espacieux,
« et les Carmes petit et arcté, et si ne se puet ac-
» croistre. » (Félibien, Hist. de Paris, preuv. T. II,
p. 510 ; lit. de 1386. — Voy. Arct.)
Artlamment, adv. (Voy. Ardent et Ardentement.)
On subslituoit g h d, comme dans la formation des
substantifs et verbes françois manger, en latin,
mandere ; ronger, en latin, rodere ; orge, en latin,
ordeum ; ardille, en latin, argilla, etc. lorsqu'on
prononçoit et écrivoit arge pour arde, en latin,
ardent; argant ponr ardant, argamment pour ar-
(1) de rete, relis. — (2) On le trouve même dans la Chanson de Roland sous la forme arçuns (vers 1229, 1534) : « Pleine
sa hanste l'abat mort des arçuns. » (N. E.) - (3) On lit au registre du Trésor des Chartes ,IJ. 154, p. 443: « Ledit Guillaume
decoppa par grand despit à Cyrot arçonneur la corde de son arçon. » (n. e.)
AR
— d32
AR
dammenl(l). La signification de cet adverbe est figu-
rée dans ces vers :
Cuers qi anjanment
Aime, ne doit refuser q'il n'olrie
La volenlé, tant cou soit aconpUe,
De sa Dame haut et bas plainement.
Ane. VoH. fr. MS. du Vatican, n- U90, fol. 443, V'.
VARIANTES :
ARDAMMENT. Cotgrave, R. Estienne et Nicot, Dict.
Ardamm.vnt. Monet, Dict.
Arganment. Ane. Poës. Fr. MS. du Vat., n» 1490, fol. 143.
Ai'dant, part., adj. et sub&t. Qui brûle, qui est
en llamme, qui est en feu. Qui est de nature l^ brû-
ler, à s'eullammer, à prendre feu. Qui brûle, qui
enflamme, qui fait prendre feu. Qui est couleur de
feu.
On a désigné l'état passif d'un corps qui brûle,
qui est en flamme, qui est en feu, en disant qu'il
éloit ardent en (eu, ou tout simplement qu'il éioit
ardent. « Esloient villes, villaiges, chasteaulx,
« forteresses, champs et forests, toutes ardentes en
.< feu. » (Rabelais, T. V, p. 184.)
11 semble que pour le peuple ce soit un besoin
d'imaginer des prodiges qui annoncent la mort des
hommes extraordinaires qu'il a détestés ou aimés
durant leur vie. Que peu de temps avant celle de
Cbarlemagne, un pont de bois s'en vienne argant,
c'est-à-dire, qu'il soit brûlé par un accident dont on
ignore la cause, cet accident présage la mort de ce
Prince.
Or oéz com Karles fu dignes.
Et quels miracles et quels signes
Devant sa mort flst nostre Sire.
. . . Uns pons k'il ot fait de fust
A Maience, ù il mit sept ans,
Quar il ert Ions et haus et grans,
S'en vint artjunt par la rivière ;
Si ne sot on par quel manière.
Ph. Muuslics, MS. p. 303.
Dans ces vers, la signification du participe argant,
altération visible de l'orthographe ardant, est la
même ([ue celle de l'expression ardent en feu.
(\'oy. Ardam.me.nt.)
Il y avoit déjà longtemps que l'humanité récla-
moit en vain le secours de la îfédecine contre l'es-
pèce de maladie épidémique et pestilentielle qui,
sous les noms de feu Sacré et de feu S'-Antoine, a
désolé la France à plusieurs reprises ('2j ; lorsqu'avec
celui de la Foi, les ArdeMs, c'est-a-dire les Malades
qui étoient brûlés de ce feu, obtinrent de S"'-Gene-
viève, vers l'an 1130, une guérison surnaturelle,
par un miracle dont on a perpétué la mémoire en
le nommani miracle de S"-Geneviève des Ardens.
La même maladie, ou une toute semblable, s'étant
renouvelée en 1374, on l'appela le mal des Ardens.
(Voy. Du Gange, Gloss. lat. T. I, col. 671 et 672. —
Ménage, Dict. Etym. — Dict. de Trévoux.)
On a nommé enu ardant et vin ardant (3), l'esprit
de vin et l'eau-de-vie, comme étant de nature à
brûler, à s'enflammer, à prendre feu. (Voy. Cotgrave,
Dict.) Charles-le-Mauvais, Roi de Navarre, pour ra-
nimer en lui la chaleur naturelle amortie par l'âge,
faisoit meilre une bucine d'œrain dans son lit, avec
laquelle on lui « souflloit, à air volant, eau ardant. »
Mais cette façon de le réchauffer lui fut fatale un
jour, « ainsi que Dieu ou les Diables le vouloyent :
" car flamme ardant se bouta en son licl, entre ses
« linceux, par telle manière qu'on n'y peut oncques
<i venir à temps, ne lui secourir, qu'il ne fust tout
•■ ars, jusques à la boudiné;.... Ne Cirurgien, ne
« Médecin, n'y purent oncques remédier qu'il n'en
« mourust. » (Froissart, Vol. 111, p. 275.)
C'est encore à raison de la nature inflammable
de ces météores, de ces exhalaisons, de ces feux
folets qui s'élèvent et paroissent à la surface des
lieux marécageux, qu'ils ont été désignés par l'ad-
jectif ou participe ardent pris substantivement,
comme dans l'expression mal des Ardens.
Qtiebiue générale que soit aujourd'hui l'acception
figurée de l'adjectif ardent, qui peint l'homme
comme étant de nature à brûler, à s'enflammer, à
prendre feu, à la vue des objets qui affectent son
âme et réchauffent, on ne diroit plus en parlant
d'une femme qui seroit de nature à brûler, à s'en-
flammer d'un amour illégilime, qu'elle est ardente.
Il semble ([ue ce soit là signification d'argans en
ces vers :
Quant li Dame est iière et argans,
Ses cuers devient ausi cangeans
Com li faucons qui par orguel
Ne daigne nis veir de l'oel
Cel oisel ù on l'a rué.
Puisque feme s'en vait au cange,
Sen cuer met en un lieu estrange,
Ne daigne aler à son oisel ;
Ains s'asiet sour un Damoisel, etc.
Ane. Poét. fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 13-25.
On exprimoit l'idée d'un feu qui brûle et enflamme
l'objet sur lequel il agit, lorstiu'en faisant l'éloge
d'une femme on disoit :
Vos douçours est la fontenele
Qui sourt sous la plaisant gravele,
Qui rent talent as maladieus.
Les mors cuers pereceus et viens
Esprendés â'argitDt eslincele.
Ane. Poès. fr. MS. du Valic. n- li90, fol. 120, R'.
L'effet des passions étant comparé à celui d'un
feu qui brûle et enflamme, on ditfigurément que la
colère est ardente, que l'amour est ardent, etc.
. . . Feme qui done, art et enflame
D'orjajis amours : car j'ai oï retraire, etc.
Ane. Poes. fr. MS. du Vatican, n- 1490, fol. 157. R*.
Enfin, une soye ardente étoit une soye couleur
de feu. (Voy. Extr. des Reg. du Très, des Ch., p. 12.)
Jaune, vert, sort, ardani et perse.
G. Guiart, MS. fol. 345, V'.
(1) C'est mêler des phénomènes phonétiques bien différents: manger vient de maiiducare, devenu mand'carre ; ronger
vient de rumigare (ruminer dans Apulée), devenu rum'gare; ardille, comme ^irdillon, rf-monte à l'ancien français harde,
bâton, et, comme hart, est d'origine celtique ou germanique; orge, arge et argant rentrent seuls dans la même ciitégorie ;
ils viennent de liordium, ardiat, ardiantem, et le g est amené par le i, deveuu consonne. (N. E.) — (2) Elle paraît avoir été
une sorte d'érysipèle gangreneux, (n. e.) — (3) De nos jours encore, les paysans bas-bretons l'appellent giuin ardant, vin
ardent, (n. E.)
AR
— 133 —
AR
VARIANTES :
ARDANT. Fabl. MS. du R. n° 7615, fol. 188, V» col. 1.
Ardent. Orth. sub. — Rabelais, T. V, p. 184.
Argans. Ane. Poët. Fr. MSS. av. 1300, T. IV, p. 1325.
Argant. Ane. Poës. Fr. MS. du V., n» 1490, fol. 120, R».
Ardéeur, subst. masc. Brûleur, incendiaire.
Anciennement, les incendiaires, les brûleurs de
maisons se nommoient Ardéeitrs de maisons, et
tout simplement Ardéeurs. (Voy. Ord. T. I, p. 288.
— Rymer, T. I, part, ii, p. 13; tit. de 1256, etc.)
VARIANTES :
ARDÉEUR. Ord. T. I, p. 228.
Ardeor. Gloss. sur les Coût, de Reauvoisis.
Ardeur. D. Carp. suppl. Gl. lat. de Du C. T. I, col. 284.
Ardour. Rymer, T. I, part, ii, p. 13, tit. de 1256.
Ardenteiuent, adverbe. Ardemment. (Voy.
Ardamme.nt.)
Tant il alla et tant il en revint,
Qu'ardeiiteinent amoureux II devint.
Clém. Marot, p. 2i5.
Arder, verbe. Brûler. Briller. Rougir.
La signilication propre et figurée de l'ancien
verbe arder, ardoir, ou ardre, en latin, ardere,
éloit passive, lorsque dans le sens neutre du verbe
brûler, on disoit : « Il virent ces grans rues
« mareheandes ardoir en feu. » (Villehardouin,
page 81.;
.... Fut pour n)-rf/-eau feu livré,
Quant par pluye fut délivré.
Qui le grand feu fist tost esteindre.
Rom. de la Rose, vers 6851-6853.
Li uns le juge à escorchier,
Et l'autre le juge à noier.
Et ii tier à arder en cendre.
Fabl. MS. du R. n" 7615, fol. I8i, R" col. 2.
. . . Ii fèvre qui toz jors s'arcleiil,
Et qui moult poi sont à sejor ;
Ce qu'il ont gaaignié le jor
Despendent largement et bien.
Fabl. MS. du R. n" --218, fol. 198, R- col. 1.
C'est relativement à l'usage de comparer les pas-
sions à un feu dont on brûle, qu'on a dit : « Mieulx
" vauU mariage que ardoir au feu de luxure. »
(Chron. S' Denys, T. I, fol. 271, R°.)
. . . Quant plus air et espran,
Plus seu.x joious ; et si di.
Madame et Amors merci.
Chans. fr. MS. de Berne, n' 389, pari. Il, fol. 55, R'.
Quant li Rois l'ot, si a tel raige,
Avis 11 est que de duel arye.
Fabl. MS. de S- Germ. fol. 60, R- col I.
Il a tel doel, a poi qu'il n'art.
Siège de Tliébes, MS. du R. n" 6987, fol. 65, V col. *.
On disoit dans le sens actif du même verbe brû-
ler : « Ceaus qui son pople courrecoient arst tôt en
« feu. " (Livres des Rois, ms. des Cordel. fol. 158.)
« Cil de Sepharnaum arstrent lur fiz en l'onurance
« Adramalech. » (Ibid. fol. 143, R- col. 2.)
. . . Pria que son corps ardisse?!?,
Sitost comme ardoir ils le puissent.
Rom. de la Rose, vers 6811 et 6812.
Se ce pourpris ne puis garder,
Tout vif me puisse l'en arder.
Ibid. vers 3824 et 3825.
Le maxfex m'arâe à froide cendre,
Se jà me font à mari prandre, etc.
Parton. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 150. R- ool. 2.
Au figuré :
Amours art, amours point ; amours esprent trop fort ;
Amours, sans deffiance, a maint preudome mort.
Fabl. MS. du R. n- 7615, fol. 138. V.
Toute princesse en qui prudence habite,
Aymé vertu, de vice se désiste ;
Justice tient, charité son cueur ard.
i. Marot, p. 78.
Ce même verbe, pris substantivement, a signifié
l'action de brûler, d'incendier, le crime d'un incen-
diaire. « Es cas de rapt, de murdre, de traïson, de
» ardoir, et de larrecein, etc. » (Ord. T. IIl, p. 361.
— Voy. Ardéeur.)
En termes de science hermétique, la signification
de brûler est la même que celle de l'ancien verbe
arder, cuire. » Faisoient fondre, ardoient et affi-
« noient leur suif. .. (Ord. T. III, p. 6'»0.) On dési-
gnoit alors un effet de l'activité du feu, comme
lorsqu'en parlant du feu du soleil qui brûle, qui
dessèche la terre et la rend aride, on disoit : « Le
« soleil.... hasle toutes les routes et ar^, eschauffe
« la terre et oste Tumeur. » (Chasse de Gaston
Phébus, MS. p. 22i.) « Aux champs il n'a point
« d'ombre; ainçoys a le soleil arse la terre. » (Id.
ibid. p. 226. — Voy. Ardant.)
C'est relativement à l'idée de la couleur brillante
et rouge d'un corps qui brûle, d'un corps enllammé,
que par comparaison l'on a dit, l" dans le sens de
briller :
.... Tout aussi comme l'or art
Et flamboie sus touz métaus
Que l'on vent et livre à detaus, etc.
G. Guiarl, MS. fol. 290, V.
2° Dans le sens de rougir, être rouge de honte :
Anseis l'ot ; de honte art com un fu.
Auscis, MS. fol. 61, R» col. 1.
CONJllG.
Air, ind. prés. Je brûle. (Chans. Fr. hs. de B.)
Airt, ind. prés. Il brûle. (Ibid. fol. G2, V°.)
Ar {]), ind. prés. Je brûle. (R. Est. Gr. Fr. p. 64.)
Arce, pari. Brûlée. (Fabl. ms. du R. fol. 60.)
Arch, ind. prés. Je brûle. (H. de Job. fol. 168.)
Ard, ind. prés. Il brûle. (R. Est. Gr. Fr. p. 64.)
Ard, participe. Brûlé. (Id. ibid.)
Arde, subj. prés. Qu'il brûle. (Rom. de la Rose.)
Ardent, ind. prés. Brûlent. (Rom. de la Rose.)
Ardent, part. Brûlant. (Rabelais, T. V, p. 184.)
Ardèrent, ind. prêt. Brûlèrent. (Siège de Troye,
Ms. du R. n° 6987, fol. 108, R» col. 1.)
Ardez-, ind. prés. Vous brûlez. (R. Est. Gr. Fr.)
Ardi (j'), indic. prêter. ,Ic brûlai. (Id. ibid.)
Ardi, ind. prêt. Brûla. (Villehardouin, p. 101.)
Ardirent, ind. prêt. Brûlèrent. (R. Est. Gr. Fr.)
Ardismes, ind. prêt. Brûlâmes. (R. Est. Gr. Fr.)
Ardis, ind. prêt. Tu brûlas. (Id. ibid.)
Ai-dissent, subj. imp. Brûlassent. (R. de la Rose.)
Ardist, subj. imp. Brûlât. (Les Marg. de la Marg.
fol. 178, V°.)
Ardistes, ind. prêt. Vous brûlâtes. (R. Est. Gr. Fr.)
Ardit, indic. prêter. Brûla. (Id. ibid.)
AR
— 13i -
iLX
Ardnns, ind. prés. Nous brûlons. (R. Est. Gr. Fr.)
Ardirnt, ind. prêt. Brûlèrent. (Villeliard. p. 195.)
Ards, parlicipe. Brûlé. (Rabelais, T. III, p. '268.)
Ardij, ind. prêt. Brûla. (Poës. de Molinet, p. 159.)
Avgc, subj. prés. Qu'il brûle ; en latin ardent. —
Fabl. Ms. de S' Germ. l'ol. G3.j
.1rs, ind. prés. Tu brûles. {R. Est. Gr. Fr. p. 64.)
Ars, participe. Brûlé. (Id. ibid.)
Arsent, ind. prêt. Brûlèrent. (Pli. Mousk. p. 482.)
Arsimes, ind. prêt. Brûlâmes. (Livres des Rois,
MS. des Cordel. fol. 39, R" col. 2.)
.'l)'s/,s, ind. prêt. Tu brûlas. (Dit de Cbarité.)
Arsisent, subj.imp. Brûlassent. (Ch. d'Outremer.)
Arsist, subj. imp. Brûlât. (Fabl. ms. du R.)
Arsse, parlicipe. Brûlée (G. Guiart, ms. fol. 92.)
Arst, ind. prêt. Brûla. (Livres des Rois.)
Arstrcnt, ind. prêt. Brûlèrent. (Livres des Rois.)
.4)-/, ind. prés. Brûle. (Modus et Racio, fol. 200.)
Art, ind. prêt. Brûla. (Livres des Rois.)
Art, subj. prés. Qu'il ])rùle. (Siège de Troye.)
Astrcnt, ind. prêt. Brûlèrent. (Livres de Rois.)
Il existe entre les terminaisons de l'infinitif des
verbes françois et la formation des autres modes et
temps, une règle générale d'analogie, d'après
laquelle on juge que relativement à la terminaison
fln/cr, on a formé l'indicatif prétéi'itard^'reH^; rela-
tivement à la terminaison rt)'rfn% l'indicatif présent,
ar, ars, ard ou art; relativement aux terminaisons
ardre et ardoir, l'indicatif prétérit, ardi, ardis,
ardit, ardi&mes, ardistes, ardirent et le subjonctif
imparfait ardist, ardissent. On recoiinoit au pre-
mier coup-d'œil les modes et temps dont la forma-
tion est également analogue aux différentes termi-
naisons de l'infinitif, ardre, ardoir o\i arder. Quant
à ceux qui paroissent exactement imitatifs de modes
et temps latins, tels que l'indicatif prétérit arst ou
art, en latin arsit; arsimes, en latin arsiinus;
arstrent, par contraction arsent, en latin arserunt,
on pourroit les regarder comme une preuve de
l'existence de rinfinîtif arsir, et dire que les modes
et temps de cette espèce, comme le subjonctif
imparfait arsist et arsîsent, le participe ars ou
arsis, appartenoient à la conjugaison de l'ancien
verbe arsir. (Voy. Arser.)
ARDER. Fabl. MS. du R. n" 7615, fol. 18i, R» col. 2.
Ardoir. S' Bern. Serra, fr. MSS. p. 76 et 372.
Ardre. Rom. de la Rose, vers 6851.
Ardeur, subst. fém. (Voy. Ardeure.) Ardeur du
feu. Quoique la signification propre, comparative
et figurée d'ardeur, ait toujours été la même,
depuis que ce mot existe dans la Langue, il semble
qu'en parlant d'un buisson ardent, on ne diroit
plus dans le sens propre :
Il sembloit qu'il arsist; n'niv/oc ne le raehaigne.
Je vueil, dist Moyses, veoir la vision,
Comment c'est qu'il me samble qu'il art sans arsion.
Dils et iMoralités, MS. de Gaignal, fol. 298, col. 1.
Au figuré, en parlant du feu de la colère :
Karles l'entent, s'en ot ire et ardor.
Anseis, MS. fol. 68, V- col. 2.
VARIANTES :
ARDEUR. Orth. subsist.
Ardor. Dits et Moralités, MS. de Gaign-it, fol. 298.
Ardeure , subst. fém. (Voy. Ardeur.) Effet de
l'ardeur du feu. Ardeur des passions.
La signification de ce mol ardure éloit la même
que celle de brûlure, effet de l'ardeur du feu, lors-
qu'on parlant de la pierre magnétique pulvérisée,
on a dit :
La puldre est bone sur ardure,
Et sur toute eschaldeure.
Marbodus.de Gemrais. art. XIX, col. 1656.
Au figuré, et par extension de l'idée particulière
du mal occasionné par l'ardeur du feu, à l'idée
générale d'un mal physique ou moral occasionné
par le tourment de la faim, de la crainte, de
l'amour, etc.
.... Se li sièges auques dure,
Test auroient de fain ardure.
Atliis, MS. fol. 89, R- col. 1.
Oiez par quel bonne aventure
Dex les garda de ceste ardure.
Ibid. fol. 81, R- col. 1.
Quant Amours m'a ce commandé
.Te luy ay adono demandé
Comment vit homme et comment dure
En telle paine, en telle ardure '?
Rom. de la Rose, vers 2610-2617.
En comparant à l'activité, à l'ardeur du feu. celle
des passions, on disoit figurément et dans le sens
de notre mot ardeur, qu'un cheval plein de feu,
étoit de grant ardure; qu'un homme ardent au
combat s'y mettoit par ardure; qu'une femme
brûlant d'amour séchoit û'ardure, etc. {Voy. Fabl.
MS. du R. n- 7218, fol. 193. R° col. 1. — G. Guiart, ms.
fol. 350, R" etc.)
Si com Echo qui sert de recorder
Se qu'autre dit : et par sa sorcuidance
Ne la daigna Narcissus regarder :
Aiiis sécha toute de ardeure,
Fors de la voix qui encores li dure ;
Aussi perdrai tout fors merci crier,
Et sécherai de dueil et de pesance.
Fauchcl, Lang. et Poês. Fr. p. U3.
VARIANTES :
ARDEURE. Fauchet, Lang. et Poës. Fr. p. 143.
AiUDURE. Chans. Fr. MS. de B., part. II, fol. 4.
Ardure. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 3.
Ardi, subst mnsc. Liard. On s'est trompé en
croyant que // ardis ou li hardis étoient inconnus
avant le règne de Louis XI. La fausseté de cette opi-
nion est prouvée par deux titres latins, l'un de 1409
et l'autre de 1410, cités par Du Gange, (Gloss. lat. au
mot Ardicus ;) et par deux titres en françois, l'un de
1417 et l'autre de 1451, cités par son Continuateur.
« Le suppliant fist bailler au tavernier sept hardiz-,
« etc » (D.Carpentier, Sup. Gloss. lat. deDu Gange,
T. I, col. 285; lit. de 1417.) « Sera levé pour nous
« en la ville... le droit de l'asize, qui y est acous-
« tumé de lever, c'est assavoir de soixante hardiz,
« ung. " (Id. ibid. tit. de 1451.)
Le cours de cette monnoie, antérieur au règne
de Louis XI, auroit commencé sous celui de Philippe-
la-Uardi, s'il étoit vrai qu'on l'eût ainsi nommé,
parce que ce Prince fut le premier qui en ordonna
AR
— 135 —
AR
la fabrication. Probablement la ressemblance du
nom de celte monnoie avec le surnom de Phi-
lippe m, est la seule raison qu'on ait eu de croire
qu'il avoit fait frapper les premiers hardis ou ardis;
puisqu'afiu de pouvoir en attribuer la fabrication à
Richard I, roi d'Angleterre, comme à Philippe, roi
de France, on a supposé que tous deux avoient eu
le surnom de Hardi. On sait que Richard fut sur-
nommé C(i'ur-de-Lion, surnom qui atteste la har-
diesse de son courage, sans justifier la prétendue
origine de la dénomination des ardis ou hardis.
Lorsqu'on a la preuve que dans le moyen âge
l'expression latine argentum arsum, par une com-
paraison relative à la couleur noire d'une chose
arse, signifioit monnoie de billon, monnoie de cui-
vre, autrement monnoie noire, eu latiu argentum
niyrum ; il paroit bien plus raisonnable de penser
que les ardis étant une monnoie noire, une mon-
noie de billon, une monnoie de cuivre, on l'aura
désignée par un mot qui, à la terminaison près,
semble être le même que ard ou ars, en latin arsiis (1 ).
En elfet, les pièces de monnoie nommées en
Guienne et en d'autres Provinces méridionales, H
ardis, étoieut les mêmes que dans le Daupbiné et
les Provinces en-deyà de la Loire, on nommoit
liurds, en réunissant l'article pluriel H au participe
ards employé comme substantif. (Voy. Lurd.)
Les Ordonnances de l'ûO et l'i73, qu'on trouve
manuscrites en léte de l'ancienne Coutume de Nor-
mandie, envers, (fol. 17, V° et 18) et une autre
Ordonnance du 16 février 1485, citée par Du Gange
(Gloss. lat. T. IV, col. 928), concernant le cours des
Monnoies, fixent à trois deniers pièce, la valeur des
liards et hardis. « Cette monnoie qui valoit trois
« deniers, et qui par conséquent partageoit le sol
« en quatre, éloit appelée hardi en Guyenne, et
« liarden Daufmé et dans les autres provinces qui
" sont en deçà de la Loire. » (Le Blanc, Tiaité des
Monnoies, p. 250.) Peut-être rapportoit-on au sur-
nom de Pbilippe-le-//fl)'rf?, l'origine de la dénomi-
nation de cette monnoie en écrivant hardis, pour
ardis. (Voy. Du Gange, Gloss. lat. T. I, col. 673, au
mol Ardicus. — Id. ibid. col. 686, au moi Argen-
liini.)
VABIAKTES :
AUDI. Du Caiige, Gloss. lat. T. I, col. 673.
Ardic. Id. ibid.
Ardid. Cotgrave, Dict.
Ardit. Coût. gén. T. II, p. 723.
H.\RDi. Du Gange, Gloss. lat. T. I, col. 073.
H.\RDY. Des Accords, Bigarrures, fol. 60 R".
Ardilier, subst. masc. Buisson de ronces et
d'épines. Le substantif ardilier (2), formé du verbe
ahcrdre (|ue par contraction l'on écrivoil ardre,
comme dans les Poës. de Geoffroi de Paris, à la
suite du Rom. de Fauvel, (ms. du R. n" 6812, fol. 50,
R° col. 3,) désigne en îNormandie un buisson de
ronces et d'épines; peut-être parce qu'en voulant
passer à travers, on accroche, on ah.ert. (Voy. Da
Gange, Gloss. lat. T. I, col. 673, au mol Ardillaria.
Ce mot latin ardillaria, qu'on a cru de même ori-
gine et même acception que le franyois ardilier,
étant formé de ardilha, en francois ardille pour
argille, signifioit argillière. (Voy. D. Carpentier,
Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, T. I, col. 285, au
mot Ardilha.)
Ardille, snhst (ém. Argile. En latin argilla, que
dans le moyen âge on écrfvoit ardilha, en substi-
tuant d à g, comme dans le francois ardille (3) et
ardrille. « Les Cerfs.... se brunissent leurs testes,
« les uns aux Charbonnières, les autres en Vardille,
« en terre rouge. » (Fouilloux, Vén. fol. 18.) C'est
par le changement de la lettre dentale en la sif-
flante s, changement commun à toutes les Langues,
qu'on a prononcé et écrit arsille pour ardille.
« Rompirent la paray qui estoit d'arsille, d'entre
« deux coulombes, pour osier, etc (D. Carpentier,
Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, T. L col. 285, au
mol Ardilha. — Voy. Arcuil.)
VARIANTES :
ARDILLE. Fouilloux, Vén. fol. 18, V°.
Ardille. D. Carp. S. Gl. 1. de D. C. au mot Ardilha.
Arsille. Id. ibid. tit. de t397.
Ardilier, t'erftf?. Enduire d'argile. (Voy. Cotgrave,
Dict.)
Ardillier, adj. Argilleux. On a dit en ce sens,
terre ardilliere. (Voy. Golgrave, Dict.)
VARIANTES '.
ARDILLER. Cotgrave, Dict. au mot Ardilier.
Ardiller. Id. Ibid. — Médecines des Clievaux, p. 4.
Ai\DRiLLOux. D. Carp. S. Gl. 1. de D. C. à .Ardilha.
Ardillon, subst. mase. (Voy. Ardiuer.) Ce mot
qui subsiste est ancien dans notre Langue et peut-
être aussi ancien que le verbe aherdre, aerdre ou
ardre dont Gaseneuve l'a cru formé. Cette origine,
à laquelle on en oppose plusieurs autres indi-
quées dans le Dict. Elym. de Ménage, semblera
peut-être d'autant plus naturelle qu'aherdre signifie
l'usage de Vardillon d'une boucle, de la boucle
d'une ceinlure de Moine.
Si a lo Ardeillon trové;
Moult fieremant l'a atachié :
Puis est arrière repairié....
A ses compaignons a conté
Cernant lo moine avoit pendu
A la hart o li bacons (4) fu.
Fabl. MS. de Berne, n- 354, fol. 142, R- col. 1.
D'ailleurs, lorsqu'on sait qu'en certaines pro-
vinces, le Peuple prononce f/afd;7/o» \>ouv ardillon,
il ne paroit pas moins naturel de croire qu'ardillon
est le diminutif de dard, comme dardillon un peu
altéré dans l'orthographe usitée, par la suppression
de la première lettre.
VARIANTES :
ARDILLON. Orlh. subsist.
Ardeillon. Fabl. MS. de Bou. n» 354, fol. 142.
(1) On peut considérer en effet arditus comme une forme intensive de arsiis. Comme ce mot était surfont employé au
midi de la Loire (limousin ordi) et en Espagne (ardite), on a aussi proposé la racine basque ardila. (n. e.) — (2) Ce mot a
la même ori;jine que ardillon, c'est-à-dire l'ancien français arde, avec le suffixe urius, crius. (N. e.) — (3) C'est encore ainsi
que se prononce le mot uigile en Berry ; n'indique-t-eUe pas qu'à l'origine le y se prononçait dj, puis di ? (n. e.) - (4) lard.
AR
— 136 —
AR
Ardoise, suhst. fém. Pierre bleue et fossile.
On liltjue r;elte pierre, inconnue aux Anciens, a été
nommôe ardoise, en latin ardesia, ou lapis arde-
sius, later ardesius, parce que les premières ardoi-
ses ont été tirées d'Ardes en Irlande. « C'est du
a nom de ce pays, en latin Ardesia, que cette
« pierre transportée dans toute l'Europe fut
« appelée lapis ardesius, later ardesius, ardesia ;
« d'oîi nous avons fait notre mot ardoise. » (Mé-
nage, Dict. Elym.) Au reste, il y a sur l'origine de
cette dénomination, différentes opinions qu'on peut
voir ibid. au mot Ardoise (1).
Ardoiser, verbe. Couvrir d'ardoise. (Voy. Cot-
grave, Dict.) De là, l'expression clocher ardoisé.
(Epith.de M. delà Porte.)
Ardoiseux, adj. Qui est en ardoise. (Voy. Cot-
grave, Dict.)
Ardoizin, adj. Qui est d'ardoise. On a dit en ce
sens, pierre ardoizine. (Voy. Rabelais, T. Il, p. 24i.)
Ardu, adj. Haut, sublime, difficile. C'est l'ad-
jectif latin arduus, francisé par nos Auteurs du
.XVI' siècle, qui désignoient figurémenl et par compa-
raison la hauteur et la sublimité des choses, et par
conséquent la difficulté d'y atteindre, la difficulté
de parvenir à les comprendre et à les connoitre, en
disant qu'elles étoient ardues.
Nobles espritz, arduz, scientificques,
Que songez-vous, où avez -vous esté ?
F.iifeu, p. 1.
Tes poincts sont grans, tes mètres mesurez,
Tes dits tous d'or, tes termes azurez,
Voire si hauts et ardus, à tout prendre.
Que mon esprit travaille à les comprendre.
Clém. Marot, p. 157 et 158.
Les sciences, lesconnoissances auxquelles il étoit
difficile d'atteindre, étoient desconnoissauces, des
sciences ardues. « C'est une si'ience divine et bien
« ardue, que de scavoir jouir loyalement de son
« eslre. «(Sagesse de Charron, p. 314.) « Quelle
« chose peut eslre plus ardue et grave, qu'en si
« grande dissimililude d'amans et d'amantes pou-
« voir discerner tiuelle est la figure espèce de
« la vraye et parfaite amour. » (L'Amant ressusc.
p. 79.) Ce mot, dont M. Dubois alfecloit l'usage, a
vieilli dès le xtu' siècle. (Voy. Longueruana, T. I,
p. 95.)
Arduité, subst. fém. Difficulté. On a dit figuré-
menl : » L'Empereur ayant considéré Varduité de
« son entreprise, etc. » (Du Bellay, Mém. liv. X,
fol. 334. — Voyez Ardu.)
Are, adj. Aride, sec, desséché. Qui rend aride,
qui dessèche.
Ce mot are ou aire, formé par contraction du
latin aridus, signifioil aride, sec, desséché. « Le
« pays de Champaigue est si ayre cl infertile,
« qu'à peine les trois quarts des terres peuvent
« porter de l'herbe. » (Ane. Proc. vcrb. des Coût,
de Troyes, au Nouv. Coût. gén. T. III, p. 293.)
« Leurs viandes sont ares et aigres, et de peu de
« substance. » 'Du Fouilloux, Vén. fol. 18, V°.)
Dans un sens actif et analogue à celui du verbe
ardre, dessécher, rendre aride, on a dit: « Le vent
« de galerne est arre, froid, desséchant grande-
" ment. » (Du Fouilloux, Vén. fol. 4i. — Voy.
Arir.)
VARI.\^"TES :
ARE. Gloss. lat. fr. du P. Labbe, à Arefieri.
Aire. Ane. Proc. verb. des Coût, de Troyes.
Ares. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 167.
Arez. Gloss. lat fr. du P. Labbe, au mot Aridus.
Arre. Chron. S' Denys, T. I, fol. 267, R».
Ayre. Ane. Proc. verb. des Coût, de Troyes.
Are, pari. Labouré. On observera qu'au moyen
de l'ellipse du substantif terre, ce participe au fé-
minin signifioil terre arée, terre labourée. Ancien-
nement, en opposant et réunissant les terres arées
ou les arées, aux bruières, on exprimoit l'idée de
lieu en général, comme aujourd'hui en disant « par
« monts et par vaux. » (Voy. Arée.)
Tant a là Sarjanz qui se plaingnent,
Espoventablement acertes,
Que de touz lez en sont couvertes
Bruières et terres arées.
G. Guiarl, MS. fol. 47, R'.
Areaii (2), subst. masc. Instrument de labourage.
Espèce de charrue sans roues, comme l' araire.
(Voy. Araire.) « Prinl... ung atjreau fourni de
« coustre, etc. » (D. Caipentier,Suppl. Gloss. tat.de
Du Cange, T. I, col. '270 ; lit. de 1457.) « Laissoient
» leur ureau el autres habillemens de labourage. »
(Id. ibid. tit. de 1498. — Voy. Aroy.)
. . . Pour soy n'est rangé le toreau
Desous le joug, pour y traîner l'aireau.
Perrin, Poés. fol. 40, V'.
VARIANTES :
AREAU. D. Carp., S. Gl. lat. de Du Cange, T. I, col. 270.
AiREAU. Perrin, Poës. fol. 39, V".
AYRE.A.U. D. Carpentier, uhi supra ; tit. de 1457.
Arée, subst. fém. Terre labourée, terre en la-
bour, terre de labour. Sillon. Labour, labourage.
Il est visible que ce mol arée est le féminin du
participe are, el qu'on faisoit ellipse du substantif
leire, lorsqu'il désignoit substantivement terre la-
bourée, terre en labour, terre de labour, comme
dans l'expression par arée et par brieroi : c'est-à-
dire, partout, en lous lieux. (Voy. Are.)
Tost est la nouvele espandue.
Par arce et par brieroi,
C'un François a ocis le Roi.
G. Guiart, MS. fol. 99, Y'.
Vilains guerpissent les arées.
U. ibid. fol. iU, V°.
Gardez que ne mi faciez mal ;
Car mon père est en Varùe,
Où il esploit'? à son jornal.
Ane. Poël. fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1571.
(1) N'y aurait-il pas là le radical celtique arddû, noir, qu'on retrouve dans ardenne (forêt sombre)? De nos jours encore,
en Bretagne, les Montagnes Noires sont ainsi nommées des carrières d'ardoise qui assombrissent leurs flancs. (N. e.) —
(.2) Vient d'une forme areUus. (N. E.)
AR
— d37 -
AR
Dous buefs avomes en Varée.
Rom. de Floircmonl, MS. de R. n- 6973, fol. U, V col. 2.
Quelquefois une arée étoit le sillon tracé par le
soc, le contre de la charrue dans une terre en la-
bour, ou terre de labour. (Voy. Bourgoing, de Orio-
Voc. Vulg. fol. G7. — D. Carpentier, Suppl. Gloss.'
lat. de Du Gange. T. I, col. 270 ; lit. de 1400.)
Emprès Audigier cort, geule baée ;
Et la Vieille l'ateint en une arée
Par la teste le prant qu'il ot enfié'é';
Tout envers l'abati en une ai-ée.
Rom. d'Audijier, MS. de S' Gerji. fol. 68, R- col. 3.
Il semble que ce mot arée n'ait siiinifié labour
labourage, que lorsqu'on nommoit ^bœuf cl'arée
un bœuf propre au labour, au labourage des terres'
(Voy. Du Gange, Gloss. lat. T. I, col. 748 cl 1246 )
« Un chacun laboureur peut clorre et fermer pour
« chacun bœuf (Varée, pour faire pastis, un journau
« de teire. .. (Coût, de Xainlonge, au Goût »én
T. II, p. 652. — Voy. Arlre.) '
VARIANTES :
AREE. Rom. de Rou, MS. p. 37.
AiRÉE. Bourgoing, de Orig. Voc. Vulg. fol. 67, R».
Arène, subst. musc, et fétu. Sable. Rivage
Mortier. °
Quoique la première acception d'urèue, en latin
arena, soit encore usitée, spécialement dans la
Poésie, on ne diroit plus chaudes areines, en nar-
lant des sables brûlans de l'Afrique.
Soleil, c'est chose certaine
Que tu pers icy ta peine :
Non, tu pers icy ton temps.
Et tant de raiz esclatants....
Va, par ces chaudes areines,
Courtizer tes Africaines.
G. Durant, à la s. de Bonnefons, p. 1G7.
On sait qu'en prose comme en poésie, ce mot
arène signitie cirque, amphilhécàtre, par la raison
que les amphithéâtres, les cirques éloient sablés ou
couverts de sable. La raison pour laquelle il a si-
gnifié rivage, n'est pas moins naturelle « Quel
« pays ! quelle coustume ! Voz gens empêchent que
« nous ne prenions port ; que nous ne nous ra-
« Iraiclnssions sur voslre areyne. » (L'Amant res-
<> susc. p. 196.)
11 suffit que dans la préparation du mortier il v
ait ordinairement du sable, pour qu'ara i ne au fé-
minin, au masculin flm;i(l), ait signifié ciment mor-
tier ; comme en ces expressions, tables d'arow?/ et
darein, mur d'rtra/nc. (Voy. Blanchandin, ms. de
S Germ. fol. 1/8.) « Si Deus fesoit son premier iu-
« gement par eawe sur l'umaigne lignage les
« tables d'arguil et ù'arein si depesceroient^ celés
« de piere remeyndroieiU. » (Histoire de la S" Groix
ws. p. 11.) ■ '
VARIANTES :
ARÈNE. Crétin, Poës. p. 1,56.
Ar.vine. Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 12 Ro col 2
AR.i^iNNE Rom. de Tiébaut de Mailly, MS dé N D fol'-l'io
Areine. g Durant, à la suite de Bonnefons, p "l66
Areyne. L Amant ressusc. p. 196. , t- w.
Aroine Rom. de Floiremont, MS. du R., fol 8 Ro col 1
.\REiN. Hist. de la S'e Croix, MS. p. U. ' "' ' ^ ^°'' ^•
Aréneiis, adj. Sablonneux, plein de sable En
latin arenosus. (Voy. Arène.) Il est vieilli et n'a
guère d usage qu'en poésie. (Dict. de l'Acad. Fr —
»oy. Arénileux.)
VARIANTES :
ARÉNEUS. Monet, Dict.
Arène U.K. Cotgrave, Oudin et Nicot, Dict.
Arénière, subst. fém. Sablonnière. (Vov Got-
grave, Oudin, Mcot et Monet, Dict.)
Arens, subst. masc. plur. Espèce de manœuvre
Un soupçonne que ce mot arens désigne la ma-
nœuvre, les cordages, qu'en termes de marine on
nomme niartinets, marticles, et quelquefois arai-
gnées : dénomination peut-être altérée dans «m;s.
Ondes reversent et escument.
Rompent hutage (2) et obens'(3>,'
tl li caable et li arens.
Siège De Troye ; MS. du R. n" 0987, fol. lU.
Arénuleux, adj. Sablonneux, plein de menu
sable. {S oy. Cotgrave, Dict.)
Arer, verbe. Labourer. Parcourir, faire route en
mer. Discourir, parler.
Il semble qu'en préférant à l'usage de l'ancien
yerhe arer, en latin arare, proprement cultiver la
terre celui du verbe labourer, en latin laborare,
on ait substitue ù l'idée agréable d'une culture qui
leconde la terre, l'idée désagréable du labeur qu'elle
exige des Cultivateurs. Cette préférence paroissoit
peu raisonnable à Henri Eslienne, puisqu'après
avoir observe « qu'en Savoie un laboureur s'en
« allant labourer la terre, dit qu'il s'en va arar il
« demande si nous ne pouvons pas au besoin, en
« changeant a en e, dire arer. Quant à moi, ajoute-
« t-il, je n en ferois point de conscience. » (Précel-
lenceduLang Fr. p. 145. - Voy. Ménage, Dict.
Ktym.) Le verbe arer existoit de toute ancienneté
dans notre Langue; il ne s'agissoit que de le sau-
ver de la proscription. .. Helyes.... Iruvad Heivseu,
« le tizsaphath,rtrfl«/; e al Ires od lui. a bien jesques
» duze jus de boes. » (Livres des Rois, ms. des Cor-
del, loi. 114.) « Ung désert où il n'avoit onques esté
« are, ne semé, etc. » (Gh. S' D., T. I, fol. 261, V°.)
Li preudom, quant voit le jor né,
Rêva arer en son jorné.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 309, Y- col. 1.
Li vilains sa vache
Et son buef donte de sa mace ;
Et tant les en bat, kastie.
Que la tière en ère et deslie.
Ph. Mouskes, MS. p. 260.
En comparant au labourage l'action par laquelle
1 espèce humaine se reproduit et se perpétue, on a
dit : i f ■>
Arez, pour Dieu, Barons, arez
Et voz lignaiges réparez.
i)ilS4'Î5nov\mfe^^^^^^ d'hiver. (E. Rambert, Revue , es
18
AR
— 138 —
AR
Se ne pensez forment d'arer.
N'est riens qui les peust réparer.
Rom. de la R(isc, vers 20G10-'20G13.
On désignoit la nécessité de passer d'un propos
à un autre, la nécessité de discourir d'autre chose,
en disant :
Autre champ me convient arer.
Rom. de la Rose, icrs 22137.
Ce verbe arer étoit pris substantivement, lorsque
par allusion ù l'habitude que les bœufs ont de la-
bourer, on désignoit une science acquise par l'ha-
bitude de faire une chose, en disant :
Plus en sçaurez que beuf â'w'er.
Rom. de la Rose, vers 13851.
Plus sai d'Amors ke bues tl'areir.
Chans. fr. MS. de Berne, n- 389, pari. 1, fol. 120. V°.
Il est possible que relativement à Fidée de par-
courir un terrain qu'on laboure, l'expression arer
une route ait signifié faire une route, la parcourir
en naviguant, sans comparaison même du sillage
du navire, au.\ sillons tracés par la charrue. « Ces-
« tuy jour.... ne leur apparut terre, ne aultre chose
« nouvelle: car autrefois avoient are ceste routte. »
(Rabelais, T. IV, p. 6.)
En discourant d'une personne ou d'une chose, on
parcourt les objets qui leur sont relatifs. De là
peut-être l'acception figurée d'arer, discourir,
parler d'une personne avec quelque étendue.
Par cy-dessus vous ay are
Moult d'Abraham fil de Tharé.
Hist. des trois Maries, en vers, MS. p. i6.
On a vu plus haut, qu'arer antre champ, c'étoit
discourir d'autre chose; expression dont le sens
présente certaine analogie avec l'acception d'arer (I ),
discourir.
VARIANTES :
ARER. Livres des Rois, MS. des Cordel. fol. 114, R» col. 2.
Areir. Chans. fr. MS. de Berne, part. 1, fol. 120, V".
Arreu. D. Carpealier, S. Gl. 1. de Du Gange, T. I, col. 270.
Errer. Ph. Mouskes, MS. p. 260.
Harer. Hist. de B. du Guesclin, par Ménard, p. 9.
Ares, subst. On a cherché dans le grec «pa, l'ori-
gine de ce mot are ou ares, usité en Gascogne et
dans quelques autres provinces. (Voy. Dict. de
Trévoux.) Mais il est probable qu'étant de même
signification que le mot ore ou ores, il est de même
origine. On est si familiarisé avec la voyelle a, subs-
tituée à la voyelle 0 dans la prononciation et l'ortho-
graphe, (ju'en are comme en ore, on croit recon-
noitie le substantif Itoi^e, en latin hora, pris abso-
lument et employé comme adverbe pour signifier
à-l'heure-même. (Voy. Hore.) « La Bastide criast au
« Suppliant: ribault, traître; ares, par le ventre
« de Dieu, tu mourras. « (D. Carpentier, Suppl.
Gloss. lat. de Du Gange, T. I, col. 286 ; fit. de 1482.)
Il est évident qu'en ce passage la signification du
mot ares est la même que celle du composé ares-
metys qu'on' trouve dans Rabelais, et que les Gas-
cons semblent avoir formé du latin horâ rnetipsâ.
" Voussoubvienne de boire à my... et je vous plei-
» geray tout aresmetijs. r, (Rabelais, T. I, Prolog,
p. 50. — Voy. Aresmetys.)
VARIANTES :
ARES. D. Carpentier, S. Gl. 1. de Du Cange, T. I. col. 286.
Are. Id. Ibid. - Dict. de Trévoux.
Ahex. Cotgrave, Dict,
Aresmetys, adv. A-l'heure-même. En latin
horâ rnetipsâ ; d'oîi le mot composé gascon ares-
metys, aresmedis, ou aremeti. (Ménage, Dict. Etym.
— Voy. Ares.)
VARIANTES :
ARESMETYS. Rabelais, T. I, Prolog, p. 50.
Aremeti, Ares.medis. Cellhellenisme de L. Tripault. —
Mén. Dict. Etym.
Aresner, verbe- Attacher par les rênes de la
bride. Saisir par les rênes de la bride. Tenir en
bride. (Voy. Resne.)
On disoit au premier sens :
Si descent et si se désarme :
Son cheval uresne à un charme.
Rom. de Pcrccval, MS. de Bjrne, n- 35i, fol. 260, R° eol.2.
lUoec avoit un olivier ;
Il aresna son bon destrier.
Sicge de Tliébes, MS. du R. n" 6987. fol. 38, R° col. 3.
Dans le second sens :
N'il ne laist, por clicon d), le ceval amener;
Tolome quidast prendre, sel'peust aresner.
Roro. d'Alexandre, MS. du R. n- 6987, fol. 178, V col. 3,
Au figuré :
Prince qui veut en triomphe régner,
Doit le vouloir des esmeuz arraiuer ;
El n'exploicter tout ce que chagcun cuide,
Garder que nul ne se puisse effrener.
J. d'Auton, Annal, de Louis XII, MSS. 1603-1505, fol IIS, V.
VARIANTES :
ARESNER. Rom. de Rou, MS. p. 148.
Aregn'er. Anseis, MS. fol. 61, V» coi. 2.
Aresoner. Lanc. du Lee, T. I, fol. 148.
Arrainer. J. d'Auton, annal, de Louis XII, fol. 115.
Areste, subst. fém. Barbe d'épis. Petite partie
ligneuse de lin. Espèce d'aiguille ou d'épingle.
.\rète; incommodité; retard; obstacle; difficulté;
embarras.
Le mot areste, en latin arista, qu'au premier
sens Monet définit, « longue et menue pointe,
« comme une aiguille, à la cyme de l'épi, » est
ancien dans notre langue, en ce même sens :
De dolor est doloreus pains
Il est fais d'orge qui est plains
De paille et poignant areste.
Miserere du Reclus de .Volicns, MS. de Galjnat, fol. 211, R° col. 1.
On sait qu'après avoir roui, séché et broyé le lin,
on le passe par le séran qui en sépare les parties
ligneuses. En comparant ces parties ligneuses du
lin broyé et passé par le séran, aux barbes, aux
pointes des épis, on les a nommés arestes. « Du
« premier filet de lin qu'elle traira de sa quenoille,
« il lui entrera une areste au doy, en telle manière
« qu'elle s'endormira à coup, et ne s'esveillera jus-
Ci) Ce mot s'emploie encore dans la marine, lorsque l'ancre d'un vaisseau, le fonds étant mauvais, n'y tient point et
are (laboure) le fond. (N. E.) — (2) A le sens de clicart, sorte de bâton (voir Du Gange à C/icha). Traduire: « Le cheval,
malgré le bâton, ne se laisse amener. » Il s'agit ici de Bucéphale. (n e.)
AR
— 139 -
AR
V ^"wT ^ ,'''*"* ^"'^^''^ sera succée hors. » (Percef
^01. III, fol. 115. - Voy. Ibid. Vol. IV, fol. m.)
Bissus (1) est ver;;, naiscens de terre
Quant il est du bois arrachiez,
Adonc fault qu'il soit plungiez
En l'eaue, et puis traiz par defors ;
Puis aux raiz (2) du Souleil très-fors
Doit estre mis et desechiez :
Et lui sec, doit estre mailliez
Amaillez, puis fraiez aux mains,
Puis ferroiez sur le moins,
Ef divisez pout les arrestes.
Eusl. Desch. Poès. »ISS. p. 545, col. 1.
Probablement, cet ancien Poëte avoit en vue le
même objet de comparaison, lorsqu'en parlant de
la coiffure des femmes de son siècle, il désisnoit
|ar le mot areste une espèce d'aiguille ou d'épingle
Grant merveille est que deUes regarder ■
Car cornes ont trop plus longues que bestes-
lant qu om ne puet leur doulz viaire cler
/O""- Trop y a d'espingles et â'ai-estes,
Ue cheveulx mors, de bourriaux et de crestes (3)
Eusl. Desch. Poés. MSS. p. 3-28, col. \.
La ressemblance de la partie dure et solide de
certains poissons, avec les barbes ou pointes d éoi
est sans doute la raison pour laquelle on l'a nom-
mée areste. (Voy. Ménage, Dict. Etym.) Il semble
que relativement à l'idée de l'incommodité des
a} êtes dans le poisson qu'on mange, l'on ait dit
Vie d'omne est d'areste plaine ..
Moult are.stouse vie maine
Cil qui maine la plus légiére.
Miserere du Recl. de Moliens, M.S. de Gaîgnat, fol. 211, R" col. 1.
Cette même incommodité des arêtes relavûe celui
qui mange, et fait obstacle à son plaisir. Il est donc
possible que d'après cette idée le mot arestV Ta
S'^'JIfrS'^ ''•"?' "" '^"' ^1"' P'^™'* se confondre
dïns ces lers !" ""''"' '" ''^■"^"' "'^"''^' '^°'"™'^
Chiers pères, veuillez moi aidier ■
Je doute l'e-xcommunier.
Cite suy ; cy n'a os ne nreste ■
b argent n'ay devant cette feste
De Pasque, etc.
Eusl. Desch. Poës. MSS. p. 435, col 1
J^f!^^iSSl^ ^'" '^-'^^"■^-^' lorsque ce
Il n'a cy areste ne boces ;
Ne chose qui ne soit visible.
Et trouvée en texte de bible.
Id. Ibid. p. 489, col. 1.
On terminera cet article en observant que par
une autre comparaison, relative à l'idée del animes
que forme une arête de poisson, l'on a pu nommer
areste, I angle, l'élévation qui règne le loio de
que ques lames d'épées ; aresles et vLves arestes les
angles d'une pierre ou d'une pièce de bois équarrie
(I) Byssus, lin. - (2) rayons. - (3) Ailleurs, Deschamps écrit
Atournez vous, mesdames, aultrement
Sans emprunter tant de harribouras
Et sans quérir cheveulx estrangement
()ue maintes fois rongent souris et rats
'Vostre affubler est comme un grand cabas •
de Trévoux.)'"^"' '''' ^^''^'- ^^'"''' ^'''^- " ^ict.
AufcT- VARIANTES :
AKhbTE. Eust. Desch. Poës. MSS n 435
AiRESTE. Cotgrave, Dict.
AnETE. Monet, Dict.
Arreste. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 545, col 1
m^ffS^AS''' ''''''''■ ''^^" ^•"««'»-
(E?irdeKe'SS.r ' '" ^'--'-^---
Au figure une vie arestotise étoil une vie nleine
d II commodités et d'embarras. (Miserere du Si
de Mohens, ms. de Gaignat, fol. 211. _ vôy. areTte!)
.„„„ variantes:
ARESTEUX. Cotgrave, Dict.
Arestous. Miserere du Recl. de M. MS. de G. fol. 211.
Areur, subst. masc. Laboureur. (Voy. Arer.)
.„_„„ variantes:
AREUR Gloss. lat. fr. du P. Labbe au mot 4,-atnr
Areor. Vie des Saints, MS. de la ClayeUe p g "
Argent subst. masc. Métal blanc. Monnoie
^n •^'''"""'' '''^'■- '''«'--e'^l 0" d'autre métï
On observera qu'en général, lorsqu'on parlé
à argent on entend de l'argent fin, de l'a,-ent sans
alliage. Pour fixer la loi del'argen't fi'i, on^^ diviS
en douze deniers, et chaque deHier en vingt^auï ?e
grains. Cette division de l'argent fin en douze de
mers, et de chaque denier en vingt-quatre o'raint
est commune à l'Argent-le-Roi ; mfis dlins l'ArgS
f^Z'Jv' "est qu'à onze deniers douze grains
4i^s1 f^ '^ '""'"ri"" ^'"g'-quatrième d'aîliaie
Aiiibi, . lorsquon dit que Yargent fin est à tix
» deniers de loij, cela signifie qu'il y a six partie?
" d.argent et six parties d'alliage; niais loiSon
" di que \ Argent-te-ltO!i est à six deniers rfe/o/
" Çfl:' signifie qu'il y a six parties et 6/24 de pa?:
« fies en alliage; en sorte qu'il ne reste que cina
« pnrtiesetl8/24de parties en argent » (o?d T. 1?!
\Ji cl . p . CXJ .1
La loi de l'argent mis en œuvre par les Orfèvres
HP ?'-','i'o- ^'- '"'™' .^'."^ ^e"« de l'Argent-leRoL
dp ; w"i'' ""d'"' ^ ''-'"^0" ^^ ce que nos Rois
de la troisième Race accoutumèrent enfin leurs
sujets a reconnoîtrc en eux seuls le droit de fixer la
01 de 1 argent; ou qu'attentifs au moyen de répare?
le défaut de mines d'or et d'argent en France Us
en favorisèrent l'importation dans le Royaume et
I encouragèrent en payant l'argent qui étoit à onze
deniers douze grains, comme s'il eût été à douze
deniers. (Voy. Ord. T. II, p. 254. - Ibid T m
p. 0Ô5, etc. - Dict. de Trévoux.) ,. Que "nuls
« Orfèvres... ne puissent... ouvrer argent que il ne
« soit aussi bon comme celi que l'on dit l'.l?w,f/-
« le-Rot. .. Ord. T. I, p. 522.) „ Nul Or evre îe
Bourriaux y a de coton ef de laine
Autres choses plus d'une quarantaine,
Frontiaux, filets, soye, espingles et nèuds •
De les trousser est à vous trop grand peine ■
Rendez 1 emprunt des estranges cheveulx I (n e )
AR
140 —
AR
» peut ouvrer crargent qui ne se revienne aussi bon
« comme A)'i/ent-le-Roi, sans les soudures, lequel
. est dit argent de gros. « (Ibid. T. III, p. 12 )
Il semble que la dénomination, argent de gros,
soit relative à une ancienne façon de désigner le
prix du marc, soit d'argent-le-Roi, soit d'argent fin,
par un nombre de gros, espace de monnoie. Peut-
être aussi que l'argent de gros étoitde l'argent ù la
loi de cette même monnoie? « L'en dourra du inarc
" d'argent fin en pièce, au pois du marc monsieur
« Saincl-Loys , cinquente-huit gros tournois. »
(Ord. T. II, p. 38.) « Se aucun vouloit ouvrer
« Argcnt-le-I\o\i, et acheloit argent lin, et fut l'acbat
« et la délivrance tout !i un marc, il le peut faire,
u mes que le prix de la délivrance et de l'achat
« soient considérez eslre d'une valeur ; si comme
« qui acheteroit un marc cV Argent-le-lloij cinquante
« gros, l'on n'en devroit donner que cinquante-six
>> gros, se l'en les delivroit à Argenl-le-Roij, c'est
<■ tout une valeur, car argent fin en emporte plus
« que Argent-le->Aoij ; et combien que il semble que
« il donne plus grant pris, c'est assavoir cinquante
« huit gros, si ne donne il pas plus de cinquante six
« gros argent, car il acheté argent et délivre argent ;
« et semble que le seurcrois de l'argent fin que il
" acheté, il doit rendre, puis que il délivre Argent-
« le-Hoy qui bien se pourroit monter à tel prez
« demi gros. » (Registre delà Chambre des Comptes
de Paris, cotté INoster, p. "lO'). — Voy. Du Cange,
Gloss. lat. T. I, col. 687.)
Probablement, Vargent en plate, dans l'Ordon-
nance de Philippe-le-Bel, en date du mois de juin
1313, étoit de même forme que Vargent en mace et
billon, ou tout simplement Vargent en billon, dans
l'Ordonnance de Philippe de Valois, datée du 29
septembre 1329. <> L'en donrra... du msivc d'argent
« fin en billon.... cinquante six soûls six deniers
« desdiz bons peliz tournois. •• (Ord. T. II, p. 38.)
« Que tout homme puissent apporter dehors de
« noslre Royaume, à noz Monnoyes, or, argent en
« mace et billon, franchement et sans en poier,
« etc. » (Ibid. p. 39.) .< Que nuls Orfèvres, ne Chan-
« geurs, ne autres ne rachalent, ne affinent...
« nules monnoies d'or ne d'argent, blanches ne
" noires, ne nul argent en plate, quel que il soit,
« seur paine, etc. » (Ibid. T. I, p. 521.) On croit que
cei argent en plate, étoit de l'argent en barre, en
lingot; par conséquent de même forme que l'argent
en masse ou en biUon. Les Lettres de Philippe-le-
Bel, datées du mois de septembre 1295, semblent
prouver incontestablement qu'en latin Billio étoit
synonyme d'argentum in massa. (Voy. Ord. T. I,
p. 32G; notes, col. 2. — Du Cange, Gloss. lat. T. 1,
au mot Billio, col. 1108. — Id. ibid. T. V, au mot
Plata, col. 5i9.) Il paroitroit raisonnable d'en con-
clure qu'on a nommé billon, la monnoie décriée,
parce que celte monnoie étoit souvent fondue en
masse, en barres, ou en lingots qu'on employoit à
la fabrication de la monnoie nouvelle.
On soupçonne que dans quelques Ordonnances,
le marc d'argent en argent, autrement nommé
marc d'argent blanc, étoit un marc d'argent en
espèces décriées ; mais non fondues en masse, en
barres ou en lingots, comme l'étoient celles du
marc d'argent en billon. « Les Mestresde nos Mon-
« noies prendront pour nous le marc d'argent en
« billon, Argent-le-Roy, au marc de Paris, pour
« cinquante et sept soulz tournois; et en argent,
« Argent-le-Roy, pour cinquante-neuf soulz tour-
« nois. » (Ord. T. I, p. 4r)0.) « On rendra cinquante-
« neuf sols tournois, du marc d'argent blanc; et
« cinquante-septsols tournois, d'argicnl en billon. »
(Ibid. p. 408.)
Peut-être trouvera-t-on que la différence entre
l'argent en liillon et cet argent blanc, nommé ar-
gent par excellence, n'étoit autre que celle qu'on
désignoit en disant argent noir, par opposition à
argent blanc. Quoique'l'argent blanc ait été dans
les anciennes Ordonnancesde Vargent à douze de-
niers de loi ou envii'on, par conséquent de l'argent
fin ou de VArgent-le-Hoi, il semble qu'en général
on ait nommé argent blanc, celui dont l'alliage,
quel qu'il fût. étoit légal; argent noir, celui dont
l'alliage excédoit la loi. » Les Orfèvres payeront
« par chascun marc d'argent blanc et vere,àeu\
« deniers pour marc. « (Ord. T. II, p. 320.) Vrai-
semblablement, vere est une faute pour nere ou
noir. « Voulons que vous faciez donner par
« toutes nos Monnoyes, (i tous Changeurs et Mar-
« chans, de chascun marc d'argent tant blanc
« comme noir, quarante sols tournois de creue,
« oultre le pris que nous y faisons donner à pre-
« sent : c'est assavoir pour chascun marc
« d'argent alluie à la loij de trois deniers, seize
« livres tournois ; et de tout autre marc d'argent
" allnié au dessonbz; quinze livres et huit solz
<- tournois. » (Ord. T. III, p. 18.)
Les malheurs du règne de Philippe de Valois,
renouvelèrent la nécessité d'affoiblir les monnoies.
Sous le règne encore plus malheureux du roi Jean,
on n'en fabriqua presque pointd'argentfin, et assez
rarement d' Argent-le-Roi . Il y avoit presque tou-
jours moitié et même plus que moitié d'alliage.
Mais on supposoit très-souvent, pour la fixation du
prix du marc d'argent, que l'argent, par exemple,
» allié à trois deniers de loi, éio'û Argent-le-Roi. »
C'est d'après cette supposition, que dans un mande-
ment de Charles, fils aine et Lieutenant du roi
Jean, daté du 22 octobre 1350, le marc d'argent
blanc, qui étoit argent fin ou Argent-lc-Uoi, puis-
qu'il étoit réellement « à douze deniers de loi ou
« environ, >- paroissoit ne valoir que sept sols
tournois plus que le marc d'argent allié à trois
deniers. « Qu'il soit donné à tous Changeurs et
« Marchans frequentans les Monnoyes, de chascun
« marc d'argent allai é à trois deniers de loy,
« dit et nommé Argent-le-Roi huit livres dix
« solz tournois; et de tout autre marc d'argent
« blanc à douze deniers de loi ou environ... huit
« livres dix-sept solz tournois. » (Ord. T. III, p. 86.)
La raison de cette fixation du prix de l'argent h
trois deniers de loi, presque la même en apparence
AR
que celle de l'argent à douze deniers, seroit incon-
cevable, si l'on ignoroit qu'en fixant h huit livres
dix-sept sols tournois le prix du marc d'aroent à
douze deniers de loi, et ù huit livres dix sois, celui
du marc d'argent à trois deniers, on ne faisoit
quindiquer la règle de l'évaluation proportion-
nelle de l'argent supposé Argent-le-Roi, quoiiiu'il
ne fut qu à trois deniers de loi. Un autre mande-
ment du 23 novembre 135G, par lequel on ordon-
noit la fabrication de gros deniers blancs h quatre
deniers de loi, paroit fixer le prix du marc de cet
argent ainsi monnoyé, à douze livres tournois.
(A oy. Ord. T. III, p. 87 et 88.) Mais ce seroit une
erreur d en conclure que le marc d'argent avec
lequel ou labriqu;i ces gros deniers blancs, n'étant
compo.se que d'un tiers cVArgent-le-Itoi et de deux
tiers d alliage, valoit réellement douze livres
« Leia signifie seulement, que le prix du marcd'ar-
" pnt monnoye, supposé que la monnoye eust été
" abriquee avec de V Argent t-le-lioij, vandroit douze
» ivres. Or comme ces gros deniers blancs ne con-
" ',';"'?!e"t fiu'un tiers d'argent, et les deux tiers
« d alliage, le marc d'argent monnrnié de ces esné-
" ces ne conteiioit que le tiers d'un marc iVArgent-
« le-Hoi ; et comme le cuivre et l'alliage sont
" comptez pour rien, il ne devoit valoir qm iiuatre
" livres qni est le tiers de douze livres, à quoy a
« esle fixe le prix du marc d'argent monnoyé, eii le
« supposant Argent-le-Roi. » (Ord. T lIl nréf
p. cxij.) ^ ' ' ' '^'•
On a étendu la signification d'argent, monnoie
a argent, a toute espèce de monnoie, lorsque pour
designer la possibilité de tout conclure, de tout
tinir avec de 1 argent, on a dit en proverbe :
Adès fine il qui a arijenl.
Eusl. Desch. PoC-s. MSS. p. loe, col 3.
Le proverbe contraire, « Quand argent faut
'■ fiuaison nulle, « est particulièrement Justine par
art. Lxii du tit. II do la coutume du Perche, où on
lit : <■ Si le A assal ayant esté saisi, compose avec son
« Seigneur du rachat et proffit de (ief qu'il peut
« devoir, et pouriceluy payer, luy estdonné terme
" dedans lequel il n'ait payé, peut ledit Seigneur
« jouyr dudit lief, ainsi qu'il faisoit auparavant et
'■ iceluy saisir de nouvel, si saisi n'a esté; qui est
« ce qu on dit communément, quand argent faut
« maison nulle. » (Coût. uéu. T. II, p 175 ) '
Il est SI rare d'être bienfaisant et de cacher sa
bienfaisance, que pour signifier qu'une chose ne
sest jamais faite, on a pu dire troverbialemeÏÏ
quelle s'est faite a du temps qu'on se cacha po r
« presler argent. . (Cotgrave.Dict 1 ^
Les malversations trop fréquentes dans l'admi-
nistration des iinances des Rois et autres Princes
ont fait dire proverbialement que » leur aro-ent es
•• sujet a la pince. » (,Vpol. d'Hérodote, p 13G
l.ien n est plus vrai, sans doute, que le proverbe :
Mieulz vault science qu'arrye/Ls.
Froissarl, Poès. JlSS. p. 339, col. 1.
Mais l'homme qui aura dédaigné l'argent pour la
141 —
AR
science, ne s'exposera point à l'affront de s'enten-
dre dire :
A luis, à l'uis, qui n'a ar/joif.
Fabl. MS. du R. n- 7218. fol. 317, R" col. i.
Il restera chez lui paisible, et se dira avec plusde
philosophie que d'humeur : « Quelque sravoir que
« soit en l'homme, s'il n'a de Vargent, on s'en
<■ moque. « (Cotgrave, Dict.)
Il pardonnera aux hommes qui ne le vaudront
pas, leur passion pour l'argent; passion dont on a
dCMgne 1 ardeur par cet ancien jeu de mots « Li
;; ^"IfJis.f'-t l\S-ent. » (Voy. Fabl. ms. du R.
n /blo fol. 01, R" col. 2. - Cotgrave, Dict )
Peut-être même que forcé par ses besoins d'être
p us homme que philosophe, il reconnoitra la
sagesse de ce proverbe :
Qui n'a de l'argent en bource
Qu'il ait du miel à la bouche.
Méni. de Montluc, T. II, p. 529.
L'argent est si essentiel à la satisfaction des
d^tni'.ïiP, li''? '"'"^ '^'^•'^'' ^""'1 ï"* est impossible
d oublier les anciens proverbes relatifs à une vérité
dont le sentiment se renouvelle sans cesse. Si on
v.;.i^'^ -'utrelois . Point d'argent, point de
« Nailel »; on lui dit aujourd'hui, .. Point d'argent
" P.O'nt de Suisse ». Il sentira toujours qu'il est
vrai de dire : « Argent faict tout; qui ade rargeSt
« a des pirouettes; toujours argent vient ù pSiiil'
« argent comptant porte médecine, etc. .. fVov'
?!^%7'- "r ^' ^- ^^^^,"§iS' a"- 1339. - oidiJ;
c, J^»^-,- Ji'Oissart, Vol. II. p. 1C3. - Nuits de
Straparole, J. II, p. 393. - Cotgrave, Dict
Au figure, .. prendre une chose pour aro-ent
" compte ou i^our argent comptant. » c'est croire
■ rSn '"'" î'? ^^'"^ '^'^^^e' 1'' •'ega'-der comme
, îpuL A"'''^ °'Î .comptant qui est chose très-
I celle. « Ou ne doit pas toujours prendre pour
" {".yf'fl "'"<««/ tout ce qui est escrit aux
" liistoires pour ce que souvent les causes qui ont
- produi des effecis sont ignorées ou falsifiées .
(Disc, po 11. et milit. de La^'oue, p. 107 - W
Contes dEutrapel, p. i5l.) ^'
Phn'iT'-^ comptant, chose très-réelle, est aussi
chose toujours prête au besoin. De là, on a désiené
igurement la facilité avec laquelle Jean Bodin
trouvoit son esprit au besoin, en disant « ou'il
«avoit son esprit en argent comptant. » (Vov De
Thoii, Ilist. hv. cxvu, p. 701.) ^
VARIANTES ;
ARGENT. Orlh. subsist. - Ménage, Dict. Etvm
-ViiiGEN.^. Chans. fr. MS. de Berne, part. Il fol OQ
AiRGE.NT. Ibid. part. I, fol. 42 R»
Argeant. Monet, Dict.
Argient. Ord. T. I, p. 468
Ergent. Fabl. MS. du R. n» 7615, fol 253
Argentelet «r^. Argentin. (Voy. Argentif.)
L adjectif argentin dont notre Langue paroit être
redevable aux Poètes du xvr siècle, n'est pas irohîs
ancien que leur diminutif argentelet, de même si-
gnilication qu argentin. En comparant h la blan-
cheur de l'argent, le cristal d'une onde claire et
Iransparcnle, ils disoient figurémenl : .- ruisseau
AR
— 142 —
AR
« argentelet, fontaine argentelette, clc. » (Poës.de
R. Belleau, T. I, part, i, fol. KW, R°. — Id. ibid. fol.
105, R°. — Epith. de M. de la Porte.)
Prez d'une fontainelctte,
Doiicelelle, argeiileletlc,
,Te tenois, un jour d'Esté,
Ma Charlotte à mon costé.
G. Durant, à la suite de Bonnefons, p. 119 et 120.
Argenterie, SM&sf./em. Garde-meuble. Recette.
Banque.
La vaisselle et autres tneiiblesd'argent dont l'opu-
lence fait un usage souvent moins utile que fas-
tueux ; la croix, le bénitier, les chandeliers et tous
les vases d'argent que la piété consacre au service
des Eglises ; le fonds en argent que chez le Roi on
fait tous les ans pour certaines dépenses extraordi-
naires, se nomment encore argenterie [\).l\:{\?. ce
mot n'est plus usité avec la signification de garde-
meuble, lieu où se gardoit V argenterie des Rois ou
des Reines, avec tout ce qui sert à l'appareil de leur
magnificence. « LeMaistre d'hoslelde la Royne
« fêit promptement venir un Tailleur, et print des
« draps en Vargenterie pour babiller le bon homme
« Berger. » (J. Le Maire, Illustr. des Gaules, liv. I,
page 142.)
Quelquefois Vargenterie d'une ville étoil la
recette, le lieu où se versoienl les deniers publics.
« Preist suz l'arj/ra^mc de Chartres, soixante livres
« parisis; et sur la trésorerie de Thoulouse,
« soixante livres parisis de rente. » (Ord. T. I,
p. 705, notes, col. 2.)
Il semble que dans la coutume de Ponthieu,
l'argenterie d'Abbeville étoit une des banques pu-
biques où l'on faisoit valoir l'argent des Particu-
liers à qui, sur le papier de l'Argentier ou directeur
de la banque, un Greffier expédioit les contrats
nécessaires à leur sûreté. « En 1495, Nicolas de
« Sainct Eloy, procureur, ctoit greffier de Vargen-
« terie d'Abbeville. » (Coût. gén. T. 1, p. 6G8. —
■Voy. Argentier.)
VARIANTES :
ARGENTERIE. Ord. T. I, p. 7(35, notes, col. 2.
Argeanterie. Monet, Dict.
Argenteur, stthst. masc. Argentier. Significa-
tion qui semble relative h celle d'Argenterie, Garde-
meuble. « Jacques Cuer... estoit Conseiller et
« Argentier du Roy, et avoit grant autorité devers
« luy, et fournissoit son Argenteur de toutes den-
« rées. » (Procès de J. Cuer, ms. p. 85. — Voyez
Argentier.)
Ai'genteure, subst. fém. Argent massif. Argent
en pâte. Argent appliqué en feuilles. Il est probable
que le premier sens étoit celui à'argenture, lors-
qu'on parlant de la figure que Nabuchodonosor vit
en songe, on a dit qu'elle avoit.
Les bras, le pis d'arrjentiire.
G Machaut.'Poës. MSS. fol. 25. V" col. 1.
L'argent resous en pâte par l'eau de départ (2), el
destiné à argenter, se nommoit aussi argenture,
(Monet, Dict.)
Enfin, l'argent appliqué en feuilles sur le cuivre,
le bois et autres choses, étoit et est encore de l'ar-
genture. (Id. ibid.)
VARIANTES :
ARGEXTEURE. Oudin, Dict.
Argeanture. Monet, Dict.
Argenture. G. Machaut, Poës. MSS. fol. 25, 'V» col. 1.
Argenteux, adj. Qui est d'argent. Qui est mé-
langé d'argent. Qui a de l'argent.
On ne trouve ce mot argenteux, expliqué au pre-
mier sens, que dans Cotgrave, Dict.
Dans le second sens, 'or argeanteus, étoit un or
mélangé d'argent. (Monet, Dict.)
On diroit encore dans le langage familier, pour
désigner une personne qui a de l'argent : " Sy
« mondit sieur de Gueldres eust esté argenteux,
" etc. » (Lett. de Louis XII, T. I, p. 98. — Voy.
Cotgrave, Oudin, Rob. Estienne, Nicot et Monet,
Dict.)
VARIANTES :
ARGENTEUX. Cotgrave, Oudin, R. Estienne, Dict.
Argeanteus. Monet, Dict.
Argentier, subst. masc. Orfèvre. Homme qui
a une administration, une recette, un maniement
d'argent. Banquier. Homme riche, homme en
argent.
Quelque général que soit aujourd'hui le luxe des
ouvrages en or, l'on observe que dans plusieurs
lieux, 'entre autres à Caen, les Orfèvres se nomment
encore Argentiers, relativement aux ouvrages qu'ils
font en argent.
En un anel d'or tout massis
Fu mon signet mis et assis ;
Et l'entailla moult volentiers
Uns très bons mestres argentiers.
Froissart, Pofs. MSS. p. 16G, col. 1.
On sait que dans les Maisons royales et autres
grandes Maisons, Y Argentier est encore aujour-
d'hui un Officier préposé à la distribution de cer-
tains fonds d'argent qu'il administre sous l'inspec-
tion d'un Officier supérieur. Cet Officier, nommé
quelquefois Argenteur, étoit en 138G celui qui, dans
dans la maison des Ducs de Bourgogne, « recevoit
« les sommes, pour payer les frais des ambassades,
« des voyages, des habillements, de la garde-robe
(1) Les Archives Nationales conservent sous la cote KK. 18 à 27, les comptes clc Vargenterie du règne de Charles 'VI (de
13R0 à 1410). M. Douët d'Arcq, y réunissant des documents plus anciens, en a donné des extraits pour la Société de
l'Histoire de France (1 vol. in-8", 1851). Ces comptes de l'argenterie embrassent une période de six mois, du 1" janvier à la
Saint-Jean d'été, de la Saint-Jean au !•'■ janvier suivant ; on y lit d'abord les fonds de recettes ordinaires et extraordinaires ;
puis viennent les dépenses séparées du roi, des frères du roi, et de la reine: draps de laine et de soie, toiles, chaussures,
chapellerie, bijoux, peignes et peignoirs même, y sont détaillés par le menu ; ce compte se termine d'ordinaire par une
longue énumération de dettes arriérées et de façons soldées. L'Histoire du Costume, pour la fm du xiv« ciecle et le
commencement du xv siècle, est là tout entière; on peut voir ce qu'il fallait d'aunes de soie pour le hennin d'une reine ;
M. H. de Laborde a déjà dépouillé les comptes spéciaux de l'orfèvrerie dans le glossaire de sa Notice sur les émaux et
oijotix du Louvre (1853, 2 vol. in-12). (x. e.) — (2) eau régale.
AR
— 143 —
° fi "i''^^ ^^°s^s exiraordinaires. Il avoit '^00
« francs de gages. » (Etat des Officiers des D de
« Bourgogne, p. 22. - Voy. Arge.nte™ )
P.ni"';'f'l'-''"'*"^*' l'-^'cception de ce mot Arqentier
etojt SI générale que, sans égard aux distinctions
elabhes entre un Ministre des finances utS
ner, un Receveur, un Caissier, un intendant de
maison, un homme d'alfaire, on es réunissoï oS
souslamemedénomination.JacquesCœurqS so s
le règne du roi Charles VII, étoit ce qu'ont été dé
puis les Surintendans, les Contrôleurs -énériv
eto.t qualifié tout simplement cXXr ^./ÏC^
S.f " ^'^- (^^°y- P'-O'^^* fie ,1. Cuer i p 8.1 -
Godefroy, Rem. sur rilist. de Charles VII, p 850 1
If, if r '^°"'' ^r^"«" du Trésorier, du Rect
eur des l^^nances de Charles VI, lorsqu'en lil2
1 Université disoit dans ses remontrances .On
<■ n excuse pas... Raymond Raguier qui a la princi-
" P'i^^ administration de voslre Chambre aux dé-
" » «l S:,no" plus que vostre Argentier Poui art (I)
« et Guillaume Budé, maistre de vos garniso s nai'
'■ d argent, dont vous ne tirez aucun profit et dont
: £n?'a'."/r"'"'''''^'^'^^'^'-desterre'^e letïïs
"biens. » (Le Laboureur, Hist. de Charles VI n «si
On designoit un Caissier, un Intendant de nrasôn'
un Homme d'atîaires, en disant : ! Corbieu sis
aussi tacile que supe fli d'àciu^^if j^'i:; ^^
de la signification générale d'^r^^-^i/g,. honime uni
ce les du mot Argentier qui, dans un sens eHtif^
celui de rexpression « faii'e e fait et demenere ùnî
d argenterie, » sienifioit Bannuie. fVn v . î
»vo,l po,,r objel ruliliié p"l iiw'Jl m« il S'
AR
: / f'?"'"' j tellement que par le papier des Aroen-
tiers plusieurs con tracts estoient evuédie/ 1»
« estoient lesdits papiers authentk ies et / foiVn
" foi comme les instrumens passés Dardiinfl^
: Notaires d'aujourd'hui. „ (Voy Nicot D l't ! On
soupçonne que^dans la coutLm^ de Vaio?s,^c'o?t"
miner le nombre. Dans un spn« nnoi^ x^eter-
de l^adjeclif rr.^.»/, ;]" Vu^,'X l'a^^^^^^^^^
boit homme riche, un homme en aro|nt , IcK
« Jouyencel.... pour ce qu'il n'estS pas -rnfl?
tion ; la seconde dans le Dicl. de Cotgrave. "
VARIANTF-; •
ARGENTIERE. Colgrave et Oudh; Dict
Argeantière. Monet, Dict.
ArgeiUif, AcIJ. Blanc comme argent On •! dit p»
ce sens, que le croissant de la lune esfc|. ; e m?
esA^Î!^S5^eS-^;f-^J^S;;,^£-
comme aggen, le premier o se d,a,i°i?pn „ ô? '•
On a loué dans Sully son activité .. à travailler
« aux argmes (2), turcies et levées, pontz, pavez éhe.
« mins et chaussées, et sa vigilance à faire en ^orfP
« (lue les deniers octroyez aux Villes et rn.«m„
« nautez pour tels ouvrages, y fussenf bien m
■' ployez. » Mém. de Sullf T V n lo i>w\ T'
soins tels que ceux du Ministre^rSri n-,'qu1
(1) Charles Poupart était CHYJÊO/Wdpmilc iqon .,.
Lxxx. milUa hominum eï mu ierum F?/'"''"''.''" '«^'^!'''' (M«ratori Vlir col Wiv <?Tnn?'^''' ^«semate.... A,yi>,e se
victuaUbus. . (N. E.) ""^'^'^"'»- Et f^^^erunt a,rjinale,n contre exercitU de biscottô,'^dëca~e1ardo, 'e"t de'^lt'erfs
AR
144 -
AR
Louis XIV doit une partie de la gloire de sou
règne.
Arnot, siibat. masc. (Voy. Argoteure.) Article de
dol^!-du pied; doigt du pied. Ergot de coq, de
cliièn. etc. Boulet d'un cheval.
Fn faisant rénexion que d et t sont des lettres ae
nie^meoSane, auxquelles on a substitue souvent a
"ettre^ dans la prononciation et rorthographe de
auanlilé de mots, ou conçoit la possibilité quarto/,
Su pluriel/ soit une alténtion d «'■f«^./, ar-
tok au p unel avtans, arm. (\oy. Aktieil.)
i;opinion d'après Uuiuelle on se persuaderoi
qu'arîoi est réellement une altération d «rn/t'«, et
Ja. conséquent de même origine sembleroil peut-
?ù-e d'autant plus probable 4" ^^ i^';«'\.,« S,J^
même signitication, lorsiiue pour designer attitude
iu homme qui se tient légèrement sur la pointe
du pied, qui se tient ferme et eleve sur a pou tedu
pied par la tension des articles, on dit au piopie
? a liguré, qu'il se tient légèrement sur ses ergots
qui lèft surses ergots. «Le Bonhomme se . eut
l sur ses ergots le plus leg'èrement qu il peut »
(Les quinze Joyes du mariage, p. '1-) •'Lf"\mf
lion et l'opiniastreté sont signes exprès de bestise
., f e e-CY aura donné du nez à terre cen fois pour
: un otir; le voila sur ses (^r^o/s, aussi résolu et
. entier que devant. » (Montaigne, Essais, 1. 111,
'^'L'Iltftudfd'un homme élevé et ferme sur ses er-
gots, sur ses arigots, est celle d'un homme qui me-
nace son adversaire, et lui résiste de manière a se
faire cïàindre. De là ou a ditflgurémenteu par an t
du duc de Glocestre et de PhiHppe-le-Bon duc de
Bourgogne, également redoutables 1 un à laulie,
« qu'ils estoient tous deux sur leurs angoU. »
(Mém. d'Oliv. de la Marche, liv. L P- l-'i9-)
C'est par mignardise de prononciation, qu à 1 oi-
thographe argot ^^Ar^^^.::f^^!:^'^Si:},
^' cS , Dict.) On pourroit regarder comme relative a
•dîj mologie (^- argot, finsertion de la voyelle i dans
ariqot, si'la raison de celle orthographe qu en cer-
taines provinces on altère en prononçant engot et
hérigol d'où le participe érigoic ou '"'';'t/o '>,,et ]e
substantif érigoteure ou hérigotcnre, eut ele 1 idée
de la possibilité que l'origine darlueil, en latin
fl?'//cH/!is,soitcommune au moUirgoton ergot. Ma\s,
il est plus vraisemblable que relativement a 1 idée
de la figure redressée, en latin arrccta ou erecta,
de l'ongle pointu dont, par exemple, le derrière de
la iambe d'un coq est hérissé, l'on aura imagine les
oithographes arigot, êrigot et herigot, qui auront
paru contractées dans argot et ergot. Ce seroit alors
par extension de cette acception particulière, que
l'ongle qui croit au derrière de la jambe du chien
et de plusieurs autres animaux, quelle qu en lut
la fio-ure, auroit été nommée arigot et erigot, par
contraction argot et ergot. (Voy. Nicot, Dict. au mot
'peutêtre trouvera-t-on plus raisonnable de croire
(1) Posé, placé près; en latin apposltus. - (.2) Jusqu'aux.
que dans un sens analogue h celui d article, join-
ture, \e mol argot ou ergot, altéré dans arigot mi
érinot a signifié non-seulement 1 ongle qui croit au
derrière de'la jambe de quelques animaux, mais la
corne molle qui est au derrière du boulet d un che-
val parce que celte corne, ainsi que 1 ongle du coq
et du chien, croît au premier article, à la première
jointure de la jambe. L'argot ou Vergot du cheval,
est une corne molle de la grosseur d'une châtaigne,
qui est au derrière et au bas du boulet, de la jointure
au-dessus du paturon de la jambe du cheval (Voy
Dict de Trévoux, au mot Ergot.) Telle est sans
doute la signification de l'ancien mot pluriel argos,
dans ces vers ;
S'est à eus si ajoins et apos (1),
OÙé plus de trente mil en a que pns, que mors,
Ôue ses cevax en fu et sanc dusc as (2) o'-yos-
^ Rom d'Alexandre. MS. du R. n- 6987, fol. 19-2. R» col. 1.
VARIANTES :
ARGOT. Cotgrave, Nicot et Monet Dict
Argos (Plur ) Rom. d'Alexandre, MS. du R., fol. 192.
Xrgoz: (Plur.) Bible en franc, MS. de la Clayette, p. 523.
Arigot. Mém. dOliv. de la Marche, liv. i, p. US).
Ergot. Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict.
\raoté,participe. Qui a des ergots. (Voy. Argot.)
« Les chiens fauves qui sont retroussez eiherigo-
« /(?s, sont bons à faire limiers. » (Nicot, Dict. -
Voy. Argoter.)
VARIANTES :
ARGOTÉ, Ercoté. Nicot et Monet, Dict.
Erigoté. Monet, Dict.
Hergoté. Nicot, Dict.
HÉRiGOTÉ. Nicot et Monet, Dict.
Ai-goter, verbe. Combattre avec les ergots;
lulter, combattre corps à corps. , „ u„
En disant d'après Cotgrave et Nicol, que le verbe
arnoier désiguoit la manière de combattre qui est
aturelle aiTx coqs, on en concluera poin avec
eux que par allusion ti celte manière de combattre,
ilasionifié figurément, contester, disputer, chica-
ner dans la di'spute. 11 est plus probable qu en ce
^Z,argofere!i une altération du verbe ergoter
Smé ûe Vergo si familier aux argumentateurs,
dans les disputes de l'Ecole^ (Voy. ^^'^^■l
L'attitude d'un homme ferme et eleve sur ses
ercjots étant naturelle à ceux qui luttent et combat-
tent corps à corps, on a pu dire relativement à cette
Liée même en parlant de la lutte amoureuse
„ Mahilet.... prinl Gilet par la poitrine et ledit
„ Gilet lui semblablenaent; et tenoient et hargo-
oient l'un l'autre forment. » (D. Ca.pentier, bup
Gloss lat de Du Gange, au mol Argutw; Ut. de
V'Stri <! A la femme... . disl ces mots : avance, si
le va faire joluier, qui est à enlendie harigoter^^
Id ib d lit de 1403.1 Peut-être la signilication de
Sdère verbe harigoter est-elle relative a celle
de la tenue expression frôler Vortoie dune ^
femme 0,1 a indiqtié la Possibilité.iu'a,.,o e artÇ
soient de même origine que artueil, ortueiL etc.
(Voy. Argot et Arteuil).
AR - 145 —
AR
VARIANTES :
ARGOTER. Cotgrave et Nicot, Dict.
Hargoter. D. Carp. S. G. 1. de Du G. à Argutio
Harigoter. Id. Ibid. tit. de 1393.
Argoteiir, sitbst. tnasc. Ergoteur. (Cotarave et
Nicot, Dict. - Voy. Argoter.) v ë ve ei
Argoteure, subst. fém. Ergots. Terme collectif
a ergots ; dans une signification spéciale, » assor-
« tissement d'ergots, es chien de Vénerie. » (Monef
Dict. — Voy. Argot.)
VARIANTES :
ARGOTEURE. Cotgrave et Nicot, Dict.
Ergoteure. Nicot, Dict.
Ergoture. Cotgrave, Nicot et Monet, Dict
Herigoteore. Nicot, Dict
Héric.oture. Monet, Dict.
Argouirer, verbe. Vah-e des agaceries ; fâcher
par des agaceries. Il semble que dans un sens rela-
tif a celui d arguer, fâcher, on ait dit ■ >< Alizon
« commança à se rejouir et à argouirer par paroles
« à icellui estourmel qui estoit sur la table en une
-< cage de bois. » (D. Caipentier, Suppl. Gioss. lat
de Uu Lange, au mot Argutio; tit. de 1480. - Vov
Arguer.) ^*
Argu, stibst. musc. Blâme, reproche, accusation
querelle, otîense, etc. Avis, vue, idée, sentiment'
volonté, croyance, etc. Divination, Raison, raison-
nement ; prétention, demande ; argument cantieux
sopliisme; subtilité d'esprit. Peiiîe d'esprit per-
plexité; doute, irrésolution. (Voy. Arguer )
Il est possible que relativement [i l'idée d'une
chose claire et évidente, d'une chose clairement et
évidemment démontiée, le mot argu ait signifié
blâme, reproche, accusation, querelle, offense-
signification dont on abrégera la preuve parce
qu elles sont analogues à celles du verbe arguer
« Mars est le Dieu des Batailles, et se délecte en
« occisions, en contentions, en argux- et en toutes
« dissensions. » (Percef. Vol. 1, fol. lo-i, V ■ col ->)
« LeMareschal de Saint-André s'estoit... absenté
■• de la Cour pour quelques paroles A' argu qu'il
« avoit eu avec le roi de Navarre. .. (Lelt de Pas-
?Cetc. -\StTicl.)"' '''■ "' '''■ ''' '' ''''
Hui matin le lairiistes (I) ; malvès est vo arnus.
Moult lost vous en est ore li guerredoiis rendus
Rom. d Alexandre. MS. du R. n- 6987, fol. 200, V" col 3
Dame Sapho, de Pan belle amoureuse
Contre Atropos austère et rigoureuse
l'eu et chanta ung dictié plain d'argus.
Poës. de Crétin, p. 45,
On retrouve la même analogie entre l'acception
d arguer, éclairer, aviser, et celles d'argu, avis vue
Idée, sentiment par lequel on est plus ou moins
éclaire sur la raison de vouloir une chose ou de la
croire - Luy remonstra tellement et si sagement
" ^}^ V, br'sa les argus du roi de Hongrie. » (Frois-
^'p'.^^'a ^r' P- ^^'^■) " Tant considéra Messire
<■ J leirede Craon ses besongnes qu'il y subtillapar
(1) Blessâtes, offensâtes. - (2) Le Démon
mauvais argu et par l'enhortation de l'En-
nemy (-2). ,. (id. ibid. p. 140.) « S' Aimericot eust
tourne ses voyes et argus en bonnes vertus, il
esloit bon homme d'armes, de faict et d'emprise
pour moult valoir ; et pour ce qu'il en fit tout le
contraire, il en vint à maie fin. » (Id. p. 77.)
four recouvrer le temps que j'ai perdu,
voeu de nouvel priler nouvelle amie-
Je croi que jaie un raisonnable air/u
Pour recouvrer le temps que j'ai perdu.
Kroissarl. Poès. MSS. p. 331, col. t.
On me dit, dont j'ai grant merveiUe,
yne de dormir est temps perdus.
Tant qu'à moi je m'en esmerveille-
Car le dormir me vault trop plus
Que le villier. C'est mes argus ■
Dormir est grant aise de corps, etc.
Id. ibid. p, 315, col. 1.
Quoi_que la divination regardée par l'homme
supersli leux et inquiet de l'avenir, comme un avis
qui I éclaire sur son sort futur, puisse avoir été
désignée par ce mot argu, on croit néanmoins
quen ce sens, argu est une altéiation d'aunur
présage tire de l'observation des oiseaux (Vov'
AUGUR.) • \ "J-
Ne croit en songe, n'en argu,
En carroi, ne en esternu.
Rom. d'Amadas. MS. du R. n- 6987, fol. 319, V" col. i.
Si^dans la fable d'un larron et d'une sorcière.
.MS. du R. n- 7989, fol. 173, R" col. I, on lit argu en
ce même sens, un autre ms. présente le mot aunur,
moins défigure dans un troisième iis. où on lit
argure.
Qu'il ne croient, Diex, le deffent,
En argure, n'en sorcerie;
Car trahis est qui s'i affie
Fabl. d'Esope, MS. du R. n' 7615, fol. 86, V col. 2 ; Fabl. 49.
Enfin le mot argu, relativement à l'acception
geneiale d'arguer, éclaircir, raisonner, signifioit
raison, raisonnement, par lequel on croit pouvoir
rendre claire et sensible la justesse d'une idée, la
justice d'une prétention, d'une demande, etc Ouel-
que raisonnable que soit l'indifféience du Sa^-e
pour les richesses , l'homme riche s'imaginera tou-
jours l'humilier en lui disant :
Li poure chetif qui sont mol,
En voslre argu vous soustendroient ■
Car ne puent faire leur vol
Aux richesses qu'avoir vouldroient.
Eust. Descli. Poos. MSS. p. 106, col. 3.
Le roi d'Aragon sollicité de prendre la défense
du pape Benoist Xlll contre le roi de France
Charles M « respondità ceux qui delez luy estoyent'
'< Guide ce prestre que pour ses «rr/ws aider à sous-
" tenir, je doye entreprendre la guerre, contre le
•■ roi de France ? on me tiendroil bien h mal-con-
« seille. .. (Froissarl, Vol. IV, p. 311.1 On raconte
que le roi Jean ayant été fait prisonnier avec Phi-
hppe-le-Hardi, celui de ses fils qu'il aimoit le plus,
« Un chevalier Anglois prétendit droit à la foy du
<■ Roy... et pour ce que le Roy ne déposa pas au gré
« du chevalier demandeur, il se troubla : et cuida
« Philippe le fils entendre qu'en ses argus il dé-
19
AR
_ li6 —
AR
« COUD donna au t^e^alel h"' „t, ^
oïtm.rflv » (Mém d'Ol vier de la Marche, p. à-.,
" ^-^V lo if ra son el du raisonnement, etoil
SaSenl et évidemment vraie, on diso.l .
Je feroie par mon arcju:
Ce qui est no.r^deve^r_blanc. ^^^ ^ ^^,^^ ^^, ,
Famé a trestout passé argu ;
Par lor engin sont deceu
Li Sage, des le^ten^AbeL ^ ^^_^^^ ^^^ ^^^^ ^. ^^, ,
On ne parvient pas toujours aisémenlà éclaircir
, ^nnf^ de l'esorit partaoé entre des idées contrai-
res StcÊontre?ùùr^ncnl la raison qui doit en
: ïaSf, etc!t (Percef. Vol. Ul, fol. 138, Y' col. 2.)
A..fiiipp subst fém. Argument sophistique.
Abt ?e fa subtm?é d-'esprit. (Oudin et Monet, Dict.
_ Voy. Argu et Argutie.)
Arquer, verbe. Montrer clairement, démontrer ;
Wa^ne?' accuser, condamner, punir; quereller, chi-
cSer importuner, fâcher, offenser, etc. Eclaner;
avser aire voir, avertir, vouloir; presser, ha er,
épeionner 'aiguillonner, faire souffrir, ourmenter
Ser douloureusement. Eclaircir; rendre sensible
efdfstinct avancer, prétendre, objecter, rétorquer ;
Jaisoier,' examiner, discuter, disputer; hésiter
dou?èï, conjecturer ; argumenter, sophistiquer, faire
^^ LÏuion des Etymologistes est que dans le sens
propres oier, en latin argtiere (1), signifie montrer
SSient u e chose, la démontrer évidemment,
S rendiè claire et évidente. On a donc suppose que
la ia"son de blâmer, d'accuser, de condamner, de
puni %étoit clairement et évidemment démontrée
lorsqù'en ces significations analogues, on a dit .
Pm ceu ke cil cui il argtiet el reprent, ne pu.st
« murmurier, etc. ^. (S' Bernard, Serm. fr. mss.
n S4i 1 » Li reis Saul avoit une amie e Uib-
!'bose h, le fils saul s'aperceut que Al^^er la han-
„ iad;si em parlad.... e Abner se cuiuchad fo -
.. ZnL... si li dist tu as enquis, ma v'e s me.
.. niir mei aroner pur une femme. » (LiviCb cies
Ro?s M des CordeL fol. /i3, Y° col. 2) » Liquels de
» vo'sm-ar^wmUdepécliier? » (S' Bernard, Serm.
fr M^s p. 344.) « Je ai pécliiel à nostre Signor, ce
dist David, quant Nathan l'«''ff«'''«/^.de adul"
teire. » (Id. ibid. p. 368.) « Sire, ce dist li Sal-
mistes, ne m-uryuer en ta forsenncne. » ^Id-ibid.
n '2%) C'est le commencement du pseaume,
!,■ Domine, ne in furore tuo arguas me, » paraphrase
dans ces vers :
Las ! en ta fureur aiguë
Ne m'argue
De mon tait, Dieu tout-puissant :
Ton ardeur un peu retire,
N'en ton ire
Ne me punis languissant.
Clern. Marot, p. 6bï.
Le bon ami point et fovyKe
^^Lfoffe"f.^rl^Tluuf afrr». ao Fauve,, MS. du R. fol. 4S.
La vieillesse est naturellement encline a blâmer
et à condamner tout ce qui n'est p us de son goût
îl semble donc qu'on ait désigné dans une vieille
emme cette inclination à blâmer, a condamner a
auerel ler! à chicaner avec une aigreur importune,
en disant : « C'est une vieille, seiche, aigre av-
oua t. » (Les quinze .loves du mariage, p. 132 )
On conçoit qu'au moyen de l'extension de la
cause â l'effet, la signification de ce verbe arguey
St êli-e la même que celle d'importuner tacher,
offïnseï ou de tout autre verbe propre a designer
f'effét d'une chicane, d'une querelle, d'une condam-
nSn "l'une accusation, d'un blâme mjuste e
éraisonnable. « Lyonnel et ses compaignons furent
7miÏÏtdolens de ce que le desloyal ^^l^l'^es le^
>, estoit venu arguer et mocquer. « (Peicet. \oi.
V fol 4 - Yo5'. Cola-rave, Nicot et Monet, Dict.)
L'amour que la fierté d'une femme sensible et ver-
tueuse condamne el contre lequel elle se fâche,
n'en est souvent que plus dangereux.
A ce que famé est convoiteuse,
Au premier se tient orgueiuose.
Com plus se deffent et aiyue,
Tant est ele plustot^^amcue.^^^^^^ ^ ^^^^ ^^^_ „_
Il paroit inutile de multiplier les preuves de
la réalité d'une extension quil suffira davoii
''"eS montrant clairement la raison d'une cliose en
la démontrant évidemment, o^.eclaire on avise
celui à qui on la démontre, on lui fait voir la i aisoi
potu' aquelle on veut qu'il fasse ou ne fasse poin
S c lose la raison pour laquelle on 'en avertit, en
le pressant de se rendre à l'avis qu'on lui donne.
Li Arceveskcs de Ruem Hue
De la pais moult le Duc ai-gne ;
Et li Dus vint al parlement
Ph. Mouskes, MS. p. txa.
Vous vous voulez mal atorner,
Quant au siècle voulez torner.
L'Escriplure vous en arrjue
Par celui qui tient la charrue,
Kt nuis derrière soi regarde. „ , „ , , p,
Hist. de ?r. ^en \ers 1, la suite du R. de Fauvel, MS. du R. fol. 67.
I
AR
— 147 —
AR
Abés, tes basions par amont
A humilités te semont ;
Mais si tu vois trop dissolus
Ceaus qui dessouz ta garde sont...
Pour ce est tes basions agus,
Que tu les poingne en parfont...
Abés, esgarde la longuece
De ton baslon, cora il se drece.
Il te commande adrecier l'Ordre ;
Abés, tien l'Ordre sans pérece...
Evesque, Abé je vous argu
Dou baslon courbé, droit, agu :
S'au baslon ne vous confermés,
Vous desserves estre batu.
Dit de Charilé, MS. de Gaignat, fol. 220, V' col. 2 et 3.
Absolument la loi argue
Et commande qu'on se marie
Pour contenir, et pour lignie
Avoir, sans autre entencion ;
Non pas pour délectation.
Eust. Desch. poës. MSS. p. 567, col. 3.
Lorsqu'un homme éclairé par sa raison seule, ou
par le sentiment d'une passion, avisoitou sentoit le
besoin de faire une chose, on disoit qu'il s'arguoit,
qu'il s'empressoit, se hàtoit de la faire.
Chascuns de bien férir s'arrjiœ.
Rom. de Brut, MS. fol. 8, R° col. 1.
Leur compaignie vint après.
Qui moult s'arque et fierl adès.
IbiJ. fol. 96, R- col. i.
On est éclairé sur le danger de mourir, on est
averti de l'approche de la mort par le sentiment des
maux qui en hâtent l'instant. De là, on a dit:
En l'aage vient qui de mourir Varnuc.
Eust. Desch. Poës. MSS. p. 388, col. 2.
Li cuers me faut, la mors m'argue.
Rom. d'Amadas, MS. du R. n" 6987, fol. 325, V" col. 3.
Li Rois euist dit mainte cose ;
Mais li raaus qui l'argue et cose,
Le tenoil et hasloit de priés.
Ph. Mouskes, MS. p. 641.
Le cheval auquel on fait sentir l'éperon, est
averti de hâter sa course : on hâte sa course en
l'éperonnanl. De là Vexpveis'ion arguer des éperons;
ou tout simplement arguer, pour éperonner.
Le ceval broce, des espérons l'argue.
Ànseis, MS. fol. 61, V' col. 2.
Brandist l'espiel, et le ceval argue.
Ibid. fol. i2, V col. 2.
Souvent nos sensations, nos passions sont aussi
douloureuses que pressantes. Elles font souffrir,
elles tourmentent, elles agitent douloureusement
l'homme qu'elles avertissent de ses besoins et qui
les sent trop vivement. Ainsi, le verbe arguer
signifloit non-seulement presser, hâter, aiguillon-
ner, mais faire soutTrir en brûlant, en piquant, etc.
tourmenter, agiter par une douleur physique ou
morale.
Ains où vas? où viens? et quels besoins t'argue.
Rom. d'Alexandre, MS. du R. n° 6987, fol. 197. V- col. 2.
Maulalenl l'argue et alise.
Kabl. MS. du R.
7615,fol. 65, Vcol. 1.
Li Solaus (1) fu levés, li caurre (2) les argue.
Rom. d'.Mexandre. MS. du R. n- 6987, fol. 189, R° col. 1.
.... Lecherie l'espiciere
Le fit delecher par angoise,
Por la poudre qui les angoise.
Qui si est ardent et ague,
Que leur langue prenl et argue.
Crie chacun, le vin, le vin, etc.
Fabl. MS. du R. n- 7615, fol. 188, V col. 2.
Plus de sept fois se torne la Bêle en un tenant ; '
Du fort mal qui l'argue va forment tressuant.
Fabl. MS. dn R. n- 7-218. fol. 347. R- col. i.
* Amors si ont sor moi lor arc tendu ;
Si m'ont navré d'une saele ague
Qui m'est el cuer que point ne s'en remue,
Ne ne fera tant com ma Dame plera :
C'est s'amor qui si rti'argue.
Ane. Poël. fr. MSS. avant 1300, T. II, p. 657.
Enfin, c'est dans la signification d'éclaircir, dé-
montrer clairement une chose, la faire voir, la ren-
dre sensible et distincte aux yeux de l'esprit, qu'on
a défini la Logique « une science d'arguer choses^
<> saintes et subtiles, coulouréesde faulxargumens,
» pour discerner et mieulx congnoistre la vérité
« des choses entre le faulx et le voir. » (Eust.
Desch. Poës. ms.s. p. 39'i, col. l.)
L'amour-propre nous persuade si aisément quela
raison de notre façon de voir les choses et d'en
juger, doit être claire pour les autres, que dans
l'opinion de certaines personnes , avancer une
chose, la prétendre, l'objecter, la rétorquer, c'est
l'arguer, la démontrer clairement, la rendre sen-
sible, la persuader. Ainsi, l'on disoit : « Se aucun
ic veult arguer que je vueil faire de vieil bois nou-
n velle maison, etc. » ([.e Jouvencel, fol. 3, R°.)
Vous argués ainsi, et dites
Qu'en oiseaux a plus de mérites
Qu'il n'a es chiens formement,
Quant au déduit que l'en y prent.
C'est là toute la question.
Modus et Racio, MS. fol. 152, R'.
C'est ung abus, vouloir rédarguer
Femme qui est ouvrière d'arguer.
Poês. de Crétin, p. 99.
On abrégera la preuve de toutes les significations
d'arguer, relatives à celle d'éclaircir les choses, les
démontrer clairement, les rendre sensibles et dis-
tinctes aux yeux de l'esprit. Elles étoient aussi
multipliées que le sont les dilTérens verbes qui
expriment les moyens plus ou moins efficaces de
démontrer aux autres ou à soi-même, qu'une chose
est vraie ou fausse, raisonnable ou déraisonnable,
possible ou impossible, etc. Ces moyens étant le
raisonnement, l'examen, la discussion, la dispute,
l'hésitation, le doute, les conjectures, la justesse el
la subtilité d'esprit avec lesquelles on argumente,
le verbe arguer signifioit raisonner, examiner, dis-
cuter, disputer, hésiter, douter, conjecturer ; argu-
menter, sophistiquer en abusant de la subtilité de
son esprit. (Voy. Colgrave,Nicol et Monet.) » Argou-
« lant ala veoir Chaîies et arguèrent de plusieurs
« choses ensemble. ■> (Triomphe des neuf Preux,
p. 4-40, col. 1.) « Je arguatj en moy-mesme, si je
« pourrois comprendre et entendre ce que cela
« vouloit dire. » (Mathieu de Coucy, Hist. de Char-
les Vin, p. 673.) « Toutesfois sur sa demande vous
« arguastes, doublant, etc. » (Percef. Vol. III,
(1) Soleil. — (2; Chaleur; en latin calor.
AR
— 148 —
AR
fol. 85, V" col. 1.) En termes d'Ecole arguer, c'étoit
faire le sophiste (Monet, Dict.)
CONJUG.
Argueivet, iiul. imp. Bhlmoit, accusoit. (S' B. S.)
Argutn, ind. prés. Vous condamnez. (Id. ibid.)
Arguet, ind. prés. Blâme, accuse. (Id. ibid.)
Aryuevel, ind. imp. Blàmoit. (Id. ibid. p. -113.)
Argiieiir, suijst.masc. Argumentateur. Raison-
neur. (Voy. Colgrave et Oudin, Dict.)
Argueux, adj. Qui lient du reproche, de l'of-
fense, de la dispute. Signilication relative à celle de
l'expression paroles â'argu. (Voy. Argu.) « Auquel
« Boulet, Pierre Dubos print paroles argileuses. »
(D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au
mot Argulio; lit. de 1477.)
Arguil, subst. Argil. (Voy. Ardille.) « Si Deus
" fesoit son iremer jugement par eauve sur
« l'umayne lignage, les tables d'arguil et d'arein si
« dépesceroient, e celés de piere remeyndroyent. »
(Hist. de la S" Croix, ms. p. 11.)
VARIANTES :
ARGUIL. Hist. de la S'= Croix, MS. p. 11.
Argoil. Ibid.
Arguilloîineux, adj. Enclin à chicaner, à dis-
puter; plein de fausses subtilités. (Gotgrave, Dict.
— Voy. Argu et Argi'er.)
Argument, subst. masc. Vue, idée, sentiment.
Raison, raisonnement, dispute, plaidoyer, écriture,
production, etc. Les acceptions usitées et inusitées
d'argument étant comme celles d'argu, relatives à
l'idée d'une chose claire et sensible, on a dit au pre-
mier sens : « Si monterez plus haut que je ? Par
« mon chief, non ferez je fausserai vostre argu-
« meut. >' (Rom. de Dolopalhos, ms. de N. D. n" 2,
fol. 68, V°col. 1.)
On raisonne, on dispute, on écrit, on produit en
termes de procédure, afin d'éclaircir, de rendre
sensible la vérité d'une idée, la bonté d'une cause.
De là, le mot argument a signifié raison, raisonne-
ment, dispute, plaidoyer, écriture, production.
(Voy. Gotgrave et Monet, Dict.) « Il se fist un argu-
« ment de deux Dames jeunes et biaux ; l'une avoit
« chiens et l'autre oiseaux. « (Modus et Racio, ms.
fol. 147, R°.) « Deux Dames firent un argument de
« ceste matière.... et l'envoyèrent au comte de
« Tancarville pour estre jugié. » (Ibid. fol. 145, R°.)
Les lettres apporta
Au Conte à qui les présenta ;
Et le Conte les prist à lire.
Assés tost commença à rire,
Et dist : où est l'arcjument ?
Modus et Racio, MS. fol. 158, R*.
Un de nos Auteurs du xvi' siècle souffroit impa-
tiemment le mépris qu'affectoient pour l'Ecrivain
pensant et raisonnant en françois, « je ne sçay quels
<■ braves sillogisateursd'ar(/ume»i/sco>'H«s, qui don-
« noient la moitié plus de gloire à quelque petit
« Maistre es Arts crotté, ou autre bourgeon de
« scolarez, pour deux ou trois mots de latin
" desgorgez en une dispute ambiguë. » (Dialog. de
Tahureau, fol. 1C5, R^etV".)
Enfin ce mot argument, dont l'usage est toujours
familier li la logi(iue, a signifié et signifie encore
preuve, indice, conjecture, sujet en abrégé d'un
Ouvrage; parce que l'exposition abrégée d'un
Ouvrage en fait voir clairement le sujet, et qu'au
moyen des conjectures, des indices, des preuves,
on se démontre les choses, on s'en éclaircit.
(Voy. Argu et Arguer.)
VARIA:iTES :
ARGUMENT. Modus et Racio, MS. fol. 145, R».
.Vrguement. Modus et Racio, MS. fol. 157, V".
Argu.mant. Monet, Dict.
Argumeiitatif, adj. Qui argumente, qui rai-
sonne avec esprit et subtilité. On a dit en ce sens,
que Maistre Angel physicien, « pari oit bel latin et
« estoit fort moult argumentatif. « (Martène, Thés.
Aneed. T. 1, col. 1574; lit. de 1378.)
Argiinientation, subst. fém. Action d'argu-
menter, raisonnement. L'action d'éclaircir une
vérité, un dogme de la foi, en argumentant, en
raisonnant. Quoique ce mot signifie encore la
manière d'argumenter , il semble qu'on ne diroit
plus : « Il faut fuir toutes contentions et argumen-
« tations dialectiques, et se rapporter nuemenlaux
« prescriptions et formules de la foi. »
Argunienter, verbe. Déclarer, juger. Signifi-
cation relative à l'idée générale de clarté et d'évi-
dence exprimée par le verbe arguer. On lit que
Sophocles 'i fut argumenté suffisant au maniment
« des choses domestiques, contre l'accusation de
ic son fils, pour avoir veu l'une de ses tragédies. »
(Voy. Montaigne, Essais, T. II, p. 11.)
Argut, adj. e\, subst. Subtil, spirituel. Subtilité,
abus de l'esprit.
La signification d'argut étoit la même que celle
du latin «r^'itifis, subtil, lorsqu'on disoit: « Il est,
" par Dieu, sophiste, argut, ergoté, et naïf. »
(Rabelais, T. III, p. 120.)
Probablement il y avoit ellipse du substantif
raisonnement , toutes les fois {\\i argut signifioit
comme argu, l'abus de la subtilité d'esprit, une
subtilité affectée. (Monet, Dict. — Voy. Argu.)
Argutie, subst. fém. Argument sophistique,
subtilité d'esprit. Trait d'esprit, saillie, bon mot,
fine plaisanterie.
Dans le premier sens, c'est l'abus ridicule et
quelquefois dangereux de la subtilité d'esprit dans
les disputes de l'Ecole. « Si ces sottes arguties....
« doivent persuader un mensonge, cela est dange-
« reux : mais si elles demeurent sans effet et
" n'émeuvent qu'à rire, je ne voy pas pourquoi s'en
'< donner garde. » (Montaigne, Essais, T. I, p. 260
et 261. — Voy. Arguce (i).)
(1) Argutiaj avecraccent sur (ju, a du donner arguce ; cette forme est donc la plus ancienne, bien qu'on ne la rencontre
qu'au xvi« siècle, (n. e.)
AR
- 149 —
AR
Il y a une subtilité d'esprit naturelle d'où partent
les traits d'esprit, les saillies, les bons mots, les
lines plaisanteries qu'on nommoil aussi arguties
(Voy. Gotgrave, Dict.)
Ariole, subst. masc. Sorcier. Qui prédit l'avenir
par les sorts ; en latin uriolus ou hariolus: mot que
les litymologistes latins croient formé du verbe A«ri
et qui par conséquent seroit d'une signification
analogueji celle de fatidicus. La maladie du roi
Charles \[ paroissanl incurable à la médecine, on
imagina ([ue la cause en étoit surnaturelle, et les
ylr/o/^'s furent consultés. « Aucuns de ces Arioles
« atîermoyent, pour plus donner à toutes gens ù
« penser, que le Roi estoit démené par sors et par
« charmes ; et le savoyent par le Diable qui leur
« reveloit cest affaire: desquels .Im/^^s et Devins
» Il en y eut de deslruis et ars à Paris et en Avi-
gnon. » (Froissart, Vol. IV, p. 26'i. - Voy. Ariollikn )
VARl.VNTES .
ARIOLE. Froissart, Vol. IV, p. 2ii4.
AuRiOLE. Les Triomphes de la noble Dame, fol. 201, R«.
Arioler, verbe. Prédire par les sorts. En latin
anoiari ou hariolari (Voy. Aiuole.) « Aulu-Gelle
" tenoil tel langage à ceux qui croyent à ce qu'ils
» enlenuoieiU anoler, astrologiser, et mathema-
/rnifrr ■ Pîï^^ry^"^ '^l'^ ^ous fier aux Astrologues. .
(Contes de Cholières, fol. 190, V°.)
ArioîIiçMi, subst. masc. Sorcier. (Voy. Ariolf )
" Les Ariolliens, les Enchanteurs, les Devinafeurs
'- quelonnommoitSaiges, etc. » (Ilist. de la T oi
son dor, T. I, fol. 44, R°.)
Arir, verbe. Devenir aride et sec, être desséché
Rendre aride et sec, dessécher. Ce verbe rtrSSs
Rob Estienne et Nicot, Dict. est neutre ; eutre et
actif, dans Monet, Dict. (Voy. Are.)
Arire, verbe. Rire (1). Le principe évident de h
form.lion du verbe simple rire, en latin .5 -res'
1 expression imitalive de l'effet d'une sensation
agréable et plaisante, sur les mu.scles du visâîe De
la, le compose arire, rire à ce qui plaît et agrée
Ha ! Diex, s'ensi m'avoit aris
Par amiirs, une seule fois,
Cèle viers cui j'en ai defois, etc.
Prison d'.\mour, MS. de Turin, fol. 17, V col. 2.
Aristarquer, verbe. Faire TArislarque Ce
verbe anslanjuer, formé du nom propre d'un
Grammairien célèbre qui criliquoitles veSes nlus
excellensPoetes,sembleindiquWl'époqueù S ue^^^^
on prit tigurement ce nom pour désigner en otre
ët"SSetÏ^"5?7T"'-^ ''^- ^'''- «^^-- P-
de 1 Ecole pour les opinions d'Aristote, îSju on
numeement (xi. siècle. Bol ^). » Cel?x"e^p,;^e^ét=,.'^;, S ^ie^XotU^'^'^l^ ^'""^ -'ëu'e^sXa^t^^nt
disoit . .. Icelle anstotchsant en sa caboche à tort
« et à travers, veut que son advis soit receu • ce
rwS'V^ pP^"^V"^ ^^"f fl»e ce soit Evangile »
(Merhn Cocaie, T. I, p. 156.) vai.-,ne.
Armaire, subst. masc. et fém. Lieu, meuble
meiible propre a serrer autre chose que des armes '
coffre, bibliolhèque, chûsse, niche, tibernaclé '
un a mille preuxes qu' Mmaire on armoire en
lalin armanum, a signifié en général lieu propre
J^serrer des armes; spécialement dans le lli ÏÏ|
dune Nation composée d'hommes à qui, S îs la
simplicité de leurs mœurs guerrières , les femmel
n apportoient en dot que des armes, et à qui dans
1 origine de la Monarchie françoise, eseul hônneï?
d être libre imposoit la loi de s'armer pour a c Sse
eommune. Il semble que, relativen^ci à cetS
acception primu.ve et eu quelque so,f(?nationale
0 ait désigne les magasins d'armes, les arsenaux
en les nommant armoires. « 0 Pr nces, hauts et
.. nobles personnages,,., ne tentez Dieu, ne son
« executeresse fortune; ne vous liez en force de
«chevalerie de peuple, ne ,V armoires. » (Ifêm
d Ohv. de la Marche, liv. I, p. 291 )
L'obligation de s'armer, non-seulement pour la
c^iuse du .souverain , mais pour celle d'un sSeu?
féodal, a ete si générale sous nos Rois de la troisième
Race, que les roturiers et même les serfs avoieït
comme les Nobles, besoin d'une armaire, d'un lieu
^nVi"" "h"''"^ ^"^'^ '' «'^'-'-e'- leurs armes, d'un
•es nostils qui communément courent avant la
« maison, et dont de jour se faut nécessaire ien*
« aider par errement de maison; si comme son
: S!^/;.5'f '"'''•■• ""'^'"^'' '"ir>'^'^ cuslodes, sou
« .-1 mettre armures ou autres choses. » (Roule lier
Som. rur. liv.I, tit. l.vxiv, p. 434.) C'est dans le sens
d armaire, coffre à mettre armures, meuble ou lieu
propre h serrer des armes, qu'on trouve aumair^
eiUinm armamentum, dans un Gloss. fr l"t "f'
f'I ^^ Vf'^ '''^^ P^ï" D- Carpentier, (Suppl Gloss
lat. de Du Gange, T. I, col. 296.) ^^
On croiroit que le François, familiarisé avec un
besoin dont l'idée flaltoit sa passion natuieSe pou?
les armes, se soit plu à généraliser l'acception pri-
mitive et spéciale de ce mot armaire ou armoire
qui a signifie et signifie encore « meuble, ou Heu
« propre a serrer toute autre chose que des armes
" réservoir pratiqué en une muraille, à serrer et
« garder toute chose. » (Voy. Monet, DicL) « Relais
« ou artmires ne font marque de propriété du
" coste dont elles sont faites, si elles'^ne son
« accompagnées de pierre de taille traversant tout
" Tosi )" ^ Normandie, au Coût. gén. T ï,
Comme on a prononcé et écrit enlatin armazium
AR
150 —
AR
pour armarium , il est possible qu'en françois
armoire ou ermoire ait été prononcé et écrit rt?'mo/s<î
ou crinoise, par le chans:emenl de /■ en s dont la
prononciation dans ermoisc est la même que celle
de zàanaarmazium. Probablement, c'est en parlant
d'une armoire, d'une iietite armoire pratiquée dans
le mur, ciu'on a dit : « Pi'indrent ung sachet et une
« bourse qui estoiont en une ermoise ou fenestre. »
(D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au
moi Armaxium ; lit. de 1455. — Voy. Armazi.)
Les colîi'es, les meubles, les lieux propres à
serrer les livres et à les rassembler en dépôt, étoient
des armaires auxquelles on comparoit le cœur ou
la tète de l'homme, comme étant le dépôt de ses
sentimens, de ses idées, de ses connoissances.
Alain fist ouvrir les aumaires (1),
Et fist venir les bons gramaires :
Les histoires fist aporter, etc.
♦ Kora. de Brut, MS. fol. 112, V col. 2.
Celé estoire, trouvons escrite,
Que vous vueil raconter et ratraire,
En un des livres de l'Ainaire
Monseigneur S. Père à Biauvès.
Rom. d'Alexandre, MS. cilé par Du Caugc. Gl. lat. T. I, col. 701.
On déterminoit l'acception d'armaire en ce sens,
lorsqu'on disoit rtrmfl/r<' à I ivres, armaire à mettre
livres. (Voy. Nicot et Moiiet, Dicl.)
Aujourd'hui, l'on nommeroit iigurément biblio-
thèque vivante, un homme dont nos Ancêlres com-
paroient le cœur ;\ une armaire pleine de livres.
« Tant par-fu sages en toutes choses, et meisment
" en la doctrine de la foi, que ses cuersestoit aussi
« comme une aumaire pleine de livres. » (Ghron.
S' Denys, Recueil des Hist. de Fr. T. V, p. 306.)
Dans un sens relatif à l'idée de cette comparaison
du cœur avec une armaire à livres, avec une biblio-
thèque, la tète étoit aussi une armaire ; la vérité
considérée comme le dépôt des principes essentiels
à. la législation, étoit V armaire de toute toi.
Dieu ne doubtent, ne prouvoire ;
Cuidier est en leur aumoire.
Eust. Desch. Poés. MSS. p. 78, col. 1.
. . . Vérité qui est le droit aumaire
De toute loy, veult toudis estre estable.
Id. ibid. p. 21, col. 2.
En étendant l'acception de ce mot armaire ou
armoire, on en varioit le sens de manière ({\x ar-
moire tournant signifioit ce que, dans les monastè-
res de filles, l'on nomme un tour. (Voy. Gotgr. Dict.)
L'abus de l'extension fut tel , i\{x'armaire ou
rt)-îHo/re signifioit, 1° châsse, espèce de coffre oiî
sont les Reliques de quelque Saint:
Aine k'il venist al saintuaire
C'on aportoit en une almaire, etc.
Ph. MouskDS, MS. p. 293.
2° Niche dans laquelle on place une statue : « Il
« regarda en hault en une grande aumaire qui
« esloit dessus l'autel , où l'ymage de Mercurion
« estoit. .> (Percef. Vol. ï, fol. 103, R» col. 1.)
3° Espèce de tabernacle où brùloit une lampe
merveilleuse à l'honneur du souverain Dieu. « Me
« pensay que je ne pourroye mettre au non de lui
■< plus belle remembrance que de lumière;... et
" pour ce je fiz faire ceste aulmaire que vous voyez
« si noble et si riche, et y pendys ceste lampe et
« l'allumay en l'houneur de cellùy qui est souste-
« nement et lumière de tout le monde. » (Percef.
Vol. I, fol. 65, R" col. 2.)
i" Enfin le tabernacle où l'on dépose le corps de
Jésus-Ghrist. (Gotgrave, Dicl.) Il est probable que
relativement ù l'itîée de ce tabernacle, on aura dit
figurément et par comparaison, en parlant de la
S" Vierge :
Moult ait en li très glorious amaire
Ke toute fut plains dou Saint Espir.
Por herbergier son saint cors, la fist faire
Deus, ki en li voloit hom devenir.
Chans. fr. MS. de Berne n' 389, fol. 30, R'.
On a remarqué sans doute qu'anciennement il
n'y avoit pour le genre aucune dilTérence entre
armoire et armaire. En effet, le changement de la
diphthongueft?" en oi pouvoit-il altérer la nalured'un
substantif qui, sous l'une et l'autre orthographe, fut
toujours des deux genres, jusqu'à ce qu'on eût
imaginé que sous celle à'armoire il étoit essentiel-
lement féminin, et masculin sous celle û'armaire?
(Voy. Nicot et Monct, Dict.) On croit donc que ce
féminin armoire pour lequel l'usage s'est décidé,
même à l'exclusion d'armaire masculin , n'est
qu'une altération de l'orthographe primitive ;qu'«î'-
maire et armoire étant de même origine , on les
faisoit féminins relativement à la terminaison qui
sembloit féminine , et masculins relativement au
genre du substantif latin armarium, dont ils
étoient formés. (Voy. Armarie.)
VARIANTES :
ARMAIRE. Gotgrave, Nicot et Monet, Dict.
Almaire. Ph. Mousk, MS. p. 293.
Amaire. Chans. fr. MS. de Berne, part, m, fol. 30, R".
Armoire. Mém. d'Oliv. de la Marche, lir. i, p. 291.
AULMARE. D. Carpentier, S. Gl. lat. de D. Gange, à Alniaria.
AULMOIRE. Lanc. du Lac, T. II, fol. 38, R» col. 1.
Au.\i-\mE. Percef. Vol. I, fol. 63, V" col. 1.
AUMOIRE. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 78, col. 1.
AusMOiRE. Percef. Vol. VI, fol. 109, V» col. 2.
Au.MOYRE. Poës. de Villon, p. 4.
Erm.vire. Gelt-hell. de L. Trippault. — Cotgrave, Dict.
Ermoi.se D. Carpentier, S. Gl. 1. de D. C. à Annazium.
Hermaire. Gelt-hell. de L. Trippault.
Ormaire. Gotgrave, Oudin, Nicot et Monet, Dict.
Or.moire. Mém. de Sully, T. V, p. 37(3.
Armairiei", subst. masc. Ghantre, ou Procureur
d'abbaye. Quelque décisive (lue soit en général l'au-
torité de D. Garpenlier, on doute qnarmairier si-
gnifie chantre en ce pa.ssage : « Roui Potet Cheval-
« lier, par devant Fr. Nicolas de Mounier Souprieur
» et Armairier de l'abbaye de Boneval, .... fina
« audit Àr)narier pour demoiselle famé feu Aubert
« Potet à cause de la garde de ses enfans... vi lib.
« pour son droit. » (D. Garpentier, Suppl. Gloss.
lat. de Du Gange, au mot armarierius; tit. de
1348.) Peut-ètre'que dans un sens relatif à celui
d'armaire , lieu propre à serrer, non les livres
(1) Le r de armarium étant lingual, comme dans l'italien, se change en l, qui devient voyelle : almaire, aumaire. De
même Arvernia, Alvernia, Auvergne; arbor, albre, aubre... (n. e.)
AR
— -151 —
AR
d'Eglises, mais les titres de l'abbaye, l'on aura
nommé Armairier le Procureur ou l'Agent de cette
abbaye, comme étant le dépositaire des titres essen-
tiels à la conservation et à la perception de ses
droits.
VARIANTES :
ARMAIUIER, Armarier. D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat.
de Du Cange, au mot Annatierus ; til. de 13^.
Armaison, suhst. fém. Défense. Signification
relative à l'usage qu'on fait d'une arme pour se
défendre. « Cecy est plus à'armaison que cela. »
(Cotgr. Dict.)
Arinarie, mhst. masc. et fém. Armoire. Maga-
sin d'armes. Armes en termes de blason.
Il paroit que dans l'origine de notre Langue, les
mots françois formés de mots latins terminés comme
armarium, n'étoient pas essentiellement féminins ;
que relativement au genre du substantif latin, ils
étoient quelquefois masculins en françois, comme
armarie dont on prononçoit r<^ final, probablement
sans autre idée que celle d'imiter le son de la der-
nière syllabe d'anHarà//». « L'n almarie esteit el
« porclie del temple, ù l'um meteit les oblaciums
«' numéement que li Reis soleient faire as sabalz e
« as jurs festivals. » (Livres des Rois, ms. des Cordel.
fol. \-\% R-col 1.)
C'est par une extension semblable à celle de
l'acception primitive û' unitaire , qu armarie ou
almarie, si rarement d'un autre genre qn'ariiiairie
ou urmoirie toujours féminins, a signifié en géné-
ral lieu, meuble propre à serrer toute autre chose
que des armes. On nommoit en ce sens armairie
ou armoirie, une armoire pratiquée dans un mur,
quel que fût l'usage auquel elle étoit destinée.
" Geste rtrH(fl/r/e qui est dedans ce mur... souloit
« estre par dehors si subtilement fabriquée, elc. »
(Percef. Vol. 1, fol. 3, V" col. 2.) « Un chacun peut à
« ses frais affermir son bastiment dans la muraille
" commune... sans... luy ester quelque chose de
•< son épesseur, soit pour faire des cheminées, ar-
" moiries, ou autrement. » (Coût, de Bru.xelles, au
Nouv. Coût. gén. T. l, p. 1209, col. 1.)
En comparant la Bible à un dépôt sacré el mys-
térieux, on a dit figurément : « Cist livres est cum
« armarie des secrez Deu ; plein est de figure et
« de signeliance. » (Livres des Rois, îhs. des Cordel.
fol. 2, V° col. 1. — Voy. AnMAiRiî.)
On rappeloit la signification de ce mot à l'étymo-
logie, en nommant armairie ou armoirie , un cof-
fre, un meuble, un lieu propre à serrer des armes,
un magasin d'armes. (Voy. Cotgrave, Dict). « Avoit
" fait porter secrettement avec luy son harnas de
« guerre en paniers ; et quant ceux qui estoient
« aveuc luy se conclurent d'eulx armer avecq
» lui, pour ce qu'ils n'avoient point de harnas, le
« Duc leur en fist baillier de son armoirie. » (J. Le
Févre de S' Remy, Ilist. de Charles VI , page 9.)
« Commanda que.... se il leur falloil chevaulx ne
« armeures, ilz s'en allassent en ses estables et en
« son armoirie, et qu'ilz en prinssent à leurs vou-
« loirs. » (Percef. Vol. I, fol. 125, R° col. 1.)
Pouldre, bouletz, et grosse artillerie ;
Vivres assez, enseignes, wmarie.
J. Marot, p. 96.
Peut-être qu'en ces vers armarie est le nom col-
lectif d'armes en termes de Blason. Lorsqu'à la un.
du xr et au commencement du xu' siècle, les Nobles
occupés dans les combats du besoin de se faire
reconnoitre, joint au désir bien naturel de fixer les
regards sur leurs exploits, eurent imaginé à l'exem-
ple de ceux ([ui se signaloient dans les tournois, de
se distinguer les uns des autres, par les cottes d'ar-
mes, par les pannes, les couleurs, les métaux elles
figures plus ou moins arbitraires dont ils ornoient
leurs écus, on nomma armes, ces ornemens distinc-
tifs des armures, des écus, des cottes d'armes, des
bannières. C'est donc relativement à l'usage de ces
ornemens, dont la distinction originairement per-
sonnelle el passagère devint héréditaire et perma-
nente, qu'en termes de Blason, armarie a signifié
armes, bannière armoriée dans ces vers :
L'orgueilleuse armarie
Au fier Marcou de la grand'seigneurie,
Ostée fut des tours, murs el palUs,
Pour donner lieu aux nobles Heurs de Hz.
J. Slarol, p. 138.
Il semble que montrer Yarmarie, c'étoit arborer
la bannière armoriée, ou se faire connoilre à ses
armes, à son écu armorié, à sa cotte d'armes.
Qui en amours veut esti-e heureux,
Faut tenir train de seigneurie,
Estre prompt et avantureux.
Quant vient à montrer Yarmarie,
Porter drap d'or, orfaverie ;
Car cela les Dames émeut.
Tout sert : mais pour Saincte Marie,
11 ne fait pas ce tour qui veult.
Poès. à la suite de Villon, p. 64,
En faisant allusion aux armes, aux écus armoriés
dont la Noblesse se glorifie, on a dit figurément :
Ail dieu Bacchus rendit grâces condignes,
Qui tant avoit multiplié les vignes,
Que Terre adonc portoit pour armarie
Thirses hachez de vigne trés-flourie.
J. Marol.p. 48.
Probablement, ce mot cessoit d'être regardé
comme le nom collectif d'armes en termes de Bla-
son, lorsqu'en préférant à l'orthographe armarie
celle A' armoirie Qïicwe usitée au pluriel, on disoit
armoiries et qu'on définissoit le singulier armoirie,
pièce d'armes, de blason d'armes, de blason armo-
riai. (Voy. Monet, Dict.) « Il peignit les armoiries
CI d'un vilain nouvellement annobli, oîi il y a tou-
« jours à mettre et à oster ; car on dit que les
« armoiries d'un vilain sont faites à plaisir. >> (Bou-
cbet, Sérées, liv. m, p. 98. — Voy. Armerie.)
On a écrit des volumes sur l'origine de ces Armoi-
ries. Pour savoir ce qu'ils contiennent de plus
intéressant et de plus vrai, il suffit de lire une Dis-
sertation très-courte et très-instructive sur « l'Ori-
« gine des Armoiries en général, et en particulier
" de celles de nos Rois, » imprimée dans les Mém.
de Littérature (T. XX, p, 579 et suiv.) L'Auteur de
celte Dissertation, aussi lumineuse que savante, est
M. de Foncemagne, à qui nos antiquités semblent
être révélées, lanl son érudition est ingénieuse à
AR
- 152 —
AR
les dévoiler. Après avoir observé que l'usage des
Armoiries, de ces marques héréditaires de noblesse
et de dignité, qu'on distingue avec raison des ima-
ges symboliques, qui dès les premiers temps ornè-
rent l'armure des Guerriers, ne peut être plus
ancien que le xi' siècle, il fait voir qu'on assigne à
cet usage une même épo(iue (1) ; soit qu'on en rap-
porte l'origine aux tournois, où les JNobles qui pré-
tendoient à l'iionneur d'y signaler leur courage et
leur adi^esse, se faisoient connoitre par l'écu de
leurs armes; soit aux Croisades, où les bannières
armoriées des Clievaliers étoient si nécessaires
pour le ralliement de leurs vassaux. C'est même
par la réunion de ces deux opinions, différentes
quant à la circonstance de l'introduction des Armoi-
ries, mais semblables quant au temps oii elles fu-
rent introduiles, que M. de Foncemagne parvient à
constater qu'elles commencèrent avec les tournois,
dont l'éliiblissement a précédé de peu d'années la
première Croisode ; que les Croisades en étendirent
et fixèrent l'usage, variable dans les commencemens,
et restreint aux seuls Gentilshommes qui avoient
assisté il quelque tournoi. Il ajoute que ce fut aussi
depuis les Croisades que les Armoiries devinrent
héréditaires (2).
VARIANTES :
ARMARIE. Livres des Rois, MS. des Cordel. fol. 2, V».
Almakie. Livres des Rois, MS. des Cordel. fol. 142, R».
Arm.\irie. Tercef. Vol. I, fol. 3, Y" col. 2.
Armoiiue. l'ercef. Vol. I, fol. 125, R» col. 1.
Armatot. On nommoit bandage à-Varmatot, le
bandage d'une arbaleste de passe; à raison peut-
être de ce qu'au moyen du bandage adapté au fût
de l'arbaleste, on avoit bientôt mis cette arme en
état de lancer une flèche. (Voy. Brantôme sur les
Duels, p. 82.)
Armature, siihst. fem. Armure. En latin a?'?Ma-
turu. " La cuirasse ([ue les Poètes appellent Egide....
» est Vannaliire des corps célestes seulement. »
(J. le Maire, lllustr. des Gaules, liv. i, p. 101.) On a
du ligurément que « sans Varmature de pru-
« dence le dieu Mars ne sauroit conduire ses
- batailles. » (Id. ibid. p. 102. — Voy. ARiiEruE.)
Arniazi, snbst. masc. Armoire. Mot formé du
latin aniiariiim, qu'on altéroit en prononçant ar-
marJum, armazi en languedocien. (D. Carpenlier,
Suppl. Gloss. lat. de Du Cangc, au mot Armazium.
— Voy. Ermoise sous Armaire.)
Arme, subst. fém. Armes, armoiries. Cotte
d'armes. Fait d'armes, prouesses, exploit militaire,
combat. Armoire ; retrait, lieux, aisances. Défense
d'un sanglier. Espèce de courroie.
L'opinion la plus générale sur l'étymologie du mol
latin arma, armes en françois, paroît être aussi la
plus vraisemblable. En réfléchissant à la façon de
porter les plus anciennes ar7nes et de s'en servir,
on aperçoit quelle peut être la raison de croire
qu'«?7««s, en françois épaule, bras joint ù l'épaule,
est l'origine d'un mot qui a signifié bouclier, car-
quois, flèches ; par extension toute espèce de chose
dont on se dit armé, quelle que soit la manière de
la porter et de s'en servir pour l'attaque et la dé-
fense. On a nommé fln/u's, les basions que l'homme
de guerre portoit pendant ab armis, par un baudrier
porté en escharpe ou autrement. (Nicot, Dict. —
Voy. Vossius, Etym. Ling. Lat.) « Est Dict. arme,
« Cousteau, espée, bisarme ou vouge, lance ou ja-
« véline, espieu, dard, et tout fer êsmoulu et non
" esmoulu, barre, baston, tison, et tout autre chose
« de quoy l'on pourroit tuer ou blesser un homme. »
(Coût, de S' Sever, au Coût. gén. T. H, p. 094.)
Dans le langage de l'ancienne Chevalerie, les
armes courtoises étoient des armes sans fer, des
armes sans pointe et sans tranchant, destinées à
l'usage des Tournois, de ces combats où la noblesse
ne disputoit que d'adresse et de galanterie: au con-
traire, les armes esmolues ou molues, étoient des
armes affilées et aiguisées sur la meule, des armes
pointues et tranchantes. « Armé d'armes molues,
« c'est assavoir d'un demy glaive, d'une espée et
« d'un grand coustel. » (D. Cârpentier. Suppl. Gloss.
lat. de Du Gange, T. l, col. 290 ; tit. de 1375.) « Il
« me féri de ses armes esmoulues, et me donna
« coups et colées dont cuir creva, et sanc en issi,
« et me fit plaie mortieux ipii bien sont apparis-
« sans. » (Oi'd. T. 1, p. 257.)
C'est par extension et relativement à l'usage des
armes esmoulues, dans ces combats qui dévoient se
terminer par la mort de l'un des combattans, qu'on
aura nommé arnw esmoulue, toute espèce d'arme
offensive avec laquelle on donne la mort, même en
assommant. « Toutes loix se jugeront parEschevins,
« et en sera usé en la forme et manière que s'en-
« suit : à sçavoir pour simple main-mise entre
« particuliers quatre livres tournois ; de main-
« mise d'armes émohies , ores que sang y ait ou
« non, vingt livres tournois : bien entendu que
« soubs le nom de tels basions d'armes émoulues
* sont compris arcq-a-balestre, arcq à la main, plo-
« met, maillez de plomb, aussi pots, trenchoirs, et
« autres basions ayans fer, plomb, eslain ou autre
« métal. » (Coût, de Hainaut, au Nouv. Coût. gén.
T. II, p. GO, col. 1.)
Les armes offensives de l'espèce des javelines,
des lances, des pique.s, des hallebardes et des per-
tuisannes, se nommoient armes d'ast ou d'hast,
parce qu'elles étoient emmanchées d'un long bois,
d'un fût, en latin Iiastile. Ce fût, dont on les em-
manchoit, éloit la raison pour laquelle on les nom-
moit aussi armes d'haute ou de liante; mot qui
semble formé de l'allemand hand, en françois main,
et altéré dans l'orthographe hampe. (Cotgrave, Dict.)
(1) U ne faut pas, en efîel, confondre les peintures de l'écu, connues même des soldats romains, avec les armoiries,
aessins réguliers, ayant pour origine la garniture de fer fixant au bois le cuir du bouclier. (Voir Quicherat, Histoire du
Loslione, passvn) (N. e.) - (2) Les armoiries sont le signe de la puissance terrienne au moyen-âçe, où la condition de
i nomme était ceUe de sa terre ; si les communes possèdent des armoiries, c'est qu'elles sont des seigneuries coUectives. (n. e.)
à
AR
— 153 —
AR
Anciennement, s'armer de pleme& armes ou
d'armes plenières, c'étoit se conformer aux loix de
la féodalité, aux usages de la Chevalerie, ou aux
Ordonnances militaires, en s'armant de la façon
prescrite par la loi, l'usage, ou par l'ordonnance
qui fixoit l'idée des armes plenières, des pleines
armes, ou d'une armure complète.' « Le Koi armé
« de ses plenières armes, etc. » (Du Gange, Gloss.
lat. T. I, col. 697.) « Le comte d'.4rtois armé en ses
« pleines armes, etc. " (Id. ibid.)
Les armes pleines, qui pour un Ecuyerétoienl le
roussin, le gambeson, le chapel et la lance, étoient
pour un Chevalier, le cheval, le haubert, l'écu,
l'épée et le heaume. (Voy. Ane. Coul. de Normandie,
Ms. part. II, chap. xxv, citée par Du Cange, ubi supra.)
On indiquoit le service féodal et militaire auquel
assujettissoit la possession d'un fief de haubert, en
disant qu'il servoit en pleines armes, qu'il éloit
tenu à pleines armes; parce que le Chevalier ou
possesseur de ce fief étoit obligé de le desservir
armé de pleines armes. (Voy. Du Cange, Gloss. lat.
T. I, col. 697.)
Il paroit que l'homme ainsi armé, étoit celui que
par excellence on nommoit homme d'armes; c'est-
à-dire, homme armé de toutes pièces, homme ser-
vant avec l'armure complète et à cheval. (Voy. Cot-
grave et Nicot, Dict.) De 1^, on a dit en opposant
les piétons aux hommes d'armes :
Piétons meuvent, cil d'armes montent :
Coiteus que leur vueil acomplissent,
Seiréeraent de la ville issent.
G. Guiarl, MS. fol. 100. Rv
Probablement, on désignoit l'épée, comme faisant
partie des armes pleines, ûeVavnmre complète d'un
homme d'armes ou d'un Chevalier, lorsqu'on disoit
espée d'armes. L'espée d'armes étoit la même que
l'espée de chevalier. (Cotgrave, Dict.)
La comparaison assez fréquente des habits sacer-
dotaux avec les armures, est une preuve entre autres
que le parallèle de la Chevalerie avec le Sacerdoce
étoit familier à nos Ancêtres. C'est d'après ce paral-
lèle adopté par les gens d'Eglise, qui se plaisoient
quelquefois eux-mêmes à mêler par de semblables
comparaisons, aux idées saintes de leurs fonctions
sacerdotales, les idées nobles de la profession mili-
taire, qu'on a dit : « Armes-Dieu, Armes Nostre
« Seigneur, » pour signifier habits sacerdotaux.
" L'Evesque de Paris esloit revestu des armes
« Nostre Seigneur, et tout le collège aussi, où
'• moult avoit grand clergé. » (Foissart, Vol. IV,
p. 41. — Id. ibid. p. 2-J.) « Le Chapelain se revestit
« des armes de Nostre Seigneur Jesu-Christ, et
« chanta la messe. >• (Lanc. Du Lac, T. III, fol. 9'2,
V° col. 2. — Percef. Vol. VI, fol. 427, K- col. 2, etc.)
Erranment s'est des armes-Dieu vestis ;
Lors fu li lieus par lui rebeneis...
Chanta la messe rApostole gentis.
Enfance d'Ogier le Danois, MS. do Gaignal, fol. iU. V col. '2.
Il est encore possible que celle façon de désigner
les ornemens du Sacerdoce, ait été plusieurs fois
relative à l'idée des armoiries, par lesquelles la No-
blesse se distinguoildans les tournois elles combats.
n.
et qu'elle se rendit propres et héréditaires. (Voy. Ar-
MARiE.) On a nommé armes, cesmaïquesdislinctives
et héréditaires de la Noblesse, parce que les Nobles
en ornoienl leurs écus, leurs cottes d'armes, leurs
bannières, leur armure en général. De là, l'expres-
sion inusitée faire arme, c'est-à-dire blasonner,
peindre des armes ou armoiries. « Si tu demandes
« comment se faict arme.... je te dis qu'elle .se faict
« chacun escu de cinq couleurs, et d'un métal des-
« sus, ou le contraire.... si un escu est d'argent, il
« doit avoir un lion de gueulles; si l'escu est de
" gueulles, un lion d'arge'nt. Ainsi se doit faire ar-
« moirie d'une couleur et d'un metail. » (Fauchet,
Orig. liv. I, p. 101.)
Les armes pleines ou armes pures, qu'en termes
de Blason l'on oppose aux armes brisées, appar-
tiennent aux aînés des familles, que pour cette rai-
son l'on nomme Chefs d'armes. « L'aîné des frères
« a droit et prérogative à'arines plaines el pures,
« au regard de ses puînés qui n'ont droit que des
•« brisées. » (Monel, Dict. — Laurière, Gloss. du Dr.
fr.) « Les armes vrayes sont celles où couleur n'est
« mises sur couleur, ni métal sur métal, es pièces
« principalles de l'écu ; » autrement ce sont des
armes fausses. Il y a néanmoins des cas où les
armes sont vraies, quoiqu'on se soit écarté de la
règle ordinaire du Blason, en les composant de
métal sur métal, ou de couleur sur couleur ; c'est
lorsque le motif de cet écart est glorieux pour celui
dont les armes ainsi composées se nommoient
armes à enquerre, comme les armes chargées,
parce qu'elles excitoienl la curiosité de s'enquérir
de la raison de cette irrégularité. (Monet, Dict.)
Les armes en quarré distinguées de l'écusson et
affectées par la Coutume de Poitou à la dignité de
Comte, de Vicomte ou de Baron, représèntoient
sans doute la bannière qu'ils avoienl droit de porter
à la guerre. « Peut le Seigneur, Comte, Vicomte ou
« Baron, en guerre ou en armoirie, porter ses
" armes en quarré, ce que ne peut faire le Seigneur
« châtelain, lequel seulement les peut porter en
« forme d'Ecusson. » (Coût, de Poitou, art. 1, cité
par Laurière, Gloss. du Dr. fr. T. 1, p. 131.)
On dégradoitun Chevalier coupable d'une lâcheté,
d une perfidie, d'une action contraire à la noblesse
de son état; on le vouoit à l'infamie en renversant
ses armes, Vécu de ses armes. Le roi Jean dans ses
lettres, datées du 6 novembre 1351, dit en parlant
des Chevaliers de l'Etoile : « Se il y a aucun qui
>' honteusement... parle de bataille ou de besoîgne
« ordenée.... li tournera l'en.... ses armes ei son
« timbre, ce dessus dessous. » (Ord. T. II, p. 466.)
Les armes de Bertrand, où tant a de vigueur,
Ont pendue laidement, ainsi come trahiteur,
Et traînée aussi au long d'un carrefort,
Et les ont enversée, en monstrant par frenour,
Que Bertrand de Glaiequin a cuer de boisfour.
Chron. .MS. de B. Du Guesclin, Du Cange, Gl. 1. à Arma reversnta.
Il est probable qu'à raison des armoiries dont
les Chevaliers ornoient l'espèce de casaque qui cou-
vroit leur armure, le mot armes aura signifié cotte
à'armes. « Portoient les harnois à ung'Chevalier ;
20
AR
154 —
AR
.. haulberl et heaulme, et chausses de fer et genoil-
« lieres, et armes de blanc samit. » (Lanc. du Lac,
T. 11, fol. 8t>, R-col. \.)
L'acception figurée de ce mot armes, par lequel
on.désignoit les' faits d'armes, les prouesses de la
Chevalerie dans les combats et les tournois, n'est
pas plus extraordinaire que celle du mol plume,
par lequel on désigne aujourd hui l'expression des
idées d'un Ecrivain, la manière dont il les exprime.
Ainsi, 1 on disoit ligurément, faire armes, faire de
grandes armes, chercher armes, etc. (Froissart,
Vol. II, p. '2Gr.. — Vigil. de Charles Vil, part. I,
p. 197. — Ibid. part. Il, p. 108, etc. — Nicot et Mo-
net, Dict.) « Si est ce qu'î^i laide des armes que lit
« la Gendarmerie françoise, tous les AUemans
« impériaux furent rompuz. » (Du Bellay, Mém.
liv. X, fol. 324, R^) « Diray des autres nouvelles
>' armes que Sainlré fist à rencontre du Seigneur
>> de Loiselench. » (Hist. de Saintré, p. 307.)
Les faits d'armes, les prouesses de la Chevalerie,
en général les exploits militaires, les combats de la
Noblesse armée pour la gloire et la défense de
l'Etat, se nommoient armes armiyères, armes de
guerre, armes guerroiables, par opposition aux
armes de paix. (Vov. Chasse de Gaston Phébus, ms.
p. 276. — Ilisl. de 'Saintré, p. 39. — Ibid. p. 221,
etc.) Dans la noble maison où s'assembloienl les
Chevaliers de l'Ordre de l'Etoile, il y avoit une table
d'honneur à laquelle s'asseyoient tous les ans, la
veille et le jour de la fête "de l'Assomption, « les
« trois Princes, trois Bannerez et trois Bachelers
« qui l'année avoient plus fait en armes de guerre;
« car nul fait à'armes de pais n'y esloient mis en
« compte. » (Ord. T. 11, p. 4G6.)
Ces armes de paix, autrement nommées armes
de plaisance ou de plaisir, armes courtoises, étoient
les faits d'armes, les prouesses, les combats par
lesquels cette même Noblesse signaloit l'ardeur
d'êtie utile à l'Etat, sa passion pour la gloire, et le
délire héroïque de sa galanterie. •> Les armes de
« plaisance ou de plaisir se faisoient pour exercer
•' les armes et continuer le mestier, pour habilleté
« de cors, et apprendre à valoir pour la delîense
« du bien public. » (Voy. Olivier de la Marche,
Gage de bataille, fol. 2, V°. — Ibid. fol. 13, V^) Le
mérite d'être à table le plus mangeant, n'en étoit
un sans doute, qu'autant que le bon appétit d'un
Chevalier annonçoit une force qui lui assuroit la
supériorité tant en armes arvtigères qu'en armes
courtoises; c'est ainsi qu'il faut lire, au lieu d'armes
convoijtises, en ce passage : » Dame d'honneur ne
« peut aymer homme envyeulx, se ne feusl les
« bonnes vertus pour en estre le meilleur : comme
'■ à l'église le plus devosl, îi table le plus mengeant ;
« en compaignie de dames le plus gracieulx et
« plaisant ; eh armes armigeres, on armes convoxj-
" lises plus vaillant, et de ce avoir envie pour faire
« le mieulx. » (Hist. de Saintré, p. 38 et 39.)
Les armes courtoises, les armes de plaisance ou
de plaisir, se nommoient aussi armes d'einprises,
relativement au motif de gloire ou de galanterie
qui faisoit entreprendre ces armes ou combats, que
la rivalité et même la haine changèrent trop sou-
vent en combats à outrance, en armes à outrance.
« Chacun de bien en mieux, à son povoir, seeraploye
« d'acquérir la très noble grâce d'honneur ; soit en
•' ar7nes d'emprises, soit en guerres guerroyables,
« et en toutes honnesles fayons. » (Hist. de Saintré,
p. 221.)
On disoit d'un jeune Ecuyer, qui pour la pre-
mière fois figuroit en lice les armes à la main, qu'il
faisoit ses pretnières armes ; expression qui nous
est encore familière , malgré l'oubli des usages de
l'ancienne Chevalerie. » .Après les présentations
« faites,.... tous se retirèrent d'un costé et d'autre,
« hors de la lice; e.xcepté un Escuyer... conduit
" par le dit de Compays, lequel Escuyer esloit
« ordonné à faire st's premières armes. » (Mém.
d'Olivier de la Marche, liv. i, p. 192.)
Il paroit que les armes à cheval étoient les com-
bats à la lance, distingués des combats à l'épée, au
poignard, à la hache, qu'on nommoit arènes à pied.
« Se présenta un escuyer nommé Heni'y de Gouvi-
" gnon monté et armé pour faire armes à cheval
« et d'autre part se présenta un escuyer nommé
« Jehan de Chaumergis Cérémonies faites et
•< accomplies, les Escuyers furent saisiz de leurs
lances. » (Mém. d'Olivier de la Marche, liv. i, p. 19.").
— Id. ibid. p. 200. — Le Jouvencel, ms. p. 354, etc.
'< Estoyent assignées les armes de pié entre Jehan
« de Compays, seigneur de Torain,.... et .\nthoine
« de Vaudrey seigneur de l'Aigle Ledict Vaudrey
« fit délivrer au Mareschal de Bourgongne.... deux
« haches et deux espées.... Fièrement s'assemble-
« rent les deux Escuyers.... et ledict de Vaudrey
« donna de la pointe de l'estoc au bacinet de son
« compaignon. Que feroy-je.... long récit d'icelles
« armeâ'^ Si se partirent à l'honneur des
« Parties Je ne vey onques puis ce jour nulles
« armes combatre de l'estoc, en armes à pié, sans
'• relraitle : et qui les entreprendra, il les trouvera
« dures it achever ; et furent cestes armes corabatues
« l'an 1443, parun jeudyhuictiemed'Août. »(Mém.
d'Olivier de la Marche, liv. i, p. 203-206.)
En opposant, comme a fait Monstrelet, (Vol. 111,
fol. 73, R°) le verbe jouster à l'expression faire
armes, on opposoit vraisemblablement aux armes
à pied, les armes à cheval, les joutes ou combats à
la lance. Il est possible qu'on ait nommé armes par
excellence, les armes à pied: ces armes ou combats,
qu'il étoit si rare et si glorieux d'achever sans
retraite, et dans lesquels on hasardoit sa vie comme
dans les combats à outrance.
On sait que dans le langage de la Chevalerie,
faire armes à outrance, c'éfoit « combatre en lice,
« à glaives esmoulus, jusques au mourir, ou au
« rendre. » (Mcot, Dict.)
Le sort des armes étant heureux un jour, un
autre jour malheureux ; on en a désigné l'incons-
tance, en disant que les armes étoient journales,
qu'elles étoient journalières : expression qu'Olivier
de la Marche, historien du xv siècle, paroit avoir
AR — 155 —
inventée , et dont l'usage semble nous avoir été
transmis par les Ecrivains du xvi' siècle Ainsî
« que les armes sont jotirnales, et les bonnes
« aventures a la disposition de fortune, etc. » (Mém
dOMvier de la Marche, liv. ,, p. 193.) Lorsque
Charron d.so.t qu'.l étoit « bon de'^penser au hazard
« des armes qui sont journalières, » on étoit sans
doute familiarisé avec cette expression encoe
nouvelle au commencement du xvi' siècle nuisau'on
en modifloit l'usage en disant: . Les «rS s°n
" ^'\/i"e je parle ainsi, sont yo«m / " ÎV e
^sujettes à la fortune. ., (Dialog. de Tahuréau foL
;> ■ ,~ ^^y- Sagesse de Charron, p. 434 )
Que le mot arme eût signifié «rmafr^, lieu propre
r.h"'"'"'''' des armes, ce seroit une ex tens on dSnî
1 abus sembleroit moins étrange que celui d'une
extension au moyen de laquelle il paroi avôi?
Si' "«"-seulement une armoire, que^Z' en m
I usage, mais un retrait, les lieux, les aisancS
d une maison. .< Lorsque d'un cos é seul dS la
« muraille se trouvent des potelles, «jws chemi^
.< "eos conduits de la fumée; semblaE sSs
" font foy que h. muraille appartient à celuvseS
« du coste de qui ils se trouvent. . (Coût de Bra-
xenes au Nouv. Coût. gén. T. I, p. 1268 col 1
« Nest licite faire chambres aysées nommées'
« fosses «m^s ou latrines, ou fosse deTuïsfne
» pour tenir eau de maison auprès d'un mï?
p")'), '^""'' ^^ Montargis, au Coût. gén. T. I,
à ndée'^Sp 1 'nl?rP,'/'''°" toute simple et relative
d 1 iciee de 1 usage des annes défensives aue les
£sr.. ïïrSs î' ^•'•"^"'''^'i.^"^ ét/'nSJei
uimt6. Les dens dessus ne h servent de riens
« fors que d'aguiser celles dessoubz et ceTles
« dessoubz appelle on les armes ou mes du saiî
glier „ (Chasse de Gaston Phébus, ms. p 62 ^
lath' imis'm^r.! f™^/st réellement fomé du
iduii aimus[\), la signifîca ion se rannrorboit rip
letymologie, lorsque dans le sens de l'ancien mn^
enarmes, on nommoit armes les courroS m ser
anp^r// «^'"'^rasser l'écu, les courroves dans lej."
quelles on passoil le bras pour tenir l'écu et sVn
couvrir. „ s'alla le Chevalier afficher es eslrîersp^
« embrasser l'escu par les armes, hé et enflammi
« de mal talent. ,> (Percef. Vol. I fol S _] Tn
<lu Lac, T. I, fol. 74. - Voy. Enar.e i) '' ^'"'•
AR
Armé, participe et substantif. Couvert énninp
Homme armé (2). ^uuveit, cquipe.
ffuolî 'f H "r'j""'^ "' Chevaliers, et on les distin-
guoit a la différence des cottes d'irm^^ Lt î
armoiries dont elles élLn ornées lorSuls
n avoient point de cottes d'armes sS? leur cuSsst
!Tiune co'wf''.\ ^" .^^'^«''.q"'il« étoient . sans
nulle tognoibsance et armés à crud »
Touts cils de l'ost Girard, sans nulle co-noissanrp
lintie eux et les François, quant seront tuit en tourbe
p, Ger. de Roussillon, MS. p. 165
cest relativement à l'effet visible du noli dp
i mrf Ton^Z%''''' del'expressioiu^^rïnS
a iiuci, 1 on a dit être arme au cler, être arnip à
Lvon" ""'''' e Bourgmaistre che^'auchaif Sa.i
•">""'. et tous ses gens an/tes au cler 1p
ibid^rô?.)- " ^"■'"''''' ''''■ "' p ««• - 1^
Il semble que cette manière de s'armer ait été
spécialement affectée à l'appareil du triomphe
'a' ■ -• •■ i,- ■ devers Gènes s'adresse
Arme a blanc, en triomphe et honneur, etc.
r,„j , , J- Marot, p. 28.
Dedans la noble et grant cité de Bresse
tntra Loys, de ce nom le douziesme
Arme a blanc, triumphant en prouesse.
r»« I «1 f , J- Marot, p. 136.
Peut-être generalisoit-on l'idée particulière dp
s équiper, se couvrir en s'armant, iL qu'o disoit
: ame'uS '"'Zn ''''''?'^ f'' «' "'^^ ^ë toute
aimeuies. » (Voy. Arjier. « Se partit de Ipnns
: ciëval"'?}r"1 '1 '"'T <^rmïurlÎ!nlfTe
Cheval. .. (Lanc. du Lac, T. Il, fol. 130, V° col 2 )
Ont ja cinq grant bataille faites. '
Endroit ceus qui viennent serrez ' '
tt armez d'armeures chieres
En a es chans deus grans et'fieres.
G. Guiarl, MS. fol. 264, R' et V-
On abusoit étrangement de l'acception o-énéralp
de ce participe armé, en disant figurémenl"
Entrez sui enla nasse, n'i sai pas mon retor ■
Se ne me confortez, armez sui de folor '
Fabl.MS.du. R,„.7218,fol'.346,Vcol.2.
hnhn le participe armé étoit pris suhsinnfivp
men , lorsqu'en parlant de gens de pied m ieux"
armes, mieux défendus par leur armure aïe les
autres, on les nommoit par excellence les «m2
« Or avoient les François mis entre le nréSier
« rang e e second un rang d'Arquebouziërs
-' Le capitaine Yillefranche , lequel avoitKarip
- de la corne droite du bataillon des François col
" ^'derant que le bataillon d'Allemans qui le veno t
« a 0,'der estoit plus large que le sien,'... fëii tber
« du derrière de son bataillon les armez des deux
« derniers rangs dont il élargit sa teste ;? si est-ce
« qua laide des armes que fit la Gendarmerie
" ''Tn "' '°'"'"'''^ P^^'' "^ sieur de Boutiëre™ ous
Armée (3), subst. fém. Bataille, combat C'est nar
ellipse que le participe féminin ami^^ stibStSn-
ne rencontre qu'au Tiiv'^icli^ f^^fL^^^ ^''^''^ ^^ ^"-^ °^^<>^^^ Aewoà (n e ? - ?^^ Ini - "'/"'"'^ s'emploie pour les
Plus anctenne^ment, o^ ^^^te^^^.TolriT.r ''"="" ^^°'' °^'^"-' " (^-"-m^de Mact^ "tT/a^i^)
AR
— 156 —
AR
tivemenl, a signifié et signifie encore troupe armée.
(Nicot, Dict. — Voy. Arme.)
On alléroil la signification propre de l'adjectif
terrestre, en nommant fl/7He'e terrestre une armée
destinée à combattre sur terre, une armée de terre,
par opposition à une armée de mer, ù une armée
navale. (Voy. Monet, Dict.)
L'expression année volante, qu'on trouve dans
les Mém. de Dassompierre, (T. I, p. 121),) étoit moins
figurée, et paroitra sans doute plus naturelle que
celle de camp volant qu'on y a substituée.
On connoîl l'espèce de figure par laquelle le mot
bataille signifie armée, troupe en état de combat,
troupe prête à combattre : par la figure contraire,
le mol armée signifioil combat, bataille.
Puisque vous desirez l'armée ,
ComCatez vous, quant je vous broche.
Eusl. Deschamps, foés. MSS. p. 237, col. 2.
Armement, subst. masc. Armure. Ce mot,
encore usité dans le sens d'appareil de guerre ,
équipement de vaisseaux, a signifié armure. De Ih,
on disoit armement de teste pour armure de tète.
(Voy. La Jaille, du Champ de bataille, fol. 17, R°. —
Monet, Dict.)
Armer, verbe. Couvrir. Terme de Blason. Louer,
flatter.
Lorsqu'on disoit armer un fer de venin, on expri-
moit sans doute une idée relative à l'usage mortel
des armes offensives. (Voy. Nicot, Dict.) On expri-
moit l'idée contraire et relative l^i l'usage des armes
défensives, lorsque dans un sens non moins figuré
l'on disoit en termes de guerre, s'armer d'une
rivière, pour s'en couvrir, se poster de façon qu'on
fût couvert et défendu par la rivière. « Une rivière
« sert à merveilles à un ost.... pour seureté.... On
« passe de costé et d'autre ; on s'en arme quant on
« vieult ; on garde que les ennemis ne s'en puissent
>< aider. » (Le Jouvencel, ms. p. 144.)
En termes de Blason ou d'Armoiries, « un escus-
« son armé du Roy étoit un écusson fait à ses armes,
« un écusson îi ses armes. » (Voy.MatbieudeCoucy,
Hist. de Charles VIT, p. 737.) Pour signifier que
Robert Bruce, roi d'Ecosse, avoit dans ses armes
trois oreilles d'or en un champ d'argent, on disoit
qu'il « è'armoit d'argent à trois oreilles d'or. »
(Kroissart, Vol. I, p. 25, etc. — Voy. Arme.)
Si les Hérauts publioient la gloire des Chevaliers,
en blasonnant les armoiries de ceux qui entroienl
dans la lice des anciens tournois , ils révéloient
aussi publiquement la honte de ceux qui s'y présen-
toient au risque de s'en voir interdire l'entrée : de
là peut-être, l'ancien verbe blasonner, pris en bonne
et mauvaise part, aura signifié louer et blâmer. Il
semble que la signification d'ai'mer soit analogue à
celle de blasonner, louer, lorsque l'avocat Pathelin,
tout joyeux d'avoir escroqué le drap de maître
Guillaume en louant l'honnêteté de sa famille, dit :
.Te l'ai armé et blasonné ,
Si qu'il me Ta presque donné.
Je luy disoye que son feu père
Fut si vaillant : ha ! fais-je, frère,
Qu'estes-vous de bon parentaige !
Farce de rathelin, p. 29 el 30.
Armeraiige, adj. Qui aime les armes, les com-
bats. (Voy. Armeret.) La terminaison â'arrnerange
est une de ces licences que nos anciens Poètes se
permettoient en faveur de la rime.
Bertran de Benanges
Qui est hardiz et armcratujes, etc.
G. Machault, piise d'Alexaiarie, MS. p. 227, R- col. 3.
Armeret, adj. eisubst. Qui ala passion des armes
et delà gloire. Espèce d'armure de tête. (Voy. Armet.)
Anciennement, un Chevalier amoureux et arme-
ret, étoit un Chevalier dont l'amour ennobli par la
passion des armes el de la gloire, honoroit la beauté
et la trouvoit sensible. » Le gentil et joly duc Wince-
« lins de Boesme, duc de Luxembourc et de Brabant,
« en son temps, noble, frisque, sage, amoureux et
« armeret avoil esté. » (Froissart, Vol. W, p. 260.)
On désignoit cette passion des armes el de la
gloire, comme étant naturelle à la jeunesse, lors-
qu'en prenant armeret substantivement, on disoit :
« Il envoya... en la cité d'Evreux, devers le Capi-
« taine, en lui signifiant qu'il vousisl faire vuider
« et départir toutes manières de compaignons,
« jeunes armerets dont on se pourroit aider, et iceux
« traire devant Cocherel. » (Froissart, Vol. I, p. 271.)
Il semble que Yarmeret distingué du harnois de
tête, soit une armure de tète plus légère que le
heaume, une armure de même espèce que l'armet.
Peut-être même que pour la mesure des vers, on
aura allongé ce mot armet, en écrivant armeret.
Les ungz portoient son armeret,
Les autres son harnoiz de teste.
Brief, tout chascuu lors labouret
A avoir bruyt en ceste feste.
Vigil. de Charles VU, part. Il, p. 73.
Armerie, subst. fém. Ecusson, écu d'armoiries.
(Voy. Arme.) Ce mot armerie. qu'on pourroit regar-
der" comme une variation de l'orthographe armarie,
paroit être immédiatement formé du substantif
arme, qui a signifié armoiries. « Si coucha son doy
« sur Varmerie d'un chevalier de Portugal, en
« disant : haa ! véez-cy les armes dont le gentil
» Chevalier, etc. » (Froissart, Vol. III, p. 131.)
.... Chascun pense de s'accoustrer
Sans espargner drap dor, n'orfaverie ;
Desirans l'heure où pourroit rencontrer
Leurs ennemys, affin de se monstrer
Et enrichii' leurs noms et armerie.
1. Marol, p. 8i.
Armet, subst. mase. Casque. Ce mot armet, qui
au premier coup-d'œil semble, ainsi qu'armeret,
avoir été formé d'arme, est probablement une alté-
ration d'elmet, diminutif de l'ancien mot elme,
lielme, herme (1), à peine reconnoissable dans l'or-
thographe heaume. (Voy. Ei.me.)
(1) C'est là l'opinion do Ménage ; mais cette dérivation d'helmet en armet aurait laissé des traces, puisque le mot apparaît
au xiv siècle : « Li ars (^lairj resplendit touz des splendissours des armes, Des armez, des aubers, des jusarmes. s (Girard de
Kossillon, '3767.) D'autres préfèrent voir là un diminutif d'arme, (n. e.)
AR
157 -
AR
L'usage de ce mot annet et de Texpressioti accous-
trement ou habillement de teste avoit tellement
prévalu, dans le cours du xvi' siècle, sur celui de
heaume, que, si on en croit un Ecrivain de ce
même siècle, il éloit ridicule d'ignorer que l'armure
propre à couvrir la tête d'un Chevalier, d'un homme
d'armes, ne se nommoit plus heaume, mais armet,
bourguignotte, accoustrement de teste. (Voy. Contes
d'Eufrapel, p. 479.) Quand Pasquier, contemporain
de l'Auteur de ces Contes, dit en ses Recherches
(liv. vm, p. Oe'i), qu'au temps où il écrivoit, l'expres-
sion habillement de teste signitloit un heaume,
l'armure que sous P'rançois I" on avoit nommée
armet, il semble qu'on doive en conclure que dès-
lors le mot armet n'étoit pas moins inusité que
celui de heaume, sous le règne de ce Prince. On a
pourtant la preuve qu'au commencement du xvn'
siècle, cette expression étoit encore l'explication
d'armet. (Voy. Nicot, Dict.)
Quelque général qu'ait été sous François I"
l'usage du mot armet, celui du mot heaume ne fut
pas absolument proscrit, puisriue l'Auteur d'un
Roman dédié à son successeur Henri II, disoit
indifféremment heaume ou armet. « Le Chevalier
« des Flammes luy donna si grand coup d'espée
« sur ïarmet qu'il demeura si estourdy qu'il estoit
« hors de toute congnoissance, quand celuy des
« Flammes luy mit le pied sus la gorge et le
« désarma de heaume, prest à luy mettre l'espée
« en la gorge. » (D. Florès de Grèce, fol. 128, V". —
Ibid. fol. 138, \{\)
Jl est vrai qu'alors le mot heaume étoit infini-
ment moins usité que celui d'armet, dont on se sert
encore aujourd'hui lorsqu'on parle des anciens
Chevaliers errans ; mais l'usage d'armet paroît
avoir été aussi commun que celui de heaume étoit
rare, plus de demi-siècle avant le règne de
François I". Il est probable que les relations politi-
ques de la France avec l'Italie, en occasionnèrent
l'introduction dans notre Langue, vers la fin du
XIV' siècle. Dans les Mémoires d'Olivier de la Mar-
che, historien du siècle suivant, le casque des Che-
valiers armés pour les joutes, pour les combats à
la lance, n'est presque jamais autrement nommé
i\\x armet, de l'italien elmeto, diminutif d'elmo; en
françois elme ou heaiune, elinet ou heaumet « Se
« présentèrent en la lice... le comte de Sainct-
« Marliu d'un costé et Guillaume de Vaudrey de
« l'autre, tous deux montez et ai'mez comme en tel
" cas appartient.... Présentations et devoirs accous-
« tumez furent faictz et leurs lances baillées; dont
« il advint que de celle première course ledit de
>< Vaudrey donna tel coup au clou de la visière du
« Comte, qu'il rompit ledit clou; et.... pour celuy
<' jour ne peut estre Varmet du comte de Sainct-
« Martin refaict. » (Mém. d'Olivier de la Marche,
liv. I, p. 202. — Id. ibid. passim.)
On voit que le P. Daniel s'est trompé en définis-
sant Varmet un casque léger, sans visière et sans
gorgerin, comme le bassinet. (Milice françoise, T. I,
p. 389.) >> Baissans les veues de leurs armelz, vin-
« drent l'un sur l'autre, etc. « (D. Florès de Grèce,
fol. 133, R°. — Ibid. fol. 134, R° passim.) Non-seule-
ment Varmet dont on rappeloit l'origine en le nom-
mant quelquefois heaumet, mais le hacinet, étoient
des casques à visière. « Présentations faictes...
« et.... lances baillées... le Comte fit atteinte en
« glissant sur le heaumet du seigneur de Sey et l'en
« désarma ; et le S' de Sey consuivit le Comte au
« bord de la baviere de l'armcf et rompit sa lance. »
(Mém. d'Olivier de la Marche, liv. i, p. 195.)
>< Anthoine de Vaudrey, seigneur de l'Aigle
« estoit armé pour combatre à pié, le hacinet en la
« teste, à visière levée, etc. » (Id. ibid. p. 203.)
La preuve que ïarmet ou heaumet n'étoit point
un casque d'espèce particulière, c'est que dans le
xvr siècle on ledéfinissoiten général accoustrement
ou habillement de teste ; armure de teste, au com-
mencement du xviir siècle (1). Il est évident que ces
définitions n'étoient pas plus propres à Varmet
qu'au bassinet, au cabasset, anmorion, à \t\ salade,
h l'espèce de heaume nommé bourgnignote : aussi
trouve-t-on (\\ïarmet signifioit salaile, morion, ca-
basset, etc. « Je vous prie me dire qui le meut de
« porter ainsi ce heaume et l'escu blancs On les
<' jugeroit estre véritablement ou d'yvoire ou d'oz
« de quelque autre animal, .le vous le diray En
« ceste isie pierreuse souloit avoir un serpenL..
« contre lequel Macarée entreprint le combat, et fit
« tant... qu'il le deffit et rendit mort.... De la teste
« il en fit cest armet ou cabasset ; et du plus large
« du corps, l'escu qu'il porte. » (D. Florès de Grèce,
fol. 10(1, R°. - Voy. Fauchet, Orig. liv. ii, p. 110.—
Monet, Dict.) Probablement, tout casque, avec ou
sans visière, fut nommé armet ou heaumet,
parce qu'il étoit plus petit et moins lourd que l'an-
cien heaume auquel on l'avoit substitué. Lorsqu'on
ne connut plus l'usage de ces heaumes pesans et
incommodes dont parle Fauchet (Orig. liv. »,
p. 109), Varmet ou /(caMme^ devint heaume relative-
ment à celui qui étoit moins gi'and et plus léger.
Armeure, subst. fém. Ai'me offensive. Arme
défensive (2). Homme d'armes, Banneret, Chevalier,
Bachelier, Ecuyer. Compagnie d'hommes d'armes.
Port d'armes.
Quelque générale que fût l'acception du mot
(1) h'arinet fut, à l'origine, un casque ronJ à couvre-nuque, ayant sur le devant un masque grillé. Sous le règne de
Louis XI, le couvre-nuque s'élargit et le masque emboite le menton: c'est l'annet de gonjer'ui. Enfin, sous Charles VIII et
Louis XII, la mentonnière et le gorgerin sont articulés ; un garde-vue s'avance sur la visière et fait ressembler le haut do
Varmet à une casquette. Une forêt de plumes le couronne et un panache retombe sur le dos. La mentonnière est encore
plus proéminente sous François I", et les plumes atteignent les reins, (n. e.) — (2) La plus ancienne panoplie équestre de
notre musée d'artillerie date du règne de Louis XI. Une étude détaillée des armures peut être faite avec l'Histoire du
Costume, de M. Quicherat, et avec le Costume de (juerrc, de M. Demay (Mémoires de la Société des Antiquaires de France,
•Î874-1875). L'éclaircissement III de Tédition classique de la Chanson de Roland (p. 400-415), de M. L. Gautier, est
consciencieux et fort instructif pour l'équipement militaire du xi' siècle, (n. e.)
AR
— 158 -
AR
arme, on la restreignoit quelquefois à celle d'arme
offensive ; c'éloil quelquefois aussi l'acceplion du
mol anneure. « Cilz s"abessc o Varmcure qu'il
« avoit apportée ; si li cope la teste ; si l'emporte. »
(Rom. de Dolopalhos, ms. de N. D. n" 2, fol. 53.)
En restreignant l'acception d'arme à celle d'arme
offensive, on opposoit le mol arme à celui d'rtî--
meure, qui paroît avoir signifié plus spécialement
arme défensive. « Aux portes des cités et des bon-
« nés villes, \h où ils venront ou voudront entrer et
« demeurer, ils mettront jus toutes leurs armeures
>• et armes. » (Froissart, Vol. III, p. -248.) En effet,
cette opposition d'armes i~i armeiires semble prou-
ver ([u'armure défini par Monet, couverture d'ar-
mes, éloit dès-lors spécialement alTeclé à désigner
les armes dont on se couvre, les armes défensives,
telles que l'écu, le casque, la cuirasse, etc. C'est
d'ailleurs ce qu'atteste Nicol, en disant qu'armures
éloit plus singulier en sa signification que armes,
puisque le dernier comprenoit non-seulement les
basions de guerre, les armes offensives, mais les
escus, les armes défensives, les armures. (Voy.
Nicot et Monet, Dicl.) La comparaison d'après
laquelle ce mot armure a signifié différentes cboses
dont l'usage est relatif à celui des armes défensives,
paroît si naturelle qu'il suffira de l'avoir indiquée.
On nommoit figurément armenres de fer, et
tout simplement arineures, les Hommes d'armes,
les Bannerets, les Chevaliers, les Bacbeliers, les
Ecuyers, comme ayant le privilège exclusif de se
couvrir d'une armure de fer, qui les rendoit invul-
nérables. « Li cuens nous doit aidier en la tiere de
« Haynnau et en la contée de Flandres, à mil armu-
<- res de fer as gages accoustumés en France;
« c'est à savoir per'le Banerech vint sols, pour le
« Baceler diz solz, et pour l'Escuiier cuink solz
« tournois. » (D. Carpenlier, Suppl. Gloss. lat. de
Du Gange, T. 1, col. 296 ; lit. de 1297.) « Si esloyent
« bien trois mille armeures de fer. Chevaliers et
« Escuiers. » (Froissart, Vol. 1, p. 159.) « Si assem-
« bla en peu de temps mille armeures de fer, et
« huit mille hommes de pié. » (Id. ibid. p. 104.)
De personnes à guerre dures
Ont viixn- et XVI armeures.
G. Guiart, MS. fol. 213, U'.
11 est possible qu'en ce même sens figuré, le mot
armure ait signifié Compagnie d'hommes d'armes.
(Voy. Nicot, Dicl.)
Enfin « deffendre armures el en tenir vérité, »
c'éloil probablement défendre le port d'armes et
tenir une assise, où ceux que la loi obligeoit d'y
comparoître faisoient serment de dire vérité sur les
contraventions à cette même défense. « Peut faire
i> Vicontier dedans sa terre les bans d'aousl, el
« armures accouslumez delîendre.... et en tenir
« vérité une fois l'an. « (Bouleiller, Som. rur.
page 903.)
VAItlANTES :
ARMEURE. Rom. de Dolopathos, MS. de N. D. fol. 53.
Armure. D. Carpentier, S. Gl. 1. de D. G. T. I, col. 296.
Armeurerie, sm&s^ fém. Forge et boutique
d'armurier. Magasin d'armes. Armure. (Voyez
ArUiElRE.)
La première significationest attestée par Cotgrave,
Oudin et Monet, Dicl.
On n'a que Cotgrave et Monet pour garans de la
seconde, magasin d'armes ; à moins qu'on ne
veuille qu'armurerie signifie magasin d'armes,
dans ces vers :
.... Sans attendre assaulx, ne batterie,
Rendirent clefz, bastons, armurerie.
i. Marol, p. 171.
Mais il est plus probable qu'en ces vers, armu-
rerie est le nom collectif d'armes défensives. On a
la preuve que le même Poëte a dit, dans le sens
d'arme deffensive ou d'aj'mwre ;
Voit ses souldars faisans chère marrye,
Nudz, sans battons, n'aulcune armeurerie.
3. Marot, p. 90.
VARIANTES :
ARMEURERIE. J. Marot, p. 90.
Armurerie. J. Marot, p. 191. - Monet, Dict.
Armeurier, subst. masc. Faiseur d'armures.
(Voy. Armoyeur.) Dans le sens relatif à l'acception
spéciale A'armeure, arme défensive, ce mot armu-
rier ou armeurier, signifioit celui qui forgeoit et
faisoit les armes servant à couvrir la personne,
telles que le casque, la cuirasse, etc. (Voy. Nicol,
Dicl.) On imagine bien que nos anciens Chevaliers,
qui ne dévoient souvent leur salut et leur gloire
qu'à la bonté de leurs armeures, de leurs armes dé-
fensives, étoienl soigneux d'avoir à leur suite un
bon armeurier, un armeurier preudhomme. » Pour
u briefvement faire son voyage el accomplir ses
" armes,.... avoit.... ung fourrier, ung mareschal
« el ung armeurier à quatre chevaulx, etc. » (Hist.
de Saintré, p. 180 et 187.)
Ron paintre pour faire bannière,
Ron armurier fault que l'en quierre.
Eust. Desch. Pocs. MSS. p. 356, col. 4.
Armoier qui fait haubergons
Et harnois, doit estre preudoms ;
Car soubz la fiance de lui,
Combatent pluseurs à autrui.
Id. ibid. p. 443, col. î.
VARIANTES :
ARilEURIER. Hist. de Saintré, p. 187.
Armoier. Eust. Descli. Poës. MSS. p. 443, col. 2.
Armorier. Cotgrave, Dict.
Armurier. Orth. subsist. — Nicot et Monet, Dict.
Armigère, adj. Qui expose au sort meurtrier
des armes. On a déjà observé que par opposition
aux armes courtoises, à ces combats galants où
l'usage des armes meurtrières éloit interdit à la
Chevalerie, on nommoit armes «rm/r/c'/rs, ceux que
les rivalités personnelles ou nationales ont trop
souvent ensanglantés. Pour la Noblesse, ces com-
bats qui l'exposoient au sort meurtrier des armes,
étoienl des fêles armigères, distinguées sans doute
des fêtes courtoises, comme l'on dislinguoit des
armes courtoises les armes armigères. » A toutes
« les aultres testes royalles el solennelles que le Roy
>i tiendra, el aussi des autres fêtes armigères ou
« courtoises, etc. » (Du Gange, Gloss. lat. T. m, au
mot Heraldus, col. 1100. — Voy. Arme).
AR
— 159 —
AR
ArmiIle,SM6sL/-em. Bracelet; anneau (1). (Vov
Armiole.) Eu latin armilla, mot formé d'arvius oui
signifie bras. ' ^
Es bras aront armilles, et torkes à lor cols
Rom. d'Alexandre, MS. du R. n- 6987, fol. 186, V- col, 2.
Il semble qu'on ait étendu l'acception particu-
lière de ce mot armille, à des anneaux ou orne-
mens d'autre espèce que le bracelet.
Leur osteray de leurs oreilles
Les biaux anneaulx et les arnieiUes.
Eust. Desch. Poës. MSS. p. 532, col. 1.
VARIANTES :
ARMILLE. Rom. d'Alexandre, MS. du R. fol 186
Armeille. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 532, col. ï.
Armin adj. et siibst. masc. Qui est d'Arménie
Uui est d hermine. Hermine. (Voy Armine )
En latin Armenius (2), dont on a fait'ladiectif
françois hermins, ermin, armin, etc.
Ne sai s'est Grizois ou Hennins.
BlaiichaDdin, MS. de S' Germ. fol. 186, R- col 2
C'est par ellipse que cet adjectil', masculin même
sous orthographe hermine, signitioit comme sX
stantif, peuple d Arménie, homme d'Arménie un
Arménien. . ViUehardouin parlant de Léon I rïv
■' d Arménie ou de la Cilicie, le qualifie sirè des
«^mw/nes. » (Du Gange, Dissert. I" sur Joinville!
Por un sien Chevalier a mandé un Hermine
gui sa plaie appareille, et santé li devine '
Parlon. de Blois, MS. de S. Germ. fol. 173 R" col "
nin' rpHiSf }'^ ^°"^ on faisoit ellipse étoit'fémi-
mn, 1 adjectif hermine pris substantivement étoit
de même genre, et signifioit comme auiourd'hu
1 espèce de lourruie qu'anciennement on noinmoU
Cange Dissert. I" sur Joinville, p. 131.) En disant
peand hennin, peliçon d-ermin, on piroit :S
transforme ermin ou hermin, adjectif dai s l'exires
sion peliçon hermin, en substantif poui-déà-'ue;
1 espèce de rat d'Arménie que l'on connoit wcore
sous la dénomination elliptique d'hermine.
Vestuz fu d'un pliçon hennin
Floire et Blanchellor, MS. de S. Germ. fol. 201 V col "
Chemisete avoit de lin,
Et blanc peliçon d'ermin.
Ane. Poèl. Fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 14«.
.D„Tx, T. VARIA.NTES :
ARMIN. Poës. de Crétin, p 161
Ermin. Ane. Poët. F. MSS T. iv, p 1444
Harmin. J. Marot, p. 160
Hermin. Floire et Blaucheflor, MS. de S' Germ fnl ont
Hermine. Parton. de Blois, MS. de S^ Germ M 179
Hermins. Blanchandin, MS. de S- Germ f".' m
« destrier tout housse de très-fines amm^s etc »
(Ilist. de Saintré, p. 330. - Voy. Arm.n.) '
Dans 1 origine de l'usage des fourrures de peaux
d hermine, on cousoit ensemble ces peaux dont les
queues noires à l'extrémité et pendantes Jormoient
une moucheture naturelle, mais irrés^uS On
imagina ensuite de la fair^ plus régulière par le
luci, en oDservant les distances, de petits morcpauv
rèf-l;Ln?"'^"n'^^^°^'^'''^''^^' ^i' ■ est s s
tres-iuisant , « en sorte que ce noir ainsi entrp-
: d'iie mfn?".? '(xt^'T',^' blanchetfrSesreau;
moucheture artificielle de l'hermine, îo s m'on ci!
soit ermine mouchetée. « Les erminesnMetéès
" et genettes noires n'appartenoient qu'au" Dames
p. //. — - Voy. Armi>er.) '
Si Ihermine réservée par le cérpmnniii ri„
XV' Siècle aux Dames issues^ de San| rojï"di ,in-
guoit les Rois et les Princes dans lel grandes Sié
monies, elle annonçoit aussi la supérior Ué du ran.^
des .seigneurs et du mérite des Chevaliers oîi
après avoir fait d'hermine leurs cottes d'à mes^Sn
firent eurs armoiries. Vraisemblablement on Val"
soit allusion à l'hermine, comme h la première Tel
deux pannes ou fourrures en usage dans lesJrmot
ries, lorsqu'en parlant d'un Chevaliei du premier
mérite d'un mérite supérieur, on disoit figuSenî
qu II etoit « hermine et sable de tous Chevaliers ,
De tous Cevaliers convenables
Esties vous ermines et sables.
Pli. Mouskes, MS. p. 228.
Il semble qu'en réunissant le sable à'i'herminp
"SklTT l'^'S'' ^T l'hermine ei/teÏÏes'dè
uiason, est un champ d argent, semé de DPfitp«
pointes de sable, par lesquelles on a vou S Kre?
la moucheture de l'hermine. C'est par une a usioii
de même genre que la première, qu'un Poé"edï
sanfdôu P^'^ilV'^'"'^'''"^^'''»"*^' '-elativement
BretagÏÏÏamère'""'" ''' ^'""«'"'^ ^'^""^ ^^
Puisqu'avons de la douice anninc
tng beau Daulphin, dueil se termine.
Poës. de Grelin, p. 161.
no^i , '?,*^',?"?- /• Hermine. On a indiqué l'ellinse
par laquelle 1 adjectif féminin hermine qu'ancien
nemen on écrivoit ermi«e, armine !ilmrnS\
signifie et signifie encore peau d'Arménie ÎJ^enu
d une espèce de belette aussi nommée iieminP
parce qu'elle naît en Arménie, où S trafiaS
ces peaux si estimées pour lès fourrures ? Son
Ariiiiner verbe. Moucheter comme l'hermine
î' ourrer, border d'hermine
ciP^fp''!?rw"'' •'" 'ïesignoitla moucheture artifi-
tiirP iP nniiT'"''',^" assimiloit à cette mouche-
tuie le poil d un cheval gris-pommelé, en disant
qu un cheval étoit hermine de son poil, que 'her-
mine eto.t arminée. <■ Elle estoit monta sur un
aiér'i- -1?^ 'Tr t^ ^«» P«i' naturellement »
(Mem. dOhv. de la Marche, liv. u p 5571 On
trouve l'expression ermines arminées, dans les
Honneurs de la Cour, (.ms. p. 34 37 etc )
^ï=3!i-&'ï^-"ïï-3àr:s#.s&<î^^^^
AR
— 160
AR
Dans le second sens, on disoil : « Qui voudra
« fourer sa robbe aulrement qu'îi la commune et
« ancienne guise, comme de trop longues manches,
« ou de les l'aire hennhier, etc. « (Ord. T. U, p. 372.
— Voy. AuMiNE.)
VARIANTES :
ARMINER. Honneurs de la Cour, MS. p. 34, 37, etc.
Er.miner. Mém. dOliv. de la Marche, liv. ii, p. 557.
Herminer. Ord. T. II, p. 372. - Oudin, Dict.
Armiole, subst. fém. Espèce de broc. En obser-
vant que du mot latin arnms on a formé celui
A'armiUum (1), qui signilioit une espèce de vase à
mettre du vin, parce qu'on le portoit sur l'épaule,
on croit indiquer l'origine A'Armiole, espèce de
broc que sans doute on portoit à bras ou sur
l'épaule. « Saicha une dague,... et la getta à ladite
« lemme par tele manière que, se icelle dague
« n'eust encontre une armiole plaine de vin, tenant
" trois quartes ou environ, etc. » (D. Carpentier,
Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au mot Armillum;
tit. de 1381. — Voy. Armille et Arme.)
Armoie, Sit&s/. fé^n. Attirail. Peut-être que dans
un sens relatif à l'acception générale d'armer, four-
nir, équiper, le mot armoie formé d'arme, aura
signifié attirail de pressoir, comme nom collectif de
diverses choses dont il faut armer un pressoir, le
fournir, l'équiper. » En la ville de \ineuf, un pres-
» souer et quatre cuves. Item, une granche et les
» mesons, si comme elles se comportent avecques
« toute Yarmoie dudit pressouer. » (D. Carpentier,
Suppl. Gloss. lat de Du Gange, T. I, col. 300; lit.
de 4331. — Voy. Armer.) Peut-être aussi ne verra-
t-on dans armoie que l'altération d'un mot de même
origine que harnais.
Armoire, adj. et subst. fém. Qui est à armoi-
ries. Espèce de lleur.
Probal)lement les cottes armoriées des Héiauts
ne se nommoient cottes armoires, qu'autant que
la rime ne permettoit pas de les nommer cottes
d'armes.
S'avoienl haslées et noires
Les chars en ces cotes armoires ('2).
Quelques vers plus bas, on lit :
. . . Com lasses gens et destroites.
En ces cotes d'armes estroites, etc.
Dits do Baudoin de Coudé, MS. de Gaignat, fol. 318, V col. 1.
Comme substantif. Armoire étoit de même ori-
gine et même signification qu'Armoirie, espèce de
fleur, en latin armerius flos. (Gotgrave, Dict. —
Martinius, Lexic. Philolog. — Voy. Armoirie.)
Armoirie, subst. fém. Plantes de diverses
espèces; bétoine; espèce de giroflée sauvage; espèce
d'œillet. (Voy. Armoire.)
Quand il seroit vrai que de la Grande-Bretagne
on eiit transplanté dans la Bretagne Armorique, la
fleur nommée armoirie, il n'en seroit pas plus
vraisemblable qn'armorica filt, comme on l'a sup-
posé, l'origine de cette dénomination. (Voy. Ménage,
Dict. Etym.)
On a tant de preuves du changement de s en r
dans la prononciation et l'orthographe, qu'il semble
possible que du nom latin arlemisia (3), en françois
armoise, on ail fait armerie, armoirie et armoire.
Quoi qu'il en soit, l'ai-moise, celle dont les tiges
sont terminées par des épis de fleurs, chaque fleur
formant un amas de petits fleurons de couleur de
pourpre, offre une telleressemblance avec rarmem,
qu'on la soupçonne d'en être une espèce. En effet,
Varmerie ou Varmoirie, en latin armerius flos, est
une plante de diverses espèces, et dont les fleurs
qui naissent à l'extrémité des tiges, forment en se
réunissant une touffe de fleurs d'un rouge pourpré,
et semblables à de petits œillets. (Voy. Martinius,
Lexic. Philolog. T. I, p. 56, col. 1.) Probablement,
une armerie à seiz>e pompes étoit une touffe de pa-
reil nombre de ces fleurs, un bouquet formé natu-
rellement de l'assemblage de seize fleurons. « Le
« vieillard.... luyavoitdonné.... \x\\q armerie à seize
« pompes que elle garda et raeil en sa quenoille,
« pour la peur de luy. » (Arrêts d'Amours, p. 296.)
L'armerie étant, comme on l'a déjà observé, une
plante de diverses espèces, il est possible que la
bétoine, la giroflée sauvage et l'œillet qu'on nom-
moit armeries, aient été réunis comme espèce, sous
la même dénomination. On altère sans doute l'or-
thographe armerie, lorsqu'à Metz on dit armenie
pour désigner une espèce de petit œillet sauvage
qui est ordinairement de couleur de sang, (Voy.
Borel, Oudin et Monet, Dict. — Gloss. des Arrêts
d'Amours. — Ménage, Dict. Elym. — Dict. de
Trévoux.)
Peut-être l'œillet de Poëte ou de Poitou, peut-être
aussi l'armoise dont les fleurs de couleur pourpre
sont d'une odeur agréable et aromatique, fut-elle
l'espèce d'armerie que la galanterie du xv= siècle
croyoit propre à exalter le sentiment de l'amour, et
à l'usage de laquelle on ne renonçoit que lorsqu'il
falloit renoncer au plaisir de courtiser la beauté.
Ces dorelotz, ces gorgias
Menoient les meilleures galoises.
On ne sentoit que muglias,
Marjolaines, armeries, boiiquetz, etc.
Poés. de Coquillart, p. 157 et 158.
. . . Quand ce viendra au lever,
Que l'eu met dedans ces choffreltes,
Pour en amours cueurs eslever,
Armeries, sentiers, violettes, etc.
L'Amant rendu Cordeller, p. 575.
Adieu roses, armeries, et boucquetz ;
Adieu Déesses chantans comme seraines;
Adieu baisiers et plaisances mondaines.
Vigil de Cliarles VU, part. Il, p. 32.
VARIANTES :
ARMOIRIE. Gotgrave, Ménage, Dict. Etym.
ARMENIE. Ménage, Dict. Etym.
Armerie. Poës. de Coquillart, p. 158.
Armorie. Cotgrave, Dict.
(1) Armilium, non armillum, se trouve dans Isidore de Séville. (n. e ) - (2) C'est-à-dire les cottes d armes recouvertes
de taffetas armojsin, c'est-à-dire cramoisi, (n. e.) - (3) Comme Artémis secourait les femmes dans leurs maladies, cette
plante, qui passait pour utile dans ces affections, reçut le nom de la déesse. (N. e.)
AR
161 -
AR
Armoiseur, sttbst. masc. Fabriquant ou mar-
chand d'Armoisin. Il sembleroit d'après ce mot
Armoiseur, ainsi expliqué par D. Carpentier, qu'on
eût dit armoise pour armoisine, espèce de taffetas.
« Entrèrent en la maison d'un Armoiseur et là
« prindrent chacun une huvette ou capeline. »
(D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Cange, au
mol Ermisinus; tit. de 1421.)
Armoisin, adj. et subst. masc. Qui est de soie,
d'une étoffe légère de soie, qui est de taffetas. Etoffe
légère de soie," taffetas. Qui est rouge ou pourpré.
On a dit que l'espèce de taffetas désignée par ce
mot armoisin, fut ainsi nommée à cause de la toile
armoriée dans laquelle on l'enveloppoit pour faire
des envois. Une opinion plus vraisemblable, et que
paroit justifier le moi ormusinus i\m dans la latinité
du moyen-àge signifioit une étoffe légère de soie,
est celle du savant M. Huel, pour qui armoisin étoit
une altération A'ormoisin, espèce de Taffetas venant
de l'ile d'Ormus. (Voy. Ménage, Dict. Etym. — Dict.
de Trévoux.) Peut-être concluera-t-on de cette opi-
nion, qu'0)7H((SiM!/s est le nom primitif altéré dans
le latin ermisinus, l'italien crmisino ou ermesino,
et le françois armoisin ou armesin? D'ailleurs,
l'expression lat. ermisinus rubeus, en françois
armoisi)i rouge, semble évidemment prouver que
Du Cange s'est mépris en expliquant ermisinus
dans le sens de cremasinus [i), en franrois cramoisi ;
et qu ermisinus a signifié, comme onnusinus, une
étoffe légère de soie, une espèce de taffetas, quelle
qu'en fût la couleur. (Voy. Du Cange, Gloss. lat. au
mot Ermisinus . — Id. Ibid. au mot Ormusinus. —
D. Carpentier, Suppl. Gloss lat. de Du Cange, au
mot Ermisinus.) On conçoit que la même dénomi-
nation fut naturellement commune à toute étoffe
légère de soie, fabriquée à l'imitation de Yarmoisin,
du taffetas qu'on dit avoir été ainsi nommé, parce
qu'il venoit de l'ile d'Ormus (2).
Aussi, trouve-t-on que comme adjectif, armoisin
signifioit, qui est de soie, d'une étoffe légère de
soie, qui est de taffetas. (Cotgrave, Dict.)
C'est par ellipse du substantif étoffe, qn'armoisine
a signifié une étoffe légère de soie, la même que
par'ellipse du substantif taffetas, signifie encore
l'adjectif armoisin. (Cotgrave, Dict.)
Anciennement, l'on a dit taffetas armoisin;
expression dans laquelle on aura imaginé qn'armoi-
sin, qui désigne la qualité d'une espèce de taffetas,
en désignoit la couleur rouge ou pourprée. (Voy.
Hist. du Théât. Fr. T. Il, p. 38-2, etc.) C'est proba-
blement d'après une idée semblable , que pour
signifier le coloris brillant et solide de l'Eloquence
et de la Poésie, Rabelais disoit figurément, en par-
lant des Poètes et Orateurs Gallicques : « Ils ne
>« traictent que gestes héroïcques , choses grandes,
« matières ardues, graves et difficiles ; et le tout en
« ï{héXor\cque artnoisine et c7'amoisine. » (Rabelais,
T. V, prolog. p. 12. — Voy. Armoisy.)
VARIANTES :
ARMOISIN. Orth. sub. - Rabelais, T. V. prolog. p. 12.
Armesin. Monet, Dict.
Armoysin. Hist. du Théât Fr. T. II. p. 382.
Armoisy, participe. Teint en rouge ou en
pourpre. Définition relative à l'idée qu'on paroît
s'être faite de la couleur signifiée par l'adjectif
armoisin, dans l'expression taffetas armoisin.
« Les femmes.... qui portoient robbes de tafetas
« armoisy, etc. » (Rabelais, T. II, p. 160. — Voy.
Armoisin.)
Peut-être aussi qu'en ce sens, le participe armoisy
et l'adjectif armoisin étoient de même origine
qu'armoirie ou armoire, plante dont le nom paroit
une altération d'armoise ; et qu'ils signifioient une
ressemblance de couleur avec celle des fleurs rou-
ges et pourprées de cette plante. On fonde unique-
ment cette conjecture sur la possibilité qu'à la fin du
xv° et au commencement du xvi' siècle, on se soit
plu à comparer la couleur d'un tatTeias rouge pour-
pré avec celle de l'armoirie, et à la désigner par un
nom qui retraçoil l'idée d'une fleur consacrée à la
galanlerie. (Voy. Armoirie.)
Arnioyer, verbe. Armorier, bhisonner. On disoit
en ce sens : " Ung penoncel armoyé de telle cong-
« noissance comme l'escu. •■ (Percef. Vol. Il, fol. 99.
— Voy. Armoirie, armes en termes de Blason.)
VARIANTES :
ARMOYER. Froissarl, Vol. IV, p. 53.
Armoier. Monet, Dict.
Armoirer. Cotgrave, Dict.
Armoyrer. Du Bellay, Méra. T. VI. p. 136.
Armoyeur, subst. masc. Peintre et brodeur
d'armoiries. On cvo\[qu Armoyeur a l'une et l'autre
signification en ce passage : « Noble chose fust à
« Veoir la Chevalerie;.... car trop plus noblement
« estoienl parez que par avant n'avoient esté, pour
'< les Armoyeurs qui estoient venus à la feste pour
« gaigner. •> (Percef. Vol. V, fol. 81, R" col. 2)
Quoiqu'il soit très probable qu. irmoyeur signi-
fioit aussi Armurier, il semble que le titre de l'an
1412, cité par D. Carpentier. (Suppl. Gloss. lat. de
Du Cange, au mot Armeator,) ne prouve pas assez
évidemment cette signification : elle n'est pas moins
incertaine dans l'Hist. de Charles VI, par J. Le
Fèvre de S' Remy, p. 162. (Voy. Armeurier.)
Arnaud, subst. masc. Nom propre. Quoique
Arnaud ait été distingué à'Arnoul, il est vraisem-
blable que dans l'origine c'étoit le même nom.
(Ménage, Dict. Etym. —Voy. Arnulfins.)
Si l'on a ridiculisé le nom à'Arnoul en le choi-
sissant pour désigner un mari dupe et malheureux,
on a rendu odieux celui d'Arnaud, en le donnant à
toute espèce de garnement, d'homme malfaisant et
méprisable. (Voy. D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat.
de Du Cange, au mot Arnaldus.) De là, on aura
nommé Cap de S' Arnaud, un Capitaine, un Chef de
garnements, dont on feignoit que S' Arnaud étoit le
patron. « Pour estre estimé Gentil-homme, aujour-
(1) Cremasinus, d'où cramoisi, parait venir de l'arabe kermès, cochenille. (N. E.) — (2) Ou plutôt du détroit d'Ormuz. (N. E.)
n. 21
AR
— 162
AR
« d'hui il suffit qu'on ne sache d'où vous estes. Et
« un Cap de S' Ai'natid, un Pedescaux (I) de Gas-
u cogne, le Capitaine du Buisson, do l'Espine, de la
« Ronce, tous enfanis d"un hallier,.... n'auront
« point honte de se comparer aux plus illustres
« Seigneurs de France, et leur dire : je suis Gentil-
» homme comme vous. « (l'aucliot, Orig. liv, I,
p. loi. — VOy. AUiNAlDER.)
Arnaudens, adj. et siibst. masc. plur. Nom
d'une espèce demonnoie. LessolsArïiaudens ou les
Arnaudens, en lalin Ai'naldenses !;2], étoient une
espèce de monnoie connue dans les provinces
méridionales de la France; peut-être une monnoie
des vicomtes de Lomagne à qui le nom d'Arnaud
étoit familier; peut-être aussi, une monnoie des
comtes de Carcassonne ou de Comminge. (Voy. Du
Gange, Gloss. lat. T. I, col. 71G. — D. Carpenlier,
Suppl. Gloss. lai. de Du Gange, T. I, col. 300.)
<■ L'homme ou femme pris en adultère, doiveni
« courir la ville, leurs mains liées toutes deux avec
« une corde ; et le Seigneur doit avoir cinq sols
•1 Arnaudens. » (Coût. d'Agen, au Nouv. Coutgén.
T. IV, p. 903. col. 1. — Voy. Arnclfins.).
VARIANTES :
ARNAUDENS. Coût. D'Agen, au Nouv. C. g. T. IV, p. 904.
Ahnaudenx. D. Carp. S. Gl. 1. de D. C. à Arnatdensis.
Ai'iiaiider, verbe. Maltraiter. Il semble qu'«;'-
nauder quelqu'un, c'étoil le maltraiter, en agir avec
lui comme un garnement, comme un homme de
l'espèce de ceux qu'on désignoit par le nom d'^l?--
naiid, en latin Arnaldus ou \irnoIdus. « Tu me vas
<• arnaudant. comme tu fiz hier mon père que tu
« affolas. » (D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du
Gange, T. I, col. 301 ; tit. de 1410.)
Arnoul, subst. masc. Nom propre. Mari dupe
et malheureux. (Voy. Arnacd.)
Qu'on parcoure lès Légendes, on y trouvera plus
d'un Saint dont la femme resta vierge, ou lui fut
infidèle. On conserve dans la Bibliothèque du Cha-
pitre de S' Pierre de Lille, une ancienne Légende
manuscrite, où il est parlé d'un S' Gengoufle
assez malheureux en femme, pour être comme un
autre le patron de la confrérie nommée en latin,
confralria Sancti CucuUi. Saint Vincent Ferrières,
dans son sermon sur la luxure, cite l'histoire d'un
homme veuf que la crainte d'être de cette confré-
rie empéchoit de hasarder un second mariage que
ses amis lui proposoient avec une jeune femme
dont l'infidélilé, disoient-ils, étoit d'autant moins
inquiétante qu'il s'en vengeroit en la faisant de la
confrérie de Saint-Luc. « Si faciat vos de coufra-
« tria Cucullorum vel Sancli CucuUi, facietis de
« confratrià Sancti Lucœ. » (Voy. Supplément au
Gloss. du Boni, de la Bose, p. 113 et lli.)
Probablement, ce patron de la confrérie des
Maris dupes et malheureux est un Saint imaginaire
pour qui l'on auroit dû réserver fhonneur de ce
burlesque patronnage, sans y associer S' Arnoul,
dont on a ridiculisé la mémoire, en le nommant
Seigneur des Coux. On ne prétend pas décider quel
osi ce Saint Arnoul; si c'est celui dont la femme
mourut vierge, ou celui dont la femme, mère de
deux enfans, se fit religieuse du vivant de son
mari qui fut évêque de Metz.
Peut-être faut-il attribuer au besoin de la rime
l'association de Saint-Thibaud à Saint Arnoul,
dans le serment que fait une femme de se venger
des mauvais procédés de son mari. Il est vraisem-
blable que sans le besoin de la rime elle n'auroit
juré que par S" Arnoul, généralement regardé
comme le Patron de la confrérie des Maris dupes
et malheureux.
Puisque mon mari fault,
Et que mon cliastel m'emble et tault,
Et autre pertuis en estoupe ;...
Par Saint Arnoul el Saint fhiebault,
Je lui feray d'autel pain souppe.
Eust. Desch. Poës. JISS. p. 449, col. 1.
Puisqu'il brise son mariaige,
Par S' Arnoul aussi feray-je
Id. ibid. p. 334, col. 3.
On ne croira pas sans doute, d'après Jean de
Meun et Coquillart, qu'il suffise d'être marié pour
être de cette Confrérie, pour être mené à la danse
le jour de S' Arnoul, Seigneur des Coux (3).
Par vous, par voslre lécherie,
Suisje mis en la confrairie
Saint Arinnit, le Seigneur des Coux,
Dont nul ne peut estre rescoux,
Qui femme prent, etc.
Boni, de la Rose, vers 9550 et 9554.
Coquins, niays, sotz, joquesus,
Trop tost mariez en substance,
Seront tous menez au dessus.
Le jour Sainct Arnoul, à la dance.
Poës. de Coquillal, p. i"l el 172.
Il semble que Molière, en nommant Arnolphe le
principal personnage de l'Ecole des Femmes, ait
songé à perpétuer l'ancien ridicule du nom d'.ir-
noul, qui désignoit les maris même dont on feignoit
que S' Arnoul étoit le patron.
Je li voldrai coper les cous
Par qui je sui Ehiol et cous.
Fabl. MS. de Berne, n- 354, fol. 157, V col. 2.
On est scandalisé de l'indécence avec laquelle un
ancien Poêle a travesti S' Mathieu qui, dans son
Evangile (chap. \, vers, xvm), dit en parlant de
Joseph, époux de Marie: « Cum essetdesponsata
« Maria Joseph, antequàm convenirent, inventa est
« in utero habens de Spirilu Sancto. Joseph autem
« vir ejus, cum essetjustus etnolleteam Iraducere,
« voluit occulté dimit'tere eam. Ikcc autom eo cogi-
« tante, etc. » Dans le Poète, c'est Joseph qui peint
lui-même son état de perplexité , en termes qui
(1) Espèce de Bandoulier. — (2) Monnaie épiscopale d'Agen, frappée par Arnaud de Rovinham, évêque de cette ville de
1209 à 1228. (N. E.) — (3) Les saints devaient donc s'estimer heureux, lorsque les esprits falots du xv^ siècle s'arrêtaient en
chemin et se contentaient de canoniser le hareng : « La vie dp Sainct Ilarenc L-lorieux martvr. et comment il fut pesché en
la mer et porté à Dieppe. » Voir le Recueil des Poésies françaises, p.p. A. de Alontaiglon (II", 325). (n. e.)
An
- 163
AR
caractérisent la grossièreté des idées religieuses de
nos ancêtres.
Helas ! Dolent, et que feray ?
Pour ly de tous ffabbez serav,
I?f c;..J: u : -1 y :,
1 ver», MS. p 74.
Et Sire Hei-noux aussi clames.
Hist. des Tr)is Maries,
V.^RIANTES :
ARNOUL. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 449.
Elnol. Fabl. MS. de Berne , n» 354, fol. 157.
Hernoux. Hist. des Trois Maries, en vers, MS.
p. 74.
Arnulfins, suhst. masc.plur. Nom d'une espèce
de monnoie. Monnoie de même espèce que les
Arnaudens ; ce qui semble justifier l'opinion de
Ménage sur l'identité des noms Arnaud , en latin
Arnaldus,el Arnoul , en latin Arnulplius. (Voyez
Arnaid ) On lit que les Arnulfins valoient un ducat
et demi pièce ; que 98 ducats faisoient 208 liv. (Du
Gange, Gloss. lat. T. II, au mot Chatus, col. 558. -
Voy. Arnaudens.)
Aro, adv. Tout-à-l'heure. C'est la signification
de aro (1), dans une pièce de vers, en langage de Ca-
liors, citée par Borel, Dict. au mot Glouper. On en
conclura que ce mot aro est de même origine que
ares et ores, altérations de hore , en latin hora
(voy. Ares.)
Arocher, verhe. Briser, mettre en pièces ré-
duire en poudre. Saupoudrer. Accabler.
On a la preuve (\\\'arrocher et dépecer étoient
synonymes; que par conséquent la signification de
1 ancien verbe françois arracher ou arrochier étoit
la même que celle de l'italien arrochiare , briser
mettre en pièces. '
Leurs nefs aux roches dépeçait ;
Maint en noioit, maint en tuoit.
Rom. de Brul, MS. fol. 8G, R« col. 2.
Leurs nefs au perron wroclwit, etc.
Ibid. Variante du MS. de Bomljarde.
Il semble que dans un sens analogue à celui de
mettre en pièces, ce même verbe ait signifié réduire
en poudre par l'action du feu, réduire en cendres.
Cil qui furent geté el fu,
Et longues i orent geu,
Onques n'i furent entamé ;
Ne les vesteure arrochié. '
Vie de S'- Catherine, MS. de Sorb. chilT. LX, col. 29.
Peut-être qu'à raison de ce qu'on brise et réduit
en petites parties, le poivre avec lequel on assai-
sonne les viandes. Ion aura dit arrochier pour
saupoudrer. '
Li petit poucin
Sont bon au sain,
Arrochié au poivre.
Salomon et Marcol, MS. de N. D. n- 2, fol. I, R- col. 1.
Il seroit encore possible que relativement à l'idée
de briser, on eut dit arocher quelqu'un pour l'acca-
bler en lui jetant des pierres et autres choses, l'ac-
cabler eu rinsultant, en l'injuriant.
Li uns de torchons Varnchoioit ;
Li autres de près le féroient.
Fabl. MS. de la Clayclle, p. 435, col 1.
Par la grant rue tuit l'arochent ;
De vercjes le bâtent et brocent.
Rom. d'Amadas, MS. du R. n- G987, fol. 320, V" col. 3.
. . . Moult l'arocent et décacent.
Et le détirent, et agacent.
Ibid, fol. 321, R- col. t.
Moult fu arrochié! et gabez,
En toz les leux où il venoit ; etc.
Falil. MS. de la Clayette, p. 435, col. 1.
La signification que ce verbe arocher conserve
en Anjou et dans les provinces voisines, oi:i l'on dit
arocher une pierre à la tête de (iuel([u'un, pour lui
ruer une piene à la lête, est sans doule la raison
pour laquelle Ménage en a cherché l'origine dans
le verbe latin ?'He?'e(2). (Voy. Ménage, Dici Etym -
Id. Orig. délia Ling. Ital. au mot Arrochiare.)
VARIANTES :
AROCHER. Rom. d',4roadas. MS. du R. fol. 320 V» col 3
Aroceu. Rom. d'Amadas, MS. du R. n» 6987 fol 3'M ' "
Arrocher. Rom. de Brut, M.S. fol. 86, R" col '>
ARROCHIER. Fabl. MS. de la Clayette, p. 4:j5, col. 1,
Ai-oelei", verbe. Faire rouler. Mettre en train
Rouler.
On a dit en parlant de S" Léocade, dont les mira-
cles mettoient à l'aise l'église où ils s'opéroient :
Mainz maus morteus a amortiz ;
Doné nos a maint beax tortiz (3),
Maint parisi, mainte roele (4) ;
D'oltre roie nos aroele.
Hist. de S" Léocide, MS. de S. Germ. fol. 33, R" col. 3.
Il semble que dans ces vers l'expression aroeler
doltreroie, pri.se fignrémeut, signifie tirer d'un
pas mal aise, faire rouler doucement la vie en
mettant plus à l'aise.
Peut-être que par allusion au mouvement succes-
sit et continu d'une roue mise en train de tourner
1 on aura désigné la disposition d'un homme en
train de faire une chose etde la continuer, en disant
quil s arrolloit, qa'W étoit arrollé. « Delà ne se
« fusl remué.... que préalablement.... il n'eust
« achevé dévider son fil, huchant à sa femme et
« chambrière qu'elles eussent apporté le reste
» pendant qu'il estoit aroHé, et la corde au puis »
(Contes d'Eutrapel, p. 251. — Voy. Cotgrave, Dict )
On croit qu'aroller et aroeler sont de même ori-
gine qu arouller ; verbe composé dont la significa-
tion active et neutre étoit la même que celle du verbe
simple rouler (5). (Voy. Cotgr., Nicot et Monel, Dict.)
VARIANTES :
AROELER. Hist. de S«« Léocade. MS. de S' Germ fol 3S
Aroller. Contes d'Eutrapel, p 251 " lui. css.
Arroller. Cotgrave, Dict.
Arrouler. Cotgrave, Nicot et Monet, Dict
(1) Le provençal moderne a transformé en o les anciens a fiml« ^m ,. ^ /on n
rocket qxu vient de Tallemand rocken, fi.seau le seas nmv1nP?ni rln l~ ^^ ?® ™?' ^ ^^'n-' ''o"''^ '» ««"'e orisîine que
- (3) Torches - (4) Monnoie; piéceVondlde monnoie'^ C'rstTnien de ^n^ (N- E.^
nous d'autres roues (semblables à ces roclles) Tn e - rif fi^,/^?. It?f -f ^'"' ''^ '^''}''"'' ^'^"■^ ^«^ ™''"'^-- f^'^ rouler vers
(orle); roeler, au contraire, est un dérivé deroelil\fotella)\^%) ' '"' ''"'"''"''-'' 'ï"' ^^'^^t lui-même de rotuhts
AR
— 164 —
AR
Aroidi, participe. Qui est fait rouie. (Yoy. Aroit.)
Les lances sont aroidies ;
Ne sont polies, ne gauchies ;
Parmi les cors outrepassent.
Athis. MS. fol. 98, R- col. 1.
Aroidier, v^rf/é?. Etre roide ; être en érection.
(Voy. Fabl. ms. du R. n» 7'il8, fol. 333, Y" col. 1.)
Aroit, partie, ou adj. Qui est roide ; qui est en
érection. En latin urrectus. (Voy. Fabl. ms. du R.
ir 7-218, fol. -230, V° col. 2, et 231, R° col. 1.)
Ai'omas, subst. viasc. Aromate ; odeur, parfum.
(Voy. Arom.itkjue.) En grec âpai.ua, chose odorifé-
rante. Cette dénomination des herbes et drogues
odoriférantes étant devenue commune à plusieurs
espèces d'une odeur désagréable, l'expression bon
a?'o?«fts désignoit le parfum, l'odeur agréable des
premières.
En ma chambre a bon awnias
De cynamon, mirre, alloé (1),
Qu'espandu ay et alloé.
Eusl. Desch. Poës. MSS. p. 530, col. i,
Aromaticité, subst. fém. Odeur aromatique ;
goût aromatique. Odeur, goût agréable. (Cotgr. Dict.)
Aromîitique , adj. Odoriférant. Une preuve
qu'aromale signifioil quelquefois une odeur désa-
gréable, c'est que pour désigner le parfum d'une
chose odoriférante, on disoit qu'elle « estoitrtrowrt-
« tique de bonnes odeurs. » (Voy. Modus et Racio,
MS. fol. 309, R°.)
Aromatiquement, adv. Avec des aromates.
Le Roi Louis XII étant mort le 1" janvier 1514,
« son corps fut aromatiquement embasmé. »
(P. Desrey, à la suite de Monstrelet, fol. 118, R°.)
Aroinatisement , subst. masc. Aromate. En
parlant de Jésus-Christ ressuscité ot comparé au
Phénix, cet oiseau fabuleux renaissant de la cendre
du bûcher qu'il allume de ses ailes, après les avoir
remplies de douces odeurs des vergetés desLibans,
on a dit figurément: « Puisque li fenis a poesté de
« mortéfier soi et revivre, ne se doit nus merveil-
» 1er de la parole que Diex dist : j'ai poesté de
>> mestre (2) m'ame et de reprendre la. Car, quant il
" descendi des Gieus, il raempli ses èles de trois
" dons aromatisemen%. Les èles , c'est li noviaus
« testament, et li viez qu'il raempli des uromatis-
« meiiT,. » (Bestiaire, ms. de la Clayette, p. 46, col. 2.
— Voy. Arom.\s et AnosiATizER.)
VARIANTES :
AROM.\TISEMENT, Arom.\tisment. Bestiaire , MS. de la
Clayette, p. 46, col. 2.
Aronializant, adj. ou partie. Odoriférant ou
embaumant. (Voy. Aromatizer.)
La cueult à plain marjolaine et lavande
Et de ces deux, ainsi comme est dictant,
Faict ung boucquet en beaucoup méditant,
Que la doulceur si aromatizante, etc.
PoSs. de Crétin, p. 255.
Aromatizer, verbe. Embaumer. (Voy. Aroma-
TizANT.) On connoit l'acception usitée du verbe
aromati'<er, qui plus anciennement signifioit rem-
plir d'aromates un corps mort, l'embaumer pour le
garantir de corruption. C'est en étendant l'accep-
tion de baume à toute espèce d'aromate, de chose
odoriférante et propre à cet effet, qu'au verbe aro-
matiser on a substitué celui d'embaumer.
Le corps fist aromatizer
D'oingnement qu'on doit moult prisier,
Faiz par manière si soubtive
Qu'elle semble encore toute vive.
G. Machaut, Poës. MSS. fol. 206, R* col. 1.
Avant qu'il fusl ensevelis,
L'orent bien aromalifié.
El le ventre del cors sacié (3).
Siège de Troye, MS. du R. n- 6987, fol. 99, V- col. 3.
VARI.\>'TES :
AROMATIZER. G. Machaut, Poës. MSS. fol. 206, R» col. i.
Aro.matisier. Siège de Troye, MS. du R. n° 6987, fol. 99.
Aronde, subst. fém. Hirondelle. (Voy. Arondel
et Arondéle.) En latin /u'rHHf/o; d'où l'ancien nom
françois aronde qui n'est plus usité que par com-
paraison, lorsqu'en termes de fortification ou de
charpenterie, on dit que deux pièces de bois sont
assemblées en queue d'aronde, qu'un ouvrage à
cornes est fait en queue d'aronde.
On peut voir dans Martinius, Lexic. Philolog.
combien les opinions varient sur l'origine du nom
latin hirundo. Il seroit possible qu'il fit allusion au
babil, au gazouillement perpétuel de Varonde, de
l'hirondelle. Probablement, on désignoit une idée
relative à l'importunité du babil perpétuel de cet
oiseau, en disant :
Je me plaing de lingua doiosa.
Que comparer puis au chant de Varronde.
Eusl. Desch. Poës. MSS. p. 3i, col. 3.
Il semble qu'on en désignoit la monotonie aussi
vaine qu'importune, lorsqu'en parlant de choses
désagréables et auxquelles il n'y a aucun change-
ment, de choses inutiles et qui ne produisent rien,
on les comparoit au chant de Varonde.
Nous sommes trop subtilz aux choses de ce monde,
En congnoistre, en acquerre, tant que tout surabonde.
Et si sommes certains que ce ne vaiilt une unde ;
."^.ins repaire à néant ; c'est le chant de l'arondo.
i. de Meun, Cod. vers 1413-1416.
Chascun double l'escorcherie.
Vérité fault, Loy est périe :
Par-tout voit le chant de Varmtde.
Eusl. Desch. Poès. MSS. p. 27-2, col. 4.
Preschier n'y vault ; c'est le chant de Varonde.
Id. ibid. p. 32S, col. 1.
VARIAMES :
ARONDE. Bestiaire, MS. du R. fol. 181.
Arronde. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 34, col. 3.
Eronde. Ménage, Dict. Etym. au mot Aronde.
Arondel, subst. masc. Petit de l'hirondelle.
Hirondelle. (Voy. Arondéle.)
Du nom aronde s'est formé le diminutif aro/ide;/
ou arondeau qui signifioit petit d'hirondelle. (Voy.
Cotgrave et Oudin, Dict.) On peisuada à Philippe
Arlevelt, élu souverain capitaine de Gand, que
pour gouverner les Flamands : « On ne doit entre
(1) Aloès. - (2) Mesire a le sens d: milterc, abandonner, (n. e.) — (3) Mettre hors: voir Du Gange à Saccare. (n. e.)
AR
— 105
AR
« eux tenir conte de vies d'hommes ; n'avoir pitié
« d'eux, non plus que d'arondeaux ou d'allouettes
« qu'on prend en la saison pour manater. » (Frois-
sarl, Vol. II, p. i-2S. — Voy. Arondelet.)
Ainsi, c'étoit avec tautolosrie que pour désigner
les petits de l'hirondelle, on d'isoit petits urondiaus.
" On a esprouvé ke quant on emble à l'uronde ses
•' petits arondiaus, s'on lor crieve les iex, et on les
•' remet el ni, jà pour ce ne demourra k'il ne voient,
« anchois k'il soient parcreu ; et pense on bien ke
« 1 aronde les garisl : mais on ne sait comment, ne
" par quel medicine. » (Bestiaire d'Amour, ms. du
H. n° Tr.ai, fol. '276. — Voy. Arondelier.)
On oublioit sans doute qu'arotidel étoit un dimi-
nutif; et cet oubli est peut-être la cause pour
laquelle, en comparant à la rapidité du vol de
1 hirondelle, la rapidité delà course d'un cheval, on
disoit que c'étoit un arondel, une aronde; qu'il
" couroit plutost que ne vole arondel ou aronde. »
Plus tost court que ne vole aronde.
Fabl. MS. du R. n' 7G12, fol. 191, R- col, 1.
Plus tost cort qn'arondel ne vole.
Esiruberl, Fabl. MS. du R. n" 7996, p. 6i.
El ceval sist, c'om clamoit arondiel.
Anseis, MS. fol. 30, R- col. 2.
VARIANTES :
ARONDEL. Fabl. M.S. du R. n« 721S, fol. 249
Arondeau. Froissart, Vol. II, p. 128.
Arondiau. Bestiaire d'Amour, MS. du R. fol 276
Arondiel. Anseis, MS. fol. 16, R» col. 2.
Arondèle, suhst. fém. Hirondelle. On obser-
vera que le peuple, en Normandie, prononce éronde
pour aronde. (Voy. Ménage, Dict. Etym.) Il semble
que Vaugelas adoptoit la prononciation normande
en préférant l'orthographe hérondelle ù toutes les
autres ; même à celle dont l'usai^e a prévalu et
qu'on trouve dans Rabelais, (T. 1\^ p. U)- et dans
Nicot et Monet, Dict. Ainsi rortho2;raphe hirondelle
n'est point nouvelle dans noire langue ; mais elle
est bien moins ancienne que l'orthographe aron-
delle, espèce de diminutif féminin dont la formation
paroit avoir le même principe que celle du mascu-
lin arondel. On a la preuve que le diminutif aron-
del comme arondelle signifioit aronde. (V. Arondel )
Quoiqu'aronrfe filt moins usité quarondelle on
disoil assez indifféremment annidelle, ou aronde
(Voy. Bestiaire, ms. du R. n" 71»8'J, fol. 181, V° col *>
- Ibid. fol. 182, R- col. 1. -Eust. Desch. Poës. msT
p. 310, col. 3. - Id. ibid. p. 320, col. 3. — Clém
Marot, p. 31 et 22&. - Id. p. 2G, etc.)
Anciennement, on désiroil d'être arondeUe
comme aujourd'hui l'on désiroil d'être petit oiseau
pour satisfaire à l'impatience de voir la Beauté
qu'on aime, h'arondelle étoit même la messao'ère
des Amans.
Deus ! c'or fust mes ouers arondelle
Por tost voleir, s'ou vairait celle
For cui me covendioit morir,
Se vertus ni puet avenir.
Chans. fr. MS. de Berne, n' 389, part, il, fol. 3. V.
Vole, mi arondèle,
La Blondete saluer
A qui tous rai penser sont ;
Hélas ! je n'i ose aler :
S'en sospir de cuer parfont.
Ane. Poél. fr. MSS. avant 1300, T. 11, p. 644.
Si l'hirondelle obtenoit quelquefois la préférence
sur le rossignol pour les messages amoureux, c'étoit
sans doute par la rapidité de son vol, à laquelle on
a comparé le ravissement de la joie dont on étoit
transporté, en disant :
Ma joie est plus isnelle
Qu'en l'air ne vole arondelle,
Tant soit vive.
Froissart, Poës. MSS. p. 250, col. 1 .
On faisoit encore allusion à la rapidité du vol de
1 hirondelle qui attrape sa proie et la mange en vo-
lant, lorsque pour désigner le goût rapide'et volage
de la Chevalerie errante et de la .leunesse, dans 'la
jouissance du plaisir, on disoit : « Sont les amours
.. du Chevalier errant, comparables à V arondelle qui
« prendsaproye en voilant. » (Percef.Vol. V.,!fol.43)
Sur le printemps de ma jeunesse folle
,Te ressemblois Varondelle qui voile
Puis çà, puis là • l'aage mo conduisoit,
Sans peur ne soing, où le cueur me disoit.
Clém. Marol, p. 26.
La signification de ce proverbe, une hirondelle
ne fait pas le printemps, étant connue, il suffit de
remarquer qu'on le trouve dans les Poës. d'Amadis
Jamyn, fol. 193. On disoit aussi : « une arondelle
" n ameine point l'Esté. » (Contes de Cholières
fol. 107, V°.) '
Ou attribue beaucoup de vertus à la pierre A'aron-
delle, autrement nommée chelonite{l), du nom 'grec
d.' 1 hirondelle, et cbelidoine en ces vers :
Céitdoine est bone, nun bêle :
El ventre creist de Varundelle.
Marbodus, de Gemm. art. .wii, col. 1054.
Qui t'aura pierre A'arondelle ;
Ce sera vous garde fidelle
Des honneurs de la chasteté.
Car en vous les bontez extrêmes,
Les vertus et les grâces mesmes,
Ont basti leur félicité.
Poés. de R. Belleau, T. I, part. I, fol. 59, V".
Il est évident qu'arondelle. dans les significations
relatives a l'idée de rond, est le même que rondelle
(Voy. Rondelle.)
VARIANTES :
ARONDÈLE. Bestiaire, MS. du Roi, fol 182
Arondelle. Chans. fr. MS. de Berne, no 389, p n fol 3
Arrondelle. Eust. Desch. Poës. .MSS. p. 488 col" 1 ' '
Arundelle. Marbodus, de Gemmis, art. xvii' col -lési
Harondèle. Monet, Dict. '
Harondelle. Apologie pour Hérodote, p. 491.
Hérondelle. Dict. de TrévoiLx, au mot Hirondelle
Hyrundelle. Cotgrave, Dict.
Arondelet, stibst. masc. Petit d'hirondelle
Diminutif A'arondel qui signifioit aronde. '^\{Nov
Arondel.)
variantes :
ARONDELET. Cotgrave, Dict.
Arondelat. Dict. de Trévoux.
Arondel AZ. Gloss. lat. fr. du P. Labbe, au mot Irundlnus.
(1) La chélonite est une tortue pétrifiée, tandis que la chélkloinc est une agate, (n. e.)
AR
— 166 —
AR
Arondelier, adj. Qui est propre à l'hirondelle.
(Voy. AnoNDEL.) On piétend |ue l'éclair est propic à
la guérison et au recouvrement de la vue des petits
de ^hirondelle, en grec ychâév'. De là cette herbe
nommée chélidoine ou éclaire arondeliêre.
Là s'habilloit de bleu l'éclairé (iroiuleliéi-i'.
Poi-3. d'Am.idis Jamyn, fol. H8, R".
Aroutéement, adv. En faisant roule. En cou-
rant, en allant rapidement. (Voy. Arouter.)
Il est probable que dans l'expression « chevau-
« cher aroulécmcnl sur l'eaue, » l'adverbe arou-
téement signifie en faisant route sur le bord de
l'eau, le long d'une rivière. « Chevauchèrent tant
« aroutéement sur l'eaue, qu'ilz choisirent Engloiz
a de l'autre part : et adonc Caraenloet hasta moult
« ses gens, pour double que Engloiz n'entrassent
« les premiers sur le pont. » (Ilisl. de B. du Gues-
clin, par Ménard, p. ATA.)
Ce même adverbe a signifié la rapidité avec
laquelle on alloit, on faisoil route.
Ne puis n'i ot re.sne tenue ;
Ains s'en vient avouténment, etc.
Hist. do Guillaume. Roi d'Angl. MS. du R. n- 6087, fol. 24G.
Arouter, verbe. Faire route, cheminer, aller,
marcher. Mettre en roule, faire cheminer, faire
marcher, conduire; se mettre en roule, s'achemi-
ner. Suivre en faisant même route. Mettre à la
suite. Déduire, proposer par ordre. Ordonner,
mettre en ordre, disposer, assembler.
On désignoit la rapidité avec laquelle on faisoit
route, lorsque dans le sens de l'adverbe aroutée-
ment, en courant, on disoit :
Es vcus Carlon venu tout abrievé ;
Et vit Marsiles venir tout arouté.
Anseis, MS fol. 65, R- col. 1.
Plus généralement, le verbe arouter signifioit
aller, marcher, se mouvoir d'un lieu à un autre en
faisant route, en clieminant, en marchant.
Ainz fait sa bataille arouter,
Et tous ceux de pié qui là furent :
Arbalestiers premiers s'esmurent.
G. Gularl, .MS. fol. 25*. V".
Quant li bastart de Roussillon
Qui là sus s'est aie bouter,
Les voit contremont arouter, etc.
Id. ibid. fol. 211, V.
Signor, dist Alixandre, mêlés vos al cemin,
Faites arouterVosX, les somiers, le carin.
Rom. d'Alexandre, MS. du R. w 6987, fol. 208, R* col. 1.
C'est dans le sens de mettre en roule, faire che-
miner, faire marcher, conduire, qu'on lit : « Ber-
« Iran mena toutes ses gens à Chalon sur la Saosne,
« et delà les nrouta vers Avignon. » (Hist. de B.
du Guesclin, par Ménard, p. 174.)
Si fait li Rois hucier
Caroslé soient caretes et somier.
Anseis, MS. fol. 59, V col.l.
On trouve arrouter avec la signification, mettre
en route, dans Cotgrave, Nicot et Monet, Dict. En
ce sens, le verbe arouter éloit souvent réciproque.
Jusqu'au fonz du fossé s'aroutent
Li hardi qui méhaing ne doutent.
G. Guiarl, MS. fol. 77, V'.
Elle voit une grosse route
D? gens, qui droit, vers lui s'aroute.
Gacede la Digne, des Déduils, MS. fol. 65, V'.
Après aus tout droit s'arotcta.
Adonques fu en moult grant doute ;
.Jusqu'à Paris sivi la route.
Vie des Sainls, MS. de la Clayette, p, 30, col. 2.
Il semble qu'arouter ait signifié suivre, parce
qu'en tenant la route de quelqu'un, en faisant
même route, en ■&'aroutant après lui, on le suit, on
marche à sa suite.
En tel manière se franchirent.
Après cest fait, d'eus se partirent,
Les uns les autres aroutant.
Vint et trois mil hommes ou tant.
G. Guiart, MS. fol. 141, V'.
Dans une signification analogue, on aura dit que
des chevaux éloient aroutés lorsqu'ils étoient mis à
la suite les uns des autres ; que des chasseurs ou
leurs chiens étoient aroutés à un cerf, et tout sim-
plement aroutés lorsqu'ils étoient mis sur la voie,
et par conséquent à la suite du cerf. « Se départi-
■< renl d'Ouzac... et se meirent au chemin... lenans
» arroutés leurs chevaux, comme marchans voitu-
« riers. « (Froissarl, Vol. III, p. '28'2.) « Aucuns
« chiens couranz sont qui crient et janglent, quant
« sont lessiez courre, aussi bien quant ne sont
« aroutés, comme (oni quanl sont aroutés. » (Chasse
de Gaston Phébus, .ms. p. 128,)
A un grant cerf sont arouté ;
Et li oien furent descouplé.
Fabl. MS. du R. n- 7989, fol. 48, V col. 1.
Au figuré, arouter des faits, c'éloit les déduire,
les mettre à la suite l'un de l'autre, en les dédui-
sant, en les proposant par ordre.
Un Cler i ot qui lor raconte
Les cas, les griez et les meffaiz
Qui d'Engerrant estoient fez
Cil un à un les arroula ;
Engerrant moult bien l'escouta.
Hist. de Fr. en vers, à la suite du Rom. de Fauvel, MS. duR. n' 6812, fol. 87.
Les idées d'ordre et de suite étant analogues, il
est possible qu'en généralisant la signification
d'arouter, mettre de suite, on ait dit, 1° en parlant
d'une compagnie dont la marche éloit noblement
ordonnée, qu'elle étoit noblement aroutée :
Lors est la route acheminée,
Et moult noblement aroutée :
Deus et deus moult bel chevauchoient.
Dames et Chevaliers chantoient.
Cléoraadès, MS. de Gaijnat, fol. 57, R' col. 2.
2° En parlant d'une troupe mise en ordre de
bataille, d'une troupe disposée et assemblée pour
marcher et combattre en ordre, qu'elle étoit aroti'
tée : « Bertran.... prist dix mil Espaignolz.... et les
« aroutu sur une rivière qu'ils avoient au doz. »
(Hist. de B. du Guesclin, par Ménard, p. 260.)
Puceles tait arouter
Parmi les prés : lances porter
Lor a fait cent.
N'a pas trives demandé :
Sans arester, vait, por jouster
Droit à lour gent.
Ane. Po«. fr.MSS. av. 1300, T. III, p. 1286 et 1287.
3° En parlant d'une flotte disposée et assemblée
AR
— 167 —
AR
en ordre pour faire route, qu'elle éloit aroutée :
« Ils tirèrent leurs voiles amont.... et na£;erent
'< tant en mer.... qu'ilz vindrent en Flandres Si
« arrouterent leurs vaisseaux, et les raeirent
« en bon convenant, et vindrent assez près de
" Cagant. » (Froissart, Vol. I, p. 40.)
4" Enfin, par une extension singulièrement
abusive, le verbe aroutei- a désigné une disposi-
lon, un assemblage de fleurs, pour le plaisir de
la vue et de l'odorat.
.... En beaux rainseaus vers et gens
De grouseliers, fichent et boutent
Les violettes et arroiitent,
Pour mieulz veoir et oudourer.
Froissarl, Toés. WSS. p. 432, col. 1
On terminera cet article, en observant qu'il est
possible ([ue le mot route ait signillé troupe narce
quunc multitude de gens attroupés ctoit 'regar-
dée comme faisant roule et marcbaiU ensemble
comme fraisant route et marchant dans un certain
ordre. (Voy. Roite.)
VARIANTES :
AROUTER. Cléomadès, MS. de Gaignat, fol 65
AnosTER. Rom. d'Ale.xandre, MS. du R. n" G987', fol. 170
Aroteh. Rom. de Floireraont, .M.-S. du R fol 7
Arrouter. Villehard., p. 46. - Froissart, vol.' III, p. 282.
AFoy, sitbst. 7nasc. Instrument de labourao-e
Espèce de charrue, comme l'areau. >< Le cinoe
« ne garde point la maison comme un^' chien -"il
« ne lire pas Varoij comme le Ijœuf; eîc, » (Rabe-
lais, f . 1, p. 255. — Voy. Areai'.)
Arpent , siibst. masc. Etendue mesurée de terre
de^bois, de pré, de vigne, etc. Rôle, feuillet d'écri-
Les orthographes d'rtrrtpfH« /s qu'on altéroit en
emxaniagnpennis, agripentiim, arvipendium, etc
ont varie comme les opinions sur l'origine de ce
mot qiie, d'après le témoignage de Columelle(l),on
croit être Celtique, et par conséquent commun aux
Gaulois, aux Teutons, aux Flam:inds, etc On
trouve dans les loix des Wisigoths et des Bavarois
dans les ojuvres de Grégoire de Tours, dans les
anciennes formules, etc. qu-arpenlum, aripennis
ou arpenms signilioit ce .[u'^n langage llamand
sigiuhe le mot composé aerpaiif, que Volssius
défini en alin, relativement à léîymologie Teu-
tone et Gauloise : .. Quicquid cerlo lermino circum-
« sepliim, certus terrœ ambilus. » (Voy. Du Can^-e
Gloss lat. T. I, col. 624 et 625, au imlAravennis
- Spelman, Gloss. Archaiolog! au mot b^' L
- Pasquier. Recherches, liv. v.u, p. 057. - JéiS'
Dict. Etym. - M Court de Gebel.n, Dict. Etym. de
id Lang. ^r. - Volssius, Etym. Liiig. Lat. au mot
Arvipendium. - Dict. de Trévoux )
On sait combien retendue , la mesure de terre
qu on nomme arpent, diffère d'une province il l'autre
du Royaume. La coulume plus forte que la raison
nvâ s. opinialrement opposée à ce que la mesure
lixee par le Souverain devint générale, qu'on déses-
père de voir s accomplir le vœu de Deaumanoir
jurisconsulte du xur siècle. Il se plaignoit de ce
que la .. droite mesure du Souverain etoitcorom-
« pue en plunex lieux, par acoustumanche et par
« boulTranche de Seigneurs, qui avoient baillé leurs
.< birelage a cens ou à rentes, et les avoient livrés
" par convenances à leuistenans, à une mesure
-■ différente de Varpent le Roy, contenan cent
" verges de vingt-cinq pieds la verge. C'est, disoit
mesurei tous les hirelages qui par arpent se
" r^wn'^^ ™f' les acoustumances de E ans
"le corompent. .. (Voy. Deaumanoir, Coût, de
Beauvoisis, chap. xxvi, p. 135 et 136.)
La même Coutume justifie la remarque de Soel-
man sur l'usage du mot arpent, restreint à la
signification de mesure de bois, cîe piï de vione
de jardin, lorsque la mesure de terre abouriè
etoit désignée par des noms relatifs ù ceux de la
inesiire de grain nécessaire pour ensemencer une
« Aeille, dit Deaumanoir, .lue l'en fit ancienne-
« ment la mesure de terre selon la mesure dou
l HPhL "' '''"^^'"' ^^'",'"^ '■^" co"'e douze mines
« de bled pour un mu. de bled, tout aussint l'en
" conte douze mines de te; re pour un mui de terre •
« et SI voit-on clerement que, peu s'en faut l'en
" semé une mine de terre de une mme de bled
" nT,^"" ™f'"''^ '^'^ '^"'^ suit celé dou bled!
« Uuant aux bois, vignes, aulnois, jardins et prés
» on les mesure communément par arpens, et non
« par mmees, comme les terres. » (Voy. Coût de
Beauvoisis, chap. x.xv,, p. 135. - Spelman. G os?
Archaiolog. - Du Ca.ige, Gloss. lat. T. I, col 625 )
Cette distinction à laquelle on se conformoit
assez généralement, dans les temps dont parlen
Spelman et Du Cange, étant néglig'ée, on a défi"
1 arppit ■ .< cerlaine étendue de champ, vi"iie nré
" bois, de diverse mesure, en divers lieux dé
« l'iaiice la grande mesure par laquelle sont ine-
" hPHi^Ll^^ terres vignes, prez, bois et autres
« heritageb. » (Voy. ^icotetMonet. Dict.) La mesure
'•^5^'<^',Pil' ",>'Pf>"' tel que l'ont fixé les Edits d'oc-
tobie loo/ et de mars 1566, à cent perches, et la
pe.che vingt-deux pieds, qui font deu.x mille deux
cents pieds en carré.
Il est probable que relativement à l'idée de l'éten-
due en carre de Varpent en général, on aura
désigne par ce mot arpent, un rôle, un ieuillet
d écriture. » Touttes escriptures comme d'infor-
" ma ions, e.xaminations, demandes, responses
« rephcations, raisons de droit; d'un «?w«i d'es-
" criture, douze deniers. » (Etat des Offic. des D de
Bourgogne, p. 305.) ^
Arpentage, subst. masc. Mesurage de terres
La mesure faite ou prise d'un terroir, d'un héri-
tage (Cotgrave et Nicot, Dict. - Voy. Arpeîstement )
Z!r^^''^^^t^^i^^!f£l'^^%l^ II,£f9, et Forcellini. Un auteur des
bout, extrémité, (n. e.) ^ ë^uiois . aiiit, en bas-breton, est équivalent à arare, etpenn signifie tête
AR
1G8 —
AR
Arpenteinent , subst. viasc. Mesurage de
terres. La mesure qu'on fait ou prend d'une terre,
l'action de la mesurer par arpents. (^Cotgrave, Dict.
— Voy. Arpentage et AurEXTEniE.)
Arpenter, verbe. Marcher à travers champs;
marcher vite et îi grands pas. On marche à travers
le champ qu'on arpente, qu'on mesure en le par-
courant; et naturellement on marche vite et à
grands pas. De là, le verhe arpenter encore usité
en style familier dans le sens de courir, parcourir,
aura signifié relativement à l'idée de marcher à
travers champs, et à grands pas, le désordre et la
vitesse de la fuite des Véniliens et des Milanois,
après leur défaite par le roi Charles YIII, à la
journée de Fornoue. « Tous fussent tuez ou blessez,
« s'ils n'avoient plutost arpenté, en se sauvant à la
« fuite, que ceux qui les chassoient de si près; et
<> mesmemenl ceux de cheval, ausquels la meilleure
» pièce... de tout le hainois qu'ils portoienl, fut...
« la pointe de leurs éperons. » (André de la Vigne,
Voyage de Naplcs de Charles VIII, p. 1G7.)
Arpenterie, subst. féni. Art de mesurer les
terres. Mesurage des terres. Ce mot que Mcot
définit au premier sens, art et science de mesurer
les terres, signifie la même chose (\\i'arpentement,
mesurage des terres, dans Cotgrave, Dict.
Arquebusade, subst. fém. Coup d'arquebuse.
Portée d'arquebuse. Arquebuse.
Anciennement le mot arquebusade signifioit non
seulement, comme aujourd'hui, coup d'arquebuse,
l'envoi d'une balle d'arquebuse, mais la blessure
faite par le coup d'arquebuse. (Voy. Monet, Dict.)
La portée d'une arquebuse se nommoit aussi
arquebusade. (Voy. Mémoire de Montluc, T. I, p. 142.
— Essais de Montaigne, ï. III, p. 504, etc. — Monet,
Dict.)
C'éloit par ignorance ou par oubli de la première
signification de ce mot, que plusieurs Ecrivains, et
même des Gens de guerre, disoient arquebxisade
pour arquebuse. >• Soudain qu'il fut hors de la tren-
« chée, fut.... frappé d'un mosquet ou arquebusade
« à croq. » (Du Bellay, Mém. liv. k, fol. 309, R°.)
En disant coup à' arquebusade, on s'exprimoit,
dit Brantôme, très-improprement ; car le coup
d'arquebuse se nomme arquebusade. « Les Italiens
« et les Espagnols desquels nous avons appris et
« emprunté le mot arquebusade, ne font telles in-
« congruitez ; mesme je les ai veu faire à aucuns de
« nos gens de guerre. » (Brantôme, Cap. Fr. T. IV,
p. 228. — Voy. Arquebuse.)
VARIANTES :
ARQUEBUSADE. Orth. subsist. Nicot et Monet, Dict.
Arquebousade. Cotgrave, Dict.
Arquebuzade. Essais de Montaigne, T. III, p. 504.
Harquebousade. Harquebusade. Cotgrave, Dict.
Arquebuse, subst. fém. Espèce d'arme à feu.
L'arme à feu que dans le cours du xvr siècle, on
nommoit encore assez indifféremment hacquebute
ou arquebuse, paroit n'avoir été connue dans le
XV siècle que sous le nom de hacquebute. On a
même quelques raisons de croire que ce fut un
nom primitif auquel on substitua celui d'arr/Me^^î/sf.
Dans les Œuvres de Molinet, poëte du xv siècle ;
dans les Annales de Jean d'Aulon, an 150G et 1507 ;
dans les Lettres de Louis XII, an 1510 et 1511 ; dans
l'Histoire du chevalier Bayard, an 1524 ; dans les
Poésies de Jean et de Clément Marot, etc., on ne
trouve que le nom de hacqueMite. Si quelques
Ecrivains du xvi' siècle ont usé alternativement,
comme Rabelais, des noms de hacquebute et A'ar-
quebu%e, c'est qu'ils éloient à cet égard plus indif-
férens qu'un Auteur contemporain pour qui c'étoit
une peine de voir que liarquehuse prévaloit sur
hacquebute. « C'est pitié, s'écrioit-il ; il faut h ceste
heure dire harquebuse. •< (Voy. Contes d'Eutrapel,
p. 315.) Le nom de hacquebute étoit donc un nom_
primitif, relativement à celui d'arquebuse ; comme
l'atteste d'ailleurs le président Faucbel, de qui l'on
apprend qu'à la fin du xvr siècle, « la hacquebute
<■ avoit pris le nom de Harquebu:ie, que ceux qui
■' pensoient le nom estre italien lui avoient donné. »
(Voy. Fauchet, Orig. liv. II, p. 122 et 123.)
Il est probable que faute de connoitre l'origine
et la signification de ce nom hacquebute, on aura
cru devoir y substituer celui d'arquebuse, en imi-
tant les Italiens qui nommèreni areobugio, la
hacquebute. On chercha dès-lors à justifier la préfé-
rence donnée à cette nouvelle dénomination, en
disant qu'elle étoit propre à une arme à feu dont la
partie courbe du fiit sur lequel étoit monté le canon,
îiguroit une espèce de demi-arc ; à une arme à feu
dont la poudre s'enflammoit par le trou, par la lu-
mière du canon, et avec laquelle les combats s'enga-
geoient, comme ils s'étoient plus anciennement
engagés avec l'arc et l'arbalète. (Voy. Ménage, Dict.
Etym) C'est d'après ces idées que non-seulement
on adopta le nouveau nom d'arquebuse, en italien
areobugio, c'est-à-dire, arc-à-trou ; mais qu'on
italianisa l'ancien nom de hacquebute, en écrivant
liarquebute, arquebute
Probablement, ces idées étymologiques auroient
paru moins vraisemblables, si l'on eVit fait rénexion
que l'usage de l'arc et de l'arbalète subsista long-
temps après l'invention de la hacquebute et de
Varquebuse; que pour la figure, la hacquebute ou
Varquebusc à croc, plus ancienne que la Itacquebute
ou l'arquebuse à rouet, ne put être raisonnablement
comparée à l'arc et à l'arbalète. En effet, la hacque-
bute ou Varquebuse à croc, telle qu'elle est figurée
par le P. Daniel, étoit une arme à feu sans crosse,
et par conséquent sans aucune ressemblance de
courbure avec l'arc et l'arbalète. C'étoit une espèce
de petit canon plus ou moins long, monté sur un
affût en forme de trépied. On le nommoit hacque-
bute ou arquebuse à croc, à cause d'une espèce de
croc qui étoit fondu avec la pièce. (Voy. Daniel, Mil.
Fr. T. I, p. 462 et 466.)
On observera qu'il auroit été bien plus simple de
conserver à cette espèce d'arme à feu, de moyen
calibre entre les plus petits canons et le mousquet,
le nom plus ancien de hacquebute, qui, s'il est
AR
169 -
AR
réellement formé des mots allemands hacke et
buchse, comme le croient quelques Etymologistes,
signillot seul canon-à-croc. (Voy. Skinner, Elym.
ling. Anglic. au mot Ilarquebuss. — Ménage, Dict.
Etym. au mot naqucl)iiU\)U est possible que l'igno-
rance de celle siL;nilicalion littérale ait fait imagi-
ner que hacqueh'utc étoit synonyme d'arquebuse,
en italien arcobugio ; et que comme on disoit a7'-
quebuse à croc, il falloit dire haquebute à crochet.
« Après avoir gaigné le haut des tours et de la mu-
« raille, feit si bien son devoir ii coups d'arquebuse
« et d'arquebuse à croq, etc. » (Du Bellay, Mém.
liv. vin, fol. 2(52.) « Pistoles sont petites arquebuses
« qui n'ont environ qu'un pied de canon ; et tire
« l'on avecques une main, donnant le feu avecques
« le rouet. » (Id. ibid. liv. x, fol. 33i, V". — Fauchel,
Orig. liv. II, p. 123.) « Sur les murailles de la ville,
« es creneaulx, y avoit quatre cents pièces de hac-
« quebutes à crochet, toutes montées. » (Du Bellay,
Mém. T. VI, p. 347.) « Les aucuns avoienl piciiues;
■< les autres, hallebardes ; \&s aulres baquehutes et
'< espées h deux mains. » (Id. ibid. p. 342.; ■ Suy-
« voyent les jeunes enfans Marchaiis de la ville,....
a la hacquebute à l'argon de la selle. » (Id. ibid.
p. 378 et 379.)
Il résulte de ces différens passages, qu'au com-
mencement du XVI' siècle, on n'avoil déjà plus égard
à la signification étymologique du nom hacquebute,
c'est-à-dire, canon-à-croq, et qu'on le confondoit
avec celui d'arquebuse, c'est-à-dire, arc-à-lrou ;
puisqu'il désignoit les arquebuses à mèche, les ar-
quebuses à rouet, même les pistolles ou pistolets
d'arçon, et que pour signifier une arquebuse à croc,
on croyoit devoir dire hacquebute à crochet. (Voy.
Hacquebute (1).)
variantes :
ARQUEBUSE. Orlh. sub. - Cotgr., Nicot et Monet, Dict.
Arquebouse. Rabelais, T. I, p. 233.
Arquebutte. Mém. de R. de la Marck, MS. p. 127.
Harqueeouse. Apologie pour Hérodote, p. 439.
Harqebuse. Du Bellay, Mém. liv. x, fol. 334, V».
Harquebutte. Id. ibid. liv. vu, fol. 330, R°.
Harquebuze. Nicot, Dict. au mot Haquebute.
Arquebuse!', verbe. Tirer une arquebuse. Tirer
de l'arquebuse. Le verbe arquebuser, dont l'accep-
tion encore usitée se trouve dans Colgrave et Mo-
net, signifioit aussi tirer une arquebuse, tirer de
l'arquebuse. (Voy. Colgrave, Dict.)
VARIA.NTES :
ARQUEBUSER. Orth. snbsist. - Monet, Dict.
Harquebuskr. Colgrave, Dict.
Arquebuserie, subst. fém. Nom collectif d'ar-
quebuses. Nom collectif d'arquebusiers.
On a la preuve que les arquebuses, même les
arquebuses à croc, dont le canon étoit si gros et si
pesant (2) qu'on ne s'en servoitguère que pour tirer
de derrière les murailles d'une place, n'éloient point
comprises sous la dénomination générale d'artille-
rie, et qu'on lesdistinguoitdespiècesd'artillerie, des
pièces de batterie. (Voy. Mém. de Rob. de la Marck,
Seig'- de Flcuranges, ms. p. 127, 420 et 421.) De là,
aiquc'liusi'i'ic, cdinme nom collectif d'arquebuses,
distingué d' artillerie. « On ne tirera l'artillerie, hai'-
quebuserie, ny autres choses, l'un contie l'autre. »
(Brantôme, Cap. Fr, T. I, p. 413.) « Esloient les
<■ maisons de la ville assez près des murailles oîi
'< les Suisses avoienl mis toute leur arquebutterie
« et quelques pièces d'artillerie. » (Mém. de Rob.
de la Marck, Seig' de Fleuranges, ms. p. 174.)
C'éloil aussi le nom collectif d'arquebusiers,
comme en ces passages : » Le Mareschal de Birou...
'< débanda son arquebuserie pour l'attaquer. »
(Brantôme, Dames illustres, p. 264.) «Furent défaits
« par l'Infanterie et Harquebuserie, pour s'estre....
« engagez.... dans certains petits marêts.... où
« l'on les liioit comme à canards. » (Id. Cap. Fr.
T. III, p. 56 )
On croit nouveau l'usage d' arquebuserie, dans le
sens de métier d'arquebusier. (Voy. Arqueuuse.)
VARIANTES :
ARQUEBUSERIE. Brantôme, Dames illustres, p. 264.
Arquebutterie. Mém. de Rob. de la Marck, MS. p. 174.
Harquebuserie. Brantùme, Cap. Fr. T. I, p. 413.
Arquebusier, subst. masc. Les acceptions usi-
tées d'arquebusier ayant toujours été les mêmes,
depuis que ce mot existe dans notre langue, il suf-
fira de renvoyer à l'article Arquebuse, pour savoir
d'après quelles idées on a pu imaginer d'altérer le
nom de hacquebute et de l'assimiler à celui d'arque-
buse, en écrivant harquebute, arqnebute ; d'oii ar-
qucbnlerie pour arquebuserie, et harquebutier pour
uniueUusicr. (Voy. Aroueduse et Aiinri:iii si:iiie.) Si
l'on un croit Colgrave, la signification du harque-
butier et harquebusier éloit quelquefois la même
que celle d'arquebusade, coup d'arquebuse. On in-
diquera quelle peut être la cause d'une explication
qui paroit hasardée. (Voy. Hacquebutier.)
VARIANTES :
ARQUEBUSIER. Orth. sub. - Nicot et Monet, Dict.
Harquebousier. Rabelais, T. I, p. 264 et 289.
Harquebusier. Cotgrave, Monet, Dict.
(1) Le mot primitif était haquebute, dont l'étymologie est indiquée au coiirant de l'article: Haken, croc, et Buchse, canon
d'arme à feu. Haken a encore donné hache, et Buchse est une altération du mot latin pyxis, qui lui-même est devenu
boîte. Les Italiens transformèrent haquehide en arco bugin, arc à trou ou arc creux (Arioste, au chant IX. de RoUuid furieux,
l'appelle ferro bugio). Enfin, pendant les guerres de Charles VIII, de Louis XII et de François 1", nos soldats se mirent à
l'école des Italiens pour rapprendre le français, et ces braves, qu'on n'appela plus « li proz e li vaillanz, » nommèrent leur
haqui bute, arquebuse, comme leur haubert, cuirasse. La haquebute appar;iît pour la première fois aux mains des Suisses et
des Allemands qui aidèrent les Lorrains à défendre Nancy, en 1475 (Voir Chronique de Moulinet, de 1474 à 1504). Comines la
connaissait aussi : « Nostre queue estoit défendue de trois cens Allemans, qui avoient moult largement de coulevrines, et
leur portoit on beaucoup de haquelntics à cheval (T. III, 7). » Elle fit place, vers 1640, au mousquet, qui cesse d'être
réglementaire en 1671, lors de la création d'un régiment spécial do fusiliers. L'arquebuse du xv« siècle était à croc; au
commencement du xvp siècle apparaît l'arquebuse à mèche, transformée plus tard en arquebuse à rouet ; enfin , même
après l'adoption du fusil, on employa, pour le tir à la cible, Varquebuse butière. (N. E.) - (2) En plaine, on se servait d'un
chevalet pour épauler l'arquebuse; les chasseurs tyroliens, pendant la campagne de 1859, usaient encore d'une fourchette
pour appuyer leur carabine, (n. e.)
n. 22
m
170 —
AR
llARQlTEDUTiER. Cotgrave, Dict.
H \RnuEBLiTTiEH. Mém. de Rob. de la Merck, MS. p. 421.
llAiîyUEBUZiEK. Nicot, Dict. au mot Ilaquebuticr.
Avquin, siibst. masc. Fonte. Métal composé de
cuivre, d'étain et d'antimoine. 11 semble que Rabe-
lais faisoit allusion à l'usage de rantimoine, dans
l'ancienne façon de guérir les maladies vénériennes,
lorsqu'en parlant de Pantagruel attaqué de pareille
maladie, il disoit que ses Médecins lui avoient fait
prendre dix-sept grosses pommes de cuivre, nom-
mées plus bas pillules â'arquin. « Et de ces pillules
" A'arquin, en avez une à Orléans sur le clochier
« de TEcciise de Saincte Croix. » (Rabelais, T. 11,
p. 279 et 281. — Voy. Aloulmi et Alquinique.)
Arrabler, verbe. Tirer avec force et violence ;
ravir, piller. Lorsqu'on a la preuve fxn arable, en
latin arabiiis, s'est prononcé et écrit araiile, on ré-
pugne moins à croire qnaraitler pourroit être une
altération d'arabler, en ces vers où le verbe arauler
paroît désigner la force et la violence, avec les-
quelles un taureau perce de ses cornes le ventre
d'une béte monstrueuse, et en tire les entrailles.
Bien trois quartiers ou quatre du ventre li desmaule,
Que toute sa coraille (i) à terre li araule.
Fabl. MS. du R. n' "218, fol. 3M. R° col. 1.
Quoi qu'il en soit, le verbe arabler que l'on croit
altéré dans arauler, signifioit tirer avec force et
violence; au figuré ravir, piller. (Voy. Cotgrave,
Dict. — Contreditz de Songe-creux, fol. 24, V°.)
.... Preste, par la grande ardure
D'avoir conquerra et arrabler.
C'est celle qui semont d'embler, etc.
Rom. de la Rose, cité par Borel, Dict. p. 20.
On voit dans arrabler un de ces verbes qui pei-
gnent naturellement les idées de force et de vio-
lence, comme arrape.r et autres, tels qu'arracher
qui subsiste, arrager, etc. (Voy. Arapeb.) (2)
vARi.\NTEs :
.A^RR.VBLER. Cotgrave, Dict.
.\JRABLER. Contreditz de Songe-creux, fol. 24, V".
Arauler. Fab!. MS. du Koi, n» 7218, fol. 344, R» col. 1.
Arrachier, verbe. Arracher, déraciner.
J'ai ung arbre de la plante d'amours,
Enraciné en mon cueur proprement.
Qui ne porte fruits sinon de dolours,
Feilles d'ennuy et fleurs d'encombrement ;...
Et si ne puis, pour toute ma puissance,
Autre planter, ne celui arrachier.
Poès. à la s. de Villon, p. 61 et 62.
11 semble qu'on ait comparé les pattes d'une
ancre aux racines par lesquelles un arbre tient à
la terre, lorsque pour lever les ancres, on a dit
esragier les ancres.
Lor ancres ont fors esragies,
Et lor voiles al vent drecies.
Ph. Mouskes, MS. p. 452.
Dans le sens général de notre verbe arracher, on
disoit : " Piètre tira une dague.... Le Besgue qui
" vit icelle dague.... lui courut tantost à la main, et
« lui esracha » (Hist. de B. du Guesclin, par Ménard,
p. 371.).
Ains me iairoie à chevax traire
Et tous les membres arraigier,
Morir, et la teste tranchier.
Athis, MS. fol. 5, V- col.l.
Probablement, cette acception générale est une
extension de l'idée de violence aVec laquelle on
arrache un arbre ou une plante qui tient à la terre
par la force de ses racines (3). (Voy. Arraijler et
Arrager.)
variantes :
ARRACHIER. Poës. à la suite de Villon, p. 62.
Arechier. Fabl. MS. de Berne, n« 3c4, fol. -141, V» col. 1.
Arrager. Fabl. MS. de S'-Germ. fol. 64, R° col. 3.
Arraigter. Athis, MS. fol. 5, V» col. 1.
Arrecher. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 538, col. 4.
Arrescher. Id. ibid. p. 66, col. 1.
EsRACER. .\nc. Poës. Fr. MS. du V. n» 1490, fol. 128, R».
EsRACHER. Lanc. du Lac, T. I, fol. 158, V» col. 2.
EsRACHiER. Ane. Poës Fr. MS. du V. n" 1522, fol. 152.
Esragier. Ph. Mouskes, MS. p. 422.
Arrager, verbe. Enrager. (Voy. Arragerie.) On
a designé l'homme méchant que la mort arrête dans
le progrès de sa méchanceté , en disant proverbia-
lement et par comparaison :
Chien esragié longues ne vit.
Rom. de Rou. MS. p. 17-*.
Dans le sens figuré, le verbe arrager étoit l'ex-
pression lapide et forte de la violence de certaines
passions physiques et morales qui nous agitent et
nous transportent. Le mal de dents est une rage.
Quant il espoint, U convient errayier,
Eust. Desch. Poës. MSS. p. 217 col. 2.
En grant torment
Sui ; trop la truis sauvaige.
Si l'aim durement
Ke tos vis tn'esraige.
Ane. Poct. Kr. MSS. avant 1300, T. HI. p. 10*7.
VARIANTES :
ARRAGER. Briton, des Lois d'Angleterre, fol. 17.
Arager. Parton. de Elois, MS. de S'-G. fol. 166.
Erragier. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 217, col. 2.
Errajer. Ane. Poës. Fr. MS. du V. n» 1490, fol. 56.
Err.\igier. Ane. Poët. Fr. MSS. avant 1300. T. III, p. 1007.
Ef-RAGER. Ph. Moukes, MS. p. 740.
Esragier. Ane. Poët. Fr. MSS. av. 1300, T. IV, p. 1204.
EsRAiGER. Id. T. III, p. 1047.
Arragerie, subst. fém. Rage. Ce mot, qu'on
trouve au propre dans Gace de la Bigne, des Déduits,
MS. fol. 78, signifioit au ligure l'effet rapide et vio-
lent d'une passion telle que la colère , le désespoir,
etc. « Courroucez estoient durement de ce que les
» Escossois avoient ainsi victoire Si avoient
« ainsi comme par arraigerie lait attacher, etc. »
(Percef. Vol. 1, fol. 146. — Voy. Enragerie.)
VARIANTES :
ARRAGERIE. Gace de la Bigne, des Déduits, MS. fol. 78.
.\rraigebie. Percef. Vol. I, fol. 146, R» col. 2.
Arrainie, subst. fém. Obligation, gage de ba-
taille, combat judiciaire. Tençon, combat d'esprit.
(1) La courée, comme on dit encore en certaines provinces, (n. E.) — (2) Arrabler est un dérivé de râble, barre de fer qui
sert au boulanger à remuer la braise de son four, hàble vient lui-même de rotabulum (voir Du Gange), en latin classique
rutabulum (Caion H. H., 10 et 11, Suét. Aug., 75), fourgon de boulanger; son radic&l est celui de rulrum, serfouette,
c'est-à-dire ruere. (n. e.) — (3) L'étymologie est qb, plus radicare pour radicari. (N. E.)
AR
- 171 —
Défi, rivalité, amour-propre, désir de supériorité
nrZp'i'' '°'^''?' h'^'»^' Engagement, sermenî,'
promesses, garanties, etc. (Voy. Arramir )
Pia?,!i *^'^?"°/' .i'P'l'^'e" "S'ige de ces combats judi-
ciaires dont 1 événement a longtemps et tron
rohl?" r?f f '^^ T'^''' criminelle? et civiS
Lobligation de combattre se contractoit par les
îenrfJJ'- ÏÏ"f h * ''. 'f''^^^''''^ réciproquement
leur gage, et cette obligation ainsi contractée
même le combat auquel on s'étoit ainsi obligé se
nommoit arramie. » Faisons cognussant à tous
I nnL .L'"'™'"'''' '^•^^ '^''^^'"Ps et des batailles;
Sn. ™"' ^ecogneut..., c-on ne les doit faire
: .iinon'r ?^"'"'' "",'" ^«'^''' ^e l'ostel nostre
" signour 1 Eyesque de Metz. » (D. Carpentier
SoP • %T--^f- t"^ *^'''"§-^' T- I col. 75; Ut de
1299.) . Requist as Marescliaus que il fust rècreu à
" revenir h une certaine journée pour po irs ever
V ,.. " (Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis
notes, p 450; tit. de 1319.) Il est évident Sn ce
même titre, raamie est une faute pour Km//
dont armme paroit être une autre altération '
Probablement les Poètes qui s'obligeSt en
présence des Juges des Cours d-Amour,ipouver
dans leurs tenions, la vérité ou la fausseté dïn
Su^SKs^dï"''^-?'' ^"™"t désigné ceïtnçoîs
cLZriTSflr^ ^"' ''^ '"«' arramie, en les
cesTmhÏÏ. H ,n= f^' '''i ''P^ ^'"'^'e»^ Clievaliers, à
mr^^ n ' "^l^'^l"^'^ Ils s'obligeoient à prouver
par a supériorité de leur courage, celle de la
Beauté qu'ils servoient.
Daraoisello Œude enseignie
?>oiez de nostre arramie ■
Jugiez par vostre bonté ;
Uuar je l'ai sus vous jeté.
Ane. Poés. fr. MS. du Vatic. „• 15*2. fol. m. K- col. 1.
Sire Michiel, par boisdie
Maintenez ceste arramie
Ane. Poèl. Fr. MSS. avant 1300, T II p 943
AR
acceptions analogues du mot flr™> !,ni n
JJe la guerre, neVarramie
Del duc Gaifier n'acieva mie.
F'h. Mouskes. MS. p. 65.
Cil fait guerre, par aramie.
A Pepin, le signour d'Austrie.
là ibid. p. 47
rfn,^L^f certes nel faz-je mie ;
Ainz le faz par fine aramie
Et par grant ire et par anui.
Fdbl. MS. du R. n- 7-218, fol. 3, R- col. 2.
Andoi s'en vienent irié, par arramie ■
Grans cols se fièrent, ne's'épargnl'rènt mie.
Anseis, MS. fol. 30, V col. 2.
Cil cor sonent, par aramie
yue mes n'i face couardie
S.ege de Thèbes, MS. du R. n- 6987, fol. 67 V col »
Un croît que dans les trois dernières rifi'tînn«
l^S^^^'r'^'r ^'g^'fie à l?nv l'^qui
à arivS à ,?n7.°"'^'î"''"'.^e« idées relatives
Ka super or & 'l" '''.""'' ''^'-"^^"^ ^ '« désir de
sé!^-Snas>sr^^!^
tr^S unSS/'^^Sf ^'"^^^ '^^«"^ de con-
cernent, serSlïïSm2i?;'ÎS,-^';>J-' enga-
t-l 11 tornoiement assamble.
Fabl. MS. du R. n- 7G15, fol. 164, R- col »
Or ; ■■ ■ }^?1 *''^^ 'louce amie.
Or aves fait votre aramie ■
^t J ai caiens por vous servi
uixansjai vopaindeservi
.M,radesdeND.MS.duR.„.6987,r,,,3is,R.,„,.3
• ■ ■ • Ensi 1 ai con fol emnris ■
Avec ce je l'ai si apris ^ '
liensimentenfaia,a)»„e •
Kp'v.rj"" ™°"'' P-'*'' '''en amer,
ke Mvre sans amie.
Pr.so„ d Amours. MS. de Turin, fol. 30, V col. 2, el 31, R- col. 1,
VAniANTF*s '
ARR^VMIE. Ph. Mouskes, MS n'fiS
AHA.MIE. Dits de Baudoin de Condé MS d.r ■ . .
Arannie. Prison d'Amour MS^tr-P^'S^"»'' ^ol. 312.
Arremie. Athis, MS foL 8 Roco' ?""' '°'- ^'•
RAAMiE. Beaumanoir, Coût. Wea!ivoisis, notes, p 450
p^^Xe.?£i,S'St^/?t'n^^
Et 11 Grijois cevalcent irié, par aramie
Rom. d'Alexandre, MS. du'R*! „• "éos, fc
fol. 205, R- col. I.
Oi^uÎ:^?i^|',S'?^s£o ]'X'?' p™'^'^'^--
est sans doute îrmêmeq4|ei,r''" '^^ '' I^""^
les coutumes de Clem^off^tïe'îalo TLT^Pr ÎL'
: e!?B?|^^ES'-^-S^i^^
« deniers pour une arramine m ri^ .-^''^
(Voy À«,™"j* "'' P''"'"«sse, son honneur, "etc.
AR
rrl
AR
tpmus assujettie, les sages de bataille étoient
Sme les ^ar£s de ces combats Judiciaires par
fe sort desquels on croyoit.prouN-e.r 1=J j"f Ç^ «u
'injustice d'une action criminelle, même d une
luon civile De là , l'expression (irramn- une
w.^ iP où fl?T«m/r un £;age de bataille, qui dans
un sens ana^Së à celui du^ubstantif arrhes, don
le Ser^m/r semble être forme, sisn.fio.t
rontSctci l'obligation judiciaire de combattre, s y
eÏÏir-ai-antrr l'obligation d'une preuve par le
rnmhTf judiciaire, la cautionner par un gage.
! Sa it ugèment est faussés, et cil ki le fausse ne
le Duel prouver par bataille tele coume il la
LE • ains en kiet : on doit moult regarder de
?o?i plais estoit ; ou de mueble, ou d'.re âge, ou
: de crime, ou de servage. » (Conseil Je Rierre d
Fontaines, chap. xxi, n" xi, p. »^0,) ''S^^l'lsle
« mns nanoe eust arrami un gage de bataille a i isie,
: S.^ Sien Datin par devant les Ma.-esdmux
a de France; etc. » Beaumanoir, Coût de Beau
voisis notes, p. 450; tit. de 1319.) « Se gages sont
! pour aucunes barres de querele., i v^ierre
., ne o-aaigne fors le barre pourquoi h gages luient
donne^ Se un bons demandoit à un autre
cent livres, et cbil disoil que cbis jours ne seroi
uas venus devant un terme que il nommeroit a
^enir ou se il alligoil respit, liquels termes ou
resp I li seroit niés dou demandeur, et chil \ara-
: So à prouver et li demandierres le veeroi
.. un des tesmoins; se il vainqueroit, il gaaigneioi
nSe U iSseroit venus de le dete; et se U esloit
I îaincu^chisauroit le respit. » (Id. ibid. chap.txi,
p. 309.)
Lorsqu'à la preuve par le combat judiciaire, on
nréSiUa preuve par serment, par témoins ou
Saféc? on disoit par extension, quelle que fut la
manSe' de s'obliger, de s'engager à prouver une
Siose qu'on «rmm.sso/a la prouver, d" o" ' ^™^
«Hssrtîf à niouver. (Voy. Arramme.) « Quiconque
aïs" ut aS rui de plet,' et aramist à prouver les
?esins par coi il veut avoir se demande, e aprez
faut de Drueve;ilfaut à se demande, et est li
deffendienes dé ivres. » (Beaumanoir, Coût, de
Beauvoïsis cbap. xxxix p. 217.) .< Pf ''^-^^^J^f JS
,, pnntre leban, que il li devoit dix livres. Jenan
Sa paemant, liquel paiemans fu nies de
: fS. ;'elJean VarLi à prouver. Li dis Jehan
.. amena ses prueves et prouva, etc. « {Id. ibid.
chap. xuu, p. 237.)
On généralisoit sans doute l'idée des obliga ions
uour sûreté desquelles on donnoit des gages, lors-
SS'on disoit «mu/ur un to^rno/.' .«"'«tl" défis
joùte ■ expressions qui semblent designer les défis
S lesquels nos anciens Chevaliers s'atlaquoient
et engageoient leurs combats.
Quant il lient l'escu à s'enarmes,
Et il est entre deus rens mis,
Ains que tornois soit aramis ; etc.
Fabl. MS. du R. n- 7615, fol. 104, R- col. 2.
Si tost com il s'entrecoisirent,
La ioste fu moult aramie.
Sicgfl de Troje, MS. du R n- 6987. fol. 107, V col. 4.
Il seroit possible que dans un temps où l'on
étoit très-familiarisé avec les idées de ces attaques
chevaleresques, on eût alTeclé de parler le langage
de la Chevalerie, en disant figurément et dans !e
sens d'attaciuer, qu'un homme étoit arrami de dou-
tance, que son cœur étoit arrami de meschej.
Chevaliers versent en la bourbe,
Gon gent de doutance (1) aramte;
Mes li quens d'Artois n'i va mie.
G. Guiart, MS. fol. 256. Vv
Au grant besoing voit son amy
L'homme ; et ce tray-je à my ;
Car cueur de meschef esramy
Puis conforter.
Percef. Vol. 11. fol. 84. R' col. 1.
En proposant un défi et en l'acceptant, on s'enga-
oeoit à faire des efforts pour obtenir 1 avantage sur
un rival De là le verbe arramir ou s arramir aura
sio-nifié s'efforcer, faire des efforts pour l'exécution
d'une chose à laquelle on étoit engage quelque
fût le motif de cet engagement. (Voy. Arramie.) Il
faut liie arami pour aranti dans ces vers :
De bien joster sont aranti ;
Des écus n'ont nuls merci :
Ains i fièrent tant rudement etc.
Athis. MS. fûl. 48. R* col, ï.
Là veissiez cevax de tost corre aramir,
et les barons de Gresse durement enaigrir.
Rom. d'Alexandre, MS. du R. n' 6987. fol. 18U. V col. i.
Les promesses, les sermons, les juremens au
nom de Dieu étant regardés comme gages des
obligations que l'on contracte envers es autres ou
envers soi-même, on aura dit arramr, pour pro-
mettre, promettre avec serment, f^'/e serment^
Armmir Dieu et le jurer, pour jurer Dieu, faire
serment s'engager en jurant Dieu, en faisant ser-
meS au nom^ Se Dieu, comme on s'engage e'j
promettant, en donnant sa parole.^ Se il veut
« arramir ou jurer que, etc. » vOrd. T. 1, p. i/5.)
Li payens se tont bien aranu
N'en partiront, s'aront le mur saisi.
'^ Anseis, MS. fol. 47, V col. 3.
Moult les Dissiez aramir,
Serement faire, et plevir
Que por morir ne ly fauldront •
Rom. de Brut, MS. fol 95, R- col. 1 el 2.
Moult oissiez Bretons crier.
Dieu ammù- et Dieu Jurer, etc. ^^_^
VARIANTES :
ARRAMIR. Du Gange. Gloss. lat. J. I. col. 159.
Aramir. Rom. de Brut. MS fol. 9o.
Ar.^ntir. (Corr. Am.nn-). Ath.|, Mb. fol. i», U col.
l^SH.rcervrïflof^R-01.-..
Arramme, subst. fém. Obligation Ju^^ichure de
f'tirp une oreuve : action qui oblige a tau e cette
nreSve On a éfini arramme onaram^ne ;.« défaut
!nul fait le deffendeur de comparoir a 1 assi-
jStion qui lui est baillée par devant le Juge à a
„ requête du demandeur ; ou congé de Cour <iue
(1) Peur.
AR
— 173 —
AR
« le defîencleur ajourné obtient contre le deman-
« deur, ^'i faute de se trouver à la même assignation
« pour soutenir sa demande. » (Voyez Laurière,
Gloss. du Dr. Fr. T. I, p. 393.) On démontrera la
fausseté de ces définitions, en citant les articles
mêmes des Coutumes dont on s'autorise pour les
justifier. » Quand une personne noble adjournée
" par devant le Baillif, gouverneur de ClermonI, ou
« autre Juge, se laisse mettre en un ou plusieurs
« defaux, tel défaillant est tenu payer dix sol parisis
« pour chacun défaut, es lieux et jurisdictionsoù le
« roturier paye cinq sols parisis; et quinze sols
« parisis, es fieux où le roturier paye sept sols six
« deniers parisis ;etautanl pour chacune CT'm?«?«e,
« et pour chacun reclain. » (Coût, de Clermont, au
Coût. gcn. T. I, p. 35G.) « Es chastellenies et pre-
« vostez de Crespy et la Ferté-Milon, les amendes
>< ordinaires sont de soixante sols nerets, qui valent
« trente-six sols parisis; et de sept sois six deniers
» nerets, valans quatre sols six deniers parisis,
« pour la petite amende des reclains, défaults, et
« urammes, et du cens non payé. » (Coût, de
Valois, ubi supra, p. 391.)
Quoique l'amende soit la même pour les défauts
et les m'animes -, on ne peut en conclure que
Varamme soit un défaut obtenu par le demandeur
contre le défendeur qui ne comparoit pasen.Fuslice,
puisque dans l'article iv de la Coutume de Clermont,
comme dans l'article vu de la Coutume de Valois,
elle est évidemment distinguée du défaut. Ce n'est
point un congé de Cour obtenu par le défendeur
contre le demandeur, puisque l'article iv de la
Coutume de Clermont ne prononce d'amende que
contre le défendeur ou la personne adjournée.
La différence entre Varamme et le reclain parois-
soit si peu sensible à Laurière, qu'il a cru possible
que Du Cange les ait confondus, en définissant
Varamme, une action par laquelle on répète une
chose, avec obligation de prouver par seimeni, ou
par témoins, qu'elle nous appartient. (Voy. Du
Cange, Gloss. lat. T. L col. 158, au mot Arcmia.)
Varamme, dit Laurière, « est proprement le
« delTaut de payement pour lequel le débiteur qui
« s'est obligé par serment envers son créancier, et à
« jour certain, doit payer l'amende. >■ Il cite en
preuve de sa définition l'article ccxxu de la Coutume
d'.\miens, oîi on lit : « Quand aucun est obligé par
■• lettres obligatoires passées souz seel royal, ou
<' pardevant le Seigneur dont l'obligé est subjet,
■• pour deniers payables à jour et à terme; et le
'< créancier après le terme se retire à la justice du
« Roy, quand l'obligation est sous le seel "royal ; ou
« à la justice du Seigneur, quand l'obligation y est
« passée et l'obligé y est demeurant ;"ledit obligé
« doit sept sols six deniers parisis d'amende au
« Roy, ou au Seigneur auquel on se relire à faute
« de payement. » (Coût. d'Amiens, au Coût. gén.
T. I, p. 604.)
On ne voit pas qu'en cet article de la Coutume
d'Amiens, il soit question de Varamme. Autrement,
il paroîtroit en résulter qu'elle ne diiïère aucune-
ment du reclain; c'est-à-dire, « de la plainte qu'un
« créancier fait en jugement, de ce que celuy qui
« est son débiteur par contracts faits et passez sous
« le seel royal ou authentique, ne luy a payé au
« jour préfix et marqué, la somme îju'il s'étoit
» obligé par serment de luy payer. « Dans la Cou-
tume de Montereau, à la suite des Coutumes géné-
rales de Meaux, on lit ; « Au Roy noslreSire
■' appartient, et a droit de prendre de chacun
« reclain des lettres et contrats faits et passez
« souz le seel royal de ladite ville et chastellenie,
« la somme de sept sols six deniers tournois , pour
« l'amende de la fraction de la promesse faicte par
« serment, par les debteurs, lesquels s'obligent en
« la main du Tabellion ou Notaire. •> (Coût, de
Meaux, au Coût. gén. T. T, p. 89.)
Cet article de la Coutume de Montereau étant
rapproché de l'article ccxxu de la Coutume d'Amiens,
onjugera sans doute que dans la Coutume d'Amiens,
l'action de se l'etirer ù la justice du Roi ou du Sei-
gneur, à faute d'un payement que , par contract
authentique, un débiteur s'est obligé de faire à
terme, à jour préfix, est réellement une même
chose que le reclain, dans la Coutume de Monte-
l'eau. Si l'une attribue au Roi » le droit de prendre
« de chacun reclain, la somme de sept sols six
« deniers tournois pour l'amende de la fraction de
« promesse par le débiteur; l'autre condamne le
" débiteur à sept sols six deniers parisis d'amende
■' envers le Roi, ou envers le Seigneur auquel on
« se retire à faute de payement. «Ainsi l'article de
la Coutume d'Amiens, supposé qu'il y fût question
de Varamme, ne justifieroit aucunement la distinc-
tion de Laurière. 11 semble plus propre à démontrer
l'identité de Varamme et du reclain, qu'à en prouver
la différence.
Les Praticiens que Laurière avoit consultés sur
la vraie signification ù'aramme, lui ayant répondu
que c'est " une amende qui se paye par celuy qui
<' succombe en cause en laquelle les parties ont été
« appointées contraires, soit le demandeur quand il
« n'obtient pas, soit le défendeur quand il est
« condamné sur les preuves ; » on ne conçoit pas
la raison pour laquelle il s'est cru plus exact que
Du Cange, dans la définition de Varamme. A la
vérité, ce n'est point une amende, puisque l'article iv
de la Coutume de Clermont et l'article vu de la
Coutume de Valois, fixent l'amende de Varamme.
Mais la réponse des Praticiens autorise-t-elle
Laurière à dire que Varamme , distinguée du
reclain, est le deffaut de payement pour lequel
etc. (Voy. Laurière, Gl. du Dr. Fr. T. I, p. 393-395.)
Il semble qu'en rectifiant cette réponse, plus
favorable à la définition de Du Cange qu'à celle de
Laurière, on peut en conclure que Varamme n'est
ni une amende, ni un défaut de payement; mais
une obligation judiciaire de prouver par serment
ou par témoins la justice d'une demande. Si la
demande étoit prouvée juste, le défendeur payoit
l'amende à laquelle étoit sujet le demandeur ,
lorsqu'il manquoit la preuve qu'il s'étoit obligé de
AR
— 174 -
AR
faire, qu'il avoit garantie, en formant sa demande.
Ainsi, Varamme paroit être l'obligation judiciaire
d'une preuve par serment, ou par témoins ; l'action
qui oblige à cette preuve. I/analogie de ce subs-
tantif arramme avec le verbe arramir, contracter
l'obligation d'une preuve en Justice, semble indiquer
cette signification et la justifier. (Voy. Ahramir.)
VARIANTES :
ARR.\MME. Cotgrave, Dict.
Aramme. Du Gange. G. lat. T. I, col. 158, à Aremia.
Eramme. Lauriére, Gloss. du Dr. Fr. au mot Errame.
Erkame. Lauriére, Gloss. du Dr. Fr.
Erramme. Coût gén. T. I, p. 356.
Arre, subst. fém. Chose obligatoire; gage,
assurance, garantie. Ou ne conçoit pas quelle a été
au commencement de ce siècle, la raison de croire
qu'au sens figuré il falloit dire arrhes, et erres au
sens propre. L'ancienne langue françoise n'offre
aucun exemple de cette distinction attestée par le
Dictionnaire Universel, où on lit qu'au propre on
prononçoit erres, lors même qu'on écrivoit, comme
au figuré, arrhes. « Se aucun met ses erres en
« aucun gaige qui se vend au marchié, gardoir soy
« bien se li gaige vault ; car puis qu'il a mis ses
« erres, prendre le doit et pa'ier. - (Ord. T. Il,
p. 349.) « Qui se parjure, il a grant erres de vilenie
n avoir. » iBeaumanoir, Coul. de Beauvoisis, p. l'2.)
« Il y a une future béatitude;.... à la consécution
« d'icelle Dieu a ordonné aucuns moieiis conve-
« nables ; et le principal est grâce qui est
" appellée vie éternelle, parce que c'est le gage ou
« erre d'icelle " (Triomphes de la Noble Dame,
fol. 336, V% et 337.)
Maies hen-es, ami, reçui,
Maie estraine quant vous connui :
AJnz puis ne soir, ne jor ne fui
Sanz grant paine et sanz ennui.
l'yrarae et Tysbé, MS. de S. Gerra. fol. 99. V- col. 2.
Oroison est Veuverre
Que Dieu prent d'homme pour erre
De le remettre en son erre.
Al. Chartier, de rEspérance, p. 38i et 385.
On voit qu'anciennement on disoit erres au figuré
comme au propre. On prouvera d'ailleurs que rela-
tivement à l'un et à l'autre sens, il n'existoit aucune
distinction entre erres et arrhes. 11 est même pro-
bable que l'orthographe arrhes est postérieure à
l'orthographe erres ; la seule qui paroisse avoir été
usitée tant au singulier qu'au pluriel , jusqu'à ce
qu'on ait songé à la rendre plus conforme à l'éty-
mologie, en écrivant au propre comme au figuré,
aires, arres, arrhes, en laLin arrhœ.
Ce mot qui n'est plus d'usage qu'au pluriel, signi-
fioit au singulier, comme erre formé du latin
arrha (I), chose obligatoire, gage qui oblige à l'exé-
cution d'une chose, gage qui en assure et garantit
l'exécution ; dans le sens propre, gage pour assu-
rance d'un marché. (Voy. Monet, Dict. au moi Arre.)
L'acception de ce mot arre éloit figurée , lorsqu'on
disoit: « Il lui sembloit bien que desaccuu-slumant
'■ les ennemis de vaincre et les François d'estre
« vaincuz, il donneroit assez bon commencement
« et auroit suffisantes arres pour la future et désirée
« victoire. » (Du Bellay, Mém. liv. vu, fol. 209, R°.
— Voyez Arrer.)
Il est possible que comme on dit aujourd'hui, sur
ces enlrefailes, pour désigner l'instant présent oii
se fait une chose, on ait dit, sur cesrt/res; expres-
sion figurée dans laquelle, ainsi qu'eu l'adverbe
maintenant, il semble qu'on ait comparé cet instant
présent à celui oii l'on se tient la main , où l'on
donne et reçoit des arrhes, en signe d'un marché
présentement fait et conclu. » Advint... que sur ces
« arres les Marchands venans des foires de Lyon,
« et qui s'estoient hastez pour estre h temps à celle
« de Strasbourg, arrivèrent les uns après les
« autres. » (Du Befiay, Mém. liv. vi, fol. 177, R».)
variantes :
ARRE. Du Bellay, Mém. liv. vi, fol. 177.
Aire. Loisel, Institut, coutum. T. II, p. 276.
Erre. Beaumanoir, Coût, de BeauvoisiSj p. 12.
Herre. Pyrame et Tysbé, MS. de S< Germ. fol. 99.
Arrement, subst. masc. Moyens juridiques de
satisfaire à l'obligation d'une preuve en Justice ;
preuve faite par ces mêmes moyens. Action d'arrher.
Gage d'amour, engagement amoureux, promesse
d'amoureux retour. (Voy. Arramie.)
Nos Ancêtres, familiarisés avec l'idée des arra-
mies, des gages de bataille, de ces combats judi-
ciaires pour lesquels ils donnoient et acceptoient
un gage en signe de l'obligation réciproque de
proiiver, par le succès heureux ou malheureux du
combat, la justice ou l'injustice d'une action crimi-
nelle et même civile, paroissent avoir pris plaisir
à retracer cette idée et à la perpétuer, en comparant
aux gages, aux arrhes de ces combats judiciaires,
et en nommant arrements , airements , ou erre-
ments, les moyens de satisfaire à l'obligation d'une
preuve, selon les loix de la Jurisprudence civile.
On assure « qu'à l'imitation des gages de batailles,
« les procédures en matière civile ont été nommées
.. e;Te//i?ns du plait; c'est-à-dire, gages ou aires
« du plait. " (Voy. Loisel , Institut, coutum. T. II,
p. 270.) Encore aujourd'hui les derniers erremens
sont, en style de pratique, les dernières procédures :
procéder suivant les derniers erremens, c'est conti-
nuer dos poursuites qui ont été commencées ,
pourvu que l'instance ne soit point périe. (Voyez
Lauriére, Gloss. du Di-. Fr. T. I, p. 396, col. 1. —
Nouv. Dict. de Droit.)
En effet, il paroit constant qu'en l'ancien style,
lorsqu'à la preuve par gages de bataille, par arra-
mies. on préféroitla preuve parécritet par témoins,
les productions, les procédures, en général les
(1) Du latin arrha ou arm (Grég. de Tours), et aussi arrhabo (dipl. de 879), du grec apâa6a>y. Calvm et d'.^.ubigne, au
XVI» siècle, employaient encore ce mot au singulier. La prononciation arrhes a duré jusqu'au .'CVii" siècle, et c'est Boiihours
qui remarquait qu'on dit arrhes au figuré, et errhes au propre : i Donner des arrhes au coche. » Sans doute on a du
prononcer d'abord aïrrhes, comme en Berry et à Genève ; puis le son est devenu nasal, et s'est transforme en un c ferme .
Mais d'où venait cet i ? Il me semble aussi difficile à expliquer que dans le français aire et dans le provençal paire, (n. e.)
AR
— 175 —
moyens juridiques de satisfaire à loblio-aLion de
celte preuve, se nommoient par comparaison, arre-
mms ou errenmis du plait. (Voy. Arrkr et Erremen-
fant'li' i'"^ ^^™.^'"^^, " ''"''"" t^O"'' soi et pour
pn ôn'n ™'H ^^ ^^^ preuves qui ont esté faites
î^ co'iun soient monstrées, si ke on puisse savoir
" tî> ,, r'"' '' '*" P^'^i^- ^'' P=^'' 'levant qui le parolle
•' ^t tiaitie commandera ke li airrcment et li co-
" A^.-^^'^?} so'^"*' regardé pour faire foi de
;« ^^'n 'on l^T''^ ^^^ P**^'"''^ 'î'^ Fontaines, chap. .^'
/'P- 90.) "Mis n est tenusà aporler en jugement
« Lettres, m Chartres, ne £;Te»u.«s qui soûl contre
« h. " (Beaumanou% Coût, de Beauvoisis, cliap. vu,
p. -«9.) «Quanti en fet pès d'aucune qùerele, e
: Dlet" e?/'"/n ',''i '^?'"^'"^ ''^^ Verrement dou
piet etc. » (Id. ibid. cliap. xxx , p IGO — Vnv
Launère, Gloss. du Dr. Fr. T. I, p. 396 col 1 ; '
En opposant à la preuve autorisée par Tancienne
Jursprudence mditan-e, celle que prescr.voit la
Jurisprudence civile, on disoit qu'une cause se
Jiigeo.t sur erremem dcplet, sur . r.m'^s e non
par gages, par bataille, par gages de bâta le S
lecoi delaQuemune apartient, non par ga-es
« de bataille, mais par les erremens dou pfet !
li sonlT'"' ^'"'••^''^ Beauvoisis, chap. l^ 071
11 sont deux manières de fausser jugement des-
: Ss' V^ f'' ''^'''^"^ ^^'^ '^«'^ démener pur
gages,... 1 autre se doit démener par erremens
; ^37,'^'^oi.l'jugemensfu fès. «(Id.ibid.chap xv
p. 3o .) ,. he aucuns veut fausser jugement en nais
" t ". ^^"f ement de jugement afiert, il n aui'a
« point de bataille; mais li cleim, li respons e" il
SlSeS^oSu^f qu-aujuurd-buiS llœSï.ÏÏt
tentures. Quoi qu il en soit, on escouinrenoit sons
chàruïs lL"n.f ^V^' P^'' 'e"^0'"s et par
estSs;s^;^S^^?;g^^Ses..ji,
mm^m
AR
T 7 '"■^""{'.Pf V'-''""'^- : (Bû"teiller, Som. rur.
rhï-~ Oy. Erreme.NT.
t etoit évidemment le même ^marrement fn.>m^
(1 arre, en latin «n-fta, lorsqu'il sionifioH' !? -^^
: {;ss;rs?^sl'^Es^^—
sSî?iS»niEœ""'■-
Uu ele m-a tos jors eslongié ; etc
Ane. Poèl. Fr. MSS. avant 1300, T. III, p. 1018.
ARREMENT. Cot^rave.'Dfér™' '
AIREMENT. Lauriere, Gloss. du Dr fr T I n Mr
AiRREMENT. Conseil de Pierre riPFn.iti' ' P" u^^'
Arrhement. Cotgrave Dict ^°"'aines, chap. xii.
ERREM.i.NT. Monet, Dict
ERRE.MENT. Gr. Cout. de Fr. Uv. Il, chap. xli p 07-2
signifie nouer, serrer lipr Air. /ri ^^^? <'<"'^'^'''
On s assure du service d'un hommp nn i-^m-
à servir, en le prenant à ses" aoeî ffp niJ ''^'F
mw dans le sens d'en-iopp^Xt'f , '^ ^^''^^
^de^suiss^s, cois;i;;^rd;^s,j[^tri!;j^
p. 210! ^' " ^^"' ''^ ^ouis XII, T. IV,
P.f édure. .. r7uanï dSx '^eVon? ? s Sj,"^'
« dent, là où le demandeur detfault les er remin:
« rompent, et convient venir à nou e'auîx efrenS
« se II plaist au deffendeur : car aulcu ne fois f/ef'
« au t le demandeur par fraude là où voU Le I
- a mauvaisement conduicte sa cause ou délaissé
« de ses temoings à amener, ou autremein mv
L.)^TJiaumassière Cout^ de Berry, chap.'^ïi, ^''2,
ei -0^. — Voy. Arre et Arre.ment.) ^
icni-D r^ VARIANTES :
AHHt.K. Cotgrave et Monet, Dict
t-RRER. La Thaumassiére, C. de Rerry, ch. xxiii. p. 262.
^^iS!:^i^f -' "»>-«■■'.
AR
— 170
AR
Il s»!nil)lc qu'ayant préféré à l'ortliographe «rm-e
celle ^'arrière, on devroil écrire arriérage ; ortho-
graphe que Ménage a condamnée en raisonnant
plus d'après l'usage que d'après l'analogie , dont
Nicol inditiue la lègle en disant : Le droit mot est
arriéruges, mais le françois le syncope (1). (Voy.
Nicot, Dicl. au moi Arrérage. — Ménage, Rem. sur
la Langue, p. 299.) Anciennement, le mot arrérage
qui n'est plus usité qu'au pluriel, l'étoit au pluriel
et au singulier. On a désigné ce (lui est dîl , ce qui
est échu d'une rente, d'une pension, d'un loyer,
d'une ferme, etc. par le mol arrérage om arrérages,
relativement à l'idée générale être arrière , être
après. " ^nrm(7É', ou anwfl(/fs sont restais, termes
« escheuz et non payez de renies constituées , ou
« autres censives et pensions ; et vient de arrière,
" par ce que les payements n'ayant esté faits au jour
« qu'ils échéoient... sont demeurés en arrière. «
(Nicot, Uict. — Nouv. Dict. de Droit.)
Telle est l'origine de la signification encore usitée
de ce mot, qui dans un sens analogue à celui de
l'ancienne expression, être à l'arrière de deniers,
signifioil retard de payement ou débet. Lorsque les
Receveurs des impositions royales , sous le règne
de Charles VII « estoyent négligents ou mauvais
« mesnagers, et tomboient en arrérages , on y en
« commettoit d'autres. » (Eloge de Charles VII, p. 7.)
Probablement, tomber en arrérages éloit la même
chose que demeurer en arrérages ou en arriérage.
(Voy. Nicot et Monet, Dict.)
On croit que l'acception d'amemfl'eétoit relative
à celle d'arrière, loin, quand pour signifier qu'on
se trouvoit éloigné du but de ses désirs, on disoit :
Se j'eusse songié
Mes désirs que tu m'as paie,
N'en truis en moi fors qnarrieruge.
Famine, accroissement de rage.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 209, R- col. 1.
VARIANTES :
ARRÉRAGE. Orth. subs. - Cotgrave et Monet, Dict.
ARÉHAGE. Nuits de Straparole, T. II, p. 398.
Arriéhage. Cotgrave et Nicot, Dict.
Arriraghe. Duchesne, H. g. de la M. de Guines, pr. p. 291.
Arrérager, verhe. Déposséder. On connoît
l'acception usitée de ce verbe, qui présentoit un
sens analogue à celui de l'expression figurée être
arrière de son droit, en être dépossédé, lorsqu'on
disoit : « Se les Parties qui pledent, de leur assen-
" tentent requièrent délai jusques à autre journée,
» en autel estât li Sires ne leur doit pas véer, se il
« n'est ainsint que le querele louche le Seigneur,
« et que il ne t'ust arriéragiés de son droit, pour le
" délai des Parties. » (Beaumanoir, Coût, de Beau-
voisis, chap. lxv. — Voy. Arrère.)
variantes :
ARRÉRAGER. Orth. sub. - G. de Bourbonnois, T. II, p. 393.
Arriéragier. Beaum. G. de Beauv. chap. lxv, p. 332.
Arrère, adv. et prépos. Arrière, en rétrogra-
dant, en reculant, en retournant. Derrière, après,
loin. Derrière, près, dans, chez, auprès, contre.
Anciennement, on écrivoit dans un môme titre,
arriens ou arriers, parce qu'en prononçant, il est
naturel et très-ordinaire de substituer n à r; lettre
dont on semble avoir évité la prononciation rude,
en disant aiere et aier pour arier et ariere, arer et
arere. 11 est possible qu'en retranchant la dernière
syllabe A'arrere on ait écrit arre, dont Ve final et
muet paroit être le principe de forthographe areus,
arreuso en langue Limousine.
Per aqui (2) monten cent miri (3) auzello (4);
Alquant (5) s'en tornen aval arreuso.
Fragm. de la Vie de Boèce, MS. de S. Benoîl-sur-Loire, p. 274.
Peut-être qu'en certains cas, hareu étoit de
même origine que an'e , dont l'orthographe erres
est sans doute une variation. (Voy. Hareu.) Il semble
du moins que erres et hareu signilioienl arrière,
lorsqu'on disoit avec ou sans ellipse :
Erres, erres, vos ni dormirés mie
Entre mes bras, jalons ; etc.
Ane. Ro8l. fr. MSS. avant 1300, T. II, p. 921.
J'ai mis mon coer en un lieu puis un peu.
Ma dame disl: fuies, fuies hareu.
Quant recorder je li voeil mon afaire
Froissart. PoSs. MSS. p. 325, col. 1
On soupçonne d'ailleurs arrié, espèce d'excla-
mation vulgaire, et probablement la même que
arré en Normandie , d'être comme arriez, une
altération de Y adverbe arrère ou arrière, et d'avoir
une signification relative à celle de l'expression
resivardeir ayere. « Ne nos covient mies rester ; et
« molt moins nos covient ancor reswardeir ayere. »
(S'-Bernard, Serm. Fr. mss. p. 3i0.) Ainsi, ce seroit
avec ellipse, qu'à l'occasion d'une surprise agréable
ou désagréable, les gens du peuple disent arrié ou
arré , comme s'ils disoient regardez arrrière ;
comme s'ils avertissoient de se tourner arrière, de
tourner la tête en arrière, de retourner la tête, de
se retourner pour voir ce qui leur plait ou déplaît,
et pour en juger. C'est peut-être aussi la signifi-
cation de hareu en ces vers :
Hareu, hareu, jou la voi là,
La riens el mont qi plus ma mis en desconfort :
N'onques ne voi déport.
Ane. Pofs. fr. MS. du Valican, n' 1490, fol. 116, R*.
Lorsqu'à la vue d'une personne ou d'une chose
pour laquelle on se sent de l'aversion et de la
crainte, on en exprime le sentiment en criant
arrière, arrière de moi la chose qui se présente, ou
la personne qui s'avance, arrière n'est point,
comme on fa dit, une préposition. (Voy. Dict. de
Trévoux.) Il est adverbe, et signifie avec ellipse,
allez arrière, rétrogradez, reculez; éloignez-vous
de moi en allant arrière, en rétrogradant, en recu-
lant. Il étoit l'expression d'un sentiment d'aversion
pour une chose à craindre , lorqu'on disoit :
« Arrière, ce sera une mauvaise besoigne. » (Contes
de Despériers, T. I, p. 74.)
(t) Si Ve de reiro est considéré comme étant en position, il reste pur, et du composé ad rétro on fait arrère ; si l'on tient
compte de la liquide r, il est bref, se diphthongue en ic, comme dans Pierre (Velrum), et l'on fait arrière, (n. e.) —
(2) Par-là. — (3) Milliers. — (4) Oiseaux. — (5) Quelques-uns. Voir le texte publié par M. P. Meyer et mentionné plus haut. (n. e.)
AR
177 —
AR
C'est donc par impér..lif supprimé qu'en criant
arrière, on rompt des cliieus en défaut; que l'on
comm^iiide à un tiomme, à une Iroupu, à des che-
vaux de harnois, de reculei-. ^^oy. Nicot, Dict.)
Si crient les Veneurs, arrière,
Arrière chiens, arrière, arrière.
Adoncq se mectent en requeste
Chiens, pour raieuLx retrouver leur beste.
Gace de la Bigne, des Déduits, MB. fol. lOi, R'.
Lorsqu'en suivant une affaire on s'étoit un peu
écarté du but, et qu'en parlant de cet écart comme
peu dangereux en la suite de l'affaire qui n'avoit
avancé lii reculé, on disoit figuiément, « pour un
« petit n'avant n'arriére, » il y avoit ellipse d'un
verbe, comme en l'expression « avant et airiere; »
c'est-à-dire, de toutes fayoïis. On lit: « pour un
« petit n'avant n'arriére, » dans Colgrave, Dict.
En étendant à toute espèce de façons d'agir diffé-
rentes, les idées contraires de l'action d'aller avant
et arrière, de la lagon de se mouvoir avant et
arrière, on a dit :
Regastoient en tel manière
Saint Yglise, avayitel arrière.
G. Guiart, MS. fol. 102, Rv
Tant que tu te plaindras et avant et arrière.
Aura celé enlenilu ta voix et ta proiere ;
Ne t'en chaut s'au premier est orgueilleuse et fiere.
Fabl. MS. du R. d* 7G)5, fol 178, V' col 2.
Dans ces expressions où l'on reconnoit sans
doute l'ellipse du verbe qui désigne le mouvement,
la signification de l'adverbe arrière, propre ou
figurée, est donc la même qu'en mille autres
expressions , telle que arrière aller , ou aller
arrière, tourner arrière , venir arrière , entrer
arrière, mener arrière, carier arrière, arrière
porter ou porter arrière, envoyer arrière, bouter
arrière ou arrière bouter, etc. « Les prièrent k'il
>• allassent arere, e trencbassent de cet fust six
« cotées, e de celé partie feissenl une croix. »
(Hist. de la S" Croix, ms. p. 16. — Fabl. ms. de
Berne, n° 354, fol. 23. — Eust. Desch. Poës. mss.
p. '240, col. 3, etc.)
Pères, fet-il, tornez arrière...
Or vous faz-je seignor et mestre
De mon ostel, à toz jors mais.
Se ma famé ne veut la pais ; etc.
Fabl. MS. du R. n" llh». fol. J51, V- col. 2.
Tantost sans plus delaier,
A lor ostel vincirent arrière.
Chantant et faisant bêle chiere.
Fabl. MS. du R. n' 7615, fol. 127, V col. 1.
Entrent en leurs vessiaux arrière.
L'autre navie, qui qu'en hoingne (1),
Le port de la cité resloingne.
G. Guiart, MS. fol. 22*, V'.
Il seroit possible que dans les verbes rentrer,
revenir, retourner, et autres de même espèce, le
principe de la particule rc, fût l'adverbe arrere
qu'on ecrivoit arre ; d'où vraisemblablement plu-
sieurs verbes inusités, tels que araler, aretourner
dans le sens de arrere aller, arrere tourner. (Voy.
Rom. d'Alexandre, ms du R. n° 6987, fol. 190. —
Villehardouin, p. 55.) Au moins est-il constant que
dans nombre de verbes, la particule re, comme
arrere dans nombre d'expressions, signifie que le
mouvement désigné par le verbe, se Tait en rétro-
gradant, en retournaiil vers un lieu d'où l'on est
parti, d'où l'on est venu. C'étoit encore la significa-
tion d'arrere, lorsiju'oii disoit : « Si te eiifreiieiai,
« eariere te merai là dun tu venis. » (Livres des
Rois, MS. des Cordcl. fol. 146.) « Tele malady luy
" p.ist en cheminaunt vers ceste court que il ne
>< poit avauiit pur gayner, ne pur perdre : eiiis se
" tist carier arrere à sa meson. « (Britton des Loix
d'Angleterre, fol. 281. i « Cumandad David (jue l'um
" portast l'arche ariere en la cited. ■■ (Livres des
Rois, MS, des Cordel. fol, 60.)
Sire, fet il, que ce sera?
Je cuit que il me convenra
Le mantel arrière porter.
Fabl. MS. du R. n- 7615, fol. H5, R- col. 1.
Dans le sens de renvoyer un criminel, de le faire
retourner au lieu de la Seigneurie dont il est justi-
ciable, on lit : « Tuit Geiitis-bons qui ont voirie
" en leur terre, pendent larron de quelque larrecin
" que il ait fait en leur terre : mes en aucune Clias-
« tellerie les mené l'en juger à leur Saingnour. Et
« quand li Sires les a jugiés, si les envoie arrière;
■' et cil en font la justice. « (Ord. T. l, p. 135 et 136.)
C'est relativement à l'idée d'une force à hniuelle
on cède en rétrogradant, en faisant un inouvenient
arrière, que dans le sens de repousser on disoit
« botter ayere et arrier bouler, » d'où, peut-être,
notre verbe rebuter. « 0! tu chaitive chars, ke
« feras-tu, s'il avient que tu de ceste glore soyes
« botteie arjere, el'jugieie knonûigne. >> (S' Bernard,
Serm. Fr. mss. p. 46.)
Petit nous ont douté
Paien, quant sont de Homme la cité
Issi ainsi. Fait ont gront foleté,
Quant si sont trait fors de leur fermeté.
Si radement (2) soient arrier bouté.
Qu'il ne nous tiengnent mie pour enprunté.
Enfance d'Ogier le Danois, .MS. de Gaigiiat, fol. lOJ.
On ouvre une porte, une barrière, un buis, en
les poussant, en les faisant mouvoir en arrière :
de là, l'expression, « ouvrir arrière un huis. »
A l'uis vit droit o l'Aversiere
Fu apuiez; si Vuevre ariere.
Fabl. MS. du R. n» 7615, fol. 128, V" col. 1.
Lorsque, par ce mouvement, une barrière ou une
porte étoit ouverte autant qu'elle pouvoit l'être,
lorsqu'elle étoit poussée en arrière tant que se
pouvoit, on disoit comme on le dit encore aujour-
d'hui, quelle étoit ouverte toute arrière, qu'elle
« étoit arrière ouverte. » (Voy. Froissait, Vol. IV,
p. 35. — Cotgrave, Oudin et Monet, Dicl.)
Cheoir par dayer, c'étoit cheoir par un mouve-
ment en arrière, tomber à la renverse. » El mont
« volt seoir li anciens serpens mordanz les ungles
" del cheval, por ceu ke cil ki sor siet. chacet par
(1) C'est le sens fameux ; « Qui qu'en grogne. » Ce mot n'aurait-il pas la même origine que honni); c'est-à-dire l'aUemand
hohnen, moquer, [aire honte'? (n. e.) — (2) Rapidement: rapidum a de même donné rade. (H. e.)
II. 23
AR
- 178 -
AR
« d'ayer. » (S" Bernard, Serm. Fr. mss. p. 316.) La
mémo idée de mouvement en arrière se retrouve
encore dans les expressions, « couper teste arrière
« bras, ferir à arriere-inain, » c'est-à-dire, couper,
frapper de l'evers ; fi apper, couper en faisant un
mouvement de bras ou de main en arrière. « Si le
« fiert de l'espëe îi arrU're-mahi, tellement qu'il
« l'abatit. .. (l.;inc. du Lac, T. L fol. 80.) « Toutes
K les fois qu'il .sentoit les Chevaliers si près de
« luy.... il leur coupoit les testes arrière bras »
(Percef. Vol. L fol. 58. — Voy. AnRiERE-.MAiN.)
Peut-être regardoit-on les choses délivrées,
rendues, redemandées, reconquises, etc. comme
faisant ou devant faire un mouvement par lequel
elles alloient, elles retournoient aux personnes à
qui on vouloil qu'elles revinssent, loi'squ'on disoit:
1° délivrer arere : >■ Soit comaundé as Coroners et
« à lour heires que ilz deliverent as Justices lour
« roules puis le dareyn eyre : et volons que les
« Justices les enselent desouth lour sealx, et
<t taunlost, saiinz nul examinement les lour dc//D(?-
« rent arere. « Britlon,desLoix d'Angleterre, fol. 9.
2° Rendre arrière :
Tout Artois conquist celui Hue...
Puis ot des siens si granl piiere,
Qu'il le rendi au Conte uriere.
G. Guiart, MS. fol. U7, V'.
A la morte rendi arrière
L'ame el cors ; et sus se leva, etc.
Miracles, MS. de la Clayelte, p. 456, col. 1.
.... Firent li Normant proiere
Que Dieux reniJist l'enfant ariere.
Oies coument il fu garis.
Ph. Mouskcs, MS. p. 374.
3° Demaunder arre, pour redemander « Si ascun
« eyt lessé à terme des ans son lenement que il
« avéra lenu à terme de sa vie, ou à greynour
« terme des auns, et demnunde arre sa seisine,
« demeyne après le terme del leès; etc. » (Britton,
des Loix d'Aiit;lelerre, fol. 207.)
4° Conquérir arrière, pour reconquérir :
Jhernsalem fut des Turcs trette
Par Cliarleraaine et Constantin (1),
Qui les chacierent en la fin
Hors de celle Saincte Cité.
Es mains fut de Creslienté...
A mille ans lIIUx un mains,
Sariazin l'osterent des mains,
Des Ci"Sliens qui la perdirent.
A cent iiprès la conquirent
Arrier Godefroy de Buillon, etc.
Eusl. Desch. Poês. MSS. p. 572, col. \.
Il semble « qu'entendre arrière à quelqu'un, »
c'étoil avoir un retour de bonne intention pour lui,
retourner à lui par le mouvement d'une passion
contraire à celle qui en avoit éloigné. « Après ce
« que le Duc de Julliers eut entendu arrière à son
« oncle le Duc de Brabant, et quitté et délivré de
« sa prison, ils furent assez bons amis ensemble. «
(Froissart, Vol. III, p. 272.)
Peut-être encore s'est-on figuré les personnes et
les choses qui redeviennent ce qu'elles étoient, qu'on
remet et pose où elles étoient, comme retournant
et revenant à leur place, à leur premier élal, par
un mouvement semblable à celui par lequel on
revient et retourne au lieu d'oi^i l'on est parti. On
croit que d'après cette comparaison, l'on aéra dit .-
1° Poser arrière, mettre arrière, arrière mettre,
pour remettre, rétablir: « Comme plusieurs Ser-
« geiils... ayent esté pour leurs metfais... privez
« pour tousjours de leurs Offices et ils soient
« arrière mis en leurs Offices, qu'icel en soient
« derecbief osté à touz jours. » (Ord. ï. 1, p 559.)
« Que la chose me soit mise arrière en pesible
•• estât. » (Beaumanoir , Coût, de Beauvoisis ,
chap. xxxii, p. 167.)
Celériere,
Alez ; et si scit mis arrière
Là donc il fut osté et pris.
Fabl. MS. du R. n" 7615, fol. 147, V- col. i.
Puis le fist-on poser arrière
En son Siège de Cantorbiere.
G. Guiarl, MS. fol. 13, R'.
2° Devenir arrière , pour redevenir : » Les
« Romains... après la perte de pluseurs consulz ..
« devinrent arrière victoriens. » (Instruction de
Chevalerie et exercite de guerre, m,>. fol. 4.)
3" Estre arrière, pour revenir à son premier état,
redevenir ce qu'on étoit :
L'omme durra
Sanz mourir, puis la mort première
Que cendre le fault cstre arrière.
Eusl. Desch. Poès. MSS. p 477, col. i.
4° Arrier-mourir, pour revenir à l'état de mort :
Et fussent tons ressours en propre vie.
Je croys que tuit vouldroient arrier-mourir,
Ains que de voir de ce monde l'envie.
Eusl. Desch. poés. MSS. p. 4, col. \.
5° Arrière se coucher, pour se recoucher. (Voy.
Athis, MS. fol. 6 et 26.) Qu'il suffise d'avoir indiqué
par quelle comparaison, dans une infinité de verbes
composés et d'expressions dont l'cnuméralion
paroitroit sans doute aussi ennuyeuse qu'inutile,
l'adverbe arrere aura signifié assez naturellement
une idée de retour, non-seulement à un état, mais
à une action ou à une parole, à une chose qu'on a
déjà dite ou faite. En efTet, redire une chose, comme
la refaire, c'est y revenir, y retourner en la com-
mençant arrière, en la réitérant, en la recommen-
çant. « Qui redit une chose, semble reculer à ce
« dont sa voix est partie. » (Nicot, Dict. au mot
Arrière.) Ce mouvement sembloit propre à la chose
même qui recommenyoit, lorsqu'on disoit :
Si co>n»iença la guerre arrière,
De Bresse et Henri l'Emperiere.
Hisl de Fr. en vers, à la suilc du Rom. de Fauvel, MS. du R. fol. 77.
On avouera que l'analogie de signification rend
assez vraisemblable l'opinion de Priscien, qui
croyoit possible que l'adverbe latin relro,en fran-
çois riere, arrière, fiît le principe de la particule
re, dans nombre de verbes latins de l'espèce des
verbes françois, recommencer, remettre, rede-
mander, rebuter, renvoyer, reporter, remener,
rentrer, revenir, retourner, etc. Il est évident qu'en
(1) C'est un récit fait d'après le cycle carolingien et non d'après l'histoire, (n. e,)
AR
179 —
AR
ces verbes, re signifie la même chose que an iere,
dans les expressions yrriere tourner, arrière venir,
ariiere entrer, arrière nieuur, arrière envoyer, et
autres; c'est-à-dire, une idée générale de retour,
propre ou figurée. (Voy. Arriere-chabte.) Quelle que
soit donc l'origine de cette particule, c'éloit avec
répétitition de la même idée, que dans le sens
à'ullcr arrière ou araler , tourner arrière ou
aretourner, venir arrière ou arrière venir, porter
arrière, botter arrière, demander arrière, con-
quérir arrière, remettre arrière, etc. on disoit
remettre arrière, arrière recouvrer, redemander
arrière, reboter ayere, reporter et raporter arrière
ou ancre, arrière retourner, arrière revenir ou
revenir arrière, ayere raleir ou raleir ayere, etc.
rVoy. S' Bernard, Serm. Fr. mss. p. G6 et 339. —
Anseis, ms. fol, 14. — Chans. Fr. ms. de Berne,
n<'389, part, ii, fol 102. — Fabl. ms. de la Clayette,
p. 43-2. — Vie de S' Patrice, ms. de N. D. n° '2, fol 98.
— S' Bernard, Serm. Fi'. mss. p. 339. — G Guiart,
MS. fol. 148. — S' Bernard, Serm. Fr. mss. p. "207. —
Fabl. MS. du R. n" 7()ir>, fol. 209. - S' Bernard,
Serm. Fr, mss. p. 280. — Beaumanoir, Coût, de
Beauvoisis, chap. vu, p. 47. — Enfance d'Ogier le
Danois, ms. de Gaignat, fol. 109. — Rom. d"e Per-
ceval, MS. de Berne, n° 3,i4, fol. 234, etc.)
En rétrogradant, en faisant un mouvement en
ari'iere, on passe après celui devant qui ou à côté
de qui l'on étoit, avantqu'on eût fait ce mouvement
en arrière , que paroit signifier l'expression par
de.ricie oupar d'ayer, comme on lit en ce passage :
n Adam se volt covrir contre nostre Signor, de la
« femme par cui il avoit péchiet; assi cum U par
» d'ayer son dos, se volsist eschuir delà saette. »
(S' Bernard, Serm. Fr. mss. p. 373 )
Une fai;on très-naturelle de marquer son indiffé-
rence pour les personnes et les choses, ou la pré-
férence donnée aux unes sur les autres, c'est de
jeter arrière dos, de mettre arrière dos, de mettre
arrière, de faire passer apjès celles qu'on juge
préférables, ou moins indifférentes, celle qu'on met
de côté, qu'on néglige. Ainsi, l'on disoit tigurément :
« Tous ses affaires m-jere mis, conclud entrer en
« Aragon. » (Hist. de la Toison d'or, Vol. I, fol. 92.
— Voy. Rob. Eslienne, Nicot et Monel, Uict.j
« Oncques pour prospérité, ne pour bien que nostre
« Dieu nous envoyast, nous ne le regratiasmes
<t Aincois le meisme arrière dos, tout ainsi que si
« nous n'eussions besoing de lui. » (Percef. Vol. I,
fol. 61. « Est si entenduiz en aquaster, k'il l'onesteit
« et lo deleit met ayer dos. » (S' Bernard, Serm. Fr.
MSS. p. 106.) « Avons parfaitement mis ayer dos les
« choses terriennes. » (Id. ibid. p. 215.) « As fait
« ydies e simulachres ii lun oes.... e mei as getté
a arrière dos; pur ço des ore enveierai mais, e
« anguisse, e travailz sur tei. » (Livres des R. ms.
des Cordel. fol. 102.)
Le possesseur d'un fief relevant immédiatement
d'un Seigneur suzerain étant son iiomme proche,
celui qui possédoil médiatement, a un oa deux
degrés de vasselage après le piemier, étoit l'homme
arrière, l'homme après celui qu'on nommoit
l'homme pi'oche du Seigneur suzerain. « Se peut
« le Seigneur poursuivre son lioinme proche ou
» arrière, par sa Cour, des obligations et conlracls
« que le Seigneur diroit avoir faits avec son
« homme. » (Coût, de Bretagne, au Coût, géu T. Il,
p 758.) C'est relativement à l'idée de celle féodalité
graduelle, et à la signification de l'adverbe arrière,
employé comme préposition dans cette expression
elliptique homme arrière, qu'on a dit arriere-vassal,
arr.ere-vasseur. Seigneur arriere-feudal, aniere-
fief, fonds arriere-censif, etc.
On observera que non-seulement le premier
vassal, mais le second, le tiers, et ainsi infiniment,
avoient tous le droit d'arrierefiefer (Voy. Bou-
teiller, Som. rur. lit. lxxxiu, annot, p 487.) 11 y
avoit donc tel vassal médiat, à plus de trois degrés
arrière ou après le vassal immédiat, à qui la déno-
mination d'arriere-vassal ou de Seigneur arriere-
feudal, étoit commune avec celui qui n'étoit (|u'au
second ou au troisième degré de vasselage. « Le
« Seigneur arriere-feudal ou l'ar. iere-vassal, qui
« se dit il la différence du premier vassal , esl celui
« qui tient un arriere-fief mouvant par moyeu du
« fief de quelque Supérieur. » (Voy. Laurière, Gloss.
du Droit Fr. — Monet, Dict.)
Il en est de l'arriere-fief (1) comme de l'arriere-
vassal ou du Seigneur arriere-feudal. Ainsi, lors-
qu'après avoir dit que tenir en arriere-fief « si est
« si comme quand on tient aucun fief par second
« ou par tierce-main, « Bouleiller ajoute qu'il est
« plus pertinent d'appeller le tiers fief » arriere-
fief qu'il n'est le second ; non-seulement il particu-
larise la significalion d'arriere-fief, mais il borne
au tiers vassal , le seul que d'après son raison-
nement on nommeroit arrière vassal, la faculté
d'arrierefiefer. Ce raisonnement, conforme sans
doute à la disposition de quelque coutume, est
contraire au droict des feudes, par lequel « le tiers
.■ vassal peut refiefver. » (Voy. Bouleiller, Som.
rur. tit. Lxxxm, p. 485. — Id. ibid. annot. p. 488.)
C'est donc en un sens aussi étendu que l'étoit la
faculté d'arriere-fiefer, que l'arriere-fief, à la diffé-
rence du proche fief, du fief sans moyen, est un
fief servant et dépendant de fief sans moyen, de
proche fief, de fief dominant. (Voy. Laurière, Gloss.
du Dr. Fr. — Nicot et Monet, Dict.)
Les fonds tenus en arriere-fief se nommoient
fonds arriere-censifs, relativement au cens, au
surcens que l'arriere-vassal, le vassal médiat devoit
au proche vassal, au vassal immédiat du Seigneur
suzerain. On a défini « le fonds arriere-censif, un
« fonds tenu en arriere-fief, qui doit cens, censive (2),
« surcens au proche vassal, au premier vassal
" duquel le Prince exige le chef-cens. De là, les
(1) Varrtere-fîef relevait directement du fief dominant, intermédiaire entre V arrière- vassal et le suzerain, mais n"avait
aucun nef dans sa dépendance, (n. e.) — <2) Il ne faut [ja.? nous étonner de voir ici confondre le fief et la censive ; le fie
peut être une terre roturière^ et jusqu'au xvin' siècle, en Normandie, fie£fer une terre était la donner en censive. (n. e.)
AR
- 180
AR
» rentes arrière-foncières, dues pour un fonds
« arriere-ceiisif, pour un fonds tenu en arriere-
« fief. » (Voy. Laur. Gl. du Itr. Vr. — Monel, Dict.)
Par la raison qu'en lenure féodale on a dit arriere-
fief, on a dit arriere-censive en tenure roturière.
(Voy. Coliirave et Micot, Dict.)
On supprimera prosnue en totalité la liste alpha-
bétiiiue d'une iulinité de semblal)les composés,
parce (lue l'on croit avoir domoniré suflisamment
la possibilité de ramène:' à l'idée générale » être
après, » la signification pnpre ou figurée de mots
tels que » ai'riere-cense, arriei'e-chambre, arriere-
« coureur, ;;rriere-fils, arriere-fossé ou arrier-fossé,
« arriere-garand, arrière-germain, arriere-guet ou
« arrier-guet, arriere-juveigneur, arrière-louage,
« arrieie-neveu , arrière -pauage. arriere-taille,
« arriere-vendage, etc. « (Voy. Coût, de Ilainaut,
au Nouv. Coul. gén. ï. 11, p. 134, col. '2. — Du
Bellay, Mém. T. VI, p. 303. — Monstrelet, Vol. Il,
fol. tJ-i. — Monet, Dict. — Eust. Desch. Poës. mss.
p. 38, col. 1. — Le .louvencel, ms. p. 56. et 67. —
3. Chartier, Ilist. de Charles Vil, p. 36. — Nicot,
Dict. — Bouteiller, Som. rur. tit. xxxiu, p. 215. —
Cotgrave et Monet, Dict. — Coût, de Gand au Nouv.
Coût. gén. T. 1, p. 1019. — Eust. Desch. Poës. mss.
p. 38. — Id. ibid, p. '237. — Le Jouvencel, ms. p. 58.
— Chron. Scandai, de Louis XI, p. 71. — La Thau-
massière. Coût, de Berry, chap. xxviu, p. 35. —
Monel, Dict. — D'Argentré, Coût, de Bretagne,
p. 841 et Sî'i. — Laûrière, Gloss. du Dr. Fr. —
Monel, Dicl. — Laûrière, Gloss. du Dr. Fr. —
Colgr.ive, Dict. — Coût, de Hainault, au Nouv.
Coût. gén. T. Il, p. l'i'i, etc.) (Juoiqu'en certains
composés, de l'espèce de ceux qu'on indique,
arrière paroisse signifier moins l'idée d'être après
une chose que celle d'y retourner, on peut, dans
l'explication, substituer très-naturellement à l'idée
de retour, celle d'après; puisque retourner ù une
chose, la réitérer, c'est la faire après l'avoir déjà
faite une ou plusieurs fois. C'est ainsi qu'arriere-ban
a signifié convocation d'arriere-vassaux, et convo-
cation itérative pour service militaire. (Voy. Arb.\n.)
On se figuroit sans doute un temps passé, une
chose passée, et on se les figure encore comme
ayant devancé une chose présente, un temps pré-
sent, lorsqu'on les désigne par l'expression ellip-
tique, ci-devant. On voyoit au contraire le présent
comme ayant arrière lui, après lui le passé, lorsque,
rétrogradant en idée et renvoyant du présent au
passé', on disoit : 1° au temps ça en arrière, au
temps d'en arrière. (Voy. Miserere du Recl. de Mo-
liens, MS. de Gaignat, fol. 211, R» col. 1.)
Soufert avons au temps ça en arrière.
Eust. Desch. Pofs. MSS. p. 237, col. 3.
2° Ça en arrière ou çay en arriers ; %a en aijer
ou %dij en ayer. (Voy. Ord. ï. I, p. 520. — Perard,
Hist. de Bourgogne, p. 503; tit. de 1261, etc.)
« Estoil très oscure nuiz et très espasses ténèbres
« sor tote la terre, quant nosire peire honorevent
« za en ayer Deus faitis. » (S* Bernard, Serm. F'r.
MSS. p. 98. — Id. ibid. p. 126, passim.)
3° En ariere ou en arere ; en arer ou en ayer ;
et tout simplement, arrière. (Voy. S' Bernard,
Serm. Fr. mss. p. 110. — Loix iNorm. art. xvii et
xxxiv. — Rom. d'Amadas, ms. du R. n° 0987, fol. 325,
etc.) " As oid co que fait ai an arrière. Grant tens
« ad puis que, elc. « (Livi'es des Rois, ms. des Cordel.
fol. 146.) « Asseurerent la convenance, si com vos
« l'avez oï arrière, parsairemens. » (Villehardouin,
p. 37.)
Probablement, la signification d'arrière étoit
encore relative à l'idée d'être après ce qui est de-
vant, dans l'ordre successif des temps et des choses,
lorsqu'on disoit :
Conseil arrière vaut petit.
Rora. de r.ou, MS. p. 329.
Jehan second filz du Roi de France
Si fut marié, puis arrière,
A une fille d'excellence
Du duc Guillaume de Bavière.
Vigil. de Charles Vit, part. I, p. g.
Cils dit ; nuls ne la vit puis A'arrers ni devant.
Mais qu'une sienne fille ; fais-là venir devant.
Gér. de Roussillon, MS. p. 101.
Il est évident que l'expression arrière trespassé
étoit une répétition inutile de l'idée d'un passé,
que signifioit arrière seul, ou avec le mot temps.
.< Nostre Père... avoit otroié que il ne ses Sergens
« nulles mains-mortes ne requéraient qui devant
« sept ans arriéres trespassez avandraient. » (La
Thaumassière, Coût. d'Orléans, p. 464; tit. de 1137.)
On a déjà vu mettre arrière ou arrière mettre,
dans le sens de rétablir, faire retourner à un pre-
mier état : sens très ditTérent de celui dans lequel
on disoit, « se mettre arrière de ce dont on étoit
1 avant. » On a vu aussi que « mettre arrière ou
« arrière mettre, » c'étoit faire passer après, mettre
de côté. (Voy. Arriehe-boutiqce.) 11 semble que rela-
tivement à cette dernière acception, l'on ait dit :
1" en parlant d'une chose qu'on met de côté et en
réserve, pour n'en user qu'après avoir usé d'une
autre :
C'est le coraill (!■) de nostre porte,
Qui l'autre jour fu adiré.
le cornant qu'il soit bien gardé...
Je voil qu'il soit arrière nus.
Fabl. MS. du R. n- 7615, fol. 147, R- col. 2, et V col. 1 .
2"" Au figuré, en parlant d'un père qui, mettant
de côté son bien-être personnel, et le faisant passer
après celui de ses enfans, leur abandonne tout ce
qu'il possède, tout ce qu'il a, sans possibilité de le
recouvrer :
Ne fêtes raie en tel manière ;
Ne ne vous mêlez mie arrière
De ce dont vous êtes avant.
Ne donez tant à vostre enfant,
Que vous n'i puissiez recouvrer.
Fabl. MS. de R. n- 7218, fol. 151, V- col. 2; et 152, R- col. 1.
(i) Voir Du Gange à Corale. On lit au registre JJ. 194, p. 345 (1471) : « Icellui Guionnet de toute sa force frappa audit huys,
tellement qu'il rompit le courreil d'icellui et se ouvrit ledit huys. » On dit encore, en Seine-et-Oise, canton de Chevreuse,
crouUler une porte, pour la fermer au verrou, (n. e.)
AR
— 481
AR
En disant qu'un homme étoit arrière d'une
cliose, on se le représentoit encore comme passant
après, comme étant après la chose (ju'il avoil eue
avant et qu'il n'avoit plus. (Voy. Ahrieke-ciiarte.)
« Li Héritiers ne sont pas arrière don droit de la
« rtscousse, pour le testament. » (Beaumanoir,
Goul. de Beauvoisis, chap. xii, p. O'J.) « Dieu me
« gard de... apprO|jrier chose à moy, dont aullre
« puist csire arrière de son droicl. » (Percef. Vol.
VI, fol. 35. — Voy. ARREliAGEH.)
C'ét)it probablement en se formant une idée
semblable de la position d'un débiteur, par rapport
à une somme de deniers qu'il n'avoil pas et dont il
avoil besoin pour payer, qu'on le disoit à Varriere
de deniers. » La guerre fut longue; et par ce moyen
« fut à l'arriére de deniers, et en grand somme. »
(Mém. d'Oliv. de la Marche, liv. », p. 655. — Voy.
Arrekage.)
Dans un sens relatif à l'idée d'être plus ou moins
éloigné de la personne ou de la chose après laquelle
on est, après laquelle on a passé en rétrogradant,
arrière aura signifié loin, dans le sens le plus gé-
néral <• S'il n'est plus de deux lieues arrière, etc. »
(Conl. de Clermont, au Nouv. Coul. gén. T. II,
p. 871.) <' Mouroit hors de son pays, arrière de sa
« bonne femme. » (André de la Vigne, Voyage de
Charles VllI, p. 183. — Voy. Rob. Estienne, Nicot et
Monet, Dict )
Plus souvent et plus anciennement, arrière signi-
fioit près, auprès, contre; signification qui, pour
être opposée à celle de loin, n'en est pas moins de
même origine. On a la preuve qu'en style figuré,
être avant d'une chose, o'éloil l'avoir, la posséder.
Le possesseur, ainsi représenté dans une position
aussi naturelle qu'avantageuse à la sûreté de sa
possession, avoit après lui, mais près, tout proche,
au(irès, tout contre, la chose dont il étoit d'autant
plus sûr qu'elle étoit moins éloignée. Il est possible
que selon celte façon de voir, on ait dit « avoir en
» aijer soi une chose • pour l'avoir, la posséder.
« Ancor n'en ay-je mies en aijer mi chose ke ju vos
" poie mettre davant : Si demanderai-ju Saint Be-
« noit trois pains dont je vos poie paslre. » (Saint
Bernard, Serm. Fr. mss. p. 314.) « Si j'ausserecoillil
■< lo sanc nostre Signor, ensi cum il decorreilde la
« croix, et si ju Vavoiie en ayer mi en un vessel de
« voire, etc. » (Id. ibid. p. 29.) C'est dans un sens
analogue, qu'au xvn' siècle on désignoit encore une
possession illégitime, en disant : « Il a beaucoup
« du mien arrière soi. » (Monet, Dict.)
L'idée de proximité, quel qu'en soit le principe,
étant généralisée, l'acception A'arriei'e fut aussi
étendue que celle de la préposition latine apud, à
laquelle il répond en quantité de passages, où il
signifie dans, chez, auprès, etc. « 0! cum bien-
« aurons le cuer. chier Sire, en ayer oui tu feras
« mansion. » (S' Bernard, Serm. Fr. mss. p. 26.)
« Li poures en ayer cui je fui harbegiez, me fist pi-
« tiet. » (Id. ibid. p. 45.) » Est li sapience de cest
« Munde, sottie en ayer Deu. .. (Id. ibid. p. 261.)
Peut-être que, comme avec ellipse, on désignoit
un conseil qui venoit après chose faite, en disant
((ue c'étoit conseil arrière, on aura désigné la Jus-
tice dont on étoit toujours près d'être secouru, e»
disant que c'éioil justice arrere.
Or fut-il aigle très notable,
Q\\\ ne voulut tondre, ne rere
Ses oyseaulx ; mais par /iisHce arrere
Leur est tous temps serourable.
Eust. Descli. Poés. MSS. p. 321, col. 1.
Quelle que soit au reste la signification à'arrere
en ces vers, on croit qu'être arrière de faire une
chose, c'étoit être près de la faire.
Quant je vi premifrement
Ma très douce Dame chiere ;
Sa grant beauté fu arrière
De moi navrer tellement,
Que se pité, n'i entent ; etc.
Froissart, Poés. MSS. p. 226, eol. 2.
Il semble même qu'en ces vers, c'étoit approcher
par derrière et le plus près possible, afin d'être plus
sûr de son coup. Il est probable (jue, relativement
ù l'idée de s'opposer en s'approchant tout près,
tout contre et par derrière, on aura dit d'une per-
sonne qui nous étoit contraire et opposée, qu'elle
nous étoit arrière dos.
Dont li redist li fel Prevoz ;
Pourquoi m'es-tu arrière dos 9
Vies de Saints, MS. de la Clayetle, p. 39, col. 2.
On termine cet article, sans autre preuve qu'ar-
riere a signifié des idées d opposition entre per-
sonnes ou choses contraires, parce qu'il paroit suf-
fisant d'indiquer l'analogie de celte signification
avec celle d'après et auprès.
VARIANTES :
ARRERE. Britton, des Loix d'Angleterre, fol. 281.
AiER. S' Bernard, Serm. Fr. MSS, p. 356 et 374.
AlERE. Id. ibid. p. 280.
AihER. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 217, col. i.
AiRiËHE. Siège de TUèbes, MS. du R. n» 6987, fol. 40.
AiRRiER. Chans. Fr. MS. de Berne, part, i, fol. 53.
Areh. Loi.x Norra. art. xvii et xxxui.
Arère. Brillon, des Loix d'Angleterre, fol. 12, V°.
Areus. Marbodus, de Gemm. art. vu, col. ■\tii6.
AiUER. Chans. Fr. MS de Berne, part, n, fol. 102.
Ariere. Livres des Rois, MS. des Cordel. fol. 146.
Ariers Fabl. MS de la Clayette, p. 432, col. 1.
Ahiez. Fabl. MS. de Berne, n" 354, fol. 20, V° col. 1.
Arre. Britton, des Loix d'Angleterre, fol. 267. R°.
Arrers. Ger. de Roussiilon, MS. p. 101.
Arreuso. Frag. de la v. deBoece, MS. de S' B -s.-L. p. 274.
Arriens. Perard, Histoire de Bourgogne, p. 503.
Arrier. Enfance d'Ogier le Danois, MS. deGaignat, fol. 92.
Arrière. Orth subsist. — Villehardouin, p. 37.
Arriéres. La Thuumassière, Coût. d'Orléans, p. 464.
Arriers. Perard, Hist. de Bourgogne, p. 503.
Ayer. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. p. 29, passiyn.
Ayere. Id. ibid. p. 66, passim.
Ayërs. Id. ibid p. 38 et 43.
Erres. Ane. Poët. Fr. MSS. avant 1300, T. II, p. 921.
Erriere. Hist. de la Toison d'or, Vol. I, fol. 92.
Hareu. Froissart, Poës. MSS. p. 325, col. 1.
Arrérer, verbe. Mettre en arrière, reculer, éloi-
gner, différer, retarder. Priver d'une possession.
Endetter.
Il senible que, par contraction du verbe arrérer
ou arriérer, formé de l'adverbe arrière ou arrere,
on ait dit arrer devises, pour reculer les bornes
qui divisoient deux possessions voisines l'une de
l'autre. « Si devises entre veisins soit arres par un
AR
- 182 —
AR
« des veisins, ydoïKiucs tient Heu ceste assyse à re-
a di-esser ses devises jesques en lour droit estate. "
(Brillon, des !.oi\ dAngieterre, fol. lt'2, H".)
C'est relativement à l'idée générale de mouve-
ment en arrière, et de la position où l'on est en
conseiiuence de ue nrmvement, que s'arriérer a
signifie se reculer, rester en arrière. (Voy. Oudin,
Dict.)
En trop haster n'a nul avancement ;
Et tels se cuide arriérer qui s'avance.
Amours, j'ai bien de tout ce sentement :
En trop haster n'a nul avancement.
Froissarl. Pocs. MSS. fol. 328, col. 1.
Quoiqu'arr/«'<'r subsiste comme verbe récipro-
que, on ne diroit plus arriérer une affaire, pour la
mettre en arrière, la reciuler; arriérer un ouvrage,
pour le reculer, en éloigner la fin ; arriérer un
jugement, pour en éloigner l'exécution, la différer;
arriérer un amour, pour en éloigner la récom-
pense, la retarder ; arriérer le cuidier de quelqu'un.
pour reculer son espéiance, l'éloigner, etc. (Voy.
Lett. de Pasquier, T. III, p. 515. — Cléomadès, ms. de
Gaignat, fol. 52. — Lanc. du Lac, T. I, fol. 132. —
Percef. Vol. VI, fol. 83.)
Cis coups a moult Brunamon desvié,
Et son cuidier durement arriéré.
Enfance d'Ofier le Danois. MS. de Gaignat, fol. 95, V col. t.
Les acceptions propres ou figurées de ce verbe,
sont toutes analogues à celles de l'adverbe arrière.
Dans l'expiession être arrière d'une chose, c'est-à-
dire, n'avoir pas une chose, en être dépossédé, en
être privé, on trouve l'origine de la signification
^'arriérer, en ces vers :
. . . Quant il est desatiriez
Et d'aucune chose arrinez,
Si dist ; se j'estoie à harnas,
Et je eusse uns linges dras,
Ou tel chose que il n'a mie ; etc.
Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 256, R" col. 1.
Enfin, par la raison qu'on a dit: être à l'arriére
de deniers, le verbe arriérer a signifié endetter.
« Il ne vouloit que le Hoy fust embesongné de le
« festoyer, ne aussi que les Genlilzhommers en fus-
« sent arriérez de les festoyer, chascun selon sa
« valleur. » (Percef. Vol. II, fol. 144.— Voy. Oudin,
Dict.) C'est dans un sens relatif qu'on dit encore
qu'un fermier ^'arrière. (Voy. Arrére et Arrérage.)
VARIANTES :
ARRÉRER. Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 5, 'V» col. 3.
ARnKR. Britton, des Loix d'Angleterre, fol. 112, R".
Arrierek. Percef. Vol VI, fol 83, V" col. 1.
Arririer. Fabl. MS. du R. n° 7218, fol. 256, R° col. 1.
Arrérisseinent, suhst. masc. Délai ou priva-
tion. On croit que, dans un sens analogue à celui
du verbe arrérer, priver d'une chose, ou la différer,
on a dit : « Soit enquis de alliances de jurors par
« entre nos Ministres et eux, ou par entre veisin et
« veisin, en arrérisseinent de droiture. ■> (Britton,
des Loix d'Angleterre, fol. 38 — Voy. Arreher.)
Arrest, suhst. masc. Chose qui arrête, obstacle,
empêchement ; arrêt de lance; partie d'une lance,
la poignée; déterminalinn, dogme, décret, sen-
tence, jugement. Slabililé, constance; station,
pause, rei'.os, demeure, détention ; état d'une per-
sonne arrêtée; état d'une chose sur laquelle on a
fait arrêt. Action d'arrêter ; cessation, délai, retard.
(Voy. Arrestance, Arrestee, Arrestement et Arres-
TOISON.)
En supposant que l'adverbe riere, en latin rétro,
soit le principe de la particule re dans nombre de
verbes, tels qu'en françois râler, retourner, rebu-
ter, on pourroit dire que de relro stare. estre ou
ester riere, s'est formé le verbe latin restare, en
françois rester ; et (\uarrester{\) est de même origine
(\u'a7-aler, aretourner, et autres que l'on croit être
formés de l'adverbe composé arrière. Peut-être ju-
geia-t-on raisonnable une supposition faite d'après
l'analogie évidente des signilications de l'adverbe
et de la particule. (Voy. Arrére.)
Quoi qu'il en soit, on avouera la possibilité
d'expliquer dans un sens relatif à celui de l'ad-
verbe arrére, le verbe arrester et le sulislanlif
arrest, en disant que» faire un arrest à quelqu'un, »
ou Varrester, c'est le forcer d'être arrière, de rester
plus ou moins loin du lieu ou de l'objet qu'il veut
joindre et vers lequel il s'avance. Ancienuement,
« faire un arrest à quelqu'un, » c'éloit l'arrêter,
l'empêcher de passer outre, faire obstacle à son
passage.
. . . Quant l'en voit une personne,
Tant soit saige, qui mal se vest ;
L'en lui a tosl fait un arrest.
Et deffendu qu'avant ne passe.
Eusl. Desch. Po6s. MSS. p. 550, col. 4.
Dans le sens général de chose qui arrête, le mot
arrest auroit désigné mille choses propres à ce
même effet, si l'on n'en avoit, comme aujourd'hui,
particularisé l'usage. Pour nos anciens Chevaliers
qui n'avoioat point d'rtm^/s de lance, « parce qu'ils
« n'eussent syu où le clouer sur leurs haubers de
c. mailles, mettre la lance en arrest, ou la coucher
« sur Varrest, » comme on lit dans l'Histoire de
Saintré, p. 499; c'étoit la coucher sur la selle, en
appuyer le gros bout contre l'arçon de la selle de
leurs' chevaux. (Voy. Fauchet, Mil.Fr. liv. n, p. 110.)
Ainsi, l'on pouvoit alors nommer arrest tout ce qui
tenoil lieu de la pièce de harnois, du petit fourreau
de cuir qu'on imagina depuis pour arrêter la lance
du Gendarme qui rompoit en lice ou dans un com-
bat. « Pierre de Bayard empoigna une lance
« d'un des Espuignols; et malgré lui, la lui meil
« hors de Varrest, tant qu'elle lui demeura. »
(Annot. sur l'ilist. du Cli" Bayard, p. 23. — Voy.
Dict. de Trévoux.)
L'opinion du Président Fauchet est que les
lances, originairement toutes unies depuis le fer
jusqu'à l'aulre bout, ainsi que les javelines, n'eu-
rent point de poignées avant l'an MCCC. (Voy. Mil.
Fr. liv. II, p. 110.) Il semble donc qu'avant l'usage
de la pièce de harnois, spécialement nommée
arrest, ce mot ait signifié poignée de lance ; soit
1) Arrêter vient de adrestare et apotir substantif verbal arrêt, (n. e.)
AR — 183 -
parce que cette poignée s'appuyoit à l'arcon de la
selle, ou à autre chose qui rarréloil ; soit parce
qu étant evidee, elle lormoit un «m'si pou i la main
de celui qui en étoit armé. « Les lances seront
« d une mesure, depuis la poincte du 1er iusuues à
'• Varrest. » (Monslrelet, Vol. II, lui. HM» i ., Le Che-
« valierKspaig-nolrompitsalancede pleine atteinte-
« et ut rompue par 1 arrest. .. (Mém. dOliv de là
Marche, hv 1, p. 187.) « Fut ledit Michaut blécé en
« la main dextre du commencement; mais il se
» blecea luy mesme à son arrest en couchant sa
« lance. » (Id. ibid. p 30!).) Peut-être dira-t-on
qu en ce dernier passage le mot arrest désigne une
pièce du harnois où l'on arrêtoit sa lance ? Mais on
reconnoitra sans doute que dans les deux précé-
dens, il désigne une partie même de la lance pro-
hahlement la poignée. (Voy Arrestell.)
La preuve qu'a/res/ signifioit en général chose
qui arrête, c'est qu'au défaut du nom' propre à dé-
signer i.articulièrement une chose de cette espèce
on disoit : .. Ung arrest qui lient une longete
« attachée au lacz. » (Moduset liacio fol 81 ) « si
" va.... pour se seoir sur le perron; mais il ne
" trouvast point à-arresl ; si va cheoir les jambes
"levées en ung nos qui derrière luy estoit. .. (Per-
ce Vol. II, fo . 32. - Voy. Arrest.se et Auestie)
Il est possible que relativement à celte acception
générale le mot arrest ait signillé figurément dé-
termination, dogme, decret,"sentence, juSenî-
en gênerai, chose qui arrête et détermine hi f^u^on
politique et morale de se conduire, chosequi arrête
et lixe les prétentions légitimes ou iUeg times de
nrn .!v ""T^'^f J"SC'menl qui arrête lecours d'un
procès. >. Or entrèrent le Roy de Castille et ces Ba-
" roiis et Chevaliers de France en parlement pour
" Z'\'' ^«'''^'n a^'-^'t et avis comment il se mai i-
« liendroyent. » (Froissart, Vol. III p 18G -
Cotgrave Rob. Estienne, et Monel, Dict'. - Vov
Arrestal.) y-
Anciennement, les Jugemens que les Cours Sou-
yeraines des Parlemens, rendoient sur procès pSr
dévolu fY-'T'"'' ^''''' ^''' >'"" des Ces Jî
devoit en faire le rapport à sa Chambre, étolent les
il • >V \' 6'» latin^;7'eA-<«m, étoit la dénomination
spéciale des Jugemens rendus publiquement e la
Chambre des Plails, dillérente de la Chan bre des
mSë é Si '■ " 'ff f ""'"^';-'"^ f *^^ Avocats La fS -
Th\J.fly " ^^".""^ ralionibus utriusque partis
ïu-y et '""^Vn"' n'"t"" ^"'^ ^'' nrreslun
mnt t'., , • ~ ^7- ^^' ^'"^^'•5' Gloss. lat. T. I, au
l'Hilf 1 ',""'• "'^- f^- - I"^em, dissert. 2, suï
1 Hist. de S' Louis, p. 143 ) '
sipîrî'l'^l"' P'f ''^.'^ 'i'"^ P''"'^*sse l'opinion de plu-
sieurs Llymologistes et Jurisconsultes, qui ont cru
?onn Z tîéc ' ''"''', ''7' «'■^^'' ^«''"«e étant
nin tSr ^ "'^""'' Plti-Ciltun en latin, en francois
plat on pense que l'ancienne formule des MS
favorise le sentiment de Mcot. .< Les Parlemens et
AR
(1) Au Parlement de Paris, le mot arrêt désignait exclusivement les sentences rendues
" Cours souveraines, dit-il, n'usent point de ces
« mois, U nous plaist, ou car ainsi nous plaist »
don 11 conclut avec assez de vraisemblance qu'au
hgure le substantif ., arrest, prins du' verte
«ai rester, ,, a signifié et signifie le jueemenf
d une Cour souveraine, parce qu'un pareil Se
mes f.'Vl'V P'-'^l'^''^'^''^ feitinies ou flîSïï
mes des Plaideurs, parce ,|u'il arrête le cours d'un
procès, parce qu'il est .. l'extrême clostine et fer
« meture aux appellations et au cou^>s d?n
" P^cès « (Voy. Mcot, Dict.) C'étoit aussi e seiuf
ment d Henry Estienne, qui a dit : ., Au hèu «'"é ê
" temps passe les Arrests faisoient arrest rlel
« procès.... maintenant on a trouvé l'inveniinn
« qu'au lieu de les arrester, il les S ta t mieS;
« coiircr : car nous voyons des procès sur esquels
« 0 este donnez jà dix arrests, et toutes forces?
doS pIIt.)''"™"''"'"'- " ^^''""^'' VonritS
Ce mot a signifié et signifie encore l'état d'une
personne qui reste en place, qui sarrShnne
Clans sa taçon d être physique ou morale: puisdu'en
parl:.nt de celle dont l'esprit ou le cor.s^ e'ïeu
s assujettir à cet état habituel, on a dit auSe
"dW^n'*-^'""'''"'^'' " q"'elle n'avoit no iplïs
"darret qu un jeune veau. » (Cotgrave Rob
S;r.)^''^^^^''''^'--^^«^-^'^^^^^^^^^^^^
Plus souvent, il désignoit l'état accidentel d'une
personne qui s-arrête en un lieu pour s'y reposer
y demeurer ; station, pause, repos, deme^ure,^Ss
]^r.S!f *^^'V?^^''^^'^'«"^'- l'étatd'unepersonnl
arrêtée, sa détention en ce passage : « La Re e
" mère avoit été arrêtée le matin .... Pe après
: meÏÏ'"' ';'^o™tesse divulgua Varrest delà âeini
êtSî " Bassompiere, T. IV, p. m
En ce sens, le mot arrest distingué de prison fei^
mee dams la Coutume de Bretao-,re, fol nf n'eit
P us usité qu au pluriel, en tenues le discipline mi
1. taire. Anciennement, on disoit d'une persinlîii
obeissoit a Varrest lait par un Officie de ustice
que le restoit en arrest; qu'elle forvoioU l'aM
SI elle y desobeissoiL « Se aucuns estoient arrestez
" f,^' "1'' r l'' "^'^". "^^'"«"l' souffisamment par
« a.son de Visconté, et il forvoioU t'arrest il
« I amenderoit par l'esbart du Maieur et des Eske-
« vins. » (Ord. T. III,p.t>95; tit.del-i91.) „ Qu con-
" ^"^ '■?"'■'' fT dehiteur, ou sa débitrice
« n estant point frère ou sœur de Loy de la mesme
« ville peut le faire arrester par l'un des oScim
.. es ablis par le Seigneur pou'r le payeme.U de sa
'< detle, ou pour autre prétention : et celuy qu, est
1' cîn'ïfin ^Vr^'l "^î 'l'^'' '" '''■''''«^' 0" d'establir
gén 'rTp."943 " '^''P''""-'''^' ^" ^^ouv. Coût.
On ne multipliera point les preuves qu'arma a
signihe eu Justice, l'état non-seulement des person-
par la Grand'Chambre. (n. e.)
AR
184 —
AR
nés, mais des clioses arrêtées : élat sur lequel pro-
noiHîoil une Jurisdicliou élaWie dans oertoiiies
Villes avec le lilre de Jurisdiclion des arrcsis.
« On csl dans rusai;e de cinq sortes de Juiis-
« dictions; de la Chambre, des Mandements, des
« Arrests, etc.... Aux Arresls, les Eschevins con-
« noisseiit à la semonce du Prévost ou Escoulette,
« de toutes les exécutions civiles, délenlions,
« arresls, apprétieiisions, appositions ou saisies
« faites dans la Ville et l'Eschevinage; comme aussi
« des causes et aclions pour lesquelles ils sont
« faits. » (Coût, de Bailleul, au iNouv. Coût. gén.
T. 1, p. 974, col. 1 et 2.)
Les Villes où l'action d'a^wi^^?" un débiteur étran-
ger et ses elTets mobiliers, étoil autorisée comme
drpit de Bourgeoisie, se nommoienl par cette rai-
son Villes d'Arrest. Ce droit, particulier à certaines
Villes privilégiées, fut octroyé en 113^, par Louis le
Gros, aux Bourgeois de Paris, « qui sans cédule ni
<■ obligation, pouvoient procéder par voye d'ariest
t sur les meubles de leurs débiteurs forains, qui
« étoienl les justiciables du Roi et non les jusli-
a ciables d'autres Seigneurs. » (Voy. Launère,
Gloss. du Dr. Fr.) Par Lettres de 1430, les babitans
de Montargis obtinrent du Roi, que leur ville seroit
« Ville d'Arrest, au regard de leurs debteurs,
« comme les Villes de Paris, Rouen, el autres bon-
« nés villes. » (Voy. La Thaumassière, Coût, de
Berry, p. 412. — Stille de procéder au Parlement
de Normandie, fol. 82, R" col. 2.) C'est sans doute
conformément à ces Lettres, que dans la Coutume
de Montargis, on lit : « La ville de Montargis, par
« privilège, est Ville d'Arrest; et les Bourgeois
<i manans et babitans en icelle, peuvent faire arres-
« to' dedans laditte Ville el Kauxbourg, les biens
« meubles d'aucun t^stranger et b'orain y trouvez,
« pour raison des dettes à eux deues tant par obli-
» galion qu'autrement. » (Coul. gén. T. \, p. 927.)
Ce droit d'Arrest, exercé en certaines Villes sur
les efl'ets mobiliers du débiteur étranger, s'exerçoit
en d'autres sur la personne même du débiteur.
« La ville de Brnsselles est une Ville d'Arrest;
« el il est permis îi un Créditeur, trouvant en icelle
« ou sa franchise, son Débiteur, de quelle qualité,
« condition ou estât il soit, n'estant bourgeois, ny
« y tenant lixedomicilcfaij'Crtrr^'sfÉîr par l'Amman,
« son Lieutenant ou Sergeants jurez, pour le tirer
« en droit devant le Magistrat de la Ville, atin
« d'avoir satisfaction de ses debtus ou prélensions. »
(Coût, de Brnsselles, au Nouv. Coût. gén. T. I,
page 1240, col. 1.)
Probablement, l'administration des Villes, qui ne
jouissoient pas du privilège des Villes d'Arrest, s' oc-
cupa des moyens d'en généraliser l'utilité, en per-
mettant aux Bourgeois, et même à ceux qui ne
l'éloient pas, d'assurer leur créance par la voie de
VArrest d eslranger. « Sont réputez arrêts d'es-
« Irangers, lorsqu'un Bourgeois ou eslranger fait
" arrest sur délies ou sur des elîets trouvez dans la
«„; Ville et l'Eschevinage, appartenants à un Estran-
« ger. » (Goût. d'Ipre, au iNouv. Coût. gén. T. 1,
p. 882.) Peut-être l'Estranger qui partageoit avec le
Bourgeois, le droit d'Arrest d'Estraugcr, dcvoit-il
èlre domicilie, ou associé aux privilèges de la
Bourgeoisie ?
La franchise des arrêts éloit le droit de s'opposer
aux arrêts, tels qu'on les permeltoil à l'égard d'un
débiteur étranger; droit réservé aux seuls Bour-
geois, à moins qu'ils ne le communiquassent à
d'autres, pour quelque raison de politique ou de
commerce. - Un créancier peut.... arrester les
« biens de son débiteur ou de sa débitrice, qui n'est
« point frère ou sœur de Loy ; desquels arrests
« sont exempts ceux avec qui la Ville a fait alliance,
« ou avec qui elle la pourroil avoir, portant la
" franchise des arrests. « (Coût, de Poperinghe, au
Nouv. Coût. gén. T. 1, p. 943, col. 1 et 2.)
C'est dans le sens propre d'Arrest, action d'arrê-
ter, (ju'en parlant de Chevaliers à qui l'on avoit
défendu de se laisser flrrt'/é'/' par des enchantemens,
de s'y arrêter, on a dit: « Seigneurs, mal vous
" souvient de Zéphirqui hier au soir vous defîendit
" Ïar7'est de telles décevances : allez vous en avant
« d'icy. » (Percef. Vol. iv, fol. 155.)
Le mouvement cessant par l'action d'arrêter,
c'est sans doute avec extension de l'idée de cette
cessation de mouvement à la cessation d'agir en
général, et même de parler, qu'on a dit figurèrent :
« Elle n'avoit arrest de dire piteusement, etc. »
(Percef. Vol. iv, fol. 21.
En comparant l'alTaire dans la suite de laquelle
on s'arrête, l'action qu'on diffère ou retarde, à un
objet ou à un lieu en arrière duquel on reste, et
vers lequel on doit ou veut s'avancer, l'on aura dit
arrest dans le sens figuré de retard, délai. (Voy.
Monet, Dict.)
Si s'en ala
Tout tantost, sans nul point d'arrest,
Par dessus une grant forest.
Cléomadès, MS. de Gainât, fol. 5î, V* col. 8.
VARIANTES :
ARREST. Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 52, V col. 2.
ÂREST. Rom. de Perceval, MS. de Berne, n» 354, fol. 217.
Arrestable, adj. Qui est en état de tenir ferme.
C'est probablement en ce sens, relatif à celui
d'arrest, stabilité, qu'on a dit : » Je cuide que ung
« homme jeun ayt meilleure voulonté et vertueuse
« force, engin, discrétion et propos, et bien ferme
« de faire son honneur, et répute preud'homme et
•" arrestable en la bataille que celui qui a beu el
X mangié. » (L'arbre des batailles, ms. fol. 176. —
Voy. Arkest.)
Arrestal, subst. masc. Séjour. Ordre. (Voy.
Arrest)
Dans le sens analogue à celui d'arrest, station,
pause, repos, on disoit : faire arrestal, pour séjour-
ner, se reposer en un lieu, s'y arrêter. (Voy. Aiiseis,
MS. fol. 30.)
Au figuré, ce mot signifioit ordre, comme arrest a
signifiè'chose qui \\\Q etdètermine ce qu'il faut faire:
Gaudisse fait crier son arrestal,
Qu'en lor nés entrent tout, main et communal.
Aaseis, MS. fol. 35, V ool. 1.
AR
— 185 —
AR
VARIANTES :
ARRESTAL. Anseis, MS. fol. 30, R° col. 2.
Arestal. Ibid. fol. 35, V" col. 1.
Arrestance, subst. fém. Chose qui arrête ;
obstacle, empêchement. Lieu où l'on arrête, où l'on
s'établit; demeure fixe, domicile. Retard, délai.
(Voy. Arrest.)
On est arrêté parles obstacles; on reste en arrière
de son but, lorsqu'on les rencontre. De là, le mot
arrestance aura signifié obstacle, empêchement; en
général, chose qni arrête.
Lors m'escriai à haut ton ;
Sens point d'arestence,
Li lous enporte un mouton.
Et Robins s'avance, etc.
Chaos. Fr. MS. de Berne, n- 389, pari, u, fol. 8, R*.
Savés qu'ele est la provance
D'amor et de son pooir ?
Mal n'i velt faire arrestance
De cortoisie faite oir.
Ane. Poët. fr. MSS, avant 1300, T. III, p. 1055.
Dans le second sens, arrestance signifioit domi-
cile, demeure fixe ; en général, lieu où l'on s'établit,
où l'on s'arrête. » Se aucuns le vient accuser de
■> larrecin, il le doitaccuser par devant le Seigneur
<■ dessous qui il est couchans et levaus, se il affnvs-
« tance : car se il n'a point de chertain lieu là où il
« demeure, si coume moût de gens qui nont point
« à.' arrestance , etc. » (Beaumanoir, Coût, de Beau-
« voisis, chap. xxxi, p. 166.)
Ouerez vostre arrestance ailleurs;
Ci ne sera plus vos séjours.
Cléoniadcs, MS. de Gaignal, fol. 55, V' col. 2.
Par la raison qu'on est arrêté, retardé par les
obstacles, on ne se méprendroit guère en expli-
quant par obstacle le mot arrestance, lors même
qu'il signifieroit retard, délai, comme en ces vers :
Celi jure bien et afie ;
Et Cléomadès la siance
En a prise, sans arrestance.
Cléomadès, MS. de Gaignal, fol. 30, V' col. 1,
VARIANTES :
ARRESTANCE. Laurière, Gloss. du Dr. Fr.
Arestence. Chans. Fr. MS. de Berne , part. II, fol. 8, R».
Arrestée, siibst. fém. Délai. Doute. (Voy,
Arrest et Arrester.)
C'est peut-être le participe du verbe arrester, qui
par ellipse d'un substantif l'éminin, comme action du
corps et de l'espi it, signifioit délai, lorsqu'on disoit :
Dans Englebers monte, sans arestée.
Anseis, MS. fol. 5i, R' col. i.
Au second sens, doute par lequel l'esprit est
arrêté et dans lequel il reste.
... Se tant l'ose atendre, que se gens soit venue;
S'avoir puet afiance sans nesune arestue, etc.
Rom. d'Alexandre, MS. du R. n' 6987, fol. 186, R' col. 2.
VARIANTES :
ARRESTÉE. Enfance d'Ogier le Danois, MS. de G. fol. 74.
Arestée. Anseis, MS. fol. 54, R" col. 1.
Arestue. Rom. d'Ale.xandre, MS. du R. fol. 186.
Arrestement, subst. maso. Séjour, prolonga-
tion de séjour. Action d'arrêter, cessation de marche,
d'action ; de différer, de retarder.
Dans un sens analogue à celui du verbe arrester,
rester, séjourner, demeurer, on a désigné la liberté
qu'avoit une personne de s'arrêter dans un lieu,
d'y rester, d'y prolonger son séjour, en disant
qu'elle avoit ■•' liberté touchant son arrêtement. »
(Voy. Mém. de Villeroy, T. VII, p. 81.)
Plus souvent, l'action à' arrestement éloil relative
à celle-d'arresler, rester en arrière, cesser de mar-
cher, par extension, cesser d'agir.
Tantost a mis le pied à terre.
En disant qu'il veult aller querre
Son faulcon, sans arrestement.
Gace de la Bigne, des Déduits, MS fol. 25, R*.
... La baisai, sans nul demorement :
Le gieu d'amors li vueil faire
Sans nul areslemcnl.
Sire, que volés-vos faire ?
Ane. Pool fr MSS. avant 1300, T. IV, p. 1489.
On a indiqué ailleurs la comparaison d'après
laquelle a?7"fstoH«if et arrestoison peuvent égale-
ment signifier cessation d'agir et action de retarder,
de différer. (Voy. Arrest et Arrestoison.)
VARIANTES :
ARRESTEMENT. Cotgrave, Dict.
Arestement. Ane. Poët. Fr. MSS. av. 1:300, T. IV, p. 1489.
ARRÊTEMENT. Mém. de Villeroy, T. VII, p. 81.
Arrestement, adv. En arrêtant. Dans le sens
propre, on a dit : « Un Lévrier tout seul ne pourroit
" prendre arrestement un de ces chaz ;.... car il a
« les ongles comme un Lyepart. » (Chasse de
Gaston Phébus, ms. p. 81.)
Au figuré, arrestement signifioit en arrêtant, en
fixant l'idée qu'on doit avoir des personnes et des
choses. » Congnoistre au vray et arrestement
» qui est vray ou faint amy, etc. " (Hist. de la
Toison d'or, Vol. II, fol. 19. — Voy. Arrester.)
Arrester, verbe. Rester en arrière, cesser de
marcher, cesser. Rester en repos, séjourner, demeu-
rer, se fixer, s'établir, se poster, rester ferme;
résister, être ferme, de pied-ferme ; être fixe, stable,
constant, posé, etc. Faire rester en arrière, empê-
cher.
Il semble, dit Nicot, (\n arrester ou s arrester (1)
soit composé de l'adverbe arrière et du verbe simple
ester. Ainsi, il signifieroit litléralement, rester en
arrière d'un lieu vers lequel il est possible d'avan-
cer, si on ne cesse le mouvement par lequel on
avance, si on ne cesse de marcher. ^ Je sçay qu'ilz
" ïiarresterent en cest nuyt de chevaucher ; ne ilz
« n'arresteront tant qu'ilz viendront où ilz doivent
« aller. .. (Percef. Vol. II, fol. 106.)
« Quant il vint en une tertre dehors Jérusalem,
<> son asne s'aroista : Balaan le féri, et l'asne
« recula. » (Martène, Ampl. coll. Contin. de G. de
« Tyr, T. V, p. 604.)
Plus on réfléchit à l'idée de Nicot sur la formation
de ce verbe arrester, plus on la trouve vraisem-
blable. En effet, " en cessant de marcher outre et
(1) Voir plus haut à Arrest.
24
AR
— 186 —
AR
» suivre sa route, on demeure arrière, eu égard au
« progrès du chemin qu'on eusl fait, si l'on ne se
» fust arresté. » (Voy. Nicot, Dict.) On a généralisé
sans doute l'idée particulière de la cessation du
mouvement par lequel on peut avancer vers un
but physi(iue ou moral, lorsqu'on a dit arrester ou
sarrester, pour cesser d'agir, de parler, de penser,
etc. (Voy. Aruestement.)
Peut-être faisoit-on abstraction de l'idée rester
en arrière, lorsque dans un sens qui paroit relatif à
l'idée générale, cesser d'agir, de se mouvoir, le
verbe arrester ou ^'arrester signilioit rester en
repos, séjourner, demeurer, se fixer, s'établir, se
poster, rester ferme, résister, être ferme, de pied-
ferme, être fixe, stable, constant, posé, etc.
S'à mon ostel fusse arcstus,
A piesce ne fusse vestuz
De roube d'escarlatte nueve.
L'en dit ; qui bien chascie, bien trueve.
Fabl. MS. du R. n- 7615, fol. 120, V col. 1.
En la forest ert urestans,
Là où li anciens manans
Avoit la seue forterece.
Fabl. MS. du R. n- 'iHS, fol. 349, R' col. 1.
A Rome ert mes Sire arrestans ;
Là estoit riches et manans.
Clëomadès. MS. de Gaignat, fol. 28, Vv col. 3.
Le Roi de France a déjeté
Juis;mès il sont arrête
En Borgoingne, et en mainte terre.
Hist. de France en vers, à la suite du Rom. de Fauvel, MS. du
R. n'6812, fol. 75, R- col. 1.
Lorsqu'une troupe postée avantageusement res-
toit ferme dans son poste, on disoit qu'elle estoit
arrestée sur son advantage. « Si on alloil com-
« battre ainsi arrestés sur leur advantage, on
« se mettoiten très-grand péril. » (Froissart, Vol. I,
p. 274.)
C'est probablement par extension de l'idée de la
position où l'on reste, lorsqu'on se fixe et s'établit,
lorsqu'on se poste, que le verbe arrester, comme
en lafin resiure, a signifié résister. (Voy. Règle de
S' Benoit, Lat. et Fr. ms. de Beauvais, chap. lxviii.)
Il semble inutile de multiplier les preuves de l'ac-
ception propre et figurée à'arrester, résister, estre
ferme, etc. (Voy. Arrestable.! Qu'il suffise d'ajouter
qu'on paroit avoir désigné, 1° l'état, l'ordre fixe et
constant dans lequel, un jour de bataille rangée,
l'on combatloit à son rang et de pied- ferme, en
disant que celle bataille étoit une journée arrestée,
une bataille arrestée. « Regardèrent longuement
" quel cry pour la journée ils crieroyent, et à quelle
■ .< bannière ou pennon ils se trahiroyent : Si furent
« grand temps sur tel estât que de crier Noslre
« Dame, Auxerre ; et de faire le Comte d'Auxerre
« leur Souverain, pour ce jour. Mais ledit Comte...
« s'excusa... en disant : Messeigneurs, grand merci
« de l'honneur que me... voulez faire.... Je suis
« encore trop jeune pour encharger si grand fais
« et tel honneur; car c'est la première journée
« arrestée où je fu oncques. » (Froissart. Vol. I,
p. 273) " Il a eue victoire en bataille arrestée, sur
« ses ennemiz, luy estant en très grant joeunesse. »
(Hist. de B. du Guesclin, par Ménârd, p. 542.)
2° La fixation de la valeur d'une monnoye qui
devoit rester toujours la même, le prix fixe et cons-
tant pour lequel on en établissoit le cours, en disant
qu'elle étoit monnaye arrestée, qu'elle devoit
arrester en même état. « Avons ordonné de faire
« 7nonnoiie arrestée et estable. » (Ord. T. 111. p. 424.)
« Pour le fait et gouvernement de noz monnoyes,
« afin qu'elles puissent et doient demeurer et
« arrester en bon etdeu estai, etc. <> (Ibid. p. 51.)
3" La constance d'un courage que rien n'ébranle,
en disant que c'étoit un courage arresté.
Prouesse fait aux Nobles assavoir....
Que nul ne peult par elle pris avoir,
N'estre receu à sa grant court planiere.
S'il n'a en luy trop plus fait que manière,
Et à l'exploit, conduit et hardement.
Ferme propos et arresté courage.
Ai. Chartier, Bréviaire des Nobles, p. 585.
4° L'état physique et moral d'un homme posé, sa
façon d'être paisible et conslant, en disant qu'il
étoit ho7n7ne arrêté ou arresté. (ÎNicot et Monet.
— Voy. Arrest.)
On pourroit citer nombre d'autres expressions
dans lesquelles la signification neutre ou active
ù'arrester, ect analogue à ces mêmes idées de
constance, de stabilité, d'état fixe, d'état de repos.
En disant ari'ester dans le sens actif d'établir, fixer,
déterminer, on faisoit, comme pour le sens neutre,
abstraction de l'idée de position en arrière : idée à
laquelle paroit être relative l'acception de ce verbe
lorsqu'on disoit figurément arrester quelqu'un
d'une chose ou d'une action.
En effet, arrester d'une trahison, par exemple,
c'étoit empêcher d'aller en avant celui qui se pré-
paroit il trahir ; littéralement, le faire rester en
arrière de sa trahison. « Pensa de cette trahyson
« faire comme elle lui avoit missus. Mais on l'avoit
« desavancée , quant ceulx qui l'apperceurent ,
« Varreslèrent de trahyson; et s'enfuyt. » (Lanc.
« du Lac, T. I, p. 427. — Voy. Aurest.)
CONJIG.
Arestace, subj. prés. Qu'il arrête.
A petit vait ne s'arestace
Por remirer encor sa face.
Siège de Troye, MS. du R. n- 0987, fol. 102, R- col. 1.
Arestad, indic. prêter. Arrêta; en latin Steiit.
(Livres des Rois, .ms. des Cordel. fol. 8.)
Aresleue, participe. Arrêtée. (Rom. d'Amadas.
MS. du R. n°Gt)87, fol. 319.)
Aresteus, participe. Arrêté. (Athis, ms. fol. 128.)
Arestit, indic. prêt. Arrêta. Fabl. ms. du R.)
Arrestoie, ind. imp. J'arrêtois. (Cbans. Fr. du
xiir siècle.)
Arresturent, ind. prêt. Arrêtèrent. (L. des R.)
Arestut et .i7'resta, ind. prêter. Arrêta.
En un boiz s arestut; et sa gent s'aresta.
Rom. de Rou, MS. p. 123.
Arestuz, partie. Arrêté. (Athis, ms. fol. 8.)
Arrestu, partie. Arrêté. (Cléomadès, fol. 26.)
Arrestut, ind. prêt. Arrêta. i^Fabl. ms. de S' G.)
Airestut, subj. imp. Arrêtât. (L. des R. fol. 68.)
AR — 187 —
AR
VARIAI*»TES '
Ah\T;k1" M^o^n^^t^rct°°"- '■ '^ ^- ^«^y^^^ V.-co.. 604.
Arter. Vigil. de Charles VII, part. I, p. 164
Erester. Athis, MS. fol. 100, V" col. 2
Arresteul, subst. masc. Partie d'une lance la
5Ss?- 112. A"--) Si=-"ification relaUve à cèl e
a arrest, chose qui arrête.
Les aresleujs des lances font en l'aiguë fichier
Pour ataindre le fons . ,nais n'i pueint {ouchièr.
Ouileclm de Sasswgne, MS. deGaignal. fol. 237, R' col. 2.
• . . Sa lance torna, derrière
Le fer et Vareslu,'! devant.
Rom. d'Erec et d'Eaide, MS. du R. n- 6987, fol. 281 V co! 3
çéSe>ïux"f™"H- '"""f ,'' ''''"ce,qu-uri ennemi
geneieux f appa darestol un vieillard à aui le
uneT/T^^T'"''; Pé-'ii-sonnis, faisoit chercher
une moi t certaine dans un combat inégal.
Quant li Du.x voit que mais ne peut
Voille ou non, jouster l'estuet ■
D un arestal l'a féru.
Que del destrier l'a abatu.
Li gentilz Dux le fist lever etc
Rom. de Floireniont, MS. du R. n' 6973, fol. 33, R- col. 1.
ARRESTEUL. Guiteclin de Sassoigne, fol 237
Arescuel (corr. Arestuel.) Borel Dict
ARESTOL^'RnrH'^'t^f'^"^'^^- ^^^S'-'" «■ "° 6987, fol. 327
ARESTOL. Rom. de Hoiremont, MS. du R n» 607q fni qq
Arestuel. r. d'Erec et dEnide, MS. du R. 6987, Fol. 289
Arrestcus, adj. Qui s'arrête. Qui recule (Vov
Arrester et Arrére ) 'cu-uie. ^vo>.
arderï""'"" '""' ''' '""^ 'ï'«''^^'^'"«' qui reste en
. . . Cil n'est pas aresteus;
Ains est partout ; léens, alez.
A chascun dist : levez, levez
Cléomadès, MS. de Gai'ynal, fol. 57, R- col. 2
Probablement, rétif est de même origine aue
1 ancien adjectif rt?-£'s//s, qui recule. " ^
Li oisel qui volent par l'air
Ne volent plus del palefroi '
Et si nest pas de grant effroi ;.
Qu 11 n est ombrages, n'arestis
Rom. d'Erec et dEnide. MS. „u R. „• f,987, fol. 281, R- col. 4
On disoit airesiise, au premier sens :
A la Court vont aine n'i font arreslise ■
El palais entrent qui fu de piere bise.'
Aiiseis, MS.fol. 51, R-col
Dans le second sens, arestie :
Vers lui s'en vint moult fièrement
Le cheval par Varestie prent ; etc '
Cléomadès, JIS. do Gaignat, fol.'i, V col. ».
.r>r^r,,.„ variantes:
ARREbTISE. Anseis, MS. fol. 51, R» col "
Arestie. Cléomadès, MS. de Ga'ignat, fol".^, V» col. 2.
Arrestoison, subst. [cm. Action d''irrÀiflr
pause etc. (Voy. Arrest et ArrestemenÎ) '''
On disoit en ce sens :
Et Oant^^Jl^"® l'entent, si levé le menton ;
Et Oautiers s en torna, n'i fist arestison
Fabl. MS. du R. n- 7218. fol. 34*, V col. 1
Dusc al tref Alixandre n'i font arestison.
Rom. d Alexandre, MS. du R. n- 6987, fol. 203 V
Fa,- e venir avant, dist li Sire au garçon ;
Et ctl 1 est venuz sans plus dm-estison. '
Fabl. MS. du R. „• 7218, fol. 345, V col. 2.
ARRESTOISON. Cléom™Ms' de Gai^nat fol 10
illUuZ ^««i,«'..MS.fol.'3, V» col 2."""'' '"'• '''■
.«iREbTizoN. Ane, Poët. Fr MSS av l'^nn t it o^n
ARRESTioN. Fabl. MS. du R n^72^8 M m "' P' *^^'-
ARRET.SON. Enfance d'Ogier le Dano!s!j!s'de G. fol 107
Arnere-boutique, sMfts/. /-m Réserve n-ins
?'TS4^;1^,^S:"È-,J|^^ieineg,c'^
rrw''^"," ''°"''"«^ *!"' se réservoit (les m2vens
on ^wli^fi"'™''"' '."^ dispositions quil f.tisôuS
ni. rr ^"^'^V 6'. i*ict. S il n etoil pas ré.servé sur Ip*
motifs qui le faisoienl açir, s'il ne les , n,.hn;. .1
s'il ne les tenoit pas secret , on d soft qïi SsS
sans arriere-boutique. « Ceux ,,ui fa vor sô em 5n.
K'livn'?"4 '%Dauph,n,' etc. ''.'Tas u,^'
«ecn. iiv H, p. o9. _ Voy. Arrére et Arriére-pensée
ou intérêt qui, relalivement au chani o u .nS
'et du principal, est arrière, après. (Voy. AiIrérÈ )
. Arriere-charte, subst fém. Charte de ivnnn
it; udueae uieiig-ny, » renontja u -même mt- ,-p
raite a toutes les demandes qu'il faisoïï sSci f
emen au nom, au droit, aux armes, e a cl a-"
anse de la Couronne et du Rovaume de France
J homma|;e, souveraineté, et domaine de là
Duché de -^ormandie, de la Duché de Touraine
etc. . Il semble donc qu'un traité par \emw an
renonçoit réciproquement à des possédons ? des
demandes, à des prétentions respecK ,i( fâ
nomme arriere-charte. dans un seSs anàio L?
ce 111 de l'expression être mis en arrière ^^?pp
iqui s appelle Lc//r<î de renoue ntioiu tant d'un
AR
188 -
AR
Arriere-femme, subst. fém. Concubme. La
traduction de la Bible en françois, par Sébastian
Castalio, scandalisa Henri Eslienne. U lui reproche
l'indécence avec laquelle il avoit défigure le langage
de l-Ecriturc Sainte, ■> appelant Arnerc-lemmc,
. comme on dit arrière-boutique, celle que le mari
. entretient avec sa femme ; au lieu de Prépuce,
. usant de ce mot d'Avant-peau ; au heu de Lir-
. concis, disant Rongné; au heu d Incirconcis,
. Empellé. » (Apologie pour Hérodote, p. ri»- —
Voy. Arrèbe.)
Arrière-foin, subst. masc. Regain. (Cotgrave,
Dict. — Voy. Arrére.)
Arrière-garde, subst. fém. Garde-noble de
mineur d'Arriere-vassal. Le mol armrc-garde
désigne encore aujourd'hui la dernière partie d une
armée marchant en bataille; et, en ce sens, il est
très-ancien dans notre Langue.
C'est relativement à l'idée de l'Homme arrière,
du vassal noble qui étoil arrière ou après 1 Homme
proche, le Vassal immédiat d'un Seigneur suzerain,
qu'il a sisniûé « garde noble de mineurs d Arriere-
.' vassal' la garde qui appartient au Roi ou autre
. Seigneur feudal, pendant que le mineur d ans est
. en 'sa garde, si ceux qui tiennent fief noble du
« mineur, tombent en sa garde. (Voy. Laurière,
Gloss. du Dr. Fr.i « Pendant que le mineur d ans
. est en garde, si ceux qui tiennent tief nohlc de kii
« tombent en la garde, la garde en appartient au
« Seigneur gardain dudit mineur; el où ledit mineur
« seroit à la garde du Roy, il a pareil droit à 1 ar-
.< rière-gardè que les autres Seigneurs. » itout. de
Normandie, au Nouv. Coût. gén. T. IV, p. /O. —
Voy. Abrére, homme arrière.)
VARIANTES :
ARRIÈRE-G.\RDE. Orth. subs. - Cotgrave et Nicot Dict.
Erriere-garde. Blanchandin, MS. de S' Ger. fol. 191.
Arriere-jeu, subst. masc. Dessert; fin du
repas. On observe, d'après Le Ducbal, que Rabelais
faisoit allusion au jeu de Toutes-tables, en désignant
par le mot composé arriere-jeu, l'usage Anglois et
Ecossois de boire le vin au dessert, ou sur la fin des
repas, dans les bonnes tables. « Angleterre, Escosse,
« les Rstrelins seront assez maulvais Pantagruehs-
. tes. Aultant sain leur seroit le vin que la bière,
.. pourveu qu'il feusl bon et triant. A toutes tables,
» leur espoir sera en Y arriere-jeu. "(Rabelais, T.\,
pronostic, p. 19.— Voy. Abrébe, après.)
Arriere-main, express, adv. et subst. Arrière,
après coup, en relard. En rétrocédant. En taisant
un mouvement de main en arrière. Coup d arriere-
main, revers. .
H est possible que relativement a 1 idée a une
main prèle à saisir ce qui s'avance, on ait désigne
ce qui reste airiere, une chose tardive et venant
après coup, en disant figurément qu'elle étoit
arriere-main, en arriere-main. « Voyant.... que
« longuement ne pourroient tenir, et secours leur
« estre en arriere-main, se rendirent. " (.T. d'Auton,
Annal, de Louis XH, an. 1499-1501.)
Conselz avriere-main n'est preuz.
Prov. du Vilain, MS. de S' Germain, fol. 16. R' col. 3.
Probablement, l'acception à' arriere-main étoit
analogue à celle de l'adverbe arrière qui signilioit
fio-urément le retour d'une chose à un premier pos-
sesseur, lorsqu'en parlant de l'espèce de rétroces-
sion par laquelle une possession féodale retournoit
aux mains de celui qui l'avoil inféodée, on disoit :
<. Si tenant en taile fait un feffement à son uncle,
« et puis l'uncle fait un feffement en fée ovesque
.. garranty à un auler, el puis le feffée del uncle
« ènfeoffa areremaine l'uncle en fée, el puis l'uncle
« enfeffa un eslrange, etc. » (Tenures de LitUeton,
fol. 168.) . . , ,
11 semble qu'on se soit figure la chose dont on
éloit dépossédé, comme ayant fait un mouvement
en arrière ; el la main de celui qui recouvroit sa
possession, comme faisant un pareil mouvement,
lorsqu'on a dit : « Come plusurs assises de ceo
« soient (lar eux arainés, si coviendra primes ler-
a miner l'assise arraine de la mort le dareyii seisi,
u el issi de seisine en seisiue arrere]ncijn, jesques
. à tant que le droit de la possession soit joint par
« jugement al droit de la propreté. » (Britlon des
Loix d'Angleterre, fol. 20i.) _
Au reste, c'est dans un sens relalif a celui de
l'expression ferir à arriere-main, en faisant un
mouvement de main en arrière, q\i' arriere-main,
pris comme substantif, a signifié coup à'arriere-
main, revers. (Cotgrave et Nicot, Dicl. — Voy.
ARRERE.;
VARIANTES :
ARRIERE-M.VIN. Cotgrave et Nicot, Dict
Abère-maine. Tenures de LitUeton, fol. Ib8, V».
.VRiERMAiN. Fabl. MS. du R. n"76l5, fol. 138.
.Vrrere-.\ieyx. Brittou, des Loix d Angleterre, fol. 204.
Arriere-mein. Fabl. du R. n» 7615, fol. 192.
Arrière-pensée, subst. fém. Pensée secrète
de vengeance; ressenlimenl caché. Dans les subs-
tantifs composés, tels quarriere-pensée, arriere-
sens et autres de même espèce, l'adverbe arrière
paroit signifier des idées analogues à celles qu il
désignoit figurémenl dans le composé arriere-bou-
tiniie. (Vov. Arriere-doitiqce. ■ Quoi qu'il en soit, on
a dit en parlant de Charles IX, dont le ressentiment
fut si funeste aux Calvinistes : « Il leur garda tous-
« jours une arrière-pensée. ■■ iDisc. de la Noue,
p. 731. — Voy. Arrière-sens.)
Arrière-sens, subst. masc. Secret dune affaire.
Il semble que ce soit le sens dans lequel on a dit :
« Chacun se mutine, si on luy cache le fonds des
« affaires auxquels on l'employé, et si on luy en a
« dérobé quelque arrière-sens. <• (Essais de Mon-
tai^'ne, T III, p. 10. — Voy. Arrière-pensée.)
Arrivage, subst. masc. Rive, rivage, heu ou
l'on aborde et débarque. Transport par eau. Abord,
débarquement. Droit pour abord et débarquement,
droit d'arrivée dans un port.
La signification de ce mot éloit la même que celle
AR
- 189 —
AR
de rivage, formé de rive, lorsqu'on disoit : « Toutes
« et quantes fois que auscuns basteaulx, uefz ou
« nasselles vuides ou chargées, menans denrées ou
« marchandises.... arrivoient à port sur ladite terre
« et arrivaige, et que les marchands bastelliers,
« voituriers menans et conduisans iceulx bas-
« teaulx... affichoient en la dite terre, livaige ,
« aucuns pieulx, etc. » (Du Gange, Gloss. lat. T. V.
col. 28; tit. de 1442. — Voy. Arrivouer.)
II est probable (incurivage signifioit transport
par eau, relativement à l'idée de l'abord et débar-
quement de choses ainsi transportées. « Sera tenu
« ledit preneur de faire à ses dépens tous les
» arrivaiges et chariages pour les réparations
« dudit hostel et ferme. » (D. Carpentier, Suppl.
Gloss. lat. de Du Gange, au mot Arrivagiimi;
tit. de 1501.)
Les lieux d'arrivage étoient sans doute les lieux
de l'abord et débarquement des marchandises.
« Les Vicontes ou Receveurs feront rabat sur ce que
« il devront pour leurs marchiez desdis cent
» molle.... sur les lieux de ranvwtffe. •> (Ord, T. VI,
p. 228. — Gr. Goût, de Fr. chap. vi, p. 51 ; tit. de
U02. — Monet, Dict. — Dicl. de Trévoux.)
De là, l'acception figurée (Varrivage, droit pour
abord et débarquement de marchandises, droit
d'arrivée dans un port. « Seront frans et (juites de
« rouage,.... de pelage, de passage, d'arrivage, el
« de toutes autres coustumes. » (Du Gange', Gloss.
lat.T.I, aumot..lmva^n/m,coll60; tit.de'l320. (!).)
VARIANTES :
ARRIVAGE. Moael, Dict. au mot Arrivemant, - Dict. de
Trévoux.
Arrivaige. Du Cange, Gl. lat. T. V, col. 28. tit. de 1442.
Arrivée, subst. fém. Approche de la rive, abord.
Dans le sens propre et littéral, on a dit d'arrivée,
poursignilier à l'approche de la rive, en abordant.
« Ne trouvèrent le moyen de passer la rivière que
" parle bac passager accoastumé; mais voulant
« les hommes d'aimes passer à la foule, s'en noya
« d'arrivée cinq ou six. Quoy voyant le passager....
" et que nostre armée estoil séparée, ii sçavoir la
•' Gendarmerie d'un costé de l'eau et les Gens de
>' pied de l'autre,.... s'en alla avecques le bac aval
» l'eau droit à Pavie. » (Du Bellay, Mém. liv. II,
fol. 38, R°. - Voy. Nicot et Monet, Dict.)
La signification d'arrivée étoit relative à celle
d'arriver, dans l'expression arriver à une personne,
aborder une personne, l'approcher lorsqu'on disoit:
Les doulx regardz, les paroUes privées,
Les entretiens, les doulces arrivées.
Poès. de Crétin, p. 176,
Quoique ce mot désigne encore l'instant où l'on
arrive, on ne diroitplus ligurément, d'arrivée pour
d'abord, dès le premier instant, dès l'instant de
l'arrivée. « Ne luy servit cette institution que
•' de le faire enjamber d'arrivée aux premières
« classes. » (Essais de Montaigne, vie de l'Auteur,
p. 6. — Voy. Arriver.)
Arrivement, subst. mase- Action d'approcher
de la rive, d'arriver, d'aborder. Approche, venue.
L'acception propre de ce mot, qu'on trouve dans
Gotgrave, Rob. Estienne et Monet, est ancienne
dans notre Langue.
.... Un Serpens li avoit mort,
Droit à l'arivement del port.
Siège de Tioye, MS. du R. n- 6987, fol. 116, R" col 3.
Il étoit de même acception qu'arrivée, lorsque
relativement à celle d'arriver, approcher, venir, il
signifioit par extension approche, venue dans le
sens le plus général. « Arriva ausdits fauxbourgs
« de Vauceulles, etincontinentaprès^a?'r^^'emm^...
« passa le Roi la rivière. » (Al. Ghartier, Hist. de
Gharles VI et Ghaiies VII, p. 202. — Brantôme,
Cap. Fr. T. III, p. 210, etc. — Voy. Arrive et Arriver.)
VARIANTES :
ARRIVEMENT. Gotgrave, R. Estienne, Nicot et Monet, D.
Arivement. Siège de Troye, MS. du R. n» 0987, fol. 116.
Arriver, verbe (2). Faire approcher de la rive,
débarquer, faire aborder. Approcher de la rive,
aborder, débarquer. Approcher, aborder, aller,
venir, parvenir. Venir lécemmenl; survenir.
Anciennement, arriver signifioit comme verbe
actif, faire approcher de la rive, débarquer, faire
aborder. « Il fist torner vers terre, et ariva ses
« galies à une cité qui a nom Palerne. " (Ghron.
d'Outremer, ms. de Berne, n° 113, fol. 144.) « Les
« menrés en Ghrestienté.... ne les arriverés fors là
« oii vous arriverés les riches homes. » (Marlène,
ampliss. coll. contin. de G. de Tyr, T. V, col. 621.)
Citherea, ce dist l'Autor,
Avoit à non l'isle à cel jor,
U il ariverettt lor nés.
Siège de Troye. MS. du R. n- 0987, fol. 76, V- ool. 4.
Li Mondes, que nous n'i menton,
Nous tient, en noant, le menton.
Tant qu'il nous ait osté de rive.
Quant il nous a mené en l'onde,
Si nous l'est en l'eue parfonde,
Quant nous cuidons qu'il nous arivc.
FaW. MS. du R. n- 7218, fol. 187, R- col. 2.
La signification neutre d'arriver n'est pas moins
ancienne que la signification active de ce verbe.
Quelquefois il étoit réciproque comme en ce pas-
sage : « S'en ala Outremer.... et s'ariva à Acre. »
(Ghron. d'Outremer, ms. de Berne, u" -113. fol. 145.)
Mais plus souvent il étoit actif ou neutre; et dans
le sens neutre, il signifioit, comme aujourd'hui,
aborder, débarquer, par extension du sens littéral
approcher de la rive. « S'en vindrent arriver au
« havre deDourdrec. » (Froissart, Vol. III, p. 236.)
Tant singlérent et tant nagiérent
Qu'ils arrivèrent el paiis
Qui estoit à lor anemis.
Siège do Troye, MS, du R. n" 6987, fol. 76, V* col. 3.
En étendant cette acception propre et littérale.
(1^ Le mot se trouve déjà au xiii' siècle, dans le Livre des Métiers, page 331 : « La trouse [doit] six deniers de conduit, et
obole d'arivage, et se en la porte à col, si ne doit point de conduit. » (N. E.) — (2) ArAver vient de arripare, qu'on trouve
en 841 dans une charte de S' Victor de Marseille (D. Bouquet, t. VIII, p. 272) : « Nec non et thelonium de navibus ab Italià
venientibus, quœ ad eamdem ecclesiam arripare videntur. » (n. e.)
AR
— 190
AR
approcher de la rive, parvenir au rivage, y aborder,
on a dit arriver, dans le sens général d'aborder,
parvenir, approcher en allant, eiï venant par terre.
Quelle que soit encore aujourd'hui celte extension,
on ne diroit plus arriver à un étendard, s,'arriver
contre un cadavre, pour en approcher, s'en appro-
cher; arriver à une personne, pour aller, venir,
parvenir à elle, l'aborder, l'approcher, etc. » Les
« gens du Roy, qui venoient à terre comme nous, ... .
« nous escrierent que alissions arriver à l'enseigne
« Saint Denys. Mais je ne les en voulu croire ; ains
« alasmes arriver devant une grosse b;itaille de
« Sarrazins. » (Joinville, Hist. de S' Louis, p. 29.)
« Le Héraut dit.... tout en pleurant priez Dieu
« pour l'ame de très excellent prince le Roy
« Charles VII et ayant dit cela s'arriva
« contre le corps en la fosse. » (Mathieu de Coucy,
Hist. de Charles VII, p. 738.) « Je arrivay à ung
« marchant qui estoit , etc. » (Ger. de Nevers ,
part. I, p. 125.)
L'abus de cette extension étoit autrefois tel,
qu'en parlant d'une personne qui s'approchant d'une
autre et l'abordant, en étoit mal venue, on disoit
qu'elle en étoit ma/ arrivée. « Se misrent par les
« vignes où les Françoys estoient logez, dont iceulx
« coureurs furent si mal arrivez que presque tous
« y demeurèrent. » (J. d'Auton, Annal, de Louis
XII, an. 1503-1505, ms. fol. 61.)
Si fu des Roys
Cel Evesque mal arrivé ;
De son temporel fu privé,
Et grant temps en fu en prison.
Hist. de Fr. en vers, à la suile du R. de Fauv. MS. du R. n' G81-2, fol. 74.
Peut-être aussi (\\x'êtTe mal arrivé de quelqu'un,
c'étoit en être mal mené. On supposeroit, alors que
par extension du sons actif, faire approcher de la
rive, mener au rivage, mener à bord, le verbe
arriver auroit signifié mener aussi généralement
qu'il signifloit approcher, parvenir, par extension
du sens neutre aborder, parvenir au rivage, appro-
cher de la rive. C'est relativement à l'idée d'arri-
ver, approcher, parvenir dans le sens le plus géné-
ral, approcher, parvenir en allant, qu'au figuré
l'on a dit d'un corps de Cavalerie qui n'alloit pas à
certain nombre de chevaux : " Toute sa Cavalerie
« n'arrivait pas à mille chevaux. » (Dict. de la
Noue, p. 739.)
Il est possible qu'en se retraçant les idées dont
on se sent naturellement affecté à l'instant qu'on
voit une personne ou une chose approcher de la
rive et parvenir au rivage, on ait comparé à cette
arrivée, la venue récente ou inopinée d'une per-
sonne, un événement heureux ou malheureux dans
le cours des choses physiques et morales. Probable-
ment, c'est d'après une semhlable comparaison,
qu'encore aujourd'hui, on dit d'une personne qui
Jte fait que de venir, qu'elle arrive ; qu'elle nous
armw, lorsqu'elle nous survient: au ligure, qu'il
lui arrih's bonheur ou malheur, s'il lui vient l'un ou
l'autre, si', un événement la rend heureuse ou
malheureufse. On voit comme autant d'événemens
toutes les ^actions possibles d'un homme, lorsqu'on
a dit : s'il arrive qu'il fasse telle chose, s'il lui
arrive ÙQ la faire; expressions encore usitées, et
qui sont très-anciennes dans notre Langue. » Il est
« accordé en cesle pez, que se il arivoet que ledit
« Olivier méfeist à nous le dit Comte, etc. »
(D. Morice, preuv. de l'Hist. de Bretagne, T. 1,
col. 981; tit. de 1261.)
VARIANTES :
ARRIVER. Orth. subs. - Nicot et Monet, Dict.
Ariver. Siège de Troye, MS. du R. n« 6987, fol. 116.
Arrivouer, subst. masc. Rive oîi l'on aborde et
débarque. On a dit en ce sens : « Prindrent.... le
« chemin droit à.... Yarrivouer d'Avenieres.... et
« quant ilz eurent passé la rivière, trouvèrent à
" Yarrivouer de l'autre costéd'icelle, etc. » (D. Car-
pentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, T. I, col.
294 ; lit. de 1470. — Voy. Arrivage.)
Ari'ogatif, adj. Adoptif.
Signification relative à celle du substantif arroga-
tion. « Le Roi René mort le duc Jean de Cala-
« brc son fils, restant de sa lignée seule Mon-
" sieur Charles d'Anjou,.... fit en son vivant ledit
« Monsieur Charles son fils arrogatifet légitime, le
» déclarant son héritier universel, et l'intitula Duc
" de Calabre. » (Godefroy, Observ. sur l'Hist. de
Charles VIII, p. 479. — Voy. Arrogation.)
Arrogation, subst. fém. Adoption. Dans le
Droit Romain, l'adoption à laquelle on demandoit
que le Peuple consentit, se nommoit arrogatio,
adrogatio, parce qu'elle se faisoit per populi roga-
tionem. (Voy.. Aulu-Gell. lib. v, cap. 19. — Marti-
nius, Lexic. philolog.) C'est d'après l'idée de celle
espèce d'adoption, qu'en parlant de celle de Louis,
duc d'Anjou, par Jeanne, reine de Naples, on a
dit : « Elle arrogea et adopta Louys duc d'Anjou et
« de Touraine, comte du Maine, fils du roy Jean de
« France, lequel elle fit son fils et héritier après le
« detïaut d'elle en ses Royaumes et Seigneuries;....
« de laquelle arrogation.... le pape Clément, etc. ■>
(Godefroy, Observ. sur l'Hist. de Charles VIII,
p. 478. — Voy. Arrogatif et Arroger.)
Arroger, verbe. Adopter. Arroger. Abroger.
(Voy. Arguer, éperonner.)
Le premier sens du verbe arroger, en latin
arrogare, adrogare, est relatif à celui'du substantif
arrogation, en latin arrogatio, adrogatio; action
par laquelle, en demandant, on obtenoit celui qu'on
desiroit de faire passer dans sa famille, à titre
d'adoption. (Voy. Arrogatio.n.)
Dans le sens d'arroger, s'arroger une chose, de-
mander une chose et se l'attribuer, quelqu'injuste
et oiïensanl que soit le désir d'après lequel on la
demande et on se l'attribue, on a dit en faisant
l'éloge du mérite et de la modestie de Saint-Gelais :
« De telz que luy ne s'en trouve pas treize en la
.' grand douzaine; et si ne se arogue rien, et ne
" dérogue à" nul. » (Quintil. Censeur, p„ 238.) On
croit pouvoir rapporter à cette signification A'aro-
guer, le même qu'arroger, celle de notre adjectif
arrogant, dont l'usage ne paroit pas remonter
AR
— J91 -
qui estant iiches deviennent si arroocm^i miP
« es rues ne sont pas capables de les ten?r qu3nd
« ^s se preipent par les costez; et. sèmEt
« mesmes estre favorisez et recognus par Is vS
iB|?!ï^e^SV'S3Soi&,S ïïf--- -
Honneur son cheval an-ogua
Fn "Z"^ '!f " '°°>' ; ^' marresta
ii.n moy demandant, qu'avez faitz ■>
Gacede la Bigne, des Déduits, MSS. fol. 33, R-,
ippnrrr, r VARIANTES :
AH0c°.l^Q*;î„^1î^f„|,-- '■"■|t. ''^ Cbarles VIII, p. 478.
ARROGUER. Godefr. annot, su'r l'Hist. de Charles VI, p. 625
.^^^•^«•(^^««is/./wasc. Ligne, trait fi-ure li-nP
rang, dispos.lion sur une ou sur pusieurf liÔne^
r'int'i'"" ^'l''^'*^ ^ «ne opération miSre ETe
dii. ingénient, disposition reo-uijArp p, ..^'v^nn?; '
f désigné ;s? 2onS^s:ii/Se'SLs;;,if 'sr^'Li;"
AR
b"nez;aela-bouche,^S''
One enfant ne ressembla mieuU
A père. Quel menton forché '
V rayment c'estes vous tout poché
ipus deux encontre la naroy
D une matière el dim arroJ
bi senez-vous sans dilîérence.
,, l^aree de Palhelin, fi. U
te motarroy, par la ménieanaloo'ie aun ^^icmifin
uL"m.'?nf f''P'^*^'°" d-une troupe raSeSî
une ou sur plusieurs lignes. « Chevauchèrent p,
Ti;oVv,^"^,"' P'"" foie hardiesce,
Voult plus vamcre que par arroy etc
Eusl. Desch. Po«s. MSS. p.' 549, col. 4.
L Idée particulière de cette disposition sur nnp
ou sur plusieurs lignes, étant généraise'e' on .nrf
despe par le substantif «/To^r comme p^ ïï^^^^^^
arroyer, toute espèce de disposition re^afie fin
guerre, aux combats, aux opérations m nfaitl
« Quant «rro2/eust esté mis en certîois bSifs"
oSlle' ^^r^.'lf •^"^'■^"t «"'■ les chïmps »
lJoin\iiie, Hist. de h' Louis, p. 99.) .< Feit le rAv Vio
" France son arroy, et prit avec lii toS ses hLt^
n„ mTf • " <^" ^'''"?«' Gloss. lai T ? col 7"?
au mot.l^■amcw^Mm.) ' '"^'
Les banieres en haut levant
be vont aux plains chans essevant •
D eus ordener font leur arroi.
G. Guiart, MS. fol. 262, V.
n.".<J ^y,' ' ' ■ j ^^® services des pais
Quant U chevauchoit en ao-ou
np"/„f ^""''® «^' pour >a deffense.
ue son règne, etc.
Eusl. Desch. Po5s. MSS, p, 466, col. 9.
Son o.t i""*'^ et Bourguignons virent
feon ost, ses gens et son arroy ■
nflif 'l,"1-'' ''''"^' S'' encloirent
ue grands fossez et de charroy.
Vigil. de Charles vil, part. I p 130
ii?^^,^^'«'^^'^t-c^-oi
\lnpVl^P "^^ P^"" merveilleux arro,, "
V ns camot'pV'S^"'' ^"'^ Lombarde^ plaines
wns canipeger, d ennemis toutes pleines
J.
p, .-, •■■ Marot. p. 193.
^t s il veut dire avoir vaincu les Rovs
Dare et Pyrrhus, par militans ?»-"°l etc.
Ar. .,„ •. ,. Clëm. Jlarot, p. 488
BriefleditDucsivintauRoy
tt promist à son bon plaisir
Repparer et mettre e>, arroii
Le discord, selon son désir.
Vigil. de Charles VII, pari, il, p. 140.
En termes de fauconnerie, mettre en arvmi nn
oiseau de proie, c'étoit raminger! lé me tr? Z
règle pour voler, l'armer, l'équiper de Soeron
101 iiu I, el \ . — ibid. fol 136, R" et V" 1
Or t'ay dit quelz oiseaux auras
Quant Emperiere ou Roy seras
Ayes ung homme avec tov
Qui mecte en ton desduyt à,vo)/
Gace de la Bigne, des Déduits, MS. fol. 12, V
Mettre arroi en son corps, pour en réo-ler
passions et les diriger vers ftionnêteté et la vertu.
\i) i^e mot se trouve dès le xivc " i a
AR
— 192 —
AR
Je te conjur de Dieu le Roi
Que en ton cms moles aroi.
Quant Marie o^,P-ler_^d,e D.eu, etc. ^^_^ ^. ^^, ,_
Si les vertus qu'on aime dans un homme, étm^n[
la règle invariable de ses actions , • on le tiou\oii
« de grand arvoi. "
Brichemerestdebelafere;
N'est pas un hon plain de deroi.
Doux, et cortois, et debonere
te "-"-"'/i.^'âl'd; nT^eiS, fol. 7., R. col. 2.
Pnnr sic^nifier (lue la mort ne garde point de
rèï en^Sappant les Rois comme les autres
hommes; on a dit qu'elle n'a point d arroy.
Tu n'as point d'airoy :
Espargnier Prince, ne Roy
Ne'veulx ; tant y^es o^uejUeuse^ ^ ^ ^^^ ^
Fn réfrénant les passions, la Foi et la Religion
nréSaîet et assurent l'observation des règles qui
L£f. une liberté paisible dans les Républiques ;
STes Monarchies, à une salutaire dépendance.
S sont les règles que paroit désigner le mol «m ,
dans les deux citations suivantes. ;. f m^'i Que 'e
, compte que l'on fait de 1 honneur dnin. et l en
. tSen de la foy maintient les Républiques en
IX; ausst le mépris d'icelle est cause de^eu
» dernière ruine. - (Machiavel, Disc, sur lite
Live, p. 'ï'i-)
Girart est homs le Roy.
Touts ies Subjecis du règne a^Y Roys en «r™y ••
Si ne peut-on le Roy «^a.sju^a tort .guerroyer. ^
Telle est l'extension pm; ^'''^'IV^^nufrdi
exprimoit toute idée relative ^^ ,^«1 e de ,«y^, de
lit^ne tracée pour servir de règle; une idée gène
ral^de rè-le, de convenance, lorsqu'il signifioit,
'arrangement, disposition régulière, disposition
conforme à rusage du cérémonial qui règle les
S g' ; La plus belle pucelle du monde er-
1 vdent deux pucelles qui se ass"'e.nt 1 ung^ ung
„ costé et l'autre à l'autre sur ung siège, non pas
„ si haut que elle. Quant Bennucq..^. veit cesl
a ajToy, tanlosl congneut, etc. » (Percef. \ol. I\,
*° ^-'msposi'tïn'co'îiVenable pour faire une chose.
Je vous voi si bel pourveues
De sens, d'an-oi et de manière
Que vous receviés ma proiere. „ . c^,, ,
Sus li n'a tache, visce, ne blasme ;
Mes sens, et bien, et arvoi de parler
Arréement, mieuls que nulle^aultie feme.
3" Préparation, assaisonnement de mets :
Dieux scet le service et Varroy
Des mes, et les maulx que j'endure
Après disner : se du vin boy,
Tantost fault payer, j'e^t d^rodu^re. ^ ^^^ ^^^ ^
4'" Préparatif d'une fête :
Riens qui apartiengne à nrroi
De teste estorée pour Roi. . , , rs r. p„i »
Cléomadès, MS. de Gai(;n«t, fol. 62, R' col. 2.
5' Préparatif, équipage convenable pour une
expédition militaire, pour un siège, une conquête
rouand Philippe Rov de Macédoine entreprmt
S-er .. Corinthe les Corinthiens... ad vertis
„ nue c^tr'eulx il venoit en grand arroy e exercite
» numereux, etc. ■■ (Rabelais, T. III, prolog. p. 5.
';']^qtipnl?;"!iabillement, parur^, appareil
convenSble, coi'lége, Pompe,convoK(Voy. Mathieu
de Coucv, Hist. de Charles MI, p. '^0- r f "n-^ ^
ratv.esxètxvm,p. 74 et 131.-NicotetM .net, Dict.)
Après sa mort, son vrai Seigneur et Roy
Luiordonna ce beau funèbre «^,7^y;,,„„, p.4„.
Il semble qu'on se soit figuré les grâces et les
vertus "onvenaSies à une belle femme, comme
fonSnt son cortège et ennoblissant son triomphe,
lorsqu'on a dit :
C'est ung chef-d'«u\Te de beaulté,
Ung triumphe de noble arroy :
Sa prudence et sa loyauUe
Vallent l'avoir d'ung peW R^Yp^,^ ^ ,3,,
Fn mrlant d'un homme qui s'annonççit d'une
fa. on Svenahlë, par la beauté de son équipage
[le "on habillement, de sa parure, on d.soit qu il
étoit de bel arroy.
Rel fut, gent, et de bel arroy :
Il sembloit estre f.lz d^e Roy.^_^^^^ ^^^^ ^,^ ^, ,,,,
Quoique l'équipage des Personnes ne soit pas
touiours conforme et convenable a leur état ofi
S si communément de ^-^\V^\\^f\tl.Tl
U-oit tout simple qu'arroy ait signifie l^Ut Je
rang., la position relative des personnes dans l ordre
politique et social.
Le chien a Macaire trouvé
Séant à la table du Roy ;
car estoit ho^me^e grand arr^. ^^ ^^, „ ^._
Soit Sa Majesté contente
De m'y laisser en mon premier "'•;■"!'••
Soit de sa chambre, ou sa loge, ou sa tente,
ce m'est tout un, "^^^Zo^J-^^nl^^S^' '
On a même désigné l'état des choses P^r exemple,
le mauvais état d'un jardin, en djsant qu il ctoil en
piteux arroy. (Voy. Poës. de Charles, Duc d Orléans,
MS. du R. p. 97, col. 2.)
VARIANTES :
Arroy Ger. de RoussiUon, MS. p. à-t.
Errm Fabl.MS duR. n»7615,tol.71,V«col_l.
Eroy Ger. de RoussiUon, ubi supra; Var. du MS. delà
Cathéd. de Sens.
Arroiance. snbst. fém. et masc. Arrangement,
^'lÏÏSi.'- -Sucs à celles d'arroi, arran-
wernènt, disposition, etc.
Sire fet ele au Roi, vous veez bien comment
La chose ne vint pas de mon arréement ^
Borle as srans pies, MS. de Gaignal, fol. 133, V col. ..
AR
— 193 —
Lors p ot cure de plus targier
yuK 1 arroiance ne pourvoie
Comment tost soit mis à la voie
_ Cleomadès, MS. deGaignal, fol. Sl.R-coI 3
Arreee fu Vavréunce ' '
De la feste, sans oubliance.
VARIANTES :
ARROIANCE. Cléomadés, MS de Gai^nat M q^
Arrkance. Ibid. fol, 62 ^ocoio ^ ''^°'-^-
ARREE.MENT. Berts as grans pies; MS. de Gaignat, fol 133
garder sn ligne. (Voy. ArrcS ^'' '*'' ^ '^" ''3"-
latin radiare !i nnP Hnn! *^ '""P'*' '■«^"'' en
comparaison d-aprèllumelle Z iT' '^l?'''^ ^ '^
ture, un sillon se no „ïe corpV.r"' "^ 'S'"'""'-
latin radius, on aura dU ! Si LTi, n ''''f "' ^^
« terre qui marcisse nn Jr-inV 1 °''"^" '''hiuiner
rur. ti/ LxxxvTiî^ë^SsV" " (««"^^^'''er, Som.
d'un centre; par des li-nos ï^.-^'"''' •''"' P'"''ent
rayes: dénomïïtion q fsemb eïSsK" ""TT'
des rayons par des li<.- .Vs pMo , ^'e^^.' ™'tation
lignes à des rayons ^' '' "^«"^P^'-aison de ces
ligne, aura signifié raierÛnp'?.n' ""f '''^J'^- ""e
ligne, la dispose su,r'"'^'^"'^''' ' '^°™^*^''en
la ranger en bataille '"'' P'^^'^urs lignes,
Et s'an-ef/e,.e„ni conrov
^ Moult bellement lun de lès l'autre
tt h Vassal furent aroié
(^om por bataille conrée
biege de Truye, MS. d« R. n- 6987, fol. 97, R- col 3
Celh qui scet gens d'armes arroyer étc
point soi lef;^^'Vîrrïe«Srd^;£
AR
SS'''' ■■ '""■' *^"e "'^ d'autant plus nalurelleà
n-aurot-îlTs Fori'i'n. "^"" ''^ '''''^'^ =i'"''«"ger
a?7r?«'.? Si dû erbP 1 in , ; ''^ orthographe
françois ronger il n'es? nn f ' '?' ^'^'""^'^ "^
qne le franco! m 9^,^ J',^ f ,^"^':f/d'''^'i'-e
composé «^rirlv. ™" ? , n PO^^'t^'^té T-e le
même origine n?fl,TJ,f^?'^H """ «''''''"^^'^ s^it de
de rano-e r et n, t'^ 1-- -'' -^Ç*^ ''"'^ ''^^ s>Snilications
de l'ânc^n vérlp^Tr'^*' ^^ '«"* encore celles
bataille, les foLr en o';. '.^ "i-J*^^ '■^^"°'^'- «"
ou sur plusieurs lionp« nJu', «''sposer sur une
qui,refat 4S|cett?nc^^^^^^^
Camp. .. Le Rov'as.in.P."''^ ''^ "°' Maréchaux de
-< geSts d Vmel et de L Ju/'^'m'^ ^"''"«"''^^ ^'^
« descendit le Roy au niiniV „;, i',P-.^'"-) ",Si
ordonne pour lu^» S^oSsS .?,", f 7^1
Va ; SI aroie ta maison. ' ' ' " ■'
Fabi. MS. du H. n- 7989, fol. «i-2 R. col »
Son palefroi Hst enceler
i-t ses charretes aroiiier
Fabl.MS.duR.„.7615,foI.124 R- col )
preuve d^rhan. , enVde "îo'vpfi ""' "T'^'^
voyelles nasales. b'orAR„îi„7'"'' ^""P'^^ e"
|dJi^Se;ïïss'^t.iiï?v^?;^,û;f"^^
dispo^/oSydSu à iSu-e^lo^""'^ '^r'^
qu'elle en étoit arro/^V le-' ^'^'^i^' "^'^ ^''^oit
(i)i?a«^«,- est dérivé dp V ^lonauoiec ou s y «rmo//; dans le
dans ApJéefi'rr ''^ ""^' ^<^"" ''" '^-* '^"^-and /.™,, cercle, rangée circulaire ■
n. ' ^"^^^^'^'^"'■'"«.'•«"Se.vient de ;•«,;.,;;«,.« (ruminer,
25
AR
194
AR
sens de diriger, que ses pensées s'y arroioient.
« Hz sont Gens d'Ordonnance, bien advertiz et bien
« arrotjcz de ce qu'ils doivent faire. » (Le Jouven-
cel, Ms. p. 577.)
S'acesment, et perent,
Et arréent d'aler souper ; etc.
Cléomadès. MS. de Clignai, fol. 37, V" col. 3.
Chascuns de li servir s'an-ée.
Dits de Baudouin de Condé, MS. de Gaignat, fol. 312, V- col. 1.
Leurs pensées à divers ars s'arroient.
Eust. Desch. Poès. MSS p. H3, col. 1.
Probablement, arroierim règne, c'étoit arranger,
régler le plan de l'administration, le tracer d'après
les règles d'une saine politique, en diriger toutes
les parties vers le même but et, pour ainsi dire,
les aligner.
Drois Rois est qui son règne arroie.
Dit de Charilé, MS. de Gaignat, fol. 217, R' col. 1.
C'est relativement à l'idée générale de certaines
règles de convenance, d'après lesquelles on s'ar-
moit, on s'équipoit pour combatli'e, que l'on aura
dit : « Il qui tient par un fee de service de Chivaler,
» covient eslre ove le Roi par .\l jours, bien et
« convenablement ariwi pur le guerre. » (Tenures
de Littletoii, fol. 20, R°.)
D'armes et de cheval bien et bel s'arréa.
buenon de Connû.ircliiBS, .MS. de Gaignat, fol. 197, Y" col. 1.
Il est des règles de convenance pour l'équipage,
l'habilieracnt, la parure ties personnes; pour la
préparation ties choses à certains usages: règles
dont on retrafoit l'idée, lorsqu'on disoit, 1" en par-
lant de princesses équipées, babillées et parées
d'une façon convenable a leur naissance, qu'elles
étoient bien araées :
Furent bien araées,
Et en Lombardie menées
Au Roi Silvium leur parent,
Qui les maria moult richement.
Rom. de Brut, MS. fol. 12, R' col. 2 et V' col. 1.
Quant Clarmondine l'entendi,
Moult duremfcut li abeli...
Les puceles n'atargent mie ;
Ains ont la besoignc avancie.
De ce que il i convenoit.
Bien et bel, et tost et adroit,
L'ont pourveue et arrée.
Cléomadès, MS. de Gaignat fol. 20, R- col. 2.
2° En parlant de mets préparés, assaisonnés,
qu'ils étoient arréés. (Gloss. lat. fr. du P. Labbe,
au mot Condire.)
3° En parlant de peaux préparées pour certains
usages, qu'elles étoient aroiées.
Fevres fet fers à peletierg
De qoi il aroient lor piaus
A forrer cotes et mantiaus.
Fabl. MS. du R n' 7218, fol. 109, R» col. 1.
Notre verbe corroyer, qu'anciennement on écri-
voit conroijer, signilie encore préparer des cuirs,
les appièler. Cette analogie de signification prou-
veroil, s'il en étoit besoin, qu'il e'st de même ori-
gine qu'ajT0i/e7- (1). (Voy. CONROIER.)
Enfin, lorsqu'on désignoit un jeune liomme
rangé, en disant qu'il étoit arréé, on se le figuroit,
sans doute, comme gardant la ligne d'après laquelle
la sagesse régloit ses démarches.
De joene home arreé,
Pris pou la Sainteé :
Souvent avons veu
Qu'il a el cors la rage,
Quant il est en l'aage
Qu'il a le poil chenu.
Prov. du Vilain. MS. de Gaignat, fol. 274, R° col. 1.
11 semble en effet que, relativement à l'idée de
garder sa ligne, être à son rang, on ail dit figuré-
ment faire «rro/cr quelqu'un pour faire qu'il soit
à son rang dans l'ordre social, lui faire garder la
règle établie pour le maintien de ce même ordre.
Drois Rois est qui son règne arroie,
Et les desrois fait arroiier.
Dit de Cliarité, MS. de Gaignat, fol. 217, V- col. 1.
V.\R1ANTES :
ARROIER. Eust. Desch. Poes. MSS. p. 113.
Araer. Rom. de Brut, MS. fol. 12, R» col. 2.
Aréer. Cléomadès, MS. de Gaignat, foL 32.
Akeger. Borel, Dict.
Aroier. Siège de Troye, MS. du R. n» G987, fol. 97.
Aroiner. Fabl. MS. du R. n" 7G15, fol. 124, R» col. 1.
Arrayer. Du Cange, Gloss. lat. au mot Arraiare.
Arréer. Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 20.
Arroher. Dit de Chanté, MS. de Gaignat, fol. 217.
Arroyer. Bouteiller, Som. rur. tit. Lxxxv, p. 498.
Ari'oquer, verbe. Presser, accabler. (Voy.
Arrocher.) On soupçonne qu'arroquer est une va-
riation d'orthographe du verbe arrocher, mettre en
pièces, accabler ; et que dans un sens aiuiloî^ue on
a dit d'un sanglier pressé par une meute de chiens
qui l'accablent et le mettent en pièces, qu'il en
étoit ai-roqtié.
Se demeslant ainsi d'une presse guerrière
Qu'un sanglier arroqué, dedans une fondrière,
D'une meute de chiens, escuraant, hérissant,
Qui de hure et le dents se fait voye en poussant.
Bergeries de R. Belleau, T. 1, p 126.
Ari'ousable, adj. Propre à arroser. Piopre l'i
être arrosé.
Dans le premier sens, on disoit : fontaine arou-
sable. (Voy. Fabl. ms. du R. n» 7218, fol. 301, R°.)
On trouve arrousable au second sens, dans
Cotgrave, Dict.
VARIANTES :
ARROUSABLE. Cotgrave et Oudin, Dict.
Arousable. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 301.
Arrousage, subst. masc.
Cotgrave et Oudin, Dict.)
Arrosement. (Voy.
Arrousement, subst. masc. Action d'arroser.
Quoiiiue la signification d'aiTosement soit encore
aujourd'hui la même qu'en ce passage des Serni.
fr. Mss. de S' Bernard, p. 12[t, où on lit que « usai-
« ges des awes est li arrosement; » on ne diroit
plus, en parlant d'un jardin qu'arrosei'oit une
fontaine, que ce jardin est « deleitaules par l'arro-
« sèment de cette fontaine. » (kl. ibid. p. 130. —
Voy. Arrouser.)
(1) Conroijer, comme arroyev, viennent des prépositions cicm et ad, unies à redum (arrangement), qui rappelle le flamand
reden et le gothique raidjan, préparer, (n. e.)
AR
195 -
AR
VARfANTES :
ARROUSEMENT. Cotgrave, Nicot et Monet, Dict.
Arrosement. Orth. subs. — S' Bernard, S. F. MSS. p. 130.
Arrouser (1), verbe .Inonder , entourer, environ-
ner, assiéger. La rosée qui coule sur les fleurs et
les embellit, est une image si naturelle des larmes
qui coulent sur le visage d'une personne intéres-
sante par sa douleur, qu'on se la figure encore
aujourd'hui, comme ayant « la face de larmes piteu-
« sèment arrousée. » (Voy. J. Marot, p. 32.)
Ce verbe arrouser, dit Nicot, signifie « jetter de
« l'eau par plusieurs petites gouttes au coup comme
« rousée. >• (Voy. Arrousoir.) Si Feau qui « coule et
« se répand en rosée. » est insuffisante pour hu-
mecter la terre et vivifier les plantes, on la « ré-
" pand et on l'a fait couler avec une abondance »,
«lue par exiension désigne le même verbe arrouser.
(Voy. Nicot, Dict.)
En comparant à l'effet de cette abondance arti-
ficielle, celui d'une fontaine qui coule dans un
jardin, d'une rivière qui coule dans une campagne,
on dit qu'elles les arrosent. Mais on ne diroit plus
qu'une place fortifiée par des fossés inondés d'eau,
est arrosée. L'idée de fossés ainsi inondés paroil
avoir été si familière dans les siècles de l'anarchie
féodale, qu'en parlant d'une armée qui inondoitles
environs d'une Ville et l'entouroit pour en faire le
siège, on a dit qu'elle l'arrosoit, sans doute comme
l'eau qui en inondoit les fossés.
Son bien proisiez à deux cents mile
Qui tuit assiéent en Murel
Symon le Conte naturel.
Murel que celé gent arouse,
Siet en l'Evesohié de Thoulouse.
G. Guiarl, MS. fol. 92, V.
Ce seroit par un abus singulier de celte signi-
fication d'arroser, entourer, environner, assiéger,
qu'on auroit dit figurément; 1° en parlant d'un
Roi entouré de biens et environné d'honneurs :
. . . Bien et honneur l'arousa ;
Trois nobles Dames espousa.
G. Guiart, MS. fol. H,Rv
2° En parlant d'un cœur qu'assiège une passion
amoureuse.
Si je repose de fere chançon,
S'amor qui arone mon cuer environ, etc.
Clians. fr. du Xllf siècle, MS. de Bouhier, fol. 47, V'. col. 1.
Peut-être trouvera-t-on qu'en ces derniers vers,
arroser signifie l'abondance du plaisir qui inonde
un cœur amoureux ; dans les premiers, une abon-
dance de biens et d'honneurs répandus sur la tête
de celui qu'on disoit en être arrosé. (Voy Abrou-
SEMENT.)
VARIANTES :
ARROUSER. J. Marot, p. 32.
Aroseu. Chans. Fr. du xius siècle, M.S. de B. fol. 45.
Aroi'ser. g. Guiart, MS. fol. 11, R».
Arreuser. Rom. d'Audigier, MS. de S'-Germ. fol 66.
Arroser. Orth. subs. - S'-Bernard, S. Fr. MSS. p. 129.
Arrousoir, subst. masc. Arrosoir. Vase d'oîi
l'eau « s'écoule et se répand en forme de rosée. »
(Cotgrave, Nicot et Monet, Dict. — Voy. Arrouser.)
Arrudir, verbe. Rendre ou devenir rude ; ren-
dre ou devenir insensible. (Voy. RuDE.)On sefiguroit
les sens et l'esprit comme étant d'une rudesse qui
s'opposoit à l'impression des objets propres à affec-
ter, lorsqu'en parlant de l'insensibilité d'une per-
sonne pour ces mêmes objets, on disoit qu'elle
s'arrudissoit, qu'elle avoit les sens tout arrudis,
que son engin étoit tout arrudi. « Mon petit engin
- qui étoit tout arrudi:^, etc. » (G. Machaut, ms. fol.
172, V" col 3.)
Dame Nature ayant les yeux mourans,
En force pleurs et larmes décourans.
Le chef baissé, les sens tout (irudis, etc.
J. le Maire, à la suite de l'Illuslr. des Gaules, p. MO.
Tant m'amtdisse
Que mon bon seulement perdisse,
G. Machaut, MS. fol. 171, V col. 3.
VARIANTES :
ARRUniR. Cotgrave et Oudin, Dict.
Arudir. j. le Maire, à la s. de ITlIustr. des Gaules, p. 400.
Arrimer, verbe. Arranger, équiper, etc. Arran-
ger la cargaison d'un navire. Régler une Carte
marine.
Il est possible que les substantifs rang et ray,
comme les verbes arrayer et arranger, soient de
même origine; et que la différence de l'un à l'au-
tre soit l'effet d'un son nasal au moyen duquel ray
aura été prononcé ra»g, rcng, run, etc. De là, le
verbe arritner de même signification quarroyer,
arranger, équiper, etc. « Chevaliers et Escuyers...
« qui désiroyent les armes, montèrent une fois sur
' leurs chevaux, sur les meilleurs et plus aspres
« qu'ils eussent, et les mieux gouvernés et arru-
« nés. « (Froissart, Vol. llî, p. 244.) Le Peuple en
Normandie prononce encore aujourd'hui run pour
rang; et, pour arranger, dit flj'nmp?". (Voy. Cotgrave
et .Nicot, Dict. — Ménage, Dict. Etym.)
On pourroit douter qu'arriiner et nrrumer
fussent de même origine qu'arruner, si l'on étoit
moins familiarisé avec le changement des voyelles
71 et ?, et des consonnes nasales n et m qui dans la
prononciation .se substituent souvent l'une à l'autre ;
et si l'on n'avoit la preuve qu'en termes de marine,
arruner, arrumer, ou arrimer, c'est arranger la
cargaison d'un navire, et que dans un sens ana-
logue, on a dit arrimage, arrumage, ou arunage.
(Voy. Aubin, Dict. de Marine, p. 46. — Dict. de
Trévoux, col. C03 et 60G.)
Enfin, la signification d'arrumer, la même que
celle à'arruner, qu'on croit être une altération
d'arranger, se rapprochoit sensiblement de la signi-
fication'étymologique du verbe arrayer, tracer une
raie, une ligne droite comme un rayon, lorsqu'en
parlant d'une carte marine sur laquelle sont tra-
cées les raies, les lignes droites qui règlent la
division et subdivision des vents, on disoit qu'elle
étoit arrumée. Les rums ou rumbs de vent étant
des raies ou lignes qui figurent sur les cartes ma-
(1) Arroser vient du latin adrorare (arroser, dans Marcellus Empiricus). (n. e.)
AR
— 196 —
AR
rinesles trente-deux venls qui scn-enl ù la conduite
d'un vaisseau. « Selon ce on dit arritmcr une
« carie, pour tirer enicellc lesdits rums(l). » (Nicot,
Dict. — Voy. Arroier.)
VARIANTES :
ARRUNER. Froissarl, Vol. III, p. 24i.
Arrimer. Dict. de Trévoux. - Dict. de l'Acad. Fr.
Arhumkr. Cotgrave, Nicot et Monet, Dict.
Ars, subst. mase.plur. Partie de devant du corps
d'un cheval, d'un cerf, etc. Ais, planche.
En termes de manège, on dit : « saigner un che-
« val des ijuatre ars. « (Voy. Dict. de Trévoux. —
Dict. de l'Acad. Fr.) Cette expression paroit relative
à l'idée que ce mot ars est formé du latin artus,
en frant'ois membres; et qu'on a désigné les quatre
membres du cheval, en disant ars de derrière, par
opposition aux ars de devant. Mais nulle preuve
que, comme on disoit ars de devant, l'on ait dit a/'s
de derrière; et supposé qu'il en existe, l'étymologie
reste douteuse.
Anciennement, on écrivoit ars pour arcs, en latin
arcus; et l'on nommoit arcs de devant, ou tout
simplement arcs, les jambes de devant d'un cheval.
Cette définilion, qu'on a hasardée sur la foi du
Seigneur du Fouilloux, paroit inexacte. Quelques
citations ajoutées à celles qu'on trouve sous le mot
Arc, partie du corps d'un cheval, semblent prouver
que cette parlie désignée par le pluriel arcs ou ars,
est celle où finissent les épaules du cheval et oîi
commencent les jambes. Au reste, la signification
d'ars et arcs en ces mêmes citations, est évidem-
ment la même. « Attaindirent son cheval es arcs de
«■ devant, de telle puissance que ledit cheval mons-
« tra bien comment il estoit attaint au cueur ; car il
« cheut tanstost à la terre mort. » (Percef. Vol. VI,
fol. 19.) « Le fer du glaive luy fiert es ars de devant si
« en parfont qu'il luy saillit hors par derrière; dont
« cheut le cheval tout plat. (Ibid.Vol. I, fol. 51.) « Le
« porc qui estoit eschauffé.... consieut de la dent le
« cheval de Thelamon, et luy va fendre le ventre,
« des «î's jusfiLies es rains derrière. " (Ibid. Vol. II,
fol. 9.) « Les deux chevaulx avoient chascun une
« lance qui leur avoit esté fichée es ars; et leur
« sortoient hors l'arcon de devant la selle. » (Ibid.
Vol. III, fol. 2.)
Ce mot ars ou arcs signifioit non-seulement parlie
de devant du corps d'un cheval, mais une parlie
semblable du corps d'un cerf, et même d'un chien.
» Passelion s'estoit enveloppé de la peau d'un
« cerf au plus genlement que il avoit peu : car
« il avoit audessus de la teste les cornes qu'il faisoit
« venir sur son dos; si venoil à quatre piedz.
« Mais il ne mist hors de l'épinoy, fors la moitié
« du corps; si que la vieille luy véoit les ars de
« devant et les cornes » (Percef. Vol. V, fol. 100.—
Voy. Arc, partie du corps d'un chien.)
Probablement, on nommoit arcs ou ars, partie
de devant du corps d'un chien, d'un cerf, on la
voyoit comme formant une espèce d'arc. On l'assi-
miloit à la parlie de devant du corps d'un cheval ;
partie dont la forme nécessite celle de farcon d'une
selle. (Voy. Arçon.)
Quoique les ais dont l'assemblage formoit les
Ecus de nos anciens Chevaliers, fussent de figure
bombée et par conséquent imilative de la courbure
d'un arc, il est peu vraisemblable qu'on ait comparé
ces ais à des arcs, et qu'en ce sens on ait dit :
« La beste luy courut sus, de grant randon, en luy
" prenant son escu aux de'ns ; tellement qu'ilz
« entrèrent bien parfond dedans les ars. » (Percef.
Vol. III, fol. 89.) « Hz s'en vont férir es escuz des
« lances telz coups qu'ilz faulcérent les ars et les
« haubers. » (Ibid. fol. 105.) - Couchèrent leurs lan-
« ces ; si commencèrent les joustes de toutes pars,
« dont les éclatz des lances rompirent les ars à très
'< grant effort. » (Ibid. fol. 112.) Peut-être trouvera-
t-on plus de vraisemblance à croire que le mot ars,
dont la signification en ces passages paroit évi-
demment relative à celle des mots «es et a\jes, dans
les expresssions « faire voler les aijes d'un escu,
« en fendre les aés, » est moins une variation d'or-
tographe du pluriel arcs, qu'une corruption du mot
ais. (Voy. Aïs.)
Ars, participe et substantif. Mis au feu, jeté au
feu. Brûlé. Incendie.
Il semble qu'a?'s, en latin arsus, participe du
verbe ardere, d'où le franç.ois ardre, signifioit mis
au feu, jeté au feu, lorsqu'en réunissant ars et
bruslé, on disoit : « Si fut la Ville arse et bruslée
« en un grant feu. » (Ger. de Nevers, part, n,
p. 127.)
Dans le sens de brûlé, le participe ars désignoit
les elfets de l'activité du feu, sur ce qui avoit été
ars ou mis au feu. (Voy. Ardre sous .\rder.)
De Iti, on a dit, 1° en parlant de l'elfet chimérique
de l'ardeur du feu sur le jais :
Quant est ars mult est rairables :
Chaice Serpent, destruit Diables.
Marbudus. de Geram. an. xviil, col. 1654.
2° En parlant des elfets de l'ardeur du soleil en
Espagne : « La terre leur sembla trop arse. "
(Chron. S' Denys, T. I, fol. 143.)
3" En parlant de l'effet de fardeur, du tempé-
rament du lièvre lorsqu'il est en amour : « Gete les
« fumées plus arses et plus menues. » (Chasse de
Gaston Phébus, ms. p. 43.)
Enfin, ce participe ars, pris substantivement
comme le verbe ardoir, action de brûler, d'incen-
dier, a signifié l'elïet de celte action, fincendie
même. « En demandes qui sont fctes pour cas de
« crime se convient il fere partie, et dire en
« tele manière : Sire, veslà Jehan qui a fait tel
« meurtre, ou tel traïson, ou tel homicide, ou tel
« rat, ou tel ars, ou telle roberie. » (Beaumanoir,
Coût, de Beauvoisis, chap. xi, p. 38. — Voy. Arsis.)
Arsenal, subst. masc. On doutoit encore, au
(I) Tous ces mots, arrimer, arrumer, arrimer, ont pour étymologie rum, riimb, qui signifie cale, fond de navire, espace^
en danois rummct, en allemand Raum. (n. e.)
AR
— 197
AR
commencement du xvni" siècle, s'il falloit écrire
arsenac ou arsenal. Enfin, rorlhogiaplie arsenal a
prévalu, malgré le pronostic de Ménage, qui croyoit
qu'arsenac obtiendroit la préférence.
L'opinion la plus vraisemblable sur l'élymologie
d'arsenal, est que ce mot a été formé de l'arabe
Dâr-senâah{l], en retranchant le rfpour la facilité de
la prononciation. Il est évident que les signifi-
cations particulières et usitées d'arsenal, sont ana-
logues à la signification générale du mot arabe,
traduit en latin par ilomus opificiL en françois
atelier, magasin. (Voy. Court de Gebelin, Dict.
Etym. delà Lang. Fr. — Ménage, Dict. Elym. —
Dict. de Trévoux.)
VARIANTES :
ARSENAL. Orlh. subs. Bourg, de Orig. Voc. Vulg. fol. 11.
Arcenac. ,I. Marot, p. 76. — Borel, Dict.
Arcenal. Mém. de Ph de Commines, T. II, p. (512.
Arsenac. Rabelais, T. III, p. 251 et 272.
Arsenic, srt^s^ 7nasc. Poison brûlant et prompt.
En langage oriental, alzernig('2): mol composé de
%er, brûler, mordre, et de neg, être prompt, se
hâter. (Voy. Court de Gebelin, Dict. Etym. de la
Lang. Fr.) En adoptant cette étymologie du mot
arsenic, on avouera sans doute (lu'il signifie très-
énergiquement l'elîet d'un poison tel que Varsenic
sublimât, probablementl'orpiment sublimé. « Il est
« une chose qui se apppelle arsenic sublimât : se
« un homme en mangoit aussi groz que un poiz,
« jamais ne vivroit. » (Confession de Vourdreton,
ubi supra.)
Cette espèce d'arsenic sublimé plusieurs fois
avec le sel marin, se forme en une masse très-pure
et cristaline, qu'on aura désignée par le mot rocher,
en disant arsenic rocher.
En réagal, en arcenic rocher,
En orpigment, en salpestre et chaulx vive, etc.
Villon, Po«s. p. 68.
VARIANTES :
ARSENIC. Orth. subs.
Alssignv. Du Bellay. Mém. T. VI, p. 301.
Arcenic. Villon, Poës. p. 68,
AR.SIGNY. Du Bellay. Mém. T. IV, p. 261.
Arser, verbe. Brûler. Briller.
Ce verbe arser, formé du participe ars, comme
les substantifs arseure et arsion, étoit de même
signification qxïarder, brûler. (Voy. Ane. Poët. Fr.
Ms. du Vatican, n° 1 i90, fol. 153. — Gace de la
Bigne, des Déduits, ms. fol. Ai, etc.) On a désigné la
facilité de rallumer dans un cœur le feu d'une
passion dont il a déjà brûlé, dont il a éprouvé
l'ardeur, en le comparant ù un tison arsé.
Car Varsés tisons
Est plustost en calour et en vie,
Quant est près del fiu mis
Que li vers basions
De qui caure ne fu ains sentie.
Ane. Po«t. fr. MS. du Vatican, n- U90, fol. 36, R-.
La comparaison de l'ardeur physique de l'amour
avec celle du feu, semble si naturelle, qu'il est pos-
sible qu'au figuré le verbe arser signifie brûler,
être en feu, dans le Moyen de parvenir, (p. G6 et
37G1 quoiqu'on puisse l'y voir comme une con-
traction d'arresser. Cet ancien verbe arresser, qu'on
trouve dans Rabelais, T. II, p. 222, et dans Cotgrave,
Oudin et Nicot, est de même origine et de même
signification qa'ai'oidier, être roide, être en érec-
tion. (Voy. Aroidier.)
On assimiloit à l'effet de la flamme du feu, celui
du poli de l'acier, lorsque dans le sens de briller,
on disoit, » faire arser une épée. » (Régnier, Satyre
vni, p. 53. — Voy. Arder.)
Arseure, subst. fém. Ardeur du feu. Ardeur
d'une passion. Brûlure. Chose brûlée. Brùlement,
action de brûler, d'incendier.
Dans le sens propre, arseur^e signifiait l'ardeur
du feu :
De celé seconde closture
Grant eèt la pueur et l'arsure,
Et hydeus li embrasemenz.
G. Guiart, MS. fol. 80, V'.
.... coume Vursure
Fait kanq'ele ataiiit bruir ;
Fait mon cors taindre et pâlir
Sa douce regardure.
Ane. Po5s fr. MS. du Valic. n- 1490, fol. 29, R'.
Au figuré, l'ardeur d'une pission :
Mais Blancheflor le rasseure,
Dont il sent l'angoisse et Varscure.
Floire et BlancheOnr, MS. de S. Germ. fol 202, V" col. 1.
Par extension , Varseure étoit l'effet de l'ardeur
du feu, une brûlure : « Mes oignemenz est bons
« pour roulure, por arsure, etc.» (Erberie, ms. de
•S'-Germ. fol. 89. - Voy. Arreure.)
Quelquefois même, la chose brûlée :
Li tombeaul fut chargié de charbon et à'arsure
Pour le feu qu'out esté; fut tout chargié d'ordure.
Ger. de Roussillon, MS. p. MU.
Enfin, ce mot arsure pareil avoir signifié brùle-
ment, l'action de mettre le feu à une chose, l'action
de brûler, d'incendier. « De arsure l'on prant
« mort et tuit li bien sont le Roy. » (Ane. Coût.
d'Orléans, p. 468. — Voy. jVrsion.)
VARIANTES :
ARSEURE. Chasse de Gaston Phébus, MS. p. 223.
Arsure. Chron. S<-Denys, T. II, fol. 163.
Arsili, subst. masc. plur. Espèce de barques.
C'éloit des barques plates, si l'on en croit Borel qui
cite Villehardouin (3), au mol lissiers. Peut-être
seroit-il plus vrai de dire que ces barques, nommées
arsili, étoient des brûlots?
Arsin, subst. masc. Chose à laquelle on a mis
le feu, chose brûlée. Effet du feu, brûlure, incendie.
Brùlement, action de mettre le feu, de brûler, d'in-
cendier.
(1) On trouve en bas-grec le dérivé doaài/a, mais le français vient de l'italien arzenale, arzena, darsena. (n. e.) — (2) Ce
mot vient du grec dçaeyixôç, mâle, métal ainsi nommé à cause de ses propriétés puissantes. On trouve dans d'Aubigné la
lorme ancienne arsoine, avec l'accent sur la syllabe se de arsenicum: « Un arsoine si blanc qu'on le gousta pour sucre. »
(Tragiques, p. 282, éd. Jannet, 1857.) (n. e.) - (3) A\i paragraphe 217 de l'édition de 'Wailly, on parle en effet de dix-sept
navnes équipés en brûlots par les Grecs ; on n'y trouve pas la forme arsili, mais seulement : « Et li feus aluma mult hatt,
si que il sembloit que tote la terre arsisl. » Aurait •on pris s manuscrit pour i et fait de t un i ? (n. b.)
AR
— 198 —
AR
On prouve la première acception d'arsin, par
queliiues Coutumes dans lesquelles les bois aux-
quels on a mis le feu, les bois brûlés p^r malice ou
par accident, sont nommés arsins. (La Thaumas-
siiVe, Gloss. sur les Coutumes de Benuvoisis. -
Lauriôre Gloss. du Dr. Fr. - Dict. de Trévoux. -
Voy. Ansis.) . .^ , , .,
11 paroil que le même mot a signifié brûlure,
l'effet du feu que vomissoit la gueule enflammée
du Dragon qui gardoit la Toison d'or :
Feu et venin espan ensemble...
Ne fust Jason si bien garnis ,
En petit d'eure fust fenis ;
Que del arsin, que del venin
Manois fust aies à sa Tin.
Siège De Troye ; MS. du R. n' 6087, fol. 72, R' col. 1.
En termes de Coutume, l'effet du feu mis à une
maison, incendie : « Les eschevins de tout cas cri-
a minel, si comme de meurtre, homicide, lar-
« cin,rapt, etarsi» vulgairement appelle incendie.»
(Coût, de Richebourg, au Nouv. Coût gén. T. I,
p. 450. — Voy. Ars.)
Le droit des arsins, spécialement en Picardie et
en Flandre, étoit le droit de mettre le feu à la
maison d'un forain, faute par lui « d'amender le
.. forfait dont il s'étoit rendu coupable, en entre-
« prenant viers le franchise d'une ville et le corps
« des bourgeois. Parce qu'on mettoit le feu aux
« maisons des criminels, pour les abattre et les
« détruire , cette exécution a été appelée arsïii. »
(Laurière, Gloss. du Dr. Fr. p. 72 et 73.)
E« déclarant hérétiques plusieurs propositions
avancées par le Docteur Jean Petit dans son apo-
logie du meurtre de Louis duc d'Orléans, l'Evêque
de Paris et l'Inquisiteur de la Foi, condamnèrent
sans doute au feu cette apologie et la firent brûler,
par sentence dont le concile de Constance semble
avoir désigné l'exécution par le mot arsin. .< Nous
« prononçons et déclairons les procès, sentences et
« condemnations , arsins , deffenses , exécutions
« faites par l'Evesque de Paris contre Maistre Jean
« Petit.... estre de nulle valeur ; elles annulions
« et cassons. » (Monslrelet, Vol. 1, chapitre cliv,
fol 234. — J. Le Fèvrede S'-Remy, llist. de
Charles VI, p. 101 )
Le fanatisme avoit tellement familiarisé nos
ancêtres avec les horreurs des Croisades contre les
Hérétiques, qu'il leur paroissoit tout naturel de
réunir à l'idée de croisade celle de arsin.
Vint de l'apostole Grigore
Grans pardons et coumans de crois,
Dont la gent furent en effrois...
Ardoir en list assés en oire (1)
Droit à la Carité sur Loire...
Entre cest crois et cest arsin
Si avint erant joie sans fin.
Ph. MouEkes, MS. p. 785, 786 et 790.
Dans ces vers et les deux citations précédentes,
on particularisoit l'acception à'arsin, qui signifioit
en général brûlement, action de mettre le feu, de
brûîer, d'incendier. » Les pillages et rençons
« qu'ilz prindrent, les ravissemens et arsins qn'iiz
» firent, etc. » iHistoire de B. du Guesclin, par
Ménard, p. 396.) « Nul ne soit reçu à gane ipie
« pour trois cas; c'est assavoir pour meurtre, pour
.. rapt et pour «?'sen de maison. » (Savaron, Traité
contre les duels, p. 37.) Peut-être faut-il lire arson
pour arsen? (Voy. Arsion.)
VARIANTES :
ARSIN. Du Gange, Gloss. lat. T. I, col. 735.
Arsen. Savaron, Traité contre les Duels, p. 37.
Arsion, subst. fém. Effet de l'ardeur du feu;
brûlure, incendie, embrasement. Brûlement, action
de mettre le feu, de brûler, d'incendier.
Dans le premier sens, qui est le sens propre, on
a dit, en parlant du Buisson ardent, qu'il ardoitsans
arsion. (Dits et Moralités, ms. de Gaignat, fol. 298.)
En parlant de Clercs que Dieu sauva miraculeu-
sement des effets de l'ardeur du feu, qu'il garantit
d'être brûlés :
Ne daigna lors cors oublier ;
As Clers rendi lor guerredon,
Et lor rjari de l'arson.
Tout remesent bel et entier ;
Ains li flamme n'i pot touchier.
Vie de S" Kalcrine, MS. de Sorb. chiff. LX, col. 30.
On s'est figuré les Diables occupés en Enfer à
faire éprouver successivement aux damnés « les
« effets du feu et ceux de la glace, la froidure et
« Varsion. » (Voy. Fabl. ms. du R. n" 7218, fol. 222.)
Après la grant arson, si èrent plus frilous.
Rora. de Tiebaul de MaiUy, MS. de N. D. n- E. 6, fol Hl.
Il semble qn arsion ou arson signifioit les efTets
de l'ardeur du feu, tels que l'incendie, l'embrase-
ment, lorsqu'on disoit faire arson, véer arson , etc.
Dans les principes abusifs du système féodal, les
Seigneurs étant légitimement en guerre les uns
contre les autres, pouvoient se faire un jeu réci-
proque des embrasemens, des incendies, des
arsons. C'étoit un privilège de Gentilhomme, d en
être quitte pour une amende. « Tout soit-il ainssint
« nue li Gentilhoumes par nostre Couslume puis-
« sent guerroier l'un l'autre, hors de trieve,
« horsde asseurement; pourche ne pueent ilpas...
« ardoir li uns seur l'autre;.... et se il ardent liuns
« seur l'autre, il meffont aux Seigneurs de qui les
« choses sont tenues ; par quoi ils sont tenus a res-
« torer les damages au Souverain et a li
« amander de l'amande de soixante livres. Mes
« arson fere.... hors de tans de guerre, empoite
« ulus grant peine ; car li cors en dessert à estre
« justiciez. » (Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis,
chap. xxxui, p. 173.)
Maisons et Villes fist ardoir :
Le feu en pout le Roi veoir.
Puis fist à Mante un ar.fon ;
La Ville mist tout en charbon.
Roman de Rou, MS. p. Mi.
Les arsons et les proies fist véer et lessier
Ibld. p. eo*
Peut-être trouvera-t-on qu'en ce dernier vers,
arson signifie brûlement, action de mettre le feu,
(1) C'est un dérivé de iter, comme erra: il les fit brûler grand'crre, belle erre. (N. k.)
AR
— 199
AR
de brûler, d'incendier, comme dans Britton. (Loix
d'Angleterre, fol. 16. — Voy. Arseire.)
VARIANTES :
ARSION. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 222.
Arçon. Rom. d'Alexandre, MS. du R. n» 6987, fol. -198.
Arson. S'. -Bernard, Serra. Fr. MSS. p. 109.
Arsoun. Britton des Loix d'Angleterre, fol. 16, V»
Ai'sls, subs masc. Chose brûlée, embrasée,
incendiée. Brûlé, odeur de brûlé.
On a lemarqué, à la fin de la conjugaison du
verbe arder, plusieurs temps et modes qui semblent
attester l'existence de l'ancien verbe arsir, formé
comme arser, du participe ars, en latin arsus. (Voy.
Arser el Arder.) Peut-être jugera-t-on cette exis-
tence suflisammenl prouvée par celle d'arsis, que
l'on croit être le participe ù'arsir, qui, dans la Cou-
tume de Saint-Palais signifie, comme substantif,
la même chose qu'arsiiis dans quelques autres
Coutumes, des bois brûlés? (Voy. La Thaumassière
Coût. loc. de Berry et de Lorris, p. 113 et 117.) Il
seroit possible qu'arsins, au moins en ce sens, ne
différât d'flrsîs que par le changement de la voyelle
simple en voyelle nasale; changement qui étoit
très-ordinaire dans l'ancienne prononciation. (Vov
Arsin.) ^ •''
L'acception d'arsins,hois brûlés, étoit une accep-
tion particulière d'arsis, qui signilioit en général
choses brûlées, embrasées, ince'ndiées. Guillaume-
le-Conquerant ayant réduit en cendres la ville de
Mantes, éprouva, en la traversant à cheval, un acci-
dent qui causa sa mort.
Parmy la ville trespassout
Sour un cheval qui moult amout
En un ai-Sir mist ses deu.x piez, etc.
Rom. doRou, MS. p. 384et385.
Raportent gons et verteveles ,
Verrouz et clous, et tiex bereles
Qu'il orent trouvez en la cendre
Des arsiz, et les veulent vendre.
G. Guiar!, MS. fol. 335, R'.
Anciennement, la signification d'arm étoit la
même que celle du participe brûlé, pris substanti-
vement dans l'expression usitée sentir le brûlé
lorsqu en ce sens on disoil, flairer l'arsiz. '
Es nés des flamens plus prochaines
Où de gent ot ensemble tant,
Les vont embrasées gelant,
Si que le plus d'eus rni-si: ilairent.
G. Guiart, MS. fol. 316, V-.
On dit à Beaune, que le vin seul Varsi, quand il
a un certain goût brûlé. (Ménage, Dict. Etym.)
VARIANTES :
ARSIS. Du Cange, Gloss. lat. T. I, col 735
Arseiz. La Thaumassière, Coût. loc. de Berrv d 113
Arsiz. G. Guiart, MS. fol. 81, R» , et 301 V
Arssiz. Id. ibid. fol. 81, R». ' '
Xn,subst. masc. et fém. Culture de l'esprit pro-
duit de cette culture; Logique, Rhétorique, etc
Moyen d opérer de faire valoir les choses en opé-
rand esprit ou de corps , habileté, adresse, finesse
subtilité, artilice Produit de la culture des talens
il paroitroit assez naturel que le nom de la
dans celles du ^ord Airtha, Aerd, Earth, eûtdésigné
a culture à laquelle celte mère nourricière de tous
les -Etres doit sa fécondité. Ainsi le mol art, ars
en latin, signifieroit culture de la terre, le premier
des arts; art sans lequel tous les hommes, esclaves
de la nécessite de pourvoir à leurs premiers besoins
en travaillant de corps, auroient vécu toujours
courbes vers la terre, sans possibilité de s'élever
en travaillant d esprit, ù la sphère du Génie créa-
teur des a;-/s libéraux, des bons arts, des arts par
On a dit, en parlant de Clodion, roi des Francs
qu II mil prcudom el sages des ars; en parlant du
philosophe Cahstbène, qu'il étoit hommi de lès
bons ars (Voy. Ph.Mouskes, ms. p. lo. - Triomphe
desneuf preux, p. 191.) ■lumpiid
J'estois assis au milieu des Neuf Sœurs •
Si commença à chanter l'une d'elles- ' "
Assemblez-vous, dit elle, 6 Professeurs
Des bonnes Arts et des Sciences belles.
Poès. de M. de S'-Gelais, p. 77.
Ces bons arts, ou bonnes arts comme l'on disoit
eu égard au genre de ce mol dans la langue latine
éloient sans doute \esArts libéraux, ains'i nommés'
dit un de nos anciens Poètes, .. pour ce que ancien-
« nemen nul, se il nestoit libéral, c'est ù dire fils
« de noble homme et aslrail de noble lignie, n'osoit
« aprandre aucun d'iceulx ars. » (Vov. Eust
Desch. poes. mss. p. 391.) ^
■ ,t>uoique la culture de l'esprit ait réellement été
inlerdile ii 1 Homme que le despotisme féodal asser-
vissoit a la culture de la terre, il semble plus vrai
de dire qu en général les Arts libéraux sont les
Arts utiles et agréables, dont la profession, quel-
quefois lucrative sans être servile, rend libre
liomme ne pauvre et roturier qui s'en occupe, et
I associe à la liberté honorable de l'Homme né noble
ou riche qui s en amuse.
En honorant la culture de l'esprit d'une liberté
SI propre à consoler du défaut de fortune et de
naissance, la Société n'admet à cet honneur que les
Arts pour lesquels elle se passionne, par le senti-
ment de plaisirs ou de besoins dont la salisfaction
ou la jouissance, est le produit de la culture de
1 esprit inventeur de ces mêmes Arts.
Les besoins et les plaisirs pour la jouissance et
la sutislaction desquels l'esprit invente et travaille
e aiU aussi variés dans les Sociétés que les causes
physiques, politiques el morales qui en modifient
le seiilimenl, el chaque société se passionnant na-
turellement, d'après cette modification, pour les
Arts qu elle sent lui être plus agréables et plus
utiles, on conçoit qu'à raison des causes qui diffé-
rencient ce sentiment ou cette passion, les Arts li-
béraux aient été différens pour chaque Société ■ que
1 une a pu honorer comme libéral, un art que l'au-
tre dédaignoit comme servile. On sait de plus que
chaque Société, aussi variable dans sa passion
pour certains or/s que les causes mêmes de cette
passion, a souvent transporté des uns aux autres
les qualifications d'Arts serviles et d'.i/'/s libéraux,
ennoblissant ceux qu'elle avoil avilis et avilissant
ceux qu elle avoit anoblis.
AR
— 200
AR
C'est ainsi, par exemple, que rEriulition, aussi
estimée dans le xvr siècle qu'elle l'est peu dans
le xviii' où l'ulililé eu est moins sentie, évite ù
peine l'espèce de mépris auquel l'expose une pas-
sion p. es{|ue exclusive pour la Philosophie, dont
les llcau.i'-arls^dn \\i\' siècle ont accéléi'é le règne
préparé par l'Érudition même. C'est ainsi que la
Noblesse, éclairée par celte même Philosophie sur
les avantages de la culture de l'esprit, se montre
jalouse dcVartager des travaux qui, dans les siècles
d'une ignorance dont elle s'est longtemps enor-
gueillie, lui ; aroissoient une mu&anUe, un amuse-
ment frivole et indigne d'un Cenlilhomme, dévoué
par sa naissance aux travaux militaires, aux tour-
nois, aux duels, à Y Art militante. On pourroit
croire que l'expression Art militante signifie Y Art
militaire, aussi essentiel à la défense des Sociétés,
que l'Agriculture, le premier des arts, l'est à leur
subsistance, si l'on n'étoit averti que le fanatisme
du point d'honneur en a abusé pour signifier les
duels, les gages de bataille, qui ont trop souvent
privé la Patrie de ses plus braves défenseurs.
« Moult de notables hommes se cognoissans en
« Yart militante s'esmerveilloient que leurs
« devant-passez n'avoient plus escrit de tout ce
« qu'il appartient à faire, louchant ce pesant fait
a de gage de bataille. » (llardouyn de la Jaille, du
Champ de bataille, fol. 57.)
On flatloit l'orgueilleuse ignorance des Nobles,
en nommant Musards ces hommes qui, exclus de
l'honneur de servir la Patrie en exposant leurs
corps pour sa défense, la servoient peut-être aussi
utilement en cultivant leur esprit, en s'adonnant
aux Arts et Sciences par lesquelles Euslache Des-
champs, poète du xiv siècle, disoit le Monde gou-
verné. Ces Arts et Sciences, qu'il nomme Arts
libéraux, étoient la Grammaire, la Logique, la
Rhétorique, la Géométrie, l'Arithmétique, la Musi-
que et l'Astronomie. (Voy. Eust. Desch. Poës. mss.
p. 394.)
Il semble que, non moins sensibles à l'utilité de
la Médecine qu'à celle de l'Arithmétique ou de la
Grammaire, nos Ancêtres auroient dû l'admettre
au nombre des Arts libéranx, comme elle paroit
admise à celui des Arts spéculatifs, des Arts de
théorie, dans une Ordonnance del3G0, parlaquelle
le roi Jean octroyoil aux Juifs « que ils pussent
« faire et exercer leurs mestiers, leur fait, cour-
« rateries et autres euvres ; ou Ars spéculatives,
« pratiques, méchaniques, ou autres. » (Voy. Ord.
T. lll, p. 'i7G.) L'Editeur observe dans une Note,
qu'entre autres Arts spéculatifs exercés par les
Juifs, la Médecine étoit leur science favorite ; science
que probablement on a jugée trop conjecturale
§our mériter le nom û'Art. On s'occupa .sans doute
u moyen d'en prévenir l'abus, en obligeant les
Juifs qui vouloient exercer la profession de Méde-
cin, à pi'endre leurs degrés dans les Universités.
Quelle que soit une science, pratique ou spé-
culative, quel que noble qu'en soit l'objet, on a pu
la désigner par le mot Art, comme étant le produit
de la culture de l'esprit. Aussi voyons-nous que les
hautes Sciences, telles que l'Astronomie, la Géomé-
trie et l'Algèbre, qui font partie des Mathématiques,
ont été compiises sous la dénomination générale
d'Arts lihéi'au.v, ayec]([ Logique, la Rhétorique et
la GraiiiHiairc, qui dans les Ecoles ont été et sont
encore les Arts par excellence.
On sait que les Mathématiques sont la science,
non-seulement des quantités, mais aussi des pro-
portions. Le sentiment des avantages qui résultent
de cette Science des proportions,' pour l'utilité et
l'agrément des Sociétés, est une passion à laquelle
la Musique, la Peinture, la Sculpture, l'Architecture
civile et militaire, la Marine, et autres Arts à la
perfection desiiuels les Mathématiques sont essen-
tiellement nécessaires, doivent la qualification
d'.tr/s libéraux, quoiqu'ils soient lucratifs et en
partie mécani(iues; quoiqu'ils soient Ars prof fi ta-
bles, comme on lit dans Rob. Estienne et Nicot,
Dict.
En se conformant à la distinction usitée des
Arts et Sciences, on dira que la Théorie caractérise
les Sciences, lors môme que le Savant fait succéder
la Pratique, comme la Pratique caractérise les Arts,
lors même que l'Artiste fait précéder la Théorie.
Qu'un Art soit agréable et utile, que l'utilité et
l'agrément de ce même Art soient sentis, il ne sera
néanmoins Art libéral, qu'autant que la Théorie en
anoblira la Pi'atique, de façon à exciter et justifier
la passion de la Société aux yeux de laquelle il
paroîtra moins un ouvrage servile de la main,
que le produit libre delà culture de l'esprit. C'est
sans doute faute d'être assez affectés de la théorie
qui préside aux Mécaniques, à une science qui,
comme partie des Mathématiques, est aussi le pro-
duit de la culture de l'esprit; c'est faute de n'en
voir que la pratiiiue, communément abandonnée à
des hommes de qui l'intelligence se borne aux
seuls ouvrages de la main et du corps, que nous
avons dit Arts méchaniques, par opposition aux
Arls libéranx; assimilant ainsi les Arts que Robert
Estienne et Nicot ont défini. Arts qui se font
d'esprit et de la main, à des Arts serviles, tels
qu'étoient probablement ceux qu'anciennement on
nommoit Arts des mains.
Ces.4?7s,que le préjugé avilit et dédaigne comme
servîtes, ont sur les Arts libéraux l'avantage réel
d'être plus universellement et plus constamment
utiles et nécessaires; par conséquent celui d'assu-
rer, en tout temps et en tous lieux, à Y Artisan qui
travaille pour les besoins essentiels de la Société,
une subsistance au soin de laquelle YArtiste et
même le Savant font quelquefoisîe sacrifice de leur
liberté. C'est pour obvier h la nécessité de ce sacri-
fice, que Rousseau, philosophe enthousiaste d'une
indépendance peut-être idéale, auroit souhaité
qu'en faisant apprendre un Métier, un Arides mains
aux enfans, ù ceux même qui nés riches peuvent
mourir pauvres, on leur procurât les moyens de
subsister, en n'obéissant qu'à la Nature qui nous
sollicite au travail par le désir de vivre.
AR
— 201 —
AR
L'idée de proposer l'apprentissage d'un Métier,
d'un Art des muins, comme le moyen le plus propre
à nous tranquilliser sur la conservation de notre
liberté, n'est pourtant pas une de ces idées singu-
lières qui n'appartiennent qu'à notre Philosophe
moderne; elle lui est commune avec un ancien
Poëte moral qui a dit :
.... Eureux est qui aprent, dés s'enfance,
A servir Dieu, et aucun Art des mai7is
Pour soi chevir et vivre à sa plaisance.
Eust. Desch. Poés, MSS. p. 261, col. 1.
L'art, comme produit de ia culture de l'esprit,
est le moyen d'en étendre les l'acultés naturelles et
de les perfectionner, moyen général qu'on parti-
cularise en le nommant Logique, Rhétorique, etc.
On a désigné l'abus de ces mêmes Arts, de ces
moyens particuliers d'ajouter à la Nature, lorsqu'en
se plaignant de ce que trop souvent on lui préfère
l'Art, on a dit: « A'ous eschivons tous à elle ; nous
« la laissons dormir et chommer, aimans mieux
« mandier ailleurs nostre apprentissage, recourir à
" l'eslude et à r.4?'^ que de nous contenler de ce
« qui croist chés nous... Nous fermons en plein
« midy les fenesires et allumons les chandelles.
■' Geste... folie vient d'une autre qui est que nous
« n'estimons point les choses selon leur vraye et
« essentielle valeur, mais selon la monstre, la
« parade, et le bruict. » (Sagesse de Charron,
p. 252 et 253.)
Dans l'éloge que le même Auteur fait de Socrate
et d'Arislote, l'opposition de VArt à la Nature
marque la différence de leur façon de philosopher :
« Un grand maistre et admirable docteur en la ^a-
« ture a esté Socrates, comme en VArt et Science
« Aristole. Socrates par les plus simples et naturels
« propos, par similitudes et inductions vulgai-
>' res, fournit des préceptes et règles de bien
« vivre que tout Vart et science ne syauroit
« inventer. » (Sagesse de Charron, p. 252.)
11 est évident que ÏArt ainsi opposé à la Nature,
signifie en général culture de l'espril, produit de la
culture de l'esprit, moyen qui en facilite les opé-
rations naturelles el les dirige, tel que la Logique,
la Hhétorique, etc. Si la Logique a souvent offusqué
la raison naturelle qu'elle devoit éclairer, la Rhéto-
rique l'a souvent trompée en lui faisant illusion.
Aussi Montaigne a-t-il dit d'un Rhétoricien qui
avouoil que « son mestier estoit de choses petites
« les faire paroistre et trouver grandes: On luy
« eust fait donner le fouet à Sparte, de faire profes-
1 sion d'un Art piperesse et mensongère. » (Essais
de Montaigne, T. l, p. 517.)
Quel que soit un Art libéral ou servile, quelle
qu'en soit la dénomination, l'on peut dire qu'il
est un moyen de faire servir la Nature aux besoins
et aux plaisirs de l'homme; un moyen de faire
valoir et d'améliorer les talens naturels du corps
et de l'esprit en les cultivant; comme le premier
des Arts, la culture de la terre est le moyen d'en
rendre les productions naturelles, meilleures et
plus fécondes.
L'habileté, l'adresse, la finesse, la subtilité, sont
autant de moyens par lesquels on opère conformé-
ment à ses idées, à ses vues. En regardant ces
moyens d'opérer, et autres qui s'acquièrent par la
culture des talens naturels de l'esprit et du corps,
comme le produit de celte même culture, on les a
désignés tous en général par le nom d'Art, et l'on
a dit d'uD homme habile, adroit à faire une chose,
qu'il « avoit main eiai't à la faire. " (Voy. Poës. de
Crétin, p. G'i.)
Pour signifier que l'habileté, la souplesse, le
savoir-faire, sont les moyens de tirer parti de la
Société, on a dit proverbialement: « F^'homme qui
« a de l'ylr^ possède sa part. « (Cotgrave, Dict.)
Ces moyens, lorsqu'ils servoient à tromper et
à faire des dupes, lorsqu'ils nuisoient à la Société,
étoient de fins Arts, comme on lit dans les Marg.
de la Marguerite, (fol. H5, V°.) Ils étoient de maies
Arts, de ''mauvais Arts, ou tout simplement des
Arts dont on désigne aujourd'hui l'abus, en les
nommant artifices. « Li très-voisols serpenz
« les ockesons de péchiet apparaillel; par mil
« Arz por grever ne finel de tempteir. » (S' Bern.
Serm. fr. mss. p. 330.) « Tous ceux à qui les Arts
« de l'un n'estoient encore bien ogneuz, eussent
« imputé le retardement de la S" expédition à
« l'aulre. » (Du Bellay, Mém. liv. ix, fol. 287.)
« Tant estoit.... plain de mauvais Ar t,i\ueoncques
« en Gannelon n'en eust autant. » (Ger. de Nevers,
part. I, p. 7.)
Quant le vit venir, li VieiUars
Qui plein estoit de maies Aris ; etc.
Fabl. MS. de S' Germ. fol. 7, V col. 3.
La famé tient bien l'orne pour fol et pour m\isart...
Tant corn a que donner, le lobe par son Art ;
Et quant n'a que donner, cel conmande à la hart.
Fabl. MS, du T.. n" 7C15, fol. 140, R* col. i.
On croit avoir suffisamment prouvé qu'un Art,
quel qu'il soit, est le produit de la culture des
talens naturels de l'esprit et du corps ; que ce
produit est un moyen d'opérer d'une façon plus ou
moins conforme a la Nature; (}u'enfin les accep-
tions particulières du nom Art, sont toutes relatives
à l'idée générale de moyen. En effet VArt, dans le
sens do Grammaire, de Logique, est le moyen de
perfectionner la faculté naturelle de parler, de
raisonner, comme il est un moyen de tromper,
dans le sens d'artifice, finesse; un moyen de pré-
voir, de se conduire avec prévoyance, dans l'ex-
pression se conduire par art d'avis. « Je leur iray
« au devant à puissance que je m'y conduise par art
« d'avis et de très-bonne ordonnance, pour eux
« combattre. » (Froissart, Vol. IV, p. 230.)
Enfin, les moyens de subsister étant assez géné-
ralement le produit des talents cultivés, il est
possible que par cette raison l'on ait dit qu'un
homme est d'un Art, pour signifier qu'il cultive un
talent, qu'il subsiste au moyen du talent qu'il
cultive. C'est par allusion aux effets de cette
jalousie trop naturelle aux rivaux dans les yl ris,
dans la culture des mêmes talens, qu'on a dit pro-
verbialement. « L'Art est moqué de l'Art. » (Voy,
Nuits de Straparole, T. II, p. 441.)
26
AR
- 202 —
AR
VARIANTES :
ART. Orth. subsist. Rob. Est. Nicot et Monet, Dict.
Ars. (Plur.) l'h. Mouskes, MS. p. 10.
Arz. (Plur.) S'.-Bern. serni. Fr. MSS. p. 330.
Artelior, subst. 7nasc. Atelier. Dans un tilre latin
de l'an -IK'.n. artiliaria signitie atelier. (Voy. D.
Carpeiitier, Suppl. (Jloss. lat. de Du Gange, T. I,
col. 'Ml.) Celte signification (Varliliaria et l'ortho-
graplie aitelier (i), paraissent indiquer l'origine et
l'étymologie de notre mot atelier, qu'anciennement
on écrivôit « astelier, asteUier ; lieu où l'on s'oc-
« cupe de certains Arts ; lieu où l'on pose les outils
« et machines propres à ces mêmes Arts. » Il sem-
ble que ce soit relativement ii cette dernière accep-
tion, qu'en parlant de l'ancienne façon d'honorer le
passage de nos Rois dans les Villes de leur royaume,
on a dit qu'au lieu de tapisseï' les rues « on les
« paroitd'rt//d//ers bien garnis d'armes el d'espées.»
(Savaron, de l'Espée frànçoise, p. 16.) C'est dans
un sens relatif à la première, que l'on aura dit
tlguréuient : » Arislote el les autres Philosophes
« tiennentque le vray passage pour poster à la mort,
« est de s'exercer souvent à Varlcliei' de Venus. »
(Contes de Cholières, p. 114 ou 115.)
VARIANTES :
ARTELIER. Contes de Cholières, p. 114.
.ASTELIER. Rabelais, T. III, p. 2G4.
ASTELLiER. Colgrave, Dict.
Attelier. Savaron, de l'Espée Françoise, p. 22.
Attellier. Id. ibid. p. 10.
Hastellier. Gr. Cowt de France, livr. I, p. 58.
Hatelier. Cotgrave, Dict.
Arteus, adj. Qui opère avec art, adresse, habi-
leté, prudence, etc. Qui opère avec artiflce, ruse,
finesse, etc.
On n"étoit qu'adroit, habile, prudent, lorsqu'on
étoii arteus sans être blâmable.
MoiiU parest fiers et merveillox,
Pénible de guerre, et arlox.
Parlon. de Blois. MS. de S. Geim. fol. 161. V. col. 2.
sont preu et arlox.
Et Chevalier moult bon, et d'armes engignox.
Ibid. fol. 173, V col. 2.
Si l'on ëloit blâmable en opérant avec art, la
signification ù'arteus étoil la même que celle de
mal-arleus, artificieux, rusé, fin, etc.
Et Gondredos li vielz arlox.
Parlon. de Blois, MS. de S' Germ. fol. l.'iS, R° col. 2.
Cruiex, et fel, et mal-arleus.
IbiJ. fol. 154, R- col. 2.
Moult mal-artotis
Et de parler moult engignous,
Bien sçeot troubler une raison,
Et esmouvoir une tençon.
Rom. de Brul, .MS fol. 18, R' col. 2.
Enfin, dans un sens analogue à celui de l'adjectif
composé inal-arteus, on disoit d'un homme à qui
l'artilice étoit habituel, qu'il éloit Enurté de mal ou
Mal-cnarlé. (Fabl. ms. de S'-Cerm. fol. G et 7. —
Voy. Art.)
VARIANTES :
ARTEUS. Parton. de Blois, MS de S'.-Germ. fol. IS-i.
Artous. Rom. de Brut, MS. fol. 18, R° col. 2.
Artox. Parton. de Blois, MS. de S'.-Germ. fol. 153.
Artialiser, vfr/;^. Rendre artificiel. On voudroit
pouvoir encore dire avec Montaigne, qu'altérer la
Nature par l'Art, c'est Varlialiser, la rendre arti-
ficielle. « IvCS Sciences traillent les choses trop
« finement, d'une mode artificielle et différente de
" la commune et naturelle Sijestois du mes-
« lier, je naturaliserois l'Art autant comme ils
" artialiscnt la Nature. « (Essais de Montaigne,
T. III, p. 157. — Voy. Art.)
Article, subst. mase. et fém. Chose jointe à une
autre, point de croyance, article de foi. Moyen de
fait ou de droit. Chose distincte d'une autre, point
distinclif. Terme de Grammaire.
Eu termes d'Anatomie,. la signification d'article,
joinlure, en latin articulus, est aujourd'hui aussi
générale que l'éloit anciennement celle d'arteil,
altéré dans l'orthographe orteil. Il semble qu'en
celle signilicaliou le mol article ait été substitué à
celui û'hrteil, lorsque l'acceplion d'arteil a été res-
treinte à celle d'article, joinlure de doigt de pied.
(Voy. Artueil.)
Il est probable que d'après l'idée des articles,
des points où se joignent les unes aux autres diffé-
rentes parties d'un corps, comme parties intégrantes
d'un tout, on aura nommé figurément article, un
point de croyance en matière de Religion, une
vérité faisant partie de la totalité de celles'qu'il faut
croire, el que l'on désigne encore aujourd'hui
comme étant jointes les unes aux autres, en les
nommant Articles de foi.
Trés-doulx Dieu, com cy a Irèsdoulce vision,
Oii l'en voit face à face Dieu sans division !...
Sacreniens et Article seront là descouvert,
Qu'à nostre congnoissance n'y aura riens couvert.
i. de Meung, Cod. vers 1833-1846.
En rassemblant dans un Ecrit les moyens de fait
ou de droit qu'on a pour demander ou pour défen-
dre en justice civile ou criminelle, on en forme un
tout dont le molarlicle, (luelquefois féminin, signi-
fioil les parties jointes les unes aux autres, comme
il signifie encore les parties d'un mémoire, d'un
compte, d'un traité, ce qui fait partie d'une vérité,
d'un raisonnement, d'une proposition, etc. Dans le
style de notre ancienne procédure, « prendre
articles contre quelqu'un, » c'étoit saisir les moyens
de fait ou de droit par lesquels on avoit action
contre lui : donner par écrit ces mêmes moyens,
c'étoit faire articles. « Luy feut respondu qu'il se
'> conlentasl de raison Raison'? (dist Janotus)
" nous n'en usons poinct céans. Traistres malheu-
« reux, vous ne valez rien A ces mois priniireni
« articles contre luv. I.uy de l'aullre costé les feit
.. adjourner. » (Rabelais, T. I, p. 127 el 128.) « Les-
« dis Evesques, Doïen el Chapitre ont piéçà fait
(1) Atelier, encore écrit hastelier par Bernard Palissy, est un dérivé de haxtellœ (pour hastulœ, planchettes, dans Isidore
de Séville). L'a/e/ierest primitivement l'endroit où Ion fabrique les astelles, aujourd'hui attelles, lames de bois employées
pour réduire les fractures ; le sens s'est ensuite étendu, (n. e.)
AR
203 —
AR
« article, et, lesquelles ne furent oncqnes accordés :
« depuis... furent bailliez ù nostre dit procureur,
« pour faire nos raisons à rencontre. « (Ord. T. V,
Lorsque les Parlies appointées en faits contraires
ne s'accordoient point sur la rédaction de leurs
moyens réciproques, on disoit que leurs « articles
« éloient descordés. » Ils étoient accordés, si la
rédaction en éloit faite de 1 accord des Parlies, et de
manière ù ce que le Commissaire de la Cour pût
faire I Enquête ; autrement, il falloit plaider de nou-
veau et les faire réditïer par les Juges. « Souventes-
« fois est avenu et avient que quant les causes sont
« plaidoïées et apoiiitées en faiz contraires, il est
« avant un mois, ou deux ou plus, que les Advocaz
« et Procureurs baillent leurs articles descordez^ à
« la Court ; et après, autant de temps ou plus et
K communément jusques en la fin du Parlement,
« avant qu'il puissent èlve accordez-. » (0 d. T. IV,
i< p. 51'>. — Ibid. note (b). Voy. AiiTicn.ER.)
Les articles qui joi^^neul les unes aux autres dif-
férentes parties du corps, sont aussi les articles, les
points qui les dislingnciit. C'est relativement fi cette
deriiiè e idée que, se figurant un point dislinclif
entre deux cboses ditTérentes, entre la vie et la
mon, entre la raison et la déraison, l'on aura dit
qu'une chose distinguée d'une autre, étoit un autre
article ; qu'un homme sur le point de mourir, étoit
« à l'article de la mort, » qu'il agissoit « hors les
« articles de raison, « lorsqu'en agissant il s'éivar-
toil du point où la raison devoit le fixer. « Trop il
« avoit fait d'excès de chevaucher par nuict et par
« jour, et de travailler son corps et son chef en
• toutes peines, hors mesures et les articles de
« raison. » (Froissart, Vol. IV, p. 157.)
En termes de Grammaire, les articles sont des
particules ou, comme les a définis Du Marsais ,
« des adjectifs qui marquent le mouvement de
« l'esprit qui se tourne vers l'objet particulier de
« son idée. » (Voy. Principes de Gramm. p. 377.)
Les adjectifs de cette espèce ont été nommés arti-
cles, parce qu'ils distinguent avec plus ou moins
de précision les individus auxquels on donne un
nom appellatif; nom qui, sans rt/'^«c/c, les présen-
leroil indistinctement à l'esprit, comme faisant
masse avec tous les autres individus desquels il
exprime généralement la nature. Quelque néces-
saires que soient les articles pour la distinction et
la connoissance précise des objets individuels,
signifiés par un nom commun à d'autres qu'à ceux
qu'on a en vue, ils ont été souvent omis par nos
anciens Ecrivains. « Garde-toi de tomber en un vice
« commun, mesme aux plus excellons de nostre
« Langue : c'est l'omission des articles. » (Œuv. de
.loachim du Bellay, fol. 35.)
VARIANTES ;
ARTICLE. Orth. subs. - J. de Meun, Codic. vers 1845.
Article. Ord. T. II, p. 342.
Articulément, adv. Par articles. Dans un sens
relatif à l'acception figurée d'article, » moyen de
« fait ou de droit, proposer articulément une
« demande, c'étoit l'articuler, la déduire par arti-
« clés. » (Pasquier, Rech. liv. VIII, p, 749. — Voy.
Articuliérement.)
Articuler, verbe. Faire mouvoir une articu-
lation. Donner par écrit des moyens de fait ou de
droit. Citer par articles.
On désigiioit un mouvement d'articulation, en
disant « articuler des mâchoires, ■> dans le sens où
le peuple diroit jouer des mâchoires. « Ces dames
« commencèrent d'escrimer du verie et ^'articuler
» des mâchoires. » (Caquets de l'Accouchée, p. 198.)
Au figuré, - articuler une demande, " c'étoit
" bailler par articles et par écrit des moyens et
« conclusions, donner par écrit les moyens justif\-
» califs et concluans d'une demande. « (Voy. Lau-
rière, Gloss. du Dr. fr.) Bouteiller, jurisconsulte du
.\iv' siècle , étoit si persuadé « qu'articuler une
« demande par escrit étoit un des notables faicts
« patrociniens d'advocacerie, » qu'il semble avoir
été à ce sujet prodigue de leçons. (Voy. Articuleur.)
Il distingue « trois manières d'articuler une de-
« mande par escrit. » On V articulait par mi-moire,
lorsqu'en la demande et défense de.s Parties ouyes
en jugement, n'étant proposé faict contraire sur
lequel il fallût examiner témoins, tout ehéoit en
droit et en discrétion ilu Jui/e i\m àevoli iip/)oincter
les Parties à escrirc par manière de mémoire leurs
propos et conclusions. Si le Défendeur nioit les
faicts proposés par le Demandeur sans lui en oppo-
ser de contraires, le Juge devoit ordonner que la
demande fût articulée par intendit, que le Deman-
deur l'apportât articulée par majeur, mineur, et
par conclusion. Dans ce cas, nulresponsifde Partie
adverse ; mais audition des témoins produits par le
Demandeur, qui entendoit à prouver et mettre en
vérité les faits par lui articulés. On disoit qu'une
demande éloit articulée par faits contraires, lors-
qu'en leur demande et défense , les Parties propo-
soient ou alleguoient faicts positifs et contraires,
et les ojfroient à prouver \y:\T témoins. Le Deman-
deur oija^it fuit articles positifs, c'est-à-dire, ayant
articulé sa demande en majeur, mineur et conclu-
sion, le Défendeur procédoit nécessairement en la
même forme, observant de faire ses fins, articles et
conclusions contraires aux comlusions, articles et
fins du Demandeur. Cette procédure ;;rtr faits con-
traires, presque en tout semblable à la procédure
par mémoire, exigeoit le responsif, la réponse au
positif de Partie adverse. Le responsif, dit Bouteil-
ler, doit respondre à chacun article de Partie ad-
verse, cl iccux ilestruire et antiicliiller en tout,
soit par arr/umois de faicts, soit j)ar argunwns de
Coustume, soit par argumens de loij ; et ainsi pro-
céder jusques aux deux articles communément mis
en fin de tous articles. Par l'un de ces deux acticles,
on affirmoit que les choses proposées étoient vraijes,
claires et notoires, et que la Partie adverse les
avoit cogneues et confessées estre vrayes en tout
ou e« partie; par l'autre, on offrait à prouver les
faicts, en déniant les faicts de Partie advet-se rece-
vables. (Voy. Bouteiller, Som. rur. Tit. xxii, pages
AR
204
AR
112-121.) On désignoit probablement l'omission ou
l'addition du premier article, aftirmatif de Vaccord
des PUi ties sur la rédaction des articles de leur
demande et défense, en disant que les articles en
éloienl accordés ou descordés. (Voy. Article.)
Il semble fiu'«?/ù'«/e)' une Coutinne , c'étoit en
citer les articles. " Aucun.... ne doit estre receu à
« alléguer, poser, ou rtr/rci//^^?' aucunes Coustumes,
« autres que celles qui sont escrites et arrestées. »
(Coût, de Paris, au Coul. gén. T. I, p. 22.) D'ailleurs,
ce pouvoit être l'expression dequelque idée relative
à l'obligation de « se fonder d'aucune majeur de
« Droict ou de Coustume, ■> lorsqu'on articiiloit sa
demande, spécialement en la manière par faits
contraires. (Voy. Bouteiller. ubi supra, p. il3.)
Articuliérement, adv. Par articles. La signi-
fication A'arliculiérernent étoit analogue à celle
d'articulément, lorsqu'en parlant d'une informa-
tion, on la disoit faite articuliéretnent. (Voy. D.
Carpentier, Suppl. Gloss. lai. de Du Gange, au mot
Articulariter.)
Arliculeur, sh7;s/. masc. Rédacteur de deman-
des fondées sur moyens de droit ou de fait. Signi-
fication relative à celle « d'articuler une demande
<■ par escripl » ; ce qui étoit >< un des notables lïiicts
« patroniciens d'Advocacerie. ■> (Bouteiller.) « Sen-
« lenchiers,.... Articuleiirs, Notaires, Auditeurs, et
« Appariteurs desdites Courts. » (D. Carpentier,
Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, T. I, col. 316; tit.
de 1403. — Voy. Articuler.)
Artien, adj. et siibst. masc. Savant dans les
Arts de l'Ecole. Artiste.
C'est rel .tivement à l'idée particulière des Arts
enseignés et appris dans les Ecoles , qu'ancienne-
ment celui « qui vafjuoit à ces Arts dans les Univer-
« sites », qui les y apprenoit, ou qui les ayant appris
étoit re^îu à les y enseigner, se nommoit un Clerc
artien, ou tout simplement un Artien. (Voy. Rabe-
lais, ubi supra. — Cotgrave et Monet, Dicl.)
Chariot, tu as toutes les Lois ;
Tu es .luif et Crestiens ;
Tu es Chevaliers et Boigois,
Et quant tu veus, Clercs arciens.
FabL MS. du R. n- 7218, foL 323, R* coL 2.
Hé ! Arcien,
Decrestristre, Fisicien,
Et vos la gent Justinien, etc.
FabL JIS. du. R. n- 76t5, foL 70, V col. 2.
11 semble qu'en ces vers, Artien ou Clerc artien,
signifie Maitre-ès-Arts. On restreignoit néanmoins
la signification â'Artien à celle de Professeur de
logique et de philosophie, d'Etudiant en philoso-
phie, de Logicien, lorsqu'en distinguant YArtien du
Clerc grammatical, du Grammairien, on disoit:
« Clercs grammaticaulx valent bien un Artien. »
(Fabri, Art. de Rhétorique, liv. II, fol. 40.) « Seront
■< 20 escoliers enfent en Gramaire, et 30 en Logi-
'■ que et en Philosophie, et 20 en Théologie ou "en
« Divinité. Si aura chascun Gramarien par semaine
« de sept jours un s. par. Li Artlien vi s. par. et li
« Théologien tin s. par. » (D. Carpentier, Suppl.
Gloss. lat. de Du Gange, T. I,col. 314; tit. de 1304.)
Que la signification d'Artien ait été la même que
celle d'Artiste, on n'en a pour garant que le Dic-
tionnaire do Colgrave. (Voy. Art.)
VARIANTES :
ARTIEN. Rabelais, T. II, p. 181.
Arcien. Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 323, R» col. 2.
Artiien. d. Carpentier, S. Gl. l. de Du Gange, T. I, col. 313
Artifice, subst. masc. Art, effet de l'Art, chose
artificielle. Art, profession d'un Art. Instrument
propre à un Art.
On a nommé artifice ce que l'Art humain f;!it
pour ajouter à la Nature, que tiop souvent on altère
en voulant la perfectionner. « Les vanités, folies,
« et desbauches qui sont au monde sont addi-
<' lions tiennes. Ce n'est pas de Nature, mais de ton
« propre artifice. » (Sagesse de Charron, p. 3IG.)
Ce que fait le même Art, ce qu'il opère d'utile ou
d'agréable, relativement aux besoins de la société,
s'est aussi nommé artifice. Dans un poëme de
Salluste du Barlas, les artifices sont les Arts inven-
tés pour les besoins de l'homme. (Voy. Goujet .
Biblioth. fr. T. XIII, p. 312.)
En disant ar///jcc à feu, on désignoit un effet de
l'Art, une composition artificielle de matières faciles
à s'enfiammer, comme quand nous disons artiftce[l),
feu d'artifice. « Luy fusl baillé certains artifices à
" feu. On lui faisoit entendre qu'ils brusleroient les
« pilliers, si on les y altachoit. » (Comment, de
Montluc, T. I, p. 178. — Voy. Artificiel.)
Ouoii]u'on exprime encore aujourd'hui l'effet de
l'Art avec lequel une machine est composée , en
disant qu'elle est d'un artifice merveilleux, il sem-
ble qu'en parlant d'une statue, comme d'un chef-
d'iKuvre de l'Art, on ne diroit plus qu'elle est d'arti-
fice accompli. « On a trouvé aux ruines de Rome
" une slalne d'artifice lantaccomply qu'il est estimé
« divin. >' (Bouchel, Serées, liv. III, p. 110.)
Il est des femmes artificielles, des femmes dans
lesquelles tout ce qu'on idolâtre est non-seulement
artificiel mais dangereux, de qui l'on pourroil dire
avec un de nos anciens Poètes :
Ce sont ai-keficc et ydoles ;
Venin portent en lor fioles.
Dils et Moralilcs, MS. de Gaijnal, fol. 293, R" col. 3.
La profession qu'on fait d'un Art, est un moyen
de vivre, un Art que signifioil quelquefois le mot
artifice. (Voy. Art.) « Les Maistres de tous les ines-
» tiers et artifices qui sont et seront à Laon, etc. "
(Ord. T. II, p. 78.) « Font résistance a Lintlaer
« flamand, de poser le moulin servant à son arli-
« fiee, en la deuxième arche du Pont-neuf. » (Méni.
de Sully, T. VI, p. 447.)
Enfin, l'on a nommé artifices les instruinens faits
pour art, propres à un art. « Morceaulx de cuivre
« à fourme de gelions non signez, et autres ferre-
« mens et artifices à faire monnoye. » (D. Carpen-
(1) C'est au XVI» siècle seulement que le mot fut pris dans ce sens. (n. e.)
AR
— 205
AR
lier, Suppl. Gloss. lai. de Du Gange, T. 1, col. 310;
lit. de 1394.)
VARIANTES :
ARTIFICE. Orlli. subsist. - Ord. T. II, p. 78.
Arkefice. Dits et Moralités, iMS. de Gaignat, fol. 293.
Artificiel, adj. Qui se fait par art. Qui se fait
avec art, adresse ; avec finesse , artifice. Qui fait
une chose avec art, adresse; avec finesse, artifice.
La vicissitude des ténèbres et de la lumière qu'é-
prouve la Terre en faisant un tour sur son axe
dans l'espace de vingt-quatre heures, est l'effet
d'une loi de la Nature , d'après laquelle ce même
espace de temps a été nommé jour naturel. En
regardant comme opposée à la Nature la distinction
de la nuit comprise dans ce jour naturel, on a dit
que l'espace du temps oii la lumière du Soleil
éclaire l'horizon, étoit un jour artipciel. « Jour
« naturel.... emporte 24 heures, elle iour artificiel
« est appelé entre le poinct du jour et jour fail-
.. lant .. (Gr. Goul. de Vr. liv. 111, p. 310.) Celle dis-
tinction pareil néanmoins si conforme à la nature
des choses, qu'on aura cru avoir raison de s'écar-
ter des idées astronomiques sur le jour naturel ,
sur un joui qui réunit les ténèbres à la lumière, en
le nommant jour artificiel. » Il y ad jour soler et
>■ jour luner, solonc ceo que Dieu devisa clarté de
" ténèbres, et ceux deux jours fount un jour arti-
« ficiel que est fait del jour et de la nuyt suiante, et
« contient xxim houres. » (Britton, des Loix d'An-
gleterre, fol. 209, P.».)
On opposoil encore à l'idée de ce qui est naturel,
l'idée de ce qui est artificiel, de ce qui se fait par
art, en distinguant deux espèces de Musique, l'une
artificielle et l'autre naturelle « Musique natu-
« relie.... est une Musique de bouche en proférant
« paroules mélrifiées;.... et jà soit que les faiseurs
« d'icelles ne saichent pas communément la Musi-
« que arti [ici elle, ne donner chant par art de notes
« à ce qu'ilz font, toutes voies est appellée musique
« ceste Science naturelle. » (Eusl. Desch. Poës.
Mss. p. 395, col. 2.)
Quoiqu'af///jCî<'/ signifie en général ce qui se fait
par art, on ne diroil plus feu artificiel , pour arti-
fice, composition artificielle de matières faciles à
s'enflammer. « Attacha ses feux artificiels aux pil-
« liers. » (Comment, de Mouline, T. I, p. 178.)
Dans un sens relatif ii celui d'art, adresse, finesse,
artifice, on diroil encore moins que ce qui se fait
avec art, avec artifice , est artificiel. (Voy. Rob.
Estienne, Nicotet Monet, Dict.)
En ce sens, il désignoit même celui qui faisoit
une chose avec art, avec adresse ; avec finesse, avec
artifice. (Monet, Dict. — Voy. Artifice et Art.)
VARIANTES :
ARTIFICIEL. Orth. subsist. - Nicot et Monet, Dict.
Ertifficiel. Du Bellay, Mém. T. VI. p. 303.
Artificiellement, adv. Artistement, adroite-
ment; finement, arlificieusement. Significations re-
latives à celles de fadjeclif artificiel, qui se fait avec
art, avec adresse, qui se fait avec finesse, avec arti-
fice ; mais différentes de celle qui est encore usitée,
lorsqu'en parlant d'une chose artificielle, d'une
chose qui se fait par art, on dit qu'elle se fait arti-
ficiellement. (Contredilz de Songecreux, ubi suprà.
— Rob. Estienne et Monet, Dict. — Voy. Artificiki,.)
VARIANTES :
ARTIFICIELLEMENT. Orth. sub. - Rob. Estienne, Dict.
Artifficialement. Coutreditz de Songecreux, fol. 80, R».
Artificielemant. Monet, Dict.
Artificieres, suhst. masc. Celui qui fait profes-
sion d'un art. En latin Artifex. « Les seaux nient
« encore parfitement entailliez loons jà alsi
« coin parfiz, lesqueiz nekedent encor esgardet li
« Artificieres, el si \eslimeL » (S" Grég. Dial. fr.
MSS. liv. IV, chap. XVII. — Voy. Artillier.)
Artiîier, verbe. Faire avec art ; faire avec arti-
fice. (Voy. Art. — Voy. Cotgrave, Dict.)
Que vault piper, flaler en trahison,
Quester, mentir, affermer sans fiance,
Forcer, tromper, unifier poison !
Œuv. d'Al. Charlier. p. lit .
Artifior, subsl. masc. Celui qui fait profession
d'un art, qui travaille d'un art. En latin Artifex.
« La Glise del bienaurous Laurool lo martre, des
« Lombards fusl arse, laquelle li Ilom Deu covoi-
« lant resloreir, plusors Artefiors et pluisors minis-
« trans ouvriers i ajostat. » (S' Grég. Dialog. fr. mss.
liv. III, chap. xxxvii. — Voy. Artificieres.)
variantes :
ARTIFIOR. S' Bernard, Serm. fr. MSS. p. 134.
Artefior. S' Grég. Dialog. fr. MSS. liv. m, chap. xxxvii.
Artige(l), subst. /'rm. Montagne, colline nouvel-
lement cultivée. On lit artigé pour artige, dans la
Somme rurale de Bouleiller ; ce qui aura fait croire
à Baibasan (\\x'arligé éloit le participe d'un verbe
françois artiger, de même signification que le latin
arligare. C'est visiblement une méprise occasion-
née par l'accent, qui lui aura fait méconnoitre dans
artigé le substantif artige, le même qu'artigie,
comme on lit dans la Noie marginale de l'Editeur,
qui ne l'auroit pas expliqué par artifice, s'il etrt su
que dans la basse latinité artigia ou arliga signi-
fioil montagne, colline nouvellement cultivée.
« Novalles sont les places et les lieux qui ancien-
« nement n'ont esté par couslume labourez ne
« cultivez, parquoy semence ou usufruiclpeulvenir
« dont disuie peut eslre payée ne deue, si comme
« des anciens bois et places, en bois où il vient
» bois el croisl, sans ce qu'ils ayent esté à cepour-
« plainte ; en artigé, ou si comme en terre et place
« qui onques n'auroit esté labourée, el on le met-
« troit de nouvel à ahan et à semence. » (Bouleil-
ler, Som. lur. liv. II, til. x, p. 749. — Voy. Du
Cange, Gloss. lat. au mol Artiga. — D. Carpentier,
Suppl. Gloss. lai. de Du Cange, aux mots Artigia,
Arliga et Artigare.)
(1) Le mot existe encore comme nom de lieu: L'Ardre (Haute- Vienne), en latin Arliijia. D'autre part, Artegiœ (690) a
donné Arlhies (Seine -et-Oise). (n. e.)
AR
20G —
AR
VAlilANTES :
ARTIGE. nontfiiller, Sonim. nir. liv. ii, tit. x, p. 749.
AnTiaiE. Iii. ibid. Note marginale de l'Editeur.
Artiilece, suhst. fém. Art, Science. Science
acquise par arl. (Voy. Art.)
Selonc sa gentiUece,
Qu'il ait vigor et artiilece
De vivre au siècle honestement.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 244. R- col. 2.
Artiller, verbe. Munir d'arlillerie. Equiper.
Parer avec art. Opérer avec arlince. (Voy. Art el
Artilleux.)
Dans le premier sens, artiller une ville, un châ-
teau, c'étoit les munir d'arlillerie, de machines que
l'art avoit inventées, pour les mettre en état de
défense. (Voy. Artillerie ) « La ville est bien a»'«i//e<?
« et bien garnie de vivres. >• (Le .louvencel, ms.
p. 162.) « Elle estoit murée, fossoyée, tourée, et
« artillée mieux qu'aucune autre ville. » (Jaligny,
Hist. de Charles VIll, p. 38.) « La ville et lechasteau
« estoient merveilleusement bien arlillez. » (Mém.
de Rob. de la Marck, m.-;, p. 426.)
Près de la Marche, sor la mer,
Avoit fet un chastel former.
Qui moult estoit bien batilliez,
Si fors et si artilliez
Qu'il ne cremoit ne Roy ne Conte.
Fabl. MS. du R. n' 1218. fol. 1, R- col. 1.
On disoit d'un Homme d'armes, équipé de ce que
l'Art mettoit en usage pour l'attaque et la défense,
qu'il éloit arlillé(l). « Fut conclud....degaingner le
« pas, et y faire une très forte bastille, et y
« laisser ung bon nombre de genz bien artillez-. »
(Le Jouvencel, ms. p. 511.) « Le Roy... trouva.... les
« gens d'armes qui estoient malades , à pié et
« désarmez.... « Si les habilla, remonta, arma, et
u artilla le Roy au mieulx qu'il peut le faire. »
(Al. Chartier, Hist. de Charles VI et Charles VIT,
page 112.)
Si les monta et ardtla
Le feu Roy, selon son désir ;
Et grandement les rabilla.
VigiL de Charles vu, part. I, p. 103.
Plus anciennement, on avoit dit d'une femme qui
s'équipoit de ce que l'art mettoit en usage pour
sa parure, qui se pareil avec art, qu'elle s'artilloit.
Les Dames es cambres s'artillent,
De si loing comme venir voient
Le Chevalier qu'il connissoient.
Rora. d'Erec, MS. du R. n" 6987, fol. 282, R- coL 4.
Enfin artiller, dans le sens d'opérer avec artifice,
signifioil l'abus de l'art, de la culture et de l'exer-
cice des talens de l'esprit.
Mult s'estudia d'artilhier
Por qu'en le feist essilhier.
Les IV Filles le Roy. MS. de Turin, fol. 39, R* col. i.
VARIANTES :
ARTILLER. Le Jouvencel, MS. p. 162.
Artilhier. Les IV Filles le Roi, MS. de Turin, fol. 39.
Artillier. Dits et Moralités, MS. de Gaignat, fol. 283.
Artillerie, sul)st. fém. Anciennes machines de
guerre ; anciennes armes offensives et défensives ;
armes de trait. Convoi d'ancienne arlillerie.
En nommant Artillerie les anciennes machines
de guerre, les anciennes armes offensives et défen-
sives, spécialemeul les armes de trait, on désignoit
l'art qui les avoit inventées, comme on désignoit le
génie qui avoit présidé à l'invention de ces mêmes
armes et machines, en les nommant engins, du
latin ingenium. On a mille preuves qu'avant l'usage
du canon, les machines propres à l'attaque et
défense des villes et châteaux, étoient toutes com-
prises sous le nom â'Artillerie. {Voy. Borel, Dict.)
Le commandement de cette ancienne arlillerie
appartenoit au Grand-maitre des Arbalétriers, qui
pouvoit, comme l'observe le P. Daniel, être appelle
Maître de V Artillerie dès le temps de ces anciens
règnes qui précédèrent l'invention du canon et des
autres armes à feu ; puisque dès lors on nommoit
Artillerie, toutes les machines de guerre dont on
usoit dans les sièges, soit pour la défensive, soit
pour l'olTensive, et tout ce qui y avoit rapport. (Voy.
Mil. Fr. T. I, p. 195.)
Quoique Artillerie paroisse avoir signifié spécia-
lement les armes de trait, il n'en est pas moins vrai
qu'au commencement du ynr siècle, artillerie étoit
un nom collectif non-seulement d'armes de Irait,
mais d'autres armes offensives el défensives, comme
lances, larges, etc. « Recueillirent.... bien la valeur
« de deux tonneaux pleins d'artillerie, espéciale-
« ment de sayetles qui furent tirées en la Ville. »
(Froissart. Vol. Il, p. 2'i8.) « Les Castillans vindrent
« sur eux; et commencèrent à lancer et jetter
« dardes, et tant que les Castillans eurent employé
« toute leur artillerie ; et ne savoyent mais de
« quoy lancer ne getter. « (Id. Vol. III, p. 107.)
(Voy. la citation suivante, oii les larges, les lances
font partie de ce qu'on nommoit Artillerie.)
On apprend de Guiarl, hislorien romancier, qu'à
la suite des Armées marchoit une Artillerie,
c'est-à-dire un convoi d'ancienne artillerie , au
moyen duquel ceux qui étoient sans armes pou-
voient s'équiper de lances, de larges, d'arbalètes,
de dards, elc.
Artillerie est le charroi,
Qui par Duc, par Conte, ou par Roi,
Ou par aucun Seigneur de terre,
Est chargié de quarriaus en guerre,
D'arbalestes, de dards, de lances,
Et de larges d'unes semblances.
De tiex bernois là prendre seulent
Li desgarni qui prendre en veulent.
G. Guiarl, MS. fol. 341. Rv
Cette définition de l'Artillerie ancienne prouve
évidemment que l'acception de ce mot s'étendoit
à d'autres armes offensives et défensives que les
armes de trait. L'usage de ces armes, spécialement
de l'arbalète et autres armes de trait, subsistoit
avec celui du canon et autres armes à feu qu'un art
non moins destructeur y a substituées, lorsque
pour distinguer la nouvelle Ar/i/to'/e de l'ancienne,
on la nommoit Ar////t'n'(' à poudre. « Les Gantois....
(l) .lu xviiF siècle, les marins ne disaient pas un vaisseau armé, mais un vaisseau artillé. (n. e.)
AR
— 207 -
AR
« yssirent de leur siège et vindrent en belle ordon-
« nance, moult bien garnis de pïcques ei û' art i Ile-
« rie à pouldrc. » (Monslrelcl, Vol. III, fol. -i'i.)
Tant que l'usage de l'une n"a pas exclus celui de
l'autre, Artillerie signifioit tout instrument de
trait, soit de feu ou autre. (Voy. Mcot, Dict.) Lors
de cette exclusion, vers la fin du xvi' siècle, le nom
d'Arfi/Zme fut restreint aux instrumens qui pour
opérer sont aidez de pouidre faite de charbon de
saulx et de soufre allumé par le feu. (Voy. Fauchet,
de la Mil. Fr. p. 1"21.) En termes de Marine, les
canons ou pièces de fonte de gros calibre, étoient
VArtilerie cardinale. (Voy. Cotgrave et Nicot, Dict.)
C'est par allusion au clou qui, enfoncé dans la
lumière d'un canon, en empêche l'usage, qu'on a dit
figurément : « Une once de douleur gastera une
« mer de plaisir : cela s'appelle l'artillerie en-
« clouée. » (Sagesse de Charron, p. 005.)
VARIANTES :
ARTILLERIE. Orth. subs. - Froissart. Vol. II, p. 248.
ARTEiLLERiE. D. Carpentier, S. Gl. 1. de D. C. T. I, col. 317.
Artilleux, adj. Qui se conduit avec art, avec
artifice. (Voy. Artuler.) Lorsque l'art dont on usoit
dans sa conduite eloit nécessaire, artilleux signi-
fioit qui se conduit avec art, avec adresse, avec
habileté, même avec ruse et finesse.
Touz rengiez cèle part alerent ;
MUE quant de près les esgarderent,
Il coniiureiil qii'o eus avoient
ïiex V tanz de genz qu'il n'estoient,
Serrez en lieu comme Anilleus.
G. Guiart, MS. fol. 302, Vv
S'est Telamonz, preuz, et Vaillanz,
Et artilleus, et conbatans.
AlliisMS. fol. 109, R'col. 1.
Si l'on abusoit de cet art pour tromper et nuire,
artilleux signifioit qui se conduit avec art, avec
artifice, avec une adresse trompeuse et nuisible.
Ha ! feme, come es enginneuse,
Et decevans, et Arlilleuse.
Rom. d'Aniadas, MS. du R. n- 6987, fol. 329, V- col. 2.
Feme est si Artilleiise qe ne sai que je die ;
Quar feme par nature est plaine de boisdie.
Chastie-Musarl, MS. de S. Germ. fol. 105, V col. 3.
. . . C'est bien la manière de félon orgueilleux,
Que com plus le prions, plus se fait Artilleux^
Gcr. de Roussillon, MS. p. 113.
VARIANTES :
ARTILLEUX. Ger. de Roussillon, MS. p. 206.
Artileus. Modus et Racio, MS. fol. 238, R°.
Artilleus. G. Guiart, MS. fol. 302, V«.
Artilleuz. Athis, MS. fol. 109, R» col. I.
Artillos. Borel, Dict.
Artillier, subst. masc. Ouvrier qui travailloit à
l'ancienne el ùla nouvelle Artillerie. Anciennement
et longtemps avant l'invention du canon et autres
armes à feu, on nommoit « Artilleurs ou Artilliers
« les faiseurs d'arcs, fiesches, arbalestes el autres
« instruments de ject, • parce que, dit le Président
Fauchet, « il falloit avoir.... deVart pour faire et
« composer ces ouvrages subtils. » (Voy. Mil. Fr.
p. 121.) '< Quiconque.... vouldra estre Artilleur....
'< en la ville et banlieue de Paris; c'est assavoir,
« faiseur d'arcs, de fieches, d'arbalestes ; etc. »
(D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Cange, au
mot Artillator.) Lorsque les armes à feu "furent
inventées, tant qu'elles n'exclurent pas l'usage des
armes de trait, on confondit sous la même dénomi-
nation les Ouvriers en ancienne et nouvelle Artil-
lerie. Les anciens Artilleurs ou Artilliers, les
faiseurs d'arbalètes et autres armes de trait, firent
aussi tous artifices de feu. (Voy. Nicot, Dict.) « Le
« Maistre Artitler qui est celuy qui se mesle de
« faire des arbalestes, des traits et des fieches,....
« se mesloit aussi de faire des fusées. » (Brantôme,
Cap. Fr. T. IV, p. i'2. — Voy. Artillerie.) GesArtil-
liers ou Arlilleurs, comme faiseurs de fusées et
autres artifices de feu, étoient probablement alors
ce que .sont nos Arfificiers appartenant au Corps de
l'Artillerie. On particularise, aujourd'hui, la signi-
fication d'artificier, autant qu'on a généralisé celle
d'Artificier es. (Voy. Artificieres.)
Il paroit que VArlillier ou l'Artilleur, que Monet
définit Intendant d'Artillerie, étoit une espèce d'of-
ficier tel (lue « l'Artilleur de la bastide S' Anthoine
« en 1415, ou l'Arlilleur du chàleau du Louvre en
« 1364. » Le Roi, par ses Lettres du 20 Avril de la
même année, institua « .lelian de Lyons, Artilleur
'< du Chastel du Louvre. » (Voy. D. Carpentier,
Suppl. Gloss. lat. de Du Cange, au mot Artilliator,
col. 317.) On sait qu'un Artilleur n'est plus aujour-
d'hui qu'un homme servant dans l'Artillerie, à l'Ar-
tillerie. (Voy. Dict. de l'Acad. Fr.)
VARIANTES :
ARTILLIER. Fauchet, de la Milice Fr. p. 121.
Artiller. Brantùme, Cap. Fr. T. IV, p. 42.
Artilleur. Etat des Offic. des Ducs de Bourgogne, p. 6.").
Artimage, suhst. Art magique. (Voy. Artimaire.)
Le grand art, l'art d'opérer des choses qui parois-
sent surnaturelles.
Tous les Ydles que Sarrasins
Fisent, Mahon, ne ApoUin,....
Deslruit Karles fors une ymage
Ki fu faite par iwlimuife.
l'h. Mouskes, MS. p. 169.
VARIANTES ;
ARTIMAGE. R. d'Amadas, MS. du R. n» 6987, fol. 319.
Arcimage (corr. Arlimage.) Siège de Troye, MS. du R.
n» 6987, fol. 96, R« col. 3.
Artimaire, Sii/vs^ Art magique. (Voy. Artimage.)
Le grand Art, en latin Ars major, le même (\\ï Arti-
mage, Art magique.
Il ot devant le sale un pin
Dont les brances furent d'or fin,
Tresjelèes par Arlimaire,
Par Ingremance et par Gramaire.
Siège de Troje, MS. du R. n* G987, fol. 81, R- col. 1.
... Si sait meint beau geu de table,
Et d'enlregiet et A'Arlumaire,
Bien sai un enchantement faire.
Fabl. MS. de S' Germ. fol. 70, R- col. 3.
VARIANTES :
ARTIMAIRE. Fabl. MS. de S' Germain, fol. 64, col. 1.
.\RTMAinE. Siège de Troye, MS. du R. n''6987, fol. 116.
Artu.maire. Fabl. MS. de S' Germ. fol. 70, R» col. 3.
Artique, Adj. Articulaire. Il semble évident
(ixi'artétique , artique et même arreticle, sont
des altérations d'arthritique, en grec dçOçnnxài. En
AR
208
AR
termes de Médecine, arthritique, de même signifi-
cation qn'articuhure, en latin arlicularis, désigne
une douleur sensible aux articles des pieds, des
mains et autres articulations du corps. (Voy.
Article.) Ainsi, l'on aura dit goutte artique, goutte
arrclicle, parce que la goutte est une fluxion d'iiu-
meur acre sur les articles, et qu'elle les rend très-
douloureux. " Se l'en est accoustumés de maladie
« qui vient soudainement, comme de goûte arreti-
n de, ou de averlin, etc. « (Beaumanoir, Coût, de
Beauvoisis, cliap. lxi, p. 308.) « Les mains avoit
« noeuses et retraites de goûte artique. » (Uist. de
Charlemagne, r.is. de la Clayette, p. 91.) « Le Comte
« Guillaume de Haynaul.... gisoit malade de goûte
« artetique et de gravelle. »\Froissart,Vol. I, p. 30.)
VARIANTES :
ARTIQUE. Hist. de Charlemagne, MS. de la Clayette, d. 91.
Arreticle. Beaum. Coût, de Beauv. chap. lxi, p. 30».
Artétiqle. Froissart, Vol. I, p. 36.
Arthétique. Cotgrave et Oiulin, Diot.
Artisan, subst, masc. Artiste. Anciennement,
Ari/san signilioil non-seulement « Ouvrier dans un
a Art où la main seule opère, mais quelquefois
« aussi Ouvrier dans un Art où le génie dirige
« l'opération de la main. » (NuilsdeSlraparole,T.L
p. 418. — Voy. Akt et Artistk.)
C'est dans un sens relatif à l'acception inusitée de
ce mot qu'on a dit figurément : « Le Sage est un
« suffisan artisan qui faict son profict de tout. De
« loule matière il forme la vertu, comme l'excel-
« lent peintre Phidias, tout simulachre. » (Sagesse de
Charron, p. 3'ii.)
Artiste, &uhst. et adj. Artisan. Adroit en la pra-
tique d'un Art.
En définissant Artisan ou Artiste, par le latin
Artifex, Opifex, Nicot paroît attester que VArtiste
étoit quehiuefois un Artisan, comme l'Artisan étoit
un Artiste. (Nicot, Dict. — Voy. Artisan.)
Une autre preuve qu'on ne connoissoit pas alors
notre distinction de ['Artiste et de l'Artisan, c'est
qu'Artiste, comme adjectif, signifioit l'adresse d'un
Ouviier quelconque en la pratique de son Art, lors-
qu'on disoit.4c//s/£' ouvrier. Artiste main (Tonvrier.
Delà, l'adverbe arlislemenl qui a désigné el désigne
encore l'art, l'adresse, l'industrie avec laquelle'un
ouvrage est fait et travaillé. (Voy. Monet, Dict.)
Artitien, suhst. inasc. Savant dans les Arts de
l'Ecole. Espèce de diminutif que Rabelais semble
n'avoir imaginé que pour ridiculiser les Artiens.
« De beau plein jour, et ce es escholes de Feurre,
« en face de touts les Artitiens sophistes, etc. »
(Rabelais, liv. Il, p. 173. — Voy. Artien.)
Artre, subst. masc. et fém. Insecte d'espèces
différentes. Espèce d'Alcyon.
On lit dans Laurière, (Gloss. du Dr. Fr.) au mol
Artisonné, qu'un Artre étoit un Artisor,, un insecte
ou petit ver qui s'engendre dans le bois et le perce
avec son bec, comme avec un foret. (Voy. Artuiso:^.)
C'étoit aussi un insecte de l'espèce de la Teigne ou
de la Gerce qui ronge les étoffes, les papiers, etc.
« Cem'eust... esté chose très agréable de délivrer
« de l'outrage des rats, souris et artres, les
« noms de leurs ancestres. » (S' Julien, Mes!. Hist.
p. 328.— Voy. Cotgrave, Dict.)
On nommoit Artre de lloulengier, une espèce de
papillon ou d'insecte blanc qui vit dans les moulins
à blé et dans les maisons des Boulangers. Cotgrave,
qui définit ainsi Y artre de lioulengier, faisoit artre
du genre féminin, en disant que ['artre grise des
bois étoit la cloporte, le porcelet de S'-.\nloine, en
anglois Wooâ lowse. (Voy. Cotgrave Dict.)
Selon le même Cotgrave, YArtre est une espèce
d'Alcyon nommé communément Martinet-pêcheur,
par allusion, disent les Etymologistes, à ce que cet
oiseau prend des poissons, et (|u'à la S'-Martin il
abandonne les bords où il est arrivé au mois de
Mars. (Cotgrave, Dict. — Dict. des Arts. — Dict. de
Trévoux. — Ménag. Dict. Etym.) On prétend que
cet oiseau desséché, étant suspendu dans un maga-
sin d'étoffes, de draps, en éloigne les Artres, les
Teignes. Peut-être que d'après cette idée on l'aura
nommé Drapier, et Artre par anti-phrase.
Artueil, subst. masc. Article, articulation. Arti-
cle de doigt du pied et de la main, doigt du pied et
de la main, doigt du pied. Gros et petit doigt du
pied, gros doigt du pied. Articulation ; doigt, ongle
de patte de loup, de chien, etc.
11 est possible que du latin articulus, en franyois
article, on ait formé artueil, ortueil, au pluriel
ortaus, arlaulx, ou arlo:i qu'on soupçonne d'être
altéré dans argo^, articulations qu'en parlant d'un
cheval on nomme boulet. (Voy. Argot.)
L'opinion des Etymologistes sur l'origine d'ar-
tueil, ortueil, est d'autant plus probable, que la
signification de ce mot étoit la même que celle
d'article pris dans le sens propre et général d'arti-
culation, jointure des os. (Voy. Article.) « La pierre
" le vint frapper au travers des reins, el lui rompit
« tout le gros orteil de l'eschine. » (Hist. du Ch"
Bayard, p. 398.) C'est par décence qu on supprime
quelques autres preuves de cette signification géné-
rale, en renvoyant aux Ane. Poët. fr. mss. avant
1300, T. VI, p. 1341; au Moyen de Parvenir, p. 249.
etc. (Voy. .\rgoter.)
Il est néanmoins vrai de dire qii'ortueil ou
artueil, signifioit spécialement article du doigt du
pied et de la main, doigt du pied et de la main,
comme dans les Poésies mss. d'Eust. Deschainps,
p. 8.5, col. 3; et plus spécialement encore, article de
doigt du pied, doigt du pied. " Ne me demeure
« orteil en pied, ne doigt en main dont le sang ne
« saille. .. (Percef. VoL IV, fol. 107.) « Tous les
« orteil des piedz lui chéoient, fors les poulces. •
(Lanc. du Lac, T. I, fol. 51.) On dislinguoit le pre-
mier el dernier doigt du pied, en nommant l'un
petit artueil, et l'autre grand artueil. « Luy descou-
« vrit les piedz el le tira par le grand artueil ; de
0 quoy la ci'éaturc se troubla. » ;Percef, Vol. IV,
fol. 26.) « Lecoup....cheut en bas sur le peYûartueil
« du pied senestre. » (Ibid. fol. 37.)
Il semble que le petit artueil et le grand artueil.
AR
- 209 —
AR
soient les artaulx distingués des autres doigts du
pied, en ce passage : « Pi-inl les doys et artaulx de
« son senestre pied, etc. » (Percef. Vol IV, fol. 22.)
Quelquefois la signification A'artueil éloit aussi
particulière que l'est aujourd'hui celle d'orteil, gros
doigt du pied. « Pline escrit que le pouce ou a)-tmj
« du pied droit du roy Pyrrhe donnoit guérison à
« ceux qui avoient douleur de rate. • (Du Verdier
divers. Leçons, p. 228.)
. . . Jusqu'au VartoU le deschauce ;
Ne li laisse haubert, ne chauce.
Rom. de Perceval, MS. de Bjrne, n- 354, fol. 217, R- col. î.
Enfin, le mot ortueil, ou arteidl duquel on par-
ticularisoit et généralisoit indifféremment l'accep-
tion, a signifié articulation, doigt, ongle de la palte
d un loup, d'un chien , etc. « Le loup a le bout des
« artieux plus grosse et plus ronde que ne sont
« celle des chiens. » (Modus et Racio , impr
fol. 28.) « Es marches des Lièvres n'apert point de
« talion comme il fait es marches des chiens- et si
f 1^ Pl"s.d'or^<?/x ou pied que n'a ung chien. » (Jbid.
loi. 30, \\) « La Loutresse.... n'a mie les boutz des
« ortelz SI gros. » (Ibid.)
VARIANTES :
ARTUEIL. Percef. Vol. IV, fol. 26 V" col 1
Artail. Cotgrave, Dict.
Artaulx. (Plur.) Percef, Vol. IV, fol 22 R» col 1
Arteil. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 85 col 3 ' '
Artieux. (Plur.). Modus et Racio, impr fol "8 V"
Artoil. Rom. de Perceval. MS. de Berne, n» 354 fol 217
Artoir. Cotgrave, Dict. ' "'•-"•
Artoy. DHverdier, divers. Leçons, p 228
Artoz. (Plur.) Ger. de Rousillou, MS. n 203
ORTAU.S. (Plur.) Ph. Mouskes, MS. p. œi '
n^r'^\?^},^- ^"^^^^ - "°'^"S et Racio, imp. fol. 28
Ortel, Modus et Racio, impr. fol 30 V»
Orteul. xMoyen de Parvenir, p. 249 '
Ortoile. Ane. Poët. Fr. MS. avant 1300, T. IV n I3ii
Ortuiel. Percef. Vol. II, fol. 26, V» col 1
Artuison, subst. masc, Insecte d'espèces diffé-
rentes. En supposant qu'il soit vrai, comme l'attes-
tent les Auteurs du Dictionnaire Universel qu'en
quelques lieux de nos Provinces, on nomme rtr/»/s
les trous faits au bois par les vers, ou les vers qui
y tont ces trous, on pourroit croire avec assez de
probabilité (\\\'m'tuis est une altération de partuis
e même (\w pertnis. On a mille preuves d'altéra-
tions pareilles, causées par le retranchement de la
première lettre d'un mot. Une autre raison de
croire que partuis poui roit être altéré dans artuis
cest qu artuison, en étant formé, désigneroit natu-
re lement un insecte de l'espèce de l'artison, delà
calandre, du charençon, du puceron, de la t^ïi-ne
un insectequi perce, qui troue les choses auxquelles
de roto'rîv^ Uuoiqu'nrtiron dans le Dictiomiaire
de Lotgrave, signifie spécialement le puceron, on a
pu le reunir avec artison sous artuison commp
variation d'orthographe, puisque dans le même
Dictionnaire, artison est le même qu'artiron S'il
designoit le puceron comme artiron, comme artui-
son il designoit la teigne. Il ne se dit plus aujour-
d hui que de l'insecte ou petit ver qui s'entendre
dans le bois et le perce. (Labbe, Gloss. lat. fr au mot
Tmea. _ Cotgrave, Dict. — Dict. de Trévoux
(voy. Artre et Artuis.)
.^^ variantes:
ARTUISON. Labbe, Gloss. lat. fr. au mot Tinea.
Artison. (Drt. subsist. - Cotgrave, Dict.
A^«r." S"vi; ?;â. - "''='■ "' '''''■ ^" "^"^ '^^"•^<^-
Artuis, subst. masc. Trou de ver, ou ver qui fait
ce trou. Dict. de Trévoux, au mot Artisotme. (Voy.
Artuiso.\ et Artuisonné.)
Artuisonné, Paticipe. Piqué de ver, percé
D artuison, ver qui s'engendre dans le hois et le
perce, on a dit d'un bois piqué du ver, d'un bois où
Il y a plusieurs petits trous de vers qu'il étoit artui-
sonne, artisonné. (Voy. Laurière, Gl. du Dr f r )
« Seront faits les vaisseaux à vin,... de bon bois
« sec non punais, rongé, vergé, ne artisonné, sans
« aubour. « (Coût, de Tours, au Coût sén. T II
p. 5. — Coût, de Loudun, ibid p. 543. (Voy. Artois.)
VARIAiNTES :
ARTUISONNE. Dict. de Trévoux au mr.t Artimiiné
ARTISONNE. Coût, de Tours, au Coût, gén T II n 's
Artusonne. Dict. de Trévoux, uhi supra ' '
Artuzonné. Coût, de Loudun , au Coût. gén. T. II, p. 545.
Artuisonneux, adj. Plein de teignes. D'artui-
son qui, entre autres insectes, designoit la teio^ne
(Voy. Labbe. Gloss. latin fr. au mot micosus )
Artuit, subst. masc. Repas. Espèce de droit sei-
gneurial, comme le droit de gîte, vulgairement
nomme Mangerie, en latin Cnniestio. '(Voy Du
Gange. Gloss. lat. au mol Cvmestiones. — Laurière
Gloss du Dr. fr. au mot Giste.) Les repas qu'un
Vassal, asservi au Droit de Gîte, donnoit à son
seigneur, occasionnoient une consommation de
pain que désigneroit spécialement artuit, s'il étoit
réellement formé du grec «prw pain C'est
l'opinion de D. Carpentief sur l'étymologie de ce
mot, qui, dans un titre latin de I3/i6, «i.t^nifie évi-
demment droit de gite, repas, mangerie, de laquelle
les Seigneurs affranchissoient souvent leurs Vas-
saux, moyennant une redevance en argent « Ilem
« pro quodam deverio,.... vocalo«r/H/7,seu comes-
« tione qiiam anno quolibet tenetur facere, etc »
[.DjCarpenlier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, T.'l,
Si le savant Continuateur de Du Cange eût fait
rellexion que dans la Latinité du moyen âge, pastus
en françois past, étoit de même signification que
comestio, repas, mangerie, droit de gite, peut-être
qu artiat, dans un titre latin où ce niot est syno-
nyme de l'ablatif comestione, ne lui auroit paru
qu une altération de l'ablatif /jfls?«. (Voy. Du Cange
Gloss. lat. au mot Pastus. - Laurière, Gloss. du
I Dr. fr. au mot Giste, p. 548 (2).) Il est possible que
^^p^^J^t^i^ Ti^' '^i fa p'f^ce'yjlT'.^^"'- ^UJ ^" "'''" '"- ^— • • (- -) - (2) L'unique
copiste du XV. siècle, (n. b.) ' ''^"^ '* P'^°^ ^ ^^ 1 année 1346 ; c'est probablement une mauvaise leAure d^n
H.
27
AR
- 210 -
AR
l'idée de cette altération semble assez naturelle,
pour faire soupçonner que 1). Carpentler s"esl
mépris en cliercliant dans le grec aptos-, l'origine
d.'artuit, et en supposant à ce mot une signification
analogue à celle d'aiiis dans leCelt-hell. de L.Trip-
pault^ou à'arton dans le Dict. jis de Barbasan. Ces
mots formes, dit-on, du grec àçxos, sigifieut pain, en
langage Argotique. Il n'est peut-être aucun Diction-
naire qui ait été si souvent imprimé que le Dic-
tionnaiic de l'Argot. On trouveroit néanmoins dans
cinq ou six ballades de Villon, de quoi en faire une
nouvelle édition plus complète que les anciennes.
Après en avoir averti les Maîtres en Argot, qu'on
nous dispense d'allier à l'ancienne Langue Fran-
çoise « un jargon que Marot a laissé à corriger et
« exposer aux successeurs de Villon en l'art de la
<i pinse et du croq. » (Voy. Œuv. de Villon, préf. de
Marot, p. 5.)
Artus, subst. masc. Nom propre. On lit dans le
roman de Lancelot du Lac, qu'Arlus, roi de la
Grande-Bretagne, après la perte d'une bataille où
tous ses Chevaliers de la Table-ronde, à la réserve
de Lucans et de Girflet, étoient morts en combattant
avec lui contre Mordrec son mortel ennemi, se
retira seul vers une rivière, des bords de laquelle il
disparut, enlevé sur une nef par sa sœur la fée
Morgain (1). Cette fable, adoptée par les Brelons sur
la foi de leurs anciens Romanciers, fut sans doute le
principe d'une croyance vulgaire attestée par Guil-
laume de Malmesbury, qui dit en parlant d'Arius :
« Arturis sepu'cbrum nusquam visitur; unde
« antiquitas n(X'niarum adhuc eum venturum fabu-
« latur. » Le témoignage de cet Historien prouve
évidemment qu'au temps où il écrivoit, les Bretons
s'opiniàtroient encore à espérer de revoir leur bon
roi Artus, et à l'attendre.
H suffit que le merveilleux d'une fable paroisse
flatter l'amour propre d'une Nation, pour qu'une
Nation rivale en plaisante. Aussi voit-on qu'ancien-
nement une espérance incertaine, une vaine attente,
étoient pour un P'rançois l'atlente du roi Artus,
l'espérance de le revoir.
Petit iroie prisant
Mon torment,
S'Ariu reveoie.
Cbans. fr. WS. de Berne, n' 380, part, m, fol. 19. V.
De fol avoir a grant talent
Cil qui s'afole à escient.
Et qui son preu ne veult entendre.
Avec les Dretcns peut ateudre
Artu qui janiès ne vendra.
Vie des Pcres. MS. de la Clayette, p. 2.i3, col. i.
On comparoit à l'attente des Bretons, celle des
habitans de Valenciennes, qui ne vouloient pas
croire, en 1225, à la mo'i de Baudouin, comte de
Flandre.
A Valenciennes l'atent-on,
Aussi comme funt li Breton
Artu qui jk ne revenra :
Trestout ensi leur avenra.
Ph Mouskes, MS. p. 68î.
Probablement, cest par allusion à l'attente de
quelque merveille vainement espérée par le bon roi
Artus lui-même, (ju'un amant incertain du succès
de son amour, disoil :
Maix trop redous ke n'aie empris
Ceu k'en Bretaigne Artus ratent.
Chans. fr. MS. de Berne, n- 389, part. 1, fol. U, R\
Enfin, il est possible que par continuation de ces
anciennes plaisanteries, si naturelles à la rivalité,
on ait désigné les Acteurs qui dans certaines fêtes
bouffonnes établies en plusieurs Villes du royaume,
jouoient les rôles de Princes et de Rois, par « le
« nom de roy Artus, et leur Compagnie par celuy de
« Chevaliers de la Table-ronde. Il y a encore, dit le
« P. Ménestrier, des jeux et des plaisanteries que
« l'on nomme du Roy Artus. » (Voy. Ménestrier, de
la Chevalerie, p. 255.)
Ai'vau, subst. masc. Arcade, voûte. D. Carpen-
tier avertit qu'au lieu de aman, il faut lire arvau
dans un titre de 1451 (2), qu"ilcite. (Suppl. Gloss. lat.
de Du Cange, au mot Arvoutus. (Voy. Arvoili-.)
Ai've, subst. {cm. Champ. En latin du moyen
âge, arva. " La ruisselée qui est entre nos vignes
« de Rousées et Varve (3) Thomassin Geelin. » (D.'Car-
pentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Cange, T. I, col.
318; tit. de 1326. — Du Cange, Gloss. lat. au mot
Arva.)
Ai'voiilu, subst. masc. Arcade, voûte, cintre.
Du latin arcus volutus, en françois arc voulté, arc
voultis, arc volu, on a formé par contraction les mots
composés arvoulu, arvolis, arvolt, arvol, urvout,
arvou et arvau, qui tous signifioient arcade, voûte,
galerie, ou autre partie de bâtiment faite en arcade,
en voûte, en cintre. (Voy. Arvau.)
Devant la Tor fête à ciment,
En un ari-olt qui moult ert gent,
Font un tombel apareillier.
Floire et Dlanchenor, MS. de S. Germ. fol. 198, R» col. 3.
Ha ! Diex, ge vol nostre maison,
Les fenestres et les arvou:,
Dont ge me parti corome folz.
Cortois d'i\rlois, JIS. de S' Germ. fol. 85, R° col. l et 5.
On retient la poussée d'une voûte par des arcs
boutans, par des piliers qui finissent en demi arc,
et qu'en Limousin on nomme arvouts arbouts.
(Voy. Du Cange, Gloss. lat. au mot Arvoutus.) En
supposant qiïarbout ne ditîère d'arvout que par le
changement d'une lettre de même organe, on pour-
roit en conclure qu'arvout, prononcé par les Limou-
sins arbout, est le principe de la formation de notre
(1) Arthur, penteyrn ou chef des Bretons insulaires, se défendit avec un grand courage contre les Saxons, qui le
battirent et le tuèrent en 542, sans qu'on ait pu retrouver son corps. La Légende fit d'.Vrthur un autre Charlemagne, et les
poi'mes anglais qui le célébraient passèrent avec ses sujets émigrés dans la petite Bretagne. Aux traditions celtiques se
mêlèrent les traditions orientales importées par les croisades, et Ton croyait encore, au xviF siècle, à l'existence des
Chevaliers de la Table-Bonde, (n. e.) — C2) .Vu registre JJ. 185, p. 235. - (3) Arve ne signifierait-il pas ruisseau, et n'aurait-il
pas pour origine le sanscrit (1)1, signe du mouvement? Cette racine se retrouve dans l'.lcit', qui se jette dans le lac de
Genève, et, avec métathése, dans l'.4i)-o)î, affluent du Cher, dans VAvre, anciennement Arva, affluent de l'Eure, (n. e.)
AS
— 211 —
AS
mot composé arc-boutant, qu'il faudroit écrire arc-
voûtant. (Voy. Arc.)
VARIANTES :
ARVOULU. Conception de la Vierge, MS. de la ClaY- p- 161.
Arvol. Floire et Blanchellor, MS. du R. n» 6987, fol. 252.
AnvoLis. Siège de Troye, MS. du R. n° 6987, toi, 81.
Arvolt. Floire et Blanchellor, MS. de S'-Germ. fol. 198.
Arvou. Cortois d'Artois, MS. de S'-Germ. fol. 85.
Arvout. D. Carp. S. Gl. lat. de D. C. au mot Arvoutus.
Ariire, siibst. fém. Labour, labourage. En latin,
arura{\). (Ou Gange, Gloss. lat. T. I. col. 7i8.) « Par
« suffraunce de arrures se amendent les terres, et
« par le semer ; et en tiel cas est la suffraunce
« bone, et cautele à suffrer que homs semé autruy
« terre. » (Dritton des Loix d'Angleterre, fol. 142 et
143.) « L'achateur sera payé de ses ainires, semon-
« ces et engrains, s'il n'a les fruicts. » (Coût, de
Normandie, au Coût. gén. T.I, p. 1024. (Voy.AnER.)
VARIANTES :
ARURE. Monet, Dict. au mot Arev.
AiREURE. Laurière, Gloss. du D. Fr.
AiRURE. Coût, de Normandie, au Goût. gén. T. I, p. 1009.
Arrure. Britton des Loix d'Angleterre, fol. 142.
As, subst. masc. Unité. Point unique marqué sur
une carte ou sur l'une des six faces d'un dé. Nos
ancêtres étoient si familiarisés avec les idées de
chance heureuse ou malheureuse au jeu de dés, que
pour eux, changer le bonheur en malheur, c'étoit
tourner un six en as.
Hasart, dist la Mort, fols, estous ;
A ce coup vengerai ceaus tous
De cui mal faire te penas...
Je tornerai ton .sis en as.
Miserere du Recl. de Moliens, MS. de Gaignat, fol. 213, R" col. 2.
S'ils étoient malheureux, les dés étoient de deux
et d'as.
Or pues-tu bien crier, hélas !
Quar ti dé sont de deus et d'as.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 77. R° col. 2.
On leur présageoit un malheur, en leur appor-
tant dés de deux et d'as.
Mors crie à Romme, crie à Raina ;
Seignor, tuit estes en mes mains...
Certes je cor plus que le pas,
Et s'aport dez de deux et d'as,
Por vous 1ère geter du mains.
Poëme de la Mort, MS. du R. n" 7218, Strophe XV.
Ils désignoient un malheureux, un homme mé-
prisable, à qui il étoit malheureux de se fier, en
disant qu'il étoit de deux et d'as.
Par Eskievins de deux et d'as,
Fu fais à Paris li baras,
Que li Cuens ara le moitié
Es Borjois parjures d'Arras.
Poème de la Mon, MS. du R, n- G987, fol. 338, V col. 4.
En disant qu'une personne ou qu'une chose ne
valoit pas un as, ils en désignoient la valeur comme
inférieure à celle de l'as, au jeu de dés. C'étoit
l'expression du souverain mépris pour une per-
sonne ou pour une chose de nulle valeur. (Voy.
Athis, MS. fol. 19.)
Probablement, c'est par allusion à l'idée d'un dé
qui, pirouettant sur l'une de ses carnes, laisse quel-
que temps la chance douteuse et incertaine, qu'en
parlant d'un homme qui doutoit de son bonheur
dans une affaire, d'un homme qui répondoit de
fa(,îon à laisser incertain et douteux le sens de sa
réponse, on a dit « qu'il répondoit entre deux et
« as; qu'il demeuroit entre deux et as. » (Cotgrave,
Dict. — Voy. Ambesas.)
Ascendant, Partie, et subst. Qui monte, qui
s'élève. Nati.'ilé, horoscope, destinée. Supériorité.
Il est probable qu'on auroit toujours ignoré que
Maître Martin Mesnard, « personnage sachant bien
« faire le Palais, aimoit à se jouer de son esprit en
« fa-sant des vers ascendans, « si Pasquier ne nous
l'eût révé'é dans une Lettre par laquelle il témoi-
gne au Seigneur des Accords, son regret de ce
qu'une nouvelle édition des Bigarrures, n'étoit pas
enrichie de mille choses aussi curieuses que ces
vers ascendans :
Rem, regem, regimen, regionem, relligionem
Restauraverimus rel'igionicolœ.
Ces vers, que Mesnard nommoit « ascendans,
" d'autant que par forme de degré il faisoit monter
« chaque mot d'une syllabe, » ne sont qu'un échan-
lillon des jeux de son esprit. « Vous ne croiriez pas,
« dit Pasquier, (Lett. T. 1, liv, viii, p. 50G.) combien
« il a de pareilles gayetés. » On a peine à concevoir
qu'au xvi' siècle, l'esprit se soit égayé et même
enorgueilli de productions qui l'humilient aujour-
d'hui et l'attristent.
On s'est figuré les Pères, les Grands-pères, les
Grands-oncles, et on se les figure encore aujour-
d'hui comme ayant un mouvement par lequel ils
montent, ils s'élèvent d.ms l'espace du temps, au-
dessus des Fils, des Pelits-fils, des Petits-neveux,
lorsqu'en termes de généalogie on dit qu'ils en sont
les Ascendans. « Quant aux héritages propres, ils
« ensuivent les tronc et ligne du père et mère, et
« autres leurs ascendans desquels ils sont venus
« et issus. » (Coût. gén. T. I, p. 208.)
Quoiqu'on ne croye plus à l'immobilité du globe
terrestre, les astres, les points du Ciel, ou les degrés
des Signes, qu'au moyen de la rotation de la Terre
sur sou axe on aperçoit successivement à l'horizon,
n'en sont pas moins vus comme ascendans, « mon-
« tans sur ce même horizon. » Ainsi, l'on dit en
termes d'Astrologie qu'un astre, qu'un signe est à
l'ascendant, qu'il monte sur l'horizon, lorsqu'on l'y
aperçoit. " Le Soleil, dès son lever jusqu'à midi,
continue son ascendant. « (Monet, Dict.)
Il est visible qu'flsccHfto»i, participe de l'ancien
verbe ascendre, ne devient substantif (|ue par ellipse
d'un nom, tel que celui de cours ou de point, lors-
qu'on dit que le Soleil continue son ascendant,
qu'un astre est à Y ascendant, etc. En termes d'As-
trologie judiciaire, naître au moment où un astre,
un signe, une planète est au point ascendant, c'est
avoir à l'ascendant cette planète, ce signe, cet
(1) Arure vient A'aratura. Arura n'est que la transcription du grec açovça, dans Marcellus Empiricus; on le trouve aussi
dans des cartulaires anglais, mais c'est alors arure latinisé, (n. e.)
AS
- 212 —
AS
astre, au moment de sa naissance. On sait avec
quelle folie on a cru aux Astrologues qui disent
qu'en ce moment l'astre ascendant influe puissam-
ment sur la destinée heureuse ou malheureuse des
hommes. C'est par allusion à cette vaine croyance,
qu'un Poêle du xvi' siècle, espérant tout de la libé-
ralité du fioi Henry III, disoit :
.Te n'ay soucy sous quel astre ascendant
J'aye tiré quelque heureuse influence ;
Ni quels flambeaux, au jour de ma naissance,
De dovLx aspects s'entr'aUoyent regardant.
Poès. d'Amadi* Janiyn, fol. 9, R*.
En supprimant le nom de la planète, du signe,
ou de l'astre auquel on attribuoit tant d'influence
sur notre destinée, le participe ascenda)it aura
signifié, comme substantif, l'état et la disposition
du Ciel et des astres au moment de la naissance de
quelqu'un, sa nativité, son horoscope, sa destinée
dépendante de l'astre, de la planète , ou du signe
qu'en ce moment il avoit « l'ascendant.
Si par quelque raison
Votre ascendant à Ihymen vous expose,
N'épousez point d'Honnesta, s'il se peut :
N'a pas pourtant une Honnesta qui veut.
La Fontaine, conte de Belphégor.
Peut-être trouveroit-on dans l'amour-propre ,
forcé d'avouer la supériorité de certains hommes
sur l'esprit, sur la volonté, sur la fortune même de
ceux qui semblent faits pour être leurs égaux, la
raison pour laquelle on a nommé ascendant cette
supériorité. C'est une espèce de consolation de n'y
voir qu'un etîet de l'influence d'un astre plus heu-
reux que celui qu'au moment de sa naissance on a eu
à Vascendant; influence que l'on a crue irrésistible.
VARIANTES :
ASCENDANT. Orth. subs. - Poës. d'Amadis Jamyn, fol. 9.
AsçANDANT. Monet, Dict.
Ascendre, verbe. Monter, s'élever. (Voy. Ascen-
dant.) Dans le sens propre, monter, gravir au haut
d'une montagne élevée: « Cil levaunt par nuit,
'< flscfHrf? ermount Sinai, com nostre Seignor ont
« comandé. » (Trad. de la Bible , Exod. chapitre
ixxiv, ^. 4.)
Par extension de cette acception particulière,
monter, se mouvoir de bas en haut, se transporter
par ce mouvement en un lieu plus haut, plus élevé
que celui d'oii l'on part. >■ Jeo fériroi tôles tes con-
« trées des raines, lesqueux ascenderont et entre-
« ront ta maisoun et la couche de ton lit. » (Ibid.
chap. viii, f. 2.)
Dans le sens figuré, monter, s'élever aux hon-
neurs, à la fortune :
Petit hom n'aiez en despit ;
Car celi k'ore est vil et petit,
Si com avenu e.st souvent,
A richesces et honurs ascent.
Enseignemeos d'Aristote, MS.
Ascension, subst. fém. Fête de l'Ascension.
Fête de l'Assomption.
L'usage du substantif ascension, en termes de
Physique et d'Astronomie, paroît nouveau dans
notre Langue, relativement à celui d'après lequel
il a signifié et signifie encore l'élévation miracu-
leuse de Notre Seigneur , lorsqu'il monta au Ciel,
lorsqu'il « ascendit h la clarté glorifiée, » comme a
dit J. de Meung. (Testam. vers 754 et 755. — Voy.
ASCENDHE.)
11 est probable qu'anciennement on faisoit une
procession publique et solennelle le jour de V.As-
cension, puisqu'on a désigné une multitude dépeu-
ple que la curiosité atlirbit sur le passage d'un
Chevalier, en disant :
Et quant ors de la Ville issi,
Si ot autel procession,
Com s'il fust jorz li'. Acensiun.
Rom. de Perceval, MS. de Berne, n" 354, fol. 232, R- col. i.
Le terme auquel l'Eglise a fixé cette fête, étant le
même tous les ans, c'est-à-dire de quarante jours
après Pâques, on a imaginé, dès le xiv siècle , de
comparer à l'.-lsce?isiore, les choses et même les
personnes qui sont toujours dans les mêmes termes,
dans le même état. (Voy. Oudin, Dicl. — Dict. de
Trévoux.)
A moy payer est tout le monde lent ;
L'en ne me sert que de locution.
L'en paye ailleurs : je suis l' Ascension
Qui en un point m'a fait son prisonnier.
Eusl. Desch. Poès. MSS. p. 367, col. 3.
On assimiloit à l'élévation miraculeuse de Notre
Seigneur l'enlèvement de sa Mère au Ciel, en disant
Ascension pour Assomption. >> Qu'ils reçoivent le
« précieux corps de Nostre Seigneur aux bonnes
>' restes annuelles et à VAscensim Nostre-Danie. «
(Hist. de Paris, pr. T. III, p. 748 ; tit. de 1522. —
Voy. ASSUMPTION.)
VARIANTES :
ASCENSION. Orth. subsist. - Chron. S' Denys, Rec. des
Hist. de Fr. T. X, p. 311 ; Var. margin.
ACENsiON. R. de Perceval, MS. de Berne, n» 3.54, fol. 232.
AssENTiON. Vie de Théophile, MS. du R. n° 6987, fol. 312.
Ascient, subst. masc. Avis, sens, connoissanee,
raison, volonté. On observera que dans le xv et le
xvr siècle, on a dit scient, avec la signification du
participe latin sciens. (Voy. Scient.) C'est de ce même
participe latin que plus anciennement s'éloit formé
ascient, moins commun dans notre Langue qu'^s-
c/«?i^ On prononfoit et l'on écrivoil ensient , eu
modifiant par le nez le son de la voyelle initiale,
comme dans ensienteus; variation d'orthographe
de Vid'iectif escienteus, le même que scienteits ou
scientieux, formé du substantif science, escience,
en latin scientia. (Voy. Science et Scientieix.)
Il est évident que c'est par ellipse d'un nom pro-
pre à désigner la faculté de voir, de sentir, de cou-
noître , de raisonner, de vouloir, qu ascient ou
escient, \e même que scient en françois, en latin
sciens, a signifié avis, sens, connoissanee , raison,
volonté. « Pour emender à lor pooir et hlor essient
« les assises et les usages doudit Royaume , etc. »
(Assises de Jérusalem, chap. m, p. 15.) « S'il est
« hors d'escient, come s'il estoit yvre, foui, ou for-
" cenné, il doit avoir administrateur. » (Ane. Coul.
de Bretagne, fol. 123, \\]
Pécher vilainement
Muet de foible escient.
Marconi et SaloraoD, MS, de S' Gcrm. fol. 117, R* col. I.
AS
213
AS
Qui moult voit et n'aprant,
N'a pas grant escient.
Prov. du C" de Bretagne, MS. de S. Germ. fol. 115, V col. 1.
Vos en dirai mon escient.
Ane. Poét. fr. MSS. avant 1300, T. III, p. 1911.
Enfin, agir ou parler « en y mettant escient, h
« bon escient, à son escient, » en latin barbare suo
scienle, c'éloit agir ou parler avec connoissance
de cause, d'après' son sentiment et son avis, comme
l'on voyoit et sentoit. (Voy. Beaumanoir, Coût, de
Beauvoisis, p. 9, etc. — Ménage, Dict. Etym.): « Si
« je pensois que parlassiez à bon escient , je m'en
« tiendrois toute glorieuse. » (Nuits de Straparole,
T. II, p. 380.) « Avant ce que à chief venist de son
K emprinse, à mon escient, plustost auroit conquis
« toutes les AUemaignes. • (Ger. de Nevers, part, i,
page 9.)
Et sanz mètre nul esciant.
Ont lui eslit par jugement.
Parton. de Blois, MS. de S. Germ, fol. 162, R* col. 3.
En supprimant la préposition dans l'expression
à mon escienl, on àisoii mon escient , pour à ma
connoissance, à mon sentiment, à mon avis. (Voy.
ASCIEÎ^TRE.)
Se j'eusse faux talent
Et je s'eusse trecier ;
Mieux m'en fust, nio)! essimit.
Ane. Poël. fr. MSS. avant 1300, T. U, p. 801.
On a vu que « parler à bon escient, « e'étoit par-
ler comme l'on sentoit réellement. Il semble qu'on
ait généralisé celte idée de réalité, lorsqu'en oppo-
sant aux combats à la baniére les combats réels,
on a dit: « Il y faut venir à bon escient. » (Bran-
tôme, Cap. Estr. T. I, p. 304.)
Si l'on agissoit avec la volonté de nuire ou de
tromper, si l'on voyoit et sentoit, si l'on connoissoit
et raisonnoit la possibilité de l'éaliser cette volonté,
on agissoit à escient. « Le Chevalier faignant à
« essietit de dormir, etc. » (Percef. Vol. V, fol. 51.)
« Gauvain fut bien honteux du coup qu'il avoitfait,
« et dit à Lancelot : haa ! Sire , pardonnez-moi , et
« sçachez que je ne le feiz point à mon escient. »
(Lanc. du Lac, T. III, fol. 30, V- col. 1.)
Por ceu ne me puis de celi partir
Ke à assiant me fait mal sentir.
Maix se d'un baissier me voloit merir,
Tout li perdonroie.
Chans. fr. MS. de Berne, n' 389, part. I, fol. 73, R'.
Dans un sens plus général, l'expression à escient
signifioit volontairement, avec une volonté que
détermine la façon de sentir les choses et de les
raisonner. « Y a eu non seulement plusieurs aveu-
« gles, grands et sçavans ; mais d'autres encores
« qui se sont privés de veue à escient, pour mieux
« philosopher. » (Sagesse de Charron, p. 81.)
VABIANTES :
ASCIENT. Athis, MS. fol. 26, R» col. 2.
Assiant. Ch. Fr. MS. de Berne, n» 389, part, i, fol. 73.
Ensient. Athis, MS. fol. 14, V" col. t.
Esci.\NT. Ane. Poët. Fr. MSS. avant 1300, T. I, p. 5t.
Escient. Orth. subs. Rom. de Rou, MS. p. 93.
EssiANT. Ch. Fr. MS. de Berne, n°389, part, ii, fol. 77, V".
EssiENT. Ane. Poët. Fr. MSS. avant 1300, T. II, p. 801.
Ascientre, subst. et adv. En avisant, avec con-
noissance, volontairement. Avis, connoissance,
volonté. (Voy. Ascient.)
De l'adverbe latin scienter, s'est formé le françois
ascientre, qui, dans un sens analogue à celui du
participe ascient, en latin sciens , signifioit volon-
tairement, avec connoissance, en avisant. « Si vos
« wardeiz désormais k'aucuns de vos ne tignet à
« petit, cum petit k'il assiantre forfaicct. » (S' Ber-
nard, Serm. Fr. mss. p. 251.)
C'est sans doute par ignorance ou par oubli de
l'origine de l'adverbe ascioitre, qu'on s'en est servi
comme d'un substantif, et qu'on a dit à mon ascien-
tre, ou mon ascientre en sup[irimant la préposition,
pour à mon avis, à ma connoissance, à ma volonté.
(Voy. Rec. de Perard, p. 515 ; tit. de 1266.)
Mais li Rois ot mellor confort ;
Car d'Englois ot plus de lx.
Et lendemain, mon ensiantre,
Ot-il Saintes à son voloir.
Ph. Mouskes, MS. p. 816.
VARIANTES :
ASCIENTRE. Rec. de Pérard, p. 515 ; tit. de 1266.
Assi.\NTnE. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. p. 251.
Ensiantre. Ph. Mouskes, MS. p. 846.
Asclasser (s'), verbe. Tomber de lassitude. Il
est possible qu'en aspirant gulturalement le verbe
aZrtsscr, on l'ait prononcé et écrit aclasser, asclas-
ser, etc. » Ces adnes sunt voz : sis ai menez pur
» co que vos enfanz les muntent; e cest vin,
« que ces en beivent ki se alassermit, par aventure,
<• al désert. » (Liv. des Rois, ms. desCordel. fol. 60.)
A ice mot un pou s'asclasse ;
Car de travail est endormie.
Athis, MS. fol, 119, V- col. 2.
Cette analogie de signification semble justifier
notre idée sur asclasser, le même qu aclasser dont
on a cru voir l'origine dans le verbe latin cadere,
s'il n'étoil une altération du françois accoiser.
(Voy. Aclasser et Acase.ment.)
VARIANTES :
ESCLASSER (s'). Athis, MS. fol. 119, V» col. 2.
Alasser (s'). Livres des Rois, MS. des Cordel. passini.
Ascon, subt. masc. Nacelle (1). Selon Eccard,
nacelle de cuir, en latin ascus, asc en Anglo-saxon.
S'il est vrai que ces noms soient formés du grec
apxif, en françois outre, acon est une altération
d'ascon, qu'en certaines provinces les pêcheurs de
marais et d'étangs prononcent nascon. (Du Gange,
Gloss. lat. T. I, col. 757. — Ménage. Dict. Etym. —
Voy. AcoN.)
Ascouter, verbe. Ecouter. Prêter l'oreille, en
latin auscultare, d'oîi le françois ascouter, ascut^er.
ascolter, etc. « Les cuers des ascutans encitat al
" amor del céleste pa'is. » (Dial. de S' Grégoire, ms.
« liv. I, chap. IV.)
On auroit réuni escouter sous ascouter, comme
(1) Ascon est un poisson, nommé usch en allemand, ombre en français actuel. Walafridus Slrabo, mort en 859, écrivait :
. Interea du'cis fertur milii norniula piscis Asconis calidi, sequitur vas denique musti. (n. e.)
AS
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AS
allératlon d'orlliographe, s'il eût été possible d'en
rapprocher tous les noms dérivés, tels qn'escout
sous lequel on trouvera ascoitt, esronle; CHcoute-
rneiit sous leiiuel on trouvera accoiislcmcnt et
accoutemcnt ; cscoutcre ou escoutcur sous lequel
on trouvera aceousteur et accouteur ; escouterie,
escoutet, etc. (Voy. Escout et Escouter.)
VARIANTES :
ASCOUTER. Nicot, Dict. au mot Accnuter.
Abscoulter. D. Carp. S. G. 1. de Da C. au mot Abscultare.
AccousTER. Cûtgrave, Dict.
ACCOUTER. Nicot et Monet, Dict.
AcouTEK. Nicot, Dict. au mot Accnuter.
AscoLTER. Dial. de S' Grég. MS. liv. III, chap. xxxvii.
A.SCUTER. Ibid. liv. I, chap. iv.
Ascriptices, siihst. mnu. plur. Espèce de Serfs,
En latin asci'iptitii ; dénomination qui semble rela-
tive à l'usage d'inscire in album mcribere , les
Colons ou Vilains qui, passant d'un village dans
un autre , obtenoient du Seigneur , à charge de
services, la permission de s'y fixer comme servi
glebœ, comme attachés à la gièbe. Dans les Statuts
Mss. de Charles I" roi de Sicile, chap. cklis., on lit :
« Les Ascrijitices, c'est assaveirceux qui sont tenus
« de labourer les terres de tours Signors, et ne se
K peuvent partir de céans, sans lor commande-
« ment. » (Voy. Du Gange, Gloss. lat. T. I, col. 756.)
VARIANTES :
ASCRIPTICES. Du Gange, Gloss. lat. T. I, col. 757.
AscRiTicES. Id. ibid.
Asiniquement, adv. A la façon d'un âne.
Dans le sens figuré, juger asiniquement, c'étoit
juger bêtement comme feroit un àne. <■ Il avoit esté
« asiniquement }u^é par le Juge, à quo bien appelle
« par l'Appellant. » (Bigarrures du S' des Accords,
fol. 57. — Voy. AsNESQUE.)
Asma. subt. masc. Asthme. En grec âde^a, d'où
asmn, le même que asme, " Quand vous tirez un
« oiseau de la mue. ne le portez pas par temps
« chaut, car par chaleur lui vient Vasma. »
(Arteloque, Fauconnerie, fol. 91 .) « Les signes que
« l'oiseau a Vasme, autrement pantais,. sont quand
« il ne peut avoir l'haleine, etc. » (Fouilloux, Fau-
connerie, fol. 80.)
VARIANTES :
ASMA. Arteloque, Fauconnerie, fol. 91, V*.
Asme. Fouilloux, Fauconnerie, fol. 80, R».
Asmatique, Adj. Asthmatique. Du substantif
Asma, asme. (Voy. Arteloque, Fauconnerie, fol. 91.)
Asne, subst. masc. Ane, bête de somme, mon-
ture. Ane, animal lascif. Ane, animal stupide.
On a dit « que de toutes les bêtes il n'y en a point
« qui eotendent mieux que Vasne. » (Voy. Bouchet,
XI' serée.) Cette finesse d'ouïe paroît être l'origine
de la fable du roi Mldas, à qui les Poètes donnoient
des oreilles d'âne , pour signifier qu'il avoit la sage
curiosité do tout entendre et tout savoir dans son
royaume. Elle est, dit-on, l'effet naturel de celte
longueur d'oreilles, désignée, comme le croit
Court de Gébelin, par le nom d'asne. (Voy. Dict.
Etym. de la Lang. lat. au mot Ans, en françois
oreille.) On sait que si les oreilles d'âne éloient
pour quelques Poêles le signe d'une curiosité sage,
pour d'autres elles étoient celui d'une stupide igno-
rance.
Quelque général qu'ait été et que soit encore notre
mépris pour Vasne (1), cet animal si laborieux, si
patient, si frugal, par conséquent si utile comme
bête de somme' et comme monture, les Cabalistes
l'ont proposé « pour marque et enseigne de sagesse
'< et sapience : à laquelle quiconque aspire, doit
« endurer patiemment la peine, estre humble et
« sans malice comme l'asne. » On lit que fidèle à
l'allégorie cabalistique, « Ammonius Alexandrinus
« bailla à Origène et ;\ Porphyre ses disciples, un
« asne pour compagnon d'escole. » (Voy. Bouchet,
xr serée.)
Dans un sens relatif ii l'asne, bête de somme et
monture, on a dit proverbialement : 1° « La seur-
« somme abat Vasne, >> pour signifier le danger
d'une imposition excessive sur le Peuple, en général
le danger des excès. (Prov. rur. et vulg. ms. de N. D.
n- 2, fol. 12.)
2° « Jà dui orgueilleus ne chevaucheront bien un
0 asne, » pour signifier que l'union est impossible
entre deux hommes orgueilleusement rivaux l'un
de l'autre dans la possession ou dans la poursuite
d'un bien qu'ils souffriroient impatiemment de par-
tager. (Prov. du Vilain, ms. de S'-Germ. fol. 277.)
Trop seroit fort, à verte dire,
Deux orgillex un asi>e eslire
Soffisant por lor chevauchier.
Poëmo de la Mort, MS. du R. n- 6987, fol. 337, R- col. 3.
3° « Cui estli asnes, s'el tiengne par la coue, >> pour
signifier la nécessité de veiller aux affaires qui n'in-
téressent que nous-mêmes. (Prov. rur. et vulg. ms.
de N. D. n"2, fol. 10.)
A" « Pour un point, perdi Gibbert son asne, «
pour signifier qu'en affaires, comme au jeu, il n'y
a souvent qu'un point de la perte au gain. (Prov.
rur. et vulg. ms. de N. D. ir 2, fol. 13.)
Il est probable que si Cardan eût su que long-
temps avant le xvr siècle, « pour un point, Gibert
« perdit son asne, » il en auroit conclu qu'au nom
de Gibert on avoit depuis substitué celui de Martin.
(1) Elle serait curieuse, au point de vue de la langue, l'histoire de ces animaux domestiques que d'abord on évita d'ofîrir
aux yeux, et qu'ensuite on couvrit de périphrases et d'épilhètes pour en rendre la vue supportable. Homère comparait
aans façon Ajax à un àne ; Lamotte traduisit l'animal utile r/uoutmrii'nt nos dédains. Rosset voulut tenter l'aventure, mais
sentant défaillir son audace, il se contenta de dire avec hauteur : « Que ce nom méprisé dégraderait ses vers. » Il craignait
d'ailleurs de faire de la peine au mulet, « dont l'orgueil rougirait si je nommais son père. » Campenon, plus hardi, demanda
la permission de le citer dans une énuméralion : « ... Et même enfm si Vàm; osait paraître. » Delille eut enfln la bravoure
de le nommer sans périphrase ni précaution oratoire. Il aurait eu les félicitations de Sainte-Palaye et de iMouchet :
cependant le public s'élonnait, et Joseph Chénier pouvait écrire : « Un âne sous les yeux de ce rimeur maudit, Ne peut
passer tranquille et sans être décrit. » (n. e.)
AS
— 2i5
AS
Alors il n'eût pas imaginé que ce Martin étoit abbé,
et qu'un Pape l'avoil privé de son abbaye, parce
que dans le vers suivant, écrit sur la porte de ce
même abbé.
Porta patens esto, nulU. claudaris honesto.
la virgule ou le point étoit placé aprè nulU. Ce vers
ainsi ponctué, présentoit un sens dont le Pape, qui
passoil par là, fut, dit-on, tellement indigné, qu'il
en punit l'abbé Martin par la privation de son
abbaye nommée Asello, comme l'attestoit cet autre
vers mis à la suite du précédent :
Fi-o solo puncto caruit Mai-liiius Asello.
Ménage ajoute, d'après Cardan sans doute, que
« parce que le mot italien asello signifie en fran-
« çois âne, on a ainsi tourné le proverbe. Pour un
-' point Martin perdit son âne; au lieu de dire, son
- abbaye. » (Voy. Ménage, Dict. Etym. — Dict. de
Trévoux.) On le répète, si Cardan eût su qu'an-
ciennement on avoit dit de Gibert ce que, de son
temps, on disoitde Martin, probablement il n'en eût
pas fait deux abbés d'AscUo. Peut-être auroit-il
soupçonné que le proverbe « pour un point Martin
perdit son asne, » faisoit allusion à quelque conte
ou fabliau postérieur à celui dans lequel Gibert
n'étoit pas plus chanceux que Martin. Un pauvre
homme, dit Cotgrave, gagea son âne qu'il étoit tout
blanc ; mais celui contre lequel il gageoit découvrit
un poil noir, et le pauvre homme, sans doute
nommé Martin, perdit son gage : de \h, le proverbe
« pour un poil Martin perdit son asne, » le même
que pour un point, etc. (Vov. Cotgrave, Dict.)
Les Frères de l'ordre dé la Trinité, institués en
1108, première année du Pontificat d'Innocent III
furent nommés « Frères aux asnes, » parce que
leur Règle ne leur permettoit en voyage d'autre
monture que Vasne. (Voy. Asnon.) Si les trinitaires
de Fontainebleau, dans un compte de 1330, cité par
Du Cange, (Gloss. lat. T. I, col. 7G1), sont encore
nommes « les Frères des asnes de Fontainebliaut, »
c'est que longtemps après qu'il leur fût permis de
montera cheval, on affecta l'usage de cette allusion
maligne à l'humilité de leur Règle primitive. Cette
permission qu'ils oblinreiù, en 12G7, du pape Clé-
ment, a fait dire à un de nos anciens Poêles :
Cil de la Trinité ont grant fraternité.
Bien se sont aquité, d'a»es ont fait roncin ; etc
Kabl. MS. du R. n- 7C15, fol. C6, V- col. i.
Vasne, qui pour ces Religieux éloit une humble
monture, étoit pour les Bourgeois une monture
aussi ridicule et déshonorante que la jument pour
les Chevaliers. « Quand on veut faire une grande
>< ignominie h quelqu'un , on le mené pourmener
" par toute la ville sur un asne. » (Bouchet, \i' serée )
Ainsi, .. mener Vasne, » c'éloit dans le sens figuré
jouer un rôle déshonorant et ridicule, comme ceux
que 1 on exposoit à la risée et à l'ignominie publi-
que, en les promenant montés sur un asne, en leur
ïaisanl chevaucher l'asne. « Comment!.... tout le
« monde chevaulchera et je mcsneran fasne '^ »
(Rabelais, T. II, p. 221.- Voy. Poésies de Coquillart,
p. 169. — Oudin, Cur. Fr.)
Suivant une ancienne coutume, on déshonoroit
publiquement les Banqueroutiers , on les punissoit
ignominieusement en les promenant par la ville
montés sur un asne, le visage tourné vers la queue :
de là, « monter sur Vas7ie » siguifioit faire cession'
faire banqueroute. (Oudin, Cur. Fr. — Cotg. Dict.)
En certains pays, on a déshonoré de la même
façon les femmes adultères et les maris mêmes de
ces femmes, en les menant, en les promenant sur
un asne. (Bouchet, vm' et xi« serées.)
Les maris qui se laissoient battre par leurs fem-
mes, etoient publiquement ridiculisés et chevau-
cholent l'asne. « Si une femme a battu son mary
« on en chevauche l'asne. » (Bouchet, xr serée.)
.... Se ceste femme a touché
Son mary, il chevauchera
L'.isne, tout au long du marché ;
Ainsi chascun s'en mocquera.
Poês. de Cotiuillart, p. 10.
On auroit peine à croire que cette punition ridi-
cule ait été commune aux maris qui battoient leurs
femmes, si le seigneur des Accords n'affirmoit qu'à
Dijon, en 1583, il avoit été spectateur d'une pareille
farce, exécutée avec un appareil superbe. « A Dijon
« au mois de may, chacun an, l'on a coustume, par
« privilège exprès, de mener sur l'asne les maris
« qui battent leurs femmes, où il se fait très-belle
« assemblée de plusieurs voisins et autres masques
« en fort brave appareil. Or il s'en fit un qui
« fut fort superbe, l'an etc. » (Bigarrures du S' des
Accords, hv. i, fol. 50. — Voy. Asnee.) Peut-être
trouveroit-on l'origine de cet usage dans l'ancien
esprit de galanterie qui se renouveloit tous les ans
le premier jour de Mai, et se manifestoit par tout ce
que le désir de plaire aux Dames faisoit imaginer
de plus flatteur. Elles auroient sans doute été flat-
tées de voir que, pour la punition des abus de la
puissance maritale, la galanterie choisissoit le mois
dont le premier jour étoit consacré si spécialement
aux hommages de l'amour.
L'asne, si avili comme monture, a des qualités
auxquelles on opposoit celles du cheval comme très
différentes et plus estimables, lorsqu'on disoit pro-
veibialement, « revenir des asnes aux chevaux, ..
pour signifier que dans une conversation l'on pas-
soit d'une idée, d'une chose aune autre absolument
différente. (Voy. Bouchet, xr serée.) En disant qu'il
ne « falloit pas lier les asnes avec les chevaux, .. on
vouloil faire sentir la différence de l'homme noble
à l'homme roturier, au vilain, au rustre que l'on
nommoit « asne de plat pays, et l'impossibilité
« d'aucun rapport raisonnable entre des Etres aussi
« méprisés que les autres étoient estimés. » (Voy.
Prov. rur. et vulg, m. de N. D. n» 2, fol. 13.
Cotgrave, Dict. — Moyen de Parvenir, p. 200.) Pour
signifier qu'il est difficile d'inspirer à un homme les
vertus guerrières qui ne lui sont pas naturelles, on
disoit : « il est mal aisé de déguiser un asne en un
« coursier. .. (Voy. Du Bellay, Mém. liv. X, fol. 317.)
On trouve à Vasne une mauvaise grâce à laquelle
on comparoit celle d'un vieillard qui s'avisant, à
AS
216 -
AS
son âge, de faire apprentissage de l'amour, ressem-
hleroil à VAsinus ad lyram des Latins.
Qui n'ama de joueno eage,
C'est li asiles c'oii aprent
A harper contre droiture.
Ane. Poët. Fr. MSS. avant 1300, T. II, p. 8S2.
Enfès de cent ans, n'est pas bel
De joene cuer souz vielle pel :
Moi semble, quant viellars révèle.
Que ce soit asries qui vièle.
Miserere du Recl. de Moliens, MS. de Gaijnat, fol. 213. R- col. 1.
Dans le Songe du Vieux Pèlerin, ouvrage allégo-
rique et moral que Philippe de Maizières, mort vers
la fin du mv siècle, composa pour l'instrucUon dos
Enfans de Charles-le-Sage, l'Auteur semble avoir
désigné Charles VI par le « faucon blanc, à bec et
« à pieds dorés ; et par le cerf blanc volant , »
Louis , duc d'Orléans son frère. Probablement,
Eustache Deschamps , contemporain de Philippe de
Maizières, adoptoit une allégorie qui lui éloit
connue, lorsqu'il menaçoit du " cerf volant, Vastie
« pesant prêt à saillir d'Albion. »
L'asjie pesant sauldra hors d'Albion ;
D'un dos costez courra la fourmiere.
Combatre doit encore le Lion :
Là doit Bruthus estandre sa bannière.
Le cerf volant, à la teste subtile,
Quant il sçaura Vasne sur le pastis,
De son bestail fera venir maint mille.
Eusl. Desch. Poes. MSS. \i. 389, col. i.
On croit que le roi d'Angleterre ainsi désigné par
le Poète, est Henri IV, proclamé roi le 20 Décembre
1399, après la déposition de Richard II ; et que le
cerf volant si redoutable à Vasnc, est Louis duc
d'Orléans, qui dans les premières années du règne
de Henri gouvernoit le Royaume au préjudice du
■ duc de Boiirgogne à qui il avoit enlevé la Régence.
Trop occupé des moyens d'étoulïer l'espVit de
révolte qui agiloit l'Angleterre, le nouveau Roi ne
pouvoit guère songer 'à profiter des troubles de la
France. Peut-être le même Poète désignoit-il cette
impossibilité, en disant:
L'astw est en s'estable,
Qui espargne buef, vaches et brebis.
Ses pastures, allez et subgis.
En deffendant que nulz hors d'iceulx n'aille.
Eusl. Desch. Focs. MSS. p. 139, col. 2.
On ignore si ce nom A'asne étoit l'expression
d'un sentiment de haine nationale, ou une allusion
à quelque vice ou défaut de ce roi d'Angleterre.
Mais lorsqu'Edouard IV, que l'Histoire représente
comme un prince cruel et débauché, s'avisa de
sommer le roi de France de lui restituer les pro-
vinces de Guyenne et de Normandie , et qu'en
réponse à une sommation que les circonstances
politiques rendoient vaine et ridicule, Louis XI lui
envoya un asne, un loup et un sanglier, on imagine
que ce présent, dont la singularité offensa vivement
Edouard, étoit un reproche de son avide cruauté et
de sa débauche effrénée. (Voy. Chron. Scandai, de
Louis XI, p. 21G ; an l-iT'i.)
En disant que Vasne, consacré à Priape à cause
de sa lascivité, <■ semble se moquer quand il desnue
« ses dents, • on se le figure avec certains trait»
de la physionomie du Satyre, être fabuleux que les
Poètes ont doué de qua'lités ciui l'assirailoient à
Vasne. (Voy. Bouchel, xr serée.) Comme animal
lascif, il étoit le symbole de la partie animale de
l'homme ; et pour signifier que cette partie devoit
être modérée par la partie raisonnable, que le
corps devoit être l'esclave de l'àme, on disoit
ligurément :
Quant entre nos bras gist le mors.
De l'ame soit asnrs 11 cors ;
Si le face en tel liu loier
U il ait mains de ses depors.
Poëme de la Mort, MS. du Roi, n- 6987, fol. 340, V- col. 2.
Dans les vers suivans, Vas7ie est le corps qui
tombe dans la fange, et qu'on relève avec moins de
peine que l'àme tombée dans l'ordure du péché.
Asilcs, quant trop grand fais li grieve,
S'il chiet, il est prest qui le lieve
De la boe, et qui le relevé :
Ame, quant par péchié meschieve,
Poi trueve mais qui larelieve.
Dit de Cliarité, MS. de Gaignat, fol. 221, R- col. 2.
Il semble qu'on ait désigné l'avilissement auquel
expose la recherche des plaisirs sensuels, en disant
proverbialement :
Qui astw quiert, à asnc tent.
Por cou ruis (1) à Diu seulement
Servir de cuer plus que ne soel (2).
roème de la Mort, MS. du R. n- 6987, fol. 342, R' col. 3.
On exprimoit sans doute son mépris pour une
femme galante jusqu'au libertinage, lorsque pour
signifier qu'elle avoit plusieurs Amans, on disoit
que pour elle « il y avoit plus d'un asne à la foire. »
(Voy. AsNEssE.)
Amis, por Dieu, c'est chose voire
Qu'il a plus d'un asne à la foire :
Car vo Dames a plusieurs acointes,
Joennes, jolis, appers et ceintes,
Qui la vont visiter souvent.
Poès. de G. Macbaul. MS. fol. 203, R* col. 2.
L'asne, si enclin à l'amour, paroi t être pour tout
le reste d'une indifférence stupide. « A cause que
« Vasne est la beste la plus stupide de toutes les
« autres, il est pris pour l'ignorance. » (Bouchet,
XI' serée.) Ainsi, l'on a dit proverbialement :
Roy sanz Lettres comme un asne seroit ;
S'il ne savoit Tescripture ou les Loys,
Chascun de ly partout se moqueroit.
Eusl. Dcscli. Pocs. MSS. p. 263, col. 1.
Roy sans Lettre est comme asne couronné.
Id. ibid. p. 338, col. 1.
Ce proverbe plaisoit tant à notre Poète, qu'on le
trouve répété, (ibid. p. 550.) C'étoit probablement
d'Eustache Deschamps que parloit Alain Chartier,
lorsqu'après avoir observé que « se homme a
« excellence sur les bestes par sçavoir, bien doit
■c surmonter les autres hommes en science, qui sur
« les hommes a seigneurie, » il ajoutoit : « si ne
« sçaui'oye reprendre celuy qui dit que le Roy sans
« lettres est un flsuéî couronné. » (Œuv. d'Al. Char-
tier, p. 316.) Peut-être ignoroit-il l'ancienneté d'un
proverbe qui vengea Foulques III, comte d'Anjou,
(1) Je demande; en latin rogo. — (2) .J'ai coutume; en latin solco.
AS
- 217
AS
des plaisanteries que Louis d'Outremer et ses
courtisans avoient faites de lui, parce qu'ils l'avoient
vu, dans l'église de Saint-Martin de Tours, assis
parmi les Clercs, habillé comme eux, et chantant
l'Office divin. L'Auteur des Gestes des premiers
comtes d'Anjou , raconte qu'offensé de ces plaisan-
teries, Foulques écrivit à Louis en ces termes-
« Régi Francorum, Comes Andegavorum. Noveritis,
« Domine, quia inlileratus rex est asinus coro-
« natus. '• Si on l'en croit, le Roy avoua la vérité
de ce proverbe. « Quibus literis peiiectis, Rex
« Francorum vero proverbio tactus ingemuit
. dicens ; verum est, etc. » (Voy. Duchesne, Annot
sur les Œuvr. d'Al. Chartier, p. 853.) C'étoil donc
un ancien proverbe frangois, trop oublié des Princes
et Chevaliers des xiir, xiv« et xv siècles. Aussi
disoit-on, en parlant d'eux :
Noble ne scet engin ne art.
Ne qu'un des asnes de Senart
Qui bûche porte.
Fabl. IIS. du R. n" 7615, fol. 101, V col. 1.
Quelque piquans que fussent les traits avec
lesquels on attaquoit l'orgueil du .Noble ignorant
une fausse opinion l'y rendoit insensible. Cette
opinion eloit que « bien lire ou bien escrire, étoit
« reprouche de gentillesse, et que Noble homme ne
« devoil sçavoir les Lettres. » (Voy. Œuv. d'Al
Chartier, p. 310.) Comment les Lettres n'auroient-
elles pas été dédaignées comme inutiles, par des
hommes à qui, pour se faire honorer et aimer il
sufflsoude combattre pour les Dames et leur Sou-
verain? La force leur tenoit lieu de tout, même de
la Justice.
On a dit que les vertus occultes auxquelles les
Philosophes ont eu trop souvent recours, pour
éviter l'aveu de leur ignorance, étoient \epont aux
as7ies. .. C est le pont aux asnes de recourir à ces
« vertus oculles. » (Bouchet, xr serée.)
C'est par allusion aux effets ordinaires de l'igno-
rance, qu en parlant de personnes et de choses
auxquelles il étoit sot et imprudent de se fier on a
dit qu'il y avoit de Vasm'. « Il y aura ici de Vasiie
« je le prevoy Andouilles sont andouilles'
« tousjours doubles et traislresses. .. (Rabelais '
liv. IV, p. 153 et 154.) « Disoit que lesdiclz masqués'
« par les propos qu'ilz tiennent ausdictes damov-
" selles, taschent ù les desgouster de leursdictz
" marjs;.... qui est cause que quelquefois il v ha
« de 1 «SHC et de la mule esdictes femmes « (\resta
amorum, p. -408.) On disoit d'un homme qui dérai-
sonnoit avec une sotte confiance, qu'il » faisoitde
« Vasuc ; » expression proverbiale qui sisnifioit
aussi faire le sot, feindre d'être sot. « Gara«se
» fait de l'asne, tout ainsi qu'il s'est donné la per-
« mission de dire à Pasquier.... qu'il fait du veau •
<■ car puisqu'il avoit envie de prouver qu'il n'est
« point Espagnol, il ne debvoit nous donner à con-
« jecturer le contraire par ses paroles. » (Défense
pour Pasquier, p. 246. -Voy. Cotgrave, Dict -
Oudin, Cur. Fr.)
On comparoit à la stupidité de Vasne , celle d'un
homme insensible à ce qui devroit toucher son
cœur et l'attirer, ou flatter son esprit et le séduire
en disant que faire pour lui des choses agréables
ou utiles, c'étoit « chanter à Vasne, faire ses chants
" an cul de Vasne. « (Voy. Eust. Deschamps, Poës
Mss. p. 22, col. 3. — Cotgrave, Dict.)
Chantez à l'osée, il vous fera des pès.
Eust. Descliamps, Pof-s. MSS. p. -23, col. 2.
Il est possible que dans un sens analogue à celui
de 1 expression « chanter à Vas7ie, » 'on ait dit
« prendre les asnes à la glus, .. en général perdre
sa peine. iVoy. Id. ibid. p. 22.)
VARI.^NTES :
ASNE. Prov. rur. et vulg. MS. de N. D fol 13
Adne. Livres des Rois, MS. des Cordei foi 10
Ahne. Assise de Jérusalem, p. 212
Aisne. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. p 315
AiSNES. Id. ibid. p. 257.
Ane. Fabl. jMS. du R. n» 7615, fol. 66
AsGNE. Journ. rie Paris, sous Charles VI, p 97
ASNE.S. Dit de Charité, .MS. de Gaignat, folT221."
Asnée, subst. fém. Charge d'un âne. Espèce de
cotisation.
On nommoit asnée, la charge d'un âne, quelle
que fut la bête de somme qui portoit cette charge
" Avoit contraint ledit Renel de composer à lui à
«xxasnees, et ledit Gauvain à vm asnées de Vin »
(D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Cange au
mot 4sni«/rt;tit. del377.) . Unam asinatam %eu
» chargiam'Vini, quam desujter equum \e\ jumen-
" tum ducebat, abstulerunt. » (Id. ibid — Vov
Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis.)
Dans les villes où l'on chevatichoit Vasne pour
avoir ete battu par sa femme, ou pour l'avoir bat-
tue, cette punition ridicule et déshonorante étoit
sans doute ordonnée par celui que les Nouveaux
.Maries elisoient entr'eux chaque année, pour veiller
et iaire veiller à l'observation des devoirs mutuels
du mariage. » De toute ancienneté l'en a acoustumé
« a Ermenonville le jour de la My-Karesme que
« les jeunes gens nouveaulx Mariez en l'année
« prouchainement précédent font certaine teste et
« eslisent 1 un d'entre eulx qu'i'lz appellent \e Sei-
« gneur de Grant, lequel fait par chacun an certains
« procureurs pour refformer et corriger par ebas-
« tement tous ceulx dudit lieu qui se sont mal gou-
•< veniez ou portez en leur mariage durant ladite
" année. » (D. Carpentier, Suppl. 'au Gloss. lat. de
Du Cange, T. I, cul. 804 ; lit. de 1460.) Non-seule-
ment les nouveaux Mariés, mais les autres et
même les garçons, payoient, à certain jour de l'an-
née, un droit à ce Seigneur de Grant, c'est-ù-dire,
au Seigneur de la Grant terre , autrement nommé
le Seigneur des Chetifs, ou le Maire de la Chetiveté.
Probablement on se cotisoit pour se réjouir tous
ensemble, et pour égayer le spectacle boulTon que
donnoient le même jour les Maris condamnés par
» le Maire de la Chetiveté l'i chevaucher Vasne à
« être promenés sur un asne , à être chariés .
comme on lit dans un titre de 1377. .< Le Maire de
« la Chetiveté a ordonné que tu soies cliariez; car
"tu 1 as desservi pour ce que ta femme t'a batu .
(D. Carpentier, ubi supra.) « En la ville de Avise en
28
AS
— 218 —
AS
« Champagne,... le Maire des Chestiz faisoit
« contraindre les nouveaulx Mariez à payer chacun
« cinq solz, et les autres Compaignons nouveaulx
« venus ou autres estans à marier, à payer chacun
« une somme au dessoubz de cinq solz. » (Id. ibid.
lit. de 14G!).'! « En la Ville de Sueil sur Ayne et au-
« très Villes circumvoisines, de tous temps etd'an-
« cienneté, les Gens mariez ont acoustumé par
« forme de récréation eulx assembler le joui' de
« Caresme prenant, disner ensemble , et les nou-
« veaulx Mariez d'icelle année payer leur bienve-
« nue, et faire obéissance à l'un d"eulx qui se dit et
« nomme par forme d'esbatement le Seigneur des
. Chetif:^ ou de la Craiit terre. » (Id. ibid. lit. de
1472.)
Ainsi, « payer sa part de Yasnée ou de Yasne ,
« payer par forme à'asne, » c'étoit vraisemblable-
ment se cotiser pour la dépense de ces jours de
fêles bouffonnes, se cotiser comme il étoit usité en
ces jours de fêtes, égayées par le spectacle ridicule
des Maris qui ehevduclioient l'asne. « Pour payer
« leur part de hiditte asnée ou dudit asne, etc. »
(D. Carpenlier, Suppl. au Gloss. lat. de Du Gange,
T. I, col. 326 ; til. de 1447.) « Pour payer leurescol,
« les Supplians promisdrent payer /;«?• forme d'asne
« mr tourteaulx de Guesde. » (Id. ibid. — Voy.
AsNE, chevaucher l'asne.)
Asnerie, siibst. (ém. Exercice de la profession
d'Anier, de Meunier. Anerie, ignorance de ce qu'on
croit bien savoir.
D. Carpentier ne se seroit-il pas trompé en défi-
nissant asnerie, droit seigneurial payé par les Meu-
niers qui reporloient la farine à ceux à qui elle
appartenons « Les Fermiers, Muniers ou Asners
« desdiz moulins.... paieront chascun an.... ans
« rentiers ou aus fermiers qui tenront les rentes
« ou fermes de ladite Ville de Meleun quatre livres
« deparisis; et pourtant seront quite, franc et
" délivré.... de toutes autres servitudes paier, quant
« pour raison d'asnerie. « (D. Carpentier, Suppl.
au Gloss. lat. de Du Gange, au mot Asinitas; tit. de
1308.) On soupçonne que dans ce titre , asnerie
signifie l'exercice de la profession d'Anier, de Meu-
nier, parce que les Meuniers ou Asniers se sont
toujours servi d'asnes plus communément que
d'autres bétes de somme, pour apporter le blé au
moulin et en rapporter la farine. (Voy. Asnikr.)
On a nommé plante des Asnes, ïa férule; par
allusion sans doute au goût des Anes pour cette
plante, (jue Pline dit être mortelle à toute autre
bête de somme. Les tiges de cette plante sont hau-
tes, légères et moelleuses ; par conséquent propres
à fairenaitre l'idée de l'usage fabuleux qu'en fit
Prométhée. « On a feint qu'il déroba le feu du Ciel
« qui nous anime par le moyen de la plante des
« Asnes qu'on nomme férule; "pour dire, ce me
« semble, que nos plus hautes connoissances sont
« des asncries. » (La Mothe le Vayer, T. X, p. 12.
— Voy. AsNE, animal sluinde.)
Asnesque , adj. Stupide , ignorant. Stupide
comme l'Ane. (Colgrave et Oudin, Dict. — Voy.
AsNE, animal stupide.)
VARIANTES :
ASNESQUE. Cotgrave, Dict.
AsiNESQUE. Oudin, Dict.
Asnesse, suhst. j'ém. Anesse. Le sens figuré
dans lequel on a dit que, « de petit aguillon point-on
« grant asnesse, >> est d'une obscénité grossière,
dans les Prov. du Vilain (m*, de S" Germ. fol. 75, R°
col. 1. — Voy. AsNE, animal lascif.)
Asnier, subst. masc. et adj. Anier, conducteur
d'ânes. Ignorant, lourdaud, sot, stupide.
Quelle que fût la dénomination particulière de
ceux qui par leur état sont destinés à conduire des
ânes et autres bêtes de somme, comme les Meuniers,
les Muletiers, il est possible qu'on les ait compris
sous celle d'.ls/u'fr, conducteur d'ânes. (Voy. Cot-
grave, Oudin, Mcot et Monet, Dict.)
Erinenfrois sera li mausniers,
Et sire Bauduins asrncrs.
Ane. Poél. Fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1361.
Une preuve qu'/lsn/i"»" peut avoir signifié Mule-
tier, c'est que les François , ayant attaqué le 12
Mai 1511, et mis en déroule l'armée du Pape et des
Vénitiens devant Boulogne, nommèrent cette « dé-
'■ route la journée des Asniers, pour ce qu'ilyeust
« tant de mulets pris dedans les fossez, sur le grand
« chemin et autre part. » (Voy. Mém. de Rob. de la
Marck, sieur de Fleuranges, ms. p. 111.)
Il sembleroit qu'Asiiier. conducteur d'ânes de
moulin, fût synonyme de Meunier, lorsqu'on disoit :
" Muniers ou Asners des moulins jiaierontchas-
<•■ cun an, etc. » (D. Carpentier, Suppl. au Gloss.
lat. de Du Gange, au mot Asinitas; tit. de 1308. —
Voy. AsxERiE.) C'étoit dans le sens de Meunier ou de
Conducteur d'ânes de moulin que, pour signifier
les malheurs de la disette dans une ville, on disoit
proverbialement : « Dolente la Vile que Asniers poi
« voit. » (Prov. du Vilain, ms. de S' Germ. fol. li.)
On s'est moqué de l'ignorance de l'homme qui
croit tendre à un but, lorsqu'il est dirigé vers un
aulre par celui qui le conduit, en disant proverbia-
lement : « Une pance li asnes, et l'autre li asniers. «
(Prov. rur. et vulg. ms. de N. D. n° 2, fol. 12.) « Ung
« pansse ly asgne, et l'autre ly asgnier; et Dieu
« qui muale propos de Oloferne, tourna leurjoye...
« en tristour. » (Journal de Paris sous Charles VI
et Charles VII, p. 97.)
Le proverbe « à rude asne rude asnier, « pro-
verbe dans lequel ou aperçoit le principe de la for-
mation et signification de l'adjectif rudanier, dési-
gne la nécessité d'être rude à l'homme indocile ou
rebelle à la volonté de celui ([ui doit le conduire et
s'en faire obéir. On désignoit la nécessité de ruser
avec celui ([ui rusoit pour se soustraire à la con-
duite et à la volonté d'un maître, en disant prover-
bialement : » Contre viseuz asnon, viseuz asnier. «
(Voy. Prov. rur. et vulg. ms. de >'. D. n° 2, fol. 12,
V° col. 1. — Cotgrave, Dict.)
C'est relativement à l'idée d'asne, animal stupide
et lourd, (\n'asnier a signifié lourdaut, stupide, sot.
AS
219
AS
ignorant. (Voy. Contes d"Eutrnpel, p. 126. — Bigarr.
du Seig' des Accords, fol. 11, R° etc. — Cotgrave et
Oudin, Dict.)
Que voulez-vous que je vous die?
Je suis pour ung asmjer tenu
Oui vouldra, pour moy estudie :
Trop tart je m'y suis entendu,
Es derniers jours de ma vie.
Poës. de Charles duc d'Orléans, MS. p. 27, col. \.
Rabelais, plaisantant sur la connoissance abusive
des Décrétâtes, fait dire à Ilomenaz : " Qui faict en
« plusieurs pays les Escoliers badaulx et
« asniers ? Leurs précepteurs n'estoient décre-
" talistes. « (Rabelais, liv. IV, p. 226.)
Dans le xvr siècle , une sotte excuse étoit une
excuse asniere. « Je ne m'émeus pas une fois l'an
« des fautes de ceux sur lesquels j'ay puissance:
« mais sur le poinct de la bestise et opiniastreté de
" leurs allégations, excases et défenses asnieres et
<c brutales, nous sommes tous les jours à nous en
« prendre à la gorge. " (Essais de Montaigne, T. III,
p. 257. — Voy. AsNE, animal stupide.)
VARIANTES :
àSNIER. Ane. roët. Fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1361.
Anier. Monet, Dict.
AsGNiEH. .Tournai de P. sous Charles VI et Ch. VII, p. 97.
AsNER. D. Carpentier, S. au G. I. de Du C. aumot A:-i)iitas.
Asniers. Prov. rur. et vulg. MS. de N. D. n» 2, fol. 12, V".
AsNYER. Poës. de Ch. duc "d'Orléans, MS. du R. p. 27.
Asnière, subst. fém. Lieu où l'on élève des
ânes. De là, tant de Villages en France nommés
Asnière [\]. C'est par allusion à la stupidité de l'âne,
qu'on disoit d'un ignorant, d'un sot , « qu'il étoit
« logé à Asnieres, qu'il avoit étudié, qu'il avoit fait
<■ son cours à Asnieres. » (Voy. Oudin , Dict. et
Cur. Fr. — Défense pour Est. Pasquier, p. 573. —
Dict. de Trévoux.)
Asnine, adj. et subst. fém. Charge d'un âne.
(Voy. AsNÉE.) En termes de Pratique, on dit encore
Bête asine. Il est posible qu'en supprimant le subs-
tantif charge ou somme, l'adjectif az-nie ait signilié
la même chose que somme fls«/H(', la charge d'un
âne. « Pour cause de ce ont veu paier aux fermiers
« d'iceuls Religieux par plusieurs fois 4 azines de
« blé. » (Du Cange, Gloss. lat. au mot Aùna.)
.... Tant a robe lange et Une
Qu'ele poise une somme asniue.
Miserere du Recl. de Moliens, MS. de Gaignat, fol. 207, V° col. 2.
VAP.IAINTES :
ASNINE. Miserere du R. de Moliens, MS. de G. fol. 207.
AziNE. Du Cange, Gloss. lat. au mot Azi)m.
Asnon, subst. inasc. Anon. (Voy. Asne, mon-
ture.) La monture des Trinitaires, dans l'origine de
leur institution, paroissoit si humiliante, qu'un de
nos anciens Poètes satyriques a dit :
Ains c'on m'apiaut frère à Vasnon,
Ara meut pieu et venté ; etc.
Description et plaisaoce des Religions, MS. de N. D. fol. 16.
Aspection, subst. jém. Aspect, spectacle.
.... Vit des Cieulx l'aspection,
Et le filz au père monté.
Estant à son dextre costé.
J. de Meung, Test, vers H80-H82.
Aspée, subst. fém. Epée. (Livres des Rois , ms.
des Cordel. passbn. — Voy. Espée.)
Asper, adj. et subst. Rude. Bâton noueux.
L'adjectif «s/jcrs ou asper, au féminin aspère,
étoit évidemment le même que aspre, en latin asper,
aspera, rude au goût, rude au toucher, lorsque sans
transposition de \'e, on disoit figurément :
S'oncques à ses subjects fut aspei-s, ne grevable ;
A touts leur est courtois, et doux et favorable,
Ger. de Roussillon, MS. p. 89.
Juppiter père,
Qui tout tempère,
Paix nous octroyé, et guerre aspère
Eslongne de nostre Emysfere.
Poës. de Grelin, p. 144.
C'est sans doute par ellipse d'un substantif, que
l'adjectif rts;)«' signilioit une espèce d'arme, un
bâton noueux, par conséquent rude au toucher.
Tient un aper que il paumoie ;
Si est saillis enmi la voie.
Fabl. MS. ilu R. n- 7218, fol. 191, V- col. 1.
Le Forestier m'a truef, si a tret son usper (2),
Et a batu mon test, la paule et le costet.
Ibid. fol. 190, R' col. 2.
Peut-être aussi (\\ï asper ou aper en ces vers, est
une altération à' épié, espié, espiel, espieuon épieu.
VARIANTES :
ASPER. Poës. de Crétin, p. 164.
AspERS. Ger. de Roussillon, MS. p. 89.
Aper. Fabl. MS. du R. n« 7218, fol. 191, V» col. 1.
Asperague, subst. masc. Espèce de plante.
Les jeunes pousses de cette plante cuisent si promp-
tement que, pour signifier la promptitude extrême
avec laquelle on devoit faire une chose, l'on a pu
dire qu'elle devoit être faite, « plustost que ne sont
« cuits asperges; expression proverbiale, familière
« à l'Empereur Auguste. » (Voy. Rabelais, liv. V,
p. 30. — Id. ibid. Note de Le Duchal.)
Cette terminaison d'asperge étant féminine en
apparence, on a dénaturé le genre d'un nom origi-
nairement masculin en françois, comme asparagus
en latin, en grec daTrâpayos. L'opinion des Etymolo-
gistes, à qui ces noms offrent une analogie de
signification avec celle de l'adjectif latin asper, en
fraiu;ois aspre, paroîtra peut-être d'autant plus
vraisemblable que : « La coustume fut jadis en
« Boëcie, que les bonnes et honnestes Matrones
« approuchantes pour devoir coucher la nouvelle
« Mariée, luy fai.'^oiunt ung chappellet sur la teste de
« branches ile as/nwtnjcs aspres et mal gracieux,
« voulans dire qu'il laluit endurer les rudesses du
« mary. ■■ (Voy. Borel, Dict. T" add.)
VARIANTES :
ASPERAGUE. Borel, Dict.
AsPARAGE. Id. ibid. 1"* add.
(1) On trouve encore VAnerie (Eure-et-Loire), VAne-Benoit (même département), et même Amin (Asinium). (N. E.) —
(2) Ne faudrait-il pas lire aspec, et même aiiapet, le trait abréviatif étant etïacé sur a, et l manuscrit étant devenu r ?
Anspect, conservé dans la marine, vient de l'allemand hand, main, et spike, bâton pointu. (N. e.)
AS
— 220 —
AS
ASPARGE. Oudin, Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict.
Asperge. Rabelais, liv. iv, p. 26.
Aspératif, adj. Apéi'itif. (Voy. Aspre.) On aura
désigné la qualité âpre des apéritifs, en les nom-
mant aspérutifs.
Toutes choses laxatives
Et qui seront uspératives
Vueillez user communément ;
Si en vivras plus longuement.
Eusl. Desch. Poës. MSS. p. 486, col 2.
Aspérer, verbe. Rendre âpre, rude. Au figuré,
exaspérer, rudoyer ; en latin asperare. (Cotgrave,
Dict. — Voy. AsPRiR et Asproier.)
Aspergement, subsf. jnasc. Aclion d'épandre
par petites gouttes. Dans une signiTication plus
générale que' ne Test aujourd'hui celle d'aspersion,
l'on a dit : » Arroser, en iorme à'aspergement avec
. la bouche, d'un peu d'eau nette et fresche. >> (Du
Fouilloux, Fauconnerie, fol. 49. — Voy. Asperger.)
Aspergeoir, subst. masc. Aspersoir. (Voy.
Inventaire des Joyaux et Meubles de Charles V, ù la
suite de son histoire par Choisy, p. 525.)
Asperger, verbe. Epandre par petites gouttes;
arroser. L'acception de ce verbe, presque restreinte
à l'usage religieux des aspersions, étoit autrefois
plus étendue.Dans le sens général d'épandre par
petites gouttes, on disoit : asperger de l'eau sur les
fleurs, asperger du vinaigre sur les viandes, les
asperger de vinaigre ou d'eau, pour les en ai-roser.
(Monet, Diul. — Voy. AsPERGE.MENr et Aspersion.)
Xsperges, subst. masc. Aspersoir. On croit que
par allusion ù Vasperges me lnjssopo du psaume
Miserere, l'on aura désigné un aspersoii' par le mot
latin asperges, altéré dans aspergets. « L'asperges
« remply d'eau-béniste, etc. » (J. Chartier, Ilist. de
Charles VII, p. 298. — Voy. Rob. Estienne, Nicot et
Monet, Dict.)
VARIANTES :
ASPERGES. Orth. s. - J. Chartier, H. de Ch. VII, p. 298.
Aspergets. Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict.
Xspersev, verbe. Epandre par petites gouttes;
arroser. Du participe latin aspersus, s'est formé le
verbe françois asperser, de même signification
qu'asperger, en latin aspergere. (Voy. Cotgrave et
Oudin, Dict.)
Aspersion, subst. fém. Action d'épandre par
petites gouttes; action d'arroser. (Voy. Rob.
Estienne, Nicot et Monet, Dict.)
Asphodèle, subst. masc. Genre de plante ; la
Heur, la racine de celte plante. En \-M\ii (isphodelus ;
d'où asplioilêle, par corruption asphrudile, aphro-
dile, afrodile; genre de plante dont la racine a la
forme d'une botte de navets. On a vu des Peuples,
particulièrement ceux des Provinces méridionales,
manger comme des navets les racines de Vaspho-
dèle^en faire une espèce de pain dont ils se nour-
rissoient en temps de disette.
L'usage de cette nourriture semble remonter à la
plus haute antiquité, puisque les Anciens croyoient
pourvoir à celle des mânes de leurs parens et amis,
en plantant la mauve et Yasphodèle autour de leurs
tombeaux. Dans les temps où la superstition faisoit
à l'amitié et h la nature un devoir de songer aux
besoins physiques d'une vie future, il^ est probable
qu'un traité sur la mauve et Yasphodèle, n'étoit pas
aussi frivole qu'on pourroitse l'imaginer, en lisant
que " les plus grands personnages se sont amusez
>i à traicter des frivoles et légères matières;
« comme Hésiode, la malve et Vaphrodile. »
(Voy. Des Accords, Bigarr. ubl supra.) C'est par
allusion à cette prétendue nourriture des mânes
qu'on a dit : « Ne pensez que la béatitude des
« Ileroes et Semidieux qui sont par les Champs
« Elysiens, soit en leur Asphodèle, ou Ambroisie,
« ou Nectar. » (Rabelais, liv. I, p. 83.)
L'asphodèle est de deux espèces. Celui dont les
fleurs découpées en six parties, sont extérieure-
ment rayées de lignes purpurines, est vraisembla-
ment Vaphrodillè mâle, distingué de Vaphrodille
femelle, qu'on soupçonne être celui dont les fleurs
et les racines sont de couleur jaune, mais de même
forme que celles de Vaphrodille mâle, autrement
nommé aphrodille blanc. (Voyez Cotgrave et
Nicot, Dict.)
VARIANTES :
ASPHODÈLE. Orth. sub. - Rabelais, Uv. I, p. 83.
Afrodile. Monet, Dict. au mot Asphodèle.
Aphrodile. Des Accords, Bigarr. avis au Lecteur, p. 3.
Aphrodille. Cotgi-ave, Nicot et Monet, Dict.
AsFODÈLE. Dict. de Trévoux, au mot .Asphodèle.
AsPHODiLE. Cotgrave, Rob. Estienne et Nicot, Dict.
AsPHRODiLE. Cotgrave, Dict.
ASPHRODILLE. Id. ibid.
Aspirement, subst. masc. Aclion d'aspirer, de
respirer. Aclion d'inspirer. (Voy. .\spirer.)
Dans le sens figuré de respirer une chose, y aspi-
rer, la désirer comme étant aussi essentielle à la
satisfaction d'un besoin, que l'est à la conservation
de la vie l'air qu'on aspire et respire ; on a dit de
personnes qui toutes vouloient et désiroient la
même chose, qu'elles étoient « toutes d'un aspire-
» ment et d'une volonté. » (Voy. Chron. Fr. m. de
G. de Nangis, an 1096.)
En comparant à l'action de l'air sur le poumon,
l'action invisible du souffle divin dans une âme
qu'il inspire, on disoit :
Ne font pas par commandement.
Mais par devin aspii-e»ient.
Lucidaires, .MS. de Gibert, fol. 4, V.
Aspirer, verbe. Aspirer ; respirer. Quoique
aspirer soit d'usage en Physique dans la significa-
tion d'attirer l'air, le respirer, on ne diroit plus
" as])irer son haleine; aspirer la mère goutte, »
par une comparaison assez naturelle de l'action de
boire â celle d'aspirer l'air. « Le cerf aspire
« son haleine en la fraischeur et humidité de la
« terre. « (Du Fouilloux, Vénerie, fol. 42, R°.)
.... En uspifani la mère goutte.
Et la savoure bien et tjouste.
J. de Meung, Test, vers 160 cl 181.
Anciennement, comme aujourd'hui. Ton distin-
g'uoit aspirer, de respirer. (Voy. Hist. de la Toison
AS
— 221 —
AS
d'or, Vol. 11, fol. 87, R° col. 1, etc. — Rob. Eslienne
et iMcot, Dict.)
Recevons petit à petit,
Sanz trop mangier, nostre appétit ;
Sanz trop emplir le conduit,
Pour aspirer et respirer.
Eusl. Desch. Poés. MSS. p. 406, cjI. i.
Cette distinction n'éloit pourtant si constamment
observée, qu'aspirer n'ait signifié respirer, attirer
l'air dans sa poitrine et l'en repousser par le mou-
vement des poumons. « Se cet homme aspire
" encor, ergo il n'est pas mort. « Fabri, Art de
Rhotori(iue,liv. I, fol. GG. — Voy. Monel, Dict.)
Aspoi'ter, verbe. Transporter. En latin aspor-
tare, porter d'un lieu à un autre. " Se par.. ..bonne
« garde et diligence, il est bien obvié aux malices
" des portans billon, ou asportans fausses et con-
« trefaites monoyes, etc. >■ (Ord. T. III, p. 150. —
Voy. PORTF.R.)
Aspre, adj. Raboteux, inégal. Stérile, aride.
Rude à sentir, rude au goût, au tact, à l'odorat, à
l'ouie et à la vue. Ardent, actif, bardi.
Selon plusieurs Etymologistes latins, du grec
âWoçof s'est formé le latin usper, qui, dans le lan-
gage des anciens .\giicoles, désignoil un sol pier-
reux et aride, par conséquent stérile et inculte.
(Voy. Vassius, Etym. ling. Lai.) Lorsqu'en parlant
d'un lieu raboteux et inégal, on disoit qu'il étoit
aspre et rude, comme on litdans le Dictionnaire do
Nicot, il sembleroit que, dans un sens relatif h
l'étymologie du latin asper, le françois aspre eùl
signifié pierreux, inculte : stérile, aride, lorsqu'en
parlant d"un pécheur qui ne porte aucuns fruits de
pénitence, on le comparoit au figuier de l'Evangile.
Lancelot « ayant ouï une voix qui l'avoil appelle
« plus dur que pierre, plus amer que fiel, et plus
<■ aspre que ung figuier, » consulte un Hermite sur
le sens de ces paroles. L'IIermite lui répond
qu'étant ■< du tout desgarny de fueilleset de fleurs,
« c'est-à-dire, de toutes bonnes œuvres, il étoit plus
« aspre, plus stérile, plus aride que le figuier
•< dont est faicte mention en l'Evangille du jour
« de la Pasque flourie, » puisque ce figuier que
dessécha Jésus-Christ, parce qu'il ne portoit point
de fruits, étoit du moins » bien garny de fueilles. »
(Voy. Lanc. du Lac, T. III, fol. 7G. - Ibid. fol. 78.)
On a la preuve que la stérilité d'un sol, probable-
ment aride et pierreux, a été désignée en latin par
le substantif asperitas. (Voy. D. Carpentier, Suppl.
Gloss. lat. T. I, col. 329.)
11 seroit possible que par analogie l'on eût nommé
fruits aspres, les fruits que produit naturellement
un sol aspre et inculte; même ceux dont la culture
adoucit plus ou moins l'àpreté originelle. De là
l'adjectif aspre, qui semble d'ailleurs inventé pour
peindre l'effet d'une sensation désagréable au goût,
auroit pu signifier, par extension, ce qui est
désagréable et rude à sentir en général. « Cil ki
« morz est, despeilet assi bien les sueys choses de
« cest munde cum les aspres. » (S' Bernard, Serm.
fr. MSS. p. 3U.)
Dans ce même sens, on a dit : aspre faim, aipre
torment, etc. (Modus et Racio, ms. fol. 115, R°. —
Chans. fr. ms. de Berne, n° 380, part, ni, fol. M.)
Cette acception générale étant particularisée,
aspre signifioit rude au tact :
Que vaut la blanche char, plus que s'ele fust bleue,
Quant ne lessez sentir s'ele est aspre ou sueue?
Fabl. MS. Ju R. n- 7218, fol. 388, V col. 2.
.... Quant cars est rlisciplinée,
Aspre drap, povre cuisinete,
Travaus, velliers, pensée nete.
L'ont tost de grasse enluminée.
Poonie de la Mort, MS. du R. n- 6987, fol. 337, R' col. 4.
Peut-être, rude à la main, difficile à manier,
lorsqu'en parlant d'un cheval, on disoit qu'il étoit
aspre.
Moult trouvoit aspre
Le cheval sor quoi il séoit.
Clécmadès, MS. de Gaijnal, fol. 3, R" col. 2.
Au figuré, rude; qui n'a point l'esprit maniable,
qui a de l'aspérité, de l'àpreté dans le caractère, qui
est rude en sa façon, en ses mœurs. (Rob. Estienne,
ïNicot et Monet, Dict.)
Tex a vestue l'aspre haire,
Qui aspres est et de maie aire.
Vie de Théophile, Evèiiue. MS. du R. n- 6987, fol. 313, V» col. l.
Enfin, l'adjectif aspre désignoit non-seulement
ce qui est rude au goût et au tact, mais ce qui est
rude à l'odorat, à l'ouie et à la vue ; par conséquent
ce qui est rude à sentir en général. (Rob. Estienne,
Nicot et Monet, Dict.)
Probablement, on assimiloit à faction de l'àpreté
sur nos sens, à l'effet de l'àpreté d'un feu ardent,
ce que l'ait sentir à l'àme l'ardente activité des pas-
sions, lorsqu'en parlant d'une personne ardente à
vouloir et à faire une chose pour laquelle elle se pas-
sionnoit, on disoit qu'elle y éloil aspre, qu'elle étoit
» aspre à recouvrer liberté; aspre à escrire contre
« les vices. ■■ (Rob. Estienne et Mcot, Dict.) « Si fut....
« aspre de s'en vouloir venger. » (Percef. Vol. VI,
fol. 40.) » La bonne Dame estoit jeune, aspre et
» désirant de tous inaulx destourner. » (Ibid, fol. 87.)
Cil Arcevesques Robiers
Ki moult fu vallans et apriès,
Al tière a une feme prist ■
Contre Lois et Decrès le fist.
Ph. Mouskes, MS. p. 387.
Il résulte de ces divers passages que, si les objets
pour lesquels on se passionnoit ardemment étoient
louables ou regardés comme tels, l'adjectif aspre
étoit un éloge. Aussi, disoit-on d'une Princesse
ardente à l'étude et passionnée pour les Sciences,
qu'elle étoit saçans et aspre ; d'un homme ardent à
la chasse et au vol, et passionné pour les oiseaux
et les chiens, qu'il étoit aspre ; d'un valet passionné
pour le service de son maître, ardent à le servir,
qu'il étoit aspre, etc. (Voy. Ph. Mouskes, ms. p. G19.
— Gace de la Bigne, des Déduits, ms. fol. 153. —
Lanc. du Lac, T. îll. fol. 3i, etc.)
Il est possible, comme on l'a déjà observé, qu'on
ait nommé clieval aspre, un cheval que son ardeur
naturelle rendoit difficile à manier. Mais plus sou-
vent on faisoit l'éloge de cette même ardeur, si
utile au besoin lorsqu'on sait en être le maître, en
AS
— 222
AS
disant qu"un cheval ctoil aspre. « Monta sur son
« cheval qui estoit fort et aspre, où l'en se devoit
« bien fier au besoing. » (Lanc. du Lac, T. III, fol. 30.)
Cheval li amenèrent nupre, fort et legier.
Buenon de Coramarchis, MS. de Gaijnat, fo\. 192, V° col 1.
Enfin, l'ardeur guerrière qui est naturelle à cer-
tains hommes, l'activité , la hardiesse qu'inspire le
sentiment de cette ardeur, et que la figure annonce,
étoient désignées par l'adjectif aspre , lorsqn'en
parlant de ces hommes , on disoit qu'ils étoient
aspres, qu'ils étoient de chère aspre, qu'ils avoient
les chères aspres. « Si avoient les chères si vives et
« si aspres.... que combien qu'ilz fussent dessoubz
« aages d'hommes, leur visage demandoit l'escu et
« le liaulbergeon. » (Percef. Vol. II, fol. 35.) « Ung
« jouvencel ainsy comme de dix huit ans, grant et
« corsu; debonnechère, aspre et vigoureuse. »
(Ibid. fol. 106.) « Lyonnel est ung des plus aspres
« Chevaliers que l'en saiche. » (Lanc. du Lac, T. III,
fol. 6.)
Petit apriès moru Liascres,
Qui moult estoit vallans et aspres.
Ph, Mouskcs, MS. p. 623.
VAR1.\NTES :
ASPRE. S' Bernard, Serra, fr. MSS. p. 311.
AlPRE. Chans. fr. MS. de Berne, part, i, fol. 8, R".
Apre. Bestiaire d'.\raours, MS. du R. n" 7534, fol. 277.
Apries. Ph. Mouskes, MS. p. 387.
Asprelle, subst,. fém. Espèce de plante. Plante
dont les tiges sont aspres, rudes au toucher, et
qu'aujourd'hui l'on nomme prêle, en altérant l'an-
cienne dénomination asprelle. (Voy. Aspre, rude au
tact.) 11 semhleroit qu'autrefois Vasprelle fleurie
étoit une parure dans les fêtes champêtres, et que,
comme la rose, elle annon^oit le printemps.
Le Mai qui fait le lys
Croistre et Vasprelle ;
Et fait venir la rose belle,
Et toute joie renouvelle.
Froissarl, Poês. MSS. p. 47, col. 1
Cascuns ot chapiau A'asprelle.
Ane. Poês. fr. MS. du Valic. n' 1490, fol. 113, Vv
VARIANTES :
ASPRELLE. Cotgrave et Nicot, Diot.
Aprelle. Cotgrave et Monel, Dict.
AsPRELE. Moriet, Dict.
Asprement, adii. Aprement, rudement, dure-
ment, etc. Ardemment, avec ardeur, avec activité.
On croit que la signification â'asprement étoit
relative à celle de l'adjectif aspre, rude à l'ouïe,
lorsqu'on disoit clocheter asprement. « Celui qui
« porte le feu.... tient une clochete.... et s'il voit
« 1 aloe ou autre oisel, il hasle et clochete bientost
« et plus asprement. « {Modus et Racio. ms. fol. 188.)
Quoi (lu'il en soit, on a dit dans le sens générique
à'aspre, rude à sentir, qui se fait sentir rudement :
Si pèches par tolie,
Toi meisraes chastie
Tost et asprement.
Evrard, Distiques de Calon, MS. de N. D. colé M. 18.
Au figuré : « Cil qui juge doit regarder que il
« n'atablisse nulle chose plus asprement ne plus
« mollement que si come la chose le requiert. •
(Ane. Coût. d'Orléans.)
C'est par comparaison de l'ardeur d'une passion,
avec celle d'un feu âpre, qn'asprement a signifié
ardemment, avec ardeur :
.... Biautés donne talens
Toutans d'amer asprement.
Ane. Pof-s. fr. MS. du Vatican, n* 1490, fol. 144, V".
Ardemment, avec activité, avec vitesse, dans cet
autre passage : « Chevauchèrent si asprement que
« devant qu'il fust nuyt, vindrent au chasteau. »
(Lanc. du Lac, T. II, fol. 80.)
Enfin, ce même adverbe paroit avoir désigné
l'activité d'un regard fixé sur quelqu'un pour le
reconnoitre. " Il regarda le Chevalier plus aspre-
« ment qu'il n'avoit fait,.... et le recongneut. »
(Percef. Vol. III, fol. 121.— Voy. ki.m?.^ ardent,
actif.)
Aspresce, subst. fém. Aprelé, rudesse. Rigueur,
tourment, peine, mal, etc. Ardeur, activité, agilité,
hardiesse, opiniàireté, etc. (Voy. Aspre.)
Dans une signification analogue h celle de l'ad-
jectif aspre, rude au goût ou à l'odorat, rude au
« tact, l'on a dit: Viandes dont nul homme daignast
« gouster pour l'amertume et pour la très grande
« asprece qu'elles sentoient. » (Cliron. de S' Denys,
T. II, fol. 36)
Chou que il vaurront manoier,
N'ara en els nient d'aspreche,
D'amertume, ne de tristreche.
Lucidaires, MS, de Gibert, fol.74, R'.
On opposoit à l'idée générale d'une sensation
agréable et douce, celle d'une sensation rude et
désagréable, en disant : « Machabe s'aperçut que li
« hom ne li fesoit si bêle chère, come il soloit....
« et sot que ceste aspreee n'en estoit mie de bien,
« ni de bon cuer. » (Livres des Machabées, ms. des
Cordel. fol. 103.) « Garde que tes paroles ne
« soient grevables à autrui,... ti ris sans asprece,...
« ti pas sans noise. >• (Prov. de Seneke, ms. de Gai-
gnat, fol. 320.) « Icellui escuier doublant rigour el
« asprece de .lustice; etc. (l). Carpentier, Suppl.
Gloss. lat. de Du Cange, au mot Asperitas; tit.de
1372. (Voy. Aspre et Asprement.)
C'est aussi dans le sens à'aspre, rude à sentir en
général, qu asprece signifioit rigueur, tourment,
peine, mal, etc.
Pour Dieu, or ne vous soit paresse
D'assavourer com grant aspresse
Dieu souffrit en sa passion.
J. de Mcunj. Test, vers 349-351.
A tout mètre à la mort eslrivent,
Sanz merci quant tju'il aconsivent :
A flamens font maintes aspreces.
G. Guiarl, MS. fol. 299. V.
On a indiqué l'espèce de comparaison d'après
laquelle aspresce désignoit l'ardeur de la jeunesse :
.... Sui pris au premier buillon,
Tout droit en la verde seson,
Et en Vaspresce de Jovent.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 951, R- col. 1.
L'ardeur des passions :
.... Renaut de Bouloingne
Fist par courrouz et par asprece
Craventer une forterece.
G. Guiart,MS. fol. 102, Rv
AS
— 223 —
AS
Enfin, les effets de cette ardeur, dans l'animai
comme dans l'homme, l'activité, l'agilité, la har-
diesse, l'opiniâtreté, etc. « Fut combatu par une
>< merveilleuse ardeur et aspresse. » (J. Le Maire
lUuslr. des Gaules, liv. III, p. 304.) « S'assemblèrent
» ensemble vigoureusement et de grande aspresse;
« et à ce rassembler aUeindil le Chevalier., delà
« dague. >. (Mém. d'Ol. de la Marche, liv. I, p. 325.)
Voist s'en au Tornoi pour savoir
Quel force il peut eu lui avoir,
Et quel auprùce et quel vigour.
Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 62, R». col. i.
Artus fut de grant aspréce,
De grant vigour, de grant proesce.
Rom. de Brut, MS. fol. 71, \' col, i.
On a dit en parlant d'un chien agile, ardent et
hardi a la chasse :
.... Fu il bien esparinentez,
Et à granz testes esprovez
De hardement et d'isnelesce,
De tôt engig, de tôt asprèce,
Tant ert délivres et legiers,
Qu'an soit peut avoir bons lévriers.
Parlon. de Blois, MS. de S' Genii. fol. 165, V col. 1.
VARIANTES :
ASPRESCE. Liv. des Machabées, MS. des Cordel fol lUS
Appresce. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 285, col i '
Appresse. Id. ibid. p. 76, col. 4 > ■ ■
Apresse. Œuv. de Baïf, fol. 29 R»
Asprece Prov. de Seneke, MS. de Gaignat, fol, 320
Aspreche. Lucidaires, MS. de Gibert, fol 74 R» "
ASPRESGHE. Ibid. fol. 6, V". '
Aspresse. J. de Meung, Test, vers 350.
Asprete, adj. fétn. Diminutif d'âpre. Dans le
sens daspre, rude à l'ouïe, l'on a dit, voix aspretre
(G. Guiart, ms. fol. 231, — Voy. Aspre.)
Aspr été su bs t. fém. Apreté. Peine, douleur
corvée pénible. Ardeur, animosité, opiniâtreté à
combattre. (Voy. Aspre et Aspresce.)
Du latin asperitas s'est formé par contraction le
irançois asprete, plus ancien et plus usité dans
notre Langue qu'aspérité. La signification en est
aujourd hui moins générale, puisqu'on ne dit plus
aprete d odeur, comme l'on a dit et dit encore
aprete de goût, etc. (Voy. Monet, Dict.) « Tu desires
■■ par aventure la sauteit ; mais tu redotes Vaspre-
p ^[^^_ Je la médecine. (S' Bernard, Serm. fr. mss.
C'est relativement à l'acception générale d'fls»?-e
rude a sentir, qu'aspérité, comme asprete À
asprece, a signifié peine , douleur : « (tue dis-tù de
•< cou queh boin home sont besoignex,e't onlaspreté
fol 22n " ^^"^''^'''''■^'' **' '^^ '^«'' "° ^989,
La mort de Dieu vous fut mort pour jamais
Quant vous veistes sa grant aspérité
Eusl. Desch. Poês. MSS. p. 117, col. 4,
La douleur de la circoncision en ce passage ■
« lote ceste aspretcit nos at osteit li nostre Jh c'
fr.'Mbï p 220 ) '"^^'' ^""'^^'' " ^'- ' ^^"'^'^^ Serm."
Les corvées pénibles de la servitude féodale ■
» four cause de ost, de chevauchée et de toute
;j, y'/''^ (ispreté ou manière de servitude. » (Ord.
Au figuré, l'ardeur, l'opiniâtreté avec laquelle on
combattoit pour la victoire. iqueue on
Sont par force et asprelez
Leur ennemis de champ getez.
G. Guiart, MS. fol. 270, R*.
,,.^„ VARIANTES :
ASPRETE. Rob. Estienne et Xicot, Dict
ipRETrM^oi't,'rf.eT-'^°°"' '''• ^' '^°"'"-' P' 12-
Aspérité. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 117 col 4
AspRETEiT. S'-Bernard, Serm. fr. uh p. m
AnunSté"'"' '''^'^' ^''''- "^P''^'"' "«'"^"''' ^'^^^'''■
Dans le sens propre, on a dit :
La chaleur n'y peult rien, n'y Vaspreur des hvvers
Du ^'erdier, Bibliolh. préf. p. 28 '
i"!'^"'"?.,- " Pour''» grant flsy»-e»r et chaultcou-
« rage qu ilz avoient l'un contre l'autre etc »
(D. Carpentier, suppl. Gloss. lat. de Du Ca'nge 'au
mot Asperita, ; tit. de 1456.- Voy. Aspre et Aspr'et?!)
Asprir verbe. Rendre âpre; devenir âpre. (Vov
la les veibes Enasprir et Enasprier. (Voy. Aspérer ]
Dans le sens propre, on a dit : « Le maniement de
« Id nege asprit le cuir des mains. » (Monet, Dicl.
■ • . . . Esloigne-toy de brandon de CvDris •
Ceux qui contre le vent des Aquilons aspris
Endurcissent leur peau, luy font mieux résistance.
Poes. d'Amadis Janiyn, fol. 160 V
Au figuré :
N'est-ce assez que je brûle, et que l'extrême ardeur
Du feu qui me détruit, devient encor plus forte •
Sans qu un vent de soupirs à chaque moment sorte
Pour en soufflant aspru- et doubler sa fureur ?
Poës. d'Amadis Janijn, fol. 149, y.
On exprimoit sans doute une idée relative à celle
de hardiesse, d'intrépidité, lorsqu'on parlant de
Blancheflor, qui, sa prière faite à Dieu, se résigne
courageusement à être brûlée, on disoit :
.... Blancheflor s'est (wpéWe .•
Et le tapis ont apporté
Li Serjaii ; furent apresté
Por la pucele el feu lancier.
Hoire et Blaochellor, MS. de S. Germ. fol. 196, R- col. 2.
VARIANTES :
S^nToIct'^"'"' «"'^•Es"^"ne et Nicot, Dict.
AspERiR. Floire et iBlancheflor, MS. de S'. Germ. fol. 196.
_ Asprissemeut, subst. masc. Action de rendre
âpre. Du verbe asprir. (Voy. Cotgrave, Dict.)
Asproier, verbe. Traiter àprement, tourmenter-
poursuivre, presser avec ardeur. (Voy. Aspre ) Signi-
fications analogues à celles de l'adjectif «sj9?"k
Or vieng proier
A vous Dame, et merci crier
Que ne gart l'eure qn' asproier
Me viengne cil
Qui m'a mis à si grant exil
Fabl. MS.'du R. n" 7218, fol. 302, R- col. 1,
Tant m'a Amors percié et mors,
S ensi me tient, et si m'asproie
Longhement, vivre ne poroie.
Siiîge de Troje, MS. du R. n' C987, fcl. 103, R- col. 1.
AS
- 224 —
AS
On disoit d'un homme que pressoit une faim
ûpre, que la faim Vasproioit. {Voy. Les XV signes
du Jugement, ms. du H. n° 7989, fol. 197.) Dans les
vers suivans, asproier désigne l'ardeur, la vitesse
avec laquelle un faucon presse el poursuit sa proie.
Si se radresse et se ravoie,
Et se met à la droite voie,
Et son premier oisel asproie.
Poésie de G. Machaul, MS. fol. 207. R" col. 1.
VARIANTES :
ASPROIER. Siège de Troye, MS. du R. fol. -105.
Esi-noiER. Fabl. MS. du K. fol. 190.
Asproii, suhsl. masc. Espèce de petit poisson.
11 ressemble au goujon, et ne se pêche que dans le
Rhône, entre Lyon et Vienne. On a désigné l'aspé-
rilé de ses écailles en le nommant aspron. (Cotgrave
et Nicot, Dict. — Voy. Aspre.)
Assabler, verbe. Remplir de sable. Echouer sur
le sable.
On le trouve au premier sens dans Cotgrave,
Dict. " La mer avec le temps a assablé le port
« d'Aiguemorles. » (Dict. de Trévoux.)
Dans le second sens, on a dit de frégates échouées
sur le sable et entravées, qu'elles étoient assablées.
(Voy. Pélisson, Lett. hist. T. I, p. 107. — Ccfgrave,
Nicot et Monet Dict. — Dict. de Trévoux.)
Assablissement, subst. masc. Amas de sable,
banc de sable. (Voy. Cotgrave, Dict.)
Assagir, verbe. Rendre sage, raisonnable;
devenir sage, raisonnable. (Voy. Assagissement.)
Dans une signification analogue à celle du verbe
latin sagire, bien sentir, l'adjectif sage, très-ancien
dans notre langue, désigne un homme qui goûte
bien les choses, qui les sent et les connoit bien, un
homme que le goût, le bon sens guide dans la con-
noissance raisonnée de ce qui est bon ou mauvais,
au moral comme au physique. (Voy. Sage.) C'est en
ce sens que le verbe assagii' signilioit rendre sage,
raisonnable. « 11 nous faut abestir pour nous ussa-
« gir. « (Essais de Montaigne, T. II, p. 288.) « Les
« conditions de la vieillesse ne m'advertissent que
« trop, m'assagisse7it et me preschent. De l'excez
" de la gayete, je suis tombé en celui de la sévé-
« rite ; etc. » (Id. ibid. T. 111, p. 95 et 96.)
Robes de vair, ne de gris, n'ont puissance
D'assarjir nul ; mais puisque le sens as,
De robes vestus, pour ce ne le perdras.
Eusl. Desch. PoSs. MSS. p. 26. col. i.
Son doulz parler m'assarjissoit
Par le bien qui de lui issoit.
Pof'B. de G. Machaul, MS. fol. 183, Y- col, 3.
Dans les vers suivans, il sembleroit qu'assagir
une jeune innocente, c'étoil lui donner de l'esprit,
dans le sens de certain conte de Lafontaine.
Je senc jà que ton coer y tent,
Car je voi ta coulour rougir ;
Mes un peu te voeil assagir.
Froiss,irt, Pcès. MSS, fol, 35, col. 1,
Ce verbe est réciproque dans le passage suivant :
« Qui ne remue son esprit, il s'enrouille et demeure
« sot : et de tout il doit.... prendre advis et conseil,
« tant sur le passé pour lessentir les fautes qu'il a
« faict, que pour l'advenir afin de se reigler et
« s'assagir. » (Sagesse de Charron, p. 539 et 540.)
11 étoit neutre, lorsqu'on disoit : « Vieillir n'est
« pas assagir , n'y quiler les vices ; mais seulement
" les changer, et en pires. >• (Sagesse de Charron,
p. 158.)
Se beau parler faisoit homme assaair ; etc.
Eust. Desch. Pocs, MSS, p, 3S2, col. 2.
Assagissement, suhst. masc. Action de rendre
sage, raisonnable. On a dit : « L'affinement des
« esprits n'est pas V assagissement. » (Sagesse de
Charron, p. 110. — Voy. Assagir.)
Assai, Si/6s^ masc. Mesure d'essai. Dégustation,
essai. Epreuve, connoissance.
On voit ([w'Essai n'est pas moins ancien dans
notre langue qu'Assai; en latin barbare Assagium,
Essaium et prohahlemenl Exagiiim, lorsque ce der-
nier mot signifioit figurément, comme Essef et
Essief dans les coutumes d'Anjou et du Maine,
mesure û'essai, mesure publique servant à essayer,
à éprouver, à connoitre si les mesures particulières
sont telles que le prescrit la Coutume ou la Loi.
(Voy. Du Cange, Gloss. lat. T. 111, au mot Exagium,
col. 190. — Id. ibid aux mots Essaiinn el Essaymn,
col. 158. — D. Carpentier, Suppl. Gloss. latin de
Du Cange, au mot Assagium, col. 330.) « Ont....
« Moyens justiciers droit de bailler mesures à blé
« et à vin, du patron et essief un Seigneur dont ils
« tiennent leur Justice. » (Coût. d'Anjou, au Coût,
gén. T. 11, p. 65.) " h'essief, ou essef comme on lit
« dans la coutume du Maine (ibid. p. 112,) est le
« patron sur lequel on règle et on essaye les autres
« mesures. » (Voy. Lauiière, Gloss. du Dr. fr.)
C'est une acception particulière h Essef ou Essief.
que l'on regarde comme une altération A'Essai ou
Assai, qui dans le sens propre de l'Italien Assaggio,
signifie dégustation ; par métonymie fss«/, appreste
de pain , ou tranche de pain préparée pour l'aire la
dégustation, l'épreuve des viandes servies à la table
des Rois. (Voy. Nicot, Dict. — Dict. de Trévoux.)
L'Essai, la dégustation qu'aujourd'hui l'on fait des
viandes et du vin devant le Roi, se faisoit ancien-
nement » ez cours et maisons de Roys, Ducs, Princes
» et de leurs femmes. On goûtoit, on faisoit Vessay
« des épices, Vessay h la coupe, des essays tout
« tranchez de pain, pour faire la crédence à chacun
« plat de viande.... posé sur la table. 11 eût été ridi-
" cule ez maisons de plus bas degré, de faire essay,
« crédence de vin, ne des viandes. (Voy. Honneurs
de la Cour, ms. p. 49, 72 et 76.) On a remarqué
comme une preuve singulière de confiance récipro-
que, que l'Archiduc Maximilien étant venu en
1501, voir Louis XU à Blois : « eulxdeux, plusieurs
« fois l'un devant l'autre, beurenl à table et man-
« gèrent ensemble el sans essay. « (J. d'Aulon,
annal, de Louis Xll, an 1499-1501, p. 323.)
En essayant les personnes et les choses, en les "^
goûlanl, on en éprouve les qualités bonnes ou i
mauvaises, on les connoit. De là, Essai ou Assai,
par extension de l'idée d'épreuve, de connoissance
faite et acquise par le goût, aura signifié toute
>
AS
— 225 —
AS
espèce d'épreuve, de connoissance physique et
morale, faite et acquise par les sens en général ;
même par le sentiment bien ou mal raisonné qui
nait des sensations par lesquelles l'âme est affectée.
Nous convient envoyer devant
Gens saiges et de grant essay.
Eust. Desch. Pocs. MSS. p. 41i, col. 2.
Ses sorceries, ses assois
A fait par li et ses carais (1).
Siège de Troje. MS. du R n' 6987, fol. 116, V col. 3.
On disoil que l'on étoit h ïassai, en l'essai d'une
chose qu'on éprouvoit pour connoître si elle étoit
raisonnable et possible. (Prison d'amour, ms. de
Turin, fol, 17, R- col. 2, etc.)
Bien le sai ;
Car jou ai esté à l'assui.
Hisl. de Job, MS. de Gaignal, fol. 174, R" col. 2
Hom, dont venis, ou es, dit ai.
Où iras-tu ? Car je ne sai
Se tu gaaignes, ou se tu pars.
Garde-toi, tu es en Vassai :
Si com tu veu.v, mal ou bien fai ;
Tu auras chou que tu désers.
Miserere, MS. deN. D. strophe xvi.
Pitié dort et raison larmoyé ;
Convoitise est en son essai/.
Eusl. Uescli. Pufs. MSS. p. 110, col. 4.
Probablement, c'est dans le sens d'épreuve
physique et morale, que l'on a dit :
Dame on connoît à l'osa;.
Ane. Poés. fr. MS. du Vatican, n' U90, fol. 75, R" col. 2.
... Je la truis tant doucete et de bon assai,
Et de vilanie nete, que jà ne m'en partirai.
Chans. fr. MS. de Bouhier, fol. 183, V».
Un amant qui se plaint des épreuves auxquelles
on met sa constance, dit :
Por vos soffrerai ;
Mais trop sunt grief vostre essai.
Ane. Po6t. Fr. MSS. avant 1300, T. 1, p, 172.
On faisoit une chose sans assai, lorsqu'on la fai-
soit sans nécessité d'éprouver sa force, peut-être
sans éprouver de résistance.
S'adrecierent parmi Rousie ;
Si l'ont praée (2) et defroisie,
Et ne sai quante autre cité
Dont pas ne me sont recordé
Li non, ne recorder ne sai :
Mais moult destruisent sans asai.
Ph. Mouskes, MS. p. 823.
Les Joutes auxquelles les Ecuyers éprouvoientles
uns contre les autres leur force et leur adresse la
veille des tournois, étoientdes essais ou éprouves
(Voy. Mém. sur l'anc. Chevalerie, tora. I, paç' 33 )
C'est en parlant de ces épreuves ou essais que l'on
a dit :
Amours trouva premier haulx instrumens
Chansons, dances, festes, esbatemens,
Joustes, essai:, bouhors et tonrnoyemens.
Poes. d'Alaiii Cbartier, p. 566.
Enfin, c'étoit sans doute avec les mesures de
1 espèce de celles que par métonymie désisnoit
essef ou essief, qu'on faisoit Vassay, l'essai
1 épreuve des mesures particulières. » A faire
« 1 assay des poids et mesures, ly menstraulx doi-
« vent avoir de chascune ayme (3) un denir. » (D. Car-
pentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Ganse au mot
Assagium ; m. de 1355. — Voy. Assaiement.)
VARIANTES :
ASSAI. Ane. Poët. fr. MSS. avant 1300, T. III, n 1018
Asai. Ph. Mouskes, MS. p. 8-23.
AssAY. Percef. Vol. V, fol. 112, R» col. 1.
EsAi. Chanson du C» Thibaut, MS. p. 99
ES.SAI. Orth. subsist. Poës. d'Alain Ghartier, p. 566.
tssAY. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 414, col. 2^
Essef. Coût, du Maine, au Coût, crén f II n'l22
E.SSIEF. Coût. d'Anjou, ibid. p. 64. - r- •
Assaiement, snbst. 7nasc. Action d'essayer,
(voy. Ass.\i et Assagir.) L'action d'éprouver si une
chose est possible. « Sis conseaus et son assaiement
« lu trove vains. » (Livres des Machabées, ms. des
Cordel. fol. 169.) « Après plusieurs assauts et
« essayements d'avoir la place, etc. « (Juvenal des
Ursins, Hist. de Charles VI, pag. 163. — Voy. Assai
et Assaier.)
variantes :
ASSAIEMENT. L. des Machabées, MS. des Cordel fol 169
EssAiEMENT. Anc. Poët. Fr. MS. av. 1300, T. II, p 634
tssAYEMENT. Juvenal des Ursins, Hist. de Ch. VI, p. 163.
Assaier, verbe. Goûter, éprouver, connoitre.
tiendre sensible à un goût amoureux, à un goût
raisonnable. On observera qu'en Latin barbare
assaiare, eu françois essayer, étoit le même que
assaghare. (Voy. Du Gange, Gloss. lai. tom. I
col. 766. — D. Carpenlier, Suppl. Gloss. lat. de Du
Caiige, tom. I, col. 330.) C'est probablement ainsi
wassajer étoil le même ([u'assaier. On croit que
la sigiulication propre cVassajer, assaier, essaier,
est celle de l'Italien assaggiare; que par extension
de cette signification encore usitée, lorsqu'on dit
essayer d'une chose pour y goûter, l'éprouver la
connoitre en la goûtant, ce verbe aura désigné
toute espèce d'épreuve, de connoissance qui peut
être acquise par les sensations, et parla réflexion
sur ces mêmes sensations. « Cum il oui l'aspée
« ceinte alad e asaiad s'il se peust cumballre, si
<• armez. « (Livres des Rois, ms. des Cordel. fol. 23.)
La Dame connut bien le ploi.
Ses cuers estoit en grant esfroi ;
Car volentiers i asaiast,
S'ele peut et ele ossast.
Fabl. MS. du R. n- 7989, fol 53, V col 1.
.le ne sai rien de tel ahan.
Ne ne Vassaierai avan.
Ihid. fol. 61, V° col. 2.
S'un seul jour vos soullas assaioie,
Puis m'en degetissiés en Vautre jor,
Lors m'averiés doublée ma dolour.
Ane. Poél. fr. MSS. av. 1300, T. Il, p. 808.
Bien ont amers asaié
Se j'ai loiaument amé.
Ane. Poët. Fr. MSS. avant 1300. T. UI, p, 1170.
Cil qui à giUer s'avoie,
Vait une et autre asaiant :
A chascune fait semblant
Que por li morir se doie.
Id. ibid. p. 1051.
piuie^ffë - (3°Mesure.'"°"' ' ^'"'""'"' ^'°"6ine est sans doute hébraïque: ^«m, lire. (n. e.) - En latin prœdata,
II.
29
AS
- 226 —
AS
Moult est sauvaie
la meschine qu'il n'asage.
As Dames fait muer corage
^^■lirMl'.riér„e,n.35Mo..l3i.V-colM.
11 est évident qu'en ces vers, asajer est de même
signification que asaier, éprouver une femme, la
connoitre, peut-être la rendre sensible a un goût
amoureux. On soupçonne que, dans un sens relatif
à celui cVassagir, le verbe assaùer a signifie rendre
sensible ù un y,oùt raisonnable.
Loyal me verés et secré,
Obéissant et cremeteus,
Et en mes requestes honteus.
Si je fai bien, si m'en paiiés ;
Si je fai mal, si m'as-muéx.
' Froissarl, Poes. MSS. p. 25, Ml. 2.
VARIANTES :
ASSAIER. Ane. Poët. fr. MSS. av. im T- "- P- ^^^<^- ^
Asaier. Livres des Ro.s, MS. des Cord fol ^> R° «ol-^-
\SAJER. Fabl. MS. de Berne, n" 3a4 fol. 131, V» coL 1.
Ass.uiER. Froissart, Poës. MSS p. 2o, col. 2
AS30YER. Arbre des Batailles, Mfe/o!^-,*v T r, 480
Ess.UER. Ane. Poët. fr. MSS. avant '300, TI, p. 480.
Ess.^YER. Orth. subs. - Rob. Estienne et Nicot, Dict.
Assaillant, partie. Qui assaille. Dans le sens
propre du verbe assaillir, le participe assa;//aHf,
devenu substantif par ellipse, n'est plus d usage
qu'au pluriel. Pris figurément comme dans Molière,
il retrace l'ancienne idée dos .tssaj//fl/is opposes
aux Teaans dans les combats en champ clos, les
tournois et les carrousels. (Voyez CotgraveeUNicot
Dict. - Dict. de Trévoux. - Dict. de 1 Acad. fi .)
Les Assailluns étoient « ceux qui soffi-ant, pai
« leurs responses au deffy el aux cartels, de soute-
« nir le contraire , composoient les Quadrilles
.. opposées. » (Menestrier , des tournois, etc.
p. 194. — VOy. ASSAILLEUR.)
Assailler verbe. Assaillir. Le prétérit assail-
lièrent (i^ns Villehardouin, ubi supra, prouve sans
doute que l'on a dit assaillier comme assatller.
' Parce que.... les avoient assaille-, et trouvez
« d'assez meschante defTence, se férirent, etc. »
(Monstrelet, vol. Il, fol. 46. — Voy. Assalir.)
VARIANTES :
ASSAILLER. Monstrelet, Vol. II, fol. 46, R".
Assaillier. Villehardouin, p. 38.
Assailleur, siihst. masc. Assaillant. Dans la
signification relative à l'ancien usage des combats
en champ clos, le roi François!", parlant au héraut
de l'Empereur de Chaiies-Qumt, dit : « Héraut,
« porle-tu ta seureté du camp telle qu un assail-
. leur, comme est ton maistre, doit bailler a un
« deffendeur, tel comme je suis. » (Gage de bataille
de François 1" et de Charles V, fol. 81. - voy.
Assaillant et Assailli.)
Assailli, participe. La signification propre et
figurée de notre proverbe: « bien attaque, bien
défendu, » tient sans doute à l'idée (jue l'ancien spec-
tacle des combats en champ clos et des tournois
avoit rendu si familière à nos ancêtres, que nen
n'étoit plus commun que ce proverbe: » bien
« défendu, bien assailli; bien ass«f/Z;, bien détendu
a ou bien soutenu. » (Eust. Desch. poes. mss.
pag. 386. — Poës. de Charles duc d'Orléans, ms. du
R pag 68. — Id. ibid. pag. 69. — Poës. d'Alain
Chartier, pag. 785. - Coquillart, pag. 123, etc.)
« Le Roi fist'debattre ces matières devant luy
Bien assailUj, bien deffendu. » (Le Jouvencel, ms.
page 451.)
Très fort vous avez combatu,
Et j'ay mon vieillart bien tenu.
C'est lieau débat que de deux bons ;
Bien assailhj, bien deffendu.
Chasse el départ d Amours, p. 278 el 279.
On disoit aussi proverbialement : » homme
« assailli, à demi vaincu. » (Cotgrave, Dict. —
Voyez Assalir.)
Assal, subst. masc. Assaut, attaque. Cette
orthographe assaut n'est pas moins ancienne dans
notre'Langue, que celles d'rtssflM et asaut formées
d'asult et assal par le changement si ordinaire de
al en au Si l'on a dit proverbialement a qu homme
a assailli étoit à demi vaincu, c'est qu on est en
« lieux et si souldainement prins aucunes fois que
. en restât en quoy on se trouve, il se fault def-
« fendre » Aussi disoit-on qu'assaillir, avoir l as-
saut, comme on lit dans le Jouvencel, ms. etoit un
avantage; et que par cette raison « il falloit fuir un
» assaut de cent lieues et chercher une bataille de
„ cent » 'Discours polit, et milit. de la ^oue,
pag. 303. — Le Jouvencel, ms. page 491. — voyez
^"on'^a fait l'éloge du chevalier Bayard, en disant
au'il avoit « assault de lévrier, deffense de san-
u o-iier et fuite de loup : trois qualités essentielles
a ?i l'homme de guerre, qui doit assaillir aussi har-
c. diment que lait un bon lévrier : s'il est presse de
« combattre, imiter le sanglier, el s acculer contre
. maison, baye, fossé ou buisson et là soustenir
.. l'flSsaH^ en advisant de grande hardiesse a pas-
„ ser à travers les assaillaiis; comme le loup,
,. oarder l'haleine de luy ou de son cheva , dans le
« cas de possibilité d'une retraite. » (^oy. Dutouil-
loux Yen fol. IIT.-Ilist. du Ch" Bayard p. 411.)
Dans une signification relative à celle à assalir,
attaquer, en lénéral, on a dit : « L'en fait suite
: agissant et de paix brisée en diverses nianières
„ selon la diversité des lieux ; car 1 on suit d assault
„ de charue, àassuult de chemin, âassault de
,. maison, A'assuuU de champ, etc. » (.\nc Lout.
de Normandie, chap. 75, fol. 96, citée par Du Gange,
Gloss. lat. t. 1, col. 161. - Voy. Assalir.)
VARIANTES :
ASSAL. Siège de Troye, MS du R n" G987, fol. 107
AissAUS (plur.) Poëme de la Mort, Mb. du K. stropne xii.
AsALS. Villehardouin, p. 32.
Asalt. Loix Norm. art. xxx.
ASAUT. Villehardouin, M S. du R. p. 124.
AuKiiiiT T e Jouvencel, Mb. p- 4yi. eio.
fsitcf (plur) Poëme de la ifort. MS. du R. strophe xa..
Ass.« (plur.) Siège de Troye, M^- d" «• fo>: 'O'.
EssAUT Ane. Poët. fr. MSb. avant 1300, 1. 1, p. &»•
Assalie, subst. fém. Assaut. (Voy. Assal et
Assalir.) L'action d'assaillir l'ennemi dans ses re-
tranchemens,dans son camp, en faisant une sortie .
AS
- 227 —
" Snl'l'^r®"*-- «devant Archadicole, si commpn
: bien Si^'n'*' ?'^']'\ '''' '^ defrêndreïmui't
« Dien Si ouvrirent or portes- si n^pAnf n!.
yd;SS;SSr"'''-"-'^^"«-e Place, en
AS
Puis le Conte Dunoys ung jour.
Et les gens de sa compaignie '
S en tirèrent devant H^rcourt,
i-uidant 1 avoir par assaillie.
Vifil. de Charles V;i, p. ii.
même or'onnp FI L " '^^' "^'°" *^e '' ^ l' lettres de
SSiiPiSHSrr
p 101 II "^.^f'^^.^' '•'" motass«/rf«,.^. ^ vu on
S.i 'ol, «s"i, VX%-!,-a?sa'i-î,,,'." ™*
Mayne la jument sans delTaulle
Et fay que mes chevaulx Vassaùlte
Eusl. Desch. rofs. MSS. p. 480, col. 3
hnp «'.^ î °" communément
yue s un homme a une jument
Que queiqu'estalon qui VaTsaUle
Que droit li est acquis sans feinê, etc.
II „„, . -, . '(I- ibid- p. 568, col. 3
Li vilains à lesquiele prise, "'lieinare.
U apoia a un postel,
Et tient en sa main un coutel
Ae le nacon veut asa/ir.
à certaine ha ileîî Tie l'on l'^f " '"'î"^' °" «'^'ève
une Tour, un cSen,, J J "^ -Ir ««««'/^""une Cité,
l'assaut. : Uns estopës rif '^^ '^^ ^ ''"""'^'
« rner; si «sSS al casie '"''sl't "'"'"'"^ P^''
« force. . (Fabl. ms. du R. ,r ^80 fo |î["'^"t,P«^
Rom. de Perceval. ms. de B rnfn'lsi ' foT 257-
" Vint jesq'à la cited Rabba ; si Yassaillhl «; lo
T- IV, p. 2, etc.) ^' ~ ^^^'"- ^^ ViUeroy,
Al castel vindrent, si Vasalent;
Mais fors estoit; au prendre faient.
On o „„ . ■ ''" ''■ "' ™' f°'- 5*. K- col. 1.
n.'.iV V ^®'°" 'lesloial parconnier
Qu> font samblant d'am'er par traTson
C^rTT '^ ^°'^ '^^^'el, 11? donfôn '
Car n ont pas cuer de nului gerrS
presse avec avantage onlCi/poM-P v.' '^" '^
l-aua,i!,e,-à main ir?nV ? ses ho„i"!,v.f "™ ^
rii _ vn, r'i^ ^ . "'• *^'e Beauvois S, ms chan
'^~aI^ ^'°^f • ^"'' 'es Coût, de Beauvois s )
MS. desCordeL fôl J93?V"col. Tf ' ^^''^'^habées,
Anemis qui les bons assaute "'
Ut let a nvame geter faute
Dont mors estoie.
Fabl. MS. du R. „. 72)8, m. 302 r. ,,„, »
Ja ne gardera l'eure que la mort f„.„ , "
Car poor de ^^^^^S^^^f^t^tXl
■-• ''" •*■ "* ™5. fol. (42. P.. col. «.
demaîde^"''' P''^'^'^'" '•"^'" '^'«'^t^"*'' ''etTet cFune
Etiabl^^i^^r"^'^'»-
1 or viande à son porcelet
™. Mi. de Berne,,,- 354, fol. 65, V col. 1
Attaquer, asiter le i^nmc ai r«, -, ■
U mali'o-ne's Cri?Te'^Re1saïî''nin'îy'"''^'';''-
assa^//../ e traveillout. » (Libres des >?iif ' ^f '
Cordel. fol. 21, R» col. 2.) ^ ^^ "^^ '^o^^' "s. des
Savez qui YassaiUoH forment • '
t.e qu 11 ne véoit tour coument
ba chose en mauvais point ne soit
Cleomadès, »fs. de Gaignat, fol. 27. V col. »
Enfin, une preuve évidente de la signification
, (1) Assalir vient de adsali.e a ,- , Signification
AS
— 228 —
AS
primitive (Y{issaillir[\), c'est qu'on a dit « s'essaillir
« en haut lieu » pour s'y élever, comme on s'élève
en sautant; assauter, pour exalter, élever.
De mon fin cuei' me vient à grant mervelle
Ki de moi est, et si me veult occire ;
K'à assiant en si houet leu VeasaiUe,
Dont ma doior n'oseroie pais dire.
Chans. Fr. MS. de Berne, n- 389, part. Il, fol. 6, V-.
Vaillance la renommée,
Sera de raoy honorée.
Et loyauté confortée :
Le bienfait assauterai.
Eusl. Desch. Po5s. MSS. p. 201, col. 3.
(Voy. AssALiE et AssAL.) Peut-être faut-il hreassuu-
cercii pour assauterai dans la dernièi'C citation ?
Alors ce seroil, comme assancier, une variation
d'orlhogiaphe à'essaucer, essaucier, etc. » (Voyez
ASSAUCIER.)
COMJUG.
Aceiit, indic. prés. Assaille. (D. Carpenlier, Suppl.
Gloss. lat. de Du Gange, au mot Assaklare.)
Asalu, part. Assailli. (Anseis, ms. fol. 20, R°col.l.)
Asaudra, ind. fut. Assaillira. (Fabl. ms. du R.)
Asaura, ind. fut. Assaillira. (F. d'Esope, ms. duR.)
Asauroit, subj. imp. Assailliroit. (F. ms. du R.)
Asausist, subj. imp. Assaillit. (Chr. d'Outremer.)
Assalotnes, imp. Assaillons. (Rom. de Blancandin.)
Assalrons, ind. fut. Assaillirons. (R. d'Alexandre.)
Assasirent, ind. prêt. Assaillirent. (R. de Flor".)
Assaiulroit, subj. imp. Assailliroit. (D. Carpenlier,
Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au mot Assnldare.)
Assauldra, ind. fut. Assaillira. (Le Jouvencel.)
Assauldroit, sub. imp. Assailliroil. (R. de la Rose.)
Assau7'as, ind. fut. Assailliras. (G. de Roussillon.)
Assaut, ind. prés. Assaille. (Rom. d'Alexandre.)
EssaudroU, sub. imp. Assailliroit. (L. des Machab.)
VARIANTES :
ASS.\LIR. Triomphe des ix Preux, p. 542, col. 1.
AçAUDRE. D. Carpentier, S. Gl. 1. de D. C. T. IV, col. 6.
ACEUDRE. Id. ibid. col. 7.
AsALiH. Fabl. MS. du R. n» 7989, fol. 54 et 79, R» col. 1.
AsALLiii. Athis, MS. fol. 78, V» col. 1.
AsARDRE. Borel, Dict.
AsAUDRE. D. Carpentier, S. Gl. 1. de D. C. T. IV, col. 49.
Assaillir. Livres des Rois, MS. des Cordel. fol. 21.
AssAUDRE. Coût, de Beauvoisis, MS. chap. ii, p. 47.
Assaulter. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 489, col. 2.
Assauter. Fabl. MS. du R. n» 721S, fol. 302, R» col. 2.
Essaille. Chans. fr. MS. de Berne, part, ii, fol. 61, V.
Essaltre. Livres des Lois, MS. des CordeL fol. 120, V".
EssoiLLiR. Chans. fr. MS. de Berne, pirt. ii, fol. 111, V".
Assarter, verbe. Essarter. En latin barbare ,
asmrtare; variation de l'orthoeraphe Exartare.
(Voyez Du Gange, Gloss. lat. T. 'lll, col. 204. —
M. Court de Gebelin, Dict. Etym. de la Lang. fr.
col. 'iSG.) « Soit enquis le boys combien ches-
« cune acre vault par an pour tenir à boscage , ou
« pour assarter, ou pour curtiver. » (Britton des.
Loix d'Angleterre, fol. 184, v°. — Voy. Essart.)
Assasié, participe. Ensemencé, fertilisé, fertile.
Satisfait, fortuné, beureux. (Voy. Assasier.)
Dans la supposition qu'entre l'adverbe latin satis
et le substantif pluriel saia, il existe une analogie
telle que l'indique M. Court de Gebelin (Dicl. ély'm.
de la Lang fr. col. 9G6), il semblei'oit naturel qu'à
raison de cette même analogie, le participe assasié
dontsa//s(2), en françois assez, est Torigi ne, eût signi-
fié dans le sens propre, ensemencé, fertilisé, fertile.
Une valée
Qui moult est riche et assasée.
Rom. de Brut, MS. fol. 39, R' col. l.
De là, par comparaison de l'homme agricole, satis-
fait de la jouissance d'un champ fertile, avec
l'homme que satisfait ou (loitsatisfairela jouissance
d'une fortune, la jouissance d'un bonheur physique
ou moral, on auroit encore pu dire :
Un riches hom moult asaze:,
Menoit assez près de lor mez.
Fabl. MS. de Berne, n' 354, fol. IIG, R" col. 2.
Uns haus hom l'ot fet fpre manans et assasiez.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 344, V ool. 2.
Tuit sont riche et ascssei.
Chaos, fr. MS. de Berne, n- 389, pari, n, fol. 114, R-.
Me fais-jo liez quant plus sui d'ire ospris ;
Et por ce chant qu'à chascun soit avis
Que j'aie en moi aucune bone estance ;
Que homs axsaziez recuevre plus d'amis.
Ane. Poet. fr MSS avant 1300, T. I, p. 189.
Ensi me plaist, cornent k'il m'en avaigne :
Par tel raixon seux poures asezeis.
Quant ceu me plaist dont je seux plux greveis.
Chans. fr. MS. de Berne, n" 389, part, i, fol. 105, R- .
VARIANTES :
ASSASIÉ. Fabl. MS. du R. n" 7218, fol. 3i4, V» col. 2.
Acezeis. Ch. fr. MS. de Berne, n" 389, part, i, fol. 10, R".
ASASÉ. Siège de Troye, MS. du R. n» 6987, fol. 109, R».
AS.A.ZEZ. Fabl. MS. de Berne, n' 3.'54. fol. 116, R" col. 2.
AsEissEi. Ch. fr. MS. de Berne, n° 389, part, ii, fol. 114.
Asezeis. Ibid. part, i, fol. 105, R».
AsSAsÉ. Rom. de Brut, MS. fol. 30, R» col. 2.
AssAzÉ. Floire et Blanchefior, MS. de S' Germ. fol. 201, R».
AssAziÉ. Ane. Poët. fr. MSS. avant 1300, T. I, p. 189.
Assasier, verbe. Satisfaire, fournir, rassasier.
(Voy. AssAsiE.) En fertilisant la Terre, en l'ensemen-
çant, on la prépare à satisfaire, à fournir aux besoins
de la vie. De lu, on aura dit d'une leire qui produit
les choses essentielles à la satisfaction de ces mêmes
besoins, qui en est fournie, qu'elle étoit assasiée.
La tère trueve riche, assaspe, et plentie
De moult boine viande et de tarant manantie.
Rom. d'Alexandre, MS. du R. n'098", fol. 171, R" col. 2.
Qu'un homme fût fourni des biens de la fortune,
tellement qu'il dût ou crût devoir en être satisfait,
on disoit figurément qu'il en étoit assasié.
Riches bons iert, et asasez
D'or, et d'avoir, et de deniers.
Hîst. de la fête de la Conception, .MS. de la Clayetle, p. 166, col. 1.
De grant avoir est assasez.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 233, R" col. 1.
Est et beaus et preus assez.
S'il est riches et assasés.
Ane. Poét. fr. MSS. avant 1300, T. Ill, p. 1271.
On désignoit même la satisfaction d'être fourni,
doué des qualités de l'esprit et du cœur, en disant :
Douce dame, bien sai de voir
Ke ki de vos veult estre ameis,
(1) Le mot se trouve déjà dans la Chanson de Roland dans le sens de sauter : « Son corps demene, moult fièrement
asalt, » et dans celui d'assaitlir: « Nous asaldrum Olivier et Rolant. » (v. 729 - v. 947) (n. e.) — (2) Ou plutôt adsatlatu . (n. e.)
AS
— 229 -
AS
■ Il li covient en li avoir '
Fin cuer et bone volenteit ;
Garnis en seux et asczeis.
Chans. fr. MS. de Berne, n- 389, part, m, fol. 10, R"
On assasioit un désir, une passion, l'on s'en
assasioit, on s'en l'aisoit assffsie, lorsqu'on les satis-
faisoit, lorsqu'on fournissoille moyen d'y satisfaire.
Qui donc vousist hermine et pailes d'Oriaut,
Toujours s'en peust faire asKazé et manant.
Guiteclin de Sassoigne. MS. de Gaignat, fol. 244, V° col. 1.
De tout mettre en flambe s'asasenl;
Chastiaus verssent, viles embrasent.
G. Guiarl, MS. fol. 60, R*.
Nus voloirs n'ii.sosi'e
Cuers d'ami, se n'est d'amie.
Ane. PoJs. fr. MS. du Vatic. n- 1490, fol. 44, V».
Cette acception figurée paroit être une extension
de celle û'assasier ou rassasier, satisfaire à des
besoins aussi naturelsque ceux de manger et boire,
en usant des productions essentielles à la satis-
faction de ces besoins. « Com tu en avéras mangé
« et avéras esté assaciez, tu benequieras al seignor
« ton Dieu pour la bonne terre qu'il toi donna. »
(Bible en françois, ms du R. ir 7G(H ; Deut. chap. vin.)
Puis joerent au vin, au nouvel et au viez ;
Puis orent tant viande, tuit sont axsasicz.
Fald. MS. du R. n' 7-218, fol. 344, R° col. 2.
.... Si a fait del mont acorre
Une fontaine parmi l'ost ;
S'en furent rai>aziiel tost.
PI). Mouskes. MS. p. 61.
On comparoit la vie à un banquet d'où l'on sort
rassasié, en disant :
De vivre sui toz asazez ;
Cai j'ai vécu plus que assez.
Parton. de Blois, .MS. de S. Germ. fol. 144, R' col 3.
VARL-^NTES :
ASS.\SIER. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 3ti.
AsASER. Siège de Troye, MS. du R. n» 6987, fol. 9t.
ASASiER. Ane. Poës. fr. MS. du Vatican, n° 1490, fol. 44.
ASAZER. Ane. Poët. fr. MSS. avant I30i), T. I, p. 234.
AsEZEiR. Chans. fr. MS. de Berne, part, m, fol. 10, R».
AssACiER. Bible en franc. MS. du R. Deut. chap. viii,v. 10.
Ass.ASER. Rom. d'Al. MS. du R. n»6987, fol. 171, R" col. 2.
.4SSAZER. Guit. de Sass. MS. de Gaig. fol. 244, V" col. 1.
AZASSER. Descript. et plais, des Relig. MS. de N. D. fol. 244.
R.\SAZiiER. Ph. Mouskes, MS. p. 91.
Assasoimer, wri^e. Mûrir; préparer. Il semble
que la signification de notre verbe assaisonner, pré-
parer une viande ou autre chose à manger, soit
relative à l'idée des saisons il) qui préparent la matu-
rité des fruits de la terre ; maturité sans laquelle ils
manquent de cette saveur naturelle à laquelle on
aura comparé celle que l'on donne aux choses à
manger, en les assaisonnant. On a dit, en parlant
de blé non mûri, qu'il n'étoit point assaisonné.
« Comme ilz se feusseiU assemblez pour cueillir et
« amasser le blé qui esloit au dedenz d'icellui
« champ, combien que icellui blé ne feust mie pour
« lors attempresé, ne assaissonné ; etc. « (D. Car-
pentier, ubi supra; tit. de li07.)
En regardant le Printemps, comme la saison qui
prépare notre âme au sentiment de la joie et des
plus douces jouissances, on disoit :
Quant naist la flour en la prée,
Que l'erbete et la rousée
Contre le SoUeil resplent ;
Lors doit joie estre menée
De la gent qui d'.Amors ont grant talent.
Quant la seson est tornée
En i-ejevenissement.
Et est joie assnsonnée
A ceus qui maintiennent jovent ;
Endroit moi noméement,
N'ert ele jà oubliée ;
Car ne sai vivre autrement.
Chans. fr. du xin" siècle, MS. de Boahier, fol. 47, R", col. 1.
VARIANTES :
ASSASONNER. Ch. fr. du xiii'' siècle, MS. de Bouh. fol 47.
AssAissoNNER. D. G. S. Gl. lat. de D. C. au m. assaxonare.
Assassin, subst. masc. Assassinat. Dans les
langues Orientales, Assassin signifioit ce qu'en
notre Langue il signifie encore aujourd'hui. (Voy.
Ass.issiNs.) Il paroît qu'au xvr siècle l'usage n'en
étoit point familier; (lu'il étoit nouveau même pour
les Savans qui sans doute l'introduisirent ('2). «Depuis
« que la France, disoit Henri Etienne, (liv. I, p. 263,
« de l'Apologie pour Hérodote,) a eu appris le style
« d'Italie en matière de tuerie, il a fallu trouver
« des termes nouveaux pour la nouvelle meschan-
i. ceté; » et l'un de ces nouveaux termes étoit celui
d'Assassin,, qu'on ne trouve point dans Rob. Es-
tienne. Dict. C'est par oubli de la vraie signification
d'.lssrtss/», que dans le sens d'assassinat, l'action
d'un assassin, l'on a dit : « Qui jettera l'œil sur
« les meurtres et assassins que les Princes faisoient
« faire par leurs favoris, etc. » (Pasquier, Rech.
liv. I, p. 21. — Voy. ASSASSINEMENT.I
Assassinateur, s(.'&sL masc. Assassin. Du mot
Assassinat, meurtre de guet-apens, meurtre de
l'espèce de celui iiui est défini liv. I, chap. xxv des
Etablissemens de S' Louis , s'est formé le nom d'As-
sassinateur, de même signification que celui d'As-
sassin, meurtrier de guet-apens. « Les obscures
« foresls,.... réceptacles de brigans et meurtriers,
« taupinières d'Assassinateiirs, officines de faulx-
" monnoyeurs, etc. » iRabelais liv, III, p. 13.) On
trouve Assassinat et assassinateur dans Cotgrave,
Nicot et Monnet, Dict. — Dict. de Trévoux. (Voy.
Assassin.)
Assassinement, subst. masc. Assassinat. Du
verbe Assassiner. (Voy. Du Bellay, Mém. liv. IX,
fol. 2i7. — Laurière, Gloss. du Dr. Fr. — Cotgrave.
Nicot et Monet, Dict. — Dict. de Trévoux.)
Assassineur, subst. masc. Assassin. En disant
Assassin pour Assassinat, et Assassineur pour
assassin, le Peuple parle comme Pasquier et Henri
Estienne, savans du xvi' siècle, où l'on disoit indif-
féremment Assassin, ou Assassineur, du verbe
Assassiner. « A propos d' Assassineurs et tueurs à
(1) Assaisonner est dérivé de salionem, action de semer : le premier sens est mettre à point, mettre à la saison, (n. e.) —
(2) Le mot se trouve sous la forme assacis dans Joinville : l'origine est l'arabe haschisch, poudre de feuilles de chanvre.
C'est cette poudre que le Vieux de la Montagne faisait prendre à ses feidairi ; ils avaient des visions, et, dès lors, se croyant
près du paradis, ils allaient tuer les personnages ennemis qu'on leur désignait (voir plus loin l'article sur la secte), (N. E.)
AS
— 230 —
AS
« gas;es comme estoyent ceux desquels je vien de
« parler, elc. « (Apologie pour Hérodote, p. 204. —
A'oy. Assassin.)
Assassins, subst. masc. plur. IS'om de peuple.
On croit que pour se former une idée vraie des
Assassins, que la Marlinière et Moréri ont nommé
Assassinicns , comme si Assassin étoit un nom de
pays, il faut lire dans le xvu° Volume des Mémoires
de Littérature, p. 127 et suiv., une Dissertation de
M. de Falconet, pleine d'érudition et de critique, sur
l'origine, la religion et les tiabilations de ce peuple
homicide par fanatisme.
Les sectateurs d'Ali, partagées en cinq principales
sectes, qui, bien que toutes ne reconnussent qu'Ali
pour premier Iman après Maliomet, différoient de
croyance relativement :\ la succession de l'Imamat,
virent naître au milieu d'eux les Ismaéliens. La
haine leur donna le nom d'Assassins, qu'ils justi-
fièrent par leurs attentats.
Ismaël, fils aîné de Giafar-al-Sadek, le sixième
des Imans admis par les Perses, étant mort avant
son père, les Ismaéliens, ses sectateurs, prétendirent
que les descendans de cet Ismaël avoient succédé à
la dignité d'iman, préférablement à la ligne colla-
térale. On vit ces mêmes descendans, vers la fin du
troisième siècle de l'hégire, s'emparer de l'Egypte,
où ils régnèrent près de trois cents ans. Guillaume,
Archevêque de Tyr, remontoit sans doute à l'ori-
gine de cette secte, lorsqu'on parlant des Assassins
de Syrie, dans son Histoire, liv. XX, chap. xxxi, il
disoit : « lUi efiam quadringentis annis Saraceno-
« rum legem eteorum Iradiîîones tanto zelo colue-
« runt, ut omnes alii respectu eorum prœvaricatores
« judicarentur. » En datant de la mort de Giafar,
père d'Ismaël, vers le milieu du second siècle de
l'hégire, environ l'an 770 de notre ère, on trouvera
qu'au temps où écrivoit cet Historien, peu après
1170, la Religion des Assassins, la même que celle
des Ismaéliens, avoit quatre cents ans d'antiquité.
Les dogmes principaux de cette Religion étoient
la Métempsycose et la descente de l'Èsprit-saint
dans la personne de leurs Imans, à qui par cette der-
nière raison les Ismaéliens croyoient devoir obéir
aveuglément, comme à Dieu même; soit qu'ils les
armassent du poignard de la vengeance et de la
trahison, soit qu'ils exigeassent d'eux le sacrifice
effrayant de leur propre vie. Ces dogmes étoient
communs à plusieurs autres Enthousiastes, tels que
les Dararioun, les Carmathes, etc.
Les sectateurs de Kersah, nommé Carmath, du
lieu de sa naissance, croyoient avec l'imposteur
Hakem et les Zenadecab, à la Métempsycose et à la
divinité des Imans. Us ne voyoient dans toutes les
nouvelles observations légales prescrites par leur
chef, que le symbole d'une obéissance aveugle. Leur
domination en Arabie ayant été détruite, ils restè-
rent dispersés pendant plus d'un siècle dans la
Syrie, dans la Perse et même dans l'Egypte, où ils
se mêlèrent avec les Dararioun et les Ismaéliens,
sous la dénomination générale de Bathénieus, c'est-
à-dire illuminés; de l'oriental Bathen, science inté-
rieure.
En effet, les Ismaëliens se nommoient aussi, du
moins en Egypte, Bathénieus. Les Bédouins, de qui
nous parlerons à leur ordre, sont d'une origine
différente. Aussi chercheroit-ou inutilement le nom
de Bédouins dans le Manuscrit original de .loinville,
publié par M. Capperonnier. Quoiqu'il se trouve en
trois endroits de l'Histoire de S'-Louis, édition de
Du Gange, il n'en est pas moins certain que ce ne
fut jamais le nom des Assassins : « C'est, dit M. Fal-
« yonnet, une ignorance del'interpolateur deJoin-
» ville, répétée par Pasquier, Bergeron, par Case-
« neuve et autres ; et ce qui est plus dangereux,
« par les derniers Dictionnaires, celui de Moréri,
" celui de la Martinière, et le Dictionnaire uni-
« versel. »
Si les Carmathes, réunis en partie aux Ismaëliens
d'Egypte, se nommèrent Bathénieus, ce nom ne
fut pas moins naturellement celui des Dararioun,
secte formée dans le sein même de l'Egypte. Ce fut
à la persuasion de Darari, leur chef, que l'Iman des
Ismaëliens d'Egypte, le troisième Khalife Fathimjte,
affecta de se croire Dieu. Les Dararioun, as'sez
nombreux en Egypte pour que Hamzah, successeur
de Darari, tué en l'an 408 de l'hégire, crût devoir
en faire passer dans la Syrie, reconnoissoient, ainsi
que les Carmathes, les dogmes principaux des
Ismaëliens : mais ils admettofent la transfusion des
âmes entre les vivans, proscrivoient toute espèce
de culte divin et autorisoient l'inceste.
Probablement ces sectaires furent persécutés par
les Ismaéliens, à la mort du Khalife qui les avoit
protégés. Quoi qu'il en soit, ils abandonnèrent
l'Egypte, sous la conduite d'Hassan-Sabah. Les
Ismaëliens de Perse, les Carmathes et les Dararioun
répandus en Asie, s'étant réunis à ceux d'Afrique,
leur Chef les établit sur le Gebal de l'Irak persique,
dans le Kouhestan de la Perse, c'est-à-dire l'habita-
tion de la Montagne. Il jugea sans doute que, haïs
partout où ils étoient dispersés, il falloit les ras-
sembler dans un pays montueux et presque inac-
cessible, d'où ils pussent braver la haine de leurs
ennemis. « C'est ainsi, dit M. Falconet, que sur la
« fin du v^ siècle de l'hégire, se forma la Dynastie
« des Ismaëliens, dont lîassan fut le premier chef ;
« homme d'esprit, versé dans la Géométrie, la
« Magie et autres Sciences. »
Cette Dynastie, qui subsista jusqu'à l'expédition
d'Holagou contre les Ismaëliens ou Assassins de
Perse, détruits quelques années après le milieu du
vn' siècle de l'hégire et du xui' de notre ère, étant
affermie par Hassan-Sabah et ses successeurs, leurs
vues politiques s'étendirent aux Dararioun, aux
Carmathes et aux Ismaëliens de Syrie. La commu-
nication avec ceux de Perse étoit facile par la voie
du Kurdistan. Aussi Thomas Hyde, dans son
Histoire des Perses, observe-t-il que le Liban étoit
habité par grand nombre de sectaires, Kurdes d'ori-
gine.
Ces sectaires et autres, tels que les Nossairioua
AS
231 -
AS
ou Nazerini de Pline, répandus dans les environs
d'Antioclie et d'Apamie, étant réunis tous par
quelque conformité de croyance aux dogmes essen-
tiels de la religion Ismaélienne, se soumirent sans
peine à la domination d'un Prince, que le Cardinal
Jacques de Vitri (Hist. Orient, et Occid. liv. I, cliap.
xiv), qualifie primus et summus eorum Abbas. Ils
sentirent qu'ils agrandiroient leur existence et la
rendroient plus imposante h leurs persécuteurs, en
ne formant qu'un seul et même corps avec les
Ismaéliens, les Carmalhes et les Dararioun de Perse.
En conséquence, ce Prince des Ismaéliens ou
Assassins de Perse, leur envoya des Vicaires ou
Lieutenans, comme l'atteste M. Polo dans son
Histoire, en Italien (T. II, liv. i, chap. 2.) Lorsque
le Cardinal Jacques de Vitri, dans son Histoire,
liv. uv de l'édition de Marlène, dit que « le primus
« et sunwius Abbas des Assassins de Syrie, éloit le
'< chef de leur religion superstitieuse, que tous
" leurs autres Princes lui étoient soumis et lui
« obéissoient, » il semble raisonnable d'en conclure
que ces autres Princes étoient les Vicaires ou les
Lieutenans du Prince des Assassins de Perse, et
qu'ils le regardoient comme leur Souverain. Son
nom oriental Schéikh, étoit de même signification
que Senior en Latin barbare. C'est donc par igno-
rance qu'on l'a nommé Senex, Senex de Montanis,
comme M. Polo, liv. I, chap. xxvni de son Histoire ;
Sexmontius, par corruption de Senex inonlium,
comme Haïton, chap. .xxui de son Histoire orientale.
Il est vraisemblable qu'une révolution insensi-
ble, mais destructive de la souveraineté du Prince
des Ismaéliens ou Assassins de Perse, avoit pré-
paré l'indépendance de ses Vicaires ou Lieutenans
en Syrie, avant la ruine totale de leur Dynastie,
par Ilolagou. Guillaume de Tyr, qui écrivôil plus
d'un demi-siècle avant cette époque, dit, liv. XX,
chap. XXXI de son Histoire, en parlant des Assassins
de Syrie : « Hi Alagistrum non hœreditarià succes-
« sione, sed meritorum prœrogalivà soient eligere,
« quem Sencm vocaul. » Le témoignage de cet
Historien, dans lequel M. Falconet a vu une preuve
qu'en Syrie le pouvoir du Chef des Assassins éma-
noit d'un pouvoir souverain, paroit autoriser notre
sentiment sur la possibilité des révolutions qui
enhardirent insensiblement les Assassins de Syrie
à s'élire un Chef indépendant du Prince des Ismaé-
liens ou Assassins de Perse.
Les mêmes raisons pour lesquelles ces Assassins
de Perse avoient fixé leur habitation dansleKouhes-
tan, sur le Gebal de l'Irak persique, déterminèrent
sans doute ceux de Syrie à habiter le pays mon-
tueux du Liban et de l'Anti-Liban. On a nommé
Gebal, le mont Liban, le pays montueux de ces
Assassins, en le confondant avec le pays montueux,
le Gebal, des Assassins de Perse. Probablement, le
nom oriental du Prince de ces mêmes Assassins,
fut aussi celui du Chef des Assassins de Syrie:
mais l'ignorance de la vraie signification de Schéikh,
fut cause que ce Seigneur de la montagne, en latin
Senior mentis, a été nommé comme le Prince des
Assassi)is de Perse, « Senex, Senex de Montanis,
■■ Velus de Montanis, » en françois, le Vieux de
la Montagne. « Si a une manière de Sarrasins que
" on apele Hassesis. Lor Sire a non li Viex de la
■' Montagne. » (Lelt. du Patriarche de Jérusalem,
Ms. de Berne, n° 113, fol. 175.)
Li Vious de laMontayncoï
Dire que li Rois ert croisiés:
Deux siens Hakesins apiela.
Et deux coutiaus si leur bailla.
Et coumanda mer à passer
Pour le roi Loeys tuer.
Ph. llouskes, MS. p. "09.
Quoique les attentats de ces Assassins, sur le
Marquis de Montferrat, sur les Rois Philippe-
Auguste et S' Louis, ne soient peut-être pas aussi
réels qu'on le croit sur la foi des Historiens suspects
à M. Lévêque de la Ravalière (Mémoires de Litté-
rature, T. XVI), on ne peut douter que les Croisades
n'aient excité la fureur de leur fanatisme, toujours
armé pour la défense d'une Religion plus odieuse
peut-être aux Musulmans qu'aux Chrétiens mêmes.
Ils aiguisoient sans cesse contre les uns et les autres
les poignards dont parle Ph. Mouskes, sans doute
d'après Guillaume de Tyr, qui avoit dit, liv. XXI,
chap. xxxi de son Histoire: « Si quos habent Princi-
« pes odiosos, data uni de suis sica, etc. » Ce
même Historien ajoute que les Sarrazins, comme
les Chrétiens, les nommoient Assassins, dénomina-
tion aussi usitée en Perse qu'en Syrie, puisque
M. Polo, parlant d'Alaëddin, le vu' prince de la
Dynastie des Ismaéliens de Perse, dit liv. II, chap.
xxvin de son Histoire en latin : « Princeps pessimus
« Senex de Montanis.... quosdam sicarios, quos
« vulgo Assassinos vocant, sibi adjunxit; et, per
" illos, quoscumque voUint occidunt. »
Le nom ù'Assassi)i, en Latin barbare Assassinas,
de même signilicatiouque siearius, est donc Orien-
tal d'origine. C'étoit probablement l'expression
d'un. sentiment de haine et d'horreur pour les
attentats d'un Peuple fanali(iue, de qui le primus
et sunnnus Abbas étoil nommé par les Sarrazins
Magister cultellorum, comme le témoigne le
Cardinal Jacques de Vitri, liv. IIP de son Histoire
Orientale et Occidentale, édition de Martène. On
auroit pu désigner de même le Vieux de la Mon-
tagne ou le Sire des Hassesis, comme on lit dans la
continuation de Guillaume de Tyr, (Ampl. Collect.
de Martène, T. V, col. (539,) puisque sa résidence
ordinaire étoit sur le mont Assilikin, sur la monta-
gne du Couteau ou du Poignard.
Lorsqu'on a la preuve qu'en langue Orientale
saliin ou sikkin signifie poignard ou couteau ; que
le latin eulter ou siea est la traduction de sikkin;
que les Assassins, Assesis, Hassesis ou Hakesins,
étoient nommés en latin Sicarii, ou Cullelliferi
comme dans Mathieu Paris, et leur Souverain
Magister Cultellorum, on penche à croire que le
nom oriental du poignard ou couteau, dont leurs
Princes les armoient pour l'exécution de leurs
ordres sanguinaires, est une origine assez naturelle
de celui à' Assassin : mais c'est un penchant dont
AS
232 —
AS
M. Falconel s'est défié. La vraie étymologie lui
paroit èlre celle (m'indique Thomas llyde, en
disant: » /Issass;';», signidcal Irucidatores, occiso-
« res. » Du verbe Arabe llassa, Chassa, Chasasa,
entr'autres significations tuer, vient, dit-il, le par-
ticipe actif Chàsis, au pluriel Hâsisin, Châsisin,
Occidentes, tueurs, Assassins. (Voy. Accides.) Il
attribue à l'ignorance de nos Auleui s occidentaux,
ou à la faute des Copistes, la c;:use de tant de varia-
tions dansforlbograpbe du nom des Assassins, que
l'on a crus originaires de la secte juive des Esséens
ou Esséniens. D'après celle opinion, l'on aura
nomm'é Esséniens les Assassins; d'autant mieux
en apparence qu'entre l'une et l'autre secte, il y
avoit une ressemblance essentielle de dogmes et
même d'observalions légales. En eiïet, la "couleur
blanclie de rbahillenient des Esséniens, étoil un
point d'observation légale, qui semble avoir été
commune à plusieurs sectaires compris sous la dé-
nomination d'Assassins, et que l'on appeloit les
Velus de blanc, les Habillés de blanc. Au resle, ce
nom d' Esséniens, comme M. Falconet l'observe, ne
ressembloil pas moins à celui d'Assassins, que
ceux d'Arsacides, Assanites et autres, que diffé-
rens Auteurs leur ont donnés, suivant diverses
idées étymologiques également frivoles.
Il esttrès-probablequela puissance desissflssms
de Syrie, déjà fortement ébranlée par la destruc-
tion des Assassins de Perse, s'afToiblissoit de jour
en jour par les efforts mêmes qu'ils faisoient pour
la rendre redoutable à leurs ennemis. Le fana-
tisme qui les animoit, s'amortissant insensible-
ment en proportion de leur foiblesse, on eut moins
à craindre de leurs attentats. Le dernier qui soit
îi notre connqissance, est l'assassinat commis en
la personne d'Edouard fils de Henri III, roi d'An-
gleterre, dans la ville d'Acre. « Un Ilassassis navra
« sire Odouart en la cbnmbre. « (Contin. de G. de
Tyr, Ampl. Collect. de Martène, T. V, col. 746.) La
blessure de ce Prince, assassiné en 1271 ou 1272,
ne fut pas mortelle, puisqu'il succéda à son père,
et régna jusqu'en 1307. On ignore s'ils furent cou-
pables d'autres attentats religieux et politiques
jusqu'en 1280, époque £> laquelle Abulféda fixe leur
destruction totale, par les Lieutenans de Bibart, iv^
Sultan de la seconde Dynastie des Mamiuks. S'il
existoit encore des .Issass/HS en Syrie, au commence-
meiil du xi\= siècle, ils y vivoient sans doute errans
et vagabonds, et ne formoient plus un Peuple.
On sait qu'un des principes les plus actifs du fa-
natisme de ce peuple Assassin, étoit l'espoir d'un
Paradis où les plaisirs qui flalleiit le plus délicieu-
sement nos sens en celle vie, se lenouvelleroient
sans cesse avec la faculté de les goûtei' après la
mort, et de toujours les désirer. L'idée de ce Para-
dis, étoil la même que celle du paradis de Schédad,
ancien Roi de l'Arabie heureuse. « Ce Prince, dit
•c M. Falconel, voulant persuader ses sujets de la
«• divinité (lu'il s'altribuoit, imagina de renfermer
" dans un jardin tout ce qu'il y avoit de plus
« propre à flatter les sens, et y introduisoit, comme
« danslevrai Paradis, ceux qu'il en jugeoitdignes. »
Un profond sommeil, causé par certains breuvages,
préparoit leur illusion et la favorisoit. C'est par
une illusion semblable, que le Prince des Assassins
les disposoit à braver la mort et même à la désirer,
comme le commencement d'un bonheur dont
l'avant-goût les avoit séduits et enchantés (1).
VARIANTES :
ASSASSINS. Pasquier, Rech. liv. VIII, p. 689.
Arquassins. Wém. de Littérature, T. XVII, p. 165.
As.s.^ssiNiENS. La .Martinière, Dict. Géogr.
AssAsiNS. Lauriére, Gloss. du Dr. fr.
AssEsis. Martène, Amp. Col. T. V ; c. de G. de Tyr, c. 736.
AuQUAssiNS. Mém. de Littérature, T. XVII, p. 1(35.
Hakesins. Ph. Mouskes, p. 709.
Has^sis. Mart. Amp. Col. T. V ; c. de G. de Tyr, c. 746.
Hassesis. Id. ibid. col. 639.
Hauss.^cis. Annal, du Règne de S' Louis, p. 206.
Haussasis. Du Cange, Gl. lat. T. I, col. 768, au m. assashn.
Heissesins. Id. ibid.
Assavanter, verbe. Mettre en état de savoir.
Rendre savant.
Du latin sapiens, participe du verbe sapere,
saver en ancien françois ; par le changement si
ordinaire de p en v, l'on a fait savant; d'où le verbe
assavanter, mettre en état de savoir et de con-
noitre, dans un sens qui n'a rien de relatif aux
connoissances et aux goûts qui caractérisent un
Savant. « Lesquelz com'paignons, pour assavanter
« les autres ou ilz estoient, semblablement siffie-
« rent. » (D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du
Cange, T. III, col. 726; tit. de 1481.) « Quand au-
« cun acquiert aucun héritage, ou droit censé et
« réputé pour héritage, par contract de vente,
« le lignager.... peut.... les attraire à luy par
« retraict,.... en offrant payer le sort principal et
« loyaux coustemens, luy asçavanté des loyaux
« coustemens. » (Coul. de la Rochelle, au Coût,
.gén. T. II, p. 640.) « Les débats qui sourdent entre
« le mary et la femme ont esté de telle conséquence
« entre les Athéniens, qu'ils avoient des
« Magistrats n'ayans autre charge que d'appointer
« le mary et la femme, avant que le Peuple fût
« asçavanté de leur dissention. » (Bouchet, Serées,
liv. 1, p. 98.)
Lorsqu'on a la preuve qu'un nombre de mots tels
que Sergent, en latin Serviens, le g est sulistitué à
v, et qu'en nombre d'autres il est changé en e, pro-
noncé /.: ou ch, l'on esl tenté de croire que sachant,
anciennement écrit sacant, est une altération de
savant, en latin sapiens (2). Aussi la signification du
verbe assavanter, formé de savant, est-elle relative
à celle du participe sachant, dans les citations pré-
cédentes. Selon Cotgrave et Oudin, il signifioit
également rendre savant, mettre en état de savoir-
(1) Voir sur les Assassins un mémoire de Silvestre de Sacy, Mém. de l'Ac. des Insc, t. IV, p. 1. - (2) Sachcuu ou saçatit
vient directement de sapientem ; pi devient pj, puis p tombe et j se transforme en ch. D'ailleurs, par la confusion des sons
en et an, cntem latin devient ant français. Savant est d'une autre formation : Vi bref esl tombé, et p pris entre deux voyelles
est tombé à v. (n. e.)
AS
— 233 —
AS
d'acquérir des connoissances, avec le goût des Anti-
quités, des Sciences et des Arts. (Voy. Savant.)
VARrANTES :
ASSÂVANTER. Cotgravo et Nicot, Dict.
AsçAVANTER. Cotgrave, Oudin et Monet, Dict.
AssANNETER (assavanter.) Mart. Thés. A. T. III, col. 1514.
AssçAVANTER. Favin, Théàt. d'honneur, T. I, p. 532.
Assaiicier, verbe. Surhausser. Saucer.
Au premier sens, le verbe assaucier n'est proba-
blement qu'une variation des orthographes essau-
cier, essaucer, exaucer ; proprement exhausser,
au figuré exalter. On soupçonne donc qu'en une
signification analogue à celle de surhausser, l'on
aura dit figurément. en parlant à Louis d'Outremer
qui meltoit à haut prix la réparation des torts
d'Arnoul I, comte de Flandre, qu'il ne devoit point
les assaucier.
Aprez li Roiz parlèrent Barons et Chevalier,
Qui du Conte de Flandres ourent moût grant loier.
Ne devez pas, font-il, ceste chose ansaiicicr :
Ernouf est vostre hom lige, si vous peut bien aidier.
Rom. de Rou, MS. p. 77.
Dans le second sens, assaucier, formé du subs-
tantif sauce, est l'explication du latin saporare (\),
parce qu'en sauçant les viandes ou en les assaison-
nant d'une sauce, on leur donne plus de saveur.
(Voyez Labbe, Dict. fr. p. 524.)
Assaver, verbe et adverbe. Savoir. Sagement.
(Voy. Saver ou Savoir.)
En réunissant au verbe simple saver ou savoir
la préposition à, usitée par exemple dans l'expres-
sion est-à-saver ou c'est-à-savoir, l'on a écrit c'est
assavoir, etc. « Enseigne moy le cheval.... Se tu
« n'es digne,... jà ne te lairray approcher. Ce
« est assavoir , dist Olofer : mais monstre le
« moy. i> (Percef. Vol. VI, fol. 113.) « Encores est
« assaver que nous volom le creissement et amen-
« dément de la ville de Coigniat. » (Ord. T. II,
p. 343 ; lit. de 1262.)
Dès lors, la signification du verbe composé assa-
ver ou assavoir, fut souvent la même que celle de
saver ou savoir, comme lorsqu'en faisant ellipse de
la préposition à dans cette autre expression faire
à-savoir, on a dit faire savoir. « Nous faisons assa-
« voir, tant à cheus qui sont à présent, comme h
« cheus qui sont à venir, que pour le regart de
" l'amour divine, etc. » (Ord. T. I, p. 102,'^col. 2;
lit. de V2m.)
. . . Pour le cas mieulx vous faire assavoir,
On ne s'en sceut jamais appercevoir.
Faifeu, p. 40.
On ahrégeoit et l'on abrège encore aujourd'hui
l'expression c'est-à-savoir, en disant ù-savoir, et
même tout simplement savoir, dans le sens liltéral
du verbe composé assavoir. Anciennement, dans
l'usage elliptique d'assavoir et de savoir, on ajou-
toit à ces verbes la particule mon ou moun, dans
laquelle les Hellénistes du xvr siècle ont vu le .«tôi/
interrogaiif des Grecs, tandis qu'aux yeux d'autres
Etymologistes, c'étoit l'inversion du 7ium interro-
gatif des Latins. (Henri Estienne, Conform. du Fr.
avec le Grec. — Celt-hell de L. Trippault. — Nicot,
Dict. — Ménage, Dict. Etym. — Gloss. de l'Hist. de
Paris, etc.)
La seconde élymologie paroîtra sans doute plus
vraisemblable que la première, lorsqu'on aura la
preuve qu'au xn' siècle on traduisoit numquid, par
savoir-noun-si, savoir-moun-si, savoir-mon-si, de
même signification que à-savoir-mon-si, assavoir
mon-si, dans les siècles postérieurs. « Responant
« Judas qui le avoit trahi, il dist : savoir noun si jeo
« le sui, Maislre? » (Evangil. S' Matthieu, ms. du
Gard, de Soubise, chap. xxvi, v. 25.) « Saver momi si
« par ascun à ceux lesqueux jeo maundei à vous,
« vous ai-jeo deceu ? » (Epit. H, S'. Paul, aux Corin-
thiens, MS. du Card. de Soubise, chap. xn, v. 17.)
" Cil grauntement troblé comencerent chascun à
« dire: saver mon se jeo sui. Seigneur? » (Evangil.
S'. Matthieu, ms. du Gard, de Soubise, chap. xxvi,
V. 22. —Voy. Ord. T. I, p. 149, etc.— Gloss. de Ma-
rot. — Oudin, Dict.) «< Se li Sire offre à faire droit, à
« savoir mo7i se recréanche li appartient, li bons
« ne se couchera pas en cel jugement, se il ne li
« plest, " (Beaumanoir, Goût, de Beauvoisis, ms de
N. D. chap. Liv.)
Assavoir mon sy ces fillettes.
Que en paroUes toute jour tien,
Ne furent pas femmes honnestes ?
Villon, poës. p. 34.
Ung mary en vacation
S'en alla en commission
Veoir sa belle Ante. se dit-on.
Il demourra bien es villaiges
Cinq ou si.x moys : assavoir mon
S'il est tenu des arreraiges,
Quant il revient ? Dient aucuns saiges, etc.
Coquillart, p. 9.
Henri-Estienne reprochoit aux Théologiens de
son siècle, la témérité ridicule et souvent crimi-
minelle avec laquelle ils hasardoient telles ques-
tions : '< A-sçavoir-moH si Dieu pourroit pécher, s'il
<> vouloit; à-savoir-?Hon si Dieu pouvoit prendre
« nature humaine en sexe féminin ; à-savoir-?))on
« si après la résurrection il sera licite de manger et
« boire? » (Apol. pour Hérodote, p. 508. — Voy.
Cotgrave, Rob. Estienne et Nicot, Dict.)
Si nos Hellénistes eussent connu l'ancienneté de
cette particule juon dans notre Langue, probable-
ment ils auroient hésité à la croire d'origine
grecque. En voyant qu'au xir siècle la traduction
françoisedu Isiiinnumgiiidétoit savoir-noun-si, ou
savoir-moun-si, de même signification que à-savoir-
mon-si ou assavoir-mon-si, dans le xvi' siècle, peut-
être auroient-ils adopté l'étymologie latine. (Voy.
NOLN.)
En efïet, on ne peut guère douter que cette par-
ticule noun ne soit le num interrogaiif des Latins,
altéré, selon l'opinion de quelques Etymologistes,
dans inotin et mon, par une inversion qui n'est pas
(1) Saucer est dérivé de sauce, qui vient du latin sa /.sa. Du Gange cite un poème manuscrit du moyen-âge, où on lit
ces vers : « Salvia, serpillum, piper, allia, sal, petrosillum, Uis bona fit salsa, vel fit sententia falsa. » (n. e.)
11. 30
AS
- 234 —
AS
sans exemple. Mais, en admettant que ce mon ou
moun est de même origine nue noun 1 on observera
que dans la traduction fran.-oise de mnwiuid, la
particule noun, moun on mon, représente 1 l'iterro-
gation latine ?i«m, sans en avon- 1 énergie. Elle y
est tautolo^ique, puisque « savoir moun si ou savon-
« noun si '» ne signifie rien de plus que savmrbi.
Pour que mon on moun y signiiiàt quelque chose,
il faudroit qu'il ne fût pas une altération de nomi
en latin num ; mais une variation d orthographe de
l'adverhe mont ou monlt, le même que moult, en
latin multùm.
Vpocrisie moult se cuevre ;
Moult en pou d'ore se descuevre...
Les Ordres forment en déclinent...
Je nou di pas tôt por Grant-mont;
^"^";!S^(^!;:î';^mi«:aeN.D.fo,.mn-co,.,.
Quatre mois fui-je à Clervaux....
N'est pas tôt orz quanque voi luire ;
Ne luire ne pueent il )nont :
Car n'a nule ordre en tôt le mont,
Où ait mainz de fraternité.
Ibiil. fol. 08. r.' col. 1.
Fust esleu Connestable
À.rtus, Conte de Ricliemont ;
Vaillant Seigneur, douLx, amiable,
Oui a fait à son temps biens mont. , , „ ,,
^ Vigil. de Charles VII, part. 1, p. 55.
Or demandez se deduict y a monll,
Quant le faulcon part pour tirer amont
Après héron faisant une montée.
Poës. de Crcliii, p. 81. - Id. ibid. p. 27 cl 57.
On remarquera que dans ces phrases proverbia-
les « faire mons et merveilles, promettre monts et
,. merveilles » la vraie signitication de nions ou
monts et merveilles, est celle du latin milita ei
mirabilia. (Voy. Vigil. de Charles VII, Pfft- '!' ?• 8^'
etc - Cotgrave, Dicl. - Oudm, Cur. Fr.) G est par
ienorance de l'élymologie de ce pluriel 7nonts ou
mons dans lequel on a cru voirie latin montes, que
se fleurant l'idée relative de vallée et de montagne
comme idée d'un Tout, on a dit " promettre monts
« et vaux, faire mons et vaulx, « pour faire ou pro-
mettre tout ; ce qui presque toujours signitie pro-
mettre ou faire l'impossible, et par conséquent du
merveilleux. (Vigil. de Charles Vil, part, ii, p. 41. -
La Planche, Hisl. de la France sous François II,
p 704 _ Th. Corneille, l'Amour à la Mode, act. v.
se. 2. — Cotgrave, Rob. Estienne et Nicot, Dict. —
Voy. Mont.) ., ,
Après avoir prouvé qu'au xir comme au xvi" siècle,
par le changement de / en n de même organe, on
prononçoit et l'on écrivoit mont pour molt , varia-
tion des orthographes mult, moult, en latin /«((/-
iùm, on seroit 'tenté de croire à la possibilité que
7non ou moun, qui ne signifie rien, comme altéra-
tion de la particule inleirogalive noun, en latin
num, fût le même que tinnil, moult, moult, dans la
phrase savoir-mon-sl. En elfet, on a dit sç-avoir-
mont-si, comme sçavoir-mon-si. « Sçavoir mon se
. je le dois avoir ou non.» (Ord. T.I, p. 249.) « Assez
« pensa.... Morgain à celle chose; sçavoir mont
. selle la diroit à son frère le Hoy. » (Lanc. du Lac,
T. III, fol. 125.)
En supposant donc, ce qui paroît assez vraisem-
blable, que mon, inutile dans l'expression savoir-
moH-si, comme particule interrogative, soit une
altération de ?/iOH^ en latin multùm, on pourroit
dire qu'en cette même expression, 7non est adverbe
de quantité, et de même signification que bien dans
cette nouvelle phrase si analogue à rancienne : je
voudrois bien savoir si, etc. Or, cet adverhe bien a
signifié et signifie encore la même chose que beau-
coup substitué à molt ou moult; sans qu'on voye,
dit la Bruyère, par où beaucoup l'emporte sur Un.
C'est donc avec assez de vraisemblance qu'en plu-
sieurs fayons de parler affirmatives, telles que ce-
suis-îHO?i, c'estes-??iOM, c'est-H/o?(, et autres; Robert
Estienne a pensé que ce mon étoit une altération de
7noult dans la signification de l'adverbe bien ou
beaucoup. (Voy. Id. Gram. Fr.) « Toute femme
.< varie... C'est mon viayemenl : ne vous en pensez
» pas mocquer. » (Brantôme , D" Gai. T. II, p. 233.)
a II se repentira par après de s'y estre amuse. C'est
« mon : mais il s'y sera toujours amusé. « (Essais
de Montaigne, liv. 111, p. 3fâ.) « Ce seroit trop
« grant dommage. Certes, Sires, ce seroit mon. »
(Lanc du Lac, T. I, fol. 5.) « Certes ouy, dist-elle,
« se aymée suis.... Par ma foy. Dame, distOurseau,
« c'estes mon : car autre femme n'ayme au monde
.. que vous. » (Percef. Vol. IV, fol. 138.) « Geluy
» Rov... luy dit; tu es venu de l'ost des Tartarins.
« Sire, fist-il, ce suis mon. » (Joinville, Hist. de
S'. Louis, p. 92.)
Ouand il est prouvé que, non-seulement on a
prononcé et écrit mo7it pour nioll ou moult, miais
que dans ces façons de parler affirmatives, mon
semble être le même que mont, d'autant plus qu il
y est de même signification que bien, beaucoup,
moult, en latin multùm ; on trouve peu raisonnable
la distinction de Mcot entre c'est /HO/(iet c eslmon.
Après avoir reconnu dans mont l'adverbe latin
multùm, il le méconnoît dans inon, qu'en ce cas il
croit être le ^t./ des Grecs. (Voy. Nicot, Dict. aux
mots »(0»/et .lssa!'0(?'-?îiO/t (1).)
11 est possible que nos Auteurs des xv= cl xvi'
siècles, flattes d'une idée d'érudition, aient cru
parler grec, en disant : « Asçavoir mon des deux,
« si c'est vostre faulte ou la nostre. '> (Rob. Estienne
et Nicot, Dict.)
C'est luy, c'est )non, c'est luy qui d'art subtil
Fort bien s'aydoit de la plume et oustil
Des Orateurs.
Crétin, p. 53.
Cependant, ils parloient notre ancienne Langue,
comme la parlent encore les Paysans du Rerry, de
la Bourgogne et de la Champagne, lorsqu ils disent:
c'est mon", assavoir mon; expressions anciennes et
■mtindum; de purcnwiU à cerlainemeiit la transition est facile. (N. E.)
AS
— 235 —
AS
devenues populaires, dans lesquelles on affectoil
de voir l'interrogatif /^wy etl'affirmatif ^Èrdes Grecs.
Peut-être voudr'a-t-on encore que mon, dans les
phrases inlerrogatives , soit Tinversion du latin
num ? Il semble néanmoins que d'après notre
observation sur la possibilité que ce mon signifie
quelque chose dans assavoir-moji-si, non comme
particule interrogative, mais comme adverbe de
quantité, l'on pourroit soupçonner avec nous que,
soit qu'on interroge en disant asmvoir-mon-si, soit
qu'on affirme en disant c'est mon, il est de même
origine et de même signification que mont ; varia-
tion des orthographes molt, moult, mult, en latin
multùm, qu'aujourd'hui l'on rend en françois par
l'adverbe bien ou beaucoup.
Au moins ne doutera-t-on pas que ce ne fiit
réellement la signification de?HO», lorsqu'on disoit:
C'est moH, pour c'est bien ainsi, dans les Poës. de
Crétin, p. G8 ; Agardez- mon, pour regardez bien,
dans les Contes de Desperiers, T. I, p. 274 ; Ce fais
mon, pour je le fais beaucoup, je le fais bien ;
Ce cuide mon, pour je le crois bien ; Sçaij mon,
altéré peut-être dans semon, pour je le sais bien, etc.
« Messieurs les Médecins, vous en sçavez et faites
« de bonnes ; et mesmes vous Monsieur qui en
« venez parler comme maislre. Il respondit, en
« baissant la teste: semon, seinon, ouy, ouy, nous
« en sçavonsel en faisons de bonnes. >• (Brantôme,
D" Gai. T. II, p. 54 et 55.) « Mamie, moult avez eu
« de poureté depuis que ne vous vis. Ilelas ! dist la
« Dame, sçay-^non. » (Rom. de Galien restauré,
chap. Lxxv.)
Ne porroit nus, ce cuit mon, mieux eslire.
Ane. Poêt. Fr. JISS. avant 1300, T. I, p. 490.
Yvon et Yvore et Salemon
Doi jou plorer. Voire, ce fas moyi ;
Ouar il furent buen Cevalier.
Ph. Mouskes, MS. p. 212.
Dit avez
Que mon voloir n'i esgardez.
Bien voi que ce ne ne faites mon.
Parlon. de Bloi,, MS. de S. Gcrm. fol. 162, R' roi. 2.
Quoiqu'au premier coup-d'œil l'altération de
scay-mon, dans semon, paroisse assez vraisembla-
ble, il seroit possible que l'expression scay-mon ou
saij-mon, comme on lit (Rom. de Mabriant, chap.
xxviii, cité par Ménage, Dict. étym. T. II, p. 217, col. 2),
fût elle-même nne Méruûoii de se-ay-mon ; c'est-
à-dire, si en ai-je bien, si en ai-je beaucoup. « Ou
« t'en va, Ribaux, tuenas....Sefly )?iO)ivoirement :
« et adoncques se partirent «(D. Carpentier, Suppl.
Gloss. lat. de Du Gange, T. III, col. 756.) La signifi-
cation de scay-mon^ dans, la citation du Roman de
Galien restauré, m&/' s!//jra, est évidemment la même
que celle de se-ay-mon.
On pense donc qu'avec ellipse du verbe dans ces
phrases, se-ay-mon, ce-fais-mon , ce-cuide-mon ,
c'est-mon et autres, on aura dit ce-mon, semon. Du
moins semble-t-il probable que c'est par ellipse du
participe dit ou fait, qu'en affirmant ironiquement
une chose, l'on aura dit ce-a-mon, c'amon. Dans la
Comédie du Bourgeois Gentilhomme, Mad' Jourdain
blâme la manie ridicule de son mari, en lui disant:
« C'amon (1) vrayement ; il y a fort à gagner à fré-
« quenter vos Nobles. » (Acte III, scène n.)
.... Bien souvent en fesois mocquerie.
Si l'on disoit, en oyant un sermon,
Il a bien dit ; je respondois ; ce a mon.
Les Marg. de la Marg. fol. 20, R".
La signification de c'amon n'étoit pus toujours
ironique. Dans le Malade imaginaire , Toinette,
servante d'Argant qui lui a dit de se taire, répond
en feignant de s'être blessée : « C'amon ; ma foy,
'■ j'en suis d'avis, après ce que je me suis fait. »
(Acl. I", scène u.) On croit que c'amon en ce pas-
sage n'est pas plus ironique qu'en nombre d'autres
c'êst-mon; quoiqu'on ait dit quelquefois avec
ironie: Voire, c'est-mon. (Voy. Monet, Dict.)
Peut-être nous approuvera-t-on d'avoir placé
sous assavoir, nos observations sur l'unité possible
d'origine et de signification de la particule mon,
dans ce-a-mon, c'amon, semon, say-mon, ce cuide
mon, ce fais mon, c'est-mon; savoir-mon, assavoir-
mon, eu voyant que dans l'expression interrogative
assnvoir-môn ou savoir-mon, si familière à nos
Ancêtres, c'étoit une espècede particule enclytique.
Si l'on veut qu'en cette dernière phrase mon soit
l'inversion du latin num, au moins reconnoîtra-t-on
que dans c'est-mon et autres expressions, il est
comme mont une variation de molt, moult, mult,
en latin multùm ; adverbe de quantité, auquel nous
aurions renvoyé pour mon, si l'on eût dit savoir
moult, comme savoir-mont, savoir-mon. (Voy.
MoiLT ou MuLT.)
On finira cet article en disant que assavoir,
comme adverbe, a signifié sagement, parce que le
verbe simple savoir, goûter les choses, les sentir
tant au physique qu'au moral, les connoitre, pris
substantivement, a signifié sagesse, le goût, le
sentiment moral, la connoissance des choses utiles
et agréables.
Firent bien assavoir,
Et grant pris durent cil avoir
Qui escristrent premièrement.
Rom. deRou, MS. p. 1.
VARIANTES :
ASSAVER. Ménage, Hist. de Sablé, p. 220.
AsçAVOiR. Rob. Estienne et Nicot, Dict.
Assavoir. D. Morice, Hist. de Bretagne, T. I, col. 958.
Assavourement, subst. masc. Goût. La faculté
de goûter, de sentir, de discerner les saveurs :
« C'est il ki as oyls donoit la veue, as oroilles l'oye,
« à la langue la voix, à palais rassrti)Oî<j'éîmf?ii, etc. »
(S' Bernard, Ser. Fr. siss. p. 44. — Voy. Assavourer.)
Assavourer, verbe. Goûter, essayer, sentir;
ressentir, éprouver, connoitre. Sentir, éprouver de
la douceur; être doucement atTeclé. Savourer,
goûter avec plaisir, aimer, affectionner. Ragoùter,
affecter agréablement le goût. Rendre savoureux et
ragoûtant; affecter d'une sensation, d'un sentiment
agréable.
(1) Il vaut mieux écrire : Ça mon. (n. e.)
AS
— 236
AS
Du latiai sapw, en françoissayoc, savour, saveur,
s'est formé le verbe simple savourer ; d'où le com-
posé assavourer, goûter une chose, en goûter, en
essayer : par extension de l'acception goûter, sentir
en goûtant , sentir d'une fagon quelconque , physi-
que ou morale; ressentir, éprouver, connoitre.
(Voy. AssAiER.)
Dans le sens propre on disoit: « Cume vint al
« mangier, e il ourent le pulment asavured, etc. «
(Livres'des Hois, ms. des Cordel. fol. 127.) « Appro-
« cheons à la taule, chier frère ; et d'un chascun de
« ces maz assaverons al moens, cum petit que
« soit. « (S' Bernard, Serm. Fr. mss. p. 350.)
« Certes nuls ne reupet de celé chose dont il gosteit
« nen at, ne de celé ciiose mismes cuy il nen al
« mais k'assavoerie (1); en latin: sanè nemo ([uod
o non gustavit, sed neque quod tantùm gustavit,
« éructât. » (Id. ibid. p. 23; Serm. lat. col. 730.)
Au propre et au figuré, dans les expressions
assavourer la saveur de chasteté, la douceur de
pureté, la douceur d'un spectacle, assavourer le
fruit du salut, etc. « 0 ! cum est bien-aurez cil
« cuers ki est traiz par lo fruit de salveteit, k'il
« assavoreit at. i> (S' Bernard, Serm. Fr. mss. p. 51.)
« Isseiz fors, Filles de Syon, et si eswardeiz le Roi
« Salemon en la corone dont sa mère l'at coroneit.
» En-josk'ù-or aveiz vos esteit senz ces délices:
« ceste douzor nen rtssftiioî(?'ns^es vos onkes mais. »
(Id. ibid. p. 200.) « Nos semont.... ke nos.... assavo-
» riens.... la douceor de la parfaite purleit. « (Id.
ibid. p. 312.) '■ Qui est nuls de vos.... ki nen ait
« assavoreit la savor de chasteit ? » (Id. ibid. p. 233.
— Voy. Savour.)
Il semble que dans un sens analogue à celui
cVassavourer la douceur, la saveur d'une chose, on
ait dit:
Douz en bouche
Est amours, et si savorcz
Que, quant plus est assavorez,
Tant est-il de meillor savor.
Amour, quant je bien Vasavoi; etc.
Fabl. MS. du R. n' 7fil5, fol. 192, V col. i.
Dans la signification de ressentir, éprouver,
sentir, connoitre, on disoit ligurément : « Ceux qui
« vous ont conseillé le département du Concile,
" n'entendoient mie les griefs maulx qui en pour-
« roieut naistre. Pleust à Dieu qiïWs assavourassent
« et entendissent la fin comme, etc. » (Monstrelet,
Vol. II, fol. 74, R°.)
Là se rendent Chevalier
Qui ont le siècle asavoré,
Et ont tout veu et tout tasté.
Bible Guiol, citée par D. Carpenlier, S. Gl. 1. do Du C. au mot Adsaporare.
Desconfiz se metent à voie ;
Angoisse et paour asaveurent.
Li meilleur Mestre ocis demeurent.
G. Guiarl, MS. fol. 21i, V'.
Leur grant meschief asavouranf,
S'en vont après François courant ;
N'esgardent fosse ni bruière.
Id. fol. 120, R°.
Ces deux dernières citations prouvent combien
étoil étendue l'acception d'assavourer, sentir.
(Voy. Savourer. )
En désignant par assavourer, une sensation , un
sentiment désagréable, on abusoit sans doute d'un
verbe qui, comme expression ordinaire de senti-
mens et de sensations agréables, signilioit sentir,
éprouver de la douceur ; être doucement affecté du
sentiment intérieur de la paix de l'ùme, en ces vers :
Li cuers qui mal aime, maus oure :
Sovent souspire, gient et plore.
Com plus en orison demore ,
Plus sent, et çouste, et assai'ore.
Fab). MS. du R. n- "-218, fol. 125, V- col. 1.
Il est naturel qu'étant affecté d'une sensation
douce en goûtant une chose, l'on en réitère l'essai,
la dégustation, l'épreuve, pour en connoitre mieux
la saveur. Si, d'après cette épreuve réitérée, l'on y
reconnoit la même saveur, si le goût en est aussi
doucement affecté, on la goûte avec plaisir, on
l'aime. C'est encore la signification du verbe simple
savourer ; et c'étoit celle\lu composé assavourer.
Nul ne sçait qu'est bon vin , qui bien ne l'assaveure.
i. de Meung, Cod. vers 2001.
Dans le sens d'aimer, affectionner, on disoit en
général: « Celés choses que desor sunt, «ssai'Oii-
« re^:,; ne mie celés ki suai sor terre. » (S" Bernard,
Serm. Fr. mss. p. 01.) « La fin de ceux qui assavou-
» rent les choses terriennes, est la mort. » (Jean
de Saintré, p. 50.)
Rien ne m'est bon, n'autre bien n'assaveure.
Fors seulement l'attente que je meure.
rocs. d'Al. Chartier. p. 53B.
On a même désigné le sentiment doux et affec-
tueux que l'on éprouve à l'idée d'un Dieu bon, à la
vue d'un homme pour lequel on se sent du goût,
de l'affection, en disant figurément : « Fors est
« issus cum giganz por corre la voie : si nos cestui
« assavourons, et nos adès lo mattons d'avant
« l'eswart de nostre cuer ; dons corrons nos ligiére-
« ment et lost, trait par son odour. •> (S' Bernard,
Serm. Fr. mss. p. 340.)
.Assavourons bien Dieu, et si desirons l'heure
Que nous soyons au lieu; car trop plus nous demeure
Que raestier ne nous fust : mais péchié nous court seure.
J. do Mcung, Cod. vers 2002-200i.
C'est relativement à l'idée de saveur par laquelle
le goût est agréablement affecté, que dans le sens
propre de ragoûter, on a dit : « Ne me asavure ne
« délite mais, ne beivre ne mangier. » (Livres des
Rois, MS. des Cordel. fol. C7.)
Enfin, assavourer les choses, c'étoit les rendre
savoureuses et ragoûtantes, les rendre propres à
nous affecter de sensations agréables au goût, par
extension à l'odorat, à la vue. On a dit en parlant
de S' Louis : « Il menjoit moût de foi^ potage mal
« assavouré, duquel un autre ne menjoit pas volen-
« tiers; car il n'estoit pas savoureus. - iJoinville,
Vie de S" Louis, p. 307.)
Comande que li face
Savors teles dont gré II sache,
Et sauces molt assavourées.
Fabl. MSS.d.!S'Germ p. 107.
<1) Personne ne crache (respuit) ce dont il n'a goûté, ni même ce à quoi il n'a fait que goûter, (n. e.)
AS
237 —
AS
Vous qui avez eu octroy d'Amye,
Vuydez du boys la joUyette sente,
Vuydez le gand (1) et la verde lueiUie,
Vuydez les prez assavourc: de mante :
llz sont nostre que Amours desirans, etc.
Percef. Vol. VI. fol. 99, R- col. 1.
Au figuré, l'on disoit d'une jeune personne de
physionomie ragoûtante et propre à nous affecter
d'un sentiment amoureux, qu'elle éioitassavourée ;
d'un homme libéral et donnant de manière à nous
affecter d'un sentiment de reconnoissance, qu'il
assavouruit ses f/o?is; d'un cœur soupirant d'amour,
et dont les soupirs affectent l'amant d'un sentiment
flatteur, qu'il éioil assavouré de doux soupirs; d'un
mal propre à nous affecter d'un sentimentde mélan-
colie douce et agréable, qu'il estoit assavouré, etc.
« Damoiselle, cîist Flourentine, besoing n'est de
« vous courroucer : se plus belle et mignote estes
« de moy. d'aultre part je suis mieulx assavourée. •
(Ger. de Nevers, part, i, p. 118.)
Que chascuns nsavort son don.
De quel savor ? Par quel raison
Puet-il son don asavorer ?
La savor est de tout donner.
Elcs de Courtoisie, MS. de S. Gerra fol, 40, R° col. 1.
Se retenir ne me volés
D'un doue soûlas à loisir,
De fin cuer asax'ouré
D'un doue souspir, etc.
Ane. Poët. Fr. .MSS. avant 1300, T. III, p. 1275 et 127C.
Bien sont asavoreit li mal
C'on trait par fin amour loiaul.
Chans. Fr. MS. de Berne, n- 389, part. 1, fol. \<\, V-.
CONJUG.
Asaveur (j'), ind. pr. Je goûte. (Fabl. ms. de S" G.)
Asavor (j'), ind. prés. Je goûte. (Fabl. ms. du R.)
Asavoreit, partie. Goûté. (S' Bern. Serm. Fr.)
Asavort, impératif. Qu'il rende savoureux. (Etes
de Courtoisie, ms. de S' Germ. fol. 40.)
Asavuved, participe. Goûté. (Livres des Rois.)
Assavoret, iiid. prés. Il goûte. (S" Bern. Serm. Fr.)
Assavoi'iois, subj. prés. Que nous goûtions. (Id.)
VARIANTES :
ASSAVOURER. S< Bernard, Serin. Fr. MSS. p. 61.
ASAVEURER. Fabl. MS. de S' Germ. fol. 39, V» col. 1.
ASAVOREIR. Chans. Fr. MS. de Berne, n» 389, part, i, fol. 18.
ASAVOREii. Prov. du Vilain, MS.deS' Germ. fol. 75, V»col. !.
As.wûURER. .^nc. Poët. Fr. MSS. avant 1300, T. III, p. 1276.
As.wuRER. Liv. des Rois, MS. des Cordel. fol. 127, V° col. 1 .
AssAVERER. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. p. 3Ô0.
AssAVEURER. J. de Meung, Cod. vers 2001.
Ass.woERiR. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. p. 23.
Ass.woRER. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. p. 45.
Assauriller, verbe. Flétrir, déshonorer par la
mutilation des oreilles. Curer les oreilles ; Gratter
l'oreille. (Voy. Assoleiller.)
Quoique Assoriller ait, comme Assauriller, une
signification particulière, ces verbes, si l'on en croit
D. Carpentier, ont une commune origine.
Il est évident qu Assauriller, dans le sens de
flétrir, déshonorer par la mutilation des Oreilles,
est une altération de l'ancien verbe Essaureiller,
Èssoj'ei/ie?', etc. (Voy. Essaureiller.) « Justinian
0 fut chassé par Léonce Patrice, lequel, lui ayant
« fait couper le nez et les oreilles, l'envoya en
« exil. Le même Léonce chastié de pareille peine
« fut emprisonné par Tibère qui occupa sur luy
" l'Empire, Toutesfois Léonce et Tibère pris par
<> Justinian, il les Ot tous deux mourir; et luy tout
« assaurillé et enazé qu'il estoit, réintégré en sa
« Couronne. » (Pasquier, Rech. liv. III, p. l.")0.)
Mais il n'est pas aussi évident que le verbe
s'Assoreiller ou s' Assoriller soit de même origine
que Assauriller, et qu'il ait signifié se cuier les
oreilles ou se gratter l'oreille , comme font les
Gueux qui s'occupent de leur misère, assis au coin
d'un bois, sur le bord d'un chemin. (Voy. D. Carpen-
tier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, T. I, col. 393.
— Id. ibid. T. IV, col. 510.) On soupçonne donc que
dans les vers suivans, même dans ceux que cite
D. Carpentier, le verbe s'Assoreiller, ne diffère de
s'Assoleiller, se chauffer au soleil, que par le chan-
gement de / en r ; lettres de même organe.
Orés d'une puant Viellette,
Cornent ele s'asonlloit,
Et comme mi les cans s'espouilloit.
.Notice en vers de R., do Vies de Saints, etc. MS. du R. n- 6987, fol. 3*.
II chevauclioit toute une lande ;
Si vist une vieille Truande
Qui a'asoreille à un buisson.
Fabl. MS. du R. n' 7989, fol. 239, R* col. 2.
variantes :
ASSAURILLER. Pasquier, Rech. Uv. III, p. 150.
A.soREiLLER. Fabl. MS. du R. n° 7989, fol. 239, R» col. 2.
AsoRELLER. Fabl. MS. du R. n- C987, fol. 295, V° col. 2.
AsoRiLLER. Notice en vers de Romans, Vies de Saints, etc.
MS. du R. n" 6987, fol. 3i, R» col. 3.
AssoREiLLER. D. Carp. S. Gl. lat. de Du G. T. I, col. 393.
Assauvîigir, verbe. Devenir sauvage et farou-
che. Rendre sauvage et farouche. Rendre sauvage
et stérile.
On trouvera dans les variations d'orthographe de
l'ancien substantif Selve, en latin Silm ('2), l'origine
de l'adjectif Sauvage; d'où s'est formé le verbe as-
sauvagir ou s'assauvagir, devenir sauvage, prendre
quelque chose de l'humeur sauvage et farouche des
habitans des bois, s'effaroucher comme eux, en
cette première citation. « Le Cygne s'eslongua un
« petit en avant tout privéement sans soy assau-
« vagir, comme par semblant de luy vouloir mons-
« trer le chemin. » (J. Le Maire, Illustr. des Gaules,
liv. m, p. 312.)
Par la doucour de doulz nourrissement
S'apprivoisist mainte beste sauvage,
S'adomesche : par dur gouvernement
S'asauvanisl, et mue son usage,
Eust. Desch. Poês. MSS. p. 29, «1, 4.
Quant lo chat est bel,
Et luisant la pel,
Lors asauvagist.
Fabl. MS. de Berne, n" 54, fol 38, R- col. 2.
Kar si chesoun leist ses volentez...
Tut estiiie fraternité guerpir,
Et cume beste la gent ensalvagir.
Rom. des Romans, sir. 829.
Dans le sens de rendre sauvage, rendre farouche
(1) Lisez gaud, bois, bocage. — (2) Sauvage vient en effet de silvatictis et non de soUvugus, comme on l'a prétendu en ces
derniers temps, (n. e.)
AS
- 238 —
AS
et peu sociable, on disoit : « Le séjour des boib 1 a
« assauvagi. » (Monel, Dict.) ,
Au figuré, «ss«»i'«r/''- que qu un de ne plus aliei
dans une maison, c'éloil le rendre farouche e
défiant, l'eiïaroucher, le rendre lunule c\ > ficquen
îer. .' Dist au Suppliant qu'il. Jonnermt aud t
» homme deux soufllelz bien assiz, POur le «ssa
« vaaiv de plus n'aler à sa maison. " (D. \^m^-
tier Suppl. (Uoss. lat. de Du Gange, au mot Sijlva-
^'S'pirlïitï'terres que la proximité des bms
renJoirslériles, ou a dit qu'elles élfe^^lasscnr^a^^
ou assauvagiées. . Les terres sont «"te. «ssfljm
„ glées et environnées de bois. » (D Carpeniei,
Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au mot ^y^J^« "'« '
tit de 140G.) « Ferme... assisie eu bois et bruyères
« oui ont gagné et assauvagi grant parties aes
. terres labourables. » (Id. ibid. - ^oy. bAuv.^cE )
VARIANTES : ^
ASS.VUVAGIR. J. Le Maire Illustr des bliv^IH.P- ■J'-
Ens.vlvagir. Rom. des Rom. str. IW.
Asséable, adj. Sujet aux impositiçns. Significa-
tion relative ii celle du verbe Asseer, au figme
m oser leriailles, etc. « Personne noble aisante
«exerçant acte dérogeant à sa noblesse, est
« asséable, taillable et contribuable à toutes tailles,
« aydes, subsides et antres imposts. - (Goût, a ai -
tois, auCoul. gén. T. I, p. 75'2.-\oy. Gout. de
Lille, ibid. T. II, p. 921.)
Asséage, suhst. masc Posage. Dans un sens
relatif à celui du verbe Asséer, poser, mettre en
place : « Ghacune queue de vin doit v deniers tant
« pour l'encavage que pour r«sst!rt</(?. » (Statutsdes
Escbevins de Maisière-sur-Meuse ; Biblioth. de
Cangé. — Voy. Asséer.)
Asséant, participe. Séant, qui est convenable.
Si-nilication analogue à celle du verbe Asseer,
poler, placer convenablement. « Je t envoie ces
a dons bien asséans h ta Hautesse. » J. Le Maire
ïllustr. des Gaules, liv. II, p. 181 et 182. - Voyez
Asséer.)
Assec, siibst. masc. Etang à sec. Part dans le
sol d'un ctajig ^ sec.
G'est par ellipse au nom de la chose à sec, qu en
Bresse le composé assec signifie un étang qui
demeure ;\ sec, après qu'il a été pèche. (Laurière,
Gloss. du Dr. fr.) , ^. ^,^
Dans le second sens, c'est une part, une portion
dans le sol de ce même étang: portion qui est orai-
nairemenl marquée par des bornes ou des pieux, et
que chacun va reconnoître lorsque l'elang est des-
séché, mis ù sec. " Gelui qui a assec en un étang,
« quelque petit que soit Vassec, a droit de parcours
« au même étang pour son bétail. » (Laurière,
Gloss. du Dr. fr.)
Assécher, verbe. Sécher, dessécher, rendre
sec mettre à sec. Devenir à sec, être à sec; arriver,
aborder, prendre terre. Sécher, devenir sec.
Ou peut voir, sur l'origine Celtique et Orientale
de l'adjectif sec, en latin sicciis, et du verbe simple
sécher, en latin siccave, M. Court de Gebelin fDict.
clvm de la Lang. fr. col. 995.) Le verbe assécher, de
même origine que sécher, dessécher, étoit de même
si"-nification, lorsque dans le sens étymologique on
disoit ■ « Les chaleurs ont asseiché notre lontaine
« et notre puis. . (Monel, Dict.) <• Ils entrepnn-
.. drent de divertir la rivière avec des toilles, met-
« tans en avant qu'estant divertie et le cours «sse-
« ché, etc. .. (Du Bellay, Mém. liv II, fol 2(5 )
Dans ce dernier passage, c'est l effet de 1 art,
assimilé à celui de la chaleur du Soleil. En com-
paraut à l'effet naturel delà chaleur suri humidité,
celui qu'opère sur les boyaux du faucon la grosse
chair, une chair difficile à digérer, on a dit : » Geste
« chair, et la puanteur d'icelle luy vient a estrain-
a dre et assécher les boyaux, de façon que les
,< fumées et vapeurs montans à la teste, etc. « (Du
Fouilloux, Fauconnerie, fol. 13.)
Dans la signification devenir à sec, on disoit eri
parlant d'un havre d'où la mer se retire: «Si
i ainsi est qu'ils soient eu un havre qui asseiche,
„ ils'sonl tenuz de mettre balis à leur ancre, que
« apièrent au plain de la mer. » {Gout^ ^a la Mer
art. xvii. — Voy. D. Morice, Preuv. de KHist. de
Bretagne. T. I, col. 790.)
I es Marins disent encore qu'une terre ou une
rodie assèche, lorsqu'elle sort de l'eau et que la
mer en se retirant, la laisse voir étant à sec. CSoy.
Dict. de Marine.) Dans un sens analogue, on aura
d Uqu'en un havre d'où la mer se retire, les ancres
Isséchcnt, qu'elles deviennent et sont a sec, lors-
qu'elles paroissent hors de l'eau. « Deux neffs ou
.; plusieurs sont dans ung havre ou il y a poy
„ d'eaue, et si asseiche l'ancre dune neff ; le
<■ Maistre de cette neff doit dire au Maistre de 1 au-
« tre etc. » (Gout. de la Mer, art. xvu — A oy. D.
Morice, Preuv. de l'Hist. de Bretagne, T. I,
'°Eir?ega™n\ un vaisseau abordé au rivage
comme étant à sec, on aura dit dans la signification
d'arriver, aborder, prendre terre :
Moult veissiez nez atourner.
Nez atacliier, nez aancrer,
Nez assechier, et nezjloten^^^ ^^ ^^^ ^^ ^^ ^, ^
Les nefs sont à un port tornées ;
Toutes sont ensemble arrivées ;
Toutes sont ensemble accostées ;
Toutes sont ensemble aancrées ;
Et ensemble toutes asséchierent.
Et ensemble lez deschargierent^.^_^_ ^^ ^ ^^^
Enfin, C'est dans le sens propre et relatif à l'idée
de l'eiïet de la chaleur sur l'humidite, ^xx'assccher
Sdur, ou ^assécher, signifio.t sécher, devenu
sec « Lue.... manière de pantais advient aux
« Oiseaux.... quand ils se baignent aux champs en
, volant, et puis après ne sont.... mis en lieu sec
<■ et chaut où l'humidité par eux accueillie se puib.e
« esparer et assécher. » (Du Fouilloux, Faucon-
nerie, fol. 30, V-.)
AS
— 239 —
AS
Par comparaison, sécher, devenir sec, comme
le devient notre cerveau, lorsque l'âge en diminue
l'humidité: « Les advancés en aage prévalent en
« entendement sur les jeunes, d'autant plus que le
« cerveau s'essuye et s'assèche toujours plus. »
(Sagesse de Charron, liv. V, p. 90.)
Sécher, devenir sec, par la dissipation de l'hu-
mide radical : « Quant un des membres de home
« ensecliistel se pert,.... il covient que il le face
« couper, ke les autres ne porrissent. » (Moralités,
Ms. de N. Dame, p. 12C.) <■ Les vers qui font nostre
« soye, on les void comme mourir et asseclier, et
« de ce mesme corps se produire un papillon, et
« delà un autre ver. » (Essais de Montaigne, liv. II,
p. 338.)
VARIANTES :
ASSÉCHER. Chr. S' D., Rec. des llist. de Fr. T. V, p. 231.
AssÉciiiER. Rom. de Brut, MS. fol. 85, R" col. 2.
AssEiCHER. Percef. Vol. IV, fol. 22, R°col. 1.
Enséchir. Moralités, MS. de N. Dame, p. 126.
Asséement, subst. inasc. Action de s'asseoir ;
séance. Action d'asseoir, de poser; position. Action
d'asseoir, d'imposer; imposition.
Dans le premier sens asséement ou assiement,
formé du verbe assler ou asséer, signifioit séance,
l'action de s'asseoir, en latin sessio{l). (Rob. Estienne,
Nicot et Monet, Dict.)
Au second sens, position, l'action de poser,
d'asseoir, dans les Dict. de Cotgrave et d'Oudin ;
l'action d'asseoir un camp, la position d'un camp,
lorsqu'on traduisoit, « pro iniquitate vidi tentoria
« .Ethiopiœ » dans le Cantique d'Ilabacuc, en di-
sant: » Je vi les assatjemens d'Etiope, pour ma
« félonie. » (Bible en frànçois, ms.)
Dans le sens ligure, l'action d'asseoir, d'imposer,
imposition. (Oudin et Monet, Dict. — Voy. Asséer.)
VARIANTES :
ASSÉEMENT. Oudin, Dict.
AssAYEMENT. Bible, en françois, MS. Cantique d'Ilabacuc.
AssEiEJiANT. Monet, Dict.
Assiement. Cotgrave, Rob. Estienne et Nicot, Dict.
Asséer, verbe. Faire asseoir, faire reposer.
Asseoir, poser, placer. Asseoir, imposer. Assiéger.
Préposer.
Du verbe latin Assidere se sont formés, par la
suppression de la lettre d, les verbes Asséer ou
Assier, Asseoir ou Asseir. On auroit réuni sous le
même article Asseoir et Asséer comme variation
réciproque d'orthographe, si l'on n'eût cru voir
dans la conjugaison une différence de modes et de
temps, relative à la différence de terminaison. Il
semble qu'anciennement on ait conjugué asseoir,
en latin assidere, comme veoir ou voir, en latin
videre. C'est d'après l'idée de cette analogie que
l'on a composé la conjugaison d'asseoir très-dis-
tincte de la conjugaison à'asséer. En jetant les
yeux sur celle de notre verbe ^Iss^'oi?-, telle qu'elle
existe aujourd'hui dans les Dictionnaires et les
Grammaires, peut-éti-e reconnoîtra-t-on que, pour
la compléter, on emprunte des modes et temps qui
paroissent être propres à l'ancien verbe Asséer,
Asseier ou .Issie?-; tels entr'autres ç]ue j'assiérai,
ou i'asseyerai, i'asseyerois on j'assiérois? Il seroit
possible aussi qu'à raison de ce qu'avant le xvn'
siècle on écrivoil presque toujours i voyelle pour
j consonne qui tient lieu de g dans les Manuscrits
des xir et xiii' siècles, on crût devoir lire asscjer
pour asseier, et qu'on regardât cette orthographe
comme une variation d'Asséger, Assigier, etc. Au
reste, l'origine n'en seroit pas moins la même que
celle A'Asséer et .Isscoi)', puisque Assigier ou
Asségcr est aussi formé du verbe latin Assidere.
Toute la différence entre ces trois verbes consiste
en ce que le d supprimé dans la formation d'asseoir
et asséer, est changé en g dans celle â'assigier ou
asségcr ('■2). On pourroit citer plusieurs exemples de
ce cliangement, et s'en autoriser pour prouver une
identité d'origine qui semble d'ailleurs justifiée par
l'identité de signification. (Voy. Asseoir et Assiéger.)
Dans le sens de faire asseoir, faire reposer, on a
dit:
Mes les Angles de Paradis
Nous tramele le Roi celestre,
Et toz nous asaiée à sa destre
En la grant joie perdurable
Avoec son père esperitable.
l'abl. MS. du P.. n- -I-21S, fol. 28», V col. 2.
Il semble inutile de prouver que s'asséer a si-
gnifié s'asseoir, se reposer sur une chose, s'y
poser: mais on remarquera un abus singulier de
la signification de ces mêmes verbes s'Asséer et
-Issm'. Le repos étant une cessation de mouve-
ment, on aura sans doute vu les choses qui ces-
soient de se mouvoir, comme s'asséant, se repo-
sant, et l'on aura dit de pierres dressées et tombées
dans une nef, qu'elles y étoient assises; de dards
tombés sur le visage de ceux à qui on les avoit
lancés, qu'ils y étoient assis; d'une pomme tombée
dans la main de celui à qui on l'avoit jetée, qu'elle
y étoit assise ; de flots de sang qui s'écouloient en
tombant dans une rivière, qu'ils s'y asseyoient; etc.
Entre flamens chaiUoz assied
En la nef, jaunes, bis et verz.
Tant qu'il en sont comme couverz.
G. Guiarl, MS. fol. 322, R'.
Là veissiez quarriaus voler
Qui s'assiéent en pluseurs places
Sus visages nuz et sus faces.
Id, ibid. fol. 347, R'.
.... Il getoit droit en la main
De l'home d'Esté tout à plain
La pomme que tenue avoit...
Chascune main ei-t si bendée
De fer, et si bien atornée,
Qu'ele brisier ne povoit,
Qant la pomme en 11 s'asseoit.
Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 7. V* toi. 3.
. . , Tant en ocient
Qu'au desouz, une lieue entière,
En ert sanglante la rivière ;
Si con li sanc n'i asseoit.
G. Guiart, MS. fol. 275, K-.
C'est par extension de l'idée faire asseoir, faire
(1) L'étymologie serait asseckmentum. (n. e.) - (2) Asscijicr vient d'une forme supposée assediare. (n. e.)
AS
— 2'iO -
AS
reposer, nieltre dans un état de repos, qu'assez'?-
a signifié asseoir, poser, rendre immobile dans une
position : « Doit estre son arc si aisé et si doux
« qu'il se puisse tenir tout entesé longuement, et
o convoier la hesle tant qu'elle soit un pou contre
« lui, en asséant sa main et en tenant son corps
« tousjours le plus droit et serré contre son fust
« qu'il pourra. >' (Modus et Racio, ms. fol. 74.)
L'orthographe cssaier, qu'on trouve (ihid. fol, 79,)
est évidemment une altération û'asséei\ comme
celle â'assdijcv dans Modus et Racio, impr. fol. 43.)
En général, asseoir, poser, placer, mettre dans
une position conforme à certaines vues de stabilité,
de sûreté, de convenance, de proportion. « Ces
« dis basses, od tuz ces dis Vaisseis, fist li Reis
« ascer en le aitre ki plus fud prucein al temple. »
(Livres des Rois, »is. des Cordel. fol. 89.)
Si l'on dit asseoir une rente, et si plus ancien-
nement on a dit Vasséer, ou Vasier, comme on lit
Hist. généal. de la M. de Guines, p. 283, tit. de
1241, c'est dans une signification figurée: signifi-
cation de laquelle on sembloit abuser, lorsqu'on
parlant d'un Créancier dont la position étoit peu
sûre vis-à-vis de son Débiteur, on disoit qu'il en
étoit mal asseyié. « Se il faisoient ausdiz Marchans
" bailler leurs denrées à gens dont il fussent
« vtal asseyiés, lesdiz marchans, etc. » (Ord. T. U,
p. 130.)
On exprimoit une idée de convenance dans la
position des choses, lorsque dans le sens de placer,
on disoit figurément en parlant de cet ancien
proverbe. Est Saiil entre les Prophètes: « L'um le
« puet là bien asséer, ù Fum veit alcun de bas
« parage sudéement venir à haltesce e à barnage;
« là l'um veit que li fols, cume sages, entre sages
« s'embat. <■ (Livres des Rois, ms. des Cordel. fol. 12.
— Voy. Asséant.)
Dans la signification d'asseoir, imposer, le verbe
Asséer auroit toujours été l'expression d'une idée
de proportion, si l'imposition des charges publi-
ques eût toujours été proportionnée aux facultés du
Citoyen sur la tète duquel pose une partie du poids
de ces charges. « Eslirons siques à douze homes
« d'iceux, qui seront les meilleurs ichelle taille
« asséer; et les autres, etc. » (Ord. T. L p- 180.)
On assied, on pose son camp devant une ville
que l'on veut prendre, ou forcer à se rendre. De
là, le verbe Asséer, dans un sens relatif à l'idée
générale de position conforme à certaines vues,
signifioit assiéger. « \int JNabugodonosor li Reis de
« Babilonie, à tute se ost, à Jérusalem, si l'aseiad,
« e ses engins i levad. » (Livres des Rois, ms. des
Cordel. fol. 153.)
Sainne passent, la ville assiéent,
Qui lors estoit iiel atermée,
De deus paire de murs fermée.
G. Guiarl, MS. fol. 85, R».
Enfin, le verbe Asséer. dans le sens de préposer,
semble retracer une idée très-ancienne d'après
laquelle on désignoit assez naturellement la supé-
riorité d'un homme en le faisant asseoir, en le
représentant assis devant ceux à la conduite des-
quels il cHoit préposé. « Cungie les Reis ki vindrent
« à ta a'ie e retien lur Chevalerie, e ass/cCunes-
« tables sur tute Chevalerie. » (Livres des Rois, ms.
des Cordel. fol. 115.) « Noz Ouvriers et Monnoyers
" asseez et ordonnez pour ouvrage et monnoyage,
« etc. » (Ord. T. II, p. 535.)
CONJUG.
Aseiad, ind. prêt. Assiégea. (Livres des Rois.)
Asieche, subj. prés. Qu'il asseye. (Hist. généal. de
la M. de Guines, p. 283; lit. de 1241.)
Asséon, ind. prés. Nous asseyons. (G. Guiart.)
Assièce, subj. prés. Qu'il asseye. (Fabl. de la
Vieillelte, ms. du R. fol. 295.)
Assiesse7it, subj. prés. Qu'ils s'asseyent. (Lanc. du
Lac, T. II, fol. 27.)
Assiez-toi, imper. Assied-loi. (Rob. Estienne.)
VARIANTES :
ASSÉER. Rom. de Cliget. MS. du R. n» 6987, fol. 280.
AsftER. Liv. des Rois, MS. des Cordel. fol. 89, V°.
AsiER. Hist. généal. de la M. de Guines, p. 283; tit. de 1241.
AssAYER. Modus et Racio, impr. fol. 43, R°.
AssElER. Villehardouin, p. 134.
AssEYiER Ord. T. Il, p. 136.
AssiÉER. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 282, V» col. 2.
AssiER. Liv. des Rois, MS. des Cordel. fol. 115, V» col. 2.
EssAiER. Modus et Racio, MS. fol. 79, V°.
Asséeiir, siibsl. masc. Qui assied, qui pose. Qui
assied, qui impose. Espèce de Juge, d'Arbitre.
Dans un sens relatif à l'idée générale d'asséer,
asseoir, poser, on nonimoit^lssm/r, un Officier des
Rois d'Angleterre et probablement des Ducs de Bre-
tagne, quiposoit les plats sur leur table. (Voy. GIoss.
de rilist. de Bretagne. — Du Gange, Gloss. lat. T. I,
col. 776, au mot Assessor.)
Le même verbe Asséer ayant signifié asseoir,
imposer, on a nommé Asséeurs ceux qui imposoient
les fouages, ceux à qui l'on confioit la répartition
des impôts en général, des charges publiques.
« Asséeurs des.... fouages.... seront éleuz par les
« habitans inesmes des villes et paroisses ; les-
« quelz Asséeurs entendront diligemment à l'assiele
« faire sur eulz et les autres. » (Ord. T. VI, p. 444.)
« Les Impositeurs, Connestables et Asseurs sont
« tenus d'imposer tous les residans et habitans les
« maisons de leurs paroisses selon leur estât,
" leurs biens, leur commerce et exploitations. "
(Coût, de Bergh S'. Winox, au Nouv. Coût gén.
T. I, p. 537.) .' Nuls Chefs ou Asséeurs ne pourront
« exempter personne dans la Ville el la Jurisdiction,
« et le tenir franc des frais du pays ou de la
« paroisse. » (Coût, de Furne, ibid. p. 055.)
Probablement, on reprochoit à celui qu'on disoit
être un Asséeur d'escox^, wwAsseuerrede cul:i, quel-
que injustice de l'espèce de celle d'un Asséeur qui,
dans la répartition des impôts, n'observoit pas l'éga-
lité et la proportion prescrites pai- les Coutumes et
les Ordonnances. « Reprocha et dist audit des Pou-
« lies que il n'estoit que un Asséeur d'escoz. »
(D. Carpenlier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, T. I,
col. 341 ; lit. de 1357. On lit Asseuerres de cul:;:, ; Id.
ibid. au mot Assidator; tit. de 1385.)
En choisissant un Juge, un Arbitre, on met ses
AS
— 241
AS
intérêts à sa disposition ; on lui confie le droit de
poser les bornes du juste et de l'injuste ; on s'oblige
et l'on est obligé de se soumettre à la loi qu'il im-
pose. Ainsi, le substantif Asséeur, dans un sens
relatif à celui du verbe sXsséer, asseoir, poser,
imposer, pourroit avoir signifié Juge en général,
comme en particulier il a signifié Arbitre dans un
échange. Peut-être trouvera-t-on plus simple qu'un
Arbitre ait été nommé Asséeur, en comparant ses
fonctions aux séances, aux assises des Juges pré-
posés à l'exécution des Loix. « Noz rement par ceste
« peztoz lesdemaenesqueiceliHerveu avoit o Bo-
>. sic li an douant égange au dit Monsignor
« Salomon etc Est averaé antre noz quesi nu! des
« Asseors devant ditz moraet avant que ceste asise
« saet acomplie ; que un autre do consoil Monsin-
« nor Herveu de Léon sera mis au dit ledit Herveu
« équier. » (D. Morice, preuv. de l'Hisl. de Breta-
gne, T. I, col. 984; tit. de 1202. — Voy. AssEoni et
Assise.)
variantes :
ASSÉEUR. Cout. de Bergh S' Winox, au N. C. g. T. I. p. 507.
Anséor. D. Morice, Hist. de Bret. T. I, col. 984.
AssÉOR. Id. ibid.
AssÉouR. Id. ibid. — Gloss. de l'Hist. de Bretagne.
AssEUERRE. D. Carp. S. GI. lat. de D. C. au m. Afsidator.
AssEUR. Gloss. de l'Hist. de Bretagne.
AssiEiEUR. Monet, dict. au mot Asuciemant.
Asseigiieurir, verbe. Autoriser, rendre maître.
Rendre maîtresse, épouser.
On sait que, dans l'origine de plusieurs anciens
Gouvernemens , la raison guidée par la Nature,
faisoit les vieillards déposilaires d'une autorité
semblable à celle qu'ils conservent encore parmi les
Sauvages. C'est par un abus singulier de l'idée de
celte autorité si naturelle et si raisonnable, qu'en
la généralisant, on a nommé Seigneur, en latin
Senior, l'homme que la possession d'un fief aulori-
soit non-seulement à exiger de ses Vassaux des
devoirs, et des corvées de ses esclaves, mais à se
rendre maitre, en certains cas, d'une partie ou de
la totalité de la fortune de ces mêmes Esclaves. De
lîi, on aura dit d'un propriétaire ou possesseur de
fief, agissant d'après les principes de féodalité qui
l'autorisoient à faire une chose et l'en rendoient
maitre, qu'il s'asseigneurissoit de la faire. « En
« Champaigne se aucuns homs de mainmorte se
« muert, senz hoirs de son corps, li Sires
" emporte l'eschoite, en meubles et en héritages....
« Se il s'aseigïLorist de penre les meubles 'et les
« héritages, il sera tenuz i\ paier tous les debtz au
« mort pour raison des meublez ; et pour les héri-
« tages ne pniroit il riens. » (Pithou. Cout. de
<' Troyes, p. 102.)
Dans les siècles galans de notre ancienne Cheva-
lerie, l'Amant d'une Dame déclaroit son amour,
comme le Vassal d'un Seigneur faisoit hommage :
comme lui, il demandoit la bouche et les mains,
c'est-à-dire l'honneur de tenir d'elle son existence,
comme en fief. Il all'ectoit de l'en rendre Dame et
Maîtresse; il l'asseigneitrissoit; c'étoil sa genliex
Dame asseigneurie, comme on lit dans les Ane.
Poët. fr. Mss avant 1300, T. IV, p. 1424. L'Amour
personnifié étoit du sexe féminin, et l'on disoit :
.... Dame est de si haut al'aire,
Et de si noble Seignorie,
Que sor ans l'ont asseiyiwrie
Tout li plus haut Seignor du monde.
Dits de Baudoin de Condé, MS. de Gaignat, fui. 314, R* col. 2.
En épousant une femme, on l'associe h son exis-
tence ; mais on ne l'en rend pas toujours maîtresse,
comme paroit le signifier l'ancien verbe Aségnerer,
dans ce passage : « Prendés la fille à un Roi, ou à
« un Conte : en-seur-que-tot, que cuideriés vous
• avoir gaegniés 1 Se vous l'aviez asegnerée ne
<• mise à vo lit, moult i ariez peu conquis. » (Fabl.
MS. du R. ir 7989, fol. 73. — Voy. Seigneurir.)
vAniANTES :
ASSEIGNEURIR. Ane. Poët. fr. T. IV, p. 1424.
ASEGNERER. Fabl. MS. du R. n« 7989, fol. 73, V» col. 2.
ASEIGNORIR. Pithou, Cout. de ïroye, p. 402.
AssEiGNORiR. Dits de Baud. de Condé. MS. de G. fol. 314.
Assels, adv. et subst. A suffisance, en ([uantité
suffisante. En quantité, en grande (|uantité, en
quantité plus que suffisante; bien, beaucoup, trop.
Suffisance , quantité de bien suf^sante. Quantité,
grande quantité.
Du latin ad satis, on aura fait assais, par le re-
tranchement de la lettre / qui se retrouve dans
l'ancienne orthographe «srti. Delà, l'adverbe Italien
Assai, l'Espagnol Asaz, et le François Asseis. (Voy.
Ménage, Orig. liai.) Que l'analogie entre l'adverbe
latin Salis èi le substantif pluriel Sala, soit telle
qu'elle est indiquée ci-dessus à l'article Assasié ; ce
sera dans un sens relatif à l'idée primitive de ce qui
suffit aux besoins de l'homme agricole et les satis-
fait que l'on aura dit : « Se tira chascun en son
« hostel, oîi il trouva vivres asseî-, et à grant plenté
« d'or et d'ai'gent. » (Triomphe des ix Preux, p. 488.)
Mengez poi et bevez «.s.sc:.
Quant n'aurez quoi, si jeûnez ;
Et serez du pechié délivre.
Fabl. MS. du R. n- 7G15, fol. 183, V col. 2.
Qui assez a, ne démange plus.
Prov. rur. el vulg. MS. de N. D. coté N- % fol. 10, R" col. 1.
Miauz valt assez que trop avoir.
Fabl. MS. de Berne, n- 354. fol. 121. R- col. 1.
Par extension de l'idée d'une quantité de biens,
suffisante aux besoins de la vie, l'adverbe Asseis,
comme en latin Salis, aura signifié dans le sens le
plus général, en quantité suffisante, à suffisance,
suffisamment : « Lo miracle.... faiz en noces, qui fut
« li encommenceinenz des miracles nostre Signor....
« asseiz est mervillons selonc l'Ystoire. » fS' Ber-
nard, Serm. fr. mss. p. 234) " N'est mies asseiz si
« nos par defors sommes solcment sogeit à nos
« maistres. » (Id. ibid. p. 27.)
Tentes et aucubes et très
Y ot ne plus ne mains k'ns.sés.
Cléoniadès, MS. de Gaignat, fol. 5, V*. col. 3.
.... Il en fist tant que assez,
Si que de lui tout se loerent.
Ibid. fol. 70, R' col. 1.
Douce Dame, ne m'ociés ;
Ne soies cruel ne fière
Vers moi ke plux vos ain c'aisseis,
De bone amor droituriere.
Chans. fr. MS. de Berne, n- 380, part, il, fol. 36, V'.
31
AS
242 -
AS
Nous disons encore assez-, pour suffisaniment, à
sulTisaiice, en (luaiilité sulTisanle. C est évidemment
la même siunificatiou dans les expressions plus
qu'assez, lan't qu'assez, ne pI^s "emouisqu assez ;
et dans cette autre expression elliptique a..ez e
jour, faisant assez jour, étant suflisamment joui, le
jour'étant encore suffisant.
L'autre revint, assés le jour,
Partonopeu joindre en l'estour.
Siège ^c Thèbes, MS. du R. n- 6987, fol. 53, H- col. 4.
En faisant abstraction de cette idée de suffisance,
on désionoit une quantité quelconque, lorsqu au
sensnhYsinueondisoit : - Avoient de 1 artillerie
«Mais elle n'estoit pas souffisante assez- pour mec-
„ tre en subjection la ville. - (Le .louvencel, ms.
n 49!) ) « Ces exemples semblent assez suttisans
TpJur justifier, etc. - (Mém. de Séguier, p. 324
— Voy. Rom. Bourgeois, liv. 11, p. /!• — taucnei,
Lan»' et Poës fr. p. 37, etc.)
Au' moral : « Je ne suis point suffisante assez
« pour vous desservir d'ung hault guerdon. »
(Percef. Vol. IV, fol. 17.) .
Il semble évident qu'en 1 expression suffisant
assez ou assez suffisant, comme en celles de assez
plus ou plus assez, de moins assez ou assez moins,
l'adverbe assez signifie en quantité.
Certes, fet-ele, je voudroie
Avoir assez mains que ne doie,
S'il fust Belonc>na^volenté_._ ^^_^^^ ^^^ ^^^^ ^. ^^^ .^_
N'ay-je pas la moitié partout?
Nennil, je n'en ay qu'à un bout,
Moins tisse: o'une chamberiere.
Eust. Descli. Poês. MSS. p. 501, col.l.
Bien ayt lianaps d'or amassez,
Cent mille marcs, ou plus asseî.
Rom. de la Rose, vers 19725 et 2b.
Il assemble grands gens et très grand baronie,
Plus assez que devant, et mieux appareiUie. ^
Ger. de Roussillon, MS. p. 'l''-
Nous avons meilleurs gens et plus que n'ont assez.
Ibid. p. i6à.
... La profondeur des fossez
Vingt toises ot et plus asscr.
Fabl. MS. du R. n- 7-218, fol. 359, col. 2.
Mil ans seront et plus assfz.
Rom. de la Rose, vers 1440.
Aujourd'hui l'on substitueroit bien ou beaucoup
à l'adverbe assez-, dans ces phrases. Peut-être même
faudroit-il dire, d'après l'usage moderne, qu'en ces
mêmes phrases il signifioit non-seulement en quan-
tité, mais en grande quantité. C'étoit réellement la
signification d'assez, lorsqu'on disoit proverbiale-
ment, « assez parents, assez tourments ; « ou lors-
qu'on ajouloil h l'énumération de plusieurs person-
nes ou de plusieurs choses, en disant , « et autres
« assez-, et des autres «ssez- » (Voy. Cotgrave, Uict.
— J. Le Maire, llluslr. des Gaules, liv. III, p. 30o
— Hist. de B. du Cuesclin, par Ménard, p. 41, etc.)
.< Si pristrent le Cuens de Flandres et des Ha-
« mens grant partie, et des autres Chevaliers «sses. »
(Martène\ ampl. coll. Contin. de G. de Tyr, T. V,
colonne G79.) ...
Si l'usage s'oppose l'i ce qu on interprète ossez-,
autremenl que par bien, beaucoup, trop, toutes les
fois que la signification en est morale, il n en est
pas moins vrai que cet adverbe , dans le sens de
bien, beaucoup, exprimoit toujours, quoique ligu-
rément, une idée analogue à celle d'une quantité
physique, d'une grande quantité, même d'une
quantité plus que"^ suffisante , lorsqu'il signifioil
trop. Il semble qu'on ait dit en ce sens : « Ledit
-. Seigneur .luge doit entendre en quoy gist le dif-
.< ferend ; et tel rapport eu faire, que les pleiges ne
« soient si ne tant grevez d'assez. » (Hardouyn de
la Jaille, du Champ de Bataille, fol. 64, R° et V\)
Tu doiz estre plains de largesce ;....
Ce qu'as donner à chiere lie,
Promettre ce que tu n'as mie
Ne te chaille d'asser donner.
G. Machaul, MS. fol. 193, V col. 1.
Plus souvent on disoit assez pour beaucoup,
comme en ces expressions: « d'assez, plus d'assez,
« trop d'assez, pire d'assez, mieux d'assez ou d'assez
» mieux, etc. » (Vov. Hom. de Cliget, .ms. du R.
n- 6987, fol, '271, V" col. 1, etc. etc.)
Ne courut pas sitost d'assez
Comm'il souioit ; trop fu lassez. , „. ,. , ,
Confession du Renard. MS. de N. D. cote N, fol. 21, V col. S.
Chil qui sa Dame prie
Coii dont ses cors peut estre vergondés
N'aime pas tant comme li autres d'assés.
Ane. PoSs. fr. MS. du Valican, n" 1490, fol. 149, R*.
Sachiés que plus vous ain que ne faz moi d'assé.5.
Buenon de Commarchics, MS. de Gaigoal, fol. 197, R' col. 1,
.... Est de trop maie corroie
Feme ki faucement otroie.
Et li hom fait pix ke derveis :
Maix la feme est pire d'esseis. . , „, „
Cbans. fr. MS. de Berne, n- 389, part. I, fol. 87, R*.
L'espargnier miex d'asse: vaudra.
^ ° G. Guiart, MS. fol. 99, R-.
D'assez miex aim vivre et manoir.
Fabl. MS. du R. n" 7218, fol. 158. R° col. 2.
Quoique l'adverbe assez, dans l'expression « assez
.< plus ou plus assez, » et autres prises au sens
physique, signifie en quantité, en grande quantité,
dans les mêmes expressions prises au sens moral,
il faut l'interpréter par bien, beaucoup, en se con-
formant au langage moderne. •> Plus gloriouse
.. chose et plus profeitaule m'est assez que je soie
„ olïerz à ti, que, etc. » (S- Bernard, Serm. Ir.
MSS. p. 269.)
,Ie avois mis tost mon cuer
En une Dame que je amoie ;
El osse: plus de moi l'amoie. ,,.„,„. , -,
^ Fabl. MS. du R. n- "615, fol. 183, R* col. 2.
Se ne Tamoie plus que une autre assés.
Ce ne seroit pas droite loiautés.
Enfance d'Ogier le Danois. MS. de Ga.gnat, fol. 92. R' col. I.
Celé meisme poesté,
Que Dex t'a seur les tiens donne,
Aura li .\nemis sor toi,
Et plus cisser, si comme ce croi.
Vie de S' Kalerinc, MS. de borh. cbifT. LX, col. i)5.
11 en est de même pour ces façons de parler,
u assez meilleur, assez mieux ou mieux assez, pire
« assez, » et autres dans lesquelles l'interprétation
bien ou' beaucoup est indifférente. « Si se leva en-
« contre luy et luy demanda: quelles nouvelles^
. Dame, dist-il, bonnes. Dieu mercy, as.sez meii-
AS
— 243 -
AS
« leures que je ne cuydoye. » (Lanc. du Lac, T. II,
fol. 109, V° col. 2 et 110, R" col. 1.)
Assés aim mix espérer que faillir.
Ane. PoCl. fr. MS. du Vatican, n- 1490, fol. 67, R*.
Miex fust assez
Que jà onques hom ne fust nez,
Que il souftrist si lonc lorment.
Fabl. MS. du R. n" 7-218, fol. 122, V' col. 2.
Je le sai mieux de vous assax.
Fabl. MS. du R. n- 7615, fol. 170, V col. 2.
Encor valt miaux feme assez,
Que li avoirs de mile citez.
Fal)l. MS. de Berne, r
354, fol. 175, R- col. 1.
L'omme trop baut
Qui vault pis assez que ribaut, etc.
Eust. Desch. Poè.<. MSS. p. 568, col. 2.
Si l'on a dit quelquefois, assez- tost pour bientôt,
c'est dans la signification de suffisamment, et par
la raison que ce qui est suffisant est bien ; comme ce
qui est en quantité, en grande quantité, même en
quantité plus que suffisante, est bien relativement
à la façon d'étendre ou de restreindre ses désirs et
ses besoins. « Fait autressi assçavoir à tous que
« assez tost nous envoirons, etc. » (Ord. Tome I,
p. 519 ; notes, col. 2.)
Dans l'ancien langage des Sermons manuscrits
(Je S" Bernard, « asscî::i"molt plus miodres » est la
traduction du latin midto melior. « Granz demos-
■' Iremenz fut de la divine Majesteit, quant à la
« volenteit nostre Signor se tornat li awe en vin;
« mais cil chaingemenz de la dexlre de Deu ke par
« cest miracles fut signifiez, est asseiz molt plus
« miodres. Nos somes tuit apeleit as espiritels
« noces. » (S' Bernard, Serm. François, mss. p. 234.)
Cette tautologie nous paroit être une des plus sin-
gulières de celles qui surchargent notre ancienne
langue. Peut-être imaginoil-on que ces sortes de
tautologies, occasionnées sans doute par le défaut
de connoissances grammaticales, rendoient l'ex-
pression plus énergique. On seroit tenté de le
croire, en voyant que Jean de Meung, parlant de la
durée éternelle des peines de l'Enfer, a dit :
C'est trop plus tisser ;
Car adès le tormenteront
Ceux qui de povoir ce faire ont.
J. de .Meung, Test, vers 1444-1446.
On pourroit citer plusieurs exemples d'adverbes
qui, dans certains cas, reprenoient la signification
des noms dont ils sont généralement formés par
abstraction. C'est ainsi que l'adverbe assez a signi-
fié, comme substantif, suffisance , quantilé de bien
suffisante aux besoins de la vie.
Toujours lui croist son appétit ;
Et tient son assez à petit.
Rom. de la Rose, vers 4589 el 90.
11 est possible qu'abstraction faite de l'idée de
suffisance, il ait signifié, même dans l'expression,
" et des aultres rtssex-, » toute espèce de quantité,
comme en ces passages: « Dame Dex vot mos-
" trer qu'en assfô de gent ne doit-on avoir fiance,
" mais en lui. » (Chron. d'Outremer, ms. de Berne,
n" 113, fol. 119.) « De leil gent veons nos asseiz, ki
« par ceu k'il ordément vivent, devienent adès
« plus ort. » (S' Bernard , Serm. Fr. ms. p. 243.)
Peut-être que par l'habitude de ne voir qu'un ad-
verbe dans assez , préférera-t-on pour ce dernier
pas.sage et l'expression déjà citée, l'explication
adverbiale en quantité, en grande quantité.
VARIANTES :
ASSEIS. S'. Bernard, Serm. fr. MSS. p. 1.
KcÉs. Ord. T. III, p. 511.
A1S.SEIS. Chans. fr. MS. de Berne, n» 389, part, i, fol. 19.
AsAT. Frag. de la Vie de Boëce, MS. de S'. B,-s.-L. p. 273.
AsÉs. Fontaine-Guérin, Trésor de Vénerie, MS. p. 60.
AsEZ Chr. d'Outremer, MS. de Berne, n» 113, fol. 119.
Asseiz. S'.-Bernard, Serra, fr. MSS. p. 28; passhn.
Assés. Rom. de Brut, MS. fol. 5, R», col. 2 ; passim.
AssEX. Guiteclin de Sassoigne, MS. du R. n» 6983, fol. 139.
Assez. Orth. subs. - S'.-Bernard, Serm. fr. MSS. p. 269
Assiés- Rom. d'Amadas, MS. du R. n° 6987, fol. 324.
Assiez. Livres des Machabées, MS. des Cordel. fol. 189.
EssEis. Chans. fr. MS. de Berne, n» 389, part, i, fol. 87, R».
Assemblage, subst. masc. Union , réunion.
Action d'unir, de réunir.
Quoique assemblage désigne encore l'union , la
réunion de plusieurs choses, même de choses mora-
les formant un tout, un ensemble, on ne diroit plus,
en parlant de la réunion de plusieurs ruisseaux
dans un même lieu, d'une réunion de grains amon-
celés, de la réunion des choses convenables à un
ameublement, que c'est « un assemblage de cham-
« bre, un assemblage de grains en un" mulon, un
« assemblage de ruisselets en un réservoir d'eau. »
(Voy. Cotgrave et Monet, Dict.)
Ce mot, encoie usité en termes de charpenterie
et de menuiserie pour signifier l'union, la réunion,
la jonction de plusieurs pièces de bois convenable-
ment façonnées pour en former un tout, un ensem-
ble, signifioit aussi l'action d'unir, de réunir, de
joindre ces mêmes pièces, l'œuvre de les assembler
en un corps. (Cotgrave et Nicot. Dict. — Voy. Assrm-
DLEME.NT et ASSEMBLER.)
VARIANTES :
ASSEMBLAGE. Orth. subst. - Cotgrave et Nicot, Dict.
.\ssA.MBLAGE. Jlonet, Dict.
Assemblaille, subst. fém. Union amoureuse.
Combat, mêlée.
Dans le premier sens, un Amant tourmenté par
la crainte qu'on ne devinât l'amour qui l'unissoit à
sa Dame, disoit en se plaignant :
Par devinaille
Nos grièvent félon.
Por ce ne volon
Que vostre assemblaille
Saiche, se nos non.
Ane. Poêt. Fr. MSS. avant 1300, p. 30.
Il semble que nos anciens Chevaliers voyoient
les combats de même œilquelesTournois, nommés
des Assemblées d'honneur. Pour eux, une mêlée,
un combat, étoit une. IsscmWrtî//^. (Athis, ms. fol.
121, R" col. 2, etc. etc. — Voy. Assemblée.)
VABIANTES :
ASSEMBLAILLE. Athis, MS. fol. 121, R» col. 2.
AssAMBLAiLLE. R. d'Alexandre, MS. du R. fol. 166, V».
Assemblance, subst. fém. Ressemblance. (Voy.
Assembler.) Signification analogue à celle d'assem-
bler dans le sens d'assimiler, faire semblable. Peut-
AS
— iu —
AS
être trouvera-t-on qu'il faul lire à sentblance pour
assemblance, dans ces vers :
Asseynblaitcc d'omme iriez et destroiz
M'a fet amois et ydropique et mu, etc.
Ane. Foël. Fr. MSS. avant 13G0,
p.6-
Assemble, adv. et siibst. Ensemble. Tas. En
' Au premier sens, l'adverbe Assemble désignoitla
réunion de personnes faisant la même chose dans
le même temps et dans le même lieu. « Quant...
.. tuit orent fait assemble lor prières, etc. » (Livres
des Machabées, Ms. des Cordel. fol. 187, R- col . 2 )
Pris substantivement, il peut avoir signilie tas,
l'ensemble de choses réunies dans le même heu, et
entassées les unes sur les autres ; en latin exagge-
ratum. (Gloss. fr. lat. ms. du R. n° 7084, cite par
D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange,
Tom. 1, col. 335.) ^, . .„ .^
ilais plus vraisemblablement, assemble signifioit
en las, comme adverbe. On se permet cette conjec-
ture d'après le doute avec lequel assninhle ost expli-
qué par exaggeratum vel exuggcratim, dans le
Glossaire que cite D. Carpentier, ubi supra.
VARIANTES :
ASSEMBLE. L. des Machabées, MS. des C. fol. 187, R°.
AssAMBLE. D. Carpentier, S. Gl. lat. de D. C. T. I, col. 33d.
Assemblée, subst. fém. Union licite ou illicite
de l'homme et de la femme. Réunion de personnes,
d'animaux et de choses; troupe, troupeau, amas.
Espèce de foire. Combat, mêlée. Troupe de Chas-
seurs ; Chasse. Mandement, Convocation.
Anciennement l'union licite ou illicite pour
laquelle l'homme et la femme sont formés d'espèce
semblable, se nommoit xissemhlée. (Voyez Assem-
BLAILLE, ASSEMBLISON.)
... Ne savez-vous que Diex fist,
Et home et lame ensemble mist.
Pour ce que li bons conneust
La faïue, si corne il deust.
Tels assemblée bien avient.
La Vio des Porcs, MS. de la Claycltc, p. 384, col. 2.
. . . Gaufrois a la Royne espousée,
Henris Flandrine, à bonne destinée.
Grans fu la feste de la leur assemblée.
Enfance d'Ogier le Danois, IIS. de Gaignat, fol. 119, R" col. 2.
Molt vient or mielx que soit emblée
A ceux de fors nostre assemblée.
Fabl. MS. de S' Germ. fol. 81, V" col. 2.
Mais on qualifioit ù'assemblée dampnée, l'union
criminelle d'homme marié avec femme mariée.
« Fut engendrez et nez de assemblée dampnée; c'est
Cl assavoir de homme marié en famé mariée. »
(D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au
mot Assembleia, col. 335; tit. de 1331. — Voyez
AsSEMIiLEMENT.)
Celte première idée d'union élanl généralisée, le
mot Assemblée signifioit et signifie encore la
réunion de nombre de personnes en un même lieu
et pour le môme dessein. (Voy. Froissart, Vol. I,
?. 199, etc. etc. IDelii, l'ancienne expression, à asscm-
lée : c'est-à-dire, en troupe. « Ne pevent lesdiz
« Supplians peschier à assemblée, ne autrement. "
(D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au
mol Asseinbleia, col. 335; tit. de 1367.)
Si l'on ne dit plus de gens réunis en troupe, que
c'est une assemblée, on diioit bien moins encore
assemblée d'animaux, asscinhlée de poissons, en
parlant de poissons réunis en troupe, d'animaux
réunis en troupeau. L'extension de celte acception
étoil telle que la réunion de plusieurschosesafinir
dans un jour, l'amas de quelque chose, étoit une
assemblée. On disoit en ce sens, « faire assemblée
« de beaucoup de choses en un jour, faire assemblée
« de quelque chose. » (Rob. Estienne, Nicol et
Monet, Dict.)
On parlicularisoit l'acception générale A'assem-
blée, réunion de nombre de personnes dans un
même lieu, en nommant Assemblées, ces Foires
qu'autorisent de toute ancienneté les Fêles de
Paroisses, et où le plaisir, bien plus que le com-
merce, rassemble et réunit plus ou moins grand
nombre de monde. On a distingué ces Assemblées
ou Foires, encore ainsi nommées en Normandie,
non-seulement des Foires établies pour le commerce
d'une Province ou d'un Royaume, maisdes Marches
établis pour celui d'une Ville ou d'un Bourg. (Voy.
Du Gange, Gloss. l?-t. T. IV, au mot Mercalnm,
col G81.) Dans la Coutume de Ghàteauneuf, les
Assemblées n'étoient ni Foires, ni Marches, quoi-
qu'on y vendit les mêmes menues denrées. On n y
faisoit commerce, ni de grains, comme dans les
Marchés, ni de chevaux et bestiaux, comme dans
les Foires : aussi en faisoit-on la distinction. « Le
« Seigneur prend pareils droicts aux Assemblées
» qui"^se font ez Parroisses eslans au dedans des...
« Seit'-neuries, qu'es... Foires et Marchés dudict
« Chasteau-neuf, sur les non-Bourgeois d'icelui
u Ghasleau-neuf, vendans esdicles Assemblées,
« pains blancs, gasteaux,... el autres menues den-
« rées » (LaThaumassière, Coût, de Berry, p. IGi.i
Dans les siècles brillans de la Chevalerie, les
Tournois, ces spectacles militaires si pompeux, on
s'assembloil l'élite des Chevaliers unis et divises
par l'amour de la gloire, étoient des Assemblées
dniOHueur. Ce?. Assemblées dlwnnenr, ou Combats
de plaisance, comme on lit dans La Colombiere
(Théàt. d'honneur, Préf. p. iv), étoient une vraie
ima"-e de la guerre, dont les combals sanglans ne
furent aux yeux d'un Chevalier que des Assemblées
comme les Tournois. Aussi, dans nos anciens
Auteurs, Poètes, Romanciers, Historiens, une
Mêlée, un Combat est une Assemblée. « A l .isam-
« blée que Crestien et Sarrasins firent devant
« Arssur, fu Jakemes d'Avesnes, li bon chevaliers,
■> ochis. » (Chron. d'Outremer, Ms.de Berne, ""l'S.
fol 146 — Cbron. de Saint Denys, T. I, fol. lil. —
Cotgrave el Nicol, Dicl. — Voy. Assemulaille, Assem-
BLEMENT Ct ASSEMBLER.)
C'est par une espèce de mélonymie connue des
Grammairiens, que le mot Assemblée a signibe et
signilie encore aujourd'hui en termes de \ enerie
lelieu où se réunissent les Chasseurs, avant que
d'aller au laisser-courre ; mais plus naturellement
AS
— 245 —
AS
il signifioil la réunion des Chasseurs en ce même
lieu. Troupe de Cliasseurs. (Voy. Cotgrave et Nicot,
Dict.) Si par une autre espèce de métonymie, il a
signilié la Chasse même pour laquelle les Chasseurs
s'étoient réunis, alors l'expression de ce qui pré-
cède devenoit celle de ce qui suit. En ce sens, on a
dit de Catherine de Médicis : « Quand le Roy son
.1 mari vivoit, elle alloit quasi ordinairement avec
« lui à VAssemblée du Cerf, et autres Chasses. »
(Brantôme, Dames illustr. p. 47. — V. Nicot, Dict.)
Enfin, par cette même espèce de métonymie,
l'expression de ce qui suit devenoit celle de ce qui
précède, \orsq\i' Assemblée signilioit « Mandement,
« Convocation de Gens de guerre pour eux assem-
« Lier en quelque lieu, et de-là yssir et marcher en
« campagne. « (Cotgrave el Mcot, Dict. — Voyez
ASSEMDLEJIENT et ASSEMBLER.)
VARIANTES :
ASSEMBLÉE. 0. siibs. - L. du Lac, T. I, fol 45, R» coL 1.
AsAMBLÉE. Chron. d'Outremer, MS. de Berne, fol. 146.
AsEMBLÉE. Ch. Fr. MS. de Berne, n» 389. part. I, fol. 92, R».
Assamblée. Enfance d'Ogier le Danois, MS. de G. f. 119.
Asseinbléement, adverbe. Ensemble, en com-
munauté ; ensemble, de compagnie; ensemble,
d'un commun avis. On a fait l'éloge de la parole,
en disant que par sa vertu, ■< Peuples farouches, et
« çà et là espars, furent unis assemblément, et
« invitez à ceste société civile. » (Pasquier, Ubl
supra.) « Prindrent assembléeinentle chemin droit
« ù ung arivouer. » (D. Carpentier, Ubi supra.)
« Comme pour la nécessité apparissant il soii
« accordé assembliement de plusieurs de noz...
« Prelaz et Barons, avecnostre Conseil, que, etc. »
(Ord. Vbi supra. — Voy. Assemble.)
VARIANTES :
ASSE.\1BLÉEMENT. D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du
Cange, au mot .Asseinbleia, col. 385 ; tit. de 1470.
.ASSEMBLÉMENT. Pasquier, Œuv. mesl. p. 262.
Assembliement. Ord. T. I, p. 347.
Assemblément, subst. masc. Union del'homme
et de la femme. Réunion de nombre de personnes;
réunion, rencontre de deux Armées ; mêlée, com-
bat. Réunion, mélange de plusieurs choses. Convo-
cation.
C'est dans le proverbe, qui se ressemble, s'assem-
ble, qu'il faut chercher la raison pour laquelle
assemblément a signifié union de l'homme et de la
femme. « Sont les deux Vierges mis ensemble...
« et ce dont ilz n'avoient riensceu, leur apprent
« Nature. Si se entre approuchentsi charnellement
« que les fleurs de virginité sont espandues;... et
« pour ce que cest assemblément fut fait par péché
« et par ygnorance, etc. » (Lanc. du Lac, T. II,
fol. 30.) On qualifioit l'inceste, d' assemblément illi-
cite avec parente, alliée, ou religieuse. (Rob. Eslienne
et Nicot, Dict. — Voy. Assemblaille, Assemblée, Assem-
bler, ASSEMI'.LISON.)
Par extension, la signification d' assemblément
étoit la même que celle d'assemblée, réunion de
nombre de personnes en un même lieu et pour le
même dessein. On disoit : « Là ot moult grant
« assemblément de genz. » (Fabl. .ms. de la Clayette,
p. 400. — Voy. Rob. Estienne et Nicot, Dict.) Mais
on particularisoit cette acception générale, en dési-
gnant parce mot la réunion de deux Armées, et
même leur rencontre suivie d'une mêlée, d'un
combat, que l'on nommoit Assemblément. (Rob.
Estienne et Nicot, Dict. — Voy. Assemblaille, Assem-
blée et Assembler.) « Le Roi Louis envoya à M. de
" Nemours la puissance générale sur toute l'Armée,
« et pour estre Gouverneur de Milan; lequel rtsscm-
« blement desdites deux Armées par lui entendu,
« diligence fut d'assembler la sienne. » (Mém. de
Rob. de la Mark, Seigneur de Fleuranges, ms. p. H4
et-llô.)" Sitostque l'Archeprestre veit Vasamble-
« ment de la bataille, et que l'on se combattoit,
« il se bouta hors des routes. « (Froissart, Vol. I,
page 275.)
Piétons queurent, cil d'armes brochent :
De toutes pars communément
Doulereus est V assemblément.
G. Guiarl, MS. fol. 96. V'.
En parlant de choses dont la réunion, et même le
mélange, forme un ensemble, un corps, un tout, on
disoit « assemblément d'onguents ; assemblément
« de choses qui se prennenl ensemble et s'endur-
« cissent; assemblément bien ordonné des mem-
« bres. » (Rob. Estienne et Nicot, Dict. — Voyez
Assembler.) Dans le sens physique et moral, assem-
blément étoit souvent le même que notre mot
assemblage. « Qui croira, selon Démocrite et Epi-
« cure, le Monde et ce qui est en iceluy contenu,
« avoir esté composé par V assemblément fortuit de
« petits corps indivisibles qu'ils appellent atomes. "
(Dialog. de Tahureau, Epit. p. xiv.) « Hui, saverez
c< que nostre Sires venrat.... Si est cil asscmble-
<■ men: de paroles plus forz ke ne soit 11 premiers
« estaulissemenz des paroles ; et par avanture de
« tant plus fors de tant cum il al plus grant desse-
« vrance entre la figure et la vériteit. » (S' Bern,
Serm. fr. ms. p. GD.) ■< La fortune et la vertu ne
« s'assemblent guères souvent ensemble, depuis
« ces braves Romains de jadis qui en firent et achè-
te verent V assemblément. » (Brantôme, Cap. Estr.
T. Il, p. 286. — Voy. Assemblage.)
Enfin assemblément, que Rob. Estienne et Nicot
expliquent par convocation, est une preuve qu'as-
sembler peut avoir signifié convoquer. ("Voyez
Assembler.)
variantes :
ASSEJIBLEMENT. S' Bernard, Serm. fr. MSS. p. 69.
AsANBLEMENT. Fabl. MS. du R. n" 79S9, fol. 65, R» col. 1.
Asemulement. Fabl. MS. de la Clayette, p. 456, col. 1.
AssAMBLEMENT. Rom. de Narcisse, MS. de S. Germ. f. 120.
Assembler, verbe. Assimiler, faire semblable.
Assembler, unir, réunir, former un tout, un ensem-
ble. Se confondre, être confondu. S'assembler, être
assemblé, être réuni. Approcher, joindre, jouter,
attaquer, se mêler, combattre. Faire un mouvement
vers l'ennemi, aller à lui, fondre sur lui. Convo-
quer.
De l'adjectif latin Similis s'est formé le verbe
Simulare, le même que Similare, en françois faire
semblable. (Voy. Marlinius, Lexic. Philolog. — Du
AS
— 24G —
AS
Cansfe, Gloss. lat. T. VI, col. .V2'2.) II seroil donc
possible qu assembler, de même origine que le com-
posé latin assimilare ou assimulare, eût signifié
assimiler, faire semblable (1).
Reçoy ton Amadis ; pour tout jamais reçoy
Celui qui t'aimera d'inviolable foy...
Si ton amitié douce à la mienne s'assejnble,
De mesme à tout jamais nous revivrons ensemble.
Poës. d'AmadIs Janiyn, fol. 73, V".
Mais il existe une analogie si naturelle entre les
idées de ressemblance et d'unité, qu'en ces vers la
signification d'assembler peut être relative à celle
d'unir. Ce verbe, dans les passages suivans, dési-
gne l'union pour laquelle l'homme et la femme ont
été formés d'espèce semblable. •> Adans... ploura
« Abel que Cayn eût occis; et oncques puis ne vaut
<> s'asanlcr h se famé." (Lucidaires, .■««. du R. n» 708!»,
fol. 219, R»col. 2.)
Com je vous oi chi deviser
De lui et de moi assambler,
Jamais n'aurai autre Signor.
Rom. d'Amadas, M.S. du K. n' C987, fol. 331, K- col. 1.
En parlant de l'union hypostatiquedu Verbe avec
la Nature humaine dans le mystère de l'Incarnation,
l'on a dit : « Tôt ensi cum hostre foyaules moye-
« nières .Ihesu Criz assemblât par Lrès-merveillous
« Sacrement, en une personne, la sostance de Deu
» et de l'Omme, etc. » (S". Bernard, Serm. fr. mss.
p. 385.)
C'est par extension de l'idée de ressemblance à
celle de convenance, que ce verbe a signifié et signi-
fie encore l'assemblage, l'union, la réunion" de
choses différentes, mais convenables pour foi'mer
un tout, un ensemble. Quelque usitée que soit cette
acception d'assembler, spécialement en termes de
menuiserie et de charpenterie, on uediroit plus que
a les hommes sont assemblez et conjointz de vei-
« nés, nerfs et os. » (Voy. Rob. Estienne et Nicot,
Dict.)
On oublioit sans doute le sens primitif et littéral
d'assembler, lorsqu'en parlant de personnes ou de
choses réunies, on disoit qu'elles étoient assemblées
ertsemble. (Voy. Rob. Estienne et Nicot, Dict.) « Le
« Roy Alexandre et celuy d'Angleterre et d'Es-
« cosse qui s'estoientrtsscm/;/^?:^ ensemble, s'alerent
« tirer plus près du trépigny pour mieulx veoir les
'< grans chevaleries. •> (Percef. Vol. I, fol. 131, V"
col. ■2.) « Li Chevaliers de la Terre, et li Templiers, et
" li Hospitaliers s'assernblerent ensemble, et pris-
« Irent conseil à cui il porroient donner la demoi-
« selle.» (Contin. de G. deTyr; Martene, Ampl.
Col. T. V, col. 680.) » Oste une coiffe de gresse qui
» est appelléefoullie (2), et l'osteavecques l'autre que
« tu trouveras es bouiaux ; si les mesie et assem-
« blc tout ensemble. » (Modus et Racio, ms. fol. 30.)
On abusoit de ce même sens, lorsqu'on croyoit
peindre le ciel se confondant avec la terre, un pont
fondant et s'écroulant dans l'eau, en disant qu'ils
nssembloient ensemble.
... Du tonnerre à la reonde
Toute terre senti trembler.
Je cuidai bien que assembler
Feist De.\ ciel et terre eiisamble.
Fabl. MS. du R. n- 7815, fol. 186, V- col. 9.
. . . L'eve les fesoit trambler
Si fort qu'il sembloit qn'assnmbler
Deussent pontet eaue ensamble.
Fabl. MS. de R. n- 7-218, fol. 360, R* col. 1.
C'est par abstraction de l'idée de cette convenance,
au moyen de laquelle plusieuis choses, quoique dis-
semblables, peuvent être réunies et former un tout,
que le verbe assembler, neutre dans ces vers, aura
signifié une idée de confusion; idée très-différente
de celle d'union, réunion, si naturellement expri-
mée par ce même verbe.
Dans les passages suivans, il désigne la réunion
de plusieurs Chevaliers contre leurs adversaires; la
réunion de deux Armées ennemies dans un lieu où
elles se joignent pour combattre; la réunion de
plusieurs personnes qu'un état ou un intérêt sem-
blable, appelle dans un même lieu, et pour le même
dessein. « Gaheriet sitostcomment il fut assem-
« blé avec Hector et Monseigneur Gauvain,.... si se
« travaillèrent tant entre eulx trois.... qu'ils arres-
« terent toute la force au Roy Claudas. » (Lanc. du
Lac, T. III, fol. 45.) » Devant un chastel c'en apele
« Aràsnv... asamblerent li Crestien et li Sarrasins.
« et se combattirent. » (Chron. d'Outremer, ms. de
Berne, ir H3, fol. liG.)
Il assainhlerent
A parlement ; si esgarderent
Qu'entr'eux deussent avoir Roi.
Fabl. d'Esope, MS. du R. n" 7989. fol. 171, V" col. 1.
Aujourd'hui ce verbe est actif ou réciproque, dans
le sens de se réunir, ou de réunir en un même
lieu plusieurs personnes ou plusieurs choses; et
en ce sens il n'est pas moins ancien dans notre lan-
gue, qu'au sens neutre être réuni. (Voy. Chron.
d'Outremer, ms. de Berne, n" 113, fol. 120. — Cot-
grave, Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dicl.)
Nos ancêtres , familiarisés avec les spectacles
militaires, ont pu trouver naturel de présenter une
mêlée, un combat, sous l'idée d'union, de réunion,
en les comparant aux Joules et Tournois où la Che-
valerie se réunissoit pour faire montre de force et
d'adresse. Pour eux, combattre céXo'it assembler ;
approcher l'ennemi, le joindre, jouter contre lui,
l'attaquer, le combattre, c'étoit assembler à lui,
s'assembler, etc. « Puis s'assemblèrent ensemble
« vigoureusement et de grande aspresse. « (Mém.
d'OliVier de la Marche, liv. I, p. 325.) « Quant les
« quatre batailles furent venues et assemblées aux
« Gens de Monseigneur "Gauvain, lors commença la
« destresse de la Chevalerie. » (Lanc. du Lac,
T. III, fol. 'i5.) « Le Soudan emprint hardiesse qu'il
« pouroit assembler front à front à tous les Cres-
« tiens. » (Chron. de S'. Denys, T. I, fol. 2G1.)
(\) Le mot est fort ancieni on le rencontre déjà dans la Chanson de Roland : « AsemMel s'est as Sarrazins messages » ,
V. 367 ; nous sommes donc revenus au sens étvmologiquo de simiil, mettre ensemble, se rejoindre, (n. e.) — (2) Vient d'une
forme latine foUipula. (n. e.)
AS
— 247
AS
Aler vouloit,
Ainsi com devisé l'avoit,
Au Roi Primonus assembler.
Cléoniadès. MS. de Gaignat, fol. 3i, R» col. 2.
A Chevaliers n'asemble c'a terre ne le porte.
Ane. l'oèt. fr. MSS. avant 1300, p. 855.
Vait premier asambkr :
Margherite d'Oisy
Moet à li por jouster.
Ibiil. p. 1^283.
... Il voit d'armes son content.
Grant proesce où ces cuers entent
Le semon de lot assembler.
Kabl. JIS. du K. n- 7615. fol. 164. R- col, 2.
. . . Selon ce que dit le Saige,
Folie n'est pas Vasselaige.
N'est pus sens que Capitaine aille
Assembler devant la bataille.
Gacc de la liigne, des Dcduils, MS fol. 55, Vv
On a même dil, en parlant du péril auquel s'ex-
pose un Chasseur, en approchant, en joignant en
attaquant le Cerf ou l'Ours : .. Ceux de cheval le
« doivent férir en giétant de leurs lances ou espieux
« et non pus assembler à Iv ne de l'espée-. car
« il l'accoleroitet bayseroit non pas trop gracieuse-
« ment. » (Chasse de Gaston Phebus, jis. p. 270).
C'est doncques folie tréi-fiere
D'Espée o tel Cert assembler ;
Ce pourroit outrage sembler.
Fonlaints Guerin, Tiésor de Vénerie, US. p. 47.
Ce verbe assembler, étant pris comme substantif
signinoit combat, combat à outrance, lorsqu'oii
disoit « quand ce vient à VassemUer, à l'assembler
.< des lances, des épées. » (Voy. Hist. de Loys III, duc
de Bourbon, p. ICO.- Gacede la Bigne, des Déduits
MS. fol. 124. - Athis, MS. fol. 45.) « Les bons Capitai-
« nés, quant se vient au. joindre et à r«s<'?«Wn' dient
« lousjours serrez, serrez : et si vous diz que à la
« guerre ung bon docteur en ceste science estoit La
« Hire » (Le Jouvencel, ms. p. 582. — Voy. Assem-
L'action de joindre son ennemi, pour le com-
battre, est précédée d'un mouvement que désio-noit
bgurement le même verbe assembler. Dans les nas-
sages suivans, rtssc/Hf^/cr à l'ennemi, assembler sur
lui c est sans doute aller à l'ennemi, fondre sur lui
« Le comte de Montfort véant l'homme ou monde
" que plus 11 hayoit, misl l'escu avant et saisist une
« lance moult forte et roide, désirant de assembler
« sur luy ; mais Gérard, etc. .. (Ger. de Xevers
part. Il p. 103.) « Pour rtssewiWer aux Sarrasins "'
-• sembatirent incontinent entre les pieux qui fort
'■ estoient roides et aigus, si qu'ils entroient es pan-
" ces des chevaux. •■ (Hist. de Jean de Boucicaut
Jiv. I, p. 94 ; in-4° Paris, 1010.) "i-iodui.
Ne s'iert encore Oudart meu ;
En grant pensée iert qu'il feroit,
Et quel part il assembleroil ;
Ou au flo que li autre assaillent, etc.
G. Guiarl. MS. fol. 267, V'.
C'est par la même figure qu'flsst'mft/É'r aura sieni-
lie la convocation d'après laquelle les Membres
d un Conseil ou d une Cour de Justice s'assemblent,
deven^aît MN.Tr' '*' """ '' ''^""'"' P^"' ''^"'''^ P^''^'' ^om-ne notre mot ...-.,. Mais pr.mk. ement,
se reunissent en Corps, pour délibérer, pour juoer
(^oy. Rob. Estienne et iMcot, Dict.) « Le Supplfant
" "0"s requist que nous li vousissiensrtssfl«to-
«la court des frans hommes de nos dis Seigneurs »
(U Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Cahge T 'l
col. 234; lit. de 1358.) &c, i.i,
variantes:
ASSEMBLER. Orih. subs. - S. Bern. Serm. fr MSS d 'W;
Ansanbler. Guiteclin de S. Ms. du R. n» 6985 tof' «q'
AsAMBLER. Ane. Poët. Fr. MS. av. 1300, p. 1335
ASANBLER Fabl. MS. de Berne, n»354, (ol. 68, V» col 1
ASANLER. Lucidaires, MS. du B. n» 7989, fol 219
AsEMBLER. Athis, MS. fol. 45 V» col ">
.a^^K^g:'r.t^;;;!l3l^,t!^^S-' ^"^^ ^'-^-
LssAMBLER. Ger. de Roussillon, MS. p. 114.
"^.^^^'"yers subst. masc. Mêlée, combat. On a
vu 1 miïnM assembler, avec la même signitication
parce que 1 infinitif d'un verbe désigne absolument
une action laite dans un temps indéterminé, et nue
désignant une action, on l'emploie comme subs-
tantit, même avec la terminaison plurielle. De là
iiniimM assemblers dont assambley s est la variante
dans les vers suivans :
Ly as.^emblers fut mauLx, hez-Ies-vous amassés ■
Mais 11 départis fut à touts pires assés. '
Ger. de Roussillon, MS. p. 66.
VARIANTES :
ASSEMBLERS. Ger. de RousiUon, MS. p C6
AssE.MBLEYs. Ibid. Variante. '-!'••
Mlffo*^?'*''"^^? ^"^^'' /■'''"• l'nion de l'homme
et de la femme. Reunion de nombre de personnes
Signitications analogues à celles d'Assemblement et
Assemblée, et dont la preuve nous paroît superflue
(\ oy. AssEMiiLEJiEXT et Assemblée.)
VARIA.^TES :
ASSEMBLISON. Siège de Troye, MS. du R fol 103
ASSAMBLISON. Ibid. fol. 118.
Assemblure, s«/ys;. fém. Assemblage; jointure
(Lotgrave, Rob. Estienne, Nicot et Monet, Dict.)
VARIANTES :
ASSEMBLURE. Colgrave, Rob. Estienne, Dict.
AssA.MBLURE. Monet, Dict.
Assen, subst. mase. Signe, indice, renseigne-
ment, connoissance. Chose qui indique les limUes
les tenans et aboutissans d'un héritage. Sentier'
voie. Circonstance. Prévoyance.
En termes de chasse, on nomme aujourd'hui
connoissaiice, les signes, les indices auxquels on
peut reconnoitreoù est la bête que l'on a quêlée et
détournée. Telle paroit être l'acception d'asst^msfl)
dans la Chasse de Gaston Phebus, .ms. p IT'^ Ouoi
qu'il en soit, avoir l'assen d'une chose, c'étoit pro-
bablement avoir desrenseignemenssur cette même
chose, la connoître d'après ces renseiguemens.
(Fabliaux, ms. du R. n° 7CI5, nbi supra. — Vovez
ASSENSER.) •'
Dans la Coutume de Lille, les choses qui li mi-
en position latine
AS
— 248 —
AS
inipnt un hérilaec, qui on indiquoient les tenans et
a comoisins. v^u 9-21.) „ Pour deuemenl
:'l^l "eïonnS el « ";£ ^ulrl deux confins de
n disons e héritages, est requis faire évoquer et
SdTounier sur leîieu, le Prévost de Ldle ou son
: StèSt: quatre Eschevins du moms et les
? emiSse d-hé ila^i-es circonvoisins cont.guz et
: o3!".ïl'un l'autre, VO^^^ ^^^"^^^'f^i
a sance ; n'est qu'entre lesdits liei itages i eusi
: bimfes, asscnl ou séparations notables. " (Ibid.
''Tslroit possible qu'on eût nommé assens, les
.Pntiïs d'une orêt, parce qu'ils indiquent la voie
noir en sX" Sire, nous sçavons mieulx les
Tassens et con rées de la foresl que vous ne fa.c-
es fl nous convient aller devers Solei levant
. pour aller à Tiinouant ; et vous en yrez au con-
tra re(Percef. Vol. I, fol. -'lO, R° col 1.) .
C e'st'dans îe sons de voie, sentier au fgure v le
moyen de sortir heureusement dune enti éprise,
qu'on a dit :
Oui raison croit, droiture et sens,
El chemin et ou droit assens
^'XTŒ. M-l";ls.ïe%a-,,n.. fol. 1«, K- col. i.
Qui set les dis, et les assens
De dire et de biaus nios trouver,
Volentiers se doit esprouver
Enraisonetenvénte..^.^^^^,^^^^.^^,,
Il semble que dans le sens de circonstance, on
ail dit :
A cel tans et en cel aseiis,
Moru promons li quens de bens.
Renaus, ses fius ot la Conte,
Seroil-ce parce que les circonstances du." fait'
d'un événement, indiquent l'idée qu on doit s en
faire, qu'elles limitent cette idée et la de erm.nen ?
Alors cette acception figurée seroit relative a celle
A-asscns, indication de lenans et aboutissans. Nous
disons figurément d'un bomme qui sait toutes es
circonstances d'une affaire, qu'il en sait tous les
lenans et aboulissans. , ■,t„„û
Enfin, seroit-ce parce que la prévoyance indique
la voie, le moyen qui peut conduire au but ou i on
vise, que dans le sens de prévoyance, on auroit dit,
en parlant de Charlemagne :
Ce fu cil qui par son grant sens,
Par sa proaice et par assois,
Gouverna le règne de France.
Ph. Mouskcs, MS. p. «3.
Peut-être iugera-t-on qu'en ces vers assens est de
môme origine et de même signification qu'en ces
expressions encore usitées dans la basse Norman-
die, agir cVassem, parler d'assens. (\oy. Assens.)
VARIANTES :
ASSEN. Fabl. MS. du U. n» 7G15, fol. 170, V» col. 2.
ASESS. Ph. Mouskes, MS. |>. 41o.
AssEI^^ Chasse de Gaston PhebusMS. p. 1/-.
Assens. Alars de Cambrai, Moralités, MS. de G. loi. !«..
Assenai, subst. masc. Chose enseignée; con-
noisîame acquise. Part, portion assignée. Don
pai lequel un Père assigne h des enians de quoi
^- 'tabl r se marier. Domaine, héritage assigne pour
le mvèmenî d'un cens, d'une rente. Domaine,
héiSe assi-né pour sûreté 'de douaire et autres
drôil^ma?i.£Lx. Assignation de rentes, de
'^^'ofcroi'iSueïJl'er d'une chose par assenimis,
c'étoit en parler d'après ^"elques renseignemens
d'après quelque connoissance acquise. (V. A^.eneh.)
Cil bastart Jongleour qui vont par ces viliaus.
Chantent de Guileclin, aussi Par «*-*'L" '";^- . ,^y
Mais cil qui plus en set, en est tout fuis muiaus (l) ,
Car il ne sevent mie les riches vers nouviaus.
Ne la Chançon rimée.que fist Jehans Bodiaus.
Guileclin de Sassoigne, MS. dcGaignal, fol. -J, \ col.
On expnmoit une idée relative à celle du verbe
«sSer, assigner à quelqu'un sa part dans mie
Jhose lorsque dans la Coutume de Lorraine, Tit.
vv on disoi • « Il y a règlement au bois de maro-
. \me S s^avoir que celui qui a droit d'en prendre
pourbastir, n'en pourra coupper et abattre quM
nS lui soit marqué et assigné...... Aussi, estant
Sar Vusagier, ou de sa part, l'ass/ryn^Z demande
Sour bois de maronage, en est tenu le bailler
: IZ vingt quatre heures; à faute de quoi pourra
« ledit usagier, etc. » Coût. gen. 1. U, P- i«'^-)
De it l'expression, prendre bois de maronage par
nnr n'^sinnal. (Coût. gén. Ibid.)
^ C'S en ce même sens d'assignation de part dans
une chose, de part assignée dans cette même chose,
qu'on a dit :
Or lor ferai un moût bon ^>n^L^ ^^.^ ^ ,,^
I p don par lequel un Père faisoitpart de son bien
•^ ses ms Puine^s ou à ses filles, en leur assignant
de nuo s'Slir, se marier, étoit un assniat et plus
ïic ïnieiSent un assené. « Les termes assenne et
alv s nui sont anciens, signifient ce que nous
5 son à présent assinat ... don faicl et assigne
parleperè à ses enfans puinez, ou a ses filles
: 5îur les marier. . (Bouteiller,Som. rur. Tit.Lxxv,
«Mac n i'i'^ — VOV. AsSENER.) ,
ians^ia coutume de Bourgogne, chap.x. un do-
maine un héritage sur lequel o" avoit assgne un
f2?n^2^r^rd^i-?cïï!;e:^St^s
e? a son action pour les arrérages à luy deuz de
: SS «"te, contre l'^^^'î/î'C^St'll^rde
Tenementier d'icelui, sans ce qu il soit tenu de
: 3Ster' faction personnelle contre le pr.ncipa^^
„ obligé ou ses hoirs. » (Cout^ gén. 1 • ^ P- 8^»-
Yoy. Laurière, Glos. . du Dr. Fr. T. I, p. 80.)
(1) Muet. - (2) Merrain.
AS
— 249 —
Anciennement rassignation d'un nombre de livres
de terre, ou de livres de rentes en terre, opéroit en
certain cas 1 aliénation et, par conséquent, la prisée
du domaine de rhéritage sur lequel elles étoient
assignées. Dans la Coutume de Nivernois par
exemple, une femme avoil la propriété de YassigmL
de 1 héritage, du domaine qui lui étoit assigné pour
surefede son douaire et autres droits ; «'sauf aux
-■ héritiers du mari à le recouvrer dans trente
« années , en remboursant le prix pour lequel
lX'T.TCl% efsV)" ^'''- ''^""^'''^' «'°--
L'assignai, dans la Coutume de Bourgogne étoit
le domaine, héritage assigné à une femme pour
surele de sa dot et mariage, comme dans la Cou-
tume de Nivernois, mais sans aliénation de pro-
priété .. La femme jouit de son assignai h titre de
.. mort-gage, parce que les héritieis du mari e
« peuvent avoir, et le recouvrer en quelque temps
«' que ce soit, en rendant les deniers du n aria-e »
(Laurière, Gloss. du Dr. Fr. T. I, p. 80. - V A™ )
Il est probable que dans Bouteiller, (Som Rur
lit. xcviu p. 5(JG,) un assignat de conventions ma-
tnmoniales etoit la même chose qua.ssi^H.,/ dans
totgrave; c'est-à-dire, domaine, héritage assigné à
une f;emme pour en jouir jusqu'à ce qu'elle en ait
retire ce quelle a apporté en mariage; doma né
héritage bien assigné à une femme pour "on
douaire et autres droits. ^
On a défini assignai, et l'on définit encore « assi-
" gnal assignation d'une renie sur un héritaot
: IZ fvn"^d'^"e«" d'"ne rente sur unK
' lage. » (Voy. Lauriere, Gloss. du Dr. Vv. - Dict
de Trévoux - Dict. de l'Acad. Fr.) Peut-être ceUe
définition devroit-elle être celle d'assignat on 9 n
S'hérS ^^'"'''Onal,a surfout'r«S««
est 1 heiitage, le domaine assigné pour le pavemeu
d une rente; et non l'assignation de cette reUe s ,
ce même héritage. On a dit néanmoins dans "é
sens d assignation, assignai de rente. (Laurière
Gloss. du Dr. Fr. - Cotgrave, Dict.) ^'^'*"""e.
AS
VARIANTES :
Assené, subst. masc. et fém. Désignation de
valeur, évaluation, estimation Don par leouer .in
père assigne à des enfans de quoi s'é abli7se ma
rier. Assignation de douaire et autrerdroits ma ri
momaux; biens sur lesquels ce doSai'e e SSs
droits sont assignés ; douaire prélix
Dans un sens relatif à celui du'verbe asse7ipr
assigner, designer une chose, la faire connoitre o„'
a dit assigne pour désignation de valeur évalua tio^i
estimation d'après laquelle on conno t la 4le ,'
d une chose. .. L'assigne desdites bestes c es assa
« voir ce que povo.t monter le prouffit d iSiies, .
spéciiîe'^S kT ""' *'-«"^^'"'^^i°" <^^ propriété en cas
H.
« povoit valoir.... la somme de, etc. » (D Garoen-
h stfS''™^t"''/f "'^ ^«'^""^ ^ ses fils puînés ou
paitage ,les pourvoir, en leur assignant, en eur
donnant de quoi s'établir, se marier. (Voy As ener )
« Lassenne etoit un don faict et assigné Jar le père
« mariei. » (Bou eiller, Som. rur. tit. i.xxv, notes,
P- ^^'^■~ Laurière, Glossaire du Dr. Fr - Cot-
fTn^^M" ^' •" ,<^«it'lhomme a plusieurs en-
« fans, et par especial filles, et il leur veut faire
■< assenne ou advis qu'on appelle don, pour eUes
« avancer entre leurs aisnez frères qui par iiaturi
rnTirZ''''''.l^!''r!^ '''■ " (Boutei'ller, lom
rui. tit. LxxN, p. 43;. Dans la Coutume de Valen-
« aZ»;,;''^'-'"'^^ " ^" Parastre ne peut liai îer
sfitmm! '"'^f •'^'"S' J"s^""^ ^^ que Yassenne de
» sa femme soit faite. .. Coût. gén. T. II, p. 9(34 —
Voy. AssENAL et Assener.) ' '
Le douaire, nommé dot dans la Coutume d'An-
goumois, chap. vi, en latin dos dans Ses les
p r hmien;"™"''''-'^'?"' ""^^ ^«P^'^« ^e do.iation
pai laque le un mari, dans le cas de mort, assigne
de .[uoi vivre à sa femme et à ses enfans, on a dU
SnT(rr''''''^"'''°" de douaire, pour Touaire
assigne (1). Les «ss^-h^s, en général, étoient les biens
sur lesquels la dot et autres droits d'une fem ml
etoient assignés. (Bouteiller, Som. rur. p 330
notes.- Cotgrave, Dict. -Voy. Assenal.) . Assennes
» promises ou non par Iraicté de mariage, se pZ!
« ront faire devant ou après espouseï', sur pen-
X sions, rentes viagères, ou biens immeubles
« Apres le mariage consommé, le traicté... dicel'uv
» ne se pourra changer, n'est pour accroissement
l/^fcmes ,. (Coût de Hainaut, au Nouv. Coût,
^en. 1 . 11, p 04.J Par la même Coutume, chap. xxxir
Ln'n.;".. '^ ""e femme a esté fait assenne par
^0 premier mary,.... son second mary ne pourra
.. endreny aliéner iceluy«.ss.„H. plus avant que
1.1 vie de lui seulement; comme en paieil ne
« pourron les créditeurs dudit second mary, soit
" que ledit assenne fut fait sur pensions viagères
« ou sur quelques biens héritiers. » (Ibid. p 72 ')
« Les douaires et assennes commenceront avoir
« cours dès le trépas du mary. » (ibid. p. 72 )
" t^nn nf^T '"'■' fognoissance.... de renoncia-
mirn '^M^^'fT' ^^ 'J?.l«"'"s douaires et assennes. »
Svi'rl^H-fn " '^•^Pï'fiyanl (assenne par douaire
assigne, 1 Editeur a voulu sans doute indiquer une
différence entre Yassenne et le douaire ; et cette
différence est réelle.
Ouelqu'étendue que fût l'acception à'assene assi-
SIII'h nt've'''"' f '""'r' ''''''' rnatrJmonia IX,
PtM^ p ^ '^ ''"^ '^'-''"s '«'S Coutumes où douaire
m^SuITT''^'^'' ^^""'S' ilfautentendrl
I le douafpp 'nï^ir'^""""''"'.'*"'"'^'': «» par assené,
le aouaire piefix, nomme assetie conventionnel
de non remploi de la dot, ou seulement une hypothèque
32
AS
250
AS
dans la Coutume de Lille, citée par Du Gange,
(Gloss. lat. au mot assenatio, col. 773.) « La Dame
« ou la Damoiselle n'a droit de douaire, si le mary
« l'avoit en mariage avancée d'aucune chose, ou
« assenée desur son héritage ; car deux douaires
« ne peut-elle avoir ensemble. Mais il convient
« qu'elle se tienne auquel qui mieux lui plaira ; ou
« à Vassenne ou au douaire coutumier. » (Bouteiller,
Som. rur. liv. I, lit. xcvn, p. 555.) De là, " les assen-
« nés, ou avancemens de mariage, sur terres non
« nobles et lenure de mainferme, encore distingués
« des douaires apparlenans aux Dames ou Damoi-
« selles, pour cause des iîefs et nobles tenemens. »
(Voy. Id. ibid. tit. xcvui, p. 563. — Voy. Assener.)
VARIANTES :
ASSENE. Bouteiller, Som. rur. p. 330, notes.
AssENNE. Bouteiller, Som. rur. tit. xxv, p. 138.
Assigne. D. Carpentier, S. Gl. lat. de Du Gange, à Assieta.
Assené , partie, et stibst. masc. Ce qui est
assigné pour douaire et autres droits matrimoniaux.
Celui qui a un assignat. Celui qui est désigné comme
ayant cause. Dut désigné, but auquel on doit viser.
C'est par ellipse d'un substantif masculin ou fémi-
nin, comme rente, héritage, que ce qui étoit assigné
à une femme pour son douaire et autres droits étoit
un assené, uneasscnée. « Les Dames etDamoiselles,
« et autres ayans renoncé, auront... tous et quel-
« conques les héritages venans de leur costé,... et
« leurs assennées, s'aucuns elles en ont.... Tels
« assetmesse pourront faire... sur fiefs, alleuts, ou
« main-ferme, soit devant ou après espouser. »
(Coût, de Hainaut, au Coût. gén. T. l, p. 803.) « Une
o femme peut renoncer aux biens et debtes de son
« mari, et soy tenir à son rtsse/twe conventionnel. »
(Coût, de Lille, ibid. p. 777. — Laurière, Gloss. du
Dr. Fr. — Voy. Assené et Assignai.)
Dans le second sens, un assené étoit celui qui
avoit un assignat, à qui l'on avoit assigné un fief,
une aumône. « Les receveurs.... payeront fiez et
« aumosnes aux assenés, et en monoie tele comme
« il recevront de nos Fermiers. » (Ord. T. L p. 713.)
Les Assignés, en latin Assignat!, que les Loix
d'Angleterre distinguoient des Ileirs, en latin
Hœredes, étoient ceux que par cession, donation,
ou par quelque autre litre, on désignoit comme ses
ayans cause. « Purrount plusurs purchaser cncom-
<• mune à eux et à lour heires et à leur assignés....
« Et si un nequedent se lesse morir seisi de sa
« partie avaunt la devision de sa partie, ele acrest
" à ses parceners et à lour heires, et issint de tres-
« tous jusques al dareyn ; et si le dareyn moerge
« sauns heire et sauns assigné, adonques serra le
« héritage al Seignour. » (Britton, des Loix d'An-
gleterre, chap. xx.\v, fol. 91.) « Si home purchace
« terres par ceux parolx, à aver et tener à lui à
» touts jours ; ou par tielx parolx, à aver et lener à
« luy et à ses Assignés à touts jours; en ceux deux
« cases il n'y ad estate forsque pur terme de vie,
« pur ceo que il fault ceux parolx, ses Heires ; les-
« queux parolx tant solement font l'estale d'enhé-
« ritaunce. » (Tenures de Littleton, chap. i, fol. i.
— Voy. Du Gange, Gloss. lat. au mot Assignatus,
col. 782.)
Enfin, une chose désignée comme le but amiuel
« il falloit viser, étoit une assegnée. « Cellui qui
« mettoit la bille plus loing que Vassegnée ou bonne,
« etc. » (D. Carpentier, Suppl, Gloss. lat. de Du
Gange, au mol Assieta, col. 3.i2; tit. de 1383.)
Après avoir prouvé les acceptions du participe
assené, pris comme substantif, on ajoutera que
relativement à l'idée du signe, du coin dont les
monnoies sont mar(|uées, on a dit d'une monnoie
frappée en 1423, qneWeiulasennée. C'est ainsi qu'il
faut lire en ce passage : « Fut monnoie noire de
" trois tournois la pièce.... Pour ce que celle de
« deux tournois esloit blanche, et celle de trois
« tournois noire, le Peuple en fui si mal content
« que la convînt laisser; et si esloit tant assenme.«
(Journal de Paris sous Charles VI et Charles VU,
p. 94.)
C'est probablement dans un sens analogue à celui
du verbe asse7ier, indiquer une chose à quelqu'un,
la lui désigner, la lui assigner pour le rembourse-
ment de frais, que l'on aura dit : « Si voloit estre
« assenés, s'il al règne m'étoit nul cosl, où il s'en
« tenroit. » (Chron. d'Outremer, ms. de Berne,
n° 113, fol. 128. — Voy. Assener et Assensé.)
On croit que dans les vers suivans, aseené est une
variation d'orthographe du participe assené, con-
traction à' assensé :
.... Franc vouloir arbitre de pensée
Puet sur les cours, par raison ascenée,
Seigneurir par vertu vertueuse.
Eust. Desch. Poès. MSS. p. 130, eol. i.
VARIANTES :
ASSENÉ. Laurière, Gloss. du Dr. Fr.
Ascené. Eust. Desch. poës. MSS. p. 130, col. 1.
AssENNÉ. Coût, de Hainaut au Coût. gén. T. I, p. 786.
Assigné. Britton des Loix d'Angleterre, chap. xli, toi. lOC.
Assegnée, jmrlic. cl suhst. fém. D. Carpentier, Sup. Gl.
lat. de Du G. au mot Assiela.
Assenme. (Lisez .4sse))))ée.) Jour, de P. s. Charles VI, p. 94.
Assennée. Coût, de Hainaut, au Coût. gén. T. I, p. 803.
Assenemeiit , subst. masc. Action de faire
signe; signe, indication. Action d'assigner part
ou portion ; donation par laquelle on assigne de
quoi subsister; don par lequel un père assigne
à son fils de quoi vivre comme chevalier; assigna-
tion de douaire. Assignat, Assignation d'une dette,
d'une rente sur un héritage. Action de placer ;
position; disposition. Saisie; main-mise. On ne prou-
vera point ici l'analogie et la réalité de ces accep-
tions, parce que les acceptions du verbe assener
nous semblent être une preuve suffisante de celles
du substantif Assenement (Voy. Assener.)
Dans un sens analogue à celui à'assenement,
signe, indication , on disoit que le bâillement,
comme signe du besoin de se coucher, étoit une
assignation de couche ; en parlant d'une jeune fille
dont les yeux indiquoient le désir, qu'elle donnoit
des assignations ; par une allusion assez ridicule,
qu'elle é"loit fille de Sergent, qu'elle avoit les yeux
AS
— 251
AS
pleins d'assignations. (Voy. Oudin, Cur. fr. — Id.
ibid. Additions.)
VARIANTES :
ASSENEMENT. G. Guiart, MS. fol. 352.
ACENEMENT. Parton de Blois, MS. de S'-Germ. fol. 151.
AsENEMKNT. Ph. Mouskes, MS. p. 237.
AssAiNEMENT. D. Garp. S. GI. 1. de D. C. à Assenamentum.
AssiGNEMENT. S'-Bernard, Serm. fr. MSS. p. 78.
Assignation, s. f. Orth. subs. — Oud. Cur. fr.
Assener, verbe. Faire signe ; appeler en faisant
signe, appeler delà voix. Faire apercevoir par signe,
indiquer, faire connoître, donner connoissance,
désigner ; enseigner, donner des renseignements.
Assigner, destiner ; assigner en partage. Partager
en assignant de quoi vivre; pourvoir, douer. Pla-
cer, introduire en faisant signe; placer, marier,
établir, préposer, déposer. Frapper en visant, frap-
per juste ; blesser en frappant ; frapper sans viser ;
adresser, toucher, atteindre, parvenir. Mettre un
signe de saisie ; saisir, mettre en sa main ; réunir
en vertu de saisie.
On observera que dans notre langue, assener et
(tësigner{\) sont de même ancienneté, comme ils sont
de même origine. On disoit assener de la main, de
la tête, de l'œil, pour faire signe de l'œil, de la tête,
delà main ; appeler en faisant signe de la main, de
la tête, de l'œil. « S'en vint le Chastelain sur les
" carneaux, qui acheva (lisez achena) de la main;
" et Bertran monta à cheval, et ala parler à lui sur
« les fossez. » (Hist. de B. du Guesclin par Ménard,
p. I'i4.)
... Se g'estoie en Paradis,
Et la Belle m'acenast fors.
Que g'aim plus que marne et mon cors,
Ou de chief, ou d'ueil, ou de doi ;
Tost me feroit venir à soi.
Parton. de Blois. MS. de S. Germ. fol. 151. V. col. 3.
En général, assener quelqu'un, ou l'assigner,
c'étoit l'appeler en lui faisant un signe, un geste
auquel il pût connoître qu'on l'appeloit. il est
même vraisemblable que, par extension, c'étoit
l'appeler de la voix, comme du geste. « Quant il
■' orent hardoié,... si trast d'une part un cheva-
« liers Sarrasin, et acena un Turcople qu'il alast
« parler i^i lui. » (Chron. d'Outremer, ms. de Berne,
n" 113, fol. 126.) « Si voit ung de leurs Escuyers;...
« il le assigne, et celuy vient. >> (Lanc. du Lac,
T. I, fol. 145.)
Un Damoisel à lui acesne.
Par le frain le cheval li tent, etc.
Siège de Troje, MS. du R. n- G987, fol. 95, R' col. 2.
Que ce même signe soit indicatif d'un objet,
il le fait apercevoir; c'est en ce sens qu'on a dit:
Une herde de cers trouvèrent.
Ly pères au fîlz les acenist, etc.
Rom. de Brul, MS fol. ï, R» col. 1.
Au figuré, quelle que fût la manière d'indiquer
une chose, de la faire connoître en la désignant
aux yeux de l'esprit, en l'enseignant, c'étoit Vasse-
ner ou Y assigner. On diroit encore aujourd'hui,
avec Gace de la Bigne, assigner des raisons, pour
les indiquer, les faire connoître. (Voy. Poëme des
Déduits, MS. fol. 134.) Anciennement, assener quel-
qu'un d'une chose, et même d'une personne, ou
l'en assigner, c'étoit la lui faire connoître, lui en
donner connoissance, lui donner des renseigne-
mens sur cette personne, ou sur cette chose.
« Dictes-moy plus cleremenl aucune chose du
« Chevalier, pour veoir se vous en sçauroys assi-
» gner. » (Parcef. Vol. II, fol. 79.) « Voicy cestui
« qui te peut assener de ce que tu quier. » (Lanc.
du Lac, T. I, fol. 86.)
Maistre, moult par te doi amer.
Qui de tôt me ses assenei-.
Lucidaires, MS. de Giberl, fol. 20, V.
Dans la ''arce de Pathelin, le Juge ne pouvant
rien connoître à la demande du Drapier, qui dit
drap, lorsqu'il faut dire moutons, s'écrie :
Véez ! suis -je bien assené 9
Il ne cessera huy de braire.
Farce de Palhelin, p. 95.
oi l'on désignoit des greniers pour certains usa-
ges, c'étoit les assigner, quelle que fût la manière
d'en indiquer la destination. (Coût, de Bretagne,
art. ccLxvi, citée par Laurière, Gloss. du Dr. Fr.)
Dans ce même sens général de désigner, on disoit
assigner ou asse«er le temps de faire une chose;
en termes de procédures dans les champs de
bataille et les cours de justice, assener jour aux
parties. « Si assenèrent {aliàs assignèrent) jour de
« partir au roi Sigebert, ou à ceulz que il i vou-
« droit envoler. » (Chron. S' Deiiys, Rec. des Hist.
de Fr. T. III, p. 301.) « Furent tuit occiz en la nuit
« qui fu assenée pour faire si grant cruauté. »
(Ibid. p. 292.) « Li juge assenait jour aux parties,
« etc. » (Coul. de Beauvoisis, chap. xx.xix.) » Le
« Seignor doit le gage recevoir, et assener le jour
« de bataille, etc. » (Assises de Jérus. chap. Lxxin.
— Établissemens de S' Louis, liv. II, chap. xxix, etc.)
De là sans doute notre verbe assigner dans le sens
d'ajourner.
Anciennement, ass/r/HéT une chose à quelqu'un,
c'étoit la lui désigner comme son partage, quoi-
qu'elle ne lui fût pas absolument propre. « La
« Fontaine assigne al Peire de cuy li Fils naist, et
« de cuy ist li Sainz-Espiris. La lumière assigne al
« Fil, etc. La paix assigne al Sainz-Espirit, etc.
« Ceu ne dis-je mies assi cum ces choses soyent
« propres à un chascun ; car li Peires est assi lu-
« mières, etc. » (S' Bernard, Serm. fr. mss. p. 95.)
0 Fontem assigyia Patri ex quo nascitur Filius,
" etc. X (S" Bernard! opéra, T. I, col. 775.)
Encore aujourd'hui l'on dit assigner des terres,
des rentes à quelqu'un, pour les lui désigner
comme destinées aux besoins de sa vie, ou à l'ac-
quit d'une dette, les lui désigner comme son par-
(1) Assener et assirjner viennent tous deux d'assignare; mais assigner, quoiqu'on en ait des exemples au xiii« siècle, est
de formation savante. Le g de assigner ne se prononçait pas au xvii» siècle, non plus que dans les chartes du xi^ siècle, où
l'on trouve assinare. La Fontaine, au livre VI, fable 20, dit : « L'auberge enfin de l'hyménée Lui fut pour maison assenée. »
Chifflet le remarquait encore dans sa grammaire française, publiée en 1700. (n. e.)
AS
— 252 —
AS
tag'e, ou comme destinées à lui tenir lieu de ce
même partage. C'éloit aussi une ancienne accep-
tion d'wsseHer le même qu'nô's/V/»''?*- " Diront... les
« sommes assenées pourMvres, et pour douaires. »
(Ord. T. I, p. 463.) ■> Li Abbés el li Covens nous
« prièrent ke nous lor tornismes de lor à unne
« part; et nous ;\ lor prières.... lor assenâmes
« pour lor partie del bos, unne pièce debos à toutte
•c la terre ((ui est divisée par certaines bousnes. »
(Ducbesne, llist. généal. delà M. de Béthune, pr.
p. 131. tit. de 1243.) « Geste terre que mes freires
« m'asanne et assènera por.l'esclioite mon frère,
« tan^-je de lui en fié lige. " (Ducbesne, Hisl.
généal. de la M. de Bar-le-Duc, p. 31 ; tit. de 1249.)
« Il tint sens nul reclain, bien dix ans ou plus, ce
« que li fu assegnel en partie; el de cèle terre
" qui li fu assenée et asisse por sa partie, reçut
« Mesire Renais les hommages. » (Id. ibid. p. 30.)
De là, on aura dit assener quelqu'un pour le
partager en lui assignant de quoi vivre, en lui
assignant des rentes pour lui tenir lieu de sa part
dans les héritages: acception particulière que
semble indiquer l'opposition d'assener à ireter dans
le passage suivant: « Safadins ot xv fix, dont il dona
« as vu irelages, et as vni rentes Or avésoi des
« vu fix Sapbadin, coment il furent ireté ; or vos
« dirai comment li vni furent asenés. » (Lett. du
Patriarche de Jérusalem, mss. de Berne, n° 113,
fol. 175.)
C'est par comparaison d'un Roi à un Père, qui
doit partager ses enfans et les pourvoir, en leur
faisant part de son bien, en leur assignant, en
leur donnant de quoi vivre, qu'un ancien Poëte a
dit allégoriquement :
Si fet le Chief contre nature
Quant à ses membres norreture
Tost (1), qui les deust assener.
Hisl. de Fr. en vers, à la suile du Rom. de Fauvel, fol. 74, V* col. 2.
Anciennement, ce don d'un père à ses fils puînés
et à ses filles, se nommoit assené, comme l'espèce
de donation par laquelle un mari assignoit à sa
femme un douaire sur ses biens et héritages.
Ainsi, l'on disoil d'un mari qui douoit sa femme,
qu'il Vassenoit sur son héritage, qu'il Yassenoit de
douaire. (Bouteiller, Som. rur. tit. xcvni, p. 562 et
563. — Voy. Assené et Assenal.)
Si l'on pourvoyoit ù l'administration d'un
Royaume en la partageant, en assignant à différens
Officiers une part dans l'administration de ce même
Royaume, c'étoit l'assener. « Richars en ala en
" Engleterre, et porta coronc à Londres, et rechut
« ses homages de chiaus de la terre. Après si laissa
« ballius et gardes en Engleterre Quant il ot
« ensi faitement assenée sa terre, etc. » (Chron.
d'Outremer, ms. de Berne, n° 113, fol. 143.)
L'extension de cette acception à'assener, par-
tager, pourvoir, éloit telle qu'on disoit d'une
troupe pourvue d'armes et d'habillemens de luxe,
qu'elle étoit assennée d'atours et d'armeures; d'une
femme pourvue de mari, qu'elle en étoit assenée ;
d'un homme pourvu de maîtresse, et partagé de
toutes les ((ualilés propres à s'en faire aimer, qu'il
en étoit assené ; etc. ((î. Guiart, ms. fol. 287, 345, et
31. — Rom. de la Rose, vers 21808, etc.)
Grant guerredon doivent à Dé,
Quant il si bien sont assené.
Et de beauté, et de proesce,
Et de famés ; c'est grant richece.
Alhis MS. fol. 91, R- col. 2.
On place quelqu'un dans un lieu, on l'y introduit
en lui faisant signe d'entrer et de s'asseoir ; de là
le verbe assener, pour introduire, placer. « Alla
« seoir le Damoisel où le maistre d'hostel Vassena;
« et fut moult près du Roi. » (Percef. vol. VI,
fol. 97.)
... En ce pourpris l'amena,
Et dedans si droit l'assena.
Rom. de la Rose, vers 2970 et 2971.
En voyant les différens états de la vie, comme
autant de lieux dans lesquels on se trouve placé,
on aura dit d'une personne placée dans l'état reli-
gieux, qu'elle étoit assenée en Heligion. (Vie d'Isa-
belle, à la suite de Joinville, p. 172).
Dans un sens non moins figuré, un amant, un
mari content de la femme, de la maîtresse en qui
il avoit placé son choix, se félicitoit en disant qu il
étoit bien assené, bien placé, qu'il se tiendroit où
il étoit assené, etc. « Le jonne homme... a trouvé
« femme telle qu'il la demandoit ; et à l'advanture
« il luy fust bien mestier d'en avoir trouvé une
« autre. Mais il ne le voudroit pour riens ; car il
« luy semble qu'il est mieux assené que nul
» autre. >• (Les Quinze joies du Mariage, p. 100.)
Aseués sui là où je me tenrai.
Ane. Poët. fr. MSS. avant 1300, p. 1164.
Si li ai mon cuer doné ;
Bien le tieng assené.
Chans. fr. du 13' siècle, MS. deBouhier, fol. 118, V.
On disoit d'une femme, ou d'un homme qui
plaçoit son alfection en la personne désignée pour
objet de son choix, qu'en cette personne ils seroient
bien assenés. » Elle seroit en vous bien assenée,
« d'avoir ung tel amoureux. « (Petit Jean de Sain-
tré, p. 127.)
Je la voudrai marier bien.
Ne sai Prince dedens cest Raine (2),
Ne de ci jusqu'en Loheraine,
Qui, tant soit preudom et senez,
Ne fu en li bien assenez.
Fabl. MS. du R. n* 7218, fol. 350, R* col. 2.
L'acception générale d'assener, placer, étant
particularisée, l'on a dit, dans un sens relatif à
celui de cette dernière expression, assener une
fille, ou l'assigner pour la marier, l'établir en la
donnant à celui qu'on lui désigne pour mari, et
auquel elle est destinée pour femme. Encore au-
jourd'hui, placer une fille, l'établir, c'est la marier,
la donner en mariage à un homme. ■< On ne pou-
« voit mieux, ne plus hautement assigner Madame
« Bietrix de Portugal, qu'au roi d'Espaigne. >■
(Froissart, Vol. II, p. 171.) « Ma fille, si Dieu plaist.
(1) Enlève, en latin tollit — (2) Royaume ; en latin Regnum.
AS
- 253 —
AS
« sera assenée h tel homme dont elle recevra hon-
« neur. » (Percef. Vol. V, fol. 108.)
Cil siens oncles la fist mener
A un chastel, tant qu'assener
La peust à aucun preudomme ;
Et vous savez, ce est la somme.
Fabl. MS. du R. n" 7'218, fol. 289, V" col. 2.
On disoit absolument, assigner une fille, ou
Yassener, pour la marier, l'établir, la placer. « Sire,
« vous congnoissez bien tous les Chevaliers et les
« Dames aussi ; si les assenez-, si comme droit
« est. » (Lanc. du Lac, T. II, fol. 29.) « Quant vous
« mariastcs les autres, se vous eussiez esté cour-
« tois, elle ne eust pas esté oubliée : car elle est
« plus vaillante que nulles des autres ; si deust
« estre la première assignée. « (Ibid. fol. 30.)
Marier vueil, tout sans respit.
De vous toutes sui li ainsnée ;
Si doi première estre assenée.
Fabl. MS. du R. n" 7218, fol. 257, V col. 2.
Peut-être jugera-t-on qu'en ces derniers passages,
comme en plusieurs autres, il faudroit rendre
assener, ou assigner, daus un sens analogue à
celui de l'expression assener de mari, pourvoir de
mari. Car si l'on dit d'une fille mariée, qu'elle est
placée, qu'elle est établie, on dit aussi qu'elle
est pourvue. Le verbe Assener paroît susceptible
de Tune et l'autre explication dans les vers sui-
vans :
Chascune fu si assenée,
Que grandes dames toutes trois
Fm-eut ; ce fu raisons et drois.
Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 69, V- col. i.
La fièvre quarte et la double tierçaine...
Puist avoir qui mari me donna ;
Et penduz soit qui ainsy m'assena
Eust. Desch. Poës. MSS. p. 220, col. 4.
En nommant à une place, on désigne celui qu'on
y établit, qu'on y prépose. C'est donc encore rela-
tivement à l'idée générale d'assener ou assigner,
placer, que dans le sens de préposer, on a dit :
« A la garde de mesmes les terres, desul le Roy
« nostre uncle avantdit, avum ass/ff«e le honorable
« père Waut, éveske de Everwyk. » (Rymer, T. I,
part. 2, p. 110, col. 1, tit. de 1270.)
Enfin assener une chose, dans le sens propre,
c'étoit désigner le lieu où elle seroit placée, la pla-
cer, la déposer en ce même lieu. On a feint que
Charlemagiie, pour obtenir de l'empereur de Cons-
lantinople et du patriarche de Jérusalem, quelques
instrumens de la Passion de Jésus-Christ, leur fit
cette promesse :
Si m'en donnés,
S'ière noblement asenés ;
Et s'en iert moult France onorée.
Ph. Mouskes, MS. p. 288.
On se trompe en croyant que le verbe Assener,
encore usité dans le sens de frapper, exprime la
violence du coup. C'est parce qu'il en exprimoit la
justesse, que Joachim du Bellay, dans son Illustra-
tion de la Langue françoise, fol. 30, le mettoit au
nombre des mots antiques dont il recommandoit
aux Ecrivains de son siècle de renouveler l'usage,
comme propre à « donner grande majesté tant aux
« vers qu'à la prose. » Il semble que, conformément
à sa définition d'assener, frapper oii l'on vise, par
conséquent frapper juste, Brantôme ait dit : « Il
« faloit bien que celuy fut asseuré qui ne bransloil
« sous son coup, tant il sçavoit bien et très-à-pro-
« pos, et à temps le donner, ou ainsi que l'on disoit
« anciennement assener. » (Brantôme , Cap.'ifr.
T. Il, p. 162.)
On ne frappe juste qu'autant que l'on adresse|au
point désigné par l'œil, au point où l'on vise.
(Voy. AssEGNEE.) C'est donc en passant de l'idéejde
ce qui précède à l'idée de ce qui suit, qu'on a^dit
assener, le même qu'assigner, dans le sens de frap-
per, frapper juste, blesser en frappant. « Il assegna
« le bras de l'enfant, et le brisa en deux moytiés. >>
(Chron. S' Denys, T. Il, fol. 13.) « Il faillit le chien,
« et assena le maître du chien. » (Monet, Dict.)
Sache l'espée
• Fort dure et encienne,
Et il un Persant en asan}te.
Parlon. de Blois, MS. do S' Germ. fol. 158, V* col. 2.
Cis fu assenez laidement
En l'yaume, sus la visagière.
D'un alenaz parmi l'uillière.
G. Guiart, MS. fol. 128, V.
. . . Messire Gauvain Vasane
En son escu, desoz la pane.
Rom. de Perceval, MS. de Uerne, n" 354, fol. 268, V col. 2.
Amours à point ce dart lança,
K'à un coup deux cuers assena.
Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 13, V col. 1.
Ung vireton que l'en tira,
La vint en la jambe assener, etc.
Vlgil. de Charles VU, part. I, p. Ht.
L'artillerie adonques c'est monstrée.
Mais une pièce est rompue et oultrée,
Dont il advint trop merveilleux dommaige ;
Car elle occist ung gentilhomme et paige,
Par les esclats dont furent assiijnez.
Œuv. de J. Marot, p. 83.
Il résulte de ces divers passages, qu'assigner ou
assener, ce n'étoil pas toujours frapper en vi.sant,
en adressant au point désigné par l'œil ; mais que,
par extension, c'étoit frapper, frapper sans viser.
Peut-être n'a-t-on dit assener pour frapper, qu'en
particularisant l'acception générale d'assener,
adresser, loucher, atteindre.
Soit que les personnes ou les choses^ auxquelles
on adressoit, on touchoit , fussent désignées ou
indiquées par la vue, soit qu'on y adressât, qu'on
y touchât de la main sans les voir, on disoit qu'on
les assenoit, qu'on y assenait. « Avons... ordené et
« establi que toutes les armeures es menues gens,
« soient ensemble mises... en lieus sehurs et con-
« venables,... et que chascun mette son seing et
« son brevet en ce qui sien sera; et que toutes ces
« chosessoientsiseurementgardées, que chascun...
1 peust au sien assener, et le prendre. " (Ord.T. I,
p. 636. — Voy. Rassener.)
.... Par les chevilles aloit
Li chevaux, quel part c'on vouloit.
Vers la poitrine retasta ;
A une cheviUe assena,
Qui en tel fourme faite estoit. etc.
Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 11, R'eol. 3.
- 354 -
AS
AS
Liprieus le va boulant;
Tant ccrquierent qu'il ass..,e.«Ht
AU moine ; ^^„^"/^.Ul mervelliés.
t?rs^kstrvrrs^?spié.^etc.^^^^.^,.,
femme'qui nous auno t CH^^d^^«„,.„,, ^'assener,
s'adresso.t a elle Ou U ne P ^^^ ^^.^^
(Voy. Fabl. m. du R. n j , ^^^^^.^.^
(Voy.
Leaux amors et faire e es ^^^.^ ^^^^^^ .
ruetnra^-^^-i!'p^,^fW.av»^
eue, onjV^J^^f^^:^%l%^,,e^n-'.U paa que
assener a P^i^' ^ ^^^ '^ "^ ^
^'«"''"''Tses songiez commande
ou en un Ueu quelconque P^^^ Y^P^ ^^ 1 vers
géant ses pas en es aai^ ^,^^ ant 1300,
cette maison, etc. lAnc. ^«e^ ^^^^ 16;,. __ G.
p 176. - Ff , «^etc) \iquenUenrjs, si manda
Guiart,Ms.fol.287,eic.) 1^ H ^ j^gg. si h
„ un sien sergant ^^J^î^l^ eTlapi'éce de terre ou
. demanda sU savero t «ler en y ^^^ oil moult
. la bataille avoit este • ^t^ ^ i^ce de
.bien; et bien saverœ a.;3eje^^^^^^ d-Outremer,
«terreoùURosJujib^ ^„^^, 2.)
„s.deBerne,nli3,fol.J^^,^^^
hué ii droit au lieu assena
,„ „,„é, von a «\psssit L'sr •
nŒtrS"S'àïï«.ie„. .(0„..n, cur.
•%",ÎU ,ue nos -/-- S.-Tîrsïl'Sè
5m« oH f»'!»"''rMmêu4 un signe 'Je saisie, à
•^t'rdfrirofèrsrriu .»,.« su».
n 652; tit. de 1218) " ^VnvPvinces fere tenir
l ladite contesse ^\f,l'llTJ^fàienconiv,^^^^
„ Et se Gaucher ne sa fan^e/^Y^?poi que il tient de
. porroitassene/'alaconteae 4 ^^^^ ^^^
. Lien fié et en demame et ien.i^^ ^^^^^^^_ „
« mesfaire, jusqua tant que d^astiUon, pr.
(Duchesne, Hist. geneal^de la M. ûe .^Q^^^^^
p.45;tit.dem6.)« beiiarm ^^^^ ^^ ^
„ mefeist à nous ledit '^^'l'J^'VeceluY Olivier tient
pourrions assener aux tf^ «Jf f=f '"^y, in_ Morice,
: Te nous, m-rJX'nT^^ !%• '^^^ ' l'"' ?'
Preuv. de l'Hist de Bielagne^^^ i ^^. ^.^^^g^g-
1^261 .) Philippe-Auguste 'necone^^ ^^^^^
terre, son vassal, « proposa eu bannie. »
'^'auM, et k entrer en s> t ire à^ o^^^^ ^^^^
(Cbron. S' Denys T. "vW^- ^ „ ^^^ap. xxik, que e
Etablissemensdeb Lou^^,liv^ ,^^.^ ^^ ^^^^ ^e
fief possède par le passai ne ^^.^^^^ ^ on
fief du seigneur. G est par ce ^ ^ ,^ ^ g
disoit : " Se f',nenns Ge^U^\Xt, ^^ roncin de
„ par défaut d'ome, ou de racnai, ^^
„ service, ou por. autre ^hose eu ^.^^^ ^
" ^'oit, et cU qui t; ,tSsU' rendra la seue
« tenir la cnose ue luj-,
. chose. ••(<^r'i-'f-:.P,,:s répression assener ou
On croit apercevoii dan. lexp
assio-ner à un fief, la i^'^^^^f," ip sens général de
^it assi-ner ou assener, dans le seub ^ ^^^^^^
sàish îl est néanmoins P«jJi\5s''iJ «î'soit rela-
lïp ession le sens d «ssene, ou «ssigri ^^,^ ^^
liU celui de toucher à une «^^^ ^^^^.^^ ^^^ ^ef
et q^^e de là on ait d -, « s^tre sa main sur un
„ cie son vassal assigne» e héritage, saisir efiet
„ héritage, » P,9,^l^T'^rière, Gloss.duDr.fr. T. l,
de son Vassal. (Voy. t^'^^^'^^^t'^rave, Dict.
p ?é,aumot,Assener.-Cot.^^^^^^^ ^^^^a au
^" vnhn la réunion des domauies ^^
fiefdè son seigneur, étant une suite dej^^
ïes mêmes domaines ^1/ Plaisir, ^ celle de
d'étendre l'acception d "fsene/ , ^^^g les
?éun?rL^ vertu d'une saisie. « 11 sa „ ^Chron.
fîentes, et les assena à la sme ^^^ ^.^^
d'Outremer, ms. de Beine, u ,. .;^ son fief les
ce même sens qu on lit, " Jf colgrave, Dict.
« terres de son Valsai,
• .> .réterindiqua par signe. (Rom.
derS.tl^!|f,^^al....deB.^^^
Aisseneis, part. Place, v»^ (Duchesne, Hist
,/„S»ïia?."Sr«-auc.pr%-^»->
ACHEVER. (1^'=''^^
AS
- 255 —
AS
ASENEIR. Chans. fr. MS. de Berne, part. 2, fol. 20, R°.
ASENER. Ph. Mouskes, MS. p. 288.
ASENNER Fabl. MS. S'-Germ. fol. 52. V» col. 2.
AssEGNER. Chron. S'-Denys, T. II, fol. 13, V».
AsSEiGNER. Chron. S'-Denys, T. V, p. 277.
AssENNER. Athis, MS. fol. ai,R° col. 2. - Cotgrave, Dict.
Assigner. Orth. subs. - S'-Bernard, Serm. fr. MSS. p. 95.
Assenete, siibst. féni. Copeau, ou bardeau.
On a écrit aselle pour aiscelle, ais, bardeau ; et
peut-être asselle. De cette dernière variation d'or-
thographe, que l'on suppose avec tant de vraisem-
blance, on aura formé le diminutif asselete, et
même assenete, par un changement de lettre de
même organe. (Voy. Assenne.)
Quoi qu'il en soit, l'acception d'assenete paroît
être relative à celle d'aisceau, ou d'aiscelle, dans
ces vers où des bardeaux, des- copeaux, choses de
nature très-combustible, paroissent avoir servi
d'objet de comparaison au Pocte, pour rendre sen-
sible l'idée de la vitesse avec laquelle le feu prenoit
à des villes que l'on vouloit réduire en cendres:
Plus vistement qu'aus assenetes (I)
Fichent les feus par les villetes.
G. Guiarl. MS. cilé par D. Carpcnlier, Suppl. Gloss. lai. de
Du Cangc, au mol Assiela, col. 342.
Il nous semble que D. Carpentier s'est mépris en
disant qu assenete, en ces vers, est de même signi-
fication qu'assegnée, but désigné. (Voy. Aiscelle et
AiSCEAU.)
Assenne, subst. fém. Ais, bardeau.
On a la preuve que aiscelle, ais, bardeau, s'écri-
voit aiscièle, aiselle, aselle, essele. Ces variations
d'orthographe une fois prouvées, quiconque étudie
les ancîens monumens de notre langue, saura bien,
étant guidé d'ailleurs par l'identité de signification,
réunir sous l'article aiscelle, toute orthographe de
même terminaison que assielle, asseille, et autres
à peuprès semblables, que ses lectures peuvent lui
offrir. C'est un de ces supplémens qu'on se plaît à
faire soi-même, et duquel nous nous serions dis-
pensés comme de plusieurs autres, si nous n'eussions
craint que l'on n'eût eu quelque peine à reconnoître
le mot aiscelle , aisselle, aselle ou essele, dans les
orthographes essalle, essaule, ou aissaule, essaime,
aissenne ou assené , d'où probablement s'est formé
le diminutif assenete. (Voy. Assenete.)
Cependant les voyelles a et e, comme les con-
sonnes / et n, sont si communément substituées
l'une à l'autre dans la prononciation , qu'avec
un peu de réflexion, il semble aisé d'apercevoir
que essalle, essanne, et aissenne sont des va-
riations d'orthographe du mot aiscelle , comme
aisselle, esselle, ou essele. Enfin si l'on réfléchit que
«/prononcé «i<, est pour le moins aussi fréquent
dans notre langue que cl ou en prononcé al ou an,
peut-être avouera-t-on sans peine l'identité à'ais-
saule , essaule, essaulne , et même à'essaugne,
eschaugne, avec essalle, essanne, aissenne; les
mêmes qu'aisse/Ze, esselle, ou esst'/e. D'ailleurs elle
semble justifiée par l'identité de signification. « Es-
« tienne Noquin dist que s'il avoit une petite
« essaulne de boys , qu'il retourneroit bien toutes
« leurs flèches. » (D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat.
de Du Cange. au mot Essana, col. 277 ; lit. de 1483.)
On Irouve essaitgne et eschaugne , avec le même
sens, dans un ancien Cartulaire, cité ibid. « Icelle
« maison estoit couverte d'essil ou d'essaule
« vieille. « (Id. ibid. lit. de 1426.) « Voult frapper
i< Jehan Blandel d'une essalle, laquelle il print en
« la couverture de la maison. » (Id. ibid. tit. de
1483.) « Monstroil.... une essanne de bois, dont il
« avoit fait la semblance d'un coustel. » (Id. ibid.
tit. de 1374.) « Comme Jehan Auberi eust acheté
« certaine quantité à'aissenne, etc. » (Id. ibid. T.I,
col. 134, au mot aissella; tit. de 1389.) « Comme
« les supplians eussent marqué ou signé de la
« marque contrefaite deux charges de aesou assen-
« nés, etc. » (Id. ibid. col. 96; tit. de 1412. — Voy.
Aiscelle.)
variantes :
ASSENNE. D. Carpentier, S. Gl. 1. de Du C. au mot.4è.s.
Aissenne. Id. ibid. au mot Aissella, col. 134; tit. de 1389.
Aissaule. Id. ibid. au mot Acssella, col. 97; tit. de 1374.
Aselle. Bouteiller, Som. rur. p. 875.
Asseille. D. Carp. S. G. 1. de D. C. au mot A.tccUa.
Assené. Id. ibid. au mot Aès, col. 96 ; tit. de 1412.
Assielle. Id. ibid. au mot Aissella, col. 134 ; tit. de 1470.
EscBAUNGNE. Id. ibid. au mot Essana, col. 277.
Ess.\LLE. Id. ibid. col. 277 ; tit. de 1483.
Ess-\NNE. Id. ibid. col. 277 ; tit. de 1374.
EssAUGNE. Id. ibid. col. 277 ; tit. de 1421.
Essaule. Id. ibid. col. 277 ; tit. de 1426.
Essaulne. Id. ibid. col. 277 ; tit. de 1467.
Assens, subst. masc. Sentiment d'après lequel
on croit, on veut, on se confie, on consent, on
acquiesce. Droit féodal, espèce de cens.
Le peuple, en basse Normandie, dit encore au-
jourd'hui : agir et parler d'assens, pour agir et par-
ler de bon sens, avec le sentiment de la raison qui
dirige nos paroles et nos actions. (Voy. Assensé.)
Telle est probablement la vraie signification du mot
assens, expliqué ailleurs par celui de prévoyance.
(Voy. Assen.)
En général , ce même mot assens désignoit le
sentiment d'après lequel on croit , on veut une
chose avec plus ou moins de raison, avec plus ou
moins de confiance dans sa façon de sentir, ou dans
celle des autres.
Icelle, selonc mon assens,
Estoit Rétorique apelée :
Sage estoit et bien enperlée.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 258, R- ool. 1,
Ma suer ait ; c'est bien mes assens.
Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 9, R- col. 3.
A ce ot torné son assens
Que mais de là ne mouveroit
Tant que èle vivre porroit.
Ibid. fol. 49, y- col. 2.
Quelquefois c'étoit le sentiment raisonné d'après
lequel on se confioit en quelqu'un, comme dans ces
vers où Charlemagne dit, en parlant de son neveu
Roland :
Boins cevaliers et de grant sens,
A vous estoit tous mes asens.
Ph. Mouskes, MS. p. 221.
(1) Assenâtes est ici une faute de lectiu'e ; il faut asscllettes pour rimer avec villettes. (n. e.)
AS
- 25G —
AS
f/ Mais plus souvent céloit le sentiment d'après
lequel on se confioiten sa propre raison, pour vou-
loir une chose, y consentir, y acquiescer. « Les
"i.ordonnances touclians le commun proufit de la
«.^ville, soient faites... par Vassenz des trois con-
« cistoires. » (Ord. T. V, p. p. 376.)
Nos seigneurs sont d'assens
De mettre, et tenir en leurs mains,
Tous leurs privilléges aux mains.
Sentences de Liège, à la s. du Journ. de Paris, sous Cliarles VI, p. 377.
... Si fisent, par buen asois,
En tous lius despondre (1) lors sens,
Por avancier crestientet.
Ph. Mouskes, MS. p. 73.
On jugera sans doute qu'en ces trois derniers
passages, il éloil plus simple d'expliquer le mot
flsse?is par celui de consentement; mais la signifi-
cation de consentir est-elle bien la même que celle
d'assenfir.'' Quelle qu'en soit l'analogie , a-t-on eu
raison de confondre ces deux significations ? Il
semble qn assentir à une chose, c'est la vouloir, y
acquiescer d'après un sentiment que l'on conçoit
comme nous étant particulier ; au lieu que consen-
tir à celte même chose, c'est la vouloir, y acquies-
cer d'après un sentiment que l'on conçoit , comme
nous étant commun ou avec plusieurs autres.
Quand cette distinction seroit purement idéale, au
moins est-il prouvé qu'en certains cas la significa-
tion à'asseutcr difïéroit de celle de consentir.
(Voyez ASSENTER.)
11 seroit possible que dans une signification figu-
rée et relative à celle à'assens, sentiment d'après
lequel on consent, on acquiesce à une chose, on
eût nommé assens, certains droits féodaux consen-
tis au profit de seigneurs de forêts ou de châteaux,
pour exemption de service, ou pour concession de
glandée, de pacage. Mais lorsqu'on a la preuve que
l'on a écrit sens pour cens, et assenser pour acen-
ser, il paroit plus vraisemblable de dire que, dans
les Ordonnances des Ducs de Bretagne et dans la
coutume de ce Duché, Vassens étoit un droit féodal,
une espèce de cens que le seigneur d'un château
ou d'une forêt exigeoit de ses vassaux, soit pour
concession de droits, tels que ceux de pacage et de
glandée, soit pour exemption de service, tel que le
guet. (Voy. AcENsEuet Cens.) « Combien en plusieurs
<• parties de nostre Duché y aitpluseurschasteaulx,
" places et forteresses démolies et abatues, ou par
« avant la démolition d'icelles les subgitz d'iceulx
« à qui appartiennent les dictes places avoint ac-
« coustumé à faire guect et poier asseois; ce que
« depuis ycelles démolitions a esté tiré à consé-
« quence, et les a l'en contrains à ceulx assens
« poiez. » (Ord. des D. de Bretagne, fol. 225.) >■ Les
« bois de haute fustaye, forests,.... et autres bois
« non accoustumez d'estre émondez, en partage
« d'entre frères et sœurs et auties parents nobles,
« ne seront esfimez, et n'entrent en partage ; mais
" seront estimez les pasnages, glandées, «ss('»s, et
« autres émoluments accoustumez et provenans
« desdites forests. " (Coût, de Bretagne, au Coût,
gén. T. II, p. 769. — Voy. Laurière,'Gloss. du Dr.
fr. — Cotgrave, Dict.)
VARIANTES :
ASSENS. Carpentier, Hist. de Cambray, pr. p. 31.
AsENS. Ph. Mouskes, MS. p. 73.
AssENZ. Ord. T. V, p. 376.
Assensé, participe. Pourvu de bon sens; sensé.
C'est en cette signification qu'on disoit d'un
homme fait pour agir et parler d'assens, qu'il étoit
assensé. « Le suppliant qui estoit tout assensez,
« homme de raison, et personne notable, etc. »
(D. Carpentier, nbi supra. — Voyez Assens et
Assenser.)
Il semble évident qu'assené est une contraction
à'assensé, dans ces vers :
Trop me tendriez, je croi, peu assenée,
Si, selon vostre conseil, j'estois atinée (2).
Percef. Vol. VI, fol. 83, R* col. 2.
En parlant déjuges iniques et prêts à se laisser
corrompre par des présens, on a dit :
Une fois font leur jugement
Estroit, d'autrefois largement.
Chil sont de conseil assené,
Qui font à lor main ongement (31.
Rom. de Charité, strophe xill.
VARIANTES :
ASSENSÉ. D. Carpentier, S. Gl. 1. de Du C. à Sensatus.
Assené. Hist. des trois Maries, en vers, MS. p. 369.
Assenser, ve?'i>f. Faire part, instruire. Parta-
ger, douer. (Voy. Assener.)
On observera qu'anciennement l'on disoit, ap-
prendre sens : expression qu'il étoit assez naturel
d'abréger, en disant flssf/îser, pour rendre sensé,
pourvoir de bon sens. (Voy. Sens.) Quoique l'exis-
tence d'rtssfjïSff, avec cette significafion, soit encore
pour nous sans preuve, elle peut du moins être
présumée d'après celle du participe assensé, pourvu
de bon sens, sensé. (Voy. Assensé.)
En prononçant et écrivant assené pour assensé.
on s'est exposé à confondre deux mots essentielle-
ment différens par l'étymologie : confusion d'autant
moins sensible, qu'ils exprimoient des idées quel-
quefois très-analogues, puisqu'avec le bon sens on
acquiert la connoissance des choses. En consé-
quence, l'on aura cru que si l'on disoit assené pour
assensé, l'on pouvoit dire assenser pour assener.
C'est relativement à la signification de ce dernier
verbe assener, indiquer une chose, la faire connoî-
tre, qu'en parlant de la Magdeleine qui fit part aux
onze Apôtres et les inslru'isit de la résurrection du
Fils de Dieu, on a dit :
De la nouvelle a assensés
Ceaux qui remésent en l'onzaine.
Miserere du Recl. de Molicns, MS. de Gaignat, fol. 224. R- col 2.
Enfin, la signification à'assenser étoit la même
que celle d'assener, assigner une chose en partage,
partager, douer, lorsqu'on disoit :
. . . Si as ta langue dorée,
Et de grant vertu assensce,
Qui de tôt me sçais raison rendre.
Lucidaires, MS. de Gibert, fol. *9, R'.
(1) Exposer. — (2) Hâtée, pressée. — Onguent.
AS
257 —
AS
Assent, sitbst. masc. Consentement. 11 sem-
ble qu'en certains cas la distinction entre les
substantifs assent. et consent, ait dû être la même
qu'entre les verbes consentei' et assenter. ^Voyez
AssENTER.) Mais quelque réelle que puisse être la
différence de signification entre assentir et con-
sentir, différence indi(iuée au mot Assens; on dira
qu'assent signifioitconsentement, sentimentd'après
lequel on acquiesce à une chose, soit que ce senti-
ment fût particulier à une personne, soit qu'il fui
fût commun avec d'autres. « If ne me semble que
« la bataille puisse demorer, puisque fes gages sont
« donés et receus.... par V assent et fa volenté des
" trois parties. >> (Assises de Jérusalem, ciuip. xiv.)
« Avons les Leys.... fait mettre en escript;.... save
" à nous.... de amender à foutz fes foilzque.... bon
« à nous serra, par Vassent de nos Countes et de
» nos Baions. » (Brilton, des Loix d'Angleterre,
fol. i.) >< Se aucuns de mes homes ou de mes fa-
« mes.... viennent pour demorer en fa communilé
« de Bar-sur-Saine,... n'en porront aucun retenir,
« se n'est par mon assent et par ma volenté. »
(Rec. de Perard, p. 'iSO ; fit. de 1235.) « Remis li
« Archevesque de Bourges mourut : Suplices fu
« après li en la dignité, par Vassent le Roy Gon-
- trans. n (Chron.\le S' Denys, Rec. des Hist. de
Fr. T. m, p. 237.)
La signification û'assence ou acence, étoit fa
même que celle A'assent dans ces deux derniers
passages, lorsqu'on disoit : « Ne pourront fes Mais-
» 1res d'iceulz Ilostelz- dieux , bailler leurs diz
« Hostelz à ferme, pour brasser et faire brasser
« cervoises, et les vendre en icenlz,... se eulz ou
" autres ne le faisoient par nostre congié et acence.»
(Ord. T. V, p. 223. - Voy. Cotgrave, Dict.)
VARIANTES :
ASSENT. Rec. de Perard, p. 430 ; tit. de 1234.
Assent. Chron. S' Denys, Rec. des Hist. de Fr. T. III, p. 237.
AssENCE. subst. fùm. Cotgrave, Dict.
Agence, .\cense, nuhst. fém. Ord. T. V, p. 223.
Assentateur, suhst. masc. Celui qui acquiesce
servileineiil an si'nliinentd'un autre.
En lalin iissenlator. C'estune desépithètesduniot
parasite dans M. de la Porle ; et ce n'est pas la
moins juste. « Afin de sçavoir mieux discerner fes
" opinions fibres d'avec celles des ussentateurs et
« blandisseurs, etc. » (Du Bellay, Mém. Liv. VII,
fol. 204. - Voy. Borel, Dict.)
Assentation, suhst. fém. Acquiescement ser-
vile au sentiment des autres.
En fallu assentatio. On a dit qu' assentation est
" adjutrice de toute méchanceté. >- (L'Amant ressus-
cité, p. 134.) « Combien que.... l'adulation et asscn-
" tation soit fort pernicieuse, si ne peut-elle nuyre,
■< sinon à celui qui la reçoit. » (Ibid. p. 137. — Voy.
Cotgrave et Oudin, Dict.)
Assentement, substantif masc. Consentement.
Chose à laquelle on consent. Chose sensible à l'odorat.
Au premier sens, Assentement désigne, comme
assent, le sentiment particulier ou commun d'après
lequel on acquiesce à une chose. (Voy. Assert.) Il
est évident que la sentenscc est une faute d'ortho-
graphe, et qu'or, doit lire Vassentenee, avec la signi-
licalion A' assentement, dans la Chi^on. de S"-Denys,
Rec. des Hist. de Fr. T. III, p. 307. « Si che ke par fe
« otri e fe assentement de f'avanldit Rey nostre
« père, avum ordiné et establi, etc. » (Rymer, T. I,
part, n, p. 114, lit. de 1270.) .< S'if avenoit que au-
« cuns de mes homes... venoient por demorer en fa
« commune de Chasteillon et de Dormanz, li Bor-
« jois... n'en porroit nuz retenir, se n'est par mon
« assantement, ou par ma volante. » (Hist. généal.
de la M. de Chaslillon, pr. p. 14; til. de' 1231.)
« Nous, à lor prières, par consel de bonnes gens,
« et par le gré et Vassentement .Iakemon de Condé,
« etc, » (Hist. généal. de la M. de Bélhune, pr.
p. 131, tit. de 1243.) « Viel et commans,o l'assenfe-
« mt'H/ et o fa propre vofenté de fadite ïhomasse,
« etc. " (Hist. généal. de fa M. de Montmorency,
pr. p. 387 ; til. de 1265.)
Il est évident qu'en ces deux dci uiers passages,
la signification û'assenteineni est analogue à celle
de l'expression commun assentement dans ces
vers :
B'ansenlement commun li distrent
Que plus delà ne séjournast ;
-Mes en France s'en relornast.
G. Guiarl, MS. fol. 36, V.
C'est par une espèce de métonymie très-familière
aux Grammairiens, que ce même mot assentement a
signifié cfiose à faquelle on consent ; par exempte,
une donation faite du propre consentement du dona-
teur. « Tel ottroit et tel assentement ke me Dame
« me mère fist à l'abeie de Biaupret,... de treize
« livres et de quarante sols de parisis de parme-
« naule rente, etc. » (Hist. généal. de la M. de
Bélhune, pr. p. 144 ; tit. de 12G5.)
Enfin Vassentement [l] étoit une chose sensible à
l'odorat, forsqu'en terme de vénerie on disoit en
parlant des corpuscules qui émanent du corps des
fièvres, des cerfs, etc. « Lièvres de leur nature por-
" tent <ïassentement plus les uns que les autres, et
« pour ce les chiens assentent niielx des uns que
« des autres; ainsy comme une rose a plus de flai-
« reur que une autre. » (Chasse de Gaston Phébus,
MS. p. 45.) « Quant le cerf fuit aval l'yeaue, el les
« chiens sont au-dessus, l'yeaue emporte tout Vas-
« sentement du cerf contre aval devant eulx. »
(Id. ibid. p. 239. — Voy. Assentiment et Assentir.)
VARIANTES :
ASSENTEMENT. Chasse de Gaston Phébus, MS. p. 239.
ASCENTEMANT. Ord. T. III, p. 577.
Assantement. Hist. gén. de la M. de Chastillon, pr. p. 14.
AS.SONTEMENT. Ord. T. III, p. 480.
Antessetkment. (Corr. Assentement) Ord. T. II, p. 11.
Sentensce (la), subst. fém. (corr. l'Assentetice). Chron. de
S' Denys, T. III, p. 307.
(1) C'est l'odeur qui frappe le nez du chien et qui le porte à se rabattre sur la piste de l'animal poursuivi. Le mot
s'emploie encore dans ce sens. (n. e.)
11- 33
AS
— 2r.8 —
AS
Assenter, verbe. Acquiescer par un sentiment
de justice. Drilton dislingiioit assenter de consan-
^er ; distinction suivant" iatiuelle consenter h une
présentation de l)éiiclice, c'étoil y ac(iuiescer, lors
même qu'on y avoit quelque droit ; au lieu qu'assm-
ter à celte même présentation, c'étoit y acquiescer
après s'y être opposé sans droit quelconque, y ac-
quiescer par un sentiment de justice. » Une chose est
« assfH/É!r,eluneautreconsenler.^tss('»<«'estcome
« ascunquiii'ad nul droil de présenter, dit aprèsceo
« que il avéra mys desturbaunce ; jeo me assente ù
• ce présentement, sauve mon droit après. Et tel
« assent n'est mye préjudiciel ai verrey palron ; ne
« rien del droit par taunt ne acresl al deslurbour.
" Consenter est corne ascun qui est en seisine de
« avowson, consent al présentement celuy que ad
« plus de droit car l'un purra estre en seisine del
« droit possessory et l'autre de la propreté ; et qui
» plus ad dans la piopreté, plus ad del droit. »
(Britton des Loix d'Angleterre, fol. 225. — Voy.
ASSENTEME.NT.)
Assentiment, siibst. masc. Sentiment. En ter-
mes de vénerie, impression (\ue le loup et autres
animaux reçoivent par l'odorat. « Le loup n'ira
« contre le vent, s'il sent que les lévriers y soient ;
« et aval le vent n'en peut avoir aucun assentl-
« ment. » (Du Fouilloux, Vénerie, fol. 118. — Voy.
AssENTiR.) C'est par métonymie que les corpuscules
mêmes qui occasionnent cette impression sur le
sens de l'odorat, ont été désignés par le mot assen-
tement. (Voy. Assentement.)
Assentir, verbe. Sentir en tâtant, en flairant,
etc. Pressentir, prévoir; savoir, connoitre. Ressen-
tir. Rendre sensible, affecter d'un sentiment, pas-
sionner. Réunir au même sentiment, rendre con-
forme en sentiment. Consentir, acquiescer. Rendre
consentant. (Voy. Assent.)
Du verbe simple sentir, avoir connoissance de
son être et de ce qui y est relatif, par l'action interne
et externe du principe moteur de ce même être, l'on
a fait le composé assentir qui signifioit tâter, sentir
en tàtant :
En l'estable s'en vient tout droit,
Où li prestres repus estoit.
Tout sans lumière et sans chandeille,
Les brebis eschace et esveiUe;
Et va querrant et assenlant
Où li prestres ert estupant.
Fail. MS. du R. n- 7218, fol. 145. I\" col. 2.
En termes de vénerie, flairer, sentir en flairant ;
« Si les chiens y mettent les nazeaux pour assentir,
« la poudre entre dedans, qui les estouppe et osie
« le sentiment. ■> (Du Fouilloux, Vénerie, fol. 43.)
« Cerf fuit les voies dures et saiches, afiin que les
« chiens qui léchassent, ne le puissent assc/Uir ;
« et puis va à l'eaue pour soy baigner, aftin qu'il
« perdent le sentir de luy. Ainsi doit fouir homme
<■ quant le Dyable le chasse... et courre... à l'eaue
« benoiste, affin que le Dyable ne sente et cong-
« noisse sa trasse. » (Modus et Racio, fol. 38.)
C'est en ce même sens qu'on disoit d'un chien,
bon pour la quête du cerf :
... Ne se faint pas de quérir
Si en pourra riens assentir.
Gace de la Bigne, des Héduils, MS. fol. 101, R' et V.
En supprimant le mot riens dans cette expres-
sion, « riens assentir .d'un cerf, » l'on aura dit
qu'un cliien asscnlolt d'un cerf, ou d'une autre
bête. (Voy. Gace de la Digne, des Déduits, ms. fol. 72.
— Dict. de la Chasse, ms. du R. ir 7930, p. 1 42, etc.)
« Quant le cerf sort de l'eau,.... les chiens n'en
« pourroienl avoir aucun sentiment; mais à dix ou
« douze pas loiiig du bord, ils en pourroient assen-
« tir plus aisément. » (Du Fouilloux, Vénerie ,
fol. ii.) « Quand les chiens cuident «isc/t/jr de la
« beste qu'ils chascent, le tlaiieur et l'oudeur des
« herbes leur oste moult... r«s,se?iii?'de leur beste. »
(Chasse de Gaston Phébus, ms. p. 12Ï).) Dans ce der-
nier passage, asse)itir pris substantivement, est de
même signification que assentiment. (Voy. Assen-
timent.)
Il seroit possible quassentir eût désigné toute
impression faite sur notre âme par le moyen des
organes de nos sens; et que dans un sens analogue
à celui de sentir en voyant, il eût signifié pressentir
une chose, la prévoir, la savoir, en avoir connois-
sance avant qu'elle se réalise. Telle est l'acception
d'assentir dans les passages suivans. ^ Avoit....
« envoyé le dit ambassadeur du Duc devers nostre
» dit Sainct-Pere, pour assentir de lui la vérité. »
(Lett. de Louis XII, T. IV, p. 293.) « Nous avons
« assenli et appris que, etc. » (Négociations de
Jeannin, T. H, p. 187.) « Prièrent Balian d'Ibelin
" qu'il alast à Salehadins, por asenlir quel pais il
« poroient faire. « (Chron. d'Outremer, ms. de
Berne, n° 113, fol. 138,)
Dans un sens physique et moral, assentir une
peine, c'étoit la ressentir.
Por 11 me convient assentir
Les maus c'on apele d'amer:
Une eure douz, et autre amer.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 267, V col. 1.
Si l'on étoit sensible, si l'on s'affectoit d'un senti-
ment d'amour pour Dieu, si l'on se passionnoit pour
une personne ou pour une chose, on disoit que l'on
s'y assentoit.
Cil pape Gerbers
Ne fu pas en la fin bobiers ;
Mais del tout à Dieu s'assenti.
Si que pour mort vie senti.
Ph. Mouskes, MS. p. 405.
N'est droiz qu'à autre amer m'assente,
Puisque j'aim personne si gente.
Chaiis. fr. à la suite du R. de Eauv. MS. du R. n- 6812, fol. 6», R* col. 3.
Que je vous die sanz mentir,
Cornent on se doit assentir
A chevalerie embracier.
L'en doit en sus de li chacier
Tous les vices et tous les maus.
Fabl. MS. du R. n- 7G15, fol. 162 V col. 2.
On exprimoit la réunion de plusieurs personnes
au même sentiment sur une chose, une conformité
de sentiment entre elles sur cette même chose, en
disant :
Pais vint ; tout fumes assenti.
Dits de liaudouin de Condé, MS. de Gaignat, fol. 319, R* col. 1.
AS
— 259 —
AS
Tous communément s'assentirent
K'à Cléomadès offerroient,
K'à ses besoins le serviroient.
Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 35, V col. 1.
Si la chanson d'un amant n'étoit pas conforme
aux sentimens de son cœur, on disoilque " la voix
« au cœur ne s'assentoU. »
En plorent me convient chanteir :
Et si le doi faire ausiment.
Laissier deusse lou chanteir,
Quant la voix à cuer ne s'asent.
Chans. fr. MS. de Berne, n- 389, part. I. fol. 66, R'.
Le xerhe assen tir, dans la signification de con-
sentir, désignoit le sentiment particulier d'après
lequel on acquiesçoit à une chose, lorsqu'on disoit :
Chevalier se doit contenir
En Testât où il veut fenir ,
Et doit vivre honnestement.
Il ne doit jurer, ne mentir,
Ne à nul raalfait aseiilir;
Et doit faire bon jugement.
ModuselRacio.MS. fol. 221, V*.
Enfin, s'assentir à une chose, c'étoit s'y rendre
consentant, y acquiescer d'après son sentiment par-
ticulier. « Se... ne se voloient assentir à ceste
" devise, come il seront en aage, il porroient de-
« mander leur droiture, et leur devise demorroit. «
(Hist. généal. de la M. de Chastillon, pr. p. 57; tit.
de 1246.)
Bien s'assent à ce mariage.
Cléomadès, MS. de Gaignat, fol. 17, R- col. 1.
CONJUG.
Asenti (s'), indic. prêter. S'affecta d'un sentiment.
(Ph. Mouskes, ms. p. 405.)
Asentist (s), indic. prêter. Se rendit consentant.
(Poës. à la suite du Rom. de Fauvel, fol. I.)
Asentu, partie. Senti en flairant. (Modus et Racio,
MS. i^ol. 67, V'.)
Assent, Asent (m'), indic. prés. Je m'affecte d'un
sentiment, je m'y conforme. (Fabl. ms. du R. — Ane.
poët. fr. Mss. avant 1300.)
Assentus, partie. Rendu consentant. (Beauma-
noir, Coût, de Beauvoisis, chap. xv.)
V.\R1ANTES :
ASSENTIR. Cotgrave, Oudin, Nicot et Monet, Dict.
ABSENTin. Modus et Racio, HS. fol. 221, variante d'i4sa)î(i>.
AccENTiR. Id. ibid. fol. 63.
ASANTIE. Fabl. MS. du R. n» 7G15, fol. 165.
A.SENTin. Chron. d'Outremer, MS. de B. n" 113, fol. 138.
Ass.\NTiR. Fabl. MS. du R. ii» 7615, fol. 163.
Asseoir , verbe. Faire asseoir , faire prendre
séance. S'asseoir, prendre séance. Mettre dans une
position fixe et stable, établir, fixer ; établir, fixer
en évaluant, en assignant, en enchâssant, etc. Poser,
déposer, disposer. Seoir, être séant, convenable.
Toucher , adresser. Imposer. Préposer. Entourer,
environner, assiéger, enfermer. (Yoy. Assikger.)
L'orthographe asseoir , encore subsistante, n'est
pas moins ancienne que les autres, dans notre lan-
gue. En retranchant la voyelle o, l'on êcrivoit
asseir ; orthographe qui semljle indiquer que la
prononciation d'asseoir étoit quelquefois différente
de la nôtre.
Ne sai coument on puist cuer aseir
Plus hautement qu'amours m'a fait coisir.
Ane. Poés. fr. MS. du Vatican, n" 1490, fol. 85, V".
Au moins est-il évident qu'asseir se prononçoit
comme assir ; autre variation d'orthographe qui
prouve que le participe assis appartient à la conju-
gaison du verbe asseoir, de même origine et sou-
vent de même signification qu'flssm'. (Voy. Asséer.)
C'est par ellipse d'un nom féminin, et quelque-
fois masculin, que ce participe assis, au féminin
assise, s'est pris comme substantif. « Hugues de
« Borgoigne.... nos doit asseoir cinc cent livres
« de terre de tornois de rente,... à laquelle assisse
« li dux Robertz s'est consenliz. » (Rec. de Perard,
p. 514 ; tit. de J20C. — Voy. Assis et Assise.)
La signification d'asseoi?' étoit la même que celle
d'asséer, faire asseoir, faire prendre séance, lors-
qu'on disoit :
Certes moult grant enor vos fist.
Quant il de lez lui vos assist.
Rom. de Perceval. MS. de B.;rnc, n' 354, fol. 237, R' col. 1.
Tuit estoit illec délivre.
Et assis sanz faire dangier ;
Sans eulx demander, au mangier.
Dont estes vous ? Qui vous a assis ?
Eusl. Desch. Poës. MS=^. p. 464. col. 3.
Comme il est ordinaire qu'en buvant et mangeant
l'on soit assis, défendre aux taverniers et cabare-
tiers d'asseoir, de faire asseoir, ou donner à s'as-
seoir avant et après certaine heure, c'étoit leur
défendre de donner à manger et à boire avant
et après cette même heure ■< Taverniers, depuis
" que couvrefeu sera sonné en l'église de Paris,
" ne pourront asseoire, ne traire vins en leurs
te maisons à beuveurs. " (Ord. T. II, p. 3.55.)
« Nul ne pourra aller es tavernes et cabarets pour
« y boire et manger... durant la messe parochiale
« et vespres, sur encheoir en... amende, tant ceux
« qui y seroient trouvez, comme l'hoste et Ihos-
« tesse que les assiroient. >< (Coût, de Hainaut, au
nouv. Coût. gén.T. II, p. 71.)
Rien de plus fréquent dans notre ancienne langue
que l'usage de ce verbe avec le pronom personnel,
pour signifier s'asseoir, prendre séance. « Les
« tables furent mises... et il s'asistrent. Li sires les
« fist aler aseoir, et la dame s'assist au chief de
« la table. « (Rom. de Dolopathos, ms. de N. Dame,
n" 2, fol. 57.) Mais dans ce passage qui prouve l'an-
ciennelé de l'acception encore usitée de notre verbe
s'asseoir, on voit que sans pronom personnel,
asseoir étoit de même signification. Peut-être fau-
droit-il lire asseoir, au lieu d'asseor, en cet autre
passage où il s'agit de l'adoration des Mages ? « Li
« troi roi ki vienentjai, ne mies solement devers
« occident, por flsseo/' ensemble (1) Abraham, Ysaac
« et Jacob. » (S'-Bernard, Serm. fr. mss. p. 118.)
Probablement, c'est par allusion à l'idée de repos,
cessation de mouvement, signifié par le verbe
asseoir, s'asseoir, que ce même verbe, pris subs-
tantivement, aura désigné la cessation accidentelle
du mouvement d'un corps qui tombe ; un repos.
(1) Avec.
AS
— 260 —
AS
une cessation de mouvement, telle que seroit celle
d'un gant jeté en l'air, sur un bataillon assez épais
et serré pour en arrêter la chute à terre.
François qui la bataiUe reuvent (1),
De toutes parties s'esmeuvent.
Chascun conroi, lente aleure,
S'en va joint comme en quarreure ;
Si bien que s'un gant preissiez,
Et entr'eus haut le gelissiez,
Il paroist qu'à son asseoir
Ne deust mie test cheoir.
G. Guiarl, MS. fol. 345, R'.
C'est par extension de cette même idée de repos,
à celle d'une position fixe et stable, que le verbe
s'asseoir a signifié s'établir, se fixer dans un lieu :
« Pour ce que... Juyfs et Juyfves... sont de telle
• condicion qu'il n'ont pais ne lieu propre aucun
« en toute chrétienté où il puissent demourer,...
« se ce n'est de la propre et pure licence et volenté
« du Seigneur... soubz quiilsevouldroientasst'o/»',
« pour demourer souz eulz, comme leurs subgiez,
« etc. » (Ord. T. 111, p. 471.) « Nous Thiébaut
« escuier... avons franchi Hersant... et avons
« encore ([uitlé et quittons an Seigneur à qui elle
« se donra, ou dessouz qui elle se asserra, ou ma-
« riera, tout le droit... que nous avons. » (D. Car-
pentier, suppl. au Gloss. lat. de du Gange, au mot
Asselare; tit. de 1293.)
Au figuré, se fixer à un avis, comme dans le pas-
sage suivant ; à moins qu'on ne dise que se assei-
rent est une faute |)ours(^ assen tirent. « Les com-
« paignonsdela Table ronde., demandèrent l'ung
« à f autre t|ue ils feroient : et monseigneur Gau-
« vain deist;... donnons à celluy qui a vaincu, en
« signe de victoire, ceste couronne de laurier ; et
« se asseirent tous. » (Lanc. du Lac, T. III, fol. 38.)
On exprimoit toutes idées relatives à celles d'éta-
blir, de fixer, lorsqu'on disoit figurément : asseoir
jour pour une chose ; asseoir rentes de conils, en
fixer l'évaluation en argent ; asseoir «/i échange,
un partage, une loi; asseoire une cause, une
affaire devant un Juge, etc. « Oblatiuns faire, e sacri-
« fieras jurs asis e par la Lei establiz. » (Livres des
Rois, Jis. desCordel. fol. 1.) ^ Quia rentes de conils,
" le connil se assit pour douze deniers. » (Coût, de
Bourbonnois, au nouv. Coût. gén. T. 111, p. 12'28.)
'< Noz remenl par ceste pez loz les demaenes que
<' iceli Herveu avoit o Bosic; li an douant
« égnnge an noire terre demaene au Plogaslel, au
« dit monsignor Salomon... et Ermallon de Tre-
« gurn... qui devent, sur les choses que iceli Her-
« veu le vodra apprécier, Yasseir léaument, ausi
« ben por celi llerveu coine por noz. » (D. Morice,
preuv. de lllist. de Bretagne, T. 1, coi. 984; tit.
de 1262.) « Furent pris bones gens por les parties
« asseoir ; et bien apertque les parties furent faites
« au grei monsignor Renaut;... et de celé terre qui
<« li fu assenée et asisse por sa partie, reçut mesire
« Renalz, les homagcs. » (Duchesne, Hist. de la M.
de Bar-le-Duc, p. 30; tit. de 1249.)
. . . Teils est la loi asise.
Ke la feme soit conquise
Pues K'elle ait l'ome conquis.
Clians. fr. ilS. de Btrne, n' 389, pail. I, fol. 98, R'.
... Je V fis par leal jostice
Qui esl estaljlie et assise
Par tote la terre le Roi.
Rom. de Peiceval, MS. de Berne, o- 354, fol. 2G6, V col. 2, et 267, R* col. 1
En portant une cause, une affaire dans une Cour
de justice, on l'y établit de façon que le juge puisse
fixer les droits ou les torts respectifs des parties.
De là, on aura dit : ■■ Se il avenoit que... tançon fût
« entre eulz,... et le fait et tançon soit tel... par
» <iuoy homme ou femme en doie recevoir mort,
<' nous voulons que il soient recreus par pièges,...
« pour estre à droit assise par devant le Prévost,...
« et d'ilecques par appel, par devant les autres
•< juges. » (Ord. T. III, p. 574 et 575.) » En la Court
« de céans, s'est assis un procès entre les héri-
« tiers, etc. » (.\rest. amor. p. 203.)
Dans un sens moins figuré, asseoir une fille,
c'étoit l'établir, fixer son état en la mariant. « Quant
« le Duc vit que... sa fille ne se vouloit déporter
« d'aimer Gérard, il se pensa en lui-mesme qu'il lui
" donneroilîi mariage, en lui semblant que mieulx
« ne povoil estre assise. ■» Gér. de Nevers, part. II,
p. 22 et 23.) On établit quelqu'un, on fixe son étal,
en fixant ce qui doit lui être assigné en teries, eu
rentes, ou en autres choses. De là on aura dit :
« Livreisunli asist; si Tout à tut son vivant. » (Livres
des Rois, MS. des Cordel. fol. 154.) Suivant Vasise,
l'état de la maison du roi Salomon ; « à suu pestrin
« furent chascun jur asiz. nuef cenz muis de flur
« deliéemenl buletée,e dise uil cenz muis de farine
« de altre baillie ; e à sa quesiue furent asis chas-
« cun jur dis bues gras de guarde, e vint ki veneient
« de la cumune pasture ; e cent multuns, estre (2)
'< la veneisun. » (Ibid. fol. 83.) « Por quatre-viiis
« livrées de terre, lesquelles je devoye rtssfo/;' à...
« mon Signer Thomas de Coucy, etc. » (Duchesne,
Hist. de la M. de Bar-le-Duc, p. 28; tit. de 12'i3.)
« Les trois mile livrées de terre que .lehan auroil
« assises, ou devroil asseoir à lluet, etc. •» (Hist. de
la M. de Chastillon, p. 56 ; tit. de 1246.) « Qui assit
« rentes de terres, il faut qu'il baille les deux par-
« ties en bleds, et la tierce en deniers. » (Coût, de
Bourbonnois, au Nouv. Coût. gén. T. 111, p. 1127.)
Cent sospirs fais chascun jor ;
C'est ma rente assise,
Et le bien que j'ai d'amours.
Ane. Poël. Fr. MSS. avant 1300, p. 45.
La signification de ce même verbe asseoir cessoit
d'être figurée, lorsqu'on disoit, asseoir une chose
en or et en argent, pour l'y fixer en fenchàssant ;
d'oîi fou auradit d'une couronne d'or en laquelle
étoient enchâssées des pierres précieuses, qu'elle
en étoit assise. (Voy. Livres des Rois, ms. des Cord.
fol. 55.)
Li Clerc de Rouen son cuer pristrent,
Qu'en or et en argent assistrent ,
Con se ce fust un saintuaire.
G. Guiart, MS. fol. 52, V.
(1) Demandent; en latin, rayant. — (2; Hors; en latin, extra.
AS
201 -
AS
Asseoir sa main, pour la fixer, la tenir dans une
position fixe : « Arc de quoy arcliier doit traire à
. fust, doit estre plus doux et moins fort que...
« celuy de quoi on tire à veue.... 11 ne peult asscoli'
« sa main, ne tenir ferme, se l'arc est trop fort. »
(Modus et Kacio, impr. fol. 42. — Ibid. ms. fol. 70.)
Asseoir le dé, pour le fixer en larrètaut, en le
rompant (1) ; peut-être aussi en fixer la position dans
le cornet, en jouant sans l'avoir remué.
Hoche le dé ; ne l'assia mie.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 235, V col. 1.
Encor ne vos poez tenir
De dez changer et asxeir.
Fabl. MS. de S'-Germ. fol. K, R- col. 3.
Quant on ne fait sa volenté,
Si dit c'en li assiet le dé.
Ibid. ubi supra.
. . . Diex fet-il, j'ai là six.
Va, si te pent ; tn l'as astis.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 235, V col. 8.
Lorsqu'en donnant un baiser, la liouclie se fixoit,
on disoitque le baiser éfoit bien assis. " Geste dame
« sera tenue.... de donner à son amy... demy dou-
• zaine de baisers bien assis, et dont chascun
« d'iceulx pourra durer autant qu'on mettroil à dire
« un De profundis. » (Arest. amor. p. 203.)
On élendoit l'acception d'asseoir , mettre dans
une position fixe et stable, à toute espèce de ma-
nières de poser les choses, de les déposer, de les
disposer, en disant : Asseoir une couronne sur la
tète de quelqu'un ; asseoir une herbe sur sa plaie ;
asseoir l'orifiamme dans un trésor; figurément
asseoir la vérité dans une histoire ; asseoir des
tables pour manger ; asseoir des étaux dans un
marché ; asseoir pieds et mains pour bien danser,
etc. (Voy. Livres des Rois, ms. des Cordel. fol. 55. —
Rom. de Perceval, .vs. de Berne, n° 35i, fol. 265. —
G. Guiart, ms. fol. 30. — Idem. fol. 201. — Fabl. ms.
du R. ir 7615, fol. 147. — Jean de Sainlré. p. 172.
— Ord. T. V, p. 512. — Danse des Aveugles, etc.)
C'est dans le sens général de poser, qu'on disoit
asseoir le guet, asseoir une embusche, etc. « Lesdits
« clers dudit office de clergie de guet... asserront,
« mestroiit, et envoleront ledit guet des gens de
« mestier, es lieux, etc. ■> (Ord. T. III, p. 670. —
Voy. Rob. Estienne et Mcot, Dict.)
Si l'on a désigné la saisie du fief d'un Vassal, en
disant que le Seigneur asseyait sa main, c'est sans
doute relativement à l'idée de poser la main sur
une chose pour s'en saisir. « Il n'est loisible au
« Seigneur féodal d'asseoir sa main\2), n'empescher
« le fief de son Vassal décédé, jusques à quarante
« jours après le décez de son dit Vassal. » (Goût, de
Troyes. au Goût. gén. T. I, p. 414. — Voy. Laurière,
Gloss. du Dr. Fr.)
En termes de fauconnerie, on disoit d'un oiseau
de proie bien posé sur ses pieds, qu'il étoit « ne
" trop haut assis, ne trop bas. » (Modus et Racio,
MS. fol. 109. - Ibid. fol. 135.)
On observera qu'en ce dernier passage, le parti-
cipe ass/'s désigne une idée de proportion, de jus-
tesse, de convenance qu'exprimoit en général le
verbe asseoir dans le sens de disposer. On faisoit
l'éloge d'une bouche bien proportionnée, en disant
qu'elle étoit bien assise. (Voy. Ane. Poët. Fr. mss.
avant 1300, p. 1140.)
La signification d'asseoir étoit relative à des
idées de convenance, de proportion en naissance
et en fortune, lorsqu'on disoit :
Si j'estois fix à Roi,
S'asserics vous bien à moi.
Fabl. MS. du R. n" 7989, fol. 75, V- col. 2.
Il semble que dans un sens relatif à une idée de
justesse dans le coup d'œil et dans le mouvement
du bras, ce même verbe asseoir ait signifié toucher
eu visant juste, adresser, toucher droit où l'on vise.
Quoiqu'il en soit, dans les joutes ou dans les com-
bats à la lance, courir sans asseoir, c'étoit courir
sans adresser, sans toucher. « Le Ghevalier esclave
" se trouva mal armé de sa venue, et lui fut advis
« qu'il courroit sans asseoir, et pourroit faire per-
« dre le temps aux autres coureurs. ■■ (Mém. d'Ol.
de la Marche, Liv. II, p. 555.) On disoit du Ghevalier
qui avoitété louché, qu'il étoit assis; que la lance
même de celui qui avoit adressé, étoit assise « Si
« assemblerons desdictes lances une fois, et assis
« d'icelles lances, ou non assis, chascuns estera sa
« large à part luy, et prendra sonespée sans ayde. »
(Monstrelet, Vol. I, fol. 7.) « Ils dévoient faire armes
« à cheval , d'abondant de lances et d'espées; c'est
•< à sçavoir l'un contre l'autre; chacun d'une seule
« lance, fust assise ou non. » (Mathieu de Coucy,
Hist. de Gharles VII, p. 555.)
Dans l'imposition des tailles, des charges publi-
ques, on doit garder certaine proportion (jue sem-
ble désigner le verbe asseoir, lorscjue dans le sens
imposer, on dit asseoir les tailles, les gabelles, etc.
Quelque usitée que soit cette acception figurée
d'asseoir, on ne diroit plus d'un homme imposé à
la taille, qii'ily est ass/s.(Voy. du Gange, Gloss. lat.
T. I, col. 778.) « Ceux qui voulurent deinourer
« dedans la ville, leur convint bailler caution, clia-
« cun en droit soy, de payer ce de quoy ilsseroienl
« assis. " (Monstrelet, Vol. I, fol. 274.)
Encore aujourd'hui , la préséance indique une
supériorité que signifioit le verbe asseoir dans le
sens général de préposer. « Tôt avant obéisse en au
'< commandement de l'Abé, et as personnes qui par
« lui sunt assises. » (Règle de S'-Benoit, ms. de
Bouhier, p. 93.) On a la preuve que faire du haiilf
assisiS), c'étoit affecter une supériorité tyrannique.
« Où sont les traistres... qui en celle forest veulent
<• faire dit haut assis ? Sire,... nous vous les mons-
« trerons.... Quant Passelion vit les six Ghevaliers
« qui tenoienl le peuple en leur subjection, etc. »
(Percef. Vol. IV, fol. 133.)
Enfin, s'asseoir entour, comme on lit d ".ns les
(1) Rompre le dé, c'est le brouiller avant qu'on ait vu ce qu'il porte, (n. e.) — (2) Main a ici le sens de puissance, de
même que dans main-morle. (n. e.) — (3) Il vaudrait mieux donner à cette expression le sens de haute assise , haute
justice. (N. E.)
AS
262 -
AS
Fables d'Esope, ms. du R. ir 7989, fol. 181 ; ou se
mettre dans une position propre à environner son
ennemi, à l'entourer, c'étoil l'asseoir.
Rommainz à granz oz les assisirent,
Souvenles foiz sus leur coururent :
Mes onc tant grever ne les surent,
C'un seul d'eus s'en daingnast remambre.
G. Guiart, MS. fol.UO, R*.
Gent asfiise se doivent bien tenir ordenée.
Buenon de Commarchis, MS. de Gai^nal, fui. 19G. R" col 1.
En asseyant, en posant son camp devant une
\'ille, un château, on l'entoure, on l'environne; ou
du moins on se met dans une position propre à y
enfermer l'ennemi. De là, le verbe asseoir, de
même signification qu'assiéger. » Là prirent consel
« et s'accordèrent d'aler Andrinople aségier.... Si
« murent et alerent aseir Andrinople. » (Chron.
d'Outremer, ms. de Berne, n" 113, fol. 156.) « Sal-
« manasar... vint en terre de Israël, si asist le rei
« Osée, sil prisl. » (Livres des Rois, ms. des Gordel.
fol. 142.)
A Rome vindrent, si Vassistrent ;
De plusieurs pars le siège pristrent.
Rom. de Brut, MS. fol. 23, V- col. i.
. . . Quant uns Rois a ennemis,
De primes les va assnoir,
Gaster lor terres et ardoir.
Lucidaircs, MS. de Gibert, fol. 7, V'.
CONJUG.
Acist (s'), ind. prêt. S'assit. (Fabl. ms. du R.)
Aisist, ind. prêt. Fit asseoir. (Anseis, fol. 1.)
Aséront, ind. fut. Assiégeront. (Ibid.)
Aserra, ind. fut. Assiéra. (Duchesne, hist. de G.)
Aserroit, subj. imp. Assiéroit. (R. de Perceval.)
Asidrerit, ind. prêt. S'assirent. (Hist. de la fête de
la Conception, ms. de la Clayette.)
Asiet, ind. prés. Assiège. (Anseis.)
Asis, partie. Fixé. (Livres des Rois.)
.4sJse«<(s'), ind. prêt. S'assirent. (Fables d'Esope.)
Asisse, partie, fém. Assise, fixée. (Duchesne, His.
de la M. de Bar-le-Duc, p. 30.)
Asist, ind. prêt. Assit, fixa ; assiégea. (Livres des
Rois, MS. des Cordel.)
Asistrent, ind, prêt. Assirent, posèrent. (Livres
des Rois, MS. des Cordel.)
Asitreiit, ind. prêt. Assiégèrent. (Yillebardouin.)
Asseivent (s'), ind. prêt. 'S'assirent, se fixèrent.
(Lanc. du Lac, T. 111, fol. 38.)
Asseiront, ind. fut. Assiéront. (Ord. T. \, p. 186.)
Asseist (s'), subj. imparf. Qu'il s'assît, se repo-
sât. (G. Guiart, ms. fol. 143.)
Assera, ind. fut. Assiéra, fixera. (Rec. de Perard,
p. 518, lit. de 1269.)
Asseric:i, subj. imparf. Siêriez , conviendriez.
(Fabl. MS. du R. fol. 75.)
Assevra (s'), ind. fut. S'assiéra, se posera. (Gace
de la Digne, des Déduits, ms. fol. 92.)
Asserre':,, ind. fut. Assiérez, poserez. (Fabl. ms. du
R. fol. 137.)
Asserront, ind. fut. Assiéront, poseront. (Ord.
T.l, p. 186.)
Assesint {s'), subj. prés. Qu'il s'asseye, se repose.
(Ane. poës. Fr. ms. du Vatican, fol. 126.)
Assiroient, subj. imp. Feroient asseoir, donne-
roient à asseoir. (Nouv. Coût. Gén. T. II, p. 61.)
Assis, partie. Posé, fixé ; assiégé. (Rom. de Brut,
ms. fol. 109.)
Assist, ind. prés. Assiège. (G. Guiart, fol. 84.)
Assist, ind. prêt. Assist, posa ; assiégea. (Rom.de
Perceval, fol. 237.)
Assistrent, ind. prêt. Assirent, posèrent. Assié-
gèrent. (Liv. des Rois, ms. des Cordel. fol. 46.)
Assit, ind. prés. Assied. Coût, de Bourbonnois, au
Nouv. Coût. Gén. T. 111, p. 1228.
VARI.4NTES :
ASSEOIR. Orth. subsist. - Rom. de Brut. MS. fol. 109.
Aseir. Ane. Poët. fr. MS. du Vatican, n» 1490, fol. 85, V».
AsEoiR. Fabl. MS. du R. n° 7615, fol. 105, V» col. 1.
AsiR. Pli. Mouskes, MS. p. 97.
ASSEIR. D. Morice, preuv. de l'Hist. de Bret. T. I, col. 984.
AssEOR. S'-Bernard, Serm. tr.'MSS. p. 118.
AssiR. Ord. T. V, p. 512.
AssoiR. Borel, Dict. — Laurière, Gloss. du Dr. Fr.
AssoiRE. Ord. T. II, p. 355.
Assereiner, verbe. Rasséréner. Du verbe simple
sereiner, rendre serein, que l'on trouve dans les
Essais de Montaigne, au sens propre, et au figuré
dans les Poésies de Loys le Caron, s'est formé le
composé assereiner, de même signification que ras-
sénérer qui vieillit, et dont l'ancien usage, ainsi
que celui d'assereiner (1), est attesté par le Dict. de
Cotgrave. (Voyez Serei.ner.)
VARIANTES :
ASSEREINER. Cotgrave, Dict.
AsEREiNER. Oudin, Dict.
Assérement, subst. 7nase. Crépuscule du soir.
Telle paroil être la vraie signification d'rtssc'rÉ'meyif,
que D. Carpentier présente comme une allêration
d'assettremeiit, en le définissant siiretê donnée de-
vant un .luge. (Voy. Suppl. Gloss. lat. de Du Gange,
T. IV, col. 50.) C'est avec raison que dans le Glos-
saire latin-françois (2) qu'il cite (ibid. T.l, col. 1196);
le mol erepusculum est traduit en ancien franyois,
par ajournement ou par assérement; puisqu'en
latin ci'epusculum signifie le commencement du
jour ou de la nuit; l'ajournement, le crépuscule du
matin, ou Vassérement, le crépuscule du soir.
(Voy. AssÉRiR.)
Assérer, verbe. Affirmer. En latin asserere.
(Oudin, Dict. — Voy. Asserrer.)
Assergentir, verbe. Assujettir, obliger.
Du participe latin serviens, qui dans la basse lati-
nité a désigné un sergent, un vassal obligé et sujet
à quelques services envers son seigneur féodal,
s'est formé l'ancien verbe françois assergentir ; et
l'on a dit, en parlant de l'homme obligé au travail,
assujetti h la mort par la désobéissance d'Eve et la
(l) Brébeuf, La Fontaine et Saint-Simon l'employèrent communément. On trouve au xiii' siècle, dans les chansons du
sire de Coucy : « Quand la saison del dous tens s'asseiire, Que biaus estes se rasraine et esclaire. » (n. e.) — (2) C«
Glossaire latin est le manuscrit latin de la B. N. 7692. (n. e.)
AS
263 —
AS
complaisance d'Adam, qu'il étoil asscrgenii sous
cette double peine. « La miséricorde perdit assi li
« home, quant Eve fut si ardans en son cuvise qu'il
« le(l) à lei mismes n'en espargnet, n'en à son baron,
« n'en à ses filz qui estoient ti avenir; anz les as-
« sergentit toz desoz horrible maldeceon, et desoz
« la necessiteit de mort. » (S' Bernard, Serm. fr.
Ms. p. 373. — Voy. Sergent.)
Asséri, participe, subst. adv. Soir. Sur le soir.
(Voy. AssKRiR.) Anciennement, on désignoitle temps
où le jour finit et la nuit commence, en disant qu'il
assérissoit, qu'il ensérissoiL C'est sans doute par
ellipse que le participe de ce verbe assérir, ensérir,
signifioit le temps où il est soir, le soir, la fin du
jour et le commencement de la nuit. « Estoitalez....
•> pour faire prendre nostre gent, quant il seroit
« enscrit. » (Villehardouin, p.'iO.) » Comme le sup-
« pliant, environ heure de Vanséry, eust envoyé
« pour lui, sur les murs de la ville de Reims, et pour
« la garde d'icelle, un jeune lilz,etc. » (2) (D. Car-
penlier, Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, T. II, aux
mots hora seralis, col. 70'J. — Voy. Enséree.)
Il est possible que pour signifier, sur le soir, on
ait dit à séri, comme l'attesie D. Carpentier, qui
cite le verssuivant, tiiéd'unechroniquemanuscrite
de Bertrand du Guesclin.
Lui sisiesme sans plus y entra à sert.
Suppl. Gloss. lai. de Du Gange, T. III, au mol sera.
De cette même expression à séri, peut s'être
formé un adverbe tel que asséri, et qui ait signifié,
sur le soir, comme dans ces vers :
Puis l'en ont mené tôt ainsi,
Céléement et a.-iiéri (3),
Tresqu'à une chambre soltive
Où ne manoit nule riens vive.
Parlon. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 151, R- col. 3.
VARIANTES :
ASSERT. Parton. de Blois, MS. de s' Germ.f. 151, R» col. 3.
Anséry. d. Carpentier, S. Gl. 1. de Du C. T. II, col. 7C9.
Enséuit. ViUehardouin, p. -iO.
Assérir, verbe. Faire soir. Rasséréner, calmer,
tranquilliser. (Voy. Assereuner et Asserisek.)
Dans le premier sens, on disoit :
Mes por ce qu'il voit asérir.
Cil s'entremet de lui servir ;
Et tôt droit à l'ostel lo moinne.
Fabl. MS. de Berne, n" 354, fol. 31 , R-.
Tote jor, jusqu'à \'a>isèrir,
Fu li Tornois devant la porte :
Qui gaaing i fist, si l'enporte.
Rom. de Perceval, MS. de Berne, n° 354, fol. 250, R" col. 2.
Ains Vassérir,
Verres voslre songe avenir.
Rom. du Roi Guillaume d'Angleterre, MS. du R. n' 6987, fol. 246.
En adoptant pour le mot séri, dans la significa-
tion de soir, l'origine hébraïque indiquée par
M. Gébelin (Etym. fr. col. 1)'J8), on pouroit dire que
faire noir est le sens primitif ô'assérir, et qu'on
semble l'avoir conservé à ce verbe, en disant :
La nuit, quant fu bien asséri,
Que moingnes furent endormi, etc.
Rom. de Rou, MS. p. 151.
La nuyt, quant bien fu euséri,
Que l'en devoit estre endormi, etc.
Rom. de Brut, MS. fol. 4, R° col. J.
Mais on croit qu'en ces deux derniers passages,
le verbe assérir, dans une signification relative à
celle de l'ancien adjectif séri, calme, tranquille,
silencieux, désigne f idée du calme et de la tran-
quillité de la nuit, et plus spécialement une idée de
silence dans cet autre passage :
Nus ne set pas les maus que sens
La nuit, quant je sui aséi-i.
Ane. Po«. Fr. MS. avant 1300. p. 1446.
C'est peut-être encore relativement à une idée de
calme et de silence, qu'il faudroil expliquer le sens
à'asséri, dans les vers où on l'a défini comme un
adverbe signifiant sur le soir. (Voy. Asséri.)
Au moins est-il évidemment prouvé que de l'an-
cien adjectif séri, de même origine que serein, l'on
a fait le verbe assérir, qui, soit au sens propre, soit
au figuré, signifioit rasséréner, calmer, tranquilli-
ser. (Colgrave et Oudin, Dict.)
Adont ly vens s'est abaissiés,
Encontinent est rapaisiez ;
Et la mer est toute assérie :
Plus n'y ot vent, ne lumerie.
Hist. des Trois Maries, en vers, .MS. p. 374.
Ainsy se sont lors asséries
La Chambrière et les deux Maries.
Ibid. p. 299.
VARIANTES :
ASSÉRIR. Rom. de Rou, MS. p. 151.
Ansérir. Rom. de Perceval, MS. de B. n» 354, fol. 250.
Asérir. Rom. d'Erec, MS. du R. n» 6987, fol. 292, V» col. 4.
Ensérir. Rom. de Brut, MS. fol. 4, R" col. I.
Ensiérir. Anseis, MS. fol. 67, R» col. 2.
Assériser, verbe. Rasséréner, calmer, rendre
coi, etc. (Voy. Assérir et Séri.) C'est dans le sens
propre et figuré tout-à-la-fois, que fon a dit, en
parlant de Louis IX : « El tens de son benoict gou-
<> vernement, les ondes d'assaus de toutes parz
« furent assérisiées, et turbacions nuisibles loing
« chaciées. « (Vie de S" Louis, p. 292.)
D'après l'indication de l'acception générale et
figurée de fancien adjectif séri, d'où s'est formé le
verbe assériser, altéré dans l'orthographe asségri-
ser (4), on conçoit par quelle analogie ce même verbe,
avec le pronom personnel, signifioit se tenir coi, et
probablement se taire, lorsqu'on disoit : « Le sup-
« pliant ne se pouvoit app:iiser ne assegriser du
.' meschief. » (D. Carpentier, suppl. Gloss. lat. de
Du Gange, T. I, col. 334 ; tit. de 1414.)
Quant il oirent la criée
Des pèlerins qui laiens érent.
Un petitet s'assérisérent :
Et dit li Leus, j'oi laiens gens.
J'irai veoir, ce dit Hersens.
Fabl. MS. du R. n" 7218, fol. 48, V col. I.
(1) Le représente divise, désir, (n. e.) — (2) Citation tirée du registre JJ. 171, pièce 479, de l'année 1421. (n. e.) — (3) Vers
7384, édition Crapelet, 1834, 2 vol. in-S". Au vers 3220, on lit: <i Tôt coiement et à sert », en secret, clandestinement, sans
bruit. Il y a dû avoir confusion entre sero et serenus, car on trouve aussi : La nuis est soes et série. » (Partonop.
vers 697.) (n. e.) — (4) Nous voyons ici un dérivé fort éloigné de secwus. (n. e.)
AS
— 264
AS
VARIANTES :
ASSÉRISER. Conf. du Renard, Fabl. MS. du R. fol. 48.
AssÉr.niBER, Assérisier. D. Carpentier, suppl. Gloss. lat.
de Du Gange, T. I, col. 334.
Assernienter, verbe. Prendre à foi et à ser-
ment. Lier par un serment. Jurer avec serment.
Anciennement, lorsqu'on faisoil un prisonnier,
on s'assuroil de lui en le prenant à foi et à serment,
en Vdssrrnientaiit ; et dès lors ce prisonnier n'eu
fon\o\l assprineii ter un autre; ou le serment qu'il
recevoit de son prisonnier étoit nul. suivant lesloix
de la guerre. « Les prindrent et asscrmentérent de
« nouvel, et disrentque ceulxqui les avoient asser-
« mentez, n'avoient point de puissance; car depuis
« que ung homme a donné sa foy, il ne peut plus
« prendre la foy d'un autre. » (Le Jouvencel, ms.
p. 506.) " Quant aucun prent ung prisonnier, il lui
0 fait ceste grâce de le recevoir à la foy; il lui
'< donne la vie.... Pour ce ne peut le prisonnier
« assermenter homme ne porter armes, tant que
« son maistre l'ait quicté de sa foy. Depuis qui) a
« donné sa foy à son maistre, il est esclave et son
« serf, pour faire de lui toujours à son plaisir. »
(Ibid.) Les prisonniers que l'on faisoit, s'ils n'étoient
pris à foi et à serment, s'ils n'étoient assermentés
sur le champ de bataille, devenoient les prison-
niers du Capitaine de la ville où on les assermen-
toit. « Ainsi furent adjugez, l'un àl'hommed'armes
« de Crathor; c'est assavoir celluy qu'il avoitrtssf?*"-
« mérité... hors les barrières : et celluy qu'il eust
« assermenté dedans la ville, fut adjugé au cappi-
« laine de Crathor : et pour ce n'oblient pas les
« compaignons A' assermenter leurs prisonniers,
« quant ifz.vont aux champs, s'ilz font que saiges. »
(Ibid. p. 3.-J1.)
En Justice, pour s'assurer d'un témoin, et l'obli-
ger à déposer la vérité d'un fait, on le prend à ser-
ment. C'étoit la signification A' assermenter ,
lorsqu'on disoit de ce même témoin , qu'il étoit
assermenté par un Juge; qu'il étoit assermenté
d'une chose sur laquelle on le prenoit à serment.
« J'entre par fois en pensée, qu'il puisse assez bien
« convenir à un Théologien, à un Philosophe, et
« telles gens d'exquise et exacte conscience et pru-
« dence, d'escrire l'Histoire. Comment peuvent-ils
« engager leur foy sur une foy populaire?.... Des
» actions à divers membres, qui se passent en leur
« présence, ils refuseroient d'en rendre tesmoi-
« gnage, assermentez par un Juge. » (Essais de
Montaigne, T. I, p. 136 et 137.)
Assermenté de la mellée,
Nous declaira à haute voix
Qu'il en diroit sa ratellée;
Et fist serment de plaine entrée,
Qu'il congnoissoit les personnaiges,
Tant la Simple, que la Rusée.
l'oes. de Coquillarl, p. 408.
La pièce d'où ces vers sont tirés, est un badinage
assez ingénieux, intitulé l'Enquête d'entre la Simple
et la Rusée. Probablement, c'est par allusion à l'an-
cien usage des serniens sur les châsses des Saints,
que ce Poëte du xr siècle. Officiai de l'église de
Reims, aura dit d'un des témoins dans l'E'nquête,
qu'il étoit assermenté sur un crible, pour désigner
la frivolité de son serment.
Assei-menlé sur un crible,
Respondit : que homme ne bouge.
Vous orrez une droite bible ;
Et déposa chose impossible.
M. ibid. p. 101 et 102.
On disoit d'un homme que le serment lioit à un
autre, qu'il lui étoit assermenté. (Juvenal des
Ursins, Hist. de Charles VI, p. 218.)
Enfin jurer avec serment l'exécution d'une chose,
c'étoit Vassermcnter. (Cotgrave et Oudin, Dict.)
Ainsi l'on disoit, jiromesse assermentée. Epithètes
de M. de la Porte. (Voy. Sermenter.)
VARIANTES :
ASSERMENTER. Pasquier, Pech. L. VI, p. 572.
AsERMENTER. Le Jouvencel, MS. p. 351.
AssERMANTER. Monet, Dict.
Asserrer, verbe. Affermir. Serrer, retenir.
Assembler, amasser. (Voy. Enserrer et Serrer.)
On observera qu'en hébreu, en chaldéen, en
arabe, les verbes qui signifient ceindre, lier, ont
une analogie remarquable avec le verbe laimserare.
d'où le frânçois serrer^ et les composés asserrer,
enserrer. (Voy. Ménage, Dict. étym. — Gébelin,
Etym. fr. col. 1007.) On ajoute que cette même ana-
logie semble indicative d'une identité d'origine et
d'acception entre serare et serere pris dans le sens
de nectere. (Voy. Vossius, Elym. ling. lat. p. 467.)
Peut-être (\vCassérer (l)en françois, comme en latin
asserere, n'a signifié affirmer, que parce qu'affir-
mer une chose, c'est en quelque façon l'affermir,
comme dans le sens propre on affermit une chose
physique en la retenant par un lien, en la serrant.
(Voy. AssÉRER et Asserter.) La grâce affermit la vertu
de l'homme et la rend méritoire; d'où l'on aura dit
figurément :
Or lui faut vertu enquerre.
Et grâce de Dieu e.'iquerre
Qui mérites lui asserre,
Par qui il puisse conquerre
Ceulx qui le viennent surquerre.
Al. Cliarlicr, de l'Espérance, p. 384.
Quelque vraisemblable que puisse être l'analogie
ci-dessus indiquée, on ne réunit ici assérer que
comme variation d'orthographe du verbe asserrer,
de même origine que serrer, en latin serare. C'est
relativement à l'idée d'une chose qui échappe et que
l'on veut retenir, qu'on a dit figurément : « Si par
« quelcque désastre s'est santé de vos seigneuries
» émancipée,.... la puissiez-vous incontinent
« rencontrer. En bonne heure de vous rencontrée,
" sus rinslant soit par vous assérée, soit par vous
" vendicquée, soit par vous saisie et mancipée :
« les loix vous le permettent. » (Rabelais, Liv. iv.
Nouv. prolog. p. 30.) C'étoit probablement dans un
sens non moins figuré, qu'eu parlantde Juges rete-
nus par la difficulté de prononcer sur un fait, on
(1) Assérer vient du latin a,swre/'(irfl. (n. e.)
AS
- 265
AS
disoit qu'ils en étoient enserés. (Voy. Assises de
Jérusalem, ch. cclxxxvu et cclxxxvui, p. 901 et '202.)
En serrant plusieurs ctioses les unes avec les
autres, en les retenant par un lien, on les assemble
on les amasse. De là l'accepLion figurée du verbe
asserrer dans ces vers :
Regardons bien comment on fait la guerre.
Est-ce à bon droit, et pour garder sa terre '
Non pas tousjours ; mais plus pour se venger
Pour moins que rien Gens d'armes on asserre, etc.
Trionl|ilics do la noble Dame, fol, 34, V.
En ta verdeur, plaisir donques asserre;
Puis tu diras, si vieillesse te serre,
Adieu le temps qui si bon ha esté
Par seule amour.
Clém. Marot, p. 291.
VARIANTES :
A.SSERRER. Al. Chartier, de l'Espérance, p. 384
AssÉRER. Rabelais, Liv. iv, nouv. prolog. p. 30.
Asserter, verbe. Essarter. Serrer, retenir.
Il est évident qu assorfer, dans la Coutume de
Troyes, est de même significMtion qu'assarte?- dans
les Loix d'Angleterre. « Soit enquis de mesme le
« boys combien chescune acre vault par an pour
« tenei- à boscage, ou pour assarter, ou pour cur-
« tiver. » (Britton.) .< Accreues de bois joignans, à
« bois et foresls.... ensuyvent la nature et condition
" desdils bois et forests...; lesquelles accreues le
« seigneur peut faire assorter, quand bon luy
« semble. » (Coût, de Troyes.) En marge, on li't
escharter. (Voy. Essauter.)
Mais, quelque décisive que puisse être l'autorité
de Launère et de Du Cange, on doute qu asserter
soit, comme assorter et assarter, une vari-tion
d'ortbographe du verbe essarter, dans la Coutume
de Berry : « Les fermiers et accenseurs des vignes
« seront tenus de provigner par chacun an, encha-
« cun arpent d'icelles, de quatre-vingts provins
« pour le moins ; et les faire bien labourer, coupper
« et tailler en temps dut : asçavoir, les deschausser
'< tailler, marrer et asserter dedans le quinzième
« jour d'Avril, et biner en Mai, de sorte, etc »
(Goût. gén. T. II, p. 341.) Peut-être qu'en cette Cou-
tume, asserter les vignes, c'étoit les échalasser
Dans celte supposition, asserter, formé du participe
assertiim. auroit un sens relatif à celui de serrer
retenir par un lien, affermir.
Au reste, asserter est le même que serrer dans
le Dictionnaire de Cotgrave, à moins qu'on ne dise
que c'est une faute d'impression, et qu'on ne lise
asserrer (1). (Voy. Asserrer.)
VARIANTES :
ASSERTER. Du Cange, Gl. lat. T. III, col 205
Assarter. Britton, des Loix d'Angleterre, foi 184 V°
Assorter. Coût, de Troyes, au Coût, gén.' T. i, p. 4231
Asserteui-, subst. mase. Qui affirme son droit •
qui allermit celui d'un autre. Qui tient ferme pour
son droit, ou pour celui d'un autre ; en latin asser-
tor, de même origine qixassertuvi, participe du
s4nVÎLle"si^tef di?;i^h^?qu^^fir^^^^^ ^-'-'e fautive j'un copiste,
c'est travaiUer à la marre (/,cie'^?.)"îahouTdésViS^^^^^ entrelacer, et vent du lafn serUan, guirlande. yiL-er,
34
verbe flss^mr. (Cotgrave, Dict. —Dict.de Trévoux
au mot assertion. - Voy. Assérer et Asserrer.) '
Assertion, subst. fém. Affirmation ; Confirma-
tion. Significations relatives à celles du verbe .4sse-
rer, atlirmer une chose, laconfirmerpardes raisons
qui en prouvent la vérité avec plus ou moins d'évi-
dence. (Cotgrave et Oudin, Dict.) Comme la simple
assertion n est souvent rien moins (lu'une preuve
on disoit qu'elle étoit une affirmalion douteuse!
« ^ a légation des deux acteurs si très-renommez
" ^?^\ f'i^." suffire encontre la seule assertion,
« cest-à-dire affirmation douteuse. » (J. Le Maire,
Illustr. des Gaules, L. II, p. 262.) C'étoit une asser-
tion de parole, insuffisante pour prouver la vérité
d une chose. Le Roi Jean, par son Ordonnance du
-iii décembre 13o5, défendit que les Capitaines des
compagnies de Gens d'armes fussent reçus à « faire
« monstre par assertion de parole. « a iXulz ne
« sera doresnavanl receu à faire mouslre par
" cedule, ou par assertion de sa parole ; mais sera
« chascuns tenus desores-mais de faire monstre
■' armée. » (Ord. T. III, p. 35.)
Véez la condempnacion
Du Peuple, à l'acercion
D'un faulx et faint messagier.
Eust. Desch. l'uês. MSS. p. 101. col. 2.
Ce mot assertion, en latin assertio, dont on se
sert encore en style de pratique, et comme terme
didactique, n est plus guère en usage. (Voy. Asserer.)
VARIANTES :
ASSERTION. Orth. subsist. - Oudin et Cotgrave, Dict.
AcERciON. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 101, col. 2.
Assertivement, adverbe. Avec affirmation •
avec confirmation. (Voy. Assertion.) « Dist et con-
« tessa vrayement et assertivement, etc. » (D. Car-
pentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Cange, au mot
assertive, tit. de 1409.) . Le Philosophe parfaict,
" tel qu est frouillogan, respond assertivement de
" tous doubtes proposez. » (Rabelais, T. III, r. IGO
— ^oy. Cotgrave et Oudin, Dict.)
Asservagir, verbe. Asservir ; obliger. Cotgrave
Oudm, Rob. listienne, Nicot et Monet, Dict —
voy. Servage.)
Asservir, verbe. On peut voir Gebelin (Etym.
Ir. col. 1008), sur l'origine de ce verbe, qui subsiste
avec la signification des anciens verbes asservaair
et ussergentir.
Il paroit qu'on exprimoit une idée relative aux
obhgalions d'un père et d'une mère envers leurs
eiifans. lors(iu'on disoit qu'ils étoient asservis d'en-
lans. (Coût, de Cambresis, au Coul. gén. T. II
p. 84C, elc.) « Une personne asservie d'enfant de
" mariage précèdent, ne peut par testament legater
« plus avant que porte la faculté de ses biens ineu-
« blés, et acqiiesls faits en son vel'vé. » (Ibid
p. 8r)4. — Voy. E.nserver.)
AS
— 266 —
AS
Anciennement, la conjugaison à'asservir éloit la
même que celle de noire verbe simple servir.
CONJUG.
Assert, indic. prés. Asservit, oblige. (Eust. Desch.)
j^sscrre, subj. pr. Qu'il asservisse. (Eust. Desch.)
Asservent, ind. pr. Asservissent. (Tahureau.)
Asservisage, subst. inasc. Asservissement;
obligation. On disoit même d'un bien-fonds, que
l'on' obligeoit au payement d'une dette ou d une
redevance, que c'étoit un asservisage. (Cotgrave,
Dict. — Voy. AssEHVisER.)
Asserviser, verbe. Concéder sous obligation de
service, de redevance. Telle paroit avoir été la
signification à' asserviser, lorsqu'on disoif. « Terres
. lui ont esté asservisées au service annuel de
« douze deniers Viennois. » (D. Carpentier, Suppl.
Gloss. lat. de Du Gange, au mot asservisare, tit.
de 141'i. — Voy. Asservisage.)
Assès, participe et subst. masc. Subside établi,
fixé- impôt, droit imposé. Satisfaction, action de
satisfaire à ce qui est établi et fixé par une loi, par
un contrat, par une demande judiciaire. Demande
judiciaire en dommages fixés à certaine somme.
Il est possible que, relativement à l'idée de taille,
imposé à la taille, on ait vu dans aecismn, parti-
cipe du verbe latin rtt'c/dtTC, en françois tailler au
sens propre, l'origine du mot Accès, espèce de
subside. On craint néanmoins de s'être trop prévenu
pour une étymologiequ'a pu réaliser l'idée de tadle,
devenue nécessairement familière, lorsqu'en consé-
quence on a réuni Assès, comme variation d ortho-
graphe, sous ce même mot Accès. (Voy. Accès.) En
relisant la citation des Mémoires de Sully, T. XII,
p 478, où l'on trouve accès, impôts, tailles et
tributs, on seroit tenté de croire qu'impôts, tailles
et tributs sont l'explicalion du sens général d'.lcccs;
et que ce mot n'est lui-même qu'une altération du
participe isscs, qui par une ellipse semblable à celle
que Ton remarquera sous farticle Assis, a signifie
comme substantif, un subside établi, fixé ; un
impôt, un droit imposé par la loi, par la coutume,
ou par la raison qui le rend légitime. Au moins
est-il certain que dans les Annotations sur l'art, iv
du tit. Lxvui de la Somme rurale de Bouteiller, ou
l'on dit « coment treux, péages et assès furent mis
« sus, " ce mot Assès est rendu par le participe
pluriel féminin Assises, de même signification que
Assis. (Voy. Assis et Assise.)
On avoue qu'il paroit tout simple d'expliquer
.Issès comme variation d'orthographe de l'adverbe
Asseis, spécialement dans l'expression « faire asses
« à quelqu'un de ses damages. » Mais, en réfléchis-
sant que visses et ^sscssc, comme les participes
Assise et Assis ont signifié substantivement chose
imposée, chose établie, chose fixée, on soupçonne
que dans Britton (des Loix d'Angleterre), Asses pour-
roit être le même que .Isscssc dans les Tenures de
Littleton. Cette dernière terminaison, qui paroit
féminine, n'est d'aucun genre ; parce qu'en Anglois,
la distinction du genre masculin et féminin, est
nulle pour les participes comme pour les adjectifs.
D'ailleurs l'orthographe assessc, qui sembleabrégée
dans -Isses, n'est qu'imitative de la prononciation
siffiée du participe anglois ussessed, en françois
assis, fixé, imposé ; en latin assessHW. (^ oy. Assesse.)
En supposant donc que Asses soit le même que
Assesse, ce seroit comme participe, et non comme
adverbe, que ce mot pris substantivement auroit
signifié satisfaction, l'action de satisfaire à ce qui
étoit établi, fixé par les clauses d'une donation,
u Si ascun doun soit fait par plusurs condicions,
« li satisfaction soit faite à un des condicions, adon-
« ques ert le don estable, si les condicions soient
.. severales ; mes si eles soient joyntes , adonques
" covient fasses de toutes, à ceo que le purchas
.. soit estable. » (Id. ibid. fol. 94.)
Ce seroit par la même figure, suivant laquelle on
exprime la chose qui précède, pour rendre sensible
celle qui doit en être la conséquence, que Ton
auroit dit : i" " Faire asses d'une chose a un Sei-
gneur, " pour satisfaire à la justice de ce Seigneur,
en subissant une peine établie et fixée par la Cou-
tume ou par la loi. « Si il se mette en pays et se
. acquitte de la félonie, et cely que fait la suyt, eit
« mvs à veier que la chose chalenge soit la sue, et
« que ele lui fuit emblé hors de sa garde, adonques
<i luy coviendra respondre, et de faire «sses au Sei-
« gniour de la chose ; et soit le jugement tyel que
« le demandaunt recovere sa demaunde. » (Britton,
des Loix d'Angleterre, fol. 23.)
2° « Faire «sses d'un dommage, » pour satisfaire
à une demande judiciaire, par laquelle ce dommage
étoit fixé à certaine somme. « Si ascun délaye à tort
« de rendre dower, il est tenu de faire «sses a la
« femme de ses damages. « (Id. ibid. fol. 245.) _
Enfin, si l'on croit pouvoir rapporter a l idée
générale de chose établie et fixée par une loi, par
une donation, par une demande judiciaire, la signi-
fication d'Asses en ces divers passages, c'est qu une
donation, une loi que désignoit, comme substantif,
le participe féminin Assise, pouvoit, par la même
raison être également désignée par le participe
Ascs (Voy. Assi'sE.) Au moins a-t-on la preuve qu'il
a signifié demande judiciaire en dommages, parce
que les dommages étoient fixés à certaine somme
par le demandeur. « Le plus commun brefe de
» dower qui soit, si est le brefe de dower clos,
„ dount femme riens n'ad ; et pour ceo fan à com-
.. mencer de cel brefe, dount le count est tel. Ceo
„ vous monstre : A qui fuit la femme B que B fad a
.. tort deforcé la tierce party de launt de terre ove
,. les apurtenaunces, en tele ville, à ses damages
« de XL sols, et pour à tort que favaundit B, jadys
» son baron, de ceo luy dowa al huys de monster (1)
« le jour que il fesposa A ceo que est contenu
» en le brefe dount rien n'ad, purra le tenaunt
(1) A la porte de l'église, (n. e.)
AS
267 —
AS
« respondre que ele en ad party ; mes à ceo covien-
« dra distincte!' lequel la pleintife eyt resceu party
« de son dower avaunt le purchas del brefe, ou
« puis. Car si puis,... jà par taunt n'est le brefe
« abatable ; car ele purra dire que del surplus fuit
« fait son asscs; et si ele receust party avant te
« brefe purchacé, donques est le brefe abattable. »
(Britton, des loix d'Angleterre, chap. civ, fol. 249.)
Assesse, partie, et subst. Imposé, fixé ; imposée,
fixée. Satisfaction, action de satisfaire à une peine
imposée, fixée par la loi. On peut voir sous Asscs la
raison pour laquelle le participe Assesse , assessed
en anglois, en françois assis, imposé, fixé, n'est pas
plus féminin que masculin. Si l'on disoit au fémi-
nin que, pour un fieffataire à qui étoit imposée la
charge de payer une rente à un étranger, telle
rente n'étoit pour lui qu'une peine assesse; on
disoit de même, au masculin, (|ue le fieffataire
défaillant de payer au jour fixé ne payoit point au
jour assesse. « Si feoffement soit fait sur tiel con-
« dicion que... le fefïée payra al feoffor, al tiel jour
« enter eux limit, xx livres; et s'il faite de
« paier les deniers i^ le jour assesse, etc. » (Tenures
de Littlelon, liv. III, Sect. 336, fol. 76.) « Si home
'< enfeoffa un auter sur condition que il et ses hei-
» ros rendront à un estrange home.... un annuel
« rent de .« sols,... tiel rent n'est fors que une
0 peine assesse h le tenant. » (Id. ibid. Sect. 345,
fol. 79.)
C'est par ellipse et dans un sens analogue fi celui
d'.lssc's, satisfaction, action de satisfaire à ce qui
est établi et fixé par la Loi, ([ue l'on a dit figuré-
ment : « Ceux queux fuent en Cymiterie ou Eglise,
« puys s'en vont saunz fayre Vassesse, etc. » (Carta
magna, fol. 90. — Voy. Assés et Assesser.)
Assesser, verbe. Asseoir , fixer , imposer. Du
latin assessuin, participe du Verbe assidere, dont on
a fait les verbes Asséer et asseoir, avec l'acception
figurée ù' Assesser en ce passage. « Il est encounter
•< reason que si tort soit fait h un home, que il de
« ceo serra son judge ;... car pai' tiel voy s'il avoit
« damage fors que al value d'un maile, il puissoit
« assesser et aver pur ceo C sols, lequel serroit
« encounter reason. « (Tenures de Littlelon, Liv. II,
Sect. 'il'i, fol. .46.) L'identité de signification des
verbes assesser et asseoir est évidente dans les pas-
sages suivans. « Si home parle généralement d'Es-
" cuage, il serra entendus... d'Escuage non certain,
« qui est service de Chivaler... L'Escuage... est non
« certain pur ceo que n'est certain cornent le Par-
« liament asséra l'escuage... Quant Escuage est
•i tielment assesse per àuthoritie de Parliiiment,
« chescun Seigniour de qui la terre est tenus par
« escuage, etc. » (Id. ibid. Sect. 98, 99 et 100. —
Voy. Assesse.)
Assesseur, subst. masc. Espèce d'Officier de
Judicature. de Conseiller, Espèce d'Officier de Ville.
Anciennement les Assesseurs n'étoient pas, comme
aujourd'hui, des Officiers de judicature, des Juges,
des Conseillers créés en titre d'office ; mais des
hommes versés dans l'étude des Loix, que les
Baillis, les Sénéchaux et les Prévôts, gentilshom-
mes, et presque toujours ignorans, choisissoient
pour les guider, les représenter même, dans l'exer-
cice de la Justice qui leur étoit confiée. « Li Bailli
« ou li Prévost, quand ils en ont mestier pour leur
« essoine, pueent (ère Assesseurs. Chil sont appelé
« Assesseurs qui représentent la personne dou Bailly
« ou dou Prévost, en fezantleur office ; mes bien se
« doivent prenre warde li Bailli et li Prévost quiex
« gens il metent en leur lieu, quant il n'i pueent
« astre. Car se il mesfesoient, chil qui les i aroit
« mis, en .seioient blasmés et li Assesseurs meisme
« pugni. » (Beaumanoir , Coût, de Beauvoisis,
chap. I, p. 14.) On peut voir dans Bouteiller, (Som.
rur. Liv. II, lit. 2, p. 667,) quelles étoient les fonc-
tions de ces Officiers de judicature, de ces Conseil-
lers nommés Assesseurs, parce qu'ils siégeoient en
place des Baillis, des Sénéchaux, des Prévôts; ou
seulement parce qu'ils siégeoient, qu'ils s'asseoient
auprès d'eux, et les assistoient au jugement des
causes et procès. Dans ce dernier cas, les Asses-
seurs ne jugeoient point ; ils n'étoient que les Con-
seillers des Juges. On peut donc avoir eu raison de
dire que les Assesseurs, avant d'avoir été créés en
titre d'office, •< n'estoient du nombre des Magistrats
« et Officiers; ains certains hommes versez en
« droict ou praclique, que le Magistrat appelloit au
« conseil. » (Voy. Bouteiller, ubi supra, Annot.
p. 691.)
C'est sans doute relalivement à la même idée de
siéger en place d'un Officier, de le remplacer dans
ses fonctions, que certains Officiers de ville ont été
désignés par le mot Assesseurs, altéré dans Acces-
seur, en latin Accessor. (Voy. D. Carpentier, Suppl.
Gloss. de Du Cange, T. I, col. 33, tit. de 1454.) « De
" contribuer aux tailles et impos.... se veulent
« exempter les aucuns, pour ce qu'il dient estre ou
« avoiresté Capitouls, Sindics, Trésoriers, ou Aeces-
« seurs,.... ou autres Officiers de villes. » (Ord.
T. VII, p. 452.)
VARIANTES :
ASSESSEUR. Orth. subsis. - Nicot et Monet, Dict.
AccEssEUR. Ord. T. VII, p. 453.
Assessoriat, subst. masc. Office d'Assesseur.
(Cotgrave, Dict. — Voy. Assesseur.)
Assévération, subst. fém. Affirmation, En
latin Asseveratio. (Voy. Assévérer.)
Assévérer, verbe. Affirmer. En latin Asseve-
rare, verhe qui, dans le sens étymologique, signifie
severè dicere. (Voy. Martinius, Lexic. philolog. —
Vossius, Etym. ling. lat.— Gebelin. Dict. étymol. de
la Langue latine , au mot Severus.) Il semble en
effet qu'on ait voulu exprimer une idée de sévérité
philosophique, lorsqu'on parlant de Platon, l'on a
dit : « Quand il fait le Législateur, il emprunte un
« style régentant et assévérant ; et si y mesle har-
« diment les plus fantastiques de ses inventions,
« autant utiles à persuader à la Cohimune, que
AS
268 —
AS
« ridicules à persuader à soi-même. » (Essais de
Moiitaiprnc. Liv H, p. 3'2i et 325.)
PeiU-èlic Irouvera-t-oii plus naturelle l'étymolo-
gie d'après laquelle on expliqueroit le verbe latin
asscvcrare, dans un sens relatif à l'idée de verum
asserere? Dans la Coutume de Saintonge, lit. m,
art. XXX, K asse'i'cVe?' un contrat en jugement, » c'est
comme on lit plus bas, art. xxxni, affirmer par ser-
ment qu'il contient vérité, en affirmer la vérité.
« Quand quelqu'un a vendu... aucuns biens immeu-
« blés,.... le parent du vendeur... peut venir au
« retrait, en payant le sort principal dans la hui-
« taine, après que l'acquéreur aura.... exhibé et
« assévéré son contrat en jugement. » (Nouv. Coût.
gén. T. IV, p. 88i.) « Dans huitaine à compter
« auroit exhibé et assévéré son contrat, et jusqu'à
« l'exhibition et assévération, le Seigneur, etc. »
(Ibid. p. 883. — Voy. Assevkration.)
Assevir,tv^)'ô<'(l). Achever, finir, rendre parfait,
faire parfaitement. Satisfaire parfaitement, faire
avoir satisfaction parfaite, combler. (Voy. Assevisse-
MENT.)
En se figurant une chose, soit physique , soit
idéale, comme ayant un chef, un point capital
auquel finit l'accroissement et commence la perfec-
tion de cette chose, l'on aura dit qu'elle étoit ache-
vée, pour signifier qu'elle étoit finie, qu'elle étoit
parfaite. Telle étoit l'acception du participe eschavi,
eschevi, assevi, lorsqu'on disoit en parlant d'une
femme :
Ai tos jors de mon fin cuer araé
La grant, la trente, la belle, Veschavie.
Ane. Po6l. fr. MSS. avant 1300, p. 1129.
Plus bêle est cent tans que ne devis.
Ses très biaus cors, li gens, U eschevis
Me plait tant que, etc.
Ibid. p. 693.
En parlant d'un lévrier dans ces vers :
Granz ert, et forz, et escheviz,
Et beax, et genz, et bien formez, etc.
Parton. de lilois. MS. de S. Germ. fol. 165. V" col 1.
On a dit proveibialement : « Tex commence, qui
« ne peut assevir. « (Voy. prov. rur. et vulg. ms. de
N. Dame, N. 2, fol. .12.)
On désignoit une chose imparfaite, en disant
qu'elle n'éloit « de tous points assevie. » (Voy. Eust.
Desch. Poës. mss. p. 75.)
Ainsi assevir une chose, c'étoit l'achever, la faire
parfaitement, la faire de manière qu'il en résultât
une satisfaction parfaite.
. . . Tout droit pris mon chemin ay,
Pour bien mon voyage assevir,
Et aussi pour ma dame veir.
Machaul, MS. fol. 178, V col. 1.
... De fin cuer ai loialement ameit ;
Onkes amors où j'avois fiance,
Ne m'asevit riens de ma volentei.
Chans. Fr. MS. de Berne, n* 389, part. Il, fol. 30, R*.
L'acception du verbe Assevir, altéré dans esche-
vir, eschavir, est si évidemment la même que celle
d'Achever, que si l'existence de ces variations
d'orthographe (2i nous eût été connue, lors de la ré-
daction de l'article AciiEvta, on les y auroit réunies,
même celles d'assovir (3) et assouvir, comme étant de
même signification et sans doute de même origine.
« Quand le Roi ot assouvi la forteresse du bourc
« de .laphe, il s'en partit. •> (Joinville, ms. p. 292.)
« Ensi lu la convenance faite et assovie, et la paix
a faite des Grex et des Francs. » (Villehard., p. 156.)
Ay ceste euvre-cy à fin traitto.
Qui fu asouvie, et parfaitte, etc.
t'ontaines Gueriu, Trésor de Vénerie, p. 67.
Le beau soleil, père de vie,
Sa circonférence assouvie.
En passant par un chacun signe,
Justement un an y assigne
Et six heures, pour tout le compte.
J. de Meung, Reinoutrances de î<ature, vers 191-195.
Il est probable qu'une prononciation plus sonore
de Ye muet dans assevir, aura été l'unique cause
de l'orthographe assovir, d'après laquelle on se
sera imaginé qu'assovir, variation d'orthographe
d'assei^ir, étoit le même que notre verbe assouvir,
anciennement prononcé et écrit assovir. Il est vrai
que dans nos anciennes poésies, par exemple,
dans celles d'Eustache Deschamps, (p. 529, col. 4.)
les verbes assovir et assevir semblent être de
même signification ; mais, lorsqu'on a la preuve
que dans le sens d'asscvir, achever, on a dit
assovir, et même assouvir une forteresse, on en
saisit la différence, et l'on fait attention à ne pas
confondre l'idée de satiété, avec celle de satisfac-
tion parfaite qu'exprime le verbe assevir dans les
passages suivans: « Vostre doulce volenté seroit
« assevie, et laisseroie la volenté des autres. »
(Machaut, ms. fol. 185.)
Assevir puist toutes ses volentez.
Ane. Poët. Fr. MSS. avant 1300, p. 529.
. . . ,Te te promet ce tenir,
Que je te feray assevir
De ce dont yes en si grant double.
Macliault, MS. fol. 28, V° col. 2.
Enfin, avoir le cœur assevi de joie, et tout sim-
plement le cœur assevi signifioit avoir le cœur
parfaitement satisfait et comblé de joie. (Ane. Poët.
Fr. MSS. avant 1300, p. 693. — Eust. Desch. Poës.
MSS. p. 188.)
On disoil d'une personne comblée d'honneurs
et de tous les dons de la nature, qu'elle en étoit
assevie, parce qu'au figuré le comble de la satisfac-
tion est le point capital où finit la possibilité rai-
sonnable de l'accroitre.
.... Vostre chief, à toute gent agrée,
Blont com fin or; vairs oeulx, et les sourcils
Avez petits, la denture serrée.
Manette blanche com fleur de Us :
Et au surplus est vo corps assevis
De tous les biens qui sont en flour nouvelle.
Eust. Desch. PaSs. MS. p. 250, eol. 2.
(1) L'étymologie est adsequi, devenu adsequire à la basse latinité, où les verbes déponents avaient disparu. Le « se sera
consiinnifié, le q sera tombé, comme dans prosevere (proseipiere) , qu'on trouve dans les Formalœ Andeijavenses ; la
dérivation est donc adtetjuire, adseqvire, assevire, assevir. (n. E.) — (2) Ces variations d'orthographe viennent de différences
étymologiques ; achever vient de adcapitare, non de assequi. (n. e.) — (3) .Assovir vient du latin adsopire, endormir, (n. e.)
AS
- 269 -
AS
... De tout le bien qui peut estre
Par honneur, estoie anseviz
Et saoulés à mon devis.
Machaut, MS. fol. 186, R' col. i.
La réunion du participe saoulé, de même signi-
fication que assouvi, avec le participe assevi, dans
ces vers, semlMe très-propre à indiquer comment
assevi et assouvi, quoique d'origine différente,
peuvent avoir été sulislitués l'un à l'autre dans
nos anciennes poésies. On seioit même tenté de
croire qu'assevi étoit quelquefois une altération
d'assouvi, si l'on ne faisoit rétlexion que l'accep-
tion d'assevi peut être relative à l'idée de satisfac-
tion parfaite, même dans les passages suivans.
James nii huit (1) ne fussent asseviz
De regarder sa douce face tendre, etc.
Ane. Pofs. fr. MSS. avanl 1300, p. 307.
L'en ne pourroit peuple esrau retarder
Qu'il n'ait avant sa folour asfevie. etc.
Eusl. Dcsdi. Poés. MSS. p. 38, col. 1.
VARIANTES :
ASSEVIR. Ane. Poët. fr. MSS. avant 1300, p. 529.
ASEVIR. Chans. fr. MS. de Berne, Part, ii, fol. 30, R».
AsouviR. Fontaines Guérin, Trésor de Vénerie, p. 67.
AssoviR Villehardouin, p. 150.
Assouvir. Joinville, MS. p. 292.
EscHAViB. Ane. Poët. fr. JISS. avant 1.300. p. 1229.
EscHEVEB. Lett. de Louis XIL T. U, p. 246.
EscHEViR. Partoii. de Blois, MS. de S'-Germ. fol. 165, V».
Assevissenient, subst. 7nnsc. Achèvement,
Perfection. (Voy. Achevissance.) Signification analo-
gue à celle du verbe Assevir, achever, rendre
parfait. (Voy. Assevir).
Je ne puis trop longuement
Loer voslre douce figure.
En laquelle a fourni Nature
Tout son noble assevissenient.
Eust. Desch. Poès. MSS. p. 100, col. 2.
Asseuler, verbe. Isoler, réduire à être seul, à
être solitaire; éloigner des autres. De Tadjectif
seul, en latin solus, sur l'étymologie duquel on
peut voir Vossius, (Etym. Liiig. lai.) et-Couit de
Gébelin, (Dict. étym. de la Lang. Vr. col. 97G), on
a formé le verbe asseuler ou essculer, proprement:
isoler, réduire à être seul, à être solitaire. Il
semble qu'on ait dit en ce sens : " Le duc de
« Berrys'en alla en la comté d'Estampes, le duc
« d'Orléans à Bloys, le duc de Bourbon en Bour-
« bonnois ; et le duc de Bourgongne estoit en
« Bourgongne. Ainsi demouia le' duc de Guyenne
" fort esseulé du sang royal. » (J. le Fevre de
« S" Remy, Hist., de Charles VI, p. 78.) <■ Quant
« Gérard eut bieii advisé le chaslel, il fut moult
« esbahy que ce povoit estre d'une telle place
" ainsi asseullée, et que tout autour estoit gasté. »
(Gérard de Nevers, part. II, p. 54.)
Loes qu'estoie esseulés, m'enfermoie ;
Lors par semblant me trouvoie
Près de li tout abaubi.
Ensi mes maus à la fois entr'oubli.
Ane. Poet. Fr. MSS. avanl 1300, p. U2i.
Quant il est très-bien asseulé.
Et de chascun assez loingtains, etc.
Al. Charlier, Poès. p. 748.
On observera que dans ces vers, asseulé ou
esseulé paroit être le participe du verbe s'esseuler
ou s'asseuler, s'éloigner des autres, pour être seul
et solitaire. « Après ce que... Jehannot ot soupe
« avecques le gardien des moulins, se esseula et
« destourna. »'(D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de
Du Gange, au mot exsolare; tit. de 1382.)
Ma Dame s'esloit asseuléc,
Delès rosiers, près d'une alée.
Froissarl, Poès. MSS. p. 137, col. 1.
VARIANTES :
ASSEULER. Froissart, Poës. MSS. p. 137, col. 1.
Aseuler. Chans. fr. du xiii= siècle, MS. de Bouh. fol. 253.
Asseuler. Percetorest, Vol. 6, fol. 98, V» col. 2.
EssEULER. Ane. Poët. Fr. MSS. avant 1300, p. 1422.
Asseur, adv. el adject. Avec sécurité, en sûreté,
en assurance. Sûr, qui a une sûreté, une assurance.
(Voy. ASSEURER.)
On observera qu'en supprimant le substantif
Estât, l'on a pu dire d'une personne assurée de
quelque chose, qu'elle en étoit mise à seur, comme
on a dit qu'elle étoit mise en seur de cette chose.
(Voy. Seuiî.) Peut-être faut-il lire à seur, en sépa-
rant la préposition de l'adjectif, dans les vers
suivans où mettre aseur, signifie mettre en état de
sûreté?
Li Sire ot fait dedens ce mur,
Por sa femme mettre ascur,
Cambre ; sous ciel n'avoit si bêle.
Fabl. MS. du Roi, ri- 7989, fol. 49, V col. 1.
Quoi qu'il en soit, c'est sans doute par ellipse
que l'adjectif Seur, en latin securus, précédé de
la préposition à devenue inséparable, a signifié
comme adverbe, avec sécurité, en sûreté, avec
assurance. (Voy. Asseurte.) « Monseigneur Gauvain...
o se fist armer à grant haste, et tous les autres
« Barons aussi,.... comme ceulx q*ui n'estoient pas
« asseur de leurs vies. » (Lanc. du Lac, Vol. IJf .
fol. 141.) « Quant guerre estoit commencée entrj
« Gentixhommes, il laisoit à la partie qui vouloit
« estre asseurs, h requerre de quatre voies lequele
« que li plesoit. » (Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis,
p. 304.) « Si entrèrent enz, et s'i herbergiérent, et
« lors furent «sscîf?'. n (Villehardouin, p. 154.)
Vraisemblablement, l'orthographe aseiire esl une
faute dans ces vers :
. . . Chascune eut de la veoir si grant peur,
Que de long temps nulle ne fut asewe.
Faifeu, p. 37.
La rime exige qu'on lise aseur, comme dans les
vers suivans :
Tant eurent de peur.
Que la pluspart d'un moys ne fut aseur.
Ibid. p. 76 et 77.
Soubz bon pasteur, les ouailles sont asseur.
Poës. de J. Marot, p. 45.
L'inobservation des règles, pour le nombre et le
genre, dans la terminaison d'asseur en ces diffé-
rens passages, semble une preuve évidente que
l'on disoit adverbialement estre asseur, comme
parler asseur, dormir asseur, s'esbatre, se déduire
(1) Mes yeux.
AS
270 - AS
ttsseur, etc. « Envolèrent un Héraut dire à ceulx
« de la ville, comment Us estoient venus-lfi pour
» parler à la roine Racio, asseur. » (ModuselRacio,
Mss. fol. 290.)
Dame, fait-il, encor annuit,
Pourrois dormir tôt nsciir, etc.
Fabl. MS. du R. n* 7615, fol. 128, \ • col. î.
. . Se peust en honneur
ksbatre avec sa femme, asseur.
Rom. de la Uosc, vers 18978 ol 79.
Je n'aira pas mon mari del cuer plus que del coûte ;
Si me contieng vers lui que nule rien nel doute
Asseur me dédui, etc. ^^^ ^^ ^ __, ^^^^^ ^^^ ^^^ ^. ^^ ,
Hom qui famé a encore, coment auroit mesaise ?
C'est une médecine qui toz les maus apavse :
L'en i peut aussi estre asseur et a aise,
Commi plain poing l'estoup^s en une ardem fomaise.
Ce mot asseur est encore assez visiblement
adverbe en ce dernier passage : mais dans nombre
d'autres, on n'ose décider s'il est adverbe ou
adiectif « Noveles vindrent à Salahadin que le
« Roi de France et le Roi d'Angleterre estoient
a crolslés . por aler sus lui. Il n'en fut raie lies ne
. aseur. - (Contin. de G. de Tyr; Martene, ampl.
coUect. T. V, col. 62G.) « Sire, je ne suis pas bien
« asseur en ce lieu ; car l'en m y hayt. >. (Lanc. du
Lac, Vol. Il, fol. 5.)
Ne scay comment il est asseur,
Et qu'ose vivre sans peur.
Testament de J. de Meung, vcis 1337 et 38.
On a désigné, la sûreté qui naît d'une timidité
nrévovante, d'une défiance sage, en disant prover-
bialement : « Qui a peur, il est asseur. » (Cotgrave,
Dlct.)
. . Nus qdi soit en ceste vie.
N'est si preudon ne de tel estre,
^"^^Twii' '^'!^ H. n. 6987, fol. 3.3. V col. 3,
Quoiqu'en ces dernières citations, comme dans
une Infinité d'autres qu'on supprime, asseur puisse
être assez Indifféremment expliqué comme adverbe
ou comme adjectif, il est possible qu'on préfère a
seconde explication à la première, et que cette
préférence paroisse d'autant plus raisonnable, que
dans les vers suivans, aseure semble être le lemi-
iiln de l'adjectif composé aseur.
. . . Fu clos de chascun costé,
Si bien que toute créature
Puet estre dedanz aseure . , „^ , , „ „.
G. Guiarl, Mïi. fol. l6, R'.
Ce fémlnliî aseure pourrolt néanmoins être
adverbe, quelle que soll la raison de le croire
adjectif; car on a la preuve que, soit pour la com-
modité de la rime, soit par ellipse d'un substantif
féminin, tel que Situation, l'on a dit adverbiale-
ment mellre asseure, comme l'on disolt mettre
asseur. L'Amour personnifié, comparant la vertu
d'une femme que l'Intérêt domine, à une forteresse
que Vénus sa mère lui met asseure, dont elle lui
assure l'entrée après s'en être rendue maîtresse a
force d'argent, s'exprime ainsi :
Elle a prins mainte forteresse.
Qui coustoit bien mille besans,
Où je ne fu jamais presens.
Si le me mettoit on nsseure;
Mais je n'y entray en nulle heure ;
Ne ne me pleut oncques la prinse
De forteresse sans moi prinse.
Rom. de la Rose, vers 11340-11346.
On le répète ; il est souvent très douteux que le
mot asseur soit plutôt adjectif qu'adverbe, à moins
qu'il ne soit suivi, comme 11 l'estquelquefois, d une
préposition Indicative de la chose dont on est sur,
de laquelle on a une sûreté, une assurance : nulle
preuve cependant (ju'avec cette préposition 1 on ait
dit asseure au féminin, ni au pluriel asseurs.
C'est dans les variations d'orthographe de l'adjec-
tif seur, qui s'écrlvolt sceur, segur, que l'on trouve
la raison pour laquelle le composé asseur s est
écrit aseur, et peut-être asseeur ou asseeur. On
croit que c'est ainsi qu'il faut lire, au lieu û'asseeur
en ce passage: » Comme afin que chacun fust
« asseeur de sa chevance et peust chascun marchan-
« der seurement, alons fait faire bonnes monnoies,
« etc » (Ord. T. lll, p. 520.) « Fist tant qu'il fust
.. asseur des convenances que les Amiraus li avoient
« promises et jurées. •• (Contin. de G. de Tyr;
Martene, ampl. CoUect. T. V, col. 723.)
.... Cuers qui sent d'amours le point,
N'est mie tondis en un point,
S'asseur de joie ou de pâme.
M.ichaul, MS. fol. 23, R" col. 2.
VARI.\NTES :
ASSEUR. Fabl. MS. du Roi, n- 7'218, fol. 201, V».
AscuR. Contin. de G. de Tyr ; Martene T. V col. 626.
Aseur. Fabl. MS. du Roi, n° 76lo, fol. 128 V".
ASEURE. G. Guiart. MS. fol. 76, R». - Faifeu, p. 37.
ASSEEUR. Ord. T. m, p. 520.
Asseure. Rom. de la Rose, vers Uàiô.
ASSEURS. Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis, p. M*.
Asseur.ince, s«bs^ fém. Assurance, sûreté, sé-
curité; confiance, hardiesse, etc. parole, promesse,
caution, affirmation, promesse de fidehte, serment,
sauf-conduit, sauvegarde, etc. espèce de paix.
Ce mot asseurance qu'aujourd huil on écrit assu-
rance, et dont on a restreint l'acception, pouvoit
signifier toute cause active ou passive de sécurité,
tout moyen acUf et passif d'être en sûreté, en assu-
rance, comme il a signifié et signifie encore parole,
promesse, etc. confiance, hardiesse, etc. C est la
métonymie de l'elTet pour la cause « Il n y a rien
„ plus mal aisé à cognolstre, et ou il y ait moins
<■ d'rtss(;»)'«/uT, que le commun Peuple. » (Nicot,
Dict — Voy. Cotgrave, Rob. EsUenne, Monet, Dict.
Dlct. de Trévoux. — Dlct. de l'Acad. fr.)
Lv Rovs mande Girart paix, amour, concordance,
Et qu'il vienne vers luy par droitte assenurance.
' Ger. de Roussillon, Mb. p. 174.
On a dit, en parlant d'une ruse ordinaire au
cerf, lorsqu'il se sent moins ferme sur jambes, et
par conséquent moins capable de cette force de
vitesse dans laquelle 11 cherche sa surele : « Bien
,< souvent 11 fermera l'ongle., comine sU alloi
« A-asseurance; puis tout soudain il s efforcera, et
« l'ouvrira faisant de grandes glissées. » (Du l'ouii-
loux, Vénerie, fol. 40, V°.)
AS
— 271 —
AS
Après avoir indiqué la raison pour laquelle on a
pu nommer figurément asseunuice, une caution,
une affirmation, une promesse de fidélité, un ser-
ment, etc. on croit inutile de multiplier les preuves
de ces acceptions particulières. « Quiconque soit à
« qui succédera mon héritage après moy, soit con-
« traint jurer de devoir entretenir ceste liberté et
« le contenu en ceste charte, avant recevoir quelque
« asseurance ou serment des Bourgeois. » (Coût.
de Landrechies, au nouv. Coût. gén. T. II, p. 2G5.
— Voy. Cotgrave, Nicot, Monet, Dict.)
Quelque difîérens que fussent, pour le fond et
pour la forme, les actes judiciaires, par lesquels
les Officiers des seigneuries et des villes, ainsi que
les Officiers royaux, s'opposoientau penchant de la
Nation pour les voies de fait , ces actes étoient
néanmoins semblables, en ce que tous opéroient la
silreté de celui que la Justice aidoit à se mettre à
couvert de la violence. D'après cette idée générale
de sûreté, on aura quelquefois confondu les paix et
les trêves sous le nom d'asseiirances, et les asseu-
rances sous celui de trêves ou de paix. On croit
apercevoir une preuve de cette confusion dans la
Coutume de Tournay, oîi la paix, quoiiiue distin-
guée de l'asscHrajiff, semble en partager la déno-
mination. « Les Prevosts et Jurez, ex officio, peu-
« vent et ont accoustumé mander les manans qu'ils
" sçavent nourir haine et malveillance les uns aux
« autres, et à iceux donner la paix de la ville, leur
« dcffendant la voye de fait, sur peine de mort,
« bannissement, ou autre peine arbitraire Et
« au cas que les Parties soient absens, lesdits
" Prevosts et Jurez, quant il y a grand apparence
« decombat, sontaccoustumez, après icelles Parties
« appelle es, prononcer de leur office seur estât et
« asseuratice enive elles, et tous leurs parens, amis,
« allez, aydans, complices et adhérens, bastards et
«< autres, leur défendant la voye de fait sur
« confiscation de corps et de biens. » (Coût. gén.
T. II, p. 94G.)
S'il ne résulte pas évidemment de ce passage,
qu asseurance soit de même signification que paix
de la ville, au moins prouve-t-il <\\ie les tisseur ances
prononcées d'office étoient différentes de celles que
les Juges prononçotent à la réquisition de la Partie
qui craignoit la voye de fait. « Quant aucun craint
« eslre injurié ou outragé de son ennemy,.... est
« accoustumé de faire adjourner sommairement
<■ pardevant lesdits Prevosts et Jurez... celuy
« duquel il a double ou crainte, ou aucun de ses
« parens lignagers ou affins, et pardevant eux
« requérir qu'il jure asseurance pour luy et ses
« parens lignagers, affins, bastards ou légitimes,
« de non battre, outrager, injurier ou faire desplai-
« sir de fait... à sa Partie ou aux siens, à peine de
« mort, bannissement ou autre peine arbitraire ;
" lesquelles asseuranees l'adjourné est tenu de
« prestement accorder et jurer, comme est sa Partie
'< réciproquement tenue de faire. « (Coût. gén.
iibi supra. — Voy. Asseurement.)
Cependant, lorsqu'après avoir vu l'expression
Seur estât, employée comme synonyme d'Asseu-
rance, on lit ensuite que « seurs estais et paix de
« la ville, en quelsconques manières qu'ils ayent
>' esté donnez et accordez, se mettent... à néant du
« mutuel consentement des Parties principales,
« comme dit est des asseuranees, « on est bien
tenté de croire que réellement dans le sens de paix
on a dit asseurance. Au reste, la Coutume de
Tournay paroit indiquer une différence essentielle
entre cette asseurance prononcée d'office, et celles
qu'elle distingue des seurs estats et paix de la ville ;
lesquelles asseuranees, si les Parties n'en consen-
tent mutuellement la révocation en présence des
Prévôts et Jurés, « durent tant du vivant de ceux
« qui les ont accordées et jurées, que de leurs
« lignagers vivans au jour qu'elles auroicnt esté
« données. Quant à la paix de la ville, celle paix
« n'avoit lien que durant les vies de ceux ausquels
0 on avoit défendu la voye de fait. « (Voy. Coût,
gén. uhi supra.)
Probablement, c'est sans égard à la diversité des
usages coutumiers pour les Paix, Trêves et /1ss<?m-
rances, que Bouteiller, Jurisconsulte du xiv« siècle,
en a généralisé les effets, ainsi que les formalités.
Il y a différence, dit-il, à demander trêves, ou paix,
ou asseurance ; et lorsqu'elles sont obtenues, elles
diffèrent encore en ce que les Trêves ne durent
qu'un an et un jour; la Paix ou V Asseurance dure
à toujours. Mais quoique la Paix dure à toujours,
comme l'Assurance, il observe ensuite que » autre
« chose est de Asseurance, que de Paix qui se met-
« troit jus par nouvel cas sourdant, ou pour boire
« ou pour menger ensemble ; car pour boire et
" pour menger, ne pour communication, ne pour
« autre cas nouveau, l'Asscurancc ne se casse no
« abolisl que la peine ne soit tousjours criminelle,
" quiconques l'enfraint. » (Voy. Somm. Rur. Liv.l,
til. XXXIV, p. 232 et 234.)
On faisoil sans doute allusion à ces asseuranees
judiciaires par lesquelles la voie de fait étoit inter-
dite, en disant :
Li une partie et l'autre s'arme.
Sans entendre à asseuranees, etc.
G. Guiart, MS. M. 220, R-.
Une connoissance exacte des différences admises
par les diverses Coutumes du Royaume, dans la
nature et la dénomination de ces actes judiciaires,
peut être curieuse; mais on ne voit pas qu'elle soit
plus utile aujourd'hui qu'elle ne l'étoit dès le
XVI' siècle. Les voies de fait autorisées par plusieurs
de ces Coutumes, au mépris de la raison que récla-
moit eu vain un Jurisconsulte, contemporain de
Routeiller, et qui écrivoit sous le règne de Charles
VI, étoient enfin absolument proscrites en France.
Aussi Charondas, qui cite souvent cet ancien Pra-
ticien, dans ses Annotations sur la Somme rurale,
dit-il que commenter ce qu'a écrit Bouteiller sur
les Trêves, Paix el Asseuraiices, >• étuitdês-lorsune
» peine inutile, puisque les forcies d'armes apparte-
a noient au Roy. Toutefois, ajoule-t-il, on observe,
« quand il y a des menaces faictes par aucun, de le
AS
272 —
AS
« faire appeller en cas à'assritremntt pour eslre
« mis en la sauves;ardeclu Roi et de liiy ; afin d'évi-
« 1er que les Parties n'entrent en voye de faict,
« querelles et armes : du(iucl asseuremcnt et sau-
« vegarde peut co^noistre le Juge royal, mesnie-
« ment le Baillif. Senesclial, ou son Lieutenant qui
« préside en la Province, parce que c'est au Roy et
« à ses Officiers de conserver le repos et tianquil-
« litc entre ses Subjects. « (Bouteiller, Som. rur.
tit. XXXIV, Annot. p. 243. — Voy. Asseurement.)
VARIANTES :
ASSEURANCE. G. Guiart, MS. fol. 220.
AsÉGURANGE. Ane. Poët. fr. MSS. avant 13()0, p. 1233.
AssÉGURANCE. Ger. de Roussillon, MS. p 174.
AssÉGUBANGHE. D. Carpeiitier, Suppl. Gloss. lat. de Du
Cange, au mot Afisrrjuramenlum ; tit. de 1424.
Asseiiréeinent, adverbe. Assurément, en
sûreté, avec assurance, avec sécurité. Cet adverbe,
qui ne désigne plus aujourd'hui qu'une idée d'assu-
rance, fondée sur une parole ou promesse affirma-
tive, a désigné autrefois, non-seulement cette idée
particulière de sûreté, mais une idée générale de
sûreté, d'assurance avec laquelle on se confie en sa
force, en son courage, en la bonté de son armure,
en sa facilité de parler, etc. « David prist cunseil
. de noslre Seignur, s'il ireit encuntre les Philis-
« tiens Nostre Sires li respundi, alez-i bakle-
„ ment David s'enlurnad aseitrémcnt e les Phi-
« listiens... descunfit. » (Livres des Rois, ms. des
Cordel. fol. 4G.) « Quand ils véoient l'ennemy
« approcher d'eux trop asseuremcnt, et que sans
« se bazarder témérairement, ils luy pouvoient
■- donner quelque venue, etc. » (Du Bellay, Mém.
L. 7, fol. 219.) « De Bonnifacese trouva malflsse«-
« renient armé de la teste, pour combalre à pié. »
(Mém. d'Ol. de la Marche, L. i, p. 30i.)
. . . Montjoye avec toute silence,
Asseurimieid, comme au cas bien instruit,
Leur proposa le narré qui s'ensuit.
*^ J. Marot, p. 70et"l.
On a dit proverbialement, en parlant de l'homme
à qui sa pauvieté permet de vivre joyeusement, en
assurance et avec sécurité : « Asseiirémenl cbante
>. qui n'a que perdre. >> (Colgrave, Dict. — Voyez
ASSEUR.)
VARIANTES :
ASSEURÉEMENT. Cotgrave, Rob. Estienne, Nicot, Dict.
AsEURiMENT. L. des Rois, MS. des Cordel. fol. 119, R» c. 1.
AssEunÉMANT. Mouet, Dict.
AssEURÉMENT. Du Bellay, Mém. L. 7, fol. 220, R".
Asseurement, subst. masc. Sauvegarde, sauf-
conduil, caution, etc. Terme de pratique, délaisse-
ment. Terme de Coutume, espèce de Paix.
C'est relativement à une idée de sûreté, d'assu-
rance opérée par une sauvegarde, un sauf-conduit,
une caution, (|u'en ce sens on a dit asseurement.
(Voy. Colgrave, Dict.) Le roi Jean, établissant pour
Gardien et seul Juge des Juifs, Louis, Comte d'Etam-
pes, lui enjoint par ses Lettres du mois de mars
13G0, de leur faire « doner, et à cbascun d'eulx,
« bon et lovai asseurement, selon la coustume du
« pais. » (Voy. Ord. T. 111, p. 472.) i'ar Lettres de
Charles, son fils, datées du mois d'avril 1363, il fut
ordonné que les marchands et voituriers qui ame-
noienldes provisions ù Paris, « auroient bon et
« loyal asseurement, selon la coustume des pais,
« des personnes, desquelles ilslesrequiéreroient à
« avoir. » (Ibid. p. 031.1 « En Anlioche ne poroient
« il mie aler, s'il ï\'^\o\e,n\.\'aseurementAn Soutan
« de llalape, parmi cui terre il dévoient passer. »
(Chron. d'Outremer, ms. de Berne, n° 113, fol. 152.)
Cils li met certaine journée
Destre en sa court pour soi deffendre
De ce dont l'en le veult reprendre :
Mes asseuremcnt il n'envoie, etc.
G. Guiart, MS. fol. 56, V'.
Amender li covient, ains qu'il isse de cage,
Et bailler de l'amende asseurement ou gage.
Fabl. MS. du R. n" 1G15, fol. Ul, R col. 1.
C'est évidemment dans le sens de caution, que
l'on a dit : « Fist convenir ledit Escuier en la Court
« de l'Eglise de Tournay, en cas à'asseurement
« juratoire, pour lui donner plus de peine. »
(D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Cange, au
mot Assetiracio; tit. de 1375.)
Au second sens, on nommoit asseuremcnt dans
la Coutume de Metz, le délaissement d'un héritage
hypothé(|ué au payement d'une censé ou rente,
parce qu'au moyen de ce délaissement, le possesseur
de l'héritage procuroil la sûreté de la censé ou
rente, et se meltoit lui-même en sûreté contre la
poursuite du créancier hypothécaire, pour les arré-
rages échus, tant avant sa possession qu'après son
délaissement. « Le détenteur de l'héritage hypothé-
» que au payement d'une censé ou rente , est tenu
a personnellement et hypothéquairement des arré-
» rages depuis qu'il est détenteur, et pour les pré-
« cédents hvpothéquairemcnt Il se peut des-
« charger dès arrérages précédents et à l'advenir,
« en asseurant fhérilage qu'il possède Le seul
a asseurement ne dépossède point; et faut que
« celuy au profit duquel il est fait, se face conduire
« et rendre possesseur de fliérilage asseuré dedans
« l'an et jour, pour en déposséder le débiteur de la
« rente. » (Nouv. Coul. gén. T. II, p. 399.) Les
Ordonnances de Metz et Païs Messin ont pourvu :^
fabus que les détenteurs de pareils héritages
auroient pu faire de cette disposition de la Coutume,
en prononçant qu'ils « ne seront reçus à faire
» asseurement ne quitter la possession desdits héri-
« tages, qu'ils n'avent payé les arrérages... escheus
« de"" leur temps, et depuis la demande.... faite en
« jugement. » (Voy. Lauriere, Gloss. du Dr. Fr. au
mot Asseurement.)
11 paroit que la Paix nommée Asseuranee dans
quelques Coutumes et spécialement dans celle de
Tournay, ou Asseureté dans celle de Lodunois, a
été plu.s généralement connue sous le nom d'.lsse;.'-
rement. Quelque réelles que fussent les différences
établies entre Vasseurement, la paix, la trêve, la
sauvegarde, il y a lieu de croii e qu'elles ne furent
pas to'ujours exactement observées. En opposant
sans cesse la sauvegarde, la trêve et la paix à
Vasseurement, on les rapproclioit sans cesse ; et de
AS
— 273 —
AS
ce rapprocliement, ainsi que de l'habitude si natu-
relle d'assimiler les choses dont TefTet est à peu près
le même, sera résulté une confusion d'idées d'après
laquelle on aura dit assez indifféremment que la
sauvegarde, la trêve, la paix étoit un asscurement,
comme Vnsseuretnent étoit une paix, une trêve, une
sauvegarde. « Celuy qui est requis de bailler
" asscurement... est tenu de bailler ledit «sst'î/jY^-
« ment... et jurer de le tenir,... sur peine d'estre
« puny... selon la qualité de l'infraction dudit sauf-
» conduit ou sauvegarde. » (Coût, de Chaumont en
Bassigny, au Coût. gén. T. I, p. 441.) Quoi([ue
Beaumanoir, dans le Chapitre lx des Coutumes de
Beauvoisis, pose en principe « qu'entre gens de
« poole qui ne pueent guerroier, nules trives
« n'appartient, » il semble confondre la trêve avec
Xasseurcment dans le Chapitre lxi des mêmes Cou-
tumes, lorsqu'il dit : » Se il avient que aucun des
« houmes le Conte ait fet donner trives ou asseiire-
« ment à aucun de ses Sougiés, et le trive brisiée
« et li asseuremens, li Sire le doit fere apeler en se
« Court par trois quinzaines, se il est hons depooté,
« et puis par quarantaines... se il estoitapelés, etc. »
(Coût, de Beauvoisis , p. 304 et 310. — Voy.
ASSEIIRANCE et ASSEURETÉ.)
Que la distinction propre à Vasseurement ait été
négligée quelquefois, il n'en est pas moins vrai que
d'après les usages coutumiers attestés par Bouteiller
et Beaumanoir^ VAsseurement différoit essentielle-
ment de la Paix, de la Trêve, etc. Il y a différence,
disoit Bouteiller, entre paix, trêves ou asseurances,
la même chose que les asseuremens. (Voy. Som.
rur. tit. XXXIV.) La Trêve , selon Beaumanoir qui
écrivoit un siècle avant Bouteiller, » est une chose
« qui donne seurté de le guerre ou tans que ele
«■ dure ; et asseurementiidi pês confermée à tousjours
>■ par lorche de justiche. » On remarquera qu'il ne
fixe pas à un an et un jour la durée de la Trêve,
comme a fait Bouteiller. 11 dit seulement que la
Trêve est différente de Vasseurement, en ce que
« Trieves si durent à terme, et asscurement dure à
« tousjours. >> (Voy. Coût, de Beauvoisis, chap. lx,
p. 304.) Dans le chapitre lix, on lit : « Tout soit che
■■ que bons liens et fors de pès qui est fet par amis,
« et de pês qui est fête par Justiche, encore est li
<■ liens à'asseurcment plus fort. « (Ibid. p. 302.)
Aussi Vasseurement fut-il un des moyens par
lesquels on tâchoit de s'opposer au progrès de ces
vengeances personnelles, dont nos histoires,
entr'autres celle de Grégoire de Tours, et les Capi-
tulaires de Charlemagne et de Charles-le-Chauve,
attestent le barbare usage sous la première et la
seconde race de nos Rois. La fureur de ces ven-
geances s'étant insensiblement accrue sous la
troisième, à la faveur de l'anarchie féodale, OQ
nomma la voie de fait une guerre privée ; en
assimilant aux guerres d'une féodalité rivale et
ennemie, des guerres qui n'avoient souvent pour
objet que la vengeance d'un crime. « Coustume
o sueffre les guerres en Beauvoisins entre les
« Gentix-houm'es pour les vilenies qui sont fêtes
« aparans. » (Beaumanoir, Coût, de Beauvoisis,
chap. LIX, p. 300.) On trouve dans le chapitre suivant
la définition de ces vilenies. « Quant aucun fet
« avenoil de mort, de mehaing, ou de bateure, chil
« à qui le vilenie avoit esté faite, etc. » (Id. ibid.
p. 300.) On peut voir, ibid. chap. lix, p. 301 et 302,
quelles étoient, après la paix et Vasseurement, les
deux autres manières de faiie faillir ces guerres
privées, en les assujettissant à des loix que piîl
adopter une Nation chez laquelle on ne se croit
encore aujourd'hui bien vengé, qu'après s'être
exposé au danger de la vengeance.
La plus sage de ces loix (i), et la plus essentielle à
la sûreté publique, fut sans doute celle que nos
anciens Praticiens , Bouteiller entr'autres , ont
nommé la Quarantaine du Roi , ou la Quarantaine-
le-Roi, parce que c'étoit une Tivve de quarante
jours ordonnée par le Roi. A la faveur de cette
Trêve ou Quarantaine, les parens et amis de ceux
entre lesquels étoit survenue une guerre qu'ils
ignoroient, et à laquelle ils étoient néanmoins
obligés de prendre part, pouvoient se mettre en
garde contre les hostilités auxquelles les exposoit
celte même guerre. (Somme rurale, tit. xxxiv, p. 235.)
Avant cette Loi, dit Beaumanoir, « Trop mauvese
" coustume souloit courre en cas de guerre el
« royaume de France... Chil à qui vilenie avoit esté
« fête, regardoit aucun des parens de chaus qui li
« avoient fet le vilenie, et qui... ne savoient riens
« doufet ; etpuisaloient.... de nuit etde jour ; et si
« tost comme il le trouvoient, il l'ocioient ou mé-
« haignoient, ou batoient, ou en faisoient toute
« leur volenté, comme de chelui qui garde ne s'en
» donnoit... Et pour les grans périus qui en ave-
« noient, le bon roi Phelipe en fist un Establissement
■■ tel, que... luit le lignage de l'une partie etde
a l'autre qui ne furent présens au fet , ont par
'• l'Establissement le roy quarante jours de Tri-
« ves ;.... el par ces quarante jours ont les lignages
« loisir de savoir ce que avient en leur lignage , si
« que il se pueent pourveoir de guerroier, ou de
« pourcachier,4sse;nrH(rn/, Trives ou Pês. «(Coût,
de Beauvoisis, chap. lx, p. 306.)
Selon M. de Lauriêre, le bon roi Phelipe qu'en ce
passage Beaumanoir fait auteur de cette Loi, est
(1) Les baillis araient été institués par le roi pour combattre la féodalité ; ils créèrent d'abord les c cas royaux. » Toute
atteinte portée à la paix publicpie, même hors du domaine royal, était cas royal, et les baillis en connaissaient : on les voit
intervenir dans un fief, quand le seigneur laisse impunis les coupables. Les nobles étaient les premiers à troubler la paix
du royaume : 1» Par leur droit de guerre privée ; le roi n'abolit pas ce droit, mais il fait respecter une trêve de 40 jours
entre l'offense et les hostilités. Pendant cette quarantaine, le bailli intervenait; souvent on s'accordait sous sa médiation.
2» Des violences s'élèvent entre les nobles et les roturiers. Le roturier menacé se rendait prés du bailli et lui demandait de
se mettre sous la protection du roi. Le bailli faisait alors prêter au noble un serment à' asscurement , prêté sous caution ; le
seigneur, par là, s'engageait à s'abstenir de la violence. Les actes du xiu' siècle, qui Tit naître ces mesures^ confondent
rarement la quarantaine et Vasseurement. (N. E.)
II. 35
AS
274
AS
Philippe-Auguste qui étoit mort, (ce que désigne,
dit-il, le mot bon.l et non Pliilippe-le-Hardi encore
vivant, lorsque Beaumauoir finit son Ouvrage en
1283, deux ans avant la mort de ce Prince. iVoy.
Ordonn. T. 1. Observ. p. 46 et 47.) Mais est-il
impossible que le mot bon ait eu pour Beaumanoir
une signification moins rigoureuse que pour M. de
LaurieVe , et qu'il ait nommé Philippe-le-Hardi
encore vivant, le bon roi Phelipe? Ce Prince, sans
être le premier auteur d'une Loi que Beaumanoir
même nomme, quelques lignes plus haut, « l'esta-
« blissement(l) au bon roy Loois, » pouvoit l'avoir
renouvelée après la mort du Roi son père. M. Du
Gange, dans sa xxix' Dissertation sur Joinville, où
il traite des Guerres privées avec toute l'étendue et
la profondeur de son érudition, croit (|ue Beauma-
noir a voulu parler de Philippe-le-Hardi, et non de
Philippe-Auguste ; mais il attribue ni à l'un ni à
l'autre l'établissement de la Quarantaine , de la
Trêve de quarante jours. 11 se fonde sur une Ordon-
nance du roi Jean, en date du 9 avril i353, où se
trouve exactement rapportée la disposition de celle
de S' Louis, concernant les Guerres privées, pour
affirmer que S' Louis fut le premier auteur d'une
Loi à laiiuelle toute la Nation auroit applaudi, si
toute une Nation pouvoit être raisonnable. (Voy.
Rec. des Ordonn. T. I, p. 56. — Du Gange, Disser-
tations sur Joinville, p. 334.)
Durant la Trêve ou Quarantaine , par laquelle le
Souverain assuroitla personne et les biens de tous
ceux qui dévoient prendre part à une guerre com-
mencée en leur absence, et qu'ils n'avoient pas
provoquée, tout acte d'hostilité commis envers eux
avant l'expiration de cette Trêve, étoit une trahison
pour laquelle, dans le cas de mort, il y avoit peine
capitale. » Quant aucuns se venge de che que l'en
« li a meffet, à aucuns de chaus qui ne furent pas
'< au fet, dedens les quarante jours que il ont Trives
« par l'Establissement au bon roi Loois, l'en ne le
« doit pas appeler vengeance, mais traison ; et pour
" che, chil qui en cheste manière meffout,... se il i
« a houme mort, il doivent estre trainé et pendu,
« et.... perdre tout le leur; et se il n'i a forsba-
« teure, il doit avoir longue prison, et l'amande à
« la volenté dou Seigneur, etc. » (Goût, de Beau-
voisis, chap. lx, p. 306.)
Gette même Loi otîroit au Gentilhomme qui
répugnoit à partager les périls d'une guerre privée,
un moyen de s'affranchir dans l'espace de la
Quarantaine, d'une obligation à laquelle il étoit
assujetti par la Goutume. « LiGentil-houmechieent
« en guerre pour le fet de leurs amis, tout ne
" fussent-il pas au fet quant li quarante jours
« sont passés Et ne pourquant se aucuns se
« vient osier de le guerre, fere le puet.... se il fet
« ajourner ses amis... En leur présence et par
■< devant Justiche, il doit requerre qu'il ne soit pas
« tenus en guerre, si comme chelui qui est appa-
« reillié de forjurer chaus qui firent le meffet.
" Adonc le forjurement fet,... li Sires le doit fere
« asseurer, et en se personne tant seulement. »
(Goût, de Beauvoisis, ch»p. lix, p. 302.)
La Noblesse, impatiente du joug des Loix que
les successeurs de S' Louis continuèrent d'opposer
avec plus ou moins d'avantage au progrès de ces
guerres, réclamoit sans cesse et avec indignation
contre les Asseuremens auxquels elle se voyoit for-
cée, lorsqu'un gentilhomme croyoit ne pas se
déshonorer en recourant à la Justice pour les
obtenir. C'est sur une pareille réclamation de la
part des Nobles du duché de Bourgogne, desdiocêses
de Langres et Aulun, et du comfé de Forés, que
Louis X, par son Ordonnance du mois d'avril 1315,
leur octroya « les armes et les guerres, en la ma-
« niêre qu'ils en avoient usé et accoutumé ancien-
« nement. « (Voy. Ord. T. I, p. 559.) 11 est très
probable que ces Nobles prétendoient, ainsi que
ceux du bailliage d'Amiens et de Vermandois,
« guerroier les uns aux autres sans meffait, n'être
« tenus de donner trêves; ne contraint, se partie le
" requieroit.... à donner asségurement ;.... mais
« chevauchier, aller, venir et estre à armes en
" guerre et forfaire les uns aus autres, lautost après
« fait, ou défiaille aux presenz, ou aux absenz
■< après la quarantaine. » Le Roi, par une Ordon-
nance de la même année, en date du 15 mai, promit
de commettre deux personnes de son Conseil, pour
voir les registres de S' Louis, et savoir d'elles si la
prétention\le cette Noblesse étoit autorisée par les
anciens usages, et s'il devoit lui en donner Lettres.
(Voy. ibid. p. 364.)
Les Gentilshommes à qui la Goutume permettoit
de guerroier, ne pouvoient à la vérité être con-
traints à donner «sse!<?'e?wens, sans la réquisition
de l'une des parties qui se Irouvoient en guerre.
Mais avec cette réquisition, la Justice les y forçoit.
comme sans réquisition elle les foryoit à faire
paix, ou à donner trêves. C'est un principe cons-
taté par la Goutume de Beauvoisis et par les Eta-
blissemens de S'-Louis. « Li Quens ou li Roix, se li
" Quens ne le vient faire, puet contraindre les Par-
" lies à fere pès, ou ii donner trives ; mais de l'as-
« seuremenl se doivent-il souffrir, se l'une des
>' parties ne le requiert. >> (Beaumanoir, chap. Lrx,
p. 300.) " Se ainsint esloit que uns bons eust guerre
« à un autre, et il venist à la Justice pour li faere
« asseurer, la Justice le doit faere asseurer, puis-
■' que il le requiert. » (Ord. T. I, p. 129.)
On a vu qu'en requérant asseurement dans les
quarante jours de la Trêve ordonnée par S"-Louis,
on contraignoit son ennemi à le donner. Alors, s'il
exerçoit quelqu'acte d'hostilité au mépris de la
Trêve et de \' Asseurement, on pouvoit dire sans
confondre, comme on a pu le faire quelquefois.
(1) Lorsque Beaumanoir cite les Etablissements de S' Louis, il se rapporte aux ordonnances mêmes de ce prince, et nos
au recueil ainsi nommé. C'est une compilation d'un jurisconsulte qui a préféré demeurer inconnu, pour rendre son ouTrag»
Çlus célèbre, en le mettant sous le nom du roi. On le place en 1269, époque à laquelle le roi pensait plus à la croisade de
unis qu'à des lois nouvelles, c'est-à-dire difficiles à faire appliquer, (n. e.)
AS
— 275 —
AS
YAsseuremeyit avec la Trêve, qu'il étoit coupable de
Trêve enfrainte et d'Asscurement brisé. Dans les
Etablissemeiis de S'-Louis, Liv. I et II, chap. xxviii,
on lit : « Se aucuns donne asseiirement en la Cort
« le Roy, à aucun plaintif, et puis Vassenrement 11
« ait la'trive enfrainte et l'assf »;■?)« ('HMirisié, etc. »
(Ord. T. I, pag. 276.) Vers la fin du wi' siècle, après
l'abolition des anciennes formes de la Trêve et de
VAsseuronent, on dislinguoit encore V Asseurement
de la Sauvegarde royale, sous laquelle étoit mise
» la Partie appelante en cas d"flssc»)"fHiP?ii, quand
" aucun avoit faict menaces. » (Bouteiller, Som.
rur. tit. XXXIV, Annotations, p. 2i3. — Voy. Asseu-
RANCE.)
Comme la Justice, sans être requise par une des
Parties qui étoient en guerre, ordonnoit Trêves
entre Gentilshommes; entre Bourgeois et Gens de
poote, elle ordonnoit asseuremens. « Il avient sou-
" vent que merlées muevent entre Genlixhoumes,
« ou entre Gens de poote, et puis chacune Partie
« est si orgueilleuse, que ele ne daigne demander
" Trive ne Asseurement. }ilA'të....])Ouv Testablisse-
« ment au bon roy Loois,.... le Quens de Clermont
« et li autres Barons doivent fere penre les
c> Parties et contraindre les à donner Trives, se se
« sont Gentil-houme; et se se sont Gens de poote,
« ils doivent estre contrains à fere droit asseuve-
« ment. " (Coul. de Beauvoisis, chap. i.x, p. 30(i.)
Mais le Roturier ou le Bourgeois qui auroit demandé
la Trêve, ne l'auroit point obtenue.
Dans le cas où Gens de pooté avoient « méfait les
« uns aux autres de fait apparent, » la .Justice fai-
soit plain asseurement, si paix ne se faisoit entre
les Parties. (Coutume de Beauvoisis, ubi supra,
p. 304.) Le bourgeois, Vhomme de poote, pour se
garantir de la violence d'un Gentilhomme qui vou-
loit l'outrager, ou de la vengeance de celui qu'il
avoit outragé lui-même, n'aVoit que la voie de
y Asseurement, parce que, ditBeaumanoir, » guerre
« ne se pouvoit faire entre Gens de poote. et Gen-
<• tilshommes. » Qui requéroit Y asseurement en
pareil cas, devoit l'obtenir; « car seli Gentilhoume,
« ajoute Beaumauoir. lenoienl en guerre les Bour-
« jois ou chaus de poote, et li BÔurjois et cil de
« poote (1) ne povoient tenir en guerre les Gentix-
« houmes, ils seroient mort et mal bailli. » En
dédaignant le seul secours que leur olTroil la Loi,
ils métloient leur vie et leur fortune à la discrétion
des Gentilshommes qui dès-lors n'avoient rien à
redouter de la Justice, quels que fussent les excès
dont ils pouvoient se rendre coupables. (Coût, de
Beauvoisis, chap. ux, p. 300 et SOI.)
En général, les Guerres privées dont la Noblesse
étoit si jalouse, commençoient par voies de fait, ou
par paroles. « Guerre.... muet par paroles, dit
« Beaumanoir, quant li un manache l'aulre à fere
" vilenie ou annui de son cors, ou quant il le défie
« de lui et des siens ; et si muet par fet, quant
« chaude merlée (2) sourt en treGentix-houmes d'une
» part et d'autre. Si doit l'en savoir que quant ele
« muet par fet, chil qui sont au fet, chient en le
« guerre, si tost comme li fais est fais. « (Coût, de
Beauvoisis, chap. lix, p. 300.) Quoique la Loi cou-
tumière fût la même, lorsque la guerre commen-
çoit par menace ou par défi , il semble qu'à raison
de ce que « grans baras pouvoit avenir en tel cas, »
le Gentilhomme défié ou menacé pouvoit profiter
de la Quarantaine pour se mettre en état de défense,
comme en profitoit le Lignage qui n'étoit en guerre
qu'après que la Trêve de quarante jours étoit expi-
rée. « Se aucuns avoit espié son fet avant que il
« eust fet menaches ne défié, et après seur le fet
« manachoit ou déficit, il ne se pourroit escuser
« dou fet par tele menache ne pour tel deffiement.
« Doncques se doit souffrir que li défiés se puist
« garder et garantir; ou autrement.... devra estre
« justiciés se il meffet. » (Ibid. ubi supra.)
Quand nos anciens Barons s'accoutumèrent à res-
pecter la Loi souveraine qui contraignoit les Nobles
à faire Trêves, comme les non N blés à donner
asseuremens ; Loi qui, comme on l'a vu, faisoit aux
Chefs, aux Chevelaignes des guerres privées, un
devoir de V Asseurement, même pour les Nobles qui
le demandoient en Justice, on pût dire : « Guerre
" faut... par asseurement, si comme quant li Sires
« contraint les Parties chevetaignes à asseurer li
« un l'autre. « (Coût, de Beauvoisis, chap. ux,
p. 302.) Alors les asseuremens. non-seulement pré-
cédèrent, mais suivirent l'expiration de la Quaran-
taine. Lorsqu'on répugnoit à s'engager dans une
guerre, ou que l'on désiroit en finfr une déjà com-
mencée, on recouroit au Seigneur suzerain pour
être asseuré, et jugé en sa cour de Justice. (Voy.
Ord. T. III, p. 264, note. — Du Gange, Gloss. lat. au
mot Assecurare) Cette loi, si sage, est un principe
du Droit écrit. « Quand aucuns se doute, il doit
« venir à la Justice, et requerre asseurement, selon
.' Droit escrit. .. (Ord. T. I, p. 135.)
La foi des Asseuremens et des Trêves étoit si
sacrée, « qu'enfraindre ou briser ceux ou celle que
« les Parties pouvoient faire entr'elles par paroles,
« tout sans Justiche, n'emportoit menre peine que
« se le Triève avoit esté donnée, ou li Asseuremens
« de parle Roi. » (Voy. Coût, de Beauv. chap lvhi,
p. 295.) Mais dans le cas de Trêve enfrainte, l'in-
fracteur étoit le seul à qui la Loi s'en prenoit, tandis
qu'en cas d' Asseurement brisé, elle s'en prenoit
non-seulement à celui qui l'avoit brisé, mais à celui
qui l'avoit donné, quand même il auroit prouvé
qu'il n'étoit pas au fait, qu'il n'en étoil point com-
plice. « Asseurement a telle vertu que cis qui le
« donne, prent seur soi tout son lignage, fors que
(1) Poote peut venir de potesla, dérivé bas-latin de la première déclinaison, ou. de potestalem.iyi. E.) — (2) Merlée vient de
tnisculata, devenu misclala par la chute de n bref précédant la tonique; dans le groupe se, la deuxième consonne tombe,
et s se change en r, par un phénomène de rhotacisme, comme dans ele)nos(ii)>nt, transformé en ahnonie. Voir le traité de
M. C. Joret, de rhotacismo in indoeuropasis ac potissimum in germanicis linguis (Collection philologique in-8», p. p. Vieweg,
Paris, 1875). (,n. e.)
AS
276 —
AS
« chaus que il en puet mellre hors par reson; car
• il y a cliertiiines personnes qu'il en puet mettre
• liors, au [cTeVassctiremcnt » (Ibid. cIi.lx p.3(M.)
Il pouvoit excepter les parensqui, lors de l'asseu-
rement, ëtoient hors du royaume, et qui avoient la
liberté d'y revenir ; ceux qui en étoient bannis et
qui pouvoient être rappelés ; les bâtards même,
« pour clie qu'ils sont meu pai' amour naturel à
« aidier à leurs parens. » Cette précaution étoit
même insuffisante pour le soustraire à la peine à
laquelle l'exposoit un acte d'hostilité commis par
ces bâtards et ces parens exceptés de Yasseuremeiit.
Il devoit encore veiller à ce que pouvoit avoir à
craindre de leur part, celui qu'il avoit assci/re, et
lui en donner avis. S'il lui étoit_^ impossible de
réussir à les empêcher de lui mal faire, il devoit le
faire savoir à la Partie et au Souverain, et jiti'er
Sains sur qu'il n'avoit pu leuri'endre commun Vas-
seuremeni qu'il avoit donné ; autrement il étoit puni
comme coupable à'asseurement brisé. (Voy. Coût.
de Beauvoisis, tibi supra, p. 304 et 305.) Beauma-
noir a distingué certràns cas où la Justice devoit
prononcer qu'une Trêve étoit ou n'étoit pas en-
frainte, qu'un Asscurcment étoit ou n'étoit point
brisé. (Voy. Ibid. p. 307.) Lorsque Paix succédoit à
un Asseurement, la çaix l'anéantissoit ; et si celui
qui avoit été asseuré prouvoit quelque dommage,
il ne pouvoit s'en plaindre comme d' asseurement
brisié oa enfraint. " En tel cas, n'a point d'asseu-
« rement enfraint, mais doit l'en punir le délin-
« quant d'amende pécunielle. » (Pithou, Coul. de
Troyes, p. 450.) Suivant l'ancienne Coutume d'Au-
xerre, Y asseurement qui étoit rompu par battre
ou frapper inducment, ne pouvoit l'être par injures
verbales. Celui qui injurioit verbalement, étoit puni
pécuniairement à l'arbitrage du Juge. (Coût. gén.
T. I, p. 224.) Mais il y avoit peine de la hart contre
celui qui enfraignoit ou laissoit enfraindre Y asseu-
rement « qu'il avoit promis et juré de tenir et gar-
« der par lui et les siens. » (Voy. Coût, de Troyes,
au Goût. gén. T. T, p. 420.) Dans la Coutume de
Tournay, les asseurances, comme les Asseuremens
dans plusieurs autres qu'il seroit superllu de citer,
étoient inviolables ; et quiconque les violoit, ou
souffroit qu'on les violât, étoit ordinairement puni
de peine capitale. (Voy. Coût. gen. T. H, p. 940. —
Bouteiller, Som. rur. tit. xxxiv, p. 234.)
Selon les Elablisscmens de S'-Louis et les Cou-
tumes de Beauvoisis, la connoissance des Asseure-
mens brisés, comme celle des Trêves enfraintes,
appartenoit de droit aux Comtes et autres Barons
du royaume, qui pouvoient et dévoient les ordon-
ner. Le lioi, comme souverain, faisoit ce qu'ils rel'u-
soient ou négligeoient de faire, et, dans le cas
d'iniraction,lecoupable, quoique homme « levantet
« couchant en seigneurie de Baron, devoit répondre
« par-devant la Cent le Boy. » 11 semble même que
le Baron ne pouvoit s'opposer à ce que l'on s'adres-
sât au Boi, de préférence à lui, pour obtenir un
Asseurement ou une Trêve. • Se aucuns donne
« rt.ssr»/T/«<'?(i en la Cort le Roy à aucun plaintif,
« et puis Yasseurenient li ait la trive enfrainte et
" Yasseureme]U brisié, et il en .soit semons par-
>< devant la Cent le Hoy, il respondra par-devant
« aus, tout soit il levant et couchant en autre Sei-
« gnorie. ».(Ord. T. L p. 27(!. — Voyez ibid. p. 129
et 130. — Beaumanoir, ebap. x, p. 5i; chap. lix,
p. 300, et chap. Lx, p. 306.)
Au reste, ce que pouvoit le Roi dans le ressort
de la juridiction des Barons, relativement aux
trêves et asseure7nens, les Barons le pouvoient
dans le ressort de la juridiction de leurs Vas-
saux, Seigneurs hauts-justiciers. « Tuit chil qui
« tiennent de fief en le contée de Clermont, ont en
« leur fiés toute justiclie haute et basse, et la cog-
« noissanche de leurs sougés. » (Coût, de BeauvoV
« sis, chap. X, p. 53.) Quoique ces possesseurs de
fiefs pussent, à titre de Seigneurs hauts-justiciers,
connoitre des asseuremens, ils ne pouvoient empê-
cher que « li ostes (!) couchanset levans soubz eux, »
n'eussent recours au Seigneur suzerain, « quant
« aucuns vouloit avoir asseurement par le Conte ;
« car li Quens puet miex juslichier chaus qui bri-
" sent trieves ou asseurement, que ne feroient si
■■ sougiet. » (Voy. Beaumanoir, tibi supra, p. 54.)
Néanmoins, lorsque le Seigneur haut-justicier,
« houme le Conte, avoit fait donner le trieve ou
■> Yasseurenient en sa Court, l'infraction, ou li mef-
" fets devoit estre vengiés par luy. » Il est probable
que la Trêve dont il s'agit ici, n'est point une trêve
de l'espèce de celles qui étoient particulières aux
Gentilshommes , puisque les hommes le Comte,
•Seigneurs hauts-justiciers, ne connoissoient des
asseuremens qu'avec exception pour les asseure-
mens en\ve Gentilshommes; « car d'aus, dit Beau-
« manoir, n'a nul la connoissance en tel cas, fors
« que le Quens. » (Coût, de Beauvoisis, ubi supra.)
Qu'il suffise d'avoir indiqué comment on a eu
raison de dire : « Uasseurement peult estre
« donné par le Roy, ou Ilault-juslicier, par-i^evant
" lequel il sera demandé et requis. » (Pithou, Coût.
de Troyes, p. 263.)
Rien ne semble plus conforme à la raison, que le
principe d'après lequel l'Auteur du Grand Coutu-
mier de France, et Bouteiller son contemporain,
attribuoient au Roi seul " la cognoissance et cor-
« rection des asseuremens donnés et jurés en sa
« Cour. Le Roy a la cognoissance de... trefves, et
« par espécial des asseurances baillées par ses
« Juges et Officiers, se ainsi advenoit que quelque
« infraction fust sur ce faicte ; jafoit que ce soit
« fait en terre de Haut-justicier. » (Bouteiller, Som.
rur. Liv. II, tit. i, p. 648. - Voy. Gr. Coût, de Fr.
Liv. I, p. 19.)
En conséquence de ce même principe, il semble-
roil que tout autre Juge qu'un Juge royal n'eût
jamais dû connoitre de l'infraction do la Trêve
nommée la Quarantaine-le-Roi. Toutefois, malgré
(1) Voir Du Gange à Hospites. (n. e.)
AS
277 —
AS
les réclamations réitérées des Juges royaux, les
Officiers des hautes Justices en partasèrent avec
eux la connoissance. « Il a esté délibéré que si le
« cas est advenu en la terre de Haut justicier, et
« ledict Haut-justicier en prend la cognoissance
« avant lesdits Officiers du Roy, à luy comme
« Haut-justicier doit demeurer. Mais si lesdits
« Officiers du Roy encommencent premièrement
« leurs exploits sur ce, et la cognoissance, sçachez
« qu'à eux appartiendra. » (Bouteiller, Som. rur.
tit. xxxiv, p. 230.)
Peut-être la raison qui autorisoit les Officiers du
Roi à vouloir connoitre eux seuls de ce qui se fai-
soit en sa Cour, auroit-elle été plus écoutée, si Ton
n'eilt cru qu'il étoit sage de favoriser une concur-
rence qui, en excitantl'activité vigilante de Juges
rivaux les uns des auti^es, assureroit d'autant plus
la tranquillité publique ? Cependant les Officiers des
Justices royales réclamoient, comme on l'a déjà dit,
contre cette concurrence attestée par Bouteillier ;
mais ce ne fut pas toujours avec avantage. S'il fut
jugé par arrêt de fan 1278, rendu contre les Maïeur
et Jurés de Péronne, que la connoissance des «ssé"»-
remens appartcnoit au Juge royal , par un autre
arrêt de l'an 1287, les Maïeur et Echevins d'Amiens
furent maintenus, malgré les allégations du Bailli
royal, en la connoissance du hris des asseuremens
faits en leur Juridiction. (Voy. Du Gange, xxix* Dis-
sert, sur Joinville, p. 340. — Pitbou, Coutumes de
Troyes, p. 2G4. — Laur. Gloss. du Dr. fr. T. I, p. 77.)
On observera, d'après FAuteur du Grand Coulu-
mier de France, que les Maïeur et Jurés de la ville
de Péronne n'avoient qu'un droit de basse Justice.
« Toutes fois, ajoute-t-il (L. IV, p. 526), ils pouvoient
« contraindre leurs subjecls à donner flsseHre)H(?wi;
« mais leur assciirement ne s'estendoit pas à autres
« choses qu'à celles qui estoient de basse Justice,
'< ne autrement n'en pouvoient punir ceux qui se-
» roient contre leur asseurement. » Quelle que soit
f autorité de ce Jurisconsulte, qui affirme (Ibid. L. I,
page 19), que les bas justiciers pouvoient donner
asseurement comme lès hauts justiciers, on soup-
çonne que la connoissance des asseurentens , pré-
tendue par les Maïeur et Jurés de Péronne, ne leur
fut interdite par l'arrêt de 1278, que parce qu'ils
n'avoient pas la haute Justice. C'étoit sans doute
comme « Hauts-justiciers de tous crimes publics et
« privés, » que les Prévôts et Jurés de la ville de
Tournay connoissoient des assenrances. (Voy.Coul.
gén. T. II, p. 944 et 94C.) Beaumanoir, qui écrivoit
dans le temps où fut rendu ce même arrêt de 1278,
dit positivement: « Doivent estre... li asseurement
« fet par ceux qui ont haute Justice , et non par
« chaus qui ont le basse ; et puis que chil qui n'ont
« fors le basse Justiche, ne pueent contraindre à
'■ fere asseurement, doncques ne doivent pas avoir
« la connoissanche des enfraintures. » (Cout. de
Beauvoisis, chap. lviii, p. 295.) On retrouve la même
disposition dans les Coutumes d'Auxerre, rédigées
en 1507. « Asseurement pourra estre donné par le
^ Seigneur haut justicier ou son Juge, quel qu'il
« soit ; non pas par un moyen ou bas Justicier. »
(Cout. gén. T. I, p. 224. — Voy. Cout. de Sens, art.
cLxxi, citée par Pithou, Cout. de Troyes, p. 203.)
Quels étoient donc ces asseuremens dont l'infrac-
tion ne pou voit être punie que comme un cas de
basse Justice? Probablement ils n'étoient autre chose
que les défenses qu'un moyen ou bas Justicier,
selon l'autour du Grand Coutumier de France, et
son commentateur Carondas, « pouvoit faire à
« ses subjects, sur certaine peine, de s'entremes-
« faire ne mesdire : >• défenses qui n'avoient sans
doute qu'un effet coercitif, et auxquelles on con-
trevenoit sans encourir la peine prononcée contre
les infracteurs des asseuremens ordonnés par les
Seigneurs hauts-justiciers. (Voy. Grand Cout. de
Fr.^L. I, p. 16 et 17. — Ibid. L. IV, p. 533.) « Les
« Haults-justiciers peuvent bien faire donner
" asseurement entre leurs subjects. " (Ibid. L. 1,
p. 19.) « Au Haut-justicier appartient donner asseu-
" rement. » (Cout. de Meleun, au Cout. gén. T. I,
p. 101.) « Donner asseurement est exploict de
« Haulte-Justice. » (Cout. de Troyes, art. cxxiv,
p. 262. — Voy. Cout. de Sens, a; t. clxx ; celles
d'Anjou, art. xui ; du Maine, art. xlix, et du Loudu-
nois, chap. iv, art. i, citées par Pithou, Cout. de
Troyes, p. 263, et par l'Editeur des Ordonnances,
T. I, p. 130, Notes. — Loisel, Instit. cout. T. l,
p. 338. — Lauriere, Gloss. du Droit Fr. T. 1, p. 77.)
On ne conyoit pas pourquoi Carondas, sans
égard à l'assertion de l'Auteur qu'il coinmentoit,
assertion justifiée par les Coutumes, spécialement
par celles de Beauvoisis et d'Auxerre, se soit cru
permis de le contrarier, en niant positivement
qu'on ait rien pratiqué de ce que dit son Auteur,
relativement à la connoissance des asseuremens.
Que le moyen Justicier n'ait pas connu des asseu-
remens, tels qu'étoient ceux dont connoissoit le
Seigneur haut Justicier, ce n'étoit pas une raison
de dire, en les confondant l'un avec l'autre :
« Encore que le hault ou moyen Justicier (1) puisse
« faire défenses à ses subjects de s'entremesfaire
>( ne mesdire, si est-ce qu'il ne peut bailler asseu-
« rement; ains au seul Juge royal appartient ce
.. faire. » (Gr. Cout. de Fr. L. IV, p. 533.) Il raison-
noit plus conformément aux usages coutumiers,
lorsqu'il disoit ailleurs que, de son temps même,
« aucuns estimoient qne le hault Justicier pouvoit
« donner asseurement, bien que pour l'avoir, le
« demandeur pût se pourvoir par-devant le Juge
« royal ; et que l'on tenoit que le Juge du Seigneur
■( hault justicier pouvoit le donner, comme le
« Bailli ou autre Officier du Roi. • (Ibid. L. I, p. 26,
et Liv. H, p. 286.)
S'il paroit incertain que les moyens et bas Jus-
ticiers aient partagé avec les hauts Justiciers le
(1) Il y avait peu de différence entre les attributions de la haute et de la moyenne justice; la haute justice connaissait
seule : 1° de l'assassinat avec préméditation et guet-apens ; 2» de l'incendie ; 3° du rapt et du viol. Certains crimes étaient
toujours réservés ; mais ils différaient, selon les provinces, (n. e.)
AS
278 —
AS
droit à'assenrer leurs sujets, au moins est-il
ti'ès-certain, de l'avis même de Carondas, que les
OHiciers des hautes Justices ont connu des fls-
scin-emens, en concurrence avec les Officiers des
Justices royales. « Mais le Roy donnoit entre ses
« subjects sauves;arde, ce que les autres Justiciers
« ne pouvoient faire. » (Voy. Gr. Coût, de Fr. L. I,
p. 16. — Coût. deMelun, au Coût. gén.T. I, p. 101.)
Quoique le Juge du Seig;neur haut justicier pût
donner asseurement, disoit Carondas, il ne pouvoit
donner sauvegarde. « Celle noblesse.... n'appartient
« fors au Roy seulement, qui est souverain ; car
« nul autre Hault-justicier subject ne peut donner
« sauvegarde. » (Grand Coût, de Fr. L. I, p. 19. —
Ibid. p. 2().) « Cependant le Hault-justicier, ou son
« Juge, pouvoit bailler à ses suhjets ou aucuns
« d'eux, une sauvegarde » que les Coutumes
d'Auxerre, rédigées en 1507, nommoient spéciale,
en la distinguant de la sauvegarde générale et spé-
ciale, que fe Roi, ou ses Baillis, pouvoit « bailler
« à toute personne du Royaume, soit en général ou
<> en particulier, réserve aux subjets en général
■■ contre leSegneur. » (Voy. Cout.gén. T. I,p.224.)
Avec les guerres privées, cessèrent insensible-
ment les Paix, les Trêves et les anciens Asseure-
meiis. Cependant on continua de mettre enasseiire-
ment ou sauvegarde les sujets du Roi qui le
requéroient. (Pithou, Coût, de Troyes, p. 203.) On
a indiqué ailleurs en quoi ces noùveaux^ss(?i/?'e-
mens difïéroientdes Sauvegardes. (Voy. Assel'r.\nce.)
VARIANTES :
ASSEUEÎEMENT. Fabl. MS. du Roi, n° 7615, fol. 141.
Asseurement. Chron. d'Outremer, n» 113, fol. 152, V».
ASSÉGUREME.NT. Ord. T. I, p. 5fti.
ESEHUREMENT. Ibid. T. IV, p. ^QS.
Asseureiiter, verbe. Assurer, mettre en état
de sûreté.
Signification relative à celle du substantif Asseu-
reté, acte par lequel l'Officier du Roi, ou d'un
Seigneur haut justicier, mettoit en sûreté la vie et
la fortune d'un citoyen en exigeant de son ennemi
qu'il jurât de ne lui nuire directement ni indirec-
tement. « Allèrent asseurenter le Curé devant
« nostre Prévost de Meleun, avant ce que le
<> jour escheist, auquel il esloient adjournez pour
" donner ledit asseurement. » (D. Carpentier,
Suppl. Gloss. lat. de Du Gange, au mot Asscurare,
tit. de 1377. — Voy. Asselreté.)
Asseurer, verbe. Assurer, certifier, assurer,
rendre certain ;. dire, affirmer, promettre, jurer,
ratifier, etc. Assurer, rentre certain d'un état;
établir, marier, fiancer. Asseurer, mettre dans un
état de sûreté, de sécurité ; rassurer, tranquilliser,
enhardir, apprivoiser. Rendre sûr l'usage, l'essai
d'une chose; refroidir, nettoyer, écurer; purger,
guérir ; purifier, épurer.
C'est à la faveur d'une disposition plus ou moins
prompte à croire ce qu'un autre dit et affirme
d'après ses connoissances et l'usage de sa raison.
ce qu'il promet et jure d'après ses obligations et le
sentiment de son devoir, que nous éprouvons une
sécurité plus ou moins dangereuse, relativement
à ce dont on nous assure, en disant, affirmant,
promettant, jurant, ratifiant, etc.
... Se cil le mescroit de rien,
PolUnice (1) Vasseurt bien.
Siège de Tliébes, MS. du Roi, n- 9987, fol. 47, V- col. *.
Li mires de garir moult bien les asseure.
Rom. d'Aleiaodre. MS. du Roi, n- 6987, fol. 479. V* col. S.
Amis, de cou m'a/isenrés,
Vostre cemise me donrés.
Fabl. MS. du R. n* 7989. fol. 51. V col. 2.
De qu'ele dit n'a cure ;
Tort a, de rien ne l'aseure.
Ibid. fol. 62, R'col. 1.
On assure l'exécution d'un traité, en le ratifiant;
le payement d'une rente, en l'assignant sur le pro-
duit d'un impôt, etc. De là on a dit : « Seignor, de
« ce avons nos plain pooir... de seurer cesteconve-
« nance, se vos le volez asseurer devers vos. •
(Villehardouin, p. 36.) « Les quarante sous de Parisis
u ke medame Béatrice me taye ;'2) donna.... pour
« vin et oistes (3) à chanter messe, jou les asseure
<■ à prende chascun an... à mon toiilieu, à Ander-
« wic. » (Ilist. généal. de la M. de Guines, pr.
p. '291, tit. de 1270.) On ne retracera point ici les
idées d'assurance, de sûreté, d'après lesquelles
Asseurer, comme terme de pratique, signifioit dé-
.laisser « Le détenteur de l'héritage hypothéciué au
« payen\ent d'une censé ou rente.... se peut des-
» charger des arrérages précédents et à l'advenir,
« en asseurant l'héritage qu'il possède. » (Coût,
de Metz, au nouv. Coût. gén. T. II, p. 399, col. 2. —
Voy. AsSEl'REMENT.)
Anciennement «ss?<ré!r un Roi, un Duc, un Sei-
gneur féodal, c'étoit Vassurer, le rendre certain de
son état, l'établir Roi, Duc, Seigneur, en lui prêtant
serment de fidélité, en jurant de lui être fidèle;
comme en mariant une fille, en la fiançant, on l'é-
tablissoit, on Vassuroit d'un état. « J'ay ma fille à
« marier, ou j'ay grant estude la bien asseurer;
« et vous en verrez l'apparence aincois que la
<■ fesle .se parte. » (Percef. Vol. V, fol. 107.)
Li Rois les ot asseurées :
Guida bien fuissent mariées
As deux Vassors qu'il vit combatre.
Siège de Thèbes, MS. du Roi, n- 6987, fol. 66. V col. î.
Asseurer le fist li Dus,
Des Barons que plus a creus :
Et puis fist les Princes mander ;
Si leur a fait à tous jurer
Que cil sien fins auroit sa tiere.
Ph. Slouske», MS. p. «6.
Li Roi Jehan ont entière ;
Mais il ne l'ont gaires ploré.
Henris ses fms ot la couronne ;
Si hourae Tout asseure.
Idem, p. 609.
Si l'on étoit en guerre, en querelle avec quel-
qu'un, si on lui avoitfait des menaces, en jurant à
la Justice de ne lui nuire directement ni indirecte-
ment, on Yasseuroit, on le mettoit dans un état de
(1) Polynice. - (2) Aïeule, grand'mère. Voir Du Gange à Tayetum. (n. e.) - (3) Hosties.
AS
Î79 -^
AS
sûreté, qu'il n'étoit plus permis de troubler. « Se
« aucuns manans en le villes a werre à autre
« manant en li villes, li Sires le doibt faire asseurer
>' deden li franchise de le villes. » (Carpentier,
Hist. de Cambray, pr. p. 28. til. de 1237.) « Mont-
« faucon dist audit Grisart qu'il avoit bien besoing
« de charroier droit: à quoy ledit Grisart li respon-
« dit que c'étoienl menaces, et qu'il se feroit
« essegurer de lui. » (D. Carpentier, Suppl. Gloss.
lat. de Du Gange, au mol Asscciirare, til. de 1369.)
Il étoit de principe féodal que le Vassal ne devoit
asseurer son Seigneur, après lui avoir fait hom-
mage, parce que l'hommage portoit asseurement.
(Voy. Pithou, Coût, de Troyes, p. 265.)
On ne fait que rappeler ici l'idée d'une significa-
tion relative à celle de Vx{sseure7nent jmlieiaire,
que dédaignoit une Noblesse accoutumée à braver
le péril des vengeances personnelles. Probable-
ment, c'étoit delà part d'un Gentilhomme un repro-
che de lâcheté, que de dire à quelqu'un : « Si vous
« avez peur, si vous faites asseurer. » (Voy. Frois-
sart, L. III, p. 145.) Qui forçoit son ennemi à
Vasseurer, contrevenoit aux Loix de la guerre, et
n'étoit pas en sûreté. « On ne doit pas contraindre
« ung homme à faire ne à dire chose contre son
• honneur; ce n'est pas l'usance de la guerre.
« Aussi ne vous doit-il pas asseurer; car vous ne
« vous devez fier ne deffier en la parole de vostre
• ennemy. » (Le Jouvencel, ms. p. 345.)
Suivant les Loix de l'ancienne Chevalerie, le défi
éloit un refus à'asseurer son ennemi. « Se vous
« estes un... des Chevaliers delà royne Genièvre,
« si vous gardez de moy ; car je ne vous asseure
« pas... Donc vous gardez de moy, dist Lancelot ;
« car je vous deflie. » (Lanc. du Lac, T. II, fol. 19.)
« Le Chevalier... se met derrière ung chesne, et
<■ demande au Duc comment il luy est, et se il a
« garde de luy. Et il dist que il le deffie; car il
« n'asseurera jà homme qui à Dame ou Damoyselle
« face honte. » (Ibid. T. I, fol. 145.)
Dans un sens relatif à l'idée des asseuremens que
l'on disoil contraires à l'usance de la guerre ,
lorsqu'ils n'étoient pas libres, s'engager à ne point
tirer sur son ennemi, c'étoit Yasseurer sans traire
à lui, Yasseurer du trait, comme on lit dans l'Hist.
de B. du Guesclin, par Ménard, p. 379 et 440.
« Requist... qu'ilz Yasseui'assent sans traire ne
« lancier à lui. » (Id. ibid. p. 490 et 492.)
Les paroles, les promesses, les sermens sont des
engagemens plus on moins solennels, qui doivent
opérer un état de sûreté. Le verbe Asseurer dési-
gnoit cette sûreté comme celle qu'opère une paix,
une trêve, une sauvegarde, un sauf-conduit.
« Quant il sceut que la ville estoit à la Comtesse,
« d'Aumarle .. il asseura la ville et les paiis qui à
>< la Dame appartenoient. » (Froissart, L. I, p. 149.)
« Un Messagier vint... lequel dit aux trois Seigneurs
« que le Roi ne les asseuroit point. » (Monstrelet,
Vol. II, fol. 171.) « Promettant de les asseurer et
« faire accompagner jusques en lieu de sauvelé,
. etc. >• (Du Bellay, Mem. L. VI, fol. 189.)
Li Rois qui païens asseure,
Pensse bien ceste encloeure, etc.
Fabl. MS. du Roi. n* 7218, fol. 326, V- col. 1.
. . . Pour avoir paiz plus seure,
Veult que les Contes asseure
En chemin et en destournée.
G. Guiarl, MS. fol. 55, V'.
En se fortifiant, en .se précaulionnant contre un
ennemi, en se défiant d'un piège qu'on nous tend,
on se met en état de sûreté. De là on disoit : « Man-
« gunels il fit aséer as turs e as angles des
« murs, pur darz lancer e pierres grosses jeter,
« Mais puis que il S(' fud asseurez, etc. » (Livres
des Rois, hs. des Cordel. fol. 138, V- col. 2, et 139
R° col. 1. — Voy. Athis, ms. fol. 69, V- col. 1.)
Li forestiers ne s'asegwre ,•
Ainsi vint à l'ostel roide et cointe.
La Dame s'est prés de lui jointe
Moult bien en sout la Dame traire
L'anel et ce que pot avoir.
A son Seignor (•!) a fait savoir
Qu'il s'an veigne, etc.
Fabl. MS. de Berne, n- 354, fol. 85, V col. 9, et 86, II* col. 1.
On conçoit que ce verbe Asseurer peut avoir eu
plusieurs autres significations relatives aux moyens
de procurer ù soi ou aux autres un état de sûreté.
Il désignoil l'idée d'un état de sécurité dans lequel
nous met une confiance plus ou moins raisonnable,
une expérience plus ou moins constante, lorsqu'on
disoit & asseurer, pour se confier, se tranquilliser,
se rassurer. «Tuitli poplesdelaterreseesléescat(2),
« e la cited a'usenrad. » (Livres des Rois, ms. dés
Cordel. fol. 138, R" col. 1.)
. . . Quant il fu en son cliemin.
Ne samble raie pèlerin ;
Ains chevauche grant aleure.
Et Trubert point ne s'asseure.
Fabl. MS. du Roi, n- 7996, p. *7.
A l'abé Jehan parleras ,
De ses oeilles praingne cure.
Tele i a qui trop s'asseure ;
De les amender ont mestier.
Fabl. MS. du Roi, ù- 7218, fol. 321, R- col. S.
Moult fut cil de crueil nature
Ki amors fist sens raison...
Bien est fos ke s'usegure
En 11 ne en son dous nom.
Fabl. MS. de Berne, n- 389. pari. 2, fol. llu, Vv
L'amant qui se tranquillisoit avec la confiance
que sa maîtresse le rendroit toujours heureux, étoit
un asseure. « Mieulx et plus sagement ayinent les
• asseurez; et mieulx sçavent garder la paix et
« honneur de ce qu'ilz ayment, que ne font ceulx
. qui ayment enragéement. » (Percef. Vol. VI ,
fol. 99, R° col. 2.)
L'expérience et la confiance, en nous tranquilli-
sant, en nous rassurant, nous enhardissent ; et c'est
probablement dans le sens de hardi, que l'on
nomma Philippe, fils de Jean Sans-peur, Duc de
Bourgogne, Philippe YAsseuré, en mémoire peut-
être « de ce qu'en ses jeunes jours combattant les
« François, devant Sainct Riquier, pour mieux
(1) Mari. - (2) Entra en liesse.
AS
— 280
AS
<« éprouver sa personne et gaigner sa chevalerie et
« ses espérons dorés, il se para en simple habit et
« comme un commun homme d'armes. » Quelle
que soit la cause de ce surnom, « Le Duc Philippe
« de Bourgongne.... que l'on nommoit le bon Duc
« Philippe... eut deux noms acquis.... Le premier
« fut Philippe-l'-lsscH/'e; et en longue continuance
« d'expériment de ses mœurs et vertus , il fut
« nommé le Bon duc Philippe. » (Mém. d'Ol. de la
Marche, p. 49 el nO.)
Dans une signification relative à celle A'Asseurer,
enhardir, rendre hardi, signification attestée par
Monet, ondisoit. en termesde fauconnerie, asseurei'
un oiseau, pour l'apprivoiser ; comme l'on dit
encore assurer un cheval, en tirant des coups de
pistolet à ses oreilles. « C'est une chose qui moult
« asseitrc un oisel que le baing. » iModus elRacio,
Ms. fol. 140.) Il est évident que l'usage actuel de ce
verbe est toujours analogue à l'ancien usage,
lorsqu'il n'est pas absolument le même. (Voy.
Cotgrave, Rob. Estienne, Mcot, Monet, Dict. — Dict.
de Trévoux. -^ Dict. de l'Académie Fr.)
On abusoil et l'on abuse encore delà signification
du verbe Asseurer, lorsque dans un sens relatif à
celui de rendre certain, el en faisant abstraction de
toute idée de sécurité, de sûreté, on disoit comme
aujourd'hui, asseurer quelqu'un de la mort, Vasseu-
rer qu'il mourra. « Vous devez estre ioule asseurée
« que demain vous recevrez mort honteuse. »
(Lanc. du Lac, T. III, fol. 132.]
Terminons cet article par la preuve que Esseurer,
et même Escurer, que peut-être il faudroil écrire
esçurer, étoienl de même signification que Asceu-
rer, Asseurer. « Souhaittoit plustost une laide
« femme qu'une belle, parce qu'il esloit esseuré
' qu'elle ne le coupauderoit. » (Contes de Cho-
iières, pag. 217.) » Li Troien... se férirent es
<' palus et les Alains trouvèrent escurés, qui
« d'euls ne se prenoient garde ; car ils cuidoient
« que nus ne peust jusques à eulz venir. » (Chron.
S' Denys, Rec. des Ilist. de Fr. T. III, p. 156.)
... Je puis bien conclure sanz péchier,
Par ces signes que l'Evangeliste escure,
Que le monde veult sa fin adrescier.
Eust. Desch. Focs. MSS. p. 131, col. 1.
A cette preuve, on ajoutera qu'une chose mise
dans un état de sûreté relative à l'essai ou à l'usage
qu'on vouloit en faire, étoit une chose asseurée ;
d'où l'on aura dit : « Or me dictes de la fontaine ;
u ne sera-il jamais que l'eau n'en buylle? Comment
« deist le Prudhomme, n'est-elle pas encor asseu-
« rée?'Senn\ vrayement;... ains boult aussi fort
" comme elle fist oncques. » (Lanc. du Lac, T. III,
fol. 3, II- col. 1.)
On ne se dissimule point qu'il paroît naturel de
croire que le verbe Escurer , dans le sens de
nettoyer, est formé du latin Curare. Mais lorsqu'il
est prouvé qu'anciennement ce même verbe a été
une variation d'orthographe d'asseurer, et qu'rtssf ;/-
rcr de l'eau bouillante, c'étoit en rendre sûr l'essai
ou l'usage, en la refroidissant , il semble qu'on
pourroiten conclure avec assez de vraisemblance,
que l'on a pu dire indifféremment asseurer ou
escurer un vase, puisque Vescurer, le nettoyer,
c'est Vasseurer, le mettre dans un état de sûreté
relative à l'usage qu'on en veut faire.
Cele alume le feu d'estrain,
Si a mis au haster sa cure ;
Et Robins le paele etcure.
Fabl. MS. du R. n- 7989. fol. i5, V «1. 1.
En généralisant l'acception d'escurer, nettoyer,
on aura dit dans le sens physique, escurer un jardin
de certaines herbes, escure/r un mal, escurer un
homme, etc. (Rabelais, L. IV, p. 180. — Rom. de
Charité, MS. strophe 100, etc.) « L'homme bien
« escuré et estné.... ne s'applique plus à.... com-
« plaire à sa femme ; et pour ce que la livrée
« se diminue chaque jour, les plaisances, les
« délits tournent en noises et riottes. » (Les
Quinze joies du mariage, p. 105 et 106.)
Dans le sens moral :
Pucele nete, sainte et pure
Si me netoie, si m'escure.
Fabl. MS. du Roi. n- 7218, fol. 174, R- col. 1.
Amours netie et escure
Le cuer k'ele a bien saisi;
Vaillant le fait et hardi.
Ane. Poês. lis. du Vatican, n- 1490, fol. 94, R*.
CONJUG.
Asegur, indic. prés. Il assure. (Fabl. us. du Roi.)
Aseheur, indic. prés. J'assure. (Fontaines Guerin,
Trésor de Vénerie, ms. p. 10.)
Aseurad (s'), ind. prêt. Se rassura. (L. des Rois.)
Asseurist, subj. imp. Qu'il assurât. (J.deMeung.)
Asseurt, indic. prés. 11 assure. (Siège de Thèbes.)
Escuîissiez, subj. impart. Nettoyassiez. (Le Cheva-
lier de la Tour, Instr. à ses filles, fol. 5.)
VARIANTES :
ASSEURER. Ph. Mouskes, MS. p. 405.
AscEURER. Rabelais, L. 4, p. 288.
ASEGURER. Ane. Poët. Fr. MSS. avant 1300, p. 1125.
ASEHURER. Ane. Poët. Fr. MSS. avant 1300, ï. I, p. 409.
AsEURER. Livres des Rois, MS. des Cordel. fol. 139, R».
Escurer. Ch. S' Denys, Rec. des Hist. de Fr. T. III, p. 156.
EsSEGURER. D. Carp. S. Gl. 1. de D. C. au mot Assecurare.
Esseurer. Contes de ChoUeres, p. 217.
Asseiireté, subst. fém. Assurance judiciaire;
sauf-conduit, sauvegarde.
Au premier sens, ce mot signifioit l'état de sûreté
que l'on obtenoil de la Justice, en ajournant son
ennemi, pour jurer qu'il s'abstiendroitdes voies de
fait, de tout acte d'hostilité. « S'estoit mis au
« chemin à aler quérir un Sergent, pour faire
« adjourner.... Tourin et ses complices (jui
« l'avoient.... menacié, pour lui donner «ssfHj'fe. •
(D. Carpentier, Suppl. Gloss. lat. de Du Cange, au
mot Asseurare, tit. de 1415.) « Le Juge donne
« asseureté h celui qui la demande, et fait promet-
« tre au convenu en asseureté, de la tenir.... sur
« peine de la hart. » (Coût, de la Ferté-Ymbaut, au
Coût. gén. T. II, p. 286. — Voy. Asseurenter.)
Dans le second sens, l'état de sûreté où l'on se
trouve, au moyen d'une trêve, d'un sauf-conduit,
d'une sauvegarde. (Voy. Cotgrave, Dict.)
I
AS
- 281 -
AS
VARIANTES :
ASSEURETÉ. Coût, de Lodunois, au C. gén. T. II, p. 565.
AssEURTÈ. D. Carp. S. Gl. lai. de D. C. au mot Asseurare.
Assiduel, adj. Assidu, continuel. (Voy.S'Bern.
Serra, fr. mss. p. 132, où il répond au latin Creber.
— Godefr. Annot. sur Charles VIII, p. 173, et Epilli.
de Martin de La Porte.)
Assiduellement, adv. Assidûment, continuel-
lement. (Dict. de Cotgr. — Voy. les Mémoires de
Sully, T. IV, p. 213.)
VARIANTE :
AssiDUiEMENT. S' Bem. Serm. fr. MSS. p. 329 , dans le
latin Assidue.
Assiégement, suhst. masc. Siège. (Voy. Dict.
de Kob. Est., d'Oudin et de Cotgr.) « Avoient pris
« l'administration de l'armée,.... ensemble de Vas-
« siégement du chasteau. » (Mém. de Du Bellay,
Liv. III, fol. 73, W.)
VARIANTES :
ASSIÉGEMENT. Oudin, Dict.
ASSIEMENT. Cotgr. Dict.
Assiégeur, subst. masc. Qui assiège. (Voy. Dict.
d'Oudin et de Cotgr.)
Assistant, ])art. Qui se trouve présent. De là
l'expression marcliandise assistante, pour signifier
marcliandise qui se trouve dans la maison où elle
se fabrique. (Contrcd. de Songecreux, fol. 38, R°.)
Assister, verbe. Etre présent. Ce mot subsiste.
Nous remarquerons seulement le sens des deux
expressions suivantes: i° Assister à droict sedisoit
autrefois pour ester à droit, se représenter, terme de
pratique qui lui a été substitué suivant Pasquier.
(Rech. Liv. VIII, p. 705) ; 2° Assister au compte signi-
fioit être présent à une chose sans en profiter,' ou
sans en tirer sa part. (,Oudin, Dict. et Cur. fr.)
Association, subst. fém. Traité de société par
lequel plusieurs personnes s'associent ensemble.
.. Ce mol association fut donné au traité de société
« que le lioy proposa de faire dans son royaume
« en 1570. On y substitua, quelque temps après, le
« mol ùe confédération du Roy. » (Vov. les Mém.
de Montluc, T. 1, p. 172 et 173.)
Associenient, si//)sL inasc. Association. .< Que
• l'un ny l'autre prince ne pourroit, par cy après,
u faire traité, ny alliance avecques aucun autre
" prince, sans le sceu, et associement l'un de
« l'autre. » (Mém. de Du Bellay, Liv. IV, fol. 99, R°.)
Assochier, verbe. Apatroniier le bois. Ce mot,
qui paroil venir de souche , signifie apatroner le
bois cmtpc en l'appliquant sur la souche; on disoit de
même almnctiicr (1). (Voy. ce mot.) On Miassoelùer
dans l'iUiou. (Coût, de Troyes, p. 146.)
Assodé, adj. Malade sans ressource. Homme
accablé par la maladie, et qui , selon l'expression
vulgaire, ne tient plus compte de soy. (Gelt-Hell de
L. Tripp. — Voy. Dict. de Cotgr.)
Assolé, jaa?'L Mis au ras du sol. A raz terre.
« La tour où la magicienne faisoit ces en-
" chantemens el diableries fondit en abismes, et
« en notre présence. Le lieu demeura aussi assolé et
« aplany, que s'il n'y eut onques en forme de bas-
« timent, n'y pierre sur pierre. -> (Dont. Flor. de
Grèce, fol. xcxix, R°.)
Assoler, verbe. Assoler les terres se dit de celles
qu'on laboure la première année , et qu'on ense-
mence la suivante. (Du Cange, Gloss. lat. au mot
Assolare.)
Assolleiller, vfrfte. Eclairer.— Mettre au soleil.
Dans le premier sens, on a dit :
De celui soit maudit qui le mont assoleille.
■Rom. de Rou. »1S. p. 89.
On disoit aussi s' assolleiller, se mettre, se chauf-
fer au soleil. « Il faisoit froid, et il faisoit beau s'as-
« solleiller. « (Brant. Cap. fr. T. IV, p. 81.)
Assoltan, subst. masc. Le Roy des Rois. Le
Sultan. (Voyez Du Cange, Glossaire latin au mot
Sultanns.)
Assomaige, subst. JHflsr. L'action d'assommer.
C'est en ce sens qu'on a dit :
h'asso-iiiaige
De mes bestes, et le domaige.
Farces de Palhelin. p. G9.
Assommeillé, part. Endormi. « Tant estoit
« assommé, par fort dormir, qu'il ne s'en estoit de
« rien meu (2). » (Percef. Vol. VI, fol. 56, V" col. 1.)
Vus compains estoit assommez
Oui romuoit dessus une escame (3).
Poês. MSS. d'Eust. Uesch. fol. 392. mI. t.
VARIANTES :
ASSOMMEILLÉ. Baïf. fol. 5U, R».
Assommé. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 392, col. 4.
Assommeillens, verbe. Endormir. (Voy. Dict.
de Borel, Oudin et Cotgr.)
VARIANTES :
ASSOMMEILLENS. Oudin el Cotgr. Dict.
Assommer. Borel, Dict.
Assominement (i), sulist. wrtsc. Achèvement,
action de consommer, d'accomplir. (S' Bern. Serm.
fr. MSS. p. 141 et 191, dans le latin consummatio.)
Assommer, verbe. Terminer, venir à fin,
accomplir. — Calculer. — Elever. — Accabler.
Ce mot a été employé avec la signification de
terminer, venir à fin, dans les vers suivans :
Ou n'est-il riens qui ne s'assomme,
Et qui par nL.lure ne fine.
Pnês. de Froissart, MSS. p. 349, col. î.
Li derrains (5) qui fait l'euvre asoumer
Clôt l'uis (6), c'est li mieus logiers.
Ane. foH au AISS. du Valicao, n" U90, fol. 155.
Avec la signification d'accomplir, on a dit : - Si
(l) Littré donne un exemple du xiF siècle cité par Du Cange. (Tahular. S" Pétri Insnlensis, f" 112, V.) (N. E.) — (2) Remué.
— (3) Banc. — (4) Ronsard l'employait encore au x\ï' siècle: « Et (la maladie) dure, m'accabla A' assommemein «i lourd. »
(Edition de 1623, p. 8-13.) (n. e.1 - (5) le dernier. - (6) ferme la porte.
II. 36
AS
282
AS
« tout le monde melouoit, ouconseilloilunechose,
« et li contraire vous plaisoit, vostre douces volenté
« seroit asscmée et laisseroit la volenté des
« autres. » (Mactiaut,Mss. p. 185, R°.)
Dans le sens de calculer, ou a dit : « L'on a cous-
« tume de deviser ([ue vaut la ferme en dix ans
« continuels, et getler, et assommer quelle somme
« aura valu pour les dix ans. » (Coût. gén. T. I,
pajre 42 i.)
Ce mol siguifioit élever, dans les vers suivans :
Juie gent que je vous nomme,
Que orguex essauce, et assomme.
Fabl. MSS. de R. n- 7-218, fol. 310, R* col. 2.
Enfin asso7nmersesl pris dans le sens d'accabler,
exterminer. C'est une extension de la première
acception krmhier; cette acception subsiste en
partie, et l'on diroit encore assommer la nature,
pour étouffer la nature, expression qui se trouve
dans une llist. de Fr. en vers, à la suite du Rom.
de Fauv. (ms. du R. n''6812, fol. 7G), maison ne pou-
roit plus dire, comme dans l'iiist. des Xeuf Preux,
p. 158 : il Le cueur luy assomma, » au lieu de son
cœur fut accablé.
VARIANTES :
ASSOMMER. Froiss. Poës. MSS. p. 349, col. 2.
ASOU.MER. Pcët..et MSS. Vat. n« 1490, fol. 155.
AssuMMER. S. Bern. Seim. fr. MSS. p. 328, dans le latin
cwxsumare pour Assemer. — Machaut cité ci-aprés.
Assomption, suhst, fém. Avènement, éléva-
tion. « Ils s'acheminent en la cour de l'empereur
« pour en premier lieu se coujouir, au nom de sa
« majesté, de son heureuse ossoïH/^iïOJi à l'empire. »
(Mém. de Viller. T. V, p. 273. — Voy. Ibid. p. 284,
et les Mém. de Sully, T. V, p. 385, et cy après
assumpUon.)
Asson. Venir à bout, obtenir. Etre au bout, être
à la lin. On a dit :
Tex s'efforce qui conquiert,
Mais cil qui en est asson
James partir ne s'enquiert (1)
Par nus pris, d'avoir s'amie.
Poct. MSS. avoni 1300, T. 1, p. 358.
« Quant ils oient payé, si ne furent ne en mi ne
« assum (2), et lor paiierent li Baron ensemble et
•< distrent. » (Villehard. p. 22.) L'Editeur explique
ainsi ce passage : « Ils trouvèrent qu'ils étoient
« bien éloignés de leur compte. »
VARIAiSTES :
ASSON. Poët. MSS. av. 1300, T. I, p. 358.
Assum. Villehard. p. 22.
Assonneine, subst. fém. Sonnerie.
Joint du moutier l'assotmene
Qui tout l'entendement destruit
A gens qui sont en maladie.
PoBS. MSS. (l'Eusl. Desch. fol. 325, col. 3.
Assopir (3), verbe. Assoupir, endormir. (Dict. de
Nicot, R. Est. et Cotgr. au mot assopir.) Dans les
vers suivans, le poète donne ce conseil :
Sage, pourvox (4), et ne t'assoupe
Emmy les femmes, ne demeure,
Car, ainsi que tigne deveure (5)
Les vestemens et les mangue,
Ainsis femme qui ne se jue
Destruit les hommes, et sousprent
Poés. MSS. d'Eusl. Desch. fol. 532, col. l.
VARIANTES :
ASSOPIR. Rab. T. III. p. 178.
AssoupER. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 532, col. 1.
Assopissement, subst. 7Hasc. Assoupissement.
(Voyez Dict. de Cotgr.)
Assordir, verbe. Retentir.
On lit dans les Fabl. ms. du R. ir 7218, fol. 353 :
Toute la grant route asorcii
Des chevaliers et des Barons.
Ce mot asordl peut signifier retentir en tirant
l'Elymologie de ce verbe du substantif sourd. Il
peut signifier fut remplie tout à coup, en regardant
le verbe asordir comme un composé de l'ancien
mot soudre, jaillir, ou faire jaillir en parlant des
eaux. (Voy. Assoudue.) Au reste, on trouve assordir
pour retentir, dans cet autre passage des mêmes
Fabliaux :
Trop seroit Arras assortis
De IJiaus contes, et de biaus dis.
l'bi supra, fol. 62, V* col. 1.
Assortable, adj. Sortable. (Voy. Dict. de Cotgr.)
Assorter, verbe. Assortir. — Unir, appareiller.
— Empresser et efforcer. (Gloss. du R. de la Rose.)
Au premier sens, ce mot signifie fournir de choses
nécessaires. « 11 assorta et mist son chastel de
'< Japhe en tel point qu'il ressembloit bien une
« bonne ville deft'ensable. " (Joinv. p. 97.)
On a dit aussi s'assorter pour s'unir, dans le
même sens que s'assortir :
Souvent voyt on aucun faire le fin,
Qui le plus tost est trompé à la fin ;
Comme il advint d'un qui si bien se assorte
D'une fille, cuydant estre sa sorte (6)
Qu'il se fyoit en elle de son bien.
Faifeu, p. 67.
Enfin s'assorter s'est employé pour faire en sorte,
s'efforcer, s'empresser :
Donc ung chascun s'assorte
Les festyer, et luy faire grant feu.
Faifeu, p. 103.
Assortir, verbe. Fournir. — Mettre en état,
disposer. *
Dans le sens de se fournir, on a dit :
.... Maudit est qui de grâce dévie.
Mais à celui qui s'en veult assortir
La mort est fin, et principe de vie.
Cléni. Maiol. p. 730.
Avec la signification de mettre en étal, disposer,
on trouve: « Faire assortir et tirer les bombardes. »
(Berry, Chr. depuis 1402-1401, p. 41 7. — Le P. Labbe,
Gloss. p. 408, traduit par des/pere le verbe assortir ;
mais on sent qu'il faut lire assolir.)
Xssosez, part. Associés. (Voy. Villon, p. 14.)
(1) jamais ne veut se détacher. — (2) M. de Wailly (§ 58 de l'édition de 1872) corrige <i sum; donc l'étymologie est
ad sumtnum. (N. E.) — (3) Le normand a encore assouir, assommer, étourdir ; la racine est adsopire. (n. e.) — (4) Pourvois.
(5) teigne dévore. — (6) Croyant en être assorti.
AS
— 283 -
Assoler verbe. Apprivoiser, rendre familier
« Encores n avez vous point de plus vray proçnos-
« tiqueur que voslre mouton débonnaire nommé
■' sonnaillier ou clocheman , lequel vo. s devez
" assoto- )parniignotise, et souvent luyoffrirdu
« pain. . (J. leMan^e, llluslr. des Gaules, L l p gT)
cete1fs?'lt7ôë;el!iu'""""' ^'^ ""^''^ -'' °--
Tenir m'en puis pour assotlâ
yuant des lors d'aymer ne recreuz (2)
Et le conseil Rayson ne creuz.
Roni. de la Rose, vers 1243-4216.
.oi^pSip;îsSi?^^^^°^-^p^*^--^^-
a.w''''""*^^'"*^"*' ^"'«'- '»asc. Soulagement
adoucissement . Me vient de vostre paro le Tt de
l^JZTf'^ ""^' ^'''^'"Oemcnt de mesmeinbres
i,/ H^"^ je ne croys pas que vous sovez
AS
Par fausseté n'enquier nul asouhaigement
Poès. MBS. avant 1300, T. III. p.' H37
t'ai- vos faire assoagemeni.
Blanch. MS. de S' Germ. fol, 173, V col. 1.
ASSOUAGEMENT. Eus'u DesYh 'pl,ës MSS fol S4S
Uans le premier sens, le poëte a dit •
Amour qui a tel usage !
t-arlalee est précieuse,
i'arole délicieuse,
Et le veoir assouage.
Poès. MSS. d'Eust. Desch. fol. 173 col «
En parlant des qualités qu'il faut avoir pour réus
leieiia animaux, le même poëte dit •
Taupe te tiens (4), qui ne voit nullement
Et hérissons qui sa houche assouaiie '
Ibid. fol. 15, col. 2.
br^tfhaV, '"^ ^'^"^''^ S'Snifie ici (5) soula-er sa
bouche, lui donner un libre essor, dSrl, ce quf l'on
PirHn'î'''L'' r^'^ ^""P'^y*^ PO"i- «aimer, apaiser
aSicfâiST2Vo?ïïn^^*l Si/" ^
sa4' sïiS ''"S^' .^i8"i"f applaudir, dans le pas-
. , CONJUG. 1
VARIANTFS '
ÏTotlf.^,l'f-^^^- d,« s. Ger,n:fol si-, V« Jol'f '■
Alsoro^rL^'be.t^^ss^^'svf '• '"■ ''''• ''■ "'' P- "30.
iïï=^^!^k^'^ff;--?'f<!f',^-,\
ASSOUAIGER. Ibid. fol. 80 col 1 ' ''°'- ^•
ASSO0LAGER. Chron. S' Denys f I n "no r„
AssouL.^GiER. Monstr. Vol I fol ooi^bo ' ^ "
iluïoEf si n"'- Il """'^^ êt°de Corn^ '
AssuAGEn. S> Bern. Serm. fr. MSS. p. 105 et 289.
Assoubtiver, verbe. Diminuer, amincir
Les fais amoureux sont teuLv (i^) ■
Toujours vont en assouh/want-
Jamais ne scaurez faire tant
yu Us ne vous trompent.
Chasse el Dep. d'Am. p. K4.
In.^P^^r*^!'*;*^^"''^,'^*' "'*^^- '««s^- Origine, ^énéa-
nuques tapet de Witikind, dt- « TpIIp «niir>h^
" eust este plus digne destre mise au feu L5?
ses perfidies et perjuremens) que d'estre emnC
(S-7ufï^î{Jk^?Sr'"^^^ '' "^"^'^^ ^
da^Kl^f'^?Uï-^l,.foy- ObUn^ere
Assouffis, adj. Suffisans, accomplis, parfaits
Voyez les traits s', s sont point assot^'/is.
J- Lf Maire, Couronne Margariliquo p 71
nô.l souhaite qu avoir puisse de mes désirs
« assou?ssanee. .. (La Col. Th! d'hon. T. lî p Ii9)
AslT)"''""' '"'^'- -'''"■■' '^ ''' de terre'. (Voyez
Mot languedocien. (Voy. Du Can^'e rinsc int o
mot .Ulsolare.) On dikt'^i' dafs leS:;nè'sens"
Assouvie, participe. Rassasiée.
La Royne si très aasouvie
Ue plaisir que nulle plus.
J. Le Maire, lllustr. des Gaules. Ut. I, p. US.
Assovi part. Assouvi. - Satisfait - Achevé
termine - Kemplir. -Accompli. - Complet '
Dans le sens d'assouvi, le poëte a dit ^
Car de tout le bien qui peut estre
bon honneur estoit axsevif:,
E' à mon désir.
Macliaut, MS. fol. 162, col i
Uieurs desconfiz en soat en dueil confitz
Non assouffis de regrets et de pleurs '
JloIIinel, p. 137.
Avecla signification de satisfait, on a dit •
Mes désirs sont en partie asscvis.
nnno 1^ J- ,- . '="*'• Desch. fol. 183. col. î.
Dans le sens d achevé, terminé, on a dit •
De cet hostel leur conqueste assnume.
Id. Poès. MSS.
(l) Il f
ï=-f si zIj iKs.r;r=àr,^.i.s^ *
f • KO rie laudrait-il pas lire
AS
284 -
AS
Pour rempli, on a dit :
De tout honneur est si bien assevie.
Qu'il me semble qu'autre veoir ne doye.
Id. ibid. fol. 166. col. 2.
De tous biens estes si assouvie.
Id. ibid. fol. 141, col. 3.
Ce mot a été pris dans le sens d'accompli, parfait,
dans ces vers :
Plus belle que le biau jour
Plus doulce que n'est doulcour
Corps asserli (pour «.vset'i)
De riche maintien joly.
Machaut, MS. fol. 174, V' col. 2.
Rendez notre joye assouvie.
Les Marguerites de la Mar^erite.
Ce mot a été employé dans le sens de complet :
« arbalesle à deux pieds garnie et assouvie comme
« dessus. » (Etat des Ofî. du Duc de Bourg, p. 151.)
VARIANTES :
ASSOVI. ViUehardouin, p. 175.
AsouFFi. Molinet, p. 137.
AssEVi. Ibid. fol. 250, col. 2.
AssouFFiB. Molinet, p. 137.
Assouvi. Percef. Vol. IV, fol. 100, V col. 1.
Assouvï. Roman de la Rose, vers 1422.
Assovir, verbe. Assouvir, satisfaire , contenter.
— S'assouvir. — Effectuer, achever.
Nous disons encore assouvir pour contenter,
satisfaii-e un désir immodéré. On employoit, autre-
fois, ce mot en bonne, comme en mauvaise part :
Et je te promets tenir
Que je te ferai assevir
Ce dont tu as.
Mâchant, MS. toi. 2U, V- col. 3,
Se vous auriez aussi parfaictement
Comme nuls hommes aura onques sa dame,
Vouldriez-vous bien assovir vo talent
Pour une fois, sanz ressongnier (1) son blâme.
Poës. MSS. d'Eust. Desch. fol. 438, col. 4.
L'en ne pourroit peuple esinu retarder
Qu'il n'ait avant sa folour assevie.
Ibid. fol. 38, col. 1.
Assouffirent a été employé pour accomplirent :
C'est le séjour des âmes bienlieurees.
Des animaux qui onques ne messeirent,
Ains de tout bien leurs œuvres assoufirent (2).
J. Le Maire, 2' Ep. de l'Amant Verd.
Assevir peust toutes ses volontez.
Poél. MSS. avant 13u0, T. I, p. 529.
On disoil assouvir, pour s'assouvir, se rassasier:
« ils n'ont pu assouvir de parler. »
On se servoit aussi de ce mot dans le sens d'effec-
tuer : « dedeiiz si cort terme, ne puis vostre couvent
« assouir. » (Villetiard. p. 77.) « Ensi fu la couve-
» nance faite et assoivie, et la paix faite des Grecs
« et des Frans. » (Ibid. p. 17.5.) « Jusques à ce que
« qu'il eut premiers assouvis l'ouvrage qu'il avoit
« entrepris. » (Ord. T. III, p. 591.)
Après ce je m'acheminay
Et tout droit pris mon chemin ay
Pour bien mon voyage assevir
Et aussi pour ma dame veir :
Si montai sur ma jaquenée.
Macliaut, MS. fol. 178, V col. 1.
(1) Craindre. — (2) « Mêlèrent à leurs œuvres ce qu'il y faut de bien. » Asouilreiit est donc ici un composé de suffue. —
(3) Orgueil. — (4) Forteresse. — (5) Fut embarrassé.
Pour le Siiint voyage assevir.
Ibid. fol. 217, R* col. 3.
VARIANTES :
ASSOVIR. Eust. Deschamps, Poës. MSS. fol. 438, col. 4.
AssEViER. Du Gange, Gloss. lat. au mot Assoviare.
Assevir. Poët. MSS. avant 1300, T. I, p. 529.
AssoiviR. ViUehardouin, p. 175.
.issoi'FFiRE. Froissart, Poës. MSS. p. 401.
As.souiR. ViUeliardouin. p. 77.
Assouvir. Mathieu de Coucy, Hist. de Charles VII, p. 672.
Assovissemeut, suhst. masc. Achèvement.
Et lui semble proprement
Que l'oKtel ait jà assovissvinen t.
Poè3. MSS. d'Eust. Desch. fol. 54. col. 3.
Assouper, verbe. Arrêter, retenir.
« Le Seigneui' du fief peut empescher et assouper,
« par la puissance de son fief, la chose féodale , et
i< la mettre en sa main , par default dénommée,
« et de dénombrement à luy non baillés dans le
« temps deu. » (LaThaumas. Coût. deBerri, p. 323.)
De là, on a dit au passif, être rtssoitpe d'une chose,
en être dépouillé :
Prince à telle fin que ne soie assoupé
De mes estats que vous m'avez donné.
Eust. Desch. Pofs. MSS. p. 341. col. 4.
Assouplir, verbe. Devenir et rendre souple. —
Plier et faire plier. — Abaisser, humilier.
Le premier sens, qui est le sens propre et littéral,
se trouve dans les Dict. d'Oudin et de Cotgrave, au
mot Assouplir.
Ce mot s'est employé pour plier et faire plier, au
figuré abaisser, humilier, etc.
Mais par fol me tenez
Se ge cel povre orgueil n'assoploi tôt abés
Et se ge de Gautier le grant bobanne (3) bès.
l'arton. de Blois, IIS. de S. Gerra. fol. 174, R'.
Mouskes, en parlant de la guerre de Simon de
Montfort contre les Albigeois, dit :
Si li fu Toulouse rendue
Leur forteraice est abaluë (4)
Et si fist des fossés emplir
Dont ce dedens fist usoplir.
MS. p. 600.
Eichard, Roy d'Angleterre , passant par l'Autri-
che, est reconnu aux barils de vin qu'il rapportait,
et qui le firent arrêter.
Et quant çou entcndi li Rois
Moult s'enbronça (5), et asoupH,
Et dist que mal fussent empli
Li Baril, ne mandés li vins
Dont li chevalier iert devins.
Pli. Mouikes, MS. p. 530.
VARIANTES :
ASSOUPLIR. Oudin, Cotgr.
AsOPLiR. Ph. Mouskes, p. 600.
Asoploier. Ibid. p. 587.
AsouPLiR. Ibid. p. 530.
Asouploier. Fabl. MSS. de S' Germ. fol. 21, V» col. 2.
AssoPLOiER. Parton. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 174.
Assouploier. Fabl. MSS. du R. n° 7218, fol. 62, R» col. 2.
Assouply, part- Souple, soumis. — Consterné,
affiigé. — Réduit, détruit.
AS
— 285 —
AS
Dans le sens de souple, soumis :
.... Qui mettra hors de l'Eglise
Perversité, qui tant nous scandalise ?
Qui remettra la noblesse en son ply ?
Ayant le peuple aiiltrement assouply.
Cretia, p. 141.
Dans le sens de consterné, affligé :
Li Rois n'en fu pas asoplis,
Ains en fu liex et par grant joie
Prist congié, pour aller sa voie (1)
Ph. Mouskes, MS. p. ^T2 et 173.
Dans le sens de détruit : « Par l'aide de Bacchus,
« c'est le bon vin friant et délicieux, sont hault
« élevez les Esperits des humains, leurs corps évi-
« demment alaigris (2), et assouplij ce qu'en eulx
« esloit terrestre. » (Rabelais, T. IV, p. 279.)
VARIANTES :
ASSOUPLY. Crétin, p. 141.
ASOPLIR. Ph. Mouskes, MS ,,, 172 et 173.
AssiMPLiR. (Lisez Assoti- .; Monstr. 'Vol. I, fol. 820, V».
Assourdi, part, ou adj. Etourdi.
Les preux et les hardis
Sont u-isourdts de tempeste et d'orage.
Moiin. p. 140.
Si aucuns ditz
Ont été dit."!,
Qui l'honneur des dames entame ;
S'ont été des gens estourdiz.
Qui sont tous folz, et assourdiz ;
Pour meschans gens je les réclame.
Le Loyer des Faulccs iViaours. p. 317.
VARIANTES :
ASSOURDI. MoUnet, p. 140.
AsouRDY. Percef. Vol. I, fol. 145, V" col. 2.
AssoRDi. Poës. MSS. avant 1300, T. III, p. 1120.
Assourdir, verbe. Devenir sourd, avoir les
oreilles rompues par le bruit ou le fracas qu'on
entend. (Ortli. subsist.) Il signifie faire un bruit
sourd, dans ces vers :
Pour ce que louange assourdise
En bouche qui de lui le dise.
Machaut, MS. foL 22, V coL 3.
C'est-îi-dire que la louange qu'on se donne à soi-
même n'est qu'un vain biuil, un son perdu que les
autres n'écoutent point.
Assourdissement, subst. inasc. inaction d'as-
sourdir. (Ltict. d'Oudin.)
Assourdre, verbe. Survenir. Du lalin Assur-
gère. (Voy. Assordir.)
A propos se un bon point luy assourd.
Contred. de Songecreux, foL 169, R*.
Assouré, adj. Accusé ou convaincu. Au titre de
ceulx qui accusent autres de crime, etsont accusez,
on lit : « Nul ne nulle ne peut appeller, ne accuser
« autre de fait de crime , puisqu'il est prins par
« court, ou assouré de quelque crime, tant qu'il
« en soit en tout délivré et exempt par droit. »
(Ane. Coût, de Bret. fol. 8i.) « Si est ainsi que ung
« fust prins, et assouré de fait de meurtre. » (Ibid.
fol. 57.)
Assoutillance, subst. férn. Subtilité. Ce mot
est employé en ce sens dans une Chans. du xin'
siècle, (ms. de Bouhier, ch. lvu, fol. 85, R°.)
Assoutillé, part. Subtilisé. Ce mot est employé
avec cette signification dans les Prouffites champ,
etruraulx de Crescens. (Liv. I, fol. 148, V°.)
Assouver, verbe. Se nourrir, se suffire. Se dit
d'un étang qui produitdu poisson lorsqu'une rivière
le traverse. (Laur. Gloss. du Dr. fr. — Gloss. sur
les Coût, de Beauvoisis. — Du Gange, Gloss. lai. au
mot A ssewlare [S). « Etang qui n'assouve point de
« luy-mesme, s'il est d'agoust, est prisé, chacun ar-
« pent, vingt sols, et s'il est de fontaine, vingt-cinq
« sols, et s'il assouve de luy-mesme , trente sols,
« déduits toutes fois les frais et mises nécessaires. »
(Coût. gén.T. I, p. 905.)
Assubjetir, verbe. Assujétir, soumettre. Laur.
Gloss. du Dr. fr. au mot Assubgir, a employé ce
mot dansce sens: « Item que doresnavant un homme
« allié par mariage sans génération , ne pourra
« vendre, ne assubgir les'fiefs, alleuz, et main-
« ferme venant du costé de sa femme plus avant que
« durant le mariage. » (Coût. gén. T. I, p. 801.)
VARIANTES :
ASSUBJETIR. Clém. Marot, p. 261.
AssouBJECTiR. Dict. de Rob. Estienne et de Cotgr.
AssouGiR. Froiss. Poës. MSS. p. 399, col. I.
AssuBJiR. Laur. Gloss. du Dr. fr.
Assuca, verbe. Assommer. Ce mot est langue-
docien. (Dict. de Borel, au mol Sugtte.)
Assuefaction, subst. fém. Accoutumance, ha-
bitude. (Dict. d'Oudin et de Colgrave.)
Assuie, verbe à la 3' pers. du prés, de l'indic.
Suit, poursuit. — Sue, travaille. « Celluy est riche
« à qui demeure joye ; non mie celluy qui au trésor
« assuic, et double l'eschainpie l'i). >■ (Percef. Vol. V,
fol. 111, R° col. 1.)
Assuir, verbe. Poursuivre. — Avancer. — Ac-
célérer.
Assumer, verbe. Prendre. Du latin Assumere.
(Voy. la Coût, de Bruxelles, au Nouv. Coût. gén.
T. 1, p. 1274, col. 2.)
Assumeté, adj. Ce mot semble désigner le bois
couronné, « attendu que le bois mort et mort bois,
« ne peut servir aus dits suppliants, sinon pour
« chauffer, et ardoir, et que le vergisant et
« assummetté est gros bois vieil qui ne peut servir
« en aucune partie des édifices, sinon seulement
« à faire poullres, pousteaux et soUeaux. « (La
Tiiaumas. Coût. deBerry, p. 411 — Voy. Du Gange,
Gloss. lat. au mot Arbores jacentivas, où il cite le
même passage.)
Assumpcion, subst. fém. Enlèvement. — Terme
de Logique. — Feste de la Vierge.
Dans le premier sens, les -luifs parlant à Joseph
(1) Prendre sa route. - (2) Déri\és de nlacres. (m. e.) — (3) Du Gange le traduit avec raison par ussécher. (n. e.) •
à mot l'échappement; redoute de s'en écarter, (n. e.)
■ (4) Mot
AS
— 280 -
AS
d'Arimation qui avait été délivré de leur prison par
miracle, s'expriment ainsi: « Esmerveillés nous
« sommes de Ion assuinption. » (Percef. Vol. VI,
fol. 124.) Ce mol, comme terme de logique, signifie
la mineure, ou la seconde proposition d'un syllo-
gisme. (Voy. Fabr. art. de Ulielor. Liv. I, fol. 5',».)
« Le samedi prochain après Vassumpcion Nostre-
« Dame 12C3. » (Rymer, T. I, page 92.)
Assvimpt, part. Elevé.
« Nostre S' Pure nous dit que quand il fut assumpt
' au S' Siège apostolique, avant son assumption,
» luy et tous les autres Cardinaux tirent certains
« sermens solennels dedans le conclave, et depuis
« qu'il fut assumpt, il les ratifia de rechef, les jura
» et promit. >- (Preuves de Louis XI, p. 3i8.)
Assunipter (s'), verbe. Pour élever, faire mon-
ter. « Si Jupiter le Boy des hommes et des dieux
« vouloit béatifier un corps terrestre sans l'assion/J-
« ter au supernel habitacle , si ne le pourroit-il
« mieux faire qu'en le laissant user familièrement
« de ton regard, et de ta souefve collocution. »
(J. Le Maire, Illustr. des Gaules, Liv. I, p. 70.)
Assumptivenient, adverbe. Par présomption.
Opposé à absolument, affirmativement. (Voy. Fabr.
art. de Rhétor. Liv. I, fol. 40, V'.)
Assumptuosité , subst. fém. Somptuosité.
<' Puis fist Priam réédifier, et drecer le fort chasleau
a d'Ylion (l) au milieu et ou plus appai'ent de toute
« la cité, en tant grant haultesse, et assumptuosité
« d'ouvrage , qu'il est chose moult mirable à
« croire. »(IIist. d'Hector. Triomp. des Neuf Preux,
page 224, col. 2.)
Assuré, partie. Taxé, fixé. « Nul buscher (mar-
« chand de bois), vendeur de busches ou de cbar-
" bon, puis que sa busclic, ou charbon aura esté
« une fois à prix, ou assuré, nele pourra renchérir,
« ne mettre à plus haut prix. » (Ord. des R. de Fr.
T. II, p. 375.)
Assuyé, ;;nr/. Essuyé. (Ord. des R. de Fr. T. V,
page 118.)
Assyetaz, subst. masc. L'action de s'asseoir, de
se mettre à table. « Quant v vint à Yassiieta::, du
« disné. • (Lett. de Louis XII, T. 1, p. 200). On
disoit dans le même sens assiette et assire.
Ast, subst. masc. Vû{, bois de lance.
J'aime autant trieve comme ast,
Ou que bringnole.
B. N. iMS. fr. 837, fol. 174, V col. 1.
La citation est tirée d'un morceau intitulé
« Resveries » dans un Recueil de Fabliaux, (xm' s.)
Le sens général doit être : je préfère la paix aux
coups de bois de lance. Ilringiwle rimant avec
escole, serait mieux écrit brimjuole pour bricole.
Astans et présents, loeut. Assistans et pré-
sents. (Preuv. de l'IIist. de Beauv. par un Beaed.
p. 279; tit. de 1182.)
Astenant, adj. Abstinent, modéré. Le poète a dit :
Tele est il'amors poi.ssanco
Qu'ele fait l'orne antenaiit.
Désirer sans atrenprance (2)
Et fait hardi le doutant (3.)
Ane, Poe3. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1387.
Astenir, verbe. Abstenir.
Foie amor guerpirai, se m'en pois asienir.
Fal)l. MSS. du R. n- 7-218, fol. 339, R' c«l. 2.
CONJUG.
Astiegne, subj. prés. Abstienne. (Chasse de Gast.
Pheb. m. p. 398.)
Astens (me), verbe h la 1" personne du prés, de
l'indic. Je m'en tiens, je consens. « Si me astens
« à votre conseil, » (Percef. Vol. II, fol. 13.)
Asterean, subst. masc. Diminutif d'astre. (Voy.
les Poës. de Loys le Caron, fol. 44, R°.)
Asterion, subst. masc. Nom d'un animal. (4)
(Rabelais, T. IV, p. 274. —Voy. le Dicl. de Cotgr.)
Asterique, subst. masc. Astérisque. Terme
d'imprimeur. C'est une pelile marque faite en forme
d'Etoile pour les renvois à la marge. (Du Gange,
Gloss. lat. au mot asteriscus.)
Astinance, subst. fém. Abstinence, modération,
retenue. — Trêve.
Dans le premier sens, un poète a dit :
avoir mal aquis avance
Plus que ne fait astinance.
Poés. MSS. du Vatic. n' 1522, fol. 166.
En vos n'a point d'asienance.
Chans. MS. du G" Thib. p. 153.
En parlant de la prison de Richard, et des prières
publiques qui furent faites pour obtenir la liberté,
on dit :
Mandez fu as Evesques, mandé fu az Barons,
Et il li firent faire partout processions
Auraosnes, et geunes, et granz asiensions.
Rom. de Rou, MS. p. 80.
Ce mot a été employé sous les orthographes ate-
nanche et attenance pour trêve, retardement d'hos-
tilités ou suspension d'armes que les amis communs
obtenoient des gentils hommes qui étoient en
guerre. (Laur. Glbss. du Dr. fr. et Du C. Gloss. lat.
au mot Astenancia.) « A che, respondit Pierres, que
» il ne voloit pas les trives donner, car pour le fait
« que il proposoit, il estoit en attenanclie en vers
" lui par amis. » (Beaumanoir, p. 304.)
Attenance par amis, espèce de trêve, ou d'accom-
modement. (Gloss. sur les Coût, de Boauv. — Voy.
Dict. de Cotgr.)
VARIANTES :
ASTINANCE. Poës. MSS. Vat. n» 1522, fol. 160, R» col. 1.
ASTENANCE. Poës. MSS. av. 1300, T. IV, p. 138G.
AsTENsioN. Rom. de Rou, MS. p. 80.
AsTiNENCE. Ph. Mouskes, MS. p. 427.
Atenance. Thib. de Nav. poës. MSS. av. 1300, T. I, p. 86.
Aten.anche. Beaum. p. 30i.
Attenance. Gloss. sur la Coût, de Beauv.
Astipiilateur, subst. masc. Complaisant, flat-
teur. Mot formé du latin aslipulator (5) (jui est de
(1) Ilion. — (2) Tempérance. — (3) Timide, peureux. — (4) Sorte d'araignée; nous avons encore aatérie , étoile de
mer. (n. e.) — (5) C'est celui qui permet à une jeune fille d'entrer en religion, dans VOrdo Romanus. (n. e.)
AS
— 287 —
AS
même avis. « N'estoit point en ceste sienne per-
» suasion, sans y avoir aucuns aslipulateuis, et qui
n se servissent d'agréable, au lieu de véritable
« conseil. » (Mém. du Bellay, liv. VI, fol. 193, R°.)
Astisane, snbst. féminin. Nom de pays.
C'est le comté d'Ast en Italie, Comté û'Ast, ou de
V Astisane. (Godefr.Annot. sur l'Hist. de Charles VI,
p. 585.) « Laissa lesurplusde sa suite hl'Asti:^anne
" et en la duché de Milan. » (,,]. d'Aut. annal, de
Louis Xll, p. 289.)
VARIA.NTES :
ASTISANE. Godefr. sur Charles \'I, p. 585.
ASTiZANNE. J. d'Aut. Louis Xll, p. 289.
Astiveté (1), subst. fém. Activité, promptitude.
« Se mes serjant par se folie, ou par sastiveté,
« melTet en cas de criei::e (2), l'en ne s'en puet
« prenre à me personi ;, mes à lui qui lîst le
« meflet. » (Beaum. \ . i ï3.)
VAIUANTES :
ASTIVETÉ. Leaum. p. 143.
AsTiviTÉ. Iiict. de Cotgr.
Astniatie, adj. Asthmatique. (Dict. de Nicot.)
Astragale (3), subst. fém. Osselet.
« Tel os du talon à jouer à guise de dez. » (Voyez
Dict. de Monet.)
Astralabe , subst. masc. Astrolabe. (Voyez
l'Inveulahe des ducs deBerry, rapporté par Le La-
boureur au commencement de l'Hist. de Charles VI,
p. 79, où l'on voit l'e.xplication de ce mot donnée
dans le texte même.)
Nous trouvons ce mot pris dans un sens méta-
phorique très forcé, pour conduite; mais ces méta-
phores forcées sont communes dans nos anciens
poètes. Voici le passage :
Par tel don, par tel asiralcibe
Le Roi plus povre, et de là vient
Que tailler le Reaume convient.
Géofroi de Paris, à la suite du Rom. do Fauvel, MS. du U. fol. 53.
VARIANTES :
ASTRALABE. Le Laboureur, Hist. de Charles VI, p. 7'.i.
AsTRELABE (4;. Dict. de Cotgr.
AsTRALEiBE. Gecfr. de Par. à la s. du Rom. de Fauv. f. 53.
Atreslebe. h. de Fr. en vers, à la s. du R. de Fauv. f. 75.
Astrapade (5), subst. fém. Estrapade. Supplice
militaire. (Dict. de Cotgr. — Voy.Clem. Mar. p.424.
— Les Dialogues de Tahur. p. 13 et lesTriomp. de la
Noble Dame, fol. 58.)
Astre, adj. Plein d'astres. — Heureux. — Nom
d'une couleur. On trouve astre pour plein d'as-
tres, dans le Dict. d'Oudin. On ^Aiibien astre \iO\iv
bien heureux, né sous un astre heureux. « Je ai
« aussi le moyen de contempler à loysir, et de pré-
« cognoistre vostre gentille nature, et bien astrée
« inclination aux choses vertueuses. » (Alector,
Rom. Epil. de d. p. 3.) On voit mal astrée dans le
sens contraire, d'oîi l'on a fait malotru (G). Enfin
astrée éloit le nom d'une couleur. (Voy. le Dict.
Etym. de Mén. au mot Céladon.)
Astreiche, verbe à la 3' pers. du pr. de l'indic.
Serre, lie.
Dame moult séant, son pareil astreiche.
Percef. Vol. V, fol. IH, Y- col. 1.
Astrenomie, subst. fém. Astrologie. —Algèbre.
Dans le premier sens, on disoit fausses astrono-
mies. (Modusetltacio, ms. fol. 231, V) ou « astrono-
« mie au deable. » (Ibid. fol. 320, R°.)
Astrenomie est employée pour algèbre, dans les
vers suivans :
Cil set trop d'astrenomie :
Wistasses ne se doute mie.
Quant il passe le ré dun bos (7)
Tant i ait arbres, ne halos (8)
Qu'il ne cuit, tout deli, savoir
Quentes fuelles i puet avoir.
l'oés. MSS. avant 1300, T. IV, p, I3G0.
VABIANTES :
ASTRENOMIE. Poës. MSS. av. 1300, T. IV, p. 1360.
Astronomie. Orth. subsis.
Astrenomien, subst. mase. Astronome. (Voir
Hist. de Fr. à la suite du Rom. de Fauvel, ms. du R.
Il" 0812, fol. 79, V'col. 1.)
Astrenoinyer, verbe. Parler astronomie ou
prédire par le moyen des astres.
Ki bien set raisnier (9)
De compleusion d'astrenumyer (M)
Poës MSS. avant 1300, T. IV, p. 1297.
Xstvev, subst. masc. Serf ou vassal domicilié.
Qui proprement a sou àtre, son domicile, « Si le
« Seigniour soit seur que la prove (11) se fera en-
« countre le villein que il fuit son astrer resant (12)
« en son villeynage. •> (Britl. Loix d'Angl. f. 217, V.)
On lit » home astrer « au fol. 151, V°.)
Astrer, verbe. Rendre heureux.
Un ancien poète a dit dans le sens de faire naître
sous une heureuse constellation :
Pour bien astrer ta geniture.
Œuv. de Baif, fol. 225, R-.
(1) C'est un dérivé de hâte. (N. e.) — (2) Crime. — (3) Du grec darçàya'^oç, qui signifie proprement une des vertèbres dti
cou, puis un os du tarse. (N. E.) — (4) On trouve cette forme dés le xiii' siècle (CompuI, f" 16) : « En ceste manière saras tu
mesurer le lonc et le ley de totes coses par Vastrelabe. » Ce mot vient du grec daiçoXaGoi' [aarçov Xan6àyu>. prendre un
astre, prendre sa position). (N. e.) — (5) Ce mot nous est venu d'Italie au xvf siècle, oii cette torture fut appliquée aux
protestants. Sous François I" et ses successeurs, il y eut des estrapades à Paris comme il y avait des auto-da-fé en Espagne.
C'était une réjouissance populaire que présidèrent le roi et la cour eo 1523, 1535, 1560. On hait les mains et les pieds du
patient par une même corde, et on le suspendait à l'extrémité d'un poteau. Puis, à plusieurs reprises, on le bissait
retomber à deux ou trois pieds de terre, et le poids du corps disloquait les membres. C'est le supplice de la cale sèche, en
usage dans la marine de l'Etat jusqu'en 1850. Les protestants ne retombaient pas dans l'air, mais dans un bûcher aUumé
au-dessous. Le lieu de ces exécutions se nomme encore place de la Vieille Estrapade, (n. e.) — (6) Malotru vient par le
français mateslrut de malè instructus ; le provençal s'y est mêlé avec la forme malastrug, de ma!c, plus astruin, qui, dans
Pétrone, signifie la chance, (n. e.) — (7) Le long d'un bois. — (8) Bûches. — (9) Raisonner. — ,(10) Pour complections ou
influences. — (11) Preuve. — (12) Résident, domicilié.
AS
— 288 —
AS
Astriptz, partie. Astreint. (Voy. AsTUEir.!!!:.) Du
latin astricltis, obliîié. (Voy. les Coat. de Troyes,
au Nouv. Coût. gén. T. III, p. 283.)
Astrologe, suhst. fém. Astrologie.
L'auteur, aprèsavoir parlé de la grammaire et de
la logi(iue, dit :
Astrotoije des beneurtez, des raaiilx,
Des temps futurs juge natui-elment
Aux estoiles, et à son jugement.
Poès. MSS. d'Eusl. Desch. fol. 347. eol. 4.
Astrologie, suhst. fém. Astronomie. — Astro-
logie. L'astrologie ctoit prise pour l'astrologie
judiciaire. « Astrologie- est scienche qui enchier-
« que (11 les moyens des corps célestres, et si les
« monstre : astronomie est une science qui regarde
« les effets des corps célestes et si les observe. »
(Compilation de la science des estoilles par Leuppol
fils du Duc d'Ostriche, ms. de la Bibl. du R. n° 7095,
immédiatement après le prologue.)
Clém. Marot, p. 204, semble établir entre Vas-
t.rologie et l'astronomie la même distinction (jue
nous y mettons aujourd'hui.
Astrologien, su})st. mase. Astrologue et astro-
nome. (Dict. deCotgr. et d'Oud. au mot astrologien.)
Thomas de Boulogne est qualifié conseiller et
astrologien du feu roi Charles V dans Godefr.
Annot. sur l'IIist. de Charles VI, p. 790 et 7D1.
Astrologien (Vigil. de Charles VII, et Auils de
Strapar.) — Aslronomiens. dans la Chron. S' Denis,
î. Il, fol. 12, répond dans le latin au mot astrologi.
Le P. Labbe traduit aussi astourmiens par astro-
logi. (Gloss. p. 490.) Nos aslrologiens assignent
semblables, puissances et dominations aux corps
célestes. (.1. le Maire, Hlustr. des Gaules, Livre I,
p. 117.)
YAIUANTES :
ASTROLOGIEN. Vig. de Charles VII, T. II, p. 25.
AsTROLOGiENS.J.le Maire, Illustf. dss Gaules, Liv.I,p.ll7.
ASTR NOMIEN. Cotgr. Dict.
ASTROPHILE. Du Verd. Bibl. p. .56.
Astourmiens. Gloss. du P. Labbe, p. 49(1.
Astrologiqiiement, adv. A la manière des
astrologues.
Le vieiUard nous parloit aslrolorjiqueme.nt .
l.e feint Asir. Cora. du Th. de Corn. ad. II, swnc V.
Astrologiser, verbe. Prédire par les astres.
« Aulu Celle tenoit tel langage à ceux quicroyent à
« ce qu'ils entendoit arioler f2i, astrologiser et
« matliématiser, gardez vous de vous fier aux
« astrologues » (Co'ntes de Cholieres, fol. 190, Vv)
Astrologissime, subst. an superl. Très astro-
logue. Mot ridiculement forgé par un valet dans le
feint Astrolcgue du Th. Corn. act. n, scène n.
Astuce, subst. fém. Ruse, finesse. Industrie,
art. (Nicot, Oudin, Dict. — Orth. subsist.)
Sur le premier sens, voy. Dict. de Kicot et
d'Oudin, R. Est. Cotgr. et Gloss. de Marot. « Pour
« industrie, art ou métier trouverez peu de
« gens qui n'aient compassion de l'inconvénient
« d'un homme, ou femme, de leur astuce, état ou
« vocation. » (Les Triomp. de la noble Dame, f. 78,
V° et ])as.) On trouve luitntes dans Bor. et Corn,
qui l'expliquent par allechemens : ils dévoient lire
hastuces pour astuces, ruses, finesses.
ASTUCE. Nicot, Oudin, Dict. - Orth. subsist.
Hatute. Dict. de Borel et de Corn.
Asturcier, subst. masc. Fauconnier d'autour.
« La faulconnerie au devant d'icelles, gouvernée
« par asturciers bien experts dans l'art « (Rab.
Pronost. au T. Y.)
Asturcoy, adj. Qui est des Asturies. Nom
donné autrefois aux chevaux qui venoient des
Asturies. « Laquelle sorte de chevaux souloit (3)
« le temps passé, venir d'Espaigne, d'un lieu
« appelle Astnrie, et les appeloit on au moyen de
» ce asturcoy ou asturcon. » (Percef. Vol. 1, fol. 3.)
VARIANTES :
ASTURCOY. Percef. Vol. I, fol. 3, R»col. 1.
Asturcon. Ibid.
Asturs, locution. A cette heure, à présent.
(Marbod. col. 1014.)
Astut, adj. Fin, rusé. (Dict. de Cotgr. et Celth.
de Léon Trippault. — Epitliète de cautelle et de
malice dans les Epith. de Martin de la Porte.)
Asur, subst. masc. La pierre d'azur, dite lapis
kr.uli dans les Poës. de Rem. Bell. T. I, fol. G8, V°.
•^ .4x«J' est ainsi dit pour l'amour de l'air. » (Sic.
Blas. des Couleurs, fol. 28, V".) On lit Yazur d'aire
dans les œuvres de Théophile, I" part. p. 7.
On distinguoit trois couleurs d'azur suivant ce
passage: « Après ce, suivoit Lizeus qui son escu
« avolt paré de trois couleurs d'axw?'. » (Percef.
Vol. VI, fol. 74, R°col. 2.)
Guillaume de Machaut ,voulant expliquer la signi-
fication des couleurs en Amour, commence ainsi :
Saches de veoir qu'en tout endroit
On en escript armes c'est droit ;
La colour de pers est clamée
As\u\ elle est à droit nommée ;
Le rouge gueuUe, le noir sable.
Et le blanc argent ; mais sanz fable.
Je te di c on appel encor
Le vert sinople et le jaune or.
Machaut, MS. fol, 28, R' col. i.
Variantes:
ASUR. Dict. de R. Est. et de Cotgr.
Azur. Percef. Vol. VI, fol. 74.
Asurer, verbe. Peindre d'azur. En couleur
d'azur. (Dict. de Nicot, au mot asi/rer et Dict. d'Oud.
et de Cotgr. au mot a~urer.)
ASURER. Nicot.
AzuRER. Oud. Cotgr.
(1) Recherche. — (•-) Augurer et prédire. — (3) \.\o\\. coutume.
AT
Asupin, adj. Qui est de couleur d'azur ou de
couleur bleue.
Ses écrits tous d'or, tous asseurez.
Les Warg. du la Marg. fol. 3, R».
« Puis venoit le ciel, paille à fonds de draps d'or
« Irise, et les courtines de veloux cramoisi violet
« azuré. » (Mém. du Bellai, noies, T. VI, p. 133.) '
VARIANTES :
ASURIN. Nie. R. Est. Cotgr.
Azuré. Petit ,Iehan de Saintré, p. .360
AzuREUX. Poës. de Loys le Car. fol. 46 R»
AzuRiN. Monet, Oud. Cotgr.
AssEURÉ. Les Marg. de la Marguer. fol 3 R»
Adure. Lisez fir!„7i dans Geofr. de Paris à' la suite du
Rom. de Fauv. MS. du R. n»68i'2, fol. 54, V» coL 3.
Asyle, SMfcs^ rnasc. Franchise, immunité. iLaur
Gloss. du Dr. fr.)
Atabal, subst. masc. Tambour ù la moresaue
timbale. (Dict. Etym. de Mén., d'Oudin et de Cotgr.j
VARIAMES ;
ATABAL. Oudin, Dictionnaire.
Ataballe. Ibid.
Attabale. Cotgrave.
stagné, part, actif et passif. Parent, allié En
gênerai qui appartient, on à qui on appartient
Nous avons vu le verbe ataimlre, et ses orthoora-
phesdans la signification d-appartenir. « Ceux'^nui
« sont conjoincts, et attaiouans au deffunl des deux
« costez cest à S(;avoir de père, et de mère
" ensemble. .. (Coul. gén. T. I, p. 77.]
VARIANTES :
ATAGNE. Mot languedocien. (Borel, au mot Al/euir )
Attagne. Mol languedocien. (Du C. Gl. à Auiucuia)
p-tîiiiSrp'Sso '''"'''' ''''''''■ ^''''- •^■'«^«' ''"
Ataindi-e, verbe. Atteindre, obtenir. - Toucber
-oindre approcher. - Tenir, accomplir -1:
Appartenir, dépendre. — Convaincre. — Allectpr
Aveim atains dans S' Bern. Serm fr mss n ^Vi
repond au latin a;;;?7r/(«(d;s//. ' ' •l'-^^''
Ce mot, sous toutes ses orthographes, est visii,ie-
raent notre mot atteindre. 11 s-employoit ai t é fs
dans le même sens qu'il conserve encore ; il i " S 0
obtenir, parvenir à une chose. ^"nioii
Je n'ai rien en amour ataint.
r, ■,. _,. . P»*^'- WSS. av. 1300, T. IV. p. 1390.
De là, on disoit alcindre pour gagner la cause
^Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis t
Pour toucher, sonder une plaie, on disoit • . Car
« tout autre si comme li mires (1) pour pitié de
" maladie de cheli (>2) qui est entre ses^i ains
« l^se [^)katamdre bien la plaie de laquelle H^
doit ganr, le met en péril de mort, tout ai s
« etc. >. ^Beaumanoir, p. 8.) . Or, veuillez de votre
« amour actaindre. (4) » (Percef. Vol. V, fol Vl2
Pour approcher, on disoil au figuré : „ Jenescay
(1) Médecin ou chirurgien — l'2^ Pplni .qn «i„ . ,.
déjà d^,.. le., lois de Guillaiinie 11 '^f « F,f ^^'^"'ï"^ néglige
II.
59- AT
« don qui puisse attendre à celluy, et aussi il est
fol sr? ^T'^ '^^T P^"'' ™oy- » (Percef. Vol. lîî
101. 8o.) « Comme les vaisseaux des nostres ne
n-'^rT' n'^^'"'^'""' "e venir jusqu'à terre. (Cln
ft. MS. de Nangis, an 1249, p. 2.) i Prenoit paciem^
EUe ne puet plus bel veoir
We niU si preu ne si cortois
A Im n'aluint, ne dus, ne rois.
Athis, MS. f. H2, R. col. 1.
Pour tenir, accomplir, acquitter, on a dit: « Boni-
" l.ices, h marchisdeMontferrat, li requist ses
« convenances (5) que il U attendik. „ (vïïlehard
p. lus.j « Li Venissiens nous ont moult bien altev-
« dues nos couvenances. » (Ibid n 9^^] "^"
Pour appartenir, dépendre, on a dit": « du résidu
« des cous urnes, usages et manières au d t 1 ieï
" ri?fp'FT''"''?.'"^ coustumes géneralles de la
« dite Eglise et abbaye de Saint-Vaast, et aussy de la
..prevosté de Beauquesne auxquels ilss'fl/^mrfm^. »
(N Lout. gen. T. I, p. 422.) On lit à la page 420
« s niPff "ô'^'P «^"'i^'-ement pareille, . dont ils sont
o w ff'oL." '^"n^ " '^"-^'l^els i!.s s-attendent. »
On dit encore au Barreau >. atteint et convaincu »
fi.K .f même sens que .Joinville dit: « Tous
" ceul^ qu 11 pouvoit actaindre d'avoir fait aucun
" ^"^'^.'n serement il les faisoit griefvement
de i4i On îf'î?' '^i'"- '' Chaslillon, p. 14, tit.
Pernr^ mil p"*"' ^^ '"'^"'^ "t''*^ rapporté par
aueifées. ^"'^^ P' ^'^^^' «"-^«^^s (arguées).
Nous disons atteint de mal, et on disait de
même.- « de jeûner étoit si actainte, que sa couleur
« avoit perdue. » (Cer.deNev. i" part, p. 68.) C'est en
ce même sensqu'on lit : . Aucunschevaliers ontesté
■■ requis de cette besongne achever, moy-.nSmes
: ^"^"f/'"«'f de la meilleure, de' la plus beTle
« et de la plus discrette pucelle du monde, » c'est-à-
(Percif'vnfT r'i^'i^L ^X ^"'^ P«'''é P»'', etc.
(Feicel. \ol. V, fol. 4."), K°col.2.)
CONJL'C.
Aciaing, ind. prés. Atteint. (Crétin, p. 17 )
Aclainte, part, passé. (Gérard de Nevers! p 68 )
Magnant, part. prés. Atteignant, frappant. '
Si laisierenl lot seul Marsile
A petit de gent combattant,
El Rollans le vit atagnanf.
Ph. Mouskes, MS. p. 206 et 207
avaS'(i^i;;wrrî?'' ''"'"• 'pp''"^''^"'
(Faï'r5i;'!^.';^'S]i.^i!5lf'î?ïof'rr^""^^-
(Gonf .'îfr'"iA'^''P''';;''- ^'" sul'jonctif. Atteignissent.
(Gont. de G. de Tyr Marten. T. V, coi. 703 )
Ataintre, passe défini. Atteignirent. (K. de Brut.)
AT
290 —
AT
AteiH, ind. près. Atteint, joint.
Tous les encontre, et atent,
Moult si combat fièrement.
Huon d'Oisy. Poès. MS. avMl 1300, T. III. p. 1284.
Attaindist, passé dér\n\. Atteignist. (Percef. Vol.
11, fol. 34, H° col. 2.)
/l «a/HS/, passé défini. Atteignit. (Cont. de G. de
TyrMarten. T. V, col. 679.)
Attenoit, imp. de l'ind. Approchoit. (Ger. de Rouss.
MS. p. 58.)
Atienent,itià. prés. S'atteignent. (Arch. ms. f. 110.)
VARIANTES :
ATAINDRE. Du Chesne. Gén. de Chast. p. 14, tit. de 1231.
ACTAINDRE. Percef. Vol. V, fol. 112, col. 2.
Adaindhe. Poës. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1392.
Ateinure. Gloss. sur les Coût, de Beauv. Ord. T. I, p. 540.
Ateingre. S> Bernard, Serm. fr. MSS. p. 13.
Atenir. Athis, MS. fol. 96, V» col. 1.
Attaindre. Gloss. du Rom. de la Rose, au mot Atlalgue.
Atteyndre. Britton, Loi.x d'Angleterre, fol. 87, V".
Attendre. Percef. Vol. III, fol. 85, V° col. 1.
Atindre. Chron. fr. MS. de Nang\s, an i, chap. ix, p. 2.
Atainement, subst. masc. Persécution , que-
relle. " Par estrif d'alainement, et d'ennui que l'en
« lor faisoit. .. (Cont. de G. de Tyr Marlene, T. V,
col. 732. — Voy. Aatie.) Le mot Atahin est du
Breton. (Voy. Dii Gange, Gloss. lat. au mot .ym(I).)
variantes :
ATAINEMENT. Gloss. de Martine.
Atahir. Gloss. lat. de Du Gange, au mot Atia.
Atains, adj. Malade, faible. On disoit être ateint,
ou atains de maladie, d'où le mot atains fut em-
ployé seul pour signifier malade, affoibli par le
mal.
Estoit si noir, et si atains,
Qu'à paines se puet soustenir.
Fabl. MS. du R. n- 1218, fol. 4, R- col. 2.
Atainte, subst. fém. Atteinte. — Fin , but. —
Plainte en justice.
Au premier sens, c'est l'action par laquelle on
atteint, on frappe, on blesse. » Brochant son des-
« trier, s"enLrecoururent de telle roideur que, sans
« faillir d' atainte, le chevalier à l'escu aux bandes
<• faus(;a celuy de son ennemy. » (D. Florès de
Grèce, fol. cxx.xui, R°.)
On disoit en ce sens, faillir d'atteinte, pour man-
quer son coup. (Ess. de Mont. T. I, p. 420.)
On disoit aussi « pour prendre une grande at-
•' teinte, » pour atteindre loin, s'étendre.
Les tentes de toile tainte
Qui pourprenent si grant atainte.
G. Guiarl, MS. fol. 92, R'.
Dans le sens de fin, but ou approches, on
disoit : " Quiert au loing, de petit à petit , com-
« ment il puisl venir à ses atteintes. » (Froissart,
Liv. Il, p. 57.)
Aussi toujours il parvenoit.
Dix contre cent, à ses attaintes.
Vigil. de Charles VII, T. II, p. il.
Qui Dieu prie et sa Mère, et ses Saints et ses Saintes,
Jà n'est si loing de Dieu qu'il n'en viengne aux attaintes.
J. de Meung, Cod. vers 1440.
Dans le sens de plainte eu justice, accusation, on
disoit : « Aussi doit atteynte, remeindre au cas
« où le pleyntife est tenant del lenement, par sa
» intrusion. » (Britton, des Loix d'Angl. fol. 240.)
VARIANTES :
ATAINTE. D. Fier, de Grèce, fol. 133, R".
Attainte. Gloss. des .Arr. d'Amor.
Atteinte. Froiss. Liv. II, p. âl.
Attaincte. Coquillart, p. 138.
Atteynte. Britton, Loix d'Angl. fol. 237, R».
Atainter, verbe. Teindre, colorer (2).
Sousis, qui la chiere m'atainle
Me met ensi conplaindre et esmoier.
De la Courroierie, Poés. MSS. avant 1300, T. Il, p. 654.
VARIANTES :
ATAINTER. Poës. MSS. avant 1300, T. II, p. 654.
Attainter. Villon, p. 71.
Atteinter. Mémoires de Sully, T. XII, p. 308.
Atake, subst. fém. Attaque ou l'action d'atta-
quer. (Voy. le Bec. des Poës. mss. avant 1300, T. IV,
page 1350.)
Atancher, verbe. Cesser de couler. Nous disons
étancher, pour faire cesser de couler. On trouve
atancher pour cesser de couler, dans des Fabl. mss.
du R. ir 7015, T. II, fol. 109, V" col. 2.
Atanet, subst. masc. A'om de lieu situé en An-
gleterre (3).
D'autre part on l'ille Atanel,
U il faisoit moult biel, et net.
Ph. Mouskes, MS. p. 606.
Atant, adv. Alors. — Ainsi. — Lu, à ce point.
Employé dans le sens d'alors, les poêles ont dit :
Robin vers l'autre atant
Cort grant aleure.
Poës. MSS. avant 1300, T. III, p. 1359.
La ville, et chastel si rendirent ;
Et atant s'en partirent lors.
Vigil. de Charles VU, T. I, p. 181.
Dans le sens d'ainsi, nous lisons: « ^1 tant Allerie
" avoit mis fin ù sa nouvelle quand, sans attendre
« aucun commandement, elle raconta son énigme
« en ceste manière. » (Nuits de Strap. T. II, p. 284.)
Atant l'auteur, c'est-à-dire : •< Ainsi s'exprime l'au-
« leur. » (Pasq. Rech. Liv. IV, p. 360.)
Aient ai vostre commandement,
Si chanterai, par vos, joiaux et liez.
Poès. MSS. avant 1300, T. I, p. 159.
Avec le sens de là, à ce point, on a écrit : « Par
» grant dueil commença sa playe à seigner, et ne
<c resta par atant, car, de la grant angoisse qu'il
« avoit, le sang luy print à saillir par le nez. »
(Percef. Vol. V, fol. 33, V^col. 2.)
VARIANTES :
ATANT. Borel, Mén. et le Supl. au Gl. du R. de la Rose.
Atent. Poës. MSS. avant l'3U0, T. I, p. 159.
(1) Les formes aatie (Ph. Mouskes), ahutie (G. Guiart), hasiie (CuveUer), viennent de l'allemand liael, haine ; de là le dérivé
alinc, que donne aussi G. Guiart, les verbes aalir et alainer, le substantif verbal altaine (.1,1. 178. p. 69), allongé dans
attayneiiieut (,1,I. 108, p. 56). (n. e.) - (2) Les exemples suivants prouvent que laindyi: et ses composés étaient synonymes
de pâlir : « Dont raoult m'a fait pâlir et laindre » (Ch. de Couci, vers 3156); — « Fais mon vis taindre et pâlir, » (Laborde,
p. 218.) (N. E.) - (3) C'est l'ile de Thanet, à l'embouchure de la Tamise, premier séjour des Saxons, (n. e.)
AT
— 201 —
AT
A tanto. Terme de droit. C'esl-à-dire en partie.
« Droits censuels, et autres droicts seigneuriaux ne
« se peuvent prescrire à tôto, mais bien à tanto. »
(Coutumier général.)
Atarge, siibst. fém. Asile (1). Mot du Boulonnois.
Il signifie « retraite pour ceux qui s'estans trop
« retardez, ne peuvent entrer dans la ville. » (Dict.
de Borel.)
Atargement, sitbst. jnasc. Retardement. C'est
en ce sens qu'on a employé ce mot, dans le passage
suivant : « Le chevalier" s'en vint adressant par
« devant elle, et luy dist : pucelle, à vous me pré-
« sente pour vostre vouloir acomplir. Par ma foy,
« sire chevalier, dist la pucelle, maintenant j'en
« tenoye propos pouryo&tie atargement. » (Percef.
Vol. T, fol. 14.5, col. 1.)
VARIANTES :
ATARGEMENT. Percef. Vol. I, fol. 145, col. 1.
Atargier. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 93, V.col. 1.
Atarger, verbe. Tarder. — Retarder.
Atarger, dans S' Bern. (Serm. fr. jiss.), répond au
latin (li/ferre, eunctaii, remorari , tardare. (Voy.
sur le double usaf;e de ce mot : le Dict. de Borel, le
Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis, au moi Atarger,
et Du Gange, Gl. lat. aux mots Athargrati et
Targa (2).)
Dans le sens de tarder, on disoit :
Sur toutes autres vous désir,
Tant que je seray vray martlr
En amours, sans plus alargier.
l'of-s. MSS. d'Eùst. Desch. fol. 19Î, col 1.
« Fust toutes fois la besongne attargiée par les
« dessus dils seiuneurs. >• (J.Le Fev. de S' Remy,
Hist. de Charles Vl, p. 87.)
VARIANTKS :
ATARGER. Poës. MSS. avant 1300, T. III, p. 1-268.
Att.arger. Monstrelet, Vol. I, fol 17, V".
Atarjer. Estrab. Fabl. MSS. du H. n» 7996, p. 61.
Atargier. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 192, col. 1.
Att.argier. Le Fev. de S' Remv. Hist. de Ch. VI, p. 137.
Atarder. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 227, V» col. 2.
Atarzer. S' Rernard, Serm. fr. MSS. p. 62 et passim.
Ataster, verbe. Tàter.
Vint atastant Sire Combers
Au lit, etc.
Fabl. MS. duR. n- 7089, fol 2il, R° col 2.
Ataus, subst. 7nasc. pliir. Etaux. « Nuz ne soit
« contraint de lever nos rtffl;;sdou marchié. « (Ane.
Coût. d'Orléans, à la suite de Beaumanoir, p. 466.)
Ataut, subst. masc. Une Bière. Dans le patois
languedocien. (Dict. de Borel au mot Athaver.)
Atefi, subst. Ce mot paraît signifier art, dans les
vers suivants :
Le patrimnne à Crucefi
Par les goles vous ont loié
Cil qui sovant ont rimoié :
Dieu lessie par son atefi ;
Dou remenant vous di je fi ;
N'en aurez plus, je vous afi.
B. N. MS. fr. 1593, fol. 10-2. V- col. 1.
Peut-être doit-on corriger artefi et lessient : les
poètes abandonnent Dieu pour leur art.
Ateignanz, adj. Emu, palpitant, haletant.
Cueur bateiz, et ateignanz (S).
Parlon. de Blois. MS. de S. Germ. fol. 155, V. col. 3.
Ateiver, verbe. Attiédir, devenir tiède. (Voyez
S' Bernard, Serm. fr. mss. p. 301 et 361.)
VARIANTE :
Atevir. S' Bernard, Serm. fr. MSS. p. 301 et 361.
Atel, adj. Tel. — Tellement, disposé.
Seignors, je ms sens si atel,
Que jo mourrai, je croi, ennuit (4)
Hisl. de Fr. en vers, à la suiie du R. de Fauvel, MS. du R. fol. 86.
Atelé, partie. Pourvu. On disoit d'un chasseur,
passant avec sa meute. « S'en va de chiens bien
« atelé. » (Voy. Gace de la Bigne, ms. fol. 107, V°.)
Atempreure, subst. fém. Trempe. « Espéetem-
c Tporel si eaià'iiuU'e atempreure. «(Beaura. p.261.)
Atemproire, S!//^s^ Pièce d'un moulin (5). Dans
une poésie qui comp^ire un moulin aux vantards
et aux menteurs, on lit :
. . . Wauteles Eskitezounes,
De li vauroie faire atempi-oii-e
Pour cou que nus ne le puet croire.
Poës. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1362.
Atendrier, verbe. Attendrir. — Affoiblir.
Le premier sens : Attendrir est le plus usité :
Ce me font aprendre
Dont fine amours puet plus atendrier.
Laralierl Fcrris, Poês. MS. avani 1300, T. I, p. 294.
Vous me priez et requérez d'amours,
Et me faictes vos piteuses clamours
Qui font, vers vous, mon cuer atendrier.
Poës. MSS. d'Eust. Desch. fol 192, col. 3.
Tant li atenria 11 cuers.
Hist. des Trjis Maries, en vers, MSS. p. 210.
Vus fils en aki m'atenrie.
Ph. Mouskes, MS. p. 762.
Borel rend le mot atténerir par atténuer, sans
doute dans le sens d'affoiblir, comme dans le passage
qui suit : <■ Trop tenir la bride roide aux jeunes
o gens leur fait souvent affoiblir, et aetendrir
« îe cueur, et les fait devenir lasches et songeurs. »
(Jouven. MS. p. 46.)
vjvriantes :
ATENDRIER. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 192, col. 3.
Atenrier. Ph. Mouskes, MS. p. 762.
(1) Ce sont des mâts munis d'échelons, plantés sur les plages sablonneuses et bordées de dunes du nord de la France :
miand on monte à leur sommet, on dépasse le niveau des marais. On plante de ces sortes de mâts le long des côtes de
Poitou, d'Aunis et de Saintonge. Ces mâts ont des noms spéciaux dans chacune de nos provinces maritimes. (N. E.) —
(2) Le dernier éditeur de Du Gange, Hœnschel, redresse cette confusion entre tardare et atharijrati ; ce mot, qu'on trouve
dans la loi des Bavarois (titre 3), vient de .ider, veine, et de kratzen{<l'o\x gratter), ouvrir. Il ne faut pas non plus réunir targe
(targa), mot d'origine allemande, signifiant concilier, avec targer, fait sur tardicare. La forme atarrje se trouve dans la
Chanson de Roland, str. xxil. (N. E.) — (3l Cœur qui bat. — (4) Je mourrai en ce jour, aujourd'hui. — (5) Lisez atemptoire ;
ce mot sliinifie entreprise, comme atemptorium dans Du Cânge. La forme pourrait aussi être ad temporalia, ce qui se fait
en temps voulu, (n. e.)
AT
- 292 —
AT
Attendrier. Hist. de U. du Guescl. par Men. p. 201.
Attenduver. Ibid. p. 71.
Attenkrir. Horel, Dict.
AcTENDRiR. Jouvencel, MS. p. Wi.
Aténébi'ir, verbe. Obscurci. — Être obscurci.
On lit parmi les présages de la mort de Charle-
magne :
Le Solaus, et la clere Lune,
Que Dieux a fait partout coumune,
Par huit jors continuelment
Furent oscuri durement,
Iço fu une grans merveille,
?or totes autres non pareilles,
Et li jours [u aténébris
Ph. Mouskes, MS. p. 302,
L'air entour eus aténcbrist.
De sa fumée et des alainnes.
G. Guiarl, MS. Toi. 131, R*.
Atenerge, partie. Attendri, affoibli. C'est le
participe d'aténérir. (Voy . les diverses orthographes
du verbe atendrier.)
jitcner(jc furent li oel,
N'i avôit ore point d'orguel.
Vio des SS. MS. de Sorb. chif. L. Lxi, col. 15.
Ateneusement, adv. Avec animosité. (Voyez
Aatine, At.unr.)
Geste besoingne
Emprise ateneusement.
G. Guiarl, MS. fol. 32, R«.
Atenir, verhe. Tenir, avoir, posséder. — Entre-
tenir. — Etre proche, avoisiner. — Etre pa.eiit,
appartenir.
Dans le sens de tenir, on trouve :
Miex aiai de li avoir dure pensée,
Que d'une autre grignors biens atenir.
Poès. MSS. avant 1300, T. III, p. 1006.
On lit attenir pour entretenir, dans le Gloss. sur
les Coût, de Beauvoisis.
Ce même mot si;jnifie aussi être proche, avoisi-
ner, et même appartenir, dépendre. (Du Gange,
Gloss. lat. au mot Attinere.) Labbe, dans son Gloss.
p. 490, traduit aussi attenir pour attinere.
Enfin les deux orthographes ont été employées
pour être parent. « Appartenir de parenlage, ou
« alliance. » (Voyez Dict. de Monet, .Nicot', Rob.
Estienne, Borel et Cotgrave, au mot Attenir. —
Voy. Du Gange, Gloss. lat. au mot A ttinentia.) Le
dixième article des chefs d'accusations intentées
contre les Templiers étoit que leur ordre ne devoit
'< aucun enfant batisier, ne lever des sains fons,
<> tant comme ilz puissent atenir. » (Chr. fr. ms. de
Nang. sous l'an 1310.)
On l'a employé pour appartient, dans ces vers :
Mieux me plairoit avoir emprins la queste
De retirer par une grand conqueste,
Des mains des Turos le Troyen territoire,
Qui nous allient, par droit ample et notoire.
J. Le Maire, suite de l'UIustr. des Gaules, p. 375.
VARIANTES :
ATENIR. D. Morice, Hist. de Bret. p. 935; tit. de 124S.
Attenir. Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis.
Atenri (I), ailj. Enclin. (G. Guiart, ms. fol. 23, V°.)
Le poète a dit dans ce sens :
Par quoy l'Emperere Henris
Del retraire fu atenrix.
Ph. Mouskes, MS. p. 535.
Atenu, partie. Tenu obligé, redevable. « U vous
« est si atenu des faveurs. » (Negoc. de Jeann.
T. II, page 472.) « Tant que l'ame fera résidence en
« ce mien corps, je m'en sentiray leur redevable,
« et attenu. » (Pasq. Rech. p. 871.) <> Je vous suis
« bien atténue. » (Moyen de parvenir, page 61.)
VARIANTES :
ATENU. Negoc. de Jeann. T. II, p. 472.
Attenu. Pasquler, Rech. p. 871.
Ater, verbe. Elever. (Voyez Atir ou Aatir.) Ce
mot a été employé avec ce sens, dans ces vers :
Le Roi de la lune embraça.
Ses piez, et ses mains il ata (21.
Fabl. MSS. de S. Germ. fol. II, V col. 2.
Aterei* (s') (3), verbe. S'Adonner. — S'avancer,
s'approcher, arriver.
Mon cuer si m'a donné matere.
Et me semont que je matere
Et qu'à un ditié ferai essai.
Fabl. MSS. du R. a' 7218, fol. 238, R" col. 1.
Atermer, verbe. Donner terme ou délai. —
Assigner un terme, terminer. — Fixer, placer,
poster. — Remettre, différer le terme. — Enceindre.
Nous trouvons ce mot avec le premier sens, dans
le Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis.
Dans le sens d'assigner un terme, on a dit : « Se
« aucuns se plaint d'un autre ù la justice d'héritage,
« la justice li doit mettre jour, et se cil qui sera
« atermés deffaut, cil (lui se plaint doit dire en tele
« manière: Sire, je vous requiers droit. » (Ord.des
R. de Fr. T. I, p. "159 ) On hiatenniner {lb\â.) dans
le même sens. « Celluy jour mesme, le Roy Artus
« atténua ses hommes qu'ilz fussent à Karmaiot,
« et ilz y vindrent. .. (Lanc. du r..ac. T. III, fol. 139 )
Dans ce même sens, on disoit aterminer pour
assigner le jour d'un jugement. (Du Gange, Gloss.
lat au mot Adterminave .) ou pour fixer le jour
d'une bataille. (Lanc. du Lac. T. Ili, fol. 53.) On
disoit atermoyer (4) pour fixer un terme à un débi-
teur. (Du Gange, Gloss. lat. au moi Aterminare.)
Dans le sens de fixer, placer, poster, on disoil :
Si divisa Dunoy l'armée.
Et en fist illec deux batailles,
Dont l'une si fut alnrmée.
Près li gibet, vers les murailles,
Vigil. de Charles VII, T. III. p. 60.
(Voy. Du Gange, Gloss. lat au mot Acterminare.)
Dans le sens de remettre, différer le terme, on a
dit : « Vrament il y a assez longtemps que vous
(1) C'est une variante orthographique d'attendri, (n. e.) - (2) U faut lire, pour la rime, U aca. (N. E.) - (3) C'est
le français f(»(;)Tec, écrit à iori altérer dans le Dictionnaire de l'Académie, puisque terra en est la racine; je m'atere
signifie donc je m'applique, je m'attache comme le laboureur à la terre. (N. e.) — (4) .ilennoifer fait sur ternie, comrae
rudoyer sur rude, ne se rencontre guère avant le xvi" siècle; il est bien plus récent qa\il.:nnin jr, qu'on trouve dé.»
le XII' siècle, (.n. e.)
AT
— 293 —
AT
« m' aUermmjex; je vous prie que ce soit à cette
« heure. » (Moyeu de parvenir, p. 165.)
Enfin on a employé ce mot pour enceindre, dans
les vers suivants :
La ville assiéent,
Oui lors estoit bel alermée.
De deux paire de murs fermée.
G. Guiart, T. I, p. 196.
VARIANTES :
ATTERMER. Du Gange, Gloss. lat. au mot Acterminare.
Atermineb. Ibid. au mot Adterminare.
Atermoyer. Ibid. et Colgrave.
Attermer. Lanc. du Lac, T. IIL foL 1.39, R" col. 2.
Atter.moyer. Moyen de parvenir, p. 165.
Aterminer, verbe. Fixer, dessiner.
Li lit furent apariUié
Tout premerain
Qui la joie ont désirée
Que. . . . lor a aterminée.
Arch. MS. fol. 56, V col. 2.
Atermoyement, subst. masc. Terme pris
avec ses créanciers pour le payement d'une dette.
(Dicl. de Cotgr. atermynement de dettes. — Carta-
magna, fol. 141. — Voyez Atter.moyeur.)
VARIANTES :
ATERMOYEMENT. Cotgrave.
.\TER.MYNEMENT. Cartamagna, fol. 141, H".
Aternis, adj. au masc. plur. Ternis, obscurcis.
(Voy. Moiiiiet, p. 441.)
Athalac, subst. masc. Drogue. Matière qui
entre dans lesL-oinpositious chimiques. (Voy. Merlin
Cocaie, T. I, p. 65(5.)
Athaner, verbe. C'est encore un dérivé de
Atine (Voir ce mot). Tuer. (Voy. Dict de Borel,
Cotgrave.) Le Cellheil. de Léon tripp. dit que c'est
un "mot en usage en Bourgogne.
Athas, subst. masc. Nom propre d'une divinité.
C'est peut-être Datan, compagnon de Coré et
d'Abiron. On lit d'Abyran dans les vers qui suivent
le passage où le mot .ithas est employé :
Ou temple d' Athas pourras advertir,
Aux ydoles qui seulent de ce voir
Par leurs respons doubles, et amortis
Les requerraiis.
Focs. MSS. d'Eust. Desch. fol. 7, col. i.
Atheiste, subst. masc. Athée. (Voy. Dict. de
Monet, d'Oudin et de Cotgrave au mot atheiste. —
La Sagesse de Charon, p. 310, et Apol. pour Héro-
dote, p. 118, etlesLeltr. de Pasquier, T. III, p. 283.)
VALANTES :
ATHEISTE. Oudin et Cotgrave.
Ateiste. Les Touches des .\ccords, p. OL
Athéen Pasquier, Lett. T. III, p. 283.
Atheisterie, subst. fém. Athéisme. (Voy. Dict.
de Cotgrave. — L'Apol. pour Hérodote, p. 48.)
Athenienciens, subst. masc. plur. Athéniens.
(Voy. les Poës. mss. d'Eust. Desch. fol. 547.)
VARIANTES :
ATHENIENCIENS. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 517, col. 4.
Athenie.nsiens. Ibid. fol. 118, col. 4.
Atheologien, subst. masc. Impie. Dans le
sens propre, ce qui est contraire à la théologie :
" Ainsi que le diable ne manquejamais de passages
« de la S" Escriture, aussi ce granl Alhcologien,
« pour revestir sa détestable opinion de quelque
« prétexte, s'aide de quelques exemples du vieux
« testamment. ■> (Pasq. Rech. Liv. 111, p. 316.)
Athie, subst. fém. Nous trouvons Atliie ta dé-
solée comme expression proverbiale.
Athie, adj. C'est une variante d'aatie. (Voir
Atine.) Qui est en langueur. (Dict. de Borel, et de
Cotgrave.) Celthell. de Léon Trippaull dit que c'est
un mot usité en Bourgogne.
Atholaïcas. Ce mot singulier se trouve employé
et expliqué dans le passage que nous allonsrappoV-
ter: « E le lieu ou l'escriplure fu posé, si estoit
» l'oralorie ou Adam pria Dampnedeu , a donc
« li dist li Angles, Saloaion Jeopte command que
« tu facetz iloques une meson de oreyson , et
•< sera appellée la meson de Dampnedicu. Ensi fu
« ceste chose seue, qi list entendre à ceux qi vin-
« drent après lui, et Salomon appella ceste lettre
« Athotaïcas, ceo veut dire lettre sa doctrine,
« ces livres fut lescripiure que Selh escrit à son
« doi. » (Hist. de la S" Croix, ms. p. 12.)
Ati, subst. masc. Sa signification est peu déter-
minée dans ces vers :
Au llun .lordan en va Marie :
Le (1) nuit i prist herbegerie,
Bien près del rnostier S' .lehan
Sor le rive del flun .Tordan
Se herbega, sans nul ati :
Un de ses pains mangu demi;
But de l'iaiie sainte fle.
Vie des S3. MS. de Sorb. chilT. Liv, XI, col. li.
Peut-être le mot ati doit-il s'entendre ici dans
quelqu'une des significations du mot Aatie (2).
Atif er (3), verbe. Coiffer, parer la tète des femmes.
Ajuster. (Voy. Dict. de Nicot, Monet, Borel, Ménage
et Cotgrave.)
VARIANTES :
ATIFER. Nuits de Strapar. T. II, p. 361.
Attifer. Monet, Cotgrave, Borel.
Attiffer. Nicot, Monet.
Atyfer. Celthell. de Léon Trippault.
Atiffet(4),'s^(?>s^ luasc. Coiffure, ajustement, pa-
rure de tête. Ornement, ou parure de femmes.
Alilfet des demoiselles, etc., est le litre d'un livre
composé par Guill. Taissonnien. (Voy. du Verd.
(1) C'est là un manuscrit picard qui emploie l'article féminin pour le masculin, (.v. e.) — (2) La signiQcation est doule ur
(Voy. Atine). On nous parle ici de S'" Marie-Madeleine se retirant au désert, (n. e.) — (3) Attifer vient du flamand tippen,
couper le bout des cheveux ; en ancien anglais, tife signifiait parer la tête. (.N. e.) — (4) Ou appelait ainsi, au XVF siècle, des
cercles de fer qui soutenaient la passe d'un bjnnet, fort porte en ce temps là par les dames désireuses de paraître sévères
en leur mise; c'est ainsi que sont le plus souvent coiffées Marie Stuart et Catherine de M.JJicis. Il ne faut pas confondra
ïatifet avec l'arcelet, moins élevé et qui relevait seulement la chevelure aux tempes, (n. e.)
AT
294 —
AT
Bibl. p. 510.) Brantôme, parlant de la mort de Marie
Stuart, dit: « Le Bourreau lui donna un cjrand
« coup de liache, dont il lui enfonça ses aUifcts
n dans la tôle ; laquelle il n'eniporlaqu'au troisième
« coup. » (Dames Illustres, p. 153.)
VARIANTES :
ATIFFET. Du Verd. BiW. p. 510.
Attifet. Brantôme, Dames illustres, p. 153.
Atvfet, Celthell. de Léon Trippault.
Attiffement. Dict. de Robert Estienne.
Atille, subst. masc. Nom propred'liomme. Peut-
être Altila?
Ou est Atille le tyrant ?
Poës. MSS. d'Eust. Desch. fol. iH. col. 3.
Atiller (1), verbe. Disposer.
Puis cà li amer s'atil'.e
Ne li caut ki le soucourre
Poês. MSS. avant 1300, T. III, p. 1040.
Le commun maint engin atille,
Por geter en l'ost par dehors.
Hist. de Fr. en -vers, à la suite du Rom. de Fauvel, MS. du . fol, 75.
VARIANTES :
ATILLER. Poës. MSS. avant 1300, T. III, p. 1040.
Attiler. Cotgrave, Dict.
Atiltrei", verbe. Placer, poster, aposter, dispo-
ser. Qualilier. InUtuler.
Au premier sens, ce mot s'est dit anciennement
des chiens placés au passage des sangliers qu'on
chassoit, d'où il a été transposé à l'artillerie :
Et veist on lor à Tung tendre les teilles,
L'autre tenir les lévriers atiltrez.
Mectre soubdain le sangler aux abboys.
Hue;ue Satol, Poës, MS. de chas. Roy. du sanglier discord par François I", p. 24.
« L'artillerie du dedans ne pouvoit nuire aux
« ennemis, et ne se osoient monstrer ceulx de la
« place à la défense delà Brèche, car estoit subject
« aux monlaignes, où les Gennevois avoient faict
« leurs remparts, et la leur artillerie atUtrée. «
(D'Auton Annal, de Louis XII, de 1.506 et 1507,
p. 74.)
On a dit aussi atiltrer avec le sens de qualifier.
tVoy. Savar. de l'Epée française, p. 3.)
Enfin on l'a employé dans le sens propre de son
étymologie, pour intituler. Clément Marot, dans la
préface à la tête des œuvres de Villehard. p. 5, dit :
« Outre plus trouvères les mots obmys
» remys,... et les tiltres myeulx atlittrés. »
VARIANTES :
ATILTRER. Jean d'Aut. Annot. de Louis XII, p. 74.
Atistrer. Crétin, p. 230.
Attistrer, Ibid. p. 135.
Attilther. Clém. Marot, préf. des Œuv. de Villehard, p. 5.
Atiné, partie. Pourvu, muni. » Ung tant bien
« chastil.... moult atiné de Gantes. » Percef.
Vol. III, fol. 5, R» col. 2.)
Atliiter, vcrlje. Ajuster, orner, équiper. — Dis-
poser, arranger. — Coiffer, enivrer.
Le sens propre est ajuster, équiper. « Si tost qu'il
" fut armé et atinté, il monta à cheval, la lance au
« poing. » (Percef. Vol. III, fol. 5, R- col. 2.)
Besoin sera que je Vatlincte
Comme si ce fut pour un comte.
L'An, dos sept Dames, cité par Borel, Dict. au mot Atinclé.
Ce mot a signifié aussi accommoder, disposer,
arranger : « Je vous prie que vous atintiez si bien
« tout, que vous n'ayez point de besoin de vous
« excuser sur dire ijue vous ne cuidiez pas qu'ils y
« vinssent. » (Duclos, Preuv. de Louis XI.) « Elle
" les mist en une bouteille juste, l'estouppa, et
" attintn pour la porter sûrement. ■> (Percef. Vol.
VI, fol. 117, R''col.2.)
Enfin altinter, pris au figuré, se disoit pour
coiffer, enivrer, comme on le disoit en parlant de
vin bu avec excès : « Pippes et tonneaux, plains de
« vin furent là mis sur le cul, et deffoncez, pour
•■ altinter les testes de ceulx qui debvoient aller à
« l'assault. >• (J. d'Auton, Annal, de Louis XII, p. 44.)
Attintées a été aussi employé avec le sens
d'ajustées: « Quand donques toutes les trois déesses
« furent prestes et attintées, chacune s'esleva de
« terre, et .se meirent en la voye. » (.F. Le Maire,
Illustr. des Gaules, Liv. I, p. 97.)
VARIANTES :
ATINTER. Duclos, Preuv. de Louis XI, p. 373.
Atincter. Dict. de Corn.
Attincter. Borel, citât, au mot Atiiicté.
Attinteler. Percef. Vol. III, fol. 23, R» col. 1.
Attinter. Monet, Nicot, Cotgrave.
Atinté, participe. Paré, orné, ajusté, équipé.
<■ La fist coucher en un lict li plus noblement atinté
" qu'il peust faii'e ordonner. » (Percef. Vol. III ,
fol. 128, R" col. 1.)
Sera aujourdhui atlincté
Comme ung duc, comme ung conneslable.
Coquillarl, p. 16.
« 11 fist son armée par mer non grande ; mais de
" peu de navires forte, et puissante, bien attintée,
» et garnie de gens preux et vaillans. » (Ilisl. de la
Toison d'Or, Vol. I, fol. 78.) « Y trouva trois beaux
« bains honnestement, et richement attintelez. »
(Chron. scandai, de Louis XI, p. 120.)
variantes :
ATINTÉ. Percef. Vol. III, fol. 128. R» col. 1.
Attincité. Coquillart, p. 16.
Attinté. Hist. de la Toison d'Or, Vol. I, fol. 78.
Attintelé. Chr. scandai, de Louis XI, p. 120.
Atii'éement, adverbe. Avec ordre. Atiréement
et par ordêtie, avec ordre et par rang ; en latin
disposite et in ordinem. (Dans la RegL de S' Ben.
lai. fr. MS. de Beauvais, chap. ii.)
Atiremcnt, subst. masc. Arrangement. —
Traité, accommodement.
On trouve atirement expliqué par dispositio ,
distribtitio dans la Rède de S' Ben. lat. fr. ms. de
Beauvais. « Atiremens des psalmes, distributio psal-
" morum. » (Ibid. chap. xviii.)
(1,1 Atiller a le sens d'artilla- ; on trouve dans Du Gange altillium et altiltiatoi: (.\. e.)
AT
295 —
AT
Lors firent tel atii-ement
Que Guillaume pour Iveri
Prist Brionne, et si li guerpi.
Ph. Mouskes, MS. p. -175.
On lil attirs des armes dans Brilton des Lois
d'Angleterre, fol. 42, pour préparatif de combat. Le
P. Martène, dans son Glossaire, explique atirement
par composition,
De \h, il résulte qu'il faut expliquer autrement
que l'éditeur des Ordonnances le mot attirement,
dans le passage suivant: « Li attirement que le
« Roy a fait des monoyes est liex. >■ (Ord. des Rois
de France, T. I, p. 94.) L'éditeur dit dans une note :
« L'attirement estoit ce semble une ordonnance
« par laquelle le Roy attiroit à ses hostels les mon-
« noyés à refondre, ou reformer, ou c'estoit plustost
" une ordonnance par laquelle le Roy remetloit, ou
" attiroit les monnoyes affoiblies à leur juste
« valeur. >> Le mot attirement est ici pris dans le
sens d'ajustement, arrangement, ordre.
Dans le sens de traité, accommodement, ce mot
se trouve dans Duchesne. Gén. de Béthune, p. 134 ;
titre de 1247.
VARIANTES :
ATIREMENT. Reg. de S' Ben. lat. fr. MS. de Beauvais,col.22.
Atihance. Duchesne, Gén. de Béthune, p. 134 ; tit. de 1247.
Attire.ment. Ord. T. I, p. 94.
Ativement. (Lisez aliremcnt.y'Reg. de S' Ben. ubi suprà.
Attirs. (Plur.) Britton, Loix d'Angleterre, fol. 42, R<'.
Atirer, verbe. Préparer, apprêter. — Ajuster.—
Prouver. — Traiter, composer, arrêter. — Avancer.
Ateiver, dans S' Bernard, répond au latin covipu-
nere, disponere.
Dans le sens de préparer, apprêter, on a dit:
'< De ceux qui cmblaunchent quirs a escient de
« bestes emblés, de redoublours achantaunlz ù
« scient dras emblés, et les attire en autre forme. »
(Britton, Loix d'Angl., fol. 71, V°.)
On disoit aussi ^'atirer pour s'ajuster :
Mi cavalier de prime barbe
Si n'ont cure d'escouse barbe ;
Mais armes, et cevaus désirent
Et les Biaus de ras dont ils s'atirent
Ph. Mouskes, MS. p. 145.
Parlant de l'ajustement des femmes aux anniver-
saires pour donner de l'éclat à leurs yeux et à leur
figure, un poète a dit :
Voyez comment elles scaivent tout leur corps attirer.
J. de SIeung, vers 1219.
Dans le sens de procurer, on a dit : « J'ay por-
« chasée, et atirié. »
Qu'en sospirant m'en vois au port.
Poes. MSS. avant 1300, T. III, p. H3i.
Selon le Gloss. du P. Martène , atirer et attirer
signifioient : traiter, composer, arrêter. Ph. Mous-
kes, parlant de l'entrevue d'Henry, Roy d'Angle-
terre, et de Ph. Auguste, dit en ce sens :
Li parlemens lues (1) asanbla,
Si lirent pais, et aiuerent,
Si com leur hom devisèrent.
Ph. Mouskes, MS. p. 508.
La pès fù atirée (2). (Contin. de G. de Tyr Martène,
T. V, col. 634.)
Enfin on disoit s'atirer pour s'avancer, « à lui
« satire. » (Gace de la Bigne, ms. fol. 07, R°.)
VARIANTES :
ATIRER. Ph. Mouskes, MS. p. 145.
Ateirer. S' Bern. Serm. fr. MSS.j). 125.
Atirier. Poés. MSS. avant 1300, T. III, p. 1134.
Atteiœr. D. Carp. S. au Gl. de Du Gange, à Alirimentum.
Attirer. Britton, Loix d'Angleterre, fol. 71, V».
Attirier. Ger. de Roussillon, MS. p. 114.
Atirés, part. Orné, paré. — Exécuté. — Mal-
traité.
Dans le premier sens, d'orné, paré, on employoit
aussi le mot tiré, qui n'est peut-être qu'une con-
traction du mot ati)'é, dans celle acception.
Ph. Mouskes, parlant du sacre de Louis VIH, dit :
.... Messire Loeisvint
Si atirés, cora lui convint.
Ph. Mouskes, MS. p. 051.
Atiré, pris dans le sens d'arrangé, réglé, s'est dit
aussi pour exécuté, en parlant du testament de
Charlemagne.
Tôt ensi com li Rois ot dit,
Fti atiré, sans contredit.
Ph. Mouskes, MS.
Enfin nous trouvons rt//»'e', attyré, pour ajusté,
accommodé, et au figuré pour maltraité. « Battuz,
« emprisonnez, on autrement si attire:^ qu'ils ne
" pussent servir. » (Britton, des Loix d'Angleterre,
fol. .Vi.) « Chemins debrisés (3) ou autrement maie
- attirez. -. (îbid. fol. 31, R°.)
VARIANTES :
ATIRÉS. Ph. Mouskes, MS. p. a54.
Atirée. Gloss. du Roman de la Rose.
Attiré. Britton, Loix d'.\nglelerre, fol. 52, R".
Attyré. Ibid. fol. 31, R».
Atisement, subst. masc. L'action d'attiser,
d'embraser. — Instigation.
Au premier sens on disoit, en parlant des pein-
tures qui étoient sur la tente de Sadoine (4) :
Escrit i sont le jugement
D'amors, et li atisement
Des acolers, et des baisers
Des dames et des chevaliers,
Et li grant soupir des puceles.
Blanch. US. de S' Germ. fol. 187, V col. i.
Au figuré, pour instigation, agacement, provoca-
tion, l'action d'inciter ou d'exciter. (Voy. Dict. d'Ou-
din, au mol Attisement.) « Fut donnée en mariage
« par \'atisement de la Cour de Rome ii Henry. .>
(Chron. de S' Denys, T. I, fol. 270.) « Pour Vattise-
" ment (5) de sa femme, le mary qui est de noble
" courage et haut, se combat en camp. » (Les 15
Joyes du Mariage.)
VARIANTES :
.\TISEMENT. Chron. S' Denys, T. I, p. 270, V°.
Attisement. Oudin, Dict.
Atiser, verbe. Attaquer, exciter, inciter. On a
dit atisa (0) dans le patois breton. Voyez le Gloss. de
(1) Sur le champ. — (2) La paix fut arrêtée. — (3) Rompus. — (4) Dérivé de Sade (Sapidus), agréable, employé comme
nom propre dans les allégories du moyen-âge. (n. e.) — (5) L'Editeur l'explique à la persuasion de sa femme, et on lit en
marge invitation. — (6) Le mot vient du bas-latin atticinari, dérivé lui-même de titio, tison. (N. E.)
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- 296 —
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ruist. de Bretagne, au mot Attiser, où on lil ces
vers :
Pour ce, beau fils, veux raisonner,
Aflin que mieux sois avisé.
Si en tel fait es attise.
Les acceptions de ce mot, et plusieurs de ses
orthographes, rentrent dans celles du verbe Aatir.
Mais nul. pour grant elergie ne se doit trop priser
Ne ceux qui bien luy font grever, ne depriser,
Ne par ses grans paroles haynes attaisier.
J. de MeuDg. Cod. vers 1033-1035.
v.\RiANTf:s :
ATISER. Gloss. du Roman de la Rose.
Atisa, mot breton. Gloss. de l'Hist. de Bretagne.
Atizkr. Cotgrave, Dict.
Attiser. Oudin, Gloss. de IHist. de Bretagne.
AcTissER. Lanc. du Lac, T. I, fol. 132, V» col. 1.
Attisonner. Oudin et Cotgrave, Dict.
Aticer. Gloss. du Roman de la Rose.
Aticieu. Gloss. du Roman de la Rose.
Atisser. Fabl. MS. du B. n" 7G15, T. I, fol. 120, R» col. 2.
Attaisier.
Atitiiler, verhr. Intituler, qualifier. « Ce puis-
« sant lîoy Matliins, tils du Blanc chevalier de la
" Valaquie, à présent «///î^/c' l'.oy du dict royaume. »
(Méin. d Olivier de la Marche, p. 12.) « Lorsque les
« gens de guerre se nommoient, et attituloient
« guvsières et Philippus, etc. » (Lettres de Louis XII,
T. i, p. 143.)
vAniA^TKs :
ATITULER. Mém. dOlivier de la Marche, p. 12.
Attitller. Lettres de Louis XII, T. I, p. Î43.
Atoillié, s?ii;si. [cm. On trouve dans Froissart
la l'orme atoillié pour atteler ; le présent mot doit
éire le substanlil' verbal de ce verbe et signifier
action d'atteler, au figuré - sans tarder. » (ms. de
Froissart, Poës. p. 224, col. 2.)
Y atoile quatre chevaus.
Atoivre, subst. masc. Equipage ou agrès.
Quar nus ne voit sa bêle nef
Ne son atoivre (1), ne son tref.
Parlon. de Hlois, MS. de S- Gemi. fol. 140, R- col. 2.
Atoniber, verbe. Couvrir d'une tombe. " Fust
« noblemenl mis en sépulture, et honorablement
« atornbé d'or et d'argenl. » i,Cliron. fr. ms. de Nan-
gis, an 1224, p. 2.)
Atome, svbsl. fém. Atome. Ce mot subsiste,
mais comme masculin ; on l'employait autrefois
comme féminin. En voici un exemple :
Encor es tu plus petit
Que n'est une atome parfaite.
Les Touches de Des Accords, fol. 45, Y*.
Atonner, verbe. Etonner, élourdir. « Ou pays
» de France, et Normandie niilz ne porte telz ins-
« Irumens, se ne sont pouvres avugies, ou autres
« gens quérans leurs vies dont iîz atonnent les
. gens. .' (Hisl.de 13. Du Guesclin, par Mén. p. 230.)
Atorny, subst. musc. Trocurateur. « Abusion
" est 11 reteiner fl/orni/, sans brève de la chancerie. •
(Du Gange, Gloss. lat. au mot Atturnatus. — 'Voy.
Attourné.)
A toto. Terme de droit. C'est un mot latin qui
signifie du lout, « droicis censuels et autres droits
« seigneuriaux ne se peuvent prescrire à toto, mais
" bien à tanto » (Coutumes générales.)
Atoiiclier, verbe. Toucher, toucher de près. —
Dire, parler, faire mention.
Atocher ei Atochier, dans les Serra, fr. mss. de
S' Bernard, répond au latin Tangere et Attingere.
Ce mot s'employoit pour toucher, au propre et au
figuré.
Adieux Picart, adieu douce Biétrix ;
A ce départ fault que je vous atouche :
Baisir vous vueil.
Pocs. MSS. d'EusI. De.sch. fol. 233. col. 3.
■ Amors ctoche, a droit essai
Qui plus essaucs cuer verai
Quant il plus s'nmelie.
Gautier d'Esfinais. Poës. MSS. avant 1300, T. I, p. 172.
'< Ey.cep\.é ]e cas qui a toiKj lient au souverain, si
coiiie se il li font despit. » (Beaumanoii', p. 181.)
Certes onc n'atotisa ma main.
Fabl. MSS. de S Gcrm. fol. 36. V- col. 1.
On trouve aussi le mot Attoucher, pour toucher
de près, être pareni, acception qui appartient aussi
à notre mol loucher. Ainsi on disoit : « Le meurdre
« commis en la personne d'un parent noslre, ou
« allié, est crime beaucoup plus horrible que celuy
« qui seroit commis en la personne d'un qui ne
!• nous attoucheroit [)Oinl. » (Apol. poui- Hérodote,
pages 282 et 283.)
" Attoucher \e droit de l'empire, » c'est-à-dire
avoir des droits à l'Empire. » Laquelle Katerine
« atouchoit de droit le droit de l'Empire de Cons-
" tentinoble. » (Chron. Fr. ms. de iNangis, sous l'an
1300.) On lit dans le latin : Jus imperiicontingebat.
Ce mot a été employé dans le sens de dire, faire
mention : « Ceu keju briement vos ai atocliiet me
« semble! estre assez. » (S' Bernard, Serin, fr. mss.
p. 348.) On lit dans le latin : Sufficit corda breviter
tetigisse.
VARIANTES :
ATOUCHER. Eust. Pesch. Poës. MSS. fol. 236, col. 3.
Atocher. S' Bernard, Serm. fr. MSS. p. 93.
Atociiier. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. iOO et pnssim.
Atouquer. Beaumanoir, p. 181.
Atouser. Fabl. MSS. de S' Germ. fol. 36, V col. 1.
Attoucher. Apol. pour Hérodote, p. 283.
Atouchier. Modus et Racio, MS. fol. 2IG, V».
Tucher. Marbodus, col. 1056.
Atouper (2), verbe. Boucher, fermer. « Qui
« atoupe chemins doit soixante sols. » (Ane.
Coût. d'Orléans, à la suite de Beaumanoir, p. 468.)
Atour, subst. 7nasc. Piéparatif. — Parure, ar-
mure. — Figure, maintien. — Coiffe ou coiffure et
{\) Cf. Rom. du Renart, t. I, p. 44, vers 1137 : « Fors tant c'un pertuis i avoit Qui des vilains fait i estoit, Où il menoient
lor atoivre Chascune nuit juer et boire. » On trouve aussi dans Parton. de Blois le simple toitrrp: <i Qu'il puet véir tôt cler
le tref Et loi. la toivra de la nef (vers 753). » Voir une note de Grimm. }h-i»!itirt Fucks (p. Livj. (N. E.) - (2) Ce nio! a le sens
de l'italien loj^o (rat; et du latin utoiiivare (Muratori XVI, 491), faire des trous comme les rats. (n. e.)
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297 —
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sorte de coiffure particulière. — Statuts. (Voyez
Attouhnfmem et Attouriner.)
Dans le premier sens, de préparalif, on a dit :
Quist (1) gent, si se mist en la tour,
Pour deflendre fist son aloiir.
Pli. Moufkes, MS. p. 415.
Nequedent bel utor fait laire
De menger, et de luminaire.
Fabl. MSS. de s. Gcrra. fol. ii, V" col. 2.
Ce mot, pris dans le sens de piéparatif de guerre,
s'employoit quelquefois pour désigner une armée :
Ot fait son père Garnier
De son aloio- confannonnier.
l'h. Mouskes, MS. p. 260.
Appliqué aux préparatifs de toilette , ce mol a
signilié parure, ajustement. On dit encore au plu-
riel atours, en ce vers :
Prendre et avoir trop curieux atours.
Eusi. Descli. Pocs. MSS. fol. 250, col. 4.
On disoit dans le même sens, atlour, astour.
(Voy. lesDict. de Nicot, (^otgr., Rob. Estienne, etc.)
On nommoit chambre d'atour, celle où les femmes
se paroient. (Petit .Jean de Saintré, p. .575.)
On trouve souvent le mot Atoiir employé pour
armure, comme dans les vers suivants :
Les armes trenchanz rebondissent
En pluseurs lieus au deslacier
Sur les riches atours d'acier.
G. Gularl, MS. fol. 125, R'.
Ator s'est pris aussi pour tournure, figure, main-
lien.
Simple et de bel ator.
Jthan Eras, Poêt. MSS. avant 1300, T. III, p. 191.
11 y avoit autrefois une sorte de coifl'ure de fem-
mes qu'on nommoit yl^oi<?'. (Voy. Monet, Dict., et
Du Gange, Gloss. lat. au mol Atorna.)
On lit ailleurs: « Atours tout rond à la façon de
« Portugal (2), dont les bourrelets étoient à la ma-
« nière de franges et passoient par derrière, ainsi
" que pattes (3) de chapperons pour hommes. »
(Mémoires d'Olivier de la Marche, Liv. T, p. 432.)
Une autre coiffure se nommoit atour de gibet,
parce qu'elle éloit montée fort haut. (Le Chevalier
de la Tour, Instructions.) De là on appeloit toile
d'atour, la toile qui servoit aux coiffures. (Voy.
Petit .J. de Saintré, p. H5 et 288.)
Enfin on appeloit atours, les statuts et ordon-
nances faites par les maires des villes, oîi ces offi-
ciers étoient nommés atournés. (Voy. la Coût, de
Metz, au Coût. gén. T. I.) Suivant le Gloss. du
R. de la Rose, Atour doit être pris dans le sens
de préparatifs servant à leur deffense, ou de leurs
entours, soit remparts , soit soldats, soit artil-
lerie, etc.
VARIANTES ."
ATOUR. Dict. de Monet. - Gloss. du Roman de la Rose.
Attour. Dict. du Rob. Estienne.
Astour. Nicot Pt Cotgrave.
Ator. Dict. de Borel.
Atournure, subst. fém. Coiffure.
Atournez-vous d'une atournure plaine.
Eust. Desch. Po6s. MSS. fol. 327, col. *.
Atout, adv. Tout, avec et quoique. On lit dans
Marbodus, col. 1GG8 : « Des le matin lot le eveil-
« tant » qu'on doit expliquer ainsi, « avec le jour
« croissant, au jour croissant. » — Pour quoique,
comme qui diroit : avec tout celù que. On lit dans
Duchesne, Gén. de Bar-le-Duc, p. 31, titre sansdate,
à la suite des lettres de t2'i9: « Tout estoient h
Rois et ses gens en defance. >•
Les Italiens ont conservé l'analogie qui e.xiste
entre ce mot et avec dans cette phrase. « Con tutto
« cio sia cosa che » qui signifie quoique.
A tout, est employé avec le sens d'avec, dans le
passage suivant : « Ces trois vénérables mignonnes,
« ces trois chiennes enragées ministres d'enfer et
« députées au service de Pluton, a tout leurs che-
« veux colubrins, furent celles qui tindrent les
« flambeaux préjudiciables, et les malheureuses
« torches autour du lict des deux adultères, Paris
« et Heleine. >> (.1. le Maire, Illuslr. des Gaules,
Liv. II, p. 193.)
Atout a été employé dans le sens d'encore, en
outre. Ce mot, dans les Serm. Fr. mss. de S' Bernard,
répond au latinCHm. (V.leGlos. des arrêts d'amour,
le Glos.de rilist.de Paris et le Dict.de Monet, comme
ce mol se décline.) Cela pourroit faire conjecturer
qu'il est formé de la pérposition à, qui s'est dit pour
avec, et du moi tout... « A atoutes haches », c'est-
à-dire avec des haches. (Chron. de S' Denis, T. Il,
fol. 219.) « A toute sa gent » c'est-à-dire avec sa
suite. (Petit .1. de Saintré, p. 405.) « Il monta
« tantost à cheval a tout tant qu'il peut avoir de
« gens. .. (Percef. Vol. I, fol. 30, R° col. 2. - Voy.
aussi Arresta amor, p. 21. — Coquillart, p. 127. —
Ger. de Nevers I" part p. 19. — Clëm. Marot.
— Essais de Montaigne. — Rabelais.) « A toute
« neiz. » (Rom. du Brut, ms. fol. 109.) « A toute
« nois. » (Ibid. fol. 39), c'est-à-dire avec des
navires.
On disoit aussi :
\' Atout, pour dire: pendant tout... « Disant qu'il
« s'en souviendroit a tout le temps de sa vie. »
(Nuits de Strapar. T. I, p. 20.)
2° Jouer a tout, pour dire : jouer de son reste,
ou n'épargner rien, faire tous ses efforts, c Quant
« ils se virent ainsi assiégez si jouèrent a tout, car
(-1) chercha. —(2) Vatour prit naissance vers le milieu du règne de Charles V. On remplaça le fronteau de perles ou
d'orfèvrerie placé en avant de la coifle par des bourrelets en forme de cœurs, de trèfles, de cornes montantes et rabattues.
Au temps d'Olivier de la Marche, la femme de Philippe le Bon était Portugaise et mit en honneur les modes de son pays.
Elles étaient d'une bizarrerie inimaginable. Vatour du portrait du Louvre, n» 59'2, où le bourrelet est un pain fendu dressé
sur calotte, avec pièce d'étoffe retombant sur le cou, donne une idée de la coiffure ainsi décrite, (n. e.) — (3) Lorsqu'on
mettait sa tète dans la visagère du chaperon, ouverture réservée au visage, la coiffe ou cornette ne retombait plus sur la
nuque, mais était roulée comme un turban : s>ir le côté descendaient alors les plis du cjuleron, c'est-à-dire Tencolure, qui
était appelé pattes. Le chaperon, qui était à l'origine un domino, devenait ainsi une casquette. (N. e.)
II. 38
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- 298 —
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« ils avoient assez canons et artillerie. » (Journ.
de Paris sous Charles VI et VII, p. 185.)
ii" Atout- par soy, pour dire: tout seul. « Quand
. ils vindrent onla salle si encontrerent le père
« qui encontre eulx veuoit, si comme il pareil, car
« il avoit eu tant de mal qu'il ne alloil ne que atout
« par soy une toise de terre. » (Lanc. du Lac, T. I,
fol. 14-2.1
4" Atout, pour dire: alors, en même temps,
aussitôt. « Quand le guet apperceut nos gens, il
« sonna atout, et les Anglois saillirent à l'escar-
• mouche. » (Ilist. d"Artus 111, Connest. de Fr. duc
de Bretagne, p. 7G6.)
VARIANTES :
ATOUT. J. de Meun. test. 295.
Ato. Perard, Hist. de Bourg, p. 450 ; lit. de 1241.
Atot. S' Bernard, Serni. Fr. MSS. p. 46 et passim.
Atote, et Atotte pour le fém. S' Bernard, Serra. Fr. MSS.
p. 190, et Duchesne, Gén. de Chatillon, p. 283 ; tit. de 1241.
Atotes, fem. plur. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. p. 216.
Atoutte, fém. singul. Duchesne, Gén. de Bethune, p. 131 ;
tit. de 1243.
Atrabile, adj. Atrabilaire. (Dict. d'Oudin, au
mot A trahlle, elDicl. de Colgrave au mot Atrebi-
liaire.)
■VARIANTES '.
ATRABILE Oudin.
Atrebiliaire. Cotgrave.
Atraction, mbst. fém. Attraction. « Par l'a^rac-
« tion des mauvaises planètes seront élevées
« fumées corrompues. » (Modus et Racio,Ms. fol. 319.)
Atraiance, subst. fém. Attrait. (Voy. ce mot,
avec ce sens, dans les Fabl. mss. du R. n° /"il 8,
fol. 224.)
Atraichant, part. Atlrayaul. On trouve cette
orthographe dans une Chans. du \m' siècle, (ms. de
Bouh. fol. t>80.)
Atraicté, partie. Acheminé. Ce mol, formé du
substantif traî/f? pris pour rowfe, se trouve employé
en ce sens dans un ancien ouvrage de Vénerie ;
il s'agit d'une truie que les chiens chassent, au
lieu d'un sanglier: « Elle fuira deux jours devant
« les chiens, et puis qu'elle est atraictée,
« jamais ne la preudroient à force. » (Modus et
Racio, fol. 27.) On trouve atratlé dans le même
ouvrage, et pris dans le même sens, fol. .51.)
VARIANTES :
ATRAICTÉ. Modus et Racio, MS. fol. 27, V».
Atraté. Ibid. fol. 28, R°.
Atraires, subst. masc. plur. Action d'attirer,
de séduire. (Voy. Attraire.) C'est le participe actif
du verbe atraire, et c'est rinfinilif «/rai/'e employé
comme substantif, non pas selon l'usage fréquent
d'y joindre un article, mais en le déclinant et le
mettant au pluriel.
Miex vaut services, et alraircs, etc.
Poës. MSS. avant 1300, T. lU, p. 1056.
Atrait, adv. (Voy. Trait.)
Atrament, subst. masc. Encre à écrire. (Dict.
d'Oudin), au mot Atrament « estoient de cou-
« leur plus noire que atrament. » (Percef. Vol. IV,
fol. 22.) <■ Ung sarrazin aussi noir que arrement. »
(Cliron. de S' Denis.) On lit dans le lat. de Turpin :
suracenum atrum.
Plus sont noirs que arremciit.
Pues. MSS. avaiil 1300, T. IV, p. U78.
VARIANTES :
ATRAMENT. Froissart, Liv. II, p. 182.
Attrament. Oudin, Dict.
Attrement. Percef. Vol. V. fol. 24, "V" col. 1.
Atrkment. Cotgrave, Dict.
Artement. Fabl. MSS. du R. n» 7615, fol. 190, V col. 2.
Arrement. Poës. MSS. d Eiist. Desch. fol. 212, col. 4.
Arement. Percef. Vol. VI, fol. 58, R» col, 1.
AiKEMENT. Id. Vol. V, fol. 68, V" col. 1.
Atraver, verbe. Attrouper, assembler. Il semble
formé du mol Tref, tente, qu'on verra ci-après.
Henri lils de Guill. le Bâtard se fait couronner Roi
d'Angleterre, au préjudice de Robert son frère aîné
qui éloit allé à la croisade d'outre-iner :
Apriés moult petit, demora
Que li dus Robiers repaira
De Surie, et fu moult irés.
Que Henris ses frères mains nés (1)
Rois estoit fais, s'il deust i estre :
Apriés atorna tout son iesLre (2)
A moult grant gens k'il atrava
En Engletiere s'arriva.
Ph. Mouskes, MS. p. 469.
« Atravé sont à la mue. » (ms. cité par Du Gange,
Gloss. lat. au mot Trebudcbetum.)
Soixante mille du roi furent esmé.
Prennent le lieu où il sunt atravé.
Agol. y. 693.
Atraverser, verbe. Traverser. Percer de part
en part.
A une foiz qu'il n'ost joster.
Le voit armant atraverser.
Parlon. de Blois, MS. do S' Germ. (ol. 158, V col. 1.
Atreiner, verbe. Entraîner, amener, attirer.
Les poêles ont dit :
plus que les nuits sont sombres
Puissent les jours ombreu.K pires moux atreiner.
(Euv. de Baif, fol. 67, Vv
Piétons alrahicnt eschieles
G. Guiart, MS. fol. 35. R*.
VARIANTES :
ATREINF.H. Baïf. fol. 67, V».
Attrainer. Percef. Vol. VI, fol. 62, R» col. 1.
Atrainer. g. Guiart, MS. fol. 35, R".
Atrès, adi). au masc. J9/«j'. Atteints, convaincus.
« Gens atrès , et condainpnez de vilains cas. »
(Beau m. p. il.)
Atrever, verbe. Faire trêve. « Les Royaumes
« d'Anglelerre et d'Ecosse, s'estoienl atrevés en-
« semble. » (Froissart, Liv. 11, p. 268.)
VARIANTES :
ATREVER. Froissart, Liv. II, p. 268.
Atriver. Parton. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 169, V».
Atrie, subst. L'estre, le lieu. C'est le sens ap-
parent de ce mol dans le passage suivant ot"! l'on
(1) Moins né, cadet. — (2) Tout ce qu'il avait, tout son bien.
AT
- 29» —
AT
parle de Philippe-Auguste avant la bataille de
Bouvines :
La Truie s'est d'entraux partis,
Al Roi s'en vint tous aatis
Tout droit en Vatrie de Bovines.
Ph. Mouskes, MS. p. 581.
Atrier (1), subst. mase. Le lieu où se tient la jus-
tice du Seigneur. Laurière (Gloss. du Dr. Fr.lprétend
que ce mot est d'usage en ce sens en Normandie.
Atrimer, verbe. Piller, prendre, voler. Mot de
jargon. (Voy. le Dict. d'Oudin.)
Atriquei*(2), verbe. Ajuster, préparer. Voici plu-
.sieurs passages qui peuvent aider à faire sentir la
signification peu déterminée de ce mot :
Li kaillo qui issent des fondes.
Qu'aucuns pour droit geler alriqucnt.
G. Guiart, MS. fol. 69, R'.
Mais escoutez ce gaudisseur
Pourveu qu'il soit bien atrUjué,
Et vostre gozier apliqué,
Il vous fera grand bien, ma seur.
Œuv. de R. de Collerye, p. 78.
Quand la dame est bien atriquée,
Alors congnoist-on son couraige.
Ibid. p. 79.
Atroce, adj. Grave. Ce mot se dit surtout pour
qualifier une injure. <■ Atroce injure est quand on
« dit blasme, où injure à son père, ou à sa mère,
« ou à son seigneur, ou à ses gens, ou officiers,
« et qui ses robes ont vestues, ou à ceul.x de la loy,
« ou de la ville où on demeure, à son prélat, ou à
« son curé, et selon aucuns à son maisire, et en
« cette forme est airoce injure appellée, et fait trop
. griesvement à punir, plus que à autres personnes,
« si dicte leur estoit. ■> (Bouteiller, Somm. P.ur.
p. 815.)
Atrocement, ariv. D'une manière atroce. (Dict.
d'Oudin et de Cotgrave.)
Atrocher (s'), verbe. S'assembler, s'attrouper (3).
Nous citerons deux passages où ce mol semble pris
en ce sens :
Leur vienent tel noise menant
Sanz ce qu'omme ne leur responde,
Qu'il pert (4) que la contrée fonde,
Par touz les lieux où il s'atrochent.
G. Guiart, MS. fol. 227, V.
Cil de la contrée saïment;
Targes aux cols, testes armées,
Banieres es lances fermées (5)
S'en vont, jà soit ce qu'il foloient
Vers Sestraringue, où les feus voient,
Devant la gent le Roi s'ati-ochent.
Ibid. fol. 2i3, V*.
Atronchement, substantif masculin. L'action
d'apatroner le bois. (Fjaurière, Gloss. du Dr. fr.)
« Atronchement de bois est un droit qu'un Seigneur
« a de faire saisir par son juge un arbre qui a été
« coupé et emporté, de le faire scier par le pied, et
« ensuite d'appliquer ce qui en a été coupé sur le
« tronc resté en terre, pour découvrir ceux qui ont
« fait le vol. » (Laur. Gloss. du Dr. fr.)
Atronchier, verbe. Apatroner le bois coupé.
Cela se fait en appliquant sur le tronc le morceau
de bois coupé pour reconnoitre s'il est effectivement
sorti du tronc. On a dit assochier dans le même
sens. (Pithou, Coût, de Troyes, p. 46G. — Voyez
Assochier et Atronchement.)
Atropeller, verbe. Attrouper, assembler. Nous
trouvons ce mot pour « réunir en troupe, » dans
les vers suivants :
Chacez ces loups et se nulz s'atropelle
En vos marchés, ne souffrez le loRis.
Poës. MSS. d'Eust. Desch. fol. 232, ool. 4.
Si Gerbiers sa gent alropiele.
Ph. Mouskcs. MS. p. 27.
VARIANTES :
ATROPELLER. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 33i, col. 4.
Atropielkr. Ph. llouskes, MS. p. 27.
.\TnopELER. G. Guiart, MS. fol. 42, V".
Atrui'ER. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 196, R° col. 2.
Atroté, part. Arrivé, accouru. — Acheminé.
Au premier sens, on écrivoit :
Or sui tantost cy airotez.
Hisl. des Trois Maries, en vers, MSS. p. 274.
On trouve aussi atroté pour acheminé, en train
de courir, de fuir. En parlant d'une truie qui fuit
devant les chiens, on disoit: « Et puis qu'elle est
'< attrottée, jamais ne la prendroient à force. •
(Modus et Racio, ms. fol. 51, V°.)
VARIANTES :
ATROTÉ. Hisl. des Trois Maries, en vers, MS. p. 274.
Atrotté. Modus et Racio, MS. fol. 51, V».
Attrosté. Ibid. fol. 51, R».
Atroter(6), i'C)'/>c. Accourir. Le poëte a dit dans
ce sens :
Denier fet pautonniers monter,
Denier fet putains atrotcr.
Fabl. MSS. du R. n' 7218, fol. 167, R* col. 1.
Attache, subst. Ce qui sert à attacher (parure
de tête ou épingle de diamant.) — Affiche, placard.
— Insulte, injure.
Dans le premier sens, on ^ i\\\ei attaches des
chausses. noucii]uaut ne veut point s'asseoir aux
pieds de trois dames, et demande des quarreaux ou
un siège, de crainte qu'étant assis trop bas, \es atta-
ches (7) ne rompissent, et qu'elles ne l'attribuassent
h une cause indécente. (Voy. le Chev. de la Tour,
Instr. àsesfilles, fol. 13.)Onappeloit bas d'attaches
de grands bas qui alloient jusqu'au haut des cuisses,
et qu'on attachoit aux culottes. (Voy. le P. Menestr.
des Tournois, p. 199.) Dans ce sens, on disoit
«/ac/ics pour agrafîes: « EuAtoe/ies, ou enjoyaux. "
(Fabl. MSS. du R. n° 7'218, fol. 176, R" col. 2.)
Attaclie signifioit aussi parure de teste, ou épingle
(1) Se trouve dans Gérard de Vienne, v. 2253, pour autr'ier, l'autre jour. (m. e.) - (2) C'est sans doute comme étriquer,
un dérivé de l'allemand stvekhen, racler, puis ranger. (N. E.) - (3) Ce m 't se trouve encore chez ce même auteur (édition
Buchon, I, 57), où il signifie touchant à : « Et conquis Baruch et Damas Et toute l'autre atrochc. » (n. e.) — (4) Pert pour
apert, semble. - yZ^) Par opposition à bannières déployées, (n. e.) - (6) C'est un composé de trotter, qui vient du latin
to^Mfare. On trouve déjà «o/!((ani(s pour trotteur, dans Sénèque; ile tolutim. aller au trot, dans Pline; lolutare a pu s»
contracter en trotter, comme tit'lum a fait titre. (N. e.) — (7) Voir tome I, p. 254, note 1,
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- 300 -
AT
de diamant. Le poëte, parlant de Pygmalion qui
essayoil toutes sortes de coiffures pour parer sa
statue, dit :
Et dessus la crespine attacha
Une moull précieuse attache
Et par dessus la crespinete (1)
Une couronne d'or pourtraicte.
Rom. de la Rose, vers 21880-21888.
On a dit aussi attache et atacJie pour la cliose
attachée, pour afficlie, placard, écrileau. (Laurière,
Gloss. du Ltr. fr. et Dict. de Monet.) •> En seront
« mises attaches, ou affiches par escrit à la porte
. de l'Eglise. » (Coût. gén. T. I, p. 3'2:,.)
Enfin attache s'est employé pour insulte, injure,
pour noire mol vulgaire lardoti : « Si cette exécra-
« ble inhumanité commise à la veue de toute la
« France estoit vraye, ce preudhoinme eust eslé
« grand mociiueur, s'il n'en eust baillé quelque
« attache h celle princesse. » (Pasquior, Rech. Liv.
V, p. 427.) « Qui est donc aujourd'huy l'historien
« auquel ces juges faicls à la hasle, ne donnent
>< quelque attache, et quelque coup de bec. »
(Apologie pour Hérodote, Préface, p. 111.)
VARIANTES :
ATTACHE. Laurière, Glossaire du Dr. fr.
Atace et EsTANCHE. Arch. MS. fo!. 44, R» col. 2.
Atache. Monet, Dict.
AT.V1CHES (plur.) Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 252, col. 2.
Attachez. Kom. de Rou, MS. p. 389.
Attaché, participe. Qui a des bas d'attache. —
Lié, garoLto. — Enfoncé, embourbé. — Contraint,
forcé.
Nous avons vu qu'il y avoit des bas nommés bas
d'attache. De là, s'est formée celte expression :
Jacques de ki Pnvière fut trouvé mort dans sa prison,
« vestu d'une robbe noire fourrée do martres, avec
« un tissu dont il estoit ceint et serré qui estoit
« ferréd'or; et estoit chaussé et afîac/ié. «(Jacques
le Bouvier, Chr. de 1402.)
Attaché a été employé avec le sens de lié,
garotté: « Countes et Barons soient avaunt
« semouns pardetle que destreyntz cl attachés par
« lourcors; les uns pour révérence de leur per-
« sonnes, et les autres pour révérence de nostre
« service. >■ (Brilton, des Loix d'Angleterre, fol. 08.)
Attaché s'esl dit pour enfoncé, embourbé :
Povres bons qui es nez
En cort de sainte Eglise
Est aussi alachiez
Com chiens à terre glise.
Fabl. MSS. du R. n- 7615, T. II, fol. Lil, R'col. 1.
Attaché a été employé avec la signification do
sommé, contraint, forcé: « Attachés de vener
« par personale détresse. « (Britton , des Loix
d'Angleterre, fol. 31, P,°.) En ce sens, ce mot venoit
ù' attache, ou Ôl' attachement pris pour placard,
affiche, citation, ajournement.
variantes :
ATTACHÉ. Orthographe subsistante.
Atachié. Faljl.MSS. duR.n"7G15, T. II, fol. 141, R» col. l.
Attachement, subst. masc. Ajournement ou
contrainte par corps. — Sorte de machine.
Pour le premier sens, voyez le chapitre \\s\ qui
porte pour titre de attaclicmcnls dans Britton, Loix
d'Angleterre. On disoit aussi en ce sens atlaclie-
menles. (Ibid. fol. 8, R".)
On trouve altachemens à merces dans un passage
cité par Du Cange : « Le marescal doit avoir un
« clerq, ou un sergeant, pour faire les attachemens
« amerces (2), et à prender ce que appent au
1 mareschal. » (Citation de Du Cange, Gloss. lat.
au mol Marescallus forinsecus.)
Attachement étoit aussi le nom d'une machine;
« Quiconques fait nn puys a marne, et y met atta-
" cliement pour tirer la marne, il est tenu de
« restoupper bien et duement le dit puis, dès
« l'instant que Y attachement est oté. >< (Nouv. Goût,
gén. T. L p. 605.)
variantes :
ATTACHEMENT. Britton, Loix d'Angleterre, chap. xxvi.
Atache.mentes. Ibid. fol. 8, R».
Attacher, verbe. Appliquer. — Attacher. —
Sommer, ajourner. — Etre attaché. — Attaquer.
Pour le premier sens, voy. le Dict. de Borel au mot
Atager. « Si vous leur flWac/ics un bon coup d'épée,
« en la poitrine. » (Ess. de Mont. part, n, p. 198.)
On a dit avec le sens attacher :
Son escu à un arbre alairje
A un chesne, dedans un bas.
Fabl. MSS. de S' Gcrm. fol. SI, R" col. 3.
At lâcher s'est dit pour sommer en justice, ajour-
ner, forcer, contraindre : <■ Si le pàrty semounsé
« face defaute, soit attaché de estre à un autre
« jour, et si le pleyntife face de faute, et la party
« seraounsé ou ataché se profre (3), si chet la
« brefe. » (Britton, Loix d'Angleterre, fol. 244, V°.)
Vojez le chap. xxvi de ce même auteur, oîi attacher
est pour obliger, contraindre.
A tlacher a été employé dans le sens d'être attaché,
être collé, tenir : « Si se print à plourer sur le col
« de la pucelle tant amèrement qu'en peu d'heure,
« il y eut tellement arrousé la guimple qu'elle luy
« attachoit à la chair niie, qui estoit aussi blanche
« que fleur de lys. » (PerccL Vol. 111, fol. 08.)
On prononce encore, parmi le peuple en Norman-
die, attaquer au lieu et dans le sens subsistant
d'attacher [i). On écrivoit autrefois au contraire at-
tacher dans le sens actuel d'attaquer : « Après suy-
« voient douze cens arquebusiers en quatre troupes,
" ayant charge d'altaclier les corps de garde de
(■1) C'était une coiffe de soie recouverte d'une résille et enfermant les cheveux, (n. e.) — (2) Il s'agit ici d'un droit sur les
marchandises, car, trois articles plus loin, on lit : « Le Clerq, qui est attorné d'aller as marchies de par le Boy, et de par le
conte marescal, doit avoir un contrerole encontre le sergeant du marc/de... » (N. E.) — (3) Se pmfort, se présente. —
(4) Af/ai/Kfc'r n'est que la prononciation picarde et noi'mande d'i(((«c/i«/' ; aussi les deux sens se confondent-ils jusqu'au'
xvi" siècle ; lî.-iudoin de Sebourc (xiv« siècle) écrit : « Elle attaque au mantel une riche cscarboucle », tandis que dans les
lettres de Calvin (édition Bonnet, II, 201), nous lisons: « Tous ensemble méritent bien d'estre reprimés par le glayve qui
TOUS est commis, veu qu'ils s'attaclient non-seulement au roy, mais à Dieu... » (n. e.)
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— 301 -
AT
« l'infanterie ennemie, puis donner dans leur
.. quartier. » (Disc, polit, et mil. de La Noue, p. 077.)
. Les attacha si vivement qu'il les deflit d'une
-> victoire plus sanglante que n'avoit été celle qu'ils
« avoient obtenue. » (Pasquier, Recherch. Liv. J,
p. 25.) Remarquons également l'emploi du mot
attaclier dans les expressions suivantes :
1° Le loup attaché de lévriers, c'est-à-dire saisi
parles lévriers. (Du Fouilloux, Vénerie, fol. ll'J, R°.)
'.:" L'escarmouche attachée, c'est-à-dire commen-
cée. (Mémoires de Du Bellay, Liv. Vil, fol. 225, V°.)
VARIANTES ;
AÏT.VCHER. Orthographe subsistante.
ATAGHiEn. Fabl. MSS. de S' Germain, fol. 77, V» col. 2.
.\TAGER. 13orel, Dict.
Ataiger. Faljl. MSS. de S' Germain, fol. 54, R» col. 3.
.^TTAcjUEn. Celthell de Léon Trippault.
Ailachcur, suhst. masc. Sorte d'artisan. (Voy.
la Table des Métiers de Paris, ms. de M. de Meinière,
p. 11.)
AttaJnct, subst. masc. Sorte d'amende. On voit
par le passage suivant, qu'il y avoit autrefois une
amende ainsi nommée : « Le condamné doit au Roy
« l'amende de sept solz six deniers parisis, qui se
•' appellent vulgairement uiig n'y atlaiiict. » (La
Tiiaumassière, Coût, de Derry.)
Attainctes, subst. Atteintes. (Vcy. Atai.me.)
Attulique, adj. Très précieux. Epith. d'habille-
ment dans les Epith. de Martin de la Porte. Ce mot
esl formé du nom Attalus (l).
Aitamer, verbe. Entamer, commencer. (Voyez
RiitUjn, des Loix d'Angleterre, fol. 81, R°.)
Attaquement, subst. m«sc. Attaque. (Mém.
de Si'.lly, T. I, p. 3i.)
Allaryeassion, subst. fém. Retardement. En
parlant de la reddition d'une place, on dit: « La
« rendirent au plus longuement qu'ils purent ,
« tant que par leur a^frtrycrt^îOK, le Roy ne ceux
« qui estoient avec lui ne le prindrent pas bien en
. gré. » (Moastr. Vol. I, fol. 99, R".)
VARIANTES :
.\TT.\.RGE.\SSION. Monstrelet, Vol. I, fol. 21, R".
Atargeation. Ibid. fol. 99, R".
Attarjance. Hist. de Fr. en vers, à la suite du Rom. de
Fauv.l, MS. du R. n» C812, fol. 87, R» col. 2.
Attarges, subst. masc. plur. Retards de paye-
ment, arrérages. « En payant tous allarges et dé-
« pens. » (Coutumes de Valencienncs au Coût. gén.
T. H, p. 902.)
Attayner, verbe. Toucher, discuter, traiter,
dire. « Volons attayner en party par queles ac-
« cions, et par queux Brefs et coment un parce-
« ner doit chacer ses parcenemens. » (Britton, Loix
d'Angleterre, fol. 183, ÏW)
Attédiation, subst. fém. Ennuy. (Dict. de Cotgr.
— Voy. Rabelais, T. II, p. 177.)
Attedier, verbe. Ennuier, fâcher. (Voyez Du
Cange, Gloss. lat. au mot AttœcUare.) « Le commun
« peuple a</erf/(?' des grandes Tyrannies, et extor-
'< sions qui se faisoient dans la ville. » (Pasquier,
Rech. Liv. III, p. 2'i8.) » Je vous laisse une infinité
« d'autres particularités concernans la réformation
'< de Testât, desquelles si je me voulais amuser,
« ]attiédirois\e \ectem\ » (Pasq. Rech. L. II, p. 80.)
variantes :
ATTEDIER. Xicot, Monet, Borel, Oudin et Cotgrave.
.*iTEDiER. Ménage, Dict. étym. — Oudin et Cotgrave.
Attiédir. Pasquier, Rech. Liv. II, p. 80.
Attefits, subst. masc. Ente. Arbre enlé, dans le
patois de Bombes. (Voy. Du Cange, Gloss. lat. au
mot Âltefi'ctum. — Voy. Ate, du latin Aptus.)
Attejgncnient, rtrfy. D'une façon pressante,
instamment. « Pour ce que celle personne contrai-
« gnist plus atteignement nostre Seigneur par orai-
•< son. » (Vie d'Isab. à la suite de Joinville, p. 170.)
Atteinour, suhst. masc. Témoin ou peut-être
caution. « Que chescun jurour eyt deux atteinours
« au iiieyns.... et atîert que ilz soient d'ausi bone
« condicion, ou de meilloure. » (Britton , des Loix
d'Angleterre, fol. 238, R°.)
Attelabes, subst. masc. plur. Espèce de repti-
les (2). (Rabelais, T. IV, p. 271.)
Attelé, /mrt. Attaché. Ea parlant de deux che-
valiers du Roi d'Angleterre qui subirent le supplice
de mort : » A la vue de ce prince enfermé dans la
« Tour de Londres, furent amenés en la court, et
« là chacun attelé à deux chevaux. •■ (Froissart,
Liv. IV, p. 335.)
Atteîemens, subst. masc. plur. Attelages de
chevaux. (De Peyssel, Hist. de Louis XII, p. 133.)
Atleliei", subst. masc. Râtelier à mettre des
armes. « A la reveue de leur royaume, l'on garnis-
« soit les rues d'atleliers garnis d'armes et d'es-
« pées. » (Savaron, traité de l'Epée francoise, p. 22.)
Attemprance, subst. fém. Mesure. — Tempé-
rance, modération. — Proportion dans la nature
des choses de tempérament. — Voie de conciliation.
Ce mot, dans les Serm. fr. .mss. deS'Bern. répond
au latin modestia, temperanlia. « Les vertus car-
« dinales sont : justice, prudence, force, attemp-
« ranee. » (Ord. de Chev. fol. 11, R°.)
Tele est d'amour la poissance
Qu'ele fait l'home astenant
Désirer, sans atrenpranche.
Poès. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1387.
« Pour ce que 11 advocat, et procureur mengent
« tout le pays, par les gians salaires que il pren-
ds .\tt:!le, roi de Pergame, célèbre par ses i-ichesses, avait institué le peuple romain sou héritier. On disait riche comme
Attale. comme nous disons riche comme Crésus ; « .\tUUicis cuiiditiuuibus », dans Horace, (n. e.) — t2) Du grec
dxTikaGoç et dzxéXiGoç, sauterelle. On lit dans S' Jérôme, à propos d'un passage d'Esaii, ch. 33 : « Sicut colligitur
brucus. etc. » Ex locusta brucus nascitur, et quousque habeat a'as, sic vocatur. Cum autem aire oreseere creperint,
atel ,bm dicitur ; cum autem plenè volare cœperit, est locusta. (.N. e.)
AT
— 302 —
AT
a nenl si y scroit bon mettre attemperance, en
« la manière dessus dite. » (Oïd. des Rois de France,
T. I, notes, col. 1, art. 8.) I.e mot Àltrempnnce est
expliiiué par température de l'air dans le Glossaire
de Marot.
Le Gloss. du Roman de la Rose, sous lorlliographe
attrempancc, explique encore ce mot par tempéra-
ture, proportion dans la nature des choses, au vers
16925. Il y ajoute que ce mot signitie aussi tempé-
rament, voie de conciliation, et'cite le vers 17833.
Ces délinilions paraissent très justes.
VARUN'TES :
ATTEMPRANCE. Ord. de Chev. fol. 14, R».
Atempr.\nce. S' Bernard, Serm. fr. MSS. p. M et 328.
Atresipance. Labbe, Gloss. p. 503.
Atrenpr.\n-ciie. Poës. MSS. avant ISno, T. IV, p. 13X7.
Atte.mper.^nce. Ord. T. III, p. 30.
Attrvmpan'ce. Vigiles de Charles VII, T. II, p. 7G.
Attrempance. Sag. de Char. p. 467.
Attrempence. Essais de Mont. T. Il, p. 413.
Attrempure. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 105, col. 't.
Attempré, part. Mesuré, tempéré, modéré, ré-
servé. — Accordé. — Réglé. — Ralenti.
Dans le premier sens, on a dit de S' Louis : « En
« ses paroles fu-il at trempez; car onques jour de
« ma vie je ne li ov mal dire de nulluy. » (Joinville,
édition de Wailly, § 22.)
Le lieu est gras et dru, et bons et delictable
En li air attrem}ié, de tous biens abondable.
Ger. de Roussillon, MS. p. 17.
Atrempée s'est dit pour acco7'clêe. mise d'accord,
en parlant d'une vielle :
Il a endroit soi sa vielle atrempée.
Fauch. Lang. et PoOs. fr. p. HO.
Dans le sens de réglé, on disoit mal atlrempé
pour mal réglé. (Voy. l'Hist. de Floridan. p. 701.)
Toutes les significations du mot Attcmprcr déri-
vent de son sens propre modérer. .Uiisi modérer
son pas étoit le ralentir: de là, on a dit attrempé
pour ralenti... « Nous avions grand désir et imagi-
« nation d'aller, à puissance cle gens d'armes, à
« Homme, pour destruire tous incrédules; mais
« nostre chemin est retardé , et attrempé grande-
« ment. » (Froissart, Liv. IV, p. 30.)
VARIANTES '.
ATTEMPRÉ. Eust. Desch. Poës. MSS. p. 352, col. 1.
Atempéré. Ord. T. II, p. 23.
Atemprat. S' Bernard, Serm. fr. MSS. p. 10.
Atrampé. .loinville, p. 4.
Atrempé. Gloss. de Labbe, p. 507.
Attrempé et Estrampé. Ger. de Roussillon, MS. p. 87.
Attrempé. Gloss. de Marot.
Atempreiz. S' Bernard, Serra, fr. MSS.
Atempres. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 359, R" col. 1.
Estrampé et Attrempé. Ger. de Roussillon, MS. p. 17.
Attemprement, adv. Posément, avec modéra-
lion. Alempreiment , dans les Serm. fr. mss. de
S" Bernard, répond au latin Ad sobrietatem.
« Il se tenoit attemprement, etgravementen son
« pas, sans aucunement se desroyer. » (Math, de
Coucy, Ilist. de Charles VII, p. 755.) « Grand mes-
« trier est que la largesse soit démenée sagement,
« et atrempéement. » (Beaumanoir, Coutumes de
Beauvoisis, p. 9.)
Jupiter fut hors de l'ardure
Du fou qui trop art et pou dure
Et Baisoit atremprénicnt.
Poé». MSS. d'Eust. Desch. fol. 462, col. î.
VARIANTES :
ATTEMPREMENT. Math, de Coucy. Hist. de Ch. VII, p. 555.
Ate.mpi\iement. S' Bernard, Serm. fr. MSS. p. 99.
Atrempéemext. Ord. T. I, p. 42t).
Atremprement. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 462, col. 2.
Attrempéement. Petit Jean de Saintré, p. 50 et 64.
Attrempement. Froissart, Liv. I, p. 315.
Attemprer, verbe. Tempérer, modérer. —
Adoucir, accorder. — Régler, ajuster. — Tremper.
Ateinprer, dans les Serm. fr. mss ne S' Bernard ,
répond au latin Temperare.
Dans le premier sens, de tempérer, modérer, on
a dit :
Brandon devenus rigoureux,
Qui son ardeur jamais n'attempre.
Clém. Marot, p. T.
Ses douz Espris, par usage
De grâce donnez,
Doute le sauvage,
Aleiiipre les detemprez.
Poés. MSS. avant 1300, T. I, p. 459.
Employé pour adoucir ou accorder, en parlant
d'instruments de musique, on a dit :
S'ateiipre sa musette.
Ibid. T. II, p. 668.
« Il fl,'?/v'm/)<3 sa harpe, et puis en commence à
« chanter le lay. — Attrempa sa vielle, » c'est-à-dire
l'accorda, suivant l'Editeur de Ger. de Nev. I'^
partie, p. .50.
En parlant d'une horloge, on disoit Vattremper
pour la régler.
Pour mieux allremper l'oreloge.
Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 425, col. 2.
AIreuijier ses engins, les ajuster. (Fabl. mss. du
R. ir 7r.i5, T. II, fol. 170, R° col. 2.)
On disoit aussi tremper son vin., dans le même
sens que nous disons tremper son vin, y mettre de
l'eau, pour en modérer la force. (Voy. Joinv.de W.,
§ 22.)
CONJUG.
Atemprest. [S'Jievnm-à, Serm. fr. mss. p. 128,
dans le latin Temperaret.)
Allrcmperoij, cond. prés. Je tempérerois, je mo-
dérerois. (G. Durand, à la suite de Bonnef. p. 153.)
VARIANTES :
ATTEMPRER. Clém. Marot. p. 7.
Atemperer. Ord. T. II, P- 23.
Atemprer. S' Bernard, Serm. fr. MSS. p. 74 et passim.
Atenprer. Ibid. T. il, p. 668.
Attramper. Monet, Dict.
Attremper. Glossaire du Roman de la Rose. — Nicot ,
Oudin et Cotgrave.
Atremper. La Thaumas. Coût. d'Orl. p. 465, tit. de 1147.
Attempter, verbe. Attenter, entreprendre. « Ont
« altempté de tout mettre à internecion et destruire
" totalement leurs ennemis. » (Rabelais, T. I, p.
272. — Voy. les Preuv. sur le Meui tre du Duc de
Bourg, p. 252. — Ord. des Rois de Fr. T. I, p. 558.)
VARIANTES :
ATTEMPTER. Ord. T. V, p. 495.
Actempter. Poës. MSS. d'Eust. Desch. fol. 466, col. 3.
Attrkmpter. (Lisez AUemptev.) Eust. Desch. Poës. p. 376.
AT
— 303 —
AT
Attendans. Ce verbe signifie Maison des Sols,
C'éloit une maison dans la rue Daruelal (Grenela).
qui apparlenoit à une société appellée la Sotlse ; elle
a subsisté, à Paris, jusques dans le siècle passé. Le
chef de celte société s'appelloit le Prince des Sots
ou de la Sotise. Il avoit une loge distinguée àriiotel
de Bourgogne pour y assister aux représentations
des pièces de Théâtre, y jouissoit du droit de prési-
der aux assemblées qui s'y leiioienl. (Voy. lllisl.
dn Th. fr. T. II, p. 200 et f. I, p. 55.)
Attendant,/J«J'L Faisant attention, considérant.
« Attendant que hi dite ordonnance ail esté faite
" par noslre dit seigneur et père , eiie bonne et
" meure délibération de noslre conseil, sur ce
« avons ordonné. » (Ord. des R. de Fr. T. II, p. GOG.)
VARIANTES '.
ATTENDANT. Ord. T. II, p. 666.
Attendens. Ibid. T. III, p. 182.
Attendre, verbe. Ce mot avoit quelques signi-
fications qui ne subsistent plus; nous en avons
parlé sous les mots dont il n'étoit, en ce cas, qu'une
altération. Quant au sens subsistant el propre de
ce verbe, il nous donnera lieu de recueillir quel-
ques proverbes anciens.
Tout vient à point qui peut attendre.
Uîuv. de Kog. de CoUeryo, p. 190.
vVoy. aussi Rabelais, T. IV, p. '200. — Clém. Marol,
p. 08. — Poës. Mss. de Froiss. et Apol. pour Ilérod.)
On dit aussi, et bien l'eutent,
Que trop auoye qui attent.
Hist. des Trois Maries en vers, MS. p. 26-2.
On le retrouve dans la Chasse et le Départie
dainours, d'Oct. de Saint-Gelais, et dans Percef.
l'en pert bien par trop ateiidve.
Fabl. MSS. du R. n" lUlS, T. Il, fol. 147, V col. 1.
Atendés-moi sous l'orme.
Voyez l'origine de cette façon de parler, dans le
Journ. de Verd. (1) déc. 1750, p. 142Gelsuiv.
CONJUG.
Atcndai. (S' Bern. Serm. fr. mss. p. 225, dans le
latin expectavi.)
Atendomes, indic. prés. Attendons. (Fabl. mss. du
R. n" 7218, fol. 244, R° col. 2.)
Atendrommcs et entendromes, pour nous atten-
drons, futur prés. (Arch. mss. fol. 99, V° col. 2.)
Atenge, indic. prés. Attend. (Règle de S' Benoit,
lat. fr. MS. de Beauvais, ch. 49.)
VARIANTES :
ATTENDRE. Orlh. subsist.
A.STENDRE. Proc. de .1. Cuer, MS. p. 12 et 13.
Atandre. Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. I, fol. 119.
Ateindre. Cont. de G. de Tyr .Martène, T. V, col. 721.
Entendre et Atendhe. Arch. MSS. fol. 09, V" col. 2.
Attentat, subst. masc. Ce mot, qui en terme de
palais est encore en usage au figuré, semble avoir
une signification parliculière dans le passage sui-
vant : " En cas de nouvelleté, depuis ce que la
« chose est mise en la main du Roy, la partie fait
« aucun attentat, l'on la doit faire adjourner sur
« Yatlentat, de requérir qu'elle soit condamnée à
.1 reparer, et à amender au Roy; ainsi est-il en cas
« d'appel ; mais où il n'y a appel, ou main mise,
'■ l'on ne peut dire attentat. « (G. Coût, de Fr.
liv. II, p. 1 19. — Laur. Gloss. du Dr. fr.)
Attente, subst. fém. But, point où l'on tend. —
Attente.
Atendue dans les, Serm. fr. mss. de S' Bernard,
répond au latin expectatio.
■< Laquelle chose ne l'ut onques noslre attente. »
(Ord, des R. de Fr. T. I, p. 751 ) Attente dans celte
citation pouiroit y être pour entente, c'est-à-dire ce
que nous entendons.
On disoit aussi alendance pour but :
Mais n'avoit, ne vigne, ne terre ;
En tournoiement, et en guerre
Estoit trestote à tendance
Quar bien sçavoit ferir la lance.
Fabl. MSS. de S'-Germ. fol. 58, R= col. 1.
Le passage que nous venons de ciler peut égale-
ment s'entendre dans le sens d'ullenle ; on trouve
en ce dernier sens l'ortliographe atendue :
Si dis li que je li mande,
Que n'a fuce nule atendue.
FaLl. MSS. de S' Germ. fol. 50, R" col. 2.
I i Boiilangier, sans attendue
Revint, mais ne la trouva point.
Villou, Rep. fr. p. 15.
Le jeu d'attente semble une façon de parler,
usitée parmi les joueurs.
Et celluy pert le jeu d'attente.
Qui ne scet l'aire son point double.
Poës. d'Al. Charlier, p. 515.
C'est apparemment à cette façon de parler que je
rapporte cette plaisanterie de Marot à Franyois I".
« Vous n'y perdrez que le jeu et l'attente. » (Voyez
Poës. d'Al. Charlier, p. 707 et Jean d'Anton, Ann.
de Louis XII, p. 286.)
Un proverbe dit : « Bonne fue vault mieux que
« mauvaise attendue. » C'est-à-dire qu'il vaut
mieux fuir à propos que d'attendre à se sauver qu'il
n'en soit plus temps.
Attendue est pris pour défense, résistance, dans
les vers suivants :
Pour eschapper de mort vault trop iniL!U.< bonne fue
(Ce disent ly couars), que mauvaise attendue.
Ger. de Roussiilon, MS. p. 117.
VARIANTES ;
ATTENTE. Gloss. de Marot.
Atente. Poës. MSS. avant 1300, T. III, p. 1026.
Atendance. Fabl. MSS. de S' Germ. fol. 58, R» col. 1.
Atendanche. Poës. MSS. avant 1300, T. 10, p. 1199.
Atendue. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 47.
Atténuation, subst. fém. Terme de pratique.
On trouve répondre par atténuation, et on l'expli-
que : « Après l'instruction d'un procès, el les con-
« clusions prises, elles sont communiquées à
(1) Attendre sous l'orme a deux significations ; 1» Etre confiant dans sa cause ; ce sens est aujourd'hui inusité et dérive
diieclement de l'ancienne habitude de plaider sous l'orme; 2» Donner un rendez-vous auquel on n'a pas dessein de se
tru\iv(^r. Les justices seigneuriales se tenaient généralement aux portes des châteaux, sous un orme qui y était planté ;
souvent les parties assignées manquaient au rendez-vous et se faisaient attendre sous l'arme. (N. E.)
AT
304 —
AT
« l'accusé pour y répondre par atténuation, ce qui
« s'entend tant pour le justifier, et dcscliarger du
« crime dont il est :;ccusc, par dénégation, alléga-
« tion d'alibi, ou autre semblable défense que pour
« adoucir, exténuer et diminuer le faict, et la
« peine. » (Bout. Som. rur. p. 2'i2. — Voy. Laur.
Closs. du Dr. fr. — Le Dict. de Cotgr.)
Attemirir, verbe. Rendre menu, délié, mince.
(Voyez Dicl. de Mcot, Monet, R. Eslienne, Oudin et
Cotgrave.)
Altérer, verbe. Jeter par terre. — Se mettre à
terre. — Echouer.
Le premier sens de jeter par terre, se trouve
dans Grelin, p. 80. — Froissart, liv. I, p. 318 et
dans le Recueil des Poës. mss. av. 1300, T. IV, p. 1438.
Crétin a dit aussi s'altérer pour se mettre à terre :
atléré m'estoye
Soubz un rosier, où par escrit mestoye
Leur playdoyé.
Crétin, p. 85.
Enfin aterré s'est dit d'un navire échoué, d'un
bateau engravé. « Encores fumes nous à granl
« meschies Là où nous estions atterrez-, car chacun
« cuida estre noyé, et perdu, et que la gallée se
« fendist. » (Joinville, p. 112.)
VARIANTES :
ATTERER. Crétin, p. 85. - JoinviUe, p. 112.
Aterrer. Froissart, liv. I, p. 318. — Crétin, p. 80.
Attermoyeur, subst. Celui qui prête à ferme
ou sur gage ;
Mais regardez que de deniers
Ont usuriers en leurs greniers,
Faulx monnoyeurs, altennoyeiirs
Baillifs, Bedeaulx, Prevostz, Mayeurs, etc.
Rom. de la Rose, 12257-12260.
Atterrassement, subst. masc. L'action de ter-
rasser, de jeter par terre. (Dict. d'Oudin.)
VARIANTES :
ATTERRASSEMENT. Oudin, Dict.
Aterrement. Ibid.
Atterrasser, verbe. Terrasser. (Oudin, Dict.)
Atterrasseiir, subst. masc. Qui terrasse. (Dict.
d'Oudin et de Cotgrave.)
VARIANTES :
ATTERRASSEUR. Oudin.
Atterasseur. Cotgrave.
Attester, verbe. Pour témoigner, certifier ou
pour accuser, ou soupçonner.
Semblant avoit aulreffois veu ;
Faulx estoit; mais de fausseté
Ne l'eust-il jamais attesté.
Rom. de la Rose, 12854-12857.
Attexter, verbe. Attester.
comme texte
De la sainte Escripture aticxle.
Grelin, p. 35.
Atteynenient, subst. masc. Ajournement, cita-
tion en justice. « Nul ne peut attexjnement doner
« fores que cil en qui person repose la possession,
« el la propriété. » (Britlon, Loix d'Angl. f. 87, V°.)
Attinées, subst. fém. plur. Lettres de défî.
« Il y eut attinés ou lettres de deffy faits de six Dau-
« phinois contre six Bourguignons. » (Mém. de
Charles VI, p. 486.)
Attique, aâj. Antique. « Lettres attiques qu'on
« dit autrement lettres antiques. » (Du Verdier,
Bibl. p. 447.)
Attiqiiet,sî/bs^ masc. Etiquette, affiche, placard.
« Si est tenu le sergent exécuteur raeitre par escrit
" en un Billet, ou altiquet, devant l'auditoire du
« lieu oîi l'on fait les délies, quatre criées, etl'adju-
« dicalion, et déclaration de l'héritage, ou héritages
« saisis, le nom de celuy, ou ceux auxquels appar-
» tiennent, de celuy qui les fait crier, et pour quelle
« somme. » (Coul. gén. T. I, p. 421.)
Attiquete, subst fém. Etiquette. Brevet. Ecrit
en forme de sommaire et de mémorial. (Dict. de
Monet.)
Attii'age, subst. masc. L'action de tirer. —
Tirage. Peut être attirail, équipement.
Equiper la charrue, et pour son atlirage,
Tresser du poil de chèvre, à faire du cordage.
bevg. de R. Bellcau, T. I, fol. 130, V'.
Attirant, participe. Fugitif. Dans le passage
suivant, attirant semble être synonime de fugitif.
« Advenant que quelque personne, soit homme ou
« femme, est tombée en décadence de biens, Vatti-
« rant ou fugitif, ou la maison mortuaire aban-
» donné, sera' incontinent tout le bien meuble et
« imeuble inventorié. » (N. Coût. gén. T. I, p. 308.)
Attisé, adj. Excité, incité.
Ce sont meschans apostats attisez
Ceditieux, poignans, mal baptisez.
Faifeu, p. 4.
Attise-querelle, adj. Qui excite des querelles.
(Dicl. d'Oudin el de Cotgrave.)
Tu es une attise-quereUe
Tu es sorcière et maquerelle.
Œuv. de Joachim du Bellay.
Attoiiassé, partie. Abattu. <■ Depuis les cor-
a neilles Romaines aislebrenées et attouassées, les
« gei'faulx revenants de Septentrion en leurs pro-
« près et anciennes ayres, je parle des François el
" des Bourgongnons, les François s'arresterent en
« la Belgique, et les Bourgongnons en la Celtique,
« el fut Lyon de la conquèste'de ceux cy. » (S' Jul.
McsI. Hist. p. .^30.)
Attouchement, subst. masc. Coup donné,
mainmise. « Quarantaine ne s'ensuit point, s'il n'y
« a attouchement car pour paroles ne s'engendre
« point ; et s'il y a attouchement, combien qu'il ne
« soit à sang, si engendre il quarantaine à peine
« de meurdre qui sur celuy enfraint. » (Bouteiller,
Somm. rur. p. 230.)
Attournance, subst. (cm. Laurière définit
ainsi ce mot, dans le Glossaire du Droit françois :
« C'étoit un changement de la part des sujets, ou
<•■ des vassaux qui renonçoient, du consentement
AT
— 305 -
AT
<■ de celui qui avoit été leur seigneur, à l'obéis-
« sance, et à la fidélité qu'ils lui avoient jurée, et
« qui sengageoient ensuite par serement à la même
« obéissance, et à la même fidélité envers celui qui
« étoit devenu leur nouveau seigneur, par achat,
• ou autre acquisition. »
VARIANTES :
ATTOURNANCE. Laurière, GIoss. du Dr. fr
Atournance. Id. ibid.
AviRANCE. Id. ibid.
Attourné, sitbst masc. Procureur. Celui qui
fondé de procuration, gère les affaires d'un autre'
(Laurière, Gloss. du Droit françois, au mot, i;io;n'?a')
Il signifie aussi, en quelques lieux, suaire de ville
(Voy. Laurière, Gloss. du Dr. fr., au mot Atoiir )
C'est peut-être dan;? ce dernier sens qu'il faut en-
tendre les altoumez de Cojnpiegne, quoiqu'on lise
à la marge du Coût. gén. T. I, p. 333, où ces mots
se trouvent : « C'éloit ceux qui en géroient les affai-
« res. Au reste, le maire de ville est chargé de
« veiller aux affaires de la ville.... Li atome est cil
« qui par devant justice est a/mte, par aucun, en
« Echi(iuier, ou en assise, ou il a et recort pour
" poursuivre, et pour deffendre sa droicture »
(Gloss. lat. de Du Cange, au mot Attimmtiis ) L'a-
tourné de la Reine en Angleterre, en IGOl , c'étoit
son procureur général. (Voy. l'IIist. de Thou, trad.
T. XIII, p. GG4.) Attorné des procureurs, c'est le
procureur qui représente les autres. (Ord. des Rois
de France, T. II, p. 398, note.)
On disoit aussi actourné pour procureur consti-
tue. On distinguoit les actournés, des autres procu-
reurs, » les actournés ne servoient qu'aux causes
« speciliées en Vactoiirnerie, en quov ils différoient
« des procureurs qui occupoient en toutes actions
« soit en demandant, soit en défendant. » VovezLa
Roque, Tr. de la Nobl. p. 511, ch. cxlvii, où il pro-
pose la question: Si les acloimiés dérogeoient, ou
non. '
VARIANTES :
ATTOURNÉ. Ane. Coût, de Normandie, fol. 86 R»
ACTOURNE. Nicot et Cotgra-pe. '
Atornk. Rymer. T. I, p. 60, titre de -1260
Atoirné. Hist. de Tliou, T. XIII, p. 664.
Attorné. Du Cange, Gloss. latin au moi Atturnatus
ATTOunNON.s. Britton, Loix d'Angleterre fol 28 V»
Atturné. Ibid. fol. 31, R». , . -o, y .
Mionvné, part. Paré, ajusté. — Entouré, ob-
sède. — Couvert. — Garni.
Dans le sens de paré , ajusté , Rabelais a dit ■
« Uamoiselles bien pimpantes, et atourées » (T IV
page 44.) ^ ■ '
Ce mot est employé pour obsédé, dans ce vers :
Les regrets dont je suis atournée.
Les Triomphes de la Noble Dame, fol. 25i. V.
Pris dans le sens de couvert, on a dit : « A tourné
de fange pour couvert de boue. » (Percef. Vol III
fol. 138.) » Il fit couper les esclues, si furent il
« ajopie de l'eue que le Soudan si lor donna cono-ié
« d aler ariere. » (Coût, de G. deTyr,T. V, col. C93 )
Dans le sens de garni, on trouve : « Chanfraïn
n.
« atourné de fer, » c'est-à-dire garni de fer. (La
Colomb. Th. d'IIonn. p. 426, T. II.)
VARIANTES :
ATTOURNÉ. Lanc. du Lac, T. II. fol. 60, V» col 2
Atournk. Percef. Vol. III, fol. 138, R" col 2
Atouré. Rabelais, T. IV, p. 44.
Attourné, adj. « Obligations attournées, » étoit
une expression dont on se servoit pour désigner
une procuration. (Voy. Laurière, Gloss. du Dr fr.)
Attoiirnement, subst. masc. Procuration —
Préparant. - Parure , ajustement. - Revirement
de parties.
Atornemenl, dansles Serm. fr. mss. de S' Bernard
repond au latin dtspensatio et deliberatio
Sur le premier sens, de procuration, vovez Lau-
rière, Gloss. du Dr. fr., au mot Attornamentum
INous ne 1 avons trouvé employé en ce sens nue
sous sa première orthographe ; mais les diverses
orthographes du substantif rt//0Mrae, dans le sens
de procureur, donnent lieu de croire qu'on pouvoit
aussi employer, dans le sens de procuration les
orthographes (|ue nous rassemblons ici. '
On \\\. mAïïïéremmeni attonrnement et atourne-
'"'-"' l**^/"' préparatifs du siège de Montpaon , en
lo/U. « Les Anglois ordonnent attournemens d'as-
« saux » (Froiss. Liv. I, p. 409.) On lit dans le
même historien, .. appareiller grans atournemens
" a assaut. » (Livre I, p. 412.)
De l'attirail de la guerre on faisoit passer l'usafe
de ce mot a l'attirail de la toilette, avec le sens de
parure, ajustement, et l'on disoit :
Elevées furent forment
En orgueil, en atoumemenl.
Eusl. Desch. Poés. MSS. p. 531, col. 4.
Enfin Vatournement, ou aturnement , désignoit
en termes de pratique, un revirement de parties là
cession d'une créance faite d'un créancier à un
autre. « Quand il luy baille son delteur en lieu de
« luy. » (Bouteiller Som. Rur. p. 147. - Voy. aussi
Britton, Loix d'Angleterre, fol. 105, V°.)
VARIANTES :
ATTOURNEMENT. Ane. Coût, de Normandie, fol 145 V»
ATOURNE.VENT. Froissart, Liv. I, p. 4.31 ' • '^' ' •
ATURNEMENT. Britton, Loix d'Angleterre, fol 105 V»
Atornement. S< Bernard, Serm. fr. MSs! p. 161. ' '
Attourner, verbe. Accommoder, arranger
apprêter, disposer. —Ajuster, parer. — Diriger*
tourner. — Transporter, faire un virement de
parties. — Changer.
Dans le premier sens d'accommoder, arranger
apprêter, disposer, on a écrit : '
Ung jour faingnit aUer aux champs : de fait
11 s'en partit, et dist ne retourner
A la maison, qu'il n'ayt fait attourner
Et accoutrer certaine son affaire.
Faifeu.
,„.", ,'^,' atorna son affaire, et ordena ses Batailles. .
(\illehardouin, p. 133.)
39
AT
— 306 -
AT
. La baiesse (1) atome à mengier. » (Fabl. mss. de
S' Germ. fol. 65, R' col. 2.)
Ne pensez riens a me puerir
Atoniez sui tout à mourir.
Arch. USS. fol. Î8, R- col. î.
Ce mot a été employé pour parer, ajuster: « Quand
* elle fut si bien attournée que nulle mieulx, si
« vint dehors. » (Lanc. du Lac, T. II, fol. 60.)
Encor estoit en sa courtine
S'en issirent de la cité
Sor leur cheval bien acesmé et atome.
Arch. MS. fol. 57, R* col. 1.
« A Vatournev de la reine, » c'est-à-dire à la Toi-
lette, lorsque la reine se pare de ses atours. Selon
l'éditeur de Petit Jean de Saintré, p. 191, atourner
est ici employé comme substantif. Cet usage des
infinitifs des verbes, employés comme substantifs,
se rencontre dans notre langue.
Avec le sens de diriger, tourner, on a dit :
A la miller del roiaume de France,
Voire del mont, ai mon cueur alorné.
Guisnes, Poês. MSS. avanl 1300, T. III. p. 986.
L'auteur, ayant posé un cas dont il rapporte la
décision, il en pose un autre, el rapportant une
décision contraire, dit : « La raison atourne, » pour
signifier : c'est tout le contraire. (Bouteiller, Soin.
Rur. p. -420.)
Enfin on a dit alourner pour faire un virement
de parties. On a vu attourncment dans le même
sens. (Voy. ce mot.) On lit dans Bouteiller: « Jaçoil
« ce que on ne puisse sa dette atourner, etc. »
(p. 147), c'est-à-dire échanger une créance contre
une dette.
C'est par allusion à l'acception précédente, qu'on
a dit s'attourner, en parlant de changer de seigneur.
(Voy. Du Cange, Gloss. lai., au mot Atlornamen-
lum, et ci-dessus Attournance.)
CONJUG.
Ator (m'), ind. prés. Je me tourne. (Chans. fr. du
xiii' siècle, .MS. de Bouhier, ch. ccxcvi, fol. 248, R°.)
Atort (s"), ind. prés. S'ajuste, sépare. (Voy. Fabl.
MSS. de S' Germ. fol. 78, R° col. 1.)
Atoiu\ impér. Atourne, dispose. (Gloss. du
Roman de la Rose.)
Atourt, impér. Tourne. (Poës. à la suite du
Rom. de Fauvel, ms. du R. n- 0812, fol. 1, V- col. 2.)
.J^TTOURNER. Gloss. de Marot et de Cotgrave.
ATORNEin. S* Bernard, Serm. fr. MSS. p. 3 et passiin.
Atorner. Villehard, p. 17.
Atourner. Du Cange, Gloss. latin au mot Atornare.
Atourer. g. Guiart, MS. fol. 327, R».
Atourrier. (Lisez Alourner.) Ibid. fol. 68, V».
Attorner. D. Morice, Hist. de Bret. col. 934, tit. de 1248.
Entouner (s') et s' Atourner. Ger. de Rouss. MSS. p. 115.
Attourneresse, sitbst. fém. Coiffeuse ou
femme qui loue des parures. (Voy. Monet, Oudin et
Rob. Estienne, Dict.)
VARIANTES :
ATTOURNERESSE. Dict. de Monet.
Atourneresse. Dict. d'Oudin et de Rob. Estienne.
Attourneur, subst. masc. Coiffeur, homme qui
pare. (Dict. de Cotgrave.)
Attractifs, subst. masc. plur. Attraits. « Lui
« estant en cette perplexité, ambition retourna qui
« le vint embrasser, et baiser, et par ces amoureux
« attractifs fut par elle gaigné, sans pouvoir don-
« lier résislence de lui mesme. » (Les Triomphes
de la Noble Dame, fol. 114, V".)
Attraiable, adj. Qu'on peut poursuivre en jus-
tice. « Vefves, femmes, enfans, et familles ne seront
« attraiables autre part, en première instance , en
« actions personnelles civiles, ou criminelles, qu'en
« nostre dite cour. ■> (Coût, de Hainault, au Nouv.
Coût. gén. T. II, p. 95, col. 1 et 2.)
Attraictable, adj. Qu'on peut attirer.
Attraicteuse, non attraictable.
Eusl. Desch. Poés. MSS. fol. 17, col. 3.
Attraiement, subst. masc. Attrait, l'action
d'attirer. (Voy. les Dict. de Cotgrave et de Rob. Est.)
Le P. Labbe, dans son Gloss., p. 500, traduit i //;•««>-
ment par Ilaustus. C'est quelque méprise. Le Gloss.
de Labbe en fourmille.
VARIANTES :
ATTR.UEMENT. Cotgrave.
Attrayement. Dict. de Rob. Estienne.
Attraiute, adj. au fém. Serrée, restreinte,
étroite. (Voy. Bouteiller, Som. rur. p. 728.)
Attraire, verbe. Attirer, faire venir à soi, ap-
peller. Ce mot, dans S' Bernard, Serm. fr. mss. p.
10 et passiin, répond au latin abstrahere , allicere
et provoctire. (Gloss. de llarot et Gloss. sur les
Coût, de Beauvoisis.) « Il astrait merveilleusement
« à luy les cueurs de sa gent. » (Chron. fr. ms. de
Nangis, sous l'an 190.) On lit dans le latin, « gentis
« sufe corda mirabiliter ad se traxit. « Dames qui
« sont atraites en tesmoignage. • (Glossaire sur les
Coutumes de Beauvoisis.)
On disoit :
1° Atraire, ou attraire à son fié, c'est-à-dire atti-
rer, faire rentrer dans son fief. (Voy. les Assises de
Jérusalem, p. 63.)
2° Attraire témoins, les appeller, les assigner.
(Dict. de Cotgrave.)
CONJl'G.
Atraisistes, passé défini. Attirâtes. (Poës. iiss.
avant 1300.)
Certes molt m.'atraisistes.
Pofs. WSS. avant 1300, T. II, p. 950.
Atlraict, ind. pré. 11 attire. (Glossaire de Marot.)
Atracel, ind. prés. Attire. (S' Bernard, Serm. fr.
MSS. p. 10, dans le latin Alliciat.)
V.4B1AMES :
ATTRAIRE. Gloss. du Rom. de la Rose.
Astraire. Chron. fr. MS. de Nangis, an 196.
(1) Servante; voir Du Cange à ISaila.
AT
— 807 —
AT
ÀTRAHER. d'où le participe Atraham. S' Bernard, Serm.
fr. MSS. p. 382.
Atraire, Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis.
A.TRERE. Ord. T. I, p. 371, notes, col. 2.
Atreire. Fabl. MSS. du R. n' 7615, T. I, fol. 65, R» col. 1.
Attrait, ;)arf. Appelle en justice. — Atteint,
frappé. — Attribué, octroyé.
Dans le premier sens, d'appeUé en justice, on lit :
« Quand celuy qui est convenu, et attrait en ma-
« tière de retraicl, obtient congé contre le re-
« trayant, à faute de comparoir, ou autrement, en
« quelque estât que la cause soit, en ce cas, icelluy
« retrayant perd sa cause. " (Coutumes générales.)
Employé pour atteint, frappé, on a dit : « ou cas
« qu'il soit attrait de la jouste à moy, demandez
« luy s'il luy suffit, et s'il luy en faut, ou veut
« plus. » (Froissart.)
On disoit attraie au féminin ; on le trouve avec
cette orthographe pour attribuée, octroyée. « L'a-
« mour de la dame fusl attraie au mieulx jous-
« tant. » (Modus et Racio, ms. fol. 256.)
VARIANTES :
ATTRAIT. Coutumes générales.
Attraie, au fém. Modus et Racio, MS. fol. 256, R».
Attrait, adv. Posément, lentement, à loisir.
« Ils seront enquis sur les faitz, neances et défen-
« ces de l'intendit de la dite preuve, qui entendible-
« ment (intelligiblement) et «i/ra/neur sera leu. ■>
(Ordonn. Royàulx ;\ la suite de l'Ane. Coût, de
Normandie, fol. 33.) « Luy feist chanter le lay moult
« atraict. » (Percef. Vol. III, fol. 10.)
Li crestiens ce sont retrais
Tout bellement, et sont attrai.t.
Machaut, MS. fol. ï-28, V- col. 1.
La souspasmes bien et atrait.
Machaut. MS. fol. 186, R* col. 3.
variantes :
ATTRAIT. Ane. Coût, de Normandie, fol. .33, V».
Atraict. Percef. Vol. III, fol. 10, R" col. 2.
Attrais. Machaut, MS.
Atrect. Molinet, p. 171.
Attret. Froissart, Poës. MSS. p. 368 et 410.
Atrait. Régi, de S' Benoît, lat. fr. ch. xliii.
Atret. Modus et Racio, MS. fol. 184, R".
Attrait, siibst. masc. L'action d'attirer, d'exci-
ter. — Accueil. — Attirail, équipage, bagage. —
Provision, amas. — Apprêts, préparatifs, matériaux.
— Poste, guet, embuscade.
Ce mot signifioit aussi plaisir, agrément; accep-
tion qui subsiste. Nous ne devons parler que de
celles qui ne subsistent plus. Ce mot se prenoit
dans les sens suivants :
Pour l'action ou moyen d'attirer, d'exciter, insti-
gation, suggestion. » Par rrt/?'a//du Roi d'Ermenie,
o li Tarlar s'esmeurent îi venir contre eux. »
(Contin. de G. de Tyr, Martène, T. V, col. 737.)
Dans le sens d'accueil, nous lisons ;
Et quant la Duchoise la voit,
Tantost tos li sans li fremist
Com celé del mont que plus het ;
Mes son corage celer set.
Se li a fet plus bel atrct.
Conques devant ne li ot fet.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 9, V- col. 2.
On a employé ce mot avec la signification d'at-
tirail, dans les vers suivans :
Et tant fit aporter d'airait,
Qu'avant furent li engin trait.
Et furent tost prest d'asalir.
Ph. Mouskes, MS. p. 7U .
On a employé ce mot dans le sens d'amas,
provision.
Roy Balthazar qui fîst ces grans atrays
D'or et d'argent, que sur ses subgiez
Pourchace, fut prins de denz en Baljiloine.
Poés. MSS. d'Eust. Dosch. fol. 339, col. 4.
On lit dans le sens d'apprêts, pi'éparatifs. « En
« my septembre l'en commence à faire les atroiz,
« de faire les gaigneries. » (Anciennes Coutumes
de Bretagne, fol. 150.)
Ce mot désignoit des matériaux, ou tout ce qui
sert pour bâtir une maison. « Quand aucun fait
» édifier, ou réparer en son héritage, et ne le peut
« faire sans endommager son voisin, ou sans pas-
• ser par sa maison, ou héritage, celuy voisin est
« tenu luy piester, et donner patience à ce faire, et
« luy souffrir (permettre) que par sa maison ou
« héritage, celuy bâtisseur passe ses attraicts,
« soient poutres, goutières ou autres choses, si
« le dit bâtisseur ne le peut conduire, ne passer
« par ailleurs. » (Coût. Gén. T. II, p. 795. — Voy.
aussi Laurière, Glossaire du Droit Français.)
Enfin, l'on a dit attrait pour poste, guet, einbiis-
cade, ou peut-être pour retraite, refuge. « Si prin-
« drent à chasser celluy jour aux bestes saulvages
« a grant déduyt, si firent leur attrait par dessoulz
<■ ung merveilleux chesne en grandeur, pour le
« soir, avoir leur recept. » (Percef. Vol. VI,
fol. lifl.) « A ces motz se partit le Roy du veneur et
« se traist avccques sa compaignie vers la montai-
gne oîi ils arrivèrent sur le soir, et firent leur
« attrait sur une fontaine qui sourdoit au pied de
« la montaigne. » (Ibid.)
variantes :
ATTRAIT. Percef. Vol. VI, fol. 119, V col. 2.
Atrait. Ph. Mouskes, MS. p. 711.
Attraict. Hist. de Loys III, duc de Bourgogne, p. 95.
AcTRAiT. Rom. de Brut, MS. fol. 59.
Attriel. Vig. de Charles VII, T. II, p. 84.
Atrez (plur.) Parton. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 130.
Atrays (plur.) Eust. Desch. poës. MSS. fol. a39, col. 4.
Atroiz (plur.) Ane. Coût, de Bret. fol. 1.50, V».
Attraicts (plur.) Coût. Gén. T. II, p. 795.
Attraiture, mbst. fém. Attrait. (Voy. Eust.
Desch. Poës. MSS. fol. 83.)
Attrampement, subst. mase. Modération,
«i Nous ayent sopployé que nous, sur ce, de grâce,
« voulissons aucun attrcmpement mettre. » (Ord.
des R. de F., T. I, p. 44G.)
VARIANTES '.
ATTRAMPEMENT. Monet, Dict.
Attrempement. Du Gange, Gloss. lat. au mot intnmperium.
Attrape, subst. fém. Ruse, tromperie. Piège.
Ce mot est encore employé au premier sens, en
Normandie. Il .semble signifier eroe en jambe, lors-
qu'il s'agit de joutes à pied. « Messire Jacques em-
« prit deux fois de porter son homme par terre,
AT
— 308 —
AU
« comme par manière d'une atrape. » (Mém. d'Oli-
vier de la Jfarche, Liv. l, p. 315.) Parlant de deux
lutteurs que Louis XII fit combattre devant les
Dames à Milan: « Se donnèrent fl«r«/;/J('s, trousses,
. et Êtrands saults. » (J. d'Aut. Ann. de Louis Xll,
de 1506 et 1507.)
On trouve altmpe pour piège dans le Triomphe
des neuf Preux, p. 314, col. 1. " Hz avoient fléchi
« les tendres branches des bois, le bout d'en hault
•■ fiché en terre fermement, la tige de hors deux
« piez, ou environ comme ung cercle, à manière
« d'atrape, entre la chées par telle façon qu'impos-
« sible estoit à aucun cheval y traverser sans soy
« enchoper, et cheoir, tant estoit la baye espesse
« et drue. » (Hist. de César, Triomphe des neuf
Preux, p. 314.)
VARUNTES :
ATTRAPE. J. d'Aut. Annal, de Louis XII, an 150C et 1507.
Attuappe. Olivier de la Marche, Liv. I, p. 273.
Atr.\pe. Mém. d'Olivier de la Marche, Liv. I, p. 273.
Attraperie. Cotgrave.
Attrapedeniers, suhst. inasc. Escamoteur.
(Voy. des Accords Bigar. préf. p. 2.)
Attrapé, partie. Accroché. « Vindrent au pied
. de la Tour, où ils trouvèrent Eschellesa^^rrtpecs,
» aux créneaux du mur, mais n'y eut celluy qui ne
• refusast monter le premier. » (Triomphe des
neuf Preux, p. 473.)
Atrapez,;jflr/ic. ou adj. Pour dupe ou crédule.
Moult iert demain dur li esters
Si périlleux et si empris,
Moult vous iert Diex, sire, amis
Se vous sanz perle, sire, en eschapez ;
Ne soiez pas si atrapei
Oue les doiez par force prendre.
Aich. MS. fol. 93, V" col. 2, et 04. R- col. 1 .
Attrapoire, suhst. masc. Trebuchet, souricière.
(Dict. d'Oudin et de Cotgrave.)
Attrappeur, suhst. masc. Trompeur. (Voy.
Oudin, Dict. et Cur. Fr.)
Attrayamment, adv. D'une manière attrayante.
(Dict. de Cotgrave.)
Attrendedor, suhst. masc. Qui est dans l'at-
tente. (Dict. de Borel, au mot Anador.) C'est sans
doute une faute pour attendedor.
Altrette, suhst. fém. Agacerie.
Un regard, unedouce attrelle...
Friiissarl, Poês. MSS. p. U9, col. 1.
Attrit, adj. Plein d'atlrition. (Dict. d'Oudin, et
de Cotgrave.)
Attyrer, verbe. Tirer, se retirer.
Le jour passa, chascun se retira,
Mesme Faifeu vers sa femme attyra.
Faifeu, p. 109.
Atufier, verhe. Bâtir, édifier. (Voy. une Epi-
taphe rappoiiée dans le Journ. de Trévoux, août
153!», p. 1885.)
Atiirré, adj. Buté, entêté, endurci. » Pour, sur
« ce, convaincre les aturre%, au vieil abus. » (S' Jul.
Mesl. Ilistor. p. 10.) « Aturré à une opinion. »
(Dict. de Cotgrave.)
Au, art. Du. (Dict. de Borel, Carpentier, Hist.
de Cambray, p. 27; tit. de 1230. — Suppl. au Gloss.
du li. de la Rose.)
Au a été employé avec la signification de en,
ainsi on disoit: au témoignage pour en témoignage.
(Perard, Hist. de Bourgogne, p. 486; lit. de I'257.)
A ù, Là où. (Poës. MSS. du Vat. n" 1490, fol. 32.)
Au et A sont souvent convertis fun dans f autre :
comme Au et A et VAutrier et VAdrier dans le
Boman d'.l. (ms. fol. 24 et 44.)
Aubadat, suhst. masc. Funérailles des enfans.
Ce mot est en usage dans le diocèse de S' Flour.
(Voyez Du Cange, Gloss. latin, au moi Alhaderum.)
Peut-être, ajoiile-t-il, parce qu'elles se font avec
des ornements blancs.
Aubade, suhst. fém. Concert donné le plus
souvent à Yaubc du jour, danse. — Pièce de vers.
Ce mot, qui est encore en usage pour exprimer une
sérénade, se disoit aussi autrefois d'une sorte de
poésie destinée à cette espèce de concert que nous
nommons aubade. H s'est dit aussi des danses que
l'on y dansoit. (Voyez Du Verdier, Bibliothèque,
p. 88. — La Croix du .Maine, Bibliothèque, page 23.)
VARIANTES :
AUBADE. Orthographe subslst.
AuLBADE. J. Marot, page 137.
Aubader, verbe. Donner des aubades. (Voyez
Alector, Bom. fol. 125.)
Aubain, adj. et subst. masc. et fém. Etranger
et Etrangère. « Nous avons naturalisé en France le
« droit civil des Romains qui du commencement
« Q'iio'û aubain. « (Pasquier, Recherches, livre IX,
p. 835.) « Si aulcun aubain, autrement appelle
« chevaulx aulbains (1), » c'est-à-dire chevaux étran-
gers; mais spécialement ce mot désignoit certains
chevaux d'Ecosse dont l'allure étoit plus douce que
l'allure des chevaux anglois, et on les distinguoit
par le mot aulbains des autres chevaux delà Grande-
Bretagne. (Voyez Le Duchat sur Rabelais, T. I,
page ÔO, note 3.)
VARIANTES :
AUBAIN. Pasquier, Recherche, livre IX, page 835.
Albain. Coût, de Perrone, Nouv. Coût. Gén. T. II, p. 603.
Aubaine. Preuve de VHistoire de Paris, page 752.
AuBEiN. Coût. gén. T. II, page 672.
Ai'LBAiN. Laurière, Glossaire Ju droit françois.
AuLBAiNE. Lettres de Pasquier, T. I, page 6.
AuLBAN. style de procédure en Normandie, fol. 80.
AuLBiN. Cotgrave, Dictionnaire.
AuLBiNE. La Thaumassière, Coût, de Berri, page 147.
(1) Il y a là deux mots distincts; 1° aubain, qui vient peut-être d'Albanus, Ecossais; 2» anbin, se dit d'un cheval qui
galope des pieds de devant et trotte du train d'arrière, et il vaudrait mieux l'écrire hoblii (voir à Atibercau). (N. E.)
AU
— 309
AU
Aubaineté, subst. masc. et fcm. Aubainage,
aubaine, droit d'aubaine. (Dict. de Cotgrave, au mot
Aubaineté, et Du Gange, Gloss. lai. au mot Aubenœ.)
VARIANTES :
AUBAINETÉ. Dictionnaire de Cotgrave.
AUBANITÉ. Du Gange, Glossaire latin, au mot Aubcsiin.
AuLBAiNETi';. Coût. d'Anas, au Coût. gén. T. I, page 756.
AuBEiNAGE. Cout. de llainaut, au Nouv. Coût. gén.
AUBENAiGE. Cout. gén. T. I, page .390.
AuBENAGE. Laurière, Glossaire du droit François.
AuBENE. Duchesne , Gén. de Béthune, page 152. — Du
Cange, Glossaire latin au mot Aubesiie.
AUBENNAGE. Glossaire de l'iiistoire de Paris, T. II, page 93.
AuBEVNAGE. La Thaumassiére, Cout. de Berri, page 202.
AuBiNAGE. Cotgrave, Dictionnaire.
AUBiNAiLLE. Poët. MS. du Vatican, n» 1400, fol. 151, V».
AUBUNAiLLE. Poët. MS. du Vatican, n» 1522, fol. IGG, R°.
AULBINAGE. Cotgrave, Dict. — Cout. gén. T. I, page 910.
AuLTENAGE. {Lisez Aulbenage.) Cout. Gén. T. I, page 910.
Aubarde [l),subst. masc. Matelas. Froissart, par-
lant de l'iene-le-Cruel, Roy du Casiille, et d'Henri
de Transtamare son frère, dit : « A ces mots Pierre
« print à bras le Roy Henry son frère, et le tira à
« luy en luitant, et i'ut le plus fort de luy, et l'abba-
« tit dessous luy sur une aubarde, (ju'on dit en
« françois coestes de materais de soye ; cl meit la
• main à sa couslille, et là l'enst occis sans nul
« remède, se n'eust esté le Vicomte de Roque-
« berlin. » (Froissart, livre I, page 339.)
Aubarede, sitbst. féni. Arbre de bois blanc.
Du Cange, Glossaire latin, au mot Albarela, croit
que ce pouirait èlre un lieu planlé d'arbres, formé
comme ïUaWen Albere ; mais il paroit qu'il vient
à'albus, blanc, et qu'il désigne un arbre de bois
blanc. (Cout. gén. T. II, p. 672.) En Gascogne, c'est
une espèce particulière de saule.
VARIANTES :
AUBAREDE. Laurière, Glossaire du droit françois.
AuBEHEDE. Cotgrave, Dictionnaire.
Aubati'i, subst. La matrice. Aiibatrl et Aupalris
se trouvent dans le Roman d'Audigier. (.m.;, de
S. Germ. fol. 68.) Labatuesl une (auie pour Labatri
qu'il faut lire Yatibalri.
VAIIIASTES :
AUBATRI, AuPATRis. Rom. d'Audigier, MS. de S. Germ.
fol. 68, R° col. 2 et V» col. 3.
Aube, subst. fém. L'aube du jour. — Vêtement.
— Linceul.
Dans le premier sens, on disoit à l'aube crevant,
pour à la petite pointe du jour. (Froissart, livre I,
p. 220.) « Au point du jour que l'aube crevoil. »
(Ibid.)C'étoitla même chose que l'aube entr'ou verte.
Expression de G. Guiarl (ms. fol. 220.) On disoit
aussi, par allusion à cette acception du mol aube,
à l'aube des inouches, pour dire à l'entrée de la
nuit. (Le Duchal sur Rabelais, T. IV, page 33 et la
note. — Dictionnaire de Cotgrave, et Oudin, Diction-
naire et Curiosité française.)
Aube a signifié aussi les vêtements bbmos qu'on
donnoit aux enfans quand on les baptisoit. « Le fils
« de Clovis mort fut en aubes assez tost après son
« baptisemenl. » (Chroniq. de S. Denis, T. I, fol. 11.)
« Maudite soit l'heure que je fus oncques née, et
« que je ne mourus en mes aubes. » (Les Quinze
Joyes du Maria.ge, p. 27.) Nous nommons encore
aube un vêtement de toile blanche dont se servent
les prêtres.
Aube semble signifier drap, linceul, dans le pas-
sage suivant. En parlant de la mort de Hugues-le-
Grand, on a dit :
A grant ounor antierrés fu
Rice tombe, et moult rice aube.
Ph. Mouskes, MS. p. 330.
Peut-être ce mot signifioit-il en cet endroit bière
ou cercueil, et alors il seroit employé pour auge.
Enfants d'aubes. Ce nom se donnoit autrefois
aux Enfants de chœur. (Voyez Lebeuf, histoire des
Evoques d'Auxerre, page 568.)
VARIANTE :
ABE. Attis et Parfilias, MS. fol. 114, R» col. -1.
Aubé, participe. Ordonné prêtre. Du Cange
(Glossaire latin, au mot alba,) cite ces vers de l'Epi-
taphe de Frodoard, prêtre du diocèse de Rheims,
qui se trouve dans le P. MabiUon :
Vequit caste clerc, bon moine. Meilleur abbé,
Et d'.\gapit li Romain fut aubé.
Aiiboaii, subst. ma?x. Peuplier. — Aubier.
Le premier sens est le sens propre. On appelloit
ainsi cet arbre du latin Albellum, à cause de la
blancheur du dessous de ses feuilles. (Voy. Ménage,
Dict. élym.) C'étoit le peuplier sauvage, selon Ou-
din; le peuplier blanc, en général le peuplier, sui-
vant Cotgrave; une espèce d'arbre qui aime le bord
de l'eau, dans J. d'Aulon, Ann. de Louis XII, 1502,
p. 70 et 77. (Voy. AcoR.)
Dans la seconde signification, l'aubeau, de même
qu'abor ou abour[2), désignoit la partie du bois qui
est près de l'écorce, et qui est plus blanche que le
reste. " Il fautlroit une colle bien forte pour joindre
ce sans dislocation tant de membranes qui sont
« toutes d'aubean et peu de cœur de bon bois. »
(Sully, Mém. T. IX, p. 385.)
Du chesne ils estent Vaiibel
Car à brusler est condampné.
Fabri, .\rt. de Reth. Liv. II, fol. 10, Vv
(Voy. AuBEc et Albin.)
VARIANTES :
AUBEAU. Ménage, Dict. étym. - Dict. dOudin.
AUBEL. Cotgrave, Dict.
AuLBiER. ,1. d Auton, Ann. de Louis XJI, 1502, p. 76 et 77.
Aubec, subst. masc. Aubier. — Merrain.
On trouve ce mot au premier sens A' aubier, dans
l'article 115 de la Coutume de Bordeaux. (Voy.
Laurière, Gloss. du Dr. fr.) Cet article porte « qu'au-
(1) .\ubardc est le mot espagnol albarda; il a dans quelques provinces le sens de selle, et se rattache à barde, lames de
1er adaptées au poitrail d'un cheval. L'étymologie est le persan bardazet, couverture placée sous le bât. (N. E.) — (2) Les
charpentiers de marine appellent encore aubuur {albunuim, bois blanc) le cœur vert de l'aubier qu'ils coupent par
crainte de la pourriture, (n. k.)
AU
— 310 -
AU
« cun charpentier ne feront mauvaises, puantes,
« ne faulses doiielles, bois gelis, et bois où y ait
« auhec (1), bois cussonné ne autrement fausses
« doiielles en pipes, barriques, tonneaux, caves,
« doits (2) et autres sortes de vaisselle à vin grande
« ne petite. " (Coût. gën. T. II, p. GT2. - Voy.
Albin.)
Ce mot, dans le Bordelois , signifioit merrain,
selon Colgrave, sans doute le merrain dont on fait
des douves de tonneaux. Encore cette explication
ne seroit-elle pas juste, si, comme je le soupçonne,
elle n'est appuyée que sur l'article de la Coutume
de Bordeaux, ci-dessus rapporté.
Aubelière (3), subst. fém. Espèce de licou. Ce
licou ou muselière est composé de cinq pièces de
cuir blanc, comme le cuir de cheval, selon Le
Duchat sur Rabelais, T. I, p. 73, note 20. (Voyez
aussi le Dict. de Cotgrave.)
Aubenable , adj. Sujet au droit d'aubaine.
(Voyez le Dict. de Cotgrave.)
Aubepin, subst. masc. Aubépine.
A ubepin est sans doute une faute pour aiibifoin (4),
bluet, dans ce vers de Clém. Marot, p. 76.'5, où le
premier aubepin signifie aubépine :
Aubepins blancs, aiibepins azurés.
VARIANTES :
AUBEPIN. Du Cange, GIoss. lat., au mot Albepinus.
AUBESPiN. Régnier, Satires, p. 193 ; Stances, p. 200.
AULBESPIN. Cotgrave, Dict.
AuLBESPiNE, s. /'. Arresta amor, p. 164.
Aubère, subst. masc. Cheval grisûtre marqué
de taches noires. (Voy. les Dict. de Nicot, de Monet,
de Ménage et de Cotgrave.)
Aubereau (5), subst. masc. Oiseau de proie.
C'est une espèce de petit aigle. (Voy. les Dict. de
Nicot, d'Oudin et de Monet, au mot Aubereau.)
Et comme quand Vaubereau
Assuit la race de Nise (6),
L'empiétant, le fauperdreau (7)
Survient, fait lascher prise.
ŒuY. deBaif, fol.83, R'.
Que tout ausi coume l'alloé
Fuit le mousket et l'espervier
Plus que i'aubaiii, ne le bruhier ;
Tout ansement, al destraver,
Fuient païen devant les Frans.
Ph. Mouskes, MS. p. <86.
VARIANTES :
AUBEREAU. Dict. de Nicot, d'Oudin et de Monet.
AuLBEREAu et Haubereau. Idem.
AiBERET. Cotgrave, Dict.
Aubebt. Gace de la Bigne des Déduits, MS. fol. 22, R».
AuBAiN. Ph. Mouskes, MS. p. 186.
Aubez. Gace de la Bigne des Déduits, MS. fol. 83, R».
Aubergade, subst. fém. Droit de gîte. Ce
droit est usité dans le Béarn, où l'on dit Aubergada.
Anciennement les Seigneurs, en plusieurs lieux,
avoient droit de loger chez leurs sujets. Ce droit a
été converti en une rente payable en grain, ou en
argent. (Laurière, Closs. du Dr. fr., aux mots Au-
bergada ei Aubergade. — Du Cange, Gloss. latin,
au mot Albergata. — Voy. Aldergue.)
VARIANTES :
AUBERGARDE, Aubergada. Laurière, Gloss. du Dr. fif.
Auberge, subst. fém. Alberge. Sorte d'abricot.
" Pavies, auberges , muscats. » (Lettres de Pas-
quier, T. II, p. 159.)
Aubert, subst. masc. Argent, en terme d'argot.
(Voy. Le Duchat sur Rabelais, T. III, p. 221, note 13.)
Aubicon, subst. masc. Espèce de figuier. (Voy.
les Dict. d'Oudin et Cotgrave.)
Aubiers, subst. masc. plur. Sorte de raisins.
Raisins blancs, les mêmes qn'aubi7is. (Voy. Albin.)
« Leur donnèrent ung cent de quecaset trois pane-
« rées de francs aubiers. » (Rabelais, T. I, p. 182.)
Aubijoie (Terre d"). Le pays des Albigeois. On a
vu, à l'article Albigeois, que ce mot s'écrivoit aussi
Aubijois.
Aubit, subst. masc. Prière pour les morts. Nom
formé du mot latin Obiit, il est mort.
J'ay ung vieil harnoys qu'on forbit.
Sur lequel je fonde ung aubil,
Et du surplus Dieu le parface.
Villon, Dialoj. de Mallepaye, p. 60.
Aubourdie, subst. fém. Bourbier.
Mais amor qui tout maistrie
M'a remis en Vaubourdie,
Et fait amer de nouvel amistié.
Poét. MS. du Vatican, n- 1490, fol. 77, R".
Aubreaux, subst. masc. plur. Hobereaux.
Terme de dérision qui signifie un petit gentilhomme
de campagne sans fortune. (Voy. le Moyen de par-
venir.) On dit aujourd'hui Hobereau dans le même
sens. Il vient peut-être du mot Aubereau , et alors
aubreaux voudrait dire un petit gentilhomme qui
n'a pas le moyen de nourrir des oiseaux de proie
plus forts que Vobereau, ou bien qui ne vit que de
la chasse de cet oiseau.
Auc, subst. Une oie. C'est un mot Languedocien.
(Voy. Du Cange, Gloss. latin, au mot Auca.)
variantes :
AUC, Auco, AuQUETO. Du Cange, Gloss. lat., au mot Auca.
Atrvuc. Bouteillier, Somm. rurale, p. 506.
Au cas que, conjoncf. Puisque. Ce mot a cette
signification suivant l'éditeur des Ordonn. des Rois
de France, T. III, p. 70.
Aucerre, subst. fém. Auxerre. Nom propre de
ville. « Li Buveor d'Aucore. >> Ce proverbe se
(1) Ne faudrait-il pas lire atibcl, comme à l'article précédent ? (s. e.) — (2) Dol'nim. — (3) Ce mot est peut-être à rapprocher
A'nubnrdi', ayant le sens de selle, (n. e.) — (4) Nom vulgaire, mais d'origine inconnue, de la centaurée bleue, (n. e.) —
(5) Mieux orthographié hobereau; i\ vient de l'anglais hobhc, qui signifie à la fois petit cheval, petit vautour; de là aussi
hobhi, cheval qui va l'arable, (n. e.) — (6) Nisus, métamorphosé en epervier, poursuivait sans cesse Scylla, métamorphosée
en alouette, (n. e.) — (7) Le fauperdrieux, faucon à perdrix, (n. e.)
AU
- 3H —
AU
trouve cité dans le Rec. des Poëtes, mss. avant
1300, T. IV, p. 1651.
VARIANTES :
AUCERRE. Poët. MS. avant -1300, T. IV, p. 1651.
AucEURE. Chartul. MSS. de la Ch. des Comptes de Nevers.
AucuERRE. Fabl. MS. du R. n» 7615, T. II, fol. 193, V».
Aucerrois, adj. Qui est d'Auxerre.
Devers VAucerrois Saint-Germain.
Fahl. MS. du R, n- 7218, fol. 323, R- col. 1.
Aucié, adj. Réparé. Ce mot, dont le commence-
ment est tronqué, semble répondre au mot amendé,
réparé, qu'on voit dans l'auteur que nous allons
citer : •< 11 fut Irespercié, et navré à mort, et mou-
« rut présentement en la place, dont François fu-
« rent dolenz au cuer ; mais à qui est fait ne peut
« estre aucié. » (Hist. de B. du Guesclin, par Mé-
nard, p. 534.)
Aiiçor, adj. Plus haut. Du lalin altior. (Voyez
Partonopex de Blois, ms. de S' Germ. fol. 1C4, V°.)
Aucteur, suhst. masc. Auteur. — Demandeur.
Au premier sens, c'est le mot lalin Aitctor. (Voy.
sur ce sens le Dict. de Cotgrave, au mot Aucteur.)
On lit a(//ors au pluriel, dans le Rec. des Poëtes,
MS. avant 1300, T. IV, p. 1655.
Au second sens, c'est le mot Actor, opposé à
Reus. En terme de barreau, le demandeur opposé
à défendeur. De là on lit : « Vous estes auteur à la
« cause, si devés premièrement dire, et commen-
" cer. " (Modus et Racio , ms. fol. 230.) On lit nu
sujet d'Aman et de Mardocliée :
En ce cas lut ly ung auctour
L'autre venqueuz et reus.
Ger. de Roussillon, MS. p. 42.
VARIANTES :
AUCTEUR. Cotgrave, Dict.
AUCTOR. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 1U7, R" col. 2.
Alctour. Ger. de Rou.ssiUon, cité ci- après.
AUTOR (plur.) Poiit. MS. avant 13(J0, T. IV, p. 1655.
Autour. G. Guiart, MS. fol. 352, V°.
Auctif, adj. Actif. Ce mot est pris en ce sens
dans les vers suivans :
Et c'est assavoir du passif,
Et les autres sont de Yauctif.
Hisl. de Fr. en vers, à la suite du R. de F. MS. du R. n- 6812, fol. 75.
Auctorisation, subst. févi. Autorisation. On
lit en ce sens: « Lettres d' auctorisation, » dans
Laurière, Gloss. du Dr. fr.
Auctoriser , verbe. Vanter, louer, exalter.
« Seigneurs, disl le chevalier, vous estimez mon
« petit faict de trop plus haute recommandation
«' qu'il n'est. Certes, Sire, dist le Roy Lucides , si
« yousne\ousauctorise%, vous ne valez pas de
« pis: car qui se humilie, s'exaulce. » (Perceforest.
— Voy. l'IIist. de B. Du Guesclin, par Ménard.)
Auctorité, subst. fém. Avantage, supériorité.
— Pouvoir. — Prérogative. — Authenticité. —
Axiome, maxime.
Ce mot est employé pour avantage , supériorité,
dans le passage suivant: « Fortune luy fut con-
« traire à celle bataille,.... il n'eut pas auctorité âe
« ses ennemis. » (Chron. de S' Denis, T. I, fol. 123.)
Auctorité, dans l'acception de pouvoir, posses-
sion, se trouve dans le passage suivant : « Elle
« avoit moult grant désir d'avoir en son auctorité
« une canise. » (Percef. Vol. I, fol. 1-13, R° col. 1.)
On a dit, dans le sens de prérogative : « Droits,
« auctorités et prééminences appartenans au dit
« sieur. » (Coût. gén. T. I, p. 405.)
Aussi ly donna il semblable auctoi-ité
Car jusques au tiers ciel fut ravy, et porté.
Ger. de Roussillon, MS. p. 189.
Plusieurs auteurs ont donné à ce mot la signifi-
cation d'authenticité.
Enfin, on trouve ce mot employé pour maxime,
axiome. (La Thaumas. Coût. d'Orléans.) « Retenez
« ceste auctorité. « (llist. du Th. fr. T. II, p. 406.)
Cy dist X'auclorilé :
Souffisance est un très riches trésors.
Poes. MSS. d'Eusl. Desch. fol. 104, col. 3.
Car vray est comme auctorité.
Que qui n'a pas la paix temporelle,
A peine a l'espirituelle ;
Et l'une et l'autre de Dieu vient.
ll)id. fol. 527, col. 1.
VARIANTES :
AUCTORITÉ. La Thaumassière, Coût. d'Orléans , p. 464,
tit. de 1137. - Froissart, Liv. III, p. &i.
AcToniTÉ. Vigil. de Charles VII, T. I, p. 17.
AuGTHORiTÉ, La Thaumassière , Coût. d'Orléans , p. 465,
tit. de 1147 et de 1168.
Autorité. Rom. d'Alexandre, MS. du R. n» 7190, fol. 90.
Aiictroyé, iJrtri. Octroyé, accordé. (Voyez La
Thaumassière, Goût, de Berry, p. 431.)
Aucun , adj. Un. — Quelque. — Quelqu'un,
quelques-uns. — Aucun. - Autre.
Au premier sens, ce mot signifie un, dans les
vers suivans :
En ce dur choc aucun reistre de guerre
Va rencontrer d'Alvian, qui acquerre
Voulait honneur, luy donne tel caterre,
Qui le mect jus.
J. Marol, p. 123.
Dans le second sens, ce mot est employé pour :
quelque. « Aucun Prince. » (Traité de Noblesse,
MS. du R. n" 7005, fol. 41.)
Ce mot est employé pour : quelqu'un, quelques-
uns. » Je donne h diner à aucuns de mes amis. »
(Nuits de Straparole, T. I, p. 52.) >> L'amour que li
» auquant des sers ont à leur Seigneur. » (Beau-
manoir, p. 7.)
Les auquantes iteles sont,
Mais ne sont mie totes maies ;
Aucunes en i a loiales.
Fabliaux. MS. de S. Gemi, fol. 7, h' col. 3.
Ausqxmntes gui s'en echaperent.
Qui entre paiens arrivèrent,
0 aises (1) furent, ou vendues,
Ou en servage retenues
Rom. de BruI, MS. fol. 47, R* col. 2.
On disoil proverbialement :
Aucuns ont souvent batu la gerbe,
Qui n'en ont pas pourtant reçu le grain.
J. Maroi, p. 14.
(1) Libres.
AU
— 312 —
AU
Ce mol se disoit aussi pour : aucun, ou quelque.
« Quand ancan Seigneur fait saisir les fruits et
« profits des liérilages deluy tenus. » (Coût. Gén.)
Enlin ce mol a été employé avec la significalion :
autres. « Les uns et les aucuns. « (L'Amant ressus-
cité, p. 170.) (1)
VARIANTES :
AUCHUN et Auchune. Duples. Hist. de Meaux. T. II, p. 67.
AucuEN. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. p. 22.
AucuNG (le plur. Aucungz.) Perard, Hist. de Bourg, p. 430.
AUKUN et AUKUNE (masc. et fém.) Rymer, T. I, p. 13.
AuLCUENZ. Pei'ard, Hist. de Bourg, p. 430 ; tit. de 1234.
AuQUN. Duchesne, Gén. .de ChastiUon, p. 14.
Aucun et Aucune (masc. et fera.) Ortliog. subsist. — La
Ttiaum. Coût. d'Orléans, p. 465 ; tit. de 1168.
AscoNs. Loix Norm. art. 50.
AucuNQ. Dict. de Robert Estienne.
AuLcuN. Villon, Repues franches, p. 21.
AULCHUN. Faifeu. p. 9.
AucAN. Coût. Gén. T. I, p. 603.
AucoN. Fabl. MS. du R. n» 7989, fol. 52.
AUQUANT. Fabl. MS. de S' Germ. fol. 9.
Anquant. Fabl. MS. du R. n» 7615, T. II, fol. 165.
AUQUANTES (léni. plur.) Fabl. MS. de S' Germ. fol. 7.
AusQUANTES (fém. plur.) Rom. de Brut, fol. 47.
AUQUEX (plur.) Rom. de Brut, fol. 93.
Aucunement, adverbe. Un peu. — Quelque
peu, guère. — En quelque façon. — En partie.
Dans le premier sens de : un peu, on a dit :
Je l'ayme (wcuuemoit.
Non pas jusqu'à troubler vostre contentement.
La Suivanle, Com. de P. Corneille, act. 2, scène vu.
Dans la seconde acception, ce mot signifie: quel-
que peu, guère. Mouskes, parlant de la sobriété de
Charlemagne, dit :
De mangier avqves (2) de viande,
N'estoit mie li Rois engrande (3) :
A hautes fiestes, une fois.
Si avoit moult de gent li Rois
A son mangier ; et quatre mes
Avoient, sans plus, et non mes.
■Ph. Mouskes, MS. p. 81.
On a dit de même de Richard, fils de Cuillaume-
Longue-épée :
Le poil avoit auqs rouz, le vis apert, et cler.
Rom. de Rou, MS. p, 65.
Les sorciels bruns,et bel le front,
Et le chef cresp et aiitjtiel blont.
Fabl. MS. du. R. n- 7889, fol. 87, V col. 2.
Ce mot signifioit aussi pour : en quelque façon.
On a dit en ce sens. « 11 est aticunement néces-
« saire. » (Sagesse de Charron, p. 20.) « La liberté
« et la Poligamie, qui semble aucunement natu-
« relie. (Ibid. p. 185.) « L'assiette d'un homme
« meslant îi une vie exécrable la dévotion, semble
« estre aucunemeni plus condamnable que celle
« d'un homme conforme à sov, et dissolu partout. »
(Essais de Montaigne, T. I, p."538.)
Enfin, ce mot a été employé pour : en partie. On
lit dans les négociations de Jeannin, « dont il est
« demeuré aucunement content, mais non du
« tout. » (Négociation de Jeannin, T. II, p. 30-1)
Des diverses façons d'écrire cet adverbe, que
nous avons rassemblées, la plus ordinaire parmi
nos anciens auteurs, est nuques, contraction d'au-
cunement. Selon Borel, on l'employoit quelque
fois pour : autant, aussi.
AuLCUNEMENT. J. Marot, p. 32.
AucuNESFOis. Dict. de Robert Estienne et de Cotgrave.
Aucun pou. Dict. de Borel.
Aucun pov. Gloss. du P. Labbe.
AucQUES. Rom. du Brut, MS. fol. 96, R".
AuKES. Ph. Mouskes, MS. p. 273.
AuQES. Ph. Mouskes, MS. p. 81.
AuQUEs. Parton. de Rlois, fol. 139.
AuQUEz. Beaunianoir, p. 135.
AusQUES. Gaut. d'.\rgis, Poët. MS. av. 1300, T. III. p. 1137.
AuQs. Rom. de Rou, p. 65.
AUQUEL. Fabl. MS. du R. n» 7989, fol. 87.
Audafi'ida. Mot de jargon qu'on trouve dans
le discours d'un chailatan qui va débiter sa mar-
chandise. •< Audafrida fabuli fabula, quant il la
" bacula sua jor le fossé. » (Erbene, ms. de S. Germ.
fol. 89.)
Audax, adj. Audacieux. Ce mol est purement
latin. 11 est employé comme françois en ce passage.
« Ce ne seroit point fait de audax, et vertueux
« courage. » (Triomphe des ÎNeuf Preux, p. 147.)
Audessement, adv. Audacleusement, hardi-
ment. On a employé ce mot dans ce sens, au pas-
sage suivant: >< Ce sont efforcés à priver, et
« corrompre nos dites ordonnances en plusieurs
« manières, spécialement en marchandises, en
« contract, en prest, en deniers d'or, et à gros
« tournois si audessement, au dommage de
« nous, et de noslre peuple, dont moult 'nous
« deplaist. » (Ordonn. des Rois de France, T. II,
p. 57.)
Audessus, adv. Pris substantivement. Avan-
tage, supériorité.
« De par toy ly soit ly ne veult(Atvvas) courre
« pas quoique tu ayes tout fait ce que tu soyes par
« tout bon audessus. » (Ger. de Roussillon, ms.
p. 130.)
Audicion, sulst. (ém. L'action de se faire
entendre. — L'action d'entendre. — Office d'audi-
teur, ou d'audiencier.
Ce mot se trouve dans le premier sens, au pas-
sage suivant :
Pierres, ne Pois n'ont plus audicion,
Ne .lerome li bon biblislique;
Leur successeur ont autre entencion,
Tous veulent l'or, mais s'il ne sonne et clique.
Car s'il est clerc sans or, mourra de faim.
Poès. MSS. d'Eust. Desch. fol. 251, col. 1.
Audicion est un terme de palais, qui signifie:
l'action d'entendre. (Voy. Ordonn. des Rois de
France, T. 111, p. 130.)
(1) On combinait aussi ai(c«)i avec }ieu, dans le sens de quelque peu: « Aucun peu en y eut de prins. » (Froissart,
éd. Kervyn de Lettenhove, XV, 295.) (N. E.) — (2) .inquci, en provençal ahpies, a le sens du latin ali(iui(i ; parfois il est
accompa;-né de l'adverbe priés : « H se fuissent embatu en icelui part ou auqucs pries. » (l'roissart, éd. Kervyn de
Lettenhove, II, 67.) (n. e.) — (3) Engrande, qui se trouve dans G. Guiart, a le sens de engrant, désireux de. (n. e.)
AU
— 313 —
AU
Enfin, on nommoit autrefois audition, l'état ou
office d'auditeur, ou d'audiencier.
Il faut le bien commun amer,
Que justice en tous cas se fasse,
Que nulz, pour chose qu'il pourchace,
N'ait, fors que par Election,
Estât, office, audicion,
Par port, par prière, ou achat.
Poës. MSS. d'Eust. Desch. fol. 386, col. 3.
Audience, suhst. fém. L'action d'entendre et
de se faire entendre. — Crédit. — Avantage. —
Jugement, siège de justice.
Dans le premier sens (1), on a dit: « A Vandience
« de cette harmonie. » (Rabelais, T. V, p.201.) « Dist
« à V audience de tous, » c'est-à-dire parla de façon
à se faire entendre de tous. (Ilist. de B. Duguesclin,
par Ménard, p. 250.) « Le nomma hautement, et en
" audience de tous. » (Chron. de S' Denis, T. II,
fol. 200.) » Dire devant tous cm audience. » (Machaut,
Ms. fol. 187, V° col. 3. - Id. f"220.) « \M{ en au-
« dience. « (Ger. de Roussillon, ms. p. 48.)
J. de Meung, rapportant le beau trait d'humanité
de Néron, dans sa jeunesse, dit :
Et dist en audience à Romme,
Quant il pour condamner ung homme
Fut requis de la mort escrire
Qu'il voulsist mieux non sçavoir
Le tor que sa main pour escrire.
Rom. de la Rose, vers 6831-6835.
Grâces rendent ly chapelain,
En audience, tout à plain.
Hist. des Trois Maries en vers, MSS. p. 470.
L'action de se faire entendre suppose souvent
du crédit, de la faveur; de là on disoit :
Audiancc point n'avoient
Devers le Roy...
Hist. de Fr. en vers, à la suile du Rom. de Fauvel. MS. du R. ii* 6812, fol. 85.
Le crédit est un avantage, et emporte l'idée de
préférence, de supériorité (2). Ainsi on lit :
Si apert bien que Sapience
Doit avoir sur force audience.
Hist. de France, à la suile du Rom. de Fauvel, MS. du R. u- 6812, fol. 49.
Mes les Anglois, par escu de France,
Orent sus Escoz (3) audiance.
Hist. de Fr. en vers, fol. 75, R- col. 3.
On a dit aussi audience pour jugement ou siège
de justice. <■ Nous ou nostrc Prévost de Lengres ne
« devions avoir que six solz tournois pour amande,
« de cellui qui appelloit de Vandience de nostre
« Prévost. » (Ord. des Rois de France, T. III, p. 656.)
En ce sens on disoit:
1° Droit de première audience, pour droit de
première instance. « Les subjecis des Justiciers
<i hauts, moyens ou bas, aians d'ancienneté eu le
« droict de première audience, et qui en sont en
« possession, ne peuvent procéder l'un contre
« l'autre, par voye de justice ordinaire, avant
« qu'avoir faict appeller leur partie par devant le
« dit Seigneur, ou son officier, pour veoir s'il y a
<-' moyen d'accomoder leurs différents par voye
« d'appoinctement amiable. » (Coût, de Lu.vembourg,
au Nouv. Coût. Gén. T. II, p. 344, col. i.)
2° On disoit, dans le sens à'audience pour se
faire écouter, auriez mieulx audience de dire,
pour vous feriez mieux de dire, ou vous seriez
mieux écouté si vous disiez, ou vous seriez plus
autorisé à dire. <• Certes chevalier, vous este trop
« présumptueux, et oultrecuydé, qui pensez avoir
« pour aymer la plus belle pucelle du Royaulme;
« en vérité vous auriez mieulx audience de dire
« ces motz devant autruv qu'en ma présence. »
(Perceforest, Vol. V, fol. 21.)
3" Avoir audience de parler. C'est pouvoir se
faire écouter. « Pour ce qu'il luy souvenoil très
« bien que jamais il n aurait audience de parler à
« la créature du monde qu'il aymoit le mieulx, si
« auioit achevée l'aventure de l'espée vermeille. »
(Perceforest, Vol. V, fol. 42.)
4° Grandes et petites audiences, sont des droits
seigneuriaux compris dans les droits et les revenus
du Roy. (Voy. les Mém. de Sully, T. X, p. 228.)
\Ani.4NTES :
AUDIENCE. Gace de la Bigne des Déduits, fol. 68, V».
Audiance. Hist. de Fr. à la suite du Rom. de Fauvel.
Audience, participe. Plaidé. Porté à l'audience,
ou même, selon Cotgrave, mis au rôle pour être
plaidé à l'audience. (Voy. le Dict. de Cotgrave, au
mot Audience.) « La cause est audiancée, là se
» trouvent les deux parties. » (Pasquier, Recherches,
Liv. VIII, p. 749.)
VARIANTES :
AUDIENCE. Dict. de Cotgrave.
Audiance. Pasquier, Recherches, Liv. Vtll, p. 749.
Audiencier, subst. masc. Titre d'office. On
trouve ce mot employé pour désigner un officier de
justice ou agent de la Ville d'Anvers, aux Provin-
ces-linies, en1()07. Il est souvent nommé dans les
Négociations de Jeannin. (T. I, p. 2.52 et suivantes.)
Il est qualifié : « Chevalier audiencier et premier
« secrétaire de leurs altesses l'archiduc et l'archi-
« duchesse. » (T. II, p. 448.) On nommoit audian-
cier un officier particulier de la maison du Duc de
Bourgogne. Ce nom est synonyme de Contrôleur
des finances. « L'audianci'er ou conlroUeursignoit
« tous les actes de finances, et gardoit tous les
« registres. " (Etat des officiers du Duc de Bourgo-
gne,"p. 23.) L'audiencier en chancellerie de France,
ou de parlement, portoit le nom de G7-and Audien-
cier. (Voyez Laurière, Glossaire du droit françois.)
VARIANTE :
AUDL\NCIER. (Etat des off., p. 23.)
Au Dieu plaisir. C'est-à-dire : Selon Dieu, au
gré de Dieu :
Tels homs \ it bien au Dieu plaisir.
Poës. MSS. d'Eust. Desch. fol. 66, col. 4.
(1) Ajoutons dans ce sens la locution adverbiale en audience, de manière à être entendu, ouvertement ; c'est l'équivalent
de l'expression poétique en oiani (Voir Froissart, 1.1. XV, 00). (n. e.) — (2) Froissart emploie sovivenl ce mot dans le sens
d'autorité, considération, qualité de se faire écouter : « Ne le duc de Berry ne le duc de Bourgoigne, qui voulentiers
euissent amodérés ces besongnes, n'y avoieiit point d'audience. » (Edition citée, XV, 2S.) (n. e.) — (3) Ecossais. C'est déjà
le dicton du xvii' siècle ; « L'Ecossais traître à sa foi Pour un liard vendit son roi. » (n. e.)
U. . 40
AU
314 —
AU
Audi nos, subst. mase. C'est un mot latin qui
signifioit : Prières. C'étoitla finale de la prière de :
Rogamvs, aitdi nos. (Voyez Boucliel Serées, livre III,
page 74.) " Dire ses audinos. » (Ibid. page 180.)
Auditeur, snbst. masc. Sorte d'officier de
justice. On en donna aux Juifs, pour maintenir le
règlement qui fut fait à leur égard, et qui se trouve
dans l'ordonnance de Louis-le-Hulin, en 1315. (Voy.
les Ordonnances des R. de Fr. T. I, page Sfiô et sui-
vantes.) Dans le royaume de Jérusalem, c'étoit un
officier de justice qui connoissoit des dettes en 1310.
(Voyez les Assises de Jérusalem, page 208, où l'on
écrit auditonr.)
Dans la Coutume d'Amiens, de Ponthieu, de
S. Paul, de Lille, et dans l'ancienne Coutume du
Boulonois, « les Auditeurs sont des officiers par
« devant lesquels on recognoit, et passe tous con-
« tracts de vendition, ou d'assignation, pour les
« réaliser, et acquérir droit d'iiypoleque. » (Lau-
rière. Glossaire du droit françois.) Ils étoient aussi
les juges des causes d'appel. Ils tenoient leurs
séances à Nevers, trois fois l'an, par forme de grands
jours, et les appellations interjetées de leurs sen-
tences, ressorlissoient au Parlement, à cause de la
Pairie. (Voyez Ibid.) Dans la Coutume de Beauvoisis,
c'étoit ceux qui étoient commis pour ouïr des
témoins. (Voyez Ibid. elle Glossaire sur les Coutu-
mes de Beauvoisis. — Beaumanoir, p. 206 et 218. —
Coût. Gén. T. I, p. 338.) 11 y avoit des auditeurs,
des témoins au Chàtclet, qui furent supprimés en
1302. (Voy. les Ordonm.nces des Rois de Fr.) On
trouve, dans les Orduinumces des Rois de France
(T. I, p. 073), que le lioni d'(n;d/7fH/'s fut donné aux
Commissaires envoyés par le Parlement dans les
Provinces, pour faire les enquêtes. En Picardie, ce
nom a été donné aux Notaires. (Voy. La Roque, sur
la rsoblesse. p. 514.) Pasqaier, dans ses Reclierches,
livre II, p. 08, observe que ce mot a été mis, pour
la première fois, en usage, par l'Ordonnance de
1454. Pasquier s'est trompé, puisque nous avons
dit plus haut qu'il se trouve dans une Ordonnance
de 1315(1).
Dans le passage suivant, A uditeur semble le même
que les Juc/es auditeurs du Cliàtelet de Paris; ce sont
des Juges qui rendent des jugements, sommaire-
ment, à l'audience, concernant toutes les causes,
jusqu'à la somme de cinquante livres. Leurs sen-
tences s'exécutent nonobstant appel. « En amende-
« ment, demande sur taxation de despens n'a point
« d'amende; mais qui en appelleroit de Juge à
« autre, comme d'un Maire à un Bailly, s'il en
« payeroit amende ; mais d'unaudileuron Prévost,
« non : car c'est une même Cour. » (Grand Coût,
de France, livre III, page 471, etc.) Voyez ce qui est
dit de cette espèce de Juges dans les Ordonnances
des Rois de France (T. I, p. 460 et suivantes), et un
règlement touchant cet objet. (Ibid. p. 352.) Sur
Yaudileur de l'Oost Flandre, on lit ce qui suit, dans
le Nouv. Coût. Gén. (T. I, p. 1023.) « L'acte du
« Conseil privé de Sa Majesté, sur le premier arti-
" cle de la rubrique vingt-quatre, par lequel il a
« esté interdit et deffendu'à Yaudileur de l'Oost de
« Flandre de prendre connoissance des Maisons
« mortuaires, ou successions des Bourgeois décé-
« dez, et qui ont été dans le service militaire du
" 9 octobre 1641. »
VARIANTES :
AUDITEUR. Orthographe subsist.
AuDiTOUR. Assises de Jérusalem.
Audivi, subst. masc. Droit de se faire écouter ;
autorité. « Il sera assis au hault bout, on luy tran-
■< chera du meilleur; il aura Yaudivit, et le caquet
« par dessus tous. » (Cymbalumfmundi, p. 97.)
L'ung est secouru, l'aulre aydé,
L'ung est chassé, l'autre \'uydé,
L'ung a support, l'autre audivy.
Œuv. deR de Collerye, page 59.
(Voy. Coquillard, p. 48 et Clém. Marot, p. 443.)
Parmi les proverbes ruraux rapportés par l'Oisel
(Instit. Coût. T. II, page 238), on lit : « Un seul œil
« a pluz de crédit, que deux oreilles n'ont
" A'audivi. »
VARIANTES :
AUDIVI. Loysel, Instit. Coût. T. II, p. 238.
AUDiviT. Cymbalum mundi, p. 97.
AuDivy. Œuv. de R. de Collerye, p. 59.
Audous, subst. masc. Doux. Mot languedocien
qui signifie proprement, " celui qui ne fait point
'< de douleur en traitant une playe. » (Voyez le
Dictionnaire de Borel qui le dérive du grec.)
Audriettes, subst. fém. plur. Sorte de reli-
gieuses. Il faudrait dire Odriettes. Ce nom fut
donné à des Religieuses, à cause de leur fondateur
Etienne Odry qui fonda, en 1252, une maison pour
loger de pauvres femmes veuves. Elles ont donné,
elles-mêmes, leur nom à une rue de Paris dans le
quartier du Marais. (Voyez Lebeuf, Histoire civile
d'Auxerre, page 534.)
Aufaige, subst. masc. Nom de dignité. Nos
anciens auteurs, qui défigurent les noms orientaux,
supposent qu'aufaige est chez les Sarrazins le nom
d'une dignité approchant de celle de Roi.
Roy. ne aumacor, ne ou/'aiV/e
Blanchaiidin, MS. de S' Germ. M. 18i, Y» col. i.
Ne sai s'il est Roy, ou aufaige.
Ibid. fol. 187, R- col 1.
Profilias point le destrier
C'on ne savoit contrepoisier
Et fiert Vuiifa^Hje 0-) de Salerne.
Alhis, MS. fol. 111, V col. 1.
VARIANTES :
AuFAGE et AuFANGE. Athis, MS. fol. lit, V" col. 1.
Aufelis, nom de baptême d'une femme. (Perard,
Histoire de Bourg, p. 484 ; titre de 1256.)
Auïertes , subst. fém. plur. (Voyez Offerte.)
Offrandes. (Voyez fAmant ressuscité, p. 210.)
(-1) On le trouve aussi dans Beaumanoir, v. par ex. xxxi.k, 7. (n. e.) - (2) Le même mot ne désigne-t-il pas à la fois le
guerrier et le cimeterre dont il se défend : « Contre nous de pied ferme ils tirent leurs alfainjcs. » (Corn. Cid, IV, 3.) (N. e.)
AU
— 315 —
AU
Auffet, subst. masc. Effet.
Auffort, subst. masc. Nom propre. C'est peut-
être Alphonse. (Voy. le Rom. de Baudoin, fol. 29 et
36, où on lit auffort.) On trouve Aitfons dans Borel.
VARIANTES :
AUFFORT. Rom. de Baudoin, fol. 29.
AuFONS. Dict. de Borel.
Auffrique, subst. fém. L'Afrique.
Ayse, Europe et Aufrique.
Poês. MSS. d'Eust. Desch. fol. 250, col. 3.
VARIANTES :
AUFFRIQUE. Chron. de S' Denis, T. I, fol. 137.
AuFRiKE. Marbodus, col. \^%
AuFRiQUE, Eust. Deschamps, Poës. MSS. fol. 250, col. 3.
Afbike. Marbodus, col. 1664.
Aufin, adverbe. Enfin.
Auge, s^/&s^ fém. Cercueil. Ce mot, qui subsiste
dans un autre sens (t), a été employé pour cercueil
dans le passage suivant, où il s'agit du corps de
Charles VII, mort en lî(M. Il y estait: « Estoit le
« Roy dedans un coffre de cyprès enchâssé en un
« auge de plomb. » (Monstrelet, Vol. III, fol. 92, V°.)
Augette, subst. fém. Petite auge. >< Cocasses
« de limas pour servir d'abrevoir et d'augettes
« pour lesoyseaux(2). » (Bergeries de RemyBelleau,
T. I, page 74.)
Augié , participe. Averti par l'ouïe. Les
Chrestiens postés sur une éminence attendent les
Mahomélans qui les y viennent attaquer :
Se nous qui somes eu somet
De ces montaigne logié,
Bien avisé et bien duijié (3),
A si grant gent que nostre page
Les devroient sans avantage,
Enchaoier, tuer et occire ;
S'il nous povoient desconfire ,
Et si nous devroit-on prendre;
.^ vant. Seigneurs, or du delTendre.
Machaut, MS. fol. 228, R» col. 1.
Augmant, subst. masc. Augmentation. (Voyez
les Dict. de Monet et d'Oudin , aux mots Augmant
et Augment.) » advenant que le dit survivant
« augmente le dit bien par nquels, , tel augmente
« sera communiqué aux enfants. » (Coût, de Bouil-
lon, au Nouv. Coût. gén. T. II, p. 857, col. 1.)
Sur le mot augment, qui est encore usité comme
terme de droit, voyez le Gloss. lat. de Du Cange, au
mot augmentum. C'étoit le présent que l'époux
faisoit à sa femme le lendemain du mariage.
D'autres l'apellent ouelage. [C'est occelage, du latin
osculum.) On le désigne en Normandie sous le litre
de chambrée, bagnes etjoijauj:. (Voyez une Lettre in-
sérée dans le Mercure du mois d'août 1733, p. 1707.)
VARIANTES :
AUGMANT. Dict. de Monet et d'Oudin.
Auge ANGE. Carpentier, Histoire de Cambray, p. 31.
Augment. Laurière, Glossaire du Droit françois.
Augmente. Nouv. Coût. gén. T. II, p. 857, col. 2.
Augmentateur, subst. inasc. Qui augmente.
(Voyez les Dict. de Rob. Estienne et d'Oudin, et les
Contredits de Songecreux, fol. 75, R°.)
Augsi, adverbe. Aussi.
■. . . Diex
Onques mais ne fist auf/si gente.
Ovide de arte, MS. de S. Germ. fol. 97, R' col, 1.
Aiiguermer. Ce mot, dont on ne peut faire
connaître la signification, se trouve dans un tarif
de droits sur différentes marchandises, où on lit :
« LesTonneldeguede(4),septsols, et auguermema
« feur ; payelles de batterie le cent pezant trois
« solz ([uatre deniers. » (Ord. des Rois de France.)
C'est peut-être une faute pour augmente.
Augure , snbst. fém. Violence , contrainte. Il
faut peut-être lire augure, du latin anguriare.
« Est aussi à scavoir qu'il ne sera licite au Seigneur,
« pour occasion de quelque exaction, ou angure,
« faire aller les bourgeois en telles chevauchées. »
(Coût, de Landrecies, au Nouveau Coutumier
général, T. II, page 2()'t.)
Augui'einent, subst. masc. Augure, devination.
(Voy. les Dict. de Cotgrave et d'Oudin.)
Augures, subst. fém. ptur. Semble une faute
pour augive ou ogives : arceaux de voûte. Parlant
des convives sur lesquels Samson renversa les
voûtes de la salle du festin , l'Histoire de la Toison
d'Or dit: « Ces deux colonnes reposoient les «Huîtres
» de tout l'édiffice ; car elles étoient au milieu de
« la salle. « (Vol. I, fol. 34, V°.)
Augureur, subst. masc. Augure, devin. (Voyez
le Dict. d'Oudin.)
August, subst. jnasc. Août. C'est le nom d'un
des mois de l'année. •< A la feste Monseignor Saint-
« Pierre entrant august. » (Villehardouin, p. 76. —
Voyez le Roman du Brut, ms. fol. 84, V» col. 2.)
Augustaires, subst. masc. ptur. Espèce de
monnaie d'or. Cette monnoie étoit de la valeur
d'un fiorin et un quart d'or, ainsi appelée parce
qued'un costé elle porloit l'empreinte de l'Empereur
Frédéric, et de l'autre un aigle, suivant l'usage du
temps des Empereurs romains. (Voyez Du Cange,
Glossaire lalin, au mot Augustarius, et une citation
fi'ançoise ibid. au mot foeulare. (Voyez Augustins
couronnés.)
Auguste, subst. masc. Titre de dignité. — Nom
d'un jour.
Dans le premier sens, ce titre équivaloit à celui •
d'Empereur. 11 est donné à plusieurs de nos rois,
dans plusieurs Chartres, et sur plusieurs raonnoies,
sans qu'ils en eussent réellement la qualité. (Voyez
(1) Au passage cité, auge a été employée avec intention, pour désigner un coffre où la forme est usuelle, si la matière
est différente. Le mot se trouve au xiil= siècle, dans le Liure des Métiers dEt. Boileau. (N. e.) - (2) Nous employons en ce
sens le diminutif masculin auget ; le Méimgier de Paris disait déjà au xiv« siècle : « Nettoiez aux pouçains leur auget ou
abreuvouer. » (n. e.) - (3) Bien instruits par des espions ; c'est un participe refait sur duit, de duive. .iugié est une faute
•de lecture, (n. e.) — (4) Pastel.
AU
— 316 —
AU
l'Abbé de Vertot, Etablissement des Bretons, T. 1,
p. 3-28. — DuTillet, Rec.desRoisdeFrance, p. 171.)
Le nom d'auguste éloit aussi le nom que l'on
avoit donné au jour de la Sainl-Barlhélemy, par
allusion au mois d'août dans lequel celte fête arrive.
(Voyez rilist. de M. de Thou, T. YI, Liv. ui, p. 41G.)
Auguste, subst. féin. Augsbourg. C'est une ville
d'Allemagne.
Auguste, adj. Impérial. André de la Aligne, par-
lant de l'entrée de Charles VIII à ^'aples , en 1495 ,
dit : « Ce (|u'il fit en grand triomphe, et excellence,
« revêtu d'un habillement impérial surnommé
« auguste. »
Augustins (couronnes) , subst. maso. plur.
Espèce de monnoie d'or. C'est peut-être la même
monnoie que les augustaires donl ce Dictionnaire a
parlé. On lit dans une citation au Glossaire latin de
Du Cange, au mol Leoiies : «■ Couronnes augustins
« de 6i 13 den 48 gr. 14 mites (1). »
Aujoulet. subst. masc. Vieillard. Mot langue-
docien traduit par vieillard, dans des vers cités par
Borel, au mot Marelle. Peut-éirc est-ce le diminutif
A'aiol, aïeul?
Aul. S' Julien, dans sesMesl. historiques, p. 450,
remaïque que de son temps, ceux qui se piquoient
de bien parler disoient al au lieu de aul, comme
dans ce mot la Imlme au lieu de la baulme.
Aulbe, subst. fém. Ais. De cette acception géné-
rique, ce mot a passé ;i diverses signillcalions
particulières. Ainsi on nommoit aubes ou auves les
ais qui entroient diuis la composition d'une selle,
d'un bat; peut-être ù cause deia couleur blanche
du bois dont elles étoient faites. Le mot aube sub-
siste encore pour signifier les petits ais de la roue
d'un moulin ù eau, et on les appelloil aussi auves.
(Voyez C. Guiart, ms. fol. 334, R°.)
.Aulnes est une faute dans le passage suivant, où
il faut lire aulbes : « Le hourt descend le long des
« aulnes de la selle devant, en embraissant la poi-
« trine de cheval. «
On distingue les auves de l'arijon dans les passa-
ges que nous allons citer; il pareil que les atives
éloienl proprement des ais qui suppléoient aux
panneaux, ou les soutenoient :
Porter la fault au bourrelier.
Pour rembourer communément,
Et pour l'arçon qui veult briser,
Et les auves semblablement.
Pots. MSS. d'Eust. Dcsch. fol. îôi, col. 2.
Sele ot de moult riche façon,
D'ivuire furent li arçon,
• Les auves sont d'autre manière.
Floirc et Blanchenor. MS. do S. Germ. fol. 195, V col. I.
VARIANTES :
AULBE. Le Duchat sur Rabelais. T. IV, p. .58.
Aube. Dict. d'Ouiiin et tle Cotgrave.
Aulnes, s. p. Lisez Aulbes.
Auves, s. p. G. Guiart, MS. fol. :J3l, V«.
Aulberge, subst. féin. Auberge, hôtellerie.
(Voy. le Dict. de Borel.)
Aulge, subst. fém. Auge. (Voy. l'Histoire -de la
Toison d'Or, T. II, fol. 107.) On nommoit ««/(/e rf'wM
estang, le canal, conduite ou rigole par laquelle
s'écoule l'eau d'un étang, et qui en va fournir à un
autre étang: « Un seigneur d'estang peut suivre
« son poisson qui seroit monté par creue ou des-
« bordement d'eaues , jusques et dedans la fosse et
« aulge de l'estang prochain. " (Coût, du Duché
d'Orléans, au Coût. gén. T. 1, p. 958.)
Aulliours, adverbe- Ailleurs.
Aulnage, subst. mase. Aunage. Le droict d'aul-
nage éluit un dioil qu'on payoit pour certaine
quantité d'aunes d'étolTe. (Voy. Du Cange, Glossaire
lalin, au mol Vlnagium.)
Aulue, subst. fém. Aune, mesure. (Voy. le Dict.
de Cotgrave, au mot Aulne, le Glossaire latin de
Du Cange, au mot Mena.)
Aulne de Provins. C'est une mesure de deux pieds
et demi. ■> La lieue de Bourgogne contient cinquante
« portées de longueur ; la portée, douze cordes ; la
« corde, douze aulnes de Provins; Vaulne,de\ix
« pieds et demy. « (Coût, du Comté de Bourgogne,
au Coût. gén. T. I, p. 8G0.) L'aune semble avoir été
de deux coudées en Angleterre. « Lq aune ûe'deux
« contes esprovés. » (Brillon, des Loix d'Angleterre,
fol. 75, V°.)
L'aune de terre étoit certaine mesure de terre.
(Voyez Du Cange, Glossaire latin, au mot Olna.)
Tout au long de l'aune, pouce et tout : Fa.;on de
parler qui signifie oultre mesure, ou h bonne
mesure. « Faire le glorieux tout au long de Vanne,
« pouce et tout. » (Contes d'Estrapal, p. 188.) Il est
pris au figuré dans ces vers, où une jeune fille
compare ses charmes auprès de ceux de sa mère
encore belle :
Endroit li est nonne passée
.Jamais sa biaulez ne vendra;
Mes a granz ânes passera
De la moie, si est avenir ;
Se je me voll chière tenir
Bien longuement poura durer.
.\this MS. fol. 119, R- col. \ cl 2.
11 est encore employé au même sens figuré dans
ces vers :
.Te rabatrai à moult grans aunes
Les corages des becs trop /jaunes.
Athis, MS. fol. 67, V- col. 1.
VARIANTES :
AULNE. Cotgrave, Dict.
Alne. Rec. des Ord. des Rois de France, T. III, p. il3.
Ane et Ausxe. Atbis, MS. fol. lOi, V» col. 1.
Aune. Orthographe subsistante.
An.\e et Ane!^ Atliis, MS. fol. 61, V» col. 2.
EiNNES. Ord. T. III, p. 587. C'est une faute ; on lit aunes
dans tous les autres Règlements, suivant l'éditeur.
Auluée, subst. fém. L'étendue d'une aune.
(Voyez le Dict. de Cotgrave.)
(I) C'est un texte de mars 14.53.
AU
- 317 —
AU
Aulneiir, subst. ma&c. Qui aune. {Voyez le
Dictionnaire de Colgrave.)
Aultresfois, adv. Autrefois. (Voy. Faifeu, p. 23.)
Aumacor, subst. masc. Nom de dignité parmi
les Sarrazins.
Rois, et contor, et aumacor.
Fabl. MS. de S. Gerra. fol. U, V col. 3.
Le cheval point vers Vaumacor
Qu'Espagnol tiennent à singnor :
De cordy et la signorie.
Alhis, MS. fol. 99, R" col. 2 et V" col. 1.
Aumatour. (Lisez aumacour.) Dans la notice du
Rom. d'Alexandre, c'est un titre donné à ce Prince.
VARIANTES :
AUMACOR. Blanchandin, MS. de S' C.erm. fol 184, V» col. 1.
Amotor et AuM.vcoR. Athis, MS. fol. 99, R» col. 2.
AUM.4.C0URS. Phil. Mouskes, MS. p. l.W.
AUM.\T0UR. Notice du Roman d'AÎe.xandre, fol. 77.
Auniisllle, subst. et adj. Bétail. — Viande de
boucherie.
On a beaucoup varié sur la signification de ce
mot. (Voy. le Dict. de Borel, au mot .iumall.) Lau-
rière l'ex[)lique par animaux domestiques, bestiaux
privés. (Voy. son Gloss. franc, au mo\. Aumaille.)
On le trouve pour gros bétail dans le Gloss. sur les
Coût, de Beauvoisis. Du Gange, dans son Glo.çsaire
latin, le dérive de Manualia, comme bêtes venant
([uand on leur tend la main. Ménage, dans son Dic-
tionnaire Etymologique, dit, d'après Joachim Perion
qu'il cite, que les paysans appellent les brebis et
les moutons du seul nom d' aumaille ; Perion le
dérive du Grec : mais dans ce dernier sens ne
poun'oit-il pas venir du latin albus (puisqu'on a
écrit aubmaille (1)'0 Au reste, on trouve ce mot plus
communément employé pour gros bétail, et plus
communément encore pour un ferme générique qui
signifie toute espèce de bétail : -
D'aiguës, de prairies et de très bons gagnages
De vignes et de bois y a grant signorage ;
De très grands nourissons et de porcs et d'ouailles
Et de très grands preries, et grand foison (Varmailles.
Ger. de Roussillon, MS. p. 17.
Machaut, peignant le grand Polyplième, s'exprime
ainsi :
A senestre a un aviron
Lonc de C. piez, ou environ
Et gros à l'avenant, sanz faille
Dont il retourne son aumaille.
Macliaul, MS. fol. 201, V- col. 1.
Faisant parler le grand Polyphème, le poète lui
fait dire :
Et se tu de la moie aumaille
Me requiers que je la te nombre.
J'en ay tant que n'en say le nombre.
Ibid. fol. 202, R» col. 2.
On voit dans la Thaumassière, Coutume de Borri,
p. 163, article 3, un droit levé sur les bouchers
« pour chaque chef à'atimaiHe qu'ils tuent
■I de sept deniers, » et dans un autre endroit du
même auteur, « le chef d'fl»/Mfl///^ » est distingué
de « chef de bestes à laine, boucs, chèvres, etc.
« Nul ne peut mener bestes aumailles, cheva,lines,
" chèvres, ou autres qui peuvent porter dommages
« au reject es bois taillis, jusqu'à ce qu'ils soient
.• defensables. » (Coutumier Gén. T. I, page 210.)
« Chars, aumaille, vache, toute manière d'aitb-
0 maille. » Dans une citation au Gloss. latin de Du
Cange, au mot Manualia 3. « Ne leur laissoient
« aubmaille grosse, ne menue que ilz n'emmenas-
>< sent. >< (Ilist. de B. du Guesclin, par Ménard,
page 70.)
On a étendu la signification de ce mot aumaille,
et on l'a dit pour toute espèce de viande de bouche-
rie en l'opposant à volaille :
.... servi et peu
De pain, de vin et de vitaille
De toute volaille et d'atimaille
Et poissons, et autre viande.
Machaut, MS. fol. 216, V col. 1.
On a dit aumaille, et bestes aumailles; par
conséquent ce mot a été employé non-seulement
comme substantif, mais aussi comme adjectif.
VARIANTES :
AUMAILLE. Ménage, Dictionnaire Etymologique.
Armailles. Ger. de Roussillon, MS. p. 17.
Aubmaille. Histoire de R. Du Guesclin, par Ménard, p. 70.
Au.MALEs. Histoire des Trois Maries, en vers, MSS. p. 57.
AusMAiLLE. Chronique S' Denis, T. II, fol. 269, V».
AuMAiL. Dictionnaire de Borel.
AUMEX. Cortois d'Artois, MS. de S' Germ. fol. 83, R" col. 1 .
Aumalines, adj. au fém plur. Qui est d'au-
maille. On a dit bestes aumalines ou omnalines,
pour bestes d' aumaille, ou simplement aumaille.
(Voyez Du Cange, Glossaire latin, au mot Manualia.)
VARIANTES :
AU.MALINES, Abmeline, Ormaline.
Armaline. Hist. du Comté d'.Aussonne, page 25.
Aumarie. Nom de pays.
Couvert d'un paile d'^4mo)'(e.
Athis, MS. fol. 39, R- col. \ .
Et de pailes Alexandrins
De cendaus d'Inde, et tV Aumarie.
Athis, MS. fol. 30, R" col. 1.
Ceux de Bile, ceux de Sartois {al. (2) Cartagois)
Ceux d'Aufrique, et ceux de Sardine,
Ceux de Corsie et de Soutine, {al. Soltaigne)
Et ceux de Mittre, et AWmarie,
Et de Salmande et de Candie,
De Cordes, et de Portugal.
Athis,MS.fol. 87, V* col. 1.
VARIA.NTES :
AUMARIE, Amarie, AM.ATIE. Athis, MS.
Aumant (à V), adv. A l'avenir. (Voyez le Dic-
tionnaire d'Oudin.)
Aiimaster, subst. masc. Officier municipal de
la ville de S' Omer. (Voyez Godefroy, Observ. sur
l'hist. de Charles VIII, page 328.)
Auinblei" (le Bay), subst. masc. Nom d'un che-
val. U liroit peut-être ce nom de son poil bai, et du
(1) C'est le neutre pluriel animalia, pris pour un singulier féminin. Par un phénomène de rhotacisme, an'malia a donné
arinailles. (n. e.) — (2) Al signifie alias, (n. e.)
AU
- 318 —
AU
mot arnble qui étoit son allure. (Voyez une citation
au Gloss. lat. de Du Gange, au mol Ueriolum (1).)
Aumelette, mbst. fém. Omelette, œufs battus
et cuits. On lit dans le Dictionnaire de Cotgrave :
Aumelette d'ceufs, et Viveurs d'omelettes (2).
VARIANTES :
AUMELETTE, Homelette, Haumelotte. Dict de Cotg.
HOMELAICTE. Rabelais, T. IV, page 36.
Homelette. Cclthel. de Léon Tripault. — Dict. de Cotgrave.
Omelette. Ménage, Remarques sur la langue, page 68.
Ommelette. Oudin, Curiosité françoise.
Aumiers (Li), subst. masc.plur. Sorte de cliiens.
Il faut peut-être lire en un seul mot Liaumiers pour
Limiers, espèce de chiens de chasse :
As veneors, et as Valiez
Fist mener chiens, et brachez
Et 11 aumiers (3) par autre voie.
Rom. de Rou, MS. p. 155.
Au niieulx venir, expression adverbiale.
Pour le moins. — Pour le mieux.
Cette expression adverbiale signifioit quelquefois
pour le moins. « Elle racompta comme il les avoit
« rescousses sur la mer, là où elles cuydoient
« jamais eschappersanseslre mortes, ou emprison-
« nées au mieulx venir. » (Percef. Vol. VI, fol. 54.)
La même expression signifioit aussi pour le
mieux, en supposant le mieux dans la supposition
la plus avantageuse. « .Sy entendons bien que au
a mieux venir, le secours d'Angleterre sera long et
« petit. » (Lettres de Louis XII, T. I, p. 71.)
Auinoins, adv. Le moins. « Nos Baillis se
« prengnent bien garde, et aussi nos autres Officiaux
« que il n'ayent multitude de Bedeaux, ainçois s'en
« facent aumoins que eulx pourront. » (Ordon-
nance des Bois de France.)
Aumône, subst. Aumône. — Bonne œuvre. —
Hôpitaux. — Queste.
Ce mot dans S' Bernard, Serm. fr. .mss., répond au
latin Eleeinosijnu.
Nous disons encore aumône dans le premier sens.
Du Gange, Gloss. lat. au mot Elemosina pura, cite
l'orthographe .l/mo?VHC. Elle semble piouverque
notre mot aumône, s'est plutôt formé AWlimonia
que de Elemosina.
Nous avons parlé du territoire des Amognes, au-
trement territoire des moines, et qu'on doit peut-
être expliquer par territoire des aumônes (4). Nous
ne trouvons cette orthographe nulle part ailleurs.
« Tenure pas aulmone ou osmone, ce sont les
a héritages qui ont été donnés à l'Eglise pour servir
« Dieu, et dont les donateurs se sont réservés la
« seigneurie de patronage, tenure est la manière
« par quoy les tenemens sont tenus des seigneurs. »
(Ancienne Coutume de Normandie, fol. 52r)
Le mot aumosne a été pris dans un sens étendu,
pour toute bonne œuvre, et on a dit : i Par vostre
" courtoisie me veuilliez rendre à celuy à qui j'ai
« esté aujourdhuyespouséegrant «Mmosne feriez. »
(Ger. de Nevers, 2' part, page 40.)
C'est aumosne d'abattre noise.
Poët. MSS. avant 1300, T. tV, p. 1309.
Aumosne elpechié sont mis en opposition, dans
ces vers :
Oui fait ce que faire doit
Tout pechié de toute aumosne
Bel parler, et de ramposer.
Rom. de la Rose, vers 18635 à 18633.
De lii, on a nommé aumônes les hôpitaux. lion-
nes maisons et auviosues. « J'entends par ce* mots
« les hôpitaux, et les hôtels Dieu, et les autres mai-
« sons consacrées au soulagement des pauvres »
dit l'éditeur des Ordonn. (T. V, page 136, note a.)
Ce mot a aussi signifié quête : « Aussi me plaist
« que il voisent à Vaumosne ; mais je vueil que ils
« ne la despendent point sans le conseil de leur
« maistre. » (Duplessis, Hist. de Meaux, Pr. p. 67;
tit. 1180.) (5)
On disoit proverbialement :
1° L'aumosue est faicte : c'est-à-dire tout est fait,
il n'est plus teins. (Eust. Desch. Poës. mss. fol. 299.)
2' Aumône pure ou franche, étoit celle que le
Seigneur faisoit sans se retenir aucune jurisdiction
sur'le territoire aumône. (Voy. Du Gange, Gloss. lat.
au mot Tenetura.)
3' Il ne faut pas voler pour faire l'aumône. Ce
proverbe se trouve en latin dans les sermons de
Barlel 1, part. fol. 50. « Vulgo dicitur non expedit
« furare pro danda eleemosina. »
4° Donner en aumône pour donner gratuitement.
VARIANTES :
AUMONE. Orthographe subsist.
Aumosne. Assises de Jérusalem, page 184.
Aulmosne. Ancienne Coutume de Normandie, fol. 52, R".
AULMÔNE. Doctrine de Sapience, fol. 37, V".
Ausmogne. Messire Quene Poët. WSS. av.l300,T. III, p. 983.
AuMOiGNE. Britton, des Loix d'Angleterre, fol. 2, R».
Amognes. Née Hist. du Niv. page 281.
Amoignes. Bourg, de Orig. voc. vulg. fol. 76, V».
Almoigne. Du Gange, Gl. lat. au mot Elesmosina pura.
Aljiosne. Duchesne, Gén. de Chastillon, fol. 58-60.
Annosme. (Lisez Aumône.) Ord. des R. de Fr. T. II, p. 177.
Almone. S' Bern. Serm. fr. MSS. page 34et passii».
Au.'ïiONXE. Duchesne, Gén. de Guines, page 283.
Amone. Fabl. MSS. du R. n> 7615, T. I, fol. 54.
Amonne. Perard, Hist. de Bourg, page 474.
Amosne et AiNNONE. Athis, MS. fol. 116, R» col. 1.
O.MOSNE. Anciennes Coutumes de Normandie, ch. 32.
Olmosnes. Carpentier, hisi. de Cambrai, page 28.
Aumonement, subst. m«sc. Aumône, donation
faite ti une église. (Voy. la Coutume de Normandie
en vers, mss. fol. 43, V°.)
(1) Les Bénédictins empruntent par ce mot Heriotum plusieurs citations à Guil. Dugdal {.\nt. du Comté de Warwick,
p. 680). Les chevaliers ordonnaient par testament de mener devant leur tombe leur destrier, qu'on offrait ensuite à l'Eglise.
Ainsi, dans un testament de 1408, on lit : « Item lego equum meuni vocatum le Bmj aumble)-, ut ofTeratur ante corpus
meum in die sepuUuraj mère, noniine principal!. » (n. e.) — (2) La forme actuelle omelette serait une corruption de
alumele, alumete (xiv siècle, .Hénarjier de Paris, II, ô). L'omelette est en effet plate comme une lamelle, (n. e.) — (3) Il faut
lire linumiers. Le provençal a liamer, du latin lirjamen, proprement chiens qu'on tient en laisse. (N. E.) — (4) Au ix= siècle,
eleemosyna est devenu elmosna, almosna. d'où aumosne, par la vocalisation de /. (x. E.) — (5) Aumosne signifie encore
Charité, acte méritoire : « Et si seroit grande aumosne et grant grâce enviers nostre signor. » (Froissart, 1.1. V, 211.) (n. e.)
AU
— 319 —
AU
Aumônier, stihst. masc. Légataire, héritier. —
Administrateur des tiôpitaux. — Aumônier.
Ce mot est employé pour liéritier, légataire, dans
le passage suivant : « Pour héritier, légataire, on
« ne peut estre aulmosnier, et parchonnier, en
« sorte que en appréhendant l'un, l'on se prive de
« l'autre, et pour venir en succession de quelque
« trespassé, l'on est tenu de rapporter tous dons
« à luy faiLs, tant par mariage entre vif, comme
« autrement. » (Coût, de Richebourcq-Saint-Wast,
au Nouv. Coût. Gén. T. I, p. 451.)
Dans le sens d'administrateur des hôpitaux, on a
dit : " Il y a aussi dans la ville quatre grands au-
« mosniers, ou maîtres de la charité; deux hors
« des lignées, et deux hors des nations, deservants
« quatre ans de suite, ayant la surintendance de
« toutes les maisons de Dieu, du S' Esprit et des
« hôpitaux de la ville. » (Coût, de Brusselles au
Nouv. Coul. Gén. T. I, p. l'iSG.)
Aulmosnier est pour aumônier, dans les Ordon-
nances des Rois de France (T. V, p. G41); ce dernier
sens subsiste sous la première orthographe.
VARIANTES :
AUMONIER. Orthographe subsist.
Aulmosnier. Bouteiller, Somme rurale, page GOO.
AuMONNiER. Duchesne, Gén. de Montmorency, p. 388.
Au.MOsNiER. Laurière, Glossaire du Droit françois.
AusMONiER. Ancienne Coutume de Bretagne, page "179.
Aumoniere , subst. (éin. Bourse, gibecière.
C'étoit proprement la bourse ou l'on mettoit l'ar-
gent, pour faire des aumônes (1). (Voy. les Diction-
naires de Borel et de Ménage.)
Li moines trait une uumosnicre ;
Dix sols i ot.
Fabl. WS. de S. Gerin. fol. 36, V' col. 2.
M'atiinonière est mal garnie,
Et ma borse mal farsie.
eolin Muscl, Po5l. MSS. avant 1300, T. II, p. 718.
L'auteur du Roman de la Rose a fait de ce mot
un usage très indécent aux vers 20572 et 20575.
(Voy. le suppl. au Gloss. de ce Roman.)
VARIANTES :
AUMONIERE. Glossaire sur les Coût, de Beauvoisis.
AuMOSNiERE. Joinville, page 176.
AusMENiERE. Fabl. MSS. du Roy, n» 7218, fol. 283.
AusMONiERE. J. le Maire, lUustr. des Gaules, liv. I, p. 142.
AuLMOSNiERE. Fauchet, Lang. et Poës. fr. page 124.
AuLMONiERE, Almonière. Percef, Vol. VI, fol. 82.
Amoniere. Alhis, MS. fol. 91, V» col. 1.
MOSNIERE.
Aumône. Borel, au mot Fermai.
Aumosnei", verbe. Donner en aumône, en pur
don, à des églises, à des pauvres. J. de Meung cen-
sure, dans les vers suivants, les moines qui s'enri-
chissoient par les testaments qu'ils faisoient faire à
leur profit :
Ils osent bien en don ou en aumosne prendre
Quanque bons et maulvais leur oseroient tendre
S'ils font bien, Dieu le sçait ; mais ne le scay entendre
Que l'on puisse aumosner ce que l'en doit tout rendre.
J. de Meung, Cod. 1109-H12.
VARIANTE :
AUMONNER. Duchesne, Gén. de Bar-le-Duc, page 30.
Aumuce, subst. fém. Chaperon. — Aumusse.
L'aumuce étoitun habillement qui anciennement
couvroit la tête, et peut-être tout le corps. Il semble
venir du mot allemand ail, qui signifie tout, et de
l'ancien mot françois mncer, cacher, couvrir.
D'autres le dérivent de amicio.
Ce mot s'est dit aussi pour aumusse de chanoine.
(Voy. le Dict. de Colgrave, au mol aumuce, et Du
Cange, Glossaire latin, aux mots alimutia, almia-
eum, atmuchan, alinnechhim, armutia et mussa.)
Les officiers de cuisine de Monseigneur le Dauphin
porloient sur leurs têtes, à l'entrée de l'Empereur
dans Paris, en 1377 « des aumuces fourrées et à
" boulons de perle par dessus. » (Chron. S' Denis,
T. III, fol. 35.)
Dans des lettres de Charles VI, du i7janvier 1419,
qui sont au fol. 49, R" du Reg. du Pari, intitulé:
Livre croisé, cotte B. données contre Charles Dau-
phin, qui avoit fait assassiner le Duc de Bourgogne,
on lit : « Le dit Charles mist tantosl la main'à son
« aulmuce, faisant semblant de saluer nostre dit
« cousin, et à l'ombre de son bras guigna les
« yeulx et fi si signe à ses gens pour venir férir sur
« nostre dit feu cousin dont tanloust après les
>' dictes gens, comme avoit esté precogité et cons-
« pire entre le dit Charles et eulx, vindrent
" dehachier, et murdir devant luy nostre dit feu
« cousin. » .
Ostent mmutccs, font inclinacions.
Pots. MSS. d'EusI. Desch. fol. 30, col. i.
Aumuce est distingué de chaperon dans ces
vers, pris pour un vêtement à l'usage des gens,
du monde comme des gens d'Eglise :
.... Telle rie va queranl
Le jeune homme quant il se rend,
Ja si grans souliers n'aura
.la tant faire ne scaura
Chapperon, ne large aumuce.
Rom. de la Rose, vers U793-U"97.
VARIANTES ;
Aumuce. Gloss. du Rom. de la Rose.
Aulmuce. Reg. du Parlement de Paris.
Aul.musse. Chron. Fr. MSS. de Nangis, an. 1377.
Aumusse. Preuv. sur le Meurtre du Duc de Bourgogne, à
la suite du Journal de Paris, sous Charles VI et VU, p. 273.
Aumuche. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 176, V».
Auniuciers, subst. fém. plur. Faiseurs de
chaperons et d'aumusses. (Voy. Du Cange, Gloss.
lat. au mol almucium.)
Année, subst. fém. Espèce de plante. (Voy. Du
Cange, Gloss. lat. au mot Ilelna.)
Aiinement, subst. masc. Assemblée, assem-
blage. Ce mot, dans S' Bernard, Serm. Fr. mss.
p. 141, répond au latin unio. On a dit en ce sens,
« ^vàxii aunci)ienl{T) « pourgrand assemblage. 'Voy.
Fabl. MS. du R. n" 7218, fol. 326, V°.)
Aiineor, adj. Qui réunit. « Aiineor de choses. »
(S' Bernard, Serm. Fr. mss. p. 135, dans son latin
vlnitor rerum.)
(1) Le mot se trouve aussi dans Bcrte aux grans pies. (n. e.) - (2) Adiinimentum.
AU
— 320 —
AU
Aiiner, verbe. Réunir, joindre, assembler. —
Embrnsser.
Du lalin fl(/!/)!fl?r suivant le Gloss. du Rom. de
la Rose, au mol aduncr et suppl.
Au sens propre et littoral, c'est mettre en un.
(Voy. le Dict. de Cotgrave, au mot aiiner.) On a dit
aiiner ses os/s, pour assembler son armée. (Voy. le
Gloss. du P. Martene.)
Bateaux, clialans, nefs aïnm.
Rom. de Brut, MS. fol. 72, R" col. 2.
Quant les eut ensemble avetiez (1)
Le bel Adonys en fut aez.
Rom. de la Rose, vers 22121-2212i.
En tout ce peut on pécher
Trop longuement jeûner
Trop de delicux achmcr.
Rom, de la Rose, »crs 17881-11883.
Convoitise est entre nous trop commune
Despitez est qui grant avoir n'aime.
Pocs. MSS. d'Eust. Dcscli. fol. 288, eol. 1.
(Voy. Britton, des Loix d'Angleterre, fol. Sn, et
l'Hist. de S" Léocade, ms. de S' Germ. fol. 32, R-.)
On a dit aiiner pour embrasser.
La feme tint l'orne por fol et por musart
Qui bien l'aime et aûnc, et atret à sa part.
Tant c'on a doner, les lobe par son art ;
Et quant n'a mais que penre, sel commande à la hart.
Chastie-Musart, MS. de S. Germ. fol. 106, V- col. 2.
V,\RIANTES :
AUNER. Rom. de Brut, MS. fol. 72. R».
Aduner. Gloss. de l'Hist. de Paris.
AvENER (cor. AuNER.) Rom. de la Rose.
AuNiR. Dict. de Cotgrave.
Auner, verbe. Frapper avec un bâton. Ce verbe
est formé du substantif aune, sorte de bâton qui
sert à mesurer.
Foubert tantost un baston prent,
Vert et gresle tel corne une aune
Le Duc en fiert, et bat, et aune.
Eslruberl, Fahl. MS. du R. n- 7996, p. -il.
Auniaus, subst. masc. plur. Aulnes, espèces
d'arbres.
les auniaus,
Les cornilliers, et les franiaux.
Poés. MSS. de Froissart, p. 277, col. 2.
Aiinoir, subst. masc. Paire, couple.
Ce mot paroit pris en ce sens dans le passage
suivant : « Quiconque trespasse par Bourges, quel-
« ques denrées que ce soit, soit blé ou vin, draps,
« ou aunoir de porcs, ou toutes autres manières de
« marcbandises, il doibt du cbeval chargié un denier
« Parisis. » (La Tbaumassière, Coul. de Berrv,
p. 332.)
Aunois (2), subst. masc. et fém. Lieu planté
d'aulnes. (Voy. le Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis.)
VARIANTES :
AUNOIS. Gloss. sur la Coût, de Beauvoisis.
AuNoi. Chron. du xuv siècle, MS. Bouh. ch. Lin, fol. 388.
AULNAY. Menestrier, Ornemens des Armoiries, p. 451.
AusNAi. Chasse de Gaston Phebus, MS. p. 262.
AuLNOis. Poës. MSS. d'Eust. Deschamps, fol. 335, col. 3.
AUSNOI. Poët. MS. du Vat. n" 1490, fol. 161.
AULNAIE, AuNETTE. Du Cange, Glossaire latin, aux mots
Alncta et Abiidus.
Auparager, verbe. Anoblir. Ce mot est employé
avec celle signitication dans les vers suivants:
Denier fit vinde meson, plaine,
Denier taint escarlate en graine,
Denier auparafje vilaine.
Fabl. MS. du R. n- 7218. fol. 167, R- col. 1.
Auprès, adverbe. Auprès. Cet adverbe « formé
« de l'article au et de la préposition yjm, comme
" au reste, feroit croire que le mot de près avoit
« esté autrefois en usage comme adjectif, de mesme
« que loin l'est aujourd'bui. » (Grammaire de
l'abbé Régnier.)
Auprès a été aussi employé pour : « â peu près
« autant. » C'est ainsi que ce mot est expliqué à la
marge du passage suivant : « Sa présence et auto-
" rite ouvra (opéra, produisit) si non tant, auprès
« que feroit celle du dit sieur de Gurce. » (Lettres
de Louis XII, T. IV, p. 42.) Mais cette expression
sera peut-être mieux rendue par au prix ; c'est
certainement sa vraie signification dans cet autre
passage: « Ils ne sont rien «î/;;n's de vous. » (Le
Jouvencel, ms. p. 141.)
Aiiquaise, adj. au fém. Ce mot est employé
pour exprimer une difformité de la bouche.
Auquelier, subst. masc. Arbuste ou plante qui
produit l'auquelie.
Et tout au lonc maint violier
Auquelier et mariolier
Sus l'erbelte.
Poës. MSS. de Froissart, p. 45. col. 2.
VARIANTES :
AUQUELIER. Poës. MSS. de Froissart, p. 45, col. 2.
AUQUELUER. Ibid. p. 23, col. 2.
Auqiieton (3), subst. masc. Espèce de chemise
courte. (Voyez le Dict. de Borel , au mot Uoqueton.)
Ce mot s'est dit aussi pour casaque. Favin, dans
son Théâtre d'honneur (T. I, p. 94,) dit que « Vau-
' quelon étoit comme un corps de femme contre-
« pointé, il se metloit sur la chair nue de celuy qui
« devoit être reçu chevalier. >> La Colombière con-
firme celte explication; il dit, en parlant de la
réception d'un chevalier : " l'un luy metloit sur la
c< chair nue un gauluson ou auqueton, autrement
« Uoqueton, c'estoit comme un corps de cotte de
« femme conlrepointé ; et pardessus iceluy l'on luy
« metloit une chemise de gaze ou de fine toile. »
(La Colombiôre, Théâtre d'honneur, T. I, p. 572.)
Dans Mathieu de Coucy, Hist. de Charles VU, p. 594,
on trouve «;«'to«s et /(oc/ohs pour casaque d'archer.
(i) Il faut lire a» «e: au lieu d'avcnez..- (2) On trouve dans Froissart cette forme masculine au tome .X., 12i, XIV, 308
(éd. Kervyn) ; elle correspond à aunoic, aujourd'hui aunaie, et est encore employée comme nom de lieu. (N. E.) - (3) La
chanson d'Huon de Bordeaux au Nord, le poème de la Guerre des Albigeois (xm« siècle) au Midi, mentionnent déjà
1 auijucloii, alcoto en provençal. C'était un justaucorps rembourré, un qambeson placé eBtre la peau et le haubert. Il dut son
"°?„^„'^ ouate de coton dont il était piqué. Les gentilshommes de la manche et de la prévôté portaient encore le hoqueton
en 1789. (n. e.) »- i d e v h
AU
- 321
AU
Yoici le portrait d'un jeune chevalier très légère-
ment ou simplement vêtu :
En un jupel cort d'anquelo?i (alias alcoton)
Porpoint a force de coton
Reuiest sans plus, etc.
Allus, MS. fol. US, R'col. 1.
Tel est le sens de ces vers: « avec un jupon court
« ou anqueton piqué de fort coton, il estoit sans
« rien de plus: un manteau fourré de gris fut ensuite
« mis au col du chevalier. «
VARIANTES :
AUQUETON. Hist. de B. Du Guesclin, par Ménard, p. 358.
AcoTON et Anquetot.
Anqueton et Alcoton. Athis, iMS. cité plus haut.
AucTON. Mathieu de Cuucy, Histoire de Charles VII, p. 593.
Haucqceton, Hocqueton, HoctoNjHoqueton, Oqueton,
HOCTONS.
AuquetonjSwôsfflJî^i/". Espèce d'étoffe semblable
à celle dont étoient faits les auquetons ou les
housses de piqûre rembourrées.
Auraison, subst. fcm. Oraison. (Voyez la Vie
d'Isabelle à la suite de Joinville, p. 171.)
Aurande, suhst. fém. Sorte de fleur odorifé-
rante. 11 faut peut-être lire lavande ou peut-être
aurosne , auroene. « Semez de roses, œillets,
« marjolaine, aneth, aurande et autres fleurs
« odorantes. » (Rabelais, T. IV, p. 211.)
Aure, subst. fém. Vent. (Voyez le Dict. d'Oudin,
au mot Aure.)
Quant la douce eure vente,
Ki vient de cel doue pais
Pierre Kin de la Coupole.
Poêt. MSS. avant 1300, T. III, p. lOSG.
VARIANTES :
AURE. Fabl MSS. du R. n» 7218, fol. 8, R» col. 1.
Eure. Poët. MSS. avant 1300, T. III, p. lOSG.
Aure de grâce. Exclamation dans le patois de
Languedoc, suivant Le Duchat sur Rabelais. (T. 111,
p. '274, note 1.)
Aurea alexandrina , subst. fera. Sorte de
drogue. Elle servoitdansla fauconnerie pour guérir
les oiseaux malades. <• Vvenés&e aurea alexandrina.,
« environ la grosseur de deux pois chiches. »
(Arteloque, Fauconnerie, fol. 9.5, R°.)
VARIANTES :
AUREA ALEXANDRINA. Arteloque, Faucon, fol. 95, R".
AUREAU ALEXANDiiiNE. FouiUoux, Faucon. fol. 71, V».
Aurecq , subst. masc. Nom de lieu. Surnommé
en latin aquosus, opposé à un autre nommé le sec,
et appelé ly aurecq dans le cartulaire de Corbie.
Aureille, subst. fém. Oreille. (Voyez le Dict. de
Robert Eslienne, au mot Aureille.)
Remarquons les locutions suivantes:
1" Aureille de Judas. C'est un champignon, appro-
chant de la ligure de l'oreille de l'homme, qui croit
sur les vieux sureaux. Ce surnom lui est donné parce
qu'on prétend que Judas se pendit à un arbre de
cette espèce. « Sallades cent diversitez, de cresson,
• de obelon de responses, à'aureilles de Judas;
« c'est une forme de funges issans de vieulx
" sureaulx. » (Rabelais, T. IV, p. 253.)
II.
2° Vin à une aureille , c'est-à-dire vin excellent,
par allusion au mouvement que les buveurs font en
penchant )a tête d'un seul côté, quand ils trouvent
le vin bon. (Voyez Rabelais, T. V, p. 210.)
3" L'estomach affamé n'a point d'aureiUes. Façon
de parler pour dire que quand on a bien faim, on
n'est pas disposé à écouler des propos. (Voyez
Rabelais, T. IV, p. 269. —Le Ducliat, ibid. note 10.)
4° Dormir sur toutes les deux aurrilles, pour
dormir profondément. Nous disons doi'mirsur l'une
et l'autre oreille. (Contes d'Eutrapel, p. 212.)
5° Aureilles seront courtes et rares en Gascogne,
plus que de coustume, c'est-à-dire plus communé-
ment encore que par le passé ; tel Gascon n'aura
qu'une oreille qui souvent même se trouvera rognée.
(Le Duchat sur Rabelais, Pronost. T. V,p. 7, note 1.)
6° Aureilles adoublieres, pour oreilles fausses,
trompeuses. (Perceforest, Vol. VI, fol. 72, V-col.l.)
'•'.Aureilles de Bourbonnois. Expression passée
en proverbe, pour dire de longues oreilles. (Vovez
Le Duchat sur Rabelais, T. II, p. 10.)
VARIANTES :
AUREILLE. Dict. de Robert Estienne.
Areille. Dict. de Cotgrave.
Aureille, adj. Qui a des oreilles. On trouve ce
mot dans quelques auteurs pour épithète de sot et
de chêne : celle-ci, à cause des fourches qu'on voit
aux vieux chênes; et celle-là, à cause des cornes
ou oreilles qu'on inetloit aux fous. (Voyez Epilhètes
de Martin de la Porte.) On lit dans Rémi Belleau :
Les tronches aurillés
Des vieux chesnes branchus.
Pops, de Renii Belle,nu, T. 1, fol, 3-2, V.
VARIANTES :
AUREILLE. Epithètes de Martin de la Porte.
.\URiLr.É. Poës. de Hemi Belleau, T. I, loi. 32, V°.
Aureillette, subst. fém. Diminutif d'oreille. —
Partie du chaperon.
Ce mot est pris, dans le premier sens, au propre
par Des Accords, Bigarrures, fol. 137, V".
Au figuré, on donnoit ce nom à une partie du
chaperon qui en formoit comme les oreilles. « Les
« aureiliettes étoient une dépendance du chaperon
« que les femmes portoient en France dans le
« seizième siècle. « (Le Duchat sur Rabelais, T. I,
p. 77, note 3.)
Aurein, adj. Qui est d'or. (.J. Le Maire, Illustr.
des Gaules, Liv. I, p. 70.)
Aureine, subst. fém. Médaille d'or. Ce mot
désignoit une sorte d'écusson ou de médaille d'or.
Dans les vers suivants, c'est la marque de l'ordre
de la Toison d'Or :
Trois bons bergers portant une aureine
A leur poitrine, ung mouton de Colchos,
Sont assemblés, en frontière flandrine.
Molinet,]!. 139.
Aui'elot, subst. masc. Un coup sur l'oreille.
C'est le sens que paroit avoir, dans les vers sui-
vans, le mot aurelot, d'où s'est peut-être formé
notre mot horion :
41
AU
— 322 —
AU
Si uns le fiert d'ung aurelot
Et li autre d'un aurelot:
Ore est raison qu'il se deffenge.
Poël. MSS. avaiil 1300, T. IV, p. 1318.
Aurentin, subst. masc. Nom de pays. Il faut
peut-être lire il i'7T«f/".
Et si donna à l'Ospital
Une viUequ'ot en uns val,
En Aurentin s'ot non.
Ph. Mouskcs, MS. p. 481.
Auréole triomphale, loculion. « couronne
« liunineuse, rayon de gloire en ligne de triomphe. »
(J. le -Maire, Couronne Margaritique, p. 20.)
Aurer, verhe. Guetter. « Speculari, ensercher,
« agaitier. « (Glossaire du P. Labbe, p. 52G.)
Aureues, subst. masc. Evreux. Nom d'une
ville de Normandie. (G. Guiart, ms. fol. 40, R°.)
Aurichalque, subst. Espèce de métal. <■ Pala-
« frenières de Pliebus establircnt les quatre mer-
« veiUeux clievaux au freinz dorez de leur Seigneur,
. ayans les crins recercellez et rulilans de fin or,
« à l'ongle des piedz d'un métal nommé aurichal-
. que en lieu de corne. » (J. le Maire, Uluslr. des
Gaules, Liv. I, p. 92.)
Auriex, subst. masc. Le mois d'avril.
Le très douz mois, et avriex.
Adam li Bocus, Poel. MSS. avant 1300, T. IV, p. UOO.
Aupigateur, subst. 7nasc. Cocher. Du latin
aurUja.
Auriqe, subst masc. Cocher. (Voyez Anrigatcur.)
Aurillaye, subst. masc. Droit Seigneurial. Le
même qu'abeillage. « Borel et Chrestien du Burau
« ont Vauritlene par tote la forest de Burçai et de
« Cloipas et poent prendre les ées en cette ma-
" nière; .... se tes ées sont encrons de chesne, etc. »
iDu Cange, Glossaire latin, au moi .ipicularii.)
C'est aussi « le profil des ruclies des mouches à
» miel qui appartient au Seigneur ou an Roi comme
« en Provence. » (Laur. Glossaire du Dr. Fr.)
Ce mot ne seroit-il point une corruption A'aveil-
lagciormé d'avcilh', pour abeille r En lisant, on
auroit pu prendre l'epour unr. Peut-être aussi on a
pu faire venir avrillage du mot avril, parce que
c'est entre avril et mai que les essaims sortent de
Jeurs ruches.
VARIANTES :
.■VURILL.\GE. Cotgrave, Dict.
AuRiLAGE. Mém. de Sully, T. X, p. 228.
AuBisLAGE. Cotgr. Dict. Laur. Gluss. du Dr. Fr.
AuRiLLERiE (S. /.) Du Cange, Gloss. lat. au mot Apicularii.
Aurilleur,s((bs<. masc. Ce mot, formé à'au-
rillagc, signifie celui qui jouit de ce droit.
« Se il trovent aucun emblanl ées (1) en la fo-
« rest, cil qui i seront trové, feront au Seignor
1 soixante sols Cen. d'amende et li aurUleor
.< auront lor ées. » (Du Cange, Glossaire latin, au
mot Apicularii.)
Aiirilleus adj. Ce qui est du mois d'avril. —
Doux, joli.
Pour designer le tems du mois d'avril, on a dit
tempus aurieus, c'est-à-dire le temps d'avril, le
beau temps, dans les chansons de N. D. au ms. du
Vatic. n- 1400, fol. 120, R°.
Li dous tens avrilleus.
Raoul de Biauvés, Poèt. MSS. avant 1300. T. M, p. 671.
De lii et par allusion à la saison agréable du
mois d'avril, du printems, on a employé le mot
aurillous, pour signifier agréable, doux, joli ; et
c'est peut-être dans ce sens qu'il a servi d'épithète
au rossignol, parce que cet oiseau chante en avril.
Li rossignoles aurilloii.r.
IVill. li Viniers. Poèl. MSS. avant 1300, T. II, p. 819.
Mais ce mot a signifié seulement agréable, joli,
doux dans l'expression suivante :
La regine aurilloiise.
Poèt. MSS. avajil 1300. T. IV, p. 1657.
VARIANTES :
AURILLEUS. Poës. MSS. avant 1300. T. II, p. 671.
AURIEUS. Poët. MSS. du Vatic. n» 1490, fol. 120.
AVRILLOUSE (au fém.) Poët. MSS. avant 13(X), T. IV, p. 1657.
AVRILLOLX. Vill. li Vinier, Poët. MSS. av. 1300, T. II, p. 819.
Auripeaiilx, subst. masc. plur. Maladie de
l'oreille. Mot de l'Anjou, où il signifie ce mal
d'oreille qu'on appelle orillons h Paris. (Le Duchat
sur Rabelais, T. I, p. 252, note 15.)
VARIANTES :
AURIPEAULX. Rabelais, T. I, p. 252.
AuRiP£.\ux. Dict. de Cotgrave.
Auripelade, subst. masc. Richement accompa-
gnée. Motgascon, qui signifie << accompagnée comme
« d'une pellicule d'or, » suivant Borel dans son
Dict. où, au mot Marelle, il cite les deux vers
suivans :
Une piUule de science,
Auripelade d'éloquence.
Aurora, subst. fém. L'aurore. C'est le mot
latin qui se trouve employé comme françois dans
le Triomphe des neuf Preux, p. 25G, col. i.
Aurorin, adj. Qui ressemble h l'aurore. Qui a
la couleur, la fraîcheur de l'aurore; éclatant,
brillant comme l'aurore, dans les vers suivans :
Teint aurorin.
Poës. de Loys le Carron, fol. 20.
Dessoulz les loix de Vaurorine astrée.
Ibid. fol. 33. R'.
Aurosnc, subst. [cm. Aurone(2). Plante qui ap-
proche de l'absinthe par son port.
VARIANTES :
AUROSNE. Valois. Notice, p. 211, col. 1.
AuROESXE. Dict. de Cotgrave.
Ans, pronom plur. Eux. (Voy. le Dict. de Borel.)
« Se aucuns vient devant fu/s et muet question de
« marchié qu'il ait fait. » (Ordon. des Rois de
France, T. 1, p. 108.)
<1) Abeilles. - (2) Vient du grec degoiovov. (x. e.)
AU
— 323 —
AU
VARIANTES :
AUS. Poët. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1328.
Aux. ViUehardouin, p. 6.
Ax. Fabl. MSS. de S' Germ. fol. 5, R» col. 3.
Ayus. Assises de Jérusalem, p. 87.
Ans, article. Des. — Dans les. On employoit
quelquefois l'article «i/.r pour des, c'est-à-dire le
datif pour le génitif. « Par l'accort et par 11 conseil
« ans autres Barons. " (ViUehardouin, p. 55.)
Aus a été employé pour dans les. (Voy. Kuicts de
Straparole, T. 1, p." 98.)
VARIANTES :
AUS. ViUehardouin, p. 55.
Aux. Nuits de Straparole, T. I, p. 98.
Aus, adv.. Peu à peu. On a dit auq dans le même
sens.
Ausels, sitbst. Diasc. plur. Oiseaux. Mot
languedocien. (Voy. le Uict. de Borel, aux mots
gargaillot et glouper.) On dit, en Picardie et en
Normandie, oisels pour oiseaux, et au singulier
oisel pour oiseau.
Ausez, participe. Avancé, ou qui ose s'avancer.
Ce mot est employé en ce sens dans les vers
suivans :
Ainz qu'il soit sor lui ausez,
Li Damoiseax s'est si hastez,
Si est sailliz sor le destrier.
Floire et BlancheDor. MS. de S. Gerra. fol. 197, R* col. 1.
Ausine, subst. inasc. Chêne vert. Mot langue-
docien.
Auski. (Lisez Al;s-ki), pronom. A ceux qui.
Ausner, verbe. Mesurer à l'aune.
Mie.x qa'ausiwr ne sevent drapier.
G. Guiart, MS. fol. 133, R».
Ausquieux pronom. Auxquels. (Voy. les Ordon.
des Rois de France, T. 1, p. 521.)
YAniANTEs :
AUSQUIEUX. Ord. des Rois de France, T. I, p. 5'21, art. viii.
AUSQUIEX. Ibid. p. 80, art. vi.
Aussai, subst. masc. L'Alsace. Nom de pays.
Tout cil qui son jusqu'en Auxsai.
Pics. MSS. deFroissart.
Moult en i vint devers Ausai.
Fh. Mouskcs, MS.
VARIANTES :
AUSSAI. Froissart, Poës. MSS. p. 4. col. 1.
Aucois. Chron. Fr. MS. de Nangis, an 386.
AusAi. Ph. Mûuskes, MS. p. 295.
AussAis. Froissart, L. IV, p. 122, an 1394.
AussAY. Eust. Deschamps, Poës. MSS. fol. 254, col. 2.
Aussois. Monstrelel, Vol. II, fol. 158, R».
Auxois. Le Jouvencel, MS. p. 637.
Aussiau. Mot languedocien qui paroit signifier
tuoient A3iX\s, la Chronique ms. de Montpellier, citée
par Du Gange, Gloss. lat. au mot Vaccarius (1).
Aussiin, subst. masc. Nom propre d'homme.
Brantôme cite ce proverbe: « Hardiesse d'.U/ssHn. »
(Brant. Cap. Fr. T. II, p. 217.) C'étoit un proverbe
auquel avoit donné lieu le Seigneur à'Aussun,
célèbre par sa bravoure.
Austades, subst. fém. Espèce de serge. (Voyez
les Ordonnances des Rois de France, T. II, p. 383.)
Austant que, adv. Autant de. « Austant que
« picques, que h^cquebustes. » C'est-à-dire autant
de piques que d'arquebuses. (Voy. les Lettres de
Louis XII, page 49.)
Austarde, subst. fém. Outarde. Sorte d'oiseau.
(Voyez le Dictionnaire de Nicot, au mot Austarde.)
VARIANTES :
AUSTARDE. Dictionnaire de Nicot.
OSTARDE...
Auster, substantif masculin. Vent du midi.
(Voy. les Dictionnaires d'Oudin et de Cotgrave, au
mot Austre.) « Auster, espèce de vent. "Laquelle
« nieble bruineuse est aucunes fois amenée par le
« vent.lî/s/crsurla cruppedes hautes montagnes. »
(J. le Maire, Iliustr. des Caules, livie II, p. 22G.)
Ce fut tout droit au temps d'esté
Quant temps d'aiister est en saison.
Hist. des Trois Maries, en vers, MS. p. 110.
Com les flots font plungier la nasselle,
Par le tempest, et par le souffleraent
De bise, austère, et galerne ensement.
Poës. MSS. d'Eust. Dcsch. fol. 60, col. 3.
VARIANTES :
AUSTER. Hist. des Trois Maries, MS. page 110.
AUSTERE. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 60, col. 3.
AusTRA. Navig. d'Emer. Vesp. fol. 1, R».
Ai'STRE. Dictionnaire de Cotgrave et d'Oudin.
.\USTR1E. Dictionnaire d'Oudin.
Austère, adj. Dur, sévère, rigide. « Chastel du
" comté de Ventadour en Auvergne, lequel fut
« vendu, et trahi à un Breton le plus cruel, et
« austère de tous les autres. « (Froissart, livre II,
page 51.)
Austérité, subst. fém. Rigueur, peine, souf-
france. — Force, vigueur.
Dans le premier sens, Melin de Saint-Gelais dit :
.le n'ay douceur qu'en dormant, et en songe,
Et en veillant, je n'ay qn'auslérité.
Welin de Saiiit-Gelais, page 130.
Austérité, dans ce passage, est employé pour
force, vigueur. « En l'osl de César estoient aucuns
a marchans qui dirent aux Romains la contenance
« et fierté de leurs ennemis, leur grandeur, et
« austérité de corps. » (Triomphe dès IX Preux,
page 30.)
Austraçois, S!<&s/. masc. plur. Les Austrasiens.
" Quantité de gens de guerre, tant d'Anglois, Aus-
(1) Voici la citation complète: « Item aquol an meteis se mogron autra manieira de gens que se appellavon Vaquiers, e
volian passar et aussiau e casanou los mesels. » Traduction: « Ce même an, se murent autre espèce de gens qui
s'appelaient Vachers, et voulaient passer et chassaient (?) de leurs boutiques les bouchers. » Ne faut-il pas rapprocher ce
mot du verbe atisseï; employé par Froissart (Kervyn, XIV, 308), et qu'a omis Buchon : « Tant en but et à tel outrage que le
sain (sang) du corps luy refroida, et coraxnenca à ausser et à entrer en foiblesse de popUsie. » (N. E.)
AU
— 324 —
AU
« trelins, Flamans, Picards, et aultres. » (Chroni-
que scandaleuse de Louis XI, an li7(), p. 172.)
Par orgueil finerent Gregois,...
Par chelis le Règne nustraçois.
Eusl. Desoh. Poês. MSS. fol. 244, col. 4.
VARIANTES :
AUST1\.VC0IS. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 244, col. 4.
AusTiiiiLÎ.Ns. Chron. scand. de Louis XI, page 172.
Austras, adj. Australe.
La terre auslras délicieuse. <
Poês. MSS. d'Eust. Dcsch. fol. 537, col. 2.
Au.striche, subst. fém. Autruche. (Voyez les
Epilh. de Martin de la Porte.) C'est une faute pour
austrnclte.
Austrin, adj. Vent du Midi. (Voyez les Diction-
naires d'Oudin et de Cotgrave.)
Austruciors, subst. niasc.plur. Ceux qui chas-
sent à l'autour. 11 faut peut-être lire austrussiers
dans le passage suivant : « Les austrulliers, fau-
« conniers et" chasseurs. » (Brant. Cap. fr. T. III,
page 335.)
VARIANTES :
AUSTRUCIEUS. Gace de la Bigne, MS. fol. 125, R°.
AsTRUCiERS. Gace de la Bigne, MS. fol. 11, R».
AUTRUCIER. Ibid. fol. 12, R».
AuTOURSiER et AuTûURSiERs. Autourserie de G. Luzancy,
chapitre I, fol. 1.
Aususer, verbe. Exhausser, exalter, élever.
(I Pour ceu que tu as esteis feaules, sur petites
« coses, je Vausurcray sus grans coses. « Bulle
d'Alberon, évesque de Metz de l'an 040, citée dans
la préface du Dict. de Borel qui le traduit par « je te
« constituerai sur beaucou-). » C'est le latin de
l'Evangile supra multa te constituam.
Autan, subst. maso. Nous disons encore les
autans. Ce sont les vents que Pline nomme en latin
Altanos.
VARIANTES :
AUTAN. Salnove, Vénerie, page 148.
Autant. Ibid. page 191.
Aiitansions, subst. fém. plnr. Intentions. Il
faut lire antansions :
Or nos dites, se vos savés,
Keis est la lor autanshns.
Poêl. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1662.
Autant, adv. Nous remarquerons les façons
d'employer cet adverbe qui subsiste :
1° Pas n'en eut voulu autant imur une cité.
(Gérard de Nevers, 2' part. p. 02.) L'éditeur l'expli-
que : « >ie l'auroit pas donné pour la valeur d'une
.. ville. »
2° IHus d'autant et demi, c'est-à-dire la moitié
plus : " il y a voit grand foison de bannières, et de
« pennons, et estôyent par semblant, yy/(is d'autant
>■ et demi qu'ils ne furent. » (Froissart, livre I,
page 271.)
3° Autant quant, c'est-à-dire, autant les uns
comme les autres, autant d'un ctMé que de l'autre,
à nombre égal.
Demain peut assaier Normanz
Ou ost contre ost, autant quant.
r.om. de llou, MS. p. 250.
4» .1/ tant cum. Dans S' Bernard, Serm. fr. mss.
page 358, on lit : « Nazareth valt al tant cum flars
« de la racine de .Jell'é. » Dans le latin u Nazareth
« interpretatur nos de radice Jeffe. » Altretant iM
même sens. (Ibid. p. 14.)
VARIANTES :
ALTANT CUM.
Altret \nt. Marbodus, col. 1070. S' Bern. S. fr. MSS. p. 14.
Autel, adj. Semblable, tel. pareil. (Voyez les
Dict. de Borel.) « Leur respondit autelle, et sem-
« blable response. ■> (.loinville, page G7.)
On a employé aulretel avec la même signification.
(Duchesne, Gén. de Béthnne, p. IGi.) On a dit autel
pour autel, pour dire tel pour tel dans .1. de
Saintié. « Jour autel comme quant, » c'est-à-dire
à pareil jour que « celui jour estoit de Pasques,
« autel comme quant nostre Seigneur ressuscita. »
(Histoire de B. du Guesclin, par Ménard, page 205.)
VARIANTES :
AUTEL. Glossaire de l'Histoire de Paris.
AuTiEC.x. (plur.) Poët. MSS. du Vatic. n° 1522, fol. 180.
AUTRETEL. Marbodus, col. 1642.
Autel, adv. Pareillement, de même, ainsi.
Non pas aulf] fer.iy.
Poês. MSS. d'Eust. Dcsch. fol. 214, col. 2.
Autel, subst. masc. Autel, église. >■ Les mots
« d'autel et à'église sont des termes dont la dis-
« tinction fut inventée par les laïques usurpateurs
« des dismes des églises. » (Félibien, Histoire de
l'abbaie de S' Denis, p. 125.) On voit que ces mots
avoient la même signification en 1005, à en juger
par la citation suivante tirée du concile de Clér-
mont, rapportée par Du Gange, Gloss. lat. au mot
Altare : « Ecclesia quœvulgari vocabulo apud eos
» Gallos altaria nuncupatur. »
Qui autel sert d'autel doit vivre.
Prov. dans les Prov. du Vilain, MS. de S' Gcrm. fol. 75.
Voici des citations où ce mot est employé : « La
« construction deVaultier et Finimolatioh des sa-
« crifices. » (Nef des Dames, fol. 25, V°.) « On leur
« monsfra crucifix et rt!///?crs. » (Faifeu, page 06.)
« Sur le grant auter de l'église de Saint Bénigne
« de Dijon. » (Ordonn. des Rois de Fr. T. V, p. 230.)
.\u temple viennent, si descendent
Lor droiture à l'ater rendent.
Alhis, MS. fol. 55, V col. 2.
VARIANTES :
AUTKL. Orthogr.-ïphe subsi.st.
AinEiT. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 151, dans le lat. .Altaria.
Hautel. Etat des officiers du D. de Bourg, page 86.
AUTER. Ordonnance des R. do Fr. T. V, page 239.
AuTiER. Glossaire sur les Coût, de Beauvoisis.
AuLTiER. Kaifeu.
AuTEUS. tplur.) Phil. Mouskes, MS. page 284 et suivantes.
Alttex. Fabl. MS. du R n" 7218, fol. 132, R- col. 1.
AuTiEULX. (plur.l Glossaire du Rom. de la Rose.
Ater et Autel, .\lhis, MS. fol. 55, V» col. 2.
Autelet, subst. masc. Diminutif d'autel. (Voyez
les Bergeries de RemiBelleau, T. I, p. 7.)
Auteneaux, subst. )nasc. plur. Espèce de pois-
sons. « Aucuns ne prendent bcctiueteaux du fours
AU
— 325 —
" ce 1 eauwe, s'il n"a douze pouchs ou plus; ven-
« doises cinq pouchs, braismeaux sept pouchs
- auteneaux, huyt pouchs. » rCoustume de
Hayiiault, au Coutumier Général, T.'l, p. 813.)
Autenticque, adj. Authentique, célèbi'e, consi-
dère, notable. L auteur du Glossaire du Roman de la
Kose explKiue ce mol par magnifiques, éclatantes
brdlantes dans le vers 07 de ce lioman : c'est une
lausse indication. . La vindrent les plus notables
" ']^'","ies et les plus «Mtot^«y;iÊ>s des bonnes villes
« de Handres, en grand Estât et puissant. ., (Frois-
sar livre I, page 163.) (1) „ Deux conjoincts par
« mariage ne se peuvent, par disposition d'entre
« vils, ou testamentaire, ou autrement, advancer
« 1 un laiiti'o, directement ou indirectement ny les
« réserves, et stipulations autemplicles faites au
\^!^'}Vl T-K''^?''^- " (^«"f- ''e Lessines, au
^ouv. Cout. Gen. T. II, page 215.) Le Poi écrivant ù
ses ministres, pour la paix deVervinsen 151)8- leur
niaiide, en parlant des articles dont on vouloi't une
expédition aulhentiQue : .. mais prenez garde mie
« sur ce mot authentique, et en la forme accoutu-
« niee ils ne pussent prétendre qu'ils soient
« vérifiez et omologuez au Parlement » (Mém de
Bellièvre et de Sillery, T. I, page 120 )
On disoit autenticque pour accrédité, considéré
Froissart, parlant de la' mort injuste que subit Jean
Desmarelsenl382,dit: « On l'avoit toujours v-eï
<■ bomme de grand prudence, et de bon conseil e"
" avoit toujours esté l'un des greigneurs auctenti-
« questn Parlement, sur tous autres. » (Froissar
livre II, page 233.) \' i^iasdi i,
On âiso\{ ms,i\autcmtticquépo\\r rendu authenti-
que autorisé. Collation faite ausdites coustunes
« non signez, ny autantticque-^ et neantmoins en
« bonne forme. » (Nouv. Cout. Gén. T. I, p 405 )
variantes:
AUTENTICQUE. Beaurnanoir, page 16
AucTE.NTiQUE. Froissarl, livre Ii: paeé '>a'î
AUTANTTICQUE. Nouv. Cout. gén T. L pa-e 405
AUTEMPTiCLE. Ibid. T. II, pa|e 215 °
AuTENTiQUE. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 470 col «
Authentique. Orthographe subsist. ' ""
Autenticque, subst. masc. et fém. .Autorité
vente reconnue, axiome (2). «■ -»uioritc,
Pour ce avons nous ung autenticque
Uui en defflnit sainement.
Coquillarl, p. 12.
• c'est une autcntique ■
lout se pert, le monde, et leglise
Poës. MSS. d'Eust. Desch. fol. 337, col. 1.
AUTENTICQUE. Coquililrtf p^ia '
AUTENTIQUE. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 337, col. 1.
AU
Autentiquement, adv. D'une façon remarqua-
marbS''p^t™^,fH*^^'- " dedans la dicte chasse de
marbre est enclose une autre petite d'aro-ent
le'iÊ^!^ m. "''"'''■ " (^""^'e« dVLÔÏîsXli
Autentiquer, verbe. Rendre authentique ren-
dre public. (Voyez le Dictionnaire d'Oudin et îe
Cout. gen. T. II, page 980.) ^
Authorisable, adj. Qui peut servir d'autorité
Brantôme emploie ce mot, eu ce sens, au passa-e
suivant: « Sur quoy j'allegueray un exemple plaf
« san non pourtant qu'il doixeestre anthorSbe.
(Brantôme, Dames gall. T. II, p. 207.) '""''""''^■
rv^'^^Yi^'^:- *"^^.^' ^^'''"- Le féminin d'auteur
0 oyez le Dictionnaire de Cotgrave.) '
VARIANTE •
AUTRICE. Du parfait amour.
Autographe, subst. mase. Ecrit original, écrit
de la main de l'auteur. Ménage, dans ses rerl'^^r
quessur la Langue, page 280, prétend qu^rfai't
prononcer a ftographe. ' "'
Autom,subst. masc. Automne. (Voy. les Dict de
INicot et de Cotgrave.) ■* "*^
VARIANTES :
AUTOII. Dict. de Nicot.
AUTROMPNE. Eust. Desch. Poës. MSS. fol '>9 col -î
AUTUMNE. Glossaire du P. Labbe. ' '
Automates, adj. Ce mot subsiste, mais comme
substantif. Ménage, dans ses remarques suMa
langue, prelend qu'il faut prononcer «/VoSLs
(.ajg., I, 24. Engeins automates; c'est-à-dire ma-
chines automates. " uuc Uld
Automnal, adj. Qui est propre à l'automne
(\oyez les Dictionnaires d'Oudin et de Colgra \e )
On rouve au pluriel automnaux, pour épitlîète de
fruits, dans les épithètes de .Martin de la Porte
VARI.\.NTES •
AUTOMNAL Dictionnaire dOudin et de Cotgrave
AUTO.MNEL. Dictionnaire de Cotgrave. °^^'^*^*'-
Anton, subst. masc. Autan, vent du midi.
■ ,-, l'impétueuse haleine
D Auton qui la pluie ameine.
Poès. d'.\raadis Jamjn, fol. 61, V".
Autorizé, participe. Privilégié.
Bien deust pieça estre par droit canonisé
berviz et honoré et plus autorizé et auctoryiez.
Ger. de Roussillon, MS. p. 203.
VARIANTES :
AUTORIZE, AcTORiziEz.
, Autouv, préposition. En dedans. Ce mot qui ne
s emploie que pour signiner ce qui est autour de
AU
— 326 —
AU
quelque chose exlérieurement, est mis ici dans ua
sens contraire. L'auteur de la Chronique scanda-
leuse de Louis XI, pat;e '28, parlant d'une proces-
sion générale en 141)."), faite pour la santé du Roi,
dit : « La dicle assemblée, et congrégation se faisoit
« pour la santé, et bonne prospérité du Roy, et aussi
« de la Royne, et du t'ruicl qui estoit autour d'elle. «
Nos auteurs, par un même renversement d'idées,
ont dit une femme enceinte d'enfants, pour dire
une femme grosse.
Autour, subst. Espèce d'oiseau de proie.
VARIANTES :
AUTOUR. Du Cange, au.K niots.-lti?i(r, .4!(s(or;us, llosiorius.
Eust. Desch. MS. fol. 229, col. 2.
EsTOiH. Assises de Jérusalem, pages 211-212.
EsToiHE. Mouskes, MS. pages 4i9-450.
OiTOUR. Glos.saire du P. Labbe, page 486.
OsToiR. Borel, 1"^ addit.
OsTOR. Du Gange, au mot Uon.
OsTOUR. Eust. Desch. Poës. MS. fol. 113, col. 1.
Autour, adverbe. Absolument, tout-à-fait. On a
dit en ce sens : « vuider la selle autour ; » c'est-
à-dire la quitter tout à fait. (Voyez Perceforest,
Vol. I, fol. 147, R° col. 2.)
VARIANTES :
ASTOU. Mot languedocien. Du Gange, Glossaire latin, au
mot Astur.
AULTOUR. Coquillart, page 108.
AusTOR. Mot béarnois. Du Gange, Glossaire latin, au mot
Axiatorhis.
.A.USTOUR. Dictionnaire d'Oudin et de Cotgrave.
AuTOER. Gace de la Bigne des Déduits, MS. fol. 87, R".
Autran, suhst. masc. L'année précédente. C'est
comme s'il y avoit aulr'an. Cette expression est du
patois de Cahors. (Voy. Borel, Dict. au mot Glouper.)
Autre année (F.) Pour à l'avenir, à jamais.
Si te renonce et or, et l'autre année:
Car désormais par créature née
Ne sera veu qu'en me nommant je rie.
J. Le Maire, suite de niluslr. des Gaules, p. 407.
Autre, ndv. Aulrcmcnt. Ils ne le pouvoicnt
autre. (Monstrelet, Vol. I, fol. 92, R".)
Autre. Ce mot, qui subsiste, s'est employé quel-
quefois (1) :
1° Pour désigner le diable. (Voyez l'Histoire de
Fr. en vers, à la suite du Rom. de Fauvel, ms. du R.
n^ G812, fol. 82, V° col. 3.)
2" Pour le reste : " sont coupés la teste et la
« queue, et tout l'autre est mis en un pot. » (Modus
etRacio, MS. fol. 129, R".)
3° Li ou soit autre.
Autres (vous), pour vous parlant avec respect ; de
l'ancien mol e^itre-vous ; « ainsi qu'il me semble
a (souz la bénigne grâce, et supportation de voz
« bautesses) madame Venus surpasse en linéature
« et droitesse de corsage vous autres deux, mes
« très redoutées dames et déesses. » (J. le Maire,
lUustr. des Gaules, livre 1, page 110.)
Autre endroit, adv. A l'envers. (Voyez une
citation dans Un Gange. Glossaiie latin, au mot
Tuniea'2, col. 1341.)
Autrefois, adv. Une seconde fois.
Ma coulpe une fois, autrefois et tierce fois. (Bou-
teiller. Soin. rur. p. 873.) Ge mot s'entendoit aussi
dans le sens qui subsiste. On disoit aussi à Vautre-
fois pour une autre fois. (Ordonn. des R. de Fr.
T. I, p. 671; et autrefois pour aucune fois. — Ibid.
page 774.)
VARIANTES :
AUTREFOIS. Orthographe subsist.
AuTRESFOis. Froissart, livre III, page 108.
Autreget. Mot gascon qui signifie ordonna,
octroya, enjoignit, dans une citation rapportée par
Du Gange, Glossaire latin, au mot Vassalaticum,
col. 14.33.
Autre hier, adv. Avant-hier et l'autre jour,
comme on le dit familièrement :
Parla l'autre lujer au Roy, et si très bandement
Ly Sire a son garçon n'oseroit pas tant dire
Gon Girart dit au Roy, et toujours en grand ire.
Ger. de Roussillon, MS. page 33.
Les Italiens disent altrohieri dans ce sens. On
employoit aussi le mot autrehier d'une fatjon plus
générale pour ci-devant. (Voyez le Glossaire de
Miirot."! Il en est de même de l'expression « autre
jour d'hier. >■
VARIANTES :
AUTREHIER. Glossaire de Marot.
AuTREHVER. Ger. de Roussillon, MS. cité ci-après.
AuTRiER. Poët. JIS. avant 1300, T. III, page 1189.
Atrier (!'.■) Athis, MS. fol. 24, R" col. 2.
Autrejoukd'hier. La Golomb. Tbéat. d'honn. T. II, p. 420.
Autrement, adv. D'ailleurs ou assez. — Guères.
Mot subsistant. Se trouve écrit altrement dans
S' Bern. Serm. fr. mss. p. 721 et passim; dans le
latin alioquin.
Ge mot est mis pour d'ailleurs, ou assez, dans le
passage suivant, oii il s'agit de la manie des anti-
quaires qui rassemblent « des testes sans oreilles, des
« bus sans bras,.... chose autrement laide h. voir. »
(Fauchet, Langue et Poës. fr. épitre, p. 1.)
Pour guères, on lit dans Joinville, p. 80: « Il nelui
tenoit auirenicnl compaignie (2). >.
VARIANTES :
AUTREMENT, Altrement.
Autrement venu, adj. Contrevenu. (Ordonn.
des R. de Fr. T. III, page 150.)
Autreplus, rtr/yer&f!. Surplus. (Voyez Ordonn.
des Rois de France, T. III, p. 54.)
Autre que tel. Expression qui signifie tout
autre, dilTérent: « Vous ne povés pas faire les
«■ hommes autres que tels que Dieu les a fais. »
(Le Jouvencel, ms. p. 402.)
(1) On trouve dans Froissart (\.\. XIII, 76) l'expression an par autre, bon an mal an : « An par autre, les Frères y ont
bien et largement entre cens et six-vings queues de bon vin. (N. E.) — (2) Autrement signifie aussi : « Les Flourentins
estoient venus à merchy au pape et autrement bien les Pérousins. » (.Froissart, 1.1. XIV, 301.) (N. E.)
4
-d
AU
— 327 -
AU
TARIANTES :
AUTRE QUE TEL. Le Jouvencel, MS. p. 402.
AUTREQU.\TEL. Fabl. MS. du R. n° 761û, T. I, fol. 58.
Aiitresfois vous. On a employé cette expres-
sion au lieu de autre que vous.
Qu'autresfois vous, ne quier jamais ser\-ir.
Eusl. Desch. Poés. MSS. fui. 168, col. 1.
Autrestant (1), adverbe. Autant.
Nil ne heent rien autreslant,
Comme il heent loial amant.
Fabl. MS. du R. n- 7218. fol. 205, R- col. 1.
Et jeûnent autvctanl et plus que d'autres gens.
J. de .Meung. Cod. vers 1012.
VARIANTES :
AUTRESTANT. Chasse de Gaston Phébus, MS. p. 266.
Altret.\nt. Marbodus, col. ICTO.
AuTRETANT. l'oës. MSS. d'Eust. Desch. fol. 529, col. 3.
AUTRETENT. Kymer, T. I, p. 109, col. 1 et 2; Ut. de 1208.
Autrhoiii, suhst. masc. Autre homme. Ce sont
les deu.x mots réunis. (Voy. la Citation de Borel, au
mol amesurats.) Au reste, ces sortes de réunions
sont fréquentes dans nos anciens Poètes. ISous ne
nous astreignons pas à rapporter tous les mots qui
en résultent, dès qu'il est facile de démêler ceux
(lui les composent.
Autrou, subst. masc. Maître, seigneur. Mot
breton. (Voy. Du Cange, Gloss. lat. au mot auctor.)
Autrui, subst. 7nasc. Les autres. Ce mot subsiste
sous la première orthographe. On disoit autrefois
par autrui main pour par la main d'aulrui. (Beau-
manoir, Coul. de Beauvoisis, p. 8.) « Tout a esté à
'< autruy et sera à autruy. » Proverbe. C'est-à-dire :
Tout a changé de maître et en changera encore.
'Dict. de Cotgrave.) C'est dans le même sens qu'on
lit dans les Poès. .mss. d'Eust. Desch. fol. 260, col. 3 :
Tout fu et tout sera autruy.
Vautrui. C'est-à-dire ce qui appartient à autruy.
Le monstre infâme d'envie
A qui rien de Vaulnaj ne plaise.
Ménage, en commentant ces vers de Malherbe,
observe que " le mol autrij se met quelquefois avec
« l'article défini, et alors il signifie le bien, et non
« pas la personne ; mais cette façon de parler est
" du vieux temps. » (Mém. sur Mallierbe, Liv. iv,
p. •421.) Vaugelas a fait les mêmes remarques.
On écrivoil autrui estait pour dire: appartenoit
à un autre. (Duchesne, Gén. de Bar-le-Duc, p. 32.)
VARIANTES :
AUTRUL Orthographe subsist.
AUTRUY. Eust. Uesch. Poës. MSS. fol. 260, col. 3.
.VUTRI. Loix normandes, art. xiv.
AUTRY. Les 15 Joyes du mariage, préf. p. 3, et note.
.\UTRUZ. (plur.) Ordonn. des Rois de France, T. II, p. 603.
Autruschier, subst. masc. Titre d'office. C'étoit
le titre d'un des officiers de Charles VI, sans doute
celui qui avoil soin des autruches. Peut-être faut-il
lire autouschier. (Voy. Godefroy, Annot. sur l'Hist.
de Charles VI, p. 704," et Ai;strullier ci-dessus.)
Antrnsse (2), subst. féru. Autruche. C'est une
espèce d'oiseau. On lit idumes d'autrusse dans
Petit Jean de Saiiitré, p. 181».
Auve, subst. Pour les panneaux ou autre partie
de la selle qui estoient faits de bois blanc.
Poitras et cengles de rompues
Et les auves parmi fendues.
Athis, MS. fol. 105, R'col,!.
Auve, subst. fém. Saindoux. Ainsi nommé à
cause de sa blancheur, du latin alhus.
Auvent, subst. 7nasc. Auvent. Petit toit mis
au-dessus des boutiques. Portique. (Voyez le Dict. de
Cotgrave, aux mots aulven et aulvent.) On lit dans
la Coul. de Senlis: « lia également cognoissance
« des aiilvens sur rue. •■ (Coût, de Senlis au Coût.
Général, T. I, p. 312.)
On lit auvan et avautvens dans Du Cange, Gloss.
lat. au mol auvaua, on trouve uuvant^ùnns les
Oidon. des liois de France, T. III, p. 313. Voy.
Felibien, Ilist. de Paris, Preuv. T. II, part, ii, p. 10."»,
col. 2, où on lit : ■• fera bastir six ou sept loges, ou
« haultsneufs pour mettre (;eu.\ qui auront alîaire
« au dict marché à couvert. » Il falloit peut-être
lire haults vents. (Voy. le Gloss. de la même Hist.
de Paris.)
Li auvent des palais trestuit
Qui luisent contre menuit
Devers la ville sont tornés.
Parlon. de Rlois. MS. de S. Gcrm. fol. 127. R' col 2.
VARIANTES :
AUVENT. Parton. de Blois, MS. de S. Germ. fol. 127, R».
AuvA.NT. Ordon. des Rois de France, T. III, p. 313.
Auvan. Du Cange, Gloss. lat. à. Auvanna.
.\ulvent. Dict. de Cotgrave.
Aulven. Idem.
Avautvens (plur.) Du Cange, Gloss. lat. à Auvanna.
I1.\ultsneufs (plur.) Gloss. de l'Hist. de Paris.
Auvergnaus, adj. Qui est d'Auvergne.
VARIANTES :
AUVERGNAUS. Fabl. MSS. du R. n»7615. T. II. fol. 189, R».
Auvergnois. J.le Maire, lUustr. des Gaules, Liv. III, p. 288.
AuvERNOis. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 164, R» col. 1.
Auvernas, subst. masc. Espèce de raisin noir.
(Voy. le Dict. de Cotgrave.)
Auvoire, subst. Imagination, vision, croyance
sans fondement. « Autant vaut auvoire comme
" bourdes proposées en justice. » (Beaumanoir,
p. 323.) Il paroît que ce mot signifioit de simples
idées sans fondement, des choses que l'on se per-
suadoit être sans en avoir aucune preuve. Ainsi
quand on lit dans une Ordonnance, T. V, p. 712:
« Un nostre sergent par lui seul en accusant un
» homme de la dicte ville, ne seroit et n'est cru,
« ne les hommes de la dicte ville par devant nous
« ne respondront à'auvoirie », cela paroît signifier
qu'ils ne déposeront pas par des il semble. L'éditeur,
qui avoue ne pas entendre cet endroit, s'est trompé
dans les conjectures qu'il a hasardées sur ce mot.
(1) Autrelant représente alterum tantum, comme autant représente aliud tantum. On trouve aussi la formule à
l'autretant : « Et donnèrent là à l'axUretant et si longuement que vens lor revint, s (Froissart, II, 436.) (N. E.) — (2) Do
iiris-slruthio, mot à mot oiseau autruche, (n. e.)
AV
— 328 —
AV
On lit dans le même sens :
Jés sai tots sanz mivnirre.
l'arlon. de Blois, WS. du S. Cerm. fol. 160, V'.
C'esl-à-dire je sais tout avec certitude.
n'est pas amoirc (lisez auvoire.)
Dont je parle, mais chose voire.
Ibiil. fol. 148, V col. 2.
VARIANTES :
AUVOIRE. Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis.
AuvoiRRE. Parton. de Blois, p. 100, V" col, 3.
Amoirk (pour auvoiro). Ibid. p. 148, V".
AuvoiRiE. Ordon. des Rois de France, T. V. p. 712.
Aux, suhst. masc. Nom propre de ville. Peut-
être, Ausch ou Aix. Il est mis avec Nîmes et Albi,
dans le dénombrement des villes où l'on battoit
monnoie, dans les Ordon. des Rois de France, T. I,
p. r>48.
Aux, est peut-être ici pour cbasteaux, dont le
Poêle n'a conservé que la finale, afin de racourcir
et trouver la mesure de son vers :
Je les secours je les conforte
Contre désir, qui les assaut,
Et fait maint doloreux assaut :
Je leur .... aux el forteresse.
Slachaut, MS. fol. 29, R" col. 1.
Auxentit. L'auteur du Gloss. du Roman de la
Rose, au vers 379 du Test, de J. de Meung, croit
que ce mot signitie : esteignit, dissipa. Il me paroist
plus simple de corriger le texte, et de lire: «Jixm/i/.
Voici les vers où il se trouve, et dans lesquels il est
parlé de la rédemption du genre humain par le
sang de N. S. :
Précieux sang decurant
Qui amortit mort et mourant,
Qui auxentit pleurs en plourant.
i. de Meung, Test. 377-379.
Auxiliateur, subst. masc. Qui donne du se-
cours. {Voy. le Dict. de Cotgrave.)
Auxilintion, subsL fém. Secours, aide, assis-
tance. (Voy. les Mém. de Sully, T. l.\, p. 17.)
Auxpete, s!/fcs^ /■!!'»). Inquiétude, perplexiié. « Il
« vivra toujours en crainte, et ne sera jamais sans
« aujcpete, et sans ennuveux soucy. » (Du A'erdier,
Biblioth. à l'art, de J. de'Rely, p. 752.)
Auwan. En cette année.
Sire, jou ne dirai auv'aii
K'avielles soie, ne ja siens
Ne serai mais, si cou j'entens.
Poét. anonyme au MS. du Valic. n° U90.
Jà ne perdrai marcées ne foire
Là ùjou puisse mais moan...
Gaaignerai moan assés.
Roi Guillaume, p. 119.
Avable, adj. Convenable. - Toutes les choses
« profitables, arables et nécessaires. » (Gloss. de
l'Hist. de Bretagne.)
Si est mentir souvent avabte
Car mentir, .lucune seson
Donc bien colar à reson.
Fabl. MSS. du U. n- 7218, fol. 280, R* col. i.
Avable, adj. ITahile, capable. Convenable.
Dans le premier sens d'habile, capable, ce mot
semble le même que able; on lit en ce sens ^ avons
« habileté et vendeurs avables, à trùiiers, etc. »
(Ord. T. V, p. 271.)
Dans la seconde acception de convenable, avable
vient du verbe avoir ; il a été employé pour signifier
ce que l'on doit avoir, ce qui est convenable.
« Toutes les choses prohtables, avables et néces-
« saires. » (Gloss. de l'Hist. de Bretagne, p. 077.)
Avachi, «f/y. Flasque, pendant. On disoit: les
oreilles avachies. Ce mot existe encore.
Avachir, verbe. Rendre lâche, paresseux, pol-
tron. (Dict. de Borel, Monet, Oudin et Cotgrave.)
« Jamais la coutume n'auroit vaincu la nature,
« elle est invincible; mais nous avons empoisonné
« noslre jugement par les délices, la molesse, l'oisi-
" vêlé, la paresse, la lâcheté; nous l'avons encore
« avachy, l'oignant, l'huilant et tlattant de folles
« opinions, et de mauvaises mœurs. » (Essais de
Montaigne, T. I, p. 420.) On diroit aussi s'avachir
pour devenir lâche, etc.
Avail, subst. masc. Chèvre sauvage. (Dict. d'Ou-
din et de Cotgrave.)
Ava'i'leable, adj. Valable. (Voy. les Tenures de
Littleton, fol. 119.)
Availlon, sh/)S^ 7nasc. Espèce de poisson armé.
(Dict. d'Oudin et de Cotgrave.)
Avaindre, verbe. Aveindre, tirer dehors. —
Attaindre.
Sur le premier sens, voyez les Dict. de Monet,
Mcot et Cotgrave, au mot avaindre et les Vigil. de
Ch. vu (T. 1, p. 78.) On disoit aussi aveindre et
avaindre pour atteindre. (Voy. les Dictionnaires
ci-dessus cités.)
Sera mis hault, ou nul ne peut aveindre.
Les Marg. delà Marg. fol. 162, R*.
VAHIA>'TES :
AVAINDRE. Monet, Nicot, Dict.
Aveindre. Essais Je Montaigne, T. II, page 450.
Avaine (1), subst. fém. Avoine. Ce mol. qui
subsiste sans avoir même essuyé de grands chan-
gements dans son orthographe, a donné lieu ii
diverses façons de parler, que nous placerons ici :
1" Piquer Vaveine, pour être en sentinelle, atten-
dre. (Des Ace. Bigar. liv. IV, fol. 15.)
2° Escouter à l'avoine (1), pour perdre son temps.
(Voy. le MS. de la Bibl. du R. ir 8053, fol. 18.)
3° Je n'ay riens emblé, tout mon argent est en
avoyne. Equivo(iue de emblé avec en bled.
4° Gaingnier l'avoine se trouve dans une pièce
de vers d'Eust. Deschamps, où celui qui parle dit
ce qu'il feroit s'il étoit à cheval :
J'osteroie ma selle.
Pour dormir en blanche litière,
Tourneroie avant et arrière,
(1) C'est encore la proronciation de l'Ouest de la France: e long en patois normand devient d, et non oi, comme ea
français, (n. e.) - (2) On dit encore: « Escouter les avoines à lever. » (n. e.)
AV
- 329 —
AV
Pour Vai'oine, mademoiselle
Gaingnier, et avoir le gré d'elle.
Eusl. Deschanips, Poi-s. MSS. fol. 439, col. 2.
5° Jouer à l'avainne, se trouve dans Froissart,
Poës. MSS. p. 86, col. 2.
Jutons nous au Roy qui ne ment (1),
A Vavainne, et aux reponniaux.
Mais nous n'osons assurer que le mot avainne
doive ici s'entendre dans le sens d'avoine.
6° Avoijne du bois étoit le droit que l'on nommoit
aulremenl avenage. (Voy. Pithou, sur la Cout.de
Troyes, p. 354, et le mot avenage ci-après.)
VARIANTES :
AVAINE. Duchesne, Gén. de Eéth. Pr. p. 16-2 ; tit. de 1267.
AvEiNE. Robert Estienne, Gram. fr. p. 107.
Avainne. Froissart, poës. MSS. page 86, col. 2.
AvoYNE. Test, de Palh. page 138.
Avoine. Orth. subsist.
AvONE. Notice du Rom. d'Alex, fol. 83.
A\a.l, préposition Au long; dans; parmi; des-
sous. (Voy. le Gloss. de l'Hist. de Paris, et celui du
Rom. de la Rose, le Gloss. de Marot, les Diction-
naires d'Oudin et de Cotgrave, au mot aval.) Nous
avons dit qu'ainont et aval signifioient le haut et le
bas des mots 7nont et val, vallée. De là, le sens de
ces mots aval, avaux, etc.
Il est même facile de sentir que cette préposition
est composée de l'article à et du mot val, qu'on
emploie, tantôt au singulier, tantôt au pluriel.
Insensiblement le mot aval s'estemployé en général,
pour dans, parmi; ainsi on disoit :
laissiez
Vos aigniaux paistre
Aval les prez.
Poet. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1431.
« Tout le monde esloit aval les champs. » (Chron.
deS'Denys, T. 1, fol. 131.)
Cette expression : nos Baillis d'amont et d'aval,
qui se trouve au Coût. gén. T. I, page 868, signifie
des pays d'en haut et d'en bas.
On disoit aussi :
1° Avaux Van, dans le cours de l'année. (Fav.
Th. d'honn.)
2° En aval, au-dessous : « Que nuls prevosts ne
« taxent, amende en leur jugementque de sept sols
« en aval. « (Etat des Ofî. du D. de Bourg.)
3° Amor d'aval semble signifier : amour mal reçu,
maltraité, ou peut être l'amour profane, opposé à
l'amour de Dieu :
Dex, se je pooie coiUir
Dou fruit nieur de vos amer,
Si con vos m'avés fait sentir
L'amor d'aval, et comparer:
Lors porroie saoler,
Et venir à repentement.
Thibaut de Navarre, poês. MSS.
4* Descendre aval, par une sorte de pléonasme,
descendre en bas. (Du Cange, Gloss. latin, au mot
Avalare.)
5' Aval le poing, ou aval poing, au poing, sur le
poing, s'employoit en langage de fauconnerie. (Voy.
Gace de la Bigne des Déduits, .vs. fol. 5.)
6° Aval lèvent, au-dessus du vent. (Modus et
Racio, Ms. fol. 83.)
VARIANTES ."
AVAL. Glossaire de Marot et de l'Hist. de Paris.
AvAU. Dictionnaire d'Oudin.
AviAU. Fabliaux, MS. du R. n» 7218, fol. 287.
AvAUX. Favin, Th. d'honn. T. I, page 39.
Avalaige, subst. masc. Pente douce, chemin
pour descendre : « On ne peut pour ceste heure,
« aultre chose sur les ennemis, et, pour le traict à
« poudre, le dict comte et .lacques se retirent en un
« avalaige. « (Lett. du D. du Bourg, au sieur Dufay,
page 363.)
Avalange, subst. fém. Qui descend avec impé-
tuosité. Substantif formé du mot Aval et qui s'ap-
plique dans quelques pays aux chutes de neiges, ou
aux pelotons de neige qiii, en croulant du haut des
montagnes, deviennent d'une grosseur prodigieuse.
(Dict. de Cotgrave et Du Cange, Gloss. lat. au mot
lavanchia.) Dans les Alpes, on dit lavange, qu'on
verra ci-après. Dans d'autres pays, il signifie une
chute impétueuse qui vient des grosses pluies. (Du
Cange, Gloss. latin au mot Eslavcidium.) On dit en
ce sens, avalasse (2) en Normandie, et availles à
Dombes.
On prenoit aussi les mots avalée et avalison pour
la foule des poissons, qui, emportés par les crues
des eaux, tombent dans les nasses préparées pour
les prendre. (Voy. Du Cange, Glossaire latin, au
mot advaleia, et au mot avalison sous avalare.)
VARIANTES :
AV.^LANGE. Du Cange, Glossaire latin, au mot Lavanchia.
Avalanche. Dict. de Cotgrave.
AvALLANUHE. Oudin, Cotgrave.
Av.i^LisoN. Du C. Gloss. lat. au mot Avaliso)i sous Avalare.
Avallasse. Oudin, Cotgrave.
Avalée. Du Cange, Glossaire latin, au mot Advaleia.
Availles (plur.) Il)id. au mot Eslaveidium.
Avalant, participe actif. Descendant. De là,
l'expression en avalant pour au-dessous : « Milles
« lettres des cent livres en amont, ne montent point
" en avalant que h \ingtso\s. » (Etat des Offic. des
Ducs de Bourgogne, p. 306.)
Avalé (3), participe passif. Descendu, abaissé,
pendant. Baissé, diminué. Voyez, sur le premier
sens, le Glossaire de Marot, au mot avallée :
Femme au chaperon avalé,
Qui va les crucifi.x rongeans
C'est signe qu'elle a estallé,
Et dutrefoys, hanté marchans.
Coquillart, p. 30.
« Bragues avalades. » (Rabelais, T. III, p. 39.)
<> Les cheveux nonchallemment avallés. » (Dict. de
Cotgrave. — Voy. aussi le Dict. d'Oudin.)
Avalée est épithète de nourrice, dans Coquillard.
(1) On lit dans les instructions du chevalier de La Tour à ses filles : « Il advint une fois que beaucoup de chevaliers et de
dames jouoyent au roy qui ne ment, pour dire vérité du nom de s'amie. » (n. e.) — (2) Avalasse et avalaison se disent
non-seulement des torrents d'eau, mais des pierres qu'ils entraînent. Avalasse est en terme de marine un vent d'aval
continu, (n. e.) - (3) Dans la Chanson de Roland, strophe 79 ; « Si comme il put, du pin est avalet. s (N. e.)
II. 42
AV
— 330
AV
« Couroit à bride avallée, » c'est-à-dire à bride
abattue. (Voyez l'Amant ressuscité, page 213, et
Crétin, page 154.)
On disoit avalé pour baissé, diminué, extension
de l'action précédente : « Lesquelles denrées deus-
« sent estre descheues, et avalées de prix. » (Ord.
des R. de Fr. T. II, page 49.)
VARIANTES :
AVALÉ. Coquillart, page 30.
Av.\LLÉ. L'amant ressuscité, page 213.
AvALADE. Rabelais, T. III, page 39.
Avaler, verbe. Descendre. — Abaisser. —
Abattre. — Annuller. — Déposer.
Toutes ces significations viennent de celle du mot
aval, qui signifie en bas.
La pi'emière de ces acceptions, est rapportée
dans !e Glossaire du P. Martène; on trouve aussi en
ce seus : « Yindrenl en avalant le mont. » (Chron.
de S' Denys, T. II, fol. 175.)
En ung val ou j'avallay.
Poés. d'Al.' Chartier, p. 60i.
Pour abaisser : » Les autres se haussent, et
« avalenl, selon le haussement et abaissement de
« la monnoie. » (Ord. des R. de Fr.T. III, page 43.)
« Destacha ses chausses.... et les avalla sur les
« genoux. .1 (Petit Jehan de Saintré, page 631.)
En parlant d'un pont levis, on a dit :
Le portier seul ne pouvoit pas
Aisiément le pont avaller.
Vijil. de Charles VII, page 8.
Avaler pique signifioit donc baisser la pique, la
présenter pour en frapper. Cette expression se
trouve dans la Coût, de Hainaut. (Nouv. Coût. Gén.
T. II, page GO.)
Ce mot a été employé pour abattre, dans les pas-
sages suivans : « Vouloit luy avaller la teste. »
(Rabelais, T. II, p. '242.) « Ez aullres demolloit les
« reins, avalloit le nez, poschoit les yeulx. » (Id.
T. I, p. 193.) « Avalloit en taille ronde, » terme
usité dans l'ancien combat de la hache d'armes.
(Ibid. p. 103.) On disoit dans ce même sens, avaler
pour abattre. « Un homme de cheval l'alla saisir au
« corps, et Vavalla. » (Essais de Montaigne, T. III,
page 234.)
Dans le sens de casser, annuler, on lit : « Avaller
" le second mariage. "(Lettresde Louis XII, T. I, p. 69.)
Enfin avaller signifie déposer, serrer au fond
d'un chartrier, dans le passage suivant : » Seront
« toutes personnes de loy, sortissantes au dit chef-
« lieu de Mons, tenues de mettre, el avaller en leur
« forme les chirographes, et escrits des besongne-
« mens faicts, et cogneuz par devant eux. » (Coût,
de Mons, au Nouv. Coût. Gén. T. I, p. 829.)
VARIANTES :
AV.\LER. Glossaire du P. Martene.
Avaller. Glossaire des Arrêts d'Amour.
Avalir, verbe. Disparoître. Avalirea Languedoc,
signifioit se perdre et disparoitre. (Le Duchat, notes
sur Rabelais, T. V, prol. page V, note 3.)
Avalisque satanas. C'est le vade rétro Sala-
rias de Scarron, dans sa comédie de l'Héritier
ridicule. (Voy. le Dict. de Cotgrave.) Cavalische est
une interjection fréquente dans le patois de
Languedoc.
Avallées, subst. féin. plur. Descente de la
gamme en chantant. (Gloss. latin de Du Gange, au
mot Avalare.) 11 est employé pour signifier des
sons bas, et opposés à destraignans, sons poussés
avec force, sons éclatans. (Ovide de Arte, ms. de
S'Germ. fol. 97, R- col. 1.)
Avallement, subst. musc. Action de descen-
dre. — Action d'abaisser. — Action d'avaler,
d'engloutir.
Ce mot, dans S' Bernard, répond au latin descen-
sus.
VARIANTES :
AVALLEMENT. Dictionnaire d'Oudin.
AvALEMENT. S' Bernard, Serm. fr. MSS. page 92.
Av.\LLEMANT. Dictionnaire de Monet.
Avaller, verbe. Engloutir. Ce mot subsiste en
ce sens; on disoit autrefois :
1° Avaller sans mascher pour en passer par là,
sans rien dire. Dans la Farce de Pathelin, où le
marchand fait une confusion perpétuelle de ses
brebis et de son drap, le juge lui dit :
Laissez en paix cest accessoire,
Et venons au principal.
Le drapier répond :
Monseigneur, mais le cas me touche;
Toutes fois, par ma foy, ma bouche
Meshuy un seul mot n'en dira ;
Une autrefois il en yra,
Ainsi qu'il en pourra aller :
Il le me convient avaller sans mascher.
Pathelin, Farce, p. 87.
2° Avalle:^, ce sont herbes. Façon de parler pro-
verbiale en usage en Languedoc et en Dauphiné,
dont on se sert avec les malades qui répugnent à
boire une potion trouble. (Le Duchat sur Rabelais,
T. I, p. 30, note 45.)
Avalleur, subst. masc. Qui avale. Remarquons
ces expressions proverbiales :
1° Avalleur de frimats, fainéant. (Dict. d'Oudin,
de Cotgrave, et Oudin, Cur. franc.)
2° Avalleur de pois gris , c'est-à-dire gourmand,
glouton (1). (Dict. de Cotgrave, Oudin, Dict. et Cur. fr.)
Avalloiiere, subst. fém. Avaloire, gosier.
(Dict. de Cotgrave, au mot Avallouere.) On lit
avalouere dans les Ord. des R. de Fr. (T. II, p. 371.)
VARIANTES :
AVALLOUERE. Cotgrave.
Avalouere. Ord. T. II, p. 371.
Avaloire, subst. fém. Sorte de harnais. C'est là
partie du harnais qui sert au cheval de timon pour
retenir la charge. Ce mot subsiste en Normandie, en
parlant des chevaux de charrette. On le trouve, en
(1) On dit encore avaleur de charrettes ferrées, potir rodomont, fanfaron, (n. e.)
AV
331 —
AV
ce sens, dans les Fabl. mss. du R. (n» 7615, T. II,
fol. 212, R° col. 1.)
Avaloirs, subst. masc. Engins à pêcher. Sur la
rivière de Loire, ce sont les nasses où l'on prend
les poissons. (Du Gange, Gloss. lat. au moi Avalerio.
— Voy. Av.\LÉE et AvALisoN sous AvALANGK ci-dessus.)
Avalois, subst. masc. Nom de peuple. Peut-être
les peuples des Pays-Bas qui, autrefois, ont été
nommés terre d'aval, ou aval terre : « Le Roy
« d'Angleterre étoil si riche homme qu'il avoit tous
« les Àvalois, et les bouchiers avec luy par son
ec grant avoir, et par cecy endommageoit moult le
« Royaume de France. » (Chron. de Flandre citée
par Du Gange, Glossaire latin, au mot Avalterrœ.)
Normant, Breton, vindrent voirement,
Et Avalais, Flamenc, et Lohéranc.
Rom. de Garin, cité par Du Gange, Glossaire latin.
On trouve dans le même Glossaire beaucoup
d'autres citations (1). (Voyez au mot Theotisci, ibid.
— Voyez aussi le mot Aval.)
Avaloison, subst. fém. L'action de frapper de
haut en bas. De là, on disoit frapper à gi'wnz ava-
loisons. (G. Guiart, ms. fol. 348, V°.)
Avalon, subst. masc. Fruit. — Nom propre de
ville.
Dans le premier sens, c'est un ancien mot gaulois
et breton, selon Valois (2). (Notice des Gaules, p. 1.)
Avalon est aussi le nom d'une ville en Rourgogne ;
« Ces allusions que l'on a fait par forme de pro-
« verbe, il y a plus de six vingts ans, sur les villes
« de Bourgogne, qu'aucuns trouvent assez corres-
« pondantes aux mœurs ; Avalon, avale, grand
« gosier d'at>rt/o/i. » (Des Accords, Bigarr. p. 91.)
Avalterre, subst, férii. Les Pays-Bas. (Voyez
Du Gange, Glossaire latin, au mot Avalterrœ. —
Voyez Aval et Avalois (3).)
Avaluation, subst. fém. Evaluation. (Voyez le
Dict. de Gotgrave.)
variantes !
AVALUATION. Gotgrave, Dict.
Advaluation. Ibid.
Avalueinent, subst. masc. Evaluation. —
Diminution.
Ce mot est employé avec la signification d'éva-
luation, dans le Glossaire de l'Histoire de Paris, au
mot Avaluement dans les Ord. des Rois de France,
T. I, p. 018, etc., et le Coût. gén. T. II, p. 408. En
ce sens, avaluement vient de valeur, prix.
On a dit aussi avaluement pour signifier dimi-
nution, et l'on a mis ce mot en opposition avec
« crue, ou avaluement de deux solz pour sextier,
« le pain ne croistra, ne appetissera. » (Ord. des
Rois de France, T. V, p. 555.) En ce sens, avalue-
ment vient d'avaler, baisser.
variantes :
AVALUEMENT. Ord. T. I, p. 4i7.
Advaluement. Glossaire de l'Histoire de Paris.
Avaluer, verbe. Evaluer, apprécier. Diminuer.
Dans le premier sens d'évaluer, ce verbe est
formé du mot valeur, prix. Voyez sur cette acception
les Dictionnaires de Nicot, Monet, Gotgrave.
Quand ce mot vient d'avaler, il signifie baisser,
diminuer ; il est mis en opposition avec monter,
augmenter, dans ce passage : « Faire pain de
« certain pris, selon ce que le pris du blé avalueroit
« ou monteroit en plain marcbié. » (Ord. des Rois
de France, T. V, p. 553. — Voyez Avaluement.)
VARIANTES :
AVALUER. Monet, Nicot, Dict.
Advaluer. Gotgrave, Dict.
AvALLUER. Oudin, Dict.
Avalué, participe. Evalué , apprécié. — Rendu
valable, confirmé.
Dans le sens d'évalué, on a dit: « Ez lieux où
« l'en ne met pas le vin en tonneau , il sera avalué
« selon le tonneau. « (Ord. des Rois de France,
T. I, note, p. 783.) « Pour ceo le fait sera entendu,
« et pris pour le pluis ndvantage, et availé pour ce
» puis estre pris. » (Ten. de Littleton, fol. 123.)
On a employé aussi avalué pour rendu valable,
confirmé: « Les Rois dessus dits seront tenus de
'< faire confirmer toutes les choses dessus dites,
« par nostre Sainct Père le Paspe, et seront icelles
« avaluées par serment, sentences et censures de
« court de Rome, et par tous autres lieus, en la
« plus forte manière que faire se pourra. » (Frois-
sart, livre I, page 341.)
VARIANTES :
AVALUÉ. Ord. T. I, p. 783.
AvAiLÉ. Tenures de Littleton, fol. 123, V».
Avance, subst. fém. Préférence, supériorité,
avantage. — Reste.
On disoit dans le premier sens: « Qui vous ayent
« fait bailler l'avance, » c'est-à-dire qui aient fait
donner la préférence sur vous.
Or, je VOUS demande, beau Sire,
Si la Dame, ou estiez submis,
Vous a brassé si dur martire,
Que secours n'y puisse estre mis,
Y avoit-il nul compromis
Entre vous deux, et alliance ?
Ou s'ele avoit nulz autres amys,
Qui vous ayent fait bailler l'avance.
L'Amant rendu Cordelier, p. 515 et 516.
Avance signifioit aussi le reste :
Et sitost que le forchn faut
A la cuirée sans delîaut
Retournent pour mangier Vatmnce.
Fontaine Guérin, Trésor do Vénerie, MS. fol. 53.
Avancement, subst. masc. Supériorité, avan-
tage. — Aide, assistance. — Ce qui est donné en
avance.
(i) Elles sont même plus probantes; on lit au Miserere du Reclus de Moliens : « Ainsi font tout Estrelinois ; Et li Escot et
h Danois, Thyoïs, Braibant et Aimlois Tiennent des Estrelins les lois. » (N. E.) - (2) Avalou signifie en effet, en bas-breton,
des pommes ; mais i\ n'y a pas de rapprochement à faire. Avnllon est en latin Aballo. (N. E.) - (3) On trouve aussi, dans les
Chroniques de Saint-Denis (Dom Bouquet, t. VII, p. 136), la forme avauterre. (n. e.)
AV
— 332 —
AV
Dans le sens d'avantage, on a dit: « Un chevalier
« avoit un compagnon qui avoitrtiiflnfCJ?if«< devant
« luy, estant estimé et honoré du Roy, et des sei-
« gneui s dont il prit envie, et haine contre ce com-
" pagnon, et le tua. » (Olivier de la Marche, Gage
de Bataille, fol. 8.)
On a employé ce mol dans le sens d'aide, assis-
lance : « Quand un serviteur despril sa maîtresse,
•• ou dit mal de ceux dont il doil n\oiv avaiicement,
« il doit estre réputé infâme. « (Arrest. Amor. p. 389.)
Nous disons encore avancement d'hoirie pour ce
qui est donné en avance d'une succession. On disoit
aussi avancement, de mariage : «< Puisque dict ay
« des douaires appartenans aux dames, ou damoi-
« selles, pour cause des fiefs, et nobles Tenemens,
« il s'ensuit dire , et montrer des assennes ou
« avance7nens des mariages sur terres non nobles,
>• et tenure de main ferme. >>(Bout. Som.rur. p.5G3.)
VARIANTES :
AVANCEMENT. Bouteiller, Somme rurale, p. 5râ.
Advancement. Bouteiller, Somme rurale, p. 556.
Avancer, verbe. Devancer, prévenir. — Mettre
en avant, avancer. — Faire avancer. — S'ingérei',
s'aviser. — Se charger. — Se hâter. — Surpasser.
— Aider, assister, avantager. — Augmenter. —
Préférer.
Dans le sens de devancer, de prévenir, on a dit :
« Se mort ne m'avance, ou as folure de membres. »
(Perccf. Vol. I, fol. 127.) On lit dans un autre pas-
sage du même auteur : « Se mort ne m'adevance. »
(Vol. I, fol. P20.) « Pour advancer ceux qui s'en-
« fuyoienl, montèrent à cheval. » (Monslrelet,
Vol. m, fol. 57, Y".)
Pour mettre en avant, on a dit :
En désespérance
Ne doit estra qui loiautez avance.
Poël. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1460.
Ce mot a signifié faire avancer, faire marcher :
« Ne faites point la beste, si vous estes sage, que je
" ne vous avance bien de ce baston. » (Gymbalum
mundi, p. l'i'i.)
Dans le sens de s'ingérer, de s'aviser, on a dit :
« S'avança de luy dire, avant ce que l'escuyer en
« parlast. « (Ger. de Nevers, ii' partie, page 52.)
L'éditeur l'explique par s'avisa de Imj dire, etc.
Ce mot a été employé pour se charger, dans le
passage suivant; « AvanceX' vous de moy faire
« avoir une nef, car, à toutes fins, je veulx aller
« celle part. .. (Percef. Vol. IV, fol. 15, R" col. 1.)
On a dit dans le sens de se hâter: « ,I'ai laissé
■< mon cul à la maison et me suis tant advancée,
« que je suis ici venue sans mon cul. » (Bouchet,
Sérées, Liv. 111, p. 65.)
On a employé ce mot dans le sens de surpasser.
Les Italiens disent Avan::,are dans le même sens :
A la dame qui toz les biens avance.
Poet. MSS. «vani 1300, T. I, p. 142.
On trouve ce mot employé pour aider, assister,
donner quelque avanlage, dans les vers suivants :
Me sot Simon cuer embler
Ke, se pitiés ne m'avance,
Siens, sans prendre, et sans quiter,
Me rent, et sans délivrer.
Poét. MSS. avant 1300, T. III, p. 998.
Ce mol signifie donner quelque avantage, dans
ce passage : « Deux conjoincts par mariage ne
« peuvent, directement, ne indirectement, advan-
« cliier l'un l'autre. » (Goût. gén. T. 1, p. 768.)
C'est notre mol avantager.
Avance signifie augmenter, dans ce vers :
Ma douleur croit, et avance.
Les Marij. de la Marj. fol. 220, Rv
Enfin ce mol signifioit préférer, donner l'avan-
tage : « De tant qu'il y auroil vers elle plusieurs
« requerans, et serviteurs, qu'elle Vavanceroit et
« aynieroit encores mieulx par dessus tous les
« autres, de tant auroit-il plus de bien. » (^Arresta
Amorum, p. 115.)
Remarquons que le mot avanger dans le sens
d'avancer est particulier, suivant Le Duchat, à la
Basse-Normandie, à l'Anjou et au Maine.
PROVERBES :
On disoit proverbialement : mal œuvre qui ne
s'advance. (Percef. Vol. I, fol. 34.)
Tel Guide avancier qui reculs.
Fabl. MSS. du R. n- 7-218, fol. E29, V col. 1.
CONJUG.
Avanci, passé défini. Prévint, devan^'a.
Li dus en ot, ire, et annui ;
Son frère de guerre avanci.
Ph. Mrmskes, MS. p. 411.
Avancissent, subj. prés. Prévinssent. (Règle de
S' Benoit, lat. fr. ms. de Beauvais, ch. 37.)
Avant, ind. prés. Avance.
Diex vous avant.
Fabl. MSS. du R. n' 7218, fol. 67, V col. S.
VARIANTES :
AVANCER. Orthographe subsist.
Adev.\ncer. Perceforest, Vol. I, fol. 12G, R" col. 1.
Advancer. Ibid. Vol. IV, fol. 47, V» col. 2.
Advanchier. Coul. gén. T. I, p. 7GS.
AvANCHiER. Ord. T. I, p. 437, note, col. 1.
Avancier. Beaumanoir, p. 9.
AvANGER. Rabelais, T. II, p. 159.
AvENGiER. Ph. Mouskes, MS. p. 200.
Avencier. Fontaine Guérin, Trésor de Vénerie, p. 49.
Avaiiceur, subst. masc. Qui donne d'avance. —
Qui donne des avantages. — Qui avance. — Aggres-
seur, spadassin. — Coureur, découvreur, espion.
Au premier sens, on a employé le mol avanceur,
dans les vers suivants :
Si faictes sçavoir à tous les successeurs,
Que plus ne soient de l'armes avanceurs...
Car sa vertu, et grâce paladine
Rendront ses sens de vie possesseurs
Si j'ay crédit.
Grelin, p. 66.
Ce mol est employé pour qui donne des avan-
tages, dans le passage suivant :
Par eux ont eu l'avancement
Qui de bonté les avanceuva renomme.
Poés. MSS. d'Eusl. Desch. fol. 153, col. 1.
Oii a dit aussi Avenceur pom- qui avance, qui met
en avant sans preuve, menteur :
Diffamateurs, avenceurs, ventereaux.
Œuv. de R. de Collerye, p. 142.
AV
333
AV
Advanceur se disoit aussi pour aggresseur, spa-
dassin, comme en ces vers, où l'on fait parler la
France :
Venise aussi m'a mis ses advanceurs.
Qui de leurs riz d'hostelier m'ont traitée ;
Mais, vu leurs dicts, et manière escontée,
Si quelqu'un veult contre moy son arc tendre,
Tantost seray en armes apprestée.
J. d'Auton, Annal, de Louis XII, page 3-9.
Enfin on nommoit avanceurs ceux qui étoieiit en
avant, les coureurs, découvreurs ou espions. << Si
« avint, par bonne aventure, que les avanceurs
« du dit bastard rencontrèrent les Gandois; le
<■ rapport fait, le bastard de Bourgongne donna
« dedans sans les marchander, et moult en occit et
« prit, y (,Mém. d'Olivier de la Marche.)
VARIANTES ."
AVANCEUR. Crétin, page 66.
Advanckur. j. d'Auton, Ann. de Louis XII, page 329.
AvENCEUR. Roger de Collerye, page 142.
Avanchaye, siibst. masc. Lieu planté d'osiers.
(Dictionnaire dOudin et de Cotgi'ave.)
Avancier, verbe actif. Favoriser, distinguer,
faire prospérer, combler d'honneurs: « Il fu retenus
« dou plus secret conseil le roi et moult avancés
« en sa court. » (l'roissart, 1.1. II, 308.)
Faire avancer, au propre: « Monseigneur, se il
« vous plaist, n'avanchés ce varlet. » (Froissart,
VII, 30.-).)
Au sens actuel, on le trouve dès le xir siècle:
« Monjoie escrient, chascuns forment s'avance. »
Au rétléchi, il signilie se mettre en avant (Frois.,
II, 45), se montrer'favorable (II, 40-2), s'entremettre
(V, 104); s'offrir, s'empresser (VI, 203); se hûter
(XI, 296); prospérer (II, 293); se faire fort (XV, 352).
Ce mot a aussi le sens de prématuré (XVI, 1%) ou
distingué (XVI, 211).
Avanczon, siibst. masc. Avance, éminence.
Partie avancée , comme le bout de la brayette :
« Avoir ez bragues brayer de toile, o avancx-on
« garni de boucles et ardillons. » (Glossaire de
l'histoire de Bretagne.)
Avani, participe. Diffamé, avili. « Son droict
« n'est amoindry ne son honneur avanie. » (Ord.
de Ph. le Bel sur les Duels, rapportée par Basiiage
sur les duels, page 171.)
Avanies (\), siibst. fém. plur. Extorsions. « Ne
•< seront payées nulles extorsions, fouages, et Bre-
« vêts, ne autres «oaHifîs quelconques. «(Glossaire
sur l'histoire de Bretagne.) Ce mot paroit signifier
plutôt dommages ou avaries.
Avant, adj. Entreprenant. Ce mot, qui paroit
venir du verbe avancer, se trouve dans le sens que
nous lui donnons, en ce passage :
Li premiers est uns chevaliers
Preuz, et hardiz, et bien ava>if.
Fabl. MSS. du R. n' 7615, T. II, fol. 133, V col. 1. |
Avant, adverbe. Ci-après. — Plus. — Devant et
ci-dt ant. — Plutôt. — Avec. — Ça, vite.
Da..s le sens de ci-après. (Voy. Borel, Dict.)
Ce mot est employé pour plus, davantage, dans
les vers suivans :
Sans mettre y vostre estudie.
Vous eus avés là, et avant.
Poès. MSS. de Froissart, p. 139, col. 1.
Ce mot a aussi signifié cij-devant, par le passé ;
avant dit pour d'ici devant :
M'en proiates vos avant.
Pots. MSS. avant 1300, T. III, p. 1359.
On trouve ce mot employé pour plutôt, préféra-
blement, dans le passage suivant : « Ce marché ne
« feroye-je jamais, je la mariroye avant en Angle-
« terre. » (Froissart, livre III, p. 325.)
Avant est employé pour avec, dans le passage
suivant : « Il prit trois prisonniers de ses Capitai-
•< nés, scavoir des principaux, lesquels il emmena
« avant luy en son pays. » (Mathieu de Coucy,
Ilist. de Charles VII, p. 690.) On lit à la marge avec.
Cette façon de parler est en usage parmi le peuple
en Normandie, mais le mot avant n'y signifie pas
proprement avec. On dit: « Faites cela «vah^ vous, »
comme si l'on disoit: faites marcher cet ouvrage,
cette besogne devant vous.
Enfin ara/(isigninoitçavite. « Un chanoine ayant
« caché les clefs de la Ville, et ayant été rencontré
« par ceux qui le cherchoient, ils luy disent :
« avant prestrc rendez les clefs. « (Ilist. de Loys
III, duc de Bourb. pages 1 16 et 147.)
On disoit aussi :
1° Le plus avant, pour le plus vivement. « L'as-
« siégea le plus avant qu'il puet. » (Froissart,
livre I, page 112.)
2° En avant, c'est-à-dire davantage, plus.
Or voi je bien qu'en avant ne vivrai.
Poët. MSS. avant 1300, T. IV, p. U70.
3° Ne pouvoir en avant, c'est-à-dire ne le pouvoir
plus, ne le pouvoir d'avantage :
Uui ne s'aquitera, moult sera mescheant,
Fox est qui tant enprunte, fjui ne puet en avant,
Chante pleure.
MS. de s. Germ. fol. 103, Y* col. 3.
i" Avant que, c'est-à-dire: avant, avant queli;
avant lui. (Vie d'Isabelle, à la suile de Joinville,
p. Ml.) Avant çH^sa femme, pour: avantsa femme.
(Ord. des R. de Fr. T. I, p. 122.) Avant que moy,
c'est-à-dire: avant moi. (J. Marot, p. 215.) J. de
Meung avoit dit en faisant le portrait d'une jeune
et jolie personne:
Les yeulx
Qui ryoient toujours avant
Que la bouche, le plus souvent.
Rom. de la Rose, vers 8601-8603.
5" Tôt OU tout avant, c'est-à-dire : d'abord,
avant tout, préférablement.
Car raoi, non li lot avant.
Se cueur avoie envers li de fausser.
Poèt. MSS. aiant 1300, T. I, p. 180.
(1) De l'arabe kotiàn, mépris, en grec moderne dSavîa. (n. e.)
AV
— 334 —
AV
Et se j'en suis pafjurs a esciant,
L'en me devroit trahiner lot avant,
Et puis pendre plus haut qu'autre clochier.
Poiis. MSS. avaut 1300, T. I, p. 206.
Aussi avant, pour: autant. (Duchesne Gén. de
Gaines, p. 291 ; lit. de 12(50.)
Aussi avant, pour: autant que. (Duchesne, Gén.
de Bétiiune, p. 383 ; tit. de 1259.)
6° 7oH^rt!<ss/ava/i/, c'est-à-dire avec autantd'éten-
due. <> Li dit Maires et Eskevin ont et doivent avoir
« par dedens clies bournes, semonces, ajourne-
<■ mens, bourneries, la connoissance, le jufijement,
« l'exécution, et le pourfit de toutes manières de
<i prinses faites dedens ches bournes, desmelées
« tout aussi avant comme ils ont, et usent, ou
« pueent avoir en touz les biens de leur banllieue. »
(Ord. des Rois de France, T. III, p. 294.)
7° Aussi et plus avant, c'est-à-dire: autant et
plus. Les Flamans, voulant engager leur Comte à
épouser la fille du Roy d'Angleterre, disoient
qu'ils: « ly rendroient et livreroyent toutes ses
« justices, et juridictions, et les droitures de Flan-
0 dres, aussi et plus avant que nul Comte ne les
« avoit oncques eues. « (Froissart, Liv. I, p. 102.)
8° Aussi avant, c'est-à-dire: autant. « L'enfant
« bastard succède es biens délaissez par sa mère,
« aussi avant que s'il esloit légitime. » (Coût, de
Lessines au Nouv. Coût. Gén. T. II, p. 2G.)
9° Si avant, c'est-à-dire: tant. « A donc luy
« racompta le sire de Beaumont toutes les nouvelles
« si avant qu'il les sceut. « (Froissart, Liv. I,
p. 23.)
10" Si avant que, c'est-à-dire: d'autant que et
tant que. Parlant des registres que les greffiers
doivent tenir. « A sçavoir celuy des causes qui se-
« ront présentées, et expédiées au Rolle, lequel
« renouvellera tous les ans, à commencer au pre-
« miers plaids, et Rolles qui se tiendront après les
« grandes vacances de chacune année, et si avant
« que, pour le grand nombre de causes, un seul
« registre ne suffiroit, en seront faits deux, et
« renouveliez de deniy à d'autre. » (Coût, de
Hainault, au Nouv. Coût. Gén. T. II, p. 108.)
Si avant que pour tant que, se trouve dans
Percef. (Vol. II, fol. 61.)
Il" Avant et arrière, c'est-à-dire: en tout, partout.
Parlant du privilège que Chilpéric donna àl'Evéque
de Tournay, Mous'kes a dit :
Et de luy tient on la majere
I C'on prent, et avant et arriére
Et si leur donna la justice,
Dont la Signorie et moult rice.
Ph. Mouskes, MSS. p. 33.
12° Avant n'arriére, c'est-à-dire : nulle part, nul-
lement, point du tout.
Cherchié n'avoit, avant 7i'arrière.
Pocs. MSS. d'Eust. Desch. fol. 565, col. 2.
L'autre n'y yint, ne avant ne arrière.
Ibid. fol. 138, eol.l.
13' Une heure avant et l'autre arrière, c'est-à-
dire : tantôt d'un côté et tantôt de l'autre. « Hector
« chevaucha parmy le pays, une heure avant et
« l'autre arrière, et tant que l'adventure le mena
» à l'hermitage oîi Lancelot estoit. • (Lanc. du
Lac.) Cette expression se trouve souvent répétée
dans le Récit des Aventures des Chevaliers errans.
1-1" Tout avant œuvre, c'est-à-dire : avant que de
rien commencer. « Ne puisse commander son
« mestier sans parler tout avant œuvre, audit
" maistres, ou son lieutenant. » (Ord. des Rois de
France, T. I, p. 761.) « Sur laquelle supplication
« nous avons voulu estre enformés avant toute
• euvre. » (Ibid. T. III, p. 262.) L'éditeur l'explique
par avant que de décider.
15° Avant âgée, c'est-à-dire: plus âgée :
L'une n'estoit de l'autre avant aarjée.
Crétin, p. 85.
16° Venir avant, c'est-à-dire : avancer, approcher.
Puis li dist que venist avant.
FM. MSS. de S' Germ. fol. 5, V.
Vienne avant et mette soij avant, c'est-à-dire:
qu'il avance. Ces expressions étoient usitées pour
défier quelqu'un au combat. (Ilist. de Loys III, Duc
de Bourbon, p. 185.)
17° Alcr avant sur, pour: poursuivre. « Nous
« vous mandons que, tant que pour le désir que
« nous avons, que les forfaiz de nos mauves officiers
« soient punis et adreciez, avons ordené ceste voie
« qui s'ensuit, laquelle nous vous ajoustonscoment
« vous doiez aler avant sur eux. » (Ord. des Rois
de France, T. I, p. 541.) Aller avant du fait, c'est-
à-dire aller en avant. (Coût, de G. de Tyr Martene,
T. V, col. 727.)
18° Mètre avant, c'est-à-dire: dépenser, avancer.
Por un poi mètre avant, ne se doit repentir
Qar poi de chose fet un dépens embelir.
Fail. MSS. du R. n- 7218, fol. 335, R" col. 2.
19° L'un avant l'autre, comme nous disons l'un
après l'autre.
L'un avant l'autre pars lors noms.
Arch. MS. fol. 54, V- col. 2.
Avant [en), pour: à l'avenir. (Perard, Hist. de
Bourgogne, p. 483 ; tit. de 1255.)
Avantage, subst. masc. Gain, profit, pillage. —
Avance. — Distinction, récompense, gratification.
— Préférence, acception de personnes. — Argent
payé pour égaler un échange. — Avantage, primauté.
Au premier sens, pour gain, profit ou pillage,
on a écrit : « Vindrent AUemans robeurs et pillards,
« qui ne tenoyent, ne faisoyent ne trêve, ne paix ;
« mais vouloyent tousjours aller à l'avantage. »
(Froissart, Liv. III, p. 350.) Avantaige est employé
avec la même signification dans Percef. (Vol. I,
fol. 152.)
Si se cuident faire avantaige
Mais ils font leur cruel dommaige.
Roman de la Rose, vers 7997.
Ce mot a la signification d'avance, dans le pas-
sage suivant: « iCdit au Roy que s'il n'étoit question
« que de l'avantage d'un million d'or, pour faire
« subsister les affaires de sa Majesté, que Beau-
« marchais les trouveroit sur son crédit, et sur
« celuy de ses amis. » (Mém. de Bassomp. T. III»
page 194.)
AV
— 335 —
AV
Ce mot est employé pour grâce, faveur, distinc-
lion, récompense, gratification, dans les citations
suivantes :
Dido la Royne de Cartage
Qui tant luy eut fait d'uvaiUage.
Roman de la Rose, vers 13944-1391G.
« Des récompenses ordinaires qui se donnent
« aux soldats Espagnols, quand ils ont commis
" quelque acte signalé, ce qui s'appelle entre eux
« avantages. » (Discours Politiques et Militaires de
la Noue, p. 3G0.)
Ce même mot est aussi employé pour une autre
sorte de récompense, dans ces vers :
La vint li uns de leurs enfans,
Qui voloit aler à l'escole,
Et demanda à Dame Cole,
Sa mère : ça mon avantage.
Pocs. MSS. de Froissart, p. 289, col. î.
Ce mot est pris pour préférence, acception de
personnes, dans les vers suivans:
Combati soi, puis i moru,
Quar la mort n'a point d'avantage.
Ph. Mouskes, MS. p. 661.
Ce mot a signifié ce qu'on donne de surplus dans
un échange ou marché, pour rendre égal le sort
des deux parties. » De permutation et d'eschange
n passé justice, sans argent, ou aucun avanlarje, il
« n'eschet poinct de rètraict, et donneroit ou de
« l'avantage, ou soulte, il y auroit lieu au rètraict,
« a proportion de la soulte. » (Nouv. Coût. gen.
T. I, p. 1)71, col. 2.)
Enfin nous trouvons dans les poésies (Mss.d'Eust.
Desch. fol. 391, col. 3), le mot avantaige pour
signifier : primauté, en parlant du jeu.
Citons les expressions suivantes :
1° D'avantage, c'est-à-dire d'avance, tout d'abord,
de prime abord. « Les Anglois ne pouvoyent aller
« à eux, qu'ils ne fussent tous morts ou prins
« d'avantage. « (Froissart, Liv. I, p. 21.)
2° A l'avantage , c'est-à-dire avantageusement,
relativement au prix de la chose, ou relativement à
la chose, ou peut-être à l'envi. « Qui est celuy,
« considérant l'amitié de ces deux personnages, qui
« ne s'en treuve fort aise et ne la prise à l'avan-
« tage. » (L'Amant ressuscité, p. 173.)
Doulx yeux, singlans, et desvoyez,
Qui gectent ung maintien sauvage
Dont communément vous voyez
Les povres varletz de village
Porter dessoubz leurs bras la targe
Ou ung bouquet à la saincture,
Et puis saulter à l'avantage :
Hz ont bon temps, mais qu'il leur dure.
L'Amant rendu Cord. p. iSi.
3* Coiffure à l'avantage, c'est-à-dire coiffure qui
sied bien. (Voy. Poës. de Jacques Tahureau, p. 209.)
4° Vivre d'avantage, c'est-à-dire vivre de pillage.
(Voyez Monstrelet, Vol. II, fol. 75, R°)
5° Boire et manger à l'avantage (1), c'est-à-dire
vivre aux dépens d'autruy. (Froissart, Liv. IV, p. 168.)
6» Vivre d'avantage se disoit aussi dans le même
sens :
Qui n'a or, ne argent, ne gaige,
Comment peut il faire grant chère?
Il faut qu'il vive d'avanlaigs
Villon, Rep. ftanch. p. 19.
YARI.'INTES :
AVANTAGE. Orth. subsist.
AvANTAGEMENT. D. Flor. de Grèce, fol. 38, R».
Avantaige. Vigile de Charl. Vil, ï. II, p. 9.- Beaum. p. 12.
AVENTAIGE. Villehardouin, p. 10.
AvENGE. Le Jouvencel, MS. p. 3G7.
Avantagé, participe. Avancé, distingué. Ce mot
a aussi signifié préféré, favorisé, entreprenant,
hardi, présomptueux : « Estoit soldat très signalé
« de cette compagnie, et fort avantagé. » (Bran-
tôme, Capitaines français, T. IV, p. 331.)
Avantager (s'), verbe. Prendre de l'avantage.
— Se prévaloir, s'ingérer.
C'est dans le premier sens qu'on trouve s'aven-
taiger, dans les Poésies de Crétin, p. lOG. On disoit
aussi avantager son corps, pour s'avancer, faire
fortune, se distinguer. Froissart, parlant de la
guerre contre les Turcs proposée aux princes
chrétiens par le Roi de Hongrie, dit: « Si furent
« les lettres lantost, et les nouvelles de Hongrie
« publiées, certifiées et signifiées en plusieurs lieux,
« et esciiles en plusieurs pais, pour émouvoir les
« cœurs des Gentils hommes et Escuyers qui
« désiroyent à voyagea et avantager leurs corps. »
(Froissart, Liv. IV, p. 218.)
S'avantager se disoit aussi pour se prévaloir, s'in-
gérer, prendre sur soy : « Nuls tuteurs ne s'avanta-
<< gérant de faire ou se faire faire aucun rachat ou
« eschange, en aucunes maisons mortuaires, où
" leurs pupilles sont héritiers. » (Coût, de Bergh.
S' Winox, au Nouv. Coût. gén. T. I, p. 522.) « Que
« personne ne s'avantage de coupper les fruits, les
« bois , ou quelque chose croissant sur terre. »
(Coût. d'Ypre, ibid. T. I, p. 843.)
VARIANTES :
AVANTAGER (s'). Froissart, Liv. IV, p. 218.
AvENTAiGER. Crctio, p. 106.
Avantaigeux, adj. Avantageux, favorable.
De mot à mot voit les Argus et dictz,
Frians caquets, avantaigeux Editz
Que dames font, chascune en son endroict.
Crétin, poésies,
Avant-arretz, subst. masc. plur. Arrêts anté-
rieurs. (Voyez la Coût, de Gorgue, au Nouv. Coût,
gén. T. II, p. 1007, col. 1 et 2.)
Avant-avant. Cri souvent employé à la guerre,
pour animer les combatlans ou pour provoquer
l'ennemi. (Voyez Froissart, Liv. 1, p. 59.)
Avant-bras, subst. masc. Partie de l'armure.
Celle qui couvroit l'avant-bras (2). (Dict. de Nicot,
Monel, Cotgrave et d'Oudin, et Du Cange, Gloss. lat.
au mot Ante-brachia.) « Le vicomte blessa l'An-
(I) A l'avantage avait plutôt le sens de gratuitement, sans frais ; « Chiés soy il ne despendoit pas tous les jours deux sols
de parisis, mais aloit boire et mengier à l'avantage où il povoit. » (Froissart, édition Kervyn, XV, 78.) (N. E.) — (2) la
brassière se décomposait en épauliére, bras, coudière et avant-bras. (N. E.)
AV
— 33G —
AV
« glois, du dernier coup de lance, entre Vavant-
« bras et le garde-bras. •■ (Ilist. de Loys 111, duc de
Bourb. p. ICI. — Voy. PetitJeaudeSaintré, p. 240.)
VARIANTES :
AVANT-BRAS. Petit .Tean de Saintré, p. 266.
Advant-bhas. D. Flor. de Grèce, fol. 23, R».
AvANT-HAS. (Lisez Avant-bras.) H. du Chev. Bayard. p. 395.
Vant-bras. (Usez Avant-bi-as.) Du Gange, Gloss. lat.
Avant-chambre , subst. fém. Antichambre.
(Dict. de Monet.) « Croy qu'il y avoit plus de raison
« de dire avant-chambre que ce que nous disons
« antichambre. » (Pasquier, Rech.Liv. VllI, p. 662.)
Avant-chien, subst. niasc. Nom d'une étoile.
Celle qui paioit pendant la canicule. (Dict. d'Oudin.)
Avant-conseil , subst. masc. Conseil pris
d'avance ou consultation préliminaire, préalable :
« En toutes les causes pour dettes, au sujet de XXX
« francs et de plus, en toutes autres causes civiles
« ou criminelles, les procureurs seront tenus de
« prendre leur avant-conseil avec quelque avocat
« oujurisconsulte, soit de cette villeouchaslellenie,
« ou autres de dehors, avant que d'entrer en
« consultation. » (Nouv. Coût. gén. T. I, p. G77.)
Avant-courement, subst. masc. L'action de
précéder. (Dict. de Hob. Estienne et de Cotgrave.)
Avant-coureux , subst. masc. Avant-coureur.
(Dict. de Cotgrave.)
Avant-coureuze, adj.au fém. Qui précède.
(Lettres de Pasquier, T. I, p. 739.)
Avant-coiirir, verbe. S'avancer, courir en
avant.
Estradiotz, qui désiroient la prinse ,
Jusqu'aux murs viennent avant-courir.
i. Marot, p. 86.
Lors fut crié par l'ost, en mainte part,
De par le Roy, sur peine de la hart,
Que nul, pour lors, ne allast avant-courir.
Ibid. p. 99.
Avantement, subst. masc. Avance, début. On
dit de l'amour:
C'est un moult grant avantement (2)
A jone homme, et moult proufitables ;
Il s'en troeve courtois, et ables.
Po5s. MSS. de Froissarl, p. 1«, col. i.
Avant-fani, adj. Fané avant le temps.
Ton nom rendoyent sans fluers avaiit-fani.
Pocs. de J. Tabureau, p. 172
Avant-fiés, subst. masc. Avant-fief. C'est peut-
être ce que nous nommons arrière-fief. « Li montrai
« les tenanches des fiés, et des avant-fiés que je
« tenoie de li. « (Citation faite par Du Cange, dans
le Gloss. latin, au mol Estagicnm, sous Stagium)
Peut-être aussi sont-ce les liefs de qui relèvent d'au-
tres fiefs, qu'ils reportent au lief suzerain.
Avant-goutte , suhst. fém. Essai , épreuve.
(Dict. d'Oudin.)
Avant-huïs, subst. masc. Portière. (Diction-
naire d'Oudin.).
Avantiei", suhst. masc. Tablier. On dit encore
devantier en ce sens, en Normandie et en Bourg.
On trouve Avantier dans les Fabl. mss. du R. n*
7218, fol. 100, V-col. 1.
Avantier. L'autre jour. Avant-hyer, dans les
Serm. fr. mss. de S' Bern., répond au latin ante-
positos dies. Nous disons avant-hier pour désigner le
jour qui précède immédiatement le jour d'hier ; on
disoit autrefois avantier pour désigner en général,
et d'une fa(;on indéterminée, un temps passé, dans
le sens ou nous disons l'autre jour.
Tel me requist avantier,
N'd pas encore un mois entier.
Fabl. MSS. du R. n- 1218. fol. 350. R- col. 2.
Avantin, subst. masc. Greffe de vigne. (Dict. de
Monet, d'Oudin et de Cotgrave.)
Avant-jen, subst. masc. Prélude. (Dict. de Nicot,
de Monet, d'Oudin et de Cotgr., au mot Avant-jeu.)
Henry sage, vaillant, attendant que je face
Un ouvrage, qui soit plus digne de ta grâce;
De ma dévote main, veuilles avoir à gré.
Ce petit avaiiljeu que je t'ay consacré :
Avantjeu qui sera d'un bien rare exemplaire.
Œuv. de Baif, fol. 246, V'.
C'est en ce même sens que avant-jeu est mis
comme synonyme t\ préface, dans Beauch. (Rech.
duTh. P. I, p. 41ôet41(j.)
variantes :
AVANT-JEU. Nicot, Monet, Oudin, etc.
Advantjeu. Bouchet Sérées, Livre III, p. 196.
Avant-jeu (pour), adv. Préalablement. « Il ne
« sçait pas la Rhétorique, ny pour avant-jeu ca^iter
« la bénévolence du candide lecteur. » (Essais de
Montaigne, T. I, p. 258.)
Avant-joueur, adj. Qui prélude. Epithète de
Fredon, et de prologue de comédie dans les Epithè-
tes de Martin de La Porte.
Avant-jugé , subst. masc. Préjugé. (Dict. de
Cotgrave.)
Avant-juin, subst. masc. Le mois de mai. (Les
Contes de Cholières, fol. 186, V°.)
Avant-la-main, adv. Auparavant, d'avance.
Ce mot est formé de main, comme maintenant,
présentement. « L'en luy rebatra, avant-la-main,
" la somme que montera le meuble de son ma-
« riage. » (La Thaum. Coût, de Berry , p. 300. —
Sag. de Charron, p. 33. — Al. Chnrtier, Quadrilog.
invectif., p. 419. — Brantôme, Dames Gallantes,
T. 1, p. 390, etc.) " Année payée avant-main, c'est-
« îi-dire payée d'avance. » (Goût, de Hainaut, au
Nouv. Coût. gén. T. II, p. 101, col. 1.)
VARIANTES :
AVANT-LA-MAIN. Le Jouvencel, fol. 47, R».
Atant-main. Essais de Mont., T. I, p. 378.
(2) Pourquoi ne pas lire avancement? « Si croy que Dieu m'ait pourveu de ceste emprise pour mon nuanc/iewenf.
(Froissart, 1.1. Il, 62.) (n. e.)
AV
— 337 —
AV
AA'ant-l'eau (lisez Avau-reau), dans l'Amour
à la mode, de Thomas Corneille, act i, scène v. (Voy.
Aval.)
Avant-le-vent , lisez Avau-îe-vent. (Mém. de
Du Bellay, Liv. IX, fol. 291, V°. — Yoy. Aval.)
Avant-logis, subsl. masc. Vestibule. (Dict. de
Nicot, Monet et Cotgr.)
Avant-montre, subst. fém. Montre de bouti-
que. Nous appelons seulement montre, cette espèce
d'avance faite au devant d'une boutique, pour éta-
ler la montre ou l'échantillon des marchandises
que l'on vend : « Bien entendu néantmoins qu'un
u homme de mestier pourra faire un avant-montre,
« avec un petit toit au-dessus servant à son
« commerce, pourveu qu'il le fasse faire si court
" et si commode que les voisins n'en souffrent aucun
>< empeschement, ou incommodité. » (Nouvelles
Coutumes générales, T. I, p. 526, col. 2.)
Avant-mur, subst. masc. Parapet, barbacane (1).
(Dict. d'Oudin et de Cotgr.)
VARIANTES :
AVANT-MUR. Oudin et Cotgrave.
AvANT-AMUK. Hist. de la Popeliniére, T. I, fol. 42, R».
Avantoict, subst. masc. Toit avancé. (Dict. de
Cotgrave.)
Avant-panser, verbe. Préméditer. (Dict. de
Nicot, Monet, d'Oudin et de Cotgr.)
VARIANTES *.
AVANT-PANSER. Monet, Dict.
AvANT-PENSER. Dict. de Nicot, d'Oudin et de Cotgrave.
Avant-pas, S!(/*sL masc. Supériorité, préémi-
nence. Pasiiuier dit, au sujet d'une dispute où l'on
discutoit laiiuelle des deux langues, de la Toscane
ou de la Françoise, devoit avoir le dessus : «< L'autre
" au contraire soutenoit qu'il n'y avoit aucune
« rencontre de l'une à l'autre , et que la Toscane
" passoit d'un grand avant-pas la Françoise. »
(Pasquier, Rech. Liv. VU, p. 620.)
Avant-peau, subst. fém. Prépuce. « Au lieu de
« prépuce usant de ce mot Avant-peau. » (Apologie
pour Hérodote, p. 128.)
Avant-pié, subst. masc. Espèce de chaussure.
— Pointe du bas, ou de la chaussure.
Dans le premier sens, c'est celte chaussure que
l'on a appellée aussi souliers à poulaine , ou pou-
leine ; c'etoit une chaussure qui par devant avoit de
longs becs recourbés en haut, imitant assez les
patins des IloUandois et par derrière comme des
éperons qui sortoient du talon. (Yoy. Le Duchat
sur Rabelais, T. I, p. 100, note 8; T. II, p. 12, note
32, et p. 146, note 1, sur le chap. xxv. — Du Cange,
Gloss. latin, au mot Antepedes.)
On a aussi nommé axiant-pied la pointe d'un bas,
ou d'une chaussure. (Dict. d'Oudin.) Dans les Ord.
des Rois de Fr., dans un article qui concerne les
chaussetiers, on lit: « Ceux qui les appareillent ne
« prendront, pour mettre un avant-pied en une
« chausse, que deux deniers. » (Ord. des Rois de
Fr. T. II, p. 372. — Voy. Lanc. du Lac, T. I, fol. 137.)
Et mes houseaulx sans avant-piech (2).
Villon, p. G.
VARIANTES :
AVANT-PIÉ. Le Duchat sur Rabelais, T. t, note 8.
Avant-pied. Ord. des Rois de France, T. II, p. 372.
Avant-portail, subst. 7nasc. Vestibule ou bar-
rières devant les portes. (Dict. de Nicot, Monet et
Cotgrave.) ■
Avant-porte, subst. fém. Barrière. « Y avoit
« une avant-porte, où moul y ol fier assaut; et
" gangnerent les François l'avant tour à celle fois,
" et non plus. » (Hist. de B. Du Guesclin, par Mé-
nard, p. 533.) On lit avant-porte ou barrière, en
parlant d'une ville, dans Monstr. Vol. III, fol. 75.
Avant-seigneur, subst. masc. Seigneur supé-
rieur. (Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis.) Seigneur
suzerain. (Du Cange, Gloss. latin, au mot Dominas
principalis.) « Seigneur suzerain , seigneur par
« dessus, seigneur par amont, chez les praticiens
» angiois. » (Notes sur Beaumanoir.)
Avant-solier, subst. masc. Espèce de portique
ou de bâtiment avancé, et soutenu sur des colon-
nes, peut-être avant-toit. (Voy. le Gloss. latin de
Du Cange, au mot Anterolarium.) Il semble mis
comme synonyme à lierthesca, crête dans une cita-
tion latine, ibid. au mot Avant-soliers, col. 823, et
au mot flertlœsca (3). (Voy. une autre citation, ibid.
au mot Orbus vicus, où il paroit signifier avant-toit.)
Avant-tour, subst. fém. Tour avancée. — Ou-
vrage extérieur qui précède une tour. « Y avoit
« porte, ou moût y ot fier assaut, et gangnerent les
« François Vavant-tour à celle fois. » (Hist. de B.
Du Guesclin, par Ménard, p. 533.)
Avant-vandangeur, subsl. masc. Nom d'une
étoile.
C'est l'avant-vaiidaugeui-
De lumière pareille, et pareille grandeur.
Que celle qui se voit, par la noire carrière,
Sur la queue d'Helicie (4) espandant sa lumière :
Cette estoille est ardante, et les autres aussi,
Qui sont voisines d'elles.
PoL-s. deR. BelI.T. I, fol. 179. V.
Avai'ement, adv. Sordidement. — Avidement.
(Voyez sur le premier sens le Dict. d'Oudin.)
On a dit aussi avarement pour avidement, avec
l'avidité d'un avare.
Excusez donc mes yeux, si trop avarement
Fichez sur vos beautez, ils prennent aliment,
Scachans combien de faim l'absence leur prépare.
Poès. d'Am. Jamia, p. 272.
(1) Cest un mur adossé à un autre mur, ou l'enceinte la plus éloignée du corps de place. En blason, c'est un pan
de mur crénelé joint à une tour. (n. e.) — (2) Le statut des chaussetiers de Poitiers, en 1472, explique que dans une aune
de drap de 5/4 de large on taillait deux paires de chausses d'hommes, à coins et talons sans avant-pieds, c'est-à-dire
découvertes sur le cou du pied. (n. e.) — (3) La bretéche n'était pas un portique, ni une crête, mais un ouvrage de bois à
plusieurs étages, crénelé, dont on se servait pour attaquer et défendre les places fortes, (n. e.) - (4) La Grande Ourse.
n. 43
AV
- 338 —
AV
VARIANTES :
AVAREXrENT. Poës. d'Am. Jamin, p. 272.
AvOREMENT. (Lisez /li'aco/itJi/ dans le Gl. de Labbe, p. 490.)
Avarice, subst. (ém. et mase. Avidité. Ce mol
subsiste sous la première ortliograplie, mais il est
toujours féminin. Nous le trouvons au masculin, et
dans le sens (l'avidité, au passage suivant: « Des
« anciens harangueurs qui ue faisoient point état
« de l'argent, ains d'un plus noble avarice, à sca-
« voir de pouvoir consacrer la renommée sur l'au-
« tel d'immortalité. » (Contes de Cholières, fol. 77.)
Ce même mol, sous l'orthographe avarises, est
encore masculin dans ce vers:
Certes cou es crans ai'urises.
Poôs. MS. avant 1300. T. IV, y. 1356.
Proverbe.
Avarice de prouvoire , c'est-à-dire avarice de
prêtre. (Prov. dans le Rec. des Poët. mss. avant 1300.)
VARIANTES :
AVARICE. Orthographe subsist.
AVAUISES. Ane. Poës. MS. avant 1300, T. IV, p. 1356.
Avai'icieux, subst. masc. et adj. Avide, qui a
de la coiivoilise. — Avare.
Ce mot est employé au premier sens dans ce pas-
sage : » Devint avaricieux de la couronne qui tant
« esloit belle. » (Lancelot du Lac, T. 111, fol. 73.)
Jesu Christ que pas ne trouvasmes
De sa grâce aver, ne eschar.
Rom. de la Rose, vers 17303 cl 17304.
Peut-élre doil-on donner la même signification
au mot Aver, dans les vers suivans :
En convoiteux, et en aver
Ne se doit nus trop affier.
Fabliaux, MS. Je S. Germ. fol. 18, R-.
Avère signifie avare dans ces vers :
Amours est large et avère.
Fauclicl, Lang. cl Toëi. Fr. p. UO.
Ja nul avers homme ne puet pris monter.
Ibid. p. 111.
Riches princes avers qui avoir a sans compte
Ne scait qu'est donner, vivre doibt a grand honte.
Ger. de Rouss. MS. p. 29.
Thiebaut li quens de Chartres fu fol, et engingnious.
Moût ot chestaux et villes, et moût fut avérons.
Abarre semble être le même mot qu'avare (1), sui-
vant la prononciation languedocienne. Noitsse
abarre se dit dans le Languedoc pour une noix de
la coquille de laquelle on a de la peine à tirer le
noyau. (Dict. de Borel, au mot Aver.)
VARIANTES :
AVARICIEUX. Orthographe subsist.
.AvARisciEux. Fabl. MS. du R. n» 7G15. T. II, fol. 163.
AvORiAcuz. Ordonn. T. I, p. 614.
AvEROus. Rom. de Rou, MS. p. 114.
AVER. Borel, Dict. p. 27.
AVERE. Fauchet, Lang. et Poës. Fr. p. 140.
AvoR. (Lisez Aver.) Thib. de Nav. T. I, p. 359.
AVER. Gloss. du Rom. de la Rose.
Avers. Ger. de RoussiUon, MS. p. 28.
Ave, subst. musc. Oiseau. Ce mot a cette signi-
fication dans le passage suivant:
A Foulambroy puet grant sires manoir:
Daims a ou parc, qui moult vault de finance.
Et ores aussi.
Eusl. Descliarops, Poés. MSS. fol. 32, col. 2.
Avec, préposition. Avec. Dans S' Bernard, Serm.
Français, avec répond au latin ctwi et apitd.
Li Piois veut bien c'on jeté as aves
Poès. MSS. avanl 1300, T. IV. p. 1368.
Otot, Otout, Oloiis (2), Otoutes, signifient avec,
suivant les divers genres et les divers nombres.
(Duchesne, Gén. de'Chalillon, p. 45.)
Avec A signifié: encore, aussi. « Jean des Temps,
« escuyer de fEmpereur Charles le Grand, qui
« n'esloit pas parent de Dieu : vescut trois cens
■< ans, comme tesmoignent toutes les histoires de
« France et d'Allema'igne et d'Italie avec. » (J. le
Maire, lUustr. des Gaules, Liv. lll, p. 28G.) Voy. le
Dict. de Borel, au mot auqucs dont il fait mal à
propos dériver avec. » Xous n'eûmes paix, ne trêve,
« ne au soudan, ne aux adiniraux. » (.Joinville.)
« Je ne vay pas encore au baston. » (Petit Jean dé
Sainiré, p. 385.) » Sa face desrompoilrtî/o; ongles. »
(Chron. de S' Denis, T. 1, fol. 148.) « Etlfustes
« flî'CHS les Barons. »
C'est une faute pour aveuc dans un Poëte ano-
nyme, (ms. avant 1300, T. IV, p. 1602.)
Amour convient avoc moy remanoir.
Poës. anon. MS. avanl 1300, T. III, p. 1189.
Diex li dona si grant biauté fuison
Et avoec fist sens, et bonté venir. •
Symon d'Aulie, Poës- MS.
On disoit as moy pour avec moi. Nous avons vu
la seule lettre a signifier avec, et la lettre o avoir
la même signification.
On employoit quelquefois avec adverbialement,
etsans régime, pour: ensemble, avec eux: « Elavec
ce sont plusieurs faucons, etc. (3) » (Modus et Racio,
Ms. fol. 123, V".)
VARIANTES :
AVEC. Orth. subsist. — Serm. Fraiii,ais.
A. Duchesne, Gén. de Béthune, p. :i73.
As. Rymer, T. I, p. 13, cul. 2 ; tit. de 1256.
Advecques. Borel, \"^ additions.
Anvec. Borel, Dictionnaire.
As. Poës. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1527.
AuvECQUES. Ordon. des Rois de France, T. I, p. 493.
Ave. D. Morice, Hist. de Bret. col. 1013.
AvECQ. Joinville, p. 32. .
AvECQUES. Ger. de RoussiUon, MS. p. 121.
AVEIQUES. Estrub. Fabl. MS. du R. n" 7996, p. 17.
AvENC. Lisez aveuc. Borel, Dict.
AvEsouE. Rymer, T. I, p. 116.
Aveuc. Duchesne, gén. de Chastillon, p. 14.
.'VvEuc. Ordon. des Rois de France, T. III, p. 469.
jVveucques. Le Févre de Saint-Rémy, Hist. de Charles VI.
Aveu. Poës. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1662.
AVEX. Pérard, Hist. de Bourg, p. 4-30.
Avoc. Poës. MSS. avanl 1300, T. III, p. 1189.
Avocii. Beauman. p. 418.
Avoec. Chans. du comte de Thib. p. 24.
Avoecoues. Chron. du xm" siocle, MS. deBouh. fol. 281.
Avoeqles. Fabl. MS. du Roi, n"72l8, fol. 252.
.\voic. Duchesne, gén. de Chastillon, p. 33.
AvoiQUEs. Idem p 33.
Avoc'CEs. Gantiers d'Argis, T. III, p. 1148.
(1) Avarus, avec l'accent sur le deuxième a, a dû donner aver. Pour abai-re, il faut y voir la racine barrer. (N. E.) —
(2) C'est-à-dire ojaid totum. (N. E.) — (3) Il faut remarquer que Froissart combine hors de et avecques: « Et mettoit grant
paine à ce que le roi Richart eust osté hors d'uvecques iuy tous ses marmousets. » (éd. Kervyn, XII, 259.) (N. e.)
AV
— 339
AV
Au. Petit J. de Saintré, p. 385.
AuQUES. Chron. Fr. MSS. de Nangis, an 1290.
AvuEC. Duchesne, pén. de Chastillon, p. 45.
Aux. Chron. de S' Denis, T. I, fol. 148.
O. Carpentier, Hist. de Cambray, p. IS.
Ob. Ordon. des Rois de Fr. T. lï, p. 342.
Od. Mouskes, MS. p. 8, passim.
Ot. Viilehard, p. 1.
Otot. Fauohet et Percef. p. 147.
Otout. Joinville, p. 70.
Ou. Brut, MS. fol. 14, R« col. 2.
OvE. Gloss. de l'Hist. de Bret.
OvEC. Borel.
OvECQUES. Ord. des Rois de France, T. III, p. 221.
OvENO. Rou, MS. p. 26, passim.
OvEQUEs. Ord. des Rois de Fr. T. I, p. 582.
OvESQUES. Ord. des Rois de France, T. I, p. 561.
OuTOUT. Rou, MS. p. 421.
OuvECQUEs. Ord. des Rois de France, T. III, p. 405.
OwEQUEs. E. de Courtoisie, MS. de S' Germ. fol. 40.
Aveillette, subst. fém. Petite abeille. Ce sont
les diminutifs d'aveille sons abeille. (Voyez Bonr-
going, ubi siipvà.) Ils ont la même étymologie. (Id.
ibid. Dict. de Nicot, au mot aveille.) La signification
même d'avette ne différoit point de celle d"rtwi//e,
surtout dans la Touraine et l'Anjou , comme
l'observe Nicot. Nous appuierons sa remarque par
le passage de la Coutume du Bailliage de Tours :
« Le bas justicier est fondé d'avoir espaves d'avettes
« qui sont mouches à miel. » (Coût. gén. T. II, p. 2.)
Un de nos poêles du xvi' siècle a dit :
Desjà la diligente avelle
Boit la marjolaine et le thin
Et revient riche du butin
Qu'elle a pris sur le mont Hymette.
Œuv. de Théophile, !■• [larlie, p. US.
VARIANTES :
A\'EILLETTE. Bourg. Orig. Voc. Vulg
AvETTE (1). Coût. gén. T. II, p. 542.
p. 9, V».
Avel, suhst. masc. Désir, joie, satisfaction,
empressement. Ce mot, e-\pliqué dans le Gloss. du
Roman de la Rose, au mot avcaux pour divertisse-
ments, bombances, bonne chère, paroît s'être
formé du latin avère, aveo.
Si font plusieurs en leur po\Te demaine.
Oui vivent bien sous l-urs povres drapeaulx,
Et Cils ne font au monde leurs aveaulx.
Poès. MSS. d'Eust. Desch. fol. 238, col. 1.
Ses maux raconte trespassez ;
Cou sait Partonopex li beax.
Qui consent à ses aveax.
l'arlon. deUlois, MS. de S' Germ. fol. )63, V col. 1.
Ou fil aubrée
A moût beau damoisel.
Cil li agrée,
Et ele à lui bée:
Sofirez lor avel.
Robins dou Chaslel. Poës, MSS, avant (300, T, I, fol. 57.
Il menoit les grans aveaux
Des dons qu'il eut de raoy fort beaux.
Rom. de la Rose, vers 15299-15300.
Pour moy punir de ce defTault
Moy trousser mes paneaux
Faillir lors des dits aveaulx.
Ibid. vers 15101-1570G.
Ce mot a signifié besoin et désir. J. de Meung,
parlant des gens qui frêquentoient la cour, a dit :
Souvent mangeassent oefs, et choux, et naveauLx :
Ils trouvent à la court trop plus leurs avianlx
Poissons, bonnes chairs; et vins virils et nouveaulx
Ly tiennent en joye, gras et blancs et nouveaulx.
J. de Meung, Cod. vers 769-772.
variantes:
AVEL. Poës. MS. du Vatican, n» 1490, fol. 112, V».
AviAU. Fabl. MS. du R. n» 7215, fol. 287, V» col. 1.
AvoY. Eust. Deschamps, Poës. MSS. fol. 202, col. 3.
AuvûiTE. Parton. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 153.
AvEAX, suhK. p. Parton. de Blois, fol. 163, V» col. 1.
AviAUX, s. p. Machaut, MS. fol. 202, R« col. 2
AviAULx, s. p. .J. de Meung, Cod. vers 770.
A VEAUX, s. p. Glossaire du Roman de la Rose.
Aveaulx, s. p. Coquillart, p. 165.
Avelaigner, suhst. masc. Avelinier, coudrier.
(Voy. les Dict. d'Oudin et de Cotgrave, et Du Cange,
Gloss. lat. au mot Avellanarius.)
VARIANTES :
AVELAIGXER. Dict. d'Oudin et de Cotgrave.
AvEi-.MGNiEi!. Dict. d'Oudin.
AVELI.NIER. Du Cange, Gloss. lat. au mot .Avellanarius.
Avelaine, subst. fém. Aveline, noisette. (Voyez
les Dict. de Nicot, de Monet, d'Oudin et de Cotgrave.
— Voyez la Confession de Vaudreton. — Trésor des
Chartes, Layette V de Navarre, Pièce xi.)
Aulanie se dit dans le patois d'Auvergne pour
aveline. (Voy. Du Cange, Gloss. lat. à aulaneriitm (2).)
VARIANTES :
AVELAINE. Dict. de Nicot et d'Oudin.
AvELANE. Dict. de Monet et de Cotgrave.
AvELLAixE. Dict. d'Oudin.
AuLANiE. Du Cange, Gloss. lat. au mot Aulanerium.
Avemai'ia, exclamation. « Avemaria, fait-elle,
« j'aimasse mieux qu'elles fussent en leurs
« maisons. » (Les 15 Joies du Mariage, page 48. —
Voyez ibid. page 99.)
Avemaria. Remarquons cette façon de parler
où ce mol semble pris ou pour la S" Vierge même,
ou pour le miracle de l'Annonciation :
Foi que doi avemaria.
Fabl. .MS. du R. n- 7615, T, II, fol. 130, V col. 1.
Avenage (3), subst. masc. Redevance en avoine.
— Droit de bourgeoisie.
C'est un droit seigneurial que les sujets doivent
à leur seigneur pour le pâturage de leurs bestiaux
dans les bois et dans les prés. (Laurière, Gloss. du
Droit françois, et Du Cange, Gloss. lat. au mot
Avenagium. — Voyez le Dict. de Cotgrave.) On lit
avenaige dans l'Ane. Coût, de Bret. Ce droit est
appelé avoyne du bois dans Pithou. (Coût, de Troyes.)
(Voyez AvAiNE.)
prit ensuite une acception générale et s'entendit de toute espèce de redevance. Dans une bulle dianocent II a 198)' on lit •
« Avenagium anarum et arietum. » Comparez <i avena de fimo, de molta » (Du Cange, sous Avena), droit payé pour là
junuer, pour la mouture, (n. e.) » v d i /, ^.ui.. t«.jo puui n»
AV
— MO —
AV
Avenage s'est dit pour bourgeoisie, « parce que
'" le serf peut se faire bourgeois du Roy en payant
« un seplier d'nvene à certaine église. » (Laurière,
Gloss. du Droit françois. — Voyez Beaumanoir,
Coût, de Beauvoisis, p. iW. — Bouteiller, Somme
rurale, p. 107.)
VARIANTES :
AVENAGE. Du Cange, Gloss. lat. au mot nvenaghim.
AvENAiGE. Ane. Coût, de Bretagne, fol. 120.
Adven.\ge. La Thaumassiére, Coût, de Berri, p. 354.
Avenaire, adj. Qui se tient dans les avoines.
{Voyez le Dicl. de Cotgrave.) On lit aveniêre, cpiLli.
de Cigale, dans les Epithètes de Martin de la Porte.
VARIANTES :
AVENAIRE, AvENiER. Dict. de Cotgrave.
Avenarie, suhst. fém. Champ d'avoine. (Voyez
Du Cange, Gloss. lat. au mot avenarlœ, où on Ht
avenarie (1).) » Les chaumes millerines etavcneris
« ne sont aucunement de garde, sinon tant que le
« fruit est dedans les dites terres. » (Coût, de la
Ferté-Joabault, au Coût. gén. T. II, p. 287.
VARIANTES :
AVEN.AP.IE. Du Cange, Gloss. lat.
AVAiNEr^iEUL, subst. masc.
AvENERis, subst. masc. plur.
' Aveuas, subst. masc. Pain ou farine d'avoine.
Ce mot est pris en ce sens dans les vers suivants :
Soiippe à huile leur donne, et l'avenus.
Poês. MSS. d'Eust. Desch. fol. 116, col. 2.
En Karesme avenus et ris.
Or veult ris, or veult avenus.
Ibid. fol. 418, col. i.
Avéné, part. Ce mol désigne l'épuisement.
Aveneron, subst. masc. Avoine stérile. (Voyez
les Dictionnaires cités sur les diverses orthographes.)
VARIANTES :
AVENERON. Dict. de Rob. Estienne.
AVERON. Dict. d'Oudin et de Cotgrave.
AvoiN, AvoiNFOLLE. Dict. de Cotgrave.
AVHON. Dict. de Nicot, d'Oudin et de Cotgrave.
Haveron. Dict. de Nicot, d'Oudin et de Cotgrave.
Aveneux, adjectif. Garni d'avoine ou qui est
d'avoine. (Voyez le Dict. de Cotgrave.) On trouve
avoiiieiix pour épithète de picotin dans les Epith.
de Martin de la Porte.
VARIANTES :
AVENEUX. Dict. de Cotgrave.
AvoiNEUx. Epithète de Slarthi de la Porte.
Aveiire, verbe à la 3° personne du singulier du
présent de l'indicatif. Vend, met à prix :
Feme set trop de mal qui ses chieres uvenre,
Feme qui vent sa chère au deable la quit.
Chaslie-Musart, MS. de S. Germ. fol. 106, V* col. 2.
Avent, adverbe. Avant. (Voyez Hues de la Ferté,
poës. MSS. avant 1300, T. III, p. 1150.)
Aventé, part. Eventé. — Placé sous le vent.
Ce mot paroit pris au premier sens dans ce
passage :
Si jamais jour ne vantoit icy vens.
Si seroit bien ly mondes uventez.
Poes. MSS. d'Eust. Desch. fol. 222. col. 3.
On disoit aussi aventé pour placé au bon vent:
« Garde que le cuer de ta baye, où tu tendras tes
" las, soit bien aventé ; c'est-à-dire qu'il le soit au
" dessoubs du vent du pays où les bestes seront
« demarées. » (Modus et Racio, ms. fol. 63, V°.)
Aventer, verbe. « Si ascuns se sentent grevés
« par ascune fraunchise graunle par nous , et
« ascun sus franchise, ou de tout aventer nostre
« fait en taunt semble que il despise, par ount il
" est grevement amerciable, et en despyt de sa
« force, retendra l'autre sa fraunchise, lequel que
" ele soit préjudiciable h luy ou non. » (Britton,
des Loix d'Angleterre, fol. 159, V°.)
Average, subsl. masc. /BéiAû. — Droit pour
exemption de corvées.
Au premier sens, c'étoit le mot collectif d'fci'frs
pris pour bestiaux : « Est commandé ii toute per-
« sonne qu'aura en son pouvoir â'averages étran-
« gers, ou qui saura qui les détient, de les
« révéler, etc. « (Coût, de Bueil, au Nouv. Coût,
gén. T. II, p. 1243.)
C'étoit aussi un droit payé pour l'exemption des
corvées de charrettes. (Voyez Du Cange, Gloss. lat.
au mot averpennis.)
Averdir, verbe. Reverdir ou verdir.
Au tens Ice je vois urerdir,
Ke foille et Hors vois aparoir,
Amors ki mon cuer fait frémir,
Rejouir, et sovent doloir
Me fait chanter, et joie avoir.
M. Adrius, Contredit, Pues. MSS. avant 1300, T. III, p. Mil.
Avéré, part. ElTectné, accompli, proprement
vérifié. (Voyez le Dict. de Cotgrave, au mot averge.)
On lit aviiiré dans les Poës. mss. d'Eust. Deschamps ;
et avolries dans Al. Chartier, de l'Espérance.
Verrai-je ja aucré
Que joie m'en soit promise.
Bestornés, Poës. MSS. avant 1300, T. III, p. 1274.
Fu averie
La prophétie.
Poés. .MSS. de Froissarl, p. 272, col. 2.
Ha, Salemon, ta prophétie.
Est trop cruelment uvertie.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 95, R" col. 1.
VARIANTES :
AVÉRÉ. Poes. MSS. avant 1300, T. IH. p, 1274.
AvEUAÈ. D. Morice, Hist. de i3ret. préf. col. 983 et 984.
AvEM. Froissart, Poës. MSS. p. 420, col. 1.
AvEiîSÉ pour avéré, vérifié.
AvoinÉ. Eust. Deschamps. Poës. MSS. fol. 413, col. 3.
AvoiRi. Al. Chartier, de l'Espérance, p. 388.
Averti. Fabl. MS. du R. n'>72l8, fol. 95, R« col. 1.
Averement, subst. inasc. Vérification. L'action
de vérifier, ou de prouver la vérité. Du Cange,
Glossaire latin, au moi Averainentum. (Voy. Britton,
des Loix d'Angleterre, fol. 50.)
(1) D'après la Coût, de Solesmes. (n. e.)
AV
— 341
AV
Avérer, verbe. Eclaircir, démêler, vérifier,
éprouver (1).
Helas que faut-il que je fasse?
Pour montrer quel est mon amour ;
Quand, brûlant pour vous, nuit et jour,
Vous pensez que je soys de glace ;
Afin d'oi'erer toute feinte.
Ouvrez mon cœur que vous avez ;
Et mes vœux plus ne recevez.
Si dedans vous n'estes emprainte.
ŒuvTes de Des Portes, page 200.
Axeresses, subst. fém.phir. Aisances. Fosses
d'averesses, semble employé pour fosses d'aisances
en ce passage : « Par la coustume n'est loisible à
« personne'faire édifier retraits, ou fosses cravcres-
« ses à trois pieds près rhérilage de son voisin. »
(Coût, de Tournay, au Coût. gén. T. II, p. O'ilt.)
Averiaiix. Ce mot se trouve à la marge du Rom.
de Rou, Ms. On lit dans le texte avoir aux. Il faut
lire à voir aux; c'est-à-dire : h voir eux, à les voir.
Les Biars i fu avoir aux.
Roman de Rou, MS. p. 357.
Averierie, subst. fém. Mauvaise action. Œuvre
de l'aveisier, ou du démon. Ce mot est employé en
ce sens dans la Vie de S" Thaysie. (Vies des SS. ms.
de Sorb. ch. xxvu, col. 18.)
Averlan, subst. masc. Débauché, bon compa-
gnon. — Camarade.
On trouve le premier sens de ce mot dans les
Dictionnaires d'Oudin et de Cotgrave, au mot aver-
lan. Il est employé comme une épithète injurieuse
dans Rabelais. Le Ducbat, dans ses notes sur cet
auteur, T. I, page 16, note 2, dit qu'il signifie gros-
sier, brutal.
Ce mol est employé pour camarade, par Brantôme.
Il s'agit d'une offense que le prince de Portianavoit
faite à la maison de Guise, en la personne du
cardinal de Lorraine. « Si nous voulons croire la
« légende de S' Nicaise, bastard prétendu de la
" maison de Cuise, il en eut la vengeance deux
« cens ans après, au moins : car par le moyen de
« Sainct Bartbellemy, son bon averlant, il le fit
« mourir. » (Brantôme, sur les Duels, page 325. —
Voy. le Moyen de parvenir, p. 161.)
VARIANTES :
AVERLAN. Dict. d'Oudin.
AVERLANT. Brantôme, sur les Duels, p. 325.
AVERLIN. Rabelais. T. I, page t6.
Avernal, adj. Infernal. (Voyez les Dictionnaires
d'Oudin et de Colgrave.)
Avers ou Aver, subst. masc. plur. Animaux
domestiques, bestiaux. Bcles à laine dans le Dau-
phiné, selon Laurière, Glossaire du Dr. fr. Ce mot
est expliqué par bestiaux dans Du Gange, sur Join-
ville. « Pestre ses avers. » (Britlon, Lois d'Angle-
terre, fol. 141.) « 11 occist mes avers, » (dans les
Tenures de Littleton, fol. lô.) A Caen et à Valogne
en Normandie, on nomme encore un cochon aver.
(Voyez Afer.)
On trouve avère minutum, pour menu bétail,
dans le Cart. de S' Victor dé Mars. « Avoirs de
•u charrue, pour bœufs. » (Ancien Coût, de Bretagne,
fol. 150.) Avoii's étoit donc un terme générique. De
\h on disoit redevance ûe vif avoir, pour redevance
d'animaux vivans. (Nouv. Coût. Gén. T. II, p. 61.)
VARIANTES *
AVER. Loi» Norm. art. 7 et 32.
Avers. Du Gange, sur Joinville, page 100.
AvEiR. Loix Norm. art. 6, 7, 25, 29 et 32.
Avoirs. La Salade, fol. 25, R" col. 2.
Avers, préposition. Envers, au prix, en compa-
raison.
La chienne qi prent soif
Ne leus qi est fameilleus.
N'est avers moi dolereus.
PoSs. du Roy de Navarre, paraii les Poët. MSS. du Vatican, n' 1490, col. 8, R".
Averté, subst. fém. Avarice. — Résistance,
rigueur.
Ce mot signifie avarice, dans ces vers :
Li vient de grant averté
Quant de ce dont a tel planté
Me fait avoir si grant aerlé.
Focs. MSS. avant 1300, T. UI, p. 1152.
C'est dans le sens de résistance, rigueur, qu'on
a employé ce mot, dans les vers suivans :
Ah ! fait-il, tant d'avcrlé
Ai fait de moi. et tant dangier.
Fabl. MS. de S Germ. fol. 86, R° col. 1.
Averticœur, subst. masc. Maladie des cbe-
vaux('2). (Voy. le Dictionnaire d'Oudin.) Nous disons
avant-cœur ou anti-cœur.
Avertin, subst. masc. Vertige. Ce mot est
formé du latin Vertex{â]. (Voy. les Dictionnaires de
Nicot, de Monet, d'Oudin, le Glossaire sur les Coût,
de Beauvoisis, et Bourgoing de Orig. Voc. vulg.
au mot Avertin, fol. 54.) Il signifie à la fois folie,
caprice, maladie de l'esprit et foiblesse du cerveau,
éblouissement, etc. Borel, dans son Diclionnaire,
l'explique par défaut de vue. (Voy. au mot Verve,
p. 565.) On a dit avertin de chief dans le même
sens. (Voy. Erberie, ms. de S. G. fol. 90.) Le mal
S' Avertin étoit une maladie qui dispensoit de sou-
tenir le gage de bataille en personne. iVoy. Beau-
manoir, p. 308, et Oudin, Curios. franc. — Voyez
aussi les Fabliaux, ms. de S' Germ. fol. 123. — Les
Poës. MSS. d'Eust. Deschamps, fol. 220, elles Contes
de Desperriers, T. II, p. 216.)
.lii(";'f/x- est pris aussi pour la -tête même, dans
Parlonopex de Blois, ms. de S. Germ. fol. 143.)
VARIANTES :
AVERTIN. Dictionnaire d'Oudin, de Borel, de Nicot, etc.
Avertiz. Parton. de Blois, MS. de S. Germ. fol. 143, V».
(1) Froissart donne la forme nverir: '< En tesmoing de laquelle cose averir, nous avons à ces présentes fait mettre nostre
seel. » (Ed. Kervyn, V, 302.) Ce mot avait aussi le se'n»; d'accomplir ; « Tout ce qu'il avoit promis, il avery. » (Id., XIV, 292.)
11 se rencontre dés le xif siècle, (n. e.) — (2) Tumeur charbonneuse au poitrail, (n. e.) — (3) L'étyinologie est avertcre, mal
qui détourne l'esprit. On le trouve dès le xir siècle et jusque dans J.-B. Rousseau. C'est aussi le synonyme de tournis,
maladie des moutons, (n. e.)
AV
— 342
AV
ESVERTIN, EVEBTIN, OsVERTIN, VERTIOO, VERTIN, VeRTI •
•GINE, fém. Veutiginosité.
Avortinei" (s'), verbe. S'opiniàtrer. (Voyez les
Dictionnaires de Nicot et de Cotgrave, et les Œuv.
meslées de Pasquier, p. '203.)
Avertineux, aclj. Qui a des vertiges, bizarre,
frénétique, etc. (Voy. les Dictionnaires de Nicot,
d'Oudin et de Ménage, et celui de Cotgrave; au mot
avertineus.) Il estemployé comme épithète de vieux
mulet, dans les Epithètes de Martin de la Porte.
« Un avertineux destruira plus que plusieurs bien
« rassis de cerveau ne scauroient accouster. «
(S' Julien, Mesl. hist. p. G23.)
VARIANTES :
AVERTINEUX. Dict. de Nicot, d'Oudin, etc.
Avertineus. Dict. de Cotgrave.
VEiniGiNEU.\, Vertigneu.x, Vertineux.
Avesnes, snbst. fém. Nom propre de lieu. C'est
le nom d'une ville du Ilainaut, dont le territoire
porte divers fruits excellens, et entre autres des
prunes nommées Prunes d'Avesne. Parmi les droits
qui se lèvent sur les marchandises vendues h
Orléans, on lit : « Chastaignes, prunes d'Avesnes
« et fruict de bois, ne doivent rien. " (Ane. Coût.
d'Orléans, à la suite de Beaumanoir, p. 472.)
Avesprée (1'), subst. fém. La soirée. (Voyez
Vesprèe.) On lit en ce sens à l'avesprée dans les
Fabliaux, ms. du Roy (n° 7G15, T. I, fol. 105.)
Advesprement (sur le), subst. musc. Le soir.
(Voyez le Glossaire du Rom. de la Rose et les Dic-
tionnaires de Borel, d'Oudin et de Cotgrave.) « Il a
« estoit près de Vavesprer et annuitier. « (Athis,
MS. fol. 124.) « Lors alerentnoz gens fusler la ville,
B laquelle ils prindrent h un avesprement. » (Hist.
de B. du Guesclin, par Ménard, p. 185.)
L'auteur du Glossaire du Rom. de la Rose, dit
q^ue dans le vers 20,901, il signifie nuit ou obscu-
rité; mais je ne vois pas la nécessité de lui donner
cette acception, puisqu'il y est opposé au matin.
Le suppl. au même Glossaire, dit qu'en Bourgogne
les paysans disent la Vesprée pour l'après-dînée.
VARIANTES :
ADVESPREMENT (sur le). Hist. de Bertr. du Guesclin, par
Ménard, page 43.
Avesprement.
Vesprée. Suppl. au GIoss. du Roman de la Rose.
Avesprer, verbe. Se faire tard. — Tarder. Ce
mot, dans le latin, répond au moiadvespcrascere.
Dans le premier sens, ce mot s'emploie pour
désigner l'approche de la nuit. (Voy. les Dictionnai-
res de Nicot, de Monet, de Rob. Est. d'Oudin et de
Cotgrave. — Voy. aussi le Gloss. lat. de Du Cange,
au mol Vesperatus.) Phil. Mouskes, parlant de la
reine Erédégonde, dit :
Et fist un soir, quant avespri,
Ocire son signour Celpri.
Ph. Mouskes, MS. p. 3i.
Un soir, si com il avicspri.
Ibid. page 20.
On disoit aussi avesprer pour tarder, se laisser
surprendre par la nuit. (Voy. l'IIist. de France en
vers, à la suite du Roman de Fauvel, ms. du Roi,
n''G812, fol. 79, V col. 1.)
VARIANTES *
AVESPRER. Dict. de Nicot, Monet et Oudin.
AVESPERiR. S' Bernard, Serm. fr. MSS. p. 11.
AvEspRiR. Glossaire du P. Labbe.
AviESPRiR. Pli. Mouskes, MS. p. 20.
Avet, subst. maso. Sapin. Ce mot vient du lalin
abies (I). (Voy. les Dict. de Monet, de Ménage,
d'Oudin et de Cotgrave.)
Aveugle (2), adj. et partie. Aveugle, aveuglé. —
Qui aveugle. — Absorbé, évanoui, disparu. — Qui
ne prend point jour.
Le mot aveule, dans S' Bernard, répond au latin
eœcus. Il est opposé i^i oscur dans cette phrase,
p. 212: « Sei oyl ki oscur estoient purdevinrent
« plus aveule. » Dans le lalin « oculi ejus caligan-
« tes mullo magis excœcantur. «
On disoil autrefois aveugletté, pour qui va en
aveugle, qui va à l'aveuglette, comme on le dit
dans'le langage populaire. Parlant de la vie: « Bien
« va que l'on y est dedans avant qu'en voir l'entrée,
« l'on y est porté tout aveugletté. » (Sagesse de
Charron, p. 254.)
On disoit aussi aveuli pour aveugle.
Or oies corne fortune vole,
Et refait l'un et l'autre afole ;
Com celé ki trop est isniele
Tourne et retourne sa roielle ;
Ne de tourner ne s'umelie,
Quar ele est forbe, et aveulie.
Ph. Mouskes, MS. p. 662.
Ce mot est employé avec la signification: évanoui,
qui a disparu dans les vers suivans :
Entre Lu.xure qu'à trop maie entrée
Pejor maintenue et fin desespérée
Quant acoulumance l'y est enveloppée
Et foy de Dieu part comme chose avmiglée.
i. de Meu.ig, Cod. 1761-1764.
Au féminin, o\\[voww&aveuglcssecoïame épithète
d'ambition, dans les Epilhèles de Mart. de la Porte,
avec la signification : qui aveugle.
On lit: PHf/('/(//fl!'r'»,'7/t', pour absorbé dechagrin,
dans la Chronique Française, ms. de Nangis, sous
l'an 1199; le latin porte dolore absorptus.
Dans un sens beaucoup plus figuré, on a nommé
feuestres aveugles, des fenestres qui ne prenaient
point jour. (Voy. le Coul. Gén. T. II, p. 1072 et
Nouv. Coul. Gén. p. 1137.)
VARIANTES :
AVEUGLE. Orthogr. subsist.
Aveule. S' Bernard, Serm. fr. MSS. p. 46 et passim.
AvuGLE. Fabl. MS, de S. Germ. fol. 52, R« col. 1.
Veugle, Veule, Veules, Wule.
AvuLLES. Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis.
Avule. Vies des SS. MS. de Sorb. ch. lx, col. 21.
Aveuli. Phil. Mouskes, MS. p. 662.
AvuGLÉ. Chron. fr. MS. de Nangis, an 1306.
Aveugletté. Sag. de Cheirron.
Aveuglesse au fém. Triomphe de la Noble Dame, fol. 274.
(1) Ou plutôt abietem. (N. E.) — (2) La racine est ab privatif et oculo, mot à mot sans œil. (n. e.)
AV
— 343 —
AV
Aveugler, vei'be. Devenir aveugle. — Rendre
aveugle. Ce mot, dans S" Bernard, répond au latin
excœcare.
On trouve ce mot avec la signification : devenir
aveugle, dans le passage suivant: « Donnèrent au
« héraut de beaux dons qui depuis lui vindrent
« bien a point : car depuis il aveugla. » (Fioissart,
Liv. IV, p. yi.)
Ce mot signifie rendre aveugle, dans les vers
suivans :
De grâce, amour, aveurjle moy les yeux.
Œuv" de Des Portes, fol. 561.
Cil ont bien le siècle avulé,
Qui, par mentir, vont recouvant :
Miex aim languir, en attendant
Que joie avoir de folseté.
Andcfrois li Bastars, PoC-s. MSS. avant 1300. T. II, p. 848.
VARIANTES :
AVEUGLER. Orthographe suljsist.
AvuGLEii. Chron. du xiii» siècle, MSS. de Bouh. ch. XL.
AvEUGLiK. Contes de la R. de Nav. p. 52.
AvEULER. S' Bern. Serm. Fr. MSS. p. 257 et 259
AVEULiER. Adam li Bocus, Poës. MSS. av. 1300, T. IV, p. 1423.
AvEULisEii. Th. Mouskes, MSS. p. 315.
AvuLER. Andefrois li Bastars, Poës. MS. av. 1300, T. II. p. 848.
AVEULEB. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 61, R» col. 2.
Aveugleté, subst. fém. Aveuglement. Ce mot,
dans S' Bernard, répond au latin cœcitas. (Voy. les
Dict. de Borel et de Cotgrave.)
VARIANTE :
AVEULETEIT. S- Bernard, Serm. Fr. MSS. p. 48 et pctssi)ii.
Aveuglettes, adv. En aveugle.
Mais d'aller ainsi avewjlettcs,
L'on chet, s'on ne s'en donne garde.
L'Aoïaiit rendu Cordelier, p. 541 .
VARIANTES :
AVEUGLETTES. L'amant rendu Cordelier, p. 541.
A L'AVEUGLETTE. Dict. d'Oudin.
En aveuglon.s. Mém. des C"« de Champ, à la suite de la
Coût, de Troyes, par Pilhou, p. 533.
Aveiiglissement, suhsl masc. Aveuglement.
(Voy. Cartheux, Voyage du Cliev. errant, fol. (iOO.)
Aviander (s'), verbe. Se repaitre. (Voy. le Dict.
de Nicot.) Se fournir d'alimens, suivant le Dict.
d'Oudin. (Voy. le Dict. de Cotgrave.) Le mot s'avian-
rfer est pris au figuré dans les vers suivans, tirés
de Grevin :
T'aviandant aux secrets
Des auteurs latins et grecs.
Goujot, Biblioih. Fr. T. XII, p. 153.
Avichoix, subst. masc. Avis. — Qui donne des
avis, conseiller.
Ce mot signifie avis dans le passage suivant :
" Il print habit d'hermile, aux avichoix d'un très
•> faulx hypocrite. » (Monstrelet, Vol. II, fol. 161.)
Dans cet autre passage, du même auteur, ce
même mot signifie qui donne des avis, conseiller.
« A député, pour électeurs, avichoix et proclama-
" leurs, certains hommes ou diables, soubs figures
" et espèces d'hommes mussez. » (Monstrelet, Ann.
1439, Vol. II, fol. 161.)
Avidité, subst. fém. Ce mot subsiste. Nous
remarquerons seulement qu'il étoil nouveau du
temps oîi Ménage écrivoit ses remarques sur la
Langue françoisè ; on croit qu'il a été mis en usage
par Ronsard (1). (Remarques de Ménage, p. 76.)
Avier, verbe. Animer, donner la vie. — Se for-
tifier. — Enduire d'argent vif.
Sur le premier sens, voyez le Dict. de Monet aux
mots Avier et Aviver, et Du Gange, Gloss. latin, au
mol Avivare.
Et tout adès en regardant
Aviveras le feu ardant.
Rom. de la Rose, vers 2371.
Car mes voloirs à ce s'avive,
Ne dou faire ne serai jà lassez
Tant qu'en ce mond vous plaira que je vive.
Machaut, MS. fol. 4.
On lit aviver dans le Dict. de Cotgrave. " La par-
>' faite révolution des lumières célestes qui guident,
« et avivent notre \ie. » (Ponlus de Thyart, Dis-
cours du temps, fol. 14.)
Avivre un corps, c'est-à-dire l'animer, lui donner
la vie. (Dict. d'Oudin.)
Aviver signiHoil aussi fortifier, prendre une nou-
velle vigueur, dans les vers suivans :
Voslre prouesce tout temps croist
Tout temps avive, qui qu'en poist.
Rom. de Brut, MS. fol. 9i, V° col. 2.
On disoit dans le même sens s'aviver pour s'ani-
mer, s'exciter.
Cilz de Poitou bien assaillent
Et ly Breton pas ne leur faillent :
Ly uns pour les autres s'avivent,
Et aux Rommains abatre estrivent.
Rom. de Brut, MS. fol. 93, V* col. 1.
Enfin avfvfr signifioit, selon Monet, « enduire
" quelque mélaird'argentvif (2). » (Voy. le Diction-
naire de Monel.)
VARIANTES :
AVIER. Budé des Oiseaux, fol. 113, V».
Aviver. Dict. de Monet et de Cotgrave.
.VvivRE. Dict. d'Oudin.
Avier (s'), verbe. Commencer à vivre, naître.
Ung hom devient bien sainct à la fin de sa vie
Aussi lost comme fait cils qui de premiers s'avie.
Ger. de Roussillon, MS. p. 213
Avieiise, adj. au fém. Envieuse. « Le fabel de
« sirellains, et dame Aviciise su femme qui se
<c combattirent h. qui porteroit les braies. » (Fau-
chet, Lang. et Poës. franc, p. 181.)
Aviez, part, au plur. Animés , pleins de vie.
« Encores que les jumeaux soient d'un même sexe,
« si sont ils plus délicats et foibles, et moins aviez
<' que les autres. » (Bouchet, Serées, Liv. II, p. 205.)
C'est dans ce même sens qu'on a dit d'un tableau
dont les figures sembloient animées : « Comme s'ils
" eussent voulu empescher ceux qui estoieiit aviez
« en ce tableau, de bouger de là. » (Bouchet, Se-
rées, Liv. III, p. 105.)
(1) On trouve en efîet, dans l'édition de ce poète de 1625, page 615: «Incontinent que la soif futesteinteet de la faim l'ai-irfiVé
restreinte. » Et en note : « L'ardeur de manger, .le ne sçache point de mot françois plus propre, encores qu'il soit mendié
du latin. » (n.e.) -(2)Denos jours encore, nrii'er l'or, c'est l'étendre après qu'il a été amalgamé avec le vif-argent, (n. e.)
AV
— 344 -
AV
Avignon, subst. masc. Nom propre de ville,
a Braves d'Avignon » semble être un proverbe dans
les Contes de Desperiers.
Trois choses rares en Avignon,
Beau mur, belle femme, et beau pont.
Favin, Théâtre d'Honneur, T. I, p. 455.
Avigourir, verbe. Donner de la vigueur. (Voy.
les Dict. d'Oudin et de Cotgrave , et les Œuv. de
Baïf, fol. t2G, Y°.)
Aviiens, subst. masc. piiir. Avignonois. Les
habitnns d'Avignon. Phil. Mouskes, parlant de cette
ville prise par Louis VIII, dit :
Et de ces derniers feroit-on,
Par deçà l'aiguë d'.\vignon,
A l'aheie Saint-.\ndrieu,
Uns Castiel, u en autre lieu
A oes le Roy, en son pooir,
Pour Aviiens faire cremoir.
l'hil. Mouskes. MS. p. 733.
Avilance, sîii/si. fém. Opprobre, injure, ou-
trage, infamie.
Arviragus ot grant pesance,
Sy ly sembla grant avilance
Que si estoit en clos tenus.
Rom, de Brut, MS. fol. 39, I\' col. 1.
On a dit en parlant de Guillaume-Longue-Epée ,
qui étoit en guerre contre Riouf :
Fuir, se dit, s'en veut, si s'en ira en France.
Guillaume, dit Boton, tu dis grant avillance:
Encor n'i as féru d'espée, ne de lance,
Et ja t'en veulx fuir.
Rom. de Rou, MS. p. 5G et 57.
VARIANTES :
AVILANCE. Rom. de Brut, MS. fol. 39, R» col. 1.
Avii.LANCE. Rom. de Rou, MS. p. 56.
ViLLANCE. Rom. de Rou, MS. de Bombardes.
Avilemant, subst. masc. Diminution. On lit
dans le Dict. de Monet : Avilemant de daurées,
pour rabais de denrées.
Avilement, s;(/;s^ mase. Avilissement, oppro-
bre.
Qui blâment les preudomes, à conseil seulement.
Bien sachiez que il font lor grant avillement.
Doctrinal, MS. de S. Germ. fol. 101, V col. 3.
Avilement [faire un) , pour s'abaisser, faire un
acte de bassesse; parlant d'un Prince qui étoit
descendu de son cliar à la vue de deux hommes
pauvres, mal vêtus et hideux, pour se jeter à leurs
genoux, il est dit qu'un frère de ce prince :
L'en reprisl durement
De ce qu'il avoit fait si grand avilement.
Ger. de Roussillon, MS. p. 92.
VARIANTES :
AVILEMENT. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 334, V» col. 2.
AviLi-EMENT. Rom. de la Rose, vers 2965.
AviLLEN.NE.MENT. Dict. de CotgravB.
Aviler, verbe. Avilir, dégrader, gâter, faire tort
ou injure. (Voy. le Dict. de Monet au mot Aviler,
celui de Cotgrave au mot Avilener.) Dans le sens
propre, aviler signifie baisser de prix. On emploie
ce mot au figuré pour dégrader, avilir.
Qui vorroit raison faire, l'en devroit, par S' Gile,
Riche feme qui sert de barat, et de guile.
Et qui pour gaaigner vent son cors, et avile,
Aussi con un Mesel, chacer fors de la vile.
Chastie Musart. MS. de S. Germ.
» Les gens d'église ont si avilenné par leurs
« coulpes, eux et leur estât, qu'ils sont ja desdai-
« gnez et des grands, et des menus du monde. »
(Al. Charlier, de l'Espérance.)
N'est mes cuers tant soit avilennis,
Se il se velt à servir atorner,
Amors, ke lues ne le faice muer
En tote honor, et tote cortoisie.
Vilains d'Arras, Po^. MS.
Comment se puet avilonnir
Fins cuers, et loiaux volentez.
Poës. MS. du Vatican, n» 1522. fol, 151, R- col. 2.
Trop s'avilonist pucele
Ki d'amer va proiant.
Ernous Compains, ToC-s. MSS. :
lant 1300, T. III, p. 1259.
Guillaume vit le peuple tout a Riouf, torné.
De ses hoimnes mesmes se vit avionni.
Rom. de Rou, MS. p. 5C.
Trop mesprent Dame qui proie
Son ami avant, por quoi
S'aveillevoit ele si'?
Se chil à le cuer failli.
Pocs. MS. du Vatican, n" U90, fol. 140. R- col. 2.
VARIANTES :
AVILER. Gloss. du Rom. de la Rose. - Dict. de Monet.
AviLLER. Chastie Musart. MS. de S. Germ. fol. 106, V°.
AviLiER. Fabl. MS. de S. Germ. fol. 80.
AviLLiER. S. Bern. Serm. fr. MSS. p. 87.
AviLLiR. Fabl. MS. du R. n° 7218, fol. 347, X" col. 2.
AviLENiR. Poës. MSS. avant 1300, T. II, p. 858.
AviLTiR. Fabl. MS. du R. n" 7615, T. I, fol. 66, V» col. 2.
Avilener. Dict. de Cotgrave.
AviLLENNER. Gloss. du Rom. de la Rose.
.\vilenner. Al. Chart. l'Esp. p. 389.
AviLLANNER. Anc. Cout. de Bret. fol. 92, V".
AvioNNER. Rom. de Rou, MS. p. 56.
Avilonnir. Poës. MS. du Vat. n« 1522, fol. 151, R».
AviLONiR. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 293, col. 2.
Aviné, adj. Rouge. — Ivre, ou qui a bu du vin.
Le premier sens se lire de la couleur du vin ;
de là. on trouve aviné pour épithète de cuivre, et
de feu, dans les Epithètes de Mart. de la Porte.
Aviné ou Eviné. qui a pris du vin plus qu'il ne
lui en faut. (Celt-IIel de Léon Trippault), ou seule-
ment qui a bu du vin par opposition à celui qui
étoit à jeun; ceux qui estaient avitiex-, sont ainsi
désignés pour les distinguer de ceux qui surent
jeûner. (Ger. de Roussillon, ms. p. 198.)
Avirer, verbe. Regarder ou tourner autour.
» Les autres jooyent aux tables, et aux dez sur le
a pré qui esWDit ■v'ert, et li aucuns musoient sur les
« fossez parlons et aviroioit la muraille dessus
a dite. » (Hist. deB. DuGuesclin, par Ménard, p. 491.)
Aviron (1), stibst. masc. Moyen. Ce mot subsiste
(1> C'est proprement l'instrument qu'on vire, qu'on tourne ; le châtelain de Coucy, au xii' siècle, et JoinviUe, au xin«,
l'emploient dans ce sens. (n. e.)
AV
— 345 —
AV
dans la signification de Rame. De là on l'employcil
au figuré pour moyen.
Ainsy je dois voler outre la nue,
Par l'aviron d'une aële non connue.
Poès. d'Araad. Janiin, p. 1G6.
Avironner, verbe. Environner (1). Ainsi on
disoit au figuré.
granz pourelez Vavironne.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. lU, V" col. 2.
VARIANTE ;
AVIRONER. S' Bern. Serm. Fr. MSS. p. 206 et 297, dans
le latin circumdare et le participe circumamicta.
Aviscerne, subst. fém. Avicenne. Nom propre.
C'est ainsi qu'est écrit le nom du célèbre Avicemie
dans le ms. intitulé: Modus et Kacio, fol. 40, R°.
Avisonner, verbe. Avoir des visions, rêver. Ce
mot est pris en ce sens dans les vers suivaus :
.... Quant avient que je sui endormiz
Solaz en ai tout celui qui doit plaire,
Mes cruelment le m'estuet comparer
Au resvoillier, quant je ne puis trover
Ce qu'en dormant m'estuet avisonner.
Gates Brullés, Poès. MSS. avant 1300, T. I, p. 102.
Aviter, verbe. Eviter.
Renaut qui amor avite.
Thibaut de Navarre, Poës. MSS. avant 1300, T. I, p. 228.
Avitin, adj. Patrimonial. « Bens, biens, et héri-
« tages avitins, « c'est-à-dire propres. Patrimoine
qui vient des aïeux, wilgAirement papoaux ('2). (Voy.
Laurière, Gloss. du Droit Français, les Dict. de
Borel, de Cotgrave et le Gloss. lat. de Du Cange,
aux mots avitinus et aviatica hœreditas.)
Avivoir, subst. ma^c. Qui donne la vie, qui
anime. (Voy. les Dict. d'Oudin et de Cotgrave.)
Avivres (3), subst. fém. Avives. Maladie du
cheval.
Avoer. Ce mot semble corrompu dans le passage
suivant, oi!i il paroit employé comme substantif ;
Il ne m'échapera devant le fruit meur ;
Si li ferai souffrir mon greu ai'oere.
Rom.de Rou, MS. p. 79,
Avoi, Interjection ou exclamation. L'Editeur
des Quinze Joyes du Mariage, l'e.Kplique par
Mon-Dieu!
Amors velt que le tiene à oste :
Avoi, qu'est mes/sens devenus?
Ge sui toz vifelz, et tos chenus.
Alexandre et Aristote, MS. de S' Germ. fol. 73, R* col. 2.
Dant Coûtant d'une part l'acorte:
Que requiert cete Dame ci ?
Avoy, Coûtant, por Dieu merci
Ge suis venue mainte fois.
Fabl. MSS. de S' Germ. fol. 79, V* col. 2.
VARIA.NTES :
AVOI. Fabl. MS. du R. n°7989, fol. 213, V col. I.
Avoy. Les Quinze Joyes du Mariage, p. 45.
Avoie, subst. fém. Couleuvre. (Voy. les Dict. de
Monnet et de Cotgrave.)
Avoieinent, subst. masc. Inslitralion. C'est
proprement l'action de mettre sur la voie, indica-
tion, renseignement, instigation, suggestion. « Galle-
« tiault prie à la Damoiselle qu'elle îuy dye nouvelle
« de Lancelot, et aucun avoyement, et elle dist
« qu'elle n'en sçavoit rien. » (Lancelot du Lac.
T. 1, fol. 161.)
Ce mot avoiement est mis dans le passage suivant
pour: instigation, suggestion; parlant de ceux qui
étoient choisis pour élire les echevins de la ville de
Douay : « avant qu'il se partent des Eglises, jureront
>c main levée contre les sainz, qu'il ne recevront
« parole, escripture, avoiement d'autrui, pour
« aucun faire Echevin. » (Ordon. des Rois de Fr.)
VARIANTES :
AVOIEMENT. Ordon. des Rois de France, T. IV p 131
Avoye.ment. Assises de Jérusalem, p. 193.
Avoier. Mettre sur la voie, s'acheminer, rentrer
dans le droit chemin. — Diriger, conduire. —
Aboutir. — Instruire, enseigner. — Ecarter et
peut-être égarer, mettre hors de la voie.
Sur le premier sens, voy. les Dict. de Borel et
de Monet, au motayo?«';les Dict. de Aicot, d'Oudin,
et le Gloss. de Marot, au molavoyer.
Il est au propre et au figuré dans les deux pas-
sages suivans :
Prist congié; chascun &'avoie à la maison.
Machaut, fol 216, V» col. 3.
La fin a requis à ta court jugement
Sommes de l'acort, Bon Roy, que l'on ly face
Avoyer, se veult que tu ly face grâce.
Ger. de Roussillou, .MS. p. 25.
Bien faire sont avoié.
Athis, MS. fol. 76, R» col. 2.
Ce mot a été employé dans le sens de diriger,
conduire, mener.
Biaus servirs, et solïrance,
Fait fin ami auoier,
Et s'onor croistre, et haucier.
Gilbert de Bernevillo, Poès. MSS. avant 1300, T. I, p 212.
Dieu ait mercy de Iuy, et ou les siens l'ame.
Ger. de Roussillon, MS. p. 15i.
Dans le sens d'arriver, aboutir, on a dit :
Dame ou tos biens s'aboie.
Pierre Kins de le Coupele, Poës. MSS. avant 1300, T. 111, p. 1083.
Ce mot a signifié instruire, enseigner.
S'il ne vous en set conseillier,
N'ulz ne vous en peut avoier.
Rom. de Brut, MS. fol. 66, R' col. i.
On lit aidier dans le ms. de M. de Bombarde.
D. Maitène dans son Gloss. explique ce mot par
égarer.
Il est employé pour écarter, repousser ou dissi-
per, dans ces vers (4) :
En leur venir si les effroient
Come granl pièce les avoient.
Athis, MS. fol. 82, V col. 2.
(1) Comme chercher (circare) dérive de circa; ce mot a le sens de parcourir: « Ainsi avironnoient-ïls le pays. » (Froissart
éd. Kervyn, \VI, 227.) (n. e.) - (2) « Biens, abilins vulgairement dits pappoaux. » (Coutume de Dax, titre I, art. 1.) Ce
dernier mol vient du grec nariTKooç, patrimonial, (n. e.) - (3) C'est un engorgement des glandes parotides. L'étyraologie
est 1 arabe ad-ckiba (même sens). (N. e.) - (4) Avoier signifiait plutôt suivre la bonne route : i^ Si vous poriés aussi bien
fourvoyer que Qivoyer. » (Froissart, éd. Kervyn, V, 67.) (n. e.) l' ■>
44
AV
— 346
AV
Celui qui me eonnoist et voit
Qu'il me consuet, et qu'il tn'avoil
Fabl. MS. du Roi, n" 7218, fol. U2, R' «ol. 1.
VARIANTES :
AVOIER. Dict. de Borel et de Monet.
Anûyer. Lisez Avoier. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 176.
AviER. Ger. de Roussillon, MS. p. 15. — Dict. d'Oudin.
AvovER. Ger. de RoussiUon. p. 25. — Gloss. de Marot.
Ravoier, Ravoyer, Reavoyer.
Avoiié, participe. Rempli, comblé. — Instruit,
appris.
Tiels fu l'abbé de S' Denis
Clers, débonnaires, et ounis,
Et de tous les biens avmié.
Ph. Wonakes, US. p. "09.
Avoillée, participe. Eveillé, vigilant.
Si soyens doisormais avoillié et adroit
D'amender en ce monde....
(Et plus bas ;)
Ainsin poult ly bon dux Girart estre avoillie:
Et d'amender ses vices de cuer apparoillié.
Ger, de RoussiUon, MS. p. 190.
Avoine, participe. Nourri d'avoine.
Li miens i ert dois ier (1) avoine.
Fabl. MSS. du R. n» 7315, T. II, fol. 151, R° col. 1.
Avoii*, suhst. musc. Biens, facultés, richesses.
(Voy. le Gloss. du P. Martene, (Jloss. de Marot,
Gloss. de Du Gange, sur Yillehardouin, Gloss. sur
les Coût, de Beauvoisis, Gloss. sur le Rom. de la
Rose et Dict. Etym. de Ménage, au mot Avoir. —
Yoy. aussi le Gloss. lat. de Du Gange, aux mots
Averium et Afferi, et le Gloss. sur les Coût, du
Beauvoisis, au mot Aver.)
Large d'avoir, et tenant de Merchi.
Hughes de Brogi, Poes. MSS. avant 1300, T. III, p. 999.
Il fist tant en pou de temps
Son avoir et par son sens
Qu'il ot G et XL voeles.
Wachaut, MS. loi. 231, V- col. 2.
Science vault mieuLx que ne fait avoir,
Car tu en puez aidier toy et les tiens.
Poês. MSS. d'Eusl. Desch. fol. H8, col. 3.
J'ay toujours oï dire
Que li cors gaaigne Vavoir.
Li Cuens de Brel. Poës. MSS. avant 1300, T. I, p. 76.
Fy d'avoir qui n'a joie,
Et d'amours sans monnoye.
Proverbe dans le Dict. de Cotgrave.
Remarquons les expressions suivantes :
1° Vif avoir se disoit pour animaux vivans.
(Voy. Avers.)
2° Avoir en terre, non extrayé, c'est-à-dire biens,
choses enfouies dans la terre. (Voy. la Coirt. de
Hainaut, au :Nouv. Goût. gén. T. II, p. 145.)
3° Avoir de pois, ou de poids Ci), c'est-à-dire toutes
choses ou marchandiscsemballéessusceptibles d'être
pesées. « Tout avoir de pois, pour chascun, vingt
« sols quatre deniers, et en seront creuz les mar-
« chands, ou les conduiseurs de dire, par leur
« serment, ce qui sera ez balles sans defardeler. »
(Ordonn. des Rois de Fr. T. I, p. 783, notes, col. 2.)
Et pour ce que marchandise
Estoit toute perdue à Pise
A Venise, à Rome, à Gennes
De draps d'or, de soye et de pennes
O'avoir de pois, d'espicerie.
Machaul, MS. fol. 233, R- col. 2.
Avoir de pois, ou saffran dort.
Id. fol. 220, V- col. 2.
4° Avoir de prix, c'est-à-dire marchandises qu'on
peut apprécier, qu'on perut marchander. •• Les drap-
« piers en gros, ou en détail, les espiciers, frippiers,
" cordiers, vendeurs de hanaps et tous autres
" marchands d'avoir de prix, pourront prendre de
« leurs marchandises, et en leurs marchandises
" deux sols parisis pour livre d'acquest. • (Ordonn.
des Rois de France, T. II, p. 364.)
Avoir à clers, toison à chien
Ne doivent pas venir à bien.
Fabl. MS. du R. n" 7615, T. 1, fol. 72, V col. 2.
variantes :
AVOIR. Gloss. de Du Gange sur Villeh.
AVER. Gloss. sur les Goût, de Beauvoisis.
Aveir. Loix Norm. art. xxxi et XLI.
AvoiRE. Coquillart, p. 129.
Avers. Fabl. MSS. du R. n» 7989, fol. 75.
Avoiraux. Il faut peut-être lire a voir aux,
a vers iaux, pour avoir eux, à les voir, ou peut-
être sont-ce des adjectifs qui signifient avare.
Les Biars i fu avoiraux.
Rom. de Rou. MS. p. 357.
On lit averiaux dans une autre copie.
variantes :
AVOIRAUX. Rom. de Rou, MS. p. 357.
Averiaux. Ibid. autre MS.
Avoisinement, subst. masc. Proximité, voi-
sinage. " Les herbes, et plantes sont affectionnées
" les unes aux autres, et entre autres n'en y a de
» si ardente qu'est le palmier, desquels ils sont
« deux espèces, masle et femelle, et que le masle
« convoite Y avoisinement de sa compagne ; que,
« s'il arrive que la femelle soit plantée loin du
« masle, il dessèche peu à peu. » (Du Verdier,
Bibliolh. p. 5.)
Avoisiner, verbe. Etre proche, être voisin ;
approcher. (Voy. Du Gange, Gloss. lat. au mot
vicinare et le Dict. de >'icot.)
De grasse cuisine
Pauvreté s'avoisine. '"
Prov. dans le Dict. de C 'tgra\e.
Avoiti'ement, subst. masc. Avortement. (Voy.
Dictionnaire de Nicot.)
Avolé, subst. et adj. Etourdi. — Etranger. —
Bâtard.
Au premier sens avolé signifie un étourdi, un
homme qui ne prend conseil que de lui-même,
selon le Dict. de Borel, et Celthel. de Léon Trip-
pault, au mot Avolé.
Ce mot signifioit aussi étranger et on le trouve
en ce sens sous les diverses orthographes. Il signi-
fioit proprement qui est venu d'ailleurs, qui n'est
pas originaire du lieu où il s'est établi. (Voyez Du
(1) Dès hier. — (2) Les Anglais donnent à la livre de 16 onces le nom d'nvoii- du poids, (n. e.)
AV
- 347 —
AX AY
Gange, Gloss. lat. au mot Advoli.) « Ceux qui
« estoient ainsi bannis, dont il y avoit foison, se
« tenoyent à S' Orner le plus, et les appelloit-on
« avoués (1). » (Froissart, éd. Kervyn, II, 417.)
« Par ma foy, dist-il, c'est meschef de celluy avollé,
« que l'on ne scet qui il est, qui emporte honneur de
« tous les chevaliers de la grant Bretaigne. » (Per-
oeforest, Vol. VI, fol. 115. — Voy. les Poës. mss. de
Froissart, p. 122, col. 4.— Ph.Mouskes, ms. p. 779.)
Ce mot est employé comme épithète d'étranger
dans les Œuv. de Baïf, fol. 177.
On trouve avolé, expliqué par Bâtard, dans l'Hist.
du Théâtre français, T. III, p. 492, et il est employé
en ce sens dans Perceforest, fol. 110.
VARIANTES :
AVOLÉ. Celthel. de Léon Trippault.
Avollé. Perceforest, VoL VI, fol. 115, V» coL 1.
Advollé. Fabri, Art. de Rhét. livre 1, fol 149, R".
ESVOLÉ, EVOLLÉ, EVOLLÉE.
Avoleinent, substantif mascuUn. L'action
d'accourir, de venir en volant. (Voy. les Dict. de
Nicot et d'Oudin, au mo\, Avolement.)
VARIANTES :
AVOLEMENT. Dict. de Nicot et d'Oudin.
ESVOLEMENT.
Avoleiiter, verbe. Inspirer de la bonne volonté.
Avoir bonne volonté.
Ce mot s'est dit dans le sens de gagner le cœur,
mettre dans ses intérêts. <• Ce fut fait sur l'espérance
« que le dit duc de Bretaigne viendroil servir le
« Roy avec ses Bretons, et déclairroit les Oiiéannois
« ausquels il avoit promis de les servir et pour lui
« avolenter. » (Monstrelet, Vol. I, fol. 99.)
Il a été employé aussi pour : avoir bonne
volonté :
De lui servir s'avolenloU.
Fabl. MS. du R. n- 7211
, fol. 51.R-C0I. !!.
VARIANTES :
AVOLENTER. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 57.
AvouLENTER. Monstrelet, Vol. II, fol. 128.
Avoler, verbe. Venir en volant, accourir. (Voy.
le Dict. de Nicot.) « Lors luy estant à la dite fenestre
« vint soudainement delà cité avollanl la pierre
« d'un veuglaire qui ferit ù la fenestre ou estoit le
« dit comte. « (Monstrelet, Vol. I, fol. 99.)
. . . S'aucuns bcsoings te court seure,
Vrais amis est qi>! en celle heure
Aporte le sien, et avole.
Poës. MSS. d'Eust. Desch.
VARIANTES :
AVOLER. Dict. de Nicot.
Advoler.
AvoLLER. Monstrelet, Vol. II, fol. 39, R«.
ESVOLER.
Avon, subst. musc. Rivière. (Voy. le Dict. de
Borel, 2' addit. au mot Aven.)
\\orte, participe. Avortée au fém. On lit dans
la complainte d'Alain Chartier :
Quand sa Dame fut avorte.
Avorter, verbe. Haïr. — Faire avorter.
Ce mot a signifié haïr. (Voyez le Dict. de Borel.)
On disoit aussi avorter pour faire avorter, et,
dans le sens moral, rendre inutile. « Avorte le fruict
« dans le ventre. » (Sagesse de Charron, p. 114.)
« Accidents qui rti'Of/e?ii les fruits de la dite trefve. »
(Négociât, de Jeannin, T. II, p. 470.)
Avortonne, subst. fém. C'est le féminin d'avor-
ton. Terme d'injure. Satan, parlant de S" Barbe :
« Barbe la faulce avortonne. » (Hist. du Théàt.
franc. T. II, p. 73.)
Avouiller, verbe. Ouiller, remplir.
Avouillette, subst. fém. Entonnoir.
Avoytrer, verbe. Avorter.
VARIANTE :
AvoRTiR. J. le Maire, lUustr. des Gaules, livre I, p. 55.
Axis, subst. musc. Essieu. Froissart, parlant de
Phaéton emporté par les chevaux de son père, dit :
Li (2) axis ront, le char renverse
Pheton cheit la teste enverse.
Poes. MSS. de Froissart, p. 184, col. 2.
On trouve assis pour essieu, dans le Glossaire du
P. Labbe, p. 490.
VARIANTES :
AXIS. Froissart, Poës. MSS. p. 184, col. 2.
Assis. Labbe, Gloss. p. 490.
Ay. Diphthongue que Des Accords reproche aux
Parisiens de prononcer comme s'il y avoit oué.
(Voyez Des Accords, des Equivoques, 'fol. C8.) Pas-
quier remarque que Ramus la prononce comme un
e pur. (Voyez les Lettres de Pasquier, T. I, p. 137.)
On employoit indistinctement aij et ax pour al.
Ainsi Lanval s'appelloit aussi Lanvax et Lanvaij.
(Voy. Fabl. ms. du R. n" 7989, fol. 50, V- col. 1.)
Ayde, subst. fém. Ide. On lit en ce sens : « En
« l'uiliesme ayde du mois d'aoust. » (Chronique
françoise de Nangis, année 1224.)
Ayemans, subst. masc. plur. Aimant. On lit
dans Perceforest : " Les fli/6'?»flHs auraient le fer. »
(Perceforest, Vol. II, fol. 35, R" col. 1.)
Ayes, subst. fém. Haie.
Vignes n'y a, ne rivière, ne gloe,
N'oyes, buisson, pour les leups demourer.
Poës. MSS. d'Eust. Desch. fol. 178, col. 3.
Aygle. Ce mot semble une exclamation ou peut-
être un nom propre, dans ce passage :
Aygle, j'ai toujotirs appris
A estre loyaux amis.
Chans. MSS. du C" Tliib. p. 60.
Aymant, subst. masc. Diamant. (Voyez le Dict.
de Borel. — Marbodus, col. 1640.)
Vers raoy la truis plus dure qn'aymant.
Richard de Fomival, Poés. MSS. av. 1300, T. I, p. 124.
Aymes, exclamation. Elle est souvent employée
(1) On surnommait ainsi les chevaliers, écuyers et bourgeois que Jacques d'Artevelde exilait de Flandre, (n. e.) —
(2) C'est la forme latine transportée en français, (n. e.)
AZ
— 348
AW
comme exclamalion de douleur, dans rilisl. (les Trois
Maries, en vers, mss. (Voy. aussi Molinet, p. 155.)
Ayiî de gré. Cette expression semble signifier
de plein gré. On lit dans Britton, des Loix d'Àngie-
terre : «■ Par son inin de gré et ove sa franclie
« volunté. » (Fol. '2CÔ, V".)
Aynncs (quarante). 11 faut lire quarantaines en
un seul mot, pour quarantaine que l'auteur a
séparé afin d'avoir une syllabe de plus. (Voyez le
Calendrier de Molinet, p. 195.)
Ayrer, verbe. Prendre l'air.
Azelle, subst. Espèce d'injure. Machaut, pour
exprimer une multitude innombrable, a dit:
Et autant comme de poil a
Sur quanque Dieu onques créa
Comme il est plumes et fincelles
Mouches, mouchettes, et azelles.
Machaut, MS. fol. 209, Y- col. 2.
Azemin, ndj. Persan. Altération du mol az-erni
qu'on a souvent employé en ce sens. De là, on
trouve : « ouvrage à'a-^emine » pour ouvrage per-
san; dans Rabelais, T. IV, p. 3, on lit: « porfilée
a d'oràouvraiged'aiewiitte. » Onlitencoredansun
autre endroit du même auteur : " fol A'a::,emine. »
(Ibid. p. 207. — Voy. Le Duchat sur Rabelais, loc. cit.)
Aziman, subst. masc. Aimant. (Voy. Ayemans.)
Awan, adv. Désormais, ci-devant. Ce mot sem-
ble formé du latin hoc anrio. 11 exprime indistincte-
ment le passé et l'avenir, désormais et ci-devant
On a vu ces deux significations contraires au mot
Avant. Borel, au mot Auwan, l'explique par: celte
année.
Grans amis, et mescheance
Li puis awan avenir
Lie est ke me fait languir.
Jehan do Renli, Poès. MS. avant 1300, T. III, p. 1195.
VARIANTES :
AWAN. Poës. MSS. avant 1300, T. III, p. 1195.
AvAN. Poët. MS. du Vatican, n» 1522, fol. 153, R» col. 1.
AWEN. Poës. MSS. de Froissart, p. 281, col. 2.
Auwan. Poës. MS. du Vatican, n° 1490, fol. 137, V».
AuwEN. Dict. de Borel, 2'^^ add.
Auv.vN-MES. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 48, R» col. 1.
Oen, Ouan, Ouen.
B
B
B. Cette lettre oloit un mol dans les expressions
suivantes :
1° B ne R (1). Façon de parler qui répond à la
nôtre : Ni A ni B.
Je ne cognols ne B ne R.
Froiss. Poës. MSS. fol. 288, V.
2° Marqué au B. Façon de parler, pour désigner
ceux qu'on peut qualiiier d'un nom qui commence
par un B. « Ceux qui sont marqués au B, comme
«■ Bastards, Bossus, Bigles, Boiteux, Borgnes, etc.,
« sont ordinairement vicieux. » (Oudin, Gur. fr.)
3° B carre, B quarre. Bécarre, B mol. Bémol.
Expression connue en musique. Elle a donné lieu
aux expressions proverbiales ci-après : Fou de B
quarre et de B mol; fou à toute outrance. (Voy.
Rabelais, T. 111, p. 202.) Par Becare et par Bémol
et à toute game. (Voy. Du Tilliof, Hist. delà Fesle des
Fous, p. 125.) On'liU'lbid. p. 123): « Poète par Becare
« et Bémol. » Nous écrivons aujourd'hui B carre (2).
i° Passer de B dur en B mol. Façon de parler
empruntée à la musique, et qui souvent avoil une
signification indécente. Elle se disoit aussi pour
BA
passer d'un discours à un autre , extravaguer.
(Oudin, Cur. fr. p. 25.)
5° Mettre quelqu'un de Bémol enBédur, c'étoitle
rendre plus misérable qu'il n'étoit auparavant.
Le conseil que le Roy ot dur
Nous mis de Bémol en Bedur.
Hist- de Fr. à la suite du R. de F. MS. du R. n- 6812, fol. 82.
On a retranché la lettre B d'un grand nombre
de mois où elle s'employoit autrefois. Ainsi on écri-
voit lebvres pour lèvres, debvons pour devons, etc.
(Mém. Du Bellay, T. VI, p. 414.)
Baa. C'est une exclamation remplacée par celle
de ha ! ha ! (Voy. les Contes de Des Per. T. I, p. 140.
— Fabl. MSS. de S" Germ. fol. i'i, R".)
VARIANTES :
BAA. Contes de Des Per. T. I, p. 140.
Banon. Fabl. MSS. de S' Germ. fol. 46, R».
Baaillemeut, subst. masc. L'action de bâiller,
bâillement.
Comblé d'ennuy, vuide de tous esbats
Et de douleur portant sanglots et baatx.
.MSS. des Mém. de Paris, cités par Borel. Dict. 2*» add.
(•1) C'est la rime qui a fait choisir ces deux lettres. On lit en effet au vers suivant : « Mais .je sçai bien qu'en celle terre
N'avéra paix, ne ou pays. Se le poovoir des flours de lys Ne vient la chose refourmer. » ^Pastourelle.) (N. e.) — (2) On
plaisantait encore, au .wii' siècle, sur le bécarre et le bémol ; voir Molière, Sicilien, se. 4. Dans la série des lettres prises
comme notes de musique, a est le la. b le si, etc. Le plain-chant abaisse souvent d'un demi-ton le si, qu'on représente
alors par un b arrondi, nommé bé mol ; quand au contraire le si était naturel, on le représentait par un b carré, ou b dur.
Depuis, le bécarre est devenu le sign^ de toutes les notes remises au ton naturel, comme le bémol est devenu celui de
toute note baissée d'un demi-ton. (n. e.)
BA
— 3-i9 -
BA
VABUNTES :
BAAILLEjrENT. Oudln, Dlct.
Baat. Borel, 2" add. p. 462.
Baailler (1), verbe. Bâiller, avoir la bouche
ouveile. — Elre oisif.
Sur le premier sens , voyez Oudin et Rabelais ,
T. 1, p. 102 et 132.
Ou s'est servi de ce mot pour exprimer l'air cons-
terné de quelqu'un qui a peur.
Li couart de peur boaiUent,
Et li hardis des portes saillent, etc.
G. Guiart, MS. fol. 223, V'.
Comme l'inaction fait naître l'ennui , et l'ennui
l'envie de bâiller, de là baaster s'est employé pour
être oisif.
Un seul d'entr'eux plus ne baaste (2),
Vers le pont destelenf a haste :
Granl erre celé part remenent
Li autre qui le contretiennent.
G. Guiarl, MS. fol. 235, F.'.
VARIANTES :
BÂ\ILLER. Oudin, Dict.
Baisler. Rabelais, T. I, p. 102.
Baaster. G. Guiarl, MS. fol. 235.
Bayer. FouiUoux, Fauconnerie, fol. 68, R».
Baaingne, suhst. fém. Bohème.
Son fd qui vint en Alemaingne
Tenu fu par Roy de Baaimjne (3),
Moult palle l'en de sa proesce,
Envorque tout de sa largesse.
Hisl. de Fr. à la suile du Rom. de Fauvel, MS. du R. n' 0812, fol. 82.
Baance, sitbst. fém. Espérance, attente.
J'ay servi si longuement
En'pardon, et en baanche.
Poét. MSS. avant 1300, T. 111, ji. 1195.
Mais paor ai qu'ailiers n'ait sa baiaiice.
Ibid. ï. IV, p. 1195.
On disoit dans lemèmesensa&eeirtHCC, abajance,
etc. Un se servoit particulièrement, en termes de
jurisprudence, des droits en litige, des droits non
encore échus, mais qui doivent naturellement
écheoir ; ils se noramoient des droits en abcianee.
(Voy. Du Gange, Gloss. lat. au mot Abeynntia.) Ces
acceptions viennent toutes du verbe Baër, dans la
signification d'aspirer.
variantes :
BAANCE. Poës. MSS. avant 1300, ï. IV, p. 1061.
Baanche. Ibid, T. III, p, 1190.
Baiance. Ibid. T. IV, p. 13il.
Abeeianck. Du Gange, Gloss. latin, au mot Abajanlu'.
Abeyance. Ibid.
Béement, subst. iiiasc. Cotgrave.
Baates, subst. Bataillons ou sentinelles. Parlant
de deux armées en prée^'nce. Alhis a dit :
Les baates se sont choisis.
Alliis, MS. fol. 40, R' col. 1.
Baates est peut-élre une faute (4) pour batailles,
escadrons, bataillons, ou peut-être faut-il lire
Waites, c'est-à-dire guettes, sentinelles. On lit
Espies dans le ms. du Roi.
Babat (5), subst. masc. (Voy. le Dict. de Cotgr.)
Ce mol, comme on le verra, en a produit beaucoup
d'autres; il s'est formé vraisemblablement de la
première articulation des enfans qui n'ont pas
encore la facilité de parler.
Babeau (6), subst. masc. Fête, cadeau.
Il vous faut mener par rivages,
En beau temps aux pèlerinages,
Et vous donner tant de babeaulx.
La Cbasse et Départ. d'Ajnours, p. 167.
Babelé, adj. Turlupiné, tourné en ridicule.
chascune est là babelée,
Mais au.x maris en est la coulpe.
Eust. Uesch. Poés. MSS. fol. 555, col. 1.
Babelu, subst. masc. Railleur, plaisant. Ce mot
ne nous paroit avoir été employé que dans cette
expression : (aire le babelu, c'est-à-dire fairejle
railleur, le plaisant :
On rit, on fait le babelu.
Coquillart, pag* 169.
Babicbon, subst. masc. Espèce de petit chien.
C'étoit une espèce de chiens petits et à poils longs,
selon le Dict. d'Oudin.
Babille, suhst. fém. Babil. (Voy. le Glossaire de
Marot et le Dict. d'Oudin.) On lit : commancher la
babilloire, pour dire babiller, dans les Contes de
Gholières, fol. 203. Nicot, dans son Dictionnaire, et
Bouchot, dans ses Sérées, livre I, p. 438, dérivent
le mot babil, de Babel (7).
VARIANTES :
BABILLE. Glossaire de Marot.
Babillerie. Oudin, Dictionnaire.
Babilloire. Contes de Gholières, fol. 263, V».
Baboc (ordre de la). Cet ordre singulier, com-
posé de buveurs, subsistoit vers le règne de
Charles VI.
Un ordre scay de nouvel p^^t.i.hlie,
Dont maintes gens se doivent foi\t, loer,
Et où l'on doit boire jusqu'à la lie, ■"■ '
Tant qu'es henaps, ne doit riens derT dire -.^
Et si doit on toudis du pot verser rlu mariaffe
Vin es vaisseaulx, l'un l'iiutre reque ,^ /
Les requerans y doivent obéir
Sanz refuser, tout boire, et sanz esc :
Ainsi se doit cest ordre maintenir, '"
Qui s'appelle l'ordre de la biihiic.
Eust. Desch. Po.i's. MSS. T. II, fol. 241.
Baboles, subst. fét". Bijoux, joyaux. — Flat-
teries. — Bagatelles.
(1) L'étymologie est badaculare, forme allongée de badare. (n. e.) - (2) H faudrait peut-être rapprocher cette forme de
baaier, guetter, observer à dessein de nuire : « Mais ja ne si baateni Que l'om ne le prenge es sons laz. » (Chron. des ducs
de Norm., éd. F. Michel, I, vers 14907.) Et au vers 15020: « Celui qui a toz jors baaie Cornent ta corone t'abate. » Voir
Baaies. (N. E.) - (3) On trouve aussi Behaujne. (N. E.) — (4) Ce n'est pas une fiute, car nous avons d'autres exemples du
mot: « Quant les baates de lator Virent les enseignes deslors. n (Chron. de Norm., id., II, v. 18590.) On Irouve en provençal
et dans les chartes latines du Midi la forme bada. (n. e.) - (5) Ne faut-il pas en rapprocher le mot baba, sorte de
pâtisserie ? (N. E.) — (6) Babeau doit être une ancienne forme remplacée au xvi= siècle par babiole, venu d'Italie. La racine
serait une corruption de babulus, nigaud. (N. E.) - (7) Il vaut mieux voir là une onomatopée qui se trouve];en d'autres
langues ; babbelen en allemand, (n. e.)
BA
— 350
BA
Sur le premier sens : l)ijoux, joyaux, voyez Du
Cange, Gloss. lat. au mot baiibella, qui a la même
signification.
On disoit aussi haboles, pour fiatteries, douceurs
feintes : " Ce sont paroles courtoises, et emmielées
« desquelles on séduit la simplicité des personnes
« non déniaisées. » (Epitli. de Martin delà Porte.)
Nous disons encore babioles, pour bagatelles. On
trouve en ce même sens , baboyes. « Tout le reste
« n'est que baboijes. » (Sagesse de Charron, p. 473.)
On disoit de même : « l'entretenoyent de jongles et
« de bobes (1). » (Froissart, livre IV, p. ■22.)
VARIANTES :
BAJ30LE3. (plur.) Epith. de la Porte.
Babioles, (plur.) Gloss. lat. de Du Cange, au mot Banbella.
Baboye. Sagesse de Charron, p. 473.
BoBE. Froissart, livre IV, page 22.
Baboleur, subst. masc. et adj. Conteur de
fables, trompeur, fabuleux. Martin de la Porte,
dans ses Epilhètes, fait un adjectif de ce mot, et
l'emploie comme épithète de mensonge.
VARI.\NTES :
B.^BOLEUR, B.A.BOULEUR.
Babou, subst. fém. Moue, grimace. — Epouvan-
tait d'enfant.
Moue, grimace est le sens propre de ce mot.
« Panurgelui feist la babou, en signe de dérision. «
(Rabelais , T. IV , p. 238.) Jouer à la babou ,
c'est-à-dire jouer à se faire réciproquement la
moue. (Id. T. I, p. 195.)
Comme les grimaces épouvantent les enfants, on
a employé le mot babouë pour le nom factice d'un
épouvantail d'enfant. « Trouvons en Théocrite
« qu'une femme nourrice menace son enfant de la
» baboue, et du marmot. » (Bouchet, Sérées,
page 347.)
VARIAiNTES :
BA.BOU. Rabelais, T. IV, page 238.
Babau. Poës. MSS. avant 1300, T. IV, page 1660.
Babaye. Cotgrave, Dict.
Baboue. Bouchet, Sérées, T. IV. page 347.
Babouye. Cotgrave, Dictionnaire.
Babouin ('2), subst. masc. Singe. — Petit enfant.
Homme difforme. - lUais, imbécile. — Lâche,
poltron. — Fip-ares, statues mal faites.
La sig"^; , .^'":>n primordiale de ce mot paroîtétre
(.p^p i.tpressior-j,^ jg t,.Quve (j^n^g cejtg acception au
Giussaf^^_^^P'"!^de Du Cange, au mot Babewijnus.
(Voy. lèV'iCi.f':- Nicot.) Dans le passage suivant, il
est mis pouf- .'eprésentalion de singe qu'on em-
ployoit comme ôrne.meat d'architecture : « Sunt
u sicut isti baboulni a'' lonuntur in lurribus et
>i pilariis. » (Sermon <ict. fol. 28.)
Il a eu des signifie;. plus étendues, mais
presque toujours employé^ mme termes d'inju-
res. On les a appliquées aux 'ans comme dans ce
vers de la Fontaine : '^
Ah ! le petit babouin.
La Fontaine, Fables, l, 19.
On s'est servi de ce mot pour désigner un homme
d'une figure difforme : « La fille du Roy considé-
« rant la laide contenance du Sarrazin avoit une
« grande douleur en son cœur de ce qu'un tel
" monstre et babouin emportoit le prix de telle
« joute. » (Nuicts de Strapar. p. 236.) C'est de là
qu'on a trouvé ce mot adressé à un nain, comme
interpellation injurieuse, dans D. Florès de Grèce,
fol. GO, »ù il est écrit babouyn. Il est employé avec
la même signification dans la Farce de Pathelin,
page 30, et les Essais de Montaigne, T. III, p. 378.
De là aussi, ce mot a signifié un enfant, ou un
homme de petite taille, comme dans le passage sui-
vant. Le P. Menestrier, parlant d'un carrousel,
s'exprime ainsi : <■ La quadrille d'Hercule étoit
« d'autant plus belle que tout y étoit extraordi-
» naire; deux centaures en étoient les trompettes,
« douze babouins portoient après eux des flam-
« beaux allumés. » (Le P. Menestrier, T. des Tourn.
etc., page 50.)
De la difformité du corps, on a appliqué ce mot à
la difformité de l'esprit, et on a dit babouijn, pour
sot, niais, imbécile. (Voyez le Dictionnaire de Nicot
et deMonet.)
J'ay agencé moy-même le pulpitre
Pour vous batif, et dresser ceste Epistre,
Par ung esprit qui n'est pas babouijn
Ce mot a aussi signifié lâche, poltron :
Es tu de si peu de dessence.
Si couard, et si babouin,
De n'oser parler que de loing?
Clém. Marot. T. I, p. 141.
Ce mot, s'employant pour les figures difformes,
a pu servir à désigner les figures souvent mal re-
présentées de nos saints. L'auteur, après avoir dit
qu'il suffit de la représentation de la Croix et de la
S" Vierge pour servir d'objet à la piétéj continue
ainsi :
Sanz brasser ce mauvais levain
Ne croire en tant de marioles.
De babouins et de fyoles,
Ou trop de fois ydolatrons
Contre les divines escoles
Telz simulacres n'aourons.
Eust. Desch. Poës. MSS. T. Ut, p. 453.
C'est par une extension de ce même sens qu'on a
nommé ainsi les fausses reliques. Henry Estienne,
parlant d'un prétendu charbon de S' Laurent pré-
senté par un imposteur comme une relique, dit
d'une femme qui avoit d'abord fait difficulté de la
baiser, » qu'elle alla baiser le babouin après tous,
« et toutes les autres. » (.\pol. pour Hérodote,
page 665.)
Baiser le babouin étoit d'ailleurs une façon de
parler qui signifioit rendre une obéissance forcée et
servile. (Voy. Oudin, Cur. fr.) « Le S' Duc de Rohan
« a été contraint de baiser le babouin (1). ■• (Caquet
de l'accouchée, p. 123.)
(1) Bobe (ou baube) doit remonter au latin balbus; baboles, au contraire, a la même origine que babeau. (s. e.) —
(2) L'étymologie doit être dans le mot des patois allemands bappe, muffle ; babouin équivaudrait donc à lippu, (n. e.)
BA
- 351 -
BA
TABIANTES :
BABOUIN. G. Guiart, MS. fol. 54, R».
Babouvn. Clém. Marot, T. I, p. 141.
Babion, Nicot, Dictionnaire.
Babouinaff, verbe breton. Baiouinaff au
visage, gallice, concilier, c'est-à-dire barbouiller
le visage. C'est l'explication que l'on trouve de
ce mot dans le Catholicum armoricum cité par Du
Gange, Gloss. lat. aux mots Dabewynus et Gersa.
(Voyez Babouinerie.)
VARIA>TES :
BABOUIN.\FF. Du Cange, Gloss. latin, au mot Babeivynus
et Gersa.
Babouineff. Id. ibid.
Baboiiiner, verbe. Tromper. — Marmotter
comme les enfans, remuer les lèvres comme les
singes.
Sur le premier sens de tromper. (Voyez les Dic-
tionnaires d'Oudin et de Cotgrave.)
Ce mot signifioit aussi remuer les lèvres, marmot-
ter, remuer les mâchoires.
Il bahirjna pour son salut.
Villon, p. H6.
On trouve babiner en ce même sens, dans le Dict.
d'Oudin où il est rendu en italien par ces mots :
muover le ganascie.
variantes :
BÂBOUINER, Babouinner, Baboiner, Babbiner, Babi-
ner, Oudin et Cotgrave, Dict.
Babigner. Villon, p. 116.
Baboyer. Cotgrave.
Babouinere, sub&t. fém. Figures bizarres et
difformes. Ces mots sont formés de barbe ou
babouin. La babouinere étoitune espèce démasque
cornu et barbu, représentant le diable. Les Sarra-
sins, voulant épouvanter les chevaux de l'armée de
Charlemagne, placèrent devant eux des gens de
pied » dont chacun avoit une babouniere cornue,
« noire et horrible, ressemblant diables, et tenoit
« chacun d'eux tympannes dans ses mains qu'ils
« heurtoient ensemble. » (Chron. de S' Denys, T. I,
fol. 143.) On lit babouineres quelques lignes plus
bas. (Ibid.) Le même fait est rapporté par l'Arch.
Turpin, en ces termes : « Habenteslarvasbarbatas,
« cornutas dœmonibus consimiles, etc. » On trouve
barbadouires pour masque, dans le Gevaudan. (Voy.
Du Cange, sur Joinville, p. 274.) Barbants signitie
la même chose en Auvergne. (Ibid.) On a appelé
barbiere de fer, la mentonnière d'un casque. (Voy.
le Glossaire de l'Histoire de Bretagne et un inven-
taire d'armures, rapporté par Du Cange, Gloss. lat.
au mot Armatura.) Barboire paroit aussi avoir été
employée dans le sens de mascarade. (Voy. Carlheny,
Voyage du Chevalier Errant, fol. 51. — Rabelais,
T. IV, p. 220.)
De là, babouijnerie s'est employé pour les orne-
mens ridicules, imaginés par les peintres, ou autres
ouvriers, pour décorer les armoiries des nouveaux
nobles, » Ils mettront en tymbre, c'est-à-dire sur le
" haut des armes, ou un masque, ou le portraict
11 d'un visage de faune ou quelque inepte et ridi-
« cule babouynnerie, et au pis aller un babouijn
« baillant à gueule ouverte. » (S' Jul. Mesl. Ilist.
page 576.)
variantes :
BABOUINERE. Chron. S' Denys, T. I, fol. 143.
Babouniere. Ibid.
Babouynerie. S' Jul. Mesl. hist. p. 576.
Barbadouires. Du Cange, sur Joinville, p. 274.
Barbauts. Id. ibid.
Barrière. Du Cange, Gloss. lat. au mot A7'matura.
B.\RB0IRE. Id. ibid. au mot Barbatoria.
Babouinerie, subst. fém. Tromperie. (Dict.
d'Oudin et de Cotgrave.) Nous avons vu le verbe
babouiner employé pour tromper.
BABOUINERIE. Oudin, Cotgrave, Dictionnaires.
Babouynerie. Ibid.
Bac, subst. masc. Bateau. — Bassin. — Vaisseau
à boire.
(Voy. l'élymologie de ce mot, dansPezron, Antiq.
des Celtes, pages 334 et 423.)
Back est un mot allemand qui signifie toute
espèce de vase. (Voy. Valois, notice sous le mot
Baciiivi.) On trouve bacca et baccns, dans la signi-
tlcalion de bateau, au Gloss. lat. de Du Cange.
^Voy. l'erceforest. Vol. III, fol. 22), oîi le mot bac
est employé dans le sens qui subsiste encore
aujourd'hui.)
Bac, employé pour bassin, se trouve dans les
Mém. d'Ol. de la Marche, Liv. II, p. 52G, et dans
Rabelais, T. III, p. 2G2.
De là, il a signifié un vase pour boire. Borel, qui
cite Pontanus, l'explique en ce sens.
On disoit :
1° Droit (le bac ou de pontenage. (Voy. sur ce
droit. Laur. Gloss. du Dr. Fr. et le Dict. de Cotgr.)
2° Bac passager, c'est-à-dire: bac à passer la
rivière. " Eux arrivez au dit lieu, ne trouvèrent le
« moyen de passer la rivière que par le bac passa-
» ge?' accoutumé. " (Mém. du Bell. Liv. II, fol. 38.)
3° Passer le bac, façon de parler pour dire qu'il
faut faire une chose. C'est en parlant du mariage
qu'on a dit :
Une fois fault jyasser ce bac.
Eust. Desch. Toës. MSS. T. III, fol. 553.
4° Etre passé au bac, être perdu, être bien loin.
Guillemette, à qui Pathelin demande son sac à ses
causes, qu'elle ne veut pas lui rendre, lui répond :
Il est passé au bac.
Test, de Pathel. p. 113.
5° Mener le bac, c'est-à-dire ; gouverner. (Voy.
Poës. MSS. d'Eust. Deschamps, fol. 26.)
variantes :
BAC. Mém. d'Ol. de la Marche, li\Te II, p. 526.
Back. Valois, notice. — Borel, Dictionnaire.
Bacq. Pezron, Antiq. des Celtes, p. 334.
(1) Le babouin était une figure ridicule charbonnée sur le mur d'un corps de garde par les soldats, qui la faisaient baiser
aux infracteurs des lois étabUes entre eux. (n. e.)
BA
— 352 —
BA
Barcq. Percef. Vol. IV, fol. 32.
Bars. Ord. des R. de Fr. T. III, p. 435.
Bekkh. Rorel, Diot.
Bacaudes, subsl. inasc. pliir. Paysans. En
Gascogne, ces mots signifient paires, bergers,
paysans. tVoy. les Dict. de Borel et de Ménage, au
mol Dayaus.) Fauchet le dérive du mot Bagaiides,
nom de peuple qui vivoil du temps d'Elien.
VARIANTES :
BACAUDES, Bagaus. Borel, Ménage.
Baccalas, subst. masc. On nommoit ainsi les
bâtons qui avancent en dehors de la couverture
d'une galère, en llalien baccalarl (1). (Dict.d'Oudin.)
Bacces, subst. fém. plur. Anneaux. — Terme
de vénerie.
Ou trouve au premier sens d'anneaux, les mois
bacœ et baccœ, employés pour aiimili catenarum
et pour uniones dans le Gloss. lai. de Du Gange.
« Pour porter au col eut une chaîne d'or pesante
« vingt cinq mille soixante et troys marcs d'or,
« faite en forme de grosses bacces, entre lesquelz
« estoyent en œuvre gros jaspes verds engravez
«' taillez en dracons. » (Uabclais, T. I, p. 46.)
Ce motsignilioit aussi brisées en termes de véne-
rie. " Quant aux brisées, elles se peuvent nommer
« bacces, ou brisées, lequel on voudra : il y a
» manière de les mettre; car il faut que le bout
« rompu soit mis par ou entre une beste. » (Du
Fouill. Yen., eh. 37, fol. 29, \\)
Bacchanalerie, subst. fém. Bacchanal. L'ac-
tion de faire bacchanale. (Dict. de Colgrave.)
Bacchanaliser, verbe. Faire bacchanale. (Dict.
d'Oudin. — Voy. Contes de Chol. fol. 88.)
Bacchar, subst. masc. Plante. Nous la nom-
mons cabaret, les latins l'appeloient asarum. (Voy.
Borel, n" add. — Pline et Tournefort.)
variantes :
BACCHAR. Dict. de Borel, n« add.
Baccar. Dict. de Cotgrave.
Bacche, subst. masc. Bacchus. Nom propre.
(Voy. Epith. de Mart. de la Porte.)
Bacchide, adj. Bachique. (Voyez Epith. de
Mart. de la Porte.)
Baces, subst. plur. Espèce de chiens de chasse.
Peut-être doit-on lire Braces. (Voy. Brac.)
Eu l'épesie d'un grand buisson,
Voit une bisse, à son faon,
Tote estoit blance celé beste
Verer de celif ot sor la teste ;
Par l'abai des baccs sailli.
Fabl. MSS. du. R. n- 7989, fol. 48, V col. 1.
Bâcha, subst. masc. Nom de dignité chez les
Turcs. Ménage, dans ses Observ. sur la langue Fr.
2' par. p. 137, dérive ce mol du turc bac qui si-
gnilie tète. Le mot bassa se trouve pour bâcha
dans le Gloss. lat. de Du Gange. I
variantes :
BACHA. Orthographe subsist.
Bassa. Du Cange, Gloss. lat. à Bassa.
Bacharat, subst. masc. Ce mot, encore usité
dans quelques villages, aux environs de Paris,
pour désordre, tumulte, sédition, pareil employé
pour un nom de lieu dans ce passage : « Viendroit-
« il du via do Bacharat pour lequel l'empereur
« Venceslas, foit yvrogne, dégagea la ville de
« Nuremberg, du serment de "fidélité qu'elle lui
« avoit prêté. » (Vie de Charles VI, p. 253.)
Bâche, subst. Instrument servant à la pèche.
Pour faire des engins, des bâches, du vervain.
Bcrg. de R. Bdlcau, fol. 115.
Bachelage, subst. masc. Apprentissage. L'ap-
prentissage pour devenir chevalier. (Voy. les Dict.
de Nicot,''Monet, Borel et Robert Estienne.) Celle
acception est propre à juslilier le sentiment de ceux
qui dérivent le mot bachelier du latin baculus.
Les exercices des jeunes gens et des enfans aux
tournois avec des basions, ou des baguettes, au
lieu de lances ou d'épées,étoient l'apprentissage de
la chevalerie.
Bachele, subst. fém. Seigneurie. Chàlellenie de
haute moyenne et basse justice. 11 falloit quatre
bachelcs pour former une baronnie. (Voy. les Dict.
de Nicot et de Monel.) Suivant Borel, dans son Dic-
tionnaire, c'est une Seigneurie ou Cualellenie
tenue par un bachelier qui n'a pas encore droit de
chevalier, ni de banière; mais il se trompe, puisque
bachelier étoit le même que chevalier. (Voy. sur le
mot Bachelles, les Ordon. des Rois de France, T. II,
p. 46G, note.)
variantes :
BACHELE. Nicot, Monet, Borel.
Bacele...
Bachelle. Ord. T. Il, p. 466.
Bachelerie, subst. fém. Espèce de fief. — Nom
colleclif de baciielier. — Qualité de bachelier.
Sur la première acception. (Voy. le Gloss. lat. de
Du Cauge, aux mots Baccalaria et Vasselaria.) II
conjecture que dece dernier mot s'est formé celui de
baccalaria, bachelerie. « Il y avoit des terres de
« haulbert et bannière, comprises sous le nom de
« milili;e, et dehnutberl: d'autres fiefs et terres
« nommées baculariœ ou de bachelerie, dont il est
« parlé dans les coutumes d'Anjou et du Maine, et
« encore d'autres appelées vavassories ; le vavas-
" seur élanl celui qui a des vassaux, mais dont la
« seigneurie dépend d'un autre seigneur. » (La
Roque, Traité de la Noblesse, p. 27.)
On employoit aussi le mot bachelerie, comme
colleclif de bachelier.
Serapres ot la cour remplie
De moult gente bachelerie.
Rom. de Brut. MS. fol. 53.
Ger. de Roussillon trace ce portrait de Fourqaes,
seigneur également brave, noble et généreux :
(1) Ce mot est dérivé peut-être du gaélique bachall, bâton, (n. e.)
BA
— 353 -
BA
Il est ly colombiers de touts les égarés
11 est de toutes gens si orné, si paré '
Que toujours est garny de grand chevalerie,
tt de très excellent, pour voir, bachelene.
Gcr. de Roussillon, MS. p. 59.
• Jehan de Hainaut qui vint à luv moiilt puis-
« samment avecques grand bachelefie deHaiiiault
« et d ailleurs. » (Froissart, Liv. I, p. 143.)
La bachelerie de Beauvés.
Prov. à la suite des Pots. JISS. avant 1300, T. IV, p. 1651
On verra ci-après ce que l'on entendoit par
bacheliers. C etoit communément ceux qui faisoient
apprentissage de chevaliers. On distinguoit deux
états dans la chevalerie: la bachelerie et la va-
msserie. Le vavasseur se bornoit à régir son
aieniures ''^''^'"^'' '^" contraire, cherciioit les
Cil qui trueuve chemin forahié
Moult est fols quant il se desvoye
Por aller une fausse sente, '
Dont chacun forvoye la sente
L|un for si est bachelerie, '
L'autre si est vavassorie.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 256, R- col 1
De là, on désigna par bachelerie, les qualités
ordinaires d'un bachelier, telles que: radolesïence
la, bravoure, le savoir, la vigilance, iSSn'
même l'imprudence, l'étourderie. Nous en allons
citer des exemples: d'ions
Pour jeunesse, âge d'adolescence, on a dit- .. Il
« apprint legiùrement le jeu des echetz, des tables
« et tous les autres jeux dont il veoit jouer et
« quant il vint en aage de bachelerie, nul ne fe
« povoit enseigner. » (Lanc. du Lac, T. I fol lo 1
Bachelerie signifie bravoure, valeur mérite
dans ces vers: '«"cui, meriie,
Cilz aussi qui de m'araour me prie
!• ust SI garnis de grant bacelerie
Que son bon los et sa chevalerie
Por tout le monde aust prisie.
Poës. MSS. de Froissart, p. 116
Afiert bien que soit chevaliers
Uouz et humbles et pois parliers
Mes dou cors, de fors et de dens
Pour 1 ordre de chevalerie •
Si doit amer bachelerie,
Et tous maux usages fuir
Et les armes par t'bt suir
Fabl. M.SS. du R. n- 7615, T. II, fol. 16:), R. col »
^Bachelerie est employé pour habileté, dans ces
C'est belle bachelerie
De trouver ce qui n'est mie
Poe». MSS. du Vatican, n- 1522, fol. 165. Vcol 1
Bachelerie désignoit vigilance, dans ces vers:
• • ••••.• amours endormie
Ne vaut rien, bachelerie
Convient, que son estauvoir
Veut en amour recevoir.
Poes. 51SS. du Vatican, n- 1490, fol. 151 V
daStpâ£a?e!^°"" ''''' ^"^'^■^'-' --'^"«n.
Qui cors a. membre et vie
Se tout a dies n'estudie
En plus grand avanchement ■
K en vivre moiiennement
N a point de bachelerie.
Poês. MSS. du Vatican, n- U90, fol. 169, y..
. Enfin &rtcfte/m'e, désignoit: action de jeunesse
imprudence, étourderie. C'ost en ce sens ou 'un
amant, piqué de se voir renvoyé par une femme
galante qui lui avoit fait partager sel faveurs a\^c
beaucoup d autres, a dit : •'l^eu^b a\ec
Si je conquis, ce fu bachelerie.
Poés. MSS. du Vatican, n- 1522, fol. 157. Y- col o
. ;^n ,voit, par les passages cités, qu'on écrivoit
indifféremment bachelerie et bacelehe ISlfv-
nièie orthographe se trouve quelquefois dns les
Ph MouskJs."'" ' ■'' '^"'""^ '^^^'^ '^^"'^^ de
Nous verrons ci-après la qualité de bachelier se
confondre avec celle de chevalier. H en fu de
même du mot bachelerie, qui se disoit indistîn^tï
ment pour la chevalerie. L'âge plus avancé et unt
fortune plus aisée faisoient peut-être la seule sudI
riorite des chevaliers sur lehacheliers. ^
Moult par fu granz sa renomée
Ou tens de sa bachelerie
Qu'il demenoit chevalerie.
Athis, MS. fol 64, V" col. 1.
Tout nostre chevalerie
C'est jovent, et bachelerie.
Athis, MS. fol 113. R- col. o
Lorsqu'un de ces mss. du même roman emploie
le mol bachelerie, l'autre y substitue ce lii de
chevalerie. (Voy. fol. 07 et 82.) ^""^"'"^ '^'^'"^ «^
„ „ VARIANTES :
BACHELERIE. Du Gange, Gloss. lat. à Baccalar,a
Bacelerie. Ph. Mouskes, MS. p. 175. '""''"""'"'•
Bachelier, siihst. maso. Bachelier. - Jeune
homme. - Homme de métier. - Chevalier -
Lcuyer. - Homnie de médiocre condition' -
Homme noble. - Officier municipal. - Tenancier
d une bachelerie. - Valet. - Titre d'étude
Il est aise de voir, par ce grand nombre de signi-
fications, combien le sens de ce mot a rem d'exten-
sion au point de désigner quelquefois des choses
absolument contraires, telles que noble, homme dl
métier, chevalier, valet, etc.
Dans le Gloss lat. de Du Gange, on trouve bacul-
«n/ pour bacheliers, et on dérive ce mot lati"i de
bacellaria, bacele ou bachele, qu'on verra ci-anrès
Caseiieuve le dérive de bacillarii ou baculares ou
baciilus à cause des bâtons avec lesquels s'exer-
çoient les jeunes gens qui vouloienl parvenir à la
chevalerie. Par là, ils supposent que les bacheliers
n etoient pas les mêmes que les chevaliers ; mais on
verra le contraire dans les citations qui Suivront
selon Gujas, les bacheliers étoient des espèces de
gardes du corps attachés aux princes et aux o-rands
seigneurs, et qui avoient bouche à cour- «"ouasi
« buccellaru, qui posteriori aetate eiant milites
" corporis custodes, siveprotectores, qui patronis
« suis assistunt semper. » (Lib. de Fendis 5 et 7)
Fauchet veut que ce soit l'abrégé de bas chevalier
Borel croit qu il est plus simple de le former de
baccœla,m,k cause du rameau de laurier qu'on
leur donnoit, comme on fait encore à ceux qui
passent maîtres ès-arts après leur philosophie.
Borel a suivi en cela le sentiment de Louis Vives
45
BA
354 -
BA
savant espagnol, qu'il ne cite pas. Plusieurs gram-
mairiens uni dérive ce mol de bataille. Fauchet, au
coulrnire. prétend qu'ils se sont trompés, qu'il vient
de bachelier (|ui, en picard, sigailie jeune homme,
mais il ne dit pas d'oîi vient le mot picard. Il
paroîtroil assez naturel de tirer son étymoloi;ie de
vassal, vassus ou vassallus, sujet dépendant, valet,
varlet, vaslet, c'est-ù-dire tout liomme qui doit
hommage ou service à un supérieur. Cette dernière
étymologie pourroit être juslillée par les mots
bassalus et liasalarius qui se trouvent employés
dans le même sens au Glossaire latin de Du Gange.
Ge mot a signifié primordialement jeune homme,
adolescent. (Voyez le Dict. de ilénage . au mot
Bachelier.) 11 cite plusieurs auteurs anciens, aux-
quels je joindrai le Roman de Brut. Artus, ayant
achevé la conquête de la France , renvoya les
vieillards qui l'avoient suivi dans son expédition :
Les hucltelcrs et la jouvente
Qi de conquerre orent entente,
Qi norent femme, ne enfans
Retint o sov U rois neuf ans.
honi. de Brut, MS. fol. 77, V*.
« Quarante autres chevaliers jeunes fertc/icZ/crs. »
(Froissart, Liv. 1, p. 37.) Ph. Mouskes, parlant de
Philippe-Auguste mourant et des regrets qu'il
inspiroit aux seigneurs de sa cour qu'il avoit
tendrement aimés, dit :
Quar onques bacclers sa touse
N'ama tant, coum U les aimoit.
Ph. Mouskes, MS. p. 6i2.
Tout cil et toutes celles
Soient bacelers ou pucelles.
Froissart, PoJs. .MSS. p. 37.
Bacheler en ce sens renfermoit quelquefois une
idée désavantageuse :
Quant l'apelastes hachder
De se ne le voliez blasmer.
Fabl. MS. de S- Gcrra. fol. 133, R°.
Ce mot s'est dit dans une signification fort
étendue en ce passage, où Pathelin, voulant fialter le
drapier et lui parlant de son père, s'exprime ainsi :
Vous luy ressemblés mieulx que goutte
D'eaue ; je n'en fais nul doubte.
Quel vaiÛant bachelier c'estoit,
Le bon preudhomme, et si prestoit
Ses deniers à qui les vouloit.
Farce de Pathelin, p. 12.
Et, en effet, le nom ou le titre de bachelier a été
donné même aux serruriers, dans un édit de Fran-
çois 1", servant à régler les droits qu'ils dévoient
payer. (Voyez Freron, année littéraire 1758, T. VI,
Lettre .\, p. 229.) On donnoit en général ce titre aux
hommes de toute espèce de métiers, passés maîtres,
mais non jurés. (Voyez Fauchet, Orig. Liv. I, p. 84.)
Le mot bachelier se trouve très souvent employé
comme synonyme à chevalier, comme épithète de
ce même mot, et pour signifier simple chevalier,
distingué de chevalier ha'nneiet et autre chevalier
en dignité ; les simples chevaliers inférieurs à ceux
qu'on appelloit bannerets ne prirent le nom de
bacheliers ou de chevaliers bacheliers que dans le
XIV' siècle, suivant le sentiment de Brussel sur les
Fiefs, T. 1, p. 1G5.
Dans un grand nombre de revues faites par les
chefs de la gendarmerie, les hommes d'armes n'y
sont jamais divisés qu'en trois classes ; à savoir,
les chevaliers bannerets, les chevaliers appelés
dans les unessimplementc/;<'('rt//t'rsetdansd'autres
clievaliers baclielicrs, et enfin les écuye>s. On n'y
trouve aucune distinction entre les clievaliers et les
chevaliers bacheliers. Ils y sont toujours pris pour
chevaliers. (Voyez l'Hist. de B. Du Guesclin, par
Du Ciiatelet, p. 325.) « Sire chevalier, si j'avois en
« ma compagnie de telz bacheliers que vous êtes,
« je me doublerois peu de mes voisins, se mal me
« vouloient. » (Perceforest, Vol. II, fol. 22.) L'auteur
de ce roman et Lancelot du Lac confondent toujours
ensemble les mots de bachelier et de chevalier
comme synonymes ; ils le sont en effet. Pour con-
firmer cette opinion, qui se trouve appuyée des
variantes de plusieurs mss., dont les uns disent
bacelier lorsque les autres (ï\s,tn[ chevalier, voyez
Athis, MS. fol. 70, R° col. 2. Si un ms. dit bachelers,
on lit dans un autre >.is.jouvenchiaits. (Ibid. fol. 17.)
Il suffit de consulter le Traité de la Noblesse, par
la Roque, et les Ordonnances des Rois de France,
dans lesquelles on trouve que la paye étoit différente
entre le chevalier banneret , le ctievalier bachelier
et Véciujcr. Celle du toHWH'ei étoit double de la paye
du bachelier, et celle de Véciiijer n'étoit que la
moitié de la paye du hachelier. On n'y voit point
d'autre distinction. A toutes ces autorités, on peut
joindre celle de Froissart, par laquelle on voit que
les bacheliers étoient le troisième des ordres dans
lesquels étoit divisée toute la chevalerie. Cet auteur,
parlant des seigneurs qui accompagnoient le roi
Edouard, nomme: l les princes, 2" les barons,
3° les bacheliers, >< telz que monseigneur Jehan
« Ghandos » et autres qui , étant tous qualifiés
messeigneurs, ne peuvent être regardés que comme
des chevaliers. On peut voir encore le Traité des
Droits d'armes, au n° 818, p. 321. — Labbe, Eibl.
MS. in-4°. (Voy. encore les Ord. des Rois de France.)
Si ces citations ne suffisoient pas , j'ajouterois
encore qu'on a été dans l'usage d'employer le mot
bachelier et hachelerie (1) pour valeur, bravoure,
comme on avoit employé ceux de chevalier et de
chevalerie pour dire brave :
Li Romain furent bacheler.
Et convoitûuz de l'assembler.
Athis, MS. fol. 46, R" col. i.
C'est donc mal à propos que Fauchet, Liv. I, p. 83
de ses Orig., dit que « bachelier étoit une dignité
« entre celle de chevalier et d'escuyer. » (Voyez le
Gloss. latin de Du Gange, au mot militare, et D.
Morice, Ilist. de Bret. Préf. p. xiv.)
Dans les vers suivans , ce mot signifie chevalier :
Trois jours dura la fête ainsi.
Quant vint au quart, au mercredi
Ly Rois ses bacelers faussa
Honneur, de livres devisa.
Rom. de Brut, MS. fui. 80.
(1) < De belles apertises d'armes et de grans bacheleries et de hardies emprises. » (Froissart, éd. Kervyn, II, 10.) (n. e.)
BA
- 355 —
BA
Ce mot paroît signifier écuyer dans le passage
suivant. On sait que les clievaliers s'exerçoient aux
tournois, et les escuyers à escrimer, lutter, sauter
et jeter la pierre :
En la guise qui dont couroit
A déduit ont le jour tourné,
Li chevalier ont boourdé,
Li bachelier ont escremy,
Pierre jette, luitié, sailly.
Rom. de Brut, MS. fol. 33.
Ce mot s'est employé pour homme de médiocre
condition, seigneur d"un état inférieur aux comtes,
vicomtes, barons et châtelains: « Outre les sei-
« gneurs dessus dits y a au dit pays aucuns autres
« seigneurs qui ne sont comtes, vicomtes, barons,
« ne chastellains, qui ont chasteaux, forteresses,
« grosses maisons, places qui sont parties de
« comtés, vicomtes, baronnies ou chastellenies des
« dits pays, et tels s'appellent 6«r//c/?é'rs. » (Coût.
d'Anjou, dans le I-^' vol. des Coût. gén. p. 66.)
Ce mot, avec la signification de seigneur, est mis
en opposition avec un seigneur de plus haut rang.
Le comte de Foix, prince du sang royal, s'adressant
à la princesse de Galles: « Madàme'fdit le comte),
« je suis un petit homme et un petit bachelier, si
« ne puis faiie nuls grans dons, mais le don que
« vous me demandés (s'il ne vaut plus de soixante
« mille francs) je vous le donne. « (Froiss. Liv. III,
p. 6.) Bertrand Du Guesclin, à qui l'on offroil la
dignité de connétable, » s'excusa grandement et
« très sagement, et dit qu'il n'en estoit mie dianeet
« qu'il estoit un povre chevalier el un peliibaclwlier
« au regard des grans seigneurs et vaiiians hommes
« de France, combien que fortune l'eust un peu
« advancé. » (Id. Liv. I, p. 403 ; an I370.)Du Guesclin
ajoute plus bas : « Mais il est vérité que je suis un
« pauvre homme et de basse venue en l'office de
« connétable qui est si grand et si noble. »
Bacheler est employé dans le passage suivant pour
tout homme noble opposé à celui qui ne l'étoit pas :
N'avoit homme au pays si o?,
Ne bacheler, ne paisant,
Tant orguiUeus, ne tant vaillant
Qui s'osast au jaiant combattre.
Rom. de BruI, MS, fol. 77, V'.
Ce mot semble signifier officiers municipaux dans
le passage suivant : « Les bacheliers de la dite ville
« et bourgeoisie. » (Coût. loc. de Chaleauneuf en
Berry, T. IH, art. iv, citée par Du Cange, Gloss. lat.
au mot Baccalarii.)
On nommoit aussi ^flcfteZier l'espèce de tenancier
qui occupoit une bachelerie qu'on a vu ci-dessus,
ou qui tenoit à ferme, ou qui cultivoit des bacliele-
ries appartenantes aux églises. (Voyez le Glossaire
latin de Du Cange, au mot Baccalarii.)
Bachelier s'est dit -pour valet dans le passage
suivant : « Tantost que Passelyon entendit le bache-
« lier, il commença à frongner des narines, puis
« print ung baslon et queurt sus au varlet »
(Percef. Vol. IV, fol. 102.)
Enfin, bachelier étoit el est encore un titre qu'on
acquiert par l'étude. Il y avoit :
i' Bacheliers en chirurgie. C'éloit ceux qui
avoient obtenu le premier degré que prenoient les
étudians en cet art.
2° Bacheliers d'église. C'étoit des ecclésiastiques
d'un ordre inférieur aux chanoines, ceux qu'on
appelle communément prébendier. (Voy. Du Cange,
Glossaire latin, au mot Baccalarii.)
S' Bacheliers formés. On appelloit ainsi ceux qui
avoient fait dix années d'étude en théologie. (Voy.
Laurière, Glossaire du Droit françois.)
4* Le bacheler d'armes étoit le jeune chevalier
qui veut s'instruire aux armes :
Car puisque Dieus ensemble adresse
Biauté, force, sans et proesce,
En cuer de haut home puissant,
Celui vait proesce croissant
Qui grant terre à main burnir
A donc à voloir de furnir
La mester d'armes à son droit
Celui claim bacheler a droit
Celui claim bacheler d'anacs.
Fabl. MSS. du R. n* 7GI5, T. II, fol 1G4, R- col 2.
5° On a dit proverbialement :
Vin de Soissons, vin d'Auviler
Vin d'Espernay le bacheler.
Ibid. n'7-2i8. fol. 231, V'col. 3.
VARIANTES :
BACHELIER. Orth, subsist. - Voy. le Gl. du R. do la Rose.
Baccheuer. Fabl. MSS. de S' Germ. fol.
Bacheler. Rom. de Brut, MS. fol. 77, V».
Bachelehs. Fabl. MSS. du R. n» 7'21«, fol. 178, R» col. 2.
Bachelet. Abrégé de l'Histoire de Charles VI.
Baicheler. Poës. MSS. avant 1300, T. III, p. 10G8.
Bacelier. Fabl. MSS. de S' Germ.
Baccler (Lisez Baceler). Dict. de Cotgrave.
Baceler. Ph. Mouskes, MS. p. 6't2.
Bakelers. Du Cange, Gloss. lat. au mot Baccularii.
Bacillier. Fauchet, Orig.
Bachelière, subst. téin. Jeune fille. — Demoi-
selle. — Femme de chambre.
Le mot de Bachelctle servoit à désigner de jeunes
filles aimable*; c'est dans ce sens que Froissart dit :
Un chapelet de violettes
Pour donner à ces bachelettes.
Pocs. MSS. p. 87, col. 2.
/Îflîss<'/Z(^ étoit un simple nom d'amitié, et c'est
ainsi que le nom de Baiselle est donné à une jeune
bergère, dans le Recueil des Poës. fr. avant 1300,
Vatican, fol. 112.
Les noms de Baisselette, Bachelctle, etc.,empor-
toient toujours une idée ou honorable ou gracieuse ;
quelquefois ils annonçoient un titre correspondant
à celui d'écuyer, comme dans ce versd'Eust.De.sch.
fol. 554, col. 1 :
Qui a escuyer ou baisselle.
On disoit bachelière pour femme de chambre.
Delà les diminutifs bachelete,bachelote, etc., appli-
qués, non-seulement aux jeunes servantes, aux
demoiselles d'honneur, mais aux jeunes filles en
général ; on prenoit dans le même sens baisse et
ses diminutifs baisselle, baiselette (1).
dpr2i?r°n,^^t'',A®-^"'-''^*^"'' '" diminutif de basse, servante, en ancien français et en normand, et l'on veut voir dans ce
dernier mot le feminm de vassus. Bachelette, qu'on ne trouve pas au xiw siècle, aura été assimilée lhachelieJ%Z
BA
— 356
BA
VARIANTES :
BACHELIÈRE. Villon, p. 7;i.
Bachelette. Gloss. du Ilom. de la Rose.
Bachelote. Fabri, Art. de Rhétorique.
Bacelote. Ane. Poës. fr. avant VMO, MSS. Vatic. fol. ■112.
Basselette. Froiss. Poës.
B.USSE. Fabl. MSS. p. 121.
Baisselle. Anr. Poes. fr. fol. 112.
Baisele. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 14S, V" col. 1.
Baisselette. Id. ibid.
BoiSELETTE. Fabl. MSS. p. 120.
Baclicryndc, stibst. Ce mot paroit employé
comme leriiie de pratique dans la justice criminelle
d'Angleterre. (Voy. Dritton, Loix dWngl. fol. 7-i.)
Bachet, siibst. masc. Bassin. Bachet de fontaine,
c'est-à-dire le bassin destiné à recevoir l'eau d'une
fontaine. (Monet, Dict.) De là on a dit , au figuré :
lâcher le baquet, vuider le bassin, c'est-à-dire ren-
dre par haut et par bas, en parlant d'une femme
qui avoit trop bu et trop mangé. (J. Marot, p. 20*2.)
VARIANTES :
B.\CHET. Monet, Dict.
B.\CQUET. J. Marot, p. 202.
Bacbevaleureiix , adj. Brave. — Guerrier.
(Voy. les Dict. de Borel et de Corneille. — Laur.
Gloss. du Droit fr. au mot Bachevaleureux.) « Il
« commanda tantost à ses mareschaux ferir en
« l'eau, au nom de Dieu et de Saint-George. Lors se
« ferit dedans le plus /jadiei'rt/ewî'eiixfl jet le mieux
« monté de tous. » (Froissart, Livre I, p. 1 10.)
Bachière, subst. fém. Bascule. Partie ajoutée
à un pont rompu pour servir d'entrée aux voitures.
On dit, en parlant d'un pont de bateaux : « Il y avoit
« faute au bout du pont par devers Vitry, et y
« metloit-on une chariere hachiere, et quant on
« estoit passé, la dite haeliiere étoit ostée du bout
'■ du pont, et estoit mise contre le dit pont au-
« dessus aussi comme au milieu, en sorte que les
« ennemis qui vouloient après passer dessus es-
« toient obligés de se mettre dans l'eau jusqu'au
« nombril. >> (Chron. de S' Denys, T. II, p. 252.) Au
lieu de hachiere, on lit bachière, dans la Chron. fr.
Ms. de Xangis, qui paroit être le véritable mot.
Charriere, dans le passage cité, paroit une épithète
employée pour désigner des charrettes.
VARIANTES :
BACHIÈRE. Chron. fr. MS. de Nangis.
H.\CHiERE. Chron. S' Denys, T. II, p. 252.
Bachinou, su])St. masc. Vase à boire. C'étoit
une tasse de bois , selon Borel , au mot Bacin.
Bachole, subst. fém. Sorte de hotte ou de vais-
seau servant à porter la vendange ou autre liquide.
(Voy. Nicot, et Du Gange, Gloss. latin au mot Basta.)
VARIANTES :
B.ACHOLE. Du Gange, Gloss. latin au mot Basta.
B.\CHOUE. Nicot et Cotgrave.
Bachot, subst. masc. Petit bateau; Imcelus;
en bas-latin baicha, batellus.
BACHOT. Nuits de Strapar. p. 85.
Bachet. Monet, Dict.
Baquet. Bouteillier, Som. rur. p. 507.
Bacquet. Ibid. p. 8(iO.
Barquet. Froissart, Liv. II, p. 207.
Bacequin. Hist. de la Toison dOr, Vol. I, fcU. 26.
Bacicoter, verbe. Tromper. (Voyez Dict. de
Corneille au mot Bacicoter.) On lit baciquotei' (2)
dans le Dict. de Borel, qui cite le Rom. de la Rose, ms.
VARIANTES :
BACICOTER. CorneiUe, Dict.
Baciquoter. Borel, Dict.
Bacin, suhst. masc. Bassin. — Vase à boire. —
Vase de garde-robe. — Cloche, tocsin. — Armure
de tête.
On employoit, dans le premier sens, les quatre
premières orthographes. Les mots bacinus sous
bacca , bacigna, bacynis, bassile , bassimis , se
trouvent dans le sens de bassin, au Gloss. latin de
Du Gange. On lit basehln pour bassin, dans le Dict.
de Borel , et basin dans les Poës. mss. d'Eust.
Desch. fol. 241.
Le droit de bassin étoit une sorte de droit sei-
gneurial. " Nous avons un droit appelle le droit du
" ?;assi«, qui est tel que dame, vidame peuvent,
« par chacun an, prendre un bassin d'environ un
« sestier plein de raisins, en quelque vigne qu'il
>i voudroit, ès-eaviron de S' Michel. " (Laur. Gloss.
du Droit fr. — Voy. le Gloss. latin de Du Cange au
mot Bacinagium.) Ce mot subsiste, sous la seconde
orthograpiie, avec cette même acception.
Bassin signifioit un vase ou tasse à boire. « Il
« avoit soif, atant il print le bassin pour puyser
« l'eau. » (Percef. Vol. V, fol. 28, R°.)
On trouve bacin et bassin pour vase de garde-robe.
Pour enfans, fault bers, et drapiaux,
Nourice, chaufete et baci)i.
Eust. Desch. Pues. MSS. T. Ill, fol. 442, col. I.
Je ne sçay mais ou seoir.
Fors au bas sur le bacin.
Ibid. T. I, fol 78, col. 2.
On lit bassin à selle percée, dans la même accep-
tion. (Voy. Dict. de Cotgrave.)
Bacin,' bassin et batsain se sont employés pour
cloche et tocsin. On dit de B. Du Guesclin , qu'au
siège de Valongnes il fit venir de « S' Lô six engins
» gettant pierres, lesquelz nos gens firent getter
« contre la toup; mais il y avoit une guérite qui
« sonnoit un bacin quand la pierre devoit eschap-
« per. -- (Hist. de B. Du Guesclin, par Ménard, p.
123.) Bassin s'est dit pour tocsin. « Fut publié que
« se ceux de Bruges vouloient faire aucunes cour-
« ses ou emvahyes sur ceux de la Chastellenie,
-' qu'on soiinastles cloches aux églises et les bas-
li sins poursoy assembler et résister à rencontre
« d'eux. » (Mônsir. Vol. II, fol. 153. — Voy. le
Nouv. Coût. gén. T. I, p. 813.)
(1) Il faut lire bachelereus, comme le prouve cet exemple emprunté au même auteur : « Ung très hardis et bachelereux
chevaliers. » (Froissart, éd. Kervyn, II, (3.) — (2) Bacicoter peut signifier berner. Bacicot, diminutif de basse, est encore une
caisse de bois pour enlever les blocs d'ardoise de la carrière ; ils y sont secoués, bassicotés (?) (N. E.)
BA
- 357 —
BÂ
Enfin bacin signifioit une armure de tête. (Voyez
Bacinet.)
Rassemblons les expressions suivantes :
1° Bassin de jongleur. C'étoit une sorte d'instru-
ment de musique à l'usage des jongleurs, sansdoute
fait à peu près comme un petit bassin , dont ils
tiroient des sons. De là ce proverbe : Tout avocat
beau diseur resscvible à bassin de jongleur. C'est-à-
dire qu'il produit du son et rien de plus. (Du Verd.
Lee. div. p. 510.)
2° Faire la perruque au bacin, semble désigner
un jeu de société. Le mot Bacin, dans ce passage,
pourroit s'entendre peut-être d'un plat à barbe :
Faire la perruque au hacin.
Rire, chanter, deviser franc,
Ce n'est meurtre ne larrecin.
Coquill. Monol. des Perruq. p. 167.
3° Dire à plain bacin, c'est-à-dire sans rien
omettre. Jean de Veuet, finissant l'Hist. des Trois
Maries, s'exprime ainsi :
Dit en ay, sans estre esmaris.
De leur enfans, et de S'« Anne
Vous ay-je aussi à plaine aune,
De ses maris (1) à plain hacin.
4° Cracher au bacin. Expression proveibiale
employée par Rabelais, T. I, p. 05.
5" Chanter de basin, c'est-à-dire se moquer. (Voy.
lesPoës. Mss. d'Eust. Desch. fol. 2-41.)
6° Bacin d'eve chaude. Façon de parler pour
désigner une chose de peu de valeur ou dont on fait
peu de cas :
Et quant la sinagogue s'oi clamer ribaude
D'ire devint plus pale et plus jaune que gaude :
Tais-toi, dit-elle, garce, trop es de parler baude (2):
Li tien diex ne vaut pas plain bacin d'ère chaude.
Fabl. MSS. du R. n° ';218, fol. 342. R° col. 1.
7° Bassin de salle. Grand bassin (3). « Prens ung
« gianl basin de salle si parfond que le faulcon
« soit en l'eaue jus(iues aux cuisses, et mectz le
« bassin en ung lieu bien secret, et soyt einply
« d'oaue, puis apporte le faulcon. » (Modus et Ra-
cio, fol. G3, V°.)
VARIANTES :
BACIN. Gloss. latin de Du Cange au mot Bacimts.
B.issiN. Orthographe subsist.
Baghin. Gace de la Bigne des Déduits, MS. fol. 94, V».
Baschin, Borel, Dict.
Basin. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 241.
Batsain. Mém. de Montluc, T. II, p. 458.
Baeine, subst. fém. Poêle à feu. «Trois milliers
<< de charbon de saulx, deux milliers de charbon
" de chesne, vingt /yrtcàics de trois piezchascune. »
(Le Jouvencel, fol. 85.)
variantes :
BACINE. Le Jouvencel, fol. 85.
Bassine. Cotgrave, Dict.
Baciner, verbe. Sonner les cloches. — Echauf-
fer un lit.
Dans le premier sens, en parlant des réjouissan-
ces publiques faites à Paris, à l'entrée du Roi en
1414, on lit: « Environ huit heures de nuyt
" commencèrent les bonnes gens de Paris, sans
« commandement, à faire feus et à baciner le plus
« grandement qu'on eust veu passé cent ans de-
« vaut. « (.lourn. de Paris, sous Charles VI et Vil,
p.24.) On lit ?)«ssjncr. (Ibid. p. 12 et p. 177.) Le
Gloss. de ce Journal explique le mot bassiner par
jouer des instrumens. Cette explication n'est pas
juste. On a vu ci-dessus bacin pour cloche.
Nous disons encore bassiner pour échauffer un
lit. On disoit baciner dans le même sens. (Voyez
Coquillart, p. IGG.)
variantes :
BACINER. Coquillart, p. 1G6.
BassIxNer. Journ. de Par. sous Charles VI et VII, p. 12.
Bacinet. subst. masc. Armure de tète. — Sorte
de fleur. — Bassin, mesure.
Au premier sens, ce mot signifioit sous toutes
ses orthographes un chapeau de fer, pot en tête,
armel ou autre espèce de casque. (Voy. l'étymologie
de ce mot dans le P. Menestrier, Oiig. des Orn. des
Arm. p. 28. — Voy. aussi le Gloss. latin de Du
Cange, aux mots Bacinetum et Armatura; les Dict.
de Borel, Cotgrave et Monet, au mot Bacinet. —
\o\. enfin Fauchet, des Orig. Liv. Il, p. lOG, et le
P. Daniel, ilil. fr. T. I, p. 389 et 400.) L'auteur des
Contes d'Eutrapel censure l'abus oi^i l'on étoit de
son temps d'emprunter sans besoin, des langues
étrangères, de nouveaux mots, pour les substituer
à ceux qui étoient en usage. Il se récrie sur ce,
qu'au lieu de cabasset, casquel et bassinet, onavoit
introduit le mot ;Uo)voH. (Voy. les Contes d'Eutra-
pel, p. 479.) Le passage suivant feroit presque
croire que le bassinet étoit une armure de tête
plus légère et moins forle que le heaume. Il y est
parlé d'un chevalier qui fut tué d'un coup de
lance qui perça son bassinet. (Voy. Froissart, Liv.
II, p. lOG, année 1380.) Mais, en général, il est
employé pour lieaume. Eust. Desehamps, dans la
description de l'armure d'un chevalier, dit :
Escu luy [ault, espée et lance.
Cotte d'acier, et parde bras,
Ilernoys de jambes pour le bas,
Solers de fer, et une pièce
Que la poitrine ne despièce
Plates, jaques et gantelès
Braconnières et bacinés
Hache, dague, camail, visière
Mais qu'il y ait bonne lannière
Cottes d'armes pour pairement .
Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 504.
« Il print son bacinet et le meit en sa teste et son
« escuyer le lui laça par derrière. « (Froissart,
livre I, p. 400.)
Il est employé au figuré, dans un passage que
nous allons citer. Les Etats de 150G, parlant au roy
Louis XII et faisant l'éloge de leur gouvernement,
lui dirent : <" qu'il avoit maintenu son royaume et
(1) Joachim. — (2) Tu es trop joyeuse de parler. — (3) Bassin nous paraît être le diminutif de basse, sorte de tonneau
qui, en Saintonge, sert à porter la vendange. Comme on trouve dans Grég. de Tours le mot ethnique bacchinon, il faudrait
peut-être remonter au celtique bac, creux, cavité. (N. E.)
BA
- 358
BA
« son peuple en si bonne paix, que par le passé
« n'avoit este en plus grande tranquilité et telle-
« ment qu'ils sçavoient (lue les poulies portoienl le
« bacinet sur la teste en fa^on qu'il n'y avoit si
« hardy de rien prendre sans payer. « (Lettres du
Roy Louis XII et du Gard. d'Amboise, T. I, p. 4i.)
On peut voir dans la Colombière (Th. d'honn. T. I,
p. 58), une description détaillée du bacinet, tel
qu'on le porloit en Brabant, en Flandres et en
Allemagne.
Le bacinet semble signifier, dans les trois cita-
tions suivantes, une calotte de fer qui se mettoit
sous le casque (1) :
Le Roy saisit au froin : tel cop ly donne en teste,
Qu'il ly .sembla qu'il fust féru d'une tempeste :
Ly yeaume l'escartelle, Iv bacinet fendist.
Ger. de Roussillon, MS. p. 158.
On voit, par le dernier passage, que le bassinet
esloit une calotte que couvioit le heaume, recou-
vert d'un bonnet d'acier ou coiffe. « L'espée qui
« estoit trenchante descend sur le heaulme et luy
« va trencber jusques au bassinet. » (Perceforest,
Vol. I, fol. 116, V°.) « Luy couppa le bonnet d'acier
« et fendit le heaulme jusques au bassinet. » (Ibid.
Vol. I, fol. 24.) Dans les Orig. de Faucbet, livre II,
p. 106 et 110, on lit que le bassinet étoit un bassin.
Le bassin renversé ne couvroit pas toujours le
visage ; cependant quelques-uns avoient des visiè-
res, comme on le voit dans le passage suivant :
« Si fit appareiller son coursier et meit son bacinet
« à visière par quoy il ne peust estre congnu. »
(Froissart.)
Le bacinet à bannière étoit un casque, ainsi
nommé de la bannière ou banderolle dont il étoit
orné. (Voy. S' Rémy, Hist. de Ch. VI, p. 89), oîi on
écr'ûbacliinet.
On trouve, dans G. Guiart, bacinez, à visières,
pour une espèce de casque :
Hauberjons et tacles entières
Escus, bacinez à visières
De tous costez y resplandissent.
G. Guiart, MS. fol. 309, V'.
On nommoit aussi bacinet ou bassinet, une fleur
jaune ('2) qui croit dans les prés.
Les bassinets, l'œillet et le narcis.
CEuv. de Baif, fol. 251.
Dans le blason des herbes, on voit que bassinets
signifient contcnte%-vous. (Voy. les Récréations des
devis amoureux, p. 58.)
Bacin, espèce de fleurs. On disoit: blond comme
un bassin.
Nous trouvons dans Guillaume de Lorris, les
vers suivans :
Le guyschet qui estoit de charme
M'ouvrit adonc une pucelle
Qui estoit assez gente et belle :
Cheveulx eut blons comme un bassin,
La chair plus tendre qu'un poussin.
Rom. de la Rose, vers 537-541 .
J. Le Maire fait cette nomenclature de fleurs,
parmi lesquelles figure le bacinelz : » Marjolaines,
» paliot, cyprès, spic, romarin, euroine, mente,
« basilisque, marguerites, soucie, ancolies, rennetr
" tes, giroflées, coqueletz, percelles, bacinet^,
« passeroses , passeveloux , glays noyelles , liz ,
« pencées, muguets, roses et œillets herbuz. »
(.1. Le Maire, lUustr. des Gaules, livre I, p. 92.)
On nommoit aussi bacinet, le bassin où l'on fait
le sel. Ce mot signifie aussi la mesure de sel que
l'on présume égale à la gelonnie commune, c'est-
à-dire le galon. (Voy. les Ord. des R. de Fr. T. III,
note, p. 660.)
VARIANTES ."
BACINET. Froissart, Liv. L p. 400.
Bassin-et. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 184, col. 3.
Bacuinet. J.Le Fev. de S' Reray, Hist. de Charles VI, p. 89.
Bacin. Cit. dans le Gloss. latin de Du Gange à Bacinetum.
Bacinics, plw: Eust. Dcsch. Poës. MSS. fol. 1S4, col. 3.
BACiNEY,;j/t(i-. G. Guiart, MS. fol. 231, V».
Bacinot et Bacinoy. Ger. de Roussillon, MS. p. 158.
Bâcles, subst.plur. Le sens de ce mol est fort
peu déterminé dans le passage suivant, le seul où
nous l'ayons trouvé. Il désigne peut-être des bâtons
d'armes, peut-être aussi le nom propre d'un peuple.
Ja cis bncles (3), si rauseis,
En lors bobans servit mateis.
Poès. MSS. avant 1300, p. 1662.
Bacon (4), subst. masc. Chair de cochon salée.
(Voy. l'étymologie de ce mol, dans les Dictionnaires
de Nicot, Borel, Oudin et Ménage, au mot bacon. —
Voy. aussi Du Gange, Gloss. lat. aux mots baco,
bacco, bacho, et ibid. au mot penellum.)
Bacons mal salez
En charnier empire
Ce dit li villanis.
Prov. du Vil. MS. de S. Germ. fol. 70.
« Deux flèches de lard apelez bacons, d'où vient
« le mot de baeoner pour saler. » (Fauch. Ane.
Poët. fr. livre II, p. 175.) C'est ainsi qu'il traduit le
mot bacon, qui se trouve souvent répété dans le
Fabliau, ms. du Moine et du Sacristain. Son opinion
peut être confirmée par l'auteur du Moyen de par-
venir, qui, à la page 131, dit qu'à Genève bacon
signifie lard. Le Duchat(sur Rabelais, T. I, p. 05), dit
aussi : « que dans le Lyonnois, dans le Dauphiné,
« dans le Poitou et dans la Lorraine bacon c'est
<■ du lard , en Angleterre même ; » après il
ajoute : « qu'en Provence, bacon veut dire du porc
« salé. i> On nommoit bacquiers, les porcs engrais-
sés pour les saler. (Voy. ce mot.)
(1) Le heaume, après 1300, ne fut guère qu'un objet de parade accroché à l'arçon de la selle . le bassinet ou la cervelière
devinrent la coiffure habituelle ; il avait les dimensions du heaume, avec plus de légèreté; il n'avait pas de nasal et
emboîtait mieux la tête. Sous Charles VII, la salade remplaça le bassinet, (x. e.) — (2) C'est le bouton d'or; on nomme
encore ainsi diverses renoncules, (n. e.) — (3) Si c'était un nom de peuple, ne faudrait-il pas le rapprocher de Baclois,
ajouté par D. Carpentier à Du Cangc, d'après le poème d'Alexandre: « Sor l'escu vet ferir .Amaudrus li courtois, Sires iert
des barons et sires des Baclois. Il ne resemble mie Provencel, ne Baclois: Ains semble que il soit un naturel François. » (N. K.)
— (4) Bacho en ancien allemand, back en allemand moderne, signifie dos, échine. (N. e.)
BA
— 359
BA
VARIANTES :
BACON. La Thauraassière, Coût. d'Orl. p. 47i.
Bascon. Fabl. MSS. de S. Germ.
Baconner, verbe. Saler. C'est-à-dire saler en
mettant dans un baquet d'eau salée. (Voy. Fauchet,
Ane. Poët. fr. livre II, p. 175.) « Quiconque acheté
« haron de fronelaye, et morues baconnées , il
« convient qu'ils soient ouverts dedans tierce et
» clos dedans vesprcssonnans. » (Ord. desR.de Fr.)
Bacques, siihst. fém. plur. Ce mot est employé
dans un sens obscène par Crétin, p. 15(5.
Bacqueter, verbe. Vider l'eau. « Soit d'une
« rivicre, soit d'autre lieu par bacquet, ou grandes
« auges, pour mettre à sec l'endroit oîi l'on veut
« piloter et hastir. » (Dict. de Nicot.)
Delà, on disoit bacqiieler le moust d'une cuve ;
c'est-ù-dire tirer le moût d'une eiive avec un
baquet. (Dictionnaire de Monel.)
Bacquiers, subst. masc. Cochon qu'on en-
graisse. « Que l'on ne meine paistre aux champs,
u ains faict-on garder le toict pour l'engraisser et
« puis tuer. » (Cellhell. de L. Trippault, au mot
porc.) Cette explication semble nous donner l'Elymo-
logie de bacon. (Voy. ce mot.)
Baciil, subst.masc. Partie du harnois. Morceau
de bois en demi-cercle qui fait partie du harnois du
mulet ou de l'âne ; on le met au-dessous de la
croupière. Rabelais fait parler ainsi le cheval au
baudet: « Pauvre et chélif baudet, j'ay de toy pitié
« et compassion : tu travailles journellement beau-
« coup, je l'apperçoy à l'usure de ton bacul. »
(Rabelais, T. V, p. 28.) On appelle baculs, en diver-
ses provinces, les palonneaux d'un chariot, les
morceaux de bois où l'on attache les traits.
VARIANTES :
BACUL. Rabelais, T. V, p. 28.
Bacoul. Contred. de SongecreiLx, foL 25, R".
Bacule, siibst. fém. Machine de guerre. — Sorte
de peine.
Dans le premier sens, c'est une machine propre à
jeter des feux d'artifice, à tirer de l'eau, à baisser
ou lever un pont-levis, une bascule. (Voy. le Dict.
de Ménage, Cotgravc, Monet et Oudin.) Ce dernier
l'explique encore par trappe, trébuchet, souricière.
On nommoit aussi bacule : « une peine imposée
« pour faute indécente an son office, bâtant le der-
« rière du coupable, avec le plat d'une paele, ou le
« faisant heurter du derrière contre chose dure. »
(Dict. de Monet.)
De là, on disoit :
Donner la bacule ; ce qu'Oudin interprète fort
imparfaitement par jeter à terre, renverser sur le dos.
Jouer à la bacule, ou à la bassectile, est une
sorte de jeu d'enfant, dont il est mention dans
Rabelais, T. I, p. 152.
Baculer, vei'be. Frapper avec un bâton. —
Frapper sur le derrière. — Maltraiter. — Mettre le
bacul à une béte de charge.
La première acception vient du mot Baculus,
bâton. Elle se trouve dans le Glossaire latin de Du ■
Cange, au mot Bacnlare. (Voy. le Dict. de Borel,
secondes add. — Les Dict. de Rob. Estienne et de
Ménage.)
La seconde signification vient de cul. Nicot, dans
son Dictionnaire, la dérive de batueiido culo.
Ménage critique celle élymologie. On lit dans le
premier article de l'Ordonnance pour les tournois,
attribuée à l'empereur Henry l'Oiseleur : « que si
«■ pour la noblesse de leur extraction, ils sont si
« téméraires que de se présenter, nous ordonnons,
•< voulons et nous plaisi, qu'ils soient desmontez et
«< privez de leur cheval et baculez, et pour note
« d'infamie à l'advenir, qu'ils chevauchent la bar-
« riere. « (Fav. Th. de Chevalerie, p. 1745.)
Le mot baculatus est employé dans le même sens
et pour le même usage, dans Mathieu Paris, cité
par Favin, ibid. p. 1808, et par Du Cange, sur Join-
ville, p. 202. 11 n'est pas aisé de décider si baculer,
en cet endroit, se doit entendre dans le premier ou le
second sens; mais il est pris certainement dans cette
seconde acception en ce passage : « Fut dit que
a Perrin Dandin avoit le plus mal rencontré, dont
« il fut contraint tendre les fesses et bacule à
« demeurant. » (Des Accords, Escr. Dijon, fol. 57.)
Des deux acceptions précédentes s'est formée la
signification générale de maltraiter : « Nos amis
« dedans le Royaume ne se osent déclarer, ni les
« gens d'armes n'osent laisser leurs ordonnances
« pour venir à nous d'autant que nous les avons
« laissés baculer. » (Godefroy, Observ. sur l'Hist.
du Roi Ch. VII, p. 507.)
Enfin, baculer s'est dit pour : « Mettre le bacul à
« une bête de charge. » (Dict. de Monet.)
Baculler sans elle; façon de parler employée
dans un sens obscène. (Chasse et Départie d'amour,
fol. 104.)
VARIANTES :
BACULER. Du Cange, Gloss. lat. au mot Baculare.
Baculleu. Chasse et départ, d'amours, foL 164.
Badal, subst. masc. Espèce d'huissier. (Dict. de
Borel, au mot Bedeau.)
Badanages, subst. masc. plur. .Juifs. « Mantoue
« n'est point sans des badanages et patarins; à iceux
« il offre sa saye, sa cappe et sa chemise, plusieurs
« donnent à ces Juifs asseurance pour luy. »
(Merlin Cocaye, T. I, p. 08 et 09.)
Badaudage, subst. masc. Caractère de badaud.
Un poêle a dit, en parlant des Parisiens :
Votre ane fut d'autre nature...
Il étoit bourgeois de Paris,
Et de fait, par un long usage,
Il retenoit du badaudage.
G. Durant, à la suite de Bonnefons, p. 223.
Badaudaille, subst. fém. Collectif de badaud.
Le duc de Sully, parlant de M. de Joyeuse que les
prêtres avoient annoncé dans les chaires de Paris,
comme destiné par le ciel pour la destruction des
Huguenots^ ajoute. « Si bien qu'après s'estre fait
« adorer comme tel par toute la badaudaille de
" cette grande ville, ou plustost petit monde de
BA
— 360 —
BA
<■ Paris, il forma son armée de toutes les meilleures
« troupes qu'eut le Roy. » (Mém. de Sully.)
Badandement, adv. Sottement. (Diot. d'Oud.)
Badauderie, subst. [cm. Sottise, niaiserie.
(Dict. de Cotgrave etd'Oudin.)
VARIANTES :
B.\DAUDERIE. Cotgrave.
Badaudise. Oudin, Cotgrave.
Badault, adj. Sot, nigaud, imbécile. — Engin
suspendu au planclier.
Dans le premier sens, ce mol subsiste ; mais on
écvïibadaiid. (Voyez-en l'étymologie dans le Cellhell.
de Léon Trippault, et dans la conformité du
françois avec le grec par Henry Estienne. — Voy.
aussi le Dict. de 5'icot et le Gloss. lat. de Du Gange,
au mot harjaudie.) Le Duchat, sur Rabelais, T. "v,
p. 201, croit que ce mot pourroit venir de Vitlellus.
Il paroitroil plus naturel de le dériver de badcr ou
baer, bayer.
Henry Estienne, parlant de l'abondancede la lan-
gue fran(,'oise pour exprimer un sot, dit: « Les
« frères, ou pour le moins cousins germains de
« sot, sont niais que le vieil françois disoit nice,
" fat, badaut, que le vulgaire en quelques lieux
« appelle badlori, nigaud, badin et plusieurs
« autres. » (Apol. pour Hérod. p. 19.) Rabelais, par-
lant de l'auteur du livre intitulé: le Blason des
couleurs, dit : « Sa besterie ba existimé que, sans
« aultres démonstrations et arguments vallables,
» le monde reiglcroit ses devises par ses imposi-
« lions badaudes. » (Rabelais, T. L P- 52.)
Badaut de Paris, semble une expression prover-
biale, dans le Moyeu de Parvenir, p. 200.
On nommoit aussi badaut « un engin qui tient
« au plancher sur lequel on plaçoit diverses choses
« dans les ménages de campagne. » (Voy. le Moyen
de Parvenir, p. 159.)
variantes :
BADAULT. Celthell. de Léon Trippault.
Badaut. Apo)ogie pour Hérodote, Liv. I, p. 19.
Badelori. Oudin, Cotgrave, Rab. T. III, p. 155.
Badlori. Apologie pour Hérodote, ubi suprà.
Badde, subst. féni. Babil. — Terme de mon-
noie. Ce mot, au premier sens, se dit encore en
Touraine parmi le peuple :
Ses quacquetez, et ses baddps.
Faifeu. T- 9%.
A Rennes sont venus à la couchée
Ou maintes bades ils ont descochée.
Id. p. 54.
Dans un sens fort différent, bade étoit un terme
de monnoie. Il existoit plusieurs façons de véri-
fier le poids des monnoies : dans la première on se
contentoit de justifier que la totalité des pièces
pesoit le marc qui avoit été réglé pour leur fabri-
cation ; on appeloit cette façon, à bade saiis recours.
Dans la seconde façon, outre celte première opéra-
tion, on pesoit encore au trébuchet les pièces deux
à deux, pour savoir si elles étoient d'un poids égal
entre elles; cette façon s'appelloit à recoiirs. (Voy-
les Ordonn. des Rois de France,' T. III, p. 94.) Les
nouveaux éditeurs du Gloss. lat. de Du Gange, pro-
posent de substituer le mot /irtr/e au molbade, mais,
outre qu'il est toujours écrit bade, on ne trouve
aucune autorité pour justifier cette correction.
variantes :
BADDE. Faifeu p. 93.
Bade. Id. p. 54.
Badé (au). Terme de chasse. G'est le terme où
l'on haye, où l'on épie le moment auquel la béte
paroilra pour la chasser. « Tantost les chiens avoir
" esté découpiez, voicy le levraut qui sort en cam-
« pagne «H badé. » (Gontes d'Eutrap. p. 172.)
Badelaire, subt. musc. Espèce de sabre ou
d'épée. Ges sabres étoient larges et recourbés;
tantôt longs et tantôt courts. On trouve dans le
Journ. de Paris, sous Gh. VI et VIL p. 30: « Espées,
« ou badelaircs, ou hachets. » (Froissart, Liv. I,
p. 18), dit: « Goupoyent plançons de bois à leurs
« espées et badelaires. » On lit dans Rabelais, T. IV,
p. 173: « Frère Jean avecques son grand badelaire
« entre le dernier. " Le maire de Londres, attaquant
Tillier, capitaine des Mutins de Kent en 1380, « tira
« un grand badelaire qu'il portoit et frappa ledit
« Tillier si grand coup par la tête qu'il l'abbatist
» aux pies de son cheval. » (Froiss. Liv. II, p. 142.)
Badelaire turquois, n'est plus en usage qu'en
termes d'armoiries. Le Laboureur, dans ses'Origines
des armoiries, dérive ce mot de bataille. (Voy. sa
préface, p. 21 et 241.) A'icoUes Gilles, parlant de
Farmure de Gharles le Ghauve, dit que « le Prince
« toujours avoit à son costé un grand badelaire
« turquois. « On ne sait trop pourquoi Fauchet,
qui, dans ses Origines, Liv. II, p. 108, cite ce pas-
sage, en infère que c'étoit une épée large.
VARIANTES :
BADELAIRE. Nicot, Monet, Borel, Ménage.
B.A.DELADRE. NiCOt, DiCt.
Baselarde. Citât, dans le Gl. lat. de Du C. à Bassillardiis.
Badelarié,flrfj. Ge mot est employé comme épi-
Ihète d'un terme obscène dans Rabelais, T. III, p.
155. (Voy. le Dict. de Gotgrave.)
Badian, subst. mase. Espèce d'oiseau qu'on
cbassoit avec l'autour.
Mais ne se faigncnt
De prendre butours et badians
Poclies, aguettes. hérons blancs, etc.
Gace de la Bigne des Déduits, MS. fol. 11, V*.
Badigoince, subst. fém. Lèvre. ■> Lors dist
« Pantagruel, plust à Dieu que chascun de vous
« eust deux paires de sonnettes de sacre au man-
« ton, et que j'eusse au mien les grosses hor-
« loges de Renés, de Poictiers, de Tours et de
« Gambray pourveoir l'aubadequenousdonnerions
« au remuement de nos badigoines. « (Rabelais,
T. Il, p. 218 et 219.) « Le pauvre ayant accordé ses
" badigoines gringuenotoit ce salve avec une voix
« horrifique. "> (Moyen de Parvenir, p. 258.)
On disoit :
1» Se declaver les badigoinces, c'est-à-dire remuer
les lèvres, comme pour ruminer ce que l'on doit
BA
361 -
BA
dire: » Tandis que trop bavards ils se delavoient
« les badigoinces de ce qu'ils avoient à dire. »
(Moyen de Parvenir, p. 23.)
2° Se délayer les badigoinces, se lécher les lèvres.
L'auteur du Moyen de Parvenir, après le récit d'une
aventure galante arrivée à une dame, ajoute: « La
« bonne dame, à ce qu'elle disoit, en s'en délayant
« les badigoinces, eut bien voulu avoir souvent
« telles pratiques. )> (Moyen de Pan'enir, p. 49.)
VARIANTES :
BADIGOINCE. Nuits de Strapar, T. I. p. 408.
Badigoine. Moyen de Parv. p. 258.
Babine. Villon, p. 109, et Crétin, p. 135.
Badigoincier, adj. Epilliète d'un cuisinier in-
venteur de la saulce madame. (Rab. T. IV, p. 171.)
Badin (1), subst. maso, et adj. Bouffon. — Sot,
niais.
Dans la première acception, ce mot, comme
substantif, désignoit autrefois un personnage de
comédie, comme Gille ou Pierrot, quelquefois cou-
vert de farine. (Voyez les épithètes que lui donne
Martin de la Porte. — Voyez aussi, sur l'étymologie de
ce mot, Caseneuve, Orig. Fr.) « En ceste manière
« voyons nous eatre les jongleurs, à la distribution
« des rolles, le personnaig^ du sot et du badin
<• estre toujours représenté par le plus périt et par-
« fait de leur compaignie. » (Rab. T. 111, p. 1!»0.)
Pour sot, niais, badin est employé comme
synonyme de ces mots et d'autres qui ont la même
signification, dans l'Apologie pour Hérodote, p. 19.
Des Accords, en ridiculisant les rébus de Picardie
qui sont des espèces de logogriphes, les appelle
fades et badi)is. (fol. 12.) Molière l'emploie dans la
même acception comme adjectif.
Ma foy j'en suis d'avis que ces penards chagrins
Nous viennent étourdir de leurs contes badins.
Com. (le l'Elourdi, ad. I, scène II.
Badin (en), «dv. Bellement. Du grec eââijy. Aller
en badin, c'est-à-dire compter ses pas. (Vovez le
Celthell. de Léon Trippault.)
Badinage, subst. mase. Sottise, chose ridicule.
« Tenez vous gay et joyeux, et me jetiez aux pieds
« ces badinages qui encharircut voire pauvre juge-
« ment dans des jalousies fort obscures. >• (Contes
de Chol. fol. 168. — Voy. le Dict. d'Ondin et de
Cotgrave, au mot Badinement.)
VARIANTES :
BADINAGE. Contes de Chol. fol. 168, R».
Badinement. Oudin, Cotgrave.
Badinatoi'ium. C'est un mot latin forgé par
Rabelais dans le catalogue ridicule de la bibliothèque
de S' Victor, au T. U, p. 75, où on lit Badinatorium
Sophistarum, au nombre des titres imaginaires des
livres de cette bibliothèque.
Badinement, adv. Sottement. (Dict. d'Oudin
et de Cotgrave.)
Badiner, verbe. Amuser. Ce mot a cette signi-
fication dans cette expression : badiner les perdrix,
c'est-à-dire les amuser en badinant derrière elles
pour les faire entrer dans la tonnelle. (Voyez le
Celthell. de Léon Trippault et le Dict. de Cotgrave.)
Badinerie, subst. fém. Farce. C'étoit une des
anciennes significations de ce mot qui subsiste,
mais qui n'a pas conservé cette acception. « Ainsi
« que nous voyons un farcereau estre bien loué
« en représantanl une parfaite badinerie. » (Dial.
de Tahur. fol. 52.)
Badoulages, subst. masc. plur. Rapports indis-
crets. On appelle ainsi à Beauvais, les rapports
qu'on fait les uns des autres. (Voyez le Dict. Etym.
de Ménage.)
Badrans, subst. masc. Nom propre de peuple.
Alexandre, dans l'énumération des princes à qui il
avoit donné des états à gouverner, nomme « le
« Soudan des Badrans qui costoye à l'autre coslé
« toute Afîrique à la Mer Majour. » (Perceforest,
Vol. 1, fol. 97.)
Baé, participe. Ouvert, béant. — Oiseux.
Dans le premier sens, ce mot signifioit ouvert,
béant. Nous le trouvons avec cette signification dans
les vers suivans : » Estoit armé d'iînes armes noi-
« res, à .111. testes d'omme d'argent, les gueules
« baées et ont les langues rouges. >■ (Modus et
Racio, Ms. fol. 285, V".)
Quant li valiez la vit pasmée,
Tôt maintenant gule haliée,
Se lest cheoir come pannez.
Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. II, fol. 182, R- col. 2.
Comme de baer, ouvrir la bouche, l'on a fait
baailler pour bâiller, et que de cette acception s'est
formée celle d'être oisif, par la même analogie baé
a passé de sa signification propre à celle d'oiseux.
C'est en ce sens qu'on a dit des espions, des
amans :
El pais sur ou celé est qui m'agrée
Si ne puis pas à mon voloir veir.
Car tant redoue la cruel gent baée
Que je n'i os ne aler ne venir.
Poés MSS. avant 1300, T. II, p. 6ti.
VARIANTES :
BAÉ. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 171, R» col. 1.
Bahé. Ibid. n» 7615, T. II, fol. 182, R" col. 2.
Baée, subst. fém. Fenêtre, ouverture. Ce mot
vient de &««■ (2), ouvrir. On a même dit: Fenêtre bée
pour fenêtre ouverte. (Ord. T. II, p. 385.) Baée
signifie petite fenêtre dans les Ord. T. III, p. 580,
où l'on trouve bâte. L'éditeur conjecture qu'il faut
lire baée, il croit que c'est le même mot que bée,
petite fenêtre. Le mot baye est encore usité dans
la maçonnerie.
Ballotte est peut-être le diminutif de baée: « Si
« un propriétaire veut en sa maison faire ériger
« quelque fenestre, fente ou bahotte en quelque
(1) Ce mot a la même origine que badaud, c'est-à-dire hadare, bayer, (n. e.) - (2) C'est le participe pas.'^é de ce verbe-
le mot se rencontre des le xii' siècle: « Et par l'iiis dont cuida clore celé bace Est la veie descloVe et l'ire Deà
mustrees. » (Tliomas le Martyr, p.p. Bekker, Berlin, 1838.) (N e) cic uesciu.t., ei iire ueu
"• 46
BA
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BA
« muraille, pour recouvrer veue sur rhérilage de
« son voisin, tel propriétaire, en ce faisant, est
u tenu d'ériger et eslever ses dites fenestres. »
(Coût, de la Ville d'Orcliies, au Nouv. Coul. gén.
T. Il, p. iWy, col. 1.)
Quoique l'éditeur des Ordonnances semble avoir
confondu les mots batte et baee, nous observerons
cependant que leurs significations sont différentes
aussi bien que leurs étymologies. Baée vient de
baer, comme nous l'avo'ns dit ; batte nous pareil
venir de battre. (Voyez Batte.)
VARIANTES :
BAEE. Ord. des R. de Fr. T. III, p. 586.
BÉE. Ibid. T. II, p. 385.
B.\CE. Ibid. T. III, p. 580.
Bahotte. Nouv. Coût. gén. T. II, p. 989.
Ba en arrière, locution. Il faut lire cha en
arrière pour ci-devant, dans ce passage: " Estoit
« de l'empire et du lignage au bon empereor
« Manuel de cui cil livre a'parlé ba en arrière. »
(Contin. de G. de Tyr, Marténe, T. V, col. 703.)
Baer, verbe. Ouvrir la bouche. — Regarder ou
songer, rêver, penser la bouche ouverte. —
S'étonner, être surpris. — Aspirer, désirer.
Le sens pro{u-e de ce mot est ouvrir la bouche.
(Voyez les Dict. de Borel et de Corneille.)
Mais li morcerax pas n'a frist (1),
Ki boulis (2) fu au fu d'estiule,
Et li vilains héc la gueule.
Fabl. MSS. du P.. n- 7989, fol. 13, V- col. \.
11 signifioit aussi regarder la bouche ouverte :
Toutes les fois que vous passez
Devant autrui meson, gardez
Que là, pour regarder céens,
Ne vous arestez : n'est pas sens
Ne cortoine de baer
En autrui meson, ne muser.
Fobl. MSS. du p.. n- 7218, fol. i32, R" col. 2.
De là, le moi gule baée, dans Marbodus, ms. col.
1674 (et non gule bacce comme dans l'imprimé),
c'est-à-dire bouche béante. Il parle des moules qui
s'ouvrent pour recevoir la rosée du ciel, et par ce
moyen conçoivent, forment les perles.
L'action de regarder la bouche ouverte étant un
signe d'étonnement, de là, baer s'est employé pour
s'étonner, être surpris. Un amant, voulant excuser
auprès de sa dame la témérité de ses désirs,
s'exprime ainsi :
Hai, frans cuers, que tant conois,
Ne baez à ma l'oleté :
Bien sai qu'en vos amer n'ai
Droit, s'amors ne m'i eust doné.
Poès. MSS. avaiil 1300, T. I, p. 69.
Par une extension des acceptions précédentes, ce
mot s'est dit pour désirer, aspirer, soupirer après
une chose:
Helas ! comment porroi-je estre liez, ne joians
Se lamors m'est vée ou j'ai fcitt lonc tans:
Et je verrai c'uns autres en fera ses commans!
Jà Diex nel me leist veir, li pères touz poissans.
Fabl. MSS. du R. n" l-HS, fol. 257, R* col. 2.
Or à quanques demandé a
Or à ce qu'ele bca.
Ibid. fol. 289, R' col. 1.
Oui viaus sens ne savoit
El cortoisie à prendre,
Gart soi bien que j'a n'aioit
Famé qui bée a prendre.
On disoit aussi baer à folie, pour tendre à faire
des folies. (Voy. Fabl. mss. du R. n- 7989, fol. 71.)
CO.NJUG.
Bel, au subj. aspire. (Chans. fr. du xiir siècle, ms.
de Doubler, fol. 182, R°.)
VARIANTES :
BAER. Fabl. MSS. du R. n» 7-il8, fol. 132, R» col. 2.
Beeb. Ibid. n» 7989, fol. 45, V» col. I.
Bayer. Glossaire du Roman de la Rose, sous Bayez.
Baerie, subst. fém. Désir, attente, espoir. Ce
mot est employé avec ces différentes acceptions
dans les vers suivans:
Cuer désirant doit avoir baerie
De bien servir adez.
Poés. MSS. Vatic. n- 1525, fol. 159, R' col. 2.
On doit leissier sa foie baerie
S'on puet aiUors avoir son estounoir.
Ibid. fol. tB2, V col. r.
VARIANTES :
BAERIE. Poës. MSS. Vatic. n» 1490, fol. 40, V°.
Baierie. Poës. MSS. avant 1300, T. IV, fol. 1306.
Be.vrie. Poës. MSS. Vatic. n» 1400, fol. 141, V°.
BEA^'CE. Glossaire du Roman de la Rose.
Bagage (3), subst. masc. Equipages, voitures. —
Habillement, ajustement. — Embarras. — Chose
supeiilue. — Injure.
Le sens propre de ce mot est équipages, voitures.
Dans la Capitulation de S' Dizier enlSS'i, on lit:
« Item que le dit sieur comte et ses gens pourront
« sortir de la ville librement, et avec la suite de
■■ leurs vies, armes et bagues sauves et tout ce
« qu'ils pourront charger et porter sur leur b«,(7rt(7(?. »
(Brantôme, Cap. fr. T. I, p. 412.)
Dans le sens d'habillement, ajustement, on disoit :
Hideux criz, piteux langaiges
Venez servir à mes gaiges
Prenez en vos maresquages
Les bariaiges
Et les atours de tristesse.
Molinet.p. 124 e* 125.
Ce mol signifioit aussi embarras :
Bonne trongne, bon visage,
La courte dague, la rapière
Bien délibéré, bon courage.
D'argent point, ce n'est que bagage.
Aussy je ne m'en charge guvere.
Œuv. de R. de'Collcrye, p. 48 et 49.
On employoit ce mot dans le sens de chose
inutile, superilue :
En trop parler, y a beaucoup bar/aige.
Poés. deCrcliii.p. H8.
Enfin, ce mot étoit pris pour injure. Le duc de
Sully, parlant à Henry IV de M"' d'Entraigues et de
son fi ère, lui dit : « Il vous souvient bien de ce
<■ que vous m'avez autrefois dit de cette fille et de
« son frère, du temps de madame la Duchesse, des
« langages que vous en tentés tout haut, et des
(1) Frit. - (2) Bouilli. - (,3) C'est un dérivé de bagues, qui aurait une origine celtique, (n. e.)
BA
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BA
« commandemens que vous me files faire à tout ce
" bagage (car ainsi appelliez-vous lors la maison et
« famille de M. et M"' d'Enlraigues) de sortir de
« Paris. » (Mémoires de Sully, p. G8.)
VARIANTES :
BAGAGE. Brantôme, Capitaines françois, T. I, p. 412.
Bagaige. Molinet, p. 1-24. — Crétin, p. 118.
Bacquaije. Nioot, Cotgrave.
Bagare, subst. fém. Vanterie, fanfaronnade. —
Sorte de bateaux.
Le sens propre de ce mot est vanlerie, fanfaron-
nade. (Voyez Oudin, Dict.)
On appelle aussi bagare sur la rivière de Seine,
une espèce de gros bateaux qui vont ordinairement
à la suite des cocbes. On dit gabarre en patois
gascon pour gros bateau, et on trouve gabarra avec
la même acception dans le Gloss. lai. de Du Gange.
Levrai motest(/ai)are(l),quieslaussi le nom d'une
sorte de bâlimens ou navires de transport.
Bagasse (2), subst. fém. Femme de mauvaise
vie. — Servante. — Terme d'injure.
Dans le premier sens , nous lisons : « Cette
« fortune s'alla, comme une bagasse, abandonner
« à d'autres. » (Brantôme, Cap. fr. T. I, p. 145.)
On désigne quelquefois sous ces noms une ser-
vante , mais ils emportent toujours une idiée
désavantageuse ; par exemple, en parlant d'une
servante de cabaret :
Voi com cel garse se meut ;
La bajassi; les entend bien.
Fabl. MSS. fol. 87.
Begarde (3) est une injure vague dans ce passage
de rîlistoire des Trois-Maries, p. 307 :
Or ça, dame hécjarde.
Vous êtes digne qu'on vous arde.
variantes :
BAGASSE. Brantôme, Capitaines françois, T. I, p. 14,5.
Bajasse. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 292, V» col. 2.
Bajarse. Du Gange.
Bagare. Oudin, Dict.
Begarde. Ilist. des Trois Maries, MSS. p. 307.
Béasse. Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. Il, fol. 150, V° col. 2.
Bagatellerie , subst. fém. Bagatelle. (Dict.
d'Oudin et de Cotgrave.)
Bagatin, subst. masc. Petite monnoie, ainsi
appellce par les Vénitiens. (Voyez le Dict. d'Oudin,
et Le Ducbat sur Rabelais, T. IH, p. 226.) Ce dernier
conjecture que ce mol signifie batelier, à qui on
donnoit un bagatin pour passer la rivière. (Voyez
Rabelais, T. V, pronostic, p. 15.)
Bagaiides, subst. masc. Nom d'un peuple dans
les Gaules, qui se révolta contre les empereurs.
(Voyez le Gloss. lat. de Du Gange, au moi BagamJœ,
le Dict. de-Borel, au mol Bachard, et Ménage, Dict.
Etymologique.) On peut voir aussi la dissertation
sur les bagaudes dans l'Hist. de Carausius, empe-
reur de la Grande-Bretagne, imprimée à Paris en
1740, in-4°. Pavin dérive ce mol de l'ancien mot
goy(i), bois ou forêt. S' Julien, dans ses Mélanges
historiques, les appelle baogaudes.
variantes :
BAGAUDES. Borel, au mot Bachard.
Baogaudes. S' Julien, Meslanges historiques.
Bagad. Du Gange, Glossaire latin, au mot Barjaadœ.
Bagat. Ibid.
Bagette, subst. fém. Baguelle, verge. « S'il
« veut saillir dedens l'eaue, si le laisse alfer seure-
<■ ment, et fier de la /wt/c^/c en l'eaue, afin qu'il
« sente l'eaue, etc. »(ModuselRacio,Ms.fol. 118, R°.)
Bagoages, subst. masc. plur. Mallôles. (Voyez
Laurière, Glossaire du Droit frangois.)
Bagonisier, subst. masc. Gosier. « En ouvrant
« le bagonisier, il y entra une aliénée humide qui
« luy parfuma... tout le palais. « (Moyen de Parve-
nir, p. 19.) « Manassès luy va fiaquer ce fourmage
« mou dans le bagoulier si proprement, qu'il entra
« tout, et rien n'en sortit. " (Ibid. p. 258 et 259.)
variantes :
BAGONISIER. Moyen de Parvenir, p. 19.
Bagoulier. Ibid. p. 258.
Bagottier, subst. masc. Niais, nigaud. « Cou-
« vrez-vous bagottier. » (Oudin, Cur.'fr.)
Bague, subst. fém.. Hardes, habits, bagage. —
Couvertures de bêtes de charge. — Joyaux. — Aug-
mentation de dot. — Droit seigneurial. ~ Baie,
fruit. — Femme de mauvaise vie.
Dans le premier sens, ce mot signifioil hardes,
habits, bagages: » Prendoient petits' enfans es bers,
« et montoient sur vaches, portant les dits petits
« enfans el baghes devant eux. » (Le Fev. de S'
Remy, Ilist. de Charles VI, p. 127.) « Détroussèrent
« dix-huil charrettes, chargées de vivres et autres
« bagues. » (Monslr. Vol. III, p. 16.) Nous disons
encore, dans ce sens : vies et bagues sauves , dans
les capitulations.
Bagues semble désigner des couvertures de bêtes
de charge, en ce passage : « Ils apperçurent grand
« planté de sommiers, dont les bagues de dessus
« sembloient de fin or. >• (Percef. Vol. IV, fol. 2.)
Le mot bagues subsiste encore pour anneau. Il
signifioit autrefois toutes sortes de joyaux. C'est en
ce sens qu'on lit dons et bagues , dans les Ait.
d'Amour, p. 16.
En étendant cette acception, bague, en Norman-
die, a signifié ce qu'on appelle ailleurs augment de
dot . (Voy. une lettre insérée dans le Mercure d'août,
175;5, p. 1707.)
Bague semble un droit seigneurial en ce passage :
« Pour la part de mon trisayeuil échurent les terres
« de Rosierres avec la cueillère de la mesure,
« comme au Reingr afféchut la bague et au sei-
.^1^.5,L°I\.?f:/5PP?rL''l'A.V?.^P''?".°L^''''"'",.^1'f.P"'®^^^ ^^. '^^".' '}lleniand bàcja (combat), ou à l'irlandais ha^fair (menacer),
■ , avec
comme les
dont ils faisaient profession, (k. e.) - (4) L'étymologie serait plutôrirceÏÏique'l/asaf'raWe'mbïée.'inultUudî^^^ (N. g^^^"^""^ ^
BA
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« gneur de Crouy le gobelet. » (Mém. de Bassorap.
T. I, p. C.)
Oa il d'il bague pour baie, fruit du laurier, du
lierre, etc. (Voy. Le Ducliat sur Rabel. T. V, p. 169.)
EaWn bague s'est dit pour une femme de mau-
vaise vie. (Voy. Coquillart, p. 45 et 54. — Clcm.
Marot, p. lî>. - Ftabeiais, T. V, p. 176.) En ce sens,
ce mot est une contraction de bayasse, bajarce, etc.,
dont nous parlons ailleurs.
VARIANTES :
BAGUE. Monstrelet, Vol. III, fol. 96, R:
Baghe. Le Fev. de S' Remy, Hist. de Charles VI, p. -127.
Bagué, adj. Garni d'anneaux. (Dict d'Oudin et
de Cotgrave.)
Baguenaude, subst. fém. Baie, fruit. — Sorte
de poésie.
On a dit baguenaude pour baie, fruit dequelijues
arbres, comme du laurier, du liei're, du myrte et
du houx. (Dict. Etym. de Ménage.)
On a aussi nommé baguenaude une espèce de
poésie ancienne toute masculine dont la rime étoit
mauvaise. (Dict. de Borel et de Ménage.) « Nota que
« les Picards dient que baguenaudes sont couplets
« faicts à la, volonté, contenans certaine quantité
« de syllabes sans ritbme et sans raison. » (Fabr.
art. de Rhétorique, Livre II, fol. 58.)
Baguenaudes, subst. {ém. plur. Plaisanteries.
— Sottises, niaiseries.
Ce mot est employé , dans le passage suivant,
pour plaisanteries: « Le remboursant bas et roide
« en sa conscience d'aultant de baguenaudes
« comme y ha de poil en dix-huict vaschcs et aul-
« tant pour le brodeur. » (Rabelais, T. II, p. 134. —
Voy. la note 15 de Le Duchat, ibid. p. 62.)
Baguenaudes a été employé pour sottises, niaise-
ries. En parlant des superstitions des Mahométans,
on dit: " Comme peut eslre créance d'homme si
« legiere, que telles baguenaudes soient prinses
■• pour doctrines? » (Al. Chart. de l'Espér. p. 3.5?).)
VARIANTES :
BAGUENAUDES. Rabelais, T. II, p. 134 et note.
Baguenaudebies. Contes de Gholières, fol. 120.
Baguenaulder, verbe. Baguenauder. — Jouer,
badiner, s'amuser à rien faire. (Voy. Le Jouvencel,
fol. 16, R°.)
Baguer, verbe. Emballer. — Charger. — Lier.
Baguer, dans le sens propre, signifie emballer:
• Or convient au bon homme chanoyer sa femme
« et ses enfans au chasteau , ou la ville : et Dieu
« sçait s'il a la peine de monter et de remonter la
• dame et ses enfans, de trousser et de baguer, et
« de loger quand ils sont en la forteresse. » (Les
Quinze Joyes du Mariage, p. 465.)
Bacquer a été employé pour charger: " Ainsyque
« fait la charge de l'asne quand elle est mal bac-
• quée. » (Merl. Cocaie, ï. II, p. 354.)
Enfin ce mot a signifié lier:
Navrent les uns, et les aulcuns tuèrent,
Les autres prins lyerent et bayucrenl.
J. Marot, p. 25.
VARIANTES :
BAGUER. Les Quinze Joyes du Mariage, p. 165.
Bacquer. J. Marot, p. 25.
Baguete, subst. fém. Petite bague, joyaux. —
Poche, gousset.
Le mol baguette est le diminutif de bague , et il
se prenoit en ce sens pour choses peu considéra-
bles. « La devoit fournir de soye et de plusieurs
« autres menues baguettes. » (Arr. d'Am. T. I, p. 89.)
Adieu présens, baguetes, affiquets.
Vigil. de Charles VII, T. Il, p. 32.
Baguette signifie visiblement poche ou gousset,
dans le passage suivant :
Ont lyards dessemblez
Quel z'il pousa en sa bource ou baguette.
Faifeu, p. 40.
Mais nous soupçonnons qu'il faut lire bougette
ou peut-être brayette.
variantes :
BAGUETE. Vigil. de Charles VII, T. II, p. 32.
Baguette. Arr. Amor. T. I, p. 89.
Baguetter, verbe. Frapper avec une baguette.
(Dict. d'Oudin et de Cotgrave.)
Baguolet, subst. masc. Nom propre. C'est celui
d'un valet dans les vers suivans :
Il fait le maistre la dedans,
Et diriés à voir barjuollet.
Que monsieur n'est que son vallet,
Et madame sa chambrière.
Œuv. de Rem. Belleau, T. H, fol. U9, V.
11 faudroit peut-être lire bagnolet au lieu de ba-
guolet.
Bnhnçinc. subst. jém. La Bohême. (Voy. Dict.
Etym. dcMénage, au mol Bahoigne.) On Vû'eeintu-
res de lUiliaigne dans Petit Jean de Saintré, p. 119 ;
(/(' 7;('a/.(/Ht'dansleTriomp. des ix Preux, p. 412, et
Balhaigne A-Am k\. Chart. Hist. de Charles VI et VII,
p. 257, où l'on trouve « roi de Hongrie, de Balhal-
« gne et duc d'Autriche. » Nous lisons Behaigne
dans Froissart, Livre 1, p. 5. (Voy. les notes de l'é-
diteur des Mém. d'Ol. de la Marche, p. 12.) On a
appelle Bebaignons les peuples de Bohème. (Voy.
les Mém. d'Ol. de la Marche, Livre I, p. 167.) Il est
écrit Boliaignons dans l'Hist. de la Toison d'Or,
T. I, p. 65.
VARIANTES :
Bahaigne. Petit Jean de Saintré, p. 119.
Bahoigne. Dict. Etym. de Ménage.
Balhaigne. Al. Chartier, Hist. de Charles VI et VII, p. 247.
Behaigne. Froissart, Livre I, p. 5.
Bahairiz, subst. masc. plur. Espèce d'archers.
Lorsque les rois d'Orient étoient en guerre, le vain-
queur enlevoit le plus de prisonniers qu'il pouvoit
et les vendoil à des marchands qui les condui-
soient en Egypte pour les revendre. De ces prison-
niers, il nafssoit des enfans que le Soudan faisoil
nourrir et garder. On leur apprenoit à tirer de
l'arc, et à mesure ([u'ils avançoient en âge, le Sou-
dan en faisoit des archers qui étoient destinés à la
garde de sa personne. Ces archers ou chevaliers
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étoient appelles bahairi%[\). (Voy. Jointille, p. 55.) Ce
mot pounoil s'être formé de l'allemand behalten,
qui signitie garder. Du Cauge, Gloss. latin, au mot
Bahudum, croit cjue ce même mot allemand a pro-
duit 6a/iH/ ou ^a/iî/<, que l'on a dit aussi bahurs.
11 n'y a qu'une ditîérence légère entre balutr et
huhairi^.
Baliis, adj. Ebahi, stupéfait. fV'oy. Partonopex
de Blois, Ms. de S' Germ. fol. 156.)
Partonope.x n'est point baliis.
Ibid. fol. 158.
Partonopex rest si penssis
Qu'il en devient fox et baliia.
[m fol. 160.
Bahu, subst. masc. Espèce de coffre. Il étoit
ordinairement bombé par dessus. Du Gange, Gloss.
latin, au mot Bahudum, qui a la même acception, le
dérive du mot allemand hehiiten, qui signifie garder.
Ainz prennent partout comme ahurs,
Tentes et cotres et bahurs,
Dont ils treuvent la bêle pile ;
Et puis retournent vers la vile
Es pès, com l'en conduit au maille.
G. Guiart, MS. fol. 263, R*.
VARIANTES :
BAHU. L'Am. Ressusc. p. 16. - Crétin, p. 180.
Bahud. Petit ,Tean de Saintré, p. 649.
Bahurs. Du Cange, Gloss. latin, à Bahudum.
Bahut. J. Marot, p. 66 et 132.
B.^YEUL. Cotgrave.
Bahutier, subst. masc. Ouvrier qui fait des
bahus. D'où est venue cette façon de parler. Faire
comme les baliutiers, c'est-à-dire faire bien du
bruit et peu de besogne. (Oudin, Cur. fr.)
Bahutier, adj. Propre à porter le bahut. On
disoit en ce sens cheval bahutier. (Dict. de Cotgr.)
Bai, adj. Blond.
Quant je remis sa bouchete,
Et son bel chief bai,
Et sa polie gorgete
Qui plus est blanchete
Que n'est fleur de lis en may.
Chron. fr. du xin" siècle, MS. de Bouliier, fol. 183.
Bai, sk/*s^ masc. Cheval bai. — Animal marqué
en tête d'une tache blanche.
Nous disons encore bai dans le premier sens. On
trouve presque toutes ces orthographes dans Du
Cange, Gloss. latin, aux mots FariUs equus, Baucus
frisca, Hevioldum.
Il a fait baielart sin ceval inseler.
Po5s. MSS. avant 1300, T, IV, p. 1365.
De là, on disoit :
Bai héron, bai couleur de héron. (Parton. de
Blois, MS. de S. Germ. fol. 149.)
Bail brun (dans Rabelais. T. I, p. 70.)
Baxj aumbler, cheval bai qui va l'amble. (Du
Cange, Gloss. lat. au mot Hariotum.)
On trouvera dans Champier, Hist. de Louis XII,
page 353, les allusions du mot haiard, dans le
sens que nous exposons, avec le nom du Chevalier
Bayard.
Feste Dieu Baijart, est un jurement dans Rab.
T. [, p. 249, etï. IV, p. 285.
On nomiiioit aussi baillet (2) les chevaux, et même
les autres animaux marqués au front d'une tache
blanche. (Voy. Monet et Robert Estienne, Dict. et
Du Cange, Gloss. lat. au mot Frisca.) On dit bai l
en ce même sens en Bretagne, et baiard en
Flandres.
VARIANTES :
BAI. Orth. subsist. - Parton. de Blois, fol. 149, R».
Bau>. Rabelais, T. I, p. 70.
Baill. Du Cange, Gloss. latin, à Farius Equus.
Bailles. Ibid. dans une citation au mot Baucus.
Baillet. Monet, Dict.
Balvkt. Du Cange, Gloss. latin, à Baiardus.
Bayakt. Mém. de R. de la Marck, MS. p. 223.
Bavaud. Du Canae, Gloss. latin, ubi supra. '
Baye. Mém. Du Bellay, T. VI, p. 443.
Baielart. Poës. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1366.
Baiaus, partie, au plur. Baillans. (Chron. de S'
Denis, T. I, fol. 236.) On lit dans le latin de Suger
bâtantes.
Baiart, subst. masc. Oiseau de maçon. Petit
auge dans laquelle le maçon porte le ciment.
« Brouettes, civières, baiars, sacs, hottes. » (Mém.
de Sully, p. 484.) « Portions le S' Gentil et moy le
« bayart, pour donner l'exemple. » (Mém. de Mont
Luc, T. 1, p. 623)
variantes ;
BAIARS (plur.) Mém. de Sully, p. 484.
B.WART. Mém. de Mont Luc, T. I, p. 623.
Baie, subst. (ém. Fruit. — Objet de peu de
valeur, discours frivoles.
On nomme encore ainsi le fruit du laurier et de
quelques autres arbres.
Comme les bayes (3) sont de peu de valeur, ce
nom a été employé pour signifier chose de peu de
conséquence, discours frivoles, tromperies. Ce mot
subsiste en ce sens.
VARIANTES :
BAIE. Nicot, Dict.
Baye. Oudin, Dict.
Baien, adj. Espèce de pois (4). Peut-être pois
chiche.
Le vin laissent por la fontaine,
Et la char por les pois baiens.
Hisl. de S' Luc. MS. de S. Germ. fol. 30, V col. 1.
En parlant des mortifications d'Isabelle, sœur de
S' Louis, on dit que : « souventes fois quand elle
>i avoit tout jour jeusné, sa viande estoit un peu
« de poirée et de pois baiens. » (Vie d'Isabelle, à la
suite de Joinville, p. 171.)
De bon civé avec les poids bayens.
Eust. Desch. Po5s. MSS. fol. SM4.
(i) M. de Wailly, d'après MM. Daunou et Renaud, voit là un mot arabe, signifiant maritimes, de bahr, mer ou fleuve;
ils occupaient une caserne sur les bords du Nil, dans l'île de Rauda, en face du Caire, (n. e.) — (2) L'étymologie est le
latin badius. (n. e.) - (3) Molière et Corneille employaient encore ce mot dans l'Etourdi et le Menteur. Mais baie de bacca
n'a pas affaire ici : l'origine est bayer, parce que celui qui donne une baie fait baijer qui la reçoit. (N. E.) — (4) Pois n'est
pas un adjectif, or le sens est brun, comme on peut le voir dans Du Cange, sous beretmus. (n. k.)
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Au figuré, le mot baicii, sigiiinoil : sans valeur,
rien :
Ne les pris ele un pois baien
Quar il sont luit demi paien.
Hisl. de s. Luc, fol. 33.
VARIANTES :
BAIEN. Hist. de S" Leoc. MS. de S' Germ. fol. .33, R».
Bajens. Vie d'Isabelle, à la suite de Joinv. p. 171.
Bayen. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 214.
Baier, verbe. Attendre. Nous trouvons ce verbe
avec cette signification dans les vers suivans :
Après toy ne fay abaier,
Pouvre marcheans ne haier.
Geofroi de Paris, Pocs. à la suito du Roai. de Fauvel, fol. 50.
Baieves, sm^s^ Bayeux. Nom d'une ville en
Normandie.
En Normandie entrèrent au terme qui fu mis
Li duc de Paris Hue et le Roy Loeis,
Li duc vint vers Baieves, tost gastant le païs.
Rom. de Rou, MS. p. 85.
Li jureor de Bniex.
Prov. dans le Rec. des Poël. MSS.
vanll300. T. IV, p. 1651.
VARIANTES :
BAIEVES. Rom. de Rou, MS. p, 85.
Baiex. Poës. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1651.
Baïfin, adj. Nom d'une espèce de vers que Baïf
appelle ainsi parce (lu'il en éloit finventeur (1).
(Voy. les Œuv. de Baïf, fol. 35.)
Baigner, verbe. Se baigner. — Plonger. —
Se noyer. — Se délecter, se complaire.
Ce mot, dans le sens propre, signifie : baigner.
A tout le moins ayés compassion
Du noble sang, et de France et d'Espagne
Dedans lequel le cruel Mars se bagne.
Clém. Marot, p. 257.
Par une extension de cette acception, on a dit
baguer pour plonger. « Ils leur font leurs fers
. baguer dedans les poitrines. » (Percef. Vol. I,
fol. 90.)
Mal furent telz avoirs et acquis et gaigné.
Dont ly filz, et ly père sont en enfer baiqné.
J. de Meung, Cad. 340 et 3*1.
Ce mot s'est dit aussi pour se noyer.
Trébuchiez ileuques se baignent:
Piétons Français a eus s'enpaingnent
Oui iusques à la mort les paient.
G. Guiarl, MS.fol.275,R-.
Au figuré, ce mot signifie : se plaire, se délecter,
prendre plaisir. « Une colère qui se plaisoil et
« bciignoit en ses inimitiés. » (Des Ace. Big. fol. 72.)
L'usage de ce mot prouve l'amour qu'on prenoit
alors pour le bain et justifie l'élymologie qu'on
pourroit donner aux mots gan (2) et s'égayer comme
venant d'aiguë, aqiia. J. de Meung, opposant aux
pauvres qui le sont véritablement ceux qui seule-
ment en ont fait une profession tels qu'étoient les
Moines mendiants, a dit de ces derniers :
Mais de ceulx qui povres se fai^nent
Et de leurs mains "ouvrer ne daignent,
El tous en ricliesses se baignent
Mendians, et puissans de corps.
De ceux ne veux je pas entendre
Que l'on leur doye aumosne tendre
Sans les chastier et reprendre.
J.deMeung, Test. 16iM651.
De là, on disoit se baigner en liesse, nager dans
la joie :
Les premiers jours qu'amours range sous sa puissance
Un cœur qui chèrement garde sa liberté.
Dans des lilets de soye il le tient arresté.
Et l'émeut doucement d'un feu sans violence :
Mille petits amours lui font la révérence,
// se bagne en lienne et en félicité.
Les jeux, la mignardise etc.
Œuv. de Des Perles, p. 43.
VARIANTES :
BAIGNER. Orthog. subsist.
B.4.IGNIER. G. Guiart, MS. fol. 35, R".
Baingn'ier. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 234, col. 4.
B.UNGNER. G. Guiart, MS. fol. 102, V°.
Bagner. Clém. Marot, p. 257.
Bannier. Marbodus, col. 1670.
Baignei'ie, subst. fém. Lieu propre ù se bai-
gner. — L'action de se baigner.
Le premier sens signifie : lieu propre à se
baigner.
Il semble à l'eschanconnerie,
Que ce soit une baingnerie
"Tant y a de vin respandu.
Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 377, col. i.
De la première acception, ce mot a passé à la
seconde, pour signifier l'action mêmede se baigner.
« Les convis, et banquets plus grands et plus pro-
« digues qu'en nul autre lieu, dont j'aye en con-
« noissance, les baignniries et autres festoyemens
« avec femmes, grands et desordonnez et a peu de
« bonté. » (Mém.'de Comines, p. 16.)
variantes :
BAIGNERIE. Gotgrave, Dict.
Baignoirie. Mém. de Comines, p. 16.
Baingnerie. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 377, col. 4.
Baignes, subst. fém. Nom de lieu ou plutôt
d'une ville.
Et puis Baignes qui moult est belle
Et Serres où l'on fait la sove.
Parlon. de BloU, MS. de 3. Gerra. fol. 151, R- col. 1.
Baignoire, subst. fém. Chaudière à faire le sel.
— Ilaignoire.
On trouve le mol bagerna employé avec la pre-
mière signification, dans Du Gange, Gloss. lat.
Sur le'second sens, voyez le Dict. de Cotgrave,
au mot Bag noire, qu'il interprète par vaisseau oîi
l'on se baigne.
VARI.^NTES :
BAIGNOIRE. Du Cange, Closs. lat. à Bagerna.
Bag.voire. Cotgrave, Dict.
Bail, subst. masc. Tutelle. — Régence, adminis-
tration. — Garde, défense.
Voyez le Dicl. de Corn, au mot Bail, le Dict. de
Nicot et les Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis et
sur le Hom. de la Rose, au mot BailHe ; Laur.
Gloss. du Dr. Fr., et Dict. de Cotgrave, au mot
BailUstrerie, où l'on peut voir les différentes ac-
(1) Il croyait l'être, mais on en trouve avant lui. (N. e.) - (2) Gai, qui vient peut-être de Gains, Gavius, noms latins de
bon augure, n'a rien à voir avec aqua et balucare. (N. E.)
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ceplions données ii ces mois. Avrait, nous renvoyons,
sur l'origine du mol bail, à Boulainvilliers, Essay
sur la Noblesse, Table, p. 41, sous le mot baillis;
Du Gange, Gloss. lat. aux mots hailleta, Bajuliis,
BajuUvi, Balia, Ballium, Ballive, hœredes et
miindium. Voy. aussi les divei'ses acceptions de ce
mot bail dans Laur. Gloss. du Dr. Fr. et dans les
Ordon. des Rois de France, T. I, p. 58; Ibid. p. 106,
et T. III, p. 427. On trouve l'ancien usage de ce
mot dans le nouveau traité de Diplomatique, T. I,
p. 394.
Ce mot a été employé pour tutelle. » Le jeune
« Prince d'Antioche dit que sa mère le tient en
■• bail. " (.loinv. p. 98.) « Et si parlerons en quelle
« manière, l'on puet et doit osier enfans de son
« baailij, à che que il ne puisse riensdemander par
« rez ou de compaignie. » (Beaumanoir, p. 110.)
Bail semble un droit appartenant au tuteur, et
dont l'héritier de la maison de Vendôme est exempt,
même en minorité, par des Lettres de Ch. Vlil.
(Voy. Godefr. Observ. sur Cb. VIII, p. 428.)
On a dit aussi bail pour régence. « La Reyne
• Blanche avoit la garde de Louis neuf son fils par
« raison de tutelerie, et de bail (1). » (Chron. de
S- Denis, T. II, fol. 49.)
Chascuns vouloit avoir prébende.
Et tenir le royaume en bai/.
Eu6l. Desch. Po5s. MSS. fol. 558.
On a employé ce mot dans le sens de: garde,
défense :
,1'ain le chevalier
Qui bien met sa terre
En Uaat.
Poës. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1661.
VARIANTES :
BAIL. D. Morice, Hist. de Bretagne, col. 959. — Boulainv.
Ess. sur la Nobl. Tabl. p. 41.
Baailg. Beaumanoir, p. HO.
Baal. Poës. MSS. avant 13(K3, T. IV, p. 1661.
Ban. (lisez Bail.) Gloss. lat. de Du Gange, à Warda.
Bailaoe. Du Gange, Gloss. lat. au mot Baijlia.
Baliage. Contin. de G. de Tyr, Martin. T. V, col. 702.
Bailli.\ge. Dict. du Droit Français de Laurière.
Bailage , subst. masc. Baillage, juridiction.
(Voy. Du Gange, aux mots Baglia et Baillagimn. —
Rech. de Pasquier, p. 3.53, et le Gloss. sur les Coût,
de Beauvoisis.)
variantes :
Baillie (s. /'.) Loix Norm. art. ii, dans le latin Bailliva.
Baylie (s. f.) Rymer, T. I, p. 114, col. '2,pasi<im. lit. de 1270.
Bailet, subst. 7)iasc. Valet. Mot gascon. (Dict. de
Borel, au mot Ligne.)
Baillance, subst. fém. Action de donner, de
livrer. « Et si sur la tradition et baillance de telles
« charges, etc. » (Nouv. Coût. Gén, T. II. p. 702.)
Baille, subst. fém. Servante. — Nourrice. —
Palissades.
Ces mots, selon Du Gange, sont dérivés du mot
latin Bajula, qui signifie nourrice, celle à qui on
confioit la garde des enfans, ou peut être en géné-
ral femme de charge, servante.
Dans le Recueil des Poës. Françaises, avant 1300,
je trouve dans une pièce d'Adam li Bocus, au sujet
de la S" Vierge : « à sa nation n'eut baïesse. » Ce
qui signifie, il ne se trouva point de nourrice ou
de servante pour avoir soin de l'enfant, lorsqu'il
vint au monde.
Le mot baille a signifié Palissades (2). Elles éloient
composées de pieux plantés dans la terre, quelque-
fois t'i distance d'un demi pied les uns des autres.
On .s'en servoit pour défendre aux ennemis les
approches des faubourgs et portes des villes, d'un
chàleau, d'une tour. Gemot semble venir de bataille
qui s'est pris dans le même sens, ou de bal mis
pour pal, pieu. On l'employoit souvent dans le
sens de barrière, barricade : « Adonc avoit un abbé
« à Bonnecourt de grand sens et de grand hardiesse
" entreprins, lequel fit au dehors de Bonnecourt
« faire et chaipenter unes bailles, et asseoir au
« travers de la rue, et y pouvoit avoir entre deux
« de l'un pillier et de l'autre, demi pié d'ouverture. »
(Froissart, Liv. I, p. 48.)
Dedens la ville s'enfermèrent.
Et li nostre el baille remeserent
Entre la cité et uns pont.
Ph. Mouskes, MS. p. 698.
variantes :
BÂILLE. Ph. Mouskes, MS, p. 698.
Balle. Ph. Mouskes, MS. p. 701.
Beille. Lancelot du Lac, T. I, fol. 115, Y».
Belle. Ibid. fol. 1.50, R» col. 2.
Bolle. Ibid. T. I, fol. 79, V» col. 1.
Baile., Du Gange.
Baïesse. Poës. Fr. avant 1300, notice 67S.
Baillée, subst. fém. Bail à ferme, bail. « 11 n'y
" a point de nécessité au seigneur de renouveller
" les baillées, n'y à l'homme de faire reprise, si ce
« n'est que le seigneur l'en requière, ce qu'il peut
« faire, (juand bon lui semble, après le bail
« expiré. » (Nouv. Goût. gén. T. IV, p. 413.)
Baillée, subst. fém. Action de bailler, de donner
don, cession, donation. (Voyez Duchesne, Gén. de
Montmorency, p. 380.)
Bâillement, subst. masc. Action de donner à
ferme. « Par la diste coustume, il loist à un chacun,
« si bon luy semble, bailler son héritage à lui venu
« de succession à rente, et sourcens annuel et
« heritable, pourveu que le dit bâillement soit fait
« pour juste prix. » (Nouv. Coût. gén. p. 356.)
(1) Lorsqu'à la mort d'un vassal, l'héritier était encore en bas-âge, les services dus par le fief ne pouvaient être remplis.
11 suit de là que le suzerain confisquait, reprenait le fief, usait du droit de commise. La pratique tempérait ce droit
rigoureux : le suzerain jouissait du revenu et recevait les services du plus proche parent de l'enfant mineur. Mais les
collatéraux, héritiers présomptifs, soignaient plutôt le fief que l'enfant mineur. On dut donc, à côté du représentant féodal
de l'enfant, établir un gardien qui prenait le nom de sa charge, un bai/. Le bail ne cessait qu'à la majorité; il fut aussi
désigné sous le nom de yanie-noblij. (n. e.) - (2) On peut regarder ce mot comme le substantif verbal de baculare, former
de bâtons, ou de baju/ure, protéger. La bai//e, dans les châteaux forts, était l'avant-cour, la cour des ouvrages extérieurs,
la basse cour ; on y disposait d'ordinaire l'écurie et les communs, (n. e.)
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Bailler, verbe. Donner. — Raconter, débiter.
— Défendre, soutenir.
Le premier sens de ce mot est donner. (Voyez le
Dict. de Nicot.l On trouve bulliare dans le même
sens au Glossaire latin de Du Gange. Baila est un
mot du patois de Cahors. (Voyez le Dict. de Borel,
au mot Clouper.)
Le mot baille s'employoit aussi pour débiter une
nouvelle, la raconter :
Si con l'ystoire le me baille,
Que i'ay à S' Denis veue.
G. Guiart, MS. fol. 123, V.
En tel guise con ge vous baille,
Atendent Flamens la bataille.
G. Guiar!, MS. fol. 340. V*.
Enlîn, on disoit bailler pour défendre, soutenir,
avoir soin : « Si povez bien dire que nostre lignage
« est plus abaissé par vous, que il ne sera jamais
« baillé. " (Lancelot du Lac, T. III, fol. 55. —
Voy. les Mém. d'Olivier de la Marche, T. II, p. 578.)
C'est en ce même sens qu'on cmployoit se bailler,
se soutenir, se défendre :
César ot en sa corapaignie
Le mieulx de sa chevalerie
Oui moult s'argue, et moult se baille
Moult se combat, moult se travaille.
Rom. de Brut, MS. fol. 31.
Remarquons cette expression dans les vers sui-
vans : « Mes pensées me baillent » qui signifient :
je pense.
Selonc ce que l'en puet esmer.
Et que mes pensées me baillent.
G. Guiarl, MS. fol. 278, V-.
On disoit aussi : « soupirs en larmes baillies »
pour soupirs mêlés, trempés de larmes. (Machaut,
MS. fol.27, Rocol. 1.)
CONJUG.
Baillege. imp. du subj. Donnasse. (Ane. C.deBr.)
Baillesins, imp. du subj. Donnassions. (Perard,
Hist. de Bourg, p. 450 ; lit. de 1241.)
liaillet, part, passé. Donné. (Carp. Ilis. deCamb.)
Bailli, passé défini. Je donnai. (Eust. Desch.)
Bailliens, imp. de l'ind. Donnions. (Perard, Hist.
de Bourg, p. 451.)
Baillié, part, passé. Donné. (La Tbaum. C.d'Orl.)
Bâillon, impératif. Donnons. (Crétin, p. 163.)
Ba//gnï,ind. prés. Donnent. (L'Am.ressusc. p. 248.)
Banrra, futur. Donnera. (Ord. T. III, p. 592.)
Bandera, futur. Donnera. (15,Ioyesdumar. p.75.)
Baudrai, futur. Je donnerai. (Fabl. mss. du R.)
Baudrons, futur. Donnerons. (G. Guiart, ms, f. 347.)
Baudront, futur. Donneront. (Ord. T. I, p. 78.)
Bauldra, futur. Donnera. (Villon Rep. fr. p. 12.)
Bauldroit, coud. prés. Donneroit. (Vig.de Cli. VII.|
Baurira, futur. Donnera. (Eust. Desch. Poés. mss.)
Baut, impér. Donne. (G. Guiarl, ms. fol. 79, R°.)
Baylé, Baill, part. pas. Donné. (Rymer, T. I, p. 114.)
Bendés, part. pas. Baillies, donniés. (Rymer, p. 71 .)
Bendesiés, imp. du subj. Donnassiez. (Id.)
VAIUANTES :
BAILLER. Mém. d'Olivier de la Marche, T. II, p. 578.
lÎAiLLiER. Duchesne, Gén. de Chastillon, p. 45.
Baileb. Duchesne, Gén. de Chastillon, p. 46.
Baier. Fabl. MSS. du K. n» 7989, fol. 71, R" col. 1.
Baller. Duchesne, Gén. de Chastillon, p. 45.
Baila. Borel, Dict.
Ballier. Duchesne, Gén. de Chastillon, p. 45.
Baillet, adj. Paillet, couleur de paille (1), couleur
de chair. (Dict. de ÎNicot, Rob. Estienne, Oudin et
Cotgrave.) En terme de Vénerie, l'on disoit :
Il est ung petit baillet au front,
N'a si bon lièvre en tout le mont.
Gaco de la Bigne, des Déduits, MS. fol. H3, Rv
Baillette, subst. fe'm. Bail. Le mot baillette
équivaut à un bail à fief nouveau, qu'un Seigneur
consent en faveur de quelque particulier. Il signifie
proprement le contrat qui porte la concession d'un
terrain. (Laurière, Glossaire du Dr. Fr. au mot bail
de justice.)
Bailleu, subst. mase. On appelle ainsi à Paris
celui qui remet les os disloqués. Ce mot est formé
du nom propre Bailleul, père du Président à mor-
tier de ce nom au Parlement de Paris. (Dict. Etvm.
de Ménage.) (2)
\ariaktes :
BAILLEU. Ménage, Dict. Etym.
Bailleul. T. Il du Novenn. en 1592, p. 18.
Bailleur, subst. masc. Donneur. — Terme de
jeu de paume.
Bailleur, dans le sens propre, signifie donneur.
Comme terme de jeu de paume, il est opposé à
naequet qui étoit le marqueur :
Au beau fiaî7/t'!(i- ferme naequet
Qui sache rachasser derrière.
Coqaillart, p. 27.
Bailleur, adj. Qui donne. Le mot baillart, qui
se trouve dans le Roman de la Rose vers 2201, est
expliqué dans le Supl. au Gloss. de ce roman par
bailleur, donneur. Sans admettre ce mot et cette
explication, je m'en tiendrois à la le(.;on de Galiot
qui [Mv[eGaillart.
variantes :
BAILLEUR, Baillart.
Bailli, adj. Affecté.
Las itex sni jou baillis,
Ke jolis estre soloie.
Pocs. MSS. avant 1300.
On disoit aussi 7nal bailli dans le même sens :
Li membre foible, et mal bailli.
Fau(.h. LaDj. et Poi-s. fr. p. 107.
Et mal menés, et mal baillis.
Partoii. de Blois, MS. de S. Germ. fol. Ut, V col 1.
On trouve aussi mal baillie pour mal renommée
(l) C'est plutôt la couleur rousse tirant sur le blanc. On trouve dans G. Guiart, t. Il, p. 106, la forme baille: « Et destriers
de pris hennissans, Blans, noirs, bais, baucens et bailles. » L'italien a la forme bagliore, éblouissement ; mais nous ne
connaissons pas la racine commune expliquant la couleur et l'état de la vup. (n. e.) — (2) C'est un diminutif de bajulus,
celui qui porte, celui qui soigne. On le trouve au xiii» siècle, dans le Lai de l'utnbre, et au xiv", dans Froissart : f liaiUeu,
j'obéirai volontiers, car c'est raison. » (Poésies, II, III, 36.) (N. E.)
BA
369 -
BA
et pour mal gouvernée. Borel cite Perceval sur le
premier sens, et Faucliet sur le second. Il suit de
là que le mot bailli a été pris dans une acception
fort générique, qui n'étoit souvent déterminée que
par le sens même de la phrase.
VARIANTES ;
BA.ILLI. Fauch. Lang. et Poos. Fr. p. 107.
Baillis. Poës. MS. avant 1300.
Baillial (sergent), subst. 7nasc. Sergent du
bailli. (Yoy. La Thaum. Coût, de Berry, p. 160.) On
trouve Sergent juré, autrement baillial. (ibid. p. 164.)
Baillie, subst. fém. Santé. R'estreen sa baillie,
signifie : Avoir repris ses forces, revenir en meil-
leure sanlé :
Tôt dolereuz en ai le dos,
Si n'ai mestier fors de repos ;
Ains que la trive soit faillie,
Reserai bien en ma baillie.
Alhis, MS. fol. 118, R'col. 1.
Baillier, verbe. Gouverner. — Prendre soin. —
Enlever, déplacer.
Ce mot, au premier sens, dérive du mot bailli,
tuteur, ou peut-être le mot baillir, du latin bajttlare,
a-t-il formé le substantif bailli?
Caii/té^rsignilioil aussi prendre soin de quelqu'un,
le dominer, le subjuguer, le conduire :
Je puis riche homme bal lier:
Vous le me verres si tailler
Qu'il n'aura jà tant marcs, ne livres
Qu'il n'en soit, en brief tems, délivres.
Voler feray tous ses deniers.
Rom. de la Rose, vers 11471-11475.
Gautier, ce dist li Sires, ne vous quier anvier ;
Por l'amor votre père vous ai-je forment chier;
Ma fille vous donrai, si la volez baillier,
Pour que vueilliez prendre a per, et à moillier.
Fabl. MS. du R. n- 7218. fol. 348, R" col. 1.
On a employé ce mol avec la signification d'en-
lever, de déplacer :
Venez avant, dit-il, venez,
Or poez les pierres bailler,
A vos nés porter et charger.
Rom. de Brul, MS. fol. 62.
Bailler a signifié prendre ou porter dans les vers
suivans :
D'armes bailler s'aparillerent :
Chances de fer premiers chaucerent.
Alliis.MS.fol. 94, Vcol. 1.
Baillir s'est dit pour commander , mener ,
conduire :
Ces m en lait 11 dus issir.
Et celle gent c'ont à baillir.
Alhis, MS. fol. 95, R" col. 1.
Mal baillir se disoit pour malmener ou peut-être
ici pour mal garder :
L'enmaine pris Ermagoras ;
Cil nel laira mal baillir pas.
Alhis, MS. fol. lOG, V'col.2.
Ballier a été employé pour garder, conserver,
dans ces vers :
Plus de .C. lances froissèrent ;
Et si que une n'en baillèrent.
Alhis, MS. fol. IIG, V" col. 2.
Nous trouvons baillir, avec la signification de
tenir, garder :
lUec encontre son destrier
Tout atïraé, moult estraier ;
N'est qui le baut ne qu'il le gart,
Alhis, MS. fol. 100, V" col. 1.
Enfin, on s'est servi de ce mot dans le sens de
tenir, manier :
Onques cors de famé mielz taillies
Ne fu par mains d'ome baillies.
Alhis, MS. fol. 65, V* col. 2.
VARIANTES :
BAILLIER. Rom. de la Rose, vers 15780.
Ballier. Id. cité ci-aprés.
B.ULLin. Alhis, MS.
Baillionner, verbe. Mettre un bâillon. (Laur.
Glossaire du Dr. Fr.)
Baillir, verbe. Traiter. 11 est pris en mauvaise
part dans ce passage :
Dame je te disoie bien :
Onques croire ne vausise rien
Que il m'osast ensi baillir:
Dieu toi a il fait faillir.
Fabl. MSS. du R. n- 7989, fol. 62, R- col. 1.
Baillis, subst. masc. Bailli, chef de justice,
régent, tuteur, gardien (1). La signification la plus
(1) En partant pour la croisade, où il emmène avec lui le sénéchal (1189), Philippe-Auguste fit son testament. C'est
dans cet écrit qu'il établit les baillis, ou du moins qu'il leur donne des fonctions précises : baillivus, avant lui, ne
signifiait pas autre chose qu'olficier en général. Les baillis devinrent dans chaque province supérieurs aux prévôts, qu'ils
durent obliger à une bonne administration de la justice. A de certaines époques, ils devaient se rendre à la cour du roi,
pour y remplacer le sénéchal absent. Ils étaient, dans leurs bailliages, responsables de l'administration. Quand le sénéchal
mourut, en 1191, les baillis le remplacèi-ent tout naturellement. Est-ee à l'imitation du roi que les seigneurs créèrent des
baillis, est-ce au contraire le roi qui imita ses vassaux? C'est là une question qu'il est difficile de résoudre. Nous voyons,
dans les grandes seigneuries, le bailli au-dessus du prévôt, qu'il remplace dans les petites. Au midi, les deux degrés
d'administration restent aux mains du bayle et du sénéchal, qui semble parfois trop puissant et voit ses attributions
partagées entre plusieurs fonctionnaires portant son titre. Le IkiHIi, au xiii« siècle, est un chevalier lettré (Pierre de
Fontaine, Philippe de Beaumanoir). Au nord, c'est plutôt un homme d'épée, choisi dans la noblesse des environs de Paris.
Sous Philippe-le-Bcl, on choisit souvent des roturiers. Représentants du roi, agents révocables, ils touchaient jusqu'à
6,000 francs d'appointements.
1» Agents financiers, ils reçoivent des prévôts les revenus des domaines royaux et les portent eux-mêmes au Trésor, à
Paris, où ils rendent leurs comptes. 2» Agents de justice, ils la rendent en première instance et en appel: ils président les
assises des nobles, prennent en main les procès des ecclésiastiques ou des mainborés. 3° Officiers militaires, ils
convoquent les nobles du bailliage et les conduisent au roi. 4° Agents politiques, ils surveillent les seigneurs, créent les
cas royaux, entravent ou apaisent les guerres privées par la quarantaine le roi, et protègent par Vasseurement le roturier
contre les violences de la noblesse. La royauté déplaçait souvent les baillis et les surveillait étroitement ; elle ne tarde
pas à les redouter et les annule peu à peu. Dès le xiv^ siècle, au nord, des lieutenants de robe longue remplacent les baillis
dans l'admmistration judiciaire. On crée pour les revenus ordinaires des receveurs de bailliage, et les revenus
extraordinaires sont perçus par les élus. L'année soldée devient nécessaire ; l'inspection du ban et de l'arrière-ban n'est
plus qu'une formalité, et sa levée une mesure extraordinaire, (n. e.)
II. 47
BA
- 370 -
BÂ
générale de ce mot est celle de bai/Zi, chef de justice,
en un bailliage. Il siç^nifie aussi gardien, tuteur,
gouverneur, régent d'un royaume. iVoyez les Dict.
de Monet, Borel et Laur. Gloss. du Dr. Vr. au mot
Bailli. — Voy. Du Cange, Gloss. lat. aux mots
Ballivus et liajidus.) Hailleu répond au latin dapi-
fer, dans l'IIist. de Beauvais par un bénédictin, pr.
p. 271», tit.de 1182.
Les auteurs ne s'accordent pas sur l'étymologie
de ce mot. Pasquier le dérive du mot bailler, don-
ner. « Or furent ainsi appelles, à mon jugement ces
« bailli fs pour autant que de leur première origine,
« ils esloient bailler et envoyez en diverses provin-
u ces comme conservateurs et gardiens du peuple,
« encontre les oITences qu'il eust pu encourir des
<■ juges ordinaires. » 11 njnule plus bas : « Le mol
« baillif en vieil langage t'iauçois ne signifioit
« autre chose que gardien et bailiie garde. » (Pasq.
Rech. p. 105.) La 'Roque, dans son traité de la
Noblesse, p. 2G2, dit que Ragueau contredit celte
étymologie; il ajoute que Bodin en parle de cette
sorte : «' Et bailïivos custodes vocant. » 11 dit aussi
que « d'autres sont de ce sentiment que bailly
« vient de bailler, parce qu'ils étoient envoyés et
« baillés en nos provinces par nos Rois pour y faire
« administrer la justice, ou bien que le baiUij signi-
« fie conservateur, et gardien du peuple. » Le
même auteur prétend que la charge du baillij ne
devoit être exercée que par des gentilshommes de
nom et d'armes. Quelques auteurs ont placé la
création de celle charge, sous le règne de Philippe-
Auguste, lorsqu'il alla à la Terre-Sainte ; ils disent
que par son testament, ce prince donna la garde de
ses états aux baillis. Ménage, dans son Dict. étym.,
dérive ce mot de Bajulare, porter, comme étant ceux
qui portoient le poids de l'administration du royaume.
Comme toutes les acceptions données à ce mol
sont justifiées dans la dissertation qu'on vient de
lire, il suffit d'avoir, d'ailleurs, indiqué dans quels
auteurs on trouve lesdifîérentes orthographes sous
lesquelles on le présente.
Nous remarquerons seulement que :
1° Baili s'est dit aussi pour syndic de confrérie.
(Du Cange, Gloss. lat. au mot Bajtili confratriœ], et
pour ceux qui levoient les impôts et cens dus aux
Seigneurs. (Ord. des R. de F., T. III, p. 274.)
2° Baillies chevetains étoient ceux qui étoient
commis par le duc de Normandie sur ses sujets.
(Voy. Laur. Gloss. du Dr. fr.)
3° Baillif est synonyme de maire, dans la Chr. Fr.
Ms. de Nangis, an 1292. Il répond au mot major
qu'on lit dans le latin.
Il est employé pour bailly, dans le Gr. Coût, de
Fr. livre IV, ch. v ;
Pour tuteur, dans les Recherches de Pasquier,
page 105 ;
Pour ceux qui ont la garde noble ou bourgeoise
de leurs en fans;
Pour avocat, dans le Moyen de parvenir, p. 104;
Pour gouverneur, dans la Chr. de Berry, p. 402;
Entin, pour officier préposé à la garde du trésor
des deniers du Roy, appelé la secrète royale, dans
Du Cange, Gloss. fat. au mot Sécréta regia.
4° fkiill étoit le nom qu'on donnoit, dansl'Orient,
au chef de la République de Venise, en 1370. On le
nomme encore, h la Poite, le baile de Venise. (Voy.
Assis, de Jérus. p. 205.)
5" Baillisseur s'est dit pour tuteur, qui a la garde
des personnes nobles mineurs. (Laur. Gl. du D. Fr.)
0° Baillistre signifioit proprement tuteur ou gar-
dien. (Laur. Gloss. du Dr. Fr. — Du Cange, Gloss.
lat. au mot Bajuliis.) Il est cependant distingué de
tuteur, et semble signifier curateur, dans les Ord.
des R. de Fr. T. II, p. 64.)
1" Le port baillijéio'û un officier de justice infé-
rieur au grand baillij. On l'appelloit aussi bailly des
bourgeois. (Nouv. Coût. Gén. T. I, p. 1059.)
S° Le bailly portatif élo'ii une espèce de lieute-
nant du bailly ; « Vices ipsius gerens. » (Voyez les
Chartes dupaysetComtédellainaul, au Nouv. Coût.
Gén. T. II, page 44.) ^-^
9" Enfin le bals de l'Empire étoit le vice-empe-
reur. (Dict. de Bore), qui cite Villehardouin.)
VARIANTES :
BAILLIS. Gloss. du Rom. de la Rose.
Bailly. Nouv. Coût. Gén. T. I, p. 10.59, col. 1.
Baillif. Ord. des Rois de France, T. I, p. 91.
Bailliffes. Britton, Loix d'Angl. fol. 4, V».
Baili. Du Cange, Gloss. latin au mot Bajiilus.
Bail. Buris;ny, Hist. de Constantinople, T. II, p. 405.
Baile. Nouv. Coût. Gén. p. 1238, col. 1.
Baill. Assises de Jérusalem, p. 189.
Baille. Procès de Jacq. Cuer, MS. p. 168 et 169.
Bayle. Nouv. Coût. Gén. T. IV, p. 905, col. 1.
Baeles. La Thaum. Coût, de Berry, p. 102.
Bailleus. Beaum. p. 7, Poës. MSS. av. 1300, T. IV, p. 1309.
Baillie. Gloss. du Dr. Fr. par Laurière.
Bailliée. Ane. Coût. d'Orléans, à la suite des Coût, de
Beauvoisis, page 467.
Bailliens. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 454, col. 2.
Baillieus. Poës. MSS. du Vatic. n» 1490, fol. 130, V".
Bailliex. Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis.
Baillisseur. Laurière, Gloss. du Dr. Fr.
Bailliste. Etat des Offlc. du duc de Bourgogne, p. 76.
Baillistre. Coût. Gén. T. I, p 294 et passim.
Baillius. Poës. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1362.
Baiule. Borel, Dictionnaire.
Bal. Ph. Mouskes, MS. p. 377.
Ballius. Ph. Mouskes, MS. p. 752.
Bailleu. Duchesne, Gén. de Béthune, p. 164.
Bals. Borel, Dictionnaire.
Baus (plur.) Du Cange, Glossaire de Villehardouin.
Baux (plur.) Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 247.
B.WLius. Glossaire sur les Coût, de Beauvoisis. 1*'Sîii^
Vaillies. Rymer, T. I, p. 116 et 117, titre de 1270; dans le
même titre, en latin, on lit BajuUs,
Baillistre, siibst. masc. Bélître (1). Ce mot a plu-
sieurs significations. Elles sont toutes injurieuses.
(Voy. Boulainvilliers, Ess. sur laNob. Tab. p. 41.)
Baillistrei'ie,s?/&sf. fém. Domination, autorité,
pouvoir. — Tutelle. — Propriété.
Dans le premier sens de domination, autorité.
(1) Bélître, qui d'après Diez vient de BcHler, mendiant, ne doit pas être confondu avec baillistre, patent qui accepte la
garde, le bail d'un mineur, (n. e.)
BA
— 371 —
BA
pouvoir, on disoit : <• S'il avoit son cuer en sa
« bailUe, qu'il en puest faire à sa volunté. » (Lanc.
du Lac, T. III, fol. 122, P» col. 2.)
Nous trouvons le mot de halistcrie avec la signi-
fication de tutelle, dans le passage suivant : « La
« femme qui est baliste, administratresse, ou tu-
« triée de ses enfants ne perd point la dite
« balisterie, etc. « (Coût. Gén. T. I, p. 8il. — Voy.
Laur. Gloss. du Dr. Fr.)
Prendre quelqu'un, et le bouter
En sa tutelle, en sa baillie.
Coquillarl, p. 82.
Ce mot a signifié la propriété d'une chose. En
voici un exemple :
Toute sa terre ot en baillie.
Qui moult ert riche et bien garnie.
Fabl. MSS. du R. n' 7ï>18, fol. 355, R' col. 2.
VARIANTES :
BAILLISTRERIE. Laur. Gloss. du Dr. Fr.
Balisterie. Coût. Gén. T. I, p. S41.
Bailliu, subst. 7nasc. Sujet, vassal. Dans le pas-
sage suivant, l'Amour dit, en parlant d'un jeune
indifférent adoré des femmes :
N'onques service, ne homage
Ne le fist en tous que li lut,
Por ce qu'il ne se reconnut
A son hom, n'a son bailliu.
Si li fist en temps, et en lieu.
Sentir son pooir et sa force.
Fabl. IIS. de S. Germ. fol. 3-21.
Bailliveaux, subst. masc. plnr. Baliveaux.
En termes des Eaux et Forêts, ce sont de jeunes
chênes au-dessous de .'<0 ans. (Dict. de Borel et
Laur. Gloss. du Dr. Fr. au mot Bailliveaux.)
<• A temps passé les maîtres en faisant et vendans
« ventes de bois ont oublié par inadvertance à faire
« retenue de bayneaux ou estalons pour repeupler
« des forêts. >^ (Grand Coût, de Fr. p. 55.) Peut-être
faut-il lire baijveaux comme dans le passage sui-
vant : « Les baijveaux laissez de la dernière
« coupe. >' (Pitliou, Coût, de Troyes, p. 37G.)
VARIANTES :
BA.ILLIVEAUX. Laurière, Gloss. du Dr. Fr.
B.wvEAUX. Pith. Coût, de Troyes, p. 370.
Bayneaux. Grand Coût, de Fr. p. 55 (pour hayveaux.)
Bâillon, Billon (pont à), subst. masc. Ce mot
semble mis pourunnom de lieu dans Villon (Repues
franches, p. i et 7.)
Baillorge, subst. Espèce de grain, de l'orge.
Voyez le Dict. de Colgrave, au mot Baillarge et le
Coût. Gén. T. II, p. 5G4, où l'on trouve : « tiers
« froment, tiers seigle et baillerge et avoyne. »
VARIANTES :
BAILLORGE. Coût. Gén. T. II, p. 564.
Baillarge. Cotgrave, Dict.
Baillerge. Coût. Gén. T. II, p. 585.
Baillot, subst. masc. Espèce de vase. « Parce
a qu'aucune fois on n'a pas commodité d'avoir fon-
« taines, ou ruisseaux, il est requis faire de petits
« baillots de bois pour mettre leur eau. » (Fouil-
loux, Vénerie, fol. 10, V°.)
Bailou, subst. masc. Valeur. Dans le patois
gascon, il est employé sous la même acception dans
ie Rec. des Poës. mss. avant 1300, T. IV, p. 1364.
Bain, subst. masc. Bain. — Effusion de larmes.
Pour la signification de bain, voyez bagnum dans
le Glossaire latin de Du Cange.
Et combien parez-vos de moi ?
Dame, dit-il, foi que vos doi.
Se ge ai vingt sols, et mon baaing,
Et ge ai mon convoi de gaaing
Gel' voldrai molt bien de servir.
Fabl. MSS. de S' Germ. p. 125.
Li a fait pranre une poison,
Enprés a fait temprer un bainrj
Donc fu gariz de son mehaing.
Blanch. MS. de' S. Germ. fol. 189.
« Après que la petite fille eusl été bien lavée et
« netoyée dedans le baing. » (Nuits de Straparole,
T. I, page 112.)
Dans un sens très figuré, le mot boing a été em-
ployé pour effusion de larmes. Coquillarl, parlant
d'une femme qui plaide pour les intérêts d'une
autre femme auprès de son mari, dit :
En usant de pleurerie,
Remonstrera, s'il est besoing,
Que sa femme est seiche et tarie,
Et n'a pas de vie plain poing ;
Et s'il faut qu'elle prenne soing,
Elle y demourra toute roide.
Et cela à l'aide du boing.
Trouvera sur ce cas remède.
Coquillarl, p. U et 15.
Le passage suivant justifie pleinement cette ex-
plication :
On feroit de larmes un boii>g
Qu'ay pleurez de desplaisance.
La Chasse et Dép. d'Amours, fol. 283.
Locutions remarquables :
i" Bain d'une gisante: c'est-à-dire, bain d'une
femme en couche
2° Bain de Marie (1). Monet l'explique ainsi:
« Fourneau d'alembic , ou plantes à distiller se
« cuisent et résolvent à sec, mais dans l'eau bouil-
« lante. "
3° Chevaliers du bain. Voyez, sur cette expression,
le Gloss. lat. de Du Cange, au mot Miles ; on y
trouve une grande dissertation sur l'usage du bain
dans les cérémonies qui préparoient à la chevalerie ;
on y avoit aussi » rordoiinance et manière de
« créer et faire nouveaulx chevaliers fin baing (2) au
« temps de paix, suivant la Coutume d'Angleterre. »
(Voy. aussi La Salade, fol. 54.)
4° Argenté à bain. En termes d'orfèvrerie,
argenté à bain se disoit vraisemblalilement par
opposition h argent bruni. A la bataille d'Arqués,
« Sagonne étoit monté sur un cheval turc armé
<■< d'armes argentées à bain, et un petit manteau
t d'écarlate. » (Mém. d'Angoulême, p. 85.)
5° Bains de Valentin. Façon de parler prover-
(1) Le bain-marie aura été ainsi nommé par allusion à sa douce chaleur, (n. e.) — (2) L'ordre du bain fut établi par
ichard II. Le nom de l'ordre vient de l'usage de se baigner avant de chausser les éperons d'or. (n. e.)
BA
372 —
BÂ
iiale ii laquelle a donné lieu l'aventure d'un mari
qui prenoit un bain pour se disposer îi coucher
avec sa femme, tandis que le galant profite de son
absence pour occuper sa place. (Voy. le Francien,
cité dans Oud. Cur. Fr.)
()° Ikdtifj du diable. Expression singulière pour
signifier humeur mélancolique. (Voyez Malad.
d'Amour, p. 159.)
7° Baiiig cruel, pour bain d'eau froide. Cette
fa(,;on de parler se trouve dans les vers suivans :
Après lor a deiïendu
Qu'ils ne soient jamés veu
En la maison, ne el porprès,
Qiiar si il y estoient représ
Il auroient un bainrj cruel
De la froide eue du chanel.
Fabl. MSS. du R. n" IHS. fol. 239, R- col. 1.
VARIANTES :
BAIN. Orthographe snbsist.
Baaing. Fabl. ^ÎSS. de S. Germ. p. 125.
Baing. Nuits de Strapar. livre I, p. 112.
Baig. Blanch. MS. de S. Germ. fol. 189.
BoiNG. La Chasse el Départ, d'amour, fol. 283.
Baincheres, suhst. Engin h pêcher. (Voy. les
Ord. des R. de Fr. T. Il, p. l'i.)
Baine, subst. Droit sur le poi.sson.Ce mot vient
apparemment de l'ancien mol Bc/ma, qui signifie un
panier. (Gloss. de l'IIist. de Paris.)
variantes :
HAINE, Benne. Gloss. de l'Hist. de Paris.
Baiocque, subst. fém. Espèce de monnoie (1).
Elle étoit de peu de valeur. (Voy. Dict de Colgrave,
au mot Baiocque.) En parlant d'un empirique,
qui avoit promis de guérir de la goutte un cardinal,
on a dit: « 11 luy envoya son maistre d'hostel pour
« emprunter dix mille écus, auquel ce gentil gué-
« risseur respondit eslre un pauvre compagnon, et
« n'avoir pas une baijoque pour passer l'eau. »
(Contes d'Eutr. p. 78. j
VARIANTES :
BAIOCQUE. Cotgrave, Dict.
Bayaqlie. Contes d'Eutrap. p. 78.
Baion, subst. fém. Nom de Ville. Bayonne. Ce
mot répond, dans le lit. de 1259, p. 50, au latin
Bayona.
VARIANTES :
BAION. Bymér, T. I, p. 45; tit. de 1259.
Baone. Rymer, T. I, p. 50; tit. de 1259.
Baioniers, subst. viasc. plur. Arbalétrier.
Borel, sur ce mot, cite la Chroniq. de Flandres. 11
prétend qu'il vient de Banonne, parce qu'on y fai-
soit de meilleures arbalètes qu'ailleurs. (Voy. Laur.
Gloss. du Dr. Fr.) Au lieu de bayoneier dans le Dict.
de Colgrave, peut-être faudroil-il lire baioniers ou
baionniers, du mot Bajoue, pris pour joue, à cause
de l'attitude que prennent ceux qui se servent de
l'arbalète, et qui mettent la joue sur cette arme
pour tirer.
(1) Cette monnaie de cuivre, en usage dans les Etats Romains, serait ainsi nommée à cause de sa couleur baie (bajo) ;
de même en Irançais, on dit un blanc, un jaunet. (N. e.)
VARIANTES :
BAIONIERS. Borel, Dict.
Bayoneiers. Cotgrave, Dict.
Bayonniers. Laur. Gloss. du Droit Français.
Baire, subst. fém. Barre. C'est la traverse qui
soutient le fond d'un tonneau. « Quiconque vend
« vin, cervoise, ou autre bruvage es mettes de la
« jurisdiclion desdits Seigneurs hauts justiciers,
« viscontiers ou l'un deux, il doit au Seigneur droict
« d'afforage, tel que de chacun fond bairé deux
« lolz, el de chacun fond non portant baire, un lot
« seulement. » (Coût. Gén. p. 885.)
Bairé, part. Barré. Se disoil des tonneaux. (Voy.
la citation de l'article précédent.)
Bais, adj. Décrié. Au propre, abaissé.
Lors fus d'aus huiez, et baiz
Lors fus enginnez, et traiz
Par les tiens, etc.
Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. I, fol. 73, V ool. 2.
Baiselle, subst. Gouvernante d'une princesse.
Un amant ayant fait l'éloge de sa dame, compte
ainsi la cour qu'elle doit avoir :
Pour ce, sera Venus vo damoiselle.
Et vous dressé serez plus haute qu'elle.
Et SI sera Juno vostre pucelle.
Aussi Pallas vostre sage baiselle
Sanz huece
Machaut, MS. fol. 197, R" col. 2.
Baisemain, subst. niasc. Hommage. — Com-
pliment.
Le sens propre est l'hommage qu'un possesseur
defiefrendoit à son Seigneur. « Cela estoit tenu
« pour fiefd'honneur. Le greffier du Tillet le nomme
« baisemain. « (S' Jul. Mesl. Histor. p. G76.)
On disoit en ce sens pris au figuré :
1° Venir à baise main, c'est-;Vdire : se soumettre.
En parlant du refus que fit le Comte d'Armagnac
de rendre à Charles Vil le Comté de Comminge, que
le Prince lui demandoit, on ajoute:
Pour le contraindre à ce faire,
Si y fut a tout mille lances
Et vint devant l'isle Jourdain,
Où là, sans grandes résistences,
Le Comte vint à baise main.
Vigil. de Charles VII. T. I, p. 9U.
2° Donner à bese main, c'est-à-dire : prodiguer
les bienfaits pour quelqu'un.
Richart outremer demeura
Salehadin tant l'ounoura.
Et li donna à bese main
Si largement, hui, et demain,
Qu'il laissa perdre, etc.
G. Guiarl , MS. fol. 37, R'.
S' Julien se récrie sur l'introduction de ce mot
dans les usages franyois pour compliment. 11 le
regarde comme contraire à la liberté et à la fran-
chise de la nation, et le met au nombre « d'infinies
« autres solises et dépravations de l'antique vertu,
« francise et générosité françoise corrompues, de
>' tant de façons par les étrangers. » (S' Julien, Mesl.
BÂ - 373 -
Histor. p. 427. — Voy. Ibid p. 586. — Voy. aussi
les Div. Letions de Du Verdier, p. 234.)
Baisement, siibst. masc. Baiser. — L'action
de baiser.
Vers lui courut, si l'enbraça ;
Iluec ot gra?it enbracement,
Et moult merveillox haiscmenl.
Floiro e( BlancheQor, MS. do S. Germ. fol. 203, V' col. 1.
par un bais
Sol à sol.
Pois. MSS. avant 1300.
Baiserct éloit le diminutif de baiser; baiser de
paix, c"étoit le baiser qui se donnoil en signe de
réconciliation et de répiiration pour un homicide.
On observoit pour le recevoir Tordre et le degré de
parenté. Les mâles en ligne directe avoienl la pré-
férence sur les collatéraux, et les deniers qui pro-
venoient de la réparation étoient partagés entre les
héritiers, comme des effets de succession. Les
bâtards n'avoient ce droit que dans les homicides
qui regardoient la famille de leur mère. (Voy. le
Nouv. Coût. Gén. T. I, p. 804, 8.-.O. <)!)4 et 1113.)
Baiser doulce margot, et le elier baiser margot
sont deux quolibets usités vraisemblablement, au-
trefois, dans le style burlesque:
Mais voyons si déduit de chiens
Donne si largement ses biens :
Nenni, il faut païer l'escot ; '
C'est le baiser douce Marqol.
Gace de la Signe, des Uéduils, MS. fol. 1211, R-
Mais après dit ung mauvais mot,
Que c'est le cher baiser maryot.
Ibid. fol. 13i, V'.
VARI.-INTES :
BAISEMENT. Dict. de Rob. Est. et de Cotgr.
Baissement. Dict. de Rob. Est.
Baiser. Orth. subsist.
Baisier. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 439, col. 1.
Boiser. Fabl. MSS. de S' Germ. fol. 69.
Bais. Poës. MSS. avant 1300, T. I, p. 900.
B.useret. Poës. de Jacq. Tahur. p. 250.
Baiseï", verbe. Baiser. On trouve le mot basiare
dans le même sens, au Gloss. hit. de Du Gange :
Las se cou avient jamsis k'ele me bâche
Pis arai que forsenés ki porte mâche (1).
Poês. MSS. avanl 1300, T. III, p. 1046.
On lit bâche pour bace, dans une autre copie
MS. de la même pièce.
Doucement le racaulli
Les eus li baisse, et le vis.
Fabl. MSS. du R. n' 7989, fol. 8, V col, 2.
Baisotter, est proprement le diminutif de baiser.
(Voy. ce mot dans Cotgr. et dans Gilles Durand, à
la suite de Bonnefons, p. 91.)
Brtiisierse trouve pour baiser dans le Rec. des
Poës. MSS. avant 1300, T. Il, p. 605, mais c'est pro-
bablement une faute.
Locutions remarquables:
1° Baiser les mains, c'est-à-dire saluer. « L'usage
« de baiser les mains est venu des anciens Empe-
« reurs qui bailloient premièrement à baiser leurs
« mains aux nobles, et après la bouche, et le
BA
« menu peuple leur baisoit le genouil. » (Du Verd.
dans ses Div. Lee. p. 105.)
2° Baiser la terre, toucher la terre. « Il n'afiert
« pas que pour moy vostre pied la terre baise. »
(Percef. Vol. I, fol. 140.)
3° Se baiser publiquement l'un l'autre. Autrefois
cet usage s'observoit par les gens mariés pour mar-
quer d'une manière solennelle la liberté cl la bonne
foi avec lesquelles on faisoi t les contrats et la volonté
qu'on avoit de les exécuter. (Laurière, Glossaire
du Droit Français.)
4° Baiser le verroul. « C'est le signe de l'hom-
■■ mage que le vassal fait à son seigneur feudal au
« manoir du fief dominant, en l'absence du sei-
« gneur, en lieu de la bouche et des mains que le
« seigneur présente à son vassal, en recevant le
« serement de fidélité. " (Laur. Gloss. du Dr. fr.)
5° Baiser la paix après sa dame. G'étoit une
galanterie de nos ancêtres, de baiser à l'église la
paix, après sa maîtresse. (Gloss. des Arr. d'Amour.
— Voy. l'Amant rendu Cordelier, p. 530 et 531.)
6° Miser le babouin. Acte de soumission. (Dict.
d'Oudin.)
7° Baiser son ami à la bouche. On disoit prover-
bialement : « Il ne faut pas tant baiser son ami à la
« bouche que le cœur lui en fasse mal ; » c'est-à-
dire il ne faut pas tant importuner un ami qu'enfin
il s'en fâche. (Oudin, Cur. fr.)
On disoit proverbialement :
Bon fait maie bouclie appaiser ;
Aucunes fois on seuU (2) baiser
La main qu'on vouldroit qui fust arse.
Roman de la Rose, 7755-7757.
CONJUG.
Baisarent [se], passé défini. Se baisèrent. (S" Bern.
Serm. fr. mss. p. 369.)
Cftis/, indicatif présent. Il baise. (Ghans. mss. du
comte Thibaut, p. 61.)
Bes, indicatif présent. Je baise. (Poës. mss. avant
1300, T. IV, p. 1576.)
Best, subj. Baise. (Blanch. ms. de S' G. fol. 180.)
VARIANTES :
BAISER. Orlh. subsist.
Beser. Ord. T. 1, p. 268.
Baisser. Fabl. MSS. du R. n» 7982, fol. 90, V° col. 2.
Baissier. Ibid. fol. 79, V" col. 1.
Baisier. Poës. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1427.
Besier. Ibid. p, 1403.
Besser. Athis, MS, fol, 39, V» col. t.
Bacer. Ibid, T. III, p. 1046.
Bâcher. Ibid, dans un autre MS.
Bruisier. Poës. MSS. avant 1300, T. II, p. 605.
Baisotter. Durant à la suite de Bonnef, p, 91.
Baiseresse, adj. au fém. Qui baise.
Quand ma langue piUeresse,
Sur ta bouche baiseresse
Aura ravi tes esprits
Repren ce que j'aurai pris.
G. Durant, à la suile de Bonnef. p. 96.
VARIANTES t
BAISERESSE. Oudin, Dict.
Baisarde. Epith. de la Porte.
(1) Masse, massue. - (2) On a coutume.
BA
— 374 —
BA
Baiserie, siihst. fém. L'action de baiser.
Ains a laissié la baiserie. •
Eust. Dcsch. Pws. MSS. fol. 4C3, col. 1.
Baisez, subst. masc. jilur. Pièces d'un lit. Il
peut venir du mol baz, qui, eu breton, signifie bâton.
(Gloss. de rilist. de Bretagne.) « Quilance d'azelis
« femme, à Rouaull de kaiisoit, chastelain d'Auray,
« pour 60 sols à elle dus pour un covertor, dous
« linceus, une cortepoinle et dous baise:i portez l'i
« Pontquelec à l'usage du duc. » (Histoire de Bre-
tagne, T. II, p. i58.)
Baislement, subst. tnasc. Ouverture. C'est en
ce sens qu'il faut l'entendre en ce passage :
Le feu ceignant l'obscur creuse le ciel : ainsi
Quand l'exalaison grande, ou large, s'amoncelle,
S'il est desmesuré, baislement ou l'appelle :
Mais s'il est plus petit, et serré tellement
Qu'il ne s'étende au loin, c'est un muy seulement.
Œuv. deBaif, fol. 10.
Baisse, subst. fém. Terrain affaissé, que le
séjourneinent des eaux a fait baisser. Montluc, par-
lant du mouvement de son armée et de celle des
ennemis: » Je commençay à marcher (dit-il), et
« comme les ennemis descouvrirent les gens de
« pied, ils firent alte à l'endroit d'une grande baisse,
« que l'eau avoit faicl par succession de temps...
« Je les vis dans la plaine portans leur lance droicte
« sans s'avancer et vis aussi le capitaine Ascaigne
« sur un petit cheval gris qui faisoit mettre ses
« picquiers dans la baisse. ■• (Mém. de Montluc,
T. I, p. 131 .) De là on a dit baisse d'un marest, pour
fond d'un marais. (Voy. Oudin, Dict.)
Baissement, subst. masc. Diminution. (Voy.
Du Gange, Gloss. latin au mot Baissamentum , qui
a la même signification.)
Baisser, verbe. Baisser. (Voyez Bassere dans le
même sens, au Gloss. latin de Du Gange.) « Et quant
a ce vint as lances baissier, et li Greu lor tornerent
« le dos. » (Villehardouin, p. 59.)
Quant il se baisa, et il boit,
Dedens en la fontaine, voit
L'ombre qui sort de l'autre part ;
Avis U est qu'il le regart.
Fabl. MSS. du R. n- 7989, fol. 6i, V col. 2.
VARIANTES :
BAISSER. Orthographe subsist.
Baissier. Villehardouin, p. 59.
Baiser. Fabl. MSS. du R. n» 7989, fol. 62, V col. 2.
Baiver, subst. 7nasc. Bavarois.
VARIANTES :
BAIVER. Parton. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 157.
B.\iuviERS. Ph. Mouskes, p. 320.
Baix (en), adv. En bas. (Voy. S" Bernard, Serm.
fr. MSS. p. 6Ô.)
Bajouere, subst. fém. Médaille. — Monnoie.
Selon le Dict. de Corneille, bajouere est une mé-
daille sur laquelle on voit deux têtes en profil (I).
C'est aussi une monnoie des Pays-Bas , suivant
Le Duchat, notes sur Rabelais, T. III, p. 110 et 111.
Bii\ula.tion, subst. fém. Commission, emploi.
C'est en ce sens qu'on a dit: bajulation en gabelle,
pour recette des gabelles. (Laur. Gloss. du Dr. fr.)
Bal, subst. masc. Danse. — Assemblée de danse.
On disoit autrefois bal pour danse , l'action de
danser.
Du luth, et du pinceau, j'esbattray ma vie
De l'escrime et du bal.
Œuv. de Joach. du Bell. p. 391.
Sor un ormel
Mainent baudet.
Poês. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1461 .
L'auteurdu Roman de la Rose, parlantdes moyens
employés par les dames pour cacher les défauts de
leurs tailles, a dit :
Et s'ele a trop grosses espaules
Pour plaire à dances et à baulles.
De deiyé drap robe porte :
Si sera de moins lait déport.
Rora. de la Rose, 14089-14092.
Baleries baudes se trouve dans le Roman de la
Rose et signifie danses dissolues . prises dans un
sens détourné et plus obscène.
Bal signifioit aussi toute assemblée où l'on dan-
soit, même l'après-dinée. Brantôme, parlant de la
reine d'Ecosse, auparavant reine de France , dit :
« Les nopces donc solemnellement célébrées dans
« la grande église, et le palais de Paris, où l'on vit
« cette reyne'paroistre cent fois plus belle qu'une
a déesse du ciel, fut après disner à se pourmener
<i au bal, et fût sur le soir, à s'acheminer d'un pas
« modeste, et façon desdaigneuse pour offrir et faire
« son vœu au Dieu hyménée. » (Brantôme, Dames
illustres, p. 119.)
On disoit :
Mener le grand bal, pour désigner une espèce de
danse, peut-être celle par où commençoit le bal ,
ou celle que toute l'assemblée dansoit en commun.
(Voy. les Mémoires de Brantôme, p. 142.)
Au figuré, on disoit baule dolente :
Douloureuse danse, pour une playe terrible
De sou branc fiert le duc, par si très grand hayr
Que, d'un pied en parfond, ly porfendist l'espaule :
Le duc tout mort chaist; vecy dolente baule.
Ger. de RoossiUon, MS. p. ICI.
V.\RIANTES :
B.\L. Orthogi-aphe subsist.
Baules (plur.) Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 318, V» col. 2.
Baus (;>'"'■•> Fabl. MSS. du R. n» 7989, fol. 79, R" col. 1.
Baux (phi>\) Ane. Coût, de Bret. p. 142.
Baudel. Poës. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1461.
Balement. Gloss. du P. Labbe.
Balerie, subst. fém. Ph. Mouskes, MS. p. 257.
Ballerie, subst. fém. Gloss. du R. de la Rose.
Bale, subst. fém. Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. I, fol. 119.
B.wle, subst. fém. Ibid. n» 7218, fol. 311, V" col. 1.
Baulle. subst. fém. Gloss. du Rom. de la Rose.
Boule, subst. fém. Ibid. fol. 260, R» col. 1.
Balade, subst. fém. Chanson. — Danse. Ce mot
subsiste encore aujourd'hui. On connoitroit impar-
faitement ce qu'il signilloit autrefois, si l'on s'en
tenoit à l'explication qu'en donnentMonet et Borel.
Ils définissent la balade: « Epigramme ancien, tout
« ou presque tout d'une cadence. » A en juger par
(1) Ce serait une corruption de baisoire, parce que les deux tètes semblent se baiser, (n. e. )
BA
— 375 —
BA
les anciens auteurs qui en ont composé, nous
croyons pouvoir la dclinir par une espèce de poëme
que ion trouve, nommé indifleremment chanmi
0^ balade, dans les Poës. mss. de Froiss. foi. 102 et
103 Le nombre des stroplies, ainsi que des vers qui
y entroient, etoit indéterminé. Les vers en étoient
ordinairement à rime croisée ; chaque stropliefinis-
soit par le même refrain, et la pièce étoit terminée
par un renvoi où le refrain éfoit encore répété Le
nombre des vers de renvoi devoit être réduit à la
moitié de ceux qui composoient chaque couplet Je
crois que la balade éloil originairement une chan-
son à danser, comme son nom et son refrain sem-
blent le designer. Elle étoit composée, le plus ordi-
nairemen , de trois couplets, et quelquefois de cinq.
Ppf.rA^-'Jf "'^'^?"'^,® ''"'' "«"S ayons vue, est
celle de Uillaume Li \iniers, parmi les Poës fr
MSS avant 1300, T. II, p. 8J7. Elle commence'par
cette strophe : ^
En tout tans se doit fins cuers resjoir
tl joie mener, et son cors cointeir
Car on voit celui de samour joir
Qui loyaument proie :
Bonne est la dolours
De quoy naist doucours,
Et soûlas et joye.
..^^'/^,?1"P'^ ^"•'■^ PO"'' '"efuter Fopinion de l'au-
i«/L/. ['P°^^"I"^''''^"fO'^'' <?"• P' étend que la
ftl^à'î w ^?" o"8"^e, s'adressoit aux princes,
• et ne raitoil que matières graves et dignes dé
dan^'i-À H X^il "■ (^'^y- '^' '"^g'^^s de la^ balade
danb 1 Art. de Rhétorique, par Fabri, Liv. II n a\
rL^^M^"'^^-^ " ""^-^ ^'''''' ^'"''^"st. Deschamps, dans le
recuei de ses poésies, fait deux arlicles séparés
aes balades. L un sous le simple litre de balaie et
1 autre sous celui ûechanronsrondauLr; nousn'ap-
percevons d'autre distinction entre les unes et les
seulenteni'^nf * T ''' ''^'""' «"^ '«.issti^ophe
?«\S/i^?''''''^'';?'V''.' ^^P^'^es de balades.
ï naïade leonime. Fabri, dans son art de Rhét
écrit Leomne. Les rimes en étoient pleines comme
l'ônVcSte ?"' ""' "''''' '^■^"^*- l'e«'^''î4? ou
dolente
présente
conception
p . n ., „ coiîsteUation.
tust. Desch. Pul's. WSS. fol. 396, col, 3.
. Fabri appelle aussi Léonine, la balade où Ipq
"'TnainTr' '"^édiatement. (Art de Rhitïr.f '
i Balade leonime et moitié sonant Elle étoit
composée de rimes pleines et de rimes simplemen
sonnantes, comme dans ces vers • ^'n^P'^ment
El
monde
onde
présentement
innocent
calmer
u , ostir.
bu»!. Desch. Poës. MSS. fol. 396, col. i.
S Balade équivoque et leonimc. On désie-noit
ainsi la ft«/arfe où la dernière syllabe drchlaue
vers etoit reprise au commencement du vers sui-
vant, dans une autre signification. Elle étoi't très
difficile. On en jugera par la citation suivante •
Lasse, lasse maleureuse et dolente
Lente me voy fors de soupirs et plains
Mei'l qui VêuU,^ e?c" ''"""^ '' '' '°"™^"t« ■
Eusl. Desch. Poés. MSS. fol. 397, col «
4" Balade dorée. On trouve une balade sous ce
titre, dans le Départie d'amours. Elle est intitïîée^
MorpheusDieu des songes dit à sou père Deudu
7SoSsT"' '""''''''"' ''i'"'oques fanem
Père gentil à qui je dois obéissance
lout mon vivant vous veu.x obéir sans ce
Que par vous soit dit, sans mectre plaizance
Quant cognoistray que soit vostre plaisance
Chasse et départie d'Amours, p. 235.
Celte sorte de poésie, comme on vient de le voir
eto.t composée de rimes qui consistoient dans rS
voque et 1 analogie du son du dernier mot dû
second vers avec le dernier mot du vers précèdent
Peut-être aussi le mot dorée n'est-il qu'une eSètP
de balade pour marquer son excel ence comml
dans ces mots, légende dorée et sentence dorée
o Balade pleine unisonatite et retronrade on
balade de ryme autrement dite enchaînée Téloff
la balade dont la dernière syllabe de chaque rime
commençoit le vers suivant : ^"-me urne
0 faulce mort et pourquoy luy donnas''
N as-tu pas tort, et fait grand vilennie ''
Nye le donc, certes tu ne pourras
Has est son corps; elle fa prest suivie
Vie luy, etc.
Chasse et déparlie d'Amours, p. 235, col. 2.
0° Balade unisonante. Celle qui rimoit nar les
mots pris dans une acception différente • ' '"'
I Meurtrière mort ! je vois que tes trésors
Ne sont ja beaux, mais sont laitz, très-orts
Plus de mal faiz que les cornes dès beufz '
Jamais poison tant amere ne beuz.
Chasse et déparlie d'Amours, p. 237. col. l.
7- Balade unisonante et batelée. Dans cette sorte
de poésie, 1 hémistiche nmoit avec le den er mot
hffisrsS^;^-î^,^,f-^sS
Adversité m'a durement cité,
Sans charité ; las trop me maîtrise
Et sans faintise, j'ai trouvé récité '
Félicité, etc.
Chasse et déparlie d'Amours, fol. 251.
8° Balade couronnée. Le dernier mot de chacun
des vers qui la composoient, avoit une analSe de
son avec les deux mots qui le précédoient :
Haultain fatal par très pouans vens vente
Aux amoureux dessoubz venus nuz nue
Ue griefz tourmens faict pargrevans liant? hanto
Une douleur des advenuz ne eulx nue.
Chasse et départie d'Amours, fol. 251.
9° Balade double couronnée à double unison-
nance. L'hémistiche et la fin du vers rimoien" aîec
BA
37G —
BA
les mots qui les précédoient, et formoienl une
espèce d'ccho :
Par disoors cors appeliez, accords corps
Tu soumis meis plusieurs tes amys mis.
Cliasse el d^iiarlic d'Amours, fol. 254.
10° Ftalade recoupée. On en trouve plusieurs dans
les Poésies de Guillaume Macbault, à la suite duMs.
du Livre d'Ovide de la Vieille, en vers Fr. par J. Le
Fèvre. (Bibl. du R. n" 7236.)
11° Daladea couronnées, enchaînées et batelées.
(Yoy. l'Art, de Pierre de ÎNogerolles, Bibliothèque
de Du Verdier.)
12° ISaluûe baladant ou batelée. (Idem.)
13° Balade fratisée ou jumelle. (Voy. l'Art, de
Rliét. par Jean Molinet, .ms. du R. n» 7984 et l'Art,
de Rbét., par Fabri, fol. 45, 11" et Y'.)
14° Balade sotte et pastourelle. C'éloit une
balade dont le sujet éloit grossier et rustique.
(\'oy. Eust. Descb.)
VARIANTES :
BALADE. Orthographe subsist.
Ballade. Dial. de Tahur. fol. 50, V.
Baladelie, subst. fém. Diminutif de balade :
En chantant ceste baladelie,
Qui me sembla jolie et belle.
Froissarl, Poes. MSS. fol. 50.
Baladeur, subst. masc. Danseur. (D. de Borel.)
Balafreiix, adj. et jiart. Déchiré. — Balafré.
Dans le premier sens de déchiré, nous lisons :
" N'est estimé Cordelier, ni Jacobin qui avecques
« habits balafrez, va vagabond parmy le monde. »
(Pasq., Mono. p. 188.) « Ils portoient les chausses
« plus bigarrées, découpées, déchiquetées, et balla-
« frées et la pluspart montroient la chair de la cuisse,
« voire les fesses. » (Brant. Cap. Fr. T. IV, page 44.)
Nous disons encore ?*«/«/'/'('. (Voyez dans Uudin et
Cotgrave, le mot balafreux (1) pris en ce sens.)
Ont plusieurs membres coupez :
Aucuns ont piedz et poingz griffez
Pour approcher les horions,
Et les autres fort J/re/o/fî-ez,
Plaindaiis leurs grandes passions.
Molinet. p. 193.
VARIANTES :
BALAFREUX. Oudin et Cotgrave, Dict.
Balafré. Pasquier, Mono, page 188.
Ballafhé. Brantôme, Cap. Fr. T. IV, page 4i.
Brelafé. Cotgrave, Dictionnaire.
Brelaffré. Molinet, p. 193.
Balai, adj. et subst. Qui est de couleur claire.
Epitbète de Hubis. Il est quelquefois substantif. Le
Rubis balais est pâle, couleur de rose. Ce mot
pourroit venir de l'ancien mot françois baillet (2),
qu'on a vu ci-dessus pour clairet, paillet, couleur
de chair, et pour épilhètedevin. Gautier d'Epinais,
dans ses Poës. mss. dit qu'il n'y a pas plus de com-
paraison h faire de la beauté de sa dame avec celle
des autres, (lue du mois de mai avec celui de
février, et du rubis au rubis balais :
Ausi con de février mais,
Et li rubiz dou balais
N'a de beauté nule igance.
G.1U1. d'Epinais, Pocs. MSS. avant 1300, T. I, p. 36.
VARIANTES :
BALAIS. Poës. MSS. avant 1300, T. I, p. 36.
Ballais. Petit .1. de Saintré, p. 267.
Bailay. Rabelais, T. V, p. 196.
Baloy. Glossaire du Rom. de la Rose.
Balaier, verbe. Enlever, piller. Au figuré, c'est
le sens de ce mot en ce passage :
Fromraanz et seigles habondoient
Es liens où les deus os estoient,
Qu'aucuns sorent si balaier
Que poi i remest que saier.
G. Cuiart, MS. fol. 21, V.
Balaine, sȔ>sL On lit dans Froissart, livre II,
p.2i'J,qu'àlahatailledeRosebecq,enl382, plusieurs
Flamands avoient des gans de fer à balaine (3).
L'éditeur soupçonne que c'est une faute et qu'il faut
lire : de Boulogne, de Matines ou de quelque autre
lieu.
Ba\siii, subst. masc. i\Iol obscène. (Voy. le Dict.
d'Oudin et de Cotgrave.)
Balance, subst. fém. Instrument qui sert àcon-
noitre l'égalité du poids. — Bon ordre. — Puissance.
— Perplexité. — Peine. — Péril. — Caducité. —
Usage.
Ce mol, qui subsiste dans la première significa-
tion, est formé de lanx, plat ou bassin, et de bis.
(Voy. Fauchet, des Orig. livre IL — Pasquier, Rech.
p. Gt)8. — Le Glossaire latin de Du Cange, au mot
Balanx, el le Dict. de Borel, au mot Bes.) On disoit
en ce sens : d'une même balance, pour signifier
également. « Ainsi est mort ce grand capitaine et
« guerrier, aimé et hay d'uns et autres d'une mesme
« balance. » (Lettres de Pasq. T. I, p. 244.)
Balance, au figuré, s'employoit pour bon ordre.
Ph. Mouskes, parlant du désordre de la bataille de
Roncevaux, et de l'ordre qui y fut rétabli par Ro-
land, dit :
Sa bannière avoit retrouvé...
Si firent es gens Marsile
Com cil qui n'orent soin de gille :
Tout s'est remis dans la balance
Rollans tint une grosse lance.
Ph. Mouskes, MS. p. 205.
Dans la seconde acception, balance a signifié
puissance :
Faveur n'as, amour, ne congnoissance
A homme ; nul riens ne te puet estordre
Josne, ne viel luit sont en ta balance.
Eust. Deschamps, Poés. MSS. fol. 32*.
Balance s'est dit pour perplexité, doute :
J'ay été entrepris.
En péril, et en balance
D'avoir grant maie meschance :
J'en suis hors, bien m'en est prins.
Eust. Desch. Poés. MSS. fol. 173.
Dans ce même sens, on disoit : être en balance.
(1) Le bas-latin a balafardus, balasardus , épée courte, qui rappelle balisarde, si disputée entre les paladins de
l'Ârioste. (n. e.) - (2) En bas-latjn balascius, de Tarabe balchasch, de Balakschan, près Samarcande ; beaucoup de termes
de joaillerie sont ainsi venus de l'Orient, (n. e.) — (3) La phrase est : oc Armés d'auquetons et de gans de balaine. » (Edition
Kervyn, X, 159.) (n. e.)
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~ 377 —
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expression qui subsiste, mais que nous trouvons
dans Ph. Mouskes, ms. p. ii"i9.
On trouve le mot balance, employé pour peine.
Sarrette, servante des Trois Maries, ayant perdu ses
maîtresses, s'exprime ainsi :
Desa seray en grant balance,
S'eUes de moy n'ont souvenance.
Hist. des Trois Maries, eu vers, MS. p. 442.
Balance a signifié péril, danger, risque, hasard :
Et sera s'arae en grant balance
Se il n'a en luy repentance.
Eusl. Uesch. Poës. MSS. fol. 472.
Ce mot est pris au même sens, dans Athis, ms. fol.
50, où il est question du danger d'un combat. On y
lit encore :
Prison se rent, et li fiance
Qui ne soit onques en doutance (ou balance.)
Alliis, MS. fol. '35, R° rx)l. 2.
Le même auteur, parlant des dangers de la
Cour, dit :
Car trop est court, périlleuse balance.
Ibid. fol. 70.
J'y mettray le corps et l'avoir
Voire certe l'ame en balance.
Rom. do la Rose, vers 15583-15584.
Ne scay pourquoy on n'ose dire voir,
Quant on se voit de tout perdre en balance.
Froissart, Poès. MSS. fol. 335.
L'un aime, craint, et sert sa dame
Sanz penser, ne désirer blasme,
Sanz plus, pour venir ù vaillance ;
Et se met souvent en balance
De tost valoir, ou tost mourir,
Sanz demander autre merir.
Maclmul, MS. fol. 186, R" col. 2.
« Toutes femmes, qui tels signes font, et qui se
" laissent baiser à homme, à qui elles ne le doivent
» faire, elles mettent leur honneur et leur estât en
« grant />rt/rtHce et en grant péril d'estre diffamées. »
(Le Chevalier de la Tour, Instr. à ses tilles, fol. 65.)
Enfin, on a dit balance pour exprimer la caducité
de la vieillesse. C'est en ce sens que Charlemagne,
forcé de reprendre les armes après la déroute de
Roncevaux, a dit :
Or m'estuera porter ma lance
Et jou sui vious et en balance;
Or m'estuera espée çaindre,
Qui deuce em mes cambres maindre.
Ph. Mouskes, MS. p. 227.
On s'est encore servi de ce mot pour usage :
II ne se mue onques deci
Mes ades avec aus sejorne :
C'est lor balance et lor coustume.
'Fabl. MSS. du H. n- 7615, T. 1, fol. 117, R- col. 1.
Remarquons quelques expressions auxquelles ce
mot a donné lieu :
!• Traire à sa balance, attirer de son côté :
De toutes manières de gens
Par fallace et decevance,
Tout avoit trait à sa balance.
Hisl. de Franco, à la suile du Rom. de Fauvcl, MS, du R. w 6812, fol. 87.
2° Monnoye en dure balance. Je crois que cette
expression, dans le passage suivant, désigne une
monnoie de mauvais aloi :
Cele en fu monnoië en France
Tornée en dure balance...
Dont le roy en fu moult repris.
Hisl. de France, à la suile du Rom. de Fauvel, MS. du R. n» 6812, fol. 87.
3" Vin en balance, c'est-à-dire on verse souvent
du vin :
Toz jors est le vin en balance.
Fabl. MSS. du R. n' 7218, fol. 238, R° col. 1.
4° Porter droite balance. Façon de parler figurée :
Bien le voit en reaume de France
Qui porte plus droite balance.
Geofroy de Paris, à la suile du Rom. de Fauvcl, fol. 49.
5' Contre moi poise la balance, pour dire : j'ai
du dessous :
Moult sui cheuz en grant vitance :
Contre moi poise la balance.
Alhis, MS. fol. 51, R" col. 2.
Balancer, verbe. Hésiter. — Etre agité, palpi-
ter. — Agiter, remuer, rouler. — Lancer, jeter.
Ce mot subsiste sous la première orthographe.
En termes de chasse, on disoit, en parlant des
chiens qui ne tiennent pas une route certaine et se
jettent tantôt d'un côté, tantôt de l'autre, qu'ils se
balançoient : « Celui qui veut afaitier son chien doit
a suivir après le limier qui fait la suyte, non pas de
" près , mais un petit loing , car l'un limier se
» balcnccroit pour l'autre (1). » (Chasse de Gaston
Phébus, MS. p. '211.)
Balancer signifie palpiter, être agité , dans ce
passage :
A l'entrant d'esté, que li tans commence,
Quant j'oi ces oiseaux sor la flour tentir,
Sopris sui d'amours, dont mes cuers balance,
Dex m'en doint joïr tôt à mon plaisir.
Poès. MSS. avanl 1300, T. I, p. 32 et 33.
On s'est servi du mot balancer pour agiter,
remuer, rouler. Nous lisons dans la description du
martyre de S' Jean :
Ly firent ce glout pautonnier
Eri un tonnel d'oile boullant...
Mettre tout nu, et balancier :
Sa mort vouloient avancier.
Hisl. des Trois Maries, en vers, MSS. p. 383.
On disoit aussi balancer pour lancer, jeter :
Si Va. en l'eue balancic
A tout le sac qu'il ot lié
Quar paor avoit durement
Qu'il encore ne l'alast sivant.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 240, R' col. 1.
Enfin, on a dit balancher pour compenser, établir
une balance entre deux choses ditîérentes. Le pape
Herbert, voulant en quelque façon effacer les
péchés dont sa langue , ses pieds, ses mains, qu'il
avoit consacrés au diable, avoient été l'occasion, se
les fit couper par son valet :
Mains, et langue, et pies li trencha.
Les pechiés fors en balancha.
Ph. Mouskes, MS.
VARIANTES :
BALANCER. Poës. MSS. avant 130U, T. I, p. 32.
Balancier. Hist. des Trois Maries, MS. p. 383.
Balencier. Chasse de Gaston Phébus, MS. p. 232.
Balencer. Djid. p. 211.
Bai.ancher. Ph. Mouskes, MS.
(1) Molière l'employait encore; « Chasser tous aTec crainte, et Finaut balancer, i (Fâcheux, II, 7.) (N. E.)
II.
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— 378 —
BA
Balamiran ' 1), subst. masc. Espèîce de manteau.
11 ctuit l'endu sur les côtés, pour passer les bras, et
boulonné par devant. iDicl. de Monet. — Voyez Du
Caniçe, Glossaire latin, au mot Balandrand.) Dans
une citation latine du même Glossaire, au mol
Supoidiis, on lit hulandrava pour baUDulrancu au
lieu de yaUnuIraviou qu'on y trouve aussi pour
signilier balandran. (Lisez lialaudranum.)
Le duc de iSemours étant à la cour de Turin,
« un des écuyers (du duc de Savoye) offrit de sa part,
« à M. le duc de iNemours, un chapeau couvert de
« lanctillé d'or, avec des plumes de diverses cou-
« leurs, un balandran de toille d'argent, bandé de
« clinquant d'or. » (La Colomb. Th. d'honn. p. 304.)
Penscs-vous, sans avoir ses raisons toutes pi-estes,
Que le sieur de Provins persiste en ses requêtes,
Et qu'il ait, sans espoir d'être mieux à la cour,
A .son long balandran changé son manteau court.
Régnier, salyre XIV, p. 2ii.
Balati'on, subst. masc. Gourmand. (Dict. de
Borel, l"'" additions.) 11 cite sur ce mot les satires
chrétiennes.
Balay, subst. masc. Champignon. 11 est rendu
par le mot latin Baletus, dans le Glossaire du
P. Labbe, p. 491.
Balbucie, subst. fém. Bégaiement. Montaigne
dit des réponses simples et na'i'ves des Indiens aux
Espagnols: « Voilà un exemple de la balbucie de
« celle enfance. «(Essais de Mont. T. Ill, p. 220.)
Malherbe a dit de lui-même » qu'il étoit de balbus
« en balbucie (2). » (Balzac, Soir. Chrét. T. Il, p. 229.)
Balcanifer, subst. masc. Borel explique ainsi
ce mot: « Portant l'esleiidard des Templiers (3). »
Baie, subst. fém. Ballon. — Caisse, malle.
Au premier sens, c'éloit une boule de cuir rem-
plie de vent, qui la rendoit propre à rebondir:
« Autres qui estoient plus grands le delîent au jeu
" de la baie, de cette baie, dis-je, qui a accoustumé
« d'enfler avec une seringue. » (Merl. Coc. T. 1,
p. 67.) Rabelais, T. 1, p. 1C3, l'appelle grosse balle.
La balle beliniere, ou de bélier, étoit une espèce
de ballon fait d'une des parties du bélier, et plus
petit que le ballon ordinaire. Les gens du commun
en jouoient autrefois el le poussoient avec des
bâtons courts. C'étoit aussi le jeu des pages.
Brantôme prend de là occasion d'en faire un conte
très malhonnête sur une des dames de la reine.
(Voyez Brantôme, Dames galantes, T. 11, p. 458.)
Ce mot signifie caisse," malle, dans le passage
suivant : « 11 atteignit les Impériaux , lesquels
« s'estant mis à la fuite abandonnèrent les mulets,...
« sans jamais avoir eu loisir de rompre les balles. »
(Mémoires de Du Bellay, Liv. VllI, fol. 208, V°.)
Voici des expressions auxquelles ce mot a donné
lieu :
1° C'est ma baie ; c'est mon fait, c'est mon balot.
« Les historiens sont ma droite baie , car ils sont
" plaisans et aisez. « (Essais de Mont. T. 11, p. 148.)
2' Halle à emporter semble désigner le jeu de la
paume dans ce passage, où il s'agU des exercices
du roi Henry second : >■ S'il ne jouoit à la balle à
« emporter, ou au ballon, ou au maille. » (Brant.
Capitaines fran(.;ois, T. II, p. 40.)
3° Garder les balles. Façon de parler empruntée
du jeu de la paume. On dit familièrement: garder
les manlcaux.
Et moy pendant ce temps, je garderay les halles.
P. Corn. Place royale, Coin, acte II, scène vu.
4° Jiales à feu, sacs à feu, autrement carcasses :
" >'ouvelle manière de bombes , faisant d'abord
« l'effet des fusées, et mettant enfin le feu où elles
« sont, furent employées au siège de Condé, en
« 1070. » (Pelisson, Lett. hist. T. îll, p. 17.)
5° Balles ardentes ou //«//^sà /'('«. Boulets rouges.
Bassompierre dit « qu'il lit tirer la nuit du fort
« Louis, pour divertir les ennemis, six canonades
« dans La Rochelle, àxec àes balles à feu. » (Mém.
de Bassompierre, T. 111, p. 359.) c Je fis tirer force
" balles ardentes du fort Louis. » (Ibid. p. 362.)
« Je fis tirer la nuit dans la ville des balles à feu
a qui le mirent en deux endroits. » (Ibid. p. 414.)
VARIANTES :
BALE. Merl. Coc. T. I, p. 67.
Balle. Rabelais, T. I, p. 163.
Balé (4), subst. masc. Galerie. (Dict. de Monet et
Glossaire du Roman de la Rose.) Ce mot se dit en
Languedoc pour saillie, avance, en forme de balcon.
Le Dict. de Borel cite ces vers du Rom. de la Rose :
Elle est dehors araonnée
D'un balé qui vet tout entour.
Balegnier. subst. masc. Espèce de vaisseau de
mer. 11 a vraisemblablement pris son nom du mol
baleine, à la pèche de laquelle il étoit originaire-
ment destiné. (Voyez le Gloss. latin de Du Cange,
au mot Balneriùm.) On trouve communément ce
mot dans différents auteurs pour vaisseau de trans-
port et pour avant-coureur d'une armée navale. Les
corsaires s'en servoient ordinairement, parce qu'ils
approchoient de terre. En 1385, le duc de Lancastre
s'étant approché, avec sa flotte, des côtes de Nor-
mandie , les vaisseaux normands <• sçurent par
« leurs balengers que l'armée d'Angleterre venoit,
« si se retirèrent au Havre de Herfleur. » (Froiss.
Liv. III, p. 110.) « Les Anglois avoient en leur
« armée vaisseaux qu'on dit baleniers , qu'escu-
■I meurs de mer par coustume ont volontiers, et
(I) Le fcaiojidcas était, au xn" siècle, \& chape à pluie Aes méridionaux: ouverte dans toute sa longueur, ou fermée à
l'encolure ; elles avaient ou des manches, ou de simples fentes pour passer les bras; le tissu en était grossier, et c'était là
les parapluies de l'époque, (n. e.) - (2) Diderot lui-même employait ce mot : « Le temps me poursuit et voilà que je m'en
retourne à la balhuiic. {s. e.) - i3) Le mot se trouve dans Math. Paris, aux années 1237 et 12'(6 ; Du Cange y voit imc
variante de baU/ali'tniler. (.\. e.) - (i) Le mot balct était employé en Poitou au temps de Du Cange ; il désigne le retrait
qui s'enfonce sous un balcon, ou le balcon lui-même. Les registres du Trésor des Chartes, aux .kiv» et xv= siècles, en font
un fréquent usage; on trouve même en 1416 (JJ. 169, p. 279): « Le suppliant trouva icelle femme toute nue en sa chemise
sur les valez ou galeries de son hostel à la lune au serin. » (n. e.)
BA
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BA
« qui approchent les terres de plus près que les
« autres vaisseaux ne l'ont (1). » (Ibid. p. 3H ;
an 1388.)
VARIANTES :
BALEGN7ER. Froissart, T. II, Liv. III, p. 189.
Balenief(. Ibid. p. 111.
Balleniers. Monstrelet, Vol. III, fol. 102, V".
Balleniez. Vieil, de Charles Vif, p. 132.
Balinier. Le Jouvencel. MS. p. 458.
B.M-NIER. Froissart, Liv. 111. p. 297.
Balengers. Id. T. II, p. 110.
B.\.LLANGERS. Ibid. p. 109.
Ballengers. Ibid. p. 143.
Ballinger. Daniel, Milice française, T. II, p. 634.
Ballinjer. Id. ibid.
Baleis, subst. masc. Verge. Il est employé en
ce sens, comme un mot vulgaire, par Mathieu
Paris cité dans le Glossaire latin de Du Gange, au
mot Disciplina.
Balen , subst. masc. Berceau , ou peut-être
lange ou couverture de laine. (Voyez le Gloss. lat.
de Du Gange, aux mots Balenja, BalÙnia et Batlinia.)
VARIANTES :
EALEN. Du Gange, Glossaire latin, au mot Baleiija, etc.
Ballen. Ibid.
Balena, subst. masc. Le petit d'une baleine.
(Voyez les Mém. de Bassompierre, T. Il, p. 244.)
Balendre (2), subst. Espèce d'oiseau.
Si chantoil si bien et si bel ,
Chans d'aloué, ne de mavis (3)
Ne de loigtaing, ne de balendre,
N'estoit si plesans à entendre.
Fabl. MSS. du R. 11° 7015, T. H, fol. ICtl, Y- col. 2.
Balendrior, subst. masc. Garde-fou. « Nous
« passions sur le ponl d'Anne, et le balendrier, id
» est garde-fous, estoil osté. » (Moyen de Parvenir,
page 363.)
Balenus, subst. masc. Nom d'un devin. Suivant
le suppl. au Glossaire du Roman de la Rose, « ce
a pourroit bien estre Ilelenus, fils de Priam et
« d'Hecube, qui eut en partage le don de prévoir
« l'avenir. >> (Itoman de la Rose, 15181.)
Balcr, verbe. Danser. — Remuer, s'agiter. —
Sortir, s'affranchir.
Sur le premier sens, voyez les Dict. de Monet et
d'Oudin, les Gloss. du Roman de la Rose elle suppl.
de l'Histoire de Bref, de dom Morice. Baler est traduit
en latin par tvipudiarc, danser, dans le Gloss. du
P. Labbe, p. 531. Il est employé dans le même
sens, par AVill. Liviniers (Poës. mss. av. 1300, T. II,
p. 820.) Baller a la même signification, dans les
Nuits de Strapar. p. 401.
Ce mot se disoit de là, pour remuer, s'agiter :
Aufrique avons conquise, jusqu'à la mer qui baie.
Notices du Roman d'Alexandre, fol. H4,
Baie semble signifier agité, tourmenté, dans ces
vers :
Ung ours, quant il est bien betez.
N'est si batif, ne si b(dez
Que serez, se vous y alez.
Rom. de la Rose, vers 10619-10G21.
De là, on étendit cette acception jusqu'à signifier
sortir, s'affi'anchir. Un malade, se plaignant de ce
que le régime l'exténuoit, dit :
Des jeunes me fault bâter.
Eust. Desch. PoSs. MSS. fol. 170.
Voici quelques expressions auxquelles ce mot a
donné lieu :
1 ' Baler du talon, c'est-à-dire jouer des talons :
Fille Juliette
Qui sçait baler du talnn.
Eusl. Deschamps, Poês, MSS. fol. 199.
2° Baler la queue, c'est-à-dire la remuer. Au
figuré, cette expression signifioit faire l'agréable.
Un jeune militaire résolut d'aller à la cour'; « ung
« de ses compaignons lui dit pour l'en détourner :
« voulés-vousjà allerlà baler la queue. » (Le.Iouven-
cel, fol. 11. — Voy. Ballequeue, espèce d'oiseau.)
VARIANTES :
BALER, Gloss. du P. Labbe, p. 531.
Baller. Suppl. au Glossaire du Rom. de la Rose.
Balesaniite, subst. fém. Espèce de plante.
« Prenez jus de balesaniite, et métez les deux pars
« de let de chèvre, et le tiers du jus, et moeilliez
« le char que vous donnerés à vostre oisel, dedens,
« et lui donnés pardeux fois, et il guérira. » fModus
et Racio, ms. fol. 131, R°.)
VARIANTES :
BALESAMITE. Modus et Racio, MS. fol. 131, R°.
Balsaun-icte. Modus et Racio, fol. 70, V°.
Balesteaiix, subst. masc. plur. Chansons à
danser. (Du Gange, Gloss. lat. au mot Balistcum
sous Balare. — Voy. les Poës. mss. d'Eust. Desch.)
Balestrier, subst. masc. ; au fém. Balestrière.
Arbalétrières. « Les als sur quoy sont les soldats
« dans un vaisseau. » (Dict. de Cotgrave et d'Oudin.)
Balestrille, subst. fém. Instrument astronomi-
que. Il scrvoit à trouver la hauteur du pôle et des
étoiles. (Dict. d'Oudin.)
Balet, subst. masc. Sorte de spectacle. On nom-
moit autrefois ainsi une sorte de spectacle qui
servoit à l'amusement des convives, dans les inter-
valles des services d'une table, ce que nos anciens
auteurs appellent entremets. Bassompierre raconte
qu'étant en Angleterre, en 1G.2G, « le Roy soupa en
« une table avec la Reine, et lui, qui fut servie par
" des balets entiers à chaque service, et des repré-
* senlations diverses, changemens de théâtres, de
« table et de musique. " (Mém. de Bassompierre,
T. III, p. 306 et 307. — Voy. Entremets.)
Balet, subst. masc. Balai. Ustensile de ménage,
propre à ôter les ordures. On disoit :
1» Traîner le balet. — Bâtir le balaij. « Ceux qui
BA
380 —
BA
« ont prntiqué les courlisannes d'Italie, aucuns on
« a vu, et voit on choisir toujours les plus fameu-
« ses et antiques, et qui ont plus traisné le balet
« pour y trouver quelque chose de plus gentil, tant
« au corps qu'à l'esprit. » (Brantôme, D"Gall.T. II,
page lt)7.)
'i- Chcvauclier le ballatj Façon de parler fjui
répond à l'expression courir, ou chevaucher l'escou-
velle. C'est une pratique des magiciens; quelques-
uns l'attribuent aux hérétiques, suivant Fabri (Art
de llbétoriii. livre I, fol. 110.) Cotgrave, dans son
Dict. y l'ail allusion par ces mots, donner trois tours
de ballay par la cheminée.
VARIANTES :
BA-LET. Brantôme, D« Gai. T. II, p. 197.
Ballay. Fabr. Art de Rhétor. livre I, fol. 110.
Baloy. Contes d'Eutrapel, page 80.
Balette, suhst. fém. Belette. C'est une faute.
(Voy. les Contes de Des Perriers, T. I, p. 200.)
Balevre, suhst. fém- Lèvre. — Mâchoire.
Il semble que ce mot ne devroit pas avoir d'autre
signification que la première. Pris en ce sens.
Ménage et l'auteur du Suppl. au filoss. du Roman
de la îîose, le dérivent de bis et de labra (1). Pasquier
lui donne la même élymologie, dans ses Recher-
ches, p. "(81. 11 dit, en parlant d'un jeune homme
qui avoill'art de contrefaire la voix de toute sorte
d'animaux, et qu'il représente encore comme un
ventriloque : <i mais surtout, dans son estomach,
« sans ouvrir que bien peu, les balevres, à manière
« qu'eslans près de vous, s'il vous appelloit, vous
« eussiés crû que c'eust esté une voix qui venoitde
<• bien loin. » Le passage suivant paroit aussi con-
firmer le sentiment de Ménage : « Encores vont
« descendre les coups parmy les testes deschevaulx
« droit sur les oreilles, et leur vont fendre jusques
« parmi les dents, en telle manière que les oreilles,
« les yeux et les dens dessus étoient à terre, et les
« baiiievres de dessus, et la denture avecques la
« langue demeurent tenant au hasterel. » (Percef.
Vol. I, fol. 45.)
Cependant Borel, dans son Dictionnaire, croit que
le mot balevres signifie joues et mâchoires. Il
s'appuie sur ce vers de Froissart :
Perçolent bras, têtes et bah^vres.
Le passage suivant est plus décisif :
Je vous di bien que, par ce . est
Un moine plus cras que un fevres
Que il jeu miex des haulevres.
Fabl. MSS. du R. n" 7218, fol. 198, R- col. 1.
On trouve aussi bault fves (2), en ce sens, dans les
Poës. Mss. d'Eust. Deschamps.
variantes :
BALEVRE. Borel, Ménage, Dict.
Baslevre. Ord. des R. de Fr. T. II, p. 283.
Baulevre. Lanc. du Lac, T. II, fol. 118, R» col. 1.
Baulievhe. Gloss. du Rom. de la Rose.
Banlevre. Cotgrave, Dict.
Baillevre. Perceforest, Vol. I, fol. 45.
Balievre. Le Duchat sur Rabelais, T. III, p. 111, note 6.
Baulievre. Ph. Mouskes, p. 41.
Bolievre, Bolieuvre. Dictionnaires de Bob. Estienne,
Oudin, Nicot et Cotgrave.
Boliéfvre. Godefr. sur Charles VI, p. 681.
Baultfres. Eust. Deschamps, Poës. MSS.
Balhes, subst. /'em.pZH)'. Baguettes de tambour.
C'est le sens que je crois pouvoir donner à ce mot.
Le P. Menestrier, parlant d'un carrousel, dit :
« Pour la seconde quadrille étoit celle de Thésée
« retournant des enfers pour accepter le cartel de
« Soloon : elle estoit composée de trois furies, avec
« quatre monstres infernaux montés sur des dra-
« gons, avec six trompettes torses et des tambours
« entourés de vipères, et balhes de deuxserpens. »
(Le P. Menestrier, des Tournois, p. 48.)
Ballant, participe. Brillant. — Flottant, vol-
tigeant.
Au premier sens, nous citons les vers suivans :
Vindrent d'une tige si franche.
Et en si haut lieu ballant,
Com du noble Roy Priant.
G. Guiarl, MS. fol. 7, R-. "
Dans la seconde acception, ballant (3) a signifié
flottant :
Que vos crins n'aillent balant.
Eusl. Desch. MSS. fol. 216.
variantes '
BALIANT. G. Guiart, MS. fol. 7, R».
Balant. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 216.
Balier (4), verbe. Balayer.
Il fait un gros balay, si va tout baloy er.
Ger. de Rouss. MS. p. 1 et 2.
On disoit en parlant des longues robes des fem-
mes : « Ne les faisoit-il pas bon voir, quand elles
« avoyent les grandes queues troussées, ou quand
« d'icelles traînantes elles balioijent les Eglises. >•
(Apol. pour Ilérod. p. 334.) Nous nous servons de
ce mot en ce sens.
11 est parlé d'un peuple et d'un clergé qui vont en
procession recevoir un monarque à son arrivée :
Li champs furent bien balez
Car il turent plus de xx miUe
Machaut. MS. fol. 216, R" col. \.
variantes:
BALIER. Apol. pour Hérod. p. 334.
Rallier. Nuits de Strapar. p. 168.
Baloyer. Ger. de Roussillon, MS. p. 172.
Râler. Alachaut.
(1) Du Can'-'e voyait là un composé de ban et de lèvre, comme dans banlieue, et l'expUquait par le pourtour des lèvres. Il
s'appuyait sur ce passage des Ordonnances (II, 283) : « Nous voulons... qu'on lui fende la lèvre de dessus d'un fer chaud
(au blasphémateur), et que les dens hii apparoissent. A la tierce fois, la lèvre de dessous, et à la carte toute la bas-levre. »
Il ajoute entre parenthèses : lisez banlevre. Mais au même volume des Ordonnances, page 48, on lit : « La banlicvre dessus,
c'est assavoir ce qui est entre le nez et le banlyevre dessous. » M. Littré voit là un préfixe péjoratif ba ajouté au mot
lèvre. Le mot se trouve au xni« siècle dans Joinville (édition de Wadly, S 68.5) et dans le Roman de la Rose, vers 10202
(édition Méon). (n. e.) — (2) Cle doit être une faute de lecture ou de copie pour bauteffres, qu'on trouve dans le registre
ÎJ. 77, p. 412 (an. l.'i'iQ). (n. e.) — (3) jBo/ayer avait dans l'ancienne langue, outre sa signification actuelle, celle de flotter
au vent, peut-être restée dans cette expression: une robe qui baUuje la terre; haliant, ici traité, ii'est donc que le participe
présent de balayer, (n. e.) — (4) Le genêt se dit en breton balann ; de là peut-être vient balai, puis balayer, (n. e.)
BA
- 381
BA
ou recueil de ballades ; comme nous disons un
barjuier pour écrin à meltre des bagues. L'abbé
Goug-el, dans sa Bibliothèque Fr. T. X, p. 45, cite
des rondeaux mss. qu'il a trouvés dans le balladié
lin duc frorh'ans.
Balle de Flandres, siibst. Nom de diamant.
(Voy. Lussan, Ilist. de Louis XI, T. V, p. 135.)
Ballé, adj. Où il y a des balles, ou petites
pailles. C'est en ce sens qu'on trouve pain balle,
dans Rabelais, T. I, p. 179. (Voy. la note de Le
Duchat, Ibid.)
Ballequeue, suhst. masc. Sorte d'oiseau. Peut-
être celui que l'on appelle hochequeue (2).
Baller, verbe. Atteindre. Parlant d'une espèce
de jeu de pelotte où les joueurs couroient les uns
après les autres, il est dit de l'une des parties :
Cil s'avesturent ques sievoient
Dieiit jamais nés cousuivroient, (al baUeyont).
Alliis, MS. fol. 18, R- col. 2.
Ballet, subst. masc. Danse.
Donna deduiz, donna halez.
Rom. de Brut, MS. fol. 80.
Balet de chevaux ou ballet à cheval, étoit une
espèce de danse qui se faisoit à cheval. On en
dansa trois h Paris, en 1581 et 1606; le dernier
fut exécuté au carrousel pour le mariage de
Louis XIII. (Voy. Sauvai, Ilist. de Paris, 'T. II,
p. 693. — Voy. sur les Ballets, Brant. Cap. Fr.
T. II, p. 162, 398 et 399.)
VARIANTES :
liALLET. Brant. Cap. Fr. T. II, p. 162.
Balet. Mém. de Bassomp. T. I, p. 324.
Balez. Rom. de Brut, MS. p. 80.
Balletrou, subst. masc. Mot obscène forgé par
Rabelais, T. II, p. 222. (La note de Le Duchat. Ibid.
— Voy. aussi le Dict. de Cotgrave )
Balleur, subst. masc. Danseur, sauteur. (Gloss.
de Marot.)
Ballongner, verbe. Mettre un bâillon. « Luy
« faisant par force ouvrir la bouche, la ballongne
« avec un gros baston. » (Merl. Cocaï, T.ll, p. 106.)
Ballonner, subst. masc. Garçon, homme vil.
Sorte d'injure.
N'autre garçon, ne bialcmicr.
l'hil. .Mouskcs, MS. p. 08.
Le surnom de ballomer est donné par mépris à
Gondovaldus, dans Grég. de Tours (3), p. 341.
VARIANTES :
BALLOMER. Grég. de Tours, p. 341.
BiELE.MiER. Ph. Mouskes, MS. p. 98.
Balmer, subst. masc. Tempête. Il paroit que
c'est le sens de ce mot dans les vers suivans :
C'est ce que j'ajTTi, c'est mes joyeux depors.
C'est 11 doulx temps qui en balmer fait calme,
Et les vaissiaulx arriver à bons pors.
Eust. Desch. Pot's. MSS. fol. 159, col. 3.
(1) Le bas-latin a balinvernia, voile de navire. (N. e.) — (2) C'est encore la bergeronnette. — (3) Au livre VI, ch. 14, et dans
bien d'autres passages, ^n. e.)
BalieureSi subst. fém. plur. Balayures. (Dict.
deRob. Eslienne.)
VARIANTES :
BALIEURES, Baliures.
Baligaiit, adj. Maussade, impertinent. (Dict. de
Nicotet de Monet.)
Balin, subst. masc. On appelle ainsi, aux envi-
rons de Cosne, des nuages très épais et passagers
qui fondent tout à coup et inondent une petite
étendue de pays. C'est ce qu'on nomme en Champa-
gne et en Brie un chameau.
Balinges, subst. fém. plur. Couches ou langes.
Mot du patois Limousin. (Du Gange, Gloss. latin,
au mot lialtinia.)
Baliser, verbe. Terme d'eaux et forêts. Il
signifie débarrasser le cours d'une rivière, pour en
faciliter la navigation. (Dict. de Monet et Cotgr.)
VARIANTES *
BALISER. Dict. d>- Monet.
Ballizkr. Cotgrave.
Balissage, subst. wflsc. Droit seigneurial. Celui
de faire baliser le cours des rivières, peut-être
aussi le droit d'imposer des amendes sur ceux qui
embarrassoient la navigation. Dans l'état sommaire
que le duc de Sully donne au roi de tous les droits
et redevances qui composoient alors les revenus du
royaume, on lit : « Passages, barrages, travers,
« péages, pontonnages, balissages. » (Mém. de Sully,
T. X, p. 228.)
Balisse.ment, subst. masc. L'action de balayer.
Ce mot est employé flgurément dans les Contes de
Cholières, fol. 246.
Baliverner (I), verbe. S'arrêtera dos bagatelles.
La difficullé de bien faire un conte et le petit nom-
bre de ceux qui possèdent ce talent, ont fait dire à
Montaigne : « Entre les pertinents même, j'en voy
« qui veulent, et ne se peuvent detTaire de leur
« course ; cependant qu'ils cherchent le poinct
« de clorre le pas, ils s'en vont balivernant et
" traisnant, comme les hommes qui défaillent de
« foiblesse. » (Essais de Montaigne, T. I, p. 45.)
Baliverneries, subst. fém. plur. Balivernes.
Discours inutiles. (Dict. d'Oudin.)
Baliwike, subst. L'affiche du bailli. fVoyez
Tenures de Littleton, fol. 89.)
Baliz, subst. masc. plur. Pieux.
Quant un edefieraent
Est de terre en baliz boutée,
Prist est tost, et inellement :
N'avoir ne peut longue durée.
Geofr. de Par. à la suite du Rom. de Kauv. MS. du R. n' 6812, fol. 53.
Ballader, verbe. Faire des ballades. (Voy. les
Œuv. de Roger de Collerye, p. 159.)
Balladié, subst. masc. Le collectif de ballades.
BA
— 382
BA
Balmier, subsl. nuise. L'arbre qui porte le
baume.
Le bahnier sui qui bien scay pure et nette
Ou tel lleur croist à loi noble vergier.
Eusl. Desch. t'ocs. MSS. fol. 155, col. 3.
Baloier, verbe. Flotter, voltiger. — Briller.
Au premier sens, de flotter, voUiger, nous lisons :
Li confanon sont desploié
Qui tuit erent de rice soie
Et Taure doce lor buloie.
Alhis, MS. fol. 102. V" col. 2.
fialoicr s'est dit pour briller, en parlant d'un
gazon éniaillé de fleurs:
C'est en may, quant reverdoie
L'erbe que voi («i/o/er
Pocs. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1494.
VARIANTES ',
lî.\LOIER. Athis, MS. fol. 102, V« col. 2.
lÎALOYER. Borel, au mot Ori/!ame. •
B.\i,LOiER. Athis, MS. fol. 50, R» col. 2.
Ballûyer. Lanc. du Lac, T. II, fol. 70, V° col. 1.
Banlûier. Athis, MS. fol. 79, R» col. 2.
Bauloier. Du Gange, Gloss. lat. au mot Bandum.
Balier. Ci. Guiart, MS. fol. 320, R».
Baloine, suhst. fém. Herbe odoriférante. Il
faut peut-être lire baume (ou balme). La mesure du
vers seroit plus exacte :
Je n'y voi rose, ne bouton
Lavende, violette driie,
Marjolaine, Basilicon,
Baloine, ne douce odeur en rue.
Eusl. Desch. Pocs. MSS. fol. 7, col. 3.
Balonges, siibst. plitr. Sorte de cuves de bois.
Les marchands de poissons, à Langres et ailleurs,
étoient dans l'usage de tenir leur marchandise
« dans de grands vaisseaux de bois, de deux fois
« plus longs que larges, quasi comme demi ba-
» longes. » (Des Accords, Escr. Dijonn. p. 22.)
On trouve barlogiws dans des Lettr. de septembre
1387, au Bailli et Prévôt. (Très, des Chart.
Regisl. 131.)
VARIANTES :
BALOMGES. Des Ace. Escr. Dijonn. v. 22.
B.ARLOGNE. Très, des Chartr. Reg. 131.
Balons, siibst. 7nasc. Bombes. (Dict. d'Oudin.)
Baloquement, subst. masc. Trafic, échange.
C'est le sens que présente ce mot dans le passage
qui suit :
Baloquement de marchandise
Y sera fait, eu mainte guise.
Eusl. Desch. Poës. MSS. fol. 407, col. 1.
Baloste,SH7vs^/'c?H. Fleur du grenadier (1). (Dict.
d'Oudin.) ^ ^ ' ^
Balotade, subst. fém. Rebondissement, bricole
(Dict. d'Oudin.)
Balotte, subst. fém. Grosse balle, boulet.
« Dedans ung faulconneau de bronze, il meltoit
« sur la poudre une balotle de fer bien qualibrée. »
(Rabelais, T. IV. p. 8G2.)
Balous, subst. masc. Balle d'avoine. Ce mot est
employé dans le passage suivant, pour chose de
peu de valeur :
Qui n'acomptent deux balous,
Aux biens mondains fuitis et faulx.
Eusl. Desch. Pots. MSS. fol. 344.
Balsamée, subst. fém. Jus de baume.
De vin, d'uille, et de balsamée
Sont chargiez.
Eust. Desch. Poês. MSS. fol. 85, col. 3.
Balsamer, subst. Espèce d'arbre qui produit le
baume.
Balsami, subst. masc. « On luy donne poudre
« de gomme balsami, elcastorei, avec jus de men-
" tastre, autrement nommée herbe contre les
« puces. » (Du Fouilloux, Fauc. fol. 70, V°.)
Balseme, partie. Embaumé. Dans la descrip-
tion d'une tente merveilleuse en tous points on
lit:
Moult furent riche li pesçon
Et bel, et noble de façon
Car tout erent de balsamer
Qui sor toz arbres a mestries.
Amis, MS. fol. 39, R- col. 1.
Baltée, subst. masc. Baudrier, du \a.{mBalteus.
Borel, sur ce mot, cite la Nef des folles.
Balvard, subst. masc. Boulevard. « Le Rous-
« sillon, le meilleur balvard, que peut avoir le
» Languedoc. » (Godefr. Observ. sur CharFes VIII,
p. 072.)
Balzan, adj. Qui a des Balzanes, c'est-à-dire
des marques blanches à un ou plusieurs pieds.
(Dict. d'Oudin et de Cotgrave.) Ce mot est formé
du substantif bal:ian (2), qui désigne celte même
marque.
Balsane, subst. fém. Marque blanche au pied
d'un cheval. (Dict. d'Oudin et de Cotgrave.) On juge
de la iionté des chevaux selon les' pieds oîi les
balzanes se rencontrent.
Poil chastain, astre au front, au jambes deux bahans.
Des Ace. Bijar. fol. 141).
VARIANTES :
B.\LS.\NE. Oudin, Cotgrave, Dict.
B.\LZ.\NE. Oudin, Dict.
Bambe, adj. Surnom d'un prince d'Antioche.
Il faut probablement lire baube qui signifie bègue.
(Voy. baube, ci-après.)
Bamberge, subst. Ce mol, dont nous n'avons
pas d'exemple, semble avoir été françois, et avoir
signifié l'armure des jambes. Je le dériverois du
mot allemand bein, qui veut dire;«m/^('. On trouve
dans le Gloss. lat. de Du Cange, Dainberga, et
Bcmberga dans des citations latines où se trouvent
ces autres mots, Itrunia, helmum, halsberga et
manica, qui répondent aux mots françois Broigne,
heaume, aubergeon et manche.
(1) C'est plutôt kl marrube; vient du grce ,3aAA(urn. (n e)
bordure, (n. k.)
(2) Dicz remonte avec bonlieur jusqu'au latin halteus,
BA
— 383 —
BA
Bamboche, s!<fcsi. fém. Bâton. Canne à nœuds.
On s"esl servi de ce mot pour désigner une personne
de petite taille. En Italien, il signifie marionnette,
du mol Bambo, quiveutdire enfant. (Dicl. Etym. de
Ménage.)
Bamboches, sut)st. mase. plnr. Nom qui fut
donné à des comédiens établis 'i Paris en 1674.
Bamille. C"est une faute dans le passage que
nous allons citer.
Il faut lire bataille. « Ses sot assembla isnelle-
» ment, et vint à bamille, à grant ferveur de soy
« vanger. » (Chr. de S. Den. T. II, fol. 3.)
Bamievir, verbe. Devenir blême. Pâlir. (Celthel.
de Léon Tripp. et Dict. de Borel.)
Ban, suhst. masc. Publication. — Convocation.
— Hommage. — Ordonnance. — Règlement. —
Territoire d'une seigneurie. — Corvée. — Droit
seigneurial. — Amende. — Saisie. — Terme de
pratique.
Au premier sens, ban signifioit toute proclama-
tion publique, les publications faites h haute voix,
au son du tambour, de la trompette, au son même
de la cloche, pour ordonner ou défendre quelque
ciiose. (Voy. Beaum. p. 330 et '140. — l'.ech. de Pas-
quier, p. 704, le Gloss. du R. de la Rose ; les Dict.
de Monet et de Nicot, et Laur. Gloss. du Droit Fran-
çois où Ton trouve que la cloche du ban étoit celle
qu'on sonnoit pour assembler les habitans d'une
paroisse.)
De cette première acception dérivent les sui-
vantes, avec plus ou moins d'analogie.
Pris dans une signification beaucoup moins géné-
rique, ce mot désignoit les publications qui se
faisoient pour convoquer les nobles d'une province,
tenant immédiatement du Roi , â venir le servir
dans son armée, suivant qu'ils y étoient obligés
par la loi des fiefs. (Voy. La Roque, du ban et arrière
ban, p. 2, et suiv.; les Ordonnances des R. de Fr.
T. I, p. 152. — Bout. Som. rur. annot. p. 488, etc.)
Ban s'étantdit ^om- publication q\\ général, a pu
signifier celle que les seigneurs faisoient faire pour
obliger leurs vassaux â leur rendre hommage, et
c'est par une extension de cette dernière acception
que ce mot est employé pour l'hommage même
dans le passage suivant :
Et Engletiere, et Danemarce,
Qui moult estoit lontaine marce
Si en ot le Dunois Ogier,
Pour Gaufroy son père ostagier,
Et diut rendre Treu et ban
De IV deniers, cascun an.
Ph. Mouskes, MS. p. 125.
Ban s'est dit pour ordonnance, règlement. « Chas-
« cun an qu'il plaist au Seigneur,"peut faire bans
u pour un bien commun de toute la dite commu-
« nauté d'icelui village et eschevinage, laquelle
« communauté est tenue tous ensemble y compa-
« roir, pour ieeux voir, et justement garder et tenir,
u sur la demande, et peine de deux sols tournois. »
(Coût. gén. T. II, p. 520.)
Juner les devenres de l'an
Ne trespasseront si fait ban.
Pofs. MS. a\anl 1300, T. IV, p. 1372.
Le ban de mars et d'aoust estoit une défense de
mener « des bêtes dans les terres emblavées, ou
« autres héritages qui pouvoient en être endom-
« mages. » (Coût. gén. T. I, p. 688.) Bouteiller, sous
le titre des bans et défences d'aoust, en étend la
signification jusqu'aux défenses qui regardent la
voirie, la chasse, la pêche, et même les mauvais
lieux, les jeux de hasard, etc. (Voyez Bout. Som.
rur. p. 50G et suiv.)
Ban s'est dit pour territoire d'une seigneurie.
" Le Seigneur haut justicier peut empescher ses
« sujets de lever ou mettre bornes faisans sépara-
« lions de bans, à peine d'amende arbitraire ; ne
« les peut aussi le dit seigneur du ban, lever ny
« poser, sans en avertir le seigneur du ban join-
. dant. » (Nouv. Coût. gén. T. il, p. 397.)
Dans la signification de corvée, &rt?i désignoit une
sorte de droit appartenant au seigneur sur ses vas-
saux. « Tout homme tenant servement son héritage,
« ou morlaillablement, doit faire, pour chacune
« sepmaine à son seigneur, le ban ou arban, c'est-
« â-dire une corvée a bras du mestier qu'il sçait
« faire, et s'il fait arban avec deux bœufs, il en
a vaut deux, etc. » (Voy. le Coût. gén. T. II, p. 508.)
On appeloit ban de four et de moulin, un droit
en vertu duquel le seigneur d'un fief peut obliger
ses vassaux à venir cuire au four banal, à moudre
à son moulin. (Dict. de Monet.) Plusieurs seigneurs
avoient aussi le droit de vendre leur vin à l'exclu-
sion des habitans de leur territoire; c'est ce que
signifie ban-banneaii, dans ce passage. « Je ne puis
« vendre vin, pour raison de ban-banncau, en la
" ville de Vaydun, fors que vin mouys. » (La Thau.
Coût, de Berry, p. 103.) On disoit aussi ban-vin. Ce
droit a subsisté en Touraine, en Bourgogne et autres
lieux. Le seigneur en jouissoit pendant 40 jours. Il
duroit pendant tout le mois d'août, suivant un litre
de 122t), rapporté par Jurain. (Ilist. du comté d'Aus-
sonne, p. 27.) Ce droit est appelle ba^ic de vin.
(Pérard, IIist.de Bourg, p. 317; titre de 1247), et
ban de vin vendre. (Id. p. 430, titre de 1246.)
Ban s'est employé pour amende, peine pécu-
niaire. C'est en ce sens que Laurière le définit,
0 peine qui se paye par celui dont les bestiaux ont
« fait dommage â autrui. » (Gloss. du Dr. Fr.)
On disoit ban pour saisie de meubles. " Si aucun
o habitan de la dite ville et cité de Bayonne veut
a mettre &an,adveu, arrest, ou autre empeschement
0 sur aucune chose meuble, ou sur les fruits pen-
« dens en chose immeuble, pour raison de ce qu'il
a prétend la chose meuble luy apartenir, ou aucun
» deble luy estre deu par le possesseur des dites
o choses meubles, ou immeubles, etc. » (Coût,
gén. T. II, p. 714.)
Ban de trelfond désignoit la saisie réelle d'un
héritage hypothéqué à une rente. ■< Auparavant la
« guerre, estoit couslume de procéder par ban de
<• treffond sur les héritages hypotéqués aus dits
• censés,' et ventes indiîéremment ; de manière
BA
38 i —
BA
« qu'il advenoit que cehiy qui avoit esté contraint
■ ■■ prendre quelques deniers à rente en sa nécessité,
« pour petite rente, i cnidit héritages de grand
« valeur, au giand préjudice des propriétaires, et
« autrescréancier3,etau seuravanlagedurentier. «
(Coul. gcn. T. I, p. IIGI.)
On donnoit autrefois une sauvegarde à un héri-
tage, de même qu'à un homme, et l'on se servoit
du mot ba)i pour signifier, en termes de pratique,
les écussons que le seigneur faisoit mettre sur le
fond qui était en sauvegarde, pour l'empêcher
d'être endommagé, ou pour conserver les meubles
et autres elfets hypothéqués à des créanciers. >• Le
■i maire, ou son "lieutenant, quand il est question
« dedebte, si le requérant lui en fait apparoir par
« letties, ou autres enseignemens suflisans, doit
« bailler un sergent au requérant pour aller poser
« le dit ban aux ciioses meubles, ou immeubles qui
« ne meuvent et fiuicts pendans, ou cliose immeu-
» ble, le dit sergent doit mettre une, ou plusieurs
« croix en enseigne du dit ban ou y mettre pan-
« nonceaux, ou autre signe de ban. » (Coût. gén.
T. II, p. 714.)
Voici quelques expressions remarquables aux-
quelles ce mot a donné lieu :
1° Sauvegarde de ban. C'étoit la sauvegarde
accordée à celui qui craignoil d'être troublé dans
sa possession ; elle le mettoil à l'abri de la saisie
qu'on auroit pu obtenir contre lui. Masnerius, litre
de possesso, parle d'une sauvegarde de ban « qu'on
« appelle autrement interdicl de simple ban, qu'ob-
« tient celui qui craint d'être troublé en sa posses-
« sion auparavant, le trouble réel, et seulement
» pour les menaces, ou jactances qu'on faict de le
« troubler. » (Gr. Coût, de Fr. Liv. I, ch. 111, p. 27.)
2° Donner à ban, pour abandonner, mettre à la
discrétion du public. (Pasq. Rech. Liv. VIII, p. 704.)
3" Dati le roi, expression qui semble signifier la
même chose que de par le Roy, dans ces vers :
Aucune faiz, ce m'est avis,
Crie on le ban le Roi Loys.
Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 246, V- col. 2.
4° Corner le ban, sonner la retraite. On a dit en
ce sens, en parlant d'un tournoi :
A tant est partis le tournois,
Que plus n'i font à celé fois :
Li Bannier ont le ban corné
Par tant sont as estes aie.
Parton. de Blois.'MS. de S' Gcrra. fol. 154, V" col. 1.
5° Procéder à ban, c'est-à-dire poursuivre une
instance criminelle, par cri public. « En cas cri-
« minel, Von procédoit à ba7i. » (Gr. Coût, de Fr.
Liv. m, p. 350.)
G- Mettre ban, c'est-à-dire « faire bans, édits, cris
« et proclamations; mettre et induire peine sur ses
« sujets, selon la qualité et nécessité des cas. >■
(Ord. des R. de Fr. T. I, p. lt>G, note e.)
7° Uan brisé. On appelloit ainsi le délit commis
par ceux qui se battent sur une seigneurie difïérente
de celle oii la querelle s'est élevée. (Voyez le Nouv.
Coût. gén. T. II, p. 1051.) On y lit que « l'amende
" du ban brisé appartient au haut justicier du lieu
« ou le débat a esté faict. »
8° lianes francs. Temps de l'armée pendant lequel
on ne pouvoit faire prise de corps, ou saisie de
biens, excepté pour les cas et criminels, et dettes
contractées pendant les dits banqs. (Coût. gén.
p. 805, T. II.)
VARIAMES :
BAN. Bout. Somm. rur. annot. p. 488.
Banc et Arrière- Banc. Ger. de Rouss. MS. p. 122.
Bancq. Nouv. Coût. gén. T. I, p. 450, col. 2.
Banage, subst. masc. Territoire de la bana-
lité. — Sorte de droit seigneurial.
Dans le premier sens, banage signifioit l'étendue
du district d'un moulin banal. « Musniers et servi-
« leurs de musniers ne peuvent aller sur le ban-
" nage d'autruy charger bled, et y mener farine. »
(Coût. gén. T. I, p. 713.)
On appelloit aussi droit de bancage , le droit de
Banvin. (Voy. Ban.) « Seigneur qui a droit de ban
« vin, peut vendre le vin de son creu, de son fief
« pour raison duquel il a le droit de bancage, et
« ne- durera le dit bancage que quatre jours. »
(Coût. gén. T. Il, p. 54G.)
VARIANTES :
BANAGE. Grandes Coutumes de France, p. 125.
Bannage. Coût. gén. T. I, p. 713.
B.\NCAGE. Ibid. T. II, p. 542.
B.\NCQUAGE. Laurière, Gloss. du Dr. fr.
Baxquage. Id. ibid.
Ban-arban, subst. masc. Droit seigneurial. —
Corvée. (Voy. le Dict. de Borel.) « Doit faire à son
« seigneur ban, ou arban, c'est-à-dire une corvée
X à bras. Et s'il fait arban avec deux bceufs il en
« vaut deux, etc. » (Coût. gén. T. II, p. 508.)
Banai'd, subst. masc. Gardes des forêts. — Gens
qui présidoient à la garde des fruits et des forêts ,
sergent. (Voy. Dict. de Borel au mot Danards.) II
dit qu'on les appelle bandiers dans le patois du
Languedoc. « Fortiers (lisez forestiers) hangars, ou
« messiers peuvent , dans vingt-quatre heures ,
« poursuivre les mesusans, et sont crus en leurs
« rapports. » (Coût. gén. T. II, p. 423.)
VARIANTES :
BANARD. Borel, Dict.
Banar. Id. ibid.
Baxnar. Coût. gén. T. I, p. 864.
Bannard. Laurière, Gloss. du Dr. fr.
Ba.n-g.\r. Nouv. Coût. gén. T. II, p. 423, col. 3.
Bangard. Ibid. p. 407.
Bangarde. Ibid. p. 407, col. 1.
Banvar. Gloss. sur les Coutumes de Beauvoisis.
Banward. Coût. gén. T. II, p. 1073.
Bauvvard (.lisez Banward.) Nouv. Coût. gén. T. II, p. 1096.
Baxdier. Borel, Dict.
Bancacles, subst. plur. Terme de marine.
Il dérobe le mast, la poupe, et le fanon,
Raze voile, et bancs, bayicades, et antennes
Apostis, et fougons jusques à la carène.
Berger, de Rémi Belleau, T. I, p. 125.
Banchel, subst. masc. Diminutif de banc.
... El estoit sor un banchel...
Parton. de Bluis, MS. de S. Gxnn, fol. 150, Y' col. 1.
BA
- 385 —
BA
VARIANTES :
BANCHEL. Parton. de Blois, MSS. de S< Germ. fol. 151.
Bancselle, subsl. fétn. Fav. Th. d'honn. T. II, p. 1830.
Baiichier, subst. niasc. Tapis. Celui dont on
couvre un banc. Ce mot désigne spécialement les
tapis que l'on met sur les bancs placés dans le
cha'ur des églises, suivant Du Gange, Gloss. latin
aux mots Bancale et Banquerium. On s"en servoit
cependant pour désigner les lapis dont on couvroit
toutes sortes de ba)ics. « Près de la chaire y aura
« place où l'on peut mettre un petit banc sans
<■ appois, couvert d'un banquier et des quarreaux
« de soye, ou autres pour s'asseoir, quand on vient
« voir l'accouchée. » (Honn. de la Cour, à la suite
des Mém. sur la Chev.)
VARIANTES :
BANCHIER. Du Gange, Gloss. latin au mot Banquerium.
Banquiek. Bcuteillier, Som. rur.
Banqueke. Journ. de Paris sous Charles VI et VII, p. 85.
B.\NC.\L. Du Gange, Gloss. latin au mot Bancale.
Bancloche, SM&si. fem. Cloche, tocsin, beffroi.
Ce mot, composé de ceux de ba7i et de cloche, slgni-
fioit la cloche que l'on sonnoit pour assembler les
habitans d'une commune. (Yoy. cloche du ban, sous
l'article Ban.) Crtwc/od/e est une faute: il faut lire
bancloclie dans le passage suivant : » Us firent
Cl commander qu'on sonnast la bauclochc , et que
« chacun s'allast armer. » (Froissart, Liv. I, p. 9G.)
L'éditeur l'explique ainsi : « C'est en plusieurs lieux
« de France le tocsin, ou befroy. «
VARIANTES :
BANGLOGHE. Dict. de Borel et de Corneille.
Banclocque. Du Gange, Gloss. lat. au mot Campana.
Bancloque. Id. ibid.
Baucloche. Froissart, Liv. I, p. 96.
BoNCLOCHE {lisez Bancloche.) U. deB. Du Guesc. parMén.
Bande, subst. fém. Ceinture. — Galon. —
Echarpe. — Parti. — Troupes. — Guerre, querelle,
division. — Terme de blason. — Frontière. —
Terme de marine. — Terme de fauconnerie. —
Pièce d'un moulin.
Ce mot, qui subsiste sous la première orthogra-
phe, pour signifier en général tout morceau de
toile ou d'étoffe plus long que large, s'employoit
pour désigner spécialement une ceinture.
Plicons, hendes d'orfrois
Elance cemise autresi.
Pocs. MSS. du Vatican, n- U90, fol. 99, V°.
Delà, il s'est dit pour galon. « Après ces parol-
« les, se départit le doulphin, et s'en vint à la
« fueillée par devant Mynerve, et luy baille l'habit
« de révérence, etluydist: Pucelle, vecy ce dont
« me priastes. Lors le print à regarder et dessoubz
» et dessus pour les affrois et les bendes lissues à
« or qui entour estoient. » (Percef. Vol. I, fol. 140.)
Ce mot s'est dit pour écharpe. Dans les guerres
civiles des maisons de Bourgogne et d'Orléans,
sous Charles VI, l'Orléanois portoit des escharpes
que Ton appeloit bandes; et ce n'est que depuis ce
temps que ce mot a eu cette signification. Originai-
rement ilétoit pris pour étendard, du mot bandum.
(Voy. Du Gange, Gloss. latin.) La Roque, en le déri-
vant du mot allemand Bandt (1), lui fait signifier la
même chose. « Portoient tous les princes des
« alliances, et aussi toutes leurs gens... pour Fen-
« seigne bendes étroites qui estoient de linges sur
« leurs épaules, pendans au senestre bras de tra-
« vers ainsy que le porte un diacre en faisant le
« service de l'église. » (Monstrelet, Vol. I, an. 1410,
chapitre lxv, fol. 101.)
Baiide s'étant pris pour la marque distinctive de
ce parti, passa de là à la signification du parti même.
(Voy. les Rech. de Pasquier, p. 733.)
Bende s'est pris pour le côté, la partie. « En
« l'effort de la bataille, la bende des François
" commenijast à décliner, et estre foullée de la
>' puissance et multitude des Allemans. » (J. Le
Maire, Illuslr. des Gaules, Liv. 111, p. 3'iO.)
Dans la suite, on s'est servi du mot bande pour
exprimer toute espèce particulière de troupes qui
faisoient corps. André de La Vigne, parlant de l'en-
trée de Charles VIII à Florence, en 1494, dit : » Les
« bandes du roy commencèrent à marcher, la
« bande des picquiers , la bande des hallebar-
« diers, etc. » (André de La Vigne, voyage de Naples,
chapitre viii, p. 118.) Depuis, lorsque la légion eut
été instituée, on la composa de deux bandeï de gens
de pied qui furent appelées bandes légionnaires.
Elles furent supprimées pendant quelque temps, et
Charles IX les rétablit. (Voy. Daniel, Mil. fr. p. 338.)
F]utrapel nous apprend que, de son temps , le mot
bande commençoit à vieillir, et qu'on y substituoit
celui d'escadre. (Voy. Contes d'Eutrapel, p. 479.)
On distinguoit les bandes coronales. Dans le pro-
cès verbal de la Coutume d'Estampes, de 1550, on
lit: « Messire Loys d'Arbouville, lieulenant des
« bandes coronales de France. » (Coutumes géné-
rales, T. I, page 274.)
Les bandes noires étoient un corps de troupes,
composé de soldats italiens. A la mort du capitaine
qui les commandoil, ils prirent une enseigne noire
et des habits noirs; de là, le nom de bandes noires.
Ils se distinguèrent dans les guerres d'Italie. Ils
passèrent du service de l'Empereur à celui de
François 1"('2), auquel ils demeurèrent attachésjus-
qu'à sa mort. (Voy. Mém. de Montluc, T. I, p. 50.)
Pierre Desrey les appelle lansquenets, et dit, en
parlant de François I" qui s'avançoit pour faire
le siège de Navarre : « Cependant vint de renfort
« au Roy une bande de Lansquenets qu'on appelloit
« la bande noire (3). » (Chr. de Pierre Desrey, à la
suite de Monstrelet, fol. 120, R".)
Ce mot signifioit aussi guerre, querelle, division :
Envie court à tout sa houpelande :
Mais en dépit de la vieille truande
Vueil de liesse estre vray soudoier :
Se m'espée ay je li ferai grief bande.
Eust. Desch. Poes. MSS. fol. 230, col. S.
(1) Il vaut mieux remonter jusqu'à l'allemand binclen. (n. e.) — (2) Elle combattit à Marignan. (N. e.)
.encore en anglais hand, la musique d'un régiment, (n. e.)
(3) On nomme
49
BA
— 38G —
BA
« Pour les hendes et hrouillis de la maison du
« Roy, son père, il se relira en Dauphiné. » (Mém.
de Côiniiies, p. 517.)
En termes de blason, bande est une des pièces
qu'on appelle honorables (1) dans l'Ecu. (Voy. Le
Labour. Ori2,'. des Arm. p. 170.) On trouve ce mot
dans une citation latine de Du Gange, au mot
umhra Leoiiis, dans le même sens.
Dans un sens aussi figuré que celui dans lei[uel
nous employons aujourd'hui le mot lisière, bande a
signifié autrefois frontière, les bornes, les confins
d'un champ, d'un pays, d'une province, etc. « 11
« envova hastivemenl devers le sire de Coucy, et le
« seigneur de la Rivière, et remontrant ses beson-
« gnès, qu'ils se délivrassent de reconquérir ses
« chasteaux par trailté, convenances ou accords,
« et parspécial,lesplusprochainesdes bendes{2)âe
« la mer. » (Froissart, livre II, p. 24.) 11 faut lire
bandes pour bondes, dans cet autre passage du
même auteur : « En costoyant Cornouaille et les
« bondes d'Angleterre, ils arrivèrent sauvement. »
(Froissart, livre 111, p. 89.)
En termes de marine, on appeloit bandes ce que
les marins désignent aujourd'hui par tribord et
bâbord : les côlés, les flancsd'un vaisseau, h L'avant
Cl garde ayant fait plusieurs bordées pour prendre
« le vent, vint enfin sur les sept heures et demie à
« la portée du canon de nostre Hotte, et des deux
« pointes : puis tournant le bord tirèrent tous les
« canons de la bande, puis ayant tourné en firent
« de même de l'autre bande. » (Mém. de Bassom-
pierre, T. 111, p. 450.)
Le même mot signifioit, en terme de fauconnerie,
le côté du bec de cet oiseau. « Car aucunes fois, le
« bec croist et surmonte d'une bande plus que de
•1 l'autre, et fait ceste excrescence que l'oiseau ne
« peut pas resserrer le bec à son droit point. »
(Fouilloux, Faucon, fol. 121, R°.)
Enfin, nous trouvons bandes pour pièces d'un
moulin, dans ce passage: « Au fief appartient l'ar-
« bre du moulin, les bandes, et ce qui ne se mouve
» pas au moulin. » (Nouv. Coût. Gén. T. 1, p. 700.)
On disoit :
1° Bande d'artillerie, pour batterie. « La nuict
« sequente, laissant des pièces pour battre à la dite
« brèche, pour empescher de la remparer, meit
« une autre ba^ide d'artillerie pour battre l'encoi-
« gneure du costé de Montdevis. » (Mém. du Bell,
livre Vlll, fol. 2G4.)
Cette expression, dans cet autre passage, désigne
seulement un nombre de pièces d'artillerie : « M. de
« la Palice estoit venu avec cinq cent lances fran-
« çoises, deux mille piétons et une bande d'artille-
« rie. " (Lettr. de Louis Xll, T. 111, p. 32.)
2° Bende de lard. C'étoit une façon de parler figu-
rée pour tranche ou pièce de lard. (Dict. d'Oudin.)
3° Tenir part, ne bande, signifioit ne pencher
d'aucun côté. On lit dans l'Histoire du mareschal
de Boucicaut, p. 17G : " Si n'cstoit favorable à nul,
« par corruption , ne par quelconque familiarité,
« tenir part ne bande. » Montaigne a dit en ce
sens : - A quekiue bande qu'on panche. » (Essais,
T. 11, p. 592.)
4° Tenir sa bende, être de son parti. « Le dit
« Antimachus avoit esté corrompu par Paris
<< Alexandre, à force de dons et d'argent pour tenir
« sa bende. » (J. Le Maire, lUuslr. des Gaules,
livre XI, p. 221.)
5° Estaient de sa bande, pour : parti, faction.
« Avoit despouillé tous les trésors et reliques de
« l'Eglise, pour souldoyer ceux qui estoient de sa
« be7ide. » (J. Le Maire, Schismes et Conciles, p. 47.)
G° La grande bande. Cette façon de parler semble
faire allusion aux 24 Violons de la Chambre. Dorine
dit à Marianne, que Tartuffe veut épouser et mener
en province :
La danse au carnaval vous pourrez espérer
Le bal, et la grand'bunde, à savoir, deux musettes
Et parfois fagolin (3), et les marionnettes.
L'Imposleur, de Molière, acl. 2, se. 3.
« Les amoureux de la symphonie y estoient aussi
» attirés par un concert des vingt-quatre violons de
<■ la grand bande. « (Rom. Bourg, p. 7.)
7° La petite bande. C'est ainsi que Brantôme dési-
gne le petit nombre choisi des Dames qui étoient
ordinairement des parties du roi et auxquelles il
envovoit quelquefois des plats de sa table. (Voyez
Brantôme, D" Gai. T. Il, p. 442 et 413.)
8" Bande royale. Nous lisons dans la description
d'une colonne : « Dessus l'architrave est la frize,
« appellée autrement bande royale. » (Vray et parf.
Amour, fol. 215, R°.)
9° Faire bande et lice. Façon de parler empruntée
des tournois, pour :se liguer. L'ingratitude du peu-
ple envers ceux qui le gouvernent avec douceur a
fait dire :
Soudainement font leur bande et leur lice
Contre les bons, et rendent bénéfice
De cruauté ; par Boece apparra.
Eust. Desih. fol. 340, col. 3.
V.\RIANTES :
BANDE. Orthographe subsist.
Bende. Monstr. Vol. l, fol. 101, R° et V».
Bonde (4). Froissart, Livre III, fol. 89.
Bandé, part. Galonné. — Terme de blason. —
Pansé. — Qui a une lisière. — Attentif.
Au premier sens, on lit : « Estaffiers, habillés de
« velours noir, tous bandez de passement d'or. »
(Mém. de Bassompierre, T. 1, p. 323.)
Et la fu li siens cors trouvés,
En un sarqu ki fu bendés.
Ph. Mouskcs, MS. f. 305.
En termes de blason, bandé signifioit orné d'une
bande :
Le noir escu bendé de nuit,
Ot larrecins au col pendu,
(1) Elle représente le baudrier du cavalier, et prend d'ordinaire depuis le haut de l'angle droit de l'écu jusqu'à l'angle
gauche du bas de l'écu. (n. e.) — (2) Cette forme, employée par le chroniqueur de Valenciennes, se rapproche du namurois
bainde. (N. E.) — (3) Bouffon d'un théâtre de foire ; proprement ces singes qu'on habille comme un fagot. (N. E.) —
(4) Bonde nous paraît être là pour bonne, borne, du latin bodina. (n. e.)
BA
— 387 -
BA
Et d'une forches apendu,
Et en l'escu un cheval fust.
Fabl. MS. du R. n- 7015, T. II, fol. 191, V' col. 1.
On disoit dans le sens de pansé : « Bandé de sa
« navreure ; « pour pansé de sa blessure ou dont
la blessure a été bandée. (Percef. Vol. IV, fol. 83.)
Bandé signifioit : « Qui a une bande, une
« lisière » en termes de manufactures de draps.
(Voy. Ord. des R. de Fr. T. III, p. 413.)
Enfin bandé s'est dit pour attentif, en parlant de
l'attaque d'un bastion : « Ceulx d embas estoyent
« toujours bandez à trouver leurs gens au descou-
« vert. » (J. d'Auton, Ann. de Louis XII, p. 2(58.)
Le même mot signifioit aussi faire bande à part :
Sur l'heure entra une assez grosse bende
De survenans, et ainsi qu'on se bende
Homme n'y eut qui ne print sa pareille
Pour deviser.
Crelin, p. 108.
Expressions à remarquer :
1° Bander sa part d'cs^nz/Js (1). Terme du jeu de
paume. « Il vint entrer au jeu de paume et appelle
« Fouquel qui avoit déjà bandé sa part de deux
« douzaines d'esteufs, et jouoit à l'acquit. » (Contes
de Desperriers, T. I, p. 82.)
2° A bander et à racler. Façon de parler prover-
biale empruntée de la paume ; comme la première,
elle sert à exprimer toutes sortes d'excès en tout
genre. La Noue, parlant des liorreurs que commet-
toient les gens de guerre qui n'avoient à la bouche
que ces mots : « L'honneur du Roy, la religion ca-
« tholique, l'évangile, la patrie, » ajoute : « on void
« après la plus grande partie, prendre du tout le
» contrepied, et jouer, comme dit le proverbe de la
« paume, à bander et à racler, et plus sur les amis
« que sur les ennemis; c'est-à-dire saouler sa ven-
« geance, son ambition, sa cupidité et son avarice
« de tout ce que la guerre fait indiféremment
« ployer sous soy. « (Disc, polit, et milit. de la
Noue, p. 415.) Ce même proverbe est appliqué à la
gourmandise, dans les Div. Lee. deDuVeid. p. 123.)
3° Bander sa quaisse. C'est-à-dire, en termes bur-
lesques, s'en aller. (Oudin, Cur. Fr.)
VARIANTES :
BANDÉ. Mém. de Bassompierre, T. I, p. 323.
Bendé. Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. II, fol. 191, V° col. 1.
Bendés. Ph. Mouskes, MS. p. 305.
Bandée, subst. fém. Ban de vendange. Laur.
Gloss. du Dr. Fr. définit ce mot: « temps et ouver-
« ture des vendanges que l'on fait publier par or-
« donnance de Justice... On nedoitaller aux vignes,
« pour icelles grappeter, que trois jours après que
« les dites vignes sont vendengées, sur peine
« d'amende, et n'est partant entendu que les
« Seigneurs des dittes vignes ne les puissent gar-
« der plus longuement que du jour assigné de la
« bandée, pour en faire leur profit, si bon leur
« semble. » (Coût. Gén. T. II, p. 394.)
Bander, verbe. Tenir en inquiétude. — Liguer,
conspirer. — Faire bande à part.
Au premier sens, ce mot a signifié : tenir en
inquiétude. (Voy. le Gloss. de Marot.)
On disoit se bander, se bender, pour se liguer,
conspirer. Ce mot, dans ce sens, vient de bande,
faction. ■• Lorsqu'il eschel que plusieurs machinent
« une conspiration, nous disons qu'ils se bandent k
« telle entreprise. « (Pasq. Rech. p. 733.)
VARIANTES :
BANDER. Pasq. Rech. p. 733.
Bender. Crétin, p. 108.
Banderet, subst. masc. Chef de bande. (Dict.
deBorel et d'Oudin.) « Banderets... ceux qui ont
« eu le gouvernement de la ville de Rome, et la
« puissance de vie et de mort sur un chacun. »
(Laur. Gloss. du Dr. Fr.)
VARIANTES :
BANDERET. Borel.
Benderet. Oudin.
Bandez, snbst. plur. Ce fut le nom que le peu-
ple donna aux partisans de la maison d'Orléans,
sous Charles VI, à cause de la bande ou écharpe
qu'ils portoient. (Voy. Pas([. Rech. p. 733.) On
appela aussi bende:i, la faction du duc de Berry
contre le duc de Bourgogne. (Voy. le Journ. de
Paris sous Charles VI et'VÎI, p. 4.)
BANDEZ. Pasquier, Rech. p. 733.
Bendés. Journ. de Paris sous Charles VI et VII, p. 4.
Bandolier, subst. masc. Bandit, brigand. Ban-
dolier se trouve dans la préface des Contes de la
Reine de Navarre, p. 4 et .5. Borel, dans son diction-
naire au mot Bandouillers, dit que c'étoient des
voleurs du pays de Foix et des Pyrénées, ainsi
nommés parce qu'ils alloient par bande. (Voyez le
Dict. Etym. de Ménage et Cotgrave.) Bouchet, dans
ses Serees, le dérive de l'espagnol vando, faction.
(Livre II, p. 95.) En 1502, c'étoit des troupes au ser-
vice de France. (Voy. .1. d'Auton, Ann. de Louis XII,
p. 170.) On en faisoit la levée dans les Pyrénées,
selon M. de Thou. (Voy. son Hist. T. IV, p. 391.)
Nous avions encore de ces troupes dans nos ar-
mées, en 1.50G. (Mém. deMontluc, T. II, p. 69 et 71.)
Les bandoliers de la garde étoient peut-être les
archers de la garde de Louis XII ; ils furent ainsi
nommés de la bandoliêre qu'ils portoient. (Voyez
J. d'AuL Ann. de Louis XII, de 1500 et 1507, p. 134.)
VARIANTES :
BANDOLIER. Bouchet, Serées, livre II, p. 95.
Bandouiller. Goujet, liibl. fr. T. XIV, p. 177.
Bandouillier. Borel, Ménage, Cotgrave, etc.
Bandoulier. Favin, l'h. d'honn. T. I, p. 431.
Bandon, subst. masc. Permission, liberté. —
Possession, partage. — Abandon.
Sur le premier sens, voyez le dictionnaire de
Rob. Estienne. « Le Roy avoit tous les jours ftandora
a d'aller parler à la dame du chasteau. "(Voy. Lanc.
du Lac, T. I, fol. 107, R" col 1.)
(1) i?antter une balle, c'est la pousser dans les filets avec la raquette, quand elle roule sur le pavé. L'éteuf est ainsi
nommé parce qu'il était fait d'étoffe, (n. e.)
BA
— 388 —
BA
Ainors est foie et vaine
Ki trop est mise à batidoii.
Poes. MSS. avant 1300, T. III, p. 1025.
Laisser aller à son bandon, pour abandonner,
laisser aller. Venir h quelqu'un, à son bandon, le
charger à corps perdu, en s'abandonnant sur lui.
(Ger.'de Koussillon, ms. p. 158.)
Ce mot a signifié possession, partage :
Honneurs divins au ciel sont ordonnés,
Pour tous humains aux lettres adonnés ;
Se par vertuz leur sont habandonnez
Les biens haultains, ceux à tel bandon nez
Mériteront, s'ils font bons labouraiges,
Honneurs divins.
Crétin, p. 65.
Bandon a été employé pour abandon. (Dict. de
Monet.) « Si dist au Roy : vous promets sur le bandon
<■ de ma teste, que se vous arrivez lu, vous y pren-
« drez terre à voslre voulenté. » (Froissart, livre I,
p. 150. j J. de Meung fait ainsi parler la Raison, per-
sonnage allégorique :
Oncque pucelle de mon pariage
N'eusl d'aymer, tel bandon que j'ay ;
Car j'ay de mon père congeay
De faire amy, et d'estre amée,
Et n'en serây de luy blasmée.
Rom. de la Rose, vers 6056.
Bandon (à), adv. En abondance, en quantité,
entièrement, tout à fait. —A disposition, à volonté.
(Gloss. du Roman de la Rose.)
Dans le sens d'abondance, nous trouvons ce mot
employé dans les vers suivans :
La terre est si mouillée de sanc à tel bandon.
Ger. de Roussillon, p. 116.
. . . Estranges coups s'assemblent à bandon
Oui ne lairont à nul, ce n'est advis
Geline, o e, ne poucin, ne chapos.
Eusl. Desch. Poos. MSS. fol. 237.
Ce mot s'est dit pour : entièrement, tout à fait.
Les portes œinrent à bandon.
Athis, MS. fol. 102. R° col. 2.
De là, on disoit à grand bandon, pour à profu-
sion. En parlant des femmes qui se remarient, et
du peu de soin qu'elles ont des enfans du premier
lit, on disoit: <■ Ses enfans, que le bon homme
a aymoit, sont déboutés, et leur despendon le leur
« à grand bandon. » (Les quinze Joyes du Mariage,
page 171.)
A bandon ?,i^\n{ïo'û aussi: îi disposition, à volonté,
à discrétion.
Le mieulx joustant n'aura pas lange
Mais d'argent fin chapel à son bandon.
Eust. Desch. Pois. MSS. fol. 119.
Mais quant j'ay à mon bandon,
De ce bon vin dont liaune fait don
Estre ne quier clers, ne parler latin.
Ibid. fol. ...
On lit dans la Chr. fr. mss. de Nangis, sous l'an
1191 ; « La prist, et à bandon la récent. Nous serons
« bien maistres de ceste ville, et nous mettrons
« voulonliers hommes et femmes, tout le leur à
« nostre bandon. » (Froissart, Vol. I, p. 145.)
Baneré, adj. Ayant une bannière.
Banerolle, subst. [cm. Banderolle. Petit éten-
dard plus étendu en longueur qu'en largeur, quel-
quefois il étoit carré. « Chascun avoit ung meistre
« logeur, et ce maistre logeur portoit une petite
« banerole comme d'ung pié et demy en carré, en
« quoy estoit la livrée du capitaine. » (Le Jouvencel,
MS. p. 176.)
VARIANTES :
B.\NEROLLE. Le Jouvencel, MS. p. 176.
Banerote. (Lisez Banerole). Ibid.
Banfiee, subst. masc. Bénéfice. ^ Quant au-
« cuns esloit accusés d'aucun crime, dont il deust
" estre noyez, s'il n'estolt coupable, il ne pooil
« noyer, mais ce n'est mie voirs, car ce faisoit li
» banfices de l'air qui le retient, non mie autre
« chose. " (Du Gange, Gloss. lat. au mot Aquce.)
Baniée, part, au fém. Abandonnée. (Dict. de
Borel.) 11 auroit peut-être dû lire Bannie.
Banisseur, subst. masc. Proclamaleur. Du
verbe banir, proclamer.
Il n'est qu'ung gaudisseur,
Joueur, pipeur, de follycs banisseia:
Faifeu, p. 99.
Banisseur de follyes signifie, e^ cet endroit, celui
qui propose d'en faire.
Banisure, subst. fém. Bannissement. Exil. C'est
en ce sens que nous lisons : « Punir les uns par
« banisure, les autres par mort. » (Chr. S' Denys,
T. II, fol. 17G.)
Banlieue, substantif féminin. Territoire.
Juridiction d'un bien comprenant le pays auquel
elle s'étend. Cette définition est de Borel. (Voyez sur
ce mot une note savante du P. Sirmond, T. ÏII, sur
les Epitres de Godefroy de Vendosme, Liv. II,
Ep. 16.) L'auteur du Grand Coutumier de France,
qui écrivoit sous Charles VI, ayant distingué la
prévôté, la vicomte et la banlieue de Paris, ù la
page 10. ajoute: <• L'on appelle banlieueàeVa.r\s, là
« où Paris est, et la circuitude contenant environ
« une lieue. » Il fait ensuite le dénombrement des
lieux qu'ellecomprend, et l'éditeur interprète le mot
banlieue, par « le circuit et destroict dans lequel
« s'étend le ban, et publication que fait faire le
« prevost de Paris. » (Voy. le Gr.Gout. de Fr. p. 12.)
Eust. Deschamps, parlant des négociations pour
la paix avec les Anglois, en I3G0, dit :
Combien que de par les deitx Rois,
Près de Paris, à une lieue
A un lieu qu'on dit la banlieue
Fussent en la œaladerie
Assemblés, ne traittièrent mie.
Eust. Desch. Poos. MSS. fol. 575.
Dans quelques pays, la banlieue étoit de l'étendue
de cent vingt cordes, dont chaque corde étoit de
cent vingt pieds. (Voy. le Coût. Gén. T. II, p. 778.)
" La banleue a trois cens soixante neuff perches
« de terre, chascune perche de 24 pies. » (Ane.
Coût. deBret. fol. i3G.)
Expressions remarquables :
1° Banlieue de moulin signifie : « l'étendue et la
« lieue au dedans de laquelle les sujets sont tenus
« mener moudre leur bled au moulin bannier. »
(Laur. Gloss. du Dr. Fr.) Dans la Coût, du Loudu-
BA
389 -
BA
nois, la banlieue de moulin éloil de deux mille pas,
chacun valant cinq pieds ; en Anjou, de mille tours
de roue valant quinze pieds. (Ordon. des R. de Fr.
T. I, p. i97, note.)
2" Plate à banlieue. Expression singulière pour
désigner la blessure pour laquelle celui qui l'avoit
faite, étoit punissable dans le lieu du délit. Dans
une charte citée par Du Gange, Gloss. lat. au mot
plagaad Bannileugam, on lit : « Quiconque enfrain-
« dra les trièves por fait dont mort, allblure. ou
« playe ouverte que l'on dil;j/ayc à banlieue, s'en-
« suit, puni sera de peine capitale. »
VARIANTES ;
BANLIEUE. Orth. subsist.
Banliue. Ord. T. I, p. 533, art. ii.
Banleue. Ano. Coût, de Bret. fol. 153, R» et 136, V".
Banlée. Ordon. des R. de Fr. T. III. p. 518.
Be.\ulieu, subsl. MUSC. Coût. Gén. T. II, p. 079.
Bannal, adj. Prohibé, réservé, défendu.
(Orth. subsist.) Ce mot s'est dit des bois et des
forêts ; selon Laur. Gloss. du Dr. Fr. il s'est dit
aussi des eaux et des rivières qui étoient en pro-
priété, et que l'on donnoit à ferme ou à cens. (Id.
Ibid.) « En caves et rivières bannales, si aucun y
« pesche, sans le congé du Seigneur, ou de son
« fermier, il y a amende de soixante sols tournois,
« avec restitution de poisson, pour chacune fois. »
(Coût. Gén. T. I, p. 423.)
Banne, subst. fém. Vanne, chute d'une rivière,
l'endroit où elle se décharge dans une autre rivière.
Le lieu appelle lombe de Lysoire (1), dans la Chron.
Fr. Ms. de Nangis, est appelé banisoire, au fol . 262 des
Chron. de S' Denys. C'est peut-être comme s'il y
avoit bannlsoirc, ysarœ banna, la vanne ou la chute
de l'Oise ; peut-être : Pontoise, ou quelque lieu voisin.
VARIANTE :
BANISOIRE. Chr. S' Denys, fol. 262.
Bannelle, subst fém. Petite vanne. Conduit,
passage, chute des eaux d'une maison. C'est ce
qu'on appelle en certains lieux venelle, c'est-à-dire
la séparation qui est entre deux maisons voisines
dans laquelle tombent les eaux des toits. « Si l'on
« donne une maison avec ses appartenances, pour
<' les appartenances est entendu qu'il donne les
« bannelles, entrées et issues, conduits, jettemens
" d'eaues de la maison donnée seulement, et non
" pas terres, ou autres choses adjacentes ù la dite
« maison. » (Coat. Gén. T. II, p. 070.)
Banneresse, sm/)s/. fém. Femmed'un banneret.
« Princesses, femmes d'étal et banneresses. » (Ilonn.
delà Cour, à la suite des Mém. de l'Ane. Cheval.)
I/auteur du R. de Ger. de Rouss. après avoir fait
rénumération de provinces et des grandes seigneu-
ries que son héros possédoit en France, en Flandres,
en Allemagne, en Espagne et en Lombardie, ajoute:
Cent et quatorze comtes erent, pour voire ses hommes
Deux Dan, et quatre Bers, et trois dalphin par sommes,
De très hauts haiierel.^ : des chastellain sans nombre
Avoit en son hommage ; les autres plus ne nomme.
Ger. de Roussillon, MS. p. 7.
Banneret, adj. et subst. masc. Qui a droit de
bannière. Il y avoit des chevaliers bannerets, des
écuyers bannerets et des doubles bannerets.
1° Le chevalier banneret étoit un chevalier d'un
ordre supérieur et qui étoit assez riche pour mener
à la guerre, sous son enseigne, un certain nombre
de vassaux. (Voy. le Dicl. de Nicot, au mot Baron;
les Dict. de Monet, Oudin, .Cotgrave, Ménage,
Corneille et Laur. Gloss. du Droit Fr. au mot
Banneret.) On faisoit un chevalier banneret &n cou-
pant les deux pointes qui pendoient à l'enseigne
des simples chevaliers, qui par ce moyen devenoit
carrée. (Voy. Petit J. de Saintré, Avertiss. p. H,
et l'ancien cérémonial cité par P. Daniel, Mil. Fr.
Liv. III, ch. V.) « Ils avoient à la guerre une paye
« double de celle des chevaliers. >> (Du Tillet, Rec.
des R. de Fr. p. 319.) La Salade fixe au nombre de
dix chevaliers, ou écuyers, bacheliers, les vassaux
nécessaires à celui qui vouloit lever bannière.
(Voy. La Salade, fol. 54.)
Cet ordre étoit inférieur aux ducs, comtes,
barons et prélats. « Les ducs, les comtes,
<■ les barons et les prélats tiui feront contre ceste
« ordonnance payeront cent livres tournois, pour
« peine, et sont tenus faire garder ceste establis-
.< sèment à leurs subjets, en quelque estât qu'ils
<c soient, et en telle manière que si aucun bannier
« fait encontre, il payera cinquante livres tournois,
« et les chevaliers ou les vassaux vingt-cinq
« livres. » (Ord. de Ph..le Bel, de 1294.) Cette or-
donnance n'est pas dans le recueil. On trouve
chevalier banneret dans Froissart, Liv. I, p. 278; et
dans l'Inventaire de Joyaux et meubles de Ch. V,
à la suile de son Hist. par Choisy, p. 540, on lit
chevalier bnnnicourt.
2" L'écuijcr banneret étoit celuy qui, ayant par
son fief le droit de bannière et un nombre de vas-
saux suffisans pour la lever, n'avoit cependant pas
encore été reyu chevalier. Il en est fait mention
dans les revues rapportées par Du Chatelet, Hist.
de B. Du Guesclin, p. 431. Suivant la Roque, les
écuyers bannerets précédoient les chevaliers, et
cela sur l'autorité de leur bannière et le comman-
dement qui leur étoit attribué par le roi. (Voyez la
Roque, Traité de la Noblesse, p. 397. — Voyez les
Dict. de Borel et de Corneille.)
3° Le double banneret étoit celui qui avoit double
bannière. Eust. Deschamps le qualifie ainsi , parce
que deux rivaux partageoient avec lui les faveurs
de sa maîtresse:
J'ai grant joye, quant je lui asséné
A si doulx cuer, et qui tant s'umilie
Que banneret serait double clamé
Deux compagnons ayant ma compagnie.
Eust. Desch. Poès. MSS. fol. 209.
VARIANTES :
BANNERET. Laur. Gloss. du Dr. Fr.
liANNEREL. Froissart, Liv. I, p. 178.
Bannie». Ord. de Ph. le Bel, de 1294.
Bannicourt. Inv. deCh. V, à la suite de son Hist.
(1) C'est Tombe-Issoire, village de 200 habitants, réuni à Paris (14" arrondissement), (n. e.)
BA
— 390 —
BA
Danneret, suJist. iniisc. Porle-enseigne. (Voyez
Borel, Dict.) C'éloil celui qui cloil chargé de porter
l'enseigne du seigneur i);uiuereL: « (Juillaunie de
« Montlieu avoue tenir du mcme à foy et liommage
» lige, à devoir d'être son bannier et porter sa
« bannière, etc. » (Ueaumanoir, sur les Coutumes
de Beauvoisis, p. 407.)
VARIANTES :
BANNERET. Borel, Dlct.
B.vNNiER. Beauman. notes sur les Coût, de Beauv. p. 407.
Banni, partie. Outre les acceptions qu'il tire du
verbe bannir, il en avoit une remarquable dans
cette expression : Baiini de lignage , c'étoit celui
qui déclaroit n'être pas coupable d'un meurtre ou
autre offense, et ne vouloir prendre aucune part à
la guerre ou querelle que le coupable et toute la
parenté auroient à soutenir contre les parens du
mort qui voudroient en poursuivre la vengeance
par la voie des armes. (Voy. Deauman. p. 302.)
Bannier, adjectif. Qui a droit de banalité. —
Sujet à la banalité. — Commun.
Sur le premier sens, voyez Laurière, Glossaire du
Droit francois, au mot liandier. On disoit en ce
sens: « Nul ne peut avoir torel bannier [l], s'i\ n'est
« hault justicier. " (Grand Coutumier de France,
p. 181.) Il se dit des fours, des pressoirs, etc. (Voyez
Recherches de Pasquier, p. 704.)
Bannier a signifié sujet à banalité: « Le suject
« du seigneur qui a droict de baniere ne peut, ne
« doit aller cuire , ne mouldre ;^ autre four, ne
« moulin que de son propre seigneur, dont il est
« bannier. >^ (Bouteiller, Somme rurale, p. 904.)
Moulin bannable dans Pérard est cité aux ortho-
graphes.
Dans le sens de commun , le pocte J. de Meung a
dit:
Mort est à tous commune, mort est à tous bannière.
Mais nul n'en peut sçavoir ne l'heure, ne la manière.
J. de lleung, Cod. 21 et 22.
Ces vers ont été expliqués dans le sens de
commun, banal, par Borel et par l'auteur du Glos-
saire sur le Roman de la Rose. Nous disons encore
banal en ce sens pour désigner une chose dont
l'usage est public.
On lit dans les Loix normandes, art. xviii, en
parlant du denier de S' Pierre : « Le seigneur pur
« IV deniers que il dourad, si erunt quites ses
« bordiers, e ses boner et ses serjanz. « L'un des
traducteurs latins explicpie boner par le même mot
boner, et l'autre par bonnarii. 11 est expliqué par
scabini dans l'édition de Wilkins. Je crois que sa
véritable signification est bannier (2), sujet à la
banalité.
VARIANTES :
BANNIER. Borel, Dict.
Banier. Cotgrave, Dict.
Bennier. Beaumanoir, p. 140.
Bandier. Laurière, Glossaire du Droit francois.
Bannable. Perard, Hist. de Bourg, p. 483 ; tit. de 1255.
lioNNiER. (.Lisez Bannier.) Nouv. Coût. gén. p. 276.
Banquier. Glossaire du Droit francois.
liANNET. Nouv. Coût. gén. T. I, p. 3dl, col. 2.
Banxeret. La Thaumassière, Coût, de Berry, p. 129.
Biennable. Glossaire sur les Coutumes de Beauvoisis.
BONNAL. (Lisez Bannal.) Nouv. Coût. gén. p. 276, col. 1.
Boner. Loi.\ normandes, art. xviii.
Bannier, sub&t. ma&c. Qui proclame le ban.
Trompelle public. Dans le Dict. de Borel, celui qui
crie imbliquement quelque chose. C'est en ce sens
qu'on a dit :
Lors fait faire commandement
Par le bannier, qui eu l'ost crie, etc.
G. Guiarl, MS. fol. 337, V.
On trouve sergent bannier, pour celui qui fait
les proclamations ou cris publics appelés bans ,
dans les Assises de Jérusalem, p. 28, etc. Son office
éloil de faire payer les amendes, de saisir et de
faire vendre les effets de ceux qui refusoient de
payer. (Ord. des Rois de France, T. JII, p. 268.)
VARIANTES :
BANNIER. Borel, Dict.
Banier. Parton. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 159.
Bannière, subst. fcm. Marque de dignité. —
Banderole. — Enseigne, étendard. — Partie du
harnois du cheval.
On distinguoit le pennon de la bannière que les
seigneurs bannerets avoient coutume de porter. La
bannière étoit de forme carrée ; le pennon , au
contraire, se terminoit en pointe. Lorsqu'on rece-
voit un chevalier banneret, on coupoit cette queue,
et son pennon représentoit alors cette bannière
dont il s'agit. Plusieurs auteurs prétendent qu'elle
étoit propre aux seigneurs bannerets. Cependant
nous lisons dans La Salade, fol. 54, « qu'elle appar-
« tenoit aussi îi tous royaulx et tous leurs lieute-
« nans, connestables , admiraulx , maistre des
" arbalestriers, et tous les maréchaulx, sans estre
« barons ne banneretz , de tant qu'ils sont officiers
« pour dignitez de leurs offices, et non aultre-
« ment. »'Par ce mot de baron, il faut entendre
tout seigneur de fief érigé en comté, vicomte ou
baronnie.
Les armoiries en bannière, c'est-à-dire en carré,
éloient beaucoup plus honorables que celles qui
étoieat en écusson, dont le bas tlnissoit en pointe.
(Voyez Laurière, Glossaire du Droit francois.) Ainsi
l'on trouve ifue « le comte, vicomte ou baron peut
c< porter baniere, c'est-à-dire qu'il peut en guerre
« ou armoirie porter ses armes en quarrë, ce que
« ne peut faire le seigneur chastelain, lequel seule-
« meut les peut porter en forme d'écusson. »
(Coût. gén. p. 570. — Voyez la Roque, Traité de la
Noblesse, p. 25.)
Ce mot, sans changer d'acception , a été souvent
employé pour signifier une autre espèce d'étendard
plus petit, une banderole. C'est en ce sens que l'on
(1) Taureau banal. - (2) Bon«r correspond ici, selon Du Cange, au latin bonnarii, qu'on trouve dans une Constitution de
Charles le Gros: ce sont les possesseurs d'ua bonnier (1 liectare 28 ares), comme les bordiers sont les possesseurs d une
borde. (N. E.)
BA
— 391 -
BA
a dil, en parlantdeSainIré, lorsqu'il enlroit clans
les lices, il lenoit « en sa main droicle sa haniiiere,
« là où esloit Nostre-Dame et son enfant, de
« laquelle, de pas en pas, il se seinnoit. » (Petit
Jean de Saintré, p. 240.) Olivier de la Marche, par-
lant du même acte de dévotion, se sert du mot
ianerole. (Olivier de la Marche, Liv. I, p. 182.)
On disoit aussi: « La bannière de heanlme »
pour la banderole qui se mettoit au haut du casque •
« Us promettent, estant arrivés en Turquie, de
« prier qu'on leur donne congé d'eslre les avant-
« coureurs, et qu'en ce cas ils porteront l'enseigne
. de Nostre-Dame en baneroles, alias bannières,
« sur leurs salades ou sur les habillements de teste
« qu'ils auront. » (Mathieu de Coucy, an 1453
Hist. de Charles Vit, p. G75.)Dans une enumératioiî
des armures de tête, on lit : .. Bacinets, salades ou
« bannières ou heaulmes. -. (Petit Jean de Saintré,
p. 253.) C'étoit apparemment cette bannière dont
on faisoil le signe de la croix dans les lices.
De lîi, ce mot s'est pris pour drapeau, étendard,
enseigne militaire, dans ce passage :
Destriers entre Flamens s'embatent,
Des quiex Tiin verse, l'autre blesse,
Au travers d'eux rompent la presse
En tel manière qu'en alant
Va leur frontière dévalant
A plus de Lxxx banieres,
Jusqu'es tentes le roi premières.
G. Guiart, MS. fol. 3G0, V.
On appeloit, en ce sens, bannière de France, le
drapeau de nos anciens rois, lorsqu'ils alloient à la
guerre. C'etoit le plus grand étendard de tous et
le plus orné. Il étoit semé de fleurs de lis sans
nombre. On le plaçoit toujours au centre de l'ar-
mée, et l'oiin'étoit censé vaincu, que lorsque les
ennemis l'avoient enlevé. Cet étendard, qui fut
depuis appelé co?wWc blanche\\), étoit différent de
la bannière de S- Denis. On ne portoit l'orillamme
que dans les cas extraordinaires. (Dict. de Borel
et de Nicot.)
Enfin , le mot bannière semble mis pour une
partie du harnois du cheval, dans un compte de
1 argentier du roi, en 1351, cité par Du Gange, au
mo Tumca.Ow y lit : « Pour six pièces de camocas
« mans :\ faire deux harnois de cheval- c'est
■■ assavier colliere, crupiere, bannière, panonceaux
« ettumcle. » (Voyez le Closs. latin deDu Cange
au mot Tunica.) Froissart se sert de l'expression
bannières de chevaux pour désigner ceux nui
avoient été tués. Il ajoute qu'on les releva pour
dire qu on en fournit de nouveaux ; ce qui fait
présumer que l'on mettoit des banderoles sur la
tête des chevaux. (Voyez Froissart, Liv. I, n 23 )
Expressions à remarquer :
1° Prince à bannière, seigneur banneret :
Va li rois la ville assegier,
0 lui mainz princes à bannières.
G. Guiart, MS. fol. 149, R».
2' Chefs de bannière. (Voyez le Glossaire latin de
Du Gange, au mot Bandornenses.) G'étoient les capi-
taines de quartiers dans une ville.
3° Majeur de bannière semble signifier la même
chose que chef de bannière. Dans la liste des gens
du tiers-etat de la ville d'Abbeville, on lit : « David
« dii Groq, majeur de bannière. (Nouv. Coutumier
gênerai, p. 108.)
4° Fief de bannière désigne un fief de dignité •
on en donnoit l'investiture par une bannière. (Vov'
le ^loss. lat. de Du Cange, au moi FeudumvexilltS
f lanniere allumée. Robert d'Artois, après la
bataille de S' Orner, en 1340, rentra dans son
camp « L!i bannière esloiiimoulealinnée; mais
DenisMfoTloi^Vy '"'''''• " ^'^"'^"- '' ''
G" Les danies de grande bannière étoient les
femmes des chevaliers bannerets : « Item les dames
« de bannières grandes ont, en leur gésine, le grand
« lict et une couchette à un coing de la chambre. »
(Honn. de la Cour, ms. p. 54.)
7° Cent ans bannière, cent ans civière. C'étoit
une façon de parler proverbiale, pour exprimer
1 instabilité des choses humaines et les révolutions
quelles éprouvent. C'est en ce sens que le peuple
dit des maisons nobles, qu'elles sont « cent ans
-^^bannieres cent ans civières. . (Rech. de Pasq.
8° Entrer en bannière, la lever, la porter, la
relever el la développer. Toutes ces expressions
dillerenles ont aussi diverses significations. On
disoit :
Entrer en bannière, pour être reçu chevalier
banneret.
Lever la bannière, c'étoit acquérir un fief à
bannière.
l'or ter bannière, c'étoit marcher en guerre
Relever bannière, c'étoit succéder à une maison
éteinte de bannerets, et obtenir du prince la per-
mission de relever la bannière.
Développer bannière, c'étoit être fait chevalier
banneret par le prince, ou général d'armée, parce
qu ayant celte cérémonie, la bannière estoit enve-
loppée. (Menest. de la Chev. p. 156 et 159.)
9" Emporter la bannière étoit une expression
figurée, en parlant de Dieu :
Dieu qui tout flst, emporte la bannière.
Percef. Vol. I, fol. 64, V col. ).
10° Faire porter bannière se disoit figurément
pour donner l'avantage, assurer la supériorité :
Fi de li nulul ne tient à anui,
S'il n'est et faus, et trichieres ;
Celui fait porter banicre ;
Le loial mal endurer ;
Jou ne mi voel plus fier.
Poès. MSS. du Vatican, n" 1490, fol. 84, R- col. 1.
11° Porter l'escu et la banicre d'avarisce signifioit
être avare :
Li clergiez, où honor deust estre pleniere.
Portent d'avarisce l'escu et la baniere.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 337, R'col. S.
18^4, ki°-&J).'(x. E.r '^""°" '' controversée, les Recherches mr les Drapeaux français, de M. Desjardins (Paris, Morel,
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— 392 —
BA
12° Faire bannière, c'esl-ii-dire faire Iropliée, se
vanter :
Ce bel honneur dont vous faites bannière.
Les Marg. delà Marg. fol. 316, V.
Pasquier, faisant le parallèle des Romains et des
Gaulois, dit: » En tant (|ue louelie le Camille tant
« recliaiilé par les Romains, et dont à cliaque propos
« ils l'onl bannière contre nous, pour quehiue
« victoire qu'il rapporta de nous pendant le siège
« du Capitole, je croy qu'il leur eustestédu tout
« plus séant de s'en taire. » (Recli. de Pasquier,
Livre I, page 13.)
VARIANTES :
BANNIERE. Orth. subsist.
Baniebe. Fabl. MSS. du R. nû 7218, fol. 127, R» col. 2.
Banyere. Gace de la Bigne des Déduits, MS. fol. 58, R".
Beniere. Fabl. MS. du R. n» 7615, T. I, fol. 101, Y» col. 1.
Bannir, verbe. Pulilier, ordonner. — Convo-
quer. — Défendre, prohiber.
Au premier sens, bannir a signifié publier, or-
donner. (Voyez le Dict. de Borel.)
Par toute Normandie, fist crier, et banir
Qu'il y ait tant hardi qui ost autre assaillir
Meson ne viUe ardoir, ne rober, ne tollir.
Rom. de Rou, MS. p. 50.
A chacun rouva, et bany,
Que, au terme qu'il estably,
Venist chascun o sa navie.
Rom. de Brut, MS. fol. 85.
De là, on a dit bannir pour convoquer par une
proclamation. Ainsi osl banni signifioit les vassaux
convoqués par cri public pour se trouver à la
guerre. (Laur. Gloss. du Dr. Fr.)
Enfin bannir signifioit aussi prohiber, défendre
par un ban ou cri public. (Voyez La Roque, de
l'Arrière-ban, p. 8.)
VARIANTES :
BANNIR. Laur. Gloss. du Dr. Fr.
Banir. Rom. de Rou, MS. p. 50.
Bannis et Caboches, subst. ma&c. plttr. Noms
de faction. Ces noms furent donnés aux bouchers
de Paris, partisans du duc de Bourgogne, qui se
retirèrent dans son pavs en 1413. (Yoy". Al. Chart.
Hist. de Charles VI et VII, p. 28.)
Bannois,s!( /s/. )««sc. Ce mot devoit signifier une
cloison formée de claies ou de pieux, pour renfermer
le poisson dans l'eau. Nous trouvons dans une con-
cession de privilège, en faveur des bourgeois de
Maisière-sur-Meusè, Eibl. de Cangé : « Chascun
« bourgeois puelt avoir sa nasselle au rivage du dit
« Mézières, sa huge, bannois, bondiers, et autres
« vaisseaux à mettre poissons. »
Banoier, verbe. Voltiger, flotter. Du mot ban-
nière. (Voyez ce mot.)
Armeures luisanz flamboient,
Baniéres panons banuient
Quant encontre le vent se plient.
G. Guiart. ils. fol. 301,R'.
Banque, snbst. niase. Banquier. « Le Roy
« entend que le dit tributvienneès-mainsde nostre
« dit S. Père, comme il a accoustumé et baillera le
« dit sieur banques pièges, et respondans à Rome
«■ de bailler les dits deniers qui viendront du dit
« tribut de quarante mille ducats, à nostre dit
« S' Père, ainsi que l'on accoustumé. « (Lettr. de
Rab. p. 75.)
Banque (lettres de), subst. fém. Lettres de
change. (Voy. Mém. du Bell. Liv. IV, fol. 101.)
Banque, subst. fém. Théâtre. C'est la significa-
tion de ce mot dans cette expression : monter en
fertHr/(/t', qui signifie faire le baladin; de là le mot
saltimbanque. « .Je ne croyois pas qu'un jésuite
« voulust dépouiller sa gravité, et monter en ban-
« que (1) pour nous faire monstre de ses folies. »
(Préf. de la Défense, par Est. Pasq. p. 6.)
Banquerie, subst. fém. Métier de banquier.
« Ce bon docteur estoit nommé Pseudomanthanon,
« très sçavant maistre es ars de sa profession, qui
« estoit magie cabale, Thalmud, hypocrisie.... tian-
« querie, usure, intéresserie, etc. » (Alector, Rom.
fol. 35.)
Banquei'otier, subst. masc. Banqueroutier.
(Dict. de Cotgrave.)
Banquet, subst. masc. Repas. Banquet entre
les repas et après souper. « Le lundy quinzième le
« roy Charles VII disna à l'hostel de la ville, et alla
« souper en l'hostel d'un cardinal joignant la grand
« Eglise, oi^i les dits seigneurs de Siene envoyèrent
>' leurs trompettes, clairons et autres instrumens
« pour rejouyr le Roy. Après souper le Roy alla à
» un banquet (2) à l'hostel de ville. » (André de la
Vigne, Hist. de Charles VIII, p. 152, an 141)5.)
Banquetenient, subst. masc. L'action de ban-
queter, de manger à un banquet. (Dict. de Monet,
de Rob. Est. et de Cotgrave.)
Banquetei'ie, subst. fém. L'action de tenir
table. Rob. Estienne l'explique par banquet.
Banqueteui*, subst. masc. Convive. (Dict. de
Rob. Estienne et d'Oudin.) Platon veut « que les
« banqueteurs soient couronnés. » (Bouchet, Ser.
Liv. I, p. 32.)
Bant, subst. mase. Limite, borne. Vieux mot
flamand.
Banz, subst. masc. Banc, siège. — Officiers de
justice. — .luridiction. — Question. — Torture. —
Etau. — Table. — Banque.— Instrument de pécheur.
Ce mot signifie ordinairement un siège dans
son acception propre, à la réserve de ban qui
signifie communément proclamation, comme je l'ai
dit à son article. Il semble cependant avoir désigné
(i) On trouve dans la Satyre Ménippée : « Le charlatan estoit monté sur un petit eschaffaut jouant des regales (epinette),
et tenant banque comme on en voit assez à Venise en la place S'-Marc. » Le « banquiste », comme on dit encore dans la
peuple, est comparé à un changeur : les planches sont un6a?ic sur lequel il débite des plaisanteries pour marchandises, (n. e.^
— (2) Le mot se trouve au xiv siècle, dans Froissart. Au xvn« siècle, les puristes ne rappliquaient qu'au banquet sacre
de l'Eucharistie. (N. E.)
BA
- 393 —
BA
aussi quelquefois de grosses pièces de bois ou de
pierre que l'on roulait sur les tissiégeans, lorsqu'ils
donnoient l'assaut. On a employé cette même
orthographe pour désigner des espèces de bancs
qui servoient d'étais. » ils firent soutenir sur bonnes
<■ étales et sur grans bans pesans, eic. » (Ilist. de
Du Guescl. p. 98.) Il est probable que ces pièces de
bois, ces étais étoient ainsi nommés parce qu'ils
étoient taillés comme des bancs.
Le P. Labbe assure qu'on a dit banquet pour
petit banc. Nous disons encore dans ce sens ban-
quette. Ainsi le mot dont il s'agit ici, selon toutes
les orthographes que j'ai citées, a servi pour dési-
gner un siège, ce ([ue nous nommons encore un
banc. On lit dans Alhis, ms. fol. 114, V° col. 2:
En un lit sistrent leza lez ad hanc.
Ce même mot, pris au figuré, avoit plusieurs
acceptions différentes que je vais marquer.
Comme les officiers de justice siégeoient sur des
bancs, on a employé le mot de banc pour désigner
les officiers mêmes. « Un banc entier de la loi,
« c'est-à-dire composé de sept échevins au moins. »
(Coût. gén. T. I, p. 992.) « Les officiers, hommes de
« fief, échevins, représentant les trois banqs du
c pays. .. (Ibid. p. 311.)
On opposoit les justices en bank, aux justices
ambulantes, et qui faisoient des tournées. « Ascune
« foitz par devant nos justices errauntz, et ascune
" foitz en bank à "Westminster. » (Brit. Loix d'Ang.
fol. 222.)
Les officiers de ces justices «i banc étoient dis-
tingués entre eux, comme le prouve ce passage, oîi
nous lisons : « Les bailly et les eschevins du haut
« ifl»f ont la police, et le gouvernement d'icelle
« ville. .. (Coût. gén. T. I, p. 047.)
On disoit aussi bancq esclievinage, pour un corps
de ville. (Voy. Nouv. Coût. gén. T. I, p. 37G.)
Par une extension naturelle de celte dernière
acception, ce mot a signifié juridiction, le res-
sort d'une justice, dans le passage qui suit : « Les
« fiefs et autres biens cens aux cens et rentes situez
« dans la ville et sa franchise, resortans sous les
« bancs de S'° Gertrude, les aliénations, transports
0 en charges, et obligations desquels se doivent
« faire par devant les dits bancs. » (Coutumes géné-
rales, T. I, p. 1245.)
Le mol banc, pris dans le sens de question, tor-
ture, semble faire allusion au tréteau sur lequel on
étendoit le criminel. (Voy. Nouv. Coul. gén. T. I,
p. 740), oîi nous trouvons banc de la torture. On lit
(Ibid. p. 1001) : « Lorsqu'on veut aller au banc, ou
« à la torture, elle se fait en la présence du grand
« bailly, sous-bailly, et du collège des eschevins
« au moins de sept. »
On se servoit aussi du mot banc, pour signifier
un étau, une boutique, « pour chascun banc, ou
« estai de quelque denrée que ce soit. » (La Thaum.
Coût, de Berry, p. 129.) Bail est employé en ce
même sens dans les Ord. des R. de Fr. T. V, p. 681.
Danc est mis pour table en ce passage : " Après
« le conseil, disnoient tous ensemble, "et se mettoit
II.
" le duc de Berry et de Bretagne au banc, le comte
» de Charolois et le duc Jean de Calabre au devant,
« et portoit le dit comte, honneur à tous comme à
«■ l'assiette. ■> (iMém. de Comines, p. 59.)
La nape mise au long d'un hanc.
Coijuillart, p. 167.
Ba7ic signifioit quelquefois le lieu où les ban-
quiers paient à bureau ouvert, la caisse, le colïre
où ils enferment leurs effets. « Vingt mille ducats
« contans qu'il avoit à son banc en la ville. » (Mém.
de Comines, p. 578.) « Sous couleur qu'on n'auroit
« le loisir, eu égard à la proximité de l'ennemy de
« faire le payement des gens de pied à la banque
« fut ordonné h chacune enseiane son Ihrésorier. »
(Mém. de Du Bellay, Livre X, fol. 321.)
Enfin ce mol désigne un instrument de pêcheur,
dans les Ordonn. des Rois de France , où nous
lisons : « Puissent pescher par le dit temps, depuis
« my-mars jusqu'à my-mai, en la manière qu'ils
« ont fait du temps de nos prédécesseurs, et du
<• nôtre, c'est à syavoir, à banc, raooles loyaux , et
« hamessons. » (Ord. des R. de Fr. T. V, p. 208.)
Nous placerons ici quelques expressionsqui nous
ont paru mériter d'être remarquées :
1° Bancs plaijdoyables, c'es,l-h-A'ne\e lieu où Ton
plaidoit les causes. « Les bancs playdoyables de la
« seigneurie. >• (Coul. gén. T. II, p. 918.)
2° Banc dossier et doulcier. Banc à dos. (Dict. de
Monet.)
3° Sans baiics et sans selles, c'est-à-dire sans
formalité. « Ils font les nopces sans bancs, et sans
« selles à l'advanlure. » (Les Quinze Joyes du Ma-
riage, p. 157.)
4" Ne tenir banc, ne lice, c'est-à-dire n'observer
pas, transgresser.
Or vient le terme brief
De cet aige convoiteux en malice ;
Ses dix commans ne tenons banc, ne lice.
Eust. Desch. Po5s. MSS.
5° Crier bancs et le cbalUct. Façon de parler fai-
sant allusion à la publication des bans de mariage.
« Deshuy au soir fais en crier les bancs et le chal-
a lict. ..'(Rabelais, T. III, p. 146.)
Proverbes :
1» L'on ne prent mie lou, ne goupil souz son banc.
Rom. de Rou, MS.
2° Je n'en irai pas ch( banc au feu.
Dicl. de Col^rave.
TARUNTES :
BANZ. Hist. de Du Guescl. p. 98.
Banc. Percef. Vol. III, p. 86, col. 1.
Banch. Fabl. MSS. du R. n» 7989, fol. 210, V».
Bancq. Coût. gén. T. I, p. 313.
Bank. Britt. Loix d'Angl. fol. 222, V».
Banke. Id. ibid. fol. 37, V».
B.VNQUE. Coût. gén. T. II, p. 601.
Banquet. Labbe, Gloss.
Baonnois, subst. masc. Bayonnois.
Baptisement, sul)S. masc. Baptême. — L'action
de baptiser.
Au premier sens, nous trouvons ces vers :
Jurez le saint sacrement
Vostre foy, vo baplisewcnt
Eusl. Desch. Poês. MSS. fol. 374, col. 3.
50
BA
— 39i
BA
Au second sens, ce mot signifie raction de conférer
le baptême, dans ces vers :
Isayes prophétisa,
Dame, le doux avènement
De celui qui vous baptisa ;
Et après le bapUscmciit, etc.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 18G, V col. 2.
VARUNTES :
BAPTISEMENT. Chron. S. Den. T. III, fol. 10.
Batissement. Etat des offîc. des D. de Bourg, p. 228.
Bautestire. Rom. de Hou, MS. p. 37.
Baptestire. Du C. Gloss. lat. au mot Baplislerinin.
Batestire Ph. Mousk. MS. p. 198.
Batame. Id. ibid. p. 141.
Bauptesme. Poës. MSS. av. 1300, p. 880, T. II.
Bautesme, Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. II, fol. 180.
Baittesme. Ibid. fol. 186, Y° col. 1.
Baptiser, verbe. Baptiser. — Ordonner, taxer.
— Nommer, qualifier.
Sur le premier sens baptiser, voyez le Dict. de
Borel et le Glossaire du Roman de la Hose, au mot
Baptoyer (I).
Tu es le fils Dieu baployé.
J. de Meung, Tesl. 238.
L'auteur du Roman d'Atliis, exprimant les regrets
d'une mère payenne sur la perte d'un fils, lui fait
dire :
Chevalerie t'engendra.
Et Largece te buplisa.
Alhis, MS. fol. 127, R- col. 2.
Baptiser signifioit aussi ordonner, taxer, selon
Laur. Gloss. du Dr. Fr.
Enfin baptiser se disoil pour nommer, spécifier,
qualifier. « Qu'il y eust alliance ou promesse parti-
« entière entre eulx deux, et telle qu'il l'avoit
« baptisée, il ne la trouveroit point. » (Arrest. amor.
p. 137.)
Expressions à remarquer:
1° Baptiser un héraut ou un poursuivant, c'étoit
leur donner un nouveau nom. Cette cérémonie se
faisoit en leur versant sur la tète une coupe d'or
pleine de vin. (Voy. Fav. Th. d'Honn. p. 59.)
2° Enfant difficile à baptiser. Expression prover-
biale qui paroit avoir servi de titre à quelque conte.
(Voy. Menagiana, T. II, p. 21.)
3° Baptiser le temps, le fixer, le déterminer. -< Le
« Bailly doit donner souffrance une fois seulement
« et non plus.... et encore à celle seule fois doit-il
« baptiser le temps. « (Gr. Goût, de Fr. p. 190.)
4° Haptiser ai)jiellntion,grief et possession,c'étOii
spécifier les preuves, les moyens et les raisons sur
lesquels on les fonde. (Laur. Gloss. du Dr. Fr.)
variantes :
BAPTISER. Mém. du BeU. Liv. IV, fol. 108, V°.
Baptizer. Style de proc. au pari, de Norm. fol. 81.
Baptoyer. liorel, Dict.
Bautiper. Fabl. MSS. du R. n° 7982, fol. 70.
Bautisier. Ibid. fol. 73, R» col. 1.
Baptistle et Baptistles. Surnom de S' Jean.
(Voy. S. Bern. Serm. Fr. mss. p. 41.) Dans le latin
Baptista.
Baptizons (jour des). Expression forgée par
Molinet.
Les cendres, se nous ralizons.
Aurons le jour des haptizoxs.
Molin. Caleiidr. Burletq. p. 195.
Baptu, partie. Battu.
Baquete, subst. fém. Monnoie de Béarn. On la
nomme ainsi à cause des vaches qui y sont repré-
sentées. « Six baquets font un double. » (Dict. de
Borel, au mot Yaquete.)
variantes :
BAQUETE. Rab. T. III, p. 226.
Vaquete. Borel, Dict.
Bar, subst. masc. Barbeau. « D'où vient qu'on
« parle ès-armoiries des bai's adossés. » (Dict. de
Borel.)
Sur les côtes de Normandie (2), il y a un poisson de
mer qu'on appelle Jiar et qui tient beaucoup du
mulet, sinon qu'il est un peu moins rond et que
l'écaillé en est plus petite et plus argentée.
Menquent les bars
Les saumons et les truites.
Fabl. MSS. du R. n- 7615, T. II, fol. lil, R° col. 2.
VARIANTES :
BAR. Borel, Dictionnaire.
Babt. Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. I, fol. 104, V» col. 2.
Bar, subst. mase. Le sens de ce mol est difficile
à déterminer dans ce passage :
Mors qui pris ou mors de pome
Primes en famé, pus en home
Qui bar le siegle comme toille,
Va moi saluer la grant Rome..,.
Rome est li mail qui tôt assome.
Fabl. MSS. du R. n" 7015, T. I, fcl. lO-! bis, V° col. î.
La signification de ce mot paroit moins incer-
taine dans ces vers, où l'on pourroit, ce semble,
lui assigner celle de Irébuchet en un sens figuré :
Vous ne povez fouir le cours ,
Nous savons les pas, les passages,
Ci demorrez por les ostages
Au bar vous a le pape pris.
Hisl. de Fr. en vers, à la suile du R. de F. MS. du R. fol. 66.
Bar étoit un nom propre de ville. Les écrevisses
de Bar éloient passées en proverbe dès avant l'an
1300. (Voy. Prov. mss. T. IV, p. 1G53.)
Bar (3), adv. Heureusement, bien. Ce mot
étoit presque toujours uni au participe né, du
verbe naitre.
Cil bar fu nez qui est à ese
Et ne sent riens qui li desplaise.
Parlon. de Blois. MS. de S Gerra. fol. 163, V°.
Tout cil seroit boer
Né, dont eUe proiera.
Poès. MSS avant 1300, T. II, p. 831.
variantes :
BAR. Parton. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 156.
Boeu. Poës. MSS. avant 1300, T. II, p. 831.
BuER. Rom. de Rou, MS. p. 55.
(1) Le mot se trouve dans la Chanson de Roland (str. 268). Comme disait Calvin (Instit., p. 1062, Genève, 1561) : « Le mot
mesme de baptiser signifie plonger. » Il vient en effet du grec ^anxCÇuv, à cause de l'immersion complète en usage dans
la primitive Eglise, (n. e.) — (2) Il porte aussi ce nom sur les côtes de Bretagne, de Vendée, d'Aunis, de Saintonge. (N. e.)
— (.3) On dit encore barlomj. (n. e.)
BA
- 395 —
BA
Bara (1), subst. masc. Pain, pays. On trouve dans
Borel, pour explication de ce mot, » pain comme
« aussi champ et région. >■ (Dict. de Borel.)
Baragouin, subst. inasc. On entend ce que
signifie ce mot. On trouve son étymologie dans les
Lettres de Freron, sur les Ecrits du Temps. (T. XII,
Lettre n, p. 2G-2.)
Barat (2), subst. masc. Litige , controverse. —
Trouble, peine, embarras. — Intrigue d'amour. —
Ruse, tromperie, trahison. — Combat, déroute. —
Profusion.
Barat est explique^ par litige, controverse, dans le
Grand Coutumier de France, p. 343. Britton , Loix
d'Angleterre, fol. '■2'2i, s'est servi du mol bave t dans
le même sens.
On employoit ce mot pour trouble, peine, em-
barras :
L'empereur folie fist.
Et en grant banile se mist,
Qui de'ffiance te manda.
Rom. de Brut. SIS. fol. 83.
A cel temps commencha la guerre,
Dont grant harate out en la terre
Du duc Robert, de Henry,
Pour Costentln qu'il li toUi.
Rom. de Rou, MS. p. 401.
Le mot baret a signifié mouvement, agitation. Il
est dit d'une grande ville où l'on entend des mou-
lins qui tournent et oîi l'on voit aller et venir des
ouvriers de toute espèce, charpentiers et maçons.
Car ne puet estre en la cité
Casses n'I ait barat mené
Athis, MS. fol. CO, V'col. 1.
De l'embarras nait l'intrigue. De là, barat s'est
employé pour signifier une intrigue d'amour :
A Cambrai avint l'autrier,
Que Soliers li cuveliers,
Par son angin, et son art
Se raella de grant barat,
A Cam d'ipre s'en ala.
As Béguines s'accointa, etc.
Ctiron. fr. du xiu" siècle, MS. de Bouhier, ch. LXvi, fol. 84. V°.
On trouve barat, bar ad, bavas, pour ruse, trom-
perie, trahison, dans les Dict. de Borel, Nicol, Rob.
Estienne et Ménage, etc. Les François , dans une
action contre les Espagnols qui étoient armés pesam-
ment, les commencèrent à prendre par les épaules
'< et les trébucher à terre entre les piez des che-
« vaux; quant ils apperçurenl ce barat que les
» François leur faisoient, etc. » (Ghroa. deS'Denys,
Tome II, folio 87.)
Trop de barat a en femme.
Rom. de la Rose, vers 18987.
Ce mot a été employé pour combat, déroute :
Lors voissiez entre serjans,
Granz coupz d'Engleiz et de Normanz,
Granz barates et granz mellàes.
Roman de Rou, MS. p. 335.
Les François s'obstinent à vouloir faire abattre
au duc Richard de Normandie son château de
Tillières.
Mez ja ne remaindra par perte,
Tant est l'ire entr'euls descouverte,
Qui qu'en seuffre puis la barate,
Que il Tuillieres n'abate.
Roman de Rou, MS. p. 183.
De là cette expression : mettre à la barate, pour
mettre en déroule :
Ni ot François, n'el sien abate :
Tous les ont mis à la barate.
Ph. Mouskes, MS. p. 585.
Enfin barate a signifié profusion. En décrivant
la magnificence du sacre de S' Louis, le poëte dit :
Et si avoit assés encor
De rices dras batus à or ;
Et de dras tains, et d'escarlates,
De tranciés à grans barates.
Ph. Mouskes, MS. p. 653.
Quand je voi à ces festes,
Et de dras, et de bestes,
Faire si granz baraz
Tant sui-je plus iriez.
Prov. du Vilains. MS. de S. Germ. fol. 74.
VARIANTES :
BARAT. Grandes Coutumes de France, p. 343.
Barad.
Barag. Fabl. MSS. du H. n» 7615, T. I, fol. 66, R» col. 1.
Baras (phir.)
B.\RAZ (.pli'r.) Prov. du Vil. MS. de S' Germ. fol. 74.
Baret. Britton, Loix d'Angleterre, fol. 224.
Bar.\te, subst. fém.
Barateaulx, subst. masc. Trompeur. (Dict. de
Borel. — Yoy. le Gloss. sur les Cout.de Beauvoisis,
au mot Bareteur, qu'il explique par chicaneur.)
Je cuis que c'est un baresterre.
Fabl. MSS. de S' Germ. p. 121.
« En droit parler, l'en ne doit nul desloial appe-
" 1er sage, mes bareteeur. » (Beaumanoir, p. 11.)
Il n'a soz le ciel tel tiaretel.
Corloisd'Arl. MS. de S. Germ. fol. 83, V» col. 1.
J. de Meung, parlant de la cupidité des moines
mendians, dit :
Mais s'ung grant usuriers ou ung baretieres
Combien qu'il ait esté desloyal ou pechierres
Leur veult estre à la mort larges et grant donnierres :
Il mourra cordelier, se il veut, ou preschierres.
J. de Meunj, Cod. 729-932.
Ce mot fait au féminin b'iratcresse, trompeuse.
(Voy. Rom. de la Rose, vers 22381-22392.)
VARIANTES :
BAR.\TEAULX. Borel, Dictionnaire.
Barateuu. Nicot et Cotgrave.
Barateus. Glossaire de Labbe, p. 532.
Barateqx. Cotgrave, Dict.
Bareteur. Beaumanoir, p. 11.
Baretel. Cort. d'Artois, MS. de S' Germ, fol. 83.
B.\RETERE. Poës. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1335.
Bareterre. Eust. Desch. Poës. MSS.
B.\RETiERE. Glossaire du Roman de la Ro.se.
Barrelerres (Rsez Barelerres.) Labbe. Gloss. p. 498.
B.vresterre. Fabl. JISS. de S' Germ. p. 12L
Barretors. Tenures de Littleton.
Baratëresse, fém. Gloss. du Roman de la Rose.
(1) C'est le mot breton pain, uni dans l'article suivant au mot goitin, vin. C'était une plaisanterie française que de répéter
aux gars de la province : « Baragouinez, cars de Basse-Bretagne, Baragouinez, gars, tant qu'il vous plaira. » (n. e.) —
(2) On a voulu voir l'origine de ce mot, qui sa retrouve dans toutes les langues rom.ines, dan-s l'arabe barthala, corruption
d'un juge, le nordique baratta, combat, le grec Ttçàttuv, faire des affaires, d'où le verba haràtati ; il faudrait encore tenir
compte du kymri brad. (n. e.)
BA
— 396 —
BA
Barater, verbe. Tromper. — Détruire. — Tro-
quer, éclKinger. — Négocier, traiter. — Agir, se
remuer. — Emprunter, "prendre à crédit. — Pren-
dre par la tète.
On trouve ce mot au premier sens, dans lesDict.
de Nicot, Monel et d"Oudin.
Feme s'ele Tait mal, sait bien que faire doit,
Quar se feme fait mal, et elle l'aparçoit,
Elle guilo et barate, et engingne, et déçoit.
Chaslie Musart, MS. de S. Gerin. fol. 105.
« Tieing et garde secreltes touttes les clioses
« contenues ès-dites lettres, jusques au jour de la
•< ditte publication, pour ce que, par ces choses,
X celuy qui avant les savoit ne puist baréter ne
" décevoir celuy qui rien n'en savoit. « (Ord. des
Rois de France.)
On trouve haretter pour frauder, tromper, dans
le Coût. gén. (T. I, p. 810.)
On disoit aussi barater et baréter, pour détruire,
ravager. En parlant des prêtres qui font le con-
traire de ce qu'ils prêchent, on s'exprime ainsi :
Lor doctrine tue, et confont
Ce qu'assez dlent, et poi font,
Diex ensaigna, mais avant fist :
Celé barate, et desconfist
Que par lor œuvres contredient,
Et sont contraire à ce qu'il dient.
HisU de S" LéocaJe, MS. deS. Germ. fol. 31.
Et cist avoient si graté
Et canchié, et barète
Trestout le pa'is environ,
Qu'il estoient clamé laron.
Ph. Slouskes, MS. p. 700.
Baréter signifioit aussi troquer, échanger. On
voit baratare pour permiitare , dans le Glossaire
latin de Du Gange.
Car peciés est de baréter
Son droit oir, ne desireter.
Ph. Mouikes, MS. p. 670.
Ce mol, SOUS cette même orthographe, est pour
traiter, négocier, dans le passage suivant :
Li mariages présentés
Par offisses, ne barètes,
A soi li maie flame larde.
Poës. MSS. QTanl 1300, T. IV, p. 1321.
Baréter a été employé pour se remuer, agir ou
faire du bruit. On a dit , en parlant d'une armée
qui assiégeoit Rouen et qui décampa la nuit :
Ceuls de Roem oirent ceuls de l'ost baréter,
Mettre seles, et frainz, et armes demander.
Rom. de Ruu, MS. fol. m.
Dormir se velt, et reposer
Car moult ert las de baréter.
Alhis. MS. fol. 41, V col. 1.
Baréter semble mis pour emprunter ou prendre
à crédit, dans ces vers :
Qui trop velt baréter,
Ne se puet desdeter.
Prov. du Vilain. MS. de S. Germ. fol. 57, R°.
Enfin, dans le passage suivant, baréter semble
signifier prendre par la tête, par le bonnet ; alors
ce mot viendroit de baret (1), bonnet d'enfant, peut-
être aussi s'est-il dit pour attraper. Guillaume, duc
d'Aquitaine, ayant épousé un diable sous la figure
d'une jeune fille, eut recours à un prêtre, qui
trouva le secret de le saisir.
S'a la benoite aiguë aprestée
Qu'uns clers li avoit aportée
Pour mieus saisir et baréter.
Ph. Mouskes, MS. p. 496.
Remarquons cette expression : Se baréter crun et
(Tel (2), pour se donner beaucoup de mouvement.
Tant .Sfc' baréta d'un et d'el
Que toz jors sauva son chatel,
Et ot assez de remanant.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 150, R- col. i.
VARIAMES :
D.YRATER. Nicot, Rorel, Oudin et Monet, Dict.
Bak.\tter. Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. II, fol. 141.
Haretter. Coût. gén. T. I, p. 810.
Careter. Pli. Mouskes, MS. p. 670, 700, etc.
Barateressement , adv. Frauduleusement.
(Glossaire sur la Coutume de Beauvoisis.)
Baraterie (3), subst. fém. Tromperie, trahison,
fourberie.
Ly renars, qui tant est subtils,
Estudient et est ententes
A tout barat et tricherie,
Pensa très grand baraterie.
Eust. Desch. Poês. MSS. fol. 4Ï4, col. 2.
On ne parle fors de baraterie
De demander, et deçà et delà,
Du bien d'autruy.
Ibid. fol. 261, col. 2.
Et soit donc fait sans barterie.
Hisl. des Trois Maries, MS. p. 14.
On a dit, en parlant des joueurs qui étourdissent
de leurs cris ceux avec lesquels ils jouent, pour les
distraire de leur jeu et les duper plus facilement
par ce moyen :
Ribauz qui portent les berlenz
Ne resont pas de jouer lenz :
Moult demainent grant braiterie
A chascune baraterie, etc.
G. Guiart, MS. fol. 332. R'.
variantes':
BARATERIE. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 484, col. 2.
Bareterie. Ibid. fol. 261, col. 2.
Barterie. Ilist. des Trois Maries, en vers, MSS. p. 14.
Baratre, siibst. masc. Lieu inaccessible. (Dict.
de Borel et de Cotgrave.)
variantes :
1ÎAR.\TRE. lîorel, Dict.
Barathre. Cotgrave.
Baratresse, subst. fém. Trompeuse. ^Dorel ,
Dict.) C'est le féminin de barateur.
Baratron, subst. masc. Tdole des Sarrasins.
Sadoine fait porter Mahon
Et Apolin, et baratron.
Blanch. MS. de S' Germ. fol. 185.
Barbacane, subst. fém. Sorte d'ouvrage de
défense. — Ornement de broderie. — Caverne, sou-
terrain.
(1) Baret est pour barrette, qui lui-même vient de birrkus, roux. (N. e.) - (2) El vient là de aliud. (n. e.) - (3) Le mot
se trouve aussi dans Froissart : a Li autre disoient que ce estoit une bareterie couverte. » ^Froissart, édition Kervyn,
V, 233.) (N. E.)
BA
— 397 —
BA
On appelloit d'ordinaire barbacane (1) un retran-
chementfait avec des nis et des planches enformede
parapet crénelé, pour se mettre à couvert des traits
des ennemis. (Dict. de Moiict, au mot Barbacane.)
C'étoit aussi une espèce de redoute couverte de
madriers, pour meltre les Iroiipes à l'abri, selon ce
passage de Joinville : " Pour retraire ses gens aisé-
« ment, le roy fist faire une barbacane devant le
« poncel, dont je vous ay devant parlé, et estoit
« faite en manière que on pouvoit assez entrer
« dedans par deux cousiez tout ù cheval. « (.foinv.
p. 58.) Yoy. aussi le P. Dan. Mil. fr. T. I, p. 604, où
il explique ce mot par avant-mur. Il croit que c'est
le même que baille. Borel, au mot Barbacane, cite
Vigenere, qui le rend par créneau.
On lit, au sujel d'une descente faite sur une côte
maritime, au lieu nommé Candelour :
A la terre sont descendu,
N'a riens qui soit n'ont entendu,
Fors a Candelour assaillir :
Car il n'y cuident pas faillir.
La harbucamic ont de prinsault
Guingnée, et du premier assault
Et puis le chaste! assaillirent.
Machaul, MS. fol. 124, R° col, 2.
Il y avoit aussi des barbacancs sur les vaisseaux.
« Es-greigneurs vaisseaulx de guerre fait on la fois
« tours, créneaux, et barbacanes, ainsi que on fait
« de hauts murs et puissans. " (Le Jouvenc. p. 8'J.)
On nommoit aussi barbacanes, des ornemens qui
se nietloient en broderie sur les habits , sur les
enseignes et les housses des chevaux , et qu'on
appeloit ainsi parce qu'ils représentoient cette
espèce de fortification qu'on appelloit barbacane.
« Habillé d'un riche palleto de drap d'or, houssié
u de brodeure et d'orfaverie, et sa devise de bar-
« Jjacancs. » (Du Till. Rec. des R. de Fr. p. 408.)
" Saillit le chevalier à l'arbre d'or, son cheval
« couvert de velours tanné, à grandes barbacannes
« de fil d'or en brodure, et lettres de même, à sa
u devise, et d'icelles barbacannes issoyent flammes
« de feu. » (Mém. d'Ol. de la March. Liv. l, p. 548.)
Au pas d'armes de l'Arbre d'Or, en 1408 (Ibid. p.
350), on lit : « Anlhoine bastard de Bourgogne por-
« toit pour enseigne un grand estendar blanc à
" une barbacane de brodure. »
Enfin, on disoit barbacana pour souterrain, ca-
verne :
.... En unglieu, vers lamer Adriane,
Qu'elle congneut en basse barbacane,
Dedans un gouffre obscur et bruyneux.
Jean Marot, p. 55.
Le même auteur l'employé dans un sens obscène,
page 198.
VARI.4NTES :
BARBACANE. Glossaire du Roman de la Rose.
Barbaquane. Monstrelet, Vol. III, fol. 59 et 60, R».
Barbaquenne. Ibid. fol. 59, V°.
B.\RBAQmNE. Fabl. MSS. du R. n^TllB, fol. 359, R» ool. 2.
Babbecane. Du Gange, Gloss. lat. à Sarabara.
Barbog.\ne. Borel, Dictionnaire.
Bîii'bajan (2), stibst. masc. Duc. — Sorte d'oi-
seau. (Dict. d'Oudin et de Cotgrave.)
VARIANTES :
RARBAJAN. Oudin et Cotgrave, Dict.
Barbazane. Merl. Cocaie, T. II, p. 153.
Bai'baresque, arfj. Barbare. Montaigne, dans
ses Essais, T. I, p. 71, s'est servi de ce mot. On y
lit: » commandement &rt/'/^rt?Y'S'y»t'. » Labbe traduit
barbarin par le mot latin barbarus. On le trouve
au féminin, barbarine, dans Molinet, p. 130.
VARIANTES :
BARBARESQUE. Mont. Essais, T. I, p. 71.
Barbarin. Labbe, Gloss. p. 49. — Molinet, p. 130.
Barbaresquemeiit, adv. D'une façon bar-
bare. (Dict. de Colgr. et Gelthel. de Léon Trippault.)
Barbarie, subst. fém. Barbarisme, vice de
langage. (Dict. de Monet.)
Barbarie (faucon de), subst. fém. On distingue
le faucon de Barbarie du faucon de Tartarie. « Il
« se prend lorsqu'il passe de Tartarie en Barbarie,
« estant passager, comme le pèlerin, toutes fois de
" plus grande corpulence, roux dessous les aisles,
« et moult empiété de longs doigts. » (Budé, des
Oiseaux, fol. 114, R°.)
Barljarin, subst. masc. Diminutif de barbot. —
Surmulet, poisson.
Ce mot est pris au premier sens, dans les Epith.
de Martin de La Porte.
C'est aussi le nom d'un poisson, appelle autre-
ment surmulet. (Dict. d'Oudin.)
Barbarin, adj. On disoit or barbarin, pour
désigner une sorte d'or.
D'oc barbavh>, st d'argent de copelle
D'anis, d'œillets, de roses, et de lis,
Et de boutons avec l'aube cueillis,
J'ay façonné cette couronne belle.
Dict. Etym. de Ménage.
Barbarine, subst. fém. Espèce de monnoie (3).
(Dict. d'Oudin.)
Barbariser, verbe. Parler d'une façon barbare.
— Nouveauté dans le langage. « De jour en jour
« les bons mots sont décriez entre ceux qui s'écou-
o tans pindariser à la nouvelle mode, barbarisent
« aux oreilles de ceux qui suivent l'ancienne. »
(Apol. pour Hérod. préf. p. 25.)
Barbarissime, adj. au superl. Très barbare.
(Yoy. l'Apol. pour Hérod. préf. p. 10.)
Barbasse, sulist. fém. Grande barbe. — Sorte
d'augmentatif dans le goiit des Italiens. (Oudin ,
Dict. et Cur. franc.)
(;\) C'est une défense extérieure protégeant une entrée et permettant de réunir un assez grand nombre d'hommes cour
disposer des sorties ou protéger une retraite. Il y avait des barbacanes construites en maçonnerie, en terre ; ce n'était
même parfois qu'une simple palissade. Elles affectent toujours la forme circulaire. On donne pour étymologie l'arabe
bârbâk-klianeh, galerie servant de rempart devant une porte. (N. E.) — (2) C'est un nom du chat-huant ; l'étymologie est
barbe à Jean. (N. E.) — (3) C'est aussi une variété de la courge, (n. e.)
BA
— 398
BA
Barbasse, subst. innse. Barbon. <■ là demeure
« uu vieil barbasse qu'on appelle le Temps. » (Merl.
Cocaïe, T. II, p. 8.)
Bai'bass«'s adj. n;irbu. Epillièle de bouc, dans
les Epithètes de Martin de La Porte.
Barbaude , subst. fém. Bière , cervoise. —
Apprèl de laines.
Le prumier sens se trouve attesté par les Dict.
de Nicùt, Monet, Oudin et Cotgrave. De là, barbau-
dier pour bra.sseur de bière. (Ibid.)
nnrbaude semble aussi signifier une espèce d'ap-
prêt donné aux laines et aux cuirs en les lavant.
On a appelé barhaudiers ceux qui l'aisoienl cette
préparation. Une ordonnance de police, pour la
ville de l'aris, en 1553, défend, pendant le danger
de peste, « à tojas pelletiers, megissiers, teinturiers
« de toille, barbaitdiers , et autres de semblable
a estât de faire leurs confis, megis, et barhaudes
« au dedans de leui-s maisons..., et de porter ou
« faire porter leurs laines et icelles, tremper, ou
« laver en la dite rivière de Seine, au-dessus des
.< Tliuillericis. " (Ord. des H. de Fr. T. II, p. 385.)
D. Félibien rapporte le même passage et explique
le mot harbandiers par teinturiers. (Voy. le Gloss.
de l'Histoire de Paris.)
Barbaudier, subst. masc. Brasseur de bière.
— Apprèteur de laines. (Voy. sur les deux accep-
tions de ce mot, les citations rapportées au mot
Barbaude.)
Barbe, subst. féin. Age. — Face. — Oncle. —
Ministre des Vaudois.
Le mot barbe est employé pour âge dans le pas-
sage suivant : « Avec dix 6u douze jeunes hommes
« de sa barbe. » (Des Ace. Escr. Dijon, fol. 28.)
De là on disoit :
l'riine barbe, pour adolescent, jeunes gens. Ghar-
lemagne étant à table, fait remarquer à Agolant,
roi Sarrasin, les guerriers qui l'environnent :
Cil sont mi arbalestriers,...
Mi eevalier de prime barbe (1),
Si n'ont cure d'escoudre barbe,
Mais armes, et cevaux désirent.
Ph. Mouskes, MS. p. 145.
Barbe est pris pour face dans les expressions que
nous allons citer :
Faire barbe, faire tête, faire face. « Par là affa-
« raoient ceux qui estoient dedans la ville de
« Vérone, et faisaient barbe à ceulx qui vouldroient
« partir de Milan pour leur faire porter des
« vivres. » (Hist. du Chev. Bayard, p. 262.) « Com-
« mençaà/'rt/re baj'ôeàceuxqui le poursuivoient. »
(Chron. de S' Denys, T. 1, fol. I-U.) On lit dans le
latin de Suger, in hostes regredilur.
En barbe, en face.
Lors Talebot si arrivn
A tout cinq mille co.Tibatans,
Oreîî barbe, là se trouva.
Vig. de Chartes Vit, T. I, p. 182.
Barbe à barbe, c'est-à-dire: face à face. » îls
" vindrent et rencontrèrent barbe à barbe ceste
« arrière garde, et frappèrent dedans. » (Le Jouv.
fol. 65, Y°.)
Bailler en barbe, locution. Opposer de front
mettre ep tète. « Luy fut par les Grecs baillé en
» barbe, Ajax Telamonius. Le combat fut entre eux
n deux grand, impétueux et horrible. « (J. le Maire,
lUustr. des Gaules, Liv. III, p. 281.)
Barbe [faisant), locution. Faisant tète, résis-
tant, contre ledit Gelaise. (J. le Maire, Schismes et
Conciles, p. 47.)
Barbe a signifié quelque fois oncle, suivant
Borel, Dict. Voy. aussi le Journal de Trév. aotît
1738, p. 1658. Les Vénitiens se servent du mot
Barba dans le môme sens.
Barbe fut aussi le norn des ministres des Vaudois,
selon Borel. On trouve ce mot Barba, employé
dans cette acception par Catauée, Hist. lat. des R.
de Fr. publiée par Godefr. (Rec. des Hist. de Fr.
T. VIII, p. 281.)
Il nous reste à rapporter diverses façons de par-
ler autrefois en usage, oîi le mot barbe se trouve:
1^ Faire barbe de foin, de foirre, on fourre, ou
de paille, à quelqu'un (2), c'étoit l'insulter. (Oudin,
Dict. et Cur. Fr. — Voy. Régnier, Satyre vt.) S' Julien,
dans ses Meslanges historiques, p. 108, prétend
qu'il faut dire gerbe, au lieu de barbe. Cepen-
dant cette façon de parler est encore usitée en quel-
ques endroits de la Normandie, où l'on dit : « Faire
« barbe defeure à quelqu'un, pour le recevoir naal,
« l'accueillir froideiTient.
2° // sait bien qui barbe il lèche, façon de parler
proverbiale.
Bien l'a maté, et nu chiié.
Et bien vaincu par son barat
Li vilains reproche du chat.
Qu'il sel bien qui barbes il bêche
Cestui a servi de la mèche.
Fal)l. MSS. du R. n" 7218, fol. 119, R" cot. 2.
3" Barbe rane. On disoit des commensaux, dans
les cours des Rois: « Bouche à cour, barbe raze,
« et pied ferré. » C'est-à-dire qui avoient droit d'y
manger, d'y faire raser leur barbe, et d'y faire fer-
rer leurs chevaux ou mulets. (Favin. Th. d'Honn.
T. II, p. 1090.)
A° Commerce de S" Barbe, c'est-à-dire îa com-
munauté des fabricans de tapisserie. (Voy. le
Nouv. Coût. Gén. T. l, p. 1060.)
5" S" Barbe. C'étoit le jurement de M. de Bourbon.
(Voy. Cap. Fr. T. I, p. 102.)
G" Barbe secouade, semble une allusion aux se-
cousses données dans le supplice de l'estrapade.
(Voy. les Contes d'Eutrap. p. 153.)
(1) Déjà, dans la Chanson de Roland, on lit : « Et par la barbe qui au pis me ventelet (st. IV). » (n. e.) — (2) Il y là deux
proverbes réunis en un seul : le premier est « faire la barbe à quelqu'un, » avoir l'avantat;a sur lui, et particulièrement
l'avantage de la ruse ; le deuxième est « faire à Dieu barbe de feiirre, » lui donner une gerbe de feurre (paille), pour une
gerbe de blé ; c'est donc être hypocrite. Régnier (Sat., VI), disait encore : « Et l'hypocrite fit barbe de paille à Dieu. » (x. e.)
BA
399 —
BA
7° Barbe de Pagny. Sobriquet donné à Philippe
de Vienne. (Voy. S' Jul. Mesl. Histor. p. 345.)
8° Barbe forte. Autre sobi iquet. (Voy. les contes
d'Eutrap. 505.)
9° Barbe de Neptune. Nom donné par les Dames
à une espèce de couleur que nous ne connaissons
point. (Voy. le Dict. Etym. de Ménage, au mot
Céladon.)
ii)" Bai-be d'Oribiis. Sorle de jeu dans Rabelais.
(T. I, p. 143.) Selon Le Duchat, « c'est un jeu où
" l'on bande les yeux ù (luelqu'undela compagnie,
» puis sous ombre de vouloir luy l'aire une barbe
" dorée, on le barbouille avec de l'ordure. »
11° Barbe de Niwiidie. (Voyez Bouch. Serées,
Liv. I, p. 427.)
12" Déchiqueter en barbe d'écrevisse. Egratigner
comme un chat. « Au diable soit le diable, il m'ha
" icy deschiquelé la peau en barbe d'escrevisse. »
(Rab. T. IV, p. 288.)
Barbé, adj. Barbu. — Empenné.
Au premier sens, barbé signifie barbu. Nous le
trouvons avec cette signification dans les vers
suivans :
Plus fuiable et plus effraée,
De cerf, ou de biche barbée.
ilachaut, MS. fol. 202, R- col. 1.
Une aultre estoille estrange, et fort barbée.
Molinel, p. «4.
Par une extension naturelle de la première
acception, ce mot, pris ligurément, signifioit
empenné.
Dars, et saietes barbelées,
Equarriaux pas lesquiex l'air sonne
Y courroucent mainte personne.
G.Guiart, MS. fol.220, R-.
VARIANTES :
BARBÉ. Monet, Oudin, Cotgrave. Dict.
Barbelé. G. Guiart, MS. foi. 220, R".
Barbelu. Cotgrave, Dict.
Barbeau, sitbst. masc. Partie du fer d'une
flèche. '• Le sixième enseignement d'archerie est
» que la sajete de quoy tu tireras doit avoir dix
« poigniés de long, depuis la couche de la sajele
» jusques aux barbeaulxàe fer. » (ModusetRacio,
fol. 39, V°.)
VARIANTES :
BARBEAU. Modus et Racio, MS. fol. 39, V».
Barbiau. Chasse de Gast. Phéb. MS. p. 325.
Barbel. Modus et Racio, MS. fol. 72, V».
Barbeel, subst. masc. Nom de l'abbaye où
mourut Louis VIL 11 semble que cette expression
réponde à l'expression latine sanctus portas, ùSini
le passage suivant: « LudovicusrexFranciœmorbo
" paralysi, et senio fatigatus obiit, in abbatia cister-
« ciensis ordinis à se constructa, quœ sanctus
>• portus dicilur, id eslBarbeel. » (Chron. de Nangis,
sous l'an ilSO.)
Barbel, subst. masc. Barbeau, sorte de poisson.
Le gros barbel, la crasse anguile.
Hisl de S. Leocade, MS. du S. Germ. fol. 31.
Carpes, lus, braime, barbiuttlx.
Euit. Descb. Toes. MSS. fol. 346, col. 4.
Barbelet est le diminutif de BarbeL (Ord. des
R. de Fr. T. 11, p. 12.)
VARIANTES :
BARBEL. Ord. T. I, p. 593.
Barbiaulx iplur.) Eust. Desch. Poës. MSS. foL 346.
Barbelet. Ord. des R. de Fr. T. II, p. 12.
Barbelé, adj. Hérissé de pointes. (Voyez Dict.
de Monet, au mot Barbelé.) Les fers barbclex:, c'est-
à-dire les armes hérissées de pointes, étoient mises
au nombre de celles dont l'usage étoit défendu dans
les tournois, ou gages de bataille. Nous trouvons
dans des lettres d'armes de 1402: « Ayant basions
« accoutumez, c'est à sçavoir lance, hache, espée,
« et dague, et chacun de tel advantage comme mes-
« tier et besoing luy sera pour sa seurté, et pour
« son ayder, sans avoir alesnes, ne crocs, broches,
» poinsons, fers barbelez, aiguilles, poinctes enve-
« iiimées, ne rasoirs. » (Monstr. Vol. I, fol. 8.) La
Colombière, Th. d'honn. T. II, p. 243, rapporte les
mêmes lettres ; au lieu ù&fers barbelés, il a lu fers,
barbellcs, aiguilles. Ensuite, après le motrasoirs,i\
ajoute : « Ne giet de chausses trappes. »
Saëtes barbelées.
Rom. de Rou, MS. p. 327.
Aine Diex ne fit sajete, tant fut bien barbelé,
l'oi-s. MSS. avant 1300, T- IV, p. 1366.
On lit dans une autre copie :
Aine Dex ne fist sajete, tant fut bien barbellie.
Nous trouvons sajetles barbelées, dans le Rom.
de la Rose, vers 10000. L'auteur du Gloss. de ce
Roman dit que c'est ce queJ. de Meung « appelle
« ailleurs empennées pour marquer les'barbes des
« plumes. »
<" Les chemins estoient tant barbus, et plaines de
« roseaux et buissons. » (PerceL Vol. IV, fol. 87.)
VARIANTES :
BARBELÉ. Poës. MSS. av. laX), T. IV, p. I3C5.
Barbelué. Ibid. p. 366.
Barbu. Percef. Vol. IV, fol. 87.
Barbelet, subst. masc. Voici le passage où nous
trouvons ce mot :
.... S'a un col si acesmé
Qui est de gorge si formé,
Plus blanc qu'argent seur estamé
Gras et rondet.
Droite gorge de barbelet :
Il est si biaus, il est si net, etc.
Fabl. MS. du R. n- •7218, fol. 204, R" ool. 2.
Barbelette, subst. fem. Diminutif de barbe.
(Voy. les Poës. de Jacq. Tahureau, fol. 200.)
Barbelote, subst. fém. C'est une .sorte d'insectes
qui se tient dans les fontaines, selon le Dict. de
Borel, qui cite le Rom. de la Rose. Oudin, dans son
Dictionnaire, l'explique par espèce de grenouille ou
de crapaud; ces petites grenouilles qui se trouvent
dans les buissons, en espagnol ?■«/;«. Cette expli-
cation est confirmée par Ménage, Dict. Etym. On
lit dans R. de la Rose, 1384 et 1385 :
Par lieux y eux cleres fontaines
Sans barbelotes, et sans raines.
L'auteur du Gloss. l'explique bien par espèce
d'insectes qui se trouvent dans les eaux doimantes,
BA
— 400 —
BA
mais ce qu'il ajoute dans son Suppl. n'est pas
clair, et semble faire voir qu'il n'enlendoit plus
le sens de ces vers. Il i)aroil que c'éloit aussi un
insecte qui se trouvoit dans les maisons. Une reli-
gieuse, qui avoit l'esprit aliéné, « seboutoit dessoubs
« les tables, et qucroil araignées, et barbelotes
« esclotes, et partout où elle les pouvoit trouver,
« elle les mangeoit ^1). » (Vie d'isab. à la suite de
Joinv. p. 17G et 177.)
VARIANTES :
BABBELOTE. Vie d'isab. à la suite de Joinv. p. 176.
Barbelotte. Oudin, Dict.
Barbequené, adj. Fortifié de barbacanes, cou-
verte par le dessus, comme blindée. (Voy. Barba-
cane.) « La barrière qui esloit faite à crenaulx étoit
« barbequcnée, et avoit aux cotez des canons tous
« chars^iez. » (Preuv. sur les Meurtr. du Duc de
Bourg, p. 288.)
Barber, verbe. Faire la barbe. (Dict. de Nicol,
de Monet, d'Oudin et de Cotgrave, au mot Barber.)
« Le raareschal de Ballan qui étoit notaire et aussi
« barbier, et quand on le demandoit, il disoit me
« voulez-vous pour ferrer, ou barber, ou escrire, ou
« ajourner, parce que depuis il fut sergant.» (Moy.
de Parv. p. 304.) On a dit, en parlant de la mort de
Guillaume Flavy, en 1464 : « Sa femme à la vérité
<> qui esloit de bon lieu, feit son mary meurdrir, et
« coupper la gorge par son barbier en le harbiant,
« et pour ce que le barbier ne luy couppa pas la
« gorge tout outre, elle la parcouppa du rasoir
« mesme. » (Monstr. Vol. 111, fol. 102.)
VARIANTES :
BARBER. Monet, Oudin, Cotgrave, Dict.
Barbier. Monstr. Vol. 111, fol. 102.
Barbover. Moyen de Parvenir, p. 175.
Barberie, subst. fém. Métier de barbier. (Dict.
d'Oudin et de Cotgrave.) « Un barbier avoit son
« ouvroir de i;flr/ye7V(?surleportdePirec en la ville
« d'Athènes. >> (Bouch. Serées, Liv. III, p. 71.)
Barberiot, subst. masc. Diminutif de barbier.
(Voyez Dicl. de Cotgrave.)
VARIANTES :
BARBERIOT. Cotgrave, Dict.
B.4.RBER0T. Rabelais, Pronostication, T. V, p. 11.
Barbete, siibst. fém. Terme de fauconnerie. On
a dit, en pariant des qualités d'un bon faucon, qu'il
doit « avoir les sourcils un peu bauts et gros, et les
« yeux grandz et cavez, et la tète ung peu voultée
« et rondette pardessus, et quand il est seur, qu'il
« face un peu de barbette soubs le bec de la
« plume, r, (Budé, des Oiseaux, fol. 122, R°.)
VARIANTES :
BARBETE. Modus et Racio, MS. fol. 109, V".
Barbette. Budé, des Oiseau.x, fol. 115, R».
Barbets, subst. masc. Religionnaires vaudois.
des montagnes de Piémont et autres lieux voisins.
(Dict. étymologique de Ménage.)
Barbette, subsl. fém. Sorte d'habillement de
deuil. Il faisoit partie de l'ajustement des veuves et
autres femmes en deuil : « Barbette manteau.
« et chappcron fourrez de menu vair durant
» (lu'on porte barbette et mantelet, il ne faut porter
« nulles ceintures, ne ruban de soye, ne autre que
« ce soit Pour autres frères (que l'aîné) et sœurs,
« on ne porte que la barbette et le couvre-chef
« dessus Pour marit, on portera demy an le
« manteau et cbapperon, trois mois la barbette et
« le couvre-chef dessus, trois mois le mantelet, et
« trois mois le touret. » (Honn. de la Cour, à la
suite des Mém. sur l'Ane. Chev.)
/?ff9'?^c</csignifioit aussi moustache, la moustache:
Tout Grec portant la barbette moustaclic,
Qu'il n'y ait respit, au moins s'il ne se cache.
i. Le Maire, suite de l'Illuslr. des Gaules, p. 37i.
Barbie, subst. fém. Ce mot semble une faute
pour marbre. En parlant de l'église IN'ot"e-Dame que
Charlemagne fonda à Aix-la-Chapelle, on dit : « La
« barbie, et colombes fit apporter de Bavennes. »
(Chron. de S' Denis, T. I, fol. 120.) On lit dans le
latin d'Eginhard : » Ad cujus structuram cum colum-
" nas, et marmora a Roma, et Ravenna adve-
« henda curavit. »
Barbier, subst. 7nasc. Chirurgien. Ce mot a
conservé son ancienne signification dans plusieurs
endroits de la Normandie : « Il falloit que les
« barbiers arrachassent et coupassent aux mala-
« des de grosse char qui surmontoit sur les
<< gencives. «"(Joinville, p. 60.)
Les barbiers sont distingués des chirurgiens dans
l'Ordonn. de 1372, selon laquelle ils avoient seule-
ment « le droit de panser les clous , bosses ,
« aposlumes, et les playes qui ne sont pas mcr-
« telles. » (Ord. T. V. p. 530.) Le passage suivant
marque encore mieux cette distinction : « Ordonne
■• que les maîtres barbiers, ehirurgieus (2), ainsi
" sont- ils appelles dans cet arrest, ne seroient h
« l'advenir compris aux affiches et proclamations
« des chirurgiens. » (Pasquier, Recherches, p. 833.)
Secrez doit estre li barbiers
Dessus tous les autres mestiers :
Plusieurs secrez voit de nature
Qu'om ne doit dire à créature.
Eust. Descli. Poês. MSS. fol. 443.
Barbier de bos. Expression employée pour dési-
gner un bûcheron, dans les Poésies mss. d'Eust.
besch. fol. 205, col. 4.
Barbillon, subst. masc. Barbe d'épi. — Pointes
dont on hérissoit le fer des flèches. — Maladie
d'oiseaux.
Au premier sens, ce mot a signifié barbe d'épi :
Perçant le festu d'un petit
Barbillon naissant d'un espit.
Les Touches, Des Accords, fol. 44.
(1) C'est peut-être l'insecte qu'on nomme babarottes dans le Midi, le cancrelat, (n. e.) — Les barbiers-barbaiîls , qui
n'avaient pour outils que le peigne et le rasoir, fiu-ent constitués en corporation par lettres patentes de 1637. Ils curent de
longs procès avec les barbiers-chirurgieiis. (n. e.)
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— 401
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Barbillon s'est dit pour les pointes donlonhéris-
soit quelquefois le fer des flèches : •< La flesche
« ayant le fer dressé en harhillon esloit demeuré
« en la playe. » (Vray et Parf. Am. fol. 'âOS.)
En termes de fauconnerie, barbillon désigne une
excroissance dans le bec des oiseaux, qui leur ôte
l'appétit, et devient assez considérable pour les
empêcher de serrer le bec et pour les faire mourir.
(Voyez Du Fouilloux, Fauconnerie, fol. 19, \'°.)
Barbillonner, verbe. Incommoder. On a dit
barbillonner les oreilles, dans un sens figuré, pour
étourdir, incommoder les oreilles, comme on
pourroit faire avec un barbillon ; nous disons
bourdonner aux oreilles : « Quand les moines
« disnent, il y en a un qui est en chaire, qui leur
« fait lecture des actions des Satrapes, et ainsi
« legendant, il barlnllonne les oreilles de ses con-
« frères. » (Moyen de Parvenir, p. '230.)
Barbirie, subst. féni. Lieu où l'on fait la barbe,
où l'on épile : « Par dessouz une gallerie allasmes
« veoir les baings, estuves et barbiries du palais. »
(Cartheay, Voy. du Chevalier errant, fol. 46.)
Barbite, subst. fém. Brebis. « Si comejeobaile
« à un homme mes bavbites à composter son tre
« ou mes beofes à arer la terre et il occit mes aveis,
a jeo'puissoy bien avoer une action de trespas
« envers luy, nient obstant le bailement. » (Tenures
de Litlleton, fol. 15.)
VARIANTES :
BARBUE. Tenures de Litlleton, fol. 15.
Barbitez. Carta Magna, fol. 100.-
Bai'boires, subst. fém. Espèce de mascarade.
« Tantôt survindrent jeux, comédies, morisques,
« mommeries, barboires, et autres diverses maniè-
« res des batemens telz que es grands courts des
« princes se souioient faire. « (.1. Le Maire, lUusti'.
des Gaules, Liv. 1, p. 144.)
Barbons, suMst. masc. plur. Sorte de sobriquet.
Ce nom fut donné à trois des principaux du Parle-
ment, à cause de leur longue barbe, vers l'an 1500.
(Voyez les Mém. de Tavannes, p. 130.)
Barbore , subst. fém. Espèce de poisson. (Dict.
d'Oudin.)
VARIANTES :
BARBORE. Oudin, Dict. français-italien.
Barbote. Id. Dict. français-espagnol.
Barbot,si(te/.îHffsc. Espèce d'insecte. « Si c'est
B au printemps, ou esté, les lièvres ne se gistent
« pas au fort h cause des fourmis et autres barbots,
« et des serpents et laisards qui les chassent des
« forts. » (Fouilloux, Vénerie, fol. 09, R".)
Barbotage, snbst. musc. Breuvage. Montaigne,
parlant de la facilité avec laquelle les malades
prennent toutes sortes de remèdes, dit : « Il n'est
« pas une simple femmelette de qui nous n'em-
" ployons les barbotages et breuets. » (Essais de
Montaigne, T. Il, p. 817.)
Barbote, subst. fém. Espèce de bateau. C'étoit
II.
un bateau propre à aller sous l'eau, comme dessus:
« Donc se conseillièrent ensemble k'il feroient ce
« di cent quatre barbotes, et seront toutes couvertes
» de cuirs bien joins et siérés, et iront aussi bien
« dessous aiguës, comme dessus. » (Histoire de la
Guerre S'% ms. cité par Du C. Gl. 1. au mot Barbota.)
Barbotin , subst. masc. Barbon. Vieillard qui
radote. (Contredits de Songe creux, fol. 121, V°. —
Voyez Barbasse.)
Barbotine, subst. fém. Absinthe de mer. (Dict.
de Borel.) Nous lisons : « Barbotine des marmi-
>< teux » dans Rabelais qui, par cette expression, a
voulu exprimer les prétendues amertumes de la vie
des hypocrites. (Voy. Le Duch. sur Rab. T. II, p. 72.)
Barbottement, subst. masc. L'action de mur-
murer, de marmotter entre ses dents. (Dict. de
Monet, Oudin et Cotgrave.)
VARIANTES :
RAR7Î0TTEMENT. Monet, Dict.
Barbotage. Oudin, Cotgrave, Dict.
Barbotter, verbe. Trembler, frissonner. —
Marmotter, bredouiller.
Au premier sens, ce mot a signifié trembler,
éprouver des frissons. (Voyez Nicot et Monet, Dict.)
Dans la seconde acception, on a employé barbotter
pour marmotter entre les dents, bredouiller. (Voy .
Nicot, au mot Barboter.)
Tout en barbetant ba ba ba
Et sans dire parole nulle.
Coquillart, p. U9.
Par le corps bien, il hurbelote
Ses mots, tant qu'on n'i entend rien.
Pathelin, Farce, p. 63.
Borel, dans son Dict., cite ces mêmes vers au
mot Barbeloter, qu'il explique par aboyer.
Ce mot, en généi'al, désignoit une sorte de mou-
vement de lèvres, tel que le froid l'occasionne, ou
tel qu'on le fait, lorsqu'on prononce entre ses dents
des paroles mal articulées.
VARIANTES :
BARBOTTER. Monet, Dict.
Barboter. Nicot et Monet, Dict.
Barbeter. Coquillart, p. 149.
Barbeloter. Pathelin, Farce, p. 63.
Barbouquet, subst. masc. Gourmade. Coup
sur la mâchoire. Il étoit évalué à cinq sols , dans la
taxe des droits pour les coups donnés. On trouve
cette taxe à la suite de la Charte aux Normands qui
est jointe à l'Ancien Coutumier de Normandie,
édition de 1510, fol. 100.
Barbu, adj. Qui appartient aux vieillards. On a
dit, en ce sens, enfance barbue pour exprimer la
sottise des barbons. (^Voy. Cymbalum mundi, p. 90.)
Barbue, subst. fém. Greffe, marcotte. (Dict.
d'Oudin.)
Barbue, subst. /■(?'?«., Habillement de tète. —
Armure de tête.
Dans la première acception, c'étoit un habillement
de tête en fagon de domino, masqué et non masqué,
51
BA
402 -
BA
dont on se servoit pour se garantir du froid.
(Dict. de Nicot.)
Chanoine de longue barbullc.
Coquillarl, p. 107.
La barbue (1) étoit aussi une espèce d'armure de
tète qui avoit une mentonnière. On la nommoit
ainsi du mol barbe. Cette étymologie est bien plus
naturelle que celle donnée par le P. Montl'aucon.
(Monum. de la Monar. fran. T. II, p. S/iO.JIl conjec-
ture qu'elle étoit ainsi appelée, parce que la pointe
de devant l'aisoit une espèce de barbe. Les gens de
guerre, qui portoienl cette espèce de casque,
avoient nom barbues. (Voyez les Dict. de Borel,
Nicot, Ménage, au mot Mrbule. )0n lit barbue dans
les Statuts mss. de l'Ordre du S" Esprit.
VARIANTES :
BARBUE. Du Cange, Glossaire lalin, au mot Barbuta.
Barbuette. Mérn. d'OUv. de la Marche, Liv. I, p. 314.
Bakbute. Dorel, Nicot, Ménage, Dict.
Bîirbiite,s!/^s^ /'c'hj. Nielle. — Baie. — Bouchon.
On trouve ce mot pour nielle, sorte de plante,
dans le Dict. d'Oudin.
Pour baie, fruit du laurier, du lierre, etc. (Ibid.)
Enlin pour bondon, bouchon, dans le même Dict.
Barceloiinois, adj. De Barcelonne. On disoit
en ce sens boucliers barceloiinois, de la ville de
Barcelonne oii on les faisoit. On s'en servoit sous
Henri H. (Voy. Brant. Cap. Fr. T. II, p. 14.) On
trouve picque barcelonnoise dans les Epilhètes de
Martin de la Porte.
VARIANTES :
BARCELONNOIS. Brant. Cap. Vt. T. II, p. 14.
Babselonnois. Montluc, T. l, p. 534.
Barchacer, verbe. Chasser mal :
Barchace le leu,
Qui sa proye ne resqueut (2):
Ce dit Li vilains.
Prov. du Vil. MS. de S. Geim. fol. 74, V°.
Bard, snbst. masc. On appelle encore bards (3) en
Bretagne, les joueurs de vielle et de violon qui vont
par les villages. (Voy. le Mercure de France, décem-
bre 1735, p. 2587.) Les anciens bardes étoient
poêles, chantres, historiens, faiseurs de généalogie.
Ces bardes cbantoient les faits des héros" et étoient
diiïérens des druides. (Dict. de Borcl, 2" add.) Le
mot Dagobart ou Dagobert, selon Borel, signifie
chantre héroïque. (Voy. Ibid. au mot Dagobart.)
Joachim du Bellay, parlant des vers rimes, cite
J. Le Maire, qui dit que : « Bardus V, Roy des Gau-
« les, en fut l'inventeur, et introduisit une secte de
• poètes nommés bardes. « (Voy. .Joach. du Bellay,
fol. 32.) Dans le dictionnaire de Borel, 1"' add., on
trouve: « Bardus, druidis hlius, musical et carmi-
« num inventer apud Gallos. « Borel donne au mot
barde la signification d'homme fort, ou de fils.
Selon Du Cange, Gloss. lat. au mot Bardicatio, les
mots bardie et barzie signifient en Gaulois ou Bre-
ton, chanteur ou joueur de flûte dans les assemblées
du peuple.
VARIANTES :
BARD. Borel, 2« add.
Barde. Joachim du Bellay, fol. 32.
Bardie, Barzie. Du Cange, Gloss. lat. au mol Bardicatio.
Bardable, adj. A qui on peut mettre une barde.
(Voyez Brantôme, Dames Gall. T. II, p. 437, et le mot
Barde.)
Bardane, subst. fém. Punaise. (Dict. de Nicot.)
Barde, subst. fém. Armure de cheval. Elle se
plaçoit sur les flancs et sur la poitrine : elle étoit
composée de lames de fer (4). (Dict. de Nicot, de
Monet.) On en trouve la description dans la Mil,
Fr. du P. Daniel, T. I, p. 402.
Ordonnez nos avant gardes,
Sellez chevauLx, mettez bardes,
Tirez canons, et bombardes.
Molinel. p. Iî9.
Delà, on disoit :
Javeline de barde ou pour la barde. C'étoit une
pique assez forte pour attaquer des chevaux bardés.
A l'entrée de la princesse de Ferrare à Paris, en
1548: « les compagnies des archers, arbalestriers,
« et hacquebutiers de la dite ville vêtus de
« hocquetons, bien montés, ayant chacun \xwq jave-
« Une de barde en la main. » (Félibien, Hisloirede
Paris, preuves, T. V, p. 359.) « Là à tous venaus
« très hardyment avecques une javelline pour la
« barde, tint pié ferme. » (Jean d'Auton, Ann. de
Louis XII, MS. an 1503, p. 4.)
Barde est expliqué par bois fngonné à la varlope
dans le Glossaire de l'IIisloire de Paris ; mais cette
explication est sans fondement. Nous lisons dans
Brantôme, Dames Gall. T. I, p. 348, découppé en
barde d'écrevisse. 11 est aisé de s'apercevoir que
c'est une faute pour barbe d'écrevisse, (-[ue l'on a vu
au mot Barbe.
VARIANTES :
BARDE. A. de la Vigne. Voy. de Ch. VII à Naples, p. 162.
Balde. (Lisez Barde.) Etat des OfT. des D. de Bourg, p. 287.
Bardée, subst. fém. Charge. C'est en ce sens
qu'on disoit bardée de bois. (Oudin, Dictionnaire.)
Bardelle, subst. fém. Sorte de selle. EUe étoit
plate et sans arçons. (Dict. d'Oudin.)
Barder, verbe. Armer de bardes un cheval.
(Dict. de Nicot, Monet, Oudin et de Cotgrave. — Le
P. Daniel, Mil. Fr. T. I, p. 403.)
Bardiac, subst. masc. Habit saintongeois. —
Habit des anciens bardes.
Selon Borel, bardiac et bardocucul étoit le nom
d'un habillement des Saintongeois, qui couvroit la
tète et le corps. 11 cite Fauchet, et ajoute ; " C'est
(1) C'est plutôt un casque à large couvre-nuque et à m?sque emboîtant le menton, qui fait partie de la plus ancienne
panophe du Musée d'artillerie (voir la représentation dans Vllistoh-e tlu Coslunw de M. Quicherat, p. 307). (N. E.) —
(2) Recouvre. - (3) La forme est plutôt burz ou bars. (N. E.) - (4) Elle est employée au temps de Charles Vli, pour être
délaissée sous Henri IV, dés la bataille d'Ivrv. L'étymologie est le mot arabe bardahet, couverture placée sous le bât ;
certaines provinces ont encore pour selle la forme uubaide. (n, e.)
BA
- 403
BA
« ce que nous appelions une cape, dont on use fort
« en Bearn. »
Le même Borel dit aussi que l'on nommoit bardo-
eucullcs, riiabillement des anciens bardes.
VARIANTES :
BÂRDIAC, Bardocucul, Bardocuculles. Borel, Dict.
Bardit, subst. masc. On appeloit bardit, une
sorte de cbaut très connu chez les Germains. Peut-
être faut-il lire barit, de l'allemand baren ou
baeren, ci ler, d'oîi s'est formé notre mot braire.
(Voy. La Bleterie, trad. des mœurs des Germ.
p. 5 et 97.)
Bardo, subst. masc. Crête de coq. Bochart, que
Borel cite dans son Dictionnaire au mot Ilardiacus,
nous donne cette explication.
Bardococullé, adj. Encapuchonné. « Mona-
« gaux que voyez là bardococullez d'une chausse
« d'Hippocras, comme une alouette sauvaige. »
(Babelais, T. V, p. 11. — Voyez Ibid. la note de Le
Duchat.)
Bardot, subst. masc. Ane ou mulet. (Diction-
naire d'Oudin.)
Bardot. Ces mots se rencontrent quelquefois
dans ces expressions /)flsse?'/wr bardelot, passer par
bardot (1). Elles signifient être franc d'écol, passer
sans payer. (Oudin, Dict. Cur. Fr. au mot Bardot.)
« Il a fallu que j'aye fait cette digression, il
« fautqu'elle passe par &flnte/o^ sans payer péage. »
(Brant. Gap. Estr. T. I, p. 28.)
Il semble cependant que l'expression : passer par
bardot soit prise en un sens contraire dans le pas-
sage suivant du même auteur : « Si en a-t-il tous-
« jours quelques-unes de ces pauvres vieilles hères
<< qm passent par bardot, et départent leurs larges-
« ses aux dépens de leurs bourses. » (Brantôme,
Dames Gall. T. I, p. 225.)
VARIANTES :
BARDOT. Brantôme, Daines Gall. T. I, p. 225.
Bardelot. Id. Cap. Estr. T. I, p. 28.
Bardoii, adj. Lourd, lent. Borel le dérive du
grec. (Voyez Oudin, Cur. Fr. et Celthell. de Léon
Trippault.)
Bardoul, subst. masc Bardulf. Surnom de
Hugues, fils de Barthélémy de Broyés. De l;i, on a
nommé le village de Trie au diocèse de Meaux :
« Trie le Bardoul, en latin trajectum Bardulfi. «
(Hist. de l'Eglise de Meaux.)
Bare, subst. masc. Sorte de mesure. Ce mot a
peut-être la même signification que barant, que
l'on trouvera sous l'article Baril. « Loisible aux
« maire et eschevins de la ville de leur fialrir ou
« faire flatrir toutes et chacunes les mesures.
« bareaux, poids et balances et autres choses dont
« l'on use en la ville et eschevinage, et bailliage
« de Lens, en tous stils (genres ou espèces, sortes)
<' quelconques de marchandises. » (Nouv. Coût.
Gén. T. I, p. 32G.)
VARIANTES :
B.ARE. Ph. Mouskes, MS. p. 825.
Bareau.
Barette, subst. fém. Bonnet. (Dict. Etym. de
Ménage.) « Les gens du daulphin prindrent le corps
« du duc de Bourgongne (2), si le deveslirent, et ne
« luy laissèrent que son pourpoint, les houseaulx
« et la barrette en son cliief, et le mirent dans un
« moulin qui là au plus près estoit, oii il fut toute
« la nuict. » fj. Le Fèv. de S' Rem. Histoire de
Charles VI, p. 139.)
On a dit baret pour bonnet d'enfant, selon Borel,
et on a donné le nom de birette à une sorte de
bonnet à l'usage des jésuites novices. (Voy. sur le
mot Barrette[Z), leGloss. latin de Du Gange, au mot
Baretum.)
Parler à la barette ou à la barrette, se disoit
pour battre, frapper, étriller :
La Flèche.
Je parle à mon bonnet
Harpagon.
Et moy je pourrois bien parler à ta barrette.
L'Avare, de Molière, aci. I, scène III.
Parler à la barrette, se trouve dans les Vigil. de
Charles VII, T. I, p. 117. Gholières, dans ses Contes,
fol. 0, R°, s'en est servi dans ce même sens : laver
le bonnet, laver la têle à quelqu'un.
variantes :
BABETTE. J. le Fèv. de S- Rem. Hist. de Ch. VI, p. 139.
Bavette. (Lisez Barelie.) Petit J. de Saintré, p. 81.
Barrette. Dial. de Tahur. p. 106.
Barecte. Petit J. de Saintré, p. 613.
Bkrrete. Lett. de Pasquier, T. I, p. 104.
Birette. Ménpjfe, Dict. Etym.
Birrette. Borel, Dictionnaire.
Baret, subst. masc. Borel, Dict.
Babret, subst. masc. Ibid. au mot Birrette.
BlREZ, subst. masc. ptur. Felib. Hist. de Paris, T. IILp. 536.
Barettide, subst. fém. Coup de bonnet, salut.
(Dict. d'Oudin.) « Cestuy-ci aime l'argent, l'autre
« veut qu'on luy face de grandes révérences, et
« baretades. >- _(Contes d'Eutrapel, p. 13.) Rabelais
a dit en ce sens : « Pantagruel après la petite acco-
« lade, et barretade gracieuse, etc. » (Rabelais,
T. IV, p. 11.)
variantes :
BARETTIDE. Oudin, Dictionnaire.
Baretade. Contes d'Eutrapel, p. 13.
Barretade. Rabelais, T. IV, p. 11.
Barfjaigne, subst. fém. Commerce. — Marché.
— Gain, profit. — Affaire. — Délai. — Sollicitation.
— Tromperie.
Au premier sens, ce mot a signifié : commerce.
(1) C est un dérive de barde, (n. e.) - (2) Les portraits dé Jean sans Peur le représentent presque tous avec une barrette
noire pointue ; c'était sa coiffure de prédilection. C'est vers ce temps que cette coiffure toute eccléfiiastique fut de mode
pour les laïques. Les paysans de Guissény, les derniers pilleurs d'épaves dans le Finistère, la portent encore; elle est de
laine bleue tricotée, (n. e.) - (3) L'étymologie est Inrretum, qu'on trouve au vp siècle, et qui nous ramène à birrum
(burrhus, bijrrhus), étoffe de couleur rousse, (n. e.)
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— 404 —
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trafic. Nous le trouvons employé, avec cette signifi-
cation, dans les vers suivans ;
Dedens Jérusalem ot un temps molt estrange :
Mult i ot de vitail delirose baiyaintie:
On i prant un denier d'une soie cliastaigne
Morte est la povre gent, n'i a cel ne se plaigne;
Mult ont fait, en cest an, doloirose bargaïnne.
Rom. de la Frise de Jcrus. MSS. cilé par Du C. Gloss. lat., sous barganizator.
Dans la seconde acception, bargaigne s'est dit
pour marché. Au sujet de l'union de l'âme et du
corps, et des avantages et des peines qu'ils se pro-
curent réciproquement, on lit :
l'ame, et li cors sont à perte, et à gaaigne ;
Sa il fait bien, ou mal, entr'ax en sont copaigne :
Or se gart bien li cors s'il fait maie bargair/ne.
Chanleplcure, MS. de S. G. fol. "l04.
On a employé ce mot avec le sens de gain, profit :
Cil est liés de sa banjayne
Qui sa grant perte regaagne.
Pli. liouskes, MS. p. 104.
On a dit aussi bargagne pour affaire :
En apriés icele bargagne.
Ph. Mouskes, MS. p. 478.
Qui de gré se mehaigne,
N'est pas droiz c'on le plaigne,
Mielz valt que l'en s'en rie ;
Et cil qui li ensaigne.
Caste bien sa bargaigne.
Prov. du ComW de Bret. MS. de S. G. fol. 114.
Dans le sens indéterminé d'affaire, chose quel-
conque, on a dit :
Onques pour faire grant gaaingne
Ne commencé cesti barijuine.
Ailiis, MS. fol. 14, Vcol. 1.
On trouve bargaigne employé pour délai :
Mourir m'estuet, sans plus longue bargaine.
Poês. MSS. du Val. n- 14y0, fol. 9, V".
Vint sor un cheval d'Espaigne brochant ;
Ne fait pas longhe bargaùpie.
Huoii d'Oisy, Pofs. MSS. av. 1300.
On s'est servi encore de ce mot pour sollicitations,
instances. Les Anglois, fuyant devant les François,
se sauvent vers Bressuire en Poitou, « h laquelle
-i ville vindrent les Anglois, pour cuider entrer
.< dedans, et barguynoient fort à ceux de Bressuire
■' qui les recueillissent, et à celuy barguygnement
« vint Messire Loys de Sancerre. » (Hist. de LoysIII
de Bourbon, p. 30.)
Enfin on lit barguyns pour tromperie, malversa-
lion, dans la Carta magna, fol. 148, "R°.
^1 bargaigne signifie : à l'envi, dans le passage
suivant :
Si ert li avoez d'Espaigne
Qui Dames aiment à bargaigne.
Parton. dc'Bl. MS. de S. G. fol. IGO.
V.\niANTES :
BARGAIGNE. Poës. MSS. avant -1300, T. II, p. 905.
Barg.ugne. {Usez Bargaigne.) Du. Cange, Gloss. lat.
Baraigne. (Lisez Bargaigne.) Not. du Rom. d'Alex, f. 107.
Bargaïnne. Rom. de la Prise de Jérusal. dans Du Cange,
Gloss. lat. au mot Barganizalio sous Barcaniare.
Bargagne. Ph. Mouskes, MS. p. 478.
B.VRGAiNE. Poës. MSS. du Vat. n» 1490, fol. 9, V».
Barouaigne. Parton. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 13.S.
Barguygnement, subst. masc. Eust. Desch. Poës. MSS.
Babgeyns. subst. masc. plur. Cartamagna, fol. 148, R».
Bargaigiier, verbe. Commercer, trafiquer. —
Marchander. — Faire un marché, acquérir. —
Débaucher, mettre à mal. — Disputer, défendre,
batailler, résister. — Négocier. — Amuser, trom-
per. — Agir, solliciter.
Voyez sur ce mot le Dict. de Nicot, le Gloss. sur
les Coût, de Beauvoisis, au mot Barguigner, et Du
Cange, (llossaire latin, au mot Barcaniare.
Bargaigner est mis pour trafiquer dans un sens
figuré en ce passage :
Quant les batailles sont rangiés,
Sovent i perdent, et gaaignent,
Quar ce savez issi bargaignent.
Blanch. MS. de S. G. fol. 179, R- col. 1.
Au second sens, ce mot signifie marchander (1):
peu pris.
Celui qui en ceste plaine
Bargaigne, et achate au pis.
Will. li Viniers, Poos. SISS. av. 1300, T. H, p. 815.
« Un marchant vint barquigner dviips de soye, et
« de mercerie d'un mercier de Tournay. » (Bout.
Som. rur. p. 832.)
Bargigner a été employé avec la signification de :
faire un marché, acquérir. On a dit au sujet de la
mort de Louis VIII :
N'ains, Paradis ne bargigna
Si bien, ne tant ne gaegna ;
N'ains mais France n'ot tel desroi,
Puis Charlemainne le bon Roy.
Ph. Mouskes, MS. p. 745.
Bargaigner s'est dit pour débaucher, mettre à
mal. « Disoit outre queveu que la dite nourrice, ne
« se plaignoit de luy, et qu'elle ne veult pas dire
« qu'il l'ayt vouUu séduire à bargaigner sa maîtresse
« n'est aucunement recevable à s'adresser à l'en-
« contre de luy. » (Arrest. amor. p. 290.)
Au figuré, on a donné à ce mot le sens de dis-
puter, défendre, batailler.
Ge n'i vig mi porsoir,
Mais por la pucele garir
Que vos eussiés for jugiée ;
Mais moult ert ençois bargeniée.
Floire etBlanchell. MS. de S. G. fol. 197, R° col. 3.
En mainte guise ont bargenié at tournoie
Ici perdu, ici gaaigné.
Alhis, MS. fol. 112, R- col. 1.
On trouve barginer employé pour : négocier.
Messire Jofrois, au desroi,
La tente le Roy guegna ;
N'onques à luy ne bargigna.
Ph. Mousk. MS. p. 848.
« Or fut ainsi que les dits seigneurs en chevau-
« chant entre Beauvais et Rouen, rencontrèrent
« cent ou six vingts Anglois, lesquels Anglois se
» deffcndirent si vigoureusement, qu'ils barqul-
« gnerent tant les uns avecques les autres, qu'à la
« fin les François retournèrent à Beauvais, et les
« Anglois demeurèrent au champ. » (Al. Chart.
Hist. de Ch. VI, etc.)
(1) Diez propose comme étymologie barcaniare, porter en barques marchandes, harca, qu'on trouve dans Isidore de
Séville. (n. e.)
BA
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BA
On s'est serti de ce mot pour : amuser, tromper.
nos harçjaiync
De foi parler mençongier.
Poês. MSS. av. 1300, T. TI, p. 902.
Enfin on a employé bargaigner pour : agir, solli-
citer. " Une folle damoiselle qui pour ung chap-
« peron que ung chevallier luy donna, fisl tant et
« barguigna que sa dame fist la voulenté du che-
« vallier, et qu'elle la fist deshonnorer. » (Le Chev.
de la Tour, Instruct. à ses filles, fol. 30.)
Cil qui aquite le marchié
Et premeraiii l'a bcrijenié.
Le doit avoir, et par raison.
Alhis, MS. fol. 15, R- col. i..
VARI.\NTES :
BARGAIGNE. Poës. MSS. avant 1300, T. II, p. 902.
Barbigner. Ph. Mousk. MS. p. 8'i8.
Barbignier. Poës. MSS. av. 1300, T. II, p. 905.
Baigenier. Fabl. MSS. de S. G. fol. 198, R° col. 1.
Barcheignier. Poës. MSS. av. 1300, T. II, p. Tfô.
Bargeigner. Poës. MSS. Vat. n» 1522, fol. 106, R» col. 2.
Bargenier. fi. et Blanchen. MS. de S. G. fol. 197, R».
Bargigner. Ph. Mousk, MS p. 74.5, Ger. de Rou. MS. p. 131.
Bargignier. Poës. MSS. n» 7615.
Barginer. Fabl. MSS. du R. n" 7615, T. I, fol. 59, V° col. 2.
Bargingnier. Du C. Gloss. latin, à llai-iiiiinare.
Barqlienner. Ibid. au mot Vanjaiiizalio.
Barquiner. Percef. Vol. I, fol. 140, R" col. 2.
Barquigner. Bout. Som. rur. p. 832.
BEr.GUiGNER. Gloss. lat. de Du Gange, à Barcaniare.
Barguignier. Eust Desch. Poës. MSS. fol. 380, col. 2.
Barguingnier. Fabl. MSS. du R. n» 7218, f" 296, R» col. 1.
Barguingner. Ibid. fol. 294, V» col. .2.
Barguiner. Gloss. sur les Coût, de Beauv.
Barguigner. Le Chev. de la Tour, Instr. à ses filles, t» 30.
Bergernier. Athis, MS. fol. 15, R" col. 2.
Barge (1), subst. fém. Bâtiment de mer, bateau de
rivière. — Bords des rivières, des chemins. — F^ossé.
Au premier sens, barge signifioit toutes sortes de
vaisseaux de différentes grandeurs ; il se prenoit
souvent pour bâtiment de transport, et quelquefois
pour barque, chaloupe, esquif:
Ne remest nez, bâtez, ne barge
Ne fust chargié à sa manière.
Athis. MS. fol. 87, V° col. 2.
Les barges foni appareillier.
Puis i entrent li chevalier ;
Les sigles font dresier as vents.
Blanch. MS. de S. G. fol. 189.
« Iceluy souldan seit équipper vingt quatre ou
« vingt cinq voiles, que trustes , que Darches et
« Galiions, très bien armez et empanaisez ù la mode
<• de pardeça, et très bien fournis de traict à poul-
« dre. » (J. le Maire, suite de l'IUustr. des Gaules,
p. 420.) " 11 convient plus grosse eaue à une grosse
« barge que une gallée qui court bien en platte
« eaue, ou une grosse nef periroit. >■ (Ilist. de B.
Du Guescl. par Mon. p. 404.) Le passage latin des
annales de S. Berlin, navibus magnis qitas et nos-
trates bargas vacant, est traduit par barges, dans
la Chron. de S. Den. (T. I, fol. 180.) Barge est aussi
employé pour un gros bâtiment de mer dans les
Poës. de Machaut, fol. 210. « 11 estoit entré en une
■' grosse barge à Lyon sur le Bosne. >> (Froissart,
Vol. IV, p. 13.) Les Anglois étant en mer envoyèrent
aux François un Breton, « et le firent mettre hors
« par une berge sur le sablon. » (Ibid. Vol. III,
p. 312.) « Le seigneur Louis de Lucnar conducteur
« des ambassadeurs me vint trouver avec la berge
« de la Reine qu'elle m'envoya. » (Mém. deBassomp.
T. III, p. 280.)
Nous disons encore berge pour signifier le bord
des rivières ou des chaussées. On disoit aussi autre-
fois barge. (Yoy. le Dict. d'Oudin.)
Ilarge, selon Monet, étoit le nom « d'un fossé à
'< recevoir et écouler les goutières des couverts. »
(Dict. de Monet.)
Ilurgc est une faute par barbe, dans le passage
suivant : « Chevaux, coursiers, genêts, chevaux
« d'Espagne , barges et autres. » Lisez Barbes.
(Brant. Dames Gai. T. II, p. 207.)
variantes '
BARGE. Athis, MS. fol. 54, R» col. 1.
Barche. j. le Maire, à la suite de l'IUnstr. des G. p. 420.
Berge. Mém. de Cassomp. T. III, p. 286.
Bargot, subst. niase. Petite bai-que, petit bateau.
Diminutif de barge. » Il n'y avoit, ny barge, ny
« bargot. » (llist. de B. Du Guescl. par Mén. p. 330.)
Li Rois est en une bargotle.
G. Guiarl, cité par Du C. Gloss. lat. au niot Barca.
VARIANTES :
BARGOT, subst. masc. Hist. de B. du Guescl. par Mén.
Bargotte, subst. fém. Du C. Gloss. lat. au mot Barca.
Bargette, subst. fém. G. Guiart, MS. fol. 325, V».
Barquette, subst. fém. Mém. du Bellay, T. V, p. 349.
Barguetin, subst. masc. Espèce de monnoie.
On l'appeloit ainsi parce qu'elle étoit le prix ordi-
naire des barques dans lesquelles on traversoit les
canaux de Venise. (Bob. Cenault, cité par Le Duchat
sur Babelais, ï. III, p. 220.)
Barguignard, adj. Qui barguigne, qui trafique,
qui marchande.
Ménage, dans ses Observations sur la langue
françoise, T. II, p. 401 et 402, explique ce mot par
barbarus, ce qui le confirme dans l'opinion que
baragouin s'est formé de barbaracuinus. Il s'ap-
plaudit de cette découverte, et triomphe du P. Bou-
liours, qui avoit osé le combattre. S'il m'est permis
de dire mou sentiment, je crois que bargiiius, dans
les passages cités, doit signifier faux, trompeur, et
qu'il s'est formé de barge, vaisseau, d'oîi a pu venir
barguigne , commerce , tromperie , et le verbe
bargaigner.
variantes :
BARGUIGNARD. Cotgrave, Epith. de la Porte.
Barguigneur. Rab. T. II, p. 112.
Barginus. Ménage, sur la Lang. fr. T. II, p. 40!.
Baricave, subst. masc. Fondrière, précipice.
(Dict. de Nicot, Monet et Oudin, au mot Baricave.)
Au lieu de baricace, dans le Dict. de Corneille, il
faut lire baricave. Baricane, dans D. Flor. de Grec,
fol. 120, n'est aussi qu'une faute d'orthographe.
« Acier château situé dans un fort laid pais qui est
" le Quercy, pierreux, rabotleux, montagneux, et
(I; C'est une embarcation plate, à voile carrée. On propose un diminutif du grec ^àgoç, canot ; des termes grecs de
marine ont en effet passé dans le Ponant, (n. e.)
BA
— 400
BA
(Brantôme, Cap. Fr.
« tout plein de barricaves.
T. I, p. '214.)
VARIANTES :
BARICAVE. Fav. Théat. T. II, p. 1232.
Barricave. Mém. de Cominos, p. 147.
Baricace. (Lisez Baricai<e.) Dict. de Corneille.
Baricane. (Lisez Baricave.) Id.
Barmaque, subst. fém. (Lisez Baricave.) Ibid.
Baricaut. Dict. de Cotgrsve.
Barignin, subst. masc. Sorte de jeu. Un des
jeux de Gargantua. (Rabelais, T. I, p. 140.) Le
Duchat, qui cite l'abbé Guyet, dit que c'est une
espèce de jeu de trictrac appelé par les Italiens
Baraglino.
Baril, subst. masc. Baril. Le baril faisoit partie
des marques distinctives que portoient les lépreux,
et qui servoient à les faire connaître. « En plu-
« sieurs lieux on ne trouvoit maison qui ne fut
« garnie d'une croix, et d'une cloche, et devant
" la porte d'un tronc avec les armoiries des ladres:
« la cliquette, et le baril (1). » (Bouchet, Serées,
Eiv. III, p. 290.)
On disoit v'm à baris, pour vin en barils. « Si
« comme vins en pos, ou à baris. » (Beaumanoir,
page 12.)
Et puis si ont al vin tramis
Deus Barjus, que d'Acre aportoient,
A la Taverne le envoient
Ph. Mouskes, cite par Du Gange, GIoss. lat. au mot Barile.
L'orthographe barrox, étoit en usage dans le pays
du Maine. Il falloit quatre barro::, (2) pour faire une
pipe. (Voy. Aimon. (jest. Fr. note de l'édit. p. 204.)
Le pluriel barucheaulx étoit un mol du patois de
Marseille. (Voy. Du Gange, Gloss. lat. au mot
Barutellus.) Le barrai devoit contenir trente-cinq
mesures appelées pichiers. (Voy. Ibid. aux mots
Soquetum et Ikirtassus.)
Expressions remarquables :
1° Baril foudroyant et /lamboijant. Espèce de feu
d'artifice dont on se servoit dans l'attaque ou la
défense d'une place. (Voy. le P. Daniel, Mil. Fr.
T. I, p. 589.)
2° Baril de poudre. Espèce de grenade. « Il feit
« renouveller l'assaut de 8 enseignes d'Allemens,
« avec force petits barits de poudre, lances, et
« autres artifices de poudres. » (Mém. du Bell.
Liv. X, fol. 332.)
3" Courir au baril plein d'eau. Sorte de jeu. « Les
« festes des Tupineiz, ou table ronde, estoient
« plutost des débauches et des mascarades que des
« exercices de chevalerie, car on y courait au
« faquin, au pot cassé, au baril plein d'eau, au sac
« mouillé, et à d'autres courses ridicules, qui
« estoient indignes de la noblesse. " (Le P. Menestr.
de la Chev. p. 246.)
variantes :
BARIL. Bouchet, Serées, Liv. III, p. 290.
Barril. Id. ibid. p. 308.
Bareil. Fabl. MSS. du R. n" 7218, fol. 242, V» col. 2.
Baris. lîeauman. p. 12.
lÎARAS. Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. II, fol. 166, V» col. 2.
Barrai., Rabelais, T. V, p. 168.
Barant. Du Gange, Gloss. lat. à Barallus.
Barrault. Rabelais, T. IV, p. 3.
Barroz (plier.) .\imoin. not. de l'Edit. p. 264.
Barreaulx (pliir.) Rabelais, T. V, p. 168.
Baiullaus (pliir.) Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. IV, R».
Barisiaus (plur.) Ibid. fol. 3, R" col. 1.
Barissiaus (phir.) Ibid. fol. 5, R» col. 2.
Barucheaulx (plur.) Du Gange, Gloss. lat. à Barutellut.
Barjus. Ibid. au mot Barile.
Barillage, suist. masc. Sorte de droit. On l'im-
posoil sur les barils à mettre le vin. (Voy. Du
Gange, Gloss. lat. aux mots Barilagium, ou Baril-
lagium ?,ons, Barile.)
Bariller, subst masc. Officier de l'échançon-
nerie du roi. Il étoit chargé du soin du vin. (Voy.
le Gloss. lat. de Du Gange, aux mots Barillarius et
Somarii, sous Sagma.) Dans l'état des officiers de la
reine femme de Louis XI, on lit : « Jean le Pré, dit
« Grelin, et Mathelin du Bois barilliers, chacun
» soixante livres. » (Observ. sur l'Hist. de Ch. VIII,
par Godefroy, an 1483, p. 305.)
VARIANTES :
BABILLER. Du Gange, Gloss. lat. au mot Barillarius.
Barillier. Ord. du R. de Fr. T. III, p. 33.
Barrellier. Etat des off. du D. de Bourg, p. 251. "
Barillet, subst. masc. Petit baril, diminutif de
baril.
Or me fêtes seulement tant.
Par amor Dieu le tout poissant.
Que portez mon bariselet,
Ci devant, à ce.st ruisselet.
Fabl. MSS. du R. n' 7218, fol. 3, R- col. 1.
variantes :
BARILLET. Oudin, Dict.
liARRILLET. Nicot, DiCt.
Bariselet. Fabl. MSS. duR. n» 7218, fol. 3, R" col. 1.
Barillié, adj. Qui sent le fût. On disoit en ce
sens, vin barillié. Un ancien poëte, parlant de la
façon de vivre à la cour, dit :
On dort le jour, et y veille l'on la nuit ;
Et y fait on trop de gourmanderie,
Vin barillié, et viande pourrie
Y ont plusieurs.
Poës. MSS. d'Eust. Desch. fol. 55, col. 1.
Barillier, subst. masc. Faiseur de barils.
(Boileau, Livre des Mestiersdu Chàtelet, mss. fol.ll.)
Barion, subst. masc. Nom de démon. Nous le
trouvons souvent répété dansleprocèsdu maréchal
de Rais. (ms. du Roi, p. 40, V% etc.)
Bariquer, subst. masc. Cri de l'éléphant. (Dict.
d'Oudin.)
Barisel(3), subst. masc. Gapitaine de sergens ou
d'archers (Dict. de Borel et de Ménage. — Voy.
Régnier, Satyre VI.)
VARIANTE :
BARIZEL.
(1) Baril a ici le sens d'écuelle, comme le prouve ce passage d'Ambroise Paré : « Pour ceste cause les magistrats leur
enjoignirent [aux ladres] ne boire qu'en leur baril. » (Edition xMalgaigne, ISiO, XXII, 8.) (N. E.) - (2) Amyot emploie aussi
cette forme (les Graajues, 23); chez Ponsard on trouve barrau. (Edition citée, I, p. 616.) (n. e.) — (3) En bas-Iatin
barigildus. Nous avons affaire à un radical allemand, encore inconnu. (N. E.)
BA
407 —
BA
Baritonner, verbe. Fredonner. (Dict. de Cotgr.)
Borel explique baritoniser par chanter et cite les
vers suivans, tirés d'un ancien livre intitulé l'Art
de Rhétorique :
Pan oncques mieux ne barilonisa
Diapason, au son de ses musetes.
Mais cette explication ne paroit pas juste. Ce mot
signilie proprement faire du bruit comme l'élépliant,
autrement &ar?vsser. 11 s'employoit de là, au figuré
pour fredonner; c'est en ce sens qu'il paroît devoir
être pris dans le passage cité. Le participe de ce
verhe, mis pour épithète de basse contre, dans le
passage suivant, sert encore à condamner Borel.
« Basse contres barytonnantes, tailles douces, et
« agues haut contres. » (Alect. Rom. fol. H8.)
Rabelais donne h ce mot une acception particulière.
(T. I, p. 39, et T. 111, p. 207.)
Barytonnant est aussi un terme de musique.
Là naaint gosier, barytonnant bondit.
Qui iay prononce, ou balade accentue,
Virelay vire ou rondel arondit.
Maint servenlois là endroit se ponctue
Chant royal maint si chante et psalmodie.
j. Lo Maire, suite de l'Illustr. des Gaules, p. 3Sl.
VARIANTES :
BARITONNER. Cotgr. Dict.
Barytonner. Alector. Rom. fol. 118.
Baritoniser. Borel, Dict.
Barles (1), sxib^t. plur. Engins ù pêcher. Paniers
ou autres inslruuiens à prendre du poisson. « Qui
« est trouvé à chacun bacquet, qui ait plus de huit
<' barles, et de cinquante vievins, cliet en amende
« de soi.xante sols, et pert le surplus. » (Bout. Som.
rur. p. 8G0.) Ce qui nous feroit croire que biuie
désignoit spécialement un engin à prendre des an-
guilles, c'est que nous trouvons (Ibid. p. 507), la
même disposition répétée avec cette différence seu-
lement, qu'au lieu de huit barles, on lit, Imit
bouche lies aux anguilles.
Bai'ley, subst. masc. Orge. On disoit : « pain
'< fait de barley, » en latin panis hordeacei, dans
une citation de Du Cange, Gloss. lat. au mol
Panis furtis.
Bai-long, subst. masc. Parallélogramme. Carré
plus long que large. (Voy. les Dict. de Monet,
Ménage, Borel.) « On a donné le nom de barloug,
« en armoiries, aux figures plattes, et longues en
« quarré comme les peaux d'Arragon. » (Menestr.
Orn. des Arm. p. 342.)
VARIANTES :
BARLONG. Monet et Nicot, Dict.
Barlang. (Lisez Baiiong.) Borel, Dict.
Berlong. Du Cange, Gloss. lat. à Bislonntis.
Belong. Gloss. de l'Hist. de Bret.
Balong. Cotgrave, Dict.
Baiiong, adj. Oblong. « En forme ovale, et
barlongue. « (Uist. de la Popelinière, T. 1, fol. 35.)
Barloug s'est dit aussi d'un habit plus long d'un
côté que de l'autre. (Dict. de Nicot.)
variantes :
BARLONG. Hist. de la Popel. T. I, fol. 35, Ro.
Bellong. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 230, V» col. 2.
Barlue, subst. fém. Berlue. Nicot, dans son
dictionnaire, définit ce mot: » Otruccation des yeux
« qui fait que l'œil ne peut discerner une chose de
« l'autre. " Selon Monet, barlue signifie lumière
obscure et ombragée, et Oudin fe traduit par
l'Italien barlume (2)"qu'il explique: « entre chien et
« loup. »
Dea pourtant si g'ay la barlue,
Désormais je suis un vieillard.
Test, de Palhelin, p. HO.
Barn, subst. ■masc. Jugement. Mot breton. (Voy.
Du Cange, Gloss. lat. au mot Matiberiii, qu'il expli-
que psii- judices probi, et boni.)
Barna, verbe. Juger. Mot breton. (Voy. Babn.)
Barnabe, subst. masc. Nom d'un saint. On
disoit proverbialement : « A la S' Barnabe, sont les
« plus longs jours d'été, ou la S' Barnabe le plus
'> long jour d'été ; à la S'° Luce, les jours augmen-
« tent. » Mais ces proverbes ne peuvent plus être
véritables depuis la réforme du calendrier par
Grégoire Xll, en 1582.
Barnart, subst. masc. 11 est écrit Banarf dans le
passage suivant, où ce mot semble désigner le roi
d'Angleterre, en guerre avec le roi de France.
Il ot jadis, selon la fiction,
Guerre mortel, périlleuse, doutable
Qui trop dura, et fist d'afliction,
Entre Banart, l'archiprêtre invocable,
Et Briquemerle cerf non defensable.
Qui gasterent l'un de Tautre pais
Eusl. Desch. fol. ia9, col. i. pois. MSS.
Barnei, subst. ou nom de lieu. Bureaux de
Barnei. Expression proverbiale qui se trouve dans
le Recueil des poës. mss. av. 1300, T. IV, p. 1652.
Barnelment, adv. Courageusement. Ce mot,
dans S' Bernard, Serm. Fr. Mbs. répond au latin
Viriliter.
La Virge li dist, douce amie,
Ne soies de riens esmarie.
Mais barnelment vos continez
Car hui, en cest jor, reclievrés
Por ceste fraisle vie brieve,
La grant joie qui ains n'akieve.
Vie des SS. HS. de Sorb. chif. LX, col. 57.
VARIANTES :
BARNELMENT. Vies des SS. MSS. de Sorb. Liv. X, col. 57.
Bernilement. S' Bern. Serm. fr. MSS. p. 319 et 331.
Barnes, subst. plur. On appeloit ainsi les lieux
où il y avoit des fontaines dont l'eau étoit salée.
C'est de ce mot que s'est formé celui de bruneau,
en latin brunellum, qu'on trouve dans les titres de
la Bourgogne, pour signifier une mesure de sel.
(Peliss. Hist. de Louis XIV, Liv. VI, p. 339, etc.)
Le mot de barnes, employé au masculin pluriel,
signifioit le nom de peuples, peut-être des habitants
de Berne. « L'an 1476, le duc de Lorraine qui esloit
(1) Barle, dans les mines exploitées, est aujourd'hui synonyme de faille, (n. e.) - (2) Le mot italien assure l'étymolosie :
nous avons là le préfixe péjoratif bar, plus la forme lue, dérivée de lucere, luire, (n. e.)
BA
408 —
BA
0 au pays de Suisse, avecques les Suisses, liâmes,
« Allemans, Lorrains. •> [Cliron. Scand.de Louis XI,
p. 200.)
Bai-nez, s!(/^s/. masr. plur. Les juges des
Hébreux. Ce mol est employé en ce sens dans
l'Hisl. des trois Maries, en vers, mss. p. 196. Il est
formé visiblement du mot barn, jugement; d'où est
aussi venu notre mot t)rt?'orî, le premier attribut des
barons étant de rendre la jusiice à leurs vassaux,
et de former même le tribunal de la nation.
Barnis, adj. Mâle, viril. Li barnis Manière-^,
dans S. Bern., répond au latin Vlrilis conslantia.
— Àige bernil, iclas virilis. — neriiil coraigc,
virilis animas. — Demis li cucrs, virilis auimus.
VARIANTES :
BARNIS. s. Bern. Serm. fr. MSS. p. 269.
Bernil. S. Bern. Serm. fr. MSS. p. 207 et 219.
Bernis. S. Bern. Serm. fr. MS. p. 269.
Bariio, subst. inasc. Fils libre. (Dict. de Borel,
2" add.) Cet auteur n'appuie cette explication d'au-
cune autorité. (Yoy. Bauoî;.)
Baron, subsl. masc. Homme. — Homme illustre.
— Titre de fief. — Titre de noblesse. — Fils aine
d'un sei-sneur. — Titre de l'archevêque de Tours.
— Homme du commun. — Voleur. — Mari. — Titre
donné aux saintes.
Les mots baron et hcrs, dans S. Bern. Serm. fr.
MSS., répondent au latin vit; dans le sens d'homme
et dans le sens de mari. Nous ne considérerons pas
ce mot dans la signification qu'on lui donne aujour-
d'hui. Nous nous contenterons de rapporter les
différentes acceptions que les anciens auteurs lui
ont données, et nous ferons un article particulier
de chacune d'elles. Voyez d'abord, sur les diverses
origines de ce mol (1): Ruinarl, sur laChron. deFré-
dégaire, p. 021 ; le Gloss. lai. de Du Cange, au mot
Ri'ci homines; le Gloss. du R. de la Rose et le supl.
d'Argenlré, Coût, de Bret. p. 2188 ; Fauchet, Origine
des dignités de France ; Le Laboureur de la Pairie,
p. 250^ et le Cellhell. de L. Trippault.
Le mot baron s'est employé pour homme. (Laur.
Gloss. du Droit fr.)
Dans la seconde acception, il a signifié : Homme
par excellence, homme illustre en vertu et en nais-
sance, brave seigneur, homme vaillant. (La Roque,
sur la Noblesse, p. 352.)
Noble ou nouble baron, ce titre est pris dans les
actes par les comtes et les ducs de Bourgogne.
(Voy. Pérard, Hist. de Bourg, p. 450, lil. de 1242 ;
p. 46f), tit. de 1246 et autres, jusqu'il 1269.) En y
ajoutant : par la grâce de Deu, (Voy. Pérard, Hisl.
de Bourg, p. 486, tit. de 1257) et quelquefois : el
Prince. (Pérard, p. 518 et 519, tit. de 1269.) Ce titre
est donné aux comtes de Savnve et Bourgogne,
dans Pérard (pages 518 et 519, lit. de 1269), et aux
comtes deNevers et aux comtes de Bar, dans Pérard
(p. 408, lit. de 1247.) On lit 7Wbles bers, parlant du
duc de Bourgogne, du duc de Bretagne et d'autres
seigneurs. (Voy. Pérard, Hist. de Bourg, p. -482, tit.
de 1255 ; et Morice, Hist. de Brel. col. 112 et 1 1.3, tit.
de 1268; et Rymer, T. I, p. 13, tit. de 1256.) Hono-
rable ou onorable baron, monseignor éloit la quali-
fication de l'Abbé de S' Etienne et du Doyen de la
S" Chapelle de Dijon. (Pérard, Hist. de Bourg, page
52(1, lit. de 1209.) Onorable baron étoit le litre d'un
Archidiacre de Langres. (Pérard, Hist. de Bourg,
p. 478, tit. de 1254.) Onorables barons est dit de deux
personnes, dont lune estoil arcedlacre et l'autre
arceprevene (c'esl-à-dire archipreslre) de Beaune.
(Pérard, Hist. de Bourg, p. 500, tit. de 1260.)
Ber est pris en ce sens dans ce vers :
Ne sui pas si preux, ne si her.
Fabl. MSS. du P.. n- 7996. p. 2.').
Il est comme synonyme à prodome. On lit : pro-
domes et barons, dans Athis, ms. fol. .54, V" col. 2.
Baron est employé comme terme générique et
comme terme spécifique. « Trestout li Baron, Prin-
« ces Barons Ducs Comtes. » (Ger. de Rouss. ms.
p. 80.) Ce mot est aussi employé en mauvaise part
comme en parlant du grand Polyphôme.
Ainsi se scet li bers esbatre
Mais loing, et prés, toiiz ceulz qui l'oient
De son encontre se desvoient.
Macliaut, MS. fol. 201, V- col. 1.
Baron, comme titre de fief, désignoil tous ceux
qui tiennent leur pinncipale seigneurie immédiate-
ment de la Couronne. ^La Roque, sur la Nob. page
350 ; Du Tillet, Recueil des R. de Fr. p. 341. — Voy.
aussi un long article à ce sujet dans le Supl. au
Gloss. du R. de la Rose.)
Le titre de grands barons exprimoit une supé-
riorité éminenle sur les nobles et les riches, dans
ces vers :
A tous ses grands barons manda en commandant
A tous nobles et riches commanda en mandant. .
Gérard de Rouss. MS. p. 193.
Le titre de baron royal, qu'on voit dans Petit J.
de Saintré, p. 325, étoit apparemment celui sous
lequel on désignoil les hauts barons. On trouve
proceres-^our barons, dans le Gloss. du P. Labbe.
C'étoil le premier ordre de la noblesse en Béarn.
« Dans le Bearn, il y a trois ordres de noblesse, les
« barons (lui sont les grands seigneurs de la
« noblesse titrée, les cavèrs qui sont les chevaliers
« armez, et les domengers qui sont les écuyers,
» baclicliers, damoiseaux et autres, non encore
« chevaliers. » (Le P. Menestr. de la Cheval, p. 100.)
Le baron, pris en ce sens, étoit supérieur au châ-
telain. « Avant qu'aucun se puisse dire seigneur
<. baron, il convient qu'il ayt souz lui plusieurs
.< chaslelains, ou deux pour le moins, et est fondé
» d'.avoir ville close, collège, abbaye ou prieuré, ou
.< autres droits déclarez au chapitre des droits de
» seigneur chaslellain. » (Coût. Gén. T. H, p. 545.
(1) On hésite entre le celtique- fcar, héros, et le barus de la loi des Allemands, qu'on rattacherait à beran, porter, avec le
sens d'homme robuste, de noble. L'étymoloaie allemande est assez probable, le mot baro ayant en latm populaire le sens
péjoratif dhomme stiipide. de valet d'armée. C'est là le sort des mots allemands dans le français; de même Hoss, cheval
de prix, est devenu ce que l'on sait. (,n. e.) '
BA
409 -
BA
— Voy. Les Ordoii. des ft. de Vr. T. I, p. 271 ; les
Annot. sur la Soin. rur. de Bout. p. 901.)
Le bcn'on devoit avoir, au moins, dix hommes
nobles pour vassaux. (Voy. La Salade, fol. 53.) Sui-
vant le même auteur, le vicomte étoit supérieur au
baron ; mais ce sentiment, peu fondé, est contredit
par l'arlicle suivant :
Ou dislinguoit les barons simples et les barons
doubles. Le "baron simple éloit celui qui avoit une
cliatellenie avec un ressort: il étoit distingué du
haut baron, qui relevoit immédiatement du Roi.
(Voy. Bruss sur les Fiefs, p. 89:) ) Le baron double
avoit deux baronnies. « Une aulre exemple vous
'< diray d'une grant U;.me qui fut femme à ung
<< baron double. » (Le Cliev. de la Tour, Instr. à ses
filles, fol. 07.) Les auteui's sont partagés sur le
nombre des cbatellenies qui devoit composer une
baronnie, et sur le nombre des baronnies néces-
saires pour former un comté, un marquisat, un
duché. (Voyez La Salade, fol. 53. — Le Coût. gén.
T. II, p. 05; et Fauch, de l'Orig. des Dign deFr.
page M.)
tout baron, par la nature de son fief, étuil ban-
nerel et avoit droit de lever bannière. Le simple
bannerel n'avoit ce droit que par une concession
particulière. « Le comte de Laval debatil que
" monsieur Raoul de Conequen n"estoit baron ,
« mais seulement bannerel, et qu'il avoit levé baa-
« nière, dont ou se mocquoil, et l'appelloit le che-
» valier au drappeau quarré ; et le dit Conequen
« se maintenoit baron ayant près de cinq cents
« vassaux, et grandes rentes. » (Du Till. Rec. des
R. de Tr. p. 318. — Voy. La Roque, traité de la >;ob.
p. 28.; Cependant on voit souvent dans différens
auteurs le mot baron, pris pour chevalier banneret,
servir à le distinguer du simple chevalier. (Voy. Du
Cange, sur Joinv. p. 190.)
Le titre de baron, pris comme titre de noble,
signifioit toute la haute noblesse supérieure aux
simples chevaliers. « Les Roys doivent avoir des-
" soubz eux contes, et viconles, ducs, princes,
>' valvasseurs, et dessoubz ces /^«ro?fs doivent estre
" chevaliers d'ung Escu, lesquels doivent gouver-
« ner selon l'ordonnance des barons qui "sont es
« haulx degrés de chevalerie, devant nommez. »
(Ord. de Chev fol. 5, R°.)
La dignité de baron venoil immédiatement après
celle des ducs. « Le baron de Raiz auroit supplié
« qu'il ne fust rien changé au rang premier que,
« de toute ancienneté, les barons ont après les ducs,
« de ne prescrire aucune forme de partage entre
" les héritiers des comtes barons. » (Coût. gén.
T. II, p. 832.) Par ce passage, les comtes paroissent
confondus avec les barons.
Baron, désignoit le fils aine d'un seigneur de
village, suivant la façon de parler de quelques pro-
vinces. (Boulainv. Ess. sur la Nobl. Tab. page 44.)
C'est sans doute ce que Borol entend p;ir'le mot
barno, qu'il explique par fils libre dans les 2'' add.
de son Dict. Il y a tout lieu de croire qu'il a mal lu.
En Bretagne, le titre de baron se donne aux puînés;
les aines s'appellent co»//<rs. (Voy. La Roque, sur la
Nobl. p. 150.)
Baron éloit un titre attaché à l'archevêché de
Tours. « Révérend père en Dieu, messire Simon de
« Maillé, archevêque, seigneur, baron du palais
« archiépiscopal de Tours. » (Coût. gén. T. II, [1.20.)
Baron se disoit aussi pour désigner un homme
du commun. (Dict. de Borel, et Suppl. au Gloss. du
R. de la Rose.)
Ce mot a même servi pour signifier un voleur, en
italien barone. (Dict. d'Oudin.) « Louis le Débonnaire
" commanda aux messagiers qu'ils cherchassent les
« contrées pour les barons, et les robeurs qui, en
« ce temps, faisoient moult de maulx. » On lit dans
le latin » prœcepit ut missi irent qui immanilalem
<■ prœdonum at(iue latronum quœ inaudila emer-
« serai, cohiberent. » (Chion. S. Den. T. I, p. 173.)
Baron se disoit quelquefois pour le maître d'une
maison et pour mari. (Glossaire du P. Labbe.)
Le comte ou duc époux de la duchesse Berthe est
appelé son baron, dans Gérard de Rouss. p. 185.)
Aussis semblablement occis
Très deloyaument son baron,
Clitemnestra, Agamemnon.
Eust. Desch. Pous. IISS. fol. 506, col. 1.
C'est en ce sens qu'en parlant d'une paysanne
qui répond à son mari, l'on a dit:
Elle respond à son baron.
Fabl. MSS, de S. G. fol. 21.
De là, femme covertc de baron signifioit femme
en puissance de mari. (Britt. Loix d'Angl. fol. 67.
— Voy. Beauman. p. 230 et 237; les Ord. des R.
de Fr. T. I, p. 119; et le Gloss. du P. Martene.)
Enfin /;«; OH a été une qualification donnée aux
saints : le baron Saint-Jacques. (Froiss. Liv. III,
p. IH.) Le glorieux baron M-' Saint-Antoi)ie. {A\)o\.
pr. Hérodote, p. 6Ti7.)Lebaronde Berhanie pour le
Lazare et autres, dans nos anciens sermonnaires,
cité dans le Suppl. au Gloss. du R. de la Rose.
Baronet étoit le diminutif de baron.
» Le ber [i] qui est le terme dont on se sert en
" Flandres el en Picardie est la même chose que
" baron. » (La Roque, sur la Noblesse, p. 01. —
Voy. aussi Du Cange, Gloss. lat. au mot Barones et
Gloss. sur Villehard.) On a employé le mot ber,
comme celui de baron, pour désigner un homme
brave, v;iillant :
l'ovres estoit, mes de cuer estoit ber.
Nol. du Rom. d'Alex, fol. 23.
Henry est tant sage, tant puissant et tant ber.
Rom.de Kou, MS. p. 136.
(Voy. Du Cange, Gloss. lat. au mot Barnagium.)
On s'est servi du mot bers ironiquement dans ce
vers :
Promettre sans donner est bers.
rocs. MSS. avant 1300. T. IV, p. U91.
Ou disoit au féminin baronesse, barronnesse,
barncsse, femme de baron. Nous trouvons aussi bar-
il) Li ber est le cas sujet et vient de baro, avec l'accent sur a ; le baron est le cas résime et vient de baronem. (N. E.)
II. - 52
BA
- 410 —
BÂ
ncssc, pour femme en gcnéml, dans Ph. Mouskes,
Ms. page 352.
Heniaïquons celle expression :
Ilaron de Fa'ueslc (1) semble signifier fanfaron,
suivant une (lazelle de 1031, elle I*. Meneslriei'. On
lit, au sujet d'un ballet joué en 1031 : « Puis
« descendit des Alpes, une autre femme représen-
« tant la vraye l^enommée qui au son de ses
« trompetles list paroisire la vanité des barons de
« Fd'iicslc ei introduisit en leur place neuf cava-
« iici s encore plus ricliemenl vêtus, auxquels elle
" laissa libre le champ de la gloire. » (Beaucb.
Rech. des Th. T. III, p. 98.)
VAF.IANTES :
BARON. Orlh. siibsist. S. Bern. Serm. fr. MSS. p. 177.
Barron. Poës. MSS. av. i300, T. IV, p. 13H.
Baronet. Valesiana, p. 202 et 203.
Baran. Chr. S' Den. T. II, fol. 169.
Barat. Notice des Vœux du Paon, fol. 163.
Barnes et Barons. Ger. de Rouss. MSS. p. 110.
Barno. (Lisez Baron.) Borel, Dict.
Barnies at Bernes. Ger. de Rouss. MS. p. 112.
Bauron at Baron. Athis, MS. fol. 87, R» col. 2.
Barlm. Pérard, Ilist. de Bourg, p. 473.
Ber. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 179.
Bernes ou Barnies. Ger. de Rouss. MS. p. 112.
Bers. Ger. de Rouss. MS. p. 7.
Barnesse, subsl. féru. Ph. Mousk. MS. p. 352.
Baronesse, suhul. l'ém. Froissart, Liv. I, p. 67.
Baronnesse, sicbst. fém. Ger. de Nev. 2 part. p. 100.
Baronage, suhst. mase. Corps de noblesse. —
Train, éi|uipage. — Seigneurie, domaine. — De-
meure, habilalion. — Gouvernement. — Droit
seigneurial. — Valeur, vertu. — Acte de vertu, de
valeur. — (Jloii-e, honneur, magnilicence.
(Voyez, surce mat, leDict. deNicot etLaur. Gloss.
du Dr. Fr. ; les Dict. de Rob. Est. Borel et Cotgrave,
au mot lîarnrtge; Du Cauge, Gloss. lat. au mot
Ileriiugium ; le Dict. d'Oudin, au mot liernaige)
Dans toutes ses acceptions, ce mol dérive du mol
bavun.
Ce mot s'est employé pour corps de noblesse.
C'est en ce sens qu'on lit : « Le Roy a tout son riche
« barnage ;-2;i. » (Chroniq. de S' Denis, T. I, f° 152.)
Sou havnmjc ol par grant poésie
Tuit asseniblé-à une feste.
Blanch. MS. de S' Genil. fol. 183.
Charlemagne, ayant perdu les principaux chefs
de son armée, à la "journée de Roncevaux, s'exprime
ainsi :
Dieux ou est mes baniarjcs tous.
Ph. Mouskes, MS. p. 223.
Lors parla liautement oyant tout le barney
Ger. de Uoussillon, .MS. p. lli.
Dans la seconde acception, barnage a signifié :
train, suite, équipage.
Or li verrons son barnuUje,
Et son beubans démener.
Tocs. MSS. avant 130O, T. 11. p. 1008.
Vaillants chevalier de l'aller s'appareille
Trestout son barnage.
Ger. de Roussillon, MS. p. 45.
Onaditaussi6aj'Ha(/e, pour seigneurie, domaine.
.le vous donray un fief, voyant tout mon bornez (3).
Faucli. Dign. de Fr. li»re I, p. 34.
. . . Qui ne croist conseil des sages
Tost apetice ses bernayes.
Hisl. des Trois Maries, en vers, MS. p. 22.
De là, on lit dans Coquillart, nobles bernages, au
figuré, pour demeure, habitation :
Vous espritz, et vertueux courages,
Plaisans, honnestes, loyaux et pacifiques,
S'allez à cop (4) de vos nobles bernaqp.s.
Coiiuillart, p. 1^2.
On a dit aussi liernaige, dans un sens figuré, pour
gouvernement. Un de nos anciens écriv^iins, par-
lant de l'action d'Appius, el de sa violence ù l'égard
de Virginie, jeune fille romaine, dit : » Dès lors
n Rome enchangea son bernaige et liberté; on vit
« à chacun faire. « (Triomphe de Pélr. trad. du
B. d'Oppède, fol. 40.)
Barnage, comme droit seigneurial, éloil un droit
qui se payoit au roi et aux seigneurs, à raison des
feux, dont les nobles et les ecclésiastiques étoient
exempts. (Laur. Gloss. du Dr. Fr. au mol Barnage.)
Les maisons situées dans l'étendue du duché d'Or-
léans y étoient sujetles. Ce droit, t)u'on appelle
fouagc en Normandie, changeoit de dénomination
suivant les dilférentes provinces où il se levoit.
(Bruss. sur les Fiefs, préf. p. 19.)
Ce mot, pris dans le sens qui lui est propre et
naturel, ayant signifié un corps de noblesse el la
bravoure étant regardée comme un altribul essen-
tiel de ce corps, de là, barnage (5) se prenoitpour
valeur, courage, vertu :
Demain verra l'en mon barnage.
Fabl. MSS. du. R. n- 70%, V col. 0).
Lors se leva emprés Fourques le preux, le sage
Qui estoit son droit neps, plain de trestout bernaqe.
Ger. deKoussillon, MS. p. 108.
De là aussi barnage s'omployoil pour exprimer
l'acte même de valeur :
.\nques n'oi loer ottrage
Senz etmesuie sont barnaige :
Uns pois hardis puet moult bien faire
Dont maint prodome ont moult contraire.
Albis, MS. fol. 42, R- col. 2.
Les felonniers des félons.
Et les burnages des barons.
Rom. de Kou, MS. p. 1.
Enfin, par une extension de ces deux dernières
acceptions, on a étendu la signification de ce mot
à celle de gloire, honneur, magnificence :
Vielles gens doivent séjorner
Et jovenceax doivent errer
Por conquierre pris, et barnage
Et proesce par vasselage.
Blanch. MSS. de S' Germ. fol. 184.
(1) C'est une allusion aux aventures du Barcm de Fœneslc, imaginé par d'Aubigné, et qui préférait les apparences du
luxe à la réalité du bien-être. Les quatre livres parurent successivement de 1617 à 1630. (N. e.) — (2) Le mot barnage se
trouve déjà avec ce sens dans la Chanson de Roland (édition L. Gautier, v. 1349); « Dist l'arcevesque : Ben ait nostre
barnage. » (N. E.l — (3) La forme barnrt se trouve aussi dans la Chanson de Roland, vers 536 : « Meilz voelt mûrir que
guerpir sun barnei. » (N. E.) — (4) Aussitôt. — (5) On a ce même sens dans la Chanson de Roland, v. 535 : « De tel barnagi:
l'ad Deus enluniinet. » (n. e.)
BA
— 411 -
BA
Barnatge étoil un mot languedocien, et dans ce
patois, fa barnatge sigiiilioit faire du train, faire du
désordre. (Dict. de Borel, au mot Bernagc.)
VARIANTES :
Bargnage. Borel, Dictionnaire.
Barnage. Ph. Mouslves, MS. p. 225.
Barnaige. Athis, MS. fol. 42, R» col. 2.
Barnatge. Borel, Dictionnaire.
Bernage. CoquiUart, p. 182.
Bernaige. La Colomb. Th. d'honn. T. I, p. 73.
Barnail. Fabl. MSS. du R n» 7218, fol. 190.
Baronail. Ibid. fol. 191, R» col. I.
Barnè. Ph. Mouskes, MS. p. 140.
Barney. Ger. de Roussillon, MS. p. 114.
Barnez. Fauch. Dign. de Fr. livre I, p. 34.
Baronie, suhst. fém. Collectif de barons. —
Titre de dignité. — Vaillance.
Au premier sens, on lit dans La Colombière (Tli.
d'honn. p. 73) : .< La baronnie soubs vous ici pré-
« sente. »
Le Glossaire du Roman de la Rose l'explique par
compagnie, assemblée de seigneurs.
Comme titre de dignité, la baronie étoit confondue
avec la pairie. Dans l'acte de cession de terres faite
h Jeanne, fille de Louis-le-IIulin, on lit : « Pour les
« tenir eu pairie et baronie. « (Voyez le Glossaire
latin de Du Cauge, au mol/'rt)"cs.)
Le titre de baronie (1) étoil affecté particulièrement
aux terres de Coucy et Beaujeu. (Voy. Gr. Cout.de
Fr. livre II, p 182.) Tenir une tere en baronie,
c'étoit la posséder en qualité de duc, comte, prince
ou roi. On disoil aussi : « Tenir en baronnerie \)0\ir
" tenir du Roy immédiatement , aVec tiltre de
« baron, d'un seigneur qui peut avoii' des barons
« tenans de luy. comme de duc au comte. » (Bout.
Som. rur. p.4'i(>; noie de l'éditeur.)
On a dit aussi baronnie pour vaillance, qualité
qui distinguoit particulièrement les baVous ou
nobles. Cemot est employé en ce sens, dans leRec.
des Poés. .MSS. av. 1300, f . IV, p. 1360. On a vu le
mot barnage avoir cette même acception, et en
général toutes celles du mot baronie.
variantes :
BARONIE. Du Gange, Gloss. lat. au mot Pares.
Baronnie. La Colomb. Th. d'honn. p. 73.
Baronnerie. Rom. de Rou, MS. p. 72.
Barqiiei'ol, subat. ninsc. Batelier. « Se fait
« mettre à bord par le burqueroUe. « (Apol. pour
Hérodote, p. 18!).)
variantes :
BARQUEROL. Berg. de R. Bell. T. I, fol. 97.
Barquerolle. Apol. pour Hérodote, p. 189.
Barquerot. Mém. du Bell, livre IX, fol. 279, R».
Barqlierotier. Jlerl. Coc. T. I, p. 256.
Barfiuei"ole,S!<Z;sf. fém. Diminutif de bateau (2),
nacelle. (Voy. les autorités citées sur chacune des
orthographes rapportées en cet article.)
variantes :
BARQUEROLE. Monet, Dict.
Barquerote. Div. Lee. de Du Verd. p. 119.
Bariquelle. Nicot, Oudin et Monet.
Barquette. Essais de Mont. T. II, p. 448.
Barquiaii, snbsl.masc. Bassin. Réservoir d'eau.
Ce mot est employé dans le patois de Marseille.
(Voy. Du Gange, Gloss. lat. au mot liarquelius.)
Barracan, subst. masc. Espèce de camelot. —
Manteau.
On trouve, dans le premier sens, harracanns et
boracanus, dans le Gloss. lat. de Du Gange.
Les barracans (3) étoient des manteauxainsi nom-
més, sans doute, parce qu'ils étoient de l'étoffe
appelée barracan. Les iiabitans del'ile de Zerbi ou
de Gerbes étoient vêtus, en l.">(jO, de manteaux de
laine, avec une frange de soie en bas ; ils appeloient
ces manteaux barracans. (Ilist. de M. de Thou,
T. III, p. 395.)
liavviichexix, adjectif. Rabacbcux. Motvulgaire.
(Gelthel. de L. Tripp.)
Bai-rage, subst. masc. Sorte de droit. C'est un
droit de passage ou péage à la barrière. Il est doma-
nial à Paris et dans d'autres villes. On Ulbeirages
dans les Ord. T. III, p. 3Ci. C'est une faute pour
barrages et l'éditeur se trompe lorsqu'il dit qu'on
peut lire berrages.
variantes :
BARRAGE. Cotgnve, nictionnaire.
Barage. Borel, .Ménage, Dict.
Barraige. Rabelais, T. II, p. 70 et 275.
Beir.\ge. Ord. des R. de Fr. T, III, p. 364.
Barraux, subst. masc. plur. Voici le passage
oii nous trouvons ce mot: « Le sommelier doit
« venir avec trois bons chevaux chargez de bons
■t instrumens pour arrouser le gosier, comme
« coutrets, barrau.r,'\)nv\\s, flacconset bouteilles. »
(Fouilloux, Vénerie, fol. 34, V°.)
variante :
B.VRREAU. La Thaum. Goût, de Barri, p. 451.
Bnvve, subst. fém. Cour ou siège de justice. —
Délais, exceptions. — Barrière. "— Obstacle. —
Empêchement.
Au premier sens, ce mot signifioit cour ou siège
de justice.
On lit dans Du Gange, sur les établissements de
S' Louis, p. 190 : « Ordonnons que en toutes les
« barres ou jurisdictions de nostre duché et sei-
« gneurie d'icelle, les sénéchaux dessus les lieux,
« chacun en sa barre et auditoire, s'enquièrent,
« etc. » (Ord. des ducs de Bret. fol. 219.)
Barres duehables se disoit pour justice ducale.
(Ibid. fol. 308.)
Havre signifie aussi défense, exception en justice,
délai. Quelquefois même on s'en est servi pour :
(1) Dans la hiérarchie des fiefs, ta baronnie venait au second rang, après les fiefs de dignité : elle se composait d'une
ville fortifiée, entourée dp douze bourgs au moins, (x. E.) - (2) C'est ce mot, et non barcarolle, qu'aurait dû employer
V. Hugo dans sa 5« Orientale : « Adieu la barcarnllr, Dont l'humble banderolle Autour des vaisseaux vole. » La barcarolle
est une chanson particulière aux "ondoliers de Venise. (N. E.) - (3) L'étymologle est l'arabe harrakan, de berck, vêtement
en poil de chameau. On emploie encore la forme bouracan. (n. e.)
BA
- 412 —
BA
procès. (Voy. Loisel, Institut. Coût, au titre des
barres et crccpliuns, T. Il, p. 'iUi.) On lit delai:^ au
lieu de /;rtm's, dans d'autres ouvrages. (Voy. Pithou,
Coul. de Troyes, p. 004.)
Iluri'e se \iviinu pour procès. (Bout. Soui. rur.
p. 'iOG, note de l'éditeur.)
On lit bare pour allégation, ou exception en jus-
tice, dans Pli. Mouskes, .ms. p. 823.)
I>e mot barre a été employé pour barrière (1).
Au propre, c'est un morceau de bois qui se met
derrière les portes. M. Valois, d:ins sa notice p. ;i5r>,
remari|ue que le mot barre a plus de 000 ans d'an-
cienneté. Il conjecture que ce mol a formé celui de
bar (2) qui s'est dit pour porte. (Voy. ibid. p. 75.)
« L'huis ferment h bonnes /narres coulices. » (Lanc.
du Lac, T. I, fo!. 112.) « Ces t;ens d'armes bretons
« el frauçois s'en vindrent de grand vonlenté au
« guet : et gais'aereut, de plaine venue, la barre
« du guet. » (Froissnrt, Vol. 1!, p. 100.) » La dite
« ville et les barri:^ d'icelle ont besoiug de repara-
« lion et forlificalion. » (Ord. des l\. de Fr. T. V,
p. 390.) L'éditeur l'explique par barrière.
Sa garnison y mit, très fort bien y fait faire :
De bars, et de chaflaulx, l'a clouse, tout entour.
Ger. de Roussillon, MS. p. 53.
Pris flgurément, le mot barre signifioit aussi
obstacle,'résislance, empêchement :
I metront contrediz, et barres.
G. Gniart. MS. fol. 68, V.
Pour faire là escu et barre.
Machaut, MS. fol -219, U" col. -2.
Citons les expressions suivantes :
1° Jeter, ruer, ou tirer la barre. Sorte d'exercice.
Ce jeu consistoil à jeter une bari'e de fer, le plus
loin ([ue l'on pouvoit. (Voy. la Mil. fr. du P. Daniel,
T. 1, p. 228.) On voit, dans les Mém. d'Olivier de la
Marche, Liv. 1, p. 338, que « le comte Charolois
« jouoit aux barres à la façon de Picardie. »
2" Tenir barre, c'esl-îi-dire résister: « Ses
>> ennemis le combattirent, et luy tinrent bonne
« barre, car ils éloient grand quantité de gens. »
(Cliron. de S' Denis, Vol. 1, fol. 78.)
3" Partir des barres (3). Expression usitée en
termes de vénerie, en parl.iut du sanglier. (Gace de
la Digne, des Déduits, ms. fol. 118, V°.)
-4" Par la barre .S" Just. Espèce de jurement :
« Ha par la barre S' Just, je n'avois garde de
» dormir. » (Contes d'Eutrapel, p. 391.)
Barre, employé comme terme de vénerie, signifioit
mâchoire du sanglier: « Hz ontquati'edenz, deuxen
« la ftrtrre dessus, et deux en la barre dessoubz. Des
>< petits ne parle-je qui sont teles comme d'un autre
« porc. » (Chasse de Gaston. Pliébus, ms. p. 01. i
VARIANTES :
Barre. Valois, Notice, p. 3T)5.
Bar. Ger. de Roussillon, ilS.
Barr. (Lisez Barre.) Du Gange, Gloss. lat. au mot Barra.
Barriz, subst. masc. plur. Ord. T. V, p. 396.
Bari'endegui, subst. muse. Bois clos el fermé.
fLaurière, Glossaire du Droit françois.) « Le beslail
« qui entre au temps de gtandage dedans un bois
« vulgairement appelle barrendegui , clos et fermé
« raisonnablement comme est accoustumé clorre,
« peut estre prins par le seigneur du dit bois. »
(Coulumier général, T. II, page 723.)
Barrer, verbe. Exclure. — P.ayer.
Au premier sens, c'est un terme de droit:
« Félonies et baslirdies et teles autres générales
« exceptions purront tielx pleintyfs barrer de lour
« p'jrpartyes recoverer. » (Brilton, Loix d'Angle-
terre, fol. 191.)
On a dit aussi barrer pour rayer. (Voyez Dict. de
Borel.)
L'un porte sa chance barrée
L'autre la porte dessirée.
Eusl. Desch. Pocs. MSS. fol. 40 1.
Barres (jeu de). On lit dans les lettres d'Henri,
roi de France et d'Angleterre, datées de septembre
•I42'<, adressées au bailli d'Amiens: « Comme le
•' mercredy d'après Pasques communiaus dernier
« passé, que les compaignons, et gens de la ville
>. de Warloy, avoient fait crier et savoir aux villes
« d'entour que au jeu de barres qui se devoit faire,
« et list, le dit mercredi, ilz donroieut à la plus
•■ belle compaiguie de une ville et parroisse un
« mouton à laine. « (Trésor des Charles, P.eg. 172,
pièces 022 et 050.)
Barresches, subst. fém. Nous ne trouvons ce
mol que dans ce passage :
.le dis que Vanterres n'a droit
En bonne amour, ne j'à n'aura ;
Cist n'est pas sages qui fera
S'araonr crier à la barresches.
Kabl. MSS. du R. n- -GIS, T. II, fol. r33, V» col. 2.
Barrez, part. plur. mase. Raj'é. Barrées sert
d'épilhèle à Messiers dans le >'6uv. Coul. gén.
(T. Il, p. 1090.) 11 désigne leurs habits rayés ou
bigarrés. On se servoit aussi du mol barrez- pour
épllhète de carmes, à cause de leurs habits bigarrés
et barrés de diverses couleurs. (Dict. de Borel, Du
Cange, à Barrati et Birrati.) De là, il s'est employé
substantivement pour signifier des religieux mêmes :
Li barrez sont près des béguines,
Septante en ont a lor voisines ;
Ne lor faut que passer la porte.
Fabl. MSS. du R. ii" 7015, T. I, fol. 05, V col. 1.
(1) Les barres étaient ainsi nommées , parce que souvent elles étaient de simples barres de bois qui se tiraient
horizontalement comme les barrières des forêts, ou qui, relevées par un contre-poids, s'abaissaient au moyen d'une chaîne.
Elles ne servaient alors qu'à arrêter un corps de cavalerie ou les gens et voitures soumis au péage. D'autres étaient des
palissades à parties mobiles et formaient de véritables barbacanes. Les barrières étaient enfin des barricades, et Ton peut
voir une attaque curieuse de ces sortes d'obstacles dans Froissart (éd. Kervyn, t. III, p, 24-25), en l'339. Les barres étaient
aussi de simples poutres engagées dans la muraille et tirées au dehors pour renforcer le vantail ; parfois, elles étaient à
coulisse et pivotaient sur un axe. (N. k.) — (2) Bar, de Tallemand Barhe, est une civière: « Si fu h corps mis sur un bar
vesti de noir. » (Froissart, éd. Kervyn, 111, 85.) (N. E.) — (3) C'est sortir au moment précis où l'on doit se mettre on
route. (N. E.)
BA
— 413 —
BA
VARIANTES :
BARREZ. Rorel, Dict. 2" additions.
Carrée. Coût. gén. T. II, p. 723.
Barri , subst. musc. plur. Maisons de faubourg.
Ce mol, dans le patois d'Auvergne, signifie maisons
dans les fauliourgs , ou dani'. les deliors d'une ville.
(Voyez Du Gange, à Barrium.) On a dit les barri de
S' AI lyre, d'un'f:;ubourg de la ville de Clennont.
Barrier, subst. masc. Commis qui reçoit les
barrages. Le barrage est un droit qui se paie aux
barrières. (Voyez les Ord. des Rois de France, T. V,
p. "216, et Du Gange à Bicarium.)
Barrière, subst. fém. Xous ne citerons, sur ce
mot qui subsiste, ([ue les expressions suivantes :
1° Combat à la barrière. Espèce de tournoi qui
consistoit à attaquer et ù défendre une barrière.
(Voyez Petit Jean de Saintré, p. 83.) « La barrière
« amoureuse fut tenue devant Plancy contre les
.< Anglois, en -1372. » (Voyez l'Histoire de Loys III,
duc de Bourbon, p. 59.)
2" Chevaucher la barrière, c'est-à-dire être mis
à cbeval sur les barres ou les barrières des lices, et
y demeurer exposé à la risée de toute l'assemblée,
tant que le tournoi duroit. C'étoil une punition
imposée pour les cas ■< plus griefs et principaux
" des tournois. « (Voyez La Colombière, Théâtre
d'iionneur, T. I, p. G5.) On éloil ainsi exposé « léte
■< nue, et sans armes, avec sa cotte d'armes pour
« être recognu de toute l'assemblée. » (Faviu, Th.
d'honneur,"T. II, p. 1745.)
3° Faire barrière signifioit faire obstacle, mettre
obstacle :
Je ne cuidasse jamais
Que ma douce dame chiere
Me queist tant de délais,
Ne qu'elle f\sl barrière.
Eusl. Ueschamps, Poès. MSS fol. -231, cul. 4.
Barriquer, verbe. Barricader. (Dict. d'Oudin et
de Gotgrave.) « Le peuple commencedese barriquer
« vers la rue Gailande. » (Lettres de Pasquier,
T. 1, p. 787.)
Barrisser (1), verbe. Grier comme l'éléphant.
« Barrissent les éléphants. » (Rab. T. III, p. 71.)
Barroir, subst. masc. Longue tarière. J^es
tonneliers s'en servent pour faire les trous à mettre
les chevilles qui tiennent la barre du fond d'un
tonneau. (Dict. de Nicot et d'Oudin.)
Barrois de Brabant, subst. inasc. plur. Sorte
de monnoie. (Dict. de Bore), au mot .So/s.} Ondisoit
sols et deniers de Brabant.
Barroque (2), arfj. Inégal, irrégulicr. Il se disoit
des dents lui éloient d'inégale grandeur. (Dict.
étymologique de Ménage.) Ge terme est encore
usité parmi les joailliers, en parlant des perles qui
lie sont pas parfaitement rondes.
Barroyement , subsl. masc. Exception dila-
toire. Bouteiller ayant usé de ce mot, l'éditeur
ajoute en marge: « Barroijement signifie ici, comme
« en mon praticien, quit ù la main, exceptions
« dilatoires pour avoir barre sur le demandeur. »
(Bouteiller, Somme rurale, p. 231.)
Barroyer, verb. Retarder. — Débattre, contester.
Au premier sens, ce mot pareil venir de /;flnT,
pris dans le sens d'exception dilatoire, délais. On
trouve liarroijer sous ces deux orthographes, avec
cette acception dans le Dict. d'Oudin.
Barroijer, pris pour débattre, contester, semble-
roit venir encore de barre, juridiction, siège de
justice. Cependant l'éditeur de Bouteiller dit, au
contraire, que barre vient de barroyer, lorsqu'il
signifie procès. (Voyez Somme rurale, p. 206.)
VARIANTES I
BARROYER, Barroier. Oudin, Dict.
Barriiier, subst. masc. Brayer. « Deux attaches
« larges pour attacher à son barruier. " (Du Gange,
sur Joiuville, p. 184.)
Barsene, subst. fém. Bar-snr-Seine. Nom de
ville. Les loches de Barsene éloient passées en pro-
verbe d:^s avant 1300. (Voyez Recueil des Poésies ms.
avant 1300, T. IV, p. 1653.)
Bartas, subst. masc. Buisson. Mot languedo-
cien. (Itict. élym. de Ménage, elDu Gange, à /<ar/fl.)
Bartavelo, adj. Ouvert. Mot du patois langue-
docien. (Dict. de Borel, au mot Desvertoillé.)
Barthemien, subst. mase. Barthélemi. Nom
propre.-
Nulz ne veult estre Barthemieu,
Cliascuns doubte l'escorcherie.
Eust. Deschamps, Pocs. MSS. fol. 292, col. 4.
VARIANTES :
BARTHE.MIEU. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 272, col. 4.
Berte.mieu. Duchesne, Gén. de Bélhune, p. -137.
Berthemieus. Froissart, Poës MSS. p. 208, col. l.
Berthelomer. Pérard, Hist. de Bourg, p. 400.
Bertholemy. Pérard, Hist. de Bourg, p. 460.
Barthulo.mier. Cout. gén. T. I, p. 879.
Bertiiomier. Beaumanoir, p. 407.
B.\RTHOMiEnE. Proc. lie ,Iacq. Cuer, MS. p. 9.^.
BERTREMiE.ii. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 132, V» col. 2.
Berthre.my. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 195, col. 4.
BiETRE.Miu. Duchesne, Gén. de Béthune, Preuv. p. 140.
Barthoiomistes, subst. masc. plur. On nom-
moit ainsi les partisans de l'anti-pape Barthélemi.
(Voy. le Méin. de Secousse, sur le procès fait à
Ghauveron, prévôt de Paris.)
Bartole, sul)St. masc. Nom propre d'homme.
Bariole est la vraie orthographe.
Proverbe :
Bésolu comme Barthole , c'étoit une façon de
parler proverbiale à laquelle Bartole a donné lieu,
par l'autorité qu'avoient acquises les décisions de
ce jurisconsulte dans les parlemens et autres tribu-
naux (Voy. Pasquier, Rech. p. G82), ou plutôt par
(1) De nos jours on dit bar
haroco. (N. E )
•ir, du latin barrire. (N. E.) - (2; L'étyraologie est peut-être le terme dj Scolastique
BÂ
- Ali —
BA
une îilUision à l'ouvrnse déco célèbre jurisconsulte,
inliliilc Itcsolutiones Haiioli.
VAIUANTKS :
mi.
RAnTOLE. Pasquier, necli. d, (
Hertuolle. Coquillart, p. liO.
Barzelottes, siibst. fém. plur. Espèce de poé-
sie. Ce mol semble avoir quelque analogie avec
celui de harcarolles, dont on se servoit à Venise
pour désigner une sorte de chanson.
.... Chansoi;s, ballades, trioUetz,
Mettez, rondeaux, servantz, et virelaix,
Sonnet-/,, strambotz, harzelotles, chapitres,
Lvririues vers, chants royaux, et epistres.
Uoujet. Bibl. fr. T. \I, p. 1 18.
Bas, siibst. masc. lias. — Fosse, tombe. —
Chausse.
On trouve bas pour bast, dans la Farce de Pathe-
lin, page 89.
fias ètoit aussi un mol languedocien, qui signi-
(ioit fosse, tombe. (Voy. Borel, au molI>as>j.)
EnTin, on écrivoit ^«s et baas , dans le sens de
chausse, sens qui subsiste encore.
Ou distinguoit autrefois :
1° Le bas d'atlaclie. C'étoient les bas qui s'atla-
choient sous le tonnelet, ou bas de saije. (Diction-
naire d'Oudin.)
2" Le bas de chausse, le bas qui ne couvroit que
la jambe. (Dict. de Nicot.)
On disoil aussi :
3° Bas de colet, pour gorgerette ou colet de
femme. (Dict. d'Oudin.)
4° lias de manches, pour le bas des manches, les
manches pendantes, opposé au liaut des manches,
comme le bas des chausses l'éloit au liaut. des
chausses. (Voy. Rabelais, T. V, p. 69.)
5° Bas de saye, pour tablier plissé ou tonnelet
qui se meltoit autour de la ceinture. « Il y avoit
» huict enseignes de gens de pied , et de huict à
« neuf cents hommes de cheval, bien montez, et
« armez ;\ ecu, avec le bas de saije, là où défault le
« harnoys, à la façon des ordonnances de Bourgo-
« gne. » 'Mémoires du maréchal de Vieilleville,
T. ni, page 201.)
VARIANTES :
R.\S. Orthographe subsist.
Baas. Du Gange, Glossaire latin, au mot So!elus.
Bas, adj. Petit, léger, peu considérable. — Af-
faibli, exténué.
On a dit, au premier sens: « Toutes battures,
« contusions ou playes ouvertes, sont de la con-
« noissance de la haute justice ; autres batiures
« plus l)asses sont de la connoissancedu maveur. »
(Nouv. Coût. gén. T. II, p. 871.) On a ûd'hasses
réparations, pour réparations légères. (Ibid. page
1 !()().) Nous lisons /w.se au féminin, pour basse, infé-
rieure, dans les Tenures de LitUeton, fol. 17. Cette
acception subsiste, et cette même orthographe se
trouve encore dans ce vers :
Le cors ot gent, hase la liance.
Fabl. MSS. du R. n- 7989, fol 57, V- col •:.
Bas s"esl pris aussi pour affoibli, exténué: » .Soit
« advisé le fauconnier qui son oiseau ne soit trop
" maigre, et alTamé, lorsqu'il le voudra orpigmen-
« ter : car l'orpigment luy pourroit nuire, s'il le
« Irouvoit bas. » (Fouilloux, Fauconnerie, fol. 49.)
De lu cette expression: mettre an bas, pour affoiblir.
« 11 fa.'.t entretenir l'oiseau de quelque bon past
« vif, et chant, car autrement on le pourroit mettre
« au bas. (Budé, des Oiseaux, fol. 119.)
Expi'essions remarquables :
i" En ce bas , c'est-à-dire en ce bas monde.
« Pour nostre regard nous nous confessons chres-
« tiens, mililans en ce t)as pour prix, sous l'ensei-
« gne, et estendart de nostre grand capitaine
« Jésus-Christ. » (Pasquier, Itech. p. 303.)
2" Bas de poil, pour tondu de près, qui a le poil
court. Cette expression est employée figurément
dans ce passage, pour malheureux, infortuné :
Le près tondu, besoing n'est qu'on le tonde ;
Dire on luy doibt : rustre, couvres la blonde
Quant bas de poil est surtout les chrétiens.
Œuv. de RoLjer ds Collerye, p. IGO.
3° Bas du devant, épithète d'un mari, jirise dans
un sens obscène. (Voyez les Serées de Bouchet ,
Livre I, page 198.)
4° Bas-sergents , signifioit sergents d'un ordre
inférieur. (Voy. l'Ane. Coût, de Xorm. fol. lôO.)
5" Bas-instrument, désignoil un instrument d'un
son plus doux (jue d'autres. « Trompettes et menes-
« triers cornoient, et si y avoit bas-instrumens. »
(Juven. des Ursins, Histoire de Charles VI, p. 7ô.)
« Près deulx jouoient plusieurs bas-instrumens
« qui rendoient de grandes mélodies. » (Chron. de
Louis XI, page 19.)
6" Bas-mestier. Cette expression est employée
dans un sens obscène, dans les Poës. mss. d'Eûst.
Deschamps, fol. 32.j.
7° Bas-rebouer ou rembouer. C'étoit un engin à
pêcher, selon l'éditeur des Ordonnances des Rois
de France, T. I, page 792.
8- Estre de bas-renom, pour avoir mauvaise
réputation.
Pour con qu'il iert de bas renom.
Plu Mouskes, MS. p. 38(i.
9° Temps bas , pour saison avancée ou courts
jours. On a dit, au sujet do l'expédition contre
l'Angleterre, projetée par Charles Vf, eu 1386 : « Si
>■ fut bien sept jours à l'F.scluse, que tous les jours
« on disoil, nous nous partirons demain au matin,
« véritablement le vent étoit si contraire, pour
« singler sus en Angleterre, que plus ne pouvoit:
« si étoit le /cm/« tout bas, après la sainct An-
a drieu. » (Froissart, Livre III, p. 150.)
10" Bas-ton, mis en opposition avec liaut-ton,
signifioit: de quelque manière que ce soit.
.Toliveté, ne vostre hault parage.
Ne vous vauldront, que mors, de son basion,
Ne vous iiert, soit à bas, ou hniiU Ion
Tuit y mourront, et li fol et li saige.
Eust. Desch. Poos. MSS. fol. 1?.6, col. 4.
II' Vcspres t>as OU basses-vesprcs, c'est-à-dire à
l'entrée de la nuit.
Vespres est bas et près du soir.
Aihis, MS. fol. 70. n» col. 2.
BA
- 415 —
BA
On disoil encore en ce sens :
Quant il fu vespres, bas.
Vies des SS. MS. deSorb. chif. LXl.col. il.
12° De basse-heure, c'est-îi-dire tard. » Ses chiens
« le treuveni aussi bien de haulte heure, comme
« de basse, etc. » (Chasse de Gast. Phéb. »is. p. 263.)
13° liasse- chambre , c'esl-à-dire lalrines. (Du
Gange, à Bacia.)
14° Cour-basse. C'est celle du seigneur bas justi-
cier, à la diflérence du seigneur qui a moyenne ou
haute justice. (Laur. Gloss. du Dr. fr. — Du Cange,
Gloss. latin, au mol Bassa curlis.)
15" Basse-demoiselle, pour demoiselle de médio-
cre étal. (Voy. Petit Jean de Saintré, p. 140.)
10" Basse-danee, pour danse grave ou terre à
terre, opposée ;i la danse par haut ou celle des
baladins. (Voy. Clém. Marot, T. I, p. 213. — Dict.
de Nicot, d'Oudin et de Cotgrave.) Cette expression
se prenoil aussi dans un sens obscène. (Voyez Ou-
din, Cur. fr.)
17' Momioye de basse-gresse, de peu de valeur.
(Voy. Rabelais, T. IV, p. 22.)
18" Basse-main, pour la main gauche. « Après
« eulx venoient les rois d'armes et heraulx du roy,
« per à per à ceulx de France, et à leur basse-
« 7nain. » (Petit .Jean de Saintré, p. 205.)
Basse-main, pour bas-estat, grief, dédain mêlé
de colère.
19° Gens de basse-7nain, pour gens du bas étage,
inférieurs au bourgeois. « Rainbaud d'Orenge s'a-
« musa à l'amour d'une damoyselle de basse-main
« de Provence, de laquelle il n'en rapporta aucun
« proufit ne honneur. » (.J. de Notre-Dame, Vie des
Poët. Provenç. page 94. — Voyez les Assises de
Jérusalem, page 14.)
Gentilhomme de basse-main. C'est une plaisante-
rie que fait le bourreau Daru, en parlant de lui-
même dans le Mystère des Actes des Apôlres, qui
se trouve dans l'Hist. du Th. fr. T. II, p. 420. C'est
une équivoque avec main-basse.
20" Basses-marches. Façon de parler obscène,
dans les Arrêts d'Amour, p. 495.
21° Basse-musette. G'étoitnne espèce d'instrument
de musique champêtre, peut-être une cornemuse.
.... Chantoient par nos gentieus
Avec une ba use-mu sel te.
Froissarl, ToCs. MSS. p. 270.
22° Basse-noise, signifioit petit bruit. « Lors
« entendit le chevalier que la figure dit; faisons
« basse-noise, car venu est le chevalier i^i l'estrange
« signe. « (Percef. Vol. VI, fol. 47.)
23° Basse-taille. C'étoit un bois nouvellement
coupé. C'est le sens de cette expression dans ce
passage: « Trairez de si près comme vous vouldrés,
« et en ceste manière faire à revenir d'une hasse-
« taille, et faut que la lune raye bien cler. » (Modus
etRacio, ms. fol. 84.)
24° Basse-none. C'étoit l'heure de midi. (Voyez
Perceforest, Vol. IV, fol. 158.)
25° Basse-relevée. C'étoit la fin du jour. « Tu
« feras un grant noise sur le terrier, et batras la
« terre de basions en telle manière que le renart
« l'oé se il est dedens, et ainsi le feras jusque» à la
<' basse-relevée. » (Modus et Racio, ms. fol. 105.)
26* En bas, pour à voix basse.
Vers la dame sa voix atome,
Se dit en bas, non pas en haut :
Chier suei-, dit-il, iJex vos saut, etc.
Fabl. MSS. du R. n" ■;615, T. H, fol. 183, R" col. 1.
27° Bas et hault, pour entièrement.
Amours qui scet tout ^«.5, et hault.
Pois. d'Al. Chartier, p. 6(XI.
28° De bas et de haut, se disoit aussi pour entiè-
rement. " Taillable de haut et de bas à voulenté. »
(Ordonnances des Rois de France.)
29° Xe fcflSJtt; /ia(i/, pour nullement, aucunement.
J'a n'en quier don, ne bas ne haut.
Chans. MSS. du Corale Tliibaul, p. 9.
30° Prendre bas signifioit peut-être prendre par
dessous. « Si le print bas de le frapper si durement
« qu'il le porta à terre. » (Lanc. du Lac, T. III,
fol. 50.)
31° Tenir le bas, pour être asservi.
Scai-lu pourquoy je ne veux pas
Epouser Jeanne, riche et grande ?
Parce que fiere elle commande,
Et me leroit tenir le bas.
Les Touches de Des Ace. p. 59.
VARIANTES :
BAS. Orthographe subsist.
liAis et Baisse. Bas inférieur et basse inférieure. S' Bern.
Serm. fr. MSS. p. 61 et passim ; répond au latin infimus
et inferior.
Base, au fém. Tenures de Littleton, fol. 17.
Basaach [\),subst. musc. Bâcha. Bajazet s'élant
reposé quelque temps après la victoire sur les chré-
tiens à Mcopolis, en 1390, « monta fi cheval et
« grand nombre de nobles de son ost en sa corapai-
« gnie, et estoient les prochains du Roy, et de son
« conseil, le basaach, et le sourbasaacli. •> (Froiss.
Liv. IV, p. 254.) L'éditeur croit que basaaeiiest mis
ici pour lassa, et sourbasaacli pour visir bassa.
Nous prononçons hacha. (Voy. Le Fèv. Orig. des
Fiefs, p. 125.)
Basach , subst. masc. Bajazet. Nom propre
d'un Empereur turc.
ayons tuit souvenance
Des prisonniers que tient Basach soubz lame.
Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 357, col. i.
VARIANTES :
BASACH. Eust. Dosch. Poës. MSS. fol. 357, col. 4.
Basaq. Monst. Vol. I, ch. xvi, fol. -16, R".
Bazac. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 383, col. 3.
Bazat. Ibid. fol. 357, col. 1.
Basant. Froiss. Liv. IV, p. 233.
Bas-allemand, subst. masc. et adj. Qui est
des Pays-Bas.
(1) iSasaach est la forme turque de Bajazet, que Froissart nomme tantôt « le roi Basaach, » et tantôt « Y Amorath-Bucquin. »
(Froissart, t. XV, p. 322.) M. Kervyn imprime à la page suivante ; « Et estoient les plus prouchains du roy et de son conseil
Alis-Basauch tt le Sour-Hasaach. Aucunes gens disoient que c'estoient ses frères (à Bajazet), mais il ne les vouloit point
reconguoistre et disoit que il n'a^oit nul frère. » (n. e.)
BA
410 —
BA
Basanner, verbe. Ileiuhe basané. « Il ne faut
« (4u'uii haie qui basainieiii . ou noircira voslre
« femme. » (Contes du Cliul. loi. 5'J.)
VAIUA.NTKS:
BASANNER. Contes de Chol. fol. 59.
liAZANEU. Colgiave, Dict.
liasché (1) {nopces de). E.vpression populaire
pour siLMiilier une balterie à coups de poing:, ou au-
tremeni. ^Voy. les Serées des Boucli. Liv. 111, p. 92.)
Basclieur, adj. Plein de bois. En latin Nemo-
rosus. (Gloss. du \'. Labbe.)
Baschoe, subat. fém. Panier, corbeille. (Dict. de
Borel, '2" add. au mol Baacauda.) Au figure, ce
mot s'est appliqué à une femme mal faite :
Ele est plus noire c'une choe
Et plus grosse c'une baschoe.
Fabl. MSS. du H. n' 7218, toi. 2r.6, V- col. 2.
VARIANTES :
BASCHOE. Godefr. Annot. sur Ch. VI, p. 111.
Baschoues. Id. Ibid. p. 719.
Bascade. Borel, Dict. 2" addit.
Bascliouier, siibst. mase. Soile d'officier (2). Il
y avoil des officiers qui porloient ce nom, dans la
maison de Charles VI. .. Un bascliouier mangera en
« salle, et aura, chacun jour, trois sols quatre
<i deniers, pour deux chevaux qui menront le pain
« es/' aehoes. » (Godefr. Annot. sur l'Histoire de
Ch. VI, p. 111.)
VARIAMES :
BASCHOUIER. God. Annot. sur Ch. VI, p. 111.
Baschoyer. Ibid. p. 719.
Bascon , sub. masc. Titrededignité. — Biscaïen.
Au premier sens, c'étoit un titre particulier comme
celui de captai.
Ce mot, au second sens, ne se trouve que sous
rortliographe de bascon. On lit: » pais des buscons,
« ou de Biscaye, » dans les Div. lec. de Du Verd.
p. 315. On faisoit cas des chiens courans qui en
venoient. (Voy. Chasse de Cast. Pheh. Jis. p. i->2.
variantes :
BASCON. Hist. de B. Du Guesel. par Mén. p. 75.
Pascon. Ibid. p. 72.
Bascontre, subsl. masc. Basse contre. (Dicl. de
Monet.)
Baseille (3) , subst. fém. Porte de la ville de
Rbeims.
VARIANTES :
BASEILLE. Du Gange, Gloss. lat. à Basilicaris.
Bazée. Id. ibid.
Basele, subst. fém. La Biscaye. •■ Fist obéis-
a santés à luy toutes les terres d'Espaignes, de
« Galice, de Landalus, de Portingai, de Castelon-
« gne, de Navarre, de Jîase/e (4), et maintes autres. »
(Triump. des IX Preux, p. 437.)
Basenne, subst. fém. Basane.
variantes :
BASENNE. Nicol, Oudin, Cotgravc, Dict.
Bazenne. Ord. des R. de Fr. T. I, p. ©X).
Bes.\nne. Ane. Coût. d'Orl. p. 475.
Bezanne. Cotgrave, Dict.
Basennier, subst. fém. Marchand de basane ou
de souliers de basane ; ouvrier en basane. (Dict.
de Mcol, au mot Basennier.) On lit basanie>' et
ba~.:nnier, dans le Gloss. de l'Hist, de Paris.
variantes :
BASENNIER. Nicot, Dict.
Basanier. Gloss. de l'Hist. de Paris.
Bazanier. Ord. des R. de Fr. T. V, p. 106.
Bazannier. Du Gange, à Stallus et Camerarius.
Bazennier. Tobl. des Mestiers de Paris, MS. de Meinière.
Basi, adj. Mort.
Je suis hasi, si Dieu ne m'aide.
Testam. de Path. p. 117.
Guillemetle sa femme le voyant expirer s'écrie :
Le bon maistre Pierre est basi.
Ibid. p. 145.
Le même mot Basi a été employé avec la signifi-
cation de basilic, serpent fabuleux. Œil basil, œil
de basilic.
Vostre œil hasil mon cueur a si surpris,
Que son demeure totalleraent ai pris
En vous, sans plus.
La Chasse et Départ. d'Amours, p. 179.
BASI. Testam. de Path. p. 117.
Basy. Borel, Dict.
Basilic, subst. masc. Sorte de serpent. — Pièce
d'artillerie.
Ce mot subsiste au premier sens, sous la première
orthographe. Nous le trouvons employé dans ce
passage :
Bien cuident de leurs gorges
Que ce soient reliques ;
Plus venimeuses sont
Que n'est un basclicjues.
Fabl. MSS., du R. n' 7615, T. II, fol. Ui, R" col. I.
On s'est servi aussi du mot basilic pour signifier
une pièce d'artillerie, un canon de la plus grande
longueur. (Voy. Fauchet, des Orig. Liv. II, p. 122.)
« Plus de muraille deinolist ung coup de basilic (5)
« que ne feroieiit cent coups de foudre. » (Rabelais,
T. IV, p. 2(j0.)
variantes :
BASILIC. Rabelais, T. I, p. 289.
Bazilic. Lelt. de Louis, XII, T. III, p. 40.
Baselic. Rabelais, T. I, p. 185.
Baseliques. Fabl. .MSS. du R. n» 7615. T. II, fol. 144.
Basilisque, subst. fém. Monet, Dict.
(1) liasché ne serait-il pas pour bazoche, comme baschea est pour basilica ? (n. e.> — (2) C'est celui qui mène les chevau.\
chargés de baschocs. (n. e.) - (3) C'est peut-être le mot latin 6asi/ica, avec le premier i long; dans l'Orne, on trouve
BaseiUe, dérivant de 6ns, plus scillc (sylva). (N. e.) - (4) Ne faut-il pas en rapprocher Basele, qu'on trouve dans la Chanson
de Roland, au vers 3474. (x. e.) - (5) « Des baztitcs qui portoient 48 Uvres. » (d'Aubigné, hist., III, 146, éd. de 1616, in-fol.)
Et au livre I, 246 : « La furent gagnées plusieurs choses remarquables, comme des basilics de divers calibres, jusqu'à 80
livres de balles. » (n. e.)
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417
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Basilicon (1), stibst. masc. Basilic. Espèce de
plante.
Je ne voy rose, ne bouton,
Lavende, violette drue,
Marjolaine, basilicon.
Eust. Desch. fol. 7. col. 3
VARIANTES :
BASILICON. Fouilloux. Fauconnerie, fol. 13, R».
liASiLinuoT. Ici. Ibid. fol. 155, col. 3.
Basille (coq). Terme de Blason. « L'escu basi-
« lides d'or, a un coq basille. » (Percef. Vol. II, f° 129.)
Basil", verbe. Ecrouler. - Toutes fois ceulx qui
« l'eurent sains, montèrent sur les nuii-ailles, et la
» feirent sonner trompetes, et tabourins en tirant
« artillerie au travers de la ville, comnie si tout
« deust basir. » (Jean d'Auton, Ann. de Louis XII,
page 159.)
Basis, subst. masc. Basse. Terme de musique.
Basine, subst. masc. Baume. Chose excellente.
Ce mol, qui dans les Sermons Fr. mss. de Saint-
Bernard, répond au latin //«/sawHfîfs, signifioit à la
fois la plante qui produit le parfum, et le suc de
cette plante qui est le parfum même, liasmc signifie
parfum, selon les Dict. de Borel et d'Oudin. C'est
un arbrisseau, selon Nicot.
C'est droitement la fontaine de Balme.
Eust. Desch. Pu«. MSS. fol. 159, col. 2.
Au figuré, on s'est servi de ce mot pour désigner,
une chose excellente, dans quelque genre que ce
soit, relativement au goût, à rodoral,"et'même à la
vue. « La chair en est tant délicate, lanl savoureuse
« que c'est basme {'2). » (Rabelais, T. IV, p. 25.) « Ce
« sera basme de me voir briber. » (Ibid. T. II, p. 103.)
L'hoste s'écrie, et la femme se pasme ;
Les regarder, mon serment, c'est ung baume.
Faifeu. p. SI.
VARIANTES :
lîASWE. Fabl. MSS. du R. n" 7218. fol. 358, R» col. 2.
Balme. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 159, col. 2.
Blasme. (Corruption Basme.) Machaut, MS. fol. 18G.
Balsismes. S. Bern. Serm. Fr. MSS. p. 360.
Basoche (3), subst. fém. C'est le titre d'une
comédie représentée par les clercs de la juridiction
appelée basoche. Brantôme, parlant de Louis XII,
dit: « 11 pardonnoit aux comédiens de son royaume
« comme escoliers, et clercs du palais en leurs
« basoches, de quiconque ils parleroient, fors de la
« Reyne sa femme, et de ses dames et demoiselles. »
(Brant. Dames Gall. T. II, p. .'i39.)
VARIANTES *
BASOCHE. Brantôme, Dames Gall. T. II, p. i3'J.
Basoge. Bouch. Serées, Liv. I, p. 101.
Basochial, adj. Qui est de la Basoche. Au
pluriel basochiaux. On lil-souvent ces mots dans
les Statuts de la Basoche.
Basochiens, subst. masc. plur. Clercs de la
basoche. « Ils furent nommés basilicahis, du mot
« Ilasilica qui a signifié palais et maison royale de
" nos rois, et par eux délaissée au parlement pour
•< y rendre la justice. » (Des Cours souv. p. 623.)
VARIANTES '.
BASOCHIENS. Cotgrave, Dict.
Basauchiens. Rabelais, T. I, p. 315.
liAsiLicAiNS. Des Cours souver. p. 623.
Basquain, subst. masc. Basque. Nom de peuple.
VARIANTES :
BASQUAIN. Cotgrave, Dict.
Baste. Oudin, Dict.
Basque, subst. [cm. Biscaye. Nom de pays. On
dit en quelques endroits tour de Basque pour signi-
lier une fourberie.
Basquine, subst. fém. Espèce de vêtement.
C'étoit une robe fort ample. Elle se tenoit ouverte,
et étendue au moyen d'un cercle. C'étoit aussi
une espèce de corset que les dames meltoient entre
la chemise et la cotte. (Voy. le Dict. de Borel, et Le
Duchat, sur Rabelais, T. I, p. 323.)
Basquiner, verbe. Ensorceler. « Ce qui semble
« venir de Vascons, ou Basques, où on assure y
» avoir eu toujours beaucoup de sorciers. »
VARIANTES :
BASQUINER. Borel, Dict.
Uasquinier. CellheU. de Léon Trippault.
Basse, subst. fém. Base. La base d'un pilier
piédestal. (Borel, Dict.)
Bassecourt(4), subst. fém. Esplanade. Terrain
fortifié de murailles qui se trouvoit entre la cita-
delle et la ville ; dans un temps de siège, elle ser-
voitde retraite au peuple, et on y retiroit aussi les
chevaux, les bestiaux de toute espèce et les effets
mobiliers. Au siège du château neuf de la ville de
Naples, par Charles VIII, en 1W4, « l'on avoit
■I mené une quantité d'artillerie devant un lieu fort
« où y avoit une bassecourt assés forte de
« muraille. » (André de la Vigne. — Voyage de
Charles VIII, à Naples, p. 134.) « Fut la bassecourt
« prise d'assaut, et le lendemain la place rendue. »
(Hist. d'Artus III, Conn. de Fr. Duc de Bret. p. 761.)
» Fit assaillir la /vassfcoi/î'id'iceluycbastel, laquelle
« fut prinse par force, et y gaignerent les assail-
« lans grand foison de chevaux, vaches, brebis et
« jumens. » (Monslrelet, Vol. I, fol. 19.) >< Avoit en
.' sa compaignie deux cens combattans logez en la
" bassecourt, tous leurs chevaux et autres biens. »
(Ibid. Vol. III, fol. 13.)
Bassegne, subst. fém. Espèce de jeu. (Dict.
d'Oudin.) C'est peut-être le jeu de cartes des Italiens
appelé Bazzica.
Basseleur, subst. masc. Boisselier. Nous
croyons pouvoir expliquer ainsi ce mot dans ce
(1) Chez Amb. Pare (xvF siècle), c'est un onguent ; « J'appliquai un petit emplastre de basilicon, de peur que la plave
ne sagglutenast (Vlll, 40). » (n. e.) - (2) Du temps de La Fontaine, on disait: « Ma loi! c'est bàme. » (N. E.) - (3) C'était
al origine, la cour qui jugeait au parlement les différents entre clercs; l'étymologie est basilica, bourse, tribunal à
Rome. (N. e.) - (4) C'est la baille de la forteresse, (n. e.)
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— 118 -
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passage : « Un mercier portant ses denrées à col
« deux deniers, un basseleur cinq déniées. » (,Cartu-
lairc de Jumiège, T. I, p. G.)
Basselle, suhst. /■<'?«.. Javelle. Mol Languedocien
ainsi expliqué dans le Dict. de Borel, au mot
Marelle.
Bassenne, subst. fém. La voile de misaine.
(Dict. d'Oudia.)
Basset, adj. Ras, court. — Abaissé.
iBasse/ est le diminutil'de ftrts. Au premier sens,
il signilioit ras, court, comme dans ce passage :
Le poil avoit liasset, aussi noir c'une meure,
Et les cornes agues, plus c'un coutiaus à meure,
l'abl. MSS. du R. n- 7218, fol. 343, V" col. 2.
On a dit au second sens : espaules hassettes, pour
abaissées.
Vos espaules très bien fêles,
Ounies, et a point basseles.
Fabl. MSS. du R. n* 218, R- col. 2.
Bassetaille, subst. fém. Bas relief. Terme de
sculpture. (Dict. d'Oudin.)
Basseté, subst. fém. Bassesse. « L'envie est
" vilté de courage, bassenr d'esprit indigence de la
« vertu ou du bien qui abonde en autrui, noncha-
« lance manifeste. » (Antoine Chapuis, cité par Du
Verd. Bibl. p. 55.)
VARIANTES :
BASSETÉ. Oudin, Dict.
Basseur. Robert Estienne, Dict.
Bassetement, adv. A voix basse, tout bas. « Il
« lui dit basseltement un pileux adieu, qui à peine
« luy peult sortir de la bouche. » (J. le Maire, lllusl.
des Gaules, Liv. II, p. 107.) « Il respond moult
« bassettement qu'il ne mangera pas ores, car il
« n'est pas bien baitlié. » (Lanc. du Lac, T. II,
fol. 3, V° col. 2.)
VARIANTES :'
BASSETEMENT. Vies des SS. MS. de Sorb. ch. lviii.
Bassettement. Lanc. du Lac, T. II, fol. 3, V" coL 2.
Basset. Percef. Vol. III, fol. 113, V» col. 2.
Baset. Ph. Mouskes, MS. p. 648.
Bassier, subst. masc. Terme de vénerie. « Les
« fientes que les besles noires laissent sont appel-
« lées lapes qui sont dites fumes en la vennerie du
« cerf ce qui est dit es doulies bestes souraller
« est dit, es noires bestes, bassier. » (Modus et
Racio, fol. 23.)
Bassier signifioit aussi : pupille, jeune enfant
Voy. le Dict. de Borel, qui cite ce vers :
De bassier qu'il estoit il est devenu gars.
Bassiere, subst. fém. Vallée. — Baissière.
Ce mot est mis au premier sens dans ce passage :
Il regarde en une bassiere
Si a veu mayncte banyere.
Gace de la Bigne, Des Déduits, MS. fol. 53, R'.
bassiere signifioit aussi le fond d'un tonneau, le
vin qui est près de la lie.
(-1) Ne faudrait-il pas lire l'chast? (n. e.)
C'est trop enchery la bassiere
Du tonneau qui est deffoncé.
Goquill, p. 27.
De là, mettre à ^assicres pour mettre en déroule,
renverser.
Fist valoir si fort son enseigne
Qu'Angloys furent mis à bassieres.
Vigil. de Ch. VII, T. I, p. 80.
Bassinage, subst. masc. Droit. Le bassinage
de sel étoit un droit qui se levoit sur les salines.
(Du Gange, Gloss. lat. au mot Bacinagium.)
Bassiné, adj. Que l'on a mis dans un bassin.
Mol employé pour épithèle de poudre à tirer, que
l'on a mis sécher dans un bassin chaud. (Voy. le
Pèlerin d'Amour, T. I, p. 194.)
Bassinenient, sî<^sL masc. L'action d'asperger
d'eau, de bassiner un lit. Ces deux acceptions se
trouvent dans les Dict. d'Oudin et de Cotgrave.
Bassouer, verbe. Bâtir, faufiler, coudre à
grands points. (Le Duchat, sur Rabelais, T. I,
p. 12, n. 15.)
Bast, subst. masc. Tromperie. Lisez baste dans
le Dict. de Monet, et voyez Baste ci-apiès, pris en
ce sens.
On disoit fils de bas ou bast pour bastu7-d, etc.
Voici les passages oîi nous trouvons cette
expression :
Quant Dagobiers d'EscIavonie
Eu revenus, od sa mesnie,
Si donna il en celi pas
A Sigebert, son /il de bas,
Austrie c'on dist osterike.
Ph. Mouskes, MS. p. «.
« L'archevêque de Rheins Arnoul frère avoit esté
« au roi Lothaire de bast. » (Chron. S' Denys, T. I,
fol. 211, A'°.) Hugues Capet vouloit le faire déposer
« parce qu'il estoit homme bastard, » est-il dit
au fol. 212. Ibid.
Bast a signifié aussi: ébattement. C'étoit un usage,
dans plusieurs endroits, lorsqu'une personne se
marioit, d'aller chez elle chanter le bast, la pre-
mière nuit de ses noces; alors le nouveau marié
régaloit ceux qui avoient chanté. Pour donner un
idée plus précise de cette sorte de cérémonie, nous
citerons ce qui suit: » Comme le dit Gorbin, de la
« paroisse de S'° Croix de Bernay, s'en alloit,
« encontra un sein compère... qui lui dit qu'il re-
« tourneroit avec lui et qu'ils iroient chanter le
« &fls^(l)que onaaccoustumédechanterauditpaïs,
'■ la première nuyt des nopces se fassent adres-
'< siez à Jehan de Bryere lequel distribuoit
« le vin, et les viandes, en luy disant qu'il
" leur voulist bailler à boire, et de la viande pour
« aller chanter une forme d'esbatteinent appelle
« le bast, etc. » (Lett. de Henry, R. deFr. et d'Angl.
septembre 1424, au Très, des Charl. Reg. 172,
pièces G21 et 624.)
Bastaqe, subst. inasc. Droit seigneurial. Devoir
que le seigneur péager prend d'un cheval basté
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sans charge ou chargé, pour raison du bast, outre
le pénge, pour raison de la marchandise. (Laur.
Gloss. du Dr. Fr.)
Bastangue, stibst. fém. Sorle de poisson. En
Italien jiasUnacca marina. Oudin, dans son Dict.
italien, interprète ces mots par « tareronde, sorte
« de raye, bougnette, Bastangite, Vastangue. «
Bastai'd , subst. masc. Ce mot, qui subsiste,
n"a point besoin d'explication. Nous le trouvons
employé par.!. Lemaire, dans le passage suivant:
« La délient iceluy Telamon tousjours, depuis en
« vile servitude, sans loy de mariage et délie ha
« eu un beau filz, nommé Theucer, lequel à peine
« veult advouer pour son bastard. » (J. Le Maire,
lUustr. des Gaules, Liv.ll, p. 180.) [On trouve dans
Froissart la forme bascle: » Le bascle de Maruel. »
(Ed. Kervyn, VI, 31.) Le Glossaire provençal de
Baynouard donne le diminutif de basclot avec le
sens de vaurien. Froissart le transforme en bascot:
« Et s'appelloit le bascot de Mauléon (XI, A\). »
Faut-il voir là bascli, basciili. Basques, de Du
Gange, avecle sens d'hérétiques, puis voleurs?] (n. e.)
Nous rapporterons les expressions suivantes :
1° Simples bastards, c'est-à-dire ceux qui sont
nés de personnes libres : « Ce qui est dit cy-devant
« a lieu au regard des simples bastards ; mais ceux
« engendrés en adultère de personnes mariez , soit
« mary ou femme, ou de religieux ou de personnes
« parentes l'une de l'autre, en degré prohibé, ils ne
« pourront succéder à leurs mères, ou aux pareus
" du costé maternel. » (Nouv. Coût. gén. T. I, p. 777.)
2° Le grand bastard. On appeloit ainsi Antoine
de Bourgogne, fils naturel de Pliilippe-le-Bon, 1 477.
(Lussan, Illst. de Louis XI, T. VI, p. 08.)
3° N'être point bastards. Façon de parler pour
dire aller de pair avec quelqu'un :
Et pour monstrer qu'ils n'estoient point bastards
Françoys leur feirent leur part honnestement.
i. Marot, p. 2i.
4" 17)1 bastard. Sorte de vin nommé ainsi entre
plusieurs vins exquis trouvés à la prise du château
de Naples, par Charles VIII, en 1495. (Voyez André
de la Vigne, Voyage de Naples, p, 143.)
5" Caractère bastard. On a dit, en parlant d'une
traduction de l'Iliade par Jean Samxon , qu'elle
étoit impi'imée in- 4° en caractères bastards (1).
G" Bastard de chant royal ou demi chant royal.
C'étoit ainsi que l'on nommoit la ballade qui excé-
doit huit lignes et huit syllabes. (Voyez Fabri, Art.
de Rhétor. Liv. II, fol. 42.)
7° £'s/)e'esbas;an/cs.C'étoientcellesqui pouvoienl
« servir à une main et à deux, les gardes d'icelles
<i faites à une croisette seulement, et pas d'asne
« ouvert. » (La Colombière, Théâtre d'honneur,
T. II, p. 461.) C'étoit la seule dont les Suisses se
servoient, suivant Brantôme, sur les Duels, p. 5.
(Voyez Rabelais, T. I, p. 163.)
8° Galles bastardes [Galles est ici pour gâtées ou
galères.) « Le dit sieur roy m'a dit qu'il a preste au
« dit Gennes ses galles , asscavoir sexe subtiles , et
« quatre bastardes, pour en user toulles et quantes
« fois qu'il sera mestier. »(Lett. deLouisXII,p. 169.)
9° Couleuvrines bastardes. Pièces d'artillerie de
campagne (2).Ellesétoient si légères, qu'on pouvoit
les mener au trot dans les escarmouches. On disoit
aussi simplement bastardes. (Voyez les Mémoires
de Bassompierre, T. II, p. 36.) On disoit, en ce
sens, artillerie bastarde.
10" Censés ou rentes bastardes. On appeloit ainsi
« celles qui ne sont pas foncières, mais constituées
« à prix d'argent. » (Laurière, Glossaire du Droit
françois. — Voyez Coût. gén. T. I, p. Il.'ï6.)
11° Traimes bastardes- L'éditeur des Ordonnances
des Rois de France dit : « On ne se sert plus de ce
» terme ; mais il y a grande apparence que les
« tresmes et les estains , ou chaînes bastardes estoient
« d'une qualité inférieure à celle qu'on employoit
u ordinairement. » (Ord. des Rois de France, T. III,
p. 516.) Ou trouve dans le même volume « filez
« bastards et estains bastards » dans la même
acception.
12° Chiens bastards. C'étoit une espèce de chiens
« engendrez de chiens courans et matines. »
(Salnov. Vénerie, p. 304.)
13° Armé à la bastarde. On désignoit ainsi la
manière dont étoient arniés les génétaires , les
archers et autres troupes employées à faire des
courses. (Voy. J. d'Auton, Ann. de Louis XII, p. 149.)
Bastards étoient supérieurs aux gentils hommes
dans les maisons des pères qu'ils servoient :
« Devoit delîendre le pas, un des enfans légitimes
>> du roy, un des bastards et un des gentilz hommes
« de l'hostel. » (J. Le Maire, lUustr. des Gaules,
Liv. I, p. 131.)
Bastards. « Messieurs les bastards servirent les
« autres dames estrangeres. » (J. Le Maire, lUustr.
des Gaules, Liv. I, p. 144.)
Bastards [jeunes] pour les derniers nés d'entre
les bastards; le premier étoit le grand bastard.
a L'un des jeunes bastards, nommé Mistor, avec
" l'un des maislres d'hostel de la royne, et ceilains
« autres gentilz hommes se vindrent adiouster en
« leur bende. » (.1. Le Maire, Illustr. des Gaules,
Liv. I, p. 142.)
Bastardage, subst. masc. Bâtardise. Etat de
bâtard. (Dict. de Cotgrave et Du Cange, Glossaire
latin, au mot Bastardia.) « Si une femme franche
« a bastards d'un homme serf, les enfans demeurent
« en bastardage et ne seront point serfs. » (Coût,
gén. T. II, p. 383.)
VARIANTES :
BASTARDAGE. Du Cange, Glossaire latin, à Bastardia.
Bastarderie, subst. fcin. Oudin, Dict.
Bastardie, subst. fém. Cotgrave, Dict.
Bastardaille, subst. fém. Collectif de bâtards.
Race de bâtards.
(1) C'est récriture que nous nommons bâtarde. (N. E.) — (2) La bâtarde était longue d'environ neuf pieds et demi, avec
trois pouces dix lignes de calibre. On la trouve dans d'Aubigné (Hist., I, 304). (n. e.)
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120 -
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Borel à la page 48 de son Dict.) Molière a souvent
employé ce mot dans le même sens. (Voyez Baster.)
Baste (couche). Nous trouvons couche baste
dans les Contredits de Songecreux, fol. 119, pour
grabat, clialit. Ce qui nous détermine à lui donner
cette siguificaiion, c'est que l'on dit encore en
Touraine soubustement pour soubassement, et qu'il
y a apparence que ce mot tourangeau s'est formé
de baste.
Bastel, suhst. masc. Petit bateau. — Vaisseaux.
Ce mot signifioit bateau, nacelle, canot, selon
Borel, Dict.:
Tost ont les voiles abbessies
Entor les verges bien liées
Et fors des nez les balias mis.
Athis, MS. fol 60, R- col. 2.
Aux encres traire o le batel
Se mettent tuit li plus Isnel.
Athis, MS. fol CO, R'col. 1.
« Elles voyent ung bastel qui estoit attaché à la
« nef, duquel on alloit de la nef à terre, quand
« la dite nef estoit ancrée. » (Percef. Vol. VI, fol. 44.)
On employoit aussi ce mot pour vaisseaux, navi-
res. L'empereur Maximilien, écrivant en 1512 à
l'archiduchesse sa fille, sur le traité qui devoil se
conclure avec le roi d'Angleterre, dit: ■■ Le dit
" traitié fait, nous luy ferons bien des gens assez.
" tant de lanskneckts, que suyches, et" bastiaulx
« autant qu'il sera en nostre puissance. » (Lettres
de Louis XII, T. IV, p. 17.)
VARIANTES :
BASTEL. rerceforest, Vol. VI, fol. 44, R° col. 2.
B.VTEL. Borel, Dict. - Athis, MS.
Bateaulx (plur.) Vigil. de Charles VII, T II, p. 177.
Batteaux (plur.) DIas. des Fol. Am. p. 229.
Bastiaulx (plur.) Lettres de Louis XII, T. IV, p. 18.
Bateux (plur.) Britton, Loix d'Angleterre, fol. 281.
B.\TEZ. Athis, MS. fol. 87, V» co). 2.
Batias (plur.) Athis, MS. fol. 60, R" col. 2.
Bastelage, subst. masc. Charlatanerie, ruse,
artifice. Tours, finesse de bateleur: « (Juelqu'un
« proposoit contre Cleanthes des finesses dialecti-
« ques, à qui Chrysippus dit : joue toy de ces
« battelaiies avec les enfans. » (Ess. de Montaigne,
T. II, p. 2C0.) •■ Il frappe, il mord, il jure, le plus
« tempestalif maistre de France, il se ronge de
« soin et de vigilance, tout cela n'est qu'un baste-
« lage, auquel la famille mesme complote. ■> (Ess.
de Montaigne, T. II, p. lOG.) « Pour ceux qui les
" ont subjuguez , qu'ils ostent les ruses et les
« batelages. » (Ibid. T. III, p. 221.)
variantes :
BASTELAGE. Essais de Montaigne, T. II, p. 106.
Batelage. Essais de Montaigne, T. III, p. 221.
Battel.\ge. Ibid. p. 260.
Basteler, verbe. Faire le bateleur, le charlatan.
On a dit des médecins : « Voilant comme ils vont
_ ^ « bastelant et baguenaudant à nos despens. » (Ess.
Estienne. (Uial. du Lang. fr. italianisé, cité par I de Montaigne, T. H, p. 307.) « Ce que j'auray pris
variantes :
BASTARDAILLE. Oudin, Dict.
Bataudaille. Monet, Dict.
Bastardeau (I), subst. masc. Espèce de canon.
(Dict. dOudin.) Nous ne trouvons aucune autorité
qui justifie cette acception.
Baste, subst. fém. Espèce de Une. — Tour,
supercherie, moquerie. — Chaton de bague. —
Cercle. — Partie de couronne ducale. — Enclos,
territoire.
Au premier sens , baste désigne un vaisseau de
bois garni de cercles et ayant deux anses. (Du
Gange, Glossaire latin, au mot Basta.) De là, on
disoit au figuré porter la baste pour porter la
peine ou le dommage. (Oudin, Dict. et Cur. fr.)
Baste se disoit aussi pour tour, supercherie ,
tromperie, moquerie. (Oudin, Dict. et Cur. h\)Don-
ner la basie à quelqu'un, c'étoit le décevoir par
raillerie. (Monel, Dict.)
Ce mot signifioit de plus le chaton d'une bague :
« Que toutes pièces qui auront bastes soudées, soit
» pour mettre sur soye, ou ailleurs, ne puissent
« estre clouées, mais couzues à l'aguille. » (Ord.
des Rois de France, T. III, p. 12.)
Baste paroît désigner un cercle (2i dans le passage
suivant : « Le collier de l'ordre de l'Hermine et
« de l'Epie étoit fait d'épics de blé d'or passés en
« sautoir, liez haut et bas par deux bastes et
» cercles d'or. » (Le P. Honoré de S" Marie, sur la
Chevalerie, p. 471.) On voit, dans la planche à
côté, la figure de cet ordre montée sur deux cercles.
Baste étoit employée pour signifier partie d'un
chapeau ducal, ou couronne ducale, vraisemblable-
ment la bordure : « Cosme de Médicis fut déclaré
« grand duc de Toscane, et en ceste qualité cou-
<■ ronné par le dit pape Pie d'un chappeau d'or, à
« fleurons relevés de pierreries en la baste de
« ce chapeau ducal furent gravez et burinez ces
« mots: Plus T, Pont. max. et fav. » (Théâtre
d'honneur, p. 1504.)
Enfin, Ijttste signifioit enclos, enceinte ou ter-
ritoire, ressort: » Tous les sujets de la baste de
« Clugny. » (Légende du duc Charles de Guise,
p. 36.) « Baillons aux habilans le ditcoppon, ou
« la dite pièce d'eau étant entre la dite baste d'une
« part, et le dit yslel. » (Charte de Josse de Halwin
pour ceux de Maisiere sur Meuse, en 1387.) On
disoit, dans le même sens bateis et bateys. (Voyez
ces mots.)
Baste, adv. Il suffit, c'est assez. C'est propre-
ment la troisième personne singulière du présent
de l'indicatif du verbe baster ; nvA\?, ce mot est
devenu adverbial. (Voy. le Dict. d'Oudin et Rabelais,
T. H, p. 222, et T. III, p. 90.) Le mot baste, formé
de l'italien (3), s'est introduit en France depuis le
mariage de Catherine de Médicis, suivant Henry
(l) En terme de fortification, c'est un massif de maçonnerie pour retenir l'eau d'un fossé, (n. e.) - (2) Nous employo.is
encore ce mot dans le sens de cercle d'une boite de montre, (n. e.) - (3) Baslare, suffire ; c'est en ce sens q ji2 La l'ontaiue
disait: « Somme bastante. » (n. e.)
/
BA
— 421 —
BA
« à dire en batelant et en me moquant, je le diray
« le lendemain sérieusement. « (Ess. de Montaigne,
T. m, p. 101.) « Jongler, g&uàir et bâte 1er. » (Borel,
Dict. au mol Jongleour. 11 cite Perceval.) Batteler,
dans le Celtliell. de L Trippault, est rendu par
bavarder, parler beaucoup et ne rien dire. (Voyez
Cotgrave, Dict )
Ce mot est pris pour railler, tourner en ridicule,
dans les Contes de Des Périers, T. 11, p. 59.
VARIANTES :
BASTELER. Montaigne, Essais, T. II, p. 307.
Bateler. Ibid. T. III. p. 161.
Batteler. Celthell. de L. Trippault.
Basteleresque, adj. Qui est propre aux bate-
leurs. (Dict. de Cotgrave, au mot Bateleresque.)
» Tout ainsi qu'en nos bals ces hommes de vile
« condition, qui en tiennent école, pour ne pouvoir
» représenter le port et la décence de nostre
« noblesse, cherchent à se recommander par des
<< sauts périlleux, et autres mouvemens estranges
" et basteleresques. » (Ess. de Mont. T. II, p. 140.)
VARIANTES :
BASTELERESQUE. Montaigne, Essais, T. II, p. 140.
Bateleresque. Cotgrave, Dict.
Bateleuse, fcin. Taïiureau, Dial. Epit. p. 9.
Bastelerie, subst. féni. Charlatanerie. (Voyez
l'Apologie pour Hérodote, p. 474. — Les Dialogues
de Tahùreau, fol. 46.)
VAIilANTES :
RASTELERIE. Dial. de Tahùreau, fol. 46, V".
B.\TTELLEHiE. Dict. de Cotgrave.
Basteleur, subst. masc. Bateleur. —Batailleur.
Ce mot est pris dans le sens de bateleur, en ce
passage : « Il y a trois sortes de gens qui n'ayment
« point estre appeliez par leur nom, comme vous
« diriez chien et chat, moines, ministres, presires
>> pu.... et beateleur. « (Moyen de Parvenir, p. 189.)
On disoit, dans ce même sens, « acte de basteleurs
« qui font le fait et le défait. •> Façon de parler em-
ployée dans les Lettres de Rabelais, p. 18. C'étoit
peut-être te jeu appelé basteax awque] se disoit fort
habile un jongleur ou bateleur dont il est fait men-
tion dans les Fabl. mss. de S' Germ. fol. 70. Plusieurs
auteurs veulent que le mot basteleur se soit formé
de celui de bateliers, h cause de l'agilité avec
laquelle ils parcourent les cordages et les bords de
leurs bàlimens. Ils se fondent sur ce que Rabelais,
T. II, p. '250, et T. V, p. 15, vante l'adresse des bate-
liers de Lyon, et des gondoliers de Venise dans
leurs jeux d'exercice. Cependant, je crois qu'il est
plus naturel de le dériver de basteaux (1), sorte
d'instrumens dont les basteleurs se servoient dans
leurs jeux pour amuser le peuple. (Voyez Bateaux.)
Basteleur est employé pour batailleur dans ce
passage : « Je ne suis basteleur, ne homme d'ar-
" mes. » (Petit Jehan de Saintré, p. 027.)
variantes :
BASTELEUR. Lett. de Rabelais, p. 18.
Bastelleur. Trésor des Chartres, Reg. 16i, p. 195.
Besteleur. Moyen de Parvenir, p. 189.
Basteller, verbe. Frapper. Batailler, s'escrimer :
Quoique le mail d'Atropos, vous martelle
Il forge en vain, et ne sçait qu'il bastelle.
Creliu. page (U.
Bastendant, participe. Déclinant. Eustache
Deschamps, parlant de la révolution des siècles et
des choses de ce monde, disoit :
Son tour a fait le cercle en descendant,
Qui a couru par mainte région ;
Or s'en rêva monter en bastendant ,
Tant par midi com par septentrion...
Riens estabte ne scoy dessoubz la Nice.
Eust. Desch. PoCs, MSS. fol. 122, col. 4.
Bastent. Voici le passage où nous trouvons
ce mot :
Escoute, de ceste anémie,
Fit Simon, qu'ele a respondu?
Au pais en as tu entendu?
Oil'voir, Sire, bien l'entent.
.\nieuse, je te basii'iit
Que tu respons si feleraent.
Fabl. MSS. du R. n" 1218. fol. 51, R" col. 1.
Baster, verbe. Badiner, niaiser, s'amuser à des
riens. — Suffire. — Balancer, flotter.
Oudin explique ce mot dans le premier sens.
Crétin s'en est servi dans cette acception :
Vault-il pas mieulx veoir un sanglier es teilles.
Que tout le jour 6Hs?ec jusques aux estoilles
Pour regarder faulcon que vent soubz tient.
Grelin, page 91.
Un autre poëte, partant des regards séduisans
des coquettes, dit :
. . . Faisant bcister aux étoilles
. . . Font gallans jour et nuyt coiu-re.
L'Amant rendu Cordelier. p. 581.
Les Italiens disent bastare pour suffire, et nous
avons emprunté d'eux le verbe baster, pris en ce
sens. (Voy. le Dict. de Monel.) » Scanderberch, bon
« juge et très expert, avoit accoutumé de dire que
« dix ou douze mile combalans fidèles dévoient
« baster a un suffisant chef de guerre pour garantir
« sa réputation en toute sorte de besoin militaire. »
(Essais de Montaigne, T. II, p. 739.) « Donna pour
" Dieu la pluspart de ses biens, retenant seulement
« ce qui luy estoit bastant pour soy vivre. » (Nuits
de Straparole, T. I, p. 30. — Voyez te mot Baste.)
11 semble que Crétin ait employé baster dans le
sens de badiner, dans le passage suivant :
Croy pour certain que adonc ung combatant
Homme de bien n'est çà et là liasiant
Mais seullement devant luy, et ne songne
Se ung aultre faict bien ou mal la besogne.
Crétin, page 135.
(1) Basteau est un instrument d'escamoteur dans ce passage du Ménagier de Paris (xiv" siècle) : « L'autre dit que sa
femme avoit respondu qu'elle n'estoit venue ne yssue d'enchanteurs ne de sorciers, et qu'elle ne savoit jouer des basteaxdx
de nuit ne des balais (I, 6). » Au reg. ,IJ. 162, p. 175 (an 1408), on lit aussi : « Comme Perrinet Sanson joueur de bateaus...,
en sa compagnie sa femme, enffans, un ours, un cheval et une chievre, à trompes et labours eust assemblé le peuple
après disner pour le veoir jouer de son mestier et de ses dites bestes ; — en fesant sondit mestier et jouant de ses
basteaux, etc. » Comme bastaxius signifie à la fois crocheteur et jongleur, bateau signifie un bâton, et, par suite, bateleur
est un joueur de bâton ; les physiciens amusants ont encore une baguette à la main. (n. e.)
BA
BA
Bustier, adj. Qui porte bât. — Sot, bète.
On disoit au premioi- sens, clieval bastier pour
cheval de but. (Dict. de Cotgrave et Epitli. de Mart.
de la Porte.)
Delà, ou nominoit un grand bastier, un sot, un
badaud. (Dict. d'Oudin.)
Basticrrcs, subi. masc. Qui bat, qui a battu.
« Qu'il i a coups orbes de poing garni, counie de
0 baslon, ou autre chose, li basticrres doit estre
« prins et tenu sans recreanche fere dusques a tant
« que l'en voie, par la dite bature, il n'i a point de
« péril de mort. » (Reaumanoir, p. 149.)
liateur à loijer signilie un homme qu'on prend à
gages pour battre queliju'un ou pour faire de mau-
vais coups. (Voy. les Poës. mss. d'Eust.Desch. f°330.)
VABIANTKS :
BASTIERRES. Beaumanoir, p. -149 et 150.
Bateur. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 330, col. 1.
Bastille, subst. fém. Forteresse; rempart. Ce
mot signifioit toute espèce de forts, soit en maçon-
nerie, soit en bois, quelquefois entouré de fossés,
de palissades et de barrières. On les construisoit en
pleine campagne, sur les chemins et dans les postes
les plus importans : ils étoient plus communément
élevés autour des villes attaquées. Les assiégés les
employoient pour leur défense, et les assiégeans
pour investir la place et la priver de toute espèce de
secours (1). (Voy. les Dict. de Nicot, Monet, Borel et
de Colgrave; Laurière, Gloss. du Dr. Fr.) Froissart,
parlant d'une escarmouche des Anglois devant la
ville de Troyes, dit : <■ Tantost veez-cy les grosses
« batailles du comte de Bourquinguam : lesquelles
« s'en vindrent toutes, tout à pié, devers ces gens
« d'armes qui estoient en la bastide laquelle on
« avoit faite d'huis, de fenestres et de tables. »
(Froiss.irt, Vol. II, p. 93.)
Le même auteur a dit, en parlant du siège de
Brest, en 1.386 : « S'armèrent toutes gons et se tire-
« rent par bon arroy et bonne ordonnance devers
« le chastel, et la bastide qui estoit faite ouvrée et
« charpentée de grand manière : et fut ce pour
» demourer là neuf ou dix ans, car il y avoit autour
« de la bastide, fossés, portes, tours et bons murs,
« et tout de gros bois. » (Ibid. Vol. III, p. 112.)
Ce mot est employé pour signifier la Bastille de
fe porte de S' Antoine à Paris, dans l'Hist. Chronol.
depuis 1 5(10, jusqu'à 1467, p. 360.
Le mot de bastide ("2) s'est conservé à Marseille et
dans plusieurs autres lieux de la Provence, pour
signifier métairie ou maison de campagne. Voyez
les noms françois formés avec ce mot dans le
P. .Meneslrier, Orn. des Armoir. p. 462. « Le privi-
« lege de bastide nouvelle est compris avec celui
« de l'Ost et de la Croix. » (Ord. des R. de Fr. T. I,
p. 398.) C'étoit vraisemblablement le privilège
accordé à ceux qui faisoient élever des forteresses
nouvelles pour l'utilité d'un pays.
VARIANTES :
BASTILLE. Froissart, livre I, page 460.
Bastilde. Cotgrave, Dict.
Bastide. Froissart, livre I, p. 127.
Bastie. Du Gange, Glossaire latin, au mot Bastia.
Bîistiller, wrbe. Garnir de bastilles; fortifier.
— Investir.
Le premier sens est le plus usité : « Le duc Phi-
« lippe de Bourgogne, et depuis le duc Jean aussi,
« avoient fait faire plusieurs grands engins de bois
« pour bastiller Calais. ■■ (Juvenal des Ùrsins, Hist.
de Ch. VI, p. 202.) « D'autres places et villes y a-t-il,
« qui d'elles-mêmes sont si mal baslie:, de la for-
« tune, et si malheureuses, qu'ordinairement elles
« sont sujettes à prises et reprises, sacs et ruines. »
(Brantôme, Cap. Franc. T. II, p. 288.) « Quand le
" duc de Lanclaslre, et les barons et chevaliers de
« sa route furent venus devant le chastel de Mont-
« paon, si l'assiégèrent et s'y baslirent aussi bien
« et aussi fort, que s'ils deussent y demourer sept
« ans. » (Froissart, livre I, p. 408.)
Bastiller signifioit aussi assiéger, comme dans le
passage que nous allons citer, quoique l'éditeur
l'explique par fortifier : » Quand il fut à Compiegne
« là si rendirent Poton et la Hire, qui luy requirent
« qu'il leur baillast deux cent lances, et les archers
" pour les secourir à Laon qui estoit bastille. »
(Hist. d'Artus III, connétable de Fr. duc de Bref,
p. 759.) Z?«s^/7/t' en cet endroit signifie investi; ce
qui rentre dans l'acception de fortifier à cause des
lignes que les assiégeans élevoient autour de la
place, soit circonvallation, soit contrevallation.
VARIANTES '
BASTILLER. Vigil. de Ch. VII, p. 42.
Batiller. Borel, Dict. - Ph. Mouskes, MS. p. 561.
Bastilloner. Epith. de la Porte.
Bateiller. Notice du Rom. d'Alex, fol. 16.
Batailler. Le Jouvencel, MS. p. 288.
Bataillier. Blanch. MS. de S' Germ. fol. 178, R» col. 1.
Bataller. Chron. de Fland. — Du Gange, Gloss. lat.
Bastier. Brantôme, Cap. Fr. T. II, p. 288.
Bastir. Froissart, Vol. I, p. 408.
Bastillon, siibst. masc. Petit fort. Diminutif de
bastille. « Ace siège furent faites bastides
•' et bastillons. » (Mém. d'Olivier de la Marche,
livre II, p. 515.)
Bastille, subst. fém. Espèce de bât ou de selle.
(Dict. d'Oudin, Cotgrave et de Ménage.) ■< Quelqu'un
« de notre temps, escrit avoir vu en ce climat là,
« des pays où on chevauche les bœufs avec bastines,
'< estriers et brides, de s'estre bien trouvé de leur
« porture. » (Essais de Montaigne, T. I, p. 500.)
(1) On entendait par bastide, au moyen-âge, un ouvrage de défense isolé, mais faisant cependant partie d'un système
gênerai de fortification. On doit distinguer les baslillcs permanentes des bastille/s élevées provisoirement ; les bastilles
tenant aux fortifications d'une place de celles construites par les assiégeants pour renforcer une enceinte de circonvallation
et de contrevallation. Le mot bastide est plutôt employé, jusqu'à la fin du xiri» siècle, pour désigner des ouvrages provisoires
destinés à protéger un campement que des constructions à demeure ; ce n'est que par extension que l'on désigne, à partir
de cette époque, par ias/irfe ou bastille, des forts de maçonnerie se reliant à une enceinte. (Voir Le Duc, Dictionnaire
a Architecture, II, p. 16G, d'après Du Gange, (n. e.) - (2) Le patois provençal les nomme cabanou, cabanons, (n. e.)
BA
— 423 —
BA
Bastion (l), sttbst. masc. Espèce de jtournol. Il
consistoit dans l'attaque simulée d'un bastion.
i. d'Auton parle » d'un bastionque messire Charles
« d'Amboise, lieutenant du Roy, feit tenir à Milan,
« où le Roy fut présent avec tous les princes et
« seigneurs qui là estoienl et grand nombre de
« dames. » (Annales de Louis Xll, p. 2G2.) On écri-
voit aussi bastillon, et c'est ainsi qu'on écril le nom
de celui de 15G4, dont il est mention dans Beauch.
Recli. des Théat. T. III, p. 13. Ces sortes de jeux
coùtoient quelquefois la vie ii plusieurs de ceux qui
les donnoient. « Il y eut de gros festins, et esbate-
« ments et entr'autres ung /;«si;7/o«oufutmerveil-
« leusement grand désordre, car il y eut plus de
« 40 gentilshommes, que tuez, que atîolez, etc. »
(Mémoires de Rob. de la Marck. Seigneur de Fleur, m.
page 63.)
VARIANTES :
BASTION. J. d'Auton, Ann. de Louis XII, p. 262.
Bastillon. Rech. des Th. T. III, p. 13.
Bastir, verbe. Nous citerons sur ce mot, qui
subsiste, les fayons de parler suivantes :
1° Sur aultry cuyr bastir trop large courroye.
Façon de parier qui semble signilier, avoir trop de
confiance en quelqu'un, compter trop sur lui, s'y
flej» inconsidérément. (Voy. l'ercef. Vol. VI, fol. i.)
2° Bastir assaut. Livrer assaut.
Maint dur assaut m'aura amor bastis.
Chans. MSS. du G" Tliib. p. 153.
3° Bastir plait. Faire un accord, une convention,
un traité.
Il fist au roy Charles savoir
Que s'il osoit tel plait bastir
Qu'à ce voulsisl en hastir etc.
G.Guiart, MS. fol. 208, V-.
Nous disons bâtir un système, à peu près dans
le sens que nous venons de voir. On adonné même
cette acception subsistante à ce mot, lorsqu'on a
dit, en parlant de M. de Boisy et de Chievres: » Ils
« batissoient les choses tant pour l'Empire, que
« autres matières, pour mettre en paix, et union
« ces deux princes. » (Mém.deRob. de la Marck.
Seig. de Fleur, ms. p. 359.)
Bastissage, subst. masc. L'action de bâtir. —
L'action de mettre un bât.
Sur le premier sens, voy. le Dict. de Robert
Eslienne.
On trouve ce mot expliqué par l'action de mettre
un bat dans le Dicl. d'Oudin.
Bastissenient, subst. masc. Bâtiment. (Gloss.
de l'Hist. de Paris.)
Baston (2), subst. masc. Arme. — Fût de lance.
— Echalat. — Houlette. — Verge d'huissier. — Auto-
rité, juridiction. — Terme d'investiture. — Marque
d'ordre de chevalerie. — Marque du rang des
convives.
On trouve bâton pour arme, dans le Dict. de
Monet, qui le rend par arme de fust au mot Bâton
On lit dans le Glossaire du P. Labbe, bâton fust
fustis, et dans le suppl. au Gloss. du Rom. de la Rose
il est pris pour épée ou hache.
Jean Marol s'en sert aussi pour armes. Parlant
du Roi qui sortoit de Milan pour aller chercher
l'armée des Vénitiens, il dit :
Regarde en la praerie,
Voit ses souidars faisans cher raarrye
Nudz sans battons, n'aulcune armeurerie,
J. Marot, p. 90.
En ce sens, on distinguoit le baston de gnierre,
le baston d'armes, le baston de défense, le baston
de trait, ou à tirer.
Nous trouvons ce mot employé en ce dernier
sens dans ce passage, où nous lisons que « arc
« estoit un baston d'instrument trop prouffitable,
« tant pour soy déliter et déduire comme pour le
« prouffit de la deffense de son corps. « (Modus et
Racio, MS. fol. 71.) En général, le mot Bâton signi-
lioit toute sorte d'armes offensives ou deffensives.
« Onleurosta tous leurs l)astons qu'ilz n'ozoient
« pas porter, non pas mesme un cousteau. » (Hist.
d'Arlus m, Connest. de Fr. Duc de Bref. p. 743.)
« Des bastons que les parties entendent porter pour
» otTendre, et defîendre, sont espées, dagues seu-r
<• lement, sans poinçons, couteaux, ne autres
'■ pointes mussées, et le reste, comme lances,
« masses ou autres basions devises tant pour l'un
« que pour l'autre. » (La Jaille, du Ch. de Bat. fol. 45.)
De là, ce mot s'est pris pour fût de lance.
Lances brisent, basions eschardent
Tai'ges fendent, serjanz frémissent
G. Guiart.MS. fol. 230, R'.
Baston signifioit aussi échalas.
Qui fait vignes, li coux est grans ;
Bastons y faut à outraige.
Eusl. Desch. Poês. MSS. fol. 2(i3.
Baston se prenoit quelquefois pour houlette.
« Si les babitans envoyoient pasturer leur bcstail
« outre les dittes esquarres et limittes, et ilz
« estoient reprins et gagez ils seroient amendables
« de soixante sols d'amende pour chacune proye y
» trouvée sous une garde, ou baston, avec res-
« titution, ou dommage. » (Nouv. Coût. Gén.
T. II, p. 1057.)
On s'est servi du mot baston, pour désigner la
verge que portent les huissiers.
Por coï ne font sanz demorance
Joustice de laie poissance
Qui Dieu guerroie apertement :
Bastons ont, pour faire venjance,
Et cornes, en senefiance, '
Qu'il vellent hurler durement.
Fabl. WSS. du R. n- 7015, T. 1, fol. 103, R- ool. 2.
Le bâton dans les mains de ceux qui commandent
étant souvent regardé comme une marque du pou-
voir qu'ils exercent, de là ce mot s'employoit pour
autorité, juridiction : « Firent composition que le
« Genevois guerpirent lor tor, et lor rue, et s'en
« alerent à Sur et durent porter confanon sur lor
<1) Le mot n'a été employé dans la fortification qu'à partir du xw siècle ; le bastion remplace les tours du moyen-âge. (n. e.)
— (2) On trouve dans la Chanson de Roland : « Livrez m'en ore le gant et le baslun. n (Str. XVII.) (n. e.)
BA
— 424
BA
« veissiaiis au port d'Acic, ne avoir corl, ne haston
« dedcnsAcre. » (Conl. de C deTyr, Marlene, T. V.)
ISaston, comme terme d'iiiveslilure.étoit le signe
de la mise en possession, ou investiture d'un lief
dans une adjudication que le crieur remettoit au
nouvel acquéreur. (Voy. les Assis, de Jérus. p. 433.)
« Le prevost, ou son lieutenant doit mettre le
« requérant en la choze par luy requise par Rain
« etbaslon. « (Coût. Gon. T. 1, p. 709.) « Se fait
« communément la dille veslure par tradiction du
« petit haston ou bûchette. « (Ibid. p. 481. — Voy.
Laur. Gloss. du Dr. Fr. aux mots Basion, Fust et
liain. — Le Gloss. lat. de Du GanL;e, au mot
Investi lura, et le Gloss. sur les Coût, de Beauv.)
Haston, comme marciue distinctive d'un ordre
de chevalerie, se trouve dans les Vigil. de Charles
VII, où l'on parle du Captai de Buch.
Et son lilz qui avoient le haslo)i
De l'ordre, et serment de jartiere.
Vigil de Ch. VII, T. II, p. 120.
liaston éloit aussi une marque donnée aux con-
vives pour assigner le rang qu'ils dévoient avoir à
un festin. « Alors fui heure de disner: car tout
« estoil prest : et combien que le haston ne fut
« point encores donné, toutes fois GadilTer
« d'Escosse, le chevalier doré, et aucuns autres
« mangèrent à la table de la belle Priandre. »
(Percel' Vol. III, fol. 134.)
Citons maintenant les expressions anciennes où
ce mol étoit employé :
1" ItasliDis à (eu, Bastonsde pouclreet à feu[\).
Basions invasililes et invnsifs, éloient les canons,
et toute espèce d'artillerie, soit grosse, soit
menue. « Le roi avoit bonne artillerie' sur la mu-
« raille de Paris; laquelle tira plusieurs coups
« jusques à noslre ost qui est grand chose, mais je
« crois que l'on avoit le nez bien haut aux
« haslons. » (Mém. de Comines, p. 09.) « 11 fut tué
« de la main d'un paysan qui luy tira une arque-
« busade de derrière un buisson : voyez quel
« malheur qu'un grand capitaine meure de la
X main d'un vilain avec son haston k feu. »
(Mém. de Montluc, T. I, p. 370.) « Jetlant par eux
« serpentines, et aulres hastons de pouldre et à
« feti, avecques traicls de basions iiivasibles et à
« main. » (Chron.add. à la suitede Monslr. fol. 2.)
2° Baston à feu, se disoit aussi pour fusée. Nous
lisons qu'à l'entrée du roi à Courtray, « les feux
« d'artifice commencèrent le soir. M' le Duc de
" Foix allant des rues eut !e gras de la jambe percé
« d'une fusée, ou basion à feu. » (Lelt. Histor. de
Peliss. T. I, p. 42.)
3" Baston à sept hallais, se trouve dans l'Inven-
taire de Joyaux el meubles de Charles V, à la suite
de son Hist. par Choisy, p. 522.
A° Son de liaston. C'étoit un signal que donnoit
un crieur public ou autre officier, en frappant de
son biîton. « Se au troisième jour, cry et son de
« baston à la ditte feneslre, personne ne compare
« pour soy opposer à la ditte plainte, etc. » (Coût.
Gén. T. il, p. 928.)
5" Mettre la main au baston, dit ailleurs vei'ge
de justice, éloit une formalité par laquelle le
vendeur marquoit qu'il se dépouilloit de son héri-
tage ou autres biens, et l'acquéreur en prenoit
possession. « S'ils ont acqueslez quelques héritages,
« ou terres par ensemble, en leur mariage, ne les
« peuvent vendre qu'Us ne comparent devant jus-
« lice, el mettent tous deux la main au baston. »
(Nouv. Coût. Gén.) « En acquisitions d'héritages
« colliers ou de main ferme, ja soit ce que la
« femme n'ayt esté présente à telle acquisition, et
« saisine, ne mis la main au haston, néant moins
« elle est acquesteresse, comme son mary. » (Coût.
Gén, T. I, p. 749.) « De noslre baston mismes nos
« bat, si cum ou suelt dire. » (S' Bern. Serm. fr.
Mss. p. 330); dans le latin « el ut dicitur, baculo
« nosiro noseœdit, » parlant du démon qui se sert
de la chair même pour perdre les hommes, c'est-à-
dire qui les bal de leurs propres verges.
0" Baston du gouvernement. C'est-ti-dire gouver-
nement, supériorité, autorité. Froissart, parlant de
Frère-Jean de la Bochetaillade, espèce de prophète
en 137.5, dit de lui: « De la prise du roi Jehan il
« parla moull bien, el monsira, par aucunes choses
« raisonnables, que l'église avoit encores moult à
« soufrir, pour les gràns superfluités qu'il veoit
'■ entre ceux qui le baston du gouvernement
« avoyent. » (Froissart, Liv. III, p. 84.)
7° Prendre le baston, c'esl-îi-dire prendre le
dessus, avoir la préférence. Un amant fidèle, indigné
de voir son rival peu sincère l'emporter sur lui
auprès de sa maîtresse, se plaint ainsi:
Kant celé aim se moynon
Kai servi à m'enfance
Tex en a pris le haslon,
Ke je tieg à compaignon.
Focs. MSS. avant 1300, T. III, p. lOiiG.
8" Basions de eliassc. Ces basions étoienl gros
comme le pouce, el longs de deux pieds el demi,
(Voy. Salnove, Vénerie, p. 135.) « Le maislre valet
« de chiens doit avoir ces basions de ehasse, devant
« luy ù cheval, et en donner trois aux lieutenants
« de la vénerie, pour en présenter deux au grand
« veneur, afin que le grand veneur en donne un
«. au rov. » (Id. ibid. p. 138.)
9° Basion blanc. C'éloil le bâton de commande-
ment. « Monta le roy sur un petit pallefroy, un
« basion blanc à la main. L'un de ses mareschaux
<c à dexlre, el l'autre à seneslre. >• (Froissarl, Vol.I,
p. 150.) « Jean de Lyon, à la teste des rebelles fla-
« mans, avoit un haslon blanc à la main, comme
« un bâton de commandement. » (Ibid. Vol. II,
p. 08.) Le bâton étoit aussi la marque que portoient
les pestiférés, et ceux que logoient avec eux.
« Commande el enjoint à toutes personnes qui ont
« esté malades de peste, et à tous ceux de la
« maison, et famille ou auront esté, et seront ma-
il) Cette expression désigne surtout les armes à fen montées sur tût o\i hampe, comme les espingoles, les couleuvrines,
les fusils ; elle ne s'attribue donc pas à la grosse artillerie, ^n. e.)
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« lades les dites personnes, qu'ils ayent i^ porter
« en leur main, en allant et venant,.... une verge
« blanche, ou baston blanc sur la dite peine. »
(Ord. desR. de Fr. T. li, p.382.)
10" Lebasloii, ou le bastun blanc à la main. On
lit dans plusieurs auteurs que les garnisons qui
sortoienl d'une place assiégée et prise, étoient ren-
voyées désarmées, et un bâton blanc à la main :
« Ainsi rendirent cette place d'importance, et s'en
« aile: ent chacun, un baalon à leur poing, tant le
« capitaine, que les autres gens d'armes. i^A. Charl.
Hist. de Charles Vil, p. '■im.) « Ont été llnablement
« contraints de s'en aller tousnuds, avec un baston
« blanc à In main. » (.\pol. p'. Hérodote, p. 43.)
11° Le gel à uns basions. C'étoil une distance ou
mesure de terrain évalué au jet d'un bâton.
Jà ne perdra de terre le yet à uns basions
Tant corne nos puissons caucher nos espérons.
Rom. de Hou. MS. p. Ti.
12° Tourner au baston, signifioit être soumis,
respecter l'autorité d'un supérieur. Cette façon de
parler paroit empruntée aux jongleurs ou char-
latans qui, avec le bâton à la main, font faire des
tours aux bêles qu'ils montrent au peuple. Brantôme
dit, en parlant de Charles VJll: « Enlin ce fut un
« grand roy, lequel, s'il ne fust mort, vouloit
« redresser nouvelle armée résolument, et plus
« forte qu'auparavant, pour apprendre au Pape, et
• aux potentats d'Italie ù tourner mieux au baston
« qu'ils n'avoient fait. » (Brant. Cap. Fr. ï. 1.)
12° Tirer au court baston (1), pour disputer d'auto-
rité, de puissance. C'est en ce sens que Sully, par-
lant de deux princes de puissance égale, dît:
« Pour le regard de vous deux qui luitez , et tirc%
• au court baston. « (Mém. de Sully, T. XII, p. 478.)
13° Rompre le baston de sa maison{2), c'est-à-dire
ruiner ses affaires. On a dit, en parlant des risques
que couroient les chefs de la ligue, si Henri IV avoit
Tavantage sur eux : » Au moyen de quoy ils seroient
« contraints de renverser leur marmite, et non-
« seulement rompre, comme l'on dist,-le baston
« de leur maison, mais aussi de faire banqueroute
« à une grande ([uantité de personnes d'honneur,
<> et gouverneurs des places à qui ils donnoient
« certaine pension annuelle , pour les entretenir
« en leur considération. » (Mémoires de A'evers,
Tome II, page 84.)
14° Etre assuré de son baslon, pour être sûr de
son fait. (Mém. de Villeroy, T. H, p. 139.)
15° Se battre de son baston, se battre de ses pro-
pres verges. (Voy. le Chev. de La Tour, Inslr. à ses
tilles, fol. 21.) On trouve aussi : « Batre quelqu'un
« de ses propres basions. « (Histoire de la Popel.
T. I, fol. 33, R°.)
■ 16° A basions rompus (3), sans ménagement, à ou-
trance. (Rabelais, T. III, p. ô2.) Nous disons aujour-
« d'hui : « Parler à bâton rompu, pour parler sans
« suite el sans oi dre. >> (Roger de Colleiye, p. 73.)
17° Aller aux ineures sans baslon: d'autres ont
dit, sans crochet, c'est-à-dire aller sans précaution.
N'allez aux meures sans baston,
Advisez ce qui vous est bon.
Eust. Desch. Poês. MSS. fol. 299.
18° D'autre baston faut batre la rosée. C'est une
façon de parler qui semble prise ici au figuré, pour
dire qu'il faut se consoler de ses malheurs par la
vue de ceux d'autrui.
Quant la douleur est au cueur enchâssée,
D'autre bastim fault batre la rousée ;
Pensant en dueil, la douleur amoindrist.
La Cliasse el Déiiarlie rt'Aiiiour, p. 239.
19° Baston de broche signifie une brochette de
bois, dans ce passage : >< Prent l'escu par la pointe,
" et le lieveamonl aussi légèrement «lue luig baston
« de broche. » (Perceforesl, Vol. II, fol. O.-).)
20° Fêle à baston. Feste annuelle à baston. Fesle
double à bâton. C'éloit une fête où l'on portoit des
bâtons de confrérie. (Rabelais, T. II!, p. 25.)
21° Faire essuijer le baston. Façon de parler
pour signifier exposer aux premiers coups. « Le
« Roy Philippes devoit ainsi bazarder une bataille,
» par ces guerriers mercenaires, et estrangers, car
« c'est une vraye curée, puisqu'ils se sont"mis à ce
« meslier mercenaire, el voilà pourquoy il les faut
« les premiers perdre, et leur faire bien essuyer le
" baston et comme il dit, réserver, et bien garder
« ces vieux soldats Espagnols. » (Mém. de Brant.
Cap. fr. T. 111, page .54.)
22° Savoir le tour du baston (4). C'étoit savoir bien
s'escrimer de la lance, de l'épée, du bâton ou autre
arme. (Voy. Perceforesl, Vol. I, fol. 55.) C'est de là
que paroit venir notre expression, le tour du bâlon;
celle conjecture paioit plus vraisemblable que celle
que Borel propose dans son Dict. au mot Baston.
23° Le roij de baston. Celte expression désignoit
un des quatre rois du jeu de cartes espagnoles ou
suisses. (Voy. Des Accords, Bigarr. fol. 29.)
24° Le baston à ung bout. Expression obscène,
dans Rabelais, T. III, p. 97.
25° Bâton joli. Même signification que le bâton
de Jacob (5), des joueurs de Gobelets.
Jacob, en sustantacion
Portoil, pour consolacion,
La verge, et le bâton joli.
Eusl. Descli. Poâs. MSS. fol. 539.
26° Souloir le cabas battre bâton. Nous disons,
dans le sens de celte expression, ferrer la mule.
Ainsy seult on le cabas battre
Bâton, et aler souvent fait ;
(1) C'est l'analogue de « tirer a la courte paille. » (n. e.) - (2) Rapprocher cette expression de « mettre la main au
bâton. » (N. E.) - (3) Battre à bâtons rompus, c'est frapper le tambour deux fois de suite d'une main, puis de l'autre : quand
le mouvement s'accélère, on entend un bruissement, et non une batterie d'ordonnance; de là notre locution « à bâtons
rompus, )i à plusieurs reprises. (N. E.) - (4) Le mot désigne ici non le bàtoit tenu, mais le bateleur qui le tient ■ c'est là une
figure de rhétorique fréquente au moyen-age. Tour du hotun signihe donc tour de passe-passe. (N. E.) - {à) Le bâton de
Jacob se dit : l» d'un instrument géométrique, composé de deux règles mobiles avec i)innules aux extrémités, et qui servait
aux anciens astronomes à prendre les hauteurs et les distances par la méthode des angles ; 2" des trois étoUes du baudrier
d'Orion qui sont en ligne droite ; 3» de la baguette de l'escamoteur ; 4° de l'asphodèle jaune, (n e.)
"■ 54
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A ceuls qui siiyent ce fait,
Ou bout de l'an y a grant somme.
Kiisl. Deech. Pois. MSS. fol. .M3.
• VARIANTES :
B.\STON. La Jaille du Ch. de liât. fol. 45.
Bâton. Le .louvenc. MS. p. 563.
Batton. ,1. Marot, p. 90.
Bîistoncel, suhst. masc Diminutif de bâton. —
lîûlon dccoiiiinandement. — Baguette de tambour.
Dans le pi'emier sens, Froissart, parlant des jeux
de son eniance, dit :
Et sai souvent, d'un basioncel (1),
Fait un cheval.
Froissart, Poës. MSS. p. 86.
Bastonciaii se trouve pour baguettes de tambour,
dans Ph. Mouskes :
Si ferioient sur leurs taburs,
De hasloiiciaiis d'espine durs.
Ph. Mouskes, MS. p, 162.
Thésée fait une sortie contre les ennemis qui
venoient Tassiéger.
Theseus vint devers la porte :
D'un basieiicel qu'en sa main porte
Départ la route, et ront la presse.
Alhis, MS. fol. M, Y- col. 2.
VAIilANTF.S :
BASTONCEL. Froissart, Poës. MSS. p. 86.
Bastencel. Athis, MS. fol. 94.
Bastonneau. Oudin et Cotgrave, Dict.
Bastonceaulx. (ptur.) Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 228.
Bastonceaus. g. Guiart, MS. fol. 309.
Bastonxïaus. Ph. Mouskes, MS. p. 161.
Bastonnade, suhst. fém. Défaite, échec. (Orth.
subsistante.) Proprement, ce mot signilie un nom-
bre de coups de bâton. « Le seigneur Jean mécon-
« tent d'avoir eu cette bastonnade se voulut
. venger. » (Mém. Du Bell. Liv. 11, fol. 67.)
Bastonnée, subst. fém. Piston d'une pompe.
(Dictionnaire d'Oudin.)
Bastonnement, subst. masc. Bastonnade.
(Dict. d'Oudin et de Cotgrave.)
Bastonnier, subst. masc. Sergent. — Bedeau.
— Gouverneur.
Au premier sens, « le sergent bastonnier, ou
« porte verge cloit une espèce d'officier de justice,
« peut étrele même que sergent à verge. » (Voy.
Bouteiller, Som. rurale, p. S'jl.) On trouve ce mot
employé comme synonymed'liuissiervendeu7\ dans
le Nouv. Coût. gén. T. 1, p. 1005. Le bastonnier
especial étoit peut-être un sergent nommé d'office.
« Pour ce que nos subgez sont une foys grevez par
« les especiaus sergens que nous donnons aucunes
« foys, ou nostre bailly, ez religieux , et ez autres
« personnes, nous delfeudons que uuls religieux,
« ou séculiers, aient bastonniers especiaus pour
« eulx garder, se n'estoil pour cause manifeste,
« cognuë, et seue par le bailly. » (Etat des Offic.
du D. de Bourg, p. 308.)
Bâtonnier se trouve employé pour bedeau , dans
Du Gange, Gloss. latin, au mot Batonarius.
Bastonnier est le titre du gouverneur de l'ordre
de S' Georges en Franche-Comté. (Voy. le P. Honoré
de S" Marie, sur la Chevalerie, p. '206.)
Ces trois acceptions si différentes, ont au fond le
même sens ; elles désignent le bâton qui servoit de
marque dislinctive au gouverneur, au sergent, au
bedeau.
VARIANTES :
BASTONNIER. Nout. Coût. gén. T. I, p. 584.
B.\TONNlER. Du Gange. Gloss. latin, à Batonarius.
Bastoiier, subst. masc. Battoir. (Voy. l'Amant
rendu Cordelier, p. 503.)
Bixt, suhst. masc. L'action de battre du pied ou
des ailes. « Par son hennissement, il faisoit retentir
« tout le ciel, et sous le hat de ses pieds la terre
« trembloit. » (Mer!. Cocaie, T. Il, p. 309.)
Mille tritons, mille nayades belles.
Oui souslevoyent, sur le bat de leurs ailes,
Geste déesse.
Berger de Remy-Bellcau, T. I, fol. 101. V'.
De là, on employoit bat pour désigner le bruit
que font les chevaux en marchant : « Ouït le bat de
» quelques chevaux qui le suivoient: qu'est là'i'
« dit-il ; holà demeurez un peu; escoutez : j'oy le
« hat de quelques chevaux. » (Merlin Cocaie,
Tome 11, page 1%.)
Batage, subst. masc. L'action de battre. Ce mot
s'employoit en termes de guerre : « Chastel si fort
" qu'il n'y a balaige... de canons... qui puet y faire
« mal. » (Al. Chart. Hist. de Ch. VI et VII, p. 199.)
On l'employoit aussi en parlant du blé. Batage
de bled se trouve dans le Cart. de Clielles, p. 35.
VARIANTES :
BATAGE. Cort. de Chelles, p. 35.
Bataioe. Al. Chart. Hist. de Ch. VI et VII, p. 199.
Batail, suhst. masc. Battant de cloche. (Ménage,
au mot Datait, et le Gloss. latin de Du Gange, au
mot 7?fl/fa/Hj?i.) Ce mol est pris dans un sens obs-
cène, dans les Contes d'Eutrapel, p. 462. Eust.
Deschamps, parlant des suites de la sédition de
Montpellier, dit:
Des portes ont les clefs en ses mains mis
De la cloque qui fist la mocion
Fut le bateaulx destachiez.
Eust. Descli. Poes. MSS. fol. 111, col. *.
On lit batel dans la Chronique fr. ms. de Nangis,
sous l'an 1379, et batan dans la Chron. de S' Denis,
au même passage.
VARIANTES :
BATAIL. Nicot, Monet et Oudin, Dict.
Batel. Chron. fr. MS. de Nangis, an 1379.
Bateaulx. Eusi. Desch. Poës. MSS. fol. -114, col. 4.
Batlws. Fabl. MSS. du R. n" 7218, fol. 311.
Bataille, subst. fém. Combat. — Armée. —
Centre de l'armée. — Corps de troupes. — Escadre.
— Gage de bataille. — Terme de chasse.
Ce mot subsiste au premier sens. Voyez-en l'ori-
gine dans Fauchet, p. 81. 11 le dérive du mot latin
(1) C'est, comme dit Horace : « Equitare in arundine longd. » (n. e.)
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Mluere (1), qui vouloil dire, ajoute-t-il, s'escrimer
avec un bàlon de bois. Voyez aussi Ménage, Rem.
sur la Lang. fr. T. II , p. 398. Il paroit avoir été
employé d'ans cette acception, prise à la vérité
moins génériquemeat, pour signifier un combat,
une joute à la lance, dans le passage suivant:
« Quand le roy Modus ot veu les joustes , et la
« bataille, il fu tout lié de la bonne avanture qui
« estoit avenue à ses chevaliers, et fist amener les
« trois chevaliers au roy des vices, en une cham-
« bre. » (Modus et Racio, ms. fol. 2.58.)
On disoil aussi bataille, pour armée: « Se les
<• ennemis du dit royaume venoient par iceluy,
« pourquoy il nous fausist à grosse bataille, aler
« contre eiils, en nostre propre personne, les capi-
« taines des pays seront tenus de venir, à tout ce
« que il pourront avoir de genz d"arnies. ■■ (Ord.
des Rois de I^r. T. III, p. 229.)
Bataille signifioit quelquefois seulement le corps
d'armée, le centre de l'armée. Saintré, après avoir
parlé dans une ordonnance des batailles, de l'avant-
garde, de l'aile droite et de la gauche, dit que « la
« bannière des empereurs..., avecques celles des
• aullres ducs, princes, barons et nobles hommes
« qui estoient à cheval de 25 à 30 mille comhatans,
<■ feroient la bataille et que le duc de Migraine, et
<< autres feroient l'arrière-garde. » (Petit Jean de
Saintré, p. 487.)
On nommoit, en général, bataille, tout corps de
troupes, soit cavalerie, soit infanterie, dont le nom-
bre éloit quelquefois limité, et d'autres fois ne
rétoit point « Ils sont trois batailles qui sontnom-
« mées, selon l'usage de Romme , trois légions ,
« dont chacune légion tient six mille six cent
<■ soixante chevaliers d'armes. » (Percef. Vol. IV,
fol. 8.) « Les Sarrazins avoient fait trois batailles,
« c'est à svavoir, trois à cheval, et trois à pied. »
(Petit Jean de Saintré, p. 490.) On tiouve ce mot
employé comme synonyme d'échelles , dans la
Chron. de S'Denis, T. II, fol. 40. A la vérité, il
signifie un corps de troupes, mais eschielles en
désigne un plus nombreux, et plus considérable,
comme on va voir par le passage suivant : « Com-
. manda Merlin chascun s'aprester à la bataille;
» si ordonnèrent leurs csc/i?t^//f's, et en firent dix
» batailles. « (Triomphe des IX Preux, p. 402.)
Bataille est pris au figuré, en parlant des sur-
veillans d'une dame, dans les Arr. d'Am. p. 384.
Cinq sont en lor halaille
Tuil ont lacies les ventailles
Et armes ont de chevaliers
Fors k'il i ot bien vu archiers.
Nous venons de voir bataille employée pour
signifier une division d'armée, un corps de troupes;
de là, ce mol se disoit, en termes de marine, pour
une division d'une flotte, d'une escadre.
La flotte espandue s'aune :
De leur III batailles font une.
G. Guiart.MS.fol.SH, V.
Ce mol a été employé pour gage de bataille, duel
juridique en champ clos. (La Tbaumassière, Coût.
d'Orléans, p. 465, lit. de I1C8.) Bataille vaincue,
pour le combat en champ clos, oîi l'un des deux
combattans a succombé. (Pérard, Hist. de Bourg,
p. 486, tit. de 1257.)
Enfin on a dit, en termes de chasse : « Il verra
« passer le cerf devant luy, et le fort huera et verra
« quielx chiens viennent îi la première bataille, ne
« en la seconde, ne en la tierce, ou quarte. »
(Chasse de Gast. Pheb. ms. p. 9.)
Expressions remarquables :
1° Faire la bataille d'escus au soleil. Nous trou-
vons celle expression dans le passage suivant :
« Les Suisses en 1512, estoient descendus à Milan,
» deux ou trois fois, et pour ce qu'à chacun coup
« le grand nombre des chevaliers françois leur
« couppoit les vivres, s'en retournoient avec cin-
« quante mil escus qu'on leur donnoil, et leur
« faisolton ]n. bataille (l'escns au soleil {2), ei en ap-
" prirent la f;isson de monsieur le grand maistre
" Chaumont. » (Mém. de la Marck. Seig. de Fieu-
ranges, ms. p. 141.)
2° Mis en bataille, rangés, signifie peut-être mis
en réserve. Cette expression pareil un sens figuré,
dans le passage suivant. Après y avoir parlé de
plusieurs amendes dont les sommes sont exprimées
par besans, sorte de monnoie, on lit : « Tous les
« besans que l'on recevrai de ceaux qui seront
'< encheus, as peines devant devisées, doivent eslre
« mis en bataille. » (Assis, de Jérus. p. 213.)
3° Bataille campale, ehampal, campeus, campée
ou puldique. C'est-à-dire bataille rangée, bataille
générale. (Du Cange, Gloss. lai. au mot Bellum
campale.)
4° BcUallle nommée. C'éio'ûuf\e bataille fixée à un
certain jour par les chefs des deux armées. (Ord.
des R. dé Fr. T. V, p. 713.)
5° Bataille roïal. Celle où le Roi assiste en
personne.
6° Bataille ou gage de bataille, se disoit pour
duel. (Voy. le Gloss. sur les Coul. de Beauvoisis.) On
lit, Batalias omnes quas grammatici dueLla vocant,
dans la Tbaumass. (Coût, de Berry, p. 704.) On se
servoil de l'expression bataille vaincue, ({nnnà l'un
des deux champions avoil siiccoiiibé.(Voy. le Gloss.
lai. de Du Cange, au mot Duelluin victum.)
7° Loi de bataille. C'éloit la loi qui concernoil les
duels. (Voy. le Gloss. lai. de Du Cange, au mol Lex
patrice.)
8° De bataille et d'estoc. Nous disons encore de
taille et d'estoc. « Tanl ferirent sur iceulx Engloiz,
« de bataille et d'estoc que tous fussent mors, ou
(1) Battre vient de hatuerc, mais bataille vient du dérivé batlalia. On lit en effet, dans .4damantius martyr : « Batttalia
gusii vulgo battalia dicitur. » (N. E.) — (2) Lris écus d'or au soleil, ou écus .50/, furent ainsi nommés du soleil gravé
au-dessus de la couronne qui timbre l'écusson : cette monnaie fut mise en cours sous Louis .X.I et put donc payer des
Suisses au temps de François l". Quant à l'expression même, elle rappelle ie mot d'autres mercenaires qui, dans ces
Blâmes guerres d'Italie, demandaient « argent, congé ou bataille. » (n. k.)
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« prins. » (Histoire Je B. Du Cuescl. par Ménard,
page \-n.)
liataille est peut-être une faute pour baille ,
guérite, dans le passage suivant, où il s'agit de gens
assiégés :
Souvent lor traient des quarreax
Des batailles et des creneax.
Blajichand. JIS. de S. G. fol. 189.
PROVliRItE.
Anciennement on disoit « qu'il falloit fuir un
« assaut de cent lieues, et chercher une bataille de
« cent. » (Uicl. Polit, et mil. de la Noue, p. 303.)
Bataillie, adj. ou partie. Crénelé.
Toz ensemble voient la ville
Mesons ot plus de XX mille
Et M tors hautes bataillies.
Athis, MS. fol. 60, V col. 1.
Haute tors bien batellie.
IbUI. fol. 87, V- col. 1.
VARIANTES :
B.i^.TAILLIE, Batellie.
Bataillere, adj. et snbst. Fort guerrier. —
Champion. — Adversaire.
Ce mot est adjectif dans le premier sens; on
disoit : Tours batailleres, c'est-à-dire propres à
soutenir un siège ou combat. (Ane. Coût, de Norm.
fol. 53.) Cartilage la batailleresse, c'est-à-dire la
guerrière. (Al. Chart. Quadr. invect. p. iOi.)
Ce même mot est substantif dans les deux autres
acceptions. Il est employé pour champion dans le
passage suivant, où l'on parle de gages de batailles,
ou duels : « Si le dit champ de batailles est fait de
« hommes légitimes, les bataillons vaincus paye-
« ront cent deux sols. » (LaThaum. Coût, de Berri,
p. 436.) Il faut peut-être lire les bataillans.
Enfin ce mot a clé mis pour adversaire: « Puis
« reboulèrent leurs espées; alors dist Passelion à
« son batailleur : s'we chevalier, je vous prie que
« devers inoy ne teniez rancune. » (Percef. vol. V,
fol. 03.)
VARIANTES :
B.iTAILLEP.E. Ane. Coût, de Norm. fol. 53.
Batailleres. Corneille, Dict.
Bataillieres. Borel et Corneille, Dict.
Bataillons. La Tliaum. Coût, de Berri, p. 436.
Batillereux. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 548, col. '2.
B.\TEILLEREUX. Gloss. du P. Labbe, p. 491.
Bateilleux. Du Cange, Gloss. lat. à Eiiiissarius.
Batailleur. J. Marot, p. 133.
B.\tailleresse. (fém.) Al. Chart.
Bataillereusement, adv. En bien combattant.
(Dict. de Borel.)
Bataillir, verbe. Batailler, combattre.
J'ay veu Roy d'Angleterre
Ung grant trésor cœillir,
Pour la françoise terre
Conquerre, et bataillir.
iMoIinel, p. 178.
VARIANTES :
BATAILLIR, B.\Tn.LiER. Machaut, MS. fol. 219.
Batailloles, subst. fém. plur.
.... Sitost qu'il les veid, il range flanc à flanc,
Galères en bataille, et soldats ranc à rano ;
Fait dresser les parois, contre les batailloles
Fait recresper au vent bandiere et banderolles.
Berger, de Rem. Bell. fol. 1*4.
Bataillon, subst. niasc. Ce mot, qui subsiste,
n'a conserve qu'une partie de son ancienne accep-
tion. Autrefois, il s'employoit pour signitier un
corps de troupes, soit d'infanterie, soit de cavalerie.
(Voy.Mém. Du Bell. Liv. X, fol. 314.) Brantôme s'est
servi de ce mot en parlant d'un corps de dix mille
Allemans. (Cap. Fr. T. III, p. 31) 11 censure ceux
qui usent de mois impropres, et qui « pour dire un
« bataillon de gens de pied, disent un escadron de
« gens de pied. « (Ibid. T. IV, p. 227.) Pasquier se
plaint de ce qu'on substituoit des mots nouveaux
aux anciens comme celui d'escadron, au lieu de
bataillon ([u'on avoit dit autrefois. » Si en useray-
<' je, ajoute-t-il, puisque l'usage commun là gagne,
« contre lequel je ne seray jamais d'avis que l'on
« se heurte. « (Lett. de Pasq. T. 1, p. 105.)
Batailloz, subst. Nom propre de ville ou de
province.
Et puis Baignes qui moult est belle,
Et Serres où l'on fait la soie
Dont l'en se vest bien, et conroie.
Et Batailla: la grant, la riche.
Parton. de niois, MS. de S. Germain.
Batalogie,s!/&sf. fém. Discours efféminé. (Dict.
d'Oudin et de Cotgrave.) Nous disons baltollogie (1)
dans un sens fort différer.l, pour discours vide de
sens, aflluence de paroles inutiles. Je soupçonne
fort Oudin de s'être mépris.
Bâtant, subst. masc. Jambage, pied droit de
porte. (Dict. de Nicot et de Monet")
Batardiere, subst. fém. C'étoit le nom qu'on
donnoit à un terrain destiné à planter de jeunes
arbres sauvages, et des cçps de vigne. (Diction, de
Monet.)
Batbeure, subst. masc. Instrument à battre le
beurre. (Dict. de Nicot et de Cotgrave.)
variantes :
BATBEURE, Nicot, Dict.
B.\.BEURRE. Cotgrave, Dict.
Bâte, subst. fém. Chaton de bague. (Monet, Dict.)
Voyez Baste, pris dans le même sens.
Bateaux, subst. masc. plur. C'est une sorte
d'instrument dont les bateleurs se servent lorsqu'ils
amusent le peuple. Nous lisons dans des Lettres
de Henry, roi de France et d'Angleterre, datées du
31 août ii23, adressées au bailli de Sentis « qu'un
« joueur de bateaux étant entré audit Compiegne,
" pour jouer son dist mestier, et gangner la vie de
« luy, et de son mesnage, auquel basteleur un
« nommé Aubelet Baudon nostre sergent en la
« ville de Compiegne delTendi qu'il ne jouast des
(i) Battos, roi de Cyrène, était bègue et répétait toujours les mêmes paroles, (n. k.)
BA
- 429 —
BA
« dits bateaux, etc. >> (Très, des Chart. Reg. 172,
pièce C"20.)
De là, ces expressions :
1° Jeu de basteaiix. Jeux degol^elets (1). Dans des
Lettres de Charles VI, du mois de septembre lilS,
adressées au bailli de Tournay et de Tournesis, on
lit : " Qu'environ le mois d'aoust 1112, par un jour
« de fesle plusieurs gens s'étoient assemblez en une
« place.... à un jeu de basteaux. » (Très, des Chait.
Reg. 107, pièce 171.)
2° Joueur de bateaux. « Bateleur jouoyt devant
« les lois, mettoil plain sa bouche d'aguilles, et
« faisoit semblant de les menger, ce que les fols
« croyent véritablement, et par cestuy seul enchan-
• leur, joueur de bateaux, ou autrement sont invi-
« tez tous autres qui se mesleiit de telles folies. »
(Nef des Fols, fol. 99.) Ce passage confirme notre
conjecture au mot basteleur.
3° Jouer de bateaulx, pour jouer des gobelets.
Ceux qui sont auprès des royaulx
Quant vient qu'on jode de haleaux,
Ou qu'on fait quelque esbat ou jeu,
Hz n'en verront rien.
Conlred. de Songocreux, fol. 1G6, V".
4° Perdre ses bateaulx. C"étoit une expression
figurée qui signifie perdre ses pas ou sa peine.
Eust, Descbamps, demandant au Roi une augmen-
tation de pension, finit sa requête par ces deux vers :
Vueillez, ou il pert ses haleaulx.
Sur ces poins estendre vo grâce.
Eusl. Desch. Pous. MSS. fol. S8(i.
5" Quiller le batteaux, signifioit figurément aban-
donner une chose, y renoncer, y mettre fin. On
disoil, en parlant de Tamour :
Puis, quand vient sur l'aage ancienne
C'est bien raison qu'on se contienne,
Et qu'on en quitte ses batteaux.
Le Blason des Fol. Amours, p. 229.
VARIANTES :
BATEAUX. Très, des Chart. Reg. in, pièce 620.
Basteaux. Ibid. Reg. 167, pièce 171.
Bateillesches, adj. au fém. plur. Cet adjectif
se trouve toujours réuni avec le mot villes. Il
désigne que ces villes n'avoient point droit de com-
mune, et qu'il n'y avoit ni maire, ni échevin. (Gloss.
sur les Coût, de Beauvoisis, au mot Ilaeleresclies.
— Voy. la note B, au T. 1, des Ord. des R. de ¥r.
page 788.) i> Entendons nous pai" villes Hatciches (2),
« hors de communes, car les villes de communes
« ont leurs maires et leurs jurez. » (Beaum. p. 115.)
VARIANTES :
BATEILLESCHES. Ord. des R. de Fr. T. I, p. 788, note 6.
Bateleresches. Ord. des R. de Fr. T. I, p. 788, note 0.
Batleresches. Gloss. sur les Coût, de Beauv.
Bateiches. Ord. des R. de Fr. T. I, p. 788, note b.
Bateices. Ibid.
Batiches. Gloss. sur les Coût, de Beauv.
Baptices. Du Cange, Gloss. lat. à Villa legis.
Bastices. Ord. des R. de Fr. T. III, p. 227.
Bateis, suhst. musc. plur. Enclos, territoire.
•< Oter du dit ressort et bateijs de... » (Ord. des R.
de Fr. T. 111, p. 250.)
variantes :
B.VTEIS, Bateys. Ord. des R. de Fr. T. III, p. 250.
Bateiz, partie. Qui bat, qui est agité. « Cœur
« t)atei:i. " Cœur agité. (Parton. de Blois, ms. de
S' Germ. fol. 155.)
Batelage, subst. masc. Droit de batelier. Soit
pour passage ou transportde marchandises. (Oudin,
Dictionnaire.)
Batelée, adj. au fém. On disoil rhétorique ou
poésie batelée. C'étoit la même chose que balade
batelée. (Voy. le mot Balade.)
Bateliers (francs), subst. masc. plur. Espèce
de jurés qui avoient la connoissance et la justice
du commerce par eau. (Nouv. Coût. Gén. T. I,
page 1108.)
Batelilis, subst. mase. Bateliers. 11 y a lieu de
croire que ce mot est une faute. On le trouve dans
les Ord. des Rois de France, T. 111, p. 576. L'éditeur
cite en marge un autre registre on on lit Bateliers
au lieu de Batelilis.
Batemaere, sut)St. fém. Bergeronnette. Sorte
d'oiseau. (Dict. de Nicot, Monet, Cotgrave et Oudin.)
On dit encore batemare en Normandie.
VARIANTES :
BATEMARE, B.^ttemare.
Batequeue, subst. fém. Hochequeue. Sorte
d'oiseau. (Dict. de Monet, au mot Batemare.)
VARIANTES :
BATEQUEUE. Monet, Dict.
Battequeue. Cotgrave, Dict.
Baterie, suhst. fém. Brèche. 11 semble que ce
soit le sens de ce mot, en ce passage: « Au siège
a de Peronne, en 153G, se trouve avoir fait quatre
« batteries, à scavoir deux avec l'artillerie, et deux
« avec les mines. » (Mém. du Bell. T. VI, p. 325.)
On appeloit pièces de Ijatterie, les canons à battre
en brèche. « Y avoit trente-six pièces d'artillerie,
« pièces de batterie, et huit cents arquebutes à
« croq! » (Mém. de Rob. de la Marck. S*' de Fleur.
MS. p. -'120.)
Les pièces de batterie désignoient aussi les pièces
de campagne, suivant ce passage où l'on dit, en
parlant d'Olivier de Daim: « Ses armes se voyent
« encore maintenant audit fort de Meulant, sur la
« porte du corps de garde, et sur deux petites
« pièces de campagne, ou de baterie. » (Mém. de
Comines, Preuv. et Observ. p. 253.)
variantes :
BATERIE. Mém. de Comines, Preuv. et Observ. p. 2.53.
Batterie. Mém. de R. de la Marck. MS. p. 420.
(1) Voir plus haut, sous bastel. Le mot apparaît dès "1392 : « Ledit Mery dist à Icellui Régnant, Tu fais les basteaulx, me
ouides tu espoventer ? » (Tr. des Ci., JJ. 143, p. 278.) (n. e.) - (2) On trouve dans Froissart batice, en latm baticium : « Et
trouvères en Normendifi grosses villes et batices, qui point ne sont fermées. » (Ed. Kervyn, IV, 381.) Ces villes étaient
placées sous Tautorité d'un seigneur. Le mot, d'après Du Gange, signifie juridiction ; faut -il remonter jusqu'à bastir ? (N. E.)
BA
430
BA
Baterie, subst. (cm. Nom de pays. Peut-être
Baclriine. Un ancien poule, parlant des arts libé-
raux, dit: « Lesquels arts trouva au tiers aige du
« monde et au temps d'Abraliam, maistres qui
« reanoit en lialerie. « (Kust. Descti. Poës. mss.
fol. ;V.)'4.)
Batestal, subst. masc. Druit, train, tapage. —
]/d mêlée, le fort du combat.
Les deux passages suivans doivent être expli-
qués, pour la mêlée, le fort du combat, où se
faisoient le plus grand abatis, l'enclume où l'on
battoil le fer, la forge où Ion forgeoil l'honneur
avec le fer, comme on disoit :
Puis est venu au balcslal
Ou se combattent li vassal
Et les II os ont assamblées
D'ambe m pars entalentées
De lor ennor a porchacier.
AlUis, MS. fol. 87, V col. 1.
Il sont moult près de grant dehait :
De gent à pié et à cheval
Voient moult grant /ri 6a'es(a/;
S'il ont paour, ne m'en raerveil.
Alhis, MS. fol. 80,V'col.2.
Partonopex met les Norois en déroute dans les
vers suivans :
Des qans el val
Ne fine de son balestal.
Parlon. de Blois, MS. de S. Gcrm. fol. 13-2, V col. 1.
A cop férir,
Me trouveroit ou vassal,
Et faisant grant bastelal
A celi qui maineroit
Tel vie, et me despiroit.
Poês. MSS. du Valioan, n- 1490, fol. 171, V.
Dans le passage suivant, il s'agit d'une fée irritée
contre Partonopex. La sœur de la fée demande
grâce pour lui inutilement; elle répond:
S'un poi eussiés de ma cure,
Moult perdriez l'envoisure ;
N'en tenriez tel balestal :
Soef conforte qui n'a mal.
Parlon. de Blois, MS. de S. Germ. fol. U2, V- col. ».
VARIANTES :
HATESTAL. Parton. de Blois. MS. de S' Germ. fol. 132.
Bastet.\l. Poës. MSS. n» 1490, fol. 171, V».
Batista at Batestal. Athis, MS. fol. 47, V" col. 1.
Batliié, subst. fém. Demoiselle. Instrument de
paveur.
Batière (Sele ou Siele.) Ces mots semblent
signifier escabeau, ou sautoir pour monter à
cheval.
Par une sele batiere sali sour Walopin.
Poës. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1367.
Une siele batiere fist Marquesai porter ;
Il saut sur Baielart.
Ibid. p. 1365.
Batiffol (moulin), adj. Moulin à papier (1). (Voy.
Du Gange, Gloss. lal. au mot Maliens.)
Batifolage {'2), subst. masc. Niaiserie, occupa-
tion ridicule. (Voy. Le Duchal, sur Rabelais, T. II,
p. 73, noie 8.1.)
Batoil (3), subst. masc. Le son des trompes ou
cliiics; en latin taralantara. (Gloss. du P. Labbe,
p. 128.;
Bâtonnet, subst. masc. Canne. Petite baguette.
Il vint droit à la halte d'Ypre :
Un bâtonnet tint en sa main
Et de sa mie li souvint.
Fabl. MSS. du R. n° 7615, T. Il, fol. 134, R- col. 2.
Battable, aitj. Qui peut être battu. On a dit en
ce sens : ville mal batable d'Engins. C'esl-îi-dire
qu'on peut battre difficilement avec l'artillerie.
(Monslrelet, Vol. III, fol. .52.)
VARIANTES :
BATTABLE. Sagesse de Charron, p. 574.
Batable. llist. de la Popelinière, T. I, Liv. II, fol. 42, V».
Battant, adv. En hâte, tout courant. — Tout
récemment.
L'usage de ce mot a été fréquent dans le premier
sens. On disoit: « Il envoya un homme battant
« devers Monseigneur. » (Hist. d'Artus III, Connest.
de Fr. Duc de Bret. p. 766.) Borel l'explique par : à
,9raHf/t'fo;//'st'. (Voy. sonDict.au mol BafrtH^) C'est de
là qu'est venue cette façon de parler encore usitée,
mener bâtant (4). Le P. Martène, dans son Gloss.
écrit Batan, et l'explique par grand courrier, mais
c'est sans fondement.
Dans le second sens, ce mot paroit signifier « tout
récemment, » dans le passage suivant: « D'Italie
« arriva hier au soir, mon beau fils qu'en vient
« ballant. » (Lett. de Louis XII, T. IV, p. 85.) C'est
en ce sens que le peuple dit: « Un habit tout
« battant neuf. » Comme qui diroit arrivé tout
nouvellemeut. Voy. embattre pour arriver, et tout
claquant neuf, expression populaire, comme pour
" arrivant et faisant encore claquer son fouet. »
VARI.ANTES :
BATTANT. Lett. de Louis XII, T. IV. p. 85.
BATANT. G. Guiart, MS. fol. 128, R».
Batan. Gloss. de Martène, T. V.
Batte, subst. fém. Filières pour placer le bois
des fenêtres. C'est ainsi que le mot batte est
expliqué dans le Nouv. Coût. Gén. T. II, p. 1090 el
passim. C'est aussi l'explication du mot bedde.
(Ibid. p. 9i9), etdu mot battement. (Ibid. p. /i08.)
Il paroit donc que ces mots viennent de battre,
parce que c'éloit dans ces filières que seposoientles
ballans des fenêtres, le bois qui bat ou porte
contre le mur; nous disons encore battant en ce
sens. Nous croyons donc qu'il ne faut pas confon-
dre le mol batte, et ses orthographes, avec les
orthographes du mot i*ae>,quidésignent l'ouverture.
(1) Dans les textes d'origine italienne, batifollum, bacifoUum paraît désigner un bastion, une machine de guerre, tin
beffroi, (n. e.) — (2) lialtifoller el batLifolaç/e sont venus d'Italie au Wl' siècle ; c'était, au-delà des monts, des combats
simulés au pied des remparts, (n. e.) - (3) Nous avons la forme batnil, battant de cloche, au propre et en terme de blason.
Rabelais écrit : « Le bâtait estoit d'une queue de renard. » (Edition de 1711, IV, 27.) Le P. Labbe a ici pensé fort mal à
propos au vers d'Ennius: « At tuba terribilis sonitum taratantara dixit. » ISaluU n'est pas une onomatopée, mais un dérivé
de battre. (N. E.) — (4) La locution mener battant est abrégée de mener en battant, en pressant l'ennemi ; de là au sens de
récemment, de nouveUement, la dérivation est facile, (n. e.)
BA
— i31 —
BA
la fenêtre même. Ce qui a donné lieu ti celte con-
fusion, dans laquelle est tombé l'éditeur du T. III'
des Ordonn. des R. de Fr., c'est que le mol bace,
fenêtres, et le mol batte ou battement, ont servi
également de nom aux marques qui servent à
prouver que le côté du mur où elles sont appartient
à celui qui les a fait faire. (Voy. le Nouv. Coût.
Gén. aux lieux cités.)
VARIANTES :
BATTE. Nouv. Coût. Gén. T. II, p. 1090.
BATE. Onl. des R. de Fr. T. III, p. 586.
Baide. Coût, de Haynaut, Nouv. Coût. Gén. T. II, p. 145.
liEDDE. Nouv. Coût. Gén. T. II, p. 948.
Batticment, stibsl. masc. Nouv. Coût. Gén. T. II, p. lOÎM.
Battecul, subst. masc. Partie de l'armure, celle
qui couvre les fesses. (Dicl. de Cotgrave.) « Tout
« plat s'en alla parterre, en manière que au clieoir,
« les pièces de son battecul lui renversèrent sur
« le dos, tellement qu'il eut le derrière tout descou-
« vert. >' ;.iean d'Auton, Ann. de Louis XII, de 150G,
page 27 i )
Battelessifve [l], subst. fém. Lavandière. Sorte
d'oiseau, celui que « les Latins nomment motacilla
« les François hochequeue, lavandière et hatle-
. lessive, laquelle faisoit affoler d'amour. » (Maiad.
d'Amour, p. 224.)
VARIANTES :
BATTELESIFVE. Cotgrave.
Battelessive. Malad. d'Am. p. 224.
Battement, subst. masc. Coup, blessure. « S'il
« y a aucuns qui se combattent, ou se font sang,
« ou autres injures, ou battemens. » (Ord. des It.
del'r. T. m, p. 312.)
Batterie, subst. fém. Action de battre. Oudin
expliiiue ce mol par dispute, noise. On lit dans les
Tenur de Lilll. fol. 98 : « Pour doubl de baltery, »
c'est-;"! dire pour crainte d'être battu, et p. 199:
" Pour doubl, ou pavor de <;a//m(?, «c'est-à-dire
pour peur d'être battu.
On disoit : batterie de tambours, pour l'action de
battre le tambour. (Oudin, Dict. et Brantôme,
Capitaine Estr. T. II, p. 169.)
VARIANTES :
BATTERIE. Oudin, Dict.
Batekie. LiUl. Ten. fol. 99, V».
Battery. Ibid. fol. 98, V».
Batteur (2), sî/fcsf. 7nasc. Terme d'art. On disoit
batteur d'archal, baleur d'or à filer, d'estain d'or
en feuilles C'éloit le nom des ouvriers en ces
divers genres d'ouvrages. (Voy. la table des Métiers
de Paris, ms. de Meinière, p. 10 et 12.)
VARIANTES :
BATTEUR. Tabl. des Mestiers de Paris, MS. p. 12.
Bateur. Ibid. p. 10.
Battre, verbe. Battre, frapper. Ce mot subsiste
et a conservé presque toutes ses acceptions ancien-
nes. Il faut cependant remarquer diverses expres-
sions dans lesquelles on l'employoil et qui ne sont
plus d'usage.
On dil de l'âme qu'elle bat, pour exprimer la
durée de la vie. « Tout com l'ame leur bal, » pour
tant qu'ils vivent, tant qu'ils respirent. (J. deMeung,
Cod. 1074.)
1° Battre à la porte, pour heurter, frapper.
« Quand il fut arrivé vers le compère sire Pierre,
>. // bâtit à la porte. » (Nuits de Strap. T. I, p. 387.)
2- Battre à froid , pour perdre sa peine et soii
» tems. » (Voy. le Peler. d'Amour, T. I, p. 96.)
3° Se battre les joues, pour être content, satisfait
ou se moquer, tirer avantage. « Parce qu'ils font
« profit, au grand dommage du peuple, de la levée
« des deniers qu'ils font sur luy, pour ce qu'ils
« s'en battent les joues à leur bon plaisir, ne dési-
<• rant aucunement que ces troubles cessent. »
(Mém. de Nevers, T. II, p. 136.) Oudin , dans son
Dictionnaire, donne à celte exiiression un sens tout
contraire : il l'explique par se repentir.
4° Batre ses paumes , pour frapper des main*
l'une sur l'autre. Nous trouvons celle expression
dans ces vers :
Lues que (3) li prestres entre en l'huis
Commença à lire ses saumes
Et la dame à batre ses paitmcs.
Fabl. MSS. du R. n- laiS, fol. 2i3, R" col. l.
5° Battre bief en la grange ou en autrmj grange,
pour avoir un commerce illicile avec une femme
ou fille. (Voy. les Poës. mss. d'Euslache Deschamps,
folios 423 et 495.)
0° Batre bone moisson , pour façon de parler
figurée.
Einsi menrez vos bone vie ;
Car mauves vilain ne doit mie
Por li batre bone moisson.
Fabl. MSS. du R. n- 7615, T. II, fol. 18.'., R- col. 2.
7° Battre sa coulpe, pour se frapper sur la poi-
trine en signe de repentir de sa faute. (Vov. la
Chron. de S' Denis, T. 1, fol. 175.)
8° Battre de l'esté, c'est-à-dire voler.
Encore y a d'autres oyseaulx,
Esmerillons, et haubereanlx,
Qui butleitt tellement de Icsle
Tant l'ont viste, etc.
Gacc de la Bignc. des Déduits, MS. fol. 122, R'.
En termes de fauconnerie, battre, sans être joint
à aucun autre mol, signifioit voler: » Se l'espervier
>' veoit devant il plumeroit aval le poing, quant il
« batroit, et s'il veoil derrière , il batroit contre
» mont, et prendroit bons esbas. » (Modus etRacio,
MS. folio 136.)
9" Battre son cul au chant, pour perdre son
tems et sa peine. (Voy. les Poës. mss. d'Eustache
Deschamps, fol. 23.)
10° Battre le chien devant le lion (4), pour faire
peur aux grands en châtiant les petits. (Oudin,
Cur. fr.)
(T) EUps ont l'air, en effet, en battant de leur queue, de battre le tinsse, (n. e.) — (2) « Quiconques veut estre bateret
d'archal à Paris, estre le puet, mes qu'il sache le mestier. » (Liv. des Met.. 55.) (N. E.) — (3) Dès que, aussitôt que. —
(4) On dit aussi battre le chien devant le loup, de gens qui^ étant d'accord, se disputent pour faire croire qu'ils ne s'entendent
pas et attraper leur dupe. (n. e.)
BA
— 432 —
BA
i\° liatlre à la clialr. On i\)so\i, en pailanl du
faucon, lorsqu'on lui présenle l'appàl: « Se Ion
« oiseau se trouve seur, et qu'il mange, et batte à
« la chair, » pour donne sur la viande. (Budé, des
Oiseaux, fol. 123.)
i'i" Veslemcnt battus en or, vêtemens sur les-
quels il y avoil de l'or appliqué ou imprimé. (Per-
ceforest. Vol. IV, fol. 59.) On disoit de même :
. lmï\([\x& ba&tuc de /leur de Ik, ■> c'est-à-dire
parsemée de lleur de lis. (Voy. les Vigiles de Char-
les Vil, T. I, p. 170.) « Treize bannières batues des
• armes du roy. » (Voy. un inventaire ù'armeures,
cité par Du Gange, Gloss. latin, au mot Armatura.)
13° Les battus paijOient l'amende. Façon de par-
ler proverbiale encore eu usage aujourd'hui. Elle
vient d'une ancienne coutume, qui punissoit ceux
qui se battoieut en duel et qui étoient vaincus. On
leur coupoit le poing, et quelquefois on les pen-
doit. (Voy. Du Gange, Glossaire latin, au mot Cani-
pionis in duello. — Voy. Oudin, Gur. l'r. — Savaron,
contre les Duels, p. 41 et 59.)
Le battu bien souvent, ainsi paye l'amende.
Ce proverbe se trouve dans les Poésies de Le
Yasseur. Ge poète l'applique à Jésus-Ghrist, inno-
cent et souffrant pour les coupables. (Voy. Goujet,
Bibl. fr. T. XV, p. 315.)
14° Battus bleux est une expression burlesque.
(Voy. Du Tilliot, Hist. de la Kéte des Fous, p. 120.)
GoNJUG.
Butut, au prétérit. Battit. (Fabl.Mss. du R. n°7G15,
T. II, fol. 139, R°col. 1.)
Buttera [ferra ou), au futur prés, pour frappera
ou battra, espèce de tautologie. (La Thaumassière,
Coutumes d'Orléans, p. 464.)
VARIANTES :
BATTRE. Orth. subsist.
Batre. Nuits de Strap. T. I, p. 387.
Bastre. Eust. Descb. Poës. MSS. fol. 298. - Faiteu, p. 47.
Baptre. Lett. de Louis XU, T. II, p. 257.
Bactre. Modus et Racio, fol. 51, V».
Battu, partie. Abattu. « Fut la ville bien batue
« d'artillerie; il y avoil des boulevaits, et moineaux
« qui furent bains auparavant que on peust assail-
« tir. » (Histoire d'Art. III , Gonnest. de France ,
an 1437, page 771.)
Battue, subst. fém. Sorte de pèche. — Terme
de marine.
Sur le premier sens, voy. le Gloss. latin de Du
Gange, au moi Bastuda. Ce mot signifie une espèce
de pèche que l'on faisoil par le moyen d'une bat-
tue ou en battant l'eau pour rassembler le poisson,
On fait aussi des battues dans certaines chasses ; et
ce mot subsiste en ce sens.
Ce mot a été employé comme terme de marine.
Nous n'en déterminerons point la signification pré-
cise. Voici le passage oîi nous le trouvons : « Leur
« intention esloit de suyvre nos galleres, en tant
■• qu'ils le pourroient faire , sans rien bazarder,
" esperans nous attirersur les bans et i;ft//!/cs (1). »
(Mém. Du Bellay, Liv. X, fol. 340.)
Batture (2), sm/;s/. fém. L'action de battre, donner
des coups. — Grêle. — Corvée. — Ornement. —
Air de symphonie.
Sui- le premier sens de battre, donner des coups,
voyez les Dict. d'Oudin et de Gotgrave, au mot
Batture. « Son compagnon battu de telle bat-
« ture. " (Perceforest, Vol. V, fol. 87.) « La dame
« estoit toute couverte de sang des batlures qu'ils
« luy avoient faites. » (Ger. de Nevers, part. p. 37.)
Juven. des Ursins, parlant de rassassin;it commis
par ordre de Graon, en 1392, contre Olivier de
Glisson, dit qu'il ne mourut pas de la dite batture.
(llisloire de Charles VI , p. 89.) On disoit en ce
sens, batture de bombarde, pour l'action de battre
une place à coups de canon. (Mémoires d'Olivier
de la Marche, p. 72.)
C'est par une extension de ce genre que l'on a
nommé bature les grêles qui gâtent les vignes.
« La bohade (3)... est due au plus prochain vinoble,
« si en iceluy n'y a batture ou gelée. » (Coutumes
générales, T. H, p. 400.)
Go mot s'est employé pour corvée, dans le pas-
sage suivant: « Les chrestiens, qui dedans la cité
« demeuroient, estoient à trop grandes misères de
« bastures, et autres œuvres servilles pour aider à
« ceulx qui la cité avoient à deffendre. » (Tiiomphe
des IX Preux, p. 484.)
Nous ne trouvons point dans la seconde acception,
que nous venons d'exposer, l'orthographe bateure.
Elle est employée, aussi bien quebàltureel bature,
pour désigner une espèce d'ornement de métal ou
de peinture qui se mettoit sur les étotfes, les habits
ou les meubles, et qui y étoient appliqués; on les
trouve quelquefois opposés aux ouvrages en cou-
ture que l'on cousoit sur les étoffes ou sur les
babils, et aux ouvrages en brodure ou broderie.
Voyez Godefr. Hist. de Charles VI, p. 735, où l'on
a dit, en parlant de l'équipage des chevaux et des
hommes qui dévoient accompagner les obsèques
du connétable Louis de Sancerre: « Les selles des
» deux dits chevaux, l'une sera pour la guerre,
" armoyéede cousture, et l'autre pour le Tournoy
« armoyée de bateure ; et porteront les deux dits
« gentils hommes, chacun une bannière ; c'est
" assavoir, celui à la selle de guerre, la hannièrede
« guerre de cousture, et celuy à la selle de Tournoy,
<i la bannière de Tournoy de bateure, et seront les
« dites bannières, c'est assavoir celle de la guerre,
■' de cousture, et celle de Tournoy, de bateure. »
On lit: Batture de soije et de feuille, c'est-à-dire
(1) Il y a là deux termes de marine qui ont été confondus : 1° battue du poisson , creux qu'il fait dans la boue où il
s'enfonce l'hiver; 2" Imtlure, fond mêlé de sables ou de roches qui s'élève vers la surface de reau. C'est le mot qu'il faut
lire ,i rexemple cité, et c'est ainsi qu'il a été imprimé à la page 598 de l'édition de 1569. La Curne emploie l'édition de
1592. (N. E.) — (2) Batture se trouve au sens propre dès le xiiF siècle ; « Ke li mal ke il solirent ne soient mie pie bateure
de rhastiement, mais durs tlaeaz de droite venjance. » {Job, v. 471, dans les Ouatre Livres rie.t I^ois, p. p. Leroux de Lincy,
lK41.>i,N. E.) - Ci) Corvée de bœufs.
BA
433
BA
ornemens en soie et en feuilles d'or baUus. (Poës.
Mss. d'Eust. Desch. fol. 504.)
Enfin, batlnre se disoit d'un air de symphonie
sonné par une trompette : « Ils jouèrent de leurs
« trompettes une batture. » (Math, de Coucy, Hist.
de Charles VII, p. 609, — Voy. les Mémoires d'Oli-
vier de la Marche, p. 551.)
VARIANTES :
[ÎATTURE. Oudin, Dict. - Villon, Poës. p. 100.
Bature. Vigiles de Charles VII, T. II, part. p. 187.
Hasture. Beaumanoir, p. 149.
Bateure. Godefr. Hist. de Charles VI, p. 735.
Batiture. Cotgrave, Dict.
Battui'ier, sitbst. inasc. Cap dans le Canada.
Les François, lorsqu'ils le découvrirent, en 1607,
le nommèrent BaUurier, à cause du danger qu'ils
coururent d'y faire naufrage. (Rigaiilt, à la suite du
P. de Thou, T. V, p. 14.)
Battus (i), suhst. masc.plur. Confrérie de flagel-
lans. (Dict. d'Oudin et de ^'icot.)
variantes :
BATTUS, Batus.
Baubans, adj. ou part, au pliir. Aboyans. On
disoit chiens haubans. (Alector, Hom. fol. 111.) On
trouve chiens bayens, dans l'IIist. des Trois Maries,
en vers, mss. p. 449.
variantes :
BAUBANS. Alector, Rom. fol. 111.
Bayens. Hist. des Trois Maries, en vers, MSS. p. 449.
Baubau, subst. masc. Aboyement. Mot formé
par onomatopée. Il exprime le bruit que fait le chien
eu aboyant. « Le mastin du logis commence à
« abbayer, et avec son baubau appelle son mais-
« tre. » (Merl. Cocaie, T. I, p. 38.)
Baube, suhst. masc. et adj. Bègue. (Dict. de
Borel, au mot Daube). Ph, Mouskes, parlant de
Charles-le-Chauve, dit :
D'une feme, ki fu gentius
Avoit uns fils ki fu soutius :
Loeys li baubes ot non,
Et saciés k'il ot cest sornon
Pour cou k'il esloit baubiUerre (2)
Mais il n'iert fos, ne abetere.
Ph. Mouskes, MS. p. 328.
On lit, en parlant du même prince, Louis le
Barbe (3). (Chron. de S' Denis, T. I, fol. 195.) C'est
sans doute une faute pour baube.
Remarquons cette expression :
Droit parlant et baube, c'est-à-dire tous.
Cil d'armes droit parlant et batibe,
Lendemain bien matin à l'aube,
Partent les veluz et les cheus.
G. Guiart. MS. fol. !94, V.
VARIANTES :
BAUBE. Ph. Mouskes, MS. p. 328.
Balbe. J. Le Maire, Sch. et Conc. p. 33.
Baulbe. La Salade, fol. 51, V" col. 1.
Barbe (lisez Baube.) Chron. de S' Denis, T. I, p. 195.
Bambe (lisez Baube.) Lignages de Camer, p. 224.
Baubeterre. Ph. Mouskes, MS. p. 328.
Beille. Dict. de Borel.
Bijous. Dict. d'Oudin.
Bley.s. Fav. Théâtre d'Honneur, T. II.
Bley. Mot languedocien.
Baubillonner(4), verbe. Radoter. C'est un mol
breton.
Bauboier, verbe. Balbutier. « La hasle de par-
« 1er luy enlrerompoit la voix, et faisoit sa langue
« bauboijer. « (Al. Chartier, de l'Espérance, p. 26G.)
VARIANTES :
BAUBOIER. Parton. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 150.
Bauboyer. Al. Chartier, l'Espérance, p. 277.
Beii.ler. r.orel, Dict.
Bauc, subst. masc. Sorte de tablette semblable
à celles dont nous nous servons pour exposer des
fromages à l'air.
Le banc et le loier,
Et la table à mangier
Si li covient en haut
Le chassier su le bauc
A fromages garder.
Fabl. MSS. du R. n" 7615, T. II, fol. 212, V- col. 2.
Baucades(5), stilist. masc.plur. Nom de faction.
« C'étoit une sorte de mutins gaulois qui s'éloient
« élevés du temps de Diocletian. » (Dict. de Borel.)
Baucens, adj. Pie. Bai-pie. Couleur du poil d'un
cheval. (Dict. de Borel, au motBaucens, et leGloss.
latin de Du Cange, au mot Saurus.)
Chevauls ont gaaingné blans, et baucens et sors.
Rom. de Rou, MS. p. 103.
Les costes à baucans, et fauve le crespon.
Notice du Rom. d'Alex, fol. 4.
A tant brocent bruns, et bauçans.
Ph. Mouskes, MS. p. 187.
Nulle saiete qui descoche
Ne vait plus que li destriers,
Uns bruns baucans, qui estoit fiers.
Alhis, MS. fol. 7;!, v* col. 2.
On nommoit beanséant (6) le drapeau des Tem-
pliers, qui étoit noir et blanc, selon Guill. de Tyr,
cité par Favin, Théàt. d'honn. T. II, p. 1617.
VARIANTES :
BAUCENS. Rom. de Rou, MS. p. 103.
Beaucens. Du Cange, Glossaire latin, T. I, p. 1077.
Bauçans. Not. du Rom. d'Alex, fol. 4.
Bauçant. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 249, V" col. 2.
Baucein. Athis, MS. fol 104.
Baucent. Fabl. MSS. de S' Germ. fol. 64, V».
Bauch.\nt. Parton. de Blois, MS. de S' Germ. fol. 170.
Bausan. Du Cange, Glossaire latin, au mot BaMceiis.
(1) C'était leur surnom sous Henri III ; on les nommait encore blancs battus, parce que ce roi établit , en 1583, trois
confréries distinguées par trois couleurs différentes, le blanc, le bleu, le noir. (n. e.) — (2) Trompeur ; on trouve le verbe
abeter dans le Roman du Renard. (N. E.) — (3) Le / de balbiis a pu devenir »• par un phénomène de rhotaoisme. (N. e.) —
(4) On dit encore, dans le Finistère (Dial. de Léon), balnlleitreitxs pour babillarde, mais ce n'est que le mot français
babillercssc, durement prononcé. Il en est de même de baubiltoner ; batibe a donné le diminutif baubillon, sur lequel on a
créé le verbe cité. (n. e.)^ — (5) Les formes latines citées par Du Cange sont : Bacaudœ, Baccharidœ, Baijaudœ, Baogandœ,
Baogaudœ, Bav
balzan, dérivé i
baauseant ferait croire à la fausse élymologie bien séant, (n. e.)
II. 55
Tugaredœ. Borel devait sans doute aussi peu connaître le latin que le français, (n. e.) — (6) C'est le mot actuel
î de balteus, bordure, avec le sens particulier de bordure blanche. Il vaudrait mieux écrire bauçant, car
BA
434 —
BA
Baussant. Eusl. Desch. Poës. MSS. iol. 410, col. 4.
Beauseant. Citât, de Favin, Th. dhonn. T. II, p. 1617.
BOUÇANT. Not. du Rom. d'.^le.s'. p. 20.
Baçardent. Poes. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1363.
lîaucli, culj. Fou grossier. (Du Cange, Gloss. lat.
au mol neboyschalus (1).)
Baiiche, sitbst. fém. Boutique. Dict. étym. de
Ménage, au moi Vébuuclicr. (Voy. Bauge.)
Baud, subst. masc. Espèce de cliien courant.
(Dicl. de Monet, Oudin, Cotgrave, Ménage et Cor-
neille.) « A le chien baull la meilleure tache, car il
« scet bien quant il chasse le droit, etc. »(Moduset
Racio, fol. 19.) « B«i(s l'appellent pour ce qu'ilz sont
« baus et bons et sages pour le cerf. » (Chasse de
Gaston Phébus, ms. p. 120.) On les nommoit aussi
baux retifs. (Voyez Modus et Racio, ms. fol. o7.) On
trouve ibid. au fol. 19, beaulx rectis.
VARIA.NTES :
BAUD. Oudin, Dict.
Bauds. Cotgrave, Dict.
Baut. Chasse de Gaston Phébus, MS. p. 233.
Bault. Modus et Racio, fol. 19, V°.
Baus. Chasse de Gaston Phébus. MS. p. 127.
Baux. Modus et Racio, MS. fol. 37, R».
Beiaulx. Modus et Racio, fol. 19, V».
Baud (2), adj. Joyeux, gaillard. — Libertin,
effronté. — Fier, hautain. — Fin, rusé.
Dans le premier sens, ce mot signifie joyeux,
gaillard. (Gloss. du Rom. de la Rose, -au mol Baitlde,
et Suppl. au mot Baux, de mine friande) : « Sont
« baux et joyeux et liez en leur courage. »
Femme riant, safTre de chiere,
Baude, alaigre, de belle monstre.
Coquillart, pa^e 32.
Dans le second sens, ce mot a été employé pour
libertin, dissolu. (Gloss. du Rom. de la Rose, au
mot liaulde et Baulx.) « Ou les pucelles principale-
« ment, et les femmes deussent être humbles, et
« simples, celles sont plus baudes, et plus effrénées
« que les hommes ne sont. » (Nef. des Fols, fol. 7.)
" Trop estoit baude, et hardie. « (Chron. S" Denis,
T. I, fol. 36.)
Le mal déception et fraude,
Qui se fait par femme trop baude
Et aussi par l'omme trop baitl
Qui vault pis assez que ribaut.
Eust. Ucsch. Pocs. MSS. fol. 568.
Tais-toi, dist-elle, garce:
Trop es de parler baude.
Fabl. MSS. du R. n' 7518, fol. 3i2. R* col. t.
On a employé ce mot avec la signification de
hautain, allier. i^Gloss. du Rom. de la Rose, au mot
Baull.) Charlemagne, regrettant la mort de Roland,
s'exprime ainsi :
Vous n'aviez pas la ciere baude;
Aine estiez la fine esmeraude.
Ph. Mouskes, MS. p. 228.
Si lui a dit de baude chiere
Qui que tu sois, va arrière.
Eust. Descli. Poi'S. MSS. fol. 459, ool. 1.
On a dit aussi haut pour fin, rusé ;
Le renard qui est trop baut.
Eust. Desch. Pocs. MSS. fol. 482, col. 4.
Remarquons l'expression suivante, qui semble
avoir un sens différent des acceptions du mot baut
exposées ci-dessus. Avoir le haut, paroît signifier
avoir l'éveil : « Je cuiday avoir le haut, et estre de
■< guet d'après minuit. » (Contes d'Eulrapel, p. 390.)
variantes :
BAUD. Dict. de Borel, Nicot, Ménage, etc.
Bauld. Gace de la Bigne, des Déduits, MS. p. 34, R".
Baulde, fém. Glossaire du Roman de la Rose.
Bault. Chron. S' Denis, T. I, p. 180.
Baut. Fabl. MSS. du R. n» 7218. fol. 283.
Balch. Mot breton. Du Cange, Gloss. lat. au mot Baltha.
Bals. Borel, Dictionnaire.
Bault. Glossaire du Roman de la Rose.
Bauls, plw. Gace de la Bigne des Déduits, MS. fol. 107.
Baus. Poës. MSS. avant 13Û0, T. III, p. 1205.
Baux. Borel, Dict. au mot Baus.
Bauz. Poës. MSS. avant 1300, T. I, p. 529.
Bandais, subst. masc. Nom de lieu ou de pays.
Nous trouvons le ro\j de Baudais mis avec le roij
d'Afrique, dans Blanchand. >is. de S' Germ. fol. 177.
(Voy. Bai riAs.) Ces deux mots semblent signifier la
même chose.
Baudas (3), subst. masc. Nom de pays.
Li Roy de Baudas.
Parlon. de Blois, MS. de S. Germ. fol. 156.
Dans une lettre de Ph. de Valois, portant imposi-
tion sur toutes les marchandises vendues à Paris,
on lit, entre autres choses : « En cenz azur, laque
« et mastic blanc, mine borrois, inde de Baudas,
« yvoire, etc. » (Ord. des R. de Fr. T. II, p. 320.)
Baudeloiei', subst. Nom propre de lieu. La
porte Baudeloier, c'est-îi-dire la porte Baudoyer,
à présent une place publique de Paris. (Voy. Juv.
des Ursins, Ilist. de Charles VI, p. 201.) L'orlhogra-
phe buldement sembleroit indiquer l'origine de ce
mot, ainsi que ces mots baud et baudvie, comme
étant dérives de valde, validus et valetudo. Dans
celle supposition, il faudroil l'expliquer d'abord par
fortement, dontlesaulres significations ne seroient
qu'une extension. Dans les passages de S' Bernard,
oîi se trouve le mot haldement, le sens le plus pro-
pre seroit celui de valde. (Serm. Fr. p. 137.)
Baudemeut, adv. Joyeusement. — Bravement,
hardiment, hautement, insolemment, avec pré-
somption. — Doucement.
Ce mot, dans les Serm. Fr. mss. de S' Bernard,
p. 137 et passim, répond au latin certe. (Voy. les
Dict. de Nicot et de Cotgrave ; Le Duchat , sur
Rabelais, T. I, p. 20, et Gloss. de l'Hist. de Bret.)
On disoit au premier sens : « Ils vinrent tous
(1) Le mot latm se trouve dans un texte narbonais de 1367, mais s'applique à un objet matériel et non à une infirmité
morale : « Item legamus... utium salinum argenti, in quo quidem salino est deboyscliatus unus draco ermantatus cum
signis sive armis nostris. » (Mart. I, col. 1524.) (N. E.) - (2) Si le sens dilTére, l'étymologie est, comme pour l'article
précédent, Tallemand bald, joyeux, hardi, (n. e.) - (3) C'est Bufjdad : « Tandis que li roys fermoit sayete, vindrent
marcheanl en l'nst, qui nous distrent et conteront que li roys des Uartarins avuit prise la citei de Baudas et Tapostole de?
Sarrazins, qui estoit sires de la ville, lequel on appeloit le calife de Baudas. (JoinviUe, éd. de W., § 584.) (n. e.)
BA
435 -
BA
« hamlement et allaigrement. « (Juv. des Ursins,
Hist. de Ch. VI, p. 380.) « Uelournerent en la ville
« /)rt(/f/(?m(??if, et à grand joye. » (Froissart, Vol. I,
page 91.)
Bauilemcnt signifioit hardiment, effrontément,
hautement, insolemment, avec présomption. Frois-
sart, parlant des amours du jeune Boucicaut, dit :
« Il ne fut mie si hardy dé plainement dire sa
« pensée, comme font les jeunes gens du temps
« présent qui, sans deffeste, vont baudement aux
« dames requérir qu'ils soyent aimez. » (Histoire
de Boucicaut, p. 30.) « Trouvèrent les Navarrois
« d'icelle garnison qui ardoyent un village, si leur
« coururent sus baudement. » (Froissart, Vol. I,
p. 222. — Voyez Bout. Som. rur. p. 181, et Monstr.
Vol. II, fol. 172.)
Il se prenoit aussi pour doucement. Voyez le
Gloss. sur les Coût, de Beauvoisis, qui renvoie au
passage suivant : « Le bon pledeoirdoit ses paroles
" dire tout baudement et entendement. » (Assis.
de Jérusalem, p. 2G.) Entendement est expliqué par
intelligiblement dans le même Glossaire.
VARIANTES :
BAUDEMENT. Froissart, Vol. I, p. 91.
Baldemknt. S< Bernard, Serra. Fr. MS. p. 137 et passim.
Baudemant. Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. I, fol. 107.
Bauldement. Gace delà Bigne, des Déduits, MS. fol 115.
Baudequiii (1), subst. inasc. Baldaquin. —
Etoffe. — Monnoie.
Sur le premier sens de baldaquin, voy.Du Gange,
Gloss. lai. au mot Baldakinus.
Ge mot se prend aussi pour étoffe. Froissart,
parlant de l'entrée de la reine Isabelle de France à
Paris, dit : « Estoyent des bourgeois de Paris douze
« cens... parés, vestus tous d'un parement, de
« gonnes, de baudequiaxerd et vermeil. » (Frois-
sart, Vol. IV, p. 2.) On lit à la marge c\uegonnesesl
pour habillement et baudequhi pour le drap.
Enfin ce mot a signifié une espèce de monnoie
ainsi appelée, parce que le roi étoit représenté assis
sur un trône couvert d'un baldaquin. Les mon-
nayeurs en demandèrent la suppression en 1308 :
« Item qu'en l'en face faire dellense des ?^ft»f/(?fy;<îMS
« qui courent communément pour six deniers. »
(Gloss. latin de Du Gange, au mol Batdaliinus.)
VARIANTES :
BAUDEQUIN. Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. Il, fol. 190.
Baudekix. Du Gange, Gloss. latin, au mot Baldakinus.
Bauderie, subst. fém. Joie, gaieté ou cri, ou
bruit de joie. — Bravoure, acte de valeur. — Van-
terie, fanfaronnade.
Dans le DicLionnaire de Borel, au mot Bauderie;
on V\ibandon dans la traduction de Guill. de Tyr,
édit. du P. Martène, T. V, de sa collection p. 733.
C'est mal à propos qu'il renvoie au mot Bandositas
du Glossaire latin de Du Gange. Bandon est une
faute pour baudor, de même bandor que le P. Mar-
tène explique dans son Glossaire par en public.
Ce mot a été employé avec la signification de
gaieté, dans les vers suivans :
J'ay mainte fois chanté,
De joye, et de baudor.
Poès. MSS. avant 1300, T. Ill, p. 1150.
Il s'est dit aussi pour cri ou bruit de joie :
Ils mesnent si grand joye, tel bruit, et tel boudotir,
Comme se chacun eust tout plain un grand voul d'or.
Ger. de Roussîllon, MS. p. 115.
Ce mot a signifié bravoure : « Vouloir par une
« présomptueuse bndise, » dans les Serm. Fr. mss.
de S" Bernard, p. 319.
Qui en toute honnour,
En valour,
Sanz faul.K tour,
De prouesse, et de haudour
Surmontoit toute contrée.
Eust. Desch. Poès. MSS. fol. 97, col. 1.
On s'est servi de ce mot pour vanterie, ostenta-
tion, fanfaronnade :
Le trop parler me deffendoit.
Parler à point me commandoit
Sanz baudouv et sanz vanterie '
Sanz mentir, et sanz llaterie.
Machaut, MS. fol. 22, V col. 3.
VA^.IA^•TEs ;
BAUDERIE. Borel, Dictionnaire.
Baudeche. Atliis, MS. fol. 10, R" col. 1.
Baudise. Poës. MSS. avant 1300, T. I, p. 116.
B.\DisE. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. p. 319.
Baudorie. Ph. Mouskes, MS. p. 653.
Baudoire. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 360, V» col. 1.
Baudor. Poës. MSS. avant 1300, T. III, p. 1117.
Bandor. (Lisez nàudor.) Gloss. de Martèn. T. V, p. 733.
Baudon. (Lisez Haudor.) Ibid.
Baudour. Marc, et Salem. MS. de S' Germ. fol. 116.
Bautor. Fabl. MSS. du R. n« 721S, fol. 346, R" col. 1.
BouDOUR. Ger. de Roussillon, MS. p. 115.
Bande wiiis, nom propre. Baudouin.
Baudi, adj. Entonné. Il semble que ce soit le
sens de ce mot dans ce passage :
N'y ot trompe sonnée, ne autre cor baudi.
Chron. MS. de B. Du Guesclin, citée par Du Gange, Gl. 1. au mot CalamelUi.
Baudir, verbe. Réjouir. (Dict. de Nicot et d'Ou-
din.) Ge mot se trouve très souvent employé dans
nos anciens livres de vénerie. On disoit : baudir les
chiens (2), pour les animer, les agacer: « Quant ils
" auront presque mengé, tu tireras le loup par les
« jambes et le reveriras, et ainsi baudiras tes
« chiens, et en vauldront mieulx. » (Modus et
Racio, fol. 28, V°.)
Bandons, 3ubst. masc. plur. Mot factice, pour
l'action de faire de beaux dons, dans ces vers :
Beaulx dons de vins et de viandes
Ont fait donner ; maintes prébendes
Beaulx dons si font, n'en doublez mye,
Porter tesmoings de bonne vie ;
Moult tiennent partout grans baudons (3) :
Qui beau don donne il est preud'homs:
Les dons donnroit loz aux donneurs.
Rom. de la Rose, vers 8625-8630.
Baudoninaige, subst. masc. L'acte du baudet.
(Voyez Rabelais, T. V, p. 31.)
(1) Baudeguin, baldaquin, sont des dérivés de baldaco, nom corrompu de Bagdad, où se fabriquait une étoffe fine servant
à faire des tentures, (n. e.) — (2) On a encore bauder, aboyer en terme de chasse, et baudir, encourager un faucon à
combattre un héron, en terme de fauconnerie, (n. e.) — (3) Il faut lire beaux dons. (n. e.)
BA
— 436
BA
Baudouiner, verbe. Faire l'acte de baudet. —
Dresser des poulains. — Aller à cheval.
Le premier sens de faire l'acte de baudet se
trouve dans Habelais, T. V, p. 31. Cotgrave écrit
baudinei'.
On disoit aussi baudouiner pour dresser ou
dompter les poulains. (Dict. d'Oudin.)
Le même mot désignoit encore aller à cheval :
« S'en alla voir un sien voisin, selon la coustume
» qu'ils avoient de voisiner en leurs maisons,
« comme de /w«f/oi(;'«x')' par les chemins. «(Contes
de Des Périers, p. 77.)
VARIANTES :
BAUDOUINER. Rabelais, T. V, p. 31.
Badouiner. Lisez Bcmdomner.
lîAUDiNER. Cotgrave, Dict.
Baiulreotant, adj. Epithète de chien. (Epilh.
de Martin de la Porte.)
Baudrier, mbst. masc. Bourse, escarcelle,
écharpe, pris dans le sens de bourse : « Bien
« faschés d'avoir si mal employé l'argent de leur
.< baudrier. « (Brant. Cap. fr. T. IV, p. 315.)
Baudrillée, subst. fém. Quantité. (Dict. d'Ou-
din.) « A Metz, en Champagne et en Lorraine, on
« nomme baudrillée une (luanlilé d'espèces, ou de
« jetions qu'on voit couler, comme un à un , d'une
« bourse, ou d'un espèce de boiau, tel que les
.. marchands en portent quelquefois en forme de
« ceinture. » (Le Duchat, sur Rabelais, T. I, p. 181,
note 24.)
Baudroierie, subsi. fém. L'art et le métier de
corroyeur; le lieu oîi l'on apprête les cuirs. (Dict.
de >;icot et d'Oudin.)
Baudroy (1), subst. masc. Espèce de poisson de
mer. (Dict. d'Oudin et de Cotgrave.)
Baudroyer, subst. masc. Corroyeur. Propre-
ment faiseur de baudriers. C'éloit la qualité que
prenoient les corroyeurs qui préparoienl les cuirs
et qui faisoient des baudriers. (Voy. les Ord. des
R. de Fr. T. II, p. 305, et le Dict. de Cotgrave.)
VARIANTES :
BAUDROYER. Ord. des Rois de France, T. II, p. 365.
Baudraveur, liAUDRYEUR. Cotgrave, Dict.
Baudroyer. verbe. Corroyer. « Préparer les
« cuirs tannés à recevoir les couleurs. » (Dict. de
^'icot et d'Oudin.)
VARIANTES :
BAUDROYER, Baudroier Monet, Dict.
Bauduffe, subst. fém. Toupie. (Dict. étym. de
Ménage, et Le Duchat, sur Rabelais, p. 75.)
Bauduffle, subst. fém. Espèce d'étoupe gros-
sière. » Je me torchay de foin, de paille, debau-
« dufllc, de bourre de laine, de papier. » (Rabelais,
T. I, p. 78. — Voyez le Dict. étym. de Ménage.)
Bauduin, adj. Epithète d'âne.
Ausi com asnes hauduins
Se doit servir li auduins.
Poës JISS. avant 1300, T. IV, p. 1340.
Bauerie, subst. fém. Moquerie: « On peult
« entendre irrision, bauerie, moquerie, ou brague-
" rie en paioles : et par rusticité, vilenie, rudesse,
« ineptitude et malplaisance en langage. » (J. Le
Maire, Couronne margaritique, p. 47.)
Bauffrée, subst. fém. Lardon, brocard, coup de
dent :
La rusée
Ne taschoit sinon à pigner.
Et de lascher quelque bauffrée,
A mordre, ou à esgratigner.
Coquillarl, p. lOfl el 107.
Bauffrer, verbe. Bâfrer, manger goulûment.
(Dict. de Nicot, Monet, Cotgrave et^Rob" Estienne.)
Ce mot vient de baultfrés, mâchoire.
VARIANTES :
BAUFFRER. Rabelais, T. Il, p. 219.
Baufrer. Dict. de Cotgrave.
Bauffres, subst. plur. Tranches, morceaux.
Voici le passage oîi ce mot se trouve ; entre autres
préceptes sur la manière d'écorcher le cerf, de
l'habiller, nous lisons celui-ci: « Coupe le cuyr
<i par derrière les oreilles, en allant au travers, en
« laissant grans beauffrées du cuir pendant. »
(Modus etRacio, fol. 14, V".)
VARIANTES I
BAUFFRES. Modus et Racio, MS. fol. 29, R».
Beauffrées. Modus et Racio, fol. 14, V».
Bauffreur, subst. masc. Gourmand. (Dict.
d'Oudin el de Cotgrave.)
VARIANTES :
BAUFFREUR. Oudin, Dict.
Baufreur. Cotgrave, Dict.
Bauffreure , subst. fém. L'action de manger
goulûment. (Dictionnaire de Cotgrave.) « Après les
« premières bauffreures, » c'est-à-dire après les
premiers morceaux. (Rabelais, T. V, p. 22.)
V.4.RIANTES :
BAUFFREURE. Rabelais, T. V, p. 22.
Baufreure. Cotgrave, Dict.
Bauge, subst. fém. Demeure. (Dict. de Borel,
au i\wi Embaucite.) Il prétend que le nom Tolosto-
boges (2) donné aux habitans de Toulouse s'en est
formé, ^otre mot bouge pourroit en venir aussi :
Sur la mer de Triple chevauche
Mais il n'y a maison ne bauche
De terre ne d'autre merrien.
Machaut, MS. fol. 232. R" col. 3.
VARI.iNTES :
Bauche. Machaut, fol. 232.
BOGE.
Baugeart, subst. masc. Terme d'injure:
« Comme qui diroit misérable païsan dont les
« cabanes n'ont que des murs de /'«»;/<'. » ^LeDuch.
sur Rab. T. I. p. 170. — Voy. le Dict. de Cotgrave.
(l) C'est le nom vulgaire de la lophie pêcheuse. On la nomme ainsi à cause de sa large bouche, qui semble être une
bourse, un baudrier, (n. e.) - (2) Il faut lire Tolhloboii. C'est une des tribus gauloises qui s'etabUrent en Asie-Mineure. (N. ï.)
BA
— 437
BA
Baugié, subnt. masc. Le Bugey (1). Nom de pays :
« Les comtés de Bresse, et de Itaiigié, réunies îi la
« sacrée couronne de France par eschange du
■« marquisat de Salusses. » (Fav. Th. d"liO!i. p. 1855.)
Bauke, siibst. Pièce d'un moulin à vent.
L'auteur, faisant allusion des vanteriesd'unhàbleur,
à un moulin à vent, s'exprime ainsi :
L'eureus wagons a en covent
Qu'il fera un moulin de vent,
En la vue dame Sarain :
Mais n'i aura hauke, ne rain
Ne soit laite d'un menteeur.
PoCs. MSS. avant 1300, T. IV, p. 13ri7.
BauUlrier, suhst. Baudrier. — Armement
d'homme qui servoit à porter Fépée. (Gloss. du R.
de la Hose.)
Baiilx(2),Sî</;sf.?HftSC.;j/î<r. Soliveau. « .SousTan
« 44G'(, en plaidoyant une cause en parlement à
« Paris, la chambre se prit à trembler, et cheut
« illec une grosse pierre de la massonnerie, et le
« lendemain advint le péril (pour pareil) en plai-
« dant celte cause, et saillit un des haulx de la
« chambre hors de son lieu. » (Chron. de 14(10-
14G7, dans l'Hist. de Ch. VU, de Den. Godefr. p. 3.-9.)
Au 4' T. de Louis XI, de Théod. Godefr., ce mot est
expliqué par soliveaux mis de travers. On dit
encore baux pour signifier les pièces de bois ou
poutres qui soutiennent les ponts, ou tillacs des
navires.
VARIANTES :
B.\ULX. Hist. de Ch. VII, de Den. Godefr. p. 359.
Baux. Nouv. Coût. Gén. T. II, p. 289.
Baume, subst. fé)ii. Grotte, caverne. (Dict.
d'Oudin et de Ménage.) Balrne, en Bourgogne, si-
gnifie grotte, d'oi^i se sont formés plusieurs noms
de lieux. (Yoy. la P>oque, Orig. des noms, p. 65.) Il
se dit pour colline dans quelques lieux de France.
(Voy. Du Gange, Gloss. latin, au mot Balma.) En
Provence, ce mot, sous l'orthographe baume, dési-
gne un nom de lieu. « Et fùsmes au lieu de la
« liasme (3), en une roche moult haull, lu où l'on
« disoit que la Sainte Magdelaine avoit vesqu en
« hermilage, longue espace de temps. » (.Joinv.
page 118)
Baumo se dit en Auvergne pour tombe, ou cavité
d'un rocher. (Du Gange, Gloss. lat. au mot Balma.)
VARIANTES :
BAUME. Oudin, Dict.
Balme. La Roque, Orig. des noms, p. 65.
Basme. Joinv. p. H8.
Baumo. Du Gange, Gloss. lat. au mot Balma.
■ Bauson, subst. fém. Saison d'abattre les bois.
« uni coupe, ou abat les branches d'un cliesne,
« quinze sols parisis, qui est trouvé foyant bois, et
« fauchettes, et taillis, amende de trente sols pari-
• sis, se les bois abattus ne sont relevés dedans la
« margette en suivant la bauson à coupe, amende
« de soixante sols parisis. » (Coût, de Peron, au
Nouv. Coût. Gén. T. II, p. 601.)
Baiit, suhst. masc. Peut-être ce mot n'est-il
qu'une corruption de l'orthographe bail. (Voyez
Bail.) Alors il signiiieroil disposition, puissance
dans ces vers :
Li maus d'amors, qui ne me faut,
.le sui du mont tout en leur haut.
Falil. MSS. du R. n" 7i!18, fol. 304, V" col. 2.
Baut, adj. Terme de chasse. « Le veneur doit
« choisir de sa meute un chien le plus beau, hardy,
« ardant, gaillard, et baut, c'est-à-dire secret, qui
« n'ait encore chassé, etc. ■> (Du Fouilloux, Vén.
fol. 113.)
Bavardin, subst. masc. Bavard. (Lettres de
M°" de Sévigné (4), T. I, p. 132.)
Bave, subst. fém. Bavardage. Discours inutiles,
babil, caquet, sornettes et moqueries. (Dict. de
Borel et Gloss. de llarot, au mot Bave.)
Nous devisasmes là de baves.
Coquillart, p. t4G.
«.Partout oîi il sera sceu, on en tiendra rys et
« baves. .. (Perceforest, Vol. III, fol. 80.)
On disoit: estre en bave, pour être en enfance.
(Voyez Garasse, Rech. des Rech. p. 862.)
VARIANTES :
BAVE. Le Duchat, sur Rabelais, T. II, p. 123.
BAVEniE. Nicot, Oudin, Cotgrave, Dict.
Bavardinage, subst. masc. Lett. de Sévigné, T. I, p. 132.
Baver, verbe. Bavarder. Parler inutilement,
liàbler. (Dict. de Nicot, Borel et R. Est. au moi Baver.)
Et quant ils eurent bien bavé.
Disant de luy des maulx, par voye.
Il dist, eulx ayans achevé :
Gardez que le roy ne vous oye.
\'\gi\. de Charles Vil, T. I, p. 38.
VARIANTES :
BAVER. L'Amant rendu Cordelier, p. .590.
B.WASSER. Essais de Montaigne, T. III, p. 31.
Bavardiner. Lett. de Madame de Sévigné, T. I, p. 148.
Bavernes, subst. fém. plur. Balivernes. Mo-
queries. (Dict. d'Oudin et de Cotgrave.)
Baverolle , subst. fém. Banderolle. On lit :
Lance et baverolle (5), dans les Mém. Du Bellay,
T. VI, page 267.
Bavesche , subst. fém. Bobèche. (Dict. de
Cotgrave. — Voy. Serées de Bouchet, Liv. Il, p. 207.)
Baveur, subst. masc. Bavard, hâbleur. (Dict.
de Nicot, Gl. de Marot et Celthell. de L. Trippault,
au mot Baveur.) On disoit, au diminutif et au
pluriel, bavereauLx. (Œuvres de Collerye, p. 141.)
Bavus, dans Marbodus, est dans le sens propre
de baveux : « Refaire enfanz bavus. »
VARIANTES :
BAVEUR. Clém. Marot, p. 683.
Baveux. Dict. de Nicot. - Le Jouvencel, MS. p. 228.
(1) La forme latine est probablement Baugiacum, pays couvert de bauges, (n. e.) - (2) .Bau vient sans doute de l'allemand
Balken. (N. E.) - (3) Ceiie Baume est une montagne du Var; si l'on en croit A. Thierry, baou serait un mot ligurien. (N. E.)
- (4) Elle emploie aussi bavai-dino- : « Nous n'avons fait que bavardiner et nous n'avons point causé. » (Edition de 1735,
p. 40.) (N. E.) — (5) Ne faut-il pas lire baneroUe ? (N. E.)
BA
- 438 —
BE
Bavaceux. Contredits de Songecreux, fol. 120, V».
liAVARDiN. Lett. de Madame de Sévigné, T. I, p. 132.
liAVEREAULX (plur.) Roger de Collerye, p. 141.
Baveuse, suhsl. fé»i. CoquilUut, p. 78.
Bavebesse, suhsl. fém. Ibid. p. :i7.
B.WAURESSE, mlisl. féin. Iljid. p. 3.
Bavl'S, suhs(. fém. Marbodus, col. IGiS.
Bavière (1), subst. fém. Bavette. — Mentonnière
d'un casque ou le casque même garni de men-
tonnière.
Dans le premier sens, Rabelais dit des frères
Fredons: « Quand ils vouloieiit boire, ou manger,
« ils rabaloient les cahuets de leurs caputions, par
» le devant, et leur servoil de baincrc. » (Rabelais,
T. V, p. 13i.)
On disoit aussi baviere pour la mentonnière d'un
casque. « Jean Stuari duc d'Albanie eut là un coup
« de traict d'un arcTurquois, duquel fut sa baviere
« faulsée, avec sa gorgerette, tout au travers, et
<i luy atteint jusques au sang. » (J. d'Auton, Ann.
de Louis XII,' p. 208.) Le P. Daniel, dans sa Mil. Fr.
T. I, p. 400, croit que c'éloit une espèce de cornette
de taffetas dont on ornoit Farmet. Nous ne trou-
vons rien qui autorise cette conjecture.
VARIANTES :
BAVIÈRE. Crétin, p. 82.
Baverete. Monet, Dict.
Baverette. Rab. T. IV, p. 222.
B.WEROTTE. Cotgrave, Dict.
B.WEROLLE. Oudin, Dict.
Baville, subsl. Nom de lieu. Endroit de Paris,
près la porte S' Antoine. (Voy. Brant. Cap. Fr. T. III,
p. 40'2.) Il faut peut-être lire Bastille ou Belleville.
Bavois (2), subst. masc. « C'est le tableau, ou
« feuille de compte qui contient le fondement de
« l'évaluation desdroictsdeseigneurinage, foiblage,
« escharté et brassage, selon le prix qui court, et
« qui est attribué, par l'ordonnance du Roy, à l'or,
« argent, et billon, tant en œuvre, que œuvré. »
(Laur. Gloss. du Dr. Fr.)
VARIANTES :
BAA'OIS. Laur. Gloss. du Dr. Fr.
Bavouer. Cotgrave, Dict.
Bavolée, adj. au fém. Coiffée en bavolet. Il est
employé comme uintliète de chambrière, dans les
Epithètes de Mart. de la Porte.
VARIANTES :
BAVOLÉE, B.A.VOLETTÉE. Epith. de Mart. de la Porte.
Bavoler, verbe. Voltiger. (Dict. d'Oudin et de
Cotgrave.)
Ce petit archerot amour,
lia volant, s'esgayoit un jour
Dedans les Vergers de Cythère.
Pocs. de Rem. Bcll. T. I, p. 5G.
On disoit aussi : bravolerdes estes, pour voltiger,
battre des ailes. » La chuette bravolera des estes,
« cl (juant l'esprevier la verra ; il vendra llaler en
« my les pans, ainsi sont pris les espreviers à la
« perche. » (Modus et Racio, ms. fol. 168.)
VARIANTES :
B.4. VOLER. Poës. de Rem. Bell. T. I, p. 56.
BR.A.VOLER. Modus et Racio, MS. fol. 108, V.
Bavolette (3), stibst. fém. Paysanne, femme en
général portant un bavolet. (Dict. d'Oudin. — Vov.
le Dict. Etym. de Ménage, au mot Bavette.)
Bavon, subst. masc. Bavette. (Dict. d'Oudin et
de Cotgrave.)
Bayette, subst. fém. Revesche. Espèce d'étoffe
de laine. (Dict d'Oudin.)
Bayoïmes (i), subst. fém. plur. Baïonnettes.
(Dict. de Borel, au mot Baioniers.)
Baze, subst. fém. La partie inférieure, la queue.
On a dit aux médecins: « Otez la baze de vos R ;
« vous ferez D, et ainsi, au lieu de recipe, nous
« aurons decipe. » (Contes de Chol. fol. 53.)
Bazestan, subsl. masc. Le marché des esclaves
en Turquie. ■-■ Il faudroit visiter telles dames avant
« les aimer, et espouser de mesmes en font les
« Turcs en leur bazestmi, quand ils acbeplent
>' des esclaves de l'un et de l'autre sexe. » (Brant.
Dames Gai. T. I, fol. 302.)
Bazille, subst. fém. Criste marine. Espèce de
plante appelée herbe de S' Pierre. (Dict. d'Oudin.)
Bazille (curé de Sainte-). Nom factice. (Voy.
Coquin, p. 107.)
Beanfet, subst. Bénéfice ou fief donné en
récompense des services. « Nos Herveu de Léon,
« avons donné à pur et perpétuel héritage à fin et
« à jamais audit Herveu Ilequier et aux seans tote
« la tarre et la sasine que le devant dit Cuiomarc
« le peire au devant dit Herveu tenet par son
« beanfet, et quant qu'il avoet eu de noire per et
« de notre hœul. » (D. Morice, Hist. de Bretagne,
col. 983.) Peut-être aussi, faudroit-il lire beaufet
pour beau fait de guerre, service rendu à la guerre.
Béant, part. Ouvert, fendu. — Surpris, étonné.
Ce mot subsiste au premier sens. Mart. de la
Porte s'en est servi pourépilhètede la terre entr'ou-
verte par la trop grande chaleur.
Lorsque l'élonnement ou l'admiration agissent
sur nous avec force, nos sens sont comme enchaî-
nés et notrebouches'ouvresansnousen apercevoir;
de là béant s'est dit figurément, pour étonné, saisi
d'admiration. « Caton et Scipion accusés en public
« ont fait rougir leurs accusateurs, entraîné les
« juges, et toute l'assemblée béante à leur admira-
(1) La mentonnière fut élevée sous le règne de Charles VII jusqu'au-dessus des narines, avec une projection suffisante
en avant et des ouvertures pour qu'il fût possible de respirer à l'aise ; c'est ce qu'on a appelé la baviere. C'était un peu
une bavette. (N. T..) - (2) On trouve, dans Du Cange, 6ama»-di(.s, ftni«'ia)-(i».s, monnaie, (n. e.) - (3) La bavolette était ua
agrément ajoute aux coiffes des servantes, vers le temps de Richelieif ; elle consistait en une sorte de drapeau qui pendait
par derrière, entre les épaules. L'étymologie est sans doute bas voler, (n. e.) - (4) Des Accords, au xvi» siècle, dans ses-
Kebvis de Picardie, écrit : « iinsi que l'on dit bayonnettes de Rayonne. » D'autres voudraient voir dans bayonnettes ua
dorive de buynela, coutelas en espagnol, (n. e.)
BE
— 439 —
BE
« tion, et suite. » (Sagesse de Charron, p. 387. —
Voy. Baer.)
Beat, adj. Nous ne rapportons ce mot, qui
subsiste, que pour remarquer son ancien usage. Il
désignoit autrefois toutes sortes de religieux; ainsi
l'on disoit beats pars, pour exprimer les moines
en général. (Dict. de Cotgrave. — Voy. Pasquier, Liv.
VIII, p. 731, et le Moyen de Parvenir, p. 224.)
Béate, subst. fém. Aumône. Ce mot, formé de
beat, signifioit spécialement l'aumône faile îi un
moine. « La besasse des religieux s'appelloit beati-
« quorum, et l'aumosne qu'on leur faisoit se nom-
" moit la béate. «{Garasse, Rech. des Rech. p. 280.)
Beatilles (1), subst. fém. plur. Colifichets. —
Femme de petite taille-
Au premier sens, on comprenoit sous ce mot
toutes sortes de petits ouvrages et d'ornemens
d'un prix médiocre. (Voyez Du Cange, Glossaire,
latin, au mot Beatillœ. — Oudin, Cur. Fr.)
Par une extension de cette première acception,
bealUes a signifié une petite femme ; du moins
lisons-nous que ce mot « s'est dit en quelques en-
« droits des femmes de petite hauteur. » (Celthel.
de Léon Trippault.)
VARIANTES :
BEATILLES. Oudin, Cur. Fr.
Beatiles. CeltheU. de Léon Trippault.
Béatitude, subst. fém. M. de Villeroy, dans
ses Mém. T. I, p. 181, donne ce titre au Pape, et le
qualifie plus bas Sa Sainteté. (Voy. aussi La Roque'
de la Nobl. p. 362.) '
Beau, adj. Grand. — Terme d'amitié. — Terme
de mépris.
Ce mot avoit beaucoup de significations. Comme
la plupart subsistent encore, nous ne parlons que
de celles qui sont hors d'usage.
Beau se disoit pour grand. C'est en ce sens qu'il
est employé dans les expressions suivantes :
1° Boire à son beau plaisir et aise. « Entrèrent
« les gens du Jouvencel tous armez, et la
•< beurent, et repeurent à leur beau plaisir et aise. »
(Le Jouvencel, ms. p. 574.)
2° Faire beau bruit. Façon de parler encore usi-
tée. (Le Jouvencel, ms. p. 88.)
3' Belle fiebvre, pour fièvre violente. (Mém. de
Rob. de la Marck, S«' de Fleur, .vs. p. 94.)
Ce même mot, qui, lorsque nous le joignons à
ceux de père et mère, fils, frère, sert encore'aujour-
d'hui à marquer la parenté qui nait d'une alliance,
n'étoit autrefois que l'expression de l'amitié et de
la familiarité entre les personnes du sang royal, et
d'un rang égal entre elles. Ce n'est pas que celles
d'un rang inférieur n'usassent aussi de ce terme,
mais c'étoit par un excès de vanité. C'est ainsi du
moins que s'en explique l'auteur des Honneurs de
la Cour. « Quand les Roys et Roynes, ducqs, duclies-
« ses, princesses ont des parents, niepces, cousins
■> germains et autres de grand lignage, puis(|u'ils
« sont de sang royal, les doivent' appeller beaux
" nepveux, etc.. et doibt estre ce nom de beau ou
« belle, et des uns aux autres aussy en escripture,
« mais qu'ils soient de mesme degré et d'une
" mesme noblesse, et toutes ces choses dessus
0 diltes ne se doibvent faire ez maisons de plus bas
« degré, sy comme de comtesses, vicecomtesses,
« baronnesses, et ne leur appartient aussi d'ap-
« peller leurs parents beaux cousins et belles
« cousines, sinon autrement que mon cousin et ma
« cousine ; et quiconque en use autrement que dict
« est, il doibt estre notoir à chacun que cela se fait
« par gloire et présomption, et doibt estre réputé
« pour nul. » (Les Honn. de la Cour, ms. p. 74.) Si
le rang et la dignité mettoient quelque différence
entre les personnes de sang royal, alors il n'appar-
tenoit qu'au supérieur de se servir du terme de
6eflH, et l'inférieur n'en usoit pas, lors même que
le degré de parenté sembloit devoir lui donner la
supériorité et autoriser cette dénomination. L'auteur
cité dit : « Quand monsieur le ducq Philippe, eut
« espousé madame Michèle sa première femme, qui
« fut fille du Roy de Fiance, monsieur le ducq
« Jean, père d'iceluy ducq Philippe, la vouloit
« toujours servir d'espices, mais elle ne le vouloit
>■ sousfrir, toulesfois il s'agenouilloit toujours
« jusques à terre devant elle, et l'appelloit madame,
« et elle l'appelloit beau père quand madame
" Catherine, fille au Roy Charles de France, eut
« espousé Monsieur de Charrolois, Madame la
« duchesse de Bourgogne sa belle nure (2) mettoit
« toujours, la ou elle pouvoit. Madame Catherine
« devant, et luy faisoit grand honneur; et aussy
« faisoit Monsieur le Ducq Philippesetl'appelloient
« Madame, et elle les appelloit beau père et belle
« mère. » (Ibid. p. 17.)
On pourroit citer plusieurs autres exemples qui
confirment cet usage. Le roy Charles V, parlant à
ses frères, les appelle beaux frères, et Louis XI, qui
use de la même expression, en parlant h ses frères,
se contente d'appeler frère, le duc de Bourbon,
mari de sa sœur. (Voy. Froissarl, an 1380, p. 97, et
Mém. de Comin. T. III, preuv. p. 70.) Bel et biel
frères est souvent répété dans Carpentier, Histoire
de Cambrai.
On trouve beau fils pour propre fils, dans la
Chron. S' Denis, T. I, p. 256. Ces règles du cérémo-
nial, dont nous venons de parler, n'empêchèrent
pas que ce mot beau ne passât dans le langage
familier, comme une expression obligeante et ami-
cale, commune à tout le monde :
Beau filz, belle fille et beau père,
BiaiLc oncles, cousins, hiaux nepveux,
Biait compains, bêle suer, biau frère,
Belle cousine, i>iaux filleux,
Biaux voisins, s'appellent entr'eulx
Plusieurs, en langaige commun,
(X) Beatilles esi un diminutif de beatus et s'appliquait aux petits om-rages des religieux, agnus, pelotes, boîtes; les
religieux y mêlaient peut-être des reliques de béaiifiés. (n. e.) - (2) Du latia nurus.
BE
— 440 —
BE
Qui s'entr'ainent comme chiens et leux.
On ne doit pas croire chasoun.
Eusl. Descli. l'ois. MSS. fol. 14i, col. 2.
De là, les différentes farons de parler suivantes qui
ne sont employées que p;ir honnéleté, par amitié ou
par confiance. Beaux amis. Un chevalier appelle
ainsi un pauvre. (Percef. Vol. IV, fol. 28.) On trouve
beaux cotnpains ou compagnons, dans l'Histoire de
Du Guesclin, par Ménard, p. 408. Le comte de Flan-
dres, parlant au.\ i-'lamands, qui lui promettoient
deux cent mille hommes armés à son service, les
appelle beaux enfants. (Froissart, livre II, p. 48.)
C'est en ce sens encore que l'auteur plein de
confiance, adressant la parole à Jésus-Christ,
s'exprime ainsi dans ces vers :
A vos me rent, heau-perc Jhesu Criz;
Si bon Seignor avoir je ne porroie
Chans. MSS. du G" Thib. page 8.
Un père parlant à son fils lui dit : « Biax filz, et
« celui-ci li repond fecrtHjjpr^?. » (Athis, ms. f° 126.)
Beaul doux oncle. Terme d'amitié d'un neveu
parlant à son oncle. (Ger. de Rouss. ms. p. 108.)
Nous remarquerons qu'on appeloit aussi les reli-
gieux beaux pères. Sur cet usage, voyez Pasquier,
Rech. livre VIII, p. 731.
Beau, joint au mot sire, se trouve employé par le
secrétaire de Machaut, prêtant la parole à son
maître qui le consultoit : >< Sire, quant il m'ayt, il
« prisl à rire et me disl en riant biau sire, vous
« n'avez mestier de conseil. » (Machaut, ms. f" 200.)
Mais il emportoit presque toujours une idée ironi-
que et piquante. Louis .\1 écrivant au chancelier, et
voulant lui faire sentir qu'il étoit roi, se sert du
ternie de beau sire. (Duclos, Preuv. de l'Histoire de
Louis XI, p. 452.) Une demoiselle parlante un nain
l'appelle beau sire, dans Florès de Grèce, fol. 62.
Dans Eust. Deschamps, une femme emploie la
même expression, en parlant de son mari. (Poës.
MSS. fol. 515, col. 2.) Cette interpellation ne s'est
conservée parmi nous qu'en parlant aux masques.
Plaçons ici quehiues expressions où le mot beau
se trouve employé sous différentes acceptions :
Estre mont bon, suffisant et mont beil la Deu
merci, se disoit d'une personne qui étoit en bonne
santé; comme qui diroit assez bonne et belle
situation. (Rymer, T. I, p. 102.) On lit biel dans le
même titre, rapporté par D. Morice (Histoire de
Bretagne, Preuv. col. 997.)
1° Faire le beau beau, pour faire le joli. (Dict.
d'Oudin.)
2* Faire beau beau, pour caresser, flatter :
Cela me desplairoit
Quelque beau beau que la cour ne sceust faire
Et qui ce tour bien souvent me feroit,
Possible n'est que luy sceusse complaire.
Chasse d'Amours, fol. 35, col. 1.
3° Tuer de beau faict. C'est-à-dire de bonne
guerre, à son corps défendant. » Tu as occis, non
« pas de beau fait, mais par trahison. » (Percttf.
Vol. IV, fol. 30.)
4" Bar beau. On disoit : Par beau ou par lait,
pour degré ou de force : « Une demoiselle ung
" grant Seigneur vouloit avoir par beau ou par lait.
« à faire son fol plaisir. » Par beau ou autrement,
s'est employé dans le même sens. (Voyez Froissart,
livre H, p. 133.) On disoit aussi :
Cil ont son commandement fait,
Ou eus soit IjcI, ou eus soit lait.
Fabl. MSS. du R. n" 7980, fol. 5C. V col. 2.
5° A beau Jeu beau retour. On se servoit de cette
façon de parler pour dire que deux adversaires sont
de force égale. « Il le pressoit de si prez que bien
« souvent il ne luy donnoit loysir de se parer, n'y
« mettre l'escu au devant des coups; mais à mau
« chat, mau rat, a beau jeu, beau retour. » (D. Flo-
rès de Grèce, fol. 7d.)
La devise de la maison de Beaujeu, étoit : » A tout
« venant beaujeu. » (Menestr. Orn. des Arm. p. 241.)
Bial eage, pour le bel âge, la jeunesse.
6° Par bel et /jarora je. Bel, dans celle expression,
mis en opposition avec orage, semble employé
substantivement, mais il est aisé d'apercevoir que
son substantif est sous-entendu. Au propre, on a dit :
M. et cccc Troiens
Mena jiar bel et par orage.
G. Guiart, MS. fol. 139, R'.
Au figuré, on a dit :
Après le bian, après la belle chière,
Tu t'esmerveilles s'il a sus toy pieu.
Geofr. de Par. à la suite du Rom. de Kauv. MS. n' 6812, fol. 55.
7" Dire bel. Louer, dire du bien de quelqu'un, en
parler avantageusement :
Devant vous, vosire bel diront,
El derrières vous trahiront.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 205, U- col. 1.
8" Se Dieu est bel. Nous disons en ce sens, s'il
plaît à Dieu. (Fabl. mss. du R. n° 7218, fol. 128.)
9" Beaubout, pour le haut-bout. « Après que le mes-
« lier fut servy, les quatre siraines, fines ouvrières,
« filles du fieuve Achelous, et de Calliope la Muse,
« compagnes de Proserpine, fille de Ceres, déesse de
« fertilité, se présentèrent sur le beau bout. » (J.Le
Maire, Illustr. des Gaules, livre I, p. 93.)
10" Beau /î/s. C'est-à-dire joli garçon ou bel
enfant : « Si ce nouveau champion emporte leprys,
« vous vous pourrez bien moquer de moy et dire
« que ie l'auray mal deffendu. Neantmoins vous y
« aurez moins de regret, pour autant qu'il est beau
« filz. " (J. LeMaire,'^Illustr.desGau!es,L.I,p.l37.)
11° Beau matin. Façon de parler usitée : " Un
« beau matin, (\\\e le vent fut bon et propice, chacun
« print congé de ses parents et amis. » (.1. Le Maire,
Illustr. des Gaules, Livre II, p. 167.)
variantes :
BEAU. Orth. subsist.
Heaubout. J. le Maire, Illustr. des Gaules, T. I, p. 93.
BiALAT, Bkl. Ger. de Roussillon, MS. p. l'J2.
BiAU. Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. I, fol. 112.
BiAUL at Be.vl. Ger. de Roussillon, MS. p. 203.
BiAux iplur.) Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 144, col. 2.
Baus at Bax. Athis, MSS. fol. 53, V° col. 2.
Beil. Rymer, T. I, p. 102, til. de 1265.
Baul. 6er. de Roussillon, MS. p. 210.
Beals, Béas. S' Bern. Serm. Fr. MSS. p. 32, passiin. et
373, sous le lalin Baciostis et Pulcher.
Bibles pour Bel. Carpentier, Hist. de Cambrai, T. II, p. 18.
BiA.\. Fabl, MSS. du R. n» 71), fol. 58.
Beaulx (jilur.) Ger. de Nev. 2« part. p. 25.
BE
BE
Beal. Ger. de Roussillon, MS. p. 203.
Bel. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 229.
Bels pour Beaux. Marbodus, col. 1644.
Beu. Ibid. p. 7G15, T. I, fol. 119, R» col. 2.
Beau, adv. Bien. Comme adverbe, ce mot étoit
d'un usage aussi étendu que notre adverbe bien. Il
en avoit toutes les significations. On disoit : « Il fit
« un pas de clerc, et luyméme l'aprit à ses dépens,
« car pour beau dragmer ses drogues infusives, il
« ne sceut signe, etc. » (Contes de'Chol. fol. 195.)
Bial pai'olle, bien le sot faire. (Athis, m. fol. 90.)
Les vessiaux sont si bel menez,
Que je croi que mie.x ordenez
Ne vit homs nus, en un tas tel.
G. Guiart, MS. fui. 309, V'.
Plus biati signifioit quelquefois mieux :
S'en conforta plus biaii qu'il pot
Fabl. MSS. du R. n° 7-218, fol. 355, R' col. 1.
Bel (par), pour bien, convenablement :
Qui a grâce, et qui prye amesuréement
Et qui parle par bel et aviséeraent
Prier peut, et requerre le tout présentement.
J. de Meung, Cod. 1349 cl 13.')1.
Ainsi comme plus beau jmet, pour du mieux
qu'il peut. (Ger. de Roussillon, ms. p. 53.)
On disoit proverbialement :
Qui biau dit, biau veut oir.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 150, R- col. l.
VARIANTES *
BEAU. Contes de Cholières, fol. 195, R».
Bial. Athis, MS. fol. 90, R» col. 2.
Biau. Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. I, fol. 111, R» col. 1.
Bel et Bel (par). Ibid. u» 7218, fol. 313, V" col. 1.
Beaucoup, adv. Beaucoup. Borel et Ménage
dérivent ce mot de beau, grand , et de coup, en
latin copia. Cette élymologie me paroît d'autant
plus vraisemblable que je trouve un passage propre
à l'appuyer. On lit dans l'Histoire des Albigeois, en
languedocien, par un anonyme, dans les preuves
du 3' T" de rnist. de Languedoc, de D. Vaisselle,
col. 4: « Lor avia iait grand cop de mal », c'est-
à-dire leur avoit fait beaucoup de mal. (Ibid.)
Bclcop de gens pour beaucoup de gens. (Id.) Rien,
dans les passages que nous allons citer, ne contre-
dit l'origine que nous donnons à cet adverbe :
« Sire, dictes nous s'il vous plaist aucune
« advenlure Beaulx coups, dist le Seigneur,
« vous en puis-je dire, car j'en vis plus de mille. »
(Lanc. du Lac, T. II, fol. 84.) On le disoit aussi pour
signifier : une grande partie. « Clotaire se vit,
« avant mourir, monarque delà Gaule, el de beau-
« coup de l'Allemagne. » On trouve aussi autre cop
pour une autre fois.(Hist. des Albigeois, M/>i suprà.)
VARIANTES :
BEAUCOUP. Orth. subsist.
Beaulcoup. Rabelais, T. I, p. 31.
Beaulxcoups. Perceforest, Vol. V, fol. 92, 'V» col. 2.
BiAUcop. Fabl. MSS. du R. n» 7615, T. II, f« 163, V» col. 2.
Beacob. Œuv. de Rog. de Collerye, p. 189.
Belcop. Hist. des Albig. preuv. de l'Hist. de Languedoc.
Belcops. Ibid. col. 46.
Beaufils, subst. 7nasc. Rabelais a dit : " Le
« monde est deveuu beau fils. » C'est-à-dire plus
rusé, plus savant. (T. III, p. 195.)
II.
Beateit, subst. fém. Beauté. Ce mot, dans les
Serin. Fr. mss. de S' Bernard, répond au latin décor,
pulchritudo et species. Voyez les autorités citées
sur chaque orthographe :
Rose de niay ne flors novelle
Premièrement quant elle est née
N'est pas tant fort encoulorée
Que la bialcz cardyones.
Athis, MS. fol. 5, R- col. 1.
Sa biatés qui me rapele.
Quant m'en voeil partir, me ratrait.
Fabl. MSS. du R. n" 7989, fol. 62, R' col. 2.
Moul boinement a esgardé
Son cors, son vis, et sa biaté,
A lui parla cortoisement.
Et il li respont simplement
Ne li dist qui bien ne sièce.
Ibid. fol. C5, V col. 2.
VARIANTES :
BEATEIT, Beateiz, Beatez. S' Bernard, Serm; Fr. MSS.
page 19 et passim.
Bateil. Atbis, MS. fol. 23, R- col. 1.
Batel at BiAUTÉ. Athis, MS. fol. 50, V° col. 1.
Belté. Jlarbodus, col. 1644.
Beaultè. Perceforest, Vol. II, fol. 35, V» col. 1.
Baulté. Faifeu, p. 18. i
Biaté. Fabl. MSS. du R. n» 7989, fol. 68, R» col. 1.
Biatés. Ibid. fol. 62, R» col. 2.
BiATE. Athis, MS. fol. 5, R» col. 1.
Bialte. Villehardouin, page 48.
BlAUTÉ. Beaumanoir, page 15.
Beanté. (Lisez Beauté.) 'Borel, Dict.
Beaupere, subst. inasc. Confesseur, directeur.
(Glossaire de l'Histoire de Paris.)
Beauregard, subst. masc. Belvédère. (Dict.
d'Oudin.)
Bec, suhst. masc. Visage. — Nez. — Langage.
— La crête d'un fossé. — Le sommet d'une
montagne.
Dans le premier sens de visa:;e, on a dit :
Tournez toudis le bec pardevers France.
Eust. Deschamps, Poês. MSS. fol. lOG, col. 1.
" Ils avoient le bec au vent pour tirer à leur
" pais. " (Le Jouvencel, ms. p. 5G7.)
Ce mot a signifié le nez : « Crestien penront par
« le bech, » pour prendront par le nez; « nous nous
« rendrons maisires d'eux. » (Machaut, Mss.fol.230.)
Bec a été employé pour langage, babil, discours :
« Sçavez-vous pas qu'il n'a que le bec, et que par
» ses belles raisons et persuasions, etc. » (Cymbal.
mundi, p. 92.) Villon a fait une ballade sur les
femmes de Paris, qui a pour refrain :
Il n'est bon bec que de Paris.
Villon, p. 73.
On trouve ce mot avec la signification de la créle
d'un fossé, ou levée de terre : « Ceux qui ont leurs
» terres voisines aus dits chemins, et joignans à
« iceux, sont tenus les entretenir, en telle manière,
" que la sainct Jean Baptiste passée, s'ilz sont
« trouvez non ayant relevé les becques, et fossés
■< eslans selon les dits chemins, et que les eaues
« dorment et ne se puissent escouler, par faute des
« dites becques, ou autres choses non relevées, les
« hommes de la cour du dit bailliage peuvent
« condemner ceux qui ont et d&tiennent les dites
« terres voisines, à faire ouverture de ce qui
56
BE
— 442 -
BE
« empesche l'cscoulement des eaues. » (Ord. des
Rois de France, ï. II, p. '207.)
Enfin, bec signifie le sommet d'une montagne,
dans le passage suivant: -< Souffit bien de laissier
« courre dix ou douze chiens de muete, et faire au
« moins quatre reliez cliascun de quatre chiens es
« becs, et i)lus haut des montaignes, etc. » (Chasse
de Gaston Piichus, .ms. p. 2'iG.)
Expressions remarquables :
1° Donner du bec et de l'aisle , c'est-à-dire faire
ses efforts, employer toutes sortes de moyens. (Voy.
Brantôme, Capitaines frangois, T. III, p. 39(j.)
2° Faire bec, c'est-à-dire caresser:
Plus de trente fois la baisa,
Ele demande que c'estoit :
Il dit que liée H feaoil.
Fal)l. MSS. du R. a" 7G15, T. II, fol. ISi, V col. 1.
3° Faire le bec. Terme de chasse. On s'en servoit
en parlant des autours.
4° Garder le bec. Une mère encore belle, étant
jalouse de sa fille encore plus belle qui avoit excité
l'admiration d'une assemblée nombreuse de cheva-
liers, se promet de ne la plus faire paroilre de
longtemps à de pareilles fêtes, et dit :
Au départir verrois qu'en iert;
Je l'en cuit bien le bec garder
A pièce, mais n'ira muser
La ou veoir puise chevaliers.
Alhis, MS. fol. H7, V col. 2.
5° Entretenir qiielfiii'un te bec en l'eau. L'amuser,
le leurrer. ÎSoiis (li.sniis encore en ce sens : tenir le
bec dans l'eau. (Méui. Du Bellay, Liv. IV, fol. 90.)
6° Le bec des ongles. En termes de vénerie, on
disoit bec pour le bout des ongles d'un chien :
« S'ilz ont trop séjourné, faites leur accourcir le
« bec des ongles, pour ce que les ongles ne se
« rompent au courre, quant ilz sont trop longs. »
(Chasse de Gaston Phé'jus, ms. p. 107.)
7" Becs de cane. Espèce de souliers qui succédè-
rent à la chaussure appelée poulaine : « L'on fit
« d'autres souliers qu'on nommoit becs de cane,
« ayans un bec devant de quatre ou cinq doigts de
« longueur. » (Citation de Du Gange, Gloss. latin,
au mot Polainia.)
S° Avoir bec de casne , c'est-à-dire être las,
fatigué : « De tant parler, j'ay bec de casne. » (Recr.
des dev. amour, demand. d'am. p. 90.)
9" Bec de corbin , Bec de faucon. Hache à bec de
faucon , Bec d'oustarde. Espèce d'armes qui fut
atTectée particulièrement aux cent gentilshommes à
bec de corbin. (Voyez Dict. étym. de Ménage; le
Gloss. lat. de Du Gange ; le Père Daniel, Mil. fr.
T. II, p. 104, et Brantôme, sur les Duels, p. 14.)
« Tantôt après, voyans les dessus dits Angiois, ceste
« division en l'avantage de, tous ensemble entre-
« rent en eux, et jetlerent jus leurs arcs et saietles,
« et prindrent leurs espées, haches, mailles, becs
" de faucons et autres bastous, frappans, abatant et
« occisant iceux François. » (Monstrelet, Vol. 1,
fol. 229.)" Convient avoir quatre cens haches
« de guerre, tant à bec de faulcon que aullres. »
(Le Jouvencel, fol. 85.)
Cannoniers laissez vos bombardes,
Piétons laissés voler vos picques,
Mignons laissez chevaulx, et bardes,
Vos grands battons, vos becs d'oustarcles.
Coquillart, p. S.
10° Le bec, bech ou becq de faucon étoil aussi, à
ce qu'il paroit, une espèce de grue portée sur les
galères : elle servoit à élever, au-dessus des plus
hautes tours, un esquif ou petit bateau qui conte-
noit des gens de guerre et les faisoit descendre sur
la tour ou autres lieux dont ils vouloient faire
rattaijue. Parlant du siège d'Afrique, ville de Bar-
barie, vers 1390 : « D'autre partie devers la mer
" (dirent Genevois) avons intentions de faire sur
« quatre galères, deux becqs de faulcon, et en
« chacun becq de faulcon un eschis à mettre quinze
« hommes d'armes et dix arbaleslriers ; et n'y a
« bech de faucon qu\ ne soit plus haut que n'est la
« tour du port qui tant est forte, et si celle tour
« pouvons avoir, nous aurons tout. » (Histoire de
Loys m, duc de Bourbon, p. 300.)
1 1" Saigner du bec. Façon de parler qui revient
à la nôtre : saigner du nez. (Voyez fllistoire du
Théâtre française T. I, p. 161.)
12° Un lourde bec, c'est-à-dire un baiser. (Dict.
d'Oudin. — Voyez Coquillart, p. 107.)
13° Bec d'oxje est le nom d'une sorte de poisson,
aiguillât, dauphin. (Dict. d'Oudin.)
"li" Faire le bec à l'oye. Achever une affaire.
(Oudin, Cur. fr.)
VARIANTES :
BEC. Orthographe subsist.
Bech, Becq. Machaut, MS. fol. 220, R° col. 1.
BiEC. Ph. Mouskes, MS.
Bes. Chans. MSS. du comte Thibaut.
Bêche, féin. Cotgrave, Dict.
Becque. Molière, Ecole des femmes, acte iv, scène vi.
Beccus. Borel, Dict.
Becquillon. Coquillart.
Bequillon. Niool, Oudin, Cotgrave, Dict.
Becîice, subsl. fém. Bécasse. Du mot bec,
comme le brochet, bécard. (Voy. les autorités citées
sur les orthographes.) On disoit : " tendre le sac
« aux becacès » pour tendre un piège, attraper,
séduire :
Bien a la borgoise tendu
Au bouriîois le sac as becaccs.
Fabl. MSS. de S' Germ. fol. 31:2.
VARIANTES :
DEGAGE. Orthographe subsist.
Becdasse. Cotgrave, Dict.
Begage. Brantôme, sur les Duels, p. 39.
Begasse. Modus et Racio, fol. 92, R».
Beguasse, mot de Marseille. Rabelais, T. II, p. «S.
Bequache. Modus et Racio, MS. fol. 188, V".
Becaïiler (compaignons du). Mot factice, pour
dire une société de gens qui causent beaucoup,
société de bavards :
Compaignons du beeafiler.
Et de merveilles controuver.
Pensez des nouvelles à prandre
Par ce vous ferez couronner :
La se peut chascun eslever,
Pour compte de ses bourdes rendre.
Eusl. Descl). Poês. MSS. fol. il5, col. 2.
BE
— 443 —
BE
Beccade, stibst. fém. Béquée. On a dit, en
parlant de la manière dont il faut dresser un fau-
con : « Se tu le treuves mengant ne lui fais
« nulle froiterie ne ennuy, mais le reprens au
« loerre s'il a mengié, et lui donne une bcchiéc de
« char, et lui met le chapperon. » (Modus et Racio,
Ms. fol. 120.) Ce mot est pris dans un sens figuré en
ce passage: « Vint le duc d'Orléans à Paris, pour
« prendre une beschée sur la pouvre ville. »
(Journal de Paris sous Charles VI et VU, p. 191.)
VARIANTES :
liECCADE. Oudin, Dict.
Becquade, Besquée. Cotgrave, Dict.
Beschée. .Tournai de Paris sous Charles VI et VII, p. 191.
Bêchée. Monet, Oudin, Dict.
Bechiée. Modus et Racio, MS. fol. lUf, R°.
Beccasse, stibst. fém. Terme d'injure. Iteccasse
est une injure dite à une femme dans Coquillart,
p. 11'2, et dans le Moyen de parvenir, p. (32. On
disoit begaiisse, pour une femme grosse et grasse,
selon le patois normand. (Moy. de parvenir, p. 204.)
Begarde est une injure dans l'Histoire des Trois
Maries, en vers, mss. p. 204.
VARIANTES :
BECCASSE. Coquillart, p. 112.
Begarde. Hist. des Trois Maries, MS. p. 204.
Begauce. Moyen de parvenir, p. 204.
Beccher, verbe. Donner des coups de bec. —
Becqueter, manger.
Au premier sens, nous trouvons ce mot employé
dans les vers suivans :
Si durement les cuit bechei
Qu'ils n'auront gaire mon bec cher,
Parce qu'il me vont debéchant.
Hisl. de S" Léocade, MS. de S. Germ. fol. 29.
Ce mot a signifié manger : « Les poulets lors
« ne daignèrent fcfc/iW'. » (Machiavel, sur Tite-Live,
page 89.)
VARIANTES :
BECCHER. Machiav. sur Tite-Live, p. 89.
Bêcher. Hist. de S" Léocade, MS. de S. Germ. p. 29.
Beschier. Fabl. MS. du R. n" 7218, fol. 47, R» col. 1.
Becquier. Modus et Racio, MS. fol. 187, V».
Bekier. Vies des SS. MS. de Sorbonne, chiffre lx, col. 33.
Bequier. Histoire de B. Du Guesclin, par Ménard, p. 396.
Bequer. Monet, Borel, au mot Beccus.
Debecher. Histoire de S'« Léocade, ubi s^^prà.
Becchus, adj. Qui a le nez long et aquilin. —
Pointu. — Arrondi en bec de cane.
Dans le premier sens, on lit: « Beccli us i\qm\i-
« nus: qui a long nez. » (Glossaire du P. Labbe.)
Bechu est au même sens dans le Dict. de Borel.
(Voyez ibid. Becu. — Voy. aussi le Dict. de Cotgrave,
et les Œuvres de Roger Collerye, p. 189.) Monet
explique ce mot par 'garni de bec. Il est mis en
opposition avec camus, sous l'orthographe bescu,
dans le Blason des Faulces Amours, p. 263, et dans
les Poésies de Machaut, ms. fol. 205, où bescuz est
employé comme épithète de suette, qui signifie
chouette.
Becu signifie pointu , aigu , dans la Farce de
Pathelin, qui, parlant de pifules à son médecin, dit:
Ces tiois petits morceaux becus.
Pathelin, Farce, p. 4fi.
On trouve bescu mis en ce sens, dans Coquillart,
page 128.
Enfin, le mot &£'C7»H a signifié aussi arrondi en
bec de cane.
Les demy pantoufles hecquues,
Rondes par devant comme un œil.
Coquillart, p. 17.
VARIANTES :
BECCHUS. Labbe, Glossaire, p. 488.
Bechu. Borel, Dict.
Becu. Roger de Collerye, p. 489.
Becquu. Coquillart, p. 17.
Bescu. Blason des Faulces Amours, p. 303.
Becco, subst. masc. Herbe. Celle qu'on nomme
en latin rostrum avis. (Dict. de Borel.)
Becdassée. Epithète ou sobriquet donné à un
cuisinier, dans Rabelais, T. IV, p. 171.
Becgueter, verbe. Imiter la voix de la chèvre.
(Voy. Rab. T. III, p. 143, et la note de Le Duchat.)
Bêche (fils), subst. mase. Agneau. Ainsi appelé
de son cri , comme l'ânon est appelé plus bas
fils han, par la même raison dans les Fables mss. de
S. Germ. fol. 48.
Becliebois (1), subst. mase. PWerl. Sorte d'oi-
seau. (Voy. les autorités citées sur les orthographes
diverses de ce mot.) Entre autres injures dites
à une vieille, on lit:
. . . Vos talons sont plus flairans
Que becque holts, et que hairans.
Récr. des Dev. Araour. p. 92.
VARIANTES :
BECHEBOIS. Oudin, Cotgrave, Dict.
Beschebois. Cotgrave, Dict.
Becquebo. Nicot, Oudin, Ménage, Dict.
Bequebo. Nicot, Dict.
Becqueholts. Récréât, des Dev. Amour, p. 93.
Becheinent, subst. mase. L'action de bêcher,
de fouiller la terre. (Voy. les Dict. d'Oudin et de
Cotgrave, au mot Besehagc.) « Thresor d'or, ou
« d'argent trouvé en terre, par bechement, ou
« ouverture est au prince. » (Coût. Gén. T. U,
p. 758.)
VARIANTES :
BECHEMENT. Coût. Gén. T. II, p. 258.
Besche.ment. Cotgrave, Dict.
Beschage. Oudin, Cotgrave, Dict.
Bechet, subst. mase. Brochet. Sorte de poisson
dont la hure se termine en pointe, et forme une
espèce de bec (2), d'oîi on l'a nommé beehet. (Voy. les
Dict. de Monet, d'Oudin et de Cotgrave.) « Que nul
« ne preigne ftec/i(?^ en la rivière de Sonne,.... de-
« vaut la feste de S' Laurent. " (Ord. des R. de Fr.
T. II, p. 350.) BeequeteauQii\eà\m\ïm\,iî(}iQbecquet
et répond à notre diminutif brocheton. (Voy. le
Coût. Gén. T. I, p. 813.)
(1) On emploie encore la forme beschois. (n. e.) - (2) La forme broche! a la même origine. Le nom le plus ancien est
celle de luz {luciiis). (n. e.)
BE
— 444 —
BE
VARIANTES :
BECIIET. Nicot, Monet, Oudin, Colgrave, Dict.
Becquet. Ordon. des R. de Fr. T. Il, p. 207.
Bequet. Froissart, Poës. MSS. p. 20O.
lÎECQUETEAU. Coul. Gén. T. I, p. 813.
Begus. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 3i3, V" col. 1.
Beclicterre, subst. masc. Homme qui bêche
ou laboure la terre. (Dict. de Cotgrave, au mol
Beclicur.)
Jamais un brave cœur, cependant qu'il a vie,
Ne se peut contenter ;
Ores il est content avec six pieds do terre,
Partage égal à tous ;
Car autant en emporte un c\\eti{ becheterre
Que le plus grand de nous.
Tomb. de Mouline, à la suilc do ses Mcm. fol. 582.
VAHIANTES :
BECHETERRE. Tomb. de Montluc, Mém. fol. 582.
Bêcheur. Cotgrave, Dict.
Bechevet, subst. masc. A tête-bêche, pieds
contre tête et réciproquement. Ce mot, suivant
Ménage (Dict. Etym.) , se dit de deux choses
placées à contre-sens, ou dont l'une a les pieds à
la tête de l'autre. Il signifie tête à tête, suivant le
Dict. de Cotgrave, et la tête en bas, suivant Le
Laboureur (Orig. des Arm. p. 148), ce qui est con-
firmé par un passage du Moyen de Parvenir, p. 188.
Faucliet prétend (\Vie.beschevelovibeschevet,?>\gn\^\^
double chef ou chevet. (Des Orig. Liv. II, p. 120.)
Selon Monet, c'est un double chevet en un lit, l'un
à la tête et l'autre aux pieds. On lit dans Rabelais
que c'est un jeu d'eufans, qu'ils jouent avec deux
épingles que l'un d'eux cache dans la main. Quand
la tête de lune est tournée vers la tête de l'autre,
elles sont ;i bescltevel. (Voy. Le Duchat, sur Rab.
T. I, p. loi, note 18.)
VAniANTES :
BECHEVET. Ménage, Dict. Etym.
Beschevet. Fauch. Orig. Liv. II, p. 120.
Beschevel. Le Duchat, sur Rabelais, T. I, p. 151, note 18.
Becheul, subst. masc. Sorte de cage. Nous en
trouvons la tléliuition dans ce passage : « Doitestre
« carrée, et doit avoir chascun costés m pies à pié
« main, et trois doies et est fait ainsi. « (Modus et
Racio, Ms. fol. 175.)
VARIANTES :
BECHEUL. Modus et Racio, MS. fol. 175, R».
Bercheul. Ibid. fol. 17G, R".
Becueu.. Ibid. fol. 175, R".
Becul. Modus et Racio, fol. 85, V°.
Beiiuel. Modus et Racio, MS. fol. 175, R».
Becjaulne, subst. et adj. Innocent, niais, sot.
— Droit de bienvenue. — Main-mortable. (Voy. sur
ce mot le Gloss. de Du Gange, au mot Beamis, et
les Dict. de Rorel et de CotgTave.)
Le premier sens se lire de l'allusion aux oiseaux
qui pour la plupart ont le bec jaune avant d'être
drus:
Fait qui jeunes gens conseille ;
Sans faille, ce n'est pas merveille ;
S'ous n'en savés quartier ne aulne,
Car vous avez le fcf.'c trop jaune.
Rom. de la Rose, {Son e( 13575.
Batrai à moult grant armes
Orages bes trop jancs.
Athis, MS. fol. 6", V'col.t.
On nommoit becjaulne ou becjaune un droit de
bienvenue payé au trésorier de la Basoche, par les
nouveaux clercs du palais. Ceux qui étoient nobles
payoienl le double. (Voy. Miraum. des Cours Souv.
p. G61.)0n expédioitdes lettres de bec jaunes à ceux
qui étoient nouvellement reçus. (Voy. le Rec. des
statuts de la Bazoche, p. Cl.)
Enfin, les mains-mortables sont appelées becjau-
nes, en quelques lieux. (Voyez Laurière, Glossaire
du Dr. Fr.)
VARIANTES :
BECJAULNE. Jliraum. des Cours Souv. p. 661.
Becjaune. Path. Farce, p. 25.
Bejaulne. Vill. Rep. Fr. p. 16.
Bejaune. Monet, Dict.
Begaune. Cotgrave, Dict.
Bejane. Du Cange, Gloss. latin, au mot Beanus.
Beane. Id. Ibid.
Bes janes (pliir.) Athis, MS. fol. 67.
Becqueneau, adj. Babillard, causeur, rappor-
teur. (Oudin, Dict. et Gur. Fr.) On trouve presque
toutes ces orthographes dans le Dict. de Nicot. On
a dit de mademoiselle d'Entraigues qu'elle étoit im
bec affilé, et on lit plus bas: « Il vous fallut....
« trouver cent mille ecus pour donner à cette
« Bequenaut. » (Mém. de Sully, p. 63.)
VARIANTES :
BECQUENEAU. Nicot, Oudin, Dict.
Becouenau. Ibid.
Bequenauld. Cotgrave, Dict.
Bequenaud. Nicot, Dict.
Bequenaus. Mém. de Sully, p. 63.
Becquerelles, subst. fém. plur. Brocards.
(Dict. de Borel, qui cite les Rebours de Mathiolus.)
Becquerelles, adj. au fém. plur. Médisantes,
mordantes. Proprement qui donnent des coups de
bec. « Je n'ignore pas quelle fut la vengeance des
^> Muses contre les becquerelles. « (S' Jul. Mesl.
Ilistor. p. 1G2.)
Becquetement, subst. masc. L'action de
becqueter. (Dict. d'Oudin et de Cotgrave.)
Becudel.s, subst. masc. plur. Pois chiches.
Ainsi nommés dans le patois de Montauban, parce
qu'ils ont une pointe comme un bec. (Dict. de Borel,
au mol Beccus.)
Bedaine(l), subst. fém. Espèce de canon gros et
court. Le même que Dondaine. Il signifioit aussi
les boulets dont ils étoient chargés. (Dict. de Borel
et de Ménage. — Voy. Boullainv. Ess. sur la Nobl.
Tabl. et Rab. T. IV, p. 1G8.)
Bedats, subst. masc. plur. Garennes ou bois
prohibés. Le même que bois vêtez. (Voy. Laur.
(1) Bedaine peut être rapproché de bedon et même de bidet. C'était aussi un vase à grande panse : « Deux besdaines
d'airain pour servir à porter l'eaue des bains de madame la duchesse de Tourraine. » (De Laborde, Emaux, p. 162, d'après
les Comptt'S de l'Argenterie du xiv« siècle.) (N. e.)
BE
— 445 —
BE
Gloss. du Dr. Fr ; le Dict. de Cotgrave et Du
Gange, Gloss. lat. aux mots Bedatum, Vetatnm,
defensum forestœ et silva' defensœ.)
Bedaud, sitbst. masc. Terme de caresse. — Un
œuf.
Sur le premier sens, voy. Rab. T. II, p. 152,
T. m, p. 90, et la note de l'éditeur.
Suivîint le Dict d'Oudin, ce mot signifie un œuf
que les enfans appellent coquarl.
VARIANTES :
BEDAUD. Rabelais, T. II, p. 152. - Oudin, Dict.
Bedault. Rabelais, T. III, p. 96.
Bedeau, subst. masc. Sergent. (Voy. Du Gange,
Gloss. lat. aux mots BedelU,BedeUana eiBidellus;
les Dict. de Gotgrave, Borel, Ménage, et Le Dujliat,
sur Rab. T. I, p. i09.) Joinville semble mettre une
difTérence entre sergens et bedeaux {[). (Voy. Joinv.
p. 123.) Cette dislinclion est bien marquée dans le
passage suivant : « Les bedeaux sont les meudres
« sergens qui doivent prendre les namps et faire
« les "offices qui ne sont pas si honnêtes, et les
.< meudres semonces. » (.-Vnc. Coût, de Normand,
fol. 9.) Plus baut elle fait mention de sergens d'un
ordre supérievir appelés sergens de Vespée. Cepen-
dant on voit dans la même Coût, au fol. "150, que
les sergens du premier ordre y sont désignés par le
mot de bedeau, et ceux d'un ordre inférieur parles
mots de bas sergens. Suivant Faucbet, qui dérive
le mot bedeau de Bidellus, « les bedeaux servent
« aux justices subalternes, de même que font les
« sergens aux royalles, pour différence, ainsy je
« crois, et marque d'autorité ; car il semble <iiie les
« sergents roijaux fussent de franche condition, et
« les /'('(/('rt«.f paysans : qui est la cause pom-quoy
» l'on dit que les sergents estoientles Cœsariani du
« temps passé, et en Normandie sergenterie est
« non de fief. » (Fauch. des Orig. Liv.'ll, p. 105.)
Selon Pasquier, Rech. p. 83, les sergens et les
bedeaux étoientla même chose du temps de S' Louis.
Il a dit, à la page 688, « qu'au four l'Evesque de
« Paris, les sergens sont appelles bedeaux. » (Voy.
l'Ane. Coût. d'Orl, à la suite de Beauman. p. 404,
etlesOrd. R. de Fr. T. I, p. 71.)
A tant vint le hedeax corant
Qui aloit un Larron querant
Falil. MSS. de S. Germ. fol. 15, R« col. 1.
Ce mot est employé, ibid. fol. 8, dans le même
sens. On voit que leur office éloit de publier les
choses perdues, et les récompenses promises à
ceux qui les avoient trouvées.
Bc'f/;«((a" signifioit, quelquefois, une sorte d'offi-
ciers des universités (2). Eust. Deschamps, dans ses
Poës. Ms. s'en est servi en ce sens. Il les dislingue
des sergens, fol. 441, col. 1.
VAWANTES :
BEDEAU. Ane. Coût, de Norna. fol. 150.
Bediau. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 451, col. 1.
BEDI.A.US (pliii:) Poës. MSS. av. 1300, T. IV, p. 1441.
Bede.\x. Fabl. MSS. de S' Germ. fol. V, V» col. 1.
Bedel. Gloss. de l'Hist. de Paris.
Bedegar, subst. masc. Eponge qui se forme
sur l'églantier. Borel le définit « espine blanche,
« ou e'sponge qui se trouve sur le rosier sauvage. »
(Voy. le Dict. de Cotgrave.)
Bedelarv, subst. févi. Office de bedeau. (Voy. les
Ten. de LittL fol. 89.)
Beder, verbe. Tourner le dos.
Depuis s'en vindrent par la ville,
Pour Francoys cuider suborner.
Mais l'en les fist, sur pié, sur biUe,
Bientost beder, et retourner.
Vi!;il. deCh. VII, T. I. p. 119.
Bedier, adj. et subst. Sot, ignorant, grossier.
(Dict. de Borel. - Celtell. de Léon Tripp. et Dict.
de Cotgrave.) « M. de Cesarée, évesque portatif, qui
« faisoit la visite par le dioceze d'un qui l'en avoit
<■ prié, et où il avoit autrefois tenu les ordres, il se
« trouva qu'il interrogea un prestre qu'il trouva
« ignorant; ô, dit-il, gros bedier, asne que tu es,
« qui t'a fait prestre; riui est le veau d'évesque qui
>' fa conféré cet ordre'? — C'est vous, monsieur. »
(Moyen de Parvenir, p. 30.j.)
Bedon, subst. masc. Tambour ou tambourin.—
.Joueur de tambour ou de tambourin. — Ventre. —
Jeune cheval.
Au premier sens, ce mot signifie tambour ou tam-
bourin (3). (Voy. Dict. de Nicot, Monet, Oudin, Cotgr.
et Ménage, au mot Bedon.) Borel hésite mal à propos
entre le mot cloche et celui de tambour. (Voyez Le
Ducb. sur Rab. T. II, p. 80; les Vig. de Ch. VIT,
T. II, p. 31, et Coquill. p. 28.)
Alors firent beau bruit, trompes, filTres, bedons
J. Marot, p. 103.
On lit bedondon, dans les Contes d'Eutrapel, page
230. Nous ne trouvons celte orthographe employée
qu'en ce premier sens.
Bedon signifioit aussi le joueur de tambour ou de
tambourin.
.... nostre droit a fait deffendre
Aux maistres jurez du mestier
Qu'ilz n'ayent à recepvoir, ou prendre
Aucun bedon, ou menestrier,
Sans premier les faire jurer, etc.
Coquillart, p. 44.
On nommoit bedon ce que nous appelons bedaine,
ventre. (Dict. d'Oudin, au mot Bedon.)
Enfin bedon désigne un jeune cheval, dans le
patois de Dombes. (Du Gange, Gloss. lat. au mot
Bklogius.)
(1) Bedeau a pour origine le haut allemand piUil, crieur public ; on le trouve, au xii« siècle, dans le Roman de Ron
(v. 5975): « Tant i a prevoz et bedels, Et tant bailliz viez et nouvels [que les paysans]. Ne puent aveir paiz nule heure. »
C'étaient des sergents d'ordre inférieur, de caractère aussi peu déUcat que leurs missions. Au xui" siècle, ils s'étaient
multipliés dans les bailliages et sénéchaussées, et S' Louis ordonna en 125i, à ses officiers, de restreindre le nombre de
ces voleurs, auxquels on ne pouvait échapper, même par la fuite. Ils paraissent avoir exercé, en outre, les fonctions de
percepteurs d'impôts et de publicains. (N. E.) — (2) L'Université de Paris avait quatorze bedeaicx ou appariteurs à masse
d'argent, deux par nation et par faculté, l.e bedeau de la nation de France portait le titre de grand bedeau. (N. E.) — (3) On
nomme encore bedon de Biscaije, un tambour de basque garni de castagnettes. (N. e.)
BE
— 446
BE
VARIANTES :
BEDON. Oudin, Nicot, Monet, etc.
Bedondon. Contes d'Eutrapel, p. 230.
p[ Bedondaine , suhst. fém. Bedaine , ventre.
(Voy. Borel, Dict. el Rab. T. II, p. 8G.)
Bedonner, verbe. Jouer du tambour ou du
tambourin. (Dict. de Nicot, de Monet, d'Oudin et de
Cotgrave.)
Tabours adoncque bedonnèrent.
J. Marot, p. 16i.
Bedonnerie, suhst. [cm. Bruit du tambour.
« Telles bedonneries, fanfares, et musiques cordées
« me déploisent. » {Contes d'Eutrap. p. 260.)
Bedonnique, adj. Qui sonne comme un tam-
bour. C'est en ce sens qu'un poète a dit :
Après, en rimes héroïques,
Tu fais de gros vers bednniqtics.
Œuv. do Joach. du Bell. fol. «2.
Beduins(Ij,SK/).î?iasc. /?/»?'. Peuples de l'Arabie.
— Bédouins. (Voyez du Gange, Gloss. lat. au mot
Bedidni.) Ce mot, selon son étymologie arabe ,
signifie les peuples du désert de la partie de
l'Arabie qu'on nomme Arabie déserte. « Illuec
« s'esloient logiés Turs d'Arabe, que l'on appelle
« Beduins, etc. » (Contin. de G. de Tyr. Martène,
T. V, col, 585.)
Et Turc, et Arabi, Bednin et Persant.
Faucli. Lang. et Poes. fr. p. 94.
Nous trouvons dans Froissart l'orthograpbe Bec-
tuaires. L'éditeur explique ce mot par Beduins...
« Persans, Tartares, et Arabes, Bectuaires (2), et
« Suriens. » (Froiss. Liv. IV, p. 254.)
VARIANTES :
BEDUINS. Pasq. Rech. p. 690.
Beduins. Blanch. MS. de S. G. fol. 183.
Baudouins. Fabl. MS. du R. n» 7615, T. I, fol. 60, R».
Bectuaires. Froiss. Liv. IV, p. 254.
Bée, subst. fém. Moquerie, risée. — Sorte de
fruit ou de couleur. — Désir, espoir.
On disoit au premier sens de moquerie, risée :
Chascuns fera de moy la bée,
Desor seroy de tous gabée.
Hist. des Trois Maries, en vers, MS. p. 163.
Bée est, selon Borel, une sorte de fruit, ou de
couleur; c'est probablement la couleur baye, et la
baye, fruit du laurier, du genévrier, etc.
On a dit bée dans le sens de baerie, pour désir,
espoir.
Soffrés au moins ma folle bée.
Pocs. MSS. avant 1300, T. I, p. Î50.
Il semble même que l'acception de ce mot a été
étendue au-delà du désir, dans ces vers :
Cil faux amans qui vont par la contrée,....
Et des dames ne quierent que la bée.
Ibid. fol. 333.
Démarquons cette expression , oîi le mot bée
est employé comme exclamation ou espèce de
jurement :
Lors dist bee, sano de Meulant,
Argentueil, je sui moult dolent
Que tu despistes compaignons.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 232, R' col. 1.
Béel. Ce mot se trouve joint avec celui de bar,
dans la Chron. lat. de Nangis. L'un et l'autre de ces
mots, qui semblent être de la langue vulgaire,
répondent à Sanetus Petrus, nom de l'abbaye oîi
mourut Louis VII. « Abbatia cisterciensis ordinis
« quœ Sanetus Petrus dicitur, id est Barbéel. •
Beeleur, subst. masc. Criard. (Dict d'Oudin.)
Béer, adj. Brave.
Ceuls qui sont à clieval faites tantost monter :
Au ferir, sauron nos lequel est heer.
Rom. de Rou, MS. p. 39.
Bees, subst. masc. Sot, qui baye. « Sot, chetif,
« meschant, assoté, bées, laisse là ta folie. » (Percef.
Vol. II, fol. 113.)
Beessin, subst. masc. Nom de pays. Ce mot
est pour Dayeux, dans ce vers :
En Beessin moult près de Vire.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 199, R- col. 2.
Beesonfle, subst. musc. Gâteau. Il semble que
ce soit le sens de ce mot dans ces vers :
Une vieille ot entour se nape
Envelopé grant beesonfle (3);
Une truie qui bée et soufle
Saisi le tourtel en sa gueule.
Poês. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1310.
Beffer(4), verbe. Mentir, tromper, jouer, duper.
Les Italiens disent be[t'are en ce sens. (Voyez Du
Gange, Gloss. latin, au mot Befax sous Bifax ; les
Dict' d'Oudin, de Cotgrave et de Ménage, au mot
Bef/ler, etc.) « Il ne contoit à sa Majesté, touchant
« les affaires d'Espagne, que des niaiseries et bali-
« vernes, afin de le bef/ler, et l'amuser. » (Mém. de
Sully, T. VII, p. 192. — Voyez Rab. T. I, p. 315;
Mém. de Seguier, p. 84 ; Négot. de Jeann.T. I, page
182, etc.)
VARIANTES :
BEFFER. Du Cange, Gloss. lat. au mot Befnx.
Befer. Hist. de Fr. à la suite du Rom. de Fauv. fol. 39.
Beffler. Nicot, Oudin, Cotgrave, Ménage, Dict.
Befler. Naudé, des Coups d'Etat, T. III, p. 28.
Besfleu. Oudin, Cotgrave, Dict.
Beufler. Négoc. de Jeann. T. II, p. 168.
Buffler. Oudin, Dict.
Befflorie, subst. fém. Tromperie. (DicL d'Oudin
et de Cotgrave.)
VARIANTES :
BEFFLERIE. Oudin, Cotgrave, Dict.
BÉFLURE. Villon, p. 105.
(1) Ce mot, assez fréquent chez .loinville, se trouve déjà au xii» siècle, au Livre des Macchabées : « E li bedowin li sont
venu aidier et ont mises lor herberges outre le flom. » (I, ch. 5.)(N. E.) — (2) M. Kervyn imprime au t. XV', p. 324, de son
édition : « Aveuc tout ce il estoit bien advenu que plusieurs Sarrazins, payens, Persains, Tartres, Arabes, Lectuaires, Turcs
et Suriens avoient pris des prisonniers [à la bataille de Nicopolis]. » (^N. E.) — (3) Ce doit être une pâtisserie soufflée, (n. e.)
— (4) Comparez biffe, encore employé dans le sens de pierre précieuse contrefaite. (N. e.)
BE
— 447 -
BE
Beffleiir, suhst. masc. Trompeur.
Tous gens flateurs sont diaboliques,
Je les maintiens pour heflleufs repudlques
De rapporteurs vient tout mal, et discord.
Œuv. de Rog. de Colkrye, p. 184.
VABIANTES :
BEFFLEUR. Rog. de CoUerye, p. ISi.
BÉFLEUR. Villon,' p. 105.
BuFEOR. Poës. MSS. av. 1300, T. II, p. 549.
Beffray, subst. masc. Ce mot désigne propre-
ment les tours de bois (1) élevées par les assiégeants
à la hauteur des murs de la villequ'ils atlaquoient.
Elles éloienl traînées sur des roues, ou portées sur
des bateaux ou des galères ; elles avoient commu-
nément plusieurs étages, et renfermoient des gens
de guerre. On a aussi donné ce nom aux prisons
parce iiu"on mettoit les prisonniers dans des tours.
La cliarpente sur laquelle portent les cloches des
églises et des villes, s'appelloit aussi beljroy. Ce
nîot s"est dit enfin des cloches mêmes, et particu-
lièrement de la cloche destinée à appeler les
citoyens pour les faire assembler. On a dit sonner
le befroij, pour sonner le tocsin. Faute de savoir
la gradation des diverses significations qu'on a
données à ce mot, S'Jul. dans ses Mesl. historiques,
page 355; Pasquier, dans ses Recherch. page 754, et
Ménage, dans son Dict. Etymologique, l"ont fait
venir'de bel ejfroy, de ejlvoij et de bec effroij {'2). Borel
ajoute qu'il signifie quelquefois une couverte de
cuir bouilli. 11 paroit qu'il a été trompé par l'usage
où l'on éloil de couvrir avec des peaux ou des cuiVs
bouillis, les tours de bois ou beffrois , afin de
garantir les assiégeans des feux et des traits des
assiégés. Nous allons rapporter quelques exemples
de ces différentes acceptions. (Voy. d'abord le Dict.
de Nicot, de R. Est., de Borel, 1" et 2" add. ; Laur.
Gloss. du Dr. fr. ; le Gloss. de l'Ilist. de Bret. ; Case-
neuve, Orig. de la Langue fr. ; le Gloss. lai. de Du
Gange, aux mots Batif'olium, Beffredus, Belfredus,
Benfrcdum et Biiff'redus ; et le Laboureur, Orig.
des Arm.) « Les Angiois ([ui scssoient devant îa
« Riole.... avoyenl fait charpenter deux beffrois de
« gros mesrien, à trois estages, et séant chacun
« beffroij sur quatre roeles et estoient ces beffrois
" au lez devers la ville, touscouvers de cuir boulu,
» pour deffendre du feu et du trait. » (Frois. Liv. I,
page '■27.)
11 paroit employé pour prison, dans le passage
suivant :
La vieille vint à luy en la prison tout droit,
Si luy dit, mon amy, le tien corps mourir doit ;
Mais si faire voulois ce que l'on te diroit.
Tu serois délivré, et mis hors de befroit.
Roui, de G. de Monlbrune, cilé par Eorel, au mot Befroy.
Ce mot semble avoir signifié quelquefois la char-
pente servant à porter les meules de moulin. « La
» croisée, estache, arbre naiele, gisant, maison,
« beff'roy, pierres, et tout ce qui est édifié sur mou-
« lins II vent et à eaiie est réputé héritage. » (Coût,
gén. T. II, p. 88'2. — Voy. Du Gange, Gloss. lat. au
mot Haevia, où il cite la Coût. d'Artois.) Laurière
Gloss. du Dr. fr. l'explique par « la maison, ou
« l'édifice auquel le moulin à eau est attaché. » On
lit bclfroij, dans le Coût. gén. T. 1, p. 761. On se
sert encore du mot beff'roij pour désigner la cloche
destinée à sonner l'alarme dans les villes de guerre.
VARIANTES :
BEFFRAY. Nicot, Laur. Gloss. du Dr. fr.
Beffroi. Hist. de D. Duguescl. par Mén.
Beffroy. Molinet, p. 18i.
Befroy. Le Jouven. fol. 86, R".
Beffroit. J. d'Aut. ann. de Louis XII, p. 30.
Belfroit. Du Gange, Glos. lat. à Balfious et BUefioits.
Bellefroit.
Belefroy. Du Gange, Gloss. lat. au mot Campana.
Belfrûy. Le Jouven. MS. p. 293.
Baffroy. Oud. Cur. fr. Cotgr. Dict.
B.\UFROY. Cotgrave. Dict.
Beaufroi. Du Gange, Gloss. lat. au mot Belfredi.
Beauffroi. Eust. Desch. Poës. MSS.
Beaufray. Le Laboureur, Orn. des Arm. p. -146.
Bouffa Y (peut-être Beffroi.) Ord. des Ducs de Bret. f° 381.
BuFROY. Gotgrave, Dict.
Beuffroy. Le Jouven. MS. p. 293.
Berfray. Hist. de B. Duguescl. par Mén. p. 22.
Berfroi. Rom. de Brut, MS. fol. 3, V» coL 1.
Berfroy. Dict. de Borel, au mot Befroy.
Berfroit.
Berfreid. Froissart.
Berefreid. Du Gange, Gl. lat. à Berfreit sous Belfredmn.
Bekfreit. Du Gange, Gloss. lat. au mot Belfredum.
Brov (abrév. de Beffroy.) Rom. de Brut, MS. fol. 3, V".
Bcgai"{3), siibsl.masc. Pauvre, mendiant. Terme
angiois. (Gloss. de l'Histoire de Bretagne.)
Begauder, verbe. Bayer, niaiser, s'amuser.
(Dict. de Gotgrave.) « Ils vont niaisans, betjaudans
« et s'amusans par les chemins. >• (Contes d'Eulra-
pel, p. 306.)
Begault (4), adj. Sot, niais. « Et bien grand
« begaut, m'as-tu regardé assez. » (Contes d'Eulrap.
« p. 324.) Ceux qui n'auront jamais bougé d'entre
« les bras de leurs mères, ne seront que niais et
« beyaux. » (Apol. pour Hérodote, p. 461.) On lit
begault, dans le Dict. d'Oudin, où il est expliqué
par bigot. On ne sait sur quelle autorité.
BEGAULT. Apol. pour Hérodote, p. 4(rl.
Begaut. Oudin, Dict.
Bégayer, verbe. Bégayer. Ce mot subsiste sous
celte orlhographe. On l'a employé au figuré dans
quelques expressions :
1° Bégayer des aureilles. C'est une métaphore
outrée reprochée à Pasquier par Garasse. (Rech. des
Rech. p. 555.) « Ausone eut bégayé des aureilles de
« dire que la lettre de V rapportait un son furieux. »
(Lett. de Pasquier, T. I, p. 148.) « Si les oreilles ne
c< me besgayent, je pense ainsi. » (Id. Rech. p. 671.)
(t) M. Viollet-Le-Duc, dans son Dictionnaire d'Architecture (t. II), distingue la machine de Buerre, le beffroi de charpente
et le beffroi de commune. (N. E.) — (2) L'étymologie est l'allemand bercvril, de berc, tour^ et de vrit, fred, conserver. (N. E.)
— (3) Du tlaraand begijen, demander, à cause de la pauvreté à laquelle se condamnaient les becjards ou béguins, hérétiques
du xnp siècle, (n. e.) — (4) Le radical inconnu de bègue doit être l'origine de ce mot et du précédent, (n. e.)
BE
— 448 —
BE
2° Faire unjean bégayer, seml)le un terme du jeu
de trictrac clans ces vers :
Comme recluz, en ce bois de Vincennes,
Ou conviendroit getter des fois vingt sennes,
Ains que en tablier /'aire unrj jehan bégayer.
VARIANTES :
BEGAYER. Lett. de Pasquier, T. I, p. 148.
Besgayeb. Id. Rech.p. 671.
Begeher. Froissart, l'oës. MSS. p. 296, col. 2.
liEGUYEn. Cotgrave, Dict.
Begeaux, siibst. inasc. plur. Nom de faction.
Ce nom fut donné à une espèce de séditieux, ou de
brigands armés. (Voy. un mandement du Roy rendu
contre les Bourguignons en lil6.) On lit dans
Monstrelet : « Une compagnie de fuzelaires, qui se
« nomment les Bei/eaii.v accompagnez de plusieurs
« séditieux et par Iroubleurs de paix. » (Monstrelet,
Vol. I, fol. 238.)
Begehent, adj. Qui bégaye. « Je ne suis point
« éloquent, et j'ay la langue empescbée, grasse et
" bcgehentc. » (Histoire de la Toison d'Or, Vol. II,
page 82.)
Beggaunt, partie. Extorquant. (Voyez Britton,
Loix d'Angleterre, fol. 30.) Il faut lire beggaant;
c'est le participe du verbe suivant.
Begger, verlie. Extorquer. (Voyez Britton, Loix
d'Angl. fol. 37.)
Begoyement, subst. ma&c. Bégaiement. (Dict.
de Cotgrave.)
Beguards, mbst. mase. plur. Sorte d'héréti-
ques. « On les appelloit aussi fraticelles. Il y en eut
« de brûlés en ditïérentes villes de Languedoc
« en 1319. « (Voy. D. Vaisselle, Ilist. de Languedoc,
T. IV, page 182.)
""Begude (1), subsl. fém. Nous lisons : « Le pont
« de Lunel renomé par sa bégudc blanche. » (Favin,
Th. cVhonn. T. I, p. 450.)
Begué, subst. masc. Sorte d'officier de justice.
« C'est un sergent ou officier qui est autre que bail,
« et qui exécute les mandements et commissions
« de justice. » (Laur. Gloss. du Dr. Fr. aux mots
Beguer et Ileguée.) On lit begué, dans Ragueau, cité
dan^ le Dict. de Borel.
VARIANTES :
BEGUÉ. Borel, Dictionnaire.
Beguée, Beguer, 'Vegué, Veguée. Laur. Gloss. du Dr. Fr.
Begiii, subst. masc. Bonnet, coiffe. Mot langue-
docien. (Dict. de Borel, au mot Béguines, qu'il
soupçonne venir de begui.) Nous disons encore
béguin pour une sorte décoiffe ou bonnet.
Béguin, S!<fcsï. masc. Moine. — Bigot, hypocrite.
On a dit, au premier sens : « Ung faulx prophète
« qui faiîiioit mener sainte vie sous l'habit de
« béguin. « (Chron. de S' Denis, fol. 138.) On lit
dans le latin de Nangis : « Sub habitu benigno. »
Le même mot, qui désignoit un moine, signifioit
souvent aussi un hypocrite, un bigot :
Veés vous celle qui fait la papelarde,
Et celuy la qui bien fait le begui».
Eust. Desch. Poès. MS. fol. 20G.
Bien savez fere le coilart,
Le brriuin et le papelart,
Et si iia plus raestre boulier (2)
D'Arras jusqu'à Montpellier.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 260, R- col. 2.
Eude, comte de Provence, est emporté mourant,
hors du combat, sans avoir près de lui aucun de
ses trois fils qui le puisse secourir; ils étoient
occupés d'un autre côté, et ils y faisoient un hor-
rible carnage. Ses trois enfans ailleurs, dit le poëte,
ne font pas le béguin. (Ger. de Roussillon, ms.
page 127.)
Béguin., dans ces vers, est pris pour moine dont
la vie est très différente de celle des gens de guerre.
Béguine est employé pour religieux, ou espèce
de religieuse, dans Duchesne. (Gén. de Chastillon,
p. 60, "lit. de 12G8.) On y lit : Béguines de Guise.
Un saint homme, envoyé dans un monastère de
filles pour y découvrir une sainte personne qui s'y
tenoit cachée, demande à voir toute la communauté.
Comme il n'y reconnaît point celle qu'il cherchoit,
une des religieuses lui dit :
Nous n'avons plus nonnain, ne béguine
Qu'une meschante folle qu'est en nostre cuisine.
Gtr. de R.'ussillon, MS. p. 80.
Nonnain semble être une religieuse de chœur, et
béguine, une scjcur converse (3).
Voyez les reproches faits aux bégards sur la vie
déréglée qu'ils mènent avec leurs sœurs béguines,
ou beguettes. (Nef des Fols, fol- 100.) Le mot
Bajards se trouve ailleurs pour signifier les reli-
gieux de S" Bègue.
On disoil habillement de béguin, pour habit de
deuil. i^Voy. les Preuves de l'Histoire de Bretagne,
T. II, page 1373.)
VARIANTES :
BEGUIN. Le Duchat, sur Rabelais, T. IV, p. 195.
Begix. Ph. Mouskes, MS. p. 784.
Beghin. Ph. Mouskes, MS. p. 837.
Begard et Beguard. Nef des Fous, fol. 100.
Besgard. Borel, au mot Béguin, 2« addit.
r>iG.\RD. Oudin, Dict.
BiGAUT. Cotgrave, Dictionnaire.
Begaclt. Oudin, Dict.
Béguinage, subst. masc. Collectif de religieux
ou religieuses. — Hypocrisie.
Au premier sens, nous citons le passage suivant :
« Les maisons des prestres séculiers et des begui-
(1) En bas-latin begula, en provençal begudo, hôtellerie. 'On lit, au Roman du Chevalier délibéré : « Le portier me fut ung
peu rude. Et me dist : Aiez pacience, Ce n'est pas cy une begude ; C'est le lieu qui s'appelle estude. » (n. e.) — (2) Débauché,
libertin ; voir Du Can^e sous Indice. (N. e.) — (3) "Dans l'ordre des frères prêcheurs et mineurs, les frères convers se
nommaient bégxtins. Quant aux béguines, ce sont des filles ou femmes, vivant en communauté et qui ne prononcent que
les vœux simples d'obéissance et de chasteté. Elles furent instituées à Liège, d'où elles allèrent s'établir à Nivelles. S' Louis
en fit venir en France (JoinvUle, S 7'25 de l'édition de Wailly). EUes étaienl 400, de 1250 à 1300; mais il ne restait que trois
veuves en 1480. Leur nom vient peut-être de leur habit gris blanc (bis, beine, en français, bigio en italien). (N. E.)
BE
- 449 —
BE
« nagee, ne sont pas plus franches que les maisons
« des autres boui'geois et liabitans de la ville. »
(Coût. d'Oudenardé, au Nouv. Coût. Gén. T. 1,
pa{;c 10G8.)
Béguinage a signifié hypocrisie, dans ces vers :
Se li liom maint en tel usage.
Et covrir veut de heghinage
Sen ort peeié, et sa lussure,
Teux vie elle est amère et sure.
Poès. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1321.
VARIANTES :
BEGUINAGE. Fabl. MS. du R. n« 7218, fol. 297, U» col. 1.
Becuignage. Monstrelet, T. 11, fol. 40, R".
Beguinaige. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 233, col. 2.
Beghin'AOE. Poës. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1321.
Beginage. Du Gange, Gl. 1. k Beguinaçiiurii sous Beghardi.
Beginaie. Poës. MSS. du Vat. n» 1490, fol. 128, K».
Béguine, subst. fém. Religieuse. — Hypocrite,
bigote. — Sorte de religieuse mentionnée dans le
Glossaire du Roman de la Rose.
Le sens propre de ce mot est celui de religieuse :
Béguines avons mont
Qui larges robes ont,
Desor lor robes ont
Ce que pas ne vos di.
Fabl. MSS. du R. n' 7615, T. I, fol. 6G, V ool. 2.
Voyez la ?\efdes Fous, fol. 90, ofi il est dit que
c'est un ordre nouveau. On lit (ibid. fol. 1(10)
qu'elles gardoient les malades et ferinoient les yeux
aux morts. L'auteur, au folio 991, leur reproche de
mener la vie la plus dissolue avec les Lotthars ou
bigots.
De là, on trouve begliine pour hypocrite, dans
Ph. Mouskes, ms. p. 83'7. (Voyez Béguin.)
variantes '
BEGUINE. Fabl. MSS. du R. n° 7218, fol. 297.
Beghine, Begutte, Beguyne. Gloss. du Rom. de la Rose.
Beguiner, i^erbe. Faire le dévot. (Dict. d'Oudin,
au mot Iteguigner.)
Voulez-vous gouverner la contrée,
En beguinanl faire la précieuse.
Eust. Desch. Pois. MSS.
VARIANTES :
BEGUINER. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. ,334, col. 2.
Beguigner. Oudin, Dict.
Beguinet, subst. nmsc. Beignet, pâle frite h la
poêle. jNom factice d'un cuisinier, dans Rabelais,
T. IV, p. 171.
Behemoc, subst. viose. Nom de démon. « Insti-
« tuons pour nous, et en nostre nom, et pour tous
« les infernaulx, nos procureurs geiieraulx
« c'est assavoirSalhan,Bersclius, Démon, Leviaton,
« Asmodus, Behemoch, tous ensemble, chascun
<• pour le tout. » (Modus et Racio, ms. fol. 30, V°.)
Behistre, subst. Tempête, malheur, calamité :
Après fouldre, esclitre, i
Tempeste behistre,
Qui leur administre ;
Mars le fier ministre.
Molinet, p. 14&.
Les grands meehiefs, et les behistes '•
Que devoit faire assés, tost tristes,
Et les pères des Vespasiens
Aux faux juis pharisiens.
Hist. des Trois Maries, en vers, MS. p. 346.
VARIANTES :
BEHISTRE. Nicot, Borel, Oudin, Cotgrave, Dict.
Behithe Borel, Dict. i^s add.
Behite. Histoire des Trois Maries, MS. p. 346.
Behiste. Ibid, dans \m autre MS.
Bechisthe. Oudin, Dict.
Beliistreux, adj. Tempétueux. Epithète d'orage
dans les Epitbèles de Martin de la Porte. (Voyez le
Dictionnaire de Cotgrave.)
Behonrtill), subst. mnsc. Joute, tournoi. — Ap-
parence. — Dissension, querelle, orage ou tempête.
Ce mot, pris au premier sens, signifie quelquefois
tournoi en général, et quehiuefois une des espèces
particulières dos tournois. Nicot, dans son Dict. au
mot ndiourl, le dérive du mot lartarearcla. Je crois
que bchourt l'i) est un mot composé de béer, regarder,
et de lionvl, Itcurt, combat, action de se heurter.
Ainsi le behourl seroit proprement le spectacle d'un
combat. (Voy. les Dict. de Borel, de Cotgrave et de
Ménage; Du"Cange, Gloss. lat. aux mots, Bohordicum
et nàgiirdare; id. sur Joinv. p. 181; la Colomb.
Th. d'ilonn. p. 20, etc. etc.)
De behoui-s, de joustes, de vaultes,
Faut-il payer les malletaiiltes?
Pour ung plaisir raille doulours.
Wolinel, p. 127.
Le mot bouliourt est employé au figuré pour
apparence ; les tournois étant en effet la simple
apparence des combats.
Pour un bouhouri de vaine gloire,
Ensi sont li povre boni.
Poës. MSS, du Vatican, n- 1490, fol. 128, R'.
On employoit aussi ce mot au figuré pour que-
relle, dissension, tempête. (Voy. Eust. Desch. Poës.
MSS. fol. '208.)
Les behoxirdis des vens
De la mer eslevans.
Rom. de la Rose, vers 19835 0119838.
Le jour del bouhourdie ;3), dans Duchesne, Gén. de
Bétliune, p. 140, tit. de r257, me pareil être le
même que le premier dimanche de carême auquel
les beourdis ou joutes recoinmençoient; ainsi
j'expliquerois pareillement le lendemain des /wn/es,
dans Perard, Hist. de Bourg, p. 460, tit. de 1246,
par le lendemain du premier dimanche de carême.
VARIANTES !
REIIOURD. Borel, Dict,
Beheûurt. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 151, col. 4.
(1) Le premier sens est lance; au moyen-âge, dans le sens de brandons ou béquilles, on le contractait en bourdes; nous
faisons encore de même quand bourde désigne un mât soutenant un navn-e échoué. (N. E.) - (2) C'est la lance qui sert à
jouter au pied des hourds, ces échafauds eDcourlinés qui fermaient la lice d'un tournoi. L'étymologie est le haut allemand
hurt (moderne hïirdé), claie. (N. e.) - (3) Bmiliourdie est le jour où l'on fait des bordes, comme l'indiquent les deux
passagee suivants ; « Ce fu donné à Tricb.istel, ion lundi après les bordes, en l'an de grâce l.StH. » (Cart. de Langres.) Et au
registre JJ..74, p. 68, an. 1341 : « Item ledit habitant... auront esdiz bois usage de prendre et coper desdiz bois, pour faire
les bordes le jour des brandons. » Nous sommes bien là au premier dimanche de carême, où l'on portail des brandon
allumés, (n. e.)
II. 57
BE
— 450 —
BE
HElloi'ns. Nicot, Dict.
BlîHOi'Rs. Petit Jehan de Saintro, p. 542.
Behouhdis. Siippl. au Gloss. du Uom. de la Rose.
Beuourdier. Borol, Dict. au mot liehourd.
Beiiorueis. Du Gange, Glossaire lat. au mot Behm-dicum.
JJL'I.HOS, BEHORT, lil'HORS, Baiioubs.
lî AUDUHS. Suppl. au Gloss. du R. de la Rose, à Behourdii.
lluiioUKU. Nicot, Dict.
lîoiiuuns. Du Gange, sur .ToinviUe, p. 181.
BiiiioriiT. Monstrelet, Vol. IIl, fol. lOl, R".
BoHniiums. Histoire des Trois Jlaries, MS. p. 466.
lioiioiuMiis. Du Gange, Gloss. latin, au mot Bohordicum.
BoNiiOKT. Gotgrave, Dict.
BoNHOiJHT. Eust. Deschamps, poës. MSS.
BounoMSDis. (Lisez Bouhourdiji.) Ibid.
IÎOUI10RDE1S. Du Gange, sur Joinviile, p. 164.
Behoi'RS. J. Le Maire, Illustr. des Gaules, Uvre I, p. 123.
BouHOURDic. Duchesne, Gén. do liéthune, p. 140.
Bordes. Perard, Histoire de iîourgogne, p. 460.
BouHOURD. Gotgrave, Dict.
Bouhourdeix. Glossaire de l'Histoire de Bretagne.
BouHOURDis. Eust. Desch. Poës. MSS.
BouHOURS. Poës. MSS. avant 1300, T. IV, page 1417.
BouiiouRT. Poës. MSS. du Vatican, n» 1493, fol. 128, R°.
Behourder, verbe. Jouter. — Jouer, jaser,
causer. — Quereller.
Au premier sens de jouter, nous lisons : « Prin-
« drent leurs escus à leur eou, et allèrent dehors
. behourder. ■■ (Lanc. du Lac, T. II, fol. 29.)
Sous l'acception de jouer, baorder figure dans
ces vers :
Ez dances et quarolles se vont un accorder.
Es tables et eschals ly autre baorder.
Ger. de Roussillou, MS. p. 87.
Border a été employé dans le sens de jaser, cau-
ser, badiner.
. . . Quant ce vint après souper.
Si commencèrent à border,
Et contèrent de lor aviaus,
Leur aventures, etc.
Fabl. MSS. du R. n- 7615, T. II, fol. 182, R'.
Borel. dans son Dict., donne le même sens au
mol behorder, et cite Percevul pour autorité.
De là, ce mot signiiioit quereller.
Dame que je n'os nommer
Ne voz esraoiez mie,
Lessiez le vilain border
Ne vos corrociez mie.
Poés. MSS. avant 1300, T. I, p. 660.
Le verbe bouhoiirder est employé comme actif, et
dans un sens obscène, dans ce vers :
Se la buuhourdier m'y veissiez.
Kom. de la Rose, Î25i3.
VARIANTES :
BEHOURDER. Beaumanoir, p. 350.
Baorder Ger. de Roussillon, MS. p. 87.
Behorder. Borel, Dict.
Beorder. .\this, MS. fol. 55, V» col. 1.
Behourdir. Gotgrave, Dict.
Bouhourder. Glossaire du Rom. de la Rose, et le Suppl.
BouHOURDiER. Hisl. de B. Duguescl. par Ménard, p. 11.
Bohorder. Du Gange, Gloss. lat. au mot Bohordicum.
BouHORDiER. Athis, MS. fol. 56, R» col. 2.
BouoURDER. Rom. de Brut, MS. fol. 80, V".
Bogurder. Ibid. fol. 33, V" col. 2.
BoURDER. G. Guiart, MS. fol. 238, R».
Border. Parton. de Blois, MS. de S> Germ. fol. 135, R".
Behoiirdciir, mbst. masc. Jouteur. Le com-
battant d'un tournoi.
VARIANTES :
CEHOURDEUR. Fav. Th. d'Honn. T. II, p. 1750.
Behourdier. Ibid.
Behoiirdis, adj. plur. Ce mot se disoil des
combaltans qui avoient été maltraités dans un
tournoi, et qui étoient étourdis des coups qu'ils
avoient reçus. « Nos anciens romanciers appeloient
(I behourdls, et mal atournez, c'est-à-dire estourdis
« du bateau, et hors d'haleine, les uns moulus de
" coups de masse, et les autres de la presse. »
(Fav. Th. d'Honn. T. Il, p. 1750.)
Beichiad, snhst. 7nasc. Bouvier. Mot breton.
(Dict. de Borel, ii" add. au mot Baehardœ.)
Beire, verbe. Voir. Mot du patois de Caliors.
(Dict. de Borel, au mot Glouper.)
Beis, subst. mase. plur. Biens. Dans le patois
Languedocien, très beis signifie : trois biens. De là
s'est formé le nom de Trebez-, petite ville du diocèse
de Carcassonne, du latin tribus bonis. (Ord. des
R. de Fr. T. III, p. 204.)
Beisse, subst. fém. Bêche. Ce mot se dit en
Auvergne. (Voy. Gloss. lat. de Du Cange, au mot
Bessus, sous celui de Becca.)
Bejannie, subst. fém. Sottise, niaiserie. Alain
Charlier, en parlant des effets de l'amour sur les
jeunes gens, s'exprime ainsi :
Et tient sur eux, sa court, et sa justice,
Et leur oste la bejannie, et nice.
Et les retrait de maint oultrageux vice.
Tocs. d'Al. Chart. p. 564-.
VARIANTES :
BEJANNIE. Al. Ghartier, Poës. p. 564.
Bejaunerie. Oudin, Dict.
Eejaunisse. Gotgrave, Dict.
Bejaunage, subst. niasc. Gotgrave, Dict.
Bel, adj. Méchant. Lisez fel. Un ancien poêle
a dit eu parlant d'Hérode :
Tant fut bel, et forsennez
Qui fit les innocens mourir.
Hisl. des trois Maries, en Ters, MS. p. 227.
Bel ou Belle. Ces mots se trouvent plusieurs
fois dans des litres rapportés à la suite d'un mé-
moire pour la ville de Montbard, p. 8. Ils semblent
signifier place. D'autres villes du même canton
usent aussi de ces mots dans le même sens.
Bel ou Sel, subst. masc. Borel, dans son Dicl.
explique ces mots par citonicum indum et cite
hortus sanitatis.
Belaud, adj. au masc. Diminutif de beau. (Voy.
Oudin, Gotgrave, Borel et les Poës. de Jacques
Tahureau.)
Les baisers de sa meline,
De sa meline beline.
Pocs. de J. Tahureau, p. 155.
VARIANTES :
BELAUD. Fabl. MSS. du R. n' 7989, fol. 239, V» col. 1.
lÎELLOT. Oudin, Gotgrave, Dict.
Bellette, fcin. .)eh. de l'Escur. Ghr. Fr.
Beline, fé»i. Poës. de .1. Tahureau, p. 155.
Belonne, fém. Ibid. p. 270.
Beloye, Beroye, fém. Mots Languedocien. — Borel, Dict.
BE
451 —
BE
Belaus, subst. 7nasc. Mot obscène dans les
contes de Cholieres, fol. 104.
Bêle. Nous ne pouvons déterminer le sens de
ce mot dans ce passage :
Or vieng proier
A vous, Dame, et merci crier,
Que ne gart l'eure qu'asproier
Me viengne cil
Qui m'a mis à si grant exil ;
Tu me tenis jà pour ton fil
Comme bêle.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 302, R- col. 1.
Belee (coulée). Sorte de jeu. Peut-être le même
que bellinii're(BA\\e)c\-i\près. Froissart, parlant des
jeux de son enfance, dit :
Juïens nous au roy qui ne ment,...
Puis à la coulée belée
Qu'on fait dune carrelle tée.
Froissart, Poës. MSS. p. 8f..
Bêlement, adv. Doucement, lentement.
Tout bêlement, s'est arrestée.
Alliis, MS. fol. 94, V- col. 1.
Piétons passent les roiUées,
Targiez acueillent leur sentiers.
Vers les murs rompus, et entiers :
Les uns tost, les autres bêlement.
G. Guiart, MS.fol. 3i, V'.
V.\RIANTES :
BELEMENT. Fabl, MSS. du R. n° 7218, fol. 179, R« col. 1.
Balement. Atliis, cité ci-après.
Bellement. Chasse de Gast. Phéb. MS. p. 2G0.
Belerue. Ce mot est expliqué par dernier pro-
montoire, dans Borel, Dict. w" add. Vcll, qui en
breton signifie dernier, lire, selon lui, son origine
de ce mot.
Belet, subst. masc. Joyau.
Donc prist li Roiz le Duc e 1' baisa et joi :
Ses bclez, ses deduitz, ses aveirs li offri.
Roman de Rou, MS. p. 03.
VARIANTES :
BELEl'. Prov. MS. de S- Germ. fol. 74, R» col. 3.
Bêlez, plu)-. Rom. de Rou, MS. p. 63.
Beleter, verbe. Bêler. (Voy. le Dict. de Cotgr.)
Belgie, mbst. fém. Bougie. Province d'Afrique,
sur l'orthographe Bougie que nous trouvons dans
Froissart, Vol. IV. L'éditeur fait remarquer que cet
auteur, ■< use de cet ancien nom pour le nom géné-
ral du païs que nous disons maintenant Barbarie. »
VARIANTES :
BELGIE. Hist. de Loys III, Duc de B. p. 294.
Bougie. Froissart, Vol. IV, p. 81.
Belle (1), subst. fém. Bêle. Il est aisé d'apercevoir
que les orthographes de ce mot se sont toutes for-
mées du latin Bellua.
La belic qui chey morte...
Mais ce leur fist confortement
Que la beste s'y tost morut,
Rom. de Brut, MS. fol. 27.
TABIANTES :
BELIE. Rom. de Brut, MS. fol. 27.
Belue. Borel, Dict.
Bellue. J. d'Anton, Ann. de Louis XII, p. 271.
Belude. Corneille, Dict.
Relues. J. le Maire, lUustr. des Gaules, Liv. I, p. 89.
Bleve. (Lisez Bette). Rom. de Brut.
Beliere (2), subst. fém. Anneau. Ce mot, qui est
usité pour signifier l'anneau qui lient le battant d'une
cloche et celui des lampes des églises, est employé
pour l'anneau auquel étoit suspendue la colombe
de l'ordre de l'Annonciade. (Favin, Th. d'Hon.
T. Il, p. 1526.) En Normandie, hesliere se dit pour
la courroie qui tient !o battant d'une cloche. (Dict.
Etym. de Ménage.)
VARIANTES :
BELIERE. Favin, Th. d'Uonn. T. II, p. 1586.
Besliere. Ménage, Dict. Etym.
Belif, subst. mase. Rouge. Terme de blason,
gueule, de couleur rouge. « Armoiries de gueule,
« ou belif qui est rouge. » (S' Jul. Mesl. Histor.
p. 291.) « Les herauds,'et roys d'armes appellent
« cesle couleur rouge de quatre divers noms,
« cinabre, belic, gueules, et riche couleur. » (Fav.
Th. d'Honn. T. 1, p. îl.)
Nous trouvons ce mot dans Modus et Racio,
fol. 88, où « l'on devise comment on prend les
« mauvis à breter « (à la glu, à la pipée.) De beliz
signifie peut-être de biais (3), dans ce passage:
« Qui veult faire un brel, qu'il soit fait au rabat,
« ainsi comme une flèche, et doit avoir quatre
« piedz de long, et a pied de main, ou environ
« de quoy la plus grosse (verge) sera cavée tout du
« long, et l'aulre entrera dedans si justement que
u le pied du plus petit oisel ne pburroit yssir;
« el quant ilz sont l'ung dedans l'autre, ilz sont
« perchés de bf/i:; y est mise une bien déliée
« cordelette, etc. « (Modus et Racio, fol. 89.)
VARIANTES :
BELIF. S' .lui. Mesl. Histor. p. 294.
Bellif. Lanc. du Lac, T. I, fol. 37, R» col. 1.
Belic. Favin, Th. d'Honn. T. 1, p. 11.
Bellic, Belli. Monet, Oudin, Cotgrave, Dict.
Benouhic. Mém, d'Olivier Je la Marche, Liv. I, p. 280.
Belifres, subst. On lit aussi besifles, dans une
ballade de \illon, p. 109; mais ce mot, sous l'une
et l'aulre orthographes, est tout à fait inintelligible,
Belin, subst. mnsr.. et adj. Bélier. Mouton mâle.
(Voy. les Dicl. de Nicol, Monet, Oudin et Cotgrave,
au mot Belin.) Borel lui donne deux significations:
celle de mouton qui esl sa signification propre, et
celle de sol, ([ui est une acception figurée. Nous
trouvons ce mol employé comme adjectif dans le
vers suivant :
Assommer gens comme moutons bellins.
Vigil. de Charles VII, T. II, p. 187.
(1) Belie, au xv« siècle, signifiait plutôt bergerie ; « Icellui Regnault se vouloit aler esbatre en une belie du prieur de
Blessac. » (.IJ. 164, p. 188, an. 1401.) (N. E.) - (2) L'étymologie est le flamand hel, cloche ; de là vient aussi bélier, qui
n'apparaît qu'au xv siècle, le mouton qui porte la cloche. (N. E.) — (3) Ce mot a le sens de en bellivant, à besloi, qu'en
trouve dans G. Guiart (v. 11790; et dans Renart (v. 14257), de travers, à l'écart, (n. e.)
BE
— /i52 —
BE
On disoit crier hurte belhis pour : crier sus.
L'éveequc l'a aperoeu,
Si ne s'en p\iet eslre teu ;
Ains on sermone,
Et à toz cels, dix jors pardonne,
Oui ci-ii-r(wt à tel persoue
Hurle belin.
FM. J)S<. du R. n" 7218, fol. 237, R- col. î.
VAR1.\?<TES :
BELIN. Fabl. MSS. du R. n" 7218, fol. 47. V".
Bellin. Vig. de Charles VU, ï. II, p. 1S7.
Belinaige, siibst. masc. Acte de bélier. 11 est
employé avec un sens obscène dans Rabelais, T. III,
p. (54. '
Beliné (jeu du). C'est, suivant Le Duchat, c une
« espèce de jeu comme le boutehors, où l'on traite
« les gens, ou béliers, qu'on tire par les cornes
« pour les faire sortir de la bergerie. » (Voy. Rab.
T. I, p. 138.)
Beliner, verbe. Sauter. —Tromper.
Dans le premier sens de sauter, il signifie sauter
comme un bélier, et en général sauter. [Voy. Dict.
d'Oudin et de Cotgrave.)
En la Champaigne ont un fossé...
En bclinant l'orent passé.
Rom. de Rou, MS. ]>. 337.
Oudin lui donne un sens obscène dont Rabelais
s'est servi. (T. 111, p. (ii, et T. V, p. 176.)
Ce mot signiOoil aussi tromper. (Voy. le Dict.
d'Oudin.) Rabelais a dit en ce sens: « Par leur
'< astuce sera belline, corbiné, trompé, et affiné. »
(Rab. Nouv. Prol. T. IV, p. 55.)
VARIAiNTES :
BELINER. Roman de Rou, MS. p. 337.
Belliner. Rabelais, Nouv. Prol. T. IV, p. 55.
Belingc, snhst. fém. Tiretaine. Sorte d'étoffe
ou de droguet. Belinge est un mot du patois
Normand. (Dict. de Nicot, au mot Tiretaine.)
Belinier de Malniinet. Ternie d'injure, dans
Rabelais, T. IV, p. t>0.
Beliocande, suhst. fém. L'herbe de mille
feuilles. (Dict. de Borel.)
Belis, subst. Marguerite. Fleur de printemps.
Belissors, siib&l. musc.
[Di>it avoir le sens de belliqueux ou de plus beau,
comme /;e//(?;;o«?" dans la cantilène de Sainte Eulalie.]
Il est employé par l'auteur du roman d'Athis,
parlant d'une dame qui aimait un beau et brave
chevalier :
Li tens est clers du belissors :
Del tôt en tôt à 11 se tient.
Athis. .MS. fol. lis, R'col. 2.
Bclistraille, sulist. fém. Canaille. Mot collectif
de bélitre. (Dict. de >'icot, Oudin et Cotgrave.)
VARIANTES :
BELISTRAILLE, Belitraille. Nioot, Oud. Cotgr. Dict.
Belistral, adj. Qui appartient à un gueux, à lui
bélitre. (Voy. les Dialog. de Tahureau, fol. 132.)
Belistrandier, subst. masc. et adj. Bélître,
gueux mendiant. (Voy. Rabelais, T. III. p. 138, et
T. IV, p. o'i.) On lit beloicte, dans le- Celthell. de
Léon Trippault.
VARIANTES :
BELISTRANDIER. Rabelais, T. III, p. 138.
Bellistrandier. Cotgrave, Dict.
Belistrandike. Rabelais, T. IV, p. 51.
Beloictre. Celthell. de Léon Trippault.
Belistréement, adv. A la façon d'un gueux,
d'un mendiant. (Dict. de Nicot et de Cotgrave.)
variantes :
BELISTRÉEMENT, Belitrement. Nicot, Cotgrave, Dict.
Belistrer, verbe. Gueuser, mendier. (Dict. de
Rob. Eslicnne, Nicot, Cotgrave.) « Faineans qui
« vont bclifitrunt d'huis en huis. » (Nuits de Strapar.
T. II, p. 391.)
Bclistverie, subst. fém. Gueuserie. (Dict.
d'Oudin et de Cotgrave.)
variantes :
BELISTRERIE, Belitrerie. Oudin, Cotgrave, Dict.
Belistresse, subst. fém. Femme qui gueuse,
qui mendie. (Dict. d'Oudin.} Il est adjectif dans le
passage suivant. « La flaterie est un vice d'ame
« lasche, basse et belistresse. » (Sagesse de Charron,
page 494.)
variantes :
BELISTRESSE. Sagesse de Charron, p. 494.
Belitresse. Oudin, Dict.
Bellamie, subst. fém. Espèce d'habit. (Voy. une
citation au Gloss. latin de Du Cange, au mot
Belamia (I).)
BellancCii), subst. masc. Cornet àjouer aux dés.
C'est dans ce sens qu'un poète a dit :
Un bellanc i porte, et trois dez...
Amis, fait-il, vels tu joer?
Voiz que bellenc por dez jetter.
Fabl. MSS. de S' f.erra. fol. 45.
variantes :
BELLANC, Bellenc. Fabl. MS. de S' Germ. fol. 45.
Bellart, adj. Sujet à bAiller. Qui baille ou qui
gronde souvent.
Voas sentez trop vostre vieil l'art,
Dont, pour plus en amours vous mectre,
Amy, vous estes trop vieillart :
Dormez, ne soyez point bellart.
Bellastre, adj. Qui a quelque beauté. « Sa
« femme laquelle estoil assez bellastre. » fRabelais,
T. III, p. 13(j )
Belle (la), subst. fém. La lune. (Voy. Du Cange,
(1) Cette citation est tirée de la règle de Fontevrault, ch. IV: « Ut non habeant vestimenta fimbriata, neque in dorso,
neque in leclo, prieter Brlamiam, sed incisa consuantur, ut tunica; et chlamydes. » Du Gange ajoute : « Vestis species sic
dicta ex Gallico lielle aiiùe. » Mais s'il suppose ce mot, il n'en affirme pas le.xistence ; d'autant plus que belamia doit être
le belaiiuje, la tiretaine. (N. E.) — (2) Bellanc est notre mot brelan, de l'allemand brelling, petite planche, petite table sur
laquelle on jette les dés. (n. e.)
BE
- 153 —
BE
Gloss. lat. au mot Fibella.) Un ancien poSle dit des
chats-huants:
Le jour héent et la chandelle ;
Par nuit volent, et à la belle.
Eu6t. Desch. PoSs. JKS. fol. 320.
.... En terre et ciel voy obscurcir la belle.
Ibid. fol. 326.
Belleem. Nom de lieu. Bethléem. Bellem Jiule,
répond au latin Bethléem Judœ, dans S' Bern.
Serm. Fr. ms. p. 110.
En Belleem naqui li Sire ;
Mes oncques n'i ot drap de sire,
N'i ot cortine, ne buschaut;
Ouar Dame Diex d'orgueil ne chaut.
Fabl. MSS. du R. n" 7218, fol. IOj, U' ool. 1.
Bellemariae subst. Roi Sarrasin.
.< Les Mois de Fez de la maison des Benemerims
" qui regnoient il y a trois cents ans, sont appeliez
« de beùemarine par nos vieux écrivains. » (Iluet.
Orig. des Rom. p. 87.) On dit roy de belmarin,
dans l'Hist. de B. Duguesclin, par Ménard, p. 157.
VARIANTES :
BELLEMARIXE, Belmarin. Petit J. de Saintré, p. 171. -
Hist. de B. Duguesclin, par Ménard, p. 157.
Bélier, verbe. Crier. Ce mot exprime dans les
vers suivaus les cris d'un enfant qui pleure :
Alegiez nous de cest forment,
Très dous Diex , ausi vraiement
Qui nasqiiittes en belleanl (1),
En guise de petit enfant.
Fabl. MSS. du R. n» -218, fol 59, V col. 2.
Ce mot paroit signifier hurler, pousser des cris
efl'rayaiis, dans cet autre passage : « S'assemblèrent
« eniour de luy tous les màulvais esperits qui
•1 estoient en celle place, cruellement tonnans,
« bruyans et bellans sans dire une seule parole. »
(Percef. Vol, VI, fol. 7.)
Il est pris dans le sens subsistant de bêler sous
forthograpbe balialcr, dans S' Bern. Serm. fr. mss.
p. 35G. " La barbix qui entr'ous bahaleivel, » dans
le latin oviculœ inter eos balantes.
VARIANTES :
BELLER. Crétin, p. 210.
Bahaler. S' Bern. Serm. Fr. MSS, p. 350.
Belléer. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 59, V" col, 2.
Bellier. Poës, MSS. avant 1300, T. IV, p. 1367.
Bellesse, subst. fém. Beauté. (Voyez Pasq.
Moiioph. p. 10.)
Bellevesée (2), subst. fém. Billevesée. Ce mot
semble avoir été introduit dans notre langue par
Catherine de Médicis. (Voy. Brant. Dames lit. p. 83.)
Bellevidere , subst. masc. Belvédère. (Dict. de
Cotgrave.)
Belleyan , aâj. Velleien. Bénéfice belleijan ,
c'est-à-dire bénéfice de la loi Velleyenne. (Voy. une
cit. fr. dans Du Gange, Gl. lat. au mot Velleyanum.)
Belliant, subst. masc. Betlhéem.
Diex, dist-elle, de Belliant
Oui descendis honestement
El cors de la Vierge pucele.
Blanch, MS. do S. G. fol. 192, R° col. 3,
Belliateur, subst. masc. Guerrier, combattant.
(Voy. les Triomph. de Pétr. Trad. du Bar d'Oppede,
fol. 84.)
Bellicosité, subst. fém. Amour des combats.
« Ung notable personnage, natif du Dauphiné....
. s"est employé à escrire quelque chose qui puisse
« aucunement servir à exciter la bellieosité, tant
« de la noblesse, que aussi du peuple de France, et
« de Dauphiné. » (De la Forge, des Hommes belliq.
MS. de la Bibl. du U. n» 785,)"
Bellicossent, subst. mase. et adj. Guerrier,
belliqueux. On a dit de la Grande Bretagne : « Ceste
» ysle est moult habondante en or, en argent, et
" autres metaulx, aussi de bestiaux, et sont genl
« de bellicossent, et à sang. » (La Salade, fol. 28.)
On lit : « 0 vertus et puissances belliques, » dans
les Mém. du Bell. T. VI, p. 290.
En subjuguant les forces belliquanles
Vénitiennes.
J. Marot, p. 157.
VARIANTES :
BELLICOSSENT. La Salade, fol. 28.
Belliquant. j. Marot, p. 157.
liELLiQUEUH. Gloss. do Marot.
Bellique. Essais de Montaigne, T. III, p. 114.
Belligereux. Triorap, des Neuf Preux, p. 16, col. i.
Belliniere (balle). Sorte de ballon. Il étoit fait
de peau de bélier avec ses poils. On s'en servoit du
temps dllenry II. (Voy. Brant. Dames Gall. T. II,
p. 558. — Voy. Balle.)
Belliric, subst. masc. Sorte de fruit. (Dict.
d'Oudin, de Colgrave et de Borel.)
variantes :
BELLIRIC. Oudin, Cotgrave, Dict.
iJERELis. Borel, Dict.
Bellistrandie, subsl. fém. Lésine , avarice.
(Voy. Le Duch. sur Rab. T. II, p. 75.)
Belliver, verbe. Biaiser. Il paroit que c'est le
sens de ce mot dans ces vers :
François se metent es rueles
Que Flamens, comme genz senées,
Orent es charroy ordenées,
En bellivant, non mie droites.
G. Guiart, MS. fol. 3ôO, R».
Belloce (3), subst. fém. Sortes de prunes nom-
mées encore ainsi suivant le Gloss. du Roman de la
Rose, sous Belloe. Ce mot, formé de Bellocier ci-
après, a été aussi employé pour dire rien ou chose
de peu de valeur, dans lès vers suivans :
Quant dame Catherine voit l'espreuve dant ,Ioce,
Oui por l'amour sa femme ne donne une bclnre.
" J. de Meung, Cod. iiU et 4ti2.
(1) Belleanl, comme plus bas belliant, est une corruption de Bethléem, - (2) Déjà, dans le Chevalier au Cygne (xm'
siècle), on trouve ; « Car Mahomes ne vaut une belle venaie. » De là est venu ce mot du xvF siècle , qu'on trouve aussi
dans Rabelais : « Ayez en révérence le cerveau caséiforme, qui vous paist do ces belles bille-vezées. » (Prol. du 1" livre.)
tN. E.) — (3) Ces prunes sauvages sont encore ainsi nommées en Normandie, et même en Bretagne, (n. e.)
BE
— 4.>4 —
BE
BoIIocler, subst. masc. Prunier sauvage. (Dict.
de Cotgrave.)
Bellottc, subst. fém. Belette.
Belluer, verbe. Maltraiter : a pu être fait sur
beliies, pauvreté, qu'on trouve dans Isid. de Séville,
mais qui est peut-être une faute pour hœc lues ;
nous pouvons aussi remonter à bellua, bête fauve,
ou i^ bclugue, sorte de machine de guerre.
Mors qui en toz leuz as tes rentes,
Et de toz marchiez à les ventes,
Qui les riches sez desRuer,
Et les plus fors sez tressuer,
Et les plus riches belluer....
Fabl. MSS. du R. n" 7615, T. I, fol. 10-2 bis. R* col. 2.
Bellues, subst. fém. plur. Sornettes. Propre-
ment, ce mot signifie bluelte, étincelle, du mot
provençal Béluga.
quant famé a fol debonere
Et elle a rien de lui a fere.
Elle li dit tant de bellues,
De trufes et de fafelues, etc.
Fabl. MSS. du R. n- 7615, T. I, fol. fil, V ool. ».
Belluque, subst. fém. Bagatelle. Curiosité de
peu de valeur, breloque. De 1:\, on a nommé brelu-
qiies les pièces d'or vieilles et défectueuses. (Dict.
d'Oudin.)
VARIANTES :
BELLUQUE. Du Gange, Gloss. lat. au mot Belluga.
Balluque. Cotgrave, Dict.
Beluque. Colgra^e, Dict.
Beloce. Borel, Dict.
Breluque. Du Gange, GIosb. lat. au mot Belluga.
Brelaque. Ibid.
Belonc (de), adv. De travers, de biais. Expres-
sion formée de bélong ou barlong. On disoit bar-
long, en parlant d'un habit plus long d'un côté que
de l'autre.
Tout alla de travers et belonc.
Eusl. Desch. Poos. IISS. fol 12S, col. 3.
Le mot bellongues est expliqué par longues ou
berlongues, dans le Gloss, du R. de la Rose. On lit
dans le vers 19042 :
Ymages.
Droictes bellongues et enverses.
Bêlions, dans ce vers, signifie qui est placé en
long ou en travers.
Belouart, subst. masc. Boulevard. (Gloss. de
l'Hist. de Bret.)
Belourd, adj. Balourd. (Voy. Moyen deParven.
page 2'»!.)
Belouze (1), subst. fém. Le trou d'un jeu de
paume. (Oudin, Dict.)
Belues (Droits de), subst. Fouage. Droit dû au
roi ou au seigneur sur chaque feu. Dans l'Etat som-
maire des Droits du Royaume, on lit: « Droits de
« lattes, belues, de Champagne, de Logres, de
« Stipes. <• (Mém. de Sully, ï. X, p. 220.) Ce mot.
ainsi que Belugues. s'est formé de Béluga, mot
provençal qui signifie bluette, étincelle.
Belugues, subst. plur. On appeloit bclugues les
divisions des douze cents feux de la généralité de
iMoutauban ; ils furent divisés en cent "belugues par
les Règlemeiis rendus pour celte généralité, pour
les années IGGG et 1072.
Belusteur, subst. masc. Qui blutte, qui sasse.
(Dict. d'Oudin.)
Beluteau, subst. masc. Sas à passer la farine.
— Espèce de jeu. — Sorte d'étoffe.
Ce mot, dans le premier sens, vient du mot breton
Bleut[%. (Gloss. de l'Hist. 'de Bret. au mot Delutiau.
— Ibid. au mot Blavez\ où il est dit que les mots
Beluteau et Beluter viennent du breton Blawd, qui
signifie farine.
De \h, on a nommé belusteau une espèce de jeu
qui se fait en se plaçant de face, en s'entrelaçant
les mains de l'an avec celles de l'autre, et en se
poussant tour à tour. (Voy. Le Ituchat, sur Rab.
T. L p. 151.) C'est l'imitation de l'action de passer
la farine dans le tamis, lorsque deux personnes le
tiennent, chacun d'une main, et le poussent et
repoussent alternativement.
De là encore, on a donné le nom de beluteau ou
belutiau h une sorte d'étoffe. C'est un velours, si
nous en croyons le Gloss. de l'IIist. de Bret. Il ren-
voie au passage suivant qui ne paroit pas confirmer
cette explication. « Et sera le cheval covert de
« covreture de belutiau et de telles et de cen-
» dreux. » (Hist. de Bret. p. 1639.) Ce Glossaire dit
encore que ce mot a une acception difïérente, dans
ce second passage, mais il ne la détermine pas :
« La souzaine couverte de linges de beluteaux,
« appeliez estamine de linge. " (Ibid. p. 675.) Il
pourroit signifier, du moins dans ce dernier pas-
sage, l'étoffe dont on fait les sas ou tamis.
VARIANTES :
RELUTE.\U. Gloss. de THist, de Bret.
Belusteau. Rabelais, T. I, p. 151.
Belutiau. Hist. de Bret. p. 675.
Bulleteau. Oudin, Cotgrave, Dict.
Bur.ETEA.x. Fabl. MSS. de S. G. fol. 42, Y» col. 2.
Bluteax. Erber. MS. de S. G. fol. 90, V» col. 1.
BuLTEL. Du Gange, Gloss. lat. au mot Bulellux.
BuDEL, mot flamand. Du Gange, Gloss. bit. à Budele.
Buretel. La Bible Guiot, MS. dans Du Gange, à Bren.
Bureteau. Du Gange, Gloss. lat. au mot Bren.
Belutcment, subst. masc. L'action de bluter.
— Discussion, examen.
Au propre, ce mot signifie l'action de passer la
farine dans un tamis. (Dict. d'Oudin et de Cotgrave.)
Au figuré, on disoit belutement pour discussion,
examen. « Remettons à vostre retour, le grabeau,
« et belutement de ces matières. •• (Rabelais, T. III,
p. 8. — Voy. la Note de l'éditeur.)
variantes :
BELUTEMENT. Bluttement. Cotgrave, Dict.
Belustage. Oudin, Dict.
(1) Ce sont les blouses des billards, (n. e.) — (2) D'ordinaire, on cite l'allemand Beittel, bourse. Mais Diez remarquant le
bourguignon burteau, le provençal barutel, veut remonter à bure, bureau, (-n. e.)
BE
- 455 -
BE
Belutaige. Rabelais, T. III, p. 165.
Blutage. Oudin, Dict.
Blutis. Monet, Dict.
Bluttis. Monet et Cotgrave, Dict.
Beluter, verbe. Bluter. — S'agiter, se remuer.
Ce mot signifie proprement séparer la farine
d'avec le son, en la passant dans un blutoir. (Dict.
Elym. de Ménage.)
On a dit aussi beluter dans un sens plus vague,
pour s'agiter, se remuer. « Veismes aussi nombre
« infiny de poissons en espèces diverses dançants,
" volans, voltigeants, belutants, chassants. » (lîab.
Nouv. prol. T. IV, p. 156.) Il est pris dans un sens
obscène. (Ibid. T. III, p. 59, et dans les Nuits de
Strapar. ï. I, p. 408.)
VARIANTES :
BELUTER. Ménage, Dict. Etym.
BuLETER. Hist. de B. Dugnescl. par Ménard, p. 505.
BuLLETER. Oudin, Cotgrave, Dict.
BULTER. Britt. Loix d'Angl. fol. 75, R".
Belzebus, stibst. masc. Nom de démon.
Ha hai ! hai, hai, je sui venus :
Salus vous mande Behebus.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 242, R' col. 2.
VARIANTES :
BELZEBUS. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 182, R" col. 1.
Bersebus. Modus et Racio, MS. fol. 230, V°.
Behebus. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 242, R» col. 2.
Belzebut (1), subst. mase. Dieu des mouches.
C'estainsi qu'il est expliqué dans les Diverses leçons
de Du Verdier, page 41 ; il est mis avec Mercure et
Bacchus dans la Chasse et Départ. d'Am. page 2i9.
Belzoin (2), subst. masc. Benjoin. Sorte de
résine. (Dict. d'Oudin et de Cotgrave.)
Benii, adj. Faible, nigaud :
Lors le hetni
Gist endormi.
Qui ne voit, ni oyt, ni entend.
Le Blason des Faulces Amours, p. 260-
VARIANTES :
BEMI. Le Blason des Faulces Amours, p. 260.
Bemy. Citât, dans Gouj. Bibl. fr. T. X, p. 114.
Bemus. Contes de Cholières, fol. 178, V».
Besmus. Contes d'Eutrapel, p. 06.
Bemont, subst. masc. " En vieil bourguignon,
<> estoil autant que ftcZmonf ou beaumont. » (S'Jul.
Mesl. hist. p. 3()8.)
Ben, subst. masc. Vent, dans le patois de Cahors.
(Voyez Dict. de Borel, au mot Glouper.)
Ben, adv. Bien. (Hist. de la S'" Croix, ws. p. 18.)
Bien sai que, patf ma coulpe.ai sa grâce perdue,
Se par vostre conseil ne puet eslre rendue
Que je à la fin ne soie dampnée et confondue :
Bien entrastes çaiens, hen vi vostre venue.
Vies des SS. MS. de Sorb. cbif. xxvii, ool. 7.
Benafort, adv. Presque. Voyez le Dict. de
Borel, ([ui cite le vers suivant au mol Kuscun :
Kascun jour m'es a benafort un an.
C'est-à-dire selon Borel :
Chaque jour m'est presque une année.
Ce mot pourroil s'expliquer par beaucoup plus.
Crescenbeni, dans ses vies des Poètes provençaux,
p. 142 de l'édition de 1714, rend benafort mays par
hen via pui, qui signifie bien plus.
Benari, subst. masc. Ortolan. Dans le patois de
Languedoc. (Dict. étymologique de Ménage.)
Benberge, subst. fém. Armure de la jambe.
(Voyez Du Cange, Gloss, latin, au mot Bainberga.)
Bendage, subst. masc. Pièce de l'arbalète. Celle
qui servoit à la tendre ou bander. (Glossaire lalin
de Du Cange, au mot Labaiidago.)
Beiidel, subst. masc. Bandage. Rouge bendel,
dans les vers suivans, semble désigner une bande
de toile qui sert à lier une plaie :
Se tu viens mes hui après moi,
Et je truis baston, ou espoi
Tel te donrai el haterel (3),
Dont tu auras rouge bendel.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 239, V col. î.
Bendiaux , subst. masc. plur. Nous trouvons
ce mot dans ce vers :
Et Gaifiers li rois de Bordiaus
Donne paiens cos, et bendiaux (4).
Ph. Mouskes, MS. p. 197.
Benedicaniiis. Prière pour rendre grâces ùDieu
de quelque bienfait : il est dit que des moines frap-
pés d'un miracle qui s'estoit passé sous leurs yeux:
Lors font sonner, et chantent haut benedicamus ;
Et mains ymne des anges Te Deum l'audamus
Chantent a haulte voix.
Ger. de Roussillon, MS. p. 204.
Bénéfice, subst. masc. Fief ou cession de terre.
— Bienfait. — Derniers devoirs. — Tenue du jeu
de la blanque.
Au premier sens, ce mol désiguoit une cession
de terre (jue faisoit le seigneur, le prince ou le roi.
(Voyez Du Cange, Gloss.lat.au mot Ileiie/lchun (5).)
(1) En phénicien et en arabe, le nom du démon viendrait de ce mot Beel-Zebub. (n. e.) — (2) L'étymologie serait l'arabe
Imibjàn djuuui, encens javanais, nom qui se trouve dans Ibn Baloutu. (n. e.) — (3) Au cou. — (4) C'est le pluriel du mot
précédent, qui signifie IJlessure en forme de longue bande, d'estafilade. (N. E.) — (5) Bénéfice a d'abord le sens du latin
bene/icium, bienfait. Puis, sous les Mérovingiens, il signifie usufruit opposé à propriété. Ce sont alors des concessions faites
à des fidèles qui, devenant usufruitiers, doivent en retour des cens. C'est ce qui distingue le plus nettement cette forme
de bénéfice du bénéfice féodal, qui oblige à des services personnels envers le concédant. Les bénéfices mrrvciii'ficns étaient
détenus parles fidèles des diplômes, les leiides des chroniqueurs. L'acte par lequel se concède un liénci'icc est dit preslaria;
il est souvent précédé d'une demande fictive, precaria ou ccnamendatio, lorsque le possesseur d'une terre cherche un
propriétaire qui le défende : ces deux actes s'inscrivent àla suite l'un de l'autre, puis se mêlent, tout en conservant le nom de
jn-écaire. Sous les Carlovingiens, le bénéfice doit le service militaire comme l'alleu (Cap. de 807, 811, Baluze I, 494,
d. Bouquet V, 678): la propriété étant la base du service militaire, il fallut remplacer par des bénéjicicrs les hommes libres
possesseurs li'alleux, qui commençaient à disparaître. En même temps les fonctions publiques, sous le nom A' honores,
constituent une seconde classe de bénéfices : les rois ne donnent plus de traitements à leurs oriiciers, mais leur assignent
des terres qui sont l'apanage de leurs fonctions. Enfin le bénéfice devient définitivement héréditaire par le capitulaire de
Kiersy-sur-Oise (877), prend son rang dans la hiérarchie des terres, pour le transporter à son détenteur; il doit alors le
service militaire, (n. e.)
6E
456 —
BE
Au xn' siècle, on se servoit indistinctement du mot
feodiim et benelkiiim , pour exprimer la même
chose. On en voit la pi'euve dans une charte de
l'empereur Frédéric 1", de l'an IIG'2, en faveur do
Raimond , son neveu, portant don en fief du comt(5
de Forcalquier. Cette charte est cilée parBrussel,
sur les Fiefs, cli. v, p. 78. On trouve aussi bénéfice
pour bienfait ou concession, dans la Preuv. de l'Hist.
de Beauvais, par un Bénédictin, p. '273; lit. de 1 1G7.
Quelques auteurs prétendent que, sous la première
et la deuxième race , les fiefs et ce qui s'appeloil
béuélicesétoieu t la même chose ;d'autresont soutenu
le contraire. Ces différens senlimens sont discutés
parlemêmeBrussel,auch. n, p. 57. Bou'.ainvilliers,
dans son Ess:ii sur la Noblesse, p. 0-2, dit: « qu'il
« y avoit des terres qui éloienl proprement le
• domaine de l'Etat, parce qu'elles éloienl destinées
« à la récompense des soldais, des officiers et des
« seigneurs distingués: on les nommoit honneurs
« ou bénéfices, parce qu'il y eu avoil d'attachés aux
« emplois, comme magistratures, et gouveruemens,
« et d'autres qui servoient simplement de récom-
« pense: mais la possession des uns et des autres
» n'étoit que viagère. » (Voy. sur le mot Bénéfice,
le P. Daniel, Mil. fr. p. 41 et 53, etc.)
« Benevis dans le Lyonnois et les pays voisins,
« signifie en général toute concession faite par un
" seigneur à quelqu'un, sous une redevance, mais
« particulièrement une concession d'eau pour faire
« tourner les moulins, et pour arroser des prez. »
(Laurière, Glossaire du Droit franrois.) On trouve
benevis pour fief ou bénéfice, dans le Glossaire latin
de Du Gange, au mot Beuevisum, qu'il explique par
beneficium.
Le sens que nous venons d'exposer étoit une
application du sens propre et générique du mot
bénéfice, qui signifioit en général bienfait: « Il
« reprocha au comte Regnault les bénéfices qu'il
« luy avoit faits. >■ (Chron. de S' Denis, T. II, fol. 43.)
Ce mot est employé pour bienfait, bonne œuvre,
dans ces vers :
Et si bien employer sçavoi ses bénéfices
Comme s'il eust toujours maintenu telz offices.
Ger. de Roussillon, MS. p. 93.
De Ui, on nommoit aussi bénéfices les derniers
devoirs que l'on rend ù un mort. L'auteur, parlant
des funérailles de la reine Anne, duchesse de
Bretagne, dit: .. Le héros d'armes appella
« tous les princes et officiers d'icelle dame pour
» eux tous, et un chacun d'eux accomplir les
« bénéfices envers le dit corps. » (Brantôme, Dames
illustres, p. 21.)
Enlin le mol bénéfice, comme teiaiie du jeu de la
blanque, désignoit le billet ïiagnant. lOudiu, Cur.
fr., et Pasquier, Rech. p. 730.) il est opposé à blanque
qui étoil le billet perdant : « .Nos eufans sont tels
« que le hazard de leurs naissances nous les donne,
« qui est cause que recevons d'eux plus de Manques
» que de bénéfices. » (Lettres de Pasquier, T. I.
p. 699. — Voyez Brantôme, Dam. gai. T. I, p. 285.)
Expressions remarquables :
\° Courir le bénéfice, c'est hanter les mauvais
lieux. 'Oudin, Cur. fr.)
'i° Aller au bénéfice, c'est aller à la garde-robe :
Tenez que vous êtes garis.
Si vous ulez au bénéfice (1) :
Quoy que nu! phisicien dise,
Mieulx vous vaudra que un cristere.
Eusl. Desch. Poes. M9S. fol. 407, ool. 1.
3° Par le bénéfice des yeux. Par le moyen des
yeux : ■> De quoy ne pouvant faire jugement certain
« par le bénéfice des rjeux, à cause de la trop
<> épaisse obscurité. » (Mém. de Sully, T. I, p. 247.)
VARIANTES :
BENEFICE. Du Cange, Glossaire latin, au mot Beneficium.
Ben'EVIs. Laurière, Glossaire du Droit français.
liENNEVis. Du Cange , Glossaire latin, au mot Benevisiim.
EiENKET. D. Morice, Hist. de Bretagne, p. 981.
Bénéficence, subst. fém. Bonté, bienfaisance.
(Dict. de Cotgrave et Glossaire de Marot.)
VAniANTES :
BÉNÉFICENCE. Cotgrave, Dict.
BÉNÉFiciENCE. Oudin, Dict.
Bénéficié , part. Qui a des bénéfices : « Etoit
« très bien bénéficié en plusieurs et divers lieux. »
(Juv. des Urs. Hist. de Charles YI, p. 103.)
Bénéficier, verbe. Avantager: " Les parans
« voulants bénéficier aucuns de leurs enfans,
« le peuvent faire par partage, testament, dona-
« tion, etc. » (Nouv. Coût. gén. p. 1250.)
Beneficque, adj. Bienfaisant. (Voy. Le Duchat,
sur Rabelais, T. V, p. 153.) On lit: « Clément ei
<■ bénéfique à tous ses sujets, » dans les Mémoires,
Du Bellay, T. VI, p. 386.
VARIANTES :
BENEFICQUE. Le Duchat, sur Rabelais, T. V, p. 153.
BENEFIQUE. Mém. Du Bellay, T. VI, p. 38G.
Beneir, verbe. Bénir, sanctifier. (Dict. deBorel,
au mot Beneisson (2).) Voyez les autorités citées sur
chaque orthographe.
J. de Meung a dit:
Amer Dieu, et le veoir, le louer, et beneistre
C'est l'office des anges.
J. deMeunj, Cod. 113et lU.
CONJl'G.
Beneie , subj. prés. Bénisse. (Fabl. jiss. du R.
11° 7218, fol. 171, V°col. 2.)
Benesqui, ind. prés. Bénit. (Hist. de la S" Croix,
51S. page 10.1
Bencstrai, futur prés. Bénirai. (Ibid. p. 6.)
Bencijront, futur prés. Béniront. (Font. Guér.
Trésor de Vénerie, ms. p. 21.)
Bénie, subj. prés. Bénisse. (N. deSlrap. T. I, p. 24.)
Benions, dans le latin Benedicimus. (S' Bernard,
Serm. fr. mss. p. 159.)
Benoi'i:, dans le latin Benedictus. (S' Bernard,
Serm. fr. mss. p. 160.)
(1) Bénéfice de i^enlre se trouve encore dans Perrot d'Ablancourt, traducteur de Tacite, avec le sens de diarrhée spontanée
qui soulage : « 11 [UaudeJ lut délivre du premier danger [le poison] par un b'niéfice de ventre. » (n. e.) - (2) On trouve, dans
la Chanson de Itoland, la forme beneï.'isent (v. 3667) : « Et li evesques les ewes beneissent. » (n. e.)
BE
- 457 —
BE
VARIANTES :
BENEIR. Joinville, p. GO. - Clém. Marot, p. 684.
Benevr. Glossaire du Roman de la Rose.
BEiGNin. Petit Jean de Saintré, p. 83.
Benitre. Monet, Dict.
Benistre. La'jbe, Glossaire, p. 491. — Glossaire de Marot.
Beneistre. Borel, Dict.
Benoistre. Doctr. de Sap. fol. 9, V».
Benoier. Borel, Dict.
Beneison, subst. fém. Dénédiction (1). (Voyez le
Dict. de Borel, au mot lieneison, et les autorités
ci-dessus.) Ce mot, dans les Sermons français, mss.
de S' Bernard, p. 17, 88, et passim, répond au latin
Benedietio.
VARIANTES :
BENEISON. Coquillart, p. 127.
Begnisson. Hist. du Théâtre français, T. I, p. 457.
Bienadiceon. S' Bernard, Serm. fr. MSS. p. 349-383.
Beneiçon. Eust. Deschanips, Poës. MSS. fol. 430, col. 4.
Benfisson. Petit Jean de Saintré.
Beneizon. S' Bernard, Serm. fr. MSS. p. 262.
Benesson. Ger. de Nevers, i"" partie, p. 117.
Beneysson. Perceforest, Vol. IV, fol. 136.
Beniçon. Ménage, Dict. étymologique.
Benission. Perceforest, Vol. IV, fol. 119, R» col. 1.
Benisson. Eust. Deschamps, Poës. MSS. fol. 489, col. 1.
Benizon. S' Bernard, Serm. fr. MSS. p. 17 et 88.
Benoicion. Ord. des Rois de France, T. I, p. 607, col. 2.
Beneoite, subst. fém. Il est dit des lois de
Romulus, que le meurtre, suivant ces lois, étoit
puni par la mort du coupable :
Et se feme estoit mariée,
Beneoite, ne espousée
Qui puis la troveroit à hontaige
A mavaitié ne à putaige,
C'om la feist morir à honte.
Alhis, MSS. fol. 1, Vcol. 2.
Beneoite, dans ce passage, semble signifier fian-
cée, promise en mariage, qui a donné sa foi.
Benestier, subst. masc. Bénitier :
Quand une femme est du mestier,
Et sa voisine l'accompagne.
Elle a sa part au beiioislicr,
Par la coustume de Champagne.
Rlojen de parveûir, p. 383.
VARIANTES :
BENESTIER. Monet, Dict.
Benoistier. Oudin, Dict.
Beueiirement , adv. Heureusement. ■> Plus
« bencurcment furent ainsi détruis par les ennemis
« de la foy. » (Cbron. de S' Denis, T. I, fol. 264.)
On a dit en langage ascétique boneneseurement
pour bienheureux, comme les bienheureux :
Onques ne fist nule gent
Qui plus boneneseurement
Servissent à lor Creator,
Que faisoient icil Seignor,
II n'avoient soing de mal faire.
Vies des SS. MS. de Sorb. chiff. LXI, col. 17.
VARIANTES :
BENEUREMENT. Chron. de S- Denis, T. I, f" 264.
Boneneseurement. Vies des SS. MS. de Sorb. ch. lxi.
Beneviser, subst. masc. Possesseur de fief.
(Du Gange, Glossaire latin, au mot Benevisum et au
mot Alodum.) Ce mot vient de benevis, dit pour
bénéfice, fief.
Beneviser, verbe. Fixer, aborner, mettre des
bornes. (Voy. Laurière, Glossaire du Droit françois.)
Bénévole, adj. Bienveillant, bienfaisant. (Gloss.
de Marot.)
Benevolence, subst. /iem. Bienveillance, bonté.
Mais le feu roy qui fut piteux,
Par pitié, et benivolance.
Vigil. de Charles VII, T. II, p. 165.
VARIANTES :
BENEVOLENCE. Nicot, Dict.
Benivolance. Vigil. de Charles VII, T. II, p. 165.
Benivolence. Ibid. T. I, p. 191.
Begnivolence. Contredits de Songecreux , fol. 129, R».
Beuigna (faire l'O). Expression formée du latin
ô benigna, exclamation sur la bonté, la douceur
d'une personne. Ce mot signifie flatter, rendre ses
devoirs. (Oudin, Dict. et Cur. Fr.)
Benifjnaige, subst. masc. Avantage. On lit:
<• Par faulle de lieu ténébreux, il habite de jour en
« la clarté du soleil qui luy oste son benignaige. »
(Percef. Vol. III, fol. l'20.)
Bénigne, subst. fém. Favorite :
S"' Avoye vous a fait sa bénigne.
Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 206, col. i.
Benigneté, subst. fém. Bénignité. (Dictionnaire
de Cotgrave.)
Bening, adj. Bénin, doux.
Hé bon roi Loeys, gentis hom et hegnignes,
De jor en jor, devient li mondes si malignes, etc.
Fabl. MSS. du R. n" lilS, fol. 341, K- col. 2.
Ce que plus tost entre aux cueurs féminins
D'autant qu'ilz sont douz, piteux, et hcnings.
Clém. Marot, p. 259.
De lîi, on a nommé querelles bénignes, les que-
relles douces ou de peu de conséquence. (Voyez
l'Ane. Coût, de Norin. citée par Du Gange, Glossaire
latin, au mot Senescallus.)
Nous n'entendons pas le sens de ce mot dans ces
vers :
Il fut begnin d'honneurs
Et qui de bruit s'alectoit à merveille.
Contred. de Songecreux, fol. 148, R'.
VARIANTES '.
BENING. Clém. Marot, p. 259.
Begnin. Coquillart, p. 125.
Bénigne. Du Cange, Gloss. lat. au mot Senescallus.
Begnignes. Fabl. MSS. du R. n° 7218, fol. 341, R» col 2.
Benings, subst. masc. plur. Sorte de religieux.
On nommoit en Flandres benings et beningnes des
hommes et des femmes qui, sans faire de vœux, se
dévouoient particulièrement aux œuvres de charité
et de miséricorde. On les a désignés depuis sous les
noms de béguins et béguines. (Voyez Le Duchat, sur
Rabelais, T. IV, p. 194, note 10.)
Benist, adj. Béni. — Saint. — Bon. — Sot,
benêt.
(1) « Levé sa main, fait sa bcneïcun.
II.
(Ch. de Roland, y. 2194, v. 2245.) (n. e.)
58
BE
— 458 —
BE
Au premier sens, ce mol signifie béni. H a été
employé avec celle signilication dans ces vers :
Beneois soit le jornal
Qu'elle me voudra occire.
Poës. MSS. avant 1300, T. I, p. 25.
On a dil aussi : le vendredi henaist, c'est-à-dire
le vendredi siiinl. (Chron. de S" Denis, T. II, f° 2CI.)
Vivant au bois, comme un très bon herœite ;
Au monde n'a vie plus hcnediclc.
Itu Fouilloux, Vénerie, fol. 92, Y".
Enlin, on disoil aussi benoist jour, pour bonjour :
Le benoist jour vous soit donné.
FarcedePalhelin.p. ('.6.
Dieu vous doint benoistc journée.
Ibid. p. 08.
VARIANTES :
BENIST. Cotgrave, Oudin, Dictionnaire.
Heneyte. Faifeu, p. 83.
Benect. Poës. MSS. avant -1300, T. IV, p. 1449.
Bexedit. Clém. Marot, p. 4.56.
Benedict. Du Fouilloux, Vénerie, fol. 92, V».
Benaist. Chron. de S' Denis, T. II, fol. 61, V".
Beneoit. Alhis, MSS. fol. 1, V» col. 2.
Benoict. Clém. Marot, p. 88.
Benoist. Chron. de S' Denis, T. Il, fol. 207.
Benoit. Cotgrave, Dictionnaire.
Benois. Poës. MSS. avant 1300, T. II, p. 1075.
Beneois. Ibid. ï. III, p. 994.
Benne, mbst. fém. Sorte de panier. — Char-
rette, tombereau. — Bateau ou boutique à poisson.
Benne signifiolt proprement un vaisseau de bois
fait en forme de panier. (Gloss. latin de Du Gange,
au mot Banastiim.) Borel, dans son Dictionnaire au
mot Lester, dérive le mol Balasta de Wi.s et de Lnst.
Il paroit plus simple de le dériver de Yenna, d'où
Benna, panier à prendre des poissons. (Voyez le
Gloss. lat. de Du Gange, aux mots Benna et Venna.)
Le mol balaste est en usage, dans certains pays,
avec la signification de panier. (Voyez Du Gange,
Glossaire latin, au mot Basta.) On lit ibid. au mot
Kalendœ :
Avec una plena halusfa depardos.
Banasta est expliqué par corbeille, panier, man-
nequin, par M. Lancelol. (Voyez l'IIisl. del'Acad. de
B. an 1727, p. 290.) L'aichevéque d'Arles, dans son
mandement du 5 septembre 1732, appelle banaste
d'infer, les paniers des femmes (1). Ges deux mots
sont du patois provençal. Une banne, selon INicot,
étoit un grand panier d'osier.
De lu, ce mol a servi à désigner : « une sorte de
« charroy à ridelles closes pour porter du sablon ou
« autre chose qu'on veut épandre par la voye. »
(Fauchet, Lang. et Poës. Fr. p. 33.) C'est-à-dire un
tombereau. Peut-être même celte signification
est-elle la signification primitive; car benna (2)
signifioil une sorte de chariot des anciens Gaulois,
selon Festus, cité par Borel.
Banne signifie charrette, dans le passage suivant:
« Que tout harenc qui vient à Paris, eiï panier ou
« en charrette, c'est-à-dire en banne, doit estre
« mis aussi bon dessous comme dessus et au
« milieu. » (Ord. des R. de Fr. T. Il, page 575. —
Voyez Ibid. note G.)
Bannel signifie tombereau dans cet autre pas-
sage : « Furent amenez moult honteusement sur
« un bannel du Louvre. •> (Monstrelel, Vol.I, ^52.)
On fait encore usage de ces mots, dans quelques
cantons de la Normandie. Banne y signifie un cha-
riot clos; bannean ou bannel un tombereau. Il
semble, selon ces acceptions, que bannel soit pris
pour le diminutif de banne.
Enfin la signification de banne s'est étendue
jusqu'à signifier un panier à garder les poissons,
comme nous l'avons dit déjà. Le mot bannois
signifie, dans le passage suivant, cette espèce de
bateaux que nous appelons boutiques et qui sert à
conserver le poisson. « Ghascun bourgeois puelt
« avoir sa nasselle au rivage dudil Maisière, sa
« huge, bannois, bondiers et autres vaisseaux à
« mettre poissons. » (Privilège de ceux de Maisière-
sur-Meuse, Bibl. de Gange.)
Le mot barreau pour charrette est encore en
usage en Champagne, et le mot benaslnn en Bour-
gogne et en Beauce. (Voy. Du Gange, Gloss. lat. aux
mots Barrolnm elGrassale.)
VARIANTES :
BENXE. Du Cange, Glossaire latin, au mot Banastum.
Banne. Robert Estienne, Nicot, Oudin, Dict.
Benna. Fauchet, Lang. et Poës. fr. p. 13.
Ben.\te. Du Cange, Glossaire latin, au mot Baiinstum.
Banaste. Mand. de l'Archev. d'Arles, ô septembre 1732.
Banasta. Hist. de l'.^cad. des B. L. an 1727, p. 256.
Balasta. Du Cange, Glossaire latin, au mot Kalendœ.
Beneau, subsl. masc. Du Cange, Gl. latin, au mot Benna.
Benneau, subst. masc. Ord. des B. de Fr. T. II, p. 575.
Bannel, subst. masc. Monstrelet, Vol. I, fol. 52, V».
Beneton, subsl. masc. Du Cange, Gloss. lat. à Greagiuni.
Ben.\ston, subst. masc. Ibid. au mot Grassale.
Baneston, subst. masc. Froissart , Poës. MSS. p. 102.
Bannois, subst. tnasc. Bibl. de Cangé.
Barreau, subst. masc. Du Cange, Gl. 1. au mot Barvolum.
Barrot, subst. masc. Id. ibid.
Beveaux, plur. (Lisez Benneaux.) J. le Fèv. de S' Rem.
Hist. de Ch. VI, p. 105.
Bouveaux, plui: (Lisez Beneatix.) Monstrelet, T. I, p. 235.
Bennerette, subst. fém. Petite bannière, ban-
derole. (Voyez La Salade, fol. 47.)
Benny, adj. Bani, proscrit. (Dict. de Borel.)
Benoist, subsl. masc. Nom de saint. Nous ne
citons ce mot que pour parler de la loi de S' Benoist,
loi ainsi appelée dans le pays de Labourt. (Voyez le
Goût. gén. T. Il, p. 732.)
(1) Les paniers dont il est ici question sont les ancêtres de la crinoline et du pouf; il est devenu banal de les associer à
la poudre et aux mouches pour figurer aux yeux le siècle de Louis XV. Les souliers à la poulaine et les hennins du
xiv siècle furent également mUudits par les" prédicateurs et les évèques. (N. E.) — (2) C'est Festus qui nous apprend que
benna était un mot gaulois : c'était un chariot à quatre roues ou une voiture faite d'osier, comme on le peut voir sur un
li:is-relief de la colonne de Marc-Aurèle. Ce sens lui est resté dans les patois picard, normand (lîayeux), wallon,
nuniurois. Le vieux français eut la forme augmentative banastre, comme balashuin, qu'on trouve dans Isidore de Séville,
pûur balneum. De voiture d'osier, on passa facilement au sens de panier : c'est eniin une toile abritant une voiture ou un
1 ateau. (n. e.)
BE
— 459 —
BE
Benus (1), siibst. masc. Ebèiie. Borel, sur ce
mol, cite Perceval.
Beofes, subst. masc. plur. Bœufs. (Voyez les
Tenures de LiUlelon, fol. 15.)
Beoirsterchelt, subst. masc. Tilre d'office.
Nom d'un officier principal de justice. « Bailly de
« Tournay Rent maistre de Bewest, et beoh'S-
« terchcU en Zéélande. » (Nouv. Coût. Gén. T. I,
page 463.)
Beol, subst. masc. Cuve, cuvier, cuvette (2).
(Gloss. latin de Du Gange, au mot BaeoL)
Ber, subst. masc. Berceau. — Cerceau. — But
oîi l'on tire. — Treille. — Coffre. — Cercueil. —
Brancard.
Le mot berXiCl, dans S' Bernard, répond au mot
Cunœ.
On dit encore ber pour berceau en Normandie.
Ce qu'on apprend au ber
Dure jusques au ver.
Gloss. sur les Coul. de Beau-v. au mot Diers.
« Fredegonde conserva le royaume à Clotaire
« son second fils qui étoit en barcelores, lorsque
« Cliilperic son père fut tué. » (Pasq. Piech. Liv. YI,
p. 565.)
Le conte d'Artoys Robers
Des lors qu'il issit du hers
Chanta tons les jours de sa vie
Largesse, honneur, chevalerie.
nom. do la Rose, 19588-19591.
Ce mot a été employé pour cerceau dans le
passage suivant : » A tout bers de chariots en lieu
« d'échelles. » (J. Lefebvre de S' Rem. Hist. de
Charles VI, p. Ii2.) On appelle aujourd'hui en
Normandie bers de chariot, le coffre, la caisse du
chariot ; ainsi, il se pourroit que bers, dans le pas-
sage cité, signifiât non les cerceaux d'un chariot
couvert, mais la caisse, la cage même du chariot.
Ce mot a signifié but ou butte. (Gloss. du Roman
de la Rose.) Le suppl. au mot bersault, elle ces vers
qui parlent de l'amour :
A mon cueur dont il fit bcrsault
Bailla nouvel et fier assault.
« Je suis le bersaull contre qui chacun tire
<' sagettes de tribulation. » (Al. Chartier, Quad.
Invect. page 266.)
Bersel est pris dans le même sens, au Gloss. lat.
de Du Gange, au mol Bersarii. On y trouve cette
expression mettre au bersel, pour mettre au
supplice, mettre en danger de perdre la vie.
On nomme encore une treille, un berceau comme
autrefois.
. , en bersauU
L'ombre tenir, et disner matinet.
Pois. MSS. d'Eust. Desch. fol. 240.
C'est de ber, berceau, que s'est formé le mot
bière (3), pour signifier coffre. « Sire, dist la damoy-
« selle, c'est ung chevalier navré qui veoir le veult,
« il convient qu'il essaye à le gecter hors de ce coffre
« ou il est lors commancie la damoyselle aux
« escuyers que ils descendent et qu'ilz mette la
» bière jus, et si font ilz. »
Le mot biei'C s'emploie pour cercueil. On a dit
aussi biers, dans le même sens.
Si sui plus bas que biers,
Quant je me voy de tous mault personners.
Eusl. Desch. Po6s. MSS. fol. 213.
Du Bellay semble distinguer la bière du cercueil,
lorsqu'il dit bierc ou sarcueil. (Mém. T. VI, p. 133.)
On disoit proverbialement, en parlant de la
chasse au cerf:
Après le cerf faut la byere.
Et après le sanglier le myre.
Gace de la Bigne, des Déduits, MS. fol. 76, V
Ce proverbe se trouve répété dans Du Fouilloux,
Vén. fol. 52, R"
Enfin nous trouvons i)/Vre pour brancard, civière,
dans ce passage : ■■ Eschelles demeurèrent là qui
« servirent de bierc pour emporter les morts. »
(J. d'Auton, Ann. de Louis XII, de 1506 et 1507,
page 79.)
VARIANTES :
BER. Glossaire sur les Coût, de Beauvoisis.
Bers. Monet, Dict. - Lett. de Pasquier, T. I, p. 423.
Bkrsel. Du Gange, Glossaire latin, au mot Bersarii.
BERSAur.T. Eust. Deschamps, Poës. MSS. fol. 240.
Bersaulx. Id. ibid. fol. 348, col. 4.
Bersaut. Froissart, Poës. MSS. fol. 240, V».
Berseau. Du Gange, Glossaire latin, au mot Bersa.
Bercei. Fabl. MSS. du R. n" 7989, fol. 241, R" col. 2.
Bercheau. Triomphe dos Neuf Preux, p. 43.1, col. 2.
Berciuiel. Fabl. MS. du R. n» 7989, fol. 240, V° col. 2.
Bercuel. Ibid. n» 7218, fol. 319, R" col. 2.
Bercueil. Eust. Deschamps, Poës. MSS. fol. 418, col. 4.
Berseuil. Chasse de Gaston Phébus, MS. p. 365.
Berceus. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 175, V» col. 2.
Berselet. Dimin. .1. Le Maire, 111. des Gaules, L. I, p. 140.
Bercelores. Recherches de Pasquier, Livre V, p. 403.
BER7.UEL. S> Bern. Serm. Fr. MSS. p. 81 et 214.
Biercuel. Ph. Mouskes, MS. p. 296.
Biers. Eust. Deschamps, Poës. MSS. fol. 213.
BiERE, subst. fém. Ph. Mouskes, MS. p. 214.
Byere, subst. fém. Gace de la Bigne, des Déduits. MS. f»76.
Bere, subst. fém. Fabl. MSS. du R. n» 7218, f« 3t5.
Berangene, sul)st. fém. Pomme d'amour.
(Dict. d'Oudin et de Cotgrave.)
Beranguière, subst. fém. Bassin de chaise
percée. (Dict. de Monet.)
Berbère, subst. Epine vinelte. (Dict. de Borel
et de Monet.)
variantes :
BERBERE. Borel, Dict.
Berberis. Monet, Dict.
Berbette, subst. fém. Nous trouvons ce mol
dans ce passage, où il s'agit des signes auxquels on
(1) On trouve dans Flore et Blanceflor, v. 615 : « Cix arbres a à non bonus, .la un seul point n'en ardra fus. » Et au Livre
des Métiers, 173: « Nuls tabletier ne puet mètre avec buis nule autre manière de fust qui ne soit plus chier que buis c'est
à savoir, cadre, benus, bresil et ciprès. » (N. E.) - (2) C'est peut-être le même mot que bol. (n. e.) - (3) Le mot vient' dans
ce cas de l'allemand Bahre, civière, (n. e.)
BE
— 400 - BE
reconnoit la boulé d'un faucon : " Quant il est seur
. (lu'il face un peu de la bcrbelle[\), soubz le bec de
« sa plume, il doit avoir col long, et baulele poic-
« trine, etc. » (Modus el Uacio, fol. 59.)
Bercail, subst. niasc. Collectif de brebis. « Na-
. ture a donné celte faculté au bercail, de suivre
« toujours la première qui va devant. » (Merl. Coc.
T. 1, p. :W'<.)
Bercaude, subst. fém. Grillade.
Sire, je vous tieng à bercon :
N'avez vous encore un bacon?
Si en faites bones hcrcaudes :
Or sus nous les mangerons caudes.
Fabl. MSS. du R. n- 7089, fol. 9), R- col. 1.
Berce, subst. fém. Artillerie d'un vaisseau. —
Oiseau. . , , ,
Oudin, dans son Dictionnaire, donne a ce mot
la si" uilication d'artillerie d'un vaisseau. .
Le même mot, selon Monet, étoit le nom de
l'oiseau qu'on appelle communément rouge-gorge.
Bercement, subst. masc. L'action de bercer.
(Dict. d'Oudin et de Colgrave.)
Berccros, subst. masc. plur. Tireurs, chasseurs
qui tirent de l'arc. ■< Lors feit le roy demeurer ses
c< chevaliers, et maine deux de ses veneurs avec
« luy sans plus, et de se^berceres. » (Lanc. du Lac,
T. I, fol. 128. — Voy. Bekcier )
Berceresse, subst. fém. Femme qui berce.
Dans l'Etat des officiers de la maison de M. le
Dauphin, an liOi, on lit: " Catherine Mallegrap
« nourrisse, deu.K cens livres, Marie Dezest berce-
« resse, deux cens quarante livres. » (Godefr.
Observ. sur Chartes VUl, p. 703.)
Berche, subst. fém. Artillerie d'un vaisseau.
(Voy. les Dict. de Borel, Nicol et Oudin.)
VARIANTES :
BERCHE. Nicot, Borel, Dict.
Bercherie. Nicot, Oudin, Dict.
Bercherete (2), subst. fém. Espèce d'oiseau.
Nous en trouvons la définition dans le passage
suivant : « Met grant peine d'avoir menus oiseaux
« qui hanlent les rivières, qui sont appelez berche-
« retes, el sont pelis, el ont la queue longue il
« y en a de plusieurs manières. " (Modus et Racio,
Ms. f. 128.)
VARIANTES t
BERCHERETE. Modus et Racio, MS. fol. 128, V°.
Bergeronnette. Du Fouilloux, Faucon, fol. 73, R".
Bercier, verbe. Tirer de l'arc. — Blesser.
Ce mot est employé au premier sens, dans, les
vers suivans :
Li Rois dient à Devée
Qu'il n'i ait cliacié, ne bercié
Ne adesée venoison.
En la forest, se par lui non. „ , , „ „ , ,
Rom. do Brut, MS. fol. 7, R° col. 1.
On a dit, dans le même sens, en parlant de
Guillaume Longue-Epée:
(1) Petite barbe. - (.2) C'est le diminutif de berce. (N. E.)
En bois sont cointement, et berser, et vener.
Rom. de Rou, MS. p. f)5.
Gérard, voulant poursuivre le roi, dit :
Et tant chevaucheray, par le mont, par le val,
Oue le rov trouveray ; volontiers chasse et herse.
^ •• Ger. de RoussiUon, MS. p. 70.
Ce mot signifie blesser dans ces vers, où il est
parié de Gérard qui voit détruire tous ses guerriers,
dans un combat très sanglant :
Quant Girard voit ses gens tresbuclier, et verser,
Les uns ferir d'espées, et les autres verser.
Gcr. de RoussiUon, MS. p. 158-
Berser ou verser, dans le second vers, est pris
pour blesser à coups de fièches. On voit encore
berser el chasser, termes de chasse réunis dans les
Poésies de Machaul, fol. 20.
Ont a trop grant gent à faire,
Qui leur clievaus navrent, etjjersent.
G. Guia'-l, MS. fol. 268, V*.
Dans un sens moral, il s'est dit en parlant des
blessures que fait l'amour :
J'en nommeroie ja un cent.
Voir par Dieu un grant millier,
Qui tout en ont été bersé
Ardamment espris, et arsés.
Froissarl, Poes. MSS. p. 390.
VARIANTES :
BERCIER. Roman de Brut, MS. fol. 7, R» col. i.
Bercer. G. Guiart, MS. fol. 255, R".
Bercer at Beser. Athis, MS. fol. o6, V' col. 2.
Berser. Froissart, Poës. MSS. p. 238.
Bersser. g. Guiart, MS. fol. 80, R».
BiERSER. Athis, MS. fol. 60, V col. 1.
Berseler. Percef. Vol. I, fol. 55, V° col. i.
Behseiller. Percef. Vol. V, fol. 91, R" col. 1.
Bersaillek. Mém. d'Ol. de la Marche, Liv. I, p. dbd.
Bersaulder. Molinet, p. 120.
Bersauder. Dict. Etym. de Ménage.
Bersander (Lisez Bersamler.) Molinet, p. Ibi.
Verser. Ger. de RoussiUon, MS. cité ci-dessus.
Berducat, subst. masc. Nom propre d'homme.
Nous lisons dans l'Hist. de B. Duguesclin, par
Ménaid, p. 536: « Un grant chevalier baron nomme
« Berducat d'Albret. » Le moi Berducat est explique
en marge par Perdicas.
Berechte, subst. fém. Sorte de tribunal. Peut-
être ce mot désigne-t-il une juridiction. « Personne
« ne peut diviser aucune somme par deux, ou trois
u demandes pour les porter en la berechte, à peine
« de succomber. La dite berechte est assemblée
.. par les paroisses ; et quiconque perd son procès,
.. ou qui ne poursuit pas son instance tombe en
» l'amende de vingt sols parisis au profit du Bailly
« de la berechte. » (Nouv. Coût. Gen. T. 1, p. bi4.)
Berelle, subat. fém. Sorte de jeu. Peut-être le
même que mcrelle. Pris dans un sens figure, ce
mot paroit signifier embarras. On disoit:
i' Demeurer à la berelle. Le passage qui suit
rendra clair le sens de celte expression :
Beaulté ne faict l'homme estre industrieux.
Ne son parler le rend victorieux :
Sans bon etfect demeure à la berelle.
Crétin, p. 118.
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— 461 —
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2° Etre en bereîe, c'est-à-dire être embarrassé.
Prenez en cure mon afere.
Que sans vous sui en fort bereîe :
Sans vous ai perdu la querrelle.
Fabl. MSS. du R. n- 7218, fol. 318, R° col. 2.
3° Mettre quelqu'un en la hcrcle, le laisser en la
herele, se disoit pour mettre quelqu'un dans l'em-
barras, l'y laisser. (Voy. G. Guiart (1), ms. fol. 264, V°,
et 229, R°.) Le sens du mot berele nous paroît plus
difficile ù saisir dans cet autre passagie. Un amant,
d'intelligence avec sa maîtresse, lui dit :
En ceste praele,
Seur la verdure,
Merrons no berelle.
Poés. MS. T. IV, p. 1532.
VARIANTES :
BERELLE. Crétin, p. 118.
Berele. G. Guiart, MS. fol. 264, V».
Berement. Ce mot, suivant l'éditeur des Ord.
des R. de F., paroit être corrompu. (Voy. les Ord.
des R. de Fr. T. Y, p. 70G, et la note.)
Berengaiidiser, verbe. Mot factice qui semble
signifier forger des mots françois sur des mots
latins. Fabri, dans son Art de rhétorique, après
avoir blâmé, « la manière barbare appellée vice
« de innovation commis par ignorans, voulans
« apparoislre escumans termes latins en les barba-
« risant, sans prendre leur commun significat,
« comme luder à la pile de ludere a pila, » dit :
En prohibant le berengaudiset;
Ne s'aimez point vocabules latins.
Fabri, Arl de Rhél. fol. Sfi, V°.
Berenger, subst. masc. Parc d'ours. Mot alle-
mand qui signifie un parc d'ours, le lieu oîi les met
celui qui lès dompte. (Caseneuve, Orig. de la
Lang. Fr.)
Bergainasque, adj. Qui est de Bergame. Ber-
game est une ville d'Italie. « Bouclier s'a femme à
.< la bergamasque, » c'est-à-dire lui mettre une
ceinture de chasteté. (Rabelais, T. III, p. 194.)
Bergat, adj. Tacheté. Mot languedocien qui
signifie « marqueté de diverses couleurs comme
« certaines chenilles qu'il y a. » (Dict. de Borel, au
mot Virgœ.)
Berge, subst. fém. Espèce d'oiseau. Peut-être
est-ce le même que Berce ci-dessus?
Chez le dit prince ilz prindrent leur herberge
Qui leur donna de maint pouUet et berge,
Et les traicta comme homme a ce congnu.
Faifeu, p. 107.
Bergée, subst. Verger. (Gloss. lat. de Du Gange,
au mot Viridarlum.)
Berger (2), subst. masc. Nous citerons sur ce
mot, qui subsiste, les expressions suivantes :
1° L'enseigne du berger. Expression obscène
dans les Œuv. de Roger de Gollerye, p. 138.
2° Berger A peu de bruit. C'est-à-dire un pendu.
(Oud. Gur. Fr.)
Bergère, subst. masc. Nom donné à une bom-
barde. « Alerent visiter l'arlilleiie, et une bom-
« barde, nommée le bergère qui moult bien faisoit
« la besongne. » (Mém. d'Ol. de la March. Liv. I,
p. 39'i.)
Bergerette, subst. fém. Diminutif de bergère.
— Sorle de poésie.
Sur le premier sens, voy. Crétin, p. 150, et les
Epith. de Miirt. de Laporte, etc.
On nommoit aussi bergerPtle une espèce de
poésie ou rondeau double. (Voy. sur ce mol une
explication détaillée dans l'Art de Rhét. P. Fabr.
Liv. II, fol. 34.) « Les petits enfans de chœur de la
« Sainte Chapelle, qui illec disoient de beaulx vire-
« lais, chançons, et aultres bergerettes (3), moult
« mélodieusement. » (Cbron. scand. de Louis XI,
p. 116.)
VARIANTES :
BERGERETTE. Crétin, p. 156.
Bergierette. Froissart, Poës. MSS. p. 279.
Bregerette. Poës. MSS. du Vatican, n" 1490, fol. 112.
Bergerotte. Rabelais, T. III, p. 241.
Bergerolle. Epith. de La Porte.
Bergeronete. Dict. de Nicot.
Bergerie, subst. fém. Sorle de poésie. —
Troupeau.
Selon la première acception de ce mot, Sibilet
aiiprouve que les François aient substitué le m.ot
de bergerie à celui d'églogue qui étoit en usage
parmi les Grecs, pour désigner ce que nous nom-
mons aussi idylles. (Voy. Sibilel, Art Poët. Liv. II,
p. 120.1
On disoit aussi bergerie de vaclies pour troupeau
de vaches : « Emilian avoit un fort beau troupeau
« de brebis, avec un grand nombre de jeunes
« taureaux, et une bergerie de vaches. » (Nuits de
Stiapar. T. I, p. 250.) Ce mot désigne un troupeau
de moutons, dans ces vers :
Bergerie moult bêle menot.
Mes s'amie souvent regretot.
Chans. Fr. du Xlir siècle, MS. de Bouh. fol. 112, R°.
Bergeron, subst. masc. Diminutif de berger.
L'autre jour, par .i. raatinet.
M'en aloie esl)anoiant,
Et trovai, sans son bercheret,
Pastoure plaisant, etc.
Chans. du xiii- siècle, MS. de Bouh. fol. 284, V col. 1.
VARIANTES :
BERGERON. Chans. MSS. du C" Thib. p. 39.
Bregeron. Poës. MSS. avant 130O, T. HI, p. 1011.
Bekgerot. Oudin, Dict.
Bercheret. Ch. Fr. du xin= siècle, MS. de Bouh. fol. 284.
Berghière, subst. fém. Bergère.
Delez l'ombre d'un bosquet,
Là trovai gentil berghière.
Poës. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1591.
(1) Berellus est le nom du dauphin dans le ms. lat. 5838. c: « Nonnulli berellos, dolphinos vocant, eo quod, ut Albertus
Magnus ait, ante naves aquas evomant. » Dans G. Guiart, il a le sens de querelle ; à l'année 1293, on lit : « En la saison de
ces berelles. Desquelles lonc est li comprandres » ; à l'année 1304 : « Tant que l'en maintint les berelles Des serjans aus
noires gonnelles. » (.n. e.) — (2) Voir plus loin Bergier. (n. e.) — (3> Ces sortes de poésies se chantaient le jour de Pâques,
et l'on buvait à ce propos une boisson composée de vin et de miel, et nommée comme le rondeau bergerette. (n. e.)
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462
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Bergier (1), subst. masc. nerjrer. Ce mol est pris
aussi pour sol, bêle, imbécile, extravagant. Il est
souvent employé pour lionune rustique, et peu
instruit.
Guillaume, c'est grand folie,
Quant ensi avez chanté,
Li bergiers d'une abbaïe
Eust assez mieuz parlé.
Pocs. MSS avant 1300, T. I, p. 473.
Vous me tenez pour hrerj'iKr
Qui volez que jou chou pris,
A oncques noient ne pris
Pofs. MSS. du Vatican, n" IWO, fol. 131, R- col. 2.
Cueur ne peut quiung seul hoste dedens soi hébergier
Pour ce doit l'en tenir à fol, et a befrjier
Qui veult Dieu, et pechié en son cueur enfergier ;
Nus ne puet ces deus erbes planter en ung vergier.
J. de Meung, Tcsl. 1530.
S'uns hom a fit el siècle toutes ses volenlés.
Et il laisse pour Dieu trestoutes mauvestez,
Tantost est des mauves escharnés et gabez:
Ou il est ypocrites, ou bcrqicrs apelés.
Fabl. MSS. du R. n" 721S, fol. 338, R" col. 1.
VARIANTES :
BERGIER. Rabelais, T. I, p. 175
Bergiers. Poës. MSS. avant 1300, T. I, p. 473.
Bregier. Poës. MSS. du Vat. n» 1490, fol. -134, R» col. 2.
Berger. Fabl. MSS. du R. n" 7615, T. I, fol. 67, V» col. 2.
Bergiere, suhst. fém. Espèce de danse. Un air
de danse pour avertir de réliograder, de retourner
en arrière. C'est aussi une expression figurée, telle
que chanter la palinodie. J. de Meung, après avoir
censuré la conduite des femmes, et celle de tous
les grands seigneurs,
Soit comte, ou roys, ou ducz, ou prince, ou sénateurs,
qui se ruinent pour assouvir la fureur qu'elles ont
pour la parure, donne enfin cette dernière leçon,
pour corriger ces seigneurs de leurs folles com-
plaisances :
Je leur dis qu'ilz appreignent le chant de la bergiere
Ou la gent qu'ilz carolent dient ; retourne arrière;
Je me tayray atant d'endroit ceste matière ;
Car les femmes, espoir, ne l'ont mye trop chiere,
J. deMeunj, Cod. 1301.
S'on joue, peut estre la carrière,
Petit Rouen, le grand Tourrin
La gorgiase, la bergiere :
Ils se courroucent au tabourin.
Coquillart, p. 40.
Bergil, subst. masc. Bergerie, bercail.
En son cortil avoit des cho.x
Et en son bergil des bret)is.
Fabl. MSS. de S' Germ. fol. 150.
VARIANTF.S :
BERGIL, Berchil. Fabl. MSS. de S' Germ. p. 150.
Bergil. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 227, V» col. 2.
Berguel. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 228, R» col. 1.
Bercoal. Chron. Fr. MS. de Nangis, an IIIO.
Bersault. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 531, col. 1.
Bergine, subst. masc. Brebis. On trouve au
mot berblt du Gloss. lai. de Du Gange : "■ Tous
« pourceaulx, bcrgines et chievres doient, la pièce.
« une obole. »
VARIANTES :
BERGINE. Du Gange, Glossaire latin, au mot Berbix.
Barbix. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. p. 354.
Berbiette. La Marg. des Marg. fol. 216.
Berbis. Poës. MSS. avant 1300, p. 462.
Berbi.k. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. p. 9.
Berbz. Loix Norni. art. vi, passim.
Bergue, subst. masc. Nom de lieu. « Il les fit tirer
« au pays Lionnais et de Bergue qui est du pays de
« Languedoc. >> (On lit, à la marge, peut-être
.BlGORRK C^).)
Bei'îchet (3), subst. masc. Roitelet. Sorte d'oi-
seau. (Dict. de Monet el de Nicol.)
VARIANTES I
BERICHET. Monet, Dict.
Bericiiot. Nicot, Dict.
Bericle (4), subst. masc. Verre. Lisez Yericle :
« Nul ne puet faire, ne faire faire, tailler diamans
« de bericle, ne mettre en or, ne en argent. »
(Ord. des R. de Fr. T. III, p. 12. — Voy. l'bid. la
note n.) « Gens qui portentlunetles, ou bericles
« ne peuvent pas voir de si loing. » (S" Jul. Mesl.
Histor. p. 358.)
Bei'ier, adj. Dernier. Ménage, dans son Dict.
Etym. cite sur ce mol, Helinand, dans le poëme de
la mort. Peut-être est-ce une faute pour derrier et
derrière.
VARIANTES :
BERIER, Berrier. Dict. Etym. de Ménage.
Bei'il (5), subst. masc. ou fém. Pierre précieuse.
(Dict. de Monet, de Gotgrave et d'Oudin, au mot
Beril.)
Le licril que je chante est une pierre fine
Imitant le verd gay des eaux de la marine.
Œuv. de Rem. Bell. T. I. p. r,5.
Voy. le Suppl. au Glossaire du Roman de la Rose,
et les Remarques de l'Auteur, qui dit entre autres
que celte pierre « estoit d'un verd pâle (6), et que
« c'estoil une des douze pierres qui ornoit le ralio-
« nal du Grand Preslre chez les Hébreux. »
Ce mol semble employé, dans le passage suivant,
pour signifier une pierre de composition. « Voilà le
« diamant que je vous avois jà voué, ce n'est pas
« un beril, non, ni une hapelourde, il est vrayment
« oriental. » (Div. Lee. du Du Verdier, p. 349.)
Voyez lier\jl, dans Marbodus de Lapidlbus, à la
suite des (Euv. de Ilildeberl, p. 1650.
VARIANTES :
BERIL. Œuv. de Rem. Bell. T. I, p. 65.
Beryle. Dict. de Rob. Estienne.
Bervl. j. le Maire, Couronne Margaritique, p. 69.
(1) Letymologie est berbicarius, dérivé de berbix, employé en bas-latin pour vervex. (n. E.I - (2) C'est plutôt le
Rmtergue. (N. E.) - (3) On rappelle encore berichon. (n. e.) - (4) On lit au compte du testament de la royne Jehanne
dEvreux (xiv« siècle) : « Pour un vericlc encerné en manière de lunette, prisé xx frans. » Bericles est aujourd'hui bcsicle,
comme rhaire est devenu chaise; l'étymologie est berylhis, détourné de sa signification de pierre précieuse. Quant à vericle,
il suppose vitricula, diamant faux de verre ou de cristal. (N. E.) — (5) Voir le mot précèdent; la forme se trouve déjà
au Roman de la Rose ; « Et quant el l'ot du fuerre traite. Plus fu clere que nul beril (v. 15723). » (n. e.) - (6) On Ut dans le
propriétaire (tes choses, cité par de Laborde (Emaux, p. 164) ; « Beril est une pierre qui croist eu Inde, qui est semblable
a 1 esmeraulde en verdeure. » (xiv» siècle.) (n. k.)
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163 —
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Beriche. Elanchandin, MS. de S' Germ. fol. 190, R» col. 3.
Bericle. Froissart, Pocs. MSS. p. 347.
Beril. Glossaire du Roman de la Rose et le suppl.
Berille. Rabelais, T. I, p. 324.
Béryl. Marbodus, col. 1650.
Berlan, subst. masc. Lieu de débauclie. — Jeu
de hasard. — Table de jeu. — Cornets à dés.
Sur le premier sens, lieu de débauche, voyez le
Dict. de Monel. Le P. Meneslrier dit que ce mot
signifioit autrefois: « une espèce de taudis de
« planches, dressé à la campagne, au proche des
« murs des villes, et de la clôture des villages oîi
« les fainéants alloient jouer. » (Menestr. Bibl.Cur.
T. II, p. 184.)
Ce mot, sous les orthographes berîeng, brelenc,
brclengl, désignoit aussi un jeu de hasard, le
brelan. Nous trouvons brelenc en ce sens, dans
Bout. Som. Rur. p. 50G. Dans des lettres de décembre
1382 (Trésor des Chartr. Reg. 141), on lit brelengh.
De là. Ton a étendu la signification de berlan h
celle de table de jeu :
L'un met sur le berlenz son gage,
Et l'autre met argent encontre, etc.
G. Guiart, MS. fol. 332, P.'.
Ce mot est encore usité en Normandie pour
signifier un comptoir, un bureau.
Enfin berUnis, ([ui vraisemblablement s'est dit
dans son origine pour exprimer la chance du jeu,
après avoir signifié le jeu même, par une extension
de ces acceptions, s'èmployoit pour désigner les
cornets dont on se sert pour jeter les dés (1) :
Ribauz qui portent les berlenz,
Ne resont pas déjouer lenz ;
Moult demainent grant braiterie.
G. Guiarl.fol. 331, V.
On a dit, en prenant au figuré le mol berlan,
dans la signification de jeu :
1° Venir sur le berlan. c'est-à-dire venir sur le
jeu, sur le moment de décider une alîaire :
N'avons-nous pas l'ystoire
De Ajadus, quant il fut assailly
D'Alixandre-le-Grant, et accueilly
Par puissance, devant Hierusalem,
Comment alors il vinl sur le lierlan
Prier à Dieu.
Vigil. de Charles VU, T. 11, p. 104.
2° Berlant de fortune signifioit l'inconstance, le
jeu de la fortune: « Ainsy est l'heur des plus
« haulles peignez, au berlant de fortune souvent
« mis au hazard.
Louis XII, p. 110.)
(J. d'Auton , Annales de
T.\RJANTES :
BERLAN. Vig. de Charles VII, T. II, p. 194.
Berland. Menestr. Bibl. Cur. T. II, p. 184.
Berleng. Du Gange, Gloss. grec.
Berlenz. (plur.) G. Guiart, MS. fol. 331, V».
Brelenc. Bout. som. rur. p. 506.
Brelengh. Lett. de décembre 1382. — Très, des Chartr.
Berle (2), subst. fém. Cresson de rivière. (Dict.
d'Oudin et de Cotgrave.)
Deviens, subst. masc. plur. Espèce d'office. Il
est compris avec les clergies, sergenleries et autres
offiees, que le duc de Bourgogne veut être réunies
à son domaine, dans le cas de vacance, dans son
Ordonnance de 1446. (Voyez l'Etat des Officiers du
Duc de Bourgogne, p. 175.)
Berlin, subst. masc. Espèce de poisson à écaille.
(Dict. de Nicol.)
VARIANTES :
BERLIN, Berdin. Nicot, Dict.
Berlingot (3), subst. masc. Sorte de monnoie
vénitienne. Dans le Dictionnaire d'Oudin, ce mot est
employé figurément avec une signification obscène.
Berlue (4), adj. Ebloui, aveuglé. (Dict. d'Oudin et
de Cotgrave.) Les maquignons disent encore un
cheval berlu , pour un cheval lunatique.
Berms (5), subst. masc. plur. "Valets. Ce mot est
employé comme synonyme de valés, valets, dans
le passage suivant: « Leurs valés, ou berms. »
(Ord. des Rois de France, T. II, p. 13G.) Il est dit
(ibid. note D) qu'au registre 71, il y a ; « Bermans
« touchant les valets. »
Bern, subst. masc. Amas. — Le Béarn.
Au premier sens, c'est un mot brelon qui signifie
amas, monceau. (Voyez Gloss. lalin de Du Cange,
au mot Berna.)
On a dit aussi Bern pour le Béarn : » C'est la loi
« du pays de Bmi, que le batu paye l'amende. »
(Dict. de Cotgrave, au mot Bearn.)
Bernache (6), subst. fém. Macreuse. C'est ainsi
que cet oiseau se nomme à Dieppe , selon le Dict.
étymologique de Ménage.
(1) C'est plutôt la table où l'on jette les dés que le cornet où on les agite : « Plusieurs compaignons jouans aus dez sur
une table ou brelenc. » (JJ. 1C3, p. 295, an. 1409.) (N. E.) — (2) C'est le siiwi. avgustifolinm, de la famille des ombellifères. On
la regarde comme antiscorbutique ; « Des calaplasmes faits avec des herles ou cresson d'eau. » (0. de Serres, éd. de 1605,
p. 926.) (N. E.) — (3) C'est plutôt une sorte de pâtisserie. Voici ce qu'on lit dans la vie de S'" Colombe de Rieti (Acta SS.
Mai, t. V, p. 337): « Ut primo sex magnos imo majores panes formaverint, demum très placentas, postmodum quos
berlingotios dicunt multos ;.... » (N. E.) — (4) Ce mot a été formé sur berlue, où l'on voit le préfixe péjoratif ber, plus lue,
pour lucem ou lumen. Ce qui assure la dérivation est l'italien bariuine, fausse lueur. (N. E.) — (5) Il y a eu sans doute là
une abréviation oubliée, comme le remarque Du Cange sous le mot bennarius (voir J,I. 72, p. 508). On trouve aussi les formes
bermen et beaiiien : « Ledit Courtoysie dist audit Colin que il avoit veu une femme, appelée .lehanne la Crasse, qui parloit à
un bermen. et creoit que elle eust achaté une queue de vin. « (J,T. 100, p. 214, an. 1374.) Et JJ. 87, p. 130, an. 1358:
« Guillaume Davarieux, bresmen de vins et deschargeur de darrées en la ville de Dieppe. » Caen possédait aussi une
corporation mtitulée les « francs bréments canonniers, » qui est l'objet d'un mémoire publié par la Société des Antiquaires
de Normandie, entre 1840 et 1842. (n. e.) — (6) C'est le nom vulgaire du canard érythrope de Gmelin, qu'on nomme aussi
oie nonnette. On trouve, même en français moderne, les variantes barnacke, barnaclc, bernacle. Cet oiseau est ainsi nommé
parce qu'une opinion vulgaire le fait naître des barnuclen ou bernicl.es (anatifes lisses), coquillages attachés aux végétaux
du bord de la mer, où il place son nid. Le nom savant du conuillage lui-même, analife, vient de la même superstition ;
anas est un canard en latin, (n. e.)
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- 404 —
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Bernacles (1), subst. féin. Terme d'armoiries.
C'est le sens que ccriaiiis ailleurs donnent à ces
mots; ils désignoient un inslrument servant à
broyer le chanvre ou le lin. Le Laboureur, qui les
avoit expliqués ainsi dans son Orig. des Arm. p. 243,
se rétracte dans sa préface, et dit que ce sont des
caveçons ou moraiUcs. (Voyez p. 2) et 22 de la
Préface.) On voit, dans les deux passages qu'il cite,
la figure de ces bernacles. Le mot renâcler, qui se
dit d'un cheval qui roulle des naseaux, etquiparoit
venir de bernacle, semble confirmer la dernière
explication. (Voyez Broyé.)
VARIANTES :
BERNACLES, Benacle, Bernicles. Le Laboureur, Orig.
des Arra. page 243.
Bei'nagoe,.si//ys/. masc. Sorte d'outil.
Si a marcheans de lin.
De mueles, de fer de molin,
De haces, et de heniagoes (2),
De pelés , de pis, et de hoes.
Fa))l. MSS. du R. n" 721R, fol. 283, V col. 1.
Bernard, subst. masc. Selon Ménage, ce mot
signifie le génie, le naturel d'un ours; de l'allemand
art, génie, et bar, ours. (Voy. Caseneuve, Orig. de
la langue fr.) Borel, 2" additions, au mot ilrd, le
dérive du mol art, naturel, et dit qu'il signifie
naturel (ïun fils. Nous trouvons souvent ce mot
employé dans les Fabliaux mss. du Roi, pour le nom
d'un âne, que nous appelons aujourd'hui Martin :
Treuvent Bernard l'archeprêtre
En un fossé les chardons pestre :
Bernarl, dist Renart, Diex te saut.
Fal)l. MSS. du R. ii- --218, fol. 48, P.- col. 1.
VARIANTES :
BERNARD. Fabl. MSS. du R. n» 7218, fol. 48, R» col 1.
Bernart, Bernars. Ibid. fol. 49, R» col. 1.
Bernard (S"). Nous citerons ici un proverbe
auquel donna lieu le savoir prodigieux de ce saint:
Bernard n'a pas tout vu. On disoit en latin : iieque
Bernardus vidit omnia. (Voyez les Nouv. Litt. de
Florence, 1749, n° 17, col. 205.)
Bernart (3), subst. masc. Terme d'injure.
On le claime en disant bernart.
Eust. Desch. Poês. MSS. fol. 211, col. 4.
On disoit aussi:
1° Parler d'autre bernart, c'est-à-dire parler d'un
autre ton, ou changer de langage :
Se Diex me gart.
Vous parlerez d'autre bernart.
rail. MS. de S. Gcmi. p. 180.
2* Chanter de bernart semble avoir signifié se
dédire, se rétracter :
Il semble que vos m'apregniez,
Fait-il, à chanter de bernart :
Ains me lairroie à une hart
Lacer el col que gel preisse.
Fabl. MSS. de S. Germ. p. 352.
Berne (4), subst. masc. Cresson sauvage. - Pre-
« mierement faut avoir une grande poisle, tenant
« dix sceaux d'eau, puis prendredixbonnesjoinctées
« d'une herbe nommée bern, ou cresson sauvage...
« et faire bouUir le tout ensemble. » (Du Fouilloux,
Vénerie, fol. 12, V°. — Voyez Berne ci-dessous.)
VARIANTE.S :
BERNE. Salnove, Vénerie, p. 332.
Bern. Du Fouilloux, Vénerie, fol. -12, V".
Berne , subst. féin. Espèce de saie ou de man-
teau. — Moquerie.
Ce mot, au premier sens, signifie saie, ancien
vêtement militaire. (Voyez les Dict. de Borel et
d'Oudin.) Le Duchat(5), dans ses notes sur Rabelais,
T. I, p. 324, note 3, dérive ce mot de l'arabe burnous,
qui signifie un mantelet à cape. (Dict. étymologique
de Ménage.) De lu, s'est formé berner, faire sauter
sur la couverture, et par extension se moquer,
railler, tourner en ridicule.
De là aussi, on a employé le mot même de berne
pour moquerie : » La fiaterie, et la berne
« sont au degré de cousins issus de germains. »
(Le Roman bourgeois, Liv. II, p. 151. — Voyez
Berne ci-dessus.)
Bernement, subst. masc. Raillerie, moquerie.
Pour vous mettre au-dessus de tous les bernemens.
Molière, Ecole des Maris, acte m, scène V.
Bernenx, adj. Qui donne le dévoiement.
Cidres berneux qui le ventre amolie.
Eust. Descliaraps, Pofs, MSS. fol. 214, col. 3.
Bernicles (6), subst. plur. Espèce de torture.
Supplice en usage chez les Sarrazins. (Voyez Borel,
Dict.) » Voians les Sarrazins, que le roy ne vouloii
" obtempérer à leurs demantles, ilz le menasserent
« de le mectre en bernicles ; qui est le plus grief
« tourment, qu'ilz puissent faire à nully. » (.Joinv.
p. 07. — Voy. la 10' Dissert, à la suite de cet auteur,
et le Glossaire latin de Du Cange, au mot Boia.)
Bernie {1), subst. fém. Sorte de drap. C'étoit un
« drap grossier, rude et velu, dont les Iiiandois
" s'emnîantellent. » (Dict. de Nicot. — Voy. le Dict.
(1) Ces bernacles doivent être des canards ressemblant aux merlettes. (n. e.) — (2) Le texte est peut-être fautif, et l'outil
cité serait la besaiyuc, qu'on trouve dès le xiF siècle, (n. e.) — (3) Bernart avait le sens de sot, hébété, ensorcelé ; ainsi on
lit au reg. .U. 153, p. 305, an. 1397 : « Lambert, Lambert tu as enchanté ou ensorcelé mon frère, il est tout bernart de toy, et
te monstre plus grant amour qu'il ne fait à moy. » Et au reg. 142, p. 20, an. 1391 ; « Lequel Duchesne respondit au dit
Bernart qu'il n'estoit point coquart ; mais que ledit Rernart estoit bien coquart, bernart, et tous sos : car il- n'estoit si
mauvaise cornardie que sotie. » Nous conservons encore le mot bénarde, plus anciennement bernarde, pour désigner les
serrures dont la clé n'est pas forée et qui s'ouvrent des deux côtés : « Icelle Marion s'en coury à l'uis, qui fermait à serrure
bernarde et l'ouvry. » (J.l. 170. p. 191, an. 1442.) (>f. E.) — (4) Voir à Berle. — (5) Diez tire ce mot de Hibernia, Irlande,
parce que cette étoffe se fabriquait dans cette île. (n. e.) — (6) On lit au § 341 de l'édition de Wailly: « Bernicles est li plus
griez tourmens que l'on puisse souffrir; et sont dui tison ploiant, endentei ou chief ; et entrent li uns en l'autre, et sont
liés à fors corroies de buef ou chief. Et quant il vveulent mettre les gens dedans, si les couchent sus lour costez et lour
mettent les jambes parmi les chevilles dedans; et puis si font asseoir un home sur les tisons; dont il advient ainsi qu'il ne
demourra jà demi pié entier de os qu'il ne soit touz debrisiés. Et pour faire au pis que 11 peuent, ou chief de trois jours que
les jambes sont enflées, si remettent les jambes enflées dedans les bernicles, et rebrisent tout derechief. » (.N. e.) —
(7) Comparez berne, (n. e.)
BE
465 —
BE
étymologique de Ménage, et le Glossaire latin de
DÛ Gange, au mol Berniscrist.)
Bernier, subst. masc. Valet de chiens. Celui
qui avoit soin des chiens de chasse ; celui qui leur
donnoit le pain de brcn, c'est-à-dire de son. (Voyez
Du Gange, Glossaire latin, au mol Brcnarii.) On y
lit ces vers du Roman de Garin :
Sire, en ce gaut a trouvé un bernier
Le plus bel homme qui onques fu sor ciel,
S'a un sanglier retenu à trois chiens.
Plus bas :
Par devant vos a occis un bernier.
La nuit semont ses cavaliers.
Ses veneors, et ses berniers :
Au matin vont en la lorest, etc.
Fabl. MSS. du R. n- 7980, fol. 48, V- col. 1.
Bernifler, verbe. Mortifier, maltraiter.
Mes ennemis ont mon las cueur riflé
Escorniflé, celé, musse, niilé, et bernijlé.
Chasse et départie d'.\ruours, fol. 41, V' col. t.
Bernine (coiffure ou chevelure à la). On l'appe-
loit ainsi du nom du clievalier Bcrnin. 11 s'en servit
quand il fit le buste de Louis XIV, en 1665. (Voyez
la Vie du Bernin, en italien, par Baldinucci, in-i°,
168-2, page 47.)
Berniscrist, s»/;sL masc. Sac. Mot breton (I)qui
signifie sac , ou poche servant à mettre le froment
qui n'est pas encore nettoyé. (Glossaire latin de
Du Gange, au mot Berniscrist.)
Berohete (2), subst. fém. Brouette. (Voyez les
autorités citées sur chaque orlhographe.)
VARIANTES :
BEROHETE. Du Cange, Glossaire latin, au mot Traga.
Berroete. Cotgrave, Dict.
BouROAiTE. Ph. Mouskes, MS. p. 571.
BouROUAiTE. Du Cange, Glossaire latin, au mot Ribaldi.
BouETTE. Bouteiller, Somme rurale, p. 897.
Brûuere. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 213, col. 2.
Berole, subst. fém. Chicane. Il paroit que c'est
le sens de ce mot dans ce passage:
Por lui achoisonner
Li lais, comme riens ne set
De plat, ni de berole.
Tout, sans conseil d'autrui,
Commence sa parole.
Fabl. MSS. du R. m* TOtS, T. Il, fol. 141, R" col. 1.
Berqiie, adj. Borgne. C'est la signification de ce
mot dans le livre que nous allons citer, où on lit le
berque de la lieuse. (Voy. l'Ilist. de Charles VI, par
Godefr.) On explique ce mot à la marge par le borgne
de la lieuse, et c'est ainsi que ce la lieuse est nommé
par tous les autres historiens ; ainsi berque ne doit
être remarqué que comme une faute de copiste ou
d'imprimeur.
Berqui, subst. masc. Ce mot est usité dans
l'Auxerrois pour signifier une mare, un lieu aqua-
tique ; il y a même un village qui porte ce nom.
Berret, subst. masc. Paysan des Landes. Ce nom
vient dune espèce de honnèl appelé birette (3), que
les habitants des Lande? ont coutume de porter,
(Voy. L'année Litt. p. 276, note.)
Berrie, subst. fém. Du Cange. sur Joinville,
explique ce mot par campagne plate (4). « Les Tarta-
« rins disoient qu'ils estoient venuz nez, et con-
« créez d'une grant berrie de sablon là où il ne
« croissoit nul bien. » (Joinville, p. 90.)
Berrois, subst. masc. plur. Berruyers. C'est
ainsi que sont désignés les peuples du IBerri, dans
un des Poët. mss. avant 1300, T. IV, p. 1662.
VARIANTES :
Barruyers at Berruyers. Ger. de Rouss. MSS. p. 52.
Bersans, adj. plur. Ce mot, dans le passage sui-
vant, paroit servir à désigner les bêtes douces, appri-
voisées, opposées aux bêtes féroces et carnassières:
Des roces, et forés issent...
Toutes les bestes conversans
Ou pays, hors mis les bersans (5) ;
Mes les sauvages, qui se vivent
De dévorer, illuec arrivent.
Et viennent au commandement.
Froissarl, Poës. MSS. p. 179.
Berse, subst. fém. Bêche. « Ils ne sçavoient
« que c'estiMt de rasoir, de ciseaux, de lancette, de
« compas, de marteau, de hache, de houe, de
« pioche, de berse, de coulre. » (Contes de Ghol.)
Bcrser, verbe. Bercer. — Amuser, endormir.
On trouve ce mot dans Oudin, avec la significa-
tion propre de bercer.
Ce mot est employé au figuré avec le sens d'amu-
ser, dans le Gloss. du Roman de la Rose, et pour
endormir dans les vers suivans, où il s'agit de la
reine Blanche et de S' Louis :
C'estoit la chançon et la berse (6)
Dont la saincte femme le berse,
Et les mes dont il fut servis.
Eust. Desch. Pocs. MSS. fol. 559.
Berseres, subst. masc. Ce mot a probablement
le sens de berseil (en italien bersaglio), cib\e, blanc
auquel on vise. La racine est celle de berser, verbe
dont Du Cange donne de nombreux exemples sous
bersa, avec Te sens de chasser, de poursuivre les
bêtes par les bers, les berceaux d'une forêt.
Li veneor corent devant,
Li damoisiaux s'en va traiant ;
Son arc li portoit im vallés,
Son hausart (7), et son berseres (8).
Fabl. MSS. du R. n" 7989, fol. 48, V col. 1.
(1) Ce mot se trouve dans une charte de 799 (ap. Malbrancum, lib. 5 de Morinis, cap. 38) : « Ad emendos drappos, et
kamisias ultramarinas, qua' vulgo berniscrist vocitantur. (N. e.) — (2) La brouette avait autrefois deux roues, d'où
rétymologie bis, plus un diminutif de rota. (N. E.) — (3) Cette forme, mieux que béret, rappelle l'éty.rologie birruin, tjyrrhus,
étoffe rousse, (n. e.) — (4) Ce mot, dont la forme latine est beria, est l'origine des noms de lieux lierre (Bouches-du-Rhône),
Berriac (Ardèche, Aude), Berry (Aisne, Cher, etc.), Berru (Marne), Berrieux (Aisne), Berrie (Morbihan), Berrien
(Finistère). (N. E.) — (5) Bersans paraît être le participe présent de berser, tirer de l'arc : « La coromencièrent il à traire et
à berser sur ces bidaus. » (Froissart, éd. Kervyn, II, 229.) (N. E.) — (6) C'est ce que nous nommons une berceuse. (N. E.) —
(7) A peut-être le sens de poignard, comme faussart. On le trouve dans Partonopex, vers 5127 : i< Et com à sele à hareor
le hausart et l'escorcheor. » (N. E.) — (S) Pour la rime il faudrait bersés. (n. e.)
II. 59
BE
— 466
BE
Bertain (1). Nom propre, le même que Berthe,
femme du comte Gérard. (Ger. deRouss. sis. p. 17G.)
Bertaiidé,;jflj7/c. Tondu. Cemolsis'nirioitquel-
quefois tondu inégalement. (Voy. le Dictionnaire de
Colgrave, au mot liertaudé, et le Dicl. Etym. de
Me'nage, au mot Baiiondii.)
Furent les brebis herlolilées,
Et doubles diziénnes levées.
Hist. de France, à la suite du Rom. de Fauvol, iMS. du R. u- 6812, fol. 72.
VARIANTES :
BERTAUDÉ. Colgrave, Dictionnaire.
Bektoldé. Hist. de Fr. à la suite du Rom. de Fauvel,
Bertoudé. Rom. de Flor. MS. de S' Germ. fol. 41.
Bretaudé. Lett. de M""- de Sévigné, T. I, page 103.
B.\RTONDU. Dict. Etym. de Ménage.
Bertaiider, verbe. Tondre irrégulièrement.
(Dicl. de Monet et de Borel, au mot Bcrtauder.)
Oudin l'explique par couper les oreilles et la queue
d"uii ciieval, mais nous ne savons sur quelle auto-
rité. » Le list bevtauder et tondre en crois, puis le
« list monter sur une asnesse à devant derrière, et
« lenoit la couedesa main com frain. » (Contin. de
Guill. de Tyr, Martin. T. V, col. 591.)
V.iRIANTES :
BERTAUDER. Contin. de G. de Tyr, Martine, T. V, col. 591.
Bertouder, Bertourder. Nicot, Borel, Dictionnaire.
Bertouser. Oudin, Ménage, Dict.
Bretauder. Cotgrave, Dictionnaire.
Bertaux, suhst. maso. Roitelet, oiseau. On lit :
tant de petits rois bertaux, dans les Mém. de
Nevers, T. II, p. 41.
Berte, adj. Voici le passage oîi nous trouvons
ce mot :
Arras, Arras, ville de plaist
Et de haine, et de detrait,
Qui soliez estre si nobile
On va disant c'on vous refait ;
Mais, si Dius le bien n'i retrait
Je ni vois qui vous réconcilie :
On i aime trop crois et pile.
Chascuns fu berle en ceste vile
Au point com estoit à la mait.
Jeliann. de l'Escur. à la suile du R. de !•'. MS. du R. n' 6812, fol. 62.
Berlin et Gille. Noms communs de femmes.
J. de Meung, ayant parlé de la négligence des héri-
tiers à rendre ce qu'ils doivent aux morts dont ils
héritent, se plaint des maris qui n"ont pas plus tôt
perdu une femme qu'ils en cherchent une autre :
Pou refont pour leurs femmes les maris, est certain ;
Si tost com Gillt' est mort, veulent avoir Berlin.
3. de Meung, Cod. i33 et 43 t.
Bertoiinoau, siihsl. viasc. Turbot. Espèce de
poisson. Uerlonucau est un luot du patois Normand,
selon le Dicl. Etym. de Ménage. (Voy. Cotgr. Dict.)
Bertran, subst. masc. Nom de singe. — Nom
de cheval.
Selon Oudin, ce mot désignoil une espèce de sin-
ges ; c'est peut-être pour celte raison qu'on lit dans
Montluc : « Marc Antoine mon aisné, Bertrand,
» auquel par chaffre je donnai le nom de Peyiot
« qui est un mol de notre Gascongne, parce que ce
« nom la de Bertrand me deplaisoit. » (Mém. de
Montluc, T. II, p. 537.)
Ce nom propre, dit Ménage, dans son Dict. Etym.
signifie fort, robuste, du mol iJer/, éclatant, illustre,
et Ravi, force.
Le elieval Bertran semble un proverbe :
Miox vault le cheval Bertran
Qui souvent menjue avaine,
Que cil qui fait la crevaine.
Poes. MSS. du Vatican, n* 1522, fol. 153, Rv
Deschausser Bertrand étoitune sorte d'expression
proverbiale qui signifioil boire excessivement,
s'enivrer. (Oudin, Cur. Fr.) « S'appercevent, après
« le soupper, qu'un des nôtres avoit desehaussé
« Bertrand, et qu'on ne s'esloit pas moqué de luy,
« ne lui ayant pas tenu le bec en l'eau. » iBouchet,
Serées, p. 6.)
VARIANTES :
BERTRAN. Poës. MSS. du Vatican, n° 155-2, fol. 153.
Bertrand. Montluc, T. II, p. 537.
Bei'tri, subst. jnusc Noms de lieux. Ce sont les
noms de deux châteaux ou maisons dans l'Auxer-
rois, aux environs de Vermanton. En patois du
pays, un bertri signifie une élévation de terre.
VARIANTES :
BERTRI, Bertreau.
Bcrulistes, snbst. masc. plur. Les PP. de l'O-
ratoire ("2). (Voy. les Caquets de l'Accouchée, p. 17C.)
Beryder, subst. masc. Receveur des tailles.
« Le beryder ou receveur des tailles, ou cela arri-
« vera, est tenu de faire arrester les dites maisons. »
(Nouv. Coût. Gén. T. I, p. GIO.)
Bes (ce dont me). Nous trouvons celle expres-
sion pour signifier : ce dont je me vante, je me
flatte.
Joster sai mielz de lui, c'est ce dont plus me bès.
Parlon. de Blois, MS. de S. Gerni. fol. ni, R* col. ».
Besa, subst. masc. Deux as, bezet. (Voy. le Dit t.
d'Oudin ; Fauchet, des Orig. p. 120, et Pasquicr,
Rech. p. 698.)
VARIANTES :
BESA. Oudin, Dictionnaire.
Besas. Borel, Dictionnaire.
Besael, sî//>s^ masc. Instrument îi deux tran-
chants. Bisagiie est encore le nom d'un outil de
charpentier. (Voy. Rob. Est. et Borel, au mol Bes;
Du Gange, Gloss. latin, au mol Bisacuta, el Fau-
chet, dans ses Orig. livre II. p. VU).) Ce mot a
signifié une hache tranchante des deux côtés. (Voy.
le>. Daniel, Mil. Fr. T. I, p. 411.)
S'a une espée longue et dure,
Et bien molue à sa mesure :
(!) Voir, sur ces formes en am, le tome I", note de la page -468. (N. e.) - (2) Congrégation fondée par le cardinal P.
Berulle, et approuvée en 1613 par le pape Paul V. (n. e.)
BE
467 —
BE
Un autre à son arçon pendue,
D'autre part, une hesague.
Parlon. deBlois, lilS. de S' Gerra. fol. 135, R» col. 2.
Et le princes ne se mouvoit
Que sa bataille, ainsois tenoit
L'espée en la main toute nue,
Et chascuns lance ou hesague.
Macliaul, MS. fol. 228, R" col. 2.
De là, ce même mot a été employé pour signifier
un lioinme double et sans foi. On disoit de Tévêque
de Laon, qui négocioit entre Ciiades, duc de Nor-
mandie, fils du roy Jean, et le roi de Navarre :
« qu'il étoit la besague qui taille par les deux
« bouts. » (Chron. de S' Denis, T. II, fol. 240.)
De là aussi cette expression, tourner de besague,
pour tourner de la tête à la queue :
De coclielet tournant de besague,
nu temps soudain et de tempest de nue,
Se gart ciiascun, et de perilleur jour.
Car de tout ce ne vient fors que dommaige.
Eusl. Desc;i. Pofs. MSS. fol. 314, col 2.
VARIAiNTES :
BES.\EL. Britton, Loix d'Angleterre, fol. 181, R».
Bes.\eul. Ord. des R. de Fr. T. [, p. 593.
Bes.\ieul. Ord. des R. de Fr. T. I, p. 652.
Bes.weul. Chron. S' Denis, T. I, fol. 139.
Besayoul. Quinze .Toyes du mariage, p. 25 et 54.
Besaiex. lieaumanoir, p. 103.
BiSAEL. Ord. des R. de Fr. 1. I, page 588.
Besague, subst fém. Chron. de S' Denis, T. II, fol. 240.
Besaïve, suhsi. fihn. Chr. Fr. MS. de Nangis.
BiSAGUE, subst. féiii. Cotttrave Dictionnaire.
Besagu, suhsl. fém. FabK MSS. du R. n" 7615, T. II, f»212.
Besaguz, sulist. fém. Ibid. T. I, fol. 67, V» col. 2.
Besague, adj. Qui est à deux faces. » A cela
« respondit le bien apprins disciple par une contre
« raison cornue et besague. » (Alector, Roman.)
Besaine, subst. fém. Brebis. Du latin Bidens.
En parlant des droits levés par le duc de Berry,
dans les divers lieux de son domaine, on dit :
« Fenestrelay, qui a deux besaines, une qui a onze
« aigneaux, "un etc. » (La Thaum. Coût, de Berry,
page 332.)
variantf.s :
BESAINE. La Thaumassière, Coût, de Berry, page 332.
Bezaine. Glossaire latin de Du Gange, au mot Berbix.
Bezeine. La Thaumassière, ubi suprà.
Besanne. Ane. Goût. d'Orl. à la suite des G. de Beauv.
Bide. Mot du Gâtinois.
Besan, subst. masc. Sorte de monnoie et peut-
être un poids. On Yû besan, /«/{'«/«m, dansle Gloss.
du P. Labbe. Le talent de serviteur de l'Evangile,
est rendu parlemot besant{l), dansLancelotduLac.
(T. III, fol. 77.) C'étoit une sorte de monnoie d'or
dont le poids et le prix ont varié suivant les lieux
et les temps. (Voy. le Dict. de Borel, et ses ii"' add.
Glossaire du Roman de la Rose.)
Des jongleurs ayant contribué aux plaisirs d'une
fête, sont récompensés :
Auquant de robe, auquant d'argent
Les plus prisiés, les plus vaiUans
Sont bien loez à fins besar.s.
Athis, MS. fol. 15, R'col. ).
Por paresis (2) a mis besans.
Poês. MSS. avant 1300, T. IV. p. 1370.
Les ^esans (3) ont passé dans les armoiries oîi on
les trouve souvent. Ils y sont toujours « d'or ou d'ar-
>■ gent, et si quelque fois on en a fait d'hermine, ou
» de vaii',c'estqueles besans en armoi''ies tiennent
" lieu de metail, et qu'en celte qualité elles doivent
« toujours être mises sur les couleurs. » (Le Labou-
reur, Orig. des Arm. p. 23 et suivant.) Voyez Le
Blanc, sur les Monnoies, p. 157 : On y trouve les
différentes espèces de besans, avec leur poids et
leur valeur. (Voy. aussi Fauchet, de la Langue et
Poésie Franc, p. 165.) Le besan d'or fut fabriqué
sous la première et la seconde race de nos rois.
On n'en voyoit presque plus sous Charles VI.
Ce mot, joint à un verbe de prix, signifioit sou-
vent le peu de cas qu'on faisoit de quelque chose.
J'aim par amours, n'est mie doute.
Une pucelle si estoute
K'ele ne me prist un besant :
S'en ai le cuer triste, et dolant.
Vies des SS. MS. de Sorb. chif. LViii, col. 1.
Fief de bezans est expliqué par fief de boiivec
en deniers, dans le Glossaire sur la Coutume de
Beauvoisis.
Le Glossaire du Roman de la Rose, donne au
besan la signification de poids, dans ces vers :
Les doux furent d'or épuré.
Par dessus le tissu doré.
Qui estoient grans et pesans ;
En chascun avoit deux besans.
Rom. de la Rose, 1094-1097.
VARIANTES :
BESAN. Poës. MSS. avant 1300, T. III, p. 1281.
Besant. Lanc. du Lac, T. III, fol. 77, R» col. 2.
Bezant. Fauch. Lang. et Poës. Fr. p. 164.
Besonds. Du Gange, Gloss. lat. au mot Salus.
BiSANTiN. Oudin, Diot.
Besancé, participe. Chargé de besans. C'est un
terme de blason. « Targe d'o'r bendée d'argent, à
« une bende besancée. » (Fabl. mss. du R. n- 7615,
T. II, fol. 190.)
Besch, subst. masc. Vent d'Afrique. Ce vent est
appelle la bêche, par les Provençaux. (Voy. le Dict.
dOudin, et Rabelais, T. IV, p. 181.)
Besclie (4), subst. fém. Il s'agit de la peine portée
contre celui qui s'est rendu caution d'un voleur. Il
est dit qu'il rendra calallum (la chose volée) et qu'il
payera xx sols pro capile pour la personne du vo-
leur), qu'il donnera iv deniers (U i'c7J(?r(ouceptierou
chepier, c'est-à-dire geôlier), « une maille pour la
» besche, et quarante sols au roy. » (Loix Normandes,
art. IV.)
(1) Le mot se trouve dans la Chanson de Roland (v. 132): « Tant i avrat de 6asan; esmerez. » L'origine est Byzanlius
s. ent. nummus, pièce de Byzance, parce que les empereurs de G. P. firent frapper cette monnaie, (n. e.) — (2) Monnaie
parisis. — (3) Les ôesoîîts qu'on appliquait sur les boucliers étaient des pièces d'or sans marque ; elles indiquaient qu'on
avait fait le voyage de Terre-Sainte, (n. e.> — (4) On trouve l'expression haunii' sur la besche ou sur le pic et sur la pelle,
quand il s'agit du supplice d'une femme ; c'est qu'on ne les pendait pas, niais qu'on les enterrait dans une fosse creusée à
la besche : « L'an de grâce 1383, Marote la Flamenge, Mehalot de Gisors... furent banies de la terre sur la besche, pour ce-
qu'elles estoient foies de leurs cors. » (Coût, de S" Gmev., ms. fol. 26, R».) (n. e.)
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Besciaulx, subst. masc. phir. Poissons de mer.
Un ancien poêle, en parlant des poissons nuisibles
à la sanlé, dit :
Eschuez ceulx
De mer qui ont besciaulx (1) noms;
Chiens de mer, marsouins, saumons,
Pocs. MSS. d'Eusl. Descliaiups, fol. 485, col. 2.
Bescle (2), subst. Foie. C'est ainsi qu'on a expli-
que ce mot provençal, dans l'IIist. de l'Acad. des
Belles Lettres, an 17'27, Mém. de M. Lancelot,
p. 'ir^G. On le trouve traduit par jeciir, dans le
Gloss. lat. de Du Gange, au mol Kaiendœ. (Voyez
du Tillot, llisl. delà J'este des foux, p. 4'J.)
Bcscocer (se), verbe. Se méprendre. Froissart
ayant fait l'énumération de ses bienfaiteurs, se
reprend ainsi :
Haro que fai-je? me bescoce (3) ;
J'ai oublié le roy d'E.scoce.
Pois. MSS. de Froissart, p. 343.
Bescoiiffe, subst. fém. Le sens de ce mot est
obscur. Peut-être faudroit-il lire rescousse, dans
les vers suivans :
Dont sont si compaignon sailli
Quant ils cirent la bescouffe,
Et le sas à sa main escousse
De quoi il tenoit le fer chaut
Aval le rue.
Fabl. MSS. du R. n" 7-218, fol. 278, V col. 1.
Beseau, partie. Voyant. Ce mot a cette signifi-
cation dans le Patois de Cahors.-(Voy. le Dict. de
Borel, au mot Glouper.)
Beseole, subst. (Voy. Aiot.)
Besiadonien, adv. Mignardement. Ce mot est
languedocien. (Voy. le Dict de Borel, aumotBesmL)
Il se récrie sur le charme et la délicatesse de cette
expression et cite ce vers :
Petits rieux dont l'argen besiadonien gourrine.
C'est-h-dire, petit ruisseau dont l'eau argentine
murmure mignardement.
Besiadure, sul)st. fém. Mignardise. On lit dans
le Dict. de Borel, au mot Besiat :
La besiadure de nostre alge.
C'est-à-dire la mignardise de notre siècle.
Besiale (4), adj. Commun, conligu. Le champ
besiale, ou besialle, étoit une terre ou lande com-
mune à plusieurs. (Laurière, Glossaire du Droit
Français.) On explique aussi cette expression par
champs contigus, du mot beser, baiser, toucher.
(Voy. le Coût. Gén. T. II, p. 081.)
VARIANTES :
BESIALE, Besialle. Laurière, Gloss. du Dr. Fr.
Besicles, subst. fém. plur. Lunettes à deux
verres. « Besicles que nous appelions autrement
" lunettes.... les anciens les appellerent bisoculi,
« doubles yeux, par le mot abrégé de besicles (.5). »
(Pasquier, Recher. p. G98.) « Gens qui portent
•< lunettes, ou bericles. » (S' Jul. Mesl. llist. p. 358.)
VARIANTES :
BESICLES. Dict. de Borel, Nicot et Monet.
liEcvcLES. Epith. de la Porte.
Bericles. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. .388, col. i.
Besygles. Dict. de Nicot.
Bezicles. Babelais.
Besiclier, subst. masc. Faiseur de besicles.
Lunettier, faiseur de lunettes. (Voy. les Dict. d'Oud.
et de Cotgrave.)
VARIANTES :
BESICLIER, Besyclier...
Besiers (G), subst. masc. plur. Sorte de plante.
(Voy. les Contes d'Eutrapel, p. 212.)
Besil, subst masc. Massacre, carnage. Du
Gange, dans son Gloss. lat. au mot Besilium, dit
qu'il est difficile d'assigner la véritable signification
de ce mot. Il conjecture qu'il pounoitôtrele même
que bersel, qui signifie torture. Cependant, dans les
passages cités par cet auteur, il semble que besil
signifie carnage ou massacre (7) ; et c'est ainsi qu'il
faut l'entendre dans les vers suivans, d'autant
mieux qu'on verra ci-après besiller, pour massa-
crer, égorger.
De femmes fait si grant hesil :
Moult par y ot nez perilliés,
Et meschines a dueil noies.
Rom. de Brut, MS. fol. 47.
Oncques sy faite occision,
Ne si laide destruction.
Ne tel besil, no tel dolour
Ne fut des Saisnes en .i. jour
ibid. fol. "0, R».
Besilier, verbe. Egorger, massacrer, détruire.
Si nous en croyons le Glossaire du P. Martène, ce
mot signifie exiler. Il est pris pour estropier, muti-
ler, dans le Gloss. lat. de Du Gange, aux mots
(1) Il faut lire les ciaulx, pour les ceux, ou plus simplement ces. (n. e.) — (2) Aux fêtes du 1" janvier que présidait
l'évèque des sots, voici, d'après un cérémonial manuscrit de Viviers, écrit en 13G5, quelle était la formule des indulgences :
« De par mossenhor l'evesque, Que Dieus vos donne gran mal al bescle, Avec una plena balasta de pardos E dos das de
raycha de sot lo mento. » (n. e.) — (3) Ce doit être le même verbe que bescochicr, qu'on trouve au Roman de la Rose :
« C'est celé Oa concupiscence) qtii Fauteur fet prendre, Rober, tolir et baréter, et bescochier et mesconter. » Au sens de
tromper, se joint celui d'enlever furtivement: « Que tant comme on torne sa main. Nous a une ame bescochée. » (Miracles
de la Vierge, 1" vol.) (n. e.) — (4) Besal, aujourd'hui beseau, pour les agriculteurs et les meuniers, est un canal, une
rigole. (N. E.) — (5) La racine, comme nous l'avons déjà indiqué, est benjUus. (s. E.) - (6) C'est le poirier sauvage. De nos
jours encore, bczi est un nom générique ajouté au nom du pays d'où sont tirées certaines espèces de poires : besi d'Heri,
besi Chaumontel. L'origine serait le hollandais besie, ancien aUemand bese, gothique basi . qui est l'allemand actuel
Beere. (n. e) — (7) Le sens est fixé par le passage suivant de G. Guiart : « Que pais fut si oiitreement. Qu'il n'i ot besil ni
maçacre. » Ce mot devait avoir encore le sens de capture, car au reg. ,).f l't'J, p. 126, an. 1395, on lit • « Le suppliant veant
que on avoit ostée l'espée de son serouge, et que on lioit et besilloit. » C'est ce qu'indique la forme besistro employée avec
le sens de drisse par G. Guiart (an. 1304): « Cil des galles font besislre, qui es haus mas pas ne messiéent. » Il y a là un
préfixe, plus la racine du mot essilier. (n. e.)
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Besilamentum et Besilium, où il cite ces vers
de Guiart, ms. :
Car huis, et portes en refraignent ;
Besilent (1) tous ceux qu'ils ataignent,
Mais il nous paroit signifier plutôt égorger,
massacrer, détruire. Les passages que nous allons
citer décideront. « Et tanta laior atTairequededens
« trois ans furent si besillé qu'il n'en remest nul
« u pais. » (Contin. de G. de Tyr. Marlène,
T. V, col. 730.)
Las ! je ne puis le deffunct oublier,
Et sont nobles tenuz pour luy prier ;
Car les cheoit, et aymoit chierement,
Ne n'eusl souffert jamais les beziller
A son povoir.
Vig. de Charles vu, T. I, p. 7).
Therouene, le chancelier
Mohier, et autres vrays Angloys,
Si se Guidèrent beziller.
D'ainsi veoir crier les François.
Ibid. p. 150.
Quant il s'en print a souvenir,
Se vint tuer et bezillier,
Afin de justice tenir.
Ibid. p. 210et2H.
vAm.\NTEs :
BESILIER. Martène, Gloss. T. V.
Besiller. Du Gange, Gloss. lat. à Besilamentum.
Beziller. Vig. de Charles VII, T. I, p. 71.
Bezillier. Vigil. de Charles VII, T. I p. 211.
Besin, adj. Voisin. Ce mot est du patois de
Gahors.
VARIANTES :
BESIN, Besis. Dict. de Borel, au mot Glouper.
Beslantlé, adjectif. Echancré. On lit en ce sens
dans Perceforest, Vol. 111, fol. 120 : » Le chevalier
« à l'escu beslandé. »
Besloi, sitbsl. masc. Tort, dommage, injustice.
Ce mot semble s'être formé de bis et de loi, comme
qui diroit loi double, balance à double poids, injus-
tice, tort, et par extension, discorde, division, trou-
ble, désordre, et toute espèce de mal :
Par traison, et par besloi.
Ph. Mouskes, MS. p. 2"9.
Le même poëte, parlant de l'hérésie de Félix et
de son livre apporté au Concile, dit :
Quant li rois oit le besloi,
Pour le mal oster ki ens fu.
Le rouva ardoir en un fu.
Ibid. page 85.
Ce mot se trouve dans plusieurs autres Poètes
jiss. avec la même signification.
1° On disoit à besloi pour à tort, opposé à à droit
qu'on disoit à loi :
Ne burson vin, ge 1" di par bone foi,
Ainz que n'ession josté à droit où à besloi.
Parlon. de Bl. MS. de S. G. fol. 172, col. 1.
2° A tort et à besloi, pour à tort et à travers :
Tu destruiz S'" Eglise à toi-t et à besloi.
Rom. de Rou, MS. p. IM.
3° Mettre à besloi, pour détruire, ruiner :
Nous meternioit A besloi,
Mais ils orientent les chevaliers.
Fabl. MS. du R. n- 7-218. fol. 154, R- col. 2.
VARIANTES :
BESLOI. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. 154, R» col. 2.
Besloy. Ph. Mouskes, MS. p. 85 et 279.
Belloy. Parton. de Blois, MS. de S' Germ.
Besoche (2), subst. fém. Bêche. Outil propre à
remuer la terre :
Tousjours avec la besoche,
La tranche, le piq, le hoyau.
Nous faisons si bien une approche.
Que nous renversons le chasteau.
Poes. d'Amad. Jamio, fol. 226.
Dans Du Gange, Closs. latin, au mot Suffossorvum,
on lit cette citation : « SufTossorium quod bessam
« vocant. »
VARIANTES :
BESOCHE. Dictionnaire d'Oudin.
Besoge. Dictionnaire de Cotgrave.
Besfe. Glossaire latin de Du Cange, au mot Suffossoriunt.
Besce. Vies des SS. de Sorb. chif. Lxi, col. 36.
Bezoche. Fouilloux, Vénerie, fol. 76, R".
Biece. Dictionnaire de Cotgrave.
Besogne, sm/;s;. fém. Ouxrage. — Combat. —
Aventures. — Affaires. — Meubles , bardes. —
Besoin.
Ce mot désignoit en général œuvre, ouvrage, et
nous l'employons encore quelquefois en ce sens.
De là, on s'en est servi pour signifier un combat,
une bataille; comme on dit aujourd'hui une action,
appliquant le mot générique à l'espèce particulière.
« Quand les nouvelles y vindrent de la besongne de
« Poictiers (de la bataille de Poitiers.) » (Froissart,
livre 1, p. 199.)
Ce mot a signifié averitures : « Pas ne vueil
« oublier aucunes des besognes qui arrivèrent en
« Egypte tandis que nous y estions. » (Joinville,
page 77.) '
Ce mot a été employé pour : affaires, causes,
procès (3;. « Venrra toutes les semaines, deux fois ou
« trois, selon ce que plus y aura de besoignes con-
« seillées ramentevoir à ceux de nostre conseil les
« dites besoignes pour déterminer, et mettre à fin,
« selon ce que il garderont que les besoignes le
« requerront. •• (Oidonn. des R. de Fr. T. I, p. 733.)
Besoigne, dans S" Bernard et dansRymer, répond
au mot Xegotium.
Ce mot a eu la signification de meubles, de bardes.
On trouve dans les Essais de Montaigne, T. 1,
p. 423, besognes de nuit, pour bardes de nuit.
Enfin, on a dit quelquefois besoingne pour besoin.
Qui a besoir/ne d'au.
'Pocs. MSS. avant 1300. T. IV, p. 1393.
(l) On trouve dans Froissart hersillier, diminutif de berser, tirer avec une flèche ou un trait d'arbalète : « Ils furent chaciés
et bersiliès tous mors. » (Ed. Kervyn, XI, 248.) (N. E.) — (2) La forme besoche a été faite sur besse, qui a le même radical
que bec. Il en est souvent parlé dans les lettres de rémission transcrites aux registres du Trésor des Chartes. Les
laboureurs et terrassiers se donnaient des coups de besoches, comme aujourd'hui ils se frappent à coups de pioche. Voir
Du Cange. sous besoyium. (n. e.) — (3) Besongne, dans Froissart, a aussi le sens de négociation : « Li roys leur acorda ceste
besongne et fist cesser les enghiens. » (Ed. Kervyn, II, 263.) (N. e.)
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I{emarf,aons les expressions suivanles :
Action de hesoigac [dicte 6Un[ l'action qu'on avoit
en justice contre celui dont on avoit géré les affai-
res à son avantage. « Action de hcsoigne faicte, si
« comme si je fais pour autre absent aucun profit
o en ses besoignes. » (Bouteiller, Somme Rurale
page 157.)
Exercer les besoignes de quelque prince, c'est-
à-dire, le servir, faire ses affaires. (Chron. de
S' Denis, T. Ill, fol. 40.) Macliaut, da.is les vers
suivans, semble faire allusion à un proverbe dont
le sens est (ju'en vain l'on travaille si l'on ne fait
pas son métier ou ce qu'on doit faire :
Mais cilz petitement besoigne
Qui riens ne fait de sa hesokine.
Machaut, lilS. loi. 103, V col :!.
VARIANTES :
BESOGNE. Histoire de la Pucelle d'Orléans, p. 482.
Besoigne. Ord. des R. de Fr. T. I, p. 73.
Besoingne. Ord. des R. de Fr. T. I, p. 74.
Besongne (pour affaire.) Al. Chartier, Hist. de Charles VI.
Beso.nne. Faifeu, page 7.
Besoygne. Rymer, T. I, p. 114.
Besogner, verbe. Travailler. — Agir. — Avoir
besoin.
Ce mot est donné avec le sens de travailler, dans
le Dict. de Borel, le Gloss. des Arrêts d'amour, etc.
Dans cette acception, il a été souvent employé en
un sens obscène.
Besongnier signifie agir, dans ces vers :
Mais belle chose oy testnoignier
Pou parler, et bien hesoiiujider.
Machaiil, MS. fol. 27, V col. 2.
Remarquons l'usage de ce mot pris en ce même
sens, dans les expressions suivantes :
1" Bien leur besongna, c'est-à-dire bien leur en
prit. (Froissart, Vol. 1, p. SO'-i.)
2° Besongner à son entente, c'est-à-dire manquer
l'objet qu'on se propose, manquer son coup. (Arresta
Amor. page 174.)
Besongner signifioit quelquefois avoir besoin.
Ainsi l'on disoit : « Si vous avez à besongner cinq
« ou six cents lances », pour si vous avez besoin
de cinq ou six cents lances. (Froissart, Vol. Il,
page 144.)
VARIANTES :
BESOGNER. Borel, Dictionnaire, 1"' add.
Besoigner. Glossaire des Arrêts d'amour.
Besoingner. Rom. de Rou, MS. p. 137.
Besoinonier. Eust. Ueschamps, Poës. MSS.
Besongner. Glossaire de Marot.
Besoig (1), subst. masc. Résolu. Ce mot, dans
S' Bernard, répond au latin Inopia, Indigentia et
nécessitas. On disoit proverbialement :
1° Besoing fait la vieille trotter. (Perceforest,
Volume m, fol. 61.)
2° .1;;. besoig voit on son ami. (Chron. fr. du
XIII' siècle, MS. fol. 200.)
Le Laboureur déiive le mot besoing du gaulois
soin. (Orig. des Arra. p. 197 et suiv.) On lit buisson.
dans le Roman de Brut, ms. fol. 59, mais il faut lire
besoeing, cemme dans le m. de Bombarde.
VAr.IANÏES :
BESOIG. Ord. des R. de Fr. T. III, page 55.
Besoigne. Fabl. MSS. du R n» 7615, T. II, fol. 151.
Biîsoeing. Roman de Brut, MS. de Bomb.
Besoing. Le Loboureur, Orig. des Arm. page 197.
Buisson. (Lisez Besoeing.')
Busien. Loi.K Norm. art. 38.
Besoigne, s!/&sL rnnsc. Opération. C'est propre-
ment un participe employé comme substantif. Le
besoigne, c'est-à-dire ce qui s'est fait. (Voy. leNouv.
Cout.Gén. T. II, p. 34i.) « Tost après envoyèrent
« une ambassade en Angleterre, devers le Roy
« Edouard, du /;esom(7tt/e' desquels je ne mets icy
« riens pour ce que je n'en sçay rien. » (Monstrelet,
Volume m, fol. 129.)
Besoingne'::^ de loi, se trouve souvent employé
dans la coutume de Binch, pour signifier contrats
ou autres actes judiciaires ou obligatoires. (Voyez
leNouv. Coût. Gén. T. Il, p.210,et"ibid. passim.)
VARIANTES :
BESOIGNE. Nouv. Coût. Gén. T. II, page 344.
Besoignié. Monstrelet, Volume III, f" 129.
Besoignement, subst. masc. Besogne. Ce mot
est pris en ce sens dansle passage suivant: « ouand
« sera besoin de mander pair pour se trouver
« à quelque besoignement. » (Nouv. Coût. Gén.
T. II, p. 48.)
Besoignette, subst. fém. Diminutif de besogne.
(Voy. les bicL d'Oudin, au mot Besoignette, et de
Rob. Estienne, au mot Besongnette.) Il est mis
comme synonyme à bardes, dans Faifeu, p. 72.
VARIANTES :
BESOIGNETTE. Oudin, Dictionnaire.
Besongnette. Robert Estienne, Dict.
Besoigneur, subst. masc. Qui agit. En latin
Negociato'r, dans le Glossaire du P. Labbe. (Voyez
Bouteiller, Somme Rurale, p. 107.)
Besoigneus, adj. Nécessiteux. Qui est dans le
besoin. Voy. les autorités citées dans les variantes.
Besoinnex sui par l'abondance.
Fabl. MS. du R. n- "615, T. I, fol. 13, R- col. 1 .
VARIANTES :
BESOIGNEUS. Ord. des R. de Fr. T. I, page eS, col. 2.
Besoigneux. Glossaire du P. Labbe.
Besoingneus. g. Guiart, MS. fol. 290, V».
Besongneur. Chron. S' Denis, T. I, fol. 148.
Besongneux. Ger. de Roussillon, MS. p. 102.
Besougnolis. Ph. Mouskes, MS. p. 148.
Besoignf.x. Fabl. MS. du R. n« 7615, T. I, fol. 73.
Besoignols. Ce mot, dans S' Bernard, répond
aux mots egens, egenus, indigens et inops.
Le mot besoignols, dans S' Bernard, Serm. Fr.
MSS. p. 56, est pris dans un sens particulier. Il parle
de ceux qui, sans en être dignes, veulent approcbei'
de la communion et les représente sous la ligure
de ceux qui veulent aller trouver Jésus à Bétliléem
nouvellement né. « .lai n'en est mies besoignols,
« k'il ne voillel assi estre receuz en ti. »
(1) On le trouve sous la forme bosuigit dans la Chanson de Roland (v. 306): « Kar de ferir ci jo si grant bosuign. » (n. e.)
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VARIANTES :
B^SOJGNOLS. S' Bei.iard, Serm. Fr. MSS. ppge 31.
Besognols. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. page 132.
Besignols. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. page 137.
Besois.Nomdecanton.Jenesaisquelostlecanlon
de la Bourgogne dont il est. parlé sous le nom de
Castillon en Besois (1); seroit-ce l'Auxols? (Voy.
Perard, Hisl. de Bourg, p. 503, tit de 1262.)
Besoncle, subst. masc. Grand oncle. (Voyez
ï.aurière, Gloss. du Droit Fr.) Oncle ou besoncle;
on lit dans le latin : « Palruum, aut patruum
>' magnum. » (D'Argentré, Coût, de Bret. p. 1927.)
Besongne, adj. Nécessaire. On disoit en ce
sens œuvres hesongnes; c'est-à-dire, actions néces-
saires, devoir, obligation. « La royne envoya à
■' plusieurs bons chevaliers qui n'estoient mye du
« franc pallois de la blanche rose, et retenu à ses
" bons et preux chevaliers, affin que ils fussent
» encore plus preux, plus hardys et plus voulen-
« taires en toutes leurs œuvres heso)ignes, d'eulx
« avant advancer. » (Perceforest, Vol. II, fol. 148.)
On trouve hesoignables en ce sens dans la Règle de
S" Benoit, lat. et fr. et rendu par le mot «(?cessarîa.
VARIANTES :
BESONGNE. Percef. Vol. II, fol. 148.
Besoignable. Règle de S' Benoît, MS. de B. ch. lvi.
Besou, subst. masc. Voie, chemin, roule. Ce
mot est du patois de Cahors. (Voyez le Dict. de
Borel, au mot Glouper.)
Besoynnablement, adv. Nécessairement.
(Voy. Rimer, T. I, p. 114, col. 2, tit. de 1270.)
Besser (se) (2), verbe. Se baisser. — Tomber,
descendre, diminuer.
Ce mot subsiste au premier sens, avec une légère
altération dans l'orthographe.
Arbalestriers de France tendent.
Et ordonnéement se bessent
Vers leur ennemis aler lessent
Quarriaux, etc.
G. Guiart, MS. fol. 255, Rv
Par une extension de cette première acception,
besser a signifié diminuer, tomber, descendre. « Et
« oster la bride a son cheval, et le laisser pestre,
« et reposer les chiens, et bessier la grant chaleur. »
(Chasse de Gast. Phéb. ms. p. 228.)
VARIANTES :
BESSER (se). G. Gahrt, MS. fol. 255, R°.
Bessier. Chssse de Gaston Phébus, MS. p. ^23.
Besses (3), subst. ptur. Pacages, Pâturages. Mot
du patois d'Auvergne et du Limousin. (Voy. Du
Cange, Gloss. lat. au mot Bessœ.)
Bessie, subst. fém. Vessie. On a dit des Alpes :
" Ces montagnes ne sont que petits bouillons, ou
« bessies, en' comparaison des ondes de la mer. »
(L'Amant Ressuscité, p. 16.)
Bessiere (4), subst. fém. Vallée. « Le temps est
« dur et sec. qui fait le bestail traire aux bes-
« sieres, et auxprez. » (Percef. Vol. VI, fol. 102.)
Bessihuets, subst. masc. plur. Ce mot, que
nous ne trouvons que dans le Dict. Fr. Ital. d'Oud.
signifioit peut-être une bêche. Oudin renvoie au
mot Italien benocchi, qu'on ne trouve point dans
les Dict. Italiens.
Bessin, subst. masc. On nomme ainsi un lan-
gage particulier du faubourg de Haut-Pont à S'
Orner. H n'est ni flamand, ni wallon (5). (Pelisson,
Lettres Kistoriq. T. lll, p. 264.)
Besson, adj. Jumeau. — Double. Au premier
sens, ce mot vient de bishomo (6). (Voyez les Dict. de
Nicot, de Monet. de Borel, au mot lies, d'Oudin et
de Ménage.) « Elle fut bessonne, et d'une même
« ventrée, avec une autre qui mourut aussitost née. »
(Brantôme, Dames lUustr. p. 337.)
Deux aignelets bessons.
CI. Marot, p. 90.
De là, le mot besson s'est employé pour signifier
double.
De ton sein blanchissant le petit mont besson.
Berger, de Rémi BeUeau, T. I, fol. Ul.
Cette tresse bessonne,
Tresse dont Cupidon tous ses biens façonne.
G. Durant, à la suite de Bonncf. p. 136.
Besson, subst. masc. Doublet. Terme du jeu
de Trictrac. « Les plus grands bessotis, et accouplez
>. il nommoit fones. « (Rabelais, T. V, p. 42.)
Bestail, subst. masc. Bétail (7). Ce mot, pris dans
un sens générique, signifioit toute sorte d'animaux.
.< Moutons, brebis, et autre bestiaille. » (Ord. des
R. de Fr. T. II, p. 232.) « Les habitans des Iles
« Baléaires envoyèrent à Rome, demander
« secours d'armes pour combattre les connins leur
(1) Ce doit être ChâtiUon en Bazois. Ce petit pays occupe la partie orientale du Nivernais, et a pour localités principales,
le chef-lieu de canton précité, Mont-en-Bazois et Moulins-Angilbert. (n. e.) — (2) La Chanson de Roland emploie les formes
orthographiques baisse et basse; on trouve au xii" siècle be.^se, dans Aliscans, v. 985. (N. e.) — (3) La forme provençale
actuelle est bais.w; c'est un lieu bas et marécageux, couvert de ronces et de broussailles. L'article suivant, bessières, a le
même sens et la même racine bas (voir Du Cange sou> baissa). (N. E.) — (4) On ht au registre JJ 187, p. 291, an. 1457 :•
1 Procès se meut.... pour raison du droit, posse'ssion et saisine de certain bois ou bcssiei-c, ou des usages d'icellui. (n. e.)
— (5) Serait-ce le patois normand du Bessin, des environs de Bayeux? (N. E.) — (6) Le mot se rencontre au xiii« siècle,
dans H livre de jostice et de plait, p. p. Rappeti (Paris, in-4", 1850), p. 55 : « Ausi sera, se Johana enfanloit deus enfans et
emprés deus beçons. » Le suffixe on. comme le mot complet, est d'origine romane. Rapporter besson à bishomo, qui
d'ailleurs ferait contre-sens, et non à bis, c'est méconnaître la force de création propre au français. On rencontre encore le
nom propre Bisson. (n. e.) — (7> Lapin, du latin cunicidus, mot espagnol selon les auteurs anciens. Ce fait nous est raconté
par Pline l'ancien, au VHP livre de son histoire naturelle; il le place au temps d'Auguste. L'édition de la Vénerie de du
Fouilloux (L. Favre, Niort, 1864, in-4"), qui reproduit celle de 1635, imprime au fol. 88. "V», bestial. Cette forme se trouve
aussi au t. IV, p. 397 du Froissart (édition Kervyn) ; M. Scheler, auteur du Glossaire (t. XIX), corrige bestail. En Berry,
on écrit encore besïia^ ; bestail vient de bestiale, tandis que bestaille, qu'on rencontre dés le xiii' siècle, vient de beslialia,
comme aumaillu vient de animalia. (N. E.)
BE
472 —
BE
« faisant mortelle guerre, comme aussi à la vérité
« ce petit bestail est d'incroyal)lc fécondité oil il
« s'adonne. » (Fouilloux, Vénerie, fol. 121.) Ce mot
générique s'étoit restreint à ne signifier qu'une
seule espèce; ainsi on disoil bétail lanu, pour dési-
gner les bestes à laine. (Coût. Cén. T. II, p. 474.)
VAKIANTKS :
BEST.ML. Cont. Gén. T. II, p. 474.
Bestauxe. Duchesne, Gén. de Guines, p. 283, lit. de 1241.
Besteau. Cotgrave, Dict.
Bestiail. Perceforest.
Bestial. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. p. 263.
BE.STIAILLE, suhst. fém. Ord. des R. de Fr. T. II, p. 232.
Bestance, sidist. fém. Dispute, débat, différent,
division. — Inquiétude.
Au premier sens, ce mot csl formé de bis (1) et de
tancer, selon le Gloss. de Villehardouin, au mot
Bestance. « Le lendemain s'assemblèrent à
« Parlement bestance i ot assez d'unes ctioses
« et d'autres. » (Villehardouin, p. 56.)
Il n'i ot noise ne licsleuc.
Phil. Mouskes, MS. p. 754.
Le même poète semble avoir employé hestenc
pour inquiétude, dans le passage suivant :
Par cremance, et par beslenc
I fist fermer castiel fiamenc.
Ph. Mouskes, MS. p. 851.
VARIANTES :
BESTANCE. Gloss. de Villehardouin.
Bestens, suhut. masc. Hist. des 3 Maries, MS. p. 475.
Besteng, suhst. masc. Ph. Mouskes, MS. p. 516, passim.
Bestent, subst. masc. Froissart, Poës. MSS. p. 296, col. 1.
Bestats (2), adj. au masc. plnr. Sot, inepte. Des
Perriers, dans ses contes, l'a employé en ce sens
lorsqu'il a dit en parlant des petits d'une pie: «■ Ils
« faisoient les bestats et vouloient toujours retour-
« ner au nid, pensans que la mère les deut toujours
« nourrir ù la bêchée. » (Contes de Des Perriers,
T. II, p. ia2.)
Beste, subst. fém. Bête. Ce mot, au pluriel,
répond dans les Serm. Fr. mss. de S' Bernard, au
latin animalia eljumenta.
Assez font paier de musages, et d'analoignes,
A ces poures bestes lointaines.
Fabl. MSS. du R. n- 7615, T. I, fol. 101, V col. 1.
Après avoir observé que les animaux à quatre
pieds sont, par le mot de bestes, distingués des
oiseaux dans ces vers:
Tout ainsi le redoublent, bestes le lyon,
Et com font tout oiseaux le fort alerion.
Ger. de Roussillon, MS. p. 127.
Nous remarquerons les expressions anciennes
dans l('S(iiiellts ce mot éloit employé. On disoit :
1° [lestes blanclies pour brebis, moutons, chèvres.
« Les bestes blanches se peuvent mener si loin que
» l'on veut, pourveu qu'elles retournent de jour au
« giste en leur linage. .< (Coût. Gén. T. I, p. 442.)
2° liesles rouges, pour bœufs ou vaches. « N'est
<■ permis aux habilans, ou porteriens de la terre
« et seigneurie de Gorze, d'avoir, et tenir tioupeau
« à part, soit de bestes rouges, ou blanches, sur les
« bans des lieux où ils font leur résidence, ny les
« lieux circonvoisins. » (Xouv. Coût. Gén. T. II,
p. 1095.) On appelle aussi bestes rouges les bêles
fauves. (Voyez Modus et Racio, ms. fol. 30.)
3° Bestes royal, pour bestes dont la chasse est
réservée au roi.
Quant il avoit déserté
Aucune grand beste royal,
Adonc querroit le desloial
Contrée pour autre destruire.
Poes. MSS. d'Eust. Desch. fol. 483, col. 1.
4" Bestes (le nuict, pour oiseaux nocturnes.
Budé en compte de dix espèces : « Le grand duc,
« le moyen duc, ou hibou cornu, hibou sans cor-
« nés, ou chahuant, chevêche, huette, l'effraye ou
« fresaye, corbeau de nuict, faucon de nuict ou
« chaleis, et souris chauve. » (Budé, des Oiseaux,
fol. 119.)
5" Bestes doutées et bestes puantes, distinguées
les unes des autres. « Les bêtes douces, sonllecerî,
« la biche, le daim, le chevreuil et le lièvre. »
(Modus et Racio, fol. 46.) « Or, nous dirons des
« autres cinq bestes qui sont dictes puantes
« parceque la senteur qui vient d'eulx est forte et
« puante. » (Modus et Racio, fol. -18.)
6' Bestes noms. Sous cette dénomination, on
comprenoit les animaux tel que le sanglier. « L'a-
« prentis demande comment on doit parler de
« vennerie, du sanglier, et des bestesqui sontdicles
« noires. »(Modus et Racio, fol. 23, Rv)
7" Beste mî((? (3), opposée à besie féroce. « Lors s'en
« vint le cerf luy, et va ferir son lyon sur le doz
« du pied dexlre quand le lyon se sentit ainsy
« frappé de une beste mue, il le print à grand des-
« daing, et lance après le cerf de tant' qu'il peut
« courir, qui s'en alloit parmy la forest bruyant
« comme fouldre. •■ (Perceforest, Vol. II, fol. 80.)
« Bestes mues signifioit aussi les brutes, et les
« bétes en général, distinguées des bêtes humaines
« qui sont les hommes. » (Modus et Racio, p. 17.)
8" Bestes enlieudées, pour bêtes retenues par les
liens qu'elles ont aux pieds de devant. iLaurière,
Gloss. du Droit Français.)
9° Bestes liumaincs. Ce senties hommes. «Quand
« Dieu fist et ordonna le monde, il créa deux ma-
a nières de bestes, les unes qu'il appelia bestes
« humaines, et les autres furent appellées mues. ■>
(Modus et Racio, sis. fol. 33.)
10° Bestes de fer ou bestiaux de fer, étoient ceux
qu'un fermier tenoit ù bail, ou à cheptel, ainsi
appelées parce qu'elles ne meurent pas pour le
seigneur. (Voy. Laurière, Glossaire du Droit Fr.
au mot CJiaptèl, et Beaumanoir, eh. 68, p. 346.)
11° Beste ferrée, pour cheval, ou toute bête que
(1) Non pas bis, mais le préfixe péjoratif bes. (n. e.) — (2) Nsus avons encore la forme bêla ; bétail se prononce ainsi dans
la banlieue de Paris, (n. e.) — (è) On appelle mue du cerf, le bois qu'il a mis bas. Dans le passage suivant, mue parait venir
de muta, muette : « Eulx mors, leur a esté denyée sépulture, mesmement en terre prophane; mais ont esté geltez sur terre
pour eslre mengiez par les chiens, oiseaulx et bestes mues. » (Lettre de Ch. VI, 1413, d'après le mem. H. de la Ch. des
Comptes de Paris, fol. 18, Y».) (n. e.)
BE
— 473 -
BE
l'on ferre. « Leshabitans des dits lieux, et paroisses
« ne peuvent nourrir bestes aux pâturages com-
« muns, si ce n'estlebestail qu'ils peuventhiverner,
•> et nourrir de leurs foins, et pailles escrois-
« saiis en la dite paroisse, et d'avantage une
« bcste ferrée, pourceaux, et chèvres nécessaires
« pour les alimenter. » (Coût. Gén. T. Il, p. 484.)
12* Au bois qui aura bonne beste. Façon de parler
empruntée de la cbasse; c'est-à-dire aller au com-
bat bien accompagné. On lit dans le passage sui-
vant, parlant d'un défi d'armes : « La seule inimitié
« de nous deux, avec la justice, ou injustice de l'un
« et de l'autre, sera juge et tesmoing de ce qui
« aviendra entre noas deux, ou plus grand nombre,
« s'il désire estre plus accompagné, soit de
« Mondragor son cousin, ou autre, si bon luy
« semble, et lors au bois qui aura bonne beste. »
(D. Flores de Grèce, fol. 38.)
i?>° Ouvrés a bestes, étoient des étoffes sur les-
quelles il y avoit des bêles brodées ou appliquées :
Entendre fait sur le rivaige
Un drap qui fu faiz à Quartaige (1),
Ovre: à bestes tôt faitiz,
Blanch. MS. de S. G. fol. 190, R' col. 3.
Ceinture
A bestes d'or brodées.
Parlonopex de Dlois, MS. de S. C.erm.
14° Bestes mortes (2). Espèce de jeu compris dans
le dénombrement des jeux de Gargantua, (llabelais,
T. 1, p. 152.)
l'y Faire la beste, pris dans un sens obscène.
(Voyez Ménage, Remarques sur la langue, p. 109.)
iO° Fonc de bestes, se dit d'une certaine quantité
de bètes qui exige les soins d'un garde ou d'un
berger. Il ne se dit proprement que des brebis et
des pourceaux. (Voyez Beaumanoir, p, 72.)
17° Beste parist, paroîl signifier une bête pleine
qui porte des petits : - Qui gamaflre beste parist et
» plainct en est, doit cinq sols d'amande et rand le
« doaimage sans loyer. « (Ane. Coût. d'Orléans , à
la suite des Coût, de Beauvoisis, p. 408.) C'est-à-
dire qui maltraite une bête pleine, si l'on en rend
plainte eu justice, l'amende sera de cinq sols, etc.
18° Vostre cheval n'estqu'wie beste. GeHefaron de
parler vulgaire, qui est encore en usage (3), semble
venir d'un conte rapporté dans la huitième iNuit de
Straparolo, T. II, p. 145.
19° Snnz de besle, paroi t être pris pour bêtise,
action de bête, où il n'y a pas plus de sens que dans
une bête :
Car c'est chose trop deshonneste,
Laide, vilainne et sanz de bcste;
Ne telle chose à roy n'appartient.
Machaut, WS..fGl, 2^7, R' col. 2.
VARIAiNTES :
BESTE. Orth. subsist.
IJEESTE. S' Bernard, Serm. Fr. MSS. p. C.
Uestes, plur. Fahl. MS. du R. n« 761.5, T. I. fol. 101, V».
Bestelette, subst. fém. Diminutif de bête.
Cailles , pleuviers, et tant de beslelettes
Pour vous servir, quant besoing en avez.
Vigil. de Charles VU, T. H, p. 189.
VARIANTES :
BESTELETTE. Vigil. de Charles VIT, T. II, p. 189.
Bestelete. Chasse de Gaston Phébus, MS. p. 41.
Betelete. Monet, Dict.
BiESTEL at Bestelete. Athls, MS. fol. 44, R» col. 1 et 2.
Bester, verbe. Faire la bête. (Dict. d'Oudin.)
Besterie, subst. fém. Bêtise.
S'on voit nostre besterie
Nous serons naocquez de chacun.
Les Marp. de la Marg. fol. 347.
VARIANTES :
BESTERIE. Bict. de Cotgrave.
Bestesce. Chasse de Gaston Phébus, MS. p. 2il.
Besteste, subst. fém. Bête. « Se aucune, ou
« plusieurs de leurs bestes, y estoit trouvée paissant
« devant la cinquième fueille, et sans garde, il
« paieront à Nous, ou à ceulx qui cause auront de
« Nous, douze deniers d'amende pour la besle, et
« se beste y est trouvé et a garde faite, il paieront
« pour la ft^'s/fsie douze deniers. .< (Ord. des Rois
de France, T. V, p. 514.)
Bestiaire (4), subst. masç. Fable ou moralité.
Faisant allusion aux bêtes, Froissart a dit :
Ce petit plaint, et grand assez,
Ançois que je fuisse lassés,
Assis dedens mon vestiaire
Figure sur le bestiaire.
Poês. MSS. de Froissart, p. 206.
Bestial, adj. Bête, sot, inepte. — Brutal.
J. de Meung disoit, dans le premier sens:
Si l'homme est si bestiaulx.
Qu'il n'ait de nul mestier science ;
Se n'en désire congnoissance.
Mendicité, se peut traire
Sanz qu'il saiche aucun mestier faire
Dont il puisse sans truandie
« Jamais homme aymant sa gorge, et son ventre,
« ne fist bell'œuvre; aussi sont-ils de gens de peu,
« elbestials. » (Sagesse de Charron, p. OU.) /Jes^/o/e
est un mot languedocien. (Voyez des vers cités dans
le Dict. de Borêl, au mot Marelle.)
Bestial est mis pour brutal, dans ce passage de
Straparole : « Tourmenté de l'ennuieuse et ftesfia^e
« tempesle. » (Nuits de Straparole, p. 189.)
VARIANTES :
BESTIAL. Sagesse de Charron, p. 611.
Bestiaulx. Roman de la Rose, cité ci-dessus.
Bestiole. Dict. de Borel, au mot Marelle.
Bestion. Moyen de parvenir, p. 200.
Bestialement, adv. Bêtement, brutalement.
(Voyez le Dict. d'Oudin.)
(1) Carthage. - (2) Il est encore un jeu de cartes qui demande quatre ou cinq partners, et qu'on appelle la beste. (N. E.)
- (3) Dans le Crispin médecin d'Hauteroche (1736, 2 vol. in-12), o.i lit encore: « .le lui ferais bien voir que son cheval ne
serait qu'une bêle. » (l, 2.) Le sens est se tromper lourdement. (N. E.) — (4) On appelait bestiaire, dans l histoire littéraire
du moyen-âge, un recueil de fables et de morahtés sur les bétes ; c'était de tort longs potimes en vers de huit pieds,
comme le ms. (anc. 6838 B.) de la B. N. écrit au xiv siècle, (n. e.)
II 00
BE
474 —
BE
Bestialité, subst. masc. Action de bêle. (Voyez
le Dict. tic Monct.)
C'est vivre en bestialité,
Qui n'a quelque félicité,
Fors de pleisus mondains ensuyvre.
Le Dl9<ion des Faulccs Amours, p. 22C,
Bestiam, subst. masc. Bêle. « Va bestiam, mon
« goviai, scais-lu point que l'Eglise ne peul faillir. »
(Moyen de parvenir, p. 83.)
Bestiaux, subst. masc. plur. Pâtres, hommes,
bestiaux. Les gens qui mènent paitre les bestiaux.
(Voy. la Chron. de S' Denis, T. I, fol. 252.) On lit
dansSuger: « Pecorales homines. »
Bestion, s«^s^ î?;asc. Petite bête. On lit dans
Brantôme: « Tout ouvré d'or en personnages
» et petits bcstions (1). » (Brant. Cap. fr.T. I, p. 96.)
Bestors, adj. Oblique, tortueux. (Voy. Du Gange,
Glossaire latin i au mot liestulinus, et le Dict. de
Borel, au mot Bestors,) où licite ce vers d'Ovide,
Ms. dans lequel il est question d'un labyrinthe :
Tant fit les chemins bestors.
Bcstoiirné (2), participe. Changé, bouleversé.
— Henversé, tourné à l'envers. — Troublé. —
Travesti, déguisé.
Ces dillérentes acceptions ont entr' elles beaucoup
d'analogie, et dérivent toutes évidemment de la
première. Ainsi , nous nous contenterons d'en
rapporter des exemples.
Avec la signification de changé, bouleversé, on
a dit:
Li siècles est si bestornez,
Que je sui trop pis atornez,
Por le siècle qui se bestorne.
Fabl. MS. du R. n- 7218, fol. 197, F.' col. 1.
Bien est telz gens dénaturée,
Qui contre son chef est meslée ;
Nature est en eux beslournée.
Geofroy de Paris, à la suite du Rom. de Fauvcl, fol. 53.
Un ancien poëte, dans une complainte contre les
mcdisans, dit :
.Tugement m'ont besiort,
Tort a amour, se par amour n'ay grâce.
Poés. MSS. d'Eust. Desch. fol. 153, col. i.
De là, ce mot signifioit renversé, tourné à
l'envers :
Li G. est lettre bestornée,
Si li G. ne fu bestornez.
En guise de P. fust tornez.
Fabl. MS. duR. n- 7218, fol. 127, P.- col. 1.
C'est en ce sens que, pour exprimer le désordre
que la peur met dans tous nos sens, l'on a dit au
figuré :
Au feu s'en vint toz bestorne-:.
Fabl. lus. du R. n- 721S, fol. 117, V col. 2.
Enfin on trouve reynard beslournc, pour renard
déguisé, travesti. (Fabl. ms. du R. n° 7015, T. I,
fol. 101, R"col. 1.)
VARIANTES :
BESTOURNÉ. Geofroy de Pans, fol. 53.
Bestornk. Fabl. MS. du R. n» 7218, fol. ICI, R» col. 1.
Bestort. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 153, col. 4.
Bestourneis, subst. Revers, côté d'une chose
opposé à celui qui se présente d'abord ou qu'on
regarde. J. de Meung fait ainsi la description des
olijets (lue la lune présente à nos yeux dans
quelqu'une des portions de son disque :
Et la part de la lune obscure
Nous représente la figure
D'une très merveilleuse beste ;
C'est d'ung serpent qui tient sa teste
Vers occident ades encline;
Vers orient sa queue fine.
Sur son dos porte ung arbre estant,
Ses rains (3) vers orient portant ;
Mais en estendant les bestourne
Et sur ces bestourneis séjourne,
Ung homs sur les bras apuyez,
Qui vers occident a ruez
Ses piedz, ses cuisses ambedeux,
Comme il appert au semblant d'eulx.
Rom. de la Rose, vers 177.-4-17767.
Bestourneys, dans ces vers, est mal expliqué par
mauvais plis dans le Gloss. du Roman de la Rose.
v..\Ri.\xTE :
Bestourneys. Glossaire du Roman de la Rose.
Bestourner, verbe. Bouleverser. — Changer,
déguiser. — Détourner, faire prendre un autre cours.
On a dit dans le premier sens :
Moût va li siècles bestournant,
Car che derrière va devant ,
Et che devant si va derrière.
Vers anciens cités par Duchcsne, Annot. sur Al. Cbart. p. 855.
Machaut emploie bestourner et destourner comme
estant à peu près synonymes dans ces vers :
Cela du tout bestourner
Fait ton vouloir, et destourner.
Machaut, JIS. fol 21, R" col. 2.
Par une extension de cette acception, on disoit
bestourner la vérité , pour la déguiser : » Les
« advocats vendent, et beslournent vérité. » (Le
Chevalier de la Tour, Instruct. à ses filles, fol. 37.)
De là, bestourner l'écriture s'est mis pour en forcer
le sens :
Il tornciit, et bestornent,
Les droiz, et l'escripture,
Et coulourent les fous,
Et leur donnent painture.
Fabl. MS. du R. n- 7615, T. II, fol. 143, R- col. ».
Enfin , nous trouvons ce mot employé pour
détourner, faire changer le cours d'une rivière :
Après vint le flo de la mer
Qui la rivière a bestournée
Le cours, etc.
G. Cuiart, MS. fol. 313, V.
VARIANTES :
BESTOURNER. Glossaire du Roman de la Rose.
IlESTONNER, BESTORNER, DETOURNER.
Bosnehoi", verbe. Le sens de ce mot nous paroit
difficile à déterminer dans le passage suivant. Peut-
(I) Comparez ce passage des Emaux de Laborde, p. 225 (xiv= siècle): « Un cordon de chapeau, fait en façon de
triomphe, où sont représentées phisieurs figures de personnages et besiiu/is. » (n. e.) — (2) L'ancienne égli-e S'-I!enoit, da
Paris, porta d'abord le nom de Bestournée, parce que le grand autel regardait encore, en 125J, l'Occident ; elle prit le
nom de Bien tournée quand il eut été transporté à l'Orient. (N. E.) — (3) Rameaux.
BE
475 —
BE
être esl-il mis pour reculer, peut-être aussi
signifie-t-il frapper à faux, manquer son coup :
Li chapples commence hydeus,
Car cil des fronz pas ne bcsuchcnt (I).
G. Guiart , MS. fol. 238, V°.
Besuqueix (2), verbe. S'amuser à des bagatelles.
Mot du patois languedocien. (Voyez Dict. de Borel,
au mot Ih'suqiie.)
Betas, siibst. 7nasc. Terme de marine.
Dont veissiés ancres lever,
Estrans traire, hobens fermer,
Mariniers saillir par ces nez,
Desharnechier voiles et trez ;
Les uns s'efforcent au vuindas (3),
Ly autre à lof et au belas.
Rom. de Brut, MS. fol. 85.
Betaiimis, subst. inasc. La pierre de foudre.
(Voy. le Lapidaire, à la suite de la traduction de
Vegue, par J. de ^Ieung, ms. du H. ir 79il, fol. IIG.)
Bete, subst. fém. Poirée. — Capuchon.
Dans le premier sens, c'est un mot normand et
angevin qui subsiste encore dans ces provinces, où
l'on nomme bette l'herbe potagère que nous appe-
lons poirée. Le passage suivant, dans lequel on
trouve porrée qui est iine autre herbe potagère que
nous nommons porrcan ou poireau (4), du latin
porrus, confirme notre explication :
Les chois, la bette, la porée.
Poé3. MSS. d'Eust. Desch. fol. 514, col. 1.
Bete, dans le patois de Beauvais, signifie un
capuchon noir dont se couvrent ceux qui vont aux
enterremens. (Voyez Du Gange, Glossaire latin, au
mot Beta (5).)
Saug bete (6), se disoit pour sang caillé : « Quand
« ce veiioit sur la garison , ils jettoient grant
« foison de sanc beté par la bouche et par le nez, et
" pardessous, qui moult les ébahissoif, et neant-
« moins personne n'en mouroit. » (Journ. de Paris,
sous Charles VI et VH, p.21.)
vAni.\NTEs :
HETE. Dict. de Monet, d'Oudin et de Colgrave.
Bette. Eust. Desch. Poës. MSS. fol. 514.
Betée, adj. au fém. Mer belée. Peut-être mer
Baltique (7) :
Dusqn'en la mer betée.
Poês. MSS. avant 1300, T. UI, p. 1028.
Sire, dist li valés, jusqu'à la mer salée
N'a nul plus biau serjans, ne jusqu'en la belêe.
Fabl. MSS. du R. n" ■J218, fol. 348, R' col. 2.
Betelole, subst. fém. Sorte d'herbe. C'est
l'herbe nommée bardane en françois, et en latin
personata. (Voyez le Dict. de Borel, 2" add.)
Beter. Il est dit en parlant des exercices des
jeunes gens pour leur plaisir :
Cil damisel vont escremir.
Traire, lancier, corre, saillir,
Et font beter ors et lions
Et menus veatres et bracons
Ces vers comoatre et escumer,
Ces chevax corre et raviner.
Alhis, MS. fol. 56, V' col. 2.
On pourroit s'en tenir l'i la leçon de beter, qui
signifieroit que l'on faisoil combattre des ours et
des lions. Le reste s'entendoit des petits vautours (8),
c'est-à-dire épervierou autre petit oiseau ù qui l'on
faisoit voler le brahon; enfin ils combattoient le
verrat ou sanglier écumant, et faisoient des courses
de chevaux.
Betez et Betls (9) sont expliqués par hébété,
dans le Glossaire du Roman de la Rose :
Ung ours, quant il est bien betez,
N'est si betif, ne si balez
Que serez, si vous y alez.
Rom. de la Rose, vers 10G19-10G21.
Béton, subst. masc. Lait caillé. (Voy. le Dict de
Monet, au mot Béton.) On lit dans les Contes de
Cholières, fol. 204. « Betton, c'est-à-dire premier
« laict d'une accouchée qui se fait dur et troué
« comme une éponge. »
VARIANTES :
BETON. Dict. de Monet.
Betton. Contes de Cholières.
Bétonne, subst. masc. fém. Betoine. Sorte de
plante. (Voy. les Dict. de JN'icot et de Cotgrave.)
De la soussie et dou bétonne (10).
Poes. MSS. de Froissart, p. 105.
VARIANTES :
BETONNE. Dict. de Nicot.
Betosne. Dict. de Cotgrave.
Betresche (11), subst. fém. Brèohe. Nous som-
mes d'autant plus porté à croire que c'est le sens de
ce mot, dans le passage que nous citons, qu'on lit
bi'eche plus bas :
Dau fossé de la betresche,
Venus s'en ist, plus droit que flèche,
(1) Ne s'amusent pas à des niaiseries. (N. E.) — (2) L'ancien provençal avait 6e:(tcor,- voir Raynouard, lexiaue Roman, (n. e.)
— (3) L'Anglais dit encore : to wind, hisser ; c'est le guindeau. (N. E ) — (4) Le pnrreau (allium cyclum) n'est pas la poirée
(beta cyciti): les feuilles du premier ressemblent au.x pousses des oignons; celles delà seconde ressemblent aux feuilles
de la betterave, (n. e.) — (5) On trouve cette forme au Cartulaire de S'-Martin-des-Champs ; l'origine est ^aixrj, qu'on
trouve dans les glossaires grecs. (N. E.) — (6) Le mot a ce sens dés le xii= siècle, dans la bataille d'A'eschans : « Desoz
l'auberc h esl le sanc betez » (v. 715) ; et au v. 5413 : « Del sanc des cors est la terre betée. » Il faut rapprocher de ces
exemples l'article betée. — (7) La mer betée, c'est la mer gelée ; « 11 voient l'eve felenesse, Et tant périlleuse ei parfonde. Qu'il
n'est riens nule en tôt le monde, S'ele i cheoit, ne fust aiée, Aussi com en la mer betée (v. 3009 de la Charrette, xiii' siècle). »
Béton, qui vient ensuite, est un dérivé de ce verlie beter, dont la suite des sens est coaguler, cailler, geler; Diez le fait
venir de l'allemand beizen, proprement mettre un mors, mais par dérivation, coaguler à l'aide d'acides, ^w. E.) — (8) Les
viautres sont des chiens ; il ne faut pas lire brahon, mais bracons, petits braques. (N. E.) — (9) Betez est le participe passé
du verbe beter, qui vient ensuite, et signifie museler, mettre un mors : « On fit as noces beter ors Et vers (verrats) et à
chiens et à viautres. » (Roman de l'Escouffle.) L'étymologie est l'allemand beizen, cité à la note précédente, pris dans son
sens primitif, (n. e.) — (10) Au xiii" siècle, on trouve ; « Rue, veloine o termenline (térébenthine). » (Ms. S' Jean.) L'origine
est Vetlones, peuple de la Lusitanie. (N. E.) — (11; C'est une variante de breièche, sorte de tourelle en bois, crénelée, placée
devant les villes pour les attaquer, au-dessus du portail d'un château pour le défendre, enfin sur les édifices civils pour
les orner comme un balcon, (n. e.)
BE
— 476
BE
A l'uis derrière de la bourjoise
Oui la l'eslendoit com cortoise:
Ele ouvre luis, el il s'i boute.
Fnbl. MSS. du. R. n- TiUS, T. II, fol. 127, V col. 2.
Bette, sitbst. fém. Boisson. «Je ne peulx entrer
« en bette % c'est- iVdire, je ne puis me mettre en
train deljoire. (Hnbelais, T. I, p. 21.)Cemotsubsiste
encore en ce sens, dans plusieurs cantons de la
Normandie.
Betiin f I),sHfts^ niasc. (Glossaire du P. r^abbe.) Ce
mot semble employé pour immondices dans l'Hist.
du vicomte de Turenne, par Ramsays, livre III,
page '215.
Betunniere, sitbst. fém. Fondrière. « Mais
« pour ce (|ue aucunes foiz on ne puet mis chevau-
« cliier menée ou parmontaignes, ou parcroulieres
« ou betiiniiiers, que on appelle graves en Gas-
• coigne. » (Chasse de Gaston Phéblis, >is. p. 220.)
Betuniiiêres, qui n'est qu'une faute d'orthographe,
se corrige par cet autre passage, où on lit :
« Aucunes foys aux raseleiz ou l'en fait le millet,
« aucunes foys aux gravez que l'en appelle en
« France croùllières ou betumieres, aucunes fois
« es marlieres ou la terre qui s'appelle marie yst. »
(Chasse de Gaston Phébus, ms. p. 15.)
VARIAMES :
nETUNNIERE. Chasse de Gaston Phébus, MS. page 15.
liETL'MiÈRE. Chasse de Gaston Phébus, MS. page 2'20.
Beu, sitbst. masc. Dieu. Le mol beu eibieii sont
des altérations de celui de Dieu dans les espèces de
sermens suivans : « Je regnl beu. » (Journal de
Paris, sous Charles VI et VII, p. 19.)
Vais, fait-il, par la geule bieu.
Bien sui homs, chi a beau sjieu.
Falil. MSS. du R-lii- 19S9, fol. 2i0, R- col. 1.
Par le cuer beu, ou sont mes braies?
Fabi. MS. de S. G. fol. 52, V-.
Nous disons aujourd'hui par la corbieu :
Voire, fait- il, par les elz beu.
FM. MS. de S. G. fol. 46. R'.
VARIANTES :
BEU. Journ. de Paris sous Charles VI et VII, page 19.
Bieu. Fabl. MS. du R. n" 7989, fol. 240, R» col. 1.
Beucle, subst. fém. Terme d'armoirie. Peut-être
une boucle. « Esloit la bannière d'argent, à une
« beucle (2) de guettes. (Froissart, Vol. I, p. 243.)
Beuf, subst. masc. Bœuf. On dit boé dans le
Poitou, suivant Le Duchat, sur Rabelais,T. I, p. 179.
Expressions proverbiales :
!• Dieu donne le beuf et non pas la corne. Façon
de parler proverbiale qui signilie que Dieu donne
le bien, el que c'est à l'homme ù travailler pour
l'obtenir. » Jaçoit-ce que la grâce est, el vient de
« nostre Seignor, toutes voies se doit l'om pener, et
« travailler de poursuivre la grâce, lousjours en
« amendement, et à prandre pour meaus ouvrer I
« qùanquel'on peut de bien, car l'on dit en pro-
« verbe : Dieu donne le t>euf et non pas la corne,
« et en l'autre leue : qui s'évertue Dieu ly ayde. »
(Assises de Jérusalem, p. 18ï.)
2° .1 lion beuf meut on la chair. Façon de parler
proverbiale, pour dire que comme un bon beuf a
besoin d'aiguillon, de même un homme brave a
besoin d'être excité pour bien faire : « Quelque soit
« le corps de moy, si a le cueur lousjours servy
« amours dès son enfance. Madame, mon cueur
« ne peut parler. Il est paoure, pourchasser le
« convient; A Iwn beuf meut-on la chair. Premier
« vous demande, el à toutes celles de vostre com-
« paignée des hourdis, tant dames, comme pucel-
" 1ère uug seul don que demander voudray, sauf
« toutes honneurs; si aurez mon cueur asté de
« villannie, paoureté, el me aurez rendu la vie. »
(Perceforest, Vol. VI, fol. 74.)
VARIANTES :
BEUF. Assises de .Jérusalem, p. 1S4.
IJOÉ. Le Dnchat, sur Rabelais, T. I, page 179.
BuEF. Borel, Dictionnaire. — Loix Normandes, art. G.
Bues. Glossaire sur les Coût, de Beauvoisis
BuEZ. Histoire de Fr. à la suite du Roman de Fauv. f» 67.
lîUEUs. Ane. Coût. d'Orléans, à la suite de Beaum. p. ^S.
BuF. Loix Normandes, art. 29.
Beufle, subst. masc. Pièce d'artillerie :
Lors cognoissans que, par artillerie,
Ce non obstant la grande batterie
De leur lézarde, et le beufle de Pize,
Hz ne pourroient usurper seigneurie.
Sur les Francoys, vindrent par tricherie,
Peusans pour vrav qu'ilz l'auroient par tel guise.
Jcaii Marot, p. 18.
Beurate, subst. fém. Une sereine ou baratte ti
battre le beurre. (Voy. le Dict. d'Oudin.)
Beiiroer, subst. Abreuvoir. On trouve le mot
bcuroer dans le Gloss. de l'Hisl. de Paris; c'est une
faute, lisez Vabeuroer.
Beurre, subst. masc. Beurre. Burre, dans
.S' Bernard, répond au latin butyritm. Ce mot
subsiste sous cette orthograplie, mais nous devons
ciler les expressions suivantes :
î" N'estant beurre net C'est-^-dire n'étant pas
sans reproche. « l^e père de la fille qu'on vouloil
<■ lui bailler en mariage, ayant grand envie de s'en
« défaire, n'estant beurre net, pi esche tant le sotard
« qu'il lui fait accroire que sa fille avec qui il le
« vouloil marier, avoil sous mesme couverture,
« et l'une bien près de l'autre, deux bons moulins
" à eau el l'autre à vent. » (Bouchet, Serées, p. 256.)
2" Hcnrre d'amendes, sorte de friandise que l'on
trouve dans l'énumération de différents mets, dans
Rabelais, T. IV, p. 256.
3" Un seiç/neur de beurre combat bien un vassal
d'acier. Façon de parler pour marquer la supério-
rité de la puissance des souverains surdes vassaux.
(Dict. de Cotgrave.)
(1) L'exemple suivant assure le sens : « Qui ont mis aucuns fumiers, terres et autres betuns ez place de la ville de Dijon. »
(Hist. de Bourg., t. III, p. 132, col. 2, an. 1389.) On hésite pour létyraologie entre ()(•(('.■, précédera.nînt cité, elbitam'.n. (N. E .J
— (2) D'ordinaire, on buurdait de gueules ; il faudrait donc lire bourde ou bowle. (n. e.)
BE
477 -
BI
VARIANTES :
BEURRE. Orthographe subsist.
BiEURRE. Eust. Deschamps, Poës. MSS. fol. H6, col. 2.
BuiRE. Eust. Desehamps, Poës. MSS. fol. 232, col. 4.
BuBRE. Nicot, Dict.
Beiise. Ce mot, dont le sens n'est pas clair, a
donné lieu à celle façon de parler : dire beuse, pour
narguer quelqu'un :
Lai moi ester,
Ne fust por ma chose haster,
Poraler au marchié demain,
Tu le comparaisses a par main :
Comparaisses fet anieuse :
Par mon chief je vous en dis beuse.
Fabl. MS. du R. n* 7-218, fol. 49, V* col. 2.
Beusse, subst. Nous ne tenterons pas de déter-
miner la si?,nificalion de ce mot que nous trouvons
dans Rabelais : « Luy mist au doisl médical une
« verge d'or bien belle, en laquelle esloit une cra-
« pauldine de beusse maanifiquement enchâssée. «
(Rabelais, T. III, p. !H et i)'i.)
Beuvasser, verbe. Grenouiller. De l'augmen-
tatif italien bevazzare, boire à s'enivrer. (Voyez les
Dict. de Nicot et Oudin.)
VARIAMES :
BEaVASSER. Oudin, Dict.
Beuvailler. Nicot, Oudin, Dict.
Beuvette, sîibsf. fém. Buvette. — L'action de
boire. — Mauvais vin.
Au premier sens, ce mol signifie un régal fait
entre amis, une collation. (Voy. Dict. de Borel, au
mol Hoiliire, qu'il explique par beuete, collation.)
Beiivetle désignoit aussi l'action de boire, comme
dans le passage suivant: « Ces paroles, et beitvettes
« achevées, «'c'est-à-dire ayant cessé de parler et
de boire. (Rabelais, T. V, p. tiOi.)
Nous le trouvons aussi pour mauvais vin, dans
le Gloss. du P. Labbe, où il est rendu par le
mot lalin vappa. C'est alors la même acception que
celle du mot buvandc.
VARIANTES :
BEUVETTE. Rabelais, T. V. p. 204,
Bevette. Dict. de Borel, au mot Boitui-e.
Bevier, subst. musc. Mesure de lerre. » Ils aca-
« terent quatre beviers à monseigneur Régnier de
« Cais » (dans une citation françoise (I) employée
par Du Cange, Gloss. la t. au mol Bivarium.)
Beuzi, adj. Etre plongé. Mot du patois Breton.
(Voy. Du Cange, Gloss. lal.° au mol Buz-ereus.)
Bezan, subsf. niasc. Mauvais grain. « Comme
« le pur froment dégénère bien souvent en bezan,
» lus et yvraye, aussi de bons parens sortent quel-
« quefois des vaut-rien, et meschanls enfans. »
(S' Julien, Mesl. Uist. p. 598.)
Bezeines (2), subst. fém. plur. Ruches à miel.
Ou il vait veoir ses bezeines,
Qui sont de cire et de miel plaines.
Ovide de Arte Amandi, MS. de S. Germ. fol. 91.
Bezei" (3), verbe. Courir. C'est un mot Normand.
Il s'appli(]iie communément aux vaches qui courent
lorsqu'elles sont piquées des mouches. (Mén.
Dict. Etym.)
De là, on disoil proverbialement: « Aller à
« S" Bezel, ou Troltel, » pour courir comme une
vache pi(iuée de mouches. (Voy. les Dict. de Nicot
et de Cotgrave.)
VARIANTES :
BEZER. Nicot, Dict.
Beser. Ménage, Dict. Etym.
Beziklhery, subst. masc. Sorle de poire. Nous
disons besidheri (i). (Voy. le Dict. d'Oudin.) Cette
espèce de poire est fort connue dans l'Anjou.
Bezole, subst. fém. Espèce de truite (5). (Voy. les
Dicl. de Nicot et d'Oudin.)
Bi (maille de). Maille d'un filet dont la petite
maille étoil delà largeur d'un tournois, et la plus
grande de la largeur d'un gros tournois. « Qui est,
a en quelque temps que ce soit, trouvé peschanl
« d'autre harnas qu'a maille de bi; c'est à scavoir
« que la plus petite maille peut passer le tour d'un
» vieil tournois, et par la haute maille, un gros
« tournois, chel en amende de soixante sols. »
(Boulciller, Somme Rurale, p. 800.) On lit dans une
disposition pareille (Ibid. p. 507): Maille le roij.
Biafora (6). En Béarn, c'est le cri par lequel celui
qui est outragé appelle du secours pour poursuivre
ou prendre le criminel. (Laurière, Gloss. du Dr. Fr.
au mot Biafora, el Du Cange, Gloss. bit. sons le
même mol. — Voyez aussi le Coût. Gén. T. Il,
p. «85.)
VARIANTES :
BI.\FOR.\.. Laur. Gloss. du Droit Français.
Biahoras. Du Cange, Gloss. lat au mot Biafora.
BiAHORES. Coût. Gén T. il, p. 685.
BlHORE Essais de Montaigne, T. II, p. 790.
Biailliere, subst. fém. Canal, ruisseau. La
rivière qui passe près de Turin « ne laisse pas de
« porter par deux binillieres, une partie de ses
« eaux dans la ville, tant pour ses commoditez et
« sa netteté, que pour faire tourner plusieurs
« moulins. » (Mém. de Feuquiere, T. IV, p. 87.)
(\) Carlulaire d'Amiens, an. -1267, fol 106. (N. E.) — (2) On trouve encore les formes be.ianne, bezanne, bezenne. (N. E.) —
(3) Les patois lombards ont bisia, besia, piquer, bisient, mordant, bisiell, aiguillon d'abeille ; on peut en rapprocher le mot
normand et remonter, comme fait Diez, à l'allemand biss, morsure. (N. E.) — (4) Il vaut mieu.x écrire bezi ci'Hi'.ri. (n. e.) —
(5) Comment bezole sisnifierait-il truite, si besolet, qui semble être le diminutif, veut dire hirondelle de mer dans le parler
génevsis? (n. e.) — ((î) Le premier sens n'est pas celui-là; à ce cri, les bourgeois de la commune et tous les autres habitants
devaient sortir en armes de leurs maisons et suivre le prévôt ou le vlguier (Regestrum Constabularise Burdegalensis ; f. 92).
Enfi 1 le registre .1.1. 207, p. 66, an. 1480, lui donne un autre sens: « Lequel GUabert s'escrya à haulte voix à biaffora, qui
e.st un mot'du langaige du pais disant qu'il esloit mort. » La forme bikore qui, d'après les variantes, se rencontre dans
Montaigne, est employée dès 1451 au reg. ,TJ. 185, p. 281 : « Le suppliant soy sentant ainsi navré et blecé dudit cop, cria à
haulte voix, bihore, bihore, audit Martin son maistre, disant qu'il estoil mort. » (n. e.)
BI
478
BI
VARIANTES :
BIA.ILLIERE. Salnovo, Yen. p. 109 et 171.
Bi.vi.LiEiiE. Salnove, Yen. p. 158.
Biais, adj. Qui est de travers. « Interprétation
« détournée, contrainte et biais (1). » (Essais de
Montaigne, T. III, p. 517.)
ïiinquo, subst. fém. Céruse. Drogue vénitienne
à l'usage des femmes qui se fardoient. (Dict. de
Nicot, d'Oudin et de Cotgrave.)
Biard, subst. masc. Béarn. C"est le nom d'une
province. « Le baron des guerres estoit de Lorraine,
« ses prédécesseurs esfans pourtant sortis de
« Basque, ou de Biard. » (Brantôme, sur les Duels,
page 3.)
VARIANTES :
RI.iRD. Brantôme, sur les Duels, p. 3.
BiARN. Cotgrave, Dict.
Biarcla, verbe. Fuir promptemeiit. (Voy.le Dict.
de Borel, qui le dérive de Via.)
Biarnois, adj. Béarnois. (Voy. les Epith. de
Mart. de la Porte, oiî ce mot sert d'épithète à Cape
. Lagnati.)
VARIANTES :
BIARNOIS, BlERNOlS.
Biaiiine, subst. masc. Heaume. Vraisemblable-
ment, il faut écrire hiaume dans le passage
suivant :
Fer, ne fust, platine, n'escorce
Ne puet contre ses cops durer;
Et puet tant le biaumc endurer,
Qu'à dormir, ne a sommeiller
Ne li covient autre oreillier.
Fabl. MS. du R. n- 7-218, fol. 222. V col. 2.
Biauvoisinois, adj. Qui est de Beauvoisis.
Aveuc eus les Biauvoisiuois,
De Champaigne, et de Gastinois,
D'Orlenois, de Chartrains, de France.
G. Guiarl, MS. fol. 69, Rv
Biliaillc, subst. fém. Don, présent. Ce mot est
expliqué ainsi dans les Dict. d'Oudin et de Cotgr.
C'est peut-être l'action de donner pourboire.
Biaune. Nom de lieu. Beaune. (Voy. Pérard,
Hist. de Bourg, p. 500, tit. de 12G0); on lit: Beaune,
ibid.
Biauvais. Nom de ville. Beauvais. (Loisel,
Hist. de Beauvais, p. 206, tit. de IP22, etPreuv. de
l'Uist. de Beauvais, par un bénédictin, p, 273, titre
de 1107.)
VARIANTES :
BUUVAIS, BiAUVEZ.
Bibat et Vivat (2). Sorte d'exclamation, quand
quelqu'un avoit dit un bon mot. Brantôme, parlant
d'un livre contre les duels, et de ce que M. le
garde des sceaux en avoit dit aux Etats de Blois,
raison pour laquelle i! falloit lui donner Vinum et
Species, ajoute que cependant, pour le bon mot à
son avis, il ne méritoit qu'on ciàt: bibat et vivat.
(Brant. sur les Duels, p. 189.) On voit par là que
ces termes servoient d'applaudissement pour ceux
qui, dans quelque genre que ce fût, réussissoient
dans une assemblée publique. On peut aussi en
inférer que c'étoit dans nos anciennes cours la ré-
compense ordinaire des béros, jongleurs et menes-
triers qui avoient obtenu le suffrage des assistans.
Bibaux, subst. 7nasc. plur. Ce mot nous paroît
le môme que pitaux ou petaux, paysans qu'on fai-
soit aller anciennement à la guerre, suivant Borel,
au mot l'itaux. Je crois que c'est une faute pour
bidaux qu'on va voir ci-après. Cependant Corneille,
dans son Dict. au mot Bacinet, et Boulainvilliers,
Essais sur la Noblesse, citent Monslrelet, comme
ayant fait usage du mot Bibaux. (Voy. Bidallx.)
Bibelotier, subst. masc. Faiseur et mouleur de
petites images de plomb, qui se vendent aux pèle-
rins et autres : « Cela est uni aux miroitiers. »
(Sauvai. Hist. de Paris, T. III.)
Bilîclots (3), subst. Mot de jargon. (Voy. les Dict.
d'Oudin et de Cotgrave.)
Biben, subst. masc. Vivant. Mot du patois de
Cahors. (Dict. de Borel, au mot Glouper.)
Biberon, subst. masc. Espèce d'aiguière. (Voy.
les Dict. de R. Eslienne et de Monet.)
Biljet. subst. masc. Vase à boire. (Voy. le Dict.
de Cotgrave.) « Jamais je ne combaly que sous la
« courtine ensemble le pot et le voerre, et croye
« que je n'oseroye assaillir un bibet, s'il estoit
» armé. » (Fabri, Art de Rhétor. fol. 157, R».)
Biljeton, subst. masc. Bec d'un vase. « Estoit
« le bec de l'un des bassins dont on donnoit à
« laver au baptême, et duquel on versoit dans un
" autre bassin. » Ce bec étoit semblable à celui
d'une aiguière. (Honneurs de la Cour, m. p. 00.)
Bilïle, subst. fém. Livre. — Kyrielle. — Machine
de guerre.
Au premier sens., ce mot signifie livre. Guyot de
Provins (i), et Hugues de Brégy (5) ont fait deux
ouvrages sous le titre de Bible.
Ce mot, dans le passage suivant, est employé dans
le sens de kyrielle, litanie. Un témoin commence
ainsi sa déposition :
Yous avez une droicte bible.
Coquin, p. 102.
(1) Dès le xiv siècle, Oresme (Eth. 66) nomme une diagonale traverse de biais, (n. e.)-(2) Il y a là une sorte d'allitération
conservée par la tradition; dans les universités allemandes, on répète encore en choeur: « Vivamus et bibainus , Dum
juvenes sumus ; Ubi sunt qui ante nos In mundo fuère? » (N. E.) — (3) C'est une variante de bimbelols, oii l'on voit le même
radical que dans bambin, (n. e.) — (4) Guyot de Provins, trouvère du xiii' siècle, avait toutes les qualités requises pour
être un satirique; c'est dire qu'il avait tous les défauts. Voici le prologue de la Bible Gwjot : « Dou siècle puant et orible
M'estnet commencier une bible, Por poindre et por aiguillone'-, Et por grant essample doner. » (n. e.) — (5) Ce trouvère du
xii' siècle fit partie de la croisade de 1204 ; son poëme est intitulé : la Bible au seigneur de Brèze. (n. e.)
BI
479 —
BI
Peut-êlre veut-il dire une suite de témoignages,
ausLi vrais que l'Evangile.
11 y avoit aussi une machine de guerre qu'on
nommoil bible. Elle servoit à lancer des pierres.
On voit, dans le Gloss. lai. de Du Gange, liiblia et
Bibliela, employés dans celte signification. Barlete,
dans ses Sermons, 1" part. fol. 122, fait usage du
mot biblia, pour un cornet à dés. De là, on peut
juger que la machine de guerre appellée B/^/e,étoit
une espèce de tube, et que le cornet à des en étoil
une imitation. Ainsi nous pourrons expliquer le
mot Bible, dans Joinville, par cornet ou mf,chine
servant à jeter des boules ou petites balles. «Je vous
<' conterai des jeus que li cuens d'Eu nous fesoit.
« J'avoye fait (dit-il), une maison là ou moy et mes
« chevaliers mangions à la clarté de l'huys : estoit
« l'huys devers le" conte d'Eu , et il qui estoit moult
«■ subtil, llst une petite bible qui gectoit œufs, et
'■ faisoit espier quant nous estions au manger assis,
« et adressoit sa bible (1) du long de nostre table, et
» la faisoit gecter, et nous brisoit nos potz, et nos
« voirres. «"{.Joinville, hs. du Roy.) Le mot wufs est
peut-être employé dans ce passage pour estœufs.
Peut-être aussi que l'auteur se servoit du mot œuf
pour faire allusion au comte d'Eu, quiéloit l'auteur
de la plaisanterie.
Bibliens, adj. Oui concerne la Bible. Discours
bibliens, pour discours sur la Bible, illisl. du Th.
Fr. T. II, p. 383.)
Bibliothèque, subst. fém. Ce mot, qui subsiste,
s'iniroduisit sous le règne de Charles IX. à la place
de librairie dout on usoit auparavant. (Ménage,
Bem. sur la Langue, p. 295.) Il se trouve employé
dans l'Amant ressuscité, p. 7.
Bil)listique. reut-être éciivain sur la Bible ou
interprèle de l'Ecriture sainte :
Pierres et Pois n'ont plus auclicion,
Ne Jerosme li bon hiblistiqiie.
Pofs. MSS. d'Eust. Dcsch. fol. 251, col. 1.
Bibotun, sîibst. vtasc. Commandements. (Dict.
de Borel, 2" add.) Je ne sais oîi il a pris ce mot, ni
l'acception qu'il lui assigne.
Bilïule, adj. Altéré. « Aucuns insassiables, mar-
« l'vdiix et bibulcs de sang humain, ce qui ne leur
« appartenoit, s'esmeurenl et suscitèrent les esprits
11 de la reste de leurs gens d'armes. » (P. Defrey, à
la suite de Monslrelel,'fol. 113.)
Bic. On trouve ce mot dansCociuillart, qui l'em-
ploie adverbialement : de bic ou de bec, pour d'un
côté ou d'un autre.
Aincoys qui erent à délayer,
A fouir de bic, ou de bec.
CociuiUarl, p. 37.
Bicanne, subst. fém. Sorte de raisin. On le
trouve en ce sens dans les Dict. de Nicot et de Colgr.
BIC.\NNE, BiCARNE.
Biche, subst. fém. Sorte d'insecte. — Serpent.
Nous ne déterminerons point quelle sorte d'in-
secle désigne le mot biche. Il y a apparence que
c'est une sorte de ver qui perce les vaisseaux. (Voy.
Du Gange, Gloss. lat. au mot liiceialis vcrDti'i (2).)
On s'est servi du mol biche dans un seasliguré :
En sa court avoit mouche et biche,
. Qui durement l'ont esraouchié :
Si lor a le roy tout couchié,
Si en demeura sanz argent.
Hisl. de Fr. en vers, à !a suite du R. de Fauvil, MS. du R. fol. 6'J.
Ce mot signifioit aussi un serpent. (Voy. le Dict.
de Borel, 2" add. au mot Bisse.)
En terme de blason, c'est la givre des Visconti
« portant d'argent à un serpent d'azur : cestuy ser-
« peut se nomme, à blasonner, une biche, et doit
11 avoir sept tournans dont l'un est noué près la
Il teste, saillant de la gorge un enfant marrissant
11 de gueules. » (Mém.'d'Ol. de la Marche, p. 13.)
Bichechotterie, subst. fém. Caresse. « Son
i< amy luy fera tous les plaisirs qu'il pourra, et luy
11 fera mille petites bichecliotleries où elle prendra
11 grand plaisir que nul mary ne scauroit faire. »
(Les 15 Joyes du Mariage, p. 67.)
VAI.IANTES :
rilCHECHOTTERIE. Les Quinze Joyes du mariage, p. 67.
liiciiECOTTERiE. Cotgrave, Dict.
Bichecorne (porter à la). On se sert de ce
terme dans quelques provinces pour dire : porter
sur ses épaules. On voit dans Rabelais, T. III,
[). 126, porter à la cabre morte, dans le même sens.
Bichenage, subst. inasc. Droit sur les grains.
C'est celui qui se levoil au marché sur les grains ou
autres marchandises qui se mesuroienl au boisseau.
(Laurière, Glossaire du Droit françois, et Du Gange,
Gloss. lat. au mot Bichetum.)
Bichet, subst. masc. Sorte de mesure. Elle sert
à mesurer le blé et autres grains. (Dicl. d'Oudin et
de Cotgrave, au mot lliclier, et Gloss. latin de Du
Gange, au mot Biclielus.) Il s'est dit aussi pour
mesurer du vin et autres liqueurs. On dit encore en
ce sens piché en Touraine. On a employé le mot
biehel (3) au figuré pour quantité.
En te rendant de salus un bichet.
Œuv. de Roger de CoUcryc, p. iO.
VARIANTES :
BICHER. La Thaiim. Coût, de Berry, p. 429.
Bichet. Roger de Collerye, p. 40.
BiCHEZ. Du Gange, Gloss. lat. au mot Modius.
BiCHiER. Gloss. de Du Gange, au mot Picarium.
BiCHOT. Coût. Gén. T. I, p. 850.
Bicnoz. Gloss. lat. de Du Gange, au mot Gillo.
BiscHF^ . Cotgrave, Dict.
PiCH'' PiCHER, PlCHEZ, PiGlIIÉ, PlCHIER, PiCHIEZ.
(-1) Ce n'est pas une faute du manuscrit, car on lit au Roman de Claris : « Li rois fet ses engins dreciers, Et vers les haus
murs charroier. Bibles et mangoniau.K gâter. » (n. e.) — (2) Biscialis vennis doit être rapproché de binse, variante de biclie,
quand ce mot signifie serpent, et particulièrement la couleuvre de Milan, en lombard bissa, en piémontais biesso. Voir plus
haut Bezcr, qui a la même étymologie. (n. e.) — (3) La racine est peut-être le grec ^ixos. (n. e.)
BI
480 —
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Bichettcs, suhst. (ém. plur. Sorte de jeu.
Item et si ne jouerez
A la queue le leu, aux billettes,
Au tiers, au perier. aux hicheltes.
L'Amant rendu Cordelier, p. 591.
Bichon, suhst. masc. Diminutif de barbichon,
sorte de barbet. (Gram. de Tabbé Régnier, p. 175.)
Bicle, adj. Rii;le, louche. (Voy. les Dict. de
Cotgrave et de Ménage.)
VARIAMES :
BICLE. Essais de Montaigne, T. II, p. (>i8.
BiscLE. Crétin^ p, 88.
Bicler, verbe. Bigler, loucher. (Voy. les Œuvr.
deDaïf, fol. 174.)
Bicocque, sulist. fém. Xom d'une maison. Ce
mot subsiste encore aujourd'hui pour signifier une
petite ville, une place peu fortillée ; il s'est formé du
nom de la maison d'un gentilhomme où les impé-
riaux s'élant postés, en lô^'i, soutinrent l'assaut de
l'armée fran^oise conduite par le maréchal de
Laulrcc, du temps de François 1"'. « Allèrent loger
« à la bicocque (1) sur le chemin de Laude (Lodi), à
« Milan, et estoit la dite bicocque, la maison d'un
« eentilhomme, circuite de <;rands fossez. » (Mém.
de'Du Bellay, livre II, fol. 39.)
Bicoquet, subst. masc. Sorte de coifïure à
l'usage des hommes et des femmes. (Dictionnaire
de Corneille, au mot Bicoquet.)
Le bicoquet, la capeline.
Coquillart, p. -4^.
• Estoit habillié d'une brigandine couverte de
« velou.x noir, à doux dorez et en sa teste ung
« bicoquet garnix de bouillons d'argent dorez. «
(Chron. scandai, de Louis XI, p. 55.) « Le comte de
» S' Pot avoit quatre pages très richement habillez,
. chacun salade ou bicquoquet (2) très richement
« garnis. » (ms. du Procès verbal de l'entrée de
Louis XI à Reims, parmi les recueils de l'abbé Le
Grand, sur Louis XI.)
VARIANTES :
BICOQUET. CoquiUart, p. 42.
Bicquoqut;t. Procès verb. de l'entrée de Louis XI à Reims.
BiQUOQUET. Cotgrave, Dict.
Bicorne, subst. fém. Fourche ou enclume. —
Terme d'injure.
Sur les deux premiers sens, voyez le Dict. de
Nicot. On a nommé bigorne une enclume, à cause
de l'espèce de corne qu'elle forme d'un côté.
« Quiconques fait bigornes à Bourges, mez qu'elles
a soient neuves, il doit deux bicornes, la moitié à
« M'' le duc, et l'autre moitié à S" Sulpice et au
« voyer. » (La Thaum. Coût. deBerry, p. 334.)
Le château semble tonner
Tandis qu'on tourne, et retourne.
Le harnois sur la bigourne
Pour le buste façonner.
Poos. d'Amadis Jamin, fol, 58.
On s'est servi du mot bigorne (3) comme d'un
terme d'injure. Vieille bigorne se trouve en ce sens
dans les Contes de Cholières, fol. 163.
VARIANTES :
BICORNE. La Thaumassière, Coût, de Berry, p. 334.
Bigorne. Nicol, Dict.
iîiGOURNE. Poës. d'Amadis Jamin, fol. 58.
Bicorneurs, subst. masc. plur. Nom ancien
donné îi la milice de Valenciennes. (Pelisson, Lettr.
Hist. T. 111, p. 173.)
Bicornu, adj. Biscornu. Qui a deux cornes ou
deux fourches. (Dict. deColgraveet d'Oudin, aumot
liicornu.) Bigornue est épithète d'enclume dans les
Epithètes de Martin de la Porte.
VARIANTES :
BICORNU. Oudin et Cotgrave, Dict.
BiGORNU. Epith. de la Porte.
Bicque, subst. fém. Chèvre. " Chèvres ou
« bicques n'y peuvent estre menées , à peine
« d'amende arbitraire. » (Coût. Gén. T. I, p. 423.)
On lit Bique dansleDict. Etym. de Ménage. Biquette,
diminutif de BJ(?we, se trouve dans les Poésies de
R. Belléau, T. I, fol. 108, V".
VARIANTES :
BICQUE. Pilhou, Coût, de Troyes, p. 357.
Bique. Ménage, Dict. Etym.
Biquette. Rémi BelIeau, T. I, fol. 108, V°.
(1) En italien, c'est un petit château sur une hauteur; en espagnol, bicoca signifie guérite, (n. e.) — (2) Le bicoquet, fort à
la mode pendant la minorité de Charles VIII, est un chapeau ou plutôt une vaste casquette aux bords relevés contre la
forme; sur le devant est couché nu pluniCt ; le tout s'enfonce sur une calotte. (Voir une miniature du ms. fr. 2692,
reproduite par M. Quicherat à la p. 342.) (n. e.) — (3) Dans les viU^.ges bas-bretons, les enfants poursuivent leurs camarades
qui n'ont pas su leur catéchisme ou qui ont « manqué l'école » du cri de biijoriiic. M. Max-Radiguet (A travers la Bretagne,
M. Lévy, in-12, 1863, p. 262-3) associe le coquillage nommé dans l'Ouest bigorne, au cancre, ce crustacé que doivent
connaître tous les paresseux. Mais autrefois la minîique a dû accompagner les huées ; on faisait les cornes aux déhnquants ;
peut-être les leur avait-on mises, comme bonnet d'âne. Les soldats d'infanterie de marine se nomment aussi bigorneaux,
du chapeau à deux cornes qu'ils portaient sous le premier Empire, (n. e.)
Niort. — Typographie de L. Favre.
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