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i
9.
ESQUISSE d'une HISTOIRE *,
DES
THEATRES DE PARIS
y
V
EMILE COLIN — IMPRIMERIE DB LAONY
*' I
HOTEL DE BOURGOGNE ET MARAIS
ESQUISSE D'UNE HISTOIRE
DES
THÉÂTRES
DE PARIS
DE 1548 A 1635
PAR f^ i VY>^ • • '
EUGÈNE RIGAL V.
Maître des conférences à la Faculté des Lettres cTAi ^
{
\
/
i
-, ^A
»
I PARIS 2 * w*.»
* * 9 *
-• • - •
A. DUPRET, ÉDITEUR ' /
3i RUE DE MÉDICIS, 3
1887
/
>
i
L'auteur du présent travail se propose de \
parler ailleurs de l'organisation théâtrale^ "^
des acteurSj des pièces^ e/, en un mot, de *
l'état du Théâtre français à la fin du xvie et
au commencement du xvii» siècles. Toute son ^
ambition ici serait d'établir quelques faits"
de fixer certaines dates^ et défaire un pe u»
de lumière, s* il se peut, sur les origines dé^\
deux grands théâtres parisiens avant Mi*.
Hère : /'Hôtel de Bourgogne et le Marais.
-^
^...^.^
'"' à
/
^/"'^' ,
HOTEL DE BOURGOGNE ET MARAIS
ESQUISSE d'une HISTOIRE
DES
THÉÂTRES
DE PARIS
DE 1548 A i635
/
■*^
^
f^-^
Trois causes surtout semblent
avoir contribué à former et à épais-
sir les ténèbres qui, après tant d'ef-
forts tentés pour les dissiper, cou-
vrent encore pour nous l'histoire
des théâtres parisiens à la fin du
XVI® et au commencement du xvn®
siècles.
La plus grave, parce qu'elle est
irrémédiable, est la rareté des do-
Les lettres a, b, c,... renvoient aux notes
qui se trouvent au bas des pages; les chiffres
I, 2, 3,.*. aux notes qui terminent le volume.
I
/
8 Esquisse d'une histoire
cuments. Le recueil des principaux
titres de propriété de l'Hôtel lie
Bourgogne, publié par les confrères
de la Passion en i632 (i) ; quelques
autres pièces juridiques citées par
Félibien {2) et les frères Parfait (3);
le précieui mais trop sommaire
Inventaire des titres et papiers de
l'Hôtel de Bourgogne donné par
Eudore Soulié(4); quelques men-
tions d'acteurs vivants ou récem-
ment morts, dans divers écrits du
temps; c'est là tout ce dont nous
i historiens du théâ-
de moins encore, et
lé les renseignements
isédaient par des by-
£s qu'ils imaginaient,
tset hypothèses n'ont
ués avec le soin dési-
successeurs;Fclibien
^arfait sont devenus
et ont apporté dans
«...lA .&..ec^"J.-..'-(
•■Or
Des théâtres de Paris 9
une histoire obscure une nouvelle
cause d'obscurité et d'erreur.
Enfin, une idée préconçue, dont
les auteurs que nous venons de ci-
ter ont été les premières victimes,
a continué après eut à i^usser la
vue des historiens et à égar
sens critique. On a voulu ju
théâtres sousHenri IVetLot
d'après ce que l'on savait de
de Bourgogne et du Marai
Mazarinet Louis XIV; on î
admis le plus t6t possible l'ex
simultanée de cas deux. scèn>
chacune on a attribué une
I nuité, une régularité d'exi
dont on ne puisait pas l'iJé'
les documents.
Il y a une douzaine d'an
peine, M. Fournel faisait 1
vers la vérité, quand il é
dans sa courte Histoire du ,
du Marais (5) : 11 li n'y a pas
seul théâtre du Marais, il y 1
V
y
10 Esquisse d'une histoire
plusieurs, et même quand il se fut
établi dans une salle définitive, di-
verses troupes s'y succédèrent. »
Malheureusement, on n'a pas tenu
compte depuis de cette observation,
et M. Fournel lui-même n'est pas
resté assez fidèle à sa propre doc-
trine.
Notre devoir est donc tout indi-
qué pour Tétude, d'ailleurs très ra-
pide, que nous entreprenons : n'ac-
corder notre confiance qu'aux do-
cuments authentiques; rejeter ou
n'accepter qu'après vérification,
quelle qu'en soit la date, toutes les
assertions qui ne s'appuient pas sur
eux.
I
La fondation du théâtre de l'Hô-
tel de Bourgogne date de 1548.
Cinq ans auparavant, François !•»■
Des théâtres de Paris 1 1
avait ordonné la vente des hôtels de
Bourgogne, Artois, Flandres, Etam-
pes, etc. (6); et les confrères de la
Passion, forcés de quitter l'hôtel Je
Flandres où Us représentaient, après
avoir promené çà et là dans Paris
leurs mystères et leurs moralités,
se décidèrentà acheter, sur l'empla-
cement de l'hôtel des anciens ducs
de Bourgogne, un terrain de dix-
sept toises de long sur seize de large,
eti y bâiir un théâtre détinitif (7),
Il s'éleva dans la rue Mauconseil,
ou plutôt dans l'angle formé par la
rue Mauconseil et la rue Fran-
d'y reprendre leurs représentations
des mystères de l'Ancien et du Nou-
veau Testament ; mais le Parlement
(a). L'Hôtel de Bourgogns était par
conséquent situé dans le quartier
Saint-Denis, sur les confins du quar-
tier des Halles (8).
1 2 Esquisse d^une histoire
s'y opposa. Un arrêt du 17 novem-
bre leur permit seulement de « jouer
autres mystères profanes, honnêtes et
licites », et défendit « à tous autres de
jouer ou représenter dorénavant au-
cuns jeuxou mystères, tant en la ville,
faubourgs, que banlieue de Paris,
sinon que sous le nom de ladite
confrérie, et au profit d'icelle {9). »
y Ainsi les confrères étaient tenus
d'abandonner la partie la plus im-
portante de leur répertoire, mais
leurs privilèges étaient confirmés,
^\. et ils le furent encore par lettres
de Henri II en i554, de François il
en 1559, de Charles IX en i563, de
Henri III enfin en 1575.
Comment s'y prirent-ils pour les
faire valoir, et par quoi remplacè-
rent-ils leurs mystères interdits?
Nous ne serions pas embarrassés
pour le savoir, si nous pouvions en
croire le Journal manuscrit du
théâtre français {10). L'auteur, qui
f '
Des théâtres de Paris 13 v^^
ne cite aucune source, n*en était pas
moins merveilleusement informé;
il sait quelles pièces nouvelles ont
été jouées chaque année par les con-
frères, il sait de quelles reprises ces
nouveautés ont été accompagnées.
Mais cette érudition trop complète
suffirait seule à nous mettre en dé-
fiance, et nous avons eu trop d'oc-
casions de prendre le chevalier de
Mouhy en flagrant délit d'erreur ou
de mensonge pour lui accorder la
momdre créance. Faut-il tout au
moins, et d'une façon générale, ad-
mettre avec lui que les confrères
j^ouaient les œuvres des nouveaux
tragiques, des Filleul, des Grévin,
des Jean et Jacques de la Taille,
pendant qu'ils ne se gênaient guère,
d'autre part, pour jouer les mystères
et vies des saints que le Parlement
avait prétendu leur défendre? La-
question est trop importante et trop
difficile pour être traitée ici inci-
14 Esquisse d'une histoire
demment. Disons seulement que
nous ne croyons pas à la reprcsen-
tationparles confrères des œuvres
tragiques et comiques de la nou-
velle école. Ils ont dû se contenter
d' « exhiber au peuple certains jeux
anciens, Romans et Histoires >i,
comme dit un arrêt liu Parle-
ment (i i); ou de revenir quelquefois
à leurs mystères, sous des titres
trompeurs et bien faits pour n'e-
veiller pas les susceptibilitéSj comme
ceux de tragédie ou de pastorale.
C'étaient là loutefoisdesconditions
très défavorables. Certes, les mys-
tères avaient perdu beaucoup de leur
popularité; bourgeois et artisans ne
les écoutaient plus avec la foi naïve
et la curiosité ardente d'autrefois.
Mais ils avaient encore leurs parti-
sans, et joués ouvertement, régu-
lièrement, ils auraient peut-être
suffi à remplir encore la salle des -
confrères ; les précautions prises par
Des théâtres de Paris 1 5
ceux-ci déroutaient ce qui leur res-
tait de leur ancien public. D'autre
part, le public lettré avait vu se mul-
tiplier les représentations des col-
lèges; il s'était épris de la tragédie
soi-dis^ant antique, et ne prenait
plus le chemin du théâtre de la
Passion. Pour attirer ceux-ci et
pour retenir ceux-là, les confrères
n'avaient pas assez de leurs morali-
tés, genre vieilli aussi, et de leurs
farces ; et pouvaient-ils compter sur
les Romans et les Histoires que
préconisait le Parlement, œuvres
bâtardes sans doute, écrites sans ta-
lent ni conviction, où étaient con-
servés avec soin les procédés et les
trucs de l'art du moyen âge, mais où
son esprit et sa naïveté ne se retrou-
vaient plus ?
On se lasse de l'insuccès, même
quand on est une confrérie et qu'on
est attaché à ses traditions. Les con-
frères finirent donc par se dire qu'ils
i6 Esquisse (Tune histoire
gagneraient plus d'argent en louant
leur salle à des comédiens qui pour-
raient la remplir, qu'en s'obstinant
à jouer eux-mêmes devant de rares
spectateurs; et une concurrence re-
doutable qu'il fallut subir en 1577,
celle des comédiens Italiens, les Ge^
/05i, protégés par la cour (12), ache-
va peut-être de les décider. Dès
l'année suivante, 1578, nous voyons
une vraie troupe de comédiens pa-
raître sur le théâtre de l'hôtel de
Bourgogne. « 22 juillet, àxtVInven"
taire (i3), marché fait entre lesdits
maîtres et Agnan Sarat, Pierre Du-
buc, et autres compagnons comé-
diens par devant Marchand et Bru-
guet, notaires, par lequel iceux
compagnons comédiens promettent
de représenter comédies moyennant
le prix mentionné audit marché. »
Que jouaient ces comédiens ? Pro-
bablement des pièces de l'ancien ré-
pertoire, mais qui, jouées autrement
'N.
Des théâtres de Paris 17
~^~~ I 11 pli
et mieux par de^ comédiens de pro-
fession, pouvaient attirer davantage
le public (b). Avec cela des farces : le
peuple n'aurait pas pu s'en passer,
et les lettrés eux-mêmes y riaient
volontiers, tout en en médisant (i 3).
Combien de temps la troupe
d'Agnan Sarat représenta-t-elle à
l'Hôtel de Bourgogne? On ne le
sait; mais Agnan lui-même dut
fournir sur ce théâtre une assez
longue carrière, puisqu'une pièce
{^}. C'est ce que semblent indiquer quelques
vers d'une pièce des Muses gaillardes, le
haut de chausses du courtisan :
Combien de fois ta belle soie
A revêtu le roi de Troie
Et les chevaliers d'Amadis,
Quant Agnan à la laide trogne
Jouait à r Hôtel de Bourgogne
Quelque histoire du temps jadis.
Le roi de Troie et le chevalier Amadis sont
des personnages de moralités ou de mystères
profanes (14).
3
à
r
i8 Esquisse d'une histoire
des Muses gaillardes rappelle encore
son nom en 1609, et puisque Talle-
mant se souvient de lui dans le cha-
pitre où il nomme « les principaux
comédiens français » : c Agnan a
été le premier, dit-il, qui ait eu de
la réputation à Paris (16). »
Ainsi des comédiens de profes-
sion s'étaient fait entendre à Paris,
mais les privilèges des confrères
avaient été respectés. La tentation
était grande cependant pour les
troupes de campagne ou celles de
nationalité étrangère de se produire
dans la capitale, sans donner à de
grossiers artisans une bonne partie
de leur gain. Une troupe italienne
avait-elle cédé àcette tentation vers
i583, ou avait-elle au contraire
loué leur salle aux maîtres de la
Passion? Nous ne savons; mais
c'est certainement à la suite de re-
présentations théâtrales, que per-
mission fut donnée « auxdits mai-
Des théâtres de Paris 19
très de faire saisir et arrêter ce qu'ils
pourraient trouver appartenir à
Baptiste Lazarot (17), Italien, pour
sûreté de ce qu'il leur pouvait de-
voir, à cause de demi-écu par
chacune semaine qu'il leur avait été
ordonné être payé par lui (18)», En
1584, une autre troupe, qui paraît
française, s'était installée à Thôtel
de Cluny, près les Mathurins; le
Parlement mit bon ordre à ce scan-
dale ; il fit défenses aux comédiens
(c de jouer leurs comédies, ne faire
assemblée en quelque lieu de cette
ville et faubourgs que ce soit, et au
concierge de Cluny les y recevoir, à
peine de mille écus d'amende (19). »
En i588, nouvelles troupes, l'une
française et l'autre italienne : les
frères Parfait citent un arrêt rendu
contre elles par le Parlement (20).
Cependant, sur le théâtre de l'hô-
tel de Bourgogne, les confrères
avaient repris leurs représentations,
i
' 20 Esquisse d'une histoire
et il semble même qu'ils fussent re-
venus hardiment à leurs mystères
et à leurs parodies plus ou moins
pieuses des livres saints. Le mo-
ment était mal choisi, puisque la
Ligue devenait toute puissante;
d*ardentes dénonciations se firent
entendre, et nous en pouvons lire
une dans les fameuses Remontran-
ces très humbles au roi de France
et de Pologne^ qui datent de cette
même année i588 (21). L'auteur y
proteste contre toutes les représen-
tations théâtrales, mais en veut sur-
tout à la confrérie :
« Il y a un autre grand mal, dit-
il^ qui se commet et tolère en votre
bonne ville de Paris, aux jours de
dimanches et de fêtes ; ce sont les
jeux et spectacles publics qui se
font lesdits jours de fêtes et diman-
ches, tant par des étrangers Italiens
que par des Français, et, par-dessus
tous, ceux qui se font en une cloa-
Des théâtres de Paris 2 1
que et maison de Satan, nommée
l'Hôtel de Bourgogne, par ceux qui
abusivement se disent les confrères
de la Passion de J.-C... Sur l'écha-
faud Ton y dresse des autels chargés
de croix et ornements ecclésias-
tiques, Fon y représente des prêtres
revêtus de surplis, même aux farces
impudiques, pour faire mariages de
risées. L'on y lit le texte de l'Evan-
gile en chant ecclésiastique, pour
(par occasions) y rencontrer un mot
à plaisir qui sert au jeu. Et au sur-
plus, il n'y a farce qui ne soitorde,
sale et vilaine, au scandale de la
jeunesse qui y assiste, laquelle avale
à long trait ce venin et ce poison,
qui se couve en sa poitrine, et en
peu de temps opère les effets que
chacun sait et voit trop fréquem-
ment.
)> Par ce moyen Dieu est grande-
ment offensé, tant en ladite trans-
gression des fêtes que par les susdits
22 Esquisse d'une histoire
blasphèmes, jeux et impudîcités qui
s'y commettent. D'avantage Dieu y
est courroucé en l'abus et profana-
tion des choses saintes dont ils se
servent, et le public intéressé par la
débauche et jeux des artisans. Joint
que telle impiété est entretenue
des deniers d'une confrérie, qui
devraient être employés à la nourri-
ture des pauvres, principalement en
ces temps esquels il fait si cher
vivre, et esquels plusieurs meurent
de faim.
» Or, Sire, toute cette ordure est
maintenue par vous : car vous leur
avez donné vos lettres de permission
pour continuer cet abus commencé
devant votre règne ; vous avez
mandé à votre Cour de Parlement
et Prévôt de Paris de les faire jouir
du contenu en vos lettres, ce qu'ils
ont très bien exécuté, ayant main-
tenu un tel abus contre Dieu et la
défense des pasteurs ecclésiastiques,
Des théâtres de Paris 23
et nonobstant la clameur universelle
de tous les prédicateurs de Paris,
lesquels continuent encore journel-
lement às^en plaindre, maisen vain,
n'ayant pu pour tout obtenir sinon
une défense déjouer durant une an-
née (22), pour recommencer au bout
de Tan plus que devant. )>
La clameur des prédicateurs et les
remontrances des catholiques eu-
rent plus d'influence en i588 sur la
Ligue qu'elles n'en avaient eu pré-
cédemment sur le roi. La Ligue sup-
prima les représentations, ou, comme
dit la Satjrre Ménippée, « défendit
les jeux de Bourgogne (23). 3> Seule,
dit-on, une troupe de comédiens
espagnols, qui jouaient à Paris
sans beaucoup de succès, reçut d'elle
autorisation et protection (24) : jus-
qu'en iSgS, aucun document ne fait
plus mention des comédiens fran-
çais (25).
Mais, à cette date, l'entrée
À
24 Esquisse d'une histoire
d'Henri IV à Paris avait sans doute
rendu le courage aux confrères ; ils
étaient remontés sur leur scène, et
veillaient avec un soin jaloux à ce
que leurs privilèges fussent respec-
tés. Leur mécontentement fut donc
grand, quand une troupe ambu-
lante, dirigée par Jehan Cour-
tin et Nicolas Poteau (ou Po-
trau), se mit à donner des .repré-
sentations fort courues à la foire
Saint-Germaiu (j6). Ils essayèrent
de faire fermer son théâtre, le
public prit parti pour les acteurs fo-
rains, et le Châtelet, ayantégardaux
règlenjents particuliers et tradition-
nels des foires Saint-Germain et
Saint- Laurent, leur permit le 9 mai
1596 <( de jouer et représenter
mystères profanes, licites et hon*
nêtes, sans offenser ou injurier au-
cunes personnes, es faubourgs de
Paris et pendant le temps de la foire
Saint-Germain », à condition de
Des théâtres de Paris 2 5
payer pour chaque journée de re-
présentation a deux écus soleil au
profit de la confrérie. » D'autre part,
défense était faite à toutes personnes,
quelle que fût leur condition, c de
faire aucunes insolences en ladite
maison et Hôtel de Bourgogne
lorsque l'on y représentera quel-
ques jeux, ni jeter des pierres, pou-
dres et autres choses qui puissent
émouvoir le peuple à sédition, en
peine de prison et de punition
corporelle. »
Les confrères étaient battus et le
reconnurent ; ils s'abaissèrent jus-
qu'à passer avec leurs vainqueurs
un marché, pour les obliger, sans
doute à rissue de la foire, à venir
représenter « jeux et farces à T Hô-
tel de Bourgogne » ;et ce furent les
forains qui rechignèrent (27).
La confrérie avait passé par une
crise dangereuse et qui s'était mal
terminée. Les troupes de campagne
4
â
20 Esquisse d*une histoire
I
savaient maintenant comment on
pouvait faire brèche à ses privilèges,
et la foire suivante dut lui susciter
les mêmes difficultés. Le Î2 avril
i597, il fallut que le prévôt de Paris
permît « de faire publier à son de
trompe, même afficher, tant au de-
hors que dedans et contre les portes
dudit Hôtel de Bourgogne, les dé-
fenses à toutes personnes défaire
aucunes séditions ni empêcher les
représentations des comédiens dudit
Hôtel. »
La confrérie d'ailleurs ne s' endor-
mait pas. A la même date, elle obte-
nait la permission « de faire comé-
dies les jours ouvrables » ; et le
même mois, elle obtenait des a Let-
tres de Henri IV, confirmatives des
privilèges de la confrérie (28). » Le
roi, plein de bienveillance, permet-
tait même de jouer t les mystères
de la Passion et Résurrection de
Notre-Seigneur, des Saints et Sain-
Des théâtres de Paris 27
tes,... ensemble autres jeux honnêtes
et récréatifs. » Mais le Parlement fut
moins aimable. Il se référa à son
arrêt du 17 novembre 1548, et ne
permit que la représentation «'des
mystères et jeux profanes, honnêtes
et licites, sans offenser ni injurier
personne, sans pouvoir jouer les
mystères sacrés (29). » C'était une
nouvelle partie perdue. La confrérie
se résigna, et peut-être ne monta-t-
elle plus elle-même sur le théâtre ;
depuis ce moment en effet, les té-
moignages de marchés passés avec
des troupes de comédiens se multi-
plient, et Ton ne trouve plus trace
de représentations données par
elle (c).
(c) Ajoutons un argument à ceux que nous
avons déjà donnés dans le texte pour reculer
la date à laquelle les confrères seraient des-
cendus de leur théâtre. Toutes les lettres pa-
tentes du xvio siècle, et même l'arrêt du
Parlement de 1598, autorisent les confrères à
faire et jouer leur* mystères, et parlent d'eux
À
28 Esquisse d'une histoire
II
En i5o8 (2 5 mal), Jehan Sehais,
comédien anglais, loue la grande
salle et le théâtre de THôtel de
Bourgogne, mais n'en essaie pas
moins de se dérober aux obligations
que lui impose son bail. Une sen-
tence est rendue par le Châtelet le
4 juin, (( tant pour raison du susdit
bail que pour le droit d'un écu par
jour, jouant lesdits Anglais ailleurs
qu'audit Hôtel » (3o).
La même année, d'autres comé-
diens, sans doute français, viennent
se loger « en la maison et hôtellerie
de la Bastille, près l'église Saint-
Paul. » Vite, un huissier, dépêché
comme de comédiens. Au xvii* siècle, les
termes changent, et désormais Louis XIII les
autorise à jouer ou /aire jouer et représenter
les mystères dessusdits. V. Recueil des prin-
cipaux titres, p. 3q, 40, 48, 5o, 66, — 52.
Des théâtres de Paris 29
par les confrères, court leur signi-
fier les défenses accoutumées (3i).
Le 28 avril 1599, sentence du
Châtelet de Paris, entre les maîtres,
d'une part, « et les soi-disant co-
médiens italiens du Roi, d'autre,
par laquelle, entre autres choses,
est fait défenses tant auxdits comé-
diens italiens que autres, de jouer
ni représenter ailleurs qu'audit Hôtel
de Bourgogne, s'ils n'ont exprès pou-
voir de ladite confrérie; comme
aussi est fait défenses à tous bour-
geois de Paris de louer maisons à
aucuns comédiens; au dos desquel-
les pièces sont des significations
faites aux comédiens tant français
que italiens (32). ^
Nous avons cité cette pièce en en-
tier, parce que c'est elle qui a déter-
miné la plupart des historiens du
théâtre à placer en 1599 ou en
1600 la fondation d'un nouveau
théâtre fixe, celui du Marais. Voici
â
3o Esquisse d^une histoire
comment s'expriment les frères
Parfait : « Une troupe de comé-
diens de province, qui peut-être
était venue à Paris pour y jouir des
franchisesde la foire Saint-Germain,
forma le dessein de s^établir dans
cette ville. 11 faut croire qu'elle
avait de fortes protections; car, mal-
gré une sentence contradictoire du
28 avril 1 599, qui défendait à tous
bourgeois de louer aucun lieu pour
y représenter la comédie, elle ne
laissa pas de paraître Tannée sui*
vante 1600 sur un théâtre qu'elle
avait fait bâtir au quartier du Ma-
rais du Temple, en une maison
nommée l'Hôtel d'Argent (33). »
Certes, une assertion aussi grave
demanderait à être appuyée sur
quelque document. Mais les frères
Parfait, qui en citent si souvent de
peu importants, n'en donnent au-
cun ici ; Félibien n'en donnait pas
davantage, et V Inventaire ne porte
Des théâtres de Paris 3 1
rien de pareil. Les frères Parfait
ajoutent : « Il est vrai que ces co-
médiens furent obligés de payer aux
confrères, toutes les fois qu'ils
jouaient, un écu tournois ». Et ce
serait une preuve en eiffet, si la sen-
tence à laquelle ils font allusion
n'était pas, ils l'avouent eux-mêmes,
du i3 mars 1610. Quel indice reste-
t-il donc de la fondation du nou-
veau théâtre?
Hâtons-nous de rétablir la vérité,
puisqu'elle ressort avec netteté des
documents. En mars ou avril I599,
étaient arrivées à Paris deux trou-
pes, Tune italienne et l'autre fran-
çaise, qui avaient commencé par
représenter leurs pièces devant la
Cour. Les confrères n'avaient pas
le droit de s'y opposer. Mais dès
que les nouveaux venus songèrent
à représenter à la ville et à installer
leur théâtre chez quelque bour-
geois, aussitôt les privilégiés se
32 Esquisse d'une histoire
plaignirent, et l'ordre fut intimé
aux deux troupes de se transporter
bien vite à T Hôtel de Bourgogne.
Toutes deux cédèrent. Dès le 28^
avril, un bail est fait par la confrérie
à la troupe des comédiens italiens;
trois jours plus tard, le i«* mai, un
autre bail est fait à Valleran Le-
comte et à ses compagnons, qui
prennent déjà le titre de « comé-
diens français ordinaires du Roi »
(34).
Voilà donc une troupe italienne
et une troupe française qui jouent
concurremment sur la scène de
THôtel. C'était peut-être la première
fois, ce ne sera pas la dernière (35).
Il semble que cette concurrence
ait nui surtout aux comédiens fran-
çais, et qu'ils se soient décidés bien-
tôt à laisser le champ libre aux Ita-
liens. Le 2 octobre, Valleran passe
un accord avec les maîtres pour le
rachat de son bail, et le 6, les con-
Des théâtres de Paris 3 3
frères obtiennent la permission de
faire dresser des barrières au devant
de la porte d'entrée de leur hôtel,
t pour empêcher la pression du
peuple lorsqu'bn y veut jouer w (36).
Combien de temps restèrent les
Italiens? on ne le sait, et Baschet
lui-même n'a rien trouvé sur leur
compte (37). Mais le 3o octobre
1600, les maîtres passent marché
avec une nouvelle troupe de comé-
diens français, qui promet de jouer
pour elle des comédies. Probable-
ment Valleran faisait encore partie
de cette troupe, mais un seul comé-
dien en est nommé : Robert Guérin,
celui qui devait rendre si fameux
le surnom comique de Gros-Guil-
laume (38).
On sait qu'à la date où nous som-
mes, la plupart des historiens du
théâtre ont déjà installé une troupe
française fixe sur le théâtre de
l'Hôtel de Bourgogne : leurs asser-
5
34 Esquisse (Tune histoire
tions ne s^accordent guère avec la
vérité. La troupe de Robert Guérin
resta tout au plus trois ans. En dé-
cembre i6o3, la troupe italienne
de Francesco Andreini inaugure
sur théâtre privilégié des représen-
tations qui devaient durer jusqu'au
mois d'avril suivant (39); en février
1604, une nouvelle troupe française
s'y installe aussi, celle de Thomas
Poirier, dit la Vallée, et de ses com-
pagnons (40).
Quel a été son succès ? Nous ne
savons, mais son séjour ne s'est
pas prolongé longtemps. En 1607,
Thomas Poirier a quitté THôtel et
Valleran Ta remplacé (i). Aucun
{d). Dans un procès intenté en 1627 parLaf-
femas à Marie Venier, un certain Bufifequin,
■ feinteur et artificieur des comédiens », dé-
posait • qu'il y a environ vingt ans, il aurait
vu jouer des tragédies au Sabot-d'Or^ rue
Saint-Antoine, par Laffemas, lors de la com-
pagnie de Valleran, et dudit Sabot ils seraient
venus au petit Hôtel de Bourgogne. » V. Tal-
Des théâtres de Paris 35
bail nouveau, il est vrai, n'est
porté pour cette année à Vlnven^
taire, mais quatre baux, faits à
Valleran Lecomte, et dont le der-
nier est du 3o septembre 1628, sont
inscrits en bloc à cette dernière
date : le premier doit être celui que
nous cherchons.
Au mois de mai 1607, Valleran
est à l'Hôtel de Bourgogne, quel-
ques lignes de TEstoile nous Fattes-
tent; et, le 26 janvier précédent,
une troupe estimable, qui devait
être la sienne, avait joué devant le
roi une farce que le même TEstoile
analyse dans son journal (41).
Ainsi Valleran obtenait du suc-
cès, lorsqu'un dissentiment se pro-
lemant, t. v, p. 72, comm. de P. Paris. —
Ce texte concorde parfaitement avec notre
récit. Pourquoi Buffequin dit-il : le petit
Hôtel de Bourgogne? Je ne sais; mais il ne
peut s'agir que du théâtre des confrères. On
a aussi entendu par là le théâtre du Marais,
l'appellation serait singulière.
I
36 Esquisse d'une histoire
daisit entre lui et son principal
camarade, Mathieu le Febvre, dit
Laporte; et La porte quitta THôtel
vers la fin de 1607 (42). Le 26 jan-
vier suivant, nous trouvons le pro-
cès-verbal rédigé par M® Poussepin,
conseillerau Châtelet de Paris, d'une
comparution faite parles maîtres et
Mathieu le Febvre, dit Laporte,
« touchant les différends qu'ils
avaient ensemble à causé de ladite
grande salle dudit Hôtel de Bour-
gogne, que ledit Laporte avait oc-
cupée comme associé avec Valleran
Lecomte » (43). I-aporte seul, on le
voit, est ici en cause, et Valleran
reste à l'Hôtel de Bourgogne. Nous
en trouvons la preuve dans Tarrêt
du Parlement qui, le 19 juillet
1608, met fin à une longue querelle
entre la confrérie et le prince des
Sots (44). Valleran Lecomte, qui
semble n'avoir pas paru dans les
phases antérieures de la querelle.
Des théâtres de Paris 3 7
venait de se mettre du côté des
confrères, ainsi qu'un sieur Jacques
Resneau, qui était sans doute un de
ses compagnons. L'arrêt ne s'oc-
cup2 que des maîtres et du prince
de la Sottise, et met Valleran et
Resneau « hors de cour et de pro-
cès, sans dépens » (45}.
Ainsi Valleran dirigeait la troupe
française de T Hôtel de Bourgogne
en 1608; la même année, la troupe
italienne des Accesi^ dirigée par
Pier Maria Cecchini, dit Fritellino,
joue sur le même théâtre pendant
quelques mois (46).
III
Nous voici enfin arrivés au temps
où moins de changements se pro-
duisent à l'Hôtel de Bourgogne, et
où une troupe française, qu'on peut
dire stable, y est installée. C'est la
)
38 Esquisse d'une histoire
troupe même de Valleran. De
Mouhy, il est vrai, et bien d'autres
après lui, ont dit que Valleran était
passé définitivement au Marais en
1608 {47) ; mais Valleran était encore
à THôtel en 161 2, comme le prouve
une mention du Voyage de maître
Guillaume en l'autre monde vers
Henri le Grand (48); il y était en-
core en 1619, comme on le voit
par VEspadon satyrique (49) ; et en
1628, au 3o septembre, V Inventaire
mentionne le dernier de quatre
baux faits par les confrères à Val-
leran Lecomte et à ses compagnons,
ce qui suppose un temps assez long
passé à l'Hôtel. Est-ce à dire que
Valleran n'ait jamais quitté l'Hôtel
de Bourgogne ? Non, sans doute, et
nous espérons montrer le contraire
bientôt; mais c'en est assez pour
faire croire qu'il n'en est pas resté
longtemps éloigné.
Sur quoi d'ailleurs s'appuie l'opi-
Des théâtres de Paris 39
nion contraire ? uniquement sur
quelques lignes de l'abbé de Marol-
les, qui se rapportent à l'année 161 6:
« La comédie, où on nous menait
quelquefois, dit-il, lorsque cette
fameuse comédienne, appelée La-
porte, montait encore sur le théâtre,
et qu'elle se faisait admirer de tout
le monde avec Valleran, et que
Perrine et Gaultier étaient des ori-
ginaux qu'on n'a jamais depuis su
imiter (5o) »,
Marie Venier, femme du comédien
Laporte, ayant joué en 1610 —
comme nous le verrons plus loin
— sur ce qu'on veut bien appeler
le théâtre du Marais, on en conclut
qu'elle y jouait encore en 16 16,
que Valleran appartenait aussi au
Marais, et qu'il n'a plus cessé de
lui appartenir. Conclusions, dont
la dernière est évidemment forcée,
et dont la première même est
fausse, car mademoiselle Laporte
Â
40 Esquisse d'une histoire
a suivi son mari dans ses péré-
grinations, et celui*ci était déjà
revenu à l'Hôtel de Bourgogne en
1612 (5i). Il y avait rejoint son an-
cien camarade Valleran, et tout fait
supposer qu'ils ne se sont plus quit-
tés (e). Leurs deux noms sont volon-
tiers associés par les acteurs qui^ après
eux, jouaient sur la scène deTHôtel
de Bourgogne, etPombre deGaultier
Garguille, apparaissant au Gros
fej Le passage de Marolles, bien compris,
montre que Laporte et sa femme étaient à
l'Hôtel de Bourgogne en ï6i6\ ils y étaient
encore le 18 janvier 161 g, date où « Jacques
Mabille, comédien du Roi • j faisant baptiser
sa fille Marie, prenait pour marraine « Marie
Vcnière Csic)^ femme de noble homme Ma-
thieu le Febvre, comédien du roi. » (V. Jal,
Diction, critique^ 2« éd., J872, p. 413, art.
comédiens inconnus). Enfin, Laporte mourut
peu après et Marie Yenier se retira du théâ-
tre, puisqu'on la voit, en 1627, mariée eu
secondes noces à un avocat au Parlement.
Jean Rémond. (V. Tallemant, t. V, p,
71. n.)
Des théâtres de Paris 41
Guillaume en 1634, lui parle à plu-
sieurs reprises de « nos défunts
et anciens prédécesseurs Valle-
ran, Laporte », de « nos anciens
maîtres Vallêran et Laporte et
autres célèbres acteurs et actrices
(52) ».
D'ailleurs, laissons de côté la per-
sonnalité de Vallêran; la perma-
nence d'une troupe chez les confrè-
res se peut établir encore par d'au-
tres preuves.
En 1612, les comédiens qui occu-
pent l'Hôtel trouvent leur possession
assez longue pour valoir titre, et de-
mandent qu'on abolisse les privilèges
de la confrérie de la Passion (53),
Leur demande est repoussée, et le
nouveau roi Louis XIII, dans des
lettres patentes données en décembre
161 2, enregistrées au Parlement
le 3o janvier i6i3, confirme les
« privilèges, libertés, exemptions et
franchises » des confrères, auxquels
ô
i
42 Esquisse (Vune histoire
il permet déjouer et représenter les
mystères profanes « et tous autres
jeux honnêtes et récréatifs... en la-
dite salle de la Passion, dite l'Hôtel
de Bourgogne, et eti tous autres
lieux et places licites et commodes
qu'ils pourront trouver pour cet
effet, si bon leur semble (54) ».
Les comédiens ne se tiennent pas
pour définitivement battus; ils pré-
tendent que le Roi n*a adjugé THô-
tel de Bourgogne aux maîtres que
(( pour trois ans seulement, par pro-
vision,., attendant Tarrêt du princi-
pal yt, et, avant l'expiration de cette
période, deux ans environ plus tard,
ils s'empressent de revenir à la
charge dans des Remontrances au
Roi et à Aos Seigneurs de son con-
seil, pour V abrogation de la confré"
rie de la Passion^ en faveur de la
troupe royale des comédiens (55).
Ce sont bien les mêmes acteurs
qui parlent :
Des théâtres de Paris 48
« Vos comédiens, Sire, qui par
leurs bonnes qualités ontacquis des
amis assez puissants pour leur faci-
liter rentrée de votre cabinet, et
assez zélés en leur intérêt pour les
favoriser de leur présence, ils s'a-
dressent de plein vol à Votre Ma-
jesté, sans aucune autre recomman-
dation ni assistance que leur bon
droit, dans lequel ils ont établi
l'espérance de leur victoire.
» Leurs prétentions, Sire, à pré-
sent^ ne sont autres que celles
mêmes qui ont donné lieu au dififé-
rend qui s'émut, il y a quelque
temps, à votre conseil, entre les co-
médiens et les soi-disant maîtres de
la confrérie de la Passion, lors du-
quel Votre Majesté trouva bon
d'adjuger à ceux-là l'Hôtel dit de
Bourgogne, pour trois ans seule-
ment, par provision et aux charges
portées par l'arrêt, attendant la dé-
cision du principal, laquelle vos co-
À
44- Esquisse d'une histoire
médiens poursuivent aujourd'hui.))
Ces remontrances sont datées par
les frères Parfait de la fin de Tannée
1614 oudu commencement de 161 5,
et sans doute fort justement.
Quels en étaient les signataires ?
Il est fâcheux qu'on n'ait pas jugé à
propos de nous le dire; mais je
nommerais parmi les principaux :
Valleran, Laporte et sa femme, Ro-
bert Guérin, François Vautray et
Hugues Guéru dit Fléchelles, Tini-
mitable Gaultier Garguille. Robert
Guérin est nommé dans une sen-
tence du Châtelet, qui condamne
les comédiens à payer aux maîtres
36 livres ; la sentence est du 1 3 mars
161 3 et la mauvaise volonté des
comédiens à cette date s'explique
peut-être par leur récente récla-
mation contre les confrères. —
Hugues Guéru est nommé dans une
sentence du 16 janvier 161 5, ame-
née par des difficultés du même
Des théâtres de Paris 45
genre et qui peuvent s'expliquer
par des raisons analogues. — Quant
au nom de François Vautray, qui
figure dans les deux pièces^ il forme
comme un trait d'union entre les
autres noms que nous avons cités,
et confirme notre hypothèse.
De i6i5 à 1622, aucun document
juridique ne fait mention de la
troupe royale ni de ses membres.
Elle est donc toujours à F Hôtel de
Bourgogne ; si elle s'était transportée
ailleurs, les confrères auraient vite
protesté (/).
Et c'est précisément ce qu'ils font
en 1622. Le 16 février, et par une
sentence contradictoire, « Etienne
{f) Elle y était certainement en 16 19, puis-
que YEspadon satyrique désigne la plupart
de ses membres comme représentant à l'Hôtel
de Bourgogne, et puisque Dulaure (t. VI,
p. 68; cite de cette date un Advis du Grog-
Guillaume sur les affaires de ce temps,. ^
où on lit : « Si on s'amusait à aller ivrogner
aux portes, adieu THôtel de Bourgogne. »
46 Esquisse d'aune histoire
Ru fin dit Lafontaine, Hugues
Guéru dit Fléchelles, Robert Guérin
dit La Fleur, Henri Legrand dit
Belleville (56), et autres, leurs com-
pagnons comédiens, représentant en
l'Hôtel d'Argent (l'Hôtel de Bour-
gogne étant lors occupé par d'autres
comédiens), sont condamnés payer
auzdits Doyen, maîtres et gouver-
neurs, trois livres tournois par cha-
cun jour de représentation, et aux
dépens (Sy) w.
Pourquoi la troupe royale a-t-elle
ainsi quitté l'Hôtel de Bourgogne? On
ne peut que le conjecturer, et nous
le ferons tout à l'heure. Mais la date
de son départ nous paraît bien indi-
quée ; celle que nous avons posée
pour son arrivée est au moins pro-
bable ; elle était donc restée chez
les confrères environ i5 ans, de 1607
à 1621.
Des théâtres de Paris 47
IV
Qu'on nous permette maintenant
de revenir en arrière ; nous allons
trouver la première mention de ce
a théâtre du Marais », dont nous
nous étions informés inutilement
plus haut.
On a vu que Laporte, après un
court séjour à THôtel de Bourgo-
gne, l'avait quitté avant le com-
mencement de 1608. Revint-il en
province? Cela est probable, mais
Paris l'attirait, et il abandonna la
province encore une fois. Le 12 no-
vembre 1609, ^^^ ordonnance de
police parle de deux théâtres (58),
et^ le i3 mars 1610, le Châtelet
rend une sentence entre les con-
frères, d'une part, « Mathieu le Feb-
vre dit Laporte et damoiselle Marie
Venier, sa femme, et leurs compa-
gnons comédiens, d'autre, par la-
48 Esquisse (Tune histoire
quelle appert îceux comédiens, qui
jouaient lors en la maison appelée
l'Hôtel d'Argent, avoir été condam-
nés payer solidairement aux deman-
deurs soixante sols par chacun jour
qu'ils avaient représenté et repré-
senteraient audit Hôtel d'Argent,
et icelle sentence être déclarée
commune avec tous les autres co-
médiens = qui pourraient jouer ci-
après en cette ville de Paris. »
Y a-t-il rien dans ce texte qui
suppose Pexistence avant 1609 ou
ï6 10 d'un théâtre régulier à l'Hô-
tel d'Argent {g)7 Y a-t-il même
(g). Le RecueiUdes princ. tiltreSy en rap-
portant cette sentence (p. 69), dit que Laporte
représentait à l'Hôtel d'Argent, « l'Hôtel de
Bourgogne étant lors occupé par d'autres co-
médiens », Voilà qui ne suppose certes pas
la fondation déjà ancienne d'un théâtre régu-
lier et rival.
Selon P. Lacroix (xvii* s. Institutions,
p. 498), la condamnation devait avoir son
effet depuis 1600, date de la fondation de
Des théâtres de Paris 49
rien qui en suppose la fondation en
ce moment (h) ? En quoi la mention
qui est faite ici de l'Hôtel d'Argent
dif}ière-t-elle des mentions faites par
V Inventaire de tant de théâtres éphé-
mères, et, par exemple, du jeu de
paume d'Etienne Robin, rue Bourg-
l'Abbé, en 1621, du carreau de la
l'Hôtel d'Argent. Comme ce théâtre, — tou-
jours selon P. Lacroix ~ donnait trois re-
présentations par semaine, cela faisait à
peu près t200 fois 60 sols, ou 36oo livres
tournois que Laporte avait à payer. D'où les
aurait-il pu les tirer? Et cependant les con-
frères déclarent eux-mêmes que la sentence a
été exécutée f^ Recueil p. 69).
(h). Les représentations de l'Hôtel d'Argent
cessèrent sans doute presque aussitôt après
Tarrêt du Parlement rendu. En effet, Henri IV
fut assassiné le 14 mai, et • les comédiens,
n*osant jouer à Paris, tant tout le monde y
était dans la .'consternation, s'en allèrent dans
les provinces. » (Tallemant, t. I, p. 38; hist.
du maréchal de Roquelaure). — Lorsque
Laporte reyint à Paris, ce fut sans doute pour
faire sa rentrée à l'Hôtel de Bourgogne,
puisque nous Ty trouvons dès 161 2.
j
5o Esquisse d'une histoire
rue Saint- Antoine en lôaS^Si un
théâtre fixe existe désormais à THô-
tel d'Argent, pourquoi ne trouve-t-
on pas contre lui de protestations
postérieures des confrères, assez
procéduriers de nature, comme on
l'a vu (59)? Serait-ce que le Roi et
le Parlement auraient autorisé le
nouveau théâtre? Mais les lettres
patentes de 16 12, enregistrées en
161 5, prouvent le contraire fort
nettement, puisqu'elles confirment
les privilèges octroyés à la confrérie
t par les feus rois prédécesseurs »
de Louis Xlll, et portent défenses
expresses « à tous joueurs^ comé-
diens ou autres, de jouer ni repré-
senter dans la ville de Paris, fau-
bourgs et banlieue d'icelle, aucuns
)eux ailleurs qu'en ladite salle de la
Passion, dite THôtel de Bourgogne,
sinon sous le nom et congé de ladite
confrérie et au profit d'icelle (60). »
Il suffit d'ailleurs de jeter un coup
Des théâtres de Paris 5 1
d'œil sur Thistoire de la confrérie,
même après 1612, pour voir que ses
privilèges n^ont subi aucune atteinte.
Ils sont mentionnés expressément
dans des pièces de 1621 et de 1627,
et la confrérie en exige si bien le res-
pect, qu'en 16 1 9 ellefait défendre par
le Parlement aux habitants de Sois-
sons « de plus élire un prince de la
jeunesse (61). » En 1629, enfin, les
comédiens Royaux recommencent
contre elle et avec plus d'achar-
nement leur lutte de 161 2 et de
1614.
Donc, pas de second théâtre léga-
lement installé en 1610, nia au-
cune autre date antérieure à 1629;
et Ton sait qu*^n 1629, avant la re-
présentation de Mélite^ il n'y avait
à Paris qu'une seule troupe : Cor-
neille Ta dit expressément (62). Ce
qu'on a pris pour un « théâtre du
Marais », c'est tout bonnement les
asiles provisoires — et nullement
à
52 Esquisse d*une histoire
placés au Marais (i) — de troupes
qui ne voulaient pas aller chez les
confrères, mais que ceux-ci savaient
bien forcer à y venir ou à leur payer
une redevance.
Cherchons encore quelles troupes
ont passé à Paris, où elles se sont
établies et pendant quel temps.
En 1610, Claude Husson, dit
Longueval, et autres comédiens
jouant au faubourg Saint-Germain-
des-Prés, sont condamnés à (payer
aux maîtres soixante sols par jour
de représentation, en appellent au
(1). L'Hôtel d'Argent était placé : selon les
uns, au coin de la rue de la Poterie, près de la
Grève (Fr. Parfait, t. III, p. 244, n. *;
E. Despois, Le théâtre français sous
Louis XJVj 1874» P< II); selon les autres,
au coin des rues de la Verrerie et de la Pote-
rie (V. Fournel, Contemp, de Molière^ t. III,
p. vnu Dans le premier cas, il faisait partie
du quartier de la Grève, et dans le second,
il était sur les confins du quartier de la Grève
et du quartier Saint-Martin (63).
Des théâtres de Paris 5 3
bailli de Saint-Germain et ne réussis-
sent qu'à se faire condamner plus
sévèrement par le Châtelet. Défense
leur est faite « de plus représenter
aucunes comédies sans le consente-
ipent » des maîtres (64). Ils quittent
sans doute Paris pour la province.
En 161 3, le 24 novembre, la
troupe italienne d'Arlequin inau-
gure ses représentations à l'Hô-
tel de Bourgogne (65) : un nouveau
bail lui est fait le 4 avril 16 14, et
elle quitte Paris en juillet de la
même année.
C'est une troupe française qui la
remplace à l'Hôtel, celle de Claude
Husson, dit Longueval, qui s'est
décidé à revenir à Paris et renonce
à lutter contre les confrères. Elle
porte maintenant le titre de troupe
des <i comédiens ordinaires de Mon-
sieur le Prince », et c'est noble
homme Mathieu de Roger, sieur de
Champluisant, qui passe un bail
b4 Esquisse d^une histoire
pour elle (66). Il y a maintenant
deux troupes françaises à THôtel,
mais cette situation ne dure pas.
Noble homme Mathieu de Roger
abandonne ses protégés (67), qui
quittent leur théâtre le 22 novem-
bre, non sans laisser une dette de
1400 livres, pour laquelle « Husson,
dit Longueval, Nicolas Gastrau et
autres, leurs associés », sont con-
damnés par le Châtelet (68). Les
temps étaient durs pour les con-
frères ; la troupe royale venait d'at-
taquer leurs privilèges, et contestait
pour payer son loyer. Le Châtelet
dut rendre une nouvelle sentence,
qui l'obligeait à payer le prix por-
té sur le bail de Longueval.
La troupe de Monsieur le Prince
fut sans doute dissoute, ou revint
en province (69). Toujours pas de
nouvelles de l'Hôtel d'Argent.
En 161 9 (70), l'infatigable Châte-
let condamne Claude Aduet et ses
Des théâtres de Paris 5i>
associés à payer u soixante sols par
jour qu'ils ont joué, voltigé sur la
corde et représenté plusieurs choses
facétieuses • . Claude Aduet opérait
probablement en plein vent.
L'année 1620 joue un grand rôle
chez certains historiens du « Théâ-
tre du Marais ». C'est à cette date
que, selon Chappuzeau,« les accrois,
sements de la ville de Paris donnè-
rent occasion à une troupe de co*
médiens (mais avec le consentement
de celle qui représentait à THôtel
de Bourgogne) d'élever un théâtre
dans une maison nommée THôtel
d'Argent, au quartier du Marais-du-
Temple(7i). » Chappuzeau se garde
bien de citer ses preuves ; il ignore
d'ailleurs qu'on avait déjà joué à
THôtel d'Argent, et que, si un con-
sentement avait été donné, il l'au-
rait été par les confrères. Je trouve
ailleurs un renseignement bien dif-
férent : « En 1620, on voit un éta-
56 Esquisse d'une histoire
blissement de comédiens rue Vieille-
du-Temple »; et M. Fournel, à
qui j'emprunte ces mots, part de là
pour se demander si ces comédiens
étaient les mêmes qui avaient déjà
occupé THôtel d'Argent» et pour
conclure que, selon toute vraisem-
blance, il y avait alors deux trou-
pes dans le quartier du Marais (72).
Mais ni M. Fournel, ni ceux qui
parlaient avant lui des comédiens de
la rue Vieille-du-Temple (7 3), ne
prouvent leur existence en citant
le moindre document.
Le Recueil des principaux titres
et VInventaire ne nous en fournis-
sent pas non plus ; mais ils citent
une sentence du Châtelet, en date du
i3 octobre 1621, défendant a
(( Etienne Robin, maître du jeu de
paume du Moutardier, rue du
Bourg-l'Abbé, de louer son jeu aux
comédiens pour y représenter»; une
autre encore, du 4 mars 1622, signi-
Des théâtres de Paris
fiée « audit Robin et à tous autres
paumiers (74). »
Si l'année 1620 n'a ainsi, dans
l'histoire du théâtre au commence-
ment du XVII* siècle, d'autre impor-
tance que celle que les historiens
lui ont libéralement donnée, il n'en
est pas de même de Tannée 1622.
C'est alors que la troupe royale se
brouille avec les confrères et va re-
présenter à l'Hôtel d'Argent.
Pourquoi? Et pendant combien
de temps? Peut-être que les deux
sentences citées plus haut permet-
tent de répondre à ces deux ques-
tions. N'est-il pas vraisemblable,
en effet, que la troupe chassée de la
rue Bourg-l'Abbé par la sentence
du i3 octobre 1621 se sera trans-
portée à l'Hôtel de Bourgogne, où
les confrères l'auront d'autant
mieux accueillie qu'il avaient à se
plaindre des comédiens royaux (/).
(J). Rappelons-nous ce que dit encore le
58 Esquisse d'une histoire
Ceux-ci, irrités, se seront retirés à
THôtel d'Argent, où sera venue les
inquiéter la sentence du i6 février
1622, puis, s'y trouvant mal, dans
le jeu de paume de la rue Bourg-
TAbbé, où les aura poursuivis la
nouvelle sentence du 4 mars (k).
Ni Tune ni l'autre des deux troupes
ne paraît avoir gagné à ces change-
ments et à cette rivalité; vers la rin
de l'année, toutes deux ont quitté
Paris, dont les bourgeois se trou-
vent ainsi privés de leur meilleur
divertissement (jS).
Recueil des principaux titres {V. h. p. 46),
« l'Hôtel de Bourgogne étant lors occupé par
d'antres comédiens ». Or, je n'ai pas trouvé
trace d'autres comédiens que de ceux de la
rue Bourg-l'Abbé.
(k). Le rapprochement des deux dates :
16 février-4 mars, ne rend-il pas l'hypothèse
fort naturelle?
)
Des théâtres de Paris 5g
V
Un an et demi après, THôtel de
Bourgogne est de nouveau occupé,
puisque le Châtelet défend aux
confrères, le 14 février 1624, « de
permettre d'être représenté sur le
théâtre dudit Hôtel aucunes comé-
dies qui contreviendraient à la civi-
lité et honnêteté, à peine d'en ré-
pondre en leurs propres et privés
noms », et que, d'autre part, le 3
septembre, il cherche à les proté-
ger contre des insolences faites aux
portes de l'Hôtel (76). Mais la
troupe en représentations est sans
doute la troupe italienne de Lélio,
en ce^ moment à Paris (77) : les Ita-
liens étaient coutumiers de pièces
plus immorales encore que les far-
ces des troupes françaises ; et quant
aux insolences faites aux portes,
elles pouvaient être dirigées par les
6o Esquisse d*une histoire
comédiens royaux de retour ou par
la principauté de la Sottise, encore
en lutte avec les confrères.
Vers la fin de 1625, les Italiens
ont quitté Paris, et les confrères,
pour les remplacer, louent le 3 août
leur salle à des comédiens qui por-
tent le titre de < comédiens du
prince d'Orange (78). » Aucun
d'eux n'est nommé dans l'Inven-
taire ^ mais Le Noir et sa femme en
étaient sans doute, puisqu'ils étaient
« au prince d'Orange (79) », et
peut-être avaient-ils déjà pour ca-
marade Guillaume Gilbert, sieur
de Mondory.
L'entrée à l'Hôtel de Bourgogne
de cette troupe, qui était bonne,
irrite les Comédiens du Roi, et ra-
nime leur querelle avec les confrè-
res. On les voit à la fois chercher
à infirmer le bail fait à leurs rivaux,
troubler leurs représentations, et
s'installer, pour leur enlever leur
Des théâtres de Paris 6i
public, tout à proximité de THôtel
de Bourgogne. .Le lieutenant civil
est forcé d'intervenir. Il ordonne
que les comédiens du prince d'O-
range jouiront de leur bail; il dé-
fend à ceux du roi «de les troubler
ni de jouer autour de la maison et
Hôtel de Borgogne, « ains au car-
reau de la rue Saint Antoine », en
payant auxdits maîtres les droits
accoutumés (80). )>
Ainsi les comédiens du Roi n'é-
taient ni à l'Hôtel d'Argent ni dans
la rue Vieille-du-Temple,etce n'est
ni à l'une ni à l'autre de ces rési-
dences que les renvoie le lieutenant
civil.
L'année 1626 est calme, mais en
1627 les confrères font sans doute
un nouveau bail à la troupe du
prince d'Orange, et les querelles re-
commencent (81). Les comédiens
Royaux recourent aux violences
contre l'Hôtel de Bourgogne ; les
62 Esquisse d'une histoire
maîtres les font condamner par le
Châtelet et, de plus, en guise de re-
présailles, leur font défendre « de
ne plus représenter de comédies à
heure indue, à peine de prison (82). »
Presque en même temps, ils défen-
dent leurs privilèges contre une
troupe d\( opérateurs grecs », qui
demandent à jouer « comédies,
farces et ballets », et qui portent les
noms peu helléniques de Désidières,
Descombes, Hiérôme Lecomte et
Georges. Les privilèges remportent
encore une victoire, et les Grecs
sont condamnés aux dépens (83).
Cependant le bail fait aux comé-
diens du prince d'Orange était ex-
piré; ils quittent THôtel de Bour-
gogne, où les comédiens du Roi se
décident à revenir. Le 3o septembre
1628, un bail leur est fait, où sont
nommés Valleran Lecomte, Hugues
Guéru, Henri Legrand et un nou-
veau venu, Pierre le Messier, qui
Des théâtres de Paris 63
doit bientôt illustrer le surnom de
Bellerose (84).
Ce n'est pas sans quelque arrière,
pensée que ces comédiens rentraient
dans leur ancien théâtre ; moins
que jamais, ils abandonnaient l'es-
poir de déposséder les confrères et de
cesser les payements qu'ils leur
devaient. Dès le mois de mars 1629,
ils ne paient leur loyer qu'après
assignation donnée par les maîtres;
et si, le 6 juin suivant, ils passent
avec eux un nouveau bail, ils ne
cessent pas pour cela de chercher^
avec des hommes compétents, com-
ment ils parviendront à prouver
que la maison est à eux, et que c'est
aux maîtres d'en sortir. Les con-
frères le savent, veulent parer le
coup, et, cherchant à leur tour à
supplanter de dangereux locataires,
introduisent de nouveau dans l'Hô-
tel les comédiens du prince d'Orange,
à qui ils font un bail à la date du
64 Esquisse d'une histoire
9 juillet. Les comédiens du Roi
réclament, et les confrères les font
sommer de déclarer s'ils veulent
parachever le temps restant de leur
bail (85).
Une longue lutte judiciaire et ad-
ministrative s'engage, qui dure
jusqu'à la fin de janvier i63o et qui
donne lieu à de nombreux actes,
requêtes, exploits, informations et
arrêts (86). Nous ne la raconterons
pas dans le détail, mais nous de-
vons extraire des requêtes présen-
tées par les deux parties quelques
lignes qui prouvent les intentions
et les machinations que nous leur
avons attribuées.
Les coi^édiens, qui veulent obli-
ger les confrères à présenter leurs
titres de propriété au Roi et aux
seigneurs de son conseil, représen-
tent à ceux-ci le long temps qu'ils
ont joué à THôtel de Bourgogne,
depuis que le feu Roi et Louis XIII
Des théâtres de Paris 65
lui-même les ont retenus pour leur
représenter la comédie, ainsi qu'au
public. Ils montrent quel profit les
confrères ont tiré, sans travailler
eux-mêmes, du travail de la troupe
royale; comment, de plus, ils louent
leur salle à des « comédiens ita-
liens, ou autres étrangers, qui en
paient grosse somme, outre leurs
exactions. » Et la requête ajoute :
« Ils ont, par sentence, fait dé-
fendre le théâtre auxdits suppliants,
qui s'accommodaient en d'autres
lieux, s'il ne leur était par eux payé
un écu par jour, lesquelles condam-
nations lesdits suppliants ont été
forcés d'exécuter par le peu ou
point de connaissance qu'ils avaient
de l'usurpation desdits lieux, et des
mauvaises actions qu'un grand gain
qu'ils exigent produit journelle-
ment (87). Ce qu'ayant appris les-
dits prétendus Maîtres, et que les
suppliants avaient -tiré quelque lu--
66 Esquisse d'une histoire
mière par plusieurs personnes^ qui
n'ont pu souffrir la mauvaise appli-
cation de si grands denier s, quoique
levés sous prétexte d'œuvres pies,
ils ont, par une pure malice et au
préjudice de la parole qu'ils avaient
donnée auxdits suppliants pour la
continuation de leur bail^ convenu
avec quelque compagnie de corné-'
diens nouvellement venus à Paris
pour chasser les suppliants^ qui sont
près de Votre Majesté pour satis-
faire à vos commandements, afin de
leur ôter Tenvie de faire connaître
le mauvais emploi desdits deniers;
de quoi étant avertis, ils se seraient
plaints à elle, qui aurait eu agréa-
ble d*y interposer son autorité (88).
Cette requête est du 1 2 octobre.
Les confrères répondent le 26 que
les comédiens u ne sont personnes
capables wjpour exiger la produc-
tion de leurs titres de propriété, que
la production n'en saurait être faite
Des théâtres de Paris 67
devant le Conseil, mais que ces titres
sont parfaitement réels.
« Au surplus, ce qu'on leur im-
pute par ladite requête a été par
eux légitimement fait ^ Qt en vertu
de jugements, sentences et arrêts
contradictoires, à ce que lesdits
Guérin et associés n'en prétendent
cause d'ignorance (89).»
Ni comédiens ni confrères ne
parlent de la présence actuelle de
la troupe du prince d'Orange,
et Tarrêt du Conseil, qui ordonne
que les maîtres de la Confrérie
<( mettront es mains du commis-
saire à ce député, dans huitaine
pour tous délais, les titres et pièces
justificatives dudit droit par eux
prétendu en THôtel de Bourgo-
gne (90) », cet arrêt ne mentionne
même pas la troupe en question.
J'en conclus que cette troupe n'était
déjà plus à THôtel de Bourgogne,
et que les maîtres, voyant les comé-
i
68 Esquisse d'une histoire
(liens Royaux fortement soutenus
dans le Conseil du Roi, ont prié
ceux du prince d*Orange de s'éloi-
gner et de leur épargner une diffi-
culté de plus. Ceux-ci ont consenti
d'autant plus volontiers, qu'ils espé-
raient réussir mieux en jouant seuls
et dans un théâtre à eux qu'en lut-
tant contre les comédiens Royaux,
si connus déjà; et, pour établir
définitivement un nouveau théâtre,
ils comptaient sur une pièce nou-
velle, qu'un auteur encore inconnu
leur avait confiée pendant leur ré-
cent voyage en province. Déjà, il
est vrai, ils avaient présenté leur
pièce au public, et les trois premiè-
res représentations n'en avaient pas
été fructueuses; mais les suivantes
l'avaient été ou allaient l'être, et le
succès en devait être surprenant.
On voit que nous voulons parler
de la Mélite de Corneille, et que
nous essayons de résoudre un petit
i
Des théâtres de Paris 69
problème littéraire quia déjà occupé
bien des érudits.
Suivons les comédiens du prince
d'Orange. Si nos hypothèses sont
fondées, les confrères ont dû
leur promettre d'être bienveillants
pour leur entreprise et de n'exiger
pas tout de suite la redevance due
par eux. Rien, en effet, pendant
l'année i63o, ne rappelle leur exis-
tence, et nous pourrions les croire
repartis pour la province; mais nous
les retrouvons en i63i. Le 25 fé-
vrier, les maîtres envoient un exploit
d'assignation « à Le Noir, comédien,
et ses associés, pour comparoir par
devant le lieutenant civil, pour eux
voir condamner à payer six vingt
quinze écus pour six vingt quinze
journées qu'ils avaient représenté
hors dudit Hôtel de Bourgogne » (9 1 );
et l'affaire est définitivement réglée
•
en février i632 par le Châtelet, qui
condamne Le Noir et ses associés
7© Esquisse (Tune histoire
solidairement à payer aux maîtres
la somme de 4o5 livres pour six
vingt quinze jours qu'ils ont repré-
senté comédies en la ville de Paris,
(( au jeu de paume de Berthault,
comme aussi à leur payer un écu
par chacun jour qu'ils y joueraient
ci-après (92). »
Où était situé le jeu de paume de
Berthault? Dans l'ancienne rue des
Anglais, devenue la rue Berthault,
et qui fait partie du quartier Saint-
Martin (93). Ainsi, ce n'est pas au
Marais que M élite a été jouée, et
ce n'est pas au Marais que le théâ-
tre dit du Marais a commencé.
De i63i à i635, Thistoire de la
troupe Le Noir-Mondory est fort
obscure.
Nous verrons plus loin que, le
14 mai i63i, le Châtelet défend aux
comédiens du Roi «de relouer THô-
tel de Bourgogne à qui que ce soit» ;
peut-être est-ce à la troupe Le Noir-
Des théâtres de Paris 7 1
Mondory qu'ils avaient reloué : le
désir de supplanter les confrères et
de battre monnaie, eux aussi, avec
leurs prétendus droits, pouvait les
avoir réconciliés avec leurs rivaux.
A la fin de i632 ou au commence-
ment de i633, une troupe de comé-
diens s'établit au jeu de paume de
la Fontaine, rue Michel-le-Gomte,
avec un bail de deux ans ; mais les
habitants des rues Michel-le-Comte
et Grenier-Sainl-Lazare se plaignent
au Parlement des dangers que cause
la présence d'un théâtre dans des
rues aussi incommodes et aussi
étroites, et, le 22 mars i633, le
Parlement défend les représenta-
tions (94). Pour les frères Parfait,
les comédiens en question consti-
tuent une troisième troupe; mais il
s'agit encore de la troupe Mondory.
Elle ne s'était éloignée du cul-
de-sac Berthault que de quelques
toises : les rues Michel-le-Comte et
72 Esquisse d'une histoire
Grenier-Saint- Lazare faisaient aussi
partie du quartier Saint-Martin.
D'ailleurs, Tarrêt du Parlement
ne fit pas déloger les comédiens de
ce nouveau poste. Protégés sans
doute par de puissants personnages,
ils y étaient encore en 1634(95);
mais cette année même les vit se
transporter dans une nouvelle rési-
dence, qui devait être définitive. Au
8 mars, Eud. Soulié cite un « bail
•fait par des particuliers aux comé-
diens qui représentent au jeu de
paume du Marais (96] » ; ce jeu de
paume est évidemment celui de la
rue Vieille-du-Temple. La troupe
était arrivée enfin au Marais, et
ses pérégrinations étaient termi-
nées (97).
Je dis ses pérégrinations, non ses
ennuis. Le 28 novembre, elle repré-
sentait avec un grand succès La Co-
médie des Comédiens de Scudéry et
Mélite dans ces fêtes de TÂrsenal
Des théâtres de Paris y 3
qu'a racontées Renaudot (98) ; mais,
au lendemain de ce triomphe, le
Roi lui enlevait pour les transpor-
ter à l'Hôtel de Bourgogne six de
ses meilleurs acteurs: Le Noir et
sa femme, rEspy,Jodelet, La France
ou Jacquemin Jadot et Alizon (99).
Les représentations furent inter-
rompues, mais pas longtemps. Grâce
à l'énergie et à l'industrie de Mon-
m
dory, la troupe se rallia encore une
fois; dès le 18 décembre, elle repré-
sentait Sophonisbe chez le duc de
Puylaurent (100), et, quelques jours
après, elle rouvrait au public son
théâtre de la rue Vieille-du-Temple
(lOl).
Dès avant cette date, les comé-
diens du nouveau théâtre avaient
pris le nom de Comédiens du Roi
(102); mais la vraie troupe royale
est toujours celle qui représente â
l'Hôtel de Bourgogne, puisque le
Roi prend soin d'y faire entrer de
10
à
74 Esquisse d'une histoire
bons acteurs, en les enlevant à sa
rivale.
Faut-il donner nos preuves pour
le court récit qui précède? — Le
Noir « avait été au prince d'O-
range » avant de jouer au Marais, et
l'on voit qu'en i632 encore, malgré
la supériorité de Mondory, c'est lui
qui est regardé comme le chef de la
troupe où ils représentaient tous
deux. Il est donc évident que Le
Noir n'est pas passé dans une
troupe formée par Mondory ; c'est
encore celle du prince d'Orange qui
joue chez Berthault, puis au Marais
(io3). — En février i63i, Le Noir
a donné hors de l'Hôtel de Bour-
gogne i35 représentations. S'il en
donnait deux par semaine, chiffre
probable, puisqu'il y aura trois re-
présentations par semaine au temps
de Chappuzeau et qu'il n'y en avait
qu'une en 1597 (104), il a com-
Des théâtres de Paris y S
raencé à les donner précisément au
moment où, selon nous, la troupe du
prince d'Orange s'est séparée des
Confrères. Supposons pourtant que
le nombre des représentations par
semaine ait été de trois : le chiffre
de i35 représentations nous fait en-
core remonter très haut dans Tan-
née i63o; les quelques mois qui
restent peuvent avoir été considérés
comme parachevant le bail fait en
juillet 1629 par les Confrères. —
Corneille a dit lui-même de Mélite:
« Le succès en fut surprenant: il
établit une nouvelle troupe de co-
médiens à Paris j malgré le mérite
de celle qui était en possession de
s^y voir V unique » ; et ailleurs :
« Ses trois premières représenta-
tions n'eurent point tant d'affluence
que la moindre de celles qui les sui^
virent dans le même hiver {lob) ».
On sait, d'autre part, comment les
frères Parfait et M. Marty Laveaux
76 Esquisse d'une histoire
ont démontré que Mélite avait été
représentée vers la fin de 1629 {106).
Or, notre hypothèse place les pre-
mières représentations de Mélite
en septembre ou octobre 1629, et
les suivantes dans l'hiver de 1629-
i63o; les premières ont été données
sur le théâtre qui était alors Tuni-
que, les suivantes ont établi à Paris
un nouveau théâtre qui durera.
VI
Arrêtons-nous. Il est temps de
revenir à la troupe royale, que nous
avons laissée en lutte avec les con-
frères, et d'achever rapidement ce
qui nous intéresse de son his-
toire.
A la fin de 1629 (29 décembre),
le Conseil du Roi rétablit la paix
etître les parties. Forcé par les re-
gistres de la Chambre des Comptes
Des théâtres de Paris 77
de reconnaître les titres de propriété
des confrères (107), il donnait du
moins une certaine indépendance
aux comédiens. Il ordonnait que
ceux-ci « jouiraient pour le temps
et espace de trois ans de la salle
dudit Hôtel de Bourgogne et loges
étant en icelle, fors et excepté de
celle des anciens maîtres, qui demeu-
rait aux maîtres de ladite confrérie,
tant pour eux quepourleurs parents
et amis, moyennant la somme de
2400 livres de loyer pour chaque
année ; en outre, aux charges et
conditions portées audit arrêt donné
à Paris, par lequel arrêt iceux co-
médiens sont condamnés à donner
auxdits maîtres bonne et suffisante
caution )) (108). Immédiatement, les
comédiens font visiter l'Hôtel de
Bourgogne et en réclament les clefs
aux confrères. Mais les articles de
ce traité de paix n'étaient qu'insuf-
fisamment explicites sur les attribu-
78 Esquisse d'une histoire
tions et les droits de chacun ; ils ne
pouvaient produire qu'une paix
fourrée.
De 1629 à i632, les démêlés sont
incessants. En juillet i63o, les con-
frères ayant fait arrêter ce qu'ils
avaient pu trouver appartenant aux
nommés Du Rossay, Beaupré et
leurs associés, comédiens de Mon-
seigneur le duc d*Angoulême, qui
représentaient au faubourg Saint -
Germain, les comédiens du Roi in-
terviennent, et le Châtelet est obli-
gé d'adjuger aux confrères le droit
traditionnel de soixante sols par
représentation (109). — Le mois
suivant, nouvelle action des confrè-
res contre Hiérôme Scelerier et ses
associés, comédiens de Monseigneur
le Prince, qui représentaient au
mêtne faubourg Saint-Germain ;
nouvelle intervention des comé-
diens (iio). — En i632, interven-
tion des incorrigibles comédiens
Des théâtres de Paris 79
dans le procès entre les confrères et
la troupe de Le Noir ; le Châtelet
les met hors de cour (m).. — Et,
Tannée précédente, les comédiens,
voulant faire complètement acte de
propriétaires, le Châtelet avait dû
leur défendre « de relouer T Hôtel
de Bourgogne à qui que ce soit, et...
aux comédiens qui l'auraient loué
de se servir du bail qui leur aurait
été fait, à peine d'amende, et d'être
emprisonnés en cas de contraven-
tion, et aux dépens (i 12) ».
Cependant ces comédiens, si em-
pressés à faire valoir des droits
imaginaires, laissaient les maîtres
payer 600 livres « pour employé ' au
payement des gens de guerre » de
Sa Majesté, ou fournir, suivant or-
donnance royale, un homme avec
son épée etson baudrier (ii3).
Le bail de 16 32, fait à « Robert
Guérin dit La Fleur, Hugues Guéru
dit Fléchelles, Henri Legrand dit
i
J
8o Esquisse d'une histoire
Belleville, Philibert Robin dit le
Gaucher, Pierre Le Messier dit Bel-
lerose, et Louis Gallien dit Saint*
Martin, tous comédiens ordinaires
es gages de Sa Majesté », déclare
enfin expressément que les comé-
diens renoncent à leurs prétendus
droits sur l'Hôtel de Bourgogne, et
que les parties contractantes se dé-
partent c de tous procès et discords
pendant entre euxj tant au Conseil
privé du Roi qu'ailleurs » (114) : et
les années suivantes sont plus cal-
mes.
Le bail fut d'ailleurs renouvelé
en i635, puis en 1639 (ii5), etc..
et c'est en 1677 seulement que le
long procès auquel nous avons
assisté eut une solution définitive.
Les biens de la confrérie furent
confisqués au profit deThôpital gé-
néral, et c'est à Thôpital général
que les comédiens en payèrent le
loyer. La confrérie avait vécu.
Des théâtres de Paris 8 1
VII
Mais nous n^avons pas à descen-
dre si bas ; les limites que nous
nous étions tracées ont été atteintes.
Résumons en quelques mots ce que
nous avons appris.
Fondé en 1 548, le théâtre de THô-
tel de Bourgogne ne servit d*abord
qu'aux représentations des confrères
de la Passion. Leur succès ayant été
médiocre, une vraie troupe de comé-
diens fut, en 1578, chargée par eux
de les remplacer ; mais il ne
semble pas qu'elle ait abandonné
leur répertoire, et les maîtres, d'ail-
leurs, n'avaient abdiqué que provi-
soirement. Ils remontèrent sur leur
scène, mais pour en descendre
bientôt; et sans retour. Dès lors,
leur rôle se borna à louer leur salle,
à percevoir un tribut de ceux qui
représentaient en quelque autre en-
II
82 Esquisse d'une histoire
droit de Paris, et à poursuivre de-
vant les juridictions compétentes
ceux qui feignaient d'ignorer leurs
privilèges.
Maintes troupes, françaises ou
étrangères, passèrent ainsi sur leur
scène successivement ou simultané-
ment. Mais, s'il n'y eutjpas, comme
on l'a dit, de troupe régulièrement
et définitivement installée dès la fin
du XVI* siècle, nous voyons du
moins certains acteurs y revenir à
plusieurs reprises, y faire de longs
séjours, et installer enfin à rtiôtel
de Bourgogne ce théâtre définitif
qu'on avait voulu y voir trop tôt.
Valleran Lecomte représente quel-
ques mois rue Mauconseil en iSgg;
il y revient probablement l'année
suivante avec Robert Guérin ; nous
l'y retrouvons en 1607, et cette
fois pour longtemps. Sa troupe y
semble même définitivement assise,
lorsque nous la voyons quitter THô-
Des théâtres de Paris 83
tel en 1622, pour promener dans
Paris ou dans les provinces ses re-
présentations. Elle y revient enfin
en 1628, et cette fois pour n'en plus
sortir (116). Depuis longtemps, elle
porte le titre de troupe royale, et
prétendra même le mériter seule,
alors que d'autres auront acquis le
droit de le porter.
En face de cet Hôtel de Bourgo-
gne, qui ne prend que tardivement
le caractère d'un théâtre définitif,
mais où cependant les représenta-
tions ne chôment guère et où une
même troupe séjourne si longtemps,
un théâtre rival existait-il, même
soumis à des éclipses et à des chan-
gements de personnel, même se
transportant à plusieurs reprises
dans des locaux divers ?
Nous sommes forcé de répondre
non.
Les troupes que nous avons vues
paraître à l'Hôtel de Cluny, à la
84 Esquisse d'une histoire
foire Saint-Germain, au faubourg
Saint-Germain-des-Prés, dans la
rue Bourg-PAbbé, ailleurs encore,
n'avaient entre elles aucun rapport
et ne sont restées que fort peu de
temps.
De 1622 à 1628, la troupe royale,
qui n'est pas restée constamment à
Paris, n'en a pas moins changé plu-
sieurs fois de local dans la capitale ;
preuve qu'elle n'avait pas trouvé
de théâtre tout fait pour s'y éta-
blir.
Restent les représentations don-
nées par Laporte et par la troupe
royale elle-même à l'Hôtel d'Argent.
Les premières ont commencé vers
1609, et n'ont guère duré qu'un an;
celles de la troupe royale n'ont peut-
être duré que quelques jours. Et
voilà, si l'Hôtel d'Argent était au
Marais, à quoi se réduirait toute
l'histoire du a Théâtre du Marais »
jusqu'après Mélite, Mais il manque
Des théâtres de Paris 85
même, à la légende que nous ve-
nons de combattre, ce faible fonds
de vérité.
C'est seulement à la fin de 1629
que les comédiens du prince d'O-
range ont établi à Paris un second
théâtre; c'est en i634 que ce
théâtre s'est établi au quartier du
Marais {117).
à
86 Esquisse d'une histoire
NOTES
(j) Recueil des principaux filtres,
concernant Vacquisition de la propriété
des Masure & place oii a esté bastie la
maison (appelée vulgairement l'Hostel
de Bourgogne) sise en c?tte ville de
Paris, es rues de Mauconseil, & Neufve
S. François, faicte par les Doyen,
Maistres et Gouverneurs de la Confré-
rie de la Passion & Résurrection de noS"
tre Seigneur Jésus-Christ... Ensemble
autres pièces y appartenans, le tout pour
montrer que lesdits Doyen, Maistres^
Gouverneurs et Confrères, sont esdits
noms vrais & légitimes acquéreurs, pro-
priétaires et possesseurs dudit Hostel de
Bourgogne... A Paris, MDCXXXII.
Recueil très rare.
(2) Histoire de la Ville de Paris,
composée par D. Michel Féli bien f Revue,
augmentée et mise au jour par D. Guy-
Alexis Lobineau. — Paris, 1625,
Des théâtres de Paris 87
5 volumes in-fol. — Nous ne citerons
guère cet ouvrage, dont tous les docu-
ments concernant le théâtre ont été
reproduits par les frères Parfait, et
qui ne mérite aucune créance en de-
hors de ces documents. (V. p. ex. ce
qu'il dit de Jodelle, qui aurait fait
jouer à PHôtel de Bourgogne des tra-
gédies et des comédies, t. II, p. 1024.)
{3) Histoire du Théâtre François,
depuis son origine jusqu^ à présent, Pa-
ris, 1745 à 1749, i5 vol. in- 12.
(4) A la suite des Recherches sur Mo»
Hère et sur sa famille. Paris, i863,
in-8, p. i5i à i65. Cest dans cet inven-
taire que nous puiserons surtout; on
ne l'a pas encore assez fait.
(5) En tête du tome III des Content*
porains de Molière, Paris, 1875, in-8,
p. VII.
(6) Recueil des principaux tiltres, p.
3 à 8. Soulié, p. i52.
(7) Recueil des principaux tiltres,
p. 25.
(8) Pour l'emplacement de l'Hôtel de
Bourgogne, V. Jules Bonnassies, Notice
historique sur les anciens bâtiments de
la Comédie-Française y Paris, 1868, p. 5.
À
88 Esquisse d'une histoire
— Pour les quartiers de Paris, v. l'At-
las du Tableau historique et pittoresque
de Paris, depuis les Gaulois jusqu'à nos
jours, dédié au roi, par J,-B. de Saint-
Victor. 2* éd., 4 vol. in-80 (8 tomes) et
un atlas in-4, Paris, 1822.
(9) Recueil des principaux tiltres,
p. 34.
(10) Par le chevalier de Mouhy, 6
vol. in-fol. de la Biblioth. Nat. mss. fr,
numéros 9229 à 9235. Le i" vol. con-
duit l'histoire du théâtre français jus-
qu'à l'année i633.
(11) Du 20 septembre 1577. v. les
frères Parfait, t. III, p. 234, n. — En
1557, les confrères montèrent à grands
frais V Histoire de Huon de Bordeaux ^
et la jouèrent malgré l'opposition du
prévôt de Paris. Taillandier, Revue
rétrospective, t. IV, p. 345 (cité par
Petit de Julie ville, les Comédiens en
France au moyen dge, p. 73.) — Du-
laure. Histoire physique, civile et
morale de Paris, i8?4, t. IV, p. 341.
(12) Armand Baschet, Les Comédiens
Italiens à la Cour de France sous Char-
les IX, Henri III, Henri IV et Louis
XIII, d'après les lettres royales, la
Des théâtres de Paris 89
Con^espondance originale des Corné"
diens, les registres de la c Trésorerie
de V Épargne », et autres documents.
Paris, 1882, petit 8**, p. 73 à 76. Les
Gelosi représentaient à l'Hôtel de
Bourbon, quoique M. Moland les
fasse, bien à tort, paraître sur la
scène même de l'Hôtel de Bour-
gogne (V. son intéressant ouvrage
sur Molière et la comédie italienne).
Une autre troupe italienne, celle
d'Alberto Ganassa, avait déjà joué
à Paris en 1571, mais le Parlement
l'avait promptement expulsée; elle
reparut au service de la Cour. V. Bas-
chet, p. 19, sqq., qui signale vers la
même époque le passage de deux au-
tres troupes italiennes à Paris.
(i3) Eud. Soulié, p. i52.
f 14) Les muses Gaillardes recueillies
des plus beaux espirts de ce temps, par
A, D, B, Parisien. Seconde édition..,
MDCIX. Réimpression de Mertens,
Bruxelles, 1864, petit in-12; p. 184-5.
— On retrouve la même pièce dans le
Cabinet satyrique, avec une légère va-
riante, sous le titre de : Sur le haut de
chausses d^un courtisan, par le sieur de
Bouteroue. V. la nouvelle édition com-
12
à
90 Esquisse d'une histoire
plètCf, revue sur les éditions de 1618 et
de 1620 et sur celle dite du Mont-
Parnasse, sans date. L'an MDCCCLXIV.
2 vol. in-i2, t. II. p. 14. — Peut-être
pourrait-on découvrir ces vers dans
quelque autre recueil antérieur à
1609.
(i5) « Ayant depuis cinq jours en çà
conféré avec M. Agnan, qui nous est
apparu em béguine, enfariné, tel que
les sots de mon royaume Tout vu et
pratiqué en notre Hôtel de Bourgo-
gne. » Ainsi lisons-nous dans une bro-
chure, malheureusement sans date,
le Légat testamentaire du Prince des
sots, à M. C. d'Acreigne, Tullois,
avocat en parlement... Ainsi signé :
Angoulevent, prince des Sots, et scellé
de cire invisible. — (Ed. Fournier, Vdf-
r tétés historiques et littéraires^ t. III,
p. 354.)
((6) Les Historiettes de Tallemant
des Réaux. 3* éd. publiée par MM. de
Monmerqué et Paulin Paris, 1854-
1860, 9. vol. in-8% t. VU, p. 170. —
M. V. Fournel {Histoire de V Hôtel de
Bourgogne, en tête du tome I»' des Con-
temporains de Molière, i863, p. xxxii)
dit qu*Agnan était mort en 161 5; il
Des théâtres de Paris gx
semble qu'il le fût déjà depuis quelque
temps en 1609.
(17) Cest-à-dire Battista Lazaro.
Baschet ne sait rien sur ce comédien
ni sur sa troupe. V. Comédiens Italiens,
p. 83-4.
(18) Requête présentée à M. le lieu-
tenant civil... et de lui répondue le 12
février i583. Eud. Soulié, p. i53.
(ig) Du 6 octobre 1584. Fr. Parfait,
t. JIl, p. 236, n.
(20) Du 10 décembre. Fr. Parfait,
t. m, p. 237. cf., ci-dessous, Fextrait
des Remontrances à Henri III.
(21) Remonstrances très-humbles au
roy de France et de Pologne, Henry
troisiesme de ce nom, par un sien fi délie
officier et subject sur les desordres et
misères de ce royaume, causes d'î^
celles et moyens d^y pourvoir à la
gloire de Dieu et repos universel de cet
estât. i588, in-8°. Attribuées parCayet
à Nie. Rolland, conseiller à la Cour des
monnaies de Paris ; par d'autres à
Pierre d'Epinac, archevêque de Lyon.
Notre citation est faite d'après les
frères Parfait, t. III, p. 238, n. et Fr-
Godefroy, Histoire de la littérature
â
)
92 Esquisse d'une histoire
française depuis le XVI* siècle, t. i»'^,
1867, p. 3oo-i.
(22) Quelle année? Aucun document
ne nous le dit.
(23j a On défendit les jeux de Bour-
gogne et les quilles de maître Jean
Rozeau... » Et les auteurs ajoutent,
avec une cruelle ironie : c Aussi fut-il
avisé de convertir l'Hôtel de Bourgogne
en un collège de jésuites, qui avaient
besoin de récréation, pour la grande
quantité de sang dont ils étaient bour-
souflés, et leur fallait un chirurgien
pour les phlébotomîser. » Satyre Me"
nippée, de la vertu du catholicon d'Es-
pagne.,, Â Ratisbonne, chez les héri-
tiers de Mathias Kerner, MDGCXXVI,
3 vol. 8% t. I, p. 198.
(24) Ed. Fournier, La Farce et la
chanson au théâtre avant 1660, intro-
duction aux Chansons de Gaultier Gar^
^«///^(bibliothèqueelzévirienne, i858).
Cette assertion d'Ed. Fournier n'est
accompagnée d'aucune preuve.
(25) La plupart des historiens du
théâtre datent de i588 rétablissement
définitif de comédiens de profession à
THôtel de Bourgogne. Rien n'autorise
cette hypothèse. V. les fr. Parfait, t. III,
Des théâtres de Paris 9 3
p. 226, 237 ; Suard, Mélanges de litté-
rature, 1 804, t. IV, p . I n ; Sainte-Beuve,
Tableau de la poésie française au XVI*
siècle, 1843, p. 235; Eheri^ Entwick-
lungS'Geschichte der Franif, Tragodie^
Gotha, i858, p. 184; Petit de Julie-
ville, les Mystères, t. I, p. 433 ; etc.,
etc.
(26) V. Em. Campardon, Les specta-^
des de la foire..,, documents inédits
recueillis aux archives nationales. Pa-
ris. 1877, 2 vol. 8'. Introduction, p. VIll
à XI.
(27) « iSgô, II décembre. — Signifi-
cation faite à la requête desdits maî-
tres à Nicolas Potrau et ses compa-
gnons, comédiens français... » Eud.
Soulié, p. i5-3.
(28) Eud. Soulié, p. i53.
(29) Arrêt du 28 novembre iSgS.
Fr. Parfait, t. III, p. 242-3, n.
(3oJ Eud. Soulié, p. i53.
(3i) i5 décembre. Eud. Soulié, p.
i53.
(32) Eud. Soulié, p. 154. Nous lisons
aussi dans le Recueil des principaux
tiltres, p. 69-70 : c Par sentence con-
tradictoire du 28 avril 1399, défense
à
94 Esquisse d'une histoire
sont faites à Léon Fournier, tnenui-
sier^ et à tous autres bourgeois de
louer aucunes cours ni autres lieux
aux comédiens français ni étrangers
pour y représenter; et à tous comé-
diens de représenter ailleurs qu^audit
Hôtel de Bourgogne. »
(33) HisU du th.fr., t. III, p. 243-4.
De Léris et d'autres abrègent le récit
des frères Parfait (v. de Léris, Dict.
portatif hist. et litt. des théâtres, 1763,
p. 14; Ebert, p. i86; Paul Lacroix,
x\n^ s. Lettres, sciences et arts, 1882,
p. 266 ; Petit de Julleville, / es comé-
diens en Fr. au m. âge, p. 82 ; Moland,
Molière, sa vie et ses ouvrages^ 1887,
p. XL). — xM. V. Fournel fait fonder le
théâtre de l'Hôtel d'Argent en iSgS
{Contemp, de Molière, t. III, p. VIII).
— Félibien (t. II, p. i025) et de Beau-
champs {Recherches sur les th. de Fr.,
1735, in-4°, 1, p. 93) datent de 1600
la fondation du théâtre du Marais,
mais l'expliquent par un démembre-
ment de la troupe qui jouait à l'Hôtel
de Bourgogne ; inutile d*ajouter qu'ils
ne citent aucune preuve. — De Mouhy
écritdans son Abrégéde Vhist. du th.fr.^
1780, 3 vol. in-8% t. III, p. i3-i5, deux
Des théâtres de Paris 95
pages pleines d'erreurs sur les rivaux
de l'Hôtel de Bourgogne aux environs
de Tan 1600. — Enfin, Dulaure, qui
date l'Hôtel d'Argent de 1600, en fait
le théâtre particulier des troupes ita-
liennes (t. V, p. 201).
(34) Eud. Soulié, p. 154. — Si
nous ne craignions pas d'être trop
long, nous pourrions citer ici les
lignes ingénieuses, où Paul Lacroix
raconte rétablissement de Valleran à
l'Hôtel de Bourgogne et la fondation
de l'Hôtel d'Argent (xvii« s. Institutions,
usages et costumes, 1880, p. 496-7).
Jamais roman n'a été plus érudit, ja-
mais érudition n'a été plus aventu-
reuse.
(35) Eud. Soulié mentionne cinq
baux faits aux comédiens italiens ; le
dernier est du 8 avril 16 14, la date
des trois autres n'est pas indiquée.
(36) Eud. Soulié, p. 154.
(37) V. Les comédiens italiens^ p.
io3.
(38) Eud. Soulié, p. i54.
(39) A. Baschet, Les Com, ital, p. 143.
VInventaire n'en parle pas, mais le
bail passé par Andreini est certaine-
i
96 Esquisse d'une histoire
ment le premier des trois que M. Sou-
lié n*a point datés. (V. note 35.)
(40) Eud. Soulié, p. 154. — D'ail-
leurs, les comédiens de toute nationa-
lité n'ont pas manqué cette année-là.
Des Anglais jouent devant la cour,
dans la grande salle neuve de Fontai-
nebleau, et le dauphin Louis, qui en-
trait dans sa quatrième année, leur
voit représenter une tragédie le 18 sep-
tembre. (V. le Journal du médecin Hé-
roard, et V Intermédiaire des chercheurs
et des curieux,t. I, p. 85). — Le 2 août,
l'Estoile parle d'une comédienne espa-
gnole assassinée par deux espagnols, co-
médiens aussi (éd.Michaud et Pou joulat,
p. 378). Sur quoi, Ed. Fournier est
tenté de croire que ces Espagnols fai-
saient partie de la troupe de l'Italien
Ganassa, qui « devait se trouver à
Paris à cette date. C'est en effet, dit-il,
un an après, en i6o5, que Vauquelin
de la Fresnaye, parlant dans sa sa-
tire à Claude de Sanzé des farceurs
qui ont fait le plus de bruit dans ces
derniers temps, cite :
Le bon Ganasse et les comédiens
De Tabaiin... »
{U Espagne et ses comédiens en France
Des théâtres de Paris 97
au XVII* s. Revue des provinces du 1 5
sept. 1864, p. 496); mais la satire de
Vauquelin, publiée en i6o5, était de
rédaction très antérieure^ et rien ne
fait supposer que Ganassa se soit mon-
tré à Paris après 1574 (V. Baschet^ p.
49). Il s'agit bien plutôt d'une troupe
spéciale d'Espagnols.
(41) Les deux passages sont eu»
rieux. Voici le premier (dernier de
mai 1607) : « Duret, le général, ayant
fait porter parole, en ce temps, à un
secrétaire d'£tat de cinquante mille
écus, au cas qu^il se voulût défaire de
son office entre ses mains, est renvoyé
à Valleran, bouffon de l'Hôtel de Bour-
gogne, avec lequel l'autre lui dit qu'il
était en propos. » — Le second a été
souvent cité, «c Le vendredi 26 de ce
mois (janvier 1607), fut jouée à l'Hôtel
de Bourgogne, à Paris, une plaisante
farce, à laquelle assistèrent le roi, la
reine et la plupart des princes, sei-
gneurs et dames de la cour. C'étaient
un mari et une femme qui se querel-
laient ensemble... Chacun disait que
de longtemps on n'avait vu à Paris
farce plus plaisante, mieux jouée, ni
d'une plus gentille invention, même-
i3
i
I
98 Esquisse d^une histoire
ment à l'Hôtel de Bourgogne, où ils
sont assez bons coutumiers de ne jouer
chose qui vaille . »
(42) Le 9 septembre, un curieux pas-
sage de l'Estoile nous montre que La-
porte était à Bourges (v. au 2 0ct. 1607
et au 25 février 1608). Sa séparation
d'avec Valleran était sans doute ac-
complie, à moins qu'on ne suppose
qu'il se trouvait à Bourges avec la
troupe même de l'Hôtel de Bourgogne,
en train de faire une excursion en
province. Dans tous les cas, il faut
admettre que Valleran et Laporte étaient
arrivés ensemble à PHôtel, en rempla-
cement de Thomas Poirier; il n'est
pas vraisemblable que Laporte ne se
fût réuni à Valleran qu'après le mois
de septembre, et s^en fût déjà, séparé
avant le mois de janvier suivant. V.
d'ailleurs la note (d), p. 34, sur le procès
intenté à Marie Venier par LafTemas.
(43) Eud. Soulié, p. i55.
(44) V. les fr. Parfait, t. III, p. 252-5.
(45) Voir sur cette querelle Ad. Fabre
(Les Clercs du Palais. . . , 2* éd . Lyon,
1875, p. 2649) o^ ^t\\t de Julleville
{Les com, en Fr, au m. âge, p. 187-
190). Mais ces auteurs, si consciencieux
Des théâtres de Paris 99
et si bien informés, se trompent sur
le nom et la qualité de Valleran Le-
comte : « Les maîtres de la confrérie
de la Passion, qui étaient alors Va-
lérien Lecomte et Jacques Resneau, in-
terviennent dans la cause, ainsi que les
administrateurs de l'Hôtel de Bour-
gogne. » (Ad. Fabre, p. 267; cf. Pe-
tit de JuUeville, p. 187.) M. Fabre n'a
pas vu que les maîtres de la confrérie
de la Passion étaient les mêmes per-
sonnes que les administrateurs de
THôtel de Bourgogne ; que Lecomte et
Resneau, au contraire, en étaient tout
à fait distincts. Tandis que les maî-
tres et administrateurs sont sévèrement
condamnés, la cour met Valleran Le-
comte et Resneau « hors de cour et de
procès, sans dépens. > — Quant à Per-
reur de nom, elle provient de Félibien,
t. V. p. 44, qui appelle les deux co-
médiens, tantôt Valérien le Comte et
Jacques Resneau, tantôt Valleran et
Rameau. Les fr. Parfait ont rétabli
partout les formes Valleran Le Comte
et Resneau (t. IH, p. 252-5.)
(46) Venue à Paris en février pour le
baptême de Louis XllI, elle repart au
mois d'octobre. A. Baschet, p. 167, a
100 Esquisse d'une histoire
trouvé la minute du bail^ qui est du
7 février i6o8. Ce doit être le deu-
xième des baux non datés par Soulîé.
(v. notes 35 et Sg), — V. le Journal de
Jean Heroard (extrait des manuscrits
originaux,,, par Eud. Soulié et Ed. de
Barthélémy, Paris, i868, 2 vol. in-8»)
aux mois de juillet et août 1608.
(47) De Mouhy, Abrégé, t II, p. 481.
Les Â*. Parfait admettent ce passage
sans en préciser la date, t. III p. 58o.
(48) Cet opuscule est de 1612. On y
parle, p. 62, de femmes qui babillent
« comme personnes qui se vont dés-
ennuyer à l'Hôtel de Bourgogne pour
voir jouer les bateleurs de Valleran et
de Laporte. » (Cité par Moumerqué et
Paris dans Tallemant, t. VII, p. 179.)
Le samedi 7 février 1609, le dauphin
Louis avait été mené pour la première
fois à THôtel de Bourgogne {Journal
d'Héroard, t. I, p. 382), et A. Baschet
remarque que, les Accesi n'étant plus
à Paris, c'est aux comédiens français
qu'avait certainement été faite cette vi-
site. {Le Roiche:[laReine.„,7.*é<X,y 1876,
p. 267]. Mais cette assertion renferme
une part d'erreur et une part de vérité,
Des théâtres de Paris loi
comme le peut prouver une citation
complète d'Héroard : — 1609, 7 février,
samedi, a A cinq heures, mené à l'Hô-
tel de Bourgogne, à la comédie ; ce fut
la première fois. Ramené à six heures
et demie, il en récite beaucoup devant
Leurs Majestés. » t. I, p. 382. — 8 fé-
vrier, dimanche. « A trois heures trois
quarts, mené à l'Hôtel de Bourgogne ;
il se met à rire avec éclat et dit :
Mousseu de Souvré, je ris ainsi, afin
qu'on pense que f entends V italien. Ra-
mené à six heures et demie. » t. I,
p. 383.— 14 février, samedi. « A quatre
heures, mené à THôtel de Bourgogne ;
ramené à huit heures, tout morfondu
de froid. » 1. 1, p. 384. — N'est-il pas
évident que, le 7 février, le dauphin a
vu jouer des pièces françaises, puisqu'il
« en récite beaucoup devant Leurs Ma-
jestés », mais que, le 8, il a vu jouer
des pièces italiennes puisqu'il s'est mis
à rire aân de faire croire qu'il enten-
dait l'italien ? Il y avait donc à l'Hôtel
une troupe italienne, dont les repré-
sentations alternaient avec celles de
Valleran. Ou c'est une troupe incon-
nue, qui n'a pas laissé d'autres traces
de son passage, ou bien les Accesi^ont
partis plus tard que ne l'avait supposé,
102 Esquisse d'une histoire
avec beaucoup de vraisemblance pour-
tant, Armand Baschet.
(49) Régnier, Berthelot et Sigongne,
Et dedans l'hôtel de Bourgogne
Vautret, Valeran et Gasteau,
Jean Farine, Gautier Garguille,
Et Gringalet, et Bruscambille,
En rimeront un air nouveau.
L'Espadon satyrique, par le sieur
de Franchere, gentilhomme Franc-^
Comtois. Dédié à Monsieur le baron de
Roche. A Lyon, par Jean Lautret, mar-
chand libraire. M. DC. XIX, permission
du 25 avril 1619. — Sat. II, p. 3.) —
Ces vers ont été reproduits dans le
Parnasse satyrique, qui est de lôzz
(réimpr. de 1864, t. II, p. 40.)
(50) V. les Mémoires de Michel de
Marolles, abbé de Villeloin. Amster-
dam, 1755, 3 V. in-i2, t. I, p. 58-9.
(5i) V. la n. 48.
(52) Les révélations de l'ombre de
Gaultier Garguille nouvellement ap^
parue au Gros Guillaume son bon amy
sur le Théâtre de VHostel de Bourgon-
gne... )634; à la suite des Chansons de
Gaultier Garguille p. p. Ed. Fournier
{Bibl. el{ev. i858), p. 170, 172. —En
Des théâtres de Paris io5
i637, l'ombre de Turlupin parle de
même « de l'agréable séjour et des fé-
licités desquelles jouissent nos devan-
ciers: Valleran, Laporte, Vautray, Lon-
gueval, Gaultier Garguille, le Gros
Guillaume et plusieurs de nos bons
amis. » Le retour du brave Turlupin
de Vautre monde, déclarant, sur le sU'
perbe et royal Théâtre de VHostel de
Bourgongne, les adventures de son
voyage... A Paris, M. D. G. XXXVII.
p. 8. (Les Ioyeusete:(faceciesetfolastres
Imaginacions.,. p. p. Techener, i834j.
« Perrine qui, de son temps, sous
Valleran et Laporte, fut un personnage
incomparable », dit MaroUes, t. III
p. 290.
Les comédiens de THôtel de Bour-
gogne, descendus aux enfers, obéissent
encore à Valleran, et l'ombre de Gaul-
tier Garguille recommande à ses ca-
marades vivants, lorsqu'ils se senti*
ront près a de ployer ou plier leurs
quilles », c d'en envoyer un petit avis
à notre maître Valleran, lequel, comme
chef de la troupe, donnera ordre que
nous ne soyons point surpris à vous
rendre les honneurs et les devoirs que
nous vous devons. » Chansons de Gaultier
Garguille^ p. 176.
104 Esquisse d^ une histoire
(53) Hist. du Th.fr. t. III, p. 256.
(54) Recueil des principaux tiltres,
p. 5i-3. Cf. Eud. Soulié, p. i56.
(55) Hist. du Th.fr., t. III, p. 258
à 205.
(56) Henri Legrand, dit Belleville
dans la comédie et Turlupin dans la
farce ; le fameux trio : Gros-Guillaume,
Gaultier- Garguilie et Turlupin, était
donc formé.
(57) Recueil des principaux tiltres y
p. 68. Cf. Eud. Soulié, p. 157-8.
(58) Félibien, t. II, p. I025.
(59) Il est fort invraisemblable que
les camarades de Laporte et de sa
femme soient revenus sans eux àPHô-
tel d'Argent, plus invraisemblable en-
core qu'ils soient restés longtemps les
tributaires des confrères sans faire at-
tendre leur tribut, et sans donner lieu
à quelque action judiciaire qui nous
révélerait leur présence.
(60) Recueil des principaux tiltres,
p. 52; Eud. Soulié, p. i56. — Les
lettres patentes disent encore plus net-
tement, au sujet des privilèges des
confrères, que ceux-ci en a ont tou-
jours bien et dûment joui et usé, jouis-
Des théâtres de Paris io5
sent et usent encore à présent ». i^e-
cueil, p* Si.
(6i) V. Eud. Soulié, p. 157 et 160-1.
(62) Dans VExamen de Mélite. V. le
Corneille des Grands Ecrivains, t. I.
p. i38.
(63) ce L'Hôtel d'Argent », dit Sauvai,
« dont il reste un vieux corps de logis;
touty estnéanmoinssi changé, qu'outre
que cet hôtel a été partagé en plu-
sieurs maisons séparées, ce qui restait
de vide fut couvert d'autres logis oc-
cupés et rebâtis depuis par des particu-
liers. » C'est dans un de ces logis que
devait représenter Laporte. (V. H.
Sauvai, Histoire et recherches des an"
tiquités de la ville de Paris, 1724, 3 vol.
in-4% t. II, p. 149.)
(64) V. Eud. Soulié, aux 10 mars,
24 mars et 27 octobre 1610, p. i55.
(65) Â. Baschet. les Comédiens ital,,
p. 246. Il faut placer à cette date le der-
nier des trois baux non datés par Sou«
lié. Ainsi les cinq baux signalés p. 164
sont d'avril 1699, décembre i6o3, fé-
vrier 1608, novembre 161 3 et avril 16 14.
V. les notes 35, 39 et 46.
(66) Le 27 juin 1614. Eud. Soulié,
p. i56.
14
io6 Esquisse d'une histoire
(67) Il semble bien, à lire Vlnvertm
taire, que le sieur de Champluisant ne
fût pas lui-même comédien. M. A. Ba-
luffe écrit à propos de mademoiselle
Menou, camarade de Molière dans la
troupe du duc d'Epernon : a Cette ma-
demoiselle de Menou, dont le père, ori-
ginaire de Sologne, avait été, lui aussi,
en 16 16, directeur ou du moins cau-
tion d'un directeur de l'Hôtel de Bour-
gogne, sous son vrai nom de Mathieu
Roger (de Menou) de Champluisant
(ou Champlivault, ou ChampUsant, ad
libitum) et, en cette qualité de caution,
emprisonné au Grand-Châtelet, lui
aussi, comme Molière. » M. Balufife
ne donne pas les preuves de ces asser*
tions, dont quelques-unes, tout au
moins, sont fort contestables (V. Mo"
Itère inconnu, sa vie, 1. 1, 1886, p. 3 19).
(68) Le 2 janvier i6i5. Les comé-
diens refusent de payer (10 janvier).
V. Eud. Soulié, p. 137.
(69) Une partie entra, dès lors ou
bientôt après, dans la troupe de Val-
leran. En effet, VEspadon satyrique, en
161 9, cite Gasteau (qui ne doit être
autre que Gastrau) parmi les comé-
diens de THôtel de Bourgogne, et Le
Des théâtres de Paris 107
retour du brave Tur lupin, en lÔSy,
nomme Longueyal à côté de Valleran,
Laporte, Vautray, Gaultier Garguille
et le Gros-Guillaume. V. les notes 49
et 52.
(70) D'après Ed. Fournier {VEs-
pagne et ses comédiens, p. 497), une
troupe de comédiens espagnols était à
Paris en 1618 et n'y fit pas grand effet:
« Sans Bassompierre qui, sous la date
de 161 8, écrit dans ses Mémoires :
a Nous eûmes les comédiens espa-
gnols cet hiver-là^ » on ne saurait rien
de leur passage. » — Il y a là une lé-
gère erreur. Le renseignement de Bas-
sompierre est de décembre 161g {V, Le
journal de ma vie, mémoires du maré-
chal de Bassompierre, éd. publiée pour
la Soc. de VHist. de Fr,, par le mar-
quis de Chantérac, 1870-7,4 vol. in-8 ;
t. II, p. 141) ; et déjà, au mois d'août
de la même année, Louis XIII avait
souvent assisté à la comédie espagnole.
(V. Héroard, t. II, p. 235.)
(y i) Le Théâtre François divisé en
trois livres,,. A Lyon, chez Michel
Mayer, 1674, in-12, p. 189.
(72) V. Fournel, Contemp. de Mo-
lière, t. III, p. X.
loS Esquisse d'une histoire
)
(73) Entre autres Viollet le Duc
(Ancien théâtre français... 10 vol. de
la Biblioth. el:(evir., t. IV p. VII.)
(74) Recueil des principaux tiltres,
p. 70 ; Eud. Soulié, p. bj. La rueBourg-
FAbbé est dans le quartier Saint-
Denis.
(75) Une Satyre pour V hiver de 1621,
qui figure dans le Parnasse satyrique,
se plaint des maux causés par le froid,
et ajoute :
Tout divertissement nous manque ;
Tabarin ne va plus en banque,
L'Hôtel de Bourgogne est désert.
(T. I, p. 34.)
(76) Eud. Soulié, p. i58.
(77) A. Baschet, Les Comédiens
ital.t p. 323-4.
(78) Eud. Soulié, p. i58. Une troupe
tt du prince d'Orange »^ la même
peut-être, jouait à Nantes en 161 8, et
mademoiselle de Rohan en faisait l'é-
loge. V. H. Chardon, La troupe du Ro-
man comique dévoilée... 1876^ p. 33.
(79) Tallemant, t. VII, p. 172 (Hist.
de Mondory).
(80) Eud. Soulié^ aux i3 et 14 août.
p. iSg.
Des théâtres de Paris 109
(81) Je place en 1627 un bail fait
aux comédiens du prince d^Orange
et qu'Ëud. Soulié mentionne sans le
dater. (V. au 3 août 1625, p. i58.)
(82) 5 pièces, dont la dernière est du
3 août 1627 (Eud. Soulié^ p. log).
(83) 4 pièces, du 17 novembre 1627
au 22 janvier 1628 (Eud. Soulié, p. 159-
160.) — D'après Jal, Dict, crit,, p. 412,
les Grecs durent se soumettre à payer
la redevance ordinaire, car ils jouaient
encore en septembre 1628. — Remar-
quons que Désidières et Descombes
pourraient bien ne faire qu'un seul per-
sonnage, lequel ne serait autre que le
charlatan Désidério Descombes, dont
il est question dans les Caquets de
l'Accouchée (éd. de la Biblioth, el^ev.
p. p. Ed. Fournier, i855j;p. 102.)
(84) Eud. Soulié, p. 160.
(85) Eud. Soulié, p. 160.
(86) Enumérés par Eud. Soulié,
p. 160-1.
(87) Texte: produisent.
(88) Recueil des principaux titres,
p, 57-8.
(89) Recueil, p. 59 à 60.
110 Esquisse d'une histoire
(90) Recueil, p. 62.
(91) Eud. Soulié, p. i63.
(92) Eud. Soulié, p. i63.
(93) M. H. Chardon {La troupe du
roman comique dévoilée j p. 40), dit :
f à Testrapade », et ajoute : u si je ne
me trompe. 2> Mais Sauvai (t. II, p. 180),
nous apprend que la rue Bertauit, au-
paravant rue des Anglais, était un cul-
de-sac de la rue Beaubourg, opposé
directement et en droite ligne à un
autre cul-de-sac, appelé la rue de Cler-
vaux, et assis en la rue Saint-Martin.
Cest là que Jean Bertault, archer des
gardes du corps du roi avait bâti, vers
1557, un jeu de paume, qui fut cou-
vert en 1604. Le jeu de paume donna
son nom à la rue.
(94) Hist. du Th, fr., t. V, p. 5o à
52, n.
(95) On lit dans le Testament de feu
Gaultier Garguille, 1634 : « Pour faire
voir que je n'ai jamais eu de rancune
contre les comédiens du jeu de paume
de la Fontaine, quoiquMls aient pris
inutilement la peine d'attirer Teau
vers leur moulin, je veux auparavant
que de mourir leur donner quelques
Des théâtres de Paris 1 1 1
bons avis. » Suivent des conseils adres-
sés à Mondory « le coq de la paroisse»,
à Filipin, à Le Noir et à sa femme et
a à ces messieurs qui. sont venus en
foule grossir leur troupe », notamment
Jodelet et Tibaut Garray. (A la suite
des Chansons de Gaultier Garguille,
p. 160-4.) Il est encore question des co-
médiens du jeu de paume de la Fon-
taine dans les Révélations de Vombre de
Gaultier Garguille, 1634. (Id. p. i68j,
et dans le Songe arrivé à un homme
d'importance sur les affaires de ce
temps, /634 (Id., p. 208).
(96) Eud. Soulié, p. 164-5.
(97) P. Lacroix, dans son XVII^siècle.
Institutions, p. 498, simplifie singu-
lièrement toute cette histoire : « Sous
le bénéfice de cette sentence (de 1621),
les confrères de la Passion recommen-
cèrent des procédures contre les comé-
diens deTHôtel d'Argent (toujours ceux
de Laporte?), qui, se trouvant trop à
rétroit dans le quartier des Halles (l),
avaient transporté leur théâtre dans un
jeu de paume de la rue Vieilie-du-
Temple, où s'établit le Théâtre du
Marais, qui subsista jusqu'en 1673. »
Selon P. Lacroix, les comédiens de
112 Esquisse d'une histoire
ce théâtre étaient appelés par ceux de
THôtei de Bourgogne les petits comé-
diens du Marais, Selon M. V. Four-
nel, les petits comédiens du Marais
constituaient une troupe spéciale qui
fut remplacée par Mondory {Contemp,.
de Molière, t. III, p. X.)
(98) V. dans la Ga:^ette de i634
V a Extraordinaire du 3o novembre »,
p. 527-8.
(99) Galette du i5 décembre, p. 56i.
(100) Ga:[ette du 23 décembre,
p. 584.
(loi) La Galette du 6 janvier i635
dit que V ouverture de ce théâtre avait
eu lieu le dimanche précédent. Ed.
Fournier (/. c, p. 160, n.), M. Fournel
(Contemp, de Molière, t. III, p. XIII) et
d'autres encore entendent par ouver-
ture l'inauguration même; on voit
que nous ne sommes pas de leur avis.
— En ce même moment, il y avait à
Paris une a troisième bande 9 de comé-
diens installée au faubourg Saint-Ger-
main (Galette, p. i5.)
(102} Le 9 octobre 1623, Charles Le
Noir, comédien du Roi, demeurant
sur la paroisse de Saint-Nicolas-des-
Des théâtres de Paris ii3
Champs, est parrain de Marie, fille de
Jehan Ângelain, peintre, avec damoi-
selle Marie Berthelin, femme de Guil-
laume Gilbert, sieur de Mondory (Jal,
p. 878, art. Mondory.) — Le Noir est
de nouveau parrain en lôBy, mais cette
fois du dernier enfant de Turlupin,
alors son camarade à THôtel de Bour-
gogne (Jal, p. 760, art. Le Grand.) —
Dans rintervalls, on voit Charles Le
Noir figurer parmi les comédiens
auxquels les confrères font un bail de
trois ans, le 10 septembre i635 (Eud.
Soulié, p. i63).
(io3) V. p. 60 et 69, et cf. Tallemand,
t. VII, p. 172.
(104) V. Eud. Soulié, p. i53. Au
12 avril i5g7, € il est permis de faire
à présent comédies en l'Hôtel de Bour-
gogne \qs jours ouvrables ».
(io3) Examen de Mélite (éd. des
Grands Ecrivains, t. I, p. 1 38) ; EpUre
à monsieur de Liancour (t. I, p. i35).
(106) Hist, du Th.fr,, t. IV, p. 461-2,
n. — Notice sur Mélite (Corneille, 1. 1,
p. 129 a i3o).
(107) V. Eud. Soulié, au 27 octobre
1629, p. 161.
i5
1 14 Esquisse d'une histoire
(io8) Eud. Soulié^ p. x6i.
(109) Eud. Soulié, p. 162.
(iio) Eud. Soulié, p. 162.
(m) Eud. Soulié^au 10 février x632,
p. x63-4.
(112) Eud. Soulié^ au 14 mai i63i,
p. i63.
(11 3) 9 août x63o; 19 et 2 x aoûtx636.
Eud. Souiié, p. X62 et x65.
(114) Eud. Soulié, au 5 août i632.
p. 164.
(xx5) Eud. 5oulié, p. i65.
(116) Jusqu'en 1680, date de la fu-
sion entre le théâtre de l'Hôtel de Bour-
gogne et celui de l'Hôtel Guénégaud.
(117) Ces conclusions ne sont pas
seulement en désaccord avec les récits
des historiens des théâtres ; elles con-
tredisent encore l'histoire des princi-
paux acteurs du temps, telle qu'on la
trouve dans Sauvai, dans les frères
Parfait, dans Lemazurier, etc.. Mais
cette histoire, tissu de légendes et
d'hypothèses hâtives, est à refaire
presque tout entière.
Nous avons vu (p. 39-40) sur quel
fonds ruineux reposait l'histoire do
Des théâtres de Paris j 1 5
Yalleran, de Laporte et de sa femme.
Qu*on nous permette de citer un autre
exemple, emprunté à la vie des plus
célèbres farceurs du commencement du
xvu* siècle.
Lemazurier dit que Robert Guéri n
« avait été longtemps garçon boulanger
avant d'entrer à l'Hôtel de Bourgogne.
Il était ami de Hugues Guéru (Gaultier
Garguille) et de Henri Legrand (Tur-
lupin)... Ils louèrent un petit jeu de
paume à la porte SaintnJacques, y pla-
cèrent un théâtre portatif qui leur ap-
partenait et firent leurs décorations
avec des toiles de bateau grossière-
ment barbouillées. Ils jouaient depuis
une heure jusqu'à deux en faveur des
écoliers et recommençaient le soir ; le
prix du spectacle était de deux sols et
demi par tête. Les comédiens de l'Hô-
tel de Bourgogne s'étant plaints au|car-
dinal de Richelieu que trois bateleurs
entreprenaient sur leurs droits, il vou-
lut juger par lui-même de leur mérite.
Ils furent mandés au Palais Cardinal^
et reçurent ordre de jouer dans une
alcôve... (Ici un long récit de la repré-
sentation). Ce spectable plut au Car-
dinal : il fit venir les comédiens de
l'Hôtel de Bourgogne et leur com-
ii6 Les théâtres de Paris
manda de s'associer ces trois ac-
teurs... x> (P. D. Lemazurier, Galerie
historique des acteurs du Théâtre'
Français.,, Paris» 1610, 2 vol. 8« ; t. I,
p. 32 sqq.)
Voilà bien des détails précis, faits
pour inspirer la confiance. Malheureu-
sement, aucun ne peut être exact. De
ces trois acteurs introduits par Riche-
lieu à l'Hôtel de Bourgogne, Tun, Ro-
bert Guéri n, y était déjà en i6o3 ;
l'autre, Hugues Guéru, en 161 5 ; et le
troisième, Henri Legrand, faisait partie
de la troupe royale en 1622. D'ailleurs,
Lemazurier ne se gêne pas pour se con-
tredire. Page 29, il fait débuter Hugues
Guéru dès 1 598 au Marais, d'où il passa,
après quelques années, à FHôtel de
Bourgogne ; p. 24, il accepte le dire de
Sauvai et fait débuter Henri Legrand
dès 2583. Avec quelle défiance ne
faut-il pas consulter de tels historiens?
Emile Colin. — Imprimerie de Lagny.
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